Richard Millet, cet amoureux fou de la langue française, est devenu un écrivain maudit après la publication en 2012 de Langue fantôme, suivi d’Éloge littéraire d’Anders Breivik. Figure des éditions Gallimard, il fût contraint de démissionner du comité de lecture, tout en restant salarié. Son récent licenciement vient de le priver de salaire et de parachever la volonté de le tuer socialement.
Cela n’a pas réussi à tarir sa production littéraire, ni à le priver de son talent. D’autres éditeurs à l’esprit libre, Pierre-Guillaume de Roux, Fata Morgana, Léo Scheer, L’Orient des livres, Les Provinciales, publient ses dernières oeuvres. Province, roman sur le délitement de la société française, est la dernière en date.
Ce roman s’inscrit, comme le dit son titre, dans la veine provinciale de Richard Millet, mais aussi dans son obsession des femmes et de leur mystère. Son personnage principal, l’écrivain parisien Saint-Roch de son vrai nom Mambre, revient dans sa ville natale d’Uxeilles. De l’aveu même de Richard Millet, il s’est inspiré d’Ussel pour créer cette ville imaginaire, métaphore de la société française contemporaine.
Uxeilles se divise en trois parties, la ville haute plus riche et bourgeoise, la ville moyenne intermédiaire et la ville basse plus populaire. C’est par cette dernière qu’arrivent les turcs, image de l’immigration de remplacement, avant de progresser dans les autres quartiers. Sa population se partage entre les » Océaniques « , ouverts aux influences atlantiques, et, parce qu’ils font profession de s’opposer aux musulmans, les » Lépantistes « . Uxeilles représenterait un conservatoire moribond des traditions françaises.
C’est dans ce cadre que va se dérouler la nouvelle vie de Saint-Roch – Mambre. Elle nous sera contée à travers les yeux et témoignages d’un petit milieu local, intrigué par son retour, qui l’a plus ou moins connu avant son exil parisien. Est-il là pour « baiser le plus de femmes possible » selon un mot qui fait le tour de la ville? A t-il l’ambition d’écrire le roman local toujours attendu à la manière de Jouhandeau et de damer le pion aux gloires littéraires locales?
Les discussions de ces divers protagonistes permettent à Richard Millet de décrire la vie d’aujourd’hui, tel que les ravages de la société de consommation et de l’individualisme : « trois générations sacrifiées sur l’autel du bien-être européen et de la liberté personnelle, de l’égoïsme, du reniement de soi, de la consommation déculpabilisée des plaisirs. « . Par un groupe de jeunes, qui se baptisent les chevaliers, qui « voulaient perfectionner un nihilisme non comme un accomplissement du narcissisme mais comme une critique, par l’absurde, de la société contemporaine« , il montre l’impasse qu’affrontent les générations montantes.
En contrepoint, nous assistons aux multiples conquêtes féminines du revenant, qui finissent par phagocyter le récit.
Au final, Richard Millet nous offre un roman au style éblouissant, comme à son habitude. Mais cette Province, qu’on peut croire le refuge de la France profonde, n’incite pas à l’optimisme, pour l’avenir.
Louis Galibert
Province, Richard Millet, Éditions Léo Scheer, 336 pages, 19 euros (à commander en cliquant sur l’image ci-dessous) :








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Mais de ses contacts avérés avec le colonel von Stauffenberg, le porteur de la bombe qui devait tuer le Führer le 20 juillet 1944, la justice politique de la Libération n’en tiendra nul compte. Il ne sera pas plus porté à sa décharge l’intense activité de Rossé pour venir en aide à ses compatriotes alsaciens victimes de l’hitlérisme ou pour éditer clandestinement les auteurs chrétiens interdits dans l’Allemagne nazie.
Lucie est une jeune Parisienne, fille d’un père aux convictions païennes et d’une mère chrétienne d’origine ukrainienne. Spécialiste des parfums, elle doit se rendre dans un pays oriental (dont le nom ne sera, à dessein, jamais indiqué) pour mener une recherche dans le cadre de son sujet d’étude, à savoir « l’histoire des odeurs et la mémoire des peuples ». Le thème des parfums reviendra d’ailleurs comme un leitmotiv tout au long du film, qui aurait tout à fait pu être une œuvre tournée en odorama ! Les choses ne se passent toutefois pas comme prévu et, peu après son arrivée, la jeune fille, trompée par un chauffeur de taxi, est livrée à un groupe de djihadistes qui la prennent en otage pour obtenir de l’argent de la France. L’histoire nous est racontée tour à tour selon trois perspectives : celle de Lucie, celle de Younes (le chauffeur de taxi en proie à un dilemme moral et que les difficultés économiques contraignent à se faire le complice des islamistes) et celle d’Abou (un djihadiste d’origine française qui va peu à peu être assailli de doutes sur son engagement à mesure que la situation se dégrade).