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samedi, 21 juillet 2007

J.P.Roux: choc de religions

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Jean-Paul ROUX :
Un choc de religions
Présentation de l'éditeur
Il y a ces grands noms qui surgissent du passé : bataille de Poitiers, croisades, prise de Constantinople, guerre d'Algérie, et tant d'autres épisodes. Il y a ce conflit armé qui a commencé en l'année 632 et qui, de décennie en décennie et jusqu'à nos jours, a été marqué par des événements dont la presse mondiale, si elle avait existé, aurait fait pendant des jours sa première page. Il n'y a pas d'année, pas de mois, pas de semaine peut-être sans que du sang soit versé par des chrétiens ou par des musulmans. Ne vaut-il pas la peine de le rappeler, de montrer à nos contemporains que les événements qui occupent l'actualité, qui les bouleversent, s'inscrivent dans une longue série de 1375 ans d'événements tout aussi spectaculaires ; que de plus petits faits dont on ne parle guère qu'un jour ou deux ont eu, tous les jours, leurs équivalents pendant 1375 ans ? Déclarée et ouverte, génératrice de grandes batailles, de villes enlevées à l'ennemi, de provinces conquises, de pays occupés, de populations exterminées, ou larvée et sournoise, la guerre entre l'islam et la chrétienté, malgré cette amitié que l'on évoque encore et qui fut souvent réelle, malgré ces relations entre Byzance et le califat de Cordoue ou entre Charlemagne et Harun al-Rachid, malgré ces traités d'alliance comme celui de François Ier et de Soliman le Magnifique, malgré de longues périodes de trêves sur tel ou tel front alors qu'on se battait ailleurs, malgré tout ce que chrétiens et musulmans se sont mutuellement apporté, ont échangé, malgré l'admiration qu'ils ont pu avoir les uns pour les autres, cette guerre est une réalité. Elle n'a jamais vraiment pris fin.

Biographie de l'auteur
Ancien directeur de recherches au CNRS, ancien professeur à l'École du Louvre - où il enseigna l'art islamique ,
maîtrisant de nombreuses langues orientales, Jean-Paul Roux a consacré de nombreux livres à l'Orient et à l'Asie. Citons son Histoire des Turcs (Fayard, 1984 et 2000), son Histoire de l'Iran et des Iraniens (Fayard, 2006). Il s'est toujours intéressé, en érudit mais aussi en chrétien loyal et respectueux de l'autre, à l'histoire des religions (Jésus, Fayard, 1989 ; Montagnes sacrées, montagnes mythiques, Fayard, 1999).

Détails sur le produit
  • Broché: 459 pages
  • Editeur : Fayard (4 avril 2007)
  • Collection : LITT.GENE.
  • Langue : Français
  • ISBN-10: 2213632588
  • ISBN-13: 978-2213632582

Modèle juridique confucéen

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Modernité extrême-orientale et modèle juridique «confucéen»

par Robert Steuckers

On parle beaucoup de “confucianisme” ou de “nouvel asiatisme” dans les salons occidentaux soucieux d'imposer envers et contre toutes les réalités concrètes de ce bas monde, un «Nouvel Ordre Mondial», depuis la parution du célèbre essai de Samuel Huntington dans la revue diplomatique américaine Foreign Affairs  en 1993, où l'auteur annonçait l'émergence d'une nouvelle fracture duale sur la planète, opposant non plus des «hégéliens de droite» démo-libéraux et cornaqués par Washington, à des «hégéliens de gauche» communistes et soviétiques, cornaqués par Moscou: on parle désormais de l'«Ouest» contre le «reste», c'est-à-dire l'alliance planétaire de toutes les traditions non chrétiennes et non laïcisées, jugées sans nuance “obsolètes et archaïques”, de l'Islam au Confucianisme, en passant par le taoïsme et l'hindouisme.

Une politologue coréenne enseignant en Allemagne, plus précisément à l'Université de Halle, Eun-Jeung Lee, remet tranquillement les pendules à l'heure en rappelant aux terribles simplificateurs américains et euro-ricains certaines réalités historiques: le confucianisme ne cherche pas à convertir, ni même à s'ancrer définitivement dans les cerveaux des hommes d'Extrême-Orient, son influence varie au fil des siècles et au gré des circonstances et des défis politiques. En Corée, explique-t-elle, l'héritage confu­céen est désormais fragilisé en profondeur par la modernisation. Au Japon, son influence est faible, pour autant qu'elle ait jamais été forte. En Chine, le bouddhisme et le taoïsme ont influencé la société et fa­çonné le mental chinois au même titre que la doctrine de Confucius. Le régime maoïste de surcroît avait orchestré en son temps des campagnes “anti-confucianistes”, où le confucianisme était désigné comme un “obstacle à la révolution”, jusqu'au jour où l'élite post-maoïste au pouvoir sous Deng Xiaoping a subi­tement redécouvert cette vieille doctrine pour justifier les mécanismes à l'œuvre dans le renou­veau chi­nois. A la lecture de certains articles du Nouvel Observateur, on constate que les intellectuels confor­mistes s'inquiètent sérieusement des progrès du “nouvel asiatisme”, lequel réclame une interpréta­tion nou­velle, plus étoffée, des droits de l'homme, où les instances internationales sont invitées à tenir compte des traditions pluri-séculaires voire pluri-millénaires d'Asie et à ne pas imposer à tous les peuples de la Terre un modèle né dans le cerveau de quelques intellectuels parisiens hystériques de la fin du XVIIIième siècle, ou dans les réflexions brumeuses d'un Américain du nom de Tom Paine qui, tout révolu­tionnaire et naturalisé français qu'il fût, a bien failli finir sous la guillotine.

Principal reproche qu'adressent les bonnes consciences au “nouvel asiatisme”: il chercherait à justifier des pratiques autoritaires. Ce serait là la raison profonde de la remise en cause de l'idéologie occidentale. Or, écrit Eun-Jeung Lee, les formes autoritaires résiduelles en Extrême-Orient sont un héritage des ré­gimes forts voire militaires que les Américains ont soutenu dans la région pour la “stabiliser” et la neutrali­ser au profit des intérêts occidentaux, dont ils étaient bien entendu les patrons et les premiers bénéfi­ciaires. Mais la stabilisation voulue dans les années 50 et 60 par Washington a permis l'émergence de structures industrielles efficaces et une “modernisation” qui aurait d'ailleurs été totalement impossible en cas de chaos révolutionnaire permanent. La thèse huntingtonienne du «confucianisme» et du dévelop­pement confucéen récapitule, de façon simpliste, à l'usage des médias américains qui font de l'hyper-simplification une pratique quotidienne, l'ensemble des facteurs historiques et locaux qui ont permis l'émergence des NPI d'Extrême-Orient, surtout depuis la normalisation des rapports sino-américains en 1972 qui a écarté tout risque de déflagration continentale dans la région. Un double sentiment se cache derrière cette théorisation et cette hyper-simplification: d'une part, les néo-libéraux issus des reagano­mics, les conservateurs autoritaires ou les technocrates qui ne rêvent que de courbes ascendantes, veulent puiser dans cet hypothétique confucianisme quelques recettes pour justifier leurs propres doc­trines et pratiques flexibilistes ou para-thatcheriennes aux Etats-Unis et en Europe; d'autre part, elle sert à installer en veilleuse une sorte de psychose permanente, qu'on pourra activer et exacerber en cas de conflit avec un pays asiatique ou quand les NPI de la région deviendront vraiment trop concurrentiels. Mettre à tout bout de champ en exergue la critique asiatique ou islamique à l'encontre de l'eurocentrisme de l'idéologie des droits de l'homme, et s'en scandaliser, est en fait la réactualisation d'une bonne vieille tactique américaine: créer d'avance un instrument de propagande contre un adversaire potentiel, permet­tant de s'immiscer dans ses affaires intérieures ou de le mettre, CNN à l'appui, au ban des nations.

Pour Eun-Jeung Lee, le bricolage idéologique de Huntington, où l'extrême diversité religieuse et ethnique de l'Asie orientale est schématisée à outrance, trahit la volonté américaine de conserver son leadership militaire sur la planète. Pour maintenir les budgets d'une armée colossale et pour financer ses potentiali­tés de déploiement rapide (testées lors de la Guerre du Golfe), il faut qu'une pression (réelle ou virtuelle) se profile à l'horizon, que l'on puisse agiter dans les couloirs et les parloirs du Congrès de Washington un nouvel épouvantail au nom bizarre: c'est le duopole “agressif” constitué du “confucianisme” et de l'islamisme (où Mollahs iraniens et nationalistes panarabes sont allègrement confondus). L'hégémonisme américain a profité des rigidités de la Guerre Froide. Il faut donc, après la chute du Mur et la suppression du PCUS, créer un nouvel ennemi, abstrait et imaginaire: la collusion entre islamistes et confucianistes, alors qu'aucune alliance formelle ou informelle n'est décelable entre ces deux traditions religieuses. Eun-Jeung Lee fait très justement remarquer que le fondamentalisme islamique est une réaction puissante à l'échec d'une modernisation technique et d'une occidentalisation. Il est le fruit d'une terrible frustration, de l'absence de perspective chez les jeunes des pays d'Afrique du Nord ou d'ailleurs, où aucun décollage industriel ne s'est effectué. En revanche, le confucianisme, théorisé comme vecteur du succès économi­co-industriel des NPI, est une idéologie gagnante, généralement analysée sur base des thèses de Max Weber, sociologue et philosophe allemand du début du siècle, qui avait désigné l'idéologie protestante comme facteur de modernisation en Europe. En France, un Serge-Christophe Kolm avait lui aussi analysé l'efficacité sociologique du “bouddhisme” des NPI asiatiques, mais en mettant plutôt l'accent sur les vec­teurs de solidarité. La mise en équation du “confucianisme”, fabriqué par Huntington, et du fondamenta­lisme islamique dans toutes ses variantes, est une absurdité que ne corroborent pas les faits.

Eun-Jeung Lee se positionne à gauche, dans une logique néo-démocratique mais non philo-américaine: pour elle, la guerre préventive que mènent les Etats-Unis contre leurs anciens alliés autoritaires et anti-communistes des années 50 et 60, va piquer les fiertés nationales au vif, va détourner paradoxalement les esprits du modèle occidental démocratique et consolider les pouvoirs forts. Cette consolidation des pouvoirs forts est aussi ce que Washington recherche, afin de donner progressivement corps à l'image de l'ennemi nouveau, un allié dont ils n'ont plus besoin mais qui les gène sur le plan économique, vu le boom spectaculaire des industries singapourienne et coréenne. Mais les modèles nationaux et les démocraties taillées à la carte, selon les héritages spécifiques des peuples et non pas alignées sur le modèle sérialisé que cherchent à imposer les hystériques de nos intelligentsias déconnectées, sont des nécessités stabi­lisantes, seules aptes à gérer les patrimoines humains dont elles ont la responsabilité. La logique de l'immixtion constante dans les affaires intérieures des pays est perverse, surtout dans des contextes civilisationnels très différents du nôtre. La démocratie, les droits de l'homme et des communautés, les systèmes juridiques doivent varier au gré des contextes: c'est cette perspective de pluralité et de luxu­riance juridico-institutionnelle qui effraie nos intellectuels coincés, ternes et sans imagination, qui voient dans le “nouvel asiatisme”, un avatar chinois, malais ou coréen du “particularisme nazi”. Qui l'eût cru? Beati pauperes spiritu...

Robert STEUCKERS.

Références:

- Eun-Jeung LEE, «Das unheilige Wechselspiel: Östliche Modernisierung und westliche Theorie», in Internationale Politik und Gesellschaft,  3/1995, Friedrich-Ebert Stiftung, pp. 243-254.

- Samuel P. HUNTINGTON , «The Clash of Civilizations?», in Foreign Affairs, Summer 1993, pp. 22-49.

 

 

vendredi, 20 juillet 2007

Relacion entre derechos humanos y justicia

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Relación entre derechos humanos y justicia

La tensión entre la ley y lo justo

En este asunto como en tantos otros ha habido desde la antigüedad en nuestra historia occidental una tensión entre estos dos instrumentos del orden social y las dos formas de pensarlos. Por un lado están aquellos que privilegiaron lo justo, to dikaion = jus, los griegos y romanos, y, por otro, los que prefirieron la ley, nomos = lex, los judeocristianos. Los judíos con la Torah y los cristianos con la ley moral.

Estos dos antagonistas dikaion y Torah, y sus derivaciones, recorren toda la historia del derecho y encarnan dos concepciones diferentes de concebir la justicia.

Lo justo, to dikaion, lo concebían los griegos como el dar a cada uno lo que corresponde y los romanos de la época clásica lo tradujeron por jus concebido también como el arte de suun cuique tribuere, atribuir a cada uno lo suyo.

Lo adverso a esta concepción de lo justo lo encontramos en la Torah judía y en su proyección posterior la ley moral cristiana, que vienen a sustituir el jus por la lex y el dikaion por el nomos.

Y así como la Torah es un instructivo lleno de preceptos y de reglas morales(No robarás; No fornicarás, etc.) dirigidas a los individuos. Las leyes morales cristianas aparecen ya en los Padres de la Iglesia rivales del derecho romano al cual la “justicia cristiana” opondría la caridad y la misericordia. El texto de San Pablo (1 Cor 6, 1-8)# que funda todo el derecho canónico así lo afirma.

Lo justo, sea dikaion, sea jus se expresa en indicativo, lo justo, como nomos o como lex se expresa en imperativo. Un autor tan reconocido como Michel Villey, el mal denominado “filósofo del derecho”, afirmó taxativamente al respecto: La intención de la Iglesia no era cristianizar el derecho romano, se trató mas bien de reemplazar el régimen del dikaion por el régimen de la Torah cristiana.#

En ese amasijo de pensamiento bíblico y de vocabulario romano la idea de jus es absorbida por la de lex, y así lo justo viene a transformarse a partir de los siglo XII y XIII en sinónimo de ley en el apotegma: Lex sive jus.

Lo justo deja de ser definitivamente una proporción a descubrir, la búsqueda de la proporcionalidad entre la culpa y la pena, entre lo debido y lo reclamado como sostuviera el viejo Aristóteles en su Etica Nicomaquea para transformase en la acción prescripta por la ley moral.

Así el derecho objetivo es concebido como el conjunto de las leyes que como reglas de conducta nos prohiben o permiten ciertos comportamientos. Y el derecho subjetivo moderno, producto de estas leyes, es un atributo del sujeto individual como poder o permiso para actuar, sin obstáculos a su conducta, por parte de los otros.

Llegados a este punto, a este ocultamiento del ser en el ente diría Heidegger, del jus en la lex y del dikaion en el nomos estamos obligados a extraer algunas consecuencias o, al menos, realizar algunos comentarios contemporáneos.

Lo primero que nos llama la atención es, la poca atención valga la redundancia, que los juristas de hoy han puesto en el tema. Casi no existe bibliografía sobre esta mescolanza indigesta entre pensamiento bíblico y vocabulario romano.

El pensamiento jurídico greco-romano ignora el derecho subjetivo porque no lo puede tener en cuenta, dada su noción de lo justo. Si lo justo dejó de ser el suus cuique para transformase en lo moralmente debido de Vitoria y Suárez el derecho se transforma en predominantemente subjetivo como ocurre hoy día. Esta es la última razón por la cual Vitoria es el fundador de la teoría de los derechos humanos ya en la premodernidad, y Suárez el gran disidente al régimen de la monarquía absoluta de su tiempo, motivo por el cual sus obras se quemaban a diario en París y Londres. Claro, de esto no se habla porque son dos pensadores católicos stricto sensu y hoy el anticatolicismo es lo políticamente correcto. O peor aún, el anticatolicismo reemplazó al antisemitismo como ha sostenido acertadamente Vitorio Messori.

Los tan mentados derechos modernos del hombre aparecen entonces como una ideología de carácter jurídico fundada en el derecho subjetivo, el que a su vez no tiene ningún fundamento. Es por ello que un pensador del derecho y la política como Julien Freund ha podido afirmar: Toda reflexión coherente sobre los derechos del hombre no ha sido establecida científicamente sino dogmáticamente #.

La reducción de lo justo a la ley ha hecho que pensadores como Karl Jaspers, y a partir de él toda una escuela del derecho contemporáneo fundado en la Torah, sostengan la existencia de culpas colectivas y comunitarias(como la del pueblo alemán) en donde no se puede aplicar el: “a cada uno lo suyo” sino sólo el imperativo de la ley moral, solapadamente simulada como ley positiva.

La consecuencia de ello es lo que se ha dado en llamar la industria del Holocausto, denunciada por el profesor Norman Filkenstein # de la Universidad de Nueva York, tan en boga en estos días del 60 aniversario de Auschwitz en donde a partir de la teoría de las culpas colectivas de las unidades políticas unos pocos judíos usufructúan la muerte de muchos.

La comunidades políticas o los Estados-nación son inimputables, los que son responsables son sus representantes políticos.
Las culpas, si las hay, en las sociedades políticas son de los representantes, aquellos que dirigen dichas sociedades, que las orientan a sus fines y que arbitran los medios.

La sociedad argentina sigue conmovida por la masacre de Cromagnon donde murieron el último día del 2004 casi 200 jóvenes que fueron a un festival de música. La autoridades políticas de la ciudad de Buenos Aires en lugar de asumir su responsabilidad directa y abiertamente la intentan diluir en un referendum popular a fin de legitimar su representatividad, sin percibir que ésta se acabó y que de primar el jus (lo justo) sobre la lex (la ley) tendrían que ir inexorablemente presos.

Intentar judicializar los hechos y actos políticos es una utilización más de la convertibilidad entre la ley y lo justo: Lex sive jus es la falacia más profunda que ha producido el pensamiento jurídico occidental. Y el ampararse en los resquicios o pliegues que brindan las normas muestra la ruindad moral de los jueces oportunistas y sin valores.

Derechos humanos y su nueva fundamentación

A fuer de ser precisos comencemos diciendo que la expresión derechos humanos es redundante, pues los derechos no pueden ser sino humanos. Por extensión se habla de derecho de los animales, pero este derecho es convenido.
La breve historia de los derechos humanos es la siguiente: El filósofo inglés y padre del liberalismo John Locke es quien eleva su teoría de los derechos humanos a religión laica, anteriormente con Francisco de Vitoria, los derechos humanos de los indios se plantearon en el marco de pertenencia a la comunidad entendida como la Cristiandad. La moderna teoría de Locke fue adoptada por las colonias norteamericanas como derechos exclusivamente para sí mismas. Desembarca luego en el igualitarismo, aunque es sabido que para esta ideología unos son más iguales que otros. El sujeto de estos derechos fue el hombre entendido como individuo de la sociedad burguesa y no el hombre del pueblo. Finalmente, terminan estos derechos anteponiéndose a los derechos de la comunidad.
En definitiva la política de este tipo de derechos humanos vigente y triunfante hoy está dirigida a la construcción de un mundo uno y homogéneo. Nosotros a esto vamos a anteponer el derecho de los pueblos y buscarle una fundamentación acorde a nuestra realidad y necesidades.

Cuando los derechos humanos reciben su declaración explícita en la carta de las Naciones Unidas en 1948 todavía tenían como fundamento el hecho de ser una verdad reconocida libremente por todos, pues la misma era inherente a todo ser humano.
Hoy a partir de la ética del consenso pregonada por Habermas y lo que queda de la vieja escuela neomarxista de Frankfurt, así como por la teoría de la justicia del liberal noramericano John Rawls, los derechos humanos son definidos por la voluntad consensuada de aquellos que deciden, y no por estar atados a la naturaleza de la persona humana.
Este cambio es gravísimo porque siguiendo este procedimiento cualquier elemento o situación puede ser presentado como un nuevo derecho humano. Derecho a la eutanasia, al género, al aborto, al infanticidio, al matrimonio de homosexuales.

Los altos funcionarios de las Naciones Unidas persiguen a toda costa el logro del consenso, pues ello adquiere fuerza de ley en los Estados que, como el argentino con la constitución de 1994 reconocen otra fuente de derecho, más allá de ellos mismos. O Estados vicarios o dependientes de los diferentes lobbies internacionales que en forma inconsulta o imprudente ratifican las medidas tomadas.

De modo tal que, siguiendo esta lógica perversa, los Estados como el nuestro tienden a obedecer leyes que surgen de la voluntad de aquellos que crean el consenso como manifestación de su propia voluntad y no en orden a la mayor justicia respecto de un acontecimiento o situación dada en nuestro país.

Nosotros proponemos un anclaje de los derechos humanos como derechos no ya del individuo sino más bien de la persona. No es este el lugar para la profunda disquisición entre individuo y persona, solo baste decir que individuo viene del griego átomos que significa indivisible y persona, también del griego prosopón, que significa rostro o máscara a través de la cual nos manifestamos.
La noción de individuo indica que forma parte de una especie, en cambio la de persona sugiere, antes que nada, la idea ser singular e irrepetible, esto es, de único, porque está más allá de una especie. Así el hombre es individuo por formar parte de la especie homo, la persona es algo absolutamente diferente a toda especie o categoría y por eso se la ha podido definir también como: ser moral y libre. Vemos como la idea de persona implica necesariamente la de libertad y no así la de individuo.

Los derechos humanos fundados como derechos de la persona rescatarían al mismo tiempo la dimensión íntima de la unicidad vivida, lo que exige el respeto a la más elemental forma de vida humana, y la dimensión social del hombre, que sólo se puede comprender plenamente en el “rostro del otro” que es lo mismo que decir en el “otro como persona”. Esta es la forma de romper la idea de simulacro, del “como sí” kantiano, que es la que gobierna nuestras relaciones sociales y políticas en esta totalitaria y cruel dictadura del “se dice o se piensa” de los policías del pensamiento único bajo el que vivimos.
En estos días murió Jean Baudrillard quien a través de toda su obra denunció de mil manera la sociedad del simulacro en que vivimos. Hace unos años murió otro filósofo francés Guy Debord quien fustigó a nuestra sociedad como “del espectáculo”. Hoy Massimo Cacciari no se cansa de describir la pax apparens en que vivimos. ¿Es necesario insistir más sobre este tema tantas y tan bien denunciado y descripto?. Creemos que no, que es suficiente.

Conclusión
Así como los derechos del hombre y del ciudadano consagrados por la Revolución Francesa 1789 reposaban sobre un acto de fe en el mejoramiento del porvenir y el destino del hombre apoyados en la idea de progreso indefinido de la humanidad según el ideario del abad de Saint Pierre formulado en su Proyecto de paz continua de1712.

Así como los Derechos Humanos consagrados por las Naciones Unidas en 1948 se fundaban en el carácter de inherentes al ser humano, poseían un cierto fundamento filosófico. Por el contrario, en nuestros días se pretende cambiar la fuente de estos derechos y radicarla en el consenso de los países o lobbies poderosos. Esto es, dejaron de ser establecidos filosóficamente para ser fundados ideológicamente.

Nosotros proponemos, como estrategia cultural alternativa, que los derechos humanos se funden sobre la persona humana y no meramente sobre el individuo aislado como se ha hecho desde la Revolución Francesa, Porque la persona supone para su existencia una comunidad y es sólo en ésta donde encuentra el hombre, en tanto zoon politikon =animal político, su realización más plena. Sabemos que citar a Perón no es muy académico pero no por ello menos cierto: No puede haber hombre libre en una comunidad que no lo sea. Apotegma que resume no sólo la idea de que la libertad es siempre libertad en situación sino también que el hombre debe pensarse necesariamente en comunidad.

Fundemos, entonces, los derechos humanos en las necesidades de las personas. Esto es, en las carencias que sí o sí (necesariamente) se deben satisfacer, y así, al menos, tal acto se justificaría por la mayor o menor altura de sus finalidades. A la limite, todo acto de justicia es una restitutio.
Es por ello que la política debe de ser entendida como el arte de hacer posible lo necesario. Observemos como la categoría de lo necesario, esto es, aquello que no puede ser de otra manera, agregada a la de posible, libera a la política de su carácter idealista o ilustrado para trasladarla hacia un realismo político, encarnando sus acciones en los problemas y en las cosas mismas.
El mejor Alberdi, es sabido que hubo dos, lo afirma en su Fragmento que si queremos pensar genuninamente desde América debemos hacerlo a partir de nuestras necesidades.
Este anclaje de lo posible en lo necesario, esta búsqueda de dar satisfacción a aquello que se necesita, este tener en cuenta las condiciones real-concretas del fenómeno político es la norma que guía a todo el denominado realismo político que ha tenido en el siglo XX expositores de la talla de Morgenthau, Freund, Maranini, Miglio, Fernández de la Mora, Waltz, Arón, hoy día Maffesoli, entre otros.
Un estudioso destacado y brillante sobre estos temas, Alessandro Campi ha definido el realista político así: “no es conservador ni reaccionario, no defiende el status quo y mucho menos añora el pasado. El verdadero realista utiliza la historia no solo para comprender mejor el pasado sino también, y sobre todo, para representarse mejor el futuro y posee la conciencia de que nada es eterno en política” #

Es que la política como el arte de hacer posible lo necesario para una comunidad nos está obligando a realizar las acciones conducentes y no simplemente declamativas o ilusorias.

El polémico y no conformista filósofo español, Gustavo Bueno, nos ilustra con su último libro Zapatero y el pensamiento Alicia acerca de esta distinción fundamental entre política realista e ideología ilustrada.

Así, a los derechos humanos tenemos que buscarle un aclaje en las necesidades de los pueblos y de los hombres que los integran que es muy diferente al basamento que hoy se les otorga, como es el consenso de los poderosos, de los lobbies, que cuanto más fuerte son más derechos poseen o logran.

Esto que venimos a sostener hoy en este claustro de la facultad de derecho lo sostuvo hace ya más de medio siglo una joven mujer que no era filósofa sino una mujer del pueblo, Evita, cuando afirmó lacónicamente: Allí donde hay una necesidad hay un derecho. Aclaremos que este concepto de necesidad abarca las “necesidades reales” y rechaza las “necesidades falsas o simuladas” que nos crea a diario esta sociedad de consumo que transformó a través del dios monoteísta del libre mercado, a los pueblos en gente y a los hombres en público consumidor.

Alberto Buela, filósofo. Vicepresidente del CEES (Centro de estudios estratégicos suramericanos). Asesor de la CGT
Conferencia en el Aula Magna de la Facultad de Derecho y Ciencias Sociales de la Universidad de Buenos Aires, el 28 de marzo de 2006
alberto.buela@gmail.com


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Etranges conservatismes américains

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Etranges conservatismes américains

Par Herbert AMMON

En dépit des impulsions culturelles venues des Etats-Unis via Hollywood et la Pop culture, le paysage idéologique et politique de la seule puissance globale (dixit Zbigniew Brzezinski) demeure « terra incognita » pour la plupart des Européens. Les césures spécifiquement américaines, qui séparent les « liberals » des « conservatives » ne se perçoivent jamais clairement, tant et si bien qu’on les classe en Europe de manière binaire : entre une gauche et une droite. Les problèmes s’accumulent lorsque l’on cherche à établir une bonne taxinomie des écoles politiques et idéologiques américaines : les slogans et mots d’ordre sont si nombreux, reçoivent tant de définitions particulières qu’on ne s’y retrouve plus, surtout si l’on évoque une ancienne droite et une nouvelle droite, soit des paléo-conservateurs et des néo-conservateurs.

Pour définir les camps politico-idéologiques américains, les définitions habituelles ne sont guère de mise (sauf quand il s’agit, par exemple, du conservatisme tel que l’a défini jadis un Russell Kirk). Européens et Américains ont une expérience différente de l’histoire, nomment donc les choses politiques différemment, ce qui conduit aux confusions et quiproquos actuels. « Cum grano salis », on peut distinguer quelques différences majeures entre conservatismes européens et américains : d’abord, les conservatismes européens sont devenus sceptiques quant à l’histoire à venir ; les conservatismes américains sont nettement orientés vers le futur, sont, dans le fond, anti-historiques, dans la mesure où ils entendent maintenir l’idée fondamentalement américaine d’une société contractuelle (ils n’envisagent pas d’autres modèles). Ensuite, les conservatismes américains sont fiers de leur tradition historique continue, non brisée, que les Européens jugent « courte » ; les conservatismes européens, eux, sont contraints de tenir compte d’une longue histoire, marquée par des ruptures successives. Enfin, les conservateurs américains perçoivent de façon positive le rôle de puissance mondiale que joue leur pays, alors que les Européens se souviennent constamment du « suicide de l’Europe » (dixit Paul Ricoeur) en 1914. Et, last but not least, les conservateurs américains acceptent sans hésitation l’idée libérale d’un libre marché sans entraves, alors que les conservatismes européens critiquent tous le libéralisme.

Adhésion sans entraves au libre marché

La genèse des notions de « liberal » et de « conservative » nous ramène à l’ère Roosevelt (1933-1945). Les partisans de la politique social-réformiste et interventionniste / étatique du New Deal rooseveltien se dénommaient « liberals ». Les adversaires de Franklin D. Roosevelt venaient d’horizons divers : parmi eux, on trouvait des libéraux au sens économique le plus strict, qui se posaient comme les seuls véritables libéraux ; il y avait ensuite des critiques de la bureaucratie (du « big government »), en train de devenir pléthorique à leurs yeux. Enfin, du moins jusqu’à l’attaque japonaise contre Pearl Harbor, il y avait les défenseurs de l’isolationnisme. Murray Rothbard, un « libertarien », soit un extrémiste du marché, désigne cette coalition hostile à Roosevelt sous le nom de « Vieille Droite » (« Old Right »). D’après Rothbard, le terme « conservateur » n’était guère usité aux Etats-Unis avant la parution en 1953 de « Conservative Mind », le grand livre de Russell Kirk.

Les « conservateurs », qui suivaient la forte personnalité de Robert A. Taft, sénateur de l’Ohio (de 1939 à 1953) et rival républicain de Dwight D. Eisenhower en 1952, renonçaient à toute élévation du débat intellectuel en politique. Attitude qui n’a guère changé en dépit de l’émergence de courants de pensée conservateurs mieux profilés. Libéral et théoricien peu original, Peter Viereck, dans « Conservatism Revisited » (1949) s’est posé comme critique des idéologies totalitaires, le « communazisme ». Russell Kirk (1918-1994) fut donc le premier à se positionner comme explicitement conservateur et à être reconnu comme tel par l’établissement « libéral ». En se référant à Edmund Burke, le critique de la révolution française de 1789, perçue comme rupture de la Tradition, Kirk mettait l’accent sur l’origine « conservatrice » de la révolution américaine. Dans ses écrits, Kirk citait, en les comparant à Thomas Jefferson, les pères fondateurs « conservateurs », tels John Adams et les auteurs des « Federalist Papers », se référait également aux critiques européens de la révolution comme Burke ou Tocqueville. Kirk se posait également comme un conservateur écologiste, pratiquant la critique de la culture dominante, ce qui fit de lui une exception parmi les conservateurs américains, optimistes et orientés vers le futur.

« On pourrait, pour simplifier, résumer comme suit l’histoire du conservatisme américain : Russell Kirk l’a rendu respectable ; William Buckley l’a rendu populaire et Ronald Reagan l’a rendu éligible » (citation de J. v. Houten). En effet, les conservateurs doivent à William F. Buckley, né en 1925, d’avoir pu accroître leurs influences au sein du parti républicain et d’avoir percé pendant l’ère Reagan. Ils doivent ces succès au réseau de revues et de « think tanks » que Buckley a tissé dès les années cinquante, dont l’ « American Heritage Foundation », créé en 1973.

Buckley, comme le rappelle son livre « God and Man at Yale » (1951), était un catholique fervent. Il débarque un beau jour à Yale dans le bastion du « liberalism » à l’américaine, dominé par les agnostiques, les athées et les unitariens post-chrétiens, variante du protestantisme aligné sur l’idéologie des Lumières. En 1955, ce fils d’un millionnaire du pétrole fonde la « National Review », autour de laquelle se rassembleront des personnalités très diverses, toutes étiquetées, à tort ou à raison, comme « conservatrices » : des libertariens à Kirk lui-même. Dans ces années-là, où la « New Left » connaissait son apogée, le groupe « Young Americans for Freedom », lancé par Buckley, constituaient déjà un contrepoids politique. Et puisque Buckley, récemment, a critiqué les stratégies de Bush, quoique de manière très modérée, on peut le considérer aujourd’hui comme un représentant des « paléo-conservateurs ».

Le conservatisme américain, nous l’avons constaté, est un champ fort vaste dont les idéologèmes et les stratégies ne se sont cristallisés que depuis quelques décennies, contrairement à ce que l’on observe chez les conservateurs européens. Aujourd’hui, c’est évidemment George W. Bush qui domine l’univers conservateur américain. Bush se déclare « conservateur », plus exactement le continuateur de l’œuvre politique de Reagan que tous vénèrent en oubliant qu’il était au départ un « liberal ». Les Républicains doivent leurs succès électoraux depuis Reagan à un courant profond, agitant toute la base aux Etats-Unis, courant qui englobe le patriotisme (la fierté de s’inscrire dans une tradition de liberté) et les « valeurs » conservatrices (la famille, la religion, la morale, l’assiduité au travail, etc.).

Les hommes politiques qui veulent réussir en tant que « conservateurs » sont dès lors contraints de chercher le soutien de la « droite chrétienne ». Par ce vocable, il faut entendre cette immense masse d’électeurs liés aux mouvements religieux du renouveau protestant, animé par les « évangélisateurs ». Ce conservatisme théologien, partiellement fondamentaliste, rassemble des groupements où l’on retrouve les « Southern Baptists », le plus grand groupe protestant organisé, les pentecôtistes (notamment les « Assemblies of God ») et, bien sûr, les « méga-églises » des télé-évangélistes. Tous ensemble, ces mouvements évangéliques alignent quelque 80 millions de croyants, ce qui les place tout juste derrière les catholiques, qui restent le groupe religieux chrétien le plus nombreux aux Etats-Unis.

Certains évangélistes toutefois, et pas seulement les Afro-Américains, estiment que leur foi peut s’exprimer chez les démocrates. Religion et race se mêlent souvent : ainsi, Pat Robertson, étiqueté de « droite », et Jesse Jackson, étiqueté de « gauche », appartiennent tous deux au mouvement qui soutient les Baptistes et le sanglant « seigneur de le guerre » Charles Taylor au Libéria.

Malgré la très forte pression que la « droite religieuse » exerce aux niveaux locaux, voire dans certains Etats, elle n’a presque aucune influence au niveau fédéral. Ainsi, le candidat à la Présidence, Mitt Romney, appartient à la secte des Mormons, considérée comme éminemment conservatrice, ce qui ne l’a pas empêché d’être élu gouverneur du Massachusetts, Etat à majorité « libérale ». Le pentecôtiste John D. Ashcroft, représentant notoire de la « droite religieuse », fut ministre de la justice dans le premier cabinet de George W. Bush. Il serait faux, toutefois, de dire qu’après le choc du 11 septembre 2001, le bellicisme de l’actuel président américain, qui prétend être un « chrétien re-né » tout comme son adversaire Jimmy Carter, découle en droite ligne de sentiments religieux qui lui seraient propres.

La politique extérieure américaine est marquée depuis longtemps par les néo-conservateurs, comme on le constate sous le républicain Reagan avec Jean C. Kirkpatrick ou sous le démocrate Bill Clinton avec Madeleine Albright. Sous Bush Junior, les « neocons » tirent toutes les ficelles seulement depuis le retrait de Colin Powell. L’exécutif qui a programmé la politique moyen-orientale et déclenché la seconde guerre d’Irak alignait des hommes comme Dick Cheney, Donald Rumsfeld, Paul Wolfowitz et Richard Perle.

Tous ceux qui ont forgé le vocable « neocons » viennent à l’origine, comme d’ailleurs aussi bon nombre de paléo-conservateurs, du camp de la gauche (des « liberals ») ; on trouve dans leurs rangs des intellectuels de la gauche progressiste, issu des milieux juifs, qui se sont détachés du Parti démocrate au cours des années 70. Les meilleurs plumes de ce groupe furent Irving Kristol, avec sa revue « The Public Interest », Norman Podhoretz, avec « Commentary », et le sociologue Daniel Bell (« La fin des idéologies », 1970).

La définition usuelle du néo-conservatisme nous vient de Kristol : « Un conservateur est un homme de gauche, qui a été frappé de plein fouet par le réel ». Ce bon mot ne nous révèle que la moitié de la « réalité » : il pose le néo-conservateur, ex-homme de gauche, simplement comme celui qui n’accepte plus et critique les programmes sociaux pléthoriques lancés par les Démocrates. En fait, le néo-conservateur veut surtout une politique étrangère musclée : ainsi, le fils d’Irving Kristol, William Kristol (revue : « The Weekly Standard ») veut que cette politique étrangère américaine instaurent partout une « démocratisation », selon des critères déterminés depuis longtemps déjà par la vieille gauche interventionniste.

Pat Buchanan : vox clamans in deserto

Les « anciens conservateurs », ou paléo-conservateurs, qui avaient jadis forcé la mutation sous Reagan, entre 1981 et 1989, ont perdu depuis bien longtemps toute influence. Ainsi, Pat Buchanan n’est plus qu’une voix isolée dans le désert depuis des années, alors qu’il fut l’un des rédacteurs des discours de Nixon, puis conseiller de Reagan. Il tenta, rappelons-le, de lancer un parti réformiste et échoua dans sa candidature à la présidence en 2000. Il est redevenu républicain par la suite. En politique intérieure, Buchanan, catholique traditionnel, dont on se moque en le traitant de « conservateur paléolithique », lutte contre les « libertés » nouvelles que veulent imposer les « liberals » et les libertariens (avortement, mariage homosexuel, euthanasie).

Buchanan est protectionniste, s’oppose à la société multiculturelle et à l’immigration qui modifie de fond en comble le visage de l’Amérique. Sur le plan de la politique extérieure, il défend un isolationnisme modéré et s’inquiète des pièges que recèle l’interventionnisme global voulu par les « neocons ».

Il me reste à mentionner –et à saluer-  un combattant isolé, qui pourfend le « culte de la faute » choyé par de nombreux « liberals » (et par leurs homologues allemands), culte qui sert à promouvoir l’idéologie de la « correction politique » (les « Gender studies », les codes anti-discriminatoires de tous acabits, le multiculturel, etc.) : ce combattant n’est autre que l’historien des idées Paul Gottfried. Mais, malgré Buchanan et Gottfried, les paléo-conservateurs n’ont plus aucun influence notable, ni dans les universités ni dans les médias, a fortiori dans l’établissement politique.

Quelles conclusions peut-on tirer de la topographie que je viens d’esquisser ici ? Après la disparition graduelle des paléo-conservateurs, les nationaux-conservateurs allemands auront bien des difficultés à trouver des alliés Outre-Atlantique. Sans doute, seuls les chrétiens à la foi très stricte trouveront des frères en esprit pour toutes les questions morales chez les évangélisateurs ou les conservateurs catholiques.

Personnellement, je ne trouve, dans ce camp conservateur américain (toutes tendances confondues), aucune position qui me sied. Si je suis éclectique, je trouverai peut-être quelques points d’accord avec Russell Kirk, mais seulement quand il appelait en 1976 à voter pour le « démocrate de gauche » Eugene McCarthy. Quand je pense à l’idéologie qui domine la RFA aujourd’hui, je suis souvent d’accord avec Paul Gottfried, qui avait dû quitter, enfant, le IIIième Reich national-socialiste. Enfin, je lis toujours avec beaucoup d’intérêt les textes des intellectuels américains qui s’opposent à l’interventionnisme.

Vu que nous assistons à une orientalisation, soit une islamisation croissante de l’Europe occidentale les analyses clairvoyantes de nos temps présents par Samuel P. Huntington méritent que nous y consacrions toute notre attention ; Huntington nous annonce le déclin de l’Occident en général et la perte d’identité européenne des Etats-Unis. Aujourd’hui âgé de 80 ans, ce professeur de Harvard n’est toutefois pas étiqueté « conservative » mais considéré comme un représentant du « liberal establishment ».

S’intéresser aux relations intellectuelles transatlantiques est une bonne chose et permet de se comprendre réciproquement. Jusqu’ici, le monde universitaire s’est limité à importer en Allemagne et en Europe le prêchi-prêcha du « politiquement correct » des « liberals », y compris les expressions du mépris que vouent les gauches à Bush qui, quand elles sont satiriques, satisfont leur orgueil blessé. Une poignée de conservateurs allemands critiquent aujourd’hui l’idéologie importée des « liberals » (qui s’expriment en Allemagne sous des oripeaux «écologistes ») mais cette démarche est insuffisante. Face à l’immigration de masse qui menace directement l’existence du peuple allemand, en tant que peuple porteur d’histoire et en tant que nation historique et politique, et l’avenir même de l’Europe toute entière, nous devons, en première instance, procéder à une analyse factuelle et objective de la situation et ne pas ergoter et pinailler sur nos préférences intellectuelles ou rêver à d’hypothétiques coalitions qui ne viendront jamais.

La politique extérieure américaine se caractérise depuis l’immixtion des Etats-Unis dans la politique mondiale (au moins depuis 1917) par la double nature de la puissance et de la morale qu’elle révèle. La conscience qu’ont les Américains de mener à bien une « mission » inspire cette politique globale ou planétaire, et vice-versa, dans la mesure où les démarches concrètes de cette politique étayent la vision messianique que distille la religiosité américaine.

Henry Kissinger était une exception : il se posait comme « réaliste » et les notions de « mission » ne l’intéressaient pas vraiment. Depuis la montée en puissance des « neocons », qu’ils soient adhérents des démocrates ou des républicains, l’aspect idéologique et para-religieux de la politique extérieure des Etats-Unis est passé à l’avant-plan. Force est de constater que les assises fondamentales de la politique extérieure des Etats-Unis réconcilient, in fine, les « liberals » et les « conservatives » : il nous suffit d’énumérer les grands événements de ces quinze ou vingt dernières années, avec l’élargissement de l’OTAN aux pays d’Europe centrale et orientale, avec la politique balkanique (de Madeleine Albright), avec l’appui qu’apporte Washington à la candidature turque à l’UE, aux conflits qui ensanglantent le Proche- et le Moyen-Orient, etc.

Par ailleurs, la politique extérieure américaine se montre souvent fort dépendante des fluctuations de l’opinion publique intérieure. Hillary Clinton et d’autres candidats à la Présidence commencent à caresser cette opinion dans le sens du poil, en songeant à l’investiture de 2008, car, en effet, si les troupes américaines doivent se retirer d’Irak aussi peu glorieusement qu’elles se sont retirées du Vietnam, la politique extérieure américaine se trouvera confrontée à ses propres misères, aux monceaux de ruines qu’elle aura provoquées.

Quel rôle jouera la Turquie dans ce scénario ? Rien n’est certain. Quoi qu’il en soit, la paix entre Israël et la Palestine sera, une fois de plus, remise aux calendes grecques.

Herbert AMMON.

(article extrait de « Junge Freiheit », n°29/2007). 

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jeudi, 19 juillet 2007

Carences juridiques de la ND

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Les carences juridiques de la « Nouvelle Droite »

Ange SAMPIERU

Le mouvement intellectuel des idées en France a été incontestable­ment mar­qué, à partir des années 80, par l'apparition du courant dit de la “nou­velle droite” (ND).

La capacité de ce courant intellectuel à traiter les multiples aspects de la réflexion contemporaine est une réa­lité incontournable, en dé­pit de sa pro­gressive marginalisation dans le débat des idées de la fin de ce siècle.

Héritière en cela des écoles idéologiques modernes, la ND a préten­du participer à la vague de contestation qui a toujours agité les in­tellectuels européens. En particulier, dans le champ du politique, la ND a posé les fondements d'une critique globale du courant bour­geois dominant, qu'il soit d'inspiration marxiste ou libéral.

Puisant dans le courant gramsciste une partie de son corpus idéolo­gique, la ND a tourné son regard vers de multiples domaines, no­tam­ment dans la doctrine relative à l'organisation de la Cité. A ce titre, et sans prétendre à une position définitive, la pensée juridique constitue un des domaines de réflexion majeurs.

