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lundi, 26 septembre 2016

Logique des révolutions

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Logique des révolutions

À propos de : Hamit Bozarslan et Gaëlle Demelemestre, Qu’est-ce qu’une révolution ? Amérique, France, Monde Arabe, 1763-2015, Éditions du Cerf.


Ex: http://www.laviedesidees.fr
 

Avec les « Printemps arabes », la question du fait révolutionnaire s’est vue posée à nouveaux frais. Suivant une démarche comparatiste, H. Bozarslan et G. Delemestre analysent le lien entre révolution et processus démocratiques, et reviennent sur le rôle des intellectuels dans la dynamique révolutionnaire.

revolutionslivre.jpgRecensé : Hamit Bozarslan et Gaëlle Demelemestre, Qu’est-ce qu’une révolution ? Amérique, France, Monde Arabe, 1763-2015, Paris, Éditions du Cerf, 2016, 400 p., 29€.

Depuis l’hiver 2010-2011, les soulèvements de populations dans différents pays arabes ont fait couler beaucoup d’encre. Les innombrables travaux sur le sujet ont cherché à comprendre les causes et les circonstances locales des révoltes arabes. Mais ces soulèvements ont surtout montré le besoin de repenser le fait révolutionnaire. Car, en faisant revenir « l’âge des révolutions » sur le devant de l’Histoire, « le Printemps arabe » a remis en cause les anciennes grilles d’analyse. Redéfinir le fait révolutionnaire et créer de nouveaux outils d’analyse à l’aune des soulèvements arabes est justement l’ambition de Qu’est ce qu’une révolution ? de Hamit Bozarslan et Gaëlle Demelemestre.

Dans cet ouvrage, les auteurs poursuivent la réflexion sur les révolutions arabes dans la démarche comparatiste initiée en 2011 par H. Bozarslan et al. dans Passions révolutionnaires [1]. Rédigé pendant le « Printemps » tunisien, ce livre comparait les crises révolutionnaires ayant éclaté au Moyen-Orient au cours du XXe siècle avec d’autres révolutions non occidentales. Pour sa part, Qu’est-ce qu’une révolution ? met les récentes révolutions arabes en parallèle avec les deux références historiques classiques en matière de contestation que sont les révolutions américaine et française. Ce faisant, l’ouvrage explore le rapport entre l’attente d’un changement révolutionnaire et l’idée de démocratie. Cette approche novatrice redonne toute leur place aux revendications démocratiques exprimées au commencement des soulèvements arabes, rappelant les dilemmes qu’ont dû affronter, en leur temps, les révolutionnaires américains et français.

Le concept de « révolution », entre slogan et catégorie scientifique

La première chose que les révoltes arabes ont remise en cause, c’est le terme de « révolution » même. A la fois rigide et polysémique, il ne permettait pas de rendre compte des différentes évolutions des « Printemps arabes ». Le retour des régimes liberticides, l’éclatement de guerres civiles et l’abandon des revendications démocratiques par une grande partie des populations qui ont suivi les contestations étaient loin de correspondre à l’image normative des révolutions [2]. Les nombreuses controverses qui ont accompagné l’usage du terme de « révolution » pour parler des soulèvements arabes illustrent bien la difficulté d’utiliser ce concept, qui fonctionne à la fois comme un slogan, destiné à agir sur la réalité pour la changer, et un terme théorique servant à décrire cette réalité en changement.

La première partie de l’ouvrage d’H. Bozarslan et G. Demelemestre vise à répondre à ces questions afin d’analyser les révolutions au-delà de telles controverses. Ils constatent que les chercheurs sont confrontés à une double exigence. D’une part, ils ont besoin d’« objectiver » la révolution, c’est-à-dire d’essayer de sortir du discours axiologique qui se tient sur elle, afin de la comparer à d’autres mouvements du même type. D’autre part, il leur faut comprendre que cette objectivation peut contredire les dénominations utilisées par les acteurs pour définir leurs expériences. Car, « désigner une expérience (…) comme une révolution, n’est pas un acte neutre : c’est monopoliser le droit de classer et de déclasser ». En effet, « la prétention même d’être une révolution produit des effets de nature révolutionnaire sur une société que le chercheur ne peut négliger » (p. 45-46).

La difficulté d’appréhender une révolution tient également à l’emprise de discours qu’elle engendre sur elle-même, sa propre « philosophie de l’histoire » faisant de la révolution une nécessité historique qui ne pouvait qu’advenir. Vécue comme une lutte eschatologique entre le Bien et le Mal, elle exige du chercheur qu’il se positionne pour ou contre elle. Si cette philosophie de l’histoire empêche d’aborder une révolution d’une manière historique et sociologique, il est également contre-productif de l’écarter de l’analyse. Car, vécue dans la chair de ses acteurs, elle exerce des effets transformateurs sur la société. Dès lors, le chercheur « est obligé de se dédoubler », en adoptant une posture sans « fétichisme, ni rejet » vis-à-vis de la révolution (p. 24-25). De multiples lectures du fait révolutionnaire sont donc proposées : il est analysé à la fois comme une attente, un principe de changement, une rupture historique, un événement universel ancré dans le particulier, et le processus d’institutionnalisation d’un nouvel ordre politique. Ce choix d’une pluralité de lectures est permis par la variation des échelles de temporalité dans lesquelles s’inscrit un fait révolutionnaire. Il est à la fois l’événement, souvent court et dense, qui aboutit au renversement de l’ancien régime ; le processus, souvent laborieux, de négociation d’un nouvel ordre institutionnel ; et une construction historiographique permettant d’insérer une révolution dans une histoire longue (p. 29). Chaque partie de l’ouvrage est, par conséquent, consacrée à une révolution différente traitée sous un aspect particulier.

revolution(1).jpgDeux « passions », révolution et démocratie

Le fil conducteur de l’ouvrage est l’exploration du rapport entre faits révolutionnaires et attentes démocratiques. Sans établir un lien de causalité entre ces deux « passions » – un lien démenti par nombre de révolutions ayant débouché sur des régimes autoritaires comme en Russie, Chine ou Iran – le livre explore les conditions historiques dans lesquelles ces deux éléments se sont juxtaposés. Très riches et informatives, les parties 2 et 3, rédigées par la philosophe Gaëlle Demelemestre, suivent les débats qui ont accompagné la construction d’un ordre démocratique en Amérique et en France. À travers une comparaison entre les deux mouvements révolutionnaires, l’auteure explique pourquoi ils ont débouché sur différentes façons de concilier pouvoir et libertés individuelles. Les conditions politiques dans lesquelles surviennent les deux révolutions jouent un rôle crucial dans cette différence. Aux États-Unis, la constitution d’une strate sociale active a précédé la création de l’État, permettant d’élever la liberté d’entreprendre au-dessus de tout. En revanche, en France, le legs de la société hiérarchisée était trop important pour permettre à une frange importante de la population d’influer sur les décisions politiques. En suivant une lecture tocquevillienne de la Révolution française, attentive aux continuités entre le nouvel ordre et l’Ancien Régime, l’auteure suggère que cette conjoncture initiale a amené les révolutionnaires français à reprendre la forme unitaire de la souveraineté conçue sous la monarchie. La force de cette analyse est de montrer que c’est par la confrontation à des dilemmes concrets que les révolutionnaires sont parvenus à des solutions politiques. Les idées ne flottent pas dans l’air : elles sont ancrées dans les luttes politiques concrètes que connurent ces deux révolutions.

Ces luttes, toutefois, n’empruntent pas toujours le langage démocratique. Dans le monde arabe, discuté par H. Bozarslan dans la partie 4, l’association entre idée du changement révolutionnaire et attente démocratique a longtemps été l’exception plutôt que la règle. Au cours de l’histoire du Moyen-Orient, pourtant riche en contestations, les révolutions passées justifiaient souvent l’autoritarisme comme formule politique, car il était impensable qu’une société pluraliste et conflictuelle puisse servir de base à l’accomplissement des grands desseins d’indépendance et de développement. De nombreux coups d’État militaires ont secoué les pays arabes, notamment l’Égypte, l’Irak, la Syrie ou la Lybie entre 1952 et 1969. Ils étaient généralement présentés ou vécus comme de véritables révolutions, même après avoir accouché de régimes autoritaires et liberticides. La nature plurielle et conflictuelle des sociétés était perçue comme une menace contre l’unité de la nation, unité indispensable dans la lutte contre les « ennemis » extérieurs aussi bien qu’intérieurs. Ce n’est qu’au tournant des années 2010 que les attentes démocratiques se sont mêlées à l’idée de changement radical, grâce notamment aux nouveaux médias et à l’émergence des sociétés civiles (p. 306). Toutefois, la tension entre deux conceptions antagonistes de la société n’a pas disparu. D’une part, il y a l’idée d’une société organique, vue comme un seul corps allant dans la même direction. D’autre part, la société est perçue comme un magma d’intérêts divers et divergents rendant le compromis et la négociation indispensables. C’est la première conception qui domine aujourd’hui en Égypte où la police, l’armée et d’autres institutions répressives ont pu légitimer leur pouvoir par la demande de sécurité formulée par une grande partie de la société. Cette lecture sociologique fine des processus post-révolutionnaires dans les pays arabes permet de comprendre les facteurs qui ont empêché la démocratisation de l’ordre politique, tels que l’étouffement des protestations publiques et la résilience institutionnelle de l’ancien régime.

Le rôle des idées et des intellectuels

En s’interrogeant sur le rapport entre révolution et démocratie, cet ouvrage s’inscrit dans une réflexion sur le rôle des idées dans une contestation révolutionnaire. Il fait écho, sans s’y référer explicitement, au fameux débat qui a opposé dans les années 1980 T. Skocpol et W. Sewell sur le rôle des Lumières dans le déclenchement de la Révolution française [3]. H. Bozarslan suggère, pour sa part, que « les idées ne font pas la révolution », mais qu’elles sont intériorisées par les acteurs et deviennent alors « attente », « conviction partagée que l’ordre établi n’est pas juste » (p. 58-59).

Ce rôle des idées justifie l’attention portée, dans l’ouvrage, aux intellectuels arabes, qui seraient, selon l’auteur, en partie responsables de l’échec de la démocratisation des sociétés arabes. Contrairement aux intellectuels nord-américains et français, les penseurs arabes n’ont pas élaboré de notions novatrices de citoyenneté permettant à leurs sociétés d’adopter des modèles institutionnels inédits (p. 307). Ni les sciences sociales, qui se sont désintéressées des questions de pouvoir, de citoyenneté et de représentation politique, ni les intellectuels « essayistes », repliés sur la problématique de « la condition arabo-musulmane », n’ont pu remplir une fonction politique semblable à celle des théoriciens révolutionnaires du XVIIIe siècle. Cette carence théorique est selon H. Bozarslan la raison de la différence de fond entre les révolutions arabes et les révolutions américaine et française. Quand ces dernières visaient à transformer la cité, à travers la reconfiguration des rapports entre l’individu, la collectivité et le pouvoir, les révolutions arabes se sont elles limitées à la volonté d’intégrer « la cité bourgeoise » dont le modèle existait déjà ailleurs. Les contraintes idéologiques pesant sur les intellectuels, telles la culture politique arabe, imprégnée de l’idée néo-platonicienne du « roi-philosophe », ou l’emprise de la Raison théologique et de l’imaginaire de la Nation, interdisaient d’accepter le principe d’une société divisée et conflictuelle.

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Le rôle des intellectuels dans les révolutions arabes ayant très peu été exploré jusqu’ici, cette analyse offre une contribution particulièrement bienvenue. Toutefois, en n’abordant les intellectuels que sous l’angle des idées qu’ils produisent, elle empêche de saisir les logiques sociales susceptibles d’expliquer l’ambivalence de leurs positionnements face aux insurrections. Étudier ces positionnements dans leur contexte aurait aidé à mieux comprendre pourquoi les intellectuels arabes n’ont pu élaborer qu’une vision restreinte du changement politique, et sont rapidement retombés dans la logique moubarakienne de la polarisation autour de la question islamiste. On observe, en outre, un certain décalage dans le traitement du rôle des idées dans les parties du livre respectivement consacrées aux révolutions américaine et française, et aux soulèvements arabes. Alors que les passages portant sur les premières montrent comment les conceptions théoriques s’élaborent au cours de luttes concrètes, la partie qui analyse les seconds se concentre sur le contexte intellectuel détaché des affrontements politiques, adoptant une approche quelque peu désincarnée des idées. Or, le rapprochement entre les trois cas de révolutions aurait pu être plus poussé, si l’ouvrage avait intégré les débats très intenses qui ont accompagné le processus révolutionnaire en Égypte, par exemple sur le sens de la démocratie (« la démocratie des urnes » vs. « la démocratie de la rue »), ou sur la signification de « la citoyenneté » et de « l’état civil » [4].

En dépit de ces quelques réserves, Qu’est-ce qu’une révolution ? offre une réflexion novatrice et nuancée sur les processus de démocratisation en contextes révolutionnaires. Cet ouvrage donne une vision globale des mouvements révolutionnaires et permet de mieux comprendre leur ancrage dans la philosophie politique.

Pour citer cet article :

Giedre Sabaseviciute, « Logique des révolutions », La Vie des idées , 9 septembre 2016. ISSN : 2105-3030. URL : http://www.laviedesidees.fr/Logique-des-revolutions.html

jeudi, 07 juillet 2016

Pierre-Yves Rougeyron: Stasis - Penser le chaos

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Pierre-Yves Rougeyron:

Stasis - Penser le chaos

Conférence de Pierre-Yves Rougeyron pour la sortie de Perspectives Libres n°17 :

"Stasis - Penser le chaos"

lundi, 08 avril 2013

La revolución necesaria

 

La revolución necesaria

Ex: http://alternativeeuropeaasociacioncultural.wordpress.com/

Narciso-Perales
por NARCISO PERALES HERRERO
 
Se ha dicho que la historia se di­vide en edades clásicas y edades me­dias. Las edades medias son períodos de ascenso, de iniciación de un ciclo histórico cultural. Se caracteriza por la tendencia a la unidad. Las edades clásicas discurren en la unidad, en el disfrute de los bienes de civilización y cultura creados en las edades me­dias, después declinan en la disgrega­ción paulatina. Las edades clásicas acaban por afeminación, por consun­ción de los pueblos que alcanzaron el cénit en su curso. Los pueblos debili­tados terminan, de ordinario, derro­tados por otros pueblos, después de lo cual empieza una nueva edad media.
 
«Hay dos tesis» —decía José Anto­nio— «la catastrófica, que ve la inva­sión como inevitable y da por perdi­do lo caduco y lo bueno; la que sólo confía en que tras la catástrofe em­piece a germinar una nueva edad me­dia, y la tesis nuestra, que aspira a tender un puente sobre la invasión de los bárbaros; a asumir, sin catástro­fe intermedia, cuando la nueva edad hubiera de tener de fecundo y a sal­var, de la edad que vivimos, todos los valores espirituales de la civiliza­ción». He aquí nuestra tesis. Tesis a la que no hemos renunciado, porque nos negamos a aceptar la otra alter­nativa. Pero tesis de difícil triunfo. Tesis que costó a José Antonio, prime­ro la sorda persecución de las dere­chas, después la vida que le arrebata­ron, frente al paredón de la cárcel de Alicante; más tarde la deformación sistemática de su doctrina, obra de derechas y de izquierdas e incluso de viejos amigos infieles; finalmente el olvido, la «negación por la acción» de los que quieren ignorarle. Tesis que costó a España la muerte de sus me­jores hijos.
Pero también tesis justa, exacta, que no ha sido derrotada, ni puede ser sustituida más que por el triunfo del «fatalismo de la historia».
 
Bastaría desmontar el capitalismo y dar cauce al deseo de justicia que Dios puso en el alma del hombre uni­versal, para hacer imposible el comu­nismo y fundar una sociedad más justa, más humana, más sólida, pero ¿será esto posible por la persuasión? ¿Quién persuadirá a los dominadores que tienen sus bocas llenas de pala­bras buenas, pero dentro de sus crá­neos máquinas calculadoras? ¿Quién les convencerá que deben renunciar a la ganancia para salvar los valores del espíritu, que no podrían contabilizar nunca? ¿Qué razones valdrán para ha­cerles descender buenamente de sus altos sitiales y mezclarse en la tierra con el común de las gentes?
 
Existen espíritus timoratos que creen en la maldad esencial de todo cambio profundo. Durante cuatro si­glos el mundo ha venido cambiando, a veces bruscamente, de ordinario pau­latinamente. Desde Lutero el cambio ha ido de la negación de la unidad metafísica, de la unidad de Dios has­ta la negación de Dios y la programa­ción práctica y teórica, de la unidad exclusiva en la materia que es la dis­gregación, la decadencia. Ahora un cambio profundo, radical, auténtica­mente revolucionario, es absolutamen­te preciso. Pero este cambio no puede suponer un paso atrás en lo transito­rio, en aquello que por su naturaleza evoluciona, fluye transformándose. Al contrario en lo transitorio urge rectificar sobre la marcha, quemar las eta­pas peligrosas y llegar a un punto en que otras generaciones puedan reanu­dar el paso sosegado. El cambio brus­co, profundo, que deseamos, consiste puramente en el establecimiento de los eternos conceptos del ser y la ver­dad. Si restablecemos esos conceptos, objeto de la inteligencia, toda creación de ésta —lo transitorio, lo variable—, irá dirigida a su conocimiento y ser­vicio y, por tanto, hacia la perfección, cumpliéndose el mandamiento Divino: «Ser perfectos como Nuestro Padre Celestial es perfecto».
 
 
LA SOCIEDAD COMO ENTIDAD PERFECTIBLE
 
La organización de la sociedad, su estructura administrativa, su régimen económico, leyes y sus instituciones, deben dirigirse así, como todas las ac­tividades humanas, hacia la perfec­ción, aunque no la alcancen nunca; variando según el grado de civiliza­ción y de cultura, De acuerdo con el progreso científico y el desarrollo téc­nico que abren nuevas posibilidades de avance para la humanidad.
 
La mezcla de los valores eternos con una determinada organización econó­mico-social, tanto para la defensa co­mo para el ataque de algunas de sus partes se produjo como una necesidad táctica de las grandes fuerzas que se oponen en el mundo. Un auténtico movimiento revolucionario que preten­da vencer a las dos, debe rechazar enérgicamente dicha interesada iden­tificación. La mezcla de la tesis filosó­fica materialista más coherente y com­pleta que haya existido nunca, con el eterno ideal humano de justicia —ex­traño a su esencia— para su aprove­chamiento como «idea motora», debe ser igualmente denunciada como una grosera superchería.
 
La ideología más elevada de la hu­manidad para su propio perfeccionamiento es la que se deriva del con­cepto de la hermandad entre los hom­bres, se inspira en Dios y se dirige a Dios, como principio y fin de todo lo creado. La actuación del hombre a la luz de este concepto sólo puede ser para el hombre una actuación reden­tora. La revolución necesaria debe ser, ante todo, una revolución moral. Debe comenzar por la reconstrucción del hombre por su educación religiosa y moral; pero también por la subver­sión de las condiciones en que se de­senvuelve.
 
 
LA ACCIÓN REVOLUCIONARIA
 
Crear las condiciones sociales pre­cisas para que la hermandad humana sea una realidad con poco esfuerzo, será una acción revolucionaria porque supone la necesaria destrucción de las condiciones actuales que impulsan a la lucha de unos contra otros, al engaño reciproco, a la explotación de los dé­biles y a la reacción egoísta de todos. Sustituir unas condiciones que hacen que el sentimiento de hermandad sea una rara virtud, y en muchas ocasio­nes, heroísmo, por otras en las que este sentimiento fluya esporádicamen­te en la mayoría, será cristianizar la sociedad, convertirla, y será también disminuir las tentaciones, ayudar a la salvación del hombre.
 
Porque no es cierto que al hombre lo hagan «las relaciones de la produc­ción», ni siquiera el ambiente circun­dante; pero sí lo es que éste influye en el desarrollo de las posibilidades que cada hombre trae al nacer. Que es más fácil la práctica de la virtud con cierto bienestar material y más difícil si este bienestar se convierte en la abundancia o la escasez extrema de medios materiales. Y también lo es que resulta más fácil pecar contra la ca­ridad cuando el pecado es celebrado como muestra de ingenio y su resulta­do es la obtención de beneficios, que cuando supone la comisión de un de­lito y su consecuencia es la sanción de la sociedad.
 
Un movimiento revolucionario purificador, capaz de superar los antago­nismos actuales —y no estamos enun­ciando el programa de un partido po­lítico, ni unos puntos de vista origina­les, sino intuiciones populares que es­tán en el ambiente y compartimos— debe romper las fatalidades que pesan sobre los pueblos, desarrollando cier­to número de principios y decisiones válidos para cualquier país civiliza­do con las naturales modificaciones y diferencias accidentales que aconsejen las circunstancias nacionales.
 
 
LA DIGNIDAD Y LA LIBERTAD
 
La dignidad y la libertad del hom­bre dotado de un alma inmortal, ser racional, capaz de comprender las co­sas, de tener conciencia de sí mismo y de actuar libremente, por encima de un ciego determinado físico o econó­mico y de los impulsos instintivos; sujeto, moralmente, por la Ley del Creador, que debe libremente aceptar —porque Dios quiere la sumisión vo­luntaria y la premia, ya en la tierra con la plenitud humana— y por las exigencias racionales que plantea el ejercicio de la libertad de los demás. En ningún caso debe ser considerado ilícito que la sociedad civil —el Es­tado— atente a la dignidad de la per­sona, y, sólo para garantizar la liber­tad de cada uno y la permanencia de la supremacía del Bien común, le será lícita la regulación de las deliberacio­nes públicas.
 
 
LA PATRIA
 
La definición de la Patria como mi­sión, como tarea de una sociedad, que la caracteriza y distingue de otras en el curso de la historia, como unidad de destino en lo universal. La Nación es el soporte físico de la Patria, sus pobladores componen la Comunidad nacional, unidad jurídica, cultural y la­boral que exige la estrecha solidaridad de los que la integran en la salud y en la enfermedad, en la prosperidad y en la desgracia. El elemento funda­mental de la Comunidad nacional es la familia, basada en el matrimonio indisoluble. El cuerpo político de la Comunidad Nacional es el Estado, cu­yos poderes se derivan de la Comu­nidad. El servicio de la Comunidad es un honor, y en ningún caso puede constituir un negocio para particula­res, sino fuente exclusiva de benefi­cios para la Comunidad. Los servicios públicos y los seguros deberán ser propiedad de la Comunidad Nacional y deberán ser administrados por el Estado.
 
 
EL TRABAJO
 
La programación del trabajo como instrumento de perfección individual, y como medio de acrecer la dignidad de la persona; pero socialmente como fuente de todos los bienes no gratui­tos. Si el trabajo es una obligación in­dividual por mandato Divino, anterior al pecado es también una rigurosa obligación social deducida del concep­to de la hermandad de los hombres y de la solidaridad que une a los miem­bros de la comunidad nacional, puesto que su realización práctica, organiza­da y eficiente, condicionará el grado de prosperidad de la sociedad. La in­hibición del esfuerzo colectivo —la ociosidad— y el aprovechamiento del trabajo ajeno —la explotación del tra­bajo— deben ser considerados como atentados contra la Comunidad. La primacía del trabajo —expresión di­recta de la persona humana— debe asegurarse mediante la subordinación del dinero— que es sólo un signo con­vencional que permite el intercambio de bienes y servicios —y del Capital— que no es más que la acumula­ción de dinero medio estrictamente material necesario para la producción en nuestro tiempo. Lo que sólo puede lograrse mediante la nacionalización de la Banca y la orientación comu­nitaria de la política del crédito.
 
 
LA PROPIEDAD
 
Política de la extensión de la pro­piedad a todos los miembros de la co­munidad, difundiendo y extendiendo la propiedad privada de los bienes de uso y consumo, fungibles y durables de la tierra —en los cultivos suscepti­bles, de explotación individual, fami­liar y/o cooperativa— y de los instru­mentos individuales de trabajo en las labores artesanas, profesiones libe­rales y cualesquiera otras actividades productivas personales. Sustitución del contrato de trabajo por el de sociedad, que haga posible el acceso real a la propiedad de instrumentos de produc­ción colectivos, y facilite la verdade­ra cogestión en las empresas peque­ñas. Conversión de las grandes empre­sas industriales, comerciales y agríco­las cooperativas de producción, pro­piedad de los trabajadores. Abolición de las Sociedades Anónimas y direc­ción de las inversiones derivadas del ahorro hacia «obligaciones» creadas al efecto por el Estado. Regulación de las actividades económicas por medio de los Sindicatos.
 
 
EL ESTADO
 
Organización popular del Estado, mediante el establecimiento de un, a) poder político comunitario, elegido por los trabajadores de todas clases, miembros activos de la Comunidad, agrupa­dos en municipios, —Cámara de repre­sentantes políticos, formada por gru­pos orientados, según diversas tenden­cias, dentro de la tesis básica de la Comunidad— y en Sindicatos —Cáma­ra de representantes económicos en las que se coordinen y logren las aspiraciones e intereses de las distin­tas actividades—, b) poder ejecutivo derivado de las dos Cámaras de repre­sentantes y responsables ante ellas; c) movimiento político unido, como instrumento de comunicación entre los ciudadanos y representantes y co­mo medio de colaboración ciudadana con el poder ejecutivo; d) administra­ción general del Estado.
 
