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mardi, 11 janvier 2022

Les religions des Celtes et des peuples balto-slaves: une étude classique de Vittore Pisani

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Les religions des Celtes et des peuples balto-slaves: une étude classique de Vittore Pisani 

Giovanni Sessa

Source: https://www.paginefilosofali.it/le-religioni-dei-celti-e-dei-popoli-balto-slavi-uno-studio-classico-di-vittore-pisani-giovanni-sessa/


Vittore Pisani, éminent chercheur décédé en 1990, a apporté du prestige à la tradition des études philologiques et historico-religieuses. Il enseignait aux universités de Florence et de Cagliari et, plus tard, à l'université de Milan, qui avait déjà intégré l'Académie royale scientifique et littéraire, où Graziadio Isaia Ascoli de Gorizia avait auparavant enseigné. L'illustre savant de la région d'Isonzo a eu le mérite de libérer la glottologie des contraintes méthodologiques qui la rattachaient jusqu'alors à l'histoire comparée des langues. Pisani a travaillé sur la base de l'intuition d'Ascoli. C'est ce que rappelle Maurizio Pasquero dans l'introduction d'un important ouvrage du philologue, Le religioni dei Celti e dei Balto-Slavi nell'Europa preeristiana. Le volume vient d'être publié par Iduna editrice (pour les commandes : associazione.iduna@gmail.com, pp. 101, euro 12.00).

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La première édition du livre était sortie en 1950. Il s'agissait d'une réélaboration d'une série d'écrits que l'auteur avait publiés dans la prestigieuse Storia delle religioni, éditée par UTET et dirigée par Pietro Tacchi Venturi, connu comme le "jésuite de Mussolini". Le texte a la rigueur d'une étude académique mais est en même temps capable d'impliquer le lecteur non-spécialiste.

Le trait qui se dégage immédiatement des œuvres de Pisani est la dimension fabulatrice et impliquante de la prose. Le volume en question s'ouvre sur une discussion de la religion des Celtes. L'auteur part de la présentation de l'état "fluide" dans lequel se trouvait l'Europe primitive, suspendue entre les cultes chthoniques-féminins des religions indo-méditerranéennes et la nouvelle vision dont les envahisseurs eurasiens étaient porteurs. Ces derniers avaient une vision patrilinéaire et, par conséquent, leur monde était "socialement stratifié, élevant [...] des figures majoritairement masculines dans leur panthéon céleste" (p. IV). Dans l'exégèse des cultes des peuples étudiés, un mélange des deux cultures émerge. Du point de vue de la méthode, il faut tenir compte du fait que les informations dont nous disposons sur la période la plus archaïque des religions des Celtes et des Balto-Slaves sont limitées et, dans les périodes ultérieures, viciées par les interprétations romaines et chrétiennes.

Au centre de la religion celte se trouvait la caste sacerdotale des druides, qui transmettait oralement le savoir sacré. Le Keltiké des origines avait l'apparence d'"une religion homogène, polythéiste, fortement liée aux manifestations de la nature" (p. V) mais, au fil du temps, elle a subi une transformation. Les druides exerçaient à la fois des fonctions sacerdotales, thaumaturgiques et magiques et, selon la leçon de Lucian : " ils transmettaient la doctrine de la transmigration des âmes. Mais cela [...] n'excluait pas la croyance en un "autre monde"" (pp. V-VI). Les druides officiaient lors du rituel, car ils étaient les intermédiaires de la divinité suprême, que César identifiait au Dis pater. Parfois, ils présidaient à des sacrifices humains. Ces pratiques sont stigmatisées négativement par les commentateurs gréco-latins. En réalité, la pratique de "la décapitation des ennemis n'était pas un acte de cruauté gratuite, les Celtes honoraient un vaillant adversaire et, pour célébrer sa mémoire, conservaient et exposaient sa tête" (p. VI). La triade divine suprême était représentée par Taranis, " la foudre ", Teutates, le " dieu des armées ", Esus, le dieu " sanglier ", suivis de divinités mineures comme Ogma, le dieu " éloquence ", et Cernunnus, le dieu " cerf ", en référence au Paśupati védique, Seigneur des animaux. Il y avait aussi des dieux féminins et une foule de nymphes, qui étaient honorés dans des sanctuaires naturels en plein air.