L'influence, bien que marginale, des grands philosophes du droit  —en particulier du droit public—  allemands et français (Carl Schmitt en Allemagne, René Capitant en France) a fait l'objet d'une opéra­tion d'instrumentalisation chez les penseurs de la ND. La mise en œuvre d'une réflexion (critique) sur la notion de droit dans la ge­stion politique de la Cité moderne n'a pas été, de ce fait, négligée. La ND a reconnu, dans le cadre d'une conception globale, la place éminente du jus,  traductrice d'une certaine vision du monde. Ap­pré­ciation contemporaine qui s'appuie, en outre, sur une synthèse historique, expression des courants idéologiques fondamentaux.

Il apparait néanmoins que cette attention portée à la signification fondamentale du droit par la ND n'a jamais débouché sur une con­ception du droit propre à ce courant.

La découverte des notions essentielles, de caractère historique, con­sub­stan­tielles à la réflexion juridique, ne la conduit pas, pour au­tant, à une élaboration originale d'une nouvelle pensée juridique.

Dans un contexte historique marqué par une déliquescence des liens communautaires forts, la ND n'a pas été en mesure de construire une doctrine juridique nouvelle. Prudents, voire timides, devant une tâche essentielle, les penseurs de la ND n'ont, à aucun moment, pris le risque d'une action créatrice. Cette relative stérilité dans le do­mai­ne de la réflexion juridique est-elle alors lié à une incapacité intellectuelle réelle  - ou tout simplement à une difficulté de traduc­tion de la pensée dans le champ du droit, expression concrète d'un mode de vie collectif?

Il reste que l'on ne trouve qu'exceptionnellement abordée une ana­lyse des doctrines juridiques modernes, la ND préférant se réfugier dans une réflexion binaire, de nature idéologique, entre le droit ro­main et le droit germanique. Timidité ou stérilité? Dans les deux cas, cette absence traduit les limites d'une pensée qui se prétend, par ailleurs, globale.

Sous l'angle idéologique, on peut aussi questionner l'absence de la ND dans le domaine de la réflexion juridique comme une mani­festation chronique de la réduction intuitu personnae. Le poids impérial de son penseur n°1, Alain de Benoist, dans la délimitation de la pensée de la ND, pourrait aussi expliquer la faiblesse de sa réflexion juridique. Phénomène classique, que l'on retrouve dans de multiples courants de pensée, d'un “gourou” fort brillant mais loin de l'image de l'homme de la Renaissance, loin aussi de la réalité vivante et charnelle.

Le droit est-il un outil trop complexe, trop fuyant quand on se place dans la perspecti­ve de construire une doctrine multiforme? Seul l'intéressé pourrait sérieusement nous apporter une réponse à la question.

Il est aussi vrai que la ND, plutôt marquée par une vision “histo­riciste” du débat doctrinal, n'aborde jamais la nature immédiate et concrète de la pensée juridique moderne.

La ND, en choisissant de ne pas rentrer dans le débat actuel du champ juridique, n'apparait pas plus impliquée dans les choix concrets d'une organisation civile et publique de la Cité.

Ce double refus n'est pas constitutif d'un quelconque délit. Il exige tout de même une certaine explication, dans la mesure où, au travers de son discours idéologique, la ND prétend participer au mouvement de réflexion contemporaine sur le devenir de la Cité européenne.

A quand une vraie réponse?

Ange SAMPIERU.

 

 

mercredi, 18 juillet 2007

Giuliano e il "monoteismo solare"

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GIULIANO E IL "MONOTEISMO SOLARE"
Claudio Mutti

Unus Deus, unus Julianus

Richiesto di abbozzare un "ritratto" dell'Imperatore Giuliano, il teologo Sergio Quinzio fece ricorso ad una inedita e provocatoria analogia: paragonò infatti l'"Apostata" a Giovanni Paolo II, individuando nell'azione di entrambi il disperato tentativo di tenere in vita una religione ormai condannata a tramontare. "Se Giuliano mi avesse interpellato circa la possibilità della rifondazione della civiltà pagana, - scriveva il teologo - avrei dato la stessa risposta negativa che darei oggi se il Papa mi interpellasse circa la possibilità della rifondazione della civiltà cristiana" (1). Non solo: "proprio lo sforzo di restaurazione compiuto dal giovane imperatore contribuì allora a far definitivamente precipitare il paganesimo. E la cosa mi sembra puntualmente ripetersi, per quel tanto che nella storia si danno puntuali ripetizioni" (2). 

Un parallelo altrettanto originale è stato prospettato da Jacques Fontaine, docente di lingua e letteratura tardolatina della Sorbona, nella conversazione con un giornalista che gli suggeriva un raffronto tra Giuliano e altri protagonisti della storia "con progetti abbastanza simili" (sic!) quali Hitler o Stalin. "Io - rispose Fontaine - lo affiancherei meglio, se si volesse, a Khomeini. Per il fanatismo, per il sentirsi investito da un ruolo divino, per il fatto di considerarsi un dio. E poi per la cultura. Per la violenza, il settarismo. Di Giuliano abbiamo descrizioni fisiche molto precise. Una, di Ammiano di Antiochia (la barba a punta, gli occhi magnetici, la figura ieratica), lo fa davvero molto assomigliare, anche nei tratti, all'ayatollah iraniano" (3).

La galleria dei personaggi storici ai quali Giuliano è stato paragonato nel passato viene così ad arricchirsi. Non sappiamo che cosa ne avrebbe pensato Stalin. Da parte sua, Hitler avrebbe probabilmente gradito l'accostamento, lui che più volte ebbe a manifestare la propria ammirazione per il grande "Apostata" (4).

Quanto a Khomeini, lasciando da parte le abusate banalità sul "fanatismo" e l'assurdità del "considerarsi un dio" (!), un discorso un po' meno dozzinale avrebbe potuto considerare il carattere teocratico comune sia al progetto dell'Augusto sia a quello dell'Imam, per cui un riferimento all'azione restauratrice del monoteismo islamico avrebbe potuto attualizzare, se proprio era necessario farlo, il tentativo giulianeo di instaurare quello che qualcuno ha chiamato un "monoteismo di Stato" (5). Né tale operazione sarebbe stata scientificamente abusiva, dato che la parentela ideale fra la teologia solare antica e l'Islam è stata autorevolmente indicata da uno studioso del calibro di Franz Altheim, per il quale "i Neoplatonici (.) erano anche i battistrada di Maometto e del suo odio appassionato contro tutte le fedi che attribuivano a Dio un 'compagno'" (6), mentre un celebre studio di Henry Corbin sulla dottrina dell'unità divina (tawhîd) nell'Islam sciita si apre con un richiamo alla letteratura fiorita negli anni Venti del Novecento intorno al "dramma religioso dell'Imperatore Giuliano" (7). 

Eppure, è stato proprio Jacques Fontaine a riproporre, in rapporto alla religione che Giuliano officiò come pontifex maximus (8), il concetto di "monoteismo solare", al quale hanno fatto frequentemente ricorso quanti hanno indagato le manifestazioni religiose dell'età imperiale. Secondo lo studioso francese, infatti, la forma che la tradizione greco-romana assume all'epoca di Giuliano è quella di "una sintesi di tutte le religioni e le teologie pagane, sotto il segno del monoteismo solare" (9); ovvero, se si preferisce il sinonimo usato da altri studiosi, di un "enoteismo solare" definibile nei termini seguenti: "Giuliano vuole dimostrare a tutti che il dio Helios è l'unico, vero dio e che le numerose divinità romane altro non sono che ipostasi, ossia aspetti particolari, manifestazioni specifiche e settoriali dell'unica, suprema divinità solare" (10). 

Monoteista o enoteista, la dottrina difesa da Giuliano è sintetizzata da diverse epigrafi coeve che proclamano l'unicità di Dio, nonché l'unità e unicità del potere imperiale (11); epigrafi che secondo Spengler possono essere tradotte solo così: "Vi è un solo Dio e Giuliano è il suo profeta" (12). La ricorrenza di questo tema, che "ha un'importanza centrale nella concezione politica di Giuliano" (13), ha indotto la Athanassiadi-Fowden a parlare addirittura di "ossessione per l'unità" (14) e a dare risalto al fatto che "Giuliano non abbia neanche concepito la possibilità di condividere il potere con un associato, ma si sia invece considerato l'unico vicario di Dio sulla terra" (15). Tale concezione politica trova la sua formulazione più antica in Omero, il quale fa dire a Odisseo: "Non è un bene la pluralità dei capi, uno solo sia capo" (16); Seneca espone lo stesso principio per l'Impero romano, dicendo che "è stata la natura a plasmare il Re" (17); e Filone Alessandrino aggiunge un corollario che stabilisce l'analogia tra politeismo e democrazia: "Dio è uno solo, e ciò contro i fautori dell'opinione politeistica, i quali non si vergognano di trasferire dalla terra al cielo la democrazia, che è la peggiore tra le cattive istituzioni" (18). 

In fatto di "monoteismo solare", Giuliano non inventò nulla, ma si limitò a perfezionare un processo di definizione teologica che era già in atto da tempo e che Franz Altheim riassume nei termini seguenti: "La storia dell'antico dio del sole, considerata a grandi linee, è quella di un progressivo raffinamento. Il culto, di origine beduina, si stabilisce in una città della Siria. Per la sua singolarità e la sua assolutezza mette a rumore il mondo occidentale, ne provoca la più appassionata ripulsa. Ma la sua rappresentazione letteraria, la filosofia neoplatonica, e, non ultima, la capacità assimilatrice della religione romana e della concezione romana dello stato, compiono il miracolo: dalla divinità di Elagabalo (218-222 d. C.), inquinata dalle orge e dalla superstizione orientale, nasce il più puro degli dèi, destinato ad unificare ancora una volta la religiosità antica" (19). Nel 274 d. C., sotto Aureliano, il monoteismo solare diventò la religione ufficiale dell'Impero Romano e il Sol Invictus venne riconosciuto come la divinità suprema: a Roma sorse uno splendido tempio dedicato al Sole, in onore del quale furono istituite feste periodiche, mentre venne creato un collegio di pontefici del dio Sole e si coniarono numerose monete con iscrizioni e simboli solari. In tal modo "il 'monoteismo', a cui il sincretismo severiano aveva indirizzato il paganesimo romano, trovò nel culto solare propugnato da Aureliano la sua affermazione più decisa ed efficace" (20), tant'è vero che nel muro dell'intransigenza cristiana si dovette registrare qualche fessura (21). All'epoca di Costantino acquisirono una considerevole importanza "le immagini monoteizzanti della religione di Helios: l'Apollo solare ed il Sol Invictus risaltano nei rilievi dell'arco di trionfo e nelle monete dell'epoca" (22). Mentre le figure degli dèi scomparivano pian piano dalle monete di Costantino, il dio solare s'imponeva sempre di più: "Sol Invictus (.) sopravvive anche più a lungo in tutto il territorio controllato da Costantino e in tutte le sue zecche (.) sembra che l'imperatore di persona avesse per il dio Sole una profonda devozione" (23). Nella burocrazia e nell'esercito, la religione solare aveva la sua massima diffusione: "il Sol Invictus e la Victoria erano gli dei militares dell'esercito di Costantino; altrettanto favore aveva la divinità solare nelle legioni di Licinio" (24).

Considerata in un quadro storico, la formulazione giulianea della teologia solare si colloca in una fase matura del neoplatonismo, nella quale i cardini dottrinali di questo movimento spirituale si trovano già definitivamente fissati e consolidati. Se il fondatore della scuola, Plotino (204-270), aveva riconosciuto nell'Uno il principio dell'essere ed il centro della possibilità universale, il suo successore Porfirio di Tiro (233-305) aveva fatto del neoplatonismo una sorta di "religione del Libro" (25); autore di uno scritto Sul Sole (26), Porfirio aveva dedicato alla teologia solare un trattato di cui sussistono importanti frammenti nei Saturnali di Macrobio (27). "Nella sua trattazione Porfirio non fa altro che applicare la metafisica platonica - che riconduce all'Uno ogni aspetto del cosmo - alle divinità più importanti del pantheon classico, rivelando come esse non siano altro che attribuzioni particolari dell'Unico, che dal punto di vista teologico viene a determinarsi come Sole, in quanto quell''essenza' spirituale sul piano cosmico si 'appoggia' all'astro del giorno (.) in quanto Apollo egli è splendore, salute e lucentezza (.) in quanto Mercurio poi, egli 'presiede al linguaggio' (Saturn., I, XVIII, 70), cosicché ogni attività viene ricondotta ad una presenza divina - 'solare'" (28). Ma fu l'erede di Porfirio, il "divino Giamblico" (250-330), colui che con la sua dottrina "convertì (.) l'ultimo imperatore pagano alla sua eliolatria trascendente" (29). Dopo Giuliano, è possibile seguire la tradizione "solare" fino a Proclo (410-485), autore fra l'altro di un Inno a Helios (30), nonché al suo contemporaneo Marziano Capella, che con l'inno-preghiera di Filologia al Sole (De nuptiis, II, 185-193) ci ha lasciato un "documento notevole della 'teologia solare' del tardo neoplatonismo" (31), anzi, "l'ultima attestazione del sincretismo solare in Occidente" (32); infatti verso il 531, con la fuga in Persia dello Scolarca Damascio (470-544) e degli altri neoplatonici, la tradizione "solare" abbandonerà il mondo cristiano e continuerà la propria esistenza negli stessi luoghi dai quali si era irradiato, diffondendosi in tutta l'Europa, il culto di Mithra.

Sol Invictus

In un inno della tradizione iranica (Yasht, 10, 136) Mithra compare su un carro con una sola ruota, d'oro, che viene trainato da cavalli bianchi (33); perciò Strabone (XV, 3) può affermare a buon diritto che sotto il nome di Mithra i Persiani venerano Helios. A Roma, dove sarebbe stato identificato col Sol Invictus, il dio solare trovò i suoi primi seguaci intorno il 66 a. C.; verso la fine del primo secolo d. C., il suo culto assunse un'importanza considerevole, fino a diffondersi su tutti i territori dell'Impero, dall'Anatolia alla Britannia. Verso la fine del secondo secolo, tra gli iniziati ai misteri di Mithra vi fu anche un imperatore, Commodo; "cento anni più tardi, la potenza di Mithra era tale ch'esso sembrò un momento esser vicino ad eclissare i suoi rivali d'Oriente e d'Occidente e a dominare il mondo romano tutto intero" (34). Nel 307, Diocleziano, Galerio e Licinio proclamarono Mithra, "protettore del loro Impero" (fautor imperii sui). Il mithraismo si configurava ormai nei termini di "una religione (.) quasi 'enoteista', cioè una religione che riconosce molte divinità, ma allo stesso tempo insegnava che esse in fondo erano solo apparizioni differenti di uno stesso dio" (35). Quanto a Giuliano, egli "comprese che il Mithracismo, se voleva diventare una religione universale, (.) doveva aprirsi di più alle interpretazioni filosofiche. È per questo che l'inno al Sole composto dall'imperatore stesso è ispirato dal misticismo di Giamblico; Mithra s'identifica con il Sole, con Apollo, con Fetonte, Iperione e Prometeo. Le altre divinità non sono altro che l'emanazione della potenza del Sole. Giuliano si identifica col buon pastore, al quale era imposta la morale di Mithra: 'Bontà verso gli uomini che egli era chiamato a governare, pietà verso gli dèi, padronanza di sé' " (36). 

Molto probabilmente Giuliano fu iniziato ai misteri mithraici allorché, in qualità di Cesare, si trovava al comando delle truppe della Gallia, fra il 355 e il 361; "dall'anno 357 in poi si ritrova a Roma una intera serie di iscrizioni mitraiche. Appare evidente un collegamento con l'ascesa di Giuliano" (37). Della sua iniziazione ci parla egli stesso in alcune righe al termine dell'opera I Cesari, che traduciamo qui di seguito: "A te - ci disse Hermes - io ho dato di conoscere il Padre Mithra. Tu tieniti ai suoi comandamenti; ti procurerai così, finché vivrai, una gomena e un porto sicuro e, quando bisognerà andarsene via di quaggiù, troverai, con buona speranza, un dio benigno come guida" (336C). Altri accenni si trovano nelle orazioni Al Re Helios (130C) e Alla Madre degli dèi (172D-173A).

Il monoteismo o enoteismo solare officiato dall'Imperatore Giuliano ha il proprio testo dottrinale (38) in quell' "imponente edificio di sintesi teologica in chiave enoteista" (39) che è l'Inno al Re Helios. Scritto verso la fine del 362 ad Antiochia, alle falde di quel monte Casio, "sede di pietà eliolatrica con caratteristiche perspicue" (40), sul quale Giuliano ascese per contemplare il sorgere del Sole ed eseguire un sacrificio a Giove (41), l'Inno al Re Helios non è semplicemente un gesto di devozione privata, ma "si presenta come una partecipazione dell'autocrator alla solennità pubblica del Sol invictus" (42); la festa del Natale solare veniva infatti celebrata nel giorno del solstizio invernale, il 25 dicembre. Come l'opuscolo I Cesari, composto alcuni giorni prima, così anche l'Inno al Re Helios fu dedicato all'amico Salustio, l'autore del trattatello Sugli dèi e il mondo (43).

La dottrina esposta nell'Inno ha il suo riferimento fondamentale in Platone. Giuliano cita un brano della Repubblica (508B-C) dal quale risulta che il Sole (Hélios) è nel mondo sensibile e visibile (aisthetòs, oratòs) ciò che il Sommo Bene, sorgente trascendente dell'essere, è nel mondo intelligibile (noetòs); in altre parole: l'astro diurno non è che un riflesso di quel Sole metafisico che illumina e feconda il mondo delle essenze archetipiche, le platoniche "idee". Ovvero, per dirla con Evola: "Helios è il Sole, non come astro fisico divinificato ma come simbolo di luce metafisica e di potenza in un senso trascendente" (44). Ma tra il mondo intelligibile dell'Essere puro e il mondo delle forme corporee percepibili dalla vista fisica e dagli altri sensi s'interpone un terzo mondo: un mondo che viene definito "intellettuale" (noeròs), ossia dotato di intelligenza.

A riconferma del fatto che certi accostamenti non sono poi del tutto peregrini, riportiamo un passo del teosofo islamico Mahmûd Qotboddîn Shîrâzî (1237-1311), il quale riassume la dottrina dei tre mondi dicendo che Platone e gli altri sapienti dell'antica Grecia "professavano l'esistenza di un doppio universo: da un lato l'universo del puro soprasensibile, che comprende il mondo della Divinità e il mondo delle Intelligenze angeliche; dall'altro, il mondo delle Forme materiali, vale a dire il mondo delle Sfere celesti e degli Elementi e, tra l'uno e l'altro mondo, il mondo delle Forme immaginali autonome" (45). Ipostasi del Principio supremo ("figlio dell'Uno") al centro di questo mondo mediano, Helios vi svolge una funzione mediatrice, coordinatrice e unificatrice in rapporto alle cause (le "divinità") intellettuali e demiurgiche, partecipando sia dell'unità del Principio trascendente sia della molteplicità contingente della manifestazione fenomenica. La sua posizione è dunque la più centrale che possa essere concepita e giustifica il titolo di Re che gli viene riconosciuto. In termini teologici: tutti gli dèi dipendono dalla luce di Helios (46), che è l'unico a non essere sottoposto alla necessità costrittiva (anánke) di Zeus, con il quale, in realtà, egli si identifica.

Giuliano viene poi a trattare dei poteri (dynàmeiai) e delle energie (enérgheiai) di Helios, cioè, rispettivamente, delle sue potenzialità e delle sue attività in relazione ai tre mondi. L'aspetto più considerevole di questa parte dell'Inno (143B-152A) consiste nel tentativo di ricondurre la molteplicità degli dèi ad una unità principiale rappresentata per l'appunto da Helios, sicché le varie figure divine ci appaiono come suoi aspetti, ovvero come Nomi corrispondenti alle sue innumerevoli qualità. Una dottrina analoga era stata d'altronde enunciata da Diogene Laerzio, il quale interpretava Zeus, Atena, Era, Efesto, Posidone, Demetra come appellativi corrispondenti ai "modi della potenza" dell'unico Dio (47). 

In Helios, dunque, confluisce il potere demiurgico di Zeus; né d'altronde esiste alcuna reale differenza tra i due. Atena Prònoia è scaturita, nella sua integralità, dalla totalità di Helios; essendo l'intelligenza perfetta di Helios, essa riunisce gli dèi che lo circondano e realizza l'unione con lui. Afrodite rappresenta la fusione degli dèi celesti, l'amore e l'armonia che caratterizzano la loro essenziale unità. Ma soprattutto, in quanto racchiude in sé i principi della più armonica sintesi intellettuale, Helios viene identificato con Apollo, il quale, date le sue qualità fondamentali di immutabilità, perfezione, eternità, eccellenza intellettuale, è la personificazione dell'unità divina esprimentesi come intelligenza pura ed assoluta. "In altre parole, agli occhi di Giuliano, Apollo appare come l'aspetto più puramente intellettuale di Helios, la figura divina che esprime più semplicemente e direttamente l'unità del mondo intellettuale" (48).

Già Plutarco, nel dialogo Sulla E di Delfi, aveva riconosciuto in Apollo la persona divina in cui si determina immediatamente il principio primo della manifestazione universale ed aveva scoperto nel nome stesso del dio, utilizzando lo strumento dell'etimologia, il significato dell'unità e dell'unicità divina (49). E Porfirio, nella sua opera Sulla filosofia degli oracoli (50), aveva citato un responso apollineo secondo il quale c'è un solo dio, Aiòn ("Eternità"), mentre gli altri dèi non sono altro che i suoi angeli; "si riteneva comunemente che gli dèi del paganesimo fossero emanazioni di virtù dell'Essere Supremo, o tutt'al più suoi subordinati" (51). D'altra parte, attestazioni della dottrina dell'unità divina si trovano presenti, prima e dopo Plutarco, in tutto l'arco della tradizione greca, da Omero (52) fino allo stesso dedicatario dell'Inno al Re Helios (53), a dimostrazione dell'assunto secondo cui, "contrariamente all'opinione corrente, non vi è mai stata, in nessun luogo, nessuna dottrina realmente 'politeista', ossia ammettente una pluralità di princìpi assoluta e irriducibile" (54).

L'ultima parte dell'Inno contiene una rassegna dei doni e dei benefici dispensati da Helios al genere umano, che da lui trae origine e da lui riceve sostentamento. Padre di Dioniso e signore delle Muse, Helios elargisce agli uomini ogni saggezza; ispiratore di Apollo, di Asclepio, di Afrodite e di Atena, egli è il legislatore della comunità; infine è lui, Helios, il vero fondatore e protettore di Roma. È dunque a questo dio, creatore della sua anima immortale, che Giuliano rivolge la richiesta di accordare all'Urbe un'esistenza parimenti immortale, identificando così "non solo la sua missione personale sulla terra, ma anche la sua salvezza spirituale, con la prosperità dell'Impero" (55).

Ancora una volta viene ricordato nell'Inno il debito nei confronti di Giamblico (250-330), che per Giuliano è sempre "il divino Giamblico", "l'amato dagli dèi", "l'illustre ierofante", "l'ispirato"; d'altra parte, come è stato giustamente detto, "la dottrina di Giamblico spiega il tentativo di Giuliano e ne nobilita il significato" (56). 

Il discorso è suggellato da una preghiera finale a Helios, la terza contenuta nell'Inno: che il Re dell'universo conceda al suo devoto celebrante una vita virtuosa e un più perfetto sapere e, nell'ora suprema, lo faccia ascendere in alto fino a Sé (57).


(1) S. Quinzio, Come l'Apostata anche Wojtyla combatte contro il tempo in nome dell'antica religione, in Il Manifesto, 13 agosto 1992, p. 13.

(2) Ibidem.

(3) Imperatore e khomeinista, intervista con Jacques Fontaine di Sandro Ottolenghi, in Panorama, 7 giugno 1987, p. 143. 

(4) A. Hitler, Idee sul destino del mondo, Edizioni di Ar, Padova 1980, I, pp. 68, 78, 223.

(5) G. Ricciotti, L'imperatore Giuliano l'Apostata, Mondadori, Milano 1962, p. 275.

(6) F. Altheim, Dall'antichità al Medioevo. Il volto della sera e del mattino, Sansoni, Firenze 1961, pp. 14-15. Ma soprattutto si veda, di F. Altheim, Il dio invitto. Cristianesimo e culti solari, Feltrinelli, Milano 1960, dove la relazione fra teologia solare e Islam viene collocata sullo sfondo del progressivo affermarsi del monoteismo solare nella tarda antichità. "Recentemente si è sottolineata l'intima affinità del monofisismo con l'Islam. Si è definito Eutiche, uno dei padri della dottrina monofisitica, precursore di Maometto. La predicazione di Maometto era infatti ispirata dall'idea di unità, dall'idea che Dio non avesse alcun 'compagno', e si poneva così sulla stessa linea dei predecessori e vicini neoplatonici e monofisiti. Solo che la passione religiosa del Profeta seppe dare un rilievo ben più vigoroso a quello che prima di lui altri avevano sentito e desiderato" (F. Altheim, Il dio invitto, cit., p. 121).

(7) H. Corbin, Il paradosso del monoteismo, Marietti, Casale Monferrato 1986, p. 3.

(8) J. Fontaine, Introduzione a: Giuliano Imperatore, Alla Madre degli dèi e altri discorsi, Fondazione Lorenzo Valla, Mondadori, Milano 1990, p. lv.

(9) J. Fontaine, ibidem.

(10) S. Arcella, I Misteri del Sole. Il culto di Mitra nell'Italia antica, Controcorrente, Napoli 2002, p. 183.

(11) "Uno è Dio, uno è Giuliano basileus", "Uno è Dio, uno è Giuliano Augusto". Cfr. E. Peterson, HEIS THEOS. Epigraphische, formgeschichtliche und religionsgeschichtliche Untersuchungen, Vandenhoeck und Ruprecht, Göttingen 1926, pp. 270-273.

(12) Oswald Spengler, Il tramonto dell'Occidente, Longanesi, Milano 1957, p. 970.

(13) Augusto Guida, Un anonimo panegirico per l'Imperatore Giuliano, Leo S. Olschki Editore, Firenze 1990, p. 127.

(14) Polymnia Athanassiadi-Fowden, L'Imperatore Giuliano, Rizzoli, Milano 1984, p. 205.

(15) P. Athanassiadi-Fowden, op. cit., p. 206. 

(16) Omero, Iliade, II, 204.

(17) Seneca, De clementia, 1, 19, 2.

(18) Filone, Creazione del mondo,171 (Filone di Alessandria, La creazione del mondo. Le allegorie delle leggi, Rusconi, Milano 1978, p. 146).

(19) Franz Altheim, Il dio invitto, cit., pp. 11-12.

(20) Marta Sordi, Il cristianesimo e Roma, Cappelli, Bologna 1965, p. 328.

(21) Nel 307, ad Alessandria, un cristiano compare davanti al funzionario imperiale. Rifiuta di sacrificare perché, dice, secondo le Sacre Scritture chi sacrifica agli dèi sarà sterminato, a meno che non si tratti del Dio Sole. E il rappresentante dell'imperatore gli risponde: 'Immola dunque al Dio Sole'" (Louis Homo, Les empereurs romains et le christianisme, Les Belles Lettres, Paris 1931, p. 112).

(22) Lucio De Giovanni, Costantino e il mondo pagano, Associazione di Studi Tardoantichi, Napoli 1972, p. 19.

(23) Andreas Alföldi, Costantino tra paganesimo e cristianesimo, Laterza, Bari 1976, p. 49.

(24) L. De Giovanni, op. cit., p. 121.

(25) Nuccio D'Anna, Il neoplatonismo. Significato e dottrine di un movimento spirituale, Il Cerchio, Rimini 1988, p. 22.

(26) Lo scritto, perduto, è citato da Servio (Commento alle Ecloghe, V, 66) ed è forse da identificarsi col trattato Sui nomi divini; o, forse, faceva parte della Filosofia degli oracoli. Cfr. G. Heuten, Le "Soleil" de Porphyre, in Mélanges F. Cumont, I, Bruxelles 1936, p. 253 ss.

(27) Macrobio, Saturnalia, I, 17-23 (I Saturnali, a cura di Nino Marinane, UTET, Torino 1977, pp. 243-304).

(28) N. D'Anna, op. cit., pp. 49-50.

(29) Franz Cumont, La Théologie solaire du paganisme romain, in Mémoires présentés par divers savants à l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, XII, 2, 1913, p. 477.

(30) Proclo, Inni, a cura di Davide Giordano, Fussi-Sansoni, Firenze 1957, pp. 21-29.

(31) Martiani Capellae De nuptiis Philologiae et Mercurii liber secundus, Introduzione, traduzione e commento di Luciano Lenaz, Liviana, Padova 1975, p. 46.

(32) Robert Turcan, Martianus Capella et Jamblique, « Revue des Études Latins », 36, 1958, p. 249.

(33) Trad. it. dell'Inno a Mithra: Italo Pizzi, Lyra Zarathustrica, versione metrica, in Atti della R. Accademia delle Scienze di Torino, XLIV (1909), pp. 805-828. 

(34) F. Cumont, Le religioni orientali nel paganesimo romano, I libri del Graal, Roma 1990, p. 116.

(35) Reinhold Merkelbach, Mitra, ECIG, Genova 1988, p. 94.

(36) Martin Vermaseren, Mithra, ce dieu mystérieux, Éditions Sequoia, Paris-Bruxelles 1960, p. 155.

(37) R. Merkelbach, op. cit., p. 291. 

(38) "Breviario per la chiesa pagana", per usare le parole del Ricciotti, op. cit., p. 275.

(39) Nello Gatta, Giuliano Imperatore. Un asceta dell'idea di Stato, Edizioni di Ar, Padova 1995, p. 52.

(40) T. Agozzino, in: Ammiano Marcellino, Giuliano e il paganesimo morente, Paravia, Torino 1972, p. 116.

(41) Ammiano Marcellino, XXII, 14, 4.

(42) Christian Lacombrade, in: L'Empereur Julien, Oeuvres complètes, Les Belles Lettres, Paris 1964, t. II, 2a parte, p. 95. 

(43) Sallustio, Sugli dèi e il mondo, a cura di Claudio Mutti, Edizioni di Ar, Padova 1978 (2° ed. 1993); F. Daverio, Versione di "Sugli Dei e sul Cosmo" di Sallustio filosofo, "Conoscenza religiosa", 4, 1981, pp. 415-430; Salustio, Degli Dei e del Cosmo, in Gli occhi dell'anima. Intreccio di scrittura fra Giuliano detto l'Apostata e Saturninio Secondo Salustio. Il Catechismo di Salustio, a cura di Giuseppe Dagnino, ECIG, Genova 1996; Salustio, Sugli dèi e il mondo, a cura di Riccardo Di Giuseppe, Adelphi, Milano 2000.

(44) Julius Evola, Ricognizioni. Uomini e problemi, Edizioni Mediterranee, Roma 1974, p. 162. (32) 

(45) H. Corbin, Corpo spirituale e Terra celeste. Dall'Iran mazdeo all'Iran sciita, Adelphi, Milano 1986, p. 140.

(46) Sulla scia di Corbin, che include i "Neoplatonici cosiddetti tardivi" (e quindi anche il nostro Giuliano) tra le coraniche "genti del Libro" (Il paradosso del monoteismo, cit., p. 70) è stato suggerito che Helios "equivale a ciò che nell'Islam è chiamato an-nûr min 'amri-llâh, 'la luce che procede dal comando divino", per cui "non è altra cosa da quella 'nicchia delle luci' dalla quale (.) è attinta ogni sapienza" (Roberto Billi, L'Asino e il Leone. Metafisica e Politica nell'opera dell'Imperatore Giuliano, tesi di laurea, Università di Parma, anno accademico 1989-1990, pp. 79-80).

(47) Diogene Laerzio, VII, 147 (= Stoicorum Veterum Fragmenta, II, fr. 1021).

(48) R. Billi, op. cit., p. 85.

(49) Plutarco di Cheronea, Sulla E di Delfi, a cura di C. Mutti, Edizioni all'insegna del Veltro, Parma 1981. L'autore dell'Inno al Re Helios, che si pone sulla scia di Plutarco e, in fin dei conti, di Platone, sicché anche per lui l'etimologia "è principalmente una 'scienza ausiliaria' della riflessione sul mito, in quanto i nomi divini conservano con particolare precisione i pensieri degli Antichi sulle realtà metafisiche" (R. Billi, "Antichi" e "moderni" nel pensiero dell'imperatore Giuliano, in Philologica, II, 2-3, gennaio 1993, p. 118.

(50) G. Wolff (a cura di), Porphyrii de philosofia ex oraculis haurienda librorum reliquiae, Springer, Berlin 1866.

(51) A. D. Nock, La conversione. Società e religione nel mondo antico, Laterza, Bari 1974, p. 182.

(52) Si veda, ad esempio, il brano della "corda d'oro" (Iliade, VIII, 18-27), dove la "schiacciante superiorità di Zeus sugli uomini ma anche sugli dèi" (M. S. Mirto, Commento a: Omero, Iliade, Einaudi-Gallimard, Torino 1997, p. 1010) simboleggia la nullità della molteplicità di fronte all'unità principiale. 

(53) Scrive infatti Salustio: "La causa prima conviene che sia una, poiché l'unità precede ogni molteplicità" (Sugli dèi e il mondo, a cura di C. Mutti, Edizioni di Ar, Padova 1993, 2a ed., pp. 27-28). 

(54) R. Guénon, Aperçus sur l'ésotérisme islamique et le taoïsme, Gallimard, Paris 1973, p. 38. " La dottrina dell'Unità, cioè l'affermazione secondo cui il Principio d'ogni esistenza è essenzialmente Uno, è un punto fondamentale comune a tutte le tradizioni ortodosse e noi possiamo anche dire che la loro identità di fondo appare nel modo più evidente proprio su questo punto, traducendosi fin nell'espressione stessa" (ibidem, p. 37).

(55) Mario Mazza, Filosofia religiosa ed "Imperium" in Giuliano, in: AA. VV., Giuliano Imperatore, Atti del Convegno della S.I.S.A.C. (Messina, 3 aprile 1984), a cura di Bruno Gentili, QuattroVenti, Urbino 1986, p. 90.

(56) Nuccio D'Anna, Il neoplatonismo, Il Cerchio, Rimini 1988, p. 62.

(57) È veramente necessario avere una fantasia sfrenata e perversa, per cogliere in questa preghiera finale l'ironia di un Voltaire della tarda antichità, che avrebbe mascherato il proprio ateismo radicale dietro una scrittura dissimulatrice. Si può anche essere un grande studioso di Hegel, ma non si è capito assolutamente nulla di Giuliano, se ci si ingegna a sostenere con la massima serietà che l'Inno al Re Helios "è volutamente una parodia degli scritti di Giamblico", nella quale l'autore si fa beffe del dio e "si prende apertamente gioco della teologia in genere (sia pagana che cristiana) e della 'mistica' cosiddetta neoplatonica in particolar modo" (Alexandre Kojève, L'Imperatore Giuliano e l'arte della scrittura, Donzelli, Roma 1998, p. 30).

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Journalisme-"ecstasy"

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L'extase de la guerre ou le journalisme-"ecstasy"

cf. : http://www.dedefensa.org/article.php?art_id=4187...

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mardi, 17 juillet 2007

Naar een rechtse lente

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Een goede tekst van Erik Van Goor met een vernietigend oordeel over de “rechterzijde”.

http://reimerswaal.blogspot.com/2007/07/naar-een-rechtse-lente.html

Naar een rechtse lente


Het rechtse landschap maakt allesbehalve vrolijk. In de ogen van een rechts mens is "de ruimte op rechts" een groot gapend gat. De leegte is beklemmend en er is geen enkel signaal dat dit ooit anders zal worden. De stompzinnigheid wordt met de dag groter, het venijn giftiger en de decadentie schrijnender. Het landschap van rechts denken, schrijven en opereren is onverwoestbaar leeg. Rechts is dood. Want de wereld is dood. Om met Heidegger te spreken: "Alleen een godet kan ons nog redden."

Naarmate de oorlogsstemming toeneemt richting de islam, wordt steeds duidelijker dat "rechts" niets meer is dan de optelsom van ultralinks en islamhaat. De dood van westerse militairen in Afghanistan, de mislukte bomaanslagen in Groot-Brittannië en de uitspraken van imams in eigen land, wakkeren het vuur van haat hoger en hoger. "Rechtse" blogs als Elsevier.nl, Nederkrant en HetVrijeVolk.com staan vol met uitspraken in de trant van: "Het Salafisme moet uitgeroeid worden". "Iran moet worden gebombardeerd". "De woestijncultuur moet eraan geloven." Kortweg gezegd: het "islamofascisme" met een halt worden toegeroepen. Met een regen van vrije woorden en vrije bommen.

Zonder verstand, zonder joie de vivre, zonder humor en zonder fatsoen (vooral dit laatste) bestookt men alles wat beweegt, binnen en buiten het kamp, met geschimp en geschater. Gerenommeerde journalisten als Leon de Winter, 'deftige' (nou ja, deftige...) hoogleraren als Afshin Ellian en Hans Jansen razen met hun giertanks door de vaderlandse beemden, akkers en rozenperkjes. Dit alles aangevuld met een horde anonieme bloggers, haatliefdezaaiers, gefrustreerde homoseksuelen en ander volk wat te lang in Amsterdam Oud-West heeft gewoond.

Het ontwortelde en nihilistische "rechts" heeft bezit genomen van de ooit zo statige monumenten van rechts levensbesef en heeft de ernst verdreven. Alles wat "rechts" beetpakt, blijkt of dood te zijn, of wordt alsnog doodgeknepen. De historie leeft niet meer voor "rechts", maar is hoogstens een grabbelton om de liberale status quo mee op te tuigen. Het christendom, de klassieken, hoogstens worden er wat politieke en culturele clichés aan ontleend. Orde, natuurwet, traditie zijn niet in tel, alleen wanneer de melancholie in een onbewaakt moment bezit neemt van de "rechtse" opinieleiders komen de Antoine Bodars, Benno Barnards en anderen de kolommen volzwammen met opgelepelde wijsheden uit een voorbij verleden.

Het gebrek aan decorum is echter het meest in het oog springende van "rechts". Het boerse onbenul van Rita Verdonk, de stramme benadering van Wilders richting zijn tegenstanders, maar ook de volstrekte onwetenschappelijke optreden van iemand als prof. Hans Jansen, waarvan het me niet zou verbazen dat hij de zogenaamde imam, dr. Abd Al Ghaffar Al Firsani, is die keer op keer in het opinieweekblad Opinio zijn (allesbehalve) ludieke fatwa's uitspreekt.

Het is vooral dit laatste blad wat in het oog springt als bron van teleurstelling. Bij de start profileerde men zich als de stem van "fatsoenlijk rechts"; een denken dat niet overhelt naar populisme, radicalisme en bovendien een denken dat aandacht heeft voor cultuur, filosofie en diepergravende essays. De buitenkant was slechts schijn. Of misschien ook niet. De eenzijdigheid van een Elsevier wordt door Opinio niet gecorrigeerd, alleen brengt men verdieping aan, aan de stokpaardjes van "Elsevier-rechts" Nederland. Dus manifesteert men zich bij tijd en wijle als broeinest van oorlogstaal en gedweep met de sterke staat. Is het het medium dat deformeert? Zijn het de overdreven hooggespannen verwachtingen die ze de das omdoen? Het gebrek aan voorbereiding? Of wordt met de komst van een zogenaamd "conservatief" blad juist de deformatie van het rechtse denken des te duidelijker? Wanneer het gajes vuilspuit, kijkt niemand daar van op. Maar als gerenommeerde heren van stand ditzelfde doen, maar dan in mooiere woorden, dan is er iets aan de hand.

De met regelmaat terugkerende islambashing in dit blad, die geen ruimte overlaat voor tegengeluiden, wordt versterkt met oproepen tot meer bevoegdheden voor geheime diensten door Hans Jansen en een regelrechte oproep tot oorlog tegen Iran door de neoconservatieve Amerikaan Norman Podhoretz. Deze oproep was koren op de molen van Wilders die onlangs dit geluid herhaalde in de Tweede Kamer: Iran moet een halt worden toegeroepen, zonodig met militaire middelen en "bommen op dit land".

De "rechtse" bijbel

De vreemde ideologische mix van Opinio is illustratief voor de geestelijke toestand van "rechts" Nederland. De bijbel van Opinio kent een merkwaardige opbouw. De Apocalyps is er sterk in vertegenwoordigd in de vorm van rampscenario's op het gebied van demografie en internationale politiek. Het profetendom is voor een groot deel een geïmporteerd profetendom (Angelsaksisch). Het evangelie is een onverbloemde lofzang op Verlichting, democratische rechtsstaat, liberale vrijheid en vrije markt. Het geheel wordt doorspekt met de Psalmen van Hennie Vrienten en het Hooglied van Xandra Schutte, de Predikerdialoog van Yoram Stein en wat wijze Spreuken van Dalrymple.

Wat echter ontbreekt, is de basis van elke fatsoenlijk bijbel: de wet. Waar is de basis van onze cultuur, de grondlegging van ons volk? De fundamenten onder alle wetten. Waaruit wordt de ultieme rechtvaardigheid gekend? Zonder "Wet van Mozes" is er immers geen "bijbel"? De profeten passen de Wet toe. De Psalmen bezingen de Wet. Het Evangelie is de vervulling van de Wet. De wijsheidsboeken zijn de toepassing van de Wet. De Apocalyps is het schrikbeeld van een tijdperk zonder Wet. Als de Wet er niet is, valt al het andere weg. Een bijbel zonder wet is een verzameling losse flodders: prietpraat.

De vraag is nu: welke Wet hanteert "rechts"? Wat zijn de eeuwige ordeningen (bijvoorbeeld de "boventijdelijke morele orde") waar de wet naar verwijst? Wat is het verbond (de verbonden) waar een volk dat de wet kent van uitgaat en waar alle maatschappelijke verbanden door worden vormgegeven? Wat is de prepolitieke en preculturele basis van ultieme rechtvaardigheid; met andere woorden: met wat voor recht mogen we Iraanse islamieten doden wanneer eer geen rechtvaardigheid wordt beleden? Het antwoord is: in het gunstigste geval weet men dat niet; maar in de meeste gevallen is men er of niet in geïnteresseerd of men gelooft niet in zo'n Wet. De werkelijkheid waar "rechts" van uitgaat is hoogstens de "maatschappelijke werkelijkheid". Niets meer dan een stand van zaken die je verandert door debat of door flink in het rond te trappen.

Levenloze oorlogsverhalen

Het gevolg is een levenloos opportunisme. Men schrijft weliswaar vele oorlogsverhalen, maar nooit werpt men daarin, zoals in de echte Bijbel, een kritische blik naar zichzelf. Ook de oorlogsverhalen gaan niet echt ergens over; hoogstens spelen er wat "verworvenheden" een rol die men wil verdedigen. Nooit wordt de westerse, verlichte, democratische rechtsstaat aan de kaak gesteld in al haar zwakheden en inconsistenties. En nooit heeft men oog voor de eigen inconsistenties... Men verafschuwt zogenaamd links, maar tegelijkertijd wil men links een absolute macht geven "rechts" te vernietigen. Het zijn met name de geëtaleerde onrust en paniekzaaierij met de daaruit voortvloeiende oorlogsscenario's die potsierlijke suïcidale experimenten naar voren schuiven. Want waar leiden veel voorstellen van onze zogenaamde "rechtse" denkers toe? Iemand als dr. Ad Verbrugge meent dat een sterke staat nodig is om de maatschappij te hoeden en te bewaren:

"Ik ben nu dus voor een sterke staat die publieke middelen inzet voor de controle op de kwaliteit van het onderwijs. En dat ben ik uit sociale overwegingen."

