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mardi, 03 novembre 2009

Triste mondialisation...

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Triste mondialisation...

Ex: http://unitepopulaire.org/

« En vingt ans, les pays de l'Est se sont mondialisés à la vitesse grand V. A peine le mur de Berlin était-il tombé que les enseignes du "monde libre" déboulaient en force pour y planter leur logo. […] Les mêmes chaînes de vêtements low-cost, les mêmes fast-foods, les mêmes centres commerciaux, reproduits à l'identique et à l'infini aux quatre coins de la planète. Les sorties dans les shopping centers sont d'ailleurs devenues un but d'excursion en soi. […]

Grâce à Ikea, les intérieurs du monde ont d'ailleurs de plus en plus tendance à tous se ressembler. Ne dit-on pas que, déjà, un Européen sur dix aurait été conçu sur un lit Ikea ? Pour ensuite vivre sa vie dans des salons et des chambres à coucher copies conformes des pages du catalogue.

Question gastronomie, voyager loin ne permet plus forcément de manger différemment et de découvrir des plats typiques. Tant il devient difficile d'échapper à la dictature des hamburgers et à leurs corollaires : les pizzas, les crêpes et les sandwiches, assortis de quelques nouilles sautées. Ces fleurons de la world food nous poursuivent jusqu'au bout du monde, sur les plages de Tunisie ou de Thaïlande, comme au pied des pyramides d'Egypte ou de la Grande Muraille de Chine.

Est-ce pour éviter tout dépaysement ? L'aéroport de Genève vient en tout cas d'inaugurer "un nouveau concept de restauration" (sic) qui, sous l'appellation Les Jardins de Genève, réunit la quintessence de la bouffe mondialisée – Burger King, Starbucks Coffee, Upper Crust... Mais à l'heure où même le Musée du Louvre à Paris va prochainement accueillir un McDonald's, il n'y a plus qu'à s'incliner. Et à se diriger dare-dare vers le premier M jaune venu, pour y commander tranquillement son McRösti. »

 

Catherine Morand, Le Matin Dimanche, 18 octobre 2009

mardi, 13 octobre 2009

La colonisation financière

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Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1997

LA COLONISATION FINANCIERE

 

Une nouvelle ère de colonisation a commencé avec l'éreintement de l'Europe. Aux colonies de peuplement s'ajoute la co­lonisation financière par le dollar, à nouveau sur le devant de la scène à l'approche de la décision européenne en faveur de l'Euro, et après les dernières fluctuations des monnaies asiatiques très liées à cette monnaie. Depuis 1945 la colonisation à la romaine avait repris une grande importance, avec des Américains installant des bases à statut spécial au sein des autres pays; mais avec la vassalité financière “la colonisation reprend des formes oubliées, celle des fiefs vénitiens ou des ma­hones génoises, celle peut-être des Phéniciens et des Carthaginois” (1).

 

Le fondement du pillage financier: créer la crédulité

 

De 1945 à l985 s'est déroulé une guerre de quarante ans, guerre froide, gagnée par ceux qui ont été capables d'en financer les coûts (2). Le système de Bretton-Woods jusqu'en 1971 en fut la première étape. La seconde, qui se termina en l980, fonctionna avec la planche à billet; la titrisation, l'emprunt, se développèrent à la troisième étape. La crise des paiements internationaux de 1973 à l990 se ramène donc à un processus respiratoire tout à fait spécifique aux financiers: le gonflement des croyances (des creances), suivi d'un dégonflement. De 1973 à 1982, les soviets de la finance ont fait naître de nouvelles créances: exporter vers les PVD (Pays en Voie de Développement) en leur accordant prêts et crédits. De 1980 à 1985, la politique monétaire américaine fit naître de nouvelles créances, le déficit budgétaire, dont la contrepartie était les exporta­tions vers les USA. Chaque fois, les stratégies gagnantes sont: détenir et faire naître de nouvelles créances puis racheter les occasions décotées lorsque la valeur de ces créances s effondre.

 

Depuis l990, la nouvelle stratégie des colonisateurs financiers est de transformer les opinions en réalité grâce aux nou­veaux instruments financiers créés sur les marchés à terme. Ces nouveaux instruments ont deux effets :

- Ils font advenir les phénomènes redoutés. Les ventes et achats pour se couvrir contre les fluctuations, les engendrent...

- Ils accroissent le rôle des spéculateurs. Ceux-ci se présentent comme crédibles, et trouvent en face d'eux des crédules.

 

La méthode n'est rien de plus qu'une extension des procédés de fabrication de l'histoire sainte au travers des miracles : le prédicateur se rend crédible pour faire des dupes. En affectant une valeur de vérité à ses inventions, il les transforme en réalités. A l'heure présente, le colonisateur financier observe que des regroupements régionaux sont à l'œuvre, qu'il lui faut empêcher ou “investir”. Les différentes variantes sont: délocalisation, fusion-acquisition, partenariats, transferts de technologie, cessions de brevets, licences. Dans le cas de l'Asie, le mécanisme de création de créances et la tentative de les racheter après dévaluation forcée est enclenché. Un exemple paradigmatique de la méthode du colonisateur est tiré d'un cas brésilien: une créance de 10 millions de $ est vendue 2,5 millions. Une entreprise l'achète et propose au Brésil de l'abandonner en échange de cruzeiros. L'entreprise peut ainsi acheter des entreprises brésiliennes...

 

Dans le cas de l'Europe, comment se présente la situation face au colonisateur?

 

L'Europe et les Etats-Unis, un conflit potentiel

 

Les faux-monnayeurs américains, en soumettant le monde au dollar, installent partout la dépendance matérielle et suppri­ment la liberté de penser. Et celui qui travaille simplement pour exécuter les ordres de maîtres étrangers ou de leurs sei­gneurs “raquedenare” locaux perd sa joie de travailler, ses forces créatrices, son élan, ses plus hautes aptitudes. Les dol­lars mis en circulation dans le monde ne deviendront de la fausse monnaie que lorsqu'un fournisseur soupçonneux la décla­rera fausse et ne reconnaitra pas qu'elle est un pouvoir d'achat. C'est en dénonçant la création ex nihilo  de dollars que cette devise deviendra de la fausse monnaie. Car c'est le degré d'acceptabilité ou de refus d'une monnaie qui permet de la quali­fier de vraie ou de fausse. Mais il existe une solidarité entre faux-monnayeurs et receleurs: on ne dénonce pas la monnaie que l'on détient soi-même sous peine de se ruiner. Que va-t-il se passer avec l'Euro?

 

Les USA, de fait, sont passés aux antipodes des intérêts de l'Europe et, sans le déclarer, sans fanfares, agissent pour em­pêcher son union. Les USA refusent l'équilibre des forces. Tous les équilibres ont été rompus à leur profit. Ils exercent une hégémonie sur l'économie (finance, commerce, services, ressources) et sur la stratégie mondiale. «La monnaie unique, loin d'être une innocente innovation, constituera, dès sa création, un casus belli  justifiant pour les USA, la plus grave des crises» (3). La quête de l'or et le pillage de la planète s'accompagnent d'un continuel besoin de justifier ces atrocités par des arguments tirés de la morale biblique. Pour les Al Capone américains, il est impératif d'associer le pillage du monde à une mission acceptable moralement. Déjà, en 1870, les USA avaient imposé aux Mexicains un régime de paiement financier qui réduisit l'économie de ce pays au statut de colonie... Par le biais de la seconde guerre mondiale, les soviets financiers américains ont conquis l'espace économique allemand et ont éliminé en prime la France et la Grande-Bretagne. Ils ont conquis le marché japonais et son espace économique. La fin de la guerre froide a cédé les zones d'influence soviétique. La guerre du Golfe, en 1990-91, leur a permis de prélever une dime supplémentaire sur l'Europe et, par l'usage infernal des superstitions de l'ancien testament, de faire financer à celle-ci leur mainmise sur le Moyen-Orient. En 1997, les USA sont les seuls maîtres de l'économie mondiale. Or le monde, vu de Washington, est un vaste marché où les frontières nationales sont considérées comme une “inconvenance”. Les congrégations de trafiquants pieux cherchent le monopole et la rente en liant le monde, pays par pays, aux USA, par un enchevêtrement d'accords et l'usage de leur mon­naie.

 

Les USA ne s'attaquent pas de front à l'Europe, mais cherchent à l'étouffer.

- Au plan militaire: l'OTAN vassalise l'Allemagne et la France. Récemment, l'Irak puis la Bosnie ont été deux occasions de mettre les Européens sous commandement US.

- Au plan commercial: les USA ne veulent pas céder l'accès à leur marché, alors que tous les pays doivent laisser ou­verts les leurs. Et la bataille est permanente sur les marchés internationaux. Une fois, les industries étrangères sont ex­clues du marché public US; une fois, il y a des sanctions fiscales sur les importations. Etc.

- Dans la technologie de pointe, le multimédiat, le monopole US a été acquis par une astucieuse utilisation des tech­niques d'inscription des brevets. Le brevet US est accepté partout dans le monde. Le brevet étranger doit être évalué aux USA.

 

Il est impossible de discuter avec les USA. Leurs exigences, leurs intérêts et leurs croyances deviennent des impératifs religieux, au nom de l'humanité et autres billevesées, qui doivent devenir la politique de tout un chacun. La monnaie unique est donc nécessaire et urgente car les mesures internes à l'Europe sont vaines: les eurosceptiques proposent de se rapprocher des USA et de dupliquer leur modèle. Ils sont tombés dans le piège du leadership US. Hier, certains politi­ciens prenaient leurs ordres à Moscou. Aujourd hui, ils obéissent à Washington... La monnaie unique ne sera pas seulement la monnaie de l'Union Européenne, mais aussi une deuxième monnaie internationale. Des producteurs de matières pre­mières pourront demander de signer des contrats en euros. Alors, l'investissement étranger aux USA en dollar, qui est de 500 à 800 milliards par an, cessera en grande partie. De plus, la vente internationale de dollars provoquera un excédent de liquidités.

 

La réaction des USA peut être de détruire l'Euro par une manœuvre politique interne à l'Europe; par exemple en déclen­chant une nouvelle guerre civile ou en faisant appel à la Russie dont la dette pourrait être épongée, si elle œuvrait contre l'Europe et en faveur des USA.

 

Le colonisateur financier brise les économies et détache l'homme de ses frères. Partout, désunion, solitude. Les soviets financiers américains sont des mangeurs d'âmes, froids comme la goule des cimetières. Longtemps en Europe, la plupart des banquiers se sont efforcés de maintenir la vie financière sur des voies conformes à l'esprit social et à l'honnêteté. Mais la guerre de 1914-1918, avec son lot de profiteurs, ses dettes, et les ententes entre soviets du prolétariat et soviets du capital a détruit cette civilisation sans la remplacer. Les Européens vont-ils continuer à se comporter comme une délégation d'Athènes vaincue face aux satrapes perses? Vont-ils se secouer au bord de l'abîme?

 

Frédéric VALENTIN.

 

Notes:

(1) René SEDILLOT, Histoire des colonisations, Fayard, 1958, p.638.

(2) Alain SIMON, Géopolitique et stratégies d'entreprise. Créances et Croyances, Interfaces, 1993.

(3) Emile COURY, L'Europe et les Etats-Unis, un conflit potentiel, Editions de l'aube, 1996, p.10. [115 pages, 95 FF].

 

lundi, 06 avril 2009

Le G20 et l'épouvantail protectionniste

Le G20 et l'épouvantail protectionniste

Ex: http://unitepopulaire.org

 

« La spirale de la crise se déploie progressivement. Partie d'une catégorie d'actifs financiers, elle s'est étendue à la finance en général, pour atteindre de plein fouet l'économie "réelle". Le ralentissement économique fragilise un nombre croissant d'entreprises, ce qui augmente le chômage et affaiblit les bilans bancaires. La spirale est en place. Le G20 se réunit avec l'ambition affichée de la désamorcer. A-t-il la vision nécessaire pour le faire ?

 

La situation n'est pas seulement compliquée, elle est aussi complexe. La longue liste des choses "à faire" figurant dans le communiqué de la réunion du G20 de novembre est significative. Elle démontre que le G20 manque de vision d'ensemble et d'un diagnostic partagé sur les priorités. Elle accable ce même G20, dont les responsables ont laissé s'accumuler, sans réagir, tant de problèmes pendant les trois dernières décennies d'euphorie économique. Depuis 2007, alors que les pertes accumulées de la valeur d'actifs financiers sont estimées à environ 50.000 milliards de dollars, les pays du G20 ont injecté des sommes colossales dans le soutien aux banques et les plans de relance : pas loin de l'équivalent de 10% du PIB mondial, sans résultat probant. Ces sommes ont été injectées dans l'espoir de "faire repartir"  l'économie mondiale sur le sentier qu'elle aurait quitté sans raison valable, en août 2007.

 

Seulement, si la crise n'était pas un incident mais un accident ; si, pour en sortir, il ne fallait pas "réparer" mais "remplacer", c'est-à-dire infléchir de manière profonde le fonctionnement à venir de l'économie mondiale ? […] Si le G20 entend lutter contre les tentations protectionnistes, il ne précise pas le sens qu'il donne à ces termes. Or, le protectionnisme désigne tout choix qui ne se ferait pas exclusivement sur les critères du rapport qualité-prix. Aujourd'hui, d'autres critères surgissent sans être pour autant ni protectionnistes, ni déraisonnables. Quand les acteurs réduisent le périmètre de leurs activités, ils cherchent à retrouver des circuits économiques plus courts, à diminuer le nombre d'intermédiaires, à ancrer leur activité dans des réseaux de solidarité où le visage humain a sa place. Ces changements de micro-attitudes annoncent probablement une certaine déglobalisation, sans pour autant qu'il s'agisse du protectionnisme au sens propre, mais d'un changement de logique économique. Comment préparer une déglobalisation ordonnée, qui ne débouche pas sur la panique protectionniste ? C'est là encore un des défis du G20.

 

Le G20 a opté pour la voie, politiquement plus prudente, d'une longue suite de microréglages. Ce choix rend peu probables pour le moment les grandes options, dont la planète a plus besoin que jamais. Prendre le risque d'un changement de perspective demanderait, de la part du G20, un courage politique dont sont capables les leaders qui ont conscience d'avoir un rendez-vous avec l'Histoire et non pas seulement avec les caméras de CNN. Alors, vers un rendez-vous raté de plus ? »

 

 

Paul Dembinski, directeur de l'Observatoire de la finance (Genève), La Tribune, 2 avril 2009

 

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vendredi, 06 mars 2009

El postneoliberalismo y sus bifurcaciones

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El postneoliberalismo y sus bifurcaciones

 

Ana Esther Ceceña
Observatorio Latinoamericano de Geopolítica

 

 

El neoliberalismo tocó fin definitivamente con la crisis estallada en 2008. No hay vuelta atrás. El mercado, por sí mismo, es autodestructivo. Necesita soportes y contenedores. La sociedad capitalista, arbitrada por el mercado, o bien se depreda, o bien se distiende. No tiene perspectivas de largo plazo.

Después de 30 años de neoliberalismo ocurrieron las dos cosas. La voracidad del mercado llevó a límites extremos la apropiación de la naturaleza y la desposesión de los seres humanos. Los territorios fueron desertificados y las poblaciones expulsadas. Los pueblos se levantaron y la catástrofe ecológica, con un altísimo grado de irreversibilidad, comenzó a manifestarse de manera violenta.

Los pueblos se rebelaron contra el avance del capitalismo bloqueando los caminos que lo llevaban a una mayor apropiación. Levantamientos armados cerraron el paso a las selvas; levantamientos civiles impiden la edificación de represas, la minería intensiva, la construcción de carreteras de uso pesado, la privatización de petróleo y gas y la monopolización del agua. El mercado, solo, no podía vencer a quienes ya estaban fuera de su alcance porque habían sido expulsados y desde ahí, desde el no-mercado, luchaban por la vida humana y natural, por los elementos esenciales, por otra relación con la naturaleza, por detener el saqueo.

El fin del neoliberalismo inicia cuando la medida de la desposesión toca la furia de los pueblos y los obliga a irrumpir en la escena.

Los cambios de fase

La sociedad capitalista contemporánea ha alcanzado un grado de complejidad que la vuelve altamente inestable. De la misma manera que ocurre con los sistemas biológicos (Prigogine, 2006), los sistemas sociales complejos tienen una capacidad infinita y en gran medida impredecible de reacción frente a los estímulos o cambios. El abigarramiento con el que se edificó esta sociedad, producto de la subsunción pero no eliminación de sociedades diferentes, con otras cosmovisiones, costumbres e historias, multiplica los comportamientos sociales y las percepciones y prácticas políticas a lo largo y ancho del mundo y abre con ello un espectro inmenso de sentidos de realidad y posibilidades de organización social.

La potencia cohesionadora del capitalismo ha permitido establecer diferentes momentos de lo que los físicos llaman equilibrio, en los que, a pesar de las profundas contradicciones de este sistema y del enorme abigarramiento que conlleva, disminuyen las tendencias disipadoras. No obstante, su duración es limitada. En el paso del equilibrio a la disipación aparecen constantemente las oportunidades de bifurcación que obligan al capitalismo a encontrar los elementos cohesionadores oportunos para construir un nuevo equilibrio o, en otras palabras, para restablecer las condiciones de valorización del capital. Pero siempre está presente el riesgo de ruptura, que apunta hacia posibles dislocamientos epistemológicos y sistémicos.

Los equilibrios internos del sistema, entendidos como patrones de acumulación en una terminología más económica, son modalidades de articulación social sustentadas en torno a un eje dinamizador u ordenador.

Un eje de racionalidad complejo que, de acuerdo con las circunstancias, adopta diferentes figuras: en la fase fordista era claramente la cadena de montaje para la producción en gran escala y el estado en su carácter de organizador social; en el neoliberalismo el mercado; y en el posneoliberalismo es simultáneamente el estado como disciplinador del territorio global, es decir, bajo el comando de su vertiente militar, y las empresas como medio de expresión directa del sistema de poder, subvirtiendo los límites del derecho liberal construido en etapas anteriores del capitalismo.

Los posneoliberalismos y las bifurcaciones

La incertidumbre acerca del futuro lleva a caracterizarlo más como negación de una etapa que está siendo rebasada. Si la modalidad capitalista que emana de la crisis de los años setenta, que significó una profunda transformación del modo de producir y de organizar la producción y el mercado, fue denominada por muchos estudiosos como posfordista; hoy ocurre lo mismo con el tránsito del neoliberalismo a algo diferente, que si bien ya se perfila, todavía deja un amplio margen a la imprevisión.

Posfordismo se enuncia desde la perspectiva de los cambios en el proceso de trabajo y en la modalidad de actuación social del estado; neoliberalismo desde la perspectiva del mercado y del relativo abandono de la función socializadora del estado. En cualquiera de los dos casos no tiene nombre propio, o es un pos, y en ese sentido un campo completamente indefinido, o es un neo, que delimita aunque sin mucha creatividad, que hoy están dando paso a otro pos, mucho más sofisticado, que reúne las dos cualidades: posneoliberalismo. Se trata de una categoría con poca vida propia en el sentido heurístico, aunque a la vez polisémica. Su virtud, quizá, es dejar abiertas todas las posibilidades de alternativa al neoliberalismo -desde el neofascismo hasta la bifurcación civilizatoria-, pero son inciertas e insuficientes su fuerza y cualidades explicativas.

En estas circunstancias, para avanzar en la precisión o modificación del concepto es indispensable detenerse en una caracterización de escenarios, entendiendo que el espectro de posibilidades incluye alternativas de reforzamiento del capitalismo -aunque sea un capitalismo con más dificultades de legitimidad-; de construcción de vías de salida del capitalismo a partir de las propias instituciones capitalistas; y de modos colectivos de concebir y llevar a la práctica organizaciones sociales nocapitalistas.

Trabajar todos los niveles de abstracción y de realidad en los que este término ocupa el espacio de una alternativa carente de apelativo propio, o el de alternativas diversas en situación de coexistencia sin hegemonismos, lo que impide que alguna otorgue un contenido específico al proceso superador del neoliberalismo.

El posneoliberalismo del capital

Aun antes del estallido de la crisis actual, ya eran evidentes los límites infranqueables a los que había llegado el neoliberalismo. La bonanza de los años dorados del libre mercado permitió expandir el capitalismo hasta alcanzar, en todos sentidos, la escala planetaria; garantizó enormes ganancias y el fortalecimiento de los grandes capitales, quitó casi todos los diques a la apropiación privada; flexibilizó, precarizó y abarató los mercados de trabajo; y colocó a la naturaleza en situación de indefensión. Pero después de su momento innovador, que impuso nuevos ritmos no sólo a la producción y las comunicaciones sino también a las luchas sociales, empezaron a aparecer sus límites de posibilidad.

Dentro de éstos, es importante destacar por lo menos tres, referidos a las contradicciones inmanentes a la producción capitalista y su expresión específica en este momento de su desarrollo y a las contradicciones correspondientes al proceso de apropiación y a las relaciones sociales que va construyendo:

1. El éxito del neoliberalismo en extender los márgenes de expropiación, lo llevó a corroer los consensos sociales construidos por el llamado estado del bienestar, pero también a acortar los mercados. La baja general en los salarios, o incluso en el costo de reproducción de la fuerza de trabajo en un sentido más amplio, fue expulsándola paulatinamente del consumo más sofisticado que había alcanzado durante el fordismo.

La respuesta capitalista consistió en reincorporar al mercado a esta población, cada vez más abundante, a través de la producción de bienes precarios en gran escala. No obstante, esta reincorporación no logra compensar ni de lejos el aumento en las capacidades de producción generadas con las tecnologías actuales, ni retribuir las ganancias esperadas. El grado de apropiación y concentración, el desarrollo tecnológico, la mundialización tanto de la producción como de la comercialización, es decir, el entramado de poder objetivado construido por el capital no se corresponde con las dimensiones y características de los entramados sociales. Es un poder que empieza a tener problemas serios de interlocución.

2. Estas enormes capacidades de transformación de la naturaleza en mercancía, en objeto útil para el capital, y la capacidad acumulada de gestión económica, fortalecida con los cambios de normas de uso del territorio y de concepción de las soberanías, llevaron a una carrera desatada por apropiarse todos los elementos orgánicos e inorgánicos del planeta. Conocer las selvas, doblegarlas, monopolizarlas, aislarlas, separarlas en sus componentes más simples y regresarlas al mundo convertidas en algún tipo de mercancía fue -es- uno de los caminos de afianzamiento de la supremacía económica; la ocupación de territorios para convertirlos en materia de valorización. Paradójicamente, el capitalismo de libre mercado promovió profundos cercamientos y amplias exclusiones. Pero con un peligro: Objetivar la vida es destruirla.

Con la introducción de tecnologías de secuenciación industrial, con el conocimiento detallado de genomas complejos con vistas a su manipulación, con los métodos de nanoexploración y transformación, con la manipulación climática y muchos otros de los desarrollos tecnológicos que se han conocido en los últimos 30 años, se traspasó el umbral de la mayor catástrofe ecológica registrada en el planeta. Esta lucha del capitalismo por dominar a la naturaleza e incluso intentar sustituirla artificialmente, ha terminado por eliminar ya un enorme número de especies, por provocar desequilibrios ecológicos y climáticos mayores y por poner a la propia humanidad, y con ella al capitalismo, en riesgo de extinción.

Pero quizá los límites más evidentes en este sentido se manifiestan en las crisis de escasez de los elementos fundamentales que sostienen el proceso productivo y de generación de valor como el petróleo; o de los que sostienen la producción de la vida, como el agua, en gran medida dilapidada por el mal uso al que ha sido sometida por el propio proceso capitalista. La paradoja, nuevamente, es que para evitar o compensar la escasez, se diseñan estrategias que refuerzan la catástrofe como la transformación de bosques en plantíos de soja o maíz transgénicos para producir biocombustibles, mucho menos rendidores y tan contaminantes y predatorios como el petróleo.

El capitalismo ha demostrado tener una especial habilidad para saltar obstáculos y encontrar nuevos caminos, sin embargo, los niveles de devastación alcanzados y la lógica con que avanza hacia el futuro permiten saber que las soluciones se dirigen hacia un callejón sin salida en el que incluso se van reduciendo las condiciones de valorización del capital.

3. Aunque el neoliberalismo ha sido caracterizado como momento de preponderancia del capital financiero, y eso llevó a hablar de un capitalismo desterritorializado, en verdad el neoliberalismo se caracterizó por una disputa encarnizada por la redefinición del uso y la posesión de los territorios, que ha llevado a redescubrir sociedades ocultas en los refugios de selvas, bosques, desiertos o glaciares que la modernidad no se había interesado en penetrar. La puesta en valor de estos territorios ha provocado una ofensiva de expulsión, desplazamiento o recolonización de estos pueblos, que, evidentemente, se han levantado en contra.

Esto, junto con las protestas y revueltas originadas por las políticas de ajuste estructural o de privatización de recursos, derechos y servicios promovidas por el neoliberalismo, ha marcado la escena política desde los años noventa del siglo pasado. Las condiciones de impunidad en que se generaron los primeros acuerdos de libre comercio, las primeras desregulaciones, los despojos de tierras y tantas otras medidas impulsadas desde la crisis y reorganización capitalista de los años setenta-ochenta, cambiaron a partir de los levantamientos de la década de los noventa en que se produce una inflexión de la dinámica social que empieza a detener las riendas sueltas del neoliberalismo.

No bastaba con darle todas las libertades al mercado. El mercado funge como disciplinador o cohesionador en tanto mantiene la capacidad desarticuladora y mientras las fuerzas sociales se reorganizan en correspondencia con las nuevas formas y contenidos del proceso de dominación. Tampoco podía ser una alternativa de largo plazo, en la medida que la voracidad del mercado lleva a destruir las condiciones de reproducción de la sociedad.

El propio sistema se vio obligado a trascender el neoliberalismo trasladando su eje ordenador desde la libertad individual (y la propiedad privada) promovida por el mercado hacia el control social y territorial, como medio de restablecer su posibilidad de futuro. La divisa ideológica del "libre mercado" fue sustituida por la "seguridad nacional" y una nueva fase capitalista empezó a abrirse paso con características como las siguientes:

1. Si el neoliberalismo coloca al mercado en situación de usar el planeta para los fines del mantenimiento de la hegemonía capitalista, en este caso comandada por Estados Unidos, en esta nueva fase, que se abre junto con la entrada del milenio, la misión queda a cargo de los mandos militares que emprenden un proceso de reordenamiento interno, organizativo y conceptual, y uno de reordenamiento planetario.

El cambio de situación del anteriormente llamado mundo socialista ya había exigido un cambio de visión geopolítica, que se corresponde con un nuevo diseño estratégico de penetración y control de los territorios, recursos y dinámicas sociales de la región centroasiática. El enorme peso de esta región para definir la supremacía económica interna del sistema impidió, desde el inicio, que ésta fuera dejada solamente en las manos de un mercado que, en las circunstancias confusas y desordenadas que siguieron al derrumbe de la Unión Soviética y del Muro de Berlín, podía hacer buenos negocios pero no condiciones de reordenar la región de acuerdo con los criterios de la hegemonía capitalista estadounidense. En esta región se empieza a perfilar lo que después se convertiría en política global: el comando militarizado del proceso de producción, reproducción y espacialización del capitalismo de los albores del siglo XXI.

2. Esta militarización atiende tanto a la potencial amenaza de otras coaliciones hegemónicas que dentro del capitalismo disputen el liderazgo estadounidense como al riesgo sistémico por cuestionamientos y construcción de alternativas de organización social no capitalistas. Sus propósitos son el mantenimiento de las jerarquías del poder, el aseguramiento de las condiciones que sustentan la hegemonía y la contrainsurgencia. Supone mantener una situación de guerra latente muy cercana a los estados de excepción y una persecución permanente de la disidencia.

Estos rasgos nos llevarían a pensar rápidamente en una vuelta del fascismo, si no fuera porque se combinan con otros que lo contradicen y que estarían indicando las pistas para su caracterización más allá de los "neos" y los "pos".

Las guerras, y la política militar en general, han dejado de ser un asunto público. No solamente porque muchas de las guerras contemporáneas se han enfocado hacia lo que se llama "estados fallidos", y en ese sentido no son entre "estados" sino de un estado contra la sociedad de otra nación, sino porque aunque sea un estado el que las emprende lo hace a través de una estructura externa que una vez contratada se rige por sus propias reglas y no responde a los criterios de la administración pública.

El outsourcing, que se ha vuelto recurrente en el capitalismo de nuestros días, tiene implicaciones muy profundas en el caso que nos ocupa. No se trata simplemente de privatizar una parte de las actividades del estado sino de romper el sentido mismo del estado. La cesión del ejercicio de la violencia de estado a particulares coloca la justicia en manos privadas y anula el estado de derecho. Ni siquiera es un estado de excepción. Se ha vaciado de autoridad y al romper el monopolio de la violencia la ha instalado en la sociedad.

En el fascismo había un estado fuerte capaz de organizar a la sociedad y de construir consensos. El estado centralizaba y disciplinaba. Hoy apelar al derecho y a las normas establecidas colectivamente ha empezado a ser un disparate y la instancia encargada de asegurar su cumplimiento las viola de cara a la sociedad. Ver, si no, los ejemplos de Guantánamo o de la ocupación de Irak.

Con la reciente crisis las instituciones capitalistas más importantes se han desfondado. El FMI y el Banco Mundial son repudiados hasta por sus constructores. Estamos entrando a un capitalismo sin derecho, a un capitalismo sin normas colectivas, a un capitalismo con un estado abiertamente faccioso. Al capitalismo mercenario.

El posneoliberalismo nacional alternativo

Otra vertiente de superación del neoliberalismo es la que protagonizan hoy varios estados latinoamericanos que se proclaman socialistas o en transición al socialismo y que han empezado a contravenir, e incluso revertir, la política neoliberal impuesta por el FMI y el Banco Mundial. Todas estas experiencias que iniciaron disputando electoralmente la presidencia, aunque distintas entre sí, comparten y construyen en colaboración algunos caminos para distanciarse de la ortodoxia dominante.

Bolivia, Ecuador y Venezuela, de diferentes maneras y con ritmos propios, impulsan políticas de recuperación de soberanía y de poder participativo, que se ha plasmado en las nuevas Constituciones elaboradas por sus sociedades.

La disputa con el FMI y el Banco Mundial ha determinado un alejamiento relativo de sus políticas y de las propias instituciones, al tiempo que se inicia la creación de una institucionalidad distinta, todavía muy incipiente, a través de instancias como el ALBA, el Banco del Sur, Petrocaribe y otras que, sin embargo, no marcan una pauta anticapitalista en sí mismas sino que apuntan, por el momento, a constituir un espacio de mayor independencia con respecto a la economía mundial, que haga propicia la construcción del socialismo. Considerando que, aun sin tener certeza de los resultados, se trata en estos casos por lo menos de un escenario posneoliberal diferente y confrontado con el que desarrollan las potencias dominantes, es conveniente destacar algunos de sus desafíos y paradojas.

1. Para avanzar en procesos de recuperación de soberanía, indispensable en términos de su relación con los grandes poderes mundiales --ya sea que vengan tras facetas estatales o empresariales--, y para emprender proyectos sociales de gran escala bajo una concepción socialista, requieren un fortalecimiento del estado y de su rectoría. Lo paradójico es que este estado es una institución creada por el propio capitalismo para asegurar la propiedad privada y el control social.

2. Los procesos de nacionalización emprendidos o los límites impuestos al capital transnacional, pasándolo de dueño a prestador de servicios, o a accionista minoritario, marca una diferencia sustancial en la capacidad para disponer de los recursos estratégicos de cada nación. La soberanía, en estos casos, es detentada y ejercida por el estado, pero eso todavía no transforma la concepción del modo de uso de estos recursos, al grado de que se estimulan proyectos de minería intensiva, aunque bajo otras normas de propiedad. Para un "cambio de modelo" esto no es suficiente, es un primer paso de continuidad incierta, si bien representa una reivindicación popular histórica.

3. El reforzamiento del interés nacional frente a los poderes globales o transnacionales va acompañado de una centralización estatal que no resulta fácilmente compatible con la plurinacionalidad postulada por las naciones o pueblos originarios, ni con la idea de una democracia participativa que acerque las instancias de deliberación y resolución a los niveles comunitarios.

4. Las Constituyentes han esbozado las líneas de construcción de una nueva sociedad. En Bolivia y Ecuador se propone cambiar los objetivos del "desarrollo" por los del "buen vivir", marcando una diferencia fundamental entre la carrera hacia delante del desarrollo con la marcha horizontal e incluso circular del buen vivir, que llamaría a recordar la metáfora zapatista de caminar al paso del más lento. La dislocación epistemológica que implica trasladarse al terreno del buen vivir coloca el proceso ya en el camino de una bifurcación societal y, por tanto, la discusión ya no es neoliberalismo o posneoliberalismo sino eso otro que ya no es capitalista y que recoge las experiencias milenarias de los pueblos pero también la crítica radical al capitalismo. Los apelativos son variados: socialismo comunitario, socialismo del siglo XXI, socialismo en el siglo XXI, o ni siquiera socialismo, sólo buen vivir, autonomía comunitaria u horizontes emancipatorios.

Ahora bien, la construcción de ese otro, que genéricamente podemos llamar el buen vivir, tiene que salirse del capitalismo pero a la vez tiene que transformar al capitalismo, con el riesgo, siempre presente, de quedar atrapado en el intento porque, entre otras razones, esta búsqueda se emprende desde la institucionalidad del estado (todavía capitalista), con toda la carga histórica y política que conlleva.

El posneoliberalismo de los pueblos

Otro proceso de salida del neoliberalismo es el que han emprendido los pueblos que no se han inclinado por la lucha electoral, fundamentalmente porque han decidido de entrada distanciarse de la institucionalidad dominante. En este proceso, con variantes, se han involucrado muchos de los pueblos indios de América, aunque no sólo, y su rechazo a la institucionalidad se sustenta en la combinación de las bifurcaciones con respecto a la dominación colonial que hablan de rebeliones larvadas a lo largo de más de 500 años, con las correspondientes a la dominación capitalista. Las naciones constituidas en el momento de la independencia de España y Portugal en realidad reprodujeron las relaciones de colonialidad interna y por ello no son reconocidas como espacios recuperables.

La resistencia y las rebeliones se levantan a veces admitiendo la nación, más no el estado, como espacio transitorio de resistencia, y a veces saltando esta instancia para lanzarse a una lucha anticapitalista-anticolonial y por la construcción-reconstrucción de formas de organización social simplemente distintas.

Desde esta perspectiva el proceso se realiza en los espacios comunitarios, transformando las redes cotidianas y creando condiciones de autodeterminación y autosustentación, siempre pensadas de manera abierta, en interlocución y en intercambio solidario con otras experiencias similares.

Recuperar y recrear formas de vida propias, humanas, de respeto con todos los otros seres vivos y con el entorno, con una politicidad libre y sin hegemonismos. Democracias descentradas. Este es el otro camino de salida del neoliberalismo, que sería muy empobrecedor llamar posneoliberalismo porque, incluso, es difícil de ubicar dentro del mismo campo semántico. Y todos sabemos que la semántica es también política y que también ahí es preciso subvertir los sentidos para que correspondan a los nuevos aires emancipatorios.

Lo que viene después del neoliberalismo es un abanico abierto con múltiples posibilidades. No estrechemos el horizonte cercándolo con términos que reducen su complejidad y empequeñecen sus capacidades creativas y emancipatorias. El mundo está lleno de muchos mundos con infinitas rutas de bifurcación. A los pueblos en lucha toca ir marcando los caminos.

Bibliografía

Acosta, Alberto 2008 "La compleja tarea de construir democráticamente una sociedad democrática" en Tendencia N° 8 (Quito).

Prigogine, Ilya 2006 (1988) El nacimiento del tiempo (Argentina: Tusquets).

Constitución de la República del Ecuador 2008.

Asamblea Constituyente de Bolivia 2007 Nueva Constitución Política del Estado (documento oficial)

jeudi, 05 mars 2009

Intervention de F. Ranson au Colloque identitaire (28-02-09)

Frédéric RANSON:

Intervention au colloque identitaire du 28 février 2009

Sint-Pieters-Leeuw (Brabant)

Il m’incombe aujourd’hui de vous présenter le manifeste du néo-solidarisme. En fonction du sujet d’aujourd’hui, j’en voudrais retenir deux idées en particulier, à méditer par le public. D’abord, je voudrais féliciter les organisateurs et les autres participants pour leur contribution à un genre de débat qu’on ne connaît plus ailleurs en Flandre, malgré des conditions plus favorables qu’en Belgique francophone. Des identitaires s’occupent aujourd’hui des questions sociales et c’est déjà une bonne description pour les néo-solidaristes.

 

En bref, la crise que nous vivons est celle de plus de trente ans de néolibéralisme anglo-saxon. L’architecture financière mondiale de l’après-guerre a toujours été conçue, par les Etats-Unis et leur haute finance, de telle manière que les profits soient pour eux-mêmes et les charges pour le reste du monde. Depuis les années septante, le néolibéralisme sert de nouvel instrument pour assurer leurs intérêts financiers. L’ouverture des marchés financiers a permis  de prolonger l’hégémonie du dollar. Ensuite, suivaient le Royaume-Uni et plus tard l’Union européenne. La première conséquence était que les « capitaux sociaux » des Etats européens, accumulés depuis des décennies, étaient alors transférés à un marché financier mondialisé. La deuxième conséquence était l’invention des produits dérivés, contrepartie pour les risques sur un marché dérégulé. L’ampleur de la crise actuelle est un indice du degré d’américanisation et de mondialisation.

 

Il faut se rendre compte de quelle manière, non pas seulement les conditions économiques ou financières, mais par là aussi les conditions politiques ont changé. Oui, ils sont encore là, les parlementaires, mais ils sont presque dégradés jusqu’au niveau de conseiller communal dans le « village global ». Le cadre national, base de notre modèle social et du consensus entre travail et capital, est en voie de disparition, sapé par le néolibéralisme et le libre-échangisme. L’embourgeoisement des droites et des gauches les a rendu totalement incapables à proposer des alternatives. Face à leur incapacité et face aux nouvelles conditions, de nouvelles réponses s’imposent. La crise actuelle est une rupture. Ou bien on voit dans cette crise une nouvelle phase de concentration et de mondialisation. Ou bien on y voit une occasion d’organiser une colère légitime et de proposer des alternatives.

 

La première idée que je veux retenir de notre manifeste est donc celle de la renationalisation de l’Etat et de l’économie, tant l’économie monétaire que l’économie réelle, de Fortis à Opel. Dans les conditions actuelles, où vous étés trompés par des propositions européanistes et altermondialistes qui se relaient, où la pensée unique prône un « socialisme des banquiers » et ainsi de suite, cette revendication est déjà un acte révolutionnaire. La deuxième idée à retenir est celle de la souveraineté monétaire, qui implique une redéfinition des notions habituelles sur l’argent. J’y reviens en brève réponse à monsieur Robert. La synthèse idéale de ces deux idées serait la correspondance entre l’économie réelle et l’économie monétaire. Donc : plus de bulles, plus d’inflation, plus de déflation, mais « euflation » (notion d’Antonio Miclavez). Hélas, nos banques centrales semi-publiques n’ont pas ce but. Elles agissent dans l’intérêt des banquiers et pas dans l’intérêt des peuples. Les mêmes critiques, dans la tradition populiste, à la Réserve fédérale américaine peuvent s’appliquer à la Banque centrale européenne. Les premières banques à nationaliser seront donc les banques centrales elles-mêmes !

 

Monsieur Robert vient d’attribuer le « miracle économique » de l’Allemagne nationale-socialiste à son ministre de l’économie Schacht et sa « politique très éloignée du programme en 25 points ». D’autres l’attribueront à Keynes. Eh bien, quel était le secret de ce miracle ? Les travaux publics et le réarmement allemands étaient payés par des « bons Öffa » et des « bons MeFo », donc de l’argent alternatif ou supplémentaire, sans accroître la dette publique, c’est à dire basé sur la notion de souveraineté monétaire. Ces bons étaient au moins une idée hybride, parce que ils étaient effectivement déjà proposée dans le Programme en 25 Points sous le nom de « Staatskassengutscheine » (bons du Trésor publique). Evidemment, les idées de son auteur, Gottfried Feder, allaient encore plus loin. Ses idées étaient très proches des principes antiques et scholastiques, aujourd’hui encore présents dans le financement islamique. Schacht, profondément banquier, a enfin même refusé l’émission ultérieure de cet argent sans dette, ainsi qu’un autre célèbre banquier, Necker, plus d’un siècle avant lui, avait refusé l’émission des assignats. L’argent alternatif est-il une utopie aujourd’hui ? Non ! Qui ne connaît pas les chèques de repas ou les chèques de service, qui sont simplement des formes de salaire alternatif ?

 

Peut-être ces quelques propositions semblent encore précoces ou futuristes, mais nous sommes surs que la situation aggravante les rendra de plus en plus acceptées. L’importance est de ne surtout pas rater ce rendez-vous avec le 21ième siècle, ou de subir le renforcement du système par une « gouvernance mondiale » accrue et répandue par la pensée unique. Je vous remercie pour votre attention.

samedi, 28 février 2009

Mondialisme et Nouvel Ordre Mondial

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Mondialisme et Nouvel Ordre Mondial

 

Voici un siècle, l’empire Victorien, le plus vaste empire de l’Histoire, dominait déjà le monde. Par leurs alliances avec les familles de l’élite wasp (White, Anglo-saxon, Pro­tes­tant), les élites dirigeantes britanniques de cet em­pi­re favorisèrent l’émergence des Etats-Unis sur la scène mon­diale, entrés délibérément en guerre en 1898 contre l’Es­pagne après l’explosion (très suspecte) du cuirassé amé­ricain Maine dans le port de La Havane. Alors déjà, les di­ri­geants des Etats-Unis camouflaient leur cynique soif d’hé­gé­monie et leurs brutales ambitions impériales derrière un discours qui instrumentalisait en les magnifiant, la Démo­cratie, la Liberté et le Droit, comme les principes humani­taires, ainsi que le rappelle Henry Kissinger dans son der­nier ouvrage intitulé Diplomatie.

 

Début du nouvel empire mondial: la création de la banque centrale en 1913

 

Ce sont ces mêmes élites anglo-saxonnes qui, après avoir or­ganisé la panique monétaire de 1907 aux Etats-Unis (com­me le révèle le pris Nobel Milton Friedman), jetèrent les ba­­ses de leur nouvel empire mondial en imposant à l’o­pi­nion publique en 1913 la création de la banque cen­trale des Etats-Unis, le Federal Reserve System, dont elles con­servent toujours depuis lors le contrôle étroit.

 

Elles créèrent en outre à cette même époque, sur les mo­dèles de la Round Table et de la Fabian Society de l’empire Victorien, de nombreuses organisations, réunissant discrè­te­ment les personnes des milieux financiers, politiques, médiatiques, industriels, syndicaux, intellectuels et univer­sitaires, les plus puissantes de la planète : elles fondèrent ainsi entr’autres, sous la houlette du ²colonel² Edward Mandel House, mentor du Président Woodrow Wilson, le Council of Foreign Relations (CFR) à New-York, et le Royal Institut of International Affairs (Chattam House) à Lon­dres, qui essaimèrent par la suite en d’autres organisations similaires dans bien d’autres pays.

 

A l’issue du premier conflit mondial, c’est encore la ²di­plo­matie² des Etats-Unis qui imposa largement aux Etats euro­péens les nouveaux découpages des empires centraux vain­cus, abrités derrière les fameux ²quatorze points², attri­bués, pour les innombrables naïfs, au Président W. Wilson. Un quart de siècle plus tard, le CFR et le RIIAA ont pu à nou­veau exercer leurs influences lors du partage de l’Eu­ro­pe et du monde qui a prévalu lors des conférences de Yalta et de Postdam, après l’écrasement des puissances de l’Axe. Les ouvrages du professeur américain Caroll Quigley (cf. par exemple Tragedy and Hope ou The Anglo-American Establishment) auquel le Président Bill Clinton a rendu pu­bli­quement hommage lors de son allocution d’investiture, font désormais autorité sur le sujet.

 

Bien que toujours inconnu du grand public, le CFR de New-York, associé à son homologue britannique, le RIIA de Lon­dres, continue de gérer depuis les premières décennies du siècle le destin et la vie politique des Etats-Unis, et pré­tend à présent régenter le monde entier en imposant son Nouvel Ordre Mondial, conforme aux conceptions, et sur­tout aux intérêts et à la soif de puissance de leurs chefs. Ces organisations ont du reste, depuis une trentaine d’an­nées, essaimé en de multiples cercles ²externes² transna­tionaux, dont certains, tels le Groupe Bilderberg (en 1954), la Commission Trilatérale (en 1973) ou le Forum de Davos (en 1978), commencent désormais à être connues du grand public, les médias n’acceptant que maintenant seulement, d’en parler peu à peu à l’occasion.

 

Dans son allocution inaugurale à la session de juin 1991 du Bilderberg Group, en effet,  M. David Rockefeller, prési­dent de la Chase Manhattan Bank, fils du grand John Da­vison Rockefeller, l’un des fondateurs du CFR, que lui, son fils, préside aujourd’hui, lui-même fondateur et actuel pré­sident de la Commission Trilatérale,  n’accueillait-il pas ain­si à Baden-Baden les personnalités venues du monde en­tier participer aux travaux : “Nous remercions le Washing­ton Post, le New-York Times, Time Magazine et les autres gran­des publications dont les directeurs ont assisté à nos réu­nions et respecté leurs promesses de discrétion pen­dant au moins quarante ans… Il eut été impossible pour nous de développer notre place mondiale si nous avions été l’objet d’une publicité quelconque pendant ces an­nées-là. Mais le monde est aujourd’hui vraiment plus so­phi­stiqué et préparé à marcher vers un gouvernement mon­dial. La souveraineté supranationale d’une élite intel­lec­tuelle et des banquiers mondiaux est certainement pré­fé­rable aux décisions nationales qui se pratiquent depuis des siècles… ”

 

Des champions du malthusianisme

 

Soulignons en passant que les Rockefeller, père et fils, se sont par ailleurs, depuis au moins les années 1930, consti­tués les champions du malthusianisme mondial, et de la lut­te contre la fécondité humaine. A la suite des recher­ches qu’ils ont financées avec persévérance, ce sont leurs firmes qui possèdent aujourd’hui les premiers brevets des pi­lules contraceptives à œstrogènes, ainsi que ceux des pre­­miers stérilets abortifs. Leurs immenses richesses et les multiples fondations privées exemptées d’impôts, dont le Po­pulation Council, qu’ils ont créées aux Etats Unis, leur ont en outre permis d’exercer depuis les années 1950 dans ce domaine, un véritable magistère sur les organisations in­ternationales, en particulier sur le système des Nations U­nies. Cette influence prend aujourd’hui tout son sens en Europe, dont les peuples sous-féconds sont désormais lar­gement engagés depuis 25 ans dans un processus cu­mu­latif mortel d’implosion démographique qui renverse leurs pyramides des âges.

 

Tous ces groupes, dont les dirigeants aujourd’hui détermi­nent déjà largement de facto les affaires mondiales, ten­tent d’unir leurs efforts pour imposer maintenant à tous les peuples du monde l’émergence et la construction de jure d’un gouvernement mondial qui se substitue aux nations, et spécialement aux états nations historiques, appelés à être dissous, qui subsistent encore. Et les textes des traités eu­ropéens récents imposés aux opinions publiques euro­péen­nes, tels l’Acte Unique (1986), le traité de Maastricht (1992) et celui d’Amsterdam (1998), prennent alors tout leur sens sous cet éclairage, en constituant l’étape décisive de la quête de cet objectif : Un gouvernement mondial de­vant très vite disposer d’une monnaie mondiale (l’euro, dé­jà presque à parité avec le dollar, étant appelé à fusion­ner avant dix ans dans une monnaie unique transatlan­ti­que), et d’une police mondiale dévolue à l’OTAN, bras ar­mé des maîtres mondialistes, qui s’essaie aujourd’hui à son nouveau rôle en détruisant la Serbie, alliée traditionnelle de la France, pour imposer par la force et la terreur le Nou­vel Ordre Mondial des Rockefeller and Co. aux peuples ré­calcitrants.

 

Même si les opinions publiques en sont toujours tenues dans l’ignorance, cet état de chose des affaires du monde n’est plus, bien sûr, au-delà des cercles des initiés, totalement inconnu d’un public averti. Ainsi Le Figaro a-t-il fait écho ré­cemment dans sa page Opinions à des positions qui fai­saient des allusions précises sur ce sujet : le 30 mars 1999, l’historien Dominique Venner y publiait un court article sur la guerre à la Serbie sous le titre éloquent : “ Qui com­man­de le monde ? ” ; mais surtout le 18 janvier 1999, dans un ar­ticle intitulé “°Vers une Europe américaine, Amsterdam est l’aboutissement d’une politique hégémonique destinée à faire disparaître les nations européennes°”, l’ancien Am­bassadeur de France Albert Chambon, révélait le dessous des cartes du traité d’Amsterdam en impliquant directe­ment l’action du CFR et de la Trilatérale.

 

Il est particulièrement révélateur d’observer que, en ré­pon­se à l’article de M. l’Ambassadeur Albert Chambon qui brisait ainsi l’Omerta en révélant dans la grande presse à l’opinion française le rôle moteur du CFR et de la Trila­té­rale dans l’élaboration du traité d’Amsterdam, ce fut le po­lono-américain, Zbigniew Brzezinski, conseiller de M. Da­vid Rockefeller et de plusieurs Présidents des Etats-Unis, qui s’est senti tenu de publier dans les mêmes colonnes du Figaro, le 26 janvier 1999, un article intitulé : “ Défense de la Trilatérale. Il n’y a aucun ²complot² ”. Or c’est ce mê­me personnage qui, quelques mois plus tard, à la une du jour­nal Le Monde du samedi 17 avril 1999, sous le titre “ Guer­re totale contre Milosevic ! ” (expression employée pour la première fois par Joseph Goebbels), rapportait avec arrogance les dernières consignes des vrais dirigeants, en rap­pelant le Président de la République française, Jacques Chirac, et son Premier Ministre, Lionel Jospin, ainsi que les di­rigeants français, à la fidélité à leurs obligations, après près d’un mois de bombardements aériens de l’OTAN sur la Serbie.

 

Les drames, les atrocités et les crimes de guerre en tous genres qui ont accompagné la dislocation de l’ex-Yougo­slavie depuis 1991, en Bosnie serbo-musulmane, en Kraïna et Slavonie serbo-croates d’abord, et qui sévissent aujour­d’hui au Kosovo albano-serbe, masquent utilement aux o­pinions publiques des “ grandes démocraties ” occiden­ta­les les véritables enjeux géopolitiques de ces événe­ments, enjeux qui visent en réalité l’avenir de l’indé­pen­dance et de la liberté en Europe face aux diktats des di­rigeants mondialistes américains et à leurs appétits de puis­sance.

 

L'avertissement d'Attali à la France

 

Depuis deux ans déjà pourtant, nous en étions, nous Fran­çais, solennellement avertis : alors que M. Felix Ro­ha­tyn, l’un des dirigeants du Groupe Lazard Brothers de New-York, et l’un des gestionnaires de fonds les plus puis­sants sur le Stock Exchange de New-York, acceptait de s’é­loigner de ses bureaux de Manhattan pour remplacer l’Am­bassadeur des Etats-Unis à Paris, Mme Pamela Harriman, qui venait tout juste de décéder subitement, M. Jacques At­tali, lui-même très proche du groupe Lazard et de M. Fe­lix Rohatyn, ancien conseiller (et sherpa) du Président fran­çais, François Mitterrand, aujourd’hui dirigeant d’un ca­binet de conseil international financé par le groupe La­zard, venait de signer un article fracassant dans le journal Le Monde du 4 mars 1997 sous le titre “ Géopolitique de l’immigration ”. Lui aussi, avec arrogance, fidèle écho des volontés des ²cénacles² supérieurs, mettait ainsi sévère­ment en garde les responsables français : “ Si la France et l’Europe décidaient de s’affirmer comme un club chré­tien, elles devraient se préparer à l’affrontement avec un milliard d’hommes, à une véritable ²guerre de civili­sations². Avec, en prime, en France, une guerre civile. Car la France, en raison de ses choix géopolitiques anté­rieurs, est une nation musulmane : l’Islam est la religion de plus de deux millions de citoyens français et du tiers des immigrés sur son sol. ”. M. Attali tenait soigneusement ce­pendant le lecteur de son article du Monde dans l’igno­rance de la contribution essentielle qu’il venait d’apporter, sous le titre “ For a New Political Order ”, au numéro spé­cial winter 1996 que la revue américaine Time Magazine ve­nait de consacrer quelques mois auparavant à l’Europe et à son avenir. Il y exposait, avec condescendance, les vues mondiales et mégalomanes pour les 50 prochaines années des vrais dirigeants des affaires du monde, son article, paru ensuite dans Le Monde à l’usage des seuls lecteurs français, apparaissant dès lors n’être plus qu’une simple application localisée et provinciale de l’exposé général du grand des­sein et du grand œuvre des nouveaux maîtres du monde. Parmi ces aperçus admirables et impératifs, on relèvera sous la plume de M. Attali la stricte obligation américaine faite aux Etats membres de l’Union Européenne d’inté­grer dans un avenir très proche la Turquie, alliée stra­tégique des Etats-Unis, comme membre à part entière de l’Union, obligation dont, du reste, le Président de la Ré­publique, M. Jacques Chirac, qui s’en était, depuis quel­ques années déjà, constitué le champion, apparaît au­jourd’hui le premier et le plus zélé porte-parole en Europe.

Comme l’expose du reste sans détour, avec un cynisme in­génu, M. Zbigniew Brzezinski, en page 68 de son livre, pu­blié en France en 1997 sous le titre : “ Le grand échiquier : l’Amérique et le reste du monde ”, livre que tous les cito­yens des pays européens se devraient d’avoir lu méticu­leu­sement et de méditer, quand il identifie les conditions du maintien pour le prochain demi-siècle de l’hégémonie mon­diale à laquelle les Etats-Unis sont aujourd’hui parvenus : “ Cette approche géopolitique n’a de sens qu’autant qu’e­lle sert les intérêts de l’Amérique, c’est-à-dire, à court terme, le maintien de son statut de superpuis­san­ce planétaire et, à long terme, l’évolution vers une co­opéra­tion mondiale institutionnalisée[1]…(..)…Les trois grands impératifs géostratégiques se résumeraient ainsi : éviter les collusions entre vassaux et les maintenir dans l’état de dépendance que justifie leur sécurité ; cultiver la docilité des sujets protégés ; empêcher les barbares de former des alliances offensives. ”. On peut mesurer à quel point les sacro-saints principes de Démocratie, des Droits de l’Homme et autres Droits des peuples à disposer d’eux-mêmes, ainsi que les fondements solennels de la Charte des Nations Unies sont ici oubliés, voire niés, car devenus alors par trop inopportuns.

 

Couper l'Europe des richesses de la Russie-Sibérie et chasser les Européens de leurs positions africaines

 

En réalité l’hégémonie américaine n’a pu s’établir au XXème siècle, et ne peut se perpétuer à l’avenir, qu’en coupant délibérément l’Europe, principal réservoir mondial des res­sources humaines culturelles, scientifiques et techniques, des gigantesques réservoirs mondiaux de matières pre­miè­res que constituent la Russie-Sibérie d’une part, et l’Afri­que d’autre part, toutes deux géographiquement limitro­phes ou proches de l’Europe. Historiquement, ce sont les deux premiers conflits mondiaux, qui, en plongeant la Rus­sie dans la paralysie du communisme, puis en séparant l’Eu­rope par le rideau de fer, la coupant ainsi des richesses de l’Est, ont assis la domination des Etats-Unis sur notre continent au cours de ce siècle. On mesure ici ce que l’hé­gémonie américaine actuelle doit à l’instauration du com­mu­nisme et aux deux guerres mondiales.

 

Le soutien des Etats-Unis à la décolonisation d’après guer­re, qui plonge aujourd’hui le continent africain dans le ma­rasme et les guerres ethniques, le financement qu’ils ont assuré au FLN algérien dans leur lutte contre la France dans les années 50, leurs menées actuelles en Afrique Centrale et Australe, illustre bien leur souci constant de chasser l’Eu­rope de ses positions africaines, pour la couper de ces réservoirs de matières premières.

 

Cependant l’effondrement interne du communisme à l’Est, et la désagrégation récente de l’empire soviétique, en dé­pit des efforts désespérés de la diplomatie du Président a­mé­ricain Georges Bush et de son allié le Président Mikhaïl Gorbatchev, constitue désormais une menace, de nature à re­mettre en cause à terme la suprématie actuelle des diri­geants des Etats-Unis sur le monde, et susceptible de rui­ner, lors même qu’ils semblent enfin accessibles, leurs rê­ves mondialistes.

 

Le livre, paru il y a deux ans sous la signature d’Alexandre del Valle, “ Islamisme et Etats-Unis, une alliance contre l’Europe[2] ”, jette une lumière crue sur la stratégie de re­change, engagée déjà depuis une vingtaine d’années par les dirigeants mondialistes américains pour faire face à ce nouvel état de choses. Il constate que, de l’Irak à l’Afgha­nistan, en passant par l’Iran et le Pakistan, ainsi que dans d’au­tres pays musulmans, en particulier en Afrique du Nord, la politique et la diplomatie américaines, sous cou­vert des menées de l’Arabie Saoudite, leur protégée, s’in­génient à susciter et à promouvoir délibérément les régimes islamiques les plus rétrogrades, faciles à contrô­ler par la corruption de leurs dirigeants impliqués dans les tra­fics internationaux de drogues, et à détruire les régi­mes laïques de ces pays fondés sur l’idée nationale, exci­tant ainsi potentiellement les islams les plus extrémistes contre les chrétientés européennes et slaves, dont ils sont géographiquement proches. Appelée, bien sûr, à ga­gner les pays musulmans d’Afrique, cette hostilité poten­tielle est de nature à couper un peu plus l’Europe des ri­chesses naturelles de l’Afrique.

 

Mitterrand avait vu juste: l'Amérique nous mène une guerre à mort

 

Dans un livre paru la même année, “ Le Syndrome de l’or­to­lan ”, où il explicitait la stratégie médiatique d’aveugle­ment des opinions publiques européennes, Arnaud-Aaron Upinsky rappelait opportunément cette citation impres­sionnante, tirée d’un entretien du Président François Mit­ter­rand accordé au journaliste Georges Marc Benamou[3], : “ La France ne le sait pas, mais nous sommes en guerre avec l’Amérique. Oui, une guerre permanente, une guer­re vitale, une guerre économique, une guerre sans morts. Apparemment…(..)…Oui, ils sont très durs les A­mé­ricains, ils sont voraces, ils veulent un pouvoir sans par­tage sur le monde. Une guerre inconnue, une guerre permanente, sans morts apparemment, et pourtant, une guerre à mort…(..)…Les Américains voulaient envoyer les Turcs bombarder les Serbes. ”

 

Dans la traduction française de son livre “ Le choc des civi­lisations ”, paru également la même année, le professeur américain Samuel P. Huntington insistait, quant à lui, lon­guement sur les opportunités géopolitiques qu’offre le cli­va­ge historique et culturel qui sépare la chrétienté eu­ro­péenne entre les peuples slaves et orthodoxes d’une part, et les pays catholiques et protestants d’autre part.

 

La destruction de la Serbie était programmée depuis longtemps

 

Dès lors s’éclaire la stratégie des cénacles mondialistes amé­ricains et leurs intentions dans les Balkans. Mme Ma­deleine Albright, leur porte-parole dans le gouvernement Clinton, tchèque d’origine et très liée à M. Brzezinski, exi­ge impérieusement aujourd’hui de la part de leurs affidés européens, la destruction de la Serbie, planifiée déjà de­puis plusieurs années à Washington, qui fait obstacle à la réa­lisation de leurs plans, destruction de la Serbie par l’U­nion Européenne et l’OTAN qui leur permettrait d’un seul coup d’atteindre plusieurs objectifs :

 

En effet, la destruction délibérée de la Serbie sous les bom­bes de l’OTAN, suivie de l’engagement des contingents euro­péens sur le sol serbe, programmé sans doute pour l’été prochain, au moment où les populations des “ grandes dé­mo­craties ” gagnent les plages de leurs vacances annuel­les, anesthésiant ainsi les opinions publiques occidentales, permettrait d’abord de creuser un fossé irrémédiable en­tre les peuples slaves et orthodoxes d’une part et ceux de l’Europe occidentale d’autre part, coupant en parti­cu­lier la France des alliés traditionnels de sa diplomatie à l’Est. En outre, ce fossé rétablirait la coupure que le com­munisme avait autrefois établie en Europe, qui inter­disait à celle-ci l’accès aux richesses de l’empire Russe.

 

La destruction impitoyable de la Serbie devrait en outre ser­­vir d’exemple pour dissuader les peuples européens de toutes velléités de retour à leur ancienne indépen­dan­ce nationale, au moment où se parachève l’Union Euro­péen­ne fédérale, sous protectorat des Etats-Unis, base dé­cisive de la construction du rêve mondialiste de leurs diri­geants.

 

Les dirigeants américains

veulent ré-islamiser les Balkans

 

L’écrasement de la Serbie aurait en outre pour effet d’a­bais­ser la Grèce dans la région, et de lever l’obstacle grec à l’entrée de la Turquie dans l’Union Européenne.

 

Comme le dénonce, avec autant d’obstination que de per­tinence, le Général Pierre-Marie Gallois, auquel le Géné­ral De Gaulle avait naguère confié le soin d’élaborer la doc­trine d’emploi de la force de dissuasion française, auteur des deux livres “ Le sang du pétrole : tome I, l’Irak, tome II, la Bosnie ” et qui a préfacé “ Islamisme et Etats-Unis ”, les dirigeants américains veulent ré-islamiser les Bal­kans. Les accords de Dayton leur ont déjà permis d’établir en Bosnie, après en avoir largement chassé les Serbes, la première République Islamique en Europe, dirigée par le fon­damentaliste musulman Izetbegovic. La destruction de la Serbie leur permettra de réaliser prochainement une grande Albanie islamique, placée sous leur protectorat, et sur le territoire de laquelle, comme chez leur protégée mu­sulmane du Golfe, l’Arabie Saoudite, ils pourront dispo­ser de larges bases militaires navales et terrestres perma­nentes, y installant, comme en Arabie Saoudite, du ma­té­riel lourd, et des troupes à demeure.

 

Ces républiques islamiques, ainsi installées dans les Bal­kans, deviendraient les “ clientes ” naturelles de la Tur­quie, prochain membre, de par la volonté américaine, de l’U­nion Européenne, le reste des Balkans restant sous in­fluence allemande, l’ensemble de la zone, ainsi que les al­liés privilégiés turcs et allemands des Etats-Unis, de­meurant sous le contrôle de ces derniers au sein de l’Union Européenne.

 

Neutraliser définitivement la Russie

 

Cette présence Turco-islamique au cœur de l’Europe, é­troitement sous contrôle des dirigeants mondialistes des Etats-Unis, garantirait à ces derniers la pérennité de leur suprématie mondiale pour le prochain demi-siècle : De nature, en effet, à maîtriser l’incertitude russe, que, dans son livre, M. Brzezinski appelle “ le trou noir ”, en neu­tra­lisant définitivement la Russie, cette installation de son en­nemi historique et culturel turc sur ses frontières du Sud-Ouest, complèterait son encerclement au sud par les répu­bliques musulmanes turcophones, où les diplomaties amé­ricaine et israélienne, attirées par la richesse de leur sous-sol et de leur position stratégique, sont déjà très actives.

 

De plus, la Turquie, devenue Etat membre de l’Union, pourrait très vite peser d’un poids décisif sur la politique migratoire et sur l’ouverture des frontières européennes aux mondes musulmans des Proche et Moyen Orient et d’Afrique, alors même que les effectifs des populations de la chrétienté européenne et du monde orthodoxe ont dé­jà amorcé leur déclin. Après plus de 25 ans d’une fécon­dité toujours plus éloignée du seuil de remplacement des générations, ces populations européennes autochtones, à présent en cours de vieillissement rapide, se sont ainsi en­ga­gées en effet dans un processus d’implosion démogra­phi­que bientôt irréversible. Elles ont déjà largement entamé le renversement de leurs pyramides des âges appelé à s’accélérer au cours des trois prochaines décennies. Au cours de la même période, de Dakar à Alma-Ata, les jeu­nes populations musulmanes, proches de l’Europe et de la Russie, vont au contraire connaître l’apogée de leur croissance démographique en doublant leurs effectifs.

 

Persévérance

de la croisade malthusienne

 

Les dirigeants mondialistes des Etats-Unis, qui, par la per­sé­vérance de leur croisade malthusienne depuis une cinquantaine d’années, ont poussé les peuples euro­péens dans ce processus d’implosion démographique en passe de devenir maintenant incontrôlable, tirent à pré­sent un parti cynique de cette nouvelle donne géostra­tégique, parfaitement prévisible, qui bouleverse le face à fa­ce entre les chrétientés européennes et slaves et les mon­des musulmans d’Afrique et du Moyen Orient, en ac­com­pagnant aujourd’hui délibérément l’islamisation ra­pi­de de l’Europe et de la Russie au cours du premier tiers du siècle qui s’ouvre, pour tenter de la canaliser au mieux de leurs intérêts et de leurs projets.

Ce nouvel état de chose garantissant à ces dirigeants, pour plus d’une génération encore, la maîtrise sans partage des affaires du monde, est de nature à leur ouvrir la perspec­tive prochaine de réaliser enfin leur rêve d’imposer à tous les peuples du monde un gouvernement mondial dont ils pourraient espérer conserver le contrôle au cours du siècle qui s’ouvre, sous réserve de parvenir à convaincre ra­pidement les dirigeants de la Chine et de l’Inde de s’y as­socier. Du moins est-ce là la vision générale de ces diri­geants mondialistes, telle qu’elle ressort de la lecture des li­vres et articles récents de leurs principaux porte-parole.

 

Philippe BOURCIER de CARBON,

Démographe, Ancien Auditeur de l’IHEDN, Président du Comité d’honneur de La Voix des Français (Renaissance 95)

 



[1] Bien évidemment dominée par les actuels dirigeants mondialistes anglo-américains du CFR et du RIIA (commentaire de l’auteur de cet article).

[2] Et, devrait-on ajouter, contre la Russie.

[3] “ Le dernier Mitterrand ”, Georges-Marc Benamou, 1995.

samedi, 31 janvier 2009

La mondialisation et le rôle de l'Etat

La mondialisation et le rôle de l'Etat

http://polemia.com

La mondialisation de l’économie réelle pour les entreprises va continuer et s’amplifier selon deux axes majeurs : la recherche de nouveaux marchés et l’optimisation globale de la chaîne de valeur sur les plans des coûts et de l’efficacité des processus :

Il est vital pour les entreprises occidentales de trouver de nouveaux débouchés afin d’amortir leurs frais fixes de plus en plus importants, et de compenser le manque à gagner sur leur marché intérieur. La Chine et l’Inde font partie des premières destinations recherchées, et plus généralement les BRICs (Brésil, Russe, Inde, Chine). Pour servir ces nouveaux marchés, les entreprises construisent des usines locales (pour bénéficier de coûts de revient compétitifs, mais aussi sous la pression des gouvernements nationaux), mais aussi des centres de R&D nécessaires pour concevoir des produits adaptés aux marchés locaux (il faut être dans l’écosystème local pour être capable de concevoir des offres pertinentes). Mais le risque est grand que les centres de R&D et les usines implantées dans ces nouvelles régions ne servent pas uniquement ces nouveaux marchés, mais aussi les marchés traditionnels européens et américains. L’ exemple récent de la Logan montre qu’un produit destiné aux BRICs peut aussi trouver des débouchés en Europe (l’homogénéisation des goûts et de la culture des consommateurs facilitent ces transferts).
Plus généralement les entreprises globales utilisent aujourd’hui leurs ressources, usines, centres de R&D et centres de support de manière globale. Un produit peut être conçu et géré aux Etats-Unis, développé dans des Centres de R&D en Asie et en Europe, fabriqué en Chine et dans les pays de l’Est, commercialisé en Europe, aux Etats-Unis et en Asie au travers de structures marketing et commerciales locales, et supporté grâce à un centre d’appel situé en Inde. Cette logique de fragmentation de la chaîne de valeur résulte d’une optimisation poussée entre pénétration de nouveaux marchés, maîtrise des coûts et augmentation de l’efficacité des processus. L’entreprise globale sera de plus en plus « anationale » car elle est uniquement motivée par son intérêt économique bien compris. On peut aujourd’hui clairement dire que les intérêts de l’entreprise mondialisée ne coïncident plus naturellement avec ceux de la Nation (du moins en termes de localisation de valeur ajoutée et de création d’emploi).

Il est important de bien comprendre que nous ne sommes plus en train de parler de délocalisations, mais de marchés structurellement mondialisés qui appellent donc des réponses optimisées sur un plan mondial de la part des entreprises. La question pour l’Etat est donc la suivante: comment rendre la création d’emplois et la localisation de valeur ajoutée en France compatibles avec cette optimisation globale des ressources dont ont besoin les entreprises pour se globaliser aujourd’hui ? Quels avantages comparatifs offrir aux entreprises pour qu’elles aient intérêt à localiser une part significative de leur chaîne de valeur en France ? Car au-delà des contraintes de marché, nous sommes aussi directement en compétition avec des Nations équivalentes à la nôtre en terme de coût du travail !

La réponse est ouverte ; car du fait des technologies de l’information et de la communication, les ressources qui travaillent pour un pays n’ont pas nécessairement besoin d’être localisées dans ce pays. Les moyens de communication qui jouent en faveur des BRICs et des pays « low cost » peuvent donc aussi jouer en notre faveur, et nous devons en chercher d’autres qui pourront compenser notre relatif désavantage en coût salarial (mais peut-être pas en coût du travail si l’on inclut la productivité et la compétence des ressources françaises).

Mais au-delà, le développement d’une attitude nationale face à l‘emploi de la part de nos grands dirigeants d’entreprise est un impératif ! Nous reviendrons sur ce problème du panurgisme qui fait souvent préférer la solution à la mode ou préférée par les analystes financiers à celle qui offrirait le meilleur rendement pour l’entreprise. Un certain nombre de non localisations d’activités en France ne sont pas justifiées économiquement. Des études économiques réalisées par de grands Cabinets de consultants en stratégie l’ont récemment mis en évidence.

Les problèmes de la Finance contribuent à redonner leur place légitime à l’industrie et aux services non financiers, mais en premier lieu à l’industrie. Les pays qui vont le plus souffrir de cette crise sont ceux qui avaient une hypertrophie de leur secteur financier (cas emblématique de l’Islande, mais aussi des Etats Unis et du Royaume-Uni). La France avec ses écoles d’ingénieur de haut niveau, sa Recherche fondamentale et appliquée, ses champions nationaux et son appétence naturelle pour les sciences devrait en bénéficier à condition que les réformes structurelles nécessaires soient conduites à leur terme (enseignement et université, flexibilité du marché de l’emploi, rôle et mission de l’Etat dans l’économie nationale, notamment). L’industrie va de nouveau être au cœur de la réflexion économique des Etats-Nations dans les années à venir.

Le système financier mondial va être assaini et une nouvelle gouvernance financière européenne et mondiale va se mettre en place. Cette reprise en main va se traduire de plusieurs manières :

– De meilleurs ratios prudentiels, plus adaptés au nouveau contexte économique, et permettant d’identifier les risques qui ont contribué à la catastrophe actuelle

– Une réforme des agences de notation. L’efficacité de leurs méthodes d’évaluation et la qualité de l’information produite doivent être renforcées. Mais il fait aussi définitivement régler la question de leurs conflits d’intérêt potentiels avec leurs clients (ces agences notent les entreprises, mais ces mêmes entreprises sont aussi leurs clients directs !)

– La modification de certaines règles comptables qui se révèlent mortifères dans des périodes de crise boursière (telle la valorisation des actifs au prix de marché)

– Une meilleure information sur les résultats des banques et des institutions financières

– De nouvelles règles sur les produits financiers dérivés basés sur des montages spéculatifs à hauts risques (avec a minima une information obligatoire sur le contenu précis de ces produits)

– Une gouvernance mondiale renforcée avec les Banques Centrales et le FMI notamment. Cependant deux conceptions assez différentes semblent s’opposer :

– Les Etats-Unis  ne sont pas favorables à une gouvernance mondiale et donc partagée avec l’Europe. Ils souhaitent réformer leur gouvernance interne  sous forme de « bonnes pratiques », mais sans entraver le marché
– Alors que l’Europe pousse cette gouvernance mondiale et souhaite mettre en œuvre de nouvelles règles de régulation. Mais pour être efficace la gouvernance devra nécessairement être mondiale puisque le système financier est mondial
– De manière plus générale, de nouvelles règles permettant d’empêcher les effets systémiques entraînant la propagation invisible des risques. Il faut notamment mieux contrôler, voire éviter les opérations spéculatives financées avec un fort niveau d’endettement
– Enfin, et pour un certain temps, une nationalisation de fait d’une partie des banques qui devrait simplifier leur contrôle par les Etats-Nations.

La faillite morale de la « finance spéculative », découplée de l’économie réelle, est une opportunité historique pour  mettre de l’ordre dans un système qui avait dérapé, mais qui a d’une certaine manière profité à tout le monde (l’immobilier aux Etats-Unis, les gains en bourse pour tous). Certaines crises sont inhérentes au capitalisme : les travaux de Carlotta-Perez sur les cycles économiques de l’innovation l’ont montré. Mais il serait intelligent de faire l’économie des crises purement spéculatives (immobilier, produits financiers spéculatifs).

Mais cette reprise en main du système financier ne change en rien les fondamentaux et les mauvais cotés du « capitalisme financier ». La recherche de la rentabilité pour l’actionnaire au détriment de l’intérêt à moyen terme de l’entreprise ne sera pas réglée par ces réformes. Le fameux ratio de rentabilité du capital pour l’actionnaire de 15 % (10 à 12 % pour l’augmentation du cours de l’action et 3 % de dividendes versés) reste mortifère, car en décalage avec la rentabilité d’exploitation structurelle des entreprises, avec deux conséquences :

– Une rémunération trop importante du capital aux dépens du travail, mais aussi des investissements
– Et des bulles spéculatives qui finissent par exploser, quand tout le monde se rend enfin compte que le roi est nu !

Il va y avoir un retour de l’Etat, de manière conjoncturelle, mais également plus en profondeur, avec un rôle renouvelé dans les économies occidentales :

La crise a eu le mérite de rappeler l’importance de l’Etat et de certaines Institutions internationales (FMI, Banque Mondiale, Europe). Tous les acteurs économiques ont senti passer le vent du boulet, et chacun sait la gravité de la situation et ses conséquences si les principaux Etats n’avaient pas été présents
Une certaine conception ultra-libérale de l’économie est fortement remise en cause et va probablement être mise en minorité, en Europe tout au moins, mais probablement pas dans le monde anglo-saxon. Elle avait connu sa pleine notoriété avec les « Chicago Boys » et Milton Friedman, ainsi que Von Hayek. Les pays anglo-saxons l’avaient promue comme instrument efficace de leur suprématie économique, suivant la stratégie bien connue du « kicking away the ladder ». Elle avait aussi inspiré l’Union Européenne, et bien sur les Etats-Unis. On avait alors oublié le rôle qu’ont joué les Etat-Nations dans le développement des économies nationales, la France, mais aussi le Royaume Unis et les Etats-Unis
On avait aussi oublié qu’un marché dynamique, fortement compétitif et bien irrigué en information n’est pas la seule condition de création de richesse. On peut dire que l’écosystème économique ne se réduit pas au marché, mais qu’il est beaucoup plus complexe dans nos économies :
– Le rôle des Institutions (formelles et informelles) est également important (Douglass North)
– Dans certains cas une certaine dose de protection est indispensable pour permettre le développement de certains secteurs économiques ou de l’innovation
– Seul l’Etat (ou l’Europe) est à même de financer certains chantiers d’infrastructure  majeurs ou les phases initiales du développement de nouvelles technologies très intensives en R&D et en capital
Cette compréhension de l’écosystème économique et de ses leviers de performance (au delà du marché) est un des verrous intellectuels essentiels qu’il faut faire sauter. Dans nos économies complexes, le marché n’est pas le seul facteur structurant du fonctionnement de l’économie, et dans certains cas, le « tout marché » ou le « trop marché » est simplement inefficace
Accessoirement la philosophie libérale naïve de l’Europe ainsi que son fantasme d’affaiblir (supprimer ?) les Etat-Nations pourront aussi être affaiblis

Ce retour de l’Etat ne se fera pas selon les anciennes formules (Plan, protection de secteurs structurellement condamnés, gestion directe d’entreprise avec un tropisme social contre-productif). Ce ne sera pas le retour du capitalisme d’Etat des années 60, mais plutôt :

– Une politique d’investissements ciblés et stratégiques : un Etat entrepreneur et investisseur, plutôt que protectionniste et dirigiste (le redressement d’Alstom plutôt que l’assistanat à perte de la sidérurgie française). Il est à noter que le recours au soutien à la consommation se révèle inutile voire contreproductif dans une économie mondialisée comme la nôtre

– Le soutien d’une politique industrielle nationale :
– avec notamment le levier important que représentent les pôles de compétence
– et le rôle de l’Etat actionnaire stratégique (Fonds Stratégique d’Investissement français) comme protecteur des industries stratégiques et des champions nationaux en difficulté temporaire
– et aussi des politiques ciblées et discrètes de protection d’entreprises ou de secteurs ciblés (comme savent le faire discrètement mais efficacement les Etats-Unis)

– Un meilleur équilibre entre  l’Etat et le marché, ou le Politique et le marché. Les opinions politiques européennes y sont très favorables, les Politiques doivent saisir cette opportunité

Le retour des Etats-Nations et un rééquilibrage par rapport à l’Europe :
– Les Etats-Nations doivent bénéficier de plus d’autonomie, car  les politiques économiques doivent être plus ciblées en fonction des la situation de chaque Etat (dette, déficit, structure de l’industrie, capacité d’innovation, situation sociale)
– Les éléments économiques du Pacte de Stabilité et la doctrine européenne sur les aides de l’Etat doit être complètement revus, sans toutefois remettre en cause l’objectif à moyen terme d’assainissement des finances plubliques
– L’affaiblissement de facto de l’Europe car ses deux crédos majeurs, le libéralisme intégral et l’affaiblissement des Etats-Nations  vont exactement à contre courant des besoins vitaux de l’économie

L’intelligence économique va devenir un des leviers importants de la politique industrielle

Ce retour possible de l’Etat-Nation et la perte de confiance dans le « tout libéral » sont une opportunité pour la Droite. Elle peut permettre de repenser une économie au service du Politique avec une nouvelle synthèse entre économie globalisée et intérêt national, une troisième voie entre le « tout marché » et « l’économie sociale de marché molle », qui n’est que le cache-sexe de l’Etat Providence. Henri Guaino l’a d’ailleurs fort bien exprimé : « la capitalisme financier a perverti la capitalisme et détruit le système de valeurs qui depuis toujours lui donne sa vitalité et sa puissance créatrice. L’enjeu aujourd’hui c’est de revenir aux sources éthiques du vrai capitalisme, celui de l’entrepreneur, de la récompense de l’effort et du mérite, de la responsabilité ».

Jean-Claude Bernardon
Consultant international
25/11/08
© Polémia
11/01/09

 

Jean-Claude Bernardon

samedi, 24 janvier 2009

Plaidoyer pour un protectionnisme européen!

Sortons de la crise ! Plaidoyer pour un protectionnisme européen.
Par Karl Hauffen

Depuis le mois d’août 2007 la crise financière n’en finit pas de faire des ravages jusqu’à se transmettre désormais à l’économie réelle et menacer la planète d’une grave dépression. On reste toutefois surpris de voir que parmi nos élites aucune analyse des causes profondes à l’origine de la crise n’ait été ni produite, ni même entamée. Certes, afin d’éviter la déflagration totale du système, des solutions ont été apportées dans la précipitation - consistant d’ailleurs essentiellement à émettre des chèques en bois - mais aucune d’entre elles ne se révèle en mesure de corriger durablement le grand chaos désormais installer au cœur de l’économie monde, un chaos qui ne cesse de s’amplifier et de se propager. Refusant de reconnaitre les apories du modèle dont elle tire sa richesse, l’hyperclasse mondiale en a perdu tout simplement le contrôle. Son pouvoir consiste donc désormais à faire croire, coût d’annonce médiatique après coût d’annonce médiatique, qu’elle est en mesure de relancer l’économie grâce à des milliers de milliards virtuels cachés dans son chapeau et dont elle ne dispose pas dans la réalité.

La mondialisation première responsable de la crise
Sur la base des travaux de nombreux économistes reconnus, il apparait pourtant évident que cette crise est d’abord et avant tout une faillite de la mondialisation économique et financière imposée aux populations par une petite élite mondiale depuis la fin des années 80. En ayant libéralisé les échanges mondiaux de biens et de capitaux, en ayant fait sauter tous les verrous douaniers et étatiques visant à réguler les flux marchands, la mondialisation s’est révélée sous les traits d’un système libre-échangiste planétaire dénué d’écluses et entièrement livré au principe des vases communicants : les emploies industrielles partaient des pays développés vers les pays émergents à faibles coûts salariaux acculant ainsi les ménages des mêmes pays développés à s’endetter pour acheter les biens qu’ils ne produisaient désormais plus. Lorsque le 15 septembre 2008 la banque Lehman Brother se déclara officiellement en faillite, c’est toute cette machinerie de redistribution des rôles entre pays émergents et pays développés qui venait d’atteindre la masse critique au-delà de laquelle le système mondialiste entrait dans une réaction en chaîne de fission nucléaire.

Une crise de l’endettement provoquée par une déflation salariale sans précédent.
Qu’on le veuille ou non, la crise financière actuelle est donc d’abord une crise de l’endettement. En effet, fidèles aux logiques dictées par la mondialisation, les pays émergents ont opté pour des politiques de prédation en pratiquant un dumping social et écologique à l’échelle planétaire. Cette concurrence a provoqué en Europe et aux Etats-Unis un effet de déflation salariale, les menaces de délocalisation systématiquement brandies obligeant les salariés à accepter une dégradation de leurs conditions salariales et sociales afin de conserver leurs emplois. Le recours à l’immigration permit également d’étendre les effets de cette déflation salariale à des secteurs économique non délocalisables comme le bâtiment, l’hôtellerie ou la restauration. Pour compenser les effets de cette redoutable concurrence internationale, les pays développés n’avaient d’autres choix que de mettre en œuvre des stratégies par déficit. Ainsi devant la stagnation de leurs revenus, les ménages ont été conduits à accroitre leur taux d’endettement pour maintenir leur capacité de consommation. Un surendettement rendu possible grâce à une libération financière qui tolérait la création de produits bancaires toxiques permettant de sortir du bilan des banques des crédits de plus en plus pourris et insolvables. Certains pays plus dirigistes optèrent également pour un endettement public, certes plus propre en apparence mais qui revient finalement au même et s’avère en prime bien plus difficile à reformer. Ni vu, ni connu, l’appauvrissement structurel des économies occidentales disparaissait ainsi par magie des tableaux statistiques et comptables. L’engrenage infernal de la crise des subprimes pouvait alors pleinement dérouler sa logique folle jusqu’à que les déséquilibres monétaires internationaux deviennent intenables.

Avant tout, briser la spirale de la déflation
A la lumière de ce constat, on éprouve donc bien de la peine à croire que les mesures prises par Sarkozy suffiront à contenir la grande déconfiture économique que tout le monde annonce pour l’Europe. Ni les plans de relance annoncés par le gouvernement, ni les aides financières abyssales garanties au secteur bancaire ne sauront compenser le déséquilibre structurel de l’économie-monde. Sortir de la crise implique en priorité de briser la spirale infernale de la déflation salariale. Comment envisager sérieusement une hausse des salaires et une relocalisation des activités industrielles sans d’abord mettre en place un système d’écluses douanières ? Car rappelons-le une fois encore : la crise actuelle est avant tout le résultat de déséquilibres provoqués par une mondialisation libérale mettant en concurrence des espaces de développement par trop hétérogènes. Ces profonds déséquilibres ne pourront être résolus sans d’abord procéder à un découplage partiel et raisonné entre les grandes régions économiques de la planète. L’avènement d’un ordre monétaire stable nécessite un encadrement du commerce international incompatible avec un libre-échange débridé. Un développement social et économique planétaire en bon ordre implique donc de revoir complètement l’organisation mondiale de l’économie.

Reconstituer des zones d’échange régionales homogènes
Nous savons maintenant qu’aucun équilibre monétaire international ne pourra être viable sans un minimum d’équilibre des balances commerciales. La crise actuelle vient de nous enseigner que cet équilibre ne saurait être obtenu par le simple jeu du marché. Des règles claires doivent donc être définies et appliquées afin de réguler les échanges internationaux en pénalisant et les stratégies par déficit et les stratégies misant sur le dumping social ou écologique. Le projet mondialiste de libre-échange planétaire faisant fi des frontières, des peuples et des nations apparait pour ce qu’il est et a toujours été : une pure folie. Pour sortir de la crise, de grandes zones régionales de libre-échange, regroupant des pays aux structures économiques à peu près homogènes, devront être constituées. Les échanges entre ces grandes zones devront être régulés par des politiques protectionnistes souples et transparentes assises sur de solides accords bilatéraux. Toutefois, il serait complètement illusoire de vouloir mener cette politique sans déléguer aux pouvoirs nationaux une part de la régulation. Le souhait de Jacques Attali de voir confier l’économie-monde à une gouvernance mondiale stratosphérique (élue par qui et représentant qui ?) est tout simplement irréaliste, dangereux et proprement anti-démocratique. Nous pensons au contraire que seule une coordination interétatique laissant une marge de manœuvre confortable aux échelons nationaux sera à même de garantir des résultats vraiment satisfaisants et durables. Car nous savons mieux que quiconque que seuls les pouvoirs nationaux peuvent correctement connaitre et défendre les intérêts de leurs peuples.

Un protectionnisme pro-européen à l’encontre des intérêts étatsuniens
En Europe, l’Union européenne se voit toute désignée pour jouer cette mission de coordination interétatique. A elle donc de consolider une zone d’échange régionale protégée et d’en fixer les modalités d’interaction avec les autres zones économiques ou grands Etats du monde. Il lui revient aussi clairement la mission de contribuer à la redéfinition des règles mondiales de contrôle des flux de capitaux et de fixation des taux de change. Difficile toutefois d’envisager l’esquisse de ces solutions salutaires sans se heurter au refus catégorique des Etats-Unis. C’est aussi pourquoi il nous semble nécessaire de rappeler que si les Européens veulent vraiment s’en sortir, ils devront forcément accepter l’idée d’une friction, voire d’une opposition, avec Washington. Dans cette partie de bras de fer, l’Europe devra se rapprocher de la Russie (allié géostratégique naturel) de manière à peser de tout son poids pour imposer aux USA une vision moins univoque de l’économie monde. On reste cependant consterné d’observer qu’au moment même où l’Europe trouve enfin une opportunité historique de s’affirmer, ses Etats membres agissent isolément dans la plus grande confusion cédant à un égoïsme contre-productif qui confine à l’incompétence. Même consternation encore lorsque nous constatons que Sarkozy a précisément choisi cette phase historique pour conduire à contretemps la France sur une politique d’alignement atlantiste qui va à l’encontre de tous nos intérêts économiques et stratégiques. Les oligarques européens et bruxellois, trop compromis avec l’hyperclasse mondialiste et n’ayant pas pris toute la mesure des bouleversements en cours, se révèlent incapables ni d’imaginer, ni de préparer le monde d’après la crise. Alors que la crise gronde de plus en plus fort et annonce une ère nouvelle en gestation, il est grand temps que l’Europe reprenne la pleine souveraineté de son destin et rompe avec le dictat des barons de Wall-Street. Il est grand temps également que les Européens renversent une classe dirigeante qui a complètement failli et s’avère incapable d’aller contre les intérêts de l’hyperclasse capitaliste mondiale.

 


 

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dimanche, 04 mai 2008

La fin de la mondialisation heureuse

La fin de la « mondialisation heureuse » : un retour vers des économies plus autocentrées ?

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Les mois de mars et d'avril 2008 ont été marqués par un tumulte médiatique sur des sujets anecdotiques : les heurs et malheurs d’Ingrid Betancourt, la perturbation du parcours de la flamme olympique, les banderoles de mauvais goût du PSG, les profanations de cimetières ou les agonies télévisées : un programme de divertissement et d'ahurissement de l'opinion qui a permis d'occulter les sujets majeurs. Notamment l'ampleur de la crise économique – 1.000 milliards de dollars de pertes annoncés par le FMI – qui marque la fin de la « mondialisation heureuse ». Heureuse pour certains, sans doute. Mais malheureuse pour beaucoup.

Explications :

Le libre-échangisme mondial

Durant la campagne électorale présidentielle française de 2007, Dominique Strauss-Kahn (DSK) se présenta comme le candidat de la « mondialisation heureuse ». Jolie formule qui ne lui permit pas de devenir président de la République mais qui en a fait un président du Fonds monétaire international (FMI) acceptable pour les Américains.

La « mondialisation heureuse » est l'expression médiatique utilisée pour désigner le libre-échangisme mondial, courant de pensée qui a imposé, au cours des trois dernières décennies, la disparition de tout obstacle à la libre circulation des marchandises, des services, des capitaux et des hommes. Selon cette doctrine, la suppression des frontières, en permettant l'allocation optimale des ressources à l'échelle mondiale, déboucherait sur l'amélioration de la situation dans chaque pays et pour chaque groupe social.

Cette doctrine s’est d’autant mieux imposée qu’elle a assis sa domination par un processus de « ringardisation » et de diabolisation de ses adversaires ; s'y opposer c’était prendre le risque de se placer à l'écart de la modernité et de la rationalité économique et par conséquent d’être déconsidéré.

La mondialisation a été « heureuse » pour la superclasse mondiale

Dans « Qui sommes nous », Samuel Huntington décrit l'existence d'une superclasse mondiale : les « cosmocrates », les « transnationaux économiques », qui mettent l'accent sur la mondialisation, les échanges sans frontières et font carrière en se déplaçant d'un pays à l'autre.
http://www.polemia.com/contenu.php?iddoc=1392&cat_id=...

Huntington estime cette population à 20 millions, dont 40% d'Américains, en 2003, avec la perspective qu'elle atteigne 40 millions en 2010.

Ces « transnationaux » ont été les grands bénéficiaires de la mondialisation : aux Etats-Unis, la croissance enregistrée depuis 1996 a bénéficié à moins de 10% de la population, les revenus des autres Américains stagnant. A titre d'exemple et pour la seule année 2006, les bénéfices des cinq plus grandes banques d'affaires new-yorkaises (Goldman Sachs, Lehman Brothers, Bearn Stearns, Morgan Stanley et Merrill Lynch) ont porté sur 28 milliards de dollars. Et 170.000 banquiers et courtiers d'établissements new-yorkais ont reçu cette même année 2006 en moyenne 212.000 euros de bonus annuel. Des sommes qui, comme le dit Madame El Karoui, professeur de mathématiques financières à l'école Polytechnique, aurait dû alerter (1). La crise de 2007 n'a pas modifié ces pratiques puisque les 100 courtiers les mieux payés du monde ont gagné en moyenne 304 millions de dollars, cinq d'entre eux dépassant le milliard de dollars de gains personnels !

En Chine, en 2006, le nombre de Rolls Royce vendues a, lui, augmenté de 60%.

En France, les 3.500 foyers les plus riches ont vu leurs revenus réels progresser de 43% de 1998 à 2005.

Ces évolutions ne reflètent évidemment pas la croissance générale.

 

L'ouverture des frontières européennes s'est accompagnée du ralentissement de la croissance française

De 1947 à 1957 puis de 1957 à 1967 l'économie française a vécu dans une ambiance protectionniste, stricto française d'abord, européenne ensuite avec le tarif extérieur commun ; durant cette période, la croissance moyenne annuelle a été de 5,4% (2).

L'aboutissement des négociations Kennedy et de celles de Tokyo, puis les enchaînements libre-échangistes qui ont suivi ont abouti à une suppression progressive des frontières ; parallèlement le taux annuel de croissance a reculé à 3,3% durant la période 1967/1980, puis à 2,12% de 1979 à 2005.

Le taux de chômage initialement à 2% s'est installé autour de 10% bien que la mise en place de préretraites, d'un côté, du RMI et des minima sociaux, de l'autre, contribue à le minorer.

Encore faut-il nuancer ce taux de 2,12% de croissance annuelle puisqu'il tombe à 0,52% pour le revenu moyen disponible des ménages, la croissance nominale étant à partager entre un plus grand nombre de bénéficiaires du fait de l'immigration, d'une part, du vieillissement de la population, de l'autre ; le vieillissement s'accompagnant par ailleurs de la marchandisation de tâches familiales et domestiques qui n'entraient pas jusqu'ici dans le cadre de la comptabilité nationale et contribuant ainsi indirectement à une augmentation du PIB en partie artificieuse.

Ajoutons que de 1998 à 2005 les revenus déclarés par 31,5 millions de foyers fiscaux, soit 90% de la population fiscale, n'ont augmenté que de 4,6% (3).

Enfin, la mondialisation et la financiarisation se sont accompagnées d'une amélioration de la situation des détenteurs de capitaux (rentes et fonds de retraites notamment) au détriment des producteurs et des jeunes.

En France, l'écart entre les jeunes et les vieux actifs, notamment pour les cadres, s'est accru pour la génération née entre 1970/1980 par rapport à la situation connue par la génération née de 1950 à 1970. Ce sont les classes d'âge jeune et en âge de constituer les familles qui se sont trouvées financièrement pénalisées, ce qui contribue à la baisse du taux de fécondité et au déclin démographique des populations européennes.

 

Libre échange et financiarisation : l'augmentation des coûts de friction économiques et sociaux

Le libre-échange international et la financiarisation de l'économie n'ont cessé de pousser les entreprises à améliorer leur compétitivité.

Des efforts considérables ont été accomplis en France et en Europe pour diminuer les coûts de production ; ils ont porté sur l'amélioration de la productivité des industries et des services et souvent débouché sur la délocalisation d'une partie de la production (4).

Si une partie de ces efforts ont bénéficié aux consommateurs, d'un côté, et à ceux des travailleurs qui ont pu garder leur emploi, de l'autre, ils n'ont pas été, non plus, sans augmenter les coûts de friction économiques, sociaux et psychologiques.

D'abord, le courtermisme et la versatilité des marchés (notamment des devises et des matières premières) n’ont cessé de rendre difficile, voire impossible, l'allocation optimale des ressources. D'autant que les changements rapides de stratégies et les chocs brutaux des prix ne sont pas absorbables sans dommages ni gaspillages. Tout cela fragilise l'inscription dans la durée des projets de vie professionnels et personnels.

Enfin, la sortie de l'emploi – de manière provisoire ou définitive – de nombreux agents économiques engendre un coût social élevé pour la collectivité, les gains économiques en termes de productivité étant souvent compensés par des charges sociales et fiscales supplémentaires. En termes de revenus le jeu risque alors d'être à somme nulle tout en étant à somme négative en termes d'équilibre social et psychologique.

C'est ce qui a conduit Giulio Tremonti, vice-président de Forza Italia, à rompre avec le libéralisme mondialiste dans son livre « Crainte et Espoir ». Il y dénonce la vélocité et la violence dans le processus de compétitivité et voit dans la précarité de l'emploi et la chute du pouvoir d'achat la conséquence de la « folie de la mondialisation ». Dénonçant à l'origine de ce phénomène (5) « un groupe de fous, d'illuminés ayant décidé dans les vingt dernières années de diviser le monde en deux : production à bas coût en Asie et consommation aux Etats-Unis et en Europe. Et au final la situation a empiré pour nous comme en Asie ».

 

Libre-échange et spéculation : l'émergence d'une crise alimentaire mondiale

L'ouverture générale des frontières tout comme la spéculation débouche aujourd'hui sur le retour d'une crise alimentaire dans certains pays d'Afrique ou d'Asie.

D'abord, l'accès à la richesse de centaines de millions d'Indiens et de Chinois modifie leurs habitudes alimentaires. La viande qu'ils consomment désormais, poulets ou porcs, augmente la demande en céréales et oléagineux qu'il faut produire pour nourrir le bétail ou les volailles, ce qui crée une tension dans l'économie réelle entre l'offre et la demande, conduisant à une hausse des prix. Celle-ci est amplifiée par les mouvements spéculatifs, la crise boursière et l'éclatement de la bulle immobilière conduisant les détenteurs de capitaux et les acteurs des marchés à terme à rechercher d'autres placements.

En se portant sur les matières premières et les produits alimentaires, l'économie casino déclenche leur renchérissement. Cela nourrit les craintes légitimes sur le pouvoir d'achat dans les pays développés et se traduit par des révoltes frumentaires dans de nombreux pays d'Afrique, comme la Côte d'Ivoire, le Sénégal, le Cameroun, l'Egypte ou les Caraïbes comme Haïti, voire d'Asie du Sud (Bengladesh).

Enfin certains producteurs de riz comme le Vietnam, la Thaïlande ou l'Inde ont choisi de protéger la consommation de leurs nationaux en limitant leurs exportations.

Vers un retour à des économies réelles plus autocentrées

Selon de nombreux analystes, la crise actuelle est la plus profonde depuis la grande dépression de 1929. Son ampleur doit conduire à une complète réorientation de l'économie mondiale :

– d'abord par l'arrêt de la fabrication artificielle de monnaie, la limitation de l'endettement des acteurs financiers et une meilleure couverture des risques qu'ils prennent par l'existence d'actifs réels pour les garantir ;

– ensuite par une meilleure maîtrise des autorités nationales sur les grands échanges économiques ; sauf à dénier toute souveraineté aux Etats – et à vider la démocratie de tout sens dans les pays qui la pratiquent encore – il faut rapprocher les centres de décisions politiques et les centres de décisions économiques ; ce que la mondialisation ne permet pas ;

– les pays les moins développés seront d'ailleurs conduits à agir dans le sens de la recherche de l’autosuffisance pour des raisons sociales : garantir l'accès aux produits alimentaires de première nécessité (céréales, oléagineux) à leur population ;

– les pays les plus avancés seront, eux, conduits aux mêmes nécessités pour protéger la rareté de leurs espaces et la qualité de leur environnement ; des règles strictes dans ces domaines étant difficilement compatibles avec la mise en compétition des entreprises européennes avec celles des pays aux normes beaucoup moins exigeantes.

Il faut reconstruire l'ordre économique des nations, selon les perspectives tracées depuis plus de 10 ans déjà par le prix Nobel français d'économie Maurice Allais, politiquement incorrect mais économiquement lucide !

http://etienne.chouard.free.fr/Europe/messages_recus/La_c...
et :
http://www.polemia.com/contenu.php?cat_id=37&iddoc=16...

Polémia

NOTES :
(1)     Dans « Le Monde » du 29 mars 2008. La Lettre de Polémia de janvier 2007 avait signalé le caractère exorbitant de ces chiffres.
(2)     Pierre Milloz, « Les frontières ou le chômage », Editions nationales.
(3)     Camille Landais, « Les hauts revenus en France (1988/2006) », Paris School of economics, 2007.
(4)     Voir le dossier de Polémia sur « Les stratégies possibles pour les entreprises industrielles dans la mondialisation » :
http://www.polemia.com/campagne.php?iddoc=1494&cat_id...
(5)     Le 6 mars 2008 sur la 2e chaîne de télévision de la RAI.

00:17 Publié dans Economie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : mondialisation, libre-échange | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook