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lundi, 16 octobre 2023

Le siècle américain

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Le siècle américain

Carlos X. Blanco

Le 20ème siècle a été le siècle américain

Revenons en arrière. Le XIXe siècle est anglais ; le XVIIIe siècle est français. Le XVIe et la moitié du XVIIe siècle sont les siècles de l'Espagne, et l'interrègne du baroque fut couvert par la Hollande. La modernité, c'est (presque) un siècle pour chaque puissance. La puissance dominante ou hégémonique donne le ton à toute une époque: elle écrit l'histoire, les autres puissances résistent, les périphéries sont pillées et les vaincus sont poussés par les desseins de l'hégémon ou, le cas échéant, de la puissance régionale et résistante sous la domination de laquelle ils tombent. Les puissances dominantes utilisent les autres à leur profit exclusif. Il est rare qu'un ordre soit conçu pour le bien commun. Celui-ci n'est possible que dans les situations où s'érige une vision du monde rationnelle et hautement éthique, bien au-dessus des intérêts chrématistiques.

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L'Empire hispanique, malgré tant d'indigénistes, possédait une telle vision du monde, et subordonnait les intérêts chrématistiques à un Ordre universel, à un Bien commun. Le Portugal, la Hollande, l'Angleterre, la France n'ont jamais possédé cette conception d'un Ordre Universel. Ce n'étaient que de purs empires coloniaux, des entreprises basées sur le pillage, l'esclavage et la piraterie. Cependant, nous ne sommes pas naïfs: l'Empire hispanique n'a pas toujours été à la hauteur de sa conception, et il n'a pas non plus été le paradis sur terre. De plus, il faut garder à l'esprit que la construction d'un Ordre universel réveille des forces opposées: la lumière existe, l'obscurité aussi. Le jour ne se comprendrait pas sans la nuit. La nuit correspondant au Midi d'une Humanité catholique (universelle) s'appelait l'Angleterre : véritable héritière des pirateries portugaise, hollandaise et gauloise, enfer pour les autres peuples.

On ne le souligne pas toujours, mais le grand projet des Habsbourg d'Espagne, en particulier celui de Philippe II, était de consommer non seulement l'union avec le Portugal (un royaume hispanique ou ibérique, après tout), mais aussi la récupération des Provinces rebelles (la chimère d'une Flandre pacifiée gouvernée avec la même autonomie que les territoires ibériques et italiens), ainsi que l'annexion - par mariage ou par invasion - de la Perfide Albion. J'aborde certains de ces aspects dans mon récent ouvrage sur le Padre Suárez. Le grand projet de Philippe, plus hispanique dans sa matrice que celui de son père, l'empereur Charles, s'il avait été mené à bien, aurait bouleversé l'histoire de l'Europe et, avec elle, l'histoire du monde. Il s'agissait essentiellement d'une question de "loi et d'ordre", mais à l'échelle du continent.

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Le siècle américain, le 20ème siècle, touche à sa fin. Au pays de l'oncle Sam, il n'y a pas de Philippe II, il n'y a même pas de véritable projet d'ordre public universel. Après la chute de l'URSS et, avec elle, l'effondrement du camp socialiste, la "fin de l'histoire" semblait arrivée, c'est-à-dire l'aboutissement du siècle américain: un seul pôle ou hégémon, sans le contrepoids de l'idéologie communiste et sans menaces sérieuses de la part d'autres petites puissances non alignées. Mais la fin de l'histoire de Francis Fukuyama s'est avérée n'être que la fin d'un chapitre et le début d'un nouveau: le chapitre du "choc des civilisations" (Samuel Huntington). Les Américains ne voient plus de rivaux de l'autre côté d'un rideau de fer, des communistes avec des missiles pointés sur l'Occident, mais des menaces globales provenant d'un islamisme fanatique, dont le terrorisme s'infiltrerait partout de manière invisible et silencieuse. L'islamisme criminel remplaçait le communisme comme le "Mal" absolu et l'objet vers lequel diriger la haine et l'angoisse.

Mais les événements, pour cet hégémon impérial américain, révèlent le cours même de l'histoire, un cours qui n'est pas toujours clair pour les acteurs et les témoins au moment où les événements réels sont enregistrés, mais qui devient plus clair au fil des années et admet la révision, l'explication rétrospective qui intéresse tant le scientifique géopolitique.

Et le recul nous apprend que le siècle américain, qui a commencé avec sa guerre frauduleuse contre l'Espagne en 1898, et le début de son expansionnisme par le vol des territoires espagnols en Amérique et en Asie, a été, à proprement parler, le siècle du capitalisme impérialiste en transition vers une économie financiarisée. C'est précisément cette transition qui se situe entre le siècle anglais et le siècle américain. Il serait facile de voir dans l'ère yankee (1898-2023) un "long siècle" qui s'inscrirait dans la continuité du siècle britannique. Il est vrai qu'à ce jour, les Britanniques et les Américains partagent de nombreux intérêts stratégiques (mais pas tous) et que, face à une Europe faible et désunie, le Royaume-Uni n'a jamais agi comme un partenaire véritablement loyal, constructif et "européen", mais en partenariat avec les États-Unis. Les îles étaient, et sont toujours, une tête de pont pour les Américains en Europe, leur avant-poste pour débarquer rapidement sur les côtes normandes et flamandes.

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Mais le modèle colonial-commercial britannique n'est pas le modèle du siècle qui, aujourd'hui, dans l'Ukraine du pathétique Zelensky, s'éteint lentement. Il s'agit d'un colonialisme très différent. Alors que les Britanniques n'imposaient leur langue qu'aux élites indigènes des colonies, qui s'empressaient d'imiter la culture et les manières de leurs maîtres, les Yankees imposent un mode de vie américain par des moyens informels et consuméristes. Alors que les rois zoulous ou les rajahs indiens pouvaient revêtir des costumes traditionnels et exotiques pour recevoir Sa Gracieuse Majesté, les Indiens cooptés par l'empire yankee (y compris les Allemands, les Français ou les Espagnols) s'habillent rapidement avec les vêtements de sport amples du Bronx et mettent leur casquette de base-ball avec la visière à l'envers. Dans les villes espagnoles, personne ne sait jouer au base-ball, mais il y a des centaines de milliers d'imbéciles qui portent leur casquette à l'envers et apprennent avec plaisir la langue espagnole, indiscernable de celle de leurs frères, les émigrants des Caraïbes. C'est un exemple de la façon dont l'impérialisme colonise toujours l'impérialisme.

