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samedi, 13 octobre 2018

En souvenir d’Yvan Blot

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En souvenir d’Yvan Blot

Par Robert Steuckers

C’est dans un article signé Michel Norey, dans le tout premier numéro de la revue Nouvelle école, que j’ai eu entre les mains, le n°19 (1972), que j’ai abordé les écrits d’Yvan Blot. Cet article traitait de l’histoire des sciences économiques et montrait que les doctrines au pouvoir en Europe, en ce temps de guerre froide, n’étaient pas les seules possibles. Des hétérodoxies économiques, aux possibles féconds, attendaient de se déployer, du moins si des volontés politiques alternatives se manifestaient et forçaient le destin. De cet article, long et fouillé, j’ai toujours retenu trois leçons, et, aujourd’hui, trois jours après le décès d’Yvan Blot, je relis avec émotion les phrases que j’ai soulignées jadis pour les imprégner dans ma mémoire. Elles me rappellent les sources premières de mon regard alternatif sur les questions économiques : 1) « Norey » rendait hommage à Keynes mais formulait quelques critiques, d’où je n’ai jamais rejeté entièrement Keynes à l’ère fatidique où les médias nous poussaient à le rejeter en bloc et avec hystérie à l’instar de Madame Thatcher ; 2) « Norey » soulignait l’importance de l’innovation chez Schumpeter, seule force qui justifiait partiellement le capitalisme car tout capitalisme non innovateur est par définition parasitaire ; 3) « Norey » infléchissait nos réflexions vers l’idée d’indépendance nationale ou continentale, présente chez un penseur, aujourd’hui trop oublié, François Perroux, analyste des structures économiques et de leur histoire, interdisant, par cette méthode même, d’appliquer des doctrines qui se veulent « universelles ».

Plus tard, le livre intitulé Les racines de la liberté a retenu toute l’attention de notre groupe, surtout parce qu’il évoquait les sources islandaises, scandinaves et helvétiques de toute véritable démocratie, permettant ainsi d’argumenter solidement dans le débat sur le fédéralisme ou le confédéralisme en Belgique, qui faisait rage à l’époque où l’on s’apprêtait à modifier la constitution dans un sens fédéral.  Yvan Blot, sur base de cette histoire et de cette anthropologie de la démocratie en Europe, surtout en Europe du Nord et du Centre, est devenu un brillant avocat de la « démocratie directe », antidote nécessaire à toutes les dérives partitocratiques.

yb-polviv.jpgNotre groupe bruxellois a bien entendu suivi les travaux du Club de l’Horloge, structure métapolitique visant à régénérer les débats politiques en France, sans pour autant oublier les modèles extra-hexagonaux capables de modifier la donne dans une cinquième République, dont la constitution demeurait jacobine mais où son fondateur avait évoqué, avant son retrait et son trépas, la possibilité de créer un Sénat des Régions et des Professions, pour empêcher les partis de phagocyter les saines énergies nationales.

Dans les années 90, mon vieil et cher ami Jean Eugène van der Taelen (1917-1996) entend faire feu de tout bois pour provoquer à terme un rejet de la sordide partitocratie belge, dont le dévoiement s’accentuait au fil des ans. Jean van der Taelen avait théorisé l’idée d’une DDD (= « Démocratie Directe Décisionnaire ») dont il avait espéré faire la doctrine d’un parti anti-fiscaliste des petits indépendants, l’UDRT (« Union Démocratique pour le Respect du Travail »), dirigé par Robert Hendrick, Pascal de Roubaix et Jean-Pierre de Clippele. Comme la plupart de ces partis, aux intentions éminemment sympathiques, l’UDRT capotera assez vite après ses premiers succès électoraux. Jean-Pierre de Clippele passera au parti libéral, dont il sera Sénateur, tout en créant une « Ligue des Contribuables », dont la cheville ouvrière n’était autre que Jean E. van der Taelen. C’est dans ce cadre que Jean van der Taelen finira par découvrir Yvan Blot car il était un fervent lecteur des travaux du Club de l’Horloge. Le courant entre ces deux hommes, pourtant bien différents et issus de contextes politiques très hétérogènes, est passé très vite : ils sont devenus d’excellents amis, qui se voyaient souvent, d’autant plus qu’à l’époque, Yvan Blot exerçait son mandat de député européen et séjournait souvent à Bruxelles, à l’Hôtel Métropole.

Jean van der Taelen décide alors de créer un pendant belge du Club de l’Horloge qu’il baptise « Club du Beffroi », les beffrois étant les symboles des libertés communales et populaires depuis l’âge d’or de notre moyen-âge. C’est ainsi que j’ai eu l’occasion de rencontrer souvent Yvan Blot, de deviser longuement avec lui, notamment en dégustant du caviar et du saumon  arrosé l’aquavit à la terrasse du Métropole et d’accompagner parfois Yvan Blot sur le chemin du retour à Paris, quand le voyage ferroviaire durait encore trois bonnes heures. Il me fit ainsi part de sa passion pour la flûte traversière, un instrument qui l’accompagnait, précieusement rangé dans sa petite mallette de cuir.

Le « Club du Beffroi » n’eut pas le succès escompté car la maladie rongeait déjà lentement Jean van der Taelen. Il faut ajouter aussi, ici, qu’Yvan Blot avait sorti un ouvrage très original en 1992, Baroque et politique, dont le cœur évoquait une civilisation baroque battue en brèche par le rationalisme violent de la révolution et du jacobinisme. Pour Blot, cette civilisation baroque est celle des « harmonies spontanées », leçon que j’ai retenue dans un coin sombre de ma cervelle car je compte travailler sur le 17ème siècle espagnol en nos régions, où la culture était à l’enseigne du baroque et du picaresque. Dans l’une de nos conversations, Blot, qui savait toujours faire la part des choses et ne tranchait jamais de manière impavide et sotte, avait retenu de Hayek, non pas les terribles simplifications qu’en avait déduites Margaret Thatcher, mais l’idée de « catalaxie », qui est bien plus subtile que le slogan du « laisser faire, laisser passer » des libéraux. La « catalaxie » hayekienne était pour lui un avatar, peut-être trop intellectualisé, des « harmonies spontanées » des penseurs baroques des 17ème et 18ème siècles. Enfin, autre grand mérite de Blot : avoir convaincu les Presses Universitaires de France de traduire et de publier quelques travaux de l’anthropologue allemand Arnold Gehlen, toujours inconnu en dehors de l’espace linguistique germanique. Blot a fait là haute œuvre utile pour l’histoire de la pensée.

Fin 1995, la santé de Jean van der Taelen périclite de manière alarmante : il est terriblement amaigri, il doit subir des transfusions sanguines toutes les semaines et ne se fait plus d’illusions : à un ami, à qui il a rendu visite pour les fêtes de fin d’année, il déclare, « Mon cher Jean (c’était un autre Jean ), nous ne nous reverrons plus qu’au Ciel ! ». Début janvier 1996, Jean van der Taelen meurt et c’est avec Yvan Blot que j’assiste à ses funérailles à la Chapelle de l’Abbaye de la Cambre, face à un énorme vitrail moderne mais figuratif, représentant la Sainte-Trinité.  

YB-athena.jpgParmi les manifestations ou happenings politiques où je me suis retrouvé aux côtés de Blot, il y eut, juste après les obsèques de Jean van der Taelen, un meeting organisé à Drogenbos par Marguerite Bastien, ancienne juge au Tribunal du Travail de Bruxelles, qui s’était jetée dans la politique (contestatrice du système en place), tant elle était dégoûtée par la déliquescence son ministère, alors que ses racines politiques initiales se situaient dans une extrême-gauche que l’on qualifierait aujourd’hui de festiviste ou de sociétale.  Yvan Blot a pris la parole dans cette auberge de Drogenbos, défendant les racines grecques de la civilisation européenne, amorce première de son tropisme grec des deux premières décennies du 21ème siècle. Le Comte Jean de Marcken de Merken, qui assistait à la conférence, à la même table que moi, lui, disait préférer les racines romaines. Il y eut ensuite, un mois plus tard, une conférence de presse, toujours cornaquée par Marguerite Bastien, où toute la clique des journalistes « chiens de garde du système » (le mot est de Serge Halimi) était présente, prête à nous bouffer tout cru. A la tribune, j’étais à l’extrémité gauche, avec le Baron François van Caloen (un ancien du Bataillon de Corée) et Blot à l’extrémité droite (avec Marguerite Bastien). Nous étions les premiers visés : un journaliste de la RTBF, au patronyme ibérique, me déclare tout de go qu’il sera  « très méchant ». Il annonce l’hallali. En face de moi, le journaliste néerlandais Rinke van den Brink qui avait publié un vaste ouvrage sur les « droites extrêmes » deux ans plus tôt, un ouvrage tout à fait courtois et parfaitement documenté dont la traduction française portait un titre très différent de l’original : L’Internationale de la haine. C’est en partie grâce à cet ouvrage que j’avais pu, en 1994, confectionné sous la houlette de Roland Gaucher un numéro entier du Crapouillot, titré « Les nouveaux nationalistes ».  Face à Blot, l’inénarrable, l’omniprésent, l’ubiquitaire, l’incontournable Manuel Abramowicz. Rinke van den Brink, incité par le journaliste d’origine espagnole, ouvre le feu en ma direction : comme j’avais lu très attentivement son livre, je lui ai rétorqué qu’il avait dit exactement la même chose que les paroles, textes ou attitudes qu’il me reprochait incongrûment parce que je n’avais nullement l’intention de faire de la politique : j’étais là parce que Blot y était et parce que j’estimais que je devais rendre hommage à la touchante fidélité qu’il avait montré à l’égard de Jean van der Taelen, en assistant à la messe de son enterrement. Le pétard de van den Brink était mouillé, il n’a pas explosé. L’Ibère, par voie de conséquence, n’a pas pu être « très méchant » : frustration. Pauvre garçon. Il range sa caméra. Abramowicz ouvre alors le feu contre Blot en posant la question suivante : « Quelles ont été vos sources d’inspiration en rédigeant les statuts du FN ? ». Blot a eu beau jeu de répondre : « J’ai tout simplement repris ceux du RPR (de Chirac) ». Deuxième pétard mouillé lancé par ceux que nous nommions « la bande à Bouboule ». Mais, malgré cela, une nouvelle question bafouillée et incohérente de l’incontournable Manu la Gaffe : « Monsieur Blot, pourquoi rédigez-vous des statuts démocratiques alors que vous êtes contre la partiCRASSIE ? ». Blot était un peu tarabusté par la nature imbécile de la question. Le pauvre Manu n’y pouvait rien : on ne lui a jamais appris la rhétorique car le brave garçon est assistant social. Je saisis la parole et pose à mon tour une question au grand bachi-bouzouk de notre carnaval « antifasciste » bruxellois : « Pourquoi, Monsieur Abramowicz, utilisez-vous un vocabulaire d’extrême-droite ? En sciences politiques, on dit ‘partitoratie’ et non ‘particrassie’ comme dans les pamphlets de l’idéologie que vous prétendez combattre. Mimétisme ? ». Silence ennuyé de tous, à commencer par le brave van den Brink. Le débat fut clos. Ils quittèrent tous la salle, avec de longues tronches dépitées.

YB-RussiePoutine.jpgOn le voit : il y avait moyen de bien s’amuser dans les années 1990 à Bruxelles, aux dépens des plus sots et des plus caricaturaux de nos ennemis. Plus tard, j’ai suivi, de trop loin malheureusement, l’infléchissement hellénique de la pensée d’Yvan Blot, avec la création de son « Institut néosocratique », où il a eu l’intelligence politique et métapolitique de nous exhorter à relire attentivement Aristote, à renouer avec son réalisme politique, à nous replonger dans L’Ethique de Nicomaque, voire à réhabiliter la figure du Spoudaios, chef charismatique faisant l’équilibre entre la raison, le bon sens et l’éthique de la responsabilité. Personnellement, je pense retrouver le Spoudaios dans la figure du Caïd de la Citadelle de Saint-Exupéry. Mais le Spoudaios, pour Blot, n’allait être rien moins que le Président russe, Vladimir Poutine.

Au bout de la trajectoire intellectuelle et métapolitique de Blot, sans plus jamais nous être rencontrés, hélas, le nombre des accords entre nous a été véritablement maximisé. Au tropisme hellénique et aristotélicien s’est ajouté un tropisme russe, illibéral, qui ne pouvait que rencontrer ma pleine approbation. Yvan Blot participait aux initiatives de Iure Rosca en Moldavie, lequel venait, juste avant la mort trop prématurée de notre maître baroque et aristotélicien, de faire traduire deux de ses ouvrages (cf. l’hommage que lui rend Iure Rosca sur http://euro-synergies.hautetfort.com ).

Pour toutes ces impulsions, pour toutes ces convergences, pour tous ces souvenirs, merci, Yvan Blot.

Robert Steuckers.

 

 

Ivan Blot : 50 ans de combat intellectuel

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Ivan Blot : 50 ans de combat intellectuel

par Jean-Yves Le Gallou

Ex: http://www.bvoltaire.fr

Ivan Blot est mort mercredi 10 octobre.

vendredi, 12 octobre 2018

In Memoriam Ivan Blot

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In Memoriam Ivan Blot

Ex: http://flux.md
 

Aujourd’hui Antony Bonamy, le chef de la maison d’édition ”Le retour aux sources”, m’a écrit qu’Ivan Blot était décédé hier 10 octobre. Mon Dieu, quelle tragédie! J’étais très attaché à lui, je l’aimais comme un homme d’une exceptionnelle noblesse d’âme, je l’admirais comme auteur d’un travail solide qui honore la France et l’Europe. La semaine dernière, l’Université populaire de Moldavie a édité la version roumaine de son livre „L’Europe colonisée”. Le livre „L’homme défiguré”, qui doit également être édité par nous à Chisinau, est en cours de traduction. Notre bon ami Denys Pluvinage de la maison d’édition „Apopsix”, qui a édité les versions originales des livres d’Ivan Blot, m’a permis de les éditer en roumain.

J’ai rencontré Ivan Blot à la deuxième conférence du Forum de Chisinau en décembre dernier. Nous sommes immédiatement devenus amis. Cela n’aurait pas pu être différent, car nous avions beaucoup d’amis communs, tous issus de notre  famille intellectuelle de la nouvelle dissidence.

Le discours d’Ivan Blot à la Conference internationale „Le capitalisme financier et ses alternatives pour le XXIème siècle. Les contributions à la 4ème théorie économique” a produit une impression forte. L’approche profonde d’un sujet de la plus haute importance pour notre continent a mis en évidence une vaste expérience et une formation intellectuelle exceptionnelle. (Http://flux.md/stiri/discours-de-ivan-blot-au-forum-de-ch...).

Et en janvier de cette année, j’ai eu l’honneur de le rencontrer à Paris. Il m’a généreusement offert ces livres. Nous avons parlé de nos prochain projets académiques et éditoriaux. (http://flux.md/stiri/cultura/in-capitala-frantei-cu-autor...).

De retour à Chisinau avec une valise pleine de livres de mes amis français, j’ai lu toute une série d’œuvres d’Ivan Blot. Il y a eu une intense correspondance dans laquelle nous avons convenu des livres qui devaient paraître en roumain au cours de cette année.

Il y a quelques mois, j’ai publié ma préface au livre „L’Europe colonisée” (http://flux.md/articles/o-pledoarie-pentru-decolonizarea-... ). J’espérais beaucoup qu’il pourrait être présent à Chisinau personnellement à la présentation publique de ces volumes. Mais à un moment donné, il m’a écrit qu’il était très malade, car il s’agissait d’un cancer. Étant gravement malade, il a continué à travailler sur un nouveau livre. Le 3 Août, il m’a écrit:

 

”Cher monsieur Rosca,

Merci de cette bonne nouvelle! Je termine mon livre sur la nouvelle lutte des classes ( entre peuple souffrant et bourgeoisie cosmopolite. C’est lent à cause de ma maladie. J’ai fait 7 chapitre sur 10 et j’ai presque fini le huitième.). Je suis en chimiothérapie jusqu’à octobre. Si elle réussit cela ira mieux. Bravo pour votre courage politique”.

Il m’a ensuite envoyé la version inachevée de son dernier livre. Au cours de ces mois, j’ai espéré obtenir la version finale. Pour le moment, je ne sais pas s’il a réussi à terminer son manuscrit. Mais je considère comme un devoir d’honneur envers mon ami décédé de le traduire et de le publier. J’espère que Denys Pluvinage, qui dirige la maison d’édition Apopsix, se chargera également de l’impression de ce dernier ouvrage d’Ivan Blot.

Le 5 octobre, cinq jours seulement avant le décès de mon bon ami, nous avons annoncé l’impression de son livre aux côtés du travail d’un autre ami français, Hervé Juvin, „Le gouvernement du désir” ( http://flux.md/articles/doua-pledoarii-pentru-renasterea-... ).

La mort d’un homme proche est une perte irrécupérable. Mais Ivan Blot restera en vie grâce à souvenirs que nous garderons de celui qui fut un grand patriote français. Il vivra par ses œuvres monumentales.

Je fais partie de ceux qui espèrent que la patrie d’Ivan Blot, à l’instar de toute l’Europe, aura la chance de renaître. Le modèle d’un homme héroïque qu’Ivan Blot a cultivé dans son livre avec le même titre doit triompher.

Iurie Roșca,
Chișinău, Moldavie,
11 octobre 2018

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mercredi, 10 octobre 2018

Yvan Blot nous a quittés !

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Yvan Blot nous a quittés !

Nous venons d'apprendre avec grande tristesse le décès, en ce jour, d'Yvan Blot, jadis fondateur du Club de l'Horloge et ami de feu Jean van der Taelen (1917-1996). Ses écrits et ses conférences nous manqueront cruellement, ainsi que son réalisme aristotélicien. 

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samedi, 24 février 2018

LA DICTATURE DE L'UTILITARISME

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LA DICTATURE DE L'UTILITARISME

Visitez le site du Cercle de l’Aréopage : http://cercleareopage.org
Conférence au Cercle de l'Aréopage: LA DICTATURE DE L'UTILITARISME
Par Yvan Blot
 
Retrouvez les évènements du Cercle : http://cercleareopage.org/conf%C3%A9r...
Lisez La Relance de la Tradition: Notes sur la situation de l'Église
 

dimanche, 21 janvier 2018

Yvan Blot: La démocratie directe

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La démocratie directe
par Yvan Blot
Ex: http://www.oragesdacier.info
 
Le lien entre la démocratie et la nation est exprimé notamment dans l'article 3 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 qui figure dans nos textes constitutionnels : "le principe de toute souveraineté réside essentiellement dans la Nation. Nul corps, nul individu ne peut exercer d'autorité qui n'en émane expressément."
 
L'article 3 de la Constitution, lui, exprime le refus de toute oligarchie : "la souveraineté nationale appartient au peuple qui l'exerce par ses représentants et par voie du référendum. Aucune section du peuple ni aucun individu ne peut s'en attribuer l'exercice."
 
L'article 4 précise même l'intention des partis politiques : "ils doivent respecter les principes de la souveraineté nationale et de la démocratie" : le font-ils réellement ? On sait que les partis sont des structures oligarchiques où la direction impose sa volonté aux militants et non l'ivresse. De plus, les partis se sont opposés souvent à la démocratisation des institutions, montrant souvent une hostilité réelle à l'égard du référendum. Quant à la souveraineté, ce n'est pas leur préoccupation première comme le montre le fait qu'ils ont accepté de contourner le référendum sur la constitution européenne où le peuple avait clairement dit "non". Le Général de Gaulle avait critiqué le régime des partis qui avait mis la France hors d'état de résister à l'armée allemande en 1940.
 
Autrement dit, les principes constitutionnels de la démocratie directe existent en France mais ne sont pas appliqués. Et l'on s'étonne que beaucoup de Français montrent de la méfiance à l'égard des institutions politiques, de 40% de confiance dans le parlement à 12% seulement de confiance pour les partis politiques ! 
 
Si l'on veut combler le fossé entre les gouvernants et le peuple, il faut que les gouvernants renoncent à l'oligarchie de fait et acceptent d'introduire en France la démocratie directe comme beaucoup de nos voisins.
 
Extension géographique
 
La démocratie directe qui permet au peuple, et pas seulement à ses représentants élus, d'abroger ou d'adopter des lois, est encore très minoritaire dans le monde. C'est la démocratie représentative pure, où seuls les représentants élus du peuple adoptent formellement les lois, qui demeure encore la règle de droit commun.
     
La démocratie directe fonctionne depuis 1848 en Suisse (au niveau fédéral, cantonal et local) et aux États-Unis (au niveau de 27 États fédérés sur 50 et au niveau local). Le petit Liechtenstein la pratique aussi ainsi que l'Uruguay en Amérique latine. Depuis 1970, le référendum d'initiative populaire pour abroger une loi existe en Italie. Depuis la réunification allemande du 3 octobre 1990, la démocratie directe a été progressivement introduite dans tous les Länder allemands et souvent aussi au niveau communal. Peu à peu, la démocratie directe gagne en extension.
 
Outils de la démocratie directe
 
Il y a deux outils essentiels, le référendum veto et l'initiative populaire, un frein et un moteur.
     
Le référendum veto consiste à permettre au peuple d'annuler une loi votée par le parlement. Il faut une pétition de citoyens (50 000 en Suisse, 500 000 en Italie) qui demande l'annulation de la loi. Si le nombre minimum de signatures est atteint, un débat est lancé et le référendum populaire a lieu environ six mois plus tard. Si le non l'emporte, la loi est annulée. Si le "oui" l'emporte, la loi est confirmée. C'est un frein pour s'assurer que les élus ne votent pas une loi que la majorité des citoyens réprouve, ce qui peut arriver compte tenu des puissants lobbies qui font aujourd'hui pression sur le gouvernement ou le parlement. C'est un moyen de redonner la parole aux citoyens non organisés en lobbies, en groupes de pression.
     
L'initiative populaire est une pétition pour soumettre au référendum un projet de loi voulu par les citoyens signataires sur un sujet que le gouvernement ou le parlement ignorent ou ont peur d'aborder. En Suisse, le chiffre pour qu'une pétition soit valable a été relevé à 100 000 signatures. Aux États-Unis, le chiffre à atteindre est un pourcentage des électeurs, et il varie selon les États. Si le nombre de signatures est atteint, un débat est organisé sur les médias et le parlement donne son avis sur le projet en question. Il peut aussi rédiger un contre-projet qui sera soumis le même jour au référendum. Ainsi, le parlement n'est nullement mis à l'écart. La démocratie directe organise plutôt une saine concurrence entre les citoyens et les élus pour faire les lois : personne ne doit être exclu alors que la démocratie représentative pure exclut les citoyens de la fonction législative.

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Des études universitaires très poussées en Suisse, en Allemagne, aux États-Unis notamment ont montré que les décisions du peuple étaient toujours modérées et raisonnables. Par exemple, les Suisses ont rejeté des mesures démagogiques comme l'adoption des 35 heures ou bien la suppression de l'armée. 
    
Sur le plan des finances publiques, les travaux des professeurs Feld et Kirchgässner ont montré en étudiant les résultats des référendums financiers aux États-Unis et dans les cantons suisses que là où la démocratie directe existe; les impôts et les dépenses publiques sont un tiers plus bas que dans les pays où la démocratie est purement représentative. L'endettement public est de moitié plus faible. Ce résultat est d'une extrême importance à la fois pour le respect de la liberté de chacun que pour accroître la liberté de tous.
 
Plus généralement, la démocratie directe permet au peuple de faire de libres choix, hors des canaux réducteurs des consignes des partis politiques. Comme le dit Michael Barone dans sa préface au livre de Patrick Mc Guigan, The Politics of Direct Democracy : "Peut-être le meilleur argument classique en faveur de la démocratie directe est qu'elle permet de prendre en considération dans la décision politique des problèmes qui étaient ignorés pour des raisons institutionnelles ou idéologiques."
 
Yvan Blot, L'oligarchie au pouvoir

dimanche, 29 octobre 2017

Yves Blot: LA POLITIQUE D'ARISTOTE

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LA POLITIQUE D'ARISTOTE

Visitez le site du Cercle de l’Aréopage : http://cercleareopage.org
 
Conférence au Cercle de l'Aréopage:
LA POLITIQUE D'ARISTOTE
Par Yvan Blot
 
Retrouvez les évènements du Cercle : http://cercleareopage.org/conf%C3%A9r...

mardi, 13 septembre 2016

Réflexions sur Dostoïevski et le renouveau spirituel de la Russie

Réflexions sur Dostoïevski et le renouveau spirituel de la Russie

Avec Yvan Blot

L’âme russe a des traits particuliers qui lui donnent une forte spécificité, et des ressources qui lui permettent aujourd'hui de renaître, après un XXe siècle où le communisme soviétique, matérialiste et athée, a régné en maître. Ayant fini par rejeter le marxisme d’origine occidentale, la Russie connaît aujourd’hui un renouveau religieux conforme à sa longue histoire.
Ce pays de résistants patriotes et de mystiques assume sa destinée historique de créer un pont eurasiatique vers l’Est tout en appartenant pleinement à l’ensemble européen, par sa langue, sa culture et sa religion.

Réflexion sur un renouveau lié à la défense des valeurs traditionnelles, et se déployant dans une aire culturelle qui nous est proche.

Emission "Le florilège des arts", menée par Jean-Bernard Cahours d'Aspry.

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mercredi, 08 octobre 2014

L'Europe pharisienne contre les droits des citoyens

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L'Europe pharisienne contre les droits des citoyens

par Yvan Blot

Ex: http://www.zentropaville.tumblr.com

L’oligarchie politique et administrative qui contrôle les institutions européennes à l’heure actuelle, au sens large, (Union européenne mais aussi Conseil de l’Europe et ses prolongements) est animée d’une idéologie typiquement pharisienne.


oligarchie-246x300.jpgLe mot pharisien vient du terme hébreu « péroushim » qui signifie « séparés ». Les pharisiens sont séparés ou veulent se séparer de ceux qui leur semblent « impurs ». En politique actuellement, sont considérés comme « impurs » les « populistes », les « nationalistes » les « identitaires » mais d’une façon générale tous ceux qui sont suspectés défendre leurs intérêts nationaux en menaçant les « droits de l’homme ».

Quand les « droits de l’homme » se retournent contre les libertés

Dans ce sens, les « droits de l’homme » ne sont plus les « libertés fondamentales », ce qu’ils étaient à l’origine et qui se traduisaient politiquement dans des droits concrets accordés aux citoyens. Dans une optique égalitaire considérant les hommes comme des matières premières interchangeables, les « droits de l’homme » deviennent une arme politique et juridique pour empêcher les nations de sauvegarder leur identité propre et les libertés qui y sont liés. Les droits de l’homme dans cet esprit finissent par se retourner contre les libertés.

Les pharisiens politiques sont toujours prêts à jouer les procureurs. Le Conseil de l’Europe notamment s’est donné le ridicule de créer il y a quelques années une commission d’enquête contre le Liechtenstein soupçonné de menacer les « droits de l’homme » parce qu’une réforme constitutionnelle approuvée par référendum populaire renforçait les pouvoirs du Prince (tout en créant une possibilité de le renverser par référendum d’initiative populaire, ce qui est interdit aux citoyens dans les pays « républicains ».

Autre exemple, l’affaire « Lautsi » par laquelle la Cour européenne des droits de l’homme interdit à l’Italie la présence de crucifix dans les classes des écoles publiques. Vingt états européens se sont insurgés contre cette décision de novembre 2009. Le gouvernement lituanien a mis en parallèle cet arrêt avec la persécution religieuse qu’elle a subie sous le régime soviétique où les symboles religieux étaient strictement interdit dans la sphère publique. Il est révélateur que la plupart des anciens pays de l’Est qui ont subi la dictature communiste font partie de la liste des pays qui soutiennent l’Italie aujourd’hui contre le plan de sécularisation forcée des écoles qui inspire la Cour européenne dite des droits de l’homme.Mgr Hilarion du patriarcat orthodoxe de Moscou déclare de façon pertinente : le sécularisme qui prospère aujourd’hui en Europe est lui aussi une pseudo-religion qui a ses dogmes, ses normes, son culte et sa symbolique. A l’instar du communisme russe du XXème siècle, il prétend au monopole et ne supporte aucune concurrence » (1)

La dérive égalitariste et discriminatoire

Evidemment les pharisiens européens donnent des leçons sans regarder leurs propres turpitudes, à savoir le fameux « déficit démocratique » des institutions européennes, Union européenne, conseil de l’Europe et Cour européenne des droits de l’homme confondus.

Tous ces organismes sont de types caricaturalement oligarchiques et violent dans leur manière de se structurer et de fonctionner la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen française de 1789.

Cette déclaration qui fait des droits de l’homme des libertés fondamentales dans son article deux n’a rien à voir avec la dérive égalitariste anti- discriminatoire actuelle qui a pour but de faire des citoyens des sujets passifs interchangeables, matière première du système techno économique dirigé par des managers, lesquels n’ont rien à voir avec les propriétaires de la théorie économique libérale autrichienne.

Son article 16 déclare sans la moindre ambigüité : « Toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a point de Constitution. » C’est exactement le cas de l’Union européenne actuelle où le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif sont totalement confondus.

La confusion des pouvoirs dans l’Union européenne

Ainsi, c’est la Commission, organe exécutif qui a le monopole, nous disons bien, le monopole de l’initiative des lois. Non seulement l’initiative des lois ne revient pas au parlement européen ou aux parlements nationaux, totalement démunis, mais encore les citoyens en sont totalement exclus à la différence de ce qui se passe en Suisse, démocratie modèle qui devient la tête de Turc des oligarques de Bruxelles.

De plus, le Conseil des ministres et le parlement européen peuvent édicter des lois en codécision : le terme même viole de plein fouet l’article 16 de la déclaration de 1789. Pour les rédacteurs de cette déclaration, l’Union européenne n’aurait pas de constitution assurant la liberté des citoyens faute de séparation des pouvoirs.

Les juges de la Cour européenne des droits de l’homme sont nommés sur des listes de trois noms présentés par chaque exécutif de chaque Etat puis élu par l’assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe : procédure oligarchique de confusion des pouvoirs qui viole aussi l’article 16 de la déclaration de 1789. Cette oligarchie judiciaire est irresponsable devant le peuple faute de procédure de « rappel » telle qu’elle existe aux Etats-Unis pour les juges de cours suprêmes de beaucoup d’Etats fédérés (2)

Liberté, propriété, sûreté et résistance à l’oppression : des droits bafoués

Huit autres articles de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 (qui fait partie de nos textes constitutionnels) sont bafoués d’une manière ou d’une autre par les institutions européennes telles qu’elles sont, c’est-à-dire fort peu démocratique.

L’article 2 dispose : « le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l’homme. Ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté et la résistance à l’oppression ». On notera que les notions d’égalité, d’égalitarisme et de lutte contre les discriminations n’ont pas leur place ici et que ces notions doivent être subordonnées aux droits de l’homme listés de façon limitative à l’article 2. Par exemple, l’égalitarisme ne saurait passer avant la liberté ou le droit de propriété ne saurait être vidé de sa substance au nom de la « lutte contre la discrimination ». L’égalitarisme contenu dans l’interprétation récente des droits de l’homme est en fait la matrice d’un nouveau totalitarisme qui se retourne contre les libertés fondamentales.

La souveraineté de la Nation et des citoyens : d’autres droits bafoués

L’article 3 dispose : « le principe de toute souveraineté réside essentiellement dans la Nation ». Ce principe est bafoué ouvertement par l’idéologie anti nationale qui domine dans les institutions européennes.

L’article 5 dispose : « la loi n’a le droit de défendre que les actions nuisibles à la société ». En quoi des crucifix dans les écoles italiennes sont ils « nuisibles à la société » ? En quoi le renforcement du pouvoir du prince du Liechtenstein sous le contrôle de la démocratie directe est-il nuisible à la société ? En quoi l’interdiction des minarets en Suisse serait-elle « nuisible à la société » ? On voit ici à quel point le Conseil de l’Europe et sa Cour satellite cherchent à acquérir des pouvoirs qui vont bien au-delà des pouvoirs tolérés par la déclaration de 1789.

L’article 6 est bafoué, non seulement par les institutions européennes par la plupart des institutions des Etats membres du Conseil de l’Europe, à l’exception de la Suisse, du Liechtenstein, de l’Italie et de l’Allemagne au niveau de ses Etats fédérés, les Länder.
Il dispose en effet : « la loi est l’expression de la volonté générale. TOUS les citoyens ont droit de concourir PERSONNELLEMENT ou par leurs représentants, à sa formation ». Cet article affirme que la démocratie directe et la démocratie parlementaire doivent se compléter. Or la plupart des Etats européens n’ont toujours pas la démocratie directe qui permet aux citoyens d’être à l’initiative des lois (par pétition) et de pouvoir décider de celles-ci (par référendum). Le Traité de Lisbonne ne tolère que la pétition pour les citoyens de l’Union européenne. Résultat : il est fréquent que des lois sont adoptées pour faire plaisir à des lobbies divers sans égard pour la « volonté générale ». La population n’a alors plus confiance dans les institutions existantes : l’absence de démocratie véritable menace la démocratie elle-même. En France, environ 40% des citoyens ont confiance dans le parlement alors qu’il est élu par le peuple (mais celui-ci ne peut choisir que des candidats choisis par les états majors des partis politiques : là encore oligarchie et non démocratie !) A titre de comparaison le système de santé ou l’armée ont en France un taux de confiance de 90% (mais 38% pour les medias contrôlés par les oligarques et 18% de confiance seulement pour les partis politiques) (3)

L’article 10 de la déclaration de 1789 dispose : « Nul ne doit être inquiété pour ses opinions même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la loi ». En quoi les crucifix dans les écoles italiennes troublent-ils l’ordre public ? Cet article est violé par les institutions européennes lorsqu’elles cherchent à effacer du paysage européen les manifestations du christianisme.

La libre communication des pensées malmenée

L’article 11 dispose : « la libre communication des pensées et des opinions est un droit des plus précieux de l’homme : tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement sauf à répondre à l’abus de cette liberté dans des cas déterminés par la loi ». Cet article est surtout violé par le droit interne de beaucoup de pays européens mais cela ne semble pas gêner le Conseil de l’Europe et son satellite judiciaire. Le prix Nobel d’économie Milton Friedman, juif américain libertarien s’insurgeait à juste titre contre la loi Gayssot française (inspirée par un communiste) qui sous prétexte d’antiracisme limite la liberté d’expression et créée des catégories de citoyens privilégiés alors que la loi doit être la même pour tous. Plus récemment le tribunal constitutionnel fédéral allemand a annulé un jugement de la Cour d’Appel de Munich qui interdisait pour cinq ans une publication « d’extrême droite » : le tribunal suprême jugeait que le qualificatif d’extrême droite appartient à la polémique politique courante (comme extrême gauche d’ailleurs) et n’est pas un critère juridique d’interdiction de publication dans un Etat de droit défendant la liberté d’expression. Cela montre qu’il y a débat sur ce point désormais dans certains Etats d’Europe.

C’est un mécanisme oligarchique qui décide de l’impôt

L’article 14 de la déclaration de 1789 est totalement bafoué : « TOUS les citoyens ont le droit de constater par eux-mêmes ou par leurs représentants la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d’en suivre l’emploi, et d’en déterminer la quotité, l’assiette et la durée. Seuls les Etats à démocratie directe comme la Suisse, le Liechtenstein ou les 27 états fédérés américains (sur 50) respectent cet article. En général l’impôt est décidé par un mécanisme totalement oligarchique : même le pouvoir des « représentants (députés) est purement formel : c’est l’administration d’Etat qui décide des impôts comme dans l’ancienne Union soviétique.

Enfin l’article 15 n’est guère appliqué en réalité : « la société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration ». On a en général organisé l’irresponsabilité à tous les niveaux, administratifs et parlementaires, ce qui explique la gabegie, les déficits, l’endettement monstrueux de la plupart des Etats européens (sauf la Suisse bien entendu, décidément fort gênante).

On a déjà parlé de l’article 16 qui exige la séparation des pouvoirs législatifs, exécutifs et judicaires.

Cette revue montre que l’Europe ne porte pas tous les péchés. Les Etats membres aussi ne respectent guère les véritables droits de l’homme et du citoyen de la déclaration de 1789. Après tout, ces états oligarchiques ont créé une Europe à leur image, ce qui est bien logique mais en aggravant les défauts au détriment des droits des citoyens.

Retrouver les libertés par la démocratie directe

Pour sortir de cette dérive menaçante pour nos libertés que les connaisseurs de l’ancienne dictature communiste comme le président tchèque Vaclav Klaus savent mieux identifier que les Occidentaux inexpérimentés donc inconscients, il faut de toute urgence réformer les constitutions des pays européens pour y introduire la démocratie directe. Il faut revoir les traités fondant l’Union européenne, le Conseil de l’Europe et la Cour européenne des droits de l’homme pour démocratiser ces institutions. Cela n’aura servi à rien de faire tomber le rideau de fer si par une dérive lente, hypocrite mais inexorable, les libertés des européens et de leurs nations sont grignotées par un pouvoir irresponsable. Une nouvelle forme de dictature menacerait ainsi l’Europe au moment même où elle a pu se libérer de l’oppression rustique du communisme. Nos Etats, à la différence des anciens pays de l’Est, respectent encore certaines libertés traditionnelles mais leur processus de décision, de moins en moins démocratiques et de plus en plus favorables à des pouvoirs irresponsables rendent à bon droit inquiets pour notre avenir. Nous risquons de devenir, non pas de libres citoyens, mais des matières premières interchangeables à la merci des managers du public comme du privé.

Yvan Blot

Notes :

  1. Voir l’article de Grégor Puppinck sur l’affaire Lautsi dans La Nouvelle Revue Universelle n°22 de 2010
  2. Le rappel (recall) est une procédure de démocratie directe américaine qui permet à une pétition de citoyens de déclencher un référendum pour démettre un juge d’une Cour Suprême. Ce procédé a pour but d’éviter la confiscation du pouvoir souverain par une oligarchie judiciaire irresponsable.
  3. Voir les travaux notamment de Pierre Bréchon et Jean-François Tchernia in La France à travers ses valeurs 2010

vendredi, 22 novembre 2013

Pro-Russia-TV rencontre Yvan Blot

Pro-Russia-TV rencontre Yvan Blot

("Démocratie directe")

vendredi, 11 octobre 2013

Face à la décadence des valeurs...

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Face à la décadence des valeurs...

par Yvan Blot

Ex: http://metapoinfos.hautetfort.com

Nous reproduisons ci-dessous une intervention d'Yvan Blot au colloque de l'Institut de la démocratie et de la coopération, qui s'est tenu le 10 juin 2013, à l'assemblée nationale, sur le thème "La Grande Europe des Nations : une réalité pour demain ?". Un point de vue qui peut faire débat quant à la place qu'il accorde au christianisme, notamment...

Fondateur du Club de l'Horloge, Yvan Blot, qui préside actuellement l'institut néo-socratique, est notamment l'auteur de L'héritage d'Athéna ou Les racines grecques de l'Occident (Presses bretonnes, 1996) ainsi que d'un essai intitulé L'oligarchie au pouvoir (Economica, 2011).

La Russie et l'Europe face à la décadence des valeurs

Le problème des valeurs

Les valeurs ne sont pas une connaissance. Le vrai, le bien et le beau sont des objectifs pour l’action. Leur origine n’est pas la création par un petit père des peuples, ou par une commission interministérielle mais elle est immémoriale.   L’Europe et la Russie partagent des valeurs communes parce qu’elles sont issues de la même civilisation, issue de la Grèce et de Rome, transfigurées par le christianisme. Refuser que l’Europe soit « un club chrétien » comme l’ont dit plusieurs politiciens comme Jacques Delors ou le premier ministre turc Erdogan revient à nier l’identité historique de l’Europe.

Les valeurs montrent leur importance sociale à travers leurs fruits. Le meurtre ou la malhonnêteté ne sont pas généralisables. La société s’effondrerait. L’honnêteté ou le respect de la vie sont généralisable. Le fait d’avoir des enfants aussi. C’est le signe qu’on est en présence de valeurs authentiques.

Le problème des valeurs est qu’elles ne sont pas issues de la raison comme l’ont montré des philosophes comme Hume ou le prix Nobel Hayek. Elles se situent entre l’instinct et la raison. Le 18ème siècle européen avec son culte de la raison et son éloge de la libération de la nature, donc des instincts a été une catastrophe pour les valeurs. La raison, cette « crapule » comme disait Dostoïevski, a servi à justifier les instincts. Or les hommes ont une vie instinctive chaotique à la différence des animaux. L’homme a par nature besoin des disciplines de la culture, de la civilisation, comme l’a écrit l’anthropologue Arnold Gehlen. Du 18ème siècle a nos jours, on a assisté en Occident à la destruction des valeurs traditionnelles issues du christianisme et du monde gréco romain. Quatre faux prophètes ont joué un rôle majeur : Voltaire, Rousseau, Marx et Freud. Au 20ème siècle, les idéologies scientistes totalitaires ont provoqué des meurtres de masse au nom de la raison.

Plus récemment, la révolution culturelle des années soixante, partie des universités américaines, a affaibli nos valeurs de façon décisive avec des slogans tels que « il est interdit d’interdire » ou « il n’existe pas d’hommes et de femmes mais des choix subjectifs d’orientation sexuelle ».

Le fait est que le nombre de crimes et de délits en France resté stable autour de 1, 5 millions d’actes entre 1946 et 1968  a monté depuis lors au chiffre de 4,5 millions. Le record des prisonniers est détenu de loin par les Etats-Unis d’Amérique où le nombre de meurtre par habitant est quatre fois celui de la France. Face à cette situation, les gouvernements n’ont guère réagi sauf celui de la Russie.

Si l’on reprend les quatre causes d’Aristote matérielle, formelle, motrice et finale, on a quatre groupes de valeurs culturelles qui sont le socle de la civilisation et de la société, on a les valeurs comme normes obligatoires incarnées par l’Etat et le droit, on a les valeurs familiales qui s’étendent aussi à l’économie et enfin les valeurs spirituelles incarnées par les religions. Dans quelle situation sommes-nous par rapport à ces quatre groupes de valeurs ? L’utilitarisme américain qui réduit l’homme à une matière première de l’économie remet en cause beaucoup de nos valeurs traditionnelles.

Les valeurs culturelles et morales

L’Europe et la Russie ont dans ce domaine un héritage majeur, celui de l’Empire romain et des anciens Grecs. Il s’agissait de la « paidéia », l’éducation de l’homme afin qu’il devienne « beau et compétent » de corps et d’âme (kaloskagathos). D’où la recherche de l’excellence morale par l’exemple des grands hommes de l’histoire. Cette éducation humaniste, qui était aussi bien catholique que laïque en France, a été reniée. On cherche à former des techniciens et des commerciaux sans culture générale et non des citoyens autonomes. L’homme doit devenir un simple rouage de la machine économique comme l’a montré le philosophe Heidegger. On assiste à un effondrement de la culture générale et de la lecture. En même temps, le sens moral s’affaiblit, à commencer chez les élites car « c’est toujours par la tête que commence à pourrir le poisson ». 

 

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Au nom des droits de l’homme, on sape la morale traditionnelle car on ignore la nature véritable de l’homme. Celui-ci a trois cerveaux, reptilien pour commander les instincts, mammifères pour l’affectivité (mesocortex) et intellectuel et calculateur (neocortex). En Occident, le cerveau affectif qui commande le sens moral n’est pas favorisé : il est considéré comme réactionnaire ! La morale est réactionnaire ! Seuls sont promus le cerveau reptilien (les instincts) et le cerveau calculateur (intelligence) mis au service du reptilien. Cela donne des personnalités au comportement déréglé comme un ancien directeur du FMI. Plus gravement, cette dégénérescence a produit aussi les criminels comme Hitler ou Pol Pot ! La raison au service de l’agression reptilienne, c’est la barbarie !

Il faut réaffirmer l’importance de la morale, notamment civique, laquelle n’est pas fondée sur la raison mais sur des traditions que l’on acquiert avec l’éducation du cœur, comme l’a toujours affirmé le christianisme. C’est essentiel pour l’Europe comme pour la Russie. Nous partageons l’idéal de la personne qui recherche l’excellence, idéal issu des anciens Grecs, de l’empire romain et du christianisme.

L’offensive contre les valeurs familiales

A partir de mai 1968  pour la France, les valeurs familiales se sont effondrées. Le mot d’ordre de mai 68  était « jouir sans entraves » comme disait l’actuel député européen Daniel Cohn Bendit accusé aujourd’hui de pédophilie. Depuis les années soixante dix, un courant venu des Etats-Unis, la théorie du genre, affirme que le sexe est une orientation choisie. Le but est de casser le monopole du mariage normal, hétérosexuel. Depuis les mêmes années, la natalité s’effondre dramatiquement en Europe. L’Europe ne se reproduit plus et sa démographie ne se maintient en quantité que par l’immigration du tiers monde. Le tissu social se déchire par les échecs familiaux et par l’immigration de masses déracinées. La France favorise la gay pride, autorise le mariage gay et réduit les allocations familiales. Par contre, la Russie créé pendant ce temps une prime de 7700 euros à la naissance à partir du deuxième enfant, et crée une fête officielle de l’amour de la fidélité et du mariage avec remises de décoration.

Une idéologie venue des Etats-Unis affirme le choix de vie « childfree » (libre d’enfants) opposé à « childless » sans enfants par fatalité. Avec une telle idéologie, l’Europe contaminée est en danger de mort démographiquement. Ce  fut le cas de la Russie après la chute de l’URSS  mais le redressement s’affirme depuis trois ans environ.

Il faut aussi lier les valeurs familiales et celles de la propriété et de l’entreprise. Dans le passé, la famille était la base de l’économie. Le système fiscal français démantèle la propriété et empêche les travailleurs d’accéder à la fortune par le travail. On sait grâce aux exemples allemand et suisse que les entreprises familiales sont souvent les plus efficaces et les plus rentables.  Or on est dans une économie de « managers » de gérants qui cherchent le profit à court terme pour des actionnaires dispersés. L’Etat est aussi court termiste dans sa gestion et s’endette de façon irresponsable, droite et gauche confondues. Une société sans valeurs familiales est aussi une société tournée vers le court terme, qui se moque de ce qu’elle laissera aux générations futures. Là encore, l’Europe pourrait s’inspirer de la récente politique familiale russe et la Russie avec son faible endettement est un bon contre-exemple par ailleurs.

La crise des valeurs nationales

Le socialiste Jaurès disait : « les pauvres n’ont que la patrie comme richesse » : on cherche aujourd’hui à leur enlever cette valeur. La patrie repose sur un certain désintéressement des hommes : mourir pour la patrie fut un idéal de la Rome antique à nos jours. La marginalisation des vocations de sacrifice, celle du soldat et celle du prêtre n’arrange rien. La classe politique est gangrenée par l’obsession de l’enrichissement personnel. La patrie est vue comme un obstacle à la création de l’homme nouveau utilitariste et sans racines. 

En outre en France surtout, on a cherché à dissocier le patriotisme de l’héritage chrétien, ce qui est contraire à tout ce que nous apprend l’histoire. L’Eglise dans beaucoup de pays d’Europe a contribué à sauver la patrie lorsque celle-ci notamment était occupée par l’étranger.

La patrie, du point de vue des institutions politiques, est inséparable de la démocratie. Or en Europe à la notable exception de la Suisse, on vit plus en oligarchie qu’en démocratie. Ce n’est pas nouveau. De Gaulle dénonçait déjà cette dérive. Il faut rétablir une vraie démocratie,  au niveau national comme de l’Union européenne, organisation oligarchique caricaturale, et ré enseigner le patriotisme aux jeunes pour retisser un lien social qui se défait. 

La marginalisation des valeurs spirituelles

L’Europe comme la Russie sont issues d’une même civilisation issue de l’Empire romain et du christianisme. Le christianisme est unique en ce qu’il est une religion de l’incarnation, du Dieu fait homme pour que l’homme puisse être divinisé comme l’ont dit Saint Athanase en Orient et saint Irénée en Occident. Le christianisme met donc l’accent sur le respect de la personne humaine que l’on ne peut séparer des devoirs moraux.

Cet équilibre est rompu avec l’idéologie des droits de l’homme où les devoirs sont absents. Dostoïevski, cité par le patriarche russe Cyrillel II  a montré que la liberté sans sens des devoirs moraux peut aboutir à des catastrophes humaines. De même l’égalité sans charité débouche sur l’envie, la jalousie et le meurtre comme les révolutions l’ont montré. Quant à la fraternité, sans justice, elle débouche sur la constitution de mafias, qui sont des fraternelles mais réservées aux mafieux  au détriment des autres.

 

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L’égalité en droit des différentes religions n’est pas en cause. Mais il n’y a rien de choquant à reconnaître le rôle du christianisme dans notre histoire commune et à en tirer des conséquences pratiques. Comme l’a dit l’ancien président Sarkozy, un prêtre peut être plus efficace pour redonner du sens moral et retisser le tissu social que la police ou l’assistance sociale. Il en appelait à une laïcité positive, non anti-religieuse.

Là encore, la Russie tente une expérience intéressante qu’il ne faut pas ignorer de collaboration entre l’Etat et l’Eglise. La destruction du rôle public des Eglises a mené au totalitarisme, à un Etat sans contrepoids moral ; il ne faut pas l’oublier.

Redressement culturel et démocratie authentique

Qui pousse en Occident à l’effondrement des valeurs traditionnelles ? Ce n’est certes pas le peuple mais plutôt les élites profitant de leur pouvoir oligarchique, médiatique, financier, juridique et en définitive politique sur la société. Si on faisait un référendum sur le mariage gay, on aurait sans doute des résultats différents du vote de l’Assemblée Nationale.

Ce qui caractérise l’Europe d’aujourd’hui est une coupure croissante entre les élites acquises à la nouvelle idéologie pseudo religieuse des droits de l’homme et le peuple attaché aux valeurs traditionnelles de la famille, de la morale classique et de la patrie.

Ce fossé, par contre, existe moins, semble-t-il en Russie où le président et le gouvernement reflètent bien la volonté populaire, quitte à être critiqués par quelques oligarchies occidentalisées. C’est pourquoi je pense, contrairement à une idée reçue, que la Russie d’aujourd’hui est sans doute plus démocratique que la plupart des Etats européens car la démocratie, c’est d’abord le fait de gouverner selon les souhaits du peuple. En Occident, les pouvoirs sont manipulés par des groupes de pression minoritaires. Ils négligent la volonté du peuple et la preuve en est qu’ils ont peur des référendums.

La démocratie russe est jeune mais est-ce un défaut ? Une démocratie trop vieille peut être devenue vicieuse et décadente, et perdre ses vertus démocratiques d’origine pour sombrer dans l’oligarchie. La Russie est donc peut-être plus démocratique car plus proches des valeurs du peuple que nos oligarchies occidentales dont de puissants réseaux d’influence souhaitent changer notre civilisation, la déraciner, créer de toutes pièces une morale nouvelle et un homme nouveau sans le soutien du peuple. Démocrates d’Europe et de Russie ont en tous cas un même héritage culturel à défendre et à fructifier face à ces réseaux.

Face au déclin des valeurs, déclin surtout importé d’Amérique depuis les années soixante, il appartient donc à l’Europe et à la Russie de faire front commun pour défendre les valeurs de la nation, de la démocratie, de la culture classique avec son héritage chrétien. Comme disait De Gaulle, il faut s’appuyer sur les peuples d’Europe de ‘Atlantique à l’Oural, ou plutôt à Vladivostok. Il a écrit dans les Mémoires de guerre : «  Les régimes, nous savons ce que c’est, sont des choses qui passent. Mais les peuples ne passent pas ». J’ajouterai qu’il en est de même de leurs valeurs éternelles car elles sont inscrites dans la nature humaine et dans la transcendance ».

Yvan Blot (Institut de la démocratie et de la coopération, 10 juin 2013)

jeudi, 09 février 2012

De oligarchie

De oligarchie

door Georges FELTIN-TRACOL

9782717860429FS.gif« De westerse politieke systemen hebben zich dermate perfect georganiseerd, dat ze niet in vraag gesteld kunnen worden door het volk. Uiteraard kan de politieke klasse een stembusgang verliezen. Maar in dat geval worden ze vervangen door gelijkaardige creaturen wier beleid nooit veel verschilt van dat van hun voorgangers (p. 16). » Deze harde vaststelling werd geformuleerd door Yvan Blot in zijn nieuw werk dat luistert naar de veelzeggende titel L’oligarchie au pouvoir. Deze hoge ambtenaar – hij is inspecteur-generaal van de administratie van het Ministerie van Binnenlandse zaken – en voormalige volksvertegenwoordiger (eerst was hij tussen 1986 en 1988 voor het RPR volksvertegenwoordiger van Pas-de-Calais, daarna tussen 1989 en 1999 Europees volksvertegenwoordiger voor het FN), is zich bewust van het fundamentele belang van de strijd der ideeën. Hij stond trouwens mee aan de wieg en aan het hoofd van de Club de l’Horloge en leidt momenteel de vereniging Agir, die zich inzet voor de directe democratie.


L’oligarchie au pouvoir is het resultaat van een groot aantal onderzoeksresultaten, die sinds vele jaren werden bijeengebracht. Als fervent voorstander van het referendumsysteem van volksinitiatieven plaatste Yvan Blot nogal wat vraagtekens bij de terughoudendheid van politici ten aanzien van dit middel om de burgers te laten deelnemen aan openbare aangelegenheden. Doorheen zijn zoektocht naar de redenen van hun terughoudendheid heeft hij het bestaan van een oligarchisch systeem blootgelegd, dat ook wel eens “hyperklasse” of “Franse nomenklatoera” wordt genoemd. « Wij leven in een oligarchie onder het mom van een democratie die “representatief” genoemd wordt. Deze oligarchieën zijn de burgerlijke overheid (de beruchte « technocraten »), de media, de vakbondsleiders, de leiders van culturele en religieuze lobbygroepen, die machtige, interagerende netwerken vormen tegenover wie de gewone burger machteloos staat (met uitzondering van de directe democratie) (pp. 13 – 14). » Hij had er kunnen aan toevoegen dat deze Franse oligarchie haar eigen smaak en biotoop heeft: men kan haar bijvoorbeeld elke laatste woensdag van de maand ontmoeten in de buurt van de place de la Concorde, waar de beruchte clubavondjes van Le Siècle plaatsvinden, die zo treffend beschreven werden door de onvermoeibare dissidente journalist Emmanuel Ratier (1).


Zeker, « de term oligarch wordt tegenwoordig bij voorkeur gebruikt voor de rijke zakenmensen die in Rusland sinds de ontbinding van de Sovjetbureaucratie tegen de politieke macht aanschurken. Maar Rusland heeft zeker geen monopolie op oligarchen. Je vindt hen ook in het westen (p. 1) », meer bepaald in de Verenigde Staten (het federale establishment loopt er vol van) en in Frankrijk. Groot-Brittannië zou er vreemd genoeg van gespaard blijven…in werkelijkheid bestaat de Britse oligarchie wel degelijk, maar haar structuur en samenstelling verschillen van haar evenknieën. In Frankrijk «bestaat de oligarchie niet enkel uit politici. Hoge ambtenaren spelen een hoofdrol in het ontwerpen van wetten, en dit in samenspel met allerlei georganiseerde lobbygroepen, werkgeversorganisaties of vakbonden, en groepen die particuliere belangen verdedigen. De media behouden een zekere mate van controle, aangezien ze het gedrag van de andere oligarchieën denken aan de kaak te stellen, maar ze zijn zelf oligarchisch in hun eigen organisaties (p. 2) ».


Aangedreven als ze worden door convergerende belangen, delen de oligarchieën « een gemeenschappelijke ideologie […] (de « politieke correctheid ») [die] de burgers wil herleiden tot een rol van uitwisselbare toeschouwers, goed om te produceren en te consumeren en voorts onder controle te blijven (p. 2) ». Inderdaad, in tegenstelling tot wat men zou kunnen vermoeden, is de oligarchie wel degelijk in staat tot enig denkwerk. In navolging van Aristoteles, Heidegger en Arnold Gehlen, heeft Yvan Blot een denkschema ontwikkeld dat voortvloeit uit de aristotelische logica der vier oorzaken (motorisch, materieel, formeel en finaal) en die hem aan de heideggeriaanse Quadriparti herinnert (de mensen, de aarde, de lucht en de Goddelijkheid/de Goden). Daaruit volgt dat hij van mening is dat « de oligarchie in de moderne wereld regeert volgens een nieuwe logica, deze van het Gestell, van de utilitaire inspectie, naar de woorden van Heidegger (p. 21) ». Deze inspectie leidt tot de materiële en morele verminking van de wereld, draagt bij tot de algemene onverschilligheid en begunstigt « een culturele chaos zonder geheugen » (p. 42). Ze drukt tevens een duidelijke voorliefde voor de korte termijn en voor de onmiddellijkheid uit. De gevolgen voor de Europese samenlevingen zijn ronduit dramatisch, met een dalend geboortecijfer en zijn verwerpelijk uitvloeisel, de bevolkingsinvasie van buiten Europa.


« De economie, die de neiging heeft om de noden van de consumenten te vermenigvuldigen en er geld uit te slaan is het domein van de verstrooiing en de futiliteit (p. 63). » Waarom? Omdat het Systeem, enerzijds, het egalitarisme aanmoedigt, dat « verdedigd wordt door oligarchieën die zich onmiddellijk boven het volk plaatsen met de bijgaande privileges, inclusief de voorrechten (p. 34) » en dat, anderzijds, “de mens […] enkel gewaardeerd wordt omwille van zijn economisch nut. […] alles wat de menselijke wezens van elkaar doet verschillen moet uit de weg geruimd worden, aangezien dit de verwisselbare aard kan hinderen, die de mensen moet kenmerken om perfecte primaire materie te kunnen zijn (p. 24) ». De oligarchie en haar media, die in de geesten geleidelijk en op subtiele wijze een schadelijke censuur en een arglistige propaganda verspreiden, rechtvaardigen dit ontmenselijkende en utilitaire discours door het obligate bewieroken van de Vooruitgang, van het « governance », van het egalitarisme en van het dogma van de mensenrechten. Als ijverige lezer van de liberale en libertaire theoretici verkiest Yvan Blot, net zoals Hayek, de “fundamentele vrijheden” boven het vage concept van de mensenrechten, die in de werkelijkheid « een voorwendsel voor een steeds grotere inmenging vanwege de Staat en voor een inperking van de vrijheden vormen (p. 71) ». Hij voegt er zelfs terecht aan toe dat “de notie van het “mensenrecht” zowel unilateraal als vaag van karakter blijft. Unilateraal, aangezien er geen rechten zonder plichten zijn; vaag, omdat men nooit weet of dit begrip slaat op vrijheden of op invorderingsrechten jegens de samenleving. In de praktijk wordt de notie van de mensenrechten als wapen tegen de Staat en tegen de samenleving gebruikt om te voldoen aan de capriolen van het ego dat tot een ware afgod is verworden (p. 73) ».


De vier belangrijkste ijkpunten van de oligarchie blijven de techniek (of haar essentie, zijnde de berekenende rede), de massa’s (de ochlos), het geld en het ego. Op die manier “werkt zij mee aan het verval van transcendente waarden, en wordt het geld stilaan de allerhoogste waarde (p. 27) ». Een opgeblazen ego vermorzelt de burger! « Hoe meer de burgers geïsoleerd worden door hun egoïsme, des te ongevaarlijker ze worden voor de oligarchie. Het regime veroordeelt de minste afwijking van het discours als zijnde discriminerend, maar toont zich extreem tolerant tegenover pornografie. Hoe meer het individu zich opsluit in het onmiddellijke genot […], des te minder mengt hij zich in de staatszaken (pp. 37 – 38) », schrijft hij als antwoord op die graag vooruitlopende auteurs die  samenlevingen uitvinden waarin elke vorm van seksualiteit verboden is… .


Wat valt er te doen? Moeten we ons engageren in politieke partijen en geleidelijk aan de bestaande oligarchie afmaken? Yvan Blot heeft daar zo z’n twijfels over. Hij stelt « een afglijden van democratieën in de richting van oligarchische machtsvormen (p. 1) » vast. « Wij leven […] in een « fictieve democratie », waarin de rechten van het volk onderworpen zijn aan de goodwill van de politieke klasse die er de grenzen en de toepassing van bepaalt, en dit op soevereine wijze. De façadedemocratie verbergt de echte machten van een oligarchie, de « politieke klasse », die zichzelf rekruteert door coöptatie in de schoot van de politieke partijen (p. 19). » Uit eigen ervaring stelt hij vast dat “de politici de beslissingen nemen die hen goed uitkomen en ze worden beïnvloed, om niet te zeggen gecorrumpeerd, door minoritaire, maar goed georganiseerde lobbygroepen (p. 6) ». Bovendien « worden de kandidaten vooraf geselecteerd door de politieke partijen. Het volk stemt in feite voor partijen en het zijn de partijen die besturen, en bovendien zijn hun interne structuren vaak verre van democratisch (de partijen zijn oligarchisch van aard) (p. 6) ». Bovenop de oligarchie krijgen we dus de particratie! Deze situatie ontkracht ten volle de – dwaze – theorie van de scheiding der machten, die Montesquieu zo dierbaar was. « In werkelijkheid ligt de wetgevende macht grotendeels in de handen van de uitvoerende macht, die aan de basis ligt van de wetten en die deze laat opstellen door de overheidsdiensten (p. 11). » Erger nog, « de tweede macht van het parlement, het toezicht op de regering, functioneert niet echt, omdat de parlementaire meerderheid horig is aan de uitvoerende macht en de oppositie machteloos, want in de minderheid (p. 74) ». In de partijen heerst absolute kadaverdiscipline, aangezien deze er regelmatig mee dreigen de weerbarstige parlementsleden in de toekomst geen verkiesbare plaats meer te geven! Kortom, het zijn de meest slaafse, onderdanige en schaapachtige sujetten die de parlementen bevolken… .

De institutionele ontsporing beperkt zich niet tot de wetgevende macht. « De rechterlijke macht, die daarin een in wezen Amerikaanse tendens volgt, knabbelt meer en meer aan de wetgevende macht (2), waardoor er uiteindelijk geen scheiding der machten meer bestaat (p. 2). » Voortaan, « is de regering de belangrijkste initatiefnemer van wetten. Zij wordt op haar beurt beïnvloed door de overheidsdiensten, de media en door alle georganiseerde economische, sociale, culturele en religieuze belangengroeperingen, die rondom haar cirkelen (pp. 11 – 12) ». Tegenover deze non-democratie plaatst de auteur het Zwitserse voorbeeld en stelt hij voor om verschillende referendumprocedures in te voeren om wetten aan te nemen of te verwerpen.


Voor Yvan Blot staat het vast dat enkel de directe democratie in staat is om het Gestell af te schaffen en de zin voor democratie, burgerzin en patriottisme te reactiveren. « De democratie berust op nationale wortels, transcendente morele waarden en een zin voor het Heilige […en] berust op het concept van de verantwoordelijke burger die zich wil inschakelen in de lotsgemeenschap van zijn vaderland (p. 29) ». Indien « de natie de sokkel is waarop de mens […] gaat wonen (p. 121) », dan herbergt de natie twee heilige instellingen in haar schoot: het gezin, dat de geboortecyclus garandeert, en het leger, dat « de dood beheert (p. 123) ». Het invoeren van een participatieve democratie impliceert evenwel voor het voorgaande dat men zijn identiteit terugvindt, « die gebaseerd is op het geheugen (p. 69) ». Bijgevolg « vernietigt men de identiteit van een volk, wanneer men zijn geheugen vernietigt. In zekere zin kan men in dat geval spreken van een culturele genocide (p. 69) ». Brengt de directe democratie soelaas voor de volksidentiteiten? Laat ons het antwoord op deze primordiale vraagstelling ontdekken in een volgend essay dat specifiek aan de referendumdemocratie gewijd zal zijn.


Georges Feltin-Tracol

Voetnoten
1 : Emmanuel Ratier, Au cœur du pouvoir. Enquête sur le club le plus puissant de France, Paris, Facta, 2011.
2 : Wanneer hij heeft over de rechterlijke macht, begaat Yvan Blot een kleine fout, aangezien de Grondwet van 1958 spreekt in termen van « rechterlijk gezag ». In de logica van zijn opstellers geniet de – niet verkozen – magistratuur niet dezelfde legitimiteit als de uitvoerende en de wetgevende macht, die uitgaan van de soevereine volkswil.


• Yvan Blot, L’oligarchie au pouvoir, Paris, Économica, 2011, 144 p., 19 €.

mercredi, 25 janvier 2012

Sur l'oligarchie

Sur l’oligarchie

par Georges FELTIN-TRACOL

« Les systèmes politiques occidentaux se sont notamment parfaitement organisés pour éviter leur mise en cause par le peuple. Certes, des membres de la classe politique peuvent perdre les élections. Mais ils sont alors remplacés par des équivalents dont la politique n’est jamais très différente de celle des prédécesseurs (p. 16). » Ce dur constat est formulé par Yvan Blot dans son nouvel ouvrage au titre cinglant, L’oligarchie au pouvoir. Haut-fonctionnaire – il est inspecteur général de l’administration au ministère de l’Intérieur – et ancien élu (d’abord député R.P.R. du Pas-de-Calais de 1986 à 1988, puis député européen F.N. entre 1989 et 1999), Yvan Blot sait l’importance capitale du combat des idées. Il a d’ailleurs co-fondé et présidé le Club de l’Horloge et dirige aujourd’hui l’association Agir pour la démocratie directe.

L’oligarchie au pouvoir résulte d’un vaste ensemble d’observations recueillies depuis de nombreuses années. En fervent partisan du système référendaire d’initiative populaire, Yvan Blot s’interrogeait sur la passivité des politiciens à l’égard de ce moyen de participation des citoyens aux affaires publiques. En souhaitant comprendre leurs réticences, il a décelé l’existence d’une oligarchie qu’on appelle aussi hyper-classe ou Nomenklatura hexagonale. « Nous vivons en oligarchies sous le nom de démocraties dites “ représentatives ”. Ces oligarchies sont celles de l’administration civile (les fameux “ technocrates ”), des médias, des dirigeants de syndicats, des dirigeants de groupes de pression culturels et cultuels, qui forment des réseaux en interaction puissante devant lequel le simple citoyen est sans force (sauf en démocratie directe) (pp. 13 – 14). » Il aurait pu ajouter que cette oligarchie française a ses convenances et ses endroits : on la retrouve par exemple le dernier mercredi de chaque mois près de la place de la Concorde lors des fameuses soirées du club Le Siècle si bien décrites par l’infatigable journaliste dissident Emmanuel Ratier (1).

Certes, « le terme oligarque a retrouvé un regain de faveur pour désigner des hommes d’affaires riches proches du pouvoir politique en Russie après la désintégration de la bureaucratie du régime soviétique. Mais la Russie n’a certainement pas le monopole des oligarques. Il y a aussi des oligarques en Occident (p. 1) », en particulier aux États-Unis (l’Establishment fédéral en est rongé) et en France. La Grande-Bretagne en serait curieusement préservée… En fait, l’oligarchie britannique existe, mais sa structure et sa composition diffèrent de ses homologues. En France, « l’oligarchie ne se compose pas que des hommes politiques. La haute fonction publique joue un rôle majeur dans la fabrication des lois, en liaison avec toutes sortes d’intérêts organisés, syndicats patronaux ou ouvriers, associations défendant des groupes particuliers. Les médias conservent un certain pouvoir de contrôle car ils pensent dénoncer le comportement des autres oligarchies mais ils sont eux-mêmes oligarchiques avec leurs organisations propres (p. 2) ».

Mues par des intérêts convergents, les oligarchies se partagent « une idéologie commune […] (le “ politiquement correct ”) [qui] cherche à réduire les citoyens au rôle de spectateurs interchangeables, bons pour produire et consommer en restant sous contrôle (p. 2) ». En effet, contrairement à ce qu’on imagine, l’oligarchie pense. En s’appuyant sur Aristote, Heidegger et Arnold Gehlen, Yvan Blot a élaboré une grille de lecture qui procède de la logique aristotélicienne des quatre causes (motrice, matérielle, formelle et finale) et qui lui rappelle fortement le Quadriparti heideggérien (les hommes, la terre, le ciel et la Divinité/les Dieux). Par conséquent, il estime que « dans le monde moderne […], l’oligarchie gouverne selon une logique nouvelle qui est celle du “ Gestell ”, de l’arraisonnement utilitaire, selon la formule de Heidegger (p. 21) ». Cet arraisonnement entraîne l’enlaidissement, matériel et moral, du monde, contribue à l’indifférenciation générale et favorise « un chaos culturel sans mémoire (p. 42) ». Il exprime en outre une nette prédilection pour le court terme et l’immédiateté. Les conséquences pour les sociétés européennes en sont dramatiques avec le déclin de la natalité et de son terrible corollaire, une immigration extra-européenne de peuplement.

« L’économique qui tend à multiplier les besoins des consommateurs pour produire et en tirer de l’argent est le domaine de la dispersion et de la futilité (p. 63). » Pourquoi ? Parce que, d’une part, le Système encourage l’égalitarisme « défendu par des oligarchies qui se placent d’emblée au-dessus du peuple avec des privilèges que cela suppose, y compris les passe-droits (p. 34) » et que, d’autre part, « l’homme […] n’est apprécié que pour son utilité économique. […] Tout ce qui distingue les êtres humains doit être éliminé dès lors que cela peut gêner le caractère interchangeable que les hommes doivent avoir pour être de parfaites matières premières (p. 24) ». L’oligarchie et ses médias qui distillent subtilement dans les esprits une censure pernicieuse et une propagande insidieuse, justifient ce discours réifiant et utilitariste par la célébration obligatoire du Progrès, de la « gouvernance », de l’égalitarisme et du dogme des droits de l’homme. Lecteur assidu des théoriciens libéraux et libertariens, Yvan Blot préfère comme Hayek les « libertés fondamentales » au concept fumeux des droits de l’homme qui sont en réalité « un prétexte pour une intervention toujours plus grande de l’État et pour une restriction des libertés (p. 71) ». Il ajoute même avec raison que « la notion de “ droit de l’homme ” reste à la fois unilatérale et floue. Unilatérale car il ne peut y avoir de droits sans devoirs, floue car on ne sait jamais si à travers cette expression, on parle de libertés ou de droits de créance sur la société. En pratique, la notion de droits de l’homme sert d’arme contre l’État et contre la société pour satisfaire les caprices de l’ego devenu une véritable idole (p. 73) ».

Les quatre références majeures de l’oligarchie demeurent la technique (ou son essence qui est la raison calculatrice), les masses (l’ochlos), l’argent et l’ego. Ainsi, elle « assiste complice au déclin des valeurs transcendantes, et l’argent devient peu à peu la seule valeur suprême (p. 27) ». Un ego hypertrophié écrase le citoyen ! « Plus les citoyens sont isolés par leur égoïsme, moins ils sont dangereux pour l’oligarchie. Le régime condamne le moindre écart de langage considéré comme discriminatoire mais il est d’une tolérance immense pour la pornographie. Plus l’individu s’enferme dans les plaisirs immédiats […], moins il se mêlera des affaires de l’État (pp. 37 – 38) », écrit-il à rebours des auteurs inquiets d’anticipation qui inventaient des sociétés proscrivant toute sexualité…

Que faire alors ? Faut-il militer dans des formations politiques et abattre progressivement l’oligarchie en place ? Yvan Blot en doute. Il relève qu’il y a une « dérive des démocraties vers des formes oligarchiques de pouvoir (p. 1) ». « Nous vivons […] dans une “ démocratie fictive ” où les droits du peuple sont soumis au bon vouloir de la classe politique qui en détermine les limites et l’application, de façon souveraine. Cette démocratie de façade masque les pouvoirs réels d’une oligarchie, la “ classe politique ”, qui s’auto-recrute par cooptation à l’intérieur des partis politiques (p. 19). » Fort de sa propre expérience, il relève que « les hommes politiques prennent les décisions qui les arrangent et ils sont influencés, quand ils ne sont pas parfois carrément corrompus, par des groupes de pression minoritaires mais bien organisés (p. 6) ». En outre, « les candidats sont présélectionnés par les partis politiques. Le peuple vote en fait pour des partis et ce sont les partis qui gouvernent, or leur structure interne est rarement vraiment démocratique (les partis sont oligarchiques) (p. 6) ». S’ajoute donc à l’oligarchie la partitocratie ! Cette situation participe à l’obsolescence de la théorie – sotte – d’équilibre des pouvoirs chère à Montesquieu. « Dans les faits, le pouvoir législatif est largement dans les mains de l’exécutif qui a l’initiative réelle des lois et qui les fait rédiger dans les ministères (p. 11). » Pis, « le deuxième pouvoir du parlement, contrôler le gouvernement, ne fonctionne pas vraiment car la majorité parlementaire est asservie à l’exécutif et l’opposition est sans pouvoir car minoritaire (p. 74) ». Le caporalisme règne dans les partis puisqu’ils brandissent régulièrement la menace de ne plus donner leur investiture aux élus récalcitrants ! Bref, ce sont les plus serviles, les plus obséquieux, les plus moutonniers qui peuplent dorénavant les assemblées…

Le dévoiement institutionnel ne se restreint pas au législatif. « Le pouvoir judiciaire (2), suivant une tendance d’origine américaine, mort de plus en plus sur le législatif, ce qui fait qu’au total, il n’y a plus guère de séparation des pouvoirs (p. 2). » Désormais, « le gouvernement est donc l’auteur principal des lois. Il est lui-même influencé par l’administration, par les médias et par tous les intérêts organisés, économiques et sociaux, culturels et cultuels, qui gravitent autour de lui (pp. 11 – 12) ». À cette non-démocratie, l’auteur oppose l’exemple suisse et propose la mise en place de plusieurs procédures référendaires d’initiative populaire sur des lois à adopter ou à rejeter.

Pour Yvan Blot, la démocratie directe peut seule abolir le Gestell et réactiver les sens démocratique, civique et patriotique. « La démocratie est fondée sur des racines nationales, des valeurs morales transcendantes et un sens du sacré […et] repose aussi sur l’idée du citoyen responsable, qui veut participer au destin de sa patrie (p. 29) ». Si « la nation est le socle sur lequel l’homme […] vient habiter (p. 121) », elle détient en son sein deux institutions sacrales : la famille qui permet la naissance et l’armée qui « gère la mort (p. 123) ». L’instauration d’une démocratie participative implique toutefois au préalable de retrouver l’identité « qui est fondée sur la mémoire (p. 69) ». Or « en détruisant la mémoire d’un peuple, on détruit son identité. C’est, en quelque sorte, un génocide culturel (p. 69) ». La démocratie directe serait-elle salvatrice pour les identités populaires ? Attendons qu’Yvan Blot réponde à cette interrogation primordiale dans un prochain essai spécifiquement consacré à la démocratie référendaire.

Georges Feltin-Tracol

Notes

1 : Emmanuel Ratier, Au cœur du pouvoir. Enquête sur le club le plus puissant de France, Paris, Facta, 2011.

2 : En parlant de pouvoir judiciaire, Yvan Blot commet une légère erreur, car la Constitution de 1958 mentionne plutôt l’« autorité judiciaire ». Dans l’esprit de ses rédacteurs, la magistrature – non élue – ne saurait bénéficier d’une légitimité équivalente aux fonctions exécutive et législative issues du corps civique souverain.

Yvan Blot, L’oligarchie au pouvoir, Paris, Économica, 2011, 144 p., 19 €.


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vendredi, 30 septembre 2011

Franck ABED reçoit Yvan Blot


Franck ABED reçoit Yvan Blot 

jeudi, 07 avril 2011

Les droits de l'homme contre la démocratie directe

Les droits de l’homme contre la démocratie directe

par Yvan Blot

 

Texte paru sur le site de la Fondation Polémia [1] sous le titre Droits de l’Homme et Démocratie directe : le problème du contrôle de constitutionnalité. Yvan Blot, auteur de La Démocratie confisquée (éd. Picollec, 1988), est président de Agir pour la Démocratie directe [2].

1/ Initialement, les droits de l’homme sont des libertés fondamentales

Les droits du citoyen à voter la loi et l’impôt, donc la démocratie directe, sont d’ailleurs cités explicitement dans les articles 6 et 14 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 qui fait partie de nos textes constitutionnels. La protection de ces droits est plus une affaire de culture que de droit. Ainsi, le Royaume-Uni comme la Suisse ne connaissent aucun mécanisme de contrôle de la constitutionnalité des lois, et ces deux pays n’en sont pas devenus des dictatures pour autant. Si la culture de la liberté est développée, on n’a pas de besoin de juge de la constitutionnalité. Si par contre la culture de la liberté est sous-développée, battue en brèche par des éléments de culture totalitaire, le juge constitutionnel peut devenir le pire ennemi des libertés, et donc de la démocratie directe.

2/ Actuellement, les droits de l’homme font souvent l’objet d’une dérive totalitaire et se retournent alors contre les libertés des citoyens.

Si les droits de l’homme sont interprétés de façon égalitariste (au sujet de l’immigration par exemple), ou comme droits de créance sur la société (droit à l’emploi ou au logement par exemple), ils servent à tuer les libertés. Ainsi, la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) dans l’affaire Lautsi a demandé en 2009 à l’Italie de retirer les crucifix présents dans les écoles publiques. Suite aux protestations de 20 Etats européens, en général de l’Est, elle a inversé sa jurisprudence le 18 mars dernier. La Cour européenne de Justice de son côté interdit aux assureurs de fixer des primes d’assurance plus faibles pour les femmes qui ont statistiquement moins d’accidents que les hommes, au nom de l’égalité des sexes ! Dans son récent arrêt Hirst, la CEDH a demandé au Royaume-Uni, au nom de l’égalité, de redonner le droit de vote aux condamnés à la prison ce qui a suscité un tollé au Parlement britannique et dans le peuple.

S’agissant de la Suisse, la Cour européenne des droits de l’homme a été saisie par un recours de M. Hafid Ouardiri [3] contre le résultat de la votation populaire interdisant la construction de minarets. Mais des problèmes de procédures pourraient empêcher ce recours d’aboutir. De même, des intellectuels de gauche ont évoqué un recours contre les résultats de la votation populaire exigeant l’expulsion des étrangers condamnés à des crimes graves. Certains pensent qu’il faut restreindre la démocratie directe pour donner la priorité aux droits de l’homme interprétés par des cours européennes. Le juge se substitue alors au peuple et intervient dans la législation : il ne reste plus grand-chose de la séparation des pouvoirs ! C’est le poison de l’égalitarisme qui fait tourner la sauce des droits de l’homme et en fait une arme contre les libertés !

3/ Gouvernements des juges et « recall » aux Etats-Unis

En Amérique où, dans certains Etats, les juges des cours suprêmes sont élus, il existe la procédure de révocation ou « recall » qui est une procédure de démocratie directe. Une pétition de citoyen peut déclencher un référendum pour demander la révocation d’un juge ou d’un gouverneur. L’idée est que le peuple a le droit de révoquer ceux qu’il élit. En effet, le juge n’est qu’un homme et il peut aussi se retourner par idéologie contre la protection des libertés. Il faut alors que le citoyen ait un recours.

4/ Démocratie directe et contrôle de la constitutionnalité

Les systèmes varient selon les pays. En Suisse, un tel contrôle n’existe pas et le peuple peut modifier la constitution par initiative populaire. Aux Etats-Unis, des référendums peuvent avoir lieu sur toutes sortes de sujets dans les 27 Etats fédérés qui le permettent mais le citoyen peut toujours se plaindre du résultat d’un référendum s’il estime que celui-ci viole ses droits. L’ennui est que la Cour annule parfois le résultat : 9 juges ont-ils raison contre la majorité du peuple ? Cela créé un malaise. En Allemagne, c’est le tribunal constitutionnel de chaque Etat fédéré (Land) qui interdit a priori les référendums sur des sujets qu’il déclare inconstitutionnel. Mais alors tout dépend de la jurisprudence : dans certains Etats, les juges ont étouffé la démocratie directe, dans d’autres non !

Conclusion :

Aucun système n’est parfait. En pratique, le contrôle de constitutionnalité a parfois tendance à restreindre abusivement les droits politiques des citoyens. L’oligarchie judiciaire vient alors au secours des autres oligarchies et le peuple est lésé. En fait, la protection des libertés est plus affaire de culture que de droit comme on l’a dit au début. Avec une culture de liberté, contrôle de constitutionnalité ou pas, les libertés fondamentales sont protégées. Avec l’égalitarisme, les droits de l’homme deviennent une arme dévoyée pour réduire la liberté des citoyens et la souveraineté des Etats !

Yvan Blot

Yvan Blot donnera une conférence le lundi 4 avril à l’Hôtel Néva (rez-de-chaussée) 14, rue Brey, 75017 Paris (près de l’Etoile).
Contact : atheneion@free.fr


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[1] Fondation Polémia: http://www.polemia.com/

[2] Agir pour la Démocratie directe: http://www.democratiedirecte.fr/

[3] M. Hafid Ouardiri: http://www.tdg.ch/actu/suisse/recours-depose-strasbourg-contre-initiative-anti-minarets-2009-12-15