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jeudi, 18 mai 2023

Entretien avec le groupe Feniks/Flandre : contre-mouvement et collectif métapolitique - Contre le narratif du mondialisme

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Entretien avec le groupe Feniks/Flandre : contre-mouvement et collectif métapolitique

Contre le narratif du mondialisme

Par Nick Krekelbergh

Quiconque ouvre régulièrement un journal ou parcourt l'internet a peut-être remarqué qu'une nouvelle étoile brillait depuis peu au firmament du conservatisme et du nationalisme en Flandre. Feniks est un nouveau groupe d'action et un collectif métapolitique qui s'adresse principalement aux jeunes. Il est frappant de constater que les fondements théoriques y occupent une place centrale. Mais le groupe se fait aussi régulièrement entendre par le biais de manifestations et de campagnes dans les médias sociaux. Ce faisant, le groupement ne se concentre pas tant sur les thèmes nationalistes flamands habituels, qui se résument généralement à une synthèse des luttes identitaires et institutionnelles, mais plutôt sur ce qu'il considère comme des développements sociaux plus profonds et plus fondamentaux. Pas d'actions autour de la périphérie flamande de la région bruxelloise ou contre l'islamisation, mais des soirées de formation sur lap pensée de Spengler et des manifestations contre l'introduction des pass sanitaires et de l'euro. Après plusieurs manifestations réussies, la publication d'un manifeste volumineux constitué d'"essais contre le narratif du mondialisme" est désormais à l'ordre du jour. TeKoS s'est entretenu avec Sacha Vliegen, l'un des initiateurs de Feniks.

TeKoS : Depuis quelques années, dans la rue et sur les médias sociaux (et parfois dans les médias grand public), nous avons pu faire la connaissance d'un nouveau groupe catalogué au sein de la droite conservatrice : Feniks. Pouvez-vous nous présenter brièvement Feniks ? Comment Feniks a-t-il vu le jour ? Pourquoi le besoin d'ajouter une nouvelle association au paysage nationaliste flamand ou à celui de la droite conservatrice ?

SV : Le riche paysage conservateur et nationaliste flamand actuel compte plusieurs organisations qui s'occupent principalement du domaine identitaire et, dans une moindre mesure, du domaine politico-institutionnel. Ces thèmes n'ont certainement pas perdu de leur pertinence, mais ces dernières années, d'autres thèmes ont également été mis en avant. Nous pensons à la pandémie du coronavirus, qui semble maintenant bel et bien derrière nous, au cours de laquelle les sciences se sont alliées à la pensée de l'ingénierie sociale et ont ébranlé toute la société de manière inattendue. En outre, nous assistons à la résurgence de la géopolitique, qui s'est également installée dans les préoccupations de nos contemporains depuis le printemps arabe de la décennie précédente. En raison de l'accent mis principalement sur la politique intérieure flamande et belge, ces thèmes essentiels ont souvent échappé à d'autres organisations que la nôtre. D'un point de vue structurel, Feniks établit également un lien étroit entre le contenu propement intellectuel et idéologique (nous pensons simplement aux conférences et aux entretiens en ligne, aux blogs, à la publication d'un manifeste) et les campagnes grand public. Au cours de la première année et demie de notre existence, l'accent a été mis sur les manifestations de ce que l'on appelle le "contre-mouvement", un nom collectif pour les différentes organisations qui ont vu le jour en réponse aux mesures prises lors de la pandémie.

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TeKoS : Feniks s'est révélé pour la première fois au monde extérieur lors des manifestations contre le confinement en novembre 2021. En effet, le premier événement de l'initiative Samen Voor Vrijheid, une organisation baldaquin, pluraliste, à laquelle Feniks a apporté son soutien logistique, a attiré 35.000 personnes. Pouvez-vous nous expliquer brièvement comment vous vous êtes impliqué dans cette initiative et pourquoi cette question est si importante pour Feniks ?

SV : La réaction officielle de l'Etat à l'émergence du coronavirus a eu un impact indéniable sur la société. Les réactions telles que le confinement général, les fermetures de sites où s'exprimait la convivialité sociale, et l'introduction du CST (Covid Safe Ticket) ont été imposées par une peur irrationnelle, attisée par des médias sensationnalistes, et ont aussi parfaitement montré à quel point l'élite politique est convaincue de l'existence d'une forme d'ingénierie sociale. Une technocratie a remplacé la primauté de la politique et les aspects sociaux de la vie humaine ont été négligés. Pour nous, cela reflétait à quel point une société peut être dystopique entre les mains d'une élite, pour laquelle les êtres humains sont réduits à "survivre" en tant qu'individus, mais qui ne sont plus considérés dans leurs connexions naturelles avec leurs communautés. Alors que nous venions tout juste de nous réunir pour former Feniks, nous avons uni nos forces à celles d'un certain nombre d'organisations pour descendre collectivement dans la rue pour protester contre le CST qui venait d'être introduit. Depuis lors, le nom collectif de "contre-mouvement" a émergé compte tenu des différentes perspectives émanant de toutes les associations qui se sont réunies à l'époque. Ce qui a été organiquement mis en place en très peu de temps constitue, pour le dire avec prudence, un jalon manifeste dans l'histoire récente.

TeKoS : Outre l'activisme de rue et les campagnes sur les médias sociaux, Feniks accorde également beaucoup d'attention aux fondements théoriques de son idéologie conservatrice. Cela va au-delà de la simple organisation de soirées de formation. Un manifeste est en cours d'élaboration. Il ne s'agit pas seulement d'une liste énonçant quelques points de désaccord avec d'autres instances ou organisations. Il s'agit d'une vaste collection d'essais philosophiques fondamentaux contre "le narratif du mondialisme", qui aborde divers thèmes tels que l'identité, l'économie, la migration, la géopolitique, la spiritualité, ... Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet ? Comment ce manifeste a-t-il vu le jour ?

SV : Ce corpus doctrinal était déjà présent à l'origine juste avant la création de Feniks. Il y a tellement de thèmes différents qui se rejoignent lorsqu'il s'agit d'un système social, qu'en les réduisant à un seul thème, on s'obscurcit la vue. Par exemple, ceux qui évoquent principalement les migrations, qui sont un thème important, ne peuvent pas porter leurs regards au-delà et percevoir les causes géopolitiques. Celui qui parle d'identité doit aussi prendre en compte la phase du capitalisme dans laquelle nous sommes et l'impact qu'elle a sur notre vie quotidienne.

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TeKoS : Bon nombre d'essais couvrent le domaine de la géopolitique. Surtout aujourd'hui, avec la guerre en Ukraine en toile de fond, c'est un sujet délicat. Alexander Douguine et sa Quatrième théorie politique (y compris le modèle de la multipolarité) sont également abordés. Comment voyez-vous l'avenir de l'Europe et son rôle dans le monde ?

SV : Nous craignons nous-mêmes une Europe qui se soumet servilement à ce que dictent les Etats-Unis. Notre espoir réside dans une Europe souveraine qui poursuit ses propres intérêts et les aborde de manière réaliste. Pour les États-Unis, par exemple, les migrations provoquées par le printemps arabe ou par la guerre en Ukraine n'ont pas un impact aussi important que pour l'Europe. Pourtant, l'Europe suit docilement les États-Unis. Notre espoir est de larguer les États-Unis, tant sur le plan géopolitique que culturel, en tant que première civilisation du monde. Cette primauté ne correspond plus à la réalité, ou du moins, nous vivons une phase de transition. Douguine est un philosophe extrêmement intéressant, qui tend un bon miroir à ce qui s'est passé en Occident au cours des trente dernières années (en particulier après la chute du mur): la transition de la démocratie libérale à la société postmoderne. Cela ne veut pas dire que nous sommes entièrement d'accord avec Douguine. Douguine nous décrit ce qui se passe au sein de la civilisation russe (ou du moins d'une partie de celle-ci). La société multipolaire est de fait devenue une réalité après le 24 février 2022. Cependant, elle apparaissait déjà en gestation évidente après la guerre en Syrie (ou contre la Syrie). La civilisation occidentale a atteint ses limites. Par exemple, nous partageons avec Douguine, mais pas seulement avec lui (pensez à Samuel Huntington), l'idée que la civilisation occidentale ne continuera pas à se développer universellement. Nous pensons qu'il existe différentes civilisations qui partageront le pouvoir au niveau international, politiquement, militairement, économiquement et culturellement. La manière irréfléchie dont l'OTAN et l'UE ont cherché à s'étendre s'est traduite par une réponse militaire misérable. C'est ce qui nous différencie de Douguine, par exemple: nous envisageons la situation d'un point de vue européen et souhaitons avant tout que les armes se taisent le plus rapidement possible. Cela peut encore être possible si nous osons, en tant qu'Europe, fixer une limite à la volonté d'expansion de l'OTAN et de l'UE en échange de la souveraineté nationale des pays d'Europe de l'Est limitrophes de la Russie. Les hommes politiques européens suivent cependant la voie opposée.

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TeKoS : Chez Feniks, ce sont surtout les jeunes qui sont actifs, semble-t-il. Les jeunes générations sont parfois blâmées pour la volatilité, le manque d'engagement et de concentration par les générations plus âgées. Est-il facile de les mobiliser sur un projet aussi substantiel que Feniks ? Cela nécessite-t-il une stratégie de mobilisation et de communication adaptée ?

SV : C'est en effet un défi, en contradiction avec l'esprit du temps. C'est délibérément que nous ne visons pas les masses en soi. Les actions à l'extérieur servent à montrer les positions spécifiques que nous défendons ou auxquelles nous sommes opposés, la formation réelle est principalement une question interne, parfois individuelle, et ne s'adresse donc pas à tout le monde. La prise en compte de sujets substantiels est souvent très demandée aujourd'hui, dans un monde où l'on est constamment stimulé par de courts clips de trente secondes ou des messages publicitaires. Il y a donc des conférences en ligne, qui sont aussi parfois mises en ligne pour le grand public, ainsi qu'un canal de formation interne via Telegram (une application de médias sociaux) et des formations individuelles. Ces dernières me rappellent le regretté Francis Van den Eynde qui, à l'époque, prenait personnellement le temps de philosopher avec de jeunes étudiants, parfois pendant plusieurs heures de suite lors d'un après-midi.

TeKoS : Il y a aussi beaucoup de citations philosophiques et idéologiques partagées sur les médias sociaux. Heidegger, Spengler et Nietschze, par exemple, sont souvent cités. Si vous pouviez citer trois penseurs qui ont eu une influence fondamentale sur Feniks, quels seraient-ils ?

SV : Trois, c'est difficile parce que ce serait encore trop limité. Oswald Spengler, Heidegger, De Benoist, Douguine, Johan Gotfried von Herder et Diego Fusaro, si nous pouvons aller jusqu'à six, cela fait deux fois trois. Ils peuvent probablement tous être qualifiés de "penseurs controversés" mais leurs idées sont étroitement liées. Par conséquent, aucun d'entre eux n'est décisif dans tous les domaines. Il y a donc suffisamment de thèmes pour continuer à donner des conférences et des interviews pendant plusieurs années encore.

TeKoS : Le "marxisme culturel" n'existe pas en réalité, comme l'affirme le manifeste de Feniks, ou du moins il n'est pas ce grand moteur des évolutions sociales que certains penseurs, blogueurs et journalistes conservateurs ont cru y reconnaître il y a quelques années. Pourriez-vous nous en dire un peu plus ? Qu'est-ce que c'est ? Et quel a été le rôle de l'école de Francfort et de la génération de Mai 68 dans cette évolution ?

SV : La théorie critique, par exemple, joue un rôle très important dans notre réflexion. Alors que de nombreux faiseurs d'opinion conservateurs se concentrent sur le contexte marxiste, ils oublient souvent que les Frankfurter eux-mêmes qualifiaient Karl Marx et ses idées de réactionnaires. En outre, le terme "marxisme culturel" crée une confusion avec le socialisme ou le communisme tel que nous les connaissions à l'époque soviétique. Les communistes soviétiques et les soi-disant marxistes culturels n'en seraient peut-être pas très heureux. Nous n'allons pas nier l'infusion de Marx et de la théorie freudienne dans les idées de l'école de Francfort, ni l'impact essentiellement négatif de ce corpus sur la civilisation occidentale, avec les aberrations de la culture woke et de la cancel culture. Il est important de reconnaître également, d'un point de vue métapolitique, que ces "marxistes culturels" se sont concentrés sur le sujet individuel, de manière encore plus radicale que les libéraux classiques. Nous pouvons donc - et nous l'expliquons plus en détail dans notre manifeste - considérer le "marxisme culturel" comme un enfant du libéralisme. L'ancienne gauche radicale a donc complètement vendu son âme au capitalisme. La phrase de Clay Routledge, reprise dans Tekos 188, résume bien la situation : "Nous vivons à l'ère du woke capitalism, où les entreprises prétendent se préoccuper de justice sociale pour vendre des produits à des gens qui prétendent détester le capitalisme".

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Le n°189 de TeKoS, où est paru la version originale du présent entretien avec Sacha Vliegen.

TeKoS : Feniks accorde également de l'attention aux penseurs de gauche (Sahra Wagenknecht, Hannah Arendt, Diego Fusaro) dans son manifeste, et explique même que la Frankfurter Schule n'était pas sans mérite. Les collaborations concrètes avec des organisations dissidentes, plus à gauche, ne sont pas non plus rejetées. La droite commence-t-elle à sortir tranquillement de sa "stérilité anticommuniste", comme le rappelle Alain de Benoist dans les notes deson journal, récemment publiées ?

SV : Personnellement, je ne considère pas Hannah Arendt comme un penseur de gauche, mais dans tous les cas, l'intégration d'autres perspectives est essentielle si vous voulez poursuivre une théorie globale et être un véritable groupe anti-système. Prenez l'immigration, par exemple. La force motrice qui la sous-tend est d'origine capitaliste. Par conséquent, quiconque critique l'immigration doit également critiquer le capitalisme et vice versa. Quelqu'un comme Diego Fusaro, par exemple, le reconnaît et s'inscrit donc moins dans un cadre purement gauchiste tel que nous le verrions en 2023. La plupart des personnes appartenant à la gauche politique pourraient considérer Fusaro comme étant d'extrême droite en raison de ses opinions sur la souveraineté nationale uniquement. Même les premiers Frankfurter ont formulé des critiques intéressantes sur le capitalisme et la massification de l'homme (par exemple, l'influence de l'industrie du divertissement). Dommage que la gauche ait oublié ces critiques.

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TeKoS : "Nouvelle droite" est un terme qui revient sans cesse dans les médias, où il est utilisé par toutes sortes de journalistes, de "spécialistes" et d'universitaires pour désigner à peu près tout ce qui évolue dans le sillage du Mouvement flamand contemporain et de la droite conservatrice. Considérez-vous Feniks comme une émanation de la "Nouvelle Droite" et quelle influence la Nouvelle Droite, en tant qu'école de pensée historique, a-t-elle eue sur vous ?

SV : L'influence est indéniablement très forte. Francis Van den Eynde (auteur et éditeur de TeKoS pendant de nombreuses années, ndlr) a été mon père spirituel et politique pendant mes années d'études, et ma contribution personnelle au manifeste lui est d'ailleurs dédiée. Pour nous, Robert Steuckers est également un compagnon et une encyclopédie ambulante, et ses travaux sur l'Europe et la géopolitique sont également importants dans notre manifeste. La Nouvelle Droite ne peut pas tout englober: comme nous l'avons déjà dit, il y a plusieurs penseurs qui ont apporté des contributions importantes qui ne s'inscrivent pas tout à fait dans le cadre de la Nouvelle Droite.

TeKoS : Un thème sur lequel Feniks est remarquablement silencieux, même dans son manifeste, est celui de la Flandre, de l'indépendance flamande et des Pays-Bas. C'est plutôt atypique pour un mouvement de droite conservatrice du sud des Pays-Bas. Est-ce une décision délibérée de se concentrer sur d'autres thèmes ?

SV : Laissons de côté la question institutionnelle pour l'instant. Il s'agit également d'un thème juridique très important qui s'inscrit moins dans un cadre philosophique. Néanmoins, il y a eu une nette tendance dans ce sens ces dernières années, malheureusement peut-être. Par ailleurs, dans l'Union européenne actuelle, il sera très difficile, voire impossible, de créer de nouveaux États souverains. Cela est douloureusement clair depuis l'affaire de la Catalogne. Nous devrons donc nous détacher politiquement et institutionnellement de l'enchevêtrement de l'UE avant de pouvoir parler d'une Flandre ou de Pays-Bas "indépendants".

TeKoS : Activisme de rue, médias sociaux, multimédia, théorisation et formation. Votre champ de vision est large, les moyens sont vastes et les objectifs semblent ambitieux. Comment envisagez-vous l'année à venir et comment Feniks entend-il continuer à marquer de son empreinte le paysage métapolitique et la société civile ?

SV : L'ambition ne manque pas. Le 5 février a déjà eu lieu une manifestation sur le thème "Towards €xit", qui désigne une attitude critique à l'égard de l'Union européenne. Le pouvoir politico-institutionnel se niche largement dans les institutions européennes, bien davantage qu'au niveau national. C'était un premier pas en termes d'actions. En outre, notre manifeste sera bientôt publié et nous le présenterons lors d'un congrès. D'ailleurs, nous organiserons une première fête de la mi-hiver cet automne, et nous espérons pouvoir continuer à le faire chaque année. En ce qui concerne les conférences, nous avons déjà interviewé au début de l'année David Engels sur l'avenir de l'Europe et Robert Steuckers sur les conflits actuels en Europe. À plus long terme, la formation d'une nouvelle génération est un projet en cours, que nous avons l'intention de poursuivre dans l'esprit de feu Francis Van den Eynde.

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Le Manifeste de Feniks porte le sous-titre "Essais contre le narratif du mondialisme" et peut être lu comme une analyse du système mondial avec des contributions fondamentales et réfléchies sur des sujets tels que l'identité, l'immigration, l'idéologie, l'économie, la géopolitique et la culture, à la fois dans leurs dimensions actuelles et historiques. Les lecteurs qui souhaitent acheter un exemplaire en prévente peuvent contacter info.feniksvlaanderen@gmail.com.

jeudi, 11 mai 2023

Steuckers et une certaine Russie: sur les traces du phylum russe

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Steuckers et une certaine Russie: sur les traces du phylum russe

Georges FELTIN-TRACOL

Source: http://leslansquenetsdeurope.hautetfort.com/archive/2023/05/08/steuckers-et-une-certaine-russie-6442067.html

Le conflit entre la Russie et l’Ukraine fait rage aux confins de l’Europe. Les belligérants produisent une désinformation massive qui brouille la réalité et corrompt les faits. Esprit libre à la polyglossie avertie d’où des lectures riches, variées et pertinentes, Robert Steuckers étudie depuis des décennies sur une généalogie intellectuelle de la pensée russe.

On trouve une part non négligeable de ce travail permanent dans un recueil passionnant intitulé Pages russes. D’aucuns l’accuseront de soutenir de manière implicite, par des sous-entendus convenus et des arrières-pensées inavouables le Kremlin. Ils ne comprendront pas que l’auteur n’est pas un enfant de la Rus’ médiévale, mais un féal du Lothier impérial. Neutre, il peut se permettre d’aller aux sources philosophiques d’une « russicité » constante dans ses moments tsariste, soviétique et russe.

Contre l’Occident US !

Il est en revanche avéré que Robert Steuckers n’apprécie pas l’OTAN, ce bras armé de l’Occident planétaire américanomorphe, grand pourvoyeuse de drogues. Cette organisation poursuit depuis 1949 - 1950 les tristement célèbres Guerres de l’opium (1839 – 1856) contre l’Empire chinois. «"Internationaliste" dans son essence, elle prend le relais d’un internationalisme inégalitaire, né de l’idéologie interventionniste du One World sous égide américaine, défendue par Roosevelt lors de la deuxième guerre mondiale. » Il souligne dès 2003 qu’« être un État membre de l’OTAN […] signifie être dépendant, donc soumis à la volonté d’un autre qui ne poursuit évidemment que ses seuls intérêts; être membre de l’OTAN, c’est être le jouet d’une volonté autre, d’une volonté qui veut nous réduire à l’état de pion docile, sans volonté propre ». L’actualité récente confirme son assertion.

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Vue de Vladikavkaz.

De retour de son voyage en Chine, le président français Emmanuel Macron qui tente par ailleurs de trouver un terrain d’entente viable entre Russes et Ukrainiens, a récusé toute confrontation entre l’Occident et la Chine. Cette remarque de bon sens a suscité la colère de Donald Trump. L’ancien président étatsunien a accusé le locataire de l’Élysée de « lécher le cul de la Chine ». Sans être aussi grossiers, Polonais et Baltes ont eux aussi condamné la sortie présidentielle, montrant qu’ils adoraient bouffer le derrière de l’Oncle Sam. Quant à la Hongrie, elle a tenu au contraire à saluer les propos du dirigeant français.

L’actuelle agitation autour de la réforme adoptée des retraites et la forte impopularité que connaît Emmanuel Macron ne seraient-elles pas en partie attisées par des officines atlantistes ? Leur influence sur les syndicats de l’Hexagone, en particulier FO, est en effet indéniable…

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La littérature russe, reflet d’une sociologie

Robert Steuckers examine avec précision non pas l’« âme russe », ce cliché pseudo-psychologisant éculé, mais le phylum d’un univers mental moins ordonné qu’on ne l’imagine. Ainsi s’intéresse-t-il à la nouvelle génération littéraire qui émerge à la fin de l’Union Soviétique. Chef de file d’une école qui promeut la paysannerie et l’écologie, Valentin Raspoutine combat le mirage libéral dans une œuvre guère connue en Occident. « Raspoutine et les ruralistes défendent le statut mythique de la nation, revalorisent la pensée archétypique, réhabilitent l’unité substantielle avec les générations passées. » En recensant l’essai prodigieux Le communisme comme réalité, il signale qu’Alexandre Zinoviev « a prouvé qu’il n’était pas seulement un grand homme de lettres mais un fin sociologue ». Il le décrit en parfait « conservateur individualiste ».

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L’auteur revient sur la vie, le parcours et les écrits d’Alexandre Soljénitsyne. Ce dernier prononce, le 25 septembre 1993, un vibrant discours d’hommage à la Vendée martyrisée deux siècles plus tôt. Le dissident souligne que « les racines criminelles du communisme résident in nuce dans l’idéologie républicaine de la révolution française; les deux projets politiques, également criminels dans leurs intentions, sont caractérisés par une haine viscérale et insatiable dirigée contre les populations paysannes, accusées de ne pas être réceptives aux chimères et aux bricolages idéologiques d’une caste d’intellectuels détachés des réalités tangibles de l’histoire. […] Ce discours, très logique, présentant une généalogie sans faille des idéologies criminelles de la modernité occidentale, provoquera la fureur des cercles faisandés du “ républicanisme “ français, placés sans ménagement aucun par une haute sommité de la littérature mondiale devant leurs propres erreurs et devant leur passé nauséabond ». Ces nabots poursuivent le défunt auteur de L’archipel du goulag d’une incroyable hargne en réclamant le changement de nom d’un lycée des Pays-de-la-Loire sous prétexte qu’Alexandre Soljénitsyne était… russe.

Sur le plan intérieur, Robert Steuckers analyse l’œuvre exigeante de Dostoïevski, « idéologue génial de la “ slavophilie “ voire du panslavisme » à travers les idées de Chatov qui offrent au populisme russe (narodnikisme) une transcendance incarnée dans l’histoire. « Chatov affirme que le peuple est la plus haute des réalités, notamment le peuple russe qui, à l’époque où il pose ses affirmations, serait le seul peuple réellement vivant. En Europe occidentale, l’Église de Rome n’a pas résisté à “ la troisième tentation du Christ dans le désert “, c’est-à-dire à la “ tentation d’acquérir un maximum de puissance terrestre “. Cette cupidité a fait perdre à l’Occident son âme et a disloqué la cohésion des peuples qui l’habitent. En Russie, pays non affecté par les miasmes “ romains “, le peuple est toujours le “ corps de Dieu “ et Dieu est l’âme du peuple, l’esprit qui anime et valorise le corps-peuple. » La vision du peuple russe théophore n’est donc pas propre à Alexandre Douguine puisqu’elle s’inspire, par-delà Dostoïevski, de La Russie et l’Europe (1869) de Nicolas Danilevski. Il en résulte un messianisme civilisationnel et une eschatologie (géo)politique qu’on retrouve dans les méandres compliqués de la diplomatie soviétique.

Diplomatie manquée et impératif confédéral

Joseph Staline agit sur le plan international en dirigeant réaliste. Est-ce la raison qui l’incite à décliner à la fin de l’année 1940 le projet ambitieux de « quadripartite » avec les signataires du Pacte Tripartite (Allemagne, Italie et Japon) ? Cette grande alliance aurait modifié la donne géopolitique avec « une URSS qui aurait pris le relais de l’Angleterre en Perse, en Afghanistan, au Pakistan (voire aux Indes) et une Grande-Allemagne maîtresse du reste de l’Europe [qui] auraient, conjointement, mieux pu garantir la paix. Surtout au Moyen-Orient ».

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Robert Steuckers insiste sur l’impossibilité en Europe centrale et orientale de faire coïncider le peuple et l’État. En décembre 1942, le gouvernement polonais en exil à Londres, dans le but de neutraliser les velléités expansionnistes allemandes et soviétiques, « propose la création de deux “ unions fédérales “ dans l’Est de l’Europe centrale. La première regrouperait la Tchécoslovaquie, la Pologne, la Lituanie, la Hongrie et la Roumanie et la seconde, la Yougoslavie, la Grèce, la Bulgarie et l’Albanie (voire la Turquie) ». Dès l’immédiat après-Seconde Guerre mondiale, le Yougoslave Tito cherchera pour sa part à créer une « fédération balkanique » autour de la Yougoslavie avec l’adhésion de l’Albanie, de la Bulgarie et de la Grèce. La défaite des communistes grecs et la rivalité entre le maréchal yougoslave et l’Albanais Enver Hodja ruineront ce plan qui aurait résolu les irrédentismes croate, bosniaque, albanais, musulman et macédonien…

Robert Steuckers fustige enfin qu’« en Occident, l’ignorance du mode “ ethniste “ de pratiquer la politique dans l’Est de l’Europe centrale demeure une triste constante. Personne ne se rend compte qu’on y raisonne en termes de “ peuples “ et non en termes juridiques et individualistes ». Cette méconnaissance crasse ne doit pas stériliser les initiatives. Au contraire, « l’idée d’une confédération doit mobiliser nos esprits. Une ou plusieurs confédérations regroupant les peuples d’Europe centrale en groupes d’État dégagés de Moscou et de Washington et s’étendant de la mer du Nord à la mer Noire, donnerait un essor nouveau à notre continent ». Déclinant, vilipendé et défaillant, l’État-nation n’était pas le modèle approprié à reproduire au lendemain de la chute du mur de Berlin.

D’une érudition exceptionnelle, Robert Steuckers va volontiers à l’encontre des bouffons du savoir, « les amateurs de terribles simplifications, les spécialistes de l’arasement programmé de tous les souvenirs et de tous les réflexes naturels des peuples ». En Européen convaincu, il prévient surtout que « construire la “ maison commune “, c’est se mettre à l’écoute de l’histoire et non pas rêver à un quelconque monde sans heurts, à un paradis artificiel de gadgets éphémères », surtout quand les bases initiales n’existent toujours pas.

• Robert Steuckers, Pages russes, Éditions du Lore, 2022, 398 p., 30 € (pour toute commande: http://www.ladiffusiondulore.fr/index.php?id_product=1007&controller=product ).

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mardi, 11 avril 2023

Les opérations spéciales et leur impact sur la géopolitique future - Entretien avec Robert Steuckers

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Les opérations spéciales et leur impact sur la géopolitique future

Entretien avec Robert Steuckers

Propos recueillis par Anna Tcherkassova pour ukraina.ru (avril 2023)

Comment les opérations spéciales ont-elles modifié l'équilibre mondial des pouvoirs?

Les géopolitologues définissent l’Ukraine comme une « région-portail » (« gateway region »). Elle est un sas par lequel devraient logiquement, pacifiquement, transiter biens matériels et culturels entre les grands pôles de civilisation. Elle constitue par ailleurs une portion importante sur la route qui part de l’Atlantique, de Lisbonne et de Cadix, vers la Volga et la Caspienne et, au-delà, vers le Kazakhstan et la Chine.  La Crimée a fait partie, dans l’antiquité, de la civilisation grecque centrée sur la Mer Egée ; elle a abrité les comptoirs italiens qui commerçaient avec le reste de l’Eurasie ; Catherine II a voulu en faire le réceptacle d’une civilisation nouvelle, helléno-germano-slave. Pour la Russie, la Mer d’Azov constitue l’ouverture aux mers chaudes, le retour vers les horizons méditerranéens (grecs et égyptiens) et l’accès de l’hinterland russe des bassins du Don et de la Volga à la région pontique, ouverte aux orbes plus écouméniques du Sud et de l’Ouest. L’ensemble formé par l’Ukraine, la Crimée, le Kouban et le littoral de Novorossisk à Soukhoumi en Abkhazie aurait pu devenir la plaque tournante d’échanges fructueux entre toutes les composantes civilisationnelles voisines : espace de la civilisation russe, espace danubien (au départ de la Roumanie et de la Bulgarie), espace caucasien, monde turc-anatolien, espace de peuplement kurde, pays riverains de la Caspienne, littoral caspien de l’Iran.

Les échanges entre ces pôles d’une grande richesse culturelle, en lisière de ce que les géopolitologues et les stratégistes anglo-saxons nomment le « Heartland » ont été délibérément sabotés par les pseudo-élites occidentales, au détriment de l’intérêt de tous les peuples d’Europe et d’Asie.

Lors d’un séminaire récent, tenu dans les Ardennes belges, j’ai eu l’occasion de souligner que l’objectif des thalassocraties de l’anglosphère est de ne permettre aucune convergence de cette nature en lisière du « Heartland » (russe en l’occurrence). Les « rimlands », avec littoraux sur les mers chaudes, ne peuvent avoir de liens étroits avec le « Heartland », qui recèle des matières premières indispensables, tout comme, au-delà de la Tauride (Crimée) antique, l’arrière-pays fournissait blé et bois à la civilisation grecque. Ce refus tenace de voir s’installer durablement des synergies entre « Heartland » et « Rimlands » sans intervention impérialiste émanant d’une périphérie insulaire comme la Grande-Bretagne impériale au 19ème siècle ou comme l’ « Ile du monde » que sont les Etats-Unis bi-océaniques.

Les thalassocraties se sont établies, en réclamant, dès le 17ème siècle, la « liberté des mers », c’est-à-dire la liberté de circuler sur les océans et de maintenir libres de toute intervention les communications maritimes. La réponse à cela ne doit pas être un refus ou un rejet de la liberté des mers mais prendre la forme d’une revendication équivalente sur les terres : la liberté des peuples, dans un esprit multipolaire, d’organiser à leur guise la « liberté des terres », soit la liberté d’organiser les communications terrestres par tous moyens possibles : chemins de fer, canaux, navigation fluviale, etc.

En effet, la nouvelle guerre hybride, qui a commencé dès le Maïdan de Kiev en 2014 (avec le précédent de 2004) et qui a culminé avec l’opération militaire spéciale de février 2022, vise à bloquer les communications terrestres, à en ralentir la promotion, à ériger des murs et des barrières dans les endroits les plus stratégiques, notamment dans les « régions-portails ».

Pour n’évoquer que les régions périphériques de la Russie, je ne citerai que l’Arctique et le Corridor Economique de Transport Nord-Sud (de l’Inde à l’Iran et de celui-ci, via la Caspienne, à la Volga, la Mer Blanche et l’Arctique).

L’Arctique, vu d’Europe occidentale, et surtout depuis la Belgique et les Pays-Bas (les ports d’Anvers-Zeebrugge et Rotterdam), fait partie d’un écoumène comprenant la Mer du Nord, la Baltique, la Mer Blanche et l’Arctique. C’est généralement perçu comme un espace qui fut « hanséatique ». Les marins de nos pays ont toujours tenu à commercer avec Novgorod d’abord, avec la « Moscovie » ensuite, au départ des ports arctiques. L’Ukraine sert de prétexte au Deep State de l’anglosphère pour contrôler complètement ces régions : en effet, les demandes d’adhésion de la Suède et de la Finlande (dirigée par une dame appartenant à la catégorie des « Young Global Leaders ») font de la Baltique une Méditerranée septentrionale sous la tutelle totale de Washington. Plus aucun Etat neutre n’est riverain de la Baltique. Et, l’Allemagne mise à part, la Pologne, volontairement inféodée aux Etats-Unis, constitue l’Etat riverain le plus peuplé et désormais le plus militarisé de cette mer intérieure du sous-continent européen.

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Le sabotage des gazoducs germano-russes Nord Stream 1 & 2 plonge l’Etat le plus industrialisé du centre de l’Europe dans la récession économique, avec pour corollaire, la proclamation, par Biden, de l’IRA (Inflation Reduction Act), qui permet aux grandes entreprises européennes (et surtout allemandes) de migrer vers les Etats-Unis où le prix de l’énergie est maintenu à la baisse. Volkswagen a déjà entrepris sa migration vers les Etats-Unis : avec la gestion chaotique de l’immigration en Allemagne depuis 2015 sous Merkel, avec la récession sociale et les salaires insignifiants imposés par le système Hartz IV, le centre dynamique de l’Europe va imploser. Ce qui fut toujours un but de guerre de l’anglosphère.

Pendant la seconde guerre mondiale, les Etats-Unis ont acheminé du matériel militaire vers l’Union Soviétique envahie par voie maritime nord-atlantique en direction de Mourmansk et d’Archangelsk. De là, ce matériel était envoyé au front par les canaux partant de la Mer Blanche vers les lacs Onega et Ladoga puis vers l’intérieur des terres russes et vers la Volga. Ensuite, d’autres matériels, provenant des Indes britanniques transitaient par l’Océan indien, le chemin de fer transiranien, la Caspienne et la Volga. La victoire soviétique à Stalingrad a permis de maintenir intactes ces deux voies de communication. Aujourd’hui, le transit Arctique/Océan Indien demeure une nécessité pour un monde en paix. Le projet de le réanimer et de le consolider existe : c’est l’INSTC (International North-South Transport Corridor). Les troubles potentiels à fomenter dans le Caucase ou les tentatives de déstabiliser l’Iran (par une variante des révolutions de couleur) participent du sabotage général des projets multipolaires d’assurer la « liberté des terres ». L’otanisation de la Baltique et le sabotage des gazoducs font partie du même projet que le blocage de la « région-portail » ukrainienne. La volonté d’avancer les bases de l’OTAN dans le Donbass, vise à menacer la région de l’embouchure du Don, lié à la Volga par le Canal Lénine, donc à la Caspienne et au tracé de l’INSTC.

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En 2011, les autorités belges et celles gérant le port d’Anvers, voulaient relier la ville portuaire flamande à la Chine. L’entreprise suisse HUPAC de construction de lignes ferroviaires était partie prenante dans le projet. Des négociations ont eu lieu à haut niveau entre Belges et Chinois, avec l’implication des autorités allemandes, russes et ukrainiennes. L’Ukraine devait, dans ce projet eurasien, jouer pleinement son rôle de « région-portail ». L’avantage pour nous était de réduire le temps de transport de moitié par rapport aux communications maritimes et de se projeter vers deux régions du monde : l’Afrique occidentale et l’Amérique ibérique. Comme Bruges au temps de la Hanse, nous aurions été la plaque tournante entre le commerce eurasien (déjà pratiqué par les Vikings, fondateurs de la ville) et le commerce avec la péninsule ibérique et l’Afrique du Nord. Ma position est de travailler à restaurer de tels projets, contre les saboteurs qui sont forcément des traitres à notre destin historique inscrit dans la géographie (à lire : http://euro-synergies.hautetfort.com/archive/2011/05/13/quand-les-belges-partent-a-la-conquete-de-la-chine.html ).

Pourquoi Bruxelles soutient-elle la politique de Biden en Ukraine si la quasi-totalité de l'Europe a déjà siphonné toutes les armes à envoyer aux Forces armées ukrainiennes (AFU) ?

L’eurocratie basée à Bruxelles et à Strasbourg est totalement inféodée à Washington. Depuis la timide ébauche d’un Axe Paris-Berlin-Moscou entre Chirac, Schröder et Poutine lors de l’attaque anglo-américaine contre l’Irak en 2003, les services américains se sont efforcés avec succès de remplacer les élites traditionnelles européennes et les diplomates de l’école réaliste par des personnages, généralement amusants comme Sarkozy, qui ont fait la politique des Etats-Unis. En effet, dès que Chirac a disparu de l’horizon politique français, Sarkozy s’est empressé de ramener son pays dans le giron de l’OTAN. Aujourd’hui, Macron est un homme issu des rangs des Young Global Leaders, attaché à l’agence McKinsey : il ne peut faire qu’une politique pro-américaine, en Ukraine comme ailleurs, en se débarrassant de tous les résidus de la diplomatie gaullienne qui survivaient encore vaille que vaille du temps de Chirac. En Allemagne, Schröder a été mis sur une voie de garage et sa participation à la réalisation de Nord Stream a fait qu’il a été victime d’une cabale au sein de son propre parti socialiste. Ce sont en effet les Verts qui sont désormais le fer de lance des Américains en Allemagne. Déjà Joschka Fischer avait prêché la guerre contre la Yougoslavie quand il était ministre des affaires étrangères. Annalena Baerbock, bien que membre du parti des Verts et donc théoriquement de « gauche », infléchit la politique étrangère de l’Allemagne vers celle des néoconservateurs américains autour de Nuland, Kagan et Wolfowitz. Les services américains disposent de personnages dans tous les milieux : les avatars des « nouveaux philosophes » avec Bernard-Henri Lévy en France, les anciens gauchistes avec Daniel Cohn-Bendit en France et en Allemagne, des néolibéraux délirants comme Guy Verhofstadt (qui a signé un livre avec Cohn-Bendit), les macronistes antigaulliens, des sociaux-démocrates à la Sanna Marin en Finlande (la fille est, comme Macron, une Young Global Leader, dont on ne perçoit pas très bien les compétences), les Verts allemands (chez qui tous les éléments neutraliste et pacifistes ont été éliminés) ou d’anciens néofascistes comme Giorgia Meloni (qui a renié ses promesses électorales et qui a fait une politique néoconservatrice dès son accession au pouvoir). On voit poindre à l’horizon de nouveaux candidats à de tels aggiornamenti dans les cercles de gauche comme de droite depuis le déclenchement de l’Opération militaire spéciale. 

Pour moi, l’affaiblissement des armées européennes est voulu : pour le Deep State américain, aucune armée moderne efficace ne peut survivre en dehors de l’US Army ; l’hémorragie du matériel militaire des Etats européens membres de l’OTAN, au profit de l’Ukraine de Zelensky, aura tout simplement pour résultat que, pour remplir à nouveaux les arsenaux, les Etats membres de l’OTAN, surtout ceux qui sont appelés à former l’Intermarium rêvé par les Polonais, devront acheter du matériel américain. Déjà, une dépêche est tombée ce matin : les Estoniens ont livré leurs matériels anciens aux Ukrainiens mais ont facturé au plein prix l’achat de nouveaux matériels à l’Europe de Bruxelles ! La corruption bénéficie de la situation !

L’objectif d’affaiblir les arsenaux européens ne date pas d’hier : les « ventes du siècle » dans les années 1970, quand les Américains ont livré aux pays du Benelux et de la Scandinavie les fameux F-16, c’était au détriment de l’aéronautique française (Bloch-Dassault) et suédoise (SAAB). L’opération s’est répétée très récemment avec le F-35.

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Selon nos informations, une grande partie des pays européens connaissent de graves difficultés économiques et financières à cause des politiques pro-américaines. Y a-t-il une prise de conscience en Europe que c'est la faute des États-Unis et non de la Russie et de Poutine ?

Les difficultés économiques sont évidentes dès le moment où des sanctions frappent le premier fournisseur d’énergie des pays européens, entraînant une augmentation vertigineuse du prix de l’énergie. Le sabotage des gazoducs de la Baltique vise évidemment à pérenniser cette situation. Délibérément, les forces occidentalo-atlantistes cherchent à ruiner l’Europe et à contenir la Russie (tout en grignotant son territoire sur des franges hautement stratégiques). Que les Russes sachent bien que l’Europe, en ses dynamiques profondes, en son idéologie parfois traditionnelle parfois socialiste, n’est pas l’Occident, mixte de déviances religieuses puritaines, d’idéologie whig (rationalisation apparente de ces déviances protestantes) et d’hystérie jacobine sur le mode français : ce sont les tenants de ces délires religieux et libéraux qui ont déclaré la guerre aux puissances qui souhaitent l’avènement d’un monde multipolaire. Aujourd’hui, ces déviances ont pour nom et pour avatar le wokisme des dems américains, le néolibéralisme outrancier à la Macron, le néoconservatisme de Nuland et Kagan et les délires des Verts allemands (rejeté à 85% par la population berlinoise suite à un sondage très récent). Cette situation ne convient à personne dans le Vieux Monde, eurasien et méditerranéen. La vie quotidienne, qui avait déjà été pourrie par les mesures de confinement en 2020, connait un recul inquiétant en qualité : les prix des denrées alimentaires ne cessent d’augmenter, en même temps que le prix de l’énergie et du carburant pour les véhicules. Les entreprises ferment, incapables de payer les notes de gaz et d’électricité. Le chauffage est diminué dans les cafés et restaurants, où les pauvres viennent chercher une chaleur qu’ils ne peuvent plus se payer à domicile. Le libéralisme occidental se voulait « société d’abondance » et non de pénurie. C’est exactement l’inverse qui se produit aujourd’hui dans nos pays.

Cependant, la propagande, massive dans les médias publics et privés, camoufle cette situation en occultant le réel et en parlant sans cesse de non-événements, tel les entretiens qu’accorde une ministre de Macron à la revue Playboy, telle la généralisation de l’usage de trottinettes dans les grandes villes ou la nécessité de manger des insectes. Les masses sont déboussolées et seuls quelques lucides se rendent compte que la situation ira en se dégradant au fil du temps. Les sanctions ont et auront un effet désastreux.

Qui, selon vous, est le plus intéressé par une résolution pacifique du conflit ukrainien ? La Russie, les États-Unis, l'Ukraine, l'Union européenne ? Pourquoi ?

Les pays intéressés par une solution pacifique sont évidemment ceux qui ont intérêt à ce que les voies de communication terrestres tel le projet « Belt & Road » chinois, l’INSTC prévu par l’Inde, l’Iran, l’Azerbaïdjan et la Russie, les Etats qui pourraient bénéficier d’un élargissement de la voie maritime arctique, tous les Etats européens qui bénéficiaient du gaz russe bon marché, etc. Il est évident que les peuples d’Ukraine, sans exception, auraient intérêt à ce que cesse cette guerre et que leur pays trouve son rôle de « gateway region », de pays de transit entre l’Europe et l’Asie profonde, entre la Scandinavie et la Méditerranée. L’Europe réelle, débarrassée de son personnel eurocratique, serait également bénéficiaire d’une paix durable en cette région du monde. L’Afrique (et l’Egypte) et la Turquie verraient leurs approvisionnements en maïs et en blé garantis sur le long terme.

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Les Britanniques savent-ils pourquoi la Russie se bat en Ukraine ? Comprennent-ils que la guerre dure depuis 2014, que le non-respect par l'Ukraine des accords de Minsk et le soutien des principaux pays occidentaux à l'Ukraine pour qu'elle s'y conforme ont conduit à ce conflit ?

La stratégie de l’endiguement de la Russie est une vieille stratégie britannique, pensée dès la conquête de la Crimée par les armées de Catherine II. Elle se concrétisera lors de la guerre de Crimée de 1853 à 1856. La Crimée aux mains des Russes était un casus belli pour l’impérialisme britannique du 19ème siècle. Il l’est aujourd’hui pour l’Etat profond américain qui a repris toutes ces stratégies thalassocratiques à son compte et les a incluses dans les visions bellicistes néoconservatrices. La guerre de Crimée a été perdue pour les Russes parce que l’acheminement de troupes par voies terrestres était trop lent et trop compliqué : l’envoi de troupes par mer était plus rapide. La construction du Transsibérien rendait les opérations logistiques plus aisées : du coup, immédiatement après la mise en service de cette voie ferrée transeurasienne, le géographe MacKinder énonce sa théorie du Heartland inaccessible aux blocus navals et qu’il faut contenir aussi loin possible des littoraux atlantiques, indiens et pacifiques. Quelques années plus tard, Homer Lea, géopolitologue et stratège américain, partisan de l’alliance définitive entre l’Empire britannique et les Etats-Unis, met au point, dans son livre The Day of the Saxons, les plans du « containment », stipulant notamment que la zone d’influence russe ne peut pas dépasser la ligne Téhéran/Kaboul ; pour Lea, la Chine républicaine de Sun Ya Tsen devait être une partie du Rimland contrôlé par les « Saxons » et l’Allemagne devait être tenue éloignée des littoraux de la Mer du Nord (la poussant paradoxalement dans une alliance avec la Russie à la veille de la première guerre mondiale !). Ce sont toujours les théories de MacKinder et de Lea qui animent, en leurs versions modernisées par Spykman notamment, les stratégies de l’OTAN. Celles-ci s’appliquent à la Russie quel que soit le régime politique qui la gouverne. En ce sens, on peut parler d’une continuité de l’histoire russe.

Quant à savoir si les Britanniques de base, si l’homme de la rue dans les villes et les campagnes anglaises, se rendent compte ou non des enjeux de la guerre actuelle en Ukraine, je ne peux pas vous répondre : je ne suis plus allé à Londres depuis 2008 (et je n’y suis alors resté qu’un seul jour !). Cependant, il faut tout de même souligner la crise que traverse la Grande-Bretagne aujourd’hui, avec le risque de sécession de l’Ecosse, avec les effets quasi nuls du Brexit, avec une société gangrénée par le wokisme et la cancel culture (qui s’attaque aux meilleures productions de la culture et de la littérature anglaises), par un tissu social détruit par le thatchérisme et ses avatars ultérieurs, etc.  Il n’y a certainement plus de modèle anglais à exporter.

Je vous rappelle tout de même que Merkel elle-même a avoué publiquement que personne, parmi les dirigeants occidentaux et parmi les Européens occidentalisés, n’avait l’intention de respecter les accords de Minsk, alors que ceux-ci prévoyaient la fédéralisation de l’Ukraine et son statut de neutralité, comparable à celui de la Finlande après la seconde guerre mondiale. Or les modalités prévues lors de ces accords de Minsk auraient préservé le statut de « gateway region » de l’Ukraine au bénéfice de tous, aurait permis au complexe hydrographique Mer d’Azov/Don/Volga de fonctionner dans tous les sens, une fois de plus au bénéfice de tous. C’est ce fonctionnement sans heurts que ne veulent pas les stratèges thalassocratiques conventionnels, le Deep State et les néoconservateurs bellicistes. Merkel et Hollande ont joué le rôle de figurants impuissants dans un scénario qui était dicté par ces forces négatives. Toute réédition potentielle de l’Axe informel Paris-Berlin-Moscoua été réduite à néant, une Axe où les dirigeants de la France et de l’Allemagne auraient eu leur mot à dire dans les affaires européennes et auraient pu agir dans les intérêts réels de leurs peuples.

Il n’est plus possible de raisonner dans les termes dictés par le contexte délétère de la seconde guerre mondiale, où l’on campe la Russie actuelle comme une URSS agressive prête à bondir sur l’Europe et une Europe condamnée à se défendre. La seconde guerre mondiale a prouvé l’unité géostratégique de tout l’espace sis entre l’Algarve portugaise et le quadrilatère de Magnitogorsk au sud de l’Oural. Elle a prouvé aussi la nécessité de l’artère stratégique entre l’Arctique et l’Iran. Toutes les forces positives, en Europe et en Russie, doivent s’unir pour faire fonctionner les corridors de communications (Rhin-Alpes, Rhin Danube, Baltique/Adriatique, Arctique/Caspienne, etc.) que la guerre actuelle bloque irrémédiablement et que toute réactivation des conflits dans le Caucase du Sud bloquerait encore davantage. Ces forces positives doivent faire converger leurs réalisations avec les projets chinois dits « Belt & Road Initiative ».   

Une partie importante des forces armées ukrainiennes (AFU) adhère ouvertement aux idées nazies. Cela est évident à la fois dans leurs attributs et dans leur interprétation déformée de l'histoire et des résultats de la Seconde Guerre mondiale. Pourquoi l'Europe soutient-elle le régime nazi, contrairement à ses propres lois ?

Les allusions au nazisme en Ukraine laissent les observateurs lucides d’Europe occidentale pantois. Les anciens, qui ont vécu l’époque où le national-socialisme régnait sur l’Allemagne et sur les pays occupés par les armées de Hitler, n’ont tout de même pas le souvenir de ce folklore sinistre avec des torses masculins tatoués et une « musique » faite de fracas épouvantables. Les nazistes ukrainiens font penser aux Maras du Salvador en Amérique centrale, qui, eux aussi, furent manipulés par des forces extérieures au pays. Ce « nazisme » à Kiev est comparable à toutes ces formes de « contre-culture » nées dans les pays anglo-saxons depuis les années 1950. Dans les années 1980, et encore au début des années 1990, on trouvait en Europe occidentale une contre-culture malsaine, dite « skinhead », qui a décrédibilisé les mouvances nationales dans tous les pays où elle s’est manifestée. Les services secrets s’en servaient d’ailleurs pour cela, pour effrayer le citoyen normal, pour l’induire à ne pas voter pour de nouveaux partis (de gauche ou de droite). Aujourd’hui, cette « contre-culture » n’est plus nécessaire : les services peuvent manipuler plus adroitement les élections, en trafiquant le vote électronique ou en avançant des politiciens qui promettent un changement mais s’alignent sur le système, une fois élu (Sarkozy, Meloni). Cette « contre-culture » de violence verbale, de signes agressifs comme les tatouages de runes ou de croix gammées (ou d’autres chez les Maras salvadoriens), de musique cacophonique, est tolérée en Ukraine parce qu’elle a permis le recrutement de soldats dans la lutte contre les russophones du Donbass. Elle ne serait pas tolérée en Europe occidentale car assimilée, à tort ou à raison, à l’occupant allemand de la seconde guerre mondiale.

mercredi, 15 septembre 2021

Sur et autour de Carl Schmitt – Trois heures d'entretien avec Robert Steuckers

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Sur et autour de Carl Schmitt – Trois heures d'entretien avec Robert Steuckers

 
Cette vidéo est consacrée à la pensée de Carl Schmitt à partir du livre « Sur et autour de Carl Schmitt » de Robert Steuckers. Dans cet entretien, Robert Steuckers nous explique le contexte dans lequel Schmitt a élaboré sa conception de la « décision » en politique et du « Grand Espace » (Großraum). En effet, l’entretien est divisé en deux parties, consacrées respectivement à ces notions. L’intérêt de cet entretien est qu’il permet d’aborder la pensée politique de Schmitt non pas de manière abstraite, mais en lien avec son époque et avec ses sources. A travers Schmitt, Robert Steuckers évoque, entre autres, les figures de Donoso Cortés, Karl Haushofer, Clausewitz et même Guillaume Faye. Avec beaucoup de perspicacité et de brio, il nous rappelle l’importance et l’actualité de cette pensée.
 
Sommaire :
00:00 Introduction
12:08 Première partie - décisionnisme
29:20 Qui prend la décision ?
46:08 En quoi le décisionnisme est-il une réponse aux problèmes de l'époque?
01:08:06 "Clausewitz est un penseur politique"
01:20:24 Résumé de la pensée politique allemande depuis la fin du XVIIIe
01:30:39 Seconde partie - le "Grand Espace"
01:43:24 Caractéristiques du Grand Espace
02:04:20 Quel rapport entre le Grand Espace et la géopolitique ?
02:25:03 Actualité de cette notion
02:47:09 Influence de Carl Schmitt sur Guillaume Faye
 
 
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lundi, 02 août 2021

Ethnofuturisme ? Une recension de Rebirth of Europe

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Ethnofuturisme ? Une recension de Rebirth of Europe

Andrew Joyce

Ruuben Kaalep & August Meister
Rebirth of Europe - The Ethnofuturist Manifesto
Arktos, 2020

Il existe de nombreuses façons de décrire l'époque dans laquelle nous vivons, et aucune n'est optimiste. C'est pourquoi je considère que ce n'est pas une mince affaire que Ruuben Kaalep et August Meister, deux jeunes ethnonationalistes des pays baltes, soient parvenus à élaborer un manifeste extrêmement positif, et même réjouissant, à partir des déchets puants et des engouements imbéciles de l'époque actuelle. H.L. Mencken a suggéré un jour que "tout gouvernement, dans son essence, est une conspiration contre l'homme supérieur". Le gouvernement moderne de l'Occident est une conspiration contre le seul homme blanc, et la question de savoir comment renverser cette conspiration est le plus grand défi de notre époque. Elle a donné lieu à une prolifération de manifestes et de façons de décrire notre politique, tous dans le but de renverser la vapeur sur le plan politique et de ramener à la raison la majorité des Européens, où qu'ils vivent dans le monde.

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Ruuben Kaalep

Mais cette prolifération d'idées et de méthodes a probablement aggravé nos maux plutôt que de les soulager. Aujourd'hui, nous sommes confrontés à de la confusion: de nombreuses auto-suggestions ont été élaborées qui ne semblent qu'exacerber les factions. Et nous avons cuisiné un véritable ragoût de manifestes qui se contredisent les uns les autres ou suggèrent des points d'intérêt différents. Une grande partie de ce qui passe aujourd'hui pour la philosophie ethnonationaliste contemporaine, en particulier dans l'Anglosphère, est sous-tendue par une sorte de paralysie apathique, et exprime une attente de quelque chose d'indéfini mais néanmoins d'ardemment désiré. Je crois que la chose à laquelle nous aspirons le plus est la clarté et la confiance. La clarté de notre position. La clarté de ce qui nous arrive. La clarté de nos options. Et la confiance de voir ces options avancer dans nos sociétés. Kaalep et Meister réussissent là où d'autres échouent, car Rebirth of Europe est un chef-d'œuvre qui nous donne confiance et offre enfin de la clarté.

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Ruuben Kaalep est un nationaliste estonien qui se décrit comme un ethnofuturiste. Il est l'un des fondateurs du mouvement de jeunesse Blue Awakening (Sinine Äratus) et du Parti populaire conservateur d'Estonie (EKRE). Il est également membre du Parlement estonien depuis 2019, où il appartient à la commission des affaires étrangères et préside le groupe chargé de plancher sur la liberté d'expression. À part cela, je ne sais pas grand-chose de lui, ce qui en dit plus sur mon ignorance des affaires relatives au nationalisme est-européen que sur l'étendue de ses activités.

Les images que nous trouvons de ce théoricien et parlementaire révèlent un jeune homme joyeux qui lui donne l'air d'un artiste excentrique, doté d'une sensibilité qui se retrouve dans ce livre sous la forme d'une confiance rhétorique excentrique et irrépressible. Kaalep a écrit Rebirth of Europe avec August Meister, qui semble être le pseudonyme d'un écrivain balte, expert en histoire et en politique, entre 2015 et 2017. Tous deux sont clairement talentueux, cultivés et bien formés. Bien que nous soyons maintenant près de quatre ans après la rédaction finale du texte, celui-ci n'a pas du tout vieilli puisqu'il s'abstient de discuter des menus détails de la politique contemporaine (il n'y a qu'une ou deux références fugaces à Trump, par exemple) au profit d'une vision beaucoup plus grande et plus large de la scène politique mondiale.

Rebirth of Europe est un texte court mais incroyablement subtil d'une centaine de pages, divisé en trois chapitres. Le premier chapitre, "La lutte de notre temps", est une description succincte des causes fondamentales et des manifestations patentes du déclin européen. Le deuxième chapitre, "Ethnofuturisme", est un appel à une politique ethnonationaliste prête à accepter pleinement la technologie et à avancer dans l'histoire. Le troisième chapitre, "Les aspects géopolitiques de l'ethnofuturisme", offre une vue d'ensemble des perspectives d'avenir de l'ethnonationalisme européen sur la scène internationale.

Le livre s'ouvre sur un grand style philosophique qui, dans son appel au "principe organique", m'a quelque peu rappelé l'ouverture d'Imperium de Yockey. Ce que le premier chapitre décrit pour l'essentiel, c'est l'état spirituel et politico-culturel d'une civilisation en crise. La crise européenne, comme nous ne le savons que trop bien, se déroule à de multiples niveaux, les Européens étant confrontés à l'emballement de la technologie, à des concepts d'individualisme renégats, à une migration de masse, à une subversion calculée, à la trahison et à la corruption internes, et à la perte de tout lien avec le passé. Ce dernier point est l'une des principales préoccupations de Kaalep et Meister, la solution proposée étant une tentative d'arraisonner l'avenir tout en intégrant des éléments du passé, en évitant les dérapages nostalgiques simplistes.

Dans un sens large, il s'agit d'une idée peu originale, et je veux dire par là que je félicite les auteurs plutôt que de les dénigrer. Ce que je veux souligner, c'est qu'une telle proposition ne doit pas être considérée comme du charlatanisme, ni même comme une pensée propre à une chapelle émanant de la marginalité politique. L'un des représentants les plus impressionnants et les plus profonds de cette approche est Keiji Nishitani (1900-1990), un disciple japonais de Martin Heidegger et l'un des principaux philosophes des religions du XXe siècle [1], qui s'est immergé profondément dans la philosophie européenne, et lui a témoigné un grand respect, tout en s'interrogeant sur ce que le modernisme et la technologie de l'Occident signifieraient en fin de compte pour sa propre civilisation.

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Ce questionnement a finalement conduit Nishitani à s'opposer farouchement aux tendances nihilistes de la modernité européenne/occidentale (voir, par exemple, son ouvrage The Self-Overcoming of Nihilism), et à proposer quelque chose qui ressemble remarquablement à l'archéofuturisme défendu plus tard par feu Guillaume Faye et, en fait, par Kaalep et Meister dans le volume que je recense ici. Dans une série de conférences données à l'Association bouddhiste Shin à Kyoto entre 1971 et 1974, Nishitani a élaboré du sens face à la confrontation entre la culture japonaise et ces éléments du modernisme occidental que nous décririons aujourd'hui simplement comme le globalisme [2].

Nishitani a rejeté l'individualisme extrême, qui considère le Soi comme à la fois singulier et autonome - par opposition à singulier mais intégré dans une communauté et un héritage. Associée à la science et à la technologie, ainsi qu'à un matérialisme effréné, la vision individualiste extrême du Soi conduirait, selon Nishitani, à l'effondrement de toutes les relations humaines interpersonnelles significatives. L'athéisme matérialiste, incapable de placer l'individu dans le contexte plus large de l'univers comme lieu divin et source créatrice, conduirait à l'atrophie totale de la culture et à la régression de l'humanité. Le professeur Robert Carter, un spécialiste de Nishitani, souligne que:

    La stratégie [de Nishitani] n'est pas de préconiser un retour au passé, car il est catégorique sur le fait que le passé est à jamais figé et hors de portée. Néanmoins, en tant qu'êtres humains, nous portons le passé en nous de bien des façons, et il nous incombe d'insuffler une nouvelle vie et une nouvelle signification à la tradition, alors qu'elle est façonnée et remodelée par la science, la technologie et les cultures occidentales. Il est partisan du changement, mais d'un changement qui n'oublie pas de porter son passé vers l'avenir comme un ingrédient du "mélange de sens" qu'une vie de qualité exige toujours. La personne authentique est celle qui vit dans le présent avec un œil sur le passé et un autre sur l'avenir, sur l'espoir et les possibilités. Nishitani pense que ce que l'on attend de nous dans le monde moderne et postmoderne, c'est que nous détruisions et reconstruisions simultanément notre mode de vie traditionnel à la lumière des changements induits par le siècle dans lequel nous nous trouvons. Cependant, nous ne devons pas simplement rejoindre les laïcs qui ont abandonné la religion et une grande partie de la tradition. Ils vivent aveuglément, au gré des tendances et des modes du moment. De plus, ils ont accepté et préféré un nihilisme omniprésent qui leur fait comprendre de manière rationnelle la vérité de la condition humaine et, ce faisant, ils ont perdu toute conscience d'un arrière-plan métaphysique et spirituel durable par rapport au premier plan matérialiste et nihiliste, appauvri, de nos existences.

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Nishitani, qui suscite aujourd'hui une extrême prudence de la part des chercheurs contemporains en raison de son utilisation fréquente de l'allemand pour désigner "le sang et la terre" (Blut und Boden) et de son affirmation selon laquelle seules les civilisations européenne et est-asiatique peuvent être considérées comme prééminentes au niveau mondial [3], élabore une sorte d'ethnofuturisme sous forme poétique, en utilisant l'analogie du cerf-volant :

    Elle concrétise ce qui vient d'être dit sur l'importance de la tradition pour avancer vers un nouvel avenir, et rencontrer de nouvelles circonstances, tout en restant fidèle au passé. ... Comme un cerf-volant, le Japon a pu maintenir un cap stable, grâce à la "queue" de la tradition qui a servi à stabiliser son vol dans les vents du changement, tout en étant enraciné ou ancré par la "corde" de sa culture profonde. Un cerf-volant qui n'a pas le poids de la tradition et de l'enracinement ne fait que danser sauvagement, s'empêtrant dans les branches des arbres, ou s'écrasant au sol, ou encore se détachant complètement et perdant son passé distinctif. Ce qui a fait du Japon un pays capable de s'adapter à sa propre modernisation de haut niveau, ce sont ses traditions profondément enracinées. Il en résulte une forme de progrès plus équilibrée et plus stable [par rapport à celle observée en Occident]. Lorsqu'un vent violent souffle, la force de la tradition doit être mise à contribution. Mais... on ne peut pas faire voler un cerf-volant si sa queue est trop lourde. Il est de la plus haute importance de trouver un équilibre entre ces deux inclinations : vers la modernisation et le changement, et vers la tradition.

La lutte de notre temps

Dans Rebirth of Europe, Kaalep et Meister font presque exactement écho aux sentiments de Nishitani et commencent leur texte en avançant l'argument selon lequel le "cerf-volant" européen s'est vu couper la ficelle et la queue, ce qui l'entraîne dans une spirale de chaos. Ce chaos est cultivé par des éléments mondialistes qui veulent couper les liens de toutes les nations avec leur histoire et leurs traditions et tentent d'écraser les patrimoines génétiques uniques des différents peuples en les recouvrant d'une culture totalitaire commune tissée de conformité. Kaalep et Meister insistent sur le fait que "au XXIe siècle, le conflit fondamental oppose le mondialisme et le nationalisme. ... La lutte de notre époque ne se manifeste pas tant comme une guerre avec des rangées de tombes entourées de coquelicots et avec des charges de cavalerie, mais comme une lutte culturelle. Le monde doit soit devenir un, dirigé par une culture de masse totalitaire, soit redevenir multiple - une diversité d'ethno-états uniques". Le couple affirme que "le véritable ethnonationaliste se soucie de toutes les nations, et le principe de l'ethnonationalisme vise à fournir à chaque nation une patrie. Le nôtre est donc une rébellion contre les principes du libéralisme, qui considère que chaque pays appartient à tout le monde - et donc à personne. Le nationalisme cherche à sauver le monde".

41M3Z1gBvXL.jpgAu cœur de leur manifeste se trouve ce que Kaalep et Meister appellent "le principe organique", qui implique - une fois de plus en écho aux philosophies est-asiatiques de Nishitani et de l'école de philosophie de Kyoto à laquelle il était associé (mais avec des inflexions nietzschéennes et européennes pré-modernes) - "un principe de base non-duel de l'existence - la plus haute unité possible, au-delà du bien et du mal, qui intègre à la fois la réalité spirituelle et physique". Bien que cette rhétorique soit un peu trop tête en l'air à mon goût, elle est entrecoupée d'un langage suffisamment clair pour permettre à un lecteur peu familier avec la philosophie en question de retenir le message principal. En bref, Kaalep et Meister soutiennent que:

   Notre monde est un combat permanent entre les forces spirituelles et physiques, entre les identités, les religions, les cultures, entre "nous" et "eux". Au fur et à mesure que la vie s'étend, elle surmonte les résistances, elle devient plus complexe et inégale, et le conflit et la lutte sont donc des contreparties de la vie elle-même. ... Cette dialectique pourrait très bien être appelée le "cercle de la vie". La vie existe dans le mouvement, la différenciation et l'inégalité. ... L'inégalité universelle est un facteur qui permet au monde d'être dynamique et d'évoluer, en donnant à chacun une chance de trouver sa place dans le tout organique. C'est le principe de non-discrimination de l'État organique, qui s'oppose à l'humanisme mécaniste, selon lequel l'individu est considéré comme "un rouage de la machine", remplaçable selon les besoins d'un projet de super-État ou les besoins du marché.

Kaalep et Meister consacrent une section intéressante à la hiérarchie dans les sociétés européennes historiques, en réfléchissant au fait que, si les anciens systèmes de castes sont aujourd'hui très décriés, ils étaient en fait transparents et socialement satisfaisants. Par contraste, nos élites d'aujourd'hui prospèrent sur le fait que,

    Les hiérarchies mécanistes modernes sont secrètes et fondées sur un "mérite" purement matériel. ... Elles n'ont de comptes à rendre à personne, mais l'influence des niveaux supérieurs sur les niveaux inférieurs est totalitaire et sans aucun sens de la responsabilité éthique. Une hiérarchie verticale du pouvoir est établie ; les liens horizontaux sont affaiblis par des conflits internes et une idéologie de haine mutuelle, de compétition et d'individualisme, qui renforce le pouvoir des niveaux supérieurs. Le paradoxe aujourd'hui est le suivant : dans les conditions de l'idéologie de l'"égalité" totale, une quantité historiquement sans précédent de pouvoir appartient à ceux d'"en haut" par rapport à ceux d'"en bas". L'unicité historique de ce fait est liée au fait qu'aujourd'hui les technologies modernes et les moyens de communication de masse permettent un degré maximal de manipulation des masses d'hommes cosmopolites.

Kaalep et Meister, cependant, rejettent le pessimisme ou le désespoir, voyant dans l'accélération du libéralisme mondialiste simplement l'accélération nécessaire qui mènera à l'effondrement civilisationnel - une condition préalable à la renaissance. Pour les auteurs, "la renaissance de la civilisation est une possibilité toujours présente qui doit être comprise et réalisée". Ils insistent sur le fait que "le noyau métaphysique de notre civilisation et sa tradition intégrale, qui est profondément ethnique, se trouve actuellement en dessous, attendant le bon moment pour briser les structures artificielles de la civilisation postmoderne". Cette renaissance ne se caractérisera pas par un rejet total de la modernité, mais par la soumission de ses éléments mécanistes au principe organique: "la tâche de l'avenir est de dompter ces forces éveillées et de les mettre au service d'un objectif plus élevé - la création d'une nouvelle culture et d'un nouvel homme dont les racines restent profondément ancrées dans le sol européen et dont les yeux sont à nouveau tournés vers le ciel." Le livre procède à un examen détaillé du libéralisme en tant qu'idéologie mécaniste. On nous dit que "le libéralisme en tant que théorie est inséparable du mondialisme en tant que pouvoir" et qu'il se caractérise par une "révolution permanente" contre les traditions, les normes culturelles et la vie elle-même.

Le texte passe ensuite à une dénonciation approfondie, et plutôt excellente, du conservatisme, tout en incorporant et en critiquant les idées d'Edmund Burke, de Joseph de Maistre et de Nietzsche. L'accent est mis sur le fait que le simple conservatisme est une stratégie perdante puisque son exigence finale de garder les choses "telles qu'elles sont" conduira toujours à la décadence et au nihilisme. La seule voie véritable et naturelle à suivre est de s'engager dans une contre-révolution qui synthétise "les meilleurs éléments de la modernité et de la tradition".

