lundi, 18 décembre 2017
« Dans les démocraties libérales, tout est fake news » : entretien avec Alexandre Douguine
« Dans les démocraties libérales, tout est fake news » : entretien avec Alexandre Douguine
Entretien accordé par Alexandre Douguine aux hebdomadaire Knack (version néerlandaise) et Le Vif à Bruxelles
Propos recueillis par Jeroen Zuallaert
Ex: http://zejournal.mobi
« Vous prononcez le mot démocratie comme s’il était sacré. Vous trouvez certainement que les antidémocrates ne sont pas humains ! » Notre confrère de Knack s’est entretenu avec Alexandre Douguine, le prophète autoproclamé de Vladimir Poutine qui rêve d’un empire eurasien où il n’y a pas de place pour les journalistes.
Alexandre Douguine n’est pas l’idéologue maison de Vladimir Poutine. « Ou du moins pas littéralement », admet-il. « À l’heure actuelle, je n’occupe pas de position officielle au sein de l’appareil d’État. Je n’ai pas de ligne directe avec Poutine, je ne l’ai même jamais rencontré. Mais j’ai mes façons de communiquer ».
Pourtant, le terme « idéologue maison » n’est pas mal choisi, estime Douguine. « Si vous comparez mes théories et mes écrits à mon travail, vous pouvez uniquement en conclure que Poutine a suivi pratiquement toutes mes propositions politiques. Il a resserré les liens avec l’Iran et la Turquie et il a annexé la Crimée, ce que je lui recommande depuis des années. Il mise sur les normes et les valeurs traditionnelles. Il a fondé l’Union eurasienne, qui doit constituer la base d’un empire eurasien. Il y a dix ans, j’étais à Washington pour un débat, et on m’a introduit en ces termes : "Ne regardez pas la position de monsieur Douguine, regardez ses écrits et comparez-les aux actes de Poutine". C’est tout à fait ça ».
En Russie, Douguine est surtout populaire dans les cercles militaires, où la lecture de sa Quatrième théorie politique est obligatoire pour les futurs officiers. Cette théorie succède à trois idéologies politiques – le libéralisme, le communisme et le fascisme – qui d’après lui ont perdu leur légitimité. La quatrième théorie politique doit combiner les éléments des trois théories précédentes, même si Douguine semble surtout détester la démocratie libérale. La quatrième théorie politique doit devenir l’idéologie dominante en Eurasie, une alliance géopolitique entre la Russie et l’Europe, qui, tout comme dans 1984 de George Orwell, doit endiguer ce qu’il appelle l’impérialisme américain.
Vous avez qualifié l’investiture de Trump de « l’une des meilleures journées de votre vie ». Êtes-vous toujours de cet avis ?
Alexandre Douguine : Je pouvais à peine en croire mes oreilles ! Pour moi, l’élection de Trump est la preuve que le peuple américain est toujours en vie. Je suis très heureux de l’avènement du trumpisme, même si aujourd’hui il est pris en otage par le Deep State (l’État dans l’État, NLDR). Aujourd’hui, Trump se trouve dans la camisole de force des globalistes américains, on dirait un personnage de Vol au-dessus d’un nid de coucou. Et pourtant, rien que son élection a été une gifle énorme pour l’interventionnisme américain. Grâce à lui, l’Amérique n’est plus le centre de la globalisation. Même s’il n’arrive qu’à implémenter un centième de ce qu’il a promis, ce serait un soutien incroyable pour le projet eurasien.
Assistons-nous à la fin du libéralisme ?
Ce n’est certainement pas encore la fin, mais les aspects négatifs du libéralisme se manifestent de plus en plus clairement. C’est une sorte de fascisme libéral qui considère tout le monde qui ne possède pas au moins un iPhone 6 comme moins humain. La modernité se voit elle-même comme un objectif final, alors que pour les traditionalistes c’est un choix. Heureusement, de plus en plus de personnes comprennent que le libéralisme est fondamentalement une erreur.
Quelle est pour vous l’erreur du libéralisme ?
Il a privé l’homme de toute forme d’identité collective. La religion, les valeurs traditionnelles, la hiérarchie, la conscience nationale : il faut s’en débarrasser. Tout devient optionnel : on peut choisir sa religion, sa nation, et aujourd’hui même son sexe.
Les transgenres sont tout de même une réalité...
Au contraire, c’est l’idéologie pure. L’homme invente ces concepts et la réalité s’y adapte. Les transgenres et l’homosexualité sont une idéologie politique, ils sont le dernier stade du libéralisme.
L’homosexualité a toujours existé, non ?
C’est de la propagande politique pure qui impose des normes de manière totalitaire à la société.
Dans une démocratie libérale, personne n’est contraint à être homosexuel, non ?
À partir du moment où on autorise quelque chose, la norme change. Au fond, les normes sont une sorte de schéma qu’il faut suivre, et si vous tolérez autre chose que la norme, vous en faites automatiquement une nouvelle norme. Si vous autorisez l’homosexualité, vous détruisez la société hétérosexuelle, parce que vous lui enlevez une forme d’identité collective. L’objectif ultime du libéralisme, c’est d’éliminer l’humanité : vous donnez le choix aux gens de poursuivre leur vie comme un cyborg, ou comme un animal.
Il n’y a tout de même personne qui propose ça sincèrement ?
Nous devons comprendre que le libéralisme est un produit de la modernité. Les concepts tels que le racisme, l’esclavage et le totalitarisme sont des concepts européens nés dans la modernité. Quand le libéralisme était encore contraire au fascisme et au communisme, on aurait dit un système antitotalitaire. Mais à présent qu’il n’y a plus de grands ennemis idéologiques, le libéralisme montre son vrai visage. Les idéologues tels que George Soros et Karl Popper divisent le monde en deux groupes : les sociétés ouvertes et fermées. Tout comme les communistes divisaient le monde en capitalistes et prolétaires et les nazis faisaient la distinction entre les ariens et les non-ariens, ils divisent le monde en progressistes – les bons – et les conservateurs – les mauvais.
Cela ne rime à rien, non ? Dans une démocratie libérale, les conservateurs ont tout à fait le droit d’avoir des idées conservatrices.
Dans une démocratie libérale, seuls les conservateurs libéraux sont les bienvenus. Ceux qui ne le sont pas sont immédiatement marginalisés et criminalisés. Les gens comme moi, qui préconisent une démocratie non libérale, sont immédiatement traités de fascistes et de stalinistes. Nous sommes les nouveaux juifs et ouvriers du goulag. Votre société soi-disant ouverte n’accepte que les partisans de la société ouverte.
Mais les partis conservateurs sont tout de même autorisés dans les sociétés occidentales ?
Le débat est mené uniquement parmi les partisans du libéralisme. On peut être libéral de droite et libéral de gauche. On peut être libéral d’extrême droite ou libéral d’extrême gauche. Mais il est impossible d’être non libéral.
Considérez-vous le Front national comme un parti libéral ?
Le FN est un parti libéral d’extrême droite, car il est pour la république et la démocratie. Mais même lui est diabolisé et conspué parce qu’il n’est pas assez libéral.
N’est-il pas normal que les opposants politiques se critiquent entre eux ? Le FN peut tout de même simplement participer aux élections.
Mais ses adeptes sont diabolisés, ce sont des parias ! La même chose vaut pour les personnes qui soutiennent Trump. Si vous êtes dans un café à New York et vous dites que vous avez voté Trump, vous risquez de vous prendre une gifle.
Si vous êtes dans un café à Moscou et vous dites que vous détestez Poutine, vous risquez aussi de vous prendre une gifle.
Je ne suis pas d’accord avec cette analogie. En Russie, on peut parfaitement être anti-Poutine. Le seul moment où nous défendons Poutine, c’est quand nous sommes confrontés aux haïsseurs de l’extérieur. C’est une forme de solidarité russe collective.
Selon votre interprétation, l’Eurasie est-elle une démocratie ?
Vous prononcez le mot démocratie comme s’il était sacré. Vous trouvez certainement que les antidémocrates ne sont pas humains !
C’est une simple question. Votre interprétation de l’Eurasie est-elle démocratique ?
Ah, c’est quoi démocratique ? Disons-le ainsi : pour moi, l’Eurasie ne doit pas être non démocratique. Le taux démocratique de l’Eurasie dépend de ce que décide la société.
N’est-il pas logique qu’une telle décision découle d’un processus démocratique ?
Je trouve qu’une société doit pouvoir décider d’être régie par un monarque ou un dictateur. Le résultat d’une telle décision ne doit pas forcément être une démocratie. La seule véritable décision démocratique en Russie a été prise à l’époque du Zemski Sobor, l’assemblée russe qui a élu le premier tsar des Romanov au 17e siècle. Nous avons choisi un monarque, et nous en avons toujours été contents.
Que se passe-t-il si une société change d’avis ?
Tant qu’il n’y a pas de révolution, il y a un accord tacite qui légitime l’autorité du régime. Les libéraux veulent mettre fin à l’histoire et imposer leur idéologie à tout le monde alors que l’histoire politique est ouverte : la démocratie n’est pas une valeur universelle incontestable que le monde entier n’a qu’à accepter.
Ne trouvez-vous pas problématique que la Russie n’ait pas d’élections impartiales ?
Nos élections sont absolument impartiales, car chez nous elles ne servent pas à amener un nouveau régime au pouvoir. En tant que société, nous sommes plus ou moins contents de Poutine. Alors peu importe le pourcentage exact de gens qui votent pour lui.
Pourtant, vous êtes régulièrement critique vis-à-vis de Poutine ?
Je trouve qu’il ne fait pas ce qu’il a à faire, mais cela ne signifie pas que je ne trouve pas qu’il soit le seul leader légitime possible de la Russie. L’esprit russe fonctionne à plusieurs niveaux. Pour nous, la contradiction n’est pas inacceptable.
Quelle est votre principale critique envers Poutine ?
Je lui reproche d’avoir créé un système où il soit le seul individu capable de prendre une décision. En soi, c’est mieux que le chaos total, mais c’est instable. Poutine se comporte comme s’il était immortel. Malheureusement, il ne l’est pas.
Vous plaidez en faveur d’une dynastie Poutine.
C’est impossible, car pour cela il faut les institutions, et pour fonder ces institutions il faut formuler les principes de votre vision de la société. Il ne le fait pas. Le plus grand problème de Poutine, c’est qu’il n’a pas d’idéologie. C’est un leader génial qui a transformé un pays qui se désagrégeait en puissance souveraine. Aujourd’hui, chacun doit deviner ce qu’il signifie par « démocratie », « tradition », « religion » ou « modernisation ». Et celui qui devine mal, est puni. En 2014, j’ai été éjecté de l’université parce que j’ai critiqué sa politique étrangère. Mais je me suis résigné, je ne m’intéresse pas à ma carrière.
Êtes-vous content de la politique étrangère de Poutine ?
Je la trouve généralement équilibrée. Sa plus grande erreur c’est de ne pas avoir poursuivi la libération de l’Est de l’Ukraine. Il aurait pu pénétrer beaucoup plus loin en Ukraine. On savait à l’avance qu’il y aurait des sanctions économiques. Aujourd’hui, nous payons un prix lourd pour un produit relativement limité.
Voyez-vous un successeur possible ?
Dans le système de Poutine, il n’y a pas de place pour un successeur. Il craint de nommer un héritier qui soit aussi fort que lui, parce qu’il pourrait l’éclipser. Il était impossible de trouver un meilleur dirigeant que lui, mais nous en avons trouvé de pires. Entre 2008 et 2012, Dmitri Medvedev a pratiquement détruit le système, et il est toujours Premier ministre. C’est un danger que Poutine manipule : si vous ne me soutenez pas, je mets le monstre libéral sur le trône, et notre stratégie au Moyen-Orient tombe à l’eau. Rien n’a été réglé formellement. Le problème, c’est que Poutine parie sur deux systèmes : il est tant eurasianiste que libéral. Dans le paradigme économique, il trouve le libéralisme nettement plus important. Il devrait faire un testament où il explique son idée à son héritier.
Vous souhaitez que Poutine détermine à quel point la Russie peut être occidentale.
(hoche la tête) Il doit traduire son intuition individuelle en une doctrine destinée à sécuriser l’ordre futur. Il n’a tout simplement pas d’idéologie déclarée, et cela devient de plus en plus problématique. Chaque Russe sent que cette approche hyper individuelle de Poutine représente un risque énorme. La propagande à la télévision russe devient de plus en plus stupide. Les talk-shows politiques sur Pervyj Kanal (la principale chaîne publique, NLDR) sont carrément stupides. Les présentateurs sont une bande de libéraux qui se font passer pour des conservateurs par considérations financières. C’est une espèce de jeu : si Poutine change d’avis, il faut changer toute la machine de propagande. Là, ils invitent en permanence les mêmes idiots américains et ukrainiens pour faire passer l’Occident pour stupide. Ce n’est plus convaincant. Comprenez-moi bien : l’Occident est mauvais, mais nous devons au moins prendre la peine de l’étudier.
Ne craignez-vous pas que pour beaucoup de Russes les libertés occidentales paraissent attrayantes ?
Les Russes sont plus constants que vous ne le pensez. Dans les années nonante, les Russes ont été séduits par le libéralisme, mais ils ont rapidement senti la réalité amère. Nous ne devons pas craindre les Russes et leur présenter une caricature de la réalité à laquelle personne ne croit. C’est pourquoi je trouve la télévision russe actuelle aussi répugnante.
Cette critique vaut-elle également pour Russia Today et Sputnik ?
C’est tout à fait différent. RT et Sputnik font parfaitement leur travail. Ils promeuvent une alternative à l’agenda libéral globaliste. Ils élargissent l’opinion démocratique. Nous nous défendons uniquement contre l’élargissement agressif de la société moderne. L’Occident devrait accepter que la forme de société libérale soit optionnelle.
Ne trouvez-vous pas problématique que des médias comme Russia Today et Sputnik inventent tout le temps des événements ?
Les médias mentent en permanence. Tout est fake news. On ne peut approcher la réalité de manière neutre. L’esprit humain fonctionne toujours avec de l’information pro-cédée. Si vous cherchez la vérité, je vous conseille de devenir philosophe : vous aurez une vie intéressante. Celui qui travaille dans les médias est par définition un menteur.
De quelle façon est-ce que je mens, monsieur Douguine ?
Vous mentez parce que vous faites passer une réalité codée définie par la société, par les détenteurs de pouvoir qui contrôlent les médias. Antonio Gramsci dirait : vous mentez parce que vous avez conclu un pacte historique avec le capitalisme. Tout est idéologique, dit le marxisme, et l’idéologie est une fausse conscience : un mensonge pur.
Mais il y a les faits, tout de même ? Si demain Moscou lâche une bombe sur Bruxelles, et j’écris que Moscou a lâché une bombe sur Bruxelles, ce n’est pas un mensonge ?
(ricane) D’abord et avant tout, vous ne pourrez rien écrire si cela arrive. Vous serez mort.
Mettons que je survive.
Même alors, il vous faut recueillir des informations et vérifier les sources. Qui paiera votre billet pour accéder aux ruines ? Comment allez-vous prouver que Moscou est derrière les bombardements et non Oussama ben Laden ? Aujourd’hui, il n’est même pas clair qui étaient les auteurs du 11 Septembre ! D’abord, c’étaient les Saoudiens, mais à présent le président Trump a suggéré qu’il fallait une nouvelle enquête. Pourquoi est-ce nécessaire ? Parce que tout est fake news.
Vous êtes sérieux là ?
Dans notre société, on ne peut jamais être vraiment sûr que l’avion avec lequel Moscou a soi-disant lâché la bombe ait été détourné au dernier moment par des musulmans. Vous connaissez le film Conspiracy Theory ?
Non.
C’est un film extrêmement intéressant dont le personnage principal voit des complots partout, et qui est traité de fou. Mais finalement, il s’avère qu’il est le seul à avoir eu raison depuis le début.
Mais c’est de la fiction, non ?
Non, c’est le paradigme de la réalité. Nous vivons dans une réalité virtuelle du fake news. Le journalisme aussi est un produit typique de la modernité. La vérité est difficile à trouver, et pour la trouver nous devons éliminer le journalisme.
Vous voulez supprimer le journalisme ?
Il y a des sociétés sans journalisme qui ne sont pas pires que la société occidentale. En même temps je réalise que les mensonges peuvent être diffusés de millions de façons. Nous cherchons tout au plus la sécurité, la tolérance, le confort, et peut-être un peu de justice sociale. Le libéralisme ne s’occupe que d’efficacité et d’accélération, et plus de la recherche de la vérité.
L’autoritarisme s’intéresse encore beaucoup moins à la vérité.
Au contraire, dans l’autoritarisme il y a encore un choix. Le totalitarisme, la théocratie, la société de castes : dans les systèmes autoritaires, nous avons le choix entre plusieurs mensonges, ce qui est nettement plus agréable. En démocratie libérale, il n’y a qu’un mensonge à croire : l’assertion que la démocratie est la moins pire de toutes les formes de gouvernement. (réfléchit) Vous savez, le mal est surtout en nous. Nous mettons trop d’espoir et de confiance en la technologie épistémologique. Par exemple, je suis très préoccupé par la confiance aveugle des sociétés en les réseaux sociaux.
Vous aussi vous êtes un fervent utilisateur des réseaux sociaux.
J’essaie de transformer le poison en remède.
La Russie utilise les réseaux sociaux pour influencer les élections étrangères.
(ricane) Je crains que vous nous surestimiez. Oui, la Russie essaie de s’armer contre les attaques technologiques de l’Occident, mais nous n’y parvenons guère. Au fond, c’est une réaction à la guerre en réseau américaine des années nonante. Il vous faudra encore un peu de patience. Notre cyberprogramme n’en est qu’à ses balbutiements, et on nous accuse déjà d’avoir piraté les élections !
- Source : Le Vif (Belgique)
17:28 Publié dans Actualité, Affaires européennes, Entretiens, Eurasisme, Géopolitique, Nouvelle Droite | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : alexandre douguine, russie, entretien, géopolitique, politique internationale, nouvelle droite, nouvelle droite russe, europe, affaires européennes, eurasisme | | del.icio.us | | Digg | Facebook
Ukraine. L'Union européenne à la botte de Washington
Ukraine. L'Union européenne à la botte de Washington
par Jean-Paul Baquiast
Ex: http://www.europesolidaire.eu
Le conflit ukrainien connait actuellement un regain. Les Ukrainiens de Kiev, soutenus et armés jusqu'ici de façon non officielle par les Etats-Unis, ont repris de violentes offensives contre les séparatistes russophones de l'Est. Les Occidentaux accusent la Russie de soutenir les « rebelles » séparatistes, notamment en leur fournissant des armes, ce qui semble exact, bien que Moscou démente catégoriquement la chose. Mais le soutien russe reste modeste. Il n'est en rien comparable à l'aide occidentale. On apprend d'ailleurs aujourd'hui que le Canada a décidé, officiellement, d'armer les Ukrainiens de l'Ouest https://www.agoravox.fr/actualites/international/article/...
La décision du sommet européen devra encore être officiellement adoptée par les 28 pays de l'Union européenne, probablement dès la semaine prochaine, selon un porte-parole de l'Estonie, le pays qui assure la présidence tournante de l'Union jusqu'à fin décembre.
Il est regrettable que ni Angela Merkel ni Emmanuel Macron n'aient présenté d'objections à la décision du Conseil, au prétexte que le protocole de Minsk n'était toujours pas appliqué. Mais ils ont paru en imputer la responsabilité à la Russie, sans mentionner la volonté de Kiev, affichée dès le début, de n'en tenir aucun compte,. Depuis quelques mois, elle a repris ses offensives sur une large échelle.
Moscou a réagi calmement, mais il est évident que les relations entre la Russie et les Européens, déjà quasiment au point mort, ne s'amélioreront pas. Dans un premier temps, les contre-sanctions russes, dont souffre principalement l'agriculture françaises, ne seront pas levées.
La récente tournée européenne du secrétaire d'Etat Rex Tillerson a montré que Donald Trump fera tout son possible pour éloigner l'Europe de la Russie...et qu'il y a déjà réussi. Tillerson n'a cessé d'affirmer que la Russie était une menace grandissante pour l'Europe: « L'agression russe en Ukraine reste la plus grande menace actuelle contre la sécurité européenne » “Russia's aggression in Ukraine remains the biggest threat to European security.”. Aucun de ses interlocuteurs européens n'a fait valoir la moindre objection.
Il en résultera qu'au plan géostratégique, l'alliance entre la Russie et la Chine se renforcera. L'Europe sera de moins invitée à s'y joindre, le voudrait-elle. Quant à l'Ukraine, Vladimir Poutine dans sa dernière conférence de presse a mis en garde contre le risque d'un « massacre dans les Etats ukrainiens russophones pire que celui de Srebrenica si les Occidentaux continuaient à renforcer leur aide aux forces ukrainiennes nationalistes de Kiev ». On remarquera qu'avec sa prudence habituelle il n'a pas évoqué dans ce cas une intervention militaire de la Russie en défense des républiques populaires de Lougansk et de Donetz.
16:10 Publié dans Actualité, Affaires européennes, Géopolitique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, géopolitique, politique internationale, europe, affaires européennes, union européenne, états-unis, russie, ukraine | | del.icio.us | | Digg | Facebook
Lo clásico español
Lo clásico español
Carlos X. Blanco
Ex: https://latribunadelpaisvasco.com
La sociedad española debería procurarse una definición de clasicismo. Lo clásico, se dice, es aquello que no pasa de moda. Pero al hablar así, ya el mero contraste entre lo clásico, por un lado, y el efímero fenómeno de las modas, por el otro, indica muchas cosas. La moda no es la antítesis exacta de lo clásico. La moda es una epidermis social circunscrita al capitalismo y al imperio despótico de la mentalidad comercial, y hacer de lo clásico la antítesis de la moda constituye todo un síntoma. Lo clásico es aquello que no puede estar sujeto a modas, ni tiene nada que ver con ellas, ni siquiera guarda una relación controlable con la temporalidad e historicidad del hombre que, según notables pensadores (Ortega, Spengler, Heidegger, etc.), es aquello que perfila y define precisamente al humano animal.
Lo clásico se acerca, entonces, a lo eterno, a lo perdurable, a lo primigenio y fundador, pero desarrollado hasta su perfección. Lo clásico sería justamente el cénit de una cultura. Spengler nos decía que las culturas siguen un curso vital semejante al de los organismos vivientes. Las culturas son seres vivos que nacen, exploran y juegan como infantes, luego muestran vigor bárbaro de la juventud, y llegan, a la postre, a una madurez "clásica", un mediodía brillante y sin sombras.
La Atenas de Pericles, la República victoriosa de los romanos, el Imperio de los Habsburgo españoles en sus primeros tiempos… estos serían ejemplos de una cultura clásica. Justo a las doce y un minuto de su mediodía, las culturas clásicas comienzan a acartonarse. Devienen poco a poco fósiles de sí mismas, a ellas se les agarrotan los miembros, y sólo logran renovarse por partes, tornándose parcialmente falsas, hasta volverse pseudo-culturas y cadáveres. A las doce del mediodía pasadas, cuando el sol ciega y toda la hermosura producida por un pueblo reluce, ya comienza a convertirse esa cultura, que en el alba era fresca y nueva criatura, en una vieja civilización. La civilización es el cadáver de una cultura, y su existencia en la historia toma entonces la forma imperial. Pero la forma imperial da nacimiento, valga la redundancia, a naciones y formas humanas nuevas, garantiza una paz duradera, estabiliza contradicciones y frena a los bárbaros.
Suele hablarse de civilizaciones y de imperios de una manera indistinta. Esto es así cuando no se entiende por imperio una mera forma de jefatura del Estado, una variante dentro de la clase de las monarquías. De hecho, los imperios ni siquiera precisan ser monárquicos (caso de los romanos antes de Augusto) aunque siempre son sostenidos por cierta aristocracia.
China, más que nación, y nación milenaria, fue civilización y fue imperio. Y hoy, lo es. Su desmesurado tamaño y su ingente población lo atestiguan. Rusia, más que nación, y nación centenaria, es imperio. Imperio con zares e imperio con bolcheviques, pero siempre imperio.
Siempre en el centro de dos o más mundos, haciendo de puente, contención, unión y contrapeso de varias culturas. Entre ellas, la del oriente y la del occidente.
Y España… ¿qué decimos de España? No escribo algo inaudito en La Tribuna del País Vasco al sostener esto: España fue imperio y no puede existir plenariamente salvo en forma de imperio. Es su pasado, pero también es su destino. Pensadores muy diferentes, entre José Antonio y Gustavo Bueno, sostuvieron tal tesis. Quien dice imperio, en su fase clásica, cenital y no decadente, dice vocación universal, vocación "católica". Esto implica no agotarse nunca en la existencia de "nación-estado".
El concepto liberal, trazado con compases masónicos y extranjerizantes de "nación española", canónica y homologable con la francesa, u otras naciones europeas tenidas por "modernas", es un concepto que nunca ha resistido las pruebas del algodón, como dicen los anuncios. Es un concepto que a España se le queda corto, y que hoy en día se ha estirado cual chicle o goma, llevándolo al paroxismo. España, según los políticos de la actual demogresca (tomo prestada la palabra a Juan Manuel de Prada), tiene que ser, por lo visto, una puñetera "nación de naciones".
Hablar de nación de naciones no es otra cosa que aferrarse a la vieja ecuación liberal y burguesa "una nación, un estado", aunque sea para reventarla y violentar de paso la lógica, no es más que perseverar en el error que extranjerizó a Las Españas.
Antes de las reformas liberales del siglo XIX, mucho antes de 1812, Las Españas ya poseían su Constitución Histórica, como gustaba decir mi buen paisano Melchor Gaspar de Jovellanos (1744-1811). No hizo falta una Constitución con aires afrancesados ni angloliberales para hablar de "libertades" y de "franquicias" pues España ya era –al menos en la forma- un conjunto de Reinos libres bajo una única Corona, Reinos que en modo alguno se regían de manera absolutista, pese a las pretensiones de sujetos coronados particulares y de caciques y gerifaltes. España era –y es- diversa en su territorialidad y jurisdicción, y el término privilegio, tan en uso antes de 1812, no acarreaba, como acarrea hoy, una situación de desprecio, minusvaloración, ofensa y escarnio de uno de esos Reinos (o señoríos, Principados, etc.) frente a otros. La Constitución Histórica de Las Españas, como decía el gijonés ilustrado, era ya un verdadero "pacto" entre pueblos y soberano, pactos bendecidos y engrasados- al menos teóricamente- por la Santa Madre Iglesia.
Con ideas muy hermanadas con las del pensador asturiano Jovellanos, el "romántico" alemán Adam Müller (1779-1829) habló también de un verdadero doble pacto en la Patria: 1) con los contemporáneos, es decir, con aquellos compatriotas que comparten el solar patrio y con quienes hemos de convivir, y 2) con los coterráneos, esto es, con aquellos muertos que nos precedieron, que nos legaron la tradición, la fe, la lengua, la cultura. Error mayúsculo del jacobinismo francés y del liberalismo anglosajón fue centrar su empeño legislativo en los contemporáneos que, en un mundo globalizado y multicultural, apenas comparten entre sí otra cosa que el suelo y una hipócrita y artificiosa "educación para la ciudadanía o un dudoso respeto a las leyes. La verdadera Constitución Histórica debe ser completa, con el doble pacto vigente, y siempre hundiendo sus raíces en una fe común.
Walter Schubart (1897 -1942), un olvidado filósofo balto-alemán a quien estoy leyendo estos días, comparaba Rusia y España en su obra Europa y el alma de Oriente. La España tradicional (no la degradada sombra de ahora) se presentaba, bajo el signo de la fe, como un Imperio, pudiera decirse que una Civilización, justamente en caso parejo al de Rusia, nación grande en lo territorial, no "nación de naciones" sino Imperio, y un Imperio forjado bajo la Cruz, en denodada lucha contra el islam y las hordas asiáticas, pero también en lucha contra un occidente luterano o calvinista (después liberal y masónico) amenazador.
España y Rusia conservaron su esencia mientras no fueron "occidente", esto es, mientras fueron imperios-civilizaciones. La enorme pérdida de territorios del imperio hispánico, y su contracción a la gris realidad de la península Ibérica (mutilada de la hispana Portugal), más los archipiélagos y plazas norteafricanas, impide ver al hombre moderno, al hombre jacobino y liberal del "Estado-nación", la correcta visión de que lo Hispánico fue una Civilización, como lo ruso, lo romano y lo bizantino, lo helénico, lo chino o lo hindú. Y en toda Civilización hay un momento clásico, un mediodía. Ahora España, perdida en la noche de una época privada de fe, no se reconoce como tal, y sólo siente su alteridad. No fue Europa exactamente, aunque más bien hay que recordar que Europa no es turca gracias a España. España no es Oriente, pues desde Covadonga y la Reconquista España no quiso ser África ni Oriente, quiso ser la nación de la Cruz. No es "liberal", sino por imposición extranjera, y aún hoy España se resiste a hablar inglés, lengua ajena aprendida sólo después de esfuerzos motivados por razones de supervivencia económica.
Cuesta mucho sacar adelante un nacionalismo español precisamente porque España fue, y en su alma es, un Imperio, una "más-que-nación": España es un proyecto de civilización. Por eso ahora cacarean con la "nación de naciones" y el federalismo, porque intuyen oscuramente que España no es nación jacobina… Es mucho más que eso. Es Imperio que, como decía Schubart, admite franquicias y libertades en sus amplios territorios de los Dos Mundos, admite peculiaridades y diferencias, siempre que les una la Fe.
La pérdida de esa fe, no sólo la fe católica en el sentido religioso, sino la fe en el carácter universal de un imperio-civilización, es lo que hace de nosotros, los modernos españoles, los degenerados, unos anti-clásicos.
Y vuelvo al comienzo de mi reflexión. Lo clásico español, como lo clásico grecorromano, o lo clásico cristiano-fáustico (el románico y el gótico), no se entiende bajo esta noche oscura de pérdida de la fe. Hay un remedio para reencontrarse con lo clásico-español, y no es un remedio nacionalista. No se trata de reinventar un nacionalismo para un Imperio-Civilización como el Hispánico que en sí es plural en cuanto a identidades y territorios. Como dijo Robert Steuckers en una entrevista reciente, la idea de Imperio es, ante todo, una idea espiritual.
Se trata de educar a los muchachos tomando como base nuestro Siglo de Oro (Cervantes, El Escorial, Velázquez), hincando en el suelo de nuestros clásicos y volviendo nuestra legítima herencia (Grecia, Roma). Se trata (y venga ya el atrevimiento, por otro lado nada original) de hispanizar el mundo, empezando por nuestros vecinos al norte de los Pirineos así como los del norte de África. No para dominarles, sino para hacerles saber que nuestro Imperio era (es) mejor y que bajo su Cruz y su Espada la vida era (es) superior. Superior al consumismo laico post-protestante, jacobino o liberal. Superior miles de veces al despotismo mahometano.
15:42 Publié dans Théorie politique, Traditions | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : espagne, histoire, classicisme, classicisme espagnol, siglo de oro, 17ème siècle, idée impériale | | del.icio.us | | Digg | Facebook