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lundi, 26 septembre 2016

Logique des révolutions

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Logique des révolutions

À propos de : Hamit Bozarslan et Gaëlle Demelemestre, Qu’est-ce qu’une révolution ? Amérique, France, Monde Arabe, 1763-2015, Éditions du Cerf.


Ex: http://www.laviedesidees.fr
 

Avec les « Printemps arabes », la question du fait révolutionnaire s’est vue posée à nouveaux frais. Suivant une démarche comparatiste, H. Bozarslan et G. Delemestre analysent le lien entre révolution et processus démocratiques, et reviennent sur le rôle des intellectuels dans la dynamique révolutionnaire.

revolutionslivre.jpgRecensé : Hamit Bozarslan et Gaëlle Demelemestre, Qu’est-ce qu’une révolution ? Amérique, France, Monde Arabe, 1763-2015, Paris, Éditions du Cerf, 2016, 400 p., 29€.

Depuis l’hiver 2010-2011, les soulèvements de populations dans différents pays arabes ont fait couler beaucoup d’encre. Les innombrables travaux sur le sujet ont cherché à comprendre les causes et les circonstances locales des révoltes arabes. Mais ces soulèvements ont surtout montré le besoin de repenser le fait révolutionnaire. Car, en faisant revenir « l’âge des révolutions » sur le devant de l’Histoire, « le Printemps arabe » a remis en cause les anciennes grilles d’analyse. Redéfinir le fait révolutionnaire et créer de nouveaux outils d’analyse à l’aune des soulèvements arabes est justement l’ambition de Qu’est ce qu’une révolution ? de Hamit Bozarslan et Gaëlle Demelemestre.

Dans cet ouvrage, les auteurs poursuivent la réflexion sur les révolutions arabes dans la démarche comparatiste initiée en 2011 par H. Bozarslan et al. dans Passions révolutionnaires [1]. Rédigé pendant le « Printemps » tunisien, ce livre comparait les crises révolutionnaires ayant éclaté au Moyen-Orient au cours du XXe siècle avec d’autres révolutions non occidentales. Pour sa part, Qu’est-ce qu’une révolution ? met les récentes révolutions arabes en parallèle avec les deux références historiques classiques en matière de contestation que sont les révolutions américaine et française. Ce faisant, l’ouvrage explore le rapport entre l’attente d’un changement révolutionnaire et l’idée de démocratie. Cette approche novatrice redonne toute leur place aux revendications démocratiques exprimées au commencement des soulèvements arabes, rappelant les dilemmes qu’ont dû affronter, en leur temps, les révolutionnaires américains et français.

Le concept de « révolution », entre slogan et catégorie scientifique

La première chose que les révoltes arabes ont remise en cause, c’est le terme de « révolution » même. A la fois rigide et polysémique, il ne permettait pas de rendre compte des différentes évolutions des « Printemps arabes ». Le retour des régimes liberticides, l’éclatement de guerres civiles et l’abandon des revendications démocratiques par une grande partie des populations qui ont suivi les contestations étaient loin de correspondre à l’image normative des révolutions [2]. Les nombreuses controverses qui ont accompagné l’usage du terme de « révolution » pour parler des soulèvements arabes illustrent bien la difficulté d’utiliser ce concept, qui fonctionne à la fois comme un slogan, destiné à agir sur la réalité pour la changer, et un terme théorique servant à décrire cette réalité en changement.

La première partie de l’ouvrage d’H. Bozarslan et G. Demelemestre vise à répondre à ces questions afin d’analyser les révolutions au-delà de telles controverses. Ils constatent que les chercheurs sont confrontés à une double exigence. D’une part, ils ont besoin d’« objectiver » la révolution, c’est-à-dire d’essayer de sortir du discours axiologique qui se tient sur elle, afin de la comparer à d’autres mouvements du même type. D’autre part, il leur faut comprendre que cette objectivation peut contredire les dénominations utilisées par les acteurs pour définir leurs expériences. Car, « désigner une expérience (…) comme une révolution, n’est pas un acte neutre : c’est monopoliser le droit de classer et de déclasser ». En effet, « la prétention même d’être une révolution produit des effets de nature révolutionnaire sur une société que le chercheur ne peut négliger » (p. 45-46).

La difficulté d’appréhender une révolution tient également à l’emprise de discours qu’elle engendre sur elle-même, sa propre « philosophie de l’histoire » faisant de la révolution une nécessité historique qui ne pouvait qu’advenir. Vécue comme une lutte eschatologique entre le Bien et le Mal, elle exige du chercheur qu’il se positionne pour ou contre elle. Si cette philosophie de l’histoire empêche d’aborder une révolution d’une manière historique et sociologique, il est également contre-productif de l’écarter de l’analyse. Car, vécue dans la chair de ses acteurs, elle exerce des effets transformateurs sur la société. Dès lors, le chercheur « est obligé de se dédoubler », en adoptant une posture sans « fétichisme, ni rejet » vis-à-vis de la révolution (p. 24-25). De multiples lectures du fait révolutionnaire sont donc proposées : il est analysé à la fois comme une attente, un principe de changement, une rupture historique, un événement universel ancré dans le particulier, et le processus d’institutionnalisation d’un nouvel ordre politique. Ce choix d’une pluralité de lectures est permis par la variation des échelles de temporalité dans lesquelles s’inscrit un fait révolutionnaire. Il est à la fois l’événement, souvent court et dense, qui aboutit au renversement de l’ancien régime ; le processus, souvent laborieux, de négociation d’un nouvel ordre institutionnel ; et une construction historiographique permettant d’insérer une révolution dans une histoire longue (p. 29). Chaque partie de l’ouvrage est, par conséquent, consacrée à une révolution différente traitée sous un aspect particulier.

revolution(1).jpgDeux « passions », révolution et démocratie

Le fil conducteur de l’ouvrage est l’exploration du rapport entre faits révolutionnaires et attentes démocratiques. Sans établir un lien de causalité entre ces deux « passions » – un lien démenti par nombre de révolutions ayant débouché sur des régimes autoritaires comme en Russie, Chine ou Iran – le livre explore les conditions historiques dans lesquelles ces deux éléments se sont juxtaposés. Très riches et informatives, les parties 2 et 3, rédigées par la philosophe Gaëlle Demelemestre, suivent les débats qui ont accompagné la construction d’un ordre démocratique en Amérique et en France. À travers une comparaison entre les deux mouvements révolutionnaires, l’auteure explique pourquoi ils ont débouché sur différentes façons de concilier pouvoir et libertés individuelles. Les conditions politiques dans lesquelles surviennent les deux révolutions jouent un rôle crucial dans cette différence. Aux États-Unis, la constitution d’une strate sociale active a précédé la création de l’État, permettant d’élever la liberté d’entreprendre au-dessus de tout. En revanche, en France, le legs de la société hiérarchisée était trop important pour permettre à une frange importante de la population d’influer sur les décisions politiques. En suivant une lecture tocquevillienne de la Révolution française, attentive aux continuités entre le nouvel ordre et l’Ancien Régime, l’auteure suggère que cette conjoncture initiale a amené les révolutionnaires français à reprendre la forme unitaire de la souveraineté conçue sous la monarchie. La force de cette analyse est de montrer que c’est par la confrontation à des dilemmes concrets que les révolutionnaires sont parvenus à des solutions politiques. Les idées ne flottent pas dans l’air : elles sont ancrées dans les luttes politiques concrètes que connurent ces deux révolutions.

Ces luttes, toutefois, n’empruntent pas toujours le langage démocratique. Dans le monde arabe, discuté par H. Bozarslan dans la partie 4, l’association entre idée du changement révolutionnaire et attente démocratique a longtemps été l’exception plutôt que la règle. Au cours de l’histoire du Moyen-Orient, pourtant riche en contestations, les révolutions passées justifiaient souvent l’autoritarisme comme formule politique, car il était impensable qu’une société pluraliste et conflictuelle puisse servir de base à l’accomplissement des grands desseins d’indépendance et de développement. De nombreux coups d’État militaires ont secoué les pays arabes, notamment l’Égypte, l’Irak, la Syrie ou la Lybie entre 1952 et 1969. Ils étaient généralement présentés ou vécus comme de véritables révolutions, même après avoir accouché de régimes autoritaires et liberticides. La nature plurielle et conflictuelle des sociétés était perçue comme une menace contre l’unité de la nation, unité indispensable dans la lutte contre les « ennemis » extérieurs aussi bien qu’intérieurs. Ce n’est qu’au tournant des années 2010 que les attentes démocratiques se sont mêlées à l’idée de changement radical, grâce notamment aux nouveaux médias et à l’émergence des sociétés civiles (p. 306). Toutefois, la tension entre deux conceptions antagonistes de la société n’a pas disparu. D’une part, il y a l’idée d’une société organique, vue comme un seul corps allant dans la même direction. D’autre part, la société est perçue comme un magma d’intérêts divers et divergents rendant le compromis et la négociation indispensables. C’est la première conception qui domine aujourd’hui en Égypte où la police, l’armée et d’autres institutions répressives ont pu légitimer leur pouvoir par la demande de sécurité formulée par une grande partie de la société. Cette lecture sociologique fine des processus post-révolutionnaires dans les pays arabes permet de comprendre les facteurs qui ont empêché la démocratisation de l’ordre politique, tels que l’étouffement des protestations publiques et la résilience institutionnelle de l’ancien régime.

Le rôle des idées et des intellectuels

En s’interrogeant sur le rapport entre révolution et démocratie, cet ouvrage s’inscrit dans une réflexion sur le rôle des idées dans une contestation révolutionnaire. Il fait écho, sans s’y référer explicitement, au fameux débat qui a opposé dans les années 1980 T. Skocpol et W. Sewell sur le rôle des Lumières dans le déclenchement de la Révolution française [3]. H. Bozarslan suggère, pour sa part, que « les idées ne font pas la révolution », mais qu’elles sont intériorisées par les acteurs et deviennent alors « attente », « conviction partagée que l’ordre établi n’est pas juste » (p. 58-59).

Ce rôle des idées justifie l’attention portée, dans l’ouvrage, aux intellectuels arabes, qui seraient, selon l’auteur, en partie responsables de l’échec de la démocratisation des sociétés arabes. Contrairement aux intellectuels nord-américains et français, les penseurs arabes n’ont pas élaboré de notions novatrices de citoyenneté permettant à leurs sociétés d’adopter des modèles institutionnels inédits (p. 307). Ni les sciences sociales, qui se sont désintéressées des questions de pouvoir, de citoyenneté et de représentation politique, ni les intellectuels « essayistes », repliés sur la problématique de « la condition arabo-musulmane », n’ont pu remplir une fonction politique semblable à celle des théoriciens révolutionnaires du XVIIIe siècle. Cette carence théorique est selon H. Bozarslan la raison de la différence de fond entre les révolutions arabes et les révolutions américaine et française. Quand ces dernières visaient à transformer la cité, à travers la reconfiguration des rapports entre l’individu, la collectivité et le pouvoir, les révolutions arabes se sont elles limitées à la volonté d’intégrer « la cité bourgeoise » dont le modèle existait déjà ailleurs. Les contraintes idéologiques pesant sur les intellectuels, telles la culture politique arabe, imprégnée de l’idée néo-platonicienne du « roi-philosophe », ou l’emprise de la Raison théologique et de l’imaginaire de la Nation, interdisaient d’accepter le principe d’une société divisée et conflictuelle.

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Le rôle des intellectuels dans les révolutions arabes ayant très peu été exploré jusqu’ici, cette analyse offre une contribution particulièrement bienvenue. Toutefois, en n’abordant les intellectuels que sous l’angle des idées qu’ils produisent, elle empêche de saisir les logiques sociales susceptibles d’expliquer l’ambivalence de leurs positionnements face aux insurrections. Étudier ces positionnements dans leur contexte aurait aidé à mieux comprendre pourquoi les intellectuels arabes n’ont pu élaborer qu’une vision restreinte du changement politique, et sont rapidement retombés dans la logique moubarakienne de la polarisation autour de la question islamiste. On observe, en outre, un certain décalage dans le traitement du rôle des idées dans les parties du livre respectivement consacrées aux révolutions américaine et française, et aux soulèvements arabes. Alors que les passages portant sur les premières montrent comment les conceptions théoriques s’élaborent au cours de luttes concrètes, la partie qui analyse les seconds se concentre sur le contexte intellectuel détaché des affrontements politiques, adoptant une approche quelque peu désincarnée des idées. Or, le rapprochement entre les trois cas de révolutions aurait pu être plus poussé, si l’ouvrage avait intégré les débats très intenses qui ont accompagné le processus révolutionnaire en Égypte, par exemple sur le sens de la démocratie (« la démocratie des urnes » vs. « la démocratie de la rue »), ou sur la signification de « la citoyenneté » et de « l’état civil » [4].

En dépit de ces quelques réserves, Qu’est-ce qu’une révolution ? offre une réflexion novatrice et nuancée sur les processus de démocratisation en contextes révolutionnaires. Cet ouvrage donne une vision globale des mouvements révolutionnaires et permet de mieux comprendre leur ancrage dans la philosophie politique.

Pour citer cet article :

Giedre Sabaseviciute, « Logique des révolutions », La Vie des idées , 9 septembre 2016. ISSN : 2105-3030. URL : http://www.laviedesidees.fr/Logique-des-revolutions.html

jeudi, 28 février 2013

Mezri Haddad: « la révolution du jasmin était une manipulation du Qatar et des Etats-Unis »

Mezri Haddad: « la révolution du jasmin était une manipulation du Qatar et des Etats-Unis »

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Interviewé par le quotidien algérien La Nouvelle République, Mezri Haddad revient sur les causes de la révolution du jasmin et dévoile les objectifs stratégiques et géopolitiques du printemps arabe. Pour le philosophe tunisien, ce printemps n’est que la mise en oeuvre du « Grand Moyen-Orient » conçu par les néoconservateurs pour domestiquer l’islamisme en vue de perpétuer l’hégémonie américaine. « Le triomphe de l’islamisme en tant qu’idéologie provoquera la déchéance de l’Islam en tant que religion », prévient M.Haddad. Voici la reproduction de cette interview réalisée par Chérif Abdedaïm et publiée à la Une de la Nouvelle République du 12 février 2013.

Vous êtes de ceux qui considèrent que la « révolution tunisienne » n’est en fait qu’une  imposture qui ne relève pas seulement du ressort des islamistes. Quels sont d’après-vous les responsables de cette déstabilisation de la Tunisie et pourquoi ?

Les responsables de cette déstabilisation c’est d’abord un régime qui n’a pas été capable d’amorcer, en temps opportun, un véritable processus démocratique et qui a laissé se propager le clientélisme et la corruption. C’est aussi une opposition qui a manqué de patriotisme en se mettant au service d’agendas étrangers. Oui, j’ai considéré dès le départ que la « révolution du jasmin » était un conte de fées pour adolescents. Il s’agissait plutôt d’une révolte sociale que des traitres locaux et des services étrangers ont déguisé en révolution politique. Cette révolte sociale est semblable à celle de janvier 1978, à celle de janvier 1984 et à celle d’octobre 1988 en Algérie. Elles exprimaient toutes des revendications sociales et salariales parfaitement légitimes. Ce qui s’est passé en janvier 2011 est donc une colère sociale qu’une poignée de cyber-collabos ont transformé en soulèvement politique, selon un plan que les services américains ont mis en œuvre dès 2007. Volontairement ou inconsciemment, plusieurs jeunes tunisiens et arabes d’ailleurs ont été embrigadé par l’organisation OTPOR, par l’Open Society Institute du vénérable George Soros, et par la Freedom House, qui a été dirigé par l’ancien directeur de la CIA, James Woolsey, et qui compte parmi ses membres le théoricien du choc des civilisations, Samuel Huntington, ainsi que Donald Rumsfeld et Paul Wolfowitz, qui ont commis des crimes contre l’Humanité en Irak. C’est par la magie du Web, d’internet et de facebook qu’un simple fait divers –l’immolation par le feu d’un jeune alcoolique- s’est mu en « révolution du jasmin » pour se transmuer en « printemps arabe ».

 

Au même titre que dans beaucoup de pays arabes et même européens, la Tunisie a connu son malaise social, mal vie, chômage, etc, qui sembleraient être à l’origine du soulèvement du peuple tunisien. Toutefois, quand on  constate qu’avec la nouvelle configuration du paysage politique tunisien  cette situation sociale s’est au contraire aggravée ; qu’aurait-il fallu faire pour redresser cette situation ?

Le malaise social était bien réel mais on en a exagéré l’ampleur. Contrairement à tout ce qui a été dit par propagande, par ignorance ou par suivisme, ce n’était pas du tout une révolte de la pauvreté et de la misère économique mais de la prospérité et de la croissance mal répartie entre les strates sociales et les régions géographiques. L’économie de la Tunisie se portait nettement mieux que les économies dopées de l’Espagne, de l’Italie, du Portugal et de la Grèce, un Etat en faillite malgré trois plans de sauvetage à coup de millions d’euros. L’Etat tunisien n’était pas en faillite, bien au contraire. C’est maintenant qu’il est en faillite, avec un endettement qui s’est multiplié par sept, une croissance en berne et plus d’un million de chômeurs, alors qu’il était à 400000 en janvier 2011. En moins de deux ans, la Tunisie a perdu les acquis de 50 ans de dur labeur.

Si vous aviez à comparer l’époque Bourguiba, celle de Ben Ali, et la gouvernance actuelle,  quelle serait  d’après-vous celle qui répond le mieux aux aspirations du peuple tunisien ?

Celle de Bourguiba, incontestablement. C’était l’époque où le géni d’un homme se confondait avec l’esprit d’une nation. Je préfère employer ce concept de nation plutôt que le mot peuple dont tout le monde se gargarise depuis janvier 2011. Bourguiba, qui reste pour moi un exemple inégalable, n’était pas un démocrate mais un despote éclairé. Sa priorité n’était pas la démocratie, mais la construction d’un Etat moderne, le raffermissement d’une nation, l’affranchissement des esprits par l’éducation et l’émancipation de la femme par jacobinisme. Ben Ali n’a ni la dimension charismatique de Bourguiba, ni sa puissance intellectuelle. C’est un président pragmatique que le hasard et la nécessité ont placé à la tête de la Tunisie. Il avait deux priorités : le redressement économique du pays et la neutralisation des islamistes. Quoique l’on dise aujourd’hui, dans ces deux objectifs, il a remarquablement réussi. Sa faute majeure dont la Tunisie n’a pas fini de payer le prix, c’est qu’il n’a pas profité de ses deux atouts pour instaurer une véritable démocratie. Enivré par le pouvoir, mal conseillé, se sentant invulnérable, il n’a pas su répondre aux aspirations démocratiques d’une société à plus de 60% jeune et éduquée. Quant à la gouvernance actuelle, elle cumule l’incompétence et la suffisance. Mais plus grave encore que l’incompétence, ce gouvernement dit de la troïka n’a aucun sens du patriotisme, puisque les uns subissent les injonctions de Washington, les autres sont sous l’influence de l’ancienne puissance coloniale, et les troisièmes sont aux ordres du Qatar.

On accuse justement le Qatar de jouer un rôle déstabilisateur dans les pays arabes ; êtes-vous de cet avis ? Si oui, dans quel intérêt cet émirat joue-t-il ce rôle ?

Non seulement je suis de cet avis, mais j’ai été l’un des rares, sinon le premier à dénoncer le rôle moteur que cet émirat féodal et esclavagiste a joué dans ce fameux « printemps arabe ». Je l’avais analytiquement démontré dans mon livre « La face cachée de la révolution tunisienne », dès 2011. Le rôle de cette oligarchie mafieuse a été, en effet, déterminant. Par la propagande et l’intoxication d’Al-Jazeera, par l’activisme diplomatique, par la corruption financière des instances décisionnelles occidentales, et par le recrutement de mercenaires chargés de semer la panique et la terreur au sein de la société. Il existe des preuves matérielles selon lesquelles les premières victimes dans les rangs des manifestants ont été abattues par des snippers d’Europe de l’Est payés par les services qataris. Ce fut le cas en Tunisie mais aussi en Egypte. Dans quel intérêt le Qatar a-t-il joué ce rôle ? Primo par sous-traitance de la géopolitique israélo-américaine. Secundo par ambition énergétique. Tertio par messianisme islamo-wahhabite.

La France et les Etats-Unis, semblent également impliqués dans la déstabilisation de la Tunisie, à l’instar de l’Egypte, la Libye et maintenant la Syrie et bientôt le Sahel. Dans ces différents cas, ils semblent  se « réconcilier » avec les mouvements islamistes qu’ils combattaient depuis le 9/11 au nom de la lutte anti-terroriste. Comment peut-on interpréter cette nouvelle  « alliance »?

Pour ce qui est des anglo-saxons, cette alliance n’est pas nouvelle mais très ancienne. Elle remonte à la fameuse grande révolte arabe sous le commandement de Lawrence d’Arabie, puis à la naissance des Frères musulmans en 1928, une secte qui est le produit du géni politique anglais pour marginaliser le nationalisme arabe en guerre contre le colonialisme. L’âge d’or de l’alliance islamo-impérialiste a été en Afghanistan et contre l’URSS. Les événements du 11 septembre 2001 ont sans doute marqué un tournant. L’esclave s’est retourné contre son maître. L’administration Bush a trouvé dans cet événement l’occasion d’envahir l’Irak et croyait pouvoir éradiquer rapidement le terrorisme islamiste en Afghanistan. Mais parallèlement, dans le cadre du « Grand Moyen-Orient », les néoconservateurs renouaient avec tous les mouvements islamistes qui ont fait allégeance au gendarme du monde. Le nouveau deal : on lâche les dictatures qui vous ont persécuté, on vous aide même à prendre le pouvoir, mais en échange, vous gardez bien nos intérêts, vous ne franchissez pas la ligne rouge par rapport à Israël et vous contribuez au maintien de l’omnipuissance américaine contre la Russie, la Chine, l’Inde et les autres puissances émergentes. Comme je l’avais dit dans une interview il y a plus d’une année, « A vous la charia, à nous le pétrole. Chacun sa religion ! ». C’est ainsi que je résume le sens ultime du « printemps arabe ».  

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Vous dites également, dans l’un de vos articles que « C’est l’impatience et l’insolence d’un Rached Ghannouchi  galvanisé par le soutien américain, la crise algérienne et le bras de fer entre le FLN et le FIS qui ont changé la donne en Tunisie. » Pouvez-vous  nous éclairer à ce sujet?

Il me semble que je parlais des rapports entre Ben Ali et Ennahda entre 1987 et 1991. Il faut d’abord rappeler que deux Etats ont joué un rôle important dans l’arrivée au pouvoir de Ben Ali : l’Italie et l’Algérie. La France avait un autre successeur à Bourguiba et les Américains jouaient déjà la carte islamiste. Ben Ali a été reconnu par les Etats-Unis à la seule condition qu’il partage le pouvoir avec leurs protégés islamistes. C’est ainsi qu’il les a libéré de prison, qu’il a reçu à Carthage Ghannouchi, que les islamistes ont été autorisé à participer aux élections de 1989 avec des listes indépendantes, qu’ils ont signé le Pacte national…Le point de discorde a été la légalisation d’Ennahda. Bien installé au pouvoir, Ben Ali voulait gagner encore du temps avant de faire cette dernière concession. Excédés, confortés par l’allié anglo-américain, les islamistes ont retrouvé leurs vieux reflexes : manifestations, agitations à l’université, complots contre la sécurité de l’Etat et tentatives d’assassiner Ben Ali. Celui-ci a trouvé dans le début de la crise algérienne l’occasion de mettre hors d’état de nuire les islamistes.

En extrapolant l’impact de ces « révolutions » déstabilisatrices, on constate également, qu’un autre bras de fer se déroule en catimini entre les Etats-Unis ( y compris leur alliés Occidentaux) et les pays du BRICS. D’après-vous, quelles pourraient être  les conséquences de cette nouvelle donne ?

Ce n’est pas une extrapolation mais une expression essentielle du « printemps arabe ». Je dirai même que le premier sens géopolitique et géostratégique de ce « printemps arabe » est de saborder par anticipation tout rapprochement entre le monde arabo-islamique et les puissances du BRICS, principalement la Russie et la Chine. Il faut relire Bernard Lewis et Samuel Huntington pour une meilleure intelligibilité du « printemps arabe », à l’aune du projet de Grand Moyen-Orient. Dans le « Choc des civilisations », Huntington –qui a d’ailleurs commencé sa carrière universitaire en tant que spécialiste de la Tunisie !- parle clairement de « l’alliance islamo-confucéenne » qu’il faut empêcher par tous les moyens. La carte islamiste, comme la carte du bouddhisme tibétain, pourrait d’ailleurs tout à fait servir à l’implosion de la Chine, qui compte une trentaine de millions de musulmans. Idem pour l’Inde, autre puissance émergente, qui compte 130 millions de musulmans et que les Anglais avaient déjà affaibli par la création artificielle et sur une base confessionnelle du Pakistan en 1947, au grand désespoir de Gandhi. En termes géopolitiques, les Américains cherchent à constituer en Méditerranée un Arc sunnite, la fameuse « ceinture verte », qui partirait du Maroc jusqu’en Turquie, en passant par l’Algérie, la Tunisie, la Libye, l’Egypte, le Liban, la Syrie et le futur Etat jordano-palestinen ! Avec le Pakistan, l’Afghanistan, l’Arabie Saoudite et les pétromonarchies, l’Iran chiite sera isolé, le pétrole sera bien gardé et a foi des musulmans, bien conservée ! Mais il y a aussi un Arc chiite en prévision. C’est que les Etats-Unis ne cherchent pas tant à détruire l’Iran qu’à aseptiser son chiisme, le désamianter plus exactement. Le chiisme aura forcément un rôle à jouer, ne serait-ce que pour que la puissance de l’islamisme sunnite ne dépasse jamais le seuil de tolérance américaine.

On accuse également les instigateurs de cette déstabilisation du monde arabe de convoiter les ressources naturelles de ces pays au moment où la crise économique bat son plein en Europe et aux Etats-Unis. Dans ce cas, pourquoi alors s’être attaqué à la Tunisie qui ne dispose pas de pétrole ou d’autres ressources minières importantes ?

C’est le principal argument que les idiots utiles de la pseudo-révolution tunisienne ont utilisé pour répondre à ceux qui ont analysé cette « révolution » dans ses implications géopolitiques, en accusant d’ailleurs ces analyses de théories du complot. La Tunisie n’a pas été visée parce qu’elle regorge de pétrole mais parce qu’elle répondait au critère du parfait laboratoire. Elle devait servir de mèche à la poudrière arabe. C’était le pays socialement, économiquement et politiquement le mieux prédisposé à une telle crise. Pendant des années, on avait présenté le régime tunisien comme la plus grande dictature policière du monde arabe. Les événements de janvier 2011 ont démontré qu’il était le régime le plus vulnérable et même le plus libéral. Quant à l’appropriation des ressources naturelles par les colonialistes new look, cela ne fait pas le moindre doute. La Libye n’est plus maitresse de son gaz, de son pétrole et même de ses nappes phréatiques. Exactement comme l’Irak, depuis 2003.

Récemment les islamistes viennent de passer à une nouvelle étape  celle des assassinats ; celui du militant Chokri Belaïd, après ceux de Lotfi Nakhd, de Nidaa Tounès, il y a quelques mois ; de quoi  cela pourrait-il présager ?

C’est le présage d’une série d’attentats ciblant les politiques, les intellectuels, les journalistes, mais aussi d’un cycle de violence que la Tunisie n’a jamais connu auparavant. C’est la conséquence de deux ans de laxisme et de décisions irresponsables. Dès le 14 janvier 2011, au nom de la « révolution du jasmin », des terroristes ont été libéré, d’autres sont revenus des quatre coins du monde, des centaines de criminels qui n’ont rien à voir avec la politique ou l’islamisme ont été amnistiés par le président provisoire. Tous ces individus dangereux se promènent librement dans le pays. Il y a aussi les criminels qui sont partis faire le jihad en Syrie et qui vont revenir chez eux. Le rétablissement de l’ordre et de la paix civile vont être la tâche la plus difficile.

Enfin, à quelles conséquences pourrait-on s’attendre avec cette montée de l’islamisme radical ? Et qui en serait (ent)  le(s) véritable(s) bénéficiaire(s) ?

Première conséquence, la banalisation du choc des civilisations et la fracture entre Orient et Occident. Avec ce « désordre créatif » comme disent les architectes du « printemps arabe », les pays déstabilisés ne se relèveront pas avant une quinzaine d’années. Ils vont connaître l’anarchie, l’insécurité, l’instabilité politique et le marasme économique. Mais le plus grave à mon avis, c’est la régression sociale, éducative et culturelle que connaissent déjà ces pays et qui va connaitre une amplification dans les années qui viennent. C’est l’ère de la sacralisation du bigotisme et de l’ignorance, l’époque du repli identitaire. Mon combat contre l’idéologie islamiste n’a jamais été celui d’un marxiste, d’un freudien ou d’un laïciste. C’est parce que je me sens profondément musulman que je suis radicalement anti-islamiste. Le pire ennemi de l’islam, c’est l’islamisme. Faire de la religion de Mouhammad un enjeu politique et géopolitique entre les mains des puissances occidentales, c’est un crime impardonnable. Réduire le Coran à un manuel politique, c’est trahir l’esprit de l’islam et poignarder la transcendance de Dieu. Dès 1937, Abbas Mahmoud Al-Akkâd disait que « les groupes religieux qui recourent à la religion pour atteindre des objectifs politiques sont des agents payés qui se cachent derrière l’islam pour abattre cette religion, car la réussite de leur cause finit par la perte de l’islam ». Je considère, en effet, que le triomphe de l’islamisme en tant qu’idéologie provoquera la déchéance de l’Islam en tant que religion. En faisant du saint Coran un manuel de subversion, en réduisant la Sunna aux miasmes de la scolastique médiévale qui offense la haute spiritualité de l’Islam et la supériorité de la philosophie islamique, en faisant de l’islam un enjeu de politique internationale, en transformant cette religion en instrument de chantage , de pression ou de négociation entre les mains des « mécréants » occidentaux comme ils disent, en l‘impliquant dans des actions terroristes aussi abjectes qu’étrangères à ses valeurs intrinsèquement humanistes, ces marchands de l’islam, ces imposteurs de Dieu, ont déjà beaucoup porté atteinte à l’Islam. Vous pourriez donc facilement deviner à qui profite cette subversion de l’Islam et cette image si injuste que l’on donne des musulmans.
Tunisie-Secret.com

Interviewé par Chérif Abdedaïm
La Nouvelle République

mardi, 19 février 2013

La face cachée des révolutions arabes

 

La face cachée des révolutions arabes  - Un livre qui fait tomber les masques

La face cachée des révolutions arabes

Un livre qui fait tomber les masques

Walid Aït Saïd

Ex: http://metamag.fr/
Cet ouvrage révèle les manipulations médiatiques et politiques qui sont les ingrédients principaux d'une révolution préméditée...Montrer le vrai visage des révolutions arabes, tel est l'objectif de ce livre, présenté dernièrement à la presse parisienne. Intitulé « La face cachée des Révolutions arabes », cet ouvrage dévoile «les  manipulations et traitements politiques et médiatiques abusifs des mouvements sociaux qui ont secoué les régions du Maghreb et Proche-Orient durant l'année 2011, ainsi que leurs retombées négatives», ont expliqué les co-auteurs de ce livre qui sont un groupe de 23 politiques et experts internationaux de nationalités différentes. 
 
 
Dirigé par le Centre français de recherche sur le renseignement, sous la direction d'Eric Denécé, l'ouvrage a pour volonté de mettre la lumière sur les évènements qui ont touché le monde arabe. Son écriture est le résultat de deux missions d'évaluations, au cours de la même année, des conflits qui se sont produits dans le cadre du Printemps arabe en Libye et en Syrie. Suite à ces deux travaux d'évaluations, les auteurs ont ensuite jugé important d'élargir leur prospection par des témoignages et des analyses sur ce qu'a été le Printemps arabe dans d'autres pays (Egypte et Tunisie).
 
 
 
Ce qui ressort de ces évaluations sont des positions claires qui dénoncent «la pensée dominante qui tend à faire de ces mouvements sociaux un événement spontané et positif pour les pays d'Afrique du Nord et du Proche-Orient», ont-ils expliqué. Ce travail leur a ainsi permis d'aller à l'origine de ces «mouvements sociaux et de décrypter le jeu des acteurs nationaux qui ont participé à ces événements». Il s'agit aussi selon les auteurs, de décoder le jeu des acteurs internationaux qui ont contribué à faire éclore ces Printemps arabes, tout en s'intéressant aux conséquences prévisibles à venir. Le directeur du Centre français de recherche sur le renseignement, Eric Denécé, qui a été l'un des experts à faire la présentation de ce livre a insisté sur le fait que l'analyse approfondie de ces événements a permis aux auteurs de cet ouvrage de dégager des éléments qui rendent possible la compréhension de la réalité du phénomène derrière la vision «fabriquée» qui a été livrée à l'opinion internationale.
 

M. Labévière 
 
Parmi ces éléments, il a notamment cité l'existence d'un malaise social réel mais instrumentalisé et la présence de révolutions pilotées et mises en œuvre par l'étranger afin de promouvoir des intérêts nationaux. Eric Denécé a également précisé que l'analyse à laquelle ont abouti les auteurs de cet ouvrage a dévoilé la mise en œuvre de techniques éprouvées de manipulation des foules et de déstabilisation des régimes et révélé les conséquences néfastes de ces «Révolutions arabes» qui ne semblent pas, a-t-il estimé, être à la hauteur des espérances suscitées.
 

Eric Bénécé, Directeur du Centre français de recherches sur le renseignement 
 
Cet expert, a également révélé que les évènements qui ont secoué le monde arabe étaient prémédités depuis déjà quelques années. « Les événements auxquels l'opinion internationale a assisté étaient en préparation depuis plusieurs années, bien que leur déclenchement n'ait pas été précisément planifié», a-t-il assuré. Intervenant dans le débat, Richard Labévière, expert du Proche-Orient, a pour sa part, indiqué que ce qui a rassemblé l'entreprise de ce livre «est le concept de déconstruction». C'est dans ce sens qu'il a critiqué la couverture médiatique de ces événements. «Nous n'étions pas satisfaits par les couvertures médiatiques de ces évènements par la presse française et occidentale ainsi que par des chaînes de télévision satellitaires arabes comme El Jazeera, Al Arabia ou autres médias», a-t-il souligné. « Il y avait donc, non seulement une urgence mais un intérêt à déconstruire ces accélérations de l'histoire, de mouvements sociaux, qui étaient très anciens, en Tunisie, en Egypte ou dans d'autres pays du Proche et du Moyen-Orient», a-t-il ajouté. «Il s'agissait, par conséquent, d'essayer d'aller au-delà des affirmations de morale, souvent d'une presse trop pressée qui a qualifié trop hâtivement des mouvements sociaux de révolutions», a-t-il fait savoir.
 
M.Labévière a ainsi déploré la perte de crédibilité considérable de certains grands journaux qui envoient en mission des journalistes généralistes qui ne font aucune lecture de ce qui se passe réellement, tout en précisant que cela est lié à des phénomènes économiques. 
 
Ce livre aura donc montré la face cachée du printemps arabe. Les événements qui se passent en Tunisie ou en Egypte sont là pour confirmer les dires de ses auteurs...
 
« La face cachée des Révolutions arabes » sous la direction d'Eric Denécé, Ed Ellipse
Les illustrations sont de la rédaction

mardi, 13 novembre 2012

Le Qatar et le « colonialisme salafiste »

Le Qatar et le « colonialisme salafiste »

par Rachid BARNAT

Ex: http://mediabenews.wordpress.com/

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Le paradoxe d’un émir bourré de pétrodollars, ami des Frères musulmans et des Etats Occidentaux, qui maintient des liens privilégiés avec Israël et le Hamas et joue au sponsor des nouveaux régimes issus des «révolutions» arabes.

Le paradoxe de l’émir du Qatar Hamad bin Khalifa Al Thani, c’est son double jeu: il joue les modernistes avec ses «amis» occidentaux, et soutient les extrémistes religieux chez ses «frères» orientaux… mais probablement avec l’approbation de ses amis occidentaux, les pétrodollars de l’émir servant à faire passer la pilule du paradoxe!

A moins que son «jeu» n’entre dans la stratégie des Etats-Unis : 1- neutraliser les extrémistes de «l’intérieur», tout en les soustrayant à une probable récupération iranienne chiite! Ce que vient de faire l’émir du Qatar avec le Hamas de la bande de Gaza qui flirtait avec le régime des Ayatollah et soutenait Bachar el Assad, l’autre «ami» des iraniens. Et 2- permettre une reprise du dialogue entre les Palestiniens et les Israéliens à fin qu’Obama (s’il est réélu !), concrétise son beau discours-programme lors de sa prise du pouvoir: en finir avec un problème qui empoisonne les relations internationales depuis plus de 60 ans !

L’émir à vie apprend au président povisoire à poser devant les photographes.

Parasiter les révolutions par l’exportation massive du wahhabisme

D’autant que le Qatar, avec l’Egypte, sont les rares pays «arabes» à reconnaître Israël et à entretenir avec ce pays de bonnes relations.

Avec au passage une «reconnaissance» de la part du monde dit «arabe» au Qatar pour sa contribution à la résolution du «problème» palestinien, et pour avoir neutralisé les Ibn Saoud et leur nuisance, alors que le monde entier «découvre» le réel danger de cette dynastie moyenâgeuse qui ne doit son salut qu’au wahhabisme obscurantiste et rétrograde, et qui est «tenue» de l’exporter et d’en faire le prosélytisme pour respecter le deal  avec Ibn Abdelwahhab, qui lui avait accordé le pouvoir temporel sur la oumma!

Mais comme cet émir veut faire de l’ombre à son frère ennemi Ibn Saoud, celui-ci tente de «parasiter» son jeu par une exportation massive du «wahhabisme saoudien», plus violent et totalement rétrograde, pour neutraliser le wahhabisme qui se veut «éclairé» de l’émir!

L’autre paradoxe, et celui-là il est occidental, est illustré par l’attitude de la France vis-à-vis d’un «ami» encombrant à certains égards.

Le gouvernement français, qui entend combattre l’islamisme radical sur son territoire, a pour partenaire privilégié l’émir du Qatar, doté d’un statut fiscal avantageux, à la tête d’une monarchie absolue au modernisme tapageur, mais trompeur, qui soutient partout les Frères musulmans et les salafistes armés !

L’émir du Qatar avec le leader du Hamas Ismaïl Haniye à Gaza.

Peut être le gouvernement français se réveillera-t-il après le renvoi de la mission française pour raison d’ingérence de l’émir dans le choix des livres jugés «haram» (illicites) pour les conformer à la doctrine wahhabite. Preuve s’il en est besoin que ces monarques exportent leur modèle sociétal, wahhabisme compris!

Les Français souhaitent équilibrer leurs liens avec les pétro monarques en se rapprochant des Ibn Saoud, frères ennemis de l’émir du Qatar, mais là encore c’est un rapprochement avec des un régime fonctionnant sur le même modèle que celui du Qatar, pratiquant le wahhabisme comme système politico-religieux, en plus obscurantiste chez les Saoudiens! Mais peut on faire autrement?

L’émir du Qatar avec le président Obama

Il est tout de même anormal qu’au nom de la realpolitik on collabore avec des régimes qui soutiennent les islamistes les plus radicaux! Viendra, hélas, le jour du retour du boomerang car ces régimes seront probablement un jour les victimes de leurs créatures : «les salafistes jihadistes»!!

Qui aurait cru à la générosité de l’émir?

Si on réfléchit bien, l’émir du Qatar est logique avec lui-même! Il sert uniquement ses intérêts et protège ses arrières: étant à la tête d’un Etat pas plus grand que la Corse, très pauvre, vivant de la pêche perlière qui très vite a était concurrencée par les perles de culture développées par les Japonais, ne devant sa richesse subite qu’au gisement de gaz au large de ses côtes… mais conscient qu’une telle manne n’est pas inépuisable, investit et place ses pétrodollars dans le monde entier en achetant des actions, de l’immobilier, des terres… aussi bien en Occident que dans le monde arabe! Comme la Tunisie sur laquelle il a jeté son dévolu depuis Ben Ali, mais que, grâce à son protégé Ghannouchi, il va pouvoir avoir pour une bouchée de pain!

L’émir du Qatar reç à l’Elysée par François Hollande.

S’il s’est invité dans les révolutions du «printemps arabe», ce n’est nullement par altruisme: il fera tout pour les avorter car le risque est trop grand pour lui qu’elles contaminent les pétromonarchies.

Et quoi de mieux, pour neutraliser ces peuples en révolte, que de diffuser parmi eux le wahhabisme, système politico-religieux parfait, qui maintient sur leur trône des pétro monarques au pouvoir absolu et incontesté comme le leur accorde l’imam Mohamed Abdelwahhab, fondateur du wahhabisme !

Qui aurait cru à la générosité de l’émir qui le conduirait à aider ses frères arabes du Hamas à Gaza? Derrière cette aide se cache des intentions politiques et économiques plus terre à terre.

Des experts ont découvert récemment des gisements importants de gaz sur lesquels l’émir veut mettre la main. Son alliance avec Hamas coupe les liens incestueux qu’il entretenait avec l’Iran chiite, voisin et ennemi héréditaire de l’émir dont il craint toujours la puissance! Et sa «présence» à Gaza, lui assure le «contrôle» du voisin égyptien toujours imprévisible et qui prétend lui aussi au leadership du monde «arabe», un leadership plus ancien que celui du Qatar et de l’Arabie …

La reine Elizabeth et le prince Philip reçoivent le cheikh Hamad et son épouse.

Le réel paradoxe est celui des Occidentaux qui n’ignorent rien des intentions de l’émir et de sa capacité de nuisance aux peuples qui aspirent à la démocratie, mais pour lequel ils ferment les yeux par calculs géopolitiques et par intérêts économiques!

Toutes ces puissances «démocratiques» ou «financières» ne jouent-elles pas avec le feu au détriment de peuples qui ne leur demandent rien? D’autant que laisser se propager le wahhabisme chez les peuples en révolte finira tôt ou tard de les atteindre de gré ou de force, les jihadiste salafistes ne reculant devant rien! Le 11 septembre n’aura donc pas servi de leçon?

Seul un peuple éclairé peut déjouer ou du moins rejeter une telle ingérence!

Les Tunisiens sauront-ils résister à cette ingérence et rejeter le «colonialisme religieux» qui la sous-tend par l’exportation massive du wahhabisme des pétro monarques?

Rachid Barnat

vendredi, 03 février 2012

Contre la Syrie, les armes de la subversion

Bernhard TOMASCHITZ:

Contre la Syrie, les armes de la subversion

 

Les premières élections libres en Egypte n’ont pas amené les “libéraux pro-occidentaux” au pouvoir, mais, en dépit de cette apparente “déconfiture”, les Etats-Unis continuent à soutenir l’opposition syrienne

 

Les élections égyptiennes n’ont pas donné le résultat qu’attendait l’Occident depuis, qu’il y a environ un an, des dizaines de milliers d’Egyptiens manifestaient sur la Place Tahrir au centre du Caire pour obtenir la démission d’Hosni Moubarak, détenteur du pouvoir depuis trente bonnes années. Ce ne sont donc pas les “partis libéraux” et les représentants de la “génération Facebook” qui ont été les vainqueurs des élections pour le parlement égyptien mais les formations islamistes. Le parti des Frères Musulmans, qui se pose comme “modéré”, est nettement en tête, avec 45% des votes, suivi du parti radical-islamiste “Nour” (= “la Lumière”).

 

Les partis séculiers n’ont pas obtenu grand chose des élections législatives: jamais aucun d’entre eux n’a dépassé les 10%. Les investissements américains, effectués depuis tant d’années pour qu’un changement de régime survienne au pays du Nil, n’ont apparemment rien donné. Car en avril 2011, deux mois après la chute de Moubarak, le sous-secrétaire d’Etat américain Michael Posner confirmait, d’après une dépêche de l’AFP, que “le gouvernement américain avait, au cours des deux années écoulées, mobilisé un budget de 50 millions de dollars pour développer de nouvelles technologies destinées à aider les activistes à se protéger de toute arrestation et de toute condamnation par un régime autoritaire”. Cette campagne de financement au bénéfice de contestataires portait essentiellement sur l’Afrique du Nord et le Proche Orient: fin février, une diète s’est tenue quelque part au Proche Orient, au cours de laquelle “des activistes de Tunisie, d’Egypte, de Syrie et du Liban ont participé, pour revenir ensuite dans leurs pays respectifs dans le but de former leurs camarades de combat”.

 

Posner n’a laissé planer aucun doute quant à l’importance de Facebook, de Twitter ou d’autres services procurés par l’internet, pour autant qu’ils soient mieux coordonnés en réseau; dans ce cas, ils peuvent aider à réaliser les objectifs de Washington: “La puissance des technologies créatrices de réseaux permet d’attiser les incendies et d’obtenir, in fine, un changement politique, social et économique”. Plus particulièrement, le gouvernement américain a financé toutes les tentatives de doter les activistes des pays du monde arabe d’un accès aux technologies qui parviennent à contourner les systèmes mis en place par les gouvernements pour géner tout accès direct à la grande toile, pour empêcher que le pouvoir en place n’efface ou ne modifie les messages écrits ou parlés et pour l’empêcher aussi de s’attaquer à certaines pages d’internet. Toutefois, cette nouvelle technologie n’est pas encore parfaite au quotidien, admet Posner. Finalement, il y a encore suffisamment de lieux, en ce monde arabo-musulman, où les “activistes pro-démocratiques” ont dû être mis à disposition, comme en Syrie.

 

La Syrie, où Bashar el-Assad détient le pouvoir, a connu une année de manifestations, parfois rudement réprimées. Mais le chef de l’Etat est toujours en place. Son pays, à côté de l’Iran, focalise pour l’instant toute l’attention des Etats-Unis qui veulent y voir survenir un “changement de régime”. Finalement, la Syrie, d’après les propres paroles de l’idéologue-en-chef des néo-conservateurs et ancien vice-ministre de la défense, Paul Wolfowitz, “est devenue une composante de l’Axe du Mal”, en tant qu’allié étroit de l’Iran et soutien des milices du Hizbollah au Liban voisin. Bachar el-Assad s’avère beaucoup plus dur à cuire qu’on ne l’avait imaginé: même les sanctions prises et appliquées ne l’ont pas fait fléchir. Avec habilité, il sait utiliser la Ligue Arabe à son profit, malgré qu’elle compte parmi ses membres d’importants alliés des Etats-Unis, comme l’Arabie Saoudite. Début janvier 2012, une mission d’observation de la Ligue Arabe a sillonné le pays, sans pouvoir constater ces entorses gravissimes aux droits de l’homme que dénoncent à qui mieux mieux l’Occident et l’opposition syrienne. On ne s’étonnera pas, dès lors, qu’un représentant de l’opposition syrienne décrit la mission d’observation de la Ligue Arabe comme un “animal édenté”.

 

Les rebelles syriens seront toutefois plus heureux d’apprendre les plans concoctés par le gouvernement d’Obama. Fin décembre 2011, la revue américaine “Foreign Policy” révélait que le Conseil National de Sécurité des Etats-Unis avait décidé de “démarrer un processus informel et tranquille pour élaborer et trouver des possibilités de soutenir l’opposition syrienne”. Cette revue, considérée généralement comme bien informée, compte parmi ses rédacteurs plusieurs anciens conseillers du ministère de la défense. Elle évoque, dans son dossier consacré à la Syrie, l’éventualité d’un soutien humanitaire et logistique à l’opposition, voire la création d’un “corridor humanitaire” ou d’une “zone de protection pour les civils”, le long de la frontière avec la Turquie. Ensuite, les stratégistes américains évoquent la nomination d’un “coordinateur spécial”, selon le modèle inauguré en Libye, pour coopérer directement avec l’opposition syrienne.

 

Toutefois, à Washington, il y a tout de même des voix critiques qui s’élèvent, surtout quand on se demande quel sera l’avenir de la Syrie après el-Assad. Ces voix critiques craignent un vide de pouvoir, des flots de réfugiés, la disparition d’armes de destruction massive et, pire, des troubles dans l’ensemble de la région. Quant à la constitution d’un corridor humanitaire, elle semble “très improbable” car, dans ce cas, il faudrait aussi prévoir une “zone d’interdiction de survol”, ce qui impliquerait, en conséquence, “de déclencher des attaques de grande envergure contre les installations anti-aériennes, les postes de commandement militaire et les systèmes de contrôle de l’armée syrienne”. Il faudrait également une résolution du conseil de sécurité de l’ONU, pour créer une zone d’interdiction de survol car une telle mesure implique automatiquement de limiter la souveraineté d’un Etat. Or une telle résolution est fort improbable car la Chine et surtout la Russie entendent bien ne pas laisser tomber Damas.

 

Comme le rapporte “Foreign Policy”, “le gouvernement américain, avec l’aide d’alliés comme la France ou peut-être la Turquie, devrait travailler à une justification propre pour amorcer une intervention non militaire en Syrie”. Cela ne peut signifier qu’un soutien renforcé à l’opposition, d’autant plus que le “Conseil National Syrien” a décidé, selon ce que nous rapporte un haut fonctionnaire du gouvernement, “d’entrer dans la phase critique de la révolution syrienne”. La semaine dernière l’opposition a fait savoir qu’elle collaborerait avec l’“Armée Syrienne Libre”. Si l’on se souvient de l’exemple libyen, ce serait là une coalition des forces en présence.

 

Bernhard ROMASCHITZ.

(article paru dans “zur Zeit”, Vienne, n°3/2012; http://www.zurzeit.at ).

vendredi, 25 novembre 2011

Il n'y a pas eu de printemps arabe!

IL N'Y A PAS EU DE PRINTEMPS ARABE !

 

couverture 23 copy.jpgPar Bernard Lugan
Editorial du n°23
de l'Afrique réelle
 
Cinq grands enseignements peuvent être tirés des élections tunisiennes :
 
1) Ce vote montre que la Tunisie est coupée en deux puisque les islamistes et leurs alliés totalisent environ 50% des suffrages. Face à eux, les 50% de « laïcs » sont divisés. Les islamistes sont donc les maîtres du jeu.
 
2) Ce résultat constitue rejet de la greffe occidentale tentée il y a plus d’un demi-siècle par Bourguiba, ce qui montre que l’on ne va pas contre la nature profonde des peuples. L’on a en effet trop longtemps oublié que la Tunisie est un pays musulman, donc non laïc.
 
3) La laïcité tunisienne était en quelque sorte un luxe réservé à une élite occidentalisée vivant entre Paris et Tunis. Or, cette élite s’est tiré une balle dans le pied en renversant Ben Ali qui lui interdisait certes la plénitude de l’expression politique, mais qui, en revanche, lui permettait de vivre pleinement à l’européenne en pays musulman.
 
4) Ces élections auront fait bien des cocus, à commencer par les médias français tombés littéralement amoureux de la « révolution du jasmin », laquelle était tout, sauf une victoire de la démocratie et des droits de l’homme tels que leur esprit formaté se l’imaginait.
 
5) Les Tunisiens vivant en France ont majoritairement voté pour les islamistes, ce qui devrait faire réfléchir les irresponsables qui veulent accorder le droit de vote aux immigrés.
 
En Libye, où nous n’avons pas assisté à une révolution démocratique, mais à une guerre tribale et régionale dont ont finalement profité les islamistes, le nouveau régime portera une tare originelle. Celle d’avoir été mis au pouvoir grâce et par une intervention militaire de l’Occident immiscé sans raisons dans une guerre civile qui ne le concernait en rien. Comme les nouvelles autorités vont devoir effacer ce péché originel, elles vont immanquablement procéder à une surenchère islamiste à défaut d’être nationaliste car la Libye n’existe pas.
 
L'affaire libyenne est en définition un échec majeur, sauf pour les militaires français qui ont, une fois de plus, montré leur professionnalisme et leurs compétences, hélas mises au service d'une politique aberrante et qui va se retourner contre nous.
 
En Egypte, la révolution s’est faite en dehors du petit peuple des fellahs. Ce fut une révolte des citadins et des bourgeois, des privilégiés en somme, qui, comme en Tunisie, renversèrent un dictateur qui limitait leur expression politique et sans voir qu’ils se précipitaient dans un abîme.
 
On ne cesse de nous répéter qu’en Libye et en Tunisie, l’islam est « modéré ». Certes, mais par rapport à quoi ? A notre propre philosophie héritée des Lumières et fondée sur le contrat social ? La question n’a pas de sens car nous sommes dans deux systèmes de pensée totalement différents et irréductibles l’un à l’autre.
 
En définitive, le « printemps arabe », n’a existé que dans l’esprit simplificateur des journalistes comme nous l’expliquons dans ce numéro 23 de l’Afrique Réelle (cliquez ici).

jeudi, 07 juillet 2011

Wohin treibt die "arabische Revolution"?

 

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Wohin treibt die „arabische Revolution“?

Während die NATO um den richtigen Kurs in Libyen streitet, England und Frankreich dort weiterhin nur ihre innenpolitischen und ökonomischen Interessen ins Treffen zu  führen haben, verharrt man  gegenüber Syrien nicht weniger desorientiert. Zwar erinnert auch im Verhalten zu Syrien einiges an den  libyschen Fall, dennoch sind die beiden Staaten, sowohl  in sozialer als auch in politischer Hinsicht, wie auch deren Führung unterschiedlich zu beurteilen. So war, z. B., die Person Assad bis zuletzt ein durchaus tauglicher Gesprächspartner, und ganz so einheitlich wie gegen Gadaffi ist die Front gegen ihn ja keineswegs.

Immerhin aber war ein gleichzeitiges Vorgehen gegen Libyen und Syrien bereits von  der Bush-Administration  geplant. Damals, 2002, hatte Unterstaatssekretär John Bolton den beiden Staaten die Rute ins Fenster gestellt. Neun Jahre später hat dann Obama eine diesbezügliche Initiative im günstigen Rahmen des „arabischen Frühlings“  in die Hand genommen., wie der über  diese Länder meist gut informierte Journalist und Gründer des  „Réseau Voltaire“ Thierry Meyssan  zu berichten weiß.                                                        

Für Libyen hatte man ja, vertraulichen Informationen  zufolge,  eigentlich einen Militärputsch geplant, doch waren keine geeigneten libyschen Offiziere dazu bereit, und der schließlich dafür vorgesehene Oberst Abdallah Gehani  konnte von Gadaffi  rechtzeitig entdeckt und ausgeschaltet werden. Einen ähnlichen Putsch hatte man angeblich auch für den Libanon vorgesehen.

Im Fall Syrien war von den USA geplant, in einem begrenzten Gebiet, am besten in der  Nähe der Grenze zu Jordanien und dem israelisch besetzten Golan  oder auch zur Türkei (auch um den Nachschub für die Aufständischen zu  gewährleisten), Unruhen auszulösen.   Dazu wurden  erst einmal syrische Schüler  und Studenten aufgehetzt, die mit ihren Demonstrationen sowohl ungebildete örtliche Polizeichefs  als auch einen  nicht minder unsensiblen Provinzgouverneur herausforderten.                                                                 

Zum endgültigen Gelingen wurden von ausländischen Geheimdiensten Heckenschützen auf Dächern postiert, die sowohl  auf Demonstranten als auch auf Soldaten und  Polizisten schossen. In westlichen Medien handelte es sich bei  den Scharfschützen natürlich ausschließlich um Assad-Leute.  Damit aber ging der Plan der ausländischen  Assad-Gegner auf. Ganz ähnlich wie es im libyschen  Bengasi  schon praktiziert wurde.

Die verschiedenen Unruhen wurden von kleinen Gruppen  rekrutierter Syrer am jeweiligen Schauplatz organisiert und durch weitere  am Ort des Geschehens  dann spontan geworbene Demonstrationswillige sowie vom saudischen Prinz Bandar bin Sultan finanzierte  ausländische Söldner  ermöglicht. Der genannte Prinz  soll sich persönlich, gemeinsam mit Agenten der CIA und des Mossad,  an der  jordanisch-syrischen  Grenze zur Überwachung des Unternehmens eingefunden haben. Das nun nicht ganz das Ergebnis zeitigen will, das man sich erhofft hatte.

Eine der Optionen, eine Teilung des Landes, wie es in Libyen möglich scheint und auch für Syrien vorgesehen war, würde  in diesem historisch ganz anders geprägten Land bei  der Mehrheit der Bevölkerung ohne Zweifel auf Ablehnung stoßen. Es ist für diese Ereignisse auch bezeichnend, daß die großen Pro-Assad-Demos von unseren Medien kaum gezeigt werden, hingegen  werden sehr wohl, wie Syrer in Österreich nachweisen,  Aufnahmen von Polizei- und Armeeübergriffen präsentiert, die  irgendwo zu einem früheren  Zeitpunkt  stattgefunden haben.

Bis jetzt hat sich Assad, der doch lange Zeit als der populärste und gemäßigste arabische Politiker galt, von der ausländischen Intervention bzw. den von einer ausländischen Koalition  organisierten Unruhen nicht beeindrucken lassen.  Wahr ist aber auch, sofern nicht alles täuscht, daß Teile seiner  Armee wie auch die örtlichen Polizeikräfte bisher wenig  Zurückhaltung, dafür umso mehr Brutalität an den Tag gelegt zu haben scheinen. Die sich durch die offensichtlichen Provokationen nicht wirklich entschuldigen ließen. Da haben wohl einige, vor allem die noch in der UdSSR ausgebildeten Offiziere, noch nicht gelernt,  wie man auf zivile Proteste oder Provokation dieser Art angemessen zu reagieren hat.                                                                                                                                                                                               Da  nun der bisherige Plan, Militärs oder den Mittelstand gegen Assad aufzubringen,  sich als undurchführbar  zu erweisen scheint, setzt man verstärkt auf  mögliche Sanktionen jedweder Art. Dazu bereitet man die Öffentlichkeit via Medien darauf vor, d. h. versucht sie davon zu überzeugen, daß dies das Beste sei, um diesen „Tyrann“  Assad und sein Regime zu beseitigen. Womit nicht unbedingt alle isralischen Strategen eine Freude hätten.                                                                                                                                                            

Zu einem Regime-“Change“  ist  den verantwortlichen globalen Neuordnern jedes Mittel recht, wenn es nur zum Ziel führt. Das sah ja übrigens Lenin auch schon so.                            

Erst jüngst gab es im Internet die Geschichte einer Lesbe, die beklagte, wie sie und andere unter  diesem  schrecklichen Assad-Regime zu leiden hätten. Und schon hatte sie die ganze einflußreiche Lesben-Homo-Menschenrechtsszene hinter sich.  In Wirklichkeit hat es diese „arme“ Dame nie  gegeben.  Dahinter verbarg  sich ein 40jähriger (!) US-amerikanischer Student (wahrschein CIA-Agent ), der  angeblich mit dieser  Legende eine Intervention gar der NATO  bewirken wollte.                                                                                                        

Wenn der Westen, USA und seine Vasallen, so weitermachen, sich an Syrien womöglich die nach Profit gierenden Zähne ausbeißen,  könnte sich die „arabische Revolution“ sehr bald  umdrehen und in eine arabische Konterrevolution einmünden. Die durchaus islamistischer Natur sein könnte. Noch sind ja auch die Kapitel Ägypten und Libyen nicht abgeschlossen.

mercredi, 11 mai 2011

Brèves réflexions sur les "révolutions arabes"

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Bernhard TOMASCHITZ :

Brèves réflexions sur les « révolutions arabes »

 

Les Egyptiens ont placé d’énormes espoirs dans leur révolution. Mais maintenant que le régime dictatorial d’Hosni Moubarak appartient définitivement à l’histoire, une strate particulière de la population égyptienne verra sans doute sa situation changer de manière dramatique. Je veux parler de la minorité copte, qui forme quelque 10% des 80 millions d’habitants de l’Egypte et qui, déjà, depuis un certain temps, est la cible de débordements et de violences.

 

Quoi qu’il en soit, la nouvelle constitution du pays, acceptée avec une très large majorité en mars, ne laisse rien augurer de bon pour les Coptes, car elle prévoit que la Charia, c’est-à-dire le droit islamique, sera « la source principale du droit ». Ce qui est le plus étonnant, c’est que ce refus de toute forme laïque d’Etat ne provoque aucun cri d’orfraie en Occident chez les fabricants d’opinions et chez les exportateurs patentés de « démocratie ». Finalement, les victimes potentielles de cette nouvelle constitution islamiste ne seront « que de simples chrétiens ». Or il y a eu un précédent : les chrétiens d’Orient, dans l’Irak d’après Saddam Hussein, constituent le groupe ethno-religieux qui a eu le plus à souffrir du changement. Dans le pays du Tigre et de l’Euphrate vivait près d’un million de chrétiens : aujourd’hui, d’après les estimations, il n’y en aurait plus que 300.000 et leur nombre diminuerait encore. Les chrétiens de Syrie pourraient subir le même sort que leurs homologues irakiens, après la chute du régime d’el-Assad, dès que le pays pourrait jouir des « libertés démocratiques », ce qui amènerait probablement les « Frères musulmans » à devenir la principale force politique à Damas.

 

Mais il n’y a pas que les chrétiens qui risquent de connaître des temps sombres : certains musulmans sont également dans le collimateur des nouveaux pouvoirs potentiels. Au cours de ces dernières semaines, en Egypte, plusieurs attentats ont été commis contre des sanctuaires chiites. Le chiisme, on le sait, est une variante de l’islam, qui met surtout l’accent sur le mysticisme, ce qui fait que les islamistes les considèrent comme relaps par rapport à la « vraie foi ». Ces destructions de sanctuaires chiites sont attribuées aux  salafistes qui professent un islam particulièrement intolérant à l’égard des syncrétismes et des modernisations. Les salafistes prétendent vouloir retourner à un islam « pur », pareil à celui des origines.

 

Mais derrière tous les événements qui ont animé les scènes arabes au cours de ces quelques derniers mois, il n’y a pas que des querelles religieuses. Il s’agit plutôt de savoir qui exercera le plus d’influence dans le monde arabe. L’Arabie Saoudite, où le salafisme domine la vie sociale et politique sous la forme locale du wahhabisme, est le plus généreux des promoteurs des groupes salafistes en Afrique du Nord, au Proche et au Moyen Orient. Pour le royaume intégriste et rigoriste du désert arabique, les choses sont claires : les époques d’agitation révolutionnaire sont des époques d’incertitude ; l’insécurité et l’incertitude permettent d’orienter les hommes déboussolés vers la « bonne voie », afin de remplir très vite un vide de pouvoir.

 

Bernhard TOMASCHITZ.

(article paru dans « zur Zeit », Vienne, n°15/2011 ; http://www.zurzeit.at/ ).   

samedi, 19 février 2011

Nieuwe Arabische revoluties?

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Nieuwe Arabische revoluties?

Pieter Van Damme

Ex: http://n-sa.be/

Sinds enkele weken trekt er een golf van publiek protest door een aantal Arabische landen. Het vuur werd aan de lont gestoken door de zelfverbranding van Mohamed Bouazizi in Tunseië, halverwege december 2010. Dit leidde tot de Jasmijnrevolutie die in januari de val van het bijna 25-jarige bewind van Zine Ben Ali tot gevolg had. De volksopstand sloeg over naar Egypte waar massaal protest al weken het openbare leven in de grote steden verlamt. Voorlopig blijft dictator Hosni Moebarak nog op post, ondanks zware druk vanwege de Egyptische bevolking. Z'n Tunesische collega Ben Ali vluchtte met zijn familie naar Saoedi-Arabië. Ook in landen als Jordanië en Algerije broedt al jaren een volkswoede tegen het heersende regime.

Wat moeten wij voor ogen houden bij deze gebeurtenissen? Twee zaken: wat is positief of negatief voor Europa bij deze veranderingen en wat zijn de oorzaken die leidden tot deze volksopstanden? De oorzaken voor deze wijd verspreidde volkswoede in de Arabische wereld zijn niet ver te zoeken: het reeds decennialange liberale wanbeleid op economisch vlak, gecombineerd met een dictatoriaal beleid op politiek vlak waarbij corruptie en clan-verrijking het steeds weer halen op het algemeen belang, stevig omkaderd met een omvangrijk repressieapparaat. Het is geen toeval dat de volkswoede in de Arabische wereld vooral daar bloeit waar pro-Westerse regimes sinds jaren de lakens uitdelen. Presidenten zoals Moebarak en Ben Ali hebben hebben op sociaal-economisch vlak een beleid gevoerd dat bestaat uit verregaande liberaliseringen, het aantrekken van multinationale ondernemingen, uitbouw van massatoerisme,... terwijl de gewone man er de facto niet veel beter van werd. Meer nog, terwijl er een beperkte rijke bovenlaag ontstond die profiteerde van dit wanbeleid, steeg de werkloosheid voor de bevolking. Familiale verrijking voor die bovenlaag woekert door het afromen van winsten op massatoerisme en afdrachten die aan multinationals opgelegd worden verdwijnen in familiefortuinen in plaats van de staatskassen.

Ben Ali heeft sinds 1987 in Tunesië een ultraliberale politiek gevoerd. Tunesië heeft de voorbije jaren steevast de extremistische aanbevelingen van het IMF nauwgezet opgevolgd, onder applaus van multinationals, de EU, het Franse regime... Nog in het najaar van 2010 verklaarde de als sociaal-democraat vermomde liberaal Strauss-Kahn dat het economische beleid van Tunesië gezond en als voorbeeldig mocht aanzien worden voor andere "opkomende landen". Het feit dat de voormalige Ben Ali-knecht Ghannouchi nu na de vlucht van z'n president de macht probeert te behouden via een voorlopige regering van nationale eenheid, komt het Westen goed uit. Ze vreesden immers dat de Jasmijnrevolutie zou voortgaan en de belangen van de multinationals en de profiterende financiële elite onder druk zou zetten. Hogere lonen, wettelijk vastleggen van sociale rechten, het verhelpen van de Derde Wereld-toestanden op het platteland... zouden deze belangen (lees: winsten) aantasten.
Ben Ali heeft zijn dictatuur steeds gerechtvaardigd met het excuus van een "islamistisch gevaar" ook al is de aanhang van o.a. de religieuze Nahda-partij (vergelijkbaar met de Turkse AKP) in Tunesië beperkt. Premier Ghannouchi verkondigde de voorbije dagen al in vraaggesprekken dat oude getrouwen van het Ben Ali-regime op economische functies op post blijven om de geplande economische hervormingen gewoon door te laten gaan.
In Egypte voerde Moebarak eveneens een beleid van voortschrijdende economische liberaliseringen die uiteraard op geen enkel vlak ten goede kwamen aan de jonge bevolking. Vele Egyptenaren moeten zien rond te komen met 1 euro per dag of minder. Er heerst massale werkloosheid en de voedselprijzen swingen net als in de rest van de Arabische wereld de pan uit. Moebarak maakte er een gewoonte van diverse verworvenheden en creaties van voormalig president Nasser ongedaan te maken via een neoliberaal beleid: devaluatie van de Egyptische Pond, privatisering van overheidsbedrijven, beperking van subsidies en sociale voorzieningen, afbraak van het overheidsapparaat. Dit ging samen met subsidies aan de private sector (vnl. multinationals en investeringen in economische sectoren die Egypte op de wereldkaart moesten zetten: massatoerisme, nieuwe media en infrastructuur) en een stelselmatige besparing op het publieke onderwijs. Met als gevolg dat de zich ontwikkelende, groeiende middenklasse uiteenviel in een kosmopolitische liberale bovenlaag die mee profiteerde op de rug van de gewone bevolking, en een verarmde lagere middenklasse.

Ondertussen kreeg Moebarak jarenlang aanzienlijke financiële en militaire steun vanuit de USA als gevolg van het vredesakkoord dat hij afsloot met de terreurstaat israël in 1979. Het regime van Moebarak betekende voortaan een verlamming van het rechtvaardige Arabische protest tegen de bezetting van het Palestijnse land en een levensverzekering voor de zionistische entiteit. Het hoeft dan ook niemand te verbazen dat israël zich de voorbije week als enige uitdrukkelijk pro-Moebarak uitsprak en de Europese landen net als Noord-Amerika opriep tot actieve steun aan zijn regime. Bovendien was het regime van Moebarak een verzekering dat de controle over het Suez-kanaal "in goede handen" bleef. In ruil verkreeg Moebarak gigantische hoeveelheden Amerikaanse wapens (bijna achthonderd M1 Abrams tanks, de Egyptische luchtmacht werd na de USA en israël de derde grootste gebruiker van F-16 straaljagers ter wereld...) en bouwde hij met Amerikaans-israëlisch toezicht een omvangrijke oproer- en veiligheidspolitie uit. In de jaren '90 werd deze op grote schaal ingezet tegen het Moslimbroederschap dat al decennia een belangrijke speler in de Egyptische oppositie is, alsook tegen andere islamistische groepen. Als trouwe bondgenoot van de VS beloofde Moebarak na 11 september 2001 alle hulp in de strijd tegen het terrorisme. De Egyptenaren doorzien dan ook de hypocrisie van de USA die halfslachtig aandringt op "democratisering" vanwege de gehate Moebarak terwijl ze op straat beschoten worden met traangasgranaten waarop "made in USA" vermeld staat. De moslimextremisten waren voor Moebarak een argument om de macht stevig in handen te houden via ondermeer massale verkiezingsfraude. Zonder hem zouden de radicale islamieten het land overnemen, zo verdedigde hij zich net zoals Ben Ali in Tunesië steeds tegen kritiek vanuit Westerse landen die hem de hand boven het hoofd hielden en houden.

Vanuit Europees perspectief hebben wij hoe dan ook nood aan een stabiele Arabische wereld waar goede relaties mee onderhouden worden. De belangrijkste redenen zijn de grondstoffen die Europa nodig heeft. En een noodzakelijke remigratiepolitiek die in de toekomst miljoenen vreemdelingen laat terugkeren naar hun landen van herkomst via bilaterale akkoorden met deze landen van herkomst. Deze remigratiepolitiek moet omkaderd worden met een heroriëntering van de ontwikkelingshulp, een realistische tijdsplanning, het afleveren van zoveel mogelijk geschoolde remigranten aan die landen van oorsprong en een beleid dat vrijwillige gescheiden volksontwikkeling aanmoedigt in onze eigen Europese landen.

Het hoeft geen betoog dat een stabiel Arabisch schiereiland en Noord-Afrika onmogelijk zijn, zo lang de staat israël blijft bestaan. De creatie en het voortbestaan van israël is gebaseerd op morele chantage (schuldgevoel jegens de Joden na WO2), etnische zuivering (het verjagen van honderdduizenden Palestijnse Arabieren), permanente financiële stromen als gevolg van lobbywerk (vooral ten nadele van de Amerikaanse belastingbetaler) en het cultiveren van morele chantage (het schuldgevoel als basis voor schadevergoedingen) alsook permanente racistische discriminatie (Arabieren met israëlisch staatsburgerschap hebben minder rechten dan Joden met israëlisch staatsburgerschap). Rechtse partijen en groepen (bijvoorbeeld de PVV van Geert Wilders, de VB-strekking rond Filip Dewinter, Pro Deutschland, de FPÖ...) die vanuit welke beweegreden dan ook een wereldwijde kruistocht tegen "de islam" steunen, bemoeilijken in ernstige mate elk terugkeerbeleid van Arabische/Noord-Afrikaanse vreemdelingen naar de landen van oorsprong omdat zij een conflictueuze relatie met deze landen op het oog hebben. De islam hoort niet thuis in Europa, maar wel in die gebieden waar zij cultureel ingebed is, waaronder Noord-Afrika en het Midden-Oosten.

Welke nieuwe regimes in de Arabische wereld zullen ontstaan, valt af te wachten en zou volledig een zaak van de Arabieren moeten zijn, zonder de Amerikaanse bemoeizucht en de zionistische intriges. De EU verschuilt zich in de voorbije weken weer in een houding die getuigt van slapheid, besluiteloosheid en morele angst als gevolg van jarenlange chantage. Steun aan het seculiere volksverzet is gerechtvaardigd en in het belang van Europa, dat eens de Arabische sociaal-nationalisten inspireerde. De problemen van de Arabieren in hun dagelijkse leven alsook in hun mogelijkheden om welvarende staten op te bouwen aan het begin van de 21ste eeuw, bewijzen dat nationale én sociale vernieuwingen het antwoord kunnen bieden. Religieuze dictatuur of Westers gezinde plutocratie kunnen dit geenszins. Gelet op de voorlopig succesvolle pogingen om de oude regimes in hun macht te herstellen (Tunesië via regering van nationale eenheid) of ze aan de macht te houden (de financiële machten achter Moebarak die aanhangers betalen om protest gewelddadig te lijf te gaan) is het vooralsnog de vraag of er wel van Arabische revoluties kan gesproken worden.