 
LA UNIDAD
 
Reconocimiento de la unidad sustan­cial del género humano y en conse­cuencia desarrollo de las tendencias a la creación de unidades políticas re­gionales de la mayor extensión posi­ble, como medio de alcanzar la uni­dad entre todas las naciones, y al establecimiento de formas de coopera­ción sinceras y viables entre las na­ciones desarrolladas y las atrasadas, para extender a estas últimas los bie­nes de la civilización y la cultura.
 
 
LOS MOTORES DE LA HISTORIA
 
Claro es que no basta disponer de un esquema deducido racionalmente de los eternos principios, para reme­diar la situación del mundo. Creemos en el valor del espíritu pero no desco­nocemos el valor material de las fuer­zas dominantes. Consecuentemente deberemos preconizar la creación de una fuerza, intransigente, enérgica y ordenada, capaz de vencerlas.
 
En cualquier momento de la histo­ria, sería posible precisar que la hu­manidad se divide en personas capa­ces de entusiasmo y de generosidad, y, por tanto, del sacrificio que exige una empresa política renovadora y personas indolentes y acomodaticias, predispuestas sólo a moverse por in­tereses inmediatos, que, a lo sumo, podrían simpatizar con la tarea, pero no sacrificarían nada por ella. Este estado anormal de la humanidad se ha agravado en nuestro tiempo como en todos los momentos críticos de des­moralización social. A pesar de esto, a pesar de que el grupo humano en que reside la capacidad de la sociedad para sostener una Idea es más peque­ño, es suficiente todavía para realizar grandes proezas o promover grandes catástrofes. Y no es temeridad afir­mar que una parte de estos hombres están en los dos bandos opuestos dán­doles su verdadera fuerza, como acu­sadores inconscientes de la falsedad materialista. Ellos, que no sus teorías, son los verdaderos motores del ex­travío de la historia. Y lo serán ma­ñana, si no son rescatados del error o alguien no les corta su camino.
 
 
LO PRIMERO, LA VERDAD
 
La experiencia demuestra que, cuan­do aparece en el tablero de la historia la frase brusca o violenta de una re­volución, esta se ha producido mucho tiempo antes, secreta o públicamente, en la conciencia de los hombres. Pero desgraciadamente no prueba que la re­volución —aún eliminando los erro­res e injusticias que mancha toda ac­tuación humana— constituya auténti­co progreso o un acercamiento a la verdad. En nuestro tiempo, y en todos los países, hay ya muchos hombres que dentro de sí han visto desvelarse las tinieblas y creen llegada la hora, otra vez, de que el espíritu se haga carne ante la atormentada humanidad de hoy trayéndole el sosiego y la es­peranza.
Pero para que esto ocurra, será pre­ciso merecerlo. Y el primer quehacer es gritar nuestra verdad —que es la Verdad. Repetirla mil veces cada día. En todo lugar y por todos los medios. Propagarla hacia los cuatro puntos cardinales. Prender nuestro fervor en las almas capaces de fervor. Atraer la ayuda militante de las personalidades vigorosas. Y traer también las simpa­tías de los que no saben dar más. Convencer a todos de la rigurosa exac­titud de nuestro empeño. Entonces —¡Dios nos conceda el tiempo!— una fuerza nueva surgirá. La fuerza del es­píritu unida de nuevo a la materia do­minada. Y la victoria será segura en el combate.
 
 
Revista Juanpérez, núm. 24,  10 Abril 1965

jeudi, 26 janvier 2012

Revolution from Above

Revolution from Above

Alex KURTAGIC

Ex: http://www.alternativeright.com/

Kerry Bolton
Revolution from Above
London: Arktos Media, 2011

The popular imagination conceives Marxism and capitalism as opposing forces, imagining that—obviously—Marxists want the capitalists’ money and capitalists do not want Marxists to take it from them.

Kerry Bolton’s Revolution from Above disproves this notion.

revolution-from-aboveAs it turns out, and as many readers probably already know, the Marxist revolutions in the East succeeded in many places thanks to the ample funds supplied to them—consciously and voluntarily—by finance-capitalists in the West.

With access to all the money they could wish for and more, the finance-capitalists in Bolton’s narrative were, and are, primarily motivated by a desire for power, and their ultimate aim was not even more money per se, but the enduring ability to shape the world to their convenience, which translates into a collectivised planet of producers and consumers.

Marxism was useful in as much as it was a materialistic ideology that destroyed traditional structures and values and turned citizens into secular, deracinated wage slaves, irrespective of race, gender, age, creed, disability, or sexual orientation.

Capitalism was useful in as much as it made money the measure of all things and created a consumer culture that ultimately turned citizens into debt slaves, also irrespective of race, gender, and so on.

In this manner, Marxism and capitalism were seen as complementary, as well as a method of pacifying the citizenry: too busy labouring in the factory or in the cubicle, and too befuddled by daydreams of shopping and entertainment during their free time, the citizens of this global order, fearful of losing their jobs and not being able to buy things or satisfy their creditors, are left with little inclination to, or energy for, rebellion.

Bolton explains how the finance-capitalist oligarchy is the entity that truly runs our affairs, rather than the national governments. The latter are either financially dependent, or in partnership, with the financiers and the central bankers.

To illustrate this dependency he documents the United States’ government relationship with the Bolsheviks in Russia during the revolution, not to mention the similarity in their goals despite superficial appearances to the contrary and despite alarm or opposition from further down the hierarchy. Bolton shows how genuinely anti-communist efforts were frustrated during the Cold War. And he shows that the close relationship with communist regimes ended when Stalin decided to pursue his own agenda.

The book then goes on to describe the various mechanisms of plutocratic domination. Bolton documents the involvement of a network of prominent, immensely rich, tax-exempt, so-called ‘philanthropic’ organisations in funding subversive movements and think tanks. Marxism has already been mentioned, but it seems these foundations were also interested in promoting feminism and the student revolts of 1968.

Feminism was sold to women as a movement of emancipation. Bolton argues, and documents, that its funders’ real aim was to end women’s independence (from the bankers) and prevent the unregulated education of children: by turning women into wage-slaves they would become dependent on an entity controlled by the plutocrats, double the tax-base, double the size of the market, and create the need for children’s education to be controlled by the government—an entity that is, in turn, controlled by the plutocrats. Betty Friedan, who founded the second wave of feminism with her book The Feminine Mystique, and Gloria Steinem are named as having received avalanches of funding from ‘philanthropic’ foundations.

With regards to the university student revolts of 1968, the book highlights the irony of how, without the activists knowing it, they were backed by the same establishment they thought to be opposing. These students were but ‘useful idiots’ in a covert strategy of subversion and social engineering.

The subversion does not end there, for the plutocracy has global reach and is as actively engaged in global planning today as it ever was. Revolution from Above inevitably deals with George Soros’ involvement in the overthrow of governments or regimes not to his liking. According to Bolton’s account, the reader can take it for granted that any of the velvet or ‘colour revolutions’ we have seen in recent years have been funded in some way or another by George Soros through his extended network of instruments. ‘Regime-changes’ in Yugoslavia, Georgia, Ukraine (orange revolution), Kyrgyszstan (pink revolution), Tunisia (jasmine revolution), Egypt (white revolution), Lybia (red, green, black revolution), and Iran (green revolution) were not the result of spontaneous uprisings. Anti-government parties, think tanks, media, campaigns, demonstrations, and even training courses for political agitation—all and in all cases received vast funding from finance-capitalism overseas, not from local collections of petty sums.

In other words, many a modern revolution has not come from below, but from above. And in the context of governments being in a dependent relationship to the stratospherical plutocracy, this aggregates into a pincer strategy, with pressure coming secretly from above and from below, with the pressure from below—however spontaneous and ‘messy’ it may seem when it hits the headlines—being the result of years of careful planning, financing, and preparation by overseas elites.

The reader must ask himself how it is that whenever we see one of these ‘colour revolutions’ somehow someone is able, almost overnight, to overwhelm the streets with a tsunami of well designed, professionally printed, and colour-coordinated merchandise: flags, scarves, placards, posters, leaflets, balloons, headbands, t-shirts, face-paint, you name it, it all seems very slick, aesthetically consistent, and fashion-conscious for uprisings that are supposedly spontaneous demonstrations of popular rage.

Overall Bolton crams in an enormous mass of information within 250 pages. The lists of names and figures—and some of the sums involved are truly staggering—are endless, and the persistent torrent of footnotes considerably expand on parts of the main narrative. The plutocrats’ web of influence and deceit is immensely complicated, not only as a structure but also as a process, since it thrives in double meaning, double think, and ambiguity. Those interested in a detailed knowledge of the machinations behind current and recent events, or even twentieth-century political history, would do well to read this book more than once—at least if they have ambitions of explaining it all to an educable third party.

