Dans les années 30, beaucoup d’auteurs ont décrit les évolutions des sociétés qu’ils avaient sous les yeux. La plupart des observateurs étaient lucides et mêmes extras lucides comme André Tardieu par exemple. Ils avaient tiré les conclusions logiques, nécessaires, des phénomènes qu’ils observaient. Bien sûr ils n’ont été ni écoutés ni même entendus.
La névrose sociale est une donnée de tous les temps, les peuples vivent dans des mondes faux et fous et ils croient que c’est le monde réel; ils n’ont toujours pas compris que le monde est une construction – imposée par les dominants-une construction qu’il faut démystifier, le monde n’est pas une donnée, c’est un travail, une pratique. Ce que l’on voit n’est qu’un point de départ, il faut creuser, mettre en relation, mettre au jour les articulations cachées qui donnent sens aux évènements disparates et éclatés qui nous submergent.
Le texte ci dessous ( nous faisons référence au texte publié sur notre service juste ci-dessous, repris de FigaroVox) est intéressant en ce qu’il souligne bien l’importance de la question des referendum populaires. Il est évident pour tout le monde que ces consultations déplaisent dans la mesure où elles produisent des résultats qui ne sont pas conformes à ceux qu’attendent les « dominants ».
La comédie démocratique est tolérée tant qu’elle sert de cache-sexe à leurs volontés unilatérales. Quand les résultats ne sont pas ceux qui sont espérées, alors soit on les contourne, soit on les vide de sens. Avant, on a bien pris soin de faire donner l’artillerie de la propagande et des intimidations. Tout cela est maintenant clair.
Il est symptomatique que cette question de la légitimité des consultations populaires se pose maintenant et qu’elle ait besoin de justifications intellectuelles. Il y a toujours un mercenaire du système pour se charger de ce travail. L’exercice scélérat de Jacques Attali, l’hyper mondialiste, qui veut aller au fond des choses et attaquer à la racine cette procédure de consultation d’apparence démocratique, cet exercice en dit long sur l’urgence qu’il y a pour les dominants à reprendre la main ou mieux à ne pas la perdre.
Nous sommes à la veille d’une tentative de coup d’état en Europe, car les dominants ayant compris qu’il s’agissait d’une course de vitesse entre partisans et détracteurs de l’Union, veulent à tout prix modifier les traités et les règles du jeu afin d’accélérer l’intégration et de la rendre concrètement irréversible. C’est le sens des propos de Hollande, Sarkozy et bien sûr Merkel. Les uns veulent accélérer la vassalité et l’autre veut sceller sa domination. On reprend l’ouvrage là où on l’a laissé dans les années 30 et 40.
Pour le moment, les eurosceptiques sont encore soit minoritaires, soit majoritaires, mais divisés comme c’est le cas en France. Cependant qui ne voit que plus la crise dure et plus elle s’approfondit, plus il y a de laissés pour compte et plus le nombre des anti-intégration progresse. C’est en ce sens que nous avons introduit cette idée de course de vitesse : il y a une tendance lourde à la dégradation de la situation des classes moyennes et productives car les pseudo remèdes ne sont que des « kick the can », des reports. Et ils ont pour résultat d’augmenter les risques futurs et la fragilité de nos systèmes. Nous trainons des boulets de plus en plus lourds. En même temps ils détruisent des acquis comme les régimes de retraites et de protections sociales, ce qui fait s’effondrer les consensus. Les gens ont de moins en moins à perdre, ce qui signifie que l’on crée les conditions historiques des révoltes.
La tendance lourde est à l’approfondissement de la crise, cet approfondissement oblige les « dominants » à aller plus loin, toujours plus loin dans l’érosion des niveaux de vie, du contrôle social et de la destruction des libertés/identités. Leur cynisme devient de plus en plus facile à voir, le système lui-même se révèle pour ce qu’il est, au fil de la crise. Peu à peu ces consensus ne subsistent que par la peur, la terreur même si on en juge par les arguments qui ont été utilisés lors des débats pré- Brexit.
Il faut aller plus loin que les Attali et autres et pointer sans hésiter le sens général de l’évolution anti-démocratique : la Vérité, les Valeurs, les Principes sont unifiants, car le symbolique s’impose à tous … sauf aux chiens, aux cyniques.
Pendant les périodes intermédiaires, les luttes se déroulent encore aux marges, aux frontières du système, c’est à dire de façon civilisée, sans violence ouverte, par une sorte de réticence à déclarer vraiment la guerre sociale.
Nous pensons qu’il faut être prospectifs et oser affronter le futur qui découle de la logique : à partir du moment où les « dominants » pratiquent le cynisme, le mensonge, le contrôle social, bref à partir du moment où ils glissent sur la pente de la violence, eux même en justifient l’usage.
La force, la barbarie sont non pas des choix, mais des enchainements. Nos sociétés restent barbares, on le voit avec la multiplication des conflits honteux, mais cachés loin de chez nous.
Notre avenir sur cette pente, c’est le terrorisme domestique.