Dr. Verbrugge wil op het gebied van onderwijs een sterke staat. Hans Jansen wil op het gebied van veiligheid een sterke staat. Hirsi Ali wil op het gebied van opvoeding een sterke staat. Waarom wil "rechts" iets versterken dat inherent is aan vijandigheid ten aanzien van "rechts"? Wanneer dit soort denkwijzen doorzetten, zullen de gevolgen desastreus zijn voor wat er nog over is van de gezonde, klassieke maatschappelijke, culturele en morele ordening.

Het pleidooi voor een neutrale overheid is in de huidige constellatie van een qua competenties uitdijende overheid zodoende een moordaanslag op de civil society. Met name Hirsi Ali's denkbeelden over staatsopvoeding ("opvoeding is een taak van de staat") zijn een regelrechte aanslag op de basis van elke gezonde, zelfregulerende en weerbare maatschappij: het gezin. Waarom wordt ze hier niet genadeloos op afgerekend door "rechts"?

Hetzelfde zagen we na haar voorstel op het verbieden van besnijdenis. In het kader van de discussie rond het besnijden van meisjes poneerde ze ook de noodzaak van een verbod op besnijdenis van jongetjes, zowel van islamitische als van joodse jongens. De gevolgen van het invoeren van dit voorstel zijn niet te overzien. Joden wordt het onmogelijk gemaakt op het meest basale van hun religie te praktiseren. Meer nog: wanneer joden vanwege hun geloof niet zouden kunnen en willen voldoen aan dit verbod, zouden overheidsmaatregelen een ongekende aanslag op de moraliteit betekenen. Want wat moet een overheid doen? Joden voor altijd uit hun ouderlijke macht ontzetten? De kinderen van hen afnemen? Joodse mannen gedwongen steriliseren? Om zodoende eindelijk een vreedzame Endlösung te hebben gevonden?

"Rechts" is met uitlatingen als deze een continue stroom van aanslagen op de basis die men niet zou moeten vernietigen, maar zou moeten verdedigen. De ronduit stompzinnig oproep van prof. Hans Jansen tot meer geheime dienst en een geheime dienst binnen de geheime dienst om het moslimterrorisme te lijf te kunnen, is een ander voorbeeld. De moderne staat is de afgelopen decennia een voertuig voor het linkse denken geworden. Waar Hirsi Ali de buffers tegen deze staatsalmacht van "links" wil afbreken (familie, traditie en religie) wil Jansen de "rechtse" basis vanaf de andere kant aanvallen: door de linkse staat de almacht te schenken om alles op te ruimen wat haar nog in de weg staat. De liberale oorlogshitsigheid keert zich in de gedaante van "rechts" en "linksconservatief" tegen "oudrechts".

"Rechtse" gebreken

Er zijn weliswaar nog integere en voortreffelijke "rechtse" conservatieve denkers, waaronder Kinneging en (de in Nederland veel gelezen) Scruton. En natuurlijk mogen we Verbrugge hier ook niet helemaal afserveren. Maar enkele witte raven maken nog geen rechtse lente.

Genoemde heren zijn een toonbeeld van klassieke meesters in moraal, wijsheid en wetenschap. Waar over het algemeen zo'n gebrek aan lijkt te bestaan binnen het "rechtse" kamp; er is een schrijnend gebrek aan autoriteit. Grijze muizen, schobbejakken en doorbraak- en vernieuwingsgezinde geesten bepalen het beeld van wat er over is van het rechtse intellectuele discours. Men mist de kracht van het diep verworteld zijn in traditie en besef van orde, en ontbeert daardoor de autoriteit die nodig is om leerlingen te vormen en krachtig te maken.

Maar rechtse leiders - hoogleraren, politici, geestelijken en anderen - moeten weer achtenswaardige "meesters" worden die hun leerlingen hoeden en vormen. Rechts heeft leiders nodig die nergens bang voor zijn - een eigenschap die ze bezitten, niet door blikvernauwing en onkunde, maar door een diep besef van waarheid en "het kan en mag niet anders" en een besef "het goede te willen voor iedereen". En dat besef is grotendeels afwezig. Bij de meeste scribenten in Elsevier, Opinio, HetVrijeVolk, HP De Tijd, Nederkrant en de talrijke zogenaamde weblogs zijn de gebreken.

Er is allereerst een opvallend afwezig gebrek aan dankbaarheid naar de erfenis van christendom, traditie, gemeenschap en de voorvaderen. Men verdedigt het westen, maar de inhoud van het westen werpt men verachtelijk weg. Het daarmee samenhangende gebrek aan integrale levensvisie, waarin al deze dingen - samen met de nieuwe fenomenen - een plek krijgen in een omvattend geheel, is dan ook niet verwonderlijk. "Rechts" heeft geen visie, maar maalt daar niet om. Waar eerst de klimaatverandering werd ontkend en weggehoond, wordt deze nu toegejuicht. Dat zoveel opportunisme irritatie oproept bij anderen, is niet gek. Maar wat wil je? De onnatuurlijke denkwijze van modern "rechts" keert zich ook tegen de niet-menselijke natuur; een woestijn is helemaal niet vervelend, je kunt er ook lekker op strandballen en met de Hummer erover heen racen.

Gebrek aan moed; veel zogenaamde "rechtse" durf is verhulde links-extremistische retoriek waarin men de stokpaardjes van de moderniteit overdreven prijst en beschermt zonder een echte eigen visie te hanteren. Terwijl rechtse politici in Vlaanderen nog steeds leven zonder een ultrazware persoonlijke beveiliging, leiden "rechtse" politici in Nederland een bunkerbestaan. Dit heeft niet alleen iets met risico's en met standpunten te maken.

Verder is er het gebrek aan vertrouwen. Men vertrouwt elkaar niet. Maar men ook wekt geen vertrouwen bij het publiek. De cultuur van pseudoniemen en van verhulling moet daarom doorbroken worden. Behalve het leiderschap van de klassieke, rustige eruditie moet er het vertrouwen heersen van de openheid. Rechts heeft toch niets te verbergen? Zonder vertrouwenwekkende openheid zal rechts nooit de middenmoot overtuigen van haar gelijk. Maar misschien wil "rechts" dat ook niet. De middenmoot is namelijk nog steeds (!) traditioneler ingesteld dan de "rechtse" opiniemakers. En voor vertrouwen is herkenning nodig; dan moeten de "rechtse" opiniemakers met de billen bloot en moeten ze laten zien dat ze niets hebben met het volk dat zelf zijn kinderen wil opvoeden en geen 24-uurs economie wil. Nee, dan is oorlogsdemagogie handiger; daarmee vergeet de toehoorder in al zijn ongerustheid zichzelf en zet op een gegeven moment al zijn kaarten op vreemde "rechtse" demagogen. "Rechts" prefereert de onvrede niet voor niets boven het vertrouwen.

Er is een gebrek aan vermogen om wolven in schaapskleren op te merken. Het gedweep met Ayaan Hirsi Ali en Verdonk, die weinig meer zijn dan linkse bekeerlingen tot de harde variant van het integratieliberalisme, was inhoudelijk gezien een miskleun. Het harde staatsdenken van deze lieden dat hun morele anarchie moet compenseren is een levensgrote bedreiging voor "rechts" tot in haar diepste vezels. Om de misschien noodzakelijke remigratie van sommige bevolkingsgroepen te vermijden, neemt men de toevlucht tot de politiestaat. Men heeft geen respect voor de tegenstanders; men wil niet werven, maar vernietigen en murw maken en men streeft daarom naar een onvoorwaardelijke capitulatie van de islamitische wereld.

Er is gebrek aan humor, goedmoedige zelfspot en aan een vriendelijkheid die niet voortkomt uit slapte, maar uit de vanzelfsprekendheid van een krachtig vaderschap c.q. leiderschap. Men mist de levensvreugde om de gewone - echt waardevolle - dingen. Men hoeft geen Bas van der Vlies van de SGP of een Hans Wiegel na te willen doen, maar men zou in dit opzicht wel wat van hen kunnen leren.

Er is kortom gebrek aan verstand, aan humor en aan etiquette. Aan verstand dat is ingebed in traditie, gemeenschap en in een integrale levensvisie. Aan humor dat in haar zelfspot laat zien dat het ons niet om onszelf te doen is, maar om het goede voor iedereen. En aan etiquette die de beheerste kracht toont en het vertrouwen schenkt aan de toeschouwers van morele, etnische en culturele conflicten. Deze inwinnende houding heeft misschien geen resultaat als het om terroristen gaat, maar wel als het om (bijvoorbeeld islamitische) omstanders gaat die met een verdeeld hart alles gadeslaan.

Nieuwe Orde

"Rechts" wil echter niet harten winnen, maar culturen vernietigen. "Rechts" verdedigt geen waarden, maar abstracties waar men zelf wel in moeten geloven om anders niet met lege handen te staan. "Rechts" leeft bij containertermen: democratie, vrije markt, gelijkheid, respect, scheiding kerk en staat, etc.

De onaantastbaarheid van deze Nieuwe Orde onderstreept het geloof van "rechts" dat de geschiedenis is geëindigd om te verdampen onder de vooruitsnellende vooruitgangsidee. Er is in dit denken geen wijkplaats. Niet alleen Bin Laden, elke traditionele (nu alleen nog zij) islamiet moet worden opgejaagd tot in elke grot of spelonk aan toe om daarna te worden uitgeschakeld. Als er onrecht wordt geconstateerd moet er meteen worden ingegrepen. Zogenaamd om de humaniteit te beschermen.

Gevolg van dit denken in containertermen is een daaruit voortvloeiend zuiverheidstreven. Het schermen met aftandse begrippen als "mensenrechten" en "vooruitgang" maakt dat het "rechtse" denken steriel is en kunstmatig in stand wordt gehouden. Begrippen als volk, openbaring, natuur, historie kom je of niet tegen, of althans nooit als constituerende factoren De ondertoon is door en door democratisch en gekunsteld. Er is geen wijkplaats, geen geduld. Culturen krijgen niet de kans om van binnenuit getransformeerd te worden en zodoende het goede te behouden.

"Rechts" kent namelijk niet zoiets als "het goede" of "het goede leven", en al zeker niet in vreemde culturen. "Rechts" Nederland kan niet de hoogstaande moraal van iemand als Filip Dewinter opbrengen, voorman van het VlaamsBelang die sterke normen en waarden combineert met een sterk besef van volk en traditie. En die denken in termen van "vriend en vijand" samen kan nemen met "respect voor de vijand".

Toen enige tijd geleden de programmamakers "Ab en Sal", twee Marokkanen, Dewinter interviewden, viel hun deze houding al snel op. De humor en de charme, de verbetenheid ten aanzien van de islam ("ik werk niet samen want ik sluit geen pact met de duivel"), maar ook het respect en waardering voor elementen uit de islamitische cultuur: respect voor ouderen, familieleven en de doodstraf (waar Dewinter voor is, maar zijn eigen partij tegen). Waar Dewinter doorgaans schofterig wordt behandeld (bij tv-programma Jensen bijvoorbeeld) of wordt genegeerd (door Wilders bijvoorbeeld), waren deze twee Marokkaanse jongen wel in staat een fatsoenlijke ontmoeting met hem te hebben.

Dewinter was hiertoe in staat omdat bij hem nog altijd zoiets is van het "oudrechtse" levensbesef. Bij hem is er allereerst de Oude Orde van familie, respect voor ouderdom, wijsheid en traditie en rechtvaardigheid op basis van recht. Daarentegen gaat modern "rechts" niet uit van de oude orde, die een gemeenschappelijke basis toont die door alle culturen heenloopt, maar gaat ze uit van de Nieuwe Orde van gelijkschakeling, individualisme en afgedwongen onderdanigheid onder nieuwe principes die al het gemeenschappelijk menselijke elimineren.

Weerbaarheid

Door blind te zijn voor de oude orde van orde, gemeenschap en traditie, en door het omhelzen van de Nieuwe Orde van de moderniteit, heeft "rechts" geen oog voor de weerbaarheid en de voorwaarden voor weerbaarheid. Weerbaarheid is niet slechts het vermogen om de tegenstander te vernietigen, het is ook het vermogen om in het leven zelf tegenslagen te incasseren. Het doorgedraaide abstracte vrijheidsbegrip speelt "rechts" voortdurend parten. Het is een vrijheid zonder dankbaarheid, zonder inhoud, zonder fundering en derhalve gevaarlijk. Het kan zich tegen alles en iedereen richten.

Het kan uitmonden in onbeschoftheid, beter gezegd: narcistisch ressentiment. Elke binding, elke ontstaansgrond is immers inherent aan vrijheidsbeperking. Het leven dat wordt gevuld met vrijheid richt zich per definitie tegen gronden als opvoeding, moraal, godsdienst etc. Bij het wegwerpen van de inhoud is de enige inhoud die ertoe doet vernietigingsdrang van datgene dat doet denken aan de beperking van het leven. "Rechts" is vervuld met vernietigingsdrang ten aanzien van het leven zelf (cultuur, beschaving, etc.) dat immers slechts bestaat bij de gratie van beperking. En elke conservatief weet dat deze beperking niet een opgelegde overheersing is, maar een beantwoorden aan de aard van het leven zelf dat wordt weerspiegeld in de orde.

"Rechts" is daarom een gevaar voor zichzelf en voor haar omgeving. Achter een façade van oprechte verontwaardiging over het schenden van mensenrechten, van zogenaamde solidariteit met Amerika en Israël, of achter het opkomen voor onze cultuur, huist een verbijsterende, onverwoestbare leegte. Door deze leegte zijn onze zelfverklaarde "verdedigers van het westen" in staat zelfs het smerige werk te doen voor de werkelijke vijand: het ultraliberalisme.

Zodoende komt de linkse politiestaat er mede door toedoen van "rechts". En worden van traditionele islamieten afgedwongen nihilisten gemaakt. En wordt met overdreven doorgevoerde vrijheden op het gebied van media, meningsuiting en seksualiteit elk restant van karakter en weerbaarheid gesmoord in de onbenulligheden - pardon: verworvenheden van de moderne, westerse cultuur. Als het om de afbraak van het gezin gaat door homohuwelijk en adoptie, de afbraak van het gezag door het verbod op de "corrigerende tik" of om de vrijheid van (gewapende) zelfverdiging; "rechts" of wat daar voor doorgaat houdt de lippen stijf op elkaar. De basis wordt verzwakt - moet worden verzwakt - en de politiestaat komt er voor in de plaats. En "rechts" vindt het allemaal wel best. Die ziet geen enkele samenhang; enkel bedreigde onbenulligheden en gediscrimineerde homo's. Die ziet kortom helemaal niks.

Een rechtse lente?

Komt er ooit nog een rechtse lente? Een wederopbloei van gezond denken en van gezonde cultuur? We moeten het blijven hopen, maar de situatie is ernstig zo niet uitzichtloos. De grootste vijand voor het westen is het liberalisme. En de grootste vijand voor rechts is "rechts" "zelf". En al die projecten die proberen de laatste "rechtse" mensen zand in de ogen te strooien met linksconservatieve en rechtspopulistische verhaaltjes. De antitraditionele en dikwijls ook antireligieuze en antiklassieke houding van veel van deze mannetjes en vrouwtjes geeft aan dat de vijandschap wederzijds is. Ook voor de zogenaamde "rechtse" opiniemakers is rechts (oudrechts) de grootste vijand. Het verschil tussen de opiniemakers en het luisterende restje oudrechtse volk is dat de eersten, de opiniemakers, weten wat ze doen, namelijk de vernietiging nastreven van het westen, en dat de laatsten nog steeds niet in de gaten hebben dat het "hun" opiniemakers niet te doen is om de verdediging van het westen, maar om de verwoesting van de rechtse ziel van Europa.

De leegheid van de leiders zoekt een spiegelbeeld in de leegheid van de toehoorders. De rechtse lente komt er pas als het rechtse volk haar "rechtse leiders" respectvol in de sloot heeft gedeponeerd (met meer respect voor het ambt en de publieke zaak, dan voor de persoon en toevallige "democratische" meerderheden). En de importconservatieven een retourtje richting Iran of Somalië heeft "geschonken". Oude principes moeten herleven: leiders die hun belofte en roeping verraden, moeten worden afgezet. Net zoals in vroegere tijden. En zonodig moet een onervaren (jonge) garde het maar overnemen.

We kunnen wachten op een godet die ons redding moet verschaffen. We kunnen wachten op een moment dat de wal het schip keert. We kunnen wachten op een Grote Charismatische (doch Democratische) Leider die de democratische massa's zal weten in te winnen. We kunnen wachten op een geestelijke herleving van ons volk. We kunnen wachten tot we een ons wegen en in het graf liggen weg te teren.

We kunnen ook ons afkeren van de "rechtse" opiniemakers en onze eigen, eigenzinnige, weg gaan. Leren niet meer onder de indruk te zijn van "rechtse" praatjes of van liberale containertermen. Leren te lachen om onze vijanden - ze zonodig te negeren - en wegen zoeken om de toeschouwers in te winnen voor onze zaak. We moeten bijvoorbeeld islamieten duidelijk maken dat er ook nog een ander alternatief dan het voze liberalisme bestaat. Het is mogelijk om het goede leven te leven vanuit een bedding van traditie, christendom, orde en dankbaarheid.

Een cultuur van "harde liefde" en van "mannelijk respect" moet weer leidraad worden in ons handelen, spreken en schrijven. Islamieten die daar niet aan willen, moeten we eruit gooien en bekampen. Maar pas nadat we libertijnen, en "rechtse" landverraders van hun sokkels hebben neergehaald en in de sloot hebben gegooid. Pas dan spreken we een taal die tegenstanders verstaan: "Wie hard en eerlijk is voor zichzelf, mag ook hard en eerlijk zijn naar een ander toe". Maar zover is het nog lang niet. De rechtse lente zal nog wel even op zich laten wachten.

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Wolfowitz: Return to Sender?

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Wolfowitz: Return to Sender?

by Bill Berkowitz

http://www.antiwar.com/ips/berkowitz.php?articleid=11268...

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G. Faye: Europa: arbol en la tempestad

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Siglo XXI
Europa, un árbol en la tempestad

Guillaume Faye


Permítanme una “metáfora arqueofuturista” en torno al símbolo eterno del árbol, al que yo personalmente compararía con el del cohete. Pero antes, evoquemos la dura imagen del siglo que se nos viene encima.


MARTE Y HEFAISTOS: EL RETORNO DE LA HISTORIA

El siglo XXI será un siglo de hierro y de tempestades. No se parecerá en absoluto a esas predicciones armoniosas proferidas hasta los años setenta. No tendrá lugar la aldea global profetizada por Marshall MacLuhan en 1966, ni el planeta en red (network planet) de Bill Gates, ni la civilización mundial liberal y sin historia, dirigida por un único Estado “onusino” descrita por Francis Fukuyama. Será el siglo de los pueblos en competición y de las identidades étnicas. Y paradójicamente, los pueblos vencedores serán aquellos que permanezcan fieles o que retornarán a los valores y realidades ancestrales, ya sean éstos biológicos, culturales, éticos, sociales o espirituales, y que, al mismo tiempo, serán también quienes dominen con maestría la tecnociencia. El siglo XXI será aquél en el que la civilización europea, prometeica y trágica mas eminentemente frágil, operará una metamorfosis o llegará a conocer su propio e irremediable crepúsculo. En definitiva, será un siglo decisivo. 
En Occidente, los siglos XIX y XX han sido los de la creencia en la emancipación de las leyes de la vida, en los que se ha creído que era posible alcanzar la mente después de haber alcanzado la Luna. El siglo XXI muy probablemente reubicará las cosas en el sitio que les corresponde y operará el “retorno a lo real”, también muy probablemente a través del camino del dolor. 
Los siglos XIX y XX han visto el apogeo del espíritu burgués, esa pequeña sífilis mental, monstruosa y deformada fotocopia de la noción de elite. El siglo XXI, tiempo de tormentas, verá cómo se renuevan conjuntamente los conceptos de pueblo y aristocracia. El sueño burgués se hunde en la podredumbre de sus propios principios y de sus promesas pusilánimes: No son, necesariamente, tiempos de bonanza y felicidad para el materialismo y el consumismo, el capitalismo transnacional triunfante y el individualismo. Y no mucho más para la seguridad, la paz o la justicia social. 
Cultivemos el optimismo pesimista de F.-W. Nietzsche. «Ya no hay ningún orden al que salvar, es necesario rehacer uno nuevo», escribía Pierre Drieu La Rochelle. Y surgen las preguntas: ¿Acaso va a ir todo mal durante los primeros pasos del siglo XXI? ¿Acaso están todos los indicadores al rojo vivo? Pues tanto mejor. ¿Acaso no nos predecían el fin de la historia tras el hundimiento de la U.R.S.S.? Estamos asistiendo justamente a su retorno atronador, belicoso y arcaico. El Islam reemprende sus guerras de conquista. El imperialismo americano se desencadena. La China y la India ambicionan llegar a ser superpotencias, etc. El Siglo XXI estará emplazado bajo el doble signo de Marte, el Dios de la Guerra, y de Hefaistos, el Dios forjador de espadas, maestro-patrón de las técnicas, de los fuegos telúricos.

HACIA LA CUARTA EDAD DE LA CIVILIZACIÓN EUROPEA

A la civilización europea, civilización superior, no hay que dudar lo más mínimo en afirmarla como tal frente a los cantores lánguidos del etnomasoquismo xenófilo, y deberá, para poder sobrevivir en el Siglo XXI, operar una revisión desgarradora de ciertos de sus principios. Y sólo será capaz de ello si permanece anclada en su eterna personalidad metamórfica: Deberá transformarse toda ella permaneciendo como ella misma al mismo tiempo, cultivar el enraizamiento y la desinstalación, la fidelidad identitaria y la ambición histórica.
La Primera Edad de la civilización europea reagrupa a la Antigüedad y la Edad Media: Momento de gestación y de crecimiento. La Segunda Edad va desde los Grandes Descubrimientos hasta la Primera Guerra Mundial: Es la asunción. La civilización europea conquista al mundo. Pero del mismo modo que Roma o el Imperio de Alejandro el Magno, ella misma se hace devorar por sus propios hijos pródigos: Occidente y América, y por aquellos pueblos que ella misma ha (superficialmente) colonizado. Se abre entonces, en un trágico movimiento de aceleración de la historia, la Tercera Edad de la civilización europea tras el Tratado de Versailles y el fin de la guerra civil de 1914-18: El funesto siglo XX ¡Tan sólo cuatro generaciones fueron suficientes para precipitar en la decadencia el trabajo ascendente, la labor solis de más de cuarenta generaciones! La historia se parece a las asíntotas trigonométricas de la “teoría de las catástrofes”: Es en el pináculo de su esplendor cuando la rosa marchita, es tras un tiempo asoleado y calmado cuando el ciclón estalla. ¡La roca Tarpeya está ya cerca del Capitolio! 
Europa fue víctima de su propio prometeismo trágico, de su propia apertura al mundo. Víctima de ese exceso de toda expansión imperial: El universalismo, olvidadizo de toda solidaridad étnica interna global, víctima en consecuencia también de los micro-nacionalismos. 
La Cuarta Edad de la civilización europea se abre hoy. Y será la del renacimiento o la perdición. El siglo XXI será para esta civilización heredera de los pueblos-hermanos indoeuropeos, el siglo fatídico, el del fatum, del destino que distribuye o la vida o la muerte. Pero el destino no es el azar absoluto. Contrariamente a las religiones del desierto –el cual simbólicamente no representa más que a la nada absoluta– los pueblos europeos saben en el fondo de sí mismos que el destino y que las divinidades no son siempre todopoderosos frente a la voluntad del hombre (1). Como Aquiles, como Ulises, el hombre europeo de los orígenes se mantiene en pie y nunca acostado, posternado o arrodillado frente a sus dioses. No hay sentido de la historia.
Incluso herido, el Árbol puede continuar creciendo. Con la condición de que reencuentre la fidelidad a sus propias raíces, a su propia fundación ancestral, al suelo que nutre su savia.

LA METÁFORA DEL ÁRBOL

El Árbol, son las raíces, el tronco y el follaje. Es decir, el germen, el soma y la psique.
1) Las raíces representan al “germen”, el zócalo biológico de un pueblo y su territorio, su tierra materna. Ellas no nos pertenecen, las transmitimos. Ellas pertenecen al pueblo, al alma ancestral y por venir del pueblo, denominada por los griegos Ethnos y por los germanos Volk. Vienen desde los ancestros y están destinadas a las nuevas generaciones. (Es por ello que todo mestizaje es una apropiación indebida de un bien a transmitir y, de nuevo, una traición). Si el germen desaparece, ya no es posible nada más. Podemos talar el tronco del árbol, mas podrá eventualmente rebrotar. Pero si arrancamos las raíces o contaminamos la tierra, todo ha terminado. Es por ello que las colonizaciones territoriales y las desfiguraciones étnicas son infinitamente más graves y mortales que las lacayas servidumbres culturales o políticas, de las que un pueblo puede, llegado el caso, reponerse perfectamente.
Las raíces, principio dionisíaco, crecen y se hunden en el suelo, a través de nuevas ramificaciones: Vitalidad demográfica y protección territorial del Árbol contra las malas hierbas. Las raíces, el “germen”, jamás llegan a estar yertas. Profundizan en su esencia, tal y como lo entendía Martin Heidegger. Las raíces son a la vez “tradición” (lo que se transmite) y “materia ígnea” (fuente viva, eterno reinicio). Las raíces son pues en conjunto la manifestación de la memoria y lo ancestral más profundos y del eterno carácter juvenil dionisíaco. Y tal manifestación nos remite al concepto capital de profundización.
2) El tronco, es el “soma”, el cuerpo, la expresión cultural y física de un pueblo, siempre en constante innovación mas alimentada por la savia venida desde las raíces. No está cuajado o petrificado, gelificado. Engorda en capas concéntricas elevándose todo él hacia el cielo. Hoy en día, aquellos que quieren neutralizar y abolir la cultura europea intentan “conservarla” como si fuera un monumento del pasado, como si estuviera dentro de un frasco de formol, destinada a los eruditos “neutros”, o bien abolir la memoria histórica para las jóvenes generaciones. El tronco, sobre la tierra que lo mantiene, es, edad tras edad, crecimiento y metamorfosis. El Árbol de la larga cultura europea está a un mismo tiempo enraizado y desinstalado (socavado). Un roble de diez años no se parece a un roble de mil años. Mas es siempre el mismo roble. El tronco, aquél que recibe y afronta al rayo, obedece al principio jupiterino.
3) El follaje. Es el más frágil y el más bello. Muere, se marchita y renace como el Sol. Se expande en todos los sentidos. El follaje representa a la “psique”, es decir a la civilización, a la producción y la profusión de nuevas formas de creaciones diversas. Es la razón de ser del Árbol, su asunción. Por otro lado, ¿a qué ley obedece el crecimiento de las hojas? A la fotosíntesis. Es decir a “la utilización de la fuerza de la luz”. El Sol nutre a la hoja que, en cambio, produce el oxígeno vital. El eflorescente follaje sigue pues al principio apolíneo. Pero atención: Si crece desmesurada y anárquicamente (como es el caso de la civilización europea que ha querido al convertirse en el Occidente mundial extenderse al planeta entero), será sorprendido por la tempestad, como si de una vela mal cardada se tratase, y hará abatir y desenraizar al Árbol que le mantiene. El follaje debe ser podado, disciplinado. Si la civilización europea quiere subsistir, no debe abrirse a toda la Tierra ni practicar la estrategia de brazos abiertos..., al igual que un follaje en exceso curioso que se extiende por todas partes o se deja asfixiar por las hiedras. Deberá concentrarse sobre su propio espacio vital, es decir la Eurosiberia. De ahí la importancia del imperativo de etnocentrismo, término políticamente incorrecto pero que ha de ser preferido al modelo “etnopluralista” y de hecho multiétnico que algunos equivocados o calculadores intentan teorizar desorientando al espíritu de resistencia de la elite rebelde de la juventud.
Podemos comparar la metáfora tripartita del Árbol con la del Cohete, extraordinaria invención europea. Correspondiendo los reactores ardiendo y los propulsores a las raíces, al fuego telúrico. El cuerpo cilíndrico del ingenio se parece al tronco del árbol. Y la cofia del proyectil, desde la que se desplegarán los satélites o las naves alimentadas por la energía de los paneles solares, hacen pensar en el follaje.
¿Es acaso verdaderamente un azar si los grandes programas de cohetes espaciales construidos por europeos -incluso expatriados en EE.UU., adivinándose, obviamente, de quién hablamos- se han denominado respectivamente Appolo, Atlas, Mercury, Thor y Ariane? El Árbol, es el pueblo. Al igual que el cohete, sube hacia el cielo, pero parte de una tierra, de un suelo fecundo en el que ninguna otra raíz parásita puede ser admitida. En una base espacial, se asegura una protección perfecta, una limpieza total de la área de lanzamiento. Del mismo modo, el buen jardinero sabe que para que el árbol crezca en altura y en fortaleza, es necesario que al mismo tiempo se libere la base sobre la que se asienta de las inoportunas malas hierbas que secan sus raíces; liberar su tronco de la opresión de las plantas parásitas; pero también desramar los ramajes demasiado prolijos que carecen de verticalidad. 

DEL CREPÚSCULO AL ALBA

Este siglo será el del renacimiento metamórfico de Europa, como el Fénix, o de su desaparición en tanto que civilización histórica y su transformación en Luna Park cosmopolita y estéril, mientras que los otros pueblos, por lo que a ellos respecta, conservarán sus identidades y desarrollarán su poder. Europa está amenazada por dos virus emparentados: El del olvido de sí mismo, de la desecación interior, y el de la “apertura al Otro”, excesiva. En el siglo XXI, Europa, para sobrevivir, deberá al mismo tiempo reagruparse, volver de nuevo a su memoria y perseguir su propia ambición, fáustica y prometeica. Tal es el imperativo de la coincidentia oppositorum, la convergencia de los contrarios, o la doble necesidad de la memoria y de la voluntad de poder, del recogimiento y de la creación innovadora, del enraizamiento y de la desinstalación. Heidegger y Nietzsche...
El inicio del Siglo XXI será como esa medianoche del mundo, desesperante, de la que hablaba Friedrich Hölderlin. Pero en lo más obscuro de la noche, sabido es que por la mañana, el Sol regresará, Sol Invictus. Tras el crepúsculo de los dioses: El alba de los dioses. Nuestros enemigos han creído siempre en la Gran Noche, y sus banderas están ornadas con símbolos de estrellas nocturnas. Por el contrario, sobre nuestras banderas está acuñada la Estrella de la Gran Mañana, con rayos arborescentes: La rueda, la flor del Sol de Mediodía. 
Las grandes civilizaciones saben pasar de las tinieblas de la decadencia al renacimiento: El Islam y la China lo han demostrado. Los Estados Unidos de América no son una civilización, en absoluto, si no una sociedad, la materialización mundial de la sociedad burguesa, al igual que un cometa, con un poder tan insolente como efímero. No tienen raíces. No son nuestros verdaderos competidores en lo que corresponde a la escala de la historia, en absoluto, simplemente son parásitos. 
El tiempo de la conquista ha terminado. Ahora viene el de la reapropiación interior y exterior, la reconquista de nuestra memoria y de nuestro espacio: ¡Y qué espacio! Catorce husos horarios sobre los cuales el Sol no se pone nunca. Desde Brest hasta el Estrecho de Béring, qué duda cabe, éste es verdaderamente el Imperio del Sol, y es de hecho el espacio vital y de expansión propio de los pueblos indoeuropeos. Sobre el flanco sureste, tenemos a nuestros primos hindúes y sobre nuestro flanco este, a la gran civilización china, que podrá ser según ella determine aliada o enemiga. Sobre el flanco oeste, venida desde más allá del Océano: La América cuyo objetivo será siempre impedir la unión continental (del espacio eurosiberiano). Mas, ¿Lo podrá eternamente? 
Y además, sobre el flanco sur: La principal amenaza, resurgida desde el fondo de las épocas del pasado, aquélla con la que no podemos transigir (absolutamente para nada). 
Ciertos leñadores intentan abatir el Árbol. Entre ellos se hallan muchos traidores, muchos colaboradores. Defendamos a nuestra tierra, preservemos a nuestro pueblo. La cuenta hacia atrás ha comenzado. Todavía tenemos tiempo, si bien esta vez no por mucho tiempo. 
Es más, aun cuando logren cortar el tronco o si la tempestad lo abate, quedarán todavía las raíces, siempre fecundas. Una sola brasa es suficiente para reavivar el incendio. 
Puede darse, evidentemente, que abatan al Árbol y troceen su cadáver, en un canto crepuscular, y en tanto que anestesiados, los europeos no sientan el dolor. Pero la tierra es fecunda y una sola semilla es suficiente para relanzar al retoño. En el siglo XXI, preparemos a nuestros hijos para la guerra. Eduquemos en la juventud una nueva aristocracia, incluso aunque sea minoritaria. 
Mucho más que la moral, es necesario practicar a partir de ahora mismo la hipermoral, es decir la ética nietzscheana de los tiempos difíciles: Cuando uno defiende a su pueblo, es decir a sus propios hijos, cuando uno defiende lo esencial, sigue la regla de Agamenón y de Leónidas mas también de Carlos Martel (2): Es la ley de la espada la que prevalece, aquélla en la que el bronce o el acero refleja al brillo del Sol. El árbol, el cohete, la espada: Tres símbolos verticales que parten del suelo hacia la luz, erguidos desde la Tierra hacia el Sol, animados por la savia, el fuego y la sangre.


Guillaume Faye


(1) El europeo se afirma a sí mismo propiamente como hombre, como ser también portador de la divinidad, capaz, mediante su voluntad, de dominar y señalar el destino a seguir (N del T).
(2) Y nuestro Jaime I (N del T).
[Traducción y notas por Enrique Bisbal-Rossell. El texto precedente apareció originalmente en el número 2, del solsticio de invierno de 1999, de la revista hermana gala Terre et Peuple. La Revue]

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lundi, 16 juillet 2007

Reinhard Wulle

Reinhard Wulle

16 juillet 1950: Le théologien, germaniste et historien Reinhold Wulle meurt à Gronau en Westphalie. Né en 1882, il avait embrassé la carrière de journaliste en 1908 et prit la direction du célèbre Deutsche Zeitung, fonction qu’il exercera entre 1918 et 1920. Elu au Reichtstag sur les liste de la DNVP nationaliste en 1920, il se détache de son parti d’origine pour fonder avec son collègue von Graefe le “Deutschvölkische Freiheitspartei” qu’il dirigera entre 1928 et 1933. Il s’opposera, à cause de son nationalisme de facture libertaire, protestante, prussienne et bismarckienne, au nouveau régime national-socialiste. Il a exprimé sa conception du politique dans un ouvrage à la fois théorique et historique, Geschichte einer Staatsidee (1935). Pour donner corps à son op­position nationaliste à Hitler, il fonde, avec ses amis, la “Gesellschaft Deutsche Freiheit” (= Société de la Li­berté Allemande), ce qui conduit à son arrestation en 1938, puis à son internement dans le camp de con­cen­tration de Sachsenhausen, où il restera jusqu’en 1942. En dépit de cette opposition réelle au régime, les alliés in­terdisent le parti qu’il constitue dès 1945, la “Deutsche Aufbaupartei”. Cette interdiction prouve que les op­posants sérieux au national-socialisme n’ont pas été tolérés par les puissances occupantes, qui préféraient les dé­magogues et les idéologues écervelés, sans épine dorsale historique.

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World-Openness and Will to Power

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World-Openness and Will to Power

Michael O'MEARA

Utdrag från New Culture, New Right: Anti-Liberalism in Postmodern Europe, s. 46-51.

"What, though, is culture?" There is, of course, no single definitive answer to this question. But in seeking however partial a response, Grécistes look to philosophical anthropology, a discipline associated with the post-phenomenological works of Max Scheler. [19] Dissatisfied with Edmund Husserl's "idealist" examination of human consciousness, Scheler had sought to understand how the intellectual, institutional, and social facets of man's existence relate to the underlying structure of his biological being. It was, however, Arnold Gehlen (1904-1976), a student of Scheler's colleague, Helmuth Plessner, and the most famed recent proponent of philosophical anthropology, who has had the greatest impact on the GRECE's understanding of culture. [20]

Following Scheler and Plessner, both of whom broke from a purely metaphysical concept of man in emphasizing the role of his animal nature, Gehlen singles out man's culture-making capacity as his defining characteristic. [21] This capacity, he claims, developed as a consequence of man's "instinctual deficiencies." Although humans possess certain basic drives (such as self-preservation, aggression, territoriality, defense of the young, et cetera), these are few in number, limited in effect, and non-specific. If man had had only his few instincts on which to rely, he would not have long survived in nature 30,000 years ago when he lived under the open sky. To compensate for his instinctual deficiencies, he was compelled to draw on other faculties. For the evolutionary process that left him instinctually non-specific also imbued him with intelligence, self-consciousness, and an adaptable nature. By drawing on these faculties to cope with the natural exigencies of existence – exigencies resolved in animals by their "instinctual programming" – man "learned" to negotiate the environmental challenges of his world. Unlike animal instinct, though, this learning left him "world open" (Weltoffen), for his responses to external stimuli were not automatically programmed by earlier responses, but based on reflection and hence open to change and revision. Biological laws might therefore influence him, but only negatively, as a "framework and base." [22] In choosing, then, how to respond to nature's challenges, man had no alternative but to treat the world with care and foresight, to gain an overview of what had gone before and what was likely to happen in the future, to develop symbolic systems to communicate this knowledge, and, not least of all, to establish those institutions that would socially perpetuate the lessons of earlier responses.

The complex of habits, judgements, and techniques arising from man's worldopen responses to his environment is, for Gehlen, the fundament of his culture, insofar as this complex informs, disciplines, and stylizes all his subsequent responses to the world. Then, as this cultural complex becomes the unconscious frame of his behavior, it acquires the character of a "second nature" (zweite Natur), serving him somewhat in the way instinct serves animals. This second nature, his culture, is, however, neither automatic nor immutable, for man retains the capacity to make new choices and hence to modify his behavior. [23] This "condemns" him to endless choice-making and an on-going process of becoming. Yet, even while subject to an endless process of development, his culture continues to be influenced by the legacy of earlier choices. [24] Like Heraclitus' river, whose waters are never stepped into twice, man's "cultural nature" remains the "same," even as it constantly changes. That is, through various feedback processes based on an ever-widening accumulation of experience, it develops according to a "logic" – a vitality – distinctly its own, even though in developing it never mechanically replicates itself. On this basis, Gehlen characterizes culture as combining permanence and innovation, which makes man both its creature and its creator. [25]

Virtually every conscious realm of human activity, Gehlen holds, comes to be affected by culture. In his anthropology, it is virtually inseparable from man. For without it, and the role it plays in negotiating his encounters with the world, man would be only an undifferentiated and still unrealizable facet of nature – unable, in fact, to survive in nature. [26] Contrary to a long tradition of rationalist thought (the anthropological structuralism of Claude Lévi-Strauss being the foremost recent example), there are no "natural men." Free of culture, man would be a cretin, unable even to speak. [27] Given the inescapable character of his culture, Gehlen argues that man is best described as a biocultural being: for although culture and nature are two distinct things, in him they form an indivisible unity. [28]

Since different families of men, in different times and environments, respond differently to the limitless choices posed by their world, their cultures grow in different ways. Evident in all that distinguishes a Californian from a man of Connemara, a Chinese from a Cameroon, such disparities account for the great diversity of human cultures, with their different valuations, different symbolic systems, different ways of making sense of and responding to the world. [29] As an organic unity with forms congruent with its distinct vitality, a culture, then, is understandable only in its own terms. For its essence lies neither in rationalist nor objectivist criteria, but in the conditioned behaviors and beliefs constituting the interrelated patterns and categories specific to it. As a consequence, there is no single Culture, only different cultures, specific to the different peoples who engender them. An appeal to the universal or generic – to that which is not specific to a specific culture – can thus only be an appeal to its own negation. There can, it follows, never be a world culture, a single planetary consciousness, a single mode or distillation of life common to all men. For the heritage of choices that goes into making a culture and giving it its defining forms is distinct to each organic formation, rooted in those cycles of growth and vitality distinct to it. [30]

Because man's "membership in humanity is mediated by his particular cultural belonging," the only universals he shares with those of another culture are those found in his animal nature (and even these are affected by different phylogenetic developments). [31] This diversity of human cultures cannot, then, but imply diverse, if not incommensurable cultural perspectives, as different peoples define their interests, order their perceptions, and regulate their behaviors differently. [32] Similarly, all that a specific culture accepts as "objective" derives, in the last instance, from its particularistic valuations and vitality. This is not quite the same as subjectivism – unless a culture is in decline and overly self-conscious of its conventions – but it is testament to culture's relativist character. [33] Since all men are heirs to particular formations, without which they would not be men, even an individual seeking to individuate himself in a foreign culture is obliged to do so within a frame predetermined by his original heritage. As Gehlen argues, man can never be more than an individuated expression of his native culture. For it is through such an individualization that he realizes who he is and achieves his specific humanity. [34] All men may therefore possess the powers of cognition and the capacity to create culture, but because reason is informed by its specific concerns, it never – ultimately – transcends its specific subjectivity, even when drawing on objective and instrumentalist criteria to do so. A truly neutral reason without inherent cultural "bias" (as liberal modernity posits) would require a cultureless world – that is, a world without real human beings.

Just, then, as there is no single culture common to all men, there is no single definable reality in Gehlen's anthropology. The only reality man knows is informed by the intrinsically subjective and evolving tropes his specific heritage provides for making sense of it. [35] "Man," Protagoras said 2500 years ago, "is the measure of all things." Given the world's different cultures, there are necessarily a plethora of different measures in the world. Conversely, an individual is never distinguishable from his culture: never independent of the "measures" he applies. He may be free to express his culture in his own way and a culture may permit an infinite number of individual variations and even considerable rebellion against it, but no culture is ever the sum of its parts nor is any individual independent of its encompassing attachments. [36] Culture alone imbues the individual with his distinct consciousness . . . and the consciousness of his distinctiveness. It is likewise more than a spiritual or mental state, for its supraindividual unity inevitably takes social, institutional, and demographic form. It is always a people in its specificity, not a programmed abstraction labelled "humanity," that situates a culture. [37] Man's animal nature and his culture-making capacity may therefore be universal, but his second nature is not. Once culture is "pealed away," the only "nature" remaining is animal or physiological. Ontologically, this implies not the primacy of objective abstractions, but of hermeneutical processes (culturally specific self-understandings) embedded in the history of a people's particular growth.

