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jeudi, 19 décembre 2024

Le monde anglo-saxon se réclame du Grand Israël

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Le monde anglo-saxon se réclame du Grand Israël

par Valentin Katasonov

Source: https://telegra.ph/Il-mondo-anglosassone-pretende-di-esse...

Aujourd'hui, le mot « Occident » apparaît dans les médias russes aussi fréquemment que le mot « Russie ». Il en va de même pour les dérivés du mot « Occident »: « civilisation occidentale », « sanctions occidentales », « culture occidentale », « domination occidentale », etc. Wikipédia explique que l'Occident désigne les pays d'Europe occidentale, l'Amérique du Nord, l'Australie, la Nouvelle-Zélande et quelques autres pays. Les historiens, les politiciens et les philosophes essaient de trouver un dénominateur commun qui unit les pays qui sont ainsi mentionnés. Ils appellent la somme de ces pays la « civilisation occidentale ». Elle réunirait dès lors des pays qui ont une idéologie commune. Le noyau de cette civilisation occidentale est le monde anglo-saxon. En effet, l'idéologie occidentale est née dans les pays anglo-saxons. Le monde anglo-saxon est le regroupement idéologique, politique, militaire et financier de cinq pays: la Grande-Bretagne, les États-Unis, le Canada, l'Australie et la Nouvelle-Zélande. La formation du monde anglo-saxon a commencé au départ de la Grande-Bretagne. Pendant plusieurs siècles, elle a étendu son influence à d'autres parties du monde. Elle a colonisé le Nouveau Monde et créé l'Empire britannique, dans lequel « le soleil ne se couchait jamais ». Il faut d'abord parler de l'influence idéologique de la Grande-Bretagne, puis de son influence politique, militaire, financière et économique.

Au 20ème siècle, le noyau du monde anglo-saxon est devenu les États-Unis d'Amérique. Ils dominent le monde anglo-saxon et l'ensemble du monde occidental par leurs positions géopolitiques, militaires, financières, économiques et idéologiques. J'en viens maintenant à l'idéologie du monde anglo-saxon. Le plus souvent, on dit qu'il s'agit de l'idéologie du libéralisme. Mais le mot « libéralisme » est un terme mal compris. À l'époque soviétique, il existait une définition plus claire de l'idéologie occidentale en général et de l'idéologie anglo-saxonne en particulier: « idéologie du capitalisme », « idéologie de l'impérialisme », « idéologie de la domination mondiale », etc. En outre, on a constaté à l'époque soviétique que dans les pays occidentaux non inclus dans le monde anglo-saxon (comme la France, l'Allemagne, l'Italie, etc.), c'est-à-dire dans les pays d'Europe continentale, l'idéologie est légèrement différente de celle de la Grande-Bretagne, des États-Unis, du Canada, de l'Australie et de la Nouvelle-Zélande.

L'idéologie anglo-saxonne se distingue nettement des autres idéologies. Et ces différences se retrouvent dans les racines religieuses du monde anglo-saxon. Il convient de noter que dans les cinq pays du monde anglo-saxon mentionnés ci-dessus, le protestantisme a été la religion dominante pendant plusieurs siècles. Au moment de la Réforme (au 16ème siècle), le protestantisme est apparu dans de nombreux pays d'Europe, avec des orientations et des nuances différentes. Mais dans les îles de la brumeuse Albion, il avait des nuances bien spécifiques.

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Les causes de nombreux événements actuels dans le monde anglo-saxon et dans le monde entier sont à rechercher dans l'Angleterre des 16ème et 17ème siècles. Sans remonter plus loin dans le temps, je rappellerai que certaines mouvances protestantes (en fait des sectes) prêchaient la doctrine de l'exclusivité de leurs membres. Dans le sens d'être les élus de Dieu. Ils partaient du fait qu'eux, les habitants de la Foggy Albion, sont les descendants des tribus d'Israël. Plus précisément, des tribus qui avaient été chassées de la Terre promise. Selon certaines versions, ils sont les descendants de ceux qui ont été expulsés lorsque les Assyriens, au 8ème siècle avant J.-C., ont conquis la partie nord d'Israël avec ses dix tribus de descendants de l'Ancien Testament, soit de Jacob, fils d'Isaac et petit-fils d'Abraham. Il y avait aussi quelques « charismatiques » qui se considéraient comme les descendants des deux tribus restantes, ces Juifs de l'Ancien Testament qui avaient été expulsés de Judée (le royaume du sud) par les armées romaines des empereurs Vespasien et Titus au premier siècle avant J.-C. et qui, après la révolte de Bar Kokhba (132-136 avant J.-C.), avaient été expulsés de la Palestine tout entière. En bref, les protestants britanniques pensaient être les descendants des Israélites de l'Ancien Testament, qui avaient erré à travers le monde en empruntant différentes routes pendant de nombreux siècles. Et finalement, par la volonté du Tout-Puissant, ils se sont retrouvés sur les Iles britanniques.

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Comme nous le racontent les historiens, l'idée d'avoir des racines dans l'Ancien Testament n'a pas seulement séduit les Anglais, mais aussi d'autres protestants. Par exemple, en 1590, le huguenot français Pierre Le Loyer a publié un livre intitulé « Les dix tribus perdues ». Il y exprime sa conviction que les Anglo-Saxons, les Celtes, les Scandinaves, les Allemands et d'autres peuples apparentés sont les descendants directs des Israélites de l'Ancien Testament. Au bout d'un certain temps, presque tous les Européens ont abandonné ces théories, n'en ont plus parlé et les légendes sur leur « élection par Dieu » ont été progressivement oubliées.

A l'exception des Anglo-Saxons, tous se sont calmés en ce domaine. Les protestants britanniques les plus « charismatiques » ont continué à se considérer comme le peuple d'Israël. Avec toutes les conséquences que cela implique pour ces « charismatiques » eux-mêmes et pour leur entourage. L'un de ces « charismatiques » était le roi Jacques VI d'Écosse, alias Jacques Ier d'Angleterre (1566-1625), qui se considérait comme le roi d'Israël. Il affirmait avec assurance que le peuple britannique était le descendant direct des dix tribus perdues d'Israël et que le monarque britannique était le véritable héritier du royaume de David, l'ancien roi d'Israël le plus célèbre.

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Bien entendu, l'un des représentants les plus éminents du protestantisme pro-israélien était Oliver Cromwell. Le talmudiste juif portugais Menasseh ben Israel (de son vrai nom Manoel Dias Soeiro) a eu une grande influence sur la formation des sentiments pro-israélites de Cromwell. Cromwell n'a jamais caché ses sympathies pour les Juifs et a favorisé par tous les moyens la réinstallation des Juifs de Hollande dans la brumeuse Albion. Bien entendu, Cromwell était également guidé par des considérations économiques: il voyait dans les riches maisons de commerce juives de puissants alliés.

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John Sadle (1615-74), ami et secrétaire personnel d'Oliver Cromwell, a publié en 1649 Rights of the Kingdom, qui expose « la généalogie israélite du peuple britannique ».

Au 19ème siècle, les protestants britanniques avaient leurs propres "théologiens" et "scientifiques", qui prouvaient déjà sur une base dite « scientifique » que les habitants de la Grande-Bretagne étaient « génétiquement, racialement et linguistiquement des descendants directs » des tribus perdues de l'ancien Israël. On parlait avec assurance des dix tribus. La période de travail littéraire et scientifique actif sur le sujet de la Grande-Bretagne et d'Israël a probablement été ouverte par le livre de Richard Brothers de 1794, A Revealed Knowledge of the Prophecies and Times (Une connaissance révélée des prophéties et des temps).

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Un livre de l'Anglais John Wilson, Our Israelitish Origin, publié en 1840, a suscité un grand intérêt chez les Anglais. De même, un livre de 1879, de John Pym Yeatman, The Shemetic Origin of the Nations of Western Europe (L'origine shemétique -sémitiques- des nations de l'Europe occidentale).

En 1890, le livre de John Garnier Israel in Britain : a brief statement of the evidence proving the Israelite origin of the British race (Israël en Grande-Bretagne: un bref exposé des preuves prouvant l'origine israélite de la race britannique) sort de presse. Ce livre était particulièrement populaire sur le sujet qui nous occupe ici. Il a été réimprimé à plusieurs reprises en Angleterre et dans plusieurs pays anglophones. A lasuite de ce livre, les termes « British Israelism » ou « Israelitism » et « Anglo-Israelism » sont apparus.

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Dans la seconde moitié du 19ème siècle, l'israélisme en Angleterre commence à prendre des formes organisationnelles. Les partisans de l'israélisme, qui appartenaient à différents courants du protestantisme, se devaient de trouver des personnes partageant les mêmes idées. En effet, dans certaines églises anglaises, tout le monde n'était pas disposé à partager les vues de l'israélisme. Beaucoup pensaient que les racines israélites du peuple britannique étaient une pure fiction, un mythe. Dans certaines églises protestantes, il y a même eu des schismes à ce propos. Par exemple, le cardinal catholique John Henry Newman (1801-1890) avait été membre de l'Église anglicane pendant la première moitié de sa vie. Cependant, en 1845, il a quitté cette Église anglicane pour rejoindre l'Église catholique romaine. John Henry expliqua la raison de ce choix en déclarant qu'il existait un danger très réel de voir les partisans de l'israélisme britannique « prendre le contrôle de l'Église d'Angleterre ».

À la fin du 19ème siècle, Edward Hine, Edward Wheeler Bird et Herbert Aldersmith fondent le mouvement israélite britannique. L'Anglo-Israel Association est créée et compte, en 1886, 27 branches dans toute la Grande-Bretagne. En 1880, la publication de l'Anglo-Israel Almanach est apparu pour la première fois et a été distribué non seulement dans les îles de la brumeuse Albion, mais aussi dans d'autres pays de l'Empire britannique. L'édition de 1914 contient un aperçu intéressant des groupes qui soutiennent l'idéologie de l'israélisme britannique non seulement dans les îles de la brumeuse Albion, mais aussi en Australie, en Nouvelle-Zélande, en Afrique du Sud, au Canada et aux États-Unis d'Amérique.

L'édition de 1906 de l'Encyclopédie juive indique qu'au début du 20ème siècle, il y avait environ deux millions d'adeptes de l'israélisme britannique en Grande-Bretagne et aux États-Unis d'Amérique.

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En 1919, la British-Israel-World Federation (BIWF) est fondée à Londres. En 1922, Covenant Publishing a été fondée pour servir la Fédération. La Fédération existe toujours aujourd'hui et couvre de nombreux pays du Commonwealth britannique.

L'une des pierres angulaires de la plate-forme idéologique de la BIWF est l'affirmation selon laquelle la famille royale britannique est l'héritière par le sang et par l'esprit du roi David d'Israël. Il n'est donc pas surprenant que la Fédération ait toujours eu des mécènes de premier plan. Voici la liste des premiers mécènes (1920): Son Altesse Royale la Princesse Alice, Comtesse d'Athlone (elle est restée sur cette liste jusqu'à sa mort en 1981) ; l'Honorable Comtesse douairière de Radnor ; le Duc de Buckclough ; l'Honorable Lord Guisborough ; l'Honorable Lord St John of Bletsoe ; Son Eminence, l'Evêque des Iles Falkland ; le Révérend Evêque John D. M. McLean et d'autres encore.

Un grand nombre de livres sont publiés en Russie et à l'étranger sur le contexte mondial, la conspiration mondiale, l'élite mondiale. Presque tous les auteurs de ces livres s'accordent à dire que le noyau de l'arrière-scène mondiale (de l'élite) est constitué par les Anglo-Saxons. Leur principale caractéristique n'est même pas leur lieu de résidence, mais leur appartenance religieuse. Ils appartiennent tous à différentes branches du protestantisme et adhèrent à l'idéologie de l'israélisme britannique. Les porteurs de cette idéologie et même les fanatiques de l'israélisme britannique étaient Benjamin Disraeli (premier ministre britannique en 1868 et 1874-1880), Cecil Rhodes (magnat du diamant qui a fondé De Beers), Lord Alfred Milner et d'autres. Ils croyaient fermement à la supériorité des Anglo-Saxons, considérant les autres peuples comme, au mieux, arriérés, voire comme des communautés de sous-hommes, presque des animaux. D'où la conviction totale que le pouvoir sur terre leur a été donné par le Tout-Puissant, à eux, les descendants d'Israël. Et que les autres devaient servir les Anglo-Saxons « choisis par Dieu », être leurs esclaves. Ceux qui ne veulent pas être esclaves doivent être tués sans pitié, car ce sont des sous-hommes, des animaux aux traits humanoïdes.

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Ainsi, les Anglo-Saxons ont remplacé Dieu par la race, le sang. Comme l'a écrit la chercheuse Hannah Arendt, Benjamin Disraeli, juif baptisé, s'est soudain souvenu à l'âge adulte qu'il était plus sémite qu'anglais. Et tous les « sémites », selon lui, méritaient le titre d'« aristocrates par nature ». Disraeli, comme l'écrit Arendt, fut « le premier idéologue qui osa remplacer le mot “Dieu” par le mot “sang” ». "La race est tout, et sa base est le sang", "Tout est race, il n'y a pas d'autre vérité". "La question raciale est la clé de l'histoire du monde" : tels sont les points clés de l'idéologie du Premier ministre britannique. Cependant, dans les îles de la brumeuse Albion, selon Disraeli, Juifs et Anglo-Saxons n'ont rien à partager. Ils doivent remplir ensemble leur mission historique, qui est de dominer le monde. Pourquoi n'y a-t-il rien à partager? Parce que les Juifs sont les descendants des deux tribus expulsées de Judée (le royaume du Sud) et les Anglo-Saxons sont les descendants des dix autres tribus (celles qui furent expulsées du royaume du Nord, appelé Israël). La City de Londres, le quartier des plus grandes banques britanniques et internationales, est un symbole frappant de cette unité des descendants des douze tribus d'Israël (celles qui provenaient à l'origine de Jacob, fils d'Isaac et petit-fils d'Abraham). De nombreux Anglo-Saxons modernes partagent le point de vue de Disraeli et pensent donc qu'il est plus correct d'utiliser le terme « paix anglo-juive » plutôt que « paix anglo-saxonne ».

L'israélisme britannique est une idéologie raciste pure, sur laquelle l'Empire britannique a été construit. C'est sur la base de cette idéologie raciste anglo-saxonne que naîtra plus tard le fascisme britannique (apparu avant même les versions italienne et allemande). L'idéologie raciste britannique sera ensuite implantée en Allemagne et prendra la forme du national-socialisme du Troisième Reich (où le rôle de surhommes est attribué aux soi-disant « Aryens »).

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Une description assez compacte de l'histoire et de l'essence de l'israélisme britannique peut être trouvée dans l'ouvrage suivant: William H. Brackney, Historical Dictionary of Radical Christianity.

Au 20ème siècle, un grand nombre de livres sur le sujet de l'israélisme britannique ont continué à être publiés en Angleterre, ainsi que dans d'autres pays du Commonwealth britannique. Alexander James Ferris a été particulièrement prolifique dans ce domaine. Je citerai quelques-uns de ses ouvrages les plus significatifs :

Armageddon is at the doors (Armageddon est aux portes, 1933) ;

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The British-Israeli Teaching on the 'Signs of the Approaching End of the Age' (1933) ;

Why the British are Israel : nine conclusive facts showing that the Anglo-Saxons represent the House of Israel of the Scriptures (Pourquoi les Britanniques sont Israël : neuf faits concluants montrant que les Anglo-Saxons représentent la Maison d'Israël des Ecritures) (1934) ;

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L'enseignement israélo-britannique sur la grande pyramide de Gizeh (1934) ;

Le trône éternel de David (1935) ;

The Great Pyramid : A Simple Explanation of the Great Pyramid's Divine Message to the Anglo-Saxon Race (1935) ;

Le couronnement et le trône de David, 1940 ;

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Great Britain & The U.S.A. Revealed as Israel. The New Order (La Grande-Bretagne et les États-Unis révélés en tant qu'Israël. Le nouvel ordre, 1941).

When Russia invades Palestine (Quand la Russie envahit la Palestine, 1945) ;

Palestine for Jews or Arabs (Palestine pour les Juifs ou les Arabes? 1946).

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Une grande partie des propos de cet adepte fanatique de l'israélisme britannique devient évidente dès que l'on lit le titre de ses livres. Il exalte la famille royale britannique en tant qu'héritière du roi David. Il parle des racines israélites des Britanniques, faisant d'eux le « peuple élu de Dieu ». Citant l'Apocalypse, il est certain de la fin imminente de ce monde « pécheur », qui sera suivie d'un millénaire de règne de la couronne britannique. Enfin, il conclut que les « élus » de Dieu ne vivent pas seulement sur les îles de la brumeuse Albion. On les trouve dans d'autres pays du Commonwealth britannique. Et ils sont particulièrement nombreux dans le Nouveau Monde.

Il y a environ 400 ans, 30.000 puritains charismatiques se sont installés en Nouvelle-Angleterre pour y créer une société théocratique. Puritains, baptistes, méthodistes et autres colons britanniques à tendances religieuses particulières ont impitoyablement massacré les Indiens. La colonisation active du Nouveau Monde par les Britanniques s'est poursuivie pendant plus de deux siècles. Bien entendu, les colons ne venaient pas seulement des îles de la brumeuse Albion, mais aussi d'Europe continentale: de France, de Hollande, de Suisse, d'Allemagne, de Belgique et d'autres pays. Mais l'épine dorsale de l'État américain restait les charismatiques natifs de Grande-Bretagne (d'Angleterre, du Pays de Galles, d'Écosse, d'Irlande). C'est leur protestantisme teinté d'israélisme britannique qui est devenu l'idéologie dominante dans le Nouveau Monde. Sans tenir compte de cette base idéologique et religieuse ancrée en Amérique, il est difficile de comprendre la politique étrangère des États-Unis dans le Nouveau Monde et surtout durant l'époque moderne. Et de comprendre l'invisible communauté de vues entre les États-Unis et la Grande-Bretagne, qui forme un seul monde anglo-saxon cherchant à soumettre le reste de l'humanité. 

vendredi, 07 octobre 2022

La Russie de Poutine et les Anglo-Saxons dans une guerre hybride

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La Russie de Poutine et les Anglo-Saxons dans une guerre hybride

Markku Siira

Source: https://markkusiira.com/2022/10/03/putinin-venaja-ja-anglosaksit-hybridisodassa/

Le discours de Poutine, vendredi dernier, a une fois de plus provoqué la peur, le dégoût et l'indignation en Occident. En Finlande, et dans les autres colonies les plus ardentes de l'Occident libéral, l'éventail politique de droite à gauche est uni dans son antirussisme.

Dans la guerre hybride de l'Occident, tout le monde, des politiciens aux journalistes en passant par les experts, scande les mêmes phrases jour après jour, que de nombreux citoyens ordinaires répètent ensuite. On ne peut échapper à l'idée que ces interférences informationnelles sont coordonnées et que les traces mènent aux centres opérationnels de l'Occident.

En ce qui concerne le discours de Poutine, la droite libérale anglo-américaine et européenne n'a pas semblé apprécier les points se moquant du "satanisme" et des politiques identitaires perverses de l'Occident, et la gauche occidentale n'était même pas intéressée aux références au colonialisme et au racisme occidentaux.

Dans leur mode typique, les experts finlandais en politique étrangère ont également aboyé contre Poutine et affirmé que les nouvelles alliances territoriales de la Russie ne feraient que rendre l'Ouest et l'OTAN plus unis. On pense également que le rôle des États-Unis en tant que "garant de la sécurité" pour ses voisins de la zone euro ne fera que se renforcer.

Pour Poutine, le comportement de l'élite européenne n'est plus seulement de la flagornerie américaine, mais une "trahison pure et simple" des peuples d'Europe. Une fois encore, il nous a rappelé que la Russie n'est pas non plus prête à devenir une colonie de l'Occident, ni à céder sa souveraineté aux États-Unis. C'est pourquoi l'Occident perçoit la "pensée et la philosophie russes" comme une menace pour sa domination mondiale.

Outre les États-Unis, la Grande-Bretagne est depuis longtemps active dans la guerre contre la Russie. La guerre hybride de Londres contre Moscou dure depuis des siècles, si l'on en croit certains politologues russes. Il n'était donc pas surprenant que Poutine fasse référence aux "Anglo-Saxons" dans son discours et les accuse également de saboter les gazoducs Nord Stream.

La bulle occidentale s'imagine que le discours de Poutine était destiné à des fins de politique intérieure, alors qu'en réalité le message s'adressait au reste du monde, où les références historiques et religieuses, le patriotisme et la critique franche des politiques hypocrites de l'Occident du président russe sont compris. L'Occident lui-même est le monstre aux yeux du reste du monde, pas la Russie.

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Nous sommes passés des circonstances exceptionnelles de la période pandémique à un nouvel état étrange, une sorte de psychose de guerre, dans lequel beaucoup de gens se mentent à eux-mêmes et s'imaginent, noir sur blanc, que tout ira bien si seulement la Russie cessait d'exister. En réalité, l'"Occident collectif" ne représente pas les bonnes forces comme dans la fantaisie de J.R.R. Tolkien, et la Russie n'est pas le Mordor et ses armées d'orques.

Si quelque chose dans ce monde représente bel et bien les forces contre la civilisation, c'est précisément "l'empire global américain", qui détruit sans état d'âme des cultures, des traditions et des États entiers dans une tentative de façonner le monde entier à sa propre image tordue.

Il est également grotesque que les États-Unis, qui possèdent plus de six cents bases militaires dans divers pays, accusent la Russie d'"impérialisme". Mais même Washington, qui diffuse le faux message de la démocratie et de la liberté avec l'aide de l'industrie cinématographique hollywoodienne et de la culture populaire américaine, sait comment jouer à un jeu de faux semblants, même s'il ne s'agit que de poudre aux yeux.

Je ne sais pas si c'est la Russie qui fera tomber ce pouvoir, mais l'élite qui dirige l'Occident doit, à mon avis, être combattue, même si elle ne se soucie pas des idéologies de ses rivaux. Aucun système n'est parfait, mais je pense que la mondialisation multipolaire offre de meilleures alternatives pour différentes nations que le "modèle néocolonial" unipolaire de l'Occident. Toutefois, la transition vers un nouvel ordre ne sera pas facile.

Au conflit actuel s'ajoute la menace toujours plus grande d'une nouvelle crise économique. La guerre cessera-t-elle et le soutien à l'Ukraine sera-t-il suspendu lorsque l'Occident se trouvera à nouveau en difficulté économique? L'hégémonie du dollar américain sera-t-elle brisée en conséquence?

Comme point de référence historique, on pourrait mentionner comment, dans les dernières années de la Grande Guerre du Nord, la Grande-Bretagne a tenté d'inciter la Suède et la Pologne en particulier à attaquer la Russie avec elle. Cependant, la Grande-Bretagne a été contrainte de se retirer des plans de guerre car elle devait se concentrer sur ses affaires intérieures après le krach boursier de Londres en 1720. Sommes-nous sur le point de nous retrouver dans une situation similaire ?

lundi, 07 mars 2022

Guerre de désinformation, de droite et de gauche, au service de l'OTAN

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Guerre de désinformation, de droite et de gauche, au service de l'OTAN

par KontraInfo (6 mars, 2022) - https://kontrainfo.com/guerra-de-desinformacion-por-derecha-y-por-izquierda-al-servicio-de-la-otan-por-marcelo-ramirez/

Par Marcelo Ramírez

On entend souvent aujourd'hui des théoriciens de la guerre expliquer que la confrontation cinétique, comme on appelle les affrontements armés dans le jargon militaire, n'est que le dernier maillon d'une chaîne constituée d'actions de différents ordres allant du culturel au psychologique, en passant par l'économique ou le technologique.

Le concept de base est que la préparation d'une guerre implique l'affaiblissement préalable de l'ennemi. L'Art suprême de la guerre consiste à soumettre l'ennemi sans combattre, comme l'a déjà dit Sun Tzu au 6e siècle avant J.-C., et deux millénaires et demi plus tard, c'est toujours le cas.

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La confrontation entre la Russie et les États-Unis est bien plus que la guerre quisévit aujourd'hui en Ukraine, c'est une guerre menée sur de nombreux fronts où l'armée n'est qu'un des nombreux scénarios dans lesquels se joue la dispute entre deux modèles, l'Occident mondialiste libéral à base financière, d'une part, et, d'autre part, le reste de l'humanité. La Russie n'est qu'un acteur de plus, peut-être le plus déterminé, qui est le bélier d'un monde qui a commencé à dire "ça suffit" à la prédominance qui s'est transformée en hégémonie absolue après la chute de l'Union soviétique.

Les élites occidentales se sont retrouvées du jour au lendemain sans rival, à la vieille des années 1990, si bien que cela aurait pu signifier la dissolution de l'OTAN et la paix universelle, avec une vie plus heureuse, hélas, nous avons assisté à une concentration de plus en plus grande des richesses ainsi qu'à une augmentation de la belligérance menée par une OTAN qui sortait de son cadre d'opérations initial et qui, derrière des portes closes, a commencé, à partir de 2001 avec le 11 septembre, à créer un État policier dans lequel elle a accru le contrôle sur ses propres citoyens jusqu'aux extrêmes que nous connaissons aujourd'hui.

Le différend se pose alors face au déclin de l'Occident en termes productifs, technologiques et culturels et à la montée en puissance d'autres acteurs menés par la Chine et la Russie. Cette confrontation a entraîné plus de 100 sanctions occidentales contre la Russie depuis l'arrivée au pouvoir de Poutine jusqu'à aujourd'hui. La même chose a commencé à se produire pour la Chine lorsque l'Occident a perçu que la nation asiatique auparavant perméable, rentable et obéissante devenait une menace pour sa prépondérance.

Les modèles qui s'affrontent, l'un avec un corporatisme privé mondial, l'autre avec des Etats-nations forts qui subordonnent le pouvoir de l'argent aux décisions politiques, se traduisent depuis plusieurs années, en Occident, par des processus provoquant délibérément une confluence de mesures visant à ralentir d'abord, puis à détruire, la montée en puissance de ces puissances émergentes, plus faibles en apparence mais dotées d'un ADN historique propre des nations puissantes, présentant des modèles politiques différents mais unis face à la frousse qu'elles inspirent aux milieux mondialistes.

L'Occident a décidé que le temps de l'attente était écoulé, que le cours ascendant et la puissance accumulée par les plus fortes puissances émergentes devaient être stoppés car ils risquaient de devenir incontrôlable, l'anglosphère/américanosphère aurait ainsi perdu le contrôle des événements mondiaux dont elle avait bénéficié pendant des siècles.