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La religion des Slaves, selon Pisani, était un système hénothéiste caractérisé par un arrangement dans lequel excellait Perun, le dieu suprême, auquel le chêne était consacré. Il était souvent représenté sous la forme du feu, prenant également le nom de "dieu de la chaleur de l'été". Il y avait aussi des dieux anthropomorphes et d'autres avec plus d'un buste ou plusieurs bras, des caractéristiques qui indiquent de possibles influences orientales. Chez les Slaves, la déification des phénomènes naturels était très répandue : le feu, les sources, les forêts, les arbres, où l'on vénérait un nombre considérable d'elfes ruraux, souvent de nature maléfique.

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Dans le culte domestique, les divinités tutélaires, semblables aux Penates romains, étaient importantes. Les rites funéraires comprenaient l'incinération et l'inhumation. En général, la crémation consistait à placer le cadavre dans une barque et à y mettre le feu. Les femmes pouvaient devenir prêtresses : la pratique de la mantique leur était attribuée. Les lieux de culte étaient des constructions en bois, sur le modèle nordique, mais "les forêts étaient le lieu de culte privilégié, tout comme les arbres étaient la résidence des dieux" (p. X).

La religion des Baltes révèle, dès le début, une harmonie évidente avec la religion indo-européenne primitive. Le père suprême était Perkúnas, une divinité ouranienne dont l'attribut était la foudre et qui est souvent identifiée au feu perpétuel, le Soleil. C'est ce que raconte le mythe de Teljavel, le forgeron qui aurait forgé le disque solaire et l'aurait placé dans le ciel. La mère du dieu suprême, Perkunatete, lavait chaque nuit le Soleil dans l'Océan pour que, le lendemain, régénéré, il brille à nouveau sur le monde.

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Parmi les divinités telluriques, un rôle important était joué par Kurkas, dieu de la fertilité. En son honneur, dans la Pologne du milieu du siècle dernier, la dernière gerbe de la récolte était encore érigée en forme de phallus. La déesse Pergrubias occupe une place centrale, faisant référence au printemps, à l'éternelle renaissance de la vie. Son culte était accompagné de celui de Pūšátis, seigneur des bois, qui vivait parmi les racines d'un sureau et était suivi par de nombreux elfes. La triade suprême du Panthéon prussien était représentée par Patelus, Perkúnas et Patrimpas. Patelus était vénéré comme un aîné, tandis que Patrimpas avait les traits d'un jeune homme. Leur pouvoir était contré par le malveillant dieu chthonien, Vēlionis, gardien des âmes et praticien de la magie noire. Les landes, les eaux et les forêts étaient considérées comme sacrées: "Les cultes religieux se déroulaient principalement en plein air et consistaient en des sacrifices qui [...] comprenaient des offrandes végétales et animales" (p. XIII). Le temple le plus important se trouvait à Romowe et le culte était présidé par un pontifex maximus.

 Il s'agit d'un livre important, car il met en lumière les aspects essentiels des religions archaïques, encore peu connues aujourd'hui, mais pertinentes pour la définition de l'ubi consistam de la Tradition européenne.

 Giovanni Sessa

vendredi, 09 octobre 2020

John T. Koch: Thinking about Indo-European and Celtic Myths in the 2nd and 3rd Millenia

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John T. Koch:

Thinking about Indo-European and Celtic Myths in the 2nd and 3rd Millenia

 
 
The opening lecture from the 2016 Celtic Mythology Conference at the University of Edinburgh.
 

dimanche, 02 juillet 2017

LE CYCLE DES FÊTES CELTIQUES

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LE CYCLE DES FÊTES CELTIQUES

CONFÉRENCE DU DRUIDE JEAN-CLAUDE CAPPELLI

Dans cette conférence, le druide Jean-Claude Cappelli nous parle des quatre grandes fêtes celtiques : Samain (1er novembre), Imbolc (1er février), Beltaine (1er mai), et Lugnasad (1er août). Il évoque la conception druidique d'un temps spirale, le calendrier de Coligny, le comptage soli-lunaire celtique, etc. On nous y présente une vision d'où découlent des rituels nous connectant aux grands cycles cosmiques, aux mouvements de la nature, et au rythme des saisons. Un conférence filmée à La Maison des Sources de Tréhorenteuc.

Si vous tenez à ce que d'autres vidéos soient produites et publiées, faites-nous un don sur le site de financement Tipeee : https://www.tipeee.com/cinemagie-crea...

dimanche, 07 mai 2017

Ce que la cosmologie celte a encore à nous dire, avec Patrice Lajoye

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Ce que la cosmologie celte a encore à nous dire, avec Patrice Lajoye

Les mythes celtes peuvent nous aider à éclairer les racines profondes de notre identité mais aussi et surtout à mieux comprendre le monde dans lequel nous vivons et les forces à l’œuvre en nous-mêmes.

