jeudi, 23 octobre 2025
Sacré & consumérisme: des célébrations de Samhain à Halloween

Sacré & consumérisme: des célébrations de Samhain à Halloween
La comparaison entre les deux interprétations de la fête de passage met en évidence la dégénérescence des liturgies dans le calendrier de la matérialité économique
par Riccardo Mulas
Source: https://www.barbadillo.it/125538-sacro-consumismo-dalle-c...
Samhain, le Nouvel An celtique
Nous l’admettons. La “fête” d’Halloween ne nous a jamais enthousiasmés. Au contraire, nous ne cachons pas une certaine méfiance envers une date que nous n’avons jamais vraiment ressentie comme étant celle qui révèlerait une identité propre. À vrai dire, les préjugés ont toujours été nombreux. Si nous devions écrire les mots qui viennent à l’esprit en pensant au 31 octobre, ce seraient avant tout: “costumes effrayants”. Ensuite, nous penserions à des fêtes déguisées, des soirées à thème, des locaux décorés, des étagères de supermarchés envahies par des citrouilles en plastique et des déguisements. Et à peu d’autres choses.
En somme, dans l’imaginaire, Halloween s’est toujours présenté comme une sorte de carnaval automnal, peut-être plus sombre, plus macabre, mais toujours dépourvu de substance. De même que nous n’attribuons pas de signification particulière aux œufs de Pâques ou aux bas de la Befana, symboles vidés à cause de leur commercialisation excessive; nous pensons que le 31 octobre est également devenu une mise en scène de style capitaliste, réduite au spectacle et à la consommation, privée de toute valeur spirituelle originelle.
Nous utilisons volontairement le mot “dégénéré” parce qu’animés par la curiosité de comprendre ce que jusqu’alors nous avions seulement jugé, nous avons découvert que derrière Halloween se cache en réalité une célébration très ancienne, dotée d’un sens symbolique et spirituel profond: le Samhain des peuples celtes. En laissant de côté les apparences et les préjugés, nous avons approfondi ses origines et sommes tombés sur une histoire qui fascine et surprend, faite de mythes, de légendes et de rites nés dans la mystérieuse et verte Irlande.
Les racines celtiques d’une fête de “passage”
Les Celtes, peuples de bergers intimement liés aux rythmes de la nature, fondaient leur existence sur une relation sacrée avec la terre, source de vie et de prospérité. Pour eux, chaque saison avait une signification précise, et le passage du temps coïncidait avec le renouvellement cyclique de la nature. La fin de l’été, qui tombait précisément le 31 octobre, marquait la fin des pâturages et des récoltes, ainsi que le début de l’hiver, saison d’obscurité et de repos. En gaélique, Samhuinn signifiait “fin de l’été”.
Halloween naît donc de ces fêtes de passage, où la communauté célébrait non seulement la clôture d’un cycle, mais aussi le début de la nouvelle année naturelle. C’était un temps de transition, chargé d’ambivalence, de joie et de peur, de gratitude et d’incertitude, de fête et d’introspection. Le Samhain représentait le moment où les liens sociaux et spirituels se renforçaient, et où les rites de protection et de purification servaient à conjurer les peurs collectives et à invoquer la bienveillance des dieux.

Avec le christianisme
Avec l’avènement du christianisme, ces traditions ne disparurent pas complètement ; au contraire, elles furent en partie intégrées, superposées ou réinterprétées. Le culte des esprits et de la mort se fondit avec celui des défunts et des saints, en maintenant vive la même tension spirituelle : l’idée que la “mort de l’été” n’était pas la fin, mais le début d’un nouveau cycle vital. En hiver, en effet, la nature semble mourir, mais en réalité elle se renouvelle dans le silence de la terre, où reposent les graines et les morts. De cette analogie naît le lien profond entre Samhain et le culte des défunts : la croyance que, dans la nuit entre la vieille et la nouvelle année, les esprits pouvaient franchir le seuil entre les mondes, unissant pour un instant l’au-delà et la vie terrestre.
Cette nuit-là, les Celtes allumaient le Feu Sacré sur les collines, symbole de purification et de protection. Pendant trois jours, on dansait, on festoyait, on se déguisait avec la peau des animaux sacrifiés pour effrayer les esprits maléfiques, et on laissait en dehors des maisons de la nourriture et du lait pour les esprits bienveillants.

C’était une fête qui parlait de peur et d’espoir, de fin et de renaissance, de nuit et de lumière. Un moment d’unité, où la communauté retrouvait sa propre essence face au plus grand mystère : celui du temps et de la mort.
La déformation d’Halloween
Si l’on met en parallèle les deux visions de la fête en question, l’ancienne et la moderne, on voit plus clairement l’évolution, ou plutôt, la dégénérescence, de la société: d’un monde où l’esprit dominait la matière, à un monde où la matière a fini par étouffer l’esprit; d’une communauté qui, en se rassemblant autour d’un feu sacré, affirmait son unité, à la société moderne qui exploite chaque occasion pour alimenter le consumérisme et remplir les poches de la caste marchande.
Halloween représente donc le miroir de notre temps, une métaphore d’une époque perdue et d’une société, qui n'est plus communauté, une époque qui erre entre la dissolution de la tradition, du sacré et de la mémoire, et l’émergence du monde illusoire de la consommation et de la matière.
23:20 Publié dans Traditions | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : traditions, samhain, automne, traditions celtiques |
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