En Ukraine, la fin de ce siècle devient évidente. Ce n'est pas la fin d'une puissance agressive, car elle le restera en tant que puissance ultra-militarisée. Mais les États-Unis d'Amérique ne pourront plus être les maîtres de la planète ni les maîtres du 21ème siècle. Leur propre économie financiarisée sape leurs fondements. L'armement sophistiqué et coûteux qui, avec la ferraille et les pièces de musée, est envoyé à Zelensky, témoigne de ce que nous avons appelé "l'absence de design".

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Les Américains ne peuvent plus se vanter de changer le cours des choses partout et à tout moment. Ils ont été inefficaces dans toutes les guerres. Même dans leur première grande aventure à l'étranger, contre l'Espagne, ils se sont appuyés sur la puissance du dollar et en achetant la volonté des séparatistes, ainsi que de la cour corrompue de Madrid, pleine de traîtres à l'époque comme elle l'est aujourd'hui. Leur guerre hybride a toujours été efficace pour eux, mais dans une confrontation militaire directe, ils connaissent l'échec. Leurs soldats font dans leur froc et tremblent de peur lorsqu'ils ne bénéficient pas d'un soutien matériel et technologique important, et ils ne savent pas quoi faire face à de vrais combattants. Ils choisissent donc les guerres par procuration, les révolutions de couleur, la corruption, la propagande. Mais ils perdent de gigantesques zones d'influence, ils s'acculent au pied du mur. L'arène se situera dans la région Asie-Pacifique, quelle que soit l'ampleur des tueries en Europe de l'Est ou au Moyen-Orient. C'est là, en Asie, que se concentre le potentiel nucléaire et d'autres armes de haute technologie. La transition d'un hégémon à plusieurs (jusqu'à sept, estime Alexandre Douguine dans ses récentes publications) ne sera pas pacifique, bien au contraire. Elle sera sanglante et très risquée. Les armes nucléaires tactiques ne sont pas détenues par les seules armées nationales comme s'il s'agissait d'autocollants intimidants, à l'instar de ceux qui sont apposés dans les magasins et qui indiquent "zone surveillée par vidéo", ce qui est en fait un mensonge destiné à effrayer les voleurs les plus maladroits. Il n'en est rien. Toutes les armes, le moment venu, finissent par être utilisées.

L'humanité s'engage sur une pente très dangereuse. Rares sont les empires qui meurent sans combattre, par simple décomposition interne. Et même lorsque cela se produit, les guerres intestines, ainsi que la convoitise prédatrice des anciens rivaux, des puissances montantes et des voisins revanchards, sont immédiatement attisées. Dans leur propre intérêt, les Américains feraient mieux de préserver l'Union et de se débarrasser des tendances séparatistes latentes, car l'ombre des Balkans (qu'ils ont eux-mêmes criminellement jetés au cœur de l'Europe) couvre déjà tout pays de taille moyenne ou grande, englué dans l'échec extérieur et l'absence de projet. C'est la crainte qui devrait affecter cette "construction" qu'ils ont appelée l'Occident : après l'échec vient la désunion. Et l'Espagne?

En Espagne, à notre échelle, nous savons bien ce que cela signifie. Peu nous importerait, à nous les enfants de l'Hispanité qui vivons des deux côtés de la "mare" atlantique, qu'une Catalogne indépendante devienne un nouveau Kosovo, c'est-à-dire une toilette de l'OTAN et un nouveau paradis fiscal pour l'Anglosphère, pour les Arabes et tous ces gens-là. La peur est pour ceux qui restent à l'intérieur, comme les Palestiniens dans le régime d'apartheid, comme les habitants des ghettos. Et nous avons peur des luttes balkaniques qui pourraient se produire dans tout séparatisme qui n'est ni convenu ni légal. Le proverbe espagnol dit : "a perro flaco, todo son pulgas". Et c'est bien le cas.

La chute de l'Occident est, en réalité, la fin du siècle yankee. Nous, Européens, avons le choix: soit nous nous laissons tomber avec le colosse, soit nous saisissons le Kairos, l'occasion propice. Il est peut-être temps de créer une nouvelle union des peuples, une union en dehors de l'OTAN et du racket de Bruxelles, sans l'euro et sans la bureaucratie des sepoys qui suivent les signaux venant de Washington.

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Politique d'immigration du gouvernement de droite suédois: rien de concret à part de la rhétorique

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Politique d'immigration du gouvernement de droite suédois: rien de concret à part de la rhétorique

Source: https://zuerst.de/2023/10/16/zuwanderungspolitik-der-schwedischen-rechtsregierung-ausser-ankuendigungsrhetorik-nichts-konkretes/

Stockholm . Près d'un an après l'arrivée au pouvoir d'un gouvernement conservateur de centre-droit dirigé par le Premier ministre Ulf Kristersson, le nouveau gouvernement a certes inscrit le problème de l'immigration, qui prend des proportions démesurées dans le pays, sur la liste de ses priorités - mais n'a jusqu'à présent pas fourni grand-chose de constructif.

La ministre suédoise de l'Immigration, Maria Malmer Stenergard, également membre du Parti du rassemblement modéré au pouvoir, s'est montrée plus explicite dans une interview. On y cherche toutefois en vain des accents suédois spécifiques. La ministre se montre au contraire "très confiante" dans le fait que le "pacte sur l'immigration et l'asile" de l'UE pourra être adopté avant la fin de la législature actuelle, à la mi-2024. "Le pacte sur l'asile et la migration est extrêmement important, mais le travail sur la dimension extérieure l'est tout autant", a laissé entendre la ministre en évoquant d'éventuels accords avec des pays tiers.

Là encore, la ministre de Stockholm ne fait pas preuve d'innovation. Elle reprend plutôt les critiques souvent entendues à Bruxelles à l'encontre de pays comme la Libye et la Tunisie, accusés de violer les droits de l'homme en traitant avec des clandestins. Elle est "consciente de la situation extrêmement préoccupante dans plusieurs de ces pays", a déclaré la ministre. "Mais je reste convaincue que nous devons travailler avec les pays voisins pour lutter contre ces réseaux de passeurs", a-t-elle fait valoir.

Pour ce faire, elle appelle à une "approche globale de l'UE" - dont l'expérience montre qu'elle a déjà été peu efficace par le passé. Il faudra sans doute attendre encore longtemps avant de voir des mesures radicales contre la criminalité des gangs et des clans qui prend de l'ampleur dans le pays. Le chef du gouvernement Kristersson avait pourtant récemment annoncé son intention de faire appel à l'armée à l'avenir. (mü)

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Le Hamas et Israël. La tête froide

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Le Hamas et Israël. La tête froide

Andrea Marcigliano

Source: https://electomagazine.it/hamas-e-israele-a-mente-fredda/

Le sensationnalisme macabre de ces dernières heures risque d'empêcher tout raisonnement lucide. C'est au contraire d'une telle forme de raisonnement dont nous avons besoin. Un besoin, si j'ose dire, désespéré. Un besoin vital si l'on veut au moins tenter d'éviter une déflagration aux proportions difficilement imaginables.

Il peut sembler froid et cynique de ne pas pleurer les morts de l'un et/ou de l'autre camp. De n'éprouver, désormais, que de la nausée face aux images d'horreur, relancées sans cesse par les médias jusqu'à l'obsession. Un rituel presque obligatoire. Dont très peu - Luttwak, Moni Ovadia, quelques autres - ont jusqu'à présent réchappé.

Dont acte.

Parlons d'abord du Hamas. Ce qu'il est n'est pas un scoop. On sait quelle est sa référence idéologique. Les similitudes avec ISIS sont, il est vrai, nombreuses. Il s'agit d'une émanation extrême et hérétique des Frères musulmans. Il a littéralement pris le contrôle de la bande de Gaza depuis 2007. Interdisant violemment toute dissidence interne.

Il est dangereux. Très dangereux, assurément. Pourtant, il a bénéficié d'une tolérance apparemment incroyable. De la part du monde occidental. Et, paradoxalement, aussi du côté israélien.

La raison en est simple. Le Hamas a brisé l'unité des Palestiniens. Une unité qui a toujours été difficile. Car le monde palestinien est une mosaïque complexe, pleine de contradictions et de contrastes. Même Arafat n'a jamais réussi à le contrôler complètement.

Le Hamas, cependant, est une force particulière. Il n'est pas vraiment intéressé par la naissance d'un État palestinien indépendant. Son point de vue vise la création d'un grand califat sunnite unique.

C'est pourquoi il a eu, dans une certaine mesure, les mains libres pendant longtemps. Il a divisé les Palestiniens. Il ne représentait pas une menace territoriale directe.

Une erreur tragique, assurément. Ce qui a permis la création d'un ghetto/prison aux proportions bibliques à Gaza. Et qui a donné au Hamas une masse dépossédée, totalement dépendante de l'aide étrangère. Essentiellement celle de l'Union européenne. Qui sont gérées par le sommet de l'organisation.

Un sommet qui, soit dit en passant, réside au Qatar, son grand protecteur. Le Qatar qui est, lui, un proche allié de Washington.

Quant à la proximité avec l'Iran, il y a beaucoup à dire. Certes, les Iraniens ont exploité le Hamas pour prendre pied en Palestine. Une arme à brandir, comme une menace, contre Israël. Et le Hamas a exploité les Iraniens pour obtenir, avant tout, une bonne organisation militaire.

Mais le Hamas représente l'extrémisme sunnite, dont les chiites iraniens sont les ennemis jurés. Des hérétiques à anéantir.

Compliqué, n'est-ce pas ?

Cependant, même du côté d'Israël, tout n'est pas clair et net. Au contraire.

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Netanyahou est en net déclin. Et les factions politiques internes s'affrontent. Une lutte qui passe inévitablement par ce qui, pour Israël, est la question vitale par excellence. La relation avec les Palestiniens.

L'une des erreurs de Bibi est d'avoir mis en sourdine les accords signés pour résoudre ce problème. D'avoir concentré trop de ressources et trop d'efforts pour favoriser les implantations dans les territoires. Avoir miné le front de Gaza.

Avoir été influencé par les partis religieux. Ne pas avoir accordé suffisamment de place aux militaires dans son gouvernement.

Aujourd'hui, il tente de se rattraper avec un gouvernement d'unité nationale. Et en évinçant les partis les plus radicaux. Ceux qui rêvent du grand Israël.

Mais il est évident qu'après ce moment, les opposants politiques chercheront l'épreuve de force.

Ils exploiteront également l'isolement international de Netanyahou.

Bibi a en effet peu d'amis à Washington. Biden et les siens ne lui pardonnent pas, entre autres, la position prise sur l'Ukraine. Une tentative de rester en dehors du front anti-russe qui a fait preuve d'une certaine sagesse diplomatique.

Mais surtout, George Soros le déteste. Réciproquement, cordialement. Et Soros, c'est le pouvoir de la haute finance internationale.

L'image d'Israël comme bloc granitique, parfaitement soudé à la diaspora juive, est purement illusoire. Bien sûr, en temps de crise, ils donnent cette impression.

Pourtant, les fissures sont là. Profondes. Et capables d'émerger à tout moment.

Totalitarisme et féminisme : le point par George Orwell

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Totalitarisme et féminisme : le point par George Orwell

par Nicolas Bonnal

On ne va pas rappeler la brutalité du féminisme occidental dans l’épisode que nous vivons ; Todd en avait bien parlé dans Après l’Empire. Chesterton déjà en avait parlé (voyez mes textes) lors de son voyage en Amérique : le citoyen n’aurait pas plus de droits qu’un enfant dans une nursery. J’ai souligné dans un texte sur Gustave de Beaumont, compagnon de route de Tocqueville, le caractère ombrageux, intellectuel, triste et platonique de l’épouse américaine qui selon Beaumont ne peut réussir à s’entendre avec son mari. Par contre elle déclenchera toutes les guerres humanitaires qu’on voudra.

Nous vivons des temps apocalyptiques où le séculaire totalitarisme progressiste occidental jusque-là plus ou moins maintenu explose à la surface du monde et veut exterminer tout ce qui bouge. On relira l’étude de Rothbard sur le fanatisme judéo-protestant qui s’exprime aujourd’hui dans les pays anglo-saxons, protestants, scandinaves, germaniques et judéo-chrétiens comme on dit. La fin prévisible du catholicisme romain permet à cette folie millénariste et progressiste de s’exprimer comme elle le fit en Allemagne et ailleurs au seizième siècle. Le texte de Rothbard sur les anabaptistes de Munster est essentiel.

J’en reviens à Orwell : comme tous les lecteurs superficiels j’en étais resté au sex crime. Mais cela va beaucoup plus loin, et Orwell réglait des comptes avec la modernité, et Orwell est considéré aujourd’hui comme un suprématiste à interdire des bibliothèques british. Car rien ne les arrête.

On va voir pourquoi ; dès le début du livre ce maître martyr et étrange écrit :

« C’était une fille d’aspect hardi, d’environ vingt-sept ans, aux épais cheveux noirs, au visage couvert de taches de rousseur (NDLR : 1984 abonde en rouquines) à l’allure vive et sportive. Une étroite ceinture rouge, emblème de la Ligue Anti-Sexe des Juniors, plusieurs fois enroulée à sa taille, par-dessus sa combinaison, était juste assez serrée pour faire ressortir la forme agile et dure de ses hanches. Winston l’avait détestée dès le premier coup d’œil. Il savait pourquoi. »

C’est ce mot de détester qui me frappe. On n’en a pas fini :

« C’était à cause de l’atmosphère de terrain de hockey, de bains froids, de randonnées en commun, de rigoureuse propreté morale qu’elle s’arrangeait pour transporter avec elle. Il détestait presque toutes les femmes, surtout celles qui étaient jeunes et jolies. C’étaient toujours les femmes, et spécialement les jeunes, qui étaient les bigotes du Parti : avaleuses de slogans, espionnes amateurs, dépisteuses d’hérésies. »

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On retrouve cette idée dans plusieurs épisodes du Prisonnier (la série télé, voyez mes textes) : on a une fille jeune et jolie, crétine et fanatique, bornée et maléfique, cruelle quand il faut. Le modèle écolo-progressiste d’aujourd’hui qui veut zigouiller la planète après y avoir mis bon ordre (elle a du mal avec la Russie, mais on verra…) en vient. Tout montre que le Prisonnier est la seule série télé à garder chez soi ; le reste est divertissement.

La fille est un agent de la police de la pensée (mot remis à la mode par Annie Kriegel qui parla de police juive de la pensée un jour…) :

« Mais cette fille en particulier lui donnait l’impression qu’elle était plus dangereuse que les autres. Une fois, alors qu’ils se croisaient dans le corridor, elle lui avait lancé un rapide regard de côté qui semblait le transpercer et l’avait rempli un moment d’une atroce terreur. L’idée lui avait même traversé l’esprit qu’elle était peut-être un agent de la Police de la Pensée. C’était à vrai dire très improbable. Néanmoins, il continuait à ressentir un malaise particulier, fait de frayeur autant que d’hostilité, chaque fois qu’elle se trouvait près de lui quelque part. »

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Ces créatures (rousses comme on a dit) sont conditionnées. Intervient le fameux épisode Goldstein :

« Comme d’habitude, le visage d’Emmanuel Goldstein, l’Ennemi du Peuple, avait jailli sur l’écran. Il y eut des coups de sifflet çà et là dans l’assistance. La petite femme rousse jeta un cri de frayeur et de dégoût. Goldstein était le renégat et le traître. Il y avait longtemps (combien de temps, personne ne le savait exactement) il avait été l’un des meneurs du Parti presque au même titre que Big Brother lui-même. Il s’était engagé dans une activité contre-révolutionnaire, avait été condamné à mort, s’était mystérieusement échappé et avait disparu. »

Dans ce monde de fonctionnaires froides et sans enfants (futures commissaires de Bruxelles) il ne faut pas bouger le petit doigt :

« Deux doigts de sa main droite étaient tachés d’encre. C’était exactement le genre de détail qui pouvait vous trahir. Au ministère, quelque zélateur au flair subtil (une femme, probablement, la petite femme rousse ou la fille brune du Commissariat aux Romans) pourrait se demander pourquoi il avait écrit à l’heure du déjeuner, pourquoi il s’était servi d’une plume démodée, et surtout ce qu’il avait écrit, puis glisser une insinuation au service compétent. »

La chasse au sexe « hétérosexuel » est devenue une activité mainstream en Occident. Dans le monde d’Orwell on en est déjà là comme on sait :

« Le but du Parti n’était pas simplement d’empêcher les hommes et les femmes de se vouer une fidélité qu’il pourrait être difficile de contrôler. Son but inavoué, mais réel, était d’enlever tout plaisir à l’acte sexuel. Ce n’était pas tellement l’amour, mais l’érotisme qui était l’ennemi, que ce fût dans le mariage ou hors du mariage. »

Les naissances sont raréfiées et contrôlées (revoyez mon texte sur Platon et son livre VIII – de la République) :

« Tous les mariages entre membres du Parti devaient être approuvés par un comité appointé et, bien que le principe n’en eût jamais été clairement établi, la permission était toujours refusée quand les membres du couple en question donnaient l’impression d’être physiquement attirés l’un vers l’autre. La seule fin du mariage qui fût admise était de faire naître des enfants pour le service du Parti. »

Cible importante, l’érotisme supérieur (voyez l’hindouisme ou Daniélou, le culte de l’Amour au Moyen Age) et même le plaisir sexuel :

« La seule fin du mariage qui fût admise était de faire naître des enfants pour le service du Parti. Le commerce sexuel devait être considéré comme une opération sans importance, légèrement dégoûtante, comme de prendre un lavement. Cela non plus n’avait jamais été exprimé franchement mais, d’une manière indirecte, on le rabâchait dès l’enfance à tous les membres du Parti. »

L’on se rapproche d’une séparation totale (Philippe Muray me parlait en 2002 d’un projet de couvre-feu pour les hommes en Suède, c’est dommage, ils ne sont pas encore allés jusque-là). On évoque une insémination artificielle :

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« Il y avait même des organisations, comme celle de la ligue Anti-Sexe des Juniors, qui plaidaient en faveur du célibat pour les deux sexes. Tous les enfants devraient être procréés par insémination artificielle (artsem, en novlangue) et élevés dans des institutions publiques.

Winston savait que ce n’était pas avancé tout à fait sérieusement, mais ce genre de concept s’accordait avec l’idéologie générale du Parti. »

Ensuite on se rapproche de ce qui nous est arrivé. Le porno, la pseudo-libération, le web et l’abjection ont tué le « sexe » (le « faire l’Amour ») chez nous comme elles doivent le tuer dans le monde d’Orwell :

« Le Parti essayait de tuer l’instinct sexuel ou, s’il ne pouvait le tuer, de le dénaturer et de le salir. Winston ne savait pas pourquoi il en était ainsi, mais il semblait naturel qu’il en fût ainsi et, en ce qui concernait les femmes, les efforts du Parti étaient largement couronnés de succès. »

Le prix Nobel péruvien Vargas Llosa de passage dans une librairie universitaire US avait noté la disparition du sexe (il cherchait en amateur éclairé de la littérature érotique) et de toute culture d’ailleurs. La cancel culture a effacé presque tout (même l’orthographe) et elle effacera tout.

Le système orwellien tire ainsi parti des femmes :

« Winston apprit avec étonnement que, sauf le directeur du Commissariat, tous les travailleurs du Pornosec étaient des femmes. On prétendait que l’instinct sexuel des hommes étant moins facile à maîtriser que celui des femmes, ils risquaient beaucoup plus d’être corrompus par les obscénités qu’ils maniaient.

– Ils n’aiment pas avoir là des femmes mariées, ajouta-t-elle. On suppose toujours que les filles sont tellement pures ! En tout cas, il y en a une ici qui ne l’est pas.

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Elle avait eu son premier commerce amoureux à seize ans avec un membre du Parti âgé de soixante ans, qui se suicida plus tard pour éviter d’être arrêté. »

Revenons-en au projet orwellien occidental ; à la fin du livre tout est révélé lumineusement ; on a Macron, sa clique, le prince Charles (pour moi il ne sera jamais Roi), Bill Gates, Harari-Schwab et tout le reste (pour comprendre ces gens lisez les textes de Balazs sur les eunuques) :

« Dans notre monde, il n’y aura pas d’autres émotions que la crainte, la rage, le triomphe et l’humiliation. Nous détruirons tout le reste, tout. »

Cela c’est la France actuelle.

Mais continuons : on va briser le sexe, la famille, la culture, et même la science (j’allais dire surtout la science, car la natalité et la mortalité…) ! Orwell donc :

« Nous écrasons déjà les habitudes de pensée qui ont survécu à la Révolution. Nous avons coupé les liens entre l’enfant et les parents, entre l’homme et l’homme, entre l’homme et la femme. Personne n’ose plus se fier à une femme, un enfant ou un ami. Mais plus tard, il n’y aura ni femme ni ami. Les enfants seront à leur naissance enlevés aux mères, comme on enlève leurs œufs aux poules. L’instinct sexuel sera extirpé. La procréation sera une formalité annuelle, comme le renouvellement de la carte d’alimentation. Nous abolirons l’orgasme. Nos neurologistes y travaillent actuellement. Il n’y aura plus de loyauté qu’envers le Parti, il n’y aura plus d’amour que l’amour éprouvé pour Big Brother. Il n’y aura plus de rire que le rire de triomphe provoqué par la défaite d’un ennemi. Il n’y aura ni art, ni littérature, ni science. »

Dans un monde nu, un monde à poil, il ne restera que l’exercice du pouvoir (merci Jouvenel pour ton livre) : Breton, Leyen, Macron, Biden et leurs remplaçants vont se régaler jusqu’au bout :

« Quand nous serons tout-puissants, nous n’aurons plus besoin de science. Il n’y aura aucune distinction entre la beauté et la laideur. Il n’y aura ni curiosité, ni joie de vivre. Tous les plaisirs de l’émulation seront détruits. Mais il y aura toujours, n’oubliez pas cela, Winston, il y aura l’ivresse toujours croissante du pouvoir, qui s’affinera de plus en plus. Il y aura toujours, à chaque instant, le frisson de la victoire, la sensation de piétiner un ennemi impuissant. Si vous désirez une image de l’avenir, imaginez une botte piétinant un visage humain… éternellement. »

Le monde du vaccin, du Grand Reset et des guerres permanentes de l’Océanie est ainsi exposé (je ne donne pas les pages pour que vous les recherchiez et que vous le relisiez ce bouquin) :

« Commencez-vous à voir quelle sorte de monde nous créons ? C’est exactement l’opposé des stupides utopies hédonistes qu’avaient imaginées les anciens réformateurs. Un monde de crainte, de trahison, de tourment. Un monde d’écraseurs et d’écrasés, un monde qui, au fur et à mesure qu’il s’affinera, deviendra plus impitoyable. Le progrès dans notre monde sera le progrès vers plus de souffrance. L’ancienne civilisation prétendait être fondée sur l’amour et la justice. La nôtre est fondée sur la haine. Dans notre monde, il n’y aura pas d’autres émotions que la crainte, la rage, le triomphe et l’humiliation. Nous détruirons tout le reste, tout. »

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Et comme on nous disait que Paris se couvre de rats et de punaises sous le règne interminable et minable (mais populaire) d’Anne H. :

– Le rat, dit O’Brien en s’adressant toujours à son invisible auditoire, est un carnivore, bien qu’il soit un rongeur. Vous avez dû entendre parler de ce qui se passe dans les quartiers pauvres de la ville. Dans certaines rues, les femmes n’osent, même pour cinq minutes, laisser seul leur bébé dans la maison. Les rats l’attaqueraient certainement. En très peu de temps, ils l’éplucheraient jusqu’aux os. Ils attaquent aussi les malades et les mourants. Ils savent reconnaître, avec une étonnante intelligence, si un homme est impotent.

Sources :

http://www.bouquineux.com/index.php?telecharger=898&O...

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https://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A9volte_de_M%C3%BCnster

Réflexions sur l'état du monde: entre défaite et escalade

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Réflexions sur l'état du monde: entre défaite et escalade

Rafael Poch

Bron: https://www.lahaine.org/mundo.php/entre-la-derrota-y-la         

Un an après l'attaque du Nord Stream, menée sur ordre de Biden, l'unité du bloc occidental est beaucoup moins solide qu'il n'y paraît.

Les guerres sont sujettes à toutes sortes de rebondissements inattendus, mais dans la phase actuelle, la défaite militaire de l'Ukraine est de plus en plus évidente. Tout comme la réponse des soutiens occidentaux de Kiev: la fourniture de missiles à longue portée, capables de frapper la Crimée et de mettre les villes russes à portée.

Aujourd'hui marque le premier anniversaire de l'attentat qui a fait exploser le gazoduc Nord Stream dans les pays baltes. À un an de distance, le fait que les États-Unis aient attaqué un intérêt stratégique de l'Allemagne, leur principal allié en Europe, semble toujours être l'un des faits centraux du conflit ukrainien. Cette attaque a eu un effet dévastateur sur le leadership américain en Europe occidentale. Il a gravement endommagé l'économie allemande et en dit long sur la fragilité de la cohésion interne de l'OTAN, sur la mesure dans laquelle l'organisation militaire dirigée par les États-Unis sur le continent exerce une influence sur l'Union européenne, son bras politique subordonné. L'omertá des personnes concernées, en particulier des hommes politiques allemands humiliés, ainsi que la collaboration de leurs services secrets et de leurs médias aux écrans de fumée grossiers et divers de la CIA pour dissimuler et détourner l'attention de la simple réalité des responsables de tout cela, contribuent également à l'image que nous avons sous les yeux.

Ce tableau est déterminé et dominé par les élections présidentielles de l'année prochaine aux États-Unis. Les États-Unis sont la seule puissance capable de forcer la paix, mais tous les ingrédients et circonstances entourant ces élections pointent plutôt vers une dynamique de guerre, c'est-à-dire vers l'escalade du conflit ouvert en Ukraine et l'approfondissement du conflit latent en Asie de l'Est. Voyons ce qu'il en est.

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Au sommet de la pyramide, nous avons un président sénile, Joe Biden, sur lequel les médias auraient fait leurs chous gras s'il s'était agi d'un chef d'État russe ou chinois. En cas d'incapacité, Biden a à ses côtés une vice-présidente, Kamala Harris, qui brille par son incompétence. En deuxième ligne, le dossier ukrainien est dirigé par un trio d'universitaires sans cervelle: le secrétaire d'État Blinken, le conseiller à la sécurité nationale Sullivan et la secrétaire d'État adjointe Nuland. Ce personnel imparfait est, à son tour, engagé dans les luttes intestines les plus dures et les plus spectaculaires de l'establishment de Washington depuis la guerre civile, ce qui inclut des actions juridiques transversales visant à mettre le candidat adverse en prison. Les deux camps se sont criminalisés mutuellement et sont fermement convaincus que s'ils perdent les élections, ils seront poursuivis, et qu'ils ne peuvent donc pas perdre. Couplée à la possibilité d'une récession, cette pression pourrait faire du scénario d'une guerre ouverte avec la Russie la plus grande ressource de survie de l'administration Biden.

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Le journaliste trumpiste Tucker Carlson, que la crise de l'establishment a transformé en dissident franc-tireur très populaire, résume la situation: "Nous avons déjà perdu le contrôle du monde, nous allons maintenant perdre le contrôle et la domination mondiale du dollar, et lorsque cela se produira, nous aurons une pauvreté digne de la Grande Dépression. Nous sommes déjà en guerre avec la Russie, nous finançons et armons leurs ennemis, mais nous pouvons aller jusqu'à la guerre directe, nous pourrions faire un "Golfe du Tonkin" en Pologne (le faux incident fabriqué pour justifier l'intervention au Vietnam) et dire "les Russes l'ont fait"".

Sur le champ de bataille, la situation ne pouvait pas être pire pour l'Ukraine. Le miracle volontariste d'une contre-offensive en infériorité numérique, avec appui d'artillerie et appui aérien, n'a pas fonctionné, comme les experts russes l'avaient prédit, avec le plus grand sérieux et sans forfanterie, dès avant l'été. Les Wunderwaffen occidentales, dont la fourniture a coûté si cher, sont montrés en flammes tous les soirs dans les journaux télévisés russes (les soldats reçoivent de fortes primes pour la destruction des Bradley, Stryker, Leopard, Challenger AMX-10 et autres véhicules blindés). Le plus terrible est ce carnage effroyable et irréparable qui semble rendre impossible une nouvelle offensive ukrainienne au printemps par manque d'effectifs (alors que l'armée russe dispose d'une réserve de 300.000 hommes qui n'ont pas encore été déployés) et annonce plutôt l'effondrement militaire ukrainien. Il est donc de plus en plus probable qu'une sorte de coup d'État militaire à Kiev chassera Zelensky et ses semblables du pouvoir, imposera le réalisme et acceptera de lourdes pertes territoriales qui auraient pu être évitées en décembre 2021 s'il Kiev avait adopté une attitude différente.

Début septembre, les sources les plus fiables estimaient les pertes ukrainiennes à ce jour dans le conflit entre 240.000 et 400.000, et que celles-ci étaient trois fois supérieures aux pertes russes (80.000 morts à la mi-septembre selon la BBC). Cette estimation générale incertaine a trouvé une confirmation locale concrète dans les déclarations du responsable du recrutement de la région ukrainienne de Poltava, Vitali Berezhni: "Sur cent personnes mobilisées à l'automne dernier, il en reste entre dix et vingt, le reste est mort, blessé ou invalide". A Poltava, le plan de recrutement n'est rempli qu'à 13%, précise-t-il, tandis que son homologue de Lvov reconnaissait en août que seul un appelé sur cinq se présentait.

L'absentéisme est très répandu. Si les gardes-frontières ukrainiens affirment avoir empêché plus de 20.000 conscrits de fuir le pays, il est difficile de faire respecter la demande du gouvernement de Kiev d'expulser les plus de 650.000 Ukrainiens en âge de servir dans l'armée, enregistrés dans l'Union européenne en tant que réfugiés. Dans les missions diplomatiques ukrainiennes à l'étranger, 40 à 60% des employés ne sont pas rentrés au pays à la fin de leur séjour. Sur les vingt personnes qui devaient quitter l'ambassade des États-Unis l'année dernière, une seule est revenue, et dans certaines ambassades, personne ne revient du tout. Cette réalité de la boucherie et de la clandestinité est apparue de temps à autre dans la presse britannique au cours de l'année écoulée, mais dans la presse européenne et nationale, elle reste rare, alors qu'elle est essentielle pour définir la situation.

Dans ce contexte, les exigences et les récriminations des autorités ukrainiennes à l'égard de leurs amis européens se multiplient. La lassitude face au gouffre sans fond et sans résultat de l'effort financier et militaire de l'Europe s'est manifestée dans la campagne électorale polonaise, pimentée par un désaccord sur l'exportation des céréales ukrainiennes vers l'Europe. Le président Duda a comparé l'Ukraine à un homme qui se noie et qui peut entraîner au fond de l'eau tous ceux qui tentent de le sauver. Le Premier ministre Mateusz Morawiecki a déclaré que la Pologne cesserait d'envoyer des armes à l'Ukraine et que toutes les nouvelles armes qu'elle achèterait serviraient à s'armer elle-même. Un porte-parole du gouvernement à Varsovie annonce que l'aide aux réfugiés, qui comprend "l'exemption de l'enregistrement de la résidence et des permis de travail, l'accès gratuit à l'éducation, aux soins médicaux et familiaux", ne sera pas prolongée l'année prochaine.

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Jusqu'à présent, les réfugiés ukrainiens en Europe occidentale "se sont bien comportés" et sont "très reconnaissants" envers ceux qui les ont accueillis - ils n'oublieront pas cette générosité, a déclaré M. Zelenski dans une interview accordée à The Economist, mais "ce ne serait pas une bonne chose pour l'Europe si ces personnes étaient acculées dans un coin", ajoute-t-il dans ce qui semble être une menace voilée de créer de la déstabilisation.

L'armée ukrainienne épuisant ses réserves et le flux d'armes et de munitions occidentales s'amenuisant, la solution a consisté à franchir une nouvelle étape dans le jeu des risques: se fournir chez les Britanniques, les Français et les Américains (les Allemands y réfléchissent encore) des missiles à longue portée capables d'atteindre les villes russes. Des attaques de missiles sur la Crimée ont été rendues possibles grâce aux renseignements américains et britanniques et aux informations et technologies de localisation. Tous ces éléments incitent la Russie à étendre son occupation territoriale au reste de la côte ukrainienne de la mer Noire, jusqu'à Odessa et la frontière roumaine, et même à répondre par des attaques contre des cibles de l'OTAN, pour lesquelles Moscou semble disposer d'importantes capacités en matière de missiles. Citant des sources des services de renseignement américains, le journaliste Seymour Hersh avance que l'attaque de cibles de l'OTAN était préconisée par le chef des insurgés de Wagner, Evgeni Prigozhin, et que c'est pour cette raison qu'il a été éliminé. Qui sait, mais la prudence du Kremlin est, en tout état de cause, soumise à un test de risque de plus en plus important.

Les décideurs politiques occidentaux restent déterminés à prouver le bien-fondé de la thèse russe sur la guerre en Ukraine. Le 7 septembre, devant le Parlement européen, l'éloquent secrétaire général de l'OTAN, Jens Stoltenberg, a déclaré que "Poutine est entré en guerre pour empêcher que l'OTAN ne s'approche davantage de ses frontières" et que si l'OTAN et les États-Unis avaient accepté les conditions formulées par le Kremlin en décembre 2021, il n'y aurait pas eu d'invasion de l'Ukraine.

Stoltenberg a également réaffirmé ce que le chef du Stratcom (commandement stratégique) américain, Charles Richard, avait déclaré en novembre 2022, à savoir que la guerre en Ukraine était un "échauffement" en vue d'une guerre contre la Chine. Si l'Ukraine réussit, les États-Unis pourront se concentrer sur la Chine, a déclaré M. Stoltenberg ce mois-ci. "Si les États-Unis s'inquiètent de la Chine, l'Ukraine doit gagner. Si Kiev gagne, nous aurons la deuxième armée d'Europe et il sera plus facile de se concentrer sur la Chine et moins sur la situation en Europe. Quoi qu'il en soit, la situation en Asie de l'Est est sans ambiguïté.

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Le Japon a doublé ses dépenses militaires et relégué au second plan l'article 9 de sa constitution, pourtant hostile à la guerre. Né à Tokyo dans une famille d'Hiroshima et ayant des parents tués par la bombe atomique, le Premier ministre Fumio Kishida a organisé de façon obscène le dernier conclave du G-7 sur la guerre à Hiroshima en mai, sans la moindre allusion aux lanceurs de la bombe. En Corée du Sud, l'ultra-président, Yoon Suk-yeol, est également un militariste convaincu qui veut que des armes nucléaires américaines soient déployées sur son territoire (jusqu'à présent soupçonnées de n'exister qu'en "stockage") et accueille une flottille entière de porte-avions nucléaires dans ses eaux. La Corée du Nord poursuit ses tirs réguliers de missiles démonstratifs et conclut de nouveaux accords militaires avec Moscou. Aux Philippines, les États-Unis établissent quatre nouvelles bases militaires et l'Australie dépense des milliards pour de nouveaux sous-marins nucléaires contre la Chine. Même la Nouvelle-Zélande n'a pas pu résister et annonce des augmentations de ses budgets militaires.