BRUNO BERTEZ
Brexit : pourquoi l’UE n’aime pas les référendums sur l’Europe
Par Benjamin Masse-Stamberger
FIGAROVOX/TRIBUNE – Après Jean-Claude Juncker, Jacques Attali a critiqué l’existence même du référendum qui se tient ce jeudi au Royaume-Uni. Pour Benjamin Masse-Stamberger, certaines élites européennes ont la tentation d’«abolir» la démocratie.
Benjamin Masse-Stamberger est journaliste et essayiste, membre fondateur du Comité Orwell. Ancien Grand reporter à l’Express, il est co-auteur notamment de Inévitable Protectionnisme (Gallimard/Le Débat, 2011) et de Casser l’euro pour sauver l’Europe (Les Liens qui Libèrent, 2014). Il tient le blogBasculements.
«Il ne peut y avoir de choix démocratique contre les traités européens.» On se souvient de la sentence de Jean-Claude Juncker, prononcée début 2015, et destinée à faire rentrer les Grecs dans le rang de l’austérité. Depuis un certain temps déjà, les élites européennes ont pris l’habitude de s’asseoir consciencieusement sur les choix des peuples, du «Non» Français au Traité constitutionnel en 2005, au camouflet infligé par les Grecs à la Troïka à l’été dernier, en passant par les votes néerlandais et irlandais.
Jusqu’à présent, les «corrections» apportée par l’oligarchie européenne aux votes populaires intervenaient toujours à postériori, donnant aux électeurs l’impression désagréable – et ô combien justifiée – qu’on ne les avait consultés que pour la forme. Trop voyant. Alors que le risque de Brexit fait passer un souffle glacé dans le cou des Européistes, c’est Jacques Attali, éternel conseiller des Princes, qui a décidé de s’y coller, afin de corriger ce léger défaut de conception. Et éviter la contagion du Brexit à d’autres populations influençables.
Sa solution est simple: il s’agit, ni plus ni moins, que…de supprimer les référendums sur l’Europe!
Un tel référendum, écrit-il sur son blog à propos du Brexit, implique qu’un peuple peut remettre en cause toute évolution considérée jusque-là comme irréversible, telle qu’une réforme institutionnelle, une conquête sociale, une réforme des mœurs. (…) Selon notre conception occidentale du Droit, il existe des progrès irréversibles, (par exemple, la démocratie, la liberté du culte, l’interdiction du travail des enfants, l’abolition de la peine de mort) qu’un vote simple ne peut défaire.»
On aura saisi que l’appartenance à l’Union Européenne faisait partie de ces «progrès irréversibles» que le peuple, fut-il majoritaire, ne devrait pas être en mesure de défaire. «Toute décision ayant un impact lourd sur le sort des générations suivantes, écrit-il encore, ne devrait pas pouvoir être prise par une majorité de moins de 60% des votants, réaffirmée à trois reprises à au moins un an d’écart.»
Exit, donc, les référendums européens. On comprend en creux qu’il serait plus raisonnable de laisser la maîtrise
On aura saisi que l’appartenance à l’Union Européenne faisait partie de ces « progrès irréversibles » que le peuple, fut-il majoritaire, ne devrait pas être en mesure de défaire.
Celles-là même qui nous ont vendu cette «mondialisation heureuse» qui, grâce au «doux commerce», devait éradiquer le fanatisme et la violence. Avec le succès que l’on sait. Les mêmes, également, qui ont conçu l’architecture de cette Europe-là, si bien pensée pour résister à toutes les tempêtes. Si solide, qu’elle fut finalement la plus déstabilisée par la crise financière, pourtant d’origine américaine. Si efficace, qu’elle a plongé le continent dans la récession et la déflation. Si protectrice qu’elle a fini par confier les clés de sa politique migratoire à Recep Erdogan, le président Turc.
Ce n’est bien sûr pas un hasard si cette proposition vient d’un membre éminent de nos chères élites hexagonales, proche de François Hollande, et grand défricheur d’idées nouvelles. Car, après nos amis Anglais, s’il est un pays qui pourrait être tenté par la sortie, c’est bien le nôtre, tant il est dans la ligne de mire des directeurs de conscience de Bruxelles et de Berlin. On l’a vu, en effet, avec en particulier la loi El-Khomri, dont l’essayiste Coralie Delaume a bien montré qu’elle était une réponse directe aux désidérata de Bruxelles. Seul hic: les Français commencent à réaliser plus précisément d’où viennent leurs problèmes. Et à comprendre que sortir de la centrifugeuse européenne devenue folle, pourrait bien être le seul moyen de rompre avec quarante années d’impuissance et de rétrécissement. Aussi le plus simple est-il sans doute d’opérer de manière préventive: empêcher le Frexit avant même qu’il puisse être envisagé.
Big Brother avait énoncé : « La guerre c’est la paix, la liberté, c’est l’esclavage, l’ignorance, c’est la force ». A ce tryptique, on pourra désormais ajouter un ultime précepte : « La dictature, c’est la démocratie ».
