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mardi, 20 août 2019

Le citoyen-soldat, le seul système d'arme apte à restaurer la cité...

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Le citoyen-soldat, le seul système d'arme apte à restaurer la cité...
 
Entretien avec Bernard Wicht
Ex: http://metapoinfos.hautetfort.com

Nous reproduisons ci-dessous un entretien donné par Bernard Wicht à l'Académie de géopolitique de Paris dans lequel il évoque l’articulation entre puissance militaire et légitimité politique et le rôle du citoyen-soldat. Universitaire, historien des idées et spécialiste en stratégie, Bernard Wicht a récemment publié Une nouvelle Guerre de Trente Ans (Le Polémarque 2011), Europe Mad Max demain ? (Favre, 2013), L'avenir du citoyen-soldat (Le Polémarque, 2015), Citoyen-soldat 2.0 (Astrée, 2017) et Les loups et l'agneau-citoyen - Gangs militarisés, État policier et citoyens désarmés (Astrée, 2019).

L’entretien de Géostratégiques : Bernard Wicht

citsollivre3.jpgQuestion : Pourriez-vous nous expliquer pourquoi votre démarche de stratégie prospective se place le plus souvent au niveau des problématiques fondamentales de l’articulation entre puissance militaire et légitimité politique, et la question récurrente dans vos analyses du citoyen-soldat ?

Bernard Wicht : Au plus tard avec les travaux de Clausewitz, la stratégie moderne a opéré une distinction stricte entre armée / gouvernement / population. Cette dernière est alors complètement passive ; elle n’est plus un sujet mais seulement objet de protection. Cette distinction trinitaire fonctionne tant que l’Etat-nation demeure la forme d’organisation politique la plus appropriée pour faire la guerre, c’est-à-dire pour combattre un autre Etat, un ennemi extérieur commun au moyen d’armées régulières. Cette réalité est codifiée par la formule clausewitzienne, « la guerre est la poursuite de la politique par d’autres moyens ». En d’autres termes, la guerre est alors un acte politique à la disposition exclusive de l’Etat. Ce dernier est désormais pacifié à l’intérieur, toute forme de justice privée est bannie et le crime est poursuivi par la police et la justice – l’ennemi est à l’extérieur et le criminel à l’intérieur.  Mais une telle situation est aujourd’hui caduque : avec l’effondrement des nations européennes au cours de la tragédie Verdun-Auschwitz-Hiroshima et, ensuite à partir de 1945, avec le développement exponentiel de la guérilla, des guerres révolutionnaires et des mouvements de libération populaire, le peuple maoïste ou marxiste-léniniste fait son grand retour comme acteur central de la stratégie. Il importe dorénavant de l’encadrer, de lui montrer la voie de sa libération, de lui expliquer les raisons de son combat et de lui fournir le récit idéologique correspondant. Il serait faux de croire que la chute du Mur de Berlin, puis l’implosion du bloc soviétique ont mis fin à ce tournant « populaire » de la stratégie et que celle-ci peut revenir « tranquillement » au modèle clausewitzien de la guerre comme acte étatique au moyen d’armées professionnelles, voire de mercenaires (contractors, sociétés militaires privées). Daech et ses épigones, les gangs latino-américains et les milices ethniques de tout poil en ont fait malheureusement la « brillante » démonstration aux yeux du monde entier : les techniques maoïstes ou marxistes-léninistes de prises en main des populations se sont franchisées (au sens du franchising commercial), elles se sont dégagées du message révolutionnaire, elles sont au service du djihad ou tout simplement d’un contrôle des populations (des favelas, des bidons-villes, des banlieues) par la terreur. On a pu penser un temps que tout ceci ne concernait que le « Sud », que les sociétés n’ayant pas le niveau de modernisation des pays occidentaux. Avec les attentats, les fusillades et les tueries en France, au Royaume-Uni, en Belgique, en Espagne et ailleurs, il a fallu déchanter. Cette réalité a désormais franchi la Méditerranée ; elle est désormais présente chez nous en Europe occidentale, dans les banlieues des grandes métropoles et c’est la principale menace qui pèse aujourd’hui sur nous …. et sur nos enfants – l’ennemi est à l’intérieur !

Après cette longue entrée en matière, je peux répondre assez simplement à votre question en disant que le paradigme clausewitzien n’est absolument plus pertinent et qu’il est impératif d’en trouver un autre remettant au centre de la réflexion stratégique l’interface armée/cité. C’est pourquoi j’insiste tant sur l’articulation entre puissance militaire et légitimité politique et, surtout, sur ce système d’arme qu’est le citoyen-soldat parce qu’il est un acteur politique et militaire incontournable, le seul et unique apte à restaurer la cité. On le retrouve chez des auteurs aussi différents que Machiavel, Locke, Rousseau, Mirabeau ou Jean Jaurès. En ce qui me concerne, je suis plutôt machiavélien : la res publica, la liberté comme droit de participer à la gestion des affaires de la cité et le peuple en armes. Je suis convaincu que le paradigme machiavélien peut nous apporter des outils de raisonnement décisifs dans le contexte actuel. N’oublions pas que le Chancelier florentin vit une période assez semblable à la nôtre avec la lutte entre factions rivales au sein de la cité, l’importance des intérêts privés au détriment du bien commun et une importante fracture sociale entre citadins riches et paysans pauvres.

Question : Comment expliquez-vous la difficulté pour les Etats européens de canaliser par la motivation et la mobilisation, le capital guerrier des jeunes générations ?

Bernard Wicht : L’Etat-nation est en panne de cause. Le récit national est clôt ; il n’est plus en mesure de fournir les repères nécessaires pour se projeter « en avant » et, surtout, il n’est plus adapté pour opérer la distinction ami/ennemi. L’Etat ne parvient donc plus à mobiliser les énergies autour d’un projet commun. Par ailleurs, l’économiste italien Giovanni Arrighi le dit clairement : « L’Etat moderne est prisonnier des recettes qui ont fait son succès », c’est-à-dire l’Etat-providence. Mais, il ne s’agit plus de l’Etat providence au sens bismarckien, garantissant à chacun sa place dans la pyramide sociale sur le modèle des armées nationales. La révolution de 1968, les crises économiques des années 1970, la disparition de l’ennemi soviétique et la globalisation financière ont complètement ébranlé cette pyramide. Aujourd’hui, l’Etat-providence ne parvient plus à garantir « à chacun sa place » ; il n’est plus qu’un distributeur d’aides et de subventions cherchant à maintenir un semblant de stabilité sociale. Tout ceci explique que le capital guerrier des jeunes générations ne s’investit plus dans les institutions étatiques (l’armée notamment). L’historien britannique John Keegan en faisait le constat dès le début des années 1980. De nos jours, le capital guerrier des jeunes a plutôt tendance à migrer vers des activités et des groupes marginaux, là où ils retrouvent un code de valeurs, une forte discipline, la fidélité à un chef et d’autres éléments similaires de socialisation. Le phénomène de radicalisation et de départ pour le djihad en est une illustration particulièrement frappante.

Question : Pourquoi l’organisation militaire actuelle des Etats est de moins en moins adaptée à la nouvelle donne stratégique ? Et pourquoi affirmez-vous que l’émergence de nouvelles forces sociales est une rupture civilisationnelle ?

Bernard Wicht : Les différents groupes armés qui s’affirment depuis la fin du XXème siècle, représentent un modèle d’organisation politico-militaire en adéquation parfaite avec la mondialisation parce qu’ils savent 1) se brancher sur la finance globale (en particulier le trafic de drogue), 2) s’adapter à la révolution de l’information en diffusant un récit et une mobilisation des énergies via internet et les médias sociaux, 3) se déplacer furtivement en se fondant dans les flux migratoires. Face à cela, les armées régulières apparaissent comme des dinosaures d’un autre temps : elles sont incapables de fonctionner sans infrastructures lourdes (bases, aéroports, etc.), leurs chaînes de commandement sont à la fois lourdes et excessivement centralisées. Elles n’ont aucune liberté d’action au niveau stratégique. En revanche, les groupes armés bénéficient d’une flexibilité remarquable leur permettant d’agir aussi bien de manière criminelle que politique : c’est ce qu’on appelle l’hybridation de la guerre. Ainsi, un groupe armé subissant des revers sur le champ de bataille conventionnel est capable de basculer très rapidement dans la clandestinité pour entreprendre des actions terroristes. Il ne s’agit pas là d’un simple avantage tactique ou technique, mais d’une mutation en termes structurels. En effet, la formation de ces nouvelles formes d’organisation politico-militaire que sont les groupes armés, relève d’une dynamique d’ensemble à contre-pied de la mondialisation libérale : c’est la réponse-réaction des sociétés non-occidentales qui n’ont pas réussi à accrocher le train de la mondialisation – là où les structures étatiques se sont affaissées (les Etats faillis) – et qui, par réflexe darwinien de conservation, se sont retournées vers des modes d’organisation politique simplifiés et pré-étatiques aussi rustiques que la chefferie et l’appartenance à une forme de « clan » assurant protection. Cette dynamique n’est donc ni irrationnelle, ni passagère ; elle révèle une mutation de l’ordre mondial, une vague de fond. Forgés ainsi à l’aune de la survie, ces groupes armés sont les nouvelles machines de guerre à l’ère de la mondialisation, au même titre que la chevalerie a façonné le Moyen Age et que les armées révolutionnaires françaises ont façonné l’écitsollivre2.jpgpoque moderne. C’est pourquoi il est possible de parler de rupture civilisationnelle. En outre, ces nouvelles machines de guerre ne représentent pas qu’une adaptation réussie de l’outil militaire aux conditions de la mondialisation. Elles s’inscrivent dans une dialectique empire/barbares traduisant la résistance à l’ordre global.

Question : Pourquoi pensez-vous que la nouvelle forme de conflit n’est plus celle du choc classique de puissance mais bien une longue suite de conflits de basse intensité conduisant à l’effondrement progressif des sociétés européennes ?

Bernard Wicht : Selon les théories du système-monde proposées par Immanuel Wallerstein et d’autres auteurs à sa suite, les successions hégémoniques d’une grande puissance à une autre sont généralement le fruit de ce qu’ils appellent « une grande guerre systémique ». Typiquement, les guerres de la Révolution et les guerres napoléoniennes accouchent de l’hégémonie anglaise qui se maintiendra jusqu’en 1914. De même, la Première- et la Deuxième Guerre mondiale accouchent de l’hégémonie étatsunienne. Ceci présuppose cependant que le système international soit dominé par plusieurs grandes puissances en concurrence les unes avec les autres. Une telle situation disparaît au plus tard avec la désintégration du bloc soviétique. Et, si aujourd’hui la super-puissance américaine est en déclin, il n’y a aucun challenger digne de ce nom capable de disputer l’hégémonie mondiale et, par conséquent, susceptible de déclencher une guerre systémique de succession hégémonique comme l’Allemagne l’a fait en 1914. De nos jours en effet, la Chine est économiquement très dynamique, mais elle reste un nain en termes financiers et son outil militaire n’est en rien comparable à celui des Etats-Unis. C’est pourquoi, dans ces circonstances, certains historiens de la longue durée émettent l’hypothèse que la prochaine grande guerre systémique pourrait être, en fait, une longue suite de conflits de basse intensité (guérilla, terrorisme épidémique, guerres hybrides, etc.). Or cette hypothèse me paraît particulièrement plausible compte tenu de la réalité actuelle de la guerre. A titre d’exemple, depuis la guerre civile libanaise (1975-1990) le Proche- et Moyen-Orient s’est peu à peu complètement reconfiguré sous l’effet de ce type de conflits : d’anciennes puissances militaires (Syrie, Irak, Lybie) sont en pleine déconstruction tandis que de nouveaux acteurs locaux-globaux (Hezbollah, Hamas) s’affirment avec succès dans la durée ; longtemps acteur stratégique central de cette région, Israël est aujourd’hui totalement sur la défensive. A moyen terme, l’Europe risque fort de subir le même sort. Car j’interprète les actes terroristes intervenus à partir de 2015 comme des signes avant-coureur d’un phénomène semblable ; la dynamique enclenchée au sud de la Méditerranée a atteint dorénavant sa masse critique. Pour reprendre une comparaison tirée de la médecine, la tumeur cancéreuse moyen-orientale commence à diffuser ses métastases. C’est la vague de fond, la mutation à laquelle je faisais référence précédemment.

Question : Qu’est-ce que la « guerre civile moléculaire » ?

Bernard Wicht : Pour tenter de conceptualiser la menace susmentionnée à l’échelle de l’Europe, nous avons utilisé la notion de « guerre civile moléculaire » empruntée à l’essayiste allemand Hans-Magnus Enzensberger. Il me semble qu’elle est bien adaptée pour décrire la forme de violence qui touche nos sociétés, à savoir au niveau de la vie quotidienne (sur les terrasses, dans des salles de spectacle, dans des trains), en plein cœur de la foule, employée par des individus seuls ou par de très petits groupes (des fratries dans plusieurs cas) à la fois complètement atomisés dans- et en complète rupture avec le corps social : d’où la pertinence de cette notion mettant en évidence, d’une part, la dimension civile de cette nouvelle forme de guerre et, d’autre part, l’échelle moléculaire à laquelle elle se déroule. Ceci permet également de re-positionner l’équilibre de la terreur. Ce dernier se place désormais non plus au niveau étatique (équilibre militaro-nucléaire), mais à celui immédiat du citoyen qui est devenu tant la cible que l’acteur de cet affrontement. Autrement dit, le couteau, la hache ou le pistolet remplacent l’arme atomique comme outil de dissuasion : d’où l’urgence de repenser le citoyen-soldat dans ce contexte, non plus comme conscrit, mais comme système d’arme à part entière, comme la nouvelle unité militaire de la société. En ce sens, la diffusion du port d’armes et l’échelle du citoyen armé ayant une existence politique et étant acteur stratégique, redeviennent pertinentes face à la nouvelle menace C’est ce que nous nous sommes efforcés d’expliquer dans ce petit ouvrage.

Question : Du constat terrible que vous faites de la situation des sociétés européennes, ne devrions-nous pas en tirer la conclusion de la nécessité du « tout sécuritaire » ?

Bernard Wicht : Selon la doctrine classique de l’Antiquité grecque, seul l’hoplite peut restaurer la cité, c’est-à-dire dans notre cas le citoyen-soldat. Comme je l’ai dit plus haut, c’est lui le système d’arme, c’est lui le dépositaire des valeurs civiques de la communauté politique. Aujourd’hui malheureusement, l’Europe prend exactement le chemin inverse ; on assiste à une dérive pénal-carcéral de l’Etat moderne dont la principale préoccupation est précisément le désarmement de ses propres citoyens (voir la nouvelle Directive européenne à ce sujet, élaborée rappelons-le à la demande expresse de la France suite aux attentats de 2015). C’est une réaction typique, mais aussi une grossière erreur que l’on retrouve presque systématiquement lorsque l’Etat se sent menacé de l’intérieur. Plutôt que de chercher l’appui de ses concitoyens, celui-ci se centralise au point de devenir un Etat policier qui finit par s’aliéner toute la population précipitant ainsi, à terme, son propre effondrement. Le spécialiste australien de la contre-guérilla et du contre-terrorisme David Kilcullen qui a fait ses classes sur le terrain au Timor oriental puis en Irak, souligne dans un de ses derniers livres que l’Etat voulant absolument éradiquer le terrorisme, va obligatoirement détruire l’essence même de sa substance, à savoir la société civile et la démocratie. C’est aussi l’analyse que fait le politologue israélien Gil Merom dans son ouvrage, How Democracies Lose Small Wars. Signalons que l’historien français Emmanuel Todd n’est pas très éloigné de telles considérations dans son étude intitulée, Après la démocratie.

Question : Votre ouvrage ne réduit-il pas exagérément le rôle de la relation politique dans la Cité ?

Bernard Wicht : Permettez-moi une réponse que vous jugerez sans doute iconoclaste. Hormis les utopies pacifistes du type flower power considérant chaque individu comme un « petit flocon unique et merveilleux », toute forme d’organisation politique viable est généralement basée sur la relation protection contre rémunération. Hobbes est probablement le philosophe qui a le mieux décrit cette équation dans le cas de l’Etat moderne. Dans le Léviathan, il poursuit sa réflexion en rappelant toutefois que le droit à la légitime défense est un droit naturel de la personne humaine que celle-ci récupère immédiatement si l’Etat ne remplit plus son obligation de protection. Or c’est précisément la situation qui se met en place à l’heure actuelle. Le problème, à mon avis, est que le discours politique contemporain brouille complètement les cartes à ce propos : le citoyen n’est plus présenté que comme un contribuable, le peuple qui vote contre l’avis de sa classe politique est victime des sirènes du populisme, toute solution durable ne peut venir que du niveau supra-national et, last but not least, le défi sécuritaire posé par le terrorisme nécessite une limitation drastique des libertés. Répétées en boucle, ces affirmations créent un brouillard suffisamment dense pour laisser croire que la relation politique dans la cité est devenue si complexe, si délicate à gérer, que le citoyen n’est plus en mesure de la saisir et doit, par conséquent, se contenter de payer ses impôts.

Bernard Wicht (Académie de Géopolitique de Paris, 10 juillet 2018)

 

mardi, 18 janvier 2011

Militärische Tradition aus Schweizer Sicht

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Militärische Tradition aus Schweizer Sicht

Die geschichtliche Entwicklung der Armee in der Schweiz1

von Professor Dr. Albert A. Stahel

Ex: http://www.zeit-fragen.ch/

Wenn im Ausland von der militärischen Tradition der Schweiz die Rede ist, dann wird gemeinhin an die Milizarmee gedacht. Dabei gibt es eine militärische Tradition der Schweiz, die älter ist als ihre Milizarmee. Es ist dies die Tradition der Fremdendienste der Alten Eidgenossenschaft. Im folgenden soll zuerst auf die Fremdendienste eingegangen werden, um anschliessend die Milizarmee zu beschreiben. Am Ende soll die schweizerische Tradition in der Gegenwart beurteilt werden.

Bereits vor der Gründung der alten Eidgenossenschaft 1291 waren die Innerschweizer (Uri, Schwyz, Unterwalden) auf den damaligen Kriegschauplätzen Europas als gefürchtete Söldner und Kriegsknechte begehrt. So stellte Kaiser Friedrich II. von Hohenstaufen den Schwyzern für ihre Kriegshilfe bei ­Faenza 1240 den begehrten Freiheitsbrief aus und unterstellte sie dadurch direkt seiner Gerichtsbarkeit.
Den eigentlichen Anstoss für das Abschliessen von Verträgen der Tagsatzung für die Kriegsleistung zugunsten fremder Mächte löste paradoxerweise eine verlorene Schlacht aus. Am 26. August 1444 wurde vor den Toren Basels, bei St. Jakob an der Birs, eine Schlacht europäischen Ausmasses ausgefochten. Am 26. August trafen in drei Etappen 1500 Eidgenossen auf 40 000 Armagnaken-Söldner, die unter der Führung des französischen Kronprinzen standen. Die Schlacht begann am frühen Morgen und war nach durchkämpfter Nacht beendet. Von den Eidgenossen überlebten nur wenige, die, einmal nach Hause zurückgekehrt, Mühe hatten, nicht geköpft zu werden, da man sie für Feiglinge hielt. Die Armagnaken hatten 8000 bis 14 000 Tote zu beklagen. Der Kronprinz von Frankreich war von der militärischen Schlagkraft der Eidgenossen derart beeindruckt, dass er sein Heer abzog und am 5. September sein Hauptquartier im elsässischen Ensis­heim aufschlug.
Die Eidgenossen wurden am 21. Oktober zu einem Treffen mit dem französischen Bevollmächtigten nach Zofingen eingeladen. Am 28. Oktober 1444 wurde in Ensisheim ein Vertrag zwischen Frankreich und den Städten und Landschaften Basel, Bern, Luzern, Solothurn, Uri, Schwyz, Unterwalden, Zug und Glarus und ihren Verbündeten, dem Herzog Louis von Savoyen, dem Grafen Jean von Neuenburg, dem Grafen Jean von Aarberg und Valangin sowie den Städten Biel und La Neuveville abgeschlossen. Dieses Abkommen war eine Vorstufe zu einem Bündnisvertrag mit Frankreich. Frankreich wurde durch die Möglichkeit, Eidgenossen anzuwerben, zu einer Schutzmacht der Eidgenossenschaft. Diese erhielt dadurch einen bedeutenden Wirtschaftsmarkt im Westen.
Interessanterweise führte wiederum eine verlorene Schlacht zur Vertiefung der Beziehungen der Alten Eidgenossenschaft zu Frankreich und zur Institutionalisierung der Fremdendienste. Diesmal ging es um den Besitz des Herzogtums Mailand, das damals unter Vorherrschaft der Eidgenossen stand. Franz I., König von Frankreich, der das Herzogtum unbedingt für sich wollte, bot am 2. Januar 1515 den Eidgenossen Verhandlungen an, die aber zu keinem Ergebnis führten. Es wurde zum Krieg gerüstet. Während der König seine Kriegsmacht vereinigte, hatten die Eidgenossen Ende Mai südlich der Alpen 30 000 Mann in drei Hauptgruppen verlegt. Dank des königlichen Angebots mit Pensionen und Privilegien zog ein Drittel der Truppen ab. Der Walliser Kardinal Matthäus ­Schiner feuerte die Eidgenossen an, die darauf die Auseinandersetzung wollten.
Vom 13. bis 14. September 1515 tobte die Schlacht bei Marignano in Oberitalien. Als sich die Niederlage infolge der Überlegenheit der französischen Artillerie und der Erschöpfung der eidgenössischen Kampfkraft abzeichnete, zog der Hauptharst der Eidgenossen ab. Nach der verlorenen Schlacht wollte aber die Mehrheit der eidgenössischen Stände noch nicht aufgeben. Schliess­lich wurden die Verhandlungen mit Frankreich am 7. Juli 1516 wieder aufgenommen. Nachdem sich die Versprechungen des Kaisers und jene von Heinrich VIII. von England jedoch als unzuverlässig erwiesen, wurde am 29. November 1516 in Freiburg im Uechtland der Ewige Friede mit Frankreich abgeschlossen. Dieser Vertrag wurde mehrmals erneuert und galt bis 1792. Mit der militärischen Kapitulation (ein Vertrag, der in Kapiteln aufgeteilt war) verpflichtete sich das ‹Helvetische Corps› (die Eidgenossenschaft wurde im 17. Jahrhundert so bezeichnet) bzw. verpflichteten sich einzelne Kantone, für Frankreich Kontingente zu stellen, die in der Schweiz ausgehoben werden durften.
In allen Kapitulationen, die später auch als Vorbild für die Verträge mit anderen europäischen Mächten galten, wurde festgehalten, dass:2
1.    die Schweizer nur in Schweizer Regimentern unter Schweizer Flagge und unter Schweizer Offzieren dienen durften und dass der Generaloberst der Schweizer ­Regimenter entweder der König selbst oder ein Mitglied der königlichen Familie sein musste;
2.    die Schweizer Soldaten nur durch Schweizer Richter nach schweizerischem Recht und unter eidgenössischer Hoheit verurteilt werden durften;
3.    die Tagsatzung jederzeit das Recht hatte, die Regimenter für die Verteidigung zurückzurufen, wenn die Eidgenossenschaft bedroht war.
Grundsätzlich mussten die Schweizer Regimenter, die in Frankreich die Stellung von Hilfstruppen hatten, den Interessen der Eidgenossenschaft dienen. Die Schweizer unterstanden nur den militärischen Kapitulationen und genossen eine bevorzugte Stellung im Vergleich zu anderen Söldnern, die sich als Einzelkämpfer der Jurisdiktion und Autorität der Fürsten unterworfen hatten.
Frankreich war auf Grund seiner Aussenpolitik gegenüber dem Heiligen Römischen Reich Deutscher Nation für die protestantischen Orte glaubwürdig und wegen seiner katholischen Innenpolitik für die katholischen Orte annehmbar. Mitte des 18. Jahrhunderts hatte der König von Frankreich zwölf Schweizer Regimenter in seinen Diensten. Dazu kamen noch das berühmteste von allen, das Regiment der Schweizergarde, und die Kompanie der ‹Cent-Suisses›. Verschiedene Male trugen die Eidgenossen zur Rettung der Monarchie von Frankreich bei. Die Treue zur Krone war jedoch immer mit Opfern verbunden. Dazu gehörte die Niedermetzelung des Regiments der Schweizergarde bei den Tuilerien am 10. August 1792, ein Ereignis, das sich 1830 wiederholte.
Dem Beispiel Frankreich folgend, durften später auch andere Mächte Einheiten in der Eidgenossenschaft anwerben. Dazu gehörte der Papst, der neben einer kleinen Streitmacht von 2000 Schweizern das Recht auf eine eigene päpstliche Schweizergarde erhielt. Diese Garde musste 1527 mit 189 Mann den Vatikan gegen den Angriff der Soldateska von Kaiser Karl V. verteidigen. Nachdem die spanischen Söldner und die deutschen Landsknechte am 6. Mai 1527 8000 wehrlose Römer niedergemetzelt hatten, stiessen sie auf 147 Gardisten unter der Führung ihres Zürcher Hauptmanns Kaspar Röist vor dem Petersdom. Die Garde hatte dem Papst Treue geschworen, und für diese Treue war sie bereit, mit dem Leben einzustehen. Nach einem sechsstündigen Kampf gegen 10 000 kaiserliche Soldaten wurden die Gardisten und ihr Hauptmann niedergemetzelt. Mit dem 6. Mai 1527 erhielt die Garde ihr Adelsprädikat. Noch heute wird dieser Heldentat gedacht.
Vom 15. Jahrhundert an bis zum Jahr 1787 wurden in der Eidgenossenschaft insgesamt 614 257 Berufssoldaten für Frankreich ausgehoben.3 Unter Franz I. diente gar eine Streitmacht von 163 000 Eidgenossen. Bei allen Schlachten der Krone Frankreichs stiessen die Eidgenossen immer wieder auf ihre alten Erbfeinde, die deutschen Landsknechte, so auf den Italien-Feldzügen oder in den französischen Religionskriegen. Da gab es gegenseitig kein Pardon.
Mitte des 18. Jahrhunderts stellte die Eidgenossenschaft für Frankreich, die Niederlande, Spanien, Savoyen, Neapel und Österreich insgesamt 76 800 Berufssoldaten, dies bei einer Bevölkerungszahl von 1,5 Millionen Einwohnern. Das letzte Kontingent an Eidgenossen diente noch 1859 dem König von Neapel und beider Sizilien. Bis zu diesem Zeitpunkt hatten mehr als zwei Millionen Schweizer in den Fremdendiensten mit oder ohne Kapitulation gedient.

