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mercredi, 03 juillet 2024

Le nationalisme corse entre dans le 21ème siècle

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Le nationalisme corse entre dans le 21ème siècle

Peter W. Logghe

Source : Nieuwsbrief Knooppunt Delta, no 191, juin 2024

La plupart d'entre nous connaissent la Corse comme un merveilleux pays de vacances, avec des montagnes, des plages et une population originale et agréable. Beaucoup d'entre nous connaissent certainement le nom de Pasquale Paoli, le père de la nation corse, un homme qui a joué un rôle crucial dans l'indépendance et dans la création de la première nation corse moderne. Un inspirateur, dit-on, de George Washington lors de la fondation des Etats-Unis. Un homme à l'aube du nationalisme corse.

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Le nationalisme corse de la période qui a précédé la Seconde Guerre mondiale peut être comparé au nationalisme flamand : conservateur, catholique, de droite. Le nationalisme corse s'incarne dans un mouvement comme A Muvra, avec son leader Petru Rocca. Ce dernier est condamné après la Seconde Guerre mondiale, déchu de tous ses droits, pour avoir prétendument mis en danger la "sécurité de l'Etat français". Le mouvement semble avoir été "brûlé". Le parallèle avec la Flandre est frappant.

p5-Encart-Cedic-231x300.jpgDans les années 1960, on assiste à une renaissance du mouvement, avec le CEDIC (Comité d'études et de défense des intérêts de la Corse), avec Max Simeoni, entre autres. Ce n'était pas un parti, mais un mouvement qui essayait de convaincre la gauche et la droite d'une solution fédéraliste pour la Corse - en élargissant le soutien au fédéralisme, en quelque sorte. Ce mouvement n'a pas réussi à s'imposer.

Dans les années qui suivent, la stratégie change et les nationalistes corses mettent en place un mouvement nationaliste, notamment avec l'ARC, et radicalisent la lutte nationaliste notamment avec la fondation du FLNC (ou Fronte di liberazione naziunale corsu). Si la base du mouvement reste assez conservatrice, une tendance gauchiste et tiers-mondiste, d'orientation marxiste-léniniste, en constitue peu à peu le socle idéologique. Bien qu'il flirte - extérieurement du moins - avec la gauche et l'extrême-gauche, il y a toujours eu une minorité active de militants de droite en Corse. Malgré d'assez bons résultats électoraux (jusqu'à environ 25% des voix en Corse en 1992), le mouvement nationaliste a sombré dans une lutte fratricide acharnée entre le "canal historique" et le "canal habituel" (comparable, peut-être, à la lutte en Irlande entre les provisoires et l'IRA officielle?) En conséquence, la lutte nationaliste s'est complètement enlisée au cours des années 1990.

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2015 : année de la victoire nationaliste en Corse

Lors des élections "territoriales" de 2015 en Corse, les nationalistes de Simeoni et Talamoni (photo) remportent une victoire éclatante. La base de leur coalition est un projet d'autonomie pour la Corse, un statut pour les "secondes résidences" sur l'île, la reconnaissance du corse comme langue officielle (à côté du français), et le transfert des prisonniers politiques corses-nationalistes sur l'île (et donc plus très loin sur le continent français). Sur ce mode victorieux, les victoires électorales s'enchaînent lors des élections nationales en France. En 2021, les listes nationalistes en Corse recueillent environ 75% des voix lors des élections "territoriales". Pourtant, il faut oser reconnaître que les résultats politiques obtenus jusqu'à présent sont plutôt médiocres: la Corse n'est toujours pas indépendante. Il est également frappant de constater que les élites politiques semblent dériver de plus en plus vers la gauche, en particulier sur des questions telles que la migration, le wokisme et la mode LGBTQI+, et l'Islam, tandis que les jeunes militants de base semblent avoir moins d'appétit pour les solutions de gauche démodées prisées par les anciens.

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Palatinu - et la métapolitique sur l'île

Nicolas Battini est un nationaliste qui a passé huit ans dans une prison française pour cause d'attentats. L'assassinat d'Yvan Colonna (un autre nationaliste corse) dans une prison française par un islamiste radical a été un tournant majeur dans la vie de Nicolas Battini. De retour en liberté, il fonde un mouvement nationaliste, U Palatinu, dont l'objectif principal est de remettre le mouvement sur les rails idéologiques corses, conscients des défis du 21ème siècle. Il s'agit avant tout d'un combat culturel, d'une reconquête d'un nationalisme de droite, qui fut autrefois conservateur. Ou comme l'écrivait Nicolas Battini lui-même : "A quoi sert une Corse autonome, tiraillée entre héliotropisme et islamisation, une Corse autonome, si les Corses eux-mêmes sont devenus minoritaires dans leur propre pays".

mop.jpgMouvement culturel, le Palatinu défend l'identité corse et la famille comme concept central de ce nationalisme. En mars 2024, Battini passe à l'étape suivante et fonde le parti Mossa Palatina. Quelque 500 Corses assistent au congrès fondateur. Mossa Palatina établira des relations avec d'autres partis de droite en Europe, et veut essayer de rassembler les mouvements régionalistes et autonomistes, de préférence au niveau européen. En tout cas, ses ambitions sont impressionnantes.

Un vent différent semble également souffler sur la Corse par rapport au vent de gauche issu de la révolte de mai 68. Cette page semble désormais tournée. Il faut attendre les premières élections en Corse pour voir si ce vent nouveau va s'imposer.

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