Similarly, different cultures, like the peoples animating them, are never arbitrary, but anchored in organically evolved ways of life that the reasoning mind may render into rational terms, but is nevertheless powerless to justify or explain. It is always culture that establishes the ground – the "objective" basis – upon which the individuals making it up are able to communicate, judge the meaning of things, and reach consensus. Without it, they would be unable to agree on common standards of truth and value – and thus live together. But more than establishing the basis of a people's existence, culture frames whatever a people will attempt in its future, for it endows its world with meaning – and hence direction. [38]

If healthy and self-confident, a culture takes into account man's world-open capacity, allowing him to make himself according to those of its norms and categories that best sustain him. An authentic or a "natural" enculturation, however, has become increasingly problematical in the modern age. As Giorgio Locchi (who played the greatest role in making Gehlen's anthropology central to the GRECE's cultural politics) argues, the traditional organic model of culture is now threatened by a functional one that jeopardizes the vitalistic basis of the enculturating process. [39] Shaped by socioeconomic circumstances influencing both the micro and macro levels of existence, the functional model specific to modernity enculturates the individual according to systemic imperatives, which subordinate communal relations and individual subjectivities to large-scale social and institutional requirements. In the process, it orients to man's sensuous and egoistical nature, leaving room only for the internalization of its generic ideals, which are experienced as either external imperatives or animal drives. Such a culture, moreover, addresses men solely in their functional specificity or generic egoism, isolating them from those particularistic ways of life and behavior that have grown out of earlier forms of meaning. Swept along, then, by the macro-structures conditioning everyday existence and powerless to experience life according to imperatives based on a lived "fusion of purpose," the "other-directed" man of functional culture has no alternative, integrated as he is from the top down, but to rely on external stimuli for his direction. His life, therefore, is lived according to mechanical forms over which he has no control and which tie him to pre-determined patterns of behavior. Nietzsche (an important influence on Gehlen) calls this sort of enculturation "subjective culture for outward barbarians" – for it leaves man's inner self dependent on outside forces for its direction, devoid of development and hence susceptible to the most extreme forms of subjectivism. [40]

By contrast, the second type of culture (organically emerging from historically formed and tradition-based communities) fosters an "inner-directed" individual possessing an internalized frame of reference congruent with his second nature and geared to a sociability that integrates individual and community in an interactive synthesis. Experienced as an inheritance bequeathed by "great ancestors," organic culture is lived as a project whose rhythms respond to the individual's distinct vitality, as that vitality is shaped by a stylization native to it. The individual, as such, does not consume culture, but applies it, for his behavior is not determined, but inspired by it. This gives the man of organic culture, who encounters his world as an on-going project, the freedom and confidence to realize his cultural ideal in face of the specific exigencies challenging him. Organic culture accordingly grows from the inside out, becoming a personalized expression of a collective way of life, not an anonymously "consumed" commodity marketed to generic individuals situated in anonymous, indifferent social systems. [41]

For the last two centuries liberal societies have endeavored to impose their functional model on the whole world. Europeans, however, have lived most of their history according to the organic model. The hero, the genius, and the great artist, all of whom have played exemplary roles in their civilizational epic, were emulated not because they rebelled against the prevailing culture, but because they succeeded in giving new form and vitality to it. Indeed, such a disposition for renewal was inherent in their culture, for it was lived as an on-going response to an evolving world. By contrast, late modern society, subject to liberalism's market-driven functional culture, is virtually powerless to reformulate its cultural identity or alter its relationship to the larger world, for individual adaptation is now subsumed to a mass-manufactured model responsive to systemic, not communal, personal, or vitalist imperatives. Thus, whenever this model becomes dysfunctional, so too does the cultural orientation of those situated within it, for its failures cannot but plunge the individual into a state of indeterminacy, away from established patterns of conduct and toward greater subjectivity. Unlike the hero of organic culture, who confronts the decomposition of his age for the sake of revolution – a conservative revolution that returns to first principles and allows the cultural ideal to be reasserted at a higher level – the other-directed man of functional culture tends to slip further and further into a state of formlessness, aimlessness, and inaction, vulnerable as he is to those external influences that leave his inner self uncultivated and subject his social persona to criteria alien to his felt needs. [42] From the perspective of Gehlen's philosophical anthropology, Locchi argues that the instrumentalist rationality of functional culture may have the power to undermine organic cultures, but its generic dictates fail to generate those behaviors and beliefs compatible with man's second nature.

It is in this context that the postmodern critique needs to be situated. Against modernist claims to universality, which justify the worldwide imposition of a functional cultural model geared to faceless individuals situated in impersonal social structures, postmodernists highlight the pathologies that follow from its suppression of the lived and the particular. They thus array themselves against modernity's homogenizing model of enculturation. Yet, while advocating a new cultural pluralism, they nevertheless dismiss, disparage, or ignore the significance of earlier organic cultures, often slipping into a pure relativism that mistakes man's second nature for a construct susceptible to endless – and arbitrary – reconstructions. Relatedly, they treat cultural particularisms as if they were akin to exchangeable market options and favor the widest variety of cultural formations. This causes them to advocate a free-floating subjectivity attuned to global markets and microgroups, but resistant to specific organic formations, which are considered "totalizing" in the sense that the Great Narrative is. [43]

Although Grécistes ally with postmodernists in rejecting the instrumental dictates of modernity's functional culture, they take their distance from them in affirming the necessity, not the option, of organic cultures. Without such cultures, they claim an individual is powerless to negotiate the anonymous forces of contemporary society, with dysfunction, decadence, and alienation the inevitable consequence. To be at home in the world and in accord with one's own vitality, a people needs not only to be free of alienating functional restraints, as postmodernists insist, it also needs a sense of belonging that anchors it in a meaningful reality. Belonging, however, comes only with the particular and the enrooted – and the particular and the enrooted cannot be discarded, deconstructed, or selectively reappropriated, as postmodernists advocate, without risk of greater deculturation. [44]

This should not be taken to mean that New Rightists advocate a literal return to pre-modern cultural forms, whose naturalistic models are holistic and relatively simple. Complex societies cannot function in this way. Nevertheless, the traditional organic culture [45] out of which present-day societies have emerged need not, they argue, be rejected in toto, for even as a people evolves and assumes the need for certain functional forms, it retains a need for continuity, balance, and vitality, which can be meaningfully sustained only when rooted in the native soil of a primordial cultural identity. Tying vitality to one's native culture, New Rightists endeavor, then, to replenish all that has given life and form to the European idea over the ages, seeking to adapt Europe's organic culture to the complexities of contemporary social systems, fully conscious that its on-going adaptation gives new meaning, as well as providing new depths to the culture as a whole. [46]


19. H. O. Pappe, "On Philosophical Anthropology," in Austrasian Journal of Philosophy 39 (May 1961); Otto F. Bollnow, "Die philosophische Anthropologie und ihre methodischen Prinzipen," in R. Rocek and O. Schatz, eds., Philosophische Anthropologie Heute (Munich: Beck, 1972); Arnold Gehlen, "Philosophische Anthropologie" (1971), in Gesamtausgabe (Frankfurt/M: Klostermann, 1983), vol. 4.

20. On Gehlen, see Christian Thies, Gehlen zur Einführung (Hamburg: Junius, 2000); Karlheinz Weissmann, Arnold Gehlen: Vordenker eines neuen Realismus (Bad Vilbel: Antois, 2000); Karlheinz Weissmann, "Arnold Gehlen: Von der Aktuatität eines zu Unrecht Vergessen," in Criticón 153 (January-March 1997).

21. Giovanni Monartra, "L'anthropologie philosophique d'Arnold Gehlen," in Nouvelle Ecole 45 (Winter 1988-89).

22. Alain de Benoist, "Racism and Totalitarianism," in National Democrat 1 (Winter 1981-82).

23. Giorgio Locchi, "Ethologie et sciences sociales," in Nouvelle Ecole 33 (Summer 1979); Alain de Benoist, Comment peut-on être païen (Paris: Albin Michel, 1981), p. 67.

24. Alain de Benoist, Vu de Droite: Anthologie critique des idées contemporaines, 5th ed. (Paris: Copernic, 1979), pp. 171-73; Alain de Benoist, Les idées à l'endroit (Paris: Hallier, 1979), pp. 95-97.

25. Arnold Gehlen, Man: His Nature and Place in the World, tr. by C. McMillan and K. Pillemer (New York: Columbia University Press, 1988), pp. 24-31. After his exchange with Lorenz, Gehlen was forced to modify his depiction of man's instinctual non-specificity (Mängelwesen). For a discussion of these later revisions to his theory of culture, see Thies, Gehlen zur Einführung, op. cit., pp. 35-104.

26. "Entretien avec Konrad Lorenz," in Nouvelle Ecole 25-26 (Winter 1974-75); Thies, Gehlen zur Einführung, op. cit., p. 32.

27. Benoist, Les idées à l'endroit, op. cit., p. 41.

28. Benoist, Les idées à l'endroit, op. cit., p. 217. It is this emphasis on the culture-nature link that distinguishes Gehlen's anthropology from the "cultural determinism" of the Boas' school, which ignores man's animal nature, posits an idealist concept of culture, and relies on a good deal of fraudulent research. Typically, Franz Boas is feted in the American academy, but his culturalism is no less vulgar than the biological determinism he sought to refute. Much of contemporary research has, in fact, weighed in against Boas. For example, see Stephen Horigan, Nature and Culture in Western Discourse (London: Routledge, 1988).

29. Claude Lévi-Strauss, Race et culture (Paris: Denoël, 1987), pp. 22-23; Benoist, Les idées à l'endroit, op. cit., p. 216.

30. Alain de Benoist and Charles Champetier, "The French New Right in the Year 2000," in Telos 115 (Spring 1999); Alain de Benoist, Dernière année: Notes pour conclure le siècle (Lausanne: L'Age d'Homme, 2001), p. 88; Alain de Benoist, "Pour une déclaration du droit des peuples," in La cause des peuples: Actes du XVe collogue national du GRECE (Paris: Le Labyrinthe, 1982).

31. See John R. Baker, Race (Oxford: Oxford University Press, 1974), pp. 468-529.

32. Friedrich Nietzsche: "No people could live without evaluating; but if it wishes to maintain itself it must not evaluate as its neighbor evaluates. Much that seems good to one people seems shame and disgrace to another . . . much that is called evil in one place was in another decked with purple honors." See Thus Spoke Zarathustra, tr. by R. J. Hollingdale (London: Penguin, 1968), "Of the Thousand and One Gods."

33. Benoist, Les idées à l'endroit, op. cit., pp. 42 and 101; Alain de Benoist, "L'ordre," in Etudes et recherches 4-5 (January 1977).

34. Henri Gobard, La guerre culturelle: Logique du désastre (Paris: Copernic, 1979), p. 13.

35. Alain de Benoist, "Minima moralia (2)," in Krisis 8 (April 1991).

36. Alain de Benoist, "Fondements nominalistes d'une attitude devant la vie," in Nouvelle Ecole 33 (Summer 1979).

37. Cf. Irenäus Eibl-Eibesfeldt, Der Mensch – das riskierte Wesen. Zur Naturgeschichte menschlicher Unvernunft (Munich: Piper, 1988).

38. Stefano Paltrinieri, "La théorie sociale d'Arnold Gehlen," in Nouvelle Ecole 46 (Fall 1990); Arnold Gehlen, Man in the Age of Technology, tr. by P. Lipscomb (New York: Columbia University Press, 1980).

39. Locchi, "Ethologie et sciences sociales," op. cit.; Alain de Benoist, "'Communauté' et "société'," in Eléments 23 (September 1977).

40. Friedrich Nietzsche, Untimely Meditations, tr. by R. J. Hollingdale (Cambridge: Cambridge University Press, 1983), p. 79; Guillaume Faye, "Le culture-gadget," in Eléments 46 (Summer 1983).

41. Cf. Ferg, "Identité européenne et multiculture," in Devenir 13 (Summer 2000).

42. Locchi, "Ethologie et sciences sociales," op. cit.

43. Fredric Jameson, "Postmodernism, or the Cultural Logic of Late Capitalism" (1991), in Thomas Docherty, ed., Postmodernism: A Reader (New York: Columbia University Press, 1993).

44. The GRECE's defense of particularistic culture – a defense that makes no valuative differentiation between different cultures, but simply defends their specificity against the homogenizing impulses of liberal modernity – is seen by the Left as a sophisticated repackaging of traditional racism (insofar as culture is alleged to replace race as a criterion of exclusion). See Pierre-André Taguieff, "Le néo-racisme différentialiste. Sur l'ambiguité d'une evidence commune et ses effets pervers," in Langage et société 34 (December 1985). For a critique of this conflation of culturalism and racism, see Raymond Ruyer, Les cents prochains siècles: Le destin historique de l'homme selon la Nouvelle Gnose américaine (Paris: Fayard, 1977), pp. 49-61. It is, in fact, the nature of authentic cultures to privilege their own imperatives. To the degree it remains authentic, every culture has no option but to "reject" other cultures (which may be "objectively" just as "good") because they are irrelevant to its own concerns. It is precisely this aspiration towards a self-sufficient unity in its representational modes that makes culture inherently "exclusive" and its members part of a living whole, distinct from others. See Benoist, "Culture," op. cit.; Richard M. Weaver, Vision of Order: The Cultural Crisis of Our Time (Bryn Mawr: Intercollegiate Studies, 1995), pp. 3-21; Claude Lévy-Strauss, Le regard eloigné (Paris: Plon, 1983), pp. 24-30. Finally, the New Right's identitarianism ought not to be confused with the Left's "identity politics," which is a radical form of liberal pluralism that seeks to validate the postmodern fragmentation of identity (usually of sexual and racial minorities). On the Left's identity politics, see Jonathan Rutherford, ed., Identity: Community, Culture, Difference (London: Lawrence and Wishart, 1990). "Identitarism" is here used to denote those tendencies defending traditionalist and anti-liberal – i.e. organic – concepts of identity.

45. This allusion to "traditional culture" – like all subsequent references to "traditional society," "traditional community," "traditional ideas," etc. – refers not to those primitive, tribal formations studied by anthropologists, but to the pre-modern formations that characterized Europe up to the 17th century – that is, to the Greek, Roman, Celtic, Germanic, and Medieval forms of the European civilizational heritage.

46. Cf. Nietzsche, Untimely Meditations, op. cit., p. 83.

Sur l'état de l'armée américaine

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Sur l’état de l’armée américaine

La situation militaire internationale ne s’est guère modifiée au cours de ces quelques dernières années ; cependant, certains chiffres nous étonnent, qui sont révélés par les rapports annuels de centres de recherches aussi célèbres et performants que l’ « Institute for Strategic Studies » britannique (IISS) ou le « Stockholm International Peace Research Institute » (SIPRI) suédois. Ainsi, nous apprenons que les Etats-Unis disposent certes de forces armées dont les effectifs avoisinent le demi million d’hommes, que seule la Chine aligne des effectifs plus impressionnants, avec 2,3 millions de combattants potentiels. Mais les chiffres absolus ont leurs limites. Lorsque l’on porte en compte bon nombre d’autres facteurs, la supériorité des forces armées américaines s’avère bel et bien une réalité incontournable. Comment pourrait-il d’ailleurs en être autrement ? A eux seuls, les Etats-Unis font près de la moitié (45,6% exactement) de tous les budgets militaires du globe. La seconde puissance dans le classement est la Grande-Bretagne, suivie de près par la France et la Chine. On remarquera tout de suite que ces numéros 2, 3 et 4 dépensent chaque année un budget qui demeure plus ou moins dans le cadre raisonnable de leur produit national brut. Ce n’est évidemment pas le cas des Etats-Unis qui, en termes de chiffres, dépassent de 60% la moyenne mondiale des budgets militaires. Voilà pour la théorie.

En pratique et sur le terrain…

Que fait-on en pratique avec des forces armées aussi impressionnantes ? Là, en examinant la réalité, on tombe sur un tout autre son de cloche. La situation se révèle plus complexe, et aussi plus nuancée. Bon nombre de fondamentaux y jouent un rôle, tant en politique intérieure qu’en politique extérieure ; ces fondamentaux sont jouets aux mains d’intérêts économiques et donc politiques, mais l’essentiel, toutefois, c’est que les conflits menés en Irak et en Afghanistan exercent une pression énorme sur l’armée américaine. Les Etats-Unis, constate l’un de nos analystes, « consacrent désormais, en termes absolus, le plus gros montant jamais engagé en matière de défense depuis la seconde guerre mondiale ». Et il poursuit son raisonnement : « Pourtant, malgré cette injection considérable de fonds, il semble que l’armée américaine soit épuisée par l’irruption, sur le terrain, de toutes sortes de révoltés et d’insurgés, qui ne sont armés que d’AK-47, de grenades et de bombes artisanales ». Assertion qui ressemble certes à une boutade. Mais il y a là un fond de vérité, que l’on ne saurait nier. Il n’y pas un jour qui passe, en effet, sans que l’on entende des rapports inquiétants sur la situation en Irak. Il y a quelques jours, les Afghans reprochaient aux Américains leur manière d’intervenir et de régler des problèmes de terrain, sans se soucier des dégâts collatéraux. Les critiques de leurs alliés afghans étaient claires et nettes : « vous n’y allez pas avec le dos de la cuiller et c’est intolérable ». Un grand nombre de victimes civiles venaient en effet de périr lors d’interventions de l’US Army. Force est dès lors de constater que les difficultés d’aujourd’hui sont le résultat de choix pris hier et avant-hier.

L’ancien ministre américain de la défense, Donald Rumsfeld, était un homme de fortes convictions. Il voulait que l’on investisse dans des armes de haute technologie, dans des systèmes de reconnaissance et dans le traitement de données. La vitesse des interventions, la précision des frappes et l’efficacité générale permettraient, toutes ensemble, d’éviter d’aligner une armée de masse. Mieux : après les attentats du 11 septembre, il y près de six ans, le « leadership » américain devait assurer sa suprématie en visant le consensus. Qui fut obtenu. On parvint ainsi, avec succès, à chasser les talibans du pouvoir, puis, sans un consensus équivalent, à occuper rapidement l’Irak tout entier. Mais dès le lendemain de ces succès apparemment foudroyants, les problèmes ont commencé à surgir et à se multiplier. Les unités militaires, qui se montrèrent si rapidement victorieuses dans les conflits de haute intensité grâce à leurs technologies de haut vol, s’avérèrent bien incapables d’occuper correctement le terrain conquis. Aujourd’hui, cela saute aux yeux : l’armée américaine est aujourd’hui victime de son propre passé. Après la guerre du Vietnam, elle s’est concentré sur l’éventualité d’un seul « grand conflit », sans vouloir s’imaginer qu’une conflictualité future pouvait prendre le visage d’une multitude de petits conflits, engendrant autant de chaos intenses mais localisés. L’erreur d’appréciation a donc été la suivante : les responsables de l’US Army ont cru que les unités militaires capables de résoudre le « big bang » du « grand conflit » envisagé, alors être ipso facto capables d’intervenir avec autant d’efficacité dans les conflits de basse intensité. Pendant de longues années, les troupes américaines se sont entraînées pour réussir de beaux sprints. Hélas pour elles, elles sont aujourd’hui engagées, malgré elles, dans un long et épuisant marathon.

Une loi d’airain…

En dépit de l’entraînement des hommes et des techniques utilisées, il existe une loi d’airain : celle des chiffres. La façon moderne de mener la guerre se concrétise sur base de rapports (de proportions) qui, au préalable, doivent être bien pensés et conçus. Ainsi, sur 50 brigades de combat de l’US Army, en moyenne dix-sept peuvent être rendues immédiatement opérationnelles (ce qui donne plus ou moins un rapport de 2 :1). Mais depuis l’envoi de cinq brigades supplémentaires en Irak, le nombre de brigades engagées à l’extérieur du pays est de 25. Certaines de ces brigades ne se voient octroyer qu’un repos d’un an, après un « tour of duty » de quinze mois (rapport : 0,8 :1). En comparaison, les Britanniques tiennent à respecter un rapport de 4 :1, soit au moins deux années de repos après un engagement de six mois. Les responsables de l’armée britannique estiment que c’est là un minimum absolu. Les Américains subissent donc les effets de leur forcing : le nombre de vétérans qui souffrent de problèmes psychiatriques augmente dans des proportions inquiétantes.

Quelle est dès lors la morale à tirer de cette histoire ? Les Etats-Unis ont besoin d’une armée aux effectifs beaucoup plus nombreux qu’actuellement. D’où question : comment réaliser cela en pratique ? Les forces terrestres, composante le plus importante de l’ensemble des forces armées américaines, alignent aujourd’hui 507.000 hommes. En 2001, il y en avait 482.000 et en 1980, 780.000. Augmenter les effectifs en des temps de haute conjoncture n’est pas une sinécure ! Surtout que la réintroduction de la conscription n’est pas considérée comme une option envisageable. Les unités qui restent aux Etats-Unis manquent de matériels et de moyens, doivent sans cesse se rationner : signe de déséquilibre patent. « Toutes ces lacunes », remarque un expert, « rappellent les canaris qui mourraient dans les mines de charbon : ils annonçaient l’imminence d’une catastrophe ».

M.

(article paru dans «  ‘t Pallieterke », 4 juillet 2007 ; trad. franç. : R. Steuckers).

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dimanche, 15 juillet 2007

Entretien avec D. Lloyd (Plaid Cymru)

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Entretien avec le Dr. Dai Lloyd, chef de la fraction parlementaire du « Plaid Cymru », parti nationaliste gallois

 

Le Pays de Galles, frange occidentale et celtophone de la Grande-Bretagne, est divisée depuis 1996 en 22 « unitary authorities », instances en charge des administrations locales. Le Pays de Galles compte trois millions d’habitants. Le parti identitaire gallois, le « Plaid Cymru », a été fondé en 1925. En 2003, il avait subi un ressac électoral, mais tous les sondages prouvent désormais qu’il reprend du poil de la bête. Lors des élections du 3 mai 2007, ce parti identitaire a réussi à conquérir le quart des sièges du parlement gallois, soit 15 députés sur 60. Le « Plaid Cymru » est désormais la deuxième force politique du pays. Allié aux Ecossais du « Scottish National Party », qui ont enregistré, eux aussi, des résultats mirobolants, le « Plaid Cymryu » fait partie du groupe « EFA » au Parlement européen, une alliance qui rassemble les partis à vocation régionale. Le Dr. Dai Lloyd, qui préside la fraction parlementaire du « Plaid Cymru » a répondu aux questions de la « National-Zeitung » (n°22/2007) de Munich. Voici la version française des principales réponses du Dr. Lloyd.

 

DNZ : Comment votre parti a-t-il réussi à consolider sa représentation politique en devenant la deuxième force au Parlement national gallois, oubliant du même coup le ressac électoral que vous aviez subi en 2003 ?

 

Dr.DL : Dès qu’a démarré notre campagne électorale au début de l’année 2006, nous avons pu faire un grand pas en avant en très peu de temps. Ce succès est dû à des mutations purement extérieures, comme par exemple notre nouveau logo, avec son coquelicot jaune stylisé, qui prouve que nous sommes désormais un parti tourné vers l’avenir et non plus seulement obnubilé par le passé. D’autres innovations ont séduit l’électeur, notamment notre manifeste riche en idées nouvelles. Ensuite, pour la première fois, nous avons réussi, face aux Gallois, à évoquer des choses qui les concernaient directement, ce qui les a enthousiasmé d’emblée.

 

Nous n’avons pas seulement mené une campagne électorale fructueuse à l’échelon national gallois, mais nous avons surtout travaillé dur entre les deux scrutins. Nous demandons désormais à tous les élus de notre parti, à quelque niveau que ce soit, d’aller frapper à toutes les portes de cinq rues au moins chaque semaine, de façon à rester constamment en contact avec les gens de leur commune et à déceler immédiatement les problèmes qui surgissent.

DNZ : Quel rôle a joué la guerre en Irak dans le succès électoral du « Plaid Cymru », sachant que, pour nous, identitaires allemands, cette guerre est en contradiction flagrante avec les principes fondamentaux du droit des gens ?

Dr.DL : Le « Plaid » a refusé clairement, de manière constante et récurrente, la guerre contre l’Irak. Dans l’avenir, nous continuerons à exiger le retrait des forces militaires britanniques et le démantèlement des bases militaires qu’entretient le Royaume-Uni en Irak et en Afghanistan.

DNZ : Pourquoi le « Plaid Cymru » réclame-t-il l’indépendance du Pays de Galles, en tant qu’Etat libre au sein de l’Union Européenne ?

Dr.DL : Notre vision d’un Pays de Galles indépendant prend appui sur les besoins réels qu’éprouvent au quotidien les habitants de notre terre. Les faits parlent pour eux-mêmes : les citoyens des petits et moyens pays indépendants, dans l’Europe entière, sont en général plus riches et vivent en meilleure santé. Le peuple du Pays de Galles mérite d’obtenir les mêmes avantages dans l’avenir. Nous voulons aussi que le Pays de Galles contribue à façonner, avec les autres Européens, un monde plus juste, plus pacifique et à l’avenir certain.

DNZ : Quand l’indépendance du Pays de Galles pourra-t-elle devenir réalité ?

Dr.DL. : Notre façon de penser et d’agir politiquement part du principe intangible que la souveraineté du peuple gallois doit trouver sa légitimité dans le peuple gallois lui-même. Le « Plaid Cymru » pense que le pouvoir devrait se trouver entre les mains du peuple et de lui seul. Les Gallois ont le droit inaliénable de décider seuls de leur avenir, de décider où, par qui et dans quel but le pouvoir doit s’exercer. Notre marche vers l’indépendance sera donc, en toute bonne logique, une entreprise que nous mènerons en commun avec tous les hommes et toutes les femmes du Pays de Galles. Ainsi, tous les pas importants qui jalonneront cette marche vers l’indépendance seront nécessairement sanctionnés par des référendums.

DNZ : Dans quelles circonstances un Pays de Galles indépendant pourra-t-il faire partie de l’OTAN ?

Dr.DL : Nous aimerions bien qu’une coopération plus accentuée existe au sein de l’UE dans les questions relatives à la politique extérieure, à la prévention des conflits, à l’engagement de forces militaires dans des opérations de maintien de la paix. Nous estimons que l’UE possède les capacités pour mettre en œuvre un solide système de contrepoids à la puissance américaine dans le monde.

DNZ : Quel rôle la monarchie britannique pourrait-elle jouer après la proclamation de l’indépendance du Pays de Galles ?

Dr.DL. : Après l’indépendance du Pays de Galles, il faudra organiser un référendum sur la monarchie, par lequel les Gallois pourront décider eux-mêmes de la présence future de cette institution.

DNZ : Comment le « Plaid Cymru » va-t-il gérer le problème de la modification des limites des circonscriptions électorales, modification qui a été apportée en vue de torpiller les avancées du mouvement identitaire gallois ? Et comment va-t-il gérer ce problème d’ici aux prochaines élections pour le Parlement britannique de Londres ?

Dr.DL. : Avec notre succès du 3 mai 2007 dans les élections pour le parlement régional gallois, nous avons prouvé que les modifications apportées aux circonscriptions électorales n’avaient freiné en rien la progression de notre parti. Quoi qu’il en soit, nous mènerons une campagne électorale dure, tambour battant, et nous ferons en sorte que les Gallois puissent jouer un rôle plus important dans le Parlement de Londres.

(entretien paru dans DNZ n°22/25 mai 2007 ; trad. franç. : R. Steuckers).

 

 

 

Géophilosophie de l'Europe

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Géophilosophie de l'Europe

 

par Jure Vujic

 

L'ouvrage de Massimo Cacciari, Géophilosophie de l'Europe, traduit de l'italien en croate par Dubravka Rismondo-Zoric et Mate Zoric dans le cadre des éditions CERES (déesse de la fertilité et de la civilisation) constitue à coup sûr une contribu­tion enrichissante et de taille aux thèses géophilosophiques, connues des lecteurs de Gilles Deleuze, Otto Pöggeler, Jacques Derrida, Jean-Luc Nancy, François Makowski et des philosophes italiens Luisa Bonesio, Alessandro Marcerano, Caterina Resta et Vicenzo Vittelio.

Le thème de l'ouvrage présenté par l'auteur au travers d'une démarche “transversale et rhizomique”, selon la conception de Deleuze, s'inscrit indubitablement dans le cadre du débat controversé sur l'affirmation des identités locales et “plurales” sur et la nécessité de l'unification européenne dont les philosophes Jacques Derrida, Jean-Luc Nancy et Otto Pöggeler ont été les vaillants instigateurs. Cacciari part du constat qu'à l'heure où l'Europe est parvenue virtuellement à une unité, sur les plans politique et économique, de nouveaux conflits, des forces centrifuges ainsi que des oppositions théoriques, idéolo­giques et pratiques voient le jour et témoignent d'une certaine crise contemporaine de l'idée même de l'unité européenne.

Cacciari rejoint les filons de la pensée nietzschéenne, laquelle n'a cessé d'affirmer que l'Europe était gravement malade et, du reste, d'une maladie incurable. En cela Nietzsche fût le précurseur traumaturgique du nihilisme européen dont les mé­faits sont largement répandus sur notre continent au travers de la globalisation idéologique, de la schématisation de la pen­sée, de la mondialisation politico-économique et du cosmopolitisme culturel. Dressant un tableau synoptique des cultures et des vagues civilisationnelles ayant marquées l'histoire européenne, Cacciari estime que l'Europe, depuis la plus haute anti­quité, depuis les guerres puniques et depuis l'Asie ionnienne, porte en elle les germes de l'instabilité et les stigmates de l'insécurité dans son rapport avec son propre destin.

Selon Cacciari, depuis sa naissance et dans l'esprit hellénique le plus pur, l'évolution du continent européen s'est faite de façon conflictuelle, au travers d'une série de divisions philosophiques, religieuses, politiques, économiques et territoriales. La volonté de réduire le degré conflictuel des forces antagonistes en les réconciliant et en les harmonisant a provoqué à contre-courant le déferlement des puissances destructrices qui résultent de l'intériorité européenne. A travers une dé­marche dichotomique, Cacciari analyse, dans une perspective pan-européenne, les binomes, les bipolarités de la guerre et de la paix, de la mer et de la terre, de l'Est et de l'Ouest, du droit et du déracinement. Imprégné de la pensée de Machiavel, de Carl Schmitt, de Platon, de Saint-Augustin, de Nicolas de Cues, de Simone Weil et de Martin Heidegger, l'auteur se livre à un dialogue érudit entre la sagesse antique-tragique gréco-romaine et le réalisme politique des temps modernes.

C'est ainsi que Cacciari nous restitue à travers les luttes qu'a connues l'Europe depuis la guerre contre les Perses et contre l'Asie ionnienne, le sens antique de la notion hellénique de l'Agon Eskhatos. S'inspirant de l'idée de “Mythos”, exposée dans le Phèdre de Platon, il nous rappelle que la paideia grecque constitue l'Agon, la lutte entre forces opposées dans le cadre d'une structure unitaire et harmonieuse de l'âme. L'Agon, de par sa nature, tend à unifier, harmoniser. Chaque lutte consti­tue substantiellement un effort vers l'unité, un conatus vers l'harmonie; chaque lutte, chaque combat commence avec l'espérance de vaincre, mais triompher signifie aussi “rappeler”, convertir et unifier l'ennemi à soi. C'est pourquoi les luttes et les conflits n'ont de véritable signification que dans la mesure où elles s'orientent vers la création et la découverte d'une certaine unité et d'une harmonie.

 

Cacciari analyse les divergentes conceptions structuralistes de la Cité chez Platon et Aristote. Selon Aristote, la politeia de Platon reste utopique et donc irréalisable car elle porterait en elle la perfectibilité de l'unité, ce qui est impossible. Au con­traire, selon Aristote, la Polis  est, de par sa nature, plurielle et différentielle. La Polis, la Cité, ne constitue pas la réunion d'éléments identiques, mais, au contraire, repose sur la diversité de ses composantes, qu'il convient de sauvegarder. Mais, selon Cacciari, les analyses platoniciennes de la Polis, du droit et de l'État restent étonnement ac­tuelles et réalistes. Selon Platon, les États sains formaient des entités dans lesquelles vivaient en parfaite harmonie les hommes sous la conduite bienveillante des dieux. Les dieux assuraient à chacun la fertilité et la descendance (genos), la paix (eirénè) et la piété (pietas/aidos), de bonnes lois (eunomia) et la justice (aphthonia dikes).

 

La sagesse des dieux enseignait qu'aucun être humain n'était capable d'administrer avec un pouvoir illimité l'ensemble des affaires humaines sans tomber dans l'écueil de l'orgueil (hybris)  et de l'injustice. Dans les temps où les dieux assuraient la conduite des affaires humaines, il n'y avait pas de place pour le polemos et la guerre (stasis). C'était le règne de la paix in­finie, eirénè. Mais cet Etat sain excluait la notion de Polis  puisqu'il régissait organiquement la cohabitation de familles qui n'étaient pas sous l'impulsion de la croissance et de la volonté de puissance qui sont au cœur de la notion de Polis. La Politeia, la structure de la Polis s'impose comme une problématique incontournable depuis que les hommes ont cessé d'obéir aux préceptes sacrés et divins et depuis qu'ils ont abandonné la santé et l'harmonie divine. La Polis qu'il convient de structurer est, de par sa nature, guerrière, et ses défenseurs seront nécessairement des guerriers.

 

Toute la construction conceptuelle grecque et platonicienne du Roi-philosophe repose sur l'idée que la Polis  intègre en soi l'état de guerre permanent. Le philosophe-roi platonicien est en même temps polemikos dans la mesure où il devra former et structurer la Polis. Au contraire, la guerre civile, la stasis, détruit la Polis et constitue une négation de l'idée politique au sens éthique et aristotélicien. La philosophie pratique, de même que celle d'Aristote, accepte la pensée platonicienne en vertu de laquelle la guerre civile constitue la destruction et la fin de la Polis.  Plus tard, les héritiers authentiques de cette pensée platonicienne, comme Machiavel et Marx, accepteront et intégreront dialectiquement, dans la théorie et dans la pra­tique, la guerre civile comme source de toute décision et de toute constitution politique.

 

Dans cette perspective, Cacciari dénonce les effets dévastateurs et pernicieux des stasis, des divisions idéologiques qui ont sapé les bases de l'unité organique et hiérarchique de la Polis  européenne. S'inspirant des thèses géopolitiques et politico-juridiques de Carl Schmitt, fondées sur l'opposition terre-mer, de l'antagonisme entre, d'une part, les forces thalassocra­tiques anglo-saxonnes apatrides et niveleuses et, d'autre part, les forces continentales européennes, Cacciari nous rappelle que, contrairement à la conception aristocratique européenne du politique et de l'Etat, les thalassocraties imposent les formes politiques démocratiques et annoncent l'avénement du règne de la quantité. Selon la constitution athénienne, la pri­mauté sur les mers exige que le commandement revienne au peuple (demos)  qui met en mouvement les bâteaux. Il s'agit pour Cacciari du démon de la tekhne nautiké,  du règne des pirates colonisateurs qui reculent indéfiniment les murailles de leur propre terre, et qui, en conséquence, ne sont pas liés organiquement et charnellement à une terre véritable et ne possè­dent pas d'enracinement tellurique.

 

Cette engeance thalassocratique naît déracinée et a une vocation quasi inéluctable à déraciner. Selon Cacciari, les thalas­socraties anglo-saxonnes transportent au-delà des océans la destinée européenne de la primauté sur les mers. Cette gran­diose translatio imperii  qui est au cœur du rapport entre la puissance et la mer, de la mer et de la guerre, a déjà bien été élucidée par Hegel dans son statu nascendio. Le nouveau monde, l'Amérique, auquel ont songé tous les marins et les navi­gateurs, est dénué de tout ancrage et de stabilité spatiale; il constitue une chimère à laquelle encore aujourd'hui bien des gé­nérations continuent à croire. Ces thalassocraties anglo-saxones personifiées en l'Amérique et l'Angleterre nous font dé­couvrir une nouvelle forme de bestialité barbare qui détruit toute forme d'ethos et d'oikos. Pour Hegel, l'Amérique consti­tuera une sorte de rajeunissement barbare de l'ancien monde hérmétique et tellurique, renfermé sur lui-même. Mais pour Cacciari, les thalassocraties ne triompheront pas dans la mesure où il place la terre au même niveau. La primauté du pou­voir reviendra à celui qui gouvernera d'en haut sur “les antiques demeures”. Le survol métaphorique de la mer devra deve­nir une réalité tangible.

 

Pour Cacciari, le “gai savoir” de Nietzche témoigne de la même destruction de la terre, de l'identique déracinement de l'ethos et du nomos. La prolifération de l'esprit moderne vers l'ouest et les Etats-Unis représente l'avénement de ce qu'Ernst Jünger définissait par le terme de Mobilmachung  et de ce que Nietzsche dénommait moderne Unseuche  et de ce qu'il qualifiait dans son livre Humain trop humain par l'abandon moderne de la serénité. Les différences raciales, les genius loci, les diverses identités sociales et les groupements “pluraux” seront dépassés et nivelés par l'indifférenciation, calque de la surface aquatique (aequon). Sur cette même surface se développe une vie nomade de laquelle surgira une nouvelle race metissée, insatiablement tournée vers les choses matérielles, toujours prêtes à partir, sujette à des contingences “à court terme” et sans foi (àpistos demos).

 

Pour Nietzsche, l'esprit nihiliste moderne et la maladie incurable de l'Europe résulte d'une massification prolifique, laquelle déracine et dénature les coutumes traditionnelles, abolit les frontières entre les peuples et impose l'indifférenciation du temps et de l'espace. Sous la férule du sacro-saint principe démocratique, féru d'innovation et d'expérimentation, se con­firme la liberté individuelle contraire à toute forme de sodalitas. Cacciari constate que, de la volonté de puissance politique qui ne tolère pas les frontières continentales, découle le processus de démocratisation. Et ce même processus porte en lui les germes de la décomposition de toute forme politique saine, au sens où les incarne le zoon politikon  aristotélicien. Ce processus exige une croissance permanente des revendications et des espérances multiples et promeut le nomadisme culturel et existentiel; il garantit en même temps la propriété paisible des biens matériels et l'indépendance égoïste et indi­vidualiste.

 

L'action et le fait historique sont érigés en idole et la praxis prend la place de l'homme (cette idôlatrie porte le nom moderne d'athéisme). L'Europe est au crépuscule de ses valeurs, de leur déracinement et de leur profanation, mais elle est aussi l'Ouest qui porte en lui le crépuscule de l'énergie intérieure qui se traduisait au travers des valeurs ancestrales comme un positum, une volonté intrinsèque. L'Ouest agonal des valeurs se confond avec le déclin de sa volonté de puissance et de primauté. Mais Cacciari, dans sa logique transversale, va transformer ce triste constat de la déliquescence européenne, qu'il traduit par la maladie héroïque de la volonté de primauté, en une figure tragicomique.

 

En effet, il nous rappelle que l'homme européen, hybride dans cet aspect morbide, s'est illustré à travers les comédies d'Aristophane et dans les moqueries de ce dernier vis-à-vis du monde. Avec un tel esprit de dérision, et un tel sens de l'humour, Nietzsche illustrera le discours de Zarathoustra aux guerriers (Ainsi parlait Zarathoustra,  I, de la guerre et des guerriers ) par l'aphorisme: l'homme est quelque chose qui doit être dépassé. Accepter et supporter le poids de ce lo­gos grave et pesant ne peut se faire sans l'appui de l'eironeia  grecque. Cacciari relie le dionysisme et la gravité d'un esprit libre en l'illustrant par la parabole nietzschéenne: «J'ai proclamé saint le rire, apprenez à vous rire de moi»; Mais ne rit véritablement que celui qui rit de soi-même. Cacciari nous renvoie à l'image du héros qui marque depuis des siècles l'inconscient collectif indo-européen, lequel est le créateur d'un espace métadimensionnel de l'homme.

 

Dans l'Etat de Platon, le philosophe-défenseur se devra de réconcilier en lui-même l'image du héros Minos avec l'image du héros guerrier, l'Aidos du sage et la brutalité et le courage du guerrier. Celui qui agit en qualité d'authentique guerrier maître de son destin se distingue du giron des coutumes et des habitudes, possédant son propre ethos  sur le fondement duquel se forme la sodalitas,  la fraternité du héros. S'inspirant de la pensée eschatologique chrétienne et sur le Bhagavd-gita indien, Cacciari nous renvoie à l'enseignement de Simone Weil, selon lequel toute force brutale et puissance destructrice est vouée à un phénomène d'implosion. Pour anéantir la force à l'état brut, il ne s'agit pas seulement d'aimer son ennemi mais encore de choisir son ennemi pour pouvoir l'aimer. Pourra seul se libérer de l'état de violence, la guerre dont l'âme s'efforcera de se sacrifier et de se nier, de se purifier de l'idée de chute.

 

Cacciari nous trace l'anatomie de l'univers nihiliste européen à travers les écrits de Nietzsche, l'idée de nomos  chez Carl Schmitt, le Nietzsche de Heidegger, de L'étoile de la rédemption de Rosenzweig. L'interrogation reste toujours d'actualité: mais d'où nous vient cet invité qui nous perturbe plus qu'aucun autre? (Dieser unheimlichste aller Gäste?  de Nietzsche): de l'époque tragique que traverse l'Europe avec l'affirmation absolue du nihilisme. Cacciari se rapporte aux thèses de Carl Schmitt, fervant défenseur du ius publicum europeaum  que la logique du nihilisme a toujours tendu à effacer. Le nomos et la historia de Schmitt se fondent sur la découverte et la connaissance des antinomies qui générent le nomos  européen de­puis ses débuts.

 

La décadence du nomos  européen traverse plusieurs phases successives: en définissant le rapport fondamental entre 1a notion d'ordre et de racine (Ordnung et Ortung),  la crise prendra de l'ampleur à l'époque globalisante actuelle, en incluant les quelques résidus du ius gentium,  et en produisant des groupements désordonnés et non normativisés (ein strukturloses Chaos),  un phénomène inflationniste d'accords contradictoires, éphémères, qui constituent l'actuel droit international. Dans le cadre de la seconde phase: dans la mesure où la notion de nomos  veut dire étymologiquement le partage (némein) d'un territoire, lequel est préalablement conquis, la transformation des rapports entre les faits d'ordre et d'espace devra se ré­soudre sous la forme d'une guerre. Comme le nomos, la guerre elle-même sera déracinée.

 

Lorsque nous parvenons à l'état de guerre mondiale, aucune forme politique rigoureuse n'est en mesure d'inscrire cette guerre dans le cadre de contraintes légales et de la définir en termes précis, en l'insérant dans les limites tangibles.. Toute possibilité de définir la iusta causa est vouée à l'echec; les caractéristiques du iustus hostis  et du rebellis  se confondent. L'allié et l'ennemi deviennent des positions qui tendent exclusivement vers l'accaparement du pouvoir. L'ennemi sera celui qui n'accepte pas l'arkhé  du plus fort. Dans le cadre de la troisième phase, l'Etat qui est le principal producteur de l'esprit européen, l'agent actif de la sécularisation, le liquidateur de l'antique nomos  et de ce que l'on a appelé la respublica chris­tiana  du moyen-âge, se fonde sur la neutralisation de la guerre civile et la rationalisation des échanges extérieurs.

 

Le nouveau ius gentium  sera fondé sur le droit souverain (ius)  de chaque Etat; on est passé du nomos  médiéval au droit international moderne contemporain en tant que droit régissant les rapports entre les États sur le fondement de textes et d'accords artificiels conçus pour un temps défini. Cacciari constate que le libéralisme économique, financier et commercial génère un “globale Zeit” (= un temps global) qui rentre inévitablement en conflit avec le positivisme juridique lié à l'Etat. Sans l'existence d'un nomos positivement ancré, tout droit subsiste dans un état de faiblesse. Il est impossible de réformer les structures étatiques et de concevoir un nouveau nomos  qui serait indéfini et sans forme, privé de tout espace et de li­mite de rattachement, ce type de nomos étant actuellement à l'œuvre dans une entreprise générale de déracinement de l'esprit européen qui ne connait aucune notion de limes.

 

Pour Cacciari, Schmitt est sans illusion quant aux chances de rétablissement d'un nomos  originel européen et d'un ius publicum europeaum  qu'on ne peut selon lui prévoir à l'avance et en faire la projection constructiviste. C'est pourquoi ce dernier dénoncera toutes les formes de romantisme politique et les utopies illuministes qui tendent vers la négation du poli­tique et visent la neutralisation généralisée, la “paix” éternelle. Schmitt se situe sur le méridien nihiliste et laisse le soin aux nostalgiques de s'auto-satisfaire de bavardages et de discours stériles sur les moyens de surmonter ce nihilisme. Il reste Reus  jusqu'à la fin, un invité indésirable. Cacciari insiste sur l'origine sacrée du nomos dans son rapport avec la Polis  et l'espace. En effet, il considère que l'enracinement du nomos dans l'espace de la Polis (Nomos Poleas) est la projection de l'image sacrée du nomos. Les hommes (nomoi)  ne garantiront la pérennité d'un ordre (Ordnung) que dans la mesure où il constitue un fragement du nomos  sacré. Leur origine commune les rattache à la dikè  sacrée. Dans cette perspective, se soumettre aux lois suppose la reconnaissance implicite de leur caractère sacré et de l'existence des dieux (nomizein theous). Sans le nomizein, on ne peut concevoir l'authentique nomos. Le nomos  n'a de signification que dans la mesure où il constitue en même temps un theios  et s'il porte en lui les traces d'un ordre sacré.

