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mercredi, 09 mai 2007

T. Sunic: le langage politiquement correct

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Le langage « politiquement correct » ou genèse d'un emprisonnement

par Tomislav Sunic
([1]
tomislav.sunic@zg.htnet.hr)

Par «politiquement correct » on entend l’euphémisme actuellement le plus passe-partout derrière lequel se cache la censure et l’autocensure intellectuelle. Si le vocable lui-même n’émerge que dans l’Amérique des années 1980, les racines moralisatrices de ce phénomène à la fois linguistique et politique sont à situer dans la Nouvelle Angleterre puritaine du XVIIe siècle. Cette expression polysémique constitue donc la version moderne du langage puritain, avec son enrobage vétérotestamentaire. Bien qu’elle ne figure pas dans le langage juridique des pays occidentaux, sa portée réelle dans le monde politique et médiatique actuel est considérable. De prime abord, l’étymologie des termes qui la forment ne suggère nullement la menace d’une répression judicaire oud les ennuis académiques. L’expression est plutôt censée porter sur le respect de certains lieux communs postmodernes tels que le multiculturalisme ou une certaine historiographie, considérés comme impératifs dans la communication intellectuelle d’aujourd’hui. En règle générale, et dans la langue française, prononcer l’expression “politiquement correct” déclenche souvent le processus d’association cognitive et fait penser aux expressions tels que “la police de la pensée,” “la langue de bois” et “la pensée unique”. Or si ces dernières notions ont ailleurs qu’en France, en Europe comme en Amérique, des équivalents, ceux- ci n’y possèdent pas sur le plan lexical la même porte émotive. Ainsi par exemple, lorsque les Allemands veulent designer le langage communiste, ils parlent de “Betonsprache” (”langue de béton”), mais la connotation censoriale de la locution française “langue de bois” n’y est pas rendue. Quant à la “pensée unique,” elle reste sans équivalant hors du français, étant intraduisible en anglais ou en allemand ; seule le vocable slave “jednoumlje” - terme en vogue chez les journalistes et écrivains russes, croates ou chèques - possède la même signification(1).

En comparaison de l’Europe, les Etats-Unis, bien qu’étant un pays fort sécularisé, restent néanmoins très marqués par de « grands récits » moralistes issus de la Bible ; aucun autre pays sur terre n’a connu un tel degré d’hypermoralisme parabiblique, dans lequel Arnold Gehlen voit « une nouvelle religion humanitaire »(2). Cependant après la deuxième guerre mondiale, le langage puritain a subi une mutation profonde au contact du langage marxiste en usage en Europe, véhiculé par les intellectuels de l’Ecole de Francfort, ou inspirés par eux, réfugiés aux Etats-Unis et plus tard installés dans les grandes écoles et universités occidentales. Ce sont eux qui après la guerre ont commencé à agir dans les médias et dans l’éducation en Europe, et qui ont joué un rôle décisif dans l’établissement de la pensée unique. C’est donc de la conjonction entre l’hypermoralisme américain et les idées freudo-marxistes issues de ce milieu qu’est né le phénomène actuel du politiquement correct.
On sait que les Etats-Unis n’ont jamais eu comme seule raison la conquête militaire, mais ont cultivé le désir d’apporter aux mal-pensants, qu’ils fussent indiens, nazis, communistes, et aujourd’hui islamistes, l’heureux message du démocratisme à la mode américaine, même avec l’accompagnement du bombardement massif des populations civiles. Cet objectif s’est largement réalisé vers la fin de la deuxième guerre mondiale, quand l’Amérique, comme principale grande puissance, s’installa dans son rôle de rééducatrice de la vieille Europe. Et dans les années ultérieures, le lexique américain, dans sa version soft et libéralo-puritaine, jouera même un rôle beaucoup plus fort par le biais des médias occidentaux que la langue de bois utilisée par les communistes esteuropéens et leurs sympathisants. Au vingtième siècle cependant, l’héritage calviniste a perdu son contenu théologique pour se transformer en un moralisme pur et dur prônant l’évangile libéral des droits de l’homme et le multiculturalisme universel.

Dès la fin des hostilités, un grand nombre d’agents engagés par le gouvernement du président Harry Truman furent donc envoyés en Europe afin de rectifier les esprits, et notamment les tendances autoritaires supposées inhérentes au modèle familial européen. Parmi ces pédagogues figuraient un certain nombre d’intellectuels américains issus de la WASP et imprégnés d’esprit prédicateur, mais aussi des éléments de tendance marxiste dont les activités s’inscrivaient dans le sillage de l’Ecole de Francfort. Pour les uns et les autres, guérir les Allemands, et par extension tous les Européens, de leurs maux totalitaires fut le but principal(3). Tous se croyaient choisis par la providence divine - ou le déterminisme historique marxiste - pour apporter la bonne nouvelle démocratique à une Europe considérée comme une région à demi-sauvage semblable au Wilderness de l’Ouest américain du passé. Le rôle le plus important fut néanmoins joué par l’Ecole de Francfort, dont les deux chefs de file, Theodor Adorno et Max Horkheimer, avaient déjà jeté les bases d’une nouvelle notion de la décence politique. Dans un ouvrage important qu’il dirigea(4), Adorno donnait la typologie des différents caractères autoritaires, et introduisait les nouveaux concepts du langage politique. Il s’attaquait surtout aux faux démocrates et « pseudo conservateurs » et dénonçait leur tendance à cacher leur antisémitisme derrière les paroles démocratiques(5). D’après les rééducateurs américains, « la petite bourgeoisie allemande avait toujours montré son caractère sadomasochiste, marqué par la vénération de l’homme fort, la haine contre le faible, l’étroitesse de coeur, la mesquinerie, une parcimonie frisant l’avarice (dans les sentiments aussi bien que dans les affaires d’argent) »(6).

Dans les décennies qui suivirent, le seul fait d’exprimer un certain scepticisme envers la démocratie parlementaire pourra être assimilé au néonazisme et faire perdre ainsi le droit à la liberté de parole.
Lorsque le gouvernement militaire américain mit en oeuvre la dénazification(7), il employa une méthode policière de ce genre dans le domaine des lettres et de l’éducation allemande. Mais cette démarche de la part de ses nouveaux pédagogues n’a fait que contribuer à la montée rapide de l’hégémonie culturelle de la gauche marxiste en Europe. Des milliers de livres furent écartés des bibliothèques allemandes ; des milliers d’objets d’art jugés dangereux, s’ils n’avaient pas été détruits au préalable au cours des bombardements alliés, furent envoyés aux Etats-Unis et en Union soviétique. Les principes démocratiques de la liberté de parole ne furent guère appliqués aux Allemands puisqu’ils étaient en somme stigmatisés comme ennemis de classe de la démocratie. Particulièrement dur fut le traitement réservé aux professeurs et aux académiciens. Puisque l’Allemagne national-socialiste avait joui du soutien (bien que souvent momentané) de ces derniers, les autorités américaines de rééducation à peine installées se mirent à sonder les auteurs, les enseignants, les journalistes et les cinéastes afin de connaître leurs orientations politiques. Elles étaient persuadées que les universités et autres lieux de hautes études pourraient toujours se transformer en centres de révoltes. Pour elles, la principale tare des universités pendant le IIIe Reich avait été une spécialisation excessive, creusant un gouffre entre les étudiants comme élite, et le reste de la société allemande. L’éducation universitaire aurait donc transmis la compétence technique tout en négligeant la responsabilité sociale de l’élite vis-à-vis de la société(8). Les autorités américaines firent alors remplir aux intellectuels allemands des questionnaires restés fameux, qui consistaient en des feuilles de papiers contenant plus de cent demandes visant tous les aspects de la vie privée et sondant les tendances autoritaires des suspects. Les questions contenaient souvent des erreurs et leur message ultramoraliste était souvent difficile à comprendre pour des Allemands(9). Peu à peu les mots « nazisme » et « fascisme », subissant un glissement sémantique, se sont métamorphosés en simples synonymes du mal et ont été utilisés à tort et à travers. La « reductio ad hitlerum » est alors devenue un paradigme des sciences sociales et de l’éducation des masses. Tout intellectuel osant s’écarter du conformisme en quelque domaine que ce fût risquait de voir ses chances de promotion étouffées.

C’est donc dans ces conditions que les procédures de l’engineering social et l’apprentissage de l’autocensure sont peu à peu devenues la règle générale dans l’intelligentsia européenne. Bien que le fascisme, au début du troisième millénaire, ne représente plus aucune menace pour les démocraties occidentales, tout examen critique, aussi modeste soit-il, de la vulgate égalitaire, du multiculturalisme et de l’historiographie dominante risque d’être pointé comme « fasciste » ou « xénophobe ». Plus que jamais la diabolisation de l’adversaire intellectuel est la pratique courante du monde des lettres et des médias.

L’Allemagne forme certes un cas à part, dans la mesure où sa perception des Etats-Unis dépend toujours de celle que les Allemands sont obligés d’avoir d’eux-mêmes, comme des enfants auto-flagellants toujours à l’écoute de leurs maîtres d’outre-Atlantique. Jour après jour l’Allemagne doit faire la preuve au monde entier qu’elle accomplit sa tâche démocratique mieux que son précepteur américain. Elle est tenue d’être le disciple servile du maître, étant donné que la « transformation de l’esprit allemand (fut) la tâche principale du régime militaire »(10). Voilà pourquoi, si l’on veut étudier la généalogie du politiquement correct tel que nous le connaissons, on ne peut pas éviter d’étudier le cas de l’Allemagne traumatisée. Et cela d’autant plus qu’en raison de son passé qui ne passe pas, l’Allemagne applique rigoureusement ses lois contre les intellectuels mal-pensants. En outre, l’Allemagne exige de ses fonctionnaires, conformément à l’article 33, paragraphe 5 de sa Loi fondamentale, l’obéissance à la constitution, et non leur loyauté envers le peuple dont ils sont issus(11). Quant aux services de défense de la Constitution (Verfassungschutz), dont la tâche est la surveillance du respect de la Loi fondamentale, ils incluent dans leur mission de veiller à la pureté du langage politiquement correct : « Les agences pour la protection de la constitution sont au fond des services secrets internes dont le nombre s’élève à dix-sept (une au niveau de la fédération et seize autres pour chaque Land fédéral constitutif) et qui sont qualifiées pour détecter l’ennemi intérieur de l’Etat »(12).
Puisque toutes les formes d’attachement à la nation sont mal vues en Allemagne en raison de leur caractère jugé potentiellement non-démocratique et néonazi, le seul patriotisme permis aux Allemands est le « patriotisme constitutionnel ».

La nouvelle religion du politiquement correct est peu à peu devenue obligatoire dans toute l’Union européenne, et elle sous-entend la croyance dans l’Etat de droit et dans la « société ouverte ». Sous couvert de tolérance et de respect de la société civile, on pourrait imaginer qu’un jour un individu soit déclaré hérétique du fait, par exemple, d’exprimer des doutes sur la démocratie parlementaire. De plus, en raison de l’afflux des masses d’immigrés noneuropéens, la loi constitutionnelle est également sujette à des changements sémantiques. Le constitutionnalisme allemand est devenu « une religion civile » dans laquelle « le multiculturalisme est en train de remplacer le peuple allemand par le pays imaginaire de la Loi fondamentale »(13). Par le biais de cette nouvelle religion civique l’Allemagne, comme d’autres pays européens, s’est maintenant transformée en une théocratie séculière.

***

Sans cette brève excursion dans le climat du combat intellectuel d’après-guerre il est impossible de comprendre la signification actuelle du politiquement correct. La récente promulgation de la nouvelle législation européenne instituant un « crime de haine » est ainsi appelée à se substituer aux législations nationales pour devenir automatiquement la loi unique de tous les Etats de l’Union européenne. Rétrospectivement, cette loi supranationale pourrait être inspirée du code criminel de la défunte Union soviétique ou de celui l’ex-Yougoslavie communiste. Ainsi, le Code criminel yougoslave de 1974 comportait une disposition, dans son article 133, portant sur « la propagande hostile ». Exprimée en typique langue de bois, une telle abstraction sémantique pouvait s’appliquer à tout dissident - qu’il se soit livré à des actes de violence physique contre l’Etat communiste ou qu’il ait simplement proféré une plaisanterie contre le système.
D’après le même code, un citoyen croate, par exemple, se déclarant tel en public au lieu de se dire yougoslave pouvait se voir inculper d’« incitation à la haine interethnique », ou bien comme « personne tenant des propos oustachis », ce qui était passible de quatre ans de prison(14). Il faudra attendre 1990 pour que cette loi soit abrogée en Croatie.

A l’heure actuelle le Royaume-Uni témoigne du degré le plus élevé de liberté d’expression en Europe, l’Allemagne du plus bas. Le Parlement britannique a rejeté à plusieurs reprises la proposition de loi sur « le crime de haine », suggérée par divers groupes de pression - ce qui n’empêche pas les juges britanniques d’hésiter à prononcer de lourdes peines contre les résidents d’origine non-européenne par crainte d’être accusés eux-mêmes de cultiver un « préjugé racial ». Ainsi, indépendamment de l’absence de censure légale en Grande-Bretagne, un certain degré d’autocensure existe déjà. Depuis 1994, l’Allemagne, le Canada et l’Australie ont renforcé leur législation contre les malpensants.
En Allemagne, un néologisme bizarre (Volkshetze : « incitation aux ressentiments populaires »), relevant de l’article 130 du Code pénal, permet d’incriminer tout intellectuel ou journaliste s’écartant de la vulgate officielle. Vu le caractère général de ces dispositions, il devient facile de mettre n’importe quel journaliste ou écrivain en mauvaise posture, d’autant plus qu’en Allemagne il existe une longue tradition légale tendanciellement liberticide d’après laquelle tout ce qui n’est pas explicitement permis est interdit. Quant à la France, elle comporte un arsenal légal analogue, notamment depuis l’entrée en vigueur de la loi Fabius-Gayssot adoptée le 14 juillet 1990 - sur proposition d’un député communiste, mais renforcée à l’initiative du député de droite Pierre Lellouche en décembre 2002. Cette situation se généralise dans l’Union européenne(15), en comparaison de quoi, paradoxalement, les pays postcommunistes connaissent encore un plus grand degré de liberté d’expression, même si en raison de la pression croissante de Bruxelles et de Washington cela est en train de changer.

En Europe communiste, la censure de la pensée avait un gros avantage. La répression intellectuelle y était tellement vulgaire que sa violente transparence donnait à ses victimes l’aura des martyrs. La fameuse langue de bois utilisée par les communiste débordait d’adjectifs haineux au point que tout citoyen pouvait vite se rendre compte da la nature mensongère du communisme. En outre, comme la Guerre froide, vers la fin des années 1940, avait commencé à envenimer les rapports entre l’Est communiste et l’Ouest capitaliste, les élites occidentales se crurent moralement obligées de venir en aide aux dissidents esteuropéens, et cela moins en raison de leurs vues anticommunistes que pour prouver que le système libéral était plus tolérant que le communisme. Nul n’en sut profiter mieux que les architectes libéraux du langage politiquement correct.
En cachant leurs paroles démagogiques derrière les vocables de « démocratie », « tolérance » et « droits de l’homme » ils ont réussi à neutraliser sans aucune trace de sang tout opposant sérieux. Le langage médiatique a été également sujet à des règles hygiéniques imposées par les nouveaux princes de vertus. L’emploi châtré des structures verbales qui se sont propagés à travers toute l’Europe reflète des avatars puritains sécularisés si typiques autrefois des autorités militaires américaines dans l’Allemagne d’après-guerre. De nouveaux signifiants se font incessamment jour pour permettre à la classe dirigeante, ayant peur pour ses sinécures, de cacher ainsi ses propres signifiés privés. A-t-on jamais tant parlé en Amérique et en Europe de tolérance, a-t-on jamais tant prêché la convivialité raciale et l’égalitarisme de tous bords alors que le système entier déborde de toutes formes de violences souterraines et de haines mutuelles?
L’idéologie antifasciste doit rester un argument de légitimité pour tout l’Occident. Elle présuppose que même s’il n’y a plus aucun danger fasciste, son simulacre doit toujours être maintenu et brandi devant les masses.