Voilà où nous en sommes aujourd'hui. Le mondialisme occidental, expression ultime de ce modèle capitaliste productif, devenu financier, qui a donné naissance à l'Anglosphère, a décidé que la dernière option disponible pour empêcher que le pouvoir mondial change de mains, que le dernier rapport à imposer, c'était la guerre.

C'est ce qui nous amène à un présent où les rebelles décident qu'il n'est pas opportun de s'emparer du pouvoir par la force des armes car les USA, en gros (car l'anémie militaire des puissances européennes est notoire), peuvent détruire le monde dans leur chute. La Russie et la Chine croient simplement que l'état de l'Occident est en phase terminale et qu'elles ne peuvent qu'attendre qu'il tombe sous le poids de ses contradictions, de sa corruption et de sa faiblesse intrinsèque. 

Cela détermine ce que nous voyons ces derniers temps, un Occident qui fait appel à tout ce qui est en son pouvoir pour éviter un déclin qui s'est déjà transformé en chute libre. Ainsi, nous trouvons aujourd'hui une Ukraine où des éléments marginaux s'identifient au nazisme et se voient attribuer un statut militaire, comme le bataillon Azov ou Aidar, qui expriment le suprémacisme racial du nazisme en appelant à l'extermination des Ukrainiens d'origine russe mais cette fois, contrairement au nazisme historique, en se mettant au service des États-Unis.

Ces groupes partagent un front commun avec les groupes djihadistes, dont beaucoup ont été amenés directement de Syrie ou ont ensuite fait de courts séjours dans d'autres conflits parrainés par la CIA et le MI6.

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Ce qui est éclectique à première vue, ce qui serait incompatible comme l'huile et l'eau, est émulsifié sous le parapluie de l'OTAN. Il est donc clair que, de l'opération Gladio en Europe au djihadisme islamique, tout répond du même cerveau.

Tout cet aspect idéologique culturel est soutenu par deux pouvoirs conventionnels, la presse et les structures financières.

L'Occident utilise l'information comme une arme pour créer un monde de fumée et de miroirs afin de contrôler l'opinion publique, du moins dans ses propres sociétés, et d'essayer de secouer celles des autres. La campagne médiatique choquante déclenchée n'a jamais été vue auparavant, pas même à l'époque de la guerre du Golfe. Vous pouviez y trouver des voix dénonçant ce qui se passait, des voix minoritaires, mais des voix qui existaient quand même.

Bien sûr, le niveau du journalisme et des "spécialistes" était bien plus élevé qu'aujourd'hui, de simples répétiteurs des idées des autres, sans vol propre et sans même l'intention d'en avoir un.

Nous voyons alors comment chacune des actions et chacun des acteurs sont présentés de manière inverse à la réalité : celui qui a été persécuté pendant des décennies est présenté comme le persécuteur, celui qui est violé est l'agresseur, et celui qui est innocent est coupable.

Sur cette base, ils construisent un récit prétendument éthique et moral qui déforme et manipule les informations dans ce sens et s'appuie sur des mensonges systématiques et répétitifs. Sachant que la plupart des gens n'ont ni les informations ni le temps de savoir ce qui se passe, ils fixent les concepts au fur et à mesure.

Si un citoyen se sent plus concerné, il devra faire face à la cataracte des spécialistes dont les think tanks ou les académies sont soutenus par le mondialisme lui-même avec son réseau d'ONG et de fondations associées à des organisations internationales. Qui s'élèverait contre ceux qui les nourrissent ou, dans ce cas, financent leurs études et leurs conférences à l'étranger ?

Si cela ne suffit pas, il existe un réseau politique qui soutient les politiques atlantistes. D'un côté, nous avons le libéralisme classique qui ne cache pas son amour pour les États-Unis, soutenant explicitement ses politiques et se battant pour être ses représentants dans leurs pays, tandis que pour ceux qui se méfient des États-Unis, nous avons un menu à la carte.

S'ils sont des amoureux du capitalisme du 18e siècle, nous avons un groupe hétéroclite de libertaires, dont le blason les distingue des libéraux classiques, mais dont le noyau intérieur est le même. D'un point de vue critique des États-Unis, ou du moins formel, ils décident que tout est pareil et que Poutine est pareil à Biden.

La stratégie est simple, ceux qui ne peuvent être convaincus que le modèle anglo-américain est le meilleur de l'humanité sont placés sur une étape critique qui égale ceux qui cherchent un autre modèle.

Nous verrons des appels à une liberté abstraite et l'invocation de modèles inexistants dans l'histoire qui leur permettent d'être critiques envers la réalité en proposant quelque chose de magique et d'absent.

Ceux qui critiquent des états de chose en place au départ du discours utopique, qui s'avère toujours impraticable, ne développeront jamais une vision réaliste mais la présence bruyante de leurs discours parvient à freiner tout soutien à la Russie et à son peuple.

Curieusement, un fragment d'une expression de Klaus Schwab apparaît qui parle de Poutine comme d'un jeune homme prometteur, permettant une offensive libertaire dans sa sphère naturelle, qui est l'internet, avec des images incendiaires et des titres jaunes chargés d'épithètes envers le leader russe. Ne leur demandons pas de comprendre un quelconque contexte, tel que la Russie libérale des années 1990 avec Boris Eltsine, qui a rendu impossible toute ascension politique en dehors de ces voies.

L'important est de comprendre les politiques de Poutine une fois au pouvoir, ce qu'il fait réellement et si cela est compatible avec les politiques mondialistes du Forum de Davos, par exemple. Sans comprendre cela, nous arrivons à de mauvaises conclusions, tout en emprutant le chemin que le mondialisme lui-même trace, en semant des miettes de pain pour nous amener au but qu'il veut nous faire atteindre.

Les libertaires, se faisant l'écho des fake news et des auteurs liés à la CIA ou au MI6, diffusent leur position hostile à l'égard de la Russie et de la Chine tout en abjurant l'État, le nationalisme et la religion, éléments qui sont au cœur de la politique de Poutine.

De curieuses coïncidences qui alimentent les soupçons quand on voit les espaces que leur laissent les réseaux et les médias ainsi que les financements généreux qui leur permettent d'augmenter le nombre de leurs followers en faisant appel aux services de sociétés dédiées à l'augmentation du trafic sur les réseaux sociaux.

Si l'on ajoute à cela l'expérience antérieure de leur formation dans des universités ou des centres liés au Pentagone et le financement généreux, une fois de plus, qui leur permet de publier des livres, de donner des conférences dans différents pays et de générer des actions de marketing, il n'est pas difficile de comprendre pourquoi maintenant, en ce moment même, l'offensive anti-Poutine apparaît avec des arguments typiques de la CIA.

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Le progressisme et le "néo-marxisme" font également partie du tableau de la guerre de l'information et de la culture qui conditionne ensuite les volontés et permet de faire pression sur les gouvernements pour qu'ils se joignent aux sanctions.

Des présidents comme Boric, la social-démocratie européenne, les organisations de défense des droits de l'homme comme Amnesty International, sont des accessoires pour confondre leurs partisans qui croient qu'ils luttent contre le fascisme... en soutenant le nazisme ukrainien.

Les différentes ONG ont bien travaillé pour cela, les féministes disant que Poutine est sexiste et misogyne, les groupes comme les Femen, les ONG LGBTQ+ parlant d'homophobie et de persécution en Russie et en Ukraine, sont celles qui préparent l'atmosphère pour que les indécis finissent par soutenir l'OTAN.

Sans parler de certains hispanistes qui croient que se ranger du côté de ceux qui occupent Gibraltar et les Malouines, c'est défendre l'Hispanidad, un monde qui a été désarticulé par l'Empire britannique, c'est défendre les intérêts de ce monde, ils complètent un tableau qui vise à affaiblir la menace qui pèse sur le modèle occidental moribond.

Il s'agit de la préparation préalable aux actions militaires que l'OTAN recherche dans une course folle pour empêcher l'inévitable, déclenchant une escalade qui pourrait se terminer par une guerre thermonucléaire qui anéantirait des milliards de personnes sur terre, détruisant l'économie actuelle.

Plus alarmant encore, il existe des groupes puissants qui défendent la nécessité de réduire la population pour répondre aux exigences des nouvelles technologies.

Ce que nous voyons aujourd'hui est une guerre mondiale à différents niveaux, l'un des rares que domine encore l'Occident est la communication, et c'est ce qui nous fait voir que la Russie avait tort, que son économie va être pulvérisée et qu'elle est seule.

Cependant, les faits réels montrent que la Chine remplacera SWIFT dans une large mesure, que la Russie placera ses produits et obtiendra ce dont elle a besoin auprès de pays comme la Chine, l'Inde, les pays de l'ANASE, le Brésil, le Mexique, l'Amérique latine, surtout l'Afrique, le Pakistan. Même Israël se déclare neutre et la Turquie comprend de nombreuses actions russes.

