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vendredi, 09 mars 2018

Politique des racines

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"Enracinement", par Manon Potvin

Politique des racines

par Georges FELTIN-TRACOL

GB-limites.jpgEn 2014, dans le sillage de la « Manif pour Tous », Gaultier Bès se faisait connaître par Nos limites. Pour une écologie radicale, un essai co-écrit avec Marianne Durano et Axel Nørgaard Rokvam. Le succès de cet ouvrage lui permit de lancer en compagnie de la journaliste du groupe Le Figaro, Eugénie Bastié, et de Paul Piccarreta, la revue trimestrielle d’écologie intégrale d’expression chrétienne Limite.

Au deuxième trimestre 2017, Gaultier Bès a publié Radicalisons-nous ! qui use et parfois abuse des métaphores végétales. Il a néanmoins averti que « la métaphore (“ transport ”, en grec) n’est pas un rapport d’identité, mais d’analogie (p. 27) ». Le titre est déjà un savoureux contre-pied à l’opinion médiatique ambiante qui pourchasse toute manifestation de radicalité. Pour les plumitifs stipendiés, la radicalité signifie l’extrémisme. « Tous ceux qui sortent des sentiers battus, on les disqualifie en les traitant d’extrémistes (ou d’« ultra », de “ khmers ”, d’« ayatollas », et bien sûr de “ radicaux ” (p. 13). » Pour preuve, les terroristes islamistes. Or, « l’extrémisme se pense toujours contre, en marge, aux extrémités, par rapport à un centre dont elle cherche toujours à s’éloigner. La radicalité, au contraire, se suffit à elle-même. Elle va au bout de sa propre logique (p. 114) » parce qu’elle part de la racine du sujet et/ou du diagnostic. Les militants radicaux ne sont surtout pas des dingues extrémistes bien souvent manipulés par des officines discrètes… Tout le contraire des « djihadistes [qui] sont de nulle part et de partout. Leurs places fortes sont semblables en cela aux grandes places financières, multiculturelles, cosmopolites même (p. 110) ». Les « soldats du Califat universel » sont en réalité des triples déracinés du point de vue de la géographie, de la culture et de l’histoire. L’auteur aurait pu les qualifier d’« individus unidimensionnels » au sens marcusien du terme.

Radicalité et enracinement

GB-rad.jpgDans sa préface, Jean-Pierre Raffin estime quant à lui que la radicalité « est une notion noble qui fait appel aux fondements, aux racines de notre être, de notre vie en société puisque l’être humain est un être social qui, dépourvu de liens, disparaît ou sombre dans la démence (p. 7) ». Gaultier Bès prévient aussi que « sans la profondeur de l’enracinement, la radicalité se condamne à n’agir qu’en surface et se dégrade en extrémisme. Sans la vigueur de la radicalité, l’enracinement n’est qu’un racornissement, qui, faute de lumière, conduit à l’atrophie (p. 16) ». Il se réfère beaucoup à la philosophe Simone Weil malgré une erreur sur l’année de son décès, 1943 et non 1944, en particulier à son célèbre essai sur l’Enracinement.

Il existe une évidente complémentarité entre radicalité et enracinement. Il entend « réhabiliter la notion de radicalité et montrer qu’elle n’est viable qu’à condition d’être enracinée (p. 12) ». Il insiste volontiers sur le fait que « l’enracinement […] n’est pas nostalgique, mais politique. Il ne rêve à aucune restauration, il ne fantasme aucun âge d’or, il se pense plutôt comme une force révolutionnaire, une quête de justice qui s’appuie sur une tradition non-violente. […] Ce n’est ni une réaction ni un figement, mais un mouvement spirituel, une actualisation dynamique qui s’appuie sur le passé pour mieux embrasser l’avenir (pp. 19 – 20) ». Par conséquent, il désapprouve l’expression de « Français de souche ». Il a raison. Il y a plus d’une décennie, un rédacteur de Terre et Peuple privilégiait « l’expression “ Européen de racine ” à celle d’« Européen de souche » couramment employé parmi nous, car la racine c’est vivant alors que la souche est morte (1) ».

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Gaultier Bès

S’appuyer sur les racines n’implique pas un quelconque fixisme. Outre la nécessité d’éviter deux tentations, « celle du statu quo (p. 15) » et « celle de la table rase, et elle est à la mode. Le Progrès rase gratis ! (p. 15) », Gaultier Bès conçoit l’identité « comme une continuité permanente, c’est-à-dire comme une réalité à la fois durable et mouvante, évolutive et constante (p. 63) ». L’identité est comme la vie d’un homme : l’allure physique d’une même personne varie au fil de l’âge. L’identité française de 2018 n’est pas celle de 1830 et encore moins celle de 1580. Elle repose pourtant sur un socle ethnique indubitable d’origine boréenne. Gaultier Bès n’évoque pas ce patrimoine génétique et anthropologique commun. Pour lui, « les peuples ont des racines qui les rattachent et à un territoire et à une histoire, et que les nations qu’ils forment au gré des circonstances sont moins des radeaux de fortune que des “ maisons communes ” (p. 75) ». L’expression « maison commune » serait-il un clin d’œil (incongru ?) au mouvement métapolitique naguère animé par Laurent Ozon ? Gaultier Bès connaîtrait-il par ailleurs les travaux de l’excellent revue Le recours aux forêts qu’Ozon dirigea dans les années 1990 ? Cette belle revue défendait déjà l’enracinement et l’écologie réelle, étudiait Jacques Ellul et Bernard Charbonneau et se doutait que « l’enracinement sans radicalité est artificiel, la radicalité sans enracinement superficielle (p. 80) ».

Identité(s) et politique

Gaultier Bès se montre parfois sinon ambigu, pour le moins confus. Il considère que « l’identité comme le chemin le plus sûr vers l’altérité (p. 52) ». Très bien ! Mais comment concilier cette indispensable altérité quand il écrit par ailleurs que la France est une vieille nation politique, un État-nation qui s’est édifié sur un déracinement concerté des peuples, des territoires et des métiers, sur l’ethnocide des campagnes et la suppression des corporations ? Certes, « l’État-Nation n’est pas l’alpha et l’oméga de la vie politique, reconnaît-il. C’est moins, à l’instar de la laïcité, une “ valeur ” qu’un principe de gouvernement (p. 70) ». Émanation de la Modernité, l’État-nation déracine tout, y compris ces nations que sont les ethnies et les peuples. Mondialisme inassumé et partiel, il arrase les différences essentielles. Il aurait pu introduire dans sa réflexion la notion clé de terroir. Il semble l’oublier. Or, sans terroir, l’enracinement se révèle impossible. Le terroir est l’appropriation par le sang, l’égrégore communautaire, l’histoire et la culture, le sol investi par les génies de lieu. La nation dans sa fibre la plus authentique, avant de subir une évolution stato-nationale, coïncidait à « une culture enracinée dans le terroir (bodenständig Kulture) (2) ». Pourquoi dès lors vouloir opposer la nation à l’empire, cette forme politique qui met en cohérence des nations culturelles plus ou moins proches, dont il ne paraît pas saisir les implications pratiques de ces diversités mises à l’unisson ? Le modèle impérial diverge de la fallacieuse construction dite européenne. Il déplore les transferts de souveraineté stato-nationale prévues par les traités européens vers une strate européenne inexistante du fait de leur dépolitisation de ses instances. Il en résulte leur neutralisation politique (Carl Schmitt).

L’Europe n’est pas le miroir du monde, mais la consécration d’un polyculturalisme enraciné et autochtone. « La polis ne saurait se superposer au cosmos (p. 71) », et ce, malgré que « mondialisation culturelle et globalisation économique sont les deux faces d’une seule et même médaille (p. 76) ». Certes, « contre la City et son monde, précise-t-il plus loin, être radical, c’est user pleinement de son droit de cité (p. 123) ». Ce droit de cité ne présuppose-t-il pas l’établissement de limites, appelées par exemple frontières non seulement en géopolitique, mais aussi d’un point de vue juridique ? Force est de constater que Gaultier Bès n’aborde pas ce sujet brûlant. En effet, quelque soit sa nature, un État se doit d’établir des bornes tant territoriales que civiques. L’appartenance à une citoyenneté suppose une distinction radicale entre les citoyens et les autres, et justifie la préférence nationale. En bon Français, Gaultier Bès confond citoyenneté et nationalité. « La nation est une fiction ? Sans doute ! Mais elle est une fiction utile, condition d’une vie politique que soit autre chose que la chambre d’enregistrement des grandes firmes mondialisées (p. 64). » La nation comme peuple vivant n’est jamais fictive. C’est la citoyenneté qui l’est, surtout à l’heure de ces saloperies de réseaux sociaux et de matraquage télévisuel incessant, sans oublier les méfaits de la partitocratie. Le temps est venu de dissocier la nation et l’État. La première retrouve son caractère communautaire et identitaire; le second prend enfin une tournure spécifiquement politique en devenant sciemment communautariste autochtone et en promouvant un aspect authentiquement plurinational.

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L’auteur aurait pu se référer à l’excellente Note sur la suppression générale des partis politiques de Simone Weil. L’État-nation meurt d’un leurre démocratique et de la malfaisance des partis politiques. Outre la politicaillerie et l’invasion de la Technique, la croyance en une illusoire « fin de l’histoire (Francis Fukuyama) » favorise le pacifisme, abolit les volontés et ricane du citoyen prêt à se sacrifier pour sa cité et les siens. Le courage a déserté le Vieux Continent. Citoyenneté et res publica demeurent pourtant des concepts hautement polémogènes. La cité n’existe qu’à travers la perception, réelle ou supposée, d’un danger plus ou moins imminent envers elle. Du coup, le paragraphe « La nation et la paix » évacue le conflit comme permanence politique et nécessité historique. La lecture d’un ouvrage méconnu de Régis Debray, Le code et le glaive (3), lui aurait été profitable dans une perspective « nationiste ».

Gaultier Bès confond aussi le tribalisme, manifestation tangible de l’hyper-modernité ultra-individualiste, du communautarisme, véritable bête noire de la doxa ordo-républicaine hexagonale. Oublie-t-il que l’Ancienne France d’avant 1789 était un agencement dynastique de communautés multiples et variées ? On ne peut mettre dans une même équivalence des démonstrations néo-tribales suscitées par le consumérisme libéral (adeptes des rave parties, vegans, féministes hystériques, gays) et l’affirmation salutaire de communautés spirituelles, ethniques, culturelles et linguistiques. Les droits à la différence charnelle et à la reconnaissance institutionnelles ne concernent que les Alsaciens, les Basques, les Bretons, les Catalans, les Corses, les Savoisiens, voire les musulmans, et nullement les fumeurs de shit, les joueurs de boules ou les fans de piercing ! Seule la renaissance de communautés organiques enracinées favoriserait un renouveau démocratique de proximité. L’auteur constate que « la politique se meurt de n’être plus qu’une grande surface où le citoyen-consommateur erre, éperdu, entre les rayons pleins de promesses et de programmes affriolants (pp. 13 – 14) ». Bref, « il nous faut repenser radicalement la politique. La remettre à sa place (p. 15) ». Comment remédier à la dépréciation du politique ? Par l’intermédiaire des AMAP, des SEL, des coopératives, des jardins partagés, du recyclage généralisé, des monnaies locales ? Toutes ces excellentes initiatives n’influent cependant qu’en marge de la « société liquide (Zygmunt Bauman) ». Le tissage des liens sociaux participe au réenracinement et au maintient de son identité, de sa liberté et de sa souveraineté. « Plus un peuple a des racines solides, plus il a de ressources pour préserver son indépendance (p. 68). » Que faire alors quand les racines s’étiolent et se sclérosent ? C’est le cas pour des Français de plus en plus hors-sol.

Affranchissement du local

racines2.jpgGaultier Bès fait finalement trop confiance aux racines. Il a beau distinguer « l’image végétale des “ racines [à] celle, toute minérale, des “ sources ” (p. 25) », il se méprend puisque l’essence bioculturelle de l’homme procède à la fois aux racines, aux sources et aux origines. Ces dernières sont les grandes oubliées de son propos. Ce n’est toutefois qu’en prenant acte de cette tridimensionnalité que l’enracinement sera complet. Pourtant, il prend soin de préciser que « le global n’est pas l’universel, c’est l’extension d’un local hégémonique (p. 76) ». L’avertissement fait penser à l’opuscule du Comité invisible, À nos amis. Le local « est une contraction du global (4) ». « Il y a tout à perdre à revendiquer le local contre le global, estime le Comité invisible. Le local n’est pas la rassurante alternative à la globalisation, mais son produit universel : avant que le ne soit globalisé, le lieu où j’habite était seulement mon territoire familier, je ne le connaissais pas comme “ local ”. Le local n’est que l’envers du global, son résidu, sa sécrétion, et non ce qui peut le faire éclater (5). » Outre le collectif d’ultra-gauche, Guillaume Faye s’interrogeait sur l’ambivalence du concept. « L’enracinement doit […] se vivre comme point de départ, la patrie comme base pour l’action extérieure et non comme “ logés ” à aménager. Il faut se garder de vivre l’enracinement sous sa forme “ domestique ”, qui tend aujourd’hui à prévaloir : chaque peuple “ chez soi ” pacifiquement enfermé dans ses frontières; tous folkloriquement “ enracinés ” selon une ordonnance universelle. Ce type d’enracinement convient parfaitement aux idéologues mondialistes. Il autorise la construction d’une superstructure planétaire où s’intégreraient, privés de leur sens, normés selon le même modèle, les nouveaux “ enracinés ” (6). »

En lisant Radicalisons-nous !, on a l’impression que l’enracinement des peuples du monde entier assurerait une paix universelle, ce qui est à la fois irréaliste et fort naïf. En effet, l’auteur écarte les facteurs d’imprévisibilité de l’histoire. Même si tout un chacun (re)trouverait un enracinement approprié, tensions et contentieux plus ou moins virulents persisteront.

En célébrant « la politique par la racine », sous-titre de ce bon essai qui fait la part belle aux formules bien tournées : « Pour que notre avenir soit fécond, notre présent se doit d’être profond (p. 54) » et s’achève sur un manifeste en dix points parmi lesquels « la radicalité ne croit pas au Progrès (p. 120) » et « la radicalité est la condition de toute écologie (p. 121) », Gaultier Bès ignore peut-être que l’intérêt pour les racines n’est pas nouveau. Aux élections européennes de 1999, la liste CPNT (Chasse, pêche, nature et traditions) avait pour sympathique slogan « De toute la force de nos racines ». Plus anciennement, en 1977, le Club de l’Horloge publiait Les racines du futur, un magistral travail de reconquête intellectuelle qui mentionne « le triple enracinement ». Le constat de cet essai démontre un plus grand pragmatisme que celui de Gaultier Bès. « De cet enracinement dans l’espace et le temps pourra naître une communauté de destin. La définition d’un projet collectif doit enrayer les effets pervers d’un enracinement qui pourrait favoriser l’éclosion d’une multitude d’égoïsmes locaux ou régionaux. […] La définition d’un destin commun, qui est de la compétence souveraine de l’État, la conquête collective d’une “ nouvelle frontière ” économique, sociale, scientifique voire géographique (comme la construction européenne), pourra, seule, sublimer les égoïsmes et les particularismes, dans le respect des différences et des autonomies (7). »

La récente exposition éditoriale (y compris médiatique) d’une quête des racines lui (re)donne cependant une sympathique notoriété métapolitique. Qu’elle soit fertile auprès des Albo-Européens !

Georges Feltin-Tracol

Notes

1 : Jean-Patrick Arteault, « Guerre culturelle et combat identitaire », Terre & Peuple la revue, n° 25, Équinoxe d’automne 2005, p. 18.

2 : Martin Heidegger, Lettres à sa femme Elfride. 1915 – 1970, le Seuil, 2007, lettre du 8 juillet 1918, p. 109. En matière d’enracinement et nonobstant une langue souvent hermétique et déroutante, y compris pour les germanistes, la pensée de Heidegger présente plus que jamais un atout considérable, surtout à l’heure où une cohorte de sycophantes « universitaires » ose contester l’auteur des prophétiques Cahiers noirs.

3 : Régis Debray, Le code et le glaive. Après l’Europe, la nation ?, Albin Michel – Fondation Marc-Bloch, 1999.

4 : Comité invisible, À nos amis, La fabrique éditions, 2016, p. 191.

5 : Idem, pp. 190 – 191.

6 : Guillaume Faye, Europe et modernité, Eurograf, 1985, pp. 53 – 54.

7 : Club de l’Horloge, Les racines du futur. Demain la France, Masson, 1977, p. 194. Lisons aussi Bernard Charbonneau, L’Homme en son temps et en son lieu, préface de Jean Bernard-Maugiron, RN Édition, coll. « Ars longa, vita brevia », 2017.

• Gaultier Bès, Radicalisons-nous ! La politique par la racine, préface de Jean-Pierre Raffin, Éditions Première Partie, coll. « À la limite », 2017, 127 p., 7 €.

mercredi, 28 février 2018

Why The Ethnie Is Important

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Why The Ethnie Is Important

It is quite common in our sphere for the focus of analyses to rest on the functionality and the securing of power mechanisms in a society, both inside and outside of government. The interpretation of these mechanisms and how they developed are generally elucidated through the lens of certain macrohistorical events and trends which have existed in the West for several centuries. However, history does not exist in a vacuum, and a thorough analysis of these events cannot neglect to consider the characteristics of the “human material” involved in these trends. Doing so will leave explanatory power on the table that could be applied to understand these events more fully, and thus to learn more precise lessons from them.

One of our fundamental goals is to seek to restore a socially stable order. To this end, there a number of critiques of democracy and other factors which divide power and create unstable social and political circumstances. To fully encompass this goal, it is necessary to take into account sociological and ethnographic factors which are not always reflected in purely formalistic analyses. I would argue that one of the primary factors of interest should be that of ethnicity and its interplay both within and between groups.

First, some definitions are in order. “Ethnicity” is a term that primarily refers to commonalities shared within human groups, which serve to define the “in-group” over and against “out-groups.”  Ethnicities center around “ethnic markers,” such as language, religion, morals, traditions and customs, patterns of daily living, and so forth. Often, ethnicity is delineated through the use of various “ideological” indicators (e.g. common mythology, common descent from an eponymous ancestor), the acceptance of which helps to determine group membership. While phenotype can be included in the set of markers, it is not usually a primary determinant and is most often not what principally defines an ethnie.

It is true that members of the same ethnie will almost always share similar phenotypic expressions (which are not limited merely to skin color, however). It is likewise true that phenotypic distinctions can serve as “in/out-group” markers, especially across metaethnic faultlines. Nevertheless, “race” as a modernistic, purely biological and genetic concept, is not what is being discussed here. Rather, commonality of custom, language, religion, and psychology are at issue, and these have served for so long to define differing groups of people that they are the very quintessence of “tradition.”

It is widely recognized within the social sciences that shared ethnicity is one of the single most powerful organizing principles that exists. Ethnicity has played a role in helping to be organize and distinguish between groups from our tribal beginnings. It is something that has been hardwired into the human psyche for thousands of years, dating back to even before the rise of our first truly agrarian civilizations.

The reason all of this is important hearkens back to what was said earlier about the goal of reestablishing a stable social order. It is through the concept of ethnicity that “collective solidarity” (closely related to the Khaldunian concept of asabiyyah in agrarian societies) is primarily expressed. Collective solidarity is a (potentially) quantifiable measure of the capacity for the members of a social body to work together solidaristically towards the achievement of common goals and purposes. It is well-known that collective solidarity is much more easily achieved within groups of people who more readily identify with each other as a result of shared ethnicity. Conversely, closely proximate diversity tends to breed mistrust and a lower willingness to work together for a common good. This solidaristic behavior with co-ethnics is much stronger than for artificial groupings centered around shared economic interest or hobbies, such as corporations and fraternal organizations.

Those concerned with true social stability must work toward the establishment of rational ethnostructures that will facilitate, rather than hinder, collective solidarity. This implies a rejection of abstract civic nationalism and the “multicultural” state, as well as rejection of the sort of immigration policies and structural power-distributing institutions which would encourage multiculturalism. Keep in mind, of course, that empires in which an aristoclade has established imperial control over its neighbors, but is not actively trying to co-mingle them, do not necessarily come within the purview of this analysis.

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The power of collective solidarity can easily be seen in the modern Western experience.  Certainly, collective solidarity is something that waxes or wanes within individual ethnies over time. Collective solidarity will increase when the core elite element within an ethnie exhibits unity among itself and shares goals and ideology, which it then leads its co-ethnic commons to act upon. Usually, collective solidarity increases due to several collaborating factors, such as a shared struggle against an external enemy, a low ratio of population density to shared resources (which reduces intragroup competition), and the proximity of vastly different ethnic groups across a shared border.

Conversely, collective solidarity declines when an ethnie’s elite core is degenerate, divided, or no longer sees itself as sharing a common destiny, identity, and purpose with its co-ethnic commons.

The rise of the West coincided with a high level of collective solidarity within the various Western ethnies. Each nation shared a unity of purpose and a willingness to work together for common goals (usually national expansion or other forms of national glory). This unity was shared between the elite and common elements, and this was true even given the greater general tendency towards individualism found among northwestern European populations (but which also existed among other Europeans, as well).

The decline of the West has coincided with a palpable decline in collective solidarity among Western ethnies. There is an increasing ideological and cultural gap between our ethnic elites and the rest. This is combined with the presence of an alloethnic elite, which has suborned the loyalties of Western ethnic elites. This occurred because Jews tend to exhibit much greater in-group cohesion (i.e. higher collective solidarity) which allows them to out-compete native Western elites, who grew complacent and were already waning in their sense of solidarity with their own co-ethnic commons during the 20th century.

It should go without saying that groups with higher collective solidarity will nearly always be able to outstrip those without it.

The encouragement of multiculturalism, mass third world immigration, and other trust-destroying phenomena has been a successful strategy used by alloethnic leaders in the West to further destroy Western collective solidarity and allow victory in ethnic conflicts between alloethnic and European/American ethnic elites. Even if these phenomena were entirely native in origin, mass immigration would still be destroying Western collective solidarity, resulting in the atomization and weakening of our societies. Individualism only really has the ability to thrive when collective solidarities are worn down and broken.

Thus, it’s important to support efforts and methods for increasing collective solidarity among Western ethnies. As such, we must find (and implement) ways to increase ethnic identification among Western populations. One strategy for this is to encourage the expression of traditional ethnic markets such as Christianity, European heritage and traditions, the revivification of local languages, and the like. Coupled with this, however, must be a concerted effort to “re-elitify” these markets, so that they not only find wide expression among the ethnic commons of the various Western nations, but are also readopted by the elites, thus unifying the sense of collective purpose in our ethnies.

Doing this must obviously be coupled with the pursuit of technical methods for obtaining and maintaining formal structural power, which has been a primary interest in our sphere. Hence, the two concepts – structural formalism and ethnocollective solidarity – can and must work in tandem. Any Restoration that might take place and institute a formal mechanism for the holding and use of power will be hollow if it is not coupled with the support structure provided by a unified ethnic solidarity.

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jeudi, 22 février 2018

Multipolarity and polycentricity

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Leonid Savin:

Multipolarity and polycentricity

Ex: https://www.geopolitica.ru

The very term “multipolarity” is of American (Anglo-Saxon) origin, and in the third chapter we examined similar concepts that have been developed in other countries. As various scholars have indicated, varying interpretations of multipolarity have provoked certain conceptual dilemmas. For instance, a report on long-term global trends prepared by the Zurich Center for Security Studies in 2012 noted that:

The advantage of ‘multipolarity’ is that it accounts for the ongoing diffusion of power that extends beyond uni-, bi-, or- tripolarity. But the problem with the term is that it suggests a degree of autonomy and separateness of each ‘pole’ that fails to do justice to the interconnections and complexities of a globalised world. The term also conceals that rising powers are still willing to work within the Westernshaped world economic system, at least to some extent. This is why the current state of play may be better described as ‘polycentric’. Unlike ‘multipolarity’, the notion of ‘polycentricism’ says nothing about how the different centres of power relate to each other. Just as importantly, it does not elicit connotations with the famous but ill-fated multipolar system in Europe prior to 1914 that initially provided for regular great power consultation, but eventually ended in all-out war. The prospects for stable order and effective global governance are not good today. Yet, military confrontation between the great powers is not a likely scenario either, as the emerging polycentric system is tied together in ways that render a degree of international cooperation all but indispensable.

The Swiss scholars involved in this summation approached the issue from the standpoint of reviewing security issues in a globalized world and tried to find an adequate expression for contemporary trends. However, there also exist purely technical approaches and ideological theories which employ the term “polycentric”.

The concept of “polycentricity” had been used before to describe the functioning of complex economic subjects. Accordingly, if management theories are springboards for geopolitical practice, then this model’s basic elaborations already exist. In a literal sense, the term “polycentric” suggests some kind of spatial unit with several centers. However, the term does not specify what kind of centers are in question, hence the obvious need to review various concepts and starting points before discussing polycentrism.

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Four levels of this concept can be discussed in the context of political-administrative approaches. The analytical-descriptive level is needed for describing, measuring, and characterizing the current state of a spatial object by means of precisely determining how long a country or capital can be “polycentric.” Secondly, this concept can be understood in a normative sense which might help, for example, in reorganizing the spatial configuration of an object, i.e., either to promote/create polycentrism or support/utilize an existing polycentric structure. Thirdly, when it comes to spatial entities, it is necessary to specify their spatial scale, i.e., at the city level, city-region, mega-regional level, or even on the national or transnational levels. Upon closer examination, the concept of polycentrism concept thus challenges our understanding of centers in urban areas, since such can concern either their roles and functional ties (relations) or their concrete morphological forms (the structure of urban fabric). This differentiation between the functional and morphological understandings of polycentrism constitutes the fourth dimension.

In the contemporary situation which features the presence of city-states and megalopoli that can easily compete with some states in the classical understanding in the most varied criteria (number of residents and their ethnic identity, length of external borders, domestic GDP, taxes, industry, transport hubs, etc.), such an approach seems wholly appropriate for more articulated geopolitical analysis. Moreover, in the framework of federal models of state governance, polycentrism serves as a marker of complex relations between all administrative centers. Regional cooperation also fits into this model since it allows subjects to “escape” mandatory compliance with a single regulator, such as in the face of a political capital, and cooperate with other subjects (including foreign ones) within a certain space.

To some extent, the idea of polycentrism is reflected in offshore zones as well. While offshores can act as “black holes” for the economies of sovereign states, on the other hand, they  can also be free economic zones removing various trade barriers clearly within the framework of the operator’s economic sovereignty.

It should also be noted that the theory of polycentrism is also well known in the form of the ideological contribution of the Italian community Palmiro Togliatti as an understanding of the relative characteristics of the working conditions facing communist parties in different countries following the de-Stalinization process in the Soviet Union in 1956. What if one were to apply such an analysis to other parties and movements? For example, in comparing Eurosceptics in the EU and the conglomerate of movements in African and Asian countries associated with Islam? Another fruitful endeavor from this perspective could be evaluating illiberal democracies and populist regimes in various parties of the world as well as monarchical regimes, a great variety of which still exist ranging from the United Kingdom’s constitutional monarchy to the hereditary autocracy of Saudi Arabia which appeared relatively recently compared to other dynastic forms of rule. Let us also note that since Togliatti the term “polycentrism” has become popular in political science, urban planning, logistics, sociology, and as an expression for unity in diversity.

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In 1969, international relations and globalization expert Howard V. Perlmutter proposed the conceptual model of EPG, or Ethnocentrism-Polycentrism-Geocentrism, which he subsequently expanded with his colleague David A Heenan to include Regionalism. This model, famously known by the acronym EPRG, remains essential in international management and human resources. This theory posits that polycentrism, unlike ethnocentrism, regionalism, and geocentrism, is based on political orientation, albeit through the prism of controlling commodity-monetary flows, human resources, and labor. In this case, polycentrism can be defined as a host country’s orientation reflecting goals and objectives in relation to various management strategies and planning procedures in international operations. In this approach, polycentrism is in one way or another connected to issues of management and control.

However, insofar as forms of political control can differ, this inevitably leads to the understanding of a multiplicity of political systems and automatically rejects the monopoly of liberal parliamentarism imposed by the West as the only acceptable political system. Extending this approach, we can see that the notion of polycentrism, in addition to connoting management, is contiguous to theories of law, state governance, and administration. Canada for instance has included polycentricity in its administrative law and specifically refers to a “polycentric issue” as “one which involves a large number of interlocking and interacting interests and considerations.” For example, one of Canada’s official documents reads: “While judicial procedure is premised on a bipolar opposition of parties, interests, and factual discovery, some problems require the consideration of numerous interests simultaneously, and the promulgation of solutions which concurrently balance benefits and costs for many different parties.  Where an administrative structure more closely resembles this model, courts will exercise restraint.”

Polycentric law became world-famous thanks to Professor Tom Bell who, as a student at the University of Chicago’s law faculty, wrote a book entitled Polycentric Law in which he noted that other authors use phrases such as “de-monopolized law” to describe polycentric alternatives.

Bell outlined traditional customary law (also known as consolamentum law) before the establishment of states and in accordance with the works of Friedrich A. Hayek, Bruce L. Benson, and David D. Friedman. Bell mentioned the customary law of the Anglo-Saxons, ecclesiastical law, guild law, and trade law as examples of polycentric law. On this note, he suggests that customary and statutory law have co-existed throughout history, an example being Roman law being applied to Romans throughout the Roman Empire at the same time as indigenous peoples’ legal systems remained permitted for non-Romans.

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Polycentric theory has also attracted the interest of market researchers, especially public economists. Rather paradoxically, it is from none other than ideas of a polycentric market that a number of Western scholars came to the conclusion that “Polycentricity can be utilized as a conceptual framework for drawing inspiration not only from the market but also from democracy or any other complex system incorporating the simultaneous functioning of multiple centers of governance and decision making with different interests, perspectives, and values.” In our opinion, it is very important that namely these three categories - interests, perspectives, and values - were distinguished. “Interests” as a concept is related to the realist school and paradigm in international relations, while “perspectives” suggests some kind of teleology, i.e., a goal-setting actor, and “values” are associated with the core of strategic culture or what has commonly been called the “national idea,” “cultural-historical traditions”, or irrational motives in the collective behavior of a people. For a complex society inhabited by several ethnic groups and where citizens identify with several religious confessions, or where social class differences have been preserved (to some extent they continue to exist in all types of societies, including in both the US and North Korea, but are often portrayed as between professional specialization or peculiarities of local stratification), a polycentric system appears to be a natural necessity for genuinely democratic procedures. In this context, the ability of groups to resolve their own problems on the basis of options institutionally included in the mode of self-government is fundamental to the notion of polycentrism.

Only relatively recently has polycentrism come to be used as an anti-liberal or anti-capitalist platform. In 2006, following the summit of the World Social Forum in Caracas, Michael Blanding from The Nation illustrated a confrontation between “unicentrism” characterized by imperial, neo-liberal, and neo-conservative economic and political theories and institutions, and people searching for an alternative, or adherents of “polycentrism.” As a point of interest, the World Social Forum itself was held in a genuinely polycentric format as it was held not only in Venezuela, but in parallel also in Mali and Pakistan. Although the forum mainly involved left socialists, including a large Trotskyist lobby (which is characteristic of the anti-globalist movement as a whole), the overall critique of neoliberalism and transnational corporations voiced at the forum also relied on rhetoric on the rights of peoples, social responsibility, and the search for a political alternative. At the time, this was manifested in Latin America in the Bolivarian Revolution with its emphasis on indigenism, solidarity, and anti-Americanism.

It should be noted that Russia’s political establishment also not uncommonly uses the word “polycentricity” - sometimes as a synonym for multipolarity, but also as a special, more “peace-loving” trend in global politics insofar as “polarity presumes the confrontation of poles and their binary opposition.” Meanwhile, Russian scholars recognize that comparing the emerging polycentric world order to historical examples of polycentricity is difficult. Besides the aspect of deep interdependence, the polycentricity of the early 21st century possesses a number of different, important peculiarities. These differences include global asymmetry insofar as the US still boasts overwhelming superiority in a number of fields, and a multi-level character in which there exist: (1) a military-diplomatic dimension of global politics with the evolution of quickly developing giant states; (2) an economic dimension with the growing role of transnational actors; (3) global demographic shifts; (4) a specific space representing a domain of symbols, ideals, and cultural codes and their deconstructions; and (5) a geopolitical and geo-economic level.

Here it is necessary to note that the very term “polycentricity” in itself harbors some interesting connotations. Despite being translated to mean “many”, the first part (“poly-“) etymologically refers to both “pole” and “polis” (all three words are of Ancient Greek origin), and the second part presupposes the existence of centers in the context of international politics, i.e., states or a group of states which can influence the dynamic of international relations.

MH-Parm.jpgIn his Parmenides, Martin Heidegger contributed an interesting remark in regards to the Greek term “polis”, which once again confirms the importance and necessity of serious etymological analysis. By virtue of its profundity, we shall reproduce this quote in full:

Πόλις is the πόλоς, the pole, the place around which everything appearing to the Greeks as a being turns in a peculiar way. The pole is the place around which all beings turn and precisely in such a way that in the domain of this place beings show their turning and their conditions. The pole, as this place, lets beings appear in their Being and show the totality of their condition. The pole does not produce and does not create beings in their Being, but as pole it is the abode of the unconsciousness of beings as a whole. The πόλις is the essence of the place [Ort], or, as we say, it is the settlement (Ort-schaft) of the historical dwelling of Greek humanity. Because the πόλις lets the totality of beings come in this or that way into the unconcealedness of its condition, the πόλις is therefore essentially related to the Being of beings. Between πόλις and “Being” there is a primordial relation.

Heidegger thus concludes that “polis” is not a city, state, nor a combination of the two, but the place of the history of the Greeks, the focus of their essence, and that there is a direct link between πόλις and ἀλήθεια (this Greek word is usually translated into Russian as “truth”) Thus, in order to capture polycentricity, one needs to search for the foci and distribution areas of the essence of the numerous peoples of our planet. Here we can once again mention strategic cultures and their cores. 

Translated from Russian by Jafe Arnold.

Related links:

Russia and multipolarity

Multipolarity is the best future for Europe

Iranian view on Multipolarity in the New World

South America In The Emerging Multipolar World Order

Prisoners of Friedman and Brzezinski: Neoliberal America vs. Multipolarity

Shaping the Multipolar Future of World

mercredi, 21 février 2018

Qu’est-ce qu’un Autochtone européen ?

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Qu’est-ce qu’un Autochtone européen?

par Antonin Campana

Ex: http://www.autochtonisme.com

Selon le Larousse, un Autochtone est quelqu’un qui est « originaire par voie ancestrale du pays qu’il habite ». Cette définition a l’avantage de poser correctement ce qui fonde l’autochtonie : la fusion d’une  lignée et d’un lieu. Cependant, le mot « pays » manque ici singulièrement de précision et peut prêter à confusion.
 

Qu’est-ce qu’un « pays » ? On comprend bien qu’il s’agit d’un territoire, mais de quel territoire parle-t-on : celui d’un village avec ses environs, d’une province, d’un Etat, d’un continent ? Un Franc-Comtois résidant en Dauphiné est-il un Autochtone ? On dira sans doute qu’il est un Autochtone de France. Mais est-ce vrai dans la mesure où la lignée ancestrale de ce Franc-Comtois s’enracine dans une province qui n’est pas française avant 1678 ? Et puis la France elle-même, avec ses frontières changeantes, a-t-elle toujours existé ? Et si la France est une création récente, comment une lignée qui plonge son origine dans la nuit des temps pourrait-elle s’y enraciner ? Les frontières conventionnelles et l’autochtonicité n’évoluent pas dans la même durée. D’une manière générale, les limites tracées par l’homme  (administratives, politiques, provinciales, nationales, étatiques…) sont trop aléatoires, mouvantes, passagères, confuses et récentes pour que l’autochtonicité puisse en dépendre véritablement. Un Alsacien, par exemple, est un Autochtone de l’empire romain en 212, un Autochtone du royaume d’Austrasie au VIe siècle, un Autochtone de France à partir de 1648, un Autochtone de l’Empire allemand en 1871, un Autochtone de France en 1919, un Autochtone d’Allemagne en 1940, et de nouveau un Autochtone  de France en 1945 ! De quel « pays » sera-t-il l’Autochtone dans un siècle ou deux ? Cela n’a aucun sens.

Pour surmonter cette difficulté, il faut substituer à la notion de « pays », la notion de « terre ancestrale ». Le « pays » est le produit des vicissitudes de l’histoire. Au contraire, la « terre ancestrale » est le territoire où a vécu la lignée, quels que soient les aléas historiques qui changent le nom de ce territoire, qui le divisent, ou qui le rattachent à telle ou telle possession étatique. Peu importe que des frontières étatiques variables morcellent « accidentellement » la terre où vécurent les ancêtres : la terre ancestrale existe en soi comme un tout indivisible indépendamment de la volonté des hommes. Dès lors, si l’on fait abstraction des frontières posées par l’histoire et si l’on tient compte des grandes migrations intra-européennes (qui ont toujours plus ou moins existé), la terre ancestrale d’un Européen quel qu’il soit, ne peut être, de mémoire d’homme, que l’Europe. L’Europe est le patrimoine commun de tous les ethnoeuropéens. Et ceux-ci, avant d’être par les hasards de l’histoire des Autochtones de France, d’Allemagne ou de Russie, sont par nature des Autochtones européens. Nous posons donc la définition suivante : « Un Autochtone est une personne originaire par voie ancestrale des terres ancestrales qu’il habite ».

Est-ce à dire qu’il n’y a aujourd’hui aucune différence entre les peuples européens ? Bien sûr que non. Nous soulignons simplement que le continent européen est pour tous les peuples européens leur terre ancestrale,  leur terre des pères à tous, leur patrie commune (patrie : du latin patria : « terre des aïeux »). Cela est d’autant plus nécessaire à rappeler que les frontières extérieures des pays européens sont effacées sous les coups du mondialisme et que des frontières intérieures (ethniques, notamment) les fractionnent désormais. Se dire Autochtones de « pays » qui n’en sont plus vraiment, et qui ne l’ont pas toujours été, affaiblit sans doute la notion d’enracinement autochtone. Au contraire, il est bien plus juste et solide de se dire Autochtone européen de tel ou tel pays (la France, l’Italie…) : la notion d’Autochtonie repose alors sur les terres ancestrales européennes (le continent européen) , terres qui se confondent avec le Grand Peuple européen les habitant, de mémoire d’homme, depuis toujours.

De ce qui précède, nous pouvons dire que l’expression « Autochtones de France » est contestable, même si nous l’employons parfois par facilité. Il faudrait dire, pour être plus exact : « Autochtones européens de France » (c’est-à-dire : « Autochtones européens habitant les 551 500 km2 circonscrivant temporairement le territoire temporairement nommé France »). De ce point de vue, un Espagnol habitant la France est autant « Autochtone européen de France » qu’un  « Français de souche » (de même qu’un Français en Espagne est un « Autochtone européen d’Espagne »). Attention : cela ne signifie pas qu’un Espagnol est un Français ou que l’hispanité est la francité !

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De la même manière, il nous semble préférable de substituer l’expression « Français de souche européenne » à celle de « Français de souche ». L’expression « Français de souche européenne » correspond mieux aux réalités historiques et neutralise l’argument-Système clé, selon lequel les Français « descendent tous d'immigrants à un certain horizon temporel » (Herve Le Bras). L’affirmation est juste à condition de définir l’immigrant par rapport aux frontières actuelles, par définition temporaires et accidentelles. De ce point de vue arbitraire, un jeune ramoneur savoyard serait classé comme « immigrant » si la Savoie n’avait pas été rattachée à la France en 1860. A contrario, les Wallons venus travailler en France à la fin du XIXe siècle ne seraient pas classés comme « immigrants » si la Belgique était restée à la France après 1815. Tout cela n’a bien sûr aucun sens. L’important n’est pas l’appartenance juridico-administrative à un moment donné, mais l’appartenance lignagère et identitaire. Au-delà d’un « certain horizon temporel » (ces 50 dernières années) les « immigrants » sont tous, ou peu s’en faut, des Autochtones européens, membres du Grand Peuple européen, disposant du  même fond identitaire européen que les Français et c’est en raison de cela que le « vivre-ensemble » a été possible. Faire reposer l’Autochtonie sur un « pays » incontestable (le continent européen) et sur une voie ancestrale incontestable (la lignée européenne) serait plus juste et neutraliserait par avance de nombreux sophismes voulant justifier le Grand Remplacement. Ajoutons que cela unirait des Européens confrontés aux mêmes défi du Grand Remplacement et leur restituerait dans le même mouvement une patrie véritable, bien qu’à reconquérir.

Les Etats-nations sont devenus des réceptacles où se déverse le monde (des « creusets »). Les patries d’autrefois (la « France », « l’Allemagne », le « Royaume-Uni »…) font maintenant partie de l’ancien monde. L’autochtonicité européenne, quant à elle, s’annonce déjà comme un référent identitaire puissant et incontournable. Expression du droit à l’existence des peuples européens, en même temps que socle sur lequel les peuples européens peuvent vivre leur diversité, l’autochtonicité européenne fonde une nouvelle patrie et révèle un peuple jusque là caché par les soubresauts de l’Histoire : le Grand Peuple européen.

Car si tous les Autochtones européens ont reçu en héritage la même « terre des pères », alors ils sont tous frères.

Antonin Campana

mardi, 06 février 2018

Du dextrisme et de la révolution conservatrice

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Du dextrisme et de la révolution conservatrice

Ex: http://oragesdacier.info

Philosophie magazine titrait sa dernière revue « De quoi la gauche est-elle malade ? ». On pourrait en dresser une longue liste, mais il faut voir plus clairement une névrose multiple. Elle est amnésique, schizophrène et paranoïaque : menteuse, elle voit des choses qui n’existent pas, se crée des peurs paniques, devient colérique et de mauvaise foi. Certains diront qu’elle n’est pas malade mais simplement bête. Nous aimons à penser que les symptômes et la bêtise peuvent largement se cumuler, comme on a pu malheureusement l’observer depuis trop longtemps. Mais qu’en est-il à droite ?
 
Gaël Brustier (ancien collaborateur d’Arnaud Montebourg) a été le premier à parler de « dextrisme » à propos d’une lame de fond de droite, qui a supplanté dorénavant la gauche culturelle, voire la gauche tout court. Non sans quelques erreurs, il a bien vu que la synergie des mouvements contre le Mariage pour tous a donné pour résultat un « Mai 68 conservateur ». Puis, Guillaume Bernard a pris le pas en parlant de mouvement « dextrogyre » pour évoquer la même direction que prenaient les tournures politiques. Enfin, Patrick Buisson, dans son ouvrage revendicatif et revenchard, a repris la notion de Gaël Brustier en parlant de « dextrisme ».

Ces observateurs de la vie politique ne se sont pas trompés. Depuis quelques années déjà, il y a bel et bien une rupture des digues liée à la désillusion d’une société prospère, mondialisée et ouverte sur l’Europe. Nous n’y voyons que précarité, chômage de masse, insécurité et immigration de masse. Vision peut-être pessimiste mais néanmoins réaliste des circonstances présentes.

Est-ce à dire que le Français est un populiste en puissance ? Pour des journalistes vivant au cœur de Paris, se déplaçant en vélib’ ou en métro, et ne connaissant rien du Français moyen hors une vision phantasmée du beauf de province, oui. Pourtant, par principe, le peuple est doué d’une logique implacable. Certes on peut l’influencer, et les hommes politiques et industriels dépensent des fortunes en publicité et marketing pour cela, mais il est loin d’être bête. On peut dire même qu’il est conservateur. Prenez pour exemple des Corses, dont les élections régionales ont tourné en faveur d’une gauche corse, elle reste nationaliste, réfractaire à l’immigration et à la diversité.

Le problème dans tout cela, c’est d’y voir le terme conservateur seulement en ce qu’il veut conserver des acquis. Le conservatisme se doit d’allier des principes fondateurs, des valeurs, telles que l’autonomie et l’enracinement, qui appellent en effet à des sacrifices ou des consentements pour la France. Acheter français, acheter des produits frais cultivés en France, éviter autant que faire ce peut le « made in China » ou le « Hollywood-Disneyland-Apple ». Plus encore, le conservatisme, même présent comme logique et comme sentiment de bon sens, de « common decency » telle que le formulait George Orwell (un anarchiste-conservateur), doit être aujourd’hui transcrit politiquement. Il est bienheureux que la logique populaire française se mette en marche pour des situations ubuesques où l’idéologie de l’homme politique prend le pas sur l’expérience et sur la cohérence !

Il faut désormais transformer le tir, et tout faire pour que ce conservatisme soit dorénavant un facteur de victoire politique. Et non, Fillon est tout sauf conservateur, hormis si on prend pour lui la définition péjorative de celui qui conserve ses acquis (ou ses émoluments, comme sa femme qui a 500 000 euros de biens mal acquis dans une sorte d’emploi fictif d’assistante parlementaire).

9782081333208FS.gifQu’on puisse avoir des doutes ou des réclamations sur un parti comme le Front National est logique, mais la victoire politique doit s’abstenir d’une réaction similaire à celle qui pourrait avoir lieu à la buvette du coin. D’autant plus dans une situation de fait majoritaire où ce parti doit obtenir 50,1% des voix pour réussir. Et cela, aussi bien pour les présidentielles que pour les législatives.

Les dernières élections, départementales, municipales et régionales ont montré que le vent tournait en sa faveur. Il est temps que pour les deux prochaines élections, ce vent favorable continue de souffler. D’ailleurs, un élément en ce sens s’observe avec les primaires. C’est juridiquement un non-sens que d’avoir des primaires. Cette américanisation des élections est bien la preuve d’une altération de la vie politique française. Il y a des primaires aux Etats-Unis que parce que les Américains ne peuvent pas élire directement leur président et doivent passer par des grands électeurs. En France, depuis 1962, les électeurs choisissent directement leur président en deux tours. Les deux tours de la présidentielle, voilà nos primaires. Effectuer des primaires à la droite libérale et chez les socialistes-libéraux montrent un élément fondateur de l’avancée du conservatisme. C’est la désacralisation totale des hommes politiques dans ces partis qui se ressemblent et l’absence de chef naturel, sans compter la victoire de l’ego. Tout le monde veut devenir le calife à la place du calife. Sans pour autant réussir une quelconque unité, car ils ne sont pas légitimes ni compétents pour devenir des chefs. On peut être capitaine, mais il faut le mériter et le prouver, c’est encore plus difficile dans la reconnaissance de devenir un chef de bataillon.

Autre exemple de désacralisation, c’est l’atteinte physique des hommes politiques (mais justifiée). Il semblait improbable pour un de Gaulle, un Chirac ou un Mitterrand d’être pris à parti. A partir du moment où l’absence d’incarnation en tant que chef, où l’esprit vil et mercantile, méprisant à l’égard du peuple a pris le pas, alors toute forme de respect disparaît logiquement. Mais la justice des puissants prend le pas pour condamner les actes de revendication des faibles, à savoir nous.

A nous donc de ne plus être faibles. En premier lieu en évitant de garder un tropisme d’esprit conservateur en famille, mais bien de le revendiquer, comme par exemple aux élections présidentielles et législatives.

Cela s’accompagne d’un point plus important, accoler le terme révolution à celui de conservateur. Nous ne voulons pas garder des acquis, faire comme si de rien n’était. Bouger dans l’immobilisme, cela a été le quinquennat Hollande, ou les législatures avec Angela Merkel. Il est important de refonder le système. Pas de le réformer : quand les fondations d’une maison sont mauvaises, on ne change pas les portes et fenêtres, on détruit pour rebâtir. Cette opportunité de 2017 est un moyen supplémentaire d’avancer pour faire changer les choses. 2017 ne va pas tout changer, mais au moins, elle permettra de meilleures dispositions pour que notre Nation soit épargnée des dégâts idéologiques du libéralisme mondialisé et de ses conséquences (chômage, précarité, immigration). 
 
Le choix vous appartient donc, mais sachez juste que les préceptes liés au Baby-boom et à Mai 68 sont obsolètes. Pour paraphraser les politiciens repus, il faut changer de paradigme. Macron, Fillon, Valls et consorts représentent les deux faces opposées d’une même pièce. Engagez-vous en politique, formez-vous, lisez, réinformez-vous, adhérez, créez des associations. Tous ces éléments si anodins sont aujourd’hui subversifs, parce qu’ils ne sont pas compris dans la liste de l’acceptable exigée par un système soft-totalitaire qui demande la résignation consolée par la consommation.
 

jeudi, 25 janvier 2018

La résurrection des arts martiaux historiques européens

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La résurrection des arts martiaux historiques européens

Depuis le début des années 1990, chercheurs et pratiquants travaillent sur l'ensemble du continent à la résurrection des Arts Martiaux Historiques Européens.
 
La Fédération Française des AMHE fonctionne depuis 2011, tandis que la fédération européenne vient de voir le jour en février dernier. Du pugilat des Jeux Olympiques de la Grèce Antique à la lutte française du XIXe siècle en passant par la gladiature romaine, l'escrime médiévale et la très redoutable Glima, l'art de combat des Vikings, c'est tout le patrimoine martial européen qui s'offre aujourd'hui à l'étude et à la pratique.
 
L'équipe de Karatebushido.com est heureuse et fière de vous présenter ici le compte rendu de la première rencontre d'Arles d'AMHE Lutte qui s'est tenue les 24 et 25 janvier derniers. Nous espérons que vous prendrez autant de plaisir à les découvrir que nous en avons eu à filmer ces échanges entre experts de disciplines fondatrices de l'identité des divers peuples d'Europe, évoquant les heures les plus glorieuses de notre histoire.
 
Un reportage de Chirstophe Champclaux et Linda Meriau.
 
Pour plus de renseignements : www.ffamhe.fr
 
Un reportage de Chirstophe Champclaux
 

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vendredi, 12 janvier 2018

L’Homme de cour et le Chevalier

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L’Homme de cour et le Chevalier

Bernard Plouvier
Auteur, essayiste.

Ex: https://metamag.fr

« Tous les hommes sont idolâtres, les uns de l’honneur,
les autres de l’intérêt, la plupart de leur plaisir »
Balthazar Gracian.

2017 fut l’année de la macronisation, non pas seulement des médias, mais aussi des fantasmes de jeunes hommes et de jeunes femmes entrés depuis peu dans la vie active, fascinés, ébahis, époustouflés par la carrière de notre jeune président qui parvient, mois après mois, à occuper le devant de la scène, sans jamais se renouveler.

Il peut paraître amusant de réfléchir au clinquant et à l’éphémère, opposés à l’innovation et au durable… si l’on préfère : se pencher sur l’universel antagonisme du démagogue et de l’homme d’État. Le premier s’occupe de lui-même, de son image, de sa fortune, de sa gloire. Le second cherche à résoudre une crise de civilisation ou à entraîner une Nation ou un groupe de Nations dans une grande aventure.
Soyons honnêtes : le démagogue n’est dangereux que pour les finances d’un État. L’autre peut faire la grandeur d’une Nation, mais peut aussi la mener au désastre.

Il est évident à qui étudie l’histoire ou pour n’importe quel éthologue, que l’ensemble des sociétés animales, dont l’humaine n’est que la plus élaborée, est régie par des principes féodaux. Au sommet, règne un maître unique dans les sociétés durables et bien organisées. A contrario, toute association dominée par un groupe d’individus égaux en puissance s’écroule rapidement.

Mais, dans les deux cas, le ou les maîtres commande(nt) une ou plusieurs structures pyramidales, où œuvrent, s’agitent et intriguent les ducs, dotés d’une certaine autonomie de décision administrative (civile, militaire ou religieuse), dirigeant des barons, spécialisés dans un domaine, avec au-dessous d’eux des chefs d’équipe et ainsi de suite jusqu’au plus humble emploi, jusqu’à la plus triviale fonction… et le minus habens a encore la possibilité de faire sentir sa puissance à son conjoint, à ses enfants, voire à son chien.

La féodalité étant la règle de toutes les époques et de l’ensemble du règne animal, il peut paraître intéressant de différencier les deux types extrêmes de comportement entre lesquels évoluent la totalité des humains. Étant bien entendu, que toujours et partout, l’humanité moyenne virevolte entre les deux options opposées : celui qui se plie aux effets de mode et vénère le titulaire de la Potestas (la puissance), pour faire carrière ou pour participer à une éventuelle curée, & celui dont l’honneur est de servir une noble cause, sans jamais se renier. Et c’est là que commencent les ennuis pour tout le monde. Les bonnes questions sont, toujours et partout, de savoir ce que cachent les grands mots et de déterminer ce qu’est le devoir.

Certes, il n’est pas trente-six façons d’être honnête et de conserver son honneur : de ce côté-là les choses sont simples. Mais le devoir s’oppose parfois à ces deux notions fondamentales, d’où de très gros conflits entre le sens du devoir et la conscience éthique, chez l’individu, homme ou femme – le sexe ne faisant rien à l’affaire – que l’on peut qualifier de preux. L’enthousiasme du chevalier engagé dans une grande aventure, collective ou individuelle, peut l’amener à faire ce à quoi son éthique personnelle s’opposerait dans la vie privée. Pour la cause (politique, religieuse, scientifique), certains sont prêts à sacrifier les impératifs de leur surconscience, d’autres s’y refusent.

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En revanche, l’homme de cour fera siens les mensonges petits et gros, fera siennes les confusions sémantiques à propos de certains mots, trop souvent prostitués, comme ceux de Liberté, d’Égalité, de Démocratie, de Droit(s), de Solidarité, voire de Fraternité, aux acceptions extensibles selon l’intérêt des beaux parleurs… et il faut reconnaître que, via l’économie globale et la mondialisation de la vie culturelle, nous vivons une époque privilégiée dans les registres de la duperie et du trucage.

L’opposition entre l’homme de cour ou d’appareil et le chevalier est de toutes les époques et de toutes les races. Chacun est libre de suivre ou non son programme génétique qui le prédestine à être un ambitieux ou un idéaliste, c’est affaire de libre-arbitre (le choix) et de transcendance (la critique morale du choix).

Tous les hellénistes connaissent le vers d’Eschyle : « Quel mortel reste juste s’il ne craint rien ? » (tiré des Euménides et trop souvent cité hors contexte). L’homme, la femme (ou l’individu bizarre & indéfinissable) de cour craignent le renvoi, soit la mise à l’écart des sources de l’argent facilement gagné, de la participation au pouvoir sur autrui et de la notoriété. L’esprit religieux est (en principe) maintenu dans un chemin pas trop tortueux par la peur de l’enfer et l’espoir d’un paradis. Le chevalier n’a qu’une crainte : celle de déchoir à ses yeux et à ceux des êtres qu’il aime.
Que l’on soit chef ou suiveur, à quel que rang que ce soit, le dilemme reste le même : plier par opportunisme ou demeurer jusqu’au bout un être de devoir et de conviction. Il est plus aisé – c’est ce que la majorité des humains a compris depuis la nuit des temps -, de s’adapter à son époque, soit hurler tantôt avec les loups, tantôt avec les brebis, pour le plus grand bénéfice ou du chef de meute ou du berger.

Comme rien n’est simple dans ce sujet, on laissera le lecteur libre de choisir celle des phrases antagonistes contenues dans le livre bien connu du jésuite (!) Balthazar Gracian (Maximes – L’homme de cour), publié en 1647, ce qui prouve que de longue date l’on s’interroge sur ces notions : « Une heureuse fin couronne le tout, même si l’on a usé de faux moyens pour y arriver » versus : « Tout ce qui est bon ne triomphe pas obligatoirement ».

Pour l’heure, triomphent plus que jamais le monde des apparences et la richesse divinisée.

19:42 Publié dans Définitions | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : homme de cour, chevalier, chevalerie, définition | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

dimanche, 31 décembre 2017

The Alt Right Perspective

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The Alt Right Perspective

Mencken Club Address

By John Derbyshire

Ex: http://www.hlmenckenclub.org

Good morning, Ladies and Gentlemen. My title is “The Alt Right Perspective.” I assume this means that I should tell you what the Alt Right is, and how Alt Righters see the world.

That’s unfortunate because I don’t actually know what the Alt Right is. Casual acquaintances—neighbors and such—sometimes ask me if I am Alt Right. I never know what to say. Am I? Pass.

Some of this is just temperamental. I’m not by nature a joiner. I don’t feel strong affinity with any sports team or church. I’m not an Elk or a Shriner. I’m just not a herd animal—not well-socialized. I’m the little boy calling out that the Emperor has no clothes. (Although I’ve always thought that story would be more true to life if the little boy had been chased down and lynched by a howling mob of well-socialized Goodthinkers.)

The rest is Englishness. We English don’t do ideology. We leave that stuff to our more erudite continental neighbors. In matters social and political, we default to compromise and muddle. The nearest thing I have to an ideological hero is George Orwell, whose ideological position could fairly be described as reactionary-Tory-patriotic-socialist.

There’s some overlap between the last two paragraphs. I have utmost difficulty following any kind of ideological script. Sooner or later I always bang my shins against the boundary fences of ideological orthodoxy.

On race, for example, I get incoming fire from both sides. Goodthinkers point’n’sputter at me for my negative comments about blacks; race purists snarl at me as a race traitor because of my marriage choice.

Has my email bag familiarized me with the expression “mail-order bride”? Oh yeah.

It doesn’t help that I’m a philosemite, although I don’t much like that word. It sounds a bit cucky and patronizing. I prefer “anti-antisemite.” On any terminology, though, many self-identified Alt Righters would consider me off-reservation on this point alone.

So it’s no use looking to me for exposition of an ideological program. To present my assigned topic honestly, I therefore thought it best to seek out someone who believes he does know what the Alt Right is, and who has spelled out his knowledge clearly but concisely.

I settled on the blogger Vox Day who, in August last year, put forth a 16-point Alternative Right manifesto that has been much discussed, and translated into umpteen languages.

Here are Vox Day’s 16 points, embroidered with my comments

1.    The Alt Right is of the political right in both the American and the European sense of the term. Socialists are not Alt Right. Progressives are not Alt Right. Liberals are not Alt Right. Communists, Marxists, Marxians, cultural Marxists, and neocons are not Alt Right. National Socialists are not Alt Right.

No argument from me on that, although I don’t know what a Marxian is. Typo for “Martian”?

2.    The Alt Right is an ALTERNATIVE to the mainstream conservative movement in the USA that is nominally encapsulated by Russell Kirk’s 10 Conservative Principles, but in reality has devolved towards progressivism. It is also an alternative to libertarianism.

I’m fine with that one, too; and I’m glad to have been prompted to re-read Kirk’s principles. He was big on prudence: the word, or its derivatives, occurs nine times in the ten points, which Kirk included in a book titled The Politics of Prudence. This inspired a section of my Radio Derb podcastlast week.

I liked Vox Day’s batting away of libertarianism, too, though I think at this point it’s kind of superfluous. My impression is that libertarianism has succumbed to an intellectual version of the Aspidistra Effect. That is to say, it has moved down-market. (The aspidistra is a potted plant that decorated wealthy households in Victorian England. By the time Orwell used it in the title of a novel a generation later it had been taken up by the lower-middle classes, and of course abandoned by the gentry.)

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It used to be that if someone told you, “I am a libertarian,” it was at a gathering of conservative intellectuals, perhaps even at the Mencken club. You could then get into an interesting conversation about what kind of libertarian he was: Classical, Objectivist, Paleolibertarian, …

Nowadays if you hear those words it’s probably some smart high-schooler speaking; and if you try to drill down further he freezes.

3. The Alt Right is not a defensive attitude and rejects the concept of noble and principled defeat. It is a forward-thinking philosophy of offense, in every sense of that term. The Alt Right believes in victory through persistence and remaining in harmony with science, reality, cultural tradition, and the lessons of history.

That’s OK, except for the word “philosophy.” Let’s not get ideas above our station here. Aristotle had a philosophy. Descartes had a philosophy. Kant had a philosophy. What the Alt Right has is an attitude.

4. The Alt Right believes Western civilization is the pinnacle of human achievement and supports its three foundational pillars: Christianity, the European nations, and the Graeco-Roman legacy.

I think the Jews should have gotten a mention there, since half of the Christian Bible is about them. That’s a kind of fielder’s-choice point, though.

5. The Alt Right is openly and avowedly nationalist. It supports all nationalisms and the right of all nations to exist, homogeneous and unadulterated by foreign invasion and immigration.

No problem with that. We should, however, bear in mind what a knotty thing nationalism can be. There is a case to be made—a conservative case—for big, old, long-established nations resisting disaggregation. Does Catalan nationalism trump Spanish nationalism? Does it do so even if only half of Catalans wish to separate from Spain?

That kind of nitpicking doesn’t belong in a manifesto, though. For these purposes, Point 5 is fine.

6. The Alt Right is anti-globalist. It opposes all groups who work for globalist ideals or globalist objectives.

Again there are nits to pick, though again this isn’t the place to pick them. When the slave traders arrive from Alpha Centauri, or an asteroid hits, or a supervolcano pops, we shall all become globalists overnight.

7. The Alt Right is anti-equalitarian. It rejects the idea of equality for the same reason it rejects the ideas of unicorns and leprechauns, noting that human equality does not exist in any observable scientific, legal, material, intellectual, sexual, or spiritual form.

Yes-s-s-s.

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8. The Alt Right is scientodific. It presumptively accepts the current conclusions of the scientific method (scientody), while understanding a) these conclusions are liable to future revision, b) that scientistry is susceptible to corruption, and c) that the so-called scientific consensus is not based on scientody, but democracy, and is therefore intrinsically unscientific.

It’s what? The word “scientody” is not known to dictionary.com; nor is it in my 1971 OED with supplement; nor in my 1993 Webster’s.

I tried digging for etymologies, but got lost in a thicket of possibilities. Greek hodos, a path or way; so “the way of science”? Or perhaps eidos, a shape or form, giving us the “-oid” suffix (spheroid, rheumatoid); so “science-like”? Then there’s aoide, a song, giving … what? “Harmonizes like science”? Or maybe it’s the Latin root odor, a smell; “smells like science.”

In any case, all three of the “understandings” here are gibberish.

a) There is a large body of solidly-established scientific results that are not liable to future revision.

Saturn is further from the Sun at any point of its orbit than Jupiter is at any point of its. A water molecule has two hydrogen atoms and one oxygen atom. Natural selection plays an important role in the evolution of life.

I promise Vox Day there will be no future revisions of these facts, at any rate not on any time span he or I need worry about. (I add that qualification because there are conceivable astronomical events that could alter the sequence of planetary orbits—a very close encounter with a rogue star, for example. Those are once-in-a-billion-year occurrences, though.)

b) “Scientistry”? Wha?

c) The scientific consensus is unscientific? Huh? And why is the consensus “so-called”? There usually—not always, but usually—is a scientific consensus. It occasionally turns out to have been wrong, but it’s a consensus none the less, not a “so-called” consensus.

9. The Alt Right believes identity > culture > politics.

Again, not bad as a first approximation, but this ignores a lot of feedback loops. Has politics not affected culture this past 72 years in North Korea? Did not North Korea and South Korea have the same culture a hundred years ago?

10. The Alt Right is opposed to the rule or domination of any native ethnic group by another, particularly in the sovereign homelands of the dominated peoples. The Alt Right is opposed to any non-native ethnic group obtaining excessive influence in any society through nepotism, tribalism, or any other means.

As several commenters pointed out, the Iroquois and the Sioux might have something to say about that. Bitching about historical injustices is such an SJW thing, though, I can’t bring myself to care. I’m fine with Point 10.

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11. The Alt Right understands that diversity + proximity = war.

Again, there are nits to be picked. Diversity per se is neither good nor bad. Numbers are of the essence.

I’m a salt-in-the-stew diversitarian. I want to live in a society with a big fat racial and ethnic supermajority: somewhere north of ninety percent. Small minorities of Others can then be accommodated with friendly hospitality and accorded full equality under law. (I don’t say they necessarily will be; but they can be.)

That’s the kind of country I grew up in, 1950s England. It’s the kind of country the U.S.A. was in 1960, just barely: ninety percent European-white, ten percent black, others at trace levels.

Vox Day is using the word “diversity” in its current sense, though: as a code word for massive, deliberate racial replacement. In that sense his equation, and the embedding sentence, are both correct.

12. The Alt Right doesn’t care what you think of it.

Yee-hah!

13. The Alt Right rejects international free trade and the free movement of peoples that free trade requires. The benefits of intranational free trade is not evidence for the benefits of international free trade.

I’m an economic ignoramus, but I’d like to see a good logical proof of the proposition that free trade requires free movement of peoples. I am sincerely open to being enlightened on this point.

14. The Alt Right believes we must secure the existence of white people and a future for white children.

I doubt there is an existential threat to white people. I’d be content to secure the existence of a racially self-confident white race—one not addled by ethnomasochism—and by a future for white children free of schools, colleges, and authority figures telling them they are the scum of the earth.

15. The Alt Right does not believe in the general supremacy of any race, nation, people, or sub-species. Every race, nation, people, and human sub-species has its own unique strengths and weaknesses, and possesses the sovereign right to dwell unmolested in the native culture it prefers.

Hmm. That’s a bit kumbaya-ish (or “-oid”). No doubt the Bushmen of the Kalahari are much better at hunting with spears than are Norwegians or Japanese. As Greg Cochran points out, though: “innate superiority at obsolete tasks (a born buggy-whip maker?) doesn’t necessarily translate to modern superiority, or even adequacy.”

What do the “unique strengths” of the Bushmen, or of Australia’s aborigines, avail them in the world we actually live in? On the plain evidence it looks very much as though some “races, nations, peoples, or sub-species” are better able to cope with modernity than others. The less-able seem to agree. Great masses of them prefer not to dwell in their native culture, but in someone else’s. Boats crammed with such people have been crossing the Mediterranean from Africa for the past few years. The revealed preference of these people is not their native culture.

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16. The Alt Right is a philosophy that values peace among the various nations of the world and opposes wars to impose the values of one nation upon another as well as efforts to exterminate individual nations through war, genocide, immigration, or genetic assimilation.

I get the point and agree with it; but again, reality is knottier than this allows. “If you desire peace, prepare for war,” said the Romans, who knew a thing or two about human affairs.

That’s Vox Day’s sixteen-point definition of the Alt Right. There have been other Alt Right manifestos from other quarters; here for example is Richard Spencer’s.

Supposing this is a fair picture of the Alt Right perspective, am I on board with it? Do I belong to the Alt Right?

As you can see from my comments, I have plenty of quibbles, and I’d prefer to get my manifesto from someone acquainted with the elementary principles of scientific inquiry.

Still, it’s not bad. I can sign up to most of Vox Day’s points.

Yes, I’m on board … until I bang my shins against a fence post.

The Alt Right Among Other Rights

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The Alt Right Among Other Rights

By Keith Preston

Ex: http://www.hlmenckenclub.org

Speaking about the intricacies of different ideological tendencies can often be a bit tedious, and certainly a topic like the Alt-Right can get very complicated because there are so many currents that feed into the Alt-Right. I know that when I spoke here last year I was speaking on the right-wing anarchist tradition, which is a highly esoteric tradition, and one that is often very obscure with many undercurrents. The Alt-Right is similar in the sense of having many sub-tendencies that are fairly obscure in their own way, although some of these have become more familiar now that the Alt-Right has grown in fame, or infamy, in the eyes of its opponents. Some of the speakers we have heard at this conference so far have helped to clarify some of the potential definitions of what the Alt-Right actually is, but given the subject of my presentation I thought I might break it down a bit further, and clarify a few major distinctions.

What is the Alt-Right?

The Alt-Right can be broadly defined as a highly varied and loose collection of ideologies, movements, and tendencies that in some way dissent from the so-called “mainstream” conservative movement, or are in actual opposition to mainstream conservatism. Of course, this leaves us with the task of actually defining mainstream conservatism as well. I would define the conservative movement’s principal characteristics as being led by the neoconservatives, oriented towards the Republican Party, and as a movement for whom media outlets like Fox News, talk radio, and publications like National Review and the Weekly Standard are its leading voices. Outside of the framework of what some here appropriately call “Conservatism, Inc.,” we could say that there is an Alt-Right that can be broadly defined, and an Alt-Right that can be more narrowly defined.

miloy.jpgThe Alt-Right broadly defined would be anything on the Right that is in opposition to the neocon-led Republican alliance. This could include everything from many Donald Trump voters in the mainstream, to various tendencies that have been given such labels as the “alt-lite,” the new right, the radical right, the populist right, the dark enlightenment, the identitarians, the neo-reactionaries, the manosphere (or “men’s right advocates”), civic nationalists, economic nationalists, Southern nationalists, white nationalists, paleoconservatives, right-wing anarchists, right-leaning libertarians (or “paleolibertarians”), right-wing socialists, neo-monarchists, tendencies among Catholic or Eastern Orthodox traditionalists, neo-pagans, Satanists, adherents of the European New Right, Duginists, Eurasianists, National-Bolsheviks, conspiracy theorists, and, of course, actually self-identified Fascists and National Socialists. I have encountered all of these perspectives and others in Alt-Right circles.

Milo Yiannopoulos

Under this broad definition of the Alt-Right, anyone from Steve Bannon or Milo Yiannopoulos all the way over to The Daily Sturmer or the Traditionalist Workers Party could be considered Alt-Right. In fact, ideological tendencies as diverse as these have actually embraced the Alt-Right label to describe themselves. For example, Steve Bannon said at one point during the Trump campaign in 2016 that he wanted to make Breitbart into the voice of the Alt-Right, but then I have also encountered people who are actual neo-Nazis using the Alt-Right label to describe themselves as well.

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A narrower definition of the Alt-Right might be to characterize what is most distinctive about the Alt-Right. In this sense, the Alt-Right could be characterized as a collection of tendencies that is specifically oriented towards some of kind identification with European history and tradition, and regard Europe and, by extension, North America as part of a distinct Western civilization that was developed by European and, predominantly, Christian peoples. Consequently, the Alt-Right tends to be much more oriented towards criticizing ideas or policies like multiculturalism, mass immigration, and what is commonly called “political correctness,” than what is found among mainstream conservatism. This is in contrast to the Left’s views, which are increasingly the views of mainstream liberalism as well, and which regards the legacy of Western history and culture as nothing but an infinite string of oppressions such racism, sexism, homophobia, classism, anti-Semitism, Islamophobia, xenophobia, patriarchy, hierarchy, nativism, cisgenderism, speciesism, and the usual laundry list of isms, archies, and phobias that the Left sees as permeating every aspect of Western civilization. Presumably, other civilizations have never featured any of these characteristics. 

In this way, the Alt-Right is obviously in contrast to mainstream conservatism given that the so-called “conservative movement” is normally oriented towards what amounts to three basic ideas. One idea is that of the foreign policy “hawks,” or advocates of military interventionism for the ostensible purpose of spreading the Western model of liberal democracy throughout the world, whose greatest fear is isolationism in foreign policy, and which is a perspective that I would argue is also very convenient for the armaments manufacturers and the Pentagon budget. A second idea is a fixation on economic policy, such as a persistent advocacy of “tax cuts and deregulation,” which in reality amounts to merely advancing the business interests of the corporate class. And the third idea is a type of social conservatism that is primarily religion-driven, and has opposition to abortion or gay marriage as central issues of concern, but typically gives no thought to cultural or civilizational issues in any broader or historical sense. For example, it is now common in much of the evangelical Protestant milieu, as well as the Catholic milieu, to welcome mass immigration, as a source of potential converts, or as replacement members for churches that are losing their congregations due to the ongoing secularization of the wider society. In fact, the practice of adopting Third World children has become increasingly common within the evangelical Protestant subculture in the same way it has among celebrities and entertainers like Madonna or Angelina Jolie.

Predictably, there has been a great deal of conflict that has emerged between the Alt-Right and the mainstream conservative movement, with many movement conservatives and their fellow travelers going out of their way to attack or denounce the Alt-Right. In this sense, the attacks on the Alt-Right that have originated from mainstream conservatism essentially mirror those of the Left, or of the liberal class. For example, the Associated Press issued a description of the Alt-Right that was intended for writers’ guideline policy purposes, and which reads as follows:

The 'alt-right' or 'alternative right' is a name currently embraced by some white supremacists and white nationalists to refer to themselves and their ideology, which emphasizes preserving and protecting the white race in the United States in addition to, or over, other traditional conservative positions such as limited government, low taxes and strict law-and-order. The movement has been described as a mix of racism, white nationalism and populism ... criticizes "multiculturalism" and more rights for non-whites, women, Jews, Muslims, gays, immigrants and other minorities. Its members reject the American democratic ideal that all should have equality under the law regardless of creed, gender, ethnic origin or race (John Daniszewski, Associated Press, November 26, 2016)

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While the above quotation is from the Associated Press, I do not know that there is anything in it that could not have come from the pages of not only The New Yorker, The Atlantic, or the Southern Poverty Law Center’s Intelligence Report, but also from the pages of the National Review, Weekly Standard, the Federalist, or a Prager University video.

As for some specific examples, writing in The Federalist, conservative political scientist Nathanael Blake stated that “Christianity and Greco-Roman philosophy, rather than race, are the foundations upon which Western Civilization was built,” and suggested that the Alt-Right is actually attacking the legacy of Western Civilization rather than defending the Western cultural heritage. These questions have become a major point of contention between cultural conservatives and the racialist right-wing. Writing in National Review, David French (Bill Kristol’s one-time proposed presidential candidate), called Alt-Right adherents "wanna-be fascists" and denounced “their entry into the national political conversation.” I suppose the difference between the views of David French and the views of the Left would be that the Left would say that the Alt-Right are actual fascists, and not merely “wanna-be” fascists.  Presumably, this is what separates the mainstream Right from the Left nowadays.

Writing for The Weekly Standard, Benjamin Welton has characterized the Alt-Right as a "highly heterogeneous force" that "turns the left's moralism on its head and makes it a badge of honor to be called 'racist,' 'homophobic,' and 'sexist'". Based on my own experiences with the Alt-Right, I would say this assessment by Welton is largely true. In the National Review issue of April, 2016, Ian Tuttle wrote:

The Alt-Right has evangelized over the last several months primarily via a racist and anti-Semitic online presence. But for Allum Bokhari and Milo Yiannopoulos, the Alt-Right consists of fun-loving provocateurs, valiant defenders of Western civilization, daring intellectuals—and a handful of neo-Nazis keen on a Final Solution 2.0, but there are only a few of them, and nobody likes them anyways.

Jeffrey Tucker, a libertarian writer affiliated with the Foundation for Economic Education, describes the Alt-Right as follows:

The Alt-Right "inherits a long and dreary tradition of thought from Friedrich Hegel to Thomas Carlyle to Oswald Spengler to Madison Grant to Othmar Spann to Giovanni Gentile to Trump's speeches." Tucker further asserts that Alt-Right adherents "look back to what they imagine to be a golden age when elites ruled and peons obeyed" and consider that "identity is everything and the loss of identity is the greatest crime against self anyone can imagine."

Whatever one thinks of the Trump presidency, it is highly doubtful that Trump actually draws inspiration from Hegel.

Writing in The Federalist, a libertarian feminist named Cathy Young criticized a Radix Journal article on abortion that criticized the pro-life position as "'dysgenic,” because it supposedly “encourages breeding by 'the least intelligent and responsible' women." So apparently, it is not enough to simply favor abortion rights. Instead, one has to be “pro-choice” for what are apparently the “right reasons,” such as a “woman’s right to choose,” as opposed to “bad reasons,” such as eugenic practice. This line of thought is in keeping with the fairly standard leftist viewpoint which insists that motives and intentions rather than ideas and consequences are what matters, and the standard by which people ought to be morally judged.

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Richard Spencer

Another interesting aspect of these criticisms is that the mainstream conservatives have attacked the Alt-Right by using leftist terminology, such as labeling the Alt-Right as racist, sexist, fascist, xenophobic, etc. But a parallel tactic that has been used by mainstream conservatism has been to denounce the Alt-Right as leftist.  For example, at this year’s gathering of CPAC, or the Conservative Political Action committee, Dan Schneider, who is currently the executive director of the American Conservative Union, an organization that hosts the annual CPAC conference, criticized the Alt-Right as “a sinister organization that is trying to worm its way into our ranks,” insisting that, quote, “We must not be duped. We must not be deceived,” and said of the Alt-Right:

“They are nothing but garden-variety left-wing fascists..They are anti-Semites; they are racists; they are sexists. They hate the Constitution. They hate free markets. They hate pluralism. They despise everything we believe in.”

This sounds very similar to the rhetoric that often comes from the far left where dire warnings are issued concerning the supposed threat of fascist entryism into leftist organizations. For example, there is term called the “the fascist creep” that is used by some very far Left antifa and Maoist tendencies to describe what are supposedly ongoing nefarious plots by “fascists” to infiltrate and co-opt leftist movements, and steer these towards fascism. Ironically, this conspiracy theory is very similar to traditional anti-Semitic conspiracy theories about how Jews supposedly infiltrate and take over everything, and manipulate institutions in order to advance all sorts of supposed nefarious plots. It would appear that the far Left, and apparently increasingly mainstream conservatism, has developed its own rhetoric about the “fascist conspiracy” as a counterpart to far Right fantasies about the “Jewish conspiracy.” Perhaps we could characterize the former as the “Protocols of the Learned Elders of Thule.”

Jeff Goldstein, writing in The Federalist on September 6, 2016, suggests that, quote, “the Alt-Right is the mirror image of the New Left,” and describes the Alt-Right “an identity movement on par with Black Lives Matter, La Raza, the Council on American-Islamic Relations, and other products of cultural Marxism.” Goldstein further says of the Alt-Right:

The Alt-Right is a European-style right-wing movement that is at odds with the classical liberalism upon which our country was built, and which the Left has redefined as “Right.” That is to say, the European “Right” is mapped onto a political spectrum different than our own. Our “right” — conservatism or classical liberalism —is dead-center on our spectrum, no matter how persistently the Left tries to claim otherwise. It is constitutionalism, which incorporates federalism, republicanism, legal equity, and a separation of powers.

nina.jpgThese comments are fairly representative of the rhetoric used by mainstream conservatives who attempt to either portray the Alt-Right as leftists, or label the Alt-Right as fascists and then claim fascism is really on the Left. The general argument that is made by mainstream conservatives in response to the Alt-Right is that “true” conservatism or the “true” Right is actually veneration for the Enlightenment-influenced ideas found in the Declaration of Independence, veneration of the Founding Fathers, and reverence for the Constitution as a kind of secular Bible. Parallel to these claims is the idea of America as a “propositional nation” that has no roots in any kind of history, culture, or tradition other than just a very vaguely defined “Judeo-Christianity.” This idea of what “conservatism” supposedly is basically amounts to being for so-called “limited government,” so-called “free enterprise,” “individualism,” and various other vaguely defined abstractions, plus policy preferences like a so-called “strong national defense” (which is often just a euphemism for the neoconservatives’ foreign policy agenda), and various center-right policy prescriptions like tax cuts, opposing Obamacare, opposing affirmative action, opposing gun control, opposing abortion, opposing gay marriage, supporting school vouchers, and other ideas we are all familiar with.

Nina Kouprianova

These policy preferences will often be accompanied by silly platitudes like “Democrats are the real racists,” or dubious and often flagrantly false claims like “Martin Luther King was a conservative,” or that foreign policy hawks are the real friends of feminists and gays because of their opposition to so-called “Islamo-fascism.” At times, Democrats will be labeled as fascists and anti-Semites because of their supposed pro-Islamic views, or because some on the far Left are pro-Palestinian. Taken to extremes, there are characters like Dinesh D’Souza who would probably claim that the Democrats crucified Jesus.

The representatives of “Conservatism, Inc.” will also give lip service to opposition to attacks on free speech and academic freedom in the name of political correctness, but they are very selective about this. For example, their defense of the politically incorrect does not extend to anti-Zionists like Norman Finkelstein. On the immigration issue, while there are some mainstream conservatives that are immigration restrictionists, it is just as common that the proposed method of reducing illegal immigration advanced by mainstream conservatives is to make legal immigration easier, on the assumption that the only problem with illegal immigration is its illegality. A defining characteristic of mainstream conservatism when contrasted with the Alt-Right is the total lack of seriousness, or any kind of solid philosophical or intellectual foundation that is displayed by mainstream conservatism.

The Alt-Right is more of a meta-political movement than a political one, and the specific policy proposals that are found among Alt-Rightists vary enormously. I do not know that it would even be possible to draft a platform for an Alt-Right political party because the Alt-Right contains so much diversity of ideas. However, the Alt-Right is far more serious about ideas than mainstream conservatism in the sense of having an understanding of the reality of demographic conflict, recognizing the difficulties that are associated with rapid demographic change, understanding the reality of class conflict as well as cultural and civilizational conflicts, understanding that Western liberal democracy is particular to the cultural foundations and historical circumstances of the West, and not something that can be easily transplanted elsewhere, and concerns that mainstream conservatives normally have no perception of, or do not take seriously.

I will end my presentation by pointing to an observation by Professor George Hawley of the University of Alabama, who suggested that the Alt-Right may pose a greater threat to progressivism than the mainstream conservative movement. I would agree that this is true, but only in the sense that the mainstream conservative movement poses no threat to progressivism at all. I would argue that far from being a threat to the Democratic Party, mainstream media, the corporate class and the cultural elite, the mainstream conservative movement is actually partners in crime with the progressives. The Alt-Right at least proposes ideas that are an ideological threat to progressivism even if this small size prevents the Alt-Right from being a political threat, at least at the present time.

mercredi, 06 décembre 2017

L'immigrationnisme des libéraux a pour origine leur conception individualiste de la société

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L'immigrationnisme des libéraux a pour origine leur conception individualiste de la société

par Robert Skidelsky

Ex: http://lesalonbeige.blogs.com

Robert Skidelsky, professeur émérite d'économie politique à l'université de Warwick, publie une analyse dans Les Echos

"La sociologie, l'anthropologie et l'histoire ont apporté d'importantes avancées au débat sur l'immigration. Elles permettent notamment d'affirmer que l'hostilité à l'égard de l'immigration de masse ne peut être réduite à une protestation contre les pertes d'emplois, la baisse des salaires et les inégalités croissantes. L'économie a certainement joué un rôle dans la montée de la politique d'identité, mais la crise d'identité ne sera pas simplement effacée par des réformes économiques. Le bien-être économique n'est pas la même chose que le bien-être social.

Commençons malgré tout par l'économie, en utilisant le Royaume-Uni, qui s'apprête à sortir de l'UE, comme un cas d'espèce. Entre 1991 et 2013, il y a eu un afflux net de 4,9 millions de migrants nés à l'étranger en Grande-Bretagne. La théorie économique nous dit que l'immigration nette, comme le libre-échange, ne profite à la population autochtone qu'avec un certain retard. L'argument ici est que si l'on augmente la quantité de main-d'oeuvre, son prix (les salaires) baisse. Cela permet d'augmenter les bénéfices. L'augmentation des bénéfices conduit à davantage d'investissements, qui vont augmenter la demande de main-d'oeuvre, ce qui va renverser la première tendance à la baisse des salaires. L'immigration permet ainsi à une population plus nombreuse de jouir du même niveau de vie que la population moins nombreuse dans la situation précédente, d'où une nette amélioration du bien-être total.

Une étude récente de l'économiste de l'université de Cambridge Robert Rowthorn a toutefois montré que cet argument comporte de nombreuses lacunes. Les prétendus effets temporaires en termes de travailleurs autochtones déplacés et de salaires plus bas peuvent durer cinq ou dix ans, alors que les effets bénéfiques supposent une absence de récession. Et même sans récession, s'il y a un afflux de migrants, plutôt qu'une augmentation exceptionnelle de la taille de la main-d'oeuvre, la demande de main-d'oeuvre peut constamment être en retard sur la croissance de l'offre. La « thèse selon laquelle les migrants occupent les emplois de travailleurs locaux et poussent leurs salaires vers le bas est peut-être exagérée, dit Rowthorn, mais elle n'est pas toujours fausse ».

Un deuxième argument économique est que l'immigration va rajeunir la main-d'oeuvre et va stabiliser les finances publiques, parce que les jeunes travailleurs importés vont générer les impôts nécessaires pour financer un nombre croissant de retraités. La population britannique devrait dépasser les 70 millions d'habitants avant la fin de la prochaine décennie, soit une augmentation de 3,6 millions, ou 5,5 %, en raison de l'immigration nette et de l'excédent des naissances sur les décès parmi les nouveaux venus. Rowthorn rejette cet argument. « Pour maintenir une fois pour toutes une réduction du taux de dépendance, il faut un flux incessant de migrants. Une fois que l'afflux s'arrête, la structure des âges revient à sa trajectoire d'origine. » Ainsi, même avec des résultats optimaux comme l'évitement de la récession, les arguments économiques en faveur de l'immigration à grande échelle ne sont guère concluants. Ainsi le noeud de la question est vraiment son impact social. 

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David Goodhart, ancien rédacteur en chef de la revue « Prospect », a plaidé en faveur de la restriction d'un point de vue social-démocrate. Il tient pour acquis que la plupart des gens préfèrent vivre avec leurs semblables et que les décideurs doivent prêter attention à cette préférence. Une attitude de laisser-faire quant à la composition de la population d'un pays est aussi intenable que l'indifférence quant à sa taille. Pour Goodhart, l'origine de l'hostilité des libéraux à propos des contrôles migratoires est leur conception individualiste de la société. À défaut de comprendre l'attachement du peuple à des communautés sédentaires, ils taxent l'hostilité à l'égard de l'immigration de réaction irrationnelle ou raciste.

Un afflux trop rapide de migrants affaiblit les liens de solidarité et érode à long terme les liens affectifs nécessaires pour maintenir l'Etat providence. « Les gens préféreront toujours leur propre famille et leur propre communauté, affirme Goodhart, c'est la tâche d'un libéralisme réaliste de s'efforcer d'obtenir une définition de la communauté suffisamment large pour inclure les personnes de différentes origines, sans être trop large au point de perdre toute signification. » Les libéraux économiques et politiques sont associés dans la défense d'une immigration sans restriction. Les libéraux économiques considèrent les frontières nationales comme des obstacles irrationnels à l'intégration mondiale des marchés. De nombreux partis politiques libéraux considèrent les Etats-nations et les loyautés qu'ils inspirent comme des obstacles à l'intégration politique plus large de l'humanité.

Sur ce point se joue le plus vieux débat des sciences sociales. Les collectivités peuvent-elles être créées par la politique et les marchés, ou bien est-ce qu'elles présupposent un sentiment d'appartenance ? Il me semble que quiconque réfléchit à ces questions est forcé d'accepter avec Goodhart que la citoyenneté, pour la plupart des gens, est une chose dans laquelle ils sont nés. Si la composition d'une communauté se modifie trop rapidement, cela arrache les gens à leur propre histoire, en en faisant des déracinés. L'anxiété des libéraux de ne pas passer pour des racistes leur cache ces vérités. Une explosion de ce que l'on appelle actuellement le populisme est une conséquence inévitable.

La conclusion politique à tirer est banale, mais il est bon de la rappeler. La tolérance d'un peuple au changement et à l'adaptation ne doit pas être étendue au-delà de ses limites. Plus précisément, l'immigration ne doit pas être poussée trop loin, parce qu'elle déclenchera à coup sûr l'hostilité."

dimanche, 19 novembre 2017

Terrorisme: l’impossible définition

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Terrorisme: l’impossible définition

par François-Bernard Huyghe
Ex: http://www.huyghe.fr

Quiconque a assisté à un colloque sur le terrorisme connaît la scène. Au moment des questions, quelqu'un se lève pour en dénoncer les causes globales - misère, inégalité, intolérance, exclusion, etc. -. Un autre ajoute aussitôt qu'il faudrait s'accorder sur une vraie définition du terrorisme.

Une étude presque trentenaire comptabilisait 202 de ces définitions. Celle que nous ajouterions (plutôt "technique" : la pratique de l'attentat politique, symbolique et spectaculaire) ne clorait pas le débat. Mais, si nous ne sommes guère partisans du substantif "terrorisme", l'adjectif (terroriste) peut légitimement distinguer un groupe, une méthode, un acteur, etc.

Faute de consensus sur la terminologie exacte, il importe surtout de savoir ce qui ne relève pas du terrorisme, et surtout ce qui décide de son succès, sa durée ou sa disparition. Car, après-tout l'action terroriste, moyen au service d'une fin, recherche une victoire au moins symbolique.

Métamorphoses terroristes

Certes, l'assassinat politique, la révolte. le régicide et le tyrannicide (déjà approuvé par Platon) ont quelque siècles, comme le massacre d'innocents, les tueries systématiques et, plus généralement, toute horreur pouvant provoquer l'épouvante dans l'autre camp (terror, qui littéralement fait trembler). Mais, il faut attendre la Terreur avec majuscule pour que la terreur avec minuscule gagne sa désinence en "isme". Le "terrorisme" (tout comme "propagande" au sens politique) apparaît dans les dictionnaires, d'abord français en 1793, en référence à la terreur révolutionnaire d'État, celle qui fait trembler les opposants, celle qui coupe les têtes que la République n'a pu gagner. C'est la terreur "d'en haut", pratiquée par un appareil répressif public. Bien plus tardivement apparaît un terrorisme "d'en bas", ou plutôt des terrorismes, violence des individus ou de petits groupes contre le pouvoir, d'abord en Russie à la fin du XIX° siècle (le terme s'applique aux attentats d'abord dits nihilistes ou populistes), avant que le mot s'impose en français, entre deux guerres et ne remplace la notion des "crimes anarchistes".

Le terrorisme "d'en bas", le seul dont nous traiterons ici, celui du révolté, du révolutionnaire et bientôt du séparatiste ou indépendantiste, reflète d'abord un manque et une faiblesse : il utilise dans une première phase des pistolets et des bombes, en jouant la clandestinité et la surprise, faute de pouvoir aligner des foules et des mitrailleuses dans la rue. Il traduit aussi une impatience - frapper les représentants de la tyrannie avant que les masses aient développé une conscience et se soient révoltées, et, comme le reprocheront beaucoup les bolcheviks à leurs concurrents socialistes révolutionnaires, sans attendre que les "conditions objectives" soient réunies.

Au cours de la seconde guerre mondiale - où les résistants sont qualifiés de terroristes par les occupants- puis juste après, lorsque les chefs des mouvements anticolonialistes commencent par l'action armée clandestine avant que leurs chefs accèdent parfois à la la présidence d'un nouveau pays indépendant, la question se pose autrement. De Gaulle ou Mandela furent en leur temps considérés comme chefs terroristes. Yasser Arafat et Menahem Begin prix Nobel de la Paix furent assimilés à des poseurs de bombes avant de devenir des symboles de tolérance et de dialogue. Hier criminel, demain allié, admis dans les couloirs des Nations unies, l'ex terroriste mérite un traitement à part.

Il est tentant de distinguer en fonction de la cause ; il y aurait des terroristes criminels par essence d'une part et d'autre part d'authentiques insurgés, résistants et combattants de la liberté - contraints de lutter contre l'oppression et n'ayant d'autre moyen de protestation que les armes ; ils le feraient donc par nécessité et pour rétablir la démocratie. Ce distinguo est fort pratique, car il permet de faire passer une organisation de la catégorie criminelle à celle des partisans ou des freedom fighters, comme l'UCK kosovare lorsque l'Otan commença à bombarder la Serbie de Milosevic.

Mais si l'on met de côté la question du jugement moral ou politique sur l'acte terroriste, il faut bien constater qu'il sert les causes les plus contradictoires. Le terrorisme (attentat) se pratique pour détruire l'État (anarchistes, nihilistes...), pour se séparer de l'État (nationalistes, indépendantistes ou anticolonialistes), pour contraindre l'État (à libérer un prisonnier, à cesser d'aider un pays...), pour le provoquer par le chaos (comme les attentats "aveugles" des années de plomb italiennes que l'on nomme là-bas "strage di Stato", massacres d'Etat) mais aussi pour des justifications liées à l'écologie, au racisme, à la défense des animaux, à l'attente de l'Apocalypse... Et, bien sûr, au règne de Dieu.

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Outre le critère de finalité, beaucoup insistent sur le fait que l'acte terroriste touche des victimes "innocentes" ce qui implique a contrario que frapper des coupables relèverait de la légitime révolte. Mais qui est coupable de quoi et qui en juge ? Pour certains, même un soldat est une cible illégitime dès lors qu'il n'est pas en armes ou prêt au combat. Pour d'autres une femme ou enfant, un civil qui passe est "coupable" pour peu qu'il paie des impôts, puisse devenir ou engendrer un jour un soldat : il participe du système oppressif ou impie. On est toujours le coupable de quelqu'un et le complice de quelque chose : "aucun bourgeois n'est innocent" disait l'anarchiste Henry en lançant sa bombe sur le café Terminus. Tous les non jihadistes sont criminels, rappelle le discours de l'État islamique. La question de la juste fin juste renvoie à celle de la force juste.

Violences, visions et stratégies

Ici intervient un problème de perspective. Du point de vue de l'État ou des organisations internationales, le terroriste lance une attaque criminelle : il vise en cercles concentriques contre le gouvernement, les autorités et les forces de l'ordre et les fonctionnaires, les élites, les représentant de la classe, de l'ethnie, de la religion au pouvoir, les partisans de l'ordre établi, voire par extensions contre un citoyen lambda. Et il le fait de son initiative, sans être mandaté par une autorité élue ou sans représenter un peuple souverain (comme un armée, une police, une résistance...), il agit pour paniquer et contraindre.

Mais pour le terroriste, c'est la violence de l'autre qui est première : il ne ferait que riposter à une domination, à une occupation à une persécution. L'action terroriste est un crime qui se pense comme châtiment : elle s'adresse toujours à un État, ou à un groupe dénoncé comme agresseur, si bien que c'est celui qui réprime qui serait le "vrai terroriste". À la légalité formelle - la loi qui interdit de poser des bombes - le terroriste oppose une légitimité supérieure : il se réclame de la Nation occupée, de la classe dominée ou de la religion pure, il est l'instrument d'une justice plus haute. Il punit et dit souvent exécuter une sentence ou constituer un tribunal (éventuellement "révolutionnaire"). Pas de mouvement terroriste qui ne prétende tirer sa légitimité d'une injustice, venger des victimes et parler au nom d'une communauté plus large que la communauté combattante : elle "représente" les patriotes, le pays réel, les prolétaires, les colonisés, l'Oumma... Les masses suivront : il faut leur faire comprendre.

Une troisième façon de délimiter le champ du terrorisme le situerait par rapport à d'autres formes de violence politique suivant des critères stratégiques :

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Ce n'est pas la guerre en ce sens que la partie dite terroriste au conflit n'a ni État, ni armée pour la faire, ni possibilité de signer une paix qui s'inscrirait dans l'Histoire. Cela n'empêche pas que l'on veuille parfois "faire la guerre" au terrorisme comme G.W. Bush et François Hollande. On a même vu des terroristes participer à des "négociations" ou réconciliations, mais précisément, à la seconde où ils s'assoient à la table, ils cessent d'être réputés terroristes et deviennent "les représentants de l'insurrection" ou "la partie adverse". De leur côté, les partisans de l'attentat aiment souvent se désigner comme armée révolutionnaire ou armée secrète, avant-garde armée, résistance armée, soldats de Dieu, etc. Ils sont fiers de pratiquer la "guerre du pauvre", celle des gens qui n'ont ni avions ni canons, ne sortent pas en uniforme. Mais, là encore, au moment où un mouvement dit terroriste commence à occuper des zones territoriales, à gérer un appareil administratif et à défiler avec des drapeaux, il a franchi le stade purement terroriste et ouvre celui de la guerre civile. Le califat qui bat monnaie et lève l'impôt n'est plus exactement un groupuscule sur son territoire. D'où, par exemple, l'embarras du gouvernement qui dit que nous sommes en guerre ou subissons des actes de guerre, qui les bombarde "chez eux", mais qui est incapable de nous dire comment faire la guerre en France : il n'y a ni envahisseurs en uniforme à repousser, ni, comme autrefois au Liban, de quartiers entiers occupés par des milices bien visibles. La guerre donne au citoyen le droit de tuer légitimement une ennemi "public" (et non à titre "privé"), mais qui en l'occurrence?

Ce n'est pas non plus la guérilla ou la guerre de partisan. La guérillero, "à la campagne" et harassant des soldats ou des autorités locales, ne fait pas -stratégiquement parlant- comme le terroriste qui passe de la clandestinité à l'action brusque, commet des attentats dans les villes, et vise davantage suivant le mot de Raymond Aron à un effet psychologique qu'à un effet militaire.

Ce n'est pas une guerre civile, celle qui suppose l'hostilité de tous contre tous au sein de la Cité ; c'est une méthodes d'avant-gardes qui, se prétendent plus conscientes que le peuple (ou que les minorités opprimés ou que la masse des musulmans). Ce n'est pas non plus l'émeute. Dresser des barricades n'est pas la même chose que poser une bombe.

Ce n'est pas un "simple" massacre, au moins aux États-Unis où l'on tend à appeler "massacre de masse" des tueries dont la motivation idéologique est évidente mais que l'on préfère dire "motivés par la haine" . Ainsi, lorsqu'un blanc tire sur des noirs dans une église à Charleston, ou lorsque qu'un noir tire sur des policiers à Dallas, pour "tuer des blancs", les autorités commencent par exclure la qualification terroriste au profit de l'acte "de haine". Rhétoriques d'évitement assez subtiles qui rappellent celle des commentaires expliquant en France que des gens qui tuent en criant "Allah Akbar" ne sont pas forcément terroristes puisqu'ils sont déséquilibrés (la preuve : ils tuent).

Tout ces distinctions byzantines s'éclairent si l'on songe que le même courant politique peut pratiquer simultanément ou successivement diverses formes de violence. Il théorise avant de terroriser. Ainsi Daech pratique à la fois la "vraie" guerre en Irak et en Syrie où il prétend avoir créé un État, anime ou inspire des mouvements d'insurrection et de guérilla dans le Sahel, au Mali, etc., envoie des commandos (comme celui du 13 novembre 2015) exécuter des opérations extérieures, encourage un terrorisme plus ou moins spontané en recommandant aux croyants de prendre des pierres et des couteaux ou des véhicules pour attaquer près de chez eux, etc. Le tout sous l'étiquette englobante de djihad. Dans un tout autre genre, et sans amalgame, un mouvement politique peut avoir, comme les indépendantistes basques un bras armé et une façade politique légale, etc. Bref le terrorisme se prête à des stratégies hybrides et changeantes. Cette forme de violence se veut provisoire et qui vise, paradoxalement, à sa propre disparition, en vertu du principe que ce n'est qu'une étape en attendant un vraie mobilisation des masses, la constitution d'une vraie armée, une vraie révolution...

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Action et message

De tout ce qui précède, il ressort qu'il n'y a pas un terrorisme en soi, ni comme doctrine (au sens où l'on parle du bouddhisme, du marxisme, de l'existentialisme...), ni comme système permanent (tel le capitalisme ou le protectionnisme). En revanche, il y a des stratégies, intégrant la terreur et servant des buts divergents : pas de terrorisme sans passage à l'acte et sans recherche d'un dommage grave, souvent létal, mais cette action reste de l'ordre des moyens.

Mais moyens de quoi ? Par analogie avec la guerre au sens de Clausewitz, c'est "un acte de violence dont l'objet est de contraindre l'adversaire à se plier à notre volonté" mais sans les appareils militaires. Des législations caractérisent le terrorisme par la coercition ou la contrainte qu'il cherche à exercer sur un peuple ou son gouvernement. Son message de revendication dit souvent : nous sommes l'organisation Untel, nous poursuivons tel objectif proche (élargissement d'un prisonnier politique, abandon de tel décret) ou lointain (comme une société parfaite), nous allons continuer jusqu'à ce que vous cessiez de nous bombarder ou de nous réprimer, jusqu'à ce que vous libériez nos camarades, jusqu'à ce que disparaisse votre système odieux, etc.

L'équation dommage / menace / résultat, ne doit pourtant pas occulter le principal : l'action terroriste vise à faire comprendre quelque chose (suivant la formule : poudre plus encre, tuerie de masse plus réseau social...), donc à symboliser un rapport de force. Il s'agit de convaincre pour vaincre. D'où un message terroriste à décrypter.
Il arrive, du reste, que des groupes se dispensent de revendication explicite (tel al Qaïda qui estimait que la destruction des Twin Towers était un acte plus éloquent que n'importe quel discours, tant sa dimension emblématique était évidente). D'autre part, ils ne s'adressent pas seulement à leurs adversaires et pas que pour proposer l'alternative "cédez ou ce sera pire".

Ils ont énormément à raconter et cherchent autant à séduire ceux qu'ils appellent à rejoindre leur camp qu'à affaiblir les forces matérielles et surtout morales de leurs ennemis. La notion de "propagande par le fait", la théâtralité du terrorisme comme spectacle ou la phrase "les terroristes ne veulent pas que beaucoup de gens meurent, ils veulent que beaucoup de gens regardent" reflètent cette réalité.

Tout acte terroriste est publicitaire en ce qu'il cherche à attirer une attention maximale, et symbolique parce que, quand il frappe un homme (ou éventuellement, un bâtiment, un monument, etc.), la cible touchée est sensée être représenter une idée plus vaste qu'elle-même. La victime est là comme signifiant d'un signifié détesté : un fonctionnaire pour l'État, un policier pour la Répression, un banquier pour le Capitalisme, un juif pour les crimes sionistes, les Twin Towers pour l'orgueil idolâtre de l'Amérique, un jeune qui assiste à un concert pour Paris capitale de l'iniquité, un contribuable pour le gouvernement qui bombarde le califat, un passant devant une mosquée pour les chiites hypocrites complices de l'Iran et ainsi de suite.

Quand part la balle ou explose la bombe, le terroriste a déjà trouvé sa récompense et son sens : il a exprimé qu'il vengeait un tort et témoigné devant l'histoire que des hommes se sont dressés contre la force et l'injustice.

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Dans un second temps, le spectacle terroriste gagne encore plus d'audience et d'impact par la réaction même de la cible. Les médias qu'il juge vendus au système ennemi mais sur qui il exerce un effet judo, le servent objectivement : ils amplifient l'écho de l'acte et avec lui le sentiment qu'a chacun de pouvoir être menacé demain. Ces médias sont obligés d'en expliquer les motivations, ils spéculent sur de futures attaques et augmentent l'effet d'attente. Quand aux autorités, elles peuvent elles-mêmes aggraver l'impact de l'attentat par des mesures d'exception, des déclarations alarmistes, en suscitant des réflexes de solidarité des populations visées. Et si elles se livrent à une répression indistincte, cela revient aux yeux des terroriste à révéler leur "vrai visage" et à obliger chacun à choisir son camp, le vieux cycle provocation répression solidarité.

Transmettre par la violence

Ce que le terroriste est en mesure communiquer dans l'espace et de transmettre dans le temps a un effet à plus long terme.

Il arrive qu'il possède ses propres médias, ses propres réseaux comme Daech avec ses revues multilingues, ses agences de presse, des chaînes de diffusion Web 2.0. De là, une nouvelle capacité de recruter, de donner l'exemple, de provoquer des contagions d'idées et d'action. La technique de communication est fondamentale : chaque phase de l'histoire du terrorisme correspond à un média dominant : presse à imprimer (celle des quotidiens, mais aussi celle que l'on cache dans une cave pour imprimer des brûlots), radio à l'époque des mouvements séparatistes ou anticolonialistes, télévision internationale à l'époque du terrorisme pro-palestinien et d'extrême-gauche, Internet avec le djihadisme moderne.
Les réseaux sociaux ont pris le relais pour permettre une communication descendante (les superproductions des professionnels du califat : scènes d'exécutions, du front ou de la vie utopique au califat de Cham), une communication frère-vers-frère ou sœur-vers-sœur pour le recrutement ou le retour d'expérience du pays de djihad, et une communication "remontante", y compris sous forme de l'attentat filmé, une sorte de selfie sanguinolent pour l'édification des "bons croyants",... Face à cela, les pays occidentaux, sensés avoir inventé la technologie "2.0" doivent se contenter de fermer des comptes qui seront aussitôt recréés avec légère modification. Ou alors, ils produisent des vidéos de contre-influence et de contre-radicalisation qui disent en substance la même chose que les journaux télévisés.

L'action terroriste est une action pour l'Histoire, Histoire qu'elle veut accélérer (en évitant des années d'attente par la violence), Histoire qu'elle veut rejouer ou dans laquelle elle veut s'inscrire. En ce sens, ceux qui recourent au terrorisme ont besoin de créer des mythes et des mémoires. Les victoires de Ravachol ou de la bande à Bonnot, ont été remportées dans la littérature ou le cinéma, celles de l'Ira sur les fresques des murs de Dublin et dans les cérémonies commémoratives. Il ne faudrait pas, le jour - quand même envisageable - où Daech aura perdu ses derniers bastions territoriaux et où ses chefs autant été atteints par les derniers drones - que le souvenir de de l'Etat islamique se perpétue à travers la prolifération des opérations jihadistes plus ou moins spontanées (pour venger un califat une nouvelle fois détruit par les mécréants). Mais il pourrait aussi perdurer à travers les mémoires numériques, mythifié et incontrôlable sur les réseaux que nous ne savons ni interrompre, ni contrôler.

La méthode terroriste ne sert guère à conquérir un territoire ni à infliger de grandes pertes à l'adversaire, manières traditionnelles d'atteindre la victoire, mais elle parvient à démoraliser, à délégitimer ou à diviser avec une remarquable économie de moyens. Comme rhétorique s'adressant aux masses elle a aussi d'un surprenant rapport coût/résultat : elle transforme les armes les moins sophistiquées en médias et les médias les plus high-tech tech en armes. Le terrorisme est hybride et changeant. Il combine violence pure et intention stratégique, ostentation des supplices qu'il administre, secret de leur préparation et séduction de l'idéal. Daech en est l'exemple le plus fou : il attire des dizaines de combattants en leur promettant qu'ils pourront sacrifier des mécréants et des "hypocrites" (musulmans non jihadistes), et puis mourir pour se retrouver au plus près d'Allah...

Plutôt qu'une définition politico-philosophique du terrorisme, nous avons besoin d'une compréhension de leur désir politique. Car nous sommes surtout incapables de comprendre des gens qui disent haïr notre démocratie, notre prospérité et notre tolérance au profit du salut de leur âme et de la conquête du monde.

mardi, 14 novembre 2017

Puissance et dangers de la désinformation

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Puissance et dangers de la désinformation

 
Auteur : Eric Woillez 
Ex: http://www.zejournal.mobi

Article écrit d’après l’oeuvre de Vladimir Volkoff « petite histoire de la désinformation ». Cet article a pour but de donner les principes généraux de la désinformation afin d’avertir le public du danger qu’elle représente pour la liberté de pensée.

Qu’est ce que la désinformation?

La notion de désinformation est passée dans le vocabulaire courant. Cependant, ce concept est encore mal compris voir inconnu du grand public. Malgré son importance dans les société modernes, aucun cours fouillé sur le traitement de l’information et les techniques de désinformation n’a jamais figuré dans les programmes scolaires. On peut proposer pour la désinformation la définition suivante [1]:

La désinformation est une manipulation de l’opinion publique, à des fins politiques, avec une information traitée par des moyens détournés.

Il est important de distinguer la désinformation de deux pratiques voisines, l’intoxication et la publicité. L’intoxication vise un groupe restreint de décideurs, l’état-major ennemi par exemple lorsqu’il s’agit d’intoxication militaire. La publicité vise à séduire le public, elle peut être fallacieuse, mais elle va droit au but et n’emploie pas de moyens détournés.

Cet article a donc pour but de donner les principes généraux de la désinformation afin d’avertir le public du danger qu’elle représente pour la liberté de pensée. Il n’a pas pour but de faire un cours complet sur la notion de désinformation. Chacun pourra, s’il le souhaite, approfondir tel ou tel aspect dans des ouvrages plus spécialisés.

Nous donnerons tout d’abord brièvement le contexte historique dans lequel est née la désinformation (1). Puis nous analyserons de façon théorique comment est conçue une opération de désinformation (2) et sa mise en oeuvre concrète (3). L’analyse sera illustrée par deux exemples concrets (2-4). Enfin nous verrons comment agit la désinformation sur la population et comment s’en protéger (5).

1-Contexte historique

L’idée d’utiliser la désinformation à des fins militaires est très ancienne. L’art de la guerre( V I è ou I V è siècle av. J.C.) [5] du général chinois Sun Tzu est le premier ouvrage connu à donner les principes fondamentaux de la désinformation. Le général Sun Tzu voyait dans la désinformation une technique de guerre efficace: “L’art suprême de la guerre, c’est de soumettre l’ennemi sans combattre”. Celui-ci résume sa théorie en quelques grands principes qui eurent une influence considérable et servirent de références aux stratèges futurs qui voulurent pratiquer la désinformation (voir le tableau ci dessous). Nous voyons donc que la désinformation fut dès l’origine une technique de guerre, destinée à détruire l’adversaire avec un minimum de forces.

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Quelques bons principes du général Sun Tzu

  • Discréditez tout ce qu’il y a de bien dans le pays adverse.
  • Impliquez les représentants des couches dirigeantes du pays adverse dans des entreprises illégales. Ebranlez leur réputation et livrez les le moment venu au dédain de leurs concitoyens.
  • Répandez la discorde et les querelles entre les citoyens du pays adverse.
  • Excitez les jeunes contre les vieux. Ridiculisez les traditions de vos adversaires.

La pratique de la désinformation est restée balbutiante dans les siècles qui suivirent par manque de moyens techniques. La situation devait changer substantiellement à l’époque moderne avec l’arrivée des médias de masse, l’invention de l’imprimerie, de la TSF et l’apparition de journaux quotidiens. L’opinion publique prit aussi un rôle croissant dans la vie politique, d’où la tentation bien naturelle pour certains individus ou groupes de s’en emparer et de s’en servir à leurs propres fins.

Lors de la seconde guerre mondiale, la guerre de l’information fut un élément essentiel du conflit. Elle fut pratiquée sous la forme d’opérations d’intoxication et de propagande, qui ne sont pas à proprement parler de la désinformation mais qui utilisent des techniques très similaires. Citons en particulier deux virtuoses des opérations d’intoxication, Sefton Delmer chez les Britanniques et le tristement célèbre Goebbels chez les nazis. Goebbels avait d’ailleurs coutume de se vanter de  » jouer de l’âme populaire comme on joue du piano ».

On peut penser que la désinformation dans sa forme la plus moderne et la plus raffinée apparaît en URSS. Lénine a beaucoup pratiqué la propagande et la désinformation et on lui doit quelques citations remarquables de sincérité:  » Dites-leur ce qu’ils veulent entendre », ce qui est la devise même de toute espèce de désinformation, ou encore « dire la vérité est un préjugé bourgeois mesquin ». Sous Staline, la désinformation prend une ampleur mondiale. Elle est confiée à une élite de spécialistes regroupés dans le département A du KGB qu’on appelait en russe les chapeaux-cachettes. Le but clairement affiché de l’URSS était de faire triompher le communisme partout dans le monde. Le département A a donc organisé entre 1950 et 1989 plusieurs opérations de désinformation maintenant reconnues comme telles.[2] L’opération Tanzanie en 1964 qui avait pour but de monter l’opinion publique en Afrique contre les Etats-Unis, fut un succès total. En France, un agent d’influence travaillant pour le compte du KGB fut pris et condamné en 1979. Une grande opération de désinformation eut lieu qui aboutit à sa grâce en 1981.

Bien qu’ayant pris du retard dans la guerre de l’information et la maîtrise de l’opinion publique, les puissances occidentales ont rapidement pris conscience de la puissance de la désinformation et ont su en faire aussi leur profit, et la désinformation n’a pas été bien longtemps le seul privilège de l’URSS. Un exemple historique sera traité plus en détail dans la section (5).

Notons simplement pour conclure cette section que la désinformation a acquis de plus en plus d’efficacité grâce à l’apparition d’internet et des réseaux sociaux. Elle n’est plus du tout le privilège d’états puissants et de leur services spéciaux. Les opérations de désinformation – aussi appelés montages- sont parfois menées par des agences privées contre rétribution d’un client qui préfère rester dans l’ombre.

2-Schéma type d’une opération de désinformation

Une opération de désinformation n’a pas de schéma fixe puisqu’elle doit impérativement s’adapter au contexte social et politique et aux possibilités techniques. Nous allons cependant essayer de décrire la conception d’une opération dans ses grandes lignes.

Elle commence sous l’impulsion d’un client qui est le financeur et le bénéficiaire de l’opération. Ce client peut être aussi bien une compagnie privée qu’un état ou un homme politique. Comme le client reste généralement dans l’ombre, il est toujours très difficile de savoir qui a lancé une campagne de désinformation.

Le client s’adresse alors à un agent, c’est un professionnel qui est responsable de l’ensemble de l’opération de désinformation. Les agents furent souvent les services secrets lorsque l’opération était lancée par un état, mais aujourd’hui des agences de communication spécialisées peuvent parfaitement assurer ce rôle.

S’il souhaite réussir, l’agent doit obligatoirement faire une bonne étude de marché pour concevoir une campagne qui a des chances d’être bien acceptée par le public. Ceci l’amènera à bien choisir le support et le thème de la désinformation. Le but est toujours d’amener le public à croire à la désinformation, il faut donc que les supports aient l’air aussi vrais que possible. Toutefois la désinformation ne s’adresse qu’en surface à l’intelligence du public qu’elle prétend induire en erreur; en profondeur elle s’adresse à sa sensibilité: ”visez les tripes “ disait Goebbels. Aussi si le thème n’est pas entièrement rationnel, il a des chances d’être mieux accepté, car -ne l’oublions pas- les passions sont toujours plus fortes en l’Homme que les convictions.

Enfin, l’opération de désinformation utilise plusieurs relais pour diffuser le thème choisi. Le message est ensuite amplifié par les caisses de résonances. Les caisses de résonances sont en général de bonne foi, elles croient vraiment au message qu’elles relaient et sont de ce fait d’autant plus convaincantes. On peut comparer la situation à un instrument de musique: le thème de la désinformation, s’il est choisi avec une bonne fréquence, va entrer en résonance et s’amplifier grâce au soutien des médias et du public, jusqu’à devenir une véritable symphonie désinformante.

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L’exemple du cheval de Troie

L’épisode du cheval de Troie est décrit dans Virgile comme une astucieuse ruse de guerre, mais l’épisode peut se voir aussi comme l’allégorie d’une opération de désinformation réussie.

Les Grecs abandonnent sans explications un cheval de bois sur la rive, c’est le support de la désinformation. Le Grec Sinon qui s’est intentionnellement constitué prisonnier sert d’agent pour lancer le thème de la désinformation: ”Les Grecs ne veulent à aucun pris que le cheval rentre dans Troie, sinon les Troyens bénéficieraient à nouveau de la protection de Pallas Athéna “. Le hasard ou les dieux contribuent alors au succès de l’opération car Laocoon et ses fils sont engloutis par des serpents, eux qui avaient conseillé aux Troyens de détruire le cheval. En quelque sorte, on peut dire que le ”vent historique “ soufflait dans la bonne direction pour les Grecs à ce moment.

Sur quoi les Troyens convaincus détruisent eux-mêmes leur protection militaire la plus sûre, ils font une une brèche dans leurs remparts pour faire entrer le cheval qui va précipiter leur perte! ”Tous s’attellent à l’ouvrage “ et ”alentour, jeunes garçons et jeunes filles de chanter des hymnes sacrés, joyeux de toucher au câble… “. L’opération de désinformation s’amplifie, entre en résonance, par l’action des Troyens: plus personne ne se méfie du cheval, tous œuvrent de concert à leur propre destruction. A ce moment, l’opération a parfaitement réussi car elle a abouti à l’autodésinformation. Il n’est plus besoin d’aucune influence extérieure pour entretenir le thème, il est alimenté directement par l’opinion publique.

3-Mise en oeuvre d’une opération

Comment concrètement concevoir une opération de désinformation? Les possibilités sont infinies, elles s’adaptent au contexte et à la mentalité du temps. Cependant, on peut déterminer quelques grandes manières ”classiques “ de désinformer, que nous présentons ici sans prétendre être exhaustifs. (lire [3]  pour approfondir)

Il est en général difficile de nier totalement une réalité, surtout lorsqu’elle est déjà connue du public. Il est donc judicieux de présenter des affirmations en mélangeant le vrai et le faux. Comme une partie des affirmations est vraie et reconnue publiquement, cela donnera confiance à l’auditoire et celui-ci pensera naturellement que l’ensemble des affirmations est vrai. Dans un conflit faisant des victimes par exemple, il est très facile de grossir ou de diminuer abusivement le nombre de victimes selon l’impression que le désinformateur veut créer. Le désinformateur peut aussi modifier les circonstances de l’évènement ou passer sous silence une partie des informations. Il dira qu’une armée A forte d’un million d’hommes a attaqué une armée B de seulement dix mille hommes en oubliant sciemment de préciser que l’armée B a des chars lourds et pas l’armée A.

Nous laissons au lecteur le plaisir de compléter cette liste de techniques à loisir, interprétation sous-jacente des faits, modification ou suppression des motifs, donner des parts inégales aux adversaires, etc… Aucune affirmation n’est abusive en désinformation, il suffit qu’elle soit adaptée à l’auditoire. On observe même des occasions où il est judicieux d’inverser totalement la réalité ( voir l’exemple de la section 2): ”plus c’est gros, plus ça passe “ est également un principe fondamental de la désinformation.

Les médias comme caisses de résonance

Dans notre société, il est très facile de trouver les caisses de résonance pour diffuser de la désinformation, ce sont les médias, internet, les réseaux sociaux. Plusieurs facteurs contribuent à en faire des instruments très puissants de désinformation. Il y a d’abord le fait que le public est très réceptif à une information écrite ou visuelle. ”c’est vrai puisque je l’ai vu “ est souvent notre premier réflexe face à une information visuelle. Or une image se manipule à volonté aussi bien qu’un texte écrit, en jouant sur le cadrage, en la sélectionnant soigneusement, ou tout simplement en la fabriquant par un montage. Si l’opérateur sait s’y prendre, elle peut contenir une charge émotive très forte ce qui en fait un objet idéal pour s’adresser aux passions de l’Homme. N’oublions pas que les buts du désinformateur et ceux du journaliste se recoupent en un point: ils sont l’un et l’autre amenés à créer une émotion. Pour le désinformateur, c’est l’émotion qui entraînera les actions qu’il veut provoquer, et pour le journaliste, l’émotion se vend toujours mieux que le renseignement.

Un autre aspect des médias favorise grandement le désinformateur. Les médias ont une forte tendance à se copier les uns les autres, à parler de ”ce dont on parle “ et à créer ainsi des bouffées éphémères d’informations. Il y a bien sûr des émissions ou des journaux considérés comme les plus importants et au pas de qui les autres ont tendance à se mettre. Lorsqu’un nouveau sujet sort, on observe souvent que l’ensemble des médias s’y concentre rapidement, tel un orchestre qui brode à l’unisson sur le même thème, lequel est ensuite relégué dans l’oubli lorsque le public commence à se lasser. Ce phénomène d’amplification rapide d’un sujet est à l’avantage du désinformateur qui pourra ainsi facilement créer dans le public une sorte de psychose collective.

Il pourrait alors être tentant de ne lire que des journaux ”sérieux “ qui affichent une volonté d’objectivité. En réalité, rien n’est plus favorable à la désinformation que l’objectivité d’apparence [7] . Il faut absolument prendre conscience qu’une information est nécessairement biaisée. Un fait n’est pas une information. Les médias ne donnent jamais des faits, ils donnent des informations. Lorsque le biais n’est pas ouvertement déclaré, il intervient de façon bien plus subtile dans les détails de l’information: mise en page, choix de l’information délivrée, utilisation d’adjectifs valorisants ou dépréciatifs, dessin humoristique, avis de la rédaction… Tous ces petits détails sont des techniques d’influence d’autant plus efficaces qu’elles amènent l’auditeur à croire à ce qu’il lit. L’objectivité d’apparence amène donc à interpréter l’information, non directement, mais par des moyens détournés, exactement ce que recherche le désinformateur lui-même (cf la définition en introduction). Un organe médiatique affichant clairement sa ligne politique et les idées qu’il défend fait parfois de la propagande, mais pas de la désinformation, il est donc plus aisé de s’en protéger.

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La logomachie et la langue de bois

La logomachie, i.e bataille à coup de mots, et la langue de bois [6]  sont deux procédés distincts de désinformation, mais tous deux ont pour objectif d’attaquer le vocabulaire et la façon de parler pour mieux désinformer. Ces procédés se fondent sur le principe que la pensée est impuissante sans parole et qu’un certain vocabulaire condamne non seulement au mensonge exprimé mais aussi au raisonnement tordu. Le but consiste à créer au sens propre une nouvelle langue, en choisissant avec soin un nouveau vocabulaire, afin que tout discours devienne désinformant, même sans mauvaises intentions de la part de celui qui le prononce. La langue de bois appauvrit le vocabulaire en ne retenant que les mots et expressions qui servent la cause choisie. Un appauvrissement du vocabulaire a comme répercussion immédiate un appauvrissement de la pensée. Aussi, lorsque la langue de bois est solidement installée, même un individu voulant penser autrement que la pensée dominante sera automatiquement limité et recadré par l’usage du vocabulaire. La langue de bois fait sien l’aveu de Goebbels: ”Nous ne parlons pas pour dire quelque chose, mais pour obtenir un certain effet “.

La logomachie, elle, va créer de nouvelles expressions pour porter un jugement de valeur sur l’adversaire. Sous la Révolution française par exemple, on avait forgé avec beaucoup de bonheur des expressions telles que ”ennemi du peuple “ ou mieux encore ”ennemi de la liberté “. Le lecteur n’aura aucun mal à décrypter la charge émotionnelle de ces deux expressions.

D’ANOUVILE un peu triste -Votre Majesté compte faire une épuration?

NAPOLÉON frappé – Épurer! Voilà un mot auquel je n’aurais pas pensé. (il considère d’Anouvile.) Vous ne manquez pas de talent mon petit. C’est dommage que vous soyez dans la lune, je vous aurais employé! Jusqu’ici on avait toujours parlé de répression. C’était trop franc. (Il se met le mot dans la bouche avec ravissement.) “L’épuration.” Cela a un petit air hygiénique. C’est une trouvaille! Vous avez des tablettes? (D’Anouvile lui en tend.) Je note le mot. (Il répète, ravi.) “L’épuration.” (Il a une idée.) Et purge, peut-être? Non, ça fait sale, ça fait colique. (Il répète, satisfait. “L’épuration”.)

NAPOLÉON – Je fais ma liste pour l’épuration. J’ai besoin de vous.

LE MARÉCHAL surpris – L’épuration?

NAPOLÉON ravi – Oui. C’est un nouveau mot que j’ai trouvé! Répression n’est plus dans ma nouvelle ligne.

Jean Anouilh, La Foire d’empoigne

4-Un exemple de désinformation moderne: la guerre serbo-croate

Les guerres en ex-Yougoslavie furent l’occasion à partir d’août 1991 d’une magnifique opération de désinformation couronnée de succès, que nous allons présenter en détails dans cette section. L’opération ”Bosnie “, ainsi qu’elle fut appelée, contient tous les éléments d’une opération de désinformation moderne telle que nous l’avons évoquée dans les sections précédentes, un véritable cas d’école.

L’opération avait pour but de flétrir la réputation des Serbes dans l’opinion publique mondiale. Les clients de cette opération, du moins ceux que nous connaissons, furent donc successivement entre 1991 et 1992 la Croatie, puis la république de Bosnie-Herzegovine, et enfin le Kosovo. Il est probable qu’un client bien plus puissant pilotait cette opération, tant les enjeux politiques des Balkans sont importants, mais nous n’en aurons jamais connaissance.

L’opération ”Bosnie “ fut confiée à une agence privée américaine dont nous tairons le nom, puisqu’elle existe toujours. Nous connaissons actuellement les coulisses de cette opération grâce à des confidences de son directeur M.H. [4]  L’agence commença par l’étude de marché, c’est-à-dire par jauger l’état de l’opinion mondiale au sujet de la Serbie. La situation se présentait très mal, du fait de plusieurs facteurs:

1-Les Serbes s’étaient battus héroïquement au côtés des Alliés pendant les deux guerres mondiales

2-Les nazis avaient fondé un État croate dont les Croates se réclamaient alors sans pudeur

3-Certains chefs des fractions croates et de la fraction musulmane en Bosnie avaient déjà fait des déclarations antisémites.

Le génie de l’agence de désinformation fut, comme nous allons le voir, d’inverser les faits et de faire passer les Serbes pour des nazis auprès de l’opinion mondiale. Le support fut la publication par le New-York Newsday d’articles sur des camps de prisonniers où étaient enfermés des musulmans. L’agence choisit ensuite avec intelligence trois grandes organisations juives américaines. Le simple terme de ”camps “, était suffisant pour émouvoir cette communauté, et faire coïncider dans leurs esprits Serbes et nazis. C’était un coup de maître. Le directeur de l’agence explique: ”Aussitôt, il y eut un très net changement de langage dans la presse avec l’emploi de termes à très forte valeur émotive, tels que purification ethnique, camps de concentration, etc…, le tout évoquant l’Allemagne nazie, les chambres à gaz et Auschwitz. La charge émotive était si forte que plus personne ne pouvait aller contre, sous peine d’être accusé de révisionnisme. “

En temps de guerre, il n’est pas difficile de trouver des supports à la désinformation. Chacun des adversaires commet le lot d’atrocités qui sont caractéristiques des situations de guerres. Pour flétrir irrémédiablement les Serbes, il suffisait donc de montrer les atrocités commises par eux, éventuellement de les grossir démesurément ou d’en inventer de nouvelles si elles venaient à manquer. D’autre part, on passait totalement sous silence les crimes commis par le parti opposé, ce qui devait signifier implicitement que seuls les Serbes étaient responsables. L’équation Serbe=nazi était ancrée tellement fortement dans l’opinion publique que n’importe quelle opération de guerre de la part de Serbes passait immédiatement pour un crime contre l’humanité similaire à ceux perpétrés par les nazis.

Principalement sept supports ont servi à l’opération de désinformation: les destructions, la purification ethnique, les camps, les viols, les gaz, les charniers, les massacres de Sarajevo. La presse s’empressa de grossir les destructions faites par les Serbes, allant jusqu’à affirmer que certaines villes, qui sont encore debout à l’heure actuelle, avaient été rasées. Les camps n’étaient pas des camps de concentration mais des camps de prisonniers, mais la presse influença l’opinion publique en allant jusqu’à publier une fausse image d’ un homme émacié derrière des barbelés, image qui n’était absolument pas celle d’un camp Serbe. L’idée que les Serbes avaient un ”plan systématique “ de viol n’avait aucun fondement réel, de même que celle affirmant qu’ils utilisaient des armes chimiques. Enfin, les observateurs militaires de l’ONU, ont montré que les prétendus massacres de Sarajevo, qui ont tant ému la communauté internationale, étaient probablement l’œuvre des musulmans attaquant leur propre population pour faire accroire ensuite l’idée d’une provocation serbe.

Durant toute l’opération, un vocabulaire particulier à été soigneusement employé. Les mots de camp, charnier, purification ethnique ont servi de supports. En parlant des Serbes, on disait qu’ils avaient occupé des villes ou des régions, et assassiné leurs adversaires, tandis que les Croates libéraient les villes, et tuaient les Serbes. Une expression fut employée avec succès, celle de république autoproclamée pour parler de la république Serbe, dans le but de contester sa légitimité, alors qu’il est clair qu’une république indépendante est toujours et par définition autoproclamée.

Ainsi, l’opération ”Bosnie “ fut menée de main de maître. Quelques observateurs vigilants prirent bien conscience qu’une opération de désinformation était en cours et publièrent des articles d’avertissement, mais leurs voix comptaient bien peu au regard de la grande symphonie désinformante en cours. Ironie du sort, toute information qui allait dans le sens de la défense des Serbes était aussitôt appelée ”désinformation Serbe “.

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5-La cible: l’opinion publique

La cible de la désinformation est, par définition, l’opinion publique. La désinformation joue de la paresse intellectuelle de l’Homme, et utilise le fait que la cible se laisse désinformer. Elle ne peut aboutir sans l’acquiescement de ceux qu’on vise. Nous l’avons vu dans la section 2, les Grecs ont bâti le cheval de Troie, mais la ruse aurait été vaine si les Troyens ne l’avaient eux-mêmes introduit dans la ville. Pour obtenir facilement cet acquiescement, la désinformation s’adresse aux passions de l’Homme, et particulièrement à la haine ou à la peur. Une opération de désinformation consiste souvent à donner d’abord à la cible des préjugés qui seront favorables à la future campagne de désinformation, puis à lancer cette campagne. Par exemple, on créera ou on accroîtra l’hostilité que telle population peut éprouver pour l’ennemi qu’on veut lui donner. Une opération de désinformation crée presque toujours deux camps, les bons et les mauvais. Elle vise à dire le plus de mal possible de l’ennemi, à le noircir de sorte qu’il apparaît comme totalement mauvais: c’est le procédé de diabolisation. C’est un procédé extrêmement vicieux, car nous le savons bien, aucun groupe d’humains, aucun individu n’est totalement bon ou mauvais, la réalité est toujours plus subtile que cette vision manichéenne. Mais il est tellement plus confortable d’avoir un ennemi clairement défini, qui joue le rôle de bouc émissaire, et que l’on peut haïr et mépriser sans retenue. Retenons que l’information ne va jamais sans une déformation, hélas toujours dans le sens d’une simplification moralisatrice.

L’opération de désinformation est réussie lorsqu’elle crée dans le public une quasi-unanimité de caractère psychotique. Le public est alors dans un état irrationnel qui le pousse à ne plus voir que ce qui va dans le sens de la désinformation, à en rajouter en se désinformant lui-même. Lorsque cette psychose est atteinte, le désinformateur n’a plus besoin d’agir car le désinformé devient lui-aussi désinformateur et amplifie l’opération. L’Homme possède en lui un instinct grégaire qui le conduit à penser avec la masse, à créer une sorte de pensée unique rassurante parce qu’elle est partagée par tous. Ce type de terrain favorise la désinformation puisqu’il a tendance à éliminer ceux qui pensent autrement. Le ”Dites-leur ce qu’ils veulent entendre. “ de Lénine résume en peu de mots l’essence même de la désinformation.

Vigilance vis à vis de l’image

A titre d’exercice, et afin de montrer au lecteur que la désinformation est un procédé parfaitement actuel, voici deux images du président Vladimir Poutine tirées d’un calendrier paru en Russie en janvier 2017. Que vous soyez partisan fervent ou adversaire acharné de ce personnage ne vous empêche pas de vous interroger sur l’utilisation de ce genre d’information. Quelle représentation de Vladimir Poutine ces photos visent-elles à créer? A quel sentiments font elles appel? Sont-elles réelles ou est ce un montage?…etc

http://www.20minutes.fr/insolite/diaporama-7854-photo-870...

Ces photographies constituent un magnifique support de désinformation. Ce qui est intéressant pour notre étude, c’est de constater qu’elles peuvent être utilisées à loisir pour glorifier ou pour ridiculiser le président Poutine. En Russie, ce calendrier est diffusé avec la claire intention de donner une bonne image du Président. Il fait en quelque sorte la publicité du président, par un moyen direct et non détourné, c’est donc de la propagande. En Europe occidentale au contraire, les médias sont très méprisants. Pour eux, la diffusion de ce calendrier relève d’une pratique dictatoriale (puisque c’est de la propagande) et ils s’en servent donc pour donner de Poutine l’image d’un dictateur essayant de redorer son blason. Les médias occidentaux n’accusent pas directement le président Poutine d’être un tyran, ils s’en prennent à lui par un moyen détourné, c’est de la désinformation.

Que faire?

Il faut d’abord prendre conscience d’une chose: il n’existe pas d’information vraie, objective, décrivant parfaitement la réalité. C’est pourquoi il est inutile de tomber dans la paranoïa en voyant des opérations de désinformation dès qu’une information est biaisée ou mensongère. La prudence et la réserve bien légitime que l’on doit avoir vis-à-vis de l’information ne doit pas nous conduire à une théorie du complot, ce serait de la désinformation au second degré. De même, les médias ne sont pas nécessairement désinformants, ils jouent leur rôle de relais de l’information et ne portent pas à eux seuls la responsabilité des opérations de désinformation. Ne l’oublions pas, c’est l’acquiescement et la paresse intellectuelle de la cible qui fait aboutir l’opération de désinformation.

Cependant une opération de désinformation se repère assez facilement lorsqu’on est sur ses gardes: il y a anguille sous roche quand des journaux, même de bords opposés, se trouvent d’accord jusqu’aux détails près, quand plus personne n’ose soutenir publiquement une thèse contraire à la thèse dominante. On observe alors que les médias peuvent diffuser des informations grossièrement fausses ou absurdes avec le plus grand sérieux, sans même se rendre compte du ridicule de la situation. Et lorsqu’une désinformation flagrante est en cours, il faut la combattre farouchement et intelligemment. Vladimir Volkoff donne pour ce faire quelques conseils pratiques:

  •  N’avoir une opinion que sur les sujets sur lesquels nous pouvons avoir accès à des sources distinctes d’information (en France, presque toutes les informations proviennent de la même agence de presse, l’AFP).
    Lire des journaux extrémistes opposés, ou lire la presse étrangère, sont de bonnes techniques pour obtenir des informations bien distinctes.
  • S’informer via des médias annonçant ouvertement leur appartenance politique et leur ligne éditoriale, afin de n’être pas dupe de l’objectivité d’apparence.
  • Essayer de se faire une opinion plutôt que de les acheter toutes faites.
  • Refuser par-dessus tout de censurer ses propres idées. Le refuser systématiquement, farouchement, intelligemment.

En fin de compte, la désinformation doit questionner notre honnêteté intellectuelle. Il est tentant dans un conflit d’idées de vouloir faire triompher les siennes, en utilisant tous les moyens possibles, y compris le mensonge. Et d’un autre côté, refuser de considérer avec attention les arguments adverses de peur d’être mis en tort, car il est tout aussi difficile de reconnaitre et d’accepter ses erreurs lorsque la vérité apparaît clairement. La désinformation impose à chacun d’entre nous de faire ce choix crucial: ”Est-il plus important de faire triompher mes idées ou de chercher la vérité? “

L'auteur,Eric Woillez, est  Docteur en physique à l’ENS de Lyon

Notes:

[1] Vladimir Volkoff. Petite histoire de la désinformation. Edi- tions du ROCHER, 1998.

[2] Jacques Vindex et Véraldi Gabriel. Les Onagres. L’Âge d’homme, 1988.

[3] Vladimir Volkoff Le Montage. L’Âge d’homme,1982.

[4] Jacques Merlino. Les vérités yougoslaves ne sont pas toutes bonnes à dire. Albin Michel, 1993.

[5] Sun Tzu. L’Art de la guerre. Flammarion, 1972.

[6] Françoise Thom. La Langue de bois. Julliard, 1987.

[7] Jacques Legris. « Le Monde » tel qu’il est. Plon, 1976.

lundi, 13 novembre 2017

Tout dans la Tradition, rien contre la Tradition, rien en dehors de la Tradition

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Tout dans la Tradition, rien contre la Tradition, rien en dehors de la Tradition

par Thierry DUROLLE

« Fascisme » et « fasciste » sont aujourd’hui des termes de novlangue relevant de l’insulte. Ils servent, à l’instar du mot « nazi », à disqualifier toute personne qui tient un discours non conforme. Pour autant, le sens initial de ces mots résonne encore dans la tête d’un bon nombre de personnes, du militant politique jusqu’à l’historien.

Faf-Cologne-196x300.jpgEn effet, les fascismes – non pas uniquement le fascisme italien – en tant que phénomènes politiques, doivent d’être étudiés et leurs résultats longuement médités. En 1977, Georges Gondinet et Daniel Cologne se prononcent sur cette épineuse question avec leur fascicule Pour en finir avec le fascisme. Essai de critique traditionaliste-révolutionnaire (1). L’objectif de ce roboratif essai au titre provocateur consiste tout d’abord à mettre dos à dos les deux « mythologisations » du fascisme : la première positive, émanant des milieux dit d’extrême droite; la seconde provenant des ennemis du fascisme, soit le libéralisme et le marxisme. Les auteurs se posent en « héritiers partiels et lucides ». Leur critique du phénomène fasciste s’inscrit donc dans une troisième voie où dominent l’influence de la Tradition Primordiale et le recul historique.

Les critiques du condominium libéralo-marxiste (les auteurs parlent de « critique externe ») n’ont guère évoluées en quarante ans et ne méritent pas que l’on s’y attarde. La « critique interne », c’est-à-dire celle de la Droite radicale, est quant à elle « surtout l’œuvre de nostalgiques, des gens qui ont vécu et apprécié cette époque, de sentimentaux attachés à l’image qu’ils se font de leur passé (p. 11) ». Maurice Bardèche et sa conception rêvée du fascisme n’est pas de leur goût, car selon eux elle ne « débouche pas sur une critique interne, sur une proposition politique nouvelle, sur un fascisme purifié (p. 12) ». Ceci n’enlève rien à l’une des facettes du phénomène fasciste, soit sa proportion à renouer vers un nouvel âge d’or, dans une tentative de restauration de nature héroïque, en plein âge du loup. « Le fascisme nous apparaît comme l’effort révolutionnaire pour retrouver, en plein cœur de la modernité décadente, un monde où la puissance sociale et la supériorité naturelle soit fondées sur des critères spirituels plutôt que matériels (p. 13). » Rebondissant sur deux critiques professées par les libéraux, celles de l’impérialisme et du racisme, Daniel Cologne et Georges Gondinet, en bons défenseurs de l’idée traditionnelle, affirment que « le monde traditionnel connut l’idée impériale et la race, nullement l’impérialisme et le racisme (p. 13) ».

Néanmoins le phénomène fascisme atteint sa limite malgré la tentative de restauration de type héroïque qu’il prétend incarner. En effet, son vitalisme est avant tout perçu comme une dégradation d’un élément autrefois supérieur : « son défaut fut de considérer l’héroïsme comme l’expression de la “ volonté de puissance ”, l’affirmation brutale de la vie, l’exaltation dionysiaque de l’être subintellectuel, le culte de l’action pour l’action, la libération des forces instinctives délivrées de tout interdit moral ou religieux et de toute préconception de l’esprit (p. 16) ». En clair, et les auteurs reprennent d’ailleurs volontiers le terme de Spengler, l’homme façonné par le fascisme est l’incarnation typique de l’« homme faustien ». L’influence de la philosophie typiquement naturaliste de Nietzsche n’échappe donc pas à la critique. « En prônant le naturalisme nietzschéen, le fascisme a voulu renouer avec la grande tradition de l’Europe. En cela, il se trompait. En effet, pour saisir l’essence de la tradition européenne, il faut avoir recours à la conception de la “ spiritualité primordiale ” (Evola) (p. 17). » Ainsi pour renouer avec un idéal à la fois européenne et traditionnelle, la nécessité de se tourner vers un type ascético-militaire comme ce fut le cas avec l’Ordre du Temple par exemple. À l’époque contemporaine et à l’instar de Julius Evola, Georges Gondinet et Daniel Cologne se tournent vers la Garde de Fer du Roumain Codreanu et la Phalange de l’Espagnol Primo de Rivera plutôt que vers le régime du Duce.

sintesi.jpgLa question du matérialisme biologique, c’est-à-dire de la race, figure parmi les sujets évoqués dans cet essai. En bon évoliens, les auteurs condamnent le racisme biologique national-socialiste et adoptent sans réelle surprise les positions de Julius Evola exprimées dans Synthèse de doctrine de la race (2). « La pureté de la race ainsi comprise résulte de l’équilibre entre les trois niveaux existentiels : l’esprit, l’âme, et le corps. Il n’y a pas de pureté raciale sans une totalité de l’être, un parfait accord entre ses traits somatiques, ses dispositions psychiques et ses tendances spirituelles (p. 24). » Les auteurs en arrivent à la conclusion que la race de l’esprit, qu’ils nomment « générisme » est « la condition sine qua non du dépassement du fascisme, du retour à un traditionalisme véritable, de l’effort vers une révolution authentique (p. 25) ».

Après avoir mentionné la distinction entre totalitarisme et « totalitisme », terme que l’on pourrait remplacer par les concepts de holisme ou d’« organicité », Daniel Cologne et Georges Gondinet s’attardent sur l’aspect socialiste du phénomène fasciste. Bien que « le socialisme est une des concessions du fascisme à la modernité (p. 38) », son principal intérêt réside dans la sublimation du prolétariat et de la bourgeoisie car « il débourgeoise le nationalisme en l’unissant au socialisme et déprolétarise le socialisme en lui adjoignant le nationalisme (p. 31) ». Ce dernier découle d’une vision du monde, il n’est pas une technique ou un moyen pour arriver à une fin; les auteurs citent Moeller van den Bruck pour appuyer leurs propos. « Le socialisme, c’est pour nous : l’enracinement, la hiérarchie, l’organisation (p. 32). » Enfin, d’un point de vue social, les auteurs, sans jamais utiliser le terme, insinuent l’idée de caste. « Dans le monde apollinien, la solidarité primordiale est ressentie au niveau de catégories éthiques supranationales, entre des classes d’hommes dont les critères transcendaient le plan naturaliste ou racial. […] Le paysan français attaché à sa terre est plus lié au paysan allemand ou italien partageant sa mystique du sol qu’à l’ouvrier embourgeoisé et déraciné de la banlieue parisienne (p. 34). »

En guise de conclusion à cet essai, Georges Gondinet et Daniel Cologne font un rappel salutaire quant à l’idée, mais surtout au fait, que « le fascisme n’a de sens que dans le contexte de la culture albo-européenne (p. 37) ». Ils rappellent aussi que le fascisme ne se résume pas simplement à une troisième voie politique; cela consisterait à réduire la portée du phénomène fasciste, chose qui « conduit à de graves erreurs (p. 37) ». Ces propos visent clairement certains au sein de la mouvance nationale-révolutionnaire, adeptes du « tiers-mondisme de droite », et qui encensaient à l’époque les divers mouvements de « libération nationale » franchement hostiles au monde blanc. À ce sujet, Philippe Baillet, ancien collaborateur de la revue Totalité où écrivaient aussi Gondinet et Cologne, a fait le tour de la question dans son livre L’Autre Tiers-mondisme. Des origines à l’islamisme radical (3). Enfin, les auteurs énumèrent les concepts-clé de la pensée traditionaliste-révolutionnaire : la volonté de valeur, l’idée impériale, le « générisme », l’État organique, le « totalisme ». « Tels sont les grands axes de la pensée traditionaliste-révolutionnaire permettant d’en finir avec le fascisme, ses erreurs passées et sa déformation présente (p. 40). »

Bien que cet essai fut écrit en 1977, certains propos n’ont pas vieilli, là où d’autres ne sont peut-être plus ou alors moins d’actualité. Nous pensons bien sûr aux attaques à peine dissimulées à l’encontre de la Nouvelle Droite qui à l’époque, et comparé à aujourd’hui, méritait bien son épithète de Droite. Daniel Cologne a toujours été critique envers le nietzschéisme. Nous ne pouvons pas le lui en vouloir. Remettons toutefois les choses à leur place. Comparé à l’involution de la philosophie et de l’éthique du monde moderne, comparé à la subversion galopante des sociétés humaines, notamment celle en cours au sein de la société occidentale, le recours à la philosophie éthique et vitaliste de Nietzsche est définitivement un pas en avant de nature anagogique, comparable au « cycle héroïque » d’Hésiode. Toutefois, il ne doit pas être une finalité, mais une étape vers l’idéal défendu par Georges Gondinet et Daniel Cologne dans ce cas de figure, et par celui de Julius Evola avant eux. La nature de la philosophie nietzschéenne est naturaliste, dionysiaque, c’est-à-dire qu’elle prend source dans l’immanence, alors que la Tradition ou plus exactement l’Âge d’Or, d’essence apollinienne, prend sa source dans la transcendance ou la « transcendance immanente » chère à Evola. Nieztsche a cependant le mérite de focaliser sa philosophie sur l’européanité (5) là où certains éveilleurs de la Tradition, Frithjof Schuon en tête, négligent totalement les voies « européennes » de la philosphia perennis

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Cet opuscule que l’on peut aisément comparer au Fascisme vu de Droite (4) synthétise en partie ce dernier. Cependant, sa nature est différente car la prise de distance toute évolienne du premier cède la place, dans le deuxième, à un volontarisme politique assumé. Court dans le format, direct dans le propos, sa place est naturellement entre les mains de militants. Il est également appréciable que les auteurs ne tombent jamais dans le battage de coulpe, chose qui aurait été surprenante.

« Messagère d’une nouvelle aurore (p. 14) », la Tradition et son incarnation politique, le traditionalisme-révolutionnaire, constitue l’étape d’après dans le perfectionnement d’un mouvement politique d’envergure européen. Le traditionalisme-révolutionnaire est d’autant plus d’actualité dans notre Europe de l’Ouest enlisée dans le laïcisme et le matérialisme. La critique de Daniel Cologne et Georges Gondinet ne plaira sans doute pas aux fascistes orthodoxes, tandis que les militants néo-fascistes, sur lesquels l’influence de Julius Evola est souvent prépondérante, devraient y être plus réceptifs. Certains traditionalistes, ceux qui se tiennent strictement à l’écart de tout engagement politique, ne doivent pas non plus bouder ce fascicule. Pour en finir avec le fascisme. Essai de critique traditionaliste-révolutionnaire mériterait d’être réédité, tout comme Éléments pour un nouveau nationalisme (6), opuscule doctrinal paru dans un format identique dont l’auteur est Daniel Cologne. Nous espérons que des éditeurs à contre-courant entendrons notre appel…

Thierry Durolle

Notes

1 : Georges Gondinet et Daniel Cologne, Pour en finir avec le fascisme. Essai de critique traditionaliste-révolutionnaire, Cercle Culture et Liberté, 1977.

2 : Julius Evola, Synthèse de doctrine de la race, Éditions de L’Homme Libre, 2002.

3 : Philippe Baillet, L’autre tiers-mondisme. Des origines à l’islamisme radical, Akribeia, 2016.

4 : Julius Evola, Le Fascisme vu de Droite, Pardès, 1981.

5 : Friedrich Nietzsche, « Regardons-nous en face. Nous sommes des Hyperboréens », dans L’Antéchrist, 1894.

6 : Daniel Cologne, Éléments pour un nouveau nationalisme, Cercle Culture et Liberté, 1977.

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samedi, 04 novembre 2017

Heurs et malheurs d’une utopie: la liberté d’expression

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Heurs et malheurs d’une utopie: la liberté d’expression

Dr Bernard Plouvier
Auteur, essayiste

Ex: https://metamag.fr

L’étude de la curieuse notion de liberté d’expression à travers les âges laisse perplexe. En dépit de milliers de livres consacrés à ce sujet, généralement dépourvus de réel intérêt pratique pour le lecteur, force est de reconnaître qu’elle n’a pratiquement jamais existé

Dans l’Antiquité égyptienne, mésopotamienne, juive, persane, chinoise ou grecque, le respect pour les institutions et les dieux est exigé sous peine de mort. Seul varie le mode d’exécution : lapidation, crucifixion ou, plus simplement, l’épée, avec des raffinements qui influent sur la durée du supplice. On n’envoie pas encore au bûcher ni ne pend : le bois et les cordes sont choses précieuses.

À Rome, une fois passées les luttes intestines du dernier siècle de la République romaine et du premier siècle de l’Empire, la liberté d’expression fut, pour la première fois dans l’histoire des civilisations, respectée aux IIe et IIIe siècles : « On peut penser ce que l’on veut et dire ce que l’on pense », écrit Tacite, contemporain de Trajan.

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Encore faut-il noter que sous César, sous Octave-Auguste ou sous Néron, l’on pouvait brocarder le maître sans encourir de foudres, mais, en cette époque de polythéisme bienveillant, Zeus-Jupiter lui-même était maudit des marins et des paysans en cas de mauvais temps.

terreurnazie.jpgCette mansuétude, rarement signalée par les historiens, permet d’évoquer une curiosité également « omise » par nombre d’auteurs. L’étude exhaustive des dossiers de la Gestapo rhénane (E. A. Johnson : La terreur nazie. La Gestapo, les Juifs et les Allemands ordinaires, Albin Michel, 2001) a démontré que, jusqu’au début de l’année 1943, la police de cette province prussienne très peuplée classait sans suite une majorité d’affaires d’injures au chef de l’État ou au parti : il fallait être récidiviste ou avoir occasionné un gros scandale pour être condamné quand on était un « allemand ordinaire » – ce qui , en l’occurrence, signifiait n’être ni juif, ni ancien militant des partis socialiste ou communiste… c’est encore un « fait maudit » de l’histoire, telle qu’elle est narrée.

Après l’époque des empereurs polythéistes ou panthéistes, le clergé chrétien, puis les dictateurs séculiers imposèrent leurs dogmes et rudement. En France, au dernier siècle de l’Ancien Régime, dire tant soit peu de mal du roi, de sa famille, de ses maîtresses, des ministres (du moins tant qu’ils étaient bien en cour), de la religion et des prélats et de deux ou trois babioles du même tabac, ne conduisait plus aux galères (c’est-à-dire au bagne), mais à La Bastille, au donjon de Vincennes ou au Fort l’Évêque.

Mais ce fut pire durant la Révolution où un mot de travers pouvait entraîner son auteur « à la lanterne » ou « au rasoir national ». Sous le Premier Empire, pas plus que sous la Restauration, la liberté d’expression n’eut droit de cité. Sous la monarchie de Juillet, se moquer du roi-bourgeois ouvrait droit à un hébergement aux frais de l’État, gracieux, mais un peu rude, et sous le Second Empire, être classé républicain procurait la même jouissance, à moins que l’individu ne s’offre le coût et les affres, ô combien romantiques, de l’exil.

Au total, pour le cas français, on peut considérer que la liberté d’expression a existé de 1871 à 1938 (avec une interruption de 1914 à 1918, pour cause de « bourrage de crânes »), puis de 1969 à 1972, millésime où recommencèrent les procès pour atteinte à la religion (à condition qu’elle fût exotique) ou à l’origine ethnique (même remarque). Et comme l’on n’arrête pas le progrès, depuis le 14 juillet 1990, on va en correctionnelle (17e Chambre de Paris), voire en prison, pour avoir osé contester des dogmes historiques parfois assez peu assurés..

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Bref, le palmarès français est peu reluisant, si l’on compare le score de notre cher « pays des Droits de l’homme » à celui des Imperatores romains, jugés impitoyables par de curieux auteurs. La liberté d’expression comme la Justice se laissent très aisément violer au nom de la « raison d’État ». Au moins, en temps de guerre civile ou étrangère, peut-on évoquer le Salut public pour expliquer, sinon excuser, les atteintes aux libertés. Il est d’autres causes absolument inexcusables : l’omnipotence d’un groupe d’influence (lobby, chez les anglo-us), la dictature des minorités, le fanatisme religieux.

Car, il a fallu attendre la décolonisation de l’Afrique et du Proche-Orient et le règne quasi-absolu du pétrodollar pour voir surgir de nouveau la théocratie musulmane, qui menace présentement l’Europe, comme elle l’avait fait du début du VIIIe au début du XVIIIe siècles. L’histoire des civilisations est chaotique : aux progrès succèdent des reculs considérables, pour peu que les Nations les plus avancées, mais aveulies et amollies, se laissent envahir par des sous évolués agressifs.

Que de riches humains, dépourvus d’idées générales, se moquent de la liberté d’expression pourvu qu’on leur octroie la pleine liberté de fabriquer et de vendre est chose fort ancienne. Il leur arrive même de trouver un (riche) philosophe pour étayer d’une belle rhétorique leurs revendications.

holbachsystnat.jpg« La liberté est celle de faire, pour son propre bonheur, tout ce qui ne nuit pas aux autres » (Paul-Henri d’Holbach, in Système de la nature, un puissant soporifique paru en 1770). Mais le bon apôtre exige de l’État qu’il protège entrepreneurs et négociants de « la populace imbécile, privée de lumières et de bon sens, qui peut à chaque instant devenir l’instrument et le complice des démagogues turbulents qui veulent troubler la société ».

C’est très exactement le fondement du discours des notables qui ont exploité, plus durement que sous l’Ancien Régime, les nations occidentales, de 1830 à la Grande Guerre (et même au-delà). Toute remise en cause de la domination de la trinité dorée des financiers, des entrepreneurs et des négociants est assimilée, par leurs complices du demi-monde de la politique et des media, à une subversion de l’État.

Tout affaissement du Pouvoir politique face au Pouvoir de l’argent est à la fois une catastrophe pour le menu peuple et pour les Nations, les ploutocrates étant cosmopolites du fait de leurs intérêts multinationaux, voire transcontinentaux. Cela est bien connu depuis le XVIIIe siècle.

Mais « l’anarchie pourrait bien être plus funeste aux pauvres qu’aux riches » (Numa Fustel de Coulanges, in Histoire des institutions politiques de l’ancienne France, de 1875-77). Seul un État puissant, dirigé par des hommes probes, peut maîtriser la voracité des grands prédateurs, procurer aux citoyens l’accès au travail, source de leur dignité, ainsi qu’un minimum de protection sociale, mais aussi calmer les élans menaçants des fous furieux, prêts à tout oser, à tout faire pour assurer le règne de leur divinité ou de la « réforme sociale ». On connaît la ritournelle : « Pas de liberté pour les ennemis de La Liberté » !

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Tout ne serait-il qu’une question de subtilité dans la rhétorique ? Non point ! C’est affaire de véritable démocratie, soit de tolérance (presque) universelle. Car n’importe qui, même la pire andouille – par exemple un dinosaure communiste ou une féministe enragée – a le droit de dire ce qu’il (ou qu’elle) croit juste, pas obligatoirement ce qu’il (ou elle) « pense », parce que bien des gens parlent plus vite que leurs capacités cognitives ne fonctionnent.

Au total, tout est bon à être dit, sauf la pornographie et la calomnie qui, seules, relèvent de la censure. La liberté d’expression ne doit avoir de limites que dans ces deux registres.

Heureux les libres citoyens des États-Unis d’Amérique du Nord où cette liberté fondamentale est garantie par le Premier Amendement à la Constitution. Pour une fois qu’il y a quelque chose de bon à piquer aux USA, l’électorat français s’en moque ! Il semble préférer les hamburgers, le Coca et Halloween.

vendredi, 03 novembre 2017

Le pari multiculturaliste...

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Le pari multiculturaliste...

par Eric Werner

Ex: http://metapoinfos.hautetfort.com

Nous reproduisons ci-dessous un point de vue d'Eric Werner, cueilli dans le n°100 d'Antipresse, lettre d'information de Slobodan Despot, dont une nouvelle formule sera disponible la semaine prochaine.

Auteur d'un essai essentiel, L'avant-guerre civile (L'Age d'Homme, 1998 puis Xénia, 2015), Eric Werner vient de publier dernièrement Un air de guerre (Xénia, 2017).

Le pari multiculturaliste

Pour prévenir le chaos inévitablement liée à l’imposition contrainte et forcée du multiculturalisme, il n’y a pas d’autre moyen que le recours à l’Etat total.

Certains disent que l’Union européenne est en train de partir en petits morceaux. C’est sans doute exagéré. En revanche, ce qu’on constate, c’est qu’un vrai fossé est en train de se creuser entre l’Est et l’Ouest du continent, avec d’un côté les pays favorables au multiculturalisme et de l’autre ceux qui lui sont hostiles. La ligne de partage recoupe plus ou moins l’ancien rideau de fer, mais plus ou moins seulement. Les positions autrichiennes en la matière sont, par exemple, plus proches des positions hongroises, tchèques ou polonaises que des positions allemandes, suisses, ou françaises.

En outre, le débat sur le multiculturalisme est transversal. La société allemande est, par exemple, très divisée sur la question. Tout comme la société française, suisse, etc. Sauf que, dans ces derniers pays, les adeptes du multiculturalisme sont aujourd’hui solidement installés au pouvoir. On voit mal, à l’heure actuelle, ce qui pourrait les en déloger. Seul un événement géopolitique, peut-être. Et encore. En ce sens, la division actuelle de l’Europe en deux blocs antagonistes, l’un favorable, l’autre hostile au multiculturalisme, apparaît durablement installée.

L’hostilité au multiculturalisme se nourrit de plusieurs critiques, mais la plus importante, sans doute, est celle que résume la référence à la guerre civile. Le premier ministre hongrois insiste ainsi sur le lien, qu’il estime «évident», entre l’immigration de masse et le terrorisme (1). L’insécurité au quotidien est volontiers aussi mise en avant. Dans certains pays, elle a atteint un niveau tel que les gens sont amenés à éviter certains quartiers ou à ne pas prendre le train ou le métro à certaines heures de la journée. D’autres encore déménagent (2). Les populations de même origine tendent ainsi à se regrouper en certains points du territoire pour constituer des «blocs socioculturels» (3). Le multiculturalisme trouve ici sa limite.

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Plus fondamentalement encore, on invoque les leçons de l’histoire. Les sociétés multiculturelles, dit-on, portent en elles les germes de leur propre désintégration. Autrement dit, elles ne sont pas viables. Car, pour qu’une société soit viable, il faut que les citoyens aient un minimum de choses en partage (ethnie, religion, langue, livres, un passé commun, etc.). Pas forcément toutes, mais quelques-unes quand même. Autrement elle éclate, avec à la clé des troubles pouvant, effectivement, conduire à la guerre civile. Le pays alors disparaît, ou s’il se maintient, ne parvient à le faire qu’au prix d’une recomposition démographique. Concrètement, les minorités sont expulsées ou exterminées.

On ne reprochera pas aux adeptes du multiculturalisme d’ignorer ces risques ni même de les sous-estimer. En règle générale ils en sont conscients. Mais ils ne les croient pas rédhibitoires. C’est sur ce point qu’ils se séparent de leurs antagonistes. Leur raisonnement, en gros, est le suivant: Il y a, certes, disent-ils, des risques, risques, le cas échéant, pouvant même s’avérer mortels. Nous ne les contestons pas. En même temps, nous pensons être en mesure de les surmonter. Les surmonter comment? Par un ensemble de mesures volontaristes visant notamment au renforcement du contrôle social.

Pour répéter ce qui précède sous une autre forme encore, on pourrait dire que pour pallier la menace du chaos liée aux progrès du multiculturalisme, on s’emploie à favoriser l’émergence d’un Etat total. Comment faire en sorte que le multiculturalisme ne débouche pas dans la guerre civile? En construisant l’Etat total. C’est ce qu’on pourrait appeler le pari multiculturaliste

Le pari multiculturaliste consiste à dire: nous ne reviendrons jamais en arrière, tenez-vous le pour dit. Nous avons fait un certain choix, nous irons jusqu’au bout de ce choix. Nous étoufferons dans l’œuf toute velléité de remise en cause de l’option multiculturaliste. Mais en même temps, nous ne voulons pas le chaos. A cette fin, nous construisons l’Etat total.

Ce n’est jamais dit explicitement. Mais très certainement c’est ce qui est pensé. Car cela correspond à ce qui se fait concrètement. On pense en particulier aux lois antiterroristes. Mais pas seulement. Le «tout-numérique» pousse également dans cette direction (4). Comme aussi l’atomisation sociale en général (5).

Tel est le pari multiculturaliste. Les adeptes du multiculturalisme jugent ce pari gagnable. Il est peut-être gagnable. Mais à quel prix? Peut-être aussi sera-t-il perdu. Car l’Etat total lui-même ne garantit pas nécessairement la non-guerre civile. On aura alors les deux choses: et l’Etat total, et la guerre civile.

Eric Werner (Antipresse n°100, 29 octobre 2017)

Notes
  1. Le Monde, 23 juillet 2016, p. 3.
  2. Le Figaro, 25 octobre 2017, p. 12.
  3. J’emprunte cette expression à Christophe Guilluy (La France périphérique: Comment on a sacrifié les classes populaires, Flammarion, 2014, p. 134).
  4. Cf. François de Bernard, L’Homme post-numérique: Face à la société de surveillance générale, Yves Michel, 2016.
  5. Les analyses de Hannah Arendt conservent à cet égard leur pleine validité.

jeudi, 02 novembre 2017

Liberalismus vs. Konservativismus – Sozialismus

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Liberalismus vs. Konservativismus – Sozialismus

Ex: http://www.unwiderstehlich.org

Das 18. Jahrhundert ist das Zeitalter der „Aufklärung“. Aus der Gesamtheit der menschlichen Kräfte löst sich die Vernunft heraus und sucht ungebunden durch religiöse Glaubenssätze und staatlich-gesellschaftliche Überlieferungsmächte die Welt zu durchdringen und ihre „eigentlichen“ Gesetze zu erkennen. Überall waren Vorurteile zu beseitigen, jahrhundertelange Irrtümer und Dunkelheiten schienen sich aufzuhellen, in allen Ländern, in Holland wie in England, in Frankreich und in Deutschland regten sich kampflustig die Geister, um die religiösen und geistigen, schließlich auch die gesellschaftlichen und politischen Formen zu zerbrechen oder jedenfalls zu wandeln und den Erkenntnissen der „Vernunft“ anzupassen.

Einer der Begriffe, mit dem eine starke Richtung des 18. Jahrhunderts aufräumen zu müssen glaubte, war der des Staates. Man empfand den Staat als Hemmung der persönlichen Freiheit und als eine betrübliche Minderung des ursprünglichen Glücks, dessen sich der Mensch im Naturzustand erfreut.

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Der Mensch werde frei geboren, jetzt sei er aber überall in Banden, so ließ sich Rousseau (1712 – 1778) vernehmen; das komme daher, dass der Staat seine Rechte überschritten habe; der Staat beruhe auf einem Vertrag der Menschen untereinander und habe nur dann Sinn, wenn er die Freiheit des einzelnen, sein menschliches Recht und Glück sichere. Hier fehlt jeder Sinn für die großen geschichtlichen Mächte, für die schöpferische Kraft der Gemeinschaft, für Hingabe und Opfer über das persönliche Sein hinaus; aber man darf nicht vergessen, welchen Staat die Aufklärer vor sich haben: den Absolutistischen!

Der absolutistische Staat ist ohne von Gott geschöpftes Recht nicht denkbar. Der westeuropäische und schließlich der deutsche Materialismus, als ein Ergebnis der Aufklärung, ist trotz zeitbedingter Einseitigkeit eine geschichtlich notwendige, revolutionäre Bewegung gegen das geistige Mittelalter. Der orientalische Jahveismus hat sich in Verbindung mit der platonischen Ideenlehre als spiritualistische Metaphysik über Europa gelagert, die geisteswissenschaftliche Forschung dogmatisch begrenzt und die wahre Naturforschung behindert. Fast 1500 Jahre lang wurde die vom heidnischen Griechentum eingeleitete wissenschaftliche Erforschung und Beobachtung der realen Wirklichkeit unterbrochen.

Der Liberalismus als Frucht dieses Materialismus entartete jedoch wegen seiner Einseitigkeit sehr rasch und mutierte zu einer asozialen und staatsverneinenden Idee.

„Der Liberalismus behauptet, dass er alles, was er tut, für das Volk tut. Aber gerade er schaltet das Volk aus und setzt ein Ich an die Stelle. Der Liberalismus ist der Ausdruck einer Gesellschaft, die nicht mehr Gemeinschaft ist. […] Es liegt im Triebe eines jeden, dass er Individuum sein möchte, auch wenn er keines ist. Jeder Mensch, der sich nicht mehr in der Gemeinschaft fühlt, ist irgendwie liberaler Mensch. Seine Allzumenschlichkeiten sind liberal. Und die Selbstliebe ist sein eigenster Bereich.“ (Arthur Moeller van den Bruck: „Das dritte Reich“; Ring-Verlag, Berlin 1926; S. 117 ff.)

Der scharfdenkende Analyst Francis Parker Yockey gelangt in seinem Opus Magnum „Chaos oder Imperium“ zu einem vernichtenden Urteil:

„Der Liberalismus kann nur negativ definiert werden. Er ist ausschließlich Kritik, keine lebende Idee. Ein großes Schlagwort ‘Freiheit’ ist ein Negativum. Es bedeutet in Wirklichkeit Freiheit von Autorität, d.h. Auflösung des Organismus. In seinen letzten Stadien erzeugt er sozialen Atomismus, mit dem nicht nur die Autorität des Staates, sondern auch die der Gesellschaft und der Familie bekämpft wird. Die Scheidung ist der Ehe gleichrangig, die Kinder den Eltern. Seine Haltung war immer widersprüchlich, er suchte immer einen Kompromiss. Aber bei einer Krise war der Liberalismus als solcher nie vertreten; seine Anhänger schlugen sich auf die eine oder die andere Seite eines revolutionären Kampfes, je nachdem wie konsequent ihr Liberalismus und wie stark seine feindselige Einstellung zur Autorität war.“ (Francis Parker Yockey: „Chaos oder Imperium“; Grabert Verlag, Tübingen 1976; S. 120 f.)

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Im 19. Jahrhundert führte das Aufbäumen gegen den mittelalterlichen Obrigkeitsstaat im Politischen, vom Liberalismus zum marxistischen Sozialismus, andererseits zur Gegenreaktion des Konservativismus.

Werner Sombart schreibt dazu:

„Es gehört zu den Erbschaften, die der Liberalismus in Deutschland dem Jahre 1848 verdankt, dass eine seiner hervorstechenden Charaktereigentümlichkeiten eine seltsame Furcht vor dem roten Gespenst ist. Freilich hat das Proletariat ihm selbst durch sein Verhalten dazu verholfen. Es ist bekannt, wie die bürgerliche Bewegung des Jahres 1848 in Deutschland zusammengeklappt wie ein Taschenmesser sich unter die preußischen Bajonette flüchtet in dem Augenblicke, als die „gens mal intentionés“, die bekannte, in jeder bürgerlichen Revolution vorhandene demokratische Unterströmung – siehe 1789 ff.! – sich bemerkbar zu machen beginnen. Da war es vorbei mit dem Bürgerstolz und dem Bürgertrotz; und es ist immer wieder damit vorbei gewesen, sobald auch nur von Ferne das Gespenst der sozialen Revolution am Horizonte auftauchte: siehe Sozialistengesetz! So war die Brücke zwischen der proletarischen Bewegung und der bürgerlichen Opposition frühzeitig schon geborsten, um bald ganz abgebrochen zu werden.“ (Werner Sombart: „Sozialismus und soziale Bewegung im neunzehnten Jahrhundert“; Verlag von Gustav Hischer in Jena, 1897; S. 37.)

Der Konservativismus ist immer auf die eine oder andere Art und Weise der Versuch das Rad der Geschichte zurückzudrehen. Er ist zutiefst reaktionär! Mag er sich auch in verschiedenster Form verkleiden, uneingestanden ist allen Konservativen das Ressentiment gegen die Aufklärung gemein. Anstatt mutig in die Geschichte voranzuschreiten und die immer neuen Problemstellungen zu bewältigen, herrscht die Sehnsucht nach „der guten alten Zeit“ vor, die in Wahrheit bedeutet in das geistige Mittelalter zurückzukehren. Zu christlicher Dogmatik, zu Scholastik, zu Spiritualismus und Wissenschaftsfeindlichkeit. Da sich das Rad der Zeit aber nicht zurückdrehen lässt und sich der Geist der Zeit, im Unterschied zum Zeitgeist, nicht aufhalten lässt, gehört die Zukunft dem Sozialismus. Einem Sozialismus der eine gerechte Gemeinschaftsordnung bedeutet.

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Selbst für einen so freien und genialen Geist wie Goethe war die unabdingbare Rückkoppelung des Einzelnen an die Gemeinschaft über jeden Zweifel erhaben.

„Im Grunde aber sind wir alle kollektive Wesen, wir mögen uns stellen, wie wir wollen. Denn wie weniges haben und sind wir, das wir im reinsten Sinne unser Eigentum nennen! Wir müssen alle empfangen und lernen, sowohl von denen, die vor uns waren, als von denen, die mit uns sind. Selbst das größte Genie würde nicht weit kommen, wenn es alles seinem eigenen Innern verdanken wollte. Das begreifen aber viele sehr gute Menschen nicht und tappen mit ihren Träumen von Originalität ein halbes Leben im Dunkeln. […] Und was ist denn überhaupt Gutes an uns, wenn es nicht die Kraft und Neigung ist, die Mittel der äußeren Welt an uns heranzuziehen und unseren höheren Zwecken dienstbar zu machen. Ich darf wohl von mir selber reden und bescheiden sagen, wie ich fühle. Es ist wahr, ich habe in meinem langen Leben mancherlei getan und zustande gebracht, dessen ich mich allenfalls rühmen könnte. Was hatte ich aber, wenn wir ehrlich sein wollen, das eigentlich mein war, als die Fähigkeit und Neigung, zu sehen und zu hören, zu unterscheiden und zu wählen, und das Gesehene und Gehörte mit einigem Geist zu beleben und mit einiger Geschicklichkeit wiederzugeben. Ich verdanke meine Werke keineswegs meiner eigenen Weisheit allein, sondern Tausenden von Dingen und Personen außer mir, die mir dazu das Material boten.“ (Johann Peter Eckermann: „Gespräche mit Goethe“; Berlin o. J.; Eintrag vom 17.2.1832, S. 520 ff.)

Der Sozialismus als Gemeinschaftsordnung setzt voraus, dass es einen Bewertungsmaßstab gibt, der die verschiedenen Rangstufen innerhalb der Ordnung festsetzt. Dieser Maßstab ist im Nationalstaat die Leistung des Einzelnen für sein Volk. Sozialismus hat also nichts mit Gleichmacherei zu tun. Sozialismus ist ein Gemeinschaftszustand, eine Gesellschaftsordnung, zu der alle Angehörigen des Volkes zählen. Es ist unmöglich Sozialismus in rein äußeren Staats- und Wirtschaftsformen erschöpfen zu wollen. Sozialismus setzt die Gemeinschaft eines Volkes voraus und diese wiederrum gleiche Vernunft, Einsicht und Haltung.

Der Sozialismus ist also im Wesentlichen keine wirtschaftliche Angelegenheit, sondern im Grunde allumfassende Gemeinschaftsgesinnung und Gemeinschaftstat aller Glieder eines Volkes.

lundi, 04 septembre 2017

Le despotisme éclairé et ses avatars modernes

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Le despotisme éclairé et ses avatars modernes

Bernard Plouvier,

auteur, essayiste

Ex: https://metamag.fr

« Quant à moi, j’aime l’État plus que mon âme », Niccolo Machiavel

Qu’est-ce qui différencie le populisme du despotisme éclairé ? Le but ! Ce n’est pas le bien de la Nation qui est la cible visée par ce dernier système politique, mais la puissance et la grandeur de l’État. Machiavel, théoricien de ce type de gouvernement, pose en principe que le bon « Prince » dirige avec douceur quand il le peut, avec ruse le plus souvent, avec brutalité au besoin, mais toujours avec le souci de l’efficacité.

Les despotes éclairés sont les dévots de la raison d’État, réagissant en idéalistes pragmatiques, qui estiment que la fin justifie et ennoblit les moyens. Tout ce qui est profitable ou simplement utile à l’État devient, ipso facto, licite. Le succès fait disparaître jusqu’au souvenir des crimes qui ont paru nécessaires à l’obtention du résultat. Est beau, juste et noble ce qui a réussi. C’est un peu trop vite confondre l’État et le Bien commun. L’État n’est jamais qu’un moyen… il n’y a pas que les adeptes du despotisme éclairé qui oublient cette notion. C’est, en principe, le bien de la Nation qu’un bon gouvernement doit rechercher : c’est la définition du populisme !

Les despotes éclairés du XVIIIe siècle – Frédéric II de Prusse, Joseph II, antépénultième empereur romain de langue germanique, Pierre le Grand au début du siècle et Catherine II de Russie à la fin, Gustave III de Suède, le marquis de Pombal au Portugal ou Robert Turgot – réalisèrent des expériences politiques fort rationnelles, où un monarque héréditaire (ou un grand ministre agissant en son nom) luttait contre les féodalités nobiliaires, judiciaires et cléricales, en s’appuyant sur la fraction la plus dynamique du peuple aux plans économique et intellectuel, dans le but de moderniser l’État et d’en accroître la puissance et le prestige, voire l’étendue.

L’expression « despote éclairé » n’est pas « une création d’un historien allemand du XIXe siècle », comme l’a écrit un docte universitaire : sa sottise fut immédiatement reprise par ses confrères historiens. En réalité, on la trouve, dès 1758, sous la plume de l’ami de Diderot, Melchior von Grimm, dans sa Correspondance littéraire. On peut en faire remonter la préhistoire au cardinal de Richelieu, même si les historiens, recopiant les Mémoires de Frédéric II, en bornent l’ancienneté au règne personnel de Louis XIV, aidé de grands ministres (Colbert, Louvois et Vauban sont les plus connus) et de quelques littérateurs (‘’Molière’’, Boileau, Racine ou La Fontaine), utiles à la gloire de son règne.

Dans ce système, le monarque (ou son substitut) s’appuie sur des hommes de talent qui ont réussi dans les affaires (manufacturiers, négociants et armateurs, grands administrateurs) ou qui sont des penseurs originaux (les physiocrates français, ou la trinité enluminée : Montesquieu, ‘’Voltaire’’ et Diderot ; ailleurs : les idées de Thomas Hobbes ou les écrits et la personne de Julien Onfroy de La Mettrie). Ces hommes sont moins des conseillers que des incitateurs, remerciés avec plus ou moins de chaleur une fois que le maître a remporté ses premiers succès, dont il ne veut partager la gloire avec personne.

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Affirmer que le despote éclairé s’appuie sur la bourgeoisie pour contrer la noblesse et le haut-clergé, c’est faire preuve d’une grande simplicité et d’un défaut de documentation : tous les monarques médiévaux ont utilisé ce moyen pour asseoir leur pouvoir personnel et s’opposer aux grands prédateurs féodaux.

Certains appuis des monarques « éclairés » proviennent de milieu pauvre, de la caste nobiliaire ou du vivier clérical. Denis Diderot est issu du monde de l’artisanat peu aisé, ce qui ne l’empêche pas de conseiller Catherine II ; l’abbé Ferdinando Galiani et de nombreux aristocrates jouent un rôle de premier plan en Suède, en Autriche-Hongrie et surtout en Prusse et en Russie.

Seuls les corps constitués (assemblées du clergé, cour des pairs et parlements) sont repoussés par les monarques réformateurs qui veulent substituer au système des castes privilégiées le service de l’État, comme cela existe, depuis le XVe siècle, à Florence. Une bureaucratie zélée remplace les hiérarques traditionnels, avantageusement et à meilleur coût. Partout, le mot d’ordre est de laïciser, de moderniser, d’améliorer dans toutes les activités : de l’agriculture au commerce et aux manufactures, aussi bien qu’en matière de justice, d’enseignement, d’hygiène publique et d’art militaire ou de navigation. On casse les féodalités et l’on accroît les rentrées fiscales. Quand c’est possible, on étend le territoire.

Le despotisme éclairé, c’est le culte de l’État, fort, centralisé, uniformisé, ce qui fâche les membres des minorités ethniques qui veulent à toute force « cultiver leur différence », et de l’État moderne appliquant les innovations techniques et ne repoussant pas les idées originales, ce qui irrite les réactionnaires.

Le budget est maintenu en équilibre et la balance commerciale idéalement excédentaire, du moins en période de paix : c’est un héritage de Colbert. C’est ce qu’Antonio de Oliveira Salazar, à mi-chemin du populisme et du despotisme éclairé au XXe siècle, appelait « une politique nationale de vérité » : on règle ses dépenses sur ses recettes et l’on gère l’État comme le bon père de famille le fait (en principe) de son ménage.

Le menu peuple est protégé des fantaisies des nobles et du clergé ; il devient leur égal face à la Justice. En revanche, il doit travailler, obéir aux lois et fournir toujours plus de soldats et de marins, sans grogner et, si possible, avec enthousiasme. La promotion sociale des sujets de haute valeur est assurée : ce type de gouvernement modère les conséquences de la stratification en castes (liées à la naissance) et en classes (liées au niveau de fortune). De ce fait, il instaure un certain degré de méritocratie, du moins pour ceux qui se plient en tous points au monarque, qui, pour se vouloir éclairé par les lumières de la raison, n’en reste pas moins un despote ombrageux.

À la suite de Frédéric II, on a voulu définir ce régime par une phrase lapidaire autant que cynique : « Tout pour le peuple. Rien par le peuple » . En réalité, la formulation exacte serait : « Tout pour l’État », le monarque en étant le premier serviteur. Hegel l’a fort bien compris et en a formulé la théorie, vers 1820. Dans le despotisme éclairé, le souverain veut améliorer les conditions de vie de la majorité de ses sujets (idéalement, celle de tous), mais il ne demande nullement l’avis du peuple. Tout au plus, les élites sont-elles consultées de loin en loin, lorsque le monarque le décide.

L’armée n’intervient que pour défendre les frontières ou agrandir le territoire national : le despotisme éclairé n’a rien d’une dictature militaire. Même en Prusse, il existe beaucoup plus de fonctionnaires civils que d’officiers.

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Dans tous les cas, le despote éclairé ne sort pas du cadre de l’autocratie, de la monarchie absolue. De ce fait, les réformes sont abolies dès qu’au despote succède un monarque faible ou traditionaliste, trop facilement ému par les jérémiades ou les menaces des grands féodaux et du haut-clergé. Le système ne persiste qu’en Prusse où, un demi-siècle après le Grand Frédéric, Bismarck puis Guillaume II transcendent son œuvre, en y adjoignant une protection sociale, bien avant l’action des réformistes du XXe siècle.

Le despotisme éclairé est le système qui définit le moins mal le régime franquiste en Espagne qui ne fut pas une dictature populiste, ainsi que les expériences de divers Caudillos latino-américains durant le XIXe siècle : Simon Bolivar dans la fugace Grande-Colombie, Gabriel Moreno en Équateur, José Rodriguez de Francia au Paraguay, ou, au Mexique, le moderniste Porfirio Diaz, renversé par le  richissime socialiste, vaniteux et entouré d’affairistes, Francisco Madero, associé puis ennemi de l’Indien raciste et sanguinaire Emiliano Zapata, qui rêvait d’en revenir au mode de vie paléolithique des chasseurs-cueilleurs, ou encore la tentative du dernier Shah d’Iran, Mohamed Reza, de moderniser son État et sa Nation, en dépit d’un fanatisme religieux omniprésent et qui réussit à balayer son régime.

Les dictateurs « fous de dieu », qui furent si nombreux de la Renaissance du Quattrocento (Jérôme Savonarole) et de l’époque moderne (Oliver Cromwell) jusqu’à nos jours (les chefs d’État de l’islam djihadiste), sont généralement opposés aux riches (de nos jours : les grands capitalistes, les maîtres des multinationales) et aux rhéteurs ineptes des parlements, mais ce sont avant tout des théocrates hallucinés, des fanatiques, nullement des populistes, encore moins des individus éclairés par la raison. S’il leur arrive, inconstamment, d’entreprendre des réformes pour améliorer le sort de leur Nation, ce n’est nullement leur but premier : le triomphe de leur conception de la divinité est l’unique préoccupation de ces fous furieux.


Les sanglantes dictatures marxistes furent très exactement calquées sur ce fanatisme d’essence religieuse. L’athéisme ne fait rien à l’affaire : les sanguinaires disciples de Marx et d’Engels, qui avaient tous leur herméneutique très personnelle des textes sacrés de l’utopie communiste, voulaient imposer le bonheur sur Terre aux élus, issus d’un prolétariat de fantaisie. L’absurde berquinade dégénéra en génocides, en dantesques règlements de comptes avec les « ennemis de classes » et les « déviationnistes ». L’Inquisition catholique, même celle du marrane Thomas de Torquemada, ne fut qu’amusette comparée aux ignominies des polices politiques de chaque « paradis des travailleurs ».

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À l’opposé, les « révolutionnaires-conservateurs » européens, au XXe siècle, ne furent que des réactionnaires, issus de milieux fortunés et/ou cultivés, haïssant la plèbe et reprochant au IIIe Reich sa politique de fusion des castes et des classes sociales : Oswald Spengler, Ernst Jünger, Ernst von Salomon, Julius Evola n’en finissent pas d’agonir « l’aspect prolétarien et même vulgaire du national-socialisme ». Ce sont des nostalgiques du despotisme éclairé, mais nullement des héritiers de la centralisation jacobine de 1792-94 : le jacobinisme fut, avant tout, la mise en tutelle de l’Éxécutif par le Législatif.

Le mot d’ordre de ces esthètes a été donné en 1934 par l’un des précieux ridicules de la vie littéraire française, Abel Bonnard : « Une nation peut se sauver sans le secours d’un grand homme, elle ne le peut sans l’existence d’une élite ». C’est une phrase entièrement démentie par l’histoire des civilisations : tout système stable voit fleurir une élite d’administrateurs et de cadres, de scientifiques et de techniciens… quant à savoir si les purs intellectuels sont utiles à la Nation et à l’État, c’est une question qui risque de tourner à l’aporie.

Au XXe siècle, en Ibérie et en Amérique latine, les néo-despotes militaires se sont limités à réprimer l’agit-prop communiste, de façon d’ailleurs bien moins brutale que n’auraient agi les marxistes s’ils étaient parvenus au Pouvoir. L’opinion publique, désinformée par des clowns fort malhonnêtes, en a fait des monstres, alors qu’ils sont parvenus à éviter à leurs peuples la barbarie marxiste.

D’une manière générale, les nombreuses dictatures antimarxistes du XXe siècle, dites contre-révolutionnaires, comme celle des colonels grecs durant les années 1970 ou celle des généraux et amiraux chiliens ayant mis fin au règne chaotique de Salvator Allende, elles n’eurent rien de « populiste », étant l’expression de l’omnipotence du capitalisme cosmopolite, soutenu par la puissance de l’US-Army et de la ribambelle des services secrets des USA.

mardi, 04 juillet 2017

Sub-National & Trans-National Identity as a Response to the Loss of Nation-Statehood

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Sub-National & Trans-National Identity as a Response to the Loss of Nation-Statehood

For the most part, Western nations are over. There will only be the diaspora, or there will be nothing at all. We are faced with the choice of being absorbed into a materialistic, multicultural mess, or becoming who we are, that is to say, exiles of a defunct world.

The Fifth Political Theory (5PT [2]) believes we should work towards becoming a diasporic tribe rather than focusing on state-level nationalism(s). In other words, we can only “save” European and Eurocolonial peoples who want to be saved by bringing them into a networked tribal community, not converting the de-nationalized masses to an increasingly occult worldview of ethnocentrism, race realism, gender norms, nativism, reactionary politics, etc. I say this not as an evil racist or fascist, but as someone who cares about the continuity of my people, who cannot exist if they are transformed from their roots into something completely foreign. While a certain amount of change and flexibility is endurable, and even in some cases desirable, total replacement is not. And because the national subdivisions of Western civilization are moribund and unable to assert their own existence, we must return to the primordial levels of human social organization if we are to keep the totality of our heritage alive while innovating for an interconnected future.

5PT means fully embracing de-nationalization [3] and working the terms of that situation to our advantage within the post-modern, globalized world. As always, we cannot reverse the flows but only ride them out. Western peoples are going to become a diaspora, even in the West itself. Our response must be to engineer a tribe to face the problem of anomic, atomized life in our society and the failure of political nationalist movements to preserve European and Eurocolonial heritage against the decline in all its forms. We achieve this not by standing athwart history yelling stop, but by grasping the flow of history and letting it pull us as we adjust to the changes of post-modernity.

Put less esoterically, the breakdown of national borders and of national sentiment among Western peoples is not the end of Western peoples but of the nation-state as the organizational unit where our affinities stop. This collapse, rather than leading to seamless superstate blocs as predicted, has created immense identity-driven angst and convulsion as every matter of local folk resists the sprawling explosion of the soulless, materially-driven cosmopolis. These identitarian outbursts are telling us something about the fringes of Western political life. People who care about more than material growth or achieving progressive utopia are speaking up louder than ever. Yet, they often do so out of a passionate bond to dilapidated, outdated, and doomed forms of modern social organization—most problematically they do so as a minority. The ethnos squirms but the demos, which has voted for de-nationalization, retains a firm grip around its neck.

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The demos are ultimately following the lead of the cosmopolis. Its paradigms demand that all “citizens of the world” are eligible to live there, whether there is work or not, whether they are assimilable or not. What matters is the ability to be an economic cog, not national integrity. So if anyone can politically belong to any “nation” and claim it as their identity simply by moving there and demanding accommodation, what is to stop the people who resist their grand remplacement [4]from being bound into one identity, which like the one opposing it crosses all borders and subverts all national sentiments? Just as we see a current of decline, we must also look for that counter-current.

Communication technologies and our ability to correspond with one another in real-time—about the social, political, cultural, economic, moral, and spiritual challenges we face as members of the European and Eurocolonial family—draw us closer together than ever before. This happens without regard for borders and makes the decline of the nation-state all the more salient. We become less American or Norwegian or German, and more composite, more Western. Our tribe is already being created from this diaspora of of like-minded Westerners, out of our pre-existing similarities and affinities which technology has seen fit to amplify, even as our nations are being dissolved.

In the long-term, 5PT seeks to make this identity formation more geographically concentrated and clustered, while maintaining its sense of global connectivity and fraternity. We want to reach a point where we can talk concretely about the size, dispersion, and economic niche of the Western diaspora in any given country. The diaspora model thus posits the adoption of sub-national and trans-national identity as a response to the death of national identity and as an extension of the identity formation processes granted to us by post-modern technology.

By sub-national we mean that the Western diaspora will exist in any state where we intentionally form generational communities and tribal networks. Thus there will be a Western diaspora in countries in North America, Europe, and British Oceania, and perhaps further in Latin America and South Africa. There will be American Westerners, French Westerners, Australian Westerners, and so forth. These will have their own local concerns and idiosyncrasies and practices, as they must. At the same time, they will not become those local traits. The Western diaspora of France is not synonymous with “French people.” French people vote for their extinction while the Western diaspora will elect to perpetuate itself.

By trans-national we mean that the Western diaspora will not be walled off into geopolitical cells. Our congregations will be in communion with one another, and our tribal networks will be borderless. Our concerns will be mutual. Since we are all living in foreign countries so to speak, we will naturally have more affinity for one another as members of the same tribe than we do with our out-group neighbors. To be trans-national is to belong to a community not limited by territory. So the Western diaspora will exist in multiple countries, but not be of those countries. I am a Westerner if I am in Chile or in Britain, though I may have come from the Western congregation in Chile to the one in Britain. Our shared culture and values will be deeper than that we have with other peoples living in Chile or Britain.

Members of a foreign minority form their own distinct people regardless of where they dwell, so long as their ties to their own kind remain stronger than their ties to those who are foreign to them. That is the power of the diasporic model, that congregations of Westerners can exist anywhere enough former European or Eurocolonial nation-states are found, and retain their sense of cohesion. They are in, but not of.

In many ways, it is a return to the ways of the Old World and its scatterings of people across pre-modern states both large and small, such as the Jews, Armenians, Greeks, and Germans of Europe and the Middle East. This rather differs from the modern, national impulse of gathering of all X into the state of X-land, or converging all people of X-land into the identity of X. And it of course challenges the contemporary impulse of denying that X exists in the first place while claiming that X-land belongs to the world. Rather, we observe that the borders and demographics have fallen where they are, and that X can be found irrespective of where X is “supposed to be” or originally from. We are interested in the ur-identity of the tribe, not in the ancestral urheimat. This detachment will become our strength.

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This is an entirely different way of thinking about ourselves and our place in the world than Westerners are accustomed to. Even the descriptive terms I have preferred to use in place of “white people” so preferred by nationalists—Europeans and Eurocolonials—reflect that older (but not primordially older) conception of geography-plus-nationality. What we are approaching now is the possibility of nationality-sans-geography. The European stock and its extra-continental stocks overseas are part of the same people. Even if all other ethnocentric and civilizational rationalizations for this could be deconstructed it would still be so that they are one people, if only because a coalition of Others have declared them so. Rome and her allies became Rome just as Carthage and her allies became Carthage.

The external pressures upon the Western diaspora will facilitate this, since those who are most ethnocentric and culturally traditionalist will react by doubling down and passing those memes and genes on, while those who are the least will leave the diaspora and fold into the identity of the state they live in and the people they dwell among. The sub-national, trans-national character of the Western diaspora will intensify as time progresses.

This is not necessarily a happy situation. But the worst that can be said about the diaspora model is that people do not want it to happen, not that it can’t work. Reaching back into history for the super-structure we called the nation-state and trying to drag it into the future is not viable. What is viable is the primordial sentiment, that most basic idea that kindred people are an extended tribe, regardless of their geographic dispersal and the composition of the polities they dwell in. If my brother lives in Britain, he is still my brother.

Source: https://fifthpolitical.wordpress.com/2017/05/10/sub-natio... [5]

Article printed from Counter-Currents Publishing: https://www.counter-currents.com

URL to article: https://www.counter-currents.com/2017/06/sub-national-and-trans-national-identity/

URLs in this post:

[1] Image: https://www.counter-currents.com/wp-content/uploads/2017/06/dandelion_seeds_being_blownCROP.jpg

[2] 5PT: https://fifthpolitical.wordpress.com/2017/04/29/5pt-intro/

[3] de-nationalization: https://fifthpolitical.wordpress.com/2017/05/05/the-de-nationalization-of-the-global-european-diaspora/

[4] grand remplacement : https://translate.google.com/translate?hl=en&sl=fr&u=https://fr.wikipedia.org/wiki/Grand_remplacement&prev=search

[5] https://fifthpolitical.wordpress.com/2017/05/10/sub-national-and-trans-national-identity/: https://fifthpolitical.wordpress.com/2017/05/10/sub-national-and-trans-national-identity/

 

jeudi, 08 juin 2017

Autonomie et Tradition

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Autonomie et Tradition

par Johann Sparfell

Ex: http://www.in-limine.eu

« Il ne faut pas agir et parler comme nous l'avons appris par l'héritage de l'obéissance ». C'est ainsi qu'Héraclite introduisit sa pensée sur l'autonomie, sur l'art d'acquérir un esprit libre. Il est en effet possible et même indispensable de lier la notion d'autonomie de celle d'une éducation au travers de laquelle l'on devient soi-même, l'on s'élève. Il est bien entendu que par là nous pouvons ainsi faire référence à la nécessité d'une affirmation de l'être de l'homme et, comme d'une conséquence, de la propre personnalité de chacun en ce monde. Mais serait-ce pour autant une autorisation prêtée à l'individu d'accroître sans cesse, pense-t-il naïvement, ses prérogatives, dans une « limite » de la liberté d'autrui, afin de se soumettre toujours davantage à l'illusion de la jouissance ? Au nom d'un tel dévoiement de la notion d'autonomie, nous avons en fait appris à renier cela même qui en faisait l'élément primordial de l'existence des communautés et des hommes : la Tradition.

Mais enfin ! Qu'est-ce donc que cette « autonomie » de pacotille dont on nous serine dans nos oreilles les louanges afin de faire de nous des consommateurs « libres » de leurs choix et de leur « vie » ? Bien sûr une illusion, parce que, plutôt que d'être sans limite, elle en a au contraire beaucoup ! Ce n'est point en ce cas une affirmation de soi, mais une affirmation d'une chose extérieure à soi : d'une norme ! Oui, et c'est en cela qu'elle n'est que pure illusion ; il nous faudrait atteindre un certain état par lequel nous nous mettrions en état de suivre un mouvement que nous « participerions » à faire perdurer. « Participer » peut-être ! Mais certainement pas initier. Et encore moins innerver, c'est-à-dire en déterminer le cours, parce que ce mouvement, ce serait nous-mêmes en acte !

La liberté individualiste, que nous confondons aujourd'hui avec l'autonomie, se mêle inextricablement dans la soupe post-moderne avec l'adaptabilité, la flexibilité, la rentabilité, l'utilitarisme, l'esprit d'innovation techniciste et l'instinct de concurrence ; tout ce qui, en fait, permet au Capital, en tant que rapport social, de faire perdurer l'exploitation des ressorts humains au milieu de l'obsolescence de l'homme, et la domination de classe. Cette « liberté » est un statut, un état fixe et idéalisé, un ensemble de dispositions à atteindre au travers desquels les individus gagnent leur vie. La solvabilité en est par exemple un indice de relative réussite : elle ouvre la voie aux jouissances d'une consommation raréfiée. L' « autonomie » qui lui est liée est en ce cas un simulacre en ce sens qu'elle implique, une fois atteinte, de ne se battre que pour s'y maintenir, seul, et en regard des impératifs d'un procès que l'on ne maîtrise qu'à la mesure de nos renoncements.

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Elles se situent bel et bien là les limites de ce simulacre d'autonomie : à l'horizon bouchée des impératifs d'un économisme totalisant au noms desquels nous nous transformons en entités mécaniques dont le seul but devient de ne point tomber dans le néant du déclassement sociale. Le modernisme a inventé, par l'absolutisme de l'économisme, une nouvelle forme d'hétéronomie qui a su, comme ses prédécesseurs, se voiler des apparats de l'accomplissement humain et d'une certaine forme de rédemption. Or, se « mouvoir », ou plutôt bouger, par l'incitation de cette forme d'hétéronomie ne se résume dans les faits qu'à faire du sur-place en tentant de maintenir les « misérables » acquis dus à notre soumission à l'ordre accumulatif. Lorsque nous y creusons un peu plus, nous y voyons les racines du ressentiment ; d'un ressentiment que l'on ne pourrait croire issu que de ce que l'autre a pu acquérir à notre place, mais en fait provoqué par l'horreur que nous inspire l'image de la futilité d'une quête qui n'est que course vers le néant : nihilisme ! Par lui, nous nous en voulons à nous-mêmes de ne point savoir exister, signe d'une faiblesse inexcusable et d'un manque de savoir-vivre !

Car l'autonomie, au contraire, est bien d'exister par soi-même : exister, sortir du néant, tout simplement, sans artifice, sans préjugés. L'autonomie n'est pas une fixation en un état supposé idéal malgré qu'elle implique de savoir se donner des limites, des lois, par soi-même. Elle est une dynamique, un processus jamais parfaitement accompli d'auto-détermination. Si l'hétéronomie économiste est un effort d'adaptation à un procès dans lequel il s'avère absolument nécessaire de s'intégrer pour « exister », tout en étant un rapport social de domination en sous-main, l'autonomie est une participation à un flux vital dont l'assomption invite l'être à se fonder en soi-même en tant qu'être libre de sa propre détermination : il s'agit en ce cas d'une intégration dans un tissus de relations communautaires par lesquelles l'on coopère à son propre destin et à celui de son environnement – tant humain que naturel ou artificiel.

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L'hétéronomie économiste est une fixation. L'homme échappe ainsi à son devenir, sa responsabilité, en s'enfermant dans un éternel présent, qui s'avère en réalité être un piège vers une néantisation – l'éternel présent, ou le règne de l'immédiateté, est un univers carcéral où l'horizon se résume en une fuite perpétuelle vers un futur idéalisé qui n'est en réalité qu'adhésion, au sens premier du terme. Plus rien ne fait lien dans un monde où domine une dépendance totale à des impératifs quantitatifs, ni les hommes entre eux – car tous concurrents les uns des autres – ni le passé d'avec l'avenir – car l'un et l'autre sont devenus absolument contradictoires. Se donner ses propres règles, selon la définition de l'autonomie, ce n'est nullement se laisser enfermer selon une prescription commandée par une appartenance de classe ou autres dans une actualité sans fin. C'est fort au contraire dépasser l'actualité afin de donner corps à une connivence toujours possible, toujours souhaitable, entre le passé et l'avenir : participer par conséquent au recouvrement d'un lien intime entre les deux.

Plutôt que dans le temps, qui est une constante projection vers l'au-delà du réel, ce qui nous rend absolument dépendants du règne de la mesure temporelle, nous devrions nous inscrire dans la durée, qui est une possibilité perpétuellement donnée de pouvoir affirmer son être. Chaque être est en fait une durée singulière, un devenir qui s'étire de son origine à sa finalité, mais s'inscrivant toujours inévitablement dans une plus longue durée au sein de laquelle il devient un transmetteur, le dépositaire d'une traditio. La longue durée est une suite indéfinie d'événements, un processus global du devenir des civilisations, chacune d'elles imbriquée dans le devenir de l'humanité, et où demeurent les archaïsmes : « ce qui ne passe pas » et que l'on tient en réserve afin de dépasser sa propre condition initiale. Les durées singulières se lient les unes aux autres, transposent d'une génération à l'autre le socle sur lequel chacune participera à bâtir l'histoire à sa façon. Et pour ce faire, il est indispensable de pouvoir réellement exister ! Qu'est-ce à dire ? Que chaque homme, chaque communauté, doit pouvoir construire sur de bonnes bases ses propres règles, donc être autonome et ne plus dépendre de l'arbitraire des dogmes.

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L'existence est une élévation, l'acte de se mettre debout et d'affirmer la singularité de son être au milieu de la pluralité contradictoire de ce, et de ceux qui nous entourent. Exister, réellement, a à voir avec l'autonomie ; c'est un acte de volition qui est la condition même de la réalisation de l'autonomie. Lorsque nous nous mettons à exister « pleinement », non de façon désobligée comme aujourd'hui – l'individualisme ne nous engage plus à rien -, nous nous en tenons à une affirmation qui repose en premier lieu et qui a toute chance de pouvoir prendre son essor à partir d'un socle commun. L'existence est un passage : celui du non-être à l'être au croisement du passé et de l'avenir, où règne l'infini et la négation, l'éternel présent – mais ne s'y attardent que les aventuriers de l'esprit, s'y perdent les autres... les insensés ! -, ce qui implique de devoir y adjoindre un sens. L'existence est une dynamique en quelque sorte, dont l'élément moteur est la Tradition : le « socle » commun. Un « élément » dont la primordialité n'a d'égale que le sens qu'Elle apporte aux hommes et à leurs œuvres, un sens partagé de génération en génération par lequel le monde se voit doté d'une signification sacrée en une « durée » où se déploie l'existence, l'indéfinité des existences influant les unes sur les autres en de multiples « écosystèmes ».

La durée dans laquelle nous nous inscrivons est une épaisseur qui est celle des interrelations par lesquelles il nous est donné de pouvoir construire nos autonomies, tant personnelles que communautaires ; en d'autres termes donc, exister, à chaque instant qu'il nous est donné de pouvoir vivre par soi-même ! A contrario du temps, linéarisé par les besoins d'une foi toute basée sur un type d'homme, que l'on peut s'imaginer telle une meurtrière à travers de laquelle l'on n'a la possibilité de n'apercevoir qu'une frange étroite de la réalité : celle d'objectif qui recule sempiternellement à chaque minute.

La quête de l'autonomie est en nous comme un besoin vital de réaliser notre vie, d'être pleinement nous-même en accord avec le monde. C'est une dynamique qui se prolonge durant « mille vies » et nous transpose à chaque point de cette durée du non-être à la grâce d'être – dynamique symbolisée par la Croix, l'un des plus vieux symbole en ce monde. Elle est le Mythe, le mythos primordial que ne vient pas de l'homme, mais qui néanmoins perdure en l'homme et le fait être tel lorsqu'il en ressent le devoir, c'est-à-dire tant qu'il a en lui ce désir de s'affirmer pour le bien commun de ceux par qui, et quoi, il existe. Elle est en fin de compte l'expression « vitale » de la Tradition Elle-même, son souffle sacré par lequel les mondes se constituent et se succèdent, prennent sens et épaisseur.

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Mais qu'est-ce donc qu'être autonome sinon être soi-même, devenir soi-même, simplement, parmi les autres ? Être un esprit libre comme ont su le dire Héraclite, Montaigne ou Nietzsche, un « barbare » - un être « simple » - en chemin vers la maîtrise de son existence qui se réfère en toute humilité aux leçons et expériences accumulées par les générations qui l'ont précédées. C'est un accomplissement qui se réalise au nom d'une notion de Bien Commun, d'une notion secrètement portée par la Tradition et qui ne peut dépendre que d'un minimum de préjugés sur l'homme et la nature a contrario du respect de la parole donnée. Comme le disait S. Weill, la vérité est enfouie dans le silence des humbles ; la Tradition y a toujours trouvé son ultime refuge. La Tradition est un appel intemporel pour l'homme à s'extraire et s'élever par lui-même, de par ses propres forces, au-delà du magma informe de l' « indifférencié civilisateur » - j'entends par là la tendance historique à la standardisation massificatrice du processus civilisateur dont le marxisme orthodoxe et le néo-libéralisme, qui sont si proches l'un de l'autre dans les faits, en sont les portes-voix modernes -, donc des préjugés et des « héritages de l'obéissance ». Elle est une Connaissance qui engage à l'empathie, donc à l'autonomie.

Que pourrions-nous en conclure en somme ? Que la Tradition, loin d'être une sommation à l'inertie et l'impuissance, est fort au contraire une invitation au développement indéfini de nouvelles manière de « voir » le monde et de le faire nôtre, consciemment. Elle n'est pas une vérité imposée d'une « hauteur » inatteignable mais l'invitation à la recherche constante de la vérité. La Tradition est ce qui ne passe pas, telle une clef intemporelle qui est à même de nous élever à la com-préhension, à la lucidité « raisonnable », de ce qui agit dans le monde au travers de nos êtres et constitue celui-ci à chaque instant, à chaque époque singulière. Loin de pouvoir être interprétée Elle-même telle un carcan ou une « vérité » irréfutable sur l'homme, Elle constitue ce qui au contraire peut nous apporter en tout temps la conscience du devoir de construire nos autonomies, celle de la personne comme celle de ses communautés, afin de toujours pouvoir faire surgir, in limine, la nécessité de concevoir un sens commun au milieu de ce qui n'est, en vérité, que chaos, mais chaos riche d'une multitude de possibilités de créations, mais aussi de destructions. Elle est en somme, la richesse des possibles contenue dans l'existence et qu'il nous appartient de mettre à jour à chaque instant de l'histoire, en faisant l'histoire : en composant de nouvelles harmonies, en donnant du sens à nos vies. Elle est un socle bâti par la multitude d'expériences accumulées par l'homme sur lui-même et son devenir...

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La Tradition accompagne donc la marche de l'histoire, en lui donnant l'ouverture indispensable vers l'ensemble des possibles et des révolutions ; Elle ne saurait par conséquent représenter pour l'humanité éveillée un système clos sur lui-même, une injonction théorique idéalisée dans un système religieux, « politique » ou philosophique : « La transformation de l'activité théorique en système théorique qui se veut fermé c'est le retour vers le sens le plus profond de la culture dominante. C'est l'aliénation à ce qui est déjà là, déjà créé ; c'est la négation du contenu le plus profond du projet révolutionnaire, l'élimination de l'activité réelle des hommes comme source dernière de toute signification, l'oubli de la révolution comme bouleversement radical, de l'autonomie comme principe suprême ; c'est la prétention du théoricien de prendre sur ses propres épaules la solution des problèmes de l'humanité. Une théorie achevé prétend apporter des réponses à ce qui ne peut être résolu, s'il peut l'être, que par la praxis historique. Elle ne peut donc fermer son système qu'en pré-asservissant les hommes à ses schémas, en les soumettant à ses catégories, en ignorant la création historique, lors même qu'elle la glorifie en paroles. Ce qui se passe dans l'histoire, elle ne peut l'accueillir que s'il se présente comme sa confirmation, autrement elle le combat – ce qui est la façon la plus claire d'exprimer l'intention d'arrêter l'histoire. »1

Yohann Sparfell

Note:

1Cornélius Castoriadis in L'institution imaginaire de la société, éd. Du Seuil, 1975, p. 101

vendredi, 19 mai 2017

Populismi: evoluzione o emergenza democratica?

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Populismi: evoluzione o emergenza democratica?

Biennale Democrazia 2017

Yves Mény, Valentina Pazé, Marco Tarchi
Coordina Massimiliano Malvicini
Circolo dei Lettori - Torino

jeudi, 18 mai 2017

Elites installées, élites naturelles et populisme...

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Elites installées, élites naturelles et populisme...

Ex: http://metapoinfos.hautetfort.com

Nous reproduisons ci-dessous un point de vue cueilli sur le site Idiocratie, qui rappelle avec talent la différence entre la technocratie prédatrice et l'aristocratie organique...

Élites installées, élites naturelles et populisme

Dans le langage officiel sans cesse martelé, celui des élites installées, le « populisme » semble synonyme d'immaturité politique. Mais, peut-on se demander, ce travers d'immaturité, à quoi conviendrait-il de le reconnaître ? A la fâcheuse volonté de poser certaines questions, notamment celles qui renvoient à des enjeux décisifs ? Curieuse immaturité ! Pourtant, c'est ce qu'expriment nombre de dirigeants politiques, le plus souvent à mots couverts, mais parfois directement comme le fit un jour Ségolène Royal.

Celle-ci répondit en effet à un journaliste qui l'interrogeait quant à la possibilité d'un référendum sur le maintien de la France dans l'UE : « nous croyons en la démocratie, mais nous croyons aux bonnes questions par rapport aux bonnes réponses ». Autrement dit, nous, classes dirigeantes, décidons unilatéralement quelles sont les bonnes réponses. Résultat : il n'y a pas vraiment de questions, pas autrement que pour la forme. Ce qui témoigne d'une vision purement oligarchique de la démocratie et énonce la vérité profonde du système. A ce titre, on ne saurait trop remercier Ségolène Royal pour l'inégalable candeur dont elle fait preuve dans l'expression du cynisme. Pour cela, nul doute, on la regrettera.
 
Remarquons-le, si l'élite dirigeante prétend ainsi exercer une tutelle éclairée sur la communauté politique, c'est précisément parce qu'elle se considère éclairée : elle posséderait d'emblée les bonnes réponses. A vrai dire, le mode de connaissance qu'elle revendique ainsi implicitement procède d'une fonction oraculaire, vieille comme le monde mais jamais disparue. C'est le tropisme archaïque des initiés qu'ont notamment vécu les Romains pendant quelque temps avec les fameux pontifes, détenant seuls la connaissance mystérieuse des règles applicables, et dont la communauté civique s'est par la suite libérée au profit des jurisconsultes et de l'élaboration ouverte du droit. C'est cette tendance récurrente, dans l'histoire des sociétés, selon laquelle se forment périodiquement des castes se voulant productrices et dépositaires d'un savoir, non pas issu d'un effort dialectique, comme toute connaissance exigeante, mais d'un savoir autogène et imposé comme tel. Aujourd'hui, il y a là un trait qui ne trompe pas, quant à la nature oligarchique de l'élite qui nous gouverne.
 
Or, barricadée dans ce fantasme oraculaire, cette élite tente constamment de disqualifier le courant populiste. Non seulement en déniant tout jugement lucide au commun de la population sur ce qui le concerne, mais encore en laissant planer l'idée suivante : le peuple - qui, en pratique, correspond à l'ensemble de la communauté nationale, interclassiste par définition - serait dépourvu d'élites par nature. En somme, l'excellence serait du côté du système (haute finance, grands médias et gouvernants) et la médiocrité dans le camp de ceux qui le subissent. On doit le constater, il s'agit bien là d'une vision dualiste de la communauté politique, dans laquelle existerait ainsi une séparation étanche entre les meilleurs et les autres, vision relevant d'un biais cognitif proprement oligarchique.
 
De fait, la sécession des élites, évoquée par Christopher Lasch, est d'abord une sécession accomplie dans les représentations. L'oligarchie ne conçoit la cité qu'à travers une division de principe : d'un côté, une caste qui, forte du magistère qu'elle n'hésite pas à s'attribuer, exerce un pouvoir unilatéral, de l'autre, une masse indifférenciée. Sur la base de cet imaginaire, cette même oligarchie entretient avec la cité un rapport ambivalent. Elle est dans la cité, mais sans en jouer le jeu. Elle est à la fois à l'intérieur et en dehors, son but, en tout état de cause, n'étant pas de détruire la cité mais de l'instrumentaliser à son profit.
 
Selon une conception traditionnelle de type aristocratique, apparaît au contraire un tout autre rapport entre les meilleurs et les autres, entre le petit nombre et le grand nombre. Prenons ici la notion d'aristocratie non au sens sociologique mais en référence au principe d'excellence réelle. Principe que, comme l'enseigne la moindre expérience, certains individus incarnent mieux que d'autres (d'où une inégalité foncière, différenciation irréductible qui constitue sans doute l'invariant anthropologique le plus embarrassant pour notre époque).
 
L'excellence à la place des oracles
 
On peut observer que, dans le monde hellénique et romain, toutes considérations de statut mises à part, les meilleurs (aristoï, en grec) sont, idéalement, ceux qui pratiquent le mieux les vertus de courage, de sagesse pratique (phronesis) et de justice. Il faut insister ici sur la notion de phronesis. Disposition de la personne au jugement perspicace non dogmatique et sens aigu des limites, elle constitue « l'une des facultés fondamentales de l'homme comme être politique dans la mesure où elle le rend capable de s'orienter dans le domaine public, dans le monde commun », selon les termes d'Hannah Arendt. Cette phronesis, comme l'avait antérieurement montré Aristote, s'inscrit dans une conception délibérative de l'action et notamment de l'action commune. A ce titre, notons-le particulièrement, elle apparaît comme un précieux garde-fou contre toute velléité de sécession.
 
Pour bien saisir à quel point une telle vertu favorise un engagement non faussé dans la vie de la cité, il faut situer la question au niveau des modes de perception commune. Il apparaît en effet qu'en pratiquant la vertu prudentielle de phronesis, les meilleurs, s'ils cultivent une exigence singulière, n'ont pas pour autant un rapport au réel foncièrement différent de celui du peuple en général. Ils procèdent là pleinement de la matrice communautaire. De ce point de vue, il n'y a donc pas de fossé entre les meilleurs et le grand nombre, tous partageant, pour l'essentiel, la même vision du monde. Qu'il s'agisse de mythes, de religions ou de toute autre conception globale de l'existence, il y a unité de tradition. N'en déplaise aux défenseurs d'un lien social magique, prétendument libre de toute détermination, la solidarité du cadre de perception est une condition de la solidarité de destin.
 

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Dans un modèle de ce type, le souci de stabilité qui anime les meilleurs reflète ainsi largement les préoccupations de la population. D'où la volonté aristocratique traditionnelle, attestée dans la Rome antique et dans l'ancienne Europe, d'assurer la protection des mœurs et des coutumes. A rebours de la chimère des avant-gardes éclairées, les meilleurs n'incarnent, à ce titre, que la composante la plus dynamique de la sagesse commune. Aussi n'est-il pas absurde de dire que l'aristocratie bien comprise, loin de tout esprit de caste, n'est que la fine fleur du peuple. Du moins tant qu'elle n'emprunte pas la voie d'un contrôle et d'une transformation de ces mœurs et règles communes et ne se transforme alors elle-même, de facto, en oligarchie, avec son esprit de rupture, sa vulgarité et ses rêves de yachts.
 

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Différenciation et liberté commune
 
On ne doit pas cesser de le dire, la communauté politique, aujourd’hui comme hier, recèle des élites naturelles, lesquelles ne s'adonnent généralement pas à la vaine quête du pouvoir. De toute évidence, le rejet des élites que manifeste le populisme ne relève donc nullement d'une quelconque opposition à la compétence, à l'efficacité, au principe de l'élite en soi. C'est au contraire en vertu de ce principe qu'est contestée la nomenklatura, souvent douée pour l'incurie.
 
Il n’en faut pas moins tenir compte de l’entropie actuelle. Celle-ci peut être enrayée cependant. De fait, en misant davantage sur les ressources de l'excellence, en donnant la priorité à ses élites naturelles, toujours renaissantes, sur les technocraties prédatrices et niveleuses, la communauté peut et doit retrouver toute la vitalité de ses différenciations organiques. Rien n'est pire en effet qu'un peuple réduit à l'état de foule sentimentale et versatile, tantôt saisie d'une saine réactivité, tantôt séduite par les illusionnistes au pouvoir et inclinant à la servitude volontaire. Qui dit foule dit aliénation et, partant, impuissance à défendre la liberté commune : question vitale au cœur de l'enjeu populiste. A cet égard, notons-le, il est bien établi qu'une longue tradition aristocratique, avec son art de la bonne distance, sa lucidité au long cours et sa culture de l'exemple, a beaucoup fait, dans l’histoire européenne, pour la liberté concrète du peuple. C'est précisément à ce rôle salutaire joué par les meilleurs que faisait allusion Ernst Jünger quand il parlait, dans « Le Noeud gordien », de « la liberté élémentaire, c'est-à-dire la liberté des patres*, dont dispose un peuple ». En définitive, serait-il hasardeux de penser qu'un populisme conséquent ne saurait qu'être, au sens indiqué du terme, aristocratique ?
 
Des idiots (Idiocratie, 13 mai 2017)
 
*patres : la noblesse romaine, dans la rhétorique latine classique. Sens symbolique, ici.

mardi, 09 mai 2017

Réflexions sur la notion de Peuple

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Réflexions sur la notion de Peuple

J’écris ces lignes en ne connaissant pas le résultat du deuxième tour des élections françaises.

Dans les deux dernières années, je me suis rendu à quelques « diners en ville » fort intéressants qui avaient lieu chez des amis de ma fille ainée, Emmanuelle.

Le principe en était simple : avant de passer à table, nous écoutions un conférencier qui nous parlait d’un sujet qu’il avait travaillé et qui lui tenait à cœur. Et après, nous dinions et buvions en bonne compagnie.

L’une de ces conférences m’a profondément marqué.

Le conférencier était un ancien élève de la rue de l’ULM devenu rabbin, et la conférence portait sur la notion de peuple et de foule dans l’Histoire. Je vais essayer de résumer ici ce qu’il a dit et ce que j’en ai compris, au risque de le trahir. Mais c’est le propre d’une idée forte que d’être reprise et parfois transformée. Nul n’est propriétaire de ses idées.

Et en réalité, ce que cet homme a dit me taraude depuis des mois car je suis ainsi fait que quand je croise une idée nouvelle (pour moi), je me mets à la ruminer lentement pour qu’elle se dépose au fond de mon esprit où elle pourra se croiser avec d’autres idées «fortes» sans que j’en aie vraiment conscience la plupart du temps.Et à la fin du processus, cette idée devient mienne et je me mets à en parler pour la répandre.

Voici l’idée de départ.

Dans l’antiquité grecque et latine, la foule, la plèbe, étaient considérées comme dangereuses parce qu’imprévisibles et soumises à des emballements « incompréhensibles »  (voir les analyses de René Girard pour une explication).Les gens éduqués, les élites, se tenaient donc le plus loin possible de la plèbe et des petites gens.

Arrive le Christ qui littéralement transforme la notion de foule, de plèbe en une toute nouvelle entité, le Peuple.

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Et cette transformation se passe pendant une prédication de Jésus dans le désert.Une foule immense suivait Jésus, la fin de la journée approche, il se retourne et a pitié d’eux qui ont faim et soif alors que le lieu est désertique.Il leur dit de s’assoir et procède à la multiplication des pains et du poisson.

C’est de ce moment là  que date la notion de Peuple de Dieu, constitué de pauvres, de bancals, d’aveugles, de perclus, d’idiots. Et ce sont ces gens là que Jésus nous demande d’aimer à la place de les mépriser et de les tenir à l’écart. Et ce sont ces mêmes gens qui seront sauvés « Heureux les pauvres, heureux ceux qui pleurent…  car le Royaume des Cieux est à eux». Et d’ajouter, « ce que vous aurez fait pour le plus petit d’entre eux, vous l’aurez fait pour moi »

Ce renversement total de perspective, ou la plèbe devient le Peuple, est bien sûr à l’origine de la civilisation Chrétienne.

L’Eglise Catholique a porté ce message pendant vingt siècles (non sans de nombreux loupés, j’en conviens : « L’Eglise est un vaisseau qui a son gréement dans les étoiles et sa coque dans la merde » disait Bernanos …)

Il n’en reste pas moins que notre bonne vieille Eglise a été à l’origine du développement de la science (puisque le rôle de la créature était de comprendre par la raison ce qu’avait voulu faire le Créateur), des hôpitaux, des écoles , des universités, de la protection des femmes et des enfants au travers de la sanctification de la famille, de la limitation du pouvoir des puissants (trêve de Dieu) et bien sur des droits de l’homme (controverse de Valladolid).

Au XVIII eme siècle avec la Révolution Française et au XIX eme siècle, surtout, avec Marx, tout change.

Les notions de peuple,  de petites gens comme centre de l’histoire franchissent une nouvelle étape. Le Peuple n’est plus sauvé par le Messie, mais le DEVIENT (Marx), ce qui est une novation extraordinaire. Mais cette nouveauté à une conséquence fâcheuse que peu de gens ont compris à l’époque : le Peuple n’a plus besoin d’être aimé, soigné et éduqué mais… guidé.

Et nous nous retrouvons avec le problème qui a plombé l’Eglise Catholique pendant des siècles : comment aimer le peuple sans chercher à le diriger ?

L’église avait non seulement une réponse théorique à cette tentation (à laquelle elle a souvent cédé) « mon Royaume n’est pas de ce monde », mais aussi une réponse pratique, l’émergence de personnalités extraordinaires telles François d’Assise, Vincent de Paul ou Mère Theresa qui aimaient sans chercher à diriger.

Le socialisme ou la technocratie n’en avait  aucune, ce qui revient à dire qu’au bout d’un certain temps, les élites se lassèrent du peuple (ou le peuple des élites) et que le Peuple de Dieu redevint la plèbe, un peu comme il l’était dans la Rome antique.

Et la déchristianisation qui commence à  peu prés à la même époque ne fit qu’accentuer ce phénomène. Bien entendu, ce qui se passe aujourd’hui dans le domaine politique est la preuve de cette régression historique dans la quasi totalité des pays développés du monde en général et en France en particulier.

A l’évidence, la gauche n’aime plus le peuple et le peuple, redevenu la plèbe n’aime plus la gauche.

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En fait, nous  sommes dans un pays ou la gauche a trahi le peuple, le reléguant au rôle de plèbe, tandis que la Droite a trahi la Nation, ce qui laisse une grande partie de ceux qui ont besoin d’être aidés quelque peu désemparés.

Et  c’est ce que constate le géographe Christophe Guilly dans tous ses livres.

La France aujourd’hui est géographiquement distribuée en trois zones concentriques :

  • Au centre, ceux qui sont adaptés à l’économie moderne que j’ai appelé l’économie de la connaissance dans mon livre « C’est une révolte, non Sire c’est une Révolution ».  Ils contrôlent l’économie et les media. Il est d’usage de les appeler les « bobos » et ils constituent l’électorat de Macron.
  • En périphérie des bobos, on trouve les immigrés qui sont de fait les domestiques des bobos (Chauffeurs Uber, Taxis, gardes d’enfants, personnel soignant etc..) et sur lesquels se déversent les subventions étatiques, ce qui permet aux bobos d’avoir des domestiques pas trop chers.  Ce deuxième groupe vote Melenchon.
  • Et enfin, à une heure et demi ou deux heures du centre de la grande ville dans laquelle les bobos résident dans des appartements hors de prix, on trouve les perdants de la mondialisation, ceux qui naguère étaient employés dans le secteur industriel. Ils votaient communistes autrefois, ils votent FN aujourd’hui. Et il n’y a plus aucun contact entre les bobos et les habitants de la troisième zone.

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Et ce que cela veut dire est assez simple : Ce qui fait office d’élites de nos jours n’a que mépris pour ceux qui vivent dans la France de la périphérie. Ce qui implique que « la volonté de vivre ensemble », absolument constitutif d’une Nation n’existe plus. Les élites méprisent la plèbe et plus encore ses représentants encore plus que cela n’était le cas dans la Grèce ou la Rome antique.

A l’époque, et il faut s’en souvenir, les membres de la plèbe étaient appelés en Grèce les « idiotes » et leurs meneurs les « démagogues ».

Plus ça change…

En fait, les bobos méprisent la plèbe et REFUSENT d’entendre sa voix, ce que l’on a fort bien vu lors de cette campagne présidentielle. Toute discussion des problèmes affectant cette troisième zone a été purement et simplement interdite. Et du coup, le Peuple, redevenu plèbe se met à haïr les bobos…

Nous  sommes donc en train de fermer une parenthèse historique qui a duré prés de 2000 ans et c’est sur cette parenthèse que reposait une notion aussi fondamentale que l’égalité de tous devant la Loi.

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En Grande-Bretagne, aux USA le petit peuple a réussi à faire entendre sa voix, au moins partiellement,  en France des manœuvres politiciennes de bas étage ont réussi à empêcher tout débat.

Il reste à notre pays une dernière chance pour permettre à cette partie de la Nation de s’exprimer, les élections législatives de Juin 2017.

Faute d’un résultat qui permettrait aux citoyens de la zone périphérique de se faire entendre, la France serait irrémédiablement coupée en deux et le pire serait à craindre.

Si par malheur la Démocratie ne fonctionnait pas, alors la violence deviendrait non seulement inévitable mais légitime.

 

lundi, 08 mai 2017

Marco Tarchi : "Il populismo non è sconfitto"

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Marco Tarchi : "Il populismo non è sconfitto"

Avertissement aux lecteurs francophones: Cette analyse du résultat des présidentielles françaises est due au chef de file de la "nouvelle droite" italienne, fourvoyé en France dans le canal historique de la "nouvelle droite" d'Alain de Benoist, qui n'a jamais accordé beaucoup de publicité aux thèses de son très fidèle et obséquieux vicaire florentin, pourtant séduisantes et partagées par la presse militante comme par la grande presse en Italie. La qualité de ces analyses portait ombrage à la médiocrité du gourou parisien. Rien du Prof. Tarchi (ou presque) n'a été traduit dans les officines qui lui sont servilement inféodées. Utilisez le logiciel de traduction, si vous ne maîtrisez pas correctement la langue italienne. Ces logiciels fonctionnent bien entre langues latines. 

Il Professor Tarchi analizza il risultato delle presidenziali in Francia dove il populismo che sembrava inarrestabile ha dovuto fare i conti con la scelta "moderata" di Macron

 

Il populismo sembrava essere il fenomeno più rappresentativo della nostra epoca politica. La vittoria di Donald Trump e l'affermazione della Brexit parevano aver aperto la strada ad una serie di trionfi. Invece, sia in Olanda sia in Austria, ma soprattutto in Francia, la categoria della politica in questione si è arenata.

Come mai? Lo abbiamo chiesto a Marco Tarchi, politologo e docente italiano, professore ordinario presso la Facoltà di Scienze Politiche Cesare Alfieri dell'Università di Firenze dove attualmente insegna Scienza Politica, Comunicazione politica e Teoria politica.

populisme-mc3a9lenchon-le-pen1.pngProfessor Tarchi, l'avanzata del populismo sembrava inarrestabile. Macron è davvero l'argine definitivo all'affermazione dei sovranisti in occidente?

"Non lo penso affatto. E credo siano necessarie due precisazioni. Primo: la descrizione del populismo come una valanga destinata a travolgere ogni resistenza sul suo cammino, emersa in sede giornalistica dopo il successo di Trump, è sempre stata infondata, anche se è stata cavalcata dagli avversari di questa corrente politica, che se ne sono avvalsi per sollecitare una reazione di paura – 'distruggeranno l’Europa', 'cancelleranno l’euro provocando un caos monetario', 'apriranno la caccia agli immigrati' e così via – e poter far passare i pur consistenti progressi elettorali delle formazione populiste per sconfitte clamorose. Secondo: populismo e sovranismo, pur presentandosi a volte in connessione, non sono la stessa cosa. Nel secondo c’è una componente di statalismo in genere assente nel primo. E il connubio non sempre paga".

Quali sono stati gli errori di Marine Le Pen?

"È troppo presto per trarre conclusioni su questi punti: occorrono studi sui dati, non solo impressioni. Marine Le Pen ha puntato a conquistare contemporaneamente, su due terreni diversi, elettori sensibili ad argomenti più “di destra” (difesa dell’identità nazionale, maggior rigore nella tutela dell’ordine e della sicurezza) e più “di sinistra” (denuncia del capitalismo finanziario, delle delocalizzazioni, della disoccupazione). Evidentemente il mix proposto non ha convinto del tutto i destinatari. Ma è stato il “moderato” Fillon a renderle la vita difficile, schierandosi immediatamente con Macron, che fino a poche ore prima aveva fustigato come copia conforme di Hollande. Sia la linea Philippot sia quella Marion avevano le loro ragioni e la loro utilità: non se ne è però saputa trovare la sintesi. Quanto alle critiche alle esternazioni papali sulla necessità di non porre limiti all’accoglienza degli immigrati, dubito che abbiano avuto effetto su elettori disposti a votare la candidata frontista".

Nelle grandi città il sovranismo non passa. Eppure il terrorismo ha colpito i grandi centri. La "sicurezza" non paga più?

"Paga poco rispetto a linee di divisione più acute, come quella tra vincenti e perdenti di fronte agli effetti della globalizzazione: i primi vivono perlopiù nella Francia delle metropoli, i secondi nella Francia periferica. E fra i soddisfatti chi propugna un’alternativa al sistema vigente non può trovare consensi. Il populismo, come è noto, trova nella situazioni di crisi il suo humus".

populismeggggg.jpgIl momento che sta vivendo l'Europa sembra essere socialmente travagliato. Eppure in Olanda e in Francia, alla fine, ha vinto il moderatismo. Perchè?

"Si è troppo frettolosamente fatto d’ogni erba un fascio ascrivendo ad uno stesso fenomeno episodi piuttosto diversi. La Brexit è stata legata, oltre che al timore di vari “contagi” – crisi migratoria, perdita di sovranità - che potevano trovare un canale di diffusione nell’Unione europea, alla persistente diffidenza di molti inglesi nei confronti del continente. Trump ha sfruttato soprattutto la delusione di molti verso le incerte politiche di Obama. In Olanda e in Francia la proposta dei movimenti populisti ha valorizzato soprattutto i temi dell’immigrazione e della paventata islamizzazione: due fenomeni la cui gravità è destinata ad acuirsi nel prossimo futuro ma su cui la narrazione dei grandi strumenti di comunicazione ha fatto sin qui da argine, utilizzando con successo il ricatto psicologico della compassione e della commozione (gli immigrati rappresentati solo dal “piccolo Aylan”, dagli annegati, dalle madri incinte trasportate sui fragili barconi) contro il simmetrico ricatto della paura (dietro ogni immigrato un sospetto criminale o terrorista) spesso sbandierato dai populisti".

Il leader di "En Marche!" riuscirà ad adempiere alle richieste di Bruxelles e, contemporaneamente, a sanare la ferita tra la Francia periferica e quella urbanizzata?

"Lei mi chiede una previsione che sa di vaticinio, ma i politologi non sono chiromanti. Di certo, il neopresidente dovrà render conto delle sue molte (vaghe) promesse e dell’aulica prosa sciorinata in campagna elettorale, fatta di cuore, amore, solidarietà, speranze e futuri radiosi. Chi conosce la politica sa come vanno a finire, di solito, queste ubriacature di retorica: i risvegli portano spesso un gran mal di testa. E dallo stato di grazia alla disgrazia il passo è breve".

Cosa c'è da aspettarsi per le legislative francesi di giugno?

"I motivi di curiosità sono molti e si prestano più a domande che a risposte. Sapranno i Républicains riattivare la loro forte rete di insediamento territoriale – fatta di notabilato e clientelismo – superando lo choc del caso-Fillon? I socialisti riusciranno a non soccombere all’effetto di salita sul carro del vincitore che già da un paio di mesi ha gonfiato le vele di Macron? Mélenchon saprà tradurre il successo della brillante campagna di protesta in un solido gruppo parlamentare? E, soprattutto, come si comporterà Macron nella scelta delle candidature per sfruttare il prevedibile effetto-valanga della sua elezione?"

Quale futuro per il Front National e per il populismo francese?

"Stando a ciò che ha detto a caldo, Marine Le Pen vorrebbe travasarlo in un nuovo contenitore, ma il risultato poco brillante ottenuto non le renderà facile tradurre il progetto in pratica, perché troverà più di un’opposizione. Resta poi da capire chi sarebbe disposto a farle da alleato esterno: Dupont-Aignan senz’altro, ma pare che meno del 40% dei suoi elettori ne abbiano seguito la scelta, ed è un problema non da poco. È prevedibile una raffica di critiche alla conduzione della campagna da parte di chi vorrebbe spostare l’asse del partito, o dell’alleanza, più a destra, ma se i Républicains tenessero alle legislative, sarebbe una scelta pericolosa. Marine ha più volte criticato Fini per le sue scelte, accusandolo di aver ceduto sui “fondamentali” e proclamando di preferire di essere sconfitta con le sue idee piuttosto che di vincere con le idee altrui, ma dà l’impressione di star annacquando progressivamente quelle idee. Per lei il periodo post-elettorale non sarà facile: dall’esito delle legislative dipenderà buona parte del suo futuro politico".

dimanche, 12 mars 2017

Les réveils identitaires: une réponse à la crise de la modernité

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Les réveils identitaires: une réponse à la crise de la modernité

par Etienne Malret

Ex: http://www.institut-iliade.com 

La notion d’identité, qui a massivement investi le champ des sciences sociales depuis une quarantaine d’années, apparaît aujourd’hui comme une notion incontournable, tant au niveau individuel que collectif, dans l’analyse des conflits, tensions, crises, dans un contexte de changements sociétaux rapides et déstabilisateurs et de remise en cause des « grands récits » caractéristiques de la Modernité.

Ainsi, ce recours croissant à la notion d’identité apparaît en grande partie lié à la réhabilitation de la notion de sujet qui, au sortir de la Seconde Guerre mondiale, avait été occultée, du fait de son caractère prétendument illusoire, par plusieurs courants de pensée alors dominants (marxisme, behaviorisme, structuralisme, etc.) [1]. Ces courants de pensée issus des « grands récits » qui se sont constitués au XIXème siècle comme autant de religions séculières (libéralisme, scientisme, marxisme…) postulaient, conformément à l’idéologie du Progrès, que l’avenir serait nécessairement meilleur que le présent et affirmaient dans le même temps la possibilité d’un salut dans l’ici-bas [2]. Les évènements tragiques du XXème siècle ont cruellement infirmé la vision optimiste, progressiste du devenir du monde portée par ces religions séculières.

Omniprésente dans les débats contemporains, la notion d’identité apparaît, toutefois, difficile à cerner dans la mesure où elle résulte de constructions historiques particulières et comporte de multiples facettes. Dans une approche très générale, comme le relève Samuel Huntington, l’identité est ce qui nous distingue des autres [3]. Plus spécifiquement, le philosophe Charles Taylor l’envisage comme un cadre, un horizon au sein duquel l’individu est en mesure de prendre des engagements, une posture morale, souvent en référence à une communauté [4].

Sans doute ce cadre, pour partie hérité, pour partie choisi, n’est-il pas immuable, intemporel mais au contraire évolutif : l’identité n’est pas une essence ; elle se construit historiquement « dans le dialogue ou la confrontation avec l’Autre » [5]. De plus, la narration apparaît comme le principal mode de construction de cette identité évolutive, ainsi que l’a montré Paul Ricoeur en introduisant la distinction entre « l’identité ipse » et « l’identité idem » : « A la différence de l’identité abstraite du Même, l’identité narrative, constitutive de l’ipséité, peut inclure le changement, la mutabilité, dans la cohésion d’une vie. » [6] Ce caractère narratif de l’identité vaut aussi bien au plan individuel que s’agissant de l’identité collective [7].

Les questionnements, les débats qui surgissent actuellement dans les pays européens [8] et aux Etats-Unis [9] sur l’identité sont le plus souvent interprétés, à raison, comme un symptôme de crise d’une société en pleine mutation. L’affirmation, la revendication d’une identité est alors présentée selon les cas, soit comme une menace supplémentaire et une aggravation de la crise, soit comme une réponse légitime à cette crise, voire comme une solution (c’est notamment la question de la reconnaissance symbolique ou même juridique de l’identité des minorités ethniques, sexuelles etc.). Cette crise, vue sous l’angle de l’identité peut être appréhendée à un double niveau, individuel et collectif.

chtay.jpgAu plan individuel, le questionnement identitaire révèle un sentiment de perte de sens au sein des sociétés modernes. Dans son ouvrage Les sources du moi. La formation de l’identité moderne, Charles Taylor, en faisant la généalogie de l’identité moderne, a montré que celle-ci s’est notamment construite sur une conception instrumentale du monde, c’est-à-dire un monde vu comme un simple mécanisme que la raison doit s’attacher à objectiver et à contrôler. Or, cette vision instrumentale du monde, héritée du cartésianisme, et qui a connu son plein épanouissement au XXème siècle, s’est révélée un puissant facteur de désymbolisation [10], synonyme de perte de sens. Ainsi, cette crise, interprétée à travers le prisme de l’identité, apparaît dans une large mesure comme une crise de la modernité, une crise affectant l’homme faustien dont parlait Spengler dans Le Déclin de l’Occident, c’est-à-dire « un individu caractérisé par une insatisfaction devant tout ce qui est fini, terminé », un homme qui « ne croit plus qu’il peut savoir ce qui est bien et mal, ce qui est juste et injuste. » [11]

Au plan collectif, de puissants mouvements d’homogénéisation, dont la mondialisation constitue l’une des manifestations les plus notables, contribuent à dissoudre les identités, en particulier nationales [12]. Ces mouvements d’homogénéisation apparaissent comme le produit d’une idéologie égalitariste, ce qu’Alain de Benoist appelle « l’idéologie du Même » [13], qui tend à nier les différences, qu’elles soient d’ailleurs individuelles ou collectives, en les considérant comme insignifiantes. Ces deux dimensions, individuelles et collectives, sont liées : le processus d’homogénéisation tendant à faire disparaître les identités collectives contribue par là même au sentiment de perte de sens ressenti par les individus [14].

C’est donc à l’aune de cette crise, considérée dans ses deux dimensions, qu’il convient d’apprécier les réactions, les questionnements et les recompositions identitaires qui se manifestent aujourd’hui. Ainsi, on assiste, dans la période actuelle, à des réveils identitaires multiformes : réveil des régionalismes contre l’Etat-Nation, par exemple au Royaume-Uni ou encore en Espagne, réveil des identités nationales face à la mondialisation avec la montée des partis qualifiés de populistes, émergence d’un « tribalisme » qui serait le signe d’un déclin de l’individualisme et de la raison instrumentale et utilitaire [15], affirmation des identités religieuses, ethniques ou encore des identités liées au genre [16].

Dans ce contexte, on peut se demander comment susciter, accompagner, orienter les réveils identitaires des peuples européens en vue de reconstituer un cadre, un horizon commun, pour reprendre la terminologie de Charles Taylor, qui soit en mesure de préserver leur liberté. Ainsi, il parait nécessaire d’identifier non seulement les modèles pertinents qui pourraient inspirer la redéfinition d’un tel cadre mais également les leviers d’action métapolitiques permettant la mise en œuvre concrète d’une telle reconstruction.

Printemps identitaires : identités glorifiées, victimaires ou menacées

Schématiquement, on peut distinguer au moins trois sources auxquelles puisent les mouvements identitaires en plein développement aujourd’hui. Ainsi, les réveils identitaires que l’on observe peuvent se fonder principalement sur une identité glorifiée, sur une identité victimaire ou encore sur une identité menacée.

Tout d’abord, certains réveils identitaires se fondent sur la mise en récit d’une identité glorifiée qui prend appui sur la puissance actuelle et les succès d’une collectivité vécus comme des motifs de fierté pour les membres de cette collectivité renforçant par là même leur sentiment d’appartenance au groupe. En se limitant au cadre national, il s’agit là d’un ressort exploité par D. Trump aux Etats-Unis et que traduit son slogan de campagne « Make America Great Again ». C’est également à ce type de réveil identitaire que l’on assiste en Russie : après l’effondrement du communisme et les années noires de la période Eltsine (1991-1998), la politique de V. Poutine a consisté à restaurer la puissance de la Russie en vue d’en faire un acteur majeur au sein d’un monde multipolaire, non seulement en s’attachant à renforcer sa puissance militaire et énergétique, mais aussi en réaffirmant les valeurs traditionnelles de l’identité russe : « le peuple, la patrie, la religion orthodoxe et le souvenir des gloires impériales d’antan » [17]. Ainsi, la Russie s’est en quelque sorte érigée en contre-modèle de la postmodernité décadente d’un Occident dénué d’optimisme et d’énergie. Si bien que l’institut Levada estimait en 2009 que 80% des Russes considéraient leur pays comme une grande puissance contre seulement 30% huit ans auparavant [18].

Black51111_91lk.jpgEn second lieu, on observe le développement de mouvements identitaires, notamment à caractère ethnique, reposant sur la mise en récit d’un passé interprété comme humiliant et qui justifierait en tant que tel une reconnaissance non seulement symbolique mais aussi juridique. Il s’agit là de l’exploitation (non exempte, bien souvent, d’instrumentalisation) d’une mémoire, d’un imaginaire victimaire visant à réclamer des compensations aux supposés coupables (ou à leurs descendants), et aboutissant à nourrir un sentiment de revanche voire de haine et ainsi à fortifier une identité collective autour d’un ennemi commun. Aux Etats-Unis des mouvements de ce type invoquent la mémoire de l’esclavage pour dénoncer le traitement supposément spécifique dont feraient l’objet, de la part de la police, les membres de la communauté noire (cf. le mouvement Black Lives Matter). C’est aussi la voie suivie par une partie des populations immigrées issues des pays anciennement colonisés à l’encontre des ex-pays colonisateurs comme la France. Ces revendications identitaires trouvent un écho favorable, notamment parmi les élites politiques, économiques, judiciaires et médiatiques qui conçoivent l’affirmation identitaire des minorités comme une réaction légitime face à une culture occidentale européocentriste considérée comme un système de domination aliénant, oppressant par nature pour ces minorités. Ainsi, le traitement médiatique des faits de délinquance tend à occulter délibérément le nom des délinquants quand ils sont d’origine étrangère avec en arrière-fond l’idée que ces délinquants sont et restent par essence des victimes qu’il convient de protéger [19]. Les politiques de quota et de discrimination positive dans l’accès à l’emploi ou à l’université s’inscrivent également dans ce schéma de pensée. Comme le relève Christopher Lasch, on est passé d’une demande d’égalité et d’abolition des discriminations fondées sur la race (mouvement des droits civiques aux Etats-Unis dans les années 1960) à la revendication et à l’instauration d’un traitement de faveur au profit des minorités raciales au motif que ces minorités, éternelles victimes du racisme des Blancs, auraient par nature un droit à réparation [20]. Ce type de mesure qui avalise les revendications identitaires de nature victimaire tend à nourrir les conflits ethniques au sein de la société [21].

Enfin, certains réveils identitaires trouvent leur source dans un futur jugé menaçant. Le terrorisme islamiste a ainsi généré un regain du patriotisme dans les pays touchés par le phénomène, notamment aux Etats-Unis depuis 2001. Selon S. Huntington, le 11 septembre a symbolisé la fin du XXème siècle, siècle des conflits idéologiques, et le début d’une nouvelle ère dans laquelle les peuples se définissent eux-mêmes d’abord en termes de culture et de religion [22]. Ainsi, selon cet auteur, les ennemis potentiels de l’Amérique aujourd’hui sont l’islamisme et le nationalisme chinois non idéologique. En Europe, la multiplication des attentats islamistes ces dernières années réveille également les consciences d’autant plus que l’identité européenne s’est forgée depuis des siècles en opposition notamment aux conquêtes musulmanes [23]. Pour J. Le Goff « une identité collective se bâtissant en général autant sur les oppositions à l’autre que sur des convergences internes, la menace turque va être un des ciments de l’Europe » [24].

mazurel_SX347_BO1,204,203,200_.jpgA cet égard, dans son ouvrage Les vertiges de la guerre – Byron, les philhellènes et le mirage grec, Hervé Mazurel retrace une des étapes importantes de la prise de conscience d’une identité européenne à travers le combat civilisationnel du mouvement philhellène dans les années 1820 en vue de libérer la Grèce, matrice de la civilisation européenne, de l’envahisseur ottoman, jugé coupable des pires atrocités (massacres, viols), immortalisées par la Scène des massacres de Scio de Delacroix et dont témoigne également le recueil de poèmes Les Orientales de Victor Hugo. Or tout cet arrière-fond historique ré-émerge aujourd’hui dans les consciences non seulement au moment des attentats terroristes mais également à l’occasion des évènements dramatiques liés aux mouvements migratoires (viols de Cologne…).

Au-delà du terrorisme islamique, d’autres menaces sans doute plus diffuses permettent d’expliquer les réveils identitaires qui ont cours aujourd’hui. Ainsi la situation de profonds bouleversements (mutations technologiques, phénomènes migratoires…) que connaissent nos sociétés génère des incertitudes croissantes et laissent entrevoir des changements majeurs dans nos modes de vie (travail, éducation, sécurité…) avec le sentiment de plus en plus largement partagé, à tort ou à raison, que ces mutations touchent d’abord les plus fragiles et toucheront à court ou moyen terme une part croissante de la population alors même qu’une petite élite au pouvoir, notamment politique et économique, reste protégée. Or, ces bouleversements en cours dans les modes de vie sont envisagés de manière négative et angoissée par de larges pans de la population des pays développés qui semblent aspirer pour le moins au statu quo et ressentent même une nostalgie vis-à-vis de modes de relations sociales qui avaient cours il y a encore quelques dizaines d’années [25]. L’une des causes profondes de ce qui est vécu aujourd’hui comme un véritable délitement social en voie d’accélération rapide semble résider, au moins en partie, dans un modèle libéral dominant qui s’est progressivement radicalisé depuis une trentaine d’années.

Dénoncer les totems du libéralisme

Par nature, le libéralisme, en tant qu’il est fondé sur une conception individualiste de l’homme, contribue à diluer sinon à détruire les identités collectives traditionnelles [26]. Les justifications qui sont invoquées pour légitimer l’approfondissement du modèle libéral et son application généralisée à tous les domaines de la vie en société sont principalement de deux ordres.

D’une part, le projet libéral est une promesse de bonheur individuel en ce qu’il se propose de libérer l’individu de tous les carcans traditionnels considérés comme attentatoires à son autonomie et à son épanouissement personnel en substituant à tous les modes de relations sociales traditionnels des relations de type contractuel régies par le marché. En bref, il s’agit de substituer des identités « choisies » aux identités héritées. Ainsi, le capitalisme marchand puis industriel et enfin financier tel qu’il s’est développé dans l’histoire et qui n’est autre que la déclinaison au plan strictement économique de l’idéologie libérale fournit de multiples illustrations de ce pouvoir censément libérateur. Boltanski et Chiapello ont notamment montré que le développement du salariat qui est allé de pair avec le développement du capitalisme industriel au XIXème siècle a constitué une forme d’émancipation, principalement de type géographique, à l’égard des communautés locales traditionnelles [27].

Plus généralement, en effet, les économistes classiques puis néo-classiques se sont attachés à montrer, depuis le XVIIIème siècle, que le marché constituait le mode optimal d’allocation des ressources en vue de favoriser le progrès global de l’humanité sur un plan matériel. En pratique, cette conception, qui dilue les identités collectives traditionnelles fondées sur des liens non marchands, tend à réduire l’individu principalement au rôle de producteur-consommateur en lui fournissant des identités de substitution [28].

D’autre part, dès l’origine, le modèle libéral, en tant qu’il a pour effet de diluer les identités collectives, a été vu comme un facteur d’apaisement et de résolution des conflits [29], notamment en référence à cette forme particulière de guerres civiles que constituaient les guerres de religion qui avaient ensanglanté l’Europe aux XVIème et XVIIèmesiècles. C’est la théorie bien connue du « doux commerce » énoncée par Adam Smith au XVIIIème siècle [30]. A ce titre, le libéralisme, qui constitue le cadre idéologique de la construction européenne telle qu’elle a été pensée depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale, vise à dissoudre les identités nationales au motif qu’elles seraient les principaux vecteurs des conflits mondiaux [31].

gauchon-fdgg-2013-1.jpgOr, la théorie du « doux commerce » chère aux penseurs libéraux des Lumières apparait, dans une large mesure, comme un mythe. En réalité, les intérêts commerciaux se sont révélés être de puissants facteurs d’exacerbation des conflits. Comme le relève Pascal Gauchon (photo), « pour que règne la paix, il fallait imposer le commerce par la guerre » [32]. De plus, la tendance à l’uniformisation du monde par la mondialisation libérale entraine, aujourd’hui, en retour, des mouvements de fragmentation, sources de nouveaux conflits (montée des fondamentalismes religieux notamment) [33]. Pascal Gauchon observe qu’« alors que les frontières nationales s’abaissent, les frontières intérieures se multiplient : les communautés fermées se multiplient, les immeubles s’abritent derrière des barrières digitales et le code postal définit l’identité (…) » [34]. Apparaissent donc de plus en plus clairement tous les ferments de la guerre civile à mesure que les sociétés s’hétérogénéisent sous l’effet de l’immigration de masse qu’encourage la mondialisation libérale, ce que Pascal Gauchon appelle « les guerres de la mondialisation ». Quant au projet de libération de l’individu, il apparait lui aussi très largement comme une utopie, tant il est vrai que les politiques libérales, notamment au plan économique, se sont traduites par de nouvelles aliénations ainsi que l’ont montré les travaux de Jean Baudrillard sur la société de consommation. Aliénation par la consommation via la publicité qui est infligée à l’individu-consommateur conçu comme « un système pavlovien standard, modélisable par quelques lois comportementales et cognitives simples, manipulable et orientable par les professionnels du marketing » [35]. Aliénation au travail que subit le travailleur moderne « occupant des emplois provisoires, dépersonnalisés, délocalisés en fonction des besoins de l’économie » [36].

Aussi louables soient-elles, ces intentions (favoriser la libération de l’individu, garantir la paix) apparaissent donc, dans une large mesure, comme des totems visant à désamorcer, délégitimer les critiques apportées à l’extension radicale du projet libéral et particulièrement, aujourd’hui, la mise en œuvre par l’Union européenne de politiques ultra-libérales. Ces critiques visent à mettre à jour la réalité du modèle libéral en tant qu’il constitue certes un système de création de richesses et de valeur efficace mais ce au prix d’une destruction sans précédent de l’environnement [37]et d’un formidable accroissement des inégalités, cette richesse étant captée à grande échelle par un petit nombre d’individus [38]. Au sein des sociétés occidentales, il s’accompagne également d’une hausse inédite de la pauvreté [39]. En outre, ce modèle ultra-libéral favorise une immigration massive qui contribue à menacer gravement le cadre de vie et la sécurité des populations autochtones, et ce au nom du respect du principe de libre circulation des facteurs de production, qui constitue l’une des conditions essentielles permettant de caractériser un marché concurrentiel dans la théorie économique néo-classique libérale [40].

Insécurité physique, corporelle tout d’abord : un lien entre immigration massive, société multiculturelle et hausse de la délinquance semble pouvoir être établi. Dans le cas de la France, un rapport sur l’islam radical en prison rédigé par le député Guillaume Larrivé en 2014 a mis en évidence que les musulmans constituaient environ 60 % de la population carcérale totale alors même qu’ils ne représenteraient qu’environ 12% de la population française. Insécurité culturelle ensuite qui provient de la peur des populations autochtones de devenir minoritaires dans leur propre pays, c’est-à-dire de perdre leur statut de référent culturel. Comme le relève Christophe Guilluy (photo), cette crainte universelle est ressentie dans tous les pays qui subissent des flux migratoires massifs (pays occidentaux, pays du Maghreb…) [41].

guilluy_noye3.jpgEnfin, sur le plan économique, des travaux ont montré qu’une forte hétérogénéité ethnique au niveau local allait de pair avec une dégradation des services publics essentiels comme l’éducation ou encore les infrastructures routières et nécessitait des transferts sociaux plus importants que dans les zones à forte homogénéité ethnique [42]. Ainsi, les auteurs de cette étude en concluent que les sociétés à forte hétérogénéité se caractérisent par une moindre importance accordée à la qualité des biens publics, un développement du paternalisme et des niveaux de déficit et d’endettement plus élevés. Dans le même sens, Christophe Guilluy dans son ouvrage, la France périphérique, souligne que la politique de la ville s’est avérée être un puissant instrument de redistribution au profit quasi-exclusif des banlieues dites « sensibles », c’est-à-dire des zones à forte concentration immigrée [43].

En résumé, les pays européens connaissent aujourd’hui une situation dans laquelle une part croissante de la population subit de profondes mutations qui menacent son identité, avec le sentiment que seule une petite élite est capable de se mettre à l’abri des conséquences négatives de ces mutations. Cette situation apparaît de plus en plus visiblement liée à un modèle libéral qui s’avère être un système des plus profitables pour une minorité et un laminoir pour les couches populaires et la classe moyenne, comme il le fut déjà au XIXème siècle. Tous les ingrédients semblent donc réunis pour que ce que l’on qualifie généralement de populisme, souvent pour le discréditer, gagne du terrain.

Le populisme, un modèle en quête d’une troisième voie ?

En réponse à la crise identitaire causée par les bouleversements induits par la mondialisation libérale et par la perte de sens ressentie par les individus des sociétés occidentales, on observe un développement des mouvements populistes qui apparaissent ainsi comme une des formes les plus visibles des réveils identitaires en cours. En effet, les mouvements populistes actuels ont le plus souvent pour caractéristique commune de contester des élites acquises à la mondialisation libérale.

Toutefois, la notion même de populisme est problématique pour deux raisons : d’une part la très grande diversité des mouvements qualifiés de populistes et d’autre part l’usage polémique qui est fait de ce terme [44]. En effet, la réduction du populisme aux mouvements populistes des années 1930 apparaît comme un artifice rhétorique régulièrement utilisé pour discréditer le populisme, alors conçu comme une simple entreprise anti-démocratique d’instrumentalisation des masses faisant appel aux instincts les plus vils des individus plutôt qu’à leur raison.

Or, cette conception réductrice du populisme, à visée idéologique, ne permet pas de caractériser l’ensemble des mouvements populistes, et notamment pas le populisme russe et nord-américain de la seconde moitié du XIXèmesiècle ni même les mouvements latino-américains du XXème siècle [45]. En outre, elle tend à masquer la critique pertinente, portée par les mouvements populistes, qui consiste à mettre en lumière la crise de légitimité qui affecte les démocraties représentatives dans les pays occidentaux, en tant qu’elles sont confisquées par des oligarchies étatiques ou transnationales [46]. La profonde remise en cause des identités nationales causée par la mondialisation libérale constitue donc le principal facteur explicatif non seulement de la crise des démocraties occidentales mais aussi en retour, du développement du populisme. Ainsi, comme le remarque Guy Hermet, « le populisme comme la démocratie est intrinsèquement lié au cadre national » [47].

hermet06118-G_0.jpgSi la très grande diversité des mouvements populistes rend illusoire tout accord sur une définition unique, on peut néanmoins tenter d’énoncer les principales caractéristiques du populisme. Tout d’abord, il s’agit d’un style de discours, un appel au peuple qui exalte une communauté (peuple demos, c’est-à-dire la communauté des citoyens et/ou peuple ethnos, c’est-à-dire une communauté ethno-culturelle) en tant qu’elle est porteuse de valeurs positives (vertu, bon sens, simplicité, honnêteté,…) et qu’elle s’oppose à une élite au pouvoir, considérée comme délégitimée. Ensuite, le populisme ne s’incarne pas dans un régime politique particulier (une démocratie ou une dictature peuvent avoir une orientation populiste) ni même ne revêt en soi un contenu idéologique déterminé : il se caractérise par la recherche d’une 3ème voie entre le libéralisme et le marché d’une part et le socialisme et l’Etat-Providence de l’autre [48]. En cela, il se veut un dépassement du clivage droite-gauche [49].

Enfin, le populisme tend à émerger dans des périodes de changements profonds et/ou de crise de légitimité c’est-à-dire, en particulier, de crise du système de représentation [50]. Pour Christopher Lasch, la cause profonde du développement actuel du populisme, ainsi d’ailleurs que du communautarisme, résiderait dans le déclin des Lumières que révèlent les doutes croissants sur l’existence d’un système de valeurs qui transcenderait les particularismes [51].

Les populismes qui s’affirment actuellement, notamment dans les pays occidentaux, combinent pour beaucoup une double dimension protestataire et identitaire. La dimension protestataire se manifeste par un appel au peuple demos (les citoyens) à l’encontre d’élites accusées d’avoir confisqué le pouvoir par le biais de fausses alternances et ainsi d’avoir transformé la démocratie en une oligarchie. La dimension identitaire se manifeste par un appel au peuple ethnos qui vise à critiquer les effets néfastes de l’immigration massive ainsi que les politiques prônant le multiculturalisme et la diversité. C’est en jouant sur ces deux registres que Donald Trump a pu remporter l’élection présidentielle américaine de 2016. En effet, la campagne de Trump a été, en quelque sorte, la mise en application des analyses développées en 2004 par Samuel Huntington dans son ouvrage Who are we ? America’s Great Debate, traduit en Français sous le titre Qui somme nous ? Identité nationale et choc des cultures.

who-are-we-9780684870540_hr.jpgPour Huntington, depuis la fin du mouvement des droits civiques dans les années 1965 qui a fait des Afro-Américains des citoyens de plein exercice, l’identité nationale américaine ne se définit plus par un critère racial et ne revêt plus que deux dimensions : une dimension culturelle (c’est-à-dire la culture anglo-protestante des XVIIème-XVIIIème siècles, héritée des Pères fondateurs) et une dimension politique (« the Creed ») constituée des grands principes à vocation universaliste que sont la liberté, l’égalité, la démocratie, les droits civiques, la non-discrimination, l’Etat de droit [52] (principes qui sont, en quelque sorte, l’équivalent de ce que l’on désigne habituellement en France par « valeurs républicaines »). Or, Huntington souligne que l’identité américaine est gravement menacée pour deux raisons.

D’une part, la dimension politique de l’identité américaine est en elle-même fragile en ce que les principes qui la composent étant universels, ils ne permettent pas de distinguer les Américains d’autres peuples et donc de constituer une communauté qui fasse sens pour les individus [53]. A cet égard, Huntington remarque que le communisme qui aura duré 70 ans a laissé place à un regain identitaire à caractère ethno-culturel dans les pays d’Europe de l’Est et en Russie [54].

D’autre part, la dimension culturelle de l’identité nationale américaine est elle-même en passe d’être remise en cause du fait de l’immigration massive, en particulier d’origine hispanique (développement du bilinguisme [55], d’une éducation multiculturelle [56], craintes de revendications voire de sécessions territoriales par exemple en Californie [57]) et de l’action des élites politiques, judiciaires, économiques et médiatiques qui soutiennent et encouragent le développement du multiculturalisme et de la diversité, c’est-à-dire les revendications identitaires croissantes de type racial et ethnique de la part des minorités [58].

Ainsi, tout en proférant une dénonciation féroce contre les élites corrompues (« l’establishment », le « clan » Clinton), le candidat Trump s’est attaché à prendre en compte cette dimension culturelle (entendue au sens large comme mode de vie) de l’identité nationale américaine en proposant des mesures susceptibles de répondre aux craintes de nombreux Américains face à la dégradation de leur cadre de vie (mesures protectionnistes face à la désindustrialisation et au chômage, lutte contre la délinquance et contre l’immigration illégale notamment mexicaine). Le programme de Trump en conjuguant libéralisme (remise en cause de l’Obamacare) et nationalisme (mesures protectionnistes vis-à-vis de la Chine et du Mexique) met en lumière le syncrétisme idéologique du populisme qui s’affirme en effet comme un modèle en quête d’une troisième voie.

En Europe, l’essor des partis qualifiés de populistes [59] résulte également d’une combinaison des deux dimensions, protestataire et identitaire, avec des degrés variables. L’abstention massive aux élections et/ou le vote pour les partis « hors-système » traduisent la dimension protestataire qui s’explique par le décalage croissant entre d’une part les couches populaires et une frange croissante de la classe moyenne et d’autre part les élites, qu’elles soient politiques, économiques ou médiatiques, auxquelles il est reproché de fausser le jeu démocratique et de confisquer le pouvoir par le biais de fausses alternances. La dimension identitaire est elle aussi vivace du fait d’une immigration incontrôlée d’origine extra-européenne, notamment de culture musulmane. La succession des attentats islamistes en Europe (à Paris, Nice, Bruxelles et Berlin pour ne prendre que les plus récents) ravive le souvenir des luttes séculaires à l’encontre des conquêtes musulmanes en Europe.

Selon C. Guilluy le rejet de cette immigration de masse, qui concerne tous les pays et s’explique par la peur de devenir minoritaire et de perdre le statut de référent culturel, va bien au-delà du vote FN et se traduit par exemple par des phénomènes tels que le contournement de la carte scolaire ou encore la constitution de zones d’habitation séparées [60]. Ainsi, Christophe Guilluy identifie, sur une base géographique, les contours de trois ensembles socioculturels qui se construisent contre la volonté des pouvoirs publics : les catégories populaires, engagées dans un processus de ré-enracinement, qui se relocalisent dans la France périphérique, c’est-à-dire dans les zones géographiques les moins dynamiques économiquement, les catégories populaires d’immigration récente qui se concentrent dans les quartiers de logements sociaux des grandes métropoles et enfin les catégories supérieures, concentrées dans le parc privé de ces mêmes métropoles [61].

Face à ces dynamiques socioculturelles en cours que traduit, au plan politique, l’essor des partis populistes, il reste à s’interroger sur les voies par lesquelles pourrait être ravivée une identité culturelle, civilisationnelle créatrice de sens, c’est-à-dire qui répondrait « à la volonté, de plus en plus manifeste du peuple français, de retrouver en partage un monde commun de valeurs, de signes et de symboles qui ne demandait qu’à resurgir à la faveur des épreuves à venir » [62].

Les leviers d’action métapolitiques

buissonBBBNNNN.jpgOn l’a vu les réveils identitaires peuvent s’analyser comme une tentative de réponse à une crise identitaire caractérisée par la perte de sens au niveau individuel et par la dissolution des identités collectives. Comme le relève Patrick Buisson (photo), cela conduit à se poser « la question qui est au centre de la société française : comment redéployer les solidarités perdues, comment relier de nouveau les individus entre eux ? » [63] Autrement dit, l’enjeu est de retrouver des cadres, des horizons communs qui fassent sens pour l’individu contemporain. A cet égard, il est sans doute illusoire de croire que reviendra le temps où l’identité individuelle était entièrement absorbée par les identités collectives issues des communautés traditionnelles (religieuses, familiales…) et ne s’en distinguaient pas ou peu. L’identité individuelle est devenue plus mouvante, fluide. Avec la modernité, la composante choisie de l’identité a pris le pas sur la dimension héritée.

Dans ce contexte, et face aux menaces qui pèsent sur le cadre de vie des peuples européens, il parait urgent de s’interroger sur les actions à entreprendre en vue d’accompagner les réveils identitaires en cours. Pour guider l’action, deux principes, qui sont liés, nous paraissent pouvoir être mis en avant. D’une part, la lutte contre l’atomisation de la société (résultant de l’individualisme méthodologique, au fondement des théories économiques néo-classiques) en créant des cadres, des cercles, des organisations permettant que se réalise le processus d’identification par lequel chacun peut se définir comme appartenant à un collectif. D’autre part, les logiques de don, de contre-don et de coopération devraient être privilégiées au détriment de la prééminence des intérêts individuels afin de créer des tissus de relations, des rapports de dépendance entre les membres du groupe, et ainsi de renforcer son identité collective [64].

On se focalisera ici sur deux domaines d’action : l’éducation et le domaine économique.

Le déclin du système éducatif français, mesuré notamment par les classements PISA, fait l’objet d’un constat unanime, hormis peut-être parmi les promoteurs de l’idéologie pédagogiste, principaux responsables de la « situation de détresse » et de « banqueroute programmée » [65] de l’école. Cette idéologie néfaste qui prône un égalitarisme radical a eu pour conséquence paradoxale de générer l’inégalité la plus criante qui se manifeste à plusieurs niveaux : accroissement de l’illettrisme, faiblesse de la circulation et du renouvellement des élites, mise en œuvre de mesures de discrimination positive, etc.

Mais au-delà du pédagogisme qui constitue en quelque sorte une cause immédiate de l’effondrement du système éducatif, la cause profonde de cet effondrement est à chercher dans une crise, un déclin de l’autorité, telle que l’entendait Hannah Arendt, c’est-à-dire de « la conviction du caractère sacré de la fondation, au sens où une fois que quelque chose a été fondé il demeure une obligation pour toutes les générations futures » [66]. Or, poursuit Arendt, « dans le monde moderne, le problème de l’éducation tient au fait que par sa nature même l’éducation ne peut faire fi de l’autorité, ni de la tradition, et qu’elle doit cependant s’exercer dans un monde qui n’est pas structuré par l’autorité ni retenu par la tradition » [67].

Dans ce contexte, il parait impérieux de restaurer des structures de transmission culturelle inspirées de modèles éprouvés, c’est-à-dire régies par des principes visant à rétablir des objectifs d’excellence et à susciter l’émulation (modèle jésuite), à former le caractère autant que l’intelligence (modèle de l’école française républicaine), à valoriser la tradition qui définit l’identité (modèle des public schools britanniques) et à restaurer l’autorité et la discipline en associant à cette entreprise les intéressés eux-mêmes (modèle jésuite) [68].

Dans cette perspective, il s’agit d’encourager les initiatives visant à la création d’écoles hors contrat s’inspirant des modèles éducatifs ayant fait la preuve de leur efficacité mais également d’associations à vocation éducative et culturelle ayant pour objet la transmission des valeurs et des savoirs, tel l’Institut Iliade, dont on pourrait imaginer un développement sur le modèle des Lancastrian schools. A cet égard, il serait intéressant de créer une plateforme sur Internet recensant les différents projets existants afin de leur donner une meilleure visibilité et de permettre ainsi à un plus large public d’y adhérer voire d’y contribuer. La possibilité de financements participatifs (crowdfunding) pourrait aussi être envisagée.

mark_cropped.jpgDans le domaine économique, un large champ d’actions à vocation identitaire parait ouvert, qui peut s’appuyer sur des fondements théoriques permettant de s’abstraire de la pure logique marchande. A cet égard, le courant de la Nouvelle Sociologie Economique auquel on peut rattacher les travaux de Mark Granovetter (photo) sur les réseaux, vise notamment à remettre en cause la vision sous-socialisée des relations économiques qui est celle de l’individualisme méthodologique et qui fonde les théories néo-classiques. Pour Granovetter, l’économie n’est qu’un sous-ensemble qui s’inscrit au sein d’un ensemble plus vaste et construit à partir d’une logique proprement sociale.

A la vision de l’individu rationnel maximisant ses intérêts privés, il oppose la vision d’acteurs insérés, encastrés dans des réseaux de relations sociales. L’encastrement, concept clé de Granovetter, revêt une triple dimension. Tout d’abord, une dimension cognitive dans la mesure où la rationalité de l’individu est limitée et non absolue. Une dimension culturelle, ensuite, au sens où l’action économique est inspirée par des valeurs, des croyances et des habitudes culturelles. Une dimension structurelle, enfin, car les relations économiques sont insérées dans des systèmes durables et concrets de relations sociales, c’est-à-dire des réseaux interpersonnels, fondés sur des logiques d’appartenance, de communauté, voire des normes de réciprocité.

Or, les travaux de Granovetter ont montré que des marchés fortement encastrés permettaient d’une part d’accroitre la confiance entre les agents et d’autre part d’améliorer la circulation et la qualité de l’information, deux conditions nécessaires à la réalisation d’activités économiques. Les groupes d’affaires (zaïbatsu japonais, chaebols coréens, grupos americanos d’Amérique latine…), liés par des relations de confiance interpersonnelle sur la base d’une même origine personnelle ethnique ou communautaire, constituent un des nombreuses applications du concept d’encastrement [69]. De plus, la nature des liens sociaux au sein du réseau est également déterminante, y compris dans le domaine économique.

A cet égard, Granovetter établit la distinction devenue classique entre liens forts et liens faibles : « la force ou la faiblesse d’un lien est une combinaison de la quantité de temps, de l’intensité émotionnelle, de l’intimité (la confiance mutuelle) et des services réciproques qui caractérisent ce lien » [70]. Cette distinction met en évidence l’intérêt des liens faibles [71] : « plus grande est la proportion des liens faibles, plus grand est l’accès aux informations ; plus grande est la proportion de liens forts, plus grande est la probabilité qu’une information soit redondante et que le groupe se constitue en clique » [72]. Appliquée à l’entrepreneuriat, Granovetter a toutefois montré la prédominance des liens forts au démarrage de l’entreprise et l’importance des liens faibles dans la phase de développement [73].

Encastrement au sein d’un réseau, liens forts, liens faibles sont des concepts qui se sont révélés particulièrement riches pour expliquer notamment les comportements sur le marché du travail, l’innovation (clusters) ou encore l’entrepreneuriat. Ainsi, l’entrepreneuriat ethnique ou identitaire peut être analysé à la lumière de ces notions. L’économie du Pays basque en est un exemple typique : succès de la marque « 64 », fondé sur l’attachement à l’identité basque, les produits identitaires (bière basque, Cola basque…), le succès de la coopérative Mondragon au Pays basque espagnol [74]

L’entrepreneuriat ethnique, analysé par Edna Bonacich [75], peut également servir, dans une certaine mesure, de source d’inspiration. Cet auteur relève que certaines minorités ethniques (les Arméniens en Turquie, les Juifs en Europe, les Syriens en Afrique de l’Ouest, les Chinois en Asie du Sud-Est, les Japonais ou les Grecs aux Etats-Unis) ont pour spécificité de jouer, au plan économique, un rôle d’intermédiaire (activités commerciales, de location, de prêt…) entre producteur et consommateur [76]. Les modes d’organisation de ces minorités, dont les liens communautaires sont très forts [77], méritent d’être analysés, notamment sur le plan économique [78].

Aujourd’hui, on observe également des initiatives, attestant d’un certain réveil identitaire en matière économique, qui méritent d’être encouragées : tentatives de développement d’un tourisme identitaire manifestant l’attachement aux territoires ruraux [79], apparition de tentatives d’intégration verticale dans le domaine agricole (reprise par une coopérative d’agriculteurs de l’abattoir du Vigan [80] en vue de garantir un traitement éthique des animaux [81])…

Les réveils identitaires en matière économique pourraient aussi à l’avenir se manifester par des actions de boycott (on pense notamment à la viande issue de l’abattage rituel). Pour certains, le boycott serait au modèle postindustriel ce que la grève était au modèle industriel. Dans le modèle capital contre travail, le contre-pouvoir vient du fait que le travailleur peut priver le patron de sa puissance de travail. Le boycott constituerait quant à lui une forme possible de contre-pouvoir face à une économie mondialisée, l’arme d’une société civile mondiale forte de son pouvoir d’achat [82].

L’efficacité du boycott dépend de la capacité à créer une identité collective autour de l’événement, ce qui implique de réunir toute une série de conditions [83] : définition d’objectifs clairs, réalistes et mesurables formulés dans un message intellectuellement simple et attractif sur le plan émotionnel, soutien des médias [84], l’existence d’une cible clairement identifiée, l’existence d’une solution alternative offerte au consommateur qui soit notamment identifiable [85] et une forte solidarité du groupe mobilisé (existence de réseaux bien organisés). Dans le cas de la viande hallal, l’une des difficultés consiste dans l’impossibilité d’identifier aisément les alternatives du fait du non étiquetage du mode d’abattage.

Les réveils identitaires qui se manifestent dans la période actuelle sont multiformes : ils se traduisent au plan politique, notamment à travers la montée des populismes, mais sont également perceptibles dans le domaine de l’éducation et de l’économie. Aurait aussi mérité d’être évoqué le domaine social et notamment le thème de l’exclusion [86] ; domaine qu’investissent fortement les minorités, notamment de confession musulmane, qui y voient la mise en application du concept de « citoyenneté croyante » développé par Tariq Ramadan [87]. Il aurait également été intéressant d’aborder la question du développement de réseaux communautaires à l’échelle européenne et de réfléchir à des formes d’action commune.

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Ces réveils identitaires ne sont pas surprenants. Avec le déclin des identités collectives et des sociabilités issues des grands récits eschatologiques caractéristiques de la modernité, eux-mêmes en voie d’effacement [88], la quête d’identité devient un enjeu toujours plus crucial pour l’individu contemporain : « les hommes et les femmes recherchent des groupes auxquels ils peuvent appartenir assurément et pour toujours, dans un monde dans lequel tout le reste bouge et change » [89]. Dans ce contexte, la recherche de cadres, d’horizons communs et de récits adaptés permettant au processus d’identification de se réaliser reste bien le grand défi actuel.

Étienne Malret
Mémoire de fin de cycle de formation ILIADE
Promotion Don Juan d’Autriche, 2016/201


Annexe 1 : Liens faibles et organisations communautaires [90]

Analysant la nature des liens sociaux structurant les réseaux à partir du cas de deux communautés habitant deux quartiers distincts de Boston, soumis à des plans de « rénovation urbaine » visant in fine à la destruction de ces quartiers, Granovetter se pose la question essentielle suivante : pourquoi certaines communautés s’organisent aisément et efficacement en vue de l’accomplissement de buts communs (en l’espèce la défense d’un quartier d’habitation) alors que d’autres semblent incapables de mobiliser des ressources même face à des menaces pressantes ?

Pour l’auteur, la cause de l’incapacité de l’une des communautés (en l’espèce une communauté d’origine italienne) à s’organiser pour la défense de son quartier réside dans la nature des liens sociaux qui structurent cette communauté. Ainsi, il observe que la communauté italienne se caractérise d’une part, par l’existence de liens forts au sein des sous-groupes (familles, amis…) constitutifs de cette communauté et d’autre part, par une fragmentation globale de la communauté. Cette fragmentation globale s’explique par le manque de liens faibles entre les sous-groupes (les cliques selon sa terminologie), attesté par la pauvreté du tissu associatif et par le fait que très peu d’habitants de cette communauté travaillent au sein même du quartier. A l’inverse, la communauté ouvrière de Charleston, l’autre quartier de Boston soumis au plan de rénovation, a réussi à s’organiser efficacement contre un tel plan. Selon Granovetter, la raison en est que cette communauté possédait une vie associative riche et que presque tous les hommes résidaient et travaillaient au sein même du quartier.

Cet exemple montre l’importance et la force des liens faibles ainsi que le risque d’enfermement qu’induit l’existence de liens forts.

Annexe 2  : The middleman theory

L’organisation de certaines communautés ethniques très intégrées, étudiées par Edna Bonacich dans son article « A theory of Middleman Minorities », repose sur plusieurs spécificités. Tout d’abord, des mécanismes de financement intra-communautaires préférentiels sont mis en place : prêts à taux bas voire à taux zéro, système de la parentèle (pot commun abondé par les versements réguliers des membres de la communauté) au profit des membres de la communauté en vue notamment de leur permettre de démarrer une activité indépendante. Ensuite, une maîtrise de la chaîne de valeur est recherchée, dans la mesure du possible, par une intégration verticale des activités économiques, notamment dans le domaine agricole. Enfin, des salaires bas et une vie communautaire qui, combinés aux mécanismes de financement intra-communautaires et à un fort taux d’épargne, permettent d’abaisser les coûts de revient et d’être compétitifs.

Les succès économiques de ces minorités ethniques (en particulier les Chinois, les Indiens et les Juifs) aboutissent à des phénomènes de concentration et de domination sectorielle (surtout dans le commerce) qui s’observent partout dans le monde. Ces succès liés à l’efficacité de l’organisation de cette économie communautaire sont aussi attestés par les tensions et conflits générés du fait de l’intensification de la concurrence économique.

Notes

[1] Cf. Denise Jodelet : « Le mouvement de retour vers le sujet et l’approche des représentations sociales », Connexions 2008/1 (n°89), p. 25-46.
[2] Cf. Pierre-André Taguieff : « L’idée de progrès, la «religion du Progrès» et au-delà. Esquisse d’une généalogie », Krisis n°45 – Progrès ?
[3] « L’identité est un produit de la conscience de soi ; conscience que l’on possède, individuellement ou collectivement, des qualités distinctes qui nous différencient des autres » (Samuel Huntington, Who are we ? America’s Great Debate, Free Press, 2005, p.21).
[4] Charles Taylor, Les sources du moi. La formation de l’identité moderne, Seuil, 1998, p.46.
[5] Alain de Benoist, « Identité, égalité, différence » in Critiques – Théoriques, L’Age d’Homme, 2002, p. 418.
[6] Paul Ricoeur, Temps et récit, tome 3 : Le temps raconté, Points Seuil, 1991 (3ème édition), p.443.
[7] Paul Ricoeur, op. cit., p.444.
[8] Opposition résolue des pays dits du « Groupe de Visegrad » à la politique migratoire de l’UE, élection présidentielle française, etc.
[9] Tous les enjeux posés dans l’ouvrage précité de Huntington sont au cœur de l’élection présidentielle américaine de 2016.
[10] Gilbert Durand, L’imagination symbolique, Paris, PUF, 1964, p.23.
[11] Leo Strauss, La philosophie politique et l’histoire, Le livre de poche, p.212 et s.
[12] Ainsi, parmi les menaces pesant sur l’identité nationale des Etats-Unis, Samuel Huntington mentionne notamment la mondialisation et le cosmopolitisme (cf. Samuel Huntington : op. cit., p.4.). Néanmoins, si les identités nationales apparaissent aujourd’hui particulièrement menacées par la mondialisation libérale, il faut aussi remarquer qu’elles sont elles-mêmes le produit de la modernité, comme l’a montré Louis Dumont. Dès lors, la crise des identités nationales peut également s’analyser, dans une large mesure, comme la résultante de contradictions internes à l’idée même d’Etat-Nation.
[13] « C’est une idéologie allergique à tout ce qui spécifie, qui interprète toute distinction comme potentiellement dévalorisante ou dangereuse, qui tient les différences que l’on peut constater entre les individus et les groupes comme contingentes, transitoires, inessentielles ou secondaires. Son moteur est l’idée d’Unique. L’unique est ce qui ne supporte pas l’Autre, et entend ramener tout à l’unité : Dieu unique, civilisation unique, pensée unique » (Alain de Benoist, op. cit., p. 413).
[14] Charles Taylor, op. cit., p.623-624.
[15] Michel Maffesoli, Le Temps des tribus – Le déclin de l’individualisme dans les sociétés postmodernes, La Table Ronde, 2000, préface à la 3ème édition, p. V et VI.
[16] A cet égard, Huntington relève que l’affaiblissement de l’identité nationale des Etats-Unis du fait de la mondialisation a laissé place à une affirmation des identités ethniques, raciales et des identités liées au genre (cf. Samuel Huntington : op. cit., p.4).
[17] Revue Eléments n°131, avril-juin 2009, entretien avec Alexandre Douguine.
[18] Revue Eléments n°131, avril-juin 2009, p.36.
[19] Cf. le débat édifiant diffusé sur Arte, à l’occasion de l’affaire des viols de Cologne, au cours duquel les journalistes reconnaissent eux-mêmes l’existence de ce traitement de faveur réservé aux délinquants d’origine immigrée. Un extrait de ce débat peut être visionné sur Internet (http://www.ojim.fr/occultation-de-lorigine-des-delinquants-dans-les-medias-laveu-de-quatremer/).
[20] Christopher Lasch, La révolte des élites et la trahison de la démocratie, Flammarion, 2007, p.144. Selon Lasch, ces politiques de discrimination positive vont non seulement profondément à l’encontre de la culture américaine, fondée sur la prééminence de la responsabilité individuelle, mais elles constituent aussi une cause d’échec pour la majorité des individus appartenant à ces minorités dans la mesure où, intériorisant leur statut de victimes, ils éprouvent souvent de plus grandes difficultés à acquérir le respect d’eux-mêmes.
[21] Christopher Lasch, op. cit., p.145-146.
[22] Samuel Huntington : op. cit., p.344.
[23] Jacques Le Goff, l’Europe est-elle née au Moyen Age ?, Seuil, 2003, p.196.
[24] Jacques Le Goff, op. cit., p.258.
[25] En témoigne la filmographie parfois qualifiée de « réactionnaire » qui connait de larges succès d’audience : Le fabuleux destin d’Amélie Poulain, La famille Bélier…
[26] Alain de Benoist, « Critique de l’idéologie libérale » in Critiques – Théoriques, L’Age d’Homme, 2002, p.13 : « Le libéralisme est une doctrine qui se fonde sur une anthropologie de type individualiste, c’est-à-dire qu’elle repose sur une conception de l’homme comme être non fondamentalement social ». Pour l’auteur, se fondant notamment sur les travaux de Louis Dumont, les deux traits caractéristiques du libéralisme, à savoir la notion d’individu et celle de marché « sont directement antagonistes des identités collectives ».
[27] Luc Boltanski et Eve Chiapello, Le nouvel esprit du capitalisme, Gallimard, 2011, p.55.
[28] Cf. Marc Muller « Les Lumières contre la guerre civile – Le libéralisme ou l’idéologie du Même », Nouvelle Ecole n°65, 2016, p.34.
[29] Jean-Claude Michéa, L’empire du moindre mal – Essai sur la civilisation libérale, Flammarion, 2007, p.28 : « En replaçant ainsi la question de la pacification de la société au centre des problèmes, il devient plus facile de penser à la fois l’originalité absolue du projet moderne, les principes de l’anthropologie qui l’accompagnent et, surtout, l’unité profonde des deux figures philosophiques sous lesquelles le libéralisme va porter ce projet à son accomplissement logique ».
[30] Jean-Claude Michéa, op. cit., p.52.
[31] Cf. Marc Muller, article précité, p.37.
[32] « La paix est un souhait, la guerre est un fait », éditorial de la revue Conflits, hors-série n°1 (Hiver 2014) relatif à la guerre économique, p.5.
[33] Cf. Hervé Coutau-Bégarie: « A quoi sert la guerre ? », Krisis n°34, juin 2010 – La guerre (2) ?, p.19. Pour C. Lasch, ces mouvements d’unification et de fragmentation sont liés à l’affaiblissement de l’Etat-Nation. Affaiblissement lui-même causé par le déclin de la classe moyenne sur laquelle s’étaient appuyés les fondateurs des nations modernes dans leur combat contre la noblesse féodale. Ainsi, selon C. Lasch, la culture de la classe moyenne (sens du territoire et respect pour la continuité historique) qui servait de cadre de référence commun est en train de se décomposer pour laisser place à des factions rivales (Christopher Lasch, op. cit., p.59-60).
[34] Pascal Gauchon, « Guerre civile. Guerre de la mondialisation », Revue Conflits, Avril-Mai-Juin 2016, p.46.
[35] Cf. Marc Muller, article précité, p.35.
[36] Cf. Marc Muller, article précité, p.36.
[37] Jean-Claude Michéa relève à cet égard que « la seule guerre qui demeurera concevable, dans un tel dispositif philosophique, est la guerre de l’homme contre la nature, conduite avec les armes de la science et de la technologie ; guerre de substitution, dont les Modernes vont précisément attendre qu’elle détourne vers le travail et l’industrie la plus grande partie des énergies jusque-là consacrées à la guerre de l’homme contre l’homme » (Jean-Claude Michéa, op. cit., p.27).
[38] En France, les 10 % les plus riches captent un peu plus du quart (27 %) de la masse globale des revenus, presque dix fois plus que les 10 % les plus pauvres (2,9 %) [Note de l’Observatoire des inégalités en date du 21 janvier 2014]. Dans le monde, les inégalités moyennes au sein des pays sont plus grandes qu’il y a 25 ans (rapport de 2016 de la Banque mondiale intitulé « Taking on inequality »).
[39] Ainsi, en France, plus d’un million de personnes ont basculé sous le seuil de pauvreté en dix ans. La population vivant sous le seuil de pauvreté représente plus de 14%, soit une personne sur sept. (Le Monde, daté du 8 septembre 2016).
[40] Les trois autres conditions permettant de caractériser un marché concurrentiel sont la condition d’atomicité des offreurs et des acheteurs, la condition d’homogénéité des produits, la condition de transparence de l’information. Cf. Olivier Torrès-Blay, Economie d’entreprise, Economica, 2009, 3ème édition, p.8.
[41] Christophe Guilluy, La France périphérique, Flammarion, 2014, p.134 et s.
[42] Alberto Alesina; Reza Baqir; William Easterly, « Public Goods and Ethnic Divisions », The Quarterly Journal of Economics, Vol. 114, No. 4. (Nov., 1999), pp. 1243-1284. Dans son ouvrage « Economie du bien commun », Jean Tirole conclut de cette étude que la préférence communautaire, la préférence nationale sont des réalités, qu’il déplore, mais dont il admet qu’il faut tenir compte dans la conception des politiques publiques (Jean Tirole, Economie du bien commun, PUF, 2016, p.92).
[43] Christophe Guilluy, op. cit., p.172.
[44] Pierre-André Taguieff « Le populisme et la science politique » in Les Populismes, sous la direction de Jean-Pierre Rioux, Perrin, 2007, p.17.
[45] Pierre-André Taguieff, op. cit., p.18-19
[46] Pierre-André Taguieff, L’illusion populiste, Flammarion, 2007, p.201.
[47] Guy Hermet, Les populismes dans le monde – Une histoire sociologique XIXème – XXème siècle, Fayard, 2001, p. 45.
[48] Christopher Lasch, La révolte des élites et la trahison de la démocratie, Flammarion, 2007, p.109
[49] Christopher Lasch, op. cit., p.110.
[50] Pierre-André Taguieff, « Le populisme et la science politique » in Les Populismes, sous la direction de Jean-Pierre Rioux, Perrin, 2007, p.25.
[51] Christopher Lasch, op. cit., p.101-102.
[52] Samuel Huntington : op. cit., p.38.
[53] Samuel Huntington : op. cit., p.342-343. Dans le même sens, cf. Emilio Gentile, Les religions de la politique – Entre démocraties et totalitarismes, Seuil, 2005, p.261 : l’auteur relève que, par rapport aux religions traditionnelles, les idéologies politiques, qu’il appelle les religions de la politique, revêtent un caractère éphémère.
[54] Ce qui justifia l’utilisation polémique du terme « populiste » pour qualifier, à la fin des années 1980, les dirigeants de ces pays (Boris Eltsine à ses débuts, Lech Walesa…), à la fin des années 1980, après l’effondrement des régimes communistes (cf. Guy Hermet, op. cit., p.58).
[55] Samuel Huntington : op. cit., p.162.
[56] Samuel Huntington : op. cit., p.176.
[57] Samuel Huntington : op. cit., p.233.
[58] Samuel Huntington : op. cit., Préface p.XVII.
[59] La Ligue du Nord en Italie, l’UDC en Suisse, le PVV aux Pays-Bas, le FN en France, le FPÖ en Autriche, le UKIP en Grande-Bretagne…
[60] Christophe Guilluy, op. cit., p.135-136 et p.150.
[61] Christophe Guilluy, op. cit., p.158-163.
[62] Patrick Buisson, La cause du peuple –L’histoire interdite de la présidence Sarkozy, Perrin, 2016, p.324.
[63] Patrick Buisson, op. cit., p.437.
[64] Strategor, Dunod, 2009, p.792.
[65] Ces termes sont ceux de Roger Fauroux ancien directeur de l’ENA, cité par Alain Kimmel dans son article « L’enseignement en France : état des lieux », Krisis n°38, Education ?, p.150-157.
[66] Hannah Arendt, La crise de la culture, huit exercices de pensée politique, Gallimard, coll. « Folio essais », 1989 [1972], p.159. H. Arendt précise que « le mot auctoritas dérive du mot augere, augmenter, et ce que l’autorité ou ceux qui commandent augmentent constamment : c’est la fondation. Les hommes dotés d’autorité étaient les anciens, le Sénat ou les patres qui l’avaient obtenue par héritage et par transmission de ceux qui avaient posé les fondations pour toutes les choses à venir, les ancêtres, que les Romains appelaient pour cette raison les maiores ». (H. Arendt, op. cit., p.160).
[67] Hannah Arendt, op. cit., p.250.
[68] Pour un panorama de ces modèles, cf. Jacques Berrel « Les modèles éducatifs qui ont fait l’Europe », la Nouvelle Revue d’Histoire n°26, Septembre-Octobre 2006, p.48-51.
[69] Isabelle Huault, « Embeddedness et théorie de l’entreprise – Autour des travaux de Mark Granovetter », Annales des Mines, Gérer et comprendre, Juin 1989, p.73-86. L’auteur précise que « la confiance et le partage de croyances (…) apparaissent comme des ingrédients essentiels pour atteindre le niveau de coordination souhaité ».
[70] Olivier Torrès-Blay, op. cit., p.263.
[71] Cf. Annexe 1.
[72] B. Chollet : « L’analyse des réseaux sociaux : quelles implications pour le champ de l’entrepreneuriat ? », 6èmeCongrès international francophone en entrepreneuriat et en PME, HEC Montréal, Octobre 2002, cité par Olivier Torrès-Blay, op. cit., p.266.
[73] Mark Granovetter, Le marché autrement, Essais de Mark Granovetter, Desclée de Brouwer, 2000, cité par Fabien Reix in « L’ancrage territorial des créateurs d’entreprises aquitains : entre encastrement relationnel et attachement symbolique », Géographie, économie et société, 2008/1 (Vol. 10), p.29-41.
[74] La coopérative Mondragon a souvent été érigée en modèle et ses succès économiques ont fait l’objet de nombreuses analyses : cf. notamment Philippe Durance, « La coopérative est-elle un modèle d’avenir pour le capitalisme ? – Retour sur le cas de Mondragon », Annales des Mines – Gérer et comprendre 2011/4 (N° 106), p.69-79 ; Jean-Michel Larrasquet, « Crise, coopératives, innovation et territoire », Projectics / Proyéctica / Projectique 2012/2 (n°11-12), p.157-167 ; Christina A. Clamp, « The Evolution of Management in the Mondragon Cooperatives », disponible sur Internet, à l’adresse : http://community-wealth.org/content/evolution-management-mondrag-n-cooperatives.
[75] « A theory of Middleman Minorities », American Sociological Review, Octobre 1973, p.583-594.
[76] Elle note à cet égard que ce phénomène est particulièrement observé dans les sociétés caractérisées par un fossé entre les élites et les masses comme par exemple dans les sociétés coloniales ou encore les sociétés féodales, marquées par la division entre masses paysannes et aristocratie. La fonction des minorités est alors de combler ce fossé.
[77] Résistance aux mariages extérieurs à la communauté, établissement d’écoles et d’associations de nature culturelle et linguistique pour leurs enfants, peu d’implication dans la politique locale sauf pour ce qui touche directement à leurs intérêts communautaires…
[78] Cf. Annexe 2.
[79] Cf. par exemple le site http://www.accueil-paysan.com/fr/
[80] Cet abattoir avait été fermé en 2016 pour cause de maltraitance animale.
[81] Pierre Isnard-Dupuy, Reporterre, le quotidien de l’écologie, « Des petits paysans veulent faire de l’abattoir du Vigan un exemple éthique », 17 février 2017 (article disponible en ligne sur le site www.reporterre.net).
[82] Cf. Ulrich Beck, cité par Ingrid Nyström et Patricia Vendramin in Le Boycott, Presses de Sciences Po (P.F.N.S.P.), 2015, p.93-120.
[83] Nyström et Patricia Vendramin, op. cit., p.93-120.
[84] Même si aujourd’hui, la capacité de contagion passe d’abord et avant tout par le web et les réseaux sociaux. Ainsi, en 2011, les Anonymous, suite à leur appel à boycotter Paypal, lancé sur leur compte Twitter, avaient annoncé au bout d’une journée, neuf mille désinscriptions de comptes Paypal. La société eBay, maison mère de Paypal, dévissa en bourse et perdit un milliard de dollars en une heure de cotation à Wall Street.
[85] L’alternative au produit boycotté doit être de qualité équivalente, disponible en quantité suffisante et identifiable.
[86] Sur ce thème, cf. notamment Alain de Benoist, « Du lien social » in Critiques – Théoriques, L’Age d’Homme, 2002, p.196-214.
[87] Konrad Pedziwiatr, « L’activisme social des nouvelles élites musulmanes de Grande-Bretagne », Hermès, La Revue, 2008/2, CNRS éditions, (n°51), p.125-133. L’auteur y décrit les activités d’une association basée à Londres, The City Circle, qui, notamment, met en œuvre des projets de nature éducative (tutorat, école du samedi, conseils d’orientation professionnelle, techniques d’entretien…) et organise des réunions hebdomadaires visant à discuter des questions touchant à la population musulmane.
[88] Emilio Gentile, op.cit., p.250-251.
[89] Eric Hobsbawn, « The Cult of Identity Politics » in New Left Review, n°217, 1996, p.40, cité par Zygmunt Bauman, in « Identité et mondialisation », Lignes 2001/3 (n° 6), p.10-27.
[90] Mark Granovetter, « The Strength of Weak Ties », American Journal of Sociology, Volume 78, Mai 1973, p.1360-1380.

lundi, 13 février 2017

Calling One’s Political Opponents the “F” Word

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Calling One’s Political Opponents the “F” Word

My young friend Jack Kerwick in a column on townhall stated that protestors against Donald Trump who are destroying property and assaulting suspected Trump supporters are “not snowflakes but leftist thugs.” Jack is absolutely right in his description, although there is another qualification that I would add. Contrary to other commentaries that I see on the same website and on other Republican forums, the protestors aren’t “fascists.” They are exactly what Jack calls them, “leftist thugs.” Last year I published a carefully researched book on the uses and abuses of the term “fascist.” What motivated this project was first and foremost the tendency of journalists to call anything they didn’t fancy “fascist.” Those leftists, including a distinguished professor of European history at Yale University, Tim Snyder, who has gone after President Trump as a “fascist” or, even more ridiculously, as a “Nazi,” are using political terms with inexcusable recklessness. But then so are Republican publicists who hurl the same epithets at Democrats and who now refer to the anti-Trump protesters as fascists.

The word “fascist” has a definite historical reference point. It does not signify any group that engages in violent demonstrations or refuses to accept the election results of an American presidential contest. My book painstakingly distinguishes “fascists,” who came to power in Italy after World War One, from the German Nazis, who borrowed heavily from Stalinism as well as Latin fascism. Generic fascists came mostly out of a Latin Catholic cultures and favored a nationalist authoritarian government that would restore the glories of a partly mythic past. Fascism also served a counterrevolutionary function, as a force of resistance to revolutionary socialism. But fascists looked and acted in a sufficiently iconoclastic or disruptive manner to be mistaken for genuine revolutionaries. The German historian Ernst Nolte was on the mark when he characterized the fascists as “a counterrevolutionary imitation of the Left.”

In my book, I point out that the theory and reality of interwar fascism should not be equated with whatever a political partisan wishes to rant against. People can be violent without being fascists; and most contemporary advocates of an expanded administrative state are not trying to revisit the experiences of Mussolini’s Italy. Even less are they endorsing violence or big government for the reasons that the Nazis gave. Whatever we may say about Black Lives Matter and LGBT demonstrators, they are not glorifying Aryanism or calling for Lebensraum for Nordic man. Mind you, this does not make these demonstrators any less thuggish or repulsive. But they are, as Jack properly noted, distinctly leftist thugs—and neither fascists nor Nazis. The demonstrators want to destroy our constitutional freedoms and like all leftists, they are explicitly or implicitly totalitarian.

But they also stand for things that Western societies have been taught especially in the last fifty years taught us to revere such as egalitarianism and the interchangeability of all human beings. Even our supposedly conservative press does not attack Jack’s thugs for the ideals they profess but rather refer to these vandals as fascists or Nazis.  It would be futile in today’s court of public opinion to defend such truly conservative notions as hierarchy and particularity. This may be the case despite the fact that classical conservative ideals are at least as necessary as their opposites for those who value social cohesion and cultural stability. But one rarely encounters the defenses of such ideals in public life anymore; and therefore anyone seeking to make leftists look bad paints them as racists, sexists, and anti-egalitarians.

In a memorable observation, English political theorist John Gray, writing in the London Times Literary Supplement (January 2, 2013) commented that intellectuals continue to deny “the radical evil that has come from the pursuit of progress.” Gray was noting not only the totalitarian direction of leftist attempts to reconstruct human nature. He was also underlining the unwillingness of intellectuals to recognize the inherent danger of those ideals that the Left embraces. We continue to celebrate ideals that have been carried to excess and which now operate without the stabilizing influence of opposing principles? One might also ask whether the Left’s triumphant ideals are better than those taught by defenders of custom and traditional authority, going all the way back to Confucius and Aristotle.

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But what I’m offering is not so much a defense of conservative principles as an explanation for why our soi-disant conservatives call those they don’t like “fascists.” This is the same kind of stuff we encounter when conservative publicists try to blacken the current Democratic Party by identifying it with antebellum slave-owners? This morning a distinguished classical historian, who is beloved to our conservative establishment, Victor Davis Hanson, resorted to this shtik when he scolded California secessionists. Does Hanson, who is a well-educated scholar, really believe that the Cultural Marxists in California who want to pull their state out of Donald Trump’s America are the modern equivalents of the South Carolina planter class that seceded from the Union in 1861?  This polemic and others of its kind cause me to wonder why our official conservatives don’t tell us that leftists are harmful because they are following specifically leftist ideals.  Why do they have to link their debating partners to some antiquated Right? And even more curiously, why do they assume that talk about equality and human rights is specifically “conservative”?

Yes, I know the usual justification for such habits, namely that those who indulge them are trying to hang the Left on its own petard. But more may be going on here. The conservative establishment has trouble saying the obvious, that the Left holds harmful leftist beliefs and has been implementing these beliefs to the detriment of an inherited social order, for this among other reasons.  So-called conservatives have absorbed so much of the Left’s rhetoric and historical thinking that sometimes it can’t distance itself, at least not on first principles, from what it criticizes.

This was first brought home to me dramatically when I read a column by Jonah Goldberg in National Review in 2002. In this commentary, Goldberg declaimed against the most illustrious European counterrevolutionary of the early nineteenth century, Joseph de Maîstre (whose name by the way he misspells). According to Goldberg, Maîstre was a toxic leftist thinker because in his Evening Conversations of Saint-Petersburg we find this statement: “There’s no man as such. I’ve only encountered Frenchmen, Italians, and Russians…” Goldberg tells us this illustrates the thinking that the Democrats are promoting when they support minority quotas. Maîstre, we are made to believe, was a precursor of our Left and the Democratic Party, a party that Goldberg would later profitably associate with fascism. It makes no difference to Goldberg (who presumably never read the actual text) that Maîstre’s aphorism was spoken in response to a discussion about the relation between governments and national traditions. Maîstre, who excoriated the French Revolution, from which he fled, was warning against revolutionaries who presumed to inflict their model of government on other countries. These revolutionaries were so fixated on their presumed superior model of government that they tried to make it fit the entire world.

For Goldberg, the fact that Maîstre stresses the distinctive nature of cultures and nations indicates that he was an early representative of the party that Goldberg has made a career out of blasting. Note that I’m not saying that Goldberg is not entitled to his views. But I don’t understand what makes those views “conservative” while the archetypically conservative understanding of human nature expressed in the Evening Conversations would show that Maîstre was an early advocate of Democratic identity politics.  Moreover, Goldberg compares Maîstre to the feminist, black civil rights jurist, Lani Guiniere, who in 1993 was considered by Bill Clinton for the Supreme Court, before her name was withdrawn.

Like Goldberg, Guiniere, a Harvard Professor of Law, has repeatedly affirmed her belief in human rights. Unlike Goldberg, however, she also advocates in her writing an extensive program of minority quotas. She believes, rightly or wrongly, that we can advance these universal rights by treating preferentially those groups whom Guiniere considers to be historically disadvantaged. On this issue, I would come down on the side of Goldberg, because of my fear of the modern administrative state and its increasingly unchecked power. But I doubt that our philosophical concerns would be the same. (And I’m speaking not as a Maîstrean but as someone who can appreciate Maîstre’s insight). What separates Guiniere from Goldberg is a policy difference; what separates her and Goldberg from Maîstre is an entire worldview.