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mardi, 16 septembre 2025

L'essor de l'Asie et l'avenir de la mondialisation

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L'essor de l'Asie et l'avenir de la mondialisation

Markku Siira

Source: https://geopolarium.com/2025/09/09/aasian-nousu-ja-global...

La fin de la mondialisation a été prédite à la suite des crises du 21ème siècle, telles que les attentats du 11 septembre, la crise financière et la pandémie de coronavirus. Cependant, l'analyste stratégique Parag Khanna affirme que la mondialisation ne s'essouffle pas, mais qu'elle se transforme, l'Asie devenant son centre. Bien que la vision de Khanna sur le rôle de l'Asie soit convaincante, l'avenir de la mondialisation est complexe en raison de la concurrence technologique entre les grandes puissances et des divisions qu'elle crée.

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Khanna (photo) décrit la mondialisation comme la construction de réseaux qui englobent les échanges commerciaux, les capitaux, les idées et les technologies. Selon lui, le centre de la mondialisation s'est déplacé de l'Occident vers l'Asie, où le commerce et les investissements entre les pays, soutenus par exemple par l'accord de libre-échange régional RCEP (Regional Comprehensive Economic Partnership, qui couvre 15 pays d'Asie et du Pacifique), renforcent l'intégration régionale.

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La mondialisation est un phénomène fragile, menacé par le protectionnisme, les guerres commerciales et la concurrence entre les États-Unis et la Chine, par exemple dans le développement de l'intelligence artificielle et des réseaux sans fil avancés. Cette concurrence divise le monde en camps technologiques et fragmente les marchés mondiaux.

Khanna utilise le terme « asiatique » pour décrire la convergence économique, culturelle et politique que l'on observe en Asie.

Le développement qui a débuté avec la reconstruction du Japon s'est rapidement étendu à des économies en pleine croissance telles que Hong Kong, Singapour, la Corée du Sud et Taïwan, ainsi qu'à la Chine et à l'Asie du Sud-Est, créant ainsi un réseau d'interdépendance. Cependant, l'essor technologique de la Chine, comme la domination de Huawei dans le domaine de la 5G, a suscité des réactions négatives en Occident. Les restrictions et les sanctions imposées aux exportations technologiques pourraient ralentir l'intégration asiatique et affaiblir le caractère ouvert de la mondialisation.

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Les atouts de l'Asie sont sa population jeune, ses bas salaires et ses investissements dans les infrastructures, qui soutiennent la croissance économique. Cependant, le développement technologique nécessite une main-d'œuvre qualifiée et, en Inde par exemple, le chômage des jeunes et la qualité inégale de l'éducation limitent le potentiel. En outre, la stabilité politique est remise en question lorsque les gouvernements utilisent des technologies de pointe pour restreindre les libertés civiles, ce qui peut accroître les tensions sociales et ébranler la confiance dans la liberté promise par la mondialisation.

La concurrence technologique divise le monde en deux écosystèmes dominés respectivement par les États-Unis et la Chine, où les normes et la gestion des données diffèrent. Les controverses autour de TikTok et WeChat aux États-Unis montrent par exemple comment la technologie crée de nouvelles frontières. Les petits pays asiatiques, comme le Vietnam ou les Philippines, peuvent se retrouver pris au piège de la dépendance technologique, par exemple en ce qui concerne les réseaux 5G chinois ou les semi-conducteurs occidentaux, ce qui accroît les inégalités entre les pays.

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Même si Khanna affirme que la pauvreté a diminué en Asie, les bénéfices de la mondialisation sont répartis de manière inégale et les écarts de revenus se creusent. L'automatisation peut remplacer des millions de travailleurs et accroître la popularité du populisme politique, ce qui remet en question la légitimité de la mondialisation.

Selon Khanna, le changement climatique est le plus grand défi pour l'Asie et la mondialisation, même si ses causes et son ampleur font encore l'objet de désaccords. L'Asie souffre de conditions climatiques extrêmes et est le plus grand producteur mondial d'émissions de dioxyde de carbone, la Chine représentant à elle seule environ 30% des émissions mondiales.

Le développement et l'adoption des énergies vertes, souvent présentés comme des solutions, posent toutefois problème. L'énergie solaire et éolienne dépendent de matières premières critiques, telles que le lithium et les métaux rares, dont l'extraction cause des dommages environnementaux importants et accroît les tensions géopolitiques. En outre, les sanctions commerciales et les litiges en matière de brevets ralentissent le partage des innovations, ce qui empêche la transition vers une économie durable et remet en question la capacité des technologies vertes à résoudre les défis environnementaux sans compromis plus larges.

