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samedi, 16 mars 2019

Francis Bergeron : « Tintin véhiculait des valeurs qui me correspondaient »

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Francis Bergeron : « Tintin véhiculait des valeurs qui me correspondaient »

Propos recueillis par Alexandre Rivet

Ex: https://www.breizh-infos.com

Francis Bergeron est journaliste pour le quotidien Présent et auteur de nombreux ouvrages, notamment pour la jeunesse. Spécialiste de Tintin et de son créateur Hergé, sur lequel il a également écrit plusieurs livres, il a accepté de répondre à nos questions en cette année marquant le 90ème anniversaire du célèbre reporter…

Breizh-info.com : Francis Bergeron, d’où vient votre passion pour Tintin ?

Francis Bergeron : Comme tout le monde ou presque : de l’enfance. Quand on m’a offert mon premier Tintin, je ne savais pas lire. Mais j’avais été frappé de voir mon père lire mon album et y trouver un réel plaisir. S’agissait-il d’un livre pour moi ou pour les grandes personnes ?

Plus tard, pendant mon adolescence, il m’a semblé que Tintin, comme Bob Morane, Buck Danny, Sherlock Holmes, Les histoires de l’oncle Paul, ou La Patrouille des castors, véhiculait des valeurs, une éthique, un état d’esprit qui me correspondaient, par tradition familiale, sans doute.

FB-hergéVImm.jpgPar la suite, engagé politiquement dans des groupuscules activistes, j’ai découvert avec un infini bonheur que Hergé avait fréquenté des personnages qui me fascinaient, comme Léon Degrelle, dont j’avais lu l’épopée militaire, qu’il avait dessiné une aventure anticommuniste au pays des Soviets, album mythique, introuvable, dont j’ai pu lire pour la première fois les bonnes pages dans le mensuel anticommuniste Impact, au tout début des années 70.

Breizh-info.com : Quel est votre album favori et pourquoi ?

Francis Bergeron : Chaque tintinophile a son ou ses albums favoris. Quand je fais une conférence sur Hergé et Tintin, je pose souvent cette question ; quel est votre album préféré ? J’ai remarqué que les albums cités sont rarement les plus connus, comme Tintin au Congo, Tintin en Amérique, Les cigares du pharaon, On a marché sur la lune.

Personnellement je place au-dessus de tous Le Secret de la Licorne et Le trésor de Rackham le Rouge. Ces albums font vivre deux histoires parallèles, à deux époques différentes : celle du capitaine Haddock et celle du chevalier de Haddock. Il y a des morceaux d’anthologie : la visite du marché aux puces de Bruxelles, le combat du chevalier de Haddock et de Rackham le Rouge, la crypte de Moulinsart. L’exploration sous-marine des vestiges de La Licorne, l’inauguration du musée… C’est un cycle parfait !

Breizh-info.com : Vous avez écrit deux livres sur Hergé (Georges Rémi, dit Hergé, publié en 2011, et Hergé, le voyageur immobile, en 2015). Quelles sont les caractéristiques de l’auteur qui ont attiré votre attention ?

Francis Bergeron : En fait, j’en ai écrit trois. Avec Alain Sanders et quelques autres, illustré par Aramis, nous avons en effet publié Hergé et nous, dans les années 90. Ce livre nous a valu un procès et une condamnation plutôt sévère… que nous n’avons pas payée, d’ailleurs. Il faut dire que les dessins d’Aramis étaient très politiquement incorrects ! Récemment, dans une vente aux enchères consacrée à l’œuvre de Hergé, j’ai eu le plaisir de voir cet ouvrage estimé 200 euros ! À l’époque j’aurais dû me mettre de côté le tirage complet, ma fortune était faite !

Mais, pour revenir à votre question, je dirais que ce qui m’a frappé, chez Hergé, c’est – malgré le succès de ses albums – sa gentillesse, sa modestie, sa disponibilité à l’égard de ses jeunes lecteurs. Il n’a jamais pris « la grosse tête ». Je dirais même qu’il n’a jamais eu conscience qu’il construisait une œuvre.

Breizh-info.com : Plus les années passent, plus les polémiques au sujet d’Hergé se multiplient, alors était-il vraiment raciste, comme le suggèrent les détracteurs de Tintin au Congo, ou même un sympathisant des Nazis, comme disent ceux qui pointent du doigt ses liens avec le journal Le Soir pendant la guerre ?

Francis Bergeron : Hergé était de son temps. Sa vision du Congo est celle qu’avaient tous les Belges de l’époque, vision renforcée par la visite du musée royal d’Afrique de Tervuren, à Bruxelles. Un Congo quelque peu idéalisé, une vision paternaliste, mais affectueuse. Une parfaite symétrie de celle des Français à l’époque de l’exposition coloniale. Et alors ?

Quant aux sympathies politiques d’Hergé, il ne faut pas non plus les surévaluer. Hergé était très fidèle en amitié. Qu’il s’agisse de Tchang, du père Norbert Wallez, de Degrelle, de Paul Jamin (Jam), de Félicien Marceau, de Van Melkebeke, de Robert Poulet, de Paul Werrie. Il fut la providence des épurés belges, et même des autres (Bardèche, par exemple). C’est tout à son honneur.

Mais il me semble que ces aspects ne font que donner davantage de corps, de densité au personnage, de le complexifier. Hergé n’est pas un homme insipide, propre sur lui, une simple usine à dessiner des petits personnages pour les enfants. Comme pour Céline, Henry de Monfreid ou Jack London, son œuvre est magnifiée par sa vie et sa légende, lumineuse et sombre.

FB-herg&éqsj.jpgJe pense aussi que la grande vague de mise en cause d’Hergé est finie. Après la mort d’Hergé, en 1983, et alors que le politiquement correct n’avait pas encore suscité ses contre-poisons, on pouvait craindre une opération de diabolisation définitive. Mais ce ne fut pas le cas, et aujourd’hui il n’y a plus de « scandales » à découvrir. Pierre Assouline, dans sa biographie, a exploré les moindres courriers du père de Tintin. Les psychanalystes ont étudié chaque album, etc. Un recentrage sur l’œuvre s’est opéré.

Il y aurait bien davantage à dire sur le stalinisme de Picasso, d’Aragon ou d’Éluard, sur le polpotisme d’une bonne partie des intellectuels et artistes d’après-mai 68, etc.

Breizh-info.com : Pourquoi les journaux n’ouvrent plus ou presque leurs lignes aux auteurs de bandes dessinées ?

Francis Bergeron : Jusqu’à une époque assez récente, la bande dessinée était un produit cher. La prépublication des récits en feuilletons à suivre, dans des revues, était une nécessité économique. L’album arrivait ensuite.

Aujourd’hui l’album a sa vie autonome. Le bouche à oreille des cours de récréation, les réseaux sociaux, les rayons des grandes surfaces, la publicité qui exploite les personnages de BD, contribuent au succès. Sans parler des films et dessins animés tirés d’albums, des expositions, des ventes aux enchères médiatisées, des timbres-postes…

Breizh-info.com : La caricature a-t-elle remplacé la bande dessinée ?

Francis Bergeron : Ce sont deux domaines parallèles. Il n’y a pas vraiment de passerelles, d’ailleurs. Je ne connais pas le cas d’un grand de la BD qui ait été un grand du dessin de presse, et vice versa. Les ressorts sont très différents. Le caricaturiste base son travail sur l’humour ou la rosserie. La bande dessinée (en tout cas à partir d’Hergé) se rapproche des techniques de découpage du cinéma.

Breizh-info.com : Quelle place Hergé conservera-t-il dans l’histoire ?

Francis Bergeron : Dans l’histoire avec un grand H ? Aucune. Dans l’histoire de la bande dessinée ? La première. Dans l’histoire artistique du XXe siècle ? L’une des premières.

Son œuvre est dorénavant gravée dans le marbre de l’éternité, comme celles des plus grands de chaque époque.

Breizh-info.com : Tintin est désormais repris par les Américains, via le cinéma. Le film de Spielberg fait-il honneur au personnage d’après-vous et qu’attendez-vous de la suite que réalisera Peter Jackson ?

Francis Bergeron : Ce qui m’a frappé, dans le film de Spielberg, c’est qu’il a mis en valeur l’épisode où Tintin et Haddock sont recueillis dans le désert par la Légion étrangère. Au nom de l’anticolonialisme, et autres billevesées, un film comme celui-ci tourné en France ou en Belgique aurait occulté cette partie du récit.

Je n’ai aucune idée de ce que pourrait être la suite. L’important, c’est de valoriser toujours plus l’œuvre de Hergé. De ce point de vue, on ne peut que se féliciter d’initiatives qui vont accentuer le caractère international de l’œuvre.

petit20.jpgBreizh-info.com : Il y a d’innombrables anecdotes autour d’Hergé et de son héros, y en a-t-il une en particulier que vous souhaiteriez nous raconter ?

Francis Bergeron : Hergé faisait un gros complexe. Il était célèbre, mais il était persuadé qu’il ne resterait rien de lui, ensuite, qu’il n’était qu’un amuseur pour enfants.

Il s’est mis à prendre des cours de peinture, puis il a commencé à peindre. Il nous faisait du sous-Miro, du sous-Bernard Buffet, etc. Un jour, avec ses toiles sous le bras, il est allé voir des galeristes bruxellois. Ceux-ci n’ont guère manifesté d’enthousiasme. Mais ils lui ont dit :

– En revanche, si vous avez des planches originales des albums de Tintin, nous sommes preneurs…

Une autre anecdote amusante : quand Hergé venait à Paris, il se rendait parfois chez Maurice Bardèche, le beau-frère de Robert Brasillach. Et pour ses enfants, il dessinait des personnages de sa saga.

Aujourd’hui, la famille Bardèche ne sait plus ce qu’elle a fait de ces dessins. Probablement Suzanne et Maurice les ont-ils jetés, après que les enfants les aient coloriés, ou gribouillés…

Breizh-info.com : Tintin a désormais 90 ans : sera-t-il encore un héros dans un siècle, pour les générations futures ? Pourquoi ?

Francis Bergeron : Je crois avoir répondu à cette question. Tintin est un héros à la fois daté (ce qui en accentuera toujours le charme) et intemporel.

Il me semble en effet qu’il continuera à séduire des générations d’enfants, et donc ensuite des générations d’adultes. Car quand on pénètre dans cet univers, c’est pour la vie.

Propos recueillis par Alexandre Rivet
[cc] Breizh-info.com, 2019, dépêches libres de copie et de diffusion sous réserve de mention et de lien vers la source d’origine – V

 

lundi, 04 décembre 2017

Hergé par le Chouan des villes

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Hergé

par le Chouan des villes

Ex: http://lechouandesvilles.over-blog.com

Le film de Spielberg inspiré des aventures de Tintin m'offre l'occasion de parler un peu des relations qu’Hergé entretenait avec l'élégance. Le vêtement masculin tel qu'il apparaît dans les aventures elles-mêmes fera l'objet (peut-être...) d'un autre billet.

Hergé n'était pas beau. Son nez était trop grand, son visage trop allongé. Il avait quelque chose d’ingrat qui, jeune, le faisait ressembler à un coureur (belge, bien sûr...) du tour de France ! Ce qu'il avait de mieux, c'était ses yeux gris, aux reflets tantôt verts, tantôt bleus. Il y avait aussi sa silhouette longiligne, qui lui donnait une certaine allure. Toute sa vie, il fit attention à sa ligne. A la fin, sous l'effet de la maladie, la minceur devint maigreur. Les portraits d'alors provoquent un malaise : l'inéluctable est là, que des vêtements trop larges révèlent d'autant mieux qu'ils voudraient le dissimuler.

Hergé prêta, nous dit son biographe Benoît Peeters, « une éternelle attention aux vêtements (1). » L'origine de cette préoccupation remonte à son enfance : son père était l'employé d'un atelier de confection spécialisé dans les vêtements pour garçonnets et jeunes gens ; sa mère exerça jusqu'à son mariage la profession d'ouvrière tailleuse. C'est elle qui lui confectionna ses premiers costumes. Grâce à elle, il pouvait porter beau. Son élégance frappa dès leur première rencontre Germaine Kieckens, sa future femme, ou Paul Jamin, son assistant au Petit vingtième, le journal qui allait permettre à Hergé de se faire un nom... ou plutôt un pseudonyme.

Sur les photos de sa jeunesse, on le voit prendre des poses avantageuses, qui ont l'air empruntées à des vedettes de cinéma, succomber à des naïvetés de débutant.

Mais, très vite, il adopte un style discret, classique, reflet fidèle de ses idées conservatrices. Pierre Assouline, un autre de ses biographes, précise : « Pour ce qui est de l'élégance, ses collaboratrices évoquent sa netteté, son chic et son allure sportive (2). »

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Il ne fut cependant pas toujours indifférent à la mode. Il arbore dans les années 7O une coiffure dans le vent - cheveux plus longs recouvrant le haut des oreilles, mèche tombant artistiquement sur le front. La mise se décontracte, à l'image de celle de son héros qui, en 1977, dans Tintin et les Picaros, troque son célèbre pantalon de golf contre un vulgaire jean marron.

Hergé est arrivé alors au terme d'une lente et douloureuse évolution qui l'a amené à se détacher de tout ce qui n'était pas lui. Il a pris ses distances avec le catholicisme de sa jeunesse. Sa quête l'a conduit à s'intéresser, à partir de 1958, au taoïsme. Après bien des hésitations et des scrupules, il a quitté Germaine pour Fanny Vlamynck, de vingt-sept ans sa cadette, qu'il va finir par épouser en 1977. La palette de ses goûts s'est élargie. Il s'est initié à l'art contemporain sous l'influence de son tailleur, M. Van Geluwe, collectionneur d'oeuvres de ce genre. Les audaces de style du Hergé dernière manière témoignent de cette évolution. Audaces somme toute très limitées et parfaitement maîtrisées. Quand, en 1977, le festival d'Angoulême lui rend hommage, il ne renonce pas au costume-cravate. Au milieu des « bullistes » chevelus et mal nippés, sûr qu'il devait heureusement détonner !

S’il évolua, il ne se renia jamais. Ainsi aida-t-il du mieux qu’il le put ses amis journalistes qui, pour avoir « collaboré » avec lui au Soir de Bruxelles pendant la guerre, eurent maille à partir avec la justice.

Le goût d'Hergé pour les belles choses ne se limitait pas aux vêtements. Il aimait aussi, et notamment, les belles voitures. Il adorait la vitesse. « Ses voitures avaient longtemps été des sportives, nous dit Peeters, à la limite de la catégorie bolides. Il aimait conduire très vite, parfois sur des anneaux ou des pistes de performance. » Il a dessiné dans Tintin au pays de l'or noir la Lancia Aprilia à bord de laquelle il aurait quelques années plus tard un grave accident qui laisserait Germaine boiteuse à vie.

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Lancia Aprilia (1937)

Il roule en Porsche, en Mercedes...

Homme mûr, il se voit bien mener, dans sa vaste propriété de Céroux-Mousty, la vie d'un gentleman-farmer. Le Hergé d'alors, c'est un peu le Haddock qui, au début de L'affaire Tournesol, se promène, élégamment vêtu, dans la campagne entourant Moulinsart. Rêve de beauté et d'art de vivre...

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Porsche 1600: Hergé en posséda une...

Toute sa vie, Hergé eut le souci de la tenue, ce mot compris dans tous les sens. Souci né de la rencontre d’une éducation et d’un tempérament. « On ne naît pas impunément dans une famille liée au vêtement », écrit Peeters. J’ajoute qu’on ne naît pas non plus impunément dans une famille catholique ! « Rien ne le met en rage comme la désinvolture, dit Assouline. Plus qu’un crime contre l’esprit, elle est une faute de goût. Elle ne révèle pas seulement l’absence d’éducation, mais surtout le mépris des autres. » Difficile de distinguer ce qui, dans cette haine de la désinvolture et du laisser-aller, revient à l’éducation ou à la personnalité. La vulgarité sous toutes ses formes lui répugne. En 1932, un rappel militaire le sépare deux semaines de sa femme. Dans une lettre qu’il lui adresse, on peut lire ceci à propos des officiers : « La vie qu’ils mènent en commun leur enlève toute délicatesse, tout vernis. » Horreurs de la promiscuité…

Au sens le plus profond, Hergé était un homme d’ordre. Il lui fallait en toute chose – de la plus importante jusqu’à, apparemment, la plus dérisoire – introduire de la cohérence. Ses choix politiques, artistiques et, même, vestimentaires en portent témoignage. Son itinéraire spirituel aussi : découvrant qu’il n’avait jamais eu la foi, il se tourna vers d’autres formes de spiritualité, ne se résolvant pas à l’idée – moderne – d’un monde absurde. Dans l'œuvre univers d'Hergé (le concept est de Nimier), tout tourne rond, tout a du sens.

Les fragilités psychologiques et nerveuses d'Hergé sont connues. Sa rigueur, son exigence, son perfectionnisme le protégeaient de la menace, constante, du chaos. « Il n’avait pas la vocation du bonheur… Il y avait toujours quelque chose qui s’y mêlait… l’inquiétude… l’inquiétude… », écrit Peeters. L’effort créateur a sauvé Hergé du néant – de ce « rêve de blanc » qui, au moment de Tintin au Tibet, faillit venir à bout des défenses que, patiemment, il avait érigées pour contenir ses démons intérieurs. Le bonheur ? Un idéal pour Séraphin Lampion ! Hergé, c’était Sisyphe créateur. Un Sisyphe qu’il ne faut surtout pas imaginer heureux.

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1. Benoît Peeters, Hergé, fils de Tintin, Flammarion, 2002. 

2. Pierre Assouline, Hergé, biographie, Plon, 1996.

Tintin et moi

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Tintin et moi

Ex: http://lechouandesvilles.over-blog.com

Ce billet prolonge celui qu’une autre fois j’ai consacré à Hergé.

Quand la tintinophilie vire à la tintinolâtrie, elle ne m'intéresse plus. Ne me demandez pas combien de marches a l’escalier de Moulinsart ni le numéro d’immatriculation de la Lancia Aurelia qui, pilotée par un Italien survolté, traverse en trombe L’Affaire Tournesol. A peine si je sais distinguer les Dupondt à leurs moustaches. Je ne me ruinerais sûrement pas pour posséder l’édition rare d’un album. Je n’ai jamais acheté une statuette en résine d’un de mes personnages favoris. 

Mon amour pour Tintin est d’un autre ordre. Il puise à la source intarissable de l’enfance. Tintin a influencé pour toujours ma représentation de la réalité. Pour moi une canicule, c’est l’asphalte qui fond dans L’Etoile mystérieuse ; une éclipse, c’est Tintin ficelé à son poteau d’exécution qui implore Pachacamac dans Le Temple du soleil. Et chaque fois que je m’apprête à fréquenter un marché aux puces, je rêve d’y retrouver l’ambiance si poétique de celui que parcourt Tintin au début du Secret de la Licorne.

Des BD, il y en a beaucoup. Pourquoi, alors, cette fascination spéciale exercée par Tintin ? Des esprits très brillants ont tenté des réponses. Je n’aurai pas l’outrecuidance de me comparer à eux. Je me contenterai d’une observation fondée sur mon expérience. A mon avis, cette fascination tient beaucoup au dessin d’Hergé, qui a su trouver le point d’équilibre entre réalisme et imaginaire. Les personnages de Blake et Mortimer versent trop dans le premier ; ceux d’Astérix, trop dans le second. Le coup de génie d’Hergé consiste à avoir représenté les adultes avec un regard d’enfant. L’enfant est un caricaturiste-né. Les défauts des grandes personnes lui sautent aux yeux. La vérité peut alors sortir de sa bouche : « Maman, le monsieur a un très gros nez ! » ; « Papa, t’as vu comme la dame est maigre ! »

Si je sais lire les apparences, c’est en grande partie à Tintin que je le dois.

Tintin m’a appris à me méfier des gens qui se déguisent. Ils ont quelque chose à cacher. Je ne parle pas, bien sûr, de Tintin, qui se déguise quelquefois pour arriver à ses – nobles – fins, ni des Dupondt, dont les nombreux déguisements ridicules, censés les aider à se fondre dans le paysage, les désignent au contraire à la moquerie. Je pense à ce génie du mal qu’est Rastapopoulos, qui use d’identités et de panoplies diverses pour accomplir ses méfaits. Rastapopoulos se situe du côté dangereux de l’illusion. Ce n'est pas un hasard si, dans Les Cigares du pharaon, il s’occupe de cinéma et si, dans Coke en stock, il donne un bal masqué sur son yacht.

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Notre vêtement doit exprimer notre être profond. Cela aussi, c’est dans Tintin que je l’ai appris. En un sens, un homme stylé donne l’impression d’être toujours habillé de la même façon. Les saisons passent - auxquelles, bien sûr, il s’adapte -, mais sans affecter sa manière. Que quelqu’un vienne à lui dire : « C’est fou comme vos tenues d’été vous changent ! » et le voilà tout décontenancé. Un style est puissant quand il fait oublier les variations contingentes.

Tintin ne porte pas toujours les mêmes vêtements. Il est parfois en polo, ou en chemisette, ou en chemise, ou en pull… On le voit en costume ou en tenue dépareillée ; il arrive qu’il ait une cravate ou qu’il soit coiffé d’une casquette ; son imperméable est souvent droit, parfois croisé à martingale… Les couleurs aussi sont différentes : blanc, bleu, jaune, beige par exemple pour les chemises… Pourtant, l’impression qui domine, c’est l’absence de changement ! En cela, Tintin a du style. Qu’un élément vienne à dénoter, le lecteur, à raison, ne suit plus. Hergé a commis une faute en remplaçant, dans Tintin et les Picaros, la culotte de golf de son héros par un jean marron (1). Tintin, tout à coup, n’est plus Tintin. Parce que son style, c’est Tintin même.

Mon personnage préféré n’est pas Tintin ; c’est Haddock. Car plus complexe : humain, faible, soumis à son péché, généreux, enfantin, attaché au passé, mécontent des autres et de lui-même, colérique, dépressif – et sensible à la beauté. Ce dernier point a depuis longtemps retenu mon attention. En son château de Moulinsart, l’aventurier se fait gentleman. Il goûte à une vie de luxe et de calme : « Désormais, s’exclame-t-il au début de L’Affaire Tournesol, il ne me faut rien d’autre que cette promenade quotidienne (…) Ah ! le calme ! Ah ! le silence… Ecoutez-le, ce silence… » Dans Les Sept boules de cristal, il arbore le monocle et, dans Les Bijoux de la Castafiore, il revêt plusieurs tenues « dépareillées-chic » de belle apparence.

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Hélas ! La méchanceté des choses (2) a, à chaque fois, raison de son rêve de tranquillité. Son beau vase de Chine et son miroir florentin se brisent mystérieusement ; son ami Tournesol est enlevé ; la Castafiore attire les paparazzis chez lui…

Mon temps passe. Je vieillis. J’adapte du mieux que je peux mon vêtement à mon âge. Les héros d’Hergé n’ont pas eu à se donner cette peine. Pour ces bienheureux, le temps a arrêté son vol. Tintin est toujours un adolescent et Haddock, un homme entre deux âges. Cette bande dessinée a acquis l’intemporalité des œuvres classiques. Elle s’est détachée de sa période d’origine. Qui oserait prétendre qu’avec ses éternels cols durs Tournesol est démodé ? Les générations se succèdent. Tintin parle à mon fils d’une autre façon qu’il m’a parlé. Mais il lui parle ! Les années fuient. Je ne lis plus à cinquante-cinq ans Tintin au Tibet comme je le lisais quand j’étais enfant. Mais je continue de le lire !

Quand je suis triste, je me replonge dans ces livres d’images et ma tristesse se transforme en amicale nostalgie (3).

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1. Pierre Assouline explique, dans Hergé : biographie (Plon) : « La modernisation de l’apparence de Tintin (…), par complaisance vis-à-vis du producteur d’un des deux dessins animés adaptés de l’album, représente le seul moyen de rendre ce personnage à l’allure si désuète acceptable auprès du grand public américain. Mais pour qu’il y ait tout de même une continuité visuelle, les pantalons ne seront pas bleu délavé mais marron, solution bâtarde qui s’avère du pire effet. »
2. J’ai fait mienne cette belle expression de Liane de Pougy.
3. Pour les tenues dans Tintin, se reporter à l’étude qu’en a faite le regretté Paradigme de l’élégance ! 

lundi, 09 janvier 2017

Renaud Nattiez aux Amis de Hergé 2016

 

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Renaud Nattiez aux Amis de Hergé 2016

Renaud Nattiez est né entre Paris et la Belgique, pendant la gestation d'On a marché sur la Lune. Ancien élève de l'ENA et Docteur en économie, il est aujourd'hui inspecteur général de l'administration de l'éducation nationale et de la recherche. Dans ce document, il nous parle de son livre, sorti aux édition "Les Impressions Nouvelles", de son livre intitulé "Le Mystère Tintin - Les raisons d'un succès universel".

jeudi, 27 octobre 2016

Dans la peau de Tintin avec Jean-Marie Apostolidès

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Dans la peau de Tintin avec Jean-Marie Apostolidès

Les Nouveaux Chemins de la connaissance avec Jean-Marie Apostolidès (psychologue et sociologue)

Pourquoi Tintin n’a-t-il pas de corps ? Pourquoi n’y-a-t-il pas de femmes (hormis deux mégères) dans les albums de Tintin ?

Extraits musicaux :
– Parker Ray, « Derrière la chute d’eau ».
– Joseph Haydn, « Lieder Quartett ».
– Alibert, « Debout les zouaves ».
– Renaud et Gauthier Capuçon, « Carnaval des animaux ».
– Pink Floyd, « Seamus ».

 

samedi, 01 octobre 2016

Kuifje en Hergé in Parijs

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Kuifje en Hergé in Parijs

door Guido Lauwaert
Ex: http://www.doorbraak.be

Samengenomen vormen de albums, zoals het oeuvre van elke schrijver, een autobiografie

In het Grand Palais in Parijs loopt momenteel een expositie over Kuifje en zijn geestelijke vader Hergé, Georges Remi, van huis uit Franstalig. De strips en album verschenen eerst in het Frans en dan pas in het Nederlands en vele andere talen.

De expo toont zijn werk en scheert langs zijn karakter en persoonlijkheid en de pers bracht verslag over de opening, zo lyrisch dat het leek of Hitler hoogstpersoonlijk Stalin aan de trekhaak van zijn Mercedes-berline door de Berlijnse straten sleurde. Weinig aandacht echter voor de geestelijke evolutie van Georges Remi. Die is nochtans duidelijk zichtbaar in zijn strips.

Hergé [1907-1983] had een ongelooflijk saaie jeugd. Hij groeide op in de Brusselse randgemeente Etterbeek, indertijd nog zo netjes dat de dufheid als grondvocht uit de muren stonk. Zijn opvoeding was van een katholicisme om gek van te worden, en als blinde volgeling tekent hij zijn afkeer voor het communisme in zijn eerste strip, Kuifje in het land van de Sovjets. De strip verscheen eerst als feuilleton en daarna als album in 1930.*

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In wezen was het een propagandamiddel, verpakt als mooi verhaal, om bij de burgerij het angstgevoel voor het communisme aan te wakkeren. Dat lukte en Hergé, in al zijn naïviteit, ging op dezelfde lijn door met zijn tweede strip uit 1931, Kuifje in Congo. De Afrikanen waren het slachtoffer van Hergé’s pogingen om karikaturen te tekenen. Toen de strip als album verscheen, gebeurde dat met een stunt. Kuifje, gespeeld door een acteur arriveerde per trein in Brussel, vergezeld van tien Afrikanen in broussepakjes en gekooide wilde dieren, die van een circus waren gehuurd. Toen het spektakel in Luik werd herhaald ontstond er bijna een volksopstand. Later schaamde Hergé zich diep voor deze stunt én strip. Niet dat hij zich schuldig voelde om de kwaliteit van de tekeningen, ‘maar het grootschalig afslachten van de Afrikaanse fauna,’ zoals Harry Thompson in Kuifje, een dubbelbiografie [1991]** schreef, ‘stootte hem tegen de borst. Hij werd een fervent tegenstander van de jacht.’

Het eerste album waarin Hergé zich verzette tegen de opinie waarin mensen van eender welk ras worden beschouwd als ondermensen en ongedierte, is De Sigaren van de Farao. Kuifje raakt bevriend met een kudde olifanten, leert hun taal spreken en leeft in hun midden. De morele evolutie van Hergé groeide al in de tweede strip, Kuifje in Amerika [1932], dat eigenlijk Kuifje en de Indianen had moeten heten. Maar Hergé stond nog niet sterk genoeg in zijn schoenen om op te tornen tegen zijn promotor, abbé Norbert Wallez. Door hem heeft Hergé de Indianen naar het tweede plan verdrongen, om zich te focussen op de strijd van de Amerikaanse overheid tegen de maffia. Pas in de vijfde strip, De blauwe Lotus, daterend van 1936, wist Hergé zich los te maken uit de greep van Wallez. Dit album vormt één geheel met De sigaren van de Farao [1934] en toont een ommekeer die zich het sterkst uit in de vaart en stijl, humor en spanning. De veranderingen waren nog oppervlakkig – gericht op tienjarigen – en pas in De blauwe Lotus beginnen ze op te vallen voor de oudere en volwassen lezer.

Worden de Chinezen in de eerste strip nog getypeerd als gele primitieven, die er bij de minste weerstand jankend vandoor gaan, in de vijfde strip toont Hergé een grote betrokkenheid met de politieke toestand van China. De Japanse invasie en het terreurbewind, dat toen nog steeds woedde, zit niet eens diep verborgen in de filosofische aard van de strip. Hergé is volwassen geworden en wordt een vredesapostel, mede dankzij een student aan de kunstacademie van Brussel, Chang Chon Ren. Al zullen er nog enkele strips moeten volgen om de ethische omslag van Hergé even helder te maken als het water van Lake Tahoe.

De albums, van Het gebroken Oor [1937] tot en met De Zonnetempel [1946], worden nu eigenlijk thrillers. Toegegeven, in Het gebroken oor, De zwarte Rotsen [1938] en De Scepter van Ottokar [1939] zit wat antinazisme, maar Hergé blijft bevriend met de Waalse fascist Leon Degrelle, leider van Rex. Maar dat blijft binnenskamers, want het lucratieve zet hem aan tot voorzichtigheid. De verhalen zijn bovendien ingewikkeld, hij springt even slordig om met facts and figures als Dashiell Hammett in The Maltese Falcon van 1930.
Een andere slordigheid is de ‘geniale’ vondst van Hergé in De Zonnetempel. Aan het eind, schrijft Harry Thompson in zijn dubbelbiografie, komt Kuifje op het idee om gebruik te maken van de zonsverduistering waarover hij in de krant gelezen heeft. Hij redt het leven van Haddock en Zonnebloem en dat van zichzelf door op het moment suprême de zon opdracht te geven te verdwijnen. De Indianen zijn doodsbenauwd en weten niet wat hun overkomt. Als zonneaanbidders zouden de Inca’s in werkelijkheid alles geweten hebben over een mogelijke zonsverduistering. Deze onzorgvuldigheid hinderde Hergé, maar hij heeft er nooit wat aan gedaan, en de tweeledige reden hiervoor is te vinden in de volgende alinea.

Eén: kort na het begin van WO II raakte Hergé bevriend met Leopold III. Samen brachten zij al vissend en wandelend bijna dagelijks uren met elkaar door. Van elk album kreeg de koning – en later ook Boudewijn – een gesigneerd luxe-exemplaar. De vriendschap met de domste koning van België, de gestes en zijn Rex-verleden werden hem kwalijk genomen na de bevrijding. Op een haar na ontsnapte hij aan een veroordeling wegens collaboratie.
Twee: tijdens het maken van de strips die net vóór en tijdens WO II verschenen, kreeg Hergé te maken met een opstand in eigen rangen. Edgar P. Jacobs, de man van Blake en Mortimer, eiste dat zijn naam naast die van Hergé verscheen. Tenslotte verzorgde hij de decors, leverde grappen en schreef mee aan het plot. Hergé weigerde. Bob De Moor was de man van de details, wat hij voor het eerst bewees met De zwarte Rotsen. Voor de ‘verbeterde’ versie ervan reisde hij naar Engeland en maakte schetsen van de krijtrotsen, het huis van Dr. Müller, het station van Bishop’s Stortford. Hij reisde door naar het dorp Castlebay op het eiland Barra en naar Lochranza Castle op het eiland Arran. Vervolgens ging hij naar Edinburgh, om er een uniform van de Schotse politie te lenen. Ook hij vroeg een plaats, weliswaar niet op de kaft, maar wel in de colofon. Opnieuw weigerde Hergé. Hij wilde de opbrengst noch de eer met iemand anders delen. Kwam nog bij dat de eindredacteur en de uitgever van het weekblad Kuifje hem voortdurend de deadline onder de neus duwden. Hij kon het tempo niet meer aan. Hij wilde dit zelf bepalen, wat uiteindelijk leidde tot de stichting van Studio Hergé. Eindelijk was hij vrij. Hij zou helaas algauw ondervinden dat dit niet zo was.

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Het enige goede wat de groeiende spanning heeft opgeleverd, is de verschijning van nieuwe figuren. Er ontstaat een Kuifje-familie en -vriendenkring, met als voornaamste personages kapitein Haddock en professor Zonnebloem. Een bijkomende reden voor de creatie van de Kuifje-familie, als tegenhanger van de oplopende ruzies, is dat Hergé zich gaat ergeren aan Kuifje, tot hij zelfs een afkeer krijgt van zijn boyscout en diens poedel. Hij houdt dat echter voor zich, op paar intimi na, al komt de walg voor het eerst naar buiten met een open brief aan Kuifje, die hij voorleest op 21 juni 1964 in het Franse [niet Belgische!] radioprogramma Inter Variétés, en waarvan het meest betekenisvolle deel als volgt luidt:
‘Perfect… als iemand dat is, dan ben jij het wel, Kuifje. Ik zou daar erg blij moeten mee zijn, maar hoe komt het dat ik toch een beetje teleurgesteld ben? Ik had al mijn hoop op kapitein Haddock gevestigd. Doordat jullie zo veel tijd met elkaar doorbrachten kon hij zijn drankprobleem tot redelijke proporties terugschroeven en ik had gehoopt dat jij ook wel wat van zijn gewoonten zou overnemen. Maar jij nam geen enkele zwakheid van hem over.’

De interne ruzies, samen met een midlifecrisis en een uitgeblust huwelijk, zorgen ervoor dat hij last krijgt van zware depressies. Het werd hem allemaal wit voor de ogen en op 19 juni 1947 verdween hij spoorloos. Twee maanden later duikt hij weer op en begint hij aan wat zijn beroemdste strip in twee delen zal worden, Raket naar de Maan en Mannen op de Maan. Het succes hebben beide delen te danken aan de flinke dosis humor en aan het feit dat kapitein Haddock de hoofdrol speelt. Tot op de laatste pagina.
Maar ‘Kuifje’ was echte business geworden. Hergé werd rijk en hijzelf een wereldster. De beroemdheid bleef echter een blok aan het been, wat het aantal depressies maar deed toenemen. Het meeste werk voor Mannen op de Maan gebeurt dan ook door zijn trouwe tekenaar Bob De Moor. Het eerste deel verschijnt in 1953, het tweede deel in 1954. Daarna besluit hij het geweer van schouder te veranderen.

Van De zaak Zonnebloem [1956] tot twintig jaar later met Kuifje en de Picaro’s [1976], ruiken de strips eerder naar filmscenario’s dan naar het traditionele stripverhaal. Wat de verkoop deed stijgen, maar het werd een gewoonte: het succes hem deed vluchten. Voor de zoveelste maal naar wat hij beschouwt als het meest vredevolle en rustgevende land van Europa, Zwitserland. Het is niet toevallig dat het grootste deel van de actie in De zaak Zonnebloem zich in het land van de koeienbellen afspeelt. Langzaam wordt zichtbaar, ook voor de buitenwereld, dat alle strips samen een autobiografie zijn. Er zou echter nog één album volgen voordat zijn geestelijke toestand een dramatische wending neemt. Welbeschouwd is het een voorbode. In Cokes in Voorraad [1958] spelen alle figuren mee die Haddock het liefst uit de weg gaat. Niet alleen de opdringerige verzekeringsagent Serafijn Lampion, maar ook de ijdele sopraan Bianca Castafiore, het pestkind Abdallah, opperschurk Rastapopoulos, de corrupte generaal Alcazar, de superintrigant Dr. Müller, het gewetenloze politiehoofd Dawson… het lijkt wel een familiereünie.

Klap op de vuurpijl is dat Hergé een kast van een huis koopt, buiten Brussel maar gelegen op de route van menige wandel- en rallyclub. Wat hem in zulke mate ergerde, dat hij die afkeer weergeeft aan het slot van Cokes in voorraad, maar er tot zijn afgrijzen het tegenovergestelde effect mee bereikt. De clubs zagen het als een waardering voor hun interesse, en niet als een hint om uit zijn buurt weg te blijven. Hergé raakte bezeten van de gedachte dat hij noch thuis, noch op het werk veilig was voor opdringerige fans.
Hergé’s privéleven verslechterde. De afkeer voor zijn echtgenote was mede oorzaak van zijn verliefdheid op een nieuwe medewerkster, half zo oud als hij, Fanny Vlamynck. Maar het scoutsgevoel, samen met het katholiek gedachtengoed speelden hem hierbij parten. Verscheurd door schuldgevoelens kreeg Hergé weer last van verblindend witte nachtmerries. Hij consulteerde meerdere artsen, maar geen enkele bood een oplossing. Het leek erop dat Kuifje de enige was die aan dit probleem het hoofd kon bieden. En het probleem raakt opgelost… door Kuifje in Tibet, dat als album verscheen in 1960. Kuifje vertrekt naar Tibet om er zijn oude vriend, slachtoffer van een vliegtuigcrash in het Qingzang Plateau te redden. Iedereen verklaart dat er geen overlevende is, maar Kuifje heeft Chang om hulp horen roepen in zijn hoofd. Uiteindelijk blijkt hij gelijk te hebben en volgt er een happy end. Dit album refereert duidelijk naar de behoefte van Hergé om rust, wat inhoudt een verhaal zonder schurken, vuurwapens of geweld, en in een smetteloos decor.

De rust blijkt echter van korte duur te zijn, zelfs nadat de scheiding is uitgesproken, hij gaat samenwonen met Fanny en trouwt met haar in 1977. De rust in de studio is weergekeerd en de witte nachtmerries zijn verdwenen.
Technisch gezien wordt De Juwelen van Bianca Castafiore [1963] beschouwd als Hergé’s meesterwerk. Dat mag zo zijn, maar nog sterker dan Kuifje in Tibet, zegt De Juwelen van Bianca Castafiore meer over de auteur dan welk album ook. De afkeer voor zijn fans neemt toe en hij trekt zich terug uit het openbare leven. Genoeg gereisd. Hij wilde thuisblijven bij Fanny en de buitenwereld zoveel mogelijk ontwijken. Naar het album toe vertaald: het gehele verhaal speelt zich af binnen het domein van kasteel Molensloot. Er wordt geen stap buiten de poort gezet en Haddock wordt het absolute hoofdpersonage. Opnieuw naar de werkelijkheid: alle voorvallen in het verhaal, op dat van de papegaai na, zijn werkelijk gebeurd. Hergé had zo de pest aan de onbetrouwbare klusjesman, dat hij niet eens de moeite nam zijn naam te veranderen. Meneer Bollemans heet in de Franstalige versie gewoon monsieur Boullu. Aardig weetje: toen de Juwelen uitkwam, kreeg Hergé telefoon van een vrouw uit de buurt die wilde weten hoe ze monsieur Boullu kon bereiken. Hij had een veranda voor haar gemaakt die kort na zijn vertrek was ingestort.

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Toen dit album eenmaal was verschenen verklaarde Hergé dat er geen Kuifje meer zou volgen. Dat hield hij vier jaar vol, maar zijn geesteskind achtervolgde hem, wat leidde tot een nieuwe strip die als album verscheen in 1968: Vlucht 714.
Hergé was in topvorm. Artistiek gezien is dit zijn grootste prestatie. Door het gebruik maken van airbrush-technieken geeft Hergé een extra dimensie aan zijn kleurenspectrum en dat vindt zijn oorzaak in de tussenperiode waarin hij, ver van Kuifje, schilderde en zich verdiepte in de beeldende kunst, en bevriend raakte met figuren als Roy Lichtenstein en Andy Warhol, die trouwens een schilderij, annex zeefdruk, van hem zal maken. Bovendien bereikt de filmtechniek bij Hergé een hoogtepunt. Hij maakt meer dan ooit gebruik van de long shot en de close-up, waardoor het verhaal meer vaart krijgt en de karakters meer uitgediept worden. Het is duidelijk dat hij intens aan de strip heeft gewerkt, maar dat vroeg om moeilijkheden. Toen de strip klaar was, bekende hij aan een studiomedewerker, Michael Turner: ‘Ik moet niets meer van Kuifje hebben. Ik kan hem niet meer zíen!’ Toch zal er nog een album verschijnen, haast tien jaar later, Kuifje en de Picaro’s [1976].

Het eerste dat iedereen opviel was Kuifje’s outfit. In plaats van een pofbroek, draagt Kuifje een spijkerbroek. Voor de meerderheid van de fans stortte de wereld in. Hij rijdt bovendien met een brommer en had een Ban de Bom-teken op zijn helm. Kennelijk had Hergé alleen nog maar plezier in zijn werk als hij kon stoeien naar hartenlust en zijn personages vaak belachelijk maken. Zelfs de integere Nestor, van alle zonden vrij, speelt luistervink en zit stiekem aan de fles van kapitein Haddock. Zonnebloem is verstrooider ooit, hij zit met zijn badjas in zijn bad. Al met al is Kuifje en de Picaro’s een mat verhaal en slaat de vonk niet over bij de lezers. Maar ook bij Hergé, geholpen door zijn trouwe secondant Bob De Moor, is dat het geval. Aan het eind van het verhaal zegt Haddock: ‘Nou! Ik zal blij zijn als ik weer thuis zit, op Molensloot.’ De anders zo actieve Kuifje zegt: ‘Ik ook, kapitein.’ Tegen Bob De Moor zegt hij, eenmaal het album in de rekken ligt: ‘J’ai raconté tout.’ Samengevat: in dit laatste [afgewerkte] verhaal heeft het album iets weg van een finale, een laatste reünie, waarin zelfs de belangrijkste nevenfiguren even komen groeten: Alcazar, Serafijn Lampion, Bianca Castafiore, kolonel Sponz. De sterkste scène, waarin het hele geestelijke evolutieproces van Hergé samengebald zit, komt aan het eind. Generaal Alcazar heeft generaal Tapioca van de troon gestoten en de macht overgenomen, maar beiden kunnen niet wennen aan een staatsgreep zonder bloedvergieten.
Alcazar, de winnaar: ‘Geen sprake van fusilleren. Zijn leven wordt gespaard.’ De adjudant van Tapioca, de verliezer: ‘Maar generaal, dat druist tegen alle tradities in. Het volk zou teleurgesteld zijn.’ Tapioca, de verliezer, twijfelt aan de verstandelijk vermogens van Alcazar: ‘De kolonel heeft gelijk, generaal. Wees genadig en schenk mij geen genade! Wilt u mij soms onteren?’ Met het schaamrood op de wangen bekent Alcazar dat hij Kuifje heeft beloofd geen bloed te vergeten. Tapioca: ‘Ik snap ’t al: een idealist hè? Dat soort respecteert niets, helaas. Zelfs de oude tradities niet!’ Alcazar: ‘Ja, ’t is een droeve tijd.’

Toen Kuifje en de Picaro’s uitkwam was Hergé bijna zeventig. Zijn lichaam kon nog jaren mee, maar de wil om door te gaan was verdwenen. Toch zal hij nog een album tekenen. Hergé heeft in 1978 het idee om een strip te maken rond het kunstmilieu met zijn geldbeluste galerijhouders en verzamelaars, die van kunst de kl… kennen. Het verhaal zou een hoogtepunt en slot bereiken in wat totaal nieuw was: hij zou niet winnen maar verliezen. Hij wordt door een malafide kerel in vloeibaar polyester gegoten, zodat hij als kunstwerk voor het nageslacht bewaard blijft. Hergé is echter niet verder gekomen van pagina 42.
In 1980 kreeg hij van zijn artsen te horen dat hij leed aan een bijzondere vorm van leukemie. Zijn toestand ging met horten en stoten achteruit. Op 25 februari 1983 krijgt hij een longontsteking en raakt in coma. Hij werd naar het Brussels academisch ziekenhuis Saint-Luc gebracht, waar hij op 3 maart 1983 om 10 uur ’s avonds overleed. Hij was 75 jaar.

Bob de Moor wilde als eerbetoon het verhaal afwerken, maar hoewel Hergé geen instructies had nagelaten, had hij tien jaar voor zijn dood al gezegd: ‘Als ik er niet meer ben zal Kuifje er ook niet meer zijn. Kuifje is mijn schepping, mijn bloed, zweet en tranen.’ Zijn weduwe, Fanny Vlamynck heeft die wens gerespecteerd en zo is Kuifje overleden op dezelfde dag als Hergé.



* de datum, zoals ook verder, waarop de strip als album verscheen.
** Thompson, Harry; Tintin: Hergé and his Creation. London, 1991; Hodder and Stoughton.
Harry Thompson, Jaap van der Wijk; Hergé, Kuifje: een dubbelbiografie; 1991, Uitgeverij Balans / Kritak.

KUIFJE – Grand Palais, Parijs – te bezoeken tot januari 2017.

vendredi, 06 mai 2016

Hergé ou le voyageur immobile selon Francis Bergeron

Hergé ou le voyageur immobile selon Francis Bergeron

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mardi, 15 décembre 2015

L’œuvre d’Hergé: un parcours cyclique

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L’œuvre d’Hergé: un parcours cyclique

par Daniel COLOGNE

Scénariste de bande dessinée, déjà biographe d’Hergé dans la collection « Qui suis-je ? » des éditions Pardès, Francis Bergeron retrace à nouveau le parcours du créateur de Tintin dans un excellent ouvrage, Hergé, le voyageur immobile. Géopolitique et voyages de Tin, de son père Hergé, et de son confesseur l’abbé Wallez.

 

« Voyageur immobile », Hergé ne précède pas son héros dans les lieux où il l’envoie. Il se fonde sur une documentation parfois approximative. Par exemple, le Maroc du Crabe aux pinces d’or est fortement « algérianisé » (Louis Blin).

 

Hergé s’inspire de divers contextes géopolitiques : les tensions du Moyen-Orient (Tintin au pays de l’or noir), le conflit sino-japonais (Le Lotus bleu), l’Anschluss (Le Sceptre d’Ottokar), la guerre entre la Bolivie et le Paraguay rebaptisé San Theodoros et Nuevo Rico (L’Oreille cassée).

 

Parmi les 25 « prêtres, curés et moines » mentionnés par Francis Bergeron et gravitant dans l’entourage d’Hergé, l’abbé Norbert Wallez est le plus important. Ainsi sont justifiés le titre et le sous-titre d’un livre qui recueille ma totale adhésion dans le récit des phases ascendantes et descendantes du cycle créatif hergéen.

 

Georges Rémi naît à Bruxelles le 22 mai 1907. Dès l’âge de 15 ans, il publie ses premiers dessins dans des revues proches du scoutisme. Il fait ses études secondaires au Collège Saint-Boniface (banlieue Sud de Bruxelles). À l’époque, on désigne encore ce cycle d’enseignement par l’expression « les humanités ». Il prend très vite pour pseudonyme l’inversion phonétique de ses initiales. Il entre comme employé au quotidien Le Vingtième Siècle, que dirige l’abbé Wallez.

 

Le prêtre crée un supplément destiné à la jeunesse. Tintin apparaît en 1929 dans Le Petit Vingtième. Ses premières aventures l’entraînent « au pays des Soviets » et au Congo belge, colonie 80 fois plus étendue que sa métropole. Ce sont des albums commandés par l’abbé Wallez, anticommuniste virulent et chaud partisan de la présence belge en Afrique subsaharienne.

 

Le milieu d’où Hergé est issu cultive une vision où l’Occident catholique, l’Europe coloniale et la race blanche sont au centre du monde. Mais l’artiste s’émancipe peu à peu de cette tutelle et, dans Tintin en Amérique, il défend les Peaux-Rouges victimes des compagnies pétrolières.

 

Un des principaux mérites de Francis Bergeron est la mise en lumière des sources littéraires d’Hergé : en l’occurrence, l’indianiste Paul Coze.

 

Tintin s’embarque ensuite pour un périple à travers l’Égypte, l’Arabie, l’Inde et la Chine, à la façon d’un Albert Londres ou d’un Joseph Kessel, dans ces années 1930 qui constituent l’âge d’or de la profession de grand reporter.

 

Une autre inspiration d’Hergé, Henry de Montfreid, apparaît dans Les Cigales du Pharaon. Francis Bergeron rappelle opportunément l’influence d’un livre comme Les Secrets de la Mer Rouge sur l’imagination de plus en plus féconde d’Hergé.

 

L’auteur souligne aussi combien les intrigues demeurent peu structurées jusqu’au Lotus bleu, premier d’une série de chefs-d’œuvre. Le rôle de l’ami Tchang est bien connu et il convient plutôt d’épingler le magistère moins notoire du Père Neret, qui met Hergé en garde contre les idées fausses qui courent sur les Chinois.

 

Le scénario des albums suivants devient de plus en plus élaboré tandis que, dans L’Oreille cassée, Tintin rencontre l’ethnologue Ridgewell, qui a décidé de finir ses jours parmi les Arumbayas, tribu fétichiste perdue au fin fond de la jungle amazonienne.

 

Dans L’Étoile mystérieuse, Tintin entreprend une expédition polaire avec son nouvel ami le capitaine Haddock (rencontré dans Le Crabe aux pinces d’or) et une brochette de savants.

 

Ceux-ci ne composent qu’une infime partie de l’impressionnante quantité d’hommes de science que Tintin côtoie, qui pratiquent les disciplines les plus diverses et dont on peut regretter que Francis Bergeron ne les énumère pas dans l’une de ses intéressantes  annexes : Siclone, Fan Se Yang, Halambique, Ridgewell, Topolino, le brave professeur Tournesol et le méchant docteur Müller, les sept profanateurs du tombeau inca, Baxter et Wolff.

 

Sur ce dernier personnage, je m’autorise un désaccord avec l’auteur, mais je ne m’y attarde pas plus que sur l’erreur d’appellation du sosie sioniste de Tintin (Goldstein, et non Finkelstein, dans Tintin au pays de l’or noir).

 

Car ces points de détail sont dérisoires en comparaison du brio avec lequel Francis Bergeron nous amène à la période des « chefs-d’œuvre absolus » : les deux diptyques s’achevant par la découverte de deux trésors, celui de Rackham le Rouge et celui des Incas.

 

Vient ensuite pour Hergé le temps des épreuves : le ridicule harcèlement des épurateurs, la dépression nerveuse, la cure psychanalytique, les fissures de son couple, la rencontre d’une seconde épouse de 27 ans sa cadette et un sentiment de culpabilité, voire une obsession de la pureté perdue que d’aucuns décryptent dans Tintin au Tibet, « l’œuvre au blanc ».

 

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Les intrigues perdent de leur force. Benoît Peeters a beau avoir écrit un livre entier sur Les Bijoux de la Castafiore, force est d’admettre que le scénario est quasi inexistant. Au hasard d’une promenade, Tintin découvre un camp tzigane établi près du château de Moulinsart. Il se laisse bercer par les violons nostalgiques de ces nomades, qui ne sont pas « tous des voleurs », comme le prétendent stupidement les Dupondt. Hergé confirme que son itinéraire singulier est un plaidoyer pour une humanité plurielle. Tintin explore les diverses couches culturelles de l’Amérique précolombienne, se fait un excellent ami dans un émirat arabe, rend hommage à son adversaire japonais Mitsuhiroto qui préfère le suicide au déshonneur, laisse à toute une famille chinoise un souvenir gravé dans les cœurs « comme dans le cristal le plus pur ».

 

À partir de L’Affaire Tournesol, Hergé se laisse gagner par un désenchantement parallèle à un tarissement progressif de son inspiration. Tintin renvoie dos à dos les « bons » Syldaves d’autrefois et les « mauvais » Bordures de toujours, car les uns et les autres veulent s’approprier une invention du brave Tryphon à des fins guerrières. Il ne reconnaît plus son vieil ami Alcazar devenu, dans le très faible Tintin et les Picaros, aussi cupide que son sempiternel rival Tapioca.

 

Je suis moins indulgent que Francis Bergeron envers le diptyque lunaire de 1952 – 1953. Le rythme du récit et l’effort de « suspense » ne reposent que sur deux éléments : le chantage exercé sur Wolff (pour des dettes de jeu, et non pour un passé nazi) et l’intrusion d’un passager clandestin dans la fusée (Jorgen, alias Boris, malfaiteur récurrent déjà actif dans Le Sceptre d’Ottokar).

 

Mais je partage avec Francis Bergeron la perception des années 1943 – 1948 comme l’apogée du cycle créatif d’Hergé. L’artiste a 38 ans en 1945. Il est au milieu de son existence. Il mourra le 4 mars 1983. Le Secret de la Licorne et Le Trésor de Rackham le Rouge sont les onzième et douzième albums d’une œuvre qui en totalise 23.

 

Vainement cherché au large des Caraïbes, le trésor se trouve dans une mappemonde qui surmonte une statue de saint Jean. La découverte a lieu dans la crypte du château de Moulinsart. Loin de l’Église de Pierre chère à l’abbé Wallez, nous sommes aux portes de l’Église de Jean et de son ésotérisme qui évoquent plutôt certaines obédiences maçonniques.

 

Aux antipodes des préjugés catholiques, colonialistes et racistes de sa sphère d’origine, le message d’Hergé se résume en une scène d’anthologie extraite du Temple du Soleil.

 

Tintin vole au secours du petit Indien Zorrino brutalisé par d’odieux descendants des conquistadores. Huascar, grand prêtre inca, observe discrètement la scène. Il comprend que Tintin n’est pas un ennemi de sa race. Il lui donne un talisman protecteur avant de fomenter contre lui un attentat ferroviaire. La confrontation des cultures ne se fait pas sans violence, mais la fraternisation finale s’opère dans le climat chevaleresque du culte de la parole donnée. Le grand Inca fait cesser les souffrances des sept savants victimes de magie noire pour avoir violé la sépulture de Rascar Capac. De leur côté, Tintin, Haddock et Tournesol jurent de ne jamais dévoiler en Europe l’emplacement du Tempe du Soleil. Grâce soit rendue à Francis Bergeron de nous avoir fait revivre les aventures qui ont enchanté notre jeunesse.

 

Daniel Cologne

 

• Francis Bergeron, Hergé, le voyageur immobile. Géopolitique et voyages de Tin, de son père Hergé, et de son confesseur l’abbé Wallez, Atelier Fol’Fer (BP 20047, F – 28260 La Chaussée d’Ivry), 2015, 180 p., 16 € (+ 3,70 € de frais de port).


Article printed from Europe Maxima: http://www.europemaxima.com

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vendredi, 29 août 2014

TINTÍN-HERGÉ: UNA VIDA DEL SIGLO XX

TINTÍN-HERGÉ: UNA VIDA DEL SIGLO XX – Fernando Castillo

Ex: http://www.hislibris.com

«¡Por los bigotes de Plekszy-Gladz!»

Tintin-Herge-Fernadno-Castillo-biography.jpgInevitablemente una reseña como esta tiene un componente personal evidente. Como muchos tintinófilos (sin necesidad de caer en una cierta tintinolatría), me acerqué a los cómics de Hergé (Georges Remi, 1907-1983) en mi más tierna infancia. Lo curioso es que a día de hoy no poseo ni siquiera un ejemplar de los 23 álbumes publicados sobre las aventuras de Tintín (y eso si no contamos el 24º, Tintín y el Arte-Alfa, incompleto): siempre los he leído de prestado o in situ en bibliotecas de barrio o en librerías. No me preguntéis por qué nunca he tenido tal tentación (por eso no me acabo de considerar un tintinólatra); lo cierto es que nunca tuve la necesidad y si acaso he releído los diversos álbumes, sin orden ni concierto, ha sido, lo dicho, en bibliotecas o librerías.

No guardo un recuerdo especial de cuando fue la primera vez que un cómic de Tintín cayó en mis manos: debía de tener diez u once años, posiblemente fuera en la biblioteca del centro cívico de La Sedeta, un centro de enseñanza de la parte baja del barrio de Gràcia barcelonés, adonde acudía con algunos compañeros de clase al salir del colegio para echar unas canastas, chutar un balón de fútbol o, después, hacer los deberes de cada día. Siempre me sobraba un rato para leer cómics como los de Tintín, Astérix o el mítico Cavall Fort (los lectores catalanes de esta reseña que sean más o menos de mi edad recordarán este tebeo). Tintín siempre caía en uno de esos ratos; las relecturas fueron constantes, hasta el punto de que sus diálogos, en catalán (nunca me he acostumbrado a leer a Tintín en otra lengua que no fuera ésta), con los exabruptos del capitán Haddock, forman parte de mis recuerdos infantiles y juveniles.

Y no sólo los más que variopintos insultos y reniegos del capitán Archibald Haddock de la marina mercante, los comentarios más o menos simpáticos de Milú (que siempre me parecieron algo cargantes, aunque necesarios para comprender la peculiar relación con su amo) o las interjecciones de un joven Tintín (cómo olvidar su característico vatua l’olla! de las traducciones catalanas); también las andanzas de un reportero belga por todo el planeta, el evidente trasfondo histórico de las aventuras del personaje y, cómo no, personajes secundarios como los inefables Dupond y Dupont (Hernández y Fernández en la traducción castellana), el despistado profesor Tornasol, el insufrible Serafín Latón (Serafí Llantió para los lectores catalanes), el general Alcázar, el mayordomo Néstor o la peculiar Bianca Castafiore, el Ruiseñor de Milán (y su eterna interpretación del «Aria de las Joyas» del Fausto de Charles Gounod, «¡Ah, me río de verme tan bella en el cristal!»). Y sin olvidar a villanos y malvados como Rastapopoulos, Allan Thompson, el doctor Müller o el coronel Spönz. Y países imaginarios como Syldavia (que depende de la época en que se escribieron los álbumes era una tradicional Bélgica o una mitificada Austria) y Borduria (por las mismas razones, o bien la Alemania nazi o la Rusia soviética). Porque todo ello forma parte de un universo, el tintinesco, creado por Hergé y cuya primera presentación en sociedad, Tintín en el país de los Soviets fue en 1929. Hasta 1976 y Tintín y los ‘Pícaros’, Hergé publicó periódicamente los 23 volúmenes por todos conocidos, primero en Le Petit Vingtième, el suplemento infantil del diario católico belga Le Vingtième Siècle, luego en el rotativo Le Soir (durante los años de la Segunda Guerra Mundial) y, ya desde los años cincuenta, en los Estudios Hergé (publicados por Casterman, Editorial Juventud para las ediciones castellana y catalana).

En esta evolución cronológica, Hergé fue ganando autonomía e independencia, y de todo ello se refleja la propia evolución de Tintín y los diversos personajes: de un Tintín con rasgos y actitudes demasiado juveniles por no decir infantiles (y no sólo en el físico, sino también en la actitud moral e ideológica), que denota un anticomunismo de raíz católica y un colonialismo a la europea, pasamos ya en la década de los años treinta al Tintín que se enfrenta al autoritarismo de tono fascista de países como Borduria (id est, la Alemania nazi) y al Tintín de los años cuarenta de la Bélgica ocupada que trata de no meterse en política; y al Tintín de los años cincuenta y sesenta, el más maduro, el que ya no es periodista activo pero que tiene como telón de fondo la Guerra Fría, los antecedentes de la carrera espacial (pisando la luna quince años antes que Armstrong y con un detallismo técnico que sorprende por su casi perfección), las aventuras con ovnis y el retorno a la América de guerrilleros como el general Alcázar. No en balde la evolución de Tintín y de su universo es también la del propio Hergé, que poco a poco se fue liberando del proteccionismo del abate Wallez (que no habría que considerar un fascista sin más, como se lee por ahí, sino un conservador católico bastante radical), director de Le Vingtième Siècle. La relación de amistad de Hergé con el líder fascista belga Léon Degrelle le puso en la picota tras la guerra, así como su relativo colaboracionismo con las autoridades alemanas que ocuparon Bélgica entre 1940 y 1944. En cierto modo Hergé tuvo que pasar por un proceso de «desfastización» por el modo en que sus cómics expresaron con tibieza las relaciones con un país colaborador como Alemania, aunque lo cierto es que Hergé no se destacó realmente en mostrar un apego con la Alemania nazi. Creciendo ideológicamente, dentro de un cierto y sempiterno conservadurismo, Hergé (y Tintín) pasaron a mostrarse como adalides de una cierta manera de ver el mundo, siempre opuesto a las tiranías totalitarias o a democracias capitalistas exacerbadas como los Estados Unidos, siendo Bélgica (o Syldavia en la etapa central de la obra tintinesca) el escenario de una cierta neutralidad, o quizá un cierto distanciamiento respecto la política de bloques. Así, en el díptico sobre el viaje lunar –Objetivo: la Luna y Aterrizaje en la Luna, 1953-1954– y, especialmente, en El asunto Tornasol (1956), Hergé se distancia incluso de su propio país imaginario, Syldavia, que puede ser asimilado a unos Estados Unidos que nunca le gustaron, enfrentados a Borduria/la URSS ya sea por la carrera espacial o por la creación de armas de destrucción masiva (léase la bomba atómica). Los años sesenta nos presentan a un Hergé (y un Tintín) que se alejan de la política internacional, que se relajan incluso en la imitación de una opereta (Las joyas de la Castafiore), para regresar ya en los años finales de la década a la aventura con toques paranormales (Vuelo 714 a Sídney) o a la guerrilla latinoamericana (Tintín y los ‘Pícaros’) a mediados de los años setenta, momento en el que Tintín se ha despedido de nosotros, sin anunciarlo, por no hablar de un Hergé que trabajará en los primeros años ochenta en un álbum (Tintín y el Arte-Alfa) que no llegará a ver publicado.

De todo ello, y ya es hora de comentarlo, trata Tintín-Hergé: una vida del siglo XX (Fórcola) de Fernando Castillo, libro recién publicado y que supone una reedición, aumentada y mejorada, de una obra anterior, El siglo de Tintín (Páginas de Espuma, 2004). Todo lo anteriormente escrito no deja de ser un resumen personal de este libro, una auténtica joya para tintinófilos y tintinólatras de todo pelaje. Pues no sólo seguimos la historia de la creación de un personaje (y la biografía de su creador), sino que, como el subtítulo del libro reza, también estamos ante un viaje al siglo XX, entre 1929 y 1976 para ser exactos, en el que Tintín (y Hergé) son el doble eje sobre el que gira un universo de un cómic y de la época en el que fue escrito. Castillo, gran conocedor del personaje, ajeno a polémicas y endiabladamente ameno en su manera de contarnos una particular historia del (medio) siglo XX, nos cuenta los pormenores de cada álbum, la aparición de los diversos personajes y el cariz ideológico que subyace en cada volumen, que, como ya hemos comentado, es muy dependiente de los años en que fue escrito. Y todo ello provocando la sonrisa cómplice de todo tintinófilo (y tintinólatra) que se precie. Incluso planteándose qué habría sido de Tintín en la actualidad:

«Tras haber desaparecido Tintín en los últimos años de la década de los setenta, y muerto Hergé a principios de los ochenta, a las puertas de producirse una serie de acontecimientos que van a determinar el final de una época, ¿cómo no vamos a imaginar qué hubiese dicho y hecho el periodista al respecto en los últimos años? ¿Qué hubiera pensado del fin de la Unión Soviética y del comunismo o de la nueva crisis de los Balcanes? ¿Cómo hubiera reaccionado ante los ordenadores e Internet? ¿Qué escenarios habría recorrido ahora que la sociedad global ha acabado con todo exotismo? ¿Cómo hubiera contemplado el terrorismo generalizado que azota a las sociedades actuales o el fundamentalismo islámico? ¿Qué diría de la emigración y del narcotráfico? ¿Habríamos podido ver alguna aventura del periodista en alguno de los escenarios que han caracterizado a los años posteriores a su desaparición? ¿Qué nuevas poéticas habrían surgido?» (p. 299)

Nosotros también nos lo preguntamos. Y probablemente habríamos concluido con la frase que el propio Hergé le dedicó a su personaje en una carta radiada en junio de 1964: «¡Salud, muchacho! Yo diría aún más: ¡Salud!».

mercredi, 11 décembre 2013

Tintin au pays du Lotus bleu

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TINTIN AU PAYS DU LOTUS BLEU
 
L’ œuvre d’Hergé décryptée


Rémy Valat
Ex: http://metamag.fr

Le Lotus bleu (ou Les aventures de Tintin, reporter, en Extrême-Orient) est l’un des premiers albums écrits par Georges Rémi (dit Hergé, 1907-1983) : la première édition est parue par épisode dans la revue du Petit Vingtième entre le 2 août 1934 et le 17 octobre 1935. 


Cette publication originelle de 126 planches noir et blanc a été mise en couleur en 1946, c’est la version actuelle, la plus connue de cette bande dessinée. À la différence de ses premières réalisations, et en particulier Tintin au Congo où abondes poncifs et préjugés, Georges Rémi a fait pour cet album un réel effort documentaire. Grâce à trois prêtres, le père Wallez, qui assurait la parution du supplément pour la jeunesse du Petit Vingtième, l’abbé Gosset, aumônier des étudiants chinois de Louvain et le père Neut, ancien secrétaire d’un ministre de Sun Yat-Sen, devenu moine à l’abbaye de Saint-André (près de Bruges), Hergé va s’informer sur les traditions et la société chinoises. Par l’intermédiaire du second, il fait la connaissance d’un étudiant de Shangaï du même âge que lui, inscrit aux Beaux-Arts de Bruxelles et issu d’une famille catholique : Tchang Tchong-Jen. Tchang va initier le dessinateur belge à la culture de son pays et lui esquisser des décors et des environnements détaillés pour servir de cadre visuel aux futures planches. Cette rencontre a eu un impact sur le scénario qui se déroulera à Shangaï, ville de Tchang Tchong-Jen ; et c’est en hommage à son collaborateur chinois que Georges Rémi baptise l’un des principaux héros de l’aventure :  « Tchang ». 

L’univers et le contexte historique du Lotus Bleu relève du reportage, ce qui explique en partie son succès : l’atmosphère de Shangaï, siège des concessions américaines et européennes (Britanniques et Françaises), est plus vraie que nature avec ses ruelles encombrées et ses fumeries d’opium (plus de 1 700 établissements), dont on connaît la tragique histoire : une drogue meurtrière, sous contrôle des puissances coloniales et ayant fait des ravages dans la population (entre 25 et 100 millions de toxicomanes, 5 à 20% de la population au XIXe siècle) ; ce marché lucratif a été imposé par la force : les guerres de l’opium ; il sera interdit en 1908, mais des trafics et des fumeries illicites perduraient encore à l’époque de Tintin.

La bande dessinée a été écrite au moment où le Japon amorce son expansion territoriale en Chine : Hergé relate l’incident de Moukden (18 septembre 1931) : le sabotage de la voie ferrée perpétré par les Japonais, lesquels en attribue la responsabilité au gouvernement chinois pour servir de prétexte à l’invasion de la Mandchourie. Mais l’auteur situe l’affaire dans les environs de Shangaï par souci de cohérence avec l’unité géographique de l’album. Georges Rémi prend parti contre Tôkyô et ne modifiera pas une bulle de son scénario, malgré les protestations japonaises.


 Les œuvres d’Hergé ont été étudiées sous toutes leurs coutures par de nombreux auteurs. Ces recherches ne sont pas sans rappeler Les mémoires de Corto Maltese : décryptage de l’univers historico-symbolique de Corto, imaginé et mis en scène par Hugo Pratt (Hugo Pratt est décédé en 1995 ; les Mémoires ont été éditées en 1998) : Corto séjourne en Chine à l’époque des Seigneurs de la Guerre (Corto Maltèse en Sibérie). 


Patrick Mérand, un éditeur tintinophile et Li Xiaohan, une doctorante chinoise qui vit en France, nous offre une traduction des idéophonogrammes et un commentaire instructif et concis sur le contexte historique et culturel du Lotus Bleu. Les auteurs, outre leurs connaissances linguistiques, ont exhumé des photographies d’époque, dont certaines ont servi de document de travail à Hergé. Le Lotus Bleu décrypté est un livre instructif (centré sur la traduction des idéophonogrammes chinois) et sa lecture un moyen plaisant de (re)découvrir la Chine des années 1930. Il est vivement conseillé de procéder à une lecture en parallèle avec la bande dessinée originale. 

Patrick Mérand et Li Xiaohan, Le Lotus Bleu décrypté, éditions Sepia.

lundi, 04 novembre 2013

Het jongste Kuifje is Schots

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Het jongste Kuifje is Schots

Ex: nieuwsbrief / Deltastichting, Nr. 76, Oktober 2013
 
Europa is pluriformiteit, is een veelheid, een lappendeken van talen, culturen, dialecten, ondergroepen, tussengroepen – en conflicten. Een aantal van die lokale culturen, die in vorige eeuwen in een groter, multicultureel geheel waren ondergebracht, en dat bijna moesten bekopen met het verdwijnen van hun eigen cultuur en taal, zijn duidelijk aan een hergeboorte, aan een renaissance begonnen: we denken aan de Catalanen, aan de Schotten, aan de Zuid-Tirolers. En laat ons daar maar voor het gemak ook de Zuid-Nederlanders, de Vlamingen bij rekenen.

Dat nieuwe culturele, economische en dus ook politieke zelfbewustzijn laat zich soms zien op de meest eigenaardige plaatsen. In stripland bijvoorbeeld. De avonturen van Kuifje, de stripheld van Hergé, en tevens een van de mooiste en schitterendste voorbeelden van de “klare lijn”, werden gepubliceerd in meer dan 70 talen. In totaal werden er meer dan 200 miljoen exemplaren van verkocht.  Maar voor de eerste keer werden woorden als “caw cannie” (wees voorzichtig), “haud yer wheesht” (wees stil) en “help ma boab” (goeie hemel!), woorden en uitdrukkingen uit het Schots-Engelse dialect, in een album opgenomen. De vertaling van “De Zwarte Rotsen” werd verzorgd door Susan Rennie, Kelvin Smith Research Fellow aan de universiteit van Glasgow, die het boek vertaalde uit de originele taal, het Frans.  Het werd dus “The Derk Isle”.

De vertaling werd voorgesteld samen met een nieuwe uitgave van de Gaelicversie, “An t-Eilean Dubh”. Het hondje, Milou in het Frans, werd Bobbie in het Nederlands, Terry in het Deens en het Noors en Tobbi in het Ijslands. Voor het Schots koos de vertaler voor het woord Tarrie. En natuurlijk doen ook de detectives mee, de “twa glaikit detetives Nisbet an Nesbit”.

Het stripalbum begint alvast zo: “Tintin an his faithfu dug, Tarrie, are on the trail o an international gang o conterfaiters. Forby, they themsels are bein follaed by the twa glaikit detectives Nisbet an Nesbit”.  Wie het luidop leest, zal geen énkel probleem ondervinden om het Schots-Engels te begrijpen.
 
Peter Logghe

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lundi, 01 avril 2013

Le témoignage du neveu d'Hergé

Le témoignage du neveu d'Hergé

Herge16-171.jpgLe témoignage de George Rémi JUNIOR, le neveu d'Hergé, fils de son frère cadet, un militaire haut en couleur, cavalier insigne, auteur d'un manuel du parfait cavalier, est poignant, non seulement parce qu'il nous révèle un Hergé "privé", différent de celui vendu par "Moulinsart", mais aussi parce qu'il révèle bien des aspects d'une Belgique totalement révolue: sévérité de l'enseignement, difficulté pour un jeune original de se faire valoir dans son milieu parental, sauf s'il persévère dans sa volonté d'originalité (comme ce fut le cas...).

Sait-on notamment que le père de George Rémi junior avait été chargé d'entraîner les troupes belges à la veille de l'indépendance congolaise? Et qu'il a flanqué des officiers américains et onusiens, manu militari, à la porte de son camp qui devait être rendu aux Congolais au nom des grands principes de la décolonisation?

Le témoignage du fils rebelle, opposé à son père, se mue en une tendresse magnifique quand la mort rôde et va emporter la vie du fringant officier de cavalerie, assagi par l'âge et heureux que son fiston soit devenu un peintre de marines reconnus et apprécié. George Rémi Junior n'est pas tendre pour son oncle, certes, mais il avoue toute de même, à demi mot, qu'il en a fait voir des vertes et des pas mûres au créateur de Tintin.

Mais l'homme qui en prend plein son grade, dans ce témoignagne, n'est pas tant Hergé: c'est plutôt l'héritier du formidable empire hergéen, l'époux de la seconde épouse d'Hergé. George Rémi Junior entre dans de véritables fureurs de Capitaine Haddock quand il évoque cette figure qui, quoi qu'on en pense, gère toute de même bien certains aspects de l'héritage hergéen, avec malheureusement, une propension à froisser cruellement des amis sincères de l'oeuvre de George Rémi Senior comme le sculpteur Aroutcheff, Stéphane Steeman (qui a couché ses griefs sur le papier...), les Amis d'Hergé et leur sympathique revue semestrielle. Dommage et navrant: une gestion collégiale de l'héritage par tous ceux qui ne veulent en rien altérer la ligne claire et surtout le message moral qui se profile derrière le héros de papier aurait été bien plus profitable à tous...

George Rémi Junior rend aussi justice à Germaine Kiekens, la première épouse, l'ancienne secrétaire de l'Abbé Wallez, directeur du quotidien catholique "Le Vingtième Siècle", là tout avait commencé...

(RS)

George Rémi Jr, Un oncle nommé Hergé, Ed. Archipel, Paris, 2013 (Préface de Stéphane Steeman).

dimanche, 12 février 2012

"Tintin au Congo" ne sera pas interdit

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"Tintin au Congo" ne sera pas interdit

BRUXELLES (NOVOpress) – La justice belge vient de refuser d’interdire la commercialisation de la bande dessinée « Tintin au Congo ». Les exigences de Mbutu Mondondo, un ressortissant congolais, et du Conseil représentatif des associations noires (Cran), ont été déclarées non fondées. Le tribunal a estimé que l’éditeur Casterman, et Moulinsart, la société ayant les droits commerciaux de l’œuvre d’Hergé autres que les droits d’édition, ne s’étaient pas rendus coupables d’infraction à loi de 1981 visant à réprimer certains actes inspirés par le racisme et la xénophobie.

Selon Mbutu Mondondo, « Tintin au Congo » est une « BD raciste, qui fait l’apologie de la colonisation et de la supériorité de la race blanche sur la race noire ». Pour Alain Berenboom, représentant de Casterman et de Moulinsart, cette œuvre n’est « pas du racisme mais du paternalisme gentil ». « Tintin au Congo » reste aujourd’hui l’un des albums de la série les plus vendus au monde. Il continuera donc à enthousiasmer petits et grands, à la grande fureur des tenants du politiquement correct.

http://fr.novopress.info/107927/tintin-au-congo-ne-sera-pas-interdit/

lundi, 21 novembre 2011

Un affront fait à Hergé!

Un affront fait à Hergé

Lu dans “La Tribune de Genève”, le 3 novembre 2011:

TINTIN-affiche-film-spielberg.jpg“Neuchâtel, 26 octobre.

A propos des aventures de Tintin au cinéma

Ce Tintin version Hollywood contredit la technique de la ligne claire des albums. On est bien loin de la bande dessinée. Tintin, Haddock, les Dupond/t n’ont aucune ressemblance avec les personnages originaux. C’est un affront à Hergé. Ce Tintin, c’est une version à l’américaine, faite par un Américain, ça n’a rien à voir avec des bandes dessinées. C’est une question d’argent pour Spielberg, un point c’est tout! Pauvre Tintin”.

Michel Roy.

lundi, 03 octobre 2011

Hergé, notre copain

Hergé, notre copain





dimanche, 02 octobre 2011

Francis Bergeron: Qui est Hergé?

Francis Bergeron: Qui est Hergé?



dimanche, 24 octobre 2010

Hergé (1907-1983) et la tradition utopique européenne

Hergé (1907-1983) et la tradition utopique européenne

 
Par Daniel Cologne  
 
 

HergéGeorges Remi (devenu Hergé par inversion des initiales) est né à Etterbeek (Bruxelles) le 22 mai 1907 à 7h30. Il aimait à rappeler cette naissance sous le signe des Gémeaux (1). Peut-être explique-t-elle la récurrence du thème de la gémellité dans ses albums (les DupontDupond, les frères Halambique, etc.).

 

Il est également vrai que son père avait un frère jumeau. L’horoscope serait-il sans importance ? Rien n’est moins sûr. Remarquons-y la culmination exacte de Saturne (conjoint au Milieu du Ciel à 25°38’ des Poissons), statistiquement en relation avec un grand intérêt pour les savants et la science lato sensu (2).

Hergé grandit et évolue dans un milieu catholique, belgicain, fascisant et colonialiste. Tintin au Congo exalte la politique paternaliste de la Belgique en Afrique centrale. Les albums situés « au pays des soviets » et en Amérique renvoient dos à dos le communisme totalitaire et la frénésie capitaliste de l’exploitation industrielle.

Mais dès 1934, Hergé élargit sa perspective tandis que Tintin fait route vers l’Orient.

Dans Les Cigares du Pharaon, le professeur Philémon Siclone inaugure la galerie des portraits d’hommes de connaissance. Ceux-ci sont égyptologue, sigillographe (Halambique dans Le Sceptre d’Ottokar), ethnologue (Ridgewell dans L’Oreille cassée), psychiatre (Fan Se Yeng dans Le Lotus bleu), physicien (Topolino dans L’Affaire Tournesol). Quant à Tournesol lui-même, qui devient un personnage récurrent à partir du Trésor de Rackham le Rouge, il s’intéresse autant à la culture des roses (Les Bijoux de la Castafiore) qu’aux techniques de falsification de l’essence (Tintin au pays de l’or noir).

L’Île Noire envoie Tintin au large des côtes écossaises. Dans un château en ruines sévit une bande de faux-monnayeurs. La succession de symboles est évidente. Cet album de 1937 offre la contrefaçon de l’utopie insulaire, vieux thème de la littérature européenne de l’Atlantide platonicienne à sa version modernisée de Francis Bacon (1561-1626), de « l’île blanche » des Hyperboréens à la Cité du Soleil de Tommaso Campanella (1568-1639).

Au Moyen Âge, dans les récits du cycle du Graal, le château se substitue à l’île comme lieu utopique et objet de la quête.

Les premiers dessins d’Hergé paraissent dans le quotidien bruxellois Vingtième Siècle dirigé par l’abbé Wallez. Mais en 1936, l’hebdomadaire parisien Cœurs Vaillants sollicite Hergé pour la création de nouveaux personnages : Jo, Zette et leur petit singe Jocko.

Dans ces nouvelles aventures se confirment à la fois les influences de la tradition utopique européenne, les préfigurations thématiques des chefs d’œuvre futurs et la volonté d’Hergé d’en finir au préalable avec les contrefaçons.

Jo et Zette sont confrontés à des pirates qui annoncent les flibustiers du Secret de la Licorne et dont le repaire sous-marin renvoie aux motifs de l’utopie et de la contre-utopie souterraines. Le chef des pirates est un savant fou, reflet inversé du scientifique inspirant au saturnien Hergé un indéfectible respect. Les deux enfants et leur singe sont finalement recueillis sur une île par de « bons sauvages », réminiscences de Bernardin de Saint-Pierre (1737-1814). Le jeune Hergé n’est-il pas aussi l’auteur d’un Popol et Virginie chez les Lapinos, bande dessinée animalière dont le titre rappelle l’œuvre maîtresse du célèbre écrivain préromantique ?

La question des sources littéraires d’Hergé demeure controversée. Benoît Peeters estime par exemple excessifs les rapprochements qui ont été faits entre Jules Verne et Hergé.

Il n’en reste pas moins que le savant fou de la contre-utopie du fond des mers mène ses expériences dans sa cité-laboratoire à la manière de Mathias Sandorf dans son île utopique.

Dès 1942, au cœur du « combat de la couleur » (3), Hergé reçoit l’assistance d’Edgar-Pierre Jacobs pour le coloriage de ses albums antérieurs conçus en noir et blanc.

Lorsque Tintin devient un hebdomadaire en 1946, la collaboration de Jacobs s’avère précieuse. Les aventures de Blake et Mortimer reprennent le thème du savant fou (Septimus dans La Marque jaune), parfois récurrent (Miloch dans S.O.S. Météores et Le Piège Diabolique), le tandem Septimus-Miloch s’opposant par ailleurs au savant idéal que constitue le professeur Mortimer.

Parmi les autres collaborateurs du journal Tintin d’après-guerre, Raymond Macherot combine la bande dessinée animalière et l’utopie. Dans Les Croquillards, Chlorophylle et son ami Minimum parviennent à dos de cigogne dans l’île australe de Coquefredouille, où les animaux parlent comme les humains, circulent dans des voitures qui fonctionnent à l’alcool de menthe et sont organisés en une société idéale jusqu’à l’arrivée d’Anthracite, le rat noir perturbateur.

Chlorophylle et Minimum forment un couple inséparable, comme Tintin et le capitaine Haddock à partir du Crabe aux pinces d’or (1941). Chlorophylle rétablit le roi Mitron sur son trône de Coquefredouille de la même façon que Tintin restaure la monarchie syldave dans Le Sceptre d’Ottokar (1938).

La Syldavie est la principale utopie d’Hergé. Avant la guerre, elle n’est encore qu’un petit royaume d’Europe centrale reposant sur des traditions agricoles et menacée par des conspirateurs au service de la Bordurie voisine. L’Allemagne hitlérienne vient d’annexer l’Autriche. Comme pour la guerre entre le Paraguay et la Bolivie (devenus San Theodoros et Nuevo Rico dans L’Oreille cassée), Hergé s’inspire de l’actualité.

Trop perméable à « l’air du temps », Hergé se rend coupable de quelques dérapages dans L’Étoile mystérieuse (1942). Cet album nous interpelle surtout parce qu’il narre une sorte de navigation initiatique (4), à la manière du mythe grec de Jason et des Argonautes, vers une forme d’« île au trésor » (5). L’aérolithe qui s’abîme dans les flots arctiques recèle un métal inconnu sur Terre. Ce métal est la « Toison d’Or » découverte par Tintin, Haddock et leurs amis savants européens au terme d’une course qui les oppose à des Américains sans scrupules.

Onzième album dans une série de vingt-deux, en position centrale dans le corpus hergéen des aventures de Tintin, Le Trésor de Rackham le Rouge synthétise les thèmes utopiques de l’île, du château et du souterrain. Conçu en 1944, cet album met en scène une navigation infructueuse vers une île lointaine et la découverte finale du trésor dans la crypte du château de Moulinsart, et très précisément dans une mappemonde surmontée d’une statue de l’apôtre Jean. L’Apocalypse de Jean comporte vingt-deux chapitres. Cette apparente influence ésotérique sur Hergé est-elle due à la fréquentation de Jacques Van Melkebeke, initié à la Franc-Maçonnerie en 1937 ? Benoît Peeters en paraît convaincu (6).

Une chose est certaine : l’incontestable érudition littéraire de Van Melkebeke autorise à reposer le problème des sources d’Hergé, sur lesquelles le créateur de Tintin a peut-être été trop modeste (7).

Si l’île et le château sont deux thèmes majeurs de la tradition utopique européenne, l’un apparaît en filigrane de l’autre dans Le Grand Meaulnes d’Alain Fournier (1886-1914), dont aucun biographe d’Hergé ne signale l’influence. Le château des Galais est l’objet de la quête de Meaulnes. Le récit est criblé d’images marines. Alain-Fournier rêvait de devenir navigateur et a raté le concours d’admission à l’École Navale de Brest. La casquette à ancre de Frantz de Galais fait penser à celle du capitaine Haddock.

C’est avec des métaphores marines que Charles Péguy (1873-1914) présente sa région de la Beauce à Notre-Dame de Chartres, illustre vaisseau de l’architecture gothique. Péguy est un ami d’Alain-Fournier, originaire de Sologne, de l’autre côté de la Loire. Péguy est le chantre de la « cité harmonieuse » dont « personne ne doit être exclu ». Péguy est l’écrivain de référence des milieux catholiques des années vingt. L’ambiance intellectuelle où baigne le jeune Georges Remi et certains leitmotive de l’œuvre d’Hergé invitent à l’hypothèse d’une influence de Péguy et d’Alain-Fournier (8) sur le créateur de Tintin.

L’utopie souterraine apparaît dans la littérature européenne au XVIIe siècle avec l’Anglaise Margaret Cavendish (9) et dans l’œuvre d’Hergé dans l’immédiat après-guerre avec Le Temple du Soleil.

C’est en réalité la seconde partie d’un diptyque commencé avec Les Sept Boules de cristal, où l’on retrouve, comme dans L’Étoile mystérieuse, une expédition de sept savants, dont l’américaniste Bergamotte, spécialiste ès sciences occultes de l’ancien Pérou.

Cachée dans les contreforts des montagnes andines, la cité des Incas est atteinte après la périlleuse traversée d’une forêt. Le thème de l’épreuve forestière fait écho aux romans du Graal et à certains contes de Perrault (1628-1703), comme La Belle au bois dormant, dont une version est également fournie par Grimm (1786-1859).

Certes, les Incas punissent le sacrilège de mort et leur science n’est pas, sous le crayon d’Hergé, assez évoluée pour prévoir une éclipse solaire. Néanmoins, leur cité souterraine, qui abrite un trésor dérobé aux regards rapaces des conquistadores, est une sorte d’utopie dans la mesure où l’on y cultive les valeurs chevaleresques, le respect de la parole donnée, la réconciliation et la fraternisation avec l’adversaire. Au début de l’aventure, Tintin défend un petit Indien persécuté par d’odieux colons espagnols. Le grand prêtre inca observe en cachette la scène. Il comprend que Tintin n’est pas un ennemi de sa race. Bien qu’il soit chargé de barrer à Tintin la route du repaire montagnard, il lui offre un talisman protecteur.

Selon Raymond Trousson, l’étymologie du mot « utopie » est incertaine. Le terme vient du grec. Mais la racine est-elle ou-topos (le pays de nulle part) ou bien eu-topos (l’endroit où on est bien) ? L’œuvre d’Hergé est utopique dans les deux acceptions du vocable. Le château de Moulinsart est une « eutopie ». L’île au trésor inaccessible est une « outopie », cette terra australis dont ont rêvé de nombreux écrivains d’Europe, de Thomas More (1478-1535) à Nicolas Restif de la Bretonne (1734-1806).

L’utopie souterraine est conçue par Hergé comme une cité de la science (10), cachée dans les montagnes de Syldavie. De là part l’expédition vers le satellite de la Terre dans le célèbre diptyque du début des années cinquante : Objectif Lune et On a marché sur la Lune. Ainsi modernisée, la Syldavie refait irruption dans l’univers hergéen. Un savant-traître ne peut pas être totalement mauvais. Pour permettre aux autres occupants de la fusée d’économiser l’oxygène et de revenir sur Terre vivants, Wolff se sacrifie en se jetant dans le vide. Le suicide de Wolff est une autre forme de l’hommage d’Hergé à la science et aux savants.

La Syldavie apparaît une dernière fois dans L’Affaire Tournesol (1956). Pour Hergé commence l’époque du désenchantement, du brouillage des repères, de la progressive indistinction des valeurs. Les services secrets syldaves et bordures sont renvoyés dos à dos, comme le sont, dans Tintin et les Picaros (1974), les deux généraux de San Theodoros, le vieil ami Alcazar et son rival Tapioca.

Certes, entre-temps, il y a encore Tintin au Tibet (1960), Vol 714 pour Sydney (1968), où Hergé fait une concession à la mode « ufologique » (hypothèse des visiteurs extra-terrestres) et Les Bijoux de la Castafiore (1963), où Tintin se laisse enchanter par des airs de musique tzigane et où le château utopique de Moulinsart offre une étonnante unité de lieu. Les Tziganes sont accueillis dans le domaine, car ils ne sont pas « tous des voleurs », comme l’affirment stupidement les Dupont-Dupond.

L’esprit européen d’Hergé réside dans le mélange de fascination du savoir et de culte des vertus chevaleresques. Il faut y ajouter l’ouverture à l’Autre, malgré les bavures de la période d’occupation nazie. Car une question mérite d’être posée : le malencontreux financier juif de L’Étoile mystérieuse pèse-t-il si lourd au point de contrebalancer à lui seul la défense des Peaux-Rouges chassés de leur territoire pétrolifère, le secours porté au tireur de pousse-pousse chinois, au petit Zorrino et aux Noirs esclaves de Coke en Stock, la nuance admirative qui accompagne le commentaire de Tintin devant le seppuku du « rude coquin » Mitsuhirato, le plaidoyer pour les « gens du voyage » et leurs violons nostalgiques ?

Si nous sommes avec Benoît Peeters d’« éternels fils de Tintin », c’est parce que nous sommes des Européens capables de nous laisser bercer par des chants tziganes montant des clairières proches de Moulinsart et de toutes les forêts abritant nos châteaux de rêve.

Notes

1 : Benoît Peeters, Hergé. fils de Tintin, Paris, Flammarion, collection « Grandes Biographies », 2002, p. 26.

2 : Michel Gauquelin (1920-1991), Le Dossier des influences cosmiques, Éditions J’ai lu, 1973, et Les Personnalités planétaires, Guy Trédaniel Éditeur, 1975.

3 : Benoît Peeters, op. cit., p. 199.

4 : Jacques Fontaine, Hergé chez les initiés, Dervy-Livres, 2001.

5 : Le parallélisme entre Hergé et l’Écossais Robert Louis Stevenson (1850-1894) est remarquablement étudié par Pierre-Louis Augereau dans son Tintin au pays des tarots, Le Coudray-Maconard, Éditions Cheminements, 1999.

6 : Benoît Peeters, op. cit. Van Melkebeke est cité une quarantaine de fois, du début (p. 36) à la fin (p. 439) de l’ouvrage.

7 : Pudeur et modestie sont aussi des traits « saturniens » selon les statistiques astrologiques de Gauquelin.

8 : Sur la spiritualité d’Alain-Fournier, cf. Lettre inédite d’Isabelle Rivière (sœur du romancier) à Mademoiselle Renée Bauwin (étudiante à l’Institut des Sœurs de Notre-Dame de Namur), 22 janvier 1962.

9 : Raymond Trousson, Voyages aux pays de nulle part. Histoire littéraire de la pensée utopique, Éditions de l’Université Libre de Bruxelles, 1999.

10 : On peut la rapprocher de la « Maison de Salomon » de Francis Bacon (Nova Atlantis), qui inspira la Royal Society anglaise.

Texte paru précédemment dans Europe-Maxima

Le 3 mars 2003 correspondait au vingtième anniversaire de la mort d’Hergé. 2007 verra le centenaire de sa naissance. Opportun est le moment de retracer l’itinéraire du créateur de Tintin.

mercredi, 13 octobre 2010

Francis Bergeron: une conférence sur Tintin et Hergé...

Francis Bergeron sera jeudi soir au Local pour donner une conférence sur Tintin et Hergé...

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dimanche, 14 mars 2010

Notice sur Raymond De Becker

Notice sur Raymond De Becker

Ex: http://www.objectiftintin.com/

Moulinsart
Né en janvier 1912 à Schaerbeek, Raymond De Becker fréquente dès l'adolescence les cercles de l'Action Catholique dont la plupart des militants sont partagés entre monarchisme maurrassien et fascisme italien. Jeune homme enthousiaste et charismatique, Raymond impressionne son entourage par son intelligence et sa culture encyclopédique. En 1929, il rencontre Hergé pour la première fois au sein de la Jeunesse Indépendante Catholique dont il est le secrétaire général. Impressionné par ce brillant cadet, le père de Tintin accepte de dessiner pour "l'Effort", le bulletin de la J.I.C., et d’illustrer les propres ouvrages de Raymond : "Le Christ, roi des Affaires" (1930), "Pour un Ordre Nouveau" (1932) et "Destin de la France" (1937). Convaincu d’avoir un rôle important à jouer dans les années à venir, Raymond De Becker acquiert de plus en plus d’assurance : il s’éloigne du catholicisme et ne craint plus d’affirmer son homosexualité. Politiquement, il s’implique davantage et commence à fréquenter les salons germanophiles bruxellois. En décembre 1939, il fonde l’hebdomadaire neutraliste "L’Ouest" dans lequel Hergé publie les "exploits" de Monsieur Bellum, caricature du Belgicain francophile et va-t-en-guerre. Peu diffusé, encore moins lu, "L’Ouest" cesse rapidement de paraître.


La victoire des troupes de Hitler et l’Occupation sont accueillies favorablement par Raymond De Becker : le temps est venu pour lui d’exposer et d’imposer ses projets politiques au plus grand nombre. Dès l’été 1940, les autorités allemandes lui confient la direction du "Soir", le principal quotidien belge. Raymond ne manque pas de solliciter Hergé qui, le 17 octobre, entame dans le journal de son ami une nouvelle aventure de Tintin : "Le Crabe aux Pinces d'Or". Très vite, la ligne éditoriale du "Soir" se radicalise : déjà farouchement anticommuniste, De Becker n’hésite plus à publier des articles violemment antisémites. Parallèlement, il tente de fonder un "Parti Unique des Provinces Romanes" qui défendrait les intérêts des populations wallonnes dans la nouvelle Europe, mais les Occupants n’approuvent pas ce projet qui pourrait faire de l’ombre à Rex, le parti de Degrelle. A l’automne 1943, Raymond De Becker n’est plus convaincu de la victoire du Reich : il clame son intention d’abandonner la politique de Collaboration. Arrêté le 5 octobre, il est placé en résidence surveillée dans les Alpes bavaroises. Il y demeure jusqu’à la fin des hostilités puis rentre en Belgique où il se constitue prisonnier le 9 mai 1945.


Le 24 juillet 1946, le Conseil de Guerre de Bruxelles le condamne à mort, notamment pour avoir "ébranlé la fidélité des citoyens envers le Roi et l’Etat". Un an plus tard, sur appel, sa peine est commuée en prison à perpétuité puis, par voie de grâce, réduite à 17 ans de réclusion. Le 22 février 1951, De Becker est finalement libéré à condition de quitter sans délai la Belgique et de s’abstenir de toute activité politique et éditoriale. Pendant la détention de son ami, Hergé n’avait cessé de l'encourager et de correspondre avec lui. Raymond délivré, le dessinateur l’aide à se loger décemment à Paris et parvient même à lui trouver un emploi d’"inspecteur des ventes dans les librairies suisses".


En prison, Raymond De Becker s’était vivement intéressé à la psychanalyse. En liberté, il devient rapidement le principal exégète de l’œuvre de Carl Gustav Jung qu’il rencontre à plusieurs reprises. De Becker encourage Hergé à lire les ouvrages du père de l’"Inconscient Collectif" et à entamer une psychanalyse auprès de son disciple, le docteur Riklin.


En quête d’un nouvel auditoire, Raymond ne cesse de publier. D’une insatiable curiosité, il explore des domaines particulièrement variés : le cinéma ("De Tom Mix à James Dean, ou le mythe de l’Homme dans le cinéma américain", Fayard, 1959) , l’homosexualité ("L’Erotisme d’en face", Pauvert, 1964), le paranormal ("Les Machinations de la Nuit", Planète, 1965) ou encore les philosophies orientales ("L’Hindouisme et la crise du monde moderne", Planète, 1966). Dans les locaux de la revue "Planète", il côtoie deux très bons amis de Hergé : le scientifique Bernard Heuvelmans et l’"initié" Jacques Bergier (Mik Ezdanitoff dans "Vol 714 pour Sydney").


Jusqu’à sa mort à Paris, en 1969, Raymond De Becker sera pour Georges Remi plus qu’un ami fidèle : un véritable passeur qui, grâce à ses ouvrages et à ses conseils de lecture, l’aidera à surmonter ses crises, à tendre vers cette sérénité que le père de Tintin désirait plus que tout.

Entourage de Hergé

(Objectif Tintin remercie grimonpont, le capitaine Haddock, Tryphon Tournesol, Moulinsart, Jolyon Wagg, Tan Tan & Milou pour cet article :-)

dimanche, 10 janvier 2010

1929: naissance de Tintin sous l'impulsion de l'Abbé Wallez

Tintin-Soviet.jpg10 janvier 1929 : Sous l’impulsion de l’Abbé Norbert Wallez, rédacteur en chef du quotidien catholique belge « Le Vingtième Siècle », qui est flanqué d’un supplément destiné à la jeunesse, le « Petit Vingtième », Georges Rémy, alias « Hergé », crée le personnage de Tintin. Celui-ci est un reporter du « Petit Vingtième » et ses aventures seront relatées sous la forme de bandes dessinées, notamment, celles qui le mèneront au « pays des Soviets ». Cet art, que l’on nommera bientôt le « 9ème Art » sort des revues spécialisées pour les enfants pour entrer dans la grande presse quotidienne. Au même moment, d’autres héros de BD apparaissent dans la presse américaine, tels Spud, Popeye (le 1 juillet 1929) et Dickie Dare. Aucune étude approfondie n’a encore été faite sur les motivations de l’Abbé Wallez, sur les raisons qui l’ont poussé à adopter cette politique éditoriale. On peut d’ores et déjà dire ceci : 1) le Primat de Belgique, le Cardinal Mercier, avait élaboré une philosophie de l’action et du devoir, partiellement inspirée du philosophe français Blondel ; Tintin est un homme d’action qui obéit à son devoir et sert de modèle au mouvement scout catholique, très présent dans la vie sociale belge de l’époque ; 2) au niveau littéraire, le catholicisme de l’époque est très marqué par l’œuvre de l’Anglais Chesterton, qui exalte « l’esprit d’enfance », qu’il s’agit de conserver dans un monde adulte devenu de plus en plus désenchanté, où l’élan héroïque, le sens du devoir moral ou éthique disparaît ; il faut donc un héros pour les « jeunes de 7 à 77 ans », c’est-à-dire pour ceux qui, obéissant au vœu de Chesterton, entendent garder l’élan et les idéaux de la jeunesse, ou le « cœur pur » de l’enfance (« Cœur Pur », ne l’oublions pas, est le nom honorifique que donnent à Tintin les moines de la lamaserie tibétaine, qui l’ont recueilli, avec le Capitaine Haddock, alias « Tonnerre Grondant » dans le bel album « Tintin au Tibet »).

 

vendredi, 16 janvier 2009

Tintin a 80 ans et fait toujours polémique

http://ettuttiquanti.blogspot.com

Tintin a 80 ans et fait toujours polémique

Hergé, anti-coco ?
"L'anti-bolchévisme du tout premier tome, Tintin chez les Soviets est plus ou moins assumé en 1973, par Hergé qui, interrogé sur le sujet dans l'émission de l'ORTF "Ouvrez les guillemets" animée par un Bernard Pivot tout jeunot, confirme que Tintin est né dans une publication "catholique, d'extrême droite, dans un contexte alors très anti-blochévique". Ambigü, Hergé se réfugie cependant derrière la caricature lorsque la conversation dévie sur le colonialisme et le racisme de Tintin au Congo, également réédité en 73. Idem en 1976, dans un débat télévisé lors du festival du livre de Nice : Hergé, qui se voit repprocher sa vision idéalisée de la colonisation sans avoir jamais été en Afrique, ainsi que sa misogynie, invoque encore la caricature. Pourtant Hergé a bien émis des regrets en 1978, mais sur la manière dont il traite les animaux dans Tintin au Congo... dans l'émission 30 millions d'amis !

Hergé, collabo ?
Ces dernières années ont également vu fleurir des biographies et autres essais critiques sur Hergé, comme celles de Pierre Assouline, 1998, et de Benoît Peeters qui reviennent sur la participation du dessinateur au journal collaborationniste Le Soir sous l'Occupation. Certains vont plus loin comme Maxime Benoît-Jeannin qui, en 2006 avec Les guerres d'Hergé : Essai de paranoïa-critique analyse Tintin comme le médium privilégié des idées de la classe dominante du long XXème siècle : du colonialisme au racisme et à l'antisémitisme, et de l'anticommunisme à la collaboration. Mais la palme de la virulence revient certainement à Emile Brami qui publie en 2004, Céline, Hergé et l'Affaire Haddock dans lequel il établit un parallèle entre l'apparition en 1938 du personnage du capitaine Haddock et ses célèbres bordées d'injures très littéraires mais borderline, voire carrément racistes, et la publication du pamphlet antisémite de Bagatelles pour un massacre de Louis Ferdinand Céline qui en interdira lui-même la réédition.

Tintin, homo ?
L'ancien député conservateur britannique Matthew Parris s'est quant à lui amusé, dans un article très acide paru dans le Times, à prouver par A+B l'homosexualité de Tintin, depuis fort longtemps supposée. Sans passé, comme nombre jeunes gays qui débarquent en ville après avoir coupé les ponts avec leur famille, il finit par s'installer chez le capitaine Haddock ! Sans oublier la passion douteuse des jumeaux Dupond et Dupont (Thompson et Tompson en anglais) pour les déguisements exotiques... Ainsi déjà en 73, chez Pivot, la question est sous-entendue par les chroniqueurs qui soulignent l'absence de femmes. Hergé lui-même semble avouer le penchant de son personnage lorsqu'il évoque son album préféré, Tintin au Tibet, dans lequel le reporter part à la recherche de son ami Tchang. Pour son créateur, il s'agit d' "une histoire simple, sans méchants, juste une histoire forte d'amitié, voire même d'amour."
Cependant la dernière biographie officielle d'Hergé signée Philippe Goddin et parue à l'occasion de son centenaire en 2007 réfute les rumeurs d'homosexualité du dessinateur. Décrivant un homme à femmes, marié deux fois et peu fidèle, Goddin sous-entend qu'Hergé serait en fait mort du SIDA suite à des transfusions de sang contaminé. D'où les rumeurs d'homosexualité dans un début des années 80 bien homophobes."

Source

00:15 Publié dans Bandes dessinées | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : tintin, belgique, belgicana, 9ème art, art, hergé | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook