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lundi, 29 décembre 2025

Cirque médiatique et diversion identitaire

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Cirque médiatique et diversion identitaire

Nicolas Maxime

Source: https://www.facebook.com/nico.naf.735

Il n’aura pas fallu quelques jours de répit pendant les fêtes pour que le cirque médiatique se remette en marche.

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De l’autre côté, le député de LFI Carlos Bilongo a tenu des propos misogynes en déclarant que Rachida Dati aurait bénéficié d’une “promotion canapé” pour en arriver là. Un épisode révélateur qui démontre que l’intersectionnalité des luttes ne semble pas véritablement fonctionner. On constate que le combat antiraciste n’empêche ni la reproduction de schémas sexistes, ni l’usage d’une violence symbolique dirigée contre une femme, y compris lorsqu’elle appartient au camp adverse. Ici, la domination ne s’additionne pas mécaniquement, et certaines grilles militantes peinent à penser leurs propres angles morts.

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Bref, heureusement que le cirque médiatique — pour reprendre Guy Debord — est là pour assurer une diversion identitaire, permettant d’occuper l’espace public avec des polémiques morales et émotionnelles, pendant que l’essentiel disparaît du champ de vision.

Car pendant que l’on commente caricatures et dérapages verbaux, on ne parle pas du projet de loi spéciale sur le budget 2026, pourtant lourd de conséquences sociales et révélateur de la crise institutionnelle actuelle, sur les choix économiques à venir et le débat démocratique à mener.

Mais cela, évidemment, fait moins d’audience que le spectacle permanent des indignations sélectives. Le spectacle, écrivait Debord, n’est pas un ensemble d’images, mais un rapport social médiatisé par les images. Et une fois encore, il remplit parfaitement sa fonction en détournant l'attention et en récupérant les colères.

Platonisme et spéculations philosophiques dans la Troisième Rome

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Platonisme et spéculations philosophiques dans la Troisième Rome

La philosophe russe Natalia Melentiëva publie chez Aga Éditeur l’essai Philosophie verticale, ouvrage en lien avec la Révolution conservatrice

par Luca Negri

Dans l’un de ses aphorismes les plus sages, Nicolás Gómez Dávila affirme que le monde moderne représente une révolte contre Platon. Il est difficile de lui donner tort, surtout si l’on considère le glissement supplémentaire vers le postmodernisme, où les ombres sur le mur de la caverne se sont multipliées, comme les opinions et revendications déconnectées de l’objectivité de la nature et du logos.

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La véritable révolte contre Platon est plus précisément un nivellement sur la ligne horizontale des identités fermées, du bavardage alimenté par les médias. C’est l’oubli de l’Être, donc de la verticalité qui permet de sortir de la caverne, de se connecter au monde objectif de l’esprit.

Nous avons donc besoin d’une pensée verticale qui secoue la stagnante mare horizontale du postmodernisme, d’une philosophie tellurique capable de faire tomber les fausses et confortables certitudes pour faire surgir de nouvelles hauteurs.

Il existe néanmoins une communauté néoplatonicienne dispersée à travers le monde, capable de se révolter contre le postmodernisme. Et il y a en Russie la famille platonicienne des Douguine. Non seulement les livres du penseur moscovite, souvent cités accompagnés de tristes préjugés mais peu lus, sont précieux comme exemples de renouvellement du platonisme, mais aussi les écrits de sa fille Daria Douguina, qui a choisi très jeune le surnom de «Platonova», ressentant une affinité particulière avec le philosophe grec. On pourrait même penser que sa mort tragique par attentat en août 2022 pourrait représenter un équivalent (post)moderne de la condamnation à mort de Socrate, coupable d’avoir invité les jeunes à dépasser l’opinion pour accéder enfin à la Vérité.

Philosophie verticale

Le lecteur italien a toutefois maintenant la possibilité de lire en volume un recueil significatif d’écrits de la mère de Daria et épouse de Douguine: la philosophe Natalia Melentiëva. Tout récemment publiée par AGA Éditeur, Philosophie verticale suggère déjà, par son titre, un contenu capable de stimuler le mouvement tellurique que nous avons invoqué.

Il s’agit précisément d’une anthologie de textes abordant divers thèmes, d’abord philosophiques, avec des applications politiques d’une extrême actualité. Ce sont des contributions qui illustrent bien la fécondité de la pensée actuelle provenant de Russie, qui redevient en ce sens et véritablement une « Troisième Rome » comme le prophétise Paolo Borgognone dans sa préface précise.

67_mohler_rgb_285x255-3480939886.jpgLa lecture commence par une intervention qui se rattache au sentier interrompu de la «Révolution Conservatrice» allemande, analysant l’essai d’Armin Mohler sur le «style fasciste». Un texte à lire et méditer en ces jours où cet adjectif est surtout utilisé pour discréditer et effacer tout interlocuteur qui se place en dissidence par rapport à la narration libérale dominante et aux identifications fossilisées par la gauche du 20ème siècle.

Suit une réflexion aiguë sur un penseur fondamental pour la pensée socialiste: Auguste Blanqui. Sa conception d’univers multiples peut devenir un stimulant puissant pour ne pas accepter la civilisation présente, pour devenir révolutionnaires en étant conscients que d’autres mondes sont toujours possibles et qu’il ne faut pas céder au fatalisme du fait accompli, simple organisation d’un seul univers.

La philosophe russe s’intéresse aussi au cinéma, trouvant dans les longs-métrages de David Fincher et Lars von Trier des éléments, parfois involontaires, de critique du système libéral.

Melentiëva invite également à découvrir le philosophe allemand Gerd Berfleth, décédé en 2023, spécialiste de Bataille et de Nietzsche, défenseur d’une pensée en révolte au diapason de l’idée jüngerienne de l’Anarque.

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De grande importance, le souvenir du « navire des philosophes » (photo) qui a forcé à l’exil, aux débuts du bolchevisme, les penseurs russes les plus incisifs et les plus véritablement verticaux (comme Berdiaev et Merejkovski), appauvrissant énormément la civilisation soviétique et la conduisant vers l’échec.

Puis, des pages précieuses sur la déconstruction du paradigme mental libéral, où – en accord avec son mari Douguine – elle en tire les conséquences inévitables de la perte de contact avec les Idées platoniciennes et les «universaux» du thomisme. Lorsque le monde occidental a fini par céder au nominalisme, niant la réalité métaphysique des concepts, il ne restait que l’individu nu, qui n'était plus membre d’une société, d’une communauté ou d’une tradition plus grande que les parties elles-mêmes. La voie de la guerre de tous contre tous pour l’appropriation des biens, véritable filigrane du capitalisme, était déblayée. Dans un monde précisément aplati horizontalement.

9780241269152-3552298567.jpgEt de l’horizon, on creuse même vers le sub-humain avec la philosophie de l’Ontologie Orientée Objet, d’origine anglo-saxonne, qui nie toute centralité et spécificité à l’être humain dans un horizon où chaque entité a les mêmes droits et la même dignité: animaux, plantes et même objets matériels. Cette philosophie postmoderne était un objet d’étude critique particulier pour Daria, dans ses derniers temps incarnés.

Et c’est précisément avec des souvenirs et hommages à sa fille que se clôt le volume de Melentiëva.

Daria est partie beaucoup trop tôt, à moins de trente ans, pour réaliser pleinement sa «philosophie verticale», notamment les concepts et pratiques de ce qu’elle appelait «l’optimisme escatologique» (à laquelle AGA avait déjà consacré un volume). En s’appuyant notamment sur Platon, Hegel, Nietzsche, Evola, Cioran et Jünger, Daria a proposé une vision du monde qui accepte courageusement l’illusion, les ombres projetées sur le mur de la caverne, et la condition tragique dans laquelle se trouve l’être humain emprisonné, mais qui réagit non avec un pessimisme fataliste, mais avec l’optimisme de ceux qui se battent aussi pour des causes apparemment désespérées, sortant de la caverne, passant dans la forêt, forçant la rupture pour accéder à un stade supérieur de conscience.

Le chemin laissé inachevé par la mort brutale de Daria, rappelle sa mère, attend des sujets courageux prêts à le reprendre, à redresser la colonne vertébrale, à redécouvrir la verticalité pour laquelle l’être humain existe sur la face de la Terre.

L’armement européen comme logique Maginot du 21ème siècle – une contextualisation historique

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L’armement européen comme logique Maginot du 21ème siècle – une contextualisation historique

Elena Fritz

Source: https://t.me/global_affairs_byelena

Lorsque l’on parle aujourd’hui d’une «ligne Maginot du 21ème siècle», il ne s’agit pas d’une directive concrète, mais d’un schéma de pensée. Le terme fait référence à la Ligne Maginot – cette gigantesque fortification française des années 1930, qui promettait la sécurité, suggérait la stabilité, mais qui s’est finalement avérée stratégiquement inefficace.

La leçon historique est claire: la France n’a pas échoué par manque de ressources, mais en raison d’une hypothèse erronée sur la sécurité. On a compté sur la technologie, le béton et une défense rigide – alors que la guerre, les systèmes d’alliances et les dynamiques politiques avaient déjà changé depuis longtemps. L’adversaire n’a pas été arrêté, mais a contourné le système. La sécurité s’est révélée une illusion.

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Ce même schéma revient aujourd’hui à l’échelle européenne.

L’Union européenne prévoit un armement sans précédent: 800 milliards d’euros, coordonnés au niveau central, politiquement chargé, moralement justifié. Mais comme dans les années 1930, on confond à nouveau argent et stratégie, structure et capacité d’action.

L’antenne bruxelloise du think tank hongrois Mathias Corvinus Collegium (MCC) parle donc à juste titre (https://europeanconservative.com/articles/news/mcc-report... ) d’une nouvelle ligne Maginot. Car même aujourd’hui, les ambitions financières ne correspondent pas à la réalité industrielle, à l’unité politique ou à la capacité sociale.

Industrie plutôt que politique anxiogène

L’UE ne dispose ni d’une industrie de défense indépendante et résiliente, ni de chaînes d’approvisionnement sécurisées. Munitions, drones, renseignement, communication, capacités satellitaires – tout cela reste dépendant de pays tiers, notamment des États-Unis. Des programmes se chiffrant à des milliards n’y changent pas grand-chose à court terme. Sur le papier, cela donne de la force, dans la réalité, cela crée une dépendance.

Sécurité bureaucratisée

Comme pour la ligne Maginot historique, c’est d’abord la question du «Combien?» qui est posée. Les questions cruciales restent sans réponse :

- Pourquoi cet armement? Contre qui précisément? Avec quel objectif politique? Et à quelles conditions de désescalade? La sécurité est administrée, non pensée stratégiquement. La coordination ne remplace pas le leadership.

Le facteur oublié: la société

Les armées ne sont pas faites de budgets, mais de personnes. Et c’est là que se situe la rupture centrale:

- Il n’existe pas de demos européen, pas d’identité politique commune pour laquelle les gens seraient prêts à risquer leur vie.

- Pour leur nation, leur patrie, leur ordre social – oui.

- Pour une gestion supranationale abstraite – non.

L’UE a relativisé les liens nationaux pendant des décennies, délégitimé la souveraineté, délimité la responsabilité politique. Et voilà qu’on doit soudain se mobiliser, se montrer disponible au sacrifice – sans lien démocratique, sans ancrage culturel, sans consensus social.

Le vrai danger

Historiquement, ce n’est pas le manque de technologie militaire qui s'avère le plus risqué, mais la militarisation sans raison politique. L’armement crée ses propres dynamiques: on crée images de l’ennemi, on se réfère à des logiques d’escalade, à des logiques de blocs. Particulièrement problématique est la fixation croissante sur la Russie, fixation qui devient un récit identitaire. Elle remplace l’analyse par la morale et la diplomatie par la rhétorique de la dissuasion.

La ligne Maginot est née de la peur, du traumatisme et du désir de contrôle. Elle a créé une fausse sécurité – et a empêché, par là même, une réflexion stratégique.

Conclusion

L’armement européen suit une logique historique bien connue :

- beaucoup d’argent, beaucoup de technologie, peu de stratégie.

- Tant que l’Europe croit que la sécurité peut être gérée plutôt que négociée, financée plutôt que politiquement justifiée, elle ne bâtit pas une capacité de défense, mais une illusion de contrôle.

Une ligne Maginot – hier comme aujourd’hui – ne protège pas contre les conflits.

#géopolitique@global_affairs_byelena

samedi, 27 décembre 2025

Les influences celtes dans la littérature moderne

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Les influences celtes dans la littérature moderne

Source: https://www.facebook.com/groups/269177069889276

Les Celtes, avec leur riche héritage mythologique, leurs légendes envoûtantes et leur culture profondément ancrée dans la nature et le surnaturel, ont laissé une empreinte indélébile sur la littérature moderne. Leur univers, peuplé de héros comme Cú Chulainn, de fées, de druides et de quêtes magiques, continue d’inspirer les auteurs du monde entier. Que ce soit à travers le fantastique, la fantasy ou même la poésie contemporaine, les motifs celtiques apportent une dimension mystique et intemporelle aux récits.

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Un héritage mythologique riche

Les mythes celtes, transmis oralement avant d’être consignés par écrit, regorgent de récits épiques et de symboles puissants. Des œuvres médiévales comme les Mabinogion gallois ou les cycles irlandais (comme le Cycle d’Ulster ou le Cycle du Graal) ont posé les bases d’une narration où se mêlent aventure, magie et moralité. Ces récits ont influencé des générations d’écrivains, notamment au 19ème siècle, lors du renouveau celtique. Des auteurs comme William Butler Yeats ont puisé dans le folklore irlandais pour créer une poésie mystique, mêlant mythologie et nationalisme culturel. Ses poèmes, comme The Stolen Child ou The Wanderings of Oisin, évoquent un monde où les frontières entre le réel et l’autre monde (Tir na nÓg) sont ténues, un thème récurrent dans la littérature moderne.

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La fantasy : un terrain de prédilection

Le genre de la fantasy doit beaucoup aux Celtes. J.R.R. Tolkien, par exemple, s’est inspiré des langues et des légendes celtiques pour façonner l’univers de La Terre du Milieu. Bien qu’il ait surtout puisé dans la mythologie nordique, des éléments comme les elfes, les quêtes héroïques et les forêts enchantées trouvent des échos dans les récits celtes. Plus directement, des auteurs comme Alan Garner (The Moon of Gomrath) ou Lloyd Alexander (Les Chroniques de Prydain) ont puisé dans les Mabinogion pour créer des mondes où la magie celtique est omniprésente.

La série Harry Potter de J.K. Rowling n’est pas exempte d’influences celtiques: le choixpeau magique rappelle les objets enchantés des légendes, tandis que les créatures comme les farfadets ou les kelpies sont directement issus du folklore celtique. Même Game of Thrones de George R.R. Martin emprunte aux Celtes, avec des personnages comme les "Enfants de la Forêt", qui évoquent les Tuatha Dé Danann, le peuple féerique irlandais.

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Le réalisme magique et le surnaturel

Les Celtes ont aussi marqué le réalisme magique, un genre où le surnaturel s’immisce dans le quotidien. Des écrivains irlandais comme Lady Gregory ou John Millington Synge (photo) ont retravaillé les contes traditionnels pour les adapter à une audience moderne. Aujourd’hui, des romanciers comme Alice Hoffman (La Prophétie des sorcières) ou Juliet Marillier (La Fille du brouillard) intègrent des éléments celtes pour créer des atmosphères où la magie est palpable. Les fées, les malédictions et les métamorphoses, thèmes chers aux Celtes, y occupent une place centrale.

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La poésie et la quête identitaire

La poésie moderne, notamment en Irlande et en Bretagne, a souvent utilisé les symboles celtes pour explorer des questions d’identité et de résistance culturelle. Seamus Heaney, prix Nobel de littérature, a réinterprété les mythes irlandais dans des recueils comme North, où la légende de Sweeney Astray devient une métaphore de l’exil et de la quête de soi. En Bretagne, des poètes comme Xavier Grall ou Anjela Duval ont célébré la langue et les paysages breton en s’inspirant des anciens récits.

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Les héros et les archétypes celtiques

Les héros celtes, comme le roi Arthur (dont la légende est en partie d’origine celtique) ou Finn MacCool, incarnent des archétypes universels: le guerrier noble, le sage, le trickster. Ces figures réapparaissent dans des œuvres contemporaines, comme Les Brumes d’Avalon de Marion Zimmer Bradley, qui réinterprète la légende arthurienne sous un angle féminin et celtique. Même les super-héros modernes, comme Thor dans les comics Marvel, empruntent des traits aux dieux celtes (comme le marteau de Thor, qui rappelle celui du dieu celtique Sucellos).

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La nature et le sacré

Les Celtes vénéraient la nature, et cette spiritualité se retrouve dans des œuvres écologistes ou animistes. Robert Holdstock, dans Mythago Wood, explore une forêt où les mythes prennent vie, un thème typiquement celtique. De même, Diana Gabaldon (Outlander) mêle histoire et légendes écossaises, où les pierres dressées et les cercles de mégalithes jouent un rôle clé.

Un héritage vivant

Aujourd’hui, les influences celtes se retrouvent aussi dans la littérature jeunesse (Les Chroniques de Spiderwick de Tony DiTerlizzi) ou les romans graphiques (Sláine, de Pat Mills, inspiré des guerriers celtes). Les jeux vidéo (The Witcher, Dragon Age) et les séries (The Witcher, Cursed) perpétuent cette tradition, prouvant que les récits celtes continuent de captiver.

En conclusion, les Celtes ont offert à la littérature moderne un réservoir inépuisable de symboles, de récits et de magie. Leur héritage, à la fois poétique et sauvage, permet aux auteurs d’explorer des thèmes universels : la quête, la frontière entre les mondes, et la connexion profonde entre l’humain et la nature. Que ce soit pour évoquer un passé mythique ou pour créer des mondes imaginaires, leur influence reste vivace, témoignant de la puissance intemporelle de leurs légendes.

18:45 Publié dans Littérature, Traditions | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, lettres, celtisme, traditions | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Les six raisons pour lesquelles l’Occident périra selon Jiang Xueqin

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Les six raisons pour lesquelles l’Occident périra selon Jiang Xueqin

de Riccardo Paccosi

Source : Riccardo Paccosi & https://www.ariannaeditrice.it/articoli/i-sei-motivi-per-...

Puisque ce fut Noël tout récemment, que Noël est une tradition, et que la tradition est quelque chose que la culture néolibérale dominante en Italie et en Europe considère comme “de droite”, essayons de faire un post de Noël qui fasse le point sur ce type de problèmes.

Jiang-Xueqin-2193036597.jpgDans une vidéo très intéressante, dont les réflexions émises dans l’espace des commentaires – et en vérité peu rassurante concernant les scénarios de guerre futurs – l’analyste géopolitique chinois Jiang Xueqin (photo) énumère les raisons pour lesquelles le système occidental est arrivé à la fin de sa propre existence.

La réflexion, bien sûr, reprend la thèse d’Oswald Spengler selon laquelle chaque civilisation est soumise à un cycle de naissance, de maturation et de mort. De plus, certaines des critiques énumérées coïncident avec celles exposées par Emmanuel Todd dans son récent essai La Défaite de l’Occident.

Je pense qu’il vaut la peine de mettre en lumière la liste établie par le chercheur chinois en précisant cependant que la division aujourd’hui se fait entre ceux qui considèrent les phénomènes historiques/antropologiques rapportés ci-dessous comme des problèmes, et ceux qui, au contraire, leur donnent une lecture positive ou nient leur existence.

Je pense également que ceux qui considèrent leur position sur ces questions selon le schéma droite-gauche ne font qu’exprimer une fausse conscience et une mystification rhétorique.

Ces phénomènes, au contraire, ont détruit la raison d’être des catégories de droite et de gauche lorsque le concept de progrès apparaît aujourd’hui déconnecté de celui de justice sociale, alors que le concept de justice sociale exprime une exigence de conservation dès qu’il est évoqué.

Revenant à Jiang Xueqin, il affirme que “ce qui se passe en Occident, ce n’est pas un déclin dont on pourrait peut-être se relever dans quelques décennies, mais une phase terminale, un lit de mort”.

Il énumère ensuite les raisons de cette conviction : 

1. L’hyperurbanisation, c’est-à-dire le pourcentage croissant de la population qui s’entasse dans des mégapoles finissant par avoir, par rapport au reste de la nation environnante, une fonction parasitaire (c'est là un problème réel – je tiens à le noter – mais qui ne concerne pas uniquement l’Occident.)

2. La répulsion pour la famille et la procréation, en partie générée par le sentiment de précarité et en partie par l’exaltation philosophique de l’individu seul et privé de tout lien. Or, si le rejet de la famille implique la dissolution des fondements de la cohésion sociale, le refus de la procréation constitue tout simplement une condamnation à mort par effondrement démographique.

3. L’inégalité sociale, qui fait qu’au-delà de la part toujours plus élevée de la classe moyenne entraînée dans la pauvreté, il existe un 0,1% de riches capables de contrôler toutes les ressources et tous les actifs stratégiques.

4. Le fait que, pour faire la guerre, l’Occident doit – à l’instar de l’Empire romain à son stade terminal – recourir à des barbares et des mercenaires (les djihadistes en Libye et en Syrie, les Ukrainiens face aux Russes, etc.).

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5. La décadence générale exprimée par des phénomènes comme OnlyFans, où plus de 10% des jeunes femmes vendent leur nudité, et où, en même temps, la culture libérale-progressiste qualifie cet acte d’émancipation (note personnelle: ce point est lié au point 2, car OnlyFans est un phénomène de clôture de la sexualité dans le marché, avec une désexualisation parallèle de la culture mainstream, ainsi qu’un effondrement statistiquement constaté de l’activité sexuelle chez les jeunes.)

6. Enfin, le problème de l’immigration sans limite. Aujourd’hui, ce phénomène explose dans les métropoles occidentales non pas tant pour des raisons liées aux graves problèmes du travail, mais surtout en raison d’une question anthropologique que, bien qu’évidente, l’idéologie dominante a réussi à dissimuler pendant trente ans: une société où ses différentes composantes ne partagent ni langue, ni coutumes, ni surtout mémoire historique, est simplement une non-société, un amas informe où des segments sociaux totalement étrangers les uns aux autres cohabitent de force.

Pour donner un cadre philosophique à tous ces phénomènes, il y aurait la vision qui est à la racine de la pensée libérale, selon laquelle on peut se passer du passé ou même le supprimer.

Mais cela fera l’objet d’une autre contribution.

Une ligne ferroviaire contre les sanctions: la Russie et l'Iran comblent le vide dans le corridor nord-sud

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Une ligne ferroviaire contre les sanctions: la Russie et l'Iran comblent le vide dans le corridor nord-sud

Moscou/Téhéran. Un tournant géopolitique important au cœur du continent eurasien vient de se produire: grâce à une nouvelle liaison ferroviaire, la Russie et l'Iran comblent le dernier vide dans le corridor international de transport nord-sud (INSTC). Le tronçon Rasht-Astara, long de 162 kilomètres, relie le réseau ferroviaire iranien au Caucase du Sud et crée une route multimodale directe entre l'Inde et la Russie via l'Iran. Ce corridor de 7200 kilomètres devrait à l'avenir servir d'alternative au canal de Suez. L'achèvement prévisible de la ligne ferroviaire est également un coup géopolitique destiné à contrer les sanctions occidentales contre les deux partenaires.

Le financement du projet de 1,6 milliard de dollars est pris en charge par Moscou, tandis que Téhéran fournit les terrains. Un accord initial avec l'Azerbaïdjan portant sur 500 millions de dollars avait échoué en 2018, par crainte des sanctions américaines après le retrait de Washington de l'accord sur le nucléaire. La recherche par la Russie d'alternatives commerciales, rendue plus urgente par la guerre en Ukraine, l'a amenée à devenir un acteur décisif. Lors d'une visite à Moscou en janvier 2022, le futur président iranien Ebrahim Raisi a obtenu une ligne de crédit de cinq milliards de dollars pour les infrastructures.

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La ligne ferroviaire est plus qu'une simple voie de transport. Elle marque un rapprochement encore plus étroit entre les deux pays. Alors que Moscou soutenait autrefois les sanctions occidentales, elle est aujourd'hui le principal allié stratégique de Téhéran. Ce projet s'inscrit dans le cadre d'un partenariat global qui englobe également l'armement, l'énergie et, malgré les inquiétudes internationales, la technologie nucléaire. En septembre dernier, les deux pays ont signé un accord portant sur la construction de quatre petites centrales nucléaires d'une valeur de 25 milliards de dollars.

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Les obstacles techniques liés au relief montagneux du nord de l'Iran et les coûts élevés font de ce projet un véritable défi. Mais les arguments stratégiques sont plus forts: le corridor devrait être jusqu'à 30% moins cher et de 40% plus court que la route maritime passant par le canal de Suez. Jusqu'à dix millions de tonnes de marchandises sont prévues pour la première année. Pour l'Iran isolé et la Russie qui s'oriente de plus en plus vers l'Est, la nouvelle ligne ferroviaire est une artère vitale – et un coup indirect porté à l'Occident et à sa politique de sanctions (mü).

Source: Zu erst, Décembre 2025. 

Netflix et Warner Bros., la consolidation du monopole narratif à l’ère du capitalisme des histoires

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Netflix et Warner Bros., la consolidation du monopole narratif à l’ère du capitalisme des histoires

Jaime DQVA

Source: https://geoestrategia.eu/noticia/45523/seguridad/la-europ...

Un nouveau siècle de “storytelling” sous un même baldaquin

La récente annonce de Netflix qui évoque l’acquisition de Warner Bros. Discovery pour une valeur d’entreprise de 82,7 milliards de dollars n’est pas simplement une nouvelle fusion d’entreprises. C’est une étape stratégique dans l’évolution du capitalisme tardif, où la concentration du capital et la production de récits se fusionnent en un seul mouvement. Dans sa publication sur X, Netflix déclare: «Together, we’ll define the next century of storytelling» ("Ensemble, nous définirons le prochain siècle du storytelling"). Cette phrase, apparemment anodine, révèle une ambition démesurée : contrôler le flux d’histoires qui façonneront l’imagination mondiale dans les décennies à venir.

La concentration du capital comme moteur de la concentration narrative

La transaction, qui inclut des studios de cinéma et de télévision, HBO Max et un catalogue historique allant de “Casablanca” à “Game of Thrones,” consolide un oligopole du divertissement. Netflix, déjà leader mondial du streaming, absorbe non seulement des actifs, mais aussi un capital narratif symbolique. Cela dépasse la logique économique traditionnelle: il s’agit de l’accumulation d’imaginaires.

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Comme l’analyse Christian Salmon dans son livre Storytelling. La machine à fabriquer des histoires et à formater les esprits, nous sommes face à l’émergence de “mutations d’entreprises” dans la nouvelle ère du capitalisme. Ces entreprises ne se limitent plus à produire des biens ou des services, mais s’organisent en “organisations de storytelling”, où le récit constitue l’actif principal et le mécanisme de contrôle. La fusion Netflix-Warner Bros. est l’incarnation de cette mutation: une machine à fabriquer et diffuser des histoires à l’échelle planétaire, dotée d’une capacité sans précédent à standardiser archétypes, valeurs et cadres culturels.

Le chapitre des “entreprises mutantes”, lorsque le capitalisme se pare de ses habits de conteur

Dans le chapitre “Les entreprises mutantes de la nouvelle ère du capitalisme”, Salmon décrit comment des sociétés comme Nike, Apple ou Enron (avant sa chute) opéraient comme des entités narratives, construisant des mythologies de marque qui dépassaient leurs produits. Netflix a perfectionné ce modèle dès ses débuts, mais avec cette acquisition, elle franchit une étape qualitative: elle ne produit plus seulement des récits, elle acquiert et canonise la mémoire audiovisuelle du 20ème siècle. L’“héritage centenaire” de Warner Bros. s’intègre dans un algorithme de consommation à la demande, où classiques et nouveautés coexistent sous une même logique d’engagement et de data mining.

Cette concentration engendre une paradoxe: alors qu’on promet “plus d’options pour le consommateur”, la diversité des sources et des voix créatives diminue. Le contrôle des canaux de distribution et de production par une seule entité menace la pluralité, essentielle à une culture démocratique. Ce n’est pas seulement un monopole de marché, mais un oligopole de l’attention et de la signification.

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Le récit de la politique, la story d’Ashley et la fabrication du consensus

Un autre chapitre crucial, “Le récit de la politique”, nous offre une clé pour comprendre les implications de cette fusion. Salmon analyse le cas de “L’histoire d’Ashley”, le clip utilisé lors de la campagne de réélection de George W. Bush en 2004. Cette vidéo, montrant le président réconfortant une jeune femme dont la mère est morte le 11 septembre, ne défendait pas des politiques publiques; elle racontait une histoire à forte charge émotionnelle qui fabriquait du consensus. Son efficacité résidait dans son pouvoir narratif, pas dans sa véracité ou sa profondeur programmatique.

Netflix, en se proclamant architecte du “prochain siècle du storytelling”, vise un rôle similaire: devenir le grand narrateur de l’ère mondiale. Ses algorithmes curent et priorisent déjà les contenus selon des profils psychologiques et de consommation. En intégrant le catalogue de Warner Bros., elle renforce sa capacité à modeler les perceptions, à normaliser certaines visions du monde et à en marginaliser d’autres. Dans un contexte où la politique se joue de plus en plus dans le domaine des émotions et des identités narratives (comme le montrent les campagnes populistes dans le monde entier), celui qui contrôle les histoires dominantes aura une influence profonde sur l’espace public.

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Qui nous contera nos récits?

L’acquisition de Warner Bros. par Netflix est un symptôme d’une tendance plus large: la financiarisation de la culture et la concentration du pouvoir narratif entre les mains de méga-corporations. Ce processus n’est pas neutre. Comme Salmon le met en garde, le storytelling corporatif et politique cherche à “formater les esprits”, à créer des réalités sur mesure et à remplacer tout débat rationnel par de l’adhésion émotionnelle.

Face à ce panorama, il est urgent de promouvoir, au niveau international, des politiques antitrust adaptées à l’ère numérique, qui considèrent la diversité culturelle comme un bien public. Et, en tant que citoyens et spectateurs, nous devons cultiver une alphabétisation critique face aux récits dominants, en gardant à l’esprit que les histoires les plus puissantes ne sont pas toujours celles avec le plus grand budget, mais celles qui préservent l’autonomie, la mémoire collective et la pluralité des voix.

Le “prochain siècle du storytelling” ne devrait pas s’écrire à partir d’un seul scénario. Le défi est de faire en sorte qu’il reste une conversation ouverte, et non un monologue corporatif.

Sources consultées:

Bravo, S. (2011, 23 de enero). Storytelling – El arte de dominar el relato [Blog]. Sandra Bravo. https://sandrabravo.wordpress.com/.../storytelling-%E2.../

Netflix [@netflix]. (2025, 5 de diciembre). Today, Netflix announced our acquisition of Warner Bros. Together, we’ll define the next century of storytelling, creating an extraordinary entertainment offering for audiences everywhere [Publicación en X]. X. https://x.com/netflix/status/1996912825508462707?s=20

Netflix. (2025, 5 de diciembre). Netflix to acquire Warner Bros. from Discovery Global for total enterprise value of $82.7 billion (equity value of $72 billion). https://about.netflix.com/.../netflix-to-acquire-warner-b...

Salmon, C. (2008). Storytelling. La máquina de fabricar historias y formatear las mentes. Ediciones Península.

Storytelling. (2024, 2 de diciembre). En Wikipedia. https://en.wikipedia.org/wiki/Storytelling

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vendredi, 26 décembre 2025

Escalade sans limite: pourquoi l’UE veut croire à la guerre

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Escalade sans limite: pourquoi l’UE veut croire à la guerre

Elena Fritz

Source: https://t.me/global_affairs_byelena

L’ancien conseiller à la sécurité nationale Michael Flynn formule une accusation (https://x.com/i/status/2002518869609431458 ) qui touche au cœur de l’architecture du pouvoir occidental: la pression pour promouvoir l’escalade vis-à-vis de la Russie ne vient pas de Moscou – mais des structures occidentales de sécurité et d’intérêts elles-mêmes.

Le déclencheur a été l’intervention de la coordinatrice du renseignement américain Tulsi Gabbard, qui a publiquement contredit la thèse selon laquelle la Russie planifierait de prendre le contrôle total de l’Ukraine. Rien que cette rupture avec le récit établi constitue une transgression du tabou. Flynn va plus loin – et nomme acteurs et motifs.

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La thèse centrale de Flynn (photo) – synthétisée:

La CIA agit en collaboration avec le MI6 britannique et certaines parties de la bureaucratie sécuritaire européenne pour stabiliser un conflit permanent avec la Russie. Non par nécessité de défense, mais parce que le conflit est institutionnellement utile: pour les budgets, l’influence et la présence politique.

La logique structurelle:

- Les appareils sécuritaires ont besoin d’une menace.

- Sans escalade, pas de légitimité, pas de moyens, pas de projection de puissance.

- La “guerre sans fin” n’est donc pas une erreur, mais un état du système.

Flynn fait référence à l’Afghanistan et à l’Irak : 20 ans d’engagement, des milliards de coûts, une perte de prestige – sans conséquence stratégique.

L’UE comme accélérateur:

Ce qui est particulièrement frappant, c’est l’indication de Flynn que la volonté d’escalade vient aujourd’hui plus de l’Europe que des États-Unis. Alors que certaines élites américaines sont fatiguées de la guerre, l’Europe agit de plus en plus comme un vecteur moral de la confrontation – sur les plans politique, financier, rhétorique.

L’analyse du Premier ministre hongrois Viktor Orbán entre en jeu ici. Il dit ce qui, à Bruxelles, est considéré comme inavouable:

Une partie de la politique européenne croit sérieusement qu’un État doté d’armes nucléaires peut être vaincu dans une guerre conventionnelle. « Bonne chance », dit Orbán sèchement.

L’illusion dangereuse:

Orbán désigne trois groupes moteurs:

- Les fabricants d’armes qui veulent la guerre à tout prix.

- Les banques qui misent sur l’accès aux actifs russes.

- Et les politiciens qui ne sont pas suffisamment lucides pour voir où cette logique s’arrête. Sa conclusion est sombre: il ne faut pas compter sur une régulation en temps voulu par les élites européennes.

La dimension américaine:

Flynn appelle Donald Trump à rester ferme. Le public américain n’est pas prêt à financer une nouvelle guerre par procuration, encore moins le président ukrainien Volodymyr Zelensky, que Flynn qualifie délibérément de “petit dictateur”. Cette provocation n’est pas un hasard, mais une tentative de briser l’immunité morale de Zelensky.

Synthèse:

Ce qui se profile ici, ce n’est pas une question de narratifs, mais de puissance économique et géopolitique.

L’Europe joue avec l’illusion d’une “guerre non nucléaire” contre la Russie.

Flynn et Orbán confirment, sous différents angles, la même chose: le moteur de l’escalade se trouve en Occident lui-même.

Qui le contrôle et qui en profite ?

#géopolitique@global_affairs_byelena

À quoi sert la population pour les capitalistes?

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À quoi sert la population pour les capitalistes?

Jan Procházka

Source: https://deliandiver.org/k-cemu-je-kapitalistum-obyvatelst... 

Pour les travaux qualifiés, artisanaux et autres, après trente ans de campagnes de diffamation contre l’enseignement professionnel, il faudra tout de même importer des travailleurs.

Pour réaliser des bénéfices. Et si les actionnaires étrangers, bénéficiaires, ne veulent pas se donner la peine de travailler dans les plantations ou dans les ateliers de montage, alors on élimine la population de souche et on en importe d’autres, peut-être d’Afrique, d’Inde ou d’Indonésie. Nos propriétaires étrangers ont des siècles d’expérience dans cette pratique. Propos exagérés? Pourtant, c’est ainsi qu’est née, par exemple, la population des îles, colonies britanniques et néerlandaises, où l'on cultivait des épices (Bandy, Ambon, Zanzibar, Maurice), celle des îles à sucre (Antilles) et des Indes occidentales (Jamaïque, Honduras britannique, etc.). Les habitants originels étaient trop fiers pour se plier aux desiderata des exploiteurs et se sont rebellés contre les monopoles. C’est pourquoi les Européens les ont «éliminés» et ont fait venir à leur place des «agents de service» d’Afrique équatoriale. Grand Remplacement ! Cela vous semble familier?

La situation, ici, est bien sûr différente. Les autochtones d’Europe centrale ne seront probablement pas éliminés si facilement, et une part significative d’entre eux a d’ailleurs (volontairement ?) suivi des études universitaires auto-détruisantes, qui ne leur permettent d’occuper que des emplois précaires, voire de survivre comme un prolétariat diplômé, ou plutôt comme un «précariat de service». Il n’est même pas nécessaire d’attendre la première grande crise financière («lorsque les subventions seront coupées»). Autrefois, on appelait ces gens des domestiques, et il est étonnant de voir comment ce peuple (peu fier) de serviteurs, de servantes, de sous-hommes, de paysans et de cochers (nos ancêtres directs ! Non pas les Celtes antiques, les Indo-Européens proto-historiques, etc.) — dont les nationaux ont formé le peuple tchèque au 19ème siècle (toujours rempli de dénonciateurs notoires ou occasionnels de la monarchie "impériale et royale") — retourne sans problème dans la hiérarchie de l’humanité à un état de soumission, dans lequel il vivait depuis des siècles… Pour les travaux qualifiés et autres, il faudra importer des travailleurs après trente ans de campagnes de diffamation contre l’enseignement professionnel (on importera donc des Polonais, et pas seulement en Grande-Bretagne!).

Dépouiller une couche entière des autochtones, pour que leur groupe humain devienne déficitaire et donc non-autonome, est aussi une pratique coloniale-impérialiste éprouvée — autrefois principalement avec les «hautes classes» («religieux», guerriers), mais cela continue en fait encore aujourd’hui, car qu’est-ce sinon une «fuite des cerveaux» des périphéries vers les centres? Le capitalisme est une hiérarchie, une pyramide avec des zones centrales au sommet. Le capitalisme ne fonctionne toujours que sur la base d’une relation inégale entre le noyau et la périphérie. Le noyau, avec un pouvoir d’achat plus élevé, exploite la périphérie comme elle exploiterait un élevage, comme une source de main-d’œuvre peu coûteuse, comme un centre de transit et une décharge, tout en la maintenant dépendante et empêchant son développement. On crée des plantations, des usines de montage et des centres de transit, les bénéfices sont privatisés et sortis du pays — de la «zone» (selon les méridiens de Greenwich), tandis que les pertes sont socialisées. Les coûts et la charge pour maintenir l’infrastructure nécessaire sont supportés par la population locale. Qui nomme son enfant Oliver, Mia ou Emma et l’inscrit à une «école maternelle anglaise», qui augmente ainsi ses chances que cet enfant devienne une partie de la caste de service ou même de gestion. Par exemple, devienne un fonctionnaire colonial dans un secteur à but non lucratif.

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Pas d’économie de marché libre. Pas que chaque petit État (survivant) puisse librement commercer avec les biens et denrées qu’il veut et dont il a besoin. «L’ordre international basé sur des règles» signifie monopoles, oligopoles, embargos, sanctions, droits de douane contre les rivaux, traités coloniaux asymétriques, blocus navals et bombardements. Les vassaux jouent dans la hiérarchie comme semi-périphérie, c’est-à-dire comme une périphérie qui a sa propre périphérie, dont elle peut manger des morceaux. Comme nous le savons, l’Hegemon n’a ni amis ni ennemis, seulement des intérêts. Il n’a pas d’alliés, seulement des rivaux ou des concurrents, rien entre les deux. Le format colonial est la seule norme que reconnaissent les relations internationales. Et avec l’oppression des révoltes coloniales et la pacification de continents entiers, il a aussi des siècles d’expérience en ce domaine.

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La pacification et l’intimidation des populations indigènes ont toujours été effectuées par des soldats venus d’autres colonies. Ainsi, pour pacifier les Arabes à Zanzibar, on a envoyé des Perses, pour pacifier les Chinois dans la Victoria britannique (Hong Kong actuel), on a envoyé des Gurkhas, des soldats coloniaux du Népal. Pour pacifier Macao, possession portugaise en Chine, on a envoyé des Noirs, souvent ivres, du Mozambique et d’Angola. Cela se pratiquait depuis des siècles, et finalement — par exemple — ce sont aussi des Tchèques qui ont été déployés contre les paysans afghans. À Kaboul, on combattait pour Prague, n’est-ce pas? Et n’oublions pas que, pendant la Seconde guerre de l’opium, les Gurkhas ont également combattu pour Katmandou.

En Inde, la même chose s’est produite: dans les régions majoritairement hindoues, des musulmans ont été nommés comme administrateurs et soldats coloniaux. Lorsque les Indiens se sont rebellés contre les monopoles, ils ont été confrontés à des sicaires islamiques. Étudions attentivement l’histoire de la Compagnie des Indes orientales pour mieux comprendre notre avenir. Car même si — comme par miracle — un jour, un mouvement de libération nationale se levait, prêt à lutter, tout le système de réseaux d’experts, de mercenaires et de collaborateurs serait contre lui. Et importer de nouveaux habitants du Sud global, où il y a encore un surplus de ressources humaines, comme on nous les appelle maintenant, ne poserait aucun problème à nos propriétaires: ouvriers du bâtiment d’Asie centrale, personnel frigorifique de Roumanie, soudeurs d’Indonésie, personnels de santé d’Afrique, chauffeurs de taxi du Pakistan ou de Biélorussie. Tout cela commence déjà à se produire lentement. Où en sommes-nous quant à la mobilisation, où les «gars» de notre région centre-européenne seront envoyés pour faire la guerre à la Russie, pendant que la police coloniale, dans le cadre de l’intégration, forme ses policiers coloniaux? Nous devrions en discuter.

La philosophie de l’histoire de Hegel - Sur la dialectique non linéaire de Hegel

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La philosophie de l’histoire de Hegel

Sur la dialectique non linéaire de Hegel

Alexandre Douguine

Alexandre Douguine explique, dans ce bref article, que, pour Hegel, la fin de l’histoire correspond à un retour à l’origine.

L’Esprit Absolu n’est pas un début, mais le résultat du cycle complet de l’épanouissement de la subjectivité — c’est pourquoi Hegel n’est pas un idéaliste, mais un phénoménologue. Cependant, il est un phénoménologue du Sujet Radical. Si Hegel déclare que l’Absolu est un résultat, alors une immanence absolument radicale apparaît — semblable à celle de Fichte. Hegel écrit: «Il faut dire de l’Absolu qu’il est essentiellement un résultat, qu’il n’est ce qu’il est vraiment qu’à la fin» (1).

L’Absolu est ce qui doit encore devenir lui-même, non seulement en purgeant son côté sombre, comme chez Böhme (2), mais en passant par l'auto-aliénation de soi — du vide universel au concret catastrophique, puis en revenant du concret catastrophique à l’origine dans une nouvelle qualité. Autrement dit, l’Absolu se trouve devant nous comme un but, comme une fin. Cependant, ce n’est pas un mouvement linéaire, et cela est également crucial à comprendre: c’est un mouvement du centre vers la périphérie, puis, du périphérique, de retour vers le centre. Ce n’est pas le mouvement qui se déroule sur le cercle extérieur de la conscience, c’est-à-dire là où se produit une transformation constante (derrière l’éternité, dans l’élément du temps).

Pour Hegel, l’histoire n’est pas ce qui se déploie dans le temps; plutôt, c’est ce qui unit le départ de l’éternité dans le temps et le retour du temps dans l’éternité. L’histoire de Hegel, le temps de Hegel, est un mouvement du centre vers la périphérie, puis de la périphérie vers le centre. Cette histoire détermine à l’avance les structures et les moments du temps. Le temps lui-même n’a pas d’orientation, de sens ou de contenu; il ne porte aucun événement en lui. Tous les événements et contenus du temps proviennent de l’intérieur de la conscience (le temps en tant que processus linéaire est fondamentalement étranger à la pensée platonicienne, hégélienne et phénoménologique (3)). Tous les événements du temps proviennent de l’intérieur de la conscience. Si nous utilisons ses éléments situés à sa périphérie, ou encore plus à l’extérieur (dans le domaine hypothétique des «choses en soi»), ou si nous considérons l’histoire comme un processus linéaire, nous dévions au maximum de Hegel.

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L’histoire selon Hegel est l’histoire de l’épanouissement de l’Esprit subjectif dans le temps et de son retour et de sa transformation en l’Esprit Absolu. L’histoire selon Hegel est transversale au processus temporel en soi. C’est-à-dire que l’histoire n’est pas simplement « non temps » — elle est perpendiculaire au temps. Les événements qui se produisent dans l’histoire ne sont pas ceux qui se produisent dans le temps, mais ceux qui ont lieu dans les structures de la conscience. Et c’est cette conscience qui marque le temps par ses événements. Par conséquent, lorsque nous parlons de «la fin de l’histoire», cela signifie atteindre le point originel dans une nouvelle qualité. Cependant, ce déploiement de la structure de l’Esprit et cette progression de la dialectique de l’actualité (Wirklichkeit) n’ont jamais eu de début dans le temps — elles existaient au point de l’éternité. Ce point est ce que nous identifions comme le Sujet Radical, comme Homo Intimus (4), ou comme νοῦς ποιητικός. À partir de là, comme à partir d’un état vide et non manifesté, la négation se déplace vers la périphérie, puis une retour se produit. Dans ce retour, le centre se révèle comme quelque chose d’absolu. C’est le résultat de l’histoire, mais il n’existe ni dans une dimension linéaire ni dans une dimension cyclique. Dans un cycle, comme le montre Aristote, il n’y a ni début ni fin. Le mouvement d’une planète est éternel; elle n’a jamais commencé à partir d’un seul point — elle a toujours existé. Son début est à la fois le début et la fin, deux relations d’un seul point autour duquel tournent les planètes, non un point situé sur l’orbite elle-même. Cela nécessite une perspective totalement différente sur la dialectique de Hegel, qui ne peut pas être interprétée du point de vue des processus se produisant à la périphérie de notre conscience, mais qui se présentent comme indépendants et autonomes.

Notes: 

(1) Hegel. Phénoménologie de l'esprit.

(2) Dans les enseignements de Jakob Böhme, Dieu contient dans son fondement (Grund) un commencement obscur («la nature en Dieu»), dont il se purifie (s'absout) dans le processus de devenir-Esprit. Voir Alexander Douguine, Noomachie : Les guerres de l'esprit. Le Logos germanique. L'homme apophatique.

(3) Voir le cours magistral d'A. Douguine «Doxas et paradoxes du temps» (2021-2022).

(4) Homo intimus — « l'humain le plus intime », situé encore plus profondément que le simple «humain intérieur», homo interior. Une catégorie cruciale dans le système de Dietrich Freiberg et parmi les mystiques rhénans. Voir Douguine. Noomachie : Les guerres de l'esprit. Le Logos germanique. L'homme apophatique.

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jeudi, 25 décembre 2025

Le Venezuela comme cas d’essai – sur les intérêts, les règles et les limites de la multipolarité

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Le Venezuela comme cas d’essai – sur les intérêts, les règles et les limites de la multipolarité

Elena Fritz

Source: https://t.me/global_affairs_byelena

Le président américain Donald Trump a affirmé que les navires-citernes saisis par les États-Unis, et chargés de pétrole vénézuélien, seraient retenus. Le pétrole doit être vendu ou ajouté aux réserves stratégiques. À première vue, cela ressemble à une étape supplémentaire dans la politique de sanctions bien connue. En réalité, il s’agit de plus: d’un précédent qui en dit long sur l’état réel de l’ordre international.

Car il ne s’agit pas seulement du Venezuela, mais de la question de la signification des règles encore en vigueur, lorsque celles-ci entrent en collision avec des intérêts géopolitiques et économiques concrets. Sur le plan juridique, la démarche des États-Unis peut être juridiquement sécurisée ou du moins argumentée. Sur le plan politique, en revanche, un modèle familier se manifeste: la mise en œuvre factuelle de ses propres intérêts prime sur le droit international, tant que la résistance anticipée reste gérable.

C’est précisément pour cette raison que le cas du Venezuela est si instructif. Le pays n’est pas pertinent parce qu’il serait un acteur géopolitique central, mais parce qu’il fonctionne comme un maillon faible dans la chaîne internationale. Les réactions restent limitées, les protestations sont ritualisées, et aucune conséquence sérieuse ne se produit. Pour Washington, cela envoie un signal: la marge de manœuvre est plus grande qu’on ne le croit dans les déclarations officielles relatives à l’ordre fondé sur des règles.

De nombreuses analyses évoquent actuellement une transition irréversible vers la multipolarité. Cette hypothèse paraît rassurante, mais elle ne tient que partiellement devant une analyse plus approfondie. La multipolarité n’est pas une loi de la nature, elle ne se produit pas automatiquement par la perte relative de pouvoir d’un acteur dominant. Elle suppose que d’autres acteurs soient prêts et capables de répondre politiquement à toute violation des règles. Ce qui fait souvent défaut.

Les États-Unis n’agissent donc pas comme une puissance en retrait structurel, mais comme un acteur qui teste activement son espace de manœuvre restant. Dans ce contexte, le Venezuela n’est pas une exception, mais un laboratoire d’essai: jusqu’où peut-on aller sans provoquer une réaction sérieuse ? Quelles normes résistent – et lesquelles ne sont que de la rhétorique ?

La véritable leçon de cette affaire ne se trouve donc pas tant dans les Caraïbes, mais dans la politique d’ordre mondial. Tant que les violations des règles restent sans conséquences, il n’y a aucune incitation pour les acteurs hégémoniques à la retenue. Parler d’un monde multipolaire stable sans prendre en compte ces asymétries de pouvoir, c’est méconnaître la réalité.

En résumé : le Venezuela ne montre pas la force des États-Unis, mais la faiblesse du système qui aurait dû leur imposer des limites.

#géopolitique@global_affairs_byelena

La guerre intérieure aux États-Unis - Aristocratie nationale-industrielle vs oligarchie financière de Wall Street

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La guerre intérieure aux États-Unis

Aristocratie nationale-industrielle vs oligarchie financière de Wall Street

Lorenzo Carrasco

Source: https://jornalpurosangue.net/2025/12/20/a-guerra-interna-...

La nouvelle Stratégie de Sécurité Nationale (SSN) des États-Unis représente une rupture à plusieurs égards avec les versions précédentes de ce document doctrinal, reflétant l’intention du “noyau dur” des supporters du président Donald Trump de repositionner le pays sur la scène mondiale, en retrouvant les lignes directrices qui ont fait des États-Unis la première puissance économique mondiale, qui ont promu le système américain d’économie politique, tout en s’éloignant de l’agenda “globaliste” favorisé par ses prédécesseurs.

Parmi celles-ci, l’économie mérite une attention particulière, avec un concept de sécurité économique basé sur:

1 – un commerce équilibré;

2 – la réindustrialisation;

3 – un accès sécurisé aux chaînes d’approvisionnement et aux matériaux critiques;

4 – la domination énergétique (avec le rejet des “politiques désastreuses de ‘zéro émission de carbone’ et du changement climatique”, ainsi que la promotion des combustibles fossiles et de l’énergie nucléaire);

5 – le renforcement de la base industrielle de défense; et

6 – la préservation de la domination dans le secteur financier.

imaalhamges.jpgUne mention particulière revient au secrétaire au Trésor Alexander Hamilton (illustration), père intellectuel du système américain, qui repose historiquement sur le protectionnisme des industries naissantes/stratégiques, d’importants investissements publics dans l’infrastructure et un crédit orienté vers les activités productives.

En substance, le gouvernement Trump s’efforce d’inverser la désindustrialisation américaine, en promouvant ce que l’on pourrait appeler un “national-industrialisme stratégique”. Cet élan provient d’un groupe d’entrepreneurs et d’investisseurs réunis autour du vice-président J.D. Vance et dirigé par Chris Buskirk (photo, ci-dessous), fondateur du réseau Rockbridge, qui vise à rétablir et consolider une “aristocratie productive” au commandement du pays. Selon ses mots : “Soit vous avez une élite extractive — une oligarchie —, soit vous avez une élite productive — une aristocratie — dans chaque société.”

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Ce sont des concepts qui devraient faire l’objet d’études approfondies par d’autres pays de l’hémisphère occidental, y compris le Brésil, pour leur adaptation et leur emploi propre, leur permettant ainsi de se positionner de manière non manichéenne face à ce que la SSN qualifie de zone d’influence prioritaire des États-Unis.

Jacob Savage et la génération perdue

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Jacob Savage et la génération perdue

par Joakim Andersen

Source: https://motpol.nu/oskorei/2025/12/21/lastips-jacob-savage...

G8S80dqbMAAhEmu.jpgLa discrimination envers les hommes blancs est devenue systématique au cours des dernières décennies, notamment dans des sphères telles que le monde académique, les médias et le divertissement. Cela a conduit de jeunes hommes blancs à ressentir beaucoup plus de difficultés à faire carrière que leurs frères et pères un peu plus âgés, et cela a également contribué à leur radicalisation, remettant en question la société et l’idéologie qui les ont diabolisés et marginalisés. Ce genre de choses arrive lorsqu’on essaie de faire cuire la grenouille trop rapidement. Quoi qu’il en soit, l’esprit du temps a quelque peu changé depuis la présidence de Trump, et on accepte plus aisément maintenant de parler de cette discrimination. Ce qui était connu depuis des années dans les cercles de droite peut désormais aussi être abordé par des libéraux (de gauche), ce qui constitue en soi un pas positif dans la bonne direction. Un signe en est la large diffusion de l’article de Jacob Savage, The Lost Generation.

Le texte de Savage est bien écrit et approfondi. Il décrit, à l’aide de statistiques et de récits personnels, comment les hommes blancs ont commencé à être discriminés autour de 2014, à la suite de mouvements comme BLM et MeToo, et comment plusieurs institutions d’élite ont collectivement fait tout leur possible pour en embaucher le moins possible.

Savage cite le souvenir d’un recruteur de cette période, qui disait: «Il était évident que nous n’allions pas embaucher la meilleure personne… C’était choquant de parler d’exclure les hommes blancs». Le résultat a été dramatique. Un exemple dans le monde académique est celui de Brown: «Depuis 2022, Brown a recruté quarante-cinq professeurs en tenure-track dans les sciences humaines et sociales. Seuls trois étaient des hommes américains blancs (6,7%)». Savage écrit aussi que, «en 2011, l’année où j’ai déménagé à Los Angeles, les hommes blancs représentaient 48% des scénaristes de télévision de niveau inférieur; en 2024, ils ne représentaient plus que 11,9%. La rédaction de The Atlantic est passée de 53% d’hommes et 89% de blancs en 2013 à 36% d’hommes et 66% de blancs en 2024. La proportion d’hommes blancs est passée de 39% des postes fixes dans les sciences humaines à Harvard en 2014 à 18% en 2023. Rétrospectivement, 2014 a été le tournant, l’année où la DEI est devenue institutionnalisée dans la vie américaine». Les conséquences pour ces hommes blancs millenials qu’il a rencontrés ont été déterminantes: on leur a refusé des missions et des emplois encore et encore, leur indiquant plus ou moins clairement que cela était dû à leur race et à leur genre. Ces hommes ont en outre exigé qu’il ne publie pas leurs noms. Beaucoup d’entre eux sont bloqués dans leur vie, sans possibilité de fonder une famille.

L’article de Savage aborde un aspect important du phénomène, celui qui relève du générationnel. Beaucoup de décideurs clés, professeurs et autres, sont toujours des hommes blancs. Mais ils ont bloqué les opportunités de carrière pour les jeunes hommes blancs, par peur ou par sympathie envers l’esprit woke et ses défenseurs agressifs. Savage évoque aussi le lien entre la politique anti-blanc et l’idéologie anti-blanc («le changement démographique a remodelé non seulement qui énonçaient les narratifs, mais aussi lesquels étaient racontés »). Un journaliste soupçonnait aussi que cette politique contre les blancs contribuait à la dérive à gauche des institutions: les blancs qui y étaient encore se sentaient obligés d’adopter «une sorte de coloration protectrice, une mentalité d’allié» pour survivre. Ce n’est généralement pas suffisant, il faut le souligner. L’article vaut la peine d’être partagé avec des amis libéraux: les statistiques et les interviews sont frappantes et confirment que «au cours des années 2010, presque tous les mécanismes que l’Amérique libérale utilisait pour conférer du prestige ont été réévalués selon des lignes identitaires». Quiconque prend encore au sérieux la rhétorique sur les «privilèges blancs» après avoir lu le texte de Savage ne mérite pas non plus d’être pris au sérieux.

71vPORUO1nL._UF1000,1000_QL80_.jpgCependant, le texte présente aussi des lacunes. La conclusion est accablante : au lieu de légitimer la colère légitime, Savage aurait dû écrire quelque chose comme «la vérité, c’est que je ne suis pas un talent exceptionnel qui a été ignoré ; je suis un talent ordinaire — et en temps ordinaires, cela aurait suffi». Un complément précieux et nécessaire à cet article viral est donc celui de Compact, intitulé Lost Generation, too little, too late, du penseur qui se cahce derrière le pseudonyme de "Bronze Age Pervert" ("BAP"). BAP voit l’article comme globalement positif: il diffuse la connaissance nécessaire parmi les libéraux. Mais il identifie aussi des faiblesses cruciales et un focus erroné. Au lieu de promouvoir un récit de victime, où les hommes blancs ne doivent que prendre leur place parmi les groupes de victimes, BAP veut clairement mettre l'accent sur sur les échecs médiocres de l’establishment. Il écrit que «à mesure que ce récit se répand, cet article sera compris comme une victimisation et une supplication sentimentale, quémandant de la sympathie, plutôt que comme une condamnation juste d'un pouvoir corrompu et maladroit». Il n’a pas tout à fait tort. La discrimination que Savage décrit, et l’esprit qui la pousse et la traverse, sont anti-faustiennes et anti-méritocratiques. Les élites qui ont expulsé des hommes et femmes compétents et créatifs ont pratiquement menée notre civilisation au bord du gouffre. Une question que Savage ne pose pas, et qu’en 2025 il ne peut pas ne pas poser, est la suivante: une méritocratie ininterrompue aurait-elle garanti une surreprésentation des hommes issus de l’Occident faustien? Il s’agit du conflit entre l’Occident faustien et son esprit indo-européen d’un côté, et d’un monstre chimérique issu de l’ancien despotisme oriental de Marx et de la modernité managériale de l’autre. C’est aussi un point abordé par BAP : plutôt que de se lamenter, on pourrait rompre avec ces institutions anti-blanches et, comme Pewdiepie, créer soi-même quelque chose.

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BAP remarque aussi que le processus décrit par Savage est bien plus ancien que 2014. les Blancs ont été discriminés dans divers contextes depuis des décennies, pas seulement en tant que groupe blanc. Plus important encore, des types de personnalité rares ont été exclus de l’université, de Hollywood, etc., même avant 2012 (« pas d’emplois pour les freaks, excentriques ou créatifs audacieux à Hollywood avant 2012 »). Le résultat était une culture interne repoussante et une production également repoussante. BAP note: «Je me souviens de l’époque avant 2012, et ce n’était pas beaucoup mieux, surtout dans les domaines qu’il met en avant : journalisme, université, Hollywood ou médias».

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En somme, les articles de Savage et de BAP sont tout à fait dignes d’être lus. Une idéologie et un esprit anti-faustiens ont envahi la plupart des institutions que Althusser qualifiait d’AEI, d'Appareils d’État Idéologiques. Cela a empêché les jeunes hommes blancs d’accéder à des carrières, à l’élite et à la participation à la culture. Les hommes blancs plus âgés ont survécu de justesse tant qu’ils s’adaptaient. Le résultat a été un glissement idéologique clair et un déclin culturel, où Trump peut finalement être considéré comme une réaction. Il s’agit aussi d’une « génération de vengeance », pour reprendre une expression alt-right déjà ancienne. Cette génération s’est en grande partie construite en dehors des institutions, et en a créé de nouvelles. Leur but n’est pas d’être reconnus comme une autre groupe dans la hiérarchie officielle des victimes, mais de la remplacer par d’autres, plus saines.

Liens :

- Jacob Savage – The Lost Generation: https://www.compactmag.com/article/the-lost-generation/

- BAP – Compact « Lost Generation » DEI article: too little, too late: https://www.bronzeagepervert.yoga/p/compact-lost-generation-dei-article

Daria Douguina: des idées trempées dans le sang

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Daria Douguina: des idées trempées dans le sang

Mémoire, sacrifice et la bataille des idées

Alexander Douguine

Alexandre Douguine a déclaré que la mort de sa fille, une jeune femme qui n’avait jamais brandi aucune arme, a choqué tout le monde — du président aux citoyens ordinaires.

Lors de la Journée du Souvenir des Journalistes tués en service (15 décembre), une commémoration annuelle russe honorant les journalistes décédés dans l’exercice de leur métier, Douguine a noté que, même trois ans après le meurtre de Daria Douguina, les gens continuent d’exprimer leurs condoléances. Aujourd’hui aurait été son 33e anniversaire. Il a déclaré :

- Je pense qu’on peut même avoir des attitudes différentes envers l’Opération Militaire Spéciale, mais la mort de cette jeune, belle, jeune fille inspirée, qui n’a jamais pris les armes, qui n’a jamais participé à des opérations de combat — c’est quelque chose qui ne peut laisser indifférent aucun être humain digne, aucune personne dotée d'une conscience, d'une âme. Cela a touché absolument tout le monde, du président aux citoyens ordinaires. Cela s’est reflété dans le fait que le président a décerné à Dasha (1) l’Ordre du Courage.

- Les gens ordinaires, lorsqu’ils me rencontrent, continuent d’exprimer leurs condoléances — trois ans ont passé, et sa mémoire est vivante. Et la mémoire de chacun de nos héros — journalistes, nos guerriers — vit dans nos cœurs. C’est une force active. Les idées comptent. Les idées trempées dans le sang comptent encore plus. Elles font bouger le monde. C’est pourquoi un journaliste est vraiment quelque chose de plus qu’un simple journaliste — plus qu’un simple reporter, plus qu’un simple informateur. Un journaliste est un guerrier, une personne qui accomplit un acte héroïque, qui entre en bataille — une bataille dans le royaume des idées.

Note: 

(1) Note du traducteur : Dasha est le diminutif russe courant du prénom Daria.

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mercredi, 24 décembre 2025

Y2026

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Gelukkig Kerstfeest & Nieuwjaar 2026
Joyeux Noël & Bonne année 2026
Fröhliche Weihnachten & Glückliches Neujahr 2026
Merry Christmas & Happy New Year 2026
Feliz Navidad & Feliz Ano Nuevo 2026
Buon Natale & Felice Anno Nuovo 2026

*

Robert Steuckers & Ana Robleda

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mardi, 23 décembre 2025

Pickeresel, Julbock, figures anthropomorphes hivernales dans les traditions germaniques

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Pickeresel, Julbock, figures anthropomorphes hivernales dans les traditions germaniques
 
 
Les traditions hivernales européennes ont conservé, parfois de manière fragmentaire mais remarquablement cohérente, un ensemble de figures animales ou anthropomorphes qui occupent une place centrale dans le temps liminaire du solstice et des nuits d’hiver.
 
Loin d’être des survivances folkloriques isolées, ces figures expriment une logique symbolique profonde: lorsque le monde humain entre dans une phase d’instabilité cosmique, ce ne sont plus des figures strictement humaines qui assurent le passage, mais des animaux investis de fonctions mythiques.

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L’âne, le cheval ou le bouc constituent à cet égard un triptyque particulièrement révélateur, structuré autour de deux pôles divins majeurs du monde germanique et nordique, Wotan et Donar, connu dans le monde nordique sous le nom de Thor. Dans l’espace alémanique, la figure du Pickeresel ou Bickeresel offre un point d’entrée privilégié dans cette logique.
 
Le Pickeresel, personnage à la tête d'âne, visiteur nocturne, apparaît comme un être actif à la période de Noël, chargé de transporter des dons, mais aussi, à un niveau symbolique plus profond, d’accompagner le passage de l’année ancienne vers la nouvelle.
 
Cette fonction de portage silencieux, discrète et patiente, s’oppose en apparence à la violence de la Chasse sauvage, mais lui est en réalité complémentaire.
 
Là où le dehors est purgé par la tempête et le vacarme, l’intérieur est préservé par la continuité.
 
L’âne du Pickeresel n’est pas un choix anodin.
 
Dans l’imaginaire européen ancien, les équidés sont des animaux liminaires par excellence, associés aux voyages nocturnes, aux passages entre mondes et aux fonctions psychopompes.

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Le cheval, en particulier, est omniprésent dans les mythes de chevauchée des morts et de cortèges nocturnes.
 
Cette dimension apparaît de manière éclatante dans la figure de Wotan, dieu cavalier, meneur de la Chasse sauvage, qui traverse le ciel hivernal accompagné des âmes errantes.
 
Le cheval wotanique n’est pas seulement une monture : il est l’instrument même du passage entre les mondes, capable de franchir les frontières invisibles entre vie et mort, présent et hors-temps.
 
L’âne partage cette capacité de franchissement, mais sous une forme apaisée et domestiquée: il n’emporte pas les morts dans la tempête, il accompagne silencieusement la traversée.
 
Cette structure explique pourquoi, dans de nombreuses traditions hivernales, le personnage de Noël n’est presque jamais conçu comme se déplaçant seul.

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Qu’il s’agisse du Weihnachtsmann, de Knecht Ruprecht, une monture est fréquemment présente.
 
Le traîneau tiré par des rennes, aujourd’hui perçu comme indissociable du Père Noël, constitue en réalité une invention tardive du XIXᵉ siècle, issue de la littérature et de l’illustration modernes.
 
Il a remplacé iconographiquement des montures terrestres bien plus anciennes, sans en effacer la structure profonde: celle du déplacement liminaire nocturne assuré par un équidé, porteur d’une souveraineté invisible héritée de Wotan.
 
Avec la christianisation, cette figure animale n’a pas disparu, mais a été recouverte d’une nouvelle lecture
 
L’âne est dans le christianisme, l’animal de l’humilité volontaire, du service silencieux et de la royauté inversée.
 
Associé à Jésus-Christ, il porte le sacré sans le posséder, transporte sans décider, accompagne sans dominer.
 
Il était présent à la crèche.
 
Il a porté le Christ lors de son entrée à Jérusalem, le dimanche des rameaux.

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Cette relecture a probablement permis l’intégration du Pickeresel dans un imaginaire chrétien, sans effacer entièrement ses fonctions plus anciennes de porteur liminaire et de passeur.
 
Dans certaines traditions locales, l’âne ne se contente pas d’accompagner le Christkindl, l'enfant Christ: il peut s’y substituer entièrement, devenant à lui seul la figure du don et de la visite nocturne, signe d’un archaïsme où l’animal suffit à incarner la fonction mythique.

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Un second personnage joue un rôle tout aussi fondamental dans les traditions hivernales : celui du bouc, incarné de manière exemplaire par le Julbock.
 
Dans l’espace scandinave, le Julbock est l’une des figures les plus anciennes du solstice.
 
Animal anthropomorphe, parfois porté par des hommes masqués, parfois figuré comme porteur de dons ou comme visiteur nocturne, il est directement lié à la fertilité hivernale, à la force brute et à la violence contenue du renouveau.
 
À l’origine, le bouc n’est pas un symbole décoratif, mais l’expression d’une puissance sexuelle et vitale, associée à la survie du monde pendant la saison morte.

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Ce lien renvoie clairement à Donar / Thor, dieu du tonnerre, de la foudre et de la fertilité.
 
Le bouc est son animal privilégié: dans la mythologie nordique, Thor se déplace dans un char tiré par deux boucs, dont la capacité à renaître après avoir été consommés exprime une logique cyclique de destruction et de régénération.
 
Le Julbock s’inscrit dans cette même dynamique: il n’est pas l’animal du passage des âmes, comme le cheval de Wotan, mais l’animal de la force vitale condensée, prête à réémerger après l’hiver.
 
Là où l’équidé transporte et guide, le bouc incarne et pousse.
 
La coexistence de ces deux figures animales (équidé et bouc) révèle une structuration profonde du cycle hivernal.
 
Le cheval, associé à Wotan Odin, gouverne le passage, la mort, la circulation des âmes et la souveraineté nocturne.
 
Le bouc, associé à Donar Thor, gouverne la force, la fertilité, la violence nécessaire au retour de la vie.
 
Ces deux dimensions ne s’opposent pas: elles sont parallèles et complémentaires. Ensemble, elles assurent la traversée de l’hiver et la possibilité du renouveau.
 
Cette logique ne se limite pas au monde germanique.

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Au pays de Galles, la figure de Mari Lwyd (photo) offre un parallèle saisissant.
 
Personnage hivernal coiffé d’un crâne de cheval, porté par un groupe de chanteurs qui vont de maison en maison, la Mari Lwyd est à la fois effrayante, ludique et rituelle.
 
Le crâne de cheval, symbole explicite de mort, devient ici l’instrument d’une visite saisonnière bénéfique, accompagnée de chants et de joutes verbales.
 
Là encore, le cheval n’est pas décoratif : il est le support d’une fonction associée au passage de l’année et à la circulation entre vivants et morts.
 
À travers le Pickeresel, le Julbock et la Mari Lwyd, se dessine ainsi une structure européenne ancienne: lorsque le monde entre dans un temps hors norme, ce sont des animaux investis de fonctions mythiques qui prennent le relais des figures humaines.
 
Tantôt porteurs silencieux, tantôt incarnations de la fertilité et de la force brute, tantôt supports de la mémoire des morts, ils permettent d’exprimer des forces que l’homme ne peut plus assumer directement.

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Ces animaux ne sont pas des déguisements : ils sont des formes premières, plus anciennes que les personnages anthropomorphes modernes, et souvent plus fidèles à la logique profonde du cycle hivernal.
 
Le Pickeresel et le Julbock ne sont pas des curiosités régionales, mais deux expressions complémentaires d’un même langage symbolique.
 
Ensemble, ils forment l’ossature d’un imaginaire du solstice où la mort, la nuit et la renaissance ne sont jamais séparées, mais étroitement nouées dans le rythme profond de l’année.

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Le suicide de l’Europe

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Le suicide de l’Europe

Andrea Marcigliano

Source: https://electomagazine.it/il-suicidio-delleuropa/

Un suicide. Il n’y a pas d’autre mot pour décrire ce qui se passe dans cette Europe, de plus en plus pauvre. Un suicide assisté par von der Leyen et les bureaucrates de l’Union. Ce qu’ils sont en train de causer, il semble impossible qu’ils ne comprennent pas.

Ils veulent la guerre. Contre la Russie, bien sûr. Et ils la veulent pour une série de raisons qu’il serait un euphémisme de qualifier de mesquines, misérables.

Car il ne s’agit pas de grandes visions idéologiques, même si celles-ci seraient erronées. Ce qui pousse cette brochette de Messieurs et de Mesdames à tout faire pour provoquer une guerre mondiale, est quelque chose de beaucoup, beaucoup moins… complexe.

Car il s'agit d'intérêts particuliers. La plupart du temps personnels. La soif de richesse. La corruption.

Et je pourrais allonger la liste…

Et c’est précisément cela qui rend la situation extrêmement dangereuse. Et, surtout, difficile à résoudre.

Car nous ne sommes pas face à un Napoléon ou, pire encore, à un Hitler. Mûs par des ambitions débridées, et une soif de domination absolue.

Mais face à des hommes et des femmes, qui, comme je le disais, agissent pour leurs intérêts personnels, mesquins. Incapables, simplement, de voir les choses, et de penser la réalité, dans une perspective plus large. En substance, au-delà du bout de leur propre nez.

Bien sûr, derrière Merz, Macron, von der Leyen et leurs acolytes, il y a des lobbies et des groupes financiers, plus ou moins obscurs, qui tirent d’énormes profits de la tension et du conflit.

Et pourtant, même eux doivent être vus, ou mieux, devraient être vus, en fin de compte, pour ce qu’ils sont: des “gnomes” malveillants, capables uniquement de penser à l’argent en vase clos, en faisant abstraction de tous les autres éléments du réel. D’accumuler, sans autre but que la possession. Et, en substance, aveugles à une vision plus large des choses.

Aucun grand rêve, aussi pathologique et erroné soit-il. Aucune vision de l’histoire ou de l’homme. Rien, absolument rien. Juste l’argent. L'argent, l'argent… seulement l’argent. Rien d’autre.

Et c’est précisément pour cela que la situation actuelle est devenue si dangereuse. Incontrôlable.

Parce qu’il n’y a pas une seule intelligence qui pense à la guerre. Et qui reconnaît aussi les risques que cela pourrait comporter.

En résumé, il n’y a pas d’intelligence. Mais plutôt un mélange d’instincts, d’orgueils, d’ambitions, d’intérêts…

Un enchevêtrement difficile à démêler. Et qui, cependant, peut tous nous mener à la ruine.

UE. L’état des choses

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UE. L’état des choses

Andrea Marcigliano

Source: https://electomagazine.it/ue-lo-stato-delle-cose/

Orbán, Fico et le Tchèque Babis, se tiennent à l’écart. Ils refusent de participer au méga-financement de Zelensky pour continuer la guerre, déjà perdue, contre la Russie.

Gaspillage d’argent, l’a qualifié Orbán, avec sa franchise habituelle et brutale.

Oui, gaspillage d’argent. Et pourtant, l’Union insiste pour en verser, à pleines mains, dans l’incendie ukrainien. Pour faire un cadeau – car il s’agit bien d’un cadeau – au régime le plus corrompu d’Europe. En faisant semblant d’ignorer le gaspillage commis par les oligarques de Kiev, qui envoient le peuple à la boucherie, mais qui se délectent de nombreuses subventions, soudaines et imméritées. Et les toilettes en or ne sont qu’un petit aspect de ce vol perpétré avec arrogance.

Il est toutefois intéressant de noter que la Hongrie, la Slovaquie et la République tchèque se tiennent à l’écart. Orbán a été très clair. Et extrêmement dur. Donner encore de l’argent à l’Ukraine est une folie, inutile et délirante.

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L’Union européenne, donc, s’est ainsi rompue formellement. Et ce n’est qu’un premier signal. Car le malaise grandit dans d’autres pays. Pas seulement en Europe de l’Est, compte tenu des positions, de plus en plus différenciées, de l’Espagne et de la Belgique.

Bruxelles, et surtout l’Allemagne et la France, ont tenté de sauver ce qui peut l’être. Les milliards pour Zelensky ne viendront pas des dépôts russes gelés en Europe. Ce qui aurait fait exploser la situation, menant à une crise financière sans précédent. Comme Lagarde de la BCE, elle-même, l'a déclaré.

Cependant, ce sont des sommes d’argent, considérables, qui seront dépensées aux dépens, et au détriment, des peuples européens. Qui devront payer le prix fort en subissant une réduction effrayante des services, de la santé, des salaires et des pensions.

Et tout cela uniquement pour financer Zelensky. Et pour permettre à von der Leyen de poursuivre sa politique belliciste démentielle. Aussi pour masquer la corruption de sa Commission. Et, bien sûr, la sienne propre.

Un fardeau que beaucoup de peuples européens ne sont pas disposés à accepter passivement.

Des manifestations, de véritables révoltes populaires, sont signalées à Bruxelles, Paris, dans toute la France et dans de nombreux autres pays, de la Grèce à l’Allemagne.

L’Allemagne, où Merz cherche à mettre en place une astuce juridique pour éliminer l’AfD, le parti populaire qui a, désormais, conquis tout l’est. Et qui progresse également massivement dans les Länder occidentaux.

Et l’AfD est absolument opposée au conflit avec la Russie. Car elle veut la paix…

Bien sûr, rien de cela n’est mentionné dans nos médias mainstream. L’Italie et les Italiens sont maintenus dans une sorte de stupeur, comme s’ils avaient été drogués. Et ils sont totalement désinformés.

Pendant ce temps, Meloni continue de jongler entre Washington et Bruxelles. Elle flatte tantôt Trump tantôt von der Leyen. Incapable, en substance, de prendre une décision claire. Ce qui pourrait lui coûter très cher au printemps prochain.

Et, surtout, ce qui coûte déjà très cher, bien trop cher, aux Italiens. Où une grande partie de l’opinion publique semble encore endormie. Étourdie et inconsciente.

Le seul espoir, ce sont les protestations croissantes des agriculteurs.

Espérons, justement, que ce soit un premier signe de réveil.

Physique et politique

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Physique et politique

Alberto Giovanni Biuso

Source: https://www.grece-it.com/2025/12/13/fisica-e-politica/

Wolfgang Pauli, l’un des initiateurs de la physique quantique, donna un jour la réponse suivante à propos d’un article qui lui avait été soumis: « das ist nicht einmal falsch », « ce n’est même pas faux », car son contenu n’avait tout simplement aucun sens. En 2002, certains articles sur la gravité quantique écrits à Paris par les frères Igor et Grichka Bogdanov furent jugés, dès leur parution, comme une blague précisément parce que leur contenu était dépourvu de sens. Pourtant, ces articles avaient réussi à obtenir des avis positifs lors des procédures de peer review, c’est-à-dire l’évaluation que les revues scientifiques font des articles qui leur sont proposés. La suite de l’affaire montra qu’il ne s’agissait pas d’une farce, que les Bogdanov (photo) avaient écrit leurs textes avec de «sérieuses» intentions «scientifiques». Quoi qu’il en soit, cinq revues, dont trois très prestigieuses, avaient publié des textes remplis d’affirmations erronées ou absurdes.

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Il s’agit d’un épisode très grave, qui s’explique aussi par le blocage dans lequel la physique théorique est enfermée depuis presque un demi-siècle. Après le développement des premières théories quantiques, on était arrivé dans les années soixante au soi-disant Modèle standard de ces théories. Depuis lors, aucun progrès substantiel n’a été enregistré et, au contraire, les grands objectifs de conciliation entre la théorie quantique et la relativité, ainsi que d’unification des quatre forces fondamentales de la matière en une Grande Théorie Unifiée, se sont révélés complètement infructueux.

81aXLeo3dsL._SL1500_-1878996417.jpgLa théorie qui semblait pouvoir atteindre cet objectif s’appelle la Théorie des cordes, devenue ensuite la Théorie des Supercordes. Cette théorie est un exemple éclatant de ce que le physicien quantique Lee Smolin n’hésite pas à qualifier de situation tragique de la physique théorique contemporaine: «Pour parler franchement, nous avons échoué: nous avons hérité d’une science, la physique, qui avait continué à progresser à une vitesse si grande qu’elle était souvent prise comme modèle pour d’autres sciences. Notre compréhension des lois de la nature a continué à croître rapidement pendant plus de deux siècles, mais aujourd’hui, malgré tous nos efforts, nous ne savons plus avec certitude plus de choses sur ces lois qu’au début des années 1970» (L’univers sans cordes. La fortune d’une théorie et les troubles de la science, éd. it.: Einaudi, Turin 2007, p. X). Étant donné le poids considérable que les sciences, et en particulier la physique, ont dans la société contemporaine, il s’agit d’une tragédie qui n’est pas seulement épistémologique, mais aussi une crise sociale montrant certaines racines profondes des situations que nous avons vécues ces dernières années. L’objectif de cet article sera donc de montrer le lien entre physique et politique.

Si la théorie quantique entre en conflit total avec la perception sensible et avec l’idée que chaque humain peut se faire de la réalité, celle des cordes la dépasse largement en audace théorique et en distance abyssale de toute expérience possible. En effet, elle soutient que les constituants de la matière ne sont pas des particules, mais des élastiques qui vibrent non pas dans quatre dimensions (hauteur, largeur, profondeur et temps), mais dans vingt-six, puis réduits à neuf (dans la version « supercordes »). Des dimensions que personne n’a jamais perçues ni expérimentées. Étant donné que le monde dans lequel nous vivons ne semble pas constitué de vingt-six ou de neuf dimensions, «pourquoi la théorie n’a pas été immédiatement abandonnée est l’un des grands mystères de la science» (Smolin, p. 104).

meme_pas_fausse-2349177276.gifLa théorie postule également l’existence de tachyons, des particules capables de voyager à des vitesses supérieures à celle de la lumière. Mais «si cela se produit dans une théorie quantique des champs, c’est une indication très précise que cette dernière est en réalité incohérente. Un aspect problématique des tachyons est qu’ils peuvent transmettre des informations en arrière dans le temps, violant ainsi le principe de causalité» (Peter Woit, Pas même faux. L’échec de la théorie des cordes et la course à l’unification des lois de la physique, éd. it.: Codice Edizioni, Turin 2007, p. 149).

Un troisième élément fondamental de la théorie, capable de la rendre totalement invalide, est la nécessité de certains nombres/valeurs infinies, conduisant à «un nombre infini de théories» et «un nombre infini d’univers possibles» (Smolin, p. 198). Une théorie dotée de cette caractéristique ne peut être ni confirmée ni falsifiée par aucun expérience possible ou concevable, et ne peut donc faire aucune prédiction.

Un aperçu du vocabulaire de la théorie des cordes montre qu’on s’est très éloigné de toute théorie et pratique raisonnable du travail scientifique: «Il n’y a pas seulement le squark, le slepton et le fotino, mais aussi le déneutrino pour le neutrino, l’Higgsino pour le boson de Higgs et le gravitino pour le graviton. À deux, toute une arche de Noé de particules. Tôt ou tard, dans le fouillis du réseau de nouveaux noms et surnoms, on commence à se sentir un imbécile complet. Ou un imbécile parfait. Ou quelque chose du genre» (Smolin, p. 75).

Il s’agit d’une théorie qui existe et opère dans un monde qui n’a rien à voir avec la matière, mais presque uniquement avec des équations mathématiques, donc avec les aspects purement formels de la connaissance humaine. Des aspects qui, dans cette théorie, tendent à devenir le fruit de spéculations audacieuses et de fantasmes débridés. L’infalsifiabilité et l’incapacité de formuler des prédictions physiques précises privent la théorie des cordes du nécessaire rigorisme scientifique. Ce n’est même pas une théorie, en réalité, mais une «espérance irréalisée qu’une théorie puisse exister» (Woit, pp. XVI et 209). Le charme qu’elle exerce sur de nombreux physiciens ne vient pas de ce qu’on en sait, mais plutôt des espoirs personnels des physiciens qui y ont consacré toute leur vie.

7c8797_2ae2112a95d14f9eabd0fa7b512a24a3mv2-3685975515.jpgCet élément si psychologique et existentiel contribue à expliquer comment une telle non-théorie (ou «théorie du rien», comme l’a qualifiée le cosmologiste Lawrence Krauss) non seulement continue d’exister, mais concentre aussi le travail de la majorité des physiciens théoriciens et, surtout, parvient à obtenir des sommes vraiment impressionnantes de la part des organismes qui financent la recherche aux États-Unis. Les raisons sont nombreuses, même si elles se ressemblent.

La première, comme mentionné, est la difficulté compréhensible pour des chercheurs célèbres ou moins célèbres de déclarer l’échec d’une vie de recherche, en plus de la démonstration de leur insistance irrationnelle sur une théorie qui s’est révélée infondée.

La deuxième raison est la structure fidéiste qui sous-tend cette théorie, constituée par des calculs mathématiques de plus en plus longs, labyrinthiques et incompréhensibles, qui la rendent semblable aux questions proverbiales de la scolastique médiévale sur la «sexualité des anges». Sheldon Glashow, prix Nobel de physique, s’est exprimé ainsi pour souligner le danger irrationnel de la théorie des supercordes: «Combien d’anges peuvent danser sur la tête d’une aiguille? Combien de dimensions y a-t-il dans une variété compactifiée, 30 puissances de dix plus petites qu’une tête d’aiguille?» (Woit, p. 178).

9782290151150-475x500-1-1535544969.jpgFinalement, cette théorie ne possède même pas la beauté mathématique qui, à ses débuts, avait suscité tant d’enthousiasme, étant devenue une théorie dépourvue d’élégance formelle et qui, pour se sauver, recourt de plus en plus à la version contemporaine de l’asile de l’ignorance, le principe anthropique, basé sur la tautologie selon laquelle si nous existons, c’est que l’univers comporte les conditions de notre existence. Ce n’est pas un hasard si la théorie des cordes est devenue un domaine défendu et soutenu par diverses formes de contamination entre la physique et la New Age, dont l’exemple le plus célèbre est Le Tao de la physique de Fritjof Capra.

Une hypothèse présentée il y a un demi-siècle comme la «théorie définitive», capable d’unifier toute autre perspective, est en réalité devenue un obstacle au développement scientifique, un obstacle à l’élaboration, à la conception et à la démonstration de nouvelles théories et de différentes hypothèses sur le temps, l’espace, la matière et les particules. Un obstacle non seulement épistémologique ou théorique, mais aussi empirique, jusqu’à la violence.

Woit lança en 2004 un blog dédié à la théorie des cordes. L’un de ses résultats fut que «l’un des plus fervents partisans de la théorie des cordes, un membre de la faculté de Harvard», écrivit dans ce blog un commentaire affirmant que ceux qui «critiquaient les financements à la théorie des cordes étaient des terroristes qui méritaient d’être éliminés par l’armée des États-Unis. Ce qui m’a le plus effrayé, c’est qu’il semblait parler sérieusement» (Woit, p. 230).

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La convergence toujours désastreuse du principe d’autorité et du conformisme diffus dans la société a trouvé son emblème dans un mathématicien exceptionnel. Edward Witten (photo) est le véritable gourou de la théorie des supercordes, devenue avec lui la Théorie-M. Que signifie cette appellation? La réponse de Witten est la suivante: «M signifie magie, mystère ou membrane, selon les goûts» (Woit, p. 158). La Théorie-M n’a aucun contenu précis, elle n’existe pas, ce n’est qu’un désir de théorie. M peut donc aussi signifier le Messie attendu d’une physique réduite à une version inquiétante de l’attente de Godot.

«Inquiétante» n’est pas un adjectif d’effet ou une formule rhétorique. Le déclin de la physique montré par le parcours qui, de la théorie quantique, a conduit à la Théorie-M, est une manifestation plutôt évidente du crépuscule de l’esprit scientifique, qui touche aussi des problèmes tels que le changement climatique de la planète Terre et les choix politiques et institutionnels durant la crise du Cov id19. L’un des éléments philosophiques et politiques communs à ces questions est en effet une autre théorie, c’est le Postmodernisme devenu un instrument de négation et d’affirmation: négation de la réalité, des données, de l’empirie, de la rationalité; affirmation à leur place d’une série de principes politiques et éthiques selon lesquels la vérité est la prérogative de celui qui sait mieux imposer sa vision du monde.

71JjWHK3hPL-3975843473.jpgSmolin a écrit que la théorie des cordes dessine une véritable «physique postmoderne», formule non ironique, utilisée par ses propres partisans et non par ses opposants: «La sensation était qu’il ne pouvait exister qu’une seule théorie cohérente pour unifier toute la physique, et comme la théorie des cordes semblait le faire, elle devait être correcte. Il ne fallait plus dépendre des expériences pour vérifier les théories! C’était du Galileo. Désormais, seule la mathématique permettait d’explorer les lois de la nature. Nous étions entrés dans l’ère de la physique postmoderne» (Smolin, p. 117).

Woit souligne aussi « l’étonnante analogie entre la façon dont la recherche sur la théorie des cordes est menée dans les départements de physique et celle dont la théorie post-moderne est menée dans les départements des sciences humaines » (Woit, p. 206). Une affinité qui a pour objectif de conditionner et d’obéir à l’ensemble de la communauté sociale aux vérités présentées comme telles par des «experts» dont le langage semble obscur jusqu’à l’incompréhensibilité. La domination devient évidemment plus forte si les jeux linguistiques du postmodernisme sont soutenus par la force des médias et de la police.

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Ceux qui suivent les programmes de recherche dominants, même s’ils sont fondés sur des désirs et des fantasmes, comme la théorie des cordes, reçoivent des chaires et des financements. Ceux qui veulent explorer des champs et des perspectives «hérétiques» n’obtiennent ni l’un ni l’autre. Au contraire, la physique contemporaine tend à se fermer et donc à mourir. Il s’agit d’un cas et d’un exemple très préoccupant: une affaire qui semble relever du domaine restreint et abstrait de la physique des particules montre ainsi son lien profond avec les formes les plus avancées et efficaces du pouvoir contemporain.

Alberto Giovanni Biuso

16:33 Publié dans Science, Sciences | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : sciences, science, physique, théorie des cordes | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Le Décalogue de Friedrich List

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Le Décalogue de Friedrich List

Source: https://civenmov.blogspot.com/2025/09/decalogo-de-friedri...

List_-_Nationale_System_der_politischen_Ökonomie,_1930_-_5860425.tif.jpgFriedrich List (Reutlingen, 1789-1846), économiste allemand visionnaire, pionnier du développement économique, s’est fait connaître dans le domaine des idées par sa défense inconditionnelle du protectionnisme ainsi que des investissements publics dans les infrastructures (ports, routes, chemins de fer, télégraphes) et dans l’éducation en tant que moteurs essentiels du développement industriel, face au libre-échange et à la mondialisation économique naissante au début du 19ème siècle. Fonctionnaire, activiste et journaliste, ses idées réformistes, notamment l'idée de Zollverein (une proposition d’union douanière allemande), ont été alimentées par son exil en Amérique du Nord, où il s’est développé en tant qu’industriel et investisseur dans l’exploitation minière, tout en promouvant dans la presse les idées contenues dans son œuvre majeure de 1841: Le Système National de l’Économie Politique (Das nationale System der politischen Ökonomie), destiné à soutenir l’industrie naissante aux États-Unis face à la concurrence déloyale britannique. À la fin de sa période américaine, il fut nommé consul de Saxe.

JoseManuelBalmaceda.JPGEn Amérique du Sud, José Manuel Balmaceda (Président du Chili, 1886-1891 - portrait) et Juan Domingo Perón (Président de l’Argentine lors de trois mandats entre 1946 et 1974) ont mis en pratique la pensée développementiste listienne, en promouvant l’industrialisation, les infrastructures et la substitution des importations pour réduire la dépendance extérieure, malgré la résistance de l’oligarchie terrienne et minière, du Congrès et de la Marine (c'est-à-dire les intérêts pro-britanniques) dans le cas de Balmaceda, et de l’oligarchie agro-exportatrice, des militaires anti-peronistes, des secteurs libéraux, syndicats et de l’Union Civique Radicale dans le cas de Perón.

Après près d’un siècle de méfiance et de boycott de la politique centrée sur l’État, en 1948, la Comisión Económica para América Latina y el Caribe (CEPAL) a été créée à Santiago du Chili, ravivant les idées de List sur le protectionnisme économique sélectif et le développement industriel endogène, sous l’influence notamment du célèbre économiste Raúl Prebisch (photo), qui fut secrétaire exécutif de l’organisation entre 1950 et 1963. 202210141538.jpgPrebisch, pionnier dans l’étude du structuralisme économique et de la théorie de la dépendance, a formulé une hypothèse pertinente sur la dégradation des termes de l’échange entre les économies industrialisées et les pays producteurs de matières premières.

Aujourd’hui, dans le monde postlibéral, les idées de Friedrich List, notamment son insistance sur le protectionnisme et le développement industriel dirigé par l’État, résonnent profondément dans le modèle économique chinois, caractérisé par la planification centralisée, la protection des industries stratégiques, d’énormes investissements dans des projets d’infrastructure mondiaux comme l’Initiative Belt and Road, et la priorité donnée à l’éducation technoscientifique dans le cadre des "Quatre Modernisations", une politique ambitieuse depuis 1978 visant à transformer la Chine en une grande puissance moderne. Depuis les réformes de Deng Xiaoping, qui ont ouvert la Chine au marché mondial tout en maintenant un contrôle étatique fort, jusqu’à la direction de Xi Jinping, qui a consolidé cette vision avec un accent mis sur l’autosuffisance et l’influence sur le reste du monde, la Chine a adapté ces principes aux défis du 21ème siècle, projetant un modèle de développement efficace et souverain stratégiquement.

Ha-Joon_Chang_profile.jpgLes économistes contemporains tels que Ha-Joon Chang (photo), Erik S. Reinert, Dani Rodrik, Mariana Mazzucato, Joseph Stiglitz, Alice Amsden, Robert Wade, Justin Yifu Lin, Sanjaya Lall et Keun Lee renforcent les thèses de List, en promouvant le protectionnisme et les politiques publiques industrielles, en opposition aux économistes et écoles libérales: l'école de Chicago, l'école autrichienne, les théories néoclassiques et le Consensus de Washington, qui privilégient le libre marché et une intervention étatique minimale, aggravant ainsi les défauts de la mondialisation désordonnée (augmentation des inégalités, instabilité financière, migrations massives, stagnation des économies industrialisées et pauvreté dans les pays en développement).

Dani-Rodrik-American-4005981306.jpgChang et Reinert ont démontré que le protectionnisme historique a catalysé l’industrialisation dans les nations développées; Rodrik (photo) et Stiglitz ont montré les limites du marché dérégulé pour générer un développement équitable; Mazzucato souligne le rôle de l’État entrepreneurial dans l’innovation technologique (exemple notable: la Silicon Valley aux États-Unis), réfutant la suprématie du secteur privé; et Amsden, Wade, Lin, Lall et Lee mettent en avant le succès des “tigres asiatiques” (Corée du Sud, Hong Kong, Singapour et Taïwan) grâce à des politiques étatiques ciblées, dépassant les résultats des recettes libérales et consolidant un paradigme de souveraineté économique et de compétitivité mondiale.

Le Décalogue de Friedrich List

1. Protection de l’industrie nationale : Les pays en développement doivent mettre en place des droits de douane et des politiques protectionnistes pour favoriser la croissance de leurs industries locales face à la concurrence étrangère.

2. Priorité au pouvoir productif : Le développement économique doit se concentrer sur l’augmentation de la capacité de production d’une nation, et non seulement sur l’accumulation de richesse immédiate.

3. Différenciation entre les économies : Les politiques économiques doivent s’adapter au niveau de développement de chaque pays ; ce qui profite à une nation industrialisée n’est pas toujours approprié pour une économie en développement.

4. Importance de l’industrie manufacturière : La fabrication est essentielle pour le progrès économique, car elle génère de l’innovation, de l’emploi et une richesse durable.

5. Infrastructures comme base du développement : L’État doit investir dans les infrastructures (transports, communications) pour intégrer les marchés internes et renforcer l’économie.

6. Éducation et formation technique : Le développement économique nécessite une population instruite et qualifiée, capable de stimuler l’innovation et la productivité.

7. Intervention stratégique de l’État : Le gouvernement doit jouer un rôle actif dans la planification et la promotion de secteurs économiques stratégiques.

8. Unité économique nationale : L’intégration des marchés internes et la coopération entre régions au sein d’une nation sont essentielles à la croissance économique.

9. Critique du libre-échange absolu : Le libre-échange profite principalement aux nations déjà industrialisées, tandis que les économies émergentes ont besoin d’une protection temporaire.

10. Vision à long terme : Les politiques économiques doivent privilégier le développement durable et l’indépendance économique de la nation plutôt que les gains à court terme.

lundi, 22 décembre 2025

Bruxelles contre l'alimentation européenne. Plus d'armes et moins de pain

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Bruxelles contre l'alimentation européenne. Plus d'armes et moins de pain

Enrico Toselli

Source: https://electomagazine.it/bruxelles-contro-il-cibo-europe...

90 milliards d'euros. C'est le montant du prêt accordé à Zelensky pour poursuivre la guerre. Une somme que l'Union européenne devra trouver d'une manière ou d'une autre. 90 milliards d'euros. C'est le montant de la réduction décidée par l'Union européenne pour pénaliser le secteur agricole du Vieux Continent. Curieuse coïncidence entre les chiffres. Curieuse cette volonté des esprits étroits de Bruxelles de détruire un secteur qui est véritablement fondamental pour assurer la souveraineté européenne. Car sans agriculture, sans nourriture, il n'y a pas de souveraineté.

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D'ailleurs, les images diffusées par les journaux télévisés étaient éloquentes. À l'intérieur du palais, élégants, méprisants, les eurocrates. Occupés à décider où prendre l'argent des autres et à qui le donner. À l'extérieur, en colère, les agriculteurs qui défendaient leur travail, leur labeur. Mais ils défendaient aussi la culture européenne, qui est aussi déterminée par la nourriture, l'alimentation.

Des agriculteurs qui doivent respecter des règles de plus en plus strictes, tandis que les eurocrates voudraient autoriser l'entrée en Europe de produits cultivés selon des méthodes interdites à nos agriculteurs européens.

Mais il est évident que la viande aux œstrogènes, provenant d'animaux élevés dans d'autres pays où les règles du travail sont également très différentes, coûterait moins cher. Et elle serait à la portée des Européens qui, grâce aux imbéciles de Bruxelles, deviendront de plus en plus pauvres.

Des imbéciles qui interdisent à leurs sujets d'utiliser les poêles à bois pour se chauffer, car ils polluent. Mais ensuite, ils offrent à la bande de Zelensky des armes qui polluent mille fois plus. Et ils achètent du gaz liquéfié américain, beaucoup plus cher, transporté par des navires qui augmentent la pollution. Tout comme ils pollueront davantage les produits alimentaires acheminés à travers les océans pour remplacer la nourriture européenne.

L'important, cependant, est de poursuivre la guerre.

Les 90 milliards qui n’existent pas – le financement de l’Ukraine par l’Europe comme placebo politique

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Les 90 milliards qui n’existent pas – le financement de l’Ukraine par l’Europe comme placebo politique

Elena Fritz

Bron: https://pi-news.net/2025/12/90-milliarden-die-es-nicht-gi... 

"Merci, cher Friedrich !": L’Ukraine, le pays le plus corrompu du monde, reçoit de l’UE un prêt sans intérêt de 90 milliards d’euros.

Les décisions nocturnes du Conseil européen nous laissent surtout une impression: celle d’un théâtre politique destiné à donner une illusion d’action, là où il ne reste pratiquement plus d’espace de manœuvre. Beaucoup de problèmes semblent résolus, beaucoup de déclarations paraissent grandes – mais en y regardant de plus près, il reste étonnamment peu de substance.

Commençons par le supposé rassurant: les avoirs d’État russes gelés en Europe restent intacts. Malgré des mois de débats, de charges morales et de menaces politiques, Bruxelles n’a finalement pas osé franchir cette ligne juridique. Cela n’est pas tant l'expression de principes propres à l’État de droit, mais plutôt la reconnaissance que la confiscation formelle d’actifs étrangers serait un précédent dangereux – pour le marché financier européen, la confiance des investisseurs internationaux et la crédibilité fragile des garanties de propriété occidentales.

Au lieu de cela, on a présenté un chiffre qui capte mieux l’attention dans les médias: 90 milliards d’euros pour 2026 et 2027, "provenant du budget de l’UE". C’est là que commence le problème.

Car ce budget de l’UE existe déjà – et il est largement planifié. Le cadre financier pluriannuel 2021-2027 comprend au total 1074 milliards d’euros, soit environ 153 milliards par an. Pour l’Ukraine, aucune ligne budgétaire spécifique n’est prévue. Si l’on mobilisait effectivement 90 milliards d’euros en deux ans, cela représenterait jusqu’à 30% du budget annuel – une ampleur qui bouleverserait fondamentalement la structure financière actuelle de l’UE.

Le budget de l’UE n’est pas un simple coffre-fort, mais le résultat de compromis politiques. Il est principalement alimenté par les contributions de quelques payeurs nets – notamment l’Allemagne, la France, l’Italie et l’Espagne – et finance des politiques classiques de l’UE: subventions agricoles, projets de transport et d’infrastructure, développement régional. De grands bénéficiaires comme la Pologne en profitent tout particulièrement en chiffres absolus, tandis que des pays comme l’Estonie en profitent en proportion de leur PIB.

Un déplacement massif en faveur de l’Ukraine entraînerait donc inévitablement des perdants au sein de l’UE. Ce que ce vote nocturne ne dit pas. Reste à voir si les programmes existants seront coupés, si de nouvelles dettes seront contractées ou si les règles du budget seront simplement assouplies. Jusqu’à présent, le budget de l’UE est officiellement en équilibre; un déficit structurel serait politiquement délicat et, du moins juridiquement, nécessiterait des explications.

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Il n’est donc pas exclu qu’un troisième scénario se dessine: que la référence au "budget de l’UE" soit avant tout rhétorique – un signal politique sans financement assuré. Un simple marqueur pour gagner du temps.

Dans ce contexte, le mécanisme de remboursement choisi est particulièrement révélateur. L’Ukraine remboursera les fonds lorsque la Russie versera des réparations. Cela semble juridiquement net, politiquement élégant – mais c'est économiquement une fiction. En réalité, il s’agit de subventions assorties d’une promesse morale de remboursement. Personne à Bruxelles ne compte sérieusement sur un tel paiement.

Il ne reste donc du grand vote qu’une seule chose: un report. La question fondamentale – qui doit financer à long terme le budget de l’État ukrainien et ses besoins militaires – n’a pas reçu de réponse, mais à été reportée à l’avenir. Chaque euro devra être négocié durement, avec une opposition intérieure croissante dans les États payeurs nets.

L’UE voulait montrer sa détermination, mais a plutôt révélé son épuisement financier. Le problème central n’est pas le manque d’argent, mais le manque de sincérité quant aux limites du possible.

Figures féminines et masculines du temps liminal de l'hiver

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Figures féminines et masculines du temps liminal de l'hiver
 
 
Perchta, Holda, Frau Holle, les figures féminines
 
Au cœur des Rauhnächte se tient un ensemble de figures féminines qui ne relèvent ni du simple folklore ni d’une mythologie figée, mais d’un système cohérent de représentations liées au temps liminal de l’hiver.
 
Ces figures incarnent la surveillance, la sanction, la protection et la transmission au moment précis où l’ancien cycle s’achève et où le nouveau n’est pas encore pleinement advenu.
 
Leur rôle s’enracine dans une conception du monde où les douze nuits constituent un intervalle dangereux, hors du temps ordinaire, nécessitant une vigilance accrue et le respect strict d’un ordre rituel.

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Parmi elles, Perchta, Holda, Frau Holle ne doivent pas être comprises comme des personnages isolés, mais comme les manifestations régionales et historiques d’une même fonction féminine archaïque, liée au foyer, au fil du destin et à la frontière entre les mondes.

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La figure de Perchta, particulièrement présente dans l’espace alpin et bavarois, est sans doute la plus redoutée.
Elle apparaît durant les Rauhnächte comme une souveraine nocturne, parfois belle et lumineuse, parfois monstrueuse et punitive, une sorcière.
 
Cette ambivalence n’est pas une contradiction, mais l’expression même de sa fonction : Perchta récompense ceux qui ont respecté les règles du temps sacré et punit ceux qui les ont transgressées.
 
Les récits la décrivent inspectant les maisons durant les douze nuits, vérifiant si les travaux ont été achevés avant Noël, si le filage est terminé, si l’ordre règne dans le foyer.

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Les fautes les plus graves concernent le travail du fil et de la quenouille, activités strictement interdites durant cette période, car elles touchent symboliquement au fil de la vie et au destin de l’année à venir.
 
La sanction attribuée à Perchta, ouvrir le ventre des fautifs et le remplir de paille ou de déchets, appartient à un langage mythique ancien où la transgression rituelle appelle une punition corporelle symbolisant la rupture de l’ordre cosmique.
 
Dans les régions plus septentrionales du monde germanique, cette même fonction apparaît sous les traits de Holda (la noble Dame) ou Frau Holle.
 
Dame Holda, connue notamment par les traditions de l’Allemagne centrale, est étroitement liée à la neige, au foyer et au travail textile.
 
Comme Perchta, elle surveille le respect des interdits hivernaux et récompense les ménagères diligentes.
 
Elle secoue ses draps pour faire tomber la neige, image qui relie le monde domestique à l’ordre naturel.
 
La neige n’est pas ici un simple phénomène météorologique, mais le signe visible d’une activité féminine surnaturelle, rappelant que le monde est encore en cours de tissage.
 
Elle recouvre, assure le sommeil réparateur de la Terre, assure la fertilité à venir, d'où l'image de l'édredon, qui recouvre les dormeurs et protège la fertilité du couple.
 
Frau Holle incarne une autorité discrète mais omniprésente, moins terrifiante que Perchta dans ses formes tardives, mais tout aussi exigeante dans ses fonctions.

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Derrière ces figures folkloriques se profile une strate plus ancienne encore, celle de la déesse Frigg, épouse du dieu souverain dans la mythologie germanique.
 
Frigg est la fileuse par excellence, celle qui connaît le destin des hommes et qui tisse le fil des vies.
 
Son lien avec les Rauhnächte apparaît dans l’idée que chacune des douze nuits correspond à un mois de l’année à venir, et que durant ces nuits, le destin de l’année est filé.
 
Travailler le fil pendant cette période reviendrait à interférer avec l’œuvre divine, à se substituer à la déesse dans une tâche qui dépasse l’humain.
 
C’est pourquoi le rouet et la quenouille doivent être rangés avant Noël, et c'est pourquoi les femmes qui n’ont pas achevé leur filage avant l’entrée dans les Rauhnächte s’exposent à des figures punitives telles que Perchta ou la Roggenmuhme.
 
Le fil devient ici l’image la plus claire du temps lui-même, continu, fragile, susceptible d’être rompu si l’on agit au mauvais moment.
 
Ces figures féminines ne sont pas seulement des surveillantes ou des punisseuses ; elles sont aussi des gardiennes du foyer et de la continuité.
 
Leur autorité s’exerce à l’intérieur de la maison, espace clos et protégé durant les Rauhnächte, opposé au dehors dangereux où errent la Chasse sauvage et les âmes sans repos.
 
Elles incarnent la loi intérieure, celle qui exige le calme, l’ordre, la retenue et la préparation.
 
La maison bien tenue, le travail achevé, le feu entretenu et le silence respecté constituent autant d’actes d’allégeance à ces puissances féminines, qui assurent en retour protection et fertilité pour l’année nouvelle.
 
Avec la christianisation progressive, ces figures n’ont pas disparu, mais ont été transformées.
 
Leur violence rituelle a été atténuée, leur autorité déplacée vers des figures plus compatibles avec la morale chrétienne, sans que leur fonction fondamentale ne soit totalement effacée.

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Perchta devient parfois une simple figure de conte, Frau Holle une fée bienveillante, tandis que la dimension cosmologique de Frigg se dissout dans des interdits domestiques dont le sens originel se perd peu à peu.
 
Pourtant, la cohérence demeure lisible : ces figures féminines gouvernent le seuil, elles règnent sur le temps suspendu, et rappellent que le passage d’une année à l’autre ne peut s’effectuer sans discipline ni respect des rythmes invisibles.
 
Ainsi, les Rauhnächte apparaissent comme un temps placé sous une souveraineté féminine, non pas au sens sentimental ou maternel, mais au sens le plus archaïque du terme : celui de la maîtrise du foyer, du destin, de l'invisible.
 
Avec l’irruption des figures masculines de la Chasse sauvage et des exécuteurs nocturnes, ce sont elles qui tiennent la clef du passage, qui ferment l’ancien monde et préparent silencieusement le nouveau.
 
Leur présence rappelle que, dans l’imaginaire ancien, le renouvellement du temps ne se conquiert pas par le bruit ou la force, mais par l’ordre, la retenue et l’acceptation d’un temps où l’humain doit s’effacer devant les puissances qui tissent le monde.

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Chasse sauvage, Knecht Ruprecht, Hans Trapp, Weihnachtsmann : les figures masculines
 
La Chasse sauvage occupe une place centrale dans l’imaginaire hivernal, non comme un simple récit d’épouvante, mais comme l’expression dynamique d’un moment du cycle où le monde est mis en mouvement, secoué et symboliquement détruit afin de permettre sa renaissance.
 
Connue sous les noms de Wilde Jagd, Wütendes Heer, conduite par le Wilder Jäger, elle traverse les nuits du coeur de l'hiver comme une tempête surnaturelle, emplissant l’air de vacarme, de cris, de claquements et de vents violents.
 
La Chasse sauvage est avant tout l’irruption contrôlée du chaos, nécessaire à la régénération du monde, et non une simple punition morale.
 
Dans de nombreuses traditions, la Chasse est menée par une figure souveraine, parfois identifiée à Wodan, parfois à un chasseur, à un chef spectral, menant des seigneurs damnés ou des cavaliers nocturnes.
 
Le meneur incarne la force en mouvement, la rupture, la violence active qui traverse l’espace ouvert, les forêts, les chemins et le ciel.
 
Il emporte avec lui les âmes errantes, les morts sans repos, les figures marginales et tout ce qui n’a pas trouvé sa place dans l’ordre achevé de l’année finissante.
 
Toutefois, cette lecture ne saurait être considérée comme unique ni originelle.
 
La chasse sauvage relève d’un niveau plus archaïque participant d’un même processus cosmique.
 
Dans plusieurs régions, c’est Perchta elle-même qui conduit la Chasse sauvage, révélant une strate peut-être encore plus ancienne du mythe, où la souveraineté féminine ne se limite pas à la protection domestique, mais englobe aussi la violence rituelle et la capacité de destruction nécessaire au renouvellement.
 
Cette coexistence de meneurs masculins et féminins ne doit pas être interprétée comme une opposition de principes, mais comme l’expression parallèle de fonctions équivalentes.

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La Chasse sauvage n’est pas genrée dans son essence ; elle est un rite cosmique en mouvement.
 
Qu’elle soit conduite par une figure masculine ou féminine, elle remplit la même tâche : arracher, disperser, effrayer, purger. Dans cette perspective, destruction et fertilité ne sont pas antagonistes, mais indissociables.
 
La violence de la Chasse participe d’un ancien fonds indo-européen où la mort rituelle précède toujours la renaissance, à l’image des tempêtes hivernales qui précèdent le retour du printemps, ou du labour qui déchire la terre afin de la rendre féconde.
 
La poursuite nocturne, le fracas et la circulation des forces invisibles agissent comme un grand nettoyage symbolique, débarrassant le monde des scories de l’année écoulée.

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À cette Chasse sauvage est presque toujours associée une multitude d’êtres surnaturels hurlants et effrayants, qui en constituent la horde chaotique et bruyante. Ces figures, connues sous des appellations diverses selon les régions, trouvent leur expression la plus célèbre dans les Krampus et les créatures apparentées qui accompagnent les processions hivernales. Cornus, velus, masqués, armés de chaînes, de cloches et de fouets, ils ne représentent pas des démons au sens théologique chrétien, mais des puissances hivernales archaïques, incarnations du froid, de la nuit, de la mort et de l’indompté.
 
Leur violence n’est pas morale, mais cosmique.
 
Hurlants, excessifs, transgressifs, ils rappellent directement la horde déchaînée de la Wilde Jagd, dont ils sont la manifestation visible et incarnée.
 
Ces êtres peuvent être compris à la fois comme des génies sauvages de la forêt, des forces élémentaires de l’hiver, et comme les âmes des défunts errants, revenues hanter le monde des vivants durant ce temps où les frontières entre les mondes sont ouvertes. Leur présence souligne que la souveraineté exercée durant les Rauhnächte ne s’exerce jamais seule : elle s’entoure toujours d’une multitude chaotique, indispensable à la purge rituelle du cycle.
 
Certains personnages parcourent l'hiver, distribuant punitions et récompenses lorsque arrivent les douze nuits.
Ils relèvent de cette même logique.

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Le Bluatiger Dammerl, associé à la Thomasnacht, incarne la violence inaugurale du cycle, celle qui ouvre les Rauhnächte par le sang et l’effroi.
 
Il ne s’agit ni d’un simple croquemitaine ni d’un personnage moralisateur, mais d’une condensation extrême de la brutalité requise pour rompre avec l’ancien ordre.
 
Les traditions le décrivent fréquemment armé d’un énorme maillet ou d’une lourde masse, instrument de frappe brutale et immédiate, dont la portée symbolique dépasse largement la simple intimidation. Cet attribut renvoie clairement à l’imaginaire du dieu germanique Donar, connu dans le monde nordique sous le nom de Thor, maître de l’orage et porteur du marteau.
 
Donar est celui qui traverse le ciel en grondant, frappe la terre de sa masse et, par la violence de la tempête, fait tomber la pluie fécondante en été.

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Le maillet du Dammerl condense cette même logique : une violence céleste, sonore et terrifiante, qui n’est pas purement destructrice mais participe d’un cycle de régénération.
 
Comme l’orage qui brise pour nourrir, le coup du maillet marque, ouvre et purifie, confirmant que le Bluatiger Dammerl conserve l’empreinte d’un fonds mythique ancien où la frappe, le tonnerre et le sang sont étroitement liés à la fertilité et au renouvellement du monde.

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Dans l’espace rhénan et alsacien, Hans Trapp joue un rôle comparable, accompagnant les figures lumineuses de Noël comme leur envers sombre et complémentaire : là où l’une récompense et éclaire, l’autre éprouve, menace et corrige.
 

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Plus au nord, Knecht Ruprecht erre aux marges de la communauté en rappelant par la peur que le monde n’est pas encore stabilisé.
 
Pelzmärtel (le Martin à fourrure) est un genre de Weihnachtsmann ou Knecht Ruprecht, couvert de fourrure ou d'un manteau à fourrure. Son nom fait référence à St Martin.
 
Même la figure apparemment adoucie du Weihnachtsmann conserve, sous des formes neutralisées, cette dimension ancienne de jugement saisonnier et de collecte, héritée de figures hivernales plus rudes.
 
Il importe toutefois de préciser que le Père Noël moderne ne saurait être compris comme un avatar direct et linéaire de Wodan, malgré les rapprochements fréquents opérés dans les discours contemporains.
 
Il relève plutôt de l’évolution récente d’un personnage archétypal ancien, associé de longue date à la circulation nocturne, à la souveraineté hivernale et à la distribution saisonnière, archétype auquel Wodan a été rattaché en tant que conducteur de la Chasse sauvage.
 
La christianisation a largement récupéré et réorienté cette figure archétypale à travers des figures de saints, notamment Nicolas de Myre (Saint Nicolas) et Martin de Tours (Saint Martin), dont les légendes ont absorbé des motifs païens plus anciens : chevauchée hivernale, dons nocturnes, protection des enfants, contrôle saisonnier des comportements.
 
Ces figures saintes n’ont pas effacé les structures antérieures, mais les ont recouvertes d’une lecture morale et théologique nouvelle.
 
La figure actuelle du Père Noël est ainsi le résultat d’un long processus de neutralisation et de sécularisation, où subsiste néanmoins l’ombre d’un juge saisonnier et d’un collecteur hivernal.

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On notera enfin que le houx, plante emblématique de l’hiver et du temps sombre, est traditionnellement associé à Wotan.
Toujours vert au cœur de la saison morte, armé de feuilles piquantes et de baies rouges rappelant le sang, le houx incarne à la fois la persistance de la vie dans la nuit hivernale et la dimension dangereuse de cette vitalité.
 
Dans l’imaginaire germanique, il se rattache à la souveraineté de Wotan, dieu des morts, des tempêtes, qui traverse le monde lorsque la végétation ordinaire est en sommeil. L’usage du houx comme plante protectrice durant la période de Noël ne relève donc pas d’un simple décor, mais d’une survivance symbolique : il marque la présence d’une force vitale âpre, tranchante et indomptée, capable de repousser le chaos tout en appartenant pleinement au règne de l’hiver. Sa récupération chrétienne comme ornement festif prolonge cette ambivalence, transformant un signe de puissance wotanique et de liminalité mortifère en symbole de protection et de continuité, sans en effacer totalement la charge archaïque.

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À la périphérie de ce personnage central gravitent encore des figures mineures, telles que les gnomes ou lutins de Noël, qui peuvent être compris comme des paraphrases tardives des Albes germaniques.
 
Ces êtres intermédiaires, ni pleinement divins ni humains, attachés à la maison, à la nuit et à la liminalité du temps hivernal, témoignent de la persistance d’un monde invisible peuplé d’entités subalternes, survivance discrète mais tenace de l’ancien imaginaire germanique.
 
Comprendre la Chasse sauvage dans le contexte des Rauhnächte impose ainsi de dépasser toute lecture dualiste simpliste. Masculin et féminin n’y sont pas des principes opposés, mais des modes d’expression parallèles d’une même nécessité cosmique.
La violence n’est pas expulsée hors du cycle ; elle en constitue un moment essentiel.
 
Perchta peut être à la fois la souveraine qui inspecte les maisons et celle qui mène la Chasse, tout comme une figure masculine peut incarner la même fonction de purge et de mise en mouvement.
 
La maison, close, protégée par le feu et le silence, n’est pas l’antithèse de la Chasse sauvage, mais son complément nécessaire : tandis que l’extérieur est livré à la tempête rituelle, l’intérieur préserve le germe de la continuité.
 
Ainsi comprise, la Chasse sauvage apparaît comme l’un des rites les plus puissants du cycle hivernal, non parce qu’elle terrifie, mais parce qu’elle met en scène l’unité profonde de la vie et de la mort, de la destruction et de la fertilité.
 
Elle rappelle que la renaissance ne surgit jamais du calme seul, mais d’un passage violent et nécessaire, orchestré par des puissances anciennes qui, sous des formes multiples et changeantes, continuent de structurer l’imaginaire du solstice et des Rauhnächte.

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dimanche, 21 décembre 2025

Christkindl et Sainte Lucie

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Christkindl et Sainte Lucie
 
 
Avec la christianisation avancée de l’espace germanique, les figures féminines qui gouvernaient traditionnellement le temps liminal des Rauhnächte ne furent ni supprimées ni oubliées, mais profondément transformées.
 
Leur fonction cosmologique (veiller sur le seuil de l’année, garantir la continuité du foyer, apporter la lumière dans la nuit) fut conservée, tandis que leurs aspects les plus archaïques et les plus violents furent neutralisés.
 
C’est dans ce contexte qu’apparaît la figure du Christkindl, qui ne doit en aucun cas être compris comme un enfant.
 
Le Christkindl est, dès l'origine, une figure féminine, lumineuse, silencieuse et nocturne, angélique, créée dans l’espace luthérien comme substitut chrétien aux anciennes souveraines féminines des Rauhnächte.
 
Son rôle n’est pas d’incarner l’enfance, mais la lumière ordonnée et la pureté rituelle au cœur du temps suspendu de l’hiver.
 
Le Christkindl apparaît dans les territoires allemands protestants aux XVIᵉ et XVIIᵉ siècles, notamment dans le contexte de la Réforme, comme une réponse théologique et symbolique à la fois au culte des saints et aux figures populaires jugées trop violentes ou trop païennes.

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Là où Perchta, Holda ou Holle inspectent les maisons et sanctionnent les transgressions, le Christkindl se manifeste comme une présence discrète et bienveillante, qui ne punit plus mais récompense. Une image de l'amour et de la bienveillance du Christ. Toutefois, cette douceur ne doit pas masquer la continuité de fonction.
 
Le Christkindl intervient lui aussi à un moment précis du calendrier, durant la nuit ou à son seuil, exige le silence, la retenue et l’ordre préalable du foyer, et n’apparaît que là où l’ancien cycle a été correctement clos.
 
Il demeure une figure du contrôle rituel, mais d’un contrôle intériorisé, compatible avec la morale chrétienne et particulièrement destiné au monde domestique.

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Cette figure féminine lumineuse ne procède pas d’une dévotion christologique directe, mais d’une ré-élaboration consciente des anciennes puissances féminines du seuil.
 
Sa blancheur, sa clarté, sa douceur, son absence de bruit, son lien étroit avec la maison et la distribution de dons sont autant d’éléments hérités des figures archaïques, dont la souveraineté s’exerçait déjà sur le foyer et le destin hivernal.
 
Le Christkindl n’est pas une rupture, mais une transposition confessionnelle: la même autorité féminine, désormais dépourvue de violence rituelle explicite, mais toujours chargée d’assurer le passage de l’année et la protection de l’espace domestique.
 
C’est dans ce cadre qu’il convient également de comprendre la figure de Lucie de Syracuse, telle qu’elle s’est imposée en Suède et dans le monde scandinave.

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La Sainte Lucie suédoise, jeune femme vêtue de blanc, portant une couronne de bougies et apparaissant dans la nuit pour apporter lumière et nourriture, ne constitue pas à proprement parler d'une survivance directe d’un culte ancien distinct, mais une adaptation tardive du modèle du Christkindl luthérien.
 
Dans l’espace nordique, cette figure féminine a été déplacée dans le calendrier et fixée au 13 décembre, date qui correspondait, dans l’ancien calendrier julien, au solstice d’hiver ou à son voisinage immédiat.
 
Le choix de sainte Lucie comme support hagiographique s’explique par l’évidence de son nom, issu du latin lux, la lumière, mais la fonction symbolique dépasse largement la martyre antique.
 
La Lucie scandinave reprend point par point les attributs du Christkindl : féminité lumineuse, blancheur, silence, présence nocturne, lien exclusif avec le foyer et apport de nourriture ou de dons. Elle n’est ni punitive ni maternelle au sens strict, mais ordonnatrice, garante d’un passage maîtrisé au cœur de l’hiver. Sa procession domestique, loin d’être une simple coutume festive, rejoue la mise en scène d’une lumière fragile qui traverse la maison à un moment où l’obscurité domine encore le monde extérieur. Comme le Christkindl, elle suppose un intérieur préparé, propre, calme, et un respect implicite des règles du temps hivernal.

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Il convient toutefois de préciser que cette transformation ne saurait être comprise comme un simple remplacement des anciennes figures féminines par des figures chrétiennes nouvelles.
 
Le Christkindl et la Lucie scandinave ne se substituent pas à Perchta ; ils en incarnent la face lumineuse, isolée et rendue compatible avec l’ordre chrétien.
 
Dans la tradition ancienne, Perchta est fondamentalement ambivalente: elle possède deux visages indissociables, l’un lumineux et bienveillant, l’autre sombre et dangereux.
 
La Perchta claire, blanche, ordonnatrice, protectrice du foyer et dispensatrice de dons, coexiste avec la Perchta noire, punitive, sorcière, ouvreuse de ventres et châtieuse des transgressions.
 
Cette dualité ne relève pas d’une opposition morale, mais d’une souveraineté totale sur le seuil de l’année, où protection et destruction procèdent d’une même autorité.
 
Le christianisme n’a pas supprimé cette figure, mais en a opéré une dissociation: la face lumineuse a été conservée et sublimée sous les traits du Christkindl puis, dans l’espace nordique luthérien, sous ceux de Lucie, tandis que la face sombre a été refoulée, diabolisée ou reléguée dans les marges du folklore sous forme de sorcières, de figures nocturnes ou de récits d’épouvante.
 
Le Christkindl n’est donc pas l’anti-Perchta, mais Perchta transfigurée, dépouillée de sa violence rituelle explicite et réduite à sa fonction positive de gardienne du foyer, porteuse de lumière et garante de la continuité hivernale.
 
Cette opération de sélection symbolique permet de comprendre pourquoi la souveraineté féminine demeure centrale le soir de Noël et dans le cycle des Rauhnächte, tout en changeant de visage : ce n’est pas la fonction qui disparaît, mais son expression, adaptée à un nouvel horizon religieux.

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Cette face lumineuse tardive que prennent le Christkindl et la Sainte Lucie nordique ne renvoie pas uniquement à Frigg, déesse du foyer, de l’ordre domestique, de la divination et du destin, mais convoque également l’autre pôle du féminin germanique, celui de Freyja, figure de la jeunesse, de la beauté, de la fertilité et de la puissance vitale.
 
Là où Frigg incarne la mère, l’épouse et la continuité, Freyja représente la femme désirante, lumineuse et féconde, associée à l’or, à la magie et au renouveau.
 
Cette polarité n’est pas une opposition, mais une complémentarité constitutive du féminin souverain.
 
Perchta apparaît précisément comme la synthèse populaire de ces deux pôles : souveraine hivernale ambivalente, elle est à la fois la vieille sorcière sombre, punitive et redoutable, proche de la mort et de la loi du fil, et la jeune reine blanche, bienveillante et ordonnatrice, porteuse de fécondité et de renouveau.

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Le christianisme n’a pas détruit cette figure, mais en a opéré une dissociation: la face lumineuse, jeune et désirable, relevant de Freya, a été isolée, purifiée et rendue acceptable sous les traits du Christkindl puis de Lucie, tandis que la face sombre, hivernale et terrifiante, relevant davantage de Frigg, a été refoulée dans la figure de la sorcière ou de la Perchta noire.
 
La persistance de motifs tels que le chat de Noël, animal traditionnellement associé à Freyja, dans les traditions nordiques de Yule et de Noël, confirme que cette dimension n’a jamais disparu : elle a été déplacée, neutralisée et fragmentée, mais continue de hanter le cycle hivernal comme la trace discrète d’un féminin lumineux, fertile et souverain, indispensable à la renaissance du monde après les nuits sombres.
 
Elles témoignent de la capacité des sociétés à transformer des structures symboliques très anciennes sans les détruire, en substituant à la crainte une douceur ordonnée, à la sanction une récompense, tout en conservant l’essentiel : la reconnaissance d’un temps où l’humain doit se tenir en retrait, dans le silence et la lumière maîtrisée, tandis que le monde se prépare à renaître.

Weihnachten, Rauhnächte, Loostagen, 's kleine Johr: Aux origines des coutumes de Noël en Alsace, une affaire de calendrier

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Weihnachten, Rauhnächte, Loostagen, 's kleine Johr: Aux origines des coutumes de Noël en Alsace, une affaire de calendrier
 
 
La nuit qui précède l’Épiphanie marque traditionnellement la fin des redoutées Rauhnächte, ces nuits situées entre l’ancienne et la nouvelle année, chargées depuis des siècles d’un sens particulier. Elles incarnent à la fois l’achèvement d’un cycle et l’attente du renouveau, un temps d’incertitude où l’ordre du monde semble vaciller avant de se recomposer.
 
Bien avant leur intégration au calendrier chrétien, ces nuits étaient déjà investies d’une forte valeur symbolique, enracinée dans une conception ancienne du temps et du cosmos.
 
On croyait que, durant cette période, les frontières entre le visible et l’invisible s’amenuisaient, que les animaux pouvaient parler, que les rêves prenaient une valeur prophétique et que l’année à venir se laissait entrevoir à travers des pratiques divinatoires dont le coulage de plomb du réveillon n’est qu’un vestige tardif.
 
Pour se protéger des forces errantes censées parcourir ces nuits, on faisait grand bruit, on sonnait des cloches, on frappait des objets métalliques, et plus tard on tira des pétards et des feux d’artifice, tandis que le christianisme introduisit l’aspersion d’eau bénite et l’encensement rituel des maisons afin d’écarter toute influence néfaste.

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Les Rauhnächte, également appelées Raunächte, sont aussi connues sous les noms de Zwölfnächte ou Zwölfte (les douze nuits), Glöckelnächte (nuits des clochettes), Innernächte ou Unternächte, Zwischen den Jahren, Loostage, et en Alsace sous l’appellation de s’kleine Johr, la "petite année".
 
Elles désignent un ensemble de nuits entourant le passage à la nouvelle année, auxquelles le folklore germanique et alpin attribue une signification exceptionnelle.
 
Le plus souvent, elles correspondent aux douze jours de Noël, du 25 décembre jusqu’à l’Épiphanie, le 6 janvier, mais dans certaines régions, la période retenue commence dès le solstice d’hiver ou la nuit de la Saint-Thomas, le 21 décembre, et s’achève au Nouvel An.
 
Il arrive aussi que la Thomasnacht ne soit pas incluse dans le décompte.
 
Selon les croyances populaires, les puissances tempétueuses propres au cœur de l’hiver se retireraient dans la nuit du 6 janvier, moment où la Wilde Jagd, la Chasse sauvage, cesserait ses courses nocturnes.

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Les douze Rauhnächte servaient également de base à des règles paysannes : conformément à la pauren practick, chacune de ces nuits était censée annoncer le temps de l’un des douze mois de l’année à venir, inscrivant ainsi l’avenir météorologique dans ce temps suspendu.
 
L’origine profonde de cette période ne réside cependant ni dans le christianisme ni dans un folklore tardif, mais dans un problème fondamental de mesure du temps.
 
Une année fondée sur douze mois lunaires compte 354 jours, tandis que l’année solaire en compte 365.
Il existe donc un écart de onze jours, parfois conceptualisés comme douze nuits (les germains comptant en nuits), qui ne s’intègrent pas naturellement dans le cycle ordinaire de l’année.
 
Dans les calendriers lunisolaires simples, qui ne pratiquent pas l’intercalation régulière de mois supplémentaires, ces jours excédentaires sont considérés comme des jours "morts", des jours hors du temps, situés en marge du décompte normal des mois.
 
De nombreuses mythologies considèrent que, durant ces périodes intercalaires, les lois habituelles du monde sont suspendues, rendant les frontières entre les mondes perméables.
 
Ces nuits deviennent alors propices aux rites de protection, de purification et de divination, et il est probable que certaines coutumes liées à la sortie de l’hiver et au carnaval trouvent leur origine dans cette logique de réajustement symbolique du calendrier.

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Le solstice d’hiver, autour du 21 décembre, constitue à cet égard un seuil cosmique majeur.
 
La nuit y atteint sa durée maximale avant que la lumière ne commence lentement à regagner du terrain.
 
Les Rauhnächte s’inscrivent précisément dans cet intervalle critique, après la nuit la plus longue mais avant le retour visible de la clarté, un temps d’attente où le monde semble retenir son souffle.
 
Cette conception se superpose ensuite aux évolutions des calendriers historiques.
 
Dans le calendrier romain primitif, le début de l’année tombait le 1er mars.
 
En 153 av. J.-C., les consuls romains déplacèrent le début de leur mandat au 1er janvier, faisant de cette date le commencement officiel de l’année civile.
 
Avec l’essor du christianisme, de nouvelles tensions apparurent lorsque la fête de Noël fut élevée au rang de moment central de l’année liturgique.
 
Dans le christianisme primitif, la date de la naissance du Christ n’était pas fixée, et ce n’est qu’en 354 apr. J.-C. que l’on trouve la première attestation écrite d’une célébration du 25 décembre à Rome, date à laquelle le pape Libère fixa officiellement la Nativité, en correspondance avec le culte du dieu solaire Sol Invictus, étroitement lié au culte impérial.
 
Si le 1er janvier conserva son statut de début de l’année civile, la nouvelle année liturgique se trouva encadrée par la fête de l’Épiphanie, le 6 janvier, renforçant le caractère intermédiaire de la période située entre Noël et cette date.
 
Au concile de Tours, cette période fut rattachée au dodécaéméron liturgique, les douze jours et nuits désormais considérés comme particulièrement dignes de vénération, et cette conception est encore attestée à l’époque de l’empereur byzantin Constantin VII Porphyrogénète.

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Jusqu’à la réforme du calendrier par Grégoire XIII, le 6 janvier demeura dans de vastes régions d’Europe la date officielle du Nouvel An, tandis que la fin de l’année était traditionnellement célébrée dès le 24 décembre, laissant subsister un temps perçu comme situé "entre deux années".
 
L’introduction progressive du calendrier grégorien, inégale selon les territoires et les confessions, accentua encore ce flottement chronologique.
 
Ce n’est qu’en 1691 que le pape Innocent XII fixa définitivement le dernier jour de l’année au 31 décembre, jour de la mémoire de saint Sylvestre, stabilisant enfin le cadre civil sans effacer pour autant les représentations populaires héritées.
 
L’étymologie du terme Rauhnacht reflète cette ambivalence.
 
Selon une première interprétation, il dériverait du moyen haut allemand rûch, "rugueux, velu", terme encore présent dans le vocabulaire de la pelleterie sous les formes Rauware ou Rauchware, renvoyant à des êtres hirsutes et inquiétants censés rôder durant ces nuits dangereuses.

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Une autre interprétation le rattache au Rauch, la fumée, et aux pratiques d’encensement rituel des maisons et des étables destinées à éloigner les forces néfastes, pratiques attestées dès le XVIᵉ siècle par Johannes Boemus et Sebastian Franck :
"Die zwolff naecht zwischen Weihenacht und Heyligen drey Künig tag ist kein hauß das nit all tag weiroch rauch in yr herberg mache / für alle teüfel gespenst vnd zauberey.“ (Les douze nuits entre Noël et le jour des Saints Rois, il n’est pas une maison qui ne fasse chaque jour brûler de l’encens dans son logis, contre tous les diables, spectres et sortilèges.)
 
Ces deux lectures ne s’excluent pas : elles expriment un même imaginaire où le danger, la purification et la frontière entre les mondes se rejoignent.
 
Les Rauhnächte apparaissent ainsi comme l’expression d’un temps excédentaire, d’un reste calendaire investi de sens, un moment où l’on suspend l’action, où l’on observe, protège et anticipe.
 
Elles constituent le socle sur lequel se sont greffées figures mythiques, interdits domestiques, rites du feu et traditions alimentaires.
 
Temps dangereux mais nécessaire, elles marquent un passage, un seuil à franchir sans le brusquer, dans la lumière fragile du foyer, tandis qu’au-dehors, la nuit demeure le domaine des puissances errantes.

19:07 Publié dans Traditions | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : traditions, noël, solstice, alsace | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook