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dimanche, 17 août 2008

Entretien avec E. Delvo

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Entretien avec Edgar DELVO, ancien secrétaire de la Centrale d'Education Ouvrière du POB (Parti Ouvrier Belge)

 

Propos recueillis par Robert Steuckers

Monsieur Delvo, vous êtes consubstantiellement socialiste; vous êtes né dans une famille socialiste, vous avez été totalement imbriqué dans la vie du mouvement socialiste jusqu'en 1945. Pouvez-vous nous dire quelques mots sur votre famille et votre jeunesse?

 

Je suis né à Gand le 20 juin1905, dans une famille et un quartier ouvriers. Pour les gens de très modeste condition, c'était des temps difficiles: nos contemporains, et a fortiori les jeunes gens, ne s'imaginent plus combien pénibles étaient les circons­tan­ces de la vie quotidienne, même pour les bourgeois. La notion de “temps libre” n'existait pas: tout était orienté vers le la­beur, vers les corvées de tous les jours. Impossible, dans un tel contexte, d'imaginer une forme ou une autre d'épanouisse­ment lu­di­que ou culturel. Mon père était un ouvrier métallurgiste, un ouvrier qualifié qui aimait son métier et y mettait tout son cœur. Il était certes mieux payé que les simples manœuvres, mais, comme tout le monde, il avait grand'peine à joindre les deux bouts. Mon grand-père, que j'ai bien connu, était une célébrité dans les cafés de Gand et des environs, non pas parce qu'il aimait trop la bière, mais parce qu'il ne gagnait pas assez d'argent pour nourrir décemment sa ribambelle d'enfants. Il tra­vaillait dix heures par jour et, le soir, il vendait encore de la sciure de bois et du sable pour répandre sur le sol des auberges et des bistrots. Mon père était l'aîné d'une famille de six enfants: sa qualité d'aîné lui donnait quelques privilèges; c'est sur lui que se fondaient les espoirs de la famille. Le principal de ces privilèges était de recevoir une tartine complémentaire après le coucher. Ensuite, il a reçu l'autorisation d'apprendre à lire, alors que l'obligation scolaire n'existait pas encore dans le Ro­yaume de Belgique, et que mon grand-père était analphabète.

 

Savoir lire donnait des avantages énormes: on pouvait apprendre rapidement, on pouvait lire les journaux, à cette époque où il n'y avait ni radio ni télévision. La seule distraction que s'accordait les gens était de jouer au lotto à la lumière d'une chandelle: mais de telles récréations étaient exceptionnelles, un luxe rare. Mon père a été un homme heureux, il était fier de ses talents. Il avait une conscience socialiste, tout comme mon grand-père. Ils avaient abandonné l'église. Mon grand-père avait été profon­dément choqué par l'anti-socialisme et l'anti-syndicalisme de son curé, qui refusait de prendre en compte la misère ouvrière. Cette arrogance avait fait naître un sentiment d'aigreur profonde dans les familles ouvrières: «nous ne valons rien aux yeux des curés». Pourtant, mon père était fier de son travail: il façonnait des moules en argile pour couler des pièces. Il m'amenait le dimanche pour voir son œuvre et il me communiquait sa fierté. Pour nous le travail bien fait était une valeur inestimable et nous ne comprenions pas pourquoi les gens d'église le méprisaient. Mon père pourtant ne cultivait pas de ressentiment et n'était certainement pas un fanatique de la lutte des classes: quand il y avait une grève, il se retirait à la maison et élaborait des plans pour de nouveaux moules.

 

A douze ans, j'ai pu fréquenter l'“école moyenne”, alors qu'il n'y avait toujours pas d'obligation scolaire. J'emmagasinait faci­lement les matières, je travaillais bien, mais je n'oubliais pas non plus que j'étais un enfant de la rue, un enfant qui avait grandi au sein d'une communauté de voisins, solidaires et chaleureux. Malgré la misère ambiante, j'ai vécu une enfance insouciante. Mes parents, qui étaient doux et bienveillants, m'avaient accordé ce qu'ils n'avaient pas eu, eux: du “temps libre”. Mais leur tolérance avait des limites fixées à l'avance: il fallait toujours que nous gardions une attitude digne. Paradoxalement, ces so­cialistes avaient quitté l'église mais vivaient toujours selon les canons de la charité chrétienne. Ils refusaient simplement, mais absolument, la hiérarchie catholique. Pour eux, l'église était l'ennemie du peuple; elle choisissait toujours le camps des nantis et des puissants. Mes parents n'étaient pas actifs dans le mouvement socialiste, mais lisaient le journal socialiste de Gand, Vooruit (= «En avant», équivalent flamand du journal social-démocrate allemand Vorwärts). C'est ainsi qu'ils se te­naient au courant des événements du monde. L'idéologie de Vooruit  était marxiste mais modérée, déjà réformiste. Mais les querelles idéologiques importaient peu: Vooruit  avait le mérite de donner toute sa place au socialisme spontané du peuple.

 

Quand les voisins me demandaient ce que je voulais devenir plus tard, quand j'aurai quitté l'école, je répondais que je voulais devenir instituteur, maître d'école. Je le disais parce que c'était la profession que les gens de mon quartier m'attribuaient d'office: «tu es malin, tu deviendras instituteur». Je fus un des rares fils d'ouvrier à pouvoir accéder en quatrième; le directeur, un francolâtre fanatique qui haïssait tout ce qui était populaire et flamand, m'y avait accepté à contre-cœur. Cet extrémiste in­ventait mille chicanes pour les élèves flamands de condition modeste. J'ai donc conservé un mauvais souvenir de cette école, que je fréquentais grâce à une bourse. Mais j'ai tenu bon et j'ai fait ma cinquième et ma sixième; c'était au début de la pre­mière guerre mondiale; les temps étaient très difficiles. Nous étions à l'arrière du front allemand, en zone militaire et nous ne pouvions pas nous rendre à Bruxelles. Mes parents ne pouvaient plus me payer des chaussures: il a bien fallu que j'aille à l'école en sabots de bois, de beaux petits sabots qu'on m'avait décorés avec amour. J'étais géné. Mon francolâtre de directeur a fait une vie: il ne voulait pas que les élèves viennent en sabots à l'école. Ce fut un prétexte pour démontrer bruyamment son arrogance de classe. Cet incident m'a appris une chose: pour l'ouvrier, ce n'est pas l'argent qu'il gagne qui est important, c'est que l'on respecte sa dignitié.

 

J'ai donc eu de bons parents, qui m'ont éduqué dans la douceur, avec souci de l'avenir, malgré les difficultés. Il m'ont laissé beaucoup de liberté, à condition que je ne suscite pas de plaintes, que j'aie un comportement exemplaire. Ils m'ont aussi transmis le sens de la communauté. A l'école moyenne, j'étais le condisciple d'un fils de fabricant de liqueur assez aisé, qui recevait des jouets merveilleux, notamment un coffret pour faire de la chimie amusante. Ce garçon ne pouvait pas nous fré­quenter, son père le lui interdisait: il restait seul dans un coin avec ses éprouvettes, alors qu'il aurait bien donné tous ses jouets pour partir en randonnée avec nous. L'esprit de communauté est donc supérieur à l'individualisme bourgeois et à l'arrogance de classe: un grande leçon de mon enfance.

 

Comment s'est passé pour vous la première guerre mondiale?

 

A Gand, nous étions à l'arrière immédiat du front, dans ce que les Allemands appelaient l'Etappengebiet.  Pour survivre, il ne nous restait plus que la débrouille, le marché noir, ramasser des escarbilles de charbons, retourner au troc. La Croix-Rouge américaine et le Plan Hoover permettaient aux enfants pauvres de recevoir le matin du cacao et un petit pain, et le midi, une soupe avec du lard, que l'on nous servait dans les bâtiments du théâtre.

 

Nous avons vu passé les uhlans dans notre quartier. Plus tard, des prisonniers russes étaient contraints à des travaux de ter­rassement pour le Canal Gand-Terneuzen. Nous échangions des denrées avec ces prisonniers et nous les réconfortions. Le plus mauvais souvenir de la guerre, a été les réquisitions. Les Allemands ne réquisitionnaient pas les hommes qui avaient du travail. Mais les gens ne le savaient pas. La police gantoise venait demander si on travaillait, les gens ne disaient rien, croyant qu'on allait imposer leurs maigres revenus. Bon nombre de réquisitions se sont effectuées sur de tels quiproquos. Nous avons été frappés par la terrible discipline qui régnait dans l'armée allemande: les officiers giflaient ou bastonnaient leurs soldats en public quand ils avaient commis des pécadilles.

 

Quand êtes-vous devenu un militant socialiste?

 

C'est venu tout seul. Quand j'étais à l'“école normale” pour devenir instituteur, un professeur de néerlandais lisait Multatuli (1), la littérature pacifiste. C'était un socialiste. Il est venu chez moi pour me proposer de devenir correcteur dans l'imprimerie socialiste qui s'était réorganisée et entendait devenir une entreprise commerciale comme les autres, en ne se limitant plus à imprimer des tracts ou des pamphlets socialistes. J'ai d'abord refusé car je voulais achever mes études. Plus tard, j'y suis allé et je suis devenu automatiquement membre du parti: cela allait de soi; on travaillait dans une entreprise socialiste, on était donc militant socialiste. La politique de commercialisation m'a d'abord séduit parce que l'atmosphère n'était pas politisée à outrance. Ce fut pour moi, à seize ans, l'occasion de lire des livres plus sérieux et de me pencher sur l'idéologie socialiste. J'ai lu Marx, non pas pour adhérer à un catéchisme, mais pour prendre le pouls du socialisme à un moment de son histoire. Je n'en suis pas resté à Marx. J'ai voulu connaître le socialisme dans toutes ses moutures, même avant qu'il ne porte le nom de “socialisme”: chez les premiers chrétiens, chez les socialistes utopiques, chez les Indiens d'Amérique. J'ai voulu tout con­naître de l'esprit de charité, de justice.

 

Les typographes étaient des ouvriers, mais ils étaient lettrés. Ils savaient communiquer le fruit de leurs lectures. Dans l'im­pri­me­rie socialiste, j'ai appris aussi à vivre dans un mouvement politique qui prévoyait toute une série de structures d'accueil pour ses membres et sympathisants. Les jeunes avaient le choix: ou bien militer à la Jonge Wacht  (JW; = Jeune Garde) ou bien adhérer à la Socialistische Arbeiderjeugd  (SAJ; = Jeunesse ouvrière socialiste). Ces deux structures étaient bien diffé­rentes l'une de l'autre. Dans la JW se regroupaient les activistes, toujours présents dans les meetings et dans les bistrots, où ils fumaient et buvaient comme les adultes. Les garçons de la SAJ voulaient quitter cette ambiance et retourner à la nature, camper, organiser des randonnées à pied ou à bicyclette. Les JW fréquentaient les dancings. Les SAJ remettaient les vieilles danses populaires à l'honneur. La jeunesse socialiste était donc séparée par deux esprits bien différents. Les SAJ, dont j'étais, avaient un esprit Wandervogel,  c'étaient des amis de la nature; ils voulaient réintégrer l'homme dans la nature. Nous avions l'impression d'aller plus loin, plus en profondeur. Bon nombre de garçons de la JW voulaient d'emblée faire une carrière politique. Les SAJ n'avaient pas cette préoccupation.

 

Petit à petit, l'imprimerie populaire (Volksdrukkerij)  est devenue une entreprise purement capitaliste. La solidarité entre les membres du personnel s'est d'abord estompée puis a disparu. Les linotypistes se sentaient supérieurs aux typographes, qui estimaient valoir plus que les relieurs, qui, eux, n'adressaient pas la parole aux femmes de ménage.

 

Je suis ensuite devenu le chef de la SAJ de Gand. C'est à ce titre que j'ai rencontré pour la première fois Edouard Anseele (père), dit “Eedje Anseele”, un tribun socialiste fort populaire, qui avait le sens de la communauté et qui cherchait de jeunes idéalistes, notamment dans les rangs des SAJ, pour remplir de nouvelles fonctions dans le parti. Il m'a demandé si je con­naissais la “coopérative”. J'avais lu beaucoup de livres et d'articles sur les coopératives, notamment un ouvrage important pour toute mon évolution future, La République coopérative  du Français Ernest Poisson. Edouard Anseele voulait que je dirige une revue d'esprit “coopérativiste”. Son objectif était de relancer le mouvement coopératif afin de concurrencer le secteur capi­taliste en offrant des marchandises à meilleur prix, en sautant au-dessus du maximum d'intermédiaires, notamment en affré­tant une flotte marchande “rouge”. Mais comme le parti, à cette époque, était encore belge-unitaire, le projet coopératif n'a pas trop bien marché, car, rapidement, un clivage a surgi entre Wallons et Flamands. Les Wallons ont refusé l'orientation “coopérativiste”, au profit d'un syndicalisme plus anarchisant, de l'action directe, de la syndicalisation extrême et des grèves dures. Les Flamands, notamment les Gantois, rêvaient de la “République coopérative” d'Ernest Poisson.

 

J'ai toujours admiré Edouard Anseele (le père) car c'était un homme qui avait le sens de la décision, c'était un chef populaire, charismatique, incontesté. Ce leader populaire bénéficiait de la ferveur de son peuple. Son enterrement atteste cette dévotion des petites gens de sa ville. A la suite des conseils d'Anseele, j'ai voulu créer une culture nouvelle, solidaire et socialiste, bien organisée et bien insinuée dans le tissu social. Gand était le modèle de ce socialisme où toutes les branches du mouvement socialiste coopéraient en synergie. A Anvers, la fédération ne travaillait pas de la même façon: au contraire, on contingentait, le plus hermétiquement possible, les différentes instances du mouvement socialiste. Beaucoup de Gantois ont animé le mouve­ment socialiste avec succès, même en dehors de leur ville et dans les hautes sphères du parti. Anvers n'a pas donné de lea­der charismatique au mouvement socialiste belge et flamand. Huysmans et De Man, tous deux Anversois, n'ont pas réussi a capté la ferveur des masses socialistes. De Man était animé de très bonnes intentions, comprenait quels étaient les ratés du parti, mais il est toujours demeuré un solitaire qui communiquait difficilement avec les petites gens. J'ai assisté à la réconci­liation entre De Man et Anseele, mes deux héros, l'un sur le terrain, l'autre dans le monde sublime des théories.

 

Comment avez-vous vécu l'immédiat après-guerre?

 

En dépit de mon évolution future vers le nationalisme, le croquemitaine, pour moi, c'était le malheureux Borms, incarcéré pour collaboration en 1919. Bien entendu, nous ne le connaissions pas. Nous croyions ce que disait de lui la propagande de l'Etat belge. Notre mouvement socialiste suivait à la lettre la “Trêve du Havre”, où le gouvernement belge réfugié en Normandie avait accepté pour la première fois en son sein des ministres socialistes, qui n'avaient peut-être pas reçu de portefeuille mais à qui on avait promis d'accorder le suffrage universel. Ce qui fut fait.

 

Quand avez-vous rencontré De Man pour la première fois?

 

De Man n'était pas né dans un milieu ouvrier comme moi. C'était un bourgeois d'Anvers. Dans notre mouvement, cette ori­gine lui a causé des problèmes, pour une raison fort simple, qu'on comprend assez difficilement aujourd'hui: les ouvriers vi­vaient dans la nécessité, dans une nécessité extrême, et étaient prêts à suivre tous ceux qui leur promettaient ce qu'ils atten­daient. Les bourgeois, eux, pouvaient se permettre d'avoir des principes, dégagés des affres de la nécessité. Les livres de De Man ont participé au renouveau du socialisme, mais, au départ, nous les lisions presque en cachette dans nos groupes de la SAJ. Sa réputation était mauvaise: il ne cessait de dire que le parti ne faisait rien d'essentiel pour le peuple, ce qui ne faisait évidemment pas plaisir aux gars qui trimaient sur le terrain. Pour De Man, la misère des ouvriers n'était pas seulement ma­térielle mais aussi culturelle; en affirmant cette vérité, il se distanciait automatiquement du marxisme, alors qu'il se désignait encore comme marxiste. Un jour, pourtant, la fédération gantoise avaient restauré des orgues pour offrir des soirées musi­cales aux ouvriers: De Man a critiqué cette initiative, au grand mécontentement des militants, qui avaient côtisé et collecté. Coupé du peuple, De Man n'évoquait qu'une culture purement intellectuelle, où les orgues ne trouvaient pas leur place. En dépit de ces travers bien humains, De Man m'a énormément appris. Ses ouvrages étaient fascinants, tant ils modernisaient notre vision socialiste de la politique et de l'économie.

 

Quand je l'ai vu pour la première fois, en 1930, j'étais déjà secrétaire de la Centrale d'Education Ouvrière. Je l'ai invité à Bruxelles pour prononcer une conférence, à la tribune où étaient également venus Norman Angel, Harold Laski, Pietro Nenni, le Suisse Lucien Dubreuil et les Français Gaston Bergery, Lucien Laurat et Francis Delaisi. De Man est venu nous parler du “socialisme et du nationalisme”. Son analyse était très pertinente: il distinguait le socialisme du marxisme et le nationalisme agressif du nationalisme défensif. Une idée a commencé à germer en moi: l'idéal à atteindre c'était l'unité du peuple tout en­tier, organisateur d'un appareil étatique.

 

Plus tard, De Man est venu à Gand. Je l'ai accompagné dans le train. Mais, sur place, nos militants l'ont boudé. Néanmoins, j'ai pu avoir une première longue conversation avec l'inventeur du planisme. De Man refusait la pensée en termes de sys­tèmes. Il évoquait l'homme réel, avec ses défauts et ses qualités. Il parlait de l'“être” et du “devenir” et optait bien entendu pour le deuxième de ces termes: nous, militants socialistes, activistes politiques, étions des hommes “en chemin”, vers un but. Cette idée de devenir lui permettait de dire que Marx avait été le théoricien du “socialisme qui avait été”: la loi du devenir pos­tulait que l'on évolue, que l'on adapte l'idée aux impératifs du temps. L'humanisme véritable ne consistait pas à répéter une doctrine figée mais à se mouler dans les méandres du devenir et des mutations sociales. A la suite de ces conversations et de mes lectures, j'ai expliqué le teneur de son Plan à nos militants. Même si cette matière est ardue, d'une haute densité philoso­phique, nos militants ont compris intuitivement que le Plan, théorisé par De Man, recelait des potentialités immenses pour la classe ouvrière et qu'il n'était pas de la démagogie.

00:05 Publié dans Histoire | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : théorie politique, politique, belgique, flandre, socialisme | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

samedi, 16 août 2008

E. Delvo: Henri De Man, mon mâitre à penser

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Henri De Man, mon “maître-à-penser”

 

Edgard DELVO/E.d.V.

 

En mai 1940, l'homme politique socialiste flamand Edgard Delvo, 35 ans, se présente comme volontaire dans un bureau de recrutement de l'armée française, pour s'engager dans la lutte contre les “barbares allemands”. Mais un mois plus tard, il devient membre du Conseil de Direction (Raad van Leiding) du VNV (Vlaams Nationaal Verbond), le parti nationaliste flamand dirigé à l'époque par Staf De Clercq. Delvo est prêt en 1941 à s'engager pour le front russe, mais, en 1942, il est appelé à la tête de l'UTMI/UHGA (Union des Travailleurs Manuels et Intellectuels; Unie van Hand- en Geestesarbeiders), le syndicat unifié, pendant belge du Front du Travail allemand. En septembre 1944, il fuit la Belgique, se réfugie en Allemagne et participe au Landsleiding (le gouvernement flamand en exil). Condamné à mort par contumace par un Tribunal militaire belge, Delvo vit trente ans en exil en Allemagne, dont vingt sous une fausse identité. A l'âge de 71 ans, revenu en Flandre, il publie un livre de mémoires Sociale Collaboratie (Collaboration sociale), où il retrace les grandes lignes de son socialisme national-populaire (volksnationaal socialisme) et confie aussi ses souvenirs à E.d.V., chroniqueur historique de l'hebdomadaire sati­rique flamand ‘t Pallieterke (Anvers). Nous en publions un court extrait, où Delvo évoque la figure de Henri De Man, théoricien rénovateur du socialisme européen, très contesté au sein de son propre parti.

 

La plupart des jeunes militants socialistes de la génération de Delvo ne connaissaient même pas le nom de Henri De Man. «Dans les conférences et les cours du mouvement ouvrier belge, on ne le mentionnait pas. Ce n'est que dans un petit cénacle de notre groupe des Jeunesses Ouvrières (AJ; Arbeidersjeugd) que son nom avait bonne réputation et, pour moi personnelle­ment, ses écrits constituaient un message de salut». Voilà ce que nous déclare Delvo qui ajoute que ses amis et lui compre­naient parfaitement qu'il valait mieux ne rien laisser transparaître de leur admiration pour De Man. Il était préférable, disaient-ils, de ne même pas prononcer son nom en dehors des cercles culturels de la jeunesse socialiste. La meilleure et la seule chose qu'ils pouvaient faire, c'était d'étudier ses idées de la manière la plus approfondie et d'en parler le moins possible avec les vieux camarades du parti, et certainement pas «avec les dirigeants».

 

Première rencontre

 

Henri De Man vivait encore en Allemagne quand Delvo et ses amis le lisait en cachette. Quelques années avant la prise du pouvoir par Hitler en 1933, Delvo reçoit l'ordre d'accompagner son maître vénéré à Gand et de présenter De Man aux socia­listes de la ville. De Bruxelles à Gand, De Man et Delvo occupent à eux seuls un compartiment dans le train. Mais ils n'ont pas fait plus ample connaissance. Henri De Man avait vingt de plus que son admirateur; il n'a pas posé à son jeune camarade les questions conventionnelles que l'on pose pour montrer de un intérêt réel ou feint à son interlocuteur. De Man n'interroge donc pas Delvo sur sa jeunesse, son travail, sa façon de penser, ses dififcultés, ses espoirs... Nulle question de ce type. «Ce n'était apparemment pas son habitude de feindre de l'intérêt quand cet intérêt n'existait pas». Delvo était là comme un passant. «Mais n'allez pas croire que De Man était méprisant ou garder ostentativement ses distances. Au contraire. Il n'y avait rien d'affecté ou de blessant dans son attitude. Si je n'avais pas su que je me trouvais en présence de mon idole intellectuelle, je n'aurais rien remarqué de particulier à sa présence tranquille, à cet homme qui fumait confortablement sa pipe et laissait libre cours au vagabondage de ses idées».

 

Nationalisme et socialisme

 

En cours de route, les deux hommes ont échangé quelques mots sans signification, mais au moment où le train s'est approché de la gare de Gand-Saint-Pierre, De Man s'est brusquement animé: son intérêt s'éveillait pour la ville où il avait passé ses an­nées d'étudiant et vécu ses premières expériences dans le mouvement socialiste. Il s'est appuyé sur la fenêtre du comparti­ment et quand nous sommes entrés dans la gare, il a dit: «Il y a bien longtemps! On va voir si on ne m'a pas déjà oublié». Delvo relate cette soirée gantoise: «Non, on ne l'avait pas oublié et, apparemment, on ne lui avait rien pardonné non plus. Pour ce qui concerne le nombre de militants présents, nous n'avions pas à nous plaindre; on s'attendait à une conférence compli­quée qui n'attirait évidemment pas la masse. Un théoricien n'est pas une star du football ou un coureur cycliste victorieux. Nous pouvions aussi être satisfait du niveau intellectuel des assistants; le cercle d'étude socialiste qui avait organisé la confé­rence avait visé les intellectuels. Les dirigeants du parti, eux, ne s'étaient pas montrés. La vieille querelle durait-elle encore? Ou bien l'absence des dirigeants socialistes était-elle plutôt due à leur indifférence à l'égard de la thématique annoncée, “nationalisme et socialisme”, soit un problème auquel le POB n'a jamais voulu consacrer l'attention voulue?

 

«Je ne sais pas si Henri De Man a été déçu ou non de l'absence des dirigeants ouvriers de Gand lors de sa conférence; quoi qu'il en soit il ne l'a pas fait remarqué pendant le voyage de retour. A l'arrivée à Bruxelles-Nord, notre séparation a été brève et sans façons, comme notre tout première rencontre: une forte poignée de main».

 

Amis?

 

Selon Delvo, De Man était «tout naturel, sans contrainte dans son comportement, nullement vaniteux». Il le décrit comme «une personnalité tranquille, maîtresse d'elle-même, avec laquelle on se sentait à l'aise, bien qu'on aurait donné beaucoup pour sa­voir ce qui se passait derrière ce front haut et dans les sentiments de ce homme remarquable, qui ne laissait rien entrevoir de ses attirances et de ses répulsions».

 

Delvo, qui avait vingt-cinq ans quand il a rencontré De Man pour la première fois, n'a pas modifié fondamentalement ses premières impressions du théoricien. On a reproché à De Man «une indifférence blessante à l'endroit de ses semblables»; pour Delvo, ce n'était qu'«une inattention pour son environnement, une évasion totale ou un plongeon profond dans le monde de ses idées».

 

De Man, écrit Delvo, ne se donnait jamais la peine de susciter des effets dans son entourage. Il se comportait comme le dictait sa propre intériorité: «il restait toujours naturel et simple dans ses relations et dans son style de vie; il ne se pavanait pas, n'en mettait jamais plein la vue à ses proches, il ne faisait pas semblant, ne commettait jamais de fanfaronnades». De Man était un exemple pour l'attitude existentielle qu'il prônait lui-même: plus être que paraître, accorder moins d'importance à l'avoir qu'à l'être.

 

C'est précisément cet Henri De Man-là qui n'avait pas d'amis au sens profond de ce mot, écrit Delvo. Mais il semblait n'avoir nul besoin d'amis, «bien que beaucoup de personnes appartenant à son cercle de pensée souhaitaient que les sentiments de proximité qu'il suscitait en eux, reçoivent une réponse de sa part».

 

Assainir la démocratie

 

En 1933, De Man se fixe à Bruxelles. A partir de cette année-là, Delvo aura avec lui «des contacts extrêmement précieux et féconds». Delvo ajoute que De Man n'avait pas quitté l'Allemagne «sous pression», au moment où Hitler a accédé au pouvoir, «comme on l'a dit trop souvent par erreur». D'après Delvo, De Man aurait pu conserver sa chaire sans problème à Francfort, s'il l'avait voulu. «Combien de professeurs allemands compromis politiquement aux yeux des nouveaux détenteurs du pou­voir, pour leurs activités du temps de la République de Weimar, sont restés en Allemagne en dépit du changement de régime, en adaptant tout simplement leurs matières et leurs cours aux circonstances nouvelles, tout comme, ultérieurement, ils se sont réadaptés une seconde fois après 1944, en empruntant une direction nouvelle, dans le cadre du programme démocratique de “rééducation” du peuple allemand».

 

De Man, en revanche, a quitté le Troisième Reich volontairement et librement, parce qu'il «n'était pas prêt à s'adapter à un régime dont il rejetait les fondements». Il a préféré mettre son expérience au service «du mouvement socialiste et de la lutte contre la crise dans son propre pays». Mais Delvo nous rappelle n'est pas simplement rentré en Belgique pour défendre une démocratie menacée et exposée aux coups de la dégénérescence. Non: De Man envisageait une réforme en profondeur de la démocratie belge, son assainissement». De Man croyait à la possibilité de telles réformes. Il voulait protéger la Belgique de «toute expérimentation totalitaire et dictatoriale».

 

Hendrik De Man, dit Delvo, «n'a jamais cessé de nous dire que toute démocratie sans responsabilité et sans autorité person­nelles, sans auto-discipline et sans direction consciente, ne résisterait pas aux manipulations démagogiques et à l'auto-des­truction». Il a opté pour une «démocratie puissante, vitale et “autoritaire”» contre toutes les formes de dictature. Mais, en même temps, De Man concentrait toute son attention aux efforts entrepris par Hitler «pour susciter une solidarité nationale plus cohérente par plus de justice sociale». De Man considérait que «les réalisations sociales du Troisième Reich comme une contribution importante à l'unification spirituelle et psychique, condition préalable à ce sursaut soudain et étonnant du peuple allemand».

 

Peu après son retour en Belgique, Henri De Man devient vice-président du POB/BWP. Cette nomination avait été préparée lors de conversations avec le “patron’, Emile Vandervelde. Dans ces années de crise, tous les espoirs, dans le sérail du POB, reposaient sur Henri De Man. Les socialistes belges du POB ne désiraient plus s'adresser exclusivement et principalement aux ouvriers. En réalisant son fameux “Plan du Travail”, le POB entendait libérer toutes les catégories de la population «de l'emprise des forces économiques et financières monopolistiques».

 

Delvo, fidèle collaborateur à la revue de De Man, Leiding,  adepte convaincu de son socialisme éthique, défenseur passionné des point de vue de son maître-à-penser, contribua à diffuser largement, par la plume et la parole, les thèses de l'auteur d'Au-delà du marxisme. Pendant des années, Delvo est resté en rapports étroits avec De Man. Malgré cela, il n'ose toujours pas dire aujourd'hui, «qu'il a bien connu De Man».

 

«Réformateur du monde»

 

Pour comprendre la nature de leur relation et pour comprendre la personnalité de De Man, citons ces mots que Delvo con­signe dans ses mémoires: «Henri De Man a voulu faire beaucoup de choses pour les gens, mais il n'a pas pu le faire avec  les gens». De Man «était profondément convaincu que les gens avaient besoin de lui». Il s'est toujours senti dans la peau d'un «réformateur du monde». Il voulait littéralement compénétrer les gens de ses idées, qu'il avait bien entendu formulées pour leur bien. Il voulait aller de l'avant et diriger, mais, personnellement, il ne ressentait nullement le besoin d'appartenir à l'humanité! «Il n'a jamais été un homme de communauté», au contraire de son élève Delvo, qui ajoute: «il acceptait le soutien et la collaboration de ceux qui étaient prêts à l'aider, et voyait en eux des hommes partageant les mêmes idées et les mêmes sentiments, des compagnons de combat, et non des amis».

 

Et Spaak?

 

«Pas même Paul-Henri Spaak», nous dit Delvo, «qui a tout de même, avec De Man, été considéré comme le représentant le plus influent du “socialisme national” dans notre pays, et qui a été pour lui, un soutien indispensable quand il s'est heurté, inévi­tablement, au vieux président du parti, Emile Vandervelde, qui possédait encore à cette époque une grande autorité; je le ré­pète, même Paul-Henri Spaak, n'a jamais été son ami. Non, personne n'avait accès à l'intériorité de De Man, n'avait droit à une part de sa vie sentimentale. C'était un homme que l'on appréciait et que l'on respectait, pas un homme à qui on se liait d'amitié».

 

Spaak et De Man, selon Delvo, «étaient liés dans un combat commun, basé sur une vision commune». Mais De Man avait derrière lui un «long processus de maturation». Spaak, au contraire, était devenu un “socialiste national” en répudiant brus­quement son passé à “Action Socialiste”, où violence et extrémisme s'était souvent conjugués. C'est vrai: le retournement soudain dans la pen­sée politique de Spaak s'est opéré quand il est devenu ministre «de manière inespérée et inattendue»; tou­tefois, Delvo pense qu'il s'agit bien d'une conversion soudaine, mais sincère, et non d'un “simple calcul”. Delvo croit pouvoir comprendre cette conversion; il sait qu'il n'est pas le seul jeune “demaniste” qui «à ce moment, sa­vait que Spaak, depuis quelques temps, sous l'influence des concep­tions de De Man, avait soumis son internationalisme prolétarien à une sé­vè­re cri­tique» et était devenu un adepte du “socialisme na­tional”.

 

De Man et Spaak ont-ils été “amis”? «Ils ont été liés politiquement», sans aucun doute. «Mais amis?»: «Non» répond Delvo. Mais ce n'est certainement pas Spaak qui a été le responsable de cette “incom­municabilité”. Tout simplement, De Man n'accordait aucune valeur à l'amitié. Dans ses rapports humains, il ne visait qu'une chose: faire partager à ses interlocuteurs et à ses camarades les mêmes visions de la société et de la politique. Tous les efforts intellectuels de De Man tendaient à améliorer le sort de l'humanité, mais il perdait presque toujours de vue les «hommes vivants», y compris ceux qui évoluaient dans son environnement immédiat. Delvo a très bien perçu cet aspect de la personnalité de De Man: «Celui qui espérait des avantages personnels, entendait assurer son avenir, faisait bien de se ranger derrière la bannière de Spaak, qui ne décevait jamais ses amis et répondait toujours à leurs attentes». Mais ceux qui suivaient De Man pour ses idées ne récoltait qu'un “bénéfice intellectuel”. Aujourd'hui encore, Delvo pense que c'était là le “meilleur choix”. Et si Delvo a opté pour une autre voie que celle de De Man pendant la seconde guerre mondiale, il reste reconnaissant au théoricien du planisme.

 

Magnanimité?

 

Pendant l'été 1940, après la publication de son manifeste  —qui fit tant de vagues, parce qu'il réclamait la dissolution du parti socialiste et appelait à coopérer avec l'occupant allemand—  De Man reçut la visite de nombreux dirigeants socialistes et surtout syndicalistes, à qui il a promis son soutien, bien qu'il était parfaitement convaincu «qu'ils le renieraient plus de trois fois avant que le coq ne chante une seule fois, si la fortune des armes venait à changer de camp».

 

En recevant ces socialistes et ces syndicalistes, De Man a-t-il agit par magnanimité? Ou parce qu'il se souvenait de leur lutte commune au sein du mouvement socialiste belge? Pas du tout, nous répond Delvo. Si De Man a reçu pendant l'été 1940 ses anciens camarades du parti qui venaient lui demander conseil, «sans dire un seul mot à propos de l'attitude hostile qu'ils lui avaient manifestée quelques temps auparavant, sans prononcer le moindre blâme pour le fait qu'ils avaient déserté et aban­donné leurs camarades», cela n'a rien à voir avec la sentimentalité ou la vertu du pardon: De Man a reçu ses anciens cama­rades parce qu'ils avaient besoin de lui, de ses conseils, et qu'il était de son devoir de les aider, au-delà de tout sentiment de sympathie ou d'antipathie, de vénération ou de mépris. Parce que De Man avait décidé de remplir la mission qu'il s'était assi­gnée à ce moment-là de notre histoire: rassembler la population belge derrière son Roi.

 

Leo Magits

 

Delvo n'aime pas qu'on lui pose trop de questions sur l'«homme» Henri De Man, pour la simple et bonne raison, dit-il, qu'il ne peut le faire, qu'il n'en a pas le droit. Mais il souhaite expressément nous dire ceci: lorsque De Man «avait pris une décision, lorsque quelque chose était bon et nécessaire selon son propre jugement, aucune considération ne pouvait plus l'empêcher d'agir selon son idée. Devant ce qu'il considérait être son devoir, tout devait fléchir et il oubliait tout, y compris ses propres enfants».

 

Lorsque Delvo devint en 1932 secrétaire général de la Centrale d'Education Ouvrière, en prenant la succession de Max Buset, il a fallu nommer un nouveau secrétaire flamand. Parmi les candidats: Leo Magits, émigré en 1918 aux Pays-Bas, où il fut actif dans le Syndicat International. Delvo ne connaissait pas Magits personnellement, mais avait lu sa brochure Vlaams socia­lisme [= Socialisme flamand]. Lorsque les deux hommes font connaissance à Bruxelles, deux choses sautent aux yeux de Delvo: «l'attachement absolu de Magits à la démocratie» et «sa vision du nationalisme qui se profilait avantageusement, par rapport à la vision de De Man sur cette question», dans le sens où Magits opérait une distinction beaucoup plus nette entre les concepts de “nation” et d'“Etat”, ne réduisait pas le nationalisme à une simple question de langue; de plus, son analyse des valeurs qu'apporte le fait national dans le mouvement ouvrier, permet des déductions bien plus positives et fécondes que l'œuvre de De Man. Magits avait le mérite de ne pas sous-estimer la valeur de la prise de conscience nationale chez les ou­vriers, dans la mission culturelle que doit s'assigner tout véritable mouvement socialiste.

 

Sous la double impulsion de De Man et de Magits, Delvo va évoluer intellectuellement, et finir par théoriser ce qu'il a appelé le “volksnationaal socialisme”, le socialisme national-populaire.

 

E. de V.

(extrait de la très longue étude de l'auteur, parue dans 't Pallieterke en 1976; cet épisode a été publié le 21 octobre 1976; trad. franç.: Robert Steuckers).

 

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lundi, 04 août 2008

Jacques Pirenne: oligarchies de politiciens professionnels

Sur ce texte ancien de Jacques PIRENNE :

 

Voici une petite analyse intéressante de l'historien Jacques PIRENNE (fils de Henri) dans le tome 6 de son livre "LES GRANDS COURANTS DE L'HISTOIRE UNIVERSELLE" pp. 708-709, imprimé par les "ÉDITIONS DE LA BACONNIÈRE , NEUCHATEL" et publié par ALBIN MICHEL en 1955.

 

Cette analyse concerne la période de l'avant seconde guerre mondiale. Vous observerez que sa conclusion "sent le belge" (la stabilité par le compromis) et, à la lueur du temps, montre bien le chemin parcouru par les partis dits "démocatiques".

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Jacques PIRENNE :

 

La vie politique est prise en mains par une oligarchie de politiciens professionnels

 

Le parlementarisme fondé sur l'opinion, avait été le fait, à l'origine, de petites minorités: Le corps électoral s'est progressivement accru, au fur et à mesure que s'est étendue l'instruction et qu'a augmenté le niveau de vie, c'est-à-dire l'indépendance matérielle de la masse. Après 1918, le suffrage universel est devenu partout une réalité. Le parlementarisme s'est adapté à ce régime nouveau dans lequel l'immense majorité des électeurs ignore tout des problèmes qui se posent au pays. Tout naturellement les partis ont visé à les embrigader en les groupant selon leurs intérêts matériels. Le socialisme, parti de classe, a encadré la masse; en défendant ses intérêts, il lui a imposé en même temps une discipline et un dogme.

 

En face du socialisme, le parti catholique a, lui aussi, créé des organisations professionnelles diverses, en superposant aux intérêts de classe l'idéal religieux. Seul le parti libéral, respectueux, de par son essence, de la liberté individuelle, ne s'est pas organisé. Partout, de ce fait, il s'est trouvé réduit à n'être qu'un parti minoritaire.

 

Dans les régimes totalitaires, un parti unique impose ses chefs et son dogme à la population tout entière. Dans les pays parlementaires, chaque parti impose sa direction à la fraction de l'opinion politique qu'il représente et encadre. Le droit de vote du citoyen se trouve ainsi réduit à accepter en bloc le programme et les hommes que lui propose tel ou tel parti. Ainsi le suffrage universel a-t-il eu pour conséquence de créer une oligarchie politique formée par les dirigeants des divers partis, lesquels ne constituent qu'une très petite minorité du corps électoral.

 

Seule la Suisse , par l'usage du référendum, a conservé au citoyen une liberté qui lui permet d'exercer une action directe sur la législation. Dans tous les autres pays parlementaires, cette oligarchie politique tend de plus en plus à se transformer en une classe spéciale. La politique devient une profession. Le mandataire est rétribué. L'extension constante des attributions de l'Etat ne cesse d'augmenter l'influence des hommes politiques. Le dirigisme économique leur livre de larges secteurs de la vie économique, leur ouvrant ainsi quantité de possibilités de profits. Pour faire partie de cette minorité dirigeante de la politique, il faut se plier à une stricte discipline, franchir des échelons qui, des organisations de parti, mènent aux mandats municipaux, provinciaux ou législatifs. Le parti fait un bloc; il donne ses Consignes ; il a ses intérêts, qu'il place avant ceux de l'État. En marge du parlement, les partis constituent un rouage irresponsable, mais tout-puissant, de la vie politique. Ils dominent le parlement, voire même le gouvernement, dont tous les ministres appartiennent à leurs organisations.

 

Ainsi le personnel politique se transforme en une oligarchie, comme le personnel des grands groupements capitalistes. Entre ces deux oligarchies des rapports se nouent; des services s'échangent.

 

Il en résulte une profonde transformation du régime parlementaire, de plus en plus dominé par les intérêts de classes ou de groupes que représentent les partis. Le rôle de l'élite intellectuelle y devient de plus en plus réduit, et la valeur des mandataires politiques, dont la plus grande partie ne joue plus au parlement que le rôle de figurants, tend à baisser.

 

Les partis constituent dorénavant les cadres des régimes parlementaires. Et tout naturellement, comme toujours lorsqu'une société possède des cadres politiques ou sociaux, ces cadres ont tendance à constituer des oligarchies privilégiées.

 

Comme la source de la puissance de ces oligarchies réside dans la possession du pouvoir, les partis luttent tout naturellement pour disposer du pouvoir en faisant et en défaisant des coalitions, de sorte que l'État se trouve ballotté d'un parti à l'autre.

 

L'autorité du gouvernement diminue tandis que celle des partis augmente; or, l'interventionnisme de l'État ne cesse d'étendre les attributions du gouvernement. Les partis, ou plutôt les petites oligarchies qui les dirigent et qui, à tour de rôle, se partagent les portefeuilles, étendent ainsi de plus en plus leur mainmise sur l'État et sur le pays.

 

Tel quel, cependant, le régime parlementaire demeure un régime d'opinion. En dehors des partis, en effet, se maintient une masse flottante d'électeurs qui se portent, lors des élections, vers l'un ou l'autre parti selon les tendances du moment. Si bien que malgré leur rigidité, les partis restent influencés par l'opinion. En outre, la succession des partis au gouvernement maintient l'équilibre entre les intérêts divers qu'ils représentent. Les crises ministérielles empêchent ainsi des crises sociales. Elles jouent le rôle de soupapes de sûreté. L'instabilité apparente du pouvoir, dans les régimes parlementaires, est la raison de la stabilité du régime lui-même. L'évolution démocratique des pays parlementaires a rallié tous les partis à une politique de réformisme social qui, à travers les crises ministérielles, s'est adaptée aux intérêts de tous les groupes sociaux.

 

 

 

dimanche, 27 juillet 2008

Citaat van J. P. Van Rossem

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Citaat

“Wat mij in Liberalen aanstaat - tenminste toch als ze van het recht-voor-de-raapse soort van Guy Verhofstadt zijn, niet van het slijmballensoort van Patrick Dewael - is dat je met hen tenminste weet waar je staat omdat je weet voor wie ze staan en voor wie ze door het vuur gaan. Bovendien zijn ze zo helemaal weg van de vrijheid voor de ene mens om de andere straffeloos te mogen uitbuiten, dat ze wel verplicht zijn ook hier en daar nog een ander vrijheidje te verdedigen, en in een schijndemocratie als de onze is dat dan altijd weer mooi meegenomen.

Liberalen zijn anderzijds dan weer bijzonder goed geoefend in alle vormen van draaikonterij. Meestal maakt het hen geen donder uit met wie ze regeren - al is hun liefde voor de rode rakkers sterk ondermaats - en zijn ze al dik tevreden als ze een paar portefeuilles naar zich toe kunnen trekken. Op die manier kunnen ze hun geliefkoosde sport, die van de blauwe politieke benoemingen, in alle stilte en naar hartelust botvieren. Alhoewel nergens bewezen is dat de liberale politiek macro-economisch ooit een morzel heeft uitgehaald, hoeven liberalen niet gebukt te gaan onder prestatiedwang. Belangrijker is dat ze er steeds weer in slagen te laten geloven dat zij het patent hebben op alle economische wonderzalfjes.”

J. P. Van Rossem

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lundi, 21 juillet 2008

Een opstand van Duizend Vaandels

Een Opstand van Duizend Vaandels

Image Hosted by ImageShack.usNood aan een mentaliteitswijziging

Sommige nationalisten onder ons tonen zeer weinig of zelf geen interesse in de volksnationalistische strijd buiten onze grenzen. Zij menen dat de Vlaams-nationalistische strijd zich moet beperken tot de eigen grenzen en zijn blijkbaar niet in staat om verder te denken dan het eigen volk. Het is dan ook maar de vraag of wij hen als nationalisten kunnen klasseren, de term “separatisten” is misschien veel beter van toepassing. Mensen die de afscheuring van Kosovo zien als een kans voor Vlaanderen, zijn niets beter dan het regime dat zij menen te bestrijden.

“Nationalisten” die menen dat de strijd van de Bretoenen, Schotten, Catalanen, Palestijnen, etc… voor de Vlaming niet interessant is omdat het “te ver weg” is, zijn niet veel intelligenter dan mensen die menen dat politiek een “ver-weg-van-mijn-bed-show” is. Ik vraag trouwens ook aan hen hoe zij denken ooit de strijd te winnen als zij niet dringend hun mentaliteit omdraaien en intervolksnationalistisch beginnen denken. Staatsnationalisten en andere elementen die vijandig zijn naar de volkeren van de wereld toe (kapitalisten en marxisten om er maar twee te noemen) zijn slim genoeg om internationaal te handelen en te denken. Tegenover het internationale front van het reactionaire staatsnationalisme moeten wij dan ook een vernieuwend, doch vasthoudend aan de tradities van elk specifiek volk, volksnationalisme plaatsen. Laten we de vijand bestrijden met de eigen wapens.

Want laten we ons geen illusies maken, regimes zoals het Belgische zijn dan wel gewond, ze zijn zeker nog niet dood. En de natuur toont ons dat een gewond dier net het gevaarlijkste is. Tot nu toe hebben we al genoeg belgicistische offensieven moeten meemaken (B-Plus die met postkaarten het Vlaams-nationalisme belachelijk probeerden te maken, N-GA die separatisme belachelijk wou maken, zonder de link met België te door te hebben, etc…). Als deze aanvallen op het Vlaams-nationalisme zich zouden beperken tot dit soort paniekvoetbal, dan zouden we geruster op onze beide oren mogen slapen. Maar het Belgische francofone regime heeft nog steeds meerdere stukken op zijn schaakbord staan. Kijken we maar naar het verslag van de Raad van Europa waarin de kant werd gekozen van het racistische en imperialistische FDF. Toppunt hiervan is dat dit verslag is opgesteld door mensen die zelf uit een volk komen dat momenteel onderdrukt wordt. O.a. een Bretoen en Serviër stelden dit verslag op en concludeerden hieruit, na wel zeker 48 uur onderzoek, dat Vlaanderen eigenlijk bezig is een geweldloos fascisme uit te bouwen.

Intervolksnationalisme: praktische en ideologische redenen

Dit soort dingen toont aan dat onze tegenstanders nog genoeg wapens hebben om ons te raken. Als het volksnationalisme zich dan ook beperkt tot één volk en er geen informatie wordt uitgewisseld, geen samenwerkingsverbanden worden gesloten, dan zal het des te makkelijker zijn om de kop in te slaan. Enkel een verenigd internationaal front van volksnationalisten kan de regimes ten val brengen. Als één regime in crisis is door de volksnationalisten, kan er genoeg steun van het buitenland komen en zich concentreren op het neerslaan daarvan. Wanneer meerdere regimes echter tegelijk crisissen meemaken, zullen zij zich teveel op hun eigen binnenland moeten concentreren om, misschien wel vitale, steun te verlenen aan de buurlanden. Bijkomend is dat de onafhankelijkheid van een volk als een versterker kan werken voor de omringende landen. De Vlaamse onafhankelijkheid kan een enorme steun geven aan de Schotten, Catalanen, Corsicanen, etc… of omgekeerd. Het aan de bevolking tonen dat de onafhankelijkheid een realistische mogelijkheid is en dat dit kan worden bereikt zonder geweld, is een zeer sterk wapen in de strijd om de geesten en harten van het volk dat wij wensen te bevrijden.

Maar dan heb ik het over de puur praktische kant van de zaak gehad. We mogen echter ook niet vergeten dat internationale samenwerking niet enkel een zaak van realpolitik is, maar ook een ideologische verplichting. Een volksnationalisten is immers meer dan een separatist, een volksnationalist streeft naar het beste voor zijn volk, zonder daarbij argumenten als superioriteit of inferioriteit in te nemen over zijn dichte en verre buren. Het geloof in de overwinning moet ons drijven, maar ook het geloof in een betere en rechtvaardigere wereld moet centraal staat in de drijfveren van de volksnationalist. Als het enkel om eigen huis en tuin zou gaan en enkel om centenseparatisme, dan zouden we evengoed Gent of Antwerpen of Leuven of Brussel en omstreken onafhankelijk kunnen verklaren.

Volksnationalisme en internationale mobilisatie

Marxistische socialisten menen dat zij de ware en enige internationalisten zijn. Zogezegd zou er één groot proletariaat zijn dat wereldwijd dezelfde belangen heeft (ongeacht of dit nu een Somalische pottenbakker is of een Griekse lasser). De geschiedenis heeft echter uitgewezen dat ondanks alle mooi woorden en slogans, datzelfde proletariaat in 1914 en 1939/1940 maar al te graag de wapens tegen elkaar opnam uit een gevoel van nationale eer. Uiteraard zijn imperialistische oorlogen verwerpelijk vanuit volksnationalistisch standpunt, maar deze tonen tegelijk aan dat het internationalisme van het marxisme onrealistisch is. Maar de laatste jaren hebben getoond dat de basisideeën van het volksnationalisme net degene zijn die werkelijk kunnen mobiliseren. Het zelfbeschikkingsrecht der volkeren en een anti-imperialistisch streven naar vrijheid kon de laatste jaren honderdduizenden mensen mobiliseren.

Je moet al onder een steen geleefd hebben de laatste maanden om de tocht van de Olympische vlam der schande doorheen de wereld niet te hebben zien. Uit protest tegen de Chinese agressie tegenover Tibet hebben honderdduizenden mensen, ongeacht nationaliteit of overtuiging, zich tegen de Chinese politiek gevoerd en duidelijk geprotesteerd tegen de komst van de vlam. Enkele dapperen trotseerden ook de sterke beveiliging en sloegen er bijna in om de vlam eigenhandig te doven, wat uiteindelijk door de organisatoren zelf gedaan is. Jaren geleden ging er dan weer een andere golf door de wereld; de mensen kwamen op strijd tegen de invasie van Irak door de VSA. Honderdduizenden gingen op straat om hun stem te laten horen tegen dit voorbeeld van yankee-imperialisme, dat, om een kleine economische elite te dienen, zwakkere landen binnenviel. Van een seculier stabiel land, dat echter ook zondigde tegen de grondbeginselen van het volksnationalisme, hebben zij een soort constant “Gunfight at the Bagdad-Corral” gemaakt.

Deze twee grote golven van anti-imperialisme, en de daarbijhorende eis tot zelfbeschikkingsrecht der volkeren, tonen dat, wat marxisten en liberalen ook mogen beweren, het de volksnationalistische kernthema’s zijn die de mensen in deze post-modernistische tijden nog steeds massaal, en op een globale schaal, kunnen mobiliseren. Zelfbeschikkingsrecht van alle volkeren, economie in dienst van het volk, strijden tegen multiculturele staten, de strijd tegen imperialisme, respect voor de globale diversiteit van culturen en overtuigingen, het zijn thema’s die de kern vormen van het volksnationalisme en die nog steeds miljoenen kunnen mobiliseren. Helaas beseffen de grote aantallen mensen niet dat zij strijden voor dezelfde doelen als wij en zullen zij, zolang ze het volksnationalisme verwerpen, geen stap vooruit geraken in hun strijd tegen het regime. Het dwaas achternalopen van marxistische en liberale ideeën zorgt ervoor dat zij nooit iets wezenlijk zullen bereiken, enkel gepruts in de marge en herinneringen voor wanneer men bejaard is, zal het resultaat zijn.

Er is dan ook nood aan internationaal denken en handelen om zo op volksnationaal de doelen te bereiken. Uit eigen ervaring kan ik zeggen dat dit tot zeer interessante uitwisselingen en verfrissende ideeën kan leiden, denk ik maar aan de samenwerking tussen de NSV! en de Jeunesses Identitaires te Rijsel. Die laatsten vormen nu de militante voorhoede van een volksnationalisme dat het liberale en marxistische sprookje doorprikt en ook niet beroerd zijn om in de straten waar nodig de strijd aan te binden met het rapaille dat de voorsteden teistert.

Als men intervolksnationaal begint, durft!, denken, zullen we werkelijk onoverwinnelijk zijn. De 19de eeuw was de eeuw van het imperialistische staatsnationalisme, de 20ste eeuw was de eeuw van de Nieuwe Orde (communisme, nationaal-socialisme, liberalisme). Durven wij werkelijk intervolksnationaal te denken en te handelen, dan zullen wij volksnationalisten niet enkel de 21ste eeuw opeisen, maar het ganse Derde Millenium met een ijzeren wil tegemoet treden en veroveren.

Yves Pernet
Scriptor NSV! 2007’-08

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jeudi, 17 juillet 2008

De regering struikelt weer...

De regering struikelt weer

Volgens Adam Smith is een regering in een kapitalistische omgeving een instrument om eigendom te beschermen. Ze is dus eigenlijk in het leven geroepen om de rijken te beschermen tegen de armen, ofwel mensen die eigendom hebben tegen mensen die er geen hebben. In dit land, dat door Marx als het schoolvoorbeeld van kleinburgerlijke eigendomsverhoudingen werd gezien, is dit alles nog meer waar dan ergens anders.

België is niet een door een regering geleide staat. Neen, er is zelfs geen regering. Hier zijn de bezitters van het land de rechtstreekse onderdrukkers van het volk, dat zelfs geen eigen land of economische macht bezit. De politieke kaste die in andere landen de buffer is tussen het volk en de economische macht is hier vervangen door een anarchistische bureaucratie en een op maffia-achtige wijze gestructureerde dievenbende die zich vermomt achter het masker van de politiek. De machtskaste noemt zichzelf dan wel politiek, maar in werkelijkheid is het een belangenvereniging die zich als een parasiet heeft vastgezet op de werkkracht van het volk. De enige eigendommen die deze staatsmacht wil beschermen zijn de eigen eigendommen en de inkomens die gegenereerd worden uit het afzetten van deze volksmassa.

In de economische recessie die er nu aankomt, zullen de beschermers en eigenaars van deze staat zelfs zover gaan om hun trouwe bondgenoten, die altijd heel graag in het Belgische verhaal meedraaiden, te bestelen. Deze trouwe bondgenoten zijn de rijke middengroepen uit onze samenleving. Zij vonden dat de Belgische staat hun garantie was voor hun privé-eigendom. Het zal blijken dat deze staat niet langer deze optie nastreeft. Voor het gepeupel dat zich staatsmacht noemt, is het nu graaien en wegwezen geblazen. En men zal daarbij iedereen bestelen die bestolen kan worden, ook de vrienden uit de middenklasse. En nadat men alle vrienden en familie gedropt heeft in de lucratieve staatsorganen en -ambten is het nu tijd om er even uit te trekken.

Er kunnen nu nieuwe (of andere) poppenkastspelers op het toneel worden gezet. Ze zijn geproduceerd door dezelfde bedrijven als de vorige en ze hebben allen het democratische virus, dat we eigenlijk best volksverlakkerij zouden noemen, onder de huid. Als de nieuwe poppetjes niet snel genoeg leren dansen naar de pijpen van de bank- en andere magnaten dan zijn er nog de ultieme middeltjes zoals verkiezingen. Daar kan het volk zich nog eens lekker laten gaan. Het heeft dan de keuze uit verschillende soorten peperkoeken partijmannetjes en hun pretpartijtjes. De lol zal duren tot het geld en de middelen van de bevolking volledig zijn herverdeeld onder de verschillende bendes (partijen genaamd). Dat is nu niet meer veraf. Nu al teert die snert-elite op geld dat eigenlijk aan onze oude mensen toekomt. Vroeger noemde men dergelijke individuen en bendes beurzensnijders en ze werden opgehangen. In onze democratie noemt men dat zootje ongeregeld nu staatslui.

Er is blijkbaar niet alleen een monetaire inflatie. Onze tijd lijdt duidelijk ook aan een volledige inflatoire meltdown van alle normen en waarden. De staatsmacht heeft nu al meer dan 400 dagen de tijd gekregen om alle meubelen en kleren en andere goederen van het volk mee te grissen die verhandelbaar zijn. Ze heeft ze ze lekker verdeeld onder de Vlaamse en Waalse vrienden aan de top. Wij zijn benieuwd hoeveel tijd die laatste nu nog zullen krijgen om in de verlenging te spelen.

E. Hermy
Algemene coördinator

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mardi, 15 juillet 2008

Formation du Royaume-Uni des Pays-Bas (1814-1815)

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Jan NECKERS:

 

Sur la création du Royaume-Uni des Pays-Bas en 1814-1

L’unification des Pays-Bas (du Nord et du Sud) en 1814 et en 1815 ne s’est pas déroulée aussi facilement que le croit la majorité de nos contemporains. En octobre 1813, les Russes, les Prussiens et les Autrichiens battent Bonaparte près de Leipzig après trois jours de bataille. Les Français, défaits et en déroute, se replient derrière le Rhin mais en décembre, leurs adversaires franchissent à leur tour le grand fleuve. Une première colonne prussienne arrive dès le 16 décembre à Malines, marche en direction de Louvain mais se retire assez prestement sur Breda. Fin janvier 1814, l’offensive définitive commence et les Russes et les Prussiens entrent en libérateurs à Bruxelles le 1 février. Une semaine plus tard, le Prince Guillaume d’Orange fait une apparition à Bruxelles. Il est reçu avec un certain enthousiasme. Les Bruxellois se rappellent d’un autre Prince d’Orange, qu’ils avaient aimé.

 

Mais les bruits courent assez vite qui prétendent que le Prince Guillaume est venu pour bien d’autres raisons  qu’une simple visite de courtoisie. Le Prince, âgé de 42 ans, vient d’être proclamé souverain des Pays-Bas (du Nord) avec l’assentiment des Britanniques, après avoir balayé les réticences de l’Empereur de Russie qui lui reprochait d’avoir jadis joué la carte bonapartiste. Guillaume n’a encore aucune idée précise des formes que prendra son futur Etat. Il avait promis aux Anglais que cet Etat serait, dans tous les cas de figure, un solide tampon contre toutes les agressions françaises potentielles mais pour réaliser ce projet, il fallait que les Pays-Bas du Nord puissent s’étendre assez loin à l’est et au sud. Il avait demandé que lui soit octroyée une solide portion de l’Ouest des Allemagnes mais devinait bien évidemment que les Prussiens ne la lui accorderaient jamais. Mais dans l’ensemble constitué par les anciens Pays-Bas Royaux ou Pays-Bas autrichiens, il était sûr de pouvoir glaner quelques territoires. En attendant la décision finale des alliés, il était venu à Bruxelles pour prendre la température. Il sera bien vite confronté à la réalité.

 

Heintje (Henri) van der Noot, alors âgé de 83 ans, ancien dirigeant de la révolte contre l’Empereur Joseph II en 1789, publie une brochure où il réclame le retour à la légitimité, c’est-à-dire le retour des souverains de la dynastie des Habsbourg. Et ce projet reçoit alors un réel soutien. Discrètement, Guillaume commande à quelques hommes de confiance de réaliser une enquête dans les grandes villes afin de connaître les souhaits de l’aristocratie et de la haute bourgeoisie. La réponse est la même: une bonne part de celles-ci veut le retour à la légitimité impériale. Deux semaines plus tard, une délégation des plus grandes familles aristocratiques des Pays-Bas méridionaux part pour la France où les armées alliées poursuivent Bonaparte en déroute. La délégation réussit à parler à deux des acteurs politiques principaux de l’époque, l’Empereur François d’Autriche et le ministre anglais des affaires étrangères, Lord Castlereagh (rappelons ici que l’Angleterre a financé toutes les guerres contre Bonaparte et que leurs dépenses ont été supérieures à celles qu’ils engageront plus tard en 1914-18). L’entretien eut l’effet d’une douche très froide.

 

Un fait unique dans l’histoire

 

L’Empereur François se rappelle très bien, et même trop bien, de ses “chers” sujets des Pays-Bas. Il avait vingt-deux ans au moment de la mort de son oncle Joseph II, qui avait trépassé, disait-on, à cause du chagrin que lui avait causé la révolte des Pays-Bas. Son père Léopold ne fut Empereur que deux ans, avant de décéder à son tour. Après une première invasion française en 1792, l’armée du nouvel empereur François libère les Pays-Bas en 1793. Le souverain visite la région en 1794. Il fut même intronisé Duc de Brabant sur la Place Royale à Bruxelles et devint ainsi le premier souverain depuis Philippe II d’Espagne à être réellement présent lors de cette cérémonie. Mais en 1794, il entend essentiellement discuter argent avec ses “chers sujets” car ces derniers paient certes l’impôt, mais celui-ci est insuffisant pour entretenir l’armée qui doit les défendre contre l’envahisseur français. Seules quelques très riches abbayes sont prêtes à mettre des sommes aussi considérables que complémentaires pour faire face à la tâche. L’Empereur quitte alors le pays, réfléchit longuement et écrit une lettre à “ses chers sujets des Pays-Bas”. Il leur donne finalement la liberté, le 29 mai, de mettre en ligne une armée en toute autonomie, mais à la condition qu’ils la financent entièrement, de leurs propres deniers. C’est alors que les difficultés émergent et génèrent un chaos indescriptible. Et si les Pays-Bas refusent? Eh bien, l’Empereur et ses sujets néerlandais demeureront bons amis mais si Flamands, Brabançons, Hennuyers, etc. ne s’exécutent pas dans le sens préconisé par l’Empereur, alors qu’ils se débrouillent. L’Empereur les déclarera indépendants et ils devront alors décider par eux-mêmes quel sera leur sort futur.

 

C’est là un fait unique sous l’Ancien Régime qu’un souverain, si las de ses sujets, et à qui il a si peu de choses à dire, menace de les répudier. L’histoire nous donne bien des exemples de sujets cherchant à se débarrasser de leur souverain mais le contraire, comme dans le cas qui nous préoccupe, n’est, me semble-t-il, jamais advenu. Jamais souverain n’a cherché de cette manière à se débarrasser de certains de ses Etats. Après avoir entendu les menaces de leur Empereur, les Pays-Bas ont soupiré et décidé de se mettre à la tâche, mais ils y procèdent avec lenteur, tant de lenteur... Ce retour au réalisme politique s’est bien vite avéré inutile car, à peine quelques mois plus tard, les Français franchissent à nouveau les frontières et s’installent dans nos régions pour vingt ans. L’Empereur n’a aucun état d’âme en 1797 quand il doit céder officiellement ses Pays-Bas à la France en échange de la République de Venise, que les armées françaises avaient conquise et que Bonaparte reprendra quelques années plus tard. Or, voici donc que vingt ans après la dernière visite de l’Empereur autrichien à Bruxelles, ces casse-pieds de Néerlandais du Sud frappent à nouveau à sa porte.

 

L’Empereur François, toujours courtois, leur dit, qu’à son vif regret, il s’avère impossible qu’un membre de la famille des Habsbourg monte sur le trône des Pays-Bas. C’est ainsi que disparaît de nos régions une dynastie dont l’ascendance remonte à tous les comtes Baudouin de Flandre et à tous les Ducs Jean de Brabant. François et son chancelier Metternich, lorgnent tous deux vers l’Italie du Nord, voisine de l’Autriche: ces territoires sont bien plus intéressants et le fait que leurs habitants n’aiment guère les Habsbourg d’Autriche, laisse l’Empereur et son chancelier parfaitement froids.

 

 

“Dans un plus grand ensemble”

 

Lord Castlereagh ne fit pas dans la dentelle quand il s’adressa aux “Brabançons”, comme il appelait assez justement les ressortissants des Pays-Bas anciennement autrichiens. Deux choses seulement l’intéressent: l’abolition de l’esclavage et la constitution d’un Etat-tampon fort face à la France , capable de défendre Anvers et l’Escaut, de façon à ce que les Britanniques n’aient rien à craindre. Textuellement, il leur dit: “Pour être libres, vous devez être forts. Pour être forts, vous devez faire partie d’un plus grand ensemble et cet ensemble sera l’union avec la Hollande ”. L’affaire est donc réglée, sauf peut-être la question du tracé final des frontières. Castlereagh veut donner aux nouveaux Grands Pays-Bas quelques territoires des Allemagnes entre la Moselle et le Rhin mais il se heurte au veto des autres alliés. Les armées prussiennes sont encore bien présentes aux Pays-Bas et, en tenant compte de cette présence, une nouvelle idée germe dans l’esprit des négociateurs: partager les Pays-Bas méridionaux en prenant la Meuse comme frontière. Tous les territoires situés à l’ouest du fleuve seraient unis aux Pays-Bas du Nord et tous ceux situés à l’est reviendraient à la Prusse. Finalement , les Prussiens se désintéressent d’un tel partage et préfèrent recevoir des compensations en Allemagne même. Guillaume des Pays-Bas reçoit alors la Principauté ecclesiastique de Liège qui n’avait jamais fait partie des Grands Pays-Bas historiques (de Charles-Quint).

 

 

Et il avait encore un écueil à franchir: offciellement, les alliés déclarent avoir fait la  guerre à Bonaparte seulement  et non pas à la France et maintenant que l’envahisseur Bonaparte est exilé à l’Ile d’Elbe et qu’un Bourbon est à  nouveau hissé sur le trône de France, Talleyrand, ministre français des affaires étrangères, entend conserver une bonne partie de ces Pays-Bas ex-autrichiens. Ses manoeuvres ne réussiront pas: il ne pourra conserver que Philippeville, Mariembourg et Bouillon.

 

En juin 1814, les alliés signent le Traité des huit articles (impliquant notamment  la liberté de culte, contre laquelle l’évêque de Gand, le Français de Broglie, proteste immédiatement). Ce Traité règle les modalités de l’union des Pays-Bas du Nord et du Sud.

 

A la fin du mois de juillet, Guillaume tient provisoirement l’autorité entre ses mains. C’est effecitvement provisoire car les Russes songent un moment à une alliance avec la France et se demandent s’il ne faudrait pas, pour amadouer les Français, leur laisser ces anciens territoires sud-néerlandais lors de la signature du traité définitif. Cette alliance franco-russe ne se forge pas et, après cet intermède, c’est au tour de la Prusse de proposer à la France un marché. Les Prussiens souhaitent absorber toute la Saxe. Au début de l’année 1815, ils offrent à leur tour l’ensemble des Pays-Bas méridionaux à la France , en échange de l’appui français à l’annexion de la Saxe. Talleyrand est trop intelligent pour prendre cette offre en considération car il risque alors une guerre avec l’Angleterre. En février 1815, tous signent finalement, à Vienne, le Traité qui institue le “Royaume Uni des Pays-Bas”. Guillaume ne signe pas lui-même.... les Anglais le font à sa place!

 

 

Le retour des oeuvres d’art volées

 

Le nouveau  royaume existe de facto dès que le Congrès de Vienne scelle ses derniers actes mais Guillaume ne peut attendre aussi longtemps. En mars, il se proclame roi lui-même. Sans doute parce qu’il est ébranlé en apprenant que Bonaparte est revenu de son exil méditerranéen.

 

Du coup, il devient fort populaire dans ses nouvelles provinces du Sud car, mis à part quelques anciens collaborateurs du régime napoléonien, personne ne souhaite le retour du dictateur corse et de sa famille de brigands qui ont contraint tant de jeunes gens de chez nous à aller mourrir dans des opérations de pillage à leur seul profit. Même la Ville de Liège accueille Guillaume avec enthousiasme au début du mois de juin 1815, car les armées françaises arrivent à marche forcée. Finalement, Bonaparte est battu à Waterloo et cette fois les alliés se montreront bien moins magnanimes à l’endroit de la France. Celle-ci devra subir une occupation pendant des années et payer les frais de garnison.

 

La Prusse , après Waterloo, veut annexer toute l’Alsace et une partie de la Lorraine (ce qu’elle ne réussira à faire qu’en 1870) et exige que la Flandre méridionale (annexée à la France par Louis XIV) revienne aux nouveaux Grands Pays-Bas. Les autres alliés refusent cette suggestion prussienne. La France doit céder seulement Philippeville, Mariembourg et Bouillon.

 

Mais ce qui blessa encore davantage les Français fut le démantèlement du plus beau musée du monde: le Louvre. En 1814, il avait été décidé que toutes les oeuvres d’art volées par les armées françaises et exposées dans les musées français pouvaient rester en France. Mais, après Waterloo, les vainqueurs décident que toutes les oeuvres d’art doivent revenir à leurs propriétaires initiaux. Les commissaires néerlandais se présentent donc aux portes du Louvre. On les envoie promener. Mais Wellington, l’un des vainqueurs de Waterloo, récompensé par Guillaume sous la forme d’une plantureuse dotation annuelle et de biens immobiliers (toujours aujourd’hui aux mains des descendants du duc), ne trouve pas plaisante cette attitude des responsables du grand musée parisien. Il expédie un régiment anglais au Louvre et ses soldats emportent tout ce qui appartient légitimement aux Pays-Bas, dont le célèbre “Agneau Mystique” de Gand.

 

Le nouveau “Royaume Uni des Pays-Bas” est désormais un fait accompli. Il est toutefois aberrant de dire que la Belgique de 1830 est une création britannique. Certes, les Britanniques, en 1815, ne sont pas entièrement satisfaits de la création de ces nouveaux Grands Pays-Bas mais ils ont suffisamment de connaissances historiques pour savoir que la  césure entre le Nord et le Sud est fort profonde. C’est pourquoi, quinze plus tard, il acceptent, envers et contre tout, que les provinces anciennement espagnoles puis autrichiennes, reprennent leurs billes et se gouvernent seules, comme elles l’avaient fait pendant des centaines d’années.

 

Jan NECKERS.

(article paru dans “’ t Pallieterke”, Anvers, 4 juin 2008; trad. franç.: Robert Steuckers).