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Il va sans dire que Kaalep et Meister sont très favorables à la technologie, ce qui va à l'encontre de ceux qui, dans nos cercles, tendent davantage vers le type de pensée exposé par Ted Kaczynski et Pentti Linkola, ou vers les critiques de la pensée technologique que l'on peut trouver dans les écrits de Martin Heidegger ou Jacques Ellul. Je me compte parmi ceux que l'on pourrait décrire, au minimum, comme étant méfiants à l'égard du progrès technologique, ou du moins comme doutant de ses perspectives de progrès incessant étant donné la limitation éventuelle des ressources naturelles et le coût environnemental et social croissant de l'expansion technologique, en particulier entre les mains d'une élite mondialiste déterminée à imposer un État de surveillance et à imposer une conformité de masse. Même en dehors de certaines questions éthiques soulevées, par exemple, par la production génétique des êtres humains, la contamination massive de nos réserves d'eau par des produits chimiques industriels toxiques, qui a entraîné une baisse de la fertilité et des mutations dans le monde entier, devrait fournir à toute personne raisonnable une raison suffisante pour réfléchir sérieusement à ces problèmes actuels.

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Cela dit, les considérations géopolitiques exigent que l'Europe/l'Occident reste au moins compétitif dans la sphère technologique, ce qui signifie que nous sommes probablement, dans un avenir prévisible, enfermés dans la course aux armements technologiques. Puisque nous ne pouvons pas nous en extraire, nous pouvons tout aussi bien tenter d'en prendre la tête. Dans ce cas, le problème qui se pose est celui de l'impact potentiel sur la nature de notre civilisation. Kaalep et Meister suggèrent que nous explorions les moyens de "relier la technologie moderne à l'ancienne façon d'être la plus inhérente à l'homme". Cela ressemble certainement à un idéal, mais à quoi cela ressemble-t-il en termes pratiques? Les auteurs n'offrent aucune réponse, mais je suppose que l'important est qu'ils mettent la question sous les projecteurs.

Le premier chapitre du livre se termine par un regard sur "le totalitarisme de la nouvelle gauche et le déclin de l'Occident". Les lecteurs de The Occidental Observer ne trouveront rien de particulièrement nouveau dans ce chapitre, mais certaines tournures de phrases mémorables résument très bien la situation dans laquelle nous nous trouvons :

    Pour ce nouveau totalitarisme, les nations et les peuples sont considérés comme des obstacles qui doivent être éliminés et remplacés par un nouvel ordre mondial. ... Le monde le plus avantageux pour l'élite mondiale est celui où la valeur la plus élevée est l'individu, mais l'individu lui-même est libéré, avec l'aide du postmodernisme, de tout sens, de toute signification et de tout contexte plus large, et se retrouve isolé et vulnérable.

Après la Seconde Guerre mondiale, les populations occidentales ont été "bernées par les promesses de prospérité économique et d'innombrables libertés, remarquant rarement que la liberté de rester qui vous êtes n'était pas sur la table." De façon magistrale, nos auteurs écrivent

    Les gouvernements et les entreprises sont devenus gigantesques et inhumains, mais la démocratie dans les questions essentielles ne fonctionne tout simplement pas. En effet, là où elle est tentée, cette sorte de démocratie ne sert qu'à aliéner davantage l'homme. La conséquence générale est un sentiment universel de vide et de stress pour les humains qui ont déjà perdu tout lien avec la nature et tout contrôle sur le processus technologique. Les humains qui ne remplissent plus que le rôle de travailleurs-employeurs cherchent leur identité dans les tendances de la mode d'un jour offertes par la culture de consommation. Cette culture crée des humains incapables de réagir les uns avec les autres en tant que personnalités matures. L'illusion d'une "révolution de la jeunesse" constante est créée, alors que les jeunes ne font que recréer passivement les modèles de comportement proposés par les élites mondialistes ; ils font à leur tour partie des tendances générales du système.

Plus loin,

    Nous avons même perdu la trace de qui nous sommes, car aucune véritable identité ne peut exister dans une société de consommation. En apparence, tout le monde peut être spécial, libéré de tous les carcans de la tradition ; chacun peut s'identifier comme qui il veut. Ainsi, on ne naît pas avec une identité particulière. Si tout le monde peut être français, personne ne l'est vraiment. Lorsque le libéralisme parle de diversité, il vise en réalité à effacer toutes les distinctions. Lorsqu'il parle de multiculturalisme, il vise à créer un melting-pot mondial où aucune culture ne survit.

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Dans sa dernière attaque contre la culture européenne, le libéralisme organise le remplacement physique des Européens par des personnes issues d'autres cultures. "C'est l'immigration de masse en nombre catastrophique". Mais avec ce pari, le libéralisme "est proche de sa grande finale". Nos auteurs insistent sur le fait que le libéralisme se consumera lui-même dans le processus, et qu'il est "sur le point de devenir une notion absurde, où même les valeurs qu'il a lui-même défendues commencent à être reconstruites par son idéologie métamorphosée". À ce moment-là, nous trouverons "notre chance de commencer un nouveau cycle culturel européen qui façonne son histoire pour de nombreux siècles à venir. Les libéraux seront impuissants à l'arrêter. Ils deviendront alors des conservateurs, refusant obstinément d'accepter la nouvelle réalité dans laquelle les nationalistes vont s'engager." Ce nationalisme devra être d'un type totalement nouveau : l'ethnofuturisme.

Ethnofuturisme

L'ethnofuturisme est un type de nationalisme qui transcende l'égoïsme national. Il ne cherche pas simplement à "conserver", car cela implique une défense statique alors que "la vie n'existe que dans le mouvement". Il trouve toutefois ses racines dans la révolution conservatrice proposée en Allemagne au début du XXe siècle et cherche à promouvoir une renaissance des "archétypes de la civilisation occidentale et des formes de vie oubliées qui ont formé notre civilisation en premier lieu". Les politiques d'immigration désastreuses, qui sont devenues un élément unificateur pour tous les nationalistes européens, signifient que l'Europe dans son ensemble "sera obligée de revenir aux valeurs traditionnelles et au nationalisme pour survivre." L'Amérique sera de plus en plus accablée par les conflits ethniques, mettant fin au "rêve américain" de construire une société dans laquelle l'héritage ancestral ne joue aucun rôle - "mais c'est inévitable, car une civilisation qui nie ces vérités fondamentales sera toujours vouée à l'effondrement." Kaalep et Meister poursuivent ,

    La base fondamentale d'une nouvelle Europe doit être le nationalisme ethnique. Cela signifie que l'importance d'une nation en tant que tout organique doit être maintenue. ... En outre, la nature et les paysages de l'Europe doivent être préservés, car ils sont essentiels au patrimoine culturel et aux différences entre les peuples. La survie démographique de chaque nation doit être assurée par des politiques gouvernementales.

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Alors que l'Europe occidentale risque de subir des dommages catastrophiques dus à l'immigration massive et à la guerre civile qui s'ensuivra inévitablement, "cette nouvelle Europe - et le nouvel Occident - pourrait avoir pour centres de sa culture Budapest, Varsovie et Tallinn. En maîtrisant ses processus démographiques et en ne les laissant pas entre les mains du libéralisme, la nouvelle Europe sera réellement capable de rivaliser économiquement et culturellement avec le reste du monde... Après avoir sécurisé son ethnē, le destin de l'Europe au XXIe siècle sera décidé par l'eugénisme national, et actuellement, seule la Chine semble avoir un état d'esprit approprié." La Hongrie est louée pour son récent programme de construction d'un réseau de chemins de fer à voie étroite qui met l'accent sur la vie à la campagne, et dont aucune multinationale n'a à tirer profit. Nos auteurs soulignent qu'il s'agit là "d'un signe de l'une des tâches les plus ethnofuturistes jamais développées par un pays au 21e siècle. La technologie moderne et la rapidité permettent de combiner les avantages de la ville et de la campagne."

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Kaalep et Meister sont d'accord avec mon affirmation selon laquelle nous sommes plus ou moins enfermés dans une course aux armements technologiques. Ils soulignent que les progrès de la biotechnologie et des nanomatériaux ont "le potentiel de changer l'économie et la guerre d'ici la fin du siècle au-delà de toute reconnaissance. ... Se battre contre une telle technologie serait voué à l'échec et même dangereux. Le premier gouvernement, société ou groupe qui maîtrisera la biotechnologie aura inévitablement un énorme avantage sur tous ses rivaux." Les nationalistes européens doivent travailler ensemble car, à la fin du siècle, "le contrôle de la technologie doit être entre les mains des ethnonationalistes, et non des mondialistes, à supposer qu'ils aient survécu si longtemps."

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De là, le texte passe à l'élaboration des raisons de rejeter toute alliance avec le conservatisme économique de type Buckley, dominant aux États-Unis parmi les républicains, et de rejeter la Nouvelle Droite associée à Alain de Benoist qui s'est formée dans la France des années 1960. Les auteurs reprochent à cette dernière de promouvoir "des idées abstraites sur les communes organiques et les droits des personnes à conserver leur identité", car cela "peut conduire à l'approbation du multiculturalisme." La Nouvelle Droite est également attaquée pour avoir dépensé "une grande partie de son énergie à lutter contre le christianisme", s'aliénant ainsi une partie importante de sa base de soutien. La Nouvelle Droite est également fortement critiquée pour son soutien à l'URSS et son antiaméricanisme strident, ainsi que pour avoir négligé de développer une théorie politique claire et une pratique correspondante. Kaalep et Meister rejettent l'idée que nous pouvons concentrer nos efforts sur la conquête d'une hégémonie culturelle sans apporter de résultats pratiques, en ne produisant que des publications et des conférences sans fin qui apportent un riche matériel intellectuel sans apporter de réels changements dans la vie des Européens.

Les aspects géopolitiques de l'ethnofuturisme

Ma section préférée de Rebirth of Europe est le dernier chapitre, qui offre un aperçu fascinant de la spéculation informée sur notre avenir en devenir. Le chapitre s'ouvre sur l'affirmation selon laquelle

    nous revenons à la situation qui a précédé la révolution industrielle, dans laquelle la force économique sera déterminée par les ressources naturelles et démographiques, parce que le développement technologique sera fondamentalement le même pour toutes les nations du monde. Cela implique l'inévitabilité de la multipolarité et le retour au statut de superpuissance pour des civilisations comme la Chine et l'Inde.

Kaalep et Meister voient, dans la fin de l'hégémonie américaine, la fin du matérialisme mécaniste occidental qu'elle symbolise. De même, ils dénoncent l'idée eurasiste d'Alexandre Douguine car elle "ne peut pas fonctionner". La Russie n'est capable de combattre le marxisme culturel que dans les slogans, mais pas dans la pratique. La Russie "surpasse la décadence occidentale, avec des taux impressionnants d'avortements, d'alcoolisme et de toxicomanie, que son régime politique n'a pas pu, ou n'a pas voulu, arrêter. ... Les enfants des politiciens russes vivent à l'Ouest, et la culture de la Russie elle-même est surchargée d'émissions de télé-réalité et de culture de masse vulgaire."

Kaalep et Meister ajoutent,

    Ce ne seront ni la Russie ni les États-Unis qui dirigeront l'avenir ; nous pouvons plutôt nous attendre à une nouvelle ère du Pacifique avec la Chine et l'Inde qui regagnent leur influence. Ces pays, au moins, ne seront pas libéraux, pacifistes ou humanistes - ils utiliseront les percées scientifiques au service de leur grandeur politique. Par conséquent, les peuples européens devront changer leur vision du monde afin de survivre dans cette nouvelle compétition, où nous perdons à chaque instant que nous faisons partie d'un système libéral, haineux et autodestructeur.

Il y a une section très intéressante concernant l'expérience nationaliste dans les États baltes, qui est soulignée par un très fort sentiment de fraternité européenne. Lorsque Kaalep et Meister affirment que les nationalistes baltes feront tout leur possible s'ils sont appelés à défendre les frontières méridionales de l'Europe ou l'intégrité démographique des nations d'Europe occidentale, on perçoit la plus grande sincérité.

Les remarques finales du livre, plutôt émouvantes, portent sur le devoir et la mort, conclusion de tout cheminement spirituel. "En fin de compte, mener un combat qui semble déjà perdu dès le départ est la seule chose à faire, précisément parce que rien d'autre ne compte. Rien ne compte plus que cela." Nos auteurs terminent en soutenant que,

    Dans la situation actuelle de la civilisation occidentale, qui semble connaître une chute irréversible, s'arrêter n'est pas une option. Il ne s'agit pas seulement d'une question d'idéologies politiques, mais de la logique interne d'une culture. La seule chose qui reste à nos nations est de survivre à cette chute. Plus important encore, nos gènes et les traditions qui portent notre plein potentiel doivent survivre. Car la mort et la destruction de l'Occident, provoquées par le libéralisme, s'approchent toujours plus de leur objectif singulier. Lorsqu'elle atteindra un certain point, ce sera notre chance. Ce sera le moment d'un véritable retour aux sources, un retour sans jamais se retourner. Lorsque le monde occidental célébrait la diversité et le multiculturalisme, nous prévoyions sa destruction catastrophique par ses propres moyens. De plus, lorsqu'il commencera à paniquer devant la catastrophe qu'il n'a pu éviter, il sera alors temps pour nous de construire une nouvelle civilisation européenne. La boucle sera bouclée.

Remarques finales

Rebirth of Europe est un document rafraîchissant et optimiste qui, pour un livre d'une longueur aussi modeste, est bien au-dessus de son poids. Il présente une profondeur, une ampleur et une clarté de compréhension philosophique qui sont souvent rares dans des textes de cette nature, et le moins que l'on puisse dire, c'est qu'il donne à réfléchir. Les questions qu'il soulève exigent l'attention et l'action de toute personne concernée par la cause ethnonationaliste.

AVT_Keiji-Nishitani_1716.jpgReste à savoir si l'ethnofuturisme est une voie fiable à long terme. À part la Chine peut-être, voyons-nous vraiment dans le monde actuel un exemple de pays qui a réussi à maintenir des éléments significatifs de la culture traditionnelle tout en plongeant tête baissée dans le développement technologique ? Pour ma part, je suis sûr que si Keiji Nishitani avait prononcé ses conférences aujourd'hui, quelque 50 ans après s'être adressé à l'Association bouddhiste shin, il aurait peut-être été plus prudent dans son plaidoyer pour laisser le "cerf-volant" national s'envoler dans le vent du changement. Le Japon d'aujourd'hui est peut-être superficiellement stable et technologiquement avancé, mais il est en proie depuis des décennies à une faible fécondité et à des taux de suicide élevés, ainsi qu'à une marginalisation croissante de ses traditions et de ses religions.

Le train fou de la modernité industrielle pourra-t-il un jour être suffisamment apprivoisé pour être conduit par la tradition ? Cela reste à voir. À ce problème s'ajoute, bien sûr, la question des éléments étrangers ancrés dans l'Occident qui s'emploient à faire en sorte que "la corde et la queue" du "cerf-volant" européen restent à jamais coupées. Comment un mouvement national peut-il reconnecter un peuple avec son histoire et ses traditions tout en abritant des factions qui veulent que ces mêmes traditions et histoires disparaissent à jamais ou soient définitivement ternies par la honte ? Peut-être le seul réconfort que nous pouvons tirer est, comme Kaalep et Meister le soulignent, le fait que même dans la catastrophe il peut y avoir une opportunité.

Notes:

[1] Voir, par exemple, son monumental Religion et néant.

[2] Pour les conférences complètes, voir K. Nishitani, On Buddhism (New York : State University of New York Press, 2006), 18.

[3] G. Parkes, " The Putative Fascism of the Kyoto School and the Political Correctness of the Modern Academy ", Philosophy East and West 47, no. 3 (1997) : 305-36. Pour une exploration plus biographique de l'anti-marxisme et du traditionalisme au sein de l'école de Kyoto, voir K. Nishitani, Nishida Kitaro : The Man and His Thought (Nagoya : Chisokudo Publications, 2016).

 

mercredi, 14 juillet 2021

Nederland de Guillaume Faye: un roman posthume prenant et déjanté

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Nederland de Guillaume Faye: un roman posthume prenant et déjanté

Par Johan Hardoy

Ex: https://www.polemia.com/nederland-de-guillaume-faye-un-roman-posthume-prenant-et-dejante/?utm_source=newsletter&utm_medium=email&utm_campaign=la_lettre_de_polemia&utm_term=2021-07-14

Découvrez la dernière histoire « foutraque » d’un penseur original : Nederland de Guillaume Faye. À noter que ce roman posthume est édité par Daniel Conversano via sa maison d’édition Alba Léone.
Avant toute chose, il convient de présenter brièvement l’auteur, disparu en 2019 à l’âge de 70 ans, pour comprendre comment cet ouvrage posthume s’inscrit dans son œuvre.

Un intellectuel original

Né en 1949 à Angoulême, dans un milieu bourgeois, Guillaume Faye a tout d’abord appartenu au premier cercle des jeunes théoriciens de la Nouvelle Droite réunis autour d’Alain de Benoist.

Il développait alors une théorie politique favorable à une lutte commune des Européens et des ressortissants du « Tiers-monde » contre l’américanisme et le sionisme, visant à combattre le système capitaliste néolibéral et son corollaire, le déracinement des populations (cf. son excellent livre, « Le Système à tuer les peuples », paru en 1981 aux Éditions Copernic).

Après un début de carrière fulgurant, Guillaume Faye a quitté ce milieu dans les années 1980 pour exercer diverses activités parfois surprenantes. Il est ainsi devenu, entre autres, un animateur pourvoyeur de canulars en tout genre dans une radio libre très populaire auprès des jeunes !

À la fin des années 1990, il est revenu dans le débat culturel et politique en publiant plusieurs ouvrages très remarqués dans les milieux nationalistes. En rupture avec certaines de ses idées de jeunesse, il a adopté un discours très virulent à l’encontre de l’Islam, tout en se proclamant tout d’abord « judéo-indifférent » puis partisan d’une alliance de raison avec les « sionistes ». Selon lui, les musulmans constituent en effet les « ennemis » d’une « Eurosibérie » destinée à s’unir de l’Atlantique au Pacifique, les impérialistes américains n’en étant que des « adversaires ».

Guillaume Faye a également proposé divers concepts, dont celui d’« ethnomasochisme » qui a rencontré un succès certain au-delà même des groupes identitaires et radicaux.

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Par ailleurs, il s’est beaucoup intéressé à la dimension « faustienne » de la civilisation européenne et aux avancées et promesses de la techno-science. Un autre de ses concepts, l’« archéofuturisme », exprime une volonté de dépassement des idéologies de la modernité par le biais d’un retour à des « valeurs archaïques » conjuguées à la plus franche modernité technologique. Une réaction jugée nécessaire devant la « convergence des catastrophes » qui s’annonce sur le continent européen…

Un roman posthume prenant et déjanté

Son dernier livre n’est pas un essai ou un pamphlet, mais un récit rocambolesque dont le protagoniste principal est un triste sire prénommé Bartholomé. L’action se passe dans un univers parallèle et sur une planète qui ressemble beaucoup à la nôtre.

Cet anti-héros, qui réside dans la capitale d’un pays qui rappelle trait pour trait les États-Unis, tombe fou amoureux d’une voisine qu’il observe régulièrement de la fenêtre de son appartement, car elle habite en face de chez lui. Après avoir remarqué une présence masculine chez la belle, il décide de se procurer une arme de chasse et un silencieux pour éliminer son rival, ce qui lui permettra d’adresser la parole à la jeune femme pour la première fois en allant la consoler. L’occasion se présente bientôt lorsqu’il aperçoit les deux tourtereaux qui prennent l’air sur le balcon. Il passe immédiatement à l’acte en tuant l’homme, tout en cherchant à effacer les traces de son crime.

Très vite, d’importants moyens policiers et même militaires sont mis en œuvre, car, ô surprise !, la victime s’identifie au Président de la République Franck Nederland !

Interrogé lors de l’enquête de voisinage, l’assassin lance spontanément les enquêteurs sur une fausse piste qui les oriente vers un groupe subversif connu. En outre, la presse révèle que sa voisine, qui recevait en secret le Président chez elle, est une journaliste dont les « sympathies dissimulées et implicites » sont favorables à ce mouvement révolutionnaire, ce qui conduit à sa mise en détention provisoire.

Bartholomé est alors invité au journal de 20 heures de la chaîne télévisée la plus regardée, car son témoignage, qui a évidemment « fuité », se révèle déterminant. Parmi les téléspectateurs, une détective privée décide pourtant de reprendre l’enquête parce qu’elle est intuitivement convaincue que c’est lui le tueur.

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En attendant, la voisine est rapidement condamnée, en première instance, à la peine de mort pour complicité et incitation au meurtre sur la personne du Chef de l’État.

De son côté, la détective avance vite, puisqu’elle a déjà retrouvé l’arme du crime cachée maladroitement.

Quelques jours plus tard, c’est donc au tour de Bartholomé d’être arrêté et incarcéré. Des preuves matérielles l’accusent désormais, notamment après la découverte chez lui des douilles des balles utilisées pour tuer le Président.

Son avocat, un ténor pénaliste du Barreau qui le défend gratuitement parce que son procès lui assurera une grande notoriété, lui explique quel doit être son système de défense : il doit plaider le crime passionnel en affirmant que sa voisine l’a séduit en vue de l’inciter à tirer sur un homme qu’elle lui a présenté comme un harceleur violent sans lui révéler sa véritable identité.

Cette version, appuyée par deux faux témoignages commandités par son défenseur, emporte la conviction du jury et la sentence prononcée ne s’élève qu’à vingt ans d’emprisonnement.

En détention, le condamné, qui entend depuis longtemps une voix lui parler, devient pieux et reçoit la visite d’un prêtre.

Pendant ce temps, le successeur du Président doit contrecarrer les rumeurs qui l’accusent d’avoir fomenté un complot pour éliminer son prédécesseur…

La suite de l’histoire réserve encore de multiples rebondissements mais pas question de les « divulgâcher », comme disent plaisamment nos cousins québécois !

Au-delà de l’histoire d’un pauvre hère devenu assassin par jalousie et pris dans un engrenage qui le dépasse, Guillaume Faye met en scène la conduite de gouvernants qui n’hésitent pas à enfreindre la légalité, par le biais d’assassinats si nécessaire, pour protéger leurs positions. Quelques-uns d’entre eux peuvent bien être plus légalistes, mais leurs convictions sont vite contrariées par des menaces de révélation de dossiers en possession des services secrets, à moins qu’elles ne leur coûtent tout simplement la vie…

L’auteur s’est manifestement beaucoup amusé à enchaîner les péripéties et les clins d’œil ironiques, dans un style qui rappelle celui d’un scénario de film, loin des exposés philosophiques et politiques auxquels il nous avait habitués.

Il est bien possible qu’au soir de sa vie, il ait voulu nous proposer une leçon de sagesse : partir sur un éclat de rire !

Johan Hardoy
12/07/2021

Nederland, Guillaume Faye, Éditions Alba Leone, 289 pages, 25 euros

La place de l'Europe dans un monde multipolaire - éléments pour une pensée populiste révolutionnaire

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La place de l'Europe dans un monde multipolaire - éléments pour une pensée populiste révolutionnaire

Alexander Markovics

Ex: https://theradicaloutlook.com/europes-place-in-a-multipolar-world-elements-for-a-revolutionary-populist-thought/

Un avenir alternatif pour l'Europe

Le monde multipolaire émergent est une révolution géopolitique. Il ne marque pas seulement un changement de paradigme par rapport au court moment unipolaire établi par les États-Unis après 1991, mais aussi la fin de l'hégémonie occidentale. Le processus de multipolarité en cours est en faveur des différentes civilisations et contre le projet libéral de mondialisation. Alors que la mondialisation tente d'unifier le monde sous un seul système politique, une seule idéologie et une seule civilisation, la multipolarité proclame la diversité des différents systèmes politiques, des différentes idéologies et des différentes civilisations. 

La multipolarité et le moment populiste

La question se pose donc : Quelle est la place de l'Europe dans ce monde multipolaire ? La position actuelle de l'Europe est incrustée dans l'orbite des Etats-Unis. Après 70 ans d'atlantisme, l'Europe ne semble pas capable d'exprimer ses propres intérêts géopolitiques. Mais comme le disait Hölderlin : "Mais là où il y a danger, les puissances salvatrices grandissent elles aussi". Le moment populiste a donné naissance à des mouvements comme les Gilets jaunes et des partis contestataires dans toute l'Europe, qui ont déclaré la guerre aux élites libérales. Mais même les mouvements et partis populistes manquent d'une stratégie conséquente contre le mondialisme et le libéralisme. Les attaques des mondialistes sont dirigées contre le cœur de la civilisation européenne. Le christianisme et ses églises sont profanés, les peuples se dissolvent dans les "eaux glacées du calcul égoïste" (comme le disait Karl Marx), la famille est contestée en tant qu'instrument d'oppression, et aussi l'existence même des deux sexes est attaquée parce qu'ils représenteraient le patriarcat pour le gender mainstreaming, alors que le transhumanisme est même prêt à abolir l'humain lui-même pour, dit-on, libérer l'individu. Pour résumer ce danger, le libéralisme attaque sur plusieurs fronts. Mais les populistes ne décident de se battre que sur quelques-uns d'entre eux, notamment parce qu'ils ne comprennent pas l'importance de ces combats. Jusqu'à présent, ils n'ont remis en cause que certains aspects de l'hégémonie libérale et ne saisissent pas toute la panoplie subversive qu'ils forment tous ensemble. Ils appellent à la fin des migrations de masse mais ne remettent pas en question l'OTAN qui détruit la souveraineté des nations partout dans le monde. Ils gardent le silence sur le problème du capitalisme qui détruit leur propre culture et leur religion chrétienne, alors qu'ils crient "N'islamisez pas notre américanisation !".

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Les deux pères fondateurs de la pensée populiste révolutionnaire : Gramsci et Schmitt

Tous ces aspects de la guerre intellectuelle qui fait actuellement rage en Occident nous montrent la gravité apocalyptique du moment historique que nous vivons. Il est donc plus important que jamais de s'armer, de se blinder intellectuellement et de choisir d'être résolument à l'écart du pandémonium à l'oeuvre dans le monde occidental. Dans le cas de l'Europe, nous pouvons choisir entre les élites actuelles et leur vision perverse d'une fin de l'histoire ou la cause des peuples et la continuation de l'histoire. Ce qui manque actuellement aux populistes de toute l'Europe, c'est une théorie révolutionnaire. Mais où peuvent-ils la trouver ? Tout d'abord, nous devons regarder la période de l'entre-deux-guerres où nous trouvons, d'une part, l'intellectuel communiste Antonio Gramsci et, d'autre part, le révolutionnaire conservateur allemand Carl Schmitt. Dans la pensée de Gramsci, nous pouvons trouver sa théorie de l'hégémonie afin de mieux saisir le fonctionnement du régime libéral actuel. Si nous adoptons correctement les idées d'Antonio Gramsci, nous nous rendons compte que nous pouvons trouver l'idéologie libérale non seulement dans des phénomènes comme la migration de masse et la détérioration de la sécurité intérieure, ou l'économie capitaliste, mais aussi dans l'unipolarité géopolitique et surtout dans l'homogénéisation délétère de l'espace culturel. Par conséquent, une résistance contre l'hégémonie libérale sur l'Europe doit finir par s'avérer futile si elle n'est dirigée que contre un seul de ses aspects. Si le populisme n'est dirigé que contre un ou deux aspects de l'hégémonie, il doit nécessairement devenir un autre exemple de "modernisation défensive" et échouera finalement à long terme, comme l'a déclaré la théoricienne politique belge Chantal Mouffe. L'émergence du populisme signifie que le politique est revenu en Europe et que nous, Européens, pouvons choisir entre différents projets hégémoniques. Le libéralisme n'est qu'une possibilité - un populisme révolutionnaire orienté autour des principes de la Quatrième théorie politique, formulée en Russie par Alexandre Douguine, est l'autre possibilité. Ce sont les conditions intellectuelles préalables à une Europe souveraine dans un monde multipolaire. 

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Le land power (le puissance tellurique), le Katechon d'Europe et l'État-nation

Dans le domaine de la géopolitique, les populistes doivent redécouvrir l'opposition, théorisée par Carl Schmitt, entre la terre et la mer. Dans cette opposition, Schmitt démontre le lien entre la puissance maritime et les idées progressistes, alors qu'il met en évidence le lien entre la puissance terrestre et le conservatisme. Comme l'a formulé Alain de Benoist en se référant à Zygmunt Baumann, la puissance maritime tente de tout rendre liquide, elle "liquide" le capital et les migrants pour les laisser couler comme les eaux de la mer (ndt: cette "liquidité" de la pensée politique maritime anglo-saxonne, Carl Schmitt la formule dans son Glossarium, volume dense qu'il ne voulait pas publier de son vivant, volume qui n'a pas encore été traduit en une autre langue). Pour résister à la mondialisation, l'Europe doit devenir une "Europe katéchonique", selon l'expression de Carl Schmitt, un grand espace européen uni, afin de pouvoir s'opposer à l'Antéchrist. À bien des égards, cela signifie que l'Europe doit revenir à ses racines géopolitiques. Premièrement, elle doit reconnaître que l'État-nation, en tant que rejeton de la modernité, a) n'est plus en mesure d'exercer sa souveraineté et b) n'est pas un protecteur du peuple mais un agent des intérêts bourgeois. 

Le sujet de la pensée populiste : le peuple

Pour développer une pensée populiste révolutionnaire, il est nécessaire de mettre l'accent sur le sujet même du populisme, c'est-à-dire le peuple. Contrairement à la nation, le peuple n'est pas une communauté artificielle, mais un organisme né d'une histoire charnelle. Il n'est pas constitué d'individus isolés, mais de personnes qui trouvent leur place dans la communauté. Alors que les nations ne connaissent au-dessus d'elles qu'une humanité politiquement homogénéisée et trouvent leur aboutissement logique dans l'État mondial, les différents peuples sont autant de pensées de Dieu, comme le concluait Herder. Au-dessus des peuples, on ne trouve que les civilisations, composées de différents peuples partageant entre eux la même religion, la même histoire, l'espace commun. Chaque peuple pour lui-même est condamné à être liquidé par l'Occident, mais uni au sein d'une civilisation, il peut résister à la tempête. 

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La multipolarité et le "coeur du monde distribué"

Il est donc impératif qu'une civilisation européenne unie forme un empire commun au sens traditionaliste du terme afin de garantir la paix sur le plan intérieur et de défendre sa souveraineté face à l'assaut mondialiste. Par ailleurs, l'essor des civilisations russo-eurasienne, chinoise et irano-chiite a prouvé ce qu'Alexandre Douguine appelle le heartland distribué. Il n'y a pas qu'un seul cœur, comme l'envisageait Halford Mackinder, mais plusieurs. En tant qu'Européens, nous représentons l'un d'entre eux, notre cœur européen spécifique. Cela signifie que nous devons laisser derrière nous le "fardeau de l'homme blanc", le messianisme libéral des droits de l'homme, la (post-)modernité, le progrès et les Lumières. Nous devons faire face à la xénophobie. Ce n'est que lorsque nous abandonnerons notre arrogance et nos superstitions que nous pourrons prendre place parmi les civilisations égales et revenir à notre héritage chrétien traditionnel. Si les populistes en Europe tirent les leçons de ces événements, en laissant derrière eux les différences stériles entre la gauche et la droite, et formulent un programme révolutionnaire dirigé contre la mondialisation et le libéralisme dans toutes ses dimensions, ils peuvent gagner. La multipolarité dans sa dimension intellectuelle et géopolitique est la clé pour rendre à l'Europe son propre destin. Mais comme dans toute lutte de libération, les Européens eux-mêmes doivent faire le premier pas pour sortir de l'hégémonie occidentale. 

La fin du césarisme : réflexion et autocritique comme clés de la multipolarité européenne

Une théorie révolutionnaire permet non seulement aux populistes de toute l'Europe de différencier l'ami, l'ennemi et l'ennemi principal, mais aussi de créer une stratégie afin qu'ils puissent parvenir à libérer l'Europe du libéralisme. Une théorie sophistiquée permet également l'autocritique et met fin au césarisme irréfléchi au sein des mouvements et partis populistes. Les exemples tragiques de gouvernements populistes ayant échoué à cause du césarisme, comme en Italie et en Autriche, appartiendraient au passé. 

La multipolarité : Les civilisations unies contre le globalisme

Comme nous pouvons le voir, la multipolarité offre de grandes chances de lutter contre les forces de la mondialisation et de mettre fin à leur progression. Nous en avons été témoins sur les champs de bataille en Syrie, où la Russie et l'Iran ont empêché la chute du président Bachar-al Assad et la montée d'ISIS. Au Venezuela, la Russie et la Chine ont réussi à aider le président Maduro à résister à la déstabilisation et au changement de régime orchestrés par les États-Unis. Si nous voyons ce potentiel d'un front anti-impérialiste composé de différentes civilisations unies contre la mondialisation, il serait logique que l'Europe le rejoigne également à long terme. Il est donc impératif que l'Europe laisse derrière elle l'Occident et forme un pôle propre dans l'ordre mondial multipolaire à venir.

Alexander Markovic est un historien, expert en politique internationale et en géopolitique (Autriche).

Source - Alexander Markovics : La place de l'Europe dans un monde multipolaire - éléments pour une pensée populiste révolutionnaire (VIDEO)

lundi, 12 juillet 2021

Entretien avec "Ego Non" par The Conservative Enthusiast

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Entretien avec "Ego Non"

par The Conservative Enthusiast

Ex: https://conservativeenthusiast.com/interview-tce-23-ego-non/

1- Pour nos lecteurs qui ne vous connaissent pas encore, présentez-vous.

“Je suis belge, j’ai 24 ans et je termine des études de philosophie cette année. Il y a quelques mois maintenant, j’ai lancé une chaîne de philosophie politique sur YouTube.”

2-: Quel est votre parcours ? Votre jeunesse, vos études, vos projets déjà réalisés et vos succès passés ?

