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jeudi, 09 octobre 2008

Crise financière ou agonie du capitalisme?

Trouvé sur: http://ettuttiquanti.blogspot.com

Crise financière ou agonie du capitalisme ?

Par Thierry Ternisien d'Ouville, 29/9/2008 : "Bien loin d’être due à l’œuvre du spéculateur, l’un des trois boucs émissaires créés par nos sociétés actuelles, la crise financière qui secoue l’économie mondiale n’est que l’aboutissement logique d’une évolution qui s’est accélérée. Par son développement même le capitalisme a atteint des limites qu’il est incapable de dépasser et ne survit que par des subterfuges à la crise de ses trois piliers : l’accumulation du capital, la consommation, le travail.

Le capital. Du fait des gains croissants de productivité et de la baisse de contenu en travail des produits, la production n’est plus capable de valoriser l’ensemble des capitaux accumulés, une partie croissante de ceux-ci conservant la forme de capital financier. Une industrie financière s’est constituée qui ne cesse d’affiner l’art de faire de l’argent en n’achetant et ne vendant rien d’autres que diverses formes d’argent. C’est cette industrie que nous voyons s’écrouler. C’est ce qui a fait dire à André Gorz, dans le dernier article écrit avant sa mort que « la sortie du capitalisme a commencé ».

La consommation. Cette impossibilité croissante de valoriser le capital est accentuée par la baisse du pouvoir d’achat dans tous les pays ayant adopté le dogme néolibéral. Le recours à l’endettement massif, dont les subprime ne sont que le dernier épisode, a servi à masquer cette évidence en poussant des millions de travailleurs à consommer des richesses qu’ils n’avaient pas encore créées. C’est cette course à l’endettement qui vient de s’enrayer. Elle devrait logiquement être suivie par un effondrement de la consommation.

Le travail. Cet effondrement de la consommation sera lui-même accentué par la disparition du travail-emploi-marchandise. Ce n’est pas seulement le plein emploi, c’est l’emploi lui-même que le post-fordisme a entrepris de supprimer. Derrière des taux de chômage flatteurs et très souvent manipulés, cette destruction est visible dans la réalité des chiffres de la durée du travail qui traduit une dégradation très profonde de la qualité des derniers emplois créés.

Il faut être précis : nous aurons toujours autant de travail que nous voudrons, mais il ne prendra plus la forme du travail-emploi marchandise. Questionner le travail en revisitant l’œuvre d’Hannah Arendt et sa distinction entre les différents types d’activité humaine (travail (labour), œuvre (work), action) est très éclairant.

Par cette évolution, en détruisant ses moteurs, le capitalisme travaille à sa propre extinction et fait naître des possibilités sans précédent de passer à une économie affranchie de la domination du capital sur le mode de vie, les besoins et la manière de les satisfaire. C’est cette domination qui demeure l’obstacle insurmontable à la limitation de la production et de la consommation. Elle conduit à ce que nous ne produisons rien de ce que nous consommons et ne consommons rien de ce que nous produisons.

Tous nos désirs et nos besoins sont des besoins et des désirs de marchandises, donc des besoins d’argent. L’idée du suffisant -l’idée d’une limite au-delà de laquelle nous produirions ou achèterions trop, c’est-à-dire plus qu’il ne nous en faut -n’appartient pas à l’économie ni à l’imagination économique. Elle peut par contre appartenir à l’imagination citoyenne."

00:25 Publié dans Economie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : capitalisme, finances, banques, globalisation, etats-unis | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

dimanche, 28 septembre 2008

Le temps des continents et la déstabilisation de la planète

Le temps des continents et la déstabilisation de la planète


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Mondialisation.ca, Le 17 septembre 2008
Eurasia Rivista di Studi Geopolitici no. 2

La réaffirmation de la Russie comme acteur mondial, avec la puissante croissance économique des deux colosses asiatiques, Chine et Inde, semble avoir définitivement marqué, dans le cadre des relations internationales, la fin de la saison unipolaire sous conduite étasunienne, et posé les conditions, minimales et suffisantes, pour la construction d’un ordre planétaire articulé sur d’avantage de pôles. Les entités géopolitiques qui caractérisent ce nouveau cycle ne seront pas, vraisemblablement, les nations ou les puissances régionales mais bien les grands espaces continentaux.

 

Un nouveau cycle géopolitique

 

Le nouvel ordre international qui s’est réalisé après le 11 septembre 2001 est dû surtout à  trois facteurs concomitants : le premier concerne la politique eurasiatique lancée à Moscou, immédiatement après la fin de la présidence Eltsine, à partir de 2000-2001 ; le second concerne le développement économique particulier de l’antique Empire du Milieu qui, intelligemment intégré par la direction chinoise dans le cadre d’une stratégie géopolitique de longue période, fera de Pékin non seulement un géant économique mais un des principaux protagonistes de la politique mondiale du 21ème siècle. Le troisième, enfin, est strictement connecté à l’action de pénétration militaire des Usa dans l’espace proche et moyen-oriental, que Washington accompagne, de façon synergique, d’une intense activité de pression  politique et économique dans certaines zones critiques  comme celle de l’Asie centrale.

 

Les facteurs rappelés ci-dessus ont mis en évidence certains éléments importants utiles pour l’analyse géopolitique des futurs scénarios mondiaux : la centralité de la Russie comme région pivot de l’Eurasie, l’importance de la Chine comme élément de stabilité dans la masse continentale eurasiatique et d’équilibre pour la planète entière ; les mêmes facteurs, en outre, ont  reproposé à l’échelle mondiale, les tensions permanentes entre d’une part les puissances thalassocratiques, représentées aujourd’hui par les USA, et d’autre part les puissances continentales, constituées principalement par la Russie et la Chine.

 

Pour la première fois depuis la dissolution de l’URSS, nous assistons au renforcement et à la mise au point d’importants dispositifs géopolitiques, comme par exemple l’Organisation de la Conférence de Shanghai et l’Organisation du Traité de Sécurité Collective des Pays de la Confédération des Etats Indépendants, qui rassemblent la Russie et les principaux pays du continent asiatique. De tels dispositifs sont significativement ouverts aussi au Pakistan, à la Turquie et à l’Iran mais excluent les puissances occidentales et les USA. Il faut y ajouter aussi  les tentatives et les aspirations sud-américaines relatives à la constitution d’un système de défense du sous-continent indio-latin, délivré de Washington.

 

L’œuvre patiente et continue de tissage de relations spéciales entre Russie, Inde, Chine, Iran et les pays d’Asie centrale, mise en oeuvre par Poutine, et diligemment poursuivie maintenant par Medvedev, a certainement ralenti l’expansionnisme étasunien au cœur de l’Asie ; elle a aussi irrité fortement ces lobbies européens et d’outre-atlantique qui espéraient, au début des années 90 du siècle dernier, à force de « vagues démocratiques », ou plutôt de « bourrades démocratique » (2) - comme on le verra plus tard avec les agressions et les « guerres humanitaires » de l’Occident américano-centrique contre la Fédération yougoslave, l’Afghanistan, l’Irak - l’unification de la planète sous l’égide de Washington, champion de l’Humanité et, avant tout, la réalisation d’un gouvernement mondial fondé sur des critères libéraux de l’économie de marché.

 

Sur l’échiquier mondial, la formation d’une sorte de bloc eurasiatique, qui en est pour le moment encore à un stade embryonnaire et, du reste, déséquilibré  vers la partie orientale de la masse continentale, à cause principalement de l’absence de l’Europe comme entité politique cohérente et de son insertion artificielle dans le camp « occidentaliste » ; cette formation a, en outre, et par effet de polarisation, indéniablement favorisé les tendances continentalistes de certains gouvernements d’Amérique du Sud (Argentine, Brésil, Venezuela et Bolivie), en mettant ainsi en valeur l’hypothèse, réaliste, d’un scénario multipolaire en cours de constitution, articulé sur des entités géopolitiques continentales (3).

 

Nouvelles et vieilles tensions

 

La crainte d’une jonction des intérêts  géopolitiques entre les grandes puissances eurasiatiques (Russie, Chine et Inde) et les tendances continentalistes de certains gouvernements sud-américains (4) ont éveillé, ces derniers temps, une attention ravivée du Département d’Etat des USA et de certains think tank atlantiques, chargés d’identifier  les zones  de crise et de définir des scénarios géopolitiques qui soient en syntonie avec les desiderata et les intérêts globaux de Washington et du Pentagone ; une attention vers ces régions de la masse continentale eurasiatique – et du sous-continent indio-latin – qui seraient plus exposées aux déchirures causées par des tensions endogènes historiques et encore irrésolues.

 

C’est donc dans la perspective d’opérations de malaise et de pression envers la Chine, la Russie et l’Inde et certains gouvernements latino-américains que, pensons-nous, l’on peut  interpréter avec efficience certaines situations critiques qui sont proposées, avec une particulière emphase, à l’attention de l’opinion publique occidentale, par les principaux organes d’information.

 

Nous faisons ici référence à ce qu’on désigne comme la question de la minorité du peuple Karen et de la « révolte » couleur safran (5) du Myanmar, aux questions du Tibet et de la minorité uigur  en République Populaire de Chine, à la déstabilisation du Pakistan (6), et au maintien d’une crise endémique dans la région afghane.

 

En instrumentalisant les tensions locales de certaines aires géostratégiques, les USA, avec leurs alliés occidentaux, ont lancé un processus de déstabilisation – de longue période -  de tout l’arc himalayen, véritable charnière continentale, qui va impliquer huit pays de l’espace eurasiatique (Népal, Pakistan, Afghanistan, Myanmar, Bangladesh, Tibet, Bhoutan et Inde).

 

Ce processus de déstabilisation se coordonne avec celui déjà ébauché par les USA dans la zone caucasienne, sur la base des indications exposées, il y a plus de dix ans, par Bzezinski dans son ouvrage « Le grand échiquier » (7) ;  ce processus semble en outre se conjuguer  au Projet du Nouveau Grand Moyen-Orient de Bush-Rice-Olmert, destiné à redéfinir les équilibres de toute la zone en faveur des Etats-Unis et de son principal allié régional, Israël, ainsi qu’à reconsidérer les frontières des principaux pays de la zone (Iran, Syrie, Irak et Turquie) le long de lignes confessionnelles et ethniques.

 

Parallèlement à ce processus de déstabilisation, déjà en cours dans l’arc himalayen, il semble, selon l’avis autorisé du professeur Luiz Alberto Moniz Bandeira (8), que les USA en aient lancé  un autre, analogue, dans leur ex-arrière cour, en Bolivie : précisément dans la « région  de la demi-lune » sur la base des tensions ethniques, sociales et politiques qui affectent toute la zone.

 

Dans le cadre des stratégies destinées à fragmenter les espaces continentaux en voie d’intégration, il vaut la peine de souligner le grand rôle qu’ont joué et jouent les Organisations Non Gouvernementales dites humanitaires. Selon Michel Chossudovsky, directeur du Centre pour la recherche sur la mondialisation (CRM-CRG), certaines d’entre elles seraient directement et indirectement reliées à la CIA, par l’intermédiaire de la National Endowment for Democracy, puissante organisation étasunienne créée en 1983, dans le but de renforcer les institutions démocratiques dans le monde au moyen d’actions non gouvernementales (9).

 

L’histoire du 21ème siècle sera donc, selon toutes probabilités, l’histoire de l’affrontement entre deux tendances opposées : celle de la fragmentation (10) de la planète, pour le moment voulue par les USA, et celle des intégrations continentales, souhaitée par les plus grandes puissances eurasiatiques et par certains gouvernements du sous-continent indio-latin.

 

 

EURASIA. RIVISTA DI STUDI GEOPOLITICI.  n. 2 – 2008

Editorial du numéro 2 Mai-août 2008


Traduit de l’italien par Marie-Ange Patrizio

 

 

1. Marco Bagozzi, Accordi Brasile-Venezuela: verso una alleanza militare sudamericana svincolata da Washington,

www.eurasia-rivista.org, 25 aprile 2008.

2. Samuel Huntington, La terza ondata. I processi di democratizzazione alla fine del XX secolo, Il Mulino, Bologna, 1995.

3. Richard Hass, président du Council on Foreign Office, l’influent think tank étasunien, est d’un autre avis : selon lui le 21ème siècle se dirigerait vers un système de non polarité, caractérisé par une ample diffusion de pouvoir étalé sur plusieurs objets (Etats, Puissances régionales, ONG, Corporations, Organisations internationales, etc.) plutôt que par une concentration sur quelques (rares) pôles. Richard Hass, The Age on Nonpolarity. What Will Follow U.S. Dominance, Foreign Affairs, vol. 87, n. 3, May/June 2008, pp. 44-56.

4. Raúl Zibechi, Il ritorno della Quarta Flotta: un messaggio di guerra, Cuba debate, 9 maggio 2008, in italiano:

www.eurasia-rivista.org, 17 maggio 2008.

5. Voir dans ce même numéro de Eurasia, 2/2008, F. William Engdahl, La posta geopolitica della “rivoluzione color zafferano.

6. Michel Chossudovsky, La destabilizzazione del Pakistan, www.eurasia-rivista.org, 7 gennaio 2008; Alessandro Lattanzio, Il grande gioco riparte da Islamabad, www.eurasia-rivista.org, 29 dicembre 2007; Giovanna Canzano, La morte cruenta della Bhutto, intervista a Tiberio Graziani, www.eurasia-rivista.org, 28 dicembre 2007.

7. Zbigniew Brzezinski, La Grande Scacchiera, Longanesi, Milano, 1998.

8. Luiz Alberto Moniz Bandeira, A Balcanização da Bolívia, Folha de S.Paulo, 15/07/2007. Traduction italienne sur www.eurasia-rivista.org, 25 ottobre 2007. Sur le même thème voir aussi l’interview de Luiz Alberto Moniz Bandeira, Bolivia, Cuba, la seguridad de Brasil, el petróleo y la realidad del dólar, sur :  www.laondadigital.com et en italien sur www.eurasia-rivista.org, 9 maggio 2008.

9. Michel Chossudovsky, Cina e America: l'Operazione psicologica dei diritti umani in Tibet, www.eurasia-rivista.org, 22 aprile 2008.

10. François Thual, Il mondo fatto a pezzi, Edizioni all’insegna del Veltro, Parma, 2008.


 Articles de Tiberio Graziani publiés par Mondialisation.ca