Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

mardi, 01 octobre 2013

L’âme d’une nation coule dans nos veines

L’âme d’une nation coule dans nos veines

Ex: http://zentropaville.tumblr.com

L’idée de nation suscite encore aujourd’hui chez certains des réactions, des passions parfois vives, voire violentes. Les uns voient en elle renaître le culte de la race, du sang. Les autres, le simple et seul principe d’une nouvelle loyauté politique. Il n’est pas dans mon intention de disserter une fois de plus sur la définition de la nation, ni de reposer la traditionnelle question « Qu’est-ce qu’une nation ? ».

La Bretagne, vieille nation européenne, a répondu depuis bien longtemps à cette question. L’âme de la nation bretonne, c’est d’abord son passé. Il n’est pas vrai que les peuples heureux n’ont pas d’histoire, parce que s’ils n’en avaient pas, ils ne seraient pas des peuples. Après 10 siècles de souveraineté nationale, la Bretagne est à ce jour sous occupation étrangère. Région bâtarde, simple province française… mais toujours nation, nation sans Etat certes, mais nation déterminée à recouvrer son indépendance. Le peuple breton a-t-il conservé une conscience nationale à l’instar de son frère écossais ? Sans aucun doute. Les Bretons ont-ils, aujourd’hui, un sentiment national ? Oui et de récents sondages le démontrent. Si la politique d’assimilation de la France a, certes, fait d’énormes dégâts, elle a échoué malgré sa politique génocidaire et ethnocidaire. Les Bretons sont fiers de leur identité spécifique et le revendiquent de plus en plus. Parmi les facteurs les plus déterminants dans l’esprit national, il y a le souvenir des choses faites en commun, le souvenir des épreuves traversées qui cimentent. Une nation comme la Bretagne commence à exister lorsque que naît une fierté, un orgueil national. Elle n’existe en fait que s’il y a des femmes et des hommes qui se réclament d’elle et qui entendent se définir comme Bretons. Aujourd’hui, on honore des Bretons morts pour la patrie. Ce que l’on honore en eux c’est qu’ils aient prouvé que quelque chose valait plus qu’eux et que leur vie, à savoir la patrie. Suprême sacrifice. Valeur suprême de ce à quoi on se sacrifie.

La nation bretonne est plus que le produit d’un contrat. Elle n’existe que par la foi qu’on lui voue. Elle n’est pas non plus une unité fermée, mais ouverte. Mais sous condition de pouvoir assimiler ceux à qui elle ouvre les bras. Aujourd’hui les nations modernes réunissent tous les vices. Elles s’ouvrent à n’importe qui et n’importe comment au mépris même de leurs âmes, de leurs identités. Une nation est un organisme vivant mais elle peut mourir. Mourir de mort physique mais également de mort spirituelle. Une nation qui perd son âme, à qui l’on vole son âme ou qui se laisse arracher son âme, cette nation est une nation condamnée. Les sociétés actuelles en Europe sont toutes orientées de manière prédominante vers le confort matériel. Leur hédonisme congénital est le plus sûr poison de l’idée nationale. Il nous faut également combattre les idéologies du déracinement qui visent les attaches territoriales d’un peuple, mais aussi ses attaches culturelles et spirituelles. Il est révélateur que tout système totalitaire ou colonial, cherche à détruire l’identité d’un peuple en s’attaquant en priorité à sa culture. C’est en niant la spécificité d’un peuple que cherche à s’imposer toute pensée homogénéisante. La culture est la carte d’identité d’un peuple. C’est son passeport et contrairement aux pleurnicheries et autres niaiseries régionalistes, nous ne dissocions pas le combat culturel du combat politique. La Bretagne est un être intrinsèquement politique et culturel. Le politique renvoie au culturel et le culturel renvoie au politique. Privé de dimension politique, le culturel devient folklore.

Notre combat pour la liberté du peuple breton et l’indépendance de la Bretagne, doit s’inscrire dans le cadre de l’Europe des peuples et prendre en compte que l’Europe actuelle est aspirée dans l’idéologie du bonheur individuel et la religion des droits de l’homme qui tend à s’octroyer tout l’espace du champ moral et préparer les esprits à l’uniformité. Vaste programme nihiliste, philosophie du bonheur massifié que nous entendons combattre.

Pour conclure je vous livre cette citation de Louis Pauwels : « L’idée que le monde doit être vécu au pluriel, c’est l’idée importante de cette fin de siècle. Le vrai racisme, le racisme fondamental, c’est de vouloir broyer tous les peuples, toutes les ethnies, toutes les cultures pour obtenir un modèle unique… ».

Meriadeg de Keranflec’h.

lundi, 06 mai 2013

Les Fêtes celtiques et les trois fonctions

Les Fêtes celtiques et les trois fonctions

Ex: http://linformatrionnationaliste.hautetfort.com/

Nous prendrons pour point de départ les quatre fêtes canoniques irlandaises telles qu’elles sont énumérées et décrites dans les textes médiévaux :

• Samain (« réunion, assemblée ») au premier novembre ;
• Imbolc (« lustration ») au premier février ;
• Beltaine (« feu de Bel ») au premier mai ;
• Lugnasad (« réunion de Lug ») au premier août.

Il importe de remarquer que ces quatre fêtes ne portent pas d’autre nom, que leur nom est limité à l’Irlande sans être transposable à une quelconque fête continentale et qu’il n’y a aucun terme spécialisé en irlandais pour désigner la « fête » proprement dite. Le terme usuel, irlandais féil, gallois gwyl, breton gouel, est un emprunt au latin vigilia et ne sert à désigner que la fête d’un saint dans le calendrier liturgique chrétien. Pour les fêtes profanes, il faut se contenter de l’irlandais feasta et du breton fest (qui sont des emprunts, direct ou indirect, par l’intermédiaire de l’anglais, au vieux français feste). Le gallois a un autre mot : gwledd « banquet ».

 Nous vous renvoyons, quant à la description générale, à tout ce qui a été dit dans Les Druides (éd. 1986, p. 231-262) et dans La Civilisation celtique (éd. 1990, p. 160-163) et dans Les fêtes celtiques (éd. 1995). La répétition serait superflue. Mais nous insisterons ici sur l’aspect trifonctionnel des quatre fêtes celtiques lequel est très clairement implicite.

Samain, au 1er novembre, marque le début de la saison sombre, clôt la période d’activité militaire et marque le début de l’année. C’est la fête collective de toute l’Irlande puisque la présence de chacun est obligatoire sous peine de mort ou de sanction grave. Elle est l’occasion de cérémonies religieuses et officielles mais le principal moment en est un banquet auquel participent toutes les classes de la société. N’appartenant, ni à l’année qui se termine ni à celle qui commence, Samain est en dehors du temps chronologique et se situe de ce fait dans le mythe, sans idée de durée, c’est-à-dire en réalité dans l’éternité: des événements mythiques se produisent sans interruption ni discontinuité d’une Samain à l’autre, ce qui explique que les gens du sid puissent intervenir dans les affaires humaines ou laisser des hommes pénétrer dans le sid, voire les y inviter ou les y emmener. Avec la participation des druides, de la flaith ou noblesse guerrière et des gens du peuple, la fête est explicitement totale et trifonctionnelle. Elle a été remplacée dans le calendrier chrétien par la Toussaint et la fête des morts. C’est la seule fête celtique dont nous ayons la dénomination gauloise correspondante: Samonios dans le calendrier de Coligny. Le sens étymologique du nom est « réunion ».

Imbolc est, au 1er février, en dépit de tentatives étymologiques aberrantes, la fête de la « lustration » après toutes les souillures de l’hiver. Elle est très peu attestée dans les textes parce qu’elle a pratiquement disparu pour être remplacée par l’immense folklore de sainte Brigit, comprise en cette occurrence comme l’accoucheuse de la Vierge. Elle correspond aux Lupercales latines ou fêtes de février. C’est typiquement la fête de la troisième fonction productrice et artisanale. 

Beltaine « feu de Bel » est, au 1er mai, la fête du feu et des maîtres du feu et des éléments atmosphériques, les druides. Fête sacerdotale par excellence, elle indique le début de la saison claire et aussi le commencement de l’activité guerrière. Il n’y a pas d’équivalence continentale attestée mais, dans toute l’Europe, y compris l’ancien domaine celtique, le folklore de mai est immense et varié. C’est surtout celui qui a été le plus difficilement christianisé.

Lugnasad ou «assemblée de Lug» est, au 1er août, la fête royale par définition intrinsèque, en particulier celle du roi régulateur et « centre » de la société humaine. Cela explique les jeux, les concours de poésie et les assemblées de toutes sortes qui en marquent le déroulement. Mais le roi est toujours et en toutes circonstances, en tant que détenteur du pouvoir politique, le représentant le plus éminent de la classe guerrière. Le folklore a fait de Lugnasad une fête agraire à cause de sa position dans le calendrier mais c’est un glissement tardif et l’attribution à Lug de la fête résulte de sa position centrale dans le calendrier. L’équivalent gaulois, récupéré par la politique romaine du début de l’Empire, porte le nom latin de Concilium Galliarum ou « assemblée des Gaules ». 

Ces quatre fêtes ont en commun d’être décalées de quarante à quarante-cinq jours sur la date calendaire normale. Deux d’entre elles, Samain et Belteine, comportent des sacrifices et des cérémonies religieuses en même temps que des assemblées administratives et politiques. Elles ont toutes survécu et laissé des traces importantes dans le folklore irlandais. Samain a été récupérée par l’Église pour la fête des morts et de la Toussaint, cependant que le folklore de mai est resté très important dans toute l’Europe occidentale.

Pour aller plus loin :

1

• Christian-J. Guyonvarc’h et Françoise Le Roux, Les fêtes celtiques, Ouest France, 1995

2

• Philippe Walter, Mythologies chrétiennes, Imago, 2003.

Cattos  http://www.propagandes.info
 Source :  http://lecheminsouslesbuis.wordpress.com

vendredi, 06 mai 2011

La tradition indo-européenne chez les Celtes

La tradition indo-européenne chez les Celtes

Jean Haudry

 
Avec les Celtes, nous entrons de plein pied, sans reconstruction préalable, dans les deux dernières périodes de la tradition indo-européenne: la société lignagère des quatre cercles et des trois fonctions, qui est celle des royaumes celtiques de la période historique, et la société héroïque, qui est celle des fianna. Tout ce qui, dans le monde gréco-romain, appartient à un passé mythique est encore vivant.

1. La société des quatre cercles et des trois fonctions

L’ancienne société irlandaise telle qu’elle ressort des textes en moyen-irlandais a pour base la tribu túath (*tewtā) gouvernée par un roi, (*rēg-s). La formule du serment des héros irlandais «je jure le serment que jure ma tribu» illustre l’importance de ce cercle d’appartenance. L’évolution de la société a entraîné la création d’unités supérieures et par suite une hiérarchie des rois: il y a des «hauts rois», des «rois des hauts rois», et au-dessus d’eux le roi d’Irlande. A chaque échelon est attachée une assemblée. En dessous de la tribu, il y a la famille de quatre générations, derb-fhine «famille certaine» qui succède à la fois au village clanique et à la famille de la société antérieure; la lignée proprement dite, fine, ici comme ailleurs, est réservée aux familles nobles.

La société comporte trois castes, celle des druides, celle des nobles, celle des hommes libres. Cette institutionnalisation de la triade des fonctions, qui ne se retrouve que dans le monde indo-iranien, peut être considérée soit comme une conservation commune et donc un archaïsme, soit comme une évolution parallèle et, vu l’éloignement géographique, indépendante. Comme dans le monde indo-iranien, les esclaves, qui sont ordinairement des prisonniers de guerre, ne font pas partie de la société. On sait que cette organisation a servi de modèle à la société des trois ordres du moyen âge occidental: la société germanique dont elle était issue ne comportait pas de caste sacerdotale et ne pouvait donc faire une place au clergé chrétien. La société irlandaise médiévale est donc plus proche de la société védique du deuxième millénaire que de la cité grecque ou à plus forte raison de la république romaine ou de l’empire romain. Ses institutions et ses coutumes confirment cet archaïsme. Le roi y est soumis à divers interdits (geis) dont la violation entraîne des calamités publiques; il en va de même pour son obligation de «vérité», c’est-à-dire surtout de justice. La pratique magique de l’énonciation de vérité, celle du jeûne du créancier sont aussi des archaïsmes. Les diverses modalités du mariage sont en partie parallèles à celles du droit indien. Louange et blâme sont les mécanismes essentiels de cette société où l’honneur est tenu pour la valeur centrale. C’est une société purement rurale, où la ville est inconnue. La monnaie l’est également: tous les paiement se font en bétail.

2. La société héroïque

En marge de cette société existe une contre société institutionnalisée qui reflète les idéaux, les valeurs et les comportements de la société héroïque: la f́ian, troupe de jeunes guerriers, les fianna, qui bien qu’issus de la noblesse vivent en dehors de la société comme les vrātyas indiens, les maryas iraniens, les berserkir scandinaves. En entrant dans la fían, ils quittent leur lignage. Comme l’indique une étymologie ancienne leur nom, fíanna a venatione, ils vivent de chasse, mais aussi de diverses formes de prédation. Marie-Louise Sjoestedt les a définis en ces termes: «Les fíanna sont des compagnies de guerriers chasseurs, vivant sous l’autorité de leurs propres chefs, en semi-nomades; on les représente passant la saison de la chasse en de la guerre (de Beltine à Samain) à parcourir les forêts d’Irlande, à la poursuite du gibier, ou menant la vie de guérilla; des récits plus récents en font les défenseurs attitrés du pays contre les envahisseurs étrangers, mais tout indique qu’il s’agit là d’un développement secondaire du cycle. Pendant la mauvaise saison (de Samain à Beltine) ils vivent principalement sur le pays à la façon de troupes cantonnées chez l’habitant. Ils n’obéissent pas au pouvoir royal, avec lequel leurs chefs sont fréquemment en conflit». Ce conflit avec les autorités de la société lignagère est typique de la société héroïque. Il se double de conflits internes aux clans fíanna dont on trouve nombre d’exemples dans le cycle de Finn.

En Gaule, la société lignagère des communautés naturelles est elle aussi concurrencée, mais de l’intérieur, par des solidarités électives, comme l’a observé César, La guerre des Gaules, 6,11: «En Gaule, non seulement toutes les cités, tous les cantons et fractions de cantons mais, peut-on dire, toutes les familles sont divisés en partis rivaux; à la tête de ces partis sont les hommes à qui l’on accorde le plus de crédit; c’est à eux qu’il appartient de juger en dernier ressort pour toutes les affaires à régler, pour toutes les décisions à prendre. Il y a là une institution très ancienne qui semble avoir pour but d’assurer à tout homme du peuple une protection contre plus puissant que lui: car le chef de faction défend ses gens contre les entreprises de violence ou de ruse et, s’il agit autrement, il perd tout crédit. Le même système régit la Gaule dans son ensemble: tous les peuples y sont groupés en deux partis». Inutile de préciser que César a tiré de cette situation un avantage décisif. On voit par là que les réalités de la société héroïque de l’âge du bronze coexistent avec celles de la société lignagère, qui remontent au néolithique.

3. Formulaire et groupes de notions

Or paradoxalement les textes ne nous conservent à peu près rien du formulaire traditionnel, et la triade des fonctions est absente des récits et en particulier de la mythologie. On ne saurait expliquer l’absence du formulaire par le caractère oral de la tradition, auquel les druides étaient aussi attachés que leurs homologues indiens et iraniens, car une foule de légendes nous ont été conservées de cette façon. La raison essentielle est que ces récits sont en prose; la poésie, domaine privilégié du formulaire, n’y figure que sporadiquement. L’absence des trois fonctions, surprenante dans une société trifonctionnelle, s’explique par le fait que les récits se fondent en grande partie sur des traditions qui remontent à la période la plus ancienne, celle de la «religion cosmique» et de l’habitat circumpolaire, dont l’Irlande conserve le souvenir avec ses «Iles au nord du monde», où les «tribus de la déesse Dana», c’est-à-dire les dieux du panthéon irlandais, ont «appris le druidisme, la science, la prophétie et la magie, jusqu’à ce qu’ils fussent experts dans les arts de la science païenne». C’est là une attestation directe de l’origine polaire de la plus ancienne tradition indo-européenne. Un bon exemple en est la conception du «héros» telle que l’a résumée Philippe Jouët à l’article correspondant de son Dictionnaire de la mythologie celtique à paraître: «On peut donc attribuer aux cultures celtiques une doctrine d’héroïsation, issue d’une conception préhistorique selon laquelle la survie effective dépendait de la capacité à traverser l’hiver. Traduite en métaphores, cette conception a engendré mythes et doctrines. Par son aptitude à dominer la ténèbre hostile, le héros gagne un lieu généralement insulaire, parfois souterrain quand la terre noire équivaut à la ténèbre, où il reçoit les marques de sa promotion: illumination solaire, faveur des Aurores, trésors, «fruits de l’été» découverts en plein mois de novembre, gloire et renommée. Le vieux schéma celtique de l’incursion dans le Síd, le monde des Tertres enchantés, prend tout son sens dans cette perspective. C’est par là qu’il faut expliquer les métaphores, les images, les scénarios mythologiques et épiques les plus archaïques de la tradition celtique». Un tel «héros» n’a pas grand chose en commun avec celui de la société héroïque, mais illustre la parenté formelle entre son nom grec hērōs et celui de la déesse Hērā «Belle saison».

* * *

De Les peuples indo-européens d’Europe.

jeudi, 17 mars 2011

Vintur, le dieu lumineux des montagnes provençales

 

Belenos.jpg

Vintur, le dieu lumineux des montagnes provençales

Ex: http://tpprovence.wordpress.com/

Le nom Vintur, présent uniquement en Provence, apparaît sur trois inscriptions votives datant du IIe siècle. La première a été découverte au XVIIIe siècle, à Mirabel-aux-Baronnies, dans la Drôme, sur le site de Notre-Dame de Beaulieu, par Esprit Calvet. Elle indique VENTVRI/CADIENSES/VSLM (1). La deuxième a été relevée à Apt, dans le Vaucluse, en 1700, par Joseph-François de Rémerville, qui nota : VENTVRI/VSLM/M.VIBIVUS (2). La troisième enfin, fut exhumée, également dans le Vaucluse, lors de fouilles effectuées en 1993 à la Chapelle Saint-Véran, près de Goult : seul VINTVRI restait encore lisible sur un fragment (3). Une question se pose alors : qui était ce mystérieux Vintur, honoré par ces inscriptions ?

Apollon, le Bélénos gaulois

L’on peut lire dans La Provence antique de J.P. Clébert : « Il y a aussi des dieux des sommets comme le fameux Ventur, dieu du vent, qui a donné son nom au mont Ventoux, et à celui de la Sainte Victoire (Vencturus) et probablement dieu Mistral » (4). De même, Patrice Arcelin, dans un article du magazine Dossier Archeologia sur les « Croyances et les idées religieuses en Gaule méridionale », précise à propos des divinités associées aux montagnes : « Les sommets ont également été l’objet de dévotion. On connaît plusieurs noms de divinités qui leur sont liés : le dieu Vintur, d’après une dédicace de Mirabel (Drôme) pour le mont Ventoux : le même nom se retrouve à Buoux dans le Luberon » (5).

Comme souvent, le recours à l’étymologie permet d’éclaircir la question. C’est ainsi que Claude Sterckx explique : « Le théonyme Vintur(os) a été très peu étudié jusqu’à présent. L’alternance Vint/Vind apparaît bien attestée par la série de théonymes certainement apparentés : Vindios/Vintios-Vindonnod/Vintoros. Ils semblent tous basés sur l’adjectif gaulois Vindos : “ blanc, brillant, clair “ ». Interrogé par nos soins, Jean Haudry nous a précisé : « La présence de formes en vind- à côté des formes en vint- me semble favoriser le rattachement à l’adjectif vindos « blanc », mais le flottement entre t et d est surprenant: les diverses formes qui se attachent à vindos ont toujours nd. D’autre part, je ne connais pas de formes en -ur- à côté de formes en -o-. L’étymologie de vindos est incertaine : le rattachement habituel à *weyd- « savoir », « trouver » n’est pas très bon pour le sens, le rattachement à *sweyd- « briller » serait préférable de ce point de vue, mais le *s de cette racine n’est pas un *s- mobile ».

Pour sa part, Claude Sterckx conclut : « Vintur(os) serait donc à comprendre comme “le petit blanc“, “le petit lumineux“, et donc comme une épiclèse vraisemblablement de l’Apollon gaulois dont les autres désignations (Bélénos, Vindios, Albius) ont exactement le même sens (sans la finale hypocoristique) ». Avis partagé par tous ceux qui se sont penchés sur le cas Vintur.

Le théonyme celtique Bélénos est attesté dans l’ensemble du monde celtique continental, puisque des inscriptions ont été retrouvées en Gaule cisalpine et transalpine, en Illyrie et en Norique. Mais c’est dans le sud de la Gaule, en Provence, que son culte était prééminent. Dans son ouvrage de référence La Religion des Celtes, de Vries indique qu’il était à l’honneur surtout chez les Salyens, des Celto-ligures installés précisément en Provence. Le fait que Bélénos soit, selon l’interprétation romaine, le nom de l’Apollon gaulois, divinité « solaire », a fait comprendre cet appellatif comme « le lumineux, le brillant ». Ainsi, selon de Vries, « l’Apollon gaulois a, lui aussi, d’étroits rapports avec le soleil ; son surnom de Belenus suffirait à l’indiquer » (6). On étymologise ensuite par des racines indo-européennes imaginaires, *gwel-« briller ». En réalité, comme le démontre Xavier Delamarre dans son Dictionnaire de la langue gauloise, le théonyme Belenos vient tout simplement de *belo, *bello, « fort, puissant » (7).

Bélénos n’en est pas moins un dieu lumineux, dont les principales fonctions étaient la médecine et les arts. Il était honoré lors de la fête de Beltaine, qui marquait une rupture dans l’année, le passage de la saison sombre à la saison claire, lumineuse. Parmi ses surnoms plus spécifiquement gaulois, l’on remarque « Iovancocarus » (Juvent- : jeunesse), dieu rayonnant de jeunesse.

En Irlande, Bélénos s’appelait Oengus, le Mac-Oc, c’est à dire le « dieu jeune », décrit dans les récits médiévaux comme « un jeune guerrier monté sur un cheval blanc ». Le Mac-Oc irlandais se nomme Madon au Pays de Galles : les contes gallois insistent sur son caractère solaire, car il est décrit comme « un jeune guerrier monté sur un cheval blanc ». On peut aussi assimiler Bélénos au dieu médecin de la mythologie irlandaise, Diancecht.

Il faut aussi rapprocher Bélénos du dieu germanique Balder (vieil islandais Baldr), dieu de la jeunesse décrit dans l’Edda de Snorri Sturlusson, comme « si beau d’apparence et si clair qu’il en est lumineux ». Joseph Chérade Montbron soulignait, dès le XIXe siècle : « Il est probable que ce Balder est le même que le Belen ou Belenos qu’adoraient les Gaulois. Selon Rudbek, l’étymologie de Balder ou Belenos vient de Bella, se bien porter (…) De là Bol, Bold, Baal et Baldur, puissant, sain » (8). On retrouve là l’étymologie donnée par Xavier Delamarre.

En outre, Bélénos est assimilé à l’Apollon du panthéon classique gréco-romain, dieu du chant, de la musique et de la poésie, mais aussi des purifications et de la guérison. Revenant chaque année au printemps du pays des hyperboréens, situé à l’extrême nord, il était le dieu de la lumière. Sa fonction éminemment solaire est confirmée par ses surnoms : « le blond », « le dieu aux cheveux d’or », « Phoibos », c’est à dire « le brillant », dont les Romains firent Phébus. A en croire l’hymne homérique, Apollon « a l’apparence d’un astre qui luit en plein jour. Des feux sans nombre jaillissent de sa personne, l’éclat en va jusqu’au ciel ». Dieu guérisseur, il était nommé, en Grèce, « Apotropaïos », « celui qui éloigne les maladies » ; à Rome, un premier temple lui fut érigé à la suite d’une épidémie, en 443 av JC et y port le nom d’Apollo Medicus (9). Dans son interprétation romaine du panthéon gaulois, César qualifiait ainsi Bélénos : « Apolinem morbos depellerre », soit « ils croient qu’Apollon chasse les maladies » (10).

Sous le nom de Vintur, qui n’est qu’une épiclèse, c’est à dire une épithète par laquelle nos ancêtres désignaient le dieu dont le nom devait rester occulté, se cache donc le Bélénos gaulois, le Diancecht des Irlandais, l’Apollon des Grecs, l’Apollo Medicus des Romains.

Le Mont-Ventoux

J. Whatmough, dans The dialects of Ancient Gaul, suggère un apparentement entre le nom de Vintur et celui du Mont-Ventoux (11). Il est vrai qu’en Occitan provençal, Mont-Ventoux se dit Mont Ventor selon la norme classique ou Mount Ventour selon la norme mistralienne.

Dès 1904, dans les Annales de la société d’Etudes Provençales, C.M. Clerc écrivait : « Le vrai nom du Mont Ventoux, sur les cartes du XVIIIe s est, non pas Ventoux, mais Ventour. Ce nom dérive indubitablement du nom d’une divinité, Venturius, à laquelle sont dédiées deux inscriptions romaines tracées, l’une à Mirabel, près de Vaison, l’autre à Buoux, au nord du Luberon. Il n’est pas impossible que cette divinité ait été non seulement celle du Ventoux, mais la divinité générale des montagnes de toute la région provençale, divinité d’origine celte ou plutôt ligure. Ce nom dérive, sans doute d’une racine analogue au latin Ventus ».

Si le Ventoux doit bien son appellation à Vintur, celui-ci est nullement le dieu du vent ou du Mistral, ni un dieu local. En effet, il n’existe pas de divinités topiques dans la religion gauloise. Les Gaulois ne divinisaient pas leurs forêts, leurs fleuves ou leurs montagnes. Si le nom de Sequona est associé à la Seine, Matrona à la Marne ou Vosegos aux Vosges, c’est uniquement que ces lieux étaient consacrés à ces divinités et portaient leur nom…

Le sommet du Mont-Ventoux, enneigé tout au long de l’hiver, et recouvert de pierres blanches le reste de l’année, a été consacré à Vintur, le dieu solaire, « le blanc », « le brillant », « le lumineux », en raison de sa blancheur persistance. Quant à la célèbre source du Groseau, au pied du Ventoux, elle a été considérée comme salutaire car protégée par le dieu guérisseur Vintur.

La Sainte-Victoire

De nombreux érudits ont rapproché la toponymie du Mont-Ventoux avec celle d’un autre géant de Provence, tout aussi fameux : la Sainte-Victoire.

Passons rapidement sur la légende qui rattache l’appellation de la montagne à la victoire de Marius sur les Teutons, en 102 av JC. Elle remonte au XIXe s, et fut forgée de toutes pièces par quelques écrivains et journalistes locaux. Walter Scott, qui situe à la Sainte-Victoire un chapitre de son roman Charles Le Téméraire ou Anne de Geierstein, écrit en 1829, donne l’explication (?) suivante : « Le nom de la Montagne, écrit-il, avait été donné par suite d’une grande victoire qu’un général romain nommé Caio Mario avait remporté sur deux grandes armées de Sarrasins portant des noms ultramontains, probablement les Teutons et les Cimbres. En reconnaissance de cette victoire Caio Mario fit vœu de bâtir un monastère sur cette montagne et de le dédier à la Vierge Marie, en l’honneur de laquelle il avait été baptisé ». Défense de rire !

Pour redevenir sérieux, notons que le nom de Sainte-Victoire est inconnu dans les documents avant le XVIIe s.  Le terme de « Victoire » est mentionné pour la première fois en 1653, quand un bourgeois d’Aix-en-Provence, Honoré Lambert, fait le vœu, au cours d’une grave maladie, de restaurer la chapelle et l’ermitage situés au sommet de la montagne, sous le nom de « Notre-dame de la Victoire », et de s’y retirer pour se consacrer à une vie de prière et de contemplation. On ne sait pas si, avec un tel nom, il s’agit de commémorer la victoire de Louis XIII sur les Protestants, ou la bataille victorieuse de Lépante contre les Turcs, même si la première hypothèse semble la plus plausible.

Dans la période précédente, le nom de la montagne est « Venture » ou, sous une forme chrétienne, « Sainte-Venture » ou « Sainte-Adventure », cette appellation figurant encore sur des cartes du début du XVIIIe s, et il n’est question dans les textes que d’un chemin menant à Sainte Adventure (Itinere sancte Adventuro) en 1390, ou à Sainte-Venturie (Sancte Venturie) en 1345.

D’où l’hypothèse émise par Camille Jullian, en 1899, dans les colonnes de la Revue d’Etudes Anciennes : « Sainte-Victoire vient d’un mot celtique, ou ligure, comme Venturi, Venturius ou quelque chose d’approchant. Le nom même de la montagne n’a jamais été Victoria. Lorsqu’on trouve son nom sous sa vraie forme locale et provençale, elle s’appelle Venturi, du latin Ventur et Venturius comme le vrai nom et le nom primitif de Sainte-Victoire. Venturi, Ventoux, c’est tout un. Et dans le passé la distance entre ces deux mots diminue encore. Le Ventoux s’appelle dans les chartes Venturius, et à l’époque romaine, Vintur. Sainte-Victoire et le Ventoux ont donc porté, à l’origine, le même nom celtique ou ligure, nom fort approprié à des sommets d’où semblent partir nuages et vent ». Comme Camille jullian, Charles Rostaing et de nombreux érudits n’ont eu de cesse de rapprocher la toponymie de la montagne Sainte-Victoire de celle d’un autre sommet tout aussi célèbre : le Mont-Ventoux.

Par ailleurs, l’on retrouve en Provence d’autres toponymes dérivant du théonyme gaulois Vintur. Charles Rostaing cite l’exemple du village de Venterol, dans les Alpes de Haute Provence, dont le nom dérive, selon lui, du dieu gaulois. Hypothèse confirmée par le site de construction de l’ancien village : un piton à 1185 mètres d’altitude (12).

Jean-François Delfini, Grande Provence, hiver 2010, n°2.

NOTES

(1)  CIL 12, 1341.

(2)  CIL 12, 1104.

(3)  ILN 04, 143.

(4)  J.P. Clébert, La Provence antique, II, Robert Laffont, 1966.

(5)  Dossier Archeologia, juin 1979, n°35.

(6)  De Vries, La Religion des Celtes, Payot, 1962, 45.

(7)  X. Delamarre, Dictionnaire de la langue gauloise, Errance, 2001, p. 62.

(8)  J. Chérade Montbron, Les Scandinaves : poëme, Maradan, 1801, p. 522.

(9) Tite-Live, IV, 25.3 ; XL, 51.6.

(10) Jules César, De bello gallico, 6,7.2.

(11)  J. Whatmough, The dialects of Ancient Gaul, Cambridge, 1970, p. 117.

(12)  C. Rostaing, Essai sur la toponymie de la Provence (depuis les origines jusqu’aux invasions barbares), Laffitte reprints, Marseille, 1973, p. 295.

http://www.grandeprovence.fr/

samedi, 29 janvier 2011

Celtic Woman - Caledonia by Lady Avalonya

Celtic Woman

Caledonia by Lady Avalonya

vendredi, 28 janvier 2011

Riverdance: Irish Tap Dancing (2007)

Riverdance:

Irish Tap Dancing (2007)

vendredi, 15 octobre 2010

Noi, Celti e Longobardi

Michele Fabbri:

Noi, Celti e Longobardi

http://www.centrostudilaruna.it/

Nel 1997 Gualtiero Ciola pubblicava un’opera, poi ristampata, che costituiva un originale punto di riferimento per un’adeguata considerazione delle origini etniche dei popoli italiani. Nel suo corposo studio Noi, Celti e Longobardi, Ciola analizza le testimonianze archeologiche e linguistiche che hanno segnato il territorio della penisola italica, fornendo utili indicazioni per seguire nuovi percorsi di ricerca.

Il libro di Ciola è un’opera dal carattere decisamente militante che vuole mostrare le tracce lasciate, soprattutto nei territori settentrionali della penisola, da popolazioni di origine celtica e germanica. Si tratta quindi di un testo particolarmente importante per favorire la ricostituzione di una coscienza identitaria dei popoli padani. Infatti la classe dirigente italiana, soprattutto nell’ultimo mezzo secolo, ha utilizzato massicci flussi migratori di meridionali e di extracomunitari con l’intento di sottoporre la Padania a un processo di denordizzazione che rischia di cancellarne per sempre l’identità etnica.

In una vera e propria controstoria dell’Italia etnica, Ciola col suo libro indica la via della liberazione dai tabù e dai pregiudizi che vengono inculcati dalla cultura di regime, particolarmente insistente nel contesto del mondialismo.

A partire dal secondo millennio a.C. si verifica l’irruzione nella penisola italica di genti ariane che segneranno in modo indelebile le culture del territorio, sebbene a macchia di leopardo, come Ciola mostra nel suo libro. La differenza più evidente fra i nuovi venuti e le popolazioni preesistenti è nel fatto che gli Indoeuropei si caratterizzavano per i culti solari e patriarcali, mentre gli autoctoni celebravano culti matriarcali riferiti alla Madre Terra. Gli Etruschi sono probabilmente gli eredi dei culti matriarcali, anche se la civiltà etrusca fu di gran lunga la più avanzata fra quelle italiche delle origini, e assorbì elementi culturali di civiltà indoeuropee, soprattutto di quella greca.

L’espansione etrusca nella pianura padana venne subito fermata dai Celti che si affermarono in tutta la zona lasciando un vasto patrimonio di toponimi nonché di parole che sono arrivate fino all’italiano moderno. Ciola elenca in tavole apposite una lunga serie di lemmi di origine celtica, di cui i dialetti padani sono letteralmente infarciti. Proprio per cancellare queste tracce di cultura nordica la classe dirigente italiana ha sempre cercato di oscurare le culture dialettali, soprattutto settentrionali, sia col regime liberale, sia con quello fascista, soprattutto con quello democristiano, e ancora di più con l’attuale sistema mondialista. Assai più ampia tolleranza, invece, è stata mostrata verso i dialetti meridionali…

La parte nord-orientale della penisola era abitata dai Veneti, popolazione di origine indoeuropea che l’autore ritiene ascrivibile anch’essa all’ethnos celtico. Si tratta di una questione storiografica ancora dibattuta, sulla quale Ciola propone numerosi spunti di approfondimento.

Molte feste popolari sono chiaramente ispirate alle feste solstiziali celebrate dai Celti, e talune sono state cristianizzate, come la festa della Candelora, che originariamente era la festa della dea celtica Brigit.

Purtroppo in Italia è sempre esistito un malanimo anticeltico che risale ai tempi dei Romani e che si è perpetuato nel Risorgimento e nel fascismo, che hanno cercato di inculcare l’idea di un’Italia “schiava di Roma”: un dogma che ancora oggi viene propagandato dai governi italiani, con l’aggravante del mondialismo, di cui la classe politica è totalmente succube.

Un altro momento importante per la formazione delle identità etniche italiane è l’arrivo dei Germani col crollo dell’Impero Romano. L’invasione dei “Barbari” rappresenta un significativo apporto di sangue nordico nella penisola: i Germani si caratterizzavano per un solido senso della stirpe e per una più accentuata divisione in caste della società. Tuttavia nessuna tribù germanica riuscì a dare un assetto stabile al territorio, aprendo la strada alla riconquista bizantina e alla formazione del territorio pontificio.

L’invasione longobarda fu l’ultima occasione di instaurare un regno “nordico” in Italia. La questione, com’è noto, fu ampiamente dibattuta al tempo del Risorgimento, suscitando l’interesse anche di personalità importanti come Alessandro Manzoni. Sta di fatto che la strenua resistenza bizantina, la diplomazia papale e l’intromissione dei Franchi resero impossibile ai Longobardi la conquista dell’Italia.

Tuttavia l’apporto culturale longobardo ha lasciato tracce significative in numerosi vocaboli, nei toponimi, nonché nelle caratteristiche razziali soprattutto nel Nord Italia e in Toscana.

La diffusione dei Longobardi in Toscana ha dato origine anche a particolari teorie sul Rinascimento. Lo studioso tedesco Ludwig Woltmann sosteneva che il Rinascimento, che ebbe in Toscana la sua sede privilegiata, era un fenomeno essenzialmente nordico: un’aspirazione alla libertà e alla curiosità intellettuale che è molto meno sentita nelle culture mediterranee. In effetti l’arte toscana di quell’epoca presenta caratteri assai poco meridionali: simbolo del Rinascimento fiorentino sono le Grazie e la Venere del Botticelli, che hanno un aspetto decisamente ariano!

L’ultima parte del libro passa in rassegna tutte le regioni italiane delineandone la composizione etnica che è chiaramente celtico-germanica al Nord, con un consistente apporto celtico nelle Marche e con influenze umbre che, secondo Ciola, sono da far risalire a elementi proto-celtici. L’elemento etrusco è diffuso al Centro, ma in Toscana è frammisto a una consistente presenza longobarda. Nel Sud, invece, nonostante alcuni insediamenti longobardi e normanni, durarono a lungo le occupazioni musulmane, e ancor oggi prevalgono elementi di origine meridionale e levantina che determinano le tipiche caratteristiche psicorazziali della popolazione locale.

Il saggio di Ciola è opera di notevole erudizione, ricca di indicazioni che possono essere utili anche in ambito accademico, ma soprattutto è un invito a non dimenticare i valori delle culture nordiche che hanno segnato per tanti secoli la nostra civiltà: la sete di libertà, l’aspirazione alla giustizia, la fedeltà alla parola data, il coraggio, il senso dell’onore…

Si tratta di espressioni che rischiano di scomparire dal vocabolario, in un contesto come quello del mondialismo, dove dominano la menzogna, l’inganno, la truffa, il doppio gioco: gli ingredienti della società multicriminale.

Noi, Celti e Longobardi è un libro che ha il sapore di una boccata di aria fresca nell’ambiente asfittico della cultura ufficiale, e ha potenzialità dirompenti per la mentalità dominante, bigotta e conformista al di là di ogni ragionevole immaginazione.

* * *

Gualtiero Ciola, Noi, Celti e Longobardi, Edizioni Helvetia, Spinea (VE) 2008, pp.416, € 27,00.

vendredi, 17 septembre 2010

William Butler Yeats: A Poet for the West

William Butler Yeats: A Poet for the West

Vic OLVIR

william_butler_yeat_by_george_charles_beresford4.jpgIn saner times our great poets, writers, and philosophers expressed the feelings and ideas which came naturally from the race-soul. In these times those feelings and ideas are too “controversial” to be expressed freely, so where they cannot be suppressed outright, they are reinterpreted, obscured, and selectively anthologized by the alien arbiters of our culture. For no poet of our race has this been more true than for William Butler Yeats.

William Butler Yeats was probably the greatest poet of the modern age; T. S. Eliot acknowledged as much. His roots were deep in Ireland, but, withal, he embodied the questing spirit of the whole of Western culture.

It is impossible without writing a volume (or two) to render even a partial appreciation of his many-faceted life and work. He was born into the Irish Protestant tradition, of that line which included Swift, Burke, Grattan, Parnell. He was poet, playwright, guiding spirit of the famed Abbey Theatre, essayist, philoso­pher, statesman, mystic. But, as he once wrote, “The intellect of man is forced to choosePerfection of the life, or of the work” ["The Choice"], and it is primarily in his poetry that most people seek an understanding of his genius.

Some of his views confounded the mediocre, left-wing poets and intellectuals who sought him out in his later years. Unable, of course, to ignore him, they attempted to appropriate him as their own, much as Walter Kaufmann, a Jew, attempted to do with Friedrich Nietzsche some years later. Thus, many writings about Yeats totally ignore his more “controver­sial” ideas, or at best refer to them only obliquely.

For example, Yeats believed in reincarnation, not only in a poet’s way, as a dramatic symbol. but quite literally: the individual human spirit remained a part of the collective race-soul even after the body died, and as long as the race endured the individual spirit might re-emerge later in another body. In an early poem, written when he was about 24, we have:

“Ah, do not mourn,” he said,
‘That we are tired, for other loves await us;
Hate on and love through unrepining hours.
Before us lies eternity; our souls
Are love, and a continual farewell.

– “Ephemera”

And just a few months before his death in 1939 at age 73, with matured powers of creative expression:

Many times man lives and dies Between his two eternities,
That of race and that of soul,
And ancient Ireland knew it all.
Whether man die in his bed
Or the rifle knock him dead,
A brief parting from those dear
Is the worst man has to fear.
Though grave-diggers’ toil is long,
Sharp their spades, their muscles strong,
They but thrust their buried men
Back in the human mind again.

– “Under Ben Bulben”

Modern liberalism and democracy were anathema to Yeats’s aristocratic spirit. He was a good friend of Ezra Pound. He was associated for a time with the Irish Blueshirts, led by General O’Duffy, and he wrote some marching songs for them. He spoke of “Mussolini’s incomparable Fascisti” (although being the kind of man he was he recoiled somewhat from the demagogic elements of fascist movements).

He read widely and avidly on race, eugenics, Italian Fascism, and German National Socialism. On eugenics, according to his biographer, Yeats “spoke much of the necessity of the unification of the State under a small aristocratic order which would prevent the materially and spiritually uncreative families and individuals from prevailing over the creative.”[1] Eugenics, to Yeats, had both physical and spiritual aspects, It is touched upon in some of the poems. In “Under Ben Bulben” he wrote:

Poet and sculptor, do the work
Nor let the modish painter shirk
What his great forefathers did,
Bring the soul of man to God,
Make him fill the cradles right.

Irish poets, learn your trade,
Sing whatever is well made
Scorn the sort now growing up
All out of shape from toe to top,
Their unremembering hearts and heads
Base-born products of base beds.

A much earlier poem reads:

All things uncomely and broken, all things worn out and old,
The cry of a child by the roadway, the creak of a lumbering cart,
The heavy steps of the ploughman, splashing the wintry mould,
Are wronging your image that blossoms a rose in the deeps of my heart.

The wrong of unshapely things is a wrong too great to be told;
I hunger to build them anew and sit on a green knoll apart,
With the earth and the sky and the water, re-made, like a casket of gold.
For my dreams of your image that blossoms a rose in the deeps of my heart.

– “The Lover Tells of the Rose in His Heart”

Yeats did not write for scholars, but for the people, and schoolchildren throughout the English-speaking world are familiar with at least a few of his works–or, perhaps, just a line or a phrase from them. Many youngsters have recited in school this verse by the young Yeats:

Down by the salley gardens my love and I did meet;
She passed the salley gardens with little snow-white feet.
She bid me take love easy, as the leaves grow on the tree;
But I, being young and foolish, with her would not agree.

– “Down by the Salley Gardens”

Another favorite is ”The Lake Isle of Innisfree.” During his many tours of the United States, every American audience insisted he recite it for them:

I will arise and go now, and go to Innisfree,
And a small cabin build there, of clay and wattle made:
Nine bean-rows will I have there, a hive for the honeybee,
And live alone in the bee-loud glade.

Nearly as familiar is the stark vision of “The Second Coming”:

Turning and turning in the widening gyre
The falcon cannot hear the falconer;
Things fall apart; the centre cannot hold;
Mere anarchy is loosed upon the world,
The blood-dimmed tide is loosed, and everywhere
The ceremony of innocence is drowned;
The best lack all conviction, while the worst
Are full of passionate intensity.

Surely some revelation is at hand;
Surely the Second Coming is at hand.
The Second Coming! Hardly are those words out
When a vast image out of Spiritus Mundi
Troubles my sight: somewhere in the sands of the desert
A shape with lion body and the head of a man,
A gaze blank and pitiless as the sun,
Is moving its slow thighs, while all about it
Reel shadows of the indignant desert birds.
The darkness drops again; but now I know
That twenty centuries of stony sleep
Were vexed to nightmare by a rocking cradle,
And what rough beast, its hour come round at last,
Slouches toward Bethlehem to be born?

People with a liberal mind set have often quoted this last poem, but some do so with a certain amount of unease, and rightly. Accepting historical necessity, Yeats is not, as the American Jewish critic Harold Bloom pointed out, necessarily averse to this “rough beast.”[2]

Thus, liberal critics are never completely comfortable in the company of Yeats. In “Under Ben Bulben,” one of Yeats’s last poems and a general summary of his ideas, he writes:

You that Mitchel’s prayer have heard
“Send war in our time, O Lord!”
Know that when all words are said
And a man is fighting mad,
Something drops from eyes long blind,
He completes his partial mind,
For an instant stands at ease,
Laughs aloud, his heart at peace.
Even the wisest man grows tense
With some sort of violence
Before he can accomplish fate,
Know his work or choose his mate.

Bloom charged that Yeats “abused the Romantic tradition” in these lines. But Yeats would have shown Bloom the contempt he deserves; in one of Yeats’s letters we can read: “I am full of life and not too disturbed by the enemies I must make. This is the proposition on which I write: There is now overwhelming evidence that man stands between eternities, that of his family and that of his soul. I apply those beliefs to literature and politics and show the change they must make. . . . My belief must go into what I write, even if I estrange friends; some when they see my meaning set out in plain print will hate me for poems which they have thought meant nothing.”

Earlier Yeats had written of war, politics, and pleasant but self-defeating illusions. In “Nineteen Hundred and Nineteen” he surveyed both the halcyon pre-World War I years and the grim aftermath of war, civil war, and revolution:

We too had many pretty toys when young:
A law indifferent to blame or praise,
To bribe or threat; habits that made old wrong
Melt down, as it were wax in the sun’s rays;
Public opinion ripening for so long
We thought it would outlive all future days.
O what fine thoughts we had because we thought
That the worst rogues and rascals had died out. . . .

Now days are dragon-ridden, the nightmare
Rides upon sleep: a drunken soldiery
Can leave the mother, murdered at her door,
To crawl in her own blood, and go scot-free;
The night can sweat with terror as before
We pieced our thoughts into philosophy,
And planned to bring the world under a rule,
Who are but weasels fighting in a hole.

Yeats himself did not take an active part in the Irish civil war, and he may have felt a certain uneasiness about the physical side of the struggle:

An affable Irregular,
A heavily-built Falstaffian man,
Comes cracking jokes of civil war
As though to die by gunshot were
The finest play under the sun.

– “Meditations in Time of Civil War”

Yeats, it is true, spent much time contemplating and expressing himself on the great problems of the age and of the individual living in this age, but he never strayed far from whimsy. As typical of his poetry as anything he wrote is the neatly lyrical “To Anne Gregory,” addressed to the granddaughter of his friend and fellow playwright Lady Augusta Gregory:

“Never shall a young man,
Thrown into despair
By those great honey-colored
Ramparts at your ear,
Love you for yourself alone
And not your yellow hair:

“But I can get a hair-dye
And set such color there,
Brown, or black, or carrot,
That young men in despair
May love me for myself alone
And not my yellow hair.’

“I heard an old religious man
But yestemight declare
That he had found a text to prove
That only God, my dear,
Could love you for yourself alone
And not your yellow hair.”

I know of no English or American poet writing today who can approach even remotely Yeats’s lyrical power or his poetic shaping of strong and startling ideas. Most of today’s poets are professors of English or fine arts who grind out pedestrian or pretentious drivel, presumably for prestige within the academic commu­nity. And it is hardly conceivable that there are any campus publications, literary or otherwise, that would publish all of Yeats’s material were he writing today. What, for instance, would they do with these lines from “John Kinsella’s Lament For Mrs. Mary Moore”?:

Though stiff to strike a bargain,
Like an old Jew man,
Her bargain struck we laughed and talked
And emptied many a can . . . .

Perhaps Yeats was the culmination of that great, surging Romantic wave, now in recession.

Though the great song return no more
There’s keen delight in what we have:
The rattle of pebbles on the shore
Under the receding wave.

– “The Nineteenth Century and After”

Perhaps. And perhaps a revitalized and resurgent West can at least produce poets in the great tradition, who refuse to wallow in mud and make a career of destroying our language.

Sing the peasantry, and then
Hard-riding country gentlemen,
The holiness of monks, and after
Porter-drinkers randy laughter;
Sing the lords and ladies gay
That were beaten into the clay
Through seven heroic centuries;
Cast your mind on other days
That we in coming days may be
Still the indomitable Irishry.

– “Under Ben Bulben”

These lines also proved upsetting to Bloom, and understandably. Yeats here issues a clear tribal call for cultural unity by appealing to racial instinct and historical experience: blood and soil. A Jewish critic, who had never shared in the experience, but rather was steeped in another totally alien, and thus had no real comprehension of the soul-state from which the poet spoke, would, as a matter of course, feel hostile to such verse. Too bad for Bloom and his fellows that Yeats’s reputation is already established; they have now little other to do but to wring their hands and rend their garments in their studies.

William Butler Yeats: rooted in Ireland, a seeker in the Western tradition, a giant of our race and culture; like Nietzsche, a “conqueror of Time”; and, perchance, one of the heralds of the times to come:

O silver trumpets, be you lifted up
And cry to the great race that is to come.
Long-throated swans upon the waves of time,
Sing loudly, for beyond the wall of the world
That race may hear our music and awake.

– “The King’s Threshold”

Notes

[1] Joseph M. Hone, W. B. Yeats, 1865–1939 (1943).

[2] Harold Bloom, Yeats (1972).

mercredi, 26 mai 2010

Les femmes-champions dans la mythologie irlandaise

Les femmes-champions dans la mythologie irlandaise

 

d'après Peter Berresford Ellis

(Dictionary of Irish Mythology, Oxford, 1991)

 

boudicca.jpgPeter Berresford Ellis, historien et auteur de plusieurs nouvelles, a écrit aussi de nombreux ouvrages sur l'histoire et la culture celtiques, notamment The Cornish Language and its Literature (1974) et Celtic Inheritance  (1985). Il enseigne dans plusieurs universités et a présidé le premier Scríf-Celt,  soit la première foire du livre inter-celtique. Plus récemment, il a publié A Dictionary of Irish Mythology  (1987-1991/2ième éd.).

 

Dans ce dernier ouvrage, il mentionne notamment les «femmes-champions» de l'antique société irlandaise. Effectivement, comme dans toutes les sociétés celtiques primitives, les femmes bénéficiaient d'une parfaite égalité en droits avec les hommes. Elles pouvaient être élues à toutes les fonctions, hériter des richesses et détenir des propriétés de plein droit. En outre, les mythes et les sagas évoquent de nombreuses guerrières ou championnes. La plus célèbres des femmes de la mythologie irlandaise est Medb de Connacht. Au cours de l'une des innombrables batailles de Táin (il s'agit d'expéditions militaires en vue de s'emparer du bétail des tribus voisines; la mythologie irlandaise abonde en récits héroïques situés dans le contexte de telles expéditions), elle parvint à tuer le héros Cethren d'un coup de lance.

 

La mère du Roi mythologique Conchobhar, Nessa, est elle-même décrite comme une championne dans un passage du cycle relatant les exploits de son fils. Le héros le plus célèbre de la mythologie irlandaise, Cúchulainn, a été instruits en arts martiaux par Scáthach, une grande championne d'Alba (Ecosse). La sœur de cette Scáthach, Aoife, était également l'une de ces championnes. Quand Cúchulainn s'est mesurée à elle, il a dû avoir recours à un subterfuge pour la distraire et la vaincre.

 

La mythologie irlandaise évoque également Creidne, la championne du peuple des Fianna (une caste militaire dont les origines remontraient à 300 av. notre ère; les indépendantistes irlandais du 19ième siècle se nommaient en leur souvenir les «Fenians»; aujourd'hui le parti national-conservateur irlandais Fianna Fail, soit les «Soldats du Destin», rappelle leur existence; ils siègent au Parlement de Strasbourg à côté des représentants français du RPR). Autre championne: Coinchend, une guerrière aux dimensions monstrueuses, terrassée par le héros Art, un roi légendaire qui aurait vécu entre 180 et 250 de notre ère. A l'époque chrétienne, la «Vie de Sainte-Mochua de Balla» évoque deux guerrières dénommées Bec et Lithben. Il est significatif que dans toute la mythologie irlandaise, les batailles sont supervisées par des divinités féminines de la guerre.

 

L'histoire de l'Antiquité retient essentiellement le nom de la reine-guerrière Boudicca (Boadicea, Baudicée) de Bretagne (Angleterre) qui organisa un soulèvement contre les Romains en 60 de notre ère. Elle était la Reine des Iceni (une tribu qui vivait dans l'actuelle région anglaise d'East Anglia). Son nom signifie «La Victorieuse» (en langue irlandaise actuelle, Buadach; en gallois, Buddogal). Dans l'histoire médiévale irlandaise, la tradition nous rapporte l'existence au 13ième siècle d'une femme appelée Éabha Ruadh Mac Murchú, dont on dit qu'elle se nouait des pièces de fer dans ses longs cheveux roux avant chaque bataille.

 

Au 15ième siècle, Máire O' Ciaragáin se met à la tête de ses clans pour affronter les Anglais. On raconte qu'elle n'a jamais épargné un seul homme blessé ou assommé au combat. Un siècle plus tard, c'est l'une des Irlandaises les plus célèbres de l'histoire qui fait irruption sur la scène politique: Gráinne Ní Maillie, chef de son clan, leader d'une insurrection et capitaine de haute mer. Selon Sir Richard Bingham, c'est elle qui patronnait toutes «les rébellions du Connacht». Elle frappa tellement les imaginations anglaises que, selon le Lord Justice Drury, elle était «une femme qui avait dépassé les limites de sa féminité».

 

En somme, la tradition des femmes guerrières et championnes s'est perpétuée en Irlande en ce siècle avec l'indomptable Comtesse Markievicz (née Constance Gore-Booth), connue sous le nom de «Comtesse Rouge», parce qu'elle affichait haut et clair son socialisme. Elle fut la seule femme-officier en uniforme et en armes parmi les insurgés de la Pâques 1916. Elle est aujourd'hui une héroïne nationale en Eire. Condamnée à mort par fusillade par les tribunaux militaires britanniques pour avoir pris part à cette insurrection en pleine guerre, sur les arrières du front, elle fut grâciée «uniquement parce qu'elle était de sexe féminin». En décembre 1918, elle fut élue à la Maison des Communes britannique dans l'arrondissement de Saint Patrick à Dublin. C'était la première femme élue dans de telles conditions. Elle refusa de sièger dans la capitale ennemie, Londres, et rejoignit le Parlement des séparatistes, le Dáil Éirann, à Dublin. Elle devint ministre du travail le 2 avril 1919, dans le premier cabinet révolutionnaire de De Valera.

 

jeudi, 22 octobre 2009

10ème Congrès de l'ADSAV

congresadsavppbnovembre [1]


Article printed from :: Novopress Québec: http://qc.novopress.info

URL to article: http://qc.novopress.info/6709/10eme-congres-dadsav/

URLs in this post:

[1] Image: http://adsav.org/

dimanche, 06 septembre 2009

Hommage à Olier Mordrel

OM_Kemper_1929.jpg

Yann-Ber Tillenon:

 

Hommage à Olier Mordrel

 

Olier Mordrel, président d’honneur du Cercle “Kervreizh”, est mort subitement à Treffiagat, fin octobre (1985), le jour de la réouverture officielle de notre association. 

 

Olier Mordrel était né à Paris en 1901, dans une famille originaire du pays de Saint Malo. 

 

Olier Mordrel laissera le souvenir, chez ceux qui ont connu sa nature rude de corsaire et de fils de militaire, d’un patriote breton intégral, d’un homme fort et courageux, d’un païen qui a lutté toute sa vie pour gagner difficilement son pain sans que ses obligations n’entravent ses activités de révolutionnaire intelligent, riche de rêveries, d’actions et d’aventures.

 

Olier Mordrel, artiste, architecte, historien, politicien, journaliste, homme d’Etat, était un homme complet. Il a mené une existence aventureuse de  grand militant au service de son pays. Sans son audace, on parlerait aujourd’hui de la Bretagne comme de la Picardie ou du Poitou, d’une vague région touristique.

 

C’est Olier Mordrel qui a posé le problème breton en termes de nation et de révolution européenne. Au-delà de toutes considérations politiques et partisanes, nous devons rendre hommage à l’homme, à celui qui, avec  ses défauts et ses qualités, ses erreurs et ses vérités,  fut toujours très représentatifs de la  mentalité bretonne et fidèle aux valeurs européennes traditionnelles.

 

Breizatao-025cd.jpg

 

En effet, Olier Mordrel a  toujours été animé par la conception  celto-païenne du monde qui rassemble les  Bretons téméraires concevant la vie comme périlleuse et aléatoire. Mordrel le téméraire ne fut pas condamné trois fois à mort par hasard! Il a  voulu à sa manière remettre son  peuple sur les rails de l’histoire. Par sa volonté, il releva le défi de la décadence qui menace toute l’Europe actuelle.

 

L’étudiant des Beaux-Arts, l’architecte de Quimper, l’exilé en Argentine et en Espagne (1946-1971)  s’est toujours démarqué du nationalisme étroit et borné. Directeur du journal “Breizh Atao”  (1919-1939), de la revue “Stur” (1936-1942)  —où il tenta de dépasser l’idéologie nationale en  esquissant une vision impériale—, fondateur du “Parti Autonomiste Breton” (1931), du journal “L’Heure bretonne” (1940) et du “Comité Central des Minorités Nationales de France” (1927), il appréhende, comme tout grand Européen, sa vie comme une tragédie et non comme une comédie.

 

Là réside la grande différence entre la conception celto-païenne de l’histoire  —où l’homme, détenteur d’un “projet” historique est conçu comme “maître de son destin”, conception qui exclut tout sens présupposé de l’histoire—  et la conception judéo-chrétienne qui  soumet l’homme à une loi suprême et totalitaire, le réduisant à un point sur une ligne: l’histoire a  un sens donné, un début et une fin: tout n’est que spectacle.

 

Olier Mordrel, essayiste, journaliste du combat de renaissance britto-celtique  et historien, publiait régulièrement aux collections de François Beauval, sous son nom et sous le pseudonyme dd’Olivier Launay.  Ainsi “Les grandes découvertes du XXème siècle” (1974), “La civilisation des Celtes” (1980), “La littérature bretonne” (1980), “Histoire véritable de l’unité française” (1982).

 

Ecrivain de langues française et bretonne, on retrouve ses articles et poèmes dans les revues “Stur”, “Galv”, “Gwalarn”, “Al Liamm”  et “Preder”. “La Bretagne réelle” publie en 1966 et 1971 les deux tomes de “An nos o Skedin” qui  comprennent son  journal de prisonnier et le récit de son évasion, puis “Galerie bretonne”, “Le Breton projeté dans l’avenir”, “L’Emsav et ses catholiques”, “Dialogue celtique”, “Le vent de la pampa”, “Révision du nationalisme breton”, “de Charte en Charte”, “Vue d’ensemble et des Andes”,  “Vers un socialisme celtique”, “Celtisme et christianisme”, “la subversion chrétienne”, “Révision de la  politique bretonne”, “Après le manifeste”, “Celtisme et marxisme”, “En lisant Sav-Breizh”, “Le celtisme français”, “Sav-Breizh  répond”, “Trente ans”,  “Chants d’un réprouvé” (poèmes), “Pour une nouvelle politique linguistique”.

 

Le sentiment tragique de l’histoire a poussé Olier Mordrel à l’action. A  tout moment de son existence, il opéra des choix, fit des sacrifices et fut à l’opposé des mentalités actuelles héritées du finalisme chrétien où la vie n’est pas, ne doit pas être risquée, mais est déterminée par la  sécurité, la garantie et la  préservation d’une petite vie de bourgeois consommateur, sans intensité, dans l’attente du “salut” et du bonheur final promis après une carrière de petits calculs individualistes, complètement à l’opposé de l’esprit ludique et créateur des Celtes, que l’on retrouve chez Olier Modrel comme dans toute notre mythologie et tout au long de notre histoire.

 

Revenu en Bretagne après 28 ans d’exil, l’ancien chef de “Breizh Atao” publie trois livres importants: “Breizh Atao: histoire et actualité du nationalisme breton” (A. Moreau, 1973); “La Voie bretonne: radiographie du mouvement breton” (Nature et Bretagne, 1975) et “L’Essence  de la Bretagne” (Kelenn, 1977).

 

Olier Mordrel restera un exemple pour l’Europe dominée par la psychologie technocratique, à une époque où peut revenir la joie de “l’activisme tragique”. En cette fin de XXème siècle et de modernité, une nouvelle montée de la volonté de puissance des Européens, donc des Bretons qui en sont le résumé, doit donner naissance à un XXIème siècle qui sera celui d’une nouvelle modernité et d’une renaissance de nos peuples par la combinaison de leur conscience historique, de leur élan vital et de la technique moderne. Ils se choisiront un destin en reprenant conscience de leur lignée et en se réappropriant leur héritage. Ils doivent, à l’exemple d’hommes comme Olier Modrel, sacrifier le présent à l’avenir et l’intérêt individuel à la communauté.

 

Olier Mordrel, toujours courageux, franc et lucide malgré son grand âge, gardait sa vivacité intellectuelle légendaire. En 1979, il a publié “Les Hommes Dieux” chez Copernic, “L’Idée bretonne” chez Albatros et “Le Mythe de l’Hexagone” chez Picollec en 1981 et, en 1983, chez nathan, un grand album “la Bretagne et les pays bretons”.

 

Mais Olier Mordrel est malgré cela parti trop rapidement: inlassable créateur, il laisse plusieurs  ouvrages en suspens. Le passé n’est pas à dévaluer et nous n’oublions pas les grands hommes qui sont nos pères. Ils nous inspirent un futurisme constant, nous  servent de réacteur pour affronter l’avenir et nous rendre créateur de nous-mêmes dans l’histoire, c’est-à-dire démiurges.

 

Les Bretons historiques nous donnent un sens pour une montée en puissance collective; le progressisme est tombé dans le show-biz et la régression passéiste; c’est à nous, qui avons une conscience celto-européenne moderne, de produire une deuxième modernité sur la route défrichée par des hommes comme Olier Mordrel qui marche toujours à nos côtés comme un fier guerrier.

 

Il nous a confié un flambeau que nous devons mener jusqu’à la victoire.

 

Yann-Ber TILLENON.

(Hommage à Olier Mordrel paru dans la revue “Diaspad”, n°13, s.d.).

vendredi, 30 janvier 2009

La invasion de Italia por los galos y sus consecuencias para la Republica Romana

 

5651579.jpg

La invasión de Italia por los galos y sus consecuencias para la República Romana

por Gonzalo Fernández / http://www.arbil.org/

Una de las historias/leyendas constitutivas de Roma

El siglo IV a.C. empieza en Roma con su conquista de la ciudad etrusca de Veyes en 395 a.C. tras un asedio de diez años. Veyes está situada en la margen septentrional del Tíber a la que los latinos llaman latus tuscum (costado etrusco). Roma tiene problemas con Veyes a lo largo del siglo V a.C. por la disputa entre ambas ciudades por el dominio de Fidenas que controla la Vía Salaria o camino por el que la sal llega a Roma. Marco Furio Camilo conquista Veyes en 395 a.C. y esto acarrea cuatro efectos en Roma

 

- La génesis en la Urbe de una poesía épica gentilicia que canta las hazañas de sus héroes (vg. Aulo Cornelio Caso y Marco Furio Camilo) durante las varias contiendas con Veyes. Esa épica gentilicia pasa luego a los analistas y de éstos a Tito Livio quien la recoge en sus Décadas. En nuestros días se conocen esas hazañas por medio de los relatos en prosa de Tito Livio

 

- El  paso de una organización gentilicia de la milicia urbana a otra estatal durante el asedio de Veyes

 

- La metamorfosis de Roma desde una ciudad-estado a un estado territorial con la ocupación de los primeros territorios transtiberinos

 

- El dominio de la Vía Salaria

 

Los galos en Italia

 

El éxito romano con Veyes pronto va a verse empañado por la llegada de los galos a la Península Itálica. Hacia 400 a.C. unas tribus galas atraviesan los Alpes. Son los galos senones, ínsubres, cenómenos, lingones y boios. En Italia se apoderan de las colonias etruscas de Lombardía, el Trentino y la Emilia entre las que destacan las actuales ciudades de Milán, Trento y Bolonia. Los etruscos habían llegado hasta los Alpes desde la zona originaria de su cultura que se extiende entre los ríos Arno y Tíber a la que se puede llamar Etruria Nuclear o Propia. En su marcha hacia el norte los etruscos dominan a los habitantes de aquellas zonas de la misma manera con la que sujetan a los villanovianos aborígenes de la Etruria Nuclear: creando un sector dominado de la población parecido a los hilotas en Esparta o a los pies de polvo de Tesalia dentro del mundo griego.

 

El control de los aborígenes por los etruscos es menor en Lombardía, Trentino y Emilia que en la Etruria Propia. Además las colonias etruscas allende el Arno tienen menor importancia que las ciudades-estado de la Etruria Nuclear y sus fortificaciones son más imperfectas. Ello explica que los invasores galos conquisten con tanta facilidad Lombardía, Trentino y Emilia. Además los aborígenes sometidos a los etruscos en aquellas regiones no ofrecen resistencia a los galos pues igual les da verse dominados por los etruscos que por los galos.

 

Los galos intentan ocupar el Véneto. Sin embargo allí topan con una fortísima oposición de los vénetos. Los vénetos se hallan menos avanzados culturalmente que los etruscos pero no tienen esos sectores dominados que no hacen resistencia a los galos. Esto hace que los galos no puedan ocupar el Véneto. Una de esas tribus galas es la de los senones. Sus miembros descienden por el litoral adriático de la Península Italiana tras verse rechazados por los vénetos.

 

Los senones se dirigen hacia la Etruria Nuclear y el Lacio. Atacan la ciudad etrusca de Clusio. Acto seguido marchan contra Roma. Los romanos intentan frenarles en la batalla del río Alia. Su fecha se discute entre 390 y 387 a.C. La batalla del río Alia supone un desastre total de la milicia urbana de Roma. A lo largo de toda la historia del Pueblo-Rey el aniversario de la derrota de Alia figuraba en los calendarios como el dies alliensis (día de Alia). El dies alliensis recibe asimismo las calificaciones de dies religiosus (día religioso), dies nefastus (día nefasto) y dies fatalis (día fatal). El dies alliensis supone una auténtica jornada de luto nacional en cuyo decurso se prohíben en Roma todas las actividades públicas y privadas.

 

Los galos senones en Roma

 

La analística narra que tras la debacle del río Alia los galos se dirigen a Roma. Al llegar a la Ciudad Eterna los senadores les esperan inmóviles en el edificio del Senado. Los galos creen que los senadores son estatuas hasta que uno de ellos mesa la barba a un senador. Éste abofetea al galo desencadenándose la matanza de los senadores. Los romanos se refugian en el Capitolio. El jefe de los galos de nombre Breno ofrece la rendición a Roma a cambio de un botín en oro con su célebre sentencia Vae victis (!Ay de los vencidos!) . Al oírlo Marco Furio Camilo (el vencedor de Veyes en 395 a.C.) contesta con una frase lapidaria nec cum auro sed cum ferro (no con oro sino con hierro) que empuja a los romanos a tomar las armas y a rechazar a los galos de la Urbe.

 

Todo esto es muy bello pero no tiene consistencia histórica. La arqueología demuestra que en la primera mitad de la segunda década del siglo IV a.C. Roma queda destruida por completo. Incluso es probable que los supervivientes hubieran de pagar un tributo en oro a los galos senones para que éstos no se quedaran en Roma. Así lo hacen y se trasladan al norte de los ríos Arno y Rubicón donde se establecen con sus hermanos de etnia ínsubres, cenómenos, lingones y boios. Por tanto los latinos llaman Galia Cisalpina a la zona de Italia al norte de los ríos Arno y Rubicón y cuyo eje viene dado por la corriente fluvial del Pó.

 

La ciudad etrusca de Ceres y el ataque de Breno a Roma

 

Mucho más interesante es la noticia de Plutarco en sus Vidas Paralelas correspondiente a la biografía de Marco Furio Camilo. Plutarco recoge un texto de Aristóteles donde el Estagirita afirma también en Italia ha habido una resistencia a los galos, y que Roma se salvó gracias a un tal Lucio. Aristóteles se refiere al plebeyo Lucio Albino. Antes de que Breno cierre el cerco de Roma Lucio Albino recoge los sacra de la Ciudad Eterna que son los objetos que Eneas había salvado de Troya según la tradición. Entre aquellos sacra el más venerado es el Paladión. El Paladión consiste en una estatua de la diosa griega Palas Atenea (la Minerva de los romanos) supuestamente caída del cielo en el momento fundacional de Troya que Eneas salva antes de la entrada de los aqueos en la ciudad y lleva consigo a Italia. Lucio Albino traslada a la ciudad etrusca de Ceres los sacra de Roma,  las Vestales y el fuego sagrado de la Urbe que las vestales guardan.

 

Una vez pasado el peligro galo Roma agradece la ayuda de Ceres concediendo a sus habitantes el ius ceritium (derecho de los cérites). El ius ceritium otorga a los cérites la civitas sine suffragio es decir la ciudadanía romana menos las capacidades de votar en las elecciones (ius sufragii), acceder a las magistraturas romanas (ius honorum) y servir en la milicia urbana de Roma (ius militiae). Los cérites poseen el ius comercii (derecho a comerciar con ciudadanos romanos), ius conubii (derecho a casarse con ciudadanos o ciudadanas romanas), ius provocationis (derecho a ejercer la provocatio ad populum  o posibilidad de apelar ante los comicios curiados en la Urbe de las decisiones de los magistrados romanos que consideren lesivas a sus intereses), ius actionis (posibilidad de acudir a los tribunales de justicia del Pueblo-Rey) y  testamenti factio activa (capacidad de testar) y pasiva (posibilidad de beneficiarse de un testamento) reconocidas en Roma. Este último derecho permite a los cérites beneficiar en sus testamentos a ciudadanos romanos (testamenti factio activa) o beneficiarse de testamentos hechos por ciudadanos romanos (testamenti factio pasiva).  En esta época el ius ceritum aporta una situación muy favorable a los cérites pues el ius suffragii, el ius honorum y el ius militiae lo ejercen en Ceres que es su ciudad natal y su sitio habitual de residencia. A comienzos del siglo IV a.C. los cérites tienen las ventajas de la ciudadanía romana pero no sus cargas. Con el paso del tiempo el ius ceritum adopta un sentido más negativo cuando Roma lo otorga a extranjeros que no son cérites y viven en la Urbe pues éstos no pueden participar en la vida política de la Ciudad Eterna ni como electores ni como elegidos.

 

Los efectos en Roma de la invasión gala

 

Una vez pagado el tributo y conseguida la marcha de los galos senones la República Romana toma dos iniciativas:

 

- La reconstrucción completa de la Ciudad incluidas sus murallas

 

- La creación de la legión como unidad básica de la milicia urbana con 6.000 hombres que se dividen según la edad en las tres líneas sucesivas de príncipes (los más jóvenes en la primera línea), hastados (los menos jóvenes en la segunda línea) y triarios (los maduros en la tercera línea)

 

·- ·-· -······-·
Gonzalo Fernández,

 

Bibliografía Básica

 

BARFIELD, L. Northern Italy. Londres, 1971.

 

BERNAGOZZI, G. La storiografia romana dalle origini a Livio. Bolonia, 1953.

 

BLOCH, R. Tite Live et les premiers siècles de Rome. París, 1965.

 

EISEN, K.F. Polybiosinterpretationen. Beobachtungen zu Prinzipien griechischer und römischer Historiographie bei Polybios. Heidelberg, 1966.

 

HARRIS, W.V. Rome in Etruia and Umbria. Oxford, 1971.

 

HUBEAUX, J. Rome et Véies. París, 1958.

 

HUBERT, H. Les Celtes depuis l'époque de La Tène et la civilisation celtique. 3ª ed., París, 1958.

 

MAZZA, M. Storia e ideologia in Livio. Per un analisi storiografico della Praefatio ab Urbe condita. Catania, 1966.

 

PETZOLD, K.E. Studien zur Methode des Polybios und zu ihrer historischen Auswertung. Munich, 1969

 

SORDI, M. I rapporti romano-ceriti e l'origine della civitas sine suffragio. Roma, 1960.

 

TOZZI, P. Storia padana antica. Milán, 1972.

 

WOLSKI, J. La prise de Rome par les celtes et la formation de l'annalistique romaine, Historia, 5, 1956, págs. 24 - 52

00:05 Publié dans Histoire | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : histoire, gaule, gaulois, rome, antiquité romaine, celticité, celtisme | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

lundi, 12 janvier 2009

Les Gallois: une nation qui refuse de mourir

 

Wales%2.jpg

 

Archives de SYNERGIES EUROPEENNES / VOULOIR - 1989

 

Les Gallois: une nation qui refuse de mourir

 

par Gwyn DAVIES

 

Je voudrais vous parler aujourd'hui du Pays de Galles et des Gallois, une nation à laquelle on dénie le droit de vouer un culte à son héritage et d'avoir sa place ju­ridiquement parlant au sein de l'ordre international des Etats. Et pourtant cette nation survit toujours sous une forme re­connaissable et conserve tous les attributs né­cessaires d'un Etat, même si des forces exté­rieures l'empêchent d'exercer sa fonction souve­raine en toute indépendance. Cette nation a ma­gnifiquement résisté à la culture étrangère qu'on lui a imposée, une culture perverse, envahis­sante qui a déjà corrompu et édul­coré bien des peuples dans le monde.

 

A notre époque, où l'auto-détermination est in­voquée comme un droit naturel de l'homme et où les mouve­ments de libération nationale dans le tiers-monde sont acceptés avec la ferveur des croisades, il s'avère tout à fait impossible de contester intellectuellement la légi­timité de la lutte pour la liberté des populations indi­gènes d'Europe, enfermées dans les structures éta­tiques actuellement existantes. Nous sommes au cré­puscule des empires coloniaux et les derniers restes de ces vieilles instances peuvent aisément se repérer dans les colonies intérieures, retran­chées à l'intérieur même des frontières de la plupart des Etats européens mo­dernes. Le Pays de Galles est l'une de ces colonies.

 

C'est un objet d'étonnement pour tous d'apprendre que ce promontoire occidental des Iles Britanniques ait pu maintenir son identité et son caractère face à l'hostilité incessante de la puissance occupante au cours de près de vingt siècles. C'est l'histoire de cette résistance re­marquable que je vais tenter de vous ré­sumer aujourd'hui.

 

Du départ des légions romaines à l'époque arthurienne

 

Après le départ des légions romaines au début du Vième siècle, la province de Britannia dut assumer seule sa défense. L'historien grec Zo­zime nous relate cet épisode: «Les Bretons pri­rent les armes et, bravant le danger pour la sau­vegarde de leur indépendance, li­bérèrent les ci­tés des barbares qui les menaçaient». Les en­nemis des Bretons étaient nombreux et mena­çaient l'île de toutes parts. Le danger majeur, toute­fois, était représenté par l'invasion et l'installation sur les côtes est et sud de tribus germaniques migrantes, connues sous le nom collectif de Saeson,  ainsi que les nommait la population autochtone.

 

Pendant cette période romantique, cet «âge hé­roïque», l'Etat romano-breton se fragmenta en plusieurs petits sous-royaumes guerroyant entre eux. Chaque regulus luttait pour établir sa propre domination sur ces cymru (= compa­triotes), au moins avec le même zèle qu'il com­battait les barbares. Malgré les efforts de chefs comme Ambrosius Aurelianus et le légendaire Arthur, les Saeson  (que nous appelerons "Anglais" par faci­lité dans la suite de ce texte) poursuivirent inlassable­ment leur avance vers l'Ouest.

 

En 577, la bataille de Dyrham coupa les Bre­tons du sud-ouest de leurs compatriotes du nord. En 615, la bataille fatidique de Chester interrompit les communi­cations entre Ystrad Clud, le «Vieux Nord» et la ré­gion que l'on ap­pelera par la suite le «Pays de Galles».

 

A cette époque où les Anglais s'accrochent et s'installent, les Bretons parvinrent quand même à re­pousser des envahisseurs irlandais qui s'étaient établis sur leurs côtes occidentales. De puissantes dynasties s'imposèrent à Gwynedd, Deheubarth et Powys dans l'actuel Pays de Galles. Ce sont ces dynasties qui in­carnèrent au mieux la résistance des Gallois à l'agression an­glaise, agression violente dont témoigne l'horrible massacre de 1200 moines à Bargor-Is-Coed par Aethelfrith, Roi de Northumbrie. Ce grand mo­nastère et scriptorium  était un centre d'érudition et témoignait de la continuité de la civilisation romaine, dont les Bretons étaient les fidèles héritiers.

 

Le triomphe des Northumbriens à Chester per­mit d'étendre la puissance anglaise dans tout le pays bre­ton, situation qui connut son point cul­minant dans l'invasion de Gwynedd et la fuite de Cadwallon, son souverain, en Irlande.

 

Mais Cadwallon ne devait pas mourir ignomi­nieuse­ment en exil. Dès son retour, il leva une armée contre les Anglais qui furent mis en déroute en 632 à la ba­taille de Meigen. Leur chef, le puissant Edwin, mou­rut au com­bat. On apprend, par la plume de Bède le «Vénérable», propagandiste anti-breton viru­lent, quelles étaient les intentions de Cadwal­lon: «totum ge­nus Anglorum Brittaniae finibus erasorum se esse deliberans» («ils complotè­rent entre eux d'exterminer toute la race des Anglais présente dans le pays de Bretagne»). Que Cadwallon ait ou non planifié un tel géno­cide, il est clair que ses actions visaient la restau­ration de la domination bretonne dans les territoires conquis par les Anglais.

 

Le grand projet de Cadwallon ne se réalisa pas à cause de son décès précoce. Toutefois, sa marche vers l'est détruisit la prééminence de la Northumbrie. Les Bre­tons du Pays de Galles, bien que coupés de leurs frères du Nord, n'auront plus jamais à faire face à un danger an­glo-saxon aussi mortel pour leur existence.

 

Arrêt de la progression anglaise et guerres intestines

 

Les quatre siècles qui suivirent connurent bien des aléas, chanceux et malchanceux. Gallois et Anglais luttèrent pour déterminer le tracé de leur frontière commune, laquelle fut effective­ment fixée, grosso modo contiguë à celle d'aujourd'hui. Les Anglais dressèrent la Offa's Dyke  (= la Digue d'Offa), une ligne de fortifi­cations en terre le long de la frontière, prouvant une mutation dans la philosophie politique an­glaise: les Gallois ne doivent plus être conquis mais «contenus».

 

Au-delà de la Dyke, les Gallois se livrèrent à d'incessantes querelles fratricides; des royau­mes ri­vaux se combattaient mutuellement, as­sortissant leurs luttes de changement d'alliances si rapides que l'image que nous avons de cette époque est particuliè­rement confuse. Mais le grand legs laissé à l'histoire par ces roitelets gallois, c'est le soutien qu'ils ont ac­cordé à la tradition bardique. Grâce à ce patronage, les Gallois purent atteindre un haut degré de civi­lisation, unique en soi et qui mérite parfai­tement le qualificatif de «classique». Cette culture représente l'une des plus an­ciennes traditions littéraires d'Europe. Le Ox­ford Book of Welsh Verse commence par une œuvre de Taliesin, un poète du VIième siècle. Le premier poème présenté dans le Oxford Book of English Verse  date du XIVième siècle!

 

Ces poèmes composés il y a quinze siècles nous sem­blent toujours d'une importance vitale au­jourd'hui, aussi vitale qu'au moment de leur conception. Lais­sez-moi illustrer cela en citant un vers de Y Godod­din, une élégie guerrière de Aneirin, datant du VIième siècle:

«Gwyr a aeth Gatraeth oedd ffraeth eu Llu,

Glasfedd eu harcwyn a gwerwyn fu,

Trichart trwy beiriart yn catau,

Ac wedi elwch tawelwch fu».

 

Aux yeux de beaucoup, la littérature galloise atteint son apogée dans le Mabinogion, une collection de douze récits incarnant plus de mille ans de narration bardique: ce sont des ré­cits comme Culhwch ac Ol­wen, une romance arthurienne qui anticipe l'Historia Regum Bri­tanniae de Geoffrey of Monmouth, et The Dream of Macsen Wledig,  une épopée ayant pour hé­ros central Magnus Maximus, l'Em­pe­reur Maxence, l'«usurpateur» de l'Empire d'Oc­cident au IVième siècle.

 

Un code de lois

très modernes

 

Mais les Gallois n'étaient pas que des poètes. Sous la férule d'un chef du Xième siècle, Hywel Dda («le Bon»), un code de lois complet fut es­quissé et main­tenu en pratique jusqu'à ce que la conquête anglaise ne l'annule. Ce code, rédigé en gallois, contenait des idées juridiques révo­lutionnaires pour l'époque: les femmes pou­vaient réclamer une compensation lorsqu'elles étaient battues par leurs maris et revendi­quer une part de propriété égale en cas de divorce; le vol n'était pas punissable si le but de l'acte dé­lictueux était la survie physique; un fils illégi­time avait des droits égaux au patrimoine de son père, comme tous les autres fils.

 

Jacques Chevalier écrit que «le peuple du Pays de Galles était le plus civilisé de son époque et avait at­teint le plus haut degré d'intellectualité... Le Pays de Galles au Xième siècle était le seul pays d'Europe possédant une littérature natio­nale à côté d'une litté­rature impériale en latin».

 

Les années qui ont immédiatement suivi la conquête normande de l'Angleterre furent trau­matisantes pour les Gallois. Des aventuriers normands se rassem­blaient à l'Ouest pour se tailler des fiefs et de la puis­sance. Le Pays de Galles, malgré sa division en un réseau de petits royaumes, résista aux envahisseurs avec da­vantage d'efficacité que les royaumes anglo-saxons. Lorsque les Normands tuèrent à Has­tings le Roi Harold, ils emportèrent, d'un coup, un royaume centralisé, mais lorsqu'ils élimi­naient un petit chef gallois, ils n'enregistraient qu'un succès local.

 

Néanmoins, la marée montante de la conquête nor­mande finit par battre les contreforts des royaumes gallois et, au début du XIième siècle, le destin des dynasties autochtones semblait scellé.

 

Conquête normande et

«âge des Princes»

 

Mais la tenacité des Gallois s'avéra aussi âpre que l'appétit des Normands. Dans sa Descriptio Kam­briae,  Geraldus Cambrensis, prélat «cam­bro-nor­mand» du XIIième siècle, écrit à propos des Gallois que leur esprit «est entière­ment voué à la défense de leur pays et de leur liberté; c'est pour leur pays qu'ils se battent, pour leur liberté qu'ils œuvrent; pour cela, il leur semble doux, non seulement de lutter l'épée à la main, mais aussi de mettre leur vie à dispo­sition... Lorsque sonne le clairon de la guerre, les pay­sans abandonnent leur charrue et se pré­cipitent sur leurs armes, avec la même promp­titude que le courtier vers sa cour».

 

Les historiens surnomment les 300 années qui suivi­rent la prise du pouvoir par les Normands d'«Age des Princes». Pendant toute cette pé­riode, les chefs gallois comme Owain Gwynedd et Lord Rhys de Deheubarth luttèrent vaillam­ment pour résister aux incursions étrangères et pour unir leurs turbulents sujets en une nation capable de résister aux menaces extérieures.

 

Pendant cette époque, les Gallois enregistrèrent plu­sieurs victoires importantes, comme la des­truction d'une armée normande et flamande à Crug Mawr en 1136, l'humiliation de Henri II Plantagenet à Basing­werk en 1157 et à Cadair Berwyn en 1165. Mais mal­gré ces victoires, la résistance des chefs gallois a toujours été frei­née par les guerres fratricides endé­miques. Ces luttes intestines s'expliquent pour une part par le système des héritages, lequel, même s'il est équitable, divise et partitionne les terres. Con­trai­re­ment au système de la primogéniture ap­pliqué en An­gleterre, où le fils aîné hérite de l'en­tièreté des pro­priétés de son père, en Pays de Galles, tous les fils ont droit à une part égale de la propriété paternelle, ce qui engendre des ri­valités et des antagonismes sur une base inter-familiale. Ces disputes sont alors exploi­tées, encouragées et soutenues par des forces exté­rieures et intéressées.

 

Le seul espoir de conserver l'indépendance, c'était d'établir un Etat unitaire. Les efforts de la Maison des Gwynedd visaient un tel objectif. Sous l'égide de Llywelyn Fawr ("le Grand") et de son petit-fils, Lly­welyn ap Gruffudd, les Gwynedd prouvèrent leur prédominance sur toutes les autres dynasties autoch­tones. Ce clan de chefs chercha à fonder une structure féodale semblable à celle des Normands; leur effort connut son apogée lors du Traité de Montgo­mery de 1267, par lequel la Couronne anglaise reconnaît le droit de Llywelyn ap Gruffudd à porter le titre de «Prince de Galles» et à avoir le droit de recevoir l'hommage des autres princes mineurs.

 

Les Anglais deviennent maîtres du pays

 

Une telle concession n'a pu être arrachée que par moyens militaires car les Anglais auraient autrement refusé d'abandonner leurs projets de rapines et n'auraient jamais accepté un com­promis politique. Mais inévitablement, la toute-puissance de l'Empire anglais et la volonté in­domptable d'Edouard I, combi­nées, ruinèrent les aspirations des Gwynedd. En 1282, Llywe­lyn est tué et ses terres démembrées.

 

Les succès anglais, dus aux armées nombreuses et à la finance génoise, ont été renforcés par la construc­tion d'un réseau de puissantes forte­resses garnies de garnisons permanentes, sym­boles de l'autorité royale et destinées à surveil­ler et à réprimer la population autochtone. Un chroniqueur anglais de l'époque écri­vit: «L'histoire du Pays de Galles arrive à sa fin». Ce jugement était assurément fort prématuré! Face à l'arrogance anglaise, les Gallois refusè­rent de recon­naître leur défaite.

 

Les Anglais durent déployer une formidable puissance militaire pour mater de nombreuses rébellions, dont la plus sérieuse fut celle menée par Madog ap Llywelyn en 1294-95. Ce soulè­vement, pour être contré, exigea une campagne de neuf mois et la mobilisation de 35.000 hommes. Il empêcha la réalisation du plan d'Edouard d'envahir la France.

 

De nombreux Gallois avaient fui leur pays pour se rendre en France afin de poursuivre la lutte contre l'ennemi comme l'avaient fait les Wild Geese  (= les «Oies Sauvages») d'Irlande. Le plus connu de ces exilés fut Owain Lawgoch (= «la Main Rouge»), qui se proclama Prince de Galles et Capitaine de France. Le Duc Yvain de Galles, ainsi qu'il fut baptisé par les Français, commanda la flotte française qui s'empara de Guernesey. Yvain retournait en son pays lorsque le Roi de France le rappela pour investir La Rochelle  et entrer dans le Poitou. Le Pays de Galles s'est sou­venu des gestes d'Owain et les récits contant sa bra­voure ont été chantés à profusion par les Bardes. La Couronne anglaise voyait en lui une telle menace qu'elle loua les services d'un assassin pour le tuer lors du siège de Mortagne-sur-Mer.

 

Owain Glyndwr, le plus grand et le plus célèbre des patriotes gallois

 

Mais à peine un quart de siècle s'écoule après l'assassinat du premier Owain, qu'un autre se dresse, Owain Glyndwr, le plus grand et le plus célèbre des patriotes gallois. Les exploits de ce héros inspirèrent de nombreux esprits et ce n'est pas un hasard si les nationalistes activistes gal­lois d'aujourd'hui, qui s'attaquent aux propriétés détenues par des Anglais dans tout le Pays de Galles, ont choisi de s'appeler «Meibion Glyndwr» ou «les Fils de Glyndwr».

 

Au tournant du XVième siècle, le Pays de Galles était travaillé par le ressentiment. Aucun Anglais ne pou­vait être mandé devant une cour de justice par un Gallois et dans les arrondisse­ments ruraux (les bo­roughs),  la détention des terres et le commerce étaient des privilèges ex­clusifs des planteurs anglais. Le Parlement, averti de la colère des Gallois, émit une re­marque méprisante: «Qu'avons-nous cure de ces pendards et va-nu-pieds?». Dans une telle atmo­sphère, Glyndwr fut proclamé «Prince de Galles» et, sous les acclamations ferventes de son peuple, il fut salué comme le sauveur tant attendu, le fils du destin, l'icône des prophéties bardiques.

 

De 1400 à 1415, le Pays de Galles connut le tumulte et les feux de la rébellion, menaçant du même coup la construction de l'Angleterre mo­derne. En 1404, la plus grande année de Glyndwr, le jeune chef n'avait aucun rival en Pays de Galles; même les grandes for­teresses royales de Harlech et de Aberystwyth étaient tombées entre ses mains. Cette année-là, Owain convoqua son premier parlement national à Machynl­leth et, en présence d'émissaires d'Es­pagne, de France et d'Ecosse, avec la béné­dic­tion du Pape d'Avignon, il fut couronné for­mellement Dei Gratia Princeps Walliae  (= Prin­ce de Galles par la Grâce de Dieu). On éla­bora des plans pour détacher l'Eglise du Pays de Galles de la tutelle de Canterbury et pour fon­der des universités dans le nord et le sud du pays. Ces plans attestent le projet authentique­ment national de Glyndwr.

 

La défaite de ses alliés en Angleterre, de ses co-si­gnataires du Tripartite Indenture  qui vou­laient parta­ger l'Ile de Bretagne en un nord, un sud et un ouest, pesa considérablement sur la stratégie d'Owain; même l'aide d'une armée française ne put garantir son invul­nérabilité. Entre-temps, avec toutes les res­sources de la puissance anglaise dirigées contre lui, Glyndwr perdit du terrain. Mais si l'étau royal se re­fermait sur lui, Owain ne fut jamais battu définitive­ment sur le champ de bataille. Vers 1412, ses activités se résumaient à des coups de guerilla. Les légendes entourant son personnage se multiplièrent et s'amplifièrent. Glyndwr dis­parait de la scène vers 1415 et un voile de mystère entoure sa mort. Un chroniqueur gal­lois de cette époque relate que «la majorité af­firme qu'il est mort; les devins disent qu'il n'est pas mort».

 

Les Tudor, une dynastie galloise oublieuse

de ses racines

 

Bien qu'elle ait été écrasée par un Etat dont la popula­tion était quinze fois supérieure et dont les richesses étaient incomparablement plus im­portantes, la nation galloise, par sa guerre d'indépendance, s'était signa­lée à l'attention de toute l'Europe. A la Conférence de Constance de 1415, la délégation française maintint avec succès que le Pays de Galles était une nation dis­tincte en tous points de l'Angleterre. Les efforts de Glyndwr n'avaient pas été vains.

 

Depuis l'échec de Glyndwr jusqu'aujourd'hui, il a été refusé au peuple gallois le droit à l'auto-détermina­tion. Même l'accession de Henry Tu­dor au trône d'Angleterre avec l'appui d'une ar­mée galloise, ne déboucha pas sur une recon­naissance de la spécificité galloise. En effet, le couronnement d'un roi d'Angleterre de nationa­lité galloise retarda considéra­blement la lutte de libération car les membres les plus compétents de la gentry  galloise abandonnèrent leur rôle traditionnel de chefs du gwerin  (le peuple, le Volk)  pour partir en Angleterre à la recherche de postes, de richesses et d'influence.

 

La politique des Tudor fut d'assimiler le Pays de Galles à l'Angleterre et, en conséquence, de détruire l'identité nationale distincte des Gal­lois. A cette fin, deux actes d'union passèrent en 1536 et en 1543. Le préambule de celui de 1536 mérite d'être cité ici: «... le dominion,  la princi­pauté et le pays de Galles est in­corporé, annexé, uni et soumis à et sous la Cou­ronne impériale de ce Royaume... parce que dans le dit pays, principauté et dominion  existent divers droits, usages, lois et coutumes très différents des lois et coutumes de ce Royaume et aussi parce que le peuple du dit dominion  possède un langage quotidien utilisé dans le dit dominion  ne res­semblant pas et n'ayant pas la même euphonie que la langue mater­nelle utilisée dans le Royaume... Son Altesse, en conséquence, mani­feste l'intention de les réduire à l'ordre parfait et à la connaissance des lois du Royaume et d'extirper complètement les coutumes et usages singuliers et sinistres différant de ce qui est en ce Royaume... Elle a ordonné que le dit pays et domi­nion  de Galles sera à l'avenir, pour tou­jours et dorénavant incorporé et annexé au Royaume d'Angleterre».

 

La traduction de la Bible en gallois sauve la langue de la disparition

 

Le gouvernement anglais fit donc de la langue galloise un problème politique. La situation est restée telle jusqu'à nos jours. La survie de la langue, exclue de la vie publique et des ins­tances légales, doit beaucoup à la traduction de la Bible en gallois, terminée en 1588. Cette tra­duction permit à la langue de ne pas dégénérer à la suite de l'effondrement de l'ordre bardique et fournit la base linguistique nécessaire au Y Diwygiad ou «Grand Réveil». Le revival  reli­gieux qui souffla sur le pays au XVIIIième siècle fut alimenté par des prêcheurs charisma­tiques qui s'adressaient en gallois et en plein air à des foules de milliers de personnes. Ce qui est plus significatif encore, c'est que ce revival permit la création d'écoles itinérantes dont l'objectif était d'enseigner au gwerin  comment lire afin qu'il soit instruit des principes de la foi chrétienne. Bien sûr, la langue d'enseignement était le gallois. A la fin du XVIIIième siècle, le nombre total des élèves fré­quentant les classes de jour et de nuit s'élevait à quelque 300.000 et, avec les 3/4 de la population ayant fréquenté les écoles, le Pays de Galles était la région la plus lettrée d'Europe à cette époque.

 

L'éducation du gwerin  conduisit, inévitable­ment, à sa politisation et, dans les premières années du XIXième siècle, une agitation sé­rieuse agita le sud nouvellement industrialisé et les régions centrales encore rurales. En 1831, les ouvriers de Merthyr, la ville du fer et du charbon, brandirent le drapeau rouge et prirent d'assaut les positions tenues par les troupes gouver­nementales. Il fallut quatre journées de combat, avec l'appui de renforts en soldats ré­guliers, pour que le soulèvement soit maté. Huit années plus tard, la ville de Newport lançait à son tour un défi à l'Etat britan­nique.

 

Les Chartists  gallois constataient que leur lutte pour la justice sociale ne réussirait pas s'ils n'adoptaient pas les méthodes qui avaient fait le succès de la Guerre d'Indépendance américaine et de la Révolution française. En conséquence, ils décidèrent d'utiliser la force physique pour renverser l'ordre existant. Une armée, composée surtout de «sans armes», comptant 20.000 hommes, se rassembla pour marcher sous la bannière de CYFIAWNDER (= Justice) afin de fon­der une République Galloise (Silwian Repu­blic). L'entreprise échoua sous le feu des canons du 45ième Régiment à Pied.

 

Après les révoltes des Chartists, les Anglais décident de détruire la langue et la culture galloises

 

Les autorités anglaises étaient bien conscientes que le Pays de Galles était au bord de la révo­lution. Le Times  rapporte que «le Pays de Galles est devenu aussi volcanique que l'Ir­lande», tandis que le Mor­ning Herald  dé­clare: «Le Pays de Galles est devenu un théâtre où l'on proclame des doctrines révolution­naires, où l'on prêche la violence et l'effusion de sang. Les horreurs de la "petite guerre des Chartists  ont frappé les dominions  de la reine, qui n'avaient plus été souillés par le sang de la guerre civile depuis le temps d'Owen Glando­wer (sic)».

 

La solution préconisée par les Anglais était simple: détruire la langue galloise et le pays de­viendrait ainsi une province anglaise comme les autres. A cette fin, des commissaires sont en­voyés au Pays de Galles pour récolter des "preuves" du primitivisme et de l'ignorance du peuple autochtone. Et bien que sept huitièmes de la population était de langue galloise, les commissaires unilingues interrogeaient les té­moins en anglais. De ce fait, ce n'est pas une surprise d'apprendre que leur rapport concluait les choses sui­vantes: «Le langage gallois des­sert considérablement le Pays de Galles et constitue une barrière complexe au progrès mo­ral et à la prospérité commerciale du peuple... A cause de sa langue, la masse du peuple gallois est inférieure au peuple anglais dans tous les domaines du savoir pratique et technique».

 

Armées d'un pareil rapport, les autorités possé­daient enfin l'excuse qu'elles avaient recherchée pour asseoir une politique d'éducation obliga­toire en anglais, afin d'angliciser le gwerin  de façon si systématique qu'il serait totalement as­similé. Cette politique fut imposée sans am­bages et les enfants des écoles que l'on enten­dait parler leur langue maternelle interdite étaient punis et humiliés. Pas de surprise donc que de telles mesures, appliquées systémati­quement pendant plu­sieurs générations, combi­nées à l'immigration mas­sive d'Anglais dans les zones industrielles, s'avérèrent catastrophiques pour l'avenir de la langue galloise. Alors que 88% de la population étaient de langue galloise vers la moitié du XIXième siècle, la proportion est, aujourd'hui, d'environ 20%. Comme prévu, la perte de la langue a conduit à la perte de la conscience nationale et des pans entiers de la société galloise ont transféré leurs allégeances au concept par­faitement illusoire de la British­ness,  véhicule à peine voilé de la suprématie anglaise.

 

De telles défections se sont répercutées sur la scène politique. Dans les dernières années du XIXième siècle, un puissant mouvement de home rule  naît au Pays de Galles sous l'appellation de Cymru Fydd  (= Le Pays de Galles du Futur). Cette organisation doit être mise en parallèle avec le mouvement contempo­rain Young Ireland  (= Jeune Irlande): elle vise à créer un parti national pour le Pays de Galles, qui, au dé­but, devait se développer à l'intérieur du parti libéral gallois. Mais le Cymru Fydd  était profondément di­visé et sa vision d'un Pays de Galles autonome dans une Grande-Bretagne fédérale, marquée par l'éthos impérial anglais, n'avait rien de révolutionnaire. Par la suite, le lobby du home rule capota par la défection de ses chefs, partis à Londres pour exercer des respon­sabilités gouvernementales, comme Tom Ellis et, plus tard, David Lloyd George.

 

Premières menées activistes

 

Il fallut attendre 1925 pour que le Pays de Galles ait son premier parti national indépen­dant, avec l'apparition du Plaid Genedlaethol Cymru,  dénommé ultérieurement Plaid Cymru  (Le Parti du Pays de Galles). Sous la présidence de Saunders Lewis pen­dant l'entre-deux-guerres, le parti reçut son principal soutien de la part d'écrivains et d'intellectuels et cher­chait à donner au Pays de Galles une doctrine natio­naliste rigoureuse qui mettait l'accent sur la préserva­tion de l'identité des communautés de langue galloise contre toute installation étran­gère. Cette campagne eut pour moment fort l'incendie d'une école de l'armée de l'air, où les pilotes de bombardiers devaient être en­traînés, que les militaires avaient fait construire au cœur du Pays de Galles. Cette action provoqua l'in­culpation et l'emprisonnement de trois membres importants du parti. Ce fut un procès célèbre qui fournit à la cause nationaliste l'appui d'un public nou­veau. Mais le parti ne put enre­gistrer que de très faibles succès électoraux et la plupart des critiques le dénoncèrent pour ses tendances dangereusement fas­cistes.

 

Pendant la seconde guerre mondiale, le Plaid Cymru resta résolument neutre, affirmant que son premier devoir était de défendre la nation galloise et non un Etat britannique artificiel; cette politique aboutit à l'arrestation et à l'em­prisonnement de beaucoup de membres de l'or­ganisation nationaliste.

 

Après la guerre, le Plaid Cymru  se débarrassa de ses principes les plus pointus afin de s'attirer un électorat plus nombreux; ce fut une politique qui s'avéra fruc­tueuse quant au nombre de sièges gagnés à West­minster mais qui compro­mit l'intégrité de la cause na­tionaliste au Pays de Galles. Dans sa volonté d'obtenir une repré­sentation en Angleterre, le Plaid avait trahi sa nation et sa langue. Beaucoup d'activistes se sentirent frustrés par cette "trahison" de la di­rection du Plaid,  dont le président en exercice se décrivit un jour sottement comme un «socialiste intel­lectuel britannique». Cela dé­boucha sur la formation de plusieurs groupes alternatifs et plus radicaux, dont le plus réussi fut le Cymdeithas yr Iaith Gynraeg  (La Société de la Langue Galloise).

 

Une action directe

et non violente

 

L'organisation opta pour une action directe non vio­lente, de façon à attirer l'attention sur le sta­tut infé­rieur de la langue galloise. Les cam­pagnes du mou­vement ont ainsi lutté pour l'élimination de la signali­sation routière en an­glais, pour l'installation d'un bon service de ra­diodiffusion gallois (cet objectif a été partielle­ment réalisé avec l'apparition de la chaîne S4C) et l'accroissement de l'usage du gallois dans la vie publique. Actuellement la Cymdeithas  met l'accent sur l'importance qu'il y a d'accroître l'enseignement moyen en gallois et fait cam­pagne pour obtenir un nouveau Language Act  pour le Pays de Galles.

 

Dans les années 60, certains radicaux gallois fu­rent impliqués dans des organisations proto-ter­roristes comme la Free Wales Army  (FWA) et le Mudiad Amddifyn Cymru  (MAC; Le Mou­vement de Défense du Pays de Galles). Ces groupes se formèrent en ré­ponse à l'échec des méthodes constitutionnelles visant à éviter la destruction des communautés galloises en proie aux autorités anglaises. Lorsque plusieurs dis­tricts unilingues gallois furent mis sous eau afin de fournir de l'eau et de l'électricité à bon mar­ché à des villes anglaises, les tracés d'aqueducs et les pylônes devinrent les cibles légitimes des attaques à la bombe des groupes en question.

 

L'investiture de Charles comme Prince de Galles au cours d'une cérémonie arrogante rap­pelant les conquêtes anglaises déclencha une campagne accrue d'attentats à la bombe dans tous le Pays de Galles. Mais les autorités étaient bien conscientes de la me­nace et, le jour même de l'investiture, les membres di­rigeants de la FWA furent traduits en justice et em­prisonnés pour appartenance à une organisation quasi mi­litaire. Incident plus sérieux, le même jour, deux membres du MAC sont tués par l'ex­plosion prématu­rée de leur engin, alors qu'ils étaient en route pour at­taquer la voie de chemin de fer que devait emprunter le train royal. On soupçonne, à bon droit semble-t-il, que la machine infernale avait été «arrangée» par les services de sécurité… L'arrestation et l'inculpa­tion des membres de la FWA et du MAC mit un terme aux attentats à la bombe mais la stratégie de l'«action di­recte» constitue toujours une option pour le Meibion Glyndwr.  Ce groupe na­tionaliste clandestin a mené une campagne d'at­tentats incendiaires contre les pro­priétés possé­dées par des Anglais dans les dis­tricts de langue galloise au nord et à l'ouest du pays. Le Mei­bion Glyndwr  prend pour appui le souci des Gallois face à l'impact destructeur du «syn­drome de la rési­dence secondaire». L'organi­sation nationaliste a tra­vaillé à grande échelle et elle jouit indubitablement d'un appui populaire tacite, ce qui explique qu'elle n'a pas pu être repérée et est restée opérationnelle de­puis neuf années.

 

Pour en terminer avec ce tableau nécessaire­ment schématique des bases de l'identité gal­loise, je vou­drais citer les mots de Saunders Lewis, écrits pour une émission de la BBC en 1930, émission interdite parce qu'elle était «forgée pour enflammer les sym­pathies natio­nalistes»: «Il ne peut y avoir de lende­mains heureux pour le Pays de Galles si nous ne nous montrons pas capables de passer à l'action, de nous imposer une auto-discipline, de nous don­ner un esprit fort et viril d'indépendance et si nous ne cultivons pas la fierté qui a animé nos ancêtres. Ce dont le Pays de Galles d'aujour­d'hui et de demain a besoin, c'est de l'appel de l'héroïsme. La touche d'héroïsme n'a ja­mais vibré dans la politique galloise. Et c'est la raison pour laquelle je suis un nationaliste politique, parce que le nationalisme est appel à l'action et à la coopéra­tion, parce que le natio­nalisme re­ferme les di­visions de classe et im­pose aux ri­ches et aux pauvres, aux clercs et aux travail­leurs, un idéal qui transcende et enri­chit l'indi­vidu: l'idéal de la nation et du terroir».

 

Gwyn DAVIES.

Conférence prononcée le 11 mars 1989 dans les salons de l'Hôtel Bedford à Bruxelles.