“J’ai grandi dans la ville de Liège, dans la région wallonne et francophone de Belgique. Ayant découvert le monde antique enfant, sur les genoux de ma mère, à travers les grands récits de la mythologie grecque, l’amour de la beauté et de la grandeur est profondément ancré en moi. La culture grecque n’est en effet pas anodine, elle vous communique pour toujours, et à jamais, le sens d’une hiérarchie des valeurs face auxquelles les slogans modernes apparaissent comme ce qu’ils sont vraiment : des simulacres de valeurs.

Passionné par la culture européenne, j’ai appris l’anglais, l’allemand et le russe quand j’étais adolescent. A l’âge de 18 ans, avant de commencer l’université, j’ai décidé de passer plusieurs mois en Allemagne et en Russie pour perfectionner la connaissance de ces langues et pour découvrir la mentalité de ces pays. Cette expérience a sans nul doute contribué à consolider en moi un profond européanisme. A mon retour, j’ai commencé des études de philosophie en Belgique – ainsi qu’à Fribourg, en Suisse, pour une année. Même si je m’étais déjà intéressé à la pensée politique auparavant, c’est pendant ces années universitaires que je me suis véritablement formé intellectuellement de mon côté, en lisant tout ce que je pouvais trouver comme vieux livres dans les bouquineries de la capitale. C’est aussi à cette époque, il y a trois ans maintenant, que j’ai été baptisé et que je me suis converti au catholicisme.”

3-: Qu’est-ce qui vous a amené à lancer votre projet ? Quelles sont les étapes qui vous y ont menées ?

“A vrai dire, l’idée de faire des vidéos ne m’est venue que très récemment, je n’y avais guère vraiment songé auparavant. Elle m’est venue d’un regret de voir que certains concepts ou idées majeures de la pensée politique de droite n’étaient pas assez connus ni mobilisés. Cela m’avait particulièrement frappé avec certains concepts de Guillaume Faye, tels que « l’archéofuturisme » (auquel j’ai consacré ma première vidéo), qui méritent, à mon sens, d’être plus largement diffusés.”

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4-: Pouvez-vous nous expliquer plus en détail en quoi consiste vos projets, votre démarche et pourquoi vous faites ce que vous faites ?

“Dans chacune de mes vidéos, j’essaie donc d’exposer un concept ou une idée majeure d’un auteur, en essayant à chaque fois de le relier, d’une façon ou d’une autre, à une problématique politique contemporaine. Je ne prétends nullement à la neutralité, bien au contraire.

Le choix des idées que je présente reflète naturellement une orientation politique, même si je ne partage pas forcément toutes les pensées de l’auteur dont je parle. Je poursuis donc un double but :

1) Susciter la curiosité intellectuelle des spectateurs en faisant découvrir certains auteurs ou certaines idées

2) Offrir un nouvel angle pour repenser ou recentrer une problématique politique contemporaine

L’on critique en effet bien souvent les délires et les dérives de la pensée de gauche, progressiste et égalitaire. La critique est saine et même bien souvent salutaire, mais il me semble qu’il faut aussi savoir dépasser ces dérives par « le haut », si je puis dire. Face à la conception du monde propre des hommes de gauche, qui est totale, il faut savoir aussi offrir une conception du monde totale. Prenons un exemple précis : la gauche est égalitaire par essence. Devons-nous nous contenter de dénoncer les dérives de l’égalitarisme tout en conservant l’Égalité comme valeur intouchable ? Ou bien plutôt montrer que la beauté du monde et que le développement de la personne humaine ne vont pas sans l’Inégalité ? C’est ce que j’ai essayé de faire avec ma vidéo sur la « philosophie de l’Inégalité » de Nicolas Berdiaev notamment.”

5-: Quelles sont vos principales sources d’inspiration, vos influences et vos références ?

“Elles sont nombreuses et diverses. Depuis que je suis en âge de m’intéresser à la philosophie, j’ai toujours cherché à prélever le meilleur parmi les auteurs que je lisais, indépendamment de tout esprit de chapelle. Néanmoins, pour ce qui est de la pensée politique à proprement parler, les courants qui m’ont le plus marqué sont la Révolution Conservatrice allemande, l’Action Française historique, les penseurs russes des XIXe et XXe siècles (C. Leontiev, Dostoïevski, Berdiaev, Soljenitsyne, etc.) et des philosophes de la théorie politique pure, comme Machiavel, Vilfredo Pareto ou Carl Schmitt. A cela s’ajouteraient évidemment bien d’autres penseurs, différents les uns des autres comme Proudhon ou Joseph de Maistre par exemple, mais je voudrais surtout mentionner Guillaume Faye dont la découverte récente de l’œuvre fut à bien des égards déterminante pour moi.”

6-: Qu’est-ce que le conservatisme selon vous ? Et pensez-vous qu’il est important aujourd’hui ?

« Conservateur, voilà un mot qui commence bien mal », disait plaisamment Thierry Maulnier. En fait, comme pour toute étiquette, tout dépend de la définition qu’on en donne. Le conservatisme, comme simple volonté de préserver le statut quo, de ralentir la marche du progrès, est condamné à être à la remorque de ceux qui écrivent l’histoire. Cette forme de conservatisme, tiède et frileux, n’a pas grand intérêt et je comprends même qu’il suscite une forme de répulsion chez tous ceux qui aspirent à la grandeur.

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En revanche, il existe une définition plus noble et radicale du conservatisme dans laquelle je me reconnais tout à fait. Pour cela, je voudrais citer Arthur Moeller van den Bruck : « Nous vivons pour léguer un héritage. Celui qui ne croit pas que nous remplissons le but de notre existence dans le court laps de temps, durant la minute qui s’écoule, celui-là est conservateur ». Si, pour l’homme de gauche, la vie est un but en soi, le conservateur estime au contraire qu’une vie ne suffit pas pour créer les choses que veulent atteindre l’esprit et la volonté d’un homme. Reconnaissant la puissance médiatrice du présent qui transmet le passé à l’avenir, il voit la suite des générations occupées à construire leur histoire et leur nation. À cet égard, aucune pensée politique véritable ne peut faire l’économie de ce conservatisme : il faut se considérer comme un point de passage, comme un point reliant le passé au futur, se sentir touché par l’esprit de son peuple à travers les âges pour être appelé à faire de la politique. De plus, le conservatisme tel que l’envisage Moeller van den Bruck est une force dynamique et créatrice, nécessairement active face aux destructions engendrées par les pensées égalitaristes et libérales. C’est pourquoi il écrivait avec une grande justesse : « Auparavant, les conservateurs tentaient d’arrêter la révolution, maintenant, nous devons en prendre la tête ». L’enjeu du conservatisme actuel n’est donc pas, à mon sens, d’adopter une posture purement défensive, mais de reprendre les rênes de notre destinée historique en lui insufflant un esprit nouveau.”

7-: Que pensez-vous du contexte actuel de la société en France, en Europe ? Et à l’échelle du monde ?

” Parlons sans détour, l’Europe est en péril mortel, cernée par d’innombrables menaces : un grand remplacement de population accompagné d’une « grande déculturation » qui empêche de voir ce qui crève les yeux, un vieillissement dramatique ainsi qu’un déclin démographique de la population européenne, une disparition des instincts vitaux les plus évidents au profit de comportements collectifs suicidaires, un implacable « déclin du courage », etc. Cette « convergence des catastrophes », selon l’expression de Guillaume Faye, indique a priori un avenir bien sombre à l’Europe (et ce même constat s’applique peu ou prou à tous les pays occidentaux).  

Néanmoins, malgré toutes ces raisons objectives de craindre le pire, cette époque de crise me paraît également une période de refondation, une opportunité que nous avons de reprendre sur de nouvelles bases. Notre civilisation pourrait très bien disparaître, certes, mais elle pourrait aussi se réaffirmer sur des bases plus fortes qu’autrefois. C’est pourquoi l’enjeu en vaut la chandelle et qu’il faut, plus que jamais, se lancer dans la bataille.”

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8-: Si vous deviez donner 5 éléments sur lesquels tout français devrait sérieusement travailler au niveau individuel, lesquels seraient-ils ?

1- Fonder une famille ou la consolider : d’un point de vue collectif comme individuel, cette tâche est capitale. Au niveau collectif, il faut impérativement inverser la tendance démographique que connaît l’Europe. Mais un tel raisonnement peut sembler très abstrait. Au niveau individuel, fonder une famille est aussi, et même en premier lieu, une façon de se réaliser comme personne. Si nous vivons pour léguer un héritage, comme je l’ai dit plus haut, il faut bien avoir des héritiers pour qui se battre. Beaucoup de gens, gagnés par le désespoir et le pessimisme, se demandent si cela vaut encore la peine d’agir. Ils ne se poseraient sûrement pas cette question s’ils avaient des enfants.

2- Renouer avec la Beauté : un des traits de l’époque contemporaine qui me frappe le plus est le culte de la laideur. La laideur s’est infiltrée partout, dans l’architecture, dans la mode, dans l’art, dans la langue, dans la musique, etc. Or, notre combat est autant éthique qu’esthétique. Nous devons incarner une voie aussi rationnelle que belle ; le fond ne va pas sans la forme adéquate.

3- Apprendre au moins une langue étrangère : en plus de l’utilité évidente que cela comporte, la connaissance des langues étrangères permet de s’évader mentalement et de relativiser les discours qu’on entend dans notre pays. De plus, s’il s’agit d’autres langues européennes, cela permet justement de nouer des liens de fraternité avec des Européens d’autres horizons.

4- Se regrouper en communautés : face au déclin démographique que nous connaissons, il faut se préparer à vivre en minorité dans de larges portions de nos territoires et être, de ce fait, prêts à nous entraider. De plus, la société étant largement baignée d’idées de gauche insupportables au sens strict, la solitude et l’isolement peuvent rendre fous ceux qui partagent nos idées sans pouvoir les exprimer. Un dicton bien connu disait jadis : « Un chrétien seul est un chrétien en danger ». Or, cela s’applique également aujourd’hui à tous ceux qui ne pensent pas selon le moule conformiste de l’époque.

5- Se réinsérer dans la longue mémoire européenne : contre les ethnomasochismes de tout poil, de gauche comme de droite, il s’agit de se réapproprier notre histoire, notre identité et notre culture. Les diverses mythologies indo-européennes, la philosophie classique, la religion chrétienne et la science occidentale sont constitutives de l’âme européenne et de sa grandeur. Les simplifications outrancières qui cherchent à faire l’impasse sur telle ou telle dimension de notre histoire sont l’effet d’une cécité intellectuelle qu’il faut dépasser

9-: Pouvez-vous nous partager votre ressenti sur la jeunesse d’aujourd’hui ?

“Il est double et paradoxal. D’un côté, la rupture dans la chaîne de transmission a produit une jeunesse complètement inculte, apathique, conformiste et profondément imprégnée par la haine de soi. Mais, d’un autre côté, ce grand vide culturel suscite également, dans une part non négligeable de cette même jeunesse, un désir ardent et sincère de se redresser et de retrouver l’héritage dont on les a privés. Il y donc, désormais, plus de gens désireux de défendre leur civilisation dans la nouvelle génération que dans l’ancienne. Et ce fait est très encourageant.

10-: Beaucoup de jeunes français cherchent à renouer avec leur héritage, quel est le meilleur moyen selon vous d’y parvenir ?

“En puisant directement dans ce que notre civilisation a produit de meilleur : la musique de Vivaldi, de Schubert et de Wagner, la littérature de Shakespeare, de Racine, de Schiller et de Pouchkine, ou encore la grande peinture flamande par exemple. Ce ne sont que quelques exemples parmi tant d’autres, la civilisation européenne étant si riche rien que dans le domaine artistique qu’une vie entière ne suffirait pas pour en faire le tour !”

11-: Quels sont les principaux dangers qui menacent la civilisation européenne selon vous ?

” Le danger le plus urgent est sans conteste le changement de peuple. De même que la Chine ne serait plus la Chine si les Chinois étaient remplacés par des Péruviens, une Europe sans Européens ne serait plus européenne. Je me sens gêné de devoir énoncer une telle évidence, mais, contrairement à ce que dit l’adage cartésien, le bon sens n’est plus la chose du monde la mieux partagée. Tel n’est évidemment pas le seul danger qui guette notre civilisation, mais c’est celui qui nous commande de réagir le plus rapidement et le plus efficacement avant qu’il ne soit trop tard.

Toutefois, en plus de cette menace première, concrète et tangible, il y un problème majeur en amont qui empêche sa résolution. C’est ce que Soljenitsyne avait nommé « le déclin du courage ». Les Européens semblent en effet être entrés dans une forme de léthargie, comme si plus rien ne les affectait. Si l’expression de « décadence occidentale » a un sens, selon moi, c’est dans cette perte de toute énergie vitale qu’il faut le chercher.”

12-: Quels sont les principaux espoirs et leviers qui permettraient de surpasser ces menaces ?

“En dépassant le stade de l’analyse pour passer à celui de la croyance et du mythe, au sens sorélien du terme. Il faut être capable de proposer une vision du monde suffisamment forte pour s’emparer du cœur et de l’imagination de tous ceux qui ne veulent pas mourir et les inciter à se redresser. On ne surmontera le manque de courage et l’apathie générale qui consiste à « se laisser vivre » où le courant nous emporte que lorsque nous aurons à nouveau des raisons de vivre et de mourir. Pour cela, il faudra être capable de constituer, dans les années à venir, une élite en mesure de montrer la voie à suivre.”

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13-: Quels sont les personnalités, auteurs, initiatives ou organisations qui paraissent dignes d’intérêts aujourd’hui selon vous ?

“Elles sont trop nombreuses pour que je me montre exhaustif. Par principe, je regarde avec sympathie tous ceux qui défendent, d’une façon ou d’une autre, la civilisation européenne. Je ne comprends pas et je déplore même les querelles de chapelle qui opposent stérilement les divers camps de la droite, surtout quand on voit l’incroyable capacité qu’a la gauche de se mobiliser – ne fût-ce que provisoirement – contre nous. C’est un comble en effet que la gauche arrive à nous désigner comme son ennemi principal, alors que nous autres, lecteurs de Carl Schmitt, n’arrivons pas à le faire avec elle.

Je voudrais néanmoins citer quelques personnalités ou initiatives qui m’intéressent tout particulièrement :

Dans le contexte francophone, il y a d’abord l’Institut Iliade dont le combat « pour la longue mémoire européenne » me semble incarner une ligne juste et cohérente, ainsi que la Nouvelle Librairie, que le lecteur passionné que je suis regarde avec gratitude. Alexandre Cormier-Denis du Québec est également une figure que je suis avec intérêt, à qui s’ajoute ensuite Daniel Conversano, qui a le grand mérite de proposer pragmatiquement un communautarisme européen intelligent et qui s’efforce de dépoussiérer les idées de droite de façon souvent tonique et truculente. Et enfin, je voudrais mentionner le nom de Robert Steuckers, pour qui j’ai beaucoup d’estime, et dont les réflexions géopolitiques mériteraient d’être plus connues par la jeune génération.

A l’étranger, voici seulement quelques personnalités ou organisations parmi d’autres qui suscitent mon attention :

Götz Kubitschek en Allemagne, un des fondateurs de l’Institut für Staatspolitik, un think-tank de la Neue Recht allemande, ainsi que du journal Sezession et des « éditions Antaios », qui republient des auteurs comme C. Schmitt, les frères Jünger, O. Spengler mais aussi des auteurs français récents comme Renaud Camus, Jean Raspail ou Dominique Venner.  En Russie, je m’intéresse aux travaux de Pavel Tulaev et à sa revue Atheneum (Атеней). Je regarde ensuite avec enthousiasme et curiosité le rapide développement de la chaîne de télévision conservatrice et nationaliste Tsargrad TV (Царьград ТВ) de Konstantin Malofeev ainsi que celui du groupe de réflexion Katehon (Катехон).”

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14-: Y a t-il un sujet qui vous paraît délaissé aujourd’hui ou que vous considérez ne pas voir suffisamment dans les médias ou le débat public ?

” A peu près tous les sujets dignes d’intérêt sont mis de côté dans le débat public, et plus encore dans les universitaires occidentales où l’insignifiance semble être devenue la règle d’or.

15-: Pouvez-vous nous donner un livre, un film et une musique qui selon vous vous représente, ou auxquels vous tenez ?

  • Le « Tannhäuser » de Richard Wagner, dont la musique a changé ma vision du monde à jamais.
  • « L’idiot » de Dostoïevski
  • « Autant en emporte le vent » de Victor Fleming

16-: Que pensez-vous pouvoir apporter à quelqu’un qui vous découvre ?

“Fidèle au mot de Bergson, selon lequel il faut s’efforcer d’agir en homme de pensée et de penser en homme d’action, j’espère offrir aux spectateurs une pensée non pas abstraite, mais qui a pour finalité de reconduire à l’action. Toute pensée véritable et féconde, en effet, naît de l’action pour y retourner. Une pensée qui n’agit pas ne compte pas pour grand-chose, mais, de même, une action qui ne pense pas ne mène à rien non plus. Telle est en tout cas mon ambition. Aux spectateurs de me dire si je suis sur la bonne voie.”

17-: Quels sont vos projets à l’avenir ? Dans les prochaines semaines et mois, à court terme, mais également votre vision à long terme.

“Je vais continuer ma lancée avec le même genre de vidéos que j’ai déjà réalisées. Toutefois, dès que j’aurai un peu plus de temps, je compte diversifier le contenu de ma chaîne en proposant d’autres sortes de vidéos ainsi que des entretiens avec certains intellectuels qui me semblent dignes d’intérêt.

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18-: Où peut-on vous suivre ? Sur quel média ou réseau êtes-vous le plus actif?

19-: Un mot pour la fin ?

Dans la mesure de nos moyens, essayons de rester toujours fidèles à nos principes et de ne jamais, à l’instar de Soljenitsyne, faire de concession sur ce que nous estimons être la vérité. La force des idéologies égalitaires contemporaines repose principalement sur l’inertie et le conformisme de la masse. Le combat commence donc au quotidien, en chacun de nous. Sachons dire avec fierté : « Etiam si omnes, ego non ; même si tous, moi pas ! »

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samedi, 26 juin 2021

Les chemins ne mènent plus à Rome - Entretien avec Robert Steuckers

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Les chemins ne mènent plus à Rome

Zone Libre - Entretien avec Robert Steuckers

Nous vivons une rupture civilisationnelle qui arrache l'Europe de ses racines gréco-romaines. Robert Steuckers, intellectuel européen polyglotte, décrit cette rupture et ses causes, pour défendre la tradition impériale européenne qu'incarnèrent au fil des siècles, Charlemagne, Charles Quint et Napoléon.
 
 
On vous en dit plus, et plus librement sur telegram : https://t.me/zonelibretv 
Le blog de Robert Steuckers : http://euro-synergies.hautetfort.com
 
© 2020 TÉHEL Le générique musical de l’émission Zone Libre, conçu par Téhel ainsi que le titre, « Zone Libre », utilisé comme générique de fin, est la propriété exclusive de l’auteur. Toute reproduction est interdite sans l'autorisation de l'auteur.

vendredi, 21 mai 2021

The Nouvelle Droite with Robert Steuckers

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The Nouvelle Droite with Robert Steuckers

 
Discussing the Nouvelle Droite and The Netherlands with Robert Steuckers and Alexander Wolfheze. Robert Steuckers is known from his publication Euro Synergies and his longstanding activity within the French New Right.
 
Nederlands- en Duitstalige site van Robert Steuckers: https://synergon-info.blogspot.com/
 

mardi, 13 avril 2021

« Cessons d’être des Occidentaux et redevenons des Européens d’origine boréenne » - Entretien avec Georges Feltin-Tracol

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« Cessons d’être des Occidentaux et redevenons des Européens d’origine boréenne »

Entretien avec Georges Feltin-Tracol

Propos recueillis par Andrej Sekulovic

Pour commencer, pouvez-vous nous donner une brève introduction sur votre domaine d’expertise, votre travail et vos activités en cours ?

J’ai 50 ans. Formé aux sciences politiques, à l’histoire et à la géographie, j’ai aussi suivi des cours de droit constitutionnel.

J’écris mes premiers articles dès 1993. J’ai publié une dizaine de livres et collaboré à une dizaine d’autres. En 2005, je fonde avec quelques amis le site identitaire français Europe Maxima dont j’assume la rédaction en chef.

Je collabore aux Cahiers d’histoire du nationalisme, à la revue Synthèse nationale et au Magazine des Amis de Jean Mabire. Je tiens enfin chaque semaine sur le site officiel de TVLibertés un podcast intitulé « Chronique hebdomadaire du Village planétaire ».

Dans le passé, vous étiez également membre du grand groupe de réflexion français de la « Nouvelle Droite », le GRECE. Parlez-nous un peu de votre travail au sein de ce groupe de réflexion et de la « Nouvelle Droite » elle-même ?

Il faut d’abord rappeler aux lecteurs que le terme de « Nouvelle Droite » provient de journalistes de gauche hostiles qui alimentent une violente campagne de presse de l’été 1979. Fondé à la fin des années 1960, le GRECE est un groupe de réflexions pluridisciplinaires et contre-encyclopédiques qui n’a jamais pris de positions politiques, sauf à deux occasions :

– en 1974, quand son secrétaire général, Jean-Claude Valla (1944 – 2010), appelle les lecteurs d’Éléments à voter pour Valéry Giscard d’Estaing au second tour de l’élection présidentielle contre le candidat de l’union de la gauche socialiste – communiste François Mitterrand;

– en 1992, quand le rédacteur en chef d’Éléments, Charles Champetier, défend le « non » au référendum sur le traité européen de Maastricht. Sa prise de position suscite de vifs débats. Si Alain de Benoist s’abstient, les « Nouvelles Droites » flamande et italienne soutiennent le « oui ».

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Le GRECE m’a intellectuellement formé. J’y ai rencontré de grandes figures pionnières aujourd’hui décédées comme Roger Lemoine (1928 – 1999), Maurice Rollet (1933 – 2014) ou Jacques Marlaud (1944 – 2014). J’ai d’abord publié des articles dans ses publications régionales avant d’écrire dans Éléments. Parrainé par Jacques Marlaud et Charles Champetier, je me suis occupé du Lien, son bulletin interne. Je suis aussi intervenu à ses nombreuses universités d’été dans les années 1990 – 2000.

Aujourd’hui, le GRECE n’existe plus dans les faits. Il a été remplacé par l’Institut Iliade dont l’ambition plus politique s’inscrit dans la perspective d’un retour en politique après 2022 de Marion Maréchal, la nièce de Marine Le Pen. Je me suis détaché pour diverses raisons de la « Nouvelle Droite » parisienne qu’il ne faut pas confondre avec les « Nouvelles Droites » présentes dans les différentes régions françaises, ni avec les autres manifestations ailleurs sur le continent indépendantes, en particulier les initiatives autour de Synergies européennes de l’excellent Robert Steuckers. Je continue à ma modeste mesure l’immense entreprise de démolition des mystifications de la Modernité, du Progrès et de l’Égalité.

Une partie de votre travail porte sur la géopolitique. Que pouvez-vous nous dire sur l’actuelle situation géopolitique ? Pensez-vous que les objectifs géopolitiques de grands « acteurs » tels que la Chine, la Russie, les États-Unis d’Amérique ou de l’Union européenne évolueront dans un proche avenir ?

Balayer l’actuelle situation géopolitique en quelques lignes ne serait pas sérieux. Je ne lis pas l’avenir. Mais je ne me dérobe pas.

L’Union dite européenne prouve chaque jour son inutilité géopolitique. Ce vide existentiel atteint aussi les nations, les États et les peuples, ce qui invalide le souverainisme national et les propositions de « Frexit » ou d’« Italexit ». Le risque de sécession de la Catalogne montre aussi que l’indépendantisme et le gauchisme travaillent en réalité pour le mondialisme. Sauver notre civilisation passe par un saut historique vers une véritable unité européenne.

unnamed.jpgLa Russie reste une puissance d’ordre continental, mais l’immensité de son territoire, son faible nombre d’habitants, sa natalité toujours déficiente et sa porosité démographique avec les populations du Caucase méridionale et d’Asie Centrale fragilisent ses ambitions. N’oublions pas que Vladimir Poutine n’est pas immortel.

Avec Joe Biden élu grâce aux fraudes massives de l’« État profond », les États-Unis redeviennent le sheriff du monde entier. Mais ont-ils encore les moyens de dominer les cinq continents ? La société yankee est plus que jamais divisée. Les États-Unis se rapprochent du Tiers-Monde et la drogue ravage leurs campagnes. Verra-t-on leur éclatement ? Je le souhaite, mais je ne parierai pas.

Quant à la Chine, grâce à sa dynastie septuagénaire, le Parti communiste, elle retrouve la place qu’elle a perdue à la fin du XVIIIe siècle : la première. Face à la montée en puissance de Pékin, il faut prendre en compte l’émergence de l’Inde sous le gouvernement national-conservateur de Narendra Modi. On oublie que la Chine vieillit et qu’en 2050, l’Inde sera l’État le plus peuplé du monde. Et si le XXIe siècle était son siècle?

Vous avez également écrit sur la troisième voie et le mouvement solidariste. Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur les solidaristes et sur les grands principes des mouvements de troisième voie ?

Au risque de me défausser, ma réponse développée dépasserait le cadre de cet entretien. Après une publication récente en espagnol, Pour la troisième voie solidariste pourrait être traduit en anglais ou en slovène. Dans cet ouvrage, je me concentre sur la France sans pour autant ignorer les voisins européens et les expériences en Amérique du Sud et en Russie.

Le solidarisme est d’abord une formulation de l’homme politique français, le républicain Léon Bourgeois (1851 – 1925), premier président du Conseil de la Société des Nations. Il veut donner au radicalisme – le mouvement républicain franc-maçon qui constitue le cœur nucléaire de la IIIe République française (1870 – 1940) – une idéologie. L’ingénieur allemand Rudolf Diesel (1858 – 1913) écrit en 1903 un essai intitulé Solidarismus. Le Flamand Joris van Severen (1894 – 1940) fonde en 1931 en Belgique le Verdinaso (Ligue des solidaristes nationaux thiois). Dans la même décennie, avant de rejoindre la Phalange espagnole, Ramiro Ledesma Ramos (1905 – 1936) anime le national-syndicalisme et influence les mouvements d’Amérique latine tels le péronisme argentin ou le sinarquisme mexicain.

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Après la Guerre d’Algérie en 1962, les jeunes militants de l’Algérie française reprennent à leur compte le solidarisme et travaillent avec la NTS (la résistance solidariste russe en exil). En 1975, un militant solidariste français, Francis Bergeron qui dirige maintenant le quotidien national-catholique Présent, distribue des tracts anti-soviétiques sur la Place Rouge à Moscou ! À la même époque, d’autres solidaristes français partent au Liban combattre aux côtés des phalangistes chrétiens contre les musulmans progressistes.

La troisième voie (« Ni trusts ni soviets » et « Ni Washington ni Moscou ») prend des formes variées. En France, elle se manifeste avec le bonapartisme de l’empereur Napoléon III, le catholicisme social des royalistes contre-révolutionnaires, le distributisme cher à l’écrivain britannique G.K. Chesterton ou le gaullisme de Charles De Gaulle. Ce dernier prônait l’indépendance nationale, une Europe libérée des blocs issus de Yalta et la justice sociale (l’association du capital et du travail, l’intéressement aux bénéfices et la participation des producteurs à l’avenir de leur entreprise).

Quels autres auteurs, philosophes et écrivains ont-il eu le plus d’influence sur vous et vos travaux ? Quels auteurs recommanderiez-vous à nos lecteurs ?

Je ne mentionne que des défunts : l’Italien Julius Evola, les Allemands Carl Schmitt et Arthur Moeller van der Bruck, le Suisse Denis de Rougemont, l’Étatsunien Francis Parker Yockey, le Belge Jean Thiriart, les Français Joseph de Maistre, René Guénon, Charles Maurras, Maurice Barrès, Robert Aron, Arnaud Dandieu, Julien Freund, Guillaume Faye, Robert Dun, Dominique Venner ou Guy Debord. J’en oublie bien sûr…

J’invite vos lecteurs à les lire dans le texte ou dans une traduction disponible en anglais ou en allemand.

Quelle est votre avis sur les mouvements identitaires et nationalistes contemporains ?

Vaste question ! Chaque mouvement est différent, y compris au sein d’un même pays. Je porte un regard assez positif sur les mouvements nationalistes et identitaires, surtout s’ils s’opposent au monde financier et au multiculturalisme, à l’immigration extra-européenne et à la corruption politique.

9782367980652-475x500-1.jpgJe déplore en revanche que certains mouvements cherchent encore à régler des désaccords frontaliers et les contentieux historiques. Les nationalistes doivent renoncer aux vieilles et vaines querelles pour défendre l’intérêt général européen. Je n’apprécie pas que le FPÖ s’attaque à la minorité slovène en Carinthie. Je n’aime pas que les nationalistes norvégiens ou suédois s’indignent de la présence des Samis, ces indigènes d’Europe septentrionale.

Disciple de Julius Evola, fils d’un des cofondateurs du MSI, le penseur italien Adriano Romualdi (1940 – 1973) affirmait avec raison que « seuls les nationalistes peuvent faire l’Europe ». Les « bons Européens » doivent soutenir les avant-postes de notre civilisation européenne : protéger les enclaves espagnoles au Maroc, libérer Chypre de l’occupation turque et l’unir à la Grèce, reprendre à la Turquie la Thrace orientale et Constantinople, soutenir l’Arménie et l’Artsakh – Nagorny Karabakh. Ils doivent enfin exiger le départ de toutes les troupes US d’Europe et la dissolution de l’OTAN.

Que pouvez-vous nous dire sur la situation politique actuelle en France ? Comment voyez-vous les développements au sein de l’Union européenne, y compris les migrations massives, la crise du covid-19 et le fossé entre les États-membres du V4 et le reste des pays occidentaux « libéraux » de l’UE ?

Votre question comporte plusieurs sous-questions. La France arrive lentement à son nadir historique. Sa classe politique, intellectuelle, artistique, culturelle, économique, technicienne et sanitaire est d’une affligeante nullité. Les Français sont responsables de ce drame historique. Les nationalistes les ont prévenus depuis cinquante ans. Ils ne les ont pas écoutés ! En 1973, le gouvernement français interdit le mouvement Ordre nouveau, créateur du Front national, qui avait tenu une réunion électorale contre l’immigration, principal vecteur de la tiers-mondisation de l’Europe.

L’actuelle crise sanitaire favorise l’expansion du capitalisme de surveillance. Le covid-19 permet une expérience incroyable d’ingénierie sociale et de guerre psychologique 3.0 afin de domestiquer les peuples européens récalcitrants. Ce dressage social réussira-t-il ou bien connaîtrons-nous des insurrections salvatrices ? L’avenir nous le dira.

Le pessimiste lucide que je suis ne croit pas à l’influence déterminante du V4 (ou Groupe de Visegrad). Sous le même emballage « illibéral », la Hongrie et la Pologne divergent par rapport à la Russie. Varsovie et Budapest se plient aux conditions sur l’« état de droit » du plan de relance européen. Le V4, même avec l’apport de la Slovénie, voire de la Croatie, ne fera jamais le poids face à l’axe franco-allemand. Par ailleurs, Viktor Orban et Jaroslaw Kaczynski sont des « faux héros réactionnaires (ou conservateurs) ». On doit cette notion à Thomas Molnar (1921 – 2010) dans son essai La Contre-Révolution (1969). Catholique hongrois polyglotte exilé aux États-Unis, Thomas Molnar participait au courant paléo-conservateur. Ce collaborateur des « Nouvelles Droites » française, allemande, autrichienne et italienne conseilla le jeune Orban entre 1998 et 2002.

9782367980485-475x500-1.jpgLes régimes hongrois et polonais ne sont pas révolutionnaires–conservateurs, mais plutôt nationaux-conservateurs. Ils prennent une bonne direction, mais ils manquent de radicalité.

Quelle conséquences géopolitiques pensez-vous qu’auront les élections américaines de l’année dernière ?

Avec Joe Biden, l’humanitarisme armé et interventionniste retrouve la Maison Blanche. Les États-Unis reprennent leur volonté d’exporter partout leur conception frelatée et aliénée du bonheur bourgeois, mais ils sont très divisés : la guerre culturelle fait rage sur les campus et dans les mass media. Le sang des Étatsuniens coulera encore et encore au nom du Progrès et des droits de l’homme (pardon ! de l’humain fluide non genré trans-post-méta-sexuel…). Il importe au contraire de valoriser toutes les affirmations identitaires qui s’y développent. Ce modèle d’ultra-modernité doit éclater sous ses contradictions internes.

Selon vous, quel est l’avenir de l’Europe et de l’Occident ?

Je tiens à distinguer l’Occident de l’Europe. En 2021, l’Occident relève de l’atlantisme et du cosmopolitisme. L’Occident ne coïncide donc plus avec l’Europe dont l’antique civilisation brille de ses derniers feux. Cessons d’être des Occidentaux et redevenons des Européens d’origine boréenne. Comment ? En bâtissant un État central continental qui délivrerait la nationalité européenne aux seuls Européens. Ainsi serais-je un citoyen français de nationalité européenne et les lecteurs, des citoyens slovènes, autrichiens ou allemands de nationalité européenne. Je ne verrai pas de problème qu’un Danois ou un Italien soit maire de Strasbourg ou qu’un Hongrois devienne président de la République européenne de France.

Trêve de rêverie ! L’Europe court avec l’affreuse Union européenne vers sa perte finale. Amor fati !

Avez-vous un dernier conseil ou un dernier message pour les lecteurs slovènes ?

Je les salue. Ils appartiennent à un vieux peuple et à un jeune État. Pendant des siècles, ils ont connu diverses dominations étrangères plus ou moins consenties. Au XXe siècle, la Slovénie a subi l’oppression de la première Yougoslavie royale serbe, puis de la seconde Yougoslavie titiste. Le peuple slovènes a quand même conservé leur identité, base indispensable pour fonder la souveraineté. Il est un bel exemple de persévérance historique.

Outre de magnifiques paysages karstiques, la Slovénie est la patrie du célèbre groupe musical Leibach et du remarquable courant artistique NSK à l’esprit néo-futuriste, ironique et « situationniste ». Leur apparition a correspondu aux premiers signaux de la fin de la Guerre froide.

Amis Slovènes, vous êtes le Midi de la Mitteleuropa danubienne !

Propos recueillis par Andrej Sekulovic pour le site slovène tradicijaprotitiraniji.org mis en ligne en anglais et en slovène les 19 et 22 mars 2021, versions allemande et néerlandaise consultables sur Synergon Infos, le 4 avril 2021.

https://synergon-info.blogspot.com/2021/04/georges-feltin-tracol-die-rettung.html

https://synergon-info.blogspot.com/2021/04/georges-feltin...

vendredi, 02 avril 2021

Cent cinquante ans après la Commune

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Cent cinquante ans après la Commune

Réflexions sur le populisme français d'hier et d'aujourd'hui.
 

lundi, 15 mars 2021

Chronique européenne: TransEuropa#2, avec Robert Steuckers - L'Europe encerclée ?

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Chronique européenne: TransEuropa#2, avec Robert Steuckers

L'Europe encerclée ?

Second épisode de notre série TransEuropa, spécialement consacrée à l'Europe. Depuis son bunker belge, le conférencier et essayiste Robert Steuckers (Oncle Bob pour les intimes) abordera différents sujets à propos de notre continent. Histoire, politique, littérature, grands mythes et bien d'autres sujets qui nous l'espérons raviront les auditeurs et leur donneront des clés de compréhension à propos de l'Europe. Aujourd'hui: l'Europe est-elle encerclée ? Bonne écoute et place à oncle Bob ! #géopolitique #international #Europe
 
 
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Également disponible sur Soundcloud: https://soundcloud.com/user-640188530...
Extrait musique: © Kraftwerk-Trans Europa Express (1977)
Réalisation: ©Radio Lorraine Enragée 2021

jeudi, 11 mars 2021

Kris Roman meets Robert Steuckers: on Navalny, Klaus Schwab, liberalism, etc.

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Время Говорить

Kris Roman meets Robert Steuckers: on Navalny, Klaus Schwab, liberalism, etc.

(in English)

In the talk show Время Говорить ('Time to Speak'), Kris Roman receives special guests who explain their findings and knowledge on current topics to the general public. In this episode, recorded on 15-02-2021, Robert Steuckers is our guest.
 
He talks about Carl Schmitt, about Navalny, about liberalism, about Klaus Schwab and his plans to ban private property.
Robert Steuckers also talks about his personal experiences with Russia.
 
©Время Говорить/Kris Roman 2021
 
В ток-шоу «Время Говорить» Крис Роман принимает специальных гостей, которые объясняют широкой публике свои выводы и знания по актуальным темам. В этой эфире, записанной 15-02-2021, Роберт Штакерс - наш гость.
 
Он говорит о Карле Шмитте, о Навальном, о либерализме, о Клаусе Швабе и его планах запретить частную собственность. Роберт Штюкерс также рассказывает о своем личном опыте общения с Россией.
 
©Время Говорить/Kris Roman 2021
 

dimanche, 07 mars 2021

GUILLAUME FAYE, HÉROS DE L'EUROPE

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GUILLAUME FAYE, HÉROS DE L'EUROPE

Le Soleil se lève

avec Jean-Yves Le Gallou, Robert Steuckers, Daniel Conversano, Thomas Ferrier

Hommage à Guillaume Faye (Le Soleil se lève - ECP)
 
Bienvenue pour le dix-septième podcast du Soleil se lève, l'émission mensuelle de l'ECP avec comme invités spéciaux @Jean-Yves Le Gallou, @Daniel Conversano, @Thomas Ferrier et Robert Steuckers .
 
Autre intervenant : Lucien Lachance​.
Chroniqueurs : @Dal Dec ​.
TELEGRAM : t.me/LSSLoff
Likez, partagez et commentez aussi au maximum cette vidéo pour nous soutenir ! Rejoindre l'ECP : paris.equipe@gmail.com
 
 
Pour se communautariser hors-IDF avec nos partenaires : https://lesbraves.org/​
 
THÈME DU MOIS : HOMMAGE À GUILLAUME FAYE
Guillaume Faye, cet esprit fusée : http://www.librairiefrancaise.fr/fr/h...
 
LIENS UTILES
Institut Iliade : https://institut-iliade.com/
Super Danny Live : https://superdannylive.com/
La chaine de Thomas Ferrier : https://www.youtube.com/channel/UCEP3...
Le canal Telegram de Thomas : t.me/LePartiDesEuropeens
Le livre "Fascismes d'Europe" : http://www.librairiefrancaise.fr/fr/h...
La chaine Ego Non (avecuneprésentation de "L'archéofuturisme" de G.Faye : https://www.youtube.com/channel/UC5fz...
Le blog de Robert Steuckers : http://euro-synergies.hautetfort.com/
La Chaine de Dal Dec : https://www.youtube.com/channel/UCFzx...
Le Canal Telegram de Dal Dec : t.me/daldec
 
SOMMAIRE 00:00:00
Introduction 00:02:09
Hommage à Guillaume Faye 01:05:31
Les imitations de Dal Dec 01:16:31
Zemmour 2022 01:28:58
Rubrique communautaire : Epona (ECP) 01:34:54
Conclusions et présentations des initiatives des invités
 
REMERCIEMENTS
Un grand merci à experts audiovisuels : Juigi di Pesto et @Pourquoi Ça Craint ?
Un grand merci aussi à tous ceux, connus ou non, qui nous ont partagés.
Merci à tous ceux qui nous soutiennent sur Tipeee (notamment Witold Krauze, Le Korrigan Salt Piotr, Marquis Turbolibéral, Factoriel 41, Féfé, Raphaël, Victor, Epona, Anders, Saint Louis, Purple...) et sans qui ce travail ne serait plus possible. Enfin, merci à vous tous pour votre soutien et votre confiance !
 
 

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Pour commander Sexe et dévoiement:
http://www.ladiffusiondulore.fr/documents-essais/320-sexe-et-devoiement-9782353520299.html?search_query=faye&results=8
 

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Pour commande Guillaume Faye, cet esprit-fusée:
http://www.ladiffusiondulore.fr/home/765-guillaume-faye-cet-esprit-fusee-hommages-verites.html?search_query=faye&results=8
 

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Pour commander L'archéofuturisme:
http://www.chire.fr/A-139771-l-archeofuturisme-techno-science-et-retour-aux-valeurs-ancestrales.aspx
 
Nostalgie:
 

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samedi, 06 mars 2021

Derrière la Covid, l'Encerclement Total de l'Europe

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Cafe Noir N.13

Derrière la Covid, l'Encerclement Total de l'Europe

Café Noir – Un Autre Regard sur le Monde.
 
Émission du Vendredi 5 mars 2021 avec Pierre Le Vigan & Gilbert Dawed.
 
Émission spéciale avec comme invités Robert Steuckers & Gabriele Adinolfi.
 
Robert Steuckers, 65 ans, est dissident depuis l'âge de 14 ans. Il est traducteur diplômé de langues allemande et anglaise, animateur du blog Euro-Synergie: https://tinyurl.com/3k82r68v
 
Gabriele Adinolfi est un activiste et théoricien politique italien. Il anime les think tank Centro Studi Polaris et EurHope qui ont aboutit au projet de l’Académie Europe (2020). Le but de cette initiative est de créer une élite apte à influer sur la politique européenne à l’échelle continentale.
 
Orchestre Rouge – L’Internationale Terroriste des Années de Plomb de Gabriele Adinolfi chez AVATAR Éditions est disponible ici: https://tinyurl.com/fpj5at6j
 
Disponible sous peu, toujours de Gabriele Adinolfi et chez AVATAR Éditions, la réédition revue et augmentée de Nos Belles Années de Plomb.
 

lundi, 01 mars 2021

Entretien avec Thomas Ferrier

1- Pour nos lecteurs qui ne vous connaissent pas encore, présentez-vous.

« Thomas FERRIER, 44 ans, dirigeant du Parti des Européens, seul parti explicitement européen et non coalition de partis nationaux. »

2-: Quel est votre parcours ? Votre jeunesse, vos études, vos projets déjà réalisés et vos succès passés ?

« A l’issue d’une formation universitaire en histoire ancienne, je suis devenu cadre de la fonction publique, tout en défendant mes idées à visage découvert en faveur d’une Europe forte, unie de l’Islande à la Russie, et surtout européenne.

Le Parti des Européens est une refondation en 2016 de tentatives antérieures, avec choix d’un nom explicite et rassembleur. L’idée générale est que l’avenir de l’Europe ne peut passer que par la synthèse d’un discours européiste (en faveur donc d’une Europe politique) et identitaire (en faveur d’une Europe toujours européenne). »

3-: Qu’est-ce qui vous a amené à lancer votre projet ? Quelles sont les étapes qui vous y ont menées ?

« J’ai toujours été passionné par la chose politique. J’ai fait mes premières armes à droite, où j’ai compris au bout de quelques années qu’elle était dans l’impasse, qu’elle était même une impasse. Ceux qui croient à l’union des droites, entre pour résumer LR et le RN, perdent leur temps. Il faut rassembler les Européens lucides, pas des « clans » ou des « familles politiques » « 

4-: Pouvez-vous nous expliquer plus en détail en quoi consiste vos projets, votre démarche et pourquoi vous faites ce que vous faites ?

« L’Europe comme civilisation est en très grand péril. Je ne vous apprends rien. Elle connaît un hiver démographique tenace, avec un taux de natalité bien inférieur au taux de renouvellement requis (2,1 enfants/femme), et subit par ailleurs des flux migratoires post-coloniaux intenses qui modifient son profil et sont la cause d’un péril identitaire inédit, sans évoquer les conséquences financières ou sécuritaires engendrées. Elle est politiquement divisée donc la proie des USA et de la Chine, notamment, qui profitent du jeu nocif entre Etats et gouvernements, jeu que l’UE actuelle n’a en rien aboli, même si le rapport de force se fait désormais en son sein davantage qu’en dehors.

C’est face à ces immenses menaces sur la civilisation européenne tout entière qu’une réponse politique démocratique à l’échelle du continent doit émerger. Le parlement européen de Strasbourg, par son mode de scrutin qui le rend plus démocratique que le mode de scrutin pour les élections nationales, en tout cas en France, peut être demain le pivot de bascule permettant de passer d’une UE désunie et anti-identitaire à une Europe unie et identitaire, élargie à terme à l’ensemble du continent, Russie comprise. »

5-: Quelles sont vos principales sources d’inspiration, vos influences et vos références ?

« Elles sont multiples parce que je suis un lecteur forcené, mais disons que je considère que toutes les figures ayant prêché sainement l’unité de l’Europe sont mes « ancêtres » idéologiques, en commençant par Georges de Podiebrad au XVème siècle qui prônait une Europe unie pour résister aux Ottomans. Il ne faut pas opposer les européistes entre eux, et on doit pouvoir concilier Giscard et De Gaulle, Mosley et Monnet, Venner et Schuman. »

6-: Qu’est-ce que le conservatisme selon vous ? Et pensez-vous qu’il est important aujourd’hui ?

« Le conservatisme englobe à la fois le passé, le présent et le futur. C’est à la fois les châteaux de France, les églises de Bavière, le savoir-être courtois du gentleman anglais, les statues grecques et les tableaux des peintres italiens. Comment avancer sans s’inspirer de l’ancien ? Nous avons besoin de valeurs et de convictions pour être des hommes et des femmes complets et le conservatisme en fait partie. Si nous laissons le progressisme guider nos actions, nous finirons dans le néant à coup sûr. »

7-: Que pensez-vous du contexte actuel de la société en Europe ? Et à l’échelle du monde ?

« Je pense sincèrement que l’Europe n’a jamais été aussi menacée dans son existence même qu’au cours de ce XXIème siècle, même si elle a connu des situations tragiques au XXème siècle, qui l’ont affaiblie et menée à la situation actuelle. Si le communisme est tombé, son jumeau hétérozygote globaliste n’a jamais été aussi fort, du moins en apparence. Et il est davantage destructeur de l’âme des peuples. On constate que les pays de l’ex-bloc soviétique ont sur le plan identitaire en tout cas mieux résisté que les pays d’Europe occidentale. Pendant que la France a connu Mai 68, avec ses « valeurs » délétères porteuses d’un individualisme forcené dont on paie aujourd’hui le prix, les Tchèques et les Slovaques connaissaient les chars soviétiques dans leurs rues. »

8-: Si vous deviez donner 5 éléments sur lesquels tout français devrait sérieusement travailler au niveau individuel, lesquels seraient-ils ?

  • « L’auto-critique qui est saine lorsqu’elle est menée sans esprit de repentance mais dans le but de s’améliorer.
  • La fierté d’être un européen et d’assumer le devoir qu’implique cette identité, à savoir le dépassement permanent, la culture du doute face aux dogmes aveuglants, le respect des ancêtres à qui nous devons un immense héritage.
  • Le sentiment du devoir de défendre sa civilisation.
  • Le refus du chauvinisme étroit et l’acceptation du destin européen.
  • Le choix d’une religiosité de résistance et non d’ouverture à l’Autre. »

9-: Pouvez-vous nous partager votre ressenti sur la jeunesse d’aujourd’hui ?

« Elle est à la fois source d’une extrême tristesse et d’un immense espoir. Le jeune européen qui réussit, dans ce monde qui lui est si hostile, face à une propagande quotidienne voulant saper son moral, avec une inéducation nationale des plus nocives, à se penser en tant qu’européen, à se lever face à l’apathie générale, à faire le choix de lire et de progresser, est plus fort qu’il ne l’imagine. Et ils sont plus nombreux qu’on ne le croit ceux qui ont été capables de résister. Ils seront l’avenir de l’Europe. »

10-: Beaucoup de jeunes français cherchent à renouer avec leur héritage, quel est le meilleur moyen selon vous d’y parvenir ?

« Je crois qu’il faut beaucoup lire mais toujours avec un esprit ouvert et attentif aux petites choses. Il n’y a pas de recette miracle. Il ne faut en tout cas pas faire confiance aux media ou à l’école. Cultiver ce doute qui pousse à la curiosité. Arpenter son chemin avec lucidité, prudence et volonté. »

11-: Quels sont les principaux dangers qui menacent la civilisation européenne selon vous ?

« Je les ai évoqués plus haut mais pour résumer: le péril démographique, le péril migratoire et l’individualisme de reniement (en termes clairs, ne pas assumer qui on est et croire qu’on peut devenir autre chose), ce dernier amenant à toutes les dérives sur le « genre » ou au pseudo-nationalisme civique qui est un universalisme illusoire à peine déguisé. »

12-: Quels sont les principaux espoirs et leviers qui permettraient de surpasser ces menaces ?

« L’unité de l’Europe sur les bases de notre identité commune est la seule réponse. Le levier est l’éveil des Européens à cette nécessité et sa transposition politique via les élections européennes. »

13-: Quels sont les personnalités, auteurs, initiatives ou organisations qui paraissent dignes d’intérêts aujourd’hui selon vous ?

« Tous ceux qui ont compris l’importance de l’unité politique de l’Europe pour faire face aux périls susmentionnés. Ceux qui par exemple s’opposent à l’immigration de substitution mais sans tomber dans les travers de l’euroscepticisme, impasse suprême. »

14-: Y a t-il un sujet qui vous paraît délaissé aujourd’hui ou que vous considérez ne pas voir suffisamment dans les médias ou le débat public ?

« L’identité européenne est le grand tabou. Ceux qui parlent positivement d’Europe n’y voient qu’un projet politique, et non ethno-civilisationnel, porteur de valeurs universelles. C’est l’europhobie par globalisme qui n’envisage l’Europe que comme un magma artificiel.

Or l’Europe unie n’est un projet politique que comme la transposition d’une réalité anthropologique. C’est parce que les Européens sont de même souche qu’ils ont un même destin et qu’ils peuvent l’avoir unis. »

15-: Pouvez-vous nous donner un livre, un film et une musique, qui selon vous vous représente, ou auquel vous tenez ?

Parmi tant d’autres,

« Homère, « L’Iliade ».
« Excalibur », de John Boorman
IXème symphonie, Beethoven »

16-: Que pensez-vous pouvoir apporter à quelqu’un qui vous découvre ?

« Un point de vue audacieux sur l’Europe, une certaine lucidité face aux propagandes euro-mondialistes comme euro-sceptiques, un jugement plus nuancé sur l’actuelle Union Européenne, l’espoir aussi d’un avenir à nouveau solaire pour les Européens. »

17-: Quels sont vos projets à l’avenir ? Dans les prochaines semaines et mois, à court terme, mais également votre vision à long terme.

« L’objectif principal et même fondamental est l’émergence médiatique et pas seulement sur les canaux du pauvre (réseaux sociaux, youtube) mais au premier plan. Seule cette émergence peut permettre de présenter une liste crédible aux élections européennes, financée, avec de vrais bulletins et de vraies affiches, et donc dans des conditions idéales pour éviter de faire 3 000 voix sur toute la France, comme l’ont fait certaines listes identitaires en 2019.« 

18-: Où peut-on vous suivre ? Sur quel média ou réseau êtes-vous le plus actif?

« Je suis actuellement présent surtout sur Twitter (@ThFerrier) et aussi sur Telegram (t.me/LePartiDesEuropeens) où il y a plusieurs centaines d’audios accessibles désormais sur différents sujets que chacun peut écouter (religion, histoire, politique, institutions, droit, propositions du parti, éléments du programme, actualités…).« 

19-: Un mot pour la fin ?

« Elle ne saurait mourir que si elle était incapable de s’unir mais elle va y parvenir même si cela devait être « au bord du tombeau » pour paraphraser Nietzsche. »

vendredi, 26 février 2021

Les Pages nordiques de Robert Steuckers

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Les Pages nordiques de Robert Steuckers

par Georges Feltin-Tracol

Recension: ROBERT STEUCKERS, Pages nordiques. Fidèles à Thulé, Éditions du Lore, 2020, 100 p., 15 €.

Les excellentes Éditions du Lore poursuivent à un rythme toujours soutenu la publication des nombreux articles, recensions et conférences de l’Européen Robert Steuckers. Après Pages celtiques en 2017 (cf. SN 48), voici maintenant un nouveau recueil qui explore un monde nordique souvent lié à l’univers celtique.

Dix textes forment cet ouvrage qu’il importe de mettre dans toutes les mains, à l’exception de ceux qui croient encore à la fable de la « Lumière » venue d’Orient, de Mésopotamie et d’Afrique. Aidé par les découvertes archéologiques, Robert Steuckers examine d’un œil neuf la thèse de Jürgen Spanuth pour qui l’Atlantide se situe en Mer du Nord et dont l’île d’Héligoland serait l’une des dernières traces physiques.

L’ancien directeur des revues Vouloir et Orientations insiste sur l’action des Vikings, en particulier en Amérique du Nord dès l’An Mil. Leurs multiples expéditions et les leçons qu’ils en tirent alimenteront bien plus tard la curiosité du Génois d’origine corse Christophe Colomb. L’auteur établit par ailleurs une chronologie didactique dédiée au « Retour de la conscience païenne en Europe » de 1176 à 1971. On y apprend que le poète pan-celtique Charles De Gaulle (l’oncle de…) « appelait [...] les peuples celtiques à émigrer uniquement en Patagonie » nommée par le Gallois Michael D. Jones « Y Wladfa ». Ce dernier décida d’y implanter une colonie éphémère. Quel impact a eu cet article de 1864 sur le futur roi des Patagons Orélie-Antoine de Tounens ? La patrie patagone chère à Jean Raspail aurait-elle donc une origine celtico-nordique projetée dans l’hémisphère austral ?

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L’auteur de Pages nordiques évoque enfin le culte de la Déesse-Mère. Il remarque que « la Terre-Mère, dans ces cultes, est fécondée par l’astre solaire, dont la puissance se manifeste pleinement au jour du solstice d’été : la religion originelle d’Europe n’a donc jamais cessé de célébrer l’hiérogamie du ciel et de la terre, de l’ouranique et du tellurique ». On a perdu Alice Coffin et Pauline Harmange !

Avec son immense érudition, son sens de l’éclectisme et sa polyglossie, Robert Steuckers interprète depuis un angle différent les références spirituelles de la civilisation européenne. Celle-ci ne se cantonne pas au triangle Athènes – Rome – Jérusalem. Elle intègre l’héritage du Nord et de l’Ouest. On attend par conséquent avec les prochains volumes : Pages slaves, Pages germaniques, Pages latines, Pages balkaniques, Pages helléniques, etc.

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Pour commander l'ouvrage: http://www.ladiffusiondulore.fr/home/849-pages-nordiques-fideles-a-thule.html

 

samedi, 13 février 2021

Archéofuturisme : un dynamisme vitaliste

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Archéofuturisme : un dynamisme vitaliste

Conférence donnée au Pérou sur l'archéofuturisme selon Guillaume Faye

Traduction d’une conférence donnée au Pérou, par Israel Lira, directeur du centre des études Crisolistes – Le 24 décembre 2020

«…Les formes politiques et sociétales de la modernité se brisent. Les voies archaïques émergent dans tous les domaines politiques, la résurgence d’un Islam conquérant en est un parfait exemple. Finalement les futures altérations de la technoscience -principalement en génétique – tout comme le retour tragique à la réalité que le 20ème siècle a préparé, va demander un retour vers une mentalité archaïque. C’est le modernisme qui est une tendance passagère. Il n’y a aucun besoin de revenir au classique traditionalisme, imprégné de folklore et rêvant à un retour au passé. La modernité est déjà obsolète. Le futur doit être archaïque, c’est à dire, ni moderne ni passéiste.(Faye, 1998:15). (revoir d’après l’original, p43)

Cette citation de Faye montre le flou dans lequel il laissait les principes consubstantiels à son système théorique, pour éviter précisément qu’ils puissent être confondus avec d’autres théories ayant aussi la technoscience dans le champ de leur réflexion. Dans le cas particulier de Faye, sa proposition, dans ce qu’elle a d’universel, relève de la catégorie du constructivisme vitaliste, tandis que sa conceptualisation spécifique prend la forme du néologisme « archéofuturisme ». 

product-image.jpgCette nouvelle doctrine a influencé un large éventail d’écoles de pensées théoriques à ce jour, dans le cadre de propositions anti-globalistes, anti-individualistes et anti-libérales, face au monde postmoderne qui porte l’estampille du nihilisme culturel, dont les principales expressions phénoménales s’expriment dans la laïcité nihiliste, la globalisation néolibérale, le narcissisme hyper-individualiste et l’extrême relativisme culturel.

La trichotomie centrale de l’archéofuturisme (TCAf)

L’archéofuturisme a trois thèses principales à l’intérieur desquelles nous devons remarquer son rejet absolu – par Guillaume Faye – des positions techno phobiques (le traditionalisme classique et le conservatisme) ainsi que les positions technophiles acritiques (technicisme et transhumanisme), et elles peuvent être résumées ainsi :

Première thèse (T1): la civilisation contemporaine qui est la fille de la modernité et de l’égalitarisme, termine déjà son cycle historique, ainsi, « la vieille croyance dans le miracle de l’égalitarisme et de la philosophie du progrès, qui affirmait qu’il était toujours possible d’obtenir plus, est morte. Cette idéologie angélique a créé un monde qui devient moins viable chaque jour. » (Faye, 1998: 2-3)

Seconde thèse (T2) : Les idéologies contemporaines qui émergent comme un fait symptomatique du retour des structures psycho-bio-sociales à un état très moderne sont caractérisées par le rejet de l’individualisme et de l’égalitarisme, ce dernier comme expression maximal du nihilisme culturel. Pour affronter le futur il faut reproduire une mentalité archaïque, c’est-à-dire, pré-moderne, non égalitaire et non humaniste, qui restaurera les valeurs ancestrales d’ordre des sociétés. Maintenant, les découvertes en techno science, particulièrement dans le domaine de la biologie et de l’informatique, ne peuvent être administrée à travers les valeurs humaniste et les mentalités modernes.

Aujourd’hui les événements géopolitiques et sociaux sont dominés par des problèmes religieux, ethniques, alimentaires et épidémiologiques. Revenons à la question principale. Je (Guillaume Faye) propose donc, une nouvelle notion, l’archéofuturisme, qui nous permettra de rompre avec les dogmes modernes, égalitaire, humaniste et individualiste, inadaptés pour penser au futur, et qui nous permettrait de survivre dans le siècle de feu et de fer qui vient. (Faye, 1998:4-5)

Troisième thèse (T3) : l’avènement d’un nouveau type de scénario dans un cadre qui est totalement différent du monde égalitaire régnant et actif, dans la mesure où il est clair pour nous que « nous devons nous projeter et imaginer le monde post-chaos, le monde après la catastrophe, un monde archéofuturiste, avec des critères radicalement différent de ceux utiliser dans la modernité égalitaire.»

Ces trois thèses centrales constituent les fondamentaux de l’archéofuturisme, configurant sa trichotomie centrale (TCAf) comme système théorique qui s’exprime de la façon suivante :

Af = <T1,T2,T3>

Où,

Af = Archéofuturisme comme proposition théorique.

T1 = Thèse de la mort du mythe du progrès.

T2 = Thèse de l’éternel retour et la sombre illumination.

T3 = Thèse du nouveau paradigme existentiel.

Qui plus est, il faut mentionner qu’une partie du discours de Guillaume Faye doit être comprise dans le cadre littéraire qu’il se donne afin d’illustrer son travail, et/ou d’élaborer une sorte de projection hypothétique en forme d’utopie et de dystopie, que l’on voit se refléter dans son œuvre, l’Archéofuturisme V2. 0 ( 2016).

Archéofuturisme et transhumanisme : un antagonisme irréconciliable

Aux antipodes de TCAf, on peut présenter le transhumanisme tel qu’il ressort de manière claire et nette des travaux de Max More et Anders Sandberg, et de cette déclaration de la World Transhumanist Association, qui réaffirme la systématisation faite par ces deux auteurs : 

9781907166099-fr.jpg«Le transhumanisme est une sorte de philosophie qui tente de nous guider vers une condition post-humaine. Le transhumanisme a de nombreux points communs avec l’humanisme, tel que son respect de la raison et de la science, son acceptation du progrès et la priorité donnée à l’existence humaine (et transhumaine) dans cette vie au lieu d’une vie future surnaturelle. Le transhumanisme diffère de l’humanisme dans la reconnaissance et l’anticipation d’altérations radicales dans la nature et notre potentiel biologique grâce à différentes sciences et technologies telles que les neurosciences et la neuropharmacologie, l’extension de la vie, la nanotechnologie, l’ultra-intelligence artificielle, la vie dans l’espace, combinées à une philosophie rationnelle et un système de valeur rationnel.» (More, 1990)

Dans la même veine : « les philosophies de vie qui recherchent la continuation et l’accélération de l’évolution de la vie intelligente au-delà de la forme humaine actuelle et de ses limitations au travers de la science et la technologie, sont guidées par des valeurs et des principes qui promeuvent la vie. » (More et Sandberg 2001)

De ce qui précède, il ressort clairement, littéralement et explicitement que le transhumanisme se trouve dans la logique narrative de la modernité, dans la mesure où il implique la continuation et l’expansion de la philosophie du progrès linéaire, compris comme une perfectibilité indéfinie du genre humain et qui n’admet aucun recul que ce soit (Canguilhem, 1999 :669). C’est ce principe névralgique du transhumanisme,  celui sur lequel il repose entièrement et que même l’histoire de la science a démystifié, qui apparaît comme l’antagoniste de la trichotomie centrale de l’archéofuturisme (TCAf).

Très contraire à l’idée de la modernité du progrès linéaire,l’ archéofuturisme met devant lui une idée de mouvement synergique, qui est plus intégrale, un dynamisme vitaliste, dans la mesure où l’archéofuturisme rejette l’idée de progrès comme fin en soi. Car tout ce qui découle de la vision du monde d’un peuple doit être fondée sur des bases immémoriales, et parce que depuis 50 000 ans, Homo sapiens n’a que très peu changé, mais aussi parce que le modèle archaïque pré-moderne des organisations sociales a donné des preuves de son efficacité. À la fausse idée de progrès, nous devons opposer l’idée de mouvement ( Faye, 1998: 89) (revoir d’après l’original, p71)

De ce qui vient d’être exposé il peut être réaffirmé que l’archéofuturisme ne penche aucunement vers le système théorique du transhumanisme contemporain, comme le voit Michael O’Meara (2013) et, plus explicitement encore, Roberto Manzocco (2019), et ce système de pensée ne peut pas non plus être considéré comme une branche conservatrice du transhumanisme, un transhumanisme conservateur, erreur encore pire que toutes celles qu’on pourrait faire. A l’appui de cette idée, on ne peut trouver d’explication que dans la prétention totalitaire du transhumanisme international de s’annexer tout projet qui ferait allusion à l’utilisation de technologie pour l’amélioration de la qualité de la vie et de la condition humaine, initiatives qui ont été présentes depuis la révolution industrielle, étant donné que comme pour tout système théorique, les idées qui lui ont servi de base, et les premières pensées apparentées, ont pu être retracées comme esquissé dans les travaux de Hugues (2002) et Bostrom (2005).

Mais on ne peut en déduire que toute idée qui préconise l’utilisation des technologies pour l’amélioration de la qualité de la vie et de la condition humaine, est en soi du transhumanisme, même si cela est validé par les transhumanistes eux-mêmes, dans la mesure où « l’Homme +» (l’Homme Af) a des particularités qui le différencient précisément comme philosophie et comme proposition théorique, aussi bien par exemple de la pensée futuriste (artistiques et technologiques), et de l’utopisme technoscientifique.

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Le terme transhumanisme est apparu en 1957 sous la plume du biologiste Julian Huxley, tout comme le terme «transhumain» en 1966 dans la bouche de l’Américain futuriste F.M. Esfandiary, sans qu’on puisse parler de transhumanisme à proprement parler avant l’usage systématique du terme par la World Transhumanist Association (WTA) fondée par Nick Bostrom. Il fallait éviter de tomber dans une anarchie sémantique et méthodologique, sous peine de voir le transhumanisme se perdre lui-même dans l’imprécision. Dans cette mesure, «… l’affirmation qu’il est éthique et souhaitable d’utiliser les moyens technoscientifiques pour améliorer fondamentalement la condition humaine…(…) est simplement le plus petit dénominateur commun du transhumanisme et peut être adopté et adapté à ses propres besoins, par la majorité des idéologies politiques à l’exception des idéologies bio-conservatrices et néo luddites.(…)

Bildschirmfoto-2020-05-14-um-11-39-36_720x600.pngLes fondateurs du transhumanisme moderne, conscients de ces risques, essayèrent d’orienter le Central Axis of Transhumanism (CAT) vers des concepts tels que le respect des individualités, liberté, tolérance et démocratie, faisant remarquer que les racines du transhumanisme reposent sur la philosophie des lumières, l’humanisme et le libéralisme. Les extropiens sont allés encore plus loin, essayant d’imposer au CAT, des concepts tels que « l’ordre spontané » et, plus tard, les principes de l’Open society de Soros (Estropico, 2009).

Cependant, dans la pratique, il est clair que ces incitations n’ont pas été totalement couronnées de succès, étant donné qu’à ce jour, tel que nous le voyons, il n’est pas nécessaire d’adhérer au transhumanisme pour pouvoir prétendre que grâce à la technoscience, la qualité de vie et la condition humaine peuvent être améliorées. Cet impératif de précision téléologique et catégorique est partagé par la WTA , pour ne pas tomber dans ce qu’ils appellent le futur fascisme racialiste et eugéniste ou dans l’utopisme technoscientifique du socialisme classique.

Ainsi, il est clair que le transhumanisme et ses courants marginaux (extropianisme, techno-progressisme, singularitarisme, transfigurisme etc.), jusqu’à aujourd’hui, représentent les antithèses des propositions de l’archéofuturisme…

Le mythe de la quatrième révolution industrielle

Faye lui-même notait déjà tout ce qui est exposé dans cet article, dans un court essai publié sur son blog le 23 mai 2016, qui partageait de nombreuses similarités avec les récents commentaires que Mario Bunge a apportés sur le sujet. Il englobait en effet le transhumanisme dans le cadre plus large des réactions quasi religieuse issues de la foi en l’idée du progrès et du développement linéaire, y voyant un fait symptomatique de l’effondrement économique mondial à venir.

«L’optimisme forcé, assez irrationnel, sur la ”nouvelle économie numérique”, avec le big data, la blockchain, l’impression 3D, le ”transhumanisme”, etc. qui préfigureraient une “quatrième révolution industrielle” et un nouveau paradigme (et paradis) économique mondial, relève probablement de l’utopie et de l’auto-persuasion. Et de la croyance aux miracles» (Faye, 2016).

La première révolution industrielle – début du XIXe siècle– s’organisait autour de la machine à vapeur, la deuxième (fin du XIXe) autour de l’électricité, la troisième autour de l’informatique (milieu XXe). La quatrième révolution (début XXIe), issue des deux dernières, l’électrique et l’électronique, concernerait la généralisation d’Internet et des connections universelles numériques par le web. Le concept de « 4ème révolution industrielle » est né après la foire de Hanovre en 2011, où l’on a célébré la naissance de l’ ”usine connectée” ; cette dernière, entièrement ”webisée” et branchée directement sur les clients, est robotisée et emploie de moins en moins de salariés. On a créé l’expression abstraite d’” industrie 4.0”. C’est un concept assez creux : à quand, l’ ”industrie 5.0” ?

Le néo-scientisme et l’écologisme

Les prophéties sur la révolution de l’économie numérique, avec ses mots fétiches, cloud, big data, transhumanisme, etc, appartiennent à une idéologie néo-scientiste qui risque de déboucher sur des désillusions terribles. Or, ce néo-scientisme sans prise de recul, comme celui de la fin du XIXe siècle, cohabite curieusement, chez les mêmes, avec un anti-progressisme écologiste. Il est aussi stupide que les théories de la décroissance : il relève du même extrémisme.

pack-faye-5-ouvrages-a-prix-reduit-.jpgCe romantisme néo-scientiste est l’exact pendant de celui de la fin du XIXe siècle – relisez Jules Vernes et Victor Hugo – où l’on s’imaginait l’avenir en rose sous l’influence du concept magique et au fond peu rationnel de ”Progrès”. À la fin de son poème La légende des siècles, Victor Hugo brossait une vision idyllique du XXe siècle.

Les erreurs des pronostics technologiques sont une habitude. Jules Vernes prévoyait qu’en 1960, les habitants des villes se déplaceraient en engins volants individuels. Mais il n’avait pas prévu l’automobile. Et, dans les années 60, on pronostiquait des bases humaines nombreuses sur la Lune et sur Mars, astronomiques et d’extraction minière, la généralisation des transports aériens supersoniques et hypersoniques stratosphériques ainsi que la diffusion de l’énergie de fusion nucléaire. Bien des pronostics sur le futur de la ”révolution numérique” relèvent probablement des mêmes erreurs utopiques de jugement.

L’utilité marginale déclinante de l’économie numérique

Le téléphone, l’électrification, le chemin de fer et l’automobile, l’aviation comme la radio et la télévision, la pénicilline, l’anesthésie, etc. ont été des bonds technologiques énormes, de par leurs conséquences, bien plus qu’Internet ou l’économie numérique. Le binôme numérique/informatique offre moins de facilités qu’on ne croit ; parce qu’il complique les processus autant qu’il ne les simplifie. Les innovations technologiques de la ”révolution numérique” ne répondent pas dans la pratique quotidienne, à leurs promesses. Elles sont inférieures en terme d’avantages marginaux aux innovations des précédentes mutations techno-industrielles» (Faye, 2016).

Archéofuturisme et Crisolisme

L’archéofuturisme, selon ce que nous venons de voir, est une position équilibrée, qui intègre dialectiquement deux catégories : l’archaïsme et le futurisme. C’est une théorie critique de la modernité mais aussi des traditions.

crisolisme.jpgL’héritage fayen est à la base de l’archéofuturisme péruvien dans le cadre de la Théorie Crisoliste, laquelle prévoit une harmonie entre la vision traditionnelle de diverses ethnies, dont la Péruvienne, et l’idée d’une synergie technoscientifique ainsi qu’un mouvement socio-économique harmonieux, sans affecter les environnements, par exemple, les communautés Andine et Amazonienne, face au danger d’un idéal de progrès infini représenté par une vision d’exploitation de la nature, qui jusqu’à ce jour n’a apporté que des exploitations minières illégales dans la région de Madre de Dios, des effondrement minier à Ancash, des marées noires en Amazonie, la déprédation dans les réserves écologiques telle que Chaparri, augmentant le risque d’extinction d’espèces menacées, et la déforestation exacerbées provoquant la perte de 164 662 hectares de forêt tropicale amazonienne en 2016, ce qui mit en danger la santé et l’équilibre environnemental.

L’archéofuturisme donc, n’est pas la misanthropie cachée du transhumanisme, nourri par l’idée d’un progrès infini, qui déteste l’être humain ordinaire, limité par ses faiblesses biologiques. L’archéofuturisme n’est pas non plus, et ne sera jamais, un transhumanisme conservateur. L’archéofuturisme est la réaffirmation d’un amour authentique des potentialités de l’humain originel en tant que tel, dans la mesure où il est évident que l’idée moderne du progrès, tel qu’il fut dénoncé par Rousseau (1750), génère un être riche matériellement et techniquement puissant, mais moralement répugnant.

Source


Un grand merci à Olivier Dubuis pour la traduction

mardi, 26 janvier 2021

't Pallieterke - Interview met Robert Steuckers

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't Pallieterke

Interview met Robert Steuckers

De belangstelling van Robert Steuckers is breed, maar binnen deze waaier heeft de geopolitiek altijd al een aparte plaats ingenomen. “De geografie is het meest standvastige in internationale relaties”, benadrukt hij. “En dat is een realiteit die door geen enkele politieke beslissing miskend kan worden”. Met hem hadden we het over Turkse ambitie, Russische vergane glorie en de al dan niet te vermijden clash met China.

Sinds jaar en dag is een onopvallend rijhuis gelegen in één van de zijstraten van het Hoogte Honderdplein in Vorst – het hoogste punt van de hoofdstad – de thuisbasis van Robert Steuckers. Het is niet enkel de plek vanwaar hij sinds jaar en dag zijn vertaalbureau runt, maar ook – en vooral – de plek waar inmiddels duizenden publicaties gestalte kregen. Precies zoals men het kan verwachten van een man die als een van de toonaangevende pennen van de nouvelle droite geldt.

Als kind van een Limburgse vader en een West-Vlaamse moeder (maar wel in Molenbeek geboren) is Steuckers (64) op onderwijsvlak een product van het naoorlogse Brussel, wat concreet betekenen dat hij zijn schoolse carrière in het Frans doorliep. Onmiddellijk is dit de belangrijkste verklaring waarom het gros van de publicaties op zijn actief ook in die taal geschreven werden. Maar anders dan vele van zijn generatiegenoten deden, ging dit niet gepaard met het verloochenen van zijn roots. Hij was scholier/student in de jaren dat het FDF haar grootste successen kende, maar hij maakte andere politieke keuzes. Noem het gerust 'rechts', zij het dat die term ietwat te vaag is om hem helemaal te typeren. Hij bewoog zich jarenlang in de kringen van de GRECE, het vlaggenschip van wat men eind jaren zestig – begin jaren zeventig als nouvelle droite is gaan bestempelen. Maar de relatie met boegbeeld Alain de Benoist bekoelde en begin jaren negentig begon hij met zijn eigen project, Synergies Européennes, dat voornamelijk in het Italiaans en het Duits werkte.

Het is niet makkelijk Robert Steuckers in een bepaald hokje te plaatsen. En eigenlijk zou het ook ongepast zijn, aangezien hij veel meer dan een politiek militant een intellectueel die op een erg eclectische manier door echte en spreekwoordelijke bibliotheken flaneert. Een aantal stokpaardjes komen steeds terug. De Conservatieve Revolutie bijvoorbeeld, niet de tegenreactie op de Franse Revolutie, maar de heterogene beweging aan ideologen en denkers uit het interbellum die men onder die noemer heeft samengebracht. Geopolitiek is er nog eentje, en onmiddellijk ook de reden van ons bezoek (Zijn drieluik “Europa”, over Europese geschiedenis en geopolitiek is bij Editions Bios in Rijsel te koop en zijn twee delen over de Duitse Conservatieve Revolutie en zijn boek over Carl Schmitt bij Editions du Lore; https://editionsbios.fr en www.ladiffusiondulore.fr ; in het Engels publiceerde hij in Australië “The European Enterprise” bij Manticore Press, https://manticore.press ).

Ottomaanse inmenging

't Pallieterke // We spreken ons op een moment dat de oorlog tussen Armenië en Azerbeidzjan in alle hevigheid woedt. Op zich niet voor het eerst, maar wat deze editie wel speciaal maakt is de buitenlandse inmenging, die van Turkije in het bijzonder. Hoe schat u dit in?

Robert Steuckers // “Dit is nog maar eens een hoofdstuk in een beleid dat jaren geleden al gestalte kreeg. Ahmet Davutoğlu was enkele jaren Minister van Buitenlandse Zaken onder Erdogan en gaf gestalte aan een apart beleid, ook wel eens zero-vijanden politiek genoemd. Op zich dacht hij wel in neo-Ottomaanse termen, maar hij zag dat als een zachte politiek. Een van dialoog en handel, eerder dan militair machtsvertoon zoals we dat vandaag zien. Erdogan's kijk is verschillend, het kwam tot een spanning met als gevolg dat Davutoğlu uitgeschakeld werd. Het agressieve Turkse beleid vindt in belangrijke mate zijn wortels in het verleden. Toen de Turkse Republiek na de eerste wereldoorlog en de door Atatürk gevoerde bevrijdingsoorlog ontstond, werd het een land zonder energiebronnen. Heel bewust werd bijvoorbeeld de regio rond Kirkurk uit de Republiek gehouden. In eerste instantie leverde dit geen al te grote moeilijkheden op, maar de demografische groei veranderde het plaatje. Het Turkije van vandaag is een land van 83 miljoen inwoners, maar nog steeds zonder die begeerde energiebronnen. Het is geen toeval dat ze zich zo mengen met wat er in Libië gebeurt. Of dat ze trachten hun hand te leggen op gas in het Oostelijk deel van de Middellandse Zee. Een identieke achterliggende motivatie schuilt achter hun inmenging in de Kaukasus. Of deze neo-Ottomaanse politiek kans van slagen heeft durf ik betwijfelen. Ik vrees dat de Turken hiervoor de economische basis missen.”

't Pallieterke // De inmenging is breder dan de Turkse. Iedereen lijkt wel zijn reden te hebben?

Robert Steuckers // “Er tekenen zich inderdaad verschillende bondgenootschappen af. Dat Turkije het voor Azerbeidzjan opneemt zou ik als een pro-Turkse alliantie bestempelen, geen Islamitische want Azerbeidzjan is Sjiitisch terwijl Turkije tot het Soennitische kamp behoort. Anders dan men zou denken is de steun van Rusland voor Armenië niet zo vergaand en van een pan-Orthodoxe solidariteit is beslist geen sprake. Israël schaart zich dan weer aan de kant van Azerbeidzjan, al was het maar omdat ze hen drones en ander tuig kunnen verkopen. Maar er speelt nog iets anders; een erg belangrijk geopolitiek element. Over de Chinese Zijderoute is al veel inkt gevloeid, maar een tijdje geleden werd een vergelijkbaar project tussen India, Iran en Rusland aangekondigd. Naarmate dit gestalte zal krijgen, wordt een verbinding tussen India, Iran, de Kaspische Zee en de Wolga tot aan de Witte- en Barents Zee mogelijk. Euraziatische continentale integratie is altijd iets dat vanuit Angelsaksische hoek met een scheef oog bekeken is. Door gerommel in en rond Nagorno-Karabach wil men dit project ondergraven. Niet toevallig steunen ook Oekraïne en Georgië Azerbeidzjan, twee landen die duidelijk onder Amerikaanse invloed staan. Trouwens, het nut van deze verbinding heeft haar nut ook tijdens de tweede wereldoorlog bewezen. Zonder bevoorrading via het Noorden en Zuiden was de Sovjetunie nooit in staat geweest het Duitse offensief tegen te houden.”  

Russische zwakte

't Pallieterke // Een land dat zich de voorbije assertiever, sommigen zullen zeggen agressiever, opgesteld heeft is Rusland. Het Syrische voorbeeld is hiervan het type-voorbeeld. Hebben we het hier over een (nieuwe) grootmacht in wording? Opnieuw?

Robert Steuckers // “Als ik naar alle relevante parameters kijk, dan betwijfel ik dat. Er is de manier Rusland en het regime van Poetin voorgesteld wordt enerzijds. Wat scheef zit, kan je niet recht praten, maar nog steeds bouwt men verder op de zogenaamde zwarte legende die men destijds tegen Rusland heeft gefabriceerd, het werk van de Britse geheime diensten in de 19de eeuw ten tijde van de Krimoorlog. Dit gaat terug naar de zogenaamde Leyenda Negra, de manier waarop men het Spanje in de periode van de 15de eeuw en later in de geschiedschrijving in een erg negatief daglicht heeft geplaatst. Sindsdien is dit in tal van gevallen een beproefde tactiek geworden. Ik kan terzake het vorig jaar verschenen boek van Mark Smith, Russia's Black Legend. The Russia Anxiety: And How History Can Resolve It, warm aanbevelen. Wat zijn nu de relevante feiten? Poetin heeft zijn land gered uit de chaos die tijdens de Jeltsin-jaren ontstaan is, wat positief is. Rusland heeft ook troeven: olie, gas en andere grondstoffen, maar tegelijk is die afhankelijkheid ook hun zwakte. Vergeten we niet dat hun BBP niet groter is dan dat van de Benelux, zij het voor een veelvoud aan inwoners. En dat laatste is ook een probleem. Het land kent een sterke demografische recessie. Stuk voor stuk zijn dat elementen die me doen concluderen dat het potentieel om een challenging grootmacht te worden zonder Europa beslist niet aanwezig is.”. Rusland redt zichzelf alleen met de steun van Duitsland (dus Europa) maar nu is Duitsland ook erg ziek en schijnt onbekwaam te zijn, een eigen geopolitiek door te voeren.  

Een vermijdbaar conflict met China

't Pallieterke // De opmars van China is onmiskenbaar, wat zich vertaalt in een grotere assertiviteit, vooral dan in Azië. Is een clash met de VS onvermijdelijk, zoals vele analisten vrezen. Kan de val van Thucydides nog vermeden worden?

Robert Steuckers // “We mogen niet vergeten dat China vandaag haar plaats in de wereldorde inneemt omdat er ruimte vrijgekomen is. Het narratief van de VS wordt in de brede wereld maar zeker in Azië niet meer aangenomen. De Amerikanen hebben er trouwens bewust voor gekozen niet meer de prominente aanwezige rol van vroeger te spelen. En over de volledige afwezigheid van Europese assertiviteit spreken we dan nog niet. De Chinese ambitie en de manier waarop ze deze uitvoert is voor iedereen duidelijk, maar het is een reus op lemen voeten. De sociale wanverhoudingen zijn hun zwakte. Om deze onder bedwang te houden is een forse economische groei nodig. Als deze opeens zou uitblijven, zou dat enorme maatschappelijke spanningen teweeg brengen. Dit in combinatie met een imperial overstretch van een steeds groter gebied waarin Peking zich wil laten gelden, zou sneller dan men denkt een einde kunnen maken aan de internationale Chinese droom. Maar of het tot een clash komt, zal ook van de VS afhangen. De keuze voor Trump is er een voor meer autarkie en het grondig bijstellen van de imperiale ambities. Je kan je trouwens afvragen over dergelijke projecten nog wel over een voldoende breed draagvlak beschikken. Met de sociale problemen, antifa-gedoe, BLM of nog het gender-militantisme zie je toch meer dat de maatschappelijke consensus helemaal zoek is geraakt. Samengevat: ik zou toch geen te deterministische kijk hebben op de Amerikaans-Chinese verhoudingen.”

 Michaël Vandamme

“Brussel is een stad van parallelle samenlevingen geworden”

Urbi et orbi. De stad en de wereld. Naast zijn kijk op internationale betrekkingen en geopolitiek in het bijzonder, is ook Brussel een thema dat Robert Steuckers bezig houdt. De stad dus – zijn stad en de plaats waar hij heel zijn leven al woont. “Het wordt hier erger en erger, heel eenvoudig”, lacht hij cynisch. “In deze stad loopt gewoonweg te veel volk rond. Je krijgt een sterke sociale tegenstelling, met een wegtrekkende middenklasse, en tal van maatschappelijke problemen die iedereen kan vaststellen, voor zover men niet verblind is door politieke correctheid. Nu is er nog een periode geweest dat immigratie het uitzicht van deze stad fors veranderd heeft. Tijdens de periode 1880 en 1914 kwamen er voor elke autochtone inwoner zomaar even 17 nieuwkomers uit de andere provincies bij. Zo iemand was bijvoorbeeld Léon Trésignies, de held van de eerste wereldoorlog. Zijn geschiedenis voor de eerste wereldoorlog was die van een arme eenvoudige volksmens: aangekomen uit Charleroi, verloor hij zijn baan in Vorst toen de oorlog begon. Dat is ook de reden waarom hij zich bij het leger heeft gemeld. In een stad die zo planloos groeit, gaat het organische van een samenleving verloren. Men kampeert ergens naast elkaar, zonder dat je van een heus samenleven kan spreken. Dit stelt zich vandaag scherper dan ooit. Brussel is een amalgaam van parallelle samenlevingen geworden.”

jeudi, 07 janvier 2021

L'Europe archéofuturiste d'Adriano Romualdi

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L'Europe archéofuturiste d'Adriano Romualdi

par Alfonso Piscitelli

Les trente années qui se sont écoulées depuis la mort d'Adriano Romualdi arrivent à un moment où l’on discute - peut-être même dans la confusion - sur l'identité culturelle de l'Europe. Adriano a consacré des pages denses, pleines d'enthousiasme et tout en rigueur, à la civilisation du Vieux Continent ; aujourd'hui, son intelligence – arrivée à l'âge de la maturité culturelle complète – aurait pu apporter une contribution énorme à la définition d'un concept d'Europe qui serait une synthèse de tradition et de modernité. Une contribution certainement supérieure à celle des hommes politiques qui, "pères improvisés de la Constitution", se sont consacrés pendant des semaines à ajouter ou à supprimer des lignes au "Préambule" de la Constitution européenne.

conservatore.jpgBien sûr, il n'est pas nécessaire d'imaginer ce qui aurait pu se passer si l’homme le plus prometteur et le plus valable dans la culture de droite (de droite seulement ?), engagée à l’époque dans la guerre culturelle en cours en Italie n'avaient pas été violemment fauché sur une autoroute en un mois d'août 1973. Mais il me paraît utile de penser aux aspects du travail de Romualdi qui ont été négligés au fil des années. Romualdi a laissé derrière lui un bon nombre d'intuitions, exprimées dans un langage encore jeune : elles peuvent aujourd'hui refleurir dans notre contexte. Pour Adriano, l'idée de l'Europe et la tentative d'élaborer un nouveau mythe pour le nationalisme européen représentent la voie pour sortir des impasses dans lesquelles les mouvements patriotiques (même les plus révolutionnaires) s'étaient enfermés suite aux épreuves des deux guerres mondiales.

On peut émettre la thèse qu'en 1945 toutes les nationalités européennes ont été vaincues. Non seulement les Hongrois, mais aussi les Polonais, se sont rendus aux plus brutaux de leurs oppresseurs traditionnels. Non seulement les Allemands, mais aussi les Russes, qui ont vu se consolider un régime qui était mourant en 1939 et destiné à une implosion naturelle. Non seulement les Italiens, mais aussi les Français et les Anglais, privés de leurs empires, réduits au statut de puissances moyennes. Tous les peuples européens ont été substantiellement humiliés et, pour la première fois, ont pu voir l'abîme de leur anéantissement culturel. A ce malheur extrême, Romualdi oppose un remède extrême :celui du retour à la source primordiale ; les avant-gardes politiques et culturelles de l'Europe doivent reconnaître que leurs patries particulières provenaient d'un tronc commun, bien distinct dans sa physionomie après la « haute préhistoire » (ndt : la proto-histoire). Les racines de l'Europe, en ce sens, doivent être recherchées dans une strate plus profonde que celle caractérisée par le rationalisme moderne ou le christianisme médiéval. À travers l'anthropologie, la linguistique, l'archéologie et l'histoire au sens large, le visage de la tradition européenne devrait être reconstruit en utilisant les instruments les plus avancés de la recherche scientifique.

9788861481084_0_0_626_75.jpgNous arrivons ici à un deuxième aspect fondamental de l'œuvre de Romualdi. Adriano comprend la nécessité stratégique de maîtriser le langage, les instruments, voire les conclusions des sciences occidentales modernes. En vivant avec Evola, il va acquérir un amour pour l'élément archaïque, pour ce qui, dans un passé lointain, a marqué la pureté d'une manière d'être encore incorruptible. Néanmoins, Romualdi réagit énergiquement au courant "guénonien" de la pensée traditionaliste : à cette approche d’antiquaire, et même un peu lunatique, qui, au nom de dogmes immuables, a conduit au mépris de tout ce qui avait changé dans l'histoire des dix derniers siècles, au mépris des grandes créations du génie moderne européen. Ainsi, alors que les "Guénoniens" se sont perdus dans la métaphysique arabe et ont alimenté d'interminables polémiques sur la "régularité initiatique" ou sur la "primauté du Brahmane", Adriano Romualdi veut donner une nouvelle définition au concept de Tradition.

La tradition européenne, telle que Romualdi l'entend, est quelque chose de dynamique : on y trouve le Mos Maiorum, l'héritage des valeurs éternelles, mais aussi l'innovation technologique. En substance, les anciens Indo-Européens ont fait irruption sur la scène mondiale montés sur des charsd e combat, une invention extraordinaire pour l'époque. Dès le début, les Indo-Européens se sont caractérisés par une grande capacité d'innovation technique, et leur conception spirituelle du monde conduit à attribuer une signification supérieure aux créations matérielles elles-mêmes. En Inde, les roues des chars de combat (les chakras) sont devenues les symboles des centres d'énergie vitale que le yoga recherche dans l'intériorité. En Grèce, le marteau, qui forge les armes et autres matériels, devient l'image du dieu ordonnant le Cosmos selon la conception platonique du "démiurge". Dans les missions spatiales modernes, dans l'audace investigatrice des sciences modernes, dans le style limpide des créations technologiques, Romualdi a donc découvert les fruits les plus mûrs du génie européen.

9788861481121_0_0_626_75.jpgDisons la vérité, lorsque la Nouvelle Droite française a commencé à valoriser les études de sociobiologie, l'éthologie de Lorenz et les recherches de psychologie les plus hétérodoxes, elle n'a fait que développer une impulsion déjà lancée par Adriano Romualdi. Et c’est aussi un héritage de Romualdi qui se manifeste, lorsque Guillaume Faye lance sa brillante provocation lexicale en se définissant comme « archéofuturiste ». L'Archéofuturisme de Faye propose en effet de réconcilier "Evola et Marinetti" ou les racines profondes de l'Europe et sa capacité scientifico-technologique moderne. Faye reprend, au fond, un thème notoire de Romualdi. Le lecteur de Fascisme comme phénomène européen se souviendra que Romualdi, dans le mouvement historique des fascismes, a reconnu la tentative de défendre les aspects les plus élevés de la tradition avec les instruments les plus audacieux de la modernité. En tournant son regard vers le futur proche, qui était prédit dans les années de la Contestation de 68, Romualdi a vu le risque de voir les Européens se ramollir mentalement dans leur bien-être, tombant comme des fruits trop mûrs dans les rets de peuples moins civilisés et moins vitaux (lire la préface de Correnti politiche e culturali della destra tedesca). Romualdi n'a donc jamais négligé les aspects les plus positifs de la modernité européenne et de cette société de bien-être construite à l'Ouest. Aujourd'hui, il se moquerait sans doute copieusement  de ces intellectuels qui, à droite, sont tentés d'embrasser de stupides utopies islamisantes. Romualdi voulait une Europe ancrée dans sa propre "Arkè", et en même temps moderne, innovante, à la pointe de la technologie. Une Europe dans laquelle les hommes savent idéalement dialoguer avec Sénèque et Marc-Aurèle tout en conduisant des voitures rapides, en utilisant les instruments de communication par satellite, en opérant avec des lasers. Cette image de l'Europe, esquissée en quelques années par Romualdi, reste aujourd'hui le meilleur "préambule" pour un continent ancien et pourtant toujours audacieux.

Article tiré d’Area n° 82, juillet-août 2003.

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Archeofuturism: A Vitalist Dynamism

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Archeofuturism: A Vitalist Dynamism

By Israel Lira,

Director of the Center for Crisolist Studies – Peru

Translated by Zero Schizo

«…the political and societal forms of modernity shatter; the archaic ways remerge in all political dominions, the rebirth of a conquering Islam, is a perfect example. Finally, the future alterations of technoscience –mainly in genetics–, just as the tragic return to reality which the 20th Century is preparing, will demand the return to an archaic mentality. It is modernism the one which is a passing trend. There is no need to go back to classic “traditionalism”, impregnated of folklore and dreaming of a return to the past. Modernity is already obsolete. The future has to be “archaic”, meaning, neither modern nor passing by» (Faye, 1998:15).

Following Faye’s quote, it is pretty clear that he was always diaphanous in establishing the co-substantial principles of his theoretic system, in order to avoid, precisely, that it could be confused with other theories which also have technoscience inside of their considerations. In Faye’s particular case, the universal approach for his proposal is understood under the category of vitalist constructivism[1], meanwhile his specific conceptualization under the form of the neologism archeofuturism[2]. This new doctrine has influenced a wide array of theoretic schools of thinking up to date[3], inside of the framework of anti-globalist, anti-individualist, and anti-liberal proposals, facing a post-modern world which is shown to us under the narrative of Cultural Nihilism, whose main phenomenal expressions are expressed in nihilist secularism, neoliberal globalization, hyper-individualistic narcissism and extreme cultural relativism[4].

The Central Trichotomy of Archeofuturism (TCAf)

Archeofuturism has three main theses from which we must remark, insofar as starting from these, its absolute rejection of technophobic stances (classic traditionalism and conservatism) and acritical technophile stances (technicism and transhumanism), and can be inferred as:

First Thesis (T1): Contemporary civilization which is daughter of the modernity and of egalitarianism is already fulfilling its historic cycle, and thus, «the old belief in the miracles of egalitarianism and the philosophy of progress, which affirmed that it was always possible to obtain more, has died. This angelical ideology has created a world which becomes less viable each day» (Faye, 1998: 2-3)

Second Thesis (T2): Contemporary ideologies that emerge as a symptomatic fact of the return of psycho-bio-social structures to a pre-modern state are characterized by a rejection of individualism and egalitarianism, these last ones as maximum expressions of cultural nihilism. «In order to face the future, one must be recur to an archaic mentality, meaning, pre-modern, un-egalitarian and non-humanist[5], which will restore the ancestral values of order from societies. Now, the discoveries from technoscience, particularly in the topics of biology and informatics, cannot be administered through modern humanist values and mentalities; today the geopolitical and social events are dominated by religious, ethnic, alimentary and epidemic matters. Going back to the main questions. I propose, then, a new notion, Archeofuturism, which allows us to break with the obsolete philosophy of progress and with the egalitarian, humanist and individualist dogmas of modernity, un-adapted to think of the future, and allow ourselves to survive in the century of fire and iron about to come» (Faye, 1998: 4-5).

Third Thesis (T3): The advent of a new type of scenario under a framework which is totally different from the reigning and active egalitarian world, insofar as it is clear to us that, «we have to project and to imagine the post-chaos world, the world after the catastrophe, an archeofuturist world, with radically different criteria from those of the egalitarian modernity» (Faye, 1998: 5-6).

These three central theses conform the solid core of Archeofuturism, configuring its Central Trichotomy (TCAf) as theoretical system, which is expressed as it follows:

Af = <T1, T2, T3>

Where,

Af = Archeofuturism as a theoretical proposal

T1= Thesis of the death of the mythoids of progress

T2= Thesis of the eternal return and dark enlightenment[6]

T3= Thesis of the new existential paradigm

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To the aforementioned, it is no less important to mention that, a part of Faye’s narrative must be understood inside the literary frameworks which he gives to his work in order to exemplify it and/or elaborate a sort of hypothetical projection, under the genres of utopia and dystopia, something that is seen reflected in his work Archeofuturism 2.0 (2016).

Archeofuturism and Transhumanism: an irreconcilable antagonism

In the antipodes of the TCAf, Transhumanism (H+) is presented, from what it is clearly and explicitly concluded from the works of Max More and Anders Sandberg, and the same declarations of the World Transhumanist Association[7], which reaffirm the systematization done by the quoted authors:

«Transhumanism is a class of philosophies which seek to guide us towards a post-human condition. Transhumanism shares many elements of humanism, including the respect for reason and science, the compromise with progress and the appreciation of human existence (or transhuman existence) in this life instead of a supernatural “future life”. Transhumanism differs with humanism in recognizing and anticipating the radical alterations in nature and the possibilities of our lives as the result of diverse sciences and technologies such as neuroscience and neuropharmacology, the extension of life, nanotechnology, artificial ultra-intelligence and space inhabiting, combined with a rational philosophy and a rational system of values» (More, 1990).

In that same vein: «Philosophies of life which search for the continuation and acceleration of the evolution of intelligent life beyond their actual human form and its human limitations through science and technology, guided by principles and values which promote life» (More in Sandberg, 2001).

From the above it is exposed, clearly, literally and explicitly that, transhumanism is found in the logical narrative of modernity, insofar as it means the continuation and expansion of the philosophy of lineal progress understood as indefinite perfectibility of the human genre which does not admit any recession whatsoever (Canguilhem, 1999:669), it is this neuralgic principle of transhumanism and the one which its entire proposal is built on, quid that the very same history of science has debunked[8] and which is shown to be antagonistic to the Central Trichotomy of Archeofuturism (TCAf).

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Very contrary to modernity’s idea of lineal progress, Archeofuturism puts an idea of synergic movement in front of it, which is more integral, a vitalist dynamism, «insofar as Archeofuturism rejects all idea of progress. Because everything that proceeds from the worldview of a people has to be founded over immemorial bases (even though the forms and formulations vary), and because from 50 000 years ago, homo sapiens has changed very little, and also because the archaic and pre-modern models of social organization have given proof of their efficiency. To the false idea of progress, we must oppose the idea of movement» (Faye, 1998:89).

From the exposed above it can be reaffirmed that, Archeofuturism has no flirting nor inclination with the theoretical system of contemporary transhumanism, as Michael O’Meara[9] (2013) sees minimally and in a more explicit way by Roberto Manzooco[10] (2019), and this thought system can’t neither be considered a conservative branch of transhumanism (conservative transhumanism), which is worse. To affirm the latter one can only find an explanation in a totalitarian pretension of international transhumanism in monopolizing any project which would make allusion to the use of technologies for the betterment of the quality of life and of human condition, initiatives that had been present ever since the Industrial Revolution, given that, just as with any theoretical system, the ideas that served for it as its basis the first of these related thoughts can be traced, such as is portrayed in the works of Hughes (2002) and Bostrom (2005). But from there, it cannot be inferred that any idea which advocates on behalf of using technologies for the betterment of the quality of life and the human condition, is per se, transhumanist, such as it is countersigned by, once again, the transhumanists themselves, insofar as – the H+ – has some particularities which differentiate it as a philosophy and as a theoretical proposal, precisely, for example from the futurist thought (artistic and technological) and from the technoscientific utopianism.

The term transhumanism does not appear until 1957 by the hand of the biologist Julian Huxley, such as the term «transhuman» in the year 1966 in the mouth of American futurist F. M. Esfandiary, not being able to properly speak of transhumanism until the systematization established by the World Transhumanist Association (WTA) founded by Nick Bostrom in order to not fall into a semantic and methodological anarchy, otherwise transhumanism would delude itself into imprecision, insofar as «…the affirmation that it is ethical and desirable to employ technoscientific means to fundamentally better the human condition… (…) is just the lowest common denominator of transhumanism and can be adopted, and adapted to its own needs, by the majority of political ideologies, excluding the bio-conservative and neo-ludist ones. (…) The founders of modern transhumanism, conscious of these risks, tried to pin down the Central Axis of Transhumanism (CAT) to concepts like respect of the individual, liberty, tolerance and democracy, remarking that transhumanism’s roots are found in the enlightenment, in humanism and liberalism. The extropians have gone even further, trying to pin down the CAT to concepts such as spontaneous order to the principle of the open society later…» (Estropico, 2009). However, in praxis, it is clear that this pinning down was not completely successful, given that up to date, and as it has been seen, it is not necessary to agree with transhumanism in order to claim that through technoscience the quality of life and human condition can be bettered. This imperative teleological and categorical precision is shared by the WTA to the effects of not falling in, that which they call the racialist and eugenicist futures of fascisms[11] or technoscientific utopianisms of classic socialism.

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It is clear then, that transhumanism and its marginal currents (extropianism, techno-progressivism, singularitanism, transfigurism, etc), up to today, are configured into the antithesis of the archeofuturist proposal. If there is any similarity between Transhumanism and Archeofuturism it is in that denominator so weak that, as it has been exposed, it is not exclusive of transhumanism and which can be also manifested in pre-cautionist currents[12] which are antagonistic to H+, such as our present case.

The mythoid of the Fourth Industrial Revolution

Faye himself is the one who remarks all which is exposed in this article*, in a short essay published in his very same blog on May the 23rd of 2016[13], that shares a lot of similarities to the recent commentaries which Mario Bunge[14] has brought regarding the topic[15], given that it encompasses transhumanism inside of the quadrant of almost-religious reactions product of the faith in the idea of progress and lineal development, as symptomatic fact of a worldwide economic collapse which is soon to come:

«Forced optimism, pretty irrational, about the “new numeric economy”, with big data, blockchain, 3D printing, “transhumanism”, etc. Which preface a “fourth industrial revolution” and a new worldwide economic paradigm (and paradise), shows probably just utopia and self-convincing. And believing in miracles».

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In the same manner, Faye judges that the Fourth Industrial Revolution is more a mythoid derived from a magical thought than from rational one[16]:

«The first industrial revolution, from the beginnings of XIX Century, was organized around the vapor machine, the second (by the end of the XIX Century) around electricity, the third around the computer (mid XX Century). The Fourth Industrial Revolution (by the beginning of the XXI Century), result of the last two, the electric and electronic one, would refer to the generalization of Internet and universal digital connections throughout the web. The concept of the “4th Industrial Revolution” was born after the Fair of Hannover in 2011, where the birth of the “connected factory” has been celebrated; the last one, totally “connected to the web” and directly connected to clients, is robotic and employs less workers each time. The abstract expression “Industry 4.0” was born. This is a very void concept: “Industry 5.0” when? The neo-romantic gurus of this “4th Industrial Revolution” is –as it was pointed out previously– professor Klaus Schwab, founder and leader of the Global Economic Forum of Davos… The conference of January of 2016 is dedicated to the 4th Industrial Revolution. In the agenda: artificial intelligence, robotics, linked objects, nanotechnologies, “revolutionary” innovations, why not? What is interesting at the same time but comic all the same, is that the media, without backing down, has taken his word on the conclusions (more ideological than scientific) from this Davos Forum. No one asked what concrete improvements has brought this miraculous digital economy parallel to the detriment of the global situation. The migratory invasion destabilized Europe, augmented the Islamic Jihad, the collapse on oil prices, the global acceleration of every kind of contamination, were not up for discussion. The “digital revolution” is supposed to resolve all problems. It is the belief in miracles, which is more a magic thinking than a rational reflection.

(…)

The prophecies about the revolution of digital economy, with its favorite words, cloud, big data, transhumanism, etc, now belong to a Nano-scientific ideology which runs the risk of leading to terrible delusions. Now, this non-stopping techno-scientificism, as that of the end of the XIX Century, coexists, curiously, between itself, and an anti-ecological progressivism. It is so stupid as the theories of decrease: it is the same extremism».

Archeofuturism and Crisolism

Archeofuturism, according to what we have seen, is a balanced stance, which integrates dialectically two categories: Archaism and Futurism. It is a theory critical of modernity, but also of tradition.

The Fayean legacy is the basis of a Peruvian Archeofuturism under the framework of the Crisolist Theory, which foresees a harmony between the traditional vision of diverse ethnicities which conform Peruvianess and the idea of a synergic technoscientific and socio-economic harmonic movement, without affecting the existential spaces of, for example, Andean and Amazonian communities, in the face of the dangers of an ideal of undefined progress portrayed in an instrumentalist vision of nature, which up to date has only left: illegal mining in Madre de Dios, collapse of mining tailings in Ancash, oil spilled in the Amazonas, depredation of ecological reserves such as Chaparrí, increasing the risk of extinction of endangered species, and exacerbated deforestation which determined the loss of 164,662 hectares of the Amazonian rainforest in 2016, which put in danger a healthy and balanced environment.

Archeofuturism then, is not the hidden misanthropy of transhumanism, fed by the idea of undefined progress, that hates the common human being, limited by his biological weaknesses. Archeofuturism is not, and will never be, conservative transhumanism either. Archeofuturism is the reaffirmation of an authentic love to the original human potentiality as such, insofar it is conscious that, the modern idea of progress, such as was denounced by Rousseau (1750), generates materially rich and technically powerful beings, but morally disgusting.

Bibliography

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FAYE, Guillaume. (1998). «La Colonización de Europa: discurso verdadero sobre la inmigración y el islam». Editorial Libropolis.

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SANDBERG, Anders. (2001). «Transhuman Terminology Sub-Page».

O’MEARA, Michael. (2013). «Guillaume Faye and the battle of Europe». Editorial Arktos.

MANZOCCO, Roberto. (2019). «Transhumanism: engineering of the human condition. History, Philoshopy and Current Status». Springer.

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ROUSSEAU, Jean-Jacques. (1750). «Discurso sobre las ciencias y las artes».

Notes

[1]«…que es un cuadro de pensamiento global que alía la concepción orgánica e hipotética de la vida con las visiones del mundo complementarias de la voluntad de poder nietzscheana, del orden romano y de la sabiduría realista helénica. Leitmotiv: “un pensamiento voluntarista concreto, creador de orden» (Faye, 1998:25).

[2]«Pensar conjuntos, para las sociedades del futuro, los descubrimientos de la tecnociencia y la vuelta a las soluciones tradicionales e inmemoriales. Tal es quizás el nombre verdadero de la posmodernidad, lejos del pasadismo y del culto estúpido de lo “actual”. Reunir, según la lógica del “y”, y no del “o”, la memoria más antigua y el alma faústica, pues pueden combinarse perfectamente. El tradicionalismo inteligente es el futurismo más potente, y a la inversa. Reconciliar Evola y Marinetti. Es el concepto de “modernidad”, nacido de la ideología del Aufklärung, el que debe ser desechado. No se tienen que asociar los Antiguos a los Modernos, sino los Antiguos a los Futuristas» (Faye, 1998:25-26).

[3] «La aportación del neo-eurasismo es precisamente ésa: la de situarse en la reacción mundial frente a la globalización. El neo-eurasismo transforma la especificidad rusa en “un modelo universal de cultura, en una alternativa al globalismo atlantista, en una visión también global del mundo”. El neo-eurasismo retoma así uno de los rasgos más genuinos del pensamiento tradicional ruso: su carácter escatológico y mesiánico. El eurasismo deviene un arqueofuturismo, una “apología de la barbarie” que no duda en afirmar que, ante los estragos del desarrollismo occidental y el futuro postindustrial de nuestras sociedades, el “arcaísmo” de Rusia constituye en realidad una ventaja. Ante los obstáculos insalvables, los bárbaros prefieren siempre cortar el nudo gordiano. Tal vez sea en las estepas de Eurasia donde se resuelva el destino de la modernidad. En el Heartland de los geógrafos, en el corazón de la Isla mundial» (Erriguel, 2015:5). Disponible en: https://4tpes.wordpress.com/2015/11/02/rusia-metapolitica...

[4] «In metapolitical terms, Jorjani’s work represents yet another – very substantial – breach in the dominant Post-Modern ideological discourse of Cultural Nihilism, which is characterized by secular nihilism, globalist neoliberalism, narcissist hyperindividualism and extreme cultural relativism. Metapolitically, Jorjani’s work can be located in the – admittedly rather vague – spectrum of ‘Archaeo-Futurism’, a philosophical school historically related to what is most ironically termed the ‘Dark Enlightenment’. Both terms are essentially misnomers, most frequently applied in a disparaging way by ideological critics of the supposedly ‘anti-democratic’ and ‘reactionary’ thinkers and movements that they are meant to cover – but these terms are nonetheless useful as provisional markers. From a Traditionalist perspective, both movements are – inevitably, given of their Post-Modern subsoil – ideological hybrids. They tend to engage with particular aspects of Modernity (technological achievement, scientific exploration, futurist aesthetics) while rejecting its nihilistic, materialistic and relativistic ideologies and attitudes. It would be more accurate to say that these movements tend to be interested in ‘timeless’, rather than ‘archaic’ alternatives to these ideologies and attitudes. They tend to reject the Enlightenment premises of Modernity precisely because they associate these premises with spiritual and intellectual darkness rather with light. In this regard, Archaeo-Futurism and the Dark Enlightenment share considerable ground with Traditionalist thought, which views the Modern Age as the equivalent of a cosmic Dark Age (the Christian ‘End Times’, the Hindu ‘Kali Yuga’, the Spenglerian ‘Winter Time’). They differ from Traditionalism, however, in as far as their metapolitical discourse tends to be operational: it provides a basis not only for activist consensus-breaking, but also for revolutionary politics. In other words, Archaeo-Futurism and the Dark Enlightenment have the potential to expand into fully operational socio-political ideologies and into effective political programs. This potential is visible in the manifold crossovers from Archaeo-Futurist and Dark Enlightenment thought into the Western identitarian movement». Disponible en: https://www.geopolitica.ru/en/article/archaeo-futurist-re...

[5] Cuando Faye hace referencia a un rechazo al humanismo, no se refiere a cualquier humanismo, sino específicamente al que surge a fines de la Edad Antigua y el resto de la Edad Moderna, al que diferencia del humanismo clásico helénico con el que si se muestra conforme: «Esta philia helénica se opone evidentemente a los preceptos evangélicos impracticables del “todos los hombres son mis hermanos”. La philia helénica es humanista, porque es inegualitaria, jerarquizada, conforme a la naturaleza. Prefiero mi hermano de sangre al extranjero, pero jamás desearé hacer mal al extranjero pacífico. Y él actuará del mismo modo que yo, en su propia comunidad, en su país. El humanismo inegualitario respeta el orden natural; no miente. El humanitarismo igualitario y utópico miente. Desemboca en la tiranía, en este infierno pavimentado de buenas intenciones» (Faye, 2001).

[6] Categoría antitética de la Ilustración antropocéntrica. Si la Ilustración en el siglo XVIII significó el asentamiento de la fe en el progreso infinito y en la razón instrumental como único criterio de aproximación a la realidad, la Ilustración oscura representa el rechazo de la idea del progreso lineal, anteponiendo la idea de movimiento sinérgico y de la visibilización del carácter multívoco del conocimiento humano, en donde su forma racional conceptual es solo una de sus manifestaciones últimas y la más compleja ciertamente, pero no la única, bajo la teoría de la tres grandes racionalidades del filósofo peruano Gustavo Flores Quelopana que sostiene que la racionalidad es universal, como aptitud innata del género humano que trasciende el tiempo y que se ve manifiesto en todas las épocas de la humanidad, a través de 3 grandes manifestaciones, la de carácter empiriocrática(basada en lo sensible), mitocrática (basada en lo mítico) y logocrática (basada en los conceptos). Dado que la racionalidad bajo la forma de logos es solo una de las manifestaciones de la psique humana, es por ello que hasta el día de hoy la racionalidad de sustrato mítico como la racionalidad de sustrato sensible, subsisten y conviven, el logos no ha reemplazado a lo sensible, el mito no ha reemplazado al logos. El hombre en lugar de reducir su racionalidad, solo la ha ampliado y perfeccionado. «Si se buscan los orígenes del mito se descubre siempre sólo etapas de diferentes formas de afirmación racional del ser y de la vida. No hay mito pre-racional arcaico y, en consecuencia, ningún camino que conduzca del mito al Logos: ‘sólo hay -como dice Hans Blumenberg- una racionalidad y simbolización cambiante en el curso del tiempo. Lo que cambia es únicamente la percepción de la realidad a través del hombre’» (Peña Cabrera, 1994). La Ilustración por ello configura un reduccionismo logocrático y antropocéntrico mientras que la Ilustración oscura –semántica reaccionaria al siglo de las luces– propone un holismo gnoseológico más integral y sistémico.

[7] «Transhumanism is a way of thinking about the future that is based on the premise that the human species in its current form does not represent the end of our development but rather a comparatively early phase.

Transhumanism is a loosely defined movement that has developed gradually over the past two decades. “Transhumanism is a class of philosophies of life that seek the continuation and acceleration of the evolution of intelligent life beyond its currently human form and human limitations by means of science and technology, guided by life-promoting principles and values.” (Max More 1990)

Humanity+ formally defines it based on Max More’s original definition as follows:

(1) The intellectual and cultural movement that affirms the possibility and desirability of fundamentally improving the human condition through applied reason, especially by developing and making widely available technologies to eliminate aging and to greatly enhance human intellectual, physical, and psychological capacities.

(2) The study of the ramifications, promises, and potential dangers of technologies that will enable us to overcome fundamental human limitations, and the related study of the ethical matters involved in developing and using such technologies.

Transhumanism can be viewed as an extension of humanism, from which it is partially derived. Humanists believe that humans matter, that individuals matter. We might not be perfect, but we can make things better by promoting rational thinking, freedom, tolerance, democracy, and concern for our fellow human beings. Transhumanists agree with this but also emphasize what we have the potential to become. Just as we use rational means to improve the human condition and the external world, we can also use such means to improve ourselves, the human organism. In doing so, we are not limited to traditional humanistic methods, such as education and cultural development. We can also use technological means that will eventually enable us to move beyond what some would think of as “human”». Disponible en: https://humanityplus.org/philosophy/transhumanist-faq/

[8] «Pero resulta todavía más irónico que la historia de la ciencia fuese a destruir la imagen lineal del progreso científico mediante el replanteamiento de esa propiedad postulada para la línea recta de no admitir más que una paralela trazada por cualquier punto fuera de ella. Dado que las simulaciones de revolución en geometría euclidiana, ensayadas por Saccheri y Lambert, han sido ignoradas por sus contemporáneos matemáticos, los filósofos del siglo XVIII desconocían la idea, hoy banal, de la fecundidad teórica del No. Todavía más que la geometría no euclidiana, la mecánica no newtoniana ha contribuido a introducir en la historia de las ciencias la idea de rectificación dialéctica. El progreso continuo es un concepto de epistemología conservadora. Quien anuncia el progreso hace del hoy un mañana. Ahora bien, solamente es mañana cuando podremos hablar del día anterior. En cuanto a la crisis de las nociones fundamentales de la geometría y del análisis, a principios del siglo XIX, y la utilización de los números complejos y de las series infinitas, Jean Cavaillès escribió, «los resultados obtenidos gracias a los nuevos instrumentos son los que llevan a transformar todo el sistema matemático: modelos no euclidianos y geometría proyectiva construidos con la ayuda de los números complejos, teorías de las funciones arbitrarias representadas por series trigonométricas…, las matemáticas reales iniciales no son más que un caso particular, situado en el seno de las nuevas matemáticas y explicado por ellas mismas» (Canguilhem, 1999:675).

[9]«What are the problems in Faye’s vision? From my admittedly parochial perspective (‘I should be dissatisfied in Heaven’), there are four major ones. The first has to do with his understanding of archeofuturism, which tends to emphasize the futuristic at the expense of the archaic. Dismissing (at time disdaining) Traditionalist and Heideggerian reservations about technology, Faye favors numerous techno-scientific tendencies he thinks necessary to European survival Foremost of these are nuclear power, genetic engineering, and a more general inclination to what is called ‘transhumanism’. This ‘ism’ favors transforming the human condition by developing technologies that enhance human capacities and overcome human limitations. I find this ‘transhumanism’ potentially nihilistic, not only from the perspective of a ‘Christian-European rationality’, which distrusts man’s ability to improve on nature (for ‘the sleep of reason brings forth monsters’), but also from a metahistorical perspective that sees the techno-scientific basis of our sensate culture as having fixated on theories of truth that grasp only a narrow aspect of human reality and consequently dismiss the most important things» (O´meara, 2013: 18).

[10]«We have said before that Transhumanism can be mixed with any kind of ideology that accepts its principles; this applies, above all, to progressive ideologies, but not excusively. This is the case, for example, of Italian “Superhumanists”, who refer to the Nouvelle droite by Alain De Benoist , to the thought of Giorgio Locchi and to the Archeofuturism of Guillaume Faye- essentially to the radical right» (Manzocco, 2019:45).

[11] «WTA STATEMENT ON RACIALISM

Any and all doctrines of racial or ethnic supremacy/inferiority are incompatible with the fundamental tolerance and humanist roots of transhumanism. Organizations advocating such doctrines or beliefs are not transhumanist, and are unwelcome as affiliates of the WTA. (adopted 02/25/2002)».

[12] «la política futura se estructurará en función de la actitud de cada cual hacia las antropotecnias. Los ejes tradicionales, izquierda-derecha, o conservadores-liberales, quedarán obsoletos y serán sustituidos por el eje precaucionistas-proaccionistas (precautionaries-proactionaries) (Fuller y Lipinska, 2014), valgan los neologismos. Los unos defenderán un uso restringido o nulo de las antropotecnias, mientras que los otros abogarán por la implantación irrestricta, o casi, de las mismas. Y el TH ya ha tomado posición en el debate: lidera las propuestas más favorables a las antropotecnias, es decir, a la intervención técnica profunda sobre el propio ser humano. El objetivo declarado de esta intervención consiste en lograr la llamada mejora humana (human enhancement)» (Marcos, 2018:109).

[13] «L’optimisme forcé, assez irrationnel, sur la ”nouvelle économie numérique”, avec le big data, la blockchain, l’impression 3D, le ”transhumanisme”, etc. qui préfigureraient une “quatrième révolution industrielle” et un nouveau paradigme (et paradis) économique mondial, relève probablement de l’utopie et de l’auto persuasion.  Et de la croyance aux miracles» (Faye, 2016). Disponible en: http://www.gfaye.com/vers-un-crash-economique-mondial/

[14] Físico, epistemólogo y filósofo de la ciencia argentino. Sus obras son internacionalmente reconocidas en el mundo de la ciencia. Sentó las bases de su propio sistema teorético bajo el nombre de hylerrealismo o realismo científico, también ha sido uno de los principales propulsores de la lucha contra las modas intelectuales, dentro de estas últimas el transhumanismo.

[15] «El transhumanismo es un cuento, y tal vez una religión solapada» (Bunge, 2019).

[16] «Le mythe de la ”quatrième révolution industrielle”.

La première révolution industrielle – début du XIXe siècle– s’organisait autour de la machine à vapeur, la deuxième (fin du XIXe) autour de l’électricité, la troisième autour de l’informatique (milieu XXe). La quatrième révolution (début XXIe), issue des deux dernières, l’électrique et l’électronique, concernerait la généralisation d’Internet et des connections universelles numériques par le web. Le concept de « 4e révolution industrielle » est né après la foire de Hanovre en 2011, où l’on a célébré la naissance de l’ ”usine connectée” ; cette dernière, entièrement ”webisée” et branchée directement sur les clients, est robotisée et emploie de moins en moins de salariés. On a créé l’expression abstraite d’ ” industrie 4.0”. C’est un concept assez creux : à quand, l’ ”industrie 5.0” ?

Un des gourous néo-romantiques de cette « 4e révolution industrielle » est – comme indiqué plus haut – le Pr. Klaus Schwab, fondateur et animateur du forum économique mondial de Davos. Le colloque de janvier 2016 a été consacré à la 4e révolution industrielle. Au programme : l’intelligence artificielle, la robotique, les objets connectés, les nanotechnologies, des innovations « révolutionnaires ». Pourquoi pas ? Ce qui est à la fois intéressant mais par ailleurs comique, c’est que tous les médias, sans aucun recul, ont cru sur parole les conclusions (idéologiques plus que scientifiques) de ce forum de Davos. Personne ne s’est posé la question de savoir quelles améliorations concrètes apportait cette miraculeuse économie numérique qui est pourtant parallèle d’une dégradation de la situation mondiale. L’invasion migratoire qui déstabilise l’Europe, la montée du djihad islamique, l’effondrement des cours du pétrole, l’accélération planétaire de tous les types de pollution ne furent pas des sujets abordés. La ”révolution numérique” est censée résoudre tous les problèmes. C’est la croyance aux miracles, qui relève plus de la pensée magique que de la réflexion rationnelle.

Le néo–scientisme et l’écologisme

Les prophéties sur la révolution de l’économie numérique, avec ses mots fétiches, cloud,big data, transhumanisme, etc, appartiennent à une idéologie néo–scientiste qui risque de déboucher sur des désillusions terribles. Or, ce néo-scientisme sans prise de recul, comme celui de la fin du XIXe siècle, cohabite curieusement, chez les mêmes, avec un anti–progressisme écologiste. Il est aussi stupide que les théories de la ”décroissance : il relève du même extrémisme.

Ce romantisme néo-scientiste est l’exact pendant de celui de la fin du XIXe siècle – relisez Jules Vernes et Victor Hugo – où l’on s’imaginait l’avenir en rose sous l’influence du concept magique et au fond peu rationnel de ”Progrès”. À la fin de son poème La légende des siècles, Victor Hugo brossait une vision idyllique du XXe siècle.

Les erreurs des pronostics technologiques sont une habitude. Jules Vernes prévoyait qu’en 1960, les habitants des villes se déplaceraient en engins volants individuels. Mais il n’avait pas prévu l’automobile. Et, dans les années 60, on pronostiquait des bases humaines nombreuses sur la Lune et sur Mars, astronomiques et d’extraction minière, la généralisation des transports aériens supersoniques et hypersoniques stratosphériques ainsi que la diffusion de l’énergie de fusion nucléaire. Bien des pronostics sur le futur de la ”révolution numérique” relèvent probablement des mêmes erreurs utopiques de jugement.

L’utilité marginale déclinante de l’économie numérique

Le téléphone, l’électrification, le chemin de fer et l’automobile, l’aviation comme la radio et la télévision, la pénicilline, l’anesthésie, etc. ont été des bonds technologiques énormes, de par leurs conséquences, bien plus qu’Internet ou l’économie numérique. Le binôme numérique/ informatique offre moins de facilités qu’on ne croit ; parce qu’il complique les processus autant qu’il ne les simplifie. Les innovations technologiques de la ”révolution numérique” ne répondent pas dans la pratique quotidienne, à leurs promesses. Elles sont inférieures en terme d’avantages marginaux aux innovations des précédentes mutations techno–industrielles» (Faye, 2016). Disponible en: http://www.gfaye.com/revolution-numerique-miracle-ou-impo...

 

Translator’s Note:

*This short essay is also available in his book “Why We Fight” (Arktos, 201), see Chapter 2: Preliminary Elements, The Imposture of the ‘New Economy’.

 

Source:

https://www.facebook.com/notes/israel-lira/arqueofuturism...

Also available at:

https://www.academia.edu/39811541/Arqueofuturismo_un_dina...

https://archive.org/details/arqueofuturismoundinamismovita...

mercredi, 06 janvier 2021

Robert Steuckers: entretien au journal slovène "Demokracija"

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Robert Steuckers: entretien au journal slovène "Demokracija"

Sur la révolution conservatrice, la géopolitique et l'état de la Belgique

Propos recueillis par Andrej Sekulovic

Vous avez écrit deux volumes d’articles et d’essais sur le mouvement allemand de l’entre-deux-guerres que l’on a appelé la « Révolution conservatrice ». Pourriez-vous nous brosser un bref survol de ce mouvement et de ses principaux penseurs et dites-nous de quelles façons ce mouvement a influencé la « nouvelle droite » et vous-mêmes ?

Même si je brossais un « bref survol », comme vous dites, de la révolution conservatrice ou du mouvement folciste (= völkisch), j’aurais besoin d’une bonne centaine de page. Au moins. Cela excéderait le cadre de notre entretien. Mais pour faire bref, il faut tout de même rappeler que Theodor W. Adorno, l’une des figures de proue les plus emblématiques de l’Ecole de Francfort, laquelle est considérée, à juste titre, comme le contraire philosophique absolu de la « révolution conservatrice », a admis, un jour, que les critiques incisives, formulées par les meilleurs auteurs de cette « révolution conservatrice » à l’encontre des systèmes politiques wilhelminiens et weimariens et à l’encontre des philosophies implicites qui les sous-tendaient, étaient souvent plus pertinentes, plus profondes, que les critiques de la gauche, dans l’orbite de laquelle Adorno entendait inscrire son combat. Adorno ajoutait qu’il fallait impérativement se demander pourquoi ces critiques étaient plus percutantes que tout l’attirail para-marxiste des gauches, saupoudré ou non d’élucubrations psychanalytiques ou de spéculations zozo-sexuelles.

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Georg Simmel.

La « révolution conservatrice », en règle générale, car il ne faut pas omettre de penser l’extrême hétérogénéité de cet impressionnant ensemble d’auteurs, repose sur un sentiment aigu du déclin de notre civilisation, devenue trop matérialiste, trop procédurière, trop affectée par des routines devenues incapacitantes au fil du temps : cette idée se retrouve chez un sociologue/philosophe un peu oublié dans la mouvance néo-droitiste actuelle, Georg Simmel. Celui-ci insistait sur l’ossification inéluctable des « procédures » et des « procédés » nés dans la foulée de l’industrialisation généralisée de l’Europe à partir de la seconde moitié du 19ème siècle. Ces procédures et procédés avaient tous eu des départs fulgurants et prometteurs, constituaient l’annonce d’une modernité heureuse et rationnelle en advenance, mais avaient fini par s’enliser dans des routines qui empêchaient l’éclosion de nouvelles forces régénératrices. Les productions juridiques, institutionnelles et administratives de l’idéologie libérale progressiste finissaient donc par produire des encrôutements délétères, qui bloquaient tout progrès, toute décision, toute résolution des problèmes accumulés et engendraient, volens nolens, une régression généralisée, posant par là même un sérieux problème de légitimité (démocratique ou non).

Les sociétés, d’abord la wilhelminienne ou l’austro-hongroise avant 1914, ensuite la République de Weimar après le Traité de Versailles de 1919, en étaient arrivées à vivre sous une croûte étouffante de règles et de rigidités, de lourdeurs conceptuelles économicistes et déculturantes, de faux principes politiques et d’engouements faussement moralisateurs, croûte in fine parfaitement bloquante, qui empêchait de résoudre les terribles problèmes de l’heure, l’inflation galopante et l’obligation de nourrir la France par les réparations pharamineuses exigées à Versailles. Ces idées de Simmel, sur les blocages de la société dite « rationnelle », ont précisément influencé l’Ecole de Francfort, à partir de sa fondation en 1926. Consolidée par la vision noire et tragique de Spengler, penseur du déclin de l’Europe et de l’Occident tout entier, les « révolutionnaires conservateurs » vont cesser de croire à toutes les idéologies du progrès et à concevoir leurs actions (politiques ou métapolitiques) comme « kathékoniques » (prenant pour modèle le Kathekon de l’Apocalypse qui combat sans cesse pour retarder la chute finale). Les tenants de l’Ecole de Francfort vont, eux, chercher à sauver le progrès et à imaginer des formes de combat métapolitiques et politiques alternatives, basées sur d’autres agents révolutionnaires que les masses ouvrières. Leurs dernières émules enclencheront le processus de déliquescence à la fin des années 1960, processus que nous voyons se parachever aujourd’hui avec les folies festivistes et gendéristes que refusent aujourd’hui de traduire en pratiques sociales obligatoires les gouvernements polonais et hongrois. La modernité progressiste a donc eu deux chances historiques qu’elle a galvaudées : la première avant 1914 ; la seconde en deux temps, après 1945 et surtout après les révoltes des années 1967-68, annonçant l’ère du festivisme, que l’on espérait vecteur d’un bonheur inusable et éternel. Nous déchantons aujourd’hui, d’autant plus que ces fadaises idéologiques se sont couplées à une monstruosité socio-économique, le néolibéralisme, tout aussi antipolitique que les obsessions, sexuelles et autres, d’un Cohn-Bendit. Nous voyons aujourd’hui à l’œuvre la collusion catastrophique de ces fadaises et de cette monstruosité.

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L’idée spenglérienne de déclin sera accentuée par la défaite militaire allemande de 1918, par les conditions humiliantes du Traité de Versailles de juin 1919 et par l’incapacité des gouvernements successifs de la République de Weimar d’assurer l’ordre dans les rues, de protéger le peuple contre les effets des crises économiques et financières, etc. Parallèlement à la sinistrose que généraient, dans la société allemande, l’idée de déclin, de plus en plus répandue, et l’effondrement de la monnaie dû en grande partie à l’obligation de payer des réparations à la France, les groupes où oeuvrait notamment Arthur Moeller van den Bruck acquièrent l’idée que la défaite n’était pas seulement le résultat des actions lancées par les armées alliées occidentales contre l’armée impériale allemande mais aussi à l’inadéquation des institutions wilhelminiennes, une inadéquation que répètent les démocrates libéraux de la République de Weimar, quoiqu’au nom d’autres inepties idéologiques. Dans ses articles, Moeller van den Bruck va alors vulgariser ses idées en maniant les catégories de « jeune » (jung) et de « vieux/vieille » (alt). Est « jeune », ce qui recèle encore en soi des potentialités, de la fécondité créatrice sur le plan politique. Est « vieux » ce qui demeure passif sous la croûte des institutions figées, de ce qui répète des « ritournelles » infécondes. Transposée aujourd’hui, cette distinction, utilisée jadis par Moeller van den Bruck dans ses polémiques, décrèterait « vieux » le fatras libéral et soixante-huitard, qui conduit à l’impasse et à la crise permanente (comme sous la République de Weimar), et « jeune », tout ce qui se coagulerait dans un « pôle de rétivité » hostile à cet insupportable fatras.

carl_schmitt.jpgCarl Schmitt, dans le contexte de la République de Weimar plutôt que dans, celui, plus idéologique et polémique, de la révolution conservatrice, forge deux concepts à retenir : celui de la « décision » (Entscheidung), de la capacité et de la volonté de décider la politique à suivre (et même la guerre à mener) ; la « décision », avec la désignation de l’ennemi, sont dès lors les fondements même du politique, de l’essence du politique. La politique dans l’optique de Schmitt n’est constituée que par la gestion quotidienne et les débats sans grand relief des assemblées plus ou moins représentatives, en temps normaux. Quand il y a « état d’exception » ou « état d’urgence », quand la Cité est menacée, il faut décider, vite, sans débat, sans perte de temps. Ensuite, après avoir été sévèrement critiqué par des instances nationales-socialistes et s’être retiré de certains postes auxquels il avait été nommé, Schmitt a théorisé sa notion de « Grand Espace » (Grossraum), parallèlement à celles que formulaient à la même époque les diverses écoles de géopolitique actives en Allemagne, dont celle de Karl Haushofer. L’Europe, autour de son centre allemand, autour du territoire qui fut jadis celui du Saint-Empire Romain de la Nation Germanique, devait s’unir, gérer de concert son très grand appendice colonial africain et en interdire l’accès à toute puissance extérieure à ce double espace européen et africain. Pour Schmitt, c’était la notion de « Interventionsverbot raumfremder Mächte », visant à interdire toute intervention de puissances extérieures à l’espace européen dans l’espace européen et dans les espaces adjacents contrôlés par les Européens. Le modèle historique du raisonnement de Carl Schmitt, modèle en quelque sorte a contrario, était la proclamation en 1823 du Président américain Monroe qui posait comme axiome de la politique étrangère nord-américaine l’interdiction systématique de toute intervention européenne dans le Nouveau Monde, suite à l’éviction de l’Espagne hors de son empire ibéro-américain. Ne restaient présents en Amérique que les Russes en Alaska et en Californie (jusqu’en 1842) et les Britanniques au Canada. L’européisme grand-spatial de Schmitt complétait la vision triadique (Allemagne + Union Soviétique + Chine) des nationaux-révolutionnaires et nationaux-bolcheviques allemands. J’ai souligné, dans le principal essai du deuxième volume que j’ai consacré à la « révolution conservatrice », l’importance de cette volonté nationale-révolutionnaire de créer une vaste synergie germano-soviéto-chinoise dans les années 20 du siècle passé, jusqu’en 1933, année où les nationaux-socialistes s’installent dans tous les rouages du pouvoir. Le principal exposant de cette triade, eurasiste avant la lettre et avant la réanimation de ce concept par Alexandre Douguine en Russie actuelle, fut Richard Scheringer, dont la revue Aufbruch, disponible en facsimile, nous révèle des options géopolitiques et géostratégiques intéressantes qui ont, tout compte fait, un impact sur l’actualité. Les nationaux-révolutionnaires allemands entendaient prendre le pouvoir en Allemagne suite aux crises récurrentes que connaissait la République de Weimar ; pour eux, ces crises annonçaient une fin inévitable et catastrophique, générant un chaos passager auquel les anciens soldats de la Grande Guerre allaient mettre un terme, en renvoyant les politiciens falots dans leurs foyers ou… en règlant définitivement leur compte...

479.jpgLe Général H.  von Seeckt.

Les communistes, qu’ils percevaient au départ comme leurs alliés, étaient au pouvoir en URSS. Le parti dominant en Chine était le Kuo Min Tang de Tchang Kai Tchek, visant l’établissement d’un pouvoir militaire moderniste. Le Kuo Min Tang recevait l’appui de militaires allemands, dont le célèbre Général von Seeckt et le futur gouverneur militaire de la Belgique occupée von Falkenhausen. La Reichswehr résiduaire s’entraînait en URSS. Scheringer et aussi les frères Jünger, Hielscher et Niekisch souhaitaient la constitution de cette grande Triade eurasienne, capable d’attirer dans son orbite la Turquie kémaliste, l’Iran du premier Shah de la dynastie Pahlavi et les nationalistes indiens en révolte contre le colonialisme britannique. Aujourd’hui, l’inféodation de l’Allemagne (et du reste de l’Europe) dans l’américanosphère est un échec, ne peut plus conduire qu’à l’enlisement de notre continent et de notre civilisation. Le système Merkel conduit l’Allemagne à l’implosion et au ressac économique, face auxquels les crises de Weimar seront bientôt considérées comme des vaguelettes sans grande ampleur. Mais les principaux clients de l’Allemagne, qui la maintiennent à flot de nos jours, sont la Russie de Poutine, qui lui fournit le gros de son énergie, et la Chine de Xi Jinping, qui est son principal partenaire commercial. Inéluctablement, la Triade, eurasisme potentiel, est de retour. Scheringer avait vu juste.

La « nouvelle droite », surtout dans son expression parisienne, n’a pas vraiment embrayé sur les questions géopolitiques. En fait, c’est une de ces sectes intellectuelles parisiennes, avec tout ce que cela comporte de ridicule et de déplaisant. Je ne peux plus m’identifier à ce type de cénacle. Guillaume Faye déplore d’ailleurs cette situation expressis verbis, dans son livre intitulé L’archéofuturisme, ce qui ne lui fut pas pardonné : jusqu’à sa mort, il a été poursuivi par la haine de ses anciens compagnons de combat aux réflexes plus sectaires que métapolitiques. Stefano Vaj, ami de Faye, juriste et penseur milanais, théoricien d’une nouvelle droite italienne dissidente, est du même avis : ses textes caustiques sur les réflexes sectaires et l’art d’agiter sa sébile, pour mendier de l’argent pour nourrir le gourou et satisfaire ses caprices, sont très savoureux. Dans les rangs de la secte néo-droitiste parisienne, bien rares sont ceux qui comprennent un minimum d’allemand pour saisir l’importance des théories de la « révolution conservatrice » et surtout pour comprendre le contexte, éminemment germanique, dans lequel elles ont germé. Le résultat final de cette agitation bizarre, c’est une cacophonie où tous braillent des tirades issues des œuvres traduites de « conservateurs-révolutionnaires » sans jamais rien comprendre, dans le fond, au contexte compliqué de l’Allemagne de Weimar, où les acteurs politiques passaient parfois d’un camp à l’autre, en justifiant leurs choix par des argumentations complexes, très allemandes dans le sens où, derrière elles, se profilaient souvent un héritage philosophique hégélien ou des filons politiques originaux, inexportables, nés dans la seconde moitié du 19ème siècle.

Charles_Andler.jpgFinalement, dans le contexte de la nouvelle droite française, ce seront surtout Ernst Jünger et Oswald Spengler qui seront sollicités, parce qu’ils ont été très tôt et abondamment traduits en langue française. A cette réception de Spengler et, principalement, de Jünger, il faut ajouter un impact très important du filon nietzschéen français, né avant la première guerre mondiale, sous la notable impulsion de Charles Andler (1866-1933), Strasbourgeois de naissance, auteur de trois volumes sur la réception de Nietzsche en France. Charles Andler était socialiste, membre fondateur du Parti Ouvrier Socialiste Révolutionnaire, fondé en 1889. Il avait correspondu avec Engels, définissait sa position comme « humaniste et travailliste » mais, comme la référence à Nietzsche avant 1914 était davantage socialiste que conservatrice, il se rend en Allemagne en 1904 pour rencontrer la sœur de Nietzsche et en Suisse, à Bâle, en 1907 pour prendre conseil auprès du premier grand spécialiste de la pensée nietzschéenne, Carl Albrecht Bernoulli (1868-1937), élève de l’ami de Nietzsche, Franz Camille Overbeck (1837-1905). Son triple positionnement politique, socialiste, dreyfusard et nietzschéen, suscite l’hostilité virulente de l’Action Française, principale porte-voix de la droite nationaliste à l’époque. Pourtant, Andler n’était pas un Alsacien germanophile : pendant la première guerre mondiale, il crée diverses structures visant la réintégration de l’Alsace dans la République française.