Tout cela montre que le grand perdant est l'Europe, et que les États-Unis sont affaiblis parce que leurs partenaires déjà en déclin, maintenant avec le déclin de l'énergie et de nombreuses matières premières russes, verront leurs économies chuter précipitamment et leur poids mondial diminuer brusquement.

Le monde réel n'est pas celui que nous montrent les médias officiels et alternatifs sous leur contrôle. Les premiers mouvements montrent qu'en dehors de l'écume de la propagande, la situation est négative pour l'Occident à moyen terme, et c'est précisément ce qui augmente le danger de guerre.

mercredi, 23 février 2022

La géopolitique de l'Anglosphère et la balkanisation de la Russie

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La géopolitique de l'Anglosphère et la balkanisation de la Russie

José Alsina Calvés

Source: http://www.elespiadigital.com/index.php/noticias/geoestrategia/36832-2022-02-17-17-34-48

Ces derniers temps, nous assistons à une formidable offensive idéologique et informationnelle, encouragée par les États-Unis et les centres de pouvoir mondialistes, contre la Russie de Poutine. Les médias répètent inlassablement une série de mantras dans lesquels la Russie actuelle est dépeinte comme un enfer dictatorial, où les "dissidents", les homosexuels et les immigrants sont persécutés. Pour les néolibéraux de droite, la Russie est toujours communiste. Pour les néolibéraux de gauche, la Russie de Poutine est une sorte de réincarnation du "fascisme".

Cependant, cette attitude agressive de Biden n'est pas nouvelle. Depuis des temps immémoriaux, bien avant la révolution communiste, l'Anglo-Empire est en désaccord avec la Russie pour des raisons géopolitiques. La Grande-Bretagne d'abord et les États-Unis (son successeur), en tant que puissances thalassocratiques, ont considéré la Russie comme un ennemi à vaincre, quel que soit le régime politique.

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Carte russe des opérations pendant la guerre de Crimée (1853-1856). On voit les avantages des flottes de guerre française et anglaise (et dans une moindre mesure ottomane), qui ont permis de frapper en Crimée et d'intervenir dans la mer d'Azov. La guerre de Crimée a créé d'importants mythes militaires pour les deux puissances occidentales (prise de Sébastopol par les zouaves français, attaque de Balaklava par la cavalerie anglaise, etc.) Moins connues sont les opérations russes dans l'actuelle Roumanie, qui ont été neutralisées par les troupes ottomanes. La principale raison de la défaite russe est le manque de chemins de fer à cette époque pour transporter rapidement les troupes vers les champs de bataille. La situation a radicalement changé lorsque, au début du XXe siècle, le réseau ferroviaire russe a couvert l'ensemble du territoire impérial : d'où l'émergence de la géopolitique de MacKinder (RS). 

La guerre de Crimée

La guerre de Crimée est un conflit mené entre 1853 et 1856 par l'Empire russe et le Royaume de Grèce contre une ligue formée par l'Empire ottoman, la France, le Royaume-Uni et le Royaume de Sardaigne. Elle a été déclenchée par la politique britannique, déterminée à empêcher toute influence de la Russie en Europe suite à un éventuel effondrement de l'Empire ottoman, et s'est déroulée principalement sur la péninsule de Crimée, autour de la base navale de Sébastopol. Elle a abouti à la défaite de la Russie, qui a été scellée par le traité de Paris de 1856.

Depuis la fin du XVIIe siècle, l'Empire ottoman était en déclin et ses structures militaires, politiques et économiques étaient incapables de se moderniser. À la suite de plusieurs conflits, elle avait perdu les territoires situés au nord de la mer Noire, y compris la péninsule de Crimée, qui avait été reprise par la Russie. La Russie voulait saper l'autorité ottomane et prendre en charge la protection de l'importante minorité des chrétiens orthodoxes dans les provinces européennes ottomanes. La France et le Royaume-Uni craignaient que l'Empire ottoman ne devienne un vassal de la Russie, ce qui aurait bouleversé l'équilibre politique entre les puissances européennes.

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Le Premier ministre britannique Lord Palmerston (tableau, ci-dessus) a été un acteur décisif dans le développement de cette politique anti-russe, qui allait devenir une caractéristique constante de la politique étrangère britannique, poursuivie plus tard au 20e siècle par Halford John Mackinder, l'un des créateurs de la science géopolitique, l'idéologue du traité de Versailles et du soutien britannique aux Russes blancs.

Le "pays-coeur" ou "Heartland"

Le concept géopolitique de Heartland a été introduit par Mackinder [1], et lié à l'existence géographique de bassins endoréiques, c'est-à-dire de grands bassins fluviaux qui se jettent dans des mers fermées (mer Caspienne, mer Noire). Heartland vient des mots anglais heart et land, "terre nucléaire" ou "région-coeur" étant peut-être les traductions les plus proches de l'anglais. Le Heartland est la somme d'une série de bassins fluviaux contigus dont les eaux se jettent dans des masses d'eau inaccessibles à la navigation océanique. Il s'agit des bassins endoréiques de l'Eurasie centrale plus la partie du bassin de l'océan Arctique gelée dans la Route du Nord avec une couverture de glace de 1,2 à 2 mètres, et donc impraticable pendant une grande partie de l'année - à l'exception des brise-glace à propulsion atomique (que seule la Fédération de Russie possède) et des navires similaires [2]. La règle empirique de Mackinder pourrait être utilisée comme règle empirique pour le Heartland.

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La règle d'or de Mackinder pourrait être résumée par la phrase suivante: "Celui qui unit l'Europe à ce cœur de la planète dominera le cœur de la planète et donc la Terre". Le Heartland manque d'un centre nerveux clair et peut être défini comme un corps gigantesque et robuste à la recherche d'un cerveau. Étant donné qu'il n'existe aucune barrière géographique naturelle (chaînes de montagnes, déserts, mers, etc.) entre le Heartland et l'Europe, la tête la plus viable pour le Heartland est clairement l'Europe, suivie de loin par la Chine, l'Iran et l'Inde.

La marche de l'humanité européenne au cœur de l'Asie a culminé lorsque la culture grecque a été introduite en Mongolie même : aujourd'hui, la langue mongole est écrite en caractères cyrilliques, d'héritage gréco-byzantin, ce qui signifie que la chute de Constantinople a en fait projeté l'influence byzantine bien plus à l'est que les empereurs orthodoxes n'auraient jamais pu l'imaginer. La tâche de l'Europe ne s'arrête cependant pas là, car seule l'Europe peut entreprendre l'entreprise de transformer le Heartland en un puissant espace clos prophétisé par Mackinder.

Pour approfondir le sujet, il est nécessaire de se familiariser avec la cosmogonie mackinderienne, qui divisait la planète en plusieurs domaines géopolitiques clairement définis.

- L'île du monde est l'union de l'Europe, de l'Asie et de l'Afrique, et ce qui se rapproche le plus, dans les terres émergées, de Panthalassa ou de l'océan universel. Au sein de l'île du monde se trouve l'Eurasie, la somme de l'Europe et de l'Asie, une réalité d'autant plus distincte de l'Afrique depuis l'ouverture du canal de Suez en 1869, qui a permis à la puissance maritime d'envelopper les deux continents.

- Le Heartland n'a plus besoin d'être présenté. La théorie mackinderienne suppose que le Heartland est une réalité géographique au sein de l'Île du Monde, tout comme l'Île du Monde est une réalité géographique au sein de l'Océan Mondial.

- Le Rimland, également appelé Croissant intérieur ou Croissant marginal, est une immense bande de terre entourant le Heartland et constituée des bassins océaniques qui y sont rattachés. La Panthalassie, les Balkans, la Scandinavie, l'Allemagne, la France, l'Espagne et la majeure partie de la Chine et de l'Inde se trouvent dans le Rimland.

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- Le Croissant extérieur ou insulaire est un ensemble de domaines d'outre-mer périphériques, séparés du Croissant intérieur par des déserts, des mers et des espaces glacés. L'Afrique subsaharienne, les îles britanniques, les Amériques, le Japon, Taiwan, l'Indonésie et l'Australie font partie du Croissant extérieur.

- L'océan Méditerranéen (Midland Ocean) est la Heartsea de la puissance maritime. Mackinder a défini l'océan Méditerranéen comme la moitié nord de l'Atlantique plus toutes les zones maritimes affluentes (Baltique, baie d'Hudson, Méditerranée, Caraïbes et golfe du Mexique). Rappelons que les plus grands bassins fluviaux du monde sont ceux qui se jettent dans l'Atlantique - viennent ensuite ceux de l'Arctique et seulement en troisième position viennent les bassins du Pacifique.

Notez que ces idées géopolitiques ont guidé la politique étrangère et la stratégie britanniques. Lors de la Première et de la Deuxième Guerre mondiale, la diplomatie britannique a réussi à empêcher une alliance germano-russe qui aurait uni l'Europe au Heartland. En effet, Mackinder, loin d'être un simple intellectuel, était un homme profondément engagé dans la diplomatie et la politique étrangère britanniques. Il était l'un des idéologues du traité de Versailles, qui visait à la neutralisation politique et militaire de l'Allemagne. Il était également l'un des idéologues du soutien britannique aux Russes blancs dans leur lutte contre les bolcheviks. L'objectif était de morceler la Russie en une série de petits États féodaux liés à l'Empire britannique, mais la victoire des bolcheviks a contrecarré ce plan.

La guerre civile russe (1917-1923)

Bien que cette guerre civile soit un conflit interne, la géopolitique et les liens conflictuels avec les puissances étrangères ont joué un rôle considérable [3]. Les Rouges (bolcheviks) ont combattu les Blancs. Le bloc bolchevique avait une identité idéologique, politique et géopolitique claire. Ils étaient marxistes, défendaient la dictature du prolétariat et, géopolitiquement, ils étaient orientés vers l'Allemagne et contre l'Entente (Angleterre, France, USA).

En revanche, le bloc blanc n'était pas uniforme, ni sur le plan idéologique ni sur le plan politique. Il allait des socialistes révolutionnaires aux monarchistes tsaristes, mais géopolitiquement, il avait plutôt tendance à favoriser une alliance avec la France et la Grande-Bretagne. Seuls de petits segments de ce mouvement ont maintenu une orientation pro-allemande, comme ce fut le cas du chef cosaque Krasnov et de l'Armée du Nord.

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Mackinder, le théoricien en chef du soutien britannique aux Blancs, était convaincu que la disparité de ce bloc conduirait, en cas de victoire, à une segmentation de la Russie en petits États, puisque chaque général ou seigneur de guerre s'érigerait finalement en fondateur d'un nouvel État. La stratégie britannique pour le démembrement de la Russie a suivi, étape par étape, celle employée en Amérique latine après l'indépendance gagnée contre l'Espagne. Elle y est parvenue, et ce qui aurait pu être un grand plateau continental a été démembré en d'innombrables petits États en désaccord les uns avec les autres.

Ce ne fut pas le cas en Russie. La victoire des bolcheviks a frustré les prétentions anglaises. Mackinder était bien conscient qu'après cette victoire, l'URSS deviendrait une grande puissance, ce qu'elle a fait.

Après la Seconde Guerre mondiale, les États-Unis ont pris le relais de la Grande-Bretagne en tant qu'avant-garde de l'Anglo-Empire. La guerre froide n'était pas seulement (mais aussi) une confrontation entre le capitalisme libéral, représenté par les États-Unis (et ses alliés, l'Angleterre, la France et l'Allemagne), et le socialisme marxiste ou le vrai communisme, représenté par l'URSS. La composante géopolitique était également très importante.

Effondrement de l'URSS

Les changements en URSS ont commencé avec l'ascension de Gorbatchev au poste de secrétaire général du PCUS. La situation qu'il a trouvée en accédant à cette très haute fonction n'était pas bonne. La défaite et l'humiliation en Afghanistan planaient sur la société soviétique. Le train social, économique et idéologique commençait à cafouiller. L'économie souffrait des dépenses militaires et de l'inefficacité de l'État absolu. La vision marxiste du monde avait perdu tout son attrait, et même les partis communistes occidentaux se dissociaient (du moins aux yeux de la galerie) de l'URSS et proclamaient leur "eurocommunisme".

Gorbatchev a dû prendre position sur la stratégie future de l'URSS, ce qu'il a fait en adoptant les théories de la convergence [4] comme base et a commencé à approcher le monde occidental en lui proposant des concessions unilatérales. Cette politique, appelée perestroïka, reposait sur l'hypothèse que l'Occident devait répondre à chaque concession par des mesures similaires en faveur de l'URSS. Ce n'était manifestement pas le cas.

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La perestroïka était une concaténation d'étapes vers l'adoption de la démocratie parlementaire, du marché, de la glasnost (transparence) et l'expansion des zones de liberté civique. Mais dans les pays du bloc de l'Est et à la périphérie de l'URSS elle-même, ces changements ont été perçus comme des manifestations de faiblesse et des concessions unilatérales à l'Ouest. Des mouvements sécessionnistes ont émergé dans les républiques baltes, en Géorgie et en Arménie.

Après la tentative de coup d'État ratée de 1991, menée par les secteurs les plus conservateurs du PCUS, l'ascension de Boris Eltsine était imparable. Le 8 décembre 1991, il rencontre les présidents de Biélorussie et d'Ukraine dans la forêt de Bialowieza, où un accord est signé sur la création d'une Communauté d'États indépendants, ce qui signifie, de facto, la fin de l'existence de l'URSS. À partir de ce moment, cependant, un processus s'est enclenché qui menaçait non pas l'existence de l'URSS, qui s'était déjà éteinte, mais celle de la Russie elle-même.

Il semblait que le rêve de Mackinder était sur le point d'être mis en pratique. L'Estonie, la Lettonie, la Lituanie, le Belarus, l'Ukraine, la Moldavie, l'Arménie, la Géorgie, l'Azerbaïdjan, certaines régions du sud de la Russie et le Daghestan ont entamé leur processus d'indépendance. La déclaration d'Eltsine à Ufa le 6 août 1990 est entrée dans l'histoire : "Prenez autant de souveraineté que vous pouvez en avaler". Les nouvelles républiques ont fait appel (bien sûr !) au droit des peuples à l'autodétermination. Ainsi, par exemple, la constitution de la République de Sakha-Yakoutie, adoptée le 27 avril 1992, déclare "Un gouvernement souverain, démocratique et légal, fondé sur le droit du peuple à l'autodétermination".

La politique nationale de la Fédération de Russie elle-même a été établie par Ramzan Abdulatipov [5] et Valery Tishkov [6], qui étaient tous deux de fervents partisans de la transformation de la Fédération en une confédération, avec séparation complète des républiques nationales.

Le conflit en Tchétchénie a eu un impact particulier. Depuis 1990, sous le couvert des tendances autodestructrices à l'œuvre en Russie, divers mouvements nationalistes ont vu le jour, notamment le Congrès national du peuple tchétchène, dirigé par Dzhondar Dudayev, un ancien général de l'armée de l'air soviétique. Le 8 juin 1991, Dudayev a proclamé l'indépendance de la Tchétchénie, déclenchant un long conflit armé, qui a été compliqué par l'intervention du fondamentalisme islamique.

La réaction

Face à tous ces événements, de larges secteurs de l'opinion publique russe ont commencé à réaliser que les politiques d'Eltsine menaient à la destruction de la Russie. À tout cela s'ajoutait un énorme chaos économique, qui avait plongé la majorité de la population dans la misère, tandis que quelques oligarques s'étaient enrichis grâce à des privatisations sauvages. En septembre et octobre 1993, une révolte éclate, avec le Soviet suprême (parlement) lui-même au centre de l'insurrection. Le 4 octobre, des unités militaires fidèles à Eltsine mettent fin à la révolte en bombardant le Soviet suprême.

Les forces politiques qui se sont unies contre Eltsine sont très diverses : communistes, nationalistes et partisans de la monarchie tsariste orthodoxe. Mais ils ont tous un point commun : la défense de la souveraineté de la Russie et de l'eurasisme. C'est cette coalition de forces qui soutiendra l'émergence de Vladimir Poutine et la renaissance de la Russie. Mais ça, c'est une autre affaire.

NOTES

[1] Dans son ouvrage Le pivot géographique de l'histoire publié en 1904.

[2] Alsina Calvés, J. (2015) Aportaciones a la Cuarta Teoría Política. Tarragone, Ediciones Fides, pp. 110-112.

[3] Douguine, A. (2015) La dernière guerre mondiale des îles. La géopolitique de la Russie contemporaine. Tarragone, Ediciones Fides, p. 38.

[4] Théories apparues entre 1950 et 1960 (Sorokin, Gilbert, Aron) selon lesquelles, avec le développement de la technologie, les systèmes capitalistes et socialistes formeraient un groupe de plus en plus proche, c'est-à-dire qu'ils auraient tendance à converger.

[5] Président de la Chambre des nationalités.

[6] Président du Comité d'État de la Fédération de Russie sur les nationalités.

mercredi, 06 mai 2020

Les anglo-sionistes lancent une PSYOP stratégique contre la Chine

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Les anglo-sionistes

lancent une PSYOP stratégique

contre la Chine

Ex: https://echelledejacob.blogspot.com

 
Peut-être que la rengaine «C’est la faute des Russes» est devenue obsolète. Ou peut-être que les dirigeants de l’Empire ont finalement compris que la Chine était encore plus dangereuse que la Russie. Mais mon intuition personnelle est simplement que les anglo-sionistes paniquent d’avoir perdu la face « tous azimuts » avec leur gestion catastrophique – médicalement et, plus encore, politiquement – de cette crise socio-économique provoquée par la pandémie, et qu’ils pointent maintenant le doigt vers à peu près tout le monde – et même entre eux.