 

Les fonctions fondamentales du nouvel esprit européen

 

- Neutraliser la puissance eschatologique exceptionnelle, dont le droit positif est imprégné par la tradition chrétienne;

 

- faire taire les théologiens in murere alieno  avec pour conséquence la perte de toute haute justification de la guerre et de la conquête;

 

- soumettre les individus et les différents intérêts à un unique droit omnipotent, spatialement bien défini et délimité (s'arrogeant la faculté de légiférer en matière confessionnelle).

 

Voilà pour Cacciari les fonctions fondamentales du nouvel esprit européen, de l'Etat qui est un deus artificialis, le Creator par excellence de la paix et pas seulement le Defensor. Pour Carl Schmitt, Hobbes avait très bien cerné la profondeur de cet esprit. Car on peut déceler dans l'œuvre de Hobbes les germes de la maladie mortelle de notre époque. Une utopie est à la base de cet esprit et régit dans un sens progressiste la transformation des Etats en parfaites machines qui s'auto-diri­gent et s'auto-régulent, une machina machinarum  qui possède objectivement un pouvoir absolu puisqu'elle est totalement dépersonnalisée et dépolitisée.

 

Cette utopie constructiviste trouve ses origines dans l'idée du despotes nomos  et dont l'image des philosophes-défenseurs de Platon fut le signe précurseur. Pour Cacciari, tout Etat doit intégrer une certaine forme de pietas,  une âme propre sans laquelle il dégénerera en ce que Nietzsche appelait des monstres froids. Cacciari nous renvoie toujours à l'image antino­mique de la Terre et de la Mer. Selon lui, il convient de sauvegarder par tous les moyens la terre “ferme et sèche”, la iustissima Tellus,  de l'inondation océanique, des espoirs illusoires, des utopies, et des idées stériles qui forment son contenu. La raison continentale et fondatrice reste fortement ancrée; par opposition, la mer constitue un espace indé­fini d'idées privées d'ancrages et de repères sérieux.

 

Cacciari fait la critique du libéralisme politique qui transforme l'Etat en une unité de rapports juridiques, en une administration tentaculaire. Il rappelle néanmoins les limites et les faiblesses contemporaines de ce même libéralisme. La notion libérale de séparation des pouvoirs connait des revers considérables à notre époque. En effet, Cacciari observe un glissement flagrant, une délégation par les parlements de leur pouvoir législatif en direction et en faveur du pouvoir exécutif. D'autre part, les Etats-majors des partis politiques et les différents lobbys, sous le voile d'une activité parlementaire offi­cielle, usent de l'ensemble de leurs moyens de pression pour influencer et infléchir la position de ce même pouvoir exécutif en leur faveur. Aucune décision politique des démocraties parlementaires actuelles n'est plus créatrice de nouvelles consti­tutions (dans le sens originel de l'expression de la volonté populaire la Verfassung, l'ethos) car l'idée même de constitution est liée à un espace bien défini et reconnu, caractérisé par un “nomos territorial”.

 

Cacciari constate que la tendance générale actuelle de notre époque est tournée vers une unité globalisante. La dualité de la guerre froide d'hier ne fut qu'une étape transitoire vers cette unité, depuis la période de l'opposition idéologique radicale (Coup de Prague, Maccarthisme) jusqu'à la résolution de ce conflit concurrentiel pour le contrôle du marché économique mondial. Cette tendance vers l'unification globale constitue la forme actuelle du nihilisme européen. Les apolo­gistes de ce nihilisme le justifie par la fondation d'une nouvelle forme de “Léviathan” parfait, seul à même de neutraliser la barbarie des conflits idéologiques et procède au nivellement des valeurs et à la réduction des dangers politiques par des dé­crets administratifs.

 

Mais à aucune autre époque cette tyrannie des non-valeurs n'a été si forte. La logique de cette tyrannie est de tout rela­tiviser à l'exception du but ultime qui est la neutralisation globale des valeurs. Cacciari procède à une analyse des notions de tolérance et d'intolérance. Il considère que l'idée de tolérance antique et classique sous-jacente à la Paeidia eu­ropéenne n'a plus rien à voir avec la notion de tolérance de l'époque contemporaine. Selon lui, la tolérance de l'époque mo­derne est “sénile”. Elle a perdu la foi en elle-même, en son pouvoir unificateur et de cohésion, et compense cette perte par une aspiration vers une cohabitation et une paix universelles et cosmopolites. Cacciari se fait le chantre d'une harmonie du monde organiquement ordonné en insistant sur l'importance des poles de rattachement et d'union dans le respect de la diversité absolue.

 

En conséquence, il rejoint le projet de “paix éternelle” qu'a développé Ernst Jünger dans son livre La Paix,  fondée sur la concorde et la complémentarité des nations européennes. Se fondant sur l'enseignement mystique et eschatologique de Nicolas de Cues (De pace fidei),  Cacciari s'interroge sur le devenir de l'Europe. En partant du constat que l'Europe a toujours été la Terre de l'Æterna inquisitio,  elle devra, en guise de guérison, se construire et se concevoir en termes de communauté fondée sur l'amour de la différence et sur la diversité des expériences historiques et exis­tentielles.

 

En épilogue, Cacciari emprunte la métaphore du “coucher du soleil”, comme symbole de rédemption pour l'Europe. Ce coucher ne signifie pas de “s'arracher à soi-même” mais, au contraire, de se tourner vers sa propre profondeur, de laquelle on peut écouter et se soumettre au langage de l'infini suprême, en vertu duquel les éléments pluriels reconnaissent la né­cessité d'une interrogation propre et perpétuelle comme fondement d'une réflexion constante. Pour Cacciari, même si ce “coucher du soleil” pour l'Europe paraît inaccessible, alors cet inaccessible absolu constitue l'unique avenir de l'Europe.

 

Jure VUJIC.

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samedi, 14 juillet 2007

Retour de la "Communauté"

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Le Retour de la «Communauté»

Herbert AMMON

Herbert Ammon, né en 1943, est journaliste, écrivain et enseigne la sociologie et l'histoire au «Studienkolleg für ausländische Studierende» de la Freie Universität de Berlin. En 1981, à la suite de la grande exposition sur la Prusse à Berlin, qui a relancé le débat sur la nation, même et surtout à gauche de l'échiquier politique, il publie, de concert avec Peter Brandt, le fils de Willy Brandt, un volume à grand tirage intitulé Die Linke und die Nation, dont Orientations avait largement rendu compte dans son n°3 en 1982. Robert Steuckers avait à cette époque prononcé sur cet ouvrage capital et historique une allocution à la tribune du «Cercle Héraclite», réservée aux cadres du GRECE (Nouvelle Droite). Un clivage est né dans cette mouvance française, départageant ceux qui optaient pour une ouverture à cette gauche non-conformiste, dont Guillaume Faye, Jean-Pierre Patin (futur directeur du Partisan européen), Thierry Mudry, Patrick Jeubert, Ange Sampieru (qui avait commencé une ouverture aux gaullistes de gauche et aux auteurs des éditions «La Découverte») et, dans une certaine mesure, Pierre Vial, et ceux qui jugeaient cette ouverture inopportune, parmi lesquels, à l'époque, Alain de Benoist, qui se mit à répandre, avec l'humour particulier qui est le sien, la légende d'un “Steuckers trotskyste”, avant de parfaire au début des années 90 l'un de ces aggiornamentos dont il a le secret. Le texte de Herbert Ammon, que nous reproduisons ici, nous apparaît fondamental à plus d'un titre: paru dans Junge Freiheit, il révèle à un public conservateur un corpus doctrinal de gauche qui permet justement de transcender les clivages conventionnels et de retrouver intactes les valeurs du politique. A quatorze ans de distance, la quête d'Ammon et la quête de notre équipe présentent d'étonnants parallèles, une fraternité d'esprit évidente qui n'implique peut-être pas  —et heureusement—  une identité de vue sur bon nombre d'autres choses. Si en 1982, à la veille des grandes manifestations pacifistes et nationales, la redécouverte des linéaments de nationalisme dans les gauches allemandes étaient une nécessité théorique, en 1996, la défense et l'illustration des thèses communautariennes américaines sont également un impératif incontournable.

 

La société américaine a atteint les limites de sa crédibilité. Ce processus devrait être considéré comme irréversible s'il n'y avait pas ce fameux débat sur le “communautarisme”, où nous voyons surtout des sociologues et des philosophes du social, issus des rangs du libéralisme et de la gauche, qui affirment paradoxalement leur préférence pour la communauté. Les communautariens ont développé au cours de ces quinze dernières années une critique sociale, actuelle, de cette société libérale dominante et établie qui devient, elle, toujours plus incompréhensible, impénétrable, toujours plus abstraite dans ses lois et ses réglements pour l'individu moyen. L'aliénation croît sans cesse entre le citoyen et l'Etat, disent les communautariens, car la société se présente au citoyen moderne comme toujours plus médiate et éloignée: elle ne se présente plus en effet sous la forme d'une communauté solidaire vécue au quotidien mais comme un flot ininterrompu de lois, de réglements, de directives qui réduit le sentiment d'appartenance de beaucoup de citoyens au niveau d'un univers de papiers abstrait; la société n'est plus une forme de gestion autonome concrète, surtout locale ou régionale, mais le reflet monochrome d'un centre éloigné émettant les décisions des cours suprêmes ou celles d'organes administratifs qui n'ont pas grand' chose à voir avec la vie locale.

 

De cette façon, les instances telles les cours de justice, les ministères et les administrations, créées au départ pour défendre les intérêts des citoyens, deviennent, sans doute sans le vouloir, des obstacles à la démocratie. Cela prouve, disent les communautariens, que la démocratie, en tentant de résoudre les conflits au départ d'un centre et surtout au départ d'un système de droit fortement charpenté, butte sur ses propres limites et provoque une crise d'identification entre le citoyen et l'Etat.

 

Certes, la “gauche” de notre pays pourra dire, à juste titre, que le débat américain opposant le “libéralisme” à la “communauté” est un débat propre à la gauche américaine  —soit au sens le plus large, un débat qui se déroule à l'intérieur même du liberalism  américain. Mais il s'agit surtout d'un débat philosophique sur la justification idéelle et ultime de la démocratie; ensuite, les thèses communautariennes se posent comme une approche résolument critique de l'état de la société américaine contemporaine.

 

Commençons par clarifier l'enjeu pour le lecteur allemand: le liberalism plonge ses racines dans la tradition américaine du pragmatisme, dont le credo a été formulé jadis par le philosophe et pédagogue John Dewey: «Le médicament pour guérir les lacunes de la démocratie, c'est “plus de démocratie”».

 

Les liberals  américains, dont la parenté idéologique avec la social-démocratie européenne est mise en exergue par Michael Walzer, croient à l'imbrication des droits civils et de la responsabilité sociale. En revanche, lorsque nous entendons, dans les rangs des gauches européennes, comme par exemple dans un memorandum du groupe FDP de Berlin, où il est question de “déconstruire l'Etat”, de réaliser des privatisations dans les secteurs publics, de chanter les vertus curatives du sacro-saint marché, nous avons affaire à une gauche (certes très modérée) qui revient aux bonnes vielles recettes du libéralisme économique. Pour des oreilles américaines, ce programme ne serait pas de gauche mais serait conservateur, une sorte de mixte entre les reaganomics et cette idéologie individualiste de la prestation, assortie de rhétorique patriotarde.

 

Or c'est justement contre cette “tyrannie du marché” que s'insurge le manifeste communautarien d'un groupe de Berkeley dirigé par le professeur de sociologie Robert N. Bellah: «La puissance du marché conquiert... avec une vitesse sans cesse croissante toutes les sphères de la société, même la famille, bastion traditionnel de repli quand on ne s'y retrouve plus dans le “monde sans cœur”». Effectivement, quand l'idéologie dominante est exclusivement rationaliste, économiciste et téléologique, on voit les hommes se transformer en maximisateurs du marché et on sape leur engagement naturel pour leur famille, leur communauté religieuse, leurs voisins, leurs écoles et aussi, en bout de course, pour leur Etat et pour la société globale.

 

Indubitablement, nous avons là affaire à une critique sévère du moderne “American Way of Life”, à la domination du marché fait de brique, d'acier et de béton, à la fragmentation géographique et sociale de la société, surtout dans les immenses métropoles que sont Los Angeles ou Houston. Qu'on le veuille ou non, cette critique, issue de cénacles de gauche, ressemble à s'y méprendre à ces manifestes qu'éditent des cercles religieux-conservateurs, ou verts et anti-capitalistes. Le médicament que suggèrent ces auteurs pour guérir l'Amérique de ses maux n'est ni l'éco-socialisme ni l'éco-dictature, mais un retour réfléchi aux valeurs du liberalism  américain, à la famille, à l'école et à la communauté religieuse, sources vives de la démocratie américaine, située en-deçà de l'Etat.

 

Les communautariens proviennent d'écoles différentes: on repère ces différences d'après la provenance théorique et d'après le degré de radicalité critique à l'encontre de la société américaine actuelle. Mais ils sont tous d'accord pour dresser un diagnostic négatif sur l'ensemble de ces phénomènes connexes que sont la modernisation progressiste, l'individualisation et la mobilité sociale. Si la mobilité sociale a été considérée pendant longtemps comme la condition essentielle pour réaliser le rêve américain, Michael Walzer rompt avec cette convention: il énumère quatre mobilités typiques qui concourent à la déperdition complète du sentiment communautaire et au sens de la responsabilité à l'égard de la communauté. Ces mobilités dissolvantes sont la mobilité géographique, la mobilité sociale, la mobilité matrimoniale et la mobilité politique, c'est-à-dire, un processus de régression constante de la loyauté à l'égard des personnalités politiques dirigeantes, à l'égard des partis établis et des institutions.

 

Question: comment l'accent mis sur le lien communautaire peut-il s'harmoniser avec les autres valeurs de l'Amérique, telles la liberté individuelle de décision, la volonté de travailler, l'égalité des chances pour l'individu dans la quête de son propre bonheur, la liberté au-dessus de tout lien avec une tradition ou une institution? La force de la démocratie américaine ne repose-t-elle pas sur la puissance intégratrice de la société américaine qui est une société d'immigrants, ne repose-t-elle pas sur le concept de contrat social, qui est presque toujours interprété de manière a-historique?

 

La critique véhémente que formulent les communautariens vise la doctrine du libéralisme pur qui, à la suite de John Locke et de sa conception contractuelle de l'Etat, voit l'ordre politique de la communauté populaire comme reposant sur l'intérêt particulier des individus. Le philosophe John Rawls, dans A Theory of Justice (1979)  —un livre qui allait lancer le débat sur le communautarisme—  justifiait encore, au fil de ses arguments, la nécessité d'un équilibre social et d'une stabilité de la communauté populaire, tous deux fruits de la résultante des décisions des individus, décisions prises après un calcul rationnel comparatif des avantages et des inconvénients. Aujourd'hui, les communautariens critiquent âprement cette théorie justificatrice de l'action politique, théorie qui est purement calculante, pragmatique, rationnelle et éloignée de toute valeur supérieure; cette théorie est celle de l'Etat purement “occidental”: les obligations du citoyen à l'égard de la communauté nationale sont perçues comme purement abstraites et, de ce fait, ne suffisent pas à ancrer leur responsabilité politique et sociale. Un Etat qui n'existe que pour garantir les conditions extérieures de l'épanouissement (économique) individuel et ne cherche jamais à susciter et à ancrer de la solidarité dans la communauté, ne pourra jamais imposer à ses sujets de s'identifier à lui. D'où une autre question: qu'est-ce qui maintient une société de l'intérieur?

 

Pour les communautariens, ces critiques sont évidentes: Amitai Etzioni est le premier à les partager et à les revendiquer. Etzioni est né à Cologne sous le nom de Werner Falk. Plus tard, il est devenu un disciple de Martin Buber. Aujourd'hui il est philosophe et sociologue. Avec tous les autres communautariens, il critique sévèrement l'égoïsme libéral de la pure société de marché, en l'occurrence le néo-libéralisme de l'Ecole de Chicago, patronnée par Milton Friedman. Leurs thèses, pourtant bien ancrées dans les corpus doctrinaux de la gauche, sont ressenties comme de parfaites provocations par les libéraux de gauche allemands, dont la schizophrénie idéologique est notoire et qui prêchent, eux, un constitutionalisme “post-national”, en évoquant les dangers du nazisme et en déduisant de l'histoire nationale allemande la notion d'une culpabilité ineffaçable, d'une responsabilité germanique pour tous les maux qui affectent la planète. Alasdair MacIntyre et Charles Taylor développent des idées radicales contraires à celles de ces gauches anti-nationales allemandes.

 

«Le patriotisme est-il une vertu?». C'est par cette question que MacIntyre entend bien mettre en exergue le dilemme que pose le libéralisme: comment, dans l'Etat libéral, peut-on mettre fin aux conflits d'intérêts qui s'avèrent destructeurs? Réponse: soit en appellant à une vision supérieure, en exhortant les citoyens à reconnaître une communauté d'intérêt transcendante et axiologiquement neutre, soit en imposant par la force et l'arbitraire une solution ponctuelle. Si l'on choisit d'imposer une solution par la coercition, on transforme automatiquement l'Etat libéral en son contraire, en un “Léviathan”. Et que doit-il se passer en cas de conflit extérieur? Contrairement au pacifiste allemand moyen, MacIntyre ne peut imaginer une communauté politique sans forces armées, capables d'assurer une “sécurité minimale”. Mais les bons soldats ne peuvent pas être des libéraux, leur morale est impensable sans patriotisme. MacIntyre admet, sans ambages et sans recourir à des circonlocutions, que le patriotisme  —motif d'action particulier—  possède une toute autre substance que le pathos humanitariste et universaliste.

 

MacIntyre cite en exemple l'attitude du résistant allemand patriotique Adam von Trott zu Solz, car son patriotisme repose sur des valeurs humanistes liées à sa propre patrie, ce qui n'est pas la même chose qu'une volonté d'agir selon des critères purement éthiques et universalistes, dont le slogan de base serait “agis toujours dans le meilleur intérêt de l'humanité”. Trott zu Solz incarnait le dilemme de la résistance allemande: il voulait éliminer un dictateur et un régime qu'il jugeait criminel, mais, en même temps, il voulait maintenir le Reich allemand, assurer sa survie. Par nécessité, il agissait en tant que patriote pour provoquer l'effondrement du régime mais, en même temps, toujours par patriotisme, il servait partiellement ceux qui gérait l'Etat en déployant des pratiques criminelles.

 

MacIntyre termine son plaidoyer pour un patriotisme communautarien en remarquant très justement la teneur du patriotisme américain: pour beaucoup de citoyens des Etats-Unis, la cause américaine et la cause de la morale sont toujours identiques. Heureuse Amérique...

 

MacIntyre enseigne la philosophie à l'Université catholique Notre Dame dans l'Etat d'Indiana. Son collègue Charles Taylor enseigne à Montreal et est originaire du Royaume-Uni. Tous deux ont un passé marxiste et se reconnaissent aujourd'hui dans la tradition catholique de leurs parents et ancêtres. Mais tandis que MacIntyre fait dériver son patriotisme communautarien de la tradition catholique, jusnaturaliste et thomiste, Taylor inscrit son plaidoyer pour le patriotisme  —dont il n'ignore pas les abus et les perversions possibles—  dans une filiation intellectuelle plus vaste partant de Hannah Arendt pour revenir à Tocqueville, Montesquieu, Machiavel et Aristote.

 

Taylor constate que la tradition classique de l'Occident considère que le but de l'action politique est le Bien. Elle est par conséquent en contradiction avec l'éthique principale de la société libérale qui veut atteindre le Juste, en l'imposant par une bureaucratie toujours plus tentaculaire. Le “Bien Commun” et la “Liberté Générale” donnent une impulsion au citoyen qui s'identifie alors à sa Cité (Polis) et n'impliquent nullement l'obligation a-politique de vénérer des principes universels. Taylor évoque ensuite le motif historique que l'on peut répérer dans toute l'histoire: «Le lien de solidarité qui m'unit à mes compatriotes se base sur la conscience d'un destin partagé et sur le constat que l'on donne, lui et moi, un sens identique aux choses, où justement la notion de partage constitue également une valeur».

 

Les communautariens insistent sur la dimension historique, en opposition à la conception utilitariste de la société, et, par suite, soulignent la nécessité de l'aspect narratif des récits fondateurs et aussi la nécessité de s'imbriquer dans une continuité historique, assise de l'existence politique de la cité. (...)

 

Le débat sur le communautarisme soulève encore bien d'autres questions, que devrait aussi se poser la société allemande: peut-on transposer le modèle démocratique proposé et défendu par les communautariens américains dans notre pays, éprouvé par deux guerres perdues en ce siècle et à la conscience historique tourmentée? Où les Allemands trouveront-ils les clefs historiques pour accéder à une véritable communauté politique? Où se déploie en Allemagne la “narration historique”, évoquée par Taylor? Dans les écoles? Dans les familles? Dans l'art? Sur le petit écran?

 

Le débat américain sur le communautarisme nous montre clairement que la société qui se veut la plus “progressiste” de la Terre vient de générer un corpus doctrinal et politique très éloigné des superficialités du multiculturalisme. C'est justement la trop faible cohésion de la société libérale à l'ère “post-nationale” qui réclame le retour de “liants” plus anciens et originels que le libéralisme qui, lui, ne repose que sur les mobiles abstraits et universalistes de la société bourgeoise.

 

Enfin, dernière question: à quel type de “communauté” faut-il ramener cette Union Européenne qui a remplacé à Maastricht la défunte Communauté Européenne? Et que pourrait bien signifier le “communautarisme”, c'est-à-dire l'effort d'obtenir le “Bien Commun”, dans des Etats-Nations de type européen, devenus contre leur gré des terres d'immigration? C'est peut-être d'Amérique que nous vient aujourd'hui la bonne réponse...

 

Herbert AMMON.

(article paru dans Junge Freiheit,  n°47/1994; trad. franç. : Robert Steuckers).

vendredi, 13 juillet 2007

Communautarisme américain

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Le retour de la «communauté» dans la pensée politique américaine

par Robert STEUCKERS

(intervention lors du séminaire de l'association «Synergies européennes» à Roquefavour en Provence en janvier 1995, à l'Université d'été de la FACE  en Provence en juillet 1995 et à la tribune du «Cercle Hermès» de Metz en Lorraine en février 1996)

analyse:

- Walter REESE-SCHÄFER, Was ist Kommunitarismus?, Campus, Frankfurt am Main, 1994, 191 p., DM 26, ISBN 3-593-35056-4.

- Martha NUSSBAUM, Gian Enrico RUSCONI, Maurizio VIROLI, Piccole Patrie, Grande Mondo, Reset/Donzelli editore, Milano, 1995, 64 p., Lire 8000, ISBN 88-7989-147-2.

- Charles TAYLOR, «Wieviel Gemeinschaft braucht die Demokratie?», Jerzy SZACKI, «Aus einem fernen Land. Kommentar zu Taylor», Otto KALLSCHEUER, «Individuum, Gemeinschaft und die Seele Ame­ri­kas», Bert van den BRINK, «Gerechtigkeit und Solidarität. Die Liberalismus/Kommunautarismus-De­batte», Susan M. OKIN, «Für einen humanistischen Liberalismus», in Transit/Europäische Revue, Nr. 5, Verlag Neue Kritik, Frankfurt am Main/Institut für die Wissenschaften vom Menschen (Spittelauer Lände 3, A-1090 Wien), Winter 1992/93, 190 p., DM 20, ISSN 0938-2062, ISBN 3-8015-0267-8.

Notre projet, tant dans le cadre de cette initiative paneuropéenne qu'est «Synergies européennes» que dans celui de l'UFEC, embryon de parti politique que nous activerons quand les temps viendront, est un projet “euro-communautaire” dans le sens où il ne voit pas d'autre avenir pour l'Europe que dans une prise en compte et une organisation des communautés vivantes qui structurent effectivement, sur un mode complexe et varié, la vie des peuples sur notre continent et non pas dans la création d'un gigantesque moloch technocratique ou dans la répétition stérile des formes politico-administratives sclérosées, propres à l'Etat-Nation du XIXième siècle.

Pourquoi avoir choisi ce terme de «communauté», alors même que le sens de ce vocable de la science politique et/ou de la sociologie peut varier considérablement d'une langue à l'autre et d'un contexte politique à l'autre? «Communauté» peut dési­gner effectivement un groupe d'hommes de même origine, vivant sur un même territoire ou pratiquant des activités écono­miques en interaction constante. Mais «Communauté» peut désigner aussi la partie d'un Etat bénéficiant d'un degré d'autonomie plus ou moins grand, dont les ressortissants parlent tous une même langue, souvent minoritaire ou minorisée, partagent une culture identique ou une confession déterminée; c'est notamment cette notion-là de «Communauté» qu'utilise le droit constitutionnel espagnol actuel, quand il a instauré son «Etat asymétrique de communautés autonomes», où les commu­nautés sont les entités basques ou catalanes, etc.; de même, le terme «communauté» désign(ai)ent aussi les instances euro­péennes mises en place à Bruxelles, Luxembourg et Strasbourg, au début du processus d'unification européenne.

 

Nous avons choisi ce terme parce qu'il recèle d'emblée une connotation sympathique, demeurant malgré tout contestatrice du désordre établi, tant à gauche, où il évoque la solidarité dans le combat social, qu'à droite, où l'on garde la nostalgie des “holismes” traditionnels qui ont précédé la blessure moderne et industrielle. Qui dit «communauté», qui fait de la «communauté» l'unité de base de sa pensée politique, parie de fait pour les hommes réels, les hommes de chair et de sang, de labeur et de créativité, contre les visions abstraites de l'homme, où celui-ci n'est plus qu'une unité dissocié d'un tout préa­lable, jugé obsolète et combattu comme anachronisme, ou un rouage d'une mécanique débarrassée de toutes valeurs et de toute mémoire. Le message des “communautariens” est universel en tant qu'il implique la défense de toutes les communautés d'hommes réels dans le monde, et qu'il implique ou devrait impliquer la volonté de généraliser ce principe à l'échelle du conti­nent européen et, par extension, du monde tout entier.

 

Pour bien cerner la signification du terme sociologique de «communauté», il convient au préalable de faire référence à des no­tions scientifiques bien précises, établies par quelques grandes figures de la sociologie moderne, voire de la philosophie:

1. Ferdinand TÖNNIES.

2. François PERROUX.

Tous deux nous ont livré la définition la plus scientifique et la plus précise du terme «communauté» dans le contexte européen. Malheureusement l'exploration et l'exploitation de leurs écrits s'avèrent de plus en plus problématiques et de moins en moins médiatisables, surtout dans l'espace linguistique francophone où le recul de la culture et l'effondrement de l'enseignement ne permettent plus d'aborder des corpus scientifiques complexes. Raison pour laquelle, dans le contexte actuel, il nous paraît ur­gent de faire systématiquement référence aux «communautariens» américains qui ont abordé les questions «communautaires» dans un langage plus plastique et plus accessible, surtout dans un pays comme les Etats-Unis où il n'y a plus, depuis longtemps, de corpus classique dans les établissements d'enseignement et où la philologie classique n'a même plus l'importance qu'elle a vaguement conservée dans nos “humanités”. La médiatisation outrancière a obligé les intellectuels américains à une sorte de concision didactique, que nous sommes, nous aussi, obligés d'utiliser désormais.

3. Le nouveau débat inauguré par les COMMUNAUTARIENS américains, où bon nombre d'aspects de la notion de «communauté» sont abordés sous des angles chaque fois différents.

4. Un parallèle devrait être tracé, nous semble-t-il, entre la définition sociologique de la «communauté» (chez Tönnies et Perroux) et la définition religieuse qu'en donnaient Hauer (Das Gemeinde) et Buber (la dialogique du «Je » et du «Tu»).

Ferdinand Tönnies (1855-1936)

En 1887, paraît l'ouvrage scientifique majeur de Ferdinand Tönnies, Gemeinschaft und Gesellschaft, où il définit deux concepts fondamentaux de la sociologie moderne et les place en opposition:

 

a) La «communauté» (Gemeinschaft), regroupant des personnes de même origine, ayant entre elles des liens de sang ou des liens familiaux, partageant des sentiments communs et un destin commun, faisant appel à la mémoire. La «communauté» est en quelque sorte un élargissement du contexte familial et villageois traditionnel. Tönnies était en effet issu d'une commu­nauté de paysans et de pêcheurs de la côte occidentale du Slesvig-Holstein qui n'a jamais connu le servage et a maintenu in­tacts les ressorts de la vieille communauté traditionnelle germanique. L'aliénation moderne et capitaliste n'avaient guère eu prise sur ces sociétés, elles recelaient en elles les ingrédients d'une résistance efficace aux processus d'aliénation, qui méri­taient d'être maintenus et entretenus. La liberté collective implicite qu'elles incarnaient étaient un leg positif du passé, exem­plaire pour tous ceux qui, au contraire, avaient été jetés dans les affres d'une forme moderne d'aliénation. Par ailleurs, l'excès de communauté conduit à la répétition du même, en dépit des mutations du contexte environnant, et à la stagnation.

 

b) La «société» (Gesellschaft) dont le mode de fonctionnement est mécanique et purement utilitaire. Les excès de société conduisent à l'anomie, au désordre social et à la domination de tous les héritages par des flux incontrôlables, urbains et loin­tains. Dans cette optique, l'hypertrophie de l'existence urbaine et commerçante détruit toutes les solidarités profondes et finit par ruiner la notion même de peuple.

 

Toute l'ambiguïté du socialisme organisé en parti se repère dans cette dichotomie mise en exergue par Tönnies: en effet, le socialisme veut la solidarité, qui est intacte dans la Gemeinschaft, mais il sacrifie au mythe moderniste qui détruit les vec­teurs spontanés et irrationnels de cette solidarité, implicite dans la normalité communautaire.

 

Qu'est devenue la sociologie de Tönnies?

 

1. Elle a plu aux réactionnaires de droite, qui voulaient restaurer les holismes de l'ancien régime. Elle a plu aux pastoralistes de gauche, aux gauches utopiques, parce qu'elle semblait se démarquer des rigueurs et des horreurs de l'industrialisation (travail des enfants dans les mines, exploitation des femmes, absence d'hygiène de vie, etc.). Enfin, elle a plu aux mouve­ments de jeunes de droite comme de gauche, notamment le Wandervogel allemand et ses avatars ultérieurs, ainsi qu'à tous ceux qui oscillaient, indécis, entre la droite et la gauche.

 

2. Elle a déplu aux nationaux-socialistes, dont la propre notion de «communauté» différait considérablement de celle définie par Tönnies, dans le sens où elle désignait un ensemble beaucoup plus large, englobant tout le peuple allemand (voire tous les peuples germaniques), pourtant composé d'une multitude de communautés réelles, circonscrites dans des champs spatio-temporels ou socio-professionnels bien délimités. Cette hypertrophie de la «communauté» dans le contexte national-socialiste démontre le caractère non holiste de la définition nationale-socialiste de la «Volks-gemeinschaft»,  de même, elle révèle le projet fondamentalement moderniste dont cette pratique politique était porteuse, à la notable exception des associations pay­sannes, du moins jusqu'en 1942. L'utilisation d'une notion différente de la «communauté», le modernisme implicite du projet national-socialiste, et, face à cela, l'exception paysanne, font toute l'ambiguïté de ce régime en matière de praxis sociologique. Peu après la prise du pouvoir par Hitler, Tönnies, qui entend rester fidèle à son engagement social-démocrate, est privé de sa pension. Il meurt en 1936.

 

3. Elle a déplu aux marxistes, surtout aux intellectuels. Georges Lukacs condamne la sociologie de Tönnies comme “irrationnelle” et lui reproche d'avoir soutenu le “réformisme” au sein de la sociale-démocratie allemande, notamment le mouvement des “Genossenschaften” (des coopératives et des syndicats autonomes), car, affirme le théoricien hongrois du marxisme contemporain, ces “Genossenschaften” sont vectrices d'une re-communautarisation (re-holicisation) à l'intérieur même de la société capitaliste, alors qu'il faudrait une rupture totale et définitive, tant avec le capitalisme qu'avec les résidus de “féodalité” (ce dernier concept étant bien entendu flou et extensible). En fait, Lukacs reproche à Tönnies d'étendre les con­cepts jusqu'à les rendre “anti-historiques”, c'est-à-dire “romantiques” et “anti-scientifiques”. Lukacs prend là le relais de Marx et d'Engels quand ils condamnent les socialismes utopiques et quand ils s'opposent à Dühring qui avait cultivé, au sein du so­cialisme allemand, quand celui-ci n'était pas encore entièrement sous la coupe des marxistes, des notions vitalistes et non plus mécanicistes.

 

Que faut-il penser, ici, de ce concept d'“anti-historicisme” avancé comme une machine de guerre contre la sociologie de Tönnies, le mouvement des Genossenschaften  et les syndicats autonomes (parfois héritiers de vieux réflexes corporatifs)? Que la vision marxiste demeure prisonnière de préjugés modernistes et bourgeois, dans le sens où la bourgeoisie entendait se libérer de toutes les formes de carcans institutionnels traditionnels, pour laisser place au libre jeu incessant et dissolvant de l'économie, c'est-à-dire de son économie de classe. L'histoire pour les modernistes, les libéraux et les marxistes, ce n'est pas de construire, de défaire et de recomposer des institutions au profit du Bien commun ou d'ériger des garde-fou institution­nels contre la fluidité absolue de l'argent-roi, mais de participer à tous les processus de dissolution, y compris, en un certain sens, ceux du capitalisme, pour que plus aucune barrière ne puisse se dresser contre le “fluidisme” planétaire de celui-ci, surtout dans sa variante spéculatrice, comme nous le constatons depuis deux décennies. Le “progrès”, ainsi défini, est essen­tiellement négatif.

 

Sur le plan purement politique, la «communauté», tant qu'elle reste intacte, reste en-deça, en marge du capitalisme réel qui, lui, va accoucher, par dialectique, du socialisme définitif, contre lequel plus aucune institution ne pourra se dresser, vu qu'elles auront toutes été dissoutes.

 

4. La sociologie de Tönnies revient au grand galop aujourd'hui dans la sociologie universitaire américaine, qui tire les leçons de l'effondrement social aux Etats-Unis et de l'anomie qui frappe cette société, dans des proportions inégalées dans l'histoire. L'analyse sociale au départ de la dichotomie Communauté/Société est revenue en Amérique quand des sociologues se sont repenchés sur les différences sociologiques entre villes et campagnes. Depuis, le regain d'intérêt pour la «communauté» n'a cessé de s'amplifier et d'aborder la question sous tous les angles.

 

Mais une compréhension globale du nouveau «communautarisme» américain ne pourrait être optimale, à nos yeux, que si on replace la problématique toute entière dans le contexte de l'œuvre de Tönnies.

 

1. Tout comme Tönnies (et Carl Schmitt), les communautariens américains amorcent leurs réflexions au départ d'une récep­tion de l'œuvre de Hobbes et de sa théorie du contrat. Le contrat met un terme à l'“état de nature”, dit Hobbes, qui est un état de guerre de tous contre tous, où «l'homme est un loup pour l'homme», mais amorce par ailleurs —et quasi simultanément—  une rationalisation outrancière des relations et des comportements sociaux et, en parfaite concomitance, une neutralisation de toutes les valeurs cimentantes de la société. Hobbes reste celui qui a le mieux pensé la toile de fond tragique qui se profile derrière toutes les quiétudes politiques à l'œuvre dans l'histoire et qui a élaboré théoriquement les mécanismes (quasi eucli­diens) les plus efficaces pour contenir cette tragédie fondamentale hors de tout commonwealth humain; mais en dépit de ce mérite de Hobbes, il n'empêche que le contrat,  —surtout tel qu'il sera repris et transformé par Locke et, à sa suite, les con­tractualistes anglo-saxons—,  par la rationalisation pratique et la neutralisation axiologique qu'il implique, fait revenir, à l'avant-plan et au bout de processus plus ou moins longs, le tragique refoulé hors de la cité par le Léviathan, artifice voulu par le souverain et perçu au départ comme éminemment positif. A long terme, le contrat n'empêche pas —et même favorise—  la généralisation de l'anomie qui, elle, restaure les horreurs de la guerre civile, non plus entre factions politiques bien profilées, mais entre individus ou bandes d'individus sans projets de société cohérents, mus par leur seul désir d'acquérir illégitime­ment les biens d'autrui ou d'obtenir frauduleusement des avantages personnels.

 

2. Dans la formulation de sa théorie, Tönnies dit être fortement redevable au politologue, sociologue et “organologue” Albert Schäffle, notamment à son livre Bau und Leben des sozialen Körpers. Schäffle raisonne en termes organiques et biologiques, ne transforme pas le fonctionnement de l'économie et de la société en un jeu de purs mécanismes. Tönnies reconnaît sa dette envers les conceptions juridiques de von Ihering et à la politologie romantique et conservatrice d'Adam Müller (Die Elemente der Staatskunst), au marxisme et à l'école historique des économistes allemands (Rodbertus et Adolf Wagner). Ensuite, dans la genèse de son œuvre, il revendique l'héritage des théories de Bachofen et de Morgan sur le matriarcat, puis des hypothèses de Hearn (The Aryan Houshold), de Fustel de Coulanges (La Cité antique) et du juriste allemand Leist sur les socialités pri­mitives. La communauté, résume Tönnies, s'exprime par la famille, la vie villageoise morale et la vie urbaine religieuse. La société s'exprime par l'existence que mènent les hommes dans les mégapoles, existence fondée sur les conventions. Ensuite, par une vie nationale entièrement déterminée par la politique politicienne, puis, par une vie cosmopolite marquée par l'opinion publique, chapeautée par la “République des Intellectuels”.

 

La Communauté selon François Perroux

 

En 1942, François Perroux sort un opuscule définitionnel particulièrement bien charpenté, intitulé La communauté. Il précise la notion et complète de la sorte Tönnies. Perroux distingue:

 

1) La communauté amorphe, qui est une communauté résiduaire, survivant dans un monde entièrement dominé par le mo­dèle sociétaire. Le risque de voir disparaître tout dynamisme dans ces communautés résiduaires n'avait pas été très bien perçu par Tönnies et ses vulgarisateurs.

2) La communauté structurée selon les legs de l'histoire présente des hiérarchies efficaces. Cette communauté est efficace si elle est simultanément organisée, si un appareil organisé lui confère des règles, des règles juridiques qui reflétent dans une formulation abstraite l'essence communautaire de ces structures.

 

Le problème, déjà perçu par Simmel, survient quand il y a divorce entre structure et organisation. François Perroux écrit (p. 69): «Le divorce entre l'organisation et les structures des communautés se déclare, ..., quand le législateur part d'un sys­tème idéologique, d'un ensemble d'idées préconçues pour énoncer les règles sociales, établir les découpages territoriaux et professionnels, construire les appareils de commandement et d'administration. Il n'épouse pas alors avec délicatesse et sou­plesse les contours du réel. Il prétend plier le réel à un moule idéologique et abstrait». En résumé, la société prend le pas sur la communauté et sur les structures communautaires quand l'organisation se détache de l'héritage communautaire. François Perroux démontre qu'il y a deux façons de s'en détacher: a) on passe à une organisation proprement sociétaire qui impose la contrainte (l'imperium), le commandement par l'injonction ou par la loi; b) on passe à une organisation associationniste, centrée sur le contrat entre des libres volontés qui s'entre-limitent et procèdent à des jeux détachés des flux réels et charnels de l'existence.

 

La revendication communautaire s'oppose à ces deux modèles, coercitif et cattalexique, en se fondant sur un consensus. Perroux explique (p. 70): «Une organisation est communautaire pleinement, une organisation exprime et valorise une com­munauté lorsqu'elle fait appel aux ressorts psychiques de cette communauté et en épouse autant qu'il est possible les struc­tures spontanées. Il faut donc qu'elle ne contrarie pas, mais bien plutôt qu'elle favorise la fusion des activités et des cons­ciences (...). Il faut aussi qu'elle ne mette pas en péril, soit en l'anéantissant, soit en la bureaucratisant, la hiérarchie des fonc­tions et des situations complémentaires de la communauté». Pourquoi Perroux valorise-t-il l'organisation communautaire? Parce que l'homme, dit-il, est homme s'il a un rôle historique, s'il est une personne, c'est-à-dire un acteur sur la scène de l'histoire [de sa Cité]. Cela implique: a) qu'il soit une partie consciente et active dans un ensemble; b) qu'il soit une force qui s'exerce durablement dans un sens déterminé au cours d'un drame (qui est l'histoire de sa communauté ou de son peuple). La personne humaine, dans la perspective communautaire selon Perroux, se définit dans le drame humain (dans l'histoire). L'individu qui ne suit que sa fantaisie, qui cède aux pressions de l'instinct ou aux calculs de l'égoïsme ne joue pas un rôle: il reste en marge du drame permanent qu'est sa communauté.

 

Deux conceptions du rôle historique de l'homme communautaire existent:

 

1. L'homme communautaire-historique adhère à des valeurs et veut les incarner dans l'histoire. Soit il réussit et modèle alors les communautés selon les canons des valeurs qu'il a choisies. Dans l'absolu, ces valeurs, avant d'être incarnées, sont en marge des communautés réelles. Mais les valeurs sont éternelles et si elles ne sont pas incarnées par l'élite de telle commu­nauté, elles seront incarnées demain par celle d'une autre communauté. Pour Perroux, qui révèle là son héritage catholique, adhérer à des valeurs, ce n'est pas se soustraire au drame de l'histoire, mais au contraire se mouler dans ce drame et donner aux valeurs un ancrage spécifique, non interchangeable.

 

2. L'homme communautaire-historique choisit de jouer un rôle dans la pure immanence, soit dans la lutte des classes (communisme), soit dans la lutte des races (national-socialisme). Le risque, quand on s'enferme dans de telles luttes, c'est d'éteindre ou d'œuvrer à éteindre les dynamiques et les échanges qui demeurent même dans l'antagonisme; on se ferme à tout dialogue sur base de valeurs communes, existant de part et d'autre de la ligne de front, éventuellement sous d'autres mo­dalités.

 

Le débat américain actuel sur le communautarisme

 

Le débat actuel aux Etats-Unis ramène sous les feux de la rampe la notion de communauté, refoulée depuis quelques décen­nies hors du champ de la sociologie universitaire.

 

Si le débat est actuel, la maturation de définitions nouvelles de la communauté, les approches conceptuelles innovantes en cette matière, sont à l'œuvre ou se forgent depuis assez longtemps: Michael Sandel a développé une critique de l'égoïté dé­liée, Charles Taylor une critique de l'individu atomisé, Alasdair MacIntyre a conceptualisé un système complexe faisant appel à l'esthétique, Robert Bellah revendique une logique du cœur, Ben Barber réhabilite la notion de commune, Martha Nussbaum a construit un “aristotélisme social-démocrate” et Michael Walzer a œuvré à revaloriser les “sphères de justice” subsistant dans nos sociétés.

 

Pourquoi ce renouveau?

 

1. Parce qu'il est devenu urgent de développer une critique générale devant les dégâts sociaux causés par l'atomisation ou­trancière de la société américaine actuelle: les hommes y ont perdu tous référents.

 

2. Cette perte de tous référents fait qu'il est impossible de maintenir une démocratie viable sans vertus civiques.

 

3. S'il n'y a plus de vertus civiques, si celles-ci ne peuvent plus s'exprimer, il n'y a plus de liens, donc plus de valeurs, dans la société. Liens et valeurs, constatent les communautariens, ne peuvent pas être générés par des codes moraux abstraits qui demeurent largement incompris et inaccessibles au commun des mortels. Restaurer les vertus civiques implique donc de refaire appel au vécu, aux valeurs réellement vécues, aux comportements traditionnels. Le philosophe ou le sociologue qui entend défendre sa Cité et/ou sa famille ne peut dès lors plus partir d'“idées générales” mais seulement de “cas concrets”.