Andler, socialiste, campe toutefois une image de Nietzsche qui n’est nullement frelatée, qui est complète et synoptique. Avec méthode, avec un regard encyclopédique, il dresse la liste de toutes les sources de la pensée de Nietzsche et les commente sans jamais jargonner. Il explore bien évidemment les sources allemandes de cette pensée aphoristique et non systématique (contrairement à la mode hégélienne) mais il n’omet pas de signaler les sources françaises : Montaigne, Pascal, La Rochefoucauld, Fontenelle, Chamfort ou encore Stendhal. Bon nombre d’idées, toujours actuelles, de Nietzsche sont issues de ses lectures françaises : la volonté de démasquer les mensonges sociaux, l’idée d’un regard qui doit être nécessairement « perspectiviste » sur le réel, le naturalisme moral, le pessimisme intellectuel, la critique de l’esprit grégaire, la glorification du solitaire qui se dégage de la foule des ignorants, l’idée stendhalienne que la civilisation se mesure à l’énergie et que tout déclin d’énergie annonce une chute de civilisation, le primat du beau, etc. Mais nous sommes là en présence d’un hiatus dans l’histoire des idées en France, dès que l’on évoque la figure et l’œuvre d’Andler : les gauches françaises et allemandes ne le retiennent pas parce qu’elles ont nié, à un certain moment de leur histoire, tant en France qu’en Allemagne, sa forme de socialisme, qui était humaniste, travailliste et nietzschéenne. Il y a dans les gauches, surtout à l’heure actuelle, une dénonciation des stratégies démasquantes préconisées par Nietzsche, surtout dans La généalogie de la morale. Tout simplement parce que la gauche tient le haut du pavé dans le « paysage intellectuel français », ses intellos formant une nouvelle cléricature intolérante, hystérique, arcboutée sur ses slogans, qui craint évidemment l’émergence d’un contre-pouvoir culturel polisson, annexant à son profit les stratégies démasquantes préconisées par Nietzsche dans une partie significative de son œuvre philosophique. Ensuite, nos gauches contemporaines rejettent toute approche « perspectiviste », c’est-à-dire toute approche plurielle des phénomènes à l’œuvre dans l’histoire et sur les scènes politiques, au nom du « politiquement correct ». Toute critique de l’esprit grégaire ou toute référence à une énergie vitale est assimilée à l’ « extrême-droite », soit au mal absolu.

A droite, Andler est tout aussi délibérément oublié car son socialisme l’assimile aux gauches, ce qui est in fine une analyse à très courte vue, qui se contente d’ânonner des étiquettes, celle qu’exigent de nous tous le politiquement correct actuel et la paresse intellectuelle induite par le système politico-médiatique. Les positions dreyfusardes d’Andler ne lui sont pas pardonnées à droite du spectre politique. L’hostilité qui lui a vouée l’Action Française s’est maintenue en quelque sorte dans les cénacles de droite, qui, comme leurs adversaires de gauche, font de l’apologétique figée et ne procèdent pas à la généalogie des idées en général et de leurs propres corpus en particulier. Quant aux fractions germanophiles et/ou ethnistes/régionalistes dans le petit monde des droites françaises, elles ne comprennent pas son engagement pour réintégrer l’Alsace ethniquement et/ou linguistiquement germanophone dans le cadre d’une « Troisième République », honnie pour ses options maçonniques et bourgeoises.

md22543237156.jpgNous nous trouvons dès lors devant quelques beaux paradoxes : la « nouvelle droite », qui se revendique « nietzschéenne » par hostilité au christianisme en général et au catholicisme tiers-mondiste en vogue depuis Vatican II en particulier, ne prend pas en compte le nietzschéisme français (et allemand) original qui se situait à gauche de l’échiquier politique de la Troisième République et du Reich wilhelminien, alors que les positions prises en son temps par Andler sur l’œuvre de Nietzsche correspondent presque exactement à celles que la « nouvelle droite » entend défendre aujourd’hui, parce qu’elle a abandonné ses options premières anti-égalitaristes et favorables aux droites giscardiennes et chiraquiennes des années 1970 et 1980.

Pour revenir à votre question, quant à savoir dans quelle mesure la vaste mouvance de la « révolution conservatrice » (allemande ou autre) m’a influencé ou a influencé la « nouvelle droite » française, je dirais que mes démarches, et celles de mes condisciples au temps où nous étions à l’école secondaire, ont été entamées bien avant de connaître la « nouvelle droite » parisienne. Chez moi, elle a commencé par une lecture, très tôt, de deux livres de Nietzsche, L’Antéchrist et La Généalogie de la morale. Nous étions en 1971. Ensuite, les bougres de petits cornichons de collégiens bruxellois, que nous étions, ont tâtonné pendant quatre ans avant de découvrir la revue Nouvelle école, qui ne parlait pas encore de « révolution conservatrice », sauf au détour d’une recension par Giorgio Locchi, excellent germaniste italien, du livre d’Armin Mohler, Die konservative Révolution in Deutschland 1918-1932. Nous étions bien conscients que le « foutoir » en place dans notre pays (et ailleurs) devait être balayé, jeté au dépotoir de l’histoire comme on jette au dépotoir communal les vieux meubles gangrénés par l’insatiable voracité des xylophages. Même gamins, nous savions qu’il fallait une révolution culturelle, reposant sur le savoir classique (nous étions dans les classes latines), mais aussi sur ce qui avait été refoulé suite aux deux grandes conflagrations fratricides qui avaient ruiné l’Europe entre 1914 et 1945. Pour nous, ce refoulement était surtout celui qui avait évacué la culture germanique, qui avait été déterminante en Belgique avant 1914, quand tous voulaient penser autrement que dans les insupportables schémas de la révolution française et du « machin république », dont on nous rabat encore les oreilles aujourd’hui, au point de nous donner des envies de vomir lorsqu’un sbire de cette république mitée, qu’il soit de droite ou de gauche, ose encore parler de « valeurs républicaines », alors que tout ce qui touche à cette république n’a aucune valeur, constitue même les pires des « antivaleurs ».

51WYZjNjSuL._SX195_.jpgLa nécessité de l’ancrage classique, je la dois au professeur de latin, l’Abbé Simon Hauwaert, qui avait bien conscience que les humanités gréco-latines, auxquelles il tenait comme à la prunelle de ses yeux, devait être consolidées par un savoir mythologique et archéologique sur les mondes germaniques et celtiques. C’est ainsi que j’ai lu le celtologue Jean Markale sur les matières irlandaises, galloises et bretonnes. Pour l’initiation du collégien au monde mythologique germanique, je la dois à un petit livre que je conseille toujours vivement, dû à la plume de l’Argentin Jorge Luis Borgès, Essai sur les anciennes littératures germaniques. Ce petit savoir initial, complété par un bref cours scolaire sur les origines de la littérature néerlandaise, nous posait, dans les années 70, comme des contestataires inébranlables du désordre officiel qui s’installait en effaçant tous les legs de notre histoire et de notre culture.

Vous êtes également l’auteur d’un livre en anglais, The European Enterprise: Geopolitical Essays. Parlez-nous quelque peu de cet ouvrage et dites-nous quels événements et quels faits nous devrions prendre en considération quand nous jetons un regard sur la situation géopolitique actuelle de l’Europe et du reste du monde?

Je n’ai jamais reçu ce livre que j’ai écrit. Je ne sais pas à quoi il ressemble. Le thème de cet ouvrage, la géopolitique, est présent de longue date dans mes préoccupations : je me suis toujours intéressé à l’histoire et aux cartes depuis mon enfance. Dans la version allemande de son petit ouvrage didactique et programmatique sur la « nation européenne », Jean Thiriart évoquait la géopolitique et avait inséré quelques cartes suggestives dans les pages de ce petit volume de 192 pages. Plus tard, j’ai découvert le travail de Jordis von Lohausen, Mut zur Macht (1978), qui a donné une véritable impulsion géopolitique à mes travaux métapolitiques, non pas, de prime abord, dans le cadre d’une organisation politique ou métapolitique quelconque mais bien dans le cadre de mes études de traducteur-interprète, où nous avions, pendant les deux dernières années, un cours très important sur les relations internationales.

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De même, les cours d’anglais et d’allemand prévoyaient un volet « culturel/historique », impliquant l’étude des littératures mais aussi et surtout des « structures politiques, économiques, sociales et culturelles » (SPESC) des pays étudiés. Cette série de cours m’ont permis de comprendre l’histoire institutionnelle de l’Allemagne de Guillaume II à la République Fédérale assise sur la constitution de 1949. Pour les pays anglo-saxons, les cours étaient moins concis et moins cohérents vu qu’il s’agissait d’aborder et le Royaume-Uni et les Etats-Unis, voire d’autres pays anglophones comme le Canada ou l’Australie, dans un même cours, dans le même nombre de périodes.

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C’est dans le cadre de ce cours que je découvre les atlas historiques de Colin McEvedy qui aborde l’histoire européenne dès la protohistoire et l’envisage de manière dynamique, en la posant comme le choc permanent et/ou récurrent de matrices civilisationnelles indo-européennes avec les matrices d’autres groupes ethniques, plus ou moins homogènes aux débuts de leur émergence sur le théâtre eurasien (car McEvedy ne limite pas l’Europe ou l’aire d’expansion des matrices indo-européennes à ce qu’il est convenue de définir aujourd’hui comme notre continent ; McEvedy y englobe les deux rives de la Méditerranée et un espace steppique s’étendant jusqu’au Pamir). Les phases d’expansion et de recul de l’européanité se succèdent face à des matrices autres, notamment celle qui formera, au cours de l’histoire, le trinôme hostile regroupant les matrices hamitique/asianique, arabo-sémitique et turco-hunnico-mongole, dont les territoires initiaux sont le vaste espace nord-africain, l’espace péninsulaire arabique et l’espace steppique d’Asie centrale. La présence hamitique/asianique en Espagne à partir de 711, l’expansion arabo-sémitique après Mohamed, sous les premiers califats, la longue occupation des Balkans par l’Empire turco-ottoman sont autant de phases de recul, qui ont été compensées par des reconquistas sur une durée longue ; le ressac de l’Europe, son effondrement démographique face aux autres matrices, qui, elles, ne connaissent pas ce phénomène involutif de déclin, constituent une nouvelle et inquiétante phase de recul, accentuée par le fait qu’il n’y a plus vraiment de frontière nettement tracée, un limes ou une redoute de « graniçar » ou de « haidouks », où l’européanité pouvait s’arcbouter, l’européanité assiégée. La lutte pour la domination finale se déroule au sein même des villes d’Europe, jusqu’en Scandinavie.

Le livre en langue anglaise, et ma trilogie intitulée Europa, parue en France aux éditions Bios, abordent en long et en large ces processus de maîtrise de l’espace. A cette influence initiale de Thiriart, de von Lohausen et de McEvedy, s’ajouteront plus tard une découverte des travaux du géopolitologue allemand Karl Haushofer, grâce à de multiples impulseurs, et de la notion de « Grand Espace » (Grossraum) chez Carl Schmitt, grâce notamment à des débats avec l’avocat strasbourgeois Jean-Louis Feuerbach qui avait abordé minutieusement cet aspect de l’œuvre de Schmitt.

Tout cela implique que la survie de l’Europe en tant que civilisation particulière, différente de celle de l’Occident anglais, français et américain, passe par les nécessités suivantes :

  • Penser conjointement les dynamiques impériales présentes sur le continent européen (soit les dynamiques impériales d’Espagne (en Méditerranée notamment), d’Allemagne et d’Autriche, de Russie, dans la perspective de la restaurer pour faire face à tout environnement hostile, orchestré principalement par l’hegemon d’Outre-Atlantique. Une cohérence pluri-impériale mettrait rapidement un holà à tout défi de seconde main, c’est-à-dire à tout défi hamitique, sémitique ou turco-ottoman. Cela implique que ce qui a été défendu jadis et/ou conquis par l’un de ces empires, du moins dans l’orbite européen, doit être maintenu/consolidé et aucune tentative pour changer la donne ne peut être tolérée, ni dans les Canaries ni à Ceuta ni à Melilla ni dans les Balkans ni dans l’Egée ni en Méditerranée orientale ni dans le Caucase (où le gouvernement arménien a eu tort de se rapprocher de l’OTAN et le pouvoir azerbaïdjanais a eu tort de s’allier à la Turquie).
  • Cette position pluri-impériale doit s’étendre à l’espace iranien, à l’Inde (en tant qu’Etat-civilisation), à la Chine et au Japon, en dépit des hostilités héréditaires qui opposent ces entités les unes aux autres, au plus grand profit de l’hegemon du Nouveau Monde.

Dans le passé, on a pu observer des tendances séparatistes en Belgique, surtout émanant des droites flamandes. Ces tendances sont-elles encore à l’œuvre et comment voyez-vous les choses ? Dans la foulée, pouvez-vous nous brosser un survol de la situation politique en Belgique et nous parler des rapports actuels entre Flamands et Wallons ?

Parler des problèmes institutionnels de la Belgique implique d’élucider des mécanismes terriblement compliqués. Nos interlocuteurs étrangers décrochent très rapidement dès qu’on les esquisse. La Belgique possède plusieurs niveaux de pouvoir : le fédéral, le régional et le communautaire.

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La différence entre le régional et le communautaire déroute nos interlocuteurs étrangers. La région est un concept géographique, territorial. La communauté se fonde sur une base linguistique et traite de tout ce qui relève de la « personne » (enseignement, travail, etc.). La région et la communauté flamandes ont fusionné. La Wallonie est une région géographique, comprenant toutefois le territoire de la communauté germanophone. Ce qui en fait une entité bilingue (français/allemand). La communauté Wallonie-Bruxelles est représentée par des élus de la région wallonne et des élus francophones de la région de Bruxelles-Capitale. Je ne vais pas entrer davantage dans les détails, sinon vos lecteurs devront avaler tout un tube d’aspirines.

Les tendances séparatistes en Flandre s’expliquent surtout par la différence du comportement électoral dans les deux communautés du pays. La Flandre vote traditionnellement plus à droite que la Wallonie ou Bruxelles. Ce qui ne veut pas dire qu’il n’existe pas un socialisme flamand bien profilé, notamment dans les zones industrielles autour de Gand. En Wallonie, territoire jadis densément industrialisé depuis la révolution industrielle du 19ème siècle, un socialisme militant s’est constitué qui conserve une certaine résilience politique, en dépit d’une désindustrialisation de grande ampleur, à l’œuvre depuis près d’un demi-siècle. Mais le socialisme officiel, celui du parti qui porte le nom de PS (Parti Socialiste) a changé profondément depuis sa fondation en 1885. Au départ de sa trajectoire, ce socialisme avait toute sa raison d’être et, avant 1914, était porteur d’une révolution culturelle intéressante, dont les productions littéraires, artistiques ou architecturales fascinent encore.

AVT_Hendrik-de-1885-1953Man_4227.jpgAprès 1918 et jusqu’à la débâcle belge de mai 1940, une figure intellectuelle de haut niveau a donné au socialisme belge ses lettres de noblesse en la personne de Hendrik de Man, théoricien d’un socialisme personnaliste qui a inspiré considérablement les théoriciens et activistes français que l’on regroupe, par commodité, sous l’étiquette de « non-conformistes des années 30 ». D’aucuns font de ces « non-conformistes » les équivalents des « révolutionnaires conservateurs » allemands. Après 1945, le socialisme, comme partout en Europe occidentale, a servi de cheval de Troie aux stratégies de l’OTAN, les Américains, dans les années 40 et 50, préférant miser sur les sociaux-démocrates plutôt que sur les chrétiens-démocrates ou sur les conservateurs. Plus tard, sous l’influence des « nouvelles gauches » et de l’esprit soixante-huitard, le socialisme, comme en France et ailleurs, a préféré parier sur de nouvelles strates sociales, posées  comme défavorisées ou discriminées, et a adopté les modes que feu le philosophe Philippe Muray nommait « festivistes ». Il a délaissé la classe ouvrière et, même, plus largement, l’ensemble des familles actives dans des fonctions sociales concrètes. Avec les engouements LGBT (etc.), les combats concrets pour la classe ouvrière ont été oubliés, provoquant une hémorragie électorale au bénéfice des rigolos qui se disent écologistes et surtout d’un néo-communisme plus virulent, celui du PTB (« Parti du Travail de Belgique »), qui entend, à juste titre, défendre les acquis sociaux des classes travailleuses, acquis qui avaient été exemplaires dans la Belgique d’antan. En Flandre, la classe ouvrière a généralement (mais pas complètement) préféré le nationalisme classé à droite mais aux discours plus populistes.

Depuis une quinzaine d’années, les blocs électoraux sont très différents en Flandre et en Wallonie, compliquant derechef la constitution de gouvernements fédéraux (centraux) équilibrés. Le dosage électoral n’est plus possible dans la mesure où demeure la pratique de dresser un « cordon sanitaire » autour des formations nationalistes flamandes. Ce « cordon sanitaire » s’appliquait d’abord à la formation la plus radicale (VB – Vlaams Belang).Il s’applique aussi depuis les dernières élections fédérales de 2019 à la formation plus modérée que constitue la NVA (Nieuwe Vlaamse Alliantie), alors que ce parti, largement vainqueur des élections, avait été au pouvoir (fédéral) dans la législation précédente (2014-2019). La pratique du double « cordon sanitaire » fait qu’entre 45% et 50% des électeurs flamands n’ont aucune représentation au niveau fédéral. Cette discrimination implicite, durement ressentie comme telle, accentue bien entendu les tendances séparatistes, alors qu’elle avait pour intention première de les combattre ou, du moins, de les contenir ! Voilà, en gros, ce qui explique les velléités séparatistes des droites modérées et musclées en Flandre. Si les démocrates-chrétiens avaient adopté une ligne pareille à celle d’Orban en Hongrie et si les libéraux avaient opté pour un populisme à la façon de Haider en Autriche, jamais le séparatisme n’aurait eu autant le vent en poupe. Il aurait certes gardé toute sa résilience aux niveaux culturel et métapolitique mais n’aurait pas eu une représentation aussi forte dans les assemblées régionales et fédérales.

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Sièges au Parlement Fédéral après les élections de juin 2019.

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Sièges du Parlement Flamand  après les élections de juin 2019.

Aucune instance métapolitique correctrice du discours gaucho-festiviste dominant n’existe dans le paysage politique francophone. Une telle instance pourrait corriger les tendances délétères qu’adopte un personnel politique généralement composé d’incultes et de dévoyés, incapables, par ignorance crasse, de saisir les enjeux à l’œuvre dans le monde et tous occupés à bricoler des combines juteuses, qui tissent la réputation bien établie de la corruption francophone dans le royaume (où la belle ville de Liège a été surnommée « Palerme-sur-Meuse »). L’électorat flamand ne veut plus dépendre de cette ignorance et de cette corruption, ce qui n’exclut pas, bien évidemment, que l’ignorance et la corruption existent aussi dans le paysage politique flamand. Quant à ceux que le cordon sanitaire exclut du pouvoir, ils n’ont pu bien évidemment étaler leurs travers comme ceux qui sont ancrés dans les arcanes du pouvoir depuis de longues décennies. Ma vision pessimiste est corroborée par les faits : l’effondrement de la culture classique, la prolifération des savoirs bidon due à cet effondrement empêcheront tout nouvel envol à court et moyen terme, indépendamment des étiquettes dont s’affublent les militants qui se présentent aux suffrages des électeurs. Un exemple patent et récent : après de très longs mois de négociations, un gouvernement fédéral a pu se former vaille que vaille en 2020. Les parlementaires fédéraux ont dû prêter serment dans deux langues de leur choix, en français, en néerlandais ou en allemand. Ils devaient prononcer cette phrase simple : « Je jure d’observer la constitution », « Ik zweer de grondwet na te leven », « Ich schwöre die Verfassung zu befolgen ». Dans ce ramassis de tristes sires et de tristes bonnes femmes, presqu’aucun n’a été capable de dire correctement ces phrases simples (sujet, verbe, complément !), ni dans sa langue maternelle, ni dans l’autre langue choisie. Le spectacle à la télévision et sur « youtube » était hallucinant autant qu’affligeant. Cela en dit long pour l’avenir! 

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La Belgique fait face au problème de l’islamisation et de l’immigration de masse, ce qui conduit à l’installation de sociétés parallèles, proclamant la « sharia », à un taux de criminalité élevé et même au terrorisme. Quelle est la situation actuelle en ce qui concerne l’immigration de masse et quelles sont vos vues sur la question ?

La Belgique fait face à ces problèmes comme tous les autres pays de l’Europe occidentale. L’islamisation du paysage quotidien se perçoit surtout à Bruxelles, dans certains quartiers alors que d’autres sont exempts de toute trace d’islamisation. Pour moi, personnellement, et pour mon épouse, l’indice le plus patent d’une islamisation rampante est la disparition, dans les magasins, de certains produits alimentaires traditionnels, notamment le pain au sucre (le « craquelin ») et le pain aux raisins (le « cramique ») qui a priori ne sont pourtant pas haram. Pour être sûr de trouver tous les ingrédients de notre alimentation traditionnelle, il faut faire ses emplettes en dehors de la région de Bruxelles-Capitale, en territoire flamand ou wallon. Sinon, on est condamné à bouffer les mêmes insipidités que nos nouveaux concitoyens venus de partout et de nulle part, qui, eux, se délectent aussi désormais de malbouffe très grasse arrosée de cet infâme liquide brunâtre que l’on appelle le « Coca-Cola » : la facture « santé » sera très lourde, déjà à court terme ! Pour les citoyens qui n’ont pas de voiture, la frustration est énorme et le ressentiment grossit jour après jour.

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Le problème de l’immigration, et des diasporas qui en résultent, est surtout la constitution d’économies parallèles et de criminalités diasporiques, vivant de trafics de toutes sortes, dont surtout le trafic de drogues. Les instances officielles de l’UE et aussi de l’ONU ont créé des bureaux chargés de lutter contre ces phénomènes déplaisants ; ces bureaux ont produit une littérature intéressante qui dresse correctement le bilan de la situation. Mais comme pour l’Agence Frontex, ces constats ne sont nullement suivis d’effets ! Des mots, des débats, des bavardages, mais pas de décision, pas d’action. La grande presse, dont le principal journal du royaume, Het Laatste Nieuws, avait cartographié avec précision les divers réseaux mafieux à l’œuvre en Belgique, suite à l’arrestation d’un personnage politique de la ville de Malines qui appartenait à la mafia araméenne (classée comme « turque »). Sa neutralisation avait été suivie du démantèlement d’un réseau couvrant notamment l’exploitation des simples cafés de la capitale (par blanchiment d’argent), le trafic de véhicules d’occasion et l’alliance avec les narcotrafiquants colombiens grâce à un infiltré dans les docks du port d’Anvers. L’affaire avait démontré à l’envi que l’on avait chaque fois affaire, pour chaque réseau en particulier (qu’il soit araméen, turc, marocain, albanais, nigérian ou italien) à de la polycriminalité. Rien n’est toutefois entrepris pour assainir le pays. Et rien ne le sera vu les jojos qui siègent en nos assemblées et qui sont même incapables de prononcer les petites phrases simples de leur serment !

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Les six djihadistes belges qui ont perdu leur nationalité récemment. Les autres touchaient tranquillement leurs allocations diverses pendant qu'ils étaient en Syrie: preuve qu'ils ont agi en service commandé? Pour le compte de l'OTAN?

Quant au terrorisme, il s’agit surtout d’une famille française, celle du fameux Abdeslam, co-auteur des attentats de Paris. Finalement, ce terrorisme islamique n’est qu’un tout petit fragment de la partie émergée de l’iceberg que constitue la polycriminalité en place. Ce fameux terrorisme djihadiste ne m’alarme pas outre-mesure : il est clair, vu la clémence évidente de nos tribunaux qui font tout pour nous ramener les rescapés de l’Etat islamique en Syrie, leurs compagnes et leur progéniture, que ces oiseaux de vilain augure sont allés faire leur sale guerre, là-bas au Levant, parce que les services spéciaux de l’OTAN, de l’armée américaine, des réseaux pétromonarchiques saoudiens ou qataris les ont recrutés pour abattre le régime baathiste syrien qui ne dansait pas au son de leurs flûtes ou n’imposait pas à sa population un régime de type salafiste, wahhabite ou frériste.

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Quelle est votre opinion sur les récentes élections américaines ? Quelles conséquences les retombées de cette élection auront-elles sur l’Europe et le reste du monde ? Doit-on s’attendre à de nouvelles guerres au Moyen-Orient si Biden finit par emporter le morceau ? Enfin, que pensez-vous des accusations que Trump a émises en disant que les démocrates « ont volé les élections » ?

La principale chose à retenir de cette élection, c’est que les médias, tenus par la prêtraille fanatisée du système, veulent que leurs desiderata deviennent réalité envers et contre l’avis du gros de la population. Si celle-ci rejette les dogmes et les idées farfelues de la prêtraille médiatique, elle est considérée comme une masse méprisable de « déplorables », dont les opinions et les aspirations ne doivent pas être prises en compte. Nous avons là un phénomène relativement nouveau depuis 1945 : la population avait été flattée et gâtée au nom de la « démocratie » ; ce n’est plus le cas, ce qui permet d’évoquer un déni de démocratie dans l’américanosphère. Trump dit évidemment que l’élection lui a été volée : cette accusation est plausible vu que les manipulations sont bien plus aisées à parfaire avec le vote électronique. Ceci dit, que ce soit Trump qui reste à la Maison Blanche ou Biden qui y accède, l’agenda géopolitique et globalitaire est déterminé à l’avance par des instances du Deep State ou des responsables militaires, qui gouvernent au-delà du jeu démocratique. Avec Trump, et en dépit de la crise du Covid-19, les fronts ouverts par les Bush ou par Obama sont demeurés en place même s’ils ont été un petit peu moins « chauds » qu’auparavant. D’autres se sont ouverts, au Caucase notamment. Les tensions avec la Chine se sont accrues dans le Pacifique. L’alliance de facto entre le Maroc et Israël permet aux Etats-Unis de contrôler toute la côte atlantique de l’Afrique, depuis Tanger jusqu’aux confins de la Mauritanie et du Sénégal. En décembre 2020, les forces conjuguées de la marine américaine ont publié le mémorandum « Advantage at Sea » qui répète les grandes lignes de la politique maritime et navale des Etats-Unis depuis les thèses de l’Amiral Mahan et qui ajoute, subrepticement, un nouveau front dans l’Arctique, où la Russie dispose d’atouts solides pour appuyer l’idée russe et chinoise d’une « route de la soie arctique ». Cet espace, jadis an-écouménique et dépourvu de voies de communication maritimes, devient hautement stratégique. Et deviendra dès lors, sur le flanc septentrional/boréal de l’Europe, une zone de turbulences géopolitiques. L’ère Trump n’a donc pas réellement apaisé les confrontations en cours dans le monde d’aujourd’hui.

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Merci de nous avoir accordé cet entretien. Pour le terminer, dites-nous ce que vous croyez qu’il adviendra de l’Europe dans un futur proche ?

Il y a actuellement deux Europe : celle qui est dominée par les idéologies libérales (au sens anglo-saxon du terme) et celle, hélas minoritaire, qui expriment des tendances contraires, fustigées en Europe occidentale comme « illibérales ». Les nuisances idéologiques libérales sont mortifères et plongeront les pays qui s’en réclament pour façonner leur mode de gouvernance dans un chaos indescriptibles dont nous vivons d’ores et déjà les prémisses. Les autres ont une chance de se maintenir dans le chaos et de participer à des synergies géopolitiques positives. Inutile de vous préciser que je vis dans la partie de l’Europe qui connaîtra un effondrement dramatique et vivra un abominable chaos.

Pour se procurer les livres mentionnés dans cet entretien:

La révolution conservatrice allemande, tome 1:

http://www.ladiffusiondulore.fr/documents-essais/552-la-revolution-conservatrice-allemande-biographies-de-ses-principaux-acteurs-et-textes-choisis.html?search_query=steuckers&results=10

La révolution conservatrice allemande, tome 2:

http://www.ladiffusiondulore.fr/home/690-la-revolution-conservatrice-allemande-tome-deuxieme-sa-philosophie-sa-geopolitique-et-autres-fragments.html?search_query=steuckers&results=10

Cinq livres de Robert Steuckers pour 99,00 euros:

http://www.ladiffusiondulore.fr/home/857-pack-steuckers-5-livres-a-prix-reduit-.html?search_query=steuckers&results=10

La "Trilogie" EUROPA:

https://editionsbios.fr/editions

The European Enterprise: 

https://manticore.press/product/the-european-enterprise-geopolitical-essays/

Sinergias Identitarias:

https://editorialeas.com/producto/sinergias-identitarias-2/

 

dimanche, 27 décembre 2020

Ni réactionnaire ni progressiste mais archéofuturiste ! Hommage à Guillaume Faye

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Ni réactionnaire ni progressiste mais archéofuturiste !

Hommage à Guillaume Faye

Dans cette première vidéo, nous voyons le concept d'archéofuturisme, tel qu'il fut pensé par Guillaume Faye pour échapper au clivage réactionnaire/progressiste. Peut-être une troisième voie judicieuse pour penser l'avenir ?
 
 
Les premières réactions à la création de ce nouveau compte "youtube":
La tradition (européenne), c’est l’innovation, disait-il. Merci pour cet exposé synthétique et cristallin qui fait honneur à la pensée et l’œuvre de feu Faye.
Très bel exposé d'un concept novateur et d'un excellent auteur, par ailleurs. Félicitations pour ce premier travail !
Merci pour cette synthèse du concept de Guillaume Faye. Maintenant, je n'attend que de le lire pour approfondir le sujet. Je suis tombé sur votre chaîne au hasard de mes recherches, et je penses que vos futures vidéos seront tout aussi intéressantes !
Bel exposé, intelligemment présenté et construit ! Bonne chance pour la suite !
Une chaîne qui promet... à suivre !!!

Excellent travail. Merci de revenir sur ce concept d'une importance capitale. L'idée archéofuturiste dépasse l'opposition conservateur / progressiste par une troisième voie ; celle de l'innovation et de la conquête tout en préservant notre identité, notre Germen, notre substrat biologique. Une position qui transcende celle des partisans d'une décroissance radicale (Kaczynski) autant que celles des progressistes fous qui détruisent faune et flore au nom d'une vision hégélienne de l'Histoire. Hâte de voir tes prochaines vidéos.

samedi, 12 décembre 2020

Jean-François Gautier, l'Européen polyphonique

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Un hommage portugais à Jean-François Gautier

Jean-François Gautier, l'Européen polyphonique

Par Duarte Branquino

Jean-François Gautier (1950-2020) était un homme brillant et complet, un véritable esprit de la Renaissance, dont la sagesse s'étendait à des domaines de connaissance nombreux et variés.

410kjtYVbxL.jpgDocteur en philosophie, avec Lucien Jerphagnon comme maître, il était un profond connaisseur de l'Antiquité classique, grecque et romaine. En plus d'être un philosophe, il s'est également consacré à la science et à son histoire. Sa Grande aventure des sciences a été traduite et publiée au Portugal en 1993. Il était musicologue : il a publié des ouvrages sur Debussy et Palestrina ; en plus, il était thérapeute : il a étudié, pratiqué et enseigné l'étiologie, étant l'auteur de plusieurs livres dans ce domaine. Il a également publié deux essais qu'il convient de souligner : La sente s'efface, une poétique du paysage, principalement celui de sa Charente familiale, qu'il habitait et dont il explorait les profondeurs, et Le sens de l'histoire, une histoire du messianisme en politique.

Il a été l'un des grands noms de l'école de pensée du GRECE, d'Alain de Benoist, collaborant à plusieurs publications et signant une page régulière dans le magazine Éléments, intitulée "Anti-manuel de la philosophie". Il a également joué un rôle clé au sein de l'Institut Iliade, tant par sa participation à des colloques que par la paternité du premier volume de la collection "Longue Mémoire", lancée cette année, À propos des dieux. L'esprit des polythéismes.

J'ai eu l'honneur de deviser avec lui à la Maison de la Chimie, à Paris, lors du IIe Colloque de l'Institut Iliade, en 2015. Son discours inspirant portait sur la polyphonie, véritable révolution musicale dans l'Europe médiévale, où l'on redécouvre l'esprit du polythéisme ancien. Lors du dîner des orateurs, j'ai eu l'occasion de parler avec lui et de percevoir son intelligence captivante. Après le repas, je me suis assis à sa table et je me souviens de son sourire tranquille et de la facilité avec laquelle il a répondu à mes questions et m'a interrogé sur le Portugal tout en dégustant un verre de vin rouge. Nous avons surtout parlé de son livre L'Univers existe-t-il ?, un essai au titre provocateur qui m'a séduit et auquel je lui ai demandé de me consacrer un billet. Il a accepté ma demande avec une humilité que seuls ont les érudits au-dessus de la célébrité éphémère et, avec amitié, il m'a dédié le livre qu'il a décrit comme "un peu de physique et un peu plus de philosophie".

41s6jaZ4UPL.jpgIl nous a quitté le 6 décembre dernier, à l'âge de 70 ans, et ce jour-là, je suis retourné à ses livres pour lui rendre un hommage silencieux et personnel. Malgré la richesse de son œuvre, l'Europe devient plus aride, surtout parce que, comme il l'a si bien écrit, il manque le sens du mot "oikos", "le bien commun, c'est-à-dire à la fois la ville et ses institutions, ses terres, sa langue, ses monuments ou ses lois, toutes les ressources que chacun peut protéger et faire fructifier, dans son propre intérêt comme dans celui des autres". Un sens qui "ne peut être instruit que par la mémoire de nos origines et par ce qui, du passé, n'est pas effacé dans le présent, mais continue.

Sa vie, qui fut polyphonique, devrait inciter les Européens de notre époque sombre à redécouvrir la sagesse d'autres temps.

Texte publié dans l'hebdomadaire O Diabo, 11 décembre 2020.