vendredi, 30 avril 2010
Moi, l'interprète de Staline
Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1992
Moi, l'inteprète de Staline
Valentin M. BERESCHKOW, Ich war Stalins Dolmetscher. Hinter den Kulissen der politischen Weltbühne, Universitas, München, 1991, 517 S., DM 48, ISBN 3-8004-1228-4.
Parues dès 1949 sous le titre de Statist auf diplomatischer Bühne (Figurant sur la scène diplomatique), les mémoires de l'interprète de Hitler, le Dr. Paul Schmidt constituent un ouvrage de référence majeur sur l'histoire du IIIième Reich et de sa politique étrangère, un ouvrage qui défie les années. On ne peut en dire autant des mémoires que vient de publier l'interprète de Staline, Valentin M. Bereschkow (en graphie francisée: Berechkov). Celui-ci, né en 1916, est l'un des derniers survivants de l'entourage immédiat du dictateur soviétique. Les pages qu'il consacre à son enfance et à sa jeunesse, ses études et son service militaire dans l'armée rouge, sont pourtant très intéressantes et riches en informations de toutes sortes.
Par l'intermédiaire de ses supérieurs hiérarchiques à l'armée, Berechkov est entré de plein pied dans le saint des saints de la grande politique soviétique. Grâce à ses connaissances linguistiques de très grande qualité, il est rapidement devenu l'un des collaborateurs les plus proches de Staline. Ce qu'il nous raconte à propos du dictateur géorgien relève de la «perspective du valet de chambre». Berechkov s'efforce en effet de présenter Staline comme un homme aimable, bon compagnon de tous les jours, incapable de faire le moindre mal à une mouche en privé. Berechkov confesse qu'il n'en croyait pas ses oreilles quand le pouvoir soviétique se mit à dénoncer les crimes de Staline à partir de 1956. C'est bien ce qui distingue l'ouvrage de Berechkov des mémoires de Krouchtchev et de toutes les biographies conventionnelles de Staline...
Le livre de Berechkov nous révèle des anecdotes ou des secrets de première importance lorsqu'il aborde les tractations engagées par Staline avec Ribbentrop, Churchill ou Roosevelt. En fait, rien de tout cela n'est bien neuf mais est replacé sous un jour nouveau. Ce qui intéressera le lecteur en premier lieu sont évidemment les passages qui traitent du rapport entre Staline et l'Allemagne. Berechkov tient absolument à blanchir Staline; pour l'interprète, le dictateur soviétique ne savait rien des préparatifs allemands d'envahir l'URSS à l'été 1941. Staline refusait d'ajouter foi aux avertissements dans ce sens. Quand l'attaque s'est déclenchée, il en fut si choqué qu'il se retira du monde pendant dix jours, incapable de prendre les décisions politiques et militaires qui s'imposaient.
Berechkov défend donc Staline avec véhémence et insistance, ce qui est d'autant plus suspect que plus d'une analyse politique récente démontre que Staline avait en toute conscience adopté une «stratégie sur le long terme» (Ernst Topitsch), visant à faire basculer l'Union Soviétique dans la guerre. Berechkov cherche donc, selon toute vraisemblance, à dépeindre un Staline «sauveur de la Russie» dans la «grande guerre patriotique» quoique criminel sur le plan intérieur. Pour savoir ce qu'il en est exactement, il faudra attendre que soient enfin ouvertes au public les archives soviétiques. En attendant, les assertions de Berechkov doivent être accueillies avec circonspection.
Hans Cornelius.
(recension parue dans Junge Freiheit, März 1991).
00:05 Publié dans Histoire | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : histoire, russie, urss, union soviétique, staline, deuxième guerre mondiale, seconde guerre mondiale, histoire | | del.icio.us | | Digg | Facebook
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