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mercredi, 07 septembre 2022

Alain Daniélou et le point de vue hindou sur le Kali-Yuga européen

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Alain Daniélou et le point de vue hindou sur le Kali-Yuga européen

Nicolas Bonnal

Alain Daniélou, frère du cardinal, est païen et a vécu quinze ans en Inde au beau milieu du vingtième siècle. Là, il parfait sa connaissance de l’hindouisme, des textes sacrés, de la musique traditionnelle et de la danse initiatique. Puis il revient en Europe et assiste bien placé par ses relations mondaines au déploiement de cette Europe décadente dont a parlé Raymond Aron. Au début des années 80 il publie ses mémoires, Le Chemin du labyrinthe.

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Le livre est fabuleux, à couper le souffle, totalement passionnant. Et il va appliquer sa connaissance de la Tradition, jointe à un remarquable esprit libertarien, cet esprit libre n’ayant jamais supporté la discipline occidentale, pour analyser ce qui se passe en Europe, qui, dès les années 60 et 70, court au Reset et à la dystopie.

« C’est armé de ce bagage que j’ai commencé à reprendre contact avec l’Europe qui m’est apparue comme une région malade, atteinte d’une sorte de cancer qui fait que certaines cellules se développent de façon incontrôlée et contaminent peu à peu les autres. Ce développement à forcement une limite. L’espace vital est de plus en plus réduit pour chacun dans ces énormes termitières qui recouvrent peu à peu les campagnes et les forêts. »

Le cancer de la civilisation et la fin de l’espace vital, nous y sommes. A l’époque on en parlait, aujourd’hui on applique. Daniélou évoque son toupet habituel les origines « aryennes » (violence et pillage) de ces occidentaux toujours en guerre et colonialistes :

« La recherche de la prospérité étouffe celle de la sagesse et du bonheur de vivre. Je me suis interrogé sur les raisons qui rendaient les Occidentaux modernes si agités et en somme assez rarement heureux. Les Aryens dont sont issus la plupart des peuples qui ont dominé l’Europe, les Achéens, les Doriens, les Celtes, les Romains, les Germains, les Russes, sont des peuples prédateurs. Ayant récemment envahi une grande partie de la planète, peuplé les Amériques et l’Australie, imposé leurs langues à l’Afrique et parfois même à l’Asie, ils ont atteint une limite et leur force d’expansion se retourne contre eux-mêmes. Il semble peu probable qu’ils arrivent à se contrôler. »

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Oui, la force se retourne contre soi, et avec quelle alacrité !

Daniélou attaque l’occident là où il se croit fort, sur le plan des idées et de l’intellect ; il est aussi percutant que René Guénon :

« J’ai été surpris par l’incohérence des concepts, la naïveté des croyances, le manque de rigueur des raisonnements. De soi-disant « intellectuels » s’acharnent, sur des bases plus qu’incertaines, à changer le monde sans en étudier la logique ni en rechercher la raison d’être ; et prétendent « reformer » la société en partant de postulats irréalistes qui en tiennent aucun compte de la nature et du rôle de l’animal humain dans l’ensemble de la  Création. »

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Daniélou comprend comme Schopenhauer (voyez mon texte) que l’on ne peut convaincre en Occident. Alors il faut exterminer – surtout si on est le plus fort :

« Cette sorte de jeu artificiel ne peut aboutir qu’à de fausses valeurs imposées par des formes de tyrannie car, quand on arrive au bout du mensonge, on n’a plus d’autre issue que la destruction des preuves des opposants et l’annihilation physique de ceux qui les soutiennent ainsi que l’Histoire l’a trop souvent démontré. »

Il balaie la France fonctionnaire, républicaine et liquéfiée en une phrase :

« Les Français notamment apparus comme des gens particulièrement légers et irresponsables. »

La clé c’est la catastrophe bourgeoise. Taine en a très bien parlé dans son La Fontaine et les fables (voyez mon texte) ; Daniélou ajoute que le bourgeois est dangereux, surtout sur le plan culturel, car il est un snob. Cela donne les Femmes savantes, le bourgeois gentilhomme, la quête du mamamouchi et pas du Graal, ou le festival de Cannes et la sous-culture moderne qui repose sur la bêtise conformiste et le terrorisme critique :

«Le monde occidental, qu’il se prétende capitaliste ou socialiste, est entièrement dominé par la mentalité bourgeoise, c’est-à-dire par l’esprit qui caractérise la troisième caste, celle des marchands, non point tellement par suite de la puissance que donne l’argent que par l’importance attachée aux questions matérielles et surtout par le snobisme, un mot qui, selon certains, viendrait de l’italien snobile, « sans noblesse »

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L’esprit libre et indépendant devient une rareté dans cet occident alors :

« Les esprits indépendants qui cherchent leur propre vérité, veulent vivre selon leurs goûts, sont suspects dans ce monde artificiel et prétentieux. Les snobes prônent les modes artistiques comme s’il s’agissait de valeurs incontestables. »

Daniélou insiste sur ce snobisme qui crée un déclin actif de l’art (visible par tous dès le dix-neuvième siècle, voyez Tolstoï ou Max Nordau) :

« Il semble qu’il n’existe plus de lien entre la cosmologie et la science, entre l’art et le sacré. Il y a des maladies et des idéologies à la mode alors qu’il s’agit de questions d’importance vitale. Le communisme de salon va de pair avec la musique aléatoire ou l’enthousiasme feint pour des toiles dépourvues d’intérêt esthétique, de talent ou même de technique. »

Et de conclure sur cette question :