One aspect of Bolton’s narrative that seems quite amazing is the superficially inoffensive tone of some of the enemy quotes provided. Were it not because Bolton’s findings flow in the same direction as other books uncovering the machinations of the oligarchs and their partners in Western governments, or because the answer to cui bono is provided unequivocally by the unfolding of current and historical events, it would be easy to think that the statements quoted came from deluded idealists. It may be that some truly believe in the goodness of their cause, yet such selfless altruism is hard to believe given the known absence of ethics among our current elite of super-financiers—the banking system they engineered, not to mention many of the opaque financial instruments we have come to known through the still unfolding financial crisis in the West, is a deception designed to obscure a practice of legalised theft.

The lessons are clear: firstly, modern ‘colour revolutions’ are not instigated by public desires for more democratic or liberal governance, but by private desires for increased global power and control; secondly, subversive movements can be given a name and a face—a name and a face averse that hides behind generic institutional names and orchestrates world events at the end of a complex money trail; and thirdly, the those seeking fundamental change should first become proficient capitalists or learn how to gain access to them. These are all obvious, of course, but Revolution from Above is less about teaching those lessons than about documenting how the world is run, by whom, and for what purpose. In other words, this is material with which to back up assertions likely to be challenged by, or in front of, the unaware. Sober and factual in tone, it is also good gift material for those who may benefit from a bit of education.

mardi, 16 août 2011

Hoe ontstaan revoluties?

Hoe ontstaan revoluties?

Peter LOGGHE

Ex: Nieuwsbrief Deltastichting - Nr. 50 - Augustus 2011


Hoe revoluties ontstaan, is een vraag die men zich al heel lang stelt. De actualiteit van de zogenaamde Arabische Lente in 2011 heeft ondertussen geleerd dat er geen antwoorden bestaan, die het fenomeen op zich volledig verklaren. Maar het Franse tijdschrift, La Nouvelle Revue d’Histoire, fraai uitgegevendoor Dominique Venner en één van de beste van zijn soort, heeft het nodig gevonden om hieraan een dossier te wijden. Een dossier dat net op tijd komt, want net rond deze periode werd ook het hoofdwerk van José Ortega y Gasset , La Rebelion De Las Masas (vertaal in het Nederlands als De Opstand der Horden, verschenen bij Nijgh & Van Ditmar met ISBN-nummer 9789023655671) opnieuw in het Frans uitgegeven.
 
Auteur Jean Michel Baldassari vraagt zich af op welke manier men het belang van een boek kan afmeten en geeft hierop als antwoord: “Als men het boek lang na de publicatie nog kan herlezen, zonder de indruk te hebben dat men verraden werd of bij de neus genomen”.  De Opstand der Horden, dat in 1929 in Spanje werd gepubliceerd, voldoet volkomen aan deze stelregel en – wat meer is – geeft daarenboven eeninteressante inkijk in het wezen en het ontstaan van revoluties. Een boek dat velen irriteert, want hetgaat helemaal in tegen de lineaire conceptie van de geschiedenis, die de vooruitgang van de mensheid afmeet aan de doorbraak van de democratie.

Voor deze Spaanse filosoof is democratie geen doel op zichzelf, maar slechts een middel van emancipatie, dat de beschaving ter beschikking stelt van het individu, zodat hij uit zijn apathie kanbreken. Europa kende op dat moment een beschaving waarbij de macht en de leiding van de maatschappij werd uitgeoefend door aldan niet verlichte minderheden. Maar tussen 1800 en 1914 groeide debevolking in Europa van 180 naar 460 miljoen mensen. Daarmee deed demassa haar intrede in het publieke leven. Samen hiermee ontwikkelde het De opstand der hordenonderwijs zichenorm en zorgden democratische rechten ervoor dat een ongekende situatie ontstond. Voor de eerste keer in de geschiedenis “oefenden individuen, die onverschillig stonden tegenover verleden en toekomst, die geen bijzondere ambitie of passie hadden, het recht uit om het lot van de wereld in een bepaalde richting te sturen” (Jean Michel Baldassari, pag. 35).

Beschouwde Ortega y Gasset de democratie dan niet als een vooruitgang? Natuurlijk wel, al waarschuwde hij er wel voor dat deze vooruitgang zich evengoed tegen zichzelf kon keren en in eennieuw barbarendom kon omslaan als de elites, anders gezegd diegenen die de zware verantwoordelijkheid op zich wilden nemen om de maatschappij te leiden, zich volledig zouden laten leiden door de blinde eisen van diegenen die hij met “massa’s” omschreef.

José Ortega y Gasset zal vooral de geschiedenis ingaan als de scherpe analyticus van het verschijnsel ‘massamens’.  Dit fenomeen is eigenlijk een agglomeraat van individuen zonder welomschreven groep of bijzonder talent, maar die zich soeverein opstellen, omdat men hen heeft laten geloven dat zij dat zijn.  “Want de gemiddelde mens heeft geleerd dat alle mensen wettelijk gezien gelijk zijn”, aldus de filosoof.  Verwaand in die mate dat hij elk hiërarchie als een agressie tegen zichzelf aanvoelt. Onverschillig tegenover de mogelijke plichten, kent hij maar al te goed zijn rechten.
 
Onvermijdelijk komen dan die andere groten in beeld: Alexis de Toqueville en Hannah Arendt. Want naar het voorbeeld van de Toqueville, die ongerust was over de gevolgen van de democratie, en ORTEGA Y GASSETHannah Arendt, die in haar De oorsprong van het totalitarisme het spiritueel ontworteld individu beschrijft datzeer gevoelig is voor collectivistische avonturen, zo vreest ook Ortega y Gasset de irrationele kracht van massa. Hij stond dus eerder afkerig van het Italië van Mussolini, maar was bovenal een anticommunist.
 
Was hij een reactionair? Helemaal niet, hij observeerde gewoon wat hij zag. Maarin tegenstelling tot Oswald Spengler die de fatale ondergang van het Westen voorspelde, dacht de Spanjaard niet dat Europa ‘gedoemd’ was tot een onomkeerbare decadentie. De Europese naties, aldus Ortega y Gasset, bevonden zich natuurlijk wel in een neerwaartse spiraal, maar als ze zich maar verenigden in iets nieuw, kon er zeker een nieuwe wereldmacht groeien. Was hij het eens met liberale denkers in die tijd om te stellen dat geschiedenis niet op voorhand geschreven was en dat mensen hun eigen lot perfect in eigen handen konden nemen, dan was hij in zoverre niet meer akkoord met diezelfde liberalen en stelde zich dus eerder als een conservatief op, dat hij als voorwaarde hieraan verbond dat vrijheid betekende dat diegenen die geroepen waren om te “leiden”, dit dan ook moesten kunnen zonder aan allerlei zware democratische regels te zijn gebonden.

José Ortega y Gasset stond positief tegenover een humanistische en tezelfdertijd elitaire beschaving, maar zou heel weinig voeling hebben gehad met “wat de beschaving vandaag heeft voortgebracht, een libertaire maatschappij, puur op consumptie gericht”.
 
Enkele historici belichtten verder in dit nummer 55 de Franse revolutie van 1789, de val van de burgerkoning Louis-Philippe, het belang van het jaar 1848 voor de opstanden over gans Europa, en de revolutie van 1917 in Rusland. Tenslotte belicht Dominique Venner in een bijdrage “Wanneer de revolutie een religie wordt” de gelijkenissen tussen de twee totalitaire ideologieën van de 20ste eeuw, het fascisme en het communisme. In deze beide collectivistische stromingen merkt de auteur – terecht naar mijn inschatting – een honger naar nieuwe religiositeit, en gaat hij op zoek wat er van het geloof van de fiere zeloten is overgebleven.

Een nummerén een tijdschrift dat we alleen maar kunnen aanbevelen:


La Nouvelle Revue d’Histoire.
Avenue des Ternes, 88
F-75017 Paris (Frankrijk)

Webstek
  
(Peter Logghe)

mercredi, 01 décembre 2010

La "tension psychologique insurrectionnelle"

La « tension psychologique insurrectionnelle »

Par Philippe Grasset

Ex: http://fortune.fdesouche.com/

(…) Dans Notes sur l’impossible “révolution” du 24 septembre 2009, sur dedefensa.org, était exprimée la conviction que les mouve

Honoré Daumier, "L'insurrection" (1860)

ments d’insurrection et de révolte auxquels nous avons l’habitude de nous référer sont définitivement dépassés parce que totalement inefficaces, voire contreproductifs.