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L'avenir de la mondialisation se dessine en fonction de la concurrence technologique. L'essor de l'Asie s'inscrit dans cette transition, mais la pandémie et les clivages technologiques encouragent des pays comme l'Inde et les pays de l'ANASE à développer leur autosuffisance, par exemple dans le domaine des semi-conducteurs. Cela pourrait conduire à une « mondialisation locale », dans laquelle le commerce se concentrerait sur des blocs régionaux.

La numérisation et l'intelligence artificielle augmentent le flux de données, mais les différences réglementaires peuvent créer de nouveaux obstacles.

Même si le développement durable prévu par l'agenda des Nations unies nécessite des technologies neutres en carbone, les économies asiatiques, en particulier la Chine et l'Inde, restent dépendantes du charbon, du gaz naturel et du pétrole brut. La Chine a toutefois investi massivement dans l'économie verte, par exemple dans le développement de la plus grande usine de production d'hydrogène vert au monde, qui soutient la transition vers des sources d'énergie à faibles émissions.

Les répercussions sociales de la technologie sont considérables: elle crée des opportunités, mais elle écarte également des travailleurs, en particulier dans les secteurs à faible niveau de compétences en Asie. Si les avantages sont concentrés entre les mains d'une minorité, le mécontentement social pourrait affaiblir le soutien à la mondialisation.

Khanna constate : « À chaque moment de l'histoire, une partie du monde atteint son apogée. En ce moment, c'est l'Asie. » Cela est en partie vrai, mais l'avenir de la mondialisation est incertain. Le succès de l'Asie dépend de la résolution des défis technologiques, écologiques et sociaux. La prochaine étape de la mondialisation sera une lutte pour trouver un équilibre entre la concurrence technologique, l'environnement et l'équité.

Paléotrumpisme et néotrumpisme

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Paléotrumpisme et néotrumpisme

Daniele Perra

Après la trahison substantielle des revendications antisystème lors de la première expérience trumpiste (l’administration du magnat new-yorkais a agi dans une continuité quasi totale avec celle de ses prédécesseurs sur le plan géopolitique et, sur certains aspects, a même préparé le terrain pour son successeur), la machine de propagande s’est vue obligée de doter le message du candidat républicain d’une nouvelle « virginité ». Cette fois, libéré de l’inspiration pseudo-religieuse « à la QAnon » (une opération psychologique au succès indéniable, vu l’influence qu’elle a eue aussi sur de larges secteurs de la droite et une partie de la gauche européenne), le message trumpiste semble s’orienter vers des voies bien plus pragmatiques, visant une forme de techno-mercantilisme postmoderne qui fascine (et pas qu’un peu) les courants prométhéens de la droite occidentale, ainsi que certains représentants de l’ultra-capitalisme mondialisé.

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Dans un article publié sur son site graymirror.substack.com, sous le titre emblématique Gaza and the laws of war, l’ancien programmeur informatique de la Silicon Valley (et aujourd’hui activiste politico-idéologique) Curtis Yarvin défend la nécessité de laisser à Israël toute liberté d’agir (comme bon lui semble) dans la bande qu'est le territoire palestinien. À l’IDF devraient être attribués les mêmes pouvoirs dont bénéficiaient les Britanniques sur le mandat de Palestine (y compris celui de déplacer massivement une partie de la population). Selon lui, ce serait la seule manière de mettre fin, en un temps relativement court, à un conflit qui pèse directement sur les épaules des contribuables américains [1].

Au final, le prix que paierait le peuple palestinien ne serait que celui de quelques « transferts de propriété » aux nouveaux colons sionistes. Ainsi, la « Nouvelle Gaza », construite par l’homme d’affaires judéo-américain Jared Kushner (gendre de Donald J. Trump), deviendrait une sorte de « Los Angeles de la Méditerranée »: « une ville qui vaudrait six mille milliards de dollars » et qui rendrait millionnaires les Palestiniens eux-mêmes (sic !). En effet, tous ceux qui accepteraient volontairement d’abandonner leurs maisons en front de mer (une « zone côtière très précieuse », selon Kushner) seraient récompensés et pourraient enfin s’installer massivement à Dubaï [2].