Avec Patrice Lajoye, historien des religions, spécialiste du monde celte, qui a cofondé la revue Nouvelle Mythologie comparée, aux éditions Lingva et est secrétaire de rédaction des revues Gallia et Histoire des sociétés rurales. Il a publié chez CNRS éditions (collection Biblis), un ouvrage très savant intitulé L’arbre du monde : La cosmologie celte.

Intervenant : Patrice Lajoye (Historien des religions)

lundi, 03 octobre 2016

Itinéraire celtique - Avec Jean Markale et Charles Ravier

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Itinéraire celtique

Avec Jean Markale et Charles Ravier

Les samedis de France Culture - Itinéraire celtique. Par Philippe Arrii-Blachette - Avec Jean Markale et Charles Ravier (1ère diffusion : 06/11/1976)

mardi, 17 mai 2016

Aux origines de carnaval - Un dieu gaulois ancêtre des rois de France

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Chronique de livre:

Anne Lombard-Jourdan: Aux origines de carnaval - Un dieu gaulois ancêtre des rois de France

(Odile Jacob, 2005)

Ex: http://cerclenonconforme.hautetfort.com

cernunnos, hellequin, herlequin, légendes, folklore, mythologie celtique, livre, traditions, Au nombre des grands mythes transversaux européens est celui de la cavalcade surnaturelle menée par un chef divin. Dans le monde germanique c'est la wütendes Heer, qui parcourt les airs, réminiscence du cortège des walkyries et einherjer mené par Odin/Wotan. Dans le monde celte, c'est la chasse sauvage ou wild hunt, que le Moyen-Age dit composée de nobles damnés, de fantômes et de créatures surnaturelles, démons et fées et menée par un avatar de Cernunnos : Hellequin.

C'est à ce thème et à ce personnage, dans leurs expressions françaises que s'intéresse l'historienne Anne Lombard-Jourdan dans son ouvrage paru en 2005 chez Odile Jacob et préfacé par Jacques Le Goff : Aux origines de carnaval ;Un dieu gaulois ancêtre des rois de France. A travers son exploration de la symbolique du cerf dans la culture française médiévale et en particulier au sein de la lignée royale, Anne Lombard-Jourdan dégage une mythologie gallicane fondée sur l'alliance complémentaire de la fée serpente Mélusine (dont se réclamèrent de nombreuses familles outre les Lusignan) et du dieu cerf Cernunnos. Elle fait de ce dernier, en étayant abondamment sa thèse, le tutélaire, l'ancêtre totémique des rois de France.

L'auteur s'intéresse tout d'abord, dans une démarche comparatiste dumézilienne, aux mythes du cerf et du serpent et à leurs liens dans le monde indo-européen et en particulier en Gaule, à travers les héritages celte, latin et germanique. C'est ensuite le personnage de Gargantua qu'elle analyse comme avatar du dieu-cerf à travers lequel Rabelais aurait exprimé, sous forme parodique, les rites et symboles du mythe gaulois. Dans la droite ligne de Claude Gaignebé, elle lit, au delà des pastiches truculents, l'expression de liens mythiques entre éléments et divinités en voie d'oubli. Cornes et viscères ne sont plus des références au "bas corporel" et aux tribulations sexuelles mais les attributs des dieux : bois et serpents.

Le thème rabelaisien conduit naturellement à celui du carnaval, moment de jaillissement du refoulé païen et des rituels de fertilité au sein du calendrier chrétien. Masques, cornes, franges et cordes y réactivent de façon farcesque les mystères chamaniques liés au cerf et à la serpente. Une autre survivance du rituel se trouve dans la chasse au cerf, la plus noble entre toutes, dont l'historienne étudie, à travers manuels de vénerie et évocations littéraires, les codes. Ils témoignent d'une déférence particulière, de celles qu'on a face au totem, que seul peut chasser son "clan" : la maison royale et ceux qu'elle a anoblis.

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Ayant ainsi déployé l'héritage secret de Gargantua-Cernunnos, Anne Lombard-Jourdan s'intéresse à sa parèdre, Mélusine, et à leurs relations de complémentarité symbolique : dans le rapport à l'eau (soif insatiable de l'un, milieu naturel de l'autre), dans l'opposition de l'aspect solaire (le cycle des bois, entre perte et renouveau, suit celui des saisons) et terrestre de l'un à l'aspect lunaire et aquatique de l'autre. Elle n'en fait ni des époux divins (ce qui serait une invention de toutes pièces) ni ne les apparente, mais y voit des polarités qui fondent une mythologie proprement française.

cernunnos_by_faeorain-d4couqm.jpgL'ouvrage revient alors sur la place dévolue au cerf dans la maison de France à travers les légendes mettant en scène ses membres et des cerfs surnaturels souvent liés à la figure christique, les illustrations et la présence physique des cerfs dans les demeures royales, et les métaphores littéraires qui rapprochent monarque et cervidé. C'est dans le cerf ailé (présenté en couverture) que les rois trouvent leur emblème totémique, lié non pas, comme la fleur de lys, au Royaume de France dans son entièreté, mais à la fonction monarchique en particulier. Enfin, le don de guérison des écrouelles, le rôle thaumaturgique du roi, est analysé comme un héritage chamanique lié au culte du dieu-cerf.

L'auteur revient en profondeur sur ce dieu-cerf, en en différenciant les avatars : Dis Pater s'incarnant tantôt en Cernunnos, tantôt en Sucellus, et leurs compagnes Herecura et Nantosuelta, la femme-biche et la déesse des eaux, entourée de serpents. En Angleterre, c'est le roi légendaire Herne, ou Herle qui semble recueillir l'héritage du dieu-cerf, tandis qu'en France certains saints se le partagent. Le roi Herle ne peut que rappeler notre Herlequin ou Hellequin original, et c'est en effet lui qui clôt cette étude avec sa mesnie. Les herlequins, ou hellequins, sont les "gens" (/kin), la famille de Herle, le chasseur éternel et cerf lui-même. Le christianisme en a fait une cavalcade démoniaque, mais elle demeure liée aux dates ancestrales de l'ouverture du sidh, ce monde de l'au-delà où Cernunnos se portait garant pour ses enfants. De nombreux attributs physiques et vestimentaires furent attachés à cette menée. Des figurations celtes aux carnavals populaires, des évocations féeriques aux "arlequinades", on les y retrouve. Certains, comme le couvre-chef d'invisibilité, renforcent le lien entre wütendes Heer et chasse sauvage.

A l'issue de cette enquête, on trouve encore des annexes éclairantes : un dossier étymologique, indispensable à toute personne intéressée par le folklore et ses symboles, des documents archéologiques, diverses sources littéraires ainsi qu'une étude sur l'utilisation politique de la Mesnie Hellequin entre France et Angleterre.

Mythes, totémisme, royauté, folklore, transversalité européenne et gallicanisme, cette lecture a de quoi intéresser et enrichir à plus d'un degré quiconque s'intéresse à son héritage, mais pourra tout aussi bien permettre au gamer d'approfondir les thèmes du dernier opus de
The Witcher (Wild Hunt), et aux métalleux de comprendre ce qu'il en est historiquement et culturellement de la Mesnie Herlequin.

Mahaut pour le C.N.C.

Note du C.N.C.: Toute reproduction éventuelle de ce contenu doit mentionner la source.

vendredi, 17 janvier 2014

Lugus Longue Main : le dernier livre de Savignac sur la mythologie gauloise

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Lugus Longue Main : le dernier livre de Savignac sur la mythologie gauloise

Ex: http://breizhatao.com

BREIZATAO – KELTOURIEZH VIA LE CHEMIN SOUS LES BUIS (10/01/2014) Jean-Paul Savignac est un savant gaulois auprès duquel Astérix et ses comparses apparaissent comme des caricatures qui prolongent l’occultation par la gallo-romanité des richesses de ce pays plus grand et, sans doute, plus civilisé que la France actuelle.

Hier est paru en librairie le livre que Jean-Paul Savignac a écrit, pour les Éditions de la Différence, sur la mythologie gauloise. Des gouaches de Jean Mineraud accompagnent chacun des textes de cet ouvrage.

Ce premier livre, qui raconte la naissance et l’adolescence, en définitive la genèse, du dieu tutélaire de la Gaule, Lougous Longue-Main, inaugure une série d’ouvrages qui ne se limiteront certainement pas aux huit livres d’ores et déjà programmés.

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« Nous sommes secrètement fiers des Gaulois », m’a dit, un jour, une amie journaliste. Il y a de quoi, bien que nous les voyions à travers le prisme déformant de notre présent. Un mot résume ce qu’ils furent et ce en quoi nous nous reconnaissons en eux, ce grain de folie qui dépasse toutes les philosophies, tous les pragmatismes, tous les dogmes : le panache. Cette qualité chevaleresque exprime leur attitude à l’égard des femmes, d’où procède notre courtoisie, leur désir des beaux tissus et des belles parures d’or, d’où vient notre goût de l’élégance et du raffinement, leur amour du faste partagé, des beaux chevaux, de la belle parole écoutée pour elle-même et vénérée, qui fondent notre culte du Beau. De leur héritage provient également, issu de leur Chaudron de jouvence et d’immortalité, le Graal, ce symbole de l’élan religieux et du dynamisme pétulant de la France.

Leur antiquité quasi fabuleuse satisfait notre rêve de descendre d’ancêtres sortis de la nuit des temps et brusquement entrés dans la lumière de l’histoire, c’est-à-dire de remonter au plus loin, dans le passé du passé, pour nous relier aux dieux, ce dont se prévaut, par exemple, Don Ruy Gomez de Silva fier de montrer à Hernani la galerie des tableaux de ses aïeux, comme tous les nobles du monde, et ce dont s’enorgueillissaient les Gaulois eux-mêmes, tel ce Ouiridomaros qui se targuait d’être issu du Rhin lui-même. Car les Gaulois possédaient eux aussi une antiquité.

Autre joie fière qu’ils nous donnent : nous sentir intimement familiers avec la terre de la Gaule-France qu’ils ont aimée au point d’en nommer les plaines, les rivières, les montagnes et les installations humaines. Si la langue gauloise avait subsisté, elle serait devenue du français. Les toponymes en France le prouvent. Prenons au hasard le nom de Bayeux, admiré pour ses sonorités et sa couleur vieil or par Marcel Proust. C’est le nom gaulois Bodiocasses qui évolue phonétiquement au fil des siècles en Baiocasses pour prendre jusqu’à notre XXe siècle la forme gallo-française de Bayeux. Ainsi en est-il de Vannes (Ouenetia), Rouen (Ratomagos), Dijon (Diouio), Meung (Magidounon), Tonnerre (Tournodouron), Évry (Ebouriacon), Sablé (Sapoialon), Genouilly (Genouliacon), Chambord (Camboritou), Alençon (Alantionon), Toul (Toullon), Niort (Noouioritou), Riom (Rigomagos), Châlons (Caladounon), Nanterre (Nemetodouron), Arles (Arelate), Lyon (Lougoudounon), Paris (Parisii)…

Notre fierté inavouée se fonde encore sur l’admiration que les Gaulois nous inspirent : ils ont versé leur sang pour défendre leur liberté. Pleurons les Gaulois de ce sacrifice sublime — « Morts pour la Gaule » ! — et déplorons amèrement l’infamie de ceux d’entre nous qui ricanent à leur propos, ingrats et ignorants de l’évidence du fait que tout homme a nécessairement des ancêtres ! On n’insulte pas des héros. Les nazis savaient ajouter à l’ignominie de martyriser et de tuer leurs victimes innocentes la perversion de les humilier avant. Ne suivons pas leur exemple. J’ai jadis été frappé par un film qui offrait, aux sons de chants graves que l’on reconnaissait comme étant tibétains, les images d’armes gauloises et d’ossements humains disposés sur un sol herbu. La force incantatoire des voix, transcendant la douceur du paysage entrevu, la sobriété de l’armement épars à même le désastre des os et des crânes, tout ce spectacle lent et terrible inspirait une farouche sympathie pour ceux qui s’étaient battus là. C’était tout ce que pouvait faire une caméra, mais il y avait dans ce travelling quelque chose d’exemplairement évocatoire.

Et puis il y a ce phénomène agréable que nous voyons le Gaulois comme un être joyeux. Le rire gaulois, la bonne humeur : voilà ce que nous ne saurions dénier à nos illustres pères. Sans doute faut-il y voir l’influence de Rabelais, le maître rieur, en la parole duquel nous reconnaissons l’expression la plus libre de notre génie national. C’est que Rabelais est gaulois ! Jehan de Gravot (un de ses pseudonymes) s’honore bien d’avoir écrit des Évangiles gallicques ! Ces Gaulois, nous les devinons plus gaillards que paillards à en croire certaines inscriptions antiques sur pesons de fuseaux qu’ils nous ont laissées. Le rire que leur évocation suscite spontanément en nous, s’il ne trahit pas un plaisir régressif ou une intention railleuse, pourrait être, à mon sens, un écho de leur propre gaieté. Des ancêtres qui font rire ! Nous avons de la chance. Il plaît de penser que leur joie reflétait la félicité des dieux. Les dieux : nous en revenons là. « La nation est toute des Gaulois dans une pleine mesure adonnée aux rites », remâche César.

Avons-nous vraiment hérité d’eux ? Hypocrite question ! Ce sont les mêmes héros, les mêmes martyrs, les mêmes bourreaux, les mêmes victimes qui, pour ainsi dire, se réincarnent. L’héritage de leur langue, fût-elle fragmentaire, est une preuve suffisante de la continuité qui nous relie à eux.

Il faut décaricaturer les Gaulois, les désanathémiser, les débarbariser, les dépolitiser, les débarrasser de tout ce qui a été projeté sur eux. L’ostracisme dont ils sont victimes ne date pas d’hier. Considérés comme vaincus ils ont été abaissés par Rome, dépossédés de leur langue, de leurs usages et de leurs prêtres par l’administration impériale romaine, combattus par le christianisme constantinien. Vilipendés plus tard par les rois de France qui se prétendaient francs, c’est-à-dire d’origine germanique, ils ont été traités en réprouvés.

Des historiens les ont brandis, à la fin du XIXe siècle, comme les drapeaux d’un nationalisme revanchard et, à cause de cela, aujourd’hui, une propagande historique post-nationale, qui plaide pour la « diversité », cherche à les éradiquer de notre mémoire. On a fait d’eux des bouffons sympathiques à travers une bande dessinée pour le moins simplificatrice, qui a toutefois le mérite de les avoir sortis des ténèbres et de nous faire rire. Mais qu’est devenue leur dignité humaine ? Avons-nous envie de rire, quand nous voyons, au musée Bargoin de Clermont-Ferrand, les crânes des Gauloises auxquels adhèrent encore leurs cheveux tressés en une natte unique derrière la tête, comme celle des squaws ? Nous sommes sans doute le seul peuple au monde qui salisse le souvenir de ses ancêtres, alors que nous avons été le seul à les revendiquer pour tels !

Ils ont la vie dure.

Aujourd’hui, nos prédécesseurs de la Gaule sont réduits par une archéologie muette et fossoyeuse à des cailloux, des ossements et de la ferraille qu’elle restaure et place dans des vitrines de palais, plutôt que de se voir ressuscités en tant qu’hommes ; car les hommes ne se définissent pas comme des utilisateurs d’objets, mais d’abord comme des êtres doués de la parole. Qui se soucie de réentendre la parole gauloise ? Qu’avons-nous fait de leur parole ? Qu’avons-nous fait de la Parole ? Les quelque deux mille inscriptions gauloises parvenues jusqu’à nous pourraient donner des éléments de réponses, hélas, elles sont l’affaire de linguistes de bibliothèque avares de leur science.

Le peuple français s’est souvent divisé pour mieux se comprendre. Nous avons su que tout était affaire de dialogue et que notre dualisme apparent aboutissait à la résolution harmonieuse des contraires. Idéalisme chevaleresque et réalisme populaire. Légalité et révolte. Rationalité et imagination : pour Pascal l’imagination est « la folle du logis », pour Baudelaire c’est « la reine des facultés ». Poésie et prosaïsme. Anciens et Modernes. Tradition et modernité. Patriotisme et trahison. Ponts et Chaussées et Eaux et forêts… Pourquoi pas culture gréco-latine et héritage gaulois, voire francité et gallicité ? Le délire des formes de l’art gaulois s’ordonnant selon un impeccable lacis géométrique ne donne-t-il pas l’image d’une réconciliation possible entre deux visions des choses opposées ? Qu’avons-nous à perdre à engager le dialogue avec une origine qui parle ? L’enjeu en est l’émergence de notre obscure identité française. Reprenons le débat, sans arrière-pensées. Ce n’est pas en reniant ce que nous avons foncièrement été que nous contribuerons à renforcer la nécessaire diversité des nations. Le bonheur des hommes a besoin de différence, non d’uniformité. Explorons notre différence ! Pour cela, ne rejetons pas notre secrète nuit intérieure. C’est un trésor.

Refoulés par la civilisation voulue par l’Église, les Rois et la République, les mythes des Gaulois ont perduré souterrainement. Ils gisent dans les contes et légendes, les vieilles chansons, chères à Nerval, les Vies édifiantes, les romans médiévaux et resurgissent dans nos rêves conformément à leur nature immortelle. Si bien qu’il est possible, en ces temps de perte des repères, d’offrir aux lecteurs ces chants premiers inspirés de l’iconographie antique continentale dont le reflet littéraire brille dans les vieux textes insulaires, irlandais et gallois. Ces récits mythiques, les voici restitués dans leur palpitation authentique. Il suffisait d’endosser le manteau du conteur.

Voici des dieux qui ont laissé leurs noms aux terres gauloises, voici leurs exploits épiques, voici leurs figures mystérieusement familières, voici une mythologie toujours pressentie et enfin recouvrée et révélée. Le dieu qui incarne les Gaulois, Lougous Longue-Main, le protecteur de Vercingétorix, traceur de routes, accourt escorté des autres divinités. Le récit de ses aventures, divinement illustré par Jean Mineraud, inaugure la collection LES HOMMES-DIEUX aux Éditions de La Différence. Suivront Argantorota Grande-Reine, Cernounnos Torque-d’Or, Nodons Main-d’Argent, Gobannos Feu-Hardi, Ambactos Corps-Dévoué, Nectanos Gardien-des-Eaux, Ollouidios Roue-du-Monde.

Jean-Paul Savignac

 

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mardi, 29 mai 2012

La chevauchée littéraire, devenue mythique d’Artus

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La chevauchée littéraire, devenue mythique d’Artus

L'aventure d'une revue racontée par celui qui l'a intensément vécue

Hervé Glot
Ex: http://metamag.fr/
 
Nous avons longtemps hésité avant de classer l'article d'Hervé Glot, issu d'une contribution au magazine des Amis de l'écrivain normando-breton, Jean Mabire . Il avait sa place dans notre rubrique "émotion/réflexion", car l'histoire du magazine Artus relève d'abord de la littérature, de la poésie, de l'image et de l'imaginaire. Mais par la vocation ambitieuse qu'elle s'assignait, au service de la large culture celte, toujours vivante et ardente, par l'enthousiasme  qu'elle a suscité auprès d'artistes, d'intellectuels, du public, par l'impulsion enfin qui continue de nourrir rêves et convictions, elle relève finalement de la rubrique "communautés vivantes". 
Guilhem Kieffer
 
"Difficile de prendre individuellement la parole au sujet d’une aventure qui fut avant tout collective, d’autant que les années ont en partie gommé le contexte qui vit la naissance et l’évolution de la revue Artus, puis, par la suite, des éditions du même nom. Mais soit, je tenterai d’être le chroniqueur concis et néanmoins fidèle d’une chevauchée qui s’est étalée dans le temps et bien sûr, comme tout corps vivant, a initié ou subi ses propres métamorphoses.
 
 
L’affaire est ancienne, puisque c’est en 1979 que fut fondée l’association éditrice de la revue, avec pour dessein d’explorer les voies de la culture celtique d’hier, et d’en faire entendre les voix d’aujourd’hui. Cette association naissait en Bretagne, à Nantes capitale du duché, et Jean-Louis Pressensé en était le directeur et le premier rédacteur. Artus : le nom avait, bien sûr, été choisi en référence au roi de la Table Ronde, dont le royaume légendaire s’étendait sur les deux rives de la Manche. 
 
Il élargissait considérablement le réduit breton auquel nous étions certes attachés… mais à condition d’exercer toute liberté dans les instants où il nous siérait de larguer les amarres, comme en témoignait le sous-titre "pays celtiques et monde nordique". L’association était née d’une réaction contre une certaine vision en vogue dans les années 70, celle d’une Bretagne étroite, suffisante et, pour finir, morte d’un trop plein "de légitimes revendications et de droits imprescriptibles"…
 
Sources et survivances d’un imaginaire celtique
 
Nous souhaitions rechercher, au sein d’un univers plus large, les sources et les survivances d’un imaginaire celtique. Et nous nous interrogions: « Segalen est-il moins celte quand il compose Les Immémoriaux, Kenneth White quand il décrit Hong-Kong, Michel Mohrt quand il rédige "L’ours des Adirondacks ?" »
 
Dès lors se posait le problème du contenu que nous entendions donner au terme « celtique ». Pour ma part, très sensible à l’enseignement que prodiguait (parfois dans la douleur) Christian-J. Guyonvarc’h, l’Irlande, avec sa mythologie miraculeusement transmise, était un des conservatoires et l’un des foyers où aller chercher les brandons encore vivants du grand récit. Des brandons à raviver parce que, sans cette lueur venue de ses franges "barbares’", l’Europe, qui cherchait à s’inventer, faisait l’impasse sur une partie de son âme (elle a fait mieux depuis !). De notre point de vue, c’était pour les artistes, les créateurs, se priver d’une source d’inspiration dont des écrivains majeurs, comme Yeats ou Joyce (bon gré, mal gré), avaient fait le suc de leur œuvre, et dont le cinéma s’emparait désormais avec gourmandise. J’aime toujours rappeler que l’Irlande, un tout petit pays, peut se flatter d’avoir porté, bien au-delà de son nombril, la lumière de ses écrivains et que l’imaginaire est une pensée vivante, une flamme que l’on ravive au contact de la diversité du monde. 
 
Pourtant, la volée de bois vert ne vint pas des Bretons pur beurre : il apparut rapidement que l’usage que nous faisions des termes celte ou celtique, et ce que nous affirmions comme un héritage mésestimé étaient, pour certains, des vocables strictement interdits, des territoires de la pensée absolument prohibés. Passons sur ces polémiques, elles n’en méritent pas davantage.
 
Un sentiment géographique et quasi climatique  
 
Nous cherchions à faire partager un sentiment géographique et quasi climatique : cette Europe du nord-ouest, atlantique et baltique, est (de toute évidence) un mélange de terre et d’eau, un espace terraqué aux limites indécises, aux lumières parfois incertaines et aux origines parfois contradictoires. Nous souhaitions faire naître peu à peu, par les textes des chercheurs, ceux des écrivains et des poètes, les œuvres des photographes, des peintres ou des graveurs, etc, une esthétique, un esprit, qui donneraient à la revue une couleur que j’espérais singulière. 
 
 
Jean-Louis Pressensé avait, au tout début de l’aventure, suggéré cet en-dehors des territoires trop arrimés, en évoquant l’Artusien en devenir : « Etre enfant du granit, de la houle, des forêts et du vent, être pétri de fidélité, de folie et de rêves…» Et, effectivement, les filiations furent de cœur, de consanguinité spirituelle, de générosité, jamais fondées sur l’intérêt ou le conformisme idéologique. 
 
La revue fut, pour bien des rédacteurs, une école pratique et un centre de formation intellectuelle. Nous approfondissions nos compétences techniques, passant de la terrible composphère, fleuron de chez IBM, à l’ordinateur, et la table de la salle à manger, qui servait de table de montage, conserve les ineffaçables stigmates du cutter de mise en page : à ces moments-là, il fallait penser avec les mains, non sans avoir affirmé, quelques instants auparavant, après Rimbaud, que la main à plume valait bien la main à charrue.
 
Nous allions vers les artistes ou les chercheurs par inclination personnelle, aussi bien que par curiosité pour qui nous intriguait. Ainsi, la revue développait son contenu, tandis que les numéros sortaient avec la régularité qu’autorisaient nos occupations professionnelles. Artus a fédéré des énergies, confronté des individualités et surtout nous a conforté dans le sentiment que l’équilibre, le nôtre en tout cas, se trouve où cohabitent le travail des savants et le chant des poètes.
 
Un équilibre où cohabitent le travail des savants et le chant des poètes
 
Peu à peu, nous avons orienté notre publication vers des thèmes plus précis. Parurent ainsi "Le Graal", "A chacun ses Irlande", "Au nord du monde", "Harmonique pour la terre", "L’Amour en mémoire", "Ecosse blanches terres", "Mégalithes", "Archipels, vents et amers", autant de titres qui signaient des affinités électives, des rencontres insolites ou prévisibles. Avec le recul, cette formule éditoriale a eu le grand avantage d’ouvrir un espace accueillant et de permettre la constitution d’un noyau de collaborateurs, qui auront trouvé dans le rythme revuiste, à la fois souplesse, diversité et régularité. 
 
 
Les universitaires Jacques Briard pour l’archéologie, Christian-J. Guyonvac’h pour le domaine celtique, Léon Fleuriot pour les origines de la Bretagne, Philippe Walter pour la littérature arthurienne, Régis Boyer pour le monde nordique, Gilbert Durand pour le vaste champ de l’imaginaire, furent parmi d’autres, nos guides et nos interlocuteurs. Patrick Grainville et Kenneth White nous donnèrent de sérieux coups de main. Philippe Le Guillou a été le compagnon de nos rêveries scoto-hiberniennes. Michel Le Bris a bercé nos songes romantiques au rythme des puissances de la fiction; quant à Pierre Dubois, il a été pour nous tous l’empêcheur de raisonner en rond, le Darby O’Gill des raths et des moors.
 
La revue a permis, en outre, de créer un lectorat qui est naturellement resté fidèle lors du glissement -amorcé en douceur au milieu des années 80- de la revue vers la maison d’édition, ayant ainsi, pