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jeudi, 07 novembre 2024

Penseur de l'absolu - À l'occasion du 75ème anniversaire de Guillaume Faye

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Penseur de l'absolu

À l'occasion du 75ème anniversaire de Guillaume Faye

Werner Olles

Entre 2015 et 2023, plus de 300.000 Allemands ont été victimes de migrants, demandeurs d'asile et prétendus « réfugiés » issus de la culture arabo-islamique. Rien qu'en 2023, plus de 52.000 citoyens ont subi des délits graves tels que des violences physiques, des vols avec agression et des viols collectifs, principalement perpétrés par des individus venus d'Afghanistan, de Syrie et d'Afrique du Nord. Alors que les citoyens allemands – la situation est encore plus critique dans d'autres pays d'Europe occidentale comme la France, la Belgique, les Pays-Bas et l'Angleterre – vivent dans la peur, que les parents s'inquiètent pour leurs filles mineures, et que le racisme anti-blanc brutal se répand dans les écoles et les établissements publics, l'establishment politico-médiatique rouge-vert-libéral engage une « lutte contre la droite », édicte de nouvelles lois limitant strictement la liberté d'expression des citoyens, interdit les publications critiques envers le gouvernement et renforce, avec une rhétorique agressive et belliqueuse, la politique de sanctions insensées contre la Russie, y compris par des livraisons d'armes meurtrières au régime ukrainien corrompu et oligarchique. Cette politique a coûté la vie à environ 250.000 Russes et Ukrainiens à ce jour.

91sMx1KPioL._AC_UF1000,1000_QL80_.jpgUn homme avait pressenti cette évolution et critiquait vivement la bourgeoisie de gauche au pouvoir ainsi que certaines illusions métapolitiques de la « Nouvelle Droite » : Guillaume Faye, intellectuel de droite français, cofondateur de la Nouvelle Droite et militant du GRECE. En 2005, il avait assisté aux émeutes, aux violences et aux pillages menés par les gangs de jeunes migrants issus des banlieues françaises, choyés depuis des décennies par un cartel corrompu de partis de gauche, par le complexe industriel des ONG, par les élites culturelles et par les idéalistes naïfs. Faye, dès lors, avait anticipé ces signes avant-coureurs de la guerre civile à venir. Jusqu'à sa mort prématurée le 7 mars 2019 à seulement 69 ans, il n'a cessé de plaider pour l'arrêt de l'immigration légale et illégale, le retour des envahisseurs culturels étrangers, une Reconquista européenne et une Europe des peuples blancs, de Brest à Vladivostok. Faye appelait ce projet « Eurosibérie », bien qu'incompatible avec l'eurasisme d'Alexandre Douguine, qui inclut les peuples non européens et islamiques de la Fédération de Russie.

Faye ne s'est pas fait que des amis dans le camp de droite. Alain de Benoits l'a qualifié de « raciste » et a contribué à entraver ses possibilités de publication en Allemagne, en France et en Belgique. Ses propositions controversées, comme la demande d'une « apartheid totale », ne visaient pourtant pas un racisme biologique, mais reposaient sur sa conviction fondée que la proximité excessive de cultures, religions et intérêts divergents conduit souvent à des conflits sanglants et à des guerres civiles brutales, comme l'a montré la Yougoslavie des années 1990 ou le conflit sans fin au Proche-Orient.

Mais qui était donc ce Guillaume Faye, qui, très tôt, avait perçu le contrôle de la sphère culturelle par la gauche et le libéralisme, qui qualifiait l'UE de projet contrôlé par les États-Unis, et militait pour une démocratie souveraine sous une idéologie autre que le libéralisme ? Avec son projet original d'un « archéo-futurisme » patriotique et impérial, Faye voulait harmoniser des figures comme Marinetti et Evola, Nietzsche et Heidegger, Jünger et Klages. À l'instar d'une Europe renaissant de ses propres valeurs, Faye se présentait comme le défenseur d'une cathédrale catholique contre une mosquée islamique.

imgfgcrages.jpgNé le 7 novembre 1949 en Aquitaine, Faye était philosophe, historien et politologue. Il avait découvert le groupe GRECE à 20 ans, contribuant à l'essor des magazines « éléments » et « Nouvelle école ». Conférencier charismatique, il était aussi connu pour ses idées provocantes et originales, souvent perturbées par des militants d'extrême gauche. Après une rupture avec la Nouvelle Droite en 1986 et après un passage dans la presse en vue, dont Magazine Hebdo et dans quelques radios non conformistes et humoristiques, il revint à la scène politique dans les années 2000, écrivant plusieurs ouvrages. Dans « Pour quoi nous combattons » (Kassel, 2006), il prédisait l'effondrement de la civilisation européenne sous le poids de l'immigration massive et d'une guerre civile ethno-culturelle entre l'Europe blanche et l'islam.

Faye croyait que les peuples, qui, à la fin, seraient victorieux, seraientceux qui demeureraient fidèles à leurs valeurs culturelles, éthiques et sporituelles tandis que, simultanément, ils maitriseraient les technologies du 21ème siècle.  La civilisation européennes subira dès lors une métamorphose, qui sera tout à la fois prométhéenne, tragique et faustienne. Selon lui, seuls les peuples fidèles à leurs valeurs et maîtrisant les sciences de demain survivront. Son archéo-futurisme, concept controversé, provoqua de vives critiques, tant à gauche qu'à droite. Ainsi, Alain de Bneoist concluait sa recension par : « Dans ce monde, je ne voudrais pas vivre ! ». Pourtant, Faye, en pionnier de l'archéo-futurisme, mérite qu'on discute sérieusement et sans complaisance de sa vision et de sa pertinence.

Cinq ans après la disparition de Guillaume Faye, il est temps que ses œuvres, longtemps ignorées ou raillées, trouvent une nouvelle reconnaissance en Allemagne, tout comme elles la trouvent déjà dans d'autres pays européens.

mercredi, 06 novembre 2024

Guillaume Faye: un grand intellectuel européen aurait eu 75 ans - Une commémoration nécessaire

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Guillaume Faye: un grand intellectuel européen aurait eu 75 ans - Une commémoration nécessaire

Peter Backfisch

Guillaume Faye, né il y a 75 ans le 7 novembre 1949 à Angoulême dans le sud-ouest de la France et décédé en 2019 à l'âge de 69 ans, était journaliste et considéré comme l'un des auteurs les plus importants de la droite française et européenne. Il a été l'un des fondateurs de la Nouvelle Droite et un militant du groupe de réflexion GRECE. Son héritage est à rechercher et à trouver dans des travaux pertinents sur la construction de la pensée de droite. Les idées et les propositions qui y sont présentées offrent des solutions valables pour les défis du 21ème siècle.

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Son œuvre s'inscrit dans la lignée de Leo Strauss, Carl Schmitt, Armin Mohler, Oswald Spengler et d'autres penseurs. Mais c'est le philosophe italien Giorgio Locchi, qui fut son mentor, qui l'a davantage marqué. On peut parler d'un tandem Locchi/Faye, dont toute l'ambition a été d'ouvrir la voie au retour du mythe européen, à l'évasion des Européens captifs de la caverne vers le soleil. C'est une tentative de synthèse de l'allégorie de la caverne de Platon. Faye aimait la République de Platon mais il ne voulait pas que les peuples d'Europe continuent à végéter dans la caverne et à se contenter d'ombres sur les murs.

Faye était un homme courageux qui n'a pas hésité, même face à des attaques massives et parfois irréductibles, à briser des structures de pensée ancrées depuis longtemps et, finalement, à « redéfinir le conservatisme pour lui insuffler une nouvelle vie » (Armin Mohler). Pour ce faire, il a formulé des idées novatrices qui sont exposées dans des ouvrages tels que « Convergence des catastrophes », « Ethnomasochisme », « Archéofuturisme », « Constructivisme vitaliste », « Nouveau discours à la nation européenne », « Pourquoi nous luttons », « Pour quoi et comment lutter » et « La colonisation de l'Europe ». Il s'agit d'une lecture nécessaire pour les intellectuels de droite comme de gauche.

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La notion de catastrophe chez Faye s'oppose fortement à la notion de crise politique et à ses éventuelles interventions réformistes, qui ont été largement diffusées, notamment au sein de la Nouvelle Droite allemande. En France, on voit les choses tout autrement. Le penseur y bénéficie d'une attention sans partage. Ses œuvres sont en vente partout. Il y a quarante ans déjà, Faye analysait les combats imposés à notre civilisation et qu'elle ne cesse de perdre dans l'arène du monde contemporain comme des catastrophes évidentes. Le temps lui a donné raison, car c'est finalement ce qui s'est passé. Guerres civiles ethniques et religieuses, possibilité de mener des guerres en Europe, déclin d'économies entières, catastrophes écologiques, luttes pour la redistribution et surpopulation étrangère islamique. Tout cela est causé par le libéralisme, le multiculturalisme, l'humanitarisme, le mondialisme, l'eudémonisme de masse, la pollution et le pillage des ressources. Qu'est-ce tout cela sinon des catastrophes ?

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Dès son « Nouveau discours à la nation européenne » de 1985, il se prononce résolument pour une Europe ethnopluraliste, centrée sur l'affirmation des peuples, la préservation de leurs spécificités culturelles, de leurs particularités et de leur homogénéité interne, la recherche d'un nouvel enracinement.

Si ses prédictions annoncent une fin apocalyptique du monde moderne, que rien ne pourra arrêter, on aurait tort de réduire Faye à un conteur de dystopies. Faye apporte des réponses sur ce à quoi le monde pourrait ressembler après l'effondrement et sur la chance qu'aura l'Europe de renaître. Dans son ouvrage Archéofuturisme, il esquisse un monde qui renaît de ses cendres, au-delà des errements des temps modernes. Le concept d'archéofuturisme se veut un mélange de techno-science et de retour aux valeurs ancestrales. Il se veut l'esprit de la post-catastrophe, une philosophie qui doit être à la base du monde de demain. Pour Faye, la recréation du monde doit intégrer la relation dialectique entre le futurisme et le traditionalisme dans le cadre de vie des gens.

« Nous ne voulons pas être passéistes, restaurateurs ou réactionnaires, car le passé des derniers siècles a engendré la vérole qui nous ronge. Il s'agit de redevenir archaïque et ancestral, tout en imaginant un avenir qui soit plus que le prolongement du présent ». Dans sa théorie tournée vers l'avenir, Faye tente de mettre en lumière tous les aspects de la vie sociale, outre la technique et l'environnement, la famille, la sexualité, l'amour, le féminisme, etc. dans une perspective archéofuturiste.

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Où ce monde sera-t-il réalisé ? L'ethnopluralisme de Faye voit sa réalisation dans un empire continental formé par l'Europe et la Russie, qu'il appelle « Eurosibiria », mais qui sera aussi idéologiquement lié à l'Inde, à la Chine et même au Japon. Pour lui, ces nations ont conservé leurs mécanismes de défense archaïques. Pour l'Europe, il s'agit de retrouver des racines perdues afin de pouvoir rester fidèle à l'héritage de ses ancêtres et à l'avenir de ses enfants.

L'archéofuturisme est une œuvre provocante et on ne sera pas d'accord avec tout, notamment parce qu'après les catastrophes apocalyptiques, les hommes sont confrontés à de nouveaux défis auxquels il faut trouver de nouvelles réponses. Beaucoup de choses seront dépassées, comme l'individualisme vécu en Occident, de toutes nouvelles techniques culturelles, qui exigent beaucoup des hommes, devront être installées. Cela suscite des contradictions dans l'esprit du temps qui prévaut aujourd'hui, avec des répercussions qui portent bien plus loin que ce qui se dit et se rumine dans le camp des conservateurs et de la droite. Mais en déduire que l'on « ne veut pas vivre » dans le monde de Faye, comme veulent le voir certains représentants de la droite, montre que l'on n'a pas compris ce qui nous attend. C'est même le contraire qui se produira: si l'on continue à agir de la sorte, avec une gestion de crise inefficace, des conditions s'imposeront à la fin desquelles le monde ne sera plus habitable, ce qui rendra inutile la question de savoir si l'on veut y vivre.

Les idées de Faye sont « l'antidote parfait à l'idéologie dominante de l'Occident américano-centré. Il veut préserver les racines, appelle à l'autarcie et donc à l'indépendance européenne et russe, rejette les images de l'ennemi véhiculées par les médias inspirés par les think tanks américains et rejette l'anti-technicisme des Verts, qui sont désormais les meilleurs alliés de Washington. Un ouvrage à traduire et à diffuser le plus largement possible ». (Robert Steuckers, Agora Europa n° 3, p. 85)

Guillaume Faye: Une journée dans la vie de Dimitri Leonidovitch Oblomov

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Beate Broßmann

Guillaume Faye: Une journée dans la vie de Dimitri Leonidovitch Oblomov

Ce petit ouvrage ne compte que 100 pages en format poche. La postface de Martin Lichtmesz compte 28 pages. Rien que pour cela, la lecture de cette utopie singulière vaut la peine. Nous y apprenons par exemple que ce morceau de prose est un supplément à une œuvre plus importante de l'auteur, Guillaume Faye (1949-2019), parue en 1998 et intitulée « Archéofuturisme ».

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Pour ceux qui ne connaissent pas encore ce goût de la pensée anticipatrice, Lichtmesz les instruit en profondeur. Dans l'idéologie du « constructivisme vitaliste », on retrouve aussi bien l'essence de l'archaïsme que celle du futurisme. Faye conçoit le projet comme une vision d'une nouvelle ère après l'effondrement prévisible de la modernité et non comme une illustration de cette catastrophe elle-même. Le principe directeur est l'euro-pluralisme. La particularité de son projet réside dans une symbiose entre des modes de vie hautement technologiques et archaïques. Il existe une multitude de régions qui utilisent les possibilités du progrès technique et le font progresser. D'autre part, il existe des fondations couvrant de vastes surfaces qui vivent dans des conditions simples et pré-modernes. Simultanéité du non simultané.

La nouvelle relate une journée de la vie de D. L. Oblomow, 68 ans, conseiller impérial en pleine possession de ses moyens - qui n'a rien à voir avec le propriétaire terrien éponyme de Gontashrov -; il est responsable pour l'aplanissement des conflits d'intérêts au sein de la Fédération, dans laquelle les guerres ne devraient plus jamais avoir lieu. Cette journée est celle du 22 juin 2073. Lors d'un de ses voyages à bord du Transcontinental Rapid à travers la Fédération Eurosibérienne, une fusion de la Russie et de l'Union européenne, il raconte à une jeune fille - la fille du ministre indien des affaires étrangères qui suit un programme d'études - l'histoire de l'Occident au cours des cent dernières années. Ce genre de choses n'est pas enseigné en Inde.

Nous apprenons qu'entre 2014 et 2016, une grande catastrophe, dont le Conseiller impérial détaille le déroulement et qui ressemble à s'y méprendre à notre actuelle « convergence des crises », avait détruit les systèmes économiques et les infrastructures de l'Occident et coûté la vie à deux milliards de personnes. Faye se sert explicitement de la théorie du chaos et des catastrophes de René Thom et Ilya Prigogine pour expliquer cet effondrement soudain: tout système est composé de sous-systèmes qui agissent comme des paramètres. Si un paramètre change, les autres sphères s'adaptent. Mais si plusieurs changent, l'équilibre des relations complexes est rompu, et il suffit d'un changement supplémentaire, mais central, pour entraîner l'effondrement de l'ensemble du système sous la forme d'un saut qualitatif. « Et c'est exactement ce qui est arrivé à la civilisation mondiale du 20ème siècle. La bulle était si grande qu'elle ne pouvait qu'éclater ». Le philosophe allemand Oswald Spengler avait déjà prophétisé cet effondrement en 1918. Selon lui, la fin d'une civilisation n'est jamais très loin de son apogée. Le « “virus de la chute” agit un temps dans l'invisible, puis se fait soudain sentir de manière fatale lorsque la civilisation a atteint son zénith ».

Il est intéressant de noter que parmi les grands pays, la Russie, l'Inde, la Chine et le Japon ont résisté à l'implosion de grandes parties du monde et n'ont été touchés que de manière périphérique. Ces nations auraient conservé leur unité interne et leurs mécanismes de défense archaïques. Toutes les sociétés multiethniques auraient implosé « parce qu'elles avaient détruit et marginalisé leurs traditions ». La période 2025-2028 fut l'époque de la Reconquista. Avec l'aide des Européens de l'Est et surtout des Russes, les troupes musulmanes ont été vaincues et, par la suite, tous les immigrants non européens - environ 23 millions - ont été déportés à Madagascar. L'empire eurosibérien est né.

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En 2030, une renaissance a eu lieu, avec l'introduction d'une économie à deux vitesses. L'ordre économique technoscientifique n'était pas conçu pour structurer un jour l'ensemble du globe. Seuls 10% de l'humanité, vivant dans de petites villes peu peuplées, en bénéficiaient. Le « reste était revenu à une forme d'économie médiévale, basée sur l'agriculture, l'élevage et le travail manufacturier ». Ces communautés néo-traditionalistes garantissaient un faible impact sur l'environnement, car elles permettaient une nouvelle réglementation des transports: la conduite automobile privée était interdite, seuls les véhicules électriques et à cheval étaient autorisés. Le transport aérien a été progressivement réduit au profit du planetrail. L'Amérique était devenue un pays purement agricole. Dans les régions Hightech, les grossesses des élites étaient soutenues par le génie génétique, alors que dans les régions archaïques, ces mesures n'existaient pas. Ici, on était revenu au cycle démographique archaïque, « l'ordre naturel ancestral basé sur des taux de natalité et de mortalité élevés ».

Bien entendu, la démocratie n'est pas la forme d'État qui prévaut partout. Elle ne correspond qu'à la mentalité européenne. Chaque peuple a ses propres formes de gouvernement spécifiques. « La démocratie peut conduire à l'injustice et au chaos ou devenir la façade de la tyrannie si elle est mal appliquée ». Dans la Fédération eurosibérienne, on parle de « démocratie organique ». Martin Lichtmesz cite à la fin de sa postface Alain Benosit, qui a porté le jugement suivant sur le livre de Faye «L'Archéofuturisme»: «Rien de ce que l'auteur oppose à l'ère actuelle n'est une exagération, une augmentation de l'intensité: contre l'univers de la domination et de l'aliénation de soi, il oppose encore plus de volonté de puissance; contre le démon de la technique, encore plus d'éruption technique; contre le primat de l'efficacité et le matérialisme pratique, la réduction des idées à leur valeur purement instrumentale; contre la montée de l'intolérance, l'exclusion généralisée; contre le mouvement pour lui-même, la fuite en avant. Ce n'est ni 'archaïque', ni 'futuriste', ni même postmoderne, mais la continuation de la modernité avec tous les ingrédients de l'autodestruction. Faye dessine un univers fictif dans lequel je ne veux pas vivre».

Mais ce serait faire injure au visionnaire que de le réduire à cette dystopie qu'il considérait comme une utopie. Car il était un Européen patriote qui, par exemple, dans son « Nouveau discours à la nation européenne », prônait déjà en 1985 une Europe ethnopluraliste. Contre le discours de Julien Benda de 1932, porté par « l'humanitarisme désincarné », « l'universalisme métaphysique » et le cosmopolitisme, il opposait l'affirmation des peuples, la préservation de leurs spécificités culturelles, de leurs particularités et de leur homogénéité interne, l'aspiration à un nouvel enracinement. «L'idéologie qui n'appelle l'Europe à s'unir qu'en tant que pierre angulaire d'une civilisation mondiale, qui encourage les peuples européens à renoncer à leur enracinement et à leur volonté de puissance au profit de l'idée immatérielle d'une 'civilisation occidentale', est en effet à l'origine des faiblesses qui nous usent, des menaces qui pèsent sur nos libertés et des... combats que notre civilisation est en train de perdre instantanément dans l'arène du monde contemporain».

Au cours des presque quarante années qui se sont écoulées depuis, les craintes de Faye se sont malheureusement vérifiées.

Guillaume Faye: Ein Tag im Leben des Dimitri Leonidowitsch Oblomow. Jungeuropa Verlag: Dresden 2020

A propos de l'auteur : Beate Broßmann, née en 1961 à Leipzig, a réussi ses études de philosophie. Avant le « tournant » en RDA, elle s'est engagée pour des réformes démocratiques, puis a été membre de l'association d'opposition «Demokratischer Aufbruch».

mercredi, 18 septembre 2024

Pragmatisme, réalisme, volonté de puissance: les fondamentaux de l'archéofuturisme selon Guillaume Faye

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Pragmatisme, réalisme, volonté de puissance: les fondamentaux de l'archéofuturisme selon Guillaume Faye

Claudio Capo

Source: https://www.facebook.com/claudio.capo.1800

Il ne faut jamais juger un livre à sa couverture, mais l'image d'une technologie indéfinie se découpant sur la toile de fond de l'Erechthéion à l'aube possède en elle-même un pouvoir évocateur extraordinaire. Se plaçant dans le sillage de la philosophie du dépassement et de la « fidélité à la terre » de Nietzsche, Guillaume Faye déclenche une violente tempête idéologique contre la morale égalitaire et humaniste. L'archéofuturisme est le coup de tonnerre qui fend le ciel de la modernité. Synthétisant pragmatisme, réalisme et volonté de puissance, le penseur français aboutit à une formulation politico-idéologique mobilisatrice.

Pour Faye, la civilisation actuelle ne peut pas durer. Ses fondements sont en décalage avec la réalité. L'idéologie hégémonique, épuisée et sclérosée, n'a plus rien à dire et s'achemine vers une « convergence de catastrophes » destinée à décréter son échec. La modernité, blessée et moribonde, se dissimule pour tenter d'effectuer un « dernier tour de manège », tandis que tout rapport concret au monde est vidé de son sens et remplacé par un simulacre - référence très appropriée à Baudrillard. Pour sortir de ce cercle vicieux, Faye affirme la nécessité d'extraire continuellement le pouvoir du monde, en l'orientant vers la réalisation d'une pensée radicale et révolutionnaire capable de subvertir toutes les valeurs établies.

L'archéofuturisme est la déclinaison politique du « constructivisme vitaliste », une tentative philosophique de concilier les avancées de la technoscience avec un retour à des visions du monde qui remontent à la nuit des temps. La synthèse entre l'archaïque et le futuriste est la voie principale de la renaissance de l'Europe : tandis que le premier lemme du syntagme se réfère au fondement biologique et anthropologique des peuples indo-européens, le second incarne leur idiome distinctif de la création, de l'invention permanente. Paraphrasant Heidegger, Faye veut traverser le sentier de la forêt et affronter de nouveaux dangers : la logique du recul, de l'arrêt ou de la continuation progressive du présent n'est pas envisagée.

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Téchne et l'Europe sont intrinsèquement inséparables, mais leur union est en soi insuffisante. La technologie, isolée, n'est pas décisive : ce n'est que si elle est guidée par un axe directionnel enraciné dans les valeurs de la tradition et dans l'élan archaïque des peuples qu'elle peut devenir le facteur décisif pour repenser la civilisation dans une perspective authentiquement européenne. Seule une mentalité authentiquement néo-archaïque, aristocratique et inégalitaire permettrait d'exploiter pleinement les potentialités aujourd'hui bridées - parmi beaucoup d'autres, Faye met l'accent sur un eugénisme positif visant à l'amélioration biologique et héréditaire de l'espèce.

La technique doit être greffée sur des bases immuables : ce n'est qu'ainsi que son enrichissement indéfini est souhaitable. Il ne faut pas renforcer l'archaïque, ni le conserver dans ses formes historiques, ni le déformer pour le fétichisme du progrès.

Il n'y a pas de différence qualitative entre une trirème grecque naviguant dans la mer Égée et les missions spatiales Apollo, pas de fossé ontologique entre un bâton pointu et un missile intercontinental. La différence réside dans le degré de puissance qu'ils sont capables d'exploiter et d'exprimer.

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L'avenir de la technologie européenne sera d'autant plus brillant que le retour aux racines obscures de l'archaïque sera profond. C'est pourquoi Faye propose une double approche : d'une part, une épistémologie de la technique qui favorise la déflagration des cadres égalitaires ; d'autre part, la redécouverte des dieux qui habitent la terre et des hommes qui la fécondent. Apollon et Dionysos, ensemble, pour construire l'avenir d'une Europe déployée sur quatorze méridiens.

« Nous, descendants de peuples apparentés, avons la chance de partager un espace potentiel qui pourrait devenir pour nos enfants ce dont Charles Quint a rêvé, sans pouvoir le préserver : « L'Empire sur lequel le soleil ne se couche jamais ». Quand il est midi à Brest, il est deux heures du matin sur le détroit de Béring. C'est un idéal, peut-être l'un des rares qu'il nous reste en ces temps de pessimisme et de noirceur : construire notre Empire, c'est le rêve qui nous taraude ».

 

samedi, 03 août 2024

L'Iliade archéofuturiste

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L'Iliade archéofuturiste

Constantin von Hoffmeister

Source: https://www.eurosiberia.net/p/the-archeofuturist-iliad?publication_id=1305515&post_id=146966427&isFreemail=true&r=jgt70&triedRedirect=true

Au crépuscule de notre époque moderne, alors que les ombres s'allongent et que les vents hurlent les plaintes des dieux oubliés, surgit la figure de Guillaume Faye, un prophète qui rappelle les anciens voyants d'Hyperborée et les sages de Grèce. Sa voix, puissante et résonnante, parle d'une « convergence de catastrophes », d'un horizon sombre où l'ancien et le futuriste s'affrontent dans une étreinte cataclysmique. Comme les guerriers d'Hyperborée à la volonté de fer et les héros inébranlables de l'Iliade, la vision de Faye est un rempart contre le chaos qui s'annonce. Il prévient que l'Europe, à l'instar de la légendaire ville de Troie, est assiégée par des dangers démographiques, économiques, culturels et sociaux. Le discours dominant, recouvert d'un vernis d'humanitarisme creux, agit comme un sortilège aveuglant, rappelant les anciens enchantements des sorciers d'Hyperborée et les machinations divines relatées dans les récits d'Homère. Ce récit insidieux obscurcit la vérité, nous laissant vulnérables face à la menace imminente de ces menaces existentielles.

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Faye jette les bases de l'archéofuturisme, une philosophie aussi inflexible que le nord gelé et aussi intemporelle que les luttes épiques relatées par Homère. Cette vision, qui mêle l'ancien et le moderne, appelle à un équilibre entre le développement de nouveaux principes et le respect du passé et de l'héritage, à l'image de l'équilibre recherché par les rois hyperboréens et les héros grecs, entre la puissance des guerriers et la sagesse des sages. Ces principes doivent tenir compte des réalités bio-anthropologiques pour combattre l'éthique pernicieuse de l'ethnomasochisme, tout comme les héros antiques reconnaissaient et chérissaient la force de leur lignée et de leur héritage. L'objectif est de préserver l'homogénéité de l'Europe, comme les tribus hyperboréennes et les cités-états grecques protégeaient leurs territoires et leurs traditions contre les incursions étrangères. La disparition progressive des Européens, prévient Faye, est une perte terrible - un déclin de la diversité, de l'intelligence et du progrès qui menace le tissu même du monde, rappelant la chute d'une grande ville ou d'un puissant royaume qui se fait sentir à travers les âges à la fois dans la tradition hyperboréenne et dans le mythe grec.

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Dans le bureau faiblement éclairé, l'air était chargé de l'odeur des vieux livres et du léger bruissement des forces invisibles. Guillaume Faye se pencha sur ses tomes anciens, sa voix était un murmure bas alors qu'il parlait de l'essence primale, un concept fondamental qui signifie le cœur de l'existence et l'ordre inhérent à l'intérieur. "Ce n'est pas, comme certains le pensent, dit-il, les yeux brillants d'une lumière d'un autre monde, un appel à se retirer dans les ombres du passé. Il s'agit plutôt d'une reconnaissance, d'un respect profond et constant des forces historiques qui ont sculpté l'édifice de notre monde moderne." Il marqua une pause, ses doigts traçant les lignes d'un manuscrit usé, comme s'il cherchait la sagesse de sages morts depuis longtemps. "Les guerriers hyperboréens et les héros grecs, poursuivit-il, comprenaient l'importance de leurs anciennes traditions et des dieux qui veillaient sur eux. Ils ne s'accrochaient pas au passé par peur mais par respect, sachant que ces traditions étaient le socle sur lequel reposaient leurs civilisations."

La voix de Faye se fait plus fervente, évoquant des époques lointaines et oubliées. « Les réactionnaires », fit-il d'un geste dédaigneux, « tout comme les anciens malavisés des épopées, aspirent à faire tourner la roue du temps, à restaurer une époque révolue qu'ils perçoivent comme un âge d'or. Mais ils ne voient pas qu'un tel retour est un chemin vers la stagnation et la décadence, une immobilité mortelle où le progrès s'étiole". Son regard s'aiguise, comme s'il perçait le voile de la réalité elle-même. "Nous ne devons pas laisser les spectres du passé dicter notre avenir, ni permettre que les leçons de l'histoire soient oubliées. Cela reviendrait à renoncer à la sagesse des anciens, à ignorer l'ordre cosmique qui lie toutes choses, et à inviter le chaos au cœur de notre société". Pendant qu'il parlait, la salle semblait s'assombrir, le poids de ses mots faisant surgir d'anciennes horreurs et des vérités ancestrales qui se cachent juste à la limite de la compréhension.

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C'est dans ce cadre que s'inscrit le « futurisme », une pulsion faustienne qui pousse à la conquête, à l'exploration et à la recherche de connaissances interdites - un trait caractéristique de l'esprit européen, tout comme la ferveur qui a poussé les explorateurs hyperboréens et les aventuriers grecs vers des contrées inexplorées. Cette faim insatiable, qui s'apparente à la quête de kalokagathia - l'équilibre harmonieux entre le bien et le beau - des Grecs et à la soif de sagesse des Hyperboréens, est à la fois une source de noble fierté et une descente potentielle vers l'hubris, si elle n'est pas maîtrisée. L'archéofuturisme s'efforce d'extraire les vertus de cette puissante pulsion, en défendant une forme de traditionalisme éclairé - une préservation et une adaptation sélectives de la sagesse ancienne dans un avenir toujours incertain. Cela reflète la manière dont les rois hyperboréens sauvegardaient leurs connaissances ésotériques et dont les Grecs maintenaient leurs idéaux culturels au milieu des sables mouvants du temps. Faye a qualifié l'archéofuturisme de « constructionnisme vitaliste », soulignant que le terme « archaïque » devait être compris dans son contexte grec ancien, dérivé de archè, qui signifie « le commencement » ou « le fondement ».

Alors que nous étions assis au coin du feu dans notre logement familier de Baker Street, Holmes, avec une lueur de ferveur intellectuelle dans les yeux, commença à exposer l'intrigante philosophie de Guillaume Faye. "Watson, remarqua-t-il, les idées de Faye s'inspirent fortement de la dichotomie conceptuelle de Nietzsche entre l'apollinien et le dionysiaque - deux forces qui représentent la danse éternelle entre l'ordre et le chaos, tout comme celles observées dans les annales de la culture grecque et les obscures légendes de l'Hyperborée. L'aspect apollinien, voyez-vous, représente la stabilité et la structure de la société humaine, un peu comme la précision de notre système juridique, tandis que le dionysien puise dans les énergies primitives, anciennes, évoquant un lien profond avec ses racines." Il marqua une pause, plissant les doigts d'un air pensif. "Le futurisme, dans ce contexte, Watson, fusionne la rationalité de l'apollinien et la quête de profondeur esthétique et émotionnelle du dionysien. Il offre une double perspective à travers laquelle nous pouvons voir la réalité humaine, à la fois dans les constructions sociétales et dans les aspects bruts et indomptés de la nature. Cette dualité reflète la quête de connaissance et de beauté des Grecs, ainsi que la compréhension du mystique et du pratique des Hyperboréens. En substance, Faye préconise ce qu'il appelle la « construction vitaliste », un cadre pour l'élaboration de nouveaux principes qui sont à la fois constructivistes, enracinés dans une gouvernance décisive, et vitalistes, reconnaissant les vérités inéluctables de notre héritage biologique et culturel ». Holmes se penche en arrière, une expression satisfaite sur le visage, comme s'il avait résolu un autre mystère complexe.

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Faye dévoile une vision lucide de la réalité qui exige la reconnaissance des vérités ethniques, tout comme les Grecs anciens et les Hyperboréens tenaient fermement à la signification de l'héritage et des lignées. Il met en garde contre le concept insidieux d'ethnomasochisme - une répudiation autodestructrice de l'identité culturelle et ethnique, supplantée par une adulation malsaine de l'« Autre ». Ce phénomène pernicieux érode le tissu des sociétés européennes, sapant leur cohésion sociale et culturelle, tout comme les luttes intestines et les corruptions externes ont autrefois affaibli les fières cités-États de Grèce et les anciennes tribus d'Hyperborée. Faye attribue ce malaise à des politiques anti-blancs de longue date, soutenues par une rhétorique anticolonialiste et des récits de victimisation et de tiers-mondisme - parallèlement aux influences corrosives qui ont historiquement précipité le déclin de puissantes civilisations, à la fois dans les chroniques cryptées de la tradition hyperboréenne et dans les sagas historiques de l'antiquité grecque.

L'Occident, autrefois fier prolongement de l'ancienne et formidable civilisation européenne, se débat aujourd'hui dans une tourmente qu'il s'est lui-même infligée, tel un serpent dévorant sa propre queue. Les valeurs modernes prônées par ce colosse en décomposition, les visions déformées de la « liberté » et de l'« égalité », sont devenues un miasme qui paralyse l'âme, rappelant l'indécision ancestrale qui peut lier un guerrier dans les affres de la bataille. Ce grand léviathan culturel, aujourd'hui centré sur les Etats-Unis, diffuse une influence « américanomorphe », une force d'homogénéisation aussi implacable et dévorante que les empires de l'Antiquité qui cherchaient à plier le monde à leur volonté. C'est comme si l'Occident, sous l'emprise d'une force invisible et lovecraftienne, semblable à Cthulhu endormi, cherchait à engloutir toute diversité dans sa gueule amorphe, une peur cosmique qui efface toute singularité sous l'apparence d'une fausse unité.

L'Occident a succombé à une présence obscure et amorphe, un capitalisme transnational qui dévore l'âme de la civilisation, laissant derrière lui un paysage dévasté, dépourvu des vertus héroïques qui lui donnaient autrefois vie. Dans cette domination immonde, les individus et les cultures entières sont réduits à de simples entités interchangeables, appréciées uniquement pour leur valeur froide et utilitaire, comme les pions insidieux d'un jeu arcane et cosmique orchestré par des forces invisibles. Cette vision tordue du monde tisse le mythe séduisant d'une « communauté internationale », une illusion aussi séduisante et perfide que les sirènes de l'Antiquité, murmurant des promesses qui ne mènent qu'à un gouffre de désespoir. L'homme blanc, à l'instar des héros tragiques d'autrefois, est présenté comme l'éternel bouc émissaire, accablé d'une malédiction ancestrale aussi sombre et inquiétante que la rumeur des Deep Ones d'Innsmouth. À l'instar des poissons qui se cachent sous les vagues, ce récit oblige l'Occident à expier ses péchés imaginaires en accueillant les masses appauvries d'outre-mer, une pénitence sinistre qui rappelle la peur des horreurs lovecraftiennes invisibles qui se cachent juste sous la surface, attendant d'entraîner tout le monde dans leurs profondeurs abyssales.

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Dans ce contexte, l'appel de Faye à combattre la dérive assimilationniste de la droite est un cri de ralliement, semblable à l'appel aux armes des batailles épiques d'Hyperborée et de Grèce. Il clarifie les dangers du débat assimilation-remigration, en montrant que la droite assimilationniste, à l'instar des leaders égarés d'autrefois, tombe dans les mêmes pièges que les réactionnaires. Ils s'opposent d'abord à l'immigration de masse, puis capitulent, rappelant ceux qui cherchaient à apaiser les envahisseurs par des concessions, sans savoir que de telles actions conduiraient à une plus grande ruine.

La droite assimilationniste, sous couvert de nobles idéaux, s'oppose avec véhémence à la notion de remigration, qu'elle juge injuste sous le couvert de la « liberté » et de l'« égalité ». Cette position, cependant, pue la chevalerie malencontreuse, à l'instar de ceux qui, par une ironie tragique, refusent de fortifier leurs citadelles, laissant leurs portes ouvertes dans une démonstration d'honneur déplacée. Pourtant, à l'instar des sombres arcs gothiques qui résonnaient autrefois du rire de la sécurité, les garde-fous d'une société peuvent bel et bien être mis en place dans un cadre démocratique. Ces mesures - mettre fin à l'extension indiscriminée des prestations sociales, affirmer une identité claire et distincte, négocier des accords de retour avec les pays d'origine - ne sont pas sans rappeler les traités et les pactes des anciens.

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De la même manière que les Grecs sagaces forgeaient des alliances pour protéger leur polis, et que les austères chefs hyperboréens sécurisaient leurs domaines, ces actions servent à fortifier le tissu d'une civilisation contre les ombres qui s'approchent. Il ne s'agit pas d'idéaux rêvés, mais d'un savoir-faire historique solide comme le roc et d'un pragmatisme brut et sans états d'âme. Dans cette histoire tortueuse et labyrinthique, ne pas inscrire ces mesures dans le marbre n'est pas seulement un faux pas, c'est plonger tête la première dans un vide noir et béant, où le chaos ne se contente pas de rôder - il grimace, prêt à tout engloutir dans une tempête tourbillonnante de désespoir et d'oubli.

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Kull, le roi de Valusia, assis sur son trône, réfléchissait à la sagesse des anciens. Ses yeux, aussi aiguisés que ceux d'un faucon, balayaient le conseil réuni. « Méfiez-vous de l'attrait de l'assimilation », déclara-t-il, la voix grondant comme le tonnerre. "C'est un piège aussi perfide que les intrigues labyrinthiques des Grecs et les manigances de l'Hyperborée. Ce nouveau discours sur le mélange des peuples et des cultures - l'assimilationnisme, comme ils l'appellent - repose sur une compréhension erronée de ce qui fait une nation. Tout comme les idées fausses du passé ont mené de grands empires à leur ruine, cette erreur menace de déchirer le tissu même de nos royaumes". Les mots de Kull étaient lourds dans l'air, un avertissement d'un dirigeant qui avait vu l'essor et la chute de civilisations.

Kull poursuivit en faisant un geste vers la carte qui se trouvait devant lui. "Les nations ne sont pas forgées par le hasard ou la commodité, mais par les liens de sang et de parenté qui unissent leurs peuples. Cette conception correspond aux idéaux des Grecs, qui considéraient la parenté et l'héritage comme sacrés, et des Hyperboréens, dont les liens tribaux étaient aussi incassables que le fer. Une nation, à l'instar des fières cités-États d'antan, se définit par un passé historique, une religion, une langue et une culture communs - une lignée qui doit être préservée, et non diluée. Tout comme les anciens protégeaient leurs traditions sacrées et leurs histoires orales, nous devons protéger l'essence de notre peuple. Ne nous laissons pas influencer par les fausses promesses d'unité par la similitude. Car en fin de compte, ce sont nos identités distinctes qui nous donnent de la force, tout comme les vaillants guerriers de l'Atlantide et les nobles clans de Valusia se sont dressés, inébranlables, contre les marées du chaos et de l'obscurité.

La poussée de la gauche en faveur de l'ouverture des frontières, contrastant avec le contrôle superficiel de l'« assimilation » par la droite assimilationniste, ressemble aux efforts futiles d'une ville assiégée pour tenir ses portes face à un déluge écrasant. La seule assimilation possible, selon Faye, est l'invisibilité totale de l'étranger - une solution dure et arbitraire, qui reflète les lois draconiennes des sociétés anciennes qui cherchaient à maintenir la pureté et l'ordre. La promotion de l'assimilation en tant que solution politique en fait la règle plutôt que l'exception, ignorant la réalité selon laquelle l'assimilation est un processus profondément personnel, et non un mandat politique, à l'instar de la croyance ancienne selon laquelle la loyauté et l'identité véritables ne peuvent être imposées, mais doivent être gagnées et entretenues.

La bataille contre la droite assimilationniste et la gauche cosmopolite est cruciale, à l'instar des luttes menées par les Grecs de l'Antiquité contre les dissensions internes et les menaces externes, et par les Hyperboréens contre les ténèbres envahissantes venues du nord. L'assimilation ne peut être légiférée ; elle doit s'aligner sur la loi naturelle, reflétant les vérités intemporelles reconnues par les sages d'autrefois. La nature subjective de l'identité ne peut être définie objectivement par la loi, tout comme les héros de la Grèce et de l'Hyperborée ne pouvaient être définis simplement par leurs actes, mais par leur lignée, leur honneur et la faveur des dieux.

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« Vous êtes membre si vous adhérez » pose la question des seuils - à partir de quel point nébuleux peut-on vraiment appartenir à un groupe ? Cette question se répercute à travers les âges - l'ancien dilemme auquel étaient confrontés les dirigeants et les sages: qu'est-ce qui constitue un véritable citoyen, un véritable héros ? La loi, tout comme les décrets cryptiques des dieux grecs ou les édits impénétrables des chefs hyperboréens, doit s'aligner sur les lois immuables de la nature, reflétant l'ordre cosmique qui sous-tend l'existence elle-même. Aucun individu ou faction ne possède l'autorité nécessaire pour définir l'identité d'un peuple, de même qu'aucun héros solitaire ne peut prétendre déterminer le destin d'une nation entière. Une faction qui prétend sauvegarder la population autochtone ne peut pas, dans le même souffle, encourager l'absorption d'éléments étrangers sous le couvert d'idéaux cosmopolites, car cela reviendrait à ce qu'un guerrier abandonne son bouclier au milieu de la bataille, se laissant non seulement lui-même, mais aussi ses proches, vulnérables aux ombres qui s'approchent. De telles actions conduiraient à la dissolution des fortifications culturelles et spirituelles, exposant l'identité fondamentale du peuple à la malédiction de l'homogénéisation, où les signes distincts de l'héritage et de la tradition sont avalés par une nébuleuse dévorante, aussi insondable et redoutable que les profondeurs abyssales d'où aucune lumière ne revient.

« Alors, la fin est proche pour l'Europe, hein ? » dit-elle en jetant la cendre de sa cigarette avec un dédain désinvolte qui dément la gravité de ses propos. "C'est comme une sorte de prophétie tordue, n'est-ce pas ? Les voyants d'Hyperborée et les oracles de Grèce sont réunis en une seule et même prédiction. Les cultures s'effritent, les identités se dissolvent, et tout cela arrive aux Européens. Pendant ce temps, en Inde, en Chine, dans le monde arabo-musulman, ils tiennent bon. Il est hors de question qu'ils abandonnent leur héritage et leurs racines. Ils sont comme les Grecs anciens ou les mythiques Hyperboréens, protégeant farouchement leurs identités culturelles avec tout ce qu'ils ont ».

Sa voix est devenue un murmure conspirateur : « Et l'Europe ? L'Europe reste là, à se tordre les mains pendant que les vagues s'écrasent contre les portes. L'islamisme conquérant, la puissance chinoise inarrêtable, l'énergie implacable de l'Inde - tout cela frappe à la porte, et les dirigeants européens sont coincés dans une sorte de paralysie. On croirait voir les défenseurs de Troie se préparer à l'inévitable, ou Conan, seul dans les étendues gelées, affronter la horde. Mais le comble, c'est que..."

L'Europe doit se ressaisir. Elle doit se souvenir de ses racines, des vieilles histoires, des vieilles batailles. Elle doit se battre, non seulement pour elle-même, mais aussi pour l'avenir, pour la prochaine génération. Appelez cela de l'archéofuturisme ou autre, mais il s'agit d'honorer le passé tout en construisant l'avenir. Parce que si ce n'est pas le cas ? Eh bien, nous savons tous comment ces histoires se terminent habituellement ».

lundi, 03 juin 2024

L'archéofuturisme aujourd'hui

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L'archéofuturisme aujourd'hui

Constantin von Hoffmeister

Source: https://www.eurosiberia.net/p/archeofuturism-now?utm_source=post-email-title&publication_id=1305515&post_id=145182681&utm_campaign=email-post-title&isFreemail=true&r=jgt70&triedRedirect=true&utm_medium=email

Que pourrait-il se passer après le « déclin » prophétisé par Spengler ?

L'Archéofuturisme 2.0 de Guillaume Faye est à la fois une tapisserie utopique et une apocalypse dystopique, décrivant les jours à venir de l'humanité après que la « convergence des catastrophes » ait frappé de plein fouet et anéanti notre civilisation occidentale autrefois glorieuse. Il s'agit d'un visiteur du présent qui influence l'avenir, mais en vain, car tout passe et rien n'est jamais vraiment nouveau sous le soleil. L'humanité évolue et change, les systèmes sociaux sont renversés et remplacés par de nouveaux, et même des espèces différentes se succèdent pour l'asservissement de la planète bleue.

L'exploration spatiale était autrefois le rêve de tous les progressistes païens de l'Occident prométhéen, mais - comme le fait remarquer Faye - ne serait-ce qu'une chimère ? Des vaisseaux élégants dans le vide qui tournent lentement autour de la décomposition après avoir été abandonnés par les vivants par manque de chance, et des opportunités gâchées après avoir été incinérées dans le brasier d'un espoir démesuré...

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Les primitivistes et les amateurs de vie tribale se réjouiront de la perspective de forêts futures remplies de guerriers sauvages montés sur des destriers ardents et armés jusqu'aux dents, défendant leurs villages néo-médiévaux contre l'empiètement de clans concurrents, tous ne désirant rien d'autre que survivre et dominer. Un rêve humide, darwinien, qui prend vie dans la toundra - le dernier camion chassé par les lanciers aux yeux bleus, les chevaliers du Camelot de la Forêt, post-effondrement, chassant et combattant les descendants des hommes de la jungle du Sud à travers des cols de montagne glacés et des ravins brûlants.

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Les chimères de la fantaisie transhumaniste sont tapies dans l'ombre, leurs ailes déployées et leurs noms gravés dans le solide rocher de l'Oblivion, sur lequel sont enchaînés tous les êtres sensibles « normaux », lentement aspirés par la porosité tentaculaire de la pierre froide, qui les prive de leur mémoire.

Redécouvrant accidentellement l'écriture manuelle après des millénaires de dépendance à la technologie informatique et à l'intelligence artificielle, aiguisant leurs plumes et les trempant dans le sang métaphorique des veines de leurs ancêtres symboliques, les gens du nouvel éon se mettent au goût du jour en retournant en arrière et en allant ainsi de l'avant - en retournant aux sources et en livrant par pigeon-poste la missive du renouveau directement sur le pas de votre porte.

Hélas, coincé dans un passé pétrifié, Faye a envoyé des lettres qui ne sont jamais arrivées. Comme Rimbaud explorait les taches blanches sur la carte de l'Afrique, les comparant à des vers qu'il n'a jamais écrits parce qu'il a cessé d'écrire de la poésie à l'adolescence, Faye, par son métier et l'élixir qu'il a consommé, a plongé dans des horizons invisibles aux yeux de la plèbe, s'étendant de l'humble demeure de James Joyce à la mer de repos de l'Est. Rimbaud a vu ce que d'autres imaginaient voir. Faye a su susciter l'adhésion des voyageurs dans le no man's land entre l'éveil fervent et l'aspiration sincère - juste devant la ligne d'arrivée, le prix est déjà bien visible : le trophée ailé à deux têtes enfonçant ses griffes dans la chair des faibles chancelants. Ce trophée s'appelle « Restoration Now ».

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samedi, 05 août 2023

Guillaume Faye et l'archéofuturisme

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Guillaume Faye et l'archéofuturisme

Constantin von Hoffmeister

Source: https://www.eurosiberia.net/p/guillaume-faye-and-archeofuturism?utm_source=post-email-title&publication_id=1305515&post_id=135597938&isFreemail=true&utm_medium=email

Guillaume Faye (1949-2019), avec son aura intellectuelle interpellante, apparaît comme une pierre angulaire dans la sphère intellectuelle de la droite européenne. Né dans la ville historique d'Angoulême, en France, il ne présente d'abord aucun signe apparent du maelström intellectuel qui le caractérisera plus tard. À mesure qu'il grandit, ses études l'amènent à étudier à la prestigieuse école Sciences Po à Paris, où il perfectionne ses connaissances en sciences politiques.

Ses premières incursions dans le monde des idées l'amènent dans l'orbite du GRECE (Groupe de recherche et d'études sur les civilisations européennes), un groupe de réflexion ethnonationaliste français. Il y gravit rapidement les échelons et en devient l'un des principaux idéologues dans les années 1970 et au début des années 1980. Sa collaboration avec ce groupe a enrichi ses perspectives, lui permettant d'associer les archétypes européens intemporels à sa vision de l'avenir, pour aboutir à la philosophie de l'archéofuturisme.

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Au-delà de son association avec le GRECE, Faye a eu une carrière aux multiples facettes. Il a été journaliste, animateur radio, et s'est même essayé au métier d'acteur. Ces expériences variées ont enrichi sa compréhension de la société européenne et de ses fondements culturels. Pourtant, au milieu de ces aventures, il ne s'est jamais éloigné de ses passions intellectuelles, utilisant souvent ces plates-formes pour propager ses idées.

ILIADE-14-GF-archeofuturisme-couv.jpgAu fur et à mesure que ses perspectives philosophiques mûrissaient, son articulation du concept d'archéofuturisme s'est développée, merveilleusement résumée dans son magnum opus L'Archéofuturisme : Technoscience et valeurs ancestrales. Mais pour vraiment saisir la profondeur et l'ampleur de l'archéofuturisme, il faut d'abord en explorer les principes fondamentaux.

Au fond, l'archéofuturisme est la solution apportée par Faye à la dichotomie perçue entre l'illustre passé de l'Europe et les promesses de son avenir. Loin de considérer ces deux domaines comme contradictoires, Faye a imaginé une fusion transparente des deux. Cette philosophie invite l'Europe à s'inspirer simultanément de ses héritages gréco-romains, païens et médiévaux, tout en embrassant ardemment les avancées technologiques et scientifiques.

Imaginez, si vous le voulez bien, la ville de Rome dans le paradigme archéofuturiste de Faye: le Colisée, autrefois symbole de la grandeur impériale, pourrait être transformé en une arène écologique, accueillant des reconstitutions d'événements historiques en réalité virtuelle. La Piazza Navona pourrait présenter des sculptures intégrées à la technologie de pointe, où les conceptions baroques seraient complétées par des éléments interactifs ou lumineux modernes. Même le Vatican pourrait voir ses écritures anciennes préservées grâce à des technologies non invasives, permettant aux chercheurs du monde entier d'accéder aux manuscrits par holographie en temps réel. Par essence, Rome serait un musée vivant, une ode à son passé, tout en étant une métropole prospère et à la pointe de la technologie.

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La vision de Faye n'était pas limitée par des frontières géographiques ou temporelles. Pensez aux établissements d'enseignement d'Oxford ou de Cambridge. Dans un cadre archéofuturiste, les salles historiques résonneraient encore de la sagesse des ancêtres. Les étudiants, cependant, pourraient utiliser la réalité augmentée pour découvrir les pièces de Shakespeare ou utiliser des outils pilotés par l'IA pour approfondir les dialogues platoniciens. Imaginez un système de tutorat amélioré par l'intelligence artificielle, où les pédagogies de Socrate ou d'Aristote sont adaptées et personnalisées pour chaque élève, assurant un mélange de techniques éducatives classiques et contemporaines.

Au-delà des domaines de l'infrastructure et de l'éducation, l'archéofuturisme touche également aux normes et principes sociétaux. Faye a proposé une Europe où les valeurs éprouvées de la communauté, des liens familiaux, de l'honneur et de la chevalerie ne sont pas considérées comme archaïques, mais comme des éléments essentiels de l'organisation de la société. Ici, les dîners de famille pourraient être l'occasion pour les grands-parents de partager des contes et des mythes, tandis que des écrans holographiques reconstitueraient les scènes. Les festivals communautaires pourraient être un mélange de célébration des traditions de la récolte, avec des drones illuminant le ciel, transformant la nuit en une tapisserie en technicolor.

Par ailleurs, la campagne européenne ne serait pas en reste dans la vision de Faye. Imaginez les paysages bucoliques de Toscane ou de Provence, où les vignobles traditionnels utiliseraient des systèmes avancés de surveillance des sols. La vinification pourrait voir la confluence de techniques ancestrales avec les dernières biotechnologies pour améliorer les saveurs et assurer la durabilité écologique. Les foires locales pourraient présenter l'artisanat traditionnel aux côtés de sculptures imprimées en 3D, attirant à la fois les amateurs de nostalgie et les aficionados de l'art d'avant-garde.

Il est également essentiel de souligner que l'archéofuturisme n'est pas un simple assemblage passif de deux époques. Il est proactif, dynamique et évolutif. Alors que l'Europe est confrontée à des défis modernes - qu'il s'agisse d'écologie, d'immigration ou de technologie - la philosophie de Faye fournit un cadre permettant de répondre à ces questions sans renoncer à l'éthique fondamentale qui a défini le continent.

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Par essence, l'archéofuturisme, tel qu'articulé par Faye, n'est pas une simple retraite dans un passé romancé ou un sprint effréné vers un avenir technocratique. C'est une fusion harmonieuse de l'ancien et du nouveau, du passé et de l'avenir. À l'heure où l'Europe se cherche une direction dans un monde qui se globalise rapidement, la vision de Faye sert de phare, éclairant un chemin qui respecte les traditions tout en s'élançant ardemment vers les horizons de demain. Pour ceux qui rêvent d'une Europe enracinée dans son héritage mais qui n'a pas peur de l'avenir, l'archéofuturisme de Faye n'est pas seulement une philosophie, c'est un phare.

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mercredi, 21 juin 2023

Passé/Futur: réflexions sur l'archéofuturisme

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Passé/Futur: réflexions sur l'archéofuturisme

Paul Gottfried

Source : https://chroniclesmagazine.org/featured/the-future-past/

Comme nous l'avons déjà constaté et répété, l'œuvre de Guillaume Faye semble fasciner de plus en plus de lecteurs et de penseurs. Ces derniers jours, un essai sur le concept d'archéofuturisme a été publié par le professeur Paul Gottfried (Etats-Unis), figure de proue d'un paléoconservatisme qui mène une lutte acharnée contre le Deep State et la culture Woke. Ce nouvel article, solidement charpenté, réduira à néant toutes les insultes que Faye a dû subir au cours des deux dernières décennies de sa vie de la part de quelques méprisables individus que nous ne nommerons pas ici. Cet article confondra également les petits grenouilleux qui, malgré le nouvel intérêt mondial pour l'œuvre de Faye, continuent de se prosterner devant leurs infâmes gourous, ceux-là même qui, par leurs avanies, ont conduit Faye à une mort précose. L'histoire donnera tort à la fois aux abjects gourous et aux cloportes quo les vénèrent.

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L'archéofuturisme, concept apparu dans la Nouvelle Droite française dans les années 1970, a été définitivement exprimé par Guillaume Faye (1949-2019), homme de lettres français et nationaliste conservateur. Le livre révolutionnaire de Faye, L'Archéofuturisme, paru en 1998, proposait une vision vaste et percutante. Nous y sommes conduits vers un avenir ébranlé par les guerres, les catastrophes naturelles et la chute de la société moderne. Mais c'est aussi un avenir qui, en fin de compte, apportera un nouvel ordre des choses.

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De toute évidence, la vision archéofuturiste de la fin des temps s'inspire des prophéties bibliques, même si Faye et ses collègues préfèrent le courant néo-païen de la droite européenne, qui prévaut désormais dans les pays latins. Ce futur lointain révèle des éléments hiérarchiques et féodaux et rappellerait certains aspects du Moyen Âge. Cependant, ce qui distingue la société idéale de Faye de toute société antérieure, c'est qu'elle appartient au futur, qu'elle présente des signes de progrès technologique moderne et qu'elle n'est manifestement plus chrétienne.

En tant qu'idéologie, la vision de Faye représente un compromis entre les éléments de la droite révolutionnaire qui exigent une rupture radicale avec le passé archaïque et ceux qui veulent restaurer une société pré-moderne. L'archéofuturisme semble conçu pour donner aux deux parties un peu de ce qu'elles veulent. Il montre un avenir qui, d'une certaine manière, offre un retour au passé. Mais l'époque à laquelle nous revenons est marquée par des caractéristiques modernes et de modernité tardive. C'est ainsi que l'on avance pour revenir à une époque plus stable, qui correspond à l'accent de droite traditionnel sur la hiérarchie et l'autorité.

Cette vision est reconnaissable comme étant celle de Faye, qui était un leader de la mouvance identitaire dans son propre pays. Faye, homme de droite passionné, a rompu avec la Nouvelle Droite française en 1987, lorsque ses dirigeants ont tenté de s'allier avec des groupes pro-islamiques. Faye ne voulait pas de cette alliance avec ceux qu'il considérait comme fondamentalement anti-occidentaux et étrangers à la nation française historique. Et pour lui, l'Occident n'avait rien à voir avec les droits naturels ou la notion d'égalité. Pour Faye, l'égalitarisme était le grand mal des temps modernes, qui a conduit à l'auto-dissolution du monde européen et de ses institutions essentielles. Faye a également été l'un des premiers à évoquer dans son pays le danger de l'"ethnomasochisme" - la haine de sa propre appartenance ethnique - et a peut-être même forgé ce terme.

Sa relation avec l'héritage catholique de la France était en fait assez compliquée, tout comme celle de son contemporain néo-païen Dominique Venner, qui s'est suicidé en 2013 dans la cathédrale Notre-Dame pour protester contre l'islamisation de la France. Bien qu'il se méfiât du christianisme, dont il rejetait l'aspect égalitaire, Faye vénérait le Moyen Âge et faisait référence à la cathédrale de Reims comme étant la réalisation architecturale la plus aboutie de l'homme européen. Sa vision archéofuturiste intégrerait naturellement des caractéristiques médiévales, car Faye n'a jamais cessé d'admirer cette période parce qu'elle avait jeté les bases de l'identité occidentale et européenne en particulier.

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Comme le philosophe de l'histoire allemand Oswald Spengler, Faye associait le Moyen Âge au "printemps de l'homme occidental". Comme Spengler, il identifiait ce type d'homme à une aspiration créative sans limites et à une force intérieure profonde. Mais à l'époque moderne, ces caractéristiques positives avaient été déformées par la subordination de l'Europe à l'impérialisme et au consumérisme américains. Comme la plupart des membres de la Nouvelle Droite française, Faye craignait l'influence américaine plus encore que la domination soviétique ou l'expansion islamique. Il considérait les États-Unis comme le grand unificateur et homogénéisateur, dont la religion de droite post-chrétienne et son culte de la diversité détruisaient l'identité française. Ce que Faye considérait comme véritablement français n'est pas né de la Révolution française, mais était plus profondément enraciné dans le passé français. Cet essentialisme était à la fois français et européen au sens large, et il était censé réapparaître dans le futur archaïque vers lequel Faye disait que l'histoire se dirigeait.

Ce processus progresserait parce que les crises et les bouleversements du présent favoriseraient son épanouissement. Bien que Faye soit clairement de droite, il a également illustré l'étrange situation des marxistes révolutionnaires qui se sont mobilisés pour défendre une cause qui triomphera inévitablement. Dans les deux cas, le croyant est exhorté à se battre pour ce qui est censé gagner, avec ou sans son activisme. Dans le cas de Faye, cependant, la délimitation du futur pourrait avoir été une tentative de trouver un sens à ce vers quoi nous allons, plutôt qu'un jeu avec des lois historiques de fer. Faye pourrait avoir suggéré une issue possible à des difficultés présentes et futures, et pas nécessairement ce qu'il pensait être prédestiné.

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Une autre expression de l'archéofuturisme sous une forme plus sombre se trouve dans le roman futuriste primé de Walter M. Miller Jr., A Canticle for Leibowitz, dont la première édition est parue en 1959. Dans ce livre fascinant, écrit par un adepte de l'histoire médiévale, le lecteur est transporté dans un monastère catholique du sud-ouest de l'Amérique après qu'un cataclysme nucléaire a ravagé la majeure partie de la planète. Les moines qui copient et enluminent les textes datant d'avant l'incendie nucléaire du 20ème siècle, également connu sous le nom de "Déluge de flammes", appartiennent à l'ordre fictif des Albertiens de Leibowitz. Le Leibowitz en question était Isaac Edward Leibowitz, un scientifique juif spécialisé dans les armes, qui a survécu au déluge. Après avoir cherché en vain sa femme, morte dans l'incendie, Leibowitz accepte les ordres sacrés dans l'Église catholique et consacre le reste de sa vie à fonder un nouvel ordre monastique et à aider d'autres moines à copier des œuvres qui ont survécu au déluge.

C'est une tâche extrêmement dangereuse, car Leibowitz et son ordre doivent échapper à la vindicte de la "foule des simplificateurs", qui tente de détruire les précieuses archives du passé. Finalement, Leibowitz tombe entre les mains de ses ennemis et subit le martyre. Peu après, l'Église catholique ressuscitée le canonise. Heureusement, les moines albertiens poursuivent leur travail pendant 600 ans, copiant assidûment les écrits du 20ème siècle qui ont été préservés et qui sont connus sous le nom de "memorabilia". Pendant cette période, il y a un renouveau de la civilisation et une redécouverte scientifique, mais ces réalisations ne durent malheureusement pas. Il y a un autre déluge qui ramène le monde à l'état à partir duquel saint Leibowitz et ses co-moines ont commencé leur travail de transmission.

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Miller a peut-être écrit ce roman comme un acte d'expiation, du moins en partie. Pendant la Seconde Guerre mondiale, il a participé au bombardement américain du monastère médiéval de Monte Cassino, fondé à la fin du sixième siècle par saint Benoît et ses compagnons. Pendant la guerre, les bâtiments du monastère ont été occupés par les troupes allemandes et sont devenus la cible des Alliés. Le roman de Miller souligne la répétition consciencieuse des actions des moines du début du Moyen Âge en Italie, en Irlande, en Espagne et ailleurs en Europe occidentale, qui se sont engagés à préserver les textes anciens. Ces moines ont fini par préserver une grande partie de l'héritage de l'Antiquité païenne, ainsi que des ouvrages bibliques et théologiques chrétiens.

Les moines post-cataclysme agissent de la même manière, en copiant tout ce qui leur reste du passé. Ils traitent également ces textes et leurs auteurs avec révérence, comme des dons divins qu'ils doivent mettre à la disposition des générations suivantes. Leibowitz est vénéré pour son attachement à un monde perdu que les moines tentent de faire revivre en tant qu'héritage littéraire. Et lui et ses confrères moines travaillent face au risque permanent d'être exterminés par des foules de "Simpletons" qui surgissent de partout, brûlent les livres et tuent ceux qui tentent de les préserver.

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Le dernier exemple d'archéofuturisme qui pourrait être pris en considération ici est le roman de William Lind, qui contribue à l'édition de ce mois de Chronicles of American Culture. L'œuvre de Lind porte le titre lourd mais intéressant de Victoria : A Novel of 4th Generation War. Il est écrit sous le pseudonyme de Thomas Hobbes, ce qui pourrait indiquer l'estime de l'auteur pour le philosophe anglais, qui pensait que la guerre était l'état normal des affaires humaines sans la main forte de la société civile. Comme on pouvait s'y attendre, le roman de Lind, publié en 2014, a été raillé par des journalistes woke, qui l'ont qualifié de "gribouillis d'extrême droite". Je pense qu'il s'agit d'un brillant exemple d'archéofuturisme, qui est devenu une forme d'art de droite pour laquelle la gauche a une tolérance zéro. La raison devrait être évidente. Les archéofuturistes provocateurs télégraphient leurs fantasmes réactionnaires à travers des visions futuristes qu'ils présentent comme de la littérature. A côté de ces apôtres de l'ordre restauré, les millennials de Fox News qui célèbrent l'arrivée des républicains transgenres ne semblent être rien d'autre que de vulgaires modernistes tardifs.

En lisant le roman de Lind, il faut suspendre sa croyance en certaines réalités de l'Amérique contemporaine et de ses homologues d'Europe et du Canada. Les troupes de guérilla partisane, qui représentent la guerre de quatrième génération de Lind, n'écraseraient probablement pas les forces armées américaines bien mieux équipées, comme elles le font dans la dernière partie du roman ; pas plus qu'une puissante force de résistance au régime de gauche de Washington ne se concentrerait sur Boston, qui est le centre de la confédération "rétroculturelle" du Nord-Est dans le roman de Lind. De plus, la division sectorielle et idéologique des États-Unis telle qu'elle est présentée dans le livre ne serait pas possible, étant donné la probabilité que l'État profond de gauche et ses forces aient écrasé tout mouvement sécessionniste tentant de s'emparer d'une quelconque partie de leur pays soumis. Après tout, il est purement fantaisiste de penser que des monarchistes russes et allemands (on peut douter que beaucoup de ces raretés existent encore) se donneraient la main pour renforcer les forces conservatrices de la confédération du Nord-Est, qui luttent contre les armées unies de la gauche, approvisionnées par les envahisseurs musulmans, les Nations unies et les félons domestiques habituels.

Ne me laissez pas cacher mes sentiments : j'ai adoré Victoria quand je l'ai lu, et surtout la fin, l'hommage prolongé à "la bonne reine Victoria, monarque ayant régné le plus longtemps en Angleterre" et l'affirmation du "nouvel esprit du temps", qui est en fait une nouvelle ère victorienne adaptée aux circonstances historiques changeantes. J'ai également apprécié la moquerie tout à fait appropriée de Lind à l'égard de notre classe universitaire et la manière désinvolte dont le protagoniste du livre annonce que les forces partisanes de droite viennent d'abattre l'ensemble du corps professoral du Dartmouth College.

Cet événement fictif s'est produit après que ces mêmes armées ont exécuté des djihadistes musulmans enragés qui avaient pris Boston et tué les chrétiens pratiquants de la ville. La vision de Lind sur l'escalade de la lutte entre la gauche woke et ses cibles n'est pas "consensuelle", mais peut être réaliste. Il n'y a aucune raison de penser que nos conflits actuels ne deviendront pas plus acharnés ou que la droite ne finira pas par riposter en masse. Mais je ne suis pas sûr que la gauche, après avoir pris le contrôle de tant de biens fonciers, soit en mesure de s'imposer, et encore moins que ce conflit idéologique se termine par la victoire de la "rétroculture".

Comme dans le cas de l'œuvre fascinante de Faye, Lind nous laisse, après une période d'affliction, une issue heureuse possible pour la droite. Cela correspond à la pensée des archéofuturistes les plus optimistes, qui ne croient pas que la gauche triomphera définitivement et qui voient au moins un certain espoir pour leur camp en fin de compte. Miller, qui présente des pensées plus sombres sur la nature cyclique des événements humains, est d'un autre côté. Il nous dit que même l'héroïsme désintéressé de certaines personnes ne peut pas empêcher d'autres personnes d'agir de manière catastrophique à plusieurs reprises.

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A propos de l'auteur Paul Gottfried

Paul Gottfried est rédacteur en chef de Chronicles : A Magazine of American Culture. Il est également professeur émérite Raffensperger de sciences humaines au Elizabethtown College, où il a enseigné pendant 25 ans, lauréat du prix Guggenheim et docteur de l'université de Yale. Il est l'auteur de 14 livres, dont les plus récents sont "Antifascism : The Course of a Crusade" et "Revisions and Dissents".

mercredi, 08 mars 2023

L'archéofuturisme 20 ans après : ce que Faye nous a permis de comprendre

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L'archéofuturisme 20 ans après: ce que Faye nous a permis de comprendre

Par Adriano Scianca

Source: https://www.ilprimatonazionale.it/cultura/archeofuturismo-quello-che-faye-ci-ha-aiutato-a-capire-82600/

À l'occasion du quatrième anniversaire de la mort de Guillaume Faye, nous reproduisons pour nos lecteurs cet article de l'éditeur Adriano Scianca, publié dans ce journal le 31 mars 2018 [Il Primato Nazionale].

Rome, 31 mars 2018 - À la fin des années 1990, le nom de Guillaume Faye jouissait d'une aura légendaire auprès de quelques lecteurs cultivés, nostalgiques de l'âge d'or de la Nouvelle Droite, mais il était essentiellement inconnu de la plupart, car trop de temps s'était écoulé depuis la splendeur de son œuvre principale, Le système à tuer les peuples, qui remonte au début des années 1980. Lorsque, il y a exactement 20 ans, L'Archéofuturisme est sorti, les deux catégories de lecteurs - ceux qui n'en connaissaient pas l'existence et ceux qui se demandaient ce qu'il était devenu - ont été choquées. Le texte, en effet, était une véritable bombe atomique: par son style et par son contenu. Controversé, exagéré, provocateur, certes, comme savent l'être tous les grands écrivains. Il faut dire que le nouveau Printemps de Faye n'a pas eu beaucoup de fruits: malgré quelques exceptions (Pourquoi nous combattons ?, par exemple), la formule alchimique du succès de L'Archéofuturisme n'a jamais été répétée et les ouvrages suivants de l'auteur ont vite fini par être répétitifs et généralement sans mordant et sans éclat.

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Faye, alliant la puissance de l'archaïque aux suggestions futuristes

L'œuvre de 1998 a cependant fortement marqué l'imaginaire des deux décennies suivantes et n'a pas perdu substantiellement de son actualité. L'initiative de l'éditeur d'Aga, qui vient d'en éditer la réédition, après celle éditée en 1999 par Seb, ancêtre directe de l'actuelle maison d'édition de Maurizio Murelli, est donc plus que bienvenue. La thèse du livre est bien connue, ne serait-ce que pour avoir été entendue ici ou là : il faut unir Evola et Marinetti, le sacré et la technoscience, la puissance des suggestions archaïques et futuristes. La savoureuse petite nouvelle qui clôturait l'essai en donnait une image plastique, avec un fonctionnaire de l'empire euro-sibérien traversant les steppes dans un train à grande vitesse ultramoderne, profitant par la fenêtre de la course d'une meute de loups.

Mais c'est surtout le discours sur l'islam qui va bouleverser les anciens admirateurs de Faye et susciter le débat dans son vivier naturel. Le vieux chantre de la "cause des peuples" contre le système américano-centré a ressurgi de nulle part pour appeler à la guerre contre les musulmans.

Hérésie, trahison, main de la CIA ou du Mossad ? Sur le sujet, comme d'habitude, le point de vue de Faye tend à pousser les concepts à l'extrême, avec quelques tensions et quelques arguments taillés à la hache. Sur tout ce discours, et en général sur le lien entre la question immigrée et la question islamique, la longue recension, non pas de cet ouvrage, mais du suivant, La colonisation de l'Europe, proposée par l'un des principaux compagnons de Faye en Italie, Stefano Vaj (Per l'autodifesa etnica totale, paru dans la revue L'Uomo libero), dans laquelle les ambiguïtés d'un anti-islamisme primaire ont été bien disséquées, reste inégalée.

Vingt ans plus tard, si ce qui semblait être une obsession à l'époque n'a pas acquis les caractéristiques d'une prophétie, il s'en est fallu de peu. Trois ans après L'Archéofuturisme, Al-Qaïda s'est donné la peine de lancer le plus grand défi terroriste de l'histoire aux États-Unis d'Amérique. Et tout le monde, il faut le dire, a commenté à l'époque, non sans raison, que celui qui sème le vent... L'impression était qu'il s'agissait d'une question spécifique aux Américains, à savoir s'ils voulaient voir en Ben Laden une marionnette américaine, ou en faire l'interprète extrême mais conséquent d'une réaction à leur puissance planétaire. Ce n'est que quelques années plus tard que le terrorisme islamiste a commencé à frapper indistinctement les Européens, avec une fréquence et une férocité telles qu'elles ont découragé tout faux drapeau infatigable. Dans les périphéries multiraciales, une haine sourde et impitoyable de tout ce que nous sommes était apparue, bien au-delà de ce que nous disons ou faisons, bien au-delà de nos distinctions, certes fondées et sacro-saintes, entre l'Europe et l'Occident. Faye avait-il donc raison de nous appeler à la croisade ? Il a certainement eu raison de nous faire réfléchir à une question que nous avons toujours abordée selon des coordonnées culturelles vieilles d'au moins un siècle.

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Peu après le retour sur scène de l'ancien néo-droitiste, une réponse pro-islamique à Faye est parue en France : Les Croisés de l'Oncle Sam, de Tahir de la Nive. Mais le plus intéressant dans cet essai, c'est la préface de Claudio Mutti, qui reprend une à une les références culturelles de Faye, en montrant comment, au fil des années, elles ont manifesté de la sympathie pour l'islam : comment peut-on "unir Evola et Marinetti" contre Mahomet, alors que tous deux ont fait l'éloge de la religion musulmane, tout comme Nietzsche, Heidegger, etc. La réplique a du sens, mais elle repose sur une erreur fondamentale : l'idée d'appliquer à l'islam "chez nous" les mêmes catégories d'interprétation qu'à l'islam "chez eux". Les clés herméneutiques devaient être mises à jour, en tenant compte d'une "minorité" de moins en moins "minoritaire" qui, en Europe, se montre très peu encline à discuter du soufisme et de Guénon, préférant travailler à s'approprier un continent qu'il n'y avait pas de raison de ne pas considérer comme une future terre d'islam. Mais force est de constater que toute réflexion sérieuse sur le sujet fut vite contrariée par les élans d'une droite fallacieuse, occidentaliste, triviale, hostile à la religion et à la tradition musulmanes plus qu'à toute autre chose.

Bref, la question reste à penser. Mais pour cela, il faudrait savoir sortir des slogans adolescents, abstraits et autoréférentiels ("les centres commerciaux sont pires que les mosquées", a-t-on entendu récemment, ce qui ne veut strictement rien dire), tout en gardant la tête froide pour imposer sa propre vision des choses, ni instrumentalisée, ni exploitable, ni louée par les trublions de tous les débats, ni empruntée aux bonimenteurs médiatiques, compréhensible par le grand public mais sans facilités sloganistiques. Le passage, on le comprend bien, est étroit. Mais savoir le repérer, c'est ce qui distingue les révolutionnaires des marionnettes.

Guillaume Faye, l'homme des provocations volcaniques. Les souvenirs de Stefano Vaj

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Guillaume Faye, l'homme des provocations volcaniques. Les souvenirs de Stefano Vaj

Source: https://www.ilprimatonazionale.it/approfondimenti/guillaume-faye-nietzschanesimo-pratico-stefano-vaj-107728/

A l'occasion de l'anniversaire de la mort de Guillaume Faye, nous republions cet article de Stefano Vaj

Rome, 11 mars 2019 - "Seule la pensée radicale est féconde. Parce qu'elle seule crée des concepts audacieux qui brisent l'ordre idéologique hégémonique et permettent de sortir du cercle vicieux d'un système de civilisation qui s'est révélé être en faillite. Pour reprendre la formule du mathématicien René Thom, auteur de la Théorie des catastrophes, seuls des "concepts radicaux" peuvent faire basculer un système dans le chaos - la "catastrophe" ou le changement d'état violent et brutal - pour donner naissance à un autre ordre".

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Guillaume Faye représente la déclinaison intellectuelle et polémique, et l'exemple, d'un nietzschanisme pratique qui ne voit d'intérêt à être dans le monde que pour le comprendre, et ne voit d'intérêt à le comprendre que pour le changer. Le respect muséal des expériences passées, l'érudition suffisante, la précision philologique, la peur du changement, la recherche de la popularité personnelle, la navigation astucieuse parmi les préjugés de son public, le moralisme lugubre du militant sévère, n'ont jamais eu leur place dans cet enthousiasme panique : c'est ce qui m'a toujours attiré vers cet ami et cet interlocuteur dont l'activité et la pensée ont fortement conditionné ma propre parabole intellectuelle.

Conditionnement largement dialectique, car une formation et une sensibilité largement communes ne nous ont jamais empêchés de défendre des conclusions souvent différentes, parfois opposées, sur divers sujets, en partant cependant d'hypothèses et de sensibilités partagées, en partant de l'idée que les provocations doivent être acceptées et abordées sérieusement quelle que soit leur origine, et que dans chaque problème, dans chaque évolution passée ou présente, se cache une opportunité à côté du danger qui, autrement, ne se serait jamais manifesté. Mais le conditionnement était si important qu'il ne serait pas exagéré de dire que j'ai appris le français pour traduire Le système à tuer les peuples.

Ainsi, même après que nos contacts personnels et téléphoniques soient devenus plus sporadiques, mes deux principaux écrits, Investigation of Human Rights et Biopolitics. The New Paradigm, en plus d'être truffés de citations de Faye, ne représentent rien d'autre que des développements parallèles de préoccupations communes, et un troisième texte - qui m'a causé quelques problèmes, notamment en raison de la décision de celui qui l'avait initialement publié de l'intituler Pour une autodéfense ethnique totale - représente en fait une réinterprétation critique des questions soulevées dans La colonisation de l'Europe, dont je ne partage toujours pas les évaluations concernant le rôle de l'islam, mais qui reste l'un des textes fondamentaux que nous devons aborder lorsque nous examinons la question de l'immigration non européenne sur notre continent.

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De même, mon engagement plus récent dans le monde du transhumanisme, et en particulier dans l'AIT et dans l'associationnisme identitaire et fédéraliste de Terra Insubre, dont les représentants occupent aujourd'hui des positions institutionnelles et académiques très importantes en Italie, sont à leur tour le reflet d'intérêts partagés qui, au moment même de la mort de Faye, arrivent en quelque sorte à maturité dans la conscience collective d'au moins des minorités significatives de notre société, avec des résultats qui commencent à transcender la sociologie et le mouvement des idées pour entrer dans l'histoire.

Dans ce cadre, les positions et les provocations exprimées et promues de façon volcanique par Faye pendant plus de quarante ans ne sont pas étrangères au changement de perspective qui s'opère, même si lui-même ne prend pas tout ce qu'il dit plus au sérieux que Nietzsche ou Marinetti, l'essentiel étant d'appeler le lecteur ou l'auditeur à "mettre la pensée en mouvement", et à explorer des voies qui l'amènent à considérer autrement ce qu'il croit savoir ou avoir compris des processus passés et en cours, plutôt que de se perdre dans des détails ou des préoccupations documentaires, pour lesquels notre auteur a d'ailleurs manifesté son mépris en prenant l'habitude d'introduire régulièrement dans toutes ses œuvres une seule fausse source, inventée de toutes pièces !

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Je ne suis donc pas convaincu par ceux qui ne lui pardonnent pas d'associer, surtout dans des ouvrages plus directement liés à l'actualité politique, des intuitions profondes à des hypothèses ou des démarches invraisemblables et farfelues, voire dangereusement ambiguës, et parfois contradictoires par rapport à des thèses tenues simultanément dans le même texte - comme c'est le cas pour une bonne partie du livre sur la Nouvelle question juive, qui a attiré les foudres d'une grande partie du monde juif et de la totalité des cénacles de l'antisémitisme primaire, et que j'ai été surpris et quelque peu gêné de lui dédier. Je continue donc à considérer son rôle comme précieux et décisif, même dans sa production la plus discutable, et j'ai de la chance que nous ayons appris à nous connaître et que nous ayons forgé une amitié faite avant tout d'un attachement à des valeurs communes.

Des valeurs qui restent exprimées surtout dans les parties plus théoriques et moins connues, mais non moins provocantes, de son œuvre, comme Per farla finita con il nichilismo, une analyse pas toujours fiable mais brillante de la pensée de Heidegger publiée en italien grâce à Francesco Boco, ou Futurismo e Modernità, publié à l'origine par Divenire, une revue d'études interdisciplinaires sur la technologie et le post-humain, qui mérite certainement d'être redécouverte.

Stefano Vaj

Ouvrages de Stefano Vaj:

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vendredi, 03 février 2023

Guillaume Faye et la renaissance du gramscisme de droite

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Les oubliés: Guillaume Faye

La renaissance du gramscisme de droite

Lorenzo Cafarchio

Le philosophe français Guillaume Faye est l'idéologue de l'"archéofuturisme" : il soutient que la technologie et la science ne sont pas diaboliques tant que le passé n'est pas effacé. Il voulait conquérir les consciences à travers le cinéma, l'art et la littérature

"Mais les jours où j'oublie sont terminés, les jours où je me souviens sont sur le point de commencer". C'est ainsi que Quentin Tarantino fait parler Ringo, joué par l'acteur américain Tim Roth, dans le film Pulp Fiction. Ainsi est née notre rubrique Les oubliés. Ici, l'oubli prend fin, la mémoire s'allume. Les hommes et les femmes de culture ensevelis sous les décombres du progrès retrouvent la lumière, ils reprennent la parole. Le troisième épisode présente le philosophe français Guillaume Faye.