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L'ancien Premier ministre australien Paul Keating a résumé la situation: "Les Européens se sont battus les uns contre les autres pendant la majeure partie des trois cents dernières années, dont deux guerres mondiales au siècle dernier. Exporter ce poison malin vers l'Asie revient à accueillir ce fléau". Le secrétaire général de l'OTAN, Jens Stoltenberg, "est un parfait imbécile qui se comporte comme un agent américain au lieu d'agir comme un leader et un porte-parole de la sécurité européenne", a déclaré M. Keating.

Texte intégral : https://www.lahaine.org/mundo.php/entre-la-derrota-y-la

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De la centralité du dollar selon le Forum économique mondial de Davos à la dédollarisation du Club Valdai

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De la centralité du dollar selon le Forum économique mondial de Davos à la dédollarisation du Club Valdai

Par Alfredo Jalife Rahme

Source : https://noticiasholisticas.com.ar/del-dolarcentrismo-del-...

Dans la "phase post-Ukraine (https://bit.ly/3Q9Fldm )", le président Poutine a expliqué lors de la 20ème réunion annuelle du Club Valdai que derrière l'opération en Ukraine se profile la "construction d'un nouvel ordre mondial" de nature multipolaire (https://bit.ly/48FZAq9 ).

Lors de cette réunion, Jeffrey Sachs, économiste à l'université de Columbia, a affirmé que "l'ère du système financier international dominé par le dollar touche à sa fin et cela se produira au cours de la prochaine décennie (https://bit.ly/3tn5DzM )". Selon lui, les États-Unis ont abusé des privilèges du dollar en tant que monnaie préférée pour le commerce mondial et les réserves des banques centrales: "L'un des privilèges était la capacité d'emprunter à des taux d'intérêt bas. Cela a permis de maintenir un système de paiement international très efficace, mais les États-Unis ont abusé de ce système, en particulier au cours des 15 dernières années". Il a expliqué que les États-Unis "sont devenus dépendants de l'utilisation du système financier pour atteindre des objectifs géopolitiques".

Le déclin progressif des États-Unis se reflète dans la production mondiale : "aujourd'hui, ils ne sont responsables que de 15% de la production mondiale, alors qu'après la Seconde Guerre mondiale, ils en représentaient 30%". À mon avis, ce chiffre augmentera avec la montée irrésistible des 11 pays du groupe BRICS qui, après le sommet tectonique de Johannesburg, affichent un PIB (mesuré en parité de pouvoir d'achat) de 37%, contre 29,2% pour les pays du G7 en difficulté, de surcroît sur le point d'entrer en "stagflation (le pire des mélanges: stagnation et inflation)" et en proie à une grave crise de la dette.

Au milieu de la démondialisation et des régionalismes de proximité, le fanatique mondialiste allemand Klaus Schwab - avec les prétentions d'un Zeus post-moderne à 85 ans -, chef du Forum économique mondial (WEF), et allié du méga-spéculateur au masque philanthropique (https://amzn.to/2MR0PfM ), George Soros, a halluciné dans la "phase post-Ukraine (https://bit.ly/46C0zpl  )" que "le monde ne sera plus gouverné par des superpuissances comme les Etats-Unis [...] Il sera gouverné par des acteurs comme BlackRock et Bill Gates". Ni plus ni moins que le gouvernement mondial de la ploutocratie anglo-saxonne (https://bit.ly/3RRcR9g ) !

Dans la "phase post-Ukraine", la fracture de la biosphère américaine contre le G-2 de la Russie et de la Chine (https://bit.ly/3NnaoQg ) est encore plus profonde et je ne vois pas comment le WEF de Schwab/Soros peut imposer son gouvernement mondial dans l'anglosphère, sans parler de l'"Occident", alors que l'ingouvernabilité et l'agitation civile se répandent dans le G-7.

Depuis 52 ans, avec sa naissance en 1971, à l'unisson avec le découplage du dollar de l'"étalon-or" par Nixon, le WEF a été un phare et un forum pour la mondialisation néolibérale et, depuis la dissolution de l'URSS, pour le dollaro-centrisme.

Le problème est que la Grande-Bretagne, l'un des meilleurs alliés du WEF pour la gouvernance mondiale - la grande remise à zéro (https://bit.ly/3KoMoey ), le pernicieux Agenda 2030 et le contrôle des médicaments/vaccins GAVI (https://bit.ly/3F8cfV8 ) - a radicalement inversé son "agenda vert" géopolitisé lorsque son premier ministre Rishi Sunak est revenu, avec humilité, sur l'exploitation des hydrocarbures de la mer du Nord (https://bit.ly/3tr4bfS ).

En réalité, la mondialisation néolibérale ploutocratique et son dollaro-centrisme ont détruit la dichotomie topographique séculaire des 17ème et 18ème siècles (Parlement britannique et Assemblée française) avec le clivage "gauche-droite", lorsque la "gauche travestie" - à la recherche d'un pouvoir cannibale plutôt que de la défense de ses principes inaliénables - est devenue "mondialiste" et a adopté les canons du WEF et de son gouvernement mondial ploutocratique, que j'ai exposés dans Nationalisme vs. mondialisme : La dichotomie du 21e siècle avant l'IA (https://bit.ly/46irEyl  ).

Aujourd'hui, Alexandre Douguine, l'idéologue du président Poutine, a adopté la même dichotomie pour le 21ème siècle : "Il n'y a que deux partis dans le monde, les mondialistes du grand reset et les antimondialistes du grand réveil (https://bit.ly/3PMVWlv )".

Douguine a omis d'ajouter que les "antimondialistes" sont des souverainistes/nationalistes à l'horizon universel.

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