 

Cet abandon nécessaire des idées générales postule une réorientation complète du débat et implique un dépassement de la di­chotomie gauche/droite. En effet, dans leur souci de restaurer des valeurs civiques dans la société américaine, les commu­nautariens ont été obligés de sortir des sentiers battus d'une sociologie qui n'avait exploré que des filons de gauche. La né­cessité d'innover les oblige a procéder à une fertilisation croisée (cross-fertilization)  des discours de la droite et de la gauche, dans le sens où celles-ci s'opposent toutes deux au libéralisme, idéologie dissolvante des liens unissant les hommes. Une nouvelle opposition se dessine à l'horizon: la gauche axiologique et la droite axiologique (Wertkonservativismus)  s'opposent désormais de concert au libéralisme, idéologie dominante dans les sociétés occidentales qui a généré une permissivité incon­trôlable.

 

La critique de Michael Sandel

 

Michael Sandel a commencé sa quête en voulant “remoraliser” la société sur base d'un ouvrage fondamental, qui fit beaucoup de bruit aux Etats-Unis il y a dix-sept ans, en 1979, A Theory of Justice de John Rawls. Cet ouvrage dès sa parution a connu un grand succès, hélas vite éclipsé. Il n'est revenu à l'avant-plan qu'après la parenthèse reaganienne et néo-libérale. Rawls, puis Sandel, sont partis d'une réévaluation de l'œuvre de Hobbes. La convivialité, le consensus ne sont plus menacés au­jourd'hui par l'Etat de Nature mais par des conflits d'intérêts, qui ont pour objet la redistribution. Ces conflits permanents rui­nent en bout de course les ressorts coopératifs de la société. Pour remettre en état ces ressorts coopératifs, il faut créer des normes pour aboutir à une justice fondée sur la fairness. Mais qui dit “normes”, dit retour à la philosophie normative, reje­tée dans les pays anglo-saxons à la suite de l'empirisme logique et de “la philosophie du langage quotidien” d'Oxford. Dans cette optique, les jugements de valeur n'exprimeraient aucune réalité. Les valeurs sont donc évacuées. Elles découleraient d'anomalies et d'ambiguïtés de langage et, de ce fait, toute philosophie s'occupant de normes ou de valeurs serait considérée comme vide de sens. Rawls dénonce cette variante du libéralisme idéologique, plus en vogue chez les conservateurs que dans la gauche anglaise et américaine. Sa dénonciation a provoqué deux réactions:

 

1. Première réaction: la défense et l'illustration de normes rationnelles universellement valables, lesquelles seraient les va­leurs intangibles et indépassables du libéralisme, idéologie dominante. Telle sera l'option de Nozick (Anarchy, State, Utopia, 1974) et de Buchanan. Nozick s'inscrit dans la tradition de Locke: il existe, affirme-t-il, des droits naturels donnés une fois pour toutes; seuls les Etats en conformité avec ces droits naturels sont légitimes. Ces Etats sont des agences protectrices de ces droits fondamentaux définis une fois pour toutes. Tel est le nouveau rôle dévolu à l'Etat minimal des libéraux. Toujours dans cette optique nozickienne, les modèles particuliers de redistribution sont illégitimes et doivent être combattus. La critique des communautairens à l'égard de cette réaction “fondamentaliste” occidentale s'articule autour de trois questions: a) Où est la justification ultime de ces droits fondamentaux? b) L'affirmation de l'illégitimité des modèles particuliers de redistribution ne conduit-elle pas à la destruction de toute sphère publique? c) La destruction de toute sphère publique ne conduit-elle pas à l'absoluisation du marché et à la mort du politique? Les communautariens, à la suite de Sandel, s'opposent ainsi à tout cons­tructivisme méthodologique (ce qui pourrait être considéré comme une interprétation non libérale et non individualiste de Hayek) et s'opposent aussi à toute anthropologie qui manipule des modèles détachés de l'histoire ou de toute autre concrétude sociale.

 

MacIntyre et Taylor partagent cette critique de Sandel. Qui a imméditament eu des retombées militantes: elle a aidé les éco­logistes à formuler une éthique écologique; elle a permit de conceptualiser l'idée d'un contrat entre les générations; elle a con­solidé le mouvement de “désobéissance civile”. Examinons cette critique de plus près. Sandel demande: où se trouve le fon­dement concret de cette option communautarienne pour la justice (Rawls) et la fairness? Il répond: dans la communauté des hommes et non pas dans un discours comme chez Nozick et Buchanan. Car ceux-ci procèdent à une réduction de la philoso­phie politique à un simple énoncé de normes et à une simple justification de ces normes énoncées. Et si l'on pose la question de Carl Schmitt aux partisans d'une philosophie politique similaire à celle de Nozick, quis judicabit?  Qui juge? Ou, plus exactement: qui énonce les normes? Il n'est pas difficile de répondre à cette question dans le contexte actuel: les media. Mais ceux-ci n'ont aucune légitimité démocratique. Comme l'énoncé des normes sociales et politiques est laissé à quelques “prêtres” médiatiques et médiatisés, et non plus à la communauté des hommes réels de chair et de sang, imbriqués dans les flux réels de la vie et de l'économie, nous assistons à un appauvrissement graduel et à une hyper-moralisation de la pensée politique. Le risque est alors celui du solipsisme permanent, du détachement par rapport au drame concret.

 

La critique de Charles Taylor

 

La critique de Taylor est également, au départ, une critique des positions de Nozick, en qui il voit la quintessence de l'atomisme social. Taylor avance deux arguments majeurs: 1. Premier argument: aucune tradition philosophique classique ne pose l'homme comme un individu isolé. Pour Aristote, l'homme est par nature un zoon politikon, qui ne jouit pas d'une pleine indépendance, qui n'est pas totalement détaché des autres hommes et n'est jamais auto-suffisant. Taylor réclame là le retour à un filon fécond, celui qui part d'Aristote, passe par Thomas d'Aquin pour aboutir au Romantique Adam Müller et à Othmar Spann. Dénominateur commun de ce filon, mis en exergue par Spann en son temps: aucune sociologie n'est possible avec la méthodologie individualiste; l'universalisme (selon Spann et non pas selon les tenants de l'individualisme et du libéralismes absolus qui sévissent à Paris depuis une quinzaine d'années) insère l'individu dans un ordre supérieur, qui est l'ordre naturel.

2. Deuxième argument: l'individualisme absolu conduit au paradoxe; l'individu peut effectivement dire: “j'ai des droits: pour les faire valoir, je dénie à mes concitoyens, à mes prochains, et même à mes descendants le droit d'exercer leurs droits si ceux-ci me contrarient; cependant, pour faire valoir les leurs, ils peuvent me dénier le droit d'exercer les miens”. D'où droits et devoirs doivent être mis sur le même pied. On ne peut pas, sans verser dans le paradoxe, définir les droits de l'homme sans dresser simultanément le catalogue de ses devoirs vis-à-vis de la communauté.

 

Ces deux arguments de Taylor conduisent à formuler une question fondamental, surtout à l'ère d'anomie que nous vivons: de quel degré de “communauté” la démocratie a-t-elle besoin? Taylor dresse une typologie:

 

1. Dans la démocratie économique, telle que nous la connaissons en Occident et telle qu'elle apparaît dans sa forme la plus pure aux Etats-Unis, la forme politique de la société est un instrument pour les individus, pour qu'ils atteignent leurs objectifs individuels, et non pas un instrument pour les communautés, pour qu'elles atteignent une harmonie optimale et garantissent une continuité. Dans cette démocratie économique et individualiste, le militantisme politique des citoyens est un facteur de dé­sordre parce qu'il crée des réflexes collectifs et communautaires non prévus par la rationalité libérale. Ensuite, la décision politique doit être entièrement abandonnée aux professionnels de la politique qui, eux, connaissent les règles et savent les ap­pliquer en dépit des vicissitudes d'un réel auquel ils ne se frottent plus. Question de Taylor: où est le vertu liante (Montesquieu) dans cette démocratie économique? Poser cette question revient à envisager et à espérer l'avènement d'une démocratie avec vertu liante. Taylor l'appelle la “communauté démocratique”.

 

2. Reconstruire la “communauté démocratique” passe par la réactivation d'un sentiment de solidarité, par une participation effective aux décisions politiques, par le respect mutuel entre les membres de la communauté, par une économie fonction­nante, équilibrée entre l'entreprise privée de grandes dimensions et les propriétés collectives (ce qui nous apparaît flou). La “communauté démocratique” n'est rien d'autre que le retour de la societas civilis, c'est-à-dire la forme concrète d'une société civile garantissant liberté et dignité.

 

3. La critique de la démocratie économique, la volonté de restaurer la vertu liante et la “communauté démocratique” (alias la societas civilis)  impliquent une critique de la liberté négative, cher aux maximalistes libéraux. Taylor fonde sa critique sur les définitions formulées par Sir Isaiah Berlin dans Two Concepts of Liberty.  Pour Berlin, la liberté négative refuse tous les freins extérieurs à ma liberté; les institutions doivent veiller à éliminer le maximum de ces freins. La liberté positive est une liberté qui ne se considère possible que dans un cadre collectif; celui-ci doit être respecté, posé comme intangible, comme un bloc d'idées incontestables forgeant en ultime instance le consensus général. Cette liberté positive est celle de la vieille Rome ré­publicaine, celle de Tocqueville, Jefferson et Machiavel (qui parlait de virtù dans un sens analogue à celui de “vertu liante”). Pour Berlin, la liberté positive est totalitaire. Seule la liberté négative est véritablement liberté. Taylor réfute cette option ultra-libérale, voire anarcho-libérale, d'Isaiah Berlin et travaille à revaloriser la liberté positive.

 

L'Irlandais Alasdair MacIntyre, qui enseigne aux Etats-Unis, estime, pour sa part, que la crise morale de notre temps a besoin d'un “remède aristotélicien”, c'est à dire à un retour à la notion non individualiste et purement politique de “zoon politikon”. MacIntyre distingue trois phases dans le déclin de la structure communautaire, trois phases de déperdition graduelle de la “vertu liante”: 1. On commence, par le truchement d'une sorte de “mauvaise conscience” qui émerge parce que le consensus s'étiole, par justifier les pratiques normatives de la société dans les contextes existentiels de la vie quotidienne et politique; Carl Schmitt estime qu'en cette phase, il n'y a pas encore détachement complet par rapport à la sphère vitale du peuple; 2. La phase d'Aufklärung proprement dite: le détachement d'avec la sphère vitale est consommé. Dans la civilisation occidentale, cette phase s'étend de Descartes à la Révolution Française; 3. Aujourd'hui nous vivons sous l'emprise d'un cynisme post-Lumières, à l'ère d'une raison purement instrumentale qui camoufle sa rationalité froide derrière un rideau d'“émotivisme”. MacIntyre plaide pour un retour à l'histoire, à la tradition, à un rattachement à la sphère vitale historico-traditionnelle. Sa maxime: pas de morale possible sans communauté.

 

Robert Bellah déploie une “logique du cœur”, ou plutôt une logique calquée sur les “habitudes du cœur”. Il propose, dans ce contexte, que les communautés encore existantes, ou les résidus de communauté appelés à les reconstituer éventuellement, soient protégées contre la “tyrannie du marché”. Cette proposition découle d'un constat: “L'idéologie économiciste, qui trans­forme les gens en facteurs de maximisation du marché, sape leur engagement [naturel et spontané] au sein de leur famille, de leur église, de leur communauté de voisinage, de leur école et même leur engagement envers les grandes sociétés et idées étatiques ou globales”. Aux Etats-Unis, la négligence des facteurs sociaux (communautaires et/ou collectifs) en faveur d'une maximisation du profit individuel a provoqué un effondrement très problématique de la socialité. La critique de Bellah prend en quelque sorte le relais de celle formulée dans les années 60 par David Riesman (La foule solitaire) et de celle formulée dans les années 80 par Christopher Lash (Le complexe de Narcisse) ou par Richard Sennett (The Fall of Public Man). Bellah lance un appel pour une nouvelle “religion civile”, difficile aux Etats-Unis.

 

Ben(jamin) Barber, dans le clan des communautariens, développe une conception plus activiste que contemplative héritée de son engagement dans les rangs de la “nouvelle gauche”. Le point fort de sa critique réside dans la distinction qu'il opère entre libéralisme et démocratie. Le libéralisme est à ses yeux anarchie, égoïsme et anomie. Il professe là le contraire de ce que professaient Nozick ou Berlin. La démocratie est d'autant plus forte qu'elle accroît la participation des citoyens à tous les ni­veaux de décision. Contre le libéralisme, il faut réactiver la citoyenneté. La dimension critique du travail de Barber consiste à dire que le libéralisme n'est qu'une “démocratie faible”, que le libéralisme est “newtonien” dans le sens où sa méthodologie sociale est celle du simplisme géométrique. Il reproche ensuite au libéralisme d'être “cartésien”, c'est-à-dire purement “déductif”, on est un citoyen exemplaire, un bon citoyen, un citoyen “politiquement correct” que si l'on adhère à quelques véri­tés abstraites, si l'on professe les “bonnes” idées. L'hyper-normativisme libéral révèle sa différence fondamentale d'avec le communautarisme, pour qui on est citoyen d'un Etat qui a une histoire particulière, complexe, non réduisible à quelques schémas simplistes, et qui a déployé dans le temps des valeurs spécifiques.

 

Le libéralisme postule un homme dépolitisé, ce qui est une aberration. Barber réclame donc le retour à la Polis antique. Car le libéralisme, “démocratie faible”, génère des pathologies telles l'atomisation des agrégats humains, le chaos et la dictature, la passivité des hommes contraints de subir. Mais à quoi ressemblerait une “démocratie forte”, selon Barber? Elle ne ressem­blerait pas nécessairement à la démocratie représentative qui prétend être le seul modèle de démocratie acceptable. Pour Barber, la démocratie forte serait en quelque sorte une “assemblées de voisins” comprenant au total 5000 citoyens, liés entre eux par une “coopérative de communication”, rendue possible grâce aux progrès en matières de télécommunications. La dé­cision populaire se ferait connaître par le biais de questionnaires à choix multiples et scrutins à deux tours. Barber préconise également le vote électronique, le tirage au sort comme dans la Rome antique et le service civil généralisé. Cette vision bar­bérienne de la “démocratie forte” nous semble fort constructiviste, typiquement américaine dans son novisme, sans trop de racines dans des modèles antiques.

 

Martha Nussbaum entend réintroduire les notions de citoyen, de Polis et de communauté, telles que les concevait Aristote, dans le discours des gauches, chez les démocrates américains, dans les sociales-démocraties européennes. Martha Nussbaum énumère les éléments de ce nouvel “aristotélisme social-démocrate”

 

- sur le plan anthropologique, les porteurs de cet aristotélisme social-démocrate doivent être conscients de la mort et de la fini­tude humaine, car c'est la condition essentiel pour tempérer les ardeurs des zélotes et des messianistes; - il faut opérer un retour à la corporéité, car le corps postule des limites; le rôle de la douleur est d'être une sorte de garde-fou contre des maximalismes ignorant les résistances de la matérialité ou de la physique; - il faut penser la politique toute en réfléchissant en permanence sur les capacités cognitives réelles de l'homme; - il faut mettre l'accent sur la raison pratique plutôt que sur la raison pure; - il fait avoir conscience de l'existence d'autres formes vivantes (animales et végétales) car la nature est notre cadre global, auquel on ne peut pas attenter sans risques;

- il faut rendre à l'humour et au jeu toute leur place car ils sont des facteurs de revitalisation du discours politique.

 

Martha Nussbaum est indubitablement la sociologue “communautarienne” américaine qui a produit la réflexion la plus intense sur les implications de la conditio humana, de la finitude et de la déréliction. Elle nous enseigne une humilité, non pas une humilité masochiste mais une humilité faite d'émerveillement, non de haine de soi, c'est une humilité devant tout ce qui nous dépasse dans le temps et dans l'espace. Son idéal est de développer nos capacités à vivre en harmonie dans nos limites, notre cadre de vie qui implique forcément des contraintes. Martha Nussbaum n'est pas que sociologue, elle est aussi philo­logue classique et souhaite dès lors ramener la gauche américaine et européenne dans le giron intellectuel de la pensée clas­sique, l'expurger de ses dérapages hyper-décontextualisants, hérités d'une proximité idéologique avec le libéralisme sociale­ment atomisant.

 

Michael Walzer critique l'individualisme atomistique, propre de la société libérale, en tant que fruit de quatre formes de mobi­lité, ou de flux diraient Carl Schmitt ou Gilles Deleuze:

 

1. La mobilité géographique des citoyens: les déménagements fréquents (plus fréquents aux Etats-Unis qu'en Europe) engen­drent un néo-nomadisme. 2. La mobilité sociale implique qu'il n'y a pas de transmission de savoir-faire entre les générations. 3. La mobilité matrimoniale est générée par le nombre impressionnant de divorces.

4. La mobilité politique implque qu'il est de plus en plus difficile de fixer dans la société des loyautés politiques.

 

Outre ce repérage des mobilités dissolvantes de nos sociétés, Michael Walzer théorise ce qu'il appelle l'“art des séparations”. La modernité rejette toutes les séparations au nom de la transparence, tout comme elle manifeste la volonté d'abolir les fron­tières, les cultures, les langues minoritaires. Certes, la civilisation occidentale est marquée par une “séparation” importante, la séparation entre l'Eglise et l'Etat. Mais outre cette grande séparation, la modernité tente de supprimer toutes les autres formes de séparation. Pourtant, constate Walzer, les murs sont utiles pour la socialité: c'est à l'abri de “murs” que l'on déve­loppe des libertés particulières, des libertés spécifiques, qui sont, en fin de compte, les seules libertés réelles et concrètes. Marx est un moderne qui a rejetté les “murs”, les séparations. Ce rejet des séparations est très net dans La question juive, où les Juifs sont sommés de se fondre dans les processus de transformation modernes sans plus revendiquer aucune identité. Pour Marx, l'unité/uniformité du monde capitaliste doit engendrer l'unité/uniformité du monde socialiste. L'unité/uniformité, phénomène d'arasement propre au monde capitaliste, n'est pas un scandale aux yeux de Marx, mais, au contraire, une condi­tion première dans l'avènement d'une unité du monde post-capitaliste, c'est-à-dire, pour lui, du monde socialiste.

 

Pour Walzer, il s'agit de prendre sur cette question le contre-pied absolu de Marx: la liberté, dit-il au contraire de l'auteur de La question juive et du Capital, ne peut s'épanouir qu'à l'abri des “séparations”. Il faut de ce fait réapprendre à pratiquer l'“art des séparations” et permettre, de ce fait, à la liberté de s'épanouir de mille et une façons dans des espaces spatio-temporels limi­tés et bien circonscrits. Mieux: c'est, derrière des murs érigés comme protections, que les peuples pourront faire éclore des “sphères de justice”, au sens où l'entendait aussi Rawls. Liberté et justice ne sont possibles qu'à l'abri de “séparations”.

 

Les thèses de Walzer, Nussbaum, Bellah, Sandel, Barber, MacIntyre, etc., constituent l'actuel débat américain sur le commu­nautarisme. Ce débat répond à un besoin urgent de la société contemporaine. La nostalgie de la communauté n'est donc plus une nostalgie anachronique, une coquetterie pour archaïsants, une réminiscence de la “révolution conservatrice”, du Wandervogel ou des slavophiles. Mais peut-on, dans notre chef, clore ce débat sur la notion de communauté ou sur le néo-communautarisme américain, sans mentionner la discussion fructueuse patiemment construite avant-guerre par deux huma­nistes: Wilhelm Hauer et Martin Buber. S'il l'on médite intensément leurs conversations, il est impossible de répéter les ma­nichéismes issus de la seconde guerre mondiale ou plutôt de faire sien les interprétation schématiques que l'on a élaboré à fins de propagande après 1945. Hauer était pasteur, indologue, missionnaire protestant, officier SS. Buber était un philosophe juif, un sioniste pacifique et communautarien. Hauer et Buber ont participé avant 1939 et après 1945, sans jamais rompre leur amitié en dépit de l'effondrement de la symbiose judéo-allemande, à des débats, des colloques, des discussions dont l'objet premier était Die Gemeinde, la communauté charnelle, religieuse et de prière, la communauté aussi au sens de paroisse et de commune, de village, de grande famille. Hauer et Buber voulaient tous deux préserver les communautés, en laissant à chaque personne (chaque personne qui joue un “rôle”) un espace de liberté pour dialoguer avec Dieu, pour philosopher, réfléchir ou méditer. Si ce travail de préservation ne peut plus être presté par une communauté charnelle, naturelle ou traditionnelle, il doit être l'œuvre du Bund (de la Ligue). C'est la raison pour laquelle, au sein du mouvement de jeunesse allemand des années 20, Hauer crée le Köngener Bund, initiative inscrite dans la tradition des Wandervögel, mais flanquée d'un cercle de prospective philosophique où des personnalités d'opinions différentes, voire en apparence hostiles, débattraient de cette question de la communauté. A la tribune du Köngener Bund se sont ainsi succédé communistes, nationaux-socialistes, juifs sionistes ou non, sociaux-démocrates et catholiques. Le Köngener Bund était une communauté allemande de combat philosophique, qui propo­sait aux gouvernants des solutions aux blessures de la modernité et à l'atomisation et l'anomie en progression constante. Le Köngener Bund était animé par une volonté didactique.

 

La tâche du Bund était de réceptionner les idées, de les synthétiser, de les rendre accessibles, de les diffuser au sein du peuple. A ce stade, il faut envisager, évidemment, de créer des institutions susceptibles de fonctionner correctement. Si elles fonctionnent bien, elles sont des exemples et, à ce titre, elles sont un don offert au monde entier, elles ont une valeur univer­selle, elles sont des modèles et, en tant que tels, adaptables à d'autres contextes humains. Les institutions optimales vont en­suite étendre leurs bienfaits à des fédérations de peuples, des empires (Reiche), des grands espaces, et, enfin, sans doute à très long terme, au monde. Dans le monde européen, le Bund doit nécessairement recourir aux religiosités pré-chrétiennes (Hauer, indologue, retrouve des traces de la “communauté” de type indo-européen dans tout le monde indo-européen).

 

Martin Buber dans son Principe dialogique  (1962) émet quelques réflexions sur la “communauté” qu'il a certainement parta­gées avec Hauer. Dans la formulation de Buber, nous percevons une critique radicale du politisme qui se manifeste au sein des partis. Le parti politique est une machine de combat où le seul résidu de communauté toléré est la camaraderie. Mais souvent, en dehors du drill, de la parade, les partisans sont réduits au silence. Il n'y a pourtant communauté que là où l'on s'interroge fondamentalement sur le sens du monde et la vie. C'est justement là que le mouvement de jeunesse s'avère supé­rieur au parti politique, car on y perçoit une volonté constante d'incarner des valeurs dans le vécu. Le mouvement de jeunesse postule un engagement total et serein de la personne; dans le parti, qu'il soit totalitaire ou démocratique, on isole les partisans des non-partisans, on détache les hommes des flux réels et intimes de la vie, on se coupe de tout engagement réel et fonda­mental, on devient rouage d'une machine. On entre dans la monologique et non plus dans la dialogique. Buber nous dit: «Zwiegespräch und Selbstgespräch schweigen. Ohne Du, aber auch ohne Ich marschieren die Gebündelten, die von links, die das Gedächtnis abschaffen wollen, und die von rechts, die es regulieren wollen, feindlich getrennte Scharen, in den gemein­samen Abgrund» (Dialogue et monologue intérieur disparaissent. Sans Tu, mais aussi sans Je, ils marchent au pas les enré­gimentés, ceux de gauche, qui veulent abolir la mémoire, et ceux de droite, qui veulent la réguler; troupes opposées, enne­mies, elles marchent vers l'abîme commun).

 

Tout mouvement cherchant réellement à révolutionner la modernité et à restaurer la communauté, abîmée ou éradiquée par l'anomie moderne, doit se doter d'un atelier de prospective philosophique, d'un espace de débat: telle est la leçon commune des deux amis Hauer et Buber. Nous l'avons retenue. Et nous tâcherons de marcher dans leurs pas.

 

Robert STEUCKERS.

Bäumler, intérprete de Nietzsche

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Alfred Baeumler, intérprete de Nietzsche

Este artigo diz respeito a uma recente iniciativa das Edizioni di Ar, referente à publicação dos textos de Alfred Baeumler sobre Nietzsche. Por ocasião do quarentenário das Edizioni di Ar (nascidas no Outono de 1963), os textos baeumlerianos representam, simbolicamente, uma espécie de “fecho”. Como o fecho tem um duplo movimento, de abertura/encerramento, assim as obras de Baeumler encerram um ciclo e, ao mesmo tempo, abrem outro. Mas para melhor esclarecer o recurso a tal “símbolo” é conveniente subdividir, esquematicamente, o artigo em três pontos, distintos somente por razões analíticas, mas, na realidade, entre eles estreitamente interligados.

Antes de tudo, confirma-se a persistente centralidade da obra nietzschiana. Obviamente isto implica encarar Nietzsche com seriedade de estudo e não limitar-se a inseri-lo naquela lista de “nomina-numina” a recitar como um mantra ou a referir alguns aforismos seus quando calha. Centralidade e não actualidade, contudo. Esta, a articulação essencial. No sentido em que essencial permanece o que Nietzsche diagnostica (o niilismo) e prognostica (a Umwertung axiológica). Mas tudo isto permanece, muito mais que ontem, inactual. Porque o hoje é perfeitamente refractário às grandes lições nietzschianas. Hoje, com efeito, assistimos à mais desenfreada reapresentação daqueles valores dos quais Nietzsche já havia previsto, com olhar “meridiano”, o declínio.

O hoje é, enfim, substancialmente pré-nietzschiano. Certo, resta em pé boa parte da retórica nietzschiana (onde é preciso ler o eco da “retórica” de Michelstaedter). Ou seja, resta a simulação do acolhimento da mensagem de Nietzsche, mas em face, contudo, da sua neutralização, da redução do pensamento nietzschiano a fórmulas estereotipadas (a”morte de Deus”, etc.), de vagas afirmações de “desencanto”, da mitigação de Nietzsche pelos arautos do “pensamento fraco”( em via de esgotamento, entre mais) e por aí.

E no interior da centralidade da obra de Nietzsche um papel de relevo é ocupado por aquele seu lado político que, depois de décadas, foi finalmente desenterrado pelo volume de Domenico Losurdo, Nietzsche, il ribelle aristocratico, Torino, 2002. Trata-se do Nietzsche quase antecipador da Revolução Conservadora, algo intensamente sublinhado anteriormente em Itália por Adriano Romualdi e por Giorgio Locchi, na esteira do trabalho de Armin Mohler, Die Konservative Revolution in Deutschland 1918 – 1932, una Guida, Firenze, 1990 (edição original de 1950) cuja inteira terceira parte, intitulada “Imagens-guia”, é, para o efeito, principalmente dedicada a Nietzsche [1]. Antes, o lado político de Nietzsche acaba por contribuir para uma melhor focalização da obra nietzschiana por inteiro, como Losurdo explicou detalhadamente [2].

Passando agora ao segundo ponto, evidencia-se o interesse de décadas das Edizioni di Ar relativamente a Nietzsche, testemunhado pela publicação, no longínquo 1971 (segunda edição em 1981) do volume de Adriano Romualdi, Nietzsche e la mitologia egualitaria, e prosseguido com a publicação, em 1981, do texto de F. Ingravalle, Nietzsche illuminista o illuminato?, e, em 1995, do importante trabalho de G. Brandes, Friedrich Nietzsche o del radicalismo aristocratico[3]. Esta constelação de textos constitui uma espécie de “político”, com a adição, por último, dos textos de Baeulmer.

Detalhando: a atenção constante das Edizioni di Ar por Nietzsche não se encontra tanto na tentativa de retirar ao “espírito do tempo” o monopólio hermenêutico da obra nietzschiana (aspecto contudo crucial se se quer dar vida a um “cânone cultural” autónomo) quanto na necessidade de ajustar contas com o “coração negro”(o niilismo) da modernidade. E ninguém mais que Nietzsche merece ser interrogado a esse respeito.

Com Nietzsche, o desencanto, verdadeiro “estandarte de guerra” da modernidade, volta-se contra esta última. Este é o gesto decisivo: submeter a própria modernidade à impiedosa dissecação do desencantamento. Isto é, mostrar o rosto “mítico-ideológico” da modernidade revelando o segredo: todos os valores “modernos”, a partir do cristianismo, são intrinsecamente niilistas. A este “apocalipse” Nietzsche responde do único modo possível, com uma redobrada “dose” (ao mesmo tempo veneno e remédio [4]) de niilismo. Por um lado o niilismo é “veneno” porque conduz ao naufrágio e à perda de sentido derivantes da queda de “valores supremos” nos quais o “último homem” confia, por outro lado é “remédio” porque, fazendo tábua rasa do que em realidade não era mais que ídolos torna possível o advento de novas “matrizes de valores”. Em suma, Nietzsche está perfeitamente consciente de uma verdade fatal: denunciar a essência niilista dos “valores” sucessivos do cristianismo significa acelerar o próprio curso do niilismo, levá-lo às últimas consequências. Significa rasgar o consolador “véu de Maia”, que, escondendo o niilismo de “valores”, permitia à humanidade continuar a vida. Mas neste ponto abrem-se três perspectivas: ou fingir que não é nada (ficar surdo ao anúncio do homem “louco”) ou, passivamente, lamentar-se pelo desaparecimento dos “valores”, ou impulsionar uma nova “paisagem”. A última é a via nietzschiana. Que não é, contudo, um mero expediente tendente a substituir um “valor” por outro de modo que tudo fique inalterado e a crise seja “esquecida”. Ao contrário, Nietzsche “age” consciente do niilismo. É o seu ponto de força essencial.

Ora bem, é precisamente a “via” nietzschiana a estar no centro do interesse das Edizioni di Ar. Ou seja, não se abstrair da crise da modernidade, antes assumi-la como ponto de partida para desenhar novos cenários (mesmo políticos, sobretudo um novo Rangsordnung baseado sobre as múltiplas “estruturas de império” geradas pela vontade de potência). E, não por acaso, esta é a tese central do livro de Romualdi e Ingravalle. Sucintamente, no binómio revolucionário-conservador, revolução é tomar consciência da desagregação niilista sem nostalgia pelo que desaba, conservar é preservar (no renovamento) aquela originária conformação-intuição do mundo que, na concepção nietzschiana, é reassumida com um nome: Dionísio.

Finalmente Baeumler. Proibido pela sua adesão ao nacional-socialismo e por ter sido a “figura chave para a assimilação de Nietzsche no âmbito ideológico do III Reich” (Montinari dixit), Baeumler foi relegado, por décadas, ao esquecimento, sendo contudo, objectivamente, um estudioso de primeira grandeza. Com “óbvios” corolários: a obra de Baeumler foi, de volta em volta, liquidada por ser “ideológica”, recuperada sem referência ao autor, propositadamente silenciada, ou, por fim, drasticamente subestimada [5]. E para quem conhece minimamente as coisas da cultura sabe que frequentemente se se limita a renovar os juízos condenatórios sem sequer se indagar sobre a sua validade [6].

É por isso que as Edizioni di Ar acharam oportuno publicar os trabalhos de Baeumler, partindo da Estética (1999; ed. orig. 1934), para depois continuar com os dois volumes saídos em 2003: Nietzsche filosofo e politico (ed. orig. 1931) e L’innocenza del divenire. Textos nietzschianos (uma antologia composta de textos que vão de 1929 a 1964).

Mas qual é a interpretação que Baeumler dá de Nietzsche? Antes de mais, Baeumler é o primeiro a considerar Nietzsche um filósofo e a estudá-lo como tal, colocando em evidência a unidade do pensamento e o fundamental ângulo metafísico-político. E sem esquecer que Baeumler, graças também à sua tutoria da obra de Nietzsche, editada, a partir de 1930, pela Kroener (compreendendo uma antologia em dois volumes de material póstumo), foi um conhecedor em primeira-mão da complexa “teia” construída por Nietzsche.

Em particular, Baeumler situa na Grécia arcaica o fundo metafísico ao qual Nietzsche aspira, em vista a uma renovada essência germânica. Dito de outro modo, “o jovem Nietzsche aproxima-se aos gregos como aos verdadeiros educadores. Aponta não tanto a um restabelecimento da “antiguidade”, mas a fazer reviver o mundo helénico reinvocando os instintos mais recônditos da essência germânica” [7]. É do mundo grego pré-socrático que Nietzsche tira as suas referências cruciais: Dionísio e Heraclito sobretudo. Mas não há nada de historicista nisto, nota oportunamente Baeumler. Não se trata de mera paixão antiquária ou de interesse meramente académico/filológico. Ao contrário, aqui está em jogo a filosofia do devir. Isto é, uma realidade “heraclitiana”, agonística, heróica, centrada sobre a luta. “O Nietzsche filósofo é o dionísico-agonístico”[8], escreve, peremptório, Baeumler. E ainda :”Dionísio é a fórmula originária da vontade de potência” [9]. Daqui, Baeumler apresenta uma “paisagem” conturbada das vontades de potência em luta entre si, uma paisagem não ordenada por qualquer teleologismo mas sempre variável, e na qual é a inocência do devir e o “amor fati” a triunfar. Não há lugar, num tal cenário, nem para a opressiva mágoa cristã do pecado nem para uma “ordem” determinada de uma vez para sempre. Mas quem pode permanecer firme no mundo “heraclitiano”? Noutros termos, quem está capaz de vencer o niilismo e enfrentar a nova realidade “pós-niilista” decorrente do embate das vontades de potência? A resposta: “ Pela noção de “superhomem” Nietzsche procura ultrapassar o niilismo que antevê pender sobre a Europa e do qual reconhece o advento e os traços distintivos com formidável precisão” [10]

Portanto, para Baeumler a filosofia de Nietzsche é radicalmente não burguesa e não cristã, afastadíssima do Reich cristão-alemão, do idealismo consciencialista cartesiano e dialéctico hegeliano (que neutraliza a polémica na síntese conciliadora) e também do “culturalismo” apolítico típico da burguesia sonhadora. Do mesmo modo, claramente, Nietzsche está a uma distância sideral do igualitarismo democrático [11] (nada mais que uma secularização do ressentimento cristão).

Concluindo: Baeumler não só antecipa em setenta anos a leitura política de Nietzsche, hoje finalmente surgida também em Itália com Losurdo, mas é também um salutar antídoto contra todas as leituras “tranquilizantes” do pensamento nietzschiano.

Giovanni Damiano, Orion, nº230,Novembro de 2003

[1] Não por acaso Nietzsche é presença fundamental em alguns dos grandes protagonistas da Revolução conservadora. Por exemplo, Ernst Jünger considerava Nietzsche, juntamente com Schopenhauer e Hölderlin, um dos seus “faróis” (v. E. Juenger, Scritti politici e di guerra, vol. I°, Gorizia, 2003, p. 95, nota 74).

[2] Para uma análise mais aprofundada do texto de Losurdo, mesmo em relação aos volumes sobre Nietzsche editados pelas Edizioni di Ar remeto ao meu “Il Nietzsche di Romualdi, Ingravalle e Losurdo”, in Margini, n° 42, 2003, pp. 1-2.

[3] Recorda-se, a propósito, que Nietzsche, numa carta a Brandes de 2 de Dezembro de 1887 escreve: “a expressão radicalismo aristocrático que emprega é óptima: permita-me dizê-lo, é a coisa mais inteligente que li até agora sobre o meu conto”.

[4] Cfr. E. Benveniste, Il vocabolario delle istituzioni indoeuropee, vol. I°, Torino, 1976, p. 49 per la duplice natura, di rimedio e veleno, della ‘dose’.

[5] Para não falar dos casos em que as ideias de Baeumler foram atribuídas a outras pessoas. Por ex. a importante definição de Nietzsche como “agulha oscilante” é usualmente atribuída a Thomas Mann (cfr. L. A. Terzuolo, “Come interpretare il Nachlass di Nietzsche”, appendice ad A. Baeumler, L’innocenza del divenire. Scritti nietzscheani, Padova, 2003, pp. 263-264). Por outro lado, em boa parte ainda por explorar estão as ligações entre Baeumler e outros protagonistas da cultura alemã do Novecentos, em especial Martin Heidegger. A respeito assinalo que no último numero de Margini (nº44, 2003) foram publicados documentos inéditos de Heidegger e Baeumler sobre a sua ligação.

[6] Importante, ao cabo de uma rectificação da acusação movida a Baeumler de ter “nazificado” Nietzsche, é o texto de Baeumler, “Postille alle tesi di Mazzino Montanari su Baeumler interprete di Nietzsche”, appendice ad A. Baeumler, L’innocenza del divenire, cit., pp. 243-248.

[7] A. Baeumler, L’innocenza del divenire, cit., p. 16.

[8] Ivi, p. 27.

[9] Ivi, p. 21.

[10] Ivi, p. 114.

[11] Cfr. O parágrafo sobre Rousseau in A. Baeumler, Nietzsche filosofo e politico, Padova, 2003, pp. 89-94.

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jeudi, 12 juillet 2007

José Luis Torres (1901-1965)

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José Luis Torres (1901-1965): El fiscal de la Década Infame

Por Alberto Buela (*)

Se destacó por su producción de denuncia en torno a los grandes negociados que signaron la, bautizada por él, Década Infame. Y en el orden ideológico es el fundador junto con su entrañable amigo y compadre Carlos Montenegro (1904-1953) del nacionalismo anitimperialista hispanoamericano. Y así como el pensador boliviano fue el teórico del Movimiento Nacionalista Revolucionario, Torres lo fue del GOU y del golpe de Estado de 4 de junio de 1943.

La Gran Prensa internacional, los mass media diríamos hoy, (la nacional es un epígono de ella) tiene dos armas contundentes: una, la propaganda mediante la cual vende lo que quiere, crea arquetipos de hombres e insufla ideales que solo benefician al poder financiero que las sustenta. La otra es el silencio. Silenciar la denuncia que la afecta, omitir una noticia que la daña, ignorar la voz de un hombre que dice: lo que todos quieren decir. Es esta última la mejor arma, la más poderosa de las dos.

Así, en el momento de la propaganda la Gran Prensa se mueve con soltura, con agilidad, es el momento del ataque a las conciencias, de su manifestación y consecuentemente, de idiotización del lector. En el segundo momento, el del silencio, ella se halla abroquelada. Ha sido afectada en su poder. Le han cortado algún tentáculo. Su detractor no ha podido ser sobornado de ninguna manera, pues él es un hombre con principios y que vive en función de un ideal. Luego, hay que evitar que se lo conozca, pues reconociéndolo, sus principios y sus ideales se tornarán peligrosos para el statu quo reinante, hoy expresado a través del llamado pensamiento único y políticamente correcto.

Es este, sintéticamente, el mecanismo de los embaucadores de conciencias y José Luis Torres con sus vida y su muerte, es un ejemplo irrevocable de lo que este enfrentamiento acarrea. Sobre él escribió Arturo Jauretche: “No hay ningún periodista argentino que no haya querido escribir su necrológica. Pero no hay ningún periódico argentino que haya querido recogerla. Este silencio que ha habido para la muerte de José Luis Torrres, prueba simplemente que murió en su ley. Esto es lo que se llama aquí “libertad de prensa”. Libertad de los intereses antinacionales y antipopulares, para impedir que tenga medios de expresión lo nacional y popular” (1).

Vida y obra de Torres

Nació en la ciudad de San Miguel de Tucumán el 21 de enero de 1901, fue su madre una mujer de condición humilde, siendo su padre un ingeniero del ferrocarril, Domingo Torres, que lo reconoció como hijo. Sus estudios llegaron a cuarto grado del colegio primario, lo que habla a las claras del carácter autodidáctico de su formación. “Ya a los 14 años, recuerda la segunda señora de Torres, se unió a la acción anarquista para realizar la primera huelga violenta en el Ingenio Ledesma de Tucumán, a fin de conseguir el salario de 3 pesos para los obreros del surco”.

Al tiempo comienza a trabajar para el periódico tucumano El Orden. Es allí donde aprende el oficio de periodista y desde donde empieza, ya a los 18 años, su primera campaña periodística contra los que serán sus enemigo de por vida: la oligarquía maléfica y los perduellis, como los identificará años más tarde en libros homónimos.

Pasados los 20 años se trasladó al norte donde contrajo enlace con una mujer del lugar de quién tuvo la menos un hijo, Domingo. Ahí, nos cuenta Torres “En Salta y Jujuy fui director de diarios, obrero de ingenio, motorista de automóviles de alquiler (tachero, diríamos hoy), y siempre por temperamento, por vocación y por deber, agitador de rebeldías” (2).

Enviudó relativamente pronto, hecho que lo movió a retornar a Tucumán. De allí en más su figura comienza a adquirir dimensión política propia, y así lo vemos en 1932 cumpliendo funciones de ministro de gobierno de Juan Luis Nogués, quien a juicio de un oligarca de la talla de Juan Simón Padrós: ” Renunció a la tradición legada por sus mayores, junto con su sangre y su apellido”. Y ello por qué. Porque Nogués y Torres como su ministro, llevaron a cabo el único gobierno de provincia que defendió la autonomía federativa de la misma contra la voluntad inconstitucional del testaferro Agustín P. Justo y su patrón el requeteoligarca Centro Azucarero Tucumano. Este enfrentamiento motivó la intervención de la provincia ante el silencio cómplice del Congreso de la Nación.

Después en 1933, el que va a ser reconocido como El fiscal de la década infame, viaja a Buenos Aires donde se radica definitivamente, pues consideraba que ” la cabeza de la hidra estaba aquí”. Al viajar a Buenos Aires, cumplidos los 32 años, Pepe Torres ya está formado y la influencia del nacionalismo porteño y oligarcón es casi nula. Su nacionalismo fue siempre de Patria Grande, debido sobre todo por sus contactos permanentes con lo que fuera para nosotros el Alto Perú, esta vinculación existencial con la América profunda lo hizo el más americano de los hombres de su generación por lo que se emparenta mucho con Manuel Ugarte, un hombre de la generación anterior. Esto me trae a la memoria una anécdota: ” No, Sandino no es comunista, como dice la propaganda yanqui, Sandino es nacionalista como nosotros”. Era la voz áspera de un hombre gravemente enfermo que había dado su vida y sus bienes(de pobre que era fue a parar al osario público) por su patria y por su pueblo. De la mano de Pepe Taladríz el hermano de Domingo el imprentero del nacionalismo peronista estaba ahí parado, inmóvil, un joven de escasos 17 años conmovido por la situación y las denuncias que salían a borbotones de la boca de ese viejo gruñón. Ese hombre era José Luis Torres y era la primera vez que lo vi allá por 1963.

Comienza con su llegada a Buenos Aires su período más fértil y combativo, pues junto con las denuncias del negociado de la venta de tierras de El Palomar (origen de la fortuna de Roberto Noble y de Clarín); de la estafa de la conversión de la deuda pública externa de la provincia de Buenos Aires en 1935; del Instituto Movilizador; de la ley de Coordinación de Transportes; de los monopolios del gas y teléfonos, hace campaña periodística contra la CADE, el grupo Dreyfus, el engendro de creación del Banco Central por parte de Inglaterra y la denuncia de la Banca Bemberg, prepara el clima de lo que él llamaba la Revolución Nacional de 1943 y el posterior gobierno del General Perón.

En cuanto a su vida privada, el hecho más significativo por esa época es su enlace en 1940 con Brígida Sal que lo acompañará hasta el resto de sus días y de quien tendrá una hija que agregará alegría a su carácter ya jovial. En una carta desde Mar del Plata fechada el 26-12-74 la viuda nos contará que ” vivo prácticamente en la casa de mi hija ayudándole a manejar los mellizos”.

Si bien en el 43 publicó su primer libro Algunas maneras de vender la patria, es recién en el período que va del 43 al 53 donde Torres halla relativa tranquilidad para dejar por escrito sus experiencias, luchas e ideales. Así, Los perduellis (1943), La Década Infame (1945), La Patria y su Destino (1947), Seis Años después (1949), Nos acechan desde Bolivia (1952), La Oligarquía Maléfica (1953) son algunos de los títulos más salientes de su producción.

Pero José Luis Torres no es un hombre de partido sino de la Nación y ante la burocratización del peronismo, compuesta por esa camándula de adulones y alcahuetes que siempre rodearon a Perón, alzará nuevamente su pluma, o colaborará con sus pocos ahorros, en defensa de los intereses nacionales y populares.

Es por lo demás conocida la colaboración desinteresada que prestó al gobierno de Perón, quien incluso más de una vez lo mandó llamar a fin de que lo informara sobre temas de vital importancia para el país. Es plausible que haya sido Torres, quien redactó el borrador de la proclama del GOU del 4 de junio de l943, habida cuenta que era Perón quien lo visitaba junto a otros oficiales en su casa de la calle Perú casi Independencia.

Con posterioridad a la revolución del 55 edita la revista Política y Políticos, que tenía como leyenda “ni con unos, ni con otros”, de la que logran salir ocho números hasta que es cerrada por orden del almirante Rojas. En ella Torres, que era su único redactor y escribía con estilos diferentes para darle mayor relieve, estigmatizó la revolución triunfante desde todos los ángulos, bautizándola como “revolución fusiladora”, nombre con que años más tarde se la identificó definitivamente. Es éste, otro de los rasgos del “Loco Torres” como lo llamaban sus amigos, el poder sintetizar en un nombre preciso y apropiado hechos, personas y épocas. Así, a él se debe la caracterización de “Década Infame” al período del 32 al 43; “Oligarquía maléfica”, al sector social de mayor recursos que se enriqueció a costillas del pueblo en ese período y “Perduelio”, al aparato financiero y legal montado por los enemigos internos de la patria para su liquidación.

Clausurada la revista viaja a España, pues sostenía que: la cabeza de la hidra está en Europa y yo tengo que ir a cortarla allá. Se entrevista con Pío Baroja, el inconformista ibérico autor del inhallable ensayo Comunistas, judíos y demás ralea.

Sin embargo, a los dos meses, él que había sido un hombre todo vigor y dinamismo, regresa desanimado y sin fuerzas. Ya había comenzado a desarrollarse la larga y penosa enfermedad que le resultará mortal. Y así, mostrando un desinterés total, confiesa: Como Carlos Guido Spano, me corto la coleta y me meto en la cama a leer. No escribo más.

Luego de casi una década de oscuridad y silencio, fallece en Buenos Aires, el 5 de noviembre de l965, en la pobreza más absoluta. Sus amigos entre ellos Pepe Taladriz, realizan una colecta para comprar el cajón. Sus restos descansan en el osario público del cementerio de la Chacarita.

Más, como el mismo lo previera, no murió del todo, pues “Hasta después de muerto ha de prolongarse en el tiempo la consecuencia de mi esfuerzo”.

Notas:
1) Jauretche, Arturo: periódico “Prensa Argentina”, Bs.As. 5-11-65.
2) Torres, J.L.: La Década infame, Bs.As., Freeland, 1973, p. 26.
(*) Asesor del Consejo Directivo de la CGT y vice presidente del Centro de Estudios Estratégicos Suramericanos (CEES). Instituto Cultural Pcia. de Buenos Aires.


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mercredi, 11 juillet 2007

Manifiesto por el Libre Pensamiento

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Manifiesto Revolucionario por el Libre Pensamiento

Ante la situación de estulticia, dogmatismo, conformismo, borreguismo e indolencia en la que nuestro pueblo se ve inmersa, considero necesario lanzar este manifiesto para todos aquellos que crean aun en la lucidez de su intelecto, en la libertad de sus ideas, en la claridad de sus análisis, en la crítica como productora de opiniones y en la acción constructiva como objetivo del pensamiento.

El Manifiesto Revolucionario por el Libre Pensamiento, Rechaza el paquete de ideas y su persticiones que se heredan al adherirse a una “ideología” sin haberlas analizado, contrastado, estudiado y debatido tanto interior como exteriormente.
Reivindica el conocer y aprender todo aquello que se desconozca por muy alejado o difícil que pueda parecer, tanto para calmar la sed de saberes como potenciar el esfuerzo del estudio.

Quiere informarse para construir una opinión, basada en el cotejo e investigación de la información así como su análisis crítico.

Reniega de los pensadores, políticos, manifiestos, textos, libros, ideas, religiones y voceros que tratan o han tratado de normalizar, pacificar, aburguesar, simplificar o homogeneizar las ideas.

Impone la auto crítica y auto evaluación como primera forma de debate personal, primer enfrentamiento dialéctico y filosófico ante uno mismo y parte fundamental del camino de la lucha por las ideas.

Propone la insumisión frente a la imposición de cánones, dogmas, normas, leyes e incluso manifiestos que traten de reducir o censurar el libre conocimiento o estudio.

Pertenece a todos aquellos que a partir de la superación de la realidad actual, destinan su pensamiento a la acción y lucha coherente y sincera.

Asume la lucha por el pensamiento libre y crítico como primera forma de disidencia y subversión.

Exige la muerte del falso pluralismo dogmático y el caos de las ideas rebeldes como primer paso revolucionario.

Garantiza la única libertad que no puede ser arrebatada, alienada o encarcelada por el sistema, adláteres y advenedizos mientras se asuma y luche por la propia y común independencia cognitiva.

Invita a todo aquel que comparta y asuma libremente este manifiesto a realizar el suyo interiormente y luchar por él hasta el final.

Publicado por Diego Urioste


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Tradition (definition)

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New Culture, New Right : Tradition

Michael O'MEARA

Utdrag från New Culture, New Right: Anti-Liberalism in Postmodern Europe, s.104-106.

New Right identitarians believe a people is a living organism. As such, it can die. To guard against this, a people needs a common heritage to define itself and maintain its will to live together. In this sense, tradition serves as the scaffolding around which a people constitutes itself. If there is no heritage -- no transmission (traditio) from one generation to another -- a people has nothing to live for and no reason to remain together. [67] It is, then, as the horizon against which a people's existence is worked out that tradition imparts purpose to its common endeavors. As Gehlen writes, "without it one can keep restlessly active . . . and yet lack any inner sense that all this busyness carries any moral significance." [68] This is why identitarians believe Europe's pagan, mythic traditions are key to its renaissance.

The revival of these traditions, however, faces an awesome array of countervailing forces, for the modern order is premised not only on the belief that reflexive reason frees man from tradition and hence from the need to root his identity in it, but that the rapidly accelerating rate of change and innovation characteristic of modernity, especially late modernity, deprives traditional meanings and practices of their former relevance. [69] Against this dismissive rationalism, New Rightists hold that tradition is the basis of, not an obstacle, to all that man can achieve in the present. This was true 30,000 years ago; it is, they claim, still true today. Like the larger culture, of which they are an intregal part, traditions embody the habits and beliefs of the people who uphold them. They are thus part of a living presence -- and not simply vestiges of the past. And because they arise organically, as experience, habit, and value unconsciously shape what are culturally acceptable and individually satisfying modes of behavior, no amount of reason or theoretical modelling can substitute for them. As such, traditions arise and are sustained by a vitality distinct to those who uphold them; a people no more chooses its traditions than "it chooses the color of its hair or eyes" (Gustave Le Bon). On this count, Benoist describes tradition as that historically formed structure reflecting the perennial in a people's culture. [70] This situates it beyond time, representing the imperishable in a people's orientation to the world. Tradition in this sense serves to encode those defining principles that maintain a people in its timelessness, establishing the frame of its collective consciousness and the order of its collective being. At the same time, it conditions a people's view of its world, giving permanence to its abiding values and shaping the growth of its identity, as it is subject to the forces of time and change. Its loss can thus never be a step forward, but only backwards, toward devitalization and decline.

The existential centrality of tradition is especially evident in the fact that many, especially the most important, European traditions share a common origin, reaching back to the crucible of Indo-European civilization (subject of the next chapter). While varying in detail among the different European families, many of these traditions express a common relationship to the larger world, linking the continent's different national families through rituals, customs, and norms which speak to kindred sensibilities and common origins. As the greatest of its identitarian historians, Dominique Venner, writes: "To live according to tradition is to conform to the ideal it incarnates, to cultivate excellence according to its standard, to rediscover its roots, to transmit its heritage, to be in solidarity with the people who uphold it." [71] Without tradition's persistence, there would, in truth, be no Europe, for the historical, cultural, and genetic bonds Europeans share with their ancestors would otherwise be impossible to sustain.

Tradition in this sense has little to do with "traditionalism" -- which freezes "eternal" truths in sterile, lifeless forms. Nor is it necessarily the same as traditions. "Tradure," its Latin root, means to "translate" and in this sense tradition is the means by which innovation is rendered into an idiom conversant with the larger heritage. [72] Russell Kirk aptly describes it as the vital force that influences the future in filtering out all that is mistaken in innovation and doing so in a way which reaffirms whatever is viable in the past. [73] This makes tradition compatible with modern reflectivity, in that thought and action are constantly refracted back upon one another. But more than its reflective function, tradition creates that sense of continuity which permits the discontinuity of events to appear as aspects of a single meaningful experience. As such, it denotes not the past, but that which stands outside of and beyond time. All healthy societies tend thus to balance tradition and innovation, for without the latter, a society would ossify, losing its capacity to adapt to altering conditions; with only innovation, it risks anarchy, with nothing allowed to settle or take effect. The opposite of tradition, Venner notes, is not modernity, but nihilism. [74] (The primitive, disoriented behaviors characteristic of contemporary society, identitarians contend, are one obvious consequence of its loss). The meanings and identities forged in the past and perpetuated in tradition need, however, to be reaffirmed in every generation. For tradition exists only in the living and remains vital only in its renewal. [75]

The New Right's effort to revive the forces of tradition and make Europeans conscious of their shared origins has taken several forms. Early on, Benoist and the GRECE's Commission des Traditions undertook a study of European first names, determining which were native to Europe and which were imports, what they signify, and what importance should be attached them. Because naming positions a child "as the referent in the story recounted by those around him," it is a cultural practice of considerable implication. Benoist and the historian Pierre Vial have also produced a book length study on the all-important but reluctantly discussed issue of death, examining the ways Europeans have thought of, mourned, and reconciled themselves with it. Other Grécistes have produced monographs on traditional rites (such as those associated with Christmas and the solstice), on legends and mythology, on totem figures (like horses and wolves), and on various holidays and customs. But the most important facet of the GRECE's effort in this field occurred between 1975 and 1983 in an irregular bulletin titled GRECE/Tradition and later published as a single massive volume, Les traditions d'Europe. These studies attempted a synoptic history of those popular traditions associated with the seasonal cycles that once governed the rhythms of European life. Although centuries, in some cases, millennia, old, these traditions are presently on the verge of disappearing, as the modern world renders the seasons, days, and hours homogeneous and interchangeable. [76]

In rescuing such traditions from oblivion, the GRECE, like other New Right organizations, pursues several goals. Many of the most important traditions tend to be trans-European. While varying from nation to nation and from one national region to another, their common elements indicate that, in addition to Europe's high culture, the continent's popular culture possesses a genuinely European dimension. Their study also reveals the larger significance, often of pagan or mythic origins, of the most fundamental facets of European life: of holidays and festivals, Christmas cards and Easter eggs, Christian rites, important religious heresies and literary movements, May Day and Mothers' Day, artistic styles, and innumerable other quotidian concerns. And because they frequently allude to a pre-Christian past, having grown out of the beliefs of the continent's Indo-European founders, Grécistes emphasize the degree to which they illuminate the depth of Europe's primordial culture. [77] In reviving these traditions, they seek therefore to reacquaint Europeans with the pre-modern sensibility still affecting current cultural practices. This is especially evident in the New Right's philosophy of history.


67. Friedrich Nietzsche: "Tradition arose without regard for good or evil or any immanent categorical imperative, but above all in order to preserve a community, a people." See Human, All Too Human, op. cit., §6. Also Gianni Vattimo, The End of Modernity: Nihilism and Hermeneutics in Postmodern Culture, tr. by J. Synder (Baltimore: Johns Hopkins University Press, 1988), pp. 120-21, 132.

68. Arnold Gehlen, Man in the Age of Technology, tr. by P. Lipscomb (New York: Columbia University Press, 1980), p. 68.

69. Even while accepting that the "reflectivity" of modern social life entails on-going changes and that knowledge depends on new information and new perceptions, New Rightists emphasize that meaning and identity are only weakly tied to reflectivity. Modernity may, therefore, have freed man from the customs and traditions that once shaped his behavioral modes, but no amount of self-reflectivity can substitute for those non-rational facets of history and culture that define man's innermost identity, sustaining the meanings that infuse his life with significance. Only an abstract, decontextualized concept of man -- the self as a purely reflexive project -- renders tradition entirely superfluous.

70. Benoist, Les idées à l'endroit, op. cit., p. 115.

71. Venner, Histoire et tradition des européens, op. cit., p. 49. Also Dominique Venner, "La tradition, une idée d'avenir," in Relève politique 2 (Spring 2002).

72. Herte, "La question religieuse," op. cit.

73. Russell Kirk, "The Importance of Tradition" (1989), in Joseph Scotchie, ed., The Paleoconservatives: New Voices of the Old Right (New Brunswick: Transaction Publishers, 1999), p. 61.

74. Venner, Histoire et tradition des européennes, op. cit., p. 17; Alain de Benoist, Vu de Droite: Anthologie critique des idées contemporaines, 5th ed. (Paris: Copernic, 1979), p. 156.

75. Xavier Saint-Delphin and Luc Saint-Etienne, "La Droite et la religion," in A. Guyot-Jeannin, ed., Aux sources de la Droite: Pour en finir avec les clichés (Lausanne: L'Age d'Homme, 2000),

76. Alain de Benoist, Les traditions d'Europe, 2nd ed. (Paris: Le Labyrinthe, 1996), G/T #13; Alain de Benoist, Le guide practique des prénons (Paris: Enfants Magazine, 1979); Alain de Benoist and Pierre Vial, Le Mort: Traditions populaires/Histoire et actualité (Paris: Le Labyrinthe, 1983); Alain de Benoist, Fêter Noël (Paris: Atlas-Edena, 1982); Jean Mabire and Pierre Vial, Les solstices. Histoire et actualité (Paris: GRECE, 1975); Jean Mabire, Les dieux maudits: Récits de mythologie nordique (Paris: Copernic, 1978). Most of the GRECE's work on tradition is to be found in Eléments and Nouvelle Ecole and is too numerous to cite.

77. Cf. Jérémie Benoit, Le paganisme indo-européen (Lausanne: L'Age d'Homme, 2001).

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mardi, 10 juillet 2007

Les Etats-Unis et le pétrole d'Afrique occidentale

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Les Etats-Unis et le pétrole d'Afrique occidentale

par Stefano Liberti

Le Golfe de Guinée est riche en pétrole et plus stable que le Moyen-Orient; c’est une région de haut intérêt stratégique pour les Etats-Unis. Ils pensent y installer une base militaire.

Au moment même où ils s’implantent dans le Golfe Persique, les Etats-Unis mènent une autre bataille stratégique en silence, dans un autre golfe, à quelques milliers de kilomètres de là, plus exactement dans le Golfe de Guinée, leur futur point d’appui en Afrique occidentale. Riche en pétrole, plus facile à contrôler du point de vue politique, cette région suscite des convoitises croissantes de la part de l’administration américaine.

Tout a commencé au lendemain du 11 septembre 2001, quand de nombreuses voix demandaient une diminution de la dépendance énergétique vis-à-vis de l’Arabie Saoudite, pays dont provenaient 13 des 19 terroristes suicidaires qui ont commis les attentats de New York et Washington. Une conférence, organisée le 25 janvier 2002 par l’”Institute for Advanced Strategic and Political Studies” (IASPS) ouvre la danse; l’IASPS est un “think tank”, dont le siège se trouve à Jérusalem, dont l’objectif est de bétonner l’alliance entre les “faucons” du Likoud et les extrémistes néo-conservateurs qui ont désormais la cote au Pentagone. Le colloque s’est tenu dans le siège de Washington de l’IASPS et y ont participé de nombreux fonctionnaires de l’administration, des membres du Congrès, des responsables de sociétés pétrolières américaines et les ambassadeurs de presque tous les pays producteurs de brut sur le continent noir. L’allocution d’ouverture fut prononcée par Walter Kansteiner, à l’époque sous-secrétaire d’Etat en charge des questions africaines. Il a déclaré, sur un ton solennel, que le pétrole sub-saharien constituait désormais “un intérêt stratégique pour les Etats-Unis”.

A la fin des travaux, les congressistes ont décidé de former un “Groupe d’initiative sur la politique pétrolière africaine”, l’AOPIG, soit “African Oil Policy Initiative Group”. Il s’agit d’un véritable lobby qui s’est formé là, sans craindre les conflits d’intérêts, et où se trouvent réunis des responsables de l’administration Bush, des représentants du Congrès, des sociétés pétrolières, des sociétés d’investissement et des consultants internationaux. Ce lobby est dirigé par Paul Michael Whibey, membre en vue de l’IASPS, convaincu de la nécessité d’abandonner le pétrole du Moyen Orient parce qu’il sert à financer les ennemis d’Israël. L’AOPIG s’est ensuite présenté au grand public par le truchement d’un “livre blanc” intitulé “African Oil, A Priority for US National Security and African development” (“Le pétrole africain : une priorité pour la sécurité nationale des Etats-Unis et pour le développement de l’Afrique”). Ce texte pose comme objectif de faire passer l’idée, auprès des dirigeants américains, que l’Afrique occidentale, jusqu’ici négligée, doit devenir une zone de première importance dans la hiérarchie des intérêts américains. Pour atteindre cet objectif, l’IASPS n’est nullement isolé; à peine quatre jours après le colloque de Washington, l’influent “Council on Foreign Relations” organise un séminaire dont l’inspiration est similaire : “La riposte de l’Amérique au terrorisme : gérer les profits du pétrole africain dans un climat global mouvant”.

Le “climat global mouvant” impose, disaient-ils, un redressement et une rupture que l’administration américaine, dominée par les pétroliers, imprimera lentement mais sûrement à son propre agenda. En rendant publiques, au mois de mai suivant, les lignes directrices de la politique énergétique nationale, le Vice-Président Dick Cheney déclarait : ”Le pétrole africain, vu sa qualité élevée et son taux réduit de soufre, représente un marché en plein développement pour les raffineries de la côte est”.

La Guinée équatoriale, colonie américaine

Depuis lors, la présence américaine dans la région s’est soudainement renforcée. En juillet 2002, une délégation l’AOPIG a visité le Nigéria, où elle s’est entretenue avec le Président Olusegun Obasanjo pour chercher à le convaincre de la nécessité de sortir de l’OPEP et de se soustraire à ses mécanismes de contrôle de la production et des prix. Au cours du mois de septembre suivant, Colin Powell s’est rendu au Gabon : c’était la première visite d’un secrétaire d’Etat américain dans ce pays. Pendant l’été, Bush débarque au Nigéria, après avoir rencontré à plusieurs reprises à Washington les ambassadeurs des pays d’Afrique occidentale. A la mi-octobre, les Etats-Unis réouvrent leur ambassage à Malabo, capitale des la Guinée Equatoriale, alors qu’elle avait été fermée pendant huit ans. Depuis lors, la Guinée Equatoriale est devenue une véritable colonie américaine.

Tenant compte d’une production quotidienne de 500.000 barils de brut (un par habitant), Bush n’a eu aucun scrupule à renouer des contacts avec le dictateur guinéen Teodoro Obiang, que la CIA décrivait pourtant comme “un dirigeant sans foi ni loi qui a saccagé l’économie nationale”. Aujourd’hui, les deux tiers des concessions pétrolières de la Guinée sont aux mains des sociétés américaines et les gisements sont défendus par des garde-côte formés par une société privée, la Military Professional Ressources Inc, dirigée par d’anciens officiers du Pentagone.

Plus au Nord, les activités américaines ne sont pas de moindre envergure: en l’espace d’une année, en un temps record, s’est achevée la construction d’un oléoduc d’un peu plus de 1000 km, partant de Doba, dans le Sud du Tchad, pour aboutir à la ville côtière de Kribi au Cameroun; il devrait acheminer 225.000 barils de brut par jour. Cet oléoduc a coûté 3,5 milliards de dollars et a été inauguré le 10 octobre 2003. Son financement provient d’un consortium américain et malaisien, comprenant les trois principales multinationales du pétrole : ExxonMobil, Chevron Texaco et Petronas. La construction a également bénéficié de fonds provenant de la Banque mondiale.

Un trésor off-shore

Cette frénésie est pleinement justifiée : les données sur les potentialités énergétiques de l’Afrique occidentale sont pourtant peu impressionnantes. Les réserves certaines sont aujourd’hui de quelque 24 milliards de barils. Mais le rythme auquel on découvre de nouveaux gisements fait dire aux experts qu’en réalité les pays riverains du Golfe de Guinée possèderaient plus de 100 milliards de barils. La production, qui atteint aujourd’hui 4 millions de barils par jour (quantité équivalente à la production quotidienne du Mexique, du Venezuela et de l’Iran) devrait augmenter considérablement et atteindre, selon des prévisions réalistes, le niveau de 10 millions de barils par jour d’ici à 2010.

Le Golfe de Guinée devrait bientôt fournir 15% des importations américaines de brut, soit la quantité qu’ils importent aujourd’hui d’Arabie Saoudite. Ensuite, selon les projections effectuées par divers analystes, ce chiffre devrait atteindre les 20% en deux ou trois années à peine.

Les avantages du brut du Golfe de Guinée sont importantes et diverses : les coûts de transport sont beaucoup moindres, vu la proximité relative des côtes américaines. L’instabilité politique y est de moindre ampleur. L’OPEP y exerce une influence mineure (parmi tous les producteurs de la région, seul le Nigéria en fait partie et décidera un jour d’en sortir, comme l’a fait le Gabon). Les pays de la région sont aussi plus réceptifs à l’égard des investissements étrangers. Il n’y a pas là-bas de concurrents politiques et économiques suffisamment aguerris, comme la Russie. La France, avec TotalElfFina, même si elle peut bénéficier des liens politiques et économiques tissés à l’époque coloniale, n’est pas en mesure de faire face aux ressources financières dont disposent les géants américains Chevron et ExxonMobil. Enfin, dernier avantage, incontournable, des nouveaux gisements du Golfe de Guinée : leur position. Ces réserves, en effet, sont, pour l’essentiel “off-shore”, donc éloignée de toutes turbulences politiques et sociales éventuelles.

Pour sécuriser et contrôler la région, les Etats-Unis songent à installer un commandement militaire permanent dans le petit archipel de Sao Tomé & Principe, lui aussi très riche en pétrole et, de surcroît, position stratégique en plein centre du Golfe. C’est exactement ce que Wihbey entendait réaliser dans un rapport publié à la fin de l’année 2001. Les Etats-Unis s’apprêtent à concrétiser le contenu de ce rapport, car, récemment, des experts militaires ont rendu visite à Sao Tomé. En somme, l’avenir de l’Afrique occidentale est bel et bien inscrit dans les directives dictées par l’AOPIG, dont l’idéologie repose sur deux piliers fondamentaux : exploitation et militarisation.

(article tiré du site : www.disinformazione.it )

 

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lundi, 09 juillet 2007

Théorciens de l'impérialisme américain

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Robert Kagan, Charles Krauthammer et Victor D. Hanson, théoriciens actuels de l’impérialisme américain

Les Etats-Unis, missionnaires de Dieu sur la Terre

par Francesco Dragosei

Les nouveaux prophètes d’un néo-darwinisme entre les Etats sont des historiens, des essayistes et des journalistes. Dans leurs écrits, ils annoncent l’avènement triomphal, en Amérique et dans le monde, de la loi du plus fort. Dans les travaux de Robert Kagan et de Charles Krauthammer, on découvre qu’une euphorie américano-centrée s’affirme tout de go, spéculant sur les retombées du 11 septembre 2001. Le néo-darwinisme en politique internationale est le frère cadet du néo-darwinisme économico-social, déjà bien présent sur la scène internationale. Ses prophètes? Les intellectuels qui, par leurs écrits, donnent du poids et une dignité théorique à la “brutalité de la praxis”, suggérée par le néo-conservatisme américain actuel. Ce sont des intellectuels de “droite” quand ils le veulent, ou qui ne se posent pas d’emblée comme tels s’ils veulent être plus insidieux. Ils écrivent généralement dans les colonnes du Washington Post. Ces historiens, essayistes et journalistes annoncent l’avènement triomphal, en Amérique et dans le monde, de la loi du plus fort, de celui qui s’adapte au mieux aux lois de la survie. Cette idéologie constitue un virage à 180 degrés par rapport à leurs homologues d’il y a une quinzaine d’années qui débattaient d’un possible déclin de l’Amérique.

L’une des coryphées du néo-darwinisme est sans conteste possible Robert Kagan, dont l’ouvrage emblématique le plus récent en langue italienne est Paradiso e potere, America e Europa nel nuovo ordine mondiale (ce livre a été édité chez Mondadori en Italie). Cet essai, désormais célèbre, est en réalité un opuscule assez banal et insignifiant, écrit rapidement, sur base d’un article, préalablement paru dans la revue «Policy Review», qui a été beaucoup lu et commenté. Le bagage documentaire de cet opuscule est ridicule, est une compilation de références bibliographiques quasi nulle, de notes prises sur d’autres notes, de comptes-rendus de colloque ou de conférence. Malgré ces lacunes, cet ouvrage fort mince est devenu le plus bel exemple, et même le manifeste, de cette euphorie américano-centrée rampante et néo-darwinienne, qui, depuis l’effrittement de l’épouvantail soviétique, a pris graduellement mais inexorablement la tête de beaucoup d’Américains.

Une vieille Europe émasculée, jalouse de la puissante Amérique

La “théorie” de Kagan est simple, simpliste même. L’Europe est vieille et émasculée, à cause des bains de sang des deux guerres mondiales, mais elle se montre envieuse, jalouse, de la puissante Amérique; son seul désir est dorénavant d’en castrer la puissance militaire, en lui imposant en sous main sa culture morbide et pacifiste de la diplomatie et des négociations : cette culture, l’Europa l’a héritée de l’idéal kantien de la paix perpétuelle —mais notre auteur ne cesse de répéter cette affirmation sans jamais citer directement un seul ouvrage de Kant ou de Hobbes), tandis que Hobbes constituerait la source de la culture belliqueuse et virile de l’Amérique. Par conséquent, l’unique voie à suivre pour l’Amérique est de balancer aux orties cette politique sous-jacente de pacifisme que cultive l’Europe, un pacifisme qu’ils jugent délétère; en conclusion, les Etats-Unis souhaitent continuer à asséner les coups de massue, qu’ils distribuent à qui mieux mieux, parce qu’ils sont les plus forts, prétend Kagan sans jamais imaginer, ne fût-ce qu’un seul instant, que le refus européen de ce qu’il appelle le “monde hobbesien” pourrait être un choix de civilisation, une hypothèse sur l’évolution des rapports futurs entre les nations.

Il se sent toutefois obligé de rassurer ses lecteurs et de leur dire que les raisons de l’Amérique ne sont pas aveugles et égoïstes mais visent également le bien de l’Europe et du reste du monde, dans la mesure où le monde entier aussi veut “faire avancer les principes de la civilisation et de l’ordre mondial libéral”. Selon Kagan et ses amis, donc, l’Amérique s’auto-investit d’une fonction, celle d’être l’unique interprète et l’unique garante du progrès, de la justice planétaire et de la paix. L’Amérique rêve donc d’un Etat (mondial) parfait, de devenir la puissance patronesse du monde, et sa tutrice, comme l’avait annoncé en son temps un Reinhold Niebuhr, nous rappelle Kagan (“la responsabilité de l’Amérique, c’est de résoudre les problèmes du monde”). Ou encore Benjamin Franklin : “La cause de l’Amérique est la cause de l’humanité tout entière”. Effectuons un saut en arrière et revenons à la Russie des années 20 du 20ième siècle et rappelons-nous la figure du grand “Bienfaiteur”, le chef absolu du vaste Etat planétaire, sinistre et mielleux, qui, dans le roman de Zamiatine, Nous, explique, sur un ton paternaliste, que le devoir de son Etat parfait, est de “faire courber l’échine des êtres ignorants qui peuplent les autres planètes pour que s’exerce le jeu bénéfique de la raison”. Et “s’ils ne comprennent pas que nous leur apportons un bonheur mathématiquement exact”, alors “nous les obligerons à être heureux”.

Ne pas observer les règles du droit international, pratiquer la guerre préventive

Dans un long article paru dans le numéro 70 de «The National Interest», le journaliste du Washington Post, Prix Pulitzer, Charles Krauthammer, après avoir rappellé que, déjà dans la lointaine année 1990, à rebours des prévisions sur le déclin des Etats-Unis, il avait préconisé, pour l’avenir, une unipolarité américaine, et relevé, avec orgeuil, que “le budget militaire américain dépassait ceux, additionnés, des vingt pays suivants”, et qu’il n’y avait donc aucun signe réellement tangible de déclin; en plus de cette supériorité militaire, l’Amérique, ajoutait-il, détenait la primauté économique, technologique, linguistique et culturelle. Son triomphalisme, fruit d’une faculté typiquement américaine de transformer toute défaite en un contre-récit optimiste (c’est là une faculté que nous appelerons l’ “élaboration euphorique du deuil”), repose sur une tragédie, en apparence peu “triomphale”, celle du 11 septembre; il transforme, avec la magie d’un alchimiste, le coup le plus grave jamais porté sur le sol américain, en un mythe sur l’invulnérabilité de l’Amérique. Il observe avec cynisme : “S’il n’y avait pas eu le 11 septembre, le géant serait resté endormi [...] Grâce au fait qu’il ait pu démontrer ses capacités de récupérer [...] Le sens de l’invulnérabilité a acquis, au sein de la population, une dimension nouvelle”. Toujours à la suite des événements fatidiques du 11 septembre, Krauthammer se donne un alibi pour légitimer moralement la nouvelle politique américaine, celle de ne pas observer les règles du droit international et de pratiquer la guerre préventive : “Le 11 septembre a servi de catalyseur et a fait émerger la conscience [...] que la première mission des Etats-Unis est de se prémunir contre de telles armes”.

Après avoir pointé du doigt la “sinistre” politique des Lilliputiens européens, qui consiste à immobiliser le Gulliver américain “à l’aide d’une myriade de ficelles qui réduisent sa puissance”, Krauthammer conclut : au fond, dit-il, les Etats-Unis, en poursuivant leurs propres intérêts, poursuivent aussi ceux des Européens ingrats, surtout quand il s’agit d’apporter la paix au monde.

L’histoire militaire occidentale selon Hanson

Dans un livre substantiel et bien documenté, intitulé Carnage and Culture, le célèbre historien militaire Victor Davis Hanson effectue un travail d’anamnèse historique en profondeur et part, dans sa démonstration, de la Bataille de Salamine. Son livre est sérieux, très scientifique, mais, face au petit opuscule de Kagan et aux essais de Krauthammer, il constitue une arme bien plus insidieuse et effilée dans le dispositif néo-darwiniste. Hanson analyse toutes les batailles qui ont fait date, comme Salamine (480 av.J.C.), Gaugamèle (331 av.J.C.), Canne (216 av. J.C.), Poitiers (732), Tenochtitlàn (1520), Midway (1942), Tet (1968); Hanson donne corps, ainsi, à la théorie d’un Occident qui a la primauté méconnue, depuis fort longtemps, d’être le plus “létal” quand il fait la guerre (“Brutal Western lethality”, pour reprendre ses paroles), une brutalité qui dérive directement du primat que possède, de fait, sa culture. Que ce soit les Grecs ou les Romains, les Macédoniens d’Alexandre ou les Espagnols de Cortès, ou encore les Américains dans le Pacifique, tous ont obtenu des victoires écrasantes sur des “non occidentaux” (Non Westerners), soit, en l’occurrence des Noirs, des Jaunes ou tous autres peuples qui ne sont pas parfaitement blancs. Ces victoires ne sont pas nécessairement dues à la supériorité de leur organisation ou de leur technologie (par exemple la poudre à canon). Ces victoires, ils les doivent à une “plus-value” civile, faite de discipline, de démocratie, de liberté, d’esprit d’initiative et d’individualisme.

Quant aux inévitables pages sombres de l’histoire occidentale, Hanson —en utilisant cette capacité d’”euphoriser” le travail de deuil que nous avions déjà observé chez Krauthammer— parvient à transformer ces défaites occidentales (de la bataille de Cannae à Wounded Knee et à l’offensive du Tet) en victoires de fond, car, explique-t-il, les non occidentaux n’ont obtenu la victoire que dans la mesure où ils se sont approprié les armes, les technologies et les idées de l’Occident. Les jeux sont faits. En allongeant et en étirant quelque peu sa théorie sur les triomphes de l’Occident, Hanson parvient à interpréter la défaite américaine au Vietnam de façon telle qu’il en fait une victoire. La bataille de Khesanh, par exemple, il explique avec un orgeuil mal dissimulé, est certes une défaite américaine, mais aussi une victoire à la Pyrrhus des Vietnamiens, en ce sens que la supériorité matérielle des Américains a fait que le nombre de leurs morts est resté très réduit : un mort américain pour cinquante morts vietnamiens. Ces proportions équivalent plus ou moins aux pertes des espagnols de Cortès devant les Aztèques. Désolé, Hanson confesse toutefois que la victoire américaine s’est muée en défaite, par masochisme, à cause de l’hystérie et des distorsions de la presse, de la télévision et de la gauche américaine.

En raisonnant de la sorte, Hanson rappelle la guerre du Vietnam et la sanctifie (toujours en utilisant, malgré tout, des termes dépréciatifs, comme “horrendous slaughter”, d’”horribles massacres”, “blood bath”, des “bains de sang”, etc.), mais, simultanément, et de manière tacite, il ramène le primat guerrier et civil de l’Occident à l’actuelle supériorité militaire (et aussi civile) des Etats-Unis.

Sortir l’Amérique du syndrôme vietnamien

En outre, son livre s’inscrit, mine de rien, dans ce vaste ensemble de narrations réécrites qui visent à sortir l’Amérique de la dépression qui a suivi l’aventure vietnamienne et qui, malgré de fréquentes déclarations contraires, continue à souffir d’une intolérance génétique vis-à-vis de toutes formes de défaite, d’échec, de deuil. Ces “réécritures” relèvent, notamment, de ce célèbre récit national et populaire qui a pour personnage Rambo, porteur du mythe de la trahison du soldat américain héroïque, poignardé dans le dos par l’odieuse bureaucratie politique, militaire et médiatique.

Terminons en évoquant une voix qui n’appartient en aucune façon à cet aréopage de néo-darwinistes et qui s’exprime dans une publication très sérieuse, qui, elle, n’hésite pas à critiquer l’Amérique et sa politique; cette voix, pourtant, contribue au triomphalisme ambiant de manière subtile. Il s’agit d’un article paru en mai 2003 dans les colonnes de l’«Atlantic Monthly», dû à la plume de David Brooks, l’auteur, entre nombreux autres ouvrages, d’une “cover story” de grande ampleur, très complète (12 pages denses) portant sur les différences entre l’Amérique rouge et l’Amérique bleue. Dans son article, Brooks se réfère au livre Democratic Vistas de Walt Whitman (écrit en 1871), et rappelle que le grand poète —à rebours des anti-américains obtus d’aujourd’hui— avait bien compris que l’Amérique était (et reste) un pays fort diversifié et varié, composé d’hommes bons et moins bons, et que sa force consistait (et consiste) à ne pas dévier du chemin qu’elle avait décidé d’emprunter, c’est-à-dire celui de sa “mission historique”, qui est de se poser comme le guide du monde, même dans les moments où le leadership est médiocre (Woods fait directement allusion à Bush). A la lecture de cet article de Woods, on se laisse, à son insu, prendre aux ardeurs nationalistes et messianiques du poète de New York. Woods le rappelle avec nostalgie son blâme adressé aux Américains : “Whitman avait un sens subtil du caractère unique de la mission historique de l’Amérique (“America's unique historical mission”), que Dieu lui-même ou le destin ont assigné à ce pays, pour qu’il diffuse la démocratie dans le monde et qu’il promeuve partout la liberté”.

En avançant de tels arguments, Brooks rejette l’hypothèse d’une Amérique différente, alors qu’il venait lui-même de l’énoncer, et donne, sans doute sans le vouloir vraiment, la main aux Kagan, Krauthammer et Hanson. Il apporte, sûrement malgré lui, une contribution involontaire à la rupture générale qu’annoncent ce “bushisme” militant et l’Amérique, rupture du pacte qui unit théoriquement les peuples au sein des “Nations Unies” et postule la parité démocratique entre les nations. Brooks, avec sa vision de l’Amérique, aussi sympathique qu’elle puisse sembler, rejoint ainsi ceux qui affirment, haut et clair, que l’Amérique a une mission planétaire, légitimée par sa prépondérance militaire, renforcée par sa conscience messianique retrouvée. 

Francesco DRAGOSEI,

Mardi 19 août 2003 – article tiré du site materialiresistenti

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G. Faye: Entrevista por Menzo

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Entrevista realizada por la revista Flamenca Menzo a Guillaume Faye en Diciembre de 2005

Menzo: ¿Realmente cree usted en la posibilidad (ya trazada en su libro Avant-Guerre) de una guerra racial de proporciones históricas en el Occidente blanco?

Guillaume Faye: Sí, lo creo.  De igual forma que pienso que si conduces tu coche en el carril contrario de una autopista, es cuestión de tiempo que sufras una colisión frontal.  El momento exacto de la colisión será difícil de prever, pero lo que es seguro es que ocurrirá.  Dentro de 10 años, nos vamos a enfrentar a algo nunca antes visto.  Más que una guerra racial, lo que vamos a presenciar son crisis económicas y ecológicas, escasez de petróleo, etc., etc., etc.  Todos los gobiernos del mundo funcionan con agendas a corto plazo y no hay nada más desastroso que este tipo de gestión política.  Se dice habitualmente que la Tierra está enferma.  Pero es el hombre el enfermo.

Menzo: Tras el atentado contra las Torres Gemelas, comenzamos a darnos cuenta de la precariedad de la economía mundial.  ¿Qué otra alternativa existe?

GF: La globalización no nació en la última década, su nacimiento fue en el siglo XVI.  Este detalle no va a impedir la catástrofe que se está gestando.  Una alternativa a la economía global es lo que yo llamo "l´autarchie économique des grands espaces" (autarquía continental económica N.T).  En estas grandes áreas, por ejemplo Europa, habría una libre circulación de bienes, capital y mano de obra (pero habría barreras para otros bloques geo-económicos N.T).  Si grandes zonas continentales como, Europa, África, Asia, etc., practicaran tal autarquía económica, seria posible alcanzar un cierto nivel de bienestar económico en el mundo.  No es necesario sacrificar todo por el Libre Comercio.  El hecho de que actualmente los productos textiles manufacturados masivamente en China produce un terrible efecto en el sector textil francés.  Sin embargo, ni las prendas se han rebajado en Francia ni los trabajadores chinos han conseguido ninguna mejora en sus condiciones de vida.  Sólo el comercio se ha beneficiado.

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Menzo: ¿Qué importancia le da usted a la economía global?

GF: La misma que le atribuyo a la imposibilidad de integración de un grupo amplio de inmigrantes.  El General De Gaulle solía decir "para hacer un buen kir cóctel hace falta vino blanco y sirope de cassis.  Si se le añade demasiado cassis, ya no es un kir".  Esto es otra forma de decir que solo se puede integrar a un número determinado de extranjeros.  Hoy, en Seine-Saint-Denis, Roubaix y otros departamentos de la región parisina, por citar algunos ejemplos, existe una mayoría de población de origen extranjero, no europeo.  La integración de estas poblaciones es imposible.

Económicamente, la situación es incluso peor.  De cada 100 inmigrantes venidos del Tercer Mundo, sólo cinco entraran a formar parte de la población laboral activa del país.  Por el contrario, de cada dos graduados franceses, uno quiere emigrar y lo mismo ocurre en Bélgica.

Este proceso conllevara la gradual banca rota al sistema social del país, lo cual a su vez incrementara el riego de conflicto.  Los episodios de vandalismo y anarquía que presenciamos hace unos meses en Francia y otros países de Europa, episodios que duraron unas tres semanas, fueron un preludio de lo que va a suceder y que pienso tendrán lugar dentro del periodo 2010.  La Fundación Canadiense Wright también predice un conflicto étnico en Francia con carácter de guerra civil dentro del periodo comprendido entre los años 2007-2010.  Esta Fundación realiza esta predicción en base a diversas estadísticas como son los niveles de violencia y el número de pruebas sobre la existencia y evidencias de un aumento de los arsenales ocultos.  La masiva concentración de población islámica en nuestras ciudades y barrios periféricos en un grave problema que pronto se hará de notar si no lo hace ya.

Menzo: Sin embargo los últimos actos de vandalismo que tuvieron lugar en Francia no fueron de carácter religioso sino que fueron explicados como una reacción a la marginalidad y a la exclusión social.

GF: Siempre estamos buscando explicaciones socio-económicas.  Y éste no es sólo el método marxista de pensar sobre los conflictos, también es el incorrecto.  Los inmigrantes de hoy reciben cantidades masivas de ayuda estatal.  Incluso me atrevería a decir que los inmigrantes de hoy reciben mejor trato medico que los franceses de origen.  La inmigración portuguesa o española que llego a Francia durante la década de los 30 y de los 40, no recibió ayuda estatal alguna y esto nunca fue motivo de actos vandálicos o de violencia callejera por parte de este grupo de inmigrantes.  El profesor Loland, ganador del Premio de Economía francés y figura destacada dentro del mundo financiero, estima en 36 billones de euros anuales el gasto directo o indirecto que supone en la actualidad la inmigración para Francia.  Esta cifra supone un 80% del déficit del Estado francés o un 13.5% del gasto de Seguridad Social francesa.  Y esto no son palabras de Le Pen sino de un respetado miembro de la comunidad económica francesa.

Cada inmigrante que cruza nuestras fronteras, supone un gasto de 100.000 euros.  La noción de que los inmigrantes son tratados con negligencia o falta de atención son pues absurdos.  Es justo todo lo contrario.  Clichy-sous-Bois, zona donde comenzaron los actos vandálicos del pasado noviembre, recibe la mitad del total de la cantidad de ayudas asignadas por el gobierno a zonas urbanas conflictivas.  Creo que los instigadores de la violencia el pasado noviembre, simplemente esperaban su oportunidad para cometer tales actos.

Menzo: ¿Existe alguna prueba que indique que estos actos vandálicos estuvieran orquestados por bandas de delincuentes?  El 80% de los detenidos tenían algún tipo de historial delictivo.

GF: Ésta no es la forma en que yo lo veo.  La violencia no fue motivada por Sarkozy cuando los llamo "basura".  Y en realidad sólo el 8% de los detenidos contaba con historial delictivo.  En mi opinión fue más una revuelta étnica que un ataque contra las fuerzas de seguridad.  Razón por la cual es importante el saber por qué se revelaron y cometieron actos violentos.

Menzo: Otra indicación de que la violencia se inicio dentro de bandas de criminales fue la falta de obediencia por parte de los revoltosos a la fatwa (llamamiento religioso islámico) ordenada por la mayor organización musulmana en Francia, la  Unión de Organizaciones Islámicas Francesas.  Esto supone que la violencia no era de carácter religioso.

GF: A menudo se olvida que el Islam es, en principio, hipócrita.  El Corán dice que es perfectamente aceptado el mentir en ciertas circunstancias, por ejemplo cuando uno está en un país débil o cuando sirve a los intereses del Islam.  Es también perfectamente lógico el pensar que, a efectos prácticos y cara al resto de los franceses, los musulmanes quisieran aparentar su oposición a la violencia cuando realmente en su interior la apoyaban.  Estas palabras fueron dichas por el Primer Ministro francés, Dominique de Villepin.

Por supuesto hubo imanes (clérigos musulmanes) que no apoyaron la violencia pero éstos no son los imanes que viven el Islam como un arma ofensiva en una campaña de conquista, esto es Dar-al-Harb.

El Islam ve su misión desarrollarse en tres etapas: Dar-al-Suhi, etapa en zonas donde el Islam aún tiene que conquistar, Dar-al-Harb, zonas en proceso de ser conquistadas y Dar-al-Islam, zonas donde el Islam ya ha triunfado en subyugar al infiel o no-creyente.

Cada año se publica en Egipto un libro islámico.  La edición de este año designa a Francia, Bélgica y al Reino Unido como territorios en etapa Dar-al-Harb.  Ésta es pues, la situación actual.  Uno no debería olvidar que durante los días que duró la violencia, dos iglesias católicas fueron quemadas y destruidas.  El imán de la Gran Mezquita de París, Dalil Boubakeur condeno los hechos pero no excomulgó a los responsables.  También fue ésta la primera vez donde edificios públicos fueron atacados y destruidos; comisarías de policía, escuelas publicas, etc.  Estos hechos han sido suavizados para el público pero tiene una significación muy importante.  También es la primera vez donde ha muerto gente...cuatro para ser exactos.

Menzo: ¿Qué cree que causó todo esta violencia?

GF: Una razón es la masiva y desenfrenada inmigración que hemos permitido.  En Canadá por ejemplo, los inmigrantes son seleccionados de acuerdo con sus profesiones, riqueza y potencial económico.  Nosotros, hemos agrupado enormes cantidades de inmigrantes de origen tercermundista, provenientes de sociedades económicas rurales donde las costumbres y cultura son totalmente diferentes a las nuestras.  Grupos que no están en absoluto preparados para lo que aquí se encuentran y que carecen de una educación básica y de una experiencia profesional que les facilite la integración.  Incluso después de haber invertido sumas gigantescas en vivienda, educación y programas especiales para ellos, ¿A quién se le pudo ocurrir que esto funcionaria?

Japón esta económicamente en un nivel aproximado al nuestro, sin embargo apenas sí tiene inmigración y la que tiene cuenta con muy poco apoyo estatal.  Sin embargo en Francia, el número de jóvenes de origen extranjero se doblará en los próximos diez años.  La integración no está funcionando.  Los políticos se niegan a ver las catastróficas consecuencias de sus decisiones, la mayoría sólo piensan en sus carreras.  Incluso hay algunos demasiado viejos para preocuparse.  ¿Por qué debe Chirac de preocuparse de lo que pueda pasar dentro de diez años?  Probablemente estará ya muerto.  Además, los políticos miran a la población como votantes a los que pueden cambiar periódicamente.  Pero el pueblo no es reemplazable.  Pertenecemos a culturas muy bien definidas y unidas a mentalidades formadas con su ayuda e influencia.  Un ruso no es simplemente intercambiable por un brasileño.  Pero sólo los políticos parecen no ver esto.

Otra causa de este brote de violencia fue el aumento del número de africanos subsaharianos.  Este grupo causará problemas mayores en un futuro próximo.

Menzo: ¿Por qué?

GF: Porque al contrario que los inmigrantes magrebíes (árabes de Argelia, Marruecos y Túnez), los inmigrantes subsaharianos  están completamente desocializados.  La población magrebí posee una clara estructura familiar con un padre y una madre.  En el África subsahariana, predominantemente de población negra, esta estructura no existe.  Las madres puede tener hijos con padres diferentes y los hijos no son criados por la familia sino por el poblado.  Cuando este tipo de estructura familiar es exportada a ciudades europeas, inevitablemente produce conflicto.  Ciudades como París no son poblados y la crianza de niños no es su responsabilidad.  Los descendentes de estos africanos suele tender al crimen y terminan en centros penitenciarios.  No saben quién es su padre y nadie se hace responsable de ellos.  Su presencia en Europa es como una bomba de relojería.

Menzo: Usted ha señalado que entre los años 1989 y 1999, el índice de criminalidad en Francia ha crecido en un 176% y que el número de convictos se ha triplicado.  Usted no atribuye este aumento al desempleo.  ¿Cuáles son las causas?

GF: Existen dos razones para explicar este aumento de criminalidad:
El primero es heterogeneidad social.  Toda población con diversidad tiene problemas de criminalidad.  Los dos países con menos criminalidad son los más homogéneos: Japón y Costa Rica.  Aristóteles fue el primero en percibir que una sociedad no puede ser democrática y armoniosa si su población no es homogénea.  Sin esta homogeneidad, se convierte en tiránica.

La segunda razón por este aumento de la criminalidad proviene de la permisividad de los responsables de mantener el orden público: la policía y los juzgados.  En Túnez existe un enorme índice de desempleo, pero la criminalidad es relativamente baja debido a que la policía y los juzgados actúan  con severidad.  En Arabia Saudita puedes dejar las llaves o tu cartera en el coche y a nadie se le ocurriría robarlas ya que podría costarle las manos.  En Europa ocurre lo contrario, los extranjeros experimentan una situación donde toda forma de represión ha desaparecido desde 1968.

Menzo: Usted también ha escrito que el crimen financiará la inminente guerra racial.  ¿Cree usted realmente que existe un plan para este financiamiento?

GF: No sólo está planeado, está ya ocurriendo.  Informes policiales muestran que bandas criminales ayudan a financiar la insurgencia iraquí.  Por supuesto no todos los criminales participan en este financiamiento, pero sí que existe.  Y mientras tanto, las autoridades creen que pueden comprar la paz social.  Se estima en tres toneladas la cantidad de cannabis distribuida en París cada mes.  Otra forma de financiación son el robo de vehículos y el trafico de productos electrónicos.  La prostitución junto al tráfico de armas son también fuentes de financiación.  Siempre que la policía descubre uno de estos arsenales, incluye no sólo armamento militar, también incluye armas de caza, ideales para la guerra urbana.

Menzo: En su libro Avant-Guerre, usted sitúa al Islam en el mismo nivel de otras ideologías que buscan el control mundial: comunismo, liberalismo americano, globalismo.  Pero, ¿No es la historia una larga sucesión de sistemas e ideologías que buscan el dominio mundial?

GF: En absoluto.  Fíjese usted en el judaísmo, como religión étnica no tiene ninguna intención de convertir al resto del mundo a sus creencias.  Lo mismo que ni el budismo ni el sintoísmo buscan la conquista del mundo.  El Islam, como también lo hicieron el catolicismo, el comunismo y el neo-liberalismo.  Sin embargo, el Islam es el más agresivo de todos ellos.  Porque no sólo es una religión, es una doctrina política.  Y esta doctrina es imperialista.  Históricamente ha intentado conquistar Europa dos veces.  La primera vez fue rechazado por Carlos Martel en Poitiers en el año 732, la segunda vez en el siglo XVII fue derrotado a las puertas de Viena.  La nueva ambición de conquista por parte del Islam, fue revivida en Egipto en 1920.  Estoy convencido de que para ciertos líderes islámicos, el momento actual es el propicio para un tercer intento de conquista en Occidente.

Tal y como se jactó una vez el ex presidente de Argelia, Houari Boumediene, el mundo islámico acarrea en el útero de sus mujeres las armas que mañana conquistaran Europa.

Menzo: La primera generación de inmigrantes no mostró ningún tipo de hostilidad hacia nosotros.  La tercera generación parece más segregada que nunca.  ¿Es esto el resultado del conflicto palestino el cual ha generalizado un comportamiento anti-occidental?,  ¿Es ésta la fuente de los problemas, existe una solución?

GF: Ciertamente la cuestión palestina es una de las fuentes pero difícilmente la única.  Incluso antes del conflicto palestino, el odio hacia Occidente existía.  En parte surgió como reacción al colonialismo aunque también existía un recelo a Occidente debido a sus múltiples logros y hazañas.  El conflicto palestino ha actuado como un catalizador para el aborrecimiento hacia Europa y si se resolviese mañana, aún existiría el problema con Occidente.  Europa también es despreciada porque se ha convertido en algo frágil y débil.  Su permisividad induce a la indulgencia, lo cual nos convierte en presa fácil.  Los musulmanes se encuentran ellos mismos en una sociedad moralmente degenerada.  Recientemente, un filósofo se refirió al término hindú del Kaliyuga (Edad del Hierro).  Según esta antigua profecía, llegará un tiempo donde los hombres se podrán casar con hombres y mujeres con mujeres, los reyes se convertirán en ladrones y los ladrones en reyes y donde las mujeres matarán a sus hijos en su útero.  ¡Y bien!, no nos encontramos muy lejos de todo esto.

Menzo: En su libro, usted pone la situación en Bélgica al nivel que en Francia.  Sin embargo y al contrario que Francia, Bélgica carece de zonas o barrios marginales alejados de la ciudad.  Nuestros inmigrantes residen normalmente en barrios construidos en el siglo XIX que aún mantienen su carácter humano y que mayoritariamente carecen de zonas de acceso "prohibido" (lo que hace la situación en Francia tan peligrosa).  Según su opinión, ¿Cuál es la amenaza que se cierne sobre Bélgica?

GF: Todo esto es correcto.  Los "banlieues" franceses son únicos.  Fueron construidos para alojar a los refugiados franceses que salieron de Argelia.  En el año 1962 y durante una sola semana, un millón de franceses fueron evacuados de la nueva e independiente Argelia.  Se debería destacar y señalar que no todos los complejos urbanísticos construidos para acomodar a este influjo de población, eran de mala o baja calidad.  El gobierno designo una gran cantidad de recursos económicos a este proyecto.  De la misma manera que nuevas zonas residenciales como París Deux, cerca de Versailles, fueron construidas para alojar no a extranjeros sino a la pudiente clase media.  Esta situación es muy diferente a la de Bélgica, actual capital simbólica de Europa y sede de la OTAN.  Pero lo importante y lo que cuenta no es la situación de la vivienda per se, sino el hecho de que la inmensa mayoría de la población no es europea.

Menzo: ¿Cree usted que la violencia puede llegar a Bruselas?

GF: Tal y como lo veo es sólo cuestión de tiempo y aunque Bruselas está mejor situada que París, no creo que se libre de esta violencia.

Menzo: En los Estados Unidos y Gran Bretaña existen episodios periódicos de violencia callejera pero estos episodios son normalmente protagonizados por bandas rivales.  En Francia, estos episodios de violencia callejera fueron dirigidos directamente contra el estado.  Policías y bomberos fueron atacados y tiroteados.  ¿Cómo se ha llegado a esto?

GF: En los Estados Unidos existe por ejemplo un incremento de los conflictos entre los negros y las bandas mejicanas.  Al contrario que en los Estados Unidos aquí en Francia, las bandas de delincuentes no-franceses no se enfrentaron unas a otros sino contra el Estado francés.  La música rap tiene mucho que ver en todo esto.  El efecto subversivo del rap no debe de ser olvidado.  Incluso iría más lejos.

Estas bandas de inmigrantes están en Francia porque el Estado francés les ha ayudado y esto causa un resentimiento en ellos que es muy característico de la mentalidad magrebí/islámica.  Es un sentimiento muy peculiar que no debe de olvidarse.  Odiar a aquel que te ayuda porque esa misma ayuda que recibes es humillante porque te convierte en receptor de ella.  Cuanto más mimo y cobijo se les da más fácil que reaccionen agresivamente a estas atenciones.  Al margen de esto, la simpatía no es fomentada por la debilidad.  Con promesas de más dinero y ayudas a los inmigrantes, el gobierno de Villepin  ha actuado de una forma poco inteligente.

Menzo: Al margen de más actos violentos y guerra urbana, usted predice un aumento en la escalda de ataques terroristas:  micro-, macro-, incluso giga-terrorismo y no excluye el uso de armas nucleares  dentro de un ataque terrorista a los Estados Unidos.  ¿Realmente cree usted que esto es posible?

GF: Naturalmente que lo creo.  El escenario que he descrito no está lejos de su realización.  A su tiempo, todas estas cosas serán posibles.  Podemos esperar actos terroristas cien veces peores al ataque a al Torres Gemelas, sólo es cuestión de tiempo.

Menzo: Usted ha criticado a los servicios de inteligencia por su falta de imaginación y vigor.  Ha criticado su falta de reflexión y conocimiento de las diferentes formas y modelos del pensamiento islamista.  Sin embargo, casi cada mes los servicios de inteligencia se las apañan para desmantelar y detener posibles actos terroristas.  ¿Realmente existe, tal y como usted lo plantea un peligro tan grave?

GF: Usted tiene que distinguir entre el mantenimiento del orden público y la recolección de información o inteligencia.  Las agencias de inteligencia occidentales has hecho una gran labor.  Han sido capaces de capturar numerosas células terroristas.  Pero hace falta más.  Es necesario un amplio grupo bien informado dedicado exclusivamente a esta tarea.  También es necesario tener un grupo y los recursos necesarios para cuando salte la alarma.  Así fue como el atentado que se había planeado contra la Catedral de Estrasburgo fue desmantelado.  También es importante en la capitalización de los errores cometidos por los terroristas.  Antes del ataque a las Torres Gemelas, una empleada en una academia privada de pilotos notó que ciertos estudiantes dedicaban todo su tiempo a aprender a volar sin dedicar tiempo alguno a como aterrizar.  Meses después y tras el 9-11, alguien se fijó en esto.

Créame.  Lo increíble se va a convertir en creíble.  Lo que Bagdad experimenta cada día, nosotros lo haremos pronto.

 

 

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dimanche, 08 juillet 2007

Entretien avec Michael Hardt

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Réponse globale à l’Empire global !

Entretien avec Michael Hardt, auteur d’Empire, best-seller de la pensée altermondialiste

Le Prof. Michael Hardt, né en 1960 à Washington D. C., a commencé par entamer des études d’ingénieur, avant de passer à la littérature. Depuis 1993, il enseigne les sciences littéraires à la Duke University de Durham en Caroline du Nord. En l’an 2000, il a publié, de concert avec Antonio (Toni) Negri, le fameux best-seller Empire, une analyse et une théorie de la globalisation. Rapidement, ce livre est devenu la Bible des critiques de la globalisation et a connu très vite (trop vite?) un succès international, parce qu’il décrivait, en un langage clair et accessible, le processus de la globalisation comme l’émergence d’une dualité antagoniste, avec, d’une part, un “Empire” répressif et, d’autre part, opposée à lui, une “multitude” révolutionnaire. Negri, rappelons-le, est cet intellectuel italien, lié jadis aux groupes révolutionnaires italiens d’”Autonomie Ouvrière”, et longtemps emprisonné à ce titre, du chef d’“insurrection armée contre l’Etat”. Il vit aujourd’hui à Rome. L’ouvrage Empire est paru en langue française aux éditions Exil en 2001. NOUS PUBLIONS CET ENTRETIEN à TITRE DE DOCUMENTATION EXCLUSIVEMENT. En effet, Christian Harbulot, directeur de l’Ecole de guerre économique en France, et expert de la commission européenne chargée d’enquêter sur le réseau ECHELON, nous a averti dans l’ouvrage collectif La guerre cognitive. L’arme de la connaissance (Lavauzelle, Panazol, avril 2002, ISBN 2-7025-0601-1, 22 Euro) : « Un des aspects les plus spectaculaires de cette information dominance civile est symbolisé par le cas Toni Negri. Ancien responsable de l’extrême gauche italienne des années de plomb, Toni Negri a été salué par le New York Times comme l’auteur de la “première grande synthèse théorique du nouveau millénaire”. Comment expliquer qu’un ancien dirigeant gauchiste, soupçonné jadis d’orchestrer des actions de bandes armées, soit désormais encensé par un grand média américain? Serait-ce une démonstration exemplaire du pays de la liberté de la presse? Les journaux américains toutes tendances confondues n’ont pas l’habitude de porter en exemple les individus qui appellent à lutter contre le libéralisme économique. En déclarant au journal Le Monde (27/28 janvier 2002) que “le nationalisme est une forme qui ne fonctionne plus et le souverainisme n’est qu’une illusion pernicieuse”, Toni Negri rend un grand service aux Etats-Unis. Il contribue à casser la légitimité du discours sur le recherche de puissance qui pourrait naître en Europe au nom de la défense des opprimés. Selon lui, la seule alternative au capitalisme est la construction de contre-pouvoirs générés par la contestation de la société civile mondiale. Cette analyse est intéressante à plus d’un titre. Quelle menace peut représenter pour l’empire américain, un “contre-empire” représenté par un mouvement sans patrie ni frontières, émietté en autant de forces de proposition alternative qu’il y a de sujets de contestation? En revanche, le fait d’accorder une résonance médiatique au discours d’un théoricien anticapitaliste qui discrédite toute idée naissante de souverainté européenne est une démarche très habile» (op. cit., pp. 246-247). Dans notre numéro d’octobre 2002, nous avons publié une réponse critique et acerbe de “Pankraz”, alias Günther Zehm, à un article d’Alain de Benoist, vantant, comme Negri et Hardt, la lutte métapolitique par “réseaux”. Curieux, tout de même, que le leader de la ND, en théorie anti-américaine et anti-capitaliste, s’aligne sur un auteur d’extrême-gauche, qu’un analyste aussi fin que Harbulot, considère comme faisant le jeu de Washington. De Benoist répand cette théorie en France et en Allemagne, prenant le relais de Negri et Hardt, après la parution du livre collectif dirigé par Harbulot et portant sur la “guerre cognitive”, autre appelation de la “guerre culturelle” ou de la “métapolitique”, démarche essentielle et initiale, selon de Benoist, de sa ND. Le livre de Harbulot n’a donc pas pu lui échapper. Alors pourquoi a-t-il ignoré l’avertissement de son compatriote, spécialiste ès-guerre cognitive? Et pourquoi ne trouve-t-on nulle trace de cet excellent ouvrage français dans les publications néo-droitistes? Œuvre-t-il lui aussi à saper l’émergence d’une puissance en Europe? Autre famille politique, autre manipulation? Lisons donc l’entretien de Junge Freiheit avec Hardt, et observons les errances “réseauïstes” de de Benoist, à la lumière de l’avertissement de Christian Harbulot.

Q. : Professeur Hardt, le livre que vous avez écrit avec le philosophe italien Antonio Negri, Empire, a suscité attention et débats dés sa parution, et cela à grande échelle. Dans les pages consacrées aux débats sociologiques et politiques des grands quotidiens américains, tels le New York Times, on a dit que vous aviez accouché de la “première grande théorie du 21ième siècle”. Après de grands politologues comme Paul Kennedy ou Chalmers Johnson aient, les premiers, constaté l’émergence d’un nouvel impérialisme américain, vous décrivez, pour votre part, mais cette fois d’un point de vue “communiste”, le développement futur du monde occidental sous l’hégémonie américaine, qui se muera en un Imperium global de type nouveau. Deux ans après le 11 septembre 2001, les Américains viennent de boucher la dernière brèche qui subsistait dans le réseau de leur présence militaire dans le monde, notamment en installant des troupes en Asie centrale. Cette extension du pouvoir politique mondial des Etats-Unis relève-t-elle encore d’un impérialisme classique ou bien assiste-t-on au passage à une nouvelle forme d’Imperium?

MH : Bon nombre de stratèges de la Maison Blanche pensent encore en termes d’impérialisme à la mode ancienne, c’est-à-dire un impérialisme reposant sur la domination militaire d’une puissance hégémonique. En ce sens, ils entendent répéter les impérialismes européens de jadis. Kennedy et Johnson, que vous citez dans votre question, ont très bien prévu cette tendance et, si leurs analyses nous apportent beaucoup, elles demeurent à mes yeux, insuffisantes. Car, de fait, les concepts traditionnelsservant à définir la puissance impériale sont inappropriés au 21ième siècle, comme le prouvent les événements actuels en Irak.

Q. : Les Etats-Unis ont cependant divisé le globe toute entier en zones militaires et, pour chacune de ces régions, ils ont désigné un commandant suprême américain, qui, en règle générale, est plus puissant que la plupart des chefs d’Etat locaux...

MH : La tentative de soumettre le globe au contrôle américain échouera. Conquérir une région, y planter son drapeau et puis installer un gouvernement dépendant composé de princes locaux, comme le faisaient avec succès les Britanniques au temps de leurs colonies africaines et asiatiques, est une méthode qui ne fonctionne plus aujourd’hui. Nous assistons à l’émergence de mouvements de révolte, la résistance des peuples s’organise sous des formes multiples, qui vont de la guerilla aux soulèvements populaires à la Intifada, voire au terrorisme. Aujourd’hui, l’hégémonie doit s’exercer sous d’autres formes.

Q. : Vous désignez cette nouvelle forme d’hégémonie, en gestation, par le concept d’“Empire”, que nous reprenons ici tel quel, parce qu’il n’est pas identique à ce que nous autres Allemands entendons par “Imperium”...

MH : La désignation classique d’“impérialisme” est trop restreinte pour pouvoir décrire ce que nous entendons exprimer par le terme “empire”. Notre concept entend décrire un ordre global en réseaux qui est toute à la fois économique, communicationnel et politique, et donc la caractéristique principale est d’être sans frontières. Jadis, les Etats nationaux représentaient l’espace de déploiement du capitalisme, d’abord sur le plan intérieur, ensuite sur le plan extérieur, ils représentaient les instances porteuses de l’impérialisme, mais ils demeuraient, dans chaque cas de figure, définis par leurs frontières. Or ces deux concepts, celui d’Etat national et celui d’impérialisme classique, ne sont plus porteurs pour le capitalisme. Car les frontières ne jouent plus aucun rôle à l’ère de la globalisation. Tout capitalisme qui continuerait à parier sur la plate-forme des Etats nationaux, réduirait automatiquement sa propre croissance potentielle.

Q. : Par conséquent, le capitalisme “saute” au niveausuivant du développement, c’est-à-dire au niveau global...

MH : On peut le dire. Oui. Et nous vivons tous cette transition dans nos vies quotidiennes. Mais,dans la plupart des cas, nous ne parvenons pas à en percevoir les conséquences, dont la principale est la croissance d’un réseau étendu au monde entier, décentralisé, composé de piliers porteurs que sont les puissance économiques, culturelles, communicationnelles et politiques. L’“Empire” se compose d’une série d’organisations nationales et supranationales, qui sont unies sous la logique d’une hégémonie.

Q. : Vous soulignez le caractère amorphe des institutions de cet “Empire”, défini comme un réseau sans frontières fixes et sans centre. Vous nous parlez, par exemple, d’un “Imperium sans Rome”. Quel rôle joue encore la superpuissance américaine?

MH : Les Etats-Unis ont un rôle privilégié et constituent en quelque sorte un nœud dans le réseau; on peut les comparer au monarque dans une république aristocratique —comme si les nobles étaient les Etats européens et les Etats capitalistes d’Asie.

Q. : D’après vous, quand il s’agit des Etats européens, a-t-on affaire à des seigneurs de l’”Empire” ou à des vassaux de l’”Empire”?

MH : Les nations européennes coopèrent à la constitution de cet “Empire”; elles cherchent leur place dans sa nouvelle hiérarchie. Pour le moment, nous vivons une situation particulière : nous assistons à la tentative du “monarque” de trahir ses fidèles. Il souhaiterait régner sans eux —de manière unilatérale— mais cette tentative échouera car elle équivaut à revenir à l’ancien impérialisme pendant la phase d’émergence de l’“Empire”. Cependant, le véritable antagonisme qui est à l’œuvre aujourd’hui n’est nullement celui de l’unilatéralisme contre le multilatéralisme, comme on le formule souvent, mais celuiquioppose un quasi multilatéralisme à la démocratie. Car l’unilatéralisme n’a aucune chance de s’implanter aujourd’hui; quant au multilatéralisme, il fait partie intégrante du processus de génèse de l’“Empire”.

Q. : La figure que prend l’”Empire” dans sa phase d’émergence est une figure d’informalité, tout comme sa manière d’exercer la domination, manière que vous définissez comme étant un “pouvoir biologique”, un “biopower”...

MH : Ma notion de “biopower” tient compte du fait que les hommes ne se définissent pas au départ d’un unique paramètre social, comme, par exemple, l’économie, la politique ou la culture, mais au départ d’un faisceau composé de ces éléments ou d’autres paramètres encore. La domination atteint dès lors son maximum d’efficacité si l’on est en mesure d’influer sur tous ces paramètres. Il ne s’agit donc plus de dominer simplement certains piliers sociaux, mais de dominer la vie des hommes tout entière. Le “biopower” signifie donc, par conséquent, de générer, de faire éclore, ce champ social en soi, de faire émerger la vie sociale, par exemple par le truchement des mass media. La forme parfaite de la domination consiste donc en ceci : faire naître une société, ce qui revient à atteindre, comme l‘exprime le langage des militaires américains, une “full spectrum dominance” (une domination à spectre complet). Cette idée est née des cogitations des militaires : pour eux, il ne suffit pas simplement d’occuper militairement un pays. Si l’on veut sécuriser définitivement un territoire, il faut être capable d’infiltrer complètement les rapports sociaux; dans le cas idéal, il faut substituer aux rapports existants de nouveaux rapports artificiellement créés.

Q. : Il ne s’agit donc pas seulement d’un contrôle des corps, mais aussi d’un contrôle de la pensée, des sentiments et des espérances des hommes...

MH : Oui mais, évidemment, cela ne fonctionne pas de manière simple. On peut manipuler, mais on ne peut pas programmer du neuf. Car on ne peut pas inculquer aux hommes de “nouveaux” souhaits et espérances; on peut cependant manipuler les souhaits et les espérances existantes de l’homme. Le rêve secret de tout gouvernement est de graver sa dominationdans l’intériorité même du peuple. Mais il subsiste toujours des résistances et ce sont elles que nous devons organiser.

Q : Donc pour vous, cette résistance passe par la figure collective de la “multitude”, c’est-à-dire de la pluralité quantitative de la démocratie de base, animée par des mouvements sociaux divers, que vous opposez à l “Empire”...

MH : La “multitude”, en effet, se compose des groupes les plus divers qui sont en perpétuel dialogue et en perpétuelle coopération les uns avec les autres. La “multitude” se définit d’ailleurs comme se définit l’“Empire”, c’est-à-dire non pas de prime abord selon un modèle classique, soit sur le nombre de ses membres, mais selon sa forme d’organisation.

Q. : D’accord, mais qui, par exemple, se met en réseau aujourd’hui selon cette forme d’organisation de type nouveau?

MH : je pense aux protestations de Seattle, de Gênes et de Porto Alegre au Brésil, à l’occasion du dernier forum social mondial. Je pense surtout à la protestation qui a eu lieu le 15 février 2003. Cette manifestation a démontré pour la première fois qu’une coordination globale était possible; en effet, des hommes et des femmes du monde entier ont manifesté ce jour-là ensemble contre la guerre qui s’annonçait imminente en Irak. Ces manifestations coordonnées ont montré que des réseaux globaux décentralisés pouvaient fonctionner effectivement. Nous ne devons pas confondre cependant la “multitude” avec les 400.000 personnes qui pérégrinent de sommet en sommet pour manifester. La “multitude” englobe l’ensemble des mouvements sociaux qui se sont démocratiquement mis en réseau, comme, par exemple, les groupes écologistes, les syndicats, les mouvements communistes, anarchistes ou religieux, les groupes d’activistes qui se mobilisent pour les droits de l’homme, etc. Chacun de ces groupes conserve son identité et, pourtant, quand il le faut, ils unissent leurs forces pour proposer une alternative commune.

Q. : Mais cette “multitude” n’est-elle pas, elle aussi dans le fond, une forme de globalisation?

MH : Généralement la globalisation nous est présentée de manière unidimensionnelle : ou l’on est “pour” ou l’on est “contre”. Il me parait plus raisonnable d’indiquer d’autres possibles pour la globalisation, des possibles qui s’inscrivent sous le signe de la liberté, de l’égalité et de la démocratie : il s’agit, pour nous, de globaliser la justice.

Q. : Considérez-vous que la “multitude” est une sorte de “nouveau prolétariat”?

MH : Oui, si l’on considère que le prolétariat, tel qu’on le définit de manière classique, englobe tous ceux qui sont contraints de produire sous les conditions que dicte le capitalisme. Lorsque l’on utilise une telle définition extensive de la notion de “prolétariat”, on peut en effet poser une analogie avec notre concept de “multitude”. Mais si vous définissez stricto sensu le prolétariat comme le seul groupe social des ouvriers de l’industrie, alors une telle analogie n’est pas possible. Car il ne s’agit pas aujourd’hui d’un milieu sociologique particulier : il s’agit, de manière bien plus générale, d’être simplement concerné par les effets de la globalisation. Le concept de “multitude” est un concept intégrateur, qui se constitue, comme je viens de le dire, par une forme spécifique d’organisation, tout comme l’“Empire” qui, lui aussi, est davantage un phénomène de “formation” plutôt qu’un état de choses finalisé. Quand Karl Marx a décrit pour la première fois le capitalisme, celui-ci, à l’époque, se limitait encore à un tout petit segment de l’économie en Europe. Ce que Marx a décrit comme étant le capitalisme n’était encore qu’une tendance, un processus qui se manifestait sous une forme précise de pratiquer l’économie, mais il n’était certes pas encore un état de choses absoluisé. De même, Marx, en posant son analyse, prédisait l’avenir. Vous devez comprendre l’analyse que nous faisons de l’“Empire” de manière analogue : comme Marx en son temps, nous décrivons un processus à l’œuvre, nous tentons de dire de quoi l’avenir sera fait.

Q. : Quelle est alors la différence entre la “multitude” et la masse?

MH : Tant la “multitude” que la masse sont plurielles, c’est-à-dire hétérogènes, mais elles se distinguent toutefois sur un plan fondamental : la masse est passive, elle peut devenir foule, foule agressive, mais elle reste manipulable. Car la masse n’a pas de volonté propre, elle a besoin d’un chef. La “multitude”, en revanche, se compose d’unités actives, sa mise en réseau est démocratique, tout comme sa manière de communiquer; ses structures de groupes, elles aussi, sont démocratiques. La “multitude” est capable de se dominer elle-même et, par conséquent, ne peut se faire manipuler.

Q. : Oui mais si l’“Empire”, qui n’a pas de centre, peut se montrer répressif, alors la “multitude”, elle aussi, le cas échéant, pourra le devenir. L’argument que vous avancez, en disant que la “multitude” n’a nul besoin de chef et garantit de ce fait la démocratie ne convainc pas...

MH : Bien sûr, nous n’avons pas de garantie formelle et absolue de démocratie, car la “multitude” aussi peut en principe dégénérer. Toutefois vous devez penser que de nos jours les conditions de la résistance ont changé. A l’époque des systèmes répressifs et autocratiques, la résistance n’était possible que sous la forme de la conjuration. Par nature, évidemment, la conjuration est le fait d’une minorité. La “multitude”, en revanche, c’est la résistance avec la participation d’un très grand nombre, d’un nombre qui ne cesse de s’accroître. Ainsi, pour cette forme de résistance, la démocratie va évidemment de soi; elle n’est pas quelque chose que l’on obtiendra et que l’on devra apprendre après la lutte révolutionnaire. En principe, la “multitude” ne peut pas fonctionner autrement que de manière démocratique, car, sinon, au vu de sa structure plurielle, elle se fractionnerait.

Q. : De fait, ces groupes sont plutôt uniformes que pluriels. Ce que vous nous présentez comme une pluralité, n’est finalement jamais rien d’autre, en réalité, que l’expression des mêmes modes de vie et de pensée occidentaux, issus de l’idéologie des Lumières, bien qu’articulés sous des formes différentes. Car, par ailleurs, vous rejettez au moins comme “démodés” les groupes qui se distinguent réellement de ces modèles, en exprimant une différence de nature tribale, traditionnelle ou fondamentaliste religieuse...

MH : Non, car j’ai bien dit, tout à l’heure, que la “multitude” ne doit jamais se confondre avec les 400.000 manifestants de Seattle, Gênes et Porto Alegre. Il serait effectivement erroné de voir en eux une avant-garde qui serait déjà aujourd’hui comme tous devront être demain. La “multitude” repose sur les différences qui différencient justement ses composantes. Quand je parle de “multitude”, je n’entends pas proposer un modèle visant à rendre tous égaux et pareils, mais je propose un modèle de coopération entre composantes qui restent différentes. Si, à terme, nous assistons tout de même à une égalisation, alors celle-ci procèdera non pas par l’alignement de tous sur un modèle précis, mais par le mouvement de tous, venus de tous côtés, dans la même mesure, vers cette égalisation.

Q. : Comment abordez-vous le fait que des peuples ou des aires culturelles s’intéressent, non pas tant à la démocratie, mais davantage à des valeurs irrationnelles comme la religion ou les traditions populaires?

MH : Il est exact que beaucoup ne partageront pas nos conceptions, ce qui m’induit à militer toujours davantage pour elles. Beaucoup disent que l’on ne peut pas exporter la démocratie en dehors de la sphère occidentale, sans avoir au préalable occidentalisé les autochtones. Je pense que cette poisition est erronée, qu’elle exprime une conception réactionnaire des choses, qui est potentiellement impérialiste.

Q. : Pensez-vous qu’il soit possible que des peuples non occidentaux ressentent toute votre propagande et votre engagement pour la “multitude” comme une variante soft de l’“Empire” occidental, qui, lui, est agressif?

MH : Je comprends votre souci : l’idée démocratique de “multitude” pourrait acquérir une dimension “missionnaire” et se replier sur elle-même; cependant, comme le concept de “multitude” implique le dialogue permanent, toute retombée impérialiste semble exclue par principe. Ensuite, je ne crois pas que nous soyons si seuls : en dehors de la sphère occidentale aussi de larges strates de population souhaitent plus de démocratie, car cette aspiration est suscitée par le degré de pauvreté, d’injustice et d’oppression. Et j’ajouterais ceci : je ne crois pas à la doctrine qui affirme que la démocratie est une invention purement européenne.

Q. : Que faut-il faire, à votre avis, avec les peuples et les sphères culturelles qui n’ont pas assez rapidement découvert les racines de leur démocratie propre?

MH : Lorsque Mao a adapté le communisme à la Chine, il ne s’est pas borné à adapter une philosophie allemande aux réalités chinoises. Il a mis au grand jour les racines chinoises de ce que Marx avait saisi et développé en Europe. C’est de cette façon-là que les choses doivent se passer avec la démocratie aujourd’hui.

Q. : Le terrorisme, lui aussi, s’oppose à l’extension au monde entier du réseau de l’“Empire”. Vu sous cet angle, appartient-il aussi de manière structurelle à la “multitude”, même s’il ne relève nullement de ce concept?

MH : Les attentats perpétrés contre des personnes non concernées placent irrémédiablement les terroristes hors du concept de “multitude”.

Q. : Votre argument est ici moralisateur et non analytique...

MH : La caractéristique majeure de la “multitude” est sa décentralisation. Le terrorisme, lui, fonctionne encore selon la structure démodée du commandement central, avec, ici, le cerveau central, par exemple Oussama Ben Laden, et, là, les cellules terroristes, qui exécutent les ordres sans réfléchir. Le terrorisme répète le modèle de la puissance qu’il combat.

Q. : Quoi qu’il en soit, ceux qui ont commis l’attentat du 11 septembre 2001 ont choisi pour cible principale le centre névralgique du commerce mondial : de ce fait, ils partageaient, au moins partiellement, votre analyse de l’“Empire”. Au lieu de frapper une cible institutionnelle, symbole d’une nation, comme par exemple le Capitole, ils ont choisi le symbole de l’économie financière mondiale...

MH : Je pense qu’au contraire, en choisissant le centre du commerce mondial, les terroristes ont prouvé qu’ils pensaient encore dans des catégories démodées et visaient des symboles commes s’ils étaient des attributs de la puissance centrale. Or le réseau global n’a plus de centre. Celui qui ne comprend pas cela, ne comprend pas où va le monde. L’“Empire” n’a plus d’iconographie; il n’y a plus aujourd’hui de “palais d’hiver” que l’on peut prendre d’assaut.

Q. : Soit, mais je ne vois pas encore très clairement comment votre théorie interprète le phénomène du terrorisme...

MH : Sous la définition de “terrorisme”, nous entendons trois choses : premièrement, des actions illégitimes contre des gouvernements légitimes; deuxièmement, l’action des gouvernements qui enfreignent les droits de l’homme; troisièmement, faire la guerre en enfreignant le droit des peuples (le droit international) et le droit de la guerre. Ainsi, Noam Chomsky, par exemple, accuse les Etats-Unis d’être une puissance terroriste, parce qu’ils enfreignent les droits de l’homme, prennent des mesures contre des gouvernements légitimes et réduisent le droit international à néant. Je suis d’accord avec Chomsky mais le débat sur ces questions ne nous mène pas loin. Le seul résultat de ce débat, c’est que Chomsky et Rumsfeld s’accusent mutuellement de soutenir le terrorisme.

Q. : Au début de votre argumentaire, vous avez décrit l’Etat national comme la plate-forme initiale du capitalisme mais qu’aujourd’hui les frontières, que cet Etat national, en tant que forme politique, a établies, constituent un frein au capitalisme. Si l’Etat national a tellement perdu de son importance pour le capitalisme et s’il a tant changé sous les effets de ce capitalisme, alors pourquoi persistez-vous à rejeter sans cesse cette forme politique, ce qui donne l’impression que vous répétez un dogme?

MH : Même si je fais l’équation suivante —l’“Empire” est au capitalisme global ce que l’Etat national était au capitalisme national— il ne faut nullement en déduire que l’Etat-Nation et l’“Empire” sont en contradiction. Nous assistons bien plutôt à une mutation de fonction dans le chef des Etats nationaux. Nous constatons, par exemple, que les Etats nationaux actuels infléchissent leurs intérêts nationaux en direction des intérêts du réseau “Empire”. Les Etats-Unis, eux aussi, devront se soumettre à cette règle quand ils constateront l’échec de leur aventure unilatérale qu’ils ont déclenchée en Irak.

Q. : Jean Ziegler, critique suisse bien connu de la globalisation, nous a récemment accordé un entretien (Junge Freiheit n°33/2002), où il insistait très fort sur la fonction éminemment démocratique et sociale de l’Etat national, qui constituait dès lors un frein à la globalisation...

MH : Bien sûr, au sein de la gauche internationale, nous trouvons des gens qui défendent cette position, qui veut maintenir l’autorité de l’Etat national au nom de la démocratie. De prime abord, cette position semble rationnelle. Mais elle néglige le fait qu’il y a d’ores et déjà un terrible déficit démocratique au sein des Etats nationaux existants. Nos systèmes politiques occidentaux ne représentent plus vraiment leurs peuples. Dès lors, même si les “démocraties” des Etats nationaux d’Occident conservent encore d’admirables éléments de démocratie, la démocratie véritalbe ne pourra qu’être globale.

Q. : Oui mais le peuple n’est-il pas justement la “multitude” au sein de l’Etat national, dans le cadre limité de l’Etat national et dans la mesure où tout homme est forcément inclu dans un cadre limité, hic et nunc, et ne peut pas être de partout et de nulle part ?

MH : Le concept de peuple dans la philosophie européenne moderne pose le peuple comme unité. C’est la raison pour laquelle, nous dit par exemple Thomas Hobbes, un peuple peut être souverain, au contraire de la pluralité que représente une population hétérogène et plurielle. La “multitude”, pourtant, est une telle pluralité. Les notions de “peuple” et de “multitude” sont donc intrinsèquement et totalement divergentes.

Q. : Oui, mais les conservateurs américains autour de Pat Buchanan...

MH : ...ne sont pas vraiment intéressés à promouvoir la démocratie!

Q. : Vous niez d’emblée le fait que des conservateurs puissent avoir une définition cohérente de la démocratie. Vous réclamez pour vous seuls et vos amis l’exclusivité de définir la démocratie, laquelle doit correspondre, de manière monopolistique, à la notion globaliste que vous en donnez. Voilà qui me paraît bien apodictique!

MH : Je n’ai jamais dit que la démocratie de facture globale va fonctionner automatiquement! Je me borne à dire qu’il faut avoir l’audace, aujourd’hui, de la tenter, parce que c’est une nécessité politique.

Q. : Historiquement, la démocratie est une forme de gouvernement pour les unités politiques limitées, quantifiables et saisissables par les sens, comme, par exemple, la polis antique. Etendre cette conception raisonnable et vivable de la démocratie à des unités gigantesques, qui se veulent globales, comme ce fut le cas avec l’Empire d’Alexandre ou l’Empire romain, équivaut à la détruire. Au vu de cette expérience historique, votre “démocratie globale” n’est-elle pas une contradictio in terminis?

MH : De prime abord, votre reproche paraît justifié. Mais au 17ième siècle, nous avons assisté à une transformation radicale de la démocratie. Les Grecs avaient défini la démocratie comme le “pouvoir du grand nombre”, contraire de la monarchie, qui est le “pouvoir d’un seul”, et de l’aristocratie, le “pouvoir des meilleurs” (et par conséquent des “moins nombreux”). Vous avez raison de dire que la conception grecque est une conception “limitée”. Dans l’Europe moderne, la démocratie a cessé d’être le “pouvoir du grand nombre”, pour devenir le “pouvoir de tous”. La démocratie est devenue un absolu. Mais à l’époque, bon nombre de sceptiques ont dit que la France n’était pas Athènes et que la démocratie ne pouvait pas être hissée au niveau de l’Etat national. Aujourd’hui, nous avons affaire au même type de sceptiques. Or, actuellement, il est de notre devoir de développer des concepts capables de hisser la démocratie au niveau global.

Q. : Vous venez pourtant de dire que la mutation en direction du niveau global était une nécessité, parce que la démocratie ne fonctionne pas correctement au niveau de l’Etat national. Et maintenant, vous nous dites tout de go que l’installation de la démocratie dans les Etats nationaux doit servir de modèle...

MH : La démocratie reste à mes yeux la promesse faite par les Etats nationaux modernes, mais une promesse qui n’a pas encore été tenue. Nous avons pour tâche de la rendre concrète et de trouver des voies pour accomplir enfin la promesse de démocratie. Réussirons-nous? Nous ne pouvons le dire à l’avance. Mais une chose est sûre : ne suivons pas ceux qui disent a priori que c’est impossible.

Q. : Même si vous attribuez une fonction à l’Etat national dans le processus d’émergence de l’“Empire”, vous ne pouvez ni nier ni combattre les éléments anti-globalistes qu’ils contiennent. Ne devez-vous pas lui attribuer, au moins, un caractère hybride et le considérer aussi comme partie de la “multitude”, dans sa résistance à l’“Empire”?

MH : Non, nous devons trouver une autre alternative que le simple retour à l’Etat national, dont le déficit démocratique recèle bien des dangers, par exemple, celui de retomber dans les errements de l’impérialisme, comme tentent de le faire les néo-conservateurs aujourd’hui aux Etats-Unis.

Q. : Les néo-conservateurs américains actuels aiment pourtant à parler d’une “révolution démocratique” à l’échelle mondiale, au contraire des conservateurs traditionnels comme Pat Buchanan. Je trouve que les arguments des néo-conservateurs et les vôtres sont assez similaires, car eux comme vous souhaitez un “changement rapide”, que l’on peut considérer comme une révolution.

MH : Ce qu’entendent les néoconservateurs par “révolution” correspond au type de révolution qu’a apporté l’âge de l’absolutisme par rapport au moyen âge. Le fait que les conservateurs isolationnistes et les néoconservateurs impérialistes se crêpent le chignon démontre que ces groupes ne sont pas homogènes. Depuis le 11 septembre les néoconservateurs ont obtenu le droit d’exécuter des plans qui se trouvaient déjà dans les tiroirs auparavant. Je suis convaincu que bon nombre de diplomates de la vieille école, qui officient à la Maison Blanche et au Département d’Etat, ont été formés à l’époque où dominait l’idée du multilatéralisme et de la coexistence pacifique : ils ont honte, aujourd’hui, quand ils entendent les discours politiques des néoconservateurs. Les Etats-Unis sont un ensemble complexe plein de contradictions. Ce qui est dramatique, c’est que les attentats du 11 septembre ont contraint au silence les voix de l’équilibre, de la justice et de l’entente. Nous, anti-globalistes, nous ne voulons pas que ce changement s’installe et devienne définitif; notre tâche est de rendre la parole à ceux que l’on a réduit au silence.

(entretien paru dans Junge Freiheit, n°37/2003; propos recueillis par Moritz SCHWARZ).

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