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À cette fin, Yarvin (photo) ne se limite pas à interpréter le conflit en termes purement monétaires, en termes de flux de capitaux avant tout (ce qui, d’ailleurs, n’a rien d’original de la part d’un « penseur » américain), mais il s’aventure également dans des questions relatives à la tactique militaire, exprimant son enthousiasme pour la soi-disant « doctrine Dahiya » de l’armée israélienne. Cette doctrine, élaborée par le général Gadi Eisenkot (photo) au début des années 2000, prévoit la destruction systématique de toutes les infrastructures civiles (écoles, hôpitaux, centres de loisirs, etc.) qui pourraient de quelque manière être liées aux groupes de Résistance (Hamas et Hezbollah en premier lieu).

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Cette « doctrine » fut utilisée, avec peu de succès à vrai dire, lors de la « guerre des 33 jours » au Liban en 2006. Ciblant directement les infrastructures civiles, l’objectif serait de mettre la pression sur l’ennemi et de pousser les civils survivants à fuir afin de pouvoir, ensuite, attaquer la même cible (et les militaires à proximité) avec plus de force. La « doctrine Dahiya » est donc intrinsèquement liée à l’idée de « recours disproportionné à la force » sur laquelle repose une grande partie de la stratégie militaire sioniste actuelle.

Les idées de Yarvin font écho à celles présentées par J. D. Vance (le sénateur de l’Ohio choisi par Donald J. Trump comme vice-président dans la course à son second mandat présidentiel). En effet, Vance a déclaré en juillet dernier qu’Israël devrait mettre rapidement fin au conflit dans la bande de Gaza afin de pouvoir se concentrer (avec les monarchies sunnites participantes aux « Accords d’Abraham ») sur la menace iranienne [3].

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À ce sujet, il est intéressant de noter que parmi les principales références idéologiques de Vance figure le journaliste Sohrab Ahmari (photo - ancien rédacteur du Wall Street Journal). Fils d’Iraniens sécularisés et anti-khomeynistes, il a émigré aux États-Unis alors qu’il était adolescent et, après avoir d’abord adhéré à certains groupes trotskystes, a fini par passer dans le camp néoconservateur (Après tout, il s’agit du même parcours suivi par le père idéologique du néoconservatisme, l’Américain Irving Kristol, de confession israélite, qui, à partir de positions trotskystes défendues en 1960, a commencé à élaborer les thèses néoconservatrices dans certaines revues liées à la communauté juive nord-américaine). Ahmari, après avoir voté pour Hillary Clinton en 2016, a opté pour un changement de cap décisif, voyant en Donald J. Trump la seule chance de sauvegarder l’hégémonie mondiale américaine [4].

Il n’est donc pas surprenant qu’une autre référence idéologique de J. D. Vance soit Patrick Deneen, qui a théorisé un « ordre mondial américain post-libéral »: c’est-à-dire un ordre qui ne dépasse pas l’hégémonie mondiale des États-Unis (Donald J. Trump lui-même a défendu la nécessité d’imposer des droits de douane élevés — comme de véritables armes — à ceux qui n’utilisent pas le dollar comme monnaie de référence pour le commerce international) [5], mais qui la réajuste simplement selon de nouveaux axes.

Il semble que Yarvin ait eu une influence notable sur la « vision du monde » particulière de Vance. Sa « pensée » mérite donc une brève analyse. Descendant d’une famille de communistes juifs (du côté paternel), Yarvin aime, par suite, se définir comme « communiste juif » [6], bien qu’il soit considéré à juste titre comme le père théorique des courants néoréactionnaires et des soi-disant « Lumières noires » (dark enlightenment). Au centre de la pensée de Yarvin se trouve le concept de « monarchie profonde » (deep monarchy), qui s’oppose directement à celui d’« État profond » (le fameux « deep State »).

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Selon l’ancien programmeur informatique, la démocratie libérale actuelle n’a plus de sens, puisqu’elle s’est transformée de fait en une forme d’oligarchie (et jusque-là, il est difficile de lui donner tort). À son avis, ce modèle devrait être dépassé d’abord par une forme d’administration dirigée par un « directeur général » (un « CEO », Yarvin utilise toujours des termes « entrepreneuriaux ») qui jouerait effectivement le rôle de « dictateur » et qui ferait table rase des vestiges de « l’État profond » (ce devrait être la tâche de Donald J. Trump, personnalité dotée d’indéniables capacités entrepreneuriales). Ensuite, le « dictateur-CEO » devrait quitter ses fonctions ou assumer lui-même le rôle de monarque et donner naissance à une monarchie postmoderne (sans désignation divine) qui se comporterait comme une « entreprise dotée de souveraineté », basée sur une sorte de « camaraderie techno-entrepreneuriale » et destinée à maximiser les profits et ses propres ressources.