Aussi une certaine rhétorique employée par nos élites masque-t-elle mal la volonté d’extraire du champ de la délibération populaire, une part croissante de décisions qui pourtant, concernent nos concitoyens de manière vitale. Interrogé sur le site du Monde, Attali s’est ainsi permis d’ajouter: «Il y a des choses irréversibles en démocratie, cela s’appelle le progrès». Big Brother, lui, avait énoncé: «La guerre c’est la paix, la liberté, c’est l’esclavage, l’ignorance, c’est la force.». A ce tryptique, on pourra désormais ajouter un ultime précepte: «La dictature, c’est la démocratie.»
http://www.lefigaro.fr/vox/monde/2016/06/23/31002-20160623ARTFIG00246-brexit-pourquoi-l-ue-n-aime-pas-les-referendums-sur-l-europe.php
Brexit: Jacques Attali appelle à « sanctuariser » la dictature!
par Olivier Demeulenaere
Non, évidemment, il ne le dit pas comme ça. En des termes bien choisis, il appelle seulement – si je puis dire – à « sanctuariser le progrès ». Et le progrès, c’est l’Union européenne, vous l’avez compris… Pour Attali, donc, il ne devrait pas être autorisé qu’un référendum – qualifié avec mépris de « simple vote du peuple » et même de « vote de circonstances » – puisse défaire une grandiose usine à gaz, aussi détestable et régressive soit-elle. Vraiment qu’ils sont beaux, les raisonnements des élites autoproclamées. Surtout quand ces mêmes élites nous assuraient il y a quelques années que l’Europe était irréversible et qu’elles pètent de trouille aujourd’hui… OD
« Le référendum britannique, quel qu’en soit le résultat, constitue un tournant idéologique majeur dans l’histoire de l’Occident. Un tournant vers le pire, si l’on n’en pèse pas toutes les conséquences. Jusqu’ici, on considérait certaines évolutions institutionnelles, économiques, sociales, scientifiques, comme des avancées telles que, une fois qu’elles étaient installées, nul ne chercherait plus jamais à les remettre en cause, même pas par un vote démocratique. Avec le vote sur le Brexit, c’est ce principe, non-dit et pourtant essentiel, qui est remis en cause.
D’abord, en posant cette question, David Cameron, permet à d’autres pays de l’Union qu’ils ont eux aussi le droit de se poser la même question, de défaire ce que leurs pères ont fait. On ne pourra donc plus prétendre que le projet européen avance à des vitesses variables, dans une direction unique, et il faut admettre que l’Europe peut désormais assumer un désir de se défaire.
Plus largement, un tel referendum implique qu’un peuple peut remettre en cause toute évolution considérée jusque-là comme irréversible, telle qu’une une réforme institutionnelle, une conquête sociale, une réforme des mœurs.
Certes, il a toujours été admis qu’en principe, en démocratie, le peuple peut décider de tout. Il n’empêche : selon notre conception occidentale du droit, il existe des progrès irréversibles, (par exemple, la démocratie, la liberté du culte, l’interdiction du travail des enfants, l’abolition de la peine de mort) qu’un vote simple ne peut défaire. Admettre qu’on puisse remettre en cause des acquis, revient à nier la notion même de progrès.
Si on pousse le raisonnement à l’extrême, et certains le font déjà, on considérera que c’est la notion même d’accumulation du savoir qu’on peut remettre en cause. Depuis des siècles, le progrès scientifique consiste à échafauder de nouvelles théories qui dépassent les actuelles sans les contredire : la science peut dépasser Darwin, c’est-à-dire inclure sa vision de l’histoire du vivant dans une conception plus vaste, mais pas le nier. Et surtout pas par une décision politique, extérieure au règne de la raison.
Admettre que rien n’est acquis, peut conduire, à revenir au temps où la raison et la liberté étaient écrasées par la foi et le fatalisme et, en utilisant les armes de la démocratie, à la détruire.
Il est donc important, de réfléchir, à froid, avant qu’il ne soit trop tard, aux sujets qu’un seul vote majoritaire du peuple ne pourrait suffire à trancher.
On devrait d’abord et ce serait passionnant, faire la liste de tels sujets, qui seraient sanctuarisés, en les inscrivant dans la constitution. En particulier, une génération devrait y réfléchir à deux fois avant de modifier une situation ayant un impact sur les générations suivantes. Il faudrait ensuite modifier la procédure de réforme constitutionnelle, pour s’assurer qu’un vote de circonstances ne puisse avoir des conséquences de long terme non désirées. Toute décision ayant un impact lourd sur le sort des générations suivantes, ne devrait pas pouvoir être prise par une majorité de moins de 60% des votants, réaffirmée à trois reprises à au moins un an d’écart (sic).
Certains ne verront dans cette prise de position qu’une tentative désespérée d’une oligarchie dépassée pour maintenir un ordre démodé, en méprisant les désirs des peuples. Il s’agit au contraire de donner aux peuples le temps de réfléchir aux conséquences de ses actes et d’éviter qu’une génération, par caprice, ne détruise ce que les précédentes ont voulu laisser aux suivantes. Dans bien des circonstances, ce genre de mécanismes aurait évité à l’Europe de plonger dans la barbarie. Il pourrait encore se révéler salvateur ».
Blog de Jacques Attali, le 20 juin 2016
https://leblogalupus.com/2016/06/26/regard-sur-la-societe...
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