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mercredi, 06 février 2013

La criminalité, une conséquence de la pauvreté ?...

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La criminalité, une conséquence de la pauvreté ?...

Ex: http://metapoinfos.hautetfort.com/

Nous reproduisons ci-dessous un texte de Laurent Obertone, cueilli sur Atlantico et consacré à l'absence de lien automatique entre criminalité et pauvreté. Laurent Obertone vient de publier La France orange mécanique, aux éditions Ring, une description hallucinante de l'insécurité et de la violence qui règne dans notre pays...

 

laurent obertone,france,criminalité,immigration,délinquance,pauvreté

 

Non, la criminalité n'est pas forcément liée à la pauvreté

La criminalité est-elle liée à la pauvreté, à l’environnement ou au chômage ? La Creuse (96e), le Cantal (89e), et le Lot (71e), présentent les PIB les plus bas de France. Ce sont aussi les trois départements les moins criminels et délinquants. On peut les comparer avec trois départements parmi les plus criminels et délinquants, c’est à dire la Seine-Saint-Denis (15e), les Bouches-du-Rhône (11e) et le Rhône (3e).

Les départements à forte criminalité que sont le Rhône, l’Essonne, le Val-de-Marne, la Seine-et-Marne, ont des taux de chômage beaucoup plus bas que la Creuse, le Cantal, ou le Lot. Selon l’Apce, 8 000 entreprises se créent par an dans le « 9-3 », qui dispose de pôles économiques gigantesques, et où les investissements de rénovation urbaine sont fréquents et sans équivalent (Anru). Le revenu moyen des ménages y est de 2 186 euros par mois, légèrement supérieur à la moyenne nationale. Saisissante est la comparaison avec la Creuse (1 777 euros par mois). Quant aux bénéficiaires du RSA, ils représentent la même proportion en Seine-Saint-Denis que dans l’Aude, les Ardennes ou encore les Pyrénées-Orientales (Insee, 2010). Au niveau régional, l’Île-de-France, région la plus touchée par la criminalité, présente le troisième taux de chômage le plus bas de France.
« L’exclusion », ce fut d’abord celle des habitants historiques des grands ensembles. Immigrés portugais, polonais, italiens ou manœuvres français, ce sont eux qui ont fui massivement le nouveau communautarisme qui s’installait dans les banlieues dès les années 60. Contrairement à ce qu’affirment certains sociologues, « l’exclusion » est endogame. Tous les plans de mixité sociale, de logements sociaux, de rénovation urbaine et d’aménagement de la ville n’empêcheront jamais les communautés de se regrouper. C’est humain, et on observe ces phénomènes dans tous les pays du monde, quelles que soient les communautés. L’individu n’existe pas sans son groupe. Il ne s’en éloignera que par la contrainte. Les gens ne sont pas figés ou « parqués » dans un environnement soi-disant responsable de leurs déprédations. Un observateur attentif remarquera qu’autour des banlieues il n’y a pas de miradors et de factionnaires prêts à tirer dans le dos des fuyards.
Qu’est-ce qui empêche ces habitants de partir, comme l’ont fait des milliers de Français, d’Italiens ou de Portugais tout aussi modestes ? Des barrages de police ? Le coût de l’immobilier ? À Bobigny, le mètre carré est à 3 200 euros. Il est en moyenne de 6 000 euros à Paris, mais à 1 700 euros à Brest, ou encore à 2 300 euros dans une ville dynamique comme Dijon. Un studio en Seine-Saint-Denis est beaucoup plus cher qu’en province. Les aides sociales permettent largement de s’y établir, d’autant que les logements sociaux provinciaux et ruraux sont plus accessibles. L’Insee, dans son enquête nationale logement 2006, nous apprend qu’après Paris, « c’est en Seine-Saint-Denis que les ménages consacrent la part la plus importante de leur revenu (13 %) à se loger », y compris en secteur HLM (12 %). Des chiffres comparables à ceux de la France métropolitaine pour la location classique et pour les hlm (12,8 % dans les deux cas). On ne peutdonc pas dire qu’un loyer excessivement avantageux les retientdans le « 9-3 ». Comment nos sociologues expliquent-ils que les parfois très modestes gens du voyage se déplacent et se sédentarisent où bon leur semble ?
Peut-être n’est-il pas question pour les communautés concernées de se disperser sur le territoire. Peut-être ne veulent-elles pas partir. La Cour des comptes a montré en 2012 que la fameuse mixité sociale n’existait pas, malgré dix années de dispositifs censés la favoriser. « Il ne suffit pas de modifier le visage des quartiers pour modifier les visages des quartiers, qui restent colorés », expliquait le sociologue Renaud Epstein (Le Point, 18/07/12). L’homme n’est pas mû seulement par l’argent ou l’amour de l’Autre. L’attachement de certaines communautés aux grands ensembles est réel. Les barres d’immeuble sont parfois considérées comme un territoire, le substitut d’une identité perdue, qui n’a jamais su se reconstruire.
Mais le discours médiatique ne veut pas de cette réalité. Lui n’évoque que l’exclusion pour expliquer, justifier, exorciser le communautarisme, et à travers lui les cahots d’une société devenue hétérogène. Comme les problèmes demeurent, s’aggravent, alors que les discours et les analyses restent les mêmes, les gens commencent à se poser des questions. Et si les experts se trompaient ? Et s’ils avaient renoncé à la vérité ? Et s’ils incitaient tout le monde à y renoncer, sous peine de poursuites ? Pourquoi le feraient-ils ? Peut-être bien pour l’égalité républicaine, « âme de la France » selon François Hollande. Tout le monde est égal. Entendez, tout être humain a les mêmes capacités physiques et intellectuelles, tout un chacun peut s’adapter à tout environnement, devenir champion d’échecs, éboueur ou haltérophile, faire la même chose que n’importe qui, ressembler à n’importe quoi, donc se constituer le même patrimoine, éprouver les mêmes satisfactions, vivre les mêmes aventures que celui que l’on choisira de jalouser. 
Comme de tels décrets ont la fâcheuse tendance à ne pas se réaliser, les égalitaristes ont décidé de favoriser ceux qui n’y arrivaient pas, par l’éducation, l’accès à la culture, les aides sociales, l’invention de droits spécifiques. Et comme ça ne fonctionnait toujours pas, ils ont eu la brillante idée d’accuser ceux pour qui ça fonctionnait d’être de vils spoliateurs. Bien entendu, toute ressemblance avec des situations ayant existé est purement fortuite. 
De favoriser les faibles on en vient tout naturellement à pénaliser les forts. Lorsque l’on prétend lutter « contre les inégalités », on lutte contre la réussite, c’est-à-dire contre la propriété, le pouvoir, le possédant, le méritant, le riche, l’héritier. Celui qui n’a pas été exclu ou volé, celui qui a été favorisé par sa roublardise, son état-civil, et sûrement ses atteintes aux droits de l’Homme. En clair, le Français qui rapporte de l’argent à la société, qui peut se targuer de sa réussite, de son patrimoine, de son histoire, de sa civilisation occidentale. Pour rééquilibrer les choses, on a décidé de le grever d’un lourd handicap. On a fait en sorte qu’il devienne, par la magie des médias, un salaud de colonialiste, esclavagiste, un pillard trop riche, trop beauf, trop raciste, machiste, homophobe, exploiteur, stigmatisant, même pas de gauche, voilà la conséquence première de la logique de fraternité appliquée au droit. Ces dernières années, l’égalitarisme, un véritable culte de l’envie, a inondé tous les compartiments de la société. Jamais autant de Français ne se sont haïs eux-mêmes. Jamais autant d’esprits a priori normalement constitués ne se sont persuadés que « tout le monde était bon » à part eux, que c’était incroyable qu’il y ait « encore des guerres et des pauvres au xxie siècle », qu’il était urgent de « faire payer les riches », que la criminalité c’est « l’exclusion parce que l’immigration est une chance pour la France”.
Laurent Obertone (Atlantico, 20 janvier 2013)

Casapound, dédicace, Paris

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lundi, 04 février 2013

François Hollande, le libérateur du Mali

François Hollande, le libérateur

dimanche, 03 février 2013

Opérations extérieures et opérations d'influence...

Opérations extérieures et opérations d'influence...

Ex: http://metapoinfos.hautetfot.com/

"Nous autres idéalistes, enfants des lumières et de la civilisation, pensons régulièrement que la guerre est morte. Las, cet espoir est aussi consubstantiel à l'homme que la guerre elle-même. Depuis que l'homme est homme, la guerre et lui forment un couple indissociable parce que les hommes sont volontés – volonté de vie et volonté de domination – et que la confrontation est dans la nature même de leurs rencontres." Général Vincent Desportes, La guerre probable (Economica, 2008)

Nous reproduisons ci-dessous un entretien donné par le général Vincent Desportes à Bruno Racouchot pour l'excellente revue Communication & Influence, éditée par le cabinet COMES. Le général Desportes est l'auteur de nombreux essais consacrés à la stratégie comme Comprendre la guerre (Economica, 2000) ou La guerre probable (Economica, 2008). 

 

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Opérations extérieures et opérations d'influence: le décryptage du Général Vincent Desportes

Somalie, Centrafrique, Mali… à des titres divers, l'armée française intervient sur bien des fronts. Il ne s'agit plus seulement de frapper l'ennemi, il faut aussi gérer les conflits informationnels et anticiper les réactions, le tout en intégrant de multiples paramètres. Comment percevez-vous cette imbrication des hard et soft powers ?

Nous assistons indéniablement à un affrontement des perceptions du monde. Les terroristes cherchent à faire parler d'eux, à faire émerger leur perception du monde à travers des actions militaires frappant l'opinion, actions dont la finalité est d'abord d'ordre idéologique. Ils inscrivent leurs actions de terrain dans le champ de la guerre informationnelle. Ils font du hard power pour le transformer en soft power. Les opérations militaires qu'ils conduisent le sont en vue de buts d'ordre idéologique. Ils ne recherchent pas l'effet militaire immédiat. Ils agissent plutôt en termes d'influence, à mesurer ultérieurement. Dans cette configuration, il y a une interaction permanente entre le militaire stricto sensu et le jeu des idées qui va exercer une influence sur les opinions publiques. La guerre est alors vue comme un moyen de communication, qui a pour but de faire changer la perception que le monde extérieur peut avoir de celui qui intervient.

Notons que cela ne joue pas que pour les terroristes. La France intervient au Mali et elle a raison de le faire. En agissant ainsi, de manière claire et efficace, elle modifie la perception que le monde pouvait avoir d'elle, à savoir l'image d'une nation plutôt suiveuse des États-Unis, comme ce fut le cas en Afghanistan. En intervenant dans des délais très brefs et avec succès loin de ses bases, en bloquant les colonnes terroristes, en regagnant le terrain perdu par les soldats maliens, et surtout en ayant agi seule, elle ressurgit d'un coup sur la scène médiatico-politique comme un leader du monde occidental. Était-ce voulu au départ ? Je ne sais pas. Mais le résultat est là. La France retrouve sa place dans le jeu complexe des relations internationales à partir d'une action militaire somme toute assez limitée. En conséquence, si l'on veut avoir une influence sérieuse dans le monde, nous devons conserver suffisamment de forces militaires classiques relevant du hard power, pour pouvoir engager des actions de soft power. L'un ne va pas sans l'autre. Le pouvoir politique doit bien en prendre conscience.

 

Justement, à l'heure où s'achève la réflexion sur le futur Livre blanc, quid des armes du soft power dans le cadre de la Défense ? La France n'est-elle pas en retard dans ce domaine ? N'est-il pas grand temps, comme vous le suggériez dans La guerre probable, de commencer enfin à "penser autrement" ?

"Toute victoire, disait le général Beaufre, est d'abord d'ordre psychologique." Il ne faut jamais perdre de vue que la guerre, c'est avant tout l'opposition de deux volontés. En ce sens, l'influence s'impose bel et bien comme une arme. Une arme soft en apparence, mais redoutablement efficace, qui vise à modifier non seulement la perception, mais encore le paradigme de pensée de l'adversaire ou du moins de celui que l'on veut convaincre ou dissuader. Dans la palette qui lui est offerte, l'homme politique va ainsi utiliser des moyens plus ou moins durs (relevant donc de la sphère du hard power) ou au contraire plus ou moins "doux" (sphère du soft power) en fonction de la configuration au sein de laquelle il évolue et des défis auxquels il se trouve confronté.

Le problème de la pensée stratégique française est justement qu'elle éprouve des difficultés à être authentiquement stratégique et donc à avoir une vision globale des choses. Notre pays a du mal à construire son action en employant et en combinant différentes lignes d'opérations. L'une des failles de la pensée stratégique française est de n'être pas en continuité comme le percevait Clausewitz, mais une pensée en rupture. C'est-à-dire qu'au lieu de combiner simultanément les différents moyens qui s'offrent à nous, nous allons les employer successivement dans le temps, au cours de phases en rupture les unes avec les autres. On fait de la diplomatie, puis on a recours aux armes du hard power, puis on revient à nouveau au soft power. Cette succession de phases qui répondent chacune à des logiques propres n'est pas forcément le moyen idoine de répondre aux problèmes qui se posent à nous. Utiliser en même temps ces armes, en les combinant intelligemment, me paraîtrait souhaitable et plus efficace. Notre pays a malheureusement tendance à utiliser plus facilement la puissance matérielle que la volonté d'agir en douceur pour modifier ou faire évoluer la pensée – et donc le positionnement – de celui qui lui fait face.

Notre tradition historique explique sans doute pour une bonne part cette réticence à utiliser ces armes du soft power. Pour le dire plus crûment, nous nous méfions des manœuvres qui ne sont pas parfaitement visibles. L'héritage de l'esprit chevaleresque nous incite plutôt à vouloir aller droit au but. Nous sommes des praticiens de l'art direct et avons beaucoup de mal à nous retrouver à agir dans l'indirect, le transverse. À rebours par exemple des Britanniques, lesquels pratiquent à merveille ces stratégies indirectes, préférant commencer par influencer avant d'agir eux-mêmes. Prenons l'exemple de leur attitude face à Napoléon. Le plus souvent, au lieu de chercher l'affrontement direct, ils ont joué de toutes les gammes des ressources du soft power et engagé des stratégies indirectes. Ils ont cherché à fomenter des alliances, à faire en sorte que leurs alliés du moment, les Russes, les Prussiens, les Autrichiens, s'engagent directement contre les armées françaises. Ils ont su susciter des révoltes et des révolutions parmi les populations qui étaient confrontées à la présence ou à la menace française, comme ce fut le cas en Espagne. Le but étant à chaque fois de ne pas s'engager directement mais de faire intervenir les autres par de subtils jeux d'influence.

 

Cette logique demeure toujours d'actualité ?

Indéniablement. Même sur le plan strictement opérationnel, cette même logique perdure sur le terrain. Les travaux de l'historien militaire Sir Basil Henry Liddle Hart dans l'entre-deux guerres mondiales en matière de promotion des stratégies indirectes sont particulièrement édifiants. Liddle Hart prône le harcèlement des réseaux logistiques de l'adversaire, des frappes sur ses réseaux de ravitaillement, et dans le même temps recommande de contourner ses bastions plutôt que de l'attaquer de front.

En ce sens, nous avons un retard à combler. Comme les Américains, au plan militaire, nous préférons l'action directe. Nous avons la perpétuelle tentation de l'efficacité immédiate qui passe par le choc direct. Pour preuve nos combats héroïques mais difficiles d'août 1914. On fait fi du renseignement, on croit que l'on va créer la surprise, on préfère agir en fondant sur l'adversaire, en croyant benoîtement que la furia francese suffira à l'emporter. On sait ce qu'il advint… Le fait est que nous préférons le choc frontal aux jeux d'influence. Nous comprenons d'ailleurs mal les logiques et rouages des stratégies indirectes. Nous cherchons à attaquer la force plutôt que la faiblesse, ce qui est à l'exact opposé de ce que prône Sun Tzu. Comme on le sait, pour ce dernier, l'art de la guerre est de gagner en amenant l'ennemi à abandonner l'épreuve engagée, parfois même sans combat, en utilisant toutes les ressources du soft power, en jouant de la ruse, de l'influence, de l'espionnage, en étant agile, sur le terrain comme dans les têtes. En ce sens, on peut triompher en ayant recours subtilement aux armes de l'esprit, en optimisant les ressources liées à l'emploi du renseignement, en utilisant de façon pertinente les jeux d'influence sur les ressorts psychologiques de l'ennemi.

 

Jusqu'à ces dernières années, on hésitait à parler d'influence au sein des armées, principalement à cause des séquelles du conflit algérien. Les blocages mentaux sont encore très forts. Cependant, les interventions conduites par les Anglosaxons en Irak et en Afghanistan ont contribué à tourner la page. Nos armées doivent-elles, selon vous, se réapproprier ce concept et les outils qui en découlent ?

Dans les guerres de contre-insurrection que nous avons eues à conduire, nous avons compris que l'important était moins de détruire l'ennemi que de convaincre la population du bienfait de notre présence et de notre intervention. Ce sont effectivement les Américains, qui ont redécouvert la pensée française de la colonisation, de Lyautey et de Gallieni, qui privilégiaient la démarche d'influence à la démarche militaire stricto sensu. Notre problème dans les temps récents est effectivement lié aux douloureuses séquelles du conflit algérien, où nous avions cependant bien compris qu'il fallait retourner la majorité de la population pour stabiliser le pays et faire accepter la force française. Ce qui, dans les faits, fut réussi. Le discrédit jeté sur les armées et certaines méthodes ayant donné lieu à des excès, ont eu pour conséquence l'effacement des enjeux de la guerre psychologique et des démarches d'influence.

Avec l'Afghanistan, les choses ont évolué. Au début, nous considérions que l'aide aux populations civiles avait d'abord pour but de faire accepter la force. Ce fut peut-être un positionnement biaisé. Nous n'avions sans doute pas suffisamment intégré le fait que les opérations d'aide aux populations étaient primordiales, puisqu'il s'agissait d'opérations destinées à inciter les populations à adhérer à notre projet. Les Américains ont compris avant nous que les opérations d'influence étaient faites pour faire évoluer positivement la perception de leur action, en gagnant comme ils aimaient à le dire, les cœurs et les esprits de ces populations.

 

Dans Le piège américain, vous vous interrogez sur les raisons qui peuvent amener les États-Unis à perdre des guerres. Accorde-t-on une juste place aux opérations d'influence ? Comment voyez-vous chez nous l'évolution du smart power ?

Premier constat, la force est un argument de moins en moins utilisable, car de moins en moins recevable dans les opinions publiques. Si nous voulons faire triompher notre point de vue et imposer notre volonté, il faut s'y prendre différemment et utiliser d'autres moyens. Et d'abord s'efforcer de trouver le meilleur équilibre entre les outils qu'offre le soft power, avec une juste articulation entre les moyens diplomatiques ou d'influence, et les outils militaires. Ces derniers ne peuvent plus être employés comme ils l'étaient avant, l'avantage comparatif initial des armées relevant de l'ordre de la destruction.

Ce bouleversement amène naturellement les appareils d'État à explorer les voies plus douces présentées par les opérations d'influence, lesquelles sont bien sûr davantage recevables par les opinions publiques. Or, pour en revenir à votre question, la puissance militaire déployée par les Américains est par nature une puissance de destruction, donc de moins en moins utilisable dans le cadre évoqué ici. Sinon, comment expliquer que la première puissance mondiale, qui rassemble plus de la moitié des ressources militaires de la planète, n'ait pu venir à bout des Talibans ?

C'est bien la preuve que le seul recours à la force brute ne fonctionne pas. Les États doivent donc chercher dans d'autres voies que celle de la pure destruction, les moyens d'assurer la poursuite de leurs objectifs politiques. Même si nous devons garder à l'esprit que ce moyen militaire stricto sensu reste essentiel dans certaines configurations bien définies. Il ne s'agit pas de se priver de l'outil militaire, qui peut demeurer déterminant sous certaines conditions, mais qui n'est plus à même cependant de résoudre à lui seul l'ensemble des cas auxquels les États se trouvent confrontés.

 

Vous qui avez présidé aux destinées de l'École de guerre, quelle vision avez-vous de l'influence, des stratégies et des opérations d'influence ?

L'enseignement à l'École de guerre évolue. Même si nous nous efforçons de penser avant tout sur un mode stratégique, néanmoins, nous travaillons toujours sur les opérations relevant prioritairement du hard power.

Nous intégrons bien sûr les opérations relevant du soft power, mais elles ne sont pas prioritaires. L'élève à l'École de Guerre doit avant tout savoir planifier - ou du moins participer à des équipes de planification - dans le cadre de forces et d'opérations d'envergure. Il y a un certain nombre de savoir-faire techniques à acquérir, lesquels reposent davantage sur l'usage de la force que sur celui de l'influence. Pour les élèves, c'est là un métier nouveau à acquérir, complexe, très différent de ce qu'ils ont connu jusqu'alors, qui se trouve concentré sur l'emploi de la force militaire à l'état brut. Cependant, dans tous les exercices qui sont conduits, il y a une place pour les opérations d'influence. La difficulté est que l'on ne se situe pas là dans le concret, et que c'est délicat à représenter. Les résultats sont difficiles à évaluer, ils ne sont pas forcément quantifiables, ils peuvent aussi être subjectifs. Alors, peut-être d'ailleurs par facilité, on continue à faire ce que l'on sait bien faire, plutôt que de s'aventurer à faire ce qu'il faudrait réellement faire.

L'Armée de Terre n'a pas à définir une stratégie d'ensemble. Elle doit simplement donner une capacité opérationnelle, maximale à ses forces. Une Armée se situe au niveau technique et opérationnel. Le niveau stratégique se situe au niveau interarmées. Et c'est là que doit s'engager la réflexion à conduire en matière de soft power. Ces précisions étant apportées, il n'en demeure pas moins que – tout particulièrement au sein de l'Armée de Terre – il est nécessaire d'avoir recours à la doctrine qui porte sur les actions à conduire en direction des populations, puisque l'on veut influer sur la perception qu'elles ont de notre action. Reconnaissons pourtant que nous sommes moins avancés que les Américains en ce domaine. Un exemple: un général américain qui commandait la première division de cavalerie en Irak, m'a raconté comment, avant de partir, il avait envoyé tous ses officiers d'état-major à la mairie de Houston pour voir comment fonctionnait une ville. Car il savait bien qu'il allait acquérir le soutien de la population irakienne non pas en détruisant les infrastructures, mais au contraire en rétablissant au plus vite les circuits permettant d'assurer les besoins vitaux, comme les réseaux d'eau ou d'électricité. Il a donc travaillé en amont sur une opération d'influence, qu'il a su parfaitement intégrer à sa manœuvre globale. De la sorte, la manœuvre d'ordre strictement militaire ne venait qu'en appui de la démarche d'influence.

 

A-t-on agi de même en Afghanistan?

En Afghanistan, on a travaillé sur trois lignes d'opérations: sécurité, gouvernance, développement. On a compris que l'on ne pouvait pas travailler de manière séquentielle, (d'abord sécurité, puis gouvernance, puis développement), mais que l'on devait travailler en parallèle sur les trois registres, avec une interaction permanente permettant d'aboutir harmonieusement au résultat final. Si les lignes gouvernance et développement relèvent peu ou prou de la sphère de l'influence, il faut cependant reconnaître que le poids budgétaire de la ligne sécurité est de loin le plus important.

 

Pourquoi ?

Au niveau des exécutifs gouvernementaux, on considère que les opérations militaires sont du ressort du hard power. Or, l'action sur les autres lignes d'opération est au moins aussi importante que sur la ligne d'opération sécurité. De fait, au moins dans un premier temps, les militaires sont d'autant plus à même de conduire les opérations d'influence qu'ils sont les seuls à pouvoir agir dans le cadre extrêmement dangereux où ils sont projetés. Mais ils ont effectivement une propension à penser prioritairement les choses selon des critères sécuritaires. Autre point à prendre en considération, les États ont des budgets limités pour leurs opérations. Les opérations militaires coûtent cher. La tendance naturelle va donc être de rogner sur les autres lignes qui n'apparaissent pas – à tort sans doute – comme prioritaires. Concrètement, influence, développement, gouvernance se retrouvent ainsi être les parents pauvres des opérations extérieures.

 

N'y-a-t-il pas également un problème de formation?

Dans les armées, on est formé comme lieutenant, capitaine, commandant pour parvenir d'abord à l'efficacité technique immédiate. On est ainsi littéralement obsédé par cet aspect des choses et son corollaire, à savoir le très rapide retour sur investissement. On concentre ainsi nos ressources intellectuelles sur le meilleur rendement opérationnel des forces, en privilégiant le budget que l'on consent à une opération. N'oublions pas que nous évoluons aujourd'hui au sein de sociétés marchandes qui veulent des retours sur investissement quasiment immédiats. Nous sommes ainsi immergés dans le temps court, à la différence par exemple des sociétés asiatiques qui, elles, ont une perception radicalement différente du facteur temps. Elles savent qu'à long terme, il est infiniment moins onéreux de laisser le temps au temps, de laisser les transformations se faire progressivement, d'accompagner par l'influence ces transformations. La Chine se vit et se pense sur des millénaires, elle connaît la force des transformations silencieuses qui atteignent leur objectif par le biais de savantes et patientes manœuvres d'influence. Nous cherchons le rendement immédiat à coût fort. Ils visent le rendement à long terme et à faible coût.

 

En guise de conclusion, peut-il y avoir une communication d'influence militaire ?

C'est un peu la vocation du Centre interarmées des actions sur l'environnement, créé en juillet dernier de la fusion du Groupement interarmées actions civilo-militaires (GIACM) et du Groupement interarmées des opérations militaires d’influence (GI-OMI). Sur les théâtres où nous opérons, nous mettons naturellement en place des vecteurs destinés aux populations locales, visant à mieux faire comprendre notre action, à faire percevoir en douceur les raisons pour lesquelles nous agissons. En un mot, nous nous efforçons de jouer sur les perceptions et sur l'image. Mais ce jeu assez fin sur l'influence reste le parent pauvre de l'action militaire.

L'influence est tout en subtilité. On ne la perçoit pas comme on peut percevoir un tir d'artillerie ou une frappe aérienne. Même si nous sommes persuadés du bienfondé des opérations d'influence, nous ne parvenons pas à faire d'elles des priorités, donc à dégager suffisamment de budgets et de personnels à leur profit. En outre, les configurations actuelles privilégient plutôt les projections de puissance pour faire plier l'adversaire. Or, dans l'histoire et en prenant les choses sur le long terme, on constate que l'utilisation de la seule force pure ne marche pas dès lors qu'on examine les choses dans la durée. La projection de puissance ou l'action brutale sont capables de faire plier momentanément l'adversaire. Mais tant que l'on n'a pas changé les esprits, l'adversaire va revenir à la charge, quitte à contourner les obstacles. D'où l'importance capitale des opérations d'influence quand on embrasse une question dans son ensemble. Sur ces questions, je renvoie volontiers au remarquable ouvrage du général Sir Rupert Smith, L'utilité de la force, l'art de la guerre aujourd'hui (Economica, 2007). Pour lui, désormais, les opérations militaires doivent être considérées moins pour ce qu'elles produisent comme effets techniques que pour ce qu'elles produisent sur l'esprit de l'autre. C'est là une préoccupation relativement récente. Ainsi, les dommages collatéraux se révèlent contre-productifs et viennent miner le résultat militaire que l'on vise. Il nous faut bien plutôt réfléchir en termes d'effets à obtenir sur l'esprit de l'autre. C'est là que l'influence s'impose comme une démarche capitale, qu'il nous faut apprendre à maîtriser. Si l'on fait l'effort de mettre les choses en perspective, sur le long terme, on voit bien que toute action militaire, au fond, doit intégrer pleinement la dimension influence, jusqu'à être elle-même une action d'influence.     

Général Vincent Desportes, propos recueillis par Bruno Racouchot (Communication & Influence, janvier 2013)

samedi, 02 février 2013

Casapound à Lyon

Casapound à Lyon

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vendredi, 01 février 2013

REBELLION n° 56

REBELLION n° 56 EST SORTI !

rebellion, socialisme européen, insoumission, mas, révolution, françis cousin

Au sommaire du numéro : 

Editorial : Réflexion en écho à celle d'un philosophe transalpin

Actualité : la rébellion des peuples européens. 

Idées : Penser le libéralisme par Charles Robin. 

L'Odyssée de la crise. 

Entretien avec Francis Cousin : L'Etre contre l'Avoir. 

Esprit Libre : La liberté d'expression ne se demande pas. elle se prend !

Entretiens avec Arnaud Guyot-Jeannin et Javier R. Portella

Polémique : Retour sur la pensée de Richard Millet. 

Culture : Les illusions de la contre-culture par David l'Epée. 

Chroniques livres. 

 

Le numéro est disponible contre 4 euros à l'adresse suivante : 

Rébellion

c/o RSE BP 62124  

F-31020  TOULOUSE cedex 02

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mercredi, 30 janvier 2013

Trace Sud Ouest. Réseau MAS.

Trace Sud Ouest. Réseau MAS.

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Quelques impressions sur l’opération Serval

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Quelques impressions sur l’opération Serval

par Georges FELTIN-TRACOL

 

Depuis le 11 janvier 2013, l’armée française intervient dans le conflit malien à la demande pressée de son gouvernement intérimaire menacé par l’offensive des islamistes. Des groupes djihadistes ont plus ou moins fortuitement répliqué en s’en prenant à des Occidentaux à In Amenas dans le Sahara algérien.

Le règlement algérien de la prise d’otage a suscité de nombreux commentaires désapprobateurs. Oui, l’assaut des forces spéciales dans le complexe gazier s’est traduit par de lourdes pertes, en particulier parmi les otages occidentaux, mais le gouvernement algérien ne pouvait pas – et ne voulait pas – procéder autrement. Même si l’Algérie a autorisé le survol de son territoire par l’aviation française dans le cadre de l’opération Serval à la grande colère de la presse algérienne, elle demeure très attachée à sa souveraineté nationale. D’abord réticente à toute intervention française au Mali – donc dans son arrière-cour -, elle a pris l’action terroriste à In Amenas comme un outrage majeur. Au cours de la guerre civile des années 1990, rares furent les attaques islamistes contre les sites d’hydrocarbures. C’est à se demander si ce ne serait pas une opération sous faux drapeau…
 
Outre un attachement « souverainiste » viscéral, Alger souhaite garder son contrôle sur la région. Historiquement, le Sud algérien qui correspond à une partie du désert saharien n’a jamais fait partie de la régence beylicale d’Alger. D’ailleurs, au moment des négociations sur l’indépendance en 1961 – 1962, la France envisagea un instant de transformer le Sahara en condominium franco-africain. Le projet échoua et l’Algérie s’étendit vers le Sud en échange d’accords secrets avec Paris sur les essais nucléaires.
 
La question des frontières est bien à l’origine du désordre malien. Le Mali est un État artificiel composé de diverses ethnies négroïdes (les Bambaras, les Malinkés, les Soninkés, les Peuls, les Sénoufos, les Dogons, les Songhai, etc.) et « blanches » (les Arabes ou « Maures » ou les Touareg) souvent antagonistes. Quelques mois avant l’indépendance, une délégation targuia demanda au général De Gaulle de prévoir un État des Touareg distinct du futur Mali. L’homme de Colombey ne les écouta pas ! Il en résulta une persécution de la minorité targuia par la majorité noire malienne.
 
Ce sont les forces indépendantistes du M.N.L.A. (Mouvement national pour la libération de l’Azawad) qui sont à l’origine de la sécession, le 6 avril 2012, du Nord du Mali, mais elles furent rapidement doublées par leurs « alliés » islamistes qui profitèrent de la chute orchestrée par l’Occident globalitaire oligarchique de Kadhafi en Libye pour disposer en abondance de munitions, d’armes performantes et de combattants aguerris. Toutefois, les islamistes du Nord du Mali ne présentent aucune homogénéité puisqu’on recense la présence d’A.Q.M.I (Al-Qaïda au Maghreb islamique), d’Ansar Dine (« Défenseurs de la religion ») du Targui indépendantiste d’origine malienne Iyad Ag Ghali, de ses récents dissidents du M.I.A. (Mouvement islamique de l’Azawad), d’Ansar al-Charia (« Défenseurs de la Charia »), du M.U.J.A.O. (Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest) et du Mouwaghina Bi Dam (« Les signataires par le sang ») de Mokhtar Belmokhtar, réputé proche de certains services algériens. Les spécialistes estiment même que ces mouvements armés désignent en réalité des bandes autonomes conduites par quelques meneurs débrouillards et ambitieux. Dans le cadre d’une vive concurrence, ces petits chefs, mi-terroristes mi-maffieux, auraient cherché à s’emparer de Bamako le plus rapidement possible avant une probable intervention militaire africaine secondée par la France prévue à l’automne 2013. Ces éléments assez indisciplinés parièrent aussi sur l’inexpérience de François Hollande. Or leur offensive vers le Sud força la décision française. En cas d’inaction de Paris, les derniers États alliés de la zone auraient sollicité l’assistance des États-Unis ou d’une autre puissance. La réaction était par conséquent vitale. Elle fut rapide et solitaire, hors de toute gesticulation onusienne et euro-bruxelloise
 
Sur cette crise africaine, l’Union européenne témoigne d’une évidente et pitoyable aboulie. La première puissance commerciale mondiale est un ectoplasme militaire, d’où une pusillanimité certaine de la part de ses États-membres. Il est vrai qu’ils ne peuvent pas se lancer dans une aventure extérieure quand ils réduisent les dépenses militaires au maximum. En outre, l’idée même de guerre paraît dorénavant incongrue pour les masses repues de consommateurs abrutis.
 
Enfin, au-delà de l’urgence géopolitique, l’opération Serval sert des considérations politiciennes. Très impopulaire dans les sondages, le locataire de l’Élysée table sur une union nationale salvatrice qui ferait oublier l’imposant succès des « manifestants pour tous » du 13 janvier, malgré une navrante frigidité de ne pas foncer sur le palais présidentiel, et l’odieuse reddition des syndicats devant le patronat le 11 janvier dernier. Effective, l’unité nationale fut brève. Il importe maintenant de s’interroger sur les objectifs de cet engagement.
 
Pour les hiérarques socialistes, ils sont clairs : il s’agit, d’une part, de restaurer la souveraineté et l’intégrité du Mali et, d’autre part, de rétablir les droits de l’homme. S’il faut se scandaliser de la destruction de sanctuaires musulmans soufis par des talibans sahéliens d’une rare ignorance, l’application musclée de la Charia paraît au contraire une bonne chose qu’il faudrait étendre, le cas échéant, aux banlieues de l’immigration dans l’Hexagone. Trancher la main, le pied, la langue, voire la tête, éviterait la surpopulation carcérale.
 
On doit appréhender que les responsables français, méconnaissant les réalités locales, assimilent les Touareg aux islamistes. Il est dès lors imaginable que le Nord une fois reconquis, les populations touareg et arabes subissent représailles et exactions de la part de Maliens négroïdes prêts à une éradication génocidaire définitive…
 
Fidèle à son habitude d’araser les différences authentiques, la République hexagonale s’ingénie à soutenir tous les niveleurs du monde. L’Azawad, ou plus exactement les trois Azawad (du Sahara, de l’Ouest maure et du fleuve), ne doivent pas disparaître au profit d’entités fantoches et artificielles. Si la lutte contre le djihadisme – cet autre mondialisme mortifère – entretenu par l’Arabie Saoudite, le Qatar et certains cénacles de l’« État profond » yankee ou britannique est une obligation quasi-morale, le bon sens voudrait que Paris puisse rallier à cette lutte ces experts du désert que sont les « Hommes  bleus » en promouvant leurs revendications identitaires légitimes. Pourquoi alors ne pas encourager des Azawad qui, parrainés par Alger et Paris, stabiliseraient cette région primordiale de l’Afrique de l’Ouest dans le cadre d’un Mali fédéral ?
 
Mais avec les socialistes aux manettes, il faut craindre que leur haine pour toute identité véritable les aveugle et fasse de cette opération un nouveau bourbier. Mourir pour Bamako ou Tombouctou pour des billevesées juridiques et mondialistes n’est pas une solution digne.

Georges Feltin-Tracol
 

 


 

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vendredi, 25 janvier 2013

Maréchal toujours là !

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« Maréchal toujours là ! »

par Georges FELTIN-TRACOL

 

Depuis trois décennies au moins, la repentance et l’obsession mémorielle univoque polluent les recherches historiques. Si le phénomène contamine la guerre d’Algérie après avoir investi la traite négrière et la colonisation, il remonte à la dénonciation de l’État français du Maréchal Pétain que les autorités officielles et médiatiques qualifient de « gouvernement de fait » ou d’« illégal ». Or la réalité n’est jamais aussi manichéenne; elle est plus complexe et… surprenante.

 

Alors que l’Université hexagonale écarte les sujets déplaisants pour la pensée unique, il faut saluer une historienne, Cécile Desprairies, qui vient de publier un ouvrage au titre révélateur : L’héritage de Vichy. Ces 100 mesures toujours en vigueur. Elle démontre en effet que plus de soixante-dix ans après la fin de cette « période sombre » subsistent diverses mesures prises par ce régime « illégitime » ! « Quel est le sort des 16 786 lois et décrets promulgués entre 1940 et 1944 ? Ces mesures sont déclarées pour la plupart nulles et les textes attentatoires aux libertés publiques et discriminatoires à l’égard des citoyens envoyés aux poubelles de l’Histoire. Mais certaines d’entre elles – soixante-huit exactement – perdurent telles quelles ou légèrement modifiées… (p. 11) » À partir de cette observation explosive pour le conformisme dominant, Cécile Desprairies fait une recension assez objective.

 

L’ouvrage se veut pédagogique. On examine la persistance de la « Révolution nationale » à travers huit thèmes principaux, à savoir la vie quotidienne, l’alimentation, la culture, l’éducation, les métiers, les pratiques sportives, la santé et les équipements et transports. Le livre se présente comme un recueil d’exemples souvent structurés en trois parties : « Un peu d’histoire », « Le sujet traité sous Vichy », « Et aujourd’hui ? ».


Un quotidien toujours vichyste !
 
À partir de cette nomenclature, on découvre ce que la France contemporaine doit beaucoup à l’État français. « Prenant acte de la défaite, Pétain s’efforce de construire un ordre nouveau, imprégné d’une idéologie traditionaliste et réactionnaire, et tempéré par un courant technocratique (p. 11). » Il en découle des initiatives qui ont franchi le temps et qui sont maintenant des habitudes sociales bien ancrées. Signalons par exemple la sirène à Midi de chaque premier mercredi du mois, l’heure d’été (certes rétablie en 1976, mais elle reprenait un choix de l’occupant allemand), l’obligation d’afficher à l’entrée du restaurant un menu à prix fixe, le développement de la future restauration collective, la création de l’agrégation de géographie distincte de l’agrégation d’histoire, l’enseignement scolaire du dessin et de la musique, la mise en place de chorales scolaires, la fondation de l’Institut des hautes études cinématographiques… C’est à cette époque que commence l’enseignement à distance. La tendance décentralisatrice du régime encourage les premiers cours de breton, de provençal et d’occitan dans le secondaire. « Par l’un de ces retournements dont l’histoire est coutumière, la promotion des langues régionales est faite par un ministre jacobin (p. 137). »
 
Sous le gouvernement perspicace et technocratique de l’amiral Darlan, les régions sont conçues dans leurs tracés actuels. Ainsi la Loire-Inférieure et Nantes sont-ils détachés de la Bretagne. Par ailleurs, « sous Vichy, l’appellation Île-de-France commence à se généraliser – et remplace peu à peu celle de Groß Paris – pour désigner la région parisienne administrative et non plus seulement géographique (p. 228) ». Desprairies voit dans la nouvelle carte des futures régions administratives l’influence du géographe allemand, membre du N.S.D.A.P., Walter Christaller, dont les travaux influenceront aussi dans la décennie 1960 le Commissariat au Plan en matière d’Aménagement du territoire (les métropoles d’équilibre). Soucieux à la fois d’aménager l’espace français et d’améliorer le cadre de vie de la population parisienne, le régime pétainiste réorganise les transports parisiennes (ébauche de la R.A.T.P.), construit de nouvelles stations de métro, élabore la carte hebdomadaire de travail qui deviendra par la suite la « Carte orange », puis le Pass Navigo. S’esquisse enfin un projet ambitieux de périphérique routier séparant Paris de ses communes voisines…
 
Avant que Sarközy place sous la tutelle du ministère de l’Intérieur la police et la gendarmerie, Vichy l’avait déjà fait. Il étatise aussi dès 1941 les polices municipales et fonde une police nationale dont les recrues sont formées dans les premières écoles de police. Quant à la carte nationale d’identité, elle est étendue à l’ensemble de la population et rendue obligatoire. La présence allemande contraint à remplacer les panneaux écrits de signalisation par des panneaux pictographiques que le code de la route entérinera ensuite, et favorise les activités sportives avec les débuts du ski en haute montagne, de l’alpinisme, de l’éducation physique enseignée et du handball, un sport d’origine allemande.

Affirmation de l’appareil bureaucratique
 
Fidèle à sa tradition paternaliste, corporatiste et sociale-chrétienne, « Vichy représente un moment privilégié du développement de l’État social : allocation de salaire unique, retraite aux vieux travailleurs salariés, supplément familial de traitement pour les fonctionnaires… datent de cette période (p. 12) ». Citons d’autres mesures comme le « Noël du Maréchal » qui deviendra le « Noël des entreprises », la « Journée nationale des Mères » qui sera bientôt la « Fête des Mères », l’accouchement sous X, la fonction de président – directeur général, et la mise en place des comités sociaux d’entreprises et des comités de sécurité bientôt respectivement renommés « comités d’établissement » et « comités d’hygiène et de sécurité dans les conditions de travail ». L’État français légifère sur le salaire minimum, les accidents du travail, la charge de médecin – inspecteur du travail et impose le numéro de sécurité sociale encore en vigueur.
 
La récompense de « meilleur ouvrier de France » vient, elle aussi, de ces « Années noires ». Par cette politique sociale ambitieuse, « le régime de Vichy avait tenté de mettre en place une “ société d’ordres ”, selon le mot de l’historien François-Georges Dreyfus. En cela, il a réussi (p. 155) ». Sont ainsi créés les ordres professionnels des médecins, des architectes et des experts-comptables. Mais ce versant néo-corporatiste est contrebalancé par des initiatives modernisatrices telles la reconnaissance du travail féminin. La loi du 22 septembre 1942 « institue […] un régime de liberté d’exercice du travail par la femme mariée (p. 140) ». Il en résulte une nette étatisation comme le souligne l’historien immigrationniste Gérard Noiriel : « La révolution nationale entraîne une accélération brutale du processus d’étatisation de la société française, illustrée par l’argumentation spectaculaire du nombre des fonctionnaires (qui progresse de 26 % en cinq ans) (1). »
 
Une attention particulière est portée à la santé avec l’apparition des hôpitaux publics, des carnets de santé et de vaccination, l’extension des allocations familiales et la lutte accrue contre l’alcoolisme avec la fin du droit de bouilleurs de cru. La qualité et le terroir sont exaltés grâce aux A.O.C. (appellations d’origine contrôlée). Cet intérêt social n’est pas une simple caution théorique. « L’idée que l’État doit s’efforcer de résoudre les malheurs du peuple est devenue une évidence pour tous les hommes politiques, y compris pour les partisans de la Révolution nationale, écrit Noiriel. Certes le nouveau régime rejette la démocratie et le suffrage universel. Néanmoins, à aucun moment Pétain et ses collaborateurs n’ont soutenu l’idée qu’il fallait en revenir à un système politique fondé sur l’exclusion des classes populaires. À ma connaissance, on ne trouve dans aucun texte officiel l’idée que les pouvoirs publics ne devraient pas se préoccuper du sort du peuple. Bien au contraire, tout le projet politique de Vichy vise à convaincre l’opinion que le nouveau pouvoir peut résoudre ces problèmes mieux que la IIIe République (2). »
 
Sur les influences inavouées et méconnues entre les deux régimes, Cécile Desprairies ne cache pas que « sur un certain nombre de points, le gouvernement [de Vichy] parachève sans les nommer les initiatives du Front populaire que la IVe République entérinera (p. 12) ». En réalité, la IIIe République dans ses dernières années, l’État français, la France libre et les IVe et Ve Républiques poursuivent les mêmes objectifs. Par exemple, la protection de l’enfant délinquant si chère à Robert Badinter et aux chantres de l’excuse permanente revient au garde des Sceaux du Maréchal Raphaël Alibert… Quant au délit de non-assistance à personne en danger, on apprend que c’est à l’origine une loi de circonstance qui répond aux attentats anti-allemands. Ces quelques cas mis en exergue font écrire à l’auteur que « Vichy a été un régime autoritaire et répressif mais au sein de son œuvre législative, nous devons reconnaître la part d’héritage qu’on lui doit. Certaines lois et pratiques […] ont été constructives, même si pour beaucoup d’entre elles leur application a dû attendre la IVe République pour être efficace (p. 13) ».

L’accouchement méconnu de la France contemporaine
 
On oublie par ailleurs que de nombreux fonctionnaires commencèrent leur carrière au service du vainqueur de Verdun et que les novations du régime les marquèrent durablement. « Les technocrates qui travaillent à l’œuvre de modernisation suivront après 1942 des voies très différentes, certains s’engageant dans la résistance ou rejoignant Alger, d’autres choisissant le parti de la collaboration. Certains feront parler d’eux après 1945 : Pierre de Calan, Claude Gruson, Maurice Couve de Murville… Michel Debré est à Alger, auprès du général Weygand. Bon nombre de ces futurs hauts fonctionnaires de la IVe ou de la Ve République (Paul Delouvrier, Simon Nora… mais aussi des non-fonctionnaires comme Hubert Beuve-Méry ou Jean-Marie Domenach) se retrouvent à l’École nationale des cadres d’Uriage, créé au lendemain de la défaite par Pierre Dunoyer de Segonzac (3). »
 
Cette continuité se retrouve dans le domaine juridique peu traitée, il est vrai, par Cécile Desprairies. La législation actuelle contient encore bon nombre de décisions prises par l’État français. Le remembrement agricole, base de la « révolution silencieuse » des années 1950 – 1960, procède de la loi du 9 mars 1941 et du décret du 7 janvier 1942 validés ensuite par une ordonnance du 7 juillet 1945. Mieux, la loi du 25 novembre 1941 réduit à neuf le nombre de jurés en cours d’assises et autorise les trois magistrats professionnels à assister aux délibérations du jury et à y participer. Le décret du 22 mars 1942 consacré au délit d’entrave à la circulation ferroviaire s’applique toujours en dépit de l’abrogation de plusieurs articles. Une de ces dispositions punit encore d’une amende de quatrième catégorie d’un montant de 135 € toute « violation de l’interdiction de cracher dans une dépendance d’un service public »…
 
Dénié avec force par certains gaullistes, l’État français de Vichy appartient en fait à une variante autoritaire de la République et n’est pas un accident institutionnel. En analysant l’esquisse constitutionnelle du Maréchal, Jacques Godechot relève que « ce projet, qui ne vit pas le jour, est cependant intéressant, car plusieurs de ses articles passeront dans les constitutions et lois ultérieures (4) ». La Révolution nationale s’inscrit dans une tradition française alternative aux modèles républicain et royal qui a donné le Consulat, le Premier Empire (sous réserve de périodisation précise) et le Second Empire non libéral. À l’heure où le Conseil constitutionnel a pris une dimension nouvelle non négligeable alors que son mode de désignation demeure déficient et partial, il serait bon de s’inspirer du projet de 1942 qui envisageait une Cour suprême de justice dont le recrutement mériterait un examen attentif de la part de nos « gouvernants ».
 
L’aura constitutionnel de Vichy s’étendit jusqu’au Général de Gaulle comme le rapporte Michel Debré lors de la rédaction de la Constitution de 1958. « Une fin d’après-midi de juillet, le Général me demande de proposer au comité du soir un article qui eût sanctionné officiellement le titre de “ Chef de l’État ”. Ce que je fais d’autant plus aisément que ce titre consacrait le Droit, tel que nous l’élaborions. Mais par ma proposition, je provoque un tollé. Guy Mollet évoque Vichy et le titre conféré au Maréchal Pétain. Les autres ministres et Cassin lui-même opinent dans le même sens. Je fais observer que c’est une grande querelle pour une voyelle et une consonne. Le Président de la République est “ Chef d’État ”. Est-ce vraiment si dangereux de le dire “ Chef de l’État ” ? Oui, apparemment. L’histoire impose des souvenirs. Le Général reste silencieux. Je n’insiste pas et passe à un autre projet d’article (5). » Une fine analyse du texte initial de la Ve République montrerait que les idées constitutionnelles de Vichy s’y retrouvent, en particulier concernant la fonction et le titre de « Premier ministre ». Par conséquent, les Français devraient accepter, l’esprit tranquille, l’héritage polymorphe de l’État français et mieux comprendre cette période plus cruciale qu’ils ne le croient pour la seconde moitié du XXe siècle.

Georges Feltin-Tracol

Notes
 
1 : Gérard Noiriel, Les origines républicaines de Vichy, Hachette – Littérature, Paris, 1999, p. 163.
 
2 : Idem, pp. 57 – 58.
 
3 : Hervé Coutau-Bégarie et Claude Huan, Darlan, Fayard, Paris, 1989, p. 486. Les auteurs rappellent que Maurice Couve de Murville, futur Premier ministre de De Gaulle entre 1968 et 1969, se mit « à la disposition du haut-commissariat (p. 676) » dirigé depuis Alger par l’amiral Darlan ainsi que le futur responsable gaulliste Olivier Guichard.
 
4 : Les constitutions de la France depuis 1789, présentation de Jacques Godechot, G.F. – Flammarion, Paris, 1979, p. 342.
 
5 : Michel Debré, Trois républiques pour une France. Mémoires, tome II – Agir 1946 – 1958, Albin Michel, Paris, 1988, p. 374.
 
Cécile Desprairies, L’héritage de Vichy. Ces 100 mesures toujours en vigueur, préface d’Emmanuel Le Roy Ladurie, Armand Colin, Paris, 2012, 255 p., 27,50 €.
 

 


 

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JEAN FONTENOY : AVENTURIER, JOURNALISTE, ECRIVAIN"

JEAN FONTENOY : AVENTURIER, JOURNALISTE, ECRIVAIN"

Méridien Zéro a reçu Philippe Vilgier, auteur d'une passionnante biographie parue aux Editions Via Romana sur Jean Fontenoy, aventurier, journaliste et écrivain.

Cet homme hors du commun, au tracé de vie riche et iconoclaste, a été qualifié de "Malraux fasciste". C'est le portrait de ce personnage complexe et captivant que nous vous proposons.

A la barre : PGL

A la technique : Lord Tesla

Pour écouter:

http://www.meridien-zero.com/archive/2013/01/11/emission-n-127-jean-fontenoy-aventurier-journaliste-ecrivain.html

jean fontenoy, philippe vilgier, fascisme, finlande, berlin, shangaï, moscou, révolution bolchevique, collaboration, msr, socialisme, nationalisme, surréalisme

Xavier Faure: "Pourquoi je souhaite devenir russe!"

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Xavier Faure: "Pourquoi je souhaite devenir russe!"

Propos recueillis par Alexandre Latsa

Ex: http://fr.rian.ru/

Sur le même sujet: Un pilote de montgolfière français souhaite devenir Russe comme Depardieu

 
Alors que l’affaire Depardieu n’en finit pas de faire des remous médiatiques, on peut cependant déjà tirer une conclusion de ce Buzz planétaire: la Russie pour des centaines de millions de gens apparaît comme un pays dans lequel on peut désormais envisager de s’installer.

 

On peut même imaginer que l’affaire Depardieu a fait plus pour l’image de la Russie que la plupart des grands cabinets de PR qui travaillent pour l’Etat! Depardieu n’est cependant pas le seul à vouloir devenir russe. Les lecteurs de RIA Novosti ont pu lire une nouvelle surprenante vendredi dernier affirmant qu’un pilote de Montgolfière français, du nom de Xavier Faure, souhaitait lui aussi devenir Russe!

 

J’ai donc voulu en savoir plus sur ses motivations à "souhaiter devenir russe".

 

Xavier Faure bonjour et merci de bien vouloir rependre a mes questions, tout d’abord, pourriez vous vous présenter?

 

J'ai 37 ans, célibataire, né à Reims en Champagne. J'ai étudié le Russe comme première langue étrangère au collège. Je n'étais pas un très bon élève mais j'ai toujours porté ce pays dans mon cœur. J'ai ensuite étudié dans le domaine technique et obtenu un brevet de technicien en électrochimie, avant de travailler dans diverses usines, de simple operateur jusqu'à chef d'équipe. J'ai ensuite travaillé comme équipier de montgolfière, un métier au contact du public et de la nature. Puis j'ai passé mon brevet en contrat de qualification. En 2006, je suis devenu pilote professionnel après 150 heures de vols et avoir piloté des montgolfières de gros volumes dans différentes grosses sociétés en France et à l'étranger. Du fait de la précarité et de la saisonnalité de cette activité, j'ai essayé en parallèle de trouver une activité stable qui me correspondrait.

 

J'ai donc passé un examen professionnel en sérigraphie en 2001, puis un BTS en agriculture Biologique en 2007 mais les belle promesses sur le Bio ne sont pas suivis de financement. Parallèlement donc j’ai travaillé sur d'autres sujets: l'eau sous tous ces aspects, des traitements naturels a la potabilisation, les médecines alternatives et quantiques et aussi sur les systèmes énergétiques innovants. Je suis en relation avec des chercheurs et expérimentateurs dans ces domaines et j'écris quelques articles dans des revues spécialisés. En gros je fais de la veille technologique.

 

Si j’ai bien compris vous résidez actuellement à Koungur, une petite ville dans l’Oblast (région) de Perm. Pourriez-vous nous présenter la ville, et ce que vous y faites? Comment y est la vie?

 

C'est une très petite ville de province, source de quelques moqueries de la part des habitants des grandes villes, mais c'est surtout une étape sur la voie du transsibérien. Elle est traversée par trois rivières. Le Héros Ermak y serait arrivé en Bateau et aurais fait étape avant de conquérir les territoires sibériens et battre les tatares. Les Armes de la ville sont la corne de l'abondance et les cristaux de l’Oural, ainsi que le bateau d’Ermak.

 

Koungur possède de nombreuses et magnifiques églises et il est possible de se baigner dans les rivières en été comme en hiver, c'est même le sport local préféré, me semble-t-il. Il y a une grotte très rare ou il y de la glace toute l'année, plusieurs usines et de la place tout autour pour se poser en montgolfière. Comme partout en Russie les femmes y sont très belles.

 

La nature est très riche avec les paysages typiques des contreforts de l’Oural, plats avec de la forêt trouée par de grandes étendues de champs peu cultivés et des vallées fluviale plus prononcés mais parfois encaissées. En France, cela pourrais ressembler à un mélange de régions entre Colmar au pied des Vosges et les Ardennes entre Charleville-Mézières et Gisors.

 

Il y a quelques usines comme "Маштаб" qui fabrique des camions et emploie entre 3.000 et 4.000 personnes, deux usines de transformation de viande dont la célèbre "Телец", deux usines de limonade "Пикон", le "Молокобинат" pour le lait, deux scieries et d'autres que je ne connais pas encore.

 

La vie y est dure et douce en même temps. Dure économiquement car il me semble qu’il faille au moins deux activités pour vivre correctement. Il y beaucoup de "débrouille" mais tous le monde se connaît et il y a une forte entraide et une importante solidarité que je ne connais pas chez nous en France, en tout cas pas à cette échelle. J'entends malgré tout, souvent, que c'est moins fort qu'il y a 10-15 ans en arrière. L'esprit de la surconsommation effrénée et l’hyper matérialisme me semble porter atteinte à l'âme des gens et ici comme ailleurs les mêmes causes produisent les mêmes effets. Mais il y encore de la marge avant d'arriver à la même situation qu'en France. Les habitants sont patriotes, ils aiment leur pays et l'affichent. La ferveur religieuse est aussi très présente et importante.

 

Les institutions locales et fédérales sont socialement très présentes surtout après des enfants, écoles, bibliothèques, maison des activités de l'enfance pour les petits, maison des jeunes et du tourisme, parcs pour les enfants et installations de jeux enfantins, le sport et les installations sportive, stades, piscine, salles d’entraînement etc. Il y a aussi des musées dont celui de la conquête spatial et enfin le collège des Artistes et son foyer ou j'habite et dont les conditions matérielles pourraient paraître spartiates pour un Européen normal. Il y partout de grands quartiers d'isbas traditionnelles et parfois un ensemble d'immeubles au milieu. On trouve des petits magasins partout et quelques hypermarchés de types super U, et il y a aussi un club très actif d'école de pilotes de montgolfière, dirigé par Andreï Vertiproxov, ancien pilote de Mig.

 

Mes occupations sont diverses. J'ai fait quelques interventions dans une école locale ou on y enseigne le Français en deuxième langue. L'administration issue de l'époque Eltsine pousse pour l'anglais en première langue et le français ainsi que l'allemand font de la résistance. Je suis sinon fort occupé par mes démarches administratives (pour obtenir un passeport Russe) et les nombreuses interviews que j’ai commencé à donner a ma grande surprise. Enfin et surtout j’apprends le russe.

 

Pourquoi avoir choisi une aussi petite ville, alors que généralement les étrangers s’installent plus généralement dans des grandes villes russes?

 

J'aime les petites villes car la nature est à porté de la main, c'est très important pour moi. Je ne supporte plus, en France comme ailleurs, l'absurdité de la vie dans les grandes villes. Passer sa précieuse vie dans les embouteillages à dépenser une énergie de plus en plus rare, tout ça pour un travail qui ne sert qu’à perpétuer un système moribond, me parait complètement aberrant.

 

Mais surtout, j'ai trouvé un endroit ou je me sens à ma place.

 

Grâce à Daria Gissot de l'association So!art qui représente la ville de Perm à Bruxelles,  j'ai cet été participé à "небесная ярмака", le festival de montgolfière annuelle de Koungur. Elle m'avait souvent parlé de sa Région natale et c'est un projet que nous avions depuis longtemps.

 

J'ai rencontré ici de nombreuses personnes avec qui je me suis profondément lié d'amitié, une équipe municipale dynamique et volontaire, ainsi qu'une population chaleureuse. Une sorte de liberté et de joie de vivre malgré les soucis quotidiens, règne ici. Une ville, belle, historique avec un potentiel de développement important. Bref, un petit morceau de paradis, comme il en existe beaucoup en Russie.

 

Comment arrive-t-on de France (Lille?) à Koungur? Je veux dire physiquement bien sûr mais aussi mentalement? Quelles sont les raisons ou motivations qui vous ont poussé à quitter la France?

 

Et bien en voiture déjà, car je suis parti avec ce qui me semblais essentiel à emporter et j'ai traversé toute l'Europe et le pays baltes. Après, moralement, je ne sais pas expliquer comment, c'est à l'intérieur que cela se joue et je n'ai pas les mots pour le dire, il faut le vivre. Comme ont dit en Russe "просто так" simplement comme ça! Quelques habits chauds, une volonté de fer de rester et d'y vivre et un forte envie de pleurer de joie tout les jours quand je me lève et que je regarde par la fenêtre et ce malgré les difficultés.

 

Les raisons sont diverses et nombreuses. D’abord je crois que fondamentalement j'ai toujours voulu habiter en Russie, donc c'est un rêve d'enfant que je devais réaliser avant d'être trop âgé.  Ensuite la situation en France est devenue intenable sur beaucoup de plan. La vie est excessivement chère, cela se dégrade chaque jours et ne va pas s'arranger de si tôt, je pense même que cela va fortement se dégrader cette année. La situation économique et sociale est exécrable. Je n'y ai plus de perspectives d'emploi. Les projets et idées que j'ai eues n'ont rencontré aucun écho. Je trouve que beaucoup de gens sont fermé d'esprit ne s'intéressent qu'a eux et sont vieux dans leur tête. Les politiques n'en ont que faire du peuple et ne vivent que pour eux et leurs petites magouilles personnelles. Il n'est pas possible ne montrer qu'on aime son pays, comme en Russie. Je ne me sentais plus de rester en France. C'est mon pays que j'aime, j’aime son histoire qui me rend fier, j’aime sa culture et sa cuisine, il a été grand, mais je n'arrive plus à m'y projeter dans le futur.

 

Aujourd'hui, la France est un pays en faillite qui ne peut plus payer ses militaires en opération depuis 8 mois et qui fait enlever les culasses des armes quand le président visite une caserne!

 

J'ai vécu une expérience intéressante l'hiver dernier qui m'a décidé à partir. En revenant d'Afrique, j'ai remarqué qu'en nous posant à Orly les même gens qui était joyeux dans l'avion devenait soudain apathique comme si un couvercle leur était tombé dessus. C'est là que j'ai réalisé qu'il y avait une atmosphère particulière qui planait sur la France. J'ai eu la confirmation de ce phénomène par beaucoup de personnes qui ont voyagé ainsi que sur le blog de Pierre Jovanovic : nombreux sont ceux qui ont ressentis la même chose. Personnellement, je suis de nature joyeuse mais c'était un effort de tous les instants de ne pas être contaminé par cet apathie générale et c'était très énergivore et fatiguant.

 

En Russie il y a beaucoup de problèmes à régler mais ma vie c'est transformé d'un mauvais film de série B en aventure de tous les instant. Il m'arrive ici des choses qui n’auraient pas été possible en France!

 

L’image de la Russie est mauvaise, tout le monde le sait. Vous habitez dans ce pays depuis quelques mois et dans des conditions normales (pas en tant qu’expatrié), quelle est votre opinion sur l’image de la Russie par rapport à ce qu’est la Russie en réalité? Ou du moins telle que vous la vivez?

 

La vision médiatique est complètement fausse et n'a pas grand chose à voir avec la réalité. Il règne ici une forme d’insouciance, un joyeux bazar organisé, (les russes disent всё нормално!) à tout bout de champs pour les choses un peu curieuse et il y a une envie de vivre que j'ai aussi rencontré en Afrique noire et qui à a mon avis disparu depuis longtemps de chez nous dans nos pays Européens.

 

Sinon c'est une démocratie représentative comme les autres, ni plus ni moins avec ses particularités propres, qui sont une administration parfois lente et lourde et des différences sociales très marqués, résultat sans doute de l'hyper-libéralisation de l'économie des années 90. Les Russes sont comme les autres humains, ils y en a des bons, des très bons, des mauvais et des très mauvais, mais heureusement ceux que je connais ont un cœur "grand comme ça".

 

Surtout, je m'y sens plus libre que ces dernières années en France. Il y plein de choses, aussi simple que de se baigner librement en rivière par exemple, qui ne sont plus possible en France. Gérard Depardieu à dit que: "La Russie est une grande démocratie". La Russie est une démocratie comme la France (qui d’ailleurs à été un modèle dans la rédaction de la constitution russe) et c'est un pays à l'échelle d'un continent donc oui, techniquement "c'est une grande démocratie".

 

Comparativement à la France et dans le cadre du quotidien vécu: quel est le plus grand atout de la Russie et aussi ce qu'il faut améliorer en priorité?

 

Le plus grand atout, c'est la solidarité. Les Russes sont tous différents mais se sentent tous Russes dans l'âme et sont prêt à vivre ensemble et à construire une grande Russie. L'immense espace territorial est aussi un grand atout car il recèle de nombreuses ressources naturelles qui assurent à la Russie son indépendance. Il y a ici de la place pour tous et pour tout faire.

 

J'entends très souvent autour de moi des plaintes envers l'état des routes et la précarité des rémunérations et du système des retraites. Une autre inquiétude est la dépendance économique basé principalement sur la ventes des ressources énergétiques, qui si celles-ci devaient se tarir, laisseraient la Russie exsangue. Je pense que la Russie devrait massivement investir dans les économies d'énergies et les ressources locales de productions énergétiques et alimentaires. Parallèlement développer un système de sécurité sociale fort sur le modèle Français, modèle envié dans le monde entier et qui a été un gage de prospérité économique pendant 40 ans, jusqu'aux attaques gouvernementales de ses dernières années.

 

Beaucoup de Français, depuis l’affaire Depardieu, affirment à haute voix vouloir un jour devenir russe, notamment sur ma page Facebook j’ai pu le constater. Tous ne connaissent pas la Russie, mais ce pays pour eux représente quelque chose, comme une sorte de forteresse? Etes-vous d’accord avec cela?

 

Oui en partie. Pour l'instant c'est un pays qui semble être sur une position non-aligné par rapport à l'axe du bien censé être le monde des démocraties occidentales. En tout cas, elle participe à l'élaboration d'un monde multipolaire favorisant l'entente des peuples et est donc gage de stabilité mondiale et de prospérité économique. Les valeurs qui ont permis aux humains de vivre ensemble y sont encore défendues.

 

Le même phénomène a eu lieu envers la France quand le Président Chirac avait refusé de participer à la deuxième guerre en Irak. La France s'était levé contre une injustice majeure et avait suscité l'intérêt et l'admiration à travers le monde. Partout les Alliances Françaises avaient été envahies par des personnes qui voulaient apprendre le français.

 

La Russie représente aujourd'hui un phare guidant les gens qui refusent la vision simpliste, marchande et unipolaire du monde, et qui recherchent un peu d'enthousiasme et de chaleur humaine. Elle retrouve un peu le statu qu'avait l'URSS face au modèle tout capitalisme libéral américain, mais dans un monde qui a évolué et où les repères et valeurs sont différents.

 

Vous avez parlé de prendre la nationalité russe? Vous êtes donc prêt à abandonner votre nationalité française comme le prévoit la loi russe?

 

Et bien, je ne suis pas un expert en droit international, mais je ne vois pas d'inconvénient à abandonner la nationalité française! Mes meilleurs amis en France sont Belges, Polonais, Russes, Géorgiens. La France est aujourd’hui vendue à l'idée européenne qui ne reconnaît pas les nations en tant qu'entités souveraines. 90% des lois françaises qui sont votées par le parlement sont des lois européennes transcrites en droit français. La Commission Européenne décide du budget de la France. Le drapeau français a disparu du site de l’Élysée et nos gouvernements privatisent le système des retraites et la sécurité sociale, soit le meilleur système de protection sociale que tout le monde nous envie.

 

La France en tant que tel pour moi n'existe plus donc quid? Où est le problème?

 

Vous sentez-vous proche de la mentalité russe, et si oui comment la définiriez vous ? En quoi diffère-t-elle de la mentalité française?

 

Oui, je me sens assez proche de la mentalité russe, qui est une forme de résignation joyeuse, "вот как мы живем" disent souvent mes amis. Voilà comment nous vivons, traduction. "C'est dur mais on est chez nous avec nos amis et cela nous plaît, que peut-on faire d'autre?". C'est un mélange de survie au jour le jour et de vie intense de chaque bon moment de la vie sans trop se poser de question sur l'avenir.  En tout cas en province c'est comme cela que je le ressens.

 

En France tous est contrôlé, aseptisé, propre, rangé, légiféré, organisé, fini! Il est difficile de trouver de l'aventure comme c'était possible jusque dans les années 1950. Il n'y a plus de grandes causes dans lesquelles s'identifier sinon celles proposées par le monde anglo-saxon. C'est d'ailleurs pourquoi beaucoup partent en vacances loin, dans des destinations exotiques et aventureuses. Moi qui est vécu une grande partie de ma vie à Reims puis suis parti pour mon travail aux 4 coins de la France: Angers, Saumur, Toulouse, Lille, j'ai ressenti partout le même malaise d'être jeune avec peu de débouché et de faire face a cette situation nouvelle en France: l'ennui dans des grandes villes désertées à partir de 20h00, les tensions avec les banlieues, l'incompréhension réciproque, etc.

 

Quels sont vos plans et objectifs aujourd’hui en Russie? Que pensez- vous que la Russie peut vous apporter?

 

Dans un premier temps, je vais travailler avec les élèves de l'école de français de Perm, le temps de mieux maîtriser le russe et d'étudier le fonctionnement des structures locales. Mon expérience dans l'émission d'Andreï Makarov sur la Première chaîne m'a donné envie de participer à des émissions où il est possible de débattre calmement des questions économiques et sociales et d'apporter mon expertise, car j'ai aussi étudié l'économie politique dans un parti politique pendant cinq ans. J'écris parallèlement des articles sur la vie en Russie et aussi sur les autres sujets auxquels je m’intéresse à destination de la France.

 

Par la suite, je souhaiterais partager l'expérience de mes divers domaines de compétences, montgolfières, tourisme et agriculture biologique avec la Russie et principalement à Koungur. J'aimerai aider Koungur à devenir une ville modèle dans le domaine des questions d'environnement et monter une association de promotion des techniques liées à la protection de l'environnement en Oural, voire créer une maison de l'environnement et du tourisme environnemental, comme il en existe en France, associant une découverte du terroir en Montgolfière. Un tel centre serait je crois un pôle d'excellence et d'attraction pour Koungur.

 

Il y a ici de nombreuses possibilités. Le président Poutine et le premier ministre Medvedev ont déclaré: "2013 année de l'environnement et de l'agriculture biologique en Russie", l'occasion d'agir dans ce sens est une chance dont Koungur pourrait se saisir. La ville est idéalement située dans ce cadre, au croisement de deux axes routiers importants, un axe Nord/Sud et l'autre faisant le lien entre la Russie européenne et asiatique. La ville est proche d'un aéroport et desservie par une ligne ferroviaire. De plus, son cadre naturel et historique la chaleur de sa population, sont tout autant d'atouts qui en font une ville attractive.

 

J'aimerai que la Russie m'apporte, que la France ne permet que difficilement d’obtenir, un travail, de la reconnaissance et un terrain pour construire une maison et une famille. Mais j'aimerai surtout que ma présence ici permette à la Russie ainsi qu'à la France, deux grand pays avec des histoires communes sur de nombreux points, de mieux se comprendre et de travailler ensemble en dépassant les conflits politiques.

 

Merci Xavier Faure pour vos réponses, les lecteurs souhaitant en savoir plus peuvent consulter votre blog, qui relate votre nouvelle vie en Russie.

 

L’opinion exprimée dans cet article ne coïncide pas forcément avec la position de la rédaction, l'auteur étant extérieur à RIA Novosti.

 

Alexandre Latsa est un journaliste français qui vit en Russie et anime le site DISSONANCE, destiné à donner un "autre regard sur la Russie".

jeudi, 24 janvier 2013

Après l’Afghanistan, la Libye et la Syrie, c’est maintenant au Mali que les supplétifs français de l’O.T.A.N. sont missionnés par l’ordre mondialiste du chaos de la marchandise !

Après l’Afghanistan, la Libye et la Syrie, c’est maintenant au Mali que les supplétifs français de l’O.T.A.N. sont missionnés par l’ordre mondialiste du chaos de la marchandise !

par Gustave LEFRANÇAIS

 

« Le spectacle du “ terrorisme international ” dont le langage spectaculaire ne cesse de parler afin d’en mieux cacher la nature et les sources n’est que l’instrument d’indistinction du développement chaotique global par lequel l’ordre de la marchandise tente d’échapper à la crise économique et financière systémique de son fétichisme. »

 

L’Internationale, Critique de la société de l’indistinction,

Éditions Révolution sociale, 2007.

 
La vérité s‘inscrit toujours en négatif des apparences mises en scène par les experts étatiques de la conscience fausse et au total rebours du crétinisme universitaire et médiatique de la vie asservie puisque dans le monde de l’indistinction marchande, la totalité du réel est réellement renversée en totalité jusqu’à faire de chaque vérité un simple moment du faux partout fallacieusement réécrit et constamment retranscrit spécieusement comme inverse de ce qui est vraiment.
 
L’objectif du gouvernement du spectacle mondial, après avoir impulsé le printemps arabe de l’embrouillement accéléré aux fins de davantage maîtriser le devenir géo-politique du Moyen-Orient et d’y disperser les dernières expressions démodées de souveraineté non totalement intégrée au marché de ses exigences, consiste à aujourd’hui toujours plus avancer dans le grand ébranlement du monde africain afin d’y imposer des turbulences et convulsions croissantes qui légitimeront ainsi de nouvelles interventions militaires au nom de la religion des droits de l’homme marchandisé et de la recomposition précipitée des marchés.
 
Pour la classe dirigeante du cosmopolitisme de l’argent, l’ennemi terroriste téléguidé au plus haut niveau, est indispensable puisqu’il autorise ici un contrôle toujours plus renforcé des spectateurs de la domestication citoyenne tout en permettant là-bas la construction impérialiste d’une politique d’agression systématiquement exaspérée. C’est le cercle manipulatoire sans fin des perversions infinies de l’indistinction terroriste qui se renforce à mesure que la crise financière de la surproduction capitaliste s’accentue lourdement et qui, des macro-machinations du 11 septembre 2001 aux micro-combinaisons de l’affaire Merah, voit partout les orchestres occultes du Pentagone et de leurs métastases hexagonales s’exciter dans l’illusion, l’intoxication, la manœuvre et la manigance.
 
Cette guerre malienne utilisée subsidiairement pour redorer l’image d’un pouvoir discrédité et usé en un temps record et tenter ainsi de faire oublier des plans d’austérité intensifiée vient d’abord nous rappeler centralement que la France hollandienne, digne héritière du sarkozysme antérieur, n’est plus là qu’une banale et dérisoire province otaniste des États-Unis, simplement chargée avec les autres satellites de l’O.T.A.N. d’assumer les fonctions de gendarmerie générale dans les territoires que Washington entend remodeler adéquatement à ses impératifs économiques et politiques d’unification par la stratégie de la tension perpétuelle et du morceler illimité.
 
De cette façon et à cet endroit, le chaos et la déstabilisation se propagent et augmentent continûment par le management contrôlé de la marchandise terroriste et le jeu tortueux des forces spéciales de la schizophrénie gouvernante qui avivent intentionnellement la permanence historique des contradictions ethno-tribales sahéliennes. Ceux qui s’étonnent bien naïvement de tels faits et trouvent irresponsable que Paris ait lancé la guerre contre le régime du colonel Kadhafi puisque les effets de cette dernière ont commencé à déséquilibrer toute la région qui s’étend de la Centrafrique au Tchad, n’ont décidément rien compris et ont la culture bien courte
 
Dans le monde de l’inversion spectaculaire universalisée, les choses doivent toujours se lire à l’envers de ce que le système cabalistique de l’aliénation prétend… L’incendie généralisé qui couve sous la cendre du réel si mal dissimulé par les mensonges du fétichisme spectacliste, est bien évidemment l’expression dialectique d’une réaction en chaîne strictement souhaitée et supervisée qui voit les djihadistes de la C.I.A. du front Sud, sur-armés suite notamment au pillage délibéré et prémédité des arsenaux libyens, préposés à l’édification d’un Sahélistan pendant que leurs collègues du front Nord partis combattre le système el-Assad, eux, chapeautés par les diverses antennes américano- israéliennes du renseignement et de la feinte appuyées sur l’argent qatari coulant à flots, sont dépêchés à l’édification d’un Syristan.
 
Désormais, la dictature démocratique de l’argent est parvenue au stade supérieur de sa domination complètement réalisée. En tout lieu, règne le spectacle autocratique de la marchandise, de sa violence, de ses impostures et de sa terreur. Les seules forces spectaculaires organisées sont celles qui veulent le spectacle de la violence, de la terreur et de ses impostures en une Union sacrée politicienne de la propagande tous azimuts… Aucune structure politique efficiente ne peut donc plus être ennemie de ce qui existe comme indistinction généralisée du faux omni-présent ni contrevenir à la soumission universelle qui concerne tout et tous dans la réussite sociale répandue du mensonge circulatoire triomphant de la maffia étatique mondialiste.
 
La démocratie totalitaire du marché est cette tyrannie si parfaite qu’elle possède le don de pouvoir façonner elle-même son pire ennemi mythologique, le terrorisme. En réalité, elle ambitionne exclusivement d’être regardée à l’aune métaphorique des ennemis allégoriques qu’elle modèle dans des fictions extraordinaires et formidables plutôt que sur la matérialité de la pourriture de sa nature concrète.
 
L’équivoque, l’obscurité, le double-sens, l’énigme, l’inconnaissance, l’imbécillité et le bobard sont ainsi organisés partout par le spectacle tyrannique de l’indistinction. La préservation de la domination marchande sur le monde des spectateurs asservis s’opère donc la plupart du temps par attaques inventées sous faux-drapeaux dont la transmission médiatique a pour objet essentiel de faire bien sûr oublier les véritables enjeux, la portée logique et les conséquences recherchées.
 
Les manœuvres terroristes persistantes du G.I.A. algérien sont directement nées des bureaux nébuleux de la sécurité militaire algérienne dans le but de mobiliser l’opinion internationale en faveur du gouvernement F.L.N. et de discréditer le F.I.S. afin de museler alors durablement la population qui avait porté ce dernier au pouvoir en décembre 1991. Quelle ganache journalistique pourrait encore désormais faire semblant de ne point savoir qui était vraiment derrière la vague d’attentats commis en France en 1995 et l’assassinat des moines de Tibhirine l’année suivante ?
 
Mais qui est donc ce Mokhtar Belmokhtar figure emblématique des services spéciaux du djihad algérien qui serait l’architecte de l’attaque sanglante du site gazier de B.P. à In Amenas? C’est tout bonnement un ancien d’Afghanistan formé au combat par les légions islamiques de la C.I.A., vétéran du G.I.A., vénérable du G.S.P.C. (Groupe salafiste pour la prédication et le combat) et représentant de la nébuleuse barbouzarde Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi). Chef racailleux de divers services parallèles spécialisés en enlèvements multiples, caïd d’innombrables trafics multiformes, allant des armes aux drogues en passant par les cigarettes, et alimentant de la sorte tous les circuits économiques souterrains de la criminalité étatiquement parrainée dans ce vaste Sahara aux millions de dollars d’argent sale voracement attendu par tous les banquiers cossus du blanchiment en argent propre.
 
La société moderne de la démocratie aboutie du spectacle du faux qui repose sur l’industrie moderne du fétichisme marchand de l’indistinction n’est pas fortuitement ou superficiellement terroriste, elle l’est fondamentalement parce que le spectacle de la terreur devient l’une des principales productions de la crise actuelle de l’économie politique à mesure que l’argent qui a totalement asservi les hommes ne parvient plus à produire la possibilité de sa propre re-production.
 
Le pouvoir étatique du mensonge déconcertant est devenu si mystérieux qu’après les ténébreux attentats ésotériques du 11 septembre 2001, on a pu se demander qui commandait vraiment l’hermétique complexe militaro-industriel des États-Unis, la puissance la plus considérable du monde démocratique du despotisme du négoce ? Et donc qui diable peut commander le monde démocratique du négoce despotique si ce n’est justement la terreur de la loi de la valeur elle-même…
 
Le spectacle capitaliste des marionnettes terroristes de l’exotisme islamique est une sorte de théâtre d’effigie dont la clandestinité structurelle reproduit à l’extrême la division du travail pour que la base utilisée ignore tout du sommet utilisateur. La représentation des lampistes n’y est naturellement jamais assurée par les commanditaires en chair et en os mais par des figurines naïves (les marionnettes de l’exécution) manipulées dans l’ombre par des marionnettistes (les manipulateurs des corps détachés de la supercherie étatique, eux-mêmes impersonnellement manœuvrés par la dialectique anonyme et impitoyable des chimères de la folie de l’acquisition marchande).
 
Après avoir été massivement utilisés contre la Libye, les groupes islamo-trafiquants sahéliens d’ailleurs soutenus implicitement par l’O.T.A.N. dans leur liquidation de la contraignante présence armée Touareg, se sont renforcés en une vaste continuité territoriale potentielle s’approchant d’abord du Tchad et du Nigeria pour aller ensuite toucher les larges étendues possibles qui vont du Sénégal jusqu’au Soudan. Il est clair que si le gouvernement du spectacle mondial entend bien les utiliser comme force dépendante de déploiement de ses machinations stratégiques pour étaler son chaos régulé, il n’entend point, en revanche, leur laisser la possibilité d’acquérir une puissance d’expansion autonome. C’est là ce que vient signifier très emblématiquement ce rappel à l’ordre belliqueux du petit brigadier yankee Hollande qui est censé faire ressortir là que l’or, la drogue, les diamants, l’uranium et les métaux précieux que recèle singulièrement le Mali peuvent certes donner lieu à d’importantes commissions pour les agents islamistes de sécurité du nouvel ordre mondial mais que l’essentiel des ressources doit bien continuer à être géré principalement et directement par la classe capitaliste du spectacle mondialiste, elle-même.
 
En fait et toutes proportions gardées, c’est un peu comme lorsque la police organise en banlieue une descente emphatique dans un blafard quartier de vente de drogues… À l’évidence, elle ne vient pas annoncer qu’elle va abolir l’économie souterraine, elle procède uniquement à une vérification d’encadrement de ses flux pour les ajuster aux nécessités générales du commerce officiel des servitudes indispensables.
 
Le terrorisme islamiste des appendices armés du gouvernement du spectacle mondial est le dernier mystère de la crise généralisée du capitalisme moribond, et seul ceux dont la compréhension radicale va jusqu’à dé-chiffrer le fétiche des mystifications démocratiques peuvent saisir le piège tordu de la terreur étatique.
 
Le spectacle terroriste industriel de masse de la tromperie mondialisée est apparu avec la démocratie complètement réalisée de la liberté despotique du marché. On vérifiera qu’il ne pourra disparaître du monde qu’avec l’anéantissement de cette dernière. Alors les hommes fatigués de n’être plus que de pauvres pacotilles déambulatoires emprisonnées par les grandes surfaces de la transaction, se mettront certainement en mouvement pour substituer aux servilités de la civilisation de l’Avoir, l’auto-émancipation vers la communauté de l’Être.

Pour L’Internationale, Gustave Lefrançais

 


 

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mercredi, 23 janvier 2013

Les Indo-Européens, faits et polémiques

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lundi, 21 janvier 2013

SOS-Racisme: histoire d'une manipulation

Mardi 29 janvier (19 h 30) : conférence de Synthèse nationale à Paris...

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vendredi, 18 janvier 2013

Soirée Livr'arbitres à Paris

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Des souvenirs sur une Alsace-Lorraine allemande

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Des souvenirs sur une Alsace-Lorraine allemande

par Georges FELTIN-TRACOL

Dans le climat d’inculture généralisée qui ne cesse de s’étendre dans un Hexagone noyé par les écrans de la bêtise voulue et du divertissement marchand de la vacuité ambiante, il importe de saluer deux sympathiques éditeurs lorrains qui copublient les moments alsaciens extraits des Mémoires (1925) du prince Alexandre de Hohenlohe-Schillingsfürst (1862 – 1924). Cette parution opportune éclaire une période méconnue de cette terre qui fut allemande entre 1871 et 1918.

 

Président de l’équivalent germanique du conseil général de Haute-Alsace en 1903 et fils de Clovis de Hohenlohe-Schillingsfürst (1819 – 1901), ancien gouverneur de la région et futur chancelier impérial, Alexandre appartient à une très vieille famille dont « l’anoblissement […], attesté au XIIe siècle, était antérieur à celui des Hohenzollern ! (p. 11) ». Esprit cultivé, francophone et ne cachant pas sa francophilie, ce prince allemand se retrouve au contact quotidien avec ses administrés alsaciens.

 

Le témoignage qu’il laisse dépeint une Alsace-Lorraine ignorée des Français. Ses souvenirs contestent les clichés et autres poncifs diffusés par une historiographie parisienne pédante et revancharde. Il souligne l’influence prépondérante dans les campagnes alsaciennes de l’Église catholique et relève qu’à la veille de la Grande Guerre, le mouvement protestataire francophile est largement minoritaire dans les urnes.

 

L’échec de ce mouvement subversif soutenu clandestinement par Paris ne signifie pourtant pas une adhésion sincère au modèle allemand. Bien au contraire ! Il remarque, d’une part, que « dans l’ensemble, l’Alsace-Lorraine était aussi éloignée de Berlin qu’une colonie africaine ou qu’une station navale d’Extrême-Orient (pp. 63 – 64) » et, d’autre part, que « l’« Alsacien-Lorrain » était une entité qui n’existait que sur le papier En réalité, l’Alsacien est aussi différent du Lorrain que, par exemple, un Normand peut l’être d’un Picard (p. 53) ».

 

Si les protestataires régressent de scrutin en scrutin, la « résistance » à l’assimilation germano-prussienne persiste et s’accentue même. Alexandre de Hohenlohe observe que les jeunes gens des milieux aisés de Strasbourg, de Colmar et de Mulhouse « étaient Français de cœur (p. 55) ». En revanche, il ne retrouve pas cette inclination « dans la population paysanne [où] la plupart avaient des sentiments alsaciens (p. 55) ». La présence française demeure prégnante et l’auteur regrette la fondation d’une université à Strasbourg parce qu’elle la renforce paradoxalement. Il aurait été préférable que les futures élites étudient dans les universités réputées d’outre-Rhin, à Heidelberg ou Fribourg…

 

Son pragmatisme s’appuie sur ses échanges permanents avec les milieux économiques, en particulier les industriels Jean Schlumberger (1819 – 1908) et Édouard Köchlin (1833 – 1914). Le prince de Hohenlohe constate en effet que « chez tous les Alsaciens des hautes classes, on ne parlait que français (p. 41) » si bien qu’il emploie souvent la langue de Molière lors des rencontres privées !

 

Les élites alsaciennes ne se formalisent pas du maintien implicite du français ! Pour preuve, Hugo Zorn von Bulach (1851 – 1921) qui, même devenu responsable politique régional, « ne possédait l’allemand qu’imparfaitement, ce qui le gênait parfois beaucoup dans ses interventions publiques au Parlement, surtout quand on est décrété la publicité des débats et l’usage de la langue allemande à la Délégation d’Alsace. Malgré cela, pour plus de commodité, les députés se servaient encore du français et du patois alsacien dans les séances des commissions (p. 41) ». Situation impensable dans la République française une et indivisible…

 

Alexandre de Hohenlohe ajoute qu’« il a dû être plus d’une fois pénible à ceux qui étaient d’un âge avancé de se trouver en état d’infériorité vis-à-vis des représentants du gouvernement, par suite de leur connaissance défectueuse de la langue allemande. Chose étonnante, quelques-unes d’entre eux, qui pourtant n’avaient pas appris un mot d’allemand dans leur jeunesse avaient réussi, à force d’application et de persévérance, à s’exprime couramment dans cette langue (p. 41) ». Un bilinguisme, voire un trilinguisme, existait donc de facto.

 

Cette situation linguistique originale découle de la spécificité institutionnelle de l’Alsace-Lorraine annexée lors du traité de paix de Francfort de 1871 par l’Empire allemand naissant. Les trois anciens départements français deviennent un Reichsland, ce qui signifie que le jeune État fédéral-impérial en est le propriétaire indivis. Par conséquent, cette « Terre d’Empire » est placée sous l’autorité directe de l’empereur allemand et de son chancelier impérial. Toutefois, le Reichsland bénéficie d’une certaine liberté administrative avec un représentant de l’empereur, le Reichsstatthalter, « littéralement “ celui qui tient lieu ”, le Statthalter fait plus figure de régent que de gouverneur dans ses attributions (p. 20) ». Nommé par Berlin, il préside à Strasbourg le Conseil d’État d’Alsace-Lorraine, dirige un proto-gouvernement régional (quatre secrétaires d’État pour l’Intérieur, la Justice et les Cultes, les Finances et les Domaines et l’Industrie, l’Agriculture et les Travaux publics) et négocie avec la Délégation d’Alsace-Lorraine (Landesausschuss) de trente, puis de cinquante-huit élus au suffrage indirect entre 1874 et 1911. On est loin de la gestion despotique du centralisme parisien.

 

En 1911, le Kaiser Guillaume II accorde à l’Alsace-Lorraine une constitution locale. Le Reichsland devient le vingt-sixième État de la Fédération impériale et son Landesausschuss se transforme en un Parlement bicaméral constitué d’un Sénat de quarante-six membres désignés par l’empereur et les corps intermédiaires locaux, et d’une Assemblée régionale de soixante élus au suffrage universel direct masculin. Le déclenchement de la folle tragédie européenne de 1914 suspendra ces libertés régionales.

 

Alexandre de Hohenlohe se montre très favorable à toute solution neutraliste. « Dès avant 1914, rappelle Laurent Schang dans une belle introduction, [il] s’était prononcé en faveur de la constitution du Reichsland Elsass-Lothringen en État neutre autonome assortie d’un référendum d’autodétermination (p. 13). » Il s’agissait surtout d’éviter tout nouveau drame franco-allemand. Il regrette que Berlin ait finalement choisi la voie du Reichsland pour l’Alsace-Lorraine alors que d’autres solutions étaient à ses yeux possibles. Il en esquisse certaines : une tutelle paternaliste comme le fit son père, Statthalter avant de devenir chancelier, une large autonomie opérée dès 1874 ou 1875 ou, plus surprenant, le partage du territoire alsacien-lorrain entre les principaux États fédérés allemands (Prusse, Bavière, Bade, Wurtemberg). L’auteur de ces Souvenirs a compris que la perte de l’Alsace-Lorraine rend la France inguérissable. Il n’accuse pas Bismarck de cette erreur. « Bismarck pressentait bien les conséquences désastreuses que l’annexion de l’Alsace-Lorraine allait voir pour la politique européenne, avec un caractère comme celui du peuple français. Il voyait plus loin que les généraux, pour qui seules les considérations stratégiques entraient en ligne de compte, mais le côté tragique du grand génie politique qu’a été Bismarck, c’est qu’il n’a pu se libérer de la croyance en la force et en l’épée et qu’il a sous-estimé la puissance des valeurs morales en politique. C’est ainsi que l’avis de Moltke prévalut finalement et que la “ Terre d’Empire ” devient le “ glacis ” de l’Empire (p. 67). »

 

L’auteur sait qu’en 1866, après la victoire prussienne à Sadowa, le futur « Chancelier de Fer » avait pesé de tout son poids pour que le roi Guillaume Ier ne se rangeât pas du côté d’un état-major imbu de pensées frédériciennes qui rêvait de s’emparer de contrées autrichiennes. En 1870, la pression était trop forte pour résister frontalement à l’opinion des militaires victorieux… « On ne lira qu’avec plus d’intérêt ces pages grosses de nostalgie, desquelles émerge le regret d’une soudure “ germano-alsacienne-lorraine ” en bonne voie, sinon achevée, au seuil de la Première Guerre mondiale  (p. 12) », écrit Laurent Schang à propos de ce beau témoignage d’un Européen de langue allemande sur une région-charnière d’Europe occidentale.

 

Georges Feltin-Tracol

 

• Prince Alexandre de Hohenlohe, Souvenirs d’Alsace-Lorraine 1870 – 1923, Introduction et notes de Laurent Schang, traduction d’Edmond Dupuydauby, Édition des Paraiges (4, rue Amable-Tastu, 57000 Metz) – Le Polémarque Éditions (29, rue des Jardiniers, 54000 Nancy), Metz – Nancy, 2012, 77 p., 10 € (+ 5 € de frais de port), à commander aussi sur les sites des éditeurs.

 


 

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mardi, 15 janvier 2013

Pourquoi la France ouvre-t-elle ses portes au Qatar ?

Enquête : Pourquoi la France ouvre-t-elle ses portes au Qatar ?

20130108
 

Sous Sarkozy comme avec Hollande, le richissime émirat dispose des mêmes facilités pour racheter des pans entiers de notre économie. Que signifie l’appétit d’ogre de ce petit pays ? Pourquoi Paris lui ouvre-t-il ses portes ? Enquête.

La dépêche, stupéfiante, est tombée le 6 novembre dernier : l’ambassadeur du Qatar, Mohamed Jaham al-Kuwari, annonçait à l’Agence France-Presse que son pays avait l’intention d’investir 10 milliards d’euros dans des sociétés du CAC 40. Répondant au journaliste qui évoquait quelques rares déclarations de personnalités qui, comme Bernard-Henri Lévy, Jean-Luc Mélenchon ou Julien Dray, ont manifesté leur inquiétude sur l’influence du Qatar en France, l’ambassadeur a conclu l’interview par une formule aussi ironique qu’arrogante : «C’est quoi, le problème ?»

En effet, il n’y a, apparemment, aucun problème. Apprendre que le fonds souverain qatari va presque doubler le montant de ses participations dans le CAC 40 ne pose aucun problème au gouvernement ni à l’opposition. Organiser la Coupe du monde de football dans un pays où ce sport n’intéresse personne et va nécessiter la construction de stades munis de sols réfrigérants pour pouvoir supporter des températures à 45° C (bonjour Kyoto !), ça n’interpelle personne dans le monde du sport – pas même Michel Platini -, ni dans celui de l’écologie, surtout pas Yann Arthus-Bertrand. Coïncidence : son dernier film a été financé par des Qataris…

Savoir que des Qataris pourraient sélectionner des entrepreneurs de banlieue sur une base communautariste n’inquiète pas grand monde. Installer une annexe de Normale Sup à Doha, ville où l’on est payé 400 dollars ou 12 000 selon la couleur de sa peau, ne dérange personne, et surtout pas Monique Canto-Sperber, présidente du pôle interuniversitaire Paris Sciences et Lettres et Philosophe spécialiste de «l’éthique».

Qu’enfin la France impose à tous ses partenaires l’admission directe du Qatar au sein de la francophonie, sans passer par la case «observateur», comme l’exigeaient les usages jusqu’alors, cela n’ennuie pas grand monde non plus.

A Doha, on appelle ça le «français sonnant et trébuchant». Mais, à Paris, le silence est de rigueur. Depuis des années. On peut même dater l’origine de l’amitié franco-qatarie : le premier voyage de Nicolas Sarkozy, alors ministre de l’Intérieur, à Doha, en décembre 2005. Sarkozy s’est lié d’amitié avec le Premier ministre qatari, Hamad ben Jassem al-Thani, «HBJ» pour les intimes, au risque de mélanger les genres.

Lorsqu’il arrive à l’Elysée, Sarkozy prend l’habitude de recevoir tous les mois «HBJ». Au menu des discussions, les emplettes en France du fonds souverain Qatar Investment Authority (QIA). Selon un patron du CAC 40, «Guéant avait une liste de courses pour les Qataris. On avait l’impression que l’Elysée leur donnait à racheter la France».

C’est durant le quinquennat Sarkozy que le Qatar est entré dans le capital de plusieurs groupes du CAC 40. Le président a même donné de sa personne, en faisant pression sur le président du PSG, Sébastien Bazin, gérant du fonds Colony Capital, pour lui demander de vendre le PSG selon les conditions du Qatar. Bazin proposait aux Qataris 30 % du club de foot parisien pour 30 millions d’euros. Après l’intervention présidentielle, ils en ont récupéré 70 % pour 40 millions (ils en sont désormais propriétaires à 100 %).

Convention fiscale

Mais le sport n’est qu’une conséquence d’une orientation stratégique prise à l’Elysée. C’est sous l’ère Sarkozy que le Qatar s’est imposé – sans provoquer un quelconque débat, même au sein du gouvernement Fillon – comme un médiateur de la diplomatie française au Proche et au Moyen-Orient : intervention financière pour libérer les infirmières Bulgares en Libye (juillet 2007), aide au rapprochement entre Nicolas Sarkozy et Bachar al-Assad, puisque, avant d’aider les combattants, le Qatar était un allié solide du régime baasiste.  

Et, bien sûr, plus récemment, le Qatar, seul pays arabe à le faire, a participé – financement de l’armement, formation des combattants libyens et même présence de 5 000 hommes des forces spéciales – à l’intervention militaire occidentale contre Kadhafi.

La puissance grandissante du Qatar en France semble stimulée par la faiblesse de nos responsables politiques, déboussolés par la crise mondiale et appâtés, parfois, par les largesses supposées de ce petit pays. Ami personnel de la famille de l’émir, Dominique de Villepin, aujourd’hui avocat d’affaires, a pour principal client le Qatar Luxury Group, fonds d’investissement personnel de la cheikha Mozah bint Nasser al-Missned. A droite, parmi les habitués de Doha, on trouve aussi Philippe Douste-Blazy, Rachida Dati ou Hervé Morin.

Dans les milieux diplomatiques français, cette politique du «tout-Qatar» agaçait certains, qui espéraient que François Hollande, réputé partisan d’un resserrement des liens avec l’Algérie, allait en quelque sorte «rééquilibrer» la politique française dans la région.

Certes, François Hollande s’est rendu en Algérie le 19 décembre. Mais il avait vu le Premier ministre de l’émirat, Hamad ben Jassem al-Thani, dans un palace parisien dès le début de 2012. Les deux hommes s’étaient d’ailleurs déjà rencontrés une première fois en 2006, François Hollande le recevant en tant que premier secrétaire du PS. Depuis son élection, il l’a revu à deux reprises, et a accueilli l’émir Hamad ben Khalifa al-Thani à l’Elysée, le 22 août 2012. Un traitement privilégié.

Autre signe de continuité, l’entrée d’investisseurs qataris au capital de France Télécom en juin 2012… «Les gouvernements passent, mais les intérêts demeurent. Les accords financiers entre la France et le Qatar n’ont pas été interrompus, remarque le chercheur Nabil Ennasri, Hollande a seulement mis un terme à l’affichage publicitaire façon Sarkozy.»

Incroyable : la convention fiscale entre les deux pays – une sacrée niche fiscale qui dispense un investisseur qatari de tout impôt sur les plus-values réalisées sur la revente de biens immobiliers en France -, qui avait été tant décriée par le PS (du temps de l’opposition), n’a pas été abrogée…

Il faut dire que, même sous Sarkozy, les Qataris ont eu la prudence de créer ou de maintenir des liens solides avec la gauche française. L’ambassadeur du Qatar en France, Mohamed Jaham al-Kuwari, a préparé la transition politique de longue date en multipliant les contacts avec plusieurs dirigeants socialistes : Ségolène Royal, Laurent Fabius, Elisabeth Guigou, Jack Lang, Bertrand Delanoë, Martine Aubry, mais aussi Pierre Moscovici, Arnaud Montebourg, qui a séjourné à Doha en pleine campagne de la primaire socialiste, ou encore Manuel Valls, seul émissaire du candidat à avoir rencontré l’émir en décembre 2011.

Sous nos latitudes tempérées, le Qatar est un sujet de consensus. Jusque dans les médias, où il est devenu le pays des Bisounours. Comme dans l’émission «Un œil sur la planète», diffusée sur France 2 l’automne dernier, le présentant comme un nouvel eldorado, terre d’accueil de tous les ambitieux et les entrepreneurs.

Ou encore dans une interview de l’ambassadeur de France au Qatar publiée dans la revue Géoéconomie (1). Le diplomate s’enthousiasme d’abord sur les perspectives de coopération entre les deux pays, faisant miroiter aux groupes français la perspective des 120 milliards mobilisés en vue de la Coupe du monde de football en 2022. Autant de beaux contrats pour Bouygues, Vinci, Carrefour et quelques autres.

Mais l’ambassadeur y ajoute le supplément d’âme indispensable aux esprits délicats que nous sommes supposés demeurer : le printemps arabe aurait ainsi révélé – comme l’a reconnu lui-même François Hollande – d’importantes convergences entre les deux pays. L’honneur est sauf.

Feuilletons le dossier de presse «Qatar en France». Il s’y dessine peu à peu un véritable storytelling qatari, que l’on pourrait résumer comme suit : le Qatar est un «nanopays» richissime – 78 260 dollars de revenu par Qatari en 2009, ça fait rêver – mais coincé entre deux géants, l’Iran, avec lequel il doit partager le gisement de gaz North Dome, l’un des plus grands du monde, et l’Arabie saoudite, 14 fois plus peuplée et disposant d’avoirs neuf fois supérieurs.

Cette fragilité obligerait les Qataris à se montrer à la fois plus intelligents et plus diplomates que leurs voisins. Ils chercheraient ainsi une «assurance vie» - l’expression revient chez tous nos interlocuteurs – et seraient prêts à signer des chèques XXL à ceux qui sont susceptibles de lui garantir une protection. La France, avec son siège au Conseil de sécurité de l’ONU, constitue son meilleur allié.

Autre argument en faveur des Qataris, leurs investissements sont jugés «très professionnels». Leur charte, «Vision nationale pour le Qatar 2030», adoptée en 2008, prévoit que les revenus des placements des fonds souverains qataris se substitueront à ceux du gaz.

Il faudrait donc se réjouir, s’enthousiasme Patrick Arnoux, du Nouvel Economiste (2), de leur intérêt pour nos grands groupes : «L’entreprise Qatar, dirigée d’une main ferme par le cheikh Hamad ben Khalifa al-Thani, investit certes par milliards sur des actifs qui ont trois points communs : ils sont unitairement importants, prometteurs pour l’avenir et à forte rentabilité.» Et de vanter les financiers qataris, «issus des meilleures banques américaines comme Lehman Brothers» (curieux, cet éloge d’une banque qui a fait faillite en 2008, déclenchant la crise dans laquelle nous pataugeons encore !).

Et puis, nous assurent tous ces amis français des Qataris, ces derniers ne sont ni gourmands ni exhibitionnistes ; excepté chez Lagardère, ils n’exigent pas de siéger dans les conseils d’administration des sociétés dont ils deviennent actionnaires.

Une alternative aux Saoudiens

Riches en capitaux disponibles, respectueux de l’indépendance de leurs partenaires, les Qataris sont aussi, nous dit-on, modernes. Leur nouvelle constitution donne aux 200 000 Qataris le droit d’élire des représentants locaux qui pourront même être des femmes (au sein d’une chambre cependant strictement consultative).

La chaîne Al-Jazira, qu’ils ont créée en 1996, présentée comme une sorte de CNN arabe, aurait révolutionné l’information au Proche-Orient. La femme de l’émir, la cheikha Mozah bint Nasser al-Missned, a contribué à une véritable cité du savoir à la périphérie de Doha, ouverte aux musées et aux universités occidentales.

Enfin, le sentiment de fragilité des Qataris les pousserait à devenir une tête de pont entre le monde arabo-musulman et l’Occident. Songez que la plus grosse base militaire américaine, autrefois à Bahreïn, a déménagé à Doha et que les Qataris maintiennent des liens avec Israël. Ils constituent ainsi une alternative plus présentable que les Saoudiens, qui soutiennent les salafistes dans la région. Et si le Qatar représentait cet islam modéré dont tant d’Occidentaux espèrent l’avènement depuis des années ?

Bien sûr, comme tout storytelling, celui portant sur le Qatar reflète une partie de la réalité. L’émir, qui a chassé son père du pouvoir en 1995, s’est révélé un fin stratège. «Le Qatar est le premier à avoir acheté des méthaniers, analyse l’économiste Hakim el-Karoui, et à garder ainsi la maîtrise du transport du gaz.» Résultat : le pays frôle les 20 % de croissance en 2012, après 16 % en 2010 et 12 % en 2009.

Ensuite, il semble bien que la stratégie qatarie soit la plus subtile des pays du Golfe. «Les Qataris ne sont pas que des payeurs, observe l’ancien ministre des Affaires étrangères Hubert Védrine, ils sont astucieux et mènent une stratégie d’équilibre, entre Al-Jazira d’un côté, le phare du printemps arabe, la base américaine sur leur territoire et leurs relations assez bonnes avec Israël.»

Enfin, il est patent que les Qataris ne mélangent pas forcément leur politique diplomatique, pas facile à décrypter, et leurs investissements pour lesquels ils recherchent, c’est un banquier qatari qui parle, un «absolute return», autrement dit une garantie de retour sur investissement.

Mais ces indéniables atouts – prospérité économique, stratégie au long cours, subtilité diplomatique – ne doivent pas occulter la face moins reluisante du petit Etat. La condamnation à perpétuité, le 28 novembre, du poète Mohammed al-Ajami, coupable… d’un court texte critique sur l’émir, jette une lumière blafarde sur la modernité qatarie.

Et il y a surtout la relation très particulière que le Qatar entretient avec l’islamisme politique. L’émirat a été, depuis quinze ans, le refuge de bien des activistes radicaux, tel Abassi Madani, l’ex-patron du FIS algérien. Le Hamas a déménagé ses bureaux de Damas à Doha, et la récente visite de l’émir à Gaza n’est pas passée inaperçue.

La chaîne de télé Al-Jazira s’est fait connaître en devenant le diffuseur exclusif des communiqués d’Al-Qaida, et certains ne manquent pas de souligner que Doha a été exempt de tout attentat terroriste. Exilé au Qatar depuis quarante ans, le plus célèbre prédicateur islamiste, Youssef al-Qardaoui, officie chaque semaine sur Al-Jazira.

L’homme a déclaré que «les opérations martyres sont l’arme que Dieu a donnée aux pauvres pour combattre les forts», et que, «tout au long de l’histoire, Allah a imposé aux juifs des personnes qui les puniraient de leur corruption. Le dernier châtiment a été administré par Hitler. [...] C’était un châtiment divin. Si Allah le veut, la prochaine fois, ce sera par la main des musulmans».

Cet activisme n’étonne pas Alain Chouet, ancien chef du service de renseignements de sécurité de la DGSE (services secrets français) : «Comme la famille régnante veut ravir à la famille Al-Saoud d’Arabie saoudite son rôle moteur dans le contrôle de l’islam sunnite à l’échelle mondiale, elle héberge volontiers les imams et prêcheurs de tout poil, à condition qu’ils soient plus extrémistes que les oulémas saoudiens, de façon à leur rendre des points. Et le Qatar finance partout et généreusement tous les acteurs politico-militaires salafistes, dont la branche la plus enragée des Frères musulmans, hostiles à la famille Al-Saoud et bien sûr au chiisme, mais aussi aux régimes « laïcs » et nationalistes arabes susceptibles de porter ombrage aux pétromonarchies.»

Enfin, le Canard enchaîné affirme que les services français ont repéré une présence qatarie dans le nord du Mali, où sévissent des groupes jihadistes. «On pense, explique Roland Marchal, chercheur au Centre d’études et de recherches internationales (Ceri), qu’un certain nombre d’éléments des forces spéciales qataries sont aujourd’hui dans le nord du Mali pour assurer l’entraînement des recrues qui occupent le terrain, surtout d’Ansar Dine.» Ansar Dine, un groupe jihadiste non lié à Al-Qaida.

Bref, la famille régnante au Qatar n’a sans doute pas de doctrine bien établie, mais son jeu diplomatique, fondé sur une double exigence – concurrencer les Saoudiens dans le monde musulman et diaboliser l’Iran – peut l’amener à des positions fort lointaines de «l’islam des Lumières».

Y compris en France. «Si quelqu’un, affirme un bon connaisseur du dossier, avait la curiosité de se poster en face de l’ambassade du Qatar, il pourrait y prendre en photo d’éminents animateurs de la mouvance islamiste radicale.»

Premier instrument de l’influence du Qatar dans le monde arabe, la chaîne Al-Jazira s’est révélée être «le DRH du printemps arabe», selon l’expression de Naoufel Brahimi el-Mili, professeur de science politique et auteur du livre le Printemps arabe, une manipulation ? (3)

Ce dernier a passé des mois à décrypter les émissions de la chaîne qui fut la première à mettre en scène le martyre du vendeur de légumes tunisien Mohamed Bouazizi, dont le suicide, le 4 janvier 2011, a embrasé la Tunisie, avant que la révolte ne se propage en Libye ou en Egypte. A chaque fois, Al-Jazira accompagne et «feuilletone» les mouvements et les combats.

Il apparaît que, partout, les Qataris soutiennent les Frères musulmans, qui constituent la principale force politique du printemps arabe. Et qu’Al-Jazira est leur bras armé. Brahimi note ainsi que le nouveau ministre des Affaires étrangères libyen, Mohamed Abdelaziz, était un journaliste de la chaîne, de même que Safwat Hijazi, devenu une sorte de «conseiller spécial» du gouvernement égyptien. Pour Brahimi, le projet du Qatar est limpide : «Imposer la révolution « démocratique » par le bas, puisque les révolutions par le haut, façon néoconservateur bushiste, ont échoué.»

Autre sujet d’inquiétude, l’activisme sportif des Qataris – Grand Prix de l’Arc de triomphe, achat du PSG, Mondial de handball (2015) et Coupe du monde de football (2022) – ne relève pas forcément d’un amour désintéressé du sport mais bien d’une stratégie délibérée de soft power.

C’est d’ailleurs Nicolas Sarkozy lui-même, cumulant le rôle de superconsultant des Qataris avec celui de président de la République, qui aurait conseillé à l’émir de «passer par le sport» pour implanter Al-Jazira en France. D’où la création de la chaîne BeIN Sport, au risque de déstabiliser le système audiovisuel français, et notamment le financement du cinéma.

Enfin, et ce n’est pas le moins inquiétant, les Qataris manifestent un intérêt particulier pour les secteurs industriels sensibles et stratégiques. Cette inclination est d’abord apparue dans le dossier EADS. A la fin des années 90, l’émir sympathise avec Jean-Luc Lagardère, avec lequel il partage une passion des chevaux.

Les deux couples sympathisent, Bethy Lagardère initiant la cheikha Mozah aux joies de la vie parisienne, tandis que les équipes Lagardère apportent à l’émir leurs conseils avisés dans l’audiovisuel lors de la création d’Al-Jazira. Avant même la mort de Jean-Luc Lagardère, en 2003, l’émir avait émis le vœu d’entrer au capital d’EADS.

Mais Jean-Paul Gut, alors haut dirigeant d’Airbus, avait habilement orienté les Qataris vers une prise de participation dans le groupe Lagardère lui-même, ce qui était moins intéressant pour le Qatar mais répondait à l’inquiétude de l’héritier, Arnaud Lagardère, qui souhaitait s’assurer des alliés solides dans sa société holding. Mais, quand le groupe allemand Daimler a voulu vendre ses parts dans EADS, le Qatar s’est porté acquéreur, ce qui entraîna une vive réaction d’Angela Merkel aboutissant à un engagement de l’Etat allemand à la place de Daimler.

Si les Qataris se sont senti l’audace d’avancer sur des dossiers aussi sensibles, c’est que les liens entre la France et le Qatar sont anciens : 80 % de l’équipement militaire qatari est français et, pour l’anecdote, les 15 ha que la Direction générale de l’armement loue à Bagneux (Hauts-de-Seine) appartiennent à une banque qatarie…

Poker menteur

Autre indice de l’intérêt des Qataris pour les secteurs stratégiques, l’affaire Altis, une société de semi-conducteurs en difficulté que les Qataris voulaient acheter en 2009 pour créer une industrie similaire au Qatar. Mais Augustin de Romanet, alors patron de la Caisse des dépôts, a jugé le projet suspect, et le Fonds stratégique industriel s’est finalement substitué à l’émirat.

Encore plus inquiétant, le jeu de poker menteur autour d’Areva : il s’en est fallu de peu que l’émirat mette la main sur les mines d’uranium du groupe nucléaire ! A la manœuvre, l’ancien secrétaire général de l’Elysée Claude Guéant, l’intermédiaire de choc Alexandre Djouhri, Henri Proglio, le PDG d’EDF, et François Roussely, du Crédit suisse – une des banques conseil en France des Qataris avec la banque Rothschild.

L’alternance est, apparemment, un concept qui ne s’applique pas à cet aréopage. C’est d’ailleurs peut-être ce qui a conduit l’ambassadeur du Qatar à annoncer de nouveaux investissements dans les groupes français.

A ce rythme-là, la France va finir par avoir plus besoin du Qatar que l’inverse.

(1) «Qatar, l’offensive stratégique», no 62, été 2012.

(2) Du 3 mars 2012.

(3) Editions Max Milo, 2012.

Fonds qatari dans le CAC 40 : déjà plus de 6 milliards !

France Telecom (1 %) : 214,5 M€

Lagardère (13 %) : 1,071 milliard €

LVMH (1 %) : 653,64 M€

Suez Environnement (1 %) : 45 M€

Total (3 %) : 2,691 milliards €

Veolia (5 %) : 946,95 M€

Vinci (8 %) : 2 84,11 M€

Vivendi (5 %) : 427,88 M€

Total : 6,334 milliards d’euros

 
IMMOBILIER : 4 MILLIARDS NET D’IMPÔTS

Les avoirs immobiliers en France des Qataris se partagent entre différents membres de la famille régnante. Ils comprennent des immeubles de luxe et de nombreux hôtels. Au total, l’immobilier détenu par l’émirat dans notre pays atteindrait ainsi 4 milliards d’euros. Début 2008, les Qataris ont obtenu le vote au Parlement français d’un statut fiscal qui les exonère d’impôt sur leurs plus-values immobilières en France. Et ils en profitent : ces dernières années, ils ont racheté des hôtels de luxe comme le Martinez et le Carlton, à Cannes, le Royal Monceau, le Concorde Lafayette, l’hôtel du Louvre, à Paris, le Palais de la Méditerranée, à Nice. Mais ils ont également fait main basse sur le somptueux hôtel Lambert sur l’île Saint-Louis, à Paris, le splendide hôtel d’Evreux de la place Vendôme, à Paris, l’immeuble Virgin des Champs-Elysées, le siège de Vivendi, avenue de Friedland, à deux pas des Champs-Elysées, le siège d’Areva près de l’Opéra, et la tour Pacific à la Défense, ainsi que sur le centre de conférences Kléber, lieu chargé d’histoire – le haut commandement militaire allemand s’y était installé sous l’Occupation et c’est là qu’ont été signés les accords de Paris mettant fin à la guerre du Vietnam. Le destin du centre Kléber est de devenir un palace pour milliardaires…

Au total, les avoirs qataris en France – immobilier et CAC 40 – dépasseraient donc les 10 milliards* d’euros selon nos calculs. Une somme qui rejoint les statistiques de la Banque des règlements internationaux (9,79 milliards), ce qui représente trois fois moins que les investissements du Qatar en Grande-Bretagne, mais deux fois plus que ceux de l’Allemagne.

* Valeur au 20 novembre 2012

 

  • Article publié dans le numéro 820 du magazine Marianne, du 5 au 11 janvier 2013

lundi, 14 janvier 2013

Un intervento umanitario in Siria, 150 anni fa

Un intervento umanitario in Siria, 150 anni fa

di Pascal Herren

Fonte: Europeanphoenix

LE1860.jpgUn intervento umanitario in Siria? Il pretesto umanitario era già stato invocato, nel 1860, dalla Francia, per intervenire militarmente in Siria, allora provincia ottomana. Il docente universitario Pascal Herren passa in rassegna in quest’articolo le vere intenzioni della Francia di Napoleone III, anch’esse poco accettabili come quelle della Francia di Sarkozy o di Hollande. Egli ci ricorda inoltre le conseguenze nefaste ch’ebbero a subire le popolazioni della regione.

Un intervento umanitario in Siria è costantemente invocato per mettere fine alle sofferenze che, dal 2011, patisce la popolazione coinvolta nei combattimenti tra il regime e l'opposizione armata. Combattimenti di cui si attribuisce la responsabilità principale - a torto o a ragione- al governo.

 Quest’azione di soccorso passerebbe dunque per il rovesciamento del regime. Sarebbe anche già stata messa in opera da alcuni mesi, sotto una forma indiretta, armando gli insorti e inviando sul territorio agenti e gruppi di combattimento stranieri. Ora, fare uso della forza sul territorio di un paese straniero, senza il consenso delle autorità prestabilite a darlo, contravviene al principio di sovranità degli stati, come scritto nella carta dell’ONU. L’impiego della forza tra stati è proibita ad eccezione del caso di legittima difesa o di azioni collettive decise dal Consiglio di Sicurezza dell’ONU.

La Corte internazionale di giustizia ha condannato nel 1986 il sostegno militare offerto dall’amministrazione Reagan agli insorti nicaraguensi dei Contras che lottavano per rovesciare il potere sandinista. La Corte aveva anche precisato che un tale sostegno non era appropriato se si parlava di assicurare il rispetto dei diritti dell’uomo, allorché Washington aveva accusato il regime di aver commesso delle atrocità.

Questi ostacoli giuridici non hanno impedito che le operazioni unilaterali, ufficialmente motivate da ragioni altruistiche, non si sviluppassero, per esempio, con il bombardamento dell’ex Yugoslavia durante la crisi del Kosovo nel 1999, o l’invasione dell’Iraq nel 2003. L’ultimo esempio in ordine cronologico è stata l’azione condotta in Libia nel 2011, di cui alcuni stati affermarono che si spinse oltre ciò che permetteva la risoluzione 1973 del Consiglio di Sicurezza.

Il fondamento di questi interventi unilaterali risiede in un criterio superiore, universalista: il dovere di proteggere la vita di qualsiasi popolazione contro minacce di attentati di massa che pesano su di essa. Ma questo principio, perfettamente legittimo in quanto tale, dipende interamente dalla buona volontà di chi interviene. Infatti, come si fa ad assicurare che lo stato che interviene non si serva dell’immenso potere che si concede impiegando la violenza verso un altro stato per perseguire altre motivazioni che sarebbero riprovevoli? La storia pullula di guerre “giuste” che sono finite piuttosto male per le popolazioni coinvolte. Il grande giurista Emer de Vattel denunciava già nel 1758 la sottomissione degli Indiani d’America da parte dei conquistadores, ottenuta con il pretesto di liberarli dal tiranno.

Gli specialisti del tema hanno costantemente ricercato i precedenti che mostrassero un’azione condotta da una potenza interventista irreprensibile. Hanno creduto per molto tempo di averla trovata nella spedizione del 1860 che riguardò la provincia ottomana della Siria che inglobava l’attuale Libano (Wikipedia in francese afferma: “Nei fatti, e secondo le parole dello stesso Napoleone III, la spedizione fu ‘una operazione a scopo umanitario’”). Dal mese di maggio al mese di agosto di quell’anno, tra le 17.000 e le 23.000 persone, la maggior parte di religione cristiana, furono massacrate nella montagna del Libano e a Damasco durante gli scontri intercomunitari. La notizia, che arrivò in Europa, suscitò l’emozione dell’opinione pubblica. Le autorità ottomane furono accusate di aver incoraggiato, e perfino partecipato alle atrocità commesse dai miliziani drusi sul Monte Libano e dai rivoltosi a Damasco. 

Napoleone III decise allora d’inviare sul posto un corpo di spedizione di 6.000 uomini per mettere fine al “bagno di sangue”, col consenso delle altre potenze europee. Le truppe francesi rimasero meno di un anno sul posto. Si ritirarono una volta ritornata la calma e subito dopo aver messo in piedi una riorganizzazione amministrativa, alla quale sarà attribuito il fatto di aver mantenuto la pace civile fino alla prima Guerra Mondiale. Ancora oggi, alcuni giuristi che pur si oppongono al riconoscimento del diritto d’intervento umanitario, definiscono l’azione del 1860 il solo e “vero” intervento umanitario del XIX secolo.

A guardarli da più vicino, dunque, i dissensi intercomunitari che scoppiarono nel 1860 furono essi stessi esacerbati dal clientelismo praticato all’epoca dalle potenze europee verso le minoranze locali. Bisogna dire che erano in gioco immensi interessi. Si trattava di dividersi le province di un impero ormai alla fine, che i grandi stati europei si disputavano accanitamente. La Siria si trovava infatti sulla rotta strategica che portava alle Indie, il gioiello dell’Impero Britannico. La Francia non nascondeva la sua attrazione per questo paese ricco di promesse commerciali. La Russia cercava già da molto tempo di estendere i suoi territori verso sud. Per arrivare ai propri fini ogni potenza si appoggiava su una comunità locale che ognuno cercava di strumentalizzare: i francesi si fecero protettori dei cattolici, i russi difesero gli ortodossi, gli inglesi parteggiarono per i drusi.

Durante il periodo che seguì l’intervento del 1860, la Francia incrementò la sua intraprendenza economica in Libano, al punto che il 50% della popolazione attiva libanese lavorava nel 1914 nella filiera di produzione francese di soia. Questo settore crollò subito dopo la decisione dell’industria francese di fare a meno dei suoi fornitori libanesi, i quali così persero i loro mezzi di sussistenza.

Un anno più tardi, nel 1915, gli alleati inglesi e francesi organizzarono il blocco delle coste siriane per impedire che le derrate alimentari arrivassero a destinazione in questa regione fortemente dipendente dalle importazioni cerealicole. L’obiettivo era spingere le province arabe a sollevarsi contro il potere centrale di Istanbul, che partecipava alla Prima Guerra Mondiale accanto alla Germania di Guglielmo II. Il risultato fu una carestia senza precedenti che fece 200.000 morti nella zona centrale e settentrionale del Libano e 300.000 altrove in Siria.

Nel 1840, François Guizot, allora ambasciatore francese a Londra, aveva già riassunto i giochi geopolitici che dominavano nelle corti europee e che animavano, secondo lui, la politica del ministro inglese degli affari esteri Lord Palmerston: “Lì ci sono, al fondo di non so quale valle, in cima a non so quale montagna del Libano, degli uomini, delle donne, dei bambini che si amano e si divertono, che domani saranno massacrati perché Lord Palmerston, viaggiando sul treno da Londra a Southampton, avrà detto: “Bisogna che la Siria insorga, ho bisogno che la Siria insorga, se la Siria non insorge, I am a fool”.

Fonte: “Le Temps” (Svizzera), 6 novembre 2012 (ripubblicato da “Reseau Voltaire” l’11 dicembre 2012).

(Traduzione di Europeanphoenix.it ©)
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mercredi, 09 janvier 2013

Le roman de Charette

Philippe de Villiers:

le roman de Charette

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« Combattu souvent, battu parfois, abattu jamais » : la vie de François-Athanase Charette de la Contrie est à l’image de sa devise. Vendéen comme lui, Philippe de Villiers nourrit depuis longtemps un attachement tout particulier pour ce héros dont le destin fait écho à sa propre histoire familiale. Au point de s’identifier à lui et de ressusciter, sous forme de mémoires imaginaires, la vie aventureuse de cet homme aussi séduisant qu’intrépide, fidèle envers et contre tout à une cause : « la Patrie, la Foi, le Roi ».

De sa brillante carrière dans la Marine royale, intégrée à l’âge de quatorze ans, à ce jour de 1793 où, à la tête d’une troupe de paysans du Marais breton, Charette part à l’assaut de la République, Philippe de Villiers ressuscite la flamboyante épopée d’un homme dont l’audace et le courage, la personnalité singulièrement libre et moderne, n’ont pas fini de fasciner.

Le roman de Charette, Philippe de Villiers, Albin Michel, 2012, 480 pages, 22,00 €.

samedi, 05 janvier 2013

Méridien Zéro a reçu Jacques Bardèche (fils de Maurice Bardèche) et Patrick Canet

Méridien Zéro a reçu Jacques Bardèche (fils de Maurice Bardèche) et Patrick Canet pour évoquer avec eux l'oeuvre et la vie de Maurice Bardèche.

Animateurs : Gérard Vaudan et Eugène Krampon.

Lord Igor à la technique.

bardeche, collaboration, brasillach, biographie, histoire, philosophie, littérature

Pour écouter:

http://www.meridien-zero.com/archive/2012/12/21/emission-n-123-un-homme-un-destin-maurice-bardeche.html

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lundi, 24 décembre 2012

La ville malade de la banlieue : sauver les villes des méga-villes

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La ville malade de la banlieue : sauver les villes des méga-villes

par Pierre LE VIGAN

Hubert-Félix Thiéfaine chantait « Quand la banlieue descendra sur la ville  ». C’est  l’expression de la vieille peur de l’encerclement de la ville par la banlieue. Une peur qui s’appuie sur la crainte des émeutes urbaines, sur la peur des immigrés qui peuplent la banlieue, sur un nœud de réalités tout comme de fantasmes. La banlieue apparaît ainsi « contre » la ville, comme son contraire : l’éloignement de tout à la place de la proximité de tout que l’on connaît dans les centres villes. Les prolétaires plutôt que les « cadres sup », les populations « aidées » plutôt que les populations « aisées ». La grisaille plutôt que le clinquant. Les enjoués de la mondialisation plutôt que ses victimes.

Il y a donc bien des facteurs d’opposition entre ville et banlieue. Mais l’une et l’autre se côtoient. Elles sont contre, tout contre l’autre. En d’autres termes, l’une se nourrit de l’autre. La misère de l’une, la banlieue, est évidente (à l’exception de quelques banlieues aisées qui sont une minorité), mais la misère dans les centres-villes existe aussi. Une misère moins matérielle que morale, relationnelle, existentielle. Disons le autrement : ville et banlieue forment système. C’est le système de la modernité. Ville et banlieue souffrent de ses signes, de ses marques, de ses manques. La modernité fait des dégâts partout.

C’est ce que j’ai essayé de montrer dans mon livre, La banlieue contre la ville. Ville et banlieue : de quoi parle-t-on ? Les mêmes mots désignent des réalités qui ne sont plus celles de 1910 ni de 1950. Les banlieues étaient les faubourgs de la ville. Elles étaient le prolongement de la ville et une transition vers la campagne. Le gigantisme est venu bouleverser cela. La banlieue s’étend désormais à perte de vue dans les mégalopoles telle la région parisienne. Paris, la ville historique de Paris, même avec ses quartiers les plus récents, ceux qui n’ont été urbanisés que sous le Second Empire, n’est plus qu’un petit point au centre de l’agglomération parisienne. Deux millions d’habitants vivent à Paris, plus de douze millions vivent à côté de Paris dans les périphéries lointaines de l’agglomération, qui déborde au-delà même de l’Île-de-France, en Picardie, en région Centre, vers la Champagne Ardennes. Tous les gouvernements de la (fausse) droite et de la (fausse) gauche poursuivent le même but, faire de Paris une méga-ville encore plus « compétitive ». Cela veut dire : encore plus financiarisée, encore plus spéculative, encore plus invivable pour la masse de ses habitants. « Nicolas Sarkozy veut donner un nouvel élan au Grand Paris » dont le projet « va jusqu’au Havre », indiquaient Les Échos du 10 octobre 2011, chiffrant à trente-deux milliards le montant des investissements en infrastructures que cela requerra d’ici à 2025. Si cette  dépense n’empêchera pas nombre de Parisiens à essayer de fuir leur mégalopole, comme un million d’entre eux l’ont fait en cinq ans, bien plus nombreux sont les nouveaux habitants qui arrivent à Paris, venus, souvent, des quatre coins du monde et de ce que l’on appelait le « Tiers-Monde », où le manque de perspective attire dans les grandes villes européennes, avec les encouragements et les aides mises en place par l’hyperclasse. Car celle-ci poursuit son objectif : elle ne fait pas du social pour le plaisir de se donner bonne conscience, elle fait un minimum de social, uniquement en direction des couches les plus défavorisées, et en vue d’un objectif précis. Cet objectif, c’est de peser à la baisse sur les salaires des travailleurs originaires du pays d’accueil, de leur faire accepter des reculs sociaux, par une concurrence de main d’œuvre peu exigeante car elle n’a pas le choix. L’immigration de masse est une stratégie du capital. Réserver les H.L.M. aux plus pauvres, généralement issus de l’immigration, est un aspect de cette stratégie, et nous ramène au cœur des questions de la ville, car c’est un moyen pour le patronat de moins payer ces travailleurs (cf. Alain de Benoist dans Éléments, n° 139, 2011, « Immigration, l’armée de réserve du capital » et Le Spectacle du Monde, octobre 2010, « L’immigration en France, état des lieux »). L’objectif du capital, c’est tout simplement un financement public le plus élevé possible de la reproduction de la force de travail permettant à la part privée, patronale, de ce financement, d’être la plus faible possible. C’est uniquement en ces termes – que l’on peut qualifier de marxistes et qui sont en tout cas réalistes – que ceci peut se comprendre et non, comme paraissent le croire certains, parce que les pouvoirs publics seraient animés d’une pseudo-préférence étrangère. Celle-ci n’est qu’une préférence pour l’immigration qui n’est elle-même qu’une préférence pour les bas salaires d’une part, pour la division et l’affaiblissement de la classe ouvrière d’autre part.

L’évolution contemporaine de la ville s’analyse en fonction de cela. En périphérie se situent les zones d’habitat, loin des entreprises, très loin des usines, afin que les travailleurs ne puissent s’organiser et soient usés par le travail, tout comme les chômeurs ne peuvent non plus s’organiser dans ces immenses zones où chacun est isolé de l’autre : car la densité des banlieues est dérisoire face à celle des centres-villes. Au centre des agglomérations se situent les espaces festifs (Festivus festivus disait Philippe Muray), où il s’agit de « s’éclater », où les élus locaux aménagent des espaces de plus en plus « jouissifs » (dixit Bertrand Delanoë), afin de faire oublier les dégâts de la mondialisation, les délocalisations, la liquidation de l’industrie, tout particulièrement en France. Objectif ultime : tuer toute envie de politique, celle-ci étant noyée dans de vagues fêtes citoyennes ou communautaires (participation des élus à des ruptures du jeune, encouragements à tous les replis communautaires, etc.).

Partout les centres-villes sont devenus inabordables pour les classes populaires ou moyennes. Ils sont devenus des musées, sans artisans, sans entreprises autres que des commerces. Immigrés pauvres entassés dans des logements vétustes, bobos charmés par la « diversité » mais très habiles en stratégie d’évitement de celle-ci quand  il s’agit de scolariser leurs enfants, le peuple est en fait chassé du cœur des grandes villes. Les artisans s’y font de plus en plus rares, les petites industries y ont disparu, les services et la tertiarisation ont remplacé les ouvriers.

Face à cela, il faudrait rétablir la possibilité de liens sociaux plus forts. Cela nécessiterait deux choses. La première, c’est la densité, insuffisante en banlieue, ce qui a pour conséquence que ces banlieues sont trop étendues. Trop étendues pour des raisons écologiques, trop consommatrices en énergie notamment pour les transports, trop souvent individuels (usage excessif de la voiture rendu indispensable par la carence des transports en commun). La seconde chose qui serait nécessaire, c’est de développer la mixité habitat-travail, avec donc l’objectif d’une réduction des temps de transport, avec un nouvel urbanisme abandonnant la solution trop facile et inepte de séparer totalement zones d’activité et d’emploi. Ce sont les deux axes majeurs à développer. Comme conséquence de leur application, les liens entre travailleurs, qui sont aussi des habitants seraient facilités, les luttes, à la fois dans le domaine du travail et dans le domaine de l’habitat seraient rendues plus aisées, les collectifs habitants-travailleurs pourraient intervenir dans la gestion des usines, des ateliers, des immeubles. Les luttes sociales redeviendraient possibles à chaque fois qu’il serait nécessaire de s’opposer à la logique du capital, l’organisation des sans travail, les initiatives pour créer des entreprises sans capital, des coopératives ouvrières de production, des entreprises associatives, de l’économie solidaire seraient là aussi facilitées.

En somme, il serait possible de refaire une société forte, autour de la valeur du travail bien sûr mais pas autour du « travailler toujours plus », a fortiori quand il s’agit de travailler toujours plus pour le capital. La mise hors d’état de nuire des trafiquants de drogue et autre  pourrait être réalisée par les habitants-travailleurs eux-mêmes dotés de leur propre garde nationale civique dans le même temps que le cœur de la politique nationale (et européenne bien sûr) devrait être de lutter contre le parasitisme financier, le blanchiment de l’argent sale, la délinquance civique tout autant qu’économique et ses réseaux.

La ville doit être conçue pour le lien social. Elle doit répondre aux besoins éthologiques de l’homme : enracinement, repères, intimité. L’anonymat est aussi un besoin dans les villes, mais c’est son excès que l’on constate, c’est son excès qu’il faut mettre en cause. Pour répondre au besoin d’enracinement, il faut rapprocher habitat et lieux d’activité, il faut voir à nouveau la ville comme un paysage, et réhabiliter la notion d’identité locale, de lieu, de site. Il faut, par la densité, réduire l’étendue des villes, combattre l’étalement urbain, retrouver la coupure franche ville-campagne. C’est que j’essaye de montrer dans mon analyse des rapports de l’homme et de la ville. Montrer pour convaincre. Convaincre pour transformer.

L’avenir de la ville n’est écrit nulle part. Entre le grand ensemble et la marée pavillonnaire, d’autres voies sont possibles. Le devenir-banlieue de la ville n’est pas inéluctable. Les idées de notre modernité ont mené la ville là où on sait. D’autres idées peuvent la mener ailleurs.

Pierre Le Vigan

La banlieue contre la ville. Comment la banlieue dévore la ville et pourquoi le devenir-banlieue de la ville n’est pas une fatalité, Paris, La Barque d’or, 250 p., 18 € (+ 3,50 € de port), à commander à :

http://la-barque-d-or.centerblog.net/

Courriel : labarquedor@hotmail.fr

• Version remaniée pour Europe Maxima d’un article paru dans Rébellion, n° 51, novembre – décembre 2011.


Article printed from Europe Maxima: http://www.europemaxima.com

URL to article: http://www.europemaxima.com/?p=2377

lundi, 03 décembre 2012

Conférence de Franck Abed

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Conférence de Frank Abed

à La Charité sur Loire

Dimanche, 9 décembre 2012 - 15 h

Alain Soral dédicacera « Chroniques d’avant-guerre » le samedi 8 décembre 2012 à la librairie Facta

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Alain Soral dédicacera « Chroniques d’avant-guerre » le samedi 8 décembre 2012 à la librairie Facta

Alain Soral dédicacera son livre Chroniques d’avant-guerre le samedi 8 décembre 2012 de 14h30 à 18h30.

Venez rencontrer l’auteur à la librairie Facta :

4, rue de Clichy Paris IXe

Téléphone : 01 48 74 59 14

Courrier électronique : librairiefacta@wanadoo.fr

Situer la librairie :

Sur Google Maps : http://maps.google.fr/maps?f=q&…

Sur Mappy : http://fr.mappy.com/map#d=4+rue+de+…

« Quand on est jeune et novice dans le débat d’idées, on croit qu’en politique c’est comme en sport, qu’il y a deux équipes : la vôtre et celle d’en face, les bons et les méchants, le pouvoir et l’opposition. Puis avec la pratique, pour ceux qui passent à la pratique – les autres n’y comprennent jamais rien –, on découvre que dans la vraie vie, comme dans 1984 de George Orwell, c’est plus compliqué que ça. Il y a le pouvoir, l’opposition au pouvoir et… Goldstein.
Soit l’opposant créé par le pouvoir, ou plutôt favorisé par le pouvoir – ne soyons pas complotistes – pour dévier les énergies contestataires vers la stérilité, l’inutile…
Gauchisme à la Prévert ou gauchisme à la Baader, qu’on soit dans les nuages ou qu’on fonce droit dans le mur, sur le plan de l’inefficacité politique – les années de prison mises à part – ça revient au même… »
Chroniques d’Avant-guerre, compilation des articles publiés dans l’éphémère revue Flash entre octobre 2008 et mars 2011, est le 11e livre d’Alain Soral. Reprenant, sur le mode chronologique plutôt qu’orthographique, le principe des textes courts de ses Abécédaires (Jusqu’où va-t-on descendre ?, Socrate à Saint-Tropez), il est aussi un complément utile à son essai majeur écrit au même moment : Comprendre l’Empire.

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jeudi, 29 novembre 2012

Contre l'ouverture d'un "Starbucks" à Montmartre

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Contre l'ouverture d'un "Starbucks" à Montmartre, la mobilisation s'amplifie!

La nouvelle est tombée il y a quelques jours : Montmartre accueillera au début de l’année 2013 un Starbucks. La chaîne de cafés américaine, qui n’en finit plus d’inaugurer ses enseignes parisiennes, a jeté son dévolu juste en face du carré des artistes, dans les locaux occupés depuis des générations par le restaurant-brasserie "Au pichet du Tertre".

Préservé jusqu’à présent des appétits des multinationales, Montmartre a su sauvegarder son authenticité, ses monuments, son architecture et ses petits commerces.

Sauvegardons l’identité du quartier !

Si des touristes du monde entier viennent à Paris pour découvrir le quartier de Montmartre, c’est pour son ambiance unique. Accepter l’implantation de Starbucks dans notre quartier, c’est donner victoire aux mondialistes destructeurs d’identités.

Résistez avec nous !

Vous voulez préservez l’esprit de Montmartre ?

Vous refusez que le monde du fric puisse faire sa loi où bon lui semble ?

Vous voulez un monde des identités et non de l’uniformité ?

Il est encore temps de faire capoter l’implantation de Starbucks !

Commerçants, habitants du quartier, amoureux de Paris du monde entier, tous ensemble contre l’implantation de Starbucks !

Tous ensemble pour un Montmartre populaire !

Signez la pétition de "Paris fierté" cliquez là

Richard Millet über Terrorismus und Literatur

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Richard Millet über Terrorismus und Literatur

Martin LICHTMESZ

Ex: http://www.sezession.de/

Unmittelbar nach der Tat bezeichnete der deutsche Komponist Karlheinz Stockhausen den Terroranschlag vom 11. September 2001 als „das größte Kunstwerk, was es je gegeben hat“. Den Zusatz „jetzt müssen Sie alle Ihr Gehirn umstellen“ vorausgeschickt, sagte er im Wortlaut:

Daß also Geister in einem Akt etwas vollbringen, was wir in der Musik nie träumen könnten, daß Leute zehn Jahre üben wie verrückt, total fanatisch, für ein Konzert. Und dann sterben. Und das ist das größte Kunstwerk, das es überhaupt gibt für den ganzen Kosmos. Stellen Sie sich das doch vor, was da passiert ist. Das sind also Leute, die sind so konzentriert auf dieses eine, auf die eine Aufführung, und dann werden fünftausend Leute in die Auferstehung gejagt. In einem Moment. Das könnte ich nicht. Dagegen sind wir gar nichts, also als Komponisten. … Ein Verbrechen ist es deshalb, weil die Menschen nicht einverstanden waren. Die sind nicht in das Konzert gekommen. Das ist klar. Und es hat ihnen niemand angekündigt, ihr könntet dabei draufgehen.

Stockhausen kam damit trotz großer Empörung gerade noch davon – als Abgesandter des Sirius schützte ihn die Narrenfreiheit des Avantgardisten. Kurz darauf erregte auch der postmoderne Philosoph Jean Baudrillard erhebliche Irritation, als er in einem Artikel für die Tageszeitung Le Monde den Terroranschlag als eine Art Hyper-Event, als „Mutter aller Events“ beschrieb. Während noch alle Welt unter Schock stand, und in Deutschland betappert „Wir sind alle Amerikaner!“ gestammelt wurde, versuchte Baudrillard, die Tat mit kaltem Auge als Menetekel und Symbol zu lesen, an dem auch der selbstzerstörerische Trieb des Westens sichtbar werde.

Der Spiegel interviewte Baudrillard zu diesen Thesen:

SPIEGEL: Monsieur Baudrillard, Sie haben die Attentate vom 11. September in New York und Washington als das „absolute Ereignis“ beschrieben. Sie haben die USA beschuldigt, durch ihre unerträgliche hegemoniale Übermacht den unwiderstehlichen Wunsch nach ihrer Zerstörung zu wecken. Jetzt, wo die Herrschaft der Taliban kläglich zusammengebrochen ist, Bin Laden nichts mehr als ein gehetzter Flüchtling ist, ­ müssen Sie nicht alles widerrufen?

Baudrillard: Ich habe nichts verherrlicht, niemanden angeklagt und nichts gerechtfertigt. Man darf den Botschafter nicht mit seiner Kunde verwechseln. Ich bemühe mich, einen Prozess zu analysieren: den der Globalisierung, die durch ihre schrankenlose Ausdehnung die Bedingungen für ihre eigene Zerstörung schafft.

SPIEGEL: Lenken Sie damit nicht einfach ab von der Tatsache, dass identifizierbare Verbrecher und Terroristen für die Anschläge verantwortlich sind?

Baudrillard: Natürlich gibt es handelnde Akteure, aber der Geist des Terrorismus und der Panik reicht weit über sie hinaus. Der Krieg der Amerikaner konzentriert sich auf ein sichtbares Objekt, das sie zerschmettern möchten. Doch das Ereignis vom 11. September in all seiner symbolischen Bedeutung lässt sich so nicht auslöschen. Die Bomben auf Afghanistan sind eine völlig unzulängliche Ersatzhandlung.

SPIEGEL: Warum können Sie nicht einfach akzeptieren, dass die Zerstörung des World Trade Center die willkürliche, irrationale Tat einiger verblendeter Fanatiker war?

Baudrillard: Eine gute Frage, aber selbst wenn es sich um eine bloße Katastrophe gehandelt hätte, bliebe die symbolische Bedeutung des Ereignisses erhalten. Nur so erklärt sich auch seine Faszination. Hier ist etwas geschehen, das bei weitem den Willen der Akteure übersteigt. Es gibt eine universelle Allergie gegen eine endgültige Ordnung, gegen eine endgültige Macht, und die Zwillingstürme des World Trade Center verkörperten diese endgültige Ordnung in vollkommener Weise.

SPIEGEL: Demnach erklären Sie den terroristischen Wahn als unausweichliche Reaktion auf ein System, das selbst größenwahnsinnig geworden ist?

Baudrillard: Das System selbst in seinem totalen Anspruch hat die objektiven Bedingungen dieses furchtbaren Gegenschlags geschaffen. Der immanente Irrsinn der Globalisierung bringt Wahnsinnige hervor, so wie eine unausgeglichene Gesellschaft Delinquenten und Psychopathen erzeugt. In Wahrheit sind diese aber nur die Symptome des Übels. Der Terrorismus ist überall, wie ein Virus. Er braucht Afghanistan nicht als Heimstatt.

Irgendwo in der Mitte zwischen Baudrillard und Stockhausen stossen wir auf den österreichischen Künstler und Medientheoretiker Peter Weibel, der vor einem Jahr in einem Interview mit dem Standard das Auftreten von Amokläufern und Attentätern in Europa als Symptome eines zerfallenden Systems deutete:

  Das Problem ist: Je länger es dauert, bis das System implodiert, desto höher sind die Kosten. Die Armut wird steigen, damit steigt in der Gesellschaft das Konfliktpotential. Denken wir doch nur an die Attentate in Norwegen und Lüttich. Man kann es sich einfach machen und sagen: Anders Brevik und Nordine Amrani sind geisteskranke Individuen. Aber diese Attentäter nahmen Tendenzen, Slogans, Gedankengut auf. Brevik hat ein Manifest mit 1500 Seiten geschrieben. Und durch ihre psychische Kondition wurde dieses Gedankengut verzerrt. Amrani und Brevik hätten es aber nicht verzerren können, wenn nicht etwas zum Verzerren da gewesen wäre. Jetzt versucht man, Menschen wie Brevik zu isolieren – und übersieht, dass das Pathologische nicht in ihnen, sondern in der Gesellschaft ist. Sie sind nur das Fieberthermometer. Wenn wir nicht bald eine Lösung finden, werden solche Attentate zunehmen. Und das wäre für mich ein Symptom für die sich abzeichnende Instabilität des Systems.

Weibel ist ein Veteran des „Wiener Aktionismus“ - man begegnet ihm auch als Gesprächspartner Lutz Dammbecks in dessen legendärer Dokumentarstudie „Das Meisterspiel“ (1998), die unter anderem die alte Frage der Avantgarde nach dem Aufbrechen und Sprengen der traditionellen Grenzen der Kunst umkreiste.

Im Zentrum des Films stand ein Akt von ästhetischem „Terrorismus“: Ein unbekannter Täter war im September 1994 in das Atelier des als „Übermaler“ fremder Gemälde bekannt gewordenen Arnulf Rainer eingedrungen, und hatte dessen Bilder seinerseits mit schwarzer Farbe übermalt (wie übrigens auch einmal der „Pornojäger“ Martin Humer ein Bild von Otto Mühl „zugenitscht“ hat), eines davon mit der Persiflage eines Satzes aus der Autobiographie eines bekannten verhinderten Künstlers versehen, der sich später unter anderem in der „Ästhetisierung der Politik“  einen Namen gemacht hat, in großen roten Lettern:

Und da beschloß er, Aktionist zu sein.

Etwa ein Jahr später wurde der Polizei ein „Bekennerschreiben“ zugesandt, in der Tat eine kenntnisreiche, manifestartige Fundamentalkritik bestimmter Tendenzen der modernen Kunst. Ob tatsächlich der Autor des Traktats mit dem Übermaler des Übermalers identisch war, bleibt bis heute ungeklärt (manche vermuten, daß niemand anders als Rainer selbst hinter der Aktion steckte).

Zeitgleich wurde Österreich von einer geheimnisvollen Briefbombenserie mit fremdenfeindlichem Hintergrund heimgesucht, die ebenfalls von Manifesten (und sogar schwarzen Texttafeln) begleitet wurde. Das führte Dammbeck zu der Frage, ob es sich hierbei nicht auch um eine Art von blutiger „Konzeptkunst“ handeln könne.

Der 1953 geborene französische Romancier und Essayist Richard Millet steht also mit seinem im August des Jahres erschienenen Essay mit dem irritierenden Titel „Literarische Lobrede auf Anders Breivik“ durchaus in einer langen intellektuellen Tradition. Im Gegensatz zu Stockhausen und Baudrillard ist er aber nicht bloß mit einem blauen Auge davongekommen.

Alain de Benoist berichtete über die massive mediale Diffamierungs- und Ausgrenzungskampagne, die wider Millet einsetzte, und ihn schließlich seine Position als Lektor von Gallimard kostete (unter anderem hatte er die Herausgabe des Schlagers „Die Wohlgesinnten“ von Jonathan Littell maßgeblich mitverantwortet).

Über den Inhalt des Essays gelogen wurde auch in der deutschen Presse, die Millet übrigens bisher recht wohlgesonnen (no pun intended) war. Seinen Roman „Die drei Schwestern Piale“ (1998) pries die Süddeutsche Zeitung als „Kunstwerk von seltener Geschliffenheit und Eleganz“, und die Zeit lobte „Der Stolz der Familie Pythre“ (2001) für seine „klare und leuchtende Sprache“. Die Sprache und ihr Verfall zur Schablone der „Allgemeinheiten“ ist ein wesentliches Thema Millets: so seines Großessays „Langue Fantôme“ (Phantomsprache), zu dem die „Éloge littéraire“ nur eine kurze Bonusbeigabe ist.

In der Tat wird bei der Lektüre des inkriminierten Textes schnell klar, daß der Titel nicht nur ironisch, sondern geradewegs sarkastisch gemeint ist: in einer Zeit, in der die Sprache, die Kultur und die Literatur massiv verfallen und zerstört werden, kann man auch einen destruktiven Akt wie den Breiviks als „literarisch“ bezeichnen. Den Begriff der „Literatur“ faßt Millet dabei recht weit, gebraucht ihn geradezu synonym mit „Kultur“ selbst. In seinem Essay schreibt er:

Die Herrschaft der Zahl, der Multikulturalismus, die Horizontalität, der Taumel der Erschöpfung und der Verlust des Sinns, sowie das, was Renaud Camus die „Entzivilisierung“ nennt, zusammen mit seinem Korollarium, dem „großen Bevölkerungausstausch“: all dies bedeutet die Niederlage der Literatur.

In der aktuellen Jungen Freiheit (48/12) findet sich ein lesenwertes Interview mit Millet, in dem er den Hintergrund seines Aufsatzes erläutert:

Man muß sich dem Abscheulichen stellen, dem Unentschuldbaren. Dostojewski lieferte in den „Dämonen“ sehr gute Porträts von Monstern, Truman Capote in „Kaltblütig“. Von Breivik zu sprechen bedeutet also eine Methode, um vom Bösen zu sprechen. Ist das nicht die Aufgabe des Schriftstellers? (…)

Breivik ist ein verfehlter Schriftsteller – er selbst definierte sich im Laufe seines Prozesses als Schriftsteller. Meine „Eloge“ ist offensichtlich ironisch. Breivik symbolisiert den Tod der europäischen Kultur. Ich wollte zeigen, daß Literatur und noch viel mehr Kultur im Abendland keinen Wert mehr besitzen und daß es der Tod derselben ist, der das Vordringen des Multikulturalismus ermöglicht. Breivik und der Multikulturalismus verkörpern den Tod der Literatur insoweit, als daß letztere eine der gehobensten Ausdrucksformen dieser Kultur ist.

Breivik und sein algerisch-islamisches Pendant Mohammed Merah, der im März 2012 in Frankreich sieben Menschen erschoß, darunter drei jüdische Kinder, nennt er

…. Kriminelle, die die Schuld verbrecherischen Denkens zu Fragen der Nation und der Zivilisation tragen. Während Merah zum Dunstkreis
des internationalen islamischen Terrorismus gehört und Breivik zur Dekadenz, die er anprangert, so sind doch beide das Symbol eines Bürgerkriegs. Eines Bürgerkrieges, der noch nicht benannt wurde, weil das die Propaganda untersagt.

Dennoch ist er real: Die französischen Vorstädte befinden sich in der Gewalt von Jugoslawen oder Libanesen, da hier das Gesetz der Republik von Immigranten und einheimischen Taugenichtsen, die keinerlei Wunsch zur Integration haben, zum Versagen gebracht wird. Wenn Sie bewaffnete Soldatenpatrouillen in der U-Bahn, auf Bahnhöfen, im Hof des Louvre sehen, glauben Sie das sei Disneyland? Nein, sie sind die Konsequenz des islamistischen Terrors und der passiven Anwesenheit der Moslems, die den Islamismus auf hiesigem Boden mehr oder weniger begünstigen.

Nicht anders also als der oben zitierte Peter Weibel hebt Millet in seinem umstrittenen Essay hervor, daß es sich bei dem Attentäter um einen gescheiterten Autor handelt, als Verfasser eines „naiven“ 1,500-seitigen „Paste & Copy“-Kompendiums, dessen Machart ein durch und durch „wikipedisiertes“ Gehirn erkennen läßt. Seine Tat habe eine gewisse „formale Perfektion“ gezeigt, lange vorbereitet und wohl durchdacht in Bezug auf das, was sie mit Blut und Massenmord „kommunizieren“ wollte – durchaus vergleichbar mit der präzise gewählten Symbolik der Ziele des „9/11″-Attentats.

Und wie Weibel sieht auch Millet Breivik als Ausgeburt und Spiegel einer pathologischen Gesellschaft, als „Symptom für die sich abzeichnende Instabilität des Systems“:

Breivik  ist in erster Linie ein exemplarisches Produkt der abendländischen Dekadenz im Habitus eines amerikanisierten Kleinbürgers… Er ist nicht nur das Kind der Zerrüttung der Familie, sondern auch des ideologisch-ethnischen Bruchs, den die außereuropäische Einwanderung nach Europa über fünfzig Jahre hinweg verursacht hat, und der lange vorbereitet wurde durch die Einwirkung der amerikanischen Massenunkultur, der ultimativen Konsequenz des Marshallplanes: des Planes einer absoluten Herrschaft des globalisierten Marktes, der Europa enthistorisiert, auf der wirtschaftlichen, kulturellen und ohne Zweifel auch ethnischen Ebene.  (…)

Gleich Baudrillard sieht er in dem Terrorakt das grausame Wirken der Nemesis, die sich das System durch seinen eigenen Wahnsinn und seine Maßlosigkeit selbst heraufbeschworen hat:

Breivik ist zweifellos das, was Norwegen verdiente und was unsere Gesellschaften erwartet, die sich unablässig blind stellen, um sich besser selbst verleugnen zu können. (…)

Der Sommer (2011) brachte uns die Nuklearkatastrophe von Fukushima, das Abgleiten der internationalen Politik in die Lächerlichkeit durch die Affäre Strauss-Kahn, dem sozio-priapischen Terroristen und bisher ungewürdigten Gegenstück zu dem christdemokratischen Erotomanen Berlusconi, und, am Morgen nach dem Massaker von Utoya, den Tod von Amy Winehouse, der Breivik beinahe die Schau stahl, vor allem aber den vulkanartigen Ausbruch einer Finanzkrise, die seit dem Jahr 2008 vor sich hinschwelte, und die momentan dabei ist, Europa endgültig in die Knie zu zwingen.

Daß eine Finanzkrise dieses Ausmaßes auch den Bankrott der Zivilisation selbst offenbart, wollen nur die Schwachköpfe nicht sehen.  Breivik ist, soviel steht fest, ein verzweifeltes und entmutigendes Symbol für die europäische Unterschätzung der Verheerungen des Multikulturalismus; auch das Symbol einer Niederlage des Geistes vor dem Profit des Geldes. Die finanzielle Krise ist eine Krise des Sinns, der Werte, also auch der Literatur.

Millet verzeichnet in diesem Zusammenhang die seit etwa zwei Jahrzehnten ansteigende Ausbreitung von Massenmorden „amerikanischen“ Stils (sozusagen „à la Columbine“) gerade in jenen (nord-)europäischen Ländern, die lange Zeit als sozial und politisch stabil galten: England, Schweiz, Frankreich, Deutschland und Finnland.

Dabei sieht Millet in Breivik nun durchaus keinen „Warhol des Anti-Multikulturalismus“, der nur auf seine 15 Minuten Ruhm aus gewesen sei und „l‘art pour l‘art“ betrieben hätte:

Weit entfernt, ein Konzeptkünstler zu sein, glaubte Breivik nicht an das, was Baudrillard die „Duplizität“ der zeitgenössischen Kunst nannte, mit ihrem Bekenntnis zur „Nichtigkeit, zur Bedeutungslosigkeit, zum Non-sens, da man ja bereits nichtig ist“  – die in der Tat jeglichen künstlerischen und existenziellen Ansatz zunichte macht. (…)

Er hat auch nicht bloß jene nach Breton einfachste surreale Geste nachvollzogen, die darin bestehe, „wahllos mit dem Revolver in die Menge zu feuern“; er hat auch nicht Cioran beim Wort genommen, der einmal schrieb, daß jeder Mensch, der noch bei Sinnen ist, schon aufgrund der Tatsache, sich auf einer Straße zu befinden, Ausrottungsgelüste bekommen müsse. Beide Sentenzen, sowohl Ciorans und als auch Bretons, wurden bisher viel zu wenig vor dem Untergrund der Kriege und Genozide des 20. Jahrhunderts gelesen, mit Adornos Diktum vom Ende der Kultur „nach Auschwitz“ im Hinterkopf.

Die Ausrottung als literarisches Motiv: das ist das Unrechtfertigbare schlechthin, und dieses beinhaltet die von Breivik indirekt (und gewiß unbeabsichtigt) aufgerollte Frage nach dem Problem der globalen Überbevölkerung und der ökologischen Katastrophe, die sich verkoppelt mit jener nach der demographischen Entvölkerung Europas und der Zerstörung der Homogenität der europäischen Gesellschaften, wie in Norwegen, Finnland, Schweden, Dänemark, Holland, allesamt Länder, in denen jene, die man schamhaft als Populisten bezeichnet, in die Regierungen gewählt wurden.  (…)

Millet sieht einen engen Zusammenhang zwischen dem biologischen Tod Europas und dem vorangehenden Tod seiner Seele durch den Materialismus und die Verleugnung und Demontage seiner Identität. Auch im JF-Interview findet er hierfür drastische, harte Worte:

Die Europäer beklagen permanent ihr Schicksal. Spricht man zu ihnen von Zivilisation, antworten sie mit Ökonomie, sozial und ethisch, das heißt mit alltäglichstem Materialismus. Sie sind verfehlte Amerikaner so wie Breivik ein verfehlter Autor ist. Von dem Moment an, wo man sich selbst verleugnet, egal ob Franzose, Deutscher oder Europäer, begibt man sich in eine freiwillige Sklaverei, vollzieht die Unterwerfung der Gegenwart unter die Irrealität. Man selbst zu sein wird eine Art Schändlichkeit.

Würde ist das Empfinden für das, was man denen schuldet, die uns vorausgegangen sind, deren Erbe, die europäische Zivilisation, wir übernommen haben und deren Wurzeln christlich sind. Hat nicht Georges Bernanos gesagt, daß die moderne Zivilisation eine Verschwörung gegen jedwede Art von geistigem Leben ist?

Und er betont den bitteren Preis, den in Frankreich jeder zahlen muß, der es wagt, sich diesem Themenkomplex abseits der vorgeschriebenen Sprachregelungen zu nähern:

Die Gegenwartsliteratur kann sich damit nur unter der Maßgabe der politischen Korrektheit beschäftigen. Zu viele Journalisten fürchten die Justiz, falls sie sich solcher Themen annehmen. Die Darstellung des Ausländers, des Migranten, des illegalen Einwanderers muß explizit stark positiv erfolgen. Sagen Sie etwas anderes, laufen Sie Gefahr, als Faschist, ein anderes Wort für Rassist, beschimpft zu werden, was grotesk ist. Die Zensur hat ihre Form geändert: ständige Selbstzensur und Unterwerfung unter die Welt-Ideologie, post-rassistisch, postmenschlich. Die wenigen Intellektuellen, die es wagen, das Gegenteil zu denken – Alain Finkielkraut, Renaud Camus, Robert Redeker, ich selbst – werden vom größten Teil der Medien gehaßt.