Partout en Europe, depuis la fin de la Guerre froide, l’arène sociale doit fonctionner comme un prolongement du marché libre. L’efficacité économique est vue comme critère unique d’interaction sociale. Par conséquent, les individus qui se montrent critiques au sujet des mythes fondateurs du marché libre ou de l’historiographie officielle sont automatiquement perçus comme ennemis du système. Et à l’instar du communisme, la vérité politique en Occident risque d’être davantage établie par le code pénal que par la discussion académique. De plus, aux yeux de nouveaux inquisiteurs, l’hérétique intellectuel doit être surveillé - non seulement sur la base de ce qu’il dit ou écrit, mais sur celle des personnes qu’il rencontre. La « culpabilité par association » entrave gravement toute carrière, et ruine souvent la vie du diplomate ou du politicien. N’importe quelle idée qui vise à examiner d’une manière critique les bases de l’égalitarisme, de la démocratie et du multiculturalisme, devient suspecte. Même les formes les plus douces de conservatisme sont graduellement poussées dans la catégorie « de l’extrémisme de droite ». Et ce qualificatif est assez fort pour fermer la bouche même aux intellectuels qui font partie du système et qui ont eux-mêmes participé dans la passé à la police de la pensée. « Il y a une forme de political correctness typiquement européenne qui consiste à voir des fascistes partout » écrit ainsi Alain Finkielkraut(16). Le spectre d’un scénario catastrophique doit faire taire toutes les voix divergentes. Si le « fascisme » est décrété légalement comme le mal absolu, toutes les aberrations du libéralisme sont automatiquement regardées comme un moindre mal. Le système libéral moderne de provenance américaine est censé fonctionner à perpétuité, comme une perpetuum mobile(17).

L’Occident dans son ensemble, et paradoxalement l’Amérique elle-même, sont devenus des victimes de leur culpabilité collective, qui a comme origine non tant le terrorisme intellectuel que l’autocensure individuelle. Les anciens sympathisants communistes et les intellectuels marxistes continuent à exercer l’hégémonie culturelle dans les réseaux de fabrication de l’opinion publique.
Certes, ils ont abandonné l’essentiel de la scolastique freudo–marxiste, mais le multiculturalisme et le globalisme servent maintenant d’ersatz à leurs idées d’antan. La seule différence avec la veille est que le système libéralo-américain est beaucoup plus opérationnel puisqu’il ne détruit pas le corps, mais capture l’âme et cela d’une façon beaucoup plus efficace que le communisme. Tandis que le citoyen américain ou européen moyen doit supporter quotidiennement un déluge de slogans sur l’antiracisme et le multiculturalisme, qui ont acquis des proportions quasi-religieuses en Europe, les anciens intellectuels de tendance philo-communiste jadis adonnés au maoïsme, trotskisme, titisme, restent toujours bien ancrés dans les médias, l’éducation et la politique. L’Amérique et l’Europe s’y distinguent à peine. Elles fonctionnent d’une manière symbiotique et mimétique, chacune essayant de montrer à l’autre qu’elle n’accuse aucun retard dans la mise en place de la rhétorique et de la praxis politiquement correctes.
Autre ironie de l’histoire : pendant que l’Europe et l’Amérique s’éloignent chronologiquement de l’époque du fascisme et du national-socialisme, leur discours public évolue de plus en plus vers une thématique antifasciste.
Contrairement à la croyance répandue, le politiquement correct, en tant que base idéologique d’une terreur d’Etat, n’est pas seulement une arme aux mains d’une poignée de gangsters, comme nous l’avons vu en ex-Union Soviétique. La peur civile, la paresse intellectuelle créent un climat idéal pour la perte de liberté. Sous l’influence conjuguée du puritanisme américain et du multiculturalisme de tendance postmarxiste européen, le politiquement correct est devenu une croyance universelle. L’apathie sociale croissante et l’autocensure galopante ne nous annoncent pas de nouveaux lendemains qui chantent.

Notes :

1. Force est de constater que les Européens de l’Est semblent avoir fort bien appris à désigner les pièges de l’homo sovieticus. Voir James Gregor, Metascience and Politics: An Inquiry into the Conceptual Language of Political Science (New Brunswick: Transaction Publishers, 2004), pp. 282- 292, où se trouvent décrites les “locutions normatives” du langage protototalitaire.
2. Arnold Gehlen, Moral und Hypermoral (Vittorio Klostermann GmbH, Francfort 2004, p.78).
3. Cf. Paul Gottfried, The Strange Death of Marxism, University of Missouri Press, Columbia-Londres, 2005, p. 108. Voir également Frances Stonor Saunders, Qui mène la danse? La CIA et la guerre froide culturelle, Denoël 2003.
4. Theodor Adorno (with Else Frenkel-Brunswick, Daniel J. Levinson, R. N. Sanford), The Authoritarian Personality (Harper and Brothers, New York 1950, pp. 780-820).
5. Le langage déconstructiviste promu par l’École de Francfort a récemment été critiqué par Kevin McDonald qui observe dans les analyses d’Adorno une diffamation de la culture européenne, tout « ethnocentrisme européen étant interprété comme un signe de pathologie ». Kevin MacDonald, The Culture of Critique: An Evolutionary Analysis of Jewish Involvement in Twentieth Century Intellectual and Political Movement (Praeger Publications, Westport CT, 1998, repris par Authorhouse, Bloomington 2002, p. 193).
6. Caspar Schrenck-Notzing, Characterwäsche (Seewald Verlag, Stuttgart 1965, p. 120).
7. La dénazification (Entnazifizierung) avait été expressément décidée lors de la conférence de Yalta (février 1945). Elle fut menée selon un critère de classe en zone soviétique, rapidement confiée aux soins de juges allemands en zones française et britannique, mais directement exercée par des agents américains dans la zone relevant de leur responsabilité, de manière tellement étendue qu’elle finit par s’étouffer elle-même.
8. Manfred Heinemann, Ulrich Schneider, Hochschuloffiziere und Wiederaufbau des Hochschulwesens in Westdeutschland,1945 – 1952 (Bildung und Wissenschaft, Bonn 1990), pp. 2-3 and passim. Voir Die Entnazifizierung in Baden 1945-1949 (W. Kohlhammer Verlag, Stuttgart 1991) concernant les épurations des enseignants allemands par les autorités françaises dans la région allemande de Baden. Entre 35 % et 50 % des enseignants dans la partie de l’Allemagne contrôlée par les Américains ont été suspendus d’enseignement. Le pourcentage des enseignants épurés par les autorités françaises s’élevait à 12-15 %. Voir Hermann–Josef Rupieper, Die Wurzeln der westdeutschen Nachkriegesdemokratie (Westdeutscher Verlag, 1992), p. 137.
9. Le romancier et ancien militant national-révolutionnaire Ernst von Salomon décrit cela dans son roman satirique Der Fragebogen, et montre comment les « nouveaux pédagogues » américains arrachaient parfois des confessions à leurs prisonniers avant de les bannir ou même de les expédier à l’échafaud.
10 . Caspar Schrenck-Notzing, op. cit., p 140.
11 . Cf. Josef Schüsslburner, Demokratie-Sonderweg Bundesrepublik, Lindenblatt Media Verlag, Künzell, 2004, p.631.
12 . Ibid., p. 233.
13 . Ibid., p. 591.
14 . Tomislav Sunic, Titoism and Dissidence, Peter Lang, Francfort, New York, 1995.
15. Ainsi, sur proposition initiale du conseiller spécial du gouvernement britannique Omar Faruk, l’Union européenne s’apprête-t-elle à éditer un lexique politiquement correct destiné aux dirigeants officiels européens impliquant de distinguer soigneusement entre islam et islamisme, et de ne jamais parler, par exemple, de « terrorisme islamique » (source : www.islamonline.net/English/News/2006-04/11/article02.shtml).
16. Alain Finkielkraut, « Résister au discours de la dénonciation » dans Journal du Sida, avril 1995. Voir « What sort of Frenchmen are they? », entrevue avec Alain Finkielkraut in Haaretz, le 18 novembre 2005. A. Finkielkraut fut interpellé suite à cet entretien par le MRAP, le 24 novembre, pour ses propos prétendument anti-arabes. Le 25 dans Le Monde, il présente ses excuses pour les propos en question.
17. Alain de Benoist, Schöne vernetzte Welt, « Die Methoden der Neuen Inquisition » (Hohenrain Verlag, Tübingen 2001, pp. 190-205).

mardi, 01 mai 2007

Contra a democracia nao representativa e a partidocracia

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Contra a democracia

(não) representativa

e a partidocracia

(Tradução livre de Rodrigo Nunes de um excerto de uma entrevista a Robert Steuckers, presidente da associação “Synergies Européennes”, conduzida por Pieter Van Damme)

A visão da associação “Synergies Européennes” é democrática mas hostil a todas as formas de partidocracia, porque esta, que se pretende democrática, é na realidade a perfeita negação de democracia. No plano teórico a “Synergies Européenes” referencia um liberal russo do início do século XX, militante do Partido dos Cadetes: Moshe Ostrogorski. A análise que este liberal russo de antes da revolução bolchevique nos deixou assenta numa constatação evidente: Toda a democracia deveria ser um sistema imitando o movimento das coisas na Cidade. Os mecanismos eleitorais procuram logicamente dar representação às efervescências que actuam na sociedade, dia a dia, sem subverter de forma alguma a ordem imutável da política. Como consequência, os instrumentos de representatividade, isto é, os partidos políticos, devem também representar as efervescências que vão acontecendo e nunca procurar a eternização. O mau funcionamento da democracia parlamentar advém do facto dos partidos políticos se tornarem uma presença rigidamente permanente dentro da sociedade, englobando mais e mais gente medíocre nas suas fileiras. De forma a colocar um fim a este inconveniente Ostrogorski sugere que a democracia assente em partidos “ad hoc”, reclamando pontualmente reformas urgentes ou ajustes precisos, proclamando depois a sua própria dissolução para libertar o seu pessoal, que pode posteriormente forjar novos movimentos peticionários, permitindo redistribuir as cartas e repartir os militantes por novas formações que serão também provisórias. Os parlamentos acolheriam assim cidadãos que nunca se ancorariam no profissionalismo político. Os períodos de legislatura seriam também mais curtos ou, como no início da história da Bélgica ou no Reino Unido dos Países Baixos de 1815 a 1830, um terço da assembleia seria mudada a cada terça parte da legislatura, permitindo uma rotatividade acelerada do pessoal político e a eliminação, sancionada pelas urnas, de todos os que se mostrem incompetentes, esta rotatividade não existe hoje, o que, aparte o problema do voto recenseado, nos dá hoje uma democracia menos perfeita que à época. O problema é evitar carreiras políticas de indivíduos que não conhecerão nada da vida civil real.

Max Weber fez também observações pertinentes: ele constata que os partidos socialistas e democrata-cristãos (o centrão) instalam personagens sem competência em lugares chave, que tomam decisões sem qualquer bom-senso, animados pela ética da “convicção” em vez da ética da responsabilidade e exigindo a divisão de postos políticos ou civis em função de simples rácios de votos, sem terem de provar a sua competência no desempenho dos cargos. O ministro liberal italiano do século XIX, Minghetti, percebeu muito rapidamente como este sistema poria um fim à separação dos três poderes, já que os partidos e os seus militantes, armados da sua ética da convicção, fonte de todas as demagogias, quereriam controlar e manipular a justiça e destruir qualquer compartimentação entre o legislativo e o executivo. O equilíbrio democrático entre os três poderes, colocados à partida como estanques de forma a garantir a liberdade dos cidadãos, como definido por Montesquieu, não pode mais nem funcionar nem existir num tal contexto de histeria e demagogia. É aí que estamos.

A “Synergie Européennes” não critica portanto a instituição parlamentar em si, mas mostra claramente a sua aversão a qualquer disfuncionalidade, a toda a intervenção privada (os partidos são na realidade associações privadas, como lembra Ostrogorski) no recrutamento de pessoal político, de funcionários, etc., a qualquer tipo de nepotismo (cooptações de membros da família de um político ou funcionário para um posto político ou administrativo). Apenas a avaliação por um júri totalmente neutro deveria permitir o acesso a um cargo. Qualquer outro método de recrutamento deveria constituir um delito muito grave.

Também pensamos que os parlamentos não deveriam ser simples câmaras representativas onde se sentam membros escolhidos de partidos políticos (logo de associações privadas que exigem disciplina sem autorizar geralmente qualquer direito de tendência ou iniciativa pessoal dos deputados). Nem todos os cidadãos são membros de um partido, de facto a maioria não tem qualquer filiação partidária. Consequentemente os partidos não representam usualmente mais que 8 a 10% da população e 100% do parlamento! O peso excessivo dos partidos deveria ser corrigido por uma representação saída de associações profissionais e sindicatos como defendia De Gaulle e a sua equipa quando falavam de “Senado de profissões e regiões”. Para o professor Bernard Willms (1931-1991) o modelo constitucional mais desejável alicerçar-se-ia numa assembleia de três câmaras (Parlamento, Senado e Câmara económica). Metade do Parlamento seria recrutado entre candidatos propostos pelos partidos e eleitos pessoalmente, a outra metade seria composta por representantes das corporações e associações profissionais. O Senado seria essencialmente um órgão de representação regional (como o Bundesrat alemão ou austríaco). A Câmara económica, igualmente organizada numa base regional, representaria os corpos sociais, entre os quais os sindicatos.

O problema consiste em consolidar uma democracia assente nos “corpos concretos” da sociedade e não unicamente em associações privadas de natureza ideológica e arbitrária, como os partidos. Esta ideia aproxima-se da definição dada por Carl Schmitt dos “corpos concretos”. No entanto, toda a entidade política baseia-se num património cultural, que deve ser tomado em consideração, de acordo com a análise feita por um discípulo de Carl Schmitt, Ernst Rudolf Huber. Para Huber, o Estado coerente é sempre um Kulturstaat (Estado cultural), e o aparelho de Estado tem o dever de preservar esta cultura, expressão de uma Sittlichkeit (etnia), excedendo os simples limites da ética de forma a incluir uma variedade de campos de produção artística, cultural, estrutural, agrícola, industrial, etc., cuja fecundidade deve ser preservada. Uma representação mais diversificada, que vá para lá desses 8 a 10% de filiados partidários, permite justamente melhor garantir essa fecundidade, distribuída por todo o corpo social da nação. A defesa dos “corpos concretos” postula a trilogia “comunidade, solidariedade, subsidiariedade”, a resposta conservadora, no século XVIII, ao projecto de Bodin, visando destruir os corpos intermédios da sociedade, isto é, os “corpos concretos”, deixando o cidadão-indivíduo isolado face ao Leviathan Estatal. As ideias de Bodin foram realizadas pela Revolução francesa e o seu sonho de geometrização da sociedade, que começou precisamente pela erradicação das associações profissionais pela Lei Le Chapelier de 1791. Hoje em dia o recurso actualizado à trilogia “comunidade, solidariedade, subsidiariedade” implica dar o máximo de representatividade às associações profissionais, ao povo real, e reduzir o arbítrio dos partidos e funcionários.

lundi, 30 avril 2007

0 que é o paganismo?

O que é o paganismo ?

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O paganismo caracteriza-se fundamentalmente pela compreensão intuitiva da ordem intrínseca da realidade, ordem fundada sobre uma rede de correspondências que ligam o corpo, a alma e o espírito de cada homem, sujeito dos fenómenos (microcosmos), a uma ordem cósmica, ou ordem dos fenómenos exteriores ao sujeito (macrocosmos). Esta ordem inerente, chamada Rita entre os indianos, Asha entre os iranianos, Cosmos entre os gregos, tem um prolongamento na sociedade humana, chamado Dharma na índia, pelo aspecto ético, e Varna pelo aspecto social, ou ainda, simbolizado nos gregos por uma deusa da medida e da equidade, Némesis.

Um dos maiores símbolos desta ordem é o Zodíaco, aquele que todos conhecem, mas também o Zodíaco das runas, ou o das posições da lua, que sobreviveu na Índia, fazendo referência a múltiplos processos concomitantes, de ordem temporal, mas também atmosférica, mental, social, recordando que os grandes deuses exprimiam uma ordem exterior assim como interior, uma ordem cósmica assim como social, ignorada pelo monoteísmo simplista. O método comparativo aplicado sobre os textos védicos, por um lado, e os textos tradicionais mais tardios da Europa por outro lado, mostrou que os indo-europeus colocaram no centro da sua religiosidade uma cosmologia que permitiu a prosperação de numerosas cosmogonias.

E o interesse da tradição védica é precisamente ter sido um notável repositório desta antiga religiosidade. Um sanscritista como Jean Varenne demonstrou que estas cosmogonias podiam classificar-se de acordo com as 3 grandes funções dumezilianas, porque existe nos textos védicos cosmogonias descrevendo o aparecimento do mundo pela acção da palavra sagrada, com a fórmula “abrir a montanha pelo brado sagrado para libertar a luz escondida” ou pela acção guerreira do campeão dos deuses, Indra, contra potências de reabsorção e aprisionamento, ou pela acção de um demiurgo construtor e organizador, como Vishvakarman. Esta cosmologia, da qual encontramos traços em todos os povos de origem indo-europeia, é extremamente antiga, remonta a uma comum pré-história. Tem o lugar que ocupa a escatologia nas grandes religiões abraâmicas, que têm por corolário um tempo linear e orientado.

Ao contrário, no paganismo o tempo é cíclico, existia mesmo um culto do ano com um ritual muito preciso e, paradoxalmente, é possível atingir a imortalidade justamente transcendendo os ciclos, o que é impossível e impensável com um tempo linear. O pano de fundo destas cosmogonias é o mesmo das cosmogonias gregas: a água, sob a forma do oceano e dos rios celestes que lhe estão associados, forma o elemento primordial do qual surgiu o mundo. Do céu superior os deuses zelam pela manutenção da Ordem da qual conhecem os segredos, às vezes pela razão mas também pela vontade. Daqui resulta um modo de existência, uma forma de estar no mundo, que se caracteriza por múltiplos aspectos bem salientados por centenas de autores sobre o assunto.

Os poderes da vontade

O reconhecimento dos poderes da vontade, para o qual foram concebidos vários exercícios espirituais, simples e eficazes, baseados na meditação, no controlo do corpo, no domínio dos sentidos, na magia e na prece, cujo objectivo é afirmar um potencial de espiritualidade, que se eleva em direcção ao sagrado e se fixa sobre as suas simbolizações múltiplas. Todos estes exercícios espirituais, potentes e eficazes, emanam da visão pagã e devem ser dirigidos em relação a objectivos bem determinados, como várias flechas certeiras sobre um alvo. É o que haviam observado os Antigos, que ergueram um deus por cada força da natureza, por cada potência cósmica, por cada manifestação proveniente dos mistérios divinos, por cada virtude moral.

O primado da energia sobre a palavra

O reconhecimento do primado da energia sobre a palavra: a meditação, a oração e a intercessão são actos mágicos dos quais ignoramos ainda toda a força. A psicanálise caracteriza parcialmente este processo comparando-o ao fenómeno físico da sublimação. É uma fonte incomparável que é preciso saber dirigir sintetizando as energias. O cristianismo, como todas as religiões abraâmicas, coloca a ênfase sobre a palavra revelada, sobre um logos que seria criador, sobre a Lei e sobre o Amor, resumidamente, todo o tipo de processos que podem perpetuar-se sem fim e desligados da realidade.

O reconhecimento da arte como via de acesso ao divino: Sobre todas as suas formas, pela concretização do ideal, do belo, do sublime, não somente nas suas expressões religiosas mas também profanas. A escultura, a arquitectura, a pintura, a dança, a música, a poesia, a filosofia, o desporto, toda a actividade resulta mais ou menos da inspiração do divino, do sagrado, no que o homem pode de melhor e mais elevado. O artista ou o artesão, ou, o que é mais difícil hoje em dia, o trabalhador, o cidadão, o militante, sintetizam inevitavelmente o seu pensamento na obra à qual aderem. O paganismo, pela sua glorificação da natureza, dirige-se a um homem centrado e equilibrado, e finalmente, dirige-se mais ao espírito do que ao coração. Introduz o sentido da grandeza, da harmonia e da saúde pelo sentido da medida e das proporções, pelo domínio e unificação do ser trinitário espírito/alma/corpo, totalmente inseparáveis, pela cultura da beleza das formas e nobreza dos sentimentos.

Jean Vertemont, Vouloir n°142/145

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mardi, 24 avril 2007

Citation d'Aldous Huxley

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"[…] par le moyen de méthodes toujours plus efficaces de manipulation mentale, les démocraties changeront de nature. Les vieilles formes pittoresques - élections, parlements, hautes cours de justice - demeureront mais la substance sous-jacente sera une nouvelle forme de totalitarisme non violent.

Toutes les appellations traditionnelles, tous les slogans consacrés resteront exactement ce qu’ils étaient au bon vieux temps, la démocratie et la liberté seront les thèmes de toutes les émissions radiodiffusées et de tous les éditoriaux mais […] l’oligarchie au pouvoir et son élite hautement qualifiée de soldats, de policiers, de fabricants de pensée, de manipulateurs mentaux mènera tout et tout le monde comme bon lui semblera."

Aldous Huxley - Retour au meilleur des mondes - 1959

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mardi, 17 avril 2007

Critiques des droits de l'homme

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Bertrand BINOCHE : Critiques des droits de l'homme, PUF, 1989, ISBN 2-13-042491-0, 32 FF.

L'inquisition médiatique imagine que toute critique des droits de l'homme est de facture récente, est un produit dérivé des mouvements identitaires ou populistes, qui ont émergé au cours de la décennie 80. Faux! Archi-faux! La vulgate des droits de l'homme, qui fige dangereusement toutes les notions de droit et ridiculise par ses outrances le juste refus de l'arbitraire, obtenant ainsi orwelliennement une idéologie des droits de l'homme qui jugule la liberté d'expression et installe dans nos sociétés un arbitraire plus diffus que jamais. Le petit ouvrage de Binoche repose sur une méthodologie généalogique et archéologique. Elle nous permet de remonter dans le temps et de voir comment la critique, non pas des droits de l'homme en tant que tels, mais des dérives possibles d'une utilisation propagandiste de ces droits de l'homme à des fins de pouvoir. Binoche récapitule tous les arguments énoncés au cours de l'histoire depuis 1789: il nous reparle de la critique de Burke (qui est empiriste), de celle de Bentham (qui est utilitariste), de celle de Joseph de Maistre (qui est providentialiste), celle de l'historicisme rationaliste de Benjamin Constant et d'Auguste Comte, celle de l'historicisme organiciste de Karl von Savigny et de Hegel, celle de l'historicisme matérialiste de Marx (qui s'opposait aux droits de l'homme parce qu'ils ne respectaient pas les droits du peuple). La critique marxiste des droits de l'homme rejoint très exactement la critique actuelle des populistes qui se déclarent, curieusement, sans doute par inculture politique,"anti-marxistes", alors que les points forts du marxisme ne se retrouvent plus du tout chez ceux qui se proclament encore "marxistes". Un ouvrage bref mais exceptionnel, qui permet de critiquer tous azimuts la vulgate qu'impose la pensée unique, en avançant des batteries d'arguments venus d'école diverses, mais que nous sommes appelés à synthétiser.

samedi, 07 avril 2007

Les maîtres censeurs

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Elizabeth LÉVY : Les maîtres censeurs,

J. C. Lattès ( www.editions-jclattes.fr ), ISBN 2-7096-2132-0, Paris, 2002, 18,50 Euro.

Pour Elizabeth Lévy, la France est devenue la plus provinciale de "bien-pensances", est entrée dans une "décennie de plomb" où les "maîtres penseurs" ont laissé la place aux "maîtres censeurs". Evolution que les francolâtres, ivres de leurs trahisons, ont introduit en Belgique francophone, ruinant tout débat et parisianisant le ton de la presse, notamment du "Soir" à Bruxelles. Elizabeth Lévy dénonce dans son ouvrage l'inculpation du passé (marotte qui vise l'effacement des legs historiques et institutionnels), la judiciarisation des moeurs (où des juges se hissent sans vergogne au-dessus de la démocratie), le climat de délation (pratique qui permet l'élimination préventive de toute contestation), la hantise de la vigilance (avec la camarilla qui tourne notamment autour d'un hurluberlu nommé Olender qui s'est attaqué sans raison à la revue Vouloir), le manichéisme accusateur (or tout manichéisme est un simplisme dangereux), la diabolisation des dissidences (car on ne peut plus faire dissidence par rapport à la "pensée unique", posée comme phase terminale de l'aventure intellectuelle de l'humanité). Son analyse est à mettre en parallèle avec celle de Debord, dans la mesure où elle dénonce la "propagande-spectacle" et le mépris du sens commun dont font montre les médias (et la RTBF tout particulièrement, surtout depuis l'avènement au pouvoir de l'écoeurante majorité "arc-en-ciel"). A noter dans ce livre une analyse très fine du fameux débat des "rouges-bruns" de 1993, où avait oeuvré le pitre Olender. Elizabeth Lévy y défend notamment Alain de Benoist, avec une courtoisie qui mérite nos hommages, bien que le chef de file de la ND (canal historique) ait eu, vu de notre côté, un comportement lamentable de froussard et de trouillard, en particulier face à la jactance d'un certain Spire, qui, comme les roquets, avait senti suinter les humeurs de trouille chez son adversaire et, bavant comme un bouledogue privé de nonos, lui avait aboyé ses sornettes à la face. En entendant les glapissements stridents du Spire, molosse imaginaire, le héros-malgré-lui du "rouge-brunisme parisien" s'est enfui, piteux, à c....... rabattues... Faux facho de vrai carton pâte... Garde de fer en paroles, garde de guimauve en actes...

 

dimanche, 01 avril 2007

Taguieff: une barbarie au visage progressiste

Une barbarie au visage progressiste

Trouvé sur: http://albator.hautetfort.com

L'historien Pierre-André Taguieff dénonce la confusion actuelle des idées et les procédés d'intimidation de ceux qui voient le fascisme derrière toute pensée qui n'est pas la leur.

 
PIERRE-ANDRÉ Taguieff aggrave son cas. Il persiste et signe un livre qui va donner des boutons à ceux qui voient la pieuvre « réactionnaire » relever la tête et multiplier ses tentacules. Les Contre-réactionnaires, le progressisme entre illusion et imposture, tel est le titre provocant de son dernier ouvrage qui peut se lire comme une somme de plusieurs de ces livres précédents (Le Sens du progrès, L'Illusion populiste), la charge polémique en plus.
 
Car il s'agit d'abord d'un essai virulent contre ceux qui mettent en cause le droit de défendre des idées de droite, ou simplement libérales dans ce pays. Depuis la Libération, nous dit Taguieff, un spectre hante la France : celui du « fascisme ». Le fascisme mussolinien et le national-socialisme sont morts et enterrés, mais régulièrement on réveille leurs fantômes. Si l'idée de prétendre que les gens qui votent Buffet ou Besancenot sont des « bolcheviks » au couteau entre les dents ne vient à l'esprit de personne, il n'en va pas de même avec les électeurs de Le Pen et, depuis quelque temps, de Sarkozy, stigmatisés comme « fascistes » en puissance. Exemple récent : la chanson de Renaud : « Elle est facho... elle vote Sarko. » Les Français veulent de l'autorité à l'école ? « Réacs ». Une plus grande régulation de l'immigration ? « Fachos », etc. Heureusement, les « contre-réactionnaires » veillent, qui agitent des pétitions à tout vent. Taguieff brosse leur portrait-robot. On les reconnaît à leur manie de faire des procès ad hominem. Le « contre-réac » s'y entend pour dénoncer le conservateur sous le libéral ; le « réac » sous le conservateur et le « facho » sous le « réac ». Cet antifascisme idéologique, explique Taguieff, est l'héritier résiduel d'une rhétorique créée dans les années 1930 par le mouvement communiste international pour stigmatiser tous ceux - libéraux, conservateurs, partisans du colonel de La Roque, ou maurrassiens de l'Action française - qui n'avaient que l'anticommunisme en commun. Instrumentalisé et dissocié de l'antitotalitarisme - Georges Orwell aura ce mot fameux : « L'intellectuel de gauche n'est pas antitotalitaire, il est antifasciste » - l'antifascisme mis en musique par le PCF aura pour fonction d'occulter, à la Libération, la dimension criminelle du stalinisme et de renvoyer dans les ténèbres tous ceux que les communistes combattaient. À ce titre, de Gaulle sera traité de fasciste, mais aussi Raymond Aron. Si cet antifascisme n'est pas mort avec l'effondrement de l'URSS, c'est qu'il sert d'identité à une gauche en manque de lendemains radieux, à qui il reste quand même un Grand Méchant Loup prêt à sortir du bois, pour se donner des frayeurs. Depuis quelques années, ce rôle est joué par le FN, dont le « national populisme », ainsi que le définit Taguieff, est issu de la tradition plébiscitaire du boulangisme. Pour Taguieff, si les antifascistes voient le fascisme là ou il n'est pas, c'est qu'ils n'ont rien compris à ce qu'il a été. Pour lui, comme pour la grande majorité des spécialistes, le fascisme ne se confond ni avec le conservatisme ni avec la réaction traditionnelle : il est fondé sur l'idolâtrie de l'État et du Parti, un nationalisme mâtiné de socialisme, et surtout sur l'idée qu'il faut générer un homme nouveau, « héroïque ». Les réactionnaires, Maistre, Bonald, Maurras ou Donoso Cortes, ne croyaient pas en l'homme nouveau, ils prônaient un ordre éternel, alors que fascistes et nationaux-socialistes rêvaient d'une humanité « régénérée ». Or, le paradoxe de ce fantasme de régénérescence, où l'on peut voir l'effet d'un thème religieux sécularisé, est qu'il est plutôt d'essence futuriste et moderniste. Taguieff en retrouve le leitmotiv tout au long de l'histoire de la modernité, aussi bien chez Darwin que chez Marx, notamment à travers une certaine conception évolutionniste et finaliste qui prétend, par la science et la technique, « améliorer » l'espèce humaine.
 
Les idéaux progressistes de l'Occident générateurs de barbarie ? Pierre-André Taguieff ne va pas jusque-là, mais suggère que la volonté de transformer l'homme par l'idéologie, qui a été la marque de fabrique du fascisme, comme du communisme, aurait été inconcevable sans la vision scientiste et quasiment mécaniste du progrès qui fut à l'oeuvre tout au long du XIXe siècle.
 
Les Contre-réactionnaires, le progressisme entre illusion et imposture de Pierre-André Taguieff Denoël, 620 p., 28 €.

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Appel pour une Europe identitaire et libertaire

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Appel à l'édification d'une Europe identitaire et libertaire

Trouvé sur: http://europepuissance.blogspot.com/
Le Peuple européen est un peuple en chaînes.

La fuite en avant de l’esprit du ressentiment, maquillé en compassion et en quelque chose qui serait des Lumières, a fait de ce peuple, notre peuple, l’esclave d’un mépris de soi jusqu’alors inédit.

Un étatisme qui ferait rougir d’envie Louis XIV sert de nid aux produits de ce mépris, les coucous, les gloutons de notre perte.

La caste fonctionnarienne d’Europe est composée des soldats d’une médiocratie ultraconservatrice, des soldats d’un ressentiment qui méprise l’effort et l’amour.
Des progressistes de la bassesse qui prônent une générosité de l’Homme qui traduite dans les faits est pour eux un titre, une inamovibilité, et un salaire qui ne correspond en rien à leur contribution à la prospérité de leur société.
Ce qu’ils appellent Justice est que les paresseux les plus lâches et les moins dignes dictent quoi faire à ceux qui font aller la société de l’avant et qui assurent sa sécurité devant les hostilités d’un Monde en mouvement, et qu’ils le fassent à leurs frais.

Ils sont la démagogie incarnée.

L’entretien du chômage, qu’il soit conscient ou inconscient, offre à la caste plus hydre que mammouth un réservoir de militants dont la bonne foi dans les idéaux de leurs ennemis réels en fait les martyrs haineux d’une cause qui leur est hostile.

Assez.

Nous demandons qu’une lutte contre notre indigne asservissement débute.

Nous demandons que les êtres qui portent en leur cœur l’amour de leurs semblables, le culte du vrai, l’estime de l’effort constructif, et le désir de ce que l’accomplissement de l’Humain s’incarne en une Renaissance perpétuelle identitaire et libertaire se mobilisent, s’organisent, et utilisent toutes les possibilités de l’action pour abattre nos tyrans, leur pouvoir, et leurs mensonges.

Ceux dont le ressentiment pédant a aiguisé le sens de la manipulation possèdent aujourd’hui un monopole de la domination des médias, des partis traditionnels, des organisations traditionnelles du monde du travail, entre autres…
C’est pourquoi chacun de ces dispositifs doit être traité en ennemi.

La naissance de nouveaux dispositifs prônant une évolution radicale émancipatrice et fière doit causer la perte de ces ennemis.
De même la conquête des anciens doit faciliter leur perte.

Nous demandons que le peuple d’Europe s’émancipe et se refonde en un peuple de sages-soldats.
Un ordre d’autonomes éclairés dont l’être sera l’accomplissement humain.

Les deux piliers de cette Europe de demain doivent être la Liberté et l’Estime de soi.

La palingénésie de l’Europe est notre droit, notre devoir, et notre volonté.


Anatole Pairle

mercredi, 28 mars 2007

J. Mabire: Nazis de carnaval

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Les nazis de carnaval sont nostalgiques d’un monde dont ils ne connaissent rien

Jean Mabire

Histoire :: France
" Les Nostalgiques ", ce fut le titre d'un livre du romancier Saint-Loup. On y découvrait quelques figures d'aventuriers qui après avoir participé à la dernière guerre dans le camp des vaincus, ne cherchaient pas, bien au contraire, à oublier les élans de leur jeunesse.

Ceux qui avaient eu 20 ans en 1943 sont aujourd'hui largement septuagénaires. Ce ne sont pas des " néo-nazis ", mais des anciens combattants sans drapeaux ni médailles qui refusent d'oublier leurs camarades tombés en Poméranie ou à Berlin. Comment pourraient ils se reconnaître dans les provocations des jeunes au crâne rasé se réclamant d'un monde dont ils connaissent uniquement ce qu'en racontent les médias partis à la chasse de la Bête immonde?

…Le néo-nazi fait partie du paysage audiovisuel. Ressemble parfaitement à ce qu'on voudrait qu'il soit bête et méchant.

Très bête et très méchant. Et partout semblable à lui-même, comme un parfait clone du Diable devenu diablotin.
Avant la guerre, les grands magasins proposaient à l'approche des fêtes des " panoplies ". Les petits garçons se déguisaient en Peaux-Rouges et les petites filles en infirmières. Cet amusement a disparu, comme les découpures et les soldats de plomb. Aujourd'hui, la seule panoplie qui fait encore prime sur le marché est celle du " néo-nazi ", modèle international, dont la presse assure gratuitement la promotion.

Si l'on attache quelque importance aux symboles et aux signes, on ne peut qu'être frappé chez les néo-nazis de particularités fort peu en usage sous le régime dont ils se réclament.

D'abord, l'inévitable crâne rasé. C'était alors la caractéristique des bagnards plutôt que de leurs gardiens ; la coupe de cheveux caractéristique étant " courts sur les côtés et plus longs sur le dessus ", très différente de la " brosse " à la mode dans l'armée française. Le crâne rasé évoque bien davantage les Marines que les Waffen SS…

…Il y a toujours des gens pour croire que l'habit fait le moine et la chemise le fasciste, surtout rehaussée de quelque brassard. Ainsi naquit ce qui n'était que mauvais folklore.

Au fur et à mesure que ce folklore vestimentaire disparaissait pour péniblement survivre dans quelques groupuscules squelettiques, indispensables viviers pour les provocateurs et les indicateurs, on vit apparaître une nouvelle mode. Elle ne nous vint pas d'outre-Rhin mais d'outre-Manche et porte le nom de skinheads, têtes de peau, ou l'on préfère crânes rasés…

Des skins aux néo-nazis il n'y a qu'un pas, ou plutôt un geste, le bras tendu et l'autre poing fermé sur la pinte de stout. Puisque les Allemands hurlent dans les films, on hurle aussi. Yeah et Heil, ou n'importe quoi. L'essentiel, c'est de scandaliser l'establishment et de cogner sur les policemen. Défendez à un gamin de toucher aux confitures. Il n'aura de cesse avant d'avoir trouvé un escabeau et dévalisé la dernière étagère du placard interdit.

La mode des skinheads lancée, elle se révéla vite, à l'inverse de ce que disait Mussolini du fascisme, un article d'exportation. Le Channel franchi, le public des stades français subit la contagion. Mais que sont les quelques centaines de skins français à côté des milliers d'Allemands qui allaient désormais fournir les gros bataillons du mouvement sur le continent?

On ignore trop la fascination qu'éprouvent les Allemands pour les Britanniques. Il y avait dans le 111e Reich une nostalgie secrète de l'empire victorien et du grand mythe raciste de l'homme blanc régnant sur les sept mers du monde. En déferlant sur le continent, la mode skin ne pouvait qu'attirer nombre de jeunes Teutons en rupture de respectabilité.

L'ATTRAIT IRREPRESSIBLE DU MAL ABSOLU

Les skinheads britanniques leur ont fourni, plus qu'on ne l'imagine, leurs défroques, leur musique, leur brutalité. Tout est anglo-saxon dans le background culturel des émeutiers que nous montre la télévision. Ils ne copient pas leurs grands-pères, mais l'image qu'en a donnée la propagande antifasciste ce ne sont pas les SA du capitaine Rohm mais les SA de Rohm vus par Visconti dans Les Damnés. Et encore plus pédés que les fusillés du 30 juin 1934! …

La mise en valeur par les médias des groupuscules les plus folkloriques contribue largement à multiplier les actes de violence qui s'enchaînent par contagion morbide, dans l'attrait irrépressible du Mal absolu, d'autant plus séduisant qu'il est inlassablement dénoncé.

Jean Mabire (Le Choc du Mois juillet-août 1993 N°66)

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lundi, 12 mars 2007

"Europe" et "Occident": deux concepts antagonistes

"Europe" et "Occident"; deux concepts antagonistes

par Claudio FINZI

Nos hommes politiques et nos intellectuels parlent continuellement de l'Europe et de l'Occident, comme s'il était évident que la pre-mière était contenue toute entière dans le second. L'Occident, dans une telle acception, indiquerait ainsi un ensemble formé par les pays d'Europe, surtout d'Europe occidentale, et les Etats-Unis d'Amérique, avec l'appendice canadien. En d'autres mots, l'Occident coïncide avec l'OTAN.

Mais si nous examinons l'origine du terme "Occident", non pas au sens géographique évidemment, mais au sens politique, nous dé-couvrons quelque chose de très différent de cette acception ³otanienne²: au début du XIXième siècle, aux Etats-Unis d'Amérique, cette expression est née, non pas pour englober l'Europe dans un contexte atlantique plus vaste, mais, au contraire, pour que le jeune Etat américain prenne ses distances par rapport aux pays du Vieux Continent.

Nous trouvons les premières traces de cette distinction dans les dis-cours de l'un des plus intéressants présidents américains, Thomas Jefferson, dont on a fêté en 1993 le 250ième anniversaire de la nais-sance. Déjà en 1808, Jefferson affirmait que l'Amérique était un "hémisphère séparé"; ensuite, en 1812, et plus nettement encore en 1820, il évoquait un méridien destiné à séparer pour toujours "notre hémi-sphère" de l'Europe. Dans l'hémisphère américain, prophétisait-il, c'est-à-dire l'hémisphère occidental, "le lion et l'agneau vivront en paix l'un à côté de l'autre".

L'étape suivante fut celle de la fameuse déclaration du Président Monroe, le 2 décembre 1823, par la-quelle il interdit à toute puis-sance européenne d'intervenir dans l'hémisphère occidental-améri-cain. Depuis lors, l'affirmation de cette spécificité occidentale-amé-ricaine est allé crescendo, jusqu'aux prises de position du Président Théodore Roosevelt au début de notre siècle, puis aux déclarations diploma-tiques de 1940 et de l'immédiat après-guerre. Ce qui compte, c'est que dans tous ces discours, dans toutes ces déclara-tions, dans tous ces documents diplomatiques américains, par hémi-sphère occidental, par Occident, on entend quelque chose de radica-lement opposé à l'Europe. Il ne s'agit pas seulement d'indiquer et de délimiter une sphère d'influence ou une zone de défense dans la-quelle on exclut la pré-sence de tout ennemi potentiel. Si tel était le cas, l'Occident ne serait que l'une de ces innombrables dé-nomina-tions utilisées en politique et en diplomatie pour définir un lieu ou une situation géographique ou stratégique.

Il s'agit de bien autre chose. En réalité, l'idée de choisir un méridien qui séparerait l'Europe de l'Occident se fonde sur l'idée que l'Occident, c'est-à-dire l'Amérique comprise comme Occident par opposition à l'Europe, serait fondamentalement différent de l'Europe dans son essence et sa signification. Cette idée se fonde donc sur la présomption que ces deux mondes, le vieux et le nouveau, sont ra-dicalement diffé-rents par nature, selon la tradition et la morale. Dans un tel contexte, l'Amérique finit par être différente de l'Europe, parce que l'Amérique est la terre de l'égalité et de la li-berté, opposée à l'Europe, terre où existent des stratifications so-ciales et où règne l'oppression. L'Amérique, comprise comme Etats-Unis d'Amérique, est la terre où l'homme bon a réussi à créer un ordre social et politique bon, tandis que l'Europe est la terre du vice et de la corruption; l'Amérique est la terre de la paix, l'Europe, celle de la dis-corde et de l'esclavage.

Le méridien, qui devrait séparer l'Occident de l'Europe, revêt donc une fonction de préservation des bons contre les mauvais, signale une opposition radicale et insurmontable, du moins tant que l'Europe ne re-nonce pas à ses perversités (mais sera-ce un jour possible?).

Ce type de raisonnement trouve ses racines dans les plus anciennes traditions politiques américaines, celles des pères fondateurs. Rappelons-nous qu'ils étaient des puritains, des protestants extré-mistes, animés par une profonde foi en Dieu et en eux-mêmes, parce qu'ils croyaient être des élus de celui-ci, contraints d'abandonner l'Angleterre pour échapper aux persécutions et aux contacts entre protestants corrompus et papistes diaboliques. Pour eux, l'Amérique était une terre vierge, où ils pouvaient construire un monde nouveau, un monde de ³purs², un monde pour le peuple de Dieu, un monde libéré des règles im-pies de l'Europe, heureuse-ment séparé de celle-ci par des milliers de miles d'océan.

Dieu avait donc donné l'Amérique à ses habitants et ceux-ci devaient la garder pure et incorrompue, libre de toutes les turpitudes euro-péennes qu'ils venaient d'abandonner. La Doctrine de Monroe et la notion d'"hémisphère occidental" sont la transposition politique et laïcisée au fil des décennies, de cette menta-lité qui, au départ, était religieuse et qui aspirait à une séparation plus nette d'avec l'Europe.

Ceux qui, aujourd'hui, utilisent indifféremment les termes "Europe" et "Occident", comme s'ils étaient synonymes, ou comme si le se-cond comprenait la première, et adoptent cet usage erroné, com-mettent une grave erreur historique et politique. A moins qu'ils n'acceptent, consciemment ou inconsciemment, la vision américaine du monde, espérant de la sorte que l'Europe soit entrée tout entière dans l'Occident.

Il me semble bon de relever le fait suivant: dans la définition de l'Occident, telle qu'elle est née chez un Jefferson, s'inscrivent d'emblée les deux formes américaines de concevoir les relations internationales, que l'on a coutume de considérer comme exclusive l'une de l'autre: l'interventionnisme et l'isolationnisme. En effet, si l'Occident est le "bien", est le monde non infecté par les perversités européennes, alors il faut en tirer deux conséquences. D'une part, on peut décider de se refermer sur soi-même, pour empêcher la conta-gion d'entrer; d'autre part, on peut décider de sortir de sa propre tranchée pour s'élancer et sauver le monde. C'est cette seconde politique qui a prévalu dans l'histoire américaine, surtout parce que l'idée d'un Occident incorrompu s'est unie à celle du "destin manifeste" des Etats-Unis (cette expression a été forgée en 1845 durant le conten-tieux qui opposait les USA à l'Angleterre pour l'Oregon) pour former le pire des impérialismes.

Ainsi, toute action américaine sur le continent américain relève de la défense des intérêts propres des Etats-Unis; toute action outre-mer est dès lors une "mission" du Bien pour sauver le monde. Tandis que la réciproque ne vaut pas pour les Européens, porteurs du "mal", qui ne pourront jamais s'ingérer de bon droit dans les affaires du continent américain, comme le prétendait précisément la Doctrine de Monroe, qui interdisait aux Européens tout mouve-ment à l'Ouest du méridien ³séparateur². Ceux qui en Europe au-jourd'hui s'imaginent être des paladins de l'Occident, sont tout sim-plement des individus qui se sont inté-grés dans le mode d'être et de penser des Américains et qui, consciemment ou inconsciemment, estiment avoir été ³sauvés² par eux et ³libérés². En réalité, ils se sont soumis dans l'âme, en renonçant aux tradi-tions européennes.

Claudio FINZI.
 

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vendredi, 23 février 2007

G. LOcchi: Definizioni

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Definizioni

Editore: Società Editrice Barbarossa
Autore: Giorgio Locchi
Anno: 2006
Pagine: 320
Sezione: Arte cultura e letteratura
Argomento: Cultura e intellettuali
Codice: BROSSA0276LB

Prezzo:18,00 € (I.I.)

http://www.orionlibri.com/

Antologia degli scritti di Giorgio Locchi, per la maggior parte inediti in italiano.
Attenzione: la scheda completa di questo libro al momento della messa in vendita.

 

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