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samedi, 23 août 2025

La Révolution et les étoiles

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La Révolution et les étoiles

Claude Bourrinet

Pour qu'il y ait révolution, il ne suffit pas de la décréter, ou de penser qu'une révolte (celle des Gilets jaunes, par exemple, soit suffisante), ou qu'une crise économique va pousser la population dans ses derniers retranchements (au contraire, une dictature féroce peut en naître et aplatir tout sursaut).

Les révolution naissent quand on a un monde à défendre, ou un monde à conquérir.

L'univers différencié des ouvriers, artisans, paysans, des quartiers et des villes encore préservés de l'uniformité niveleuse, le maintien d'expressions culturelles riches, variées, et non le matraquage du show business audiovisuel, les imaginaires florissants, et non l'imposition d'UN imaginaire artificiel et imbécile, étaient le terreau favorable au rêve et à la résistance. Le rouleau compresseur de l'oppression capitaliste et colonialiste (et les peuples occidentaux américanisés sont maintenant traités de la même façon que les peuples colonisés d'antan) ne peut dérouler son aplatissement mortel que sur une voie qui l'accueille. La société de masse, servile et poreuse à la propagande, vorace en pauvres songes d'ivrognes et se détectant des mensonges empoisonnés offerts par les bonimenteurs télévisuels, est le sol idoine pour une servitude volontaire. Archimède avait besoin d'un levier pour soulever la Terre, les révolutionnaires n'ont ni Terre, ni levier.

Car, en ce qui concerne justement le "levier", à savoir les "mythes" (au sens sorélien, c'est-à-dire, finalement, fasciste, ou communiste), c'est-à-dire ces idées-forces, ces slogans, ces images obsessionnelles qui captivent les foules (lire Gustave Le Bon) ne sont même plus d'actualité dans un monde liquéfié, fluctuant, vaseux, protéique, éclaté, atomisé, qui ne donne aucune prise à une poussée, ou à une lévitation brutale et dirigée par un parti de fer. La stagnation marécageuse est son destin, non la volonté ! Même les discours "critiques" (pour autant qu'ils le soient, car maints visions "rebelles" sont aussi gelées que les paroles venteuses du système englobant) se diluent dans le bain comme des nuages d'encre. Nous avons basculé dans une autre "civilisation", qui est - comme le christianisme était la sortie de toute religion, puisqu'il avait désenchanté le monde - la sortie de toute civilisation, c'est-à-dire de tout lien, soit horizontal, soit vertical. Notre monde est orphelin, délié, désuni, dépourvu de tout, nous sommes nus au sein d'un univers froid, glacé, infini, ténébreux et sans aucune considération pour l'humanité. Dieu est mort, et, par la même occasion, toute idée de révolution.

Car Dieu (même quand il est étatisé), c'est une histoire, un conte, un songe éveillé, une connaissance. Or, il n'y a plus de récits. On ne raconte plus rien. Pour se soulever, il faut s'imaginer APRES. Que faire, une fois les fumées d'incendies révolutionnaire exténuées ? Quel monde bâtir ? Quel rêve érigé jusqu'au ciel ? La retraite à 60 ans ? Un smic à je ne sais combien ? Plus d'hôpitaux ? Certes... Mais je parle, moi, des étoiles à conquérir ! Ne riez pas ! Toutes les véritables révolutions ont eu à coeur d'atteindre les étoiles. Et il n'y a plus d'étoiles.

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