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Le salut de l'humanité est définitivement une expression vide de sens. Dans les premiers rivages abordés par la chronique Les Oubliés, nous avions accosté dans les ports placides et réfléchis d'Oriani et de Berto, cette fois, après avoir traversé la frontière alpine, nous arrivons au pied de la Tour Eiffel. C'est Guillaume Faye qui nous parle et il le fait, malgré son décès le 6 mars 2019, encore haut et fort. Sur son bureau sont éparpillés des notes, des interviews et des livres. Les pensées du philosophe s'écoulent vers l'avenir. Il a animé la Nouvelle Droite française, et en fit partie de 1970 à 1986 - il la quittera en claquant la porte et en tournant le dos à Alain de Benoist: désaccords sur des thèmes fondamentaux - et fut parmi les principaux théoriciens du GRECE (Groupement de Recherches et Etudes pour la Civilisation Européenne). Le journaliste Manilio Triggiani, dans un portrait paru dans les colonnes de Barbadillo, le décrit comme un orateur impétueux doté de superbes talents de discoureur. "Il a parlé du gramscisme de droite, de la conquête des consciences par le cinéma, l'art, la littérature et la pensée politique". Le Système à tuer les peuples (publié pour la première fois en Italie en 1983 par les Edizioni dell'Uomo Libero et réédité en 2017 par la maison d'édition AGA de Maurizio Murelli) est devenu un texte charnière pour au moins deux générations de jeunes Européens. Dans la préface de la dernière édition, Robert Steuckers prévient, avant la lecture, que si le peuple a "oublié ses valeurs, le peuple meurt parce qu'il ne peut plus agir selon ses propres lois intérieures. Le système l'a tué". La tension morale est en sommeil, la famine est partout. La puissance des lignes de Faye est toujours vivante, intacte, après quatre décennies. La matrice qui nous entoure donne un aperçu de son vrai visage, après tout "un employé de banque singapourien est plus occidental qu'un paysan breton qui parle sa langue et suit sa culture ancestrale. L'un fait partie du Système, l'autre non". Tel est le choix. Le choix de la conscience, rien d'autre en dehors de cela.

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"Le plus inquiétant". Le philosophe ombrien Adriano Scianca - qui a édité le texte Dei e potenza (éditions Altaforte), un recueil d'écrits de l'auteur français - a défini Faye de cette manière. La conscience de l'Europe, contre l'Occident castrateur. Le plus dérangeant parce qu'il était capable de regarder au-delà du conservatisme stérile de pensée faible. Capable d'imaginer Marinetti et Evola marchant bras dessus bras dessous. Mélangeant "les technosciences les plus avancées et les valeurs archaïques, dans une société à deux vitesses: une élite qui aura accès aux technologies futuristes coexistera avec une masse revenue à un mode de vie néolithique".

Telle est la photographie radieuse de Scianca. Car lorsque les héros sont fatigués, il est temps d'intervenir, de chercher dans l'histoire et le mythe ce que nous voulons être. C'est nous, mus par le temps de l'action, qui définissons l'avenir. "Que les créateurs de fausses jeunesses soient sur leurs gardes : tant qu'il y a ceux qui veillent, tout est possible. La jeunesse, un jour ou l'autre, peut l'entendre". L'appel infini - déclenché par un article paru dans la revue Éléments en octobre 1982 - est un magma qui coule sous les pieds de générations anesthésiées par le chloroforme de la société.

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Nous sommes les bâtisseurs de l'âge à venir. "Il nous appartient donc, à nous qui vivons dans l'interrègne, selon la formule de Giorgio Locchi, de préparer dès maintenant la conception-du-monde de l'après-catastrophe". L'archéofuturisme (AGA) est l'essence de l'archaïsme et du futurisme qui nous accompagne depuis plus de vingt ans. Depuis que Guillaume Faye, dans une seconde jeunesse littéraire et philosophique, est réapparu au seuil de l'an 2000 en crachant au visage de l'actualité. La propension à l'insignifiance de tout ce qui nous entoure résonne dans le vide. La modernité est passatiste. Nous devons embrasser les "valeurs anti-individualistes" qui "permettent la réalisation de soi, la solidarité active, la paix sociale, là où le pseudo-individualisme des doctrines égalitaires crée la loi de la jungle".  Stefano Vaj, l'agitateur culturel qui a le plus permis la diffusion de la pensée de Faye en Italie, a esquissé les contours de l'écrivain transalpin dans un article au titre grandiloquent Per l'autodifesa etnica totale - divisé en trois parties et paru dans la revue L'Uomo Libero en 2001 - décrivant son oraison comme hypnotique. "Il ressemblait quelque peu, physiquement et dans ses mouvements, au jeune Feddersen, joué par Gustav Froelich, le protagoniste du film Metropolis de Fritz Lang. Ses dialogues donnaient l'impression d'un "'fanatisme lucide' dans lequel se mêlaient des réminiscences de Che Guevara, D'Annunzio, Ignace de Loyola et Goebbels". En un mot, de la dynamite. Après tout, en écoutant Faye, il pouvait aussi arriver, entre autres scénarios, de se retrouver dans le film porno dont il devait être la vedette à un jeune âge. Une légende qui s'alimente, comme le roi du fouet Udo Kuoio, né Andrea G. Pinketts. 

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La dernière interview italienne, en 2019, a été recueillie par Francesco Boco (qui a édité le texte du Français dans Per farla finita col nichilismo publié par la maison d'édition SEB) et Andrea Anselmo pour Il Primato Nazionale. Un Faye, qui, au final, partait à la recherche d'une "société archéo-futuriste" parmi les gratte-ciel d'"Israël, de la Chine ou du Japon". Désemparé par le fait que "l'Europe ne peut plus concevoir de grands projets historiques". Parce que la connexion est ici. Nous avons éteint les lumières de notre vaisseau spatial, l'horizon est resté notre point de mire, tandis que les étoiles qui veillent sur nous doivent à nouveau devenir le but. La vision prométhéenne de Faye est prête à voler le feu des idées pour revigorer la flamme de l'Europe contre celle de l'Occident en déclin catastrophique.

Lorenzo Cafarchio

vendredi, 22 juillet 2022

PROMETHEICA : la voie de l'action

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PROMETHEICA : la voie de l'action

Luca Leonello Rimbotti

Source: https://www.centroitalicum.com/prometheica-la-via-dellazione/

Le prométhéisme est la volonté surhumaine (prométhéenne, précisément) de dépasser l'indécision et la peur immobiliste en se jetant à corps perdu dans la postmodernité radicale, en concevant l'action comme l'élément simultané de la pensée.

Dans le désert inintelligent et dans le silence des cultures éteintes par la brutalité de la consommation, nous tendons l'oreille et entendons le cri du contraste. Quelque chose qui appelle à la mobilisation. Qui avec des mots anciens en forme de nouveaux. Contre l'immobilisme substantiel du présent, qui ne sort pas des hypocrisies autour de la psycho-pandémie ou de la semi-guerre, et qui véhicule des modèles illusoires d'un dynamisme de rat, il faut rassembler des idées, les enflammer volcaniquement et les jeter incandescentes dans les mains des nouveaux artisans de la volonté européenne. S'il y en a encore, quelque part, un, mais un qui ne trahit pas, qui n'a pas de maîtres, qui ne veut que lui-même.

Au-delà des faits, il y a l'espoir de forger des esprits et des caractères capables de porter un regard sur les événements. Il n'est même pas important de comprendre réellement ce qui se passe, car tout se passe dans le circuit du pouvoir financier et cosmopolite. Vouloir trop comprendre l'ennemi, après tout, c'est aussi accepter de lui ressembler, d'être infecté par ses éruptions.

Cependant, si la culture n'existe pas aujourd'hui en Occident/Europe, il existe une contre-culture. C'est à ce tourbillon de la surface de l'eau qu'il faut s'intéresser. En bas, un animal idéologique nourri par les abysses est peut-être sur le point d'émerger.

Si nous prenons le magazine Prometheica, qui se présente comme une "revue d'études sur le surhumanisme, la technologie et l'identité européenne", nous nous rendons immédiatement compte qu'il existe quelque part un désir barbare de contraste. On agite des mots d'indignation, on se moque du cosmos des fausses terreurs dans le laboratoire duquel l'homme-masse est amené à croupir, on constate avec un acte volontariste que la société actuelle, dense de mensonges, n'est qu'un cadavre décomposé dans des eaux usées, psychédéliques.

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Un groupe d'intellectuels aguerris a entrepris de fournir des armes d'opposition à ceux qui acceptent de mettre la main à la pâte pour se révolter. Et c'est la main. Concevoir l'action comme l'élément simultané de la pensée. Ainsi, nous pouvons imaginer le dépassement du présent et l'érection d'une machine oppositionnelle en recourant à la totalité des forces mobilisables par l'homme d'opposition. Et précisément dans le sens avec lequel Heidegger a rappelé un jour quel était le sens de la main : "penser, c'est agir dans ce qui vous est le plus propre, si agir signifie prêter la main à l'essence de l'être". À l'époque où l'on apprend d'abord à taper sur le clavier, puis à parler, le symbole exclusif de la main - comme organe maîtrisant la techne primordiale - tombe à l'eau.

Le premier numéro du magazine Prometheica, publié au Solstice d'hiver de 2021, contenait un Manifeste du prométhéisme. Le spectre idéologique de la nouvelle subversion y était présenté. Quelques points essentiels, à la manière des manifestes du vingtième siècle.

Le premier point a déjà clarifié les idées : la technologie, dans toutes ses déclinaisons, y compris l'intelligence artificielle, le génie génétique, la robotique, etc., est non seulement acceptée, mais poussée vers le toujours plus loin. Se jeter à corps perdu dans les applications techniques et technologiques sans les freins inhibiteurs des obscurantismes monothéistes et moralisateurs : voilà la nouvelle frontière de ceux qui lient les origines primordiales doriques de notre civilisation à son destin faustien, la condamnant à gérer dans les proportions les plus denses tout ce qui est connaissance, action, mythe, rituel, symbole.

En fait, ce point et les dix autres du Manifeste illustrent la volonté surhumaine (prométhéenne, précisément) de dépasser l'indécision et la peur immobiliste en plongeant à corps perdu dans la postmodernité radicale. Ces nouveaux argonautes de l'ultraïsme voient notre destin dans l'accélération évolutive du processus de désintégration dans lequel se tord la civilisation actuelle, poussant à la limite les possibilités d'engendrer par tous les moyens l'homme nouveau invoqué sans succès par les révolutions du passé.

C'est l'homme amélioré, et voyons si au moins cela fonctionne.

Serviteur des annonces de Nietzsche, réalisateur des rêves éveillés que portent les traits saillants de notre haute histoire : l'au-delà de la tenue, l'au-delà du lancer, une constance tourbillonnante, et voici l'homme dessiné par les intellectuels spartiates de "Prométhée", qui laisse entrevoir ses contours.

L'élevage de l'homme nouveau naît essentiellement du conflit, cette soupe primordiale bouillonnante dans laquelle se forment des créatures supérieures qui s'extraient du magma et deviennent un gigantesque organisme biopolitique dans lequel bête et dieu se confondent. Des éclairs d'expérimentation futuriste surgit l'individu, qui résume toutes les formes du passé : l'anarque, l'unique, le rebelle, le scientifique, le mystique, le soldat politique : combien d'horizons jamais atteints ? Et combien d'autres doivent surgir à chaque aube, avant que nous ne voyions la civilisation de l'amas libéral s'effondrer ?

Le manifeste de Prometheica veut une Europe des forts, le pays "dans lequel le feu de la technologie a brûlé le plus brillamment". Et donc un impérialisme spatial européen, une "souveraineté technologique totale", un biocommunautarisme qui observe et évalue avec une froideur naturelle même les mondes périlleux de la génétique, peut-être pour redresser les démographies paralysées par la prospérité.

La maîtrise de l'espace tellurique dans lequel la révolution faustienne doit s'accomplir ne laisse aucun champ libre : la souveraineté et l'autodétermination sont revendiquées comme des absolus. Tout ce qui est technique doit être mis à la disposition du nouvel homme : de l'écosystème aux méthodes de coexistence, de la grande politique aux nouvelles ressources. La bataille préconçue oppose l'homme bas du présent, hétéro-dirigé en sourdine par des usuriers sans terre, au grand homme du futur proche, doté d'une volonté organisée et libre.

L'organique de la vie biologique est marié à la puissante machinerie d'un cerveau qui fixe, veut et crée ; il est flanqué de l'inorganique, devenu événement et philosophie : la civilisation n'a-t-elle pas toujours été une heureuse combinaison de la main de l'homme et de la nature, de l'organisme qui croît et de l'instrumentation qui donne du pouvoir ? Et la culture, d'où tout jaillit, n'est-elle pas précisément une culture, d'où tout porte des fruits ? Sans la correction technique de la volonté humaine, la nature, laissée à elle-même, déchaîne la cruauté, l'absurdité, la contradiction ; c'est alors que tout se décompose vigoureusement en amas d'enchevêtrements irrésolus et sans logique, plongeant dans le chaos. La technique faustienne, dont l'homme européen - pour le meilleur et pour le pire - est l'excellence suprême, c'est l'ordre, la discipline irriguée des besoins et l'expérimentation des attentes, ce qui n'offense pas mais flatte le dieu ; c'est la complicité avec la création, c'est le défi à la mort.

Francesco Boco a écrit que "l'être humain s'expose ainsi au risque suprême, expose sa nature déficiente et puissante aux éléments et à l'adversité et accepte le défi capital de devenir lui-même ou de périr". Sur la corde de Nietzsche où sont tendus le plus et le pas encore, l'homme prométhéen ne doit en vérité ni accélérer ni retarder la dissolution. Au contraire, il doit la "transcender". Il s'agit d'un mot : comment faire ? "La modernité doit être transcendée", écrit Adriano Scianca, "c'est-à-dire traversée, même dans ce qu'elle a de plus fictif et aliénant, mais avec une traversée toujours surmontée, laissant les fétiches de l'humanisme occidental dans le rétroviseur".

Un nouveau nihilisme actif ? C'est un fait que ce modèle de modernité nous souille rien qu'en le regardant ; le combattre, c'est aussi se souiller de sa laideur.

En jouant sur les dangers que l'on court en manipulant les extrêmes de la technologie et de la technique, on vit dangereusement, certainement, on est en contact avec le risque radical. C'est ce qui arrive, par exemple, à ceux qui parcourent les méandres de l'imaginaire : le héros robotique cache les possibilités d'un "dieu tonnant", comme l'écrit Carlomanno Adinolfi dans le deuxième volume de Prometheica (Equinoxe de printemps 2022), selon le binôme classique tradition/innovation japonais. Mais une telle "voie herculéenne" cachera toujours, pour l'homme massifié, un ensemble de dangers effrayants. Donc, une aristocratie des suprêmes, insensible au calcul et au risque ? Les indomptables Marinettistes ? Un futurisme ultra-social, ultra-vital ?

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Cependant, il existe un danger qui n'est pas seulement ressenti dans l'âme basse de l'individu indifférencié. L'homme massifié n'est pas le seul à avoir du nez pour les insidiosités qui se cachent dans l'illimité. Une fois la société usuraire des sectateurs cosmopolites liquidée, par on ne sait laquelle des catastrophes possibles, l'homme faustien aura en effet devant lui, une fois de plus, une énigme titanesque à démêler. Celle qui a divisé Alexandre, dévoreur d'espace et d'expériences, de ses généraux macédoniens, désireux à la fin d'un nòstos ulisside.

Les Prométhéens d'aujourd'hui et de demain devront réaliser le mariage impossible du fini avec l'infini.

lundi, 20 juin 2022

Faye: une vie faustienne entre Evola et Marinetti

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Faye: une vie faustienne entre Evola et Marinetti

Par Alfonso Piscitelli

Source: https://culturaidentita.it/faye-vita-faustiana-tra-evola-marinetti/

La vie de Guillaume Faye a été très haute en couleurs: provocations politiques, alcools forts, sexe, idées fortes même poussées à l'excès. Une vie de "sexe, de drogue et de nouvelle droite", pour paraphraser un vieil adage. Puis la mort est venue à lui dans toute sa gravité, s'annonçant comme l'ambassadrice de la douleur, au cours d'une longue maladie. Ceux qui le connaissaient disent qu'il a affronté son crépuscule avec le même esprit faustien qui l'animait lors de ses années vigoureuses: faire des plans jusqu'à son dernier jour, qui fut le 7 mars 2019.

Faye cultivait en lui ce que les romantiques appelaient le "Streben", une envie inépuisable d'aller toujours plus loin, de chercher à se surpasser, de se fixer un but dans l'infini. C'est cette même impulsion qu'Oswald Spengler voyait dans les cathédrales gothiques, avec leurs flèches projetées vers le ciel; et qu'Adriano Romualdi voyait dans les entreprises spatiales des années 1960. Dépassant le traditionalisme qui avait eu Guénon comme maître en France, Faye écrit dans son livre-manifeste L'Archéofuturisme qu'il faut réconcilier Evola et Marinetti, c'est-à-dire la référence à des racines profondes qui ne se figent pas, d'une part, avec un élan d'innovation et de créativité, d'autre part, celui de l'Homo Faber. En revanche, si notre tradition est celle des Européens apparus à l'aube de l'âge du fer sur des chars de combat (... les vaisseaux spatiaux de l'époque), alors il serait incohérent avec nos origines et donc "anti-traditionnel" de devenir immobilistes ou d'idolâtrer une quelconque période (figée) du passé comme le font les traditionalistes enfermés dans les nombreux cercles mentaux de la nostalgie (médiévistes, bourbonistes, néo-fascistes, papalistes, néo-païens...).

Certes, Faye édulcore son épopée historique par le haut degré de ses provocations: il imagine des mutations génétiques à la Marvel, il invoque le retour à des coutumes archaïques qui se concilient en même temps avec les technologies les plus audacieuses. Dans tout cela, il était également capable de faire des prédictions téméraires. Au milieu des années 1990, la Russie était à genoux, au bord de la dissolution, mais Faye a compris que le point cardinal qu'est l'Est pouvait devenir un point de référence pour la rédemption européenne et offrir un solide antidote à la crise de l'Ouest.

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Le jumeau italien de Faye était Giorgio Locchi, son maître et un auteur hélas oublié. Comme Locchi, Faye a cultivé le goût de briser les règles du langage "politiquement correct".  Dans Le Système à tuer les peuples, en 1981, Faye avait déjà déclaré que la mondialisation ouvrait la boîte de Pandore de tous les maux ; dans La colonisation de l'Europe, il a répété son refus catégorique du "remplacement ethnique" de l'Europe et de la création de zones densément islamisées sur le continent. Dans Avant-guerre, écrit au lendemain du 11 septembre, il annonce, avec une exagération polémique évidente, l'avènement d'une période hobbesienne de bellum omnium contra omnes : un conflit interethnique à la manière du Rwanda. D'accord, il exagérait....

Mais il faut aussi ajouté qu'il a exercé l'art de la provocation par rapport à son propre milieu initial, qui était fondamentalement l'extrême-droite plutôt que la nouvelle droite d'Alain de Benoist. À un moment donné, il a écrit que nous devons cesser d'accuser les Juifs de tous les maux du monde et mettre un terme au négationnisme. Cette sentence lui a apporté plus d'ennemis et - on peut l'imaginer - encore plus de plaisir de goliard.

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Comment considérer un auteur qui, à chaque page, conteste l'équivalent français de la Loi Mancino et s'attire en même temps l'accusation d'être un "sioniste"? On serait tenté de le qualifier de farceur, au mieux de boute-en-train. Il suffit cependant de réfléchir à ce passage de L'Archéofuturisme pour comprendre qu'il y avait un Logos derrière son dionysisme politique: "Il faut se réconcilier", écrit Faye dans ce livre publié au seuil fatidique de l'an deux mille, "il faut réconcilier Evola et Marinetti ; il faut penser ensemble la techno-science et la communauté immémoriale, la communauté traditionnelle". Jamais l'un sans l'autre. Considérez l'homme européen à la fois comme le deinatatos ("le plus audacieux"), le futuriste et, simultanément, l'être de longue mémoire. À l'échelle mondiale, l'avenir exige le retour des valeurs ancestrales, et ce pour la "Terre entière".

Il est difficile pour quelqu'un comme Faye de formuler le souhait funéraire: "Repose en paix". On dirait plutôt : "Ruhe im Streben".

dimanche, 19 juin 2022

Le futur post-apocalyptique du fer et du feu

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Le futur post-apocalyptique du fer et du feu

Recension de : L'archéofuturisme de Guillaume Faye

Par Martín López Corredoira (2020)

Source: https://disidentia.com/el-futuro-postapocaliptico-de-hierro-y-fuego/

Aujourd'hui, le 7 mars, un an s'est écoulé depuis la mort de Guillaume Faye, un penseur politique au caractère révolutionnaire marqué et difficile à classer. Faye sauve l'esprit des grands réformateurs sociaux et abandonne les accommodements bourgeois placides de la politique démocratique d'aujourd'hui. Il est généralement classé comme appartenant à la droite radicale, en raison de ses origines et de ses propositions anti-progressistes agressives et politiquement incorrectes, mais il y a en lui des éléments qui vont bien au-delà des postulats de la politique néo-conservatrice, et il peut être classé comme un révolutionnaire qui se situe dans le monde des idées utopiques plutôt que comme un pragmatique politique qui vit dans la réalité d'aujourd'hui et cherche à attirer quelques millions de voix avec des propositions qui plaisent à certains secteurs de l'électorat.

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L'un de ses ouvrages les plus emblématiques parmi sa vaste production est un livre qui a été récemment traduit en espagnol sous le titre El arqueofuturismo ; il existe plusieurs éditions disponibles sur le marché ; je prends ici comme source de citations la traduction publiée par Ediciones Titania. L'original français, L'Archéofuturisme, a été publié en 1998 par l'Æncre à Paris. Il existe quelques critiques du livre publiées en espagnol, par exemple par Juan José Coca dans Posmodernia ou sur le site de la Fuerza Nacional Identitaria au Chili. L'impact de l'œuvre a néanmoins atteint beaucoup plus de langues et de régions de la planète, étant reconnu comme une menace parmi ceux qui jouissent de l'existence bourgeoise et atone des démocraties libérales.

Voyant venir la fin de notre forme de civilisation, qui succombera à des cataclysmes planétaires (crises financières, pollution incontrôlée, effondrement des systèmes éducatifs, stupidité générale croissante,...) l'auteur prépare le monde post-apocalyptique, le nouvel âge de fer et de feu: celui de l'archéofuturisme, synthèse dialectique des valeurs archaïques (famille, spiritualité, séparation sexuelle des rôles, hiérarchie,...) et de la technologie futuriste, des principes apolliniens et dionysiaques. Il prône une société future dans laquelle la société est divisée en deux groupes: un groupe majoritaire voué à une économie de subsistance rurale et artisanale pré-technique, liée à une religion et des superstitions primitives; et une élite minoritaire qui conserve le pouvoir économique techno-scientifique, au sein d'un agnosticisme païen. Sa méthode est la pensée radicale: "Seule la pensée radicale est fructueuse. Car elle seule peut créer des concepts audacieux qui brisent l'ordre idéologique hégémonique et sortent du cercle vicieux d'un système de civilisation défaillant".

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L'après-naufrage peut donner lieu à une guerre entre identités, mais il peut aussi s'agir d'une grande période de paix dans laquelle renaîtront d'autres cultures qui, au loin, regarderont l'Europe parmi ses ruines avec admiration et fascination, tout comme nous regardons aujourd'hui les vestiges de l'Empire romain ou de l'ère pharaonique en Egypte antiques.

À mon avis, il existe de nombreux éléments courageux qui révèlent l'intelligence de l'observateur pertinent que fut Faye. Quelques citations notables : "Greenpeace et les idéologues correspondants (...) politiquement ultra-corrects et totalement complices du système" ; "l'égalitarisme utopique et obstiné (...) conduit l'humanité à la barbarie et à l'horreur économique, par ses contractions internes" ; "Le paradigme de l'égalitarisme matérialiste dominant-une société de consommation démocratique pour dix milliards de personnes au XXIe siècle sans pillage environnemental généralisé-est une pure utopie" ; "la démocratie parlementaire moderne (...) dictature des bureaucraties (...) est une utopie". ) dictature des bureaucraties et des requins mercantiles" (pour paraphraser le politicien britannique Peter Mandelson) ; "l'introduction des hypertechnologies ne nous conduit pas vers un plus grand égalitarisme (comme le croient les apologistes imbéciles de la pan-communication, grâce à Internet), mais vers le retour de modèles sociaux archaïques et hiérarchiques" ; "Le levier de cette manipulation, dont la bourgeoisie intellectuelle et artistique naïve est la victime, est une hypertrophie monstrueuse et irresponsable de 'l'amour du prochain comme de soi-même', une apologie de la faiblesse, une dévirilisation et une auto-culpabilisation pathologiques. Il s'agit d'une sous-culture de l'émotion facile, un culte de la décadence destiné à débrider les esprits européens" ; "le sport (...) fait partie du monde du show-business et est le nouvel opium du peuple" ; "les fêtes (...) financées artificiellement par l'État, comme des explosions d'hybrides déstructurés qui agissent comme une drogue collective" ; "la civilisation occidentale s'est considérablement affaiblie lorsqu'elle a donné une valeur absolue à un sentiment névrotique : l'amour. (...) Aujourd'hui, la moitié des mariages se brisent parce qu'ils sont basés sur un sentiment d'adolescents amoureux, éphémère, qui disparaît rapidement. Les mariages durables sont ceux qui sont calculés".

Il a un relent de la "nouvelle droite" française, bien sûr, car l'auteur a appartenu à ce vivier, même s'il a fini par le désavouer. Plus encore, il désavoue la gauche, qu'il juge impuissante à affronter le capitalisme et qu'il accuse de devenir une classe bourgeoise qui ne défend pas les plus démunis, mais plutôt une classe moyenne de salariés et une série de valeurs égalitaires (féminisme, immigrés, homosexuels,...) qui nous mènent au désastre. Bien qu'avec des airs politiques plutôt que philosophiques, je vois en Faye un digne héritier de la philosophie au marteau de Nietzsche. Les mêmes éléments sont présents chez Nietzsche, Spengler ou les penseurs classiques qui ne se promenaient pas avec un bandeau sur les yeux. Les politiciens et les philosophes s'occupent d'idées sociales, mais les premiers connaissent peu la réflexion et beaucoup la démagogie; les politiciens parlent pour leur temps, les philosophes s'occupent de questions pérennes. En ce sens, c'est une bonne chose que certains penseurs politiques s'approchent de la pensée intemporelle de la philosophie, même si c'est dans son style, plutôt que de se soucier d'occuper quelques sièges dans un congrès.

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Faye va plus loin que les autres politiciens qui défendent l'identité européenne face à l'immigration débridée en prédisant un déclin imparable sans solution. Son rejet de l'immigration et, plus particulièrement, de la religion musulmane, me semble comporter certains éléments raisonnables: on entrevoit ce que sera le destin de notre continent, à savoir être le réceptacle migratoire de grandes hordes de barbares venus d'autres régions du globe, qui n'ont pas su se contenir sur le plan reproductif et fuient la misère. Cependant, d'autres éléments montrent une certaine animosité infondée envers le monde musulman. Je constate un manque d'objectivité dans l'évaluation de la valeur des différentes civilisations. Il considère comme acquis que l'histoire donnera raison à l'homme blanc européen et qu'il doit continuer à préserver son hégémonie comme il l'a fait au cours des derniers siècles, ce qui me semble partiellement myope.

Quant à sa proposition futuriste, elle relève à la fois de l'utopie et de la prédiction fataliste. Ce n'est pas l'avenir que nous souhaitons tous, mais l'un des futurs possibles. La spéculation sur une future civilisation économique euro-russe blanche à deux vitesses, imperméable à l'immigration d'autres peuples, est un projet politique possible, mais non sans conflit avant qu'il ne devienne réalité.

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Utopies mises à part, ce qui me frappe le plus est peut-être la prophétie dystopique d'un avenir post-apocalyptique de fer et de feu. Selon l'auteur, les temps difficiles qui s'annoncent ne seront guère meilleurs lorsque la tempête du chaos fera rage. Au-delà de ce que dit le livre de Faye, on devine derrière ses mots un monde Mad Max-esque, un monde dans lequel le do-gooderism de notre époque s'éteint une fois que les nigauds qui le défendaient se sont éteints par inadaptation, laissant place à la survie du plus fort. Ce n'est pas que le darwinisme social en tant que philosophie revienne à la mode, mais que la vie est au-dessus de toute idéologie et que, continuellement à travers l'histoire, elle coule à nouveau librement comme une rivière entre les montagnes qui refuse de se déplacer entre les canaux artificiels des ingénieurs sociaux. Il y a quelque chose de poétique, il y a un style épique, un esprit prométhéen, faustien dans la déclamation d'une vie future bien éloignée des misères bourgeoises et ennuyeuses de l'Européen moyen d'aujourd'hui.

Je suis d'accord avec Faye pour dire que la compétition entre les différents groupes ethniques sera féroce dans une course du plus fort pour la survie. Je pense, cependant, que Faye a tort de parier sur le cheval gagnant. Même si cela heurte sa fierté d'Européen blanc, ces nouveaux temps de fer et de feu ne sont plus pour l'homme de miel et de beurre qui habite désormais notre continent. L'avenir appartient aux autres peuples. Cela ne vaut pas la peine de se battre pour conserver cette Europe de végétariens et de cyclistes urbains (pour paraphraser le ministre polonais Witold Waszczykowski), de féministes criardes, de femelles porte-culottes et de tapettes, de bonnes volontés et de petites sœurs de la charité. Une culture qui a perdu la force de la lutte vitale ne mérite pas de vivre. L'après-naufrage peut donner lieu à une guerre entre identités, mais il peut aussi s'agir d'une grande période de paix dans laquelle renaîtront d'autres cultures qui, au loin, regarderont l'Europe parmi ses ruines avec admiration et fascination, tout comme nous regardons aujourd'hui les vestiges de l'Empire romain ou de l'ère pharaonique de l'Egypte antique.

samedi, 18 juin 2022

Dieux et pouvoir. Le prométhéisme de Guillaume Faye

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Dieux et pouvoir. Le prométhéisme de Guillaume Faye

par Giovanni Sessa

Source: https://www.centrostudilaruna.it/dei-e-potenza-il-prometeismo-di-guillaume-faye.html

Une nouveauté importante est en librairie grâce aux éditions Altaforte. Il s'agit d'un volume dû à la plume de Guillaume Faye, Dieux et pouvoir. Textes et entretiens pour la reconquête européenne (1979-2019), publié sous la direction d'Adriano Scianca (pp. 284, euro 17,00). Il s'agit d'un recueil d'écrits du penseur français, pour la plupart inédits dans en italien jusqu'ici.

Le parcours intellectuel de Faye, pour une certaine part proche de celui de la Nouvelle droite, commence par sa fréquentation d'un Cercle Pareto à Paris. A la même époque, Dominique Venner lui fait découvrir le GRECE, qui a vu le jour en 1969. Les thèses de Jean Mabire et, surtout, de Giorgio Locchi, ont exercé sur lui une influence décisive, comme le rappelle opportunément Scianca dans sa préface bien documentée. En 1986, il rompt définitivement avec la Nouvelle Droite, non pas pour des raisons personnelles ou des conflits d'idées, mais simplement parce que ses recherches personnelles prennent une autre voie.

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Provocateur intellectuel, mais aussi homme de caractère, Faye, qui est décédé en 2019, était doté de talents oratoires hors du commun avec lesquels il gagnait son public lors de conférences où les auditeurs se bousculaient. La lecture de ce recueil, qui couvre plusieurs décennies de sa production non romanesque, donne un aperçu clair de son monde idéal. On se souvient généralement de deux textes de cet auteur français, Le système à tuer les peuples, qui résume bien sa vision initiale du monde, et L'archéofuturisme, qui constitue au contraire son point d'arrivée théorique. Dans les pages de Dei e Potenza, il est clair, en premier lieu, qu'il avait : "une formation philosophique non triviale, une vision éclectique de la réalité marquée par la méditation des Fragments d'Héraclite. Sa pensée repose sur une ontologie non finaliste, non anthropocentrique et non rationaliste, ouvertement dionysiaque" (p. 8). Une position qui, dans le "paganisme", avait donc un point de référence indispensable, la métaphysique occidentale ayant présenté une conception de la réalité finaliste et ordonnée à l'idée de Dieu. Pour Faye, le trait ontologiquement constitutif de l'homme européen est : "Esprit de conquête, audace [...] construction de formes toujours nouvelles" (p. 9). L'homme, à ses yeux, est un transgresseur, un donneur de sens, qui vit en s'affranchissant de ses propres conquêtes. En cela, nous voyons une nette proximité avec l'individu absolu d'Evola.

Les dieux européens sont sujets à la métamorphose, accrochés à la possibilité dionysiaque de la liberté : "ils peuvent même mourir, dans le crépuscule cosmique d'un ordre qui en annonce un autre" (p. 10) et l'homme peut assumer le trait du "héros rebelle" à l'ordre donné. En ce sens, il est possible d'affirmer que, ab origine, la pensée de Faye avait un trait prométhéen. Cette tendance se manifeste clairement dans son exégèse de Heidegger. Notre auteur français s'attarde sur l'idée de l'homme que Heidegger déduit d'un passage de Sophocle, et lit au deinòtaton, comme le "formidable", "ce qui est le plus inquiétant, le plus audacieux". Un tel trait permettrait à l'homme de l'ère technologique d'affronter le "monstrueux" produit par l'implant, par une réponse capable de s'appuyer sur les forces "mobilisées" par la technique elle-même, jugée inattaquable (on pense aux positions non dénuées d'intérêt de Bernard Stiegler). Un tel pouvoir élimine de la scène de l'histoire les hypothétiques retours au passé. Faye montre également dans sa lecture de la technique une dette envers l'anthropologie de Gehlen. Contrairement à l'animal qui subit l'environnement, l'homme se change lui-même et change le monde "techniquement". Avec Robert Steuckers, le penseur français est convaincu que l'imaginaire authentiquement européen, contrairement à l'imaginaire occidental autrement structuré, est capable de faire la synthèse de l'enracinement et du déracinement. Nous sommes animés par le "cœur aventureux" jüngerien et l'attitude que Spengler appelait faustienne, nous tendons vers la conquête de l'infini. Le risque a toujours régi les relations de l'homme avec l'entité. Le paganisme post-chrétien de Faye se fonde, contrairement à celui de de Benoist, sur le dépassement de " l'idée du divin [...] Pour nous [...] l'idée de Dieu a pris une connotation qui tend à dévaloriser l'action humaine " et " toute divinité est définitivement morte, définitivement archéologique " (p. 53).

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Après avoir également oeuvré dans le monde du divertissement, il revient dans l'arène intellectuelle en lançant un nouveau mot à la mode: l'archéofuturisme. Il "donne l'idée que les derniers modernes constatent l'épuisement de leur pensée et se contentent d'annoncer un "après"" (p. 16). Faye était fermement convaincue de l'implosion de la post-modernité: l'occurrence synchronisée de catastrophes allait miner sa stabilité structurelle. Il s'agit d'une thèse plutôt faible. Elle ne tient pas compte de la capacité du système à "gérer" les crises et à y survivre (docet la pandémie) et, de plus, elle implique une régression vers la vision déterministe de l'histoire, fondée sur la recherche des "signes des temps".

Plus intéressante est l'exégèse de l'Occident lu comme un paradigme du déclin : "un mécanisme acéphale, une toile dont toutes les articulations ne sont certes pas d'égale importance, mais dans laquelle il n'y a pas de marionnettiste, pas de Palais d'hiver à prendre d'assaut" (p. 19). Tout aussi significative est l'analyse, partagée plus tard par Guy Debord, sur les "sociétés du spectacle". Le spectacle "concentré" offert par le socialisme réel et le spectacle "diffus" propre au monde capitaliste, expressions du spectacle "intégré" offert par la Modernité.

La lecture de Dei e Potenza peut jouer un rôle important pour contrer l'une des maladies infantiles de la zone antagoniste, le modérantisme conservateur qui réapparaît aujourd'hui, mais elle nous semble insuffisante pour délimiter une voie politique véritablement révolutionnaire-conservatrice. Une telle voie doit impliquer la conciliation de Prométhée et d'Orphée, un duo inséparable. Privilégier l'un au détriment de l'autre donne lieu à une incompréhension fondamentale des potestats qui animent la physis. Se remettre à lire Bruno, Spinoza et Löwith pourrait être bénéfique.

Giovanni Sessa

Giovanni Sessa est né à Milan en 1957 et enseigne la philosophie et l'histoire dans les lycées. Ses écrits sont parus dans des revues et des journaux, ainsi que dans des ouvrages collectifs et des actes de conférences. Il a publié les monographies Oltre la persuasione. Saggio su Carlo Michelstaedter (Rome 2008) et La meraviglia del nulla. Vita e filosofia di Andrea Emo (Milan 2014). Il est secrétaire de la Scuola Romana di Filosofia Politica (École romaine de philosophie politique), collaborateur de la Fondation Evola et porte-parole du mouvement de pensée 'Per una nuova oggettività' (Pour une nouvelle objectivité).

vendredi, 17 juin 2022

Un passé ultérieur

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Un passé ultérieur

par Georges FELTIN-TRACOL

La conception monothéiste de l’histoire, d’où découlent les perceptions chrétiennes et marxistes, se résume par ce fameux « sens de l’Histoire » qui a commencé par une « anté-Histoire » et qui s’achèvera en « post-Histoire ». Inspiré pour sa part des anciens Grecs, Friedrich Nietzsche conçoit un jour de randonnée dans les alpages de l’Engadine suisse l’« Éternel Retour ». Il réintroduit dans la philosophie contemporaine européenne la cyclicité de l’histoire. D’autres visions historiques existent toutefois. Pensons par exemple à l’histoire sphérique de Giorgio Locchi.

En 1992, un historien français des techniques déclare que « l’histoire est cyclique. […] Peu d’historiens se sont penchés sur les mécanismes qui gouvernent l’évolution des cycles, et moins nombreux encore sont ceux qui se sont intéressés à l’évolution des techniques et des sciences dans les sociétés du passé ». Jean Gimpel (1918 – 1996) évalue « la notion de cycle historique » à une durée de « quelque deux cent cinquante ans en moyenne ». Son estimation se base sur les réflexions de l’historien arabe Ibn Khaldoun (1332 - 1406) et du chef de la Légion arabe en Jordanie, John Bagot alias Glubb Pacha (1897 - 1986), rédacteur en 1976 d’un article intitulé « The Fate of Empires ». Il reconnaît aussi toute sa dette à Oswald Spengler (1880 - 1936). « Ce qui m’a particulièrement sensibilisé à l’œuvre de Spengler, c’est sa profonde compréhension du génie technique et scientifique du Moyen Âge. Il est sans doute le premier historien à avoir compris que notre société s’est construite sur les travaux des ingénieurs et des savants de cette époque. »

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L’Occident comme décadence technique

Avec La fin de l’avenir. Le déclin technologique et la crise de l’Occident (1), Jean Gimpel commet une nouvelle polémique. Spécialisé dans les procédés industrieux et autres savoir-faire de l’âge médiéval et auteur des Bâtisseurs de cathédrales (1958), il fait sensation en 1975 en écrivant La révolution industrielle du Moyen Âge. Il y explique que l’Europe occidentale a connu entre la fin de l’Antiquité et les débuts de la Renaissance un essor proto-industriel malgré l’absence de la machine à vapeur et des manufactures. L’affirmation est osée d’autant que l’historiographie la plus récente remet en question le concept même de « révolution industrielle ». Apparue à la fin du XVIIIe siècle en Grande-Bretagne, la première « industrialisation » reposait sur la machine à vapeur et le charbon. La deuxième serait celle des hydrocarbures. La troisième en cours dépendrait de l’électricité et de l’informatique. Jean Gimpel se méfie de cette périodisation. Il pense plutôt dans La fin de l’avenir à la lumière du Déclin de l’Occident spenglérien que « l’Occident [est] parvenu, comme les sociétés qui l’ont précédé, à un plateau technologique ». L’auteur nuance immédiatement son propos en précisant que « le nucléaire rompt l’harmonie des cycles. Le cycle scientifique contemporain est [...] très différent des précédents parce que nous avons créé une technique capable de détruire le monde : la bombe atomique ».

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Guère perspicace, Jean Gimpel estime que « l’origine de la crise profonde que vit l’Occident aujourd’hui réside dans le très fort ralentissement de l’innovation technologique. Une innovation est une invention qui a été financée, testée, commercialisée et acceptée par le marché ». Quand il rédige ces lignes au début de la décennie 1990, l’informatique et le numérique ne sont qu’à leurs balbutiements. Les logiciels de traitement de texte qui remplacent avantageusement les machines à écrire mécaniques et électriques coûtent relativement chers. Un chapitre proclame : « L’informatique en panne ». On y lit que « le niveau d’investissement dans ce secteur ne serait plus jamais le même ». Il prévoit que « les années 90 ne devraient voir aucune relance dans le secteur informatique ». Le sursaut du monde des ordinateurs viendra de la démilitarisation décidée par le Pentagone du futur Internet. Ce n’est qu’à partir de 1995 que commence vraiment la « révolution néo-cybernétique ». Les téléphones portatifs existent déjà. Ils sont encore lourds, encombrants et peu maniables. En outre, les bornes de téléphonie sont rares. Et puis, rappelons-nous, parler à haute voix à un correspondant invisible en pleine rue vous fait passer pour un aliéné échappé du plus proche hôpital psychiatrique… Autre interprétation maladroite de Jean Gimpel qui annonce « le déclin des apprentis sorciers ». Il ignorait que viendraient sous peu le clonage de la brebis Dolly en 1996, les manipulations génétiques et le délire transhumaniste en attendant l’apparition fatidique des cyborgs et de l’intelligence artificielle quantique. L’auteur préfère se rassurer en expliquant benoîtement « ce qui permet à l’Occident de se maintenir provisoirement sur ce plateau technologique – avant le déclin inéluctable -, à savoir la résurgence de techniques traditionnelles modernisées et revitalisées par des techniques de pointe ».

L’avenir du passé

L’approche de Jean Gimpel n’est pas sans rappeler l’archéofuturisme de Guillaume Faye d’une part, et le « rétro-futurisme » d’autre part. Par « rétro-futurisme », il faut comprendre un courant littéraire de la science fiction dont l’intrigue se déroule dans un univers révolu avec des objets futuristes. Par exemple, un légionnaire romain d’Auguste affronte au sabre-laser un samouraï. Catégorie uchronique rétro-futuriste, le steampunk puise dans l’œuvre des écrivains français Jules Verne (1828 – 1905) et Albert Robida (1848 – 1926). Ce genre s’inscrit dans un XIXe siècle disposant d’ordinateurs fonctionnant à la vapeur et des dirigeables de transport. Paru en 1998, L’archéofuturisme marque le retour métapolitique flamboyant de Guillaume Faye au terme d’une décennie d’impostures téléphoniques jouées à la radio en tant que Skyman, et des collaborations à L’Écho des Savanes. Cet essai développe, prolonge et approfondit les thèmes soulevés dans son très méconnu Europe et modernité (2).

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L’archéofuturisme signifie « penser ensemble, pour les sociétés du futur, les avancées de la techno-science et le retour aux solutions traditionnelles de la nuit des temps. […] Rassembler, selon la logique du et, et non point du ou, la plus ancienne mémoire et l’âme faustienne car elles s’accordent. Le traditionalisme intelligent est le plus puissant des futurismes et inversement. Réconcilier Evola et Marinetti. […] Il ne faut pas associer les Anciens aux Modernes, mais les Anciens aux Futuristes (3) ».

Jean Gimpel anticipe volontiers cette démarche non-moderne. « Les fusées et les hélices connaissent une deuxième jeunesse ainsi que le dirigeable et les ballons-sondes, le train – le TGV -, les tramways, la céramique et la brique, la fonte et les structures métalliques, la craie et le tableau noir, le coton et la laine. Il est de la plus haute importance que les responsables économiques et les industriels soient pleinement conscients de cette orientation pour encourager la recherche et les investissements dans ce domaine lucratif et relativement peu exploité. Seule l’Italie montre la voie dans ce domaine. » L’auteur se réjouit du regain d’intérêt pour le bateau-bus, la voile et le vélo. Ce dernier a longtemps donné une image désuète et ancienne. Or, la « petite reine » entame au début de la décennie 1990 sa mue: « profilage des aciers, développement d’alliages acier – chrome molybdène dosés, études menées en soufflerie. Côté pneumatiques, Michelin a réalisé une génération de pneus pratiquement increvables ». Selon certaines sources bien informées, des unités de combat ukrainiennes utiliseraient des vélos électriques de fabrication locale (entreprises Delfast et Eleek) aptes à contrecarrer la progression des blindés russes. Par exemple, le modèle Defast Top 3.0 (foto) correspond à un vélo électrique aux allures de moto tout terrain qui aligne des performances impressionnantes (320 km d'autonomie, une vitesse de pointe de 80 km/h et une capacité à transporter de lourdes charges) (4). Jean Gimpel insiste enfin sur la nécessité de réaliser à l’échelle européenne un vaste réseau connecté de canaux, car « on a calculé qu’avec une puissance d’un cheval, on pouvait transporter 150 kg par la route, 500 kg par le train et 4000 kg par voie fluviale ».

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Demain, l’Italie

Jean Gimpel établit dans ce livre atypique et stimulant un parallèle troublant entre les temps médiévaux et les États-Unis d’Amérique. Il situe à 1971 le début de leur déclin quand le Congrès refuse d’accorder les crédits nécessaires au projet d’un « Concorde US ». Moins pessimiste pour l’avenir de la France, il craint néanmoins que l’Hexagone n’échappe pas à un naufrage « commun inévitable, dans la mesure où elle fait partie du monde occidental qui n’a plus […] de “ nation jeune en réserve “. D’ailleurs, elle est déjà atteinte par la “ sinistrose “ (5) qui touche le monde occidental dans son ensemble ». Sur lui plane dorénavant la menace d’« un krach de Wall Street ».

Pour lui, l’effondrement de notre système malade plongera l’Occident « dans un chaos politique et économique quelque peu semblable à celui que connaît aujourd’hui [en 1992] l’ancienne Union soviétique, nous assisterons à la désintégration de notre civilisation industrielle ». Serait-ce alors l’aurore d’un « nouveau Moyen Âge » ? Peut-être ? Jean Gimpel n’en considère pas moins que l’Italie « peut servir de modèle aux pays désireux d’améliorer leur performance économique globale », car elle « a su introduire les technologies de pointe dans des industries traditionnelles avec le plus de succès ». Il constate que « la réussite italienne est fondée sur les entreprises dites artigiano, qui trouvent leurs racines dans la famille, ancrées dans des communautés où valeurs, croyances, loyauté et intérêts sont partagés ». « Lorsque notre civilisation finira par s’effondrer […], lorsque les multinationales se désintégreront, les entreprises artigiano, qui sont beaucoup plus flexibles, s’adapteront aux nouvelles circonstances économiques. » N’y a-t-il pas ici un premier appel à un localisme alors inexistant ?

Par cet essai audacieux de Jean Gimpel, on comprend que l’avenir n’est pas fini à la condition que le futur sache se retourner et explore avec intelligence les voies du passé afin de mieux déterminer d’éventuels lendemains prometteurs.

Notes:

1 : Jean Gimpel, La fin de l’avenir. Le déclin technologique et la crise de l’Occident, Le Seuil, 202 p. Les citations en sont extraites.

2 : Guillaume Faye, Europe et modernité, Eurograf, 1986.

3 : Guillaume Faye, L’archéofuturisme, L’Æncre, 1998. On lira avec intérêt Robert Steuckers, « Guillaume Faye et la vision archéofuturiste », mis en ligne le 24 mai 2022 sur Euro-Synergies.

4 : Marc Zaffagni, « Les soldats ukrainiens utilisent de puissants vélos électriques pour neutraliser les chars russes » mis en ligne sur futura-sciences.com, le 23 mai 2022.

5 : Rappelons que l’expression « sinistrose » revient à Louis Pauwels dans sa période aristocratique païenne.

mardi, 24 mai 2022

Guillaume Faye et la vision archéofuturiste

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Guillaume Faye et la vision archéofuturiste

Par Robert Steuckers

L’idée de coupler la tradition mythologique et philosophique grecque avec l’élan futuriste agitait l’esprit de Guillaume Faye dès le moment où je l’ai connu et ai travaillé avec lui entre 1979 et 1987. Ces années furent les plus fécondes de son itinéraire intellectuel. Guillaume Faye avait été profondément marqué par ses professeurs de grec et de latin lors de ses années de lycée. Il avait lu Platon, se réclamait du réalisme d’Aristote, lectures qu’il avait complétées par une immersion dans les travaux de Mircea Eliade, de Walter Otto et de Georges Dumézil. Faye était aussi un disciple du philosophe italien Giorgio Locchi qui fut le véritable mentor de ce que l’on allait appeler plus tard, par simplification journalistique, la « Nouvelle Droite ». Sans Locchi, elle n’aurait pas été ce qu’elle est, en dépit de l’ostracisme subi injustement par le penseur italien, après 1979, année de son retrait définitif. Pour Locchi, l’idée européenne véritable, malheureusement refoulée par la modernité, repose sur une solide assise mythique, notamment la structure trifonctionnelle des sociétés indo-européennes, mise en exergue par l’œuvre de Georges Dumézil et que les Allemands du 19ème siècle nommaient plus simplement le triplet de « Lehr- Wehr- und Nährstände ». Locchi, qui était aussi un très fin musicologue, estimait que la musique européenne, depuis Bach, contribuait à entamer et à fragmenter la chape étouffante sous laquelle le « mythe européen » était prisonnier. Pour Locchi, Richard Wagner, par le truchement du « Wort- und Tondichtung » de ses opéras, apportait les coups de marteau décisifs pour libérer le mythe européen de sa prison pluriséculaire, et pour faire enfin advenir une structuration des sociétés européennes conformes à la teneur de ce mythe et, partant, de rétablir une forme politique entièrement dégagée de la cangue chrétienne, scholastique, cartésienne et kantienne. Raisonnant au-delà de la querelle qui opposa Wagner à Nietzsche, Locchi puisait dans l’œuvre de Nietzsche tous les éléments susceptibles de conforter sa thèse libératrice, tandis que Pierre Chassard, qui sera également « épuré » et ostracisé dans les rangs de la « Nouvelle Droite », fustigeait, dans son ouvrage sur Nietzsche, les platonismes incapacitants qui avaient affaibli l’Europe au cours des siècles postérieurs à l’effondrement du monde antique. Faye aimait la République de Platon mais ne voulait pas pour autant laisser les Européens de la seconde moitié du 20ème siècle végéter dans la caverne et se contenter d’ombres sur les parois de celle-ci. Le retour du mythe européen, le retour au soleil des Européens prisonniers de la caverne, la philosophie au marteau de Nietzsche qui brisait les idoles vermoulues de la vieille Europe malade : tels étaient les aspirations du binôme Locchi/Faye et aussi de Chassard, retourné bien vite dans l’Eifel où il avait élu domicile.

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La synthèse que proposait Faye n’a guère été explicitée par l’écriture, à l’exception toutefois d’un petit opuscule d’une rare densité, que ses « camarades » avaient négligé et méprisé, avaient jugé digne de la corbeille à papiers. J’ai sauvé ce tapuscrit de la destruction et mon ami Jean-Marie Simar, de Liège, en réalisa une édition modeste, artisanale avec les premiers ordinateurs personnels. Cet opuscule, introuvable aujourd’hui, était intitulé « Europe et Modernité » : Faye y constatait que la modernité, celle des Lumières du 18ème siècle, prenait fin et qu’une postmodernité s’annonçait qui allait mettre fin à tous les blocages, tous les platonismes incapacitants et toutes les formes de déclin que les Lumières et l’idéologie égalitariste de la révolution française avaient imposés à nos peuples. Armin Mohler, sur base des travaux de Wolfgang Welsch, pensait également qu’une postmodernité radicalement différente des Lumières allait émerger suite à la disparition du Rideau de fer. Il n’en fut rien. La postmodernité que l’on nous sert comme plat principal aujourd’hui est pire que les pires travers des Lumières. Pour Faye, au moment où il rédige son manuscrit qui sera boycotté, il y a implosion de la modernité, retour à des formes tribales et communautaires (comme le constate son ami le philosophe Michel Maffesoli), désaccords rédhibitoires entre les tenants autoproclamés des Lumières (Adorno, Horkheimer, Habermas, Lévy, etc.), etc. Faye et Mohler, chacun dans leur coin, croient que l’on peut impulser le mouvement postmoderne de désagrégation de la modernité dans le sens d’une sorte de restauration prémoderne, impliquant la restauration du politique (des Politischen) selon la définition qu’en donnaient Carl Schmitt et Julien Freund (par ailleurs ami de Faye et compagnon d’agapes mémorables… !).

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La modernité officielle, pour le Nietzschéen Faye est la « conscience christianomorphe », c’est-à-dire la conscience qui est marquée par toutes sortes de gnosticismes déréalisants que le christianisme a véhiculés jusqu’à leur laïcisation par les lumières anglaises et françaises du 18ème siècle et que l’église, parfois, a combattu en réclamant, via le thomisme, un retour au réalisme d’Aristote, mais tout en asséchant la pensée du Stagirite. Ces formes gnostiques se sont superposées à un inconscient païen qui subsiste, surtout dans le folklore populaire de nos campagnes. Mais la conscience christianomorphe et l’inconscient païen subjugué arrivent, dit Faye, à un point de dissociation en rencontrant un inconscient prépaïen/pré-néolithique. La dissociation s’opère en créant : 1) une conscience moderne techno-scientifique (reposant sur des postulats naturwissenschaftlich, non assimilables à la logique cartésienne ou scholastique) et innervée par l’inconscient païen politique et romain, obéissant à l’impératif de créer de la puissance politique : 2) La conscience occidentale de masse, héritière de la conscience christianomorphe tout en en constituant un nouvel avatar, non plus religieux (sauf aux Etats-Unis dans les sectes protestantes) mais idéologisé (nous dirions aujourd’hui le politiquement correct). Cette conscience s’oppose aux idéaux de puissance de la techno-science européenne comme l’attestent les idées de Horkheimer, Adorno et Habermas qui percevaient en elle un « néo-fascisme ».

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Dans ce même contexte de la dissociation, l’inconscient pré-néolithique va innerver 1) la conscience moderne, lui donner une vitalité, comme Faye l’explicitera dans son ouvrage intitulé L’archéofuturisme, car son archéofuturisme est effectivement une forme de vitalisme, inspirée par ailleurs par le philosophe espagnol José Ortega y Gasset qui parlait, lui, de « constructivisme vitaliste » ; 2) la conscience occidentale de masse à laquelle cet inconscient pré-néolithique apportera un néo-primitivisme, héritier de la mentalité hippy et de certaines sectes californiennes dites du « New Age ». Parmi les impacts du retour de l’inconscient pré-néolithique, il faut ajouter la théorie du nomadisme, revalorisée par Bernard-Henri Lévy et Jacques Attali qui s’en serviront pour étayer leur version de la modernité et du libéralisme occidental. Le pré-néolithique est effectivement nomade, relève de la chasse et de la cueillette. Le nomadisme de la conscience moderne, en ce qu’elle a de positif et d’européen, est, lui, un nomadisme abstrait : il implique la désinstallation volontaire par esprit d’aventure, que Faye appelle la « désinstallation aventureuse », celle des pionniers, des explorateurs, des soldats de fortune, etc. Le nomadisme dans la « conscience occidentale de masse » est, quant à lui, un nomadisme marchand cosmopolite ou un nomadisme forcé, notamment dans l’immigration de masse. Ce nomadisme forcé et/ou cosmopolite est l’idéal de Lévy et d’Attali. Ce nomadisme forcé a aussi pour caractéristique d’être créé de toutes pièces pour parfaire l’aspiration pathologique à l’abstraction que véhiculent les Lumières depuis leur avènement dans la pensée européenne : ce nomadisme vise donc l’effacement de tous les ancrages, le déracinement général, la désinstallation déracinante, non seulement dans le phénomène des migrations sud-nord mais aussi dans la répartition des populations autochtones (en Europe comme en Afrique) qui ont connu ou connaissent l’exode rural vers les villes puis l’exode des migrants urbains vers les petites villes et les villages (le néo-ruralisme que connait la France aujourd’hui). Le nomadisme de la conscience occidentale de masse implique l’avènement fabriqué d’une errance généralisée, perpétuellement chantée comme un idéal indépassable par l’idéologie médiatique.

Ainsi se construit la Cosmopolis occidentale, qui fait de l’Occident un « non lieu », sans ancrage, sans racines. En Allemagne, Hans-Dieter Sander appelait cela l’Entortung. Le projet planétaire de Cosmopolis et de l’Entortung vise la disparition de tout oikos, de tout espace centré sur lui-même, administré et géré par une communauté d’hommes enracinés. La disparition de tout oikos implique la mort de toute économie réelle (oikos/nomos) puisque tout sera dé-territorialisé et dé-contextualisé, selon les vœux mêmes de Madame Thatcher qui affirmait péremptoirement et à tour de bras : « There is no society ». Nous subissons les effets de cette affirmation répétée à satiété aujourd’hui dans tous les pays européens. Faye voyait toutefois des résistances en Europe méditerranéenne (comme Ernst Jünger avant lui), en Grèce par l’église orthodoxe, en Europe centrale et orientale avant la chute du Rideau de Fer. Mais un danger sournois guettait les résistances, celui de la folklorisation. Les résidus de nos enracinements se voyaient « folklorisés » (exemple : la télévision au Pays Basque était heureuse de pouvoir passer les feuilletons américains comme Dallas en langue basque !).

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Guillaume Faye lors de sa dernière internvention à TV-Libertés (Paris).

L’archéofuturisme constitue donc un système de pensée, et Faye, sur base de très nombreuses lectures, en indique les fondements, sur lesquels devront bâtir les générations futures. Il s’agit donc, d’une part, de préserver les réflexes mentaux grecs et romains du paganisme antique, tant dans ses aspects mythologiques (Iliade) que philosophiques (Platon, Aristote), les réflexes celtiques, germaniques et slaves que nous connaissons encore par la mythologie ; d’autre part, de tabler sur le vitalisme de ces antiques vertus et de ne retenir du nomadisme pré-néolithique que la propension à l’aventureux. Pour le reste, vu le changement d’échelle entre la polis grecque, l’empire romain et les aires civilisationnelles actuelles, il convient de penser l’indépendance énergétique, l’autarcie économique et la puissance militaire à des niveaux désormais continentaux (comme le voulait aussi Jean Thiriart). La première conférence de Faye, à laquelle j’ai assisté à Lille en 1975, évoquait l’indépendance énergétique de l’Europe, sujet de la plus brûlante actualité, aujourd’hui en 2022 ! Faye en ce sens était un futuriste disciple de Clausewitz. Pour Clausewitz, en effet, qui raisonnait essentiellement sur base de l’adage romain « Si vis pacem, para bellum », l’autarcie énergétique et alimentaire, l’excellence du tissu industriel, la production de biens techniques de la plus haute qualité étaient autant de garantes de l’indépendance politique. Clausewitz raisonnait au départ de l’Etat prussien, anticipait peut-être une Allemagne étendue à l’espace du Zollverein : deux siècles après lui, il convient de penser le « grand espace » (Carl Schmitt) sur base des mêmes atouts autarciques. Faye, dans sa vision grand-spatiale (Russie/Sibérie comprises), était également tributaire des écrits de l’économiste François Perroux (auteur d’un ouvrage remarqué sur l’indépendance nationale au temps du De Gaulle anti-américain des années 1960). Perroux avait théorisé l’idée d’un grand continent pour l’Amérique latine et avait préconisé l’autarcie énergétique, visée par le programme nucléaire de la France de De Gaulle. Ensuite, la création d’un grand espace euro-russe et donc euro-sibérien, en lequel les enracinements seraient protégés, encouragés et préservés, nécessitait l’organisation d’un système de communications rapides et terrestres (à l’abri des flottes anglo-saxonnes). Faye était fasciné par les projets ferroviaires : l’aérotrain Paris-Orléans, projet avorté de la France de De Gaulle, la Breitspurbahn de l’Allemagne national-socialiste qui devait joindre Berlin à Téhéran, la réalisation soviétique Baïkal-Amur-Magistral. Il aurait approuvé les projets de la nouvelle route de la soie de Xi Jinping, le « Belt & Road Initiative ». En annexe de son ouvrage sur l’archéofuturisme, on trouve une petite nouvelle, traduite désormais en allemand, qui met en exergue sa vision archéofuturiste de l’avenir : des communautés bretonnes enracinées, capables de produire une musique originale d’inspiration celtique et d’organiser une économie vivrière en terre armoricaine ; une instance impériale qui arbitre les différends surgissant entre communautés enracinées, représentée par le Commissaire Oblomov ; des pôles civilisationnels autarciques et séparés qui met succinctement en relief les conversations entre Oblomov et la jeune représentante de l’aire indienne ; une technologie de haut vol avec un système de train ou d’hyperloop qui permet de voyager ultra-rapidement entre la Bretagne et l’Ile de Sakhaline dans le Pacifique.

L’idéologie archéofuturiste qui devrait logiquement découler de la pensée laissée en jachère par ce cher Guillaume Faye est un chemin difficile : car, en apparence, des continents de la pensée très différents les uns des autres sont appelés à s’entremêler dans une pensée restauratrice du politique, de la double idée de puissance et d’autarcie. Elle est toutefois l’antidote parfait à l’idéologie dominante de l’Occident américano-centré. Elle entend préserver les racines, appelle l’autarcie et donc l’indépendance européenne et russe, refuse les désignations d’ennemis que véhicule les médias inspirés par les boites à penser américaines, rejette l’anti-technicisme des Verts, désormais meilleurs alliés de Washington. Une œuvre à traduire et à diffuser le plus largement possible.

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Que lire pour comprendre le concept d’archéofuturisme chez Guillaume Faye?

  • GF, Europe et modernité, Eurograf, Méry/Lüttich, 1985.

Sur l’échec de la première modernité, qui a véhiculé un eudémonisme incapacitant qui empêche de gérer correctement les innovations scientifiques et techniques qui contredisent ses postulats ; sur les notions d’enracinement et de « désinstallation ».

  • GF, L’Occident comme déclin, Agir pour l’Europe, Embourg/Lüttich, 1985.

Sur l’avènement de la Cosmopolis occidentale, où tout est Entortung et où le christianisme, en ultime instance, n’a pas fortifié la conscience religieuse mais a généré un athéisme laïcisé, pratiquant, sans Dieu, les travers du christianisme tels que Nietzsche les a définis ; sur l’avènement d’Antipolis, la cité qui refuse le politique, au sens où l’entendaient Carl Schmitt et Julien Freund ; Faye annonce non pas la fin de l’histoire, comme le fera Fukuyama quelques années plus tard, mais la « métamorphose de l’histoire ».

  • Guillaume Faye, Les nouveaux enjeux idéologiques, Le Labyrinthe, Paris, 1985.

Sur l’esprit faustien comme « tradition européenne » ; sur la technique moderne comme expression de l’identité européenne.

  • Guillaume Faye, L’archéofuturisme, L’AEncre, Paris, 1998 /Archeofuturism – European Visions of a Post-Catastrophic Age, Arktos, London, 2010.

Définition complète de l’archéofuturisme comme constructivisme vitaliste, seule réponse possible à la convergence des catastrophes qui s’annonce en Europe ; Faye y définit l’essence de l’archaïsme et l’essence du futurisme, deux essences qui doivent se coaguler pour former la grande synthèse nouvelle, qui est aussi l’alliance de l’apollinien et du dionysiaque ; panorama des applications pratiques induites par la nouvelle synthèse archéofuturiste ; Faye présente son idée d’économie à deux vitesses, face à l’effondrement de l’économie néo-globale.

  • Guillaume Faye, Avant-Guerre – Chronique d’un cataclysme annoncé, L’AEncre, Paris, 2002 / Prelude to War – Chronicle of the Coming Cataclysm, Arktos, London, 2021.

Lire surtout le chapitre 19 sur la pensée vitaliste contre la pensée dégénérée, complément de lecture indispensable pour saisir ce que Faye entend par « constructivisme vitaliste ».

  • Michael O’Meara, Guillaume Faye and the Battle of Europe, Arktos, London, 2013.

mardi, 19 avril 2022

Ancestrale et révolutionnaire. La nouvelle Europe selon Guillaume Faye

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En français, l'article en hommage à Guillaume Faye paru le 16 avril 2022 dans le quotidien italien Il Giornale !

Ancestrale et révolutionnaire. La nouvelle Europe selon Guillaume Faye

Plus cité que lu, loin de la gauche et de la droite, l'auteur français Guillaume Faye a proposé des scénarios audacieux

Luigi Iannone

Source: https://www.ilgiornale.it/news/spettacoli/ancestrale-e-rivoluzionaria-nuova-europa-secondo-faye-2026856.html

Guillaume Faye (1949-2019), intellectuel excentrique, à la production magmatique et presque indéfinissable, est autant cité que peu lu, notamment en raison de la rareté des traductions italiennes. À l'exception du Système à tuer les peuples et Archéofuturisme, il y a très peu de choses à trouver. Adriano Scianca tente de combler cette lacune en rassemblant les essais, articles et interviews les plus significatifs de ces quarante dernières années dans Dei e potenza (Altaforte Edizioni, p. 290, euro 17).

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Deux livres de Faye traduits en italien et parus dans la collection "Sinergie" des Editions Barbarossa de Milan.

Bien que ses intérêts tournent autour de thèmes et de références issus du monde identitaire (critique de la société de consommation et de l'occidentalisme, nationalisme continental, révolution conservatrice, Nietzsche, mythe indo-européen, paganisme, question de la technologie), le premier tournant de Faye est sa rupture avec la nouvelle droite. Des divertissements ininterrompus l'ont même conduit à entrer dans le monde du show-business, en tant qu'animateur d'une émission de radio humoristique et, de son propre aveu, en tant qu'acteur dans un film porno. Une fois cette phase également passée, il a repris avec vigueur son activité de conférencier et d'écrivain jusqu'aux derniers mois de sa vie, marqués par un cancer.

faye.jpgLe Système à tuer les peuples, un livre publié en 1981, représente le mieux la partie destructive de sa pensée. Il cloue au pilori la société globale, ses représentations massives et unificatrices et l'idéologie égalitaire occidentale structurée comme un véritable système, bien que le récit général tente de nous dire autre chose : "L'opinion publique est l'alibi. Le Système l'utilise pour démontrer à quel point il est démocratique, comment il est basé sur le consensus et l'assentiment général". Sous couvert d'un cosmopolitisme tolérant, nous assisterions en fait à la destruction de toute spécificité et à l'affirmation d'une idéologie mondiale "qui arpente les couloirs des institutions internationales et s'exprime dans les programmes de tous les partis politiques importants de la planète".

Avec L'archéofuturisme, Faye fait un pas en avant et tente de trouver une issue. L'idée est de combiner les valeurs médiévales (archaïques), des concepts tels que la hiérarchie et la virilité, avec le progrès scientifique; les archétypes avec le prométhéisme technologique. Une telle démarche serait possible pour deux raisons que l'on peut déduire des pages mêmes de Dei e Potenza: la reconquête de l'Europe par un conflit aux proportions énormes qui devra impliquer tout le continent, et la renaissance de la figure du révolutionnaire.

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Selon Faye, la modernité touche à sa fin et avec elle ses fétiches libéraux et humanitaires. Notre époque ne s'achèverait pas avec la civilisation libérale dirigée par un État universel, le village planétaire prophétisé par MacLuhan, mais ouvrirait plutôt une phase où les peuples et les identités ethniques seraient en compétition: "Les peuples vainqueurs seront ceux qui resteront fidèles ou reviendront aux valeurs et aux réalités ancestrales - qui sont culturelles, éthiques, sociales et spirituelles - et qui, en même temps, domineront la technoscience. Le XXIe siècle sera le siècle où la civilisation européenne, à la fois prométhéenne et tragique, se métamorphosera ou se dirigera vers un déclin irrémédiable. Ce serait alors le moment de reprendre les anciennes valeurs, sans toutefois chercher à les réintroduire à la lettre, car elles ont été modifiées au cours des siècles, et cela pourrait se faire sous le double signe de Mars, le dieu de la guerre, et d'Héphaïstos, le dieu qui forge les épées, le seigneur de la technologie des feux chtoniens.

Et voici l'autre point. Pour Faye, l'idée de révolution, abandonnée par les intellectuels progressistes qui sont désormais réduits à des gardiens du pouvoir, ne serait même pas celle avancée par les intellectuels de droite dont les actions semblent toujours se terminer par des poses esthétiques. La figure du rebelle, plus ou moins sur le modèle de Dominique Venner, qui s'est suicidé dans la cathédrale Notre-Dame en 2013, leur semble inutile. Ce rebelle-là aspire à être une minorité, perdue dans le rêve littéraire, comblée par l'auto-exil et jamais prête à se battre. Des intellectuels comme Cioran, Debord ou Baudrillard (qu'il définit comme des "rebelles pessimistes"), ou comme Céline, Jean Mabire et Venner ("rebelles joyeux") reculeraient devant l'idée malsaine qu'ils n'ont qu'à semer.

006724613.jpgFaye les assimile à des simulateurs de dissidence, fonctionnels à un néo-totalitarisme qui a besoin de ces faux concurrents et les nourrit presque. C'est pourquoi il espère l'entrée en scène du révolutionnaire qui - contrairement au rebelle - considère les idées comme des moyens et non comme des fins, qui n'ont donc de véracité que si elles sont subordonnées à leur efficacité. Et sur le terrain, il n'identifie que deux projets révolutionnaires, tous deux archéo-futuristes mais incompatibles: celui des musulmans (le "partisan" sans frontières, pour citer Schmitt) qui vise la conquête planétaire et avec le même rôle que le révolutionnaire marxiste du 20ème siècle, et celui qui œuvre pour la reconquête européenne.

En fin de compte, même dans un cadre analytique riche en stimuli et en provocations, certains nœuds non résolus demeurent. Tout d'abord, on ne voit pas comment il est possible de concilier, dans l'ordinaire le plus banal de nos vies, des instances archétypales, des valeurs qui ont été dépassées et le prométhéisme de la civilisation technique. Deuxièmement, pourquoi une société globale et massifiée qui s'est abandonnée à la conformité devrait-elle soudainement se retourner ? Et enfin : d'où doit venir cette nouvelle figure de révolutionnaire ?

dimanche, 16 janvier 2022

Feu et destin: manifeste du prométhéisme

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Feu et destin: manifeste du prométhéisme

https://www.kulturaeuropa.eu/2022/01/15/fuoco-e-destino-manifesto-del-prometeismo/

1 L'ASSAUT CONTRE LE CIEL - Le feu de la technologie est aujourd'hui usurpé par un système de pouvoir qui se prétend progressiste mais qui est en réalité bigot, superstitieux et stagnant. Par technique, nous entendons non seulement l'ensemble des pratiques et des connaissances liées à la science, mais aussi l'ensemble des actes politiques, esthétiques, religieux et sociaux par lesquels l'homme a historiquement compris et transformé le monde, l'œuvre générale de mobilisation totale de la réalité qui est aujourd'hui incomprise, supprimée et condamnée. Dans cet Olympe décadent, les dieux épuisés de la civilisation humaniste, égalitaire et libérale gardent une flamme dont ils ont perdu la conscience et dont ils ne soutiennent même plus la vue. L'assaut contre ce ciel de plomb pour assurer la libération du feu est ce que nous appelons la révolution prométhéenne. 

2 L'EUROPE COMME AVANT-GARDE - La technique a une portée à la fois universelle et particulière. Vivre avec cette étincelle d'innovation et de création accompagne l'homme depuis toujours et partout ; c'est même la spécificité de l'être humain par rapport aux animaux. Cependant, elle a été interprétée de manière très différente selon les cultures : certaines, sans pouvoir empêcher l'utilisation de la technologie, l'ont entourée d'interdictions, de tabous, de condamnations morales et de récits inhibiteurs. D'autres, en revanche, ont fièrement relevé le défi. Le nom du territoire où le feu de la technologie a brûlé le plus fort est l'Europe. Le prométhéisme reconnaît et revendique ce trait culturel, sans toutefois y fonder une quelconque hiérarchie morale universellement valable. 

3 ACCÉLÉRER POUR ÉVITER LE POURRISSEMENT - Le prométhéisme est résolument révolutionnaire et rejette toute tentation réactionnaire ou conservatrice, toute critique de l'esprit du temps qui s'inspire de l'esprit du temps qui vient de passer, tout refuge dans des valeurs et des institutions données. Le réactionnaire n'est que l'agent régulateur du subversif, celui qui défend les subversions d'hier. Ce n'est pas en retardant les processus en cours que l'on peut échapper à leurs aspects perturbateurs, mais en les accélérant à une telle vitesse que l'impensable émerge. Pas pour se retirer du processus, donc, mais pour aller plus loin, pour accélérer le processus. 

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4 POUR LE SURHUMANISME - Pour le prométhéisme, l'homme, en tant qu'abstraction à la fois éthique et biologique, est quelque chose qui doit être dépassé. Ontologiquement lancé en avant comme une balle, l'homme est vraiment fidèle à lui-même lorsqu'il dépasse ses limites. Il ne se trouve pas dans une essence modelée à l'image et à la ressemblance d'un être transcendant ou d'une charte des droits, mais dans un nombre incalculable de transformations, d'imitations, d'hybridations, de relations, de connexions; il se prolonge dans la machine, s'identifie dans l'animal, se déverse dans l'ordinateur, se projette dans les dieux. L'homme est sa propre expérience. Cette tension vers l'ultériorité accompagne l'homme depuis son hominisation, mais aujourd'hui elle devient consciente. Le défi de la posthumanité est devenu incontournable, ce qui peut, bien sûr, conduire à l'inhumain comme au surhumain. C'est le conflit fondamental qui caractérisera tout avenir et dans lequel le prométhéisme prend parti avec un fanatisme lucide : la bataille entre ceux qui veulent un homme rétréci et ceux qui veulent un homme augmenté. 

5 POUR UNE POLITIQUE PROMETHEENNE - Le prométhéisme refuse d'être cristallisé dans une formule sociale spécifique dérivée des ratiocinations des politiciens, et inclut différentes sensibilités et origines. Cependant, cette position ne peut être conciliée avec les positions humanistes, kantiennes, réformistes, hédonistes, réactionnaires, conservatrices, technophobes, cléricales, libérales ou politiquement correctes. Par conséquent, le cercle se rétrécit. 

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6 SOUVERAINETE TECHNOLOGIQUE TOTALE - La question de la souveraineté technologique est si importante que même les programmes politiques des sociétés occidentales en font de plus en plus mention. Toutefois, ces préoccupations sont contrecarrées par les utopies mondialistes, les tabous technophobes et la perte constante de la souveraineté générale à tous les niveaux dans nombre de ces sociétés. Le prométhéisme appelle à une souveraineté technologique totale, pour laquelle un "saut quantique" dans la manière globale de se référer à la politique et à la technologie est certainement nécessaire. La souveraineté technologique totale présuppose - mais se nourrit à son tour - de la souveraineté politique et de la disponibilité des moyens technologiques correspondants, c'est-à-dire de la liberté d'adopter certaines stratégies et de la possibilité concrète de le faire. Un tel "saut quantique" n'est donc concevable qu'à l'échelle de la grande politique, qui est nécessairement celle du grand espace de la civilisation européenne. 

7 AUTODÉTERMINATION DE LA BIOCOMMUNAUTÉ - Le développement de la biotechnologie et de l'anthropotechnologie confronte désormais l'homme à des décisions qui affecteront la quantité et la qualité de sa progéniture. Le perfectionnement des techniques de diagnostic et de traitement prénataux, de procréation artificielle, d'édition génétique et de clonage change radicalement la perspective dans laquelle nous envisageons aujourd'hui les questions démographiques, ainsi que ce nœud de problèmes sur lequel il existe des tabous brûlants et qui porte le nom d'eugénisme. Mais que nous décidions d'utiliser pleinement toutes les techniques disponibles ou de tirer un trait sur elles, nous sommes toujours entièrement responsables de la direction que nous décidons de prendre. Le prohibitionnisme bioéthique est également un choix interventionniste, culturel et auto-évolutif. Le prométhéïsme entend relever ce défi de manière créative en vue d'une autodétermination bio-communautaire. 

8 UNE ECOLOGIE FUTURISTE - Contrairement aux apparences, le prométhéisme est aujourd'hui la seule vision du monde qui puisse donner naissance à une pratique écologique vouée au succès. L'environnementalisme petit-bourgeois des "petits gestes quotidiens", l'environnementalisme nihiliste et extinctionniste, la procrastination suicidaire qu'est l'idée de décroissance, le green washing hypocrite des multinationales - tout cela fait partie d'une idéologie anti-humaine, anti-politique et anti-européenne qui, de plus, n'a aucun espoir d'influencer les dynamiques écologiques. La seule écologie authentique est celle qui intervient dans la nature avec plus, et non moins, de technologie et qui décide comment façonner l'environnement en fonction de paramètres culturels donnés. Bases d'une écologie prométhéenne : géo-ingénierie, nanotechnologies, intelligence artificielle, nucléaire, génie génétique, recherche de nouvelles ressources, nouvelles techniques de stockage et de recyclage. 

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9 LES ROBOTS COMME ALLIES - Depuis plus d'un siècle, la figure du robot agite le sommeil de la modernité, qui voit en lui le profil d'un nouveau golem. L'homme moderne éprouve, en présence du robot, la honte qu'il ressent devant la hauteur humiliante de son propre produit, qui a "vu des choses que nous, les humains, ne pouvons même pas imaginer". Mais les lamentations moralisatrices sur l'homme dépossédé de son âme par les robots évacuent un fait fondamental: le fragment d'obsidienne des premiers hominidés et la puce de silicium sont forgées par le même feu prométhéen. C'est en s'aliénant dans l'artificiel que l'homme, depuis la nuit des temps, est devenu lui-même. Dans le robot - même dans la version plus réaliste des superordinateurs et de l'IA - le prométhéisme voit le miroir de l'homme, sa volonté de vaincre, un allié au-delà du bien et du mal. 

10 EPIQUE DE L'ESPACE - Dans un monde de plus en plus petit, l'espace devient l'ultime frontière à conquérir. En plus d'être un extraordinaire vecteur de recherche et de développement de technologies utiles ici sur terre, l'exploration spatiale garantit l'accès à des matières premières rares et la consolidation de la souveraineté sur les satellites. Mais elle est avant toute chose, surtout dans sa version radicale de découverte, de colonisation et de terraformation d'autres planètes, une source inépuisable d'émerveillement. Peut-être que le prochain ver sacrum sera en direction d'un destin stellaire. Quant aux éventuelles rencontres avec des civilisations extraterrestres, le prométhéisme n'a pas de préjugés positifs ou négatifs, mais il fait cependant l'éloge de la pluralité du vivant, de l'altérité radicale, des multiples formes d'être et de devenir, celle qui nous pousse plus loin, plus haut, au-delà des universalismes et des anthropocentrismes judéo-chrétiens plus ou moins sécularisés. 

11 PHILOSOPHIE DE LA VOLONTÉ - Le prométhéisme n'est pas un messianisme. Il n'annonce pas un nouvel âge d'or dans lequel des machines d'une intelligence semi-divine conduiront les hommes par la main hors de l'histoire, ni l'avènement d'un monde parfait dans lequel les citoyens sans taches ne connaîtront ni la maladie ni la mort. Le prométhéisme est, au contraire, une philosophie inspirée par le sens tragique de la vie et le volontarisme. Ce n'est pas la prédiction fataliste de ce qui sera sûrement, mais l'exhortation vers ce que nous voulons être. La simple reconnaissance d'un destin déjà écrit est déjà un acte anti-prométhéen. Prométhée est la divinité de la décision et de la volonté. À la lumière de son feu brille un monde façonné par notre liberté la plus authentique. 

samedi, 15 janvier 2022

Contre-culture archéofuturiste

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Contre-culture archéofuturiste

Par Luca Leonello Rimbotti

Source: https://www.centroitalicum.com/controcultura-archeofuturista/

"Polemos", une revue écrite par une poignée de kinésithérapeutes audacieux, habitués à discipliner le corps et l'âme, passionnés par les sons insolents et les idées antagonistes, une mine culturelle à ne pas négliger. Des perspectives archéofuturistes, une volonté de "combiner tradition et techno-science afin de créer une vision du monde alternative à la vision dominante".

L'espace laissé libre par la pensée unique et la dictature des médias est désormais très réduit, il s'amenuise de jour en jour. Il n'y a pratiquement plus de contradicteurs officiels. Tout le monde, un peu plus, un peu moins, se plie en quatre pour exécuter les diktats des médias. Aucune exception. Ceux qui ne se prosternent pas occupent encore quelques coins plus ou moins perdus, aux marges de l'espace public, entre un interstice et un autre, le peu qui échappe au Panopticum du pouvoir usurocratique et qui est immédiatement occupé par l'intelligence, est un élément dialectique en grand danger d'extinction. Cette intelligence doit être agile, élastique, et frapper l'imagination par des bonds en avant. Action envisagée, volonté de graver, clou qui gratte la surface lisse de l'information homologuée, et y laisse gravés des mots insurgés, en forme de runes impressionnistes, d'archaïsme retrouvé. Faire de la contre-culture aujourd'hui, alors que nous vivons dans un régime de conformisme de masse, est une mission spéciale, c'est un positionnement de lutte qui mérite tous les éloges.

Nous savons tous que la politique, comprise comme une participation active à la vie de la communauté, est morte depuis longtemps, tuée par le chantage utilitaire, par la paix sociale imposée par le conformisme passif, par l'ennui inintelligent. Et pourtant, parmi les morts-vivants anéantis par la narcose libérale, quelque chose bouge, quelques ondulations, si l'on regarde bien, agitent la surface de la chape funèbre qui recouvre tout. La démocratie libérale, exaltée par son esprit mercantile et encombrée par le vacarme incommunicatif qui l'intoxique, dans son ignorance structurelle n'entend pas le bourdonnement du contraste qui naît, ici et là, qui se forme, qui prend racine parmi la mousse de la résistance humide et fertile contre le pouvoir ploutocratique nationalisé.

En parcourant un cas symptomatique de culture d'agression et d'opposition, la revue Polemos, rédigée par une poignée de kinésithérapeutes audacieux, habitués à discipliner le corps et l'âme, fans du ton insolent et de l'idée antagoniste, on se rend compte que nous avons entre les mains une mine culturelle non négligeable. Les idées sont lancées comme des éclats d'obus modernes qui illuminent l'horizon sombre du régime, activant des éclairs de lumière qui enchantent quiconque demande la nourriture aigre des lions, au lieu des bouillons d'eunuques que le courant principal télévisuel administre à la plèbe.

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Ici, messieurs, nous parlons de "perspectives archéofuturistes". La référence est bien sûr au texte de Guillaume Faye, sorti il y a des années comme un marqueur de l'insurrection anti-mondialiste, comme un phare de la théorie et de l'action, un texte qui faisait briller - et brille encore aujourd'hui - les valeurs comme instruments de lutte, les idées comme armes de défense et d'attaque, bonnes à ouvrir la brèche.

Cela fait maintenant plusieurs années, depuis la sortie en 2015 du premier numéro, consacré aux "généalogies du conflit", que Polemos distribue les idées comme la nourriture essentielle d'un Widerstand têtu et absolu en tous points, mobilisant le meilleur de la force du fer qui tourbillonne dans le poing du rebelle, de l'homme qui ne se laisse pas vaincre par la violence qui est dans le nombre, la majorité, la quantité. Et donc de repenser Faye, avec sa proposition libératrice d'engager la bataille au nom de l'archaïsme à venir.

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Le primordial répudié par le progrès revient comme but et finalité futuriste, c'est l'objectif à conquérir pour donner une logique à la vie, un sens à la survie, une force au lendemain. Faye, face à l'hypothèse loin d'être périlleuse d'une prochaine convergence mondiale de toutes les crises (écologiques, économiques, démographiques, sociales, etc.) en une seule grande catastrophe. ) en une seule grande catastrophe d'époque, a suggéré de réactiver une ancienne instrumentation de guerre - pòlemos, précisément - consistant à penser simultanément à l'archaïque et au futuriste, initiant ainsi la dernière phase du conflit général, celle qui doit et qui verra la désintégration de la société mondialiste, sa désintégration orgiaque en mille ruisseaux de destruction, ouvrant des scénarios néo-médiévaux de nouvelle agrégation tribale, clanique et identitaire.

Ce récit fantastique réaliste dissimule la vérité contenue dans le possible. Les territoires libérés par la disparition des idéologies doivent être remplis par les raisons de vivre des peuples. L'avant-garde de ces personnes doit être, à la manière de Spengler, "éveillée", juste assez pour saisir les idées au bon moment, tout comme le maître artisan saisit la hache pour tailler le bois brut et en faire un navire Viking agile. La terribilité du geste est toute dans sa potentialité. C'est l'inexorable, celui que les anciens connaissaient bien, lié au destin, et dont les contemporains, au contraire, dans leur ignorance tronquée du bas empire, ne soupçonnent même pas l'existence.

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L'unification d'Evola et de Marinetti - lit-on dans l'éditorial du dernier numéro de Polemos - doit représenter la volonté d'"unir la tradition et la techno-science afin de donner vie à une vision du monde alternative à la vision dominante". Cette nouvelle et définitive "révolution conservatrice" doit porter en elle une puissance d'agrégation/mobilisation centrée sur des desseins de réanimation des identités, afin d'entrer dans le grand jeu avec la possibilité donnée au grain de sable d'arrêter le mouvement du char. Le discours est exigeant, l'analyse est de celles qui donnent corps à un véritable manifeste politique d'action possible.

Face au "Great Reset" mené par les multinationales bien connues, qui sont à l'œuvre pour numériser le contrôle planétaire et figer la planète en un format unique, phase dont le Covid-19 n'est qu'un des aspects les plus flagrants, face à ce spectacle non plus occulte mais ensoleillé de machination psycho-politique et d'ingénierie sociale, Polemos prend le risque de l'éthique des Arditi, et vise l'attaque plutôt que la défense. Il préfigure la possibilité d'infléchir dans une certaine mesure le changement vers une hétérogénéité positive des fins, en insérant la notion d'une approche alternative à la transformation à venir.

La préparation de l'événement comprend l'établissement d'une forme intérieure adaptée à l'épreuve, l'activation d'une culture de la révolution possible:

"C'est le premier pas vers une perspective historique archéo-futuriste, qui récupère la forma mentis européenne intégrale sans reculer de peur face aux défis inquiétants et énigmatiques posés par la technologie".

C'est pourquoi, d'une certaine manière, il faut des yeux pénétrants, capables de capter les lueurs dans lesquelles peuvent être projetés les faisceaux de lumière de la nouvelle pensée de l'action :

"A partir du moment où l'on accepte l'ouverture du devenir, le risque que constitue le défi historique, alors se déploie aussi la possibilité d'horizons alternatifs, de nouvelles affirmations qui attendent dans l'ombre des grands événements. L'imprévu est au coin de la rue et il ne fonctionne pas nécessairement selon les valeurs dominantes.

Des mesures sont donc prises pour rassembler dans les cultures d'opposition tous les outils qui peuvent être utilisés le plus rapidement possible pour former l'idée qui déclenchera l'action.

En dehors de l'intellectualisme - dans lequel se morfond souvent une impolitique nostalgie de l'ailleurs: souvenez-vous du Mythomodernisme de Stefano Zecchi ? - Avec Polemos, la pensée et la culture deviennent des banques pour la collecte de la volonté active, des réservoirs d'événements et des réserves de l'avenir.

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Polemos conçoit le moment présent comme une sonde dans le primordial, pour en extraire des valeurs d'actualité et de lutte, intérieures et extérieures. La réflexion prépare l'action, le champ est ouvert à la vraie et grande révolte des cœurs et des caractères:

"L'excavation dans la pensée antique et la lecture des événements actuels à travers le mythe ne sont pas des exercices intellectuels stériles, mais doivent fournir les axes sémantiques sur lesquels configurer une présence au monde, une action concrète, qui ne se laisse pas influencer par la mono-pensée conformiste".

L'ambition est grande, comme il se doit. Les matériaux idéologiques de rupture adaptés à cette sacro-sainte Hybris se trouvent partout dans les territoires infinis de la culture européenne. Les maîtres de la subversion pluto-quaker ne sont soutenus, en revanche, que par des lambeaux d'inculture maçonnique et cosmopolite.

Dans la meule de la techno-science, le proscripteur jüngerien qui éclaire la réaction reconnaît l'ancien "feu créateur qui brûle depuis des millénaires et qui a fait ses premiers pas avec les peuples indo-européens". Aucune crainte d'être écrasé par le caractère monolithique du gigantisme technocratique, qui déchire les peuples et les nations dans la paralysie générale de toute opposition.

Les jeunes qui mènent la résistance politico-culturelle de Polemos brandissent des instruments archaïques, aiment l'ancestral et le trouvent intégré dans le grand avenir, vers lequel ils regardent avec fermeté et certitude. Parmi eux, il y a ceux qui, comme Francesco Boco, avec l'envergure d'un philosophe heideggerien, ont déjà écrit des mots droits, à la Spengler, sur l'ardente nécessité de récupérer l'identité au bord de l'abîme, et avec elle l'origine. Les peuples doivent retrouver leurs racines, chacun leur origine, qui est la vie, la diversité, la richesse, la noblesse, pour s'opposer au déshonneur de l'amoncellement mondialiste:

"L'origine est alors inépuisable. Elle peut être oubliée, méconnue, remplacée, déformée, mais elle peut toujours réapparaître dans l'histoire en devenir, en régénération. A chaque instant, le projet futur et la richesse vitale du passé sont enfermés dans la décision présente".

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Vouloir avoir son mot à dire dans les projets sociobiologiques du futur, dans les événements liés aux biotechnologies, opposer des arguments et une force mentale à la dictature sanitaire-numérique qui prépare l'assaut final pour désintégrer les peuples; essayer de s'inscrire dans la dynamique de la domination oligarchique internationaliste; persister à vouloir comprendre si le mondialisme est un rocher ou une poupée gonflable: tout cela engage les extrémistes du conflit créatif à considérer la destruction programmée de l'Europe comme quelque chose de plus qu'un drame d'époque, quelque chose de mieux, c'est-à-dire une opportunité. Puisque le mouvement crée la possibilité, c'est dans le mouvement et le bouleversement que le choix de la minorité radicale identifie l'éclair de la possibilité.

Ces collecteurs rebelles d'idées contradictoires, tout comme un autre des rédacteurs de Polemos, Andrea Anselmo, se souviennent volontiers que Jünger suggérait "d'utiliser à leurs propres fins même les dynamiques les plus paroxystiques de la contemporanéité et de les plier pour créer des espaces d'autonomie et de liberté". La liberté de croire, d'agir, de faire enfin bouger les terribles ailes du célèbre papillon confucéen.

 

1 Francesco Boco, La catastrofe dell'Europa. Saggio sul destino storico del Vecchio Continente, Éd. Idrovolante, 2018, p. 130.

La catastrofe dell’Europa

L’occidentalizzazione del mondo che ha accelerato il proprio avanzamento nei primi anni del XX secolo conosce uno sviluppo tale da fagocitare ogni cultura e ogni storia. Oggi però alcune nazioni consapevoli e gelose della propria bio-specificità cercano di tenere testa a un processo che da più parti viene presentato come ineluttabile e irreversibile.

Nel momento in cui risulta sempre più evidente che gli attori della storia mondiale sono le civiltà o i grandi agglomerati continentali, l’Europa sembra collocarsi ai margini degli eventi, in posizione di soggezione.
L’intero Mediterraneo è attraversato da guerre, rivolte, instabilità, crisi e flussi immigratori che sembrano senza precedenti ed è chiaro che tutto ciò finisce col riflettersi sul Vecchio Continente. L’incapacità dell’Europa di spezzare tutti i condizionamenti esterni dipende da un vuoto ontologico che si è andato approfondendo nel corso della sua storia. Offuscato e smarrito il legame con il suo essere autentico, l’Europa si è allontanata da se stessa divenendo qualcos’altro. Il destino storico però è fatto dalle decisioni degli uomini e niente è fissato una volta per sempre. Tutto è ancora possibile.

L’Europa è il passato?
Più precisamente, è un passato, che ci corre incontro dall’avvenire come uno dei destini possibili che si aprono alla nostra scelta storica.
Anzi, in realtà è proprio quello della scelta storica, perché in che altro consiste la specificità europea se non in una scelta-per-la-Storia, rispetto alle culture astoriche, le culture che ne sono state semplicemente preda, e soprattutto il Sistema che oggi vuole la sua fine, in vista di un Brave New World volto a porre l’ultima parola sull’avventura umana?

dalla postfazione di Stefano Vaj

 

vendredi, 07 janvier 2022

Guillaume Faye et la vision de l'archéofuturisme

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Guillaume Faye et la vision de l'archéofuturisme (I)

par Adriano Erriguel

Source: https://posmodernia.com/guillaume-faye-y-la-vision-del-arqueofuturismo-i/

Des temps nouveaux, des temps sauvages.

L'avenir est un pays étrange : les choses s'y font différemment. Cette phrase - inspirée d'un célèbre roman - est plus vraie aujourd'hui que jamais [1].

Juin 1914 

Juin 1914, le dernier été de la Belle Époque. Une ère de science et de progrès. À Aulnay-sous-Bois, charmant village des environs de Paris, un groupe de jeunes aristocrates et bourgeois désœuvrés - la "jeunesse dorée" de l'époque - s'adonne à un passe-temps à la mode : la consultation d'une voyante. Que sera ce lieu - ce café, cette petite place paisible - dans vingt-cinq, cinquante ou cent ans ? 

La voyante, dont la réputation repose sur le fait de ne pas garder pour elle les choses désagréables, est à la hauteur de sa réputation. Dans trois ans, il ne restera qu'un squelette de l'une des personnes présentes, à cinq mètres sous terre dans la campagne de Verdun. Un début peu prometteur. Les visions se succèdent les unes après les autres. Dans quinze ans (1930), tout le monde semble heureux : il y a une danse sur la place et des modèles de voitures inconnus envahissent le terrain. Dix ans plus tard (1940), une grande colonne de réfugiés semble traverser l'endroit. En juin 1964 - cinquante ans après les retrouvailles insouciantes - les choses semblent avoir changé : les anciennes maisons ont été démolies et de gigantesques blocs de béton - des masses grises en forme de cube avec une multitude de trous - sont érigés à leur place. 

A partir de là, les visions deviennent plus étranges. En juin 2014 - cent ans après la rencontre - une mosquée a été érigée sur le site du café. Les femmes portent un foulard ou se couvrent le visage d'un tissu noir, au milieu de nuées d'enfants à la peau sombre. À proximité se trouve un bâtiment ressemblant à un marché, dont les fenêtres sont brisées, comme s'il avait été pillé. Il y a des hululements, comme des sirènes d'alarme. ....       

"Une mosquée, des femmes voilées, vous parlez de la France ou des colonies ? ". - s'exclame l'un des jeunes hommes présents. Définitivement, l'humeur du groupe semble être ruinée. 

Juin 2114, deux cents ans plus tard. Le soleil brille au milieu du murmure des oiseaux. La végétation s'élève au-dessus de ce qui semble être d'immenses ruines. Sur ce qui devait être la petite place d'Aulnay-sous-Bois se dressent des habitations rudimentaires, une sorte de bicoque faite de bois et de tôle. Des groupes bruyants de personnes à la peau très foncée prennent racine parmi eux.

"Sont-ils... noirs ?" demande l'une des femmes présentes.

"Oui, Madame la Vicomtesse ; ils sont noirs".   

C'est le début du livre "Archéofuturisme 2.0", de l'écrivain et théoricien français Guillaume Faye.  Un damné parmi les damnés, dans une "famille" de pensée déjà damnée. 

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Total sinistre 

Le monde moderne ressemble à un train de munitions fonçant dans le brouillard par une nuit sans lune, toutes lumières éteintes.

ROBERT ARDREY

Dans la pensée critique, anticiper l'avenir est toujours la chose la plus risquée à faire: soit vous vous ridiculisez, soit vous gagnez l'aura d'un prophète, généralement à titre posthume. Pour éviter ce risque, les écrivains visionnaires se réfugient dans les domaines permissifs de la science-fiction. Georges Orwell (1984), Aldous Huxley (Brave New World) et Ray Bradbury (Fahrenheit 451) en sont les exemples les plus marquants. Qu'il s'agisse d'essai ou de fiction, notre époque est propice à de tels exercices. Quels sont les scénarios récurrents?

D'une part, l'invasion de la technologie dans toutes les sphères de la vie laisse entrevoir un futur transhumaniste, définitivement géré, régulé par des algorithmes prédictifs, gouverné par un dôme de contrôle des big data. D'autre part, les prévisions sur le changement climatique ont donné naissance à la collapsologie: une "science de l'effondrement" aux accents apocalyptiques. Pour compléter le tableau, la crainte que le capitalisme ne dépasse les limites physiques de la planète a conduit certains à envisager un avenir post-capitaliste. Ici, les cauchemars dystopiques des uns - une planète dévastée, gouvernée par une élite extractive - alternent avec les désirs utopiques des autres : un "écosocialisme" aux accents moralisateurs, ou - dans les cas d'optimisme aigu - un scénario d'automatisation totale, de transhumanisme émancipateur et de revenu de base universel ; un "communisme de luxe", en somme [2]. Dans ce contexte varié, où se situe l'œuvre de Guillaume Faye ? 

Guillaume Faye est connu pour son idée d'"archéofuturisme", qui est souvent catégorisé comme "une utopie d'extrême droite". Cependant, il est très difficile de considérer le monde décrit par Faye comme une "utopie". Aucune personne saine d'esprit - aussi extrémiste de droite soit-elle - ne voudrait connaître un tel monde. Les visions de Faye ne sont pas faites pour les peureux, et elles ne sont pas à prendre à la légère. Il s'agit en fait d'une dystopie carrément sinistre qui, si l'on devait noter l'échelle apocalyptique sur une échelle de un à dix, serait un vingt ou un trente. Mais l'approche de Faye n'est ni pessimiste ni optimiste. Son point de vue est celui de l'accélérationnisme, qui signifie en termes vulgaires "le pire, le meilleur". L'accélérationniste part du principe que, lorsqu'une situation est pourrie, il est préférable qu'elle explose le plus rapidement possible. Une ligne d'argumentation - celle des accélérationnistes - qui suscite la méfiance.

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La position de Faye n'est-elle pas une forme de millénarisme, un aveu d'impuissance ? Pour l'essayiste français Romain D'Aspremont, l'attitude de Faye dénote "l'impuissance de l'homme de droite qui déteste tellement ce monde - l'image de sa défaite perpétuelle - qu'il a le fantasme de sa destruction apocalyptique, d'une sorte de déluge universel qui balayerait la civilisation de gauche de la surface de la terre, lui permettant de faire triompher son programme réactionnaire" [3]. Une explication psychologique qui semble plausible. Suffisant pour nous faire oublier Faye ?

En fait, lorsqu'un prophète a raison une fois, cela peut être une coïncidence, mais lorsqu'il a raison plusieurs fois, cela peut nous faire réfléchir. Guillaume Faye a publié son livre "Archéofuturisme" en 1999, dans l'intervalle optimiste de la "mondialisation heureuse". Deux ans plus tard, les attentats du 11 septembre (2001) ont eu lieu ; 2008 a vu la crise financière mondiale ; en 2015, une crise migratoire sans précédent a éclaté ; dans le même temps, la montée du populisme a commencé à récupérer des valeurs "fortes" dans un contexte marqué par le conflit entre l'Islam et l'Occident, par un retour de la géopolitique et par un retour du leadership charismatique. Au cours de ces années, les preuves du changement climatique se sont accentuées et, en 2020, la pandémie de COVID a éclaté. D'une manière ou d'une autre, tous ces phénomènes avaient été prédits par Guillaume Faye depuis les années 1990. Mis en perspective : qui s'est avéré être le meilleur prophète, Guillaume Faye ou Fukuyama ?  

Le cœur des ténèbres

Penseur "culte", à l'écart des modes et du grand public, Guillaume Faye est, depuis les années 1970, une référence pour le monde intellectuel que l'on a appelé la "Nouvelle Droite" française. Faye était un penseur aux intuitions fulgurantes, aux idées chocs dans lesquelles il alliait la provocation et un certain caractère prémonitoire. Favorisée par une indéniable accroche personnelle - un dandy à la française - Faye combine le sens de la formule, un don d'éloquence et une large formation intellectuelle. Mais comme cela arrive parfois, une surabondance de cadeaux peut être une malédiction. Il est difficile de savoir ce qui lui est arrivé, peut-être a-t-il été victime de son désintérêt pour "faire carrière", ou peut-être a-t-il appliqué à la lettre la maxime de William Blake - "le chemin de l'excès mène au temple de la sagesse" - et en a-t-il fait trop. Quoi qu'il en soit, dans les années 1980, il a quitté la Nouvelle Droite - qu'il avait modulée de manière décisive - et s'est lancé dans diverses activités. Il était animateur sur la radio Skyrock, où il est devenu populaire pour ses farces outrancières (canulars, en français) basées sur des fake news (précurseurs des fake news actuelles) et des imitations irrévérencieuses [4].

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Il était également scénariste comique et - à l'en croire - acteur porno occasionnel, mais on ne sait jamais ; sa facette situationniste l'a conduit vers le théâtre et la farce. À la fin des années 1990, il est revenu à l'écriture politique et l'a fait sans gants de velours ; l'un de ses livres a été condamné par une décision de justice. Aujourd'hui, il est plus facile de le lire en anglais. Ses anciens camarades de la Nouvelle Droite prétendaient qu'il était devenu fou (comme une sorte de Kurtz dans Au cœur des ténèbres). Ses proches ont dit qu'il n'était pas un intellectuel typique, mais ce que les Français appellent un éveilleur, ce qui se traduit en anglais par awakener et en espagnol par quelque chose comme un "réveilleur" ou un "gardien". Le terme le plus approprié est peut-être celui d'"inspirateur".  

"Les inspirateurs, écrit un ami de Faye, sont des hommes qui viennent d'un monde immuable, immanent et permanent, d'une sorte d'"autre monde" parallèle au nôtre, et qui ont une mission à accomplir. Ces hommes n'ont d'autre souci que de transmettre leur savoir et leur énergie, toute leur vie est consacrée à cette transmission (...) Un inspirateur est un réaliste, même s'il peut apparaître comme un mystique. Il est normalement un homme simple et modeste, il n'est pas vaniteux et ne souffre pas de narcissisme ou d'un ego démesuré" [5]. Quelle mission Guillaume Faye s'est-il fixé ? Sans doute celui de secouer, de bousculer, de faire honte aux consciences de ses compatriotes européens ; celui de dénoncer la maladie de l'âme qui ronge leur civilisation. Peut-être pour les préparer à quelque chose.

Malheureusement, de nombreuses intuitions de Faye sont trop bien adaptées au climat vital - au Zeitgeist - de notre époque : comme dans le film "A Clockwork Orange", Faye nous oblige à garder les paupières ouvertes sur des choses que nous préférerions ne pas voir. 

Les prophéties de Corvus

In girum imus nocte et consumimur igni [6]

Attribué à VIRGIL

Le livre le plus proprement "prophétique" de Faye s'intitule "La convergence des catastrophes", et a été publié en 2004 sous un pseudonyme inquiétant (Guillaume Corvus) [7]. Dans le sillage du mathématicien René Thom - spécialiste des effondrements systémiques - Faye a mis en garde contre la conjonction d'une série de lignes dramatiques qui couvaient depuis longtemps, et qui aboutiront à une rupture décisive dans l'histoire humaine. Quelque chose de dix fois plus terrible que la chute de l'Empire romain. 

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Guillaume Faye prend la question du changement climatique très au sérieux, même si, selon lui, ce n'est pas la seule catastrophe qui se profile à l'horizon, ni même la plus grave. L'explosion d'une économie financière fondée sur l'endettement marquera, selon lui, l'effondrement de la mondialisation, ainsi qu'une récession économique sans précédent à laquelle s'ajoutera une escalade de crises parallèles : le retour des épidémies à l'échelle mondiale, la crise énergétique et la raréfaction des combustibles fossiles, l'insuffisance des ressources agricoles et halieutiques, les crises migratoires de grande ampleur, la montée des nationalismes, la prolifération du terrorisme, le déclenchement de conflits armés - peut-être nucléaires - et une inimitié croissante entre l'Islam et l'Occident. En Europe, les perspectives sont particulièrement sombres : une population dramatiquement vieillissante facilitera une invasion migratoire qui débouchera - pour le dire crûment et simplement - sur une série de guerres civiles raciales sur le continent. Contrairement aux collapsologues qui se concentrent sur le changement climatique et l'épuisement des ressources énergétiques, Faye considère les conflits ethniques comme l'un des principaux scénarios d'effondrement. Principalement en Europe.  

Une guerre civile raciale ? Le paradigme du "métissage universel" et du "citoyen du monde", selon Faye, ne verra jamais le jour. L'avenir sera celui d'une géopolitique faite de blocs ethniques se disputant les terres, les mers et les ressources rares de la planète. L'Europe péninsulaire est un morceau convoité par les Etats-Unis, mais aussi par le Sud, sous la bannière de l'Islam. Les jeunes issus de l'immigration ne soutiendront pas les progressistes qui leur ouvrent aujourd'hui la porte - vaine illusion de la "belle gauche" - mais les partis confessionnels de leur propre camp. Le choc des civilisations (prédit par Huntington) aura lieu au sein de l'Europe : une catastrophe bien plus grande que tous les fléaux et les guerres qu'elle a connus jusqu'à présent.        

Il y a des petits détails chez Faye qui surprennent parfois ; comme le fait qu'en 2002, il avait prédit une vague de camions-kamikazes dans les villes européennes, et avait recommandé de placer des cairns dans les zones fréquentées (une mesure généralisée depuis 2016). À cheval entre l'essai et le roman d'anticipation, Faye déroule son catalogue particulier d'horreurs : gazage de tunnels de métro, déraillement de trains à grande vitesse, attaques d'installations électriques, attaques d'aéroports avec des dards portables, bombes radiologiques dans les capitales, cyber-attaques... tous les scénarios de l'apocalypse, du macro-terrorisme sans explosifs au terrorisme avec objets incendiaires, en passant par les attaques avec des moyens balistiques, les avions suicides et le giga-terrorisme nucléaire. Qui oserait aujourd'hui dire qu'aucun de ces scénarios n'est possible? 

La grande rupture, selon Faye, ne se produira pas brusquement, mais sera une réaction en chaîne de plusieurs années. Dans un exercice d'anticipation risqué, Faye propose plusieurs scénarios alternatifs. Dans le plus dur des cas, il prévoit une contraction démographique mondiale, une régression technologique brutale et une économie de subsistance en dehors des villes (qui disparaissent pour l'essentiel). Il y aura alors une coexistence de "niveaux de civilisation": un retour au néolithique dans une grande partie du monde, un retour à une sorte de haut Moyen Âge (scénario européen) et la persistance de quelques "îlots de civilisation", avec une technologie proche de celle du début du XXe siècle. Ce scénario "Mad Max" aboutit à une stabilisation de plusieurs centaines de millions d'habitants sur la planète ; l'humanité est confirmée comme une "variante ajustable" dans la transition d'un système non viable à un système viable. Une conclusion qui n'est pas sans rappeler la célèbre "hypothèse Gaia", mais sans la dimension mystique et les artifices du New Age.

Comme le dirait Lénine, que faire ?

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L'ère du citoyen-soldat 

Ce qui est intéressant chez Guillaume Faye, ce n'est pas le péplum apocalyptique qu'il propose, mais les petits caractères qui l'entourent. Son point fort réside dans la dénonciation des maux qui, selon lui, rongent la civilisation européenne - vieillissement, ethnomasochisme, migration de repeuplement, dissolution de son tissu social, entre autres - et la laissent sans défense face aux épreuves à venir. Parmi les scénarios qu'il traite, celui de la guerre se détache : guerre des rues, guerre civile ethnique, guerre terroriste généralisée, guerre des civilisations, conflits nucléaires peut-être... Illusions d'un extrémiste de droite éclairé ? On pourrait le voir comme tel. Mais en soulevant toutes ces questions, il ne faisait qu'anticiper un état d'esprit qui allait se répandre dans les décennies à venir.     

France, avril 2021. Une vingtaine de généraux à la retraite - avec le soutien supposé d'une centaine de commandants en activité - publient une lettre commune dénonçant le communautarisme ethnique, la désintégration progressive du pays et le danger d'une guerre raciale. La réaction du gouvernement et de la presse grand public est prévisible : "discours d'extrême droite visant à attiser la haine". Des sanctions sont annoncées contre les responsables. Un mois plus tard - en mai 2021 - une nouvelle lettre, émanant cette fois de militaires actifs anonymes, réitère qu'"une guerre civile se prépare". Les soldats rappellent leurs sacrifices à l'étranger "pour détruire cet islamisme auquel vous faites des concessions sur notre sol" et annoncent une "période de chaos et de violence" qui "ne viendra pas d'une déclaration militaire mais d'une insurrection civile". Plus de 160.000 signatures soutiennent la lettre. Le scandale politique et médiatique - en France et à l'étranger - est énorme. Le tout dans le contexte d'une controverse nationale déclenchée par le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, après avoir assuré que "la France est malade de l'insécurité" et que sa société se dirige vers "l'ensauvagement". Des mots qui, selon les progressistes, "font le jeu de l'extrême droite". Peut-être que certains d'entre eux se sont souvenus de ce qu'un certain Guillaume Faye disait depuis longtemps. Il l'a dit dans des livres tels que "La colonisation de l'Europe" (condamné en 2000 pour "incitation à la haine raciale") et "Avant-guerre : chronique d'un cataclysme annoncé" (2002). Ces livres avaient des années d'avance sur les best-sellers de journalistes réputés tels que Walter Laqueur, Christopher Caldwell et Douglas Murray [8], à une différence près : Faye ne nourrit pas l'illusion que, par une sorte de miracle final, la situation peut être réglée à la satisfaction de tous. Son pronostic est sombre : le problème n'est pas celui de l'"immigration" ou de l'"invasion", mais celui de la colonisation : le processus par lequel des personnes allogènes repeuplent un territoire et en délogent les autochtones. La démographie est implacable : tôt ou tard, un pouvoir islamique s'installera en France, d'abord au niveau municipal, puis - éventuellement - au niveau national. Ce qui est pieusement dissimulé sous le nom de "délinquance juvénile" n'est que le prolégomène d'une guerre civile ethnique. Guillaume Faye a écrit ce texte plusieurs années avant que Michel Houellebecq ne publie "Soumission". Incitation à la haine ? 

4100RM9CQYL.jpgLa libanisation violente du continent est un scénario envisagé depuis des années dans les perspectives stratégiques des deux côtés de l'Atlantique. Cette thèse a inondé le débat public et a même donné naissance à un genre littéraire : le roman dystopique de guerre civile. Sans parler des innombrables essais décrivant un avenir de sang et de chaos [9]. L'Europe entre - écrit Bernard Wicht, professeur à l'Université de Lausanne - "dans une spirale de conflits chaotiques et de violence anarchique à la manière africaine". C'est ce que l'historien Ferdinand Braudel appelait les "zones de désordre prolongé" [10]. Un scénario que l'Allemand Hans Magnus Enzensberger a esquissé en 1992, lorsqu'il a annoncé que la mondialisation des marchés entraînerait une mondialisation des migrations [11]. En 1998, le politologue suisse Eric Werner dénonçait la complicité du pouvoir dans la propagation du désordre, une thèse développée à sa manière par Naomi Klein dans "The Strategy of Shock" (2008) (12).

Dans ces scénarios, les mégapoles sont configurées - comme en Bosnie et au Liban - comme le champ de bataille par excellence. La division mafieuse des zones urbaines et la division en territoires ethniques deviendront irréversibles, tandis que l'État perdra son monopole de la violence légitime et que les citoyens s'organiseront en groupes d'autodéfense. C'est la notion de "citoyen-soldat 2.0" (Bernard Wicht) [13]. C'est l'idée de "guerre civile moléculaire" (H.M. Enzensberger) qui prend la forme d'une violence permanente dite de "basse intensité" en raison de son caractère diffus. À long terme, des confrontations entre États et ONG de plus en plus agressives, ainsi que l'utilisation d'armes nucléaires de faible intensité, ne sont pas exclues. Dans ces scénarios limites, les zones qui n'ont pas une culture locale solidaire et homogène (comme le Japon, qui s'est comporté de manière exemplaire lors du tsunami de janvier 2011) seront pénalisées. Dans les zones "multiculturelles", le pillage sera à l'ordre du jour et les grandes villes deviendront des pièges mortels. 

L'avenir est archaïque

Pour situer le contexte, il faut savoir que, si les tendances démographiques ne changent pas, en 2060, les Européens autochtones seront minoritaires et en 2100, la population européenne autochtone - y compris la Russie - représentera moins d'un tiers sur le vieux continent: 170 millions d'individus contre une écrasante majorité d'origine allogène [14]. Dans un monde de pénurie et d'indigence, les constantes anthropologiques se manifesteront dans toute leur crudité: lutter pour les ressources, contrôler le territoire, assurer la reproduction, protéger la progéniture. Les valeurs que la modernité avait cherché à éliminer vont revenir en force. Nous allons assister à une ethnicisation définitive des relations sociales. Le paradigme libéral sera impuissant à penser les temps nouveaux. Dans la phase actuelle, le lien social continue de se fragmenter et la société se tribalise selon des lignes néolibérales. Mais cette diversité postmoderne - les "minorités sexuelles" en premier lieu - est un artifice. La fausse diversité ne résistera pas à l'assaut des vraies "tribus", celles organisées selon des critères ethniques et religieux (et non sociologiques). La tribu qui connaît la croissance la plus rapide, souligne Faye, est l'islam. 

Quelle est la recette officielle ? Nous ne le connaissons que trop bien: égalité devant la loi, tolérance, laïcité, "la diversité est notre force", etc. En d'autres termes: le recours à des valeurs abstraites qui cimentent la coexistence. La prospérité individuelle et le culte de la consommation sont censés faire le reste. Mais cela cache une vérité essentielle : il n'y a pas de "valeurs" si elles ne sont pas sous-tendues par un sentiment d'appartenance commune, une conscience nationale, une culture. Si tout ce qui nous lie est une promesse de consommation illimitée, que se passera-t-il lorsque cette promesse ne pourra être tenue ? 

Le temps passe et les masques tombent. Les critiques "conservateurs" posent souvent le bon diagnostic, mais ils s'obstinent à nourrir une illusion: que tout le monde peut être "occidental" s'il le veut, que tout le monde veut être occidental, sans autre horizon que celui de la consommation. C'est un déni de la réalité au sens freudien du terme. Il y a des années, l'essayiste espagnol Álvaro Delgado-Gal écrivait: "la terrible notion d'un ennemi mortel entre les formes de vie bouche l'horizon. Elle nous laisse littéralement abasourdis et stupéfaits (...) Les Occidentaux aiment à penser que leurs ennemis acharnés sont victimes d'un malentendu. Mais la douleur finira par les éveiller à la réalité" [15].  

Discours de haine ? En lisant Faye, il faut souligner qu'il n'y a aucun appel à la haine, aucun dénigrement des ethnies ou des croyances, mais une froide observation éthologique. Nous ne devons dénier à l'ennemi ni sa noblesse ni sa cohérence humaine", souligne Faye, "il ne fait qu'occuper le terrain que les autres abandonnent". L'avenir sera plus archaïque, c'est-à-dire plus humain au sens éthologique du terme, que le passé récent.

Un autre scénario est-il possible ? Faye appelle ça une "symphonie espagnole". De la résistance à la reconquête.

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Métapolitique de la fin-de-siècle

Que faire des trompettes de l'apocalypse ? Que faire de Guillaume Faye et de sa "convergence des catastrophes" ?

La "fin du monde" est à la mode. Le catastrophisme climatique et la crise du COVID n'ont fait qu'accélérer cette vague de pessimisme. Avec sa théorie de la convergence des catastrophes, Guillaume Faye anticipe un débat qui, dix ans plus tard, s'installera en France sous le nom de "collapsologie" ou "science des effondrements". L'idée, promue par les chercheurs Pablo Servigne et Raphaël Stevens, est d'agréger toutes les données fiables sur l'évolution des écosystèmes terrestres afin d'anticiper les catastrophes (16). Leur champ de vision est élargi en intégrant la théorie dite de la "complexité", qui étudie les vulnérabilités systémiques résultant de l'interaction de différents facteurs.  Cette théorie nous dit que plus une société devient complexe, plus elle devient vulnérable. À cet égard, le passé regorge d'exemples. 

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Appliquant la "théorie de la complexité" à l'histoire, l'anthropologue américain Joseph Tainter a étudié - dans un ouvrage désormais classique - l'effondrement de l'Empire romain, de la civilisation maya et de la civilisation Chaco, entre autres (17). Plus récemment, le biologiste évolutionniste Jared Diamond a développé cette analyse dans un livre à succès (18). De son côté, l'historien américain Eric H. Cline souligne qu'à l'âge du bronze tardif, il existait déjà "un système mondialisé avec de multiples civilisations en interaction, partiellement dépendantes les unes des autres (...) Les parallèles - ou comparaisons - entre cette époque et la nôtre peuvent être intrigants". L'effondrement final de cette époque s'est produit vers 1177 avant J.-C. (19). Eric H. Cline écrit qu'en travaillant à la révision de son livre (2020), il a été frappé par un titre du Guardian : "L'humanité est menacée par une tempête de crise parfaite". Selon une enquête menée auprès de 22 scientifiques de 52 pays", écrit la journaliste scientifique Fiona Harvey, "la combinaison d'une série d'urgences (pénurie d'eau, changement climatique, disparition d'espèces, crise de la production alimentaire) pourrait culminer en une "tempête parfaite" qui engloutirait l'ensemble de l'humanité". M. Cline souligne que "la question n'est pas tant de savoir si tout cela peut arriver, mais quand cela arrivera". Quelques mois plus tard, la crise du COVID a éclaté [20].

M00691208018-large.jpgLes estimations de la collapsologie se heurtent à de multiples objections. Par exemple, ceux qui dénoncent les erreurs de calcul dans la corrélation des facteurs. La vulnérabilité - disent ces critiques - coexiste avec la résilience, et les systèmes complexes ont toujours tendance à se rééquilibrer : tout le contraire de ce que disent les collapsologues. Ils sont également accusés de faire un usage sélectif des données, de ne choisir que celles qui soutiennent leur thèse. La pertinence de certaines prévisions est également contestée (par exemple, la controverse sur le changement climatique n'est pas close). Ces objections sont fondées. Mais en tout état de cause, il ne faut pas oublier qu'il n'y a aucune civilisation dans l'histoire qui ne se soit effondrée, et il n'y a aucune raison de croire que la nôtre devrait faire exception. La différence aujourd'hui réside dans le fait que la mondialisation enferme tous les peuples du monde dans un système complexe. Le plus grand danger - selon Nassim N. Taleb, auteur de la célèbre théorie du "cygne noir" - survient lorsque la connectivité est trop importante. Tout événement négatif peut créer une réaction aux conséquences fatales [21]. Selon cette idée, nous vivons à l'ère du plus grand danger. Devons-nous en être obsédés ?

Le thème de la "fin du monde" est aussi vieux que l'humanité. Ceux qui insistent trop sur ce sujet doivent être suspectés. Le catastrophisme véhicule trop souvent une "rage contre le monde" très caractéristique des perdants de l'histoire: la "catastrophe rédemptrice, purificatrice, refondatrice, présente dans les grands récits religieux" (22). Le problème de cette pensée réside dans son caractère anti-politique: "En pariant trop sur la catastrophe, écrit François Bousquet, on l'érige en un absolu indépassable et on la condamne ainsi à n'avoir aucune application pratique". En d'autres termes, l'obsession de l'effondrement réduit à néant le sens de la politique, qui est l'art du possible appliqué aux situations réelles. Les "préparationnistes" (qui attendent une apocalypse qui ne viendra jamais), les accélérationnistes (qui souhaitent que la catastrophe arrive), les moralistes (qui se réfugient dans des modes de vie utopiques): tous sont des exemples extrêmes d'anti-politique. Mais rien n'est écrit dans l'histoire. Même si les scénarios d'Armaggeddon sont possibles, le rôle de la politique est d'essayer de les éviter [23]. Guillaume Faye les connaissait certainement tous.

Guillaume Faye savait sûrement tout cela. Il savait probablement aussi que notre civilisation technologique est trop résiliente, que les connaissances accumulées sont trop importantes, qu'il est très difficile d'envisager - même en cas de cataclysme majeur - une régression de l'ampleur qu'il envisageait (et qu'il prévoyait pour 2010-2025). Même s'il s'est laissé emporter par son imagination, il est étrange qu'à un moment donné, il n'en ait pas eu conscience. Quelle était alors son intention ?

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Apollo reviendra

Grèce, été 1979. Une scène insolite se déroule dans le sanctuaire de Delphes, devant les ruines de la Stoa. Un groupe de jeunes gens, venus de différentes régions d'Europe, prononcent un étrange serment. Le ton est solennel et résolu. "Nous jurons de travailler, de toute notre énergie et de toute notre volonté, à la renaissance de la culture européenne (...). Nous jurons d'être fidèles à la plus longue mémoire pour construire le plus grand avenir (...) par la lyre d'Apollon, dont le chant accompagne nos pas: le Soleil reviendra". La formule n'est pas sans rappeler la dernière prophétie attribuée à la Pythie de Delphes au VIe siècle de notre ère: "Un jour, Apollon reviendra, et ce sera pour toujours". Le jeune Guillaume Faye - l'un des meneurs du groupe - sera marqué par ces mots. La scène - avec sa vague saveur sectaire - illustre une impulsion idéologique qui a pris beaucoup de poids dans la droite radicale de l'époque: le (néo-) paganisme. Le "serment de Delphes", promu par l'association culturelle GRECE (le noyau de la soi-disant "Nouvelle Droite" française), a solennisé l'affiliation culturelle néo-païenne d'une génération de cadres et de militants. C'est le contexte idéologique qui permet d'interpréter la vision post-apocalyptique de Faye, de l'encadrer philosophiquement.

Le "néo-paganisme" de droite a été une grande erreur métapolitique: il n'y a pas de pire "guerre culturelle" que celle qui se réfugie dans des univers parallèles. Dans sa pire version, le néo-paganisme de droite n'était qu'un antichristianisme déguisé, ou un kitsch culturel confinant au folklorisme du plus mauvais goût. Issu d'un milieu très positiviste, Faye s'intéressait à la sociologie, à la philosophie, à l'économie, aux sciences politiques, domaines bien éloignés des aléas ésotériques qu'il méprisait ouvertement. Pourtant, son travail véhicule une attitude clairement païenne. Quel genre de paganisme était-ce ? 

Le paganisme de Guillaume Faye est lié à une tradition classique de scepticisme et de réalisme politique. "Aux yeux de Faye", écrit son ami Robert Steuckers, "le seul paganisme viable est celui qui renoue avec l'antiquité grecque et sa philosophie bien structurée: l'ardeur dynamique d'Héraclite, l'élitisme de Platon, la logique et la rigueur affichées dans la Politique d'Aristote" (24). Un paganisme sobre, rationnel, philosophique, très proche de Thucydide, Machiavel et Nietzsche ; une attitude vitale à des années-lumière de l'"Empire du Bien" post-moderne. Face au normativisme moral qui envahit l'espace politique, le paganisme revendique le "bien" comme ce qui renforce l'individu, comme ce qui facilite à la fois sa survie et celle du groupe, surtout dans les temps de fer et de feu. Dans la vision de Faye, un jour viendra où les fétiches idéologiques d'aujourd'hui - l'idéologie de l'émancipation, de la communication illimitée, du métissage sans limite, des identités fluides - disparaîtront du jour au lendemain dans les poubelles de l'histoire. Le progressisme des Lumières se révèlera alors comme ce qu'il a toujours été: un stade éphémère, une illusion, comme l'ont été en leur temps le libéralisme et le marxisme, avec leur prétention à faire de la rationalité économique la source de toute raison. Nous n'aurons pas un monde pacifié par la déesse Raison, mais la "guerre des dieux" annoncée par Max Weber (La politique comme profession, 1919). Nous n'assisterons pas à la "fin de l'histoire" mais au début d'un nouveau cycle. Les lignes de conflit seront ethno-culturelles, religieuses, territoriales. Le "monde d'hier" perdurera sous la forme d'un mythe: celui d'un "âge d'or" qui aurait précédé l'âge des ténèbres.

Évidemment, il y a toute une épopée dans tout cela, une certaine poésie post-apocalyptique. Ce n'est pas un "intellectuel" mais un "inspirateur" qui parle ici. Ce qui intéresse le plus Faye, ce n'est pas que nous croyions ses pronostics, mais que nous générions une certaine attitude mentale: celle d'un ethos païen. À partir de cette attitude, le pessimisme n'est pas une option, pas plus que le désespoir, mais plutôt un optimisme tragique. "La vie - écrit Faye - est un jeu tragique mais nécessaire ; le "salut" dans la fin de l'histoire et dans la paix perpétuelle ne sont que des illusions" [25]. Faye s'adresse à ses compatriotes européens, les appelant à réagir in extremis, comme ils l'ont fait à d'autres moments de leur histoire. En fin de compte : Amor fati, acceptation résolue du destin. C'est le stoïcisme d'un Marc Aurèle. La préparation à l'Ernstfall dont parlait Carl Schmitt : la manifestation de ce qui est vital et catastrophique.  

"Le terme de catastrophe - écrit Faye - ne doit pas être perçu en termes d'apocalypse, mais de transformation ou de métamorphose (...) Se préparer à la catastrophe et à la renaissance implique de commencer à se transformer de l'intérieur"(26). Dans un ultime rebondissement spenglérien, Faye rend hommage aux conceptions cycliques de l'histoire, celles qui savaient qu'après la fin de la nuit, le soleil revient toujours: Sol Invictus, comme dans l'Iliade, les dieux jouent indifféremment avec le destin des hommes, mais ne les anéantissent jamais complètement. Après tout, que seraient les dieux sans les hommes ?

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Un mythe sorelien

Dans un enregistrement privé qui a circulé il y a des années, Faye a affirmé qu'il n'avait jamais pensé qu'il était possible d'expulser les immigrants d'Europe, que tout cela n'était qu'une blague (un canular) destinée à un public de "mongoliens": des militants d'extrême droite. Implicitement, Faye s'est reconnu comme un producteur de "biens culturels" destinés à un public spécifique. Faye était-il lui-même victime d'un canard radio ? Il a ensuite affirmé qu'il avait simplement joué le jeu de ses interlocuteurs, sachant que l'interview était un piège. Une explication confuse. Avec Faye, on ne sait jamais. Mais franchement, il est difficile de voir ce qu'il recherchait en produisant tous ces "biens culturels" qui ne lui ont apporté aucun gain matériel, et pas mal de désagréments. Que voulait-il vraiment ? Croyait-il à tout ce qu'il disait ?

Guillaume Faye se déclare admirateur de l'antiquité classique et des catégories de la pensée aristotélicienne: modération, expérience et bon sens. C'est pourquoi il est surprenant qu'il ait insisté avec autant de force sur quelque chose d'aussi anti-politique - aussi éloigné de toute modération - que la "convergence des catastrophes". Que faire de ses visions apocalyptiques ? 

gs.jpgOn peut penser que la "convergence des catastrophes" est, avant tout, une provocation. Que ce qu'il visait était de forger un "mythe" mobilisateur, au sens, par exemple, du mythe de la "grève générale révolutionnaire" dans l'œuvre de Georges Sorel. Ce n'est pas pour rien que Sorel lui-même a écrit sur l'importance du mythe apocalyptique pour les premiers chrétiens, un mythe qui les a aidés à supporter la persécution et le martyre. Les mythes politiques mesurent leur importance non pas à leur fausseté ou à leur certitude, mais aux images qu'ils génèrent et inspirent aux gens. En plaçant les Européens face à une épreuve existentielle suprême, Faye les incite à mettre les pieds au mur, à corriger - ici et maintenant - une série de tendances qui laissent présager le pire des avenirs.

Les livres récents de Faye sont décousus. Son langage est clair et parfois ampoulé, plus pour être entendu que pour être lu. Les idées coulent avec éloquence, à la hâte et en rafales. Ce sont les œuvres d'une personne dénuée de vanité. Sans doute aurait-il été capable de produire des textes soignés, de beaux essais. S'il avait adopté une approche académique pour ses premiers textes, il aurait pu s'imposer comme un intellectuel prestigieux. Mais cela n'en valait pas la peine pour lui. Faye n'était pas un penseur du "système" - le genre qui passe sa vie à gloser sur la "doctrine" ou à commenter le "maître". Il était un partisan, un partisan des pistes, pas des dogmes. Il ne voulait pas imposer ses thèses, mais provoquer un débat. Il était un forgeur de concepts, d'idées-force, de provocations. Il procédait par intuition, par approches indirectes, par éclairs. Son objectif : briser la "pensée faible" post-moderne et se concentrer sur les questions essentielles. 

Son intuition la plus retentissante - le mythe qu'il a cherché à forger - est l'archéofuturisme. Son contenu - écrivait-il - "peut sembler idéologiquement criminel aux yeux de l'idéologie hégémonique et au cœur pseudo-virginal des bienpensants. Ils le sont".

Notes de la première partie:

[1] "Le passé est un pays étranger, on y fait les choses différemment". Début du roman de L. P. Hartley, The Go-Between (1953). 

[2] Aaron Bastani, Fully Automated Luxury Communism : A Manifesto. Verso Books 2020. James Bridle, New Dark Age : technology and the End of the Future. Verso Book 2019. Peter Frase, Four Futures : Life after Capitalism. 2016 Verso Book. Murray Bookchin, Post-Scarcity Anarchism, AK Press 2004. 

[3] Romain D'Aspremont, "Archéofuturisme ou droite prométhéenne ?", https://rage-culture.com/archeofuturisme-ou-droite-prometheenne-partie-1/.

[4) Dans l'un de ses canulars les plus célèbres, Faye se rend avec deux amis dans une prestigieuse galerie d'art contemporain, se faisant passer pour un artiste-performeur lituanien, ami du président de cette République. Faye et ses acolytes - inspirés par l'alcool - ont peint vingt tableaux de pénis en érection en une seule journée, qui ont été exposés et vendus à des prix élevés les jours suivants. Un scandale retentissant qui a mis une fois de plus en évidence l'imposture de l'art contemporain.

[5] Pierre-Émile Blairon, "Guillaume Faye, un éveilleur du XXIe siècle", in Guillaume Faye, vérités et hommages. Arktos 2020, p. 123-124. 

[6] "Nous tournons en rond dans la nuit et brûlons dans le feu".

[7] Nous utilisons ici l'édition anglaise : Guillaume Faye, Convergence of Catastrophes. Arktos Media 2012.

[8] Walter Laqueur, Les derniers jours de l'Europe. Epitaph for an old continent, St Martin Press 2007. Christopher Caldwell : Reflections on the Revolution in Europe : Immigration, Islam and the West- Allen Lane 2009. Douglas Murray, The Strange Death of Europe : Immigration, Identity, Islam, Bloomsbury Continuum 2017. Guillaume Faye, La colonisation de l'Europe. Discours vrai sur l'immigration et l'Islam. L'Aencre 2000. Avant-Guerre. Chronique d'un cataclysme annoncé. L'Aencre 2002. 

[9] Jean Rolin, Les Événements(Folio-Gallimard 2016) ; Laurent Obertone, Guerilla, Le Jour où tout s'embrasa(La mécanique générale 2018) ; Franck Poupart, Demain les Barbares. Chroniques du grand effondrement (Amazon 2021). Yvan Riouffol, La guerre civile qui vient (Pierre-Guillaume de Roux 2016). 

[10] Bernard Wicht, Europe Mad Max demain ? Retour à la défense citoyenne, Favre 2013. 

[11] Hans Magnus Enzensberger, La grande migration. Vues sur la guerre civile, Gallimard 1995. 

[12] Eric Werner, L'avant-guerre civile. Le chaos sauvera-t-il le système ? Xenia 2015 (deuxième édition).

[13] Bernard Wicht et Alain Baeriswyl, Citoyen-soldat 2.0. Astrée 94. 

[14] "Enquête sur le tabou de l'immigration. Laurent Obertone enterre le "vivre ensemble". In Éléments por la civilisation européenne n° 174, octobre-novembre 2018, p. 6-9. 

[15] Álvaro Delgado-Gal, "Occidente Ignaro". ABC 10/7/2005.

[16] Alexandre Lacroix, "La fin du monde, vous la voulez comment ?" In Philosophie Magazine n° 136, février 2020. 

[17] Joseph A. Tainter, The Collapse of Complex Societies. Cambridge University Press 1990. 

[18] Jared Diamond, Colapso, Por qué algunos sociedades perduran y otras desaparecen. Debolsillo 2007

[19) Eric H. Cline retient la date symbolique de 1177 avant J.-C. comme date de l'invasion des "peuples de la mer" sur le royaume d'Égypte, qui a marqué le début d'un enchaînement de circonstances qui ont provoqué l'effondrement dramatique de la civilisation de l'époque. 

[20] Eric H. Cline, 1177 B.C., L'année où la civilisation s'est effondrée. Edition révisée et mise à jour 2020. Pp.xv-xvii (introduction). 

[21] Conversation entre N.N. Taleb et B. Avishai. Avishai : "La pandémie n'est pas un cygne noir mais le présage d'un système mondial plus fragile".  New Yorker, avril 2021  

[22] François Bousquet, "Impolitique de la catastophe. La fin du monde, une histoire sans fin". In Éléments pour la civilisation européenne n° 175, décembre-janvier 2019, p. 69-72. 

[23) Si une apocalypse devait se produire - comme le souligne Romain D'Aspremont - elle pourrait plutôt correspondre au sens grec du terme ("Révélation"), comme une révolution scientifique qui nous ouvrirait à de nouvelles perceptions de la nature de notre réalité (l'espace-temps comme illusion, par exemple).

[24] Robert Steuckers, "Adieu, Guillaume Faye, après quarante-quatre ans de lutte commune", in Guillaume Faye, vérités et hommages. Arktos 2020, p.50.

[25] Guillaume Faye, Avant-Guerre. Chronique d'un cataclysme annoncé. Éditions de L'Aencre 2002, p. 303.

[26] Guillaume Faye, Convergence des Catastrophes. Arktos Media 2012, p. 216.


Guillaume Faye et la vision de l'archéofuturisme (II)

Adriano Erriguel

"Dans le monde que je vois, tu traqueras l'élan dans les bois humides du canyon autour des ruines du Rockefeller Center. Tu porteras des vêtements en cuir qui dureront toute ta vie. Vous escaladerez les vignes de kudzu de l'épaisseur d'une poupée qui s'enroulent autour de la Sears Tower. Et quand vous regarderez en bas, vous verrez de minuscules silhouettes écrasant du maïs, des bandes de cerfs suspendues dans la voie vide d'une super-autoroute abandonnée".

12972-gf.jpgCes lignes tirées du film Fight Club - adapté d'un roman de Chuck Palahniuk - expriment un Zeitgeist apocalyptique très actuel. Ils sont une image de l'année zéro, du big bang vers un monde nouveau. Le monde de l'archéofuturisme.

Paradigme ou mythe ?

L'idée de l'"archéofuturisme" peut sembler grotesque au premier abord. Comme dans toute coïncidence des contraires (coincidentia oppositorum), cette idée nécessite une perspective radicale, une perspective de rupture avec l'idéologie hégémonique. La pensée radicale n'est pas nécessairement une pensée "extrémiste" - d'idées fixes et de tranchées doctrinales - mais une remise en question des piliers de l'ordre existant. Une pensée radicale aspire à créer son propre langage, car elle est consciente que les mots - comme l'a souligné Foucault - "sont le fondement des concepts qui sont, en eux-mêmes, l'impulsion sémantique des idées, et ceux-ci forment le moteur des actions. Nommer et décrire, c'est déjà construire" [1]. L'archéofuturisme aspire non seulement à interpréter la réalité, mais aussi à la construire, et a les contours d'un mythe. 

La science politique officielle tourne normalement le dos au mythe. Il sait que les mythes sont au-delà de la démonstration logique, qu'ils sont au-delà du vrai et du faux. C'est pourquoi, plutôt que de prouver leur fausseté, ils tentent de les dépouiller de leur aura. Ils essaient de les déconstruire. Mais les mythes ont une vie difficile. Ils peuvent disparaître pendant un certain temps, mais seulement pour réapparaître sous de nouvelles formes. "Les mythes éclatent généralement à des moments critiques de la vie sociale de l'homme, lorsque les forces rationnelles qui résistent à la résurgence des anciennes conceptions mythiques perdent confiance en elles-mêmes. A ces moments-là, l'occasion du mythe se présente à nouveau" [2]. C'est le moment archéofuturiste. 

Tous les grands mythes reposent sur un couple antithétique : le déclin et le progrès, le civilisateur et le bon sauvage, l'élu et le réprouvé, l'espace et le temps, le vrai et le faux. Le mythe archéofuturiste unit l'archaïque et le futur. Il nous dit que les valeurs "archaïques" - celles que la modernité avait tenté d'éradiquer - reviennent toujours en force. Et il exprime - comme tous les mythes - ce que beaucoup de gens ressentent et désirent sous une forme vague, inconcrète et diffuse. L'archéofuturisme fournit une clé d'interprétation - un paradigme - de l'époque dans laquelle nous vivons. 

Archéofuturisme : signes précurseurs

Pour aborder l'archéofuturisme, il est nécessaire de commencer par une précision sémantique. Le mot "archaïque" vient du grec Arché, qui ne désigne pas quelque chose d'ancien, de vieux ou de périclité, mais signifie à la fois "fondement" et "commencement"; en d'autres termes, "élan fondateur". L'archaïque renvoie à des constantes anthropologiques qui assurent la continuité des communautés humaines, au moins depuis que l'homme a cessé d'être un chasseur-cueilleur. L'archéofuturisme n'est donc pas la formulation d'une nostalgie, d'une idéologie ultra-conservatrice ou d'une pulsion réactionnaire. Est-ce une forme de traditionalisme? Seulement dans la mesure où elle favorise la transmission de valeurs "fondamentales", mais elle considère aussi qu'il y a des traditions qu'il vaut mieux jeter par-dessus bord. L'archéofuturisme n'est pas synonyme de tradition mais de vitalité. Elle ne fait pas appel à un retour du passé, mais à l'émergence de configurations "archaïques" dans un nouveau contexte. "L'archéofuturisme - écrit Faye - est une vision métamorphique du monde. Projetées dans le futur, les valeurs de l'arché sont réactualisées et transfigurées. L'archéofuturisme est aussi une pensée de l'ordre (...) mais selon la vision platonicienne exprimée dans La République : l'ordre n'est pas l'injustice, toute pensée de l'ordre est révolutionnaire, et toute révolution est un retour à la justice de l'ordre" [3].

Des signes précurseurs de l'archéofuturisme ? La révolution iranienne de 1979 a marqué le début d'un nouveau cycle : celui du retour intempestif des valeurs archaïques. L'idole du progrès - l'idée que les valeurs séculaires des Lumières allaient se répandre dans le reste du monde - a été brisée. Un fossé qui n'a fait que se creuser. L'Islam est aujourd'hui un bélier d'archaïsme à l'échelle mondiale ; une religion théocratique, prosélyte et communautaire, contrairement au harakiri théologique de l'Eglise catholique. Ce phénomène est également palpable dans la racialisation des discours culturels, qui prend aujourd'hui la forme postmoderne du wokisme. Le communautarisme ethnique - écrit Faye - injecte une logique archaïque dans le monde postmoderne : "séparation des rôles sexuels, transmission des traditions ethniques et populaires, spiritualité et organisation sacerdotales, hiérarchies sociales visibles et vertébrales, culte des ancêtres, rites de passage et épreuves initiatiques, désindividualisation du mariage - comme affaire de la communauté et des époux - et fin de la confusion entre mariage et érotisme". Spontanément, "les Maghrébins et les Noirs légalement français qui raisonnent en termes d'ethnicité (et non de nationalité) sont des archaïsants sans le savoir" [4]. Ce n'est pas pour rien que le sociologue français Michel Maffesoli a défini la post-modernité comme "la synergie de l'archaïsme et du développement économique". Pour le dire très simplement, la synergie, c'est la multiplication des effets entre l'archaïque (la tribu) et l'Internet" [5].

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D'autres exemples ? Nous assistons à une réémergence du prestige des castes guerrières, bien que sous une forme chaotique et antisociale. A l'heure où l'Etat n'est plus qu'un distributeur d'aides et de subventions - explique le politologue suisse Bernard Wicht - "le capital guerrier des jeunes n'est plus investi dans les institutions étatiques (principalement l'armée) mais tend à migrer vers des activités et des groupes marginaux, où ils trouvent un code de valeurs, une forte discipline, la loyauté envers un leader et d'autres éléments de socialisation similaires" (6). L'aura sociale de certaines organisations criminelles, des djihadistes et des groupes extrémistes de toutes sortes sont des exemples de cette pulsion tribale de violence qui ne trouve aujourd'hui d'autre forme d'expansion que le recours à la marginalité. Mais c'est dans le domaine de la géopolitique que l'on assiste à un retour des pulsions archaïques par la grande porte. 

Règles de survie

Lorsque Huntington a proposé le paradigme du "choc des civilisations" (en 1993), il décrivait déjà, sans le nommer, le monde archéofuturiste. Après le mirage de la "fin de l'histoire", les tensions idéologiques de la guerre froide ont été remplacées par la rivalité séculaire entre blocs ethnoculturels, par une course aux territoires et aux ressources. En effet, l'essence de l'histoire n'est pas une lutte d'idéologies ou une lutte des classes - comme on l'a cru au XXe siècle - mais "la lutte multiforme des peuples - contestataires ou non - sous les angles superposés de l'ethnicité, de la religion, de la territorialité et de l'économie" (7). Le défi religieux de l'Islam ; les batailles pour les ressources agricoles, pétrolières, minérales et halieutiques ; le conflit Nord-Sud ; la ruée migratoire vers l'hémisphère nord ; la rivalité géostratégique dans l'Arctique ; la pollution de la planète ; le choc entre les désirs de l'idéologie du développement et les réalités physiques : autant de questions immémoriales qui laissent les débats quasi théologiques des 19e et 20e siècles insignifiants. La prolifération de leaderships forts - Russie, Chine, Turquie, Inde, Amérique (Trump), pays de Visegrad - témoigne de cette nécessité de penser en termes stratégiques et à long terme, au-delà du court-termisme des politiciens libéraux. 

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L'archaïsme n'est pas d'hier mais de toujours, et il a plus d'avenir que l'idéologie progressiste. Le philosophe français Raymond Ruyer (photo, ci-dessus) expliquait dans les années 1970 que les peuples "religieux" l'emporteront sur les peuples "émancipés", et les empires "vénérateurs" sur les démocraties libérales. Sans surprise, les acteurs et les institutions des premiers sont orientés vers la durée dans le temps, tandis que les seconds sont orientés vers l'utilité quotidienne et immédiate. Mais la vie complexe des êtres vivants - rappelle Ruyer - est au service de la reproduction, et ce qui est vrai pour une plante ou un animal l'est aussi pour les sociétés humaines. Un peuple obsédé par son confort et sa préservation plutôt que par sa reproduction "n'est rien d'autre qu'une multitude ("population") sur le chemin de la destruction ; un peuple assassiné ou suicidaire". Assurer la reproduction est la première règle de survie, une règle qui se moque des idéologies, des morales et des "anti-morales" contemporaines. Les valeurs archaïques découlent de cet impératif de sélection naturelle qui sera toujours plus fort que les sélections - ou anti-sélections - artificielles ; en d'autres termes, les questions soulevées par Darwin et Malthus l'emporteront sur toutes les autres idéologies qui finissent en "ismes" [8].

Guillaume Faye écrit : "la parenthèse des 19e et 20e siècles se referme, et après les hallucinations de l'égalitarisme - qui ont plongé le monde dans la catastrophe - l'humanité revient à des valeurs archaïques, c'est-à-dire biologiques et humaines au sens anthropologique. Les valeurs archaïques "sont justes - au sens des Grecs anciens - parce qu'elles prennent l'homme pour ce qu'il est : un zoon politikon ("animal social intégré dans une cité communautaire") et non pour ce qu'il n'est pas : un atome asexué et isolé doté de pseudo-droits universels et imprescriptibles. Les valeurs anti-individualistes permettent l'épanouissement personnel, la solidarité active et la paix sociale, là où l'individualisme pseudo-émancipateur des doctrines égalitaristes ne mène qu'à la loi de la jungle" [9]. Pas étonnant que, expulsé par la porte, l'archaïsme rentre par la fenêtre. 

Archaofuturisme et Islam 

9782246674313-200x303-1.jpgDans un brillant essai publié en 2005, l'islamologue française Martine Gozlan s'interrogeait sur le "désir d'islam" qui semble triompher chez tant d'individus éduqués et tant de jeunes occidentaux en crise d'identité [10]. Un exemple anecdotique: il est curieux que le port du voile prenne une patine libératrice dans le discours de certaines féministes. Ils semblent désireux de disculper l'Islam de toute charge patriarcale, au nom de la lutte contre le "mâle blanc colonial et raciste". L'idéologie décoloniale, avec sa mascarade académico-foucaldienne, se consolide comme un alibi (plus ou moins conscient) à ce "désir d'islam" qui se niche dans le cœur de tant de progressistes, et qui semble véhiculer un désir de soumission non avoué [11]. Un phénomène qui se prête à une analyse quelque part entre le freudisme et l'archéofuturisme.  Martine Gozlan note que le "désir d'islam" répond au "sentiment d'immersion" qu'il procure, à ce "désir d'appartenance" que nos sociétés désenchantées et nihilistes ne parviennent pas à satisfaire. Une réponse, en somme, au déficit d'archaïsme dans les sociétés post-modernes. 

L'Islam est une force archéofuturiste, dit Guillaume Faye. "Comprendre l'islam", écrit-il, "c'est admettre son pouvoir historique, fondé sur des siècles d'intimidation et de conquête" [12]. Contrairement à ceux qui le méprisent en le qualifiant d'"archaïque" et de "rétrograde", Faye affirme qu'il n'y a rien de méprisable dans l'islam, mais beaucoup de choses dangereuses. Ce qui pour certains sont des défauts sont pour Faye les qualités qui la rendent forte, du moins pour le moment. L'Islam se radicalise, et cette radicalisation n'est pas un extrémisme mais un retour aux sources. Il existe certes des musulmans "modérés", mais ils donnent l'impression de prôner une religion réformée, interprétative, européanisée, en rupture philosophique avec la majorité de l'umma. Nous devons leur souhaiter bonne chance, mais l'Islam dans son ensemble est autre chose. Contrairement aux illusions des progressistes occidentaux, "l'islam s'est engagé dans un vaste mouvement de désoccidentalisation des esprits et des modes de vie. C'est l'inverse du mouvement qui a eu lieu tout au long du 20ème siècle". Mais les élites occidentales entretiennent un esprit d'apaisement, qui rappelle celui des démocraties face au nazisme dans les années 1930.

Comme dans une loi pendulaire du développement historique, les valeurs archaïques sont de retour. L'alternative - pour Faye - est la suivante : soit laisser l'Islam les imposer à l'Europe (ce qui se produit déjà subrepticement), soit laisser les Européens se les imposer à eux-mêmes, en s'appuyant sur leur propre bagage culturel. Une partie décisive est sur le point de se jouer et les Européens ne sont pas au mieux de leur forme. Le déclin démographique mis à part, leur principale faiblesse réside dans un état avancé de ramollissement et de crétinisation de l'esprit. Le diagnostic de Faye ne pardonne pas. L'archéofuturisme est sa thérapie de choc [14].

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Dé-virilisation 

Nous vivons sous la dictature du superflu. Le charabia idéologique masque les vrais problèmes. Le système promeut une panoplie de mesures symboliques qui touchent de très petites couches de la population, mais qui captent le bruit des médias et l'attention du public. C'est le dernier recours d'un système privé d'idées, épuisé de propositions, qui ne peut compter que sur la sidération collective pour masquer sa vacuité. Quelle meilleure forme de sidération que de placer les questions de l'ombre au centre du débat public ? Les "guerres culturelles" de la gauche postmoderne ont une fonction : imprégner les imbéciles d'un sens de la mission, leur donner l'impression d'être de dangereux subversifs, les aider à monopoliser le centre du débat. Mais les pseudo-réformes progressistes et le charabia culturel des universités anglo-saxonnes disparaîtront dans les égouts, lorsque les vraies questions déborderont. Viendra alors ce que les polémologues appellent "le point de rupture", le moment où tout se rejoint à un moment critique. L'avenir appartiendra alors à ceux qui ont vraiment quelque chose à dire, à ceux qui soulèvent les vraies questions. 

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Quels sont les "vrais problèmes" ? Parmi les "lignes de catastrophe" identifiées par Faye, il y a tout d'abord ce qu'il appelle "la cancérisation du tissu social européen". Il s'agit de facteurs tels que l'échec de la société multiraciale, la métamorphose ethno-anthropologique de l'Europe (en raison des politiques migratoires), le retour de la pauvreté, l'augmentation de la criminalité et de la consommation de drogues, la dissolution des structures familiales, le déclin de l'éducation et de la qualité des programmes scolaires, la disparition de la culture populaire, l'imbroglio audiovisuel, le manque de transmission des disciplines sociales et la corruption politique endémique.

Tout cela dans le cadre d'un modèle fiscal extractif et d'un système de surveillance généralisée qui - comme le souligne l'essayiste français Guillaume Travers - n'est rien d'autre que le stade ultime du libéralisme (15). Petit à petit, une société de plus en plus égoïste et sauvage se dessine, de plus en plus infantile et primitive, droguée par le sirop de la morale empathique, angélique et pseudo-humaniste. Il s'agit, en somme, d'un processus de décivilisation (Renaud Camus) qui continuera - s'il n'y a pas de changements majeurs - à atteindre un point de rupture.

Un aspect non négligeable de "l'adoucissement de l'esprit" évoqué plus haut est ce que Guillaume Faye appelle "la féminisation et la dévirilisation de la société". Ce phénomène a déjà été dépeint par une série de penseurs tous plus maudits et sulfureux les uns que les autres (Philippe Muray, Alain Soral, Eric Zemmour).  Pour le philosophe Peter Sloterdijk, la féminisation de la société "va de pair avec l'évolution du système politique vers la primauté des fonctions thérapeutiques" [16]. C'est parfaitement logique : dans une société de plus en plus infantilisée et violente, il est normal que le pouvoir prenne la forme soit d'une nourrice maternelle et empathique, soit d'un souverain strict et castrateur.

Il faut préciser que la féminisation de la société n'est pas le résultat de l'accès des femmes aux postes de pouvoir, ni des progrès de l'homosexualité, mais de la dévirilisation des hommes. Cette féminisation est en réalité une caricature des valeurs féminines, et consiste en la promotion hypocrite des valeurs de fragilité, de tolérance, d'émotivité et d'empathie, avec le culte de la "victime" comme couronnement de l'idéologie post-moderniste. Les ateliers sur les "nouvelles masculinités" et la lutte contre la "masculinité toxique" témoignent du fait que la dévirilisation devient une véritable politique d'État. La féminisation est une domestication idéologique qui promeut une pensée "intuitive", empathique et psychologisante, basée sur les sentiments individuels, dépourvue de vision collective, visant à nourrir la confiance dans les vertus balsamiques du système. Curieusement - et c'est là le poison caché de l'archaïsme - tout cela s'accompagne d'une résignation (voire d'une fascination non avouée) face aux attitudes machistes et testostéroniques de nombreux migrants extra-européens, souvent pratiquants d'une religion virile s'il en est. Il est compréhensible qu'ils ne veuillent pas s'intégrer dans un système où les hommes deviennent fluides et les femmes plus masculines que les hommes. Dé-virilisation, ethno-masochisme et xénophilie : les trois grumeaux mentaux qui annoncent la mort de l'Europe. 

Guillaume Faye écrit: "Les Européens n'ont jamais été aussi peu préparés à l'approche des tempêtes: envahis, dévirilisés, physiquement et moralement désarmés, prisonniers d'une culture de l'insignifiance et de la culpabilité masochiste. Les Européens n'ont jamais été aussi faibles qu'en ce moment, alors que la grande menace se profile à l'horizon". 

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Un monde hyper-technologique et inégalitaire

Nous avons souligné plus haut que l'archéofuturisme n'est pas une perspective rétrograde. Une caractéristique constante de la mentalité européenne - écrit Faye - est son rejet de tout ce qui est immobilisant. L'Europe est "faustienne" (Spengler), c'est une création et une invention incessantes, c'est un élan inépuisable vers de nouvelles formes de civilisation. Le fond culturel européen est aventureux, volontariste, transformateur, une mentalité de projets et de représentations anticipatrices du futur. "Quelle est l'essence du futurisme ? Celle de tracer l'architecture du futur, pas celle de faire table rase du passé. Le futurisme, c'est penser la civilisation comme une œuvre en mouvement" [17]. Mais le futurisme comporte un danger : celui de donner lieu à des dérives utopiques. C'est l'idée progressiste du "changement pour le changement", c'est l'hybris de l'absence de limites, qui s'avère finalement suicidaire.  "Le futurisme", conclut Faye, "doit donc être modéré par l'archaïsme ; en d'autres termes, l'archaïsme doit purifier le futurisme" [18]. On peut aussi penser à l'inverse : le futurisme doit purifier l'archaïsme. Il ne peut y avoir de place en Europe pour les normes archaïques qui sapent l'égalité juridique (comme celles qui subordonnent les femmes aux hommes), ni pour celles qui suppriment les libertés fondamentales de l'individu. L'égalité devant la loi et les libertés individuelles sont aussi des règles de survie de la communauté, clés des sociétés créatives et compétitives de l'Occident. L'archéofuturisme européen exige une voie qui lui est propre.

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L'archéofuturisme est une pensée du concret. Dans ses livres, Guillaume Faye déballe une batterie de propositions pour donner chair à l'idée, pour l'appliquer aux défis de la civilisation européenne. Il y a un peu de tout dans ce brainstorming : des intuitions suggestives et des spéculations risquées, des approches raisonnables et des divagations chimériques. Dans sa vision de la "convergence des catastrophes", Faye tombe dans une sorte de déterminisme. Il ne tient pas compte du fait que, si une crise économique majeure est hautement probable, le capitalisme est après tout construit sur des cycles de croissance, de crise et de dépression (les cycles de Kondratiev et la "destruction créatrice" de Schumpeter). Elle déprécie également la capacité des avancées technologiques à contrer les limites physiques de la croissance. En cela, il est incohérent, étant donné son exaltation enthousiaste de la techno-science. Faye s'insurge contre la "technophobie" qui affecte historiquement la pensée de droite. Dans ce domaine, il avait des idées brillantes.

L'expansion des hypertechnologies - selon Faye - ne nous conduit pas vers un monde plus égalitaire, mais vers des modèles sociaux plus archaïques et hiérarchiques. Il écrivait cela en 1998, à l'apogée de l'ère optimiste des idéologues de l'internet. Aujourd'hui, nous pouvons déjà constater que les technologies conduisent non seulement à une "démocratisation de la connaissance", mais aussi à des formes spécifiques d'aliénation, voire à une brutalisation généralisée. En revanche, une véritable éducation de qualité est de plus en plus inaccessible pour les gens ordinaires. Dans le monde hyper-technologique, les personnes ayant les "blocs d'élite" les plus forts et les mieux sélectionnés et les masses les plus organiquement intégrées gagneront. La concurrence technologique et la guerre pour les ressources rares favoriseront les sociétés les plus traditionnelles et holistiques, celles capables de produire en masse des produits de haute technologie comme tremplin vers l'innovation. N'est-ce pas déjà le cas en Chine ? Dans tous les cas, il faudra se libérer de l'orgueil de la modernité : de cette illusion égalitaire qui distribue titres et diplômes et fait croire à chacun qu'il peut s'élever au sommet. Cependant, les jours de cette illusion sont comptés. La nouvelle ère numérique va accélérer le processus. A ce stade, nous entrons pleinement dans "l'utopie d'extrême-droite" de Guillaume Faye. 

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"Le monde que voit Faye est un monde de grands États, d'empires qui englobent les grandes régions de la civilisation. Après la catastrophe, la science et la technologie n'auront d'autre choix que d'être confinées à certaines zones géographiques, abandonnant le rêve égalitaire d'une civilisation universelle. Les élites de ces empires "bénéficieraient de toutes les technologies hypermodernes et les utiliseraient comme instruments pour établir une puissance planétaire indestructible. Le reste de la population renouera avec la terre, aura un mode de vie agraire et développera une culture populaire, stable et éternelle. L'archéofuturisme est donc archaïque, agraire et écologique pour la grande masse des gens, et hyper-technique et futuriste pour les élites" (Robert Steuckers) [19]. Une vision brutale d'une humanité à deux vitesses, qui contraste avec la vision alternative - également inquiétante - d'une société de consommation illimitée pour 10 milliards de personnes dans le monde.

Rêves pour certains, cauchemars pour d'autres.

Du côté des Titans

Guillaume Faye ouvre une porte qui passe rarement par la pensée "de droite", et le fait avec un coup de pied. La droite doit penser techno-science: cette "alliance infernale" entre informatique et biologie, biotechnologie et biogénétique. Un monde qui est à notre porte et qui entraînera une impuissance éthique sans précédent, aux effets dévastateurs. C'est cette réalité qui mettra fin à la modernité (et non le post-modernisme bon marché des universités anglo-saxonnes). La communauté scientifique est désormais prise dans un dilemme : aller jusqu'au bout ou céder au "terrorisme intellectuel de l'égalitarisme", qui cherche à maintenir "les mythes canoniques de la religion des droits de l'homme, comme celui de l'égalité génétique des groupes humains". La cartographie complète du génome humain a annoncé la démolition de ces mythes il y a plusieurs décennies. Pour résister au choc global de la génétique du futur, écrit Faye, "il faudra une mentalité archaïque" [20]. La science et la technologie sont pour lui les alliées de l'archaïsme.

La méditation sur la technologie est le cœur même de la conception archéofuturiste. Dans une étude éblouissante sur Heidegger - publiée en 1982 - Faye a offert une réinterprétation originale du maître de la Forêt-Noire, généralement considéré comme un penseur peu enclin à la technique. Il y a écrit : 

"C'est par un projet fier et assumé d'un monde hyper-technifié - et non par une régression vers une civilisation non-technique - que l'Europe, pour Heidegger, redonnera un sens à son existence historique. Une spiritualité immanente prendra alors le relais d'une spiritualité transcendante, devenue impossible dans la mesure où elle est épuisée". Faye croit avoir décelé un moyen de réintroduire la technique - de manière positive - dans le système de Heidegger [21]: "la science au service de la technique : cette dernière constitue un destin historique dont l'objet n'est pas la connaissance, mais l'action". L'essence de la technologie révèle une caractéristique historique de la civilisation européenne: la maîtrise est plus importante que la connaissance". Selon cette interprétation, la technologie entraînerait un réenchantement du monde et un dépassement du nihilisme: "au monde désespérant de l'humanisme rationnel, Heidegger oppose l'avènement, au cœur de la science moderne, du sacré (das Heilige)". Comme le soulignait Hölderlin: "là où il y a du danger (dans la technique), il y a aussi ce qui sauve" [22]. Une interprétation de Heidegger qui n'est peut-être pas philologiquement correcte, mais qui est pleinement cohérente, et qui contient potentiellement toute la conception de l'archéofuturisme.

Guillaume Faye a franchi un seuil que d'autres, de "droite", ont depuis suivi. Évidemment, ce seuil mène à un abîme. Pour la première fois de son histoire, l'humanité a accès aux moyens de se transformer en tant qu'espèce. Les risques sont immenses. Celles de la réification des personnes - à travers, par exemple, la création de brevets sur les êtres humains - en font partie, surtout dans un système qui n'est mû que par la logique de l'argent. C'est un débat difficile et immense, surtout pour les familles de pensée fondées sur une tradition religieuse. Mais qu'on le veuille ou non, la question "biopolitique" est déjà au cœur du débat idéologique. Il serait souhaitable de l'aborder au-delà des jugements sommaires et des admonestations sentencieuses. L'essayiste Romain d'Aspremont - également très critique à l'égard de Faye - prône un "droit prométhéen" résolument engagé dans le génie génétique. Le transhumanisme ne peut être arrêté", écrit-il, "et ce seront les pays les plus audacieux qui en prendront le contrôle, laissant derrière eux les plus timorés et les plus conservateurs" (23).

Un autre intellectuel de droite, Julien Rochedy, affirme que " la clé du transhumanisme réside avant tout dans le sens dans lequel l'humanité doit l'utiliser, plutôt que dans la question de savoir s'il faut l'interdire ou non (...) Si la pensée traditionaliste ne lui donne pas ce sens, si elle échappe au débat et ferme les yeux, ce seront des individus aux instincts médiocres qui se le procureront, des apprentis sorciers aux instincts médiocres" (24). Le débat est lancé sur un terrain - celui de la droite dissidente - qui n'était a priori pas très fertile. 

Des objections importantes sont soulevées dans ce débat. À propos de l'archéofuturisme, Alain de Benoist écrivait: "il est frappant de constater que la seule chose que l'on puisse opposer à l'époque actuelle est une intensification de toutes ses tendances: plus de volonté de domination ; plus de frénésie technologique ; plus d'exclusion ; plus de fuite en avant". Un processus accéléré avec tous les ingrédients de l'autodestruction. Prométhée contre Zeus ; prendre le parti des Titans" [25].

Mettre fin au conservatisme 

Guillaume Faye oblige le lecteur à changer constamment de registre. On ne sait pas très bien ce qu'il est : un visionnaire, un prophète, un pamphlétaire, un journaliste, un philosophe social ou un auteur de science-fiction. Avec son talent pour la formule et la synthèse, il est capable de glisser, en une seule phrase, une leçon complète de philosophie politique. Il est peut-être l'inventeur d'un nouveau genre: la fan-science politique. Il est facile de le rejeter comme un droitier éclairé, ou comme l'idéologue d'une utopie sinistre. Mais c'est une fausse fermeture, car les stigmates ne sont pas des arguments. Indifférentes aux condamnations morales, les idées maudites continuent leur course. Que faire des idées et des visions de Guillaume Faye?

Comme c'est souvent le cas en science-fiction, Guillaume Faye a travaillé avec la matière à partir de laquelle les mythes sont forgés. Ayant rompu ses amarres avec la pensée conventionnelle, Faye a formulé un diptyque - la "convergence des catastrophes" et l'"archéofuturisme" - qui est mal assemblé et dans lequel les contradictions abondent. De plus, son exaltation de la techno-science est idéaliste et accélérée. Il est inutile de chercher une réflexion sérieuse sur les dangers du transhumanisme. Mais il faut toujours s'attendre à des incohérences de la part des artistes. Qui se soucie du fait que la chronologie d'Orwell dans 1984 était fausse, ou que l'"État mondial" prophétisé par Huxley ne se réalisera jamais? Cela n'enlève rien à la nature prémonitoire de ses visions, dont beaucoup se réalisent avec une précision étonnante. Les visions de Faye peuvent sembler absurdes, parfois délirantes, mais elles sont pleines d'intuitions valables et de vérités dures. "Les choses doivent être dites une fois pour toutes", a-t-il écrit, "car il n'y a pas de temps à perdre". Faye dit tout ce que presque personne d'autre n'ose dire aujourd'hui - y compris ceux qui se présentent comme "politiquement incorrects" - et le fait sans euphémisme ni complaisance. Les dogmes de l'idéologie occidentale sont décortiqués comme une collection d'absurdités pieuses, comme une propagande intimidante face à la nature et à la vie. Universalisme, égalitarisme, pacifisme, multiculturalisme, théorie du genre, métissage, déconstruction, postmodernisme... Faye ne fait pas de prisonniers. Quelques conclusions peuvent être tirées de ce feu de joie purificateur. 

D'abord, que les illusions politiquement correctes devront céder la place, à plus ou moins brève échéance, à une série de réalités primordiales. Un test de réalité attend ce modèle économique, social et culturel qui se croyait à l'abri du vent de l'histoire, comme s'il pouvait marcher sur l'eau. Mais l'histoire n'est pas un long fleuve tranquille, mais un courant tumultueux prêt à déborder dans une direction ou une autre.

Deuxièmement, l'intuition que l'archaïsme est toujours à l'affût et revient tôt ou tard en force. Civilisation et archaïsme entretiennent une sorte de relation dialectique. Ce que nous gagnons en civilisation - en maximisant le confort individuel - nous le payons en instincts de survie fondamentaux, y compris l'instinct de reproduction. Mais comme l'a souligné Raymond Ruyer, la nature est instinctive, non hédoniste. Seul l'instinct - et non le "désir" - est "naturel" au sens strict. C'est pourquoi toutes les civilisations, dans la mesure où elles privilégient la raison calculatrice, sont en un certain sens "dysgéniques" (elles contredisent les schémas de la sélection naturelle) et sont en un certain sens "suicidaires". Il y a alors un moment de rééquilibrage - le retour de l'archaïsme - qui pourrait bien être une "invasion des barbares". Guillaume Faye propose de ne pas attendre les barbares. Les Européens - souligne-t-il - doivent se tourner vers leur fond ancestral, le métamorphoser et le projeter dans l'avenir.

Troisièmement, Faye - qui se trouve être "de droite" - propose de faire table rase des grandes familles de droite: "traditionalistes", "réactionnaires" et "conservateurs". Surtout ces derniers. Se proclamer "conservateur" dénote, dès le départ, une attitude médiocre. Toute personne qui n'a que le désir de "conserver" mérite de perdre pour cette seule raison. La vie est une invention, un défi, un saut dans l'inconnu. Dans le domaine culturel, c'est presque toujours la gauche qui innove - bien que dans des directions désastreuses - et les conservateurs se contentent de suivre, généralement au ralenti. L'éternelle dynamique du conservatisme: le "progressiste" d'aujourd'hui sera le "conservateur" de demain. Le conservateur est un progressiste à effet retard. Comme le disait Chesterton, "l'occupation des progressistes est de faire des erreurs, et l'occupation des conservateurs est de les empêcher d'être corrigées". Être conservateur - a écrit Michael Oakeshott - est "une façon de nous accommoder aux changements et aux activités qui sont imposés à tous les hommes" [26]. Y a-t-il une plus grande déclaration de passivité? Une question d'adaptation, donc. Aucune philosophie politique ne s'enorgueillit d'autant de blasons dorés que le conservatisme: une philosophie d'éminents doctrinaires et de polémistes étincelants, à déguster dans la chaleur d'une cheminée en fumant une pipe et en étant vêtu de tweed. Mais le paysage extérieur n'est pas celui d'une paisible campagne anglaise, mais un paysage post-industriel sous les pluies acides, avec des gangs ethniques qui se bousculent pour le territoire. C'est le monde de l'archéofuturisme. 

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D'un autre point de vue, l'archéofuturisme pourrait être considéré comme une radicalisation des "conservateurs-révolutionnaires" du XXe siècle, ceux qui, plutôt que de "conserver", voulaient transformer les valeurs ancestrales en une synthèse révolutionnaire. 

En définitive - et malgré ses sinistres prédictions - Guillaume Faye n'était pas un pessimiste, bien au contraire. Il est diamétralement opposé, par exemple, au fatalisme de Michel Onfray, qui prétend que les jours de la civilisation occidentale sont comptés, que le "judéo-christianisme" ne survivra pas à la menace islamique et qu'il ne reste plus qu'à "disparaître avec style et élégance" [27]. Bien au contraire : l'archéofuturisme est un cri d'insurrection contre la fatalité, un appel à la confiance: en la Providence, en la Fortuna romaine, en la Moira grecque. L'archéofuturisme est conscient que, finalement, l'histoire est tragique et incertaine, que les mouvements sociaux ne sont pas rationnels et que la volonté humaine peut pousser l'histoire dans de multiples directions. Guillaume Faye avait une confiance absolue dans la capacité de réaction de l'homme européen. Mais nous n'en sommes pas encore là. L'homme européen est trop attaché aux biens de la civilisation, trop bourgeois, trop mou. Ce n'est que lorsqu'il n'aura presque plus rien à perdre qu'il réagira. 

Pourquoi lire Guillaume Faye aujourd'hui ? 

Pour le meilleur ou pour le pire, nous vivons un "printemps des idéologies". Populisme, extrême gauche, extrême droite, islamisme, néo-féminisme, wokisme... les visions les plus étranges et les propositions les plus incroyables prolifèrent partout. Ce qui semble clair, c'est que l'ordre d'après-guerre garanti par l'hégémonie américaine appartient au passé, et ne reviendra jamais. Dans ce contexte, écrit le journaliste britannique Aris Roussinos, nous devons accepter l'idée qu'une idéologie émergera tôt ou tard pour succéder à un ordre libéral de plus en plus déconnecté de la réalité. Peut-être une telle idéologie existe-t-elle déjà, tapie dans un obscur secteur marginal (comme le communisme a existé avant de prendre le pouvoir). Il convient donc de garder un œil sur ce qui bouge en marge, là où pourrait se trouver le véritable ferment idéologique du XXIe siècle. Dans cette atmosphère de changement d'époque, "l'existence d'excentriques est cependant largement positive, car elle montre qu'il y a des gens qui réfléchissent sérieusement à ce qui devrait remplacer le cadre intellectuel et politique qui se meurt autour de nous" [28].

Y a-t-il un plus grand excentrique que Guillaume Faye ? Son "archéofuturisme" est présenté comme un mythe, mais avec un contenu extraordinairement politique. Si l'on s'en tient à la littéralité de ses visions, beaucoup d'entre elles paraîtront farfelues et absurdes. Mais le "mythe" qu'ils présentent n'en est pas un du tout, pour ceux qui savent le comprendre. C'est là que résident l'ambiguïté et la puissance du mythe, ainsi que sa capacité à créer un langage qui lui est propre, ce que fait Guillaume Faye. Après tout, la "vérité" peut prendre une multiplicité de formes, et les grands projets sont souvent annoncés sous la forme d'une vision ou d'un mythe [29]. En définitive, les mythes ne sont pas des descriptions des choses, mais l'expression d'une volonté d'agir.

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Pour qui Guillaume Faye écrivait-il ? Principalement pour les jeunes. Il avait déjà annoncé que le système les enfermerait dans une cage: celle des sous-cultures juvéniles, de la fausse rébellion, du cirque des identités [30]. C'est le monde artificiel de "la nouvelle bourgeoisie sauvage, dont l'esprit est limité par le pragmatisme technologique, et dont la sensibilité est émoussée par le contact avec une sous-culture américaine". Et il a écrit :

"Mais l'artifice peut se retourner contre son propre maître. Que les créateurs de fausse jeunesse se méfient : tant qu'il y a des "inspirateurs", tout est possible. Peut-être qu'un jour les jeunes pourront les écouter. Comme le "fleuve de la vie", la jeunesse revient toujours avec chaque nouvelle génération. Et les "inspirateurs" sèment. Pas pour ce monde. Non pas pour cette jeunesse, mais pour la jeunesse à venir" [31].

Guillaume Faye est mort en mars 2019 ; un an avant une catastrophe qu'il avait annoncée: le retour des pandémies. Dans les jours qui ont suivi sa mort, une rumeur surprenante a été lancée. Dans un texte émouvant, l'un de ses amis a rapporté que, durant ses derniers jours, Faye a reçu l'aide spirituelle d'un prêtre dominicain et qu'il est mort - selon les termes de ce dernier - "dans la foi de son enfance et en toute simplicité de cœur" [32]. Certains de ceux qui l'ont connu ont déclaré que cela ne pouvait pas être possible. Un canular posthume ? Avec Guillaume Faye, on ne sait jamais....

Notes de la deuxième partie:

[1] Guillaume Faye, L'Archéofuturisme. Techno-science et retour aux valeurs ancestrales, L'Aencre 2011, p. 55.

[2] Ernst Cassirer, Le mythe de l'État (1947). Cité par Manuel García Pelayo dans Los Mitos Políticos. Alianza Editorial 1981, p. 19. 

[3] Guillaume Faye, L'Archéofuturisme. Techno-science et retour aux valeurs ancestrales. L'Aencre 2011, p. 73. Le terme grec Archés signifie " commencement/origine " mais aussi " mandat " ou " ordre ", ainsi que la relation nécessaire établie entre les deux termes. En effet, l'"origine" est toujours la source de l'autorité, et elle marque de son empreinte tout ce qui suit. Ce n'est pas pour rien que la notion d'Arché - rappelle le philosophe Baptiste Rappin - est au cœur de tout le système métaphysique conçu par les Grecs anciens. L'Arché est donc la cible principale à détruire par les tenants de l'an-archie, c'est-à-dire par ceux qui prônent une pensée déconstruite, sans origine ni autorité. En tant que revendication de l'Arché, l'archéofuturisme apparaît ainsi comme un ennemi absolu de la pensée postmoderniste et de son idée de déconstruction. (Baptiste Rappin, Abécédaire de la Déconstruction. Les Editions Ovadia 2021, pp. 13-20).   

[4] Guillaume Faye, L'Archéofuturisme. Techno-science et retour aux valeurs ancestrales, L'Aencre 2011, pp. 67 et 151.

[5] "Max Weber : entre relativisme et individualisme méthodologique. Entre vista con Michel Maffesoli". Rafael Arriaga Martínez. http://www.scielo.org.mx/scielo.php?script=sci_arttext&pid=S1870-11912012000200006

[6] "Aux armes, citoyens ! L'autodéfense 2.0 selon Bernard Wicht et Alain Baeriswyl". Éléments por la civilisation européennenº 173, août-septembre 2018, p. 69.

[7] Guillaume Faye, Comprendre l'Islam, Éditions Tatanis 2015, p. 277. 

[8] Raymond Ruyer, Les cent prochains siècles : le destin historique de l'homme selon la nouvelle gnose américaine. Fayard 1977. 

[9] Guillaume Faye, L'Archéofuturisme. Techno-science et retour aux valeurs ancestrales, L'Aencre 2011, p. 68.

[10] Martine Gozlan, Le désir d'Islam. Grasset 2005. 

[11) En novembre 2021, le Conseil de l'Europe - sancta sanctorum des "valeurs européennes" - a fait l'éloge du port du voile islamique comme symbole de "liberté" dans une campagne publicitaire (bien qu'il ait dû se rétracter partiellement face aux protestations de plusieurs femmes musulmanes). Cette campagne du Conseil de l'Europe - une sinécure bien rémunérée pour des politiciens amortis - illustre la pusillanimité des institutions européennes, qui trouveront toujours un moyen de s'abandonner à des valeurs archaïques lorsqu'elles estiment avoir le dessus. 

[12] Guillaume Faye, Comprendre l'Islam. Éditions Tatamis 2015, p. 10.

[13] Guillaume Faye, Comprendre l'Islam. Dans cet ouvrage, Guillaume Faye décrit la fascination réciproque entre l'islam et le nazisme : culte de la violence guerrière, antijudaïsme, antichristianisme et goût pour une société unidimensionnelle et totalitaire. Contrairement à ceux qui associent le néonazisme à l'islamophobie, Faye rappelle l'islamophilie qui prévaut chez de nombreux néonazis (comme on peut le voir, par exemple, dans les travaux de l'islamologue allemande Sigrid Hunke : The Sun of Allah Shines on the West) et leur utilisation de l'atout pro-palestinien pour attaquer les Juifs. Comme le raconte Albert Speer dans ses mémoires, Hitler a affirmé que l'Islam était "parfaitement adapté au tempérament allemand" en tant que religion "qui glorifie l'héroïsme et ouvre les portes du ciel aux guerriers audacieux" et sous laquelle "les races germaniques auraient conquis le monde". Guillaume Faye a été attaqué par l'extrême droite comme "pro-sioniste".

[14) La vision de Faye de l'Islam est, à long terme, concluante : même si aujourd'hui il navigue à la faveur de l'histoire - écrit-il - il finira par être victime de lui-même : de sa rigidité morale, de son manque de solutions, du fait qu'il se situe en dessous du niveau intellectuel et culturel moyen de l'humanité. Il y aura alors " un mouvement de désaffection, de lassitude, de déception et de révolte (...) son flux sera éphémère et finira par se dessécher dans les sables dont il est issu " (Comprendre l'Islam. Editions Tatamis 2015, pp. 286-287). Cette conclusion semble s'accommoder d'une vision " progressiste " de l'histoire qui, curieusement, serait en contradiction avec les prémisses idéologiques de Faye. D'autre part, son identification de l'islamisme à l'islam est également problématique. Il ne fait aucun doute que l'aversion de Faye pour l'islam européen le fait tomber dans une vision simpliste, dans la mesure où il semble ignorer la pluralité du monde islamique et les réalisations de sa civilisation.

[15] Guillaume Travers, La société de surveillance, stade ultime du libéralisme, La Nouvelle Librairie 2021. Shoshana Zuboff, L'ère du capitalisme de surveillance. Le combat pour un avenir humain à la nouvelle frontière du pouvoir.Profile Books 2019. 

[16] Peter Sloterdijk, interview pour Point (avril 2007). Cité par Guillaume Faye dans Sexe et déviance. Arktos 2011, p. 90-91. 

[17] Guillaume Faye, L'Archéofuturisme. Techno-science et retour aux valeurs ancestrales, L'Aencre 2011, p. 69.

[18] Guillaume Faye, L'Archéofuturisme. Techno-science et retour aux valeurs ancestrales, L'Aencre 2011, p. 70.

[19] "Guillaume Faye et l'Archéofuturisme". Entretien avec Robert Steuckers, par Philip Stein". En version espagnole: https://www.elinactual.com/p/guillaume-faye-y-el-arqueofuturismo.html

[20] Guillaume Faye, L'Archéofuturisme. Techno-science et retour aux valeurs ancestrales, L'Aencre 2011, p. 108-109.

[21] Robert Steuckers, "Adieu, Guillaume Faye, après quarante-quatre ans de lutte commune", in : Guillaume Faye, Vérités et hommages, Arktos 2020, pp. 52-53. 

[22] Guillaume Faye et Patrick Rizzi, "Pour en finir avec le nihilisme. Lectures de Heidegger". Nouvelle Ecole n° 37, printemps 1982, pp. 12-46. 

[23] Romain D'Aspremont, Penser L'Homme nouveau. Pourquoi la droite perd la bataille des idées.Amazon 2018, p. 235. 

[24] Julien Rochedy, "Penser le transhumanisme à partir de la tradition". Elinactual.com

https://www.elinactual.com/p/blog-page_615.html

[25] Alain de Benoist, Dernière Année. Notes pour conclure le siècle. L'Age d'Homme 2001, p. 183. 

[26] Michael Oakeshott, "On being Conservative", in : Rationalism in politics and other essays.Liberty Fund 1992, p.410. 

[27] Michel Onfray, Décadence : vie et mort de l'Occident, Éditions Paidós 2018.

[28] Aris Roussinos, "L'homme qui a prédit 2020".

https://unherd.com/2020/05/the-man-who-predicted-2020/

[29] Michael O'Meara, "Pourquoi lire Guillaume Faye", in :  Guillaume Faye et la bataille de l'Europe. Arktos 2013, édition Kindle. 

[30] Guillaume Faye, La Nouvelle Société de consommation, Le Labyrinthe 1984,

[31] Guillaume Faye "Les héros sont fatigués". Dans : Alain de Benoist-Guillaume Faye, Les idées de la "Nouvelle Droite". Une réponse au colonialisme culturel, Editions Nouveau Art Thor 1986, p. 324. 

[32] http://www.contre-info.com/la-mort-chretienne-de-guillaume-faye

lundi, 02 août 2021

Ethnofuturisme ? Une recension de Rebirth of Europe

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Ethnofuturisme ? Une recension de Rebirth of Europe

Andrew Joyce

Ruuben Kaalep & August Meister
Rebirth of Europe - The Ethnofuturist Manifesto
Arktos, 2020

Il existe de nombreuses façons de décrire l'époque dans laquelle nous vivons, et aucune n'est optimiste. C'est pourquoi je considère que ce n'est pas une mince affaire que Ruuben Kaalep et August Meister, deux jeunes ethnonationalistes des pays baltes, soient parvenus à élaborer un manifeste extrêmement positif, et même réjouissant, à partir des déchets puants et des engouements imbéciles de l'époque actuelle. H.L. Mencken a suggéré un jour que "tout gouvernement, dans son essence, est une conspiration contre l'homme supérieur". Le gouvernement moderne de l'Occident est une conspiration contre le seul homme blanc, et la question de savoir comment renverser cette conspiration est le plus grand défi de notre époque. Elle a donné lieu à une prolifération de manifestes et de façons de décrire notre politique, tous dans le but de renverser la vapeur sur le plan politique et de ramener à la raison la majorité des Européens, où qu'ils vivent dans le monde.

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Ruuben Kaalep

Mais cette prolifération d'idées et de méthodes a probablement aggravé nos maux plutôt que de les soulager. Aujourd'hui, nous sommes confrontés à de la confusion: de nombreuses auto-suggestions ont été élaborées qui ne semblent qu'exacerber les factions. Et nous avons cuisiné un véritable ragoût de manifestes qui se contredisent les uns les autres ou suggèrent des points d'intérêt différents. Une grande partie de ce qui passe aujourd'hui pour la philosophie ethnonationaliste contemporaine, en particulier dans l'Anglosphère, est sous-tendue par une sorte de paralysie apathique, et exprime une attente de quelque chose d'indéfini mais néanmoins d'ardemment désiré. Je crois que la chose à laquelle nous aspirons le plus est la clarté et la confiance. La clarté de notre position. La clarté de ce qui nous arrive. La clarté de nos options. Et la confiance de voir ces options avancer dans nos sociétés. Kaalep et Meister réussissent là où d'autres échouent, car Rebirth of Europe est un chef-d'œuvre qui nous donne confiance et offre enfin de la clarté.

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Ruuben Kaalep est un nationaliste estonien qui se décrit comme un ethnofuturiste. Il est l'un des fondateurs du mouvement de jeunesse Blue Awakening (Sinine Äratus) et du Parti populaire conservateur d'Estonie (EKRE). Il est également membre du Parlement estonien depuis 2019, où il appartient à la commission des affaires étrangères et préside le groupe chargé de plancher sur la liberté d'expression. À part cela, je ne sais pas grand-chose de lui, ce qui en dit plus sur mon ignorance des affaires relatives au nationalisme est-européen que sur l'étendue de ses activités.

Les images que nous trouvons de ce théoricien et parlementaire révèlent un jeune homme joyeux qui lui donne l'air d'un artiste excentrique, doté d'une sensibilité qui se retrouve dans ce livre sous la forme d'une confiance rhétorique excentrique et irrépressible. Kaalep a écrit Rebirth of Europe avec August Meister, qui semble être le pseudonyme d'un écrivain balte, expert en histoire et en politique, entre 2015 et 2017. Tous deux sont clairement talentueux, cultivés et bien formés. Bien que nous soyons maintenant près de quatre ans après la rédaction finale du texte, celui-ci n'a pas du tout vieilli puisqu'il s'abstient de discuter des menus détails de la politique contemporaine (il n'y a qu'une ou deux références fugaces à Trump, par exemple) au profit d'une vision beaucoup plus grande et plus large de la scène politique mondiale.

Rebirth of Europe est un texte court mais incroyablement subtil d'une centaine de pages, divisé en trois chapitres. Le premier chapitre, "La lutte de notre temps", est une description succincte des causes fondamentales et des manifestations patentes du déclin européen. Le deuxième chapitre, "Ethnofuturisme", est un appel à une politique ethnonationaliste prête à accepter pleinement la technologie et à avancer dans l'histoire. Le troisième chapitre, "Les aspects géopolitiques de l'ethnofuturisme", offre une vue d'ensemble des perspectives d'avenir de l'ethnonationalisme européen sur la scène internationale.

Le livre s'ouvre sur un grand style philosophique qui, dans son appel au "principe organique", m'a quelque peu rappelé l'ouverture d'Imperium de Yockey. Ce que le premier chapitre décrit pour l'essentiel, c'est l'état spirituel et politico-culturel d'une civilisation en crise. La crise européenne, comme nous ne le savons que trop bien, se déroule à de multiples niveaux, les Européens étant confrontés à l'emballement de la technologie, à des concepts d'individualisme renégats, à une migration de masse, à une subversion calculée, à la trahison et à la corruption internes, et à la perte de tout lien avec le passé. Ce dernier point est l'une des principales préoccupations de Kaalep et Meister, la solution proposée étant une tentative d'arraisonner l'avenir tout en intégrant des éléments du passé, en évitant les dérapages nostalgiques simplistes.

Dans un sens large, il s'agit d'une idée peu originale, et je veux dire par là que je félicite les auteurs plutôt que de les dénigrer. Ce que je veux souligner, c'est qu'une telle proposition ne doit pas être considérée comme du charlatanisme, ni même comme une pensée propre à une chapelle émanant de la marginalité politique. L'un des représentants les plus impressionnants et les plus profonds de cette approche est Keiji Nishitani (1900-1990), un disciple japonais de Martin Heidegger et l'un des principaux philosophes des religions du XXe siècle [1], qui s'est immergé profondément dans la philosophie européenne, et lui a témoigné un grand respect, tout en s'interrogeant sur ce que le modernisme et la technologie de l'Occident signifieraient en fin de compte pour sa propre civilisation.

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Ce questionnement a finalement conduit Nishitani à s'opposer farouchement aux tendances nihilistes de la modernité européenne/occidentale (voir, par exemple, son ouvrage The Self-Overcoming of Nihilism), et à proposer quelque chose qui ressemble remarquablement à l'archéofuturisme défendu plus tard par feu Guillaume Faye et, en fait, par Kaalep et Meister dans le volume que je recense ici. Dans une série de conférences données à l'Association bouddhiste Shin à Kyoto entre 1971 et 1974, Nishitani a élaboré du sens face à la confrontation entre la culture japonaise et ces éléments du modernisme occidental que nous décririons aujourd'hui simplement comme le globalisme [2].

Nishitani a rejeté l'individualisme extrême, qui considère le Soi comme à la fois singulier et autonome - par opposition à singulier mais intégré dans une communauté et un héritage. Associée à la science et à la technologie, ainsi qu'à un matérialisme effréné, la vision individualiste extrême du Soi conduirait, selon Nishitani, à l'effondrement de toutes les relations humaines interpersonnelles significatives. L'athéisme matérialiste, incapable de placer l'individu dans le contexte plus large de l'univers comme lieu divin et source créatrice, conduirait à l'atrophie totale de la culture et à la régression de l'humanité. Le professeur Robert Carter, un spécialiste de Nishitani, souligne que:

    La stratégie [de Nishitani] n'est pas de préconiser un retour au passé, car il est catégorique sur le fait que le passé est à jamais figé et hors de portée. Néanmoins, en tant qu'êtres humains, nous portons le passé en nous de bien des façons, et il nous incombe d'insuffler une nouvelle vie et une nouvelle signification à la tradition, alors qu'elle est façonnée et remodelée par la science, la technologie et les cultures occidentales. Il est partisan du changement, mais d'un changement qui n'oublie pas de porter son passé vers l'avenir comme un ingrédient du "mélange de sens" qu'une vie de qualité exige toujours. La personne authentique est celle qui vit dans le présent avec un œil sur le passé et un autre sur l'avenir, sur l'espoir et les possibilités. Nishitani pense que ce que l'on attend de nous dans le monde moderne et postmoderne, c'est que nous détruisions et reconstruisions simultanément notre mode de vie traditionnel à la lumière des changements induits par le siècle dans lequel nous nous trouvons. Cependant, nous ne devons pas simplement rejoindre les laïcs qui ont abandonné la religion et une grande partie de la tradition. Ils vivent aveuglément, au gré des tendances et des modes du moment. De plus, ils ont accepté et préféré un nihilisme omniprésent qui leur fait comprendre de manière rationnelle la vérité de la condition humaine et, ce faisant, ils ont perdu toute conscience d'un arrière-plan métaphysique et spirituel durable par rapport au premier plan matérialiste et nihiliste, appauvri, de nos existences.

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Nishitani, qui suscite aujourd'hui une extrême prudence de la part des chercheurs contemporains en raison de son utilisation fréquente de l'allemand pour désigner "le sang et la terre" (Blut und Boden) et de son affirmation selon laquelle seules les civilisations européenne et est-asiatique peuvent être considérées comme prééminentes au niveau mondial [3], élabore une sorte d'ethnofuturisme sous forme poétique, en utilisant l'analogie du cerf-volant :

    Elle concrétise ce qui vient d'être dit sur l'importance de la tradition pour avancer vers un nouvel avenir, et rencontrer de nouvelles circonstances, tout en restant fidèle au passé. ... Comme un cerf-volant, le Japon a pu maintenir un cap stable, grâce à la "queue" de la tradition qui a servi à stabiliser son vol dans les vents du changement, tout en étant enraciné ou ancré par la "corde" de sa culture profonde. Un cerf-volant qui n'a pas le poids de la tradition et de l'enracinement ne fait que danser sauvagement, s'empêtrant dans les branches des arbres, ou s'écrasant au sol, ou encore se détachant complètement et perdant son passé distinctif. Ce qui a fait du Japon un pays capable de s'adapter à sa propre modernisation de haut niveau, ce sont ses traditions profondément enracinées. Il en résulte une forme de progrès plus équilibrée et plus stable [par rapport à celle observée en Occident]. Lorsqu'un vent violent souffle, la force de la tradition doit être mise à contribution. Mais... on ne peut pas faire voler un cerf-volant si sa queue est trop lourde. Il est de la plus haute importance de trouver un équilibre entre ces deux inclinations : vers la modernisation et le changement, et vers la tradition.

La lutte de notre temps

Dans Rebirth of Europe, Kaalep et Meister font presque exactement écho aux sentiments de Nishitani et commencent leur texte en avançant l'argument selon lequel le "cerf-volant" européen s'est vu couper la ficelle et la queue, ce qui l'entraîne dans une spirale de chaos. Ce chaos est cultivé par des éléments mondialistes qui veulent couper les liens de toutes les nations avec leur histoire et leurs traditions et tentent d'écraser les patrimoines génétiques uniques des différents peuples en les recouvrant d'une culture totalitaire commune tissée de conformité. Kaalep et Meister insistent sur le fait que "au XXIe siècle, le conflit fondamental oppose le mondialisme et le nationalisme. ... La lutte de notre époque ne se manifeste pas tant comme une guerre avec des rangées de tombes entourées de coquelicots et avec des charges de cavalerie, mais comme une lutte culturelle. Le monde doit soit devenir un, dirigé par une culture de masse totalitaire, soit redevenir multiple - une diversité d'ethno-états uniques". Le couple affirme que "le véritable ethnonationaliste se soucie de toutes les nations, et le principe de l'ethnonationalisme vise à fournir à chaque nation une patrie. Le nôtre est donc une rébellion contre les principes du libéralisme, qui considère que chaque pays appartient à tout le monde - et donc à personne. Le nationalisme cherche à sauver le monde".

41M3Z1gBvXL.jpgAu cœur de leur manifeste se trouve ce que Kaalep et Meister appellent "le principe organique", qui implique - une fois de plus en écho aux philosophies est-asiatiques de Nishitani et de l'école de philosophie de Kyoto à laquelle il était associé (mais avec des inflexions nietzschéennes et européennes pré-modernes) - "un principe de base non-duel de l'existence - la plus haute unité possible, au-delà du bien et du mal, qui intègre à la fois la réalité spirituelle et physique". Bien que cette rhétorique soit un peu trop tête en l'air à mon goût, elle est entrecoupée d'un langage suffisamment clair pour permettre à un lecteur peu familier avec la philosophie en question de retenir le message principal. En bref, Kaalep et Meister soutiennent que:

   Notre monde est un combat permanent entre les forces spirituelles et physiques, entre les identités, les religions, les cultures, entre "nous" et "eux". Au fur et à mesure que la vie s'étend, elle surmonte les résistances, elle devient plus complexe et inégale, et le conflit et la lutte sont donc des contreparties de la vie elle-même. ... Cette dialectique pourrait très bien être appelée le "cercle de la vie". La vie existe dans le mouvement, la différenciation et l'inégalité. ... L'inégalité universelle est un facteur qui permet au monde d'être dynamique et d'évoluer, en donnant à chacun une chance de trouver sa place dans le tout organique. C'est le principe de non-discrimination de l'État organique, qui s'oppose à l'humanisme mécaniste, selon lequel l'individu est considéré comme "un rouage de la machine", remplaçable selon les besoins d'un projet de super-État ou les besoins du marché.

Kaalep et Meister consacrent une section intéressante à la hiérarchie dans les sociétés européennes historiques, en réfléchissant au fait que, si les anciens systèmes de castes sont aujourd'hui très décriés, ils étaient en fait transparents et socialement satisfaisants. Par contraste, nos élites d'aujourd'hui prospèrent sur le fait que,

    Les hiérarchies mécanistes modernes sont secrètes et fondées sur un "mérite" purement matériel. ... Elles n'ont de comptes à rendre à personne, mais l'influence des niveaux supérieurs sur les niveaux inférieurs est totalitaire et sans aucun sens de la responsabilité éthique. Une hiérarchie verticale du pouvoir est établie ; les liens horizontaux sont affaiblis par des conflits internes et une idéologie de haine mutuelle, de compétition et d'individualisme, qui renforce le pouvoir des niveaux supérieurs. Le paradoxe aujourd'hui est le suivant : dans les conditions de l'idéologie de l'"égalité" totale, une quantité historiquement sans précédent de pouvoir appartient à ceux d'"en haut" par rapport à ceux d'"en bas". L'unicité historique de ce fait est liée au fait qu'aujourd'hui les technologies modernes et les moyens de communication de masse permettent un degré maximal de manipulation des masses d'hommes cosmopolites.

Kaalep et Meister, cependant, rejettent le pessimisme ou le désespoir, voyant dans l'accélération du libéralisme mondialiste simplement l'accélération nécessaire qui mènera à l'effondrement civilisationnel - une condition préalable à la renaissance. Pour les auteurs, "la renaissance de la civilisation est une possibilité toujours présente qui doit être comprise et réalisée". Ils insistent sur le fait que "le noyau métaphysique de notre civilisation et sa tradition intégrale, qui est profondément ethnique, se trouve actuellement en dessous, attendant le bon moment pour briser les structures artificielles de la civilisation postmoderne". Cette renaissance ne se caractérisera pas par un rejet total de la modernité, mais par la soumission de ses éléments mécanistes au principe organique: "la tâche de l'avenir est de dompter ces forces éveillées et de les mettre au service d'un objectif plus élevé - la création d'une nouvelle culture et d'un nouvel homme dont les racines restent profondément ancrées dans le sol européen et dont les yeux sont à nouveau tournés vers le ciel." Le livre procède à un examen détaillé du libéralisme en tant qu'idéologie mécaniste. On nous dit que "le libéralisme en tant que théorie est inséparable du mondialisme en tant que pouvoir" et qu'il se caractérise par une "révolution permanente" contre les traditions, les normes culturelles et la vie elle-même.

Le texte passe ensuite à une dénonciation approfondie, et plutôt excellente, du conservatisme, tout en incorporant et en critiquant les idées d'Edmund Burke, de Joseph de Maistre et de Nietzsche. L'accent est mis sur le fait que le simple conservatisme est une stratégie perdante puisque son exigence finale de garder les choses "telles qu'elles sont" conduira toujours à la décadence et au nihilisme. La seule voie véritable et naturelle à suivre est de s'engager dans une contre-révolution qui synthétise "les meilleurs éléments de la modernité et de la tradition".

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Il va sans dire que Kaalep et Meister sont très favorables à la technologie, ce qui va à l'encontre de ceux qui, dans nos cercles, tendent davantage vers le type de pensée exposé par Ted Kaczynski et Pentti Linkola, ou vers les critiques de la pensée technologique que l'on peut trouver dans les écrits de Martin Heidegger ou Jacques Ellul. Je me compte parmi ceux que l'on pourrait décrire, au minimum, comme étant méfiants à l'égard du progrès technologique, ou du moins comme doutant de ses perspectives de progrès incessant étant donné la limitation éventuelle des ressources naturelles et le coût environnemental et social croissant de l'expansion technologique, en particulier entre les mains d'une élite mondialiste déterminée à imposer un État de surveillance et à imposer une conformité de masse. Même en dehors de certaines questions éthiques soulevées, par exemple, par la production génétique des êtres humains, la contamination massive de nos réserves d'eau par des produits chimiques industriels toxiques, qui a entraîné une baisse de la fertilité et des mutations dans le monde entier, devrait fournir à toute personne raisonnable une raison suffisante pour réfléchir sérieusement à ces problèmes actuels.

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Cela dit, les considérations géopolitiques exigent que l'Europe/l'Occident reste au moins compétitif dans la sphère technologique, ce qui signifie que nous sommes probablement, dans un avenir prévisible, enfermés dans la course aux armements technologiques. Puisque nous ne pouvons pas nous en extraire, nous pouvons tout aussi bien tenter d'en prendre la tête. Dans ce cas, le problème qui se pose est celui de l'impact potentiel sur la nature de notre civilisation. Kaalep et Meister suggèrent que nous explorions les moyens de "relier la technologie moderne à l'ancienne façon d'être la plus inhérente à l'homme". Cela ressemble certainement à un idéal, mais à quoi cela ressemble-t-il en termes pratiques? Les auteurs n'offrent aucune réponse, mais je suppose que l'important est qu'ils mettent la question sous les projecteurs.

Le premier chapitre du livre se termine par un regard sur "le totalitarisme de la nouvelle gauche et le déclin de l'Occident". Les lecteurs de The Occidental Observer ne trouveront rien de particulièrement nouveau dans ce chapitre, mais certaines tournures de phrases mémorables résument très bien la situation dans laquelle nous nous trouvons :

    Pour ce nouveau totalitarisme, les nations et les peuples sont considérés comme des obstacles qui doivent être éliminés et remplacés par un nouvel ordre mondial. ... Le monde le plus avantageux pour l'élite mondiale est celui où la valeur la plus élevée est l'individu, mais l'individu lui-même est libéré, avec l'aide du postmodernisme, de tout sens, de toute signification et de tout contexte plus large, et se retrouve isolé et vulnérable.

Après la Seconde Guerre mondiale, les populations occidentales ont été "bernées par les promesses de prospérité économique et d'innombrables libertés, remarquant rarement que la liberté de rester qui vous êtes n'était pas sur la table." De façon magistrale, nos auteurs écrivent

    Les gouvernements et les entreprises sont devenus gigantesques et inhumains, mais la démocratie dans les questions essentielles ne fonctionne tout simplement pas. En effet, là où elle est tentée, cette sorte de démocratie ne sert qu'à aliéner davantage l'homme. La conséquence générale est un sentiment universel de vide et de stress pour les humains qui ont déjà perdu tout lien avec la nature et tout contrôle sur le processus technologique. Les humains qui ne remplissent plus que le rôle de travailleurs-employeurs cherchent leur identité dans les tendances de la mode d'un jour offertes par la culture de consommation. Cette culture crée des humains incapables de réagir les uns avec les autres en tant que personnalités matures. L'illusion d'une "révolution de la jeunesse" constante est créée, alors que les jeunes ne font que recréer passivement les modèles de comportement proposés par les élites mondialistes ; ils font à leur tour partie des tendances générales du système.

Plus loin,

    Nous avons même perdu la trace de qui nous sommes, car aucune véritable identité ne peut exister dans une société de consommation. En apparence, tout le monde peut être spécial, libéré de tous les carcans de la tradition ; chacun peut s'identifier comme qui il veut. Ainsi, on ne naît pas avec une identité particulière. Si tout le monde peut être français, personne ne l'est vraiment. Lorsque le libéralisme parle de diversité, il vise en réalité à effacer toutes les distinctions. Lorsqu'il parle de multiculturalisme, il vise à créer un melting-pot mondial où aucune culture ne survit.

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Dans sa dernière attaque contre la culture européenne, le libéralisme organise le remplacement physique des Européens par des personnes issues d'autres cultures. "C'est l'immigration de masse en nombre catastrophique". Mais avec ce pari, le libéralisme "est proche de sa grande finale". Nos auteurs insistent sur le fait que le libéralisme se consumera lui-même dans le processus, et qu'il est "sur le point de devenir une notion absurde, où même les valeurs qu'il a lui-même défendues commencent à être reconstruites par son idéologie métamorphosée". À ce moment-là, nous trouverons "notre chance de commencer un nouveau cycle culturel européen qui façonne son histoire pour de nombreux siècles à venir. Les libéraux seront impuissants à l'arrêter. Ils deviendront alors des conservateurs, refusant obstinément d'accepter la nouvelle réalité dans laquelle les nationalistes vont s'engager." Ce nationalisme devra être d'un type totalement nouveau : l'ethnofuturisme.

Ethnofuturisme

L'ethnofuturisme est un type de nationalisme qui transcende l'égoïsme national. Il ne cherche pas simplement à "conserver", car cela implique une défense statique alors que "la vie n'existe que dans le mouvement". Il trouve toutefois ses racines dans la révolution conservatrice proposée en Allemagne au début du XXe siècle et cherche à promouvoir une renaissance des "archétypes de la civilisation occidentale et des formes de vie oubliées qui ont formé notre civilisation en premier lieu". Les politiques d'immigration désastreuses, qui sont devenues un élément unificateur pour tous les nationalistes européens, signifient que l'Europe dans son ensemble "sera obligée de revenir aux valeurs traditionnelles et au nationalisme pour survivre." L'Amérique sera de plus en plus accablée par les conflits ethniques, mettant fin au "rêve américain" de construire une société dans laquelle l'héritage ancestral ne joue aucun rôle - "mais c'est inévitable, car une civilisation qui nie ces vérités fondamentales sera toujours vouée à l'effondrement." Kaalep et Meister poursuivent ,

    La base fondamentale d'une nouvelle Europe doit être le nationalisme ethnique. Cela signifie que l'importance d'une nation en tant que tout organique doit être maintenue. ... En outre, la nature et les paysages de l'Europe doivent être préservés, car ils sont essentiels au patrimoine culturel et aux différences entre les peuples. La survie démographique de chaque nation doit être assurée par des politiques gouvernementales.

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Alors que l'Europe occidentale risque de subir des dommages catastrophiques dus à l'immigration massive et à la guerre civile qui s'ensuivra inévitablement, "cette nouvelle Europe - et le nouvel Occident - pourrait avoir pour centres de sa culture Budapest, Varsovie et Tallinn. En maîtrisant ses processus démographiques et en ne les laissant pas entre les mains du libéralisme, la nouvelle Europe sera réellement capable de rivaliser économiquement et culturellement avec le reste du monde... Après avoir sécurisé son ethnē, le destin de l'Europe au XXIe siècle sera décidé par l'eugénisme national, et actuellement, seule la Chine semble avoir un état d'esprit approprié." La Hongrie est louée pour son récent programme de construction d'un réseau de chemins de fer à voie étroite qui met l'accent sur la vie à la campagne, et dont aucune multinationale n'a à tirer profit. Nos auteurs soulignent qu'il s'agit là "d'un signe de l'une des tâches les plus ethnofuturistes jamais développées par un pays au 21e siècle. La technologie moderne et la rapidité permettent de combiner les avantages de la ville et de la campagne."

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Kaalep et Meister sont d'accord avec mon affirmation selon laquelle nous sommes plus ou moins enfermés dans une course aux armements technologiques. Ils soulignent que les progrès de la biotechnologie et des nanomatériaux ont "le potentiel de changer l'économie et la guerre d'ici la fin du siècle au-delà de toute reconnaissance. ... Se battre contre une telle technologie serait voué à l'échec et même dangereux. Le premier gouvernement, société ou groupe qui maîtrisera la biotechnologie aura inévitablement un énorme avantage sur tous ses rivaux." Les nationalistes européens doivent travailler ensemble car, à la fin du siècle, "le contrôle de la technologie doit être entre les mains des ethnonationalistes, et non des mondialistes, à supposer qu'ils aient survécu si longtemps."

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De là, le texte passe à l'élaboration des raisons de rejeter toute alliance avec le conservatisme économique de type Buckley, dominant aux États-Unis parmi les républicains, et de rejeter la Nouvelle Droite associée à Alain de Benoist qui s'est formée dans la France des années 1960. Les auteurs reprochent à cette dernière de promouvoir "des idées abstraites sur les communes organiques et les droits des personnes à conserver leur identité", car cela "peut conduire à l'approbation du multiculturalisme." La Nouvelle Droite est également attaquée pour avoir dépensé "une grande partie de son énergie à lutter contre le christianisme", s'aliénant ainsi une partie importante de sa base de soutien. La Nouvelle Droite est également fortement critiquée pour son soutien à l'URSS et son antiaméricanisme strident, ainsi que pour avoir négligé de développer une théorie politique claire et une pratique correspondante. Kaalep et Meister rejettent l'idée que nous pouvons concentrer nos efforts sur la conquête d'une hégémonie culturelle sans apporter de résultats pratiques, en ne produisant que des publications et des conférences sans fin qui apportent un riche matériel intellectuel sans apporter de réels changements dans la vie des Européens.

Les aspects géopolitiques de l'ethnofuturisme

Ma section préférée de Rebirth of Europe est le dernier chapitre, qui offre un aperçu fascinant de la spéculation informée sur notre avenir en devenir. Le chapitre s'ouvre sur l'affirmation selon laquelle

    nous revenons à la situation qui a précédé la révolution industrielle, dans laquelle la force économique sera déterminée par les ressources naturelles et démographiques, parce que le développement technologique sera fondamentalement le même pour toutes les nations du monde. Cela implique l'inévitabilité de la multipolarité et le retour au statut de superpuissance pour des civilisations comme la Chine et l'Inde.

Kaalep et Meister voient, dans la fin de l'hégémonie américaine, la fin du matérialisme mécaniste occidental qu'elle symbolise. De même, ils dénoncent l'idée eurasiste d'Alexandre Douguine car elle "ne peut pas fonctionner". La Russie n'est capable de combattre le marxisme culturel que dans les slogans, mais pas dans la pratique. La Russie "surpasse la décadence occidentale, avec des taux impressionnants d'avortements, d'alcoolisme et de toxicomanie, que son régime politique n'a pas pu, ou n'a pas voulu, arrêter. ... Les enfants des politiciens russes vivent à l'Ouest, et la culture de la Russie elle-même est surchargée d'émissions de télé-réalité et de culture de masse vulgaire."

Kaalep et Meister ajoutent,

    Ce ne seront ni la Russie ni les États-Unis qui dirigeront l'avenir ; nous pouvons plutôt nous attendre à une nouvelle ère du Pacifique avec la Chine et l'Inde qui regagnent leur influence. Ces pays, au moins, ne seront pas libéraux, pacifistes ou humanistes - ils utiliseront les percées scientifiques au service de leur grandeur politique. Par conséquent, les peuples européens devront changer leur vision du monde afin de survivre dans cette nouvelle compétition, où nous perdons à chaque instant que nous faisons partie d'un système libéral, haineux et autodestructeur.

Il y a une section très intéressante concernant l'expérience nationaliste dans les États baltes, qui est soulignée par un très fort sentiment de fraternité européenne. Lorsque Kaalep et Meister affirment que les nationalistes baltes feront tout leur possible s'ils sont appelés à défendre les frontières méridionales de l'Europe ou l'intégrité démographique des nations d'Europe occidentale, on perçoit la plus grande sincérité.

Les remarques finales du livre, plutôt émouvantes, portent sur le devoir et la mort, conclusion de tout cheminement spirituel. "En fin de compte, mener un combat qui semble déjà perdu dès le départ est la seule chose à faire, précisément parce que rien d'autre ne compte. Rien ne compte plus que cela." Nos auteurs terminent en soutenant que,

    Dans la situation actuelle de la civilisation occidentale, qui semble connaître une chute irréversible, s'arrêter n'est pas une option. Il ne s'agit pas seulement d'une question d'idéologies politiques, mais de la logique interne d'une culture. La seule chose qui reste à nos nations est de survivre à cette chute. Plus important encore, nos gènes et les traditions qui portent notre plein potentiel doivent survivre. Car la mort et la destruction de l'Occident, provoquées par le libéralisme, s'approchent toujours plus de leur objectif singulier. Lorsqu'elle atteindra un certain point, ce sera notre chance. Ce sera le moment d'un véritable retour aux sources, un retour sans jamais se retourner. Lorsque le monde occidental célébrait la diversité et le multiculturalisme, nous prévoyions sa destruction catastrophique par ses propres moyens. De plus, lorsqu'il commencera à paniquer devant la catastrophe qu'il n'a pu éviter, il sera alors temps pour nous de construire une nouvelle civilisation européenne. La boucle sera bouclée.

Remarques finales

Rebirth of Europe est un document rafraîchissant et optimiste qui, pour un livre d'une longueur aussi modeste, est bien au-dessus de son poids. Il présente une profondeur, une ampleur et une clarté de compréhension philosophique qui sont souvent rares dans des textes de cette nature, et le moins que l'on puisse dire, c'est qu'il donne à réfléchir. Les questions qu'il soulève exigent l'attention et l'action de toute personne concernée par la cause ethnonationaliste.

AVT_Keiji-Nishitani_1716.jpgReste à savoir si l'ethnofuturisme est une voie fiable à long terme. À part la Chine peut-être, voyons-nous vraiment dans le monde actuel un exemple de pays qui a réussi à maintenir des éléments significatifs de la culture traditionnelle tout en plongeant tête baissée dans le développement technologique ? Pour ma part, je suis sûr que si Keiji Nishitani avait prononcé ses conférences aujourd'hui, quelque 50 ans après s'être adressé à l'Association bouddhiste shin, il aurait peut-être été plus prudent dans son plaidoyer pour laisser le "cerf-volant" national s'envoler dans le vent du changement. Le Japon d'aujourd'hui est peut-être superficiellement stable et technologiquement avancé, mais il est en proie depuis des décennies à une faible fécondité et à des taux de suicide élevés, ainsi qu'à une marginalisation croissante de ses traditions et de ses religions.

Le train fou de la modernité industrielle pourra-t-il un jour être suffisamment apprivoisé pour être conduit par la tradition ? Cela reste à voir. À ce problème s'ajoute, bien sûr, la question des éléments étrangers ancrés dans l'Occident qui s'emploient à faire en sorte que "la corde et la queue" du "cerf-volant" européen restent à jamais coupées. Comment un mouvement national peut-il reconnecter un peuple avec son histoire et ses traditions tout en abritant des factions qui veulent que ces mêmes traditions et histoires disparaissent à jamais ou soient définitivement ternies par la honte ? Peut-être le seul réconfort que nous pouvons tirer est, comme Kaalep et Meister le soulignent, le fait que même dans la catastrophe il peut y avoir une opportunité.

Notes:

[1] Voir, par exemple, son monumental Religion et néant.

[2] Pour les conférences complètes, voir K. Nishitani, On Buddhism (New York : State University of New York Press, 2006), 18.

[3] G. Parkes, " The Putative Fascism of the Kyoto School and the Political Correctness of the Modern Academy ", Philosophy East and West 47, no. 3 (1997) : 305-36. Pour une exploration plus biographique de l'anti-marxisme et du traditionalisme au sein de l'école de Kyoto, voir K. Nishitani, Nishida Kitaro : The Man and His Thought (Nagoya : Chisokudo Publications, 2016).

 

jeudi, 11 mars 2021

Dépasser l’Archéofuturisme

Cet article est extrait du livre de Romain D’Aspremont The Promethean Right (La Droite Prométhéenne) également auteur de Penser l’Homme Nouveau. Nous avions déjà publié un extrait de son premier livre portant sur le transhumanisme ici. Nous vous invitons à lire la première partie de cet article avant d’initier votre lecture.

Les femmes et la Tradition

image_1398130_20210121_ob_2c6413_the-promethean-right-2.jpgFaye aspire à ressusciter certaines institutions, dans la mesure où elles incarnent la Tradition. Or, si certaines de ces institutions méritent effectivement d’être rebâties, c’est moins en raison de leur caractère traditionnel que parce qu’elles renforcent le groupe et l’individu et maximisent leur potentiel. Ainsi, éduquer les garçons dans une perspective d’endurcissement est davantage compatible avec leur tempérament masculin que le fait de récompenser leurs émois. Toutefois, l’éducation devrait moins être adaptée au sexe de l’enfant qu’à son caractère : c’est seulement dans la mesure où les filles sont statistiquement plus féminines que les garçons que leur éducation valorise moins le courage physique et davantage ce que les gauchistes appellent l’intelligence “émotionnelle” (qui est par ailleurs corrélée au QI, comme tous les autres types d’intelligence : les individus à faible quotient intellectuel tendent à être moins sensibles et empathiques).

En revanche, contrairement à la tradition, les femmes devraient se voir offrir les mêmes opportunités de carrière, à condition qu’elles possèdent les compétences requises (à l’inverse du concours de la gendarmerie qui requiert une moindre aptitude physique de leur part). Il en va de même pour les droits politiques. Une société productive et créative nécessite une méritocratie asexuée, libérée de toute discrimination injustifiée, positive comme négative. Au nom de la compétition et de l’excellence.

Faye a raison lorsqu’il écrit que “l’avenir n’est pas la négation de la tradition et de la mémoire historique d’un peuple, mais plutôt sa métamorphose, par laquelle il en sort renforcé et régénéré”. Cette métamorphose est précisément ce qui s’est produit concernant le rôle des femmes dans la société. Le féminisme de la première vague (entre le XIXe siècle et le début du XXe siècle) aspirait à l’égalité des droits. Il s’agissait d’un mouvement à la fois nécessaire (motivé par les changements économiques et technologiques) et positif (car l’égalité des droits permet une authentique concurrence).

Unir la droite autour de la Tradition ?

Le concept d’archéofuturisme est censé unir notre famille politique, en transcendant ses contradictions internes. Faye écrit :

“Notre courant de pensée a toujours été déchiré et affaibli par une distinction artificielle opposant les « traditionalistes » à ceux qui « regardent vers l’avenir ». L’archéofuturisme peut réconcilier ces deux familles via un dépassement dialectique.”

DgcBkd-XkAAmPd9.jpgLa droite peut et doit être unifiée sur le plan électoral : partout, il nous faut nous rallier au principal parti de droite nationaliste (en France, le “Rassemblement national”). En revanche, il serait chimérique de croire que l’unité idéologique peut être atteinte : être attiré par une droite transhumaniste est moins une question de raisonnement qu’une question de tempérament. Les personnalités de droite orientées vers le passé seront naturellement portées vers le conservatisme, et celles orientées vers l’avenir (la minorité) embrasseront la droite prométhéenne. Cette dernière manquera toujours de séduire les conservateurs, mais elle peut toutefois devenir un mouvement de pensée influent.

Faye a raison de nous mettre en garde contre l’orgueil prométhéen :

“[…] Lorsqu’elle est laissée à elle-même – en particulier dans le domaine des sciences technologiques – la mentalité futuriste peut s’avérer suicidaire, notamment en raison de son impact sur l’environnement, étant donné le risque de déifier la technologie comme une solution miracle.”

Mais il ajoute :

“Voilà pourquoi le futurisme doit être tempéré par l’archaïsme…”

Faye soutient, à raison, que les valeurs de droite que sont la hiérarchie, l’amour de la lutte et l’excellence doivent perdurer dans le contexte d’un avenir hautement technologisé. Mais il va plus loin :

“S’agit-il alors d’ “abolir la liberté” ? Paradoxalement, c’est la modernité “émancipatrice” qui a détruit les libertés concrètes en proclamant une Liberté abstraite. […] Face à cet échec, ne vaudrait-il pas mieux rétablir des institutions concrètes et médiévales, telles les franchises, les pactes communautaires locaux et les formes de solidarité organique entre voisins ?”

Pourtant, ce sont précisément les droits de l’individu et cette “liberté abstraite” qui ont, entre autres, permis l’explosion de la croissance économique et technologique. Croire que ces libertés abstraites puissent être découplées du capitalisme et de ses créations est illusoire. C’est cette même illusion qui empêche Faye d’admettre qu’une société technologiquement innovante n’est pas compatible avec une mentalité traditionnelle. Le fait que la révolution industrielle ait eu lieu au siècle des Lumières et non à l’époque médiévale, où “les anciennes institutions telles que les franchises, les pactes communautaires locaux et les formes de solidarité organique” étaient la règle n’est pas une coïncidence.

vanityfinal.JPGLa liberté individuelle (ce que Faye appelle la “liberté abstraite”) peut même être considérée comme un principe de droite. Ce n’est pas la liberté ni l’égalité qui sont de gauche, mais l’égalitarisme. Si l’égalité juridique est de droite, c’est qu’elle permet une véritable concurrence, facteur de progrès. L’égalité des résultats est de gauche, car elle supprime la concurrence et l’allocation des ressources aux plus talentueux, ce qui est facteur de déclin.

On ne peut que partager la lecture de Faye lorsqu’il affirme :

“Les modes de pensée modernes et égalitaires, pris dans le piège culpabilisant de l’éthique des droits de l’homme, sont incapables de faire face aux progrès biotechnologiques et se heurtent à des obstacles moraux qui sont en fait de nature para-religieuse.”

Le libéralisme peut en effet s’opposer, ou du moins entraver, le transhumanisme au nom du caractère sacré de la personne humaine. Cette sacralisation est un vestige du christianisme, le libéralisme en étant une version sécularisée. Un retour à la mentalité païenne, pré-chrétienne, pourrait résoudre ce problème spécifique, mais ruinerait du même coup la mentalité rationaliste et moderne qui a permis le progrès technologique en premier lieu. Certains aspects de la modernité font obstacle au transhumanisme, mais un retour à la tradition serait facteur de déclin technologique.

Quant à la relation entre technologie et tradition, Faye développe cette métaphore :

“Qu’est-ce qu’un sous-marin nucléaire lanceur de missiles balistiques a en commun avec une trirème athénienne ? Rien et tout : l’un représente la métamorphose de l’autre, mais tous deux, à des époques différentes, ont précisément servi le même objectif et incarnent les mêmes valeurs (y compris les mêmes valeurs esthétiques).”

Il signifie par là qu’il serait stupide de revenir à la construction de trirèmes, quand bien même elles incarneraient plus fidèlement la tradition. Le sous-marin à propulsion nucléaire est le bienvenu dans la mesure où il sert les mêmes objectifs tactiques et les mêmes valeurs guerrières. Il y a toutefois une faille dans ce raisonnement. Le jour viendra où la guerre navale changera si radicalement de visage qu’aucune arme ne ressemblera plus à une trirème. La guerre navale n’existera peut-être même plus, rendue obsolète par les essaims de nanorobots et autres armes encore impossibles à envisager. Faye est trop attaché à la continuité, or l’évolution technologique est le plus souvent discontinue. De même, il n’envisage pas la possibilité d’autres valeurs que celles traditionnelles. Son archéofuturisme est essentiellement un archaïsme.

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La nature humaine a évolué afin d’améliorer l’adaptabilité de notre espèce et de résoudre des questions de survie bien spécifiques. Or, du fait de l’évolution de notre environnement, l’humanité n’est plus confrontée aux mêmes défis. Les valeurs traditionnelles sont une réponse à des défis historiquement datés. C’est pourquoi il faut se garder de sanctifier la nature humaine et les valeurs traditionnelles. La valeur “hiérarchie”, qui a toute sa place dans la société médiévale, devient un frein  au progrès dans le contexte d’une société favorisant de plus en plus les structures horizontales et réticulaires, et qui intègre l’intelligence artificielle dans la boucle décisionnelle. Une société transhumaine ne pourrait qu’intensifier l’obsolescence des structures autoritaires.

Enfin, Faye a raison de substituer l’européisme au nationalisme, obsolète. Pourtant, il reproduit la même erreur à une autre échelle en excluant les États-Unis d’Amérique de la Fédération européenne qu’il envisage. Expulser la Russie de la famille occidentale est une folie ; considérer les États-Unis comme membres d’une civilisation non-européenne est une folie plus grande encore. Il nous faut raisonner en terme de “Grande Europe” : l’Occident, de Seattle à Vladivostok, en passant par l’Australie et la Nouvelle-Zélande.

Vers une droite prométhéenne

La seule valeur qui transcende les époques et les sociétés est le dépassement. Toutes les autres valeurs doivent être adoptées, conservées ou abandonnées, seulement dans la mesure où elles servent cette valeur suprême. La volonté de dépassement est l’essence de la vie et de la conscience ; elle s’oppose aux idéaux égalitaires, régressifs et conservateurs de la gauche.

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Lorsque Prométhée offre la technique aux humains, il leur fournit les moyens de comprendre et de dominer la nature, autant qu’il les confronte au spectre du dysgénisme. Il existe une coévolution entre notre génome et nos techniques : notre capacité à fabriquer des vêtements de fourrure a accéléré la diminution de notre pilosité, dont l’avantage évolutif s’est érodé. Cette coévolution tend à être facteur dysgénisme : la diffusion des techniques réduit la pression sélective jusqu’à annihiler la sélection naturelle. Heureusement, Prométhée nous a façonné à son image : des entités rebelles et créatives, en perpétuelle réinvention, capables de développer de nouvelles techniques tout en conjurant la dégénérescence génétique via le transhumanisme. A ce que la technique engendre en termes de changements négatifs (génétiques, climatiques, environnementaux), la technique fournit également la solution – par le haut.

En s’acharnant à préserver la nature humaine, les bio-conservateurs trahissent l’essence même de l’Homme (et de l’Occidental), ce pont entre la bête et le Surhomme. En cela, ils sont les alliés de Zeus et les ennemis de Prométhée.

Retrouvez Romain D’Aspremont sur twitter @R_Aspremont est son ouvrage d’où cet extrait est tiré à partir du lien ci-dessous.

NB : Toutes les citations de Guillaume Faye ont été traduites par nos soins depuis l’anglais. Par conséquent, il pourrait y avoir quelques inexactitudes par rapport à la version française originale de L’Archéofuturisme.

FRÉQUENCE OCCIDENT

Entretien: Penser l'Homme Nouveau

avec Romain D'Aspremont, D. Conversano & J. Marr...

Pour écouter: https://www.bitchute.com/video/q2Dk_2DHFR4/

Entretien CHOC de Romain d'Aspremont (qui souhaite rester anonyme) avec Daniel Conversano & Joffrey Marrot, sur son livre "Penser l'Homme Nouveau: Pourquoi la droite perd la bataille des idées", disponible sur Amazon : https://amzn.to/2QjsWCd

Téléchargez le MP3 de l'émission ici: http://radio.suavelos.eu/download/32/

Posez vos questions sur :
frequenceoccident@protonmail.com

 

dimanche, 07 mars 2021

GUILLAUME FAYE, HÉROS DE L'EUROPE

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GUILLAUME FAYE, HÉROS DE L'EUROPE

Le Soleil se lève

avec Jean-Yves Le Gallou, Robert Steuckers, Daniel Conversano, Thomas Ferrier

Hommage à Guillaume Faye (Le Soleil se lève - ECP)
 
Bienvenue pour le dix-septième podcast du Soleil se lève, l'émission mensuelle de l'ECP avec comme invités spéciaux @Jean-Yves Le Gallou, @Daniel Conversano, @Thomas Ferrier et Robert Steuckers .
 
Autre intervenant : Lucien Lachance​.
Chroniqueurs : @Dal Dec ​.
TELEGRAM : t.me/LSSLoff
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THÈME DU MOIS : HOMMAGE À GUILLAUME FAYE
Guillaume Faye, cet esprit fusée : http://www.librairiefrancaise.fr/fr/h...
 
LIENS UTILES
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La chaine Ego Non (avecuneprésentation de "L'archéofuturisme" de G.Faye : https://www.youtube.com/channel/UC5fz...
Le blog de Robert Steuckers : http://euro-synergies.hautetfort.com/
La Chaine de Dal Dec : https://www.youtube.com/channel/UCFzx...
Le Canal Telegram de Dal Dec : t.me/daldec
 
SOMMAIRE 00:00:00
Introduction 00:02:09
Hommage à Guillaume Faye 01:05:31
Les imitations de Dal Dec 01:16:31
Zemmour 2022 01:28:58
Rubrique communautaire : Epona (ECP) 01:34:54
Conclusions et présentations des initiatives des invités
 
REMERCIEMENTS
Un grand merci à experts audiovisuels : Juigi di Pesto et @Pourquoi Ça Craint ?
Un grand merci aussi à tous ceux, connus ou non, qui nous ont partagés.
Merci à tous ceux qui nous soutiennent sur Tipeee (notamment Witold Krauze, Le Korrigan Salt Piotr, Marquis Turbolibéral, Factoriel 41, Féfé, Raphaël, Victor, Epona, Anders, Saint Louis, Purple...) et sans qui ce travail ne serait plus possible. Enfin, merci à vous tous pour votre soutien et votre confiance !
 
 

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Pour commander Sexe et dévoiement:
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samedi, 13 février 2021

Archéofuturisme : un dynamisme vitaliste

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Archéofuturisme : un dynamisme vitaliste

Conférence donnée au Pérou sur l'archéofuturisme selon Guillaume Faye

Traduction d’une conférence donnée au Pérou, par Israel Lira, directeur du centre des études Crisolistes – Le 24 décembre 2020

«…Les formes politiques et sociétales de la modernité se brisent. Les voies archaïques émergent dans tous les domaines politiques, la résurgence d’un Islam conquérant en est un parfait exemple. Finalement les futures altérations de la technoscience -principalement en génétique – tout comme le retour tragique à la réalité que le 20ème siècle a préparé, va demander un retour vers une mentalité archaïque. C’est le modernisme qui est une tendance passagère. Il n’y a aucun besoin de revenir au classique traditionalisme, imprégné de folklore et rêvant à un retour au passé. La modernité est déjà obsolète. Le futur doit être archaïque, c’est à dire, ni moderne ni passéiste.(Faye, 1998:15). (revoir d’après l’original, p43)

Cette citation de Faye montre le flou dans lequel il laissait les principes consubstantiels à son système théorique, pour éviter précisément qu’ils puissent être confondus avec d’autres théories ayant aussi la technoscience dans le champ de leur réflexion. Dans le cas particulier de Faye, sa proposition, dans ce qu’elle a d’universel, relève de la catégorie du constructivisme vitaliste, tandis que sa conceptualisation spécifique prend la forme du néologisme « archéofuturisme ». 

product-image.jpgCette nouvelle doctrine a influencé un large éventail d’écoles de pensées théoriques à ce jour, dans le cadre de propositions anti-globalistes, anti-individualistes et anti-libérales, face au monde postmoderne qui porte l’estampille du nihilisme culturel, dont les principales expressions phénoménales s’expriment dans la laïcité nihiliste, la globalisation néolibérale, le narcissisme hyper-individualiste et l’extrême relativisme culturel.

La trichotomie centrale de l’archéofuturisme (TCAf)

L’archéofuturisme a trois thèses principales à l’intérieur desquelles nous devons remarquer son rejet absolu – par Guillaume Faye – des positions techno phobiques (le traditionalisme classique et le conservatisme) ainsi que les positions technophiles acritiques (technicisme et transhumanisme), et elles peuvent être résumées ainsi :

Première thèse (T1): la civilisation contemporaine qui est la fille de la modernité et de l’égalitarisme, termine déjà son cycle historique, ainsi, « la vieille croyance dans le miracle de l’égalitarisme et de la philosophie du progrès, qui affirmait qu’il était toujours possible d’obtenir plus, est morte. Cette idéologie angélique a créé un monde qui devient moins viable chaque jour. » (Faye, 1998: 2-3)

Seconde thèse (T2) : Les idéologies contemporaines qui émergent comme un fait symptomatique du retour des structures psycho-bio-sociales à un état très moderne sont caractérisées par le rejet de l’individualisme et de l’égalitarisme, ce dernier comme expression maximal du nihilisme culturel. Pour affronter le futur il faut reproduire une mentalité archaïque, c’est-à-dire, pré-moderne, non égalitaire et non humaniste, qui restaurera les valeurs ancestrales d’ordre des sociétés. Maintenant, les découvertes en techno science, particulièrement dans le domaine de la biologie et de l’informatique, ne peuvent être administrée à travers les valeurs humaniste et les mentalités modernes.

Aujourd’hui les événements géopolitiques et sociaux sont dominés par des problèmes religieux, ethniques, alimentaires et épidémiologiques. Revenons à la question principale. Je (Guillaume Faye) propose donc, une nouvelle notion, l’archéofuturisme, qui nous permettra de rompre avec les dogmes modernes, égalitaire, humaniste et individualiste, inadaptés pour penser au futur, et qui nous permettrait de survivre dans le siècle de feu et de fer qui vient. (Faye, 1998:4-5)

Troisième thèse (T3) : l’avènement d’un nouveau type de scénario dans un cadre qui est totalement différent du monde égalitaire régnant et actif, dans la mesure où il est clair pour nous que « nous devons nous projeter et imaginer le monde post-chaos, le monde après la catastrophe, un monde archéofuturiste, avec des critères radicalement différent de ceux utiliser dans la modernité égalitaire.»

Ces trois thèses centrales constituent les fondamentaux de l’archéofuturisme, configurant sa trichotomie centrale (TCAf) comme système théorique qui s’exprime de la façon suivante :

Af = <T1,T2,T3>

Où,

Af = Archéofuturisme comme proposition théorique.

T1 = Thèse de la mort du mythe du progrès.

T2 = Thèse de l’éternel retour et la sombre illumination.

T3 = Thèse du nouveau paradigme existentiel.

Qui plus est, il faut mentionner qu’une partie du discours de Guillaume Faye doit être comprise dans le cadre littéraire qu’il se donne afin d’illustrer son travail, et/ou d’élaborer une sorte de projection hypothétique en forme d’utopie et de dystopie, que l’on voit se refléter dans son œuvre, l’Archéofuturisme V2. 0 ( 2016).

Archéofuturisme et transhumanisme : un antagonisme irréconciliable

Aux antipodes de TCAf, on peut présenter le transhumanisme tel qu’il ressort de manière claire et nette des travaux de Max More et Anders Sandberg, et de cette déclaration de la World Transhumanist Association, qui réaffirme la systématisation faite par ces deux auteurs : 

9781907166099-fr.jpg«Le transhumanisme est une sorte de philosophie qui tente de nous guider vers une condition post-humaine. Le transhumanisme a de nombreux points communs avec l’humanisme, tel que son respect de la raison et de la science, son acceptation du progrès et la priorité donnée à l’existence humaine (et transhumaine) dans cette vie au lieu d’une vie future surnaturelle. Le transhumanisme diffère de l’humanisme dans la reconnaissance et l’anticipation d’altérations radicales dans la nature et notre potentiel biologique grâce à différentes sciences et technologies telles que les neurosciences et la neuropharmacologie, l’extension de la vie, la nanotechnologie, l’ultra-intelligence artificielle, la vie dans l’espace, combinées à une philosophie rationnelle et un système de valeur rationnel.» (More, 1990)

Dans la même veine : « les philosophies de vie qui recherchent la continuation et l’accélération de l’évolution de la vie intelligente au-delà de la forme humaine actuelle et de ses limitations au travers de la science et la technologie, sont guidées par des valeurs et des principes qui promeuvent la vie. » (More et Sandberg 2001)

De ce qui précède, il ressort clairement, littéralement et explicitement que le transhumanisme se trouve dans la logique narrative de la modernité, dans la mesure où il implique la continuation et l’expansion de la philosophie du progrès linéaire, compris comme une perfectibilité indéfinie du genre humain et qui n’admet aucun recul que ce soit (Canguilhem, 1999 :669). C’est ce principe névralgique du transhumanisme,  celui sur lequel il repose entièrement et que même l’histoire de la science a démystifié, qui apparaît comme l’antagoniste de la trichotomie centrale de l’archéofuturisme (TCAf).

Très contraire à l’idée de la modernité du progrès linéaire,l’ archéofuturisme met devant lui une idée de mouvement synergique, qui est plus intégrale, un dynamisme vitaliste, dans la mesure où l’archéofuturisme rejette l’idée de progrès comme fin en soi. Car tout ce qui découle de la vision du monde d’un peuple doit être fondée sur des bases immémoriales, et parce que depuis 50 000 ans, Homo sapiens n’a que très peu changé, mais aussi parce que le modèle archaïque pré-moderne des organisations sociales a donné des preuves de son efficacité. À la fausse idée de progrès, nous devons opposer l’idée de mouvement ( Faye, 1998: 89) (revoir d’après l’original, p71)

De ce qui vient d’être exposé il peut être réaffirmé que l’archéofuturisme ne penche aucunement vers le système théorique du transhumanisme contemporain, comme le voit Michael O’Meara (2013) et, plus explicitement encore, Roberto Manzocco (2019), et ce système de pensée ne peut pas non plus être considéré comme une branche conservatrice du transhumanisme, un transhumanisme conservateur, erreur encore pire que toutes celles qu’on pourrait faire. A l’appui de cette idée, on ne peut trouver d’explication que dans la prétention totalitaire du transhumanisme international de s’annexer tout projet qui ferait allusion à l’utilisation de technologie pour l’amélioration de la qualité de la vie et de la condition humaine, initiatives qui ont été présentes depuis la révolution industrielle, étant donné que comme pour tout système théorique, les idées qui lui ont servi de base, et les premières pensées apparentées, ont pu être retracées comme esquissé dans les travaux de Hugues (2002) et Bostrom (2005).

Mais on ne peut en déduire que toute idée qui préconise l’utilisation des technologies pour l’amélioration de la qualité de la vie et de la condition humaine, est en soi du transhumanisme, même si cela est validé par les transhumanistes eux-mêmes, dans la mesure où « l’Homme +» (l’Homme Af) a des particularités qui le différencient précisément comme philosophie et comme proposition théorique, aussi bien par exemple de la pensée futuriste (artistiques et technologiques), et de l’utopisme technoscientifique.

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Le terme transhumanisme est apparu en 1957 sous la plume du biologiste Julian Huxley, tout comme le terme «transhumain» en 1966 dans la bouche de l’Américain futuriste F.M. Esfandiary, sans qu’on puisse parler de transhumanisme à proprement parler avant l’usage systématique du terme par la World Transhumanist Association (WTA) fondée par Nick Bostrom. Il fallait éviter de tomber dans une anarchie sémantique et méthodologique, sous peine de voir le transhumanisme se perdre lui-même dans l’imprécision. Dans cette mesure, «… l’affirmation qu’il est éthique et souhaitable d’utiliser les moyens technoscientifiques pour améliorer fondamentalement la condition humaine…(…) est simplement le plus petit dénominateur commun du transhumanisme et peut être adopté et adapté à ses propres besoins, par la majorité des idéologies politiques à l’exception des idéologies bio-conservatrices et néo luddites.(…)

Bildschirmfoto-2020-05-14-um-11-39-36_720x600.pngLes fondateurs du transhumanisme moderne, conscients de ces risques, essayèrent d’orienter le Central Axis of Transhumanism (CAT) vers des concepts tels que le respect des individualités, liberté, tolérance et démocratie, faisant remarquer que les racines du transhumanisme reposent sur la philosophie des lumières, l’humanisme et le libéralisme. Les extropiens sont allés encore plus loin, essayant d’imposer au CAT, des concepts tels que « l’ordre spontané » et, plus tard, les principes de l’Open society de Soros (Estropico, 2009).

Cependant, dans la pratique, il est clair que ces incitations n’ont pas été totalement couronnées de succès, étant donné qu’à ce jour, tel que nous le voyons, il n’est pas nécessaire d’adhérer au transhumanisme pour pouvoir prétendre que grâce à la technoscience, la qualité de vie et la condition humaine peuvent être améliorées. Cet impératif de précision téléologique et catégorique est partagé par la WTA , pour ne pas tomber dans ce qu’ils appellent le futur fascisme racialiste et eugéniste ou dans l’utopisme technoscientifique du socialisme classique.

Ainsi, il est clair que le transhumanisme et ses courants marginaux (extropianisme, techno-progressisme, singularitarisme, transfigurisme etc.), jusqu’à aujourd’hui, représentent les antithèses des propositions de l’archéofuturisme…

Le mythe de la quatrième révolution industrielle

Faye lui-même notait déjà tout ce qui est exposé dans cet article, dans un court essai publié sur son blog le 23 mai 2016, qui partageait de nombreuses similarités avec les récents commentaires que Mario Bunge a apportés sur le sujet. Il englobait en effet le transhumanisme dans le cadre plus large des réactions quasi religieuse issues de la foi en l’idée du progrès et du développement linéaire, y voyant un fait symptomatique de l’effondrement économique mondial à venir.

«L’optimisme forcé, assez irrationnel, sur la ”nouvelle économie numérique”, avec le big data, la blockchain, l’impression 3D, le ”transhumanisme”, etc. qui préfigureraient une “quatrième révolution industrielle” et un nouveau paradigme (et paradis) économique mondial, relève probablement de l’utopie et de l’auto-persuasion. Et de la croyance aux miracles» (Faye, 2016).

La première révolution industrielle – début du XIXe siècle– s’organisait autour de la machine à vapeur, la deuxième (fin du XIXe) autour de l’électricité, la troisième autour de l’informatique (milieu XXe). La quatrième révolution (début XXIe), issue des deux dernières, l’électrique et l’électronique, concernerait la généralisation d’Internet et des connections universelles numériques par le web. Le concept de « 4ème révolution industrielle » est né après la foire de Hanovre en 2011, où l’on a célébré la naissance de l’ ”usine connectée” ; cette dernière, entièrement ”webisée” et branchée directement sur les clients, est robotisée et emploie de moins en moins de salariés. On a créé l’expression abstraite d’” industrie 4.0”. C’est un concept assez creux : à quand, l’ ”industrie 5.0” ?

Le néo-scientisme et l’écologisme

Les prophéties sur la révolution de l’économie numérique, avec ses mots fétiches, cloud, big data, transhumanisme, etc, appartiennent à une idéologie néo-scientiste qui risque de déboucher sur des désillusions terribles. Or, ce néo-scientisme sans prise de recul, comme celui de la fin du XIXe siècle, cohabite curieusement, chez les mêmes, avec un anti-progressisme écologiste. Il est aussi stupide que les théories de la décroissance : il relève du même extrémisme.

pack-faye-5-ouvrages-a-prix-reduit-.jpgCe romantisme néo-scientiste est l’exact pendant de celui de la fin du XIXe siècle – relisez Jules Vernes et Victor Hugo – où l’on s’imaginait l’avenir en rose sous l’influence du concept magique et au fond peu rationnel de ”Progrès”. À la fin de son poème La légende des siècles, Victor Hugo brossait une vision idyllique du XXe siècle.

Les erreurs des pronostics technologiques sont une habitude. Jules Vernes prévoyait qu’en 1960, les habitants des villes se déplaceraient en engins volants individuels. Mais il n’avait pas prévu l’automobile. Et, dans les années 60, on pronostiquait des bases humaines nombreuses sur la Lune et sur Mars, astronomiques et d’extraction minière, la généralisation des transports aériens supersoniques et hypersoniques stratosphériques ainsi que la diffusion de l’énergie de fusion nucléaire. Bien des pronostics sur le futur de la ”révolution numérique” relèvent probablement des mêmes erreurs utopiques de jugement.

L’utilité marginale déclinante de l’économie numérique

Le téléphone, l’électrification, le chemin de fer et l’automobile, l’aviation comme la radio et la télévision, la pénicilline, l’anesthésie, etc. ont été des bonds technologiques énormes, de par leurs conséquences, bien plus qu’Internet ou l’économie numérique. Le binôme numérique/informatique offre moins de facilités qu’on ne croit ; parce qu’il complique les processus autant qu’il ne les simplifie. Les innovations technologiques de la ”révolution numérique” ne répondent pas dans la pratique quotidienne, à leurs promesses. Elles sont inférieures en terme d’avantages marginaux aux innovations des précédentes mutations techno-industrielles» (Faye, 2016).

Archéofuturisme et Crisolisme

L’archéofuturisme, selon ce que nous venons de voir, est une position équilibrée, qui intègre dialectiquement deux catégories : l’archaïsme et le futurisme. C’est une théorie critique de la modernité mais aussi des traditions.

crisolisme.jpgL’héritage fayen est à la base de l’archéofuturisme péruvien dans le cadre de la Théorie Crisoliste, laquelle prévoit une harmonie entre la vision traditionnelle de diverses ethnies, dont la Péruvienne, et l’idée d’une synergie technoscientifique ainsi qu’un mouvement socio-économique harmonieux, sans affecter les environnements, par exemple, les communautés Andine et Amazonienne, face au danger d’un idéal de progrès infini représenté par une vision d’exploitation de la nature, qui jusqu’à ce jour n’a apporté que des exploitations minières illégales dans la région de Madre de Dios, des effondrement minier à Ancash, des marées noires en Amazonie, la déprédation dans les réserves écologiques telle que Chaparri, augmentant le risque d’extinction d’espèces menacées, et la déforestation exacerbées provoquant la perte de 164 662 hectares de forêt tropicale amazonienne en 2016, ce qui mit en danger la santé et l’équilibre environnemental.

L’archéofuturisme donc, n’est pas la misanthropie cachée du transhumanisme, nourri par l’idée d’un progrès infini, qui déteste l’être humain ordinaire, limité par ses faiblesses biologiques. L’archéofuturisme n’est pas non plus, et ne sera jamais, un transhumanisme conservateur. L’archéofuturisme est la réaffirmation d’un amour authentique des potentialités de l’humain originel en tant que tel, dans la mesure où il est évident que l’idée moderne du progrès, tel qu’il fut dénoncé par Rousseau (1750), génère un être riche matériellement et techniquement puissant, mais moralement répugnant.

Source


Un grand merci à Olivier Dubuis pour la traduction