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mardi, 23 mars 2021

Racines historiques de la théorie des « deux nations » en Inde

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Racines historiques de la théorie des « deux nations » en Inde

Par Daniele Perra

Ex: https://www.eurasia-rivista.com/

"Nous ne sommes pas des Afghans ni des Tartares ou des Turcs,

nous sommes nés d'un seul jardin, d'une seule branche bourgeonnante.

Distinguer les couleurs et les odeurs est une faute grave pour nous,

car nous avons tous, un seul et unique, engendré le printemps".

(M. Iqbal, quatrain XX, Messages de l'Orient)

L'idée de deux nations distinctes dans le sous-continent indien n'a pas accompagné tout le parcours politique de Muhammad Ali Jinnah. Ce ne fut le cas qu'à partir du milieu des années 1930, face à la crainte que le nationalisme indien ne se transforme rapidement en nationalisme hindou (l'adoption du Vande Mataram comme hymne du Congrès inquiète Jinnah, qui y voit un chant "idolâtre" fondé sur la "haine des musulmans") [1]. C’est alors que cette idée prend une place prépondérante dans la pensée du père fondateur du Pakistan. Et Jinnah lui-même était fermement convaincu que cette idée n'était pas nouvelle du tout. En fait, elle n'est pas un produit de la modernité, mais est née au moment même où le premier hindou, également pour échapper au système rigide des castes, s'est converti à l'Islam.

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Ali Jinnah.

L'idée que la théorie des deux nations a une origine prémoderne, bien qu'elle ne soit pas articulée en référence au concept moderne d'État-nation, n'est pas sans fondement. À la veille de la deuxième bataille de Tarain, le sultan des Ghurides [2] Mu'izz al-Din suggère à son rival, le souverain hindou Prithiviraj du Chahamana, une sorte de partition ante litteram par une division de l'Hindoustan qui anticipe largement les idées proposées par Muhammad Iqbal dans son discours d'Allahabad en 1930. Selon l'historien persan Firishta (1560-1620), les musulmans avaient droit à la région de Sirhind, au Punjab et au Multan, tandis que les hindous avaient droit au reste de l'espace subcontinental.

L'idée que les hindous et les musulmans représentaient inévitablement deux communautés distinctes, difficiles à faire coexister l'une avec l'autre, était récurrente à l'époque moghole.

La dynastie d'origine turco-mongole, bien qu'adhérant formellement au courant sunnite de l’islam (de rite juridique hanafite), a eu un rapport assez complexe (et en phases alternées) avec la religion. La religion, en fait, a été conçue principalement comme un instrument du pouvoir politico-militaire. Babur (1483-1530), fondateur de la famille impériale, par exemple, n'a redécouvert la ferveur religieuse que lorsqu'il était sur le point de faire la guerre aux Rajputs belliqueux de Rana Sanga : des guerriers hindous connus pour la pratique consistant à tuer leurs propres femmes et enfants dans l'imminence d'une défaite pour éviter d'être réduits en esclavage par les vainqueurs. Ainsi, à l'approche de la bataille de Khanua (1527), Babur déclara solennellement à ses hommes :

"Nobles et soldats! Celui qui participe à la fête de la vie doit, avant la fin, boire à la coupe de la mort. Il vaut donc mieux mourir avec honneur que de vivre dans l'infamie. Le Très-Haut nous a fait grâce. Il nous a maintenant placés dans une situation où, si nous tombons au combat, nous mourrons en martyrs; si nous survivons, nous serons les vengeurs victorieux de Sa Sainte Cause. Nous jurons donc d'un commun accord sur la Sainte Parole de Dieu [le Coran] qu'aucun d'entre nous ne pensera même un seul instant à tourner le dos à cette guerre; ou à se retirer de la bataille et du massacre qui suivra jusqu'à ce que son âme soit séparée de son corps "[3].

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Akbar le Grand.

Toujours à l'époque moghole, bien que sous le règne d'Akbar (petit-fils de Babur), l'idée d'incompatibilité entre hindous et musulmans a trouvé une nouvelle fortune avec la prédication d'Ahmad al-Faruqi al-Sirhindi (1564-1624). Membre de la confrérie Naqshabandi, Sirhindi a non seulement théorisé l'interdépendance entre les pratiques soufies et la Shari'a, mais, malgré les critiques des milieux orthodoxes, a soutenu la supériorité de la Réalité du Coran (haqiqat-i quran) et de la Réalité de la Ka'ba sur la Réalité du Prophète (haqiqat-i Muhammadi); cette doctrine aura une influence décisive sur le développement des théories de l'exégèse coranique et de la méthodologie du philosophe pakistanais Fazlur Rahman Malik (1919-1988). Ravivant la tension constante dans l'histoire de l'Islam entre préservation et innovation, Sirhindi est devenu le porte-parole d'une bataille acharnée pour la redécouverte de la pureté originelle de l'Islam face à la tentative impériale de construire une forme religieuse syncrétique, tentative visant à aplanir les divergences au sein de l'Empire. Cet épisode mérite une brève enquête.

L'histoire de l'empereur moghol Akbar est assez complexe. Bien qu'il ait réussi à satisfaire ses ambitions de conquête en plaçant l'Hindoustan sous son pouvoir, Akbar a toujours montré une tendance à la mélancolie (peut-être causée par de fréquentes crises d'épilepsie) qui transparaît dans l'inscription qu'il a dictée pour le majestueux portail de la Jama Masjid (la mosquée du vendredi, qu'il avait fait construire à Fatehpur Sikri, après la conquête du Gujarat) : " Le monde est un pont: passez-le, mais ne construisez pas de maison dessus [...] Le monde ne dure qu'une heure : passez-la dans la prière "[4].

Toujours à Fatehpur Sikri, en 1575, l'empereur a voulu établir un centre d'investigation philosophico-religieux, connu sous le nom d'Ibadhat Khana, dont l'objectif initial était de surmonter les différences entre les divers courants de l'Islam pour redonner à la religion sa force et sa pureté originelles. Cependant, surtout après l'ouverture des portes du centre par Akbar et la participation subséquente au débat de représentants d'autres religions (juifs, chrétiens, zoroastriens, hindous, etc.), son sentiment d'appartenance à l'Islam (bien qu'il n'ait jamais été complètement répudié) s'est lentement estompé. En particulier, 1578 est l'année du tournant (peut-être dû à une crise d'épilepsie plus lourde que d'habitude au cours d'une expédition de chasse): il passe du statut de souverain musulman orthodoxe à celui de réformateur radical.

Comme on retrouve dans la pensée d'Akbar l'idée que le rituel exécuté mécaniquement et sans conscience intérieure rend le culte de Dieu inutile, le roi était extrêmement intéressé et fasciné par le soufisme. Cet intérêt l'a cependant amené à convoquer non seulement des maîtres du courant ésotérique de l'Islam comme Shaikh Tajuddin (qui a identifié la doctrine soufie de l'unité de l'être avec le monisme de la métaphysique hindoue), mais aussi des samanas (ascètes bouddhistes et jaïns), des yogis, des brahmanes et des savants zoroastriens. En effet, à partir de 1580, sous l'influence du zoroastrien Dastur Mahyragi Rana, Akbar adopte également en public les rites de l'ancienne religion iranienne. Mais le conflit avec les autorités orthodoxes de l'islam a commencé dès 1579, lorsque, à l'occasion de l'anniversaire de la naissance du prophète Mahomet (qui tombait cette année-là le 26 juin), il a lu pour la première fois et conclu la khutba (le sermon du vendredi) dans le Jama Masjid en prononçant les mots "Allahu Akbar".

Cette expression est assez célèbre et courante en Islam. Elle suscita cependant l'ire des oulémas orthodoxes qui l'interprétèrent non pas avec le sens traditionnel "Dieu est plus grand", mais avec la volonté du souverain d'affirmer sa propre divinité, puisqu'elle pouvait aussi se prêter à un "Akbar est Dieu" plus que blasphématoire.

Quelques mois après l'événement, Akbar a obtenu de certains érudits religieux de la cour un document le déclarant Sultan-i adil (souverain vertueux). Ce document, fondé sur le dicton coranique "obéissez à Dieu, obéissez au Prophète et à ceux d'entre vous qui détiennent l'autorité", lui permettait, entre autres, d'agir en tant qu'arbitre dans les affaires religieuses et d'émettre un décret contraignant (pour autant qu'il soit conforme au Coran) pour le bien de l'empire en cas de conflit d'opinions entre les savants.

Akbar s'est servi de ce stratagème pour promulguer en 1582 sa propre religion syncrétique, le Din Ilahi, en opposition ouverte à l'orthodoxie islamique, qu'il considérait, comme le rapporte l'historien Firishta précité, comme un obstacle à ses idées. Cette nouvelle religion se présentait comme un credo syncrétique, dont le but était de trouver un point de convergence entre toutes les croyances, afin que tous puissent l'approuver tout en restant fidèles à leurs propres croyances. Il s'agissait d'une religion "régicentrique", qui, à certains égards, peut rappeler l'expérience monothéiste solaire du pharaon égyptien Akhénaton et dont les connotations étaient principalement socio-politiques. L'idée fondamentale défendue par Akbar était que la vénération du souverain faisait partie de la même vénération de Dieu ; et que la vénération de Dieu, pour le souverain, n'était rien d'autre que la pratique d'une administration conforme à la justice.

Outre le caractère assez confus de la doctrine, l'expérience d'Akbar échoua non seulement en raison du caractère élitiste (pseudo-initiatique) que le souverain voulait donner à sa "religion", mais aussi en raison de l'hostilité des érudits musulmans orthodoxes et de la réticence des communautés majoritaires respectives de l'Empire à s'amalgamer entre elles. En fait, malgré les efforts d'Akbar, les "deux nations" du sous-continent avaient déjà été largement consolidées.

Un autre précurseur de l'idée des "deux nations" est Sayyed Ahmad Barelvi (1786-1832), qui a tenté de convaincre les Pachtounes d'abandonner définitivement leur droit coutumier particulier et de construire un "État islamique" par le biais du djihad offensif contre le royaume sikh de Ranjit Singh. Avant lui, un autre représentant musulman qui mérite qu'on s'y attarde est sans doute Shah Waliullah (1703-1762), l'inspirateur du mouvement déobandi qui, au cours du XVIIIe siècle, a invité le fondateur de l'empire Durrani dans l'actuel Afghanistan, Ahmad Shah Abdali (1722-1772) [5], à intervenir dans le sous-continent pour défendre les musulmans contre les persécutions hindoues.

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Ahmad Shah Abdali.

Cependant, celui à qui l'on attribue généralement la première formulation de l'idée de deux nations distinctes dans le sous-continent indien est Sayyed Ahmad Khan : le fondateur de l'Anglo-Oriental Muhammadan College d'Aligarh, par lequel il proposait d'éduquer une nouvelle classe dirigeante musulmane "occidentalisée" (il n'est pas surprenant que sa pensée ait été prise comme référence idéologique sous le régime désastreux de Pervez Musharraf). Son nom mérite toutefois une attention particulière car c'est à partir de ses réflexions que la théorie des "deux nations" a pris un caractère proprement moderne et structuré, également en réponse anticipée au développement ultérieur des idées sur le "nationalisme composite", dont l'origine est principalement due à la pensée de Bipin Chandra Pal (1858-1932) [6] dans la première décennie du XXe siècle. Ainsi, Ahmad Khan a déclaré dans un discours prononcé en 1883 à Patna, dans l'Inde actuelle, "Mes amis, il existe en Inde deux nations importantes qui se distinguent par les noms d'hindous et de musulmans. Tout comme le corps humain possède certains organes principaux, de la même manière, ces deux nations représentent les deux principaux membres de l'Inde" [7].

En prenant note de la paternité de l'idée, il convient de noter que l'historiographie pakistanaise a mené une enquête approfondie pour savoir qui a été la première personne à formuler de manière accomplie au 20e siècle le projet de construire deux nations distinctes en Inde britannique. L'historien Sheikh Muhammad Ikram, par exemple, rapporte que la déclaration suivante du juge Abdur Rahim au congrès de la Ligue musulmane à Aligarh en 1925 a suscité une certaine consternation : "Les hindous et les musulmans ne sont pas deux sectes différentes comme les catholiques et les protestants en Angleterre, mais forment deux communautés distinctes de personnes, et se considèrent ainsi. Leurs attitudes respectives à l'égard de la vie, leurs cultures distinctes, leurs habitudes sociales et leurs civilisations, leur histoire et leurs traditions, non moins que la religion, les divisent si complètement que le fait d'avoir vécu pendant environ mille ans dans le même pays n'a rien fait pour les fusionner en une seule nation [...] Chacun d'entre nous, Indiens musulmans, voyageant par exemple en Afghanistan, en Perse ou en Asie centrale, chez les musulmans de Chine, chez les Arabes ou les Turcs, se sentiront toujours chez eux, retrouvant des coutumes auxquelles ils sont déjà habitués. Au contraire, en Inde, nous nous trouvons complètement étrangers à toutes les questions sociales dès que nous traversons la rue et entrons dans la partie de la ville où vivent nos compatriotes hindous."[8]

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Nehru et Jinnah.

Cependant, l'exposé philosophique et politique de la théorie des "deux nations" est généralement attribué à Muhammad Iqbal et à Muhammad Ali Jinnah. Le premier, en effet, dans le discours déjà cité d'Allahabad, a promu l'idée d'une forme d'"autonomie au sein de l'Empire britannique" (ou sans lui) pour les musulmans du sous-continent. Selon le poète et penseur (qui a également reconnu comment les Britanniques exploitaient les divisions entre hindous et musulmans pour des raisons géopolitiques) [9], la création d'un "État islamique" était dans le meilleur intérêt de l'Inde et de l'islam lui-même. En fait, elle aurait représenté une force fondamentale pour la sécurité, la paix et l'équilibre des pouvoirs au sein d'un sous-continent dont l'unité devait être reconstruite non pas dans la négation des différences, mais dans l'harmonie et la coopération mutuelles [10]. Cette position est également résumée dans la déclaration faite par Iqbal en réponse aux accusations de Jawaharlal Nehru après l'échec de la série de tables rondes organisées à Londres au début des années 1930 sur les réformes à adopter en Inde. En voici un extrait : "En conclusion, je veux poser une question directe au Pandit Jawaharlal : comment le problème indien peut-il être résolu si la communauté majoritaire ne veut ni accorder la protection minimale nécessaire à la protection d'une minorité de 80 millions de personnes, ni accepter l'existence d'un tiers, mais continuer à parler d'un nationalisme qui ne fonctionne qu'à son propre avantage ? Cette position ne peut admettre que deux alternatives. Soit la majorité indienne doit accepter pour elle-même le rôle d'agent pérenne de l'impérialisme britannique en Orient, soit le pays doit être redistribué sur la base des affinités historiques, religieuses et culturelles. "[11]

Une vague accusation d'être un agent de l'impérialisme britannique, pour être juste, a également été portée contre Muhammad Ali Jinnah, précisément en raison de son soutien à la cause de la partition. En 1943, cette accusation a conduit un activiste supposé être associé au mouvement Khaksar (à fort caractère social-révolutionnaire)[12] à attenter à la vie du leader politique musulman. Jinnah, cependant, continua sans se décourager à soutenir l'idée que, au contraire, c'était la fausse représentation d'une Inde unie qui maintenait les Britanniques sur le sol du sous-continent.

Comme nous l'avons déjà mentionné, le Qaid-e Azam a embrassé la cause des "deux nations" sur le tard. Brillant avocat passé à la politique, Jinnah termine ses études à Londres, où il devient membre de l'Honorable Society of Lincoln's Inn (l'une des plus prestigieuses guildes professionnelles de juges et d'avocats au monde) sur l'entrée principale de laquelle le prophète Mahomet figure parmi les grands hommes d'État et législateurs de l'humanité. À Londres, Jinnah devient l'assistant du politicien libéral (et franc-maçon) Dadabhai Naoroji [13], le premier Asiatique (de confession zoroastrienne) à devenir membre du Parlement britannique ; de lui, Jinnah hérite de la dévotion presque obstinée aux méthodes constitutionnelles et de l'idée d'émancipation (surtout des jeunes) par l'éducation. Cette insistance sur les méthodes constitutionnelles (même au moment où il s'est rendu compte qu'il n'y avait pas d'autre solution que la partition) était surtout liée au fait que, comme cela s'est effectivement produit, une fin abrupte de la domination britannique conduirait inévitablement à la violence sectaire.

Si, comme il a été dit plus haut, Jinnah a opté pour la théorie des "deux nations" dès 1937 et suite aux tensions croissantes entre le Congrès et la Ligue musulmane, il est tout aussi vrai que son idée n'a été ouvertement présentée que dans le discours qu'il a prononcé à Lahore le 22 mars 1940 :

"Il est extrêmement difficile d'apprécier le fait que nos amis hindous ne peuvent pas comprendre la nature même de l'islam et de l'hindouisme. Ce ne sont pas des religions au sens concret du terme, en fait, ce sont des ordres sociaux différents et distincts, et c'est un rêve de penser que les hindous et les musulmans peuvent développer un sens commun de la nationalité, et cette incompréhension de la nation indienne pose des problèmes et conduira l'Inde elle-même à la faillite si nous ne reconstruisons pas cette notion à temps. Les hindous et les musulmans appartiennent à deux philosophies religieuses différentes, à des littératures différentes et à des coutumes sociales différentes. Ils ne se marient pas entre eux et appartiennent à deux civilisations différentes qui reposent sur des concepts et des idées contradictoires. Leur idée de la vie et sur la vie est différente. Il est tout à fait clair que les hindous et les musulmans tirent leur inspiration de sources historiques différentes. Ils ont des épopées différentes, des héros différents et des événements différents. Souvent, le héros de l'un est l'ennemi de l'autre et leurs victoires et défaites se chevauchent. Réunir de force dans un même État ces deux nations, l'une majoritaire et l'autre minoritaire, alimentera le mécontentement et conduira à la destruction définitive de toute constitution gouvernementale conçue pour un tel État" [14]. Il s'agissait d'une déclaration similaire faite un an plus tôt.

Choudhry_Rahmat_Ali.jpgUne déclaration similaire a également été faite quelques années plus tôt par Choudhry Rahmat Ali (photo) (exactement en 1933 et à la fin des tables rondes de Londres) dans un pamphlet qui a acquis une certaine notoriété sous le titre de « Déclaration du Pakistan ». Rahmat Ali écrit : "Nos religions et nos cultures, nos histoires et nos traditions, nos codes sociaux et nos systèmes économiques, nos lois sur l'héritage, la succession et le mariage sont fondamentalement différents de ceux des personnes vivant dans le reste de l'Inde. Les idées qui poussent notre peuple à faire les plus grands sacrifices sont essentiellement différentes de celles qui inspirent les hindous à faire de même. Ces différences ne se limitent pas aux principes de base. Ils s'étendent jusqu'aux moindres détails de nos vies. Nous ne dînons pas ensemble. On ne se marie pas entre nous. Nos coutumes nationales et nos calendriers sont aussi différents que notre nourriture et nos vêtements"[15]. Nous ne sommes pas les mêmes.

Lors d'une rencontre en 1934 entre Jinnah et Rahmat Ali lui-même, le premier suggère au second de faire preuve d'une certaine prudence. Toutefois, le zèle missionnaire conduit le fondateur du Mouvement national pakistanais à se rapprocher des thèses du national-socialisme et à entrer en opposition avec Jinnah lui-même ; cela se produit lorsque ce dernier accepte une solution territoriale qui réduit l'espace géographique du futur Pakistan par rapport au projet idéal de Rahmat Ali, fondé sur l'idée de libérer les musulmans du sous-continent de la "barbarie de l'indianisme"[16].

La théorie des "deux nations" trouve également un soutien dans les milieux purement religieux. La vision de Jinnah, comme on le sait, était celle d'un État inspiré par les principes de l'Islam, bien que lui-même ait toujours refusé toute caractérisation religieuse de son rôle. À ceux qui voulaient lui donner le titre de "Maulana", par exemple, il s'est toujours fermement opposé, déclarant être un politicien et non un homme de religion [17]. En tout cas, c’est ce qu’il a déclaré lors d'une interview avec une radio nord-américaine :

"Le Pakistan est le premier État islamique [...] La Constitution du Pakistan n'a pas encore été discutée par l'Assemblée constituante. Je ne sais pas quelle sera la forme finale de cette Constitution, mais je suis sûr qu'il s'agira d'un modèle démocratique capable d'intégrer les principes essentiels de l'Islam. Celles-ci sont toujours aussi applicables aujourd'hui qu'elles l'étaient il y a 1300 ans. L'Islam et l'idéalisme nous ont appris la démocratie. L'Islam nous a enseigné l'égalité entre les hommes et la justice"[18]. L'appel à l'égalité et à la justice est important.

La référence à la justice et à l'égalité entre les hommes apparaît également dans certaines déclarations de nature plus purement économique. Par exemple :

"Le système économique de l'Occident a créé des problèmes insolubles pour l'humanité [...] Il n'a pas réussi à créer la justice entre les hommes et à éliminer les diatribes dans l'arène internationale [...] L'adoption d'une théorie économique occidentale ne nous aidera pas à atteindre l'objectif de créer un peuple autosuffisant et heureux [...] Nous devons construire notre propre destin à notre manière et présenter au monde un système économique basé sur le concept islamique d'égalité" [19].

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Maulana Abul A'la Maududi.

Sur la base de ces déclarations, de nombreux représentants du soufisme barelvi se sont prononcés en faveur de la partition. Au contraire, Maulana Abul A'la Maududi soutenait que l'idée de partition et de fermeture de l'islam au sein d'un État moderne était fondamentalement non islamique (contraire au concept traditionnel d'Umma). Cependant, sa Jama'at-e-Islami, malgré une relation difficile avec les institutions pakistanaises après la partition, a trouvé dans le militarisme islamiste de Zia ul-Haq, l'allié idéal pour développer un projet d'islamisation forcée par le haut, également contraire aux principes coraniques.

Parmi les groupes qui ont soutenu le plus activement le processus de séparation en deux États figure sans conteste la Ahmadiyya Muslim Jama'at. Il s'agissait d'un mouvement d'inspiration messianique, dont le premier leader (Mirza Ghulam Ahmad, 1835-1908) s'était déclaré le Mahdi attendu, invoquant le retour à la pureté originelle de l'Islam. Pendant la première guerre indo-pakistanaise de 1947-48, ce mouvement a créé l'organisation paramilitaire connue sous le nom de Furqan Forces, qui a combattu au Cachemire [20].

Bien sûr, même au sein de la sphère hindoue, certains penseurs et intellectuels ont adopté ou se sont opposés à la théorie des "deux nations". Il suffit de mentionner Indira Ghandi qui, lorsque le Pakistan oriental est devenu indépendant en tant que Bangladesh après la guerre de 1971 [21], a déclaré l'échec de la théorie des "deux nations". Toutefois, comme l'analyste pakistanais et ancien militaire Masud Ahmad Khan a eu l'occasion de le souligner, le Bangladesh n'est pas du tout un État laïque, c'est un État musulman. Et l'affirmation toute récente du nationalisme exclusiviste hindou du Bharatiya Janata Party, inspiré par la pensée de Vinayak Damodar Savarkar (1883-1966), est la démonstration la plus claire que la théorie de deux nations distinctes dans le sous-continent indien est plus vivante que jamais[22].

NOTES

[1]   Le Vande Mataram raconte l’histoire d’une société secrète hindoue qui, au 18ème siècle, a cherché à renverser le gouvernement islamique au Bengale.

[2]    Dynastie perse, auparavant de religion bouddhiste, qui s’est convertie à l’islam et qui a battu la dynastie turque persisée de Ghaznavides en 1186, tout en conquérant leur capitale Lahore, aujourd’hui sur territoire pakistanais.

[3]    A. Eraly, Il trono dei Moghul. La saga dei grandi imperatori dell’India, Il Saggiatore (2000), p. 43.

[4]    Il trono dei Moghul, ivi cit., p. 188.

[5]   Descendant des tribus pachtounes Sadozai et Alokozai, Ahmad Shah Abdali est le héros national de l’Afghanistan et est considéré comme le « Père moderne de la Nation ».  

[6]   Un des architectes majeurs du mouvement Swadeshi (en même temps que Sri Aurobindo) qui s’est opposé à la partition du Bengale décidée par le gouvernement britannique d’Inde en 1903. Chandra Pal était également membre du triumvirat nationaliste Lal-Bal-Pal (les deux autres membres étaient Lala Laipat Raj et Bal Ganghadar Tilak), triumvirat qui dirigea la lutte anticoloniale indienne dans les premières années du 20ème siècle.

[7]    R. Guha, Makers of modern India, Harvard University Press (2011), p. 65.

[8]    S. M. Khan, Indian muslims and partition of India, Atlantic Publisher & Dist (1995), p. 308.

[9]   L’historien David Hardiman partage également cette idée et cette théorie, selon lesquelles aucune hostilité particulière n’opposait les musulmans aux hindous au moment où les Britanniques sont arrivés dans le sous-continent indien. Ce sont donc, d’après cette théorie, les Britannques qui ont articulé la très célèbre pratique impérialiste du divide et impera afin de maintenir leur contrôle colonial sur cette région du monde. Voir  D. Hardiman, Gandhi in his time and ours: the global legacy of his idea, Columbia University Press (2003), p. 22.

[10]  Voir I. S. Sevea, The political philosophy of Muhammad Iqbal. Islam and nationalism in late colonial India, Cambridge University Press (2012), p. 14.

[11]  Dans Iqbal and the Pakistan Movement, www.allamaiqbal.com.

[12]  Ce mouvement, de caractère militariste rigide, a été fondé en 1931 par Allama Mashriqi (mathématicien et théoricien politique) qui se proposait de libérer l’Inde des Britanniques par le biais de la lutte armée et de la construction d’un Etat hindou/musulman.41DFPcBOIxL._SX327_BO1,204,203,200_.jpg 

[13]  Naoroji est aussi considéré comme le mentor de l’activiste politique et intellectuel Bal Ganghadar Tilak(déjà cité comme membre du triumvirat Lal-Bal-Pal et auteur d’un ouvrage célèbre La dimora artica nei Veda) et d’un homme politique indien très important, Gopal Krishna Gokhale, fondeteur de la « Société des Serviteurs de l’Inde ».  

[14]  Jinnah. Creator of Pakistan, Oxford University Press (1953), p. 140.

[15]  T. Kamran, Choudhry Rahmat Ali and his political imagination: Pak Plan and the continent of Dinia, contenuto in A. Usmani – M. Eaton Robb (a cura di), Muslims against the Muslim League, Cambridge University Press (2017), p. 92.

[16]  K. K. Aziz, Rahmat Ali: a biography, Steiner Verlag Wiesbaden (1987), p. 123. Rahmat Ali forgea le terme d’ « indianisme » pour définir une force qui avait dominé tout le sous-continent et s’était opposé aux efforts de ses peuples pour améliorer leur propre condition. Cette force était donc perçue comme « destructrice », comme quelque chose qui avait conduit à la servitude d’au moins la moitié de la population du sous-continent. Pour ce motif, Rahmat Ali s’opposait avec virulence à la création d’une « Fédération Indienne » sous l’égide du Congrès.

[17]  Hector Bolitho raconte, à ce propos, que Jinnah cultivait une admiration particulière pour l’expérience nationaliste, laïque et réformiste de Mustafa Kemal en Turquie, dont il critiquait toutefois les tendances libertines. Dans le même contexte, il est curieux de noter que  Muhammad Iqbal n’appréciait pas du tout le Père de la République turque.

[18]  Dans : M. A. Z. Qureshi, Decolonization and Nation-Building in Pakistan. Islam or Secularism?, IDSS Research Paper 2011.

[19]  Jinnah. Creator of Pakistan, ivi cit., p. 177.

[20]  S. Ross, Islam and the Ahmadiyya Jama’at. History, belief, practice, Columbia University Press (2003), p. 204.

[21]  L’un des préoccupations principales qui tourmentaient Jinnah au moment de la partition était l’absence d’une communication directe, soit d’un corridor terrestre, entre les deux parties du Pakistan.

[22]  Voir M. S. Khan, Jinnah’s two Nation theory, www.nation.com.pk.

Daniele Perra

Depuis 2017, Daniele Perra collabore activement avec "Eurasia. Journal of Geopolitical Studies" et le site informatique correspondant. Ses analyses portent principalement sur les relations entre la géopolitique, la philosophie et l'histoire des religions. Diplômé en sciences politiques et en relations internationales, il a obtenu en 2015 un master en études moyen-orientales de l'ASERI - Alta Scuola di Economia e Relazioni Internazionali de l'Università Cattolica del Sacro Cuore de Milan. En 2018, son essai Sulla necessità dell'impero come entità geopolitica unitaria per l'Eurasia a été inclus dans le vol. VI des "Quaderni della Sapienza" publiés par Irfan Edizioni. Il collabore assidûment avec plusieurs sites Internet italiens et étrangers et a accordé plusieurs interviews à la radio iranienne Radio Irib. Il est l'auteur du livre Être et Révolution. Ontologie heideggérienne et politique de la libération, préface de C. Mutti (NovaEuropa 2019).

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mardi, 09 septembre 2014

Inde : vers le grand conflit hindouistes/islamistes

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Inde : vers le grand conflit hindouistes/islamistes

Al Qaïda et le califat du sous-continent indien

Jean Bonnevey
Ex: http://metamag.fr

Revendiquant depuis près de 20 ans son autorité sur les jihadistes du monde entier, Al Qaïda est en perte de vitesse. Fragilisé par l’émergence de l’EI en Syrie et en Irak, le réseau fondé par Oussama ben Laden  tente de revenir en ouvrant un nouveau front.

Cette nouvelle branche est nommée en anglais « Qaedat al-Jihad in the Indian Subcontinent » (« Al-Qaïda en guerre sainte sur le sous-continent indien »). Elle est déjà active en Afghanistan et au Pakistan, sous l’autorité du Pakistanais Assim Oumar, un Pakistanais lui-même subordonné au mollah Omar, le chef des talibans afghans. La création d'«al-Qaida en guerre sainte sur le sous-continent indien» est le fruit de deux ans de travail, précise al-Zawahiri. Le chef du mouvement islamiste, déclare que la naissance d’Al-Qaïda en Inde est une bonne nouvelle pour les musulmans « de Birmanie, du Bangladesh, de l’Assam, du Gujarat, d’Ahmedabad et du Cachemire » afin de faire face à l’ «injustice » et à l’ »oppression ». Le chef de la nébuleuse islamiste entend mener le combat pour faire renaître un califat sur des terres considérées comme musulmanes par Ayman al-Zawahiri.

On sait peu de choses sur le chef de la nouvelle branche indienne d'al-Qaida. Assim Oumar lit assurément le pachto, la langue du peuple pachtoune, qui forme l'ossature du mouvement taliban. Mais il parle et écrit surtout en ourdou, langue nationale du Pakistan, qui se rapproche de l'hindi indien. Turban de charbon enroulé autour de la tête, barbe hirsute, Assim Oumar apparaît dans des vidéos de propagande diffusées notamment par al-Qaida. «Pourquoi les musulmans de l'Inde sont-ils totalement absents du jihad», s'interrogeait-il l'an dernier dans une vidéo en ourdou diffusée sur internet par Al-Qaida. Il appelait les jeunes musulmans indiens à faire preuve «d'honneur» et de «zèle» afin que l'Inde soit dirigée à nouveau par sa minorité musulmane et non sa majorité hindoue. «Ne forcez pas les infidèles à prononcer la profession de foi... C'est à eux de décider s'ils veulent devenir musulman ou continuer à pratiquer leur ancienne religion. Mais puisque cette planète est celle d'Allah, il est nécessaire d'y établir le système d'Allah», disait-il en ourdou. Ses allocutions sont truffées de références à l'empire moghol, musulman, qui a régné sur l'Inde du 16ème à la moitié du 19e siècle, et au califat ottoman. Il appelle ainsi à un «renouveau» islamique en Inde, au moment où les djihadistes prennent le contrôle des régions entières de l'Irak et de la Syrie.
 
Par cette déclaration, Al Qaïda remobilise ses forces, alors que l’Etat Islamique, qui a crée un califat avant elle, ne cesse de multiplier les actions et s’est sérieusement implanté en Irak, territoire de création d’Al Qaïda par Abou Moussab al Zarkaoui, tué par les forces américaines en 2006. Suite à la diffusion de la vidéo, les services de renseignement indiens ont demandé aux gouvernements provinciaux de plusieurs Etats de se placer en état d'alerte.

«Nous prenons le sujet très au sérieux. De telles menaces ne peuvent être ignorées», a déclaré à l’AFP une source des services de renseignement indiens. «Nous avons demandé aux Etats, en particulier au Gujarat, au Madhya Pradesh, à l’Uttar Pradesh et au Bihar, de se mettre en état d’alerte». Déjà actif en Afghanistan et au Pakistan, Al-Qaïda revendique depuis longtemps avoir autorité sur les jihadistes qui luttent pour rétablir un califat sur les terres considérées comme musulmanes.

«C’est un coup publicitaire qui montre un certain désespoir, car l’EI est désormais la vraie menace mondiale», estime Ajit Kumar Singh, du groupe de réflexion Institute of Conflict Management, dont le siège est à New Delhi. «C’est une bataille pour la suprématie entre Al-Qaïda et l’EI». Parmi les Etats cités dans la vidéo par Ayman al-Zawahiri, le Cachemire, seul Etat indien en majorité musulman, est depuis longtemps en proie à un mouvement séparatiste, mais les représentants de ce dernier soulignent que la nébuleuse jihadiste ne joue aucun rôle sur ce territoire.
 
 

mardi, 01 février 2011

2030: Moslims in Brussel en Antwerpen

mosqBXL.jpg

Ex:

http://www.npdata.be/BuG/139-aantal-moslims/

BuG 139 - Bericht uit het Gewisse 28-01-2011 Printversie (5 p)

In 2030 wonen 29,7% moslims in Brussel en 27,0% in Antwerpen
 

Aandeel Europese moslims constant op 2,7% de komende 20 jaar
  
Evolutie % moslims in de wereld: 19,9% in 1990, 23,4% in 2010, 26,4% in 2030.
Komende 20 jaar is er een afremming van hun beperkte groei op wereldvlak.
Forse daling geboorten per vrouw in moslimlanden en bij Belgische moslims.
Voor België voorspelt PEW groei moslims op 20 jaar tot 10.2% van bevolking.
De update van npdata voorziet in een groei van 5,8% in 2010 tot 9,3% in 2030.
Brussel zal nooit een moslimmeerderheid kennen: 22% in 2010, 29,7% in 2030.
Niet alleen daling geboorten, maar ook moslims sterven als ze oud worden.

Documentatie

Moslims in België per gemeente en nationaliteit: Moslims per gemeente 2010(excel)  Moslims per gemeente 2030 (excel) -  Langs de +-jes krijg je een groter detail per gemeente (rijen) en nationaliteiten (kolommen)

Beschrijving: http://www.npdata.be/BuG/139-aantal-moslims/moslims-2010-klein.jpg                 Beschrijving: http://www.npdata.be/BuG/139-aantal-moslims/moslims-2030-klein.jpg
Aantal moslims 2010                Aantal moslims 2030
%-ges op 2de blad                                               

Pewforum: Artikel aantal moslims 2030 met kaart en tabel  Rapport 2030 (11MB)  Gewogen wereldkaart moslims 2009  Artikel georganiseerdheid fundamentalisme  
Duits onderzoek 2008:  Site Bundesambt fur Migration und Fluchtlinge  Volledig Duits onderzoek (10MB) - Samenvatting in het Duits (6MB) - Samenvatting in het Engels (6MB)
Nederlands onderzoek 2006: Rapport Nederlands onderzoek (0,2MB)
Articles/Artikels Le Soir (pdf): 17-11-2010/1(onderzoek) 17-11-2010/2 (onderzoek) 18-11-2010 (forum krant) Ricardo Gutiérrez antwoordt op vragen 
 
  
Inleiding

De recente publicatie van het PEW-forum over het aantal moslims in de wereld en de berekening van hun aantal binnen 20 jaar, in 2030, rekening houdend met vruchtbaarheid, migratie en andere factoren , geeft stof tot nadenken en tot bijstellen van een aantal (voor)oordelen. Mediadoc titelt bv: "Islam nefast voor overbevolkingsspiraal; geloof in een buitenaards superwezen en lid zijn van een bepaalde godsdienst kan nefast zijn  voor planeet aarde". Vraag is maar of dit soort ideeën niet nefaster zijn voor de aarde en de mensen dan de Islam of het geloof in een god, zeker als men nalaat om het onderzoek zelf eens ter hand te nemen.

Beschrijving: http://www.npdata.be/BuG/139-aantal-moslims/MDII-graphics-webready-05.png

Het PEW forum on religion & public life maakt in ieder geval een oefening op een hoog niveau en daagt in feite alle demografen en wetenschappelijke godsdienstwatchers uit in universiteiten en studiediensten in dit land om eens met hun eigen materiaal te komen. Npdata speelt hierin maar als reserve, bij ontstentenis aan een alternatief, om toch een minimaal idee te geven van aantal moslims en evolutie van hun aantal in het kader van wat Mark Eyskens de 'allochtonisering van België' noemt, een voor hem onontkoombaar en waardevol gegeven in deze veranderende wereld. Best is toch evoluties in te schatten, de impact te voorzien en het potentieel te vatten. Zeker als de wetenschap er eerder op staat om anderen de mond te snoeren dan zelf kennis en visie te ontwikkelen, is deze BuG ook een uitnodiging tot debat. In deze BuG hernemen we de publicatie van het aantal moslims zoals door npdata in Le Soir van 17/11/2010 al is gepubliceerd samen met Ricardo Guiterez, (zie linken in de documentatie hierboven) en situeren we deze resultaten ook tegen de achtergrond van de PEW-studie.

Dubbel zo sterk groeien en toch maar beperkte groei van 3% op 20 jaar.

Moslimbevolking groeit dubbel zo sterk als niet-moslims” geeft de indruk dat zij dubbel zo veel kinderen krijgen of dat hun aandeel binnen de kortste keren verdubbelt, niets is minder waar. Als de niet-moslimvrouw gemiddeld 2,2 kinderen krijgt in haar levensloop en de moslimvrouw 2,4 dan is de aangroei van moslims als gevolg van geboorten dubbel zo hoog bij moslimvrouwen als bij niet-moslimvrouwen ook al is er hier maar een verschil van 0,2 geboorten op een levensloop, juist omdat de ‘aangroei’ van een bevolking maar gebeurt na het 2de kind. Zelfs met die dubbele groeisterkte zal het aandeel van moslims in de wereld op 20 jaar maar met 3% groeien, nl van 23,4% tot 26,4% in 2030. Zo blijft het aandeel van moslims in europa gedurende de komende twee decennia gelijk op 2,7% van alle moslims op wereldvlak. De moeite om de PEW-cfijers zelf eens te exploreren op hun site en er een demografisch bad te nemen met een gans assortiment begeleidende zeepjes en accessoires, zie PEW artikel aantal moslims 2030.
 
Welk is de referentie van de PEW-studie: 6,0% moslims in België in 2010

In de voorliggende PEW-studie wordt verwezen naar de update van de berekening van het aantal moslims in alle landen van de wereld met opgave van de bronnen per land. Voor België is dit de 'volkstelling van 2001, met projecties voor  2010, 2020 and 2030' uitgevoerd door het International Institute for Applied Systems Analysis. In de Pew-publicatie van 2009 werd nog het cijfer aangehaald van 281.000 moslims, of 2,6 %, hierbij voortgaande op de surveyonderzoeken van het Eyripean Social Survey, 2006, waarvan de opmakers (KUL) zelf aanhalen dat deze survey tekort schiet om het aantal moslims in te schatten. Bij de publicatie van het  PEW-rapport 2009 heeft npdata haar onderzoeksresultaten dan ook aan het PEW gesignaleerd: in BuG 100 worden 628.751 moslims of 6,0% van de Belgische bevolking geteld, en het is ditzelfde % waar het IASA ook op uitkomt en dat door het PEW-forum no voor 2010 wordt verrekend. Dat is een knap staaltje van het IASA, of moeten we zeggen van  npdata :-). Alleszins wordt hiermee een appèl gericht naar het centrum van demografie van de VUB en Pascal Deboosere die de gegevens van de volkstelling 2001 beheren, zij zullen allicht op de hoogte zijn van het werk van de IASA op basis van hun cijfers.

Update voor 2010 van de npdata-berekening aantal moslims in België

Zoals Nederland in 2006 en Duitsland in 2008, heeft npdata in 2010 een update gemaakt van haar berekening van aantal moslims in België. In Nederland werd in 2006 de vraag naar godsdienstbeleving eenmalig opgenomen in de huishoudenquête en dit bracht een bijstelling mee van aantal moslims naar onder. In de PEW studie wordt er naar verwezen met een aanpassing van  5,7% naar 5,5%. In Duitsland werd voor het eerst door het Bundesambt fur Migration und Fluchtlinge een enquête op grote schaal gehouden (6.000 eenheden) naar het aantal moslims in de diverse nationaliteitsgroepen/landen met moslimachtergrond. Tot dan toe gingen zij, zoals npdata, voort op de CIA-% percentages moslims in de landen van herkomst. Hierdoor werd in feite geen rekening gehouden met de 'laïcisering' van moslims, dwz het zich niet meer bekennen tot de islam wanneer daarnaar de vraag gesteld wordt. 
 
Laïciseringproces  van moslims in het westen

Voortgaande op het moslimpercentage in het gastland voor Marokko en Turkije komt de oude berekeningsmethode neer op 99% als men van Marokkaanse of turkse afkomst is. Als de vraag gesteld naar toebehoren tot een godsdienst zoals in Duitsland, geeft 88% van de Marokkaanse en Turkse vreemdelingen de islam op (een uitval van 12%) en 74% van de Duits geworden Marokkanen en Turken refereren naar de islam, of een vermindering met 14% tot 3/4 van de populatie. In feite is er, mede door het verblijf in een 'westers' land en doorheen de opvolging van generaties sprake van een 'laïcisering'. 82% van de Algerijnse en Tunesische vreemdelingen bekennen zich tot de islam, en 64% van de Duits geworden Algerijnen en Tunesiërs, Algerijnen en Tunesiërs behoren tot een oudere migratie dan turken en Marokkanen.

Vraag is of de resultaten van deze Duitse enquête kunnen toegepast worden op de Belgische situatie. Bij gebrek aan beter maar ook omdat de 'westerse' context in Duitsland, België of Nederland gelijklopend is, lijkt ons de overname van deze resultaten gerechtvaardigd. In het Forum van Le Soir wordt dat door Professor Jacobs betwist, evenwel zonder dat hij het Duitse onderzoek al geraadpleegd had. De resultaten uit de Nederlandse huishoudenquête Nederlandse huishoudenquete 2006 gaan trouwens in dezelfde zin. 

Gebruikte methode voor de berekening van aantal moslims in België
 
De berekening van aantal moslims in België naar gemeente en nationaliteit gaat voort op twee nieuwe beschikbare gegevens:
 
1. Berekening van het aantal inwoners van vreemde afkomst per gemeente en nationaliteit zoals uitgewerkt in BuG 125. . Hierin begrepen zijn de vreemdelingen, de Belg geworden vreemdeling en het natuurlijk- en migratiesaldo van deze Belg-geworden vreemdelingen na hun Belgwording. Om een zo accuraat mogelijk beeld te geven van de huidige situatie werden de bevolkingsgegevens van 2008 geëxtrapoleerd naar 2010, voortgaande op de gemiddelde evolutie tussen 2003 en 2008. Een opmerkelijke en merkwaardige opinie van Mark Eyskens, onze prof economie in 1969, zet deze 'allochtonisering van België', in het hart van z'n betoog.
2. Resultaten van de Duitse enquête met de vraag "tot welke goddienst behoor je", waarop een aantal godsdiensten genoemd werden. Door de identificatievariabelen kon het onderscheid gemaakt worden tussen  vreemdelingen en Duits-geworden vreemdelingen en nageslacht. Voor methodologie en uitwerking, zie link naar deze studie onder documentatie hierboven. De studie werd door de Duitse overheidsinstantie, bevoegd voor migratie en vluchtelingen, uitgevoerd, daar moet men in België nog niet aan denken. Voor enkele nationaliteiten (Nederland, Frankrijk, ...) geeft de Duitse enquête geen info. Hiervoor gebruiken we nog CIA-gegevens maar enkel voor de vreemdelingen. We gaan er van uit dat een Frans geworden Marokkaan bv die naar België verhuist niet meer de Belgische nationaliteit zal aanvragen. Ook voor de meeste Oost-Europese landen is het aantal moslims niet gekend en moeilijk in te schatten in een evolutie tot 2030. Het betreft hier echter kleine aantallen die slechts een geringe impact hebben op het totale beeld. 
 
Tabel met aantal moslims per gemeente en nationaliteit 01/01/2010
 
Door het % moslims toe te passen op het aantal inwoners van vreemde afkomst per nationaliteit in de verschillende gemeenten kan het beeld geschetst worden van aantal en % moslims in elke gemeente van België. Bijgaande tabel Aantal moslims 2010 naar gemeente en nationaliteit in België is ingeplooid zodat langs de +jes aan de zijkant (tot op het niveau gemeente, arrondissement, provincie, gewest) en vanboven (tot op het niveau van de nationaliteit) de informatie naar het gewenste detail kan open geplooid worden.

 Beschrijving: http://www.npdata.be/BuG/139-aantal-moslims/moslims-2010.jpg

  
Als het 2de plusje bovenaan links wordt aangeklikt komt het % van vreemde afkomst in beeld en het % moslims op het aantal van vreemde afkomst, dwz hoeveel van de inwoners van vreemde afkomst in een gemeente er moslims zijn Dit geeft dan een goed beeld van het aantal moslims binnen het aantal inwoners van vreemde afkomst in een gemeente.

In België worden dus 623.486 moslims berekend of 5,8% van de bevolking, en dat is een lichte aanpassing naar onder gezien de methodologische verfijning. Iedereen kan deze gegevens exploreren, er zijn gedachten of (voor)oordelen op bijstellen of er zijn verbeelding door laten aanspreken.

Wat zegt PEW-forum over 2030

Een toch wel indrukwekkende oefening legt het PEW-forum aan de lezers en geïnteresseerden voor. Voor België gaan zij bv uit van gemiddeld 2,7 kinderen bij de moslimvrouwen in de ganse levensloop, berekend in 2010. Dat aantal zou dalen tot 2,2 in 2030 tegenover 1,7 kinderen bij de niet-moslims zowel in 2010 als in 2030. In 2030 zou er dus (maar) een verschil zijn van 0,5 kind zijn tussen een moslim en niet-moslim vrouw in België. Dat betekent dus een langzame doch een alsmaar verminderende stijging van het aantal moslims langs het aantal geboorten. Het 'natuurlijk saldo' (geboorten - overlijdens) zal bij moslims evenwel hoger liggen omdat er in verhouding met oude Belgen en de oudere migratie de komende decennia minder overlijdens zijn. Maar tegen 2030 zullen naast het verminderend aantal geboorten, het aantal overlijdens stijgen en zal ook de laïcisering zich verder doorzetten. Het PEW-forum houdt ook rekening met de migratie die zij voor België inschatten op gemiddeld 14.000 moslims per jaar, hetgeen overeen zou komen met 30,8% van de immigratie.

Samen met nog enkele andere factoren die kunnen nageslagen worden in de excellente weergave op de PEW-site met het rapport, de grafische voorstelling en de tabel met alle 223 landen, komt het PEW-forum voor België uit op 1.194.000 moslims in België in 2030, of 10,2% van de bevolking, tegenover 638.000 of 6,0% van de bevolking in 2010 in hun berekening.

Wat zegt npdata over 2030.

De berekende cijfers van 2030 liggen al enkele maanden in de schuif van npdata. Een 'simpele' berekening, voortgaande op de cijfers van 2008 waarbij de gemiddelde bevolkingsevolutie tussen 2003 en 2008 all in (migratie, natuurlijk saldo, asiel, regularisatie) wordt doorgetrokken, zonder rekening te houden met een verdere 'laïcisering', geven de resultaten voor 2020 en 2030. Zo komt npdata, vertrekkende van 5,8% of  623.486 moslims in 2010, tot een vooruitzicht van 7,8% of 892.677 moslims in 2020 en 9,3% of 1.116.505 in 2030. In aantal liggen de npdata cijfers dus dicht bij de 1.194.000 van de PEW. De lagere 9,3% voor npdata tegenover 10,2% van de PEW in 2030 komt voort uit de hogere inschatting van de totale bevolkingsevolutie, waarin wij de algemene Belgische prognose volgen, hierdoor verhoogt de noemer en daalt het %.  In tegenstelling tot de PEW wordt de migratiedynamiek sterker maar ook meer gedifferentieerd verrekend door npdata, dus met een grotere instroom van niet-moslims. Dat komt allicht omdat de PEW voortgaat op de volkstelling van 2001 en npdata op de effectieve gemiddelde evolutie van 2003 tot 2008, de laatst gekende gegevens voor België.
 
Brussel zal nooit een 'moslimstad' worden (en dan nog).
 
De doorberekening naar 2030 is voor alle gemeenten en nationaliteiten in België beschikbaar. Daaruit blijkt dat in Brussel er in 2030 29,7% moslims zouden zijn, nog ver van een meerderheid waar nogal wat observatoren, Glenn Audenaert van de federale recherche in Brussel voorop, van uitgaan. Het was Glenn Audenaert die bij Phara op 4 juni 2010 uit de losse pols verklaarde dat "Binnen vijf tot acht jaren, afhankelijk van het onderzoek, er in Brussel een moslimmeerderheid zal zijn". Later gevraagd naar de onderzoeken waarop hij zich baseerde verwees Audenaert naar het onderzoek van npdata van enkele jaren geleden. We dragen deze BuG dan ook aan hem op.
 
Met de grootste wil van de wereld slagen wij er daarbij niet in een meerderheid van moslims in Brussel op langere termijn te berekenen, dus ook niet voor 2040, 2050 of later, we komen hoogstens uit op 35%. Ook moslims gaan dood als ze oud worden. Dat Brussel niet in meerderheid uit moslims zal bestaan is ook logisch te begrijpen. Momenteel is 71,6% van de bevolking in Brussel van vreemde afkomst en 22% van de bevolking is moslim. Om binnen de overblijvende 28,4% van niet-vreemde afkomst een demografische dynamiek te krijgen die volledig door moslims opgevuld wordt is uitgesloten zodat zij de 50% bereiken is uitgesloten. 
 
Antwerpen blijft met 32,1% 'Vlaams' verankerd in 2030, 27% van de bevolking is dan moslim

Ook voor Antwerpen is dat geen realistisch scenario: in 2010 was 42,8% in Antwerpen van vreemde afkomst en 16,8% moslim. In 2030 zou dit 67,9% inwoners van vreemde afkomst zijn in Antwerpen met 27% moslims. De eventuele toekomstig burgemeester van antwerpen, Bart de Wever hoeft dus niet te vrezen dat z'n stad, die toch nog voor 32,1% 'Vlaams' verankerd is in 2030, een moslimmeerderheid zal kennen.

Jan Hertogen, socioloog