Il convient ici de souligner quelques points. Tout d’abord, le succès de la pensée de Yarvin auprès de la droite occidentale (et/ou « occidentalisée ») est en partie aussi le fruit d’une inévitable erreur de traduction qui conduit de nombreux « non-initiés » à associer le terme anglais « corporations » au corporatisme d’inspiration médiévale européenne ou, même, au fascisme.

En réalité, Yarvin, selon ses propres dires, l’utilise simplement au sens de société/entreprise. Et il n’a aucun problème à se définir comme un « austro-mercantiliste » disciple de Ludwig von Mises (lié donc aux prémisses théoriques de cette école autrichienne qui, avec son individualisme méthodologique — aux côtés du contractualisme, du scepticisme et de l’utilitarisme — représente l’un des quatre courants théoriques du libéralisme économique).

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Il en découle que son « projet monarchique », auquel il rattache l’idée d’« illuminisme noir », vise en fait seulement à donner une structure autocratique au dit libéralisme économique : une sorte de « capitalisme absolu » garanti par le « souverain entrepreneurial ». Deuxièmement, sa vision monarchique-sociétale-financière, bien que dépourvue d’inspiration religieuse, ne semble pas du tout différente du messianique qu'implique la vision d'un « Royaume d’Israël », un royaume que la doctrine rabbinique elle-même veut purement terrestre. Ce n’est pas un hasard si Yarvin, tout en déclarant ne pas croire en Dieu, mais seulement en la physique (on retrouve ici une idée que Carl Schmitt avait associée tant au libéralisme qu’au marxisme-léninisme : réduire le gouvernement à une forme de science exacte, confiée à des spécialistes sélectionnés de façon scientifique), s’identifie aux préceptes de l’orthodoxie juive qui imposent « d’écouter et d’agir ». En elle, en effet, le point central n’est pas de croire en Dieu, ce n’est pas la foi, mais simplement l’exécution des actions requises (même si elles impliquent l’extermination de personnes sans défense).

Troisièmement, il devrait s'avérer assez difficile d’associer les concepts de l’individualisme méthodologique de l’école autrichienne à des formes de « camaraderie » (même exprimées en termes entrepreneuriaux), de corporatisme ou de collectivisme, même si Yarvin estime que « maximiser les profits et les ressources » de la « monarchie/société » équivaut à garantir le « bien commun ».

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Enfin, il est nécessaire d’ouvrir une brève parenthèse sur le concept de « Lumières noires », qui rappelle, d’une certaine manière, l’idée du « Soleil Noir » des SS himmlériens, bien que totalement dépourvue de son message spirituel. À la théorie astronomique du Soleil Noir (c’est-à-dire l’existence d’une étoile effondrée de couleur rouge-brun et de petite taille qui perturbe occasionnellement le système solaire), on a attribué dans certains milieux allemands une signification mystique-ésotérique qui la reliait à la présence/absence d’un Dieu caché, déchu et détrôné. On peut trouver des exemples similaires dans diverses civilisations traditionnelles: l’Atoum égyptien, père des dieux de l’Ancien Empire, qui devint le soleil du monde souterrain suite à l’arrivée de Rê (le « soleil de midi »); le titan Cronos/Saturne, détrôné par son fils Zeus/Jupiter; Apollon, qu’Otto Rahn, chercheur SS, associait à l’Apollyon de l’Apocalypse de saint Jean et donc à Lucifer (l’ange déchu, le prince des ténèbres) [7].

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Mircea Eliade avait déjà souligné l’existence, dans les civilisations traditionnelles d’Eurasie, d’une grande variété de mythes, rites et symboles impliquant plus ou moins clairement la coincidentia oppositorum, la présence de deux divinités opposées ou, même, la parenté entre le Dieu suprême et son rival (le Diable). Souvent, ils étaient présentés comme coéternels, tandis que dans d’autres cas, Dieu semblait incapable d’achever la création sans l’aide du Diable [8].