Pour diverses raisons exposées dans l’analyse, de tels mouvements sont condamnés par avance s’ils prétendent obtenir directement un résultat décisif correspondant au but d’insurrection de ceux qui l’initient. Pour moi, c’est un fait indiscutable, même si le mouvement parvient à un résultat tangible.

 

(Résultats tangibles de telles actions, si elles pouvaient avoir lieu ? Soit changer le régime des retraites, soit, plus hypothétiquement, prendre d’assaut le Palais de l’Elysée et habiller Sarko en sans-culotte ou en scout du Secours Catholique ; soit même, pour des Irlandais colériques et qu’on sait être coriaces et courageux, des émeutes insurrectionnelles ne menant qu’au même cul de sac de la prise d’un pouvoir politique dont ils ne sauraient que faire puisque leur pays, comme les autres, n’est qu’un maillon du système et rien d’autre. Le seul cas où une action politique réelle peut donner directement un résultat décisif, par son caractère intrinsèque de psychologie insurrectionnelle réalisant effectivement une attaque contre le cœur de la psychologie du système, c’est l’éclatement de l’Amérique avec la destruction de l’American Dream qui s’ensuit, – perspective qui, soit dit en passant, ne doit pas nous paraître rocambolesque lorsqu’on lit le dernier article de Paul Krugman.)

Cette affirmation de “l’impossibilité d’une révolution” selon le sens classique ne doit certainement pas être prise comme une affirmation désespérée, désenchantée et nihiliste si vous voulez, mais simplement comme la prise en compte du fait que nous sommes dans une époque différente, où les forces en action sont complètement différentes de celles qu’on observait dans l’époque précédente (Epoque psychopolitique et plus du tout géopolitique, où il n’y a plus aucun rapport de cause à effet entre une action politique de rupture violente, même réussie, et un changement décisif du système).

Voilà mon postulat de base, qui s’applique essentiellement dans les pays du bloc occidentaliste-américaniste, – c’est-à-dire dans les seules situation où vous pouvez toucher le système au cœur ; dans ces conditions nouvelles, “toucher au cœur le système” deviendrait alors, plutôt qu’effectivement parvenir à sa destruction d’une façon directe, accélérer puissamment, voire décisivement, son mouvement de destruction interne déjà en cours, du fait de ses propres tares fondamentales.

Je vais tenter d’expliquer les caractères de cette nouvelle situation d’abord, ce qui peut être fait ensuite, comment ce qui peut être fait peut être exploité efficacement, sinon décisivement, enfin.

La psychologie, l’arme de l’insurrection

Je mets en avant bien entendu, avant toute chose, le facteur de la psychologie, qui est complètement essentiel dans mon propos. C’est par lui que tout passe, à cause de la puissance du système de la communication, instauré par le système général mais qui, à cause de ses spécificités contradictoires, joue un “double jeu”, alors que l’autre composante du système général, le système du technologisme, est dans une crise si profonde qu’elle pourrait être qualifiée de terminale, – ce qui est ma conviction.

(Sur ce dernier point, quelques mots… Je me demande chaque jour, chaque heure, chaque minute, comment on peut encore substantiver en termes de capacités politiques et militaristes également efficaces jusqu’à lui prêter un caractère de quasi invincibilité, un système dotée de cette puissante effectivement colossale, qui étouffe littéralement sous l’accumulation de centaines et de centaines de milliards de dollars annuels, qui est incapable de fabriquer un avion de combat [JSF], incapable de prendre une décision contractuelle [KC-X], incapable au bout de neuf ans de comprendre les données fondamentales absolument primaires de la guerre où elle se débat comme dans un pot de mélasse [Afghanistan], etc. Et l’on croirait, par exemple, qu’un excrément bureaucratique de plus [le “concept stratégique de l’OTAN”] irait changer quelque chose, sinon accroître encore le désordre général et la paralysie ossifiée de cette bureaucratie ? Il y a parfois l’impression qu’une telle observation du système par ceux qui professent leur immense aversion pour lui, témoigne également de la part de ces mêmes critiques d’une singulière fascination pour lui, comme une croyance paradoxale dans la magie de ce même système. C’est lui faire bien de l’honneur, et s’en informer fort mal.)

Poursuivons… Donc le système de la communication est un Janus. Il sert le système général mais, également, il le trahit joyeusement dès que les arguments auxquels il est sensible (sensationnalisme, méthodologie de l’effet, etc.) se retrouvent dans des appréciations contestataires du système, non par goût de la trahison mais par goût de l’apparat et de l’effet de ces informations, qui ont alors sa faveur puisqu’elles font marcher la machine (Vous savez, cette remarque désolée que fait parfois tel ou tel président, tel ou tel ministre, aux journalistes, même des journalistes-Pravda ses fidèles alliés : “mais pourquoi mettez-vous toujours l’accent sur les mauvaises nouvelles ?” Pardi, parce que c’est ça qui est “sensationnel”, qui fait marcher le système de la communication, et parce qu’il n’y a rien de mieux que les “mauvaises nouvelles” pour faire marcher le système, et qu’en plus il n’y a plus aujourd’hui que des “mauvaises nouvelles”).

Par conséquent, Janus est de tous les coups, il marche avec son temps (“il n’y a plus aujourd’hui que des mauvaises nouvelles”) et il est ainsi devenu, sans intention délibérée, la plus formidable machine à influencer les psychologies dans le sens de la déstructuration du système.

En répercutant les commentaires alarmistes des serviteurs du système concernant les dangers d’insurrection des populations de notre système pourtant si cajolées de mots ronflants, le système de la communication contribue grandement à créer un climat psychologique insurrectionnel. Mais ce climat n’engendre rien de décisif dans ce qu’on juge être décisif, – l’action “révolutionnaire”, – parce que nul ne sait comment s’insurger efficacement de cette façon-là.

C’est cette idée de cette situation sans précédent, qui renverse complètement les situations connues : hier, tout le monde savait ce que serait une “révolte”, c’est-à-dire par le moyen de la “violence révolutionnaire”, l’inconnue résidant dans le fait qu’on ignorait quand existerait une volonté ou une occasion de la faire ; aujourd’hui, tout le monde admet qu’il existe partout une volonté d’insurrection, l’inconnue résidant dans le fait qu’on ignore quelle forme pourrait et devrait prendre cette insurrection.

Alors, il y a partout des protestations, des manifestations, des initiatives spontanées parfois étranges, qui ne débouchent sur rien de définitif, et l’on s’en désole ; mais l’on n’a pas raison parce qu’elles ont aussi l’effet d’accroître constamment cette tension psychologique insurrectionnelle.

L’essentiel est dans ce bouillonnement psychologique. Prenez le cas d’Eric Cantona (voir le texte du 22 novembre 2010) ; type pas sérieux, Cantona, provocateur, people et ainsi de suite. Ce qui est accessoire en l’espèce – mais d’ailleurs sans préjuger des effets éventuels de cette “initiative spontanée” (retrait massif d’argent des banques), car nous ne sommes pas au bout de nos surprises –, c’est de prendre trop au sérieux la proposition de Cantona, en disant et expliquant “ça marchera”, ou bien “ridicule, ça ne marchera pas”.

Pour l’instant (cette restriction bien comprise), l’analyse de la chose n’a strictement aucun intérêt. Ce qui importe et rien d’autre, c’est la contribution involontaire de Cantona, idole people des foules, à la montée de la tension psychologique insurrectionnelle. On pourrait définir ce que je nomme “psychologie insurrectionnelle”, un exemple très précis et extrême à cet égard, dans un texte de l’écrivain et poète US Linh Dinh, sur OnLineJournal, le 15 novembre 2010.

Première phrase du texte : « Revolt is in the air » [La révolte est dans l'air]. Puis un long catalogue des révoltes qui pourraient avoir lieu aux USA, jusqu’à la sécession, jusqu’aux révoltes armées, etc., mais chaque fois avec l’observation que cela ne se fera pas, parce que la population est trop apathique, les conditions ne s’y prêtent pas, etc. Donc, constat pessimiste, sinon désespérant ?

Et puis cette conclusion, qui contredit tout le reste, – sauf la première phrase : «I have a feeling, however, that we may be nearing the end of being jerked back and forth like this, that even the most insensate and silly among us is about to explode » [J'ai le sentiment, toutefois, que nous pourrions bientôt finir d'être trimballés en avant et en arrière comme cela, que même le plus insensé et stupides d'entre nous est sur le point d'exploser].

…Tout cela conduisait, dans le même texte référencé (sur Cantona), à cette conclusion qui me paraît digne d’intérêt pour cette réflexion : «Peut-être déterminera-t-on finalement, selon l’évolution de ce “climat” de la recherche d’une nouvelle forme de révolte et de la tension psychologique que cela ne cesse de renforcer, que c’est le développement même de ce climat qui est, en soi, la nouvelle forme de la révolte…» (Encore une fois, le mot “révolte” n’aurait pas dû être employé, mais bien celui d’“insurrection”.)

Pour conclure cet aspect de l’analyse par une tentative de chronologie datée, je proposerais l’hypothèse que cette phase d’“insurrection psychologique” où nous sommes entrés est la phase suivante de l’évolution des peuples face à la grande crise de notre système et contre ceux qui servent encore ce système, après ce que je nommerais la phase de “résistance psychologique” qui s’est développée entre les années 2003-2004 et 2008-2009…

Cela correspond par ailleurs, et ceci n’est pas sans rapport avec cela, avec ce que j’estime être, dans l’année que nous terminons, l’entrée dans la phase active de la crise eschatologique du monde, cette crise qui se développe comme un volcan entre en activité vers son éruption, au travers de la pression des crises de l’environnement, des ressources, de la crise climatique, etc.

TINA pour nous aussi

Comment analyser d’une façon générale cette situation dans la perspective de ce qui devrait être fait, sinon de ce qui pourrait être fait ?

Je dirais que le but de l’“insurrection” ne doit pas être, n’est pas de “prendre le pouvoir” (c’est-à-dire le système, bien sûr), mais de “détruire” le pouvoir (le système). Il n’est même pas intéressant de l’“affaiblir” avant de le frapper, ce pouvoir, mais, au contraire, de le frapper pour le détruire alors qu’il est au faîte de sa puissance…

Car il est au faîte de sa puissance et le restera, y compris et surtout en conduisant lui-même son processus d’autodestruction, – plus il est puissant, plus sera puissant son processus d’autodestruction, – cela, à l’ombre d’une autre contradiction qui caractérise sa crise terminale : plus il est puissant, plus il est impuissant.

Mises à part les considérations humanitaires dont on connaît l’illusoire vertu et la grandiose inutilité, je dirais que le cynique qui veut la peau du système ne comprendrait pas une seconde ceux qui, se disant eux-mêmes adversaires du système, réclament à grands cris et espèrent ardemment le retrait américaniste d’Afghanistan, même pour les meilleurs motifs du monde.

Que l’OTAN et l’U.S. Army y restent, en Afghanistan, qu’elles y déploient toute leur puissance, tant il est évident qu’elles sont en train de se dévorer elles-mêmes, en aggravant chaque jour leur crise structurelle et la crise psychologique de ceux qui ordonnent et conduisent cette guerre sans but, sans motifs, sans commencement ni fin, sans rien du tout sinon la destruction de soi-même.

Et tout cela doit bien être compris pour ce qui est, au risque de me répéter, pour bien embrasser le caractère complètement inédit de cette situation…

Il n’y a là-dedans ni affrontement classique, ni une sorte de “guerre civile” au sens où nous l’entendons, ni “révolte” justement, comme j’en indiquais la définition au sens classique. Il y a une “attaque” qui est un mélange de pression psychologique et d’action désordonnée suscitées par cette pression psychologique et l’accentuant en retour, – et là, effectivement, nous abordons le champ de l’action qui est possible aujourd’hui, à la place des mouvements “révolutionnaires” classiques et totalement discrédités.

Cette attaque par la “pression psychologique insurrectionnelle” touche le système (ses représentants mais lui-même en tant qu’entité, dirait-on) dans sa propre psychologie, affaiblit cette psychologie dans le sens du déséquilibre, avec toutes les fautes qui en découlent, ce qui accélère effectivement le retournement de sa propre immense puissance contre lui-même.

En attaquant “le pouvoir” (le système), vous attaquez le système, comme l’indiquent justement les parenthèses ; vous n’attaquez pas des hommes mais un système (anthropotechnique si vous voulez, mais aussi bien anthropotechnocratique, etc.), dont j’ai déjà dit ma conviction qu’il évolue de façon absolument autonome, hors de tout contrôle humain, mais au contraire en entretenant une servitude humaine à son avantage, dont celle des dirigeants politiques est une des formes les plus actives.

Ce dernier point indique qu’à la limite, mais une limite qui prend de plus en plus d’importance dans le contexte, l’insurrection réclamée, qui est d’abord une “insurrection psychologique” manifestée par une tension grandissante, doit aussi, et peut-être d’abord, avoir comme objectif naturel de son influence, dans ce cas définie presque comme bienveillante, la psychologie des directions et élites politiques, comme pour venir à leur secours.

Dans cette situation extraordinaire et, contrairement à tous les dogmes et théories sur l’influence, la manipulation, etc., les dernières psychologies “sous influence” de la manipulation du système sont celles des directions et élites politiques, nullement celles des populations. Ces directions et élites politiques sont beaucoup plus prisonnières par auto conditionnement (virtualisme), par aveuglement ou par dérangement psychologique, que complices conscientes et cyniques.

La pression de l’“insurrection psychologique” des peuples doit agir sur elles pour affaiblir leur “dépendance” psychologique du système, pour subvertir leur démarche de soumission et leur position d’asservissement, – en vérité, et j’ironise à peine, pour les libérer, rien de moins…

Pour cette sorte d’action, dont la composante psychologique est essentielle, il faut des mouvements confus, incompréhensibles, parce que justement ces mouvements constituent une force psychologique insurrectionnelle brute semeuse de troubles sans fin dans les psychologies prisonnières du système, qui croient encore à la bonne ordonnance du système, qui craignent le désordre par dessus tout, et ce désordre commençant par la confusion psychologique.

Le seul but, – inconscient, bien plus que conscient, sans aucun doute, – de cette sorte d’action de ces “mouvements confus” est effectivement de “détruire” le pouvoir (le système) ; ces actions ont un aspect nihiliste qui se reflète dans leur confusion, mais ce nihilisme agit comme un contre feu, contre le nihilisme institutionnalisée du système, et elles acquièrent par logique contradictoire un aspect structurant antisystème extrêmement positif… Tout cela, comme vous le constatez, se déroule toujours dans le champ de la psychologie.

Bien entendu, il y a l’exemple de Tea Party. Ne nous lamentons pas si nous ne comprenons pas vraiment le but de Tea Party, bien au contraire ; surtout, surtout, il faut éviter tout jugement idéologique, de celui qu’affectionnent les vieilles lunes de notre establishment progressiste qui se donnent encore la sensation d’exister comme dans les belles années du XXème siècle, autour de la Deuxième Guerre mondiale, en agitant l’épouvantail de l’extrême droite et du “populisme”.

Politiquement, Tea Party c’est tout et rien, et c’est n’importe quoi, – et c’est tant mieux ; c’est, par contre, l’archétype du mouvement né d’une “psychologie insurrectionnelle”, qui doit être considéré pour cette dynamique, cette pression de l’insurrection psychologique qu’il fabrique et nullement pour ses motifs confus… L’on conviendra que tout cela n’est pas sans résultats, et quels résultats quand on voit l’évolution vertigineuse de la panique du système washingtonien.

Depuis le 2 novembre, l’establishment washingtonien ne cesse de grossir Tea Party, son action, son influence, bien plus que ne le justifieraient ses résultats aux élections. On construit à partir de lui des monstres qu’on pensait impossibles à Washington, comme l’annonce d’une aile “neo-isolationniste” au sein du parti républicain, laquelle, à force d’annonces et d’avertissements répétés, finit par exister vraiment.

On envisage des réductions dans le budget de la défense et Paul Krugman nous annonce un affrontement politique de rupture à Washington pour le printemps prochain, où Tea Party ne laissera sa place à personne. C’est cela, “détruire” le pouvoir (le système), le forcer à fabriquer lui-même, dans sa toute puissance, les monstres qu’il abomine et qui vont le dévorer. Et le moteur de tout cela, c’est bien la perception d’une irrésistible tension psychologique insurrectionnelle.

Enfin, dira-t-on en pianotant nerveusement sur la table, devant son écran d’ordinateur, lisant ce texte, où tout cela va-t-il mener ? L’esprit et la raison ne peuvent se départir de leur passion pour l’organisation du monde qui soit à leur mesure, où ils tiennent une place essentielle, dont ils peuvent proclamer la gloire à leur avantage… Bien entendu, la question est hors de propos. Pour l’instant on frappe, on frappe et on frappe encore, et l’on frappe principalement par cette pression psychologique insurrectionnelle…

Et le système fait le reste devant cette pression qu’il ne comprend pas mais qui l’enserre, il transforme son immense et invincible puissance en une force contre lui-même par des réactions stupides, absurdes, des maladresses extraordinaires.

Vous dites que le système est très, peut-être trop puissant ? Qui a parlé de le vaincre sur son terrain ? Surtout pas, il faut retourner contre lui, comme un gant, sa puissance énorme, comme le recommande l’honorable Sun tzi. Il s’effondrera ; d’ailleurs, cela est en cours, l’effondrement…

Et après ? Quel monde organiser? Oh, quelle ambition est-ce là… Laissez donc la montagne de fromage pourri et les murs de Jericho s’écrouler avant d’envisager ce qu’on peut mettre à la place, – non, pardon, avant d’envisager ce qui se mettra en place, de soi-même et irrésistiblement, par la grâce de forces puissantes.

Par cette formule, je veux avancer ceci : si l’hypothèse se vérifie et si la “pression psychologique insurrectionnelle” parvient effectivement à participer, sinon décisivement du moins considérablement, à la déstabilisation et à la déstructuration du système jusqu’à son effondrement, c’est que des forces fondamentales, supérieures à nous, auront évidemment favorisé cette issue qui n’est pas de l’empire de la raison, mais plutôt suggérée par l’intuition ; ces forces resteront présentes pour l’étape d’après la Chute et joueront leur rôle, fondamental à mesure…

Pour ce qui nous concerne, pour l’immédiat, nous autres brillants sapiens de l’espèce vulgum pecus, nous n’avons, à l’image du système, que la perspective TINA (There Is No Alternative) ; mais cela, dans une position de contre force, contre le système, car il n’y a pour nous pas d’alternative à la concentration de toutes nos forces dans le but ardent de la destruction d’un tel système, cette “source de tous les maux” dont l’unique but est aujourd’hui la destruction du monde.

Les sapiens revenus sur terre, à leur place, dans le chaos qu’ils ont tant contribué à créer, sont des acteurs parmi d’autres, et pas les plus grandioses, – certainement nous sommes cela, avec une bonne cure d’humilité à suivre, considérant le monstre extraordinaire que notre “génie” pleinement exprimé dans la modernité a contribué à créer.

Qu’ils s’en tiennent, les sapiens, à ce rôle qui n’est pas sans beauté ni dignité, comme l’est l’humilité devant l’ébranlement du monde dont nous ne tenons plus les fils. Ainsi bien compris, ce rôle n’est pas inutile.

Dedefensa

lundi, 27 septembre 2010

Les ravages de l'esprit révolutionnaire

Les ravages de l'esprit révolutionnaire

Ex: http://www.polemia.com/

 

Sansculottes.jpgUne critique politique de la révolution et de l’esprit révolutionnaire est souvent à courte vue. Le phénomène de la révolution est multiforme. La révolution peut être violente comme celles de Robespierre ou de Lénine. Elle peut aussi se dérouler sans violence apparente mais bouleverser la société en profondeur. Les Canadiens parlent de « la révolution silencieuse » des années soixante où la pratique religieuse a diminué, le taux de natalité s’est effondré, la délinquance a augmenté, etc… On a bien eu dans les années 68 comme on dit en France, une sorte de révolution dans les mœurs (au sens large) qui a été reprise notamment par le parti socialiste et qui n’a pas fini d’avoir de l’influence, y compris sur la vie politique.

L’une des analyses les plus profondes de l’esprit révolutionnaire a été faite par le philosophe allemand existentiel Martin Heidegger. Dans son livre « que veut dire penser ? » (« Was heisst denken ?») il a montré que cet esprit ne procédait ni de la politique ni de la morale, mais bien de la métaphysique. La métaphysique ignore la différence entre l’être et l’étant. Elle ne connaît que l’étant et l’homme moderne, déterminé par la pensée métaphysique sans même le savoir, vit « le nez dans le guidon » accroché aux objets immédiats et à l’instant présent. Il oublie l’être sans lequel les étants n’existeraient pas.

Cet homme moderne correspond au « dernier homme » décrit par Nietzsche dans « Ainsi parlait Zarathoustra ». Ce dernier homme n’a plus d’idéal, il est matérialiste et utilitariste.

« Qu’est ce que l’amour ? Qu’est ce que la création ? Qu’est ce que la nostalgie ? Qu’est ce qu’une étoile ? » Ainsi demande le dernier homme et il cligne de l’œil. « Nous avons inventé le bonheur disent les derniers hommes, et ils clignent de l’œil ». Dans les quatre questions posées, le dernier homme montre :

  • - sa froideur envers les hommes considérés comme des matières premières interchangeables (l’égalitarisme a pour but de faciliter cette interchangeabilité avec de beaux objectifs affichés) ;
  • - son scepticisme envers un Dieu créateur ;
  • - son mépris du passé (c’est un trait fondamental comme on le verra) ;
  • - son rejet de tout idéal (l’étoile).

Le dernier homme est persuadé d’avoir inventé le bonheur : c’est typique de tous les esprits révolutionnaires. Et il va chercher à l’imposer. « Il cligne de l’œil » veut dire qu’il se sent supérieur et qu’il croit que ses jugements de valeur ont une validité universelle.

Nietzsche va loin car il découvre que la réflexion la plus profonde dont est capable le dernier homme est fondée sur « l’esprit de vengeance ». Dans le chapitre sur « les Tarentules », il explique que l’égalitarisme n’est pas autre chose que de la volonté de puissance qui prend la forme de la vengeance sous le masque de la justice. Nietzsche dit que l’on ne pourra dépasser le dernier homme que si l’on est capable de se libérer de cet esprit de vengeance, donc de l’égalitarisme. Cet homme libéré de l’esprit de vengeance, il l’appelle le surhomme, dont il donne une définition : « César avec l’âme du Christ » !

La métaphysique moderne, observe Heidegger, identifie l’être avec la volonté. La volonté veut commander à tout : c’est la définition même de l’esprit révolutionnaire. Or, quel est l’obstacle invincible contre lequel la volonté ne peut rien ? C’est le temps et plus particulièrement le passé. Le temps est ce qui passe. On ne peut pas revenir sur ce qui est passé. Et Nietzsche définit la nature de cette vengeance métaphysique : c’est la vengeance à l’égard du temps qui passe, la vengeance à l’égard du passé.

C’est bien ce que l’on trouve chez tous les révolutionnaires : Robespierre comme Lénine comme les animateurs de Mai 68 : ils ont la haine du passé. Le passé est à détruire, c’est lui qui bloque l’accès au bonheur. Pour la métaphysique, l’être, c’est l’instant, ce n’est ni ce qui est passé, ni ce qui est à venir. Autrement dit, l’être n’est autre que l’étant, les objets (y compris les hommes) que l’on a sous la main.

Mais la métaphysique commet plusieurs erreurs : l’être n’est pas l’étant mais à la fois le passé, le présent et l’avenir. Le temps lui-même ne peut être réduit à l’instant. Le temps est durée : passé, présent et avenir. C’est en cela qu’être et temps sont inséparables.Toute la civilisation est fondée sur la prise en compte de ce temps long. Le révolutionnaire qui veut tout ici et maintenant n’aboutit qu’à détruire et à tuer.

C’est l’enfant ou le sauvage qui n’est pas capable de prendre en compte le temps, d’investir dans le temps et de faire fructifier dans l’avenir l’héritage du passé.

L’esprit révolutionnaire est bien parmi nous et il exerce ses ravages. Chaque fois que la facilité conduit à ne voir que l’avantage dans l’instant, cet esprit conduit à détruire notre avenir et à gaspiller l’héritage du passé. La responsabilité de l’adulte est justement de savoir prendre des décisions dans la durée. La propriété, la famille sont des institutions qui justement poussent l’homme vers plus de sens des responsabilités. Le citoyen propriétaire aura toujours une vue plus responsable que le gérant élu pour un temps court : c’est sur cette idée qu’est fondée la démocratie directe des Suisses. T

outefois, pour Heidegger, Nietzsche avait fait un bon diagnostic mais n’a pas trouvé le remède. Il le trouve dans l’éternel retour de l’identique. Mais on ne voit pas comment cet éternel retour supposé nous délivre vraiment de l’esprit de vengeance. Pour cela, il faut aller au-delà de la métaphysique. Il ne faut plus considérer le temps exclusivement comme ce qui s’enfuit, donc comme un ennemi. Le temps, c’est aussi, ce qui advient, donc c’est un don qui nous est fait par l’être. Le don, s’il est perçu, nous conduit non à la vengeance mais à la gratitude. Alors, nous sortons totalement de l’esprit révolutionnaire et de son esprit de vengeance égalitaire, nous en sommes délivrés.
 

Yvan Blot
0I/09/2010

Correspondance Polémia - 04/09/2010