« Les snobs sont des naïfs vaniteux aisément manipulés par les intérêts des puissances d’argent et des impérialismes. Les prétendus intellectuels font bien souvent partie de ce troupeau. »

41DQGVP2TPL._SX195_.jpgLe déclin de la science est évident aujourd’hui, sur fond d’épidémie, de la fin de l’énergie et d’arnaque spatiale (coucou Apollo ? Coucou Ariane ?) ; Daniélou ajoute :

« Rares sont les savants qui au bout de leur carrière osent jeter, comme le faisait Oppenheimer, un regard effrayé sur le monde qu’ils ont contribué à construire tout en sachant qu’ils sont irresponsables, que la science collective poursuit son développement aveugle vers un destin inconnu que chacun pressent, qu’en théorie nul ne désire, et qui nous terrifie tous. »

L’abrutissement téléradio en une phrase :

« Un silence inquiétant est tombé sur les hommes saturés du bruit des radios et des images publicitaires de la télévision. »

Daniélou pressent la liquidation au nom de la lutte contre le racisme de la diversité sur terre :

« Au lieu de permettre aux différentes races de coexister, on encourage un abâtardissement général comme une solution qui contredit en fait la notion d’égalité de base. Là encore, au lieu de contempler, d’admirer, d’essayer de comprendre d’œuvre divine dans sa multiplicité, on cherche à l’abolir. »

Enfin après ce bilan la solution ? Il n’y en a pas de solution :

« On m’a souvent demandé si je ne pourrais pas définir des lignes de conduite, une méthode, une « religion » qui pourrait sortir l’Occident de l’impasse ou du moins aider quelques-uns à se réaliser. Mais je ne suis ni un maître ni un prophète. Dans un monde qui court à sa perte, selon la théorie des cycles, il n’existe de salut qu’individuel. Nous approchons, selon la conception hindoue, de la fin de kali yuga, l’âge des conflits, qui doit finir par un cataclysme. »

Macron réélu impose à son lâche et débile "peuple nouveau" (son peuple prolétaire, dirait le grand roumain Vlaicu Ionescu) un totalitarisme énergétique sur fond d’effondrement intellectuel et moral. "L’homme libre au milieu des ruines" (Julius Evola) ne peut qu’espérer passer au milieu des gouttes notamment s’il développe, dirait Laborit, sa capacité de fuite et ses dons manuels. Daniélou surdoué prétendait pouvoir exercer 32 métiers dont celui d’horloger, de jardinier ou de mécanicien.

J’oubliais : sur les USA, il explique, qu’avant Roosevelt et la guerre, ce pays était un paradis avec des gens libres et de bonne humeur – noirs compris (ils constituaient une caste). Puis est venu l’empire et sa bureaucratie… On croirait lire du Rothbard. Comme je l’ai expliqué dans mon opus sur la comédie musicale cette nostalgie a créé un genre spécial : l’americana

Sources :

Alain Daniélou – Le Chemin du labyrinthe, Robert Laffont, pp.321 -341 et 75.

Nicolas Bonnal – Chroniques sur la Fin de l’Histoire

https://www.dedefensa.org/article/max-nordau-et-lart-dege...

https://www.dedefensa.org/article/taine-et-le-cretinisme-...

https://www.dedefensa.org/article/leon-tolstoi-et-les-joy...

 

 

mercredi, 17 juin 2015

René Guénon et Alain Daniélou

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René Guénon et Alain Daniélou

par Jean-Louis Gabin

Ex: http://bouddhanar.blogspot.be

« Dans le monde moderne où les voies de la transmission normale de la connaissance ésotérique sont fermées pour la plupart, les livres jouent un rôle très différent de celui qu'ils jouaient dans des circonstances normales, de sorte que certains enseignements jusque là préservés sous forme orale se mirent à circuler sous forme écrite, constituant ainsi véhicules d'enseignement et de guidance pour ceux qui se trouvent privés de tous les autres moyens. Cette manifestation compense la disparition des voies traditionnelles de transmission de la connaissance, au moins dans son aspect théorique, sans que cela implique que cette situation elle-même puisse entraîner la manifestation de l'intégralité de la connaissance traditionnelle dans les livres sous une forme facilement accessible à tous. » 
Seyyed Hossein Nasr

 

Daniélou a témoigné plusieurs fois de l'importance qu'avait représentée pour lui la lecture de l'Introduction générale aux doctrines hindoues de Guénon. Il en traduisit des passages en hindi dans les années 40, car les milieux traditionnels dans lesquels il avait été accueilli à Bénarès étaient intéressés par la façon dont Guénon présentait le Sanâtana Dharma et la « crise du monde moderne ».

Dans le Dossier H consacré à Guénon, Daniélou aborde la question de l'accès à l'intégralité du Sanâtana Dharma, à propos du Védisme. Le Védisme, précise Daniélou, est « censé représenter la tradition primordiale d'un point de vue, disons, officiel. Mais, du point de vue ésotérique, il apparaît comme une religion qui en est devenue, à un certain moment, le véhicule ». Daniélou s'étonne que Guénon n'ait pas eu accès au Shivaïsme, car les plus hauts degrés de l'initiation ésotérique, transmis « presque exclusivement par les Sannyasis, sont shivaïtes. Ils sont en dehors du Brahmanisme, comme d'ailleurs de toute religion, et représentent en fait ce que Guénon appelle la Tradition primordiale ». Mais Daniélou considère que l'Introduction aux doctrines hindoues est le premier ouvrage à avoir tracé un tableau authentique du Sanâtana Dharma, « cette conception d'une révélation première transmise à travers les âges par des initiés, telle qu'elle apparaît dans l'hindouisme mais dont les traces doivent inévitablement se retrouver, sous une forme plus ou moins cachée, dans toutes les civilisations puisqu'elles sont la raison d'être de l'homme ». Comme souvent avec Daniélou, tout est dit en très peu de lignes ; notamment le fait que cette révélation première affleure dans toute société humaine, mais que sa signification intégrale n'est transmise que par des voies initiatiques, lesquelles ne sont pas faciles d'accès, ne sont pas destinées à tout le monde et, pour commencer, ne sont pas présentes partout. Afin d'éviter autant que se peut toute méprise, Daniélou reprend, dans le même texte, la question de l'origine transcendante, supra-humaine dirait Guénon, du Sanâtana Dharma :
« La première révélation de ce que l'homme doit connaître des lois qui régissent l'Univers et des destinées des êtres vivants a été donnée à des Rishis (Voyants), des sages des premiers âges. Leur enseignement a été ensuite transmis par des initiés, des hommes jugés dignes d'assurer la continuité de cette fonction essentielle, à travers toutes les mutations, les alternances de décadence et de progrès, les changements de religion, de langue, de société. Ceci n'exclut pas que des révélations ultérieures viennent parfois rafraîchir la mémoire des représentants de la Tradition ».
danielou-200po.jpgSur ces questions, alors que, sur d'autres points, Daniélou émet des réserves sur telle ou telle attitude, ou sur tel écrit de Guénon, l'accord entre les 2 auteurs est total, comme en témoigne cet extrait d'une lettre de R. Guénon à A. Daniélou, en date du 27 août 1947 :
« Je ne puis laisser dire que je suis “converti à l'Islam” car cette façon de présenter les choses est complètement fausse ; quiconque a conscience de l'unité essentielle des traditions est par là même inconvertissable à quoi que ce soit, et il est même le seul qui le soit ; mais on peut “s'installer”, s'il est permis de s’exprimer ainsi, dans telle ou telle tradition suivant les circonstances, et surtout pour des raisons d'ordre initiatique. J'ajoute à ce propos que mes liens avec les organisations ésotériques islamiques ne sont pas quelque chose de plus ou moins récent comme certains semblent le croire ; en fait ils datent de bien près de 40 ans... ».
Accord total, aussi, sur ce que Guénon nomme, dans Le Règne de la Quantité, la pseudo-initiation et la contre-initiation. Daniélou écrit, toujours dans ce témoignage du Dossier H : « Guénon, qui avait pris contact avec les diverses organisations initiatiques, les Rose-Croix, les Francs-maçons, les Théosophes, etc., en avait aussitôt avec justesse décelé les artifices. Certains de ces ouvrages, tels que Le Théosophisme, histoire d'une pseudo-religion, et L'Erreur spirite en sont une condamnation très bien documentée ». Daniélou ne cite pas Le Règne de la Quantité qui me semble, personnellement, un ouvrage de tout premier plan pour la quête du Sanâtana Dharma, du moins pour nous aujourd'hui, en Europe, qui cherchons à travers les livres et n'avons pas bénéficié d'un enseignement régulier dans une instance traditionnelle, comme ce fut le cas pour les 2 auteurs dont nous parlons. Le Règne de la Quantité consacre plusieurs chapitres aux organisations syncrétiques et aux sectes, permettant de mieux identifier les culs-de-sac et les pièges de l'entreprise anti-traditionnelle multiforme qui marque la dernière période du Kali Yuga.
Un vrai trousseau de clefs pour aujourd'hui que Le Règne de la Quantité et les Signesdes Temps, d'autant plus stupéfiant qu'il fut publié pur la première fois en 1946. Je me contenterai d'une brève citation, en rapport avec ce que disait Coomaraswamy tout à l'heure des chemins où se sont perdus tant d'artistes et de “poètes maudits”, ces martyrs météoriques de la modernité :
« Certains recherchent avant tout de prétendus “pouvoirs”, c'est à dire, en somme, sous une forme ou une autre, la production de phénomènes plus ou moins extraordinaires (..). Bien entendu, il ne s'agit aucunement ici de nier la réalité des “phénomènes” (..) ils ne sont même que trop réels, pourrions-nous dire, et ils n'en sont que plus dangereux (..). En général, l’être qui s'attache à ces choses devient ensuite incapable de s'en affranchir et d'aller au-delà, et il est irrémédiablement dévié (...). Il peut y avoir là une sorte de développement “à rebours” qui (...) éloigne toujours davantage de la réalisation spirituelle jusqu'à ce que l'être soit définitivement égaré dans ces prolongements inférieurs (…) par lesquels il ne peut qu'entrer en contact avec “l'infra-humain” ».
Il y a ainsi dans Le Règne de la Quantité des mises en garde nombreuses et détaillées contre l'action des organisations pseudo-traditionnelles, qui d'ailleurs se haïssent entre elles avec une virulence que Guénon compare aux haines qu'on observe entre des chapelles politiques rivales. J'emploie d'ailleurs à dessein l'expression “chapelle politique”, parce qu'à mes yeux, j'y reviendrai dans un instant, la politique et “l'actualité”, si importantes dans la vie de nos contemporains, me semblent fonctionner comme de véritables substituts du religieux. Daniélou, lui aussi, met en garde expressément contre toutes les formes d'enrôlement, particulièrement contre les pièges dans lesquels tombent en Inde les Occidentaux trop crédules, « parfois attirés par des sectes prétendues initiatiques ou enrôlés par des aventuriers pseudo-mystiques, en particulier certains Indiens qui diffusent un Védanta très simplifié et exploitent leur crédulité ». Il faut remarquer qu'A. Daniélou a cru nécessaire de revenir sur ces questions à la fin de sa vie, lors de la réédition du Chemin du labyrinthe, comme si les illustrations terrifiantes contenues dans « Le Maître des Loups » et « Le bétail des dieux » ne suffisaient pas à dessiller nos yeux occidentaux, imbus de positivisme et du sentiment de supériorité que décerne si prodigalement l'enseignement massifié de nos Universités. On pourra se reporter en particulier à ce que Daniélou écrit à propos de « Wolfgang », qui « confondit, comme beaucoup, la fumée du haschich et la spiritualité indienne » et se laissa entraîner par un de ces « ascètes hirsutes qui, par des pratiques liées au yoga, acquièrent d'étranges pouvoirs qui vont de la lévitation à l'hypnotisme, en passant par la vision à distance, l'insensibilité à la chaleur et au froid, l'envoûtement, l'asservissement de leurs victimes, etc. J'ai toujours eu très peur de ces êtres étranges dont le regard fulgurant fait aussitôt vaciller votre raison et votre volonté, et dont il vaut mieux s'éloigner sans délai ». On peut aussi faire son profit, dans ces ultimes pages d'A. Daniélou, des précisions qu'il apporte au sujet de prétendues activités politiques qu'il aurait eues en Inde, ou de sympathies politiques qui auraient été les siennes en Occident. On ne voit pas très bien pour quelle raison A. Daniélou, qui n'a jamais été effrayé d'assumer son anticonformisme, aurait dissimulé au soir de sa vie des appartenances ou des sympathies, dans une biographie qui est à mille lieues du nombrilisme mais dont la sincérité ne fait aucun doute. Contrairement à Julius Evola, mais proche encore sur ce terrain de Guénon, Daniélou s'est toujours tenu volontairement à l'écart de la politique. Le dernier texte du Chemin du labyrinthes'intitule symboliquement « le choix du libre arbitre » :
« Dans la société orthodoxe où je vivais (pendant la seconde guerre mondiale, à Bénarès) s'affrontaient subtilement et se mêlaient une orthodoxie védique sympathisant avec les théories aryennes du nazisme et une tradition shivaï'te profondément opposée aux aryens. Swamy Karpâtrî, dont je suivais fidèlement les enseignements, avait créé un mouvement culturel, le Dharma Sangh (association pour la défense des valeurs morales et religieuses) afin d'opérer un retour aux valeurs de la culture et de la société traditionnelle. Il critiquait les idées socialistes représentées par le Congrès national de Gandhi et Nehru mais aussi les réformateurs pseudo-traditionnels comme Aurobindo ou Tagore, qui prétendaient revenir à une tradition idéalisée, mais étaient très imbus d'idées occidentales. Par ailleurs, Karpâtrî était très hostile aux idées du Rashtrya Svayam Sevak Sangh (association pour la défense des valeurs nationales) qui préconisait des méthodes inspirées du fascisme dans la lutte contre le Congrès et les idées modernistes (...). De par mon opposition à la domination anglaise et mon attachement à l'Inde, j'avais des rapports très proches avec les dirigeants du mouvement indépendantiste, avec Nehru et sa famille et aussi avec la célèbre poétesse Sarojini Naïdu, tous membres influents du Congrès (…). À aucun moment et en aucune façon je n'ai voulu me mêler des mouvements politiques, ni d'un côté ni de l'autre ».

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On ne saurait être plus net, surtout en 1992, à l'ultime page de son autobiographie. Et je voudrais à présent citer presque intégralement la fin de ce « choix du libre arbitre », non par une sorte de culte, que Daniélou eût été le premier à tourner vertement en ridicule, mais parce qu'il serait vain de vouloir rivaliser avec lui dans la concision, la précision du détail, et l'adéquation avec ce thème de la recherche du Sanâtana Dharma que j'ai essayé d'aborder aujourd'hui :
« Je n'ai jamais voulu m'affilier à aucune secte religieuse ou croyance, jamais voulu perdre mon libre arbitre. Mais, frondeur de nature, j'ai toujours tendance à m'opposer à l'idéologie dominante, à contrecarrer ce que les gens prennent pour des vérités établies, à toujours remarquer que l'enfer est pavé de bonnes intentions, à penser que la remise en question de toute affirmation est le seul moyen de faire évoluer la connaissance. La discussion est un élément de recherche et non point d'assertion ».
C'est bien dans le domaine des prétendus “débats” politiques que la discussion est vraiment stérile, la règle du jeu consistant à ne pas écouter l'adversaire, à l'empêcher de parler, les moyens les plus malhonnêtes n’étant pas les moins indiqués. Dans notre société, où il semble que la parole soit avant tout un pouvoir qui se nourrit de lui-même, les marionnettes-héros de la télévision rivalisent avec celles de la politique dans une sorte de clôture narcissique sur le vide. Penser la discussion comme un élément de recherche légitime à l'époque où le dogme du politiquement correct la considère comme un indice d'éducation inconvenante, ne peut qu'attirer des représailles de la part des tenants de la langue de bois. Cela n'a pas manqué pour A. Daniélou, à propos de qui on affirme dur comme fer dans les officines indianistes et les parkings de méditation des ashrams qu'il fut au minimum, sinon le fondateur, du moins l'idéologue du RSS qu'il citait tout à l'heure. Mais continuons à lui laisser la parole :
« Le paradoxe, la remise en question des évidences qui semblent les mieux établies est un exercice salutaire, le seul capable défaire avancer les choses et de ne point rester figé sur des dogmes. Ce qui m'a fait souvent attribuer une appartenance à des théories auxquelles je ne souscris en aucune façon. La liberté d'esprit a difficilement sa place dans une société infectée par des conflits et des appartenances idéologiques également arbitraires ».
Il me semble que le propos ne peut pas être plus clair au sujet des prétendus engagements politiques d'A. Daniélou. À propos du rôle de gourou qu'il s'est toujours refusé à tenir, il n'est pas indifférent que plus de la moitié du dernier paragraphe du Chemin du labyrinthe, dans un passage qui suit immédiatement celui que nous venons de lire, lui soit consacré : 
« Je ne suis pas prophète, d'ailleurs ma barbe se refuse à pousser. Mon âge fait que les gens attendent de moi des directives ou des oracles, ce à quoi je me refuse ; je ne suis pas un guru. Je continue toujours à chercher à comprendre le mystère du monde et, pour cela, je suis prêt, chaque jour, à tout recommencer, à réexaminer mes convictions, à rejeter toute croyance, à m'avancer seulement dans la direction du savoir qui est le contraire de la foi. Ma méfiance reste entière vis-à-vis de tout rite ou cérémonie qui m'apparaît comme du théâtre dès qu'il y a des témoins. Je me refuse à faire une puja pour des dévots toujours fanatiques (nous dirions aujourd'hui des “fans”) ».
On a trop peu souvent l'occasion de saluer la probité intellectuelle pour ne pas être heureux que, dans des temps comme les nôtres, il reste de ces esprits présentant ce curieux mélange de goût du paradoxe, de liberté, de souveraineté, en même temps que d'une forme d'humilité devant la connaissance, et de distance un peu moqueuse vis-à-vis de ce qui occupe tant d'occidentaux depuis Descartes : leur propre ego. Mais il ne faut pas croire que cette légèreté de bonne compagnie ait été synonyme de superficialité ou de scepticisme. Daniélou nous le rappelle dans la péroraison de son texte que je vais à présent citer jusqu'à la fin, lui laissant d'une certaine façon le dernier mot avant de conclure :
« La seule valeur que je ne remets jamais en question est celle des enseignements que j’ai reçus de l'hindouisme shivaïte qui refuse tout dogmatisme, car je n'ai trouvé aucune forme de pensée qui soit allée aussi loin, aussi clairement, avec une telle profondeur et une telle intelligence, dans la compréhension du divin et des structures du monde. Aucune forme de pensée n'approche de près ou de loin cette merveilleuse recherche qui nous vient du fond des âges. Aucune des idéologies, aucune des théories qui divisent le monde moderne ne me semble mériter que je m'y associe, que j'en prenne la défense. Elles me paraissent puériles, quand elles ne sont pas simplement aberrantes ».
Conclusion
Le chemin pour retrouver une sagesse oubliée n'est pas toujours facile à suivre, mais il est à présent bien tracé.
« Dans le monde moderne où les voies de la transmission normale de la connaissance ésotérique sont fermées pour la plupart, les livres jouent un rôle très différent de celui qu'ils jouaient dans des circonstances normales, de sorte que certains enseignements jusque là préservés sous forme orale se mirent à circuler sous forme écrite, constituant ainsi véhicules d'enseignement et de guidance pour ceux qui se trouvent privés de tous les autres moyens. Cette manifestation compense la disparition des voies traditionnelles de transmission de la connaissance, au moins dans son aspect théorique, sans que cela implique que cette situation elle-même puisse entraîner la manifestation de l'intégralité de la connaissance traditionnelle dans les livres sous une forme facilement accessible à tous ».
Pour l'approche intellectuelle de cette sagesse, les langues occidentales, requalifiées métaphysiquement, en quelque sorte, par tous ces auteurs extrêmement attentifs à la précision du vocabulaire, disposent à présent d'un grand nombre de textes fondamentaux, aisément accessibles. S'agissant du désir de “pratiques”, en revanche, on peut noter les mises en garde répétées de tous ces auteurs. On a oublié dans notre monde profane combien toutes les sociétés traditionnelles étaient attentives aux questions de purification, de qualification, aux instants favorables et défavorables, aux précautions pour neutraliser les forces dangereuses, grâce à des “techniques de pointe”, si l'on ose dire, dont l'origine et l'inspiration, analysées comme “primitives” par les ethnologues positivistes, sont toujours présentées comme “non-humaines”.
La recherche du savoir est toujours légitime, mais l'utilisation de ce savoir pour jouir d'un pouvoir est un obstacle, une disqualification dans cette sorte de jeu de l'oie qui consiste à retrouver patiemment le chemin du divin. Et quant à l'incorporation effective dans une tradition régulière, ce qui peut être également une aspiration légitime, les auteurs traditionnels sont encore unanimes : la première règle consiste à accepter de devenir ce que l'on est, accepter sa naissance hic et nunc, car si l'esprit souffle où il veut, on sait qu'invariablement, du point de vue initiatique, « c'est en réalité la voie qui choisit l'homme et non l'homme qui choisit la voie ».
Il semble qu'au fur et à mesure que le monde moderne descend plus bas dans l'inharmonie et l'empoisonnement de la planète, des lumières apparaissent, différentes comme sont différentes les voies. Les auteurs traditionnels du XXe siècle ont en commun des connaissances immenses et des clés pour l'interprétation des grands symboles qui soudain se répondent et correspondent dans une unité éclatante — et non plus ténébreuse comme chez Baudelaire. Ils ont en même temps des styles très différents et même des formulations qui pourraient sembler contradictoires : Nasr se réfère au Dieu de l'Islam et du Christianisme, alors que le mot “Dieu” est beaucoup moins prononcé dans l'œuvre de Guénon ; Coomaraswamy traduit “Deva” par “Anges”, alors que Daniélou, qui a consacré un ouvrage entier à la réhabilitation intellectuelle du polythéisme, parle évidemment de Vishnou et de Shiva comme d'autant de Dieux ou d'aspects du divin.
Nous avons donc de quoi lire, relire, débrouiller l'écheveau. La floraison d'ouvrages traditionnels, dont l'authenticité ne fait aucun doute et qui s'épanouissent depuis le début du XXe siècle en Occident, compense jusqu'à un certain point l'absence à peu près certaine de voie initiatique dans le Catholicisme, l'absence de cultes maintenus vivants autour des Déesses et des Dieux gréco-romains. Rien ne nous empêche de vénérer les Principes organisateurs de l'harmonie du monde, de bâtir des enclaves d'harmonie, modestes mais incommensurables, d'attendre la lumière au fond de notre cœur.
Jean-Louis Gabin, Pondichéry, Shivaratri 2001. 
Source : Antaios, revue d'études polythéistes fondée en 1959 par Mircea Eliade et Ernst Jünger.

vendredi, 24 octobre 2014

Alain Daniélou’s Virtue, Success, Pleasure, & Liberation

Alain Daniélou’s Virtue, Success, Pleasure, & Liberation

By Collin Cleary 

Ex: http://www.counter-currents.com

Alain Daniélou
Virtue, Success, Pleasure, and Liberation: The Four Aims of Life in the Tradition of Ancient India [2]
Rochester, Vermont: Inner Traditions, 1993.

danndex.jpgOne hears a great deal today about “multiculturalism,” and the multicultural society. We (i.e., we Americans) are told that ours is a multicultural society. But, curiously, multiculturalism is also spoken of as a goal. What this reveals is that multiculturalism is not simply the recognition and affirmation of the fact that the U.S.A. is made up of different people from different cultural backgrounds. Instead, multiculturalism is an ideology which is predicated on cultural relativism. Its proponents want to convince people that (a) all cultures are equally good, rich, interesting, and wholesome, and that (b) a multicultural society can exist in which no one culture is dominant. The first idea is absurd, the second is impossible.

The apostles of multiculturalism are moved less by a genuine desire to “celebrate diversity” than by a hatred for Northern European culture, which is the semi-official, dominant culture of America. Indeed, multiculturalists generally nurture the most naive and simplistic ideas of what a culture is. Their conception of “culture” is fixated at the perceptual level: culture is costume,music, dance, decoration, food. What is essential to culture, however, is a certain Weltanschauung: a view of the world, and of human nature. It is in their response to these world views that multiculturalists reveal their true colors, for they tolerate and permit only those elements of a culture’s world view that do not conflict with liberal ideology.

Out of one side of their mouths, the multiculturalists tell us that one cannot judge a culture, that morality is culturally relative, that cultures are not better or worse, just “different,” and that we must revel in these differences. Thus, the English do not drive on the “wrong” side of the road, merely the left side. But when it’s not a matter of traffic laws, but a matter of severed clitorises, then the other, louder side of the multiculturalists’ mouths open, and they tell us that this sort of thing isn’t just different, it’s evil. In addition to this, one also sees that multiculturalism involves a relentless trivialization of important cultural differences. Thus, college students are encouraged to see religion almost as a matter of “local color.” Isn’t it wonderful that the Indians cook such spicy food, and worship such colorful gods! Isn’t it all terribly charming? They are further encouraged to view religion as a thoroughly irrational affair. Rather than encouraging an appreciation for different faiths, what this produces is a condescending attitude, and resistance to taking the claims of religion seriously when they conflict with the “rational” agenda of modern liberalism.

Indeed, multiculturalism is so anti-cultural that one is tempted to see behind it an even deeper, more sinister agenda. Perhaps the whole idea is to deliberately gut the world’s cultures, reducing their differences to matters of dress and cuisine, and to replace those earthborn guts with a plastic, Naugahyde culture of secularism, scientism, and egalitarianism. Why? Because real, significant cultural differences make it very hard for our corporations to do business overseas and to sell their wares. Solution: homogenization masquerading as “celebration of diversity.” The multiculturalists are right when they declare that de facto, the United States is a multicultural society. But there has never been a multicultural society in the history of the world in which there was not one dominant culture which provided a framework allowing the others to co-exist. To the multiculturalist, the unacknowledged framework is modern liberalism. I will assume that I do not have to rehearse for my readers the many arguments for why modern liberalism is untenable as a long-term societal framework.Where should we look, then, for a framework for a multicultural society? Why not look to the Indian caste system? It was the caste system that allowed Aryan and non-Aryan to co-exist peacefully in India for centuries.

The liberals will immediately object that the caste system is oppressive and unjust. In Virtue, Success, Pleasure and Liberation, however, Alain Daniélou argues that the caste system is actually a supremely just and peaceful arrangement. It is just because it is built on a recognition of real human difference; a “celebration of diversity,” if you will. Aristotle held that justice is treating equals equally, and unequals unequally. If people are not the same, then it is a mistake to treat them as if they are. The caste system is built on the idea that some human beings are born to work, others to fight and lead, and others to pray. The caste system gives to each human being a place, a community, a code of ethics, and a sense of identity and pride. Daniélou points out that although the system involves hierarchy, each level of the hierarchy is regarded as intrinsically valuable and as essential. Each plays a role that is regarded as important and indispensable. Thus, it is the caste system which truly affirms that different groups are merely different, not better or worse.

Is Daniélou whitewashing the caste system? Consider the words he quotes from the Mahabharata: “There is no superior caste. The Universe is the work of the Immense Being. The beings created by him were only divided into castes according to their aptitude.” But what of individuals born to the wrong caste? For example, what of a child born to the merchant class who shows aptitude to be a priest or scholar? Such things happen. Daniélou tells us that exceptional individuals are allowed to live “outside” the caste system, and are accepted as valuable members of the society as a whole. Modern society is structured on the premise that everyone is exceptional and can make up his mind what he wants to do. Given that sort of freedom, most people get lost — as witness the modern phenomenon of the “slacker,” or the flotsam and jetsam going in and out of psychiatrists’ offices every day.

Despite what I have said, this book is not a treatise on the caste system, but on the four things that all human lives must possess or achieve in order to be complete. In discussing virtue, success, pleasure, and liberation, Daniélou quotes extensively from ancient Indian texts, offering us an abundance of excellent advice about how to understand life and to live well. Indeed, this is really a book about how to lead a truly human life. Daniélou places the four aims in a cosmic context, showing how the same fourfold division is present in all levels of reality. It is present, of course, in the four castes (worker/artisan, producer/merchant, warrior/aristocrat, priest/scholar), and in the four stages of biological development (childhood, youth, maturity, old age), the four seasons, the four elements, the four races of humanity (black, yellow, red, white), the cycle of ages (yugas), the four bodily functions (digestion, assimilation, circulation, excretion), and the four points of the compass (in this order, significantly: south, east, west, north).

This is an excellent companion volume to Daniélou’s The Myths and Gods of India [3].

Source: Tyr, vol.. 1 (Atlanta: Ultra, 2002).

 


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[2] Virtue, Success, Pleasure, and Liberation: The Four Aims of Life in the Tradition of Ancient India: http://www.amazon.com/gp/product/B005IQ6AVY/ref=as_li_tl?ie=UTF8&camp=1789&creative=390957&creativeASIN=B005IQ6AVY&linkCode=as2&tag=countecurrenp-20&linkId=2SMLM6Q3BGWZDR7W

[3] The Myths and Gods of India: http://www.amazon.com/gp/product/B005PQUZ3G/ref=as_li_tl?ie=UTF8&camp=1789&creative=390957&creativeASIN=B005PQUZ3G&linkCode=as2&tag=countecurrenp-20&linkId=7R45BK5EQM4HKVC3

Alain Daniélou’s The Myths & Gods of India

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Alain Daniélou’s The Myths & Gods of India

By Collin Cleary

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Alain Daniélou
The Myths and Gods of India [2]
Rochester, Vermont: Inner Traditions, 1991.
(Originally published as Hindu Polytheism by Bollingen Foundation, New York, 1964.)

Typically, those who profess an interest in what might be called “Indo-European spirituality” gravitate toward either the Celtic or Germanic traditions. The Indian tradition tends to be ignored. In part, this is because present-day Indians seem so different from us. We think of their culture and philosophy as “Eastern,” as alien. Physically, the Indians look very different from those of European descent (though higher caste Indians tend to look very European, right down to lighter skin and hair, and sometimes blue eyes). But if we wish to rediscover the religion and traditions of our ancestors, what better place is there to begin than with India? The oldest Indo-European texts are the Vedas, after all. To be sure, it is hard to separate what comes from the ancient Aryans in Indian religion, myth, and mysticism, and what was contributed by the indigenous peoples conquered by the Aryans. But the same problem exists with respect to the Celtic and Germanic traditions. In addition, we know far more about the culture and religion of the ancient Aryans who invaded India, than we do about the culture and religion of the Celts and the Vikings. For one thing, more ancient texts survive in India. Therefore, anyone wishing to re-construct the “old ways” must become deeply immersed in all things Indian.

It is a cliche to state this in a review, but I write the following with total sincerity: if you read only one book on Hinduism, it must be Daniélou’s Myths and Gods of India. Indeed, it is hard to imagine why one would need to read any other. Danielou’s account of Hinduism is exhaustive, profound, and detailed. The book contains, first of all, cogent arguments on behalf of polytheism.

It details the Indian cosmogony and cosmology; the nature of Space, Time, and Thought; the nature of Brahman and Maya. Daniélou gives a complete description of every major Hindu divinity in terms of his or her function, myths, and symbolism. He details the minor gods and genii. He discusses the theory behind Mantras and Yantras. There is even extensive coverage of ritual, and the manner in which the gods must be worshiped. Alain Daniélou was born in 1907 in Paris. He was a true Renaissance man, trained in music, painting, and dance. He gave recitals and exhibited his paintings. Daniélou was also an avid sportsman: a canoeing champion, and an expert race-car driver.

He was also homosexual. Daniélou and his gay lover ventured to India, traveling around in a deluxe, Silverstream camper imported from southern California, photographing erotic sculpture. They later settled down in a Maharajah’s estate on the banks of the Ganges and devoted themselves to Sanskrit, Hinduism, music, and entertaining. Daniélou gradually “went native” and stayed in India many years. In time, he became known throughout the world as an authority on Indian music and culture. He published works dealing with Hindu religion, society, music, sculpture, architecture, and other topics. It was Daniélou, more than anyone else, who was responsible for popularizing Indian music in the West (among other things, he was the “discoverer” of Ravi Shankar). Daniélou died in 1994.

The Myths and Gods of India is a delight to read, but it can also be treated as a reference work for those needing a clear and accurate account of various gods or Hindu religious concepts. For the student of Inda-European culture, the book is a treasure trove. Indeed, those who are familiar with the Inda-European comparativist school of Georges Dumézil, Jaan Puhvel, and others, will get the most out of this book. I will offer a few brief examples here.

Daniélou writes on page 27 that “Human beings, according to their nature and stage of development, are inclined toward . . . different aspects of the Cosmic Being. Those in whom consciousness is predominant worship the gods (deva); those in whom action or existence predominates worship genii (yaksha) and antigods (asura); and those in whom enjoyment or sensation predominates worship ghosts and spirits (bhuta and preta).” This suggests, of course, the Inda-European tripartition identified by Dumézil. On page 66 we learn that Soma was “brought to earth by a large hawk,” just as Odin, in the form of an eagle, brought mead to the JEsir. On page 87 we are told that “The earth is also represented as a goddess, or as a cow that feeds everyone with her milk. She is the mother of life, the substance of all things.” What can this remind us of, except the Norse Audumla?

There also seem to be parallels between Agni (the god of fire) and Loki. Like Loki, Agni is an outcast among the gods. Daniélou tells us further that, “The fire of destruction, Agni’s most fearful form, was born of the primeval waters and remains hidden under the sea, ever ready to destroy the world” (p. 89). This is reminiscent of the Midgard Serpent, the progeny of Loki. Page 151:
“When Vishnu sleeps, the universe dissolves into its formless state, represented as the causal ocean. The remnants of manifestation are represented as the serpent Remainder (Sesa) coiled upon itself and floating upon the abysmal waters.”

Daniélou tells us (p. 92) that “the sun . . . is envisaged [by the Hindus] under two aspects. As one of the spheres, one of the Vasus, the physical sun is the celestial form of fire, of agni. As the source of light, of warmth, of life, of knowledge, the solar energy is the source of all life, represented in the twelve sons-of-the-Primordial-Vastness (Adityas), the twelve sovereign principles.” In Futhark (pp. 51-52), Edred Thorsson tells us that “The sun was known by two special names in the North . . . Sol represents the phenomenon, while sunna is the noumenon, the spiritual power residing in the concept.” Also, the “twelve sons-of-the-Primordial-Vastness” immanent within the solar energy must remind us of the twelve sig-runes that make up the Wewelsburg “sun-wheel” of Karl Maria Wiligut.

Page 99: “When the gods were receiving the ambrosia of immortality, the Moon [Soma; equivalent to Mead] detected the anti-god Rahu disguised as a god. Because of the Moon Rahu had to die, but although his head was severed from his body, he could not truly die, for he had tasted the ambrosia. His head remained alive.” Mimir?

Page 103: “Rudra, the lord of tears, is said to have sprung from the forehead of the Immense-Being (Brahma) and, at the command of that god, to have divided himself into a male form and a female form . . . “Athena?

Page 103: “The Maruts (immortals) are a restless, warlike troupe of flashy young men, transposition in space of the hordes of young warriors called the marya (mortals). . . . They are the embodiment of moral and heroic deeds and of the exuberance of youth.” Maruts = Einherjar; Marya = Indo-European Männerbünde. Page 104: “The Maruts are the friends of Indra, the wielder of the thunderbolt . . .” Thor? Page 110: Indra’s thunderbolt is “shaped like a mace … ”

Page 111: “Indra had been the deity worshiped among the pastoral people of Vraja.” Again, just as Thor was.

Page 118: Varuna “is the ruler of the ‘other side,’ of the invisible world.” He is “said to be an antigod, a magician.” Odin? Page 119: “He catches the evildoers and binds them with his noose.” Criminals sacrificed to Odin were hung. Varuna also “knows the track of birds in the sky,” just as Odin knows the track of Huginn and Muninn.

Page 132: The god of death is named Yama, which means “Twin” (Ymir). “Yama’s brother is the lawgiver, Manu, who shares with him the title of progenitor of mankind.” Yama “owns two four-eyed dogs with wide nostrils . . . They watch the path of the dead.” What can this remind us of except the Greek hellhound, Cerberus?

Page 138: “In contrast to the gods, the antigods [asura] are the inclinations of the senses which, by their nature, belong to the obscuring tendency, and which delight in life, that is, in the activities of the life energies in all the fields of sensation.” This is an accurate description of the Norse Vanir. Asura is cognate with Aesir, so, oddly enough, the term shifts meaning either in the Norse or the Indian tradition.

Page 159: The four ages (yugas) are represented as white (the golden age), red, yellow, and black (the dark age). The stages of the alchemical process (as represented in the West) are black, white, yellow, and red.

Pages 243-45 detail the Upanishadic account of creation out of the primal man Purusha: “He desired a second. He became as large as a woman and man in close embrace. He divided himself into two. From him arose a husband and a wife. Hence it is that everyone is but half a being. The vacant space is filled by a wife.” This is extraordinarily similar to the account of the creation of
men and woman given by Aristophanes in Plato’s Symposium. The world is then created out of Purusha’s body-just as the world is created out of Ymir’s body in Norse myth. “The virile member was separated; from this virile member came forth semen and from semen the earthly waters.” This is identical to the account of the creation of the ocean in the Greek myth of the sacrifice of Ouranos by Kronos.

The account of the hero Kumara/Skana (pp. 297-300) is strikingly like the saga of Sigurd, and also similar in some respects to the Parzival of Wolfram von Eschenbach. The “essences” (apsaras; pp. 304-305) are “water nymphs, eternally young women who are the courtesans and dancers of heaven.” Rhine Maidens? “They are depicted as uncommonly beautiful, with lotus eyes, slender waists, and large hips. By their languid postures and sweet words they rob those who see them of their wisdom and their intellect.” Sirens? “One can master them by stealing their clothes while they bathe. They choose lovers among the dead fallen on the battlefield.” Valkyries?

The above merely scratches the surface of this immensely rich text, which demands careful study and multiple readings.

 


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