La Russie a joué un rôle crucial ici, car c’est dans leur guerre de communication contre elle que les dirigeants de l’Empire ont inventé ce que j’appelle maintenant les «normes de preuve Skripal», signifiant «très probable». Ce dernier principe étant subrepticement accepté par tous les Européens au nom de la «solidarité» – avec qui exactement est rarement spécifié, parfois « atlantique » – il était, dirons-nous, «naïvement raisonnable» de penser qu’il fonctionnerait à nouveau cette fois-ci. Encore une fois, personnellement, je n’en suis pas du tout sûr. Beaucoup de choses ont changé au cours des deux dernières années : non seulement les Européens ont finalement découvert à quel point le conte de fées de Skripal était complètement stupide et incroyable, mais le niveau de dégoût, et même de haine envers Trump et les États-Unis a fortement augmenté.

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De plus, la Chine a beaucoup plus à offrir à l’Europe que les États-désUnis en désintégration – alors pourquoi se ranger du côté des perdants ? Dernier point, mais certainement pas le moindre, les Européens découvriront – et certains l’ont déjà fait, que les États-Unis se soucient comme d’une guigne, non seulement des Européens ordinaires, mais même de leurs classes dirigeantes [cf le brigandage des masques contre le virus, NdT]. Aparté Une étude rapide de l'histoire montre que lorsque les élites exploiteuses se portent bien, elles se soutiennent toutes loyalement, mais lorsque les choses commencent à partir en vrille, elles se retournent immédiatement les unes contre les autres. Le meilleur exemple récent de ce phénomène est le schisme des élites dirigeantes américanistes qui, depuis l'élection de Trump, se sont immédiatement retournées les unes contre les autres et se battent désormais violemment comme des "araignées dans une boîte" (pour utiliser une expression russe).

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En fait, cette constatation est si vraie qu'elle peut même être utilisé comme outil de diagnostic très fiable : lorsque vos ennemis sont tous unis, c'est qu'ils sont probablement confiants dans leur victoire, mais dès qu'ils se retournent les uns contre les autres, vous comprenez que les choses sont très mauvaises pour eux [Théorie de la "Discorde chez l'ennemie", chère à De Gaulle, NdT]. De même, nous voyons maintenant comment les Européens du Sud se mettent vraiment en colère contre leurs «alliés de l'UE» au Nord - Macron semble s'aligner derrière Trump même s'il utilise un langage diplomatique plus prudent. Enfin, la façon dont la CIA a sa politique étrangère, le Pentagone une autre et Foggy Bottom [Affaires étrangères] la sienne - même si elle se limite aux sanctions et à la stigmatisation - vous dit à peu près tout ce que vous devez savoir pour voir à quel point en est arrivée la crise systémique de l'Empire.

Bien qu’il ne reste que très peu de gens vraiment intelligents au sein du gouvernement américain, il y en a encore beaucoup «dans les strates élevées» et il ne leur a pas fallu longtemps pour découvrir que cette pandémie était une occasion en or pour coller tous leurs propres échecs et erreurs sur le dos de la Chine. Les arguments ? Vraiment facile :
 

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LA TERREUR JAUNE DANS TOUTE SA GLOIRE

1 – La propagande anti-chinoise a une longue histoire aux États-Unis et il était vraiment facile de la rallumer.

2 – La plupart des Américains ont une réaction complètement irrationnelle au mot «communiste», il est donc très facile, pour tout organe de propagande américain de mentionner le PCC, de «mentir» dans la même phrase, et de paraître crédible, indépendamment de ce que dit la phrase – comme, par exemple, une preuve factuelle.

3 – La ploutocratie américaine est terrifiée par la puissance économique et industrielle chinoise, d’où la diffamation d’entreprises comme Huawei ou DJI qui sont déclarées menaçantes pour la sécurité nationale des États-Unis. Blâmez tout sur les Chinois et les oligarques américains vont adorer !

4 – La Chine et la Russie sont dans une relation plus profonde qu’une alliance. J’appelle cela une «symbiose» tandis que les Chinois parlent d’un «Partenariat stratégique global de coordination pour la nouvelle ère» et les Russes d’une «alliance cruciale». Les termes n’ont pas vraiment d’importance ici, ce qui compte, c’est que la Russie et la Chine sont au coude à coude contre l’Empire, c’est ce qu’ils veulent dire par «coordination», et que les tentatives américaines – certes peu nombreuses et maladroites – pour briser cette alliance ont totalement échoué.

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5 – Comme pour toute nouvelle pandémie, il a fallu du temps à la Chine pour comprendre la nature de ce qui se passait et il était extrêmement facile d’accuser celle-ci d’obscurcissement délibéré – tout en gardant à l’esprit le fait que la Chine a informé le monde dès le 31 décembre, ce qui est évidemment omis, tout comme la présence d’une délégation multinationale de l’OMS pour enquêter sur cette question. En réalité, on pourrait aussi bien accuser la Chine d’être trop ouverte en permettant à diverses estimations et hypothèses de circuler avant même que le gouvernement chinois n’ait établi tous les faits. C’est un cas parfaitement insoluble de double contrainte : condamné si vous le faites et condamné si vous ne le faites pas.

6 – La culture politique américaine est telle que 99,99% des Américains américains croiront littéralement tout mensonge, aussi stupide soit-il, concernant le reste du monde [comme ils disent si joliment !, NdT], que d’accepter toute vérité désagréable sur leur pays. Faire d’un autre pouvoir un bouc émissaire, en particulier un pouvoir communiste, provoque une réaction instinctive d’approbation de la part d’une grande majorité des Américains.

7 – Lorsque l’OMS n’a clairement pas marché dans la propagande américaine [contre la Chine], ce fut une bonne occasion pour Trump de supprimer son financement. Non seulement les États-Unis devaient déjà des millions de dollars à l’OMS, de $50 à $200 millions, selon la personne à qui vous le demandez, mais le prétexte facile pour ne pas payer était de l’accuser d’être pro-chinois. Il est évident que Trump ne voit aucune utilité à l’ONU, à part en tant que punching ball, et c’était une occasion parfaite pour s’entraîner une fois de plus.

8 – Comme pour tout événement effrayant, un véritable tsunami de rumeurs complètement non fondées, et carrément stupides, a commencé à se déverser dès qu’il a été clair qu’il s’agissait d’un événement majeur. Tout ce que la machine de propagande américaine avait à faire était de parler sérieusement de certaines de ces rumeurs, en faisant croire que les médias ne faisaient que «rapporter» plutôt qu’inventer des histoires.

9 – La Chine est également une menace majeure pour les intérêts américains en Asie, et cette pandémie a fourni à ces derniers une occasion parfaite pour présenter des rapports venant de Taïwan comme des rapports venant de Chine – c’est une vieille astuce. Quant au gouvernement taïwanais, il était plus qu’heureux de l’aubaine d’avoir un autre prétexte pour haïr la Chine, rien de nouveau ici non plus.

10 – Enfin, les économistes américains n’ont pas mis longtemps à comprendre que cette pandémie aurait un effet dévastateur sur la «meilleure économie de l’histoire de la galaxie», si bien que le fait de rejeter la faute sur la Chine est le moyen idéal pour Trump et ses maîtres néocons de dévier toute accusation lancée contre eux.

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Les récits qui ont ensuite été inventés sont vraiment magnifiques. Voici quelques-uns de mes favoris :
Le FBI dit que des États étrangers ont piraté des centres de recherche américains à la recherche de percées dans l’étude de la COVID-19. Bien que cet article pointe du doigt l’Iran, pas la Russie ou la Chine, il donne très bien le ton de «on nous attaque». Remarquez le pluriel dans «États étrangers».
Les États-Unis lancent une «enquête à grande échelle» sur le laboratoire de Wuhan.
Une étude a-t-elle prouvé que le coronavirus était une création humaine, comme le prétend un lauréat français du prix Nobel de médecine ? Excellent coup joué, il donne du pouvoir à l’argument en citant une célébrité, peu importe qu’il y ait beaucoup plus de voix crédibles disant que cette théorie est une baliverne. [Cf l’interview du Pr Montagnier sur Cnews encadré par la fine-fleur des « journalistes » atlantistes, NdSF]


Il y en a beaucoup plus, je suis sûr que vous les avez vus aussi.

Finalement, et inévitablement, cette PSYOP stratégique a fait monter les enchères et FOXnews – évidemment – a diffusé ce véritable chef-d’œuvre : «Sen. Hawley : Que les victimes du coronavirus poursuivent le Parti communiste chinois ». Vraiment, c’est génial. «J’ai perdu mon emploi, que les camarades chinois diaboliques me remboursent» est une mélodie agréable pour les oreilles de la majorité des Américains.

À l’heure actuelle, la plupart des déclarations américaines ne sont que de simples mensonges, mais comme la Chine, avec le temps, publiera finalement des données corrigées plus précises, ces statistiques mises à jour seront immédiatement interprétées comme la preuve qu’initialement les Chinois mentaient délibérément, et non pas comme le résultat des Chinois eux-mêmes obtenant progressivement une meilleure image de ce qui s’est réellement passé. Encore une fois, c’est le cas typique de double contrainte où vous êtes toujours coupable.

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Je dois mentionner qu’il y a une autre raison qui pourrait contribuer à la décision des États-Unis de rejeter la faute sur la Chine : on ne sait toujours pas d’où vient ce virus, mais une possibilité est qu’il soit originaire des États-Unis et a été amené en Chine par les Américains – que ce soit délibérément ou non n’est pas la question ici. Quant aux rapports qui prétendent que les États-Unis dissimulent délibérément l’ampleur réelle de la catastrophe aux États-Unis, ils sont ignorés.

En outre, il est maintenant douloureusement évident que les politiciens américains ont très mal apprécié la situation en commençant à dire que c’était un problème chinois ou que ce n’était « pas pire que la grippe saisonnière », ou les deux. Ce n’est que le dernier exemple de ce que j’appelle le «messianisme narcissique américain», conduisant les dirigeants à croire en leur propre propagande, pour finir par découvrir que la réalité existe toujours, et qu’elle est radicalement différente des illusions de la plupart des Américains.

Maintenant, tous ces politiciens américains – les Republicrates autant que les Démoblicains – doivent courir dans tous les sens en cherchant à planquer collectivement leurs culs. Quelle meilleure façon d’y parvenir que de rejeter la faute sur la Chine ?

Comme je l’ai dit plus haut, c’est intelligent, mais absolument pas très intelligent.


Les États-Unis sont déjà coincés dans une guerre impossible à gagner contre la Russie – comme je le rappelle toujours à tout le monde, cette guerre est à 80% communication, 15% économique et seulement 5% militaire. Ouvrir un «deuxième front» à grande échelle est logique en termes d’opportunité politique à court terme, en particulier pendant une année électorale, mais à long terme, il est voué à un désastreux échec. En fait, s’il y a quelque chose que l’histoire nous enseigne, c’est que l’ouverture d’un second front lorsque vous ne pouvez même pas gérer le premier est suicidaire. Mais qui se soucie de l’histoire, en particulier aux «États-Unis d’Amnésiques» ? Et puis, quand vous êtes en même temps exceptionnel et totalement supérieur, pourquoi voudriez-vous vous soucier de l’histoire des peuples et des nations «déplorables» ici où là ? Appelez-les simplement «fosses à purin» et agitez votre drapeau – de fabrication chinoise. C’est ce qui suffit pour «paraître présidentiel» de nos jours …

Indépendamment de tout ce qui a été dit ci-dessus, l’élan de cette campagne sinophobe est trop important pour être inversé ou arrêté. Et puisque la plupart de la classe politique américaine la soutient, cela continuera probablement même après l’élection présidentielle américaine, en supposant qu’elle ait lieu.

Pourtant, tout cela pose une question : que s’est-il vraiment passé ? Quelle est la vérité ?

La vérité est que personne ne sait vraiment. Il faudra probablement des années pour obtenir l’image complète et, plus encore, les bons chiffres. Quels chiffres corrects ? Eh bien, tous : porteurs, résistants, groupes d’âge, comorbidité, caractéristiques exactes du virus et de ses diverses mutations, efficacité des différents tests, quel médicament antiviral pourrait aider, ses effets secondaires, rôle du vaccin BCG pour aider le corps à combattre le virus, etc.

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Pour l’instant, je ne pense pas que quiconque le sache vraiment, même le pourcentage de porteurs asymptomatiques change d’ordre de grandeur en fonction de l’informateur. Bien sûr, certaines suppositions sont plus proches de la vérité que d’autres, par définition, mais il est encore très difficile de déterminer lesquelles.

Il est important de garder à l’esprit maintenant que la plupart de ce que nous voyons a très peu de rapports avec une enquête scientifique. Ce que nous voyons, c’est une tentative d’utiliser cette pandémie à des fins politiques, financières et géostratégiques.

Et s’il vous plaît, ne pensez pas que ce n’est que Trump ! N’oubliez pas ce que Nancy Pelosi, la présidente de la Chambre des représentants US, disait en février !

C’était près de deux mois après que la Chine avait averti l’OMS qu’une crise majeure se préparait !

Mais Pelosi, tout comme Trump, ne pense qu’au pouvoir, à l’argent et à l’influence, pas à la sécurité des «déplorables» que les Démocrates détestent tant, comme les Républicains aussi bien sûr, mais ils ne le disent tout simplement pas aussi ouvertement que Hillary.

Quant à mesurer le respect de Trump pour ses semblables, surtout les femmes, souvenez-vous simplement de son conseil : il suffit de «les attraper par la chatte».

Ensuite, il y a un autre risque très réel : alors que la situation empire de plus en plus aux États-Unis et, en particulier, pour la réélection de Trump, il pourrait bien décider de faire ce que beaucoup de politiciens font dans une telle situation : déclencher une grande guerre. Avant la pandémie, les États-Unis n’avaient clairement pas les cojones pour déclencher une guerre contre l’Iran, mais maintenant que la pandémie paralyse l’économie mondiale et que tous les côtés abjects du système capitaliste transnational deviennent évidents, je ne mettrais pas Trump à l’abri de l’idée de commencer une guerre contre l’Iran juste pour dévier les nombreuses accusations portées contre lui. L‘Idiot en chef a maintenant ordonné aux forces de l’US Navy, au large des côtes de l’Iran, de – sans blaguer – « abattre et détruire » toute vedette iranienne armée qui « harcèlerait » l’US Navy.

Apparemment, il ne comprend toujours pas que si un navire de l’US Navy exécutait un tel ordre, il se retrouverait immédiatement face à un essaim de missiles anti-navires iraniens. De toute évidence, son narcissisme messianique et sa mégalomanie enragée ne permettent tout simplement pas à Trump de comprendre que les Iraniens existent pour de vrai, qu’ils sont sérieux, et que, contrairement aux États-Unis, ils ont soigneusement étudié les conséquences de toute guerre contre les États-Unis et bien qu’ils ne provoqueront jamais délibérément une telle guerre, ils la combattront si nécessaire, avec une énergie infiniment plus forte que les États-Unis. Aparté Comme un politicien américain typique agitant le drapeau, Trump pense probablement que si tout va mal pour eux, les États-Unis pourront atomiser l'Iran et l'emporter. Il a raison sur le premier point, mais complètement tort sur le second. Si des armes nucléaires sont utilisées contre l'Iran, alors il y aura une guerre totale et longue pour expulser les États-Unis et l'entité sioniste du Moyen-Orient. Mais c'est un sujet pour un autre jour.

Les politiciens américains me rappellent une personne vivant dans une cabane dans l’Arctique qui décide de la brûler pour se chauffer : bien sûr, cette stratégie fonctionnera pendant un petit moment, mais seulement au prix d’une catastrophe beaucoup plus importante. C’est ce que presque tous les politiciens américains ont fait avec cette pandémie, et c’est pourquoi ils n’accepteront jamais aucune responsabilité pour quoi que ce soit.

Covered_ass.jpgDécouvrez ce petit âne mignon sur la droite.

Ne ferait-il pas une mascotte et un symbole parfait pour les deux partis politiques américains et pour les nombreux politiciens américains qui ne pensent qu’à se couvrir ?

Il y a encore une chose que je voudrais mentionner ici : il y a beaucoup de gens qui aiment bien noter toutes les fois où quelqu’un a prédit que cette pandémie se produirait. Ils prennent ces avertissements comme preuve d’un complot. La vérité est que la communauté scientifique et même le grand public, du moins ceux qui lisent encore des livres, savaient parfaitement que ce n’était qu’une question de temps avant qu’une telle pandémie ne se produise, car notre société rendait un tel événement inéluctable. Un seul exemple :
 
La prochaine épidémie : nouvelles maladies émergentes dans un monde déséquilibré

51W2kHMNNUL._SX331_BO1,204,203,200_.jpgEn 1995, la journaliste américaine Laurie Garrett a publié un excellent livre intitulé «The Coming Plague: Newly Emerging Diseases in a World Out of Balance» dans lequel elle a expliqué pourquoi et même comment une pandémie mondiale émergerait naturellement en raison de la nature même de notre société moderne. Je recommande fortement ce livre en dépit du fait qu’il a maintenant un quart de siècle : il est très bien écrit, facile à lire et il est très convaincant en disant que de telles pandémies étaient inévitables, et sans besoin de faire appel aux théories non confirmées de la guerre biologique.

L’histoire montrera que nous tous, notre planète entière, n’avons pas pris cela, et bien d’autres avertissements, au sérieux.

Demandez-vous ce qui est plus facile pour un politicien : accepter que tout notre ordre socio-politique est insoutenable et carrément dangereux – ou «déséquilibré» pour utiliser l’expression de Garrett, ou rejeter la faute sur les cocos chinois et leur programme «secret» de guerre biologique » ?

Je pense que la réponse va de soi.

The Saker

Traduit par jj, relu par Hervé pour le Saker Francophone