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jeudi, 16 octobre 2014

Célébration des maudits

Célébration des maudits

 

 

Le trimestriel de la droite radicale, Réfléchir & agir, se présente comme une « revue autonome de désintoxication idéologique ». Pas moins. Cette publication militante offre à ses abonnés un « hors-série », bouquet d’hommages à une quinzaine d’écrivains ayant comme point commun d’avoir pris des risques conséquents pour leurs idées. Drieu La Rochelle, Brasillach, Saint-Loup, Bardèche, Venner, Evola, Rebatet et… Céline. Heureuse surprise : l’hommage rendu à celui-ci est signé par le professeur Jean Bastier, auteur du Cuirassier blessé (1999) que tout célinien se doit d’avoir dans sa bibliothèque. En consultant au Service historique de l’Armée de Terre  le Journal [manuscrit] des marches et opérations du 12e Cuirassiers, on se souvient que Jean Bastier avait reconstitué avec précision la guerre de Louis Destouches et l’avait comparé avec ce qu’il en dit dans Voyage au bout de la nuit. Somme malheureusement épuisée qu’il conviendrait de rééditer à l’occasion du centenaire, d’autant que c’est précisément en 1914 que Céline fut grièvement blessé.

Intitulé « Le rire de Céline », cet hommage célèbre la vis comica de l’écrivain. Texte d’autant plus attachant qu’il est très personnel : « Avec mon père, nous nous récitions de mémoire des paragraphes, et c’étaient de grands rires qui ponctuaient nos phrases  de  Céline.  Ma mère  survenait  pour  clamer  son  indignation : “ Comment ! Rire en citant du Céline ! Cet écrivain grossier, absolument illisible, qui parle dans ses livres de la merde et du vomi ! ” Cette indignation nous faisait redoubler de rire, et d’évoquer la chasse d’eau bouchée au château de Sigmaringen. ». Il ajoute : « J’étais devenu un célinien inconditionnel, un dévot, et je faisais du prosélytisme. L’on m’avait pourtant mis en garde : si j’avais l’ambition de devenir professeur des facultés de Droit, je devais plutôt me comporter en bien pensant et éviter de dire que je lisais Céline et Drieu La Rochelle, Ernst Jünger et autres auteurs maudits par la société française. »  Ayant vécu son enfance en Algérie auprès de familles juives traditionalistes, Jean Bastier confie, en revanche, n’avoir jamais compris l’antisémitisme de Céline tout en estimant qu’il ressemble à celui de Jouhandeau, ce qui peut paraître curieux car celui-ci s’apparente plutôt à l’antisémitisme d’État de l’Action Française dont l’auteur de Chaminadour était alors proche. Se référant à une réédition anastatique (et posthume) du Péril juif, Bastier ne précise pas que ce recueil parut en fait la même année que Bagatelles.  Ses digressions  sur  l’onomastique célinienne sont davantage pertinentes. Ainsi que celles sur l’argot et l’oralité. On estimera, en revanche, superfétatoires ses observations moralisantes sur la personnalité de Céline, d’autant qu’elles se fondent parfois sur des interprétations abusives ou erronées.  Il arrive qu’une morale confessionnelle fausse le jugement. Par ailleurs, s’il s’était moins fié à ses souvenirs de lecture, notre ami Bastier n’aurait pas confondu Yves et Yvon Morandat, Serge et Gilles Perrault, ou, ce qui est plus fâcheux, Doriot et Degrelle (à propos d’un discours prononcé à Sigmaringen). Vétilles. Son témoignage est précieux car il met l’accent, on l’a dit, sur le rire célinien, « au centre de la personnalité de Céline comme un noyau incandescent ».

 

Marc LAUDELOUT

 

Réfléchir & Agir, hors-série n° 1, 2014, 74 p. (textes de Éric Delcroix, Daniel Leskens, Philippe d’Hugues, Pierre Gillieth, Jean Bastier, Bruno Favrit, Georges Feltin-Tracol, Patrick Canet, Eugène Krampon, Pierre Vial). Ce numéro n’est pas vendu séparément. Il est offert aux abonnés. Abonnement simple : 26 € ; abonnement de soutien : plus de 35 € ; abonnement étranger : 40 €). Chèque à adresser à CREA, B.P. 80432, 31004 Toulouse Cedex 6.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

00:05 Publié dans Littérature, Revue | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, lettres, revue, marc laudelout | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

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