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vendredi, 05 mai 2023

Balade folciste dans le Cantal

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Balade folciste dans le Cantal

par Georges FELTIN-TRACOL

Plus étendue que la Slovénie, la région Auvergne – Rhône-Alpes (69.711 km²) comprend la Métropole de Lyon et douze départements qui couvrent un territoire des Alpes à une large part du Massif Central. Situé au Sud-Ouest de cette entité administrative, mais au sein d’un vieil ensemble montagneux complexe, le Cantal est son département le moins peuplé (environ 150.000 hab.).

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À l’écart des principaux axes de communication routière, ce territoire mériterait d’être mieux connu des Français et des Européens. Les flancs des Monts du Cantal, une imposante structure volcanique éteinte d’Auvergne d’une superficie de 2500 km², constituent des châteaux d’eau naturels. Au pied de ses principaux sommets – le Plomb du Cantal (1855 m d’altitude), le Puy Mary (1783 m) ou le Puy Griou (1690 m) – se présentent de vastes entailles géologiques creusées par les glaciers qu’occupent des vallées (Cère, Jordanne, Alagnon, Doire, etc.) d’accès difficile entrecoupées de plateaux, d’origine basaltique, plus ou moins élevés appelés « planèzes ».

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La disposition centrale du volcan géant endormi organise au fil des ères géologiques divers bassins marneux et d’autres plateaux, cristallins ceux-là. Dans sa périphérie, on trouve au Nord-Ouest le commencement du plateau limousin des Millevaches, au Sud-Ouest la mystérieuse et attachante Xaintrie, au Nord-Est, le très âpre plateau basaltique du Cézallier aux paysages steppiques (que partage aussi le département du Puy-de-Dôme) et au Sud-Est, les débuts de l’Aubrac riche en monuments mégalithiques, et l’horst (soulèvement d’une partie de la croûte terrestre) faillé de la Margeride qui relève aussi des départements de la Haute-Loire et de la Lozère. Très faiblement peuplé pour cause de conditions de vie rudes, en particulier en hiver long de six à sept mois, la Margeride recèle une forte radio-activité naturelle, car riche en uranium.

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Tome et cantalès

Le département éponyme englobe ce massif volcanique. De 5741 km², il garde son caractère paysan. Distant à vol d’oiseau de 550 km de Paris et à 631 m d’altitude, son chef-lieu, Aurillac (25.700 hab.), bénéficie de la proximité d’une aire traditionnelle d’élevage et de la culture vitale de la châtaigne, la bien nommée Châtaigneraie. On pratique sur les pentes une polyculture céréalière vivrière quand les champs ne servent pas à la belle saison à l’estive du bétail.

Dans le patois local d’origine occitane, le cantalès désigne le responsable des vachers qui travaillaient en altitude. La nuit venue, les vachers se réfugiaient dans des burons (maisons austères en pierre couvertes d’ardoise ou de lauzes). Souvent détruits ou disparus, certains d’entre eux sont toutefois restaurés et deviennent des auberges ou des chambres d’hôtes.

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Avec le lait de vache, les éleveurs fabriquent la fourme du Cantal, un fromage à pâte broyée et pressée. D’une hauteur cylindrique de 40 cm et d’un diamètre de 30 à 50 cm, ce produit rustique s’obtient par emprésurage. Le lait caillé est découpé, puis pressé, d’où on extrait le sérum qu’on émiette ensuite dans un moulin spécial. Pétri et salé, le cylindre moulé – la tome – se met dans une toile. Une fois démoulée, la tome passe à la cave où elle s’affine et est périodiquement frottée avant toute consommation.

Si dans l’histoire, le Cantal appartient à la Haute-Auvergne, les différences ne sont pas que géo-morphologiques avec sa voisine basse-auvergnate. Tandis que la Basse-Auvergne autour de Clermont-Ferrand pratique le droit coutumier d’origine germanique, la Haute-Auvergne suit le droit écrit d’origine romaine. Rome a d’ailleurs laissé des marques prédominantes. Avec Mauriac (3500 hab.), Saint-Flour (6500 hab.) est la seconde sous-préfecture du Cantal. Or Aurillac a longtemps dépendu du diocèse… sanflorain.

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Connu dès l’époque romaine en tant que Mons Indiciacum parce que la cité construite au sommet d’un promontoire rocher massif, permettait aux voyageurs de se repérer de loin, la ville doit son nom à Santi Flori, un ermite apôtre évangélisateur de l’Auvergne. Ce phare terrestre a été une place forte stratégique qui surveille la vallée du L’Ander. Érigée au cours du XVe siècle en pierre volcanique, sa cathédrale témoigne de l’attachement de sa population aux croyances populaires catholiques affirmées. Une anecdote historique veut que pendant les Guerres de Religion (1560 – 1598), un certain Brisson, consul du bourg aurait repoussé toute une troupe huguenote à grands coups de  hache ! Les archives signalent la présence dans la nef de la cathédrale aux XVIe et XVIIe siècles d’une Vierge noire. Les madones noires aux origines toujours énigmatiques sont nombreuses dans le Massif Central (Mauriac, Borée...).

Enracinement spirituel

Le fait religieux modèle le territoire. La ville d’Aurillac provient d’un site monastique près de la Jordanne bâti à la fin du IXe siècle par Saint Géraud. Mais Aurillac doit une certaine renommée à l’un des siens: Gerbert (vers 938 – 1003). Écolâtre formé à l’abbaye de Saint Géraud, puis en Catalogne et à Reims, le clerc Gerbert étudie diverses sciences dont les mathématiques. Conseiller écouté de l’archevêque reimois Adalbéron qui désire que la Francie occidentale intègre enfin le Saint-Empire romain germanique sans pour autant soutenir la candidature à la couronne des Francs du duc Charles de Basse-Lotharingie (ou de Lothier), l’oncle carolingien du défunt roi Louis V, Gerbert d’Aurillac contribue par ses conseils avisés auprès des Grands à l’élection en 987 du comte de Paris et duc des Francs, petit-fils d’un roi des Francs, Hugues Capet. Un bel exemple d’hétérotélie qui empêche la renovatio de la res publica, soit le renouvellement de l’État impérial ottonien!

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Promu à son tour archevêque de Reims en 991, il réussit une réforme ecclésiastique qui le conduit à prendre en 998 la tête du diocèse de Ravenne. Le 2 avril 999, il devient souverain pontife sous le nom de Sylvestre II. Son court pontificat combat fortement la simonie.

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Non loin de Saint-Flour aux portes de la Lozère, le viaduc ferroviaire de Garabit franchit la vallée de la Truyère. Premier ouvrage métallique érigé en France, ce pont-rail indispensable pour la liaison Clermont-Ferrand – Béziers a été conçu par l’ingénieur Léon Boyer et construit entre 1882 et 1884 par Gustave Eiffel. Le viaduc montre l’excellence du savoir-faire français. À 122 m de hauteur du cours d’eau, un pont long de 564 m repose sur cinq piliers implantés sur les deux rives.

Par-delà son folklore qui s’efface peu à peu des mémoires, de son relief majestueux et d’un patrimoine en voie de disparition, le Cantal tend vers une indéniable transcendance matérialisée par les contours du département. On y devine le pendentif porté par les membres de l’Ordre de la Toison d’Or, cette confrérie chevaleresque à vocation européenne fondée à Lille en 1430 par le duc de Bourgogne, Philippe le Bon, dans l’espoir de renouer avec l’esprit héroïque des Croisades. Ce n’est pas une coïncidence si la forme de ce département fait penser à cet honneur qui engageait à vie son détenteur.

Dans l’inextricable trame à venir de la méta-histoire, il est fort probable que le département du Cantal inscrit au cœur orographique du Massif Central joue un rôle non négligeable.

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C’est sur ces terroirs altiers, hauts lieux telluriques sanctifiés par de mystérieuses statues virginales que convergent le feu des volcans et l’eau des sources, parfois brûlantes (Chaudes-Aigues), la terre des forêts et l’air. Une éventuelle topogenèse (ou développement spirituel d’un lieu) peut y surgir à condition que surgisse un processus original de « passionarité » (Lev Goumilev), c’est-à-dire qu’une population, native ou non, choisisse d’y couler, d’y fondre, d’y tremper sa mentalité. Les divers paysages du Cantal reflètent en effet un aspect archaïque certain, mais la présence du chef-d’œuvre de Garabit représente aussi une nette incursion futuriste. L’isolement de ces contrées en fait finalement des havres propices à l’implantation pérenne de bases autonomes auto-suffisantes, de cantalès matériels pour des êtres différenciés, des bastions d’une survie personnelle et d’une reconquête collective.

GF-T

  • D’abord mis en ligne sur Les lansquenets d’Europe, le 25 avril 2023.

 

samedi, 22 octobre 2022

Brève histoire électorale de l’Allier

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Brève histoire électorale de l’Allier

par Georges FELTIN-TRACOL

Situé au Nord-Ouest de la région Auvergne – Rhône-Alpes, le département de l’Allier est un bon indicateur du bouleversement politique survenu aux législatives des 12 et 19 juin derniers. Ce département d’environ 336.000 habitants correspond à peu près à la province d’Ancien Régime du Bourbonnais, avec quelques paroisses auvergnates et foréziennes en plus. Sur cette terre naquit la Maison capétienne de Bourbon qui régna sur la France, Naples – la Sicile, Parme et le Brésil et qui continue de régner en Espagne et au Luxembourg.

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D’une superficie de 7.340 km², le territoire comprend en son centre le Val d’Allier et la Limagne bourbonnaise. À l’Ouest, le Bocage s’élève lentement vers les plateaux de la Combraille. Au-delà commencent les dénivelés légers de La Marche et les étendues de la Sologne bourbonnaise où l’on trouve la merveilleuse forêt de Tronçais. À l’Est se dresse la Montagne bourbonnaise. Les trois principales aires urbaines sont la préfecture, Moulins (19.000 hab.), Vichy (25.000 hab.) et Montluçon (34.360 hab.). La population élevée de cette dernière par rapport aux deux précédentes se comprend par la présence d’une industrie rurale prédominante. Moulins concentre des activités tertiaires et agricoles. Vichy vit du thermalisme, activité motrice pour le tourisme local.

Historiquement plutôt de gauche et rétif au gaullisme, le département de l’Allier est une terre socialo-communiste. Entre 1958 et 2010, quatre circonscriptions législatives le couvraient. Le déclin démographique lui en a fait perdre une. Aujourd’hui, les trois circonscriptions s’organisent autour de Moulins (la 1re), de Montluçon (la 2e) et de Vichy (la 3e). En 2012, dans la foulée de l’élection de « Flamby » Hollande à l’Élysée, contre les trois candidats UMP qualifiés, le PS gagne les 1re et 2e circonscriptions tandis que son allié du PRG (Parti radical de gauche) s’empare de la 3e. En 2017, le désaveu est cinglant pour le PS et son comparse. Le PCF remporte la 1re circonscription. Les candidates LREM macroniennes triomphent en revanche dans les 2e et 3e circonscriptions.

En 2022, le PCF conserve la 1re circonscription contre le candidat présidentiel à 55,51 %. La 3e circonscription voit l’élection à 60,98 % du candidat Les Républicains aux dépens de la députée macronienne sortante. Rappelons que le tiers des députés du groupe Les Républicains est originaire d’Auvergne – Rhône-Alpes dont le conseil régional est présidé par Laurent Wauquiez qui ne brigue pas la direction de sa formation. La surprise provient de la 2e circonscription. Jorys Bovet du RN est élu contre la candidate La France insoumise à 50,22 %. L’Allier perd par conséquent deux élus de la majorité présidentielle et devient un foyer d’opposition plus ou moins franche au mal-élu de l’Élysée (pensons aux atermoiements du RN et des Républicains au Palais-Bourbon).

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Département à la fois rural et industriel, l’Allier est un condensé de cette « France périphérique » si bien décrite par le géographe Christophe Guilluy. Ce territoire pâtit de l’enclavement routier, de la fermeture des services publics, de la rareté des transports en commun. Ce tout alimente le mécontentement, voire la colère des électeurs vis-à-vis des candidats de Paris. L’électorat de la 1re circonscription préfère par habitude politique voter pour le PCF dont l’ancrage territorial demeure relativement solide même si le conseil départemental est maintenant de centre-droit (alliance UDI – Les Républicains oblige). Entre 1978 et 1993, le député de l’ancienne 3e circonscription fut le candidat communiste à la présidentielle de 1988 André Lajoinie.

41mCM01+eUL.jpgPlutôt tourné vers la gauche, le département de l’Allier a néanmoins été marqué par l’action du maire de Moulins de 1971 à 1989, Hector Rolland, député gaulliste de la 1re circonscription de 1968 à 1981 et de 1986 à 1988. Né en 1911 à Neuilly-sur-Seine, c’est un enfant abandonné. Surnommé « Spartacus » et ayant l’habitude de déclamer ses poèmes dans les hémicycles du Palais-Bourbon et de Strasbourg de 1983 à 1984 avec son accent chantant de paysan, il se rapproche au début des années 1970 d’un jeune loup appelé Jacques Chirac. En 1974, il contribue à l’« Appel des 43 » parlementaires gaullistes qui soutiennent Valéry Giscard d’Estaing contre le candidat gaulliste Jacques Chaban-Delmas. Son enthousiasme envers le député de Corrèze – maire de Paris s’émousse très vite. Paru en 1990, ses Souvenirs dérangeants d'un godillot indiscipliné (Albin Michel, 215 p.) se montrent accablants pour le catastrophique Chirac.

Hector Rolland adhère en 1984 au Cercle Renaissance de Michel de Rostolan, futur député FN de l’Essonne en 1986. Favorable à l’Europe des États nationaux et à un rapprochement entre le RPR – UDF et le FN, Hector Rolland condamne l’IVG. En 1986, avec la députée UDF – barriste Christine Boutin et Michel de Rostolan, il veut créer à l’Assemblée nationale un groupe destiné à l’accueil de la vie que Chirac désapprouve et torpille aussitôt. Dans la perspective de la présidentielle de 1995, l’ancien député – maire de Moulins se rallie à Édouard Balladur. Mais il décède en mars, quelques semaines avant le premier tour.

Parmi les deux sénateurs de l’Allier, mentionnons l’ancien maire de Vichy, Claude Malhuret. Naguère militant soixante-huitard au PSU (Parti socialiste unifié) et président pendant huit ans de Médecins sans frontières, il devient secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé des Droits de l'homme de 1986 à 1988 dans le gouvernement de cohabitation de Chirac, et se remarque par sa vindicte contre Jean-Marie Le Pen et le FN. Il milite aujourd’hui au parti d’Édouard Philippe, Horizons, d’où son zèle covidien remarqué…

Département méconnu, l’Allier, on le voit, recèle cependant une histoire politique contemporaine trépignante dont il faudra suivre avec attention les prochaines péripéties.

GF-T

  • « Vigie d’un monde en ébullition », n° 47, mise en ligne le 18 octobre 2022 sur Radio Méridien Zéro.

jeudi, 24 juin 2021

Au milieu, le Massif

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Au milieu, le Massif

par Georges FELTIN-TRACOL

Ex: http://www.europemaxima.com

En étudiant la topographie de la France, les géographes remarquent que son relief s’ordonne autour d’une diagonale inclinée du Nord-Ouest vers le Sud-Est. Au-delà de cette ligne s’étend un ensemble de régions basses marquées par les Bassins aquitain et parisien ainsi que par la plaine du Nord qui se prolonge à travers toute l’Europe septentrionale jusqu’à l’Oural. En-deçà se dressent des montagnes plus ou moins élevées. Au milieu de cette diagonale géophysique s’impose le Massif Central.

D’une superficie de 80.000 km², ce vaste donjon hydrographique complexe au relief compact et contrasté est, avec le Puy de Sancy à 1885 m d’altitude, le plus élevé et le plus étendu des massifs anciens d’Europe occidentale. Vaste plan incliné vers le Couchant, fortement redressé à l’Est, anciennement marqué par un volcanisme désormais en sommeil, le Massif Central domine de plus de mille mètres le Sillon rhodanien et la plaine du Languedoc et s’abaisse vers le Nord-Ouest vers les plateaux du Limousin dont le plus célèbre reste en Corrèze celui des Millevaches, c’est-à-dire des mille sources d’eau. Son centre correspond à plusieurs systèmes volcaniques enchevêtrés. Le plus étendu correspond au département du Cantal. Son contour administratif évoque l’insigne de l’Ordre de la Toison d’Or. Par les effets du volcanisme, certains paysages frappent par leurs similitudes avec les hautes-terres de Mongolie : le Cézallier, la Margeride et l’Aubrac (où on trouve un nombre considérable de menhirs ou de pierres levées, preuves indéniables d’un habitat préhistorique).

Terres d’enracinement

Dans ces espaces de moyennes montagnes courent bien des récits ancestraux à la fois folkloriques et symboliques. Ce n’est pas un hasard si Alexandre Vialatte (1901 – 1971), chroniqueur au quotidien La Montagne et traducteur de Nietzsche, de Thomas Mann ou de Gottfried Benn, vante L’Auvergne absolue. François Mitterrand aimait à chaque Pentecôte gravir avec ses fidèles la roche de Solutré, un autre site à l’habitat fort ancien. Le président ex-Cagoulard de la République de 1981 à 1995 tenait le massif septentrional du Morvan, en particulier le Mont Beuvray, pour un haut-lieu de l’imaginaire gaulois. Le « pape des escargots » d’Henri Vincenot (1912 – 1985) rapporte bien des souvenirs celtiques tandis qu’un autre Bourguignon, Johannès Thomasset (1895 – 1973) exalte l’héritage burgonde, revient sur le « Grand Duché d’Occident » à la fin du Moyen Âge et prône l’alliance franco-allemande pour sauver l’Europe. Ce n’est pas un hasard si au début des années 1970, Jean-Claude Valla et Pierre Vial ont animé un éphémère bulletin intitulé Grande Bourgogne

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Auteur de Gaspard des Montagnes, Henri Pourrat (1887 – 1957) rédige ses récits à partir de sa récolte des fables locales du Livradois, cette forêt montagneuse autour d’Ambert qui servait de frontière médiévale entre l’Auvergne vassale du roi de France et le comté de Forez, terre d’Empire. Mitoyens aux Monts du Livradois, les Monts du Forez forment le décor somptueux et sauvage de l’œuvre majeure d’Honoré d’Urfé au XVIIe siècle, L’Astrée. Près de la limite départementale entre la Loire et le Puy-de-Dôme au col de l’Homme mort, se trouve au bord de la route une auberge nommée « Au Roi perdu ». S’agit-il d’une discrète allusion à l’évasion de la prison parisienne du Temple en 1794 du jeune roi Louis XVII grâce à la fameuse filière de Thiers ? Le fils de Louis XVI y aurait-il trouvé refuge dans cette région réputée être sous la période révolutionnaire, mais un terrain fertile pour la chouannerie locale ? L’histoire officielle l’ignore, mais pas les érudits locaux…

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Bien plus au Sud, en Bas-Vivarais, a vécu à Saint-Marcel-d’Ardèche le philosophe paysan Gustave Thibon (1903 – 2001). Aujourd’hui, dans ce même département, mais dans sa partie montagneuse et cévenole, on peut encore rencontrer l’agronome et penseur rural Pierre Rabhi. Tous ont noté dans leurs écrits la prégnance mystique des paysages. Même s’il pense dans La Colline inspirée (1913) à la bosse lorraine de Sion – Vaudémont, Maurice Barrès se souvient très bien du bourg de Saugues dans le Gévaudan d’où provenait une partie de sa famille et où il séjournait enfant pendant la saison estivale. Le Gévaudan, aujourd’hui partagé entre la Lozère et la Haute-Loire, acquiert une réputation effroyable dans toute l’Europe à la fin du XVIIIe siècle avec les méfaits d’une bête tueuse de femmes et d’enfants. Bien des hypothèses ont circulé autour de cet animal mystérieux et sanguinaire. L’auteur de polar, Pierric Guittaut a, au terme d’une enquête passionnante dans La Dévoreuse. Le Gévaudan sous le signe de la Bête 1764 – 1767 (Éditions de Borée, 2017), montre que la bête en question n’est qu’un loup-cervier de forte taille.

CVT_La-Devoreuse-Le-Gevaudan-sous-le-signe-de-la-bet_116.jpgEn Auvergne – Bourbonnais

Née de la fusion au XVIIe siècle des cités rivales de Montferrand et de Clermont d’où partit en 1095 l’appel du pape Urbain II à la Première Croisade, la ville de Clermont-Ferrand doit sa prospérité économique à partir de la seconde moitié du XIXe siècle à l’essor des machines agricoles et de la fabrication du caoutchouc avec l’entreprise Michelin. Inspirée par la doctrine sociale de l’Église catholique, la famille éponyme pratique le paternalisme social et finance la construction de nombreux logements sociaux. Les syndicalistes parisiens ou lyonnais prennent alors l’habitude de se moquer les Clermontois qui « vivent, grandissent, travaillent et meurent chez Michelin ». Au-dessus de l’ancienne Augustonemetum (« le sanctuaire d’Auguste »), premier nom de la ville auvergnate, s’élève le Puy de Dôme, ses installations de radio-diffusion et son centre de communication militaire. À leur proximité se visitent toujours les ruines d’un temple dédié au dieu Mercure. Depuis son sommet, on y contemple un large panorama dont les Combrailles à l’Ouest et le Bourbonnais au Nord. Se conformant à peu près au département de l’Allier, le deuxième département de France qui compte le plus grand nombre de châteaux, le Bourbonnais est le berceau de la dynastie française, puis européenne, des Bourbons. Si sa deuxième ville, Vichy, devient la capitale de l’État français entre 1940 et 1944, son chef-lieu, Moulins, est déjà le cœur politique du pays sous Charles VIII (1470 – 1483 – 1498). Sa sœur aînée, Anne de Beaujeu (ou de Bourbon) qui hérita de l’intelligence politique de leur père Louis XI, exerce plusieurs fois la régence et s’impose face aux grands féodaux.

Au XVIe siècle, le principal seigneur du Massif Central est son gendre, le connétable Charles III de Bourbon (1490 – 1527). L’historiographie officielle française le fait passer pour un traître. Le Connétable de Bourbon voit ses intérêts patrimoniaux de grand féodal contestés par la mère de François Premier, Louise de Savoie. Malgré sa prestance physique et sa grande taille, le roi de France reste un petit garçon devant sa mère. Il lui cède et fomente des procès truqués contre le Connétable. Furieux, celui-ci en tant que prince de Dombes va servir son autre suzerain Charles Quint. Charles de Bourbon meurt à la tête des lansquenets protestants de l’Empereur au moment de la prise de Rome. Dominique Venner appréciait cette figure altière et incomprise.

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Territoire favorable aux sourcières, l’ancien Bourbonnais voit s’installer différentes communautés proches de l’anthroposophie. Ces terres centrales facilitent une implantation communautaire tenace. Dans le Morvan, en Sologne bourbonnaise, en Auvergne autour de la ville coutelière de Thiers et non loin de là dans les Bois noirs des Monts du Forez s’implantèrent les parsonniers (ou les pariers ou encore les parciers) aussi qualifiés de « communautés taisibles ». Ces communautés rurales d’origine familiale élargie ignoraient la propriété privée individuelle. À la suite des recherches du sociologue conservateur Frédéric Le Play (1806 – 1882), historiens, micro-économistes et anthropologues étudient ces groupes coutumiers qui ont perduré jusqu’au début du XXe siècle. Détentrices d’alleux, ces communautés taisibles n’hésitaient pas à tenir tête au seigneur du coin au point que le voisinage paysan les considérait comme une forme de « noblesse populaire ». Équivalents aux bourgades nobiliaires d’Espagne du Nord et des communautés villageoises aristocratiques d’origine militaire des confins polonais, ces structures collectives originales formaient de véritables « monastères de laboureurs mariés » respectant l’obéissance aux aïeux, la pauvreté individuelle et la chasteté conjugale.

À la source du plus long fleuve de France

À cheval entre la Haute-Loire et l’Ardèche, le Vivarais – Lignon est surnommé par ses habitants le « plateau de la Burle », du nom de ce vent du Nord hivernal qui érige en quelques minutes des congères de quatre à cinq mètres de haut. Sur ce plateau d’origine volcanique existent dans des coins isolés des fermes tenues par une autre communauté spirituelle, les darbystes (ou des Frères de Plymouth, un courant protestant). Deux points saillants marquent le plateau aride de la Burle : le Mont Gerbier-de-Jonc au pied duquel surgissent les sources « véritable » et « authentique » de la Loire, le plus grand fleuve français, et le Mont Mézenc qui se caractérise par deux sommets jumeaux. Les pilotes d’avions redoutent cette zone, théâtre de divers accidents aériens mortels. Les journalistes locaux parlent d’un « triangle des Bermudes terrestre », car les pierres volcaniques perturberaient les instruments de navigation aérienne. D’autres y recherchent le trésor caché de Vercingétorix avant sa défaite à Alésia. Le plateau connaît en 1833 le scandale de l’« Auberge de Peyrebeille » sise sur la route entre Montélimar et Le Puy-en-Velay. Le réalisateur Claude Autant-Lara en fait en 1951 un film, L’Auberge rouge, avec Fernandel. La justice et le voisinage accusèrent le couple d’aubergistes et leur serviteur d’avoir tué des voyageurs. Condamnés à mort, les trois furent guillotinés sur place, ce qui est exceptionnel. Pourquoi ? Des historiens du dimanche y ont vu une forme de sacrifice et insistent sur la proximité du Meygal, le massif montagneux au centre du Velay (ou de la Haute-Loire) dont bien des villages abritaient des forgerons quelque peu alchimistes…

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Point de départ pour le pèlerinage de Saint-Jacques-de-Compostelle, la cathédrale Notre-Dame du Puy-en-Velay se distingue, d’une part, des autres bâtiments de France romane et gothique par son style byzantin et, d’autre part, par la présence ancienne d’une vierge noire, émanation chrétienne d’antiques cultes telluriques féminins. La cathédrale massive se trouve encadrée de deux promontoires rocheux. Se tient sur le rocher Corneille une statue de la Vierge Marie érigée en 1860 avec la fonte du fer de deux cent treize canons venant de la prise de Sébastopol en 1855 pendant la Guerre de Crimée (1853 – 1856). En face de la cathédrale à dix minutes de marche est édifiée sur un neck, le rocher d’Aiguilhe, de 82 mètres de hauteur, une église de style roman dédiée à Saint-Michel accessible par un escalier de 268 marches. Le folklore qualifie ce promontoire de « fiente de Gargantua ». L’église paraît répondre au rayonnement mystique de l’abbaye normande du Mont Saint-Michel. Dans son court roman Pop Conspiration (Auda Isarn, 2013), Arnaud Bordes y place le siège d’une très vieille société secrète. À cinq kilomètres du Puy surplombe depuis un large éperon rocheux l’immense forteresse médiévale de Polignac, longtemps propriété de la maison du même nom dont une branche cadette a perpétué par mariage avec la dernière héritière la dynastie princière des Grimaldi de Monaco.

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Dans la France en crise des années 1930, la Haute-Loire rejette les compagnies de l’électricité qui profitent d’un monopole de fait. Élu en 1929 maire de Vorey-sur-Arzon, Philibert Besson (1898 – 1941) mène la rébellion. Élu député en 1932, il s’associe avec l’ingénieur – agriculteur Joseph Archer, maire de Cizely (Nièvre). Inspirés des analyses d’économistes proches des non-conformistes de la décennie 1930, Philibert Besson et Joseph Archer défendent les États fédérés d’Europe dotés d’une monnaie continentale, l’europa, dont la valeur représente trente centigrammes d’or, cent grammes de cuivre, deux kilogrammes d’acier, deux kilogrammes de blé, deux cents grammes de viande, cinquante centilitres de vin à dix degrés, deux cents grammes de coton, dix kilowatt-heure, une tonne kilométrique et trente minutes de travail. Déchu de son mandat parlementaire et poursuivi par une justice aux ordres, Philibert Besson vit une année en clandestinité protégé et hébergé par les paysans vellaves. En 1936, il se présente à la députation comme le président du Parti capitaliste-travailliste et se déclare partisan du fascisme. Battu, il prévoit la Débâcle de 1940. Interné dans un asile psychiatrique, il décède de mauvais traitements à Riom.

On pourrait continuer à arpenter ces territoires riches en symbolisme populaire et en forts caractères. Oui, Maurice Barrès a raison d’écrire dans La Colline inspirée qu’« il est des lieux où souffle l’esprit. Il est des lieux qui tirent l’âme de sa léthargie, des lieux enveloppés, baignés de mystère, élus de toute éternité pour être le siège de l’émotion religieuse ». Le Massif Central ou la clé de voûte de la France spirituelle, héroïque et paysanne au sein de notre civilisation albo-européenne.

Georges Feltin-Tracol

• D’abord mis en ligne sur Vox NR – Les Lansquenets, le 29 avril 2021.

jeudi, 07 novembre 2019

CONFÉRENCE : Retour à la terre : mode d’emploi.

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CONFÉRENCE : Retour à la terre : mode d’emploi.

Le cycle de conférences 2018/2019 de la bannière auvergnate de Terre & Peuple touche à sa fin. Il débuta avec l’exposé magistral de Robert Steuckers sur le mouvement völkisch, source d’inspiration fascinante qui reste encore à être exploré dans l’espace francophone.

Pour conclure ce cycle, et s’inscrivant dans le cadre que nous avions défini, la dernière conférence aura pour thème le retour à la terre : mode d’emploi. A ce titre, nous avons le plaisir et l’honneur d’accueillir Nicolas Fabre, auteur chez les éditions Kontre Kulture de Mon retour à la terre, guide du néo-rural, vendredi 15 novembre à Clermont-Ferrand.

Fort d’un parcours et d’une expérience solide dans les domaines de la permaculture, de l’autonomie et plus généralement d’un mode de vie rejetant les affres du monde moderne, Nicolas Fabre a à cœur le plaisir et l’envie de transmettre. Il gère actuellement une ferme agroécologique dans le Morvan.

C’est à la fois une quête vers un mode de vie enraciné, une reconnexion avec la nature, mais aussi, ne nous le cachons pas, une manière de se préparer à une possible rupture de la normalité qui nous pousse à délaisser le monde des idées pour plonger les mains dans la glèbe de notre belle province.

Nous vous attendons donc nombreux à partir de 18h vendredi 15 novembre dans la capitale arverne.

Paf : 10€

Réservation obligatoire via : terreetpeuplearverne@gmail.com

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vendredi, 03 mai 2019

Le soleil et ses symboles chez les peuples européens

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Le soleil et ses symboles chez les peuples européens

La bannière auvergnate de Terre & Peuple aura le plaisir de recevoir Jean-Christophe Mathelin, fondateur et rédacteur en chef de la revue Solaria, pour une conférence-projection intitulée « Le soleil et ses symboles chez les peuples européens, des origines à nos jours », samedi 25 mai 2019 à Clermont-Ferrand.


Fondée le jour du solstice d’hiver 1992, Solaria édite une revue et un calendrier. Cette association organise des activités culturelles telles que des conférences, des visites de sites et de musées, ou encore des fêtes traditionnelles. Elle a également créé un musée du Soleil. Ses objectifs sont de promouvoir les études et recherches sur les cultes et cultures solaires, ainsi que de rendre ce patrimoine accessible et utile à nos contemporains.


La revue publie dans un esprit ouvert des études, des textes choisis, des informations, des recensions d’ouvrages et d’articles sur la solarité, envisagée au sens le plus large des activités humaines (archéologie, histoire, symboles, art, littérature, poésie, religions, astronomie, écologie, etc…).


En plus de Solaria, Jean-Christophe Mathelin est l’auteur d’une anthologie sur le Soleil et la Lumière. Il est également astronome et conférencier en planétarium.


Dans son souci de renouer avec les religions natives de France et d’Europe, Terre & Peuple et sa bannière auvergnate souhaitent, à travers cette conférence-projection, mettre l’accent sur l’aspect cosmique et solaire du paganisme de nos ancêtres, ainsi que sur l’importance de son symbolisme. Nous vous accueillerons donc samedi 25 mai à Clermont-Ferrand à partir de 17 heures.

 

samedi, 10 novembre 2018

Conférence et séance de dédicaces à Clermont-Ferrand (3 novembre 2018)

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Conférence et séance de dédicaces à Clermont-Ferrand (3 novembre 2018)

Je remercie tous les amis qui se sont décarcassés pour réussir cette charmante journée, placée sous le signe de la camaraderie et de la convivialité !

Je remercie aussi tous les amis de très longue date qui ont fait le déplacement pour de joyeuses retrouvailles !

 

dimanche, 30 septembre 2018

Conférence: le mouvement völkisch

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mardi, 30 septembre 2014

Socialisme identitaire

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