Milizarmee

Die militärische Sicherheit der Eidgenossenschaft beruhte bis zum Untergang der Alten Eidgenossenschaft grundsätzlich auf den Kapitulationen, die es der Tagsatzung ermöglichen sollten, im Bedrohungsfalle auf ausgebildete Berufssoldaten zurückgreifen zu können. Der Anstoss zur Bildung einer Art Miliz­armee für die Sicherung der Neutralität war der Dreissigjährige Krieg. Als dieser 1618 ausbrach, beschlossen die protestantischen und katholischen Stände der Tagsatzung, «still zu sitzen» und in diesem schrecklichen Krieg neutral zu bleiben. Bedingt durch die Bündner Wirren, Alt Fry Rätien gehörte damals als zugewandter Ort noch nicht zur Eidgenossenschaft, und der verschiedenen Grenzverletzungen beschloss die Tagsatzung 1647 in Wil ein Defensional- und Schirmwerk zur Sicherung der östlichen Grenzen. Zum ersten Mal wurde ein gemeinsames Kontingent von 36 000 Mann mit 147 Geschützen festgelegt, das die Neutralität der Eidgenossenschaft zu verteidigen hatte.
Eine doppelte Truppenzahl wurde «auf ­Pikett» gestellt. Dank der Bemühungen des Basler Bürgermeisters Johann Rudolf Wettstein bei den Verhandlungen in Westfalen wurde in Artikel 6 des Friedensvertrages von Westfalen vom 29. Juli 1648 die Unabhängigkeit der Eidgenossenschaft verankert. 1664 wurden die Defensionalen erneuert. 1668, beim Einfall von Frankreich in die Freigrafschaft Burgund, erweiterte die Tagsatzung in Baden das Defensionalwerk. Von da an wurde ein Bundesheer mit 40 000 Infanteristen, Reiterei und Artillerie in drei Auszügen gebildet. Bei der Eroberung der Freigrafschaft durch Frankreich 1674 folgte die erste Neutralitätserklärung. 1702 fand die letzte Erneuerung der Defensionale statt.
Durch die Französische Revolution wurde nicht nur das Machtgleichgewicht in Europa beseitigt, sondern auf Grund der Wehrpflichts­einführung in Frankreich wurden auch die eidgenössischen Berufssoldaten entlassen. Als die Franzosen 1798 in die Schweiz einfielen, ein Treuebruch, der bis auf den heutigen Tag nicht vergessen worden ist, gab es keine intakten Regimenter der Fremdendienste mehr, die man hätte einsetzen können. Den Franzosen ging es um die Plünderung der Zeughäuser und der Vermögen in der Eidgenossenschaft.
Nach der Gründung der Helvetischen Republik wurde am 27. September 1803 mit Frankreich unter Zwang eine neue Kapitulation unterzeichnet. Die Helvetische Republik musste Frankreich 16 000 Mann in vier Regimentern stellen. Am 28./29. November 1812 mussten diese den Rückzug des Rests der Grande Armée über die Beresina decken. Die Russen griffen damals achtmal an. Es überlebten nur 300 Eidgenossen des Kontingents. Während der Napoleonischen Kriege dienten Schweizer auch in den Armeen anderer kriegführender Staaten.
Nach dem Zusammenbruch des napoleonischen Reichs arbeitete die Tagsatzung der 19 Kantone im August 1815 eine neue Verfassung der Eidgenossenschaft aus. Im zweiten Pariser Frieden vom 20. November 1815 anerkannten die europäischen Mächte die immerwährende Neutralität der Schweiz, die diese militärisch aber selbst zu sichern hatte. Mit dem «Allgemeinen Militair-Reglement» vom 20. August 1817 wurde die erste eidgenössische Wehrorganisation der Neuzeit geschaffen. Das Reglement bekannte sich zum Grundsatz der allgemeinen Wehrpflicht und damit zur Milizarmee und lehnte das Berufsheer zur Verteidigung der Schweiz ausdrücklich ab. Das eidgenössische Heer wies damals einen Bestand von 67 516 Mann auf, davon waren 33 758 Mann Auszug und 33 758 Mann Reserve. Daneben gab es noch die Landwehr der Kantone.

Vereidigung der Schweizergarde

Für die Ausbildung des Kaders wurde 1819 in Thun die Militärschule eröffnet. Dieses Reglement wurde 1840 und 1842 revidiert. Im Dezember 1845 gründeten die katholischen Kantone der Urschweiz zusammen mit Freiburg und dem Wallis den Sonderbund. Der Grund dafür war die politische Uneinigkeit über die zukünftige Gestaltung der Eidgenossenschaft als Bundesstaat sowie religiöse Spannungen zwischen den Kantonen. Die Mehrheit der Kantone in der Tagsatzung forderte mehrmals, so zuletzt am 3. September 1847, die Aufösung des Sonderbundes und die Ausweisung der Jesuiten aus der Schweiz, die man als die Drahtzieher hinter dem Sonderbund vermutete. Als dies verweigert wurde, bot die Tagsatzung am 18. Oktober 1847 50 000 Mann auf. Guillaume-Henri Dufour wurde zum General und zum Oberbefehlshaber ernannt. Am 4. November beschloss die Tagsatzung, den Sonderbund gewaltsam aufzulösen. Der Sonderbund selbst verfügte über 29 500 Mann Auszug und Landwehr. Am 6. Dezember endete der Feldzug mit 104 Toten und 373 Verwundeten auf beiden Seiten.
Es folgten in den Kantonen Volksabstimmungen über die neue Verfassung des Bundesstaates, die mehrheitlich von 15½ Kantonen angenommen wurden, was an der Tagsatzung vom 12. September 1848 zur Kenntnis genommen wurde. Gemäss der neuen Verfassung waren die Fremdendienste und die Annahme von Pensionen, Titeln, Geschenken und Orden fremder Regierungen verboten. Auf der Grundlage dieser Verfassung wurde am 8. Mai 1850 das Bundesgesetz über die Militärorganisation der Eidgenossenschaft verabschiedet. Es wurden drei Heeresklassen gebildet:4
    Auszug: 20 bis 34 Jahre
    Reserve: 35 bis 40 Jahre
    Landwehr: 41 bis 44 Jahre
Das Bundesheer wies total einen Bestand von 104 354 Mann mit 252 Feldgeschützen und 48 Festgeschützen auf. Neben der Grundausbildung wurden jährliche Wiederholungskurse eingeführt, mit denen das Ausbildungsniveau der Truppe und der Stäbe aufrechterhalten werden konnte. Auf der Grundlage dieser Organisation wurde die ­Milizarmee bis 1989 immer wieder reorganisiert und der Lage angepasst.
Es gab mehrere Herausforderungen: Der Neuenburger Handel mit Preussen 1856, der Deutsch-Französische Krieg von 1870/71, die Grenzbesetzung von 1914 bis 1918 und der Aktivdienst von 1939 bis 1945, welche die Armee zu bestehen hatte.

Beurteilung aus heutiger Sicht

Ab 1989 bis heute sind bezüglich Aufrechterhaltung und Ausrüstung der Milizarmee mehrere Volksabstimmungen durchgeführt worden, so die Armeeabschaffungsinitiative von 1989 und die Kampfflugzeugbeschaffungsabstimmung von 1993. Bei allen Abstimmungen über die Armee hat sich das Schweizer Volk zu seiner Armee bekannt. Die Probleme über die gegenwärtige Existenz der Armee sind nicht an der Basis, sondern an der Spitze entstanden. 1989 beschloss eine verunsicherte Regierung die sogenannte Armeereform 95, die nichts anderes als eine Bestandesreduktion von 625 000 Mann auf 400 000 Wehrpflichtige war. Dank des unermüdlichen Einsatzes des Miliz- und Berufskaders gelang es, diese «Reform» mehr oder weniger zu bewältigen. 1995 übernahm Adolf Ogi das Verteidigungsministerium. Unter dem Einfluss seiner Berater beschloss er, obwohl die Reform 95 noch nicht beendet war, eine weitere Armeereform. Das Vorbild für die Armee XXI, die neue Reform wurde so bezeichnet, sollte eine Einsatzarmee nach amerikanischem Vorbild sein. Die bisherige Ausbildungsarmee galt plötzlich als überholt. Wieder war eine Bestandesreduktion geplant, und zwar auf 120 000 Wehrpflichtige und 80 000 Reservisten.
Diese Reform misslang vollständig. Heute muss sich unsere Bevölkerung damit abfinden, dass ihre Armee nicht mehr funktioniert, einen Unterbestand an Milizkadern hat, eine nicht funktionierende Logistik aufweist und der Unterhalt der Waffensysteme nicht mehr gewährleistet ist. Gleichzeitig ist das engmaschige Netz, das seit Generationen zwischen der Bevölkerung, den Gemeinden, den Kantonen und der Eidgenossenschaft bestand, zerstört worden. Der heutige Verteidigungsminister, Bundesrat Ueli Maurer, steht vor einer Herausforderung, die fast nicht zu erfüllen ist. Einfache Korrekturen des Fiaskos genügen nicht mehr. Im Prinzip muss er wieder bei null beginnen. Die früher existierende Tradition der Wehrbereitschaft der Schweizer Milizarmee besteht nicht mehr. Gleichzeitig ist Maurer mit der Tatsache konfrontiert, dass für die Erneuerung des Materials auch kein Geld mehr zur Verfügung steht. Die Befürworter der Armee XXI zielen leider weiterhin auf eine Berufstruppe ab, mit der sie in Kriege ziehen können, in welche die Schweiz auf Grund ihrer humanitären Tradition (IKRK) nicht einbezogen werden darf. Dazu kommt noch, dass die in der Bundesverfassung verankerte Souveränität der Schweiz missachtet wird.
Wie steht es mit den bis 1848 erlaubten Fremdendiensten? Als letzter Zeuge dieser glanzvollen Vergangenheit ist die päpstliche Schweizergarde übriggeblieben. Dank besonderer Vereinbarungen können in ihr junge Schweizer katholischen Glaubens dienen. Der junge Gardist, der bereits eine Rekrutenschule der Schweizer Armee absolviert hat, muss sich für mindestens zwei Jahre verpflichten. Der Dienst stellt eine ausserordentliche Herausforderung dar und ist von einem harten Drill bestimmt. Der Gardist verpflichtet sich durch seinen Schwur, den Heiligen Vater unter Opferung des eigenen Lebens zu schützen. Die päpstliche Schweizergarde ist ein Kleinod, das in der Schweiz immer noch hochgehalten wird. Vielleicht gelingt es dank ihrem Bestehen, der neu zu schaffenden Miliz­armee den Geist und die Tradition der alten Eidgenossenschaft und ihrer Fremdendienste einzuhauchen: Treue zum Vaterland und Wehrwille.    •

Quelle: Der «Panzerspähtrupp» Nachrichtenblatt, Nr. 48

1     Stahel, Albert A. (1994): Von den Fremdendiensten zur Milizarmee. In: Armee 95. Chance für die Miliz­armee? Hg.: Albert A. Stahel. Zürich, Vdf Verlag, Strategische Studien Band 7, S. 11.
2     Stahel, Albert A. (1994): S. 17. 2.
3     Stahel, Albert A. (1994): S. 18. 3.
4     Stahel, Albert A. (1994): S. 25. 4.

dimanche, 16 janvier 2011

La tradition militaire suisse

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La tradition militaire suisse

Histoire de l’Armée en Suisse1

Ex: http://www.horizons-et-debats.ch/

par Albert A. Stahel, professeur d’études stratégiques à l’Université de Zurich et directeur de l’Institut d’études stratégiques de Wädenswil

A l’étranger, quand on parle de la tradition militaire suisse, on pense généralement à l’armée de milice. Cependant il existe une tradition plus ancienne, celle du service étranger de l’ancienne Confédération. Nous commencerons donc par décrire ce service étranger pour passer ensuite à l’armée de milice. Et pour terminer, nous examinerons la tradition suisse aujourd’hui.

Dès avant la fondation de l’ancienne Confédération en 1291, les Suisses d’Uri, de Schwytz et d’Unterwald étaient des merce­naires redoutés sur les champs de bataille d’Europe. Ainsi, en 1240, l’empereur Frédéric II de Hohenstaufen accorda aux Schwytzois, en récompense de leur aide militaire à Faenza, l’immédiateté impériale en vertu de laquelle ils dépendaient directement de l’Empereur et non plus de ses vassaux.
C’est paradoxalement une bataille perdue qui fut à l’origine de la conclusion d’accords de la Diète sur le service au profit de puis­sances étrangères. Le 26 août 1444, aux portes de Bâle, près de Saint-Jacques-sur-la-Birse, eut lieu une bataille d’ampleur européenne. Ce jour-là, 1500 Confédérés se heurtèrent, en trois phases, à 40 000 Armagnacs commandés par le dauphin (futur Louis XI). La bataille commença le matin et prit fin le lendemain après une nuit de combats. Seuls quelques centaines de Confédérés en réchappèrent qui, une fois rentrés chez eux, eurent quelque peine à échapper à la décapitation, car on les considéra comme des lâches. Les Armagnacs perdirent entre 800 et 14 000 hommes. Le dauphin fut si impressionné par la combativité des Confédérés qu’il retira son armée et alla, le 5 septembre, établir son quartier général en Alsace, à Ensisheim.
Le 21 octobre, les Confédérés furent invités à rencontrer le plénipotentiaire français à Zofingen. Le 28, à Ensisheim, fut signé un accord entre la France et les villes et cantons de Bâle, Berne, Lucerne, Soleure, Uri, Schwytz, Unterwald, Zoug et Glaris et leurs alliés: le duc Louis de Savoie, le comte Jean de Neuchâtel, le comte Jean d’Aarberg et de Valangin ainsi que les villes de Bienne et de La Neuveville. Cet accord représentait la première étape d’un traité d’alliance avec la France. Grâce à la possibilité d’enrôler des Confédérés, la France devint une puissance protectrice de la Confédération, laquelle se vit ouvrir un important marché à l’Ouest.
Il est intéressant de constater que c’est une autre bataille perdue qui permit d’approfondir les relations entre l’ancienne Confédération et la France et d’institutionnaliser le service étranger. Il s’agissait cette fois du duché de Milan qui était à l’époque sous la domination des Confédérés. Le roi de France François 1er, qui voulait absolument s’emparer du duché, proposa, le 2 janvier 1515, des négociations aux Confédérés, mais elles n’aboutirent pas. On prépara la guerre. Tandis que le roi rassemblait ses forces armées, les Confédérés avaient déplacé 30 000 hommes en trois groupes principaux au sud des Alpes. A la suite des offres de pensions et de privilèges de la part du Roi, un tiers des troupes prirent le chemin du retour. Le cardinal valaisan Matthieu Schiner encouragea avec succès les autres à se battre.
La bataille fit rage les 13 et 14 sep­tembre près de Marignan, en Italie du Nord. Lorsque, en raison de la supériorité de l’artillerie française et de l’épuisement de la combativité des Confédérés, la défaite fut prévi­sible, le gros des troupes confédérées se retira. Toute­fois, après la défaite, la majorité des cantons ne voulut pas abandonner la partie. Finalement les négociations avec la France reprirent le 7 juillet 1516. Après que les promesses de l’empereur et celles d’Henri VIII d’Angleterre se furent avérées dou­teuses, les Confédérés signèrent avec la France, le 29 novembre 1516, à Fribourg, une paix perpétuelle. Ce traité fut renouvelé à plusieurs reprises et resta en vigueur jusqu’en 1792. Avec cette capitulation militaire – traité divisé en chapitres – le Corps helvé­tique (c’était un des noms de la Confédération depuis le XVIIe siècle) s’engageait à mettre à la disposition de la France des contingents pouvant être levés en Suisse.
Toutes les capitulations, qui servirent plus tard de modèle pour les traités avec d’autres puissances européennes, stipulaient2:
1.    que les Suisses ne pouvaient servir que dans des régiments suisses sous la bannière suisse et que le colonel général des régiments suisses devait être soit le Roi soit un membre de la famille royale;
2.    que les soldats suisses ne pouvaient être condamnés que par des juges suisses selon le droit suisse et sous la souveraineté de la Confédération;
3.    que la Diète avait en tout temps le droit de rappeler les régiments pour défendre la Confédération en cas de menace.
Les régiments suisses, qui avaient en France le statut de troupes auxiliaires, devaient en principe servir les intérêts de la Confédération. Les Suisses n’étaient subordonnés qu’à la capitulation militaire et jouissaient d’un statut privilégié par rapport à d’autres merce­naires qui, en tant que combattants individuels, étaient soumis à l’autorité et à la juridiction des princes.
En raison de sa politique étrangère à l’égard du Saint-Empire romain germanique, la France était crédible aux yeux des cantons protestants et du fait de sa politique intérieure catholique, elle était acceptable par les cantons catholiques. Au milieu du XVIIIe siècle, le roi de France avait douze régiments suisses à son service. A cela s’ajoutait le plus célèbre, celui de la Garde suisse ainsi que la Compagnie des Cent Suisses. A plusieurs reprises, les Confédérés aidèrent à sauver la monarchie française. Cependant la fidélité à la Couronne ne cessa de faire des victimes: le régiment de la Garde suisse fut massacré aux Tuileries le 10 août 1792, événement qui se reproduisit en 1830.
Suivant l’exemple de la France, d’autres puissances eurent le droit de recruter des unités dans la Confédération. Ce fut notamment le cas du Pape qui entretenait, outre une petite armée de 2000 Suisses, une Garde suisse. En 1527, celle-ci dut défendre le Vatican contre une attaque de la soldatesque de l’empereur Charles-Quint. Après avoir massacré 8000 Romains sans défense, le 6 mai 1527, les mercenaires espagnols et les lansquenets allemands se heurtèrent, devant la basilique Saint-Pierre, à 147 gardes commandés par le capitane zurichois Kaspar Röist. La Garde, qui avait juré fidélité au Pape, était prête à risquer sa vie. Au cours d’un combat contre 10 000 soldats de l’Empereur, qui dura six heures, les gardes et leur capitaine furent tous massacrés. Suite au 6 mai 1527 la Garde a été anoblie. Aujourd’hui encore, on célèbre leur héroïsme.
Du XVe siècle à 1787, 614 257 soldats furent recrutés en Suisse pour la France3. Sous François 1er, la troupe en comptait 163 000. Lors de toutes les batailles de la Couronne, les Confédérés se heurtaient à leurs anciens ennemis, les lansquenets allemands, par exemple lors des campagnes d’Italie ou des guerres de religion françaises. On se montrait impitoyable dans les deux camps.
Au milieu du XVIIIe siècle, la Confédération mettait à la disposition de la France, des Pays-Bas, de l’Espagne, de la Savoie, de Naples et de l’Autriche un total de 76 000 mer­cenaires, et cela pour une population de 1,5 million d’habitants. Le dernier contingent était encore, en 1859, au service du roi de Naples et des Deux-Siciles. Jusque-là, plus de deux millions de Suisses avaient servi à l’étranger, avec ou sans capitulation.

L’armée de milice

En principe, la sécurité militaire de la Suisse reposa, jusqu’à la fin de l’ancienne Confédération, sur les capitulations qui permirent à la Diète de rappeler des soldats de profession bien formés en cas de menace. C’est la guerre de Trente Ans qui fut à l’origine de la constitution d’une armée de milice pour garantir la neutralité. Lorsque la guerre éclata, en 1618, les cantons protestants et catholiques de la Diète décidèrent de «ne pas bouger» et de rester neutres dans cet effroyable conflit. A la suite des troubles des Grisons – la Rhétie ne faisait pas encore partie de la Confédération – et de diverses violations de frontière, la Diète de 1647 adopta le Défensional de Wil voué à la défense des frontières orientales.
Pour la première fois, on prévoyait un contingent commun de 36 000 hommes et de 147 pièces d’artillerie destiné à dé­fendre la neutralité de la Confédération. Grâce aux efforts du bourgmestre de Bâle Johann Rudolf Wettstein lors des négociations de paix de Westphalie, la souveraineté de la Confédération fut inscrite à l’article 6 du Traité de Westphalie du 29 juillet 1648. Le Défensional fut renouvelé En 1664.
En 1668, lorsque la France envahit la Franche-Comté, la Diète de Baden compléta le Défensional. On créa alors une armée fédérale de 40 000 hommes constituée de trois corps: infanterie, cavalerie et artillerie. La neutralité fut proclamée pour la première fois lors de la conquête de la Franche-Comté par la France en 1674. Le dernier renouvellement du Défensional eut lieu en 1702.
La Révolution française eut non seulement pour effet de bouleverser l’équilibre des forces en Europe, mais l’introduction du service militaire obligatoire entraîna le renvoi des mercenaires suisses. Lorsque les Français envahirent la Suisse en 1798 – félonie dont on se souvient encore – il n’y avait plus aucun régiment intact du service étranger qu’on aurait pu déployer. Il s’agissait pour les Français de piller les arsenaux et les biens des Confédérés.
Après la création de la République helvétique, une nouvelle capitulation militaire fut signée sous la contrainte avec la France le 27 septembre 1803. La République helvétique devait mettre à la disposition de la France quatre régiments de 4000 hommes chacun. Les 28 et 29 novembre 1812, ils durent couvrir la retraite de ce qui restait de la Grande Armée après le passage de la Berezina. Les Russes attaquèrent alors à huit reprises. Seuls 300 Confédérés survécurent. Pendant les guerres napoléoniennes, des Suisses servirent également dans les armées d’autres Etats en guerre.
Après l’effondrement de l’Empire napoléonien, la Diète des 19 cantons élabora, en août 1815, un nouveau Pacte fédéral (constitution). Par le second Traité de Paris, du 20 novembre 1815, les puissances européennes reconnurent la neutralité perpétuelle de la Suisse, que celle-ci devait défendre elle-même militairement. C’est le Règlement militaire du 20 août 1817 qui créa la première armée fédérale moderne. Il affirmait le principe du service militaire obligatoire et donc de l’armée de milice et s’opposait ainsi à l’idée d’une armée de métier pour défendre le pays. L’armée suisse comptait alors 67 516 soldats: 33 758 soldats d’élite et 33 758 soldats de réserve. Il y avait en outre la landwehr des cantons. En 1819, on créa à Thoune l’Ecole militaire destinée à la formation des cadres. Ce Règlement fut révisé en 1840 et en 1842.

Prestation de serment de la Garde suisse

En décembre 1845, les cantons catholiques de la Suisse primitive ainsi que Fribourg et le Valais fondèrent le Sonderbund («Alliance séparée»). La raison en était le désaccord politique sur l’organisation future de la Confédération en tant qu’Etat fédéral ainsi que des tensions religieuses entre les cantons. La plupart des cantons de la Diète demandèrent à plusieurs reprises – la dernière fois le 3 septembre 1847 – la dissolution du Sonderbund et l’expulsion hors de Suisse des jésuites supposés être les instigateurs du Sonderbund. Se heurtant à un refus, la Diète mit sur pied, le 18 octobre 1847, une armée fédérale de 50 000 hommes. Guillaume-Henri Dufour fut nommé général-commandant en chef. Le 4 novembre, la Diète décida de dissoudre le Sonderbund par la force des armes. Ce dernier disposait de 29 500 soldats d’élite et de la landwehr. Les combats prirent fin le 6 décembre: ils avaient fait de part et d’autre 104 morts et 373 blessés.
Des votations eurent alors lieu dans les cantons sur la nouvelle Constitution fédérale, laquelle fut acceptée par quinze cantons et demi, résultat enregistré par la Diète du 12 septembre 1848. La Constitution interdisait le service étranger ainsi que l’acceptation de pensions, de titres, de décorations et de cadeaux de la part de gouvernements étrangers. Le 8 mai 1850 fut adoptée la loi fédérale sur l’organisation militaire de la Confédération. Elle prévoyait la création de 3 classes d’âge:4
Elite             20–34 ans
Réserve       35–40 ans
Landwehr    41–44 ans
L’armée avait un effectif total de 104 354 soldats et possédait 300 pièces d’artillerie. Outre l’instruction de base, on introduisit des cours de répétition annuels afin de maintenir le niveau de formation de la troupe et des cadres. C’est sur ces bases que l’armée de milice fut constamment réorganisée et adaptée à la situation jusqu’en 1989.
Il fallut faire face à plusieurs défis: l’Affaire de Neuchâtel, qui opposa la Confédération à la Prusse, la guerre franco-allemande de 1970-71, l’occupation des frontières de 1914 à 1918, le service actif de 1939 à 1945.

Appréciation actuelle

De 1989 à aujourd’hui, plusieurs votations populaires ont été organisées à propos du maintien et de l’équipement de l’armée de milice: initiative sur l’abolition de l’armée en 1989 et initiative «pour une Suisse sans avions de combat» en 1993. Lors de toutes les consultations, le peuple suisse a montré son attachement à son armée. Les problèmes ne sont pas venus de la base mais du sommet. En 1989, un gouvernement désorienté a décidé la Réforme de l’Armée 95 qui n’était qu’une réduction des effectifs de 625 000 à 400 000 hommes. Grâce à l’engagement sans faille des cadres professionnels et de milice, cette «réforme» a pu être plus ou moins bien maîtrisée.
En 1995, Adolf Ogi reprit le ministère de la Défense et, sous l’influence de ses conseillers, il décida, alors que la Réforme 95 n’était pas terminée, de réaliser une nouvelle réforme. L’Armée XXI – tel était son nom – devait être une armée d’intervention sur le modèle américain. L’armée «de formation» apparaissait dépassée. Une nouvelle réduction d’effectif fut prévue: on devait passer à 120 000 appelés et à 80 000 réservistes.
Cette réforme a été un échec total. Aujourd’hui, la population doit s’accom­moder du fait que son armée n’est plus opérationnelle, qu’elle n’a pas suffisamment de cadres de milice, que sa logistique ne fonctionne pas et que l’entretien des armes n’est plus assuré. En même temps, les liens étroits tissés entre la population, les communes, les cantons et la Confédération ont été détruits. L’actuel ministre de la défense Ueli Maurer doit relever un défi quasi insurmontable. Il ne suffit plus d’apporter de simples corrections à un modèle qui a échoué. Il devrait en principe repartir de zéro. La traditionnelle volonté de défense de l’armée de milice n’existe plus. En outre, Ueli Maurer est confronté au fait que son budget ne lui permet pas de renouveler le matériel. Les partisans d’Armée XXI veulent posséder une troupe professionnelle avec laquelle ils puissent participer à des guerres contraires à sa tradition humanitaire (CICR) du pays. A cela s’ajoute le fait que cet objectif contrevient au principe de souveraineté de la Suisse inscrit dans la Constitution.
Qu’en est-il du service étranger autorisé jusqu’en 1848? Dernier témoin de son passé glorieux, seule la Garde suisse pontificale a subsisté. Grâce à des accords particuliers, des jeunes Suisses de confession catholique peuvent y servir. Le jeune garde qui a effectué une école de recrues de l’Armée suisse doit s’engager pour deux ans au minimum. Ce service représente un défi extraordinaire et suppose un entraînement très dur. Le garde s’engage par serment à protéger le Pape au sacrifice de sa vie. La Garde pontificale est un joyau qui jouit encore d’un grand prestige en Suisse. Peut-être que grâce à son maintien, on réussira à réinsuffler à l’armée de milice, qui reste à créer, l’esprit traditionnel de l’ancienne Confédération et de son service étranger: la fidélité à la patrie et la volonté de se défendre.    •

Source: Der «Panzerspähtrupp», Nachrichtenblatt no 48. (Traduction Horizons et débats)

1    Stahel, Albert A. (1994): Von den Fremdendiensten zur Milizarmee. In: Armee 95 – Chance für die Milizarmee? Hrsg.: Albert A. Stahel. Zürich, Vdf Verlag, Strategische Studien Band 7, pp. 11 sqq.
2    ibid, p. 17.
3    ibid, p. 18.
4    ibid, p. 25.