En ce sens, le luciférisme doit être compris comme une sorte de sentiment de vengeance émanant d’un Dieu détrôné; un renversement des valeurs religieuses traditionnelles au nom du retour au mythe originel. C’est la revanche du titanisme sur les dieux olympiens; la revanche de l’ange déchu sur le Dieu suprême. Ce n’est pas un hasard si l’idéologue du mouvement Azov ukrainien, Olena Semenyaka (un mouvement idéologique et militaire qui, bien qu’il soit un « idiot utile » de l’atlantisme, se réfère symboliquement de diverses manières à l’expérience des SS), s’appuyant sur une interprétation inadéquate de la pensée nietzschéenne, a souvent parlé de la « volonté de puissance luciférienne » comme « sentiment métaphysique de liberté absolue » et comme instrument idéologique d’opposition aux modèles de valeurs dominants dans les sociétés occidentales actuelles.

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Le problème fondamental de telles constructions idéologiques réside dans le fait qu’elles ne comprennent pas que le « luciférisme élitiste » peut difficilement vaincre une construction sociale qui est déjà « luciférienne » dans ses fondements mêmes. En d’autres termes, il s’agit d’une simple contradiction dans les termes.

En effet, pour paraphraser à nouveau Schmitt, la modernité elle-même s’est construite autour d’un « changement de paradigme »: la domination centrale de la société prémoderne (la religion) a été remplacée par une domination périphérique, celle de la technique, qui est rapidement devenue religion. Une religion construite sur la prémisse que tous les problèmes seront résolus par la technique et le progrès infini. Il semble donc, pour le moins, difficile d’espérer une nouvelle affirmation du titanisme alors qu’en réalité, nous y sommes déjà plongés.

En ce sens, Yarvin a le « mérite » de ne pas recourir au mythe. Il sait parfaitement que le Dieu de la Modernité relève des Lumières dans leur version qui est le courant techno-scientifique. Il ne s’y oppose pas par « une inversion de ses valeurs », mais simplement par une accélération absolutiste. Sa pensée, par conséquent, se définit (à raison ?) comme « néoréactionnaire », dans la mesure où elle n’est en rien réactionnaire, mais très « progressiste » ; tout comme les « néofascistes » ou « néonazis » actuels ne sont en rien ni « fascistes » ni « nazis ».

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La « monarchie profonde » de Yarvin, comme nous l'avons déjà mentionné, se résume simplement à l’affirmation utopique d’un « Nouveau Royaume d’Israël » ultramécanisé et fondé sur la domination des plus avancés technologiquement sur les autres. Encore une fois, rien de particulièrement original dans une pensée américaine.

On a dit qu’il n’est pas réactionnaire, mais absolument « progressiste », aussi parce que Yarvin s’est déclaré favorable au droit des personnes de même sexe de se marier. Parmi les financiers de sa start-up informatique Tlon figure Peter Thiel, célèbre investisseur américain du secteur, chrétien évangélique convaincu mais homosexuel assumé, ainsi que membre actif du Groupe Bilderberg, avant-garde atlantiste fondée par la CIA et le MI6.

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Yarvin aurait déclaré à une autre personnalité liée à la soi-disant « droite alternative », l’activiste Milo Yiannopoulos (photo - également ouvertement homosexuel, déjà connu pour avoir affirmé que les aventures amoureuses entre adolescents et adultes peuvent être une expérience mutuellement bénéfique) [9], que Thiel, défenseur de la libération de la technologie des contraintes bureaucratiques et gouvernementales qui la musèlent, aurait été son disciple. Inutile de préciser que Thiel fut le principal financier de la campagne électorale de J. D. Vance en 2022.

À ce stade, il ne reste plus qu’à examiner le domaine purement géopolitique. Dans ce champ, Yarvin suggère plus qu’il n’affirme. On n’y retrouve pas les références du trumpisme bannonien originel au « choc des civilisations », au danger que représentent pour l’hégémonie américaine l’alliance islamo-confucéenne et l’unification de l’espace allant de l’Europe centrale et orientale à la Chine. Cependant, son interprétation du conflit en Ukraine est assez intéressante. Il le définit comme un « conflit cinétique », au sens où son issue finale dépend exclusivement de l’action humaine et peut donc se terminer de manières diamétralement opposées [10]. Or, Yarvin soutient que le résultat de ce conflit déterminera l’avenir des États-Unis: soit ils persisteront sur leur trajectoire descendante (où le nationalisme libéral-démocratique les a conduits), soit ils se transformeront en «TurboAmerica»: une puissance capable de guider le monde selon de nouveaux principes.

C’est ici qu’entrent en jeu les soi-disant « isolationnistes » classiques d’un certain trumpisme. Selon Yarvin, les États-Unis devraient se comporter avec l’Europe de la même manière que la Grande-Bretagne s’est comportée avec l’Amérique dans les premières décennies du 19ème siècle. À son avis, les Britanniques furent les véritables promoteurs de la soi-disant « doctrine Monroe ». Celle-ci était totalement fonctionnelle aux intérêts de Sa Majesté, car, à un moment où Londres jouissait encore d’une hégémonie thalassocratique absolue, elle sanctionnait l’impossibilité pour la Couronne d’Espagne de récupérer son « empire ». De même, une solution adéquate du conflit en Ukraine (au sens de faire porter les coûts à l’Europe, tout en s’assurant que Poutine ne puisse pas nuire aux intérêts des États-Unis) pourrait garantir aux États-Unis un autre siècle (si ce n’est plus) de domination mondiale sans rival.

Notes :

[1] Voir Gaza and the laws of war, 3 abril 2024, www.graymirror.substrack.com .

[2] Ibidem.

[3] Voir Vance: Israel should finish war as quickly as possible, partner sunni states against Iran, 16 julio 2024, www.timesofisrael.com .

[4] Voir The seven thinkers and groups that have shaped JD Vance’s unusual worldview, 18 luglio 2024, www.politico.com .

[5] Voir Trump wants huge tariff for dollar defectors, fewer US sanctions, 13 settembre 2024, www.bloomberg.com .

[6] Voir Interview with Curtis Yarvin, 15 noviembre 2023, www.maxraskin.com 

[7] M. Zagni, La svastica e la runa. Cultura ed esoterismo nella SS Ahnenerbe, Mursia, Milano 2011, p. 385.

[8] M. Eliade, Mefistofele e l’Androgine, Roma 1971, p. 77.

[9] Voir Yiannopoulos quits Breitbart, apologies for uproar year-old comment, 21 febrero 2017, www.nbcnews.com .

[10] Voir Ukraine, the tomb of liberal nationalism, 15 febrero 2024, www.graymirror.substrack.com .

Source: https://www.eurasia-rivista.com/paleotrumpismo-e-neotrump...

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Les Etats-Unis en phase terminale: l'autodestruction annoncée

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Les Etats-Unis en phase terminale: l'autodestruction annoncée

Nicolas Maxime

Source: https://www.facebook.com/nico.naf.735

S’il existe aujourd’hui un pays qui illustre jusqu’à la caricature ce que l’on pourrait appeler la phase terminale de l’Occident, ce sont bien les États-Unis. À l’image de instrumentalisation politique des événements récents — le meurtre tragique d’Iryna Zarutska, ou l’assassinat du conservateur chrétien Charlie Kirk — et de la polarisation qui s'en suit entre deux camps irréconciliables, tout semble concourir, jour après jour, à l’effondrement de la première puissance mondiale qui ne parvient désormais plus qu’à mettre en scène ses propres convulsions.

Dans le meurtre d’Iryna Zarutksa, le profil de l’assassin, un afro-américain atteint de schizophrénie, illustre la faillite d’un système de santé qui laisse des centaines de milliers de sans-abri sans soins, livrés aux opiacés et à la violence de la rue. Les États-Unis sont le pays le plus riche du monde, mais tolèrent l’exclusion et l’effondrement de pans entiers de leur population, au risque de laisser des malades psychiques devenir des dangers potentiels pour les autres.

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Quant au tueur de Charlie Kirk, Tyler Robinson, il en serait le miroir inversé. Issu d'une famille blanche mormone, ce jeune homme de 22 ans a été décrit comme le gendre idéal. Sa trajectoire illustre l’effondrement social et moral d'un pays où l’isolement collectif et la perte de repères vont faire basculer des jeunes dans une violence meurtrière. De Bowling for Columbine jusqu'à la tuerie, récemment, dans une école dans le Minnesota, il ne passe pas une année sans qu'il y ait une tuerie de masse aux États-Unis impliquant des jeunes, parfois encore adolescents.

Sans plus tarder, la droite trumpiste a récupéré ces meurtres pour en faire la preuve d’un complot de la gauche contre l’Amérique blanche et chrétienne, tandis que certains militants progressistes ont jubilé à l'annonce de la mort de Charlie Kirk. Le débat n'est plus possible lorsqu'on instrumentalise les cadavres pour des raisons idéologiques.

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Dans Civil War, Alex Garland imagine une guerre civile aux États-Unis dans un futur proche où la haine et les règlements de comptes finissent par balayer le processus de civilisation décrit par Norbert Elias. Ceux qui ont vu le film se rappellent de cette scène effroyable où le milicien pose la question, « quel type d’Américain es-tu ? » avant de passer à l'acte. La réalité est peut-être en train de rattraper la fiction car ce qu’il montrait — une Amérique incapable de surmonter sa polarisation, où chaque camp vit dans le fantasme de l’élimination de l’autre — est en train de se réaliser sous nos yeux.

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Pour le comprendre, il faut convoquer le philosophe René Girard qui avait compris ce mécanisme dans La violence et le sacré. Il l'illustre par le désir mimétique selon lequel on désire toujours ce que l'autre désire,  ce qui mène à la violence. Cela engendre une crise sacrificielle lorsqu'il y a un conflit généralisé. Pour sauvegarder sa cohésion, la société concentre sa haine sur une victime unique, le bouc émissaire, accusé d’incarner tous les maux. Dans le cas américain, chaque camp érige son adversaire en ennemi absolu. Le meurtre de Charlie Kirk devient pour la droite trumpiste la preuve que la gauche est prête à tout pour détruire l’Amérique blanche et chrétienne. À l’inverse, une partie de la gauche voit dans la mort de Kirk celle d'un ennemi des idées progressistes. Au lieu d’apaiser la société, ce drame est devenu le support sacrificiel d’une haine sans issue où chaque camp est persuadé d'être l'ennemi du mal.

Complètement livrée au nihilisme et à ses démons intérieurs : misère sociale, drogue, violences, perte de repères … qu'elle n'a pas su et pu résoudre en devenant le pays de l'argent Roi, le pourrissement des États-Unis est tel que le pays est en voie d’auto-destruction annoncée. Pour l’instant, ce ne sont que des incendies épars, des étincelles violentes qui s’allument ici ou là. Mais viendra le jour où l’embrasement, et l'affrontement violent entre les deux camps sera définitif.

La question n’est plus de savoir si l’Amérique implosera, mais quand.

16:10 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : états-unis, actualité | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Sur les manifestations de Londres - Le peuple anglais en ébullition

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Sur les manifestations de Londres

Le peuple anglais en ébullition

Alexander Douguine

Alexander Douguine déclare que le cortège d’un million de personnes à Londres marque l’aube d’une véritable révolution conservatrice contre Starmer et le globalisme.

Une véritable révolution conservatrice a commencé à Londres. Plus d’un million d’Anglais sont descendus dans les rues pour protester contre la politique de Starmer, contre la répression de toute manifestation de patriotisme et de ses symboles, contre l’impunité accordée à des bandes d’immigrés qui ont transformé l’Angleterre en un immense dépotoir où l’on ne propose qu’une seule chose aux Anglais eux-mêmes: disparaître aussi vite que possible. Les élites libérales de l’Angleterre sont allées beaucoup trop loin en favorisant l’immigration illimitée et en imposant l’interdiction des drapeaux avec la croix de Saint-Georges, en privilégiant systématiquement les nouveaux venus et les défenseurs de diverses minorités.

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Eva Vlaardingerbroek (Pays-Bas) et Ada Lluch (Espagne) à Londres.

L’Angleterre s’est soulevée contre les mondialistes, tout comme l’Amérique l’a fait il y a un an.

Les manifestants exigent la démission immédiate de Starmer, l’expulsion des bandes pakistanaises incontrôlées, l’interdiction de toute expression LGBTQ et le retour du droit des Britanniques à être maîtres chez eux.

Le meurtre de Charlie Kirk aux États-Unis par un libéral de gauche, partisan des mouvements LGBTQ et furry, a attisé encore plus la colère populaire.

Si de telles manifestations sont courantes en France, la population locale en Angleterre est beaucoup plus réservée et respectueuse des lois. Pour faire descendre un million d’Anglais somnambules dans la rue, il faut vraiment les avoir poussé à bout. Et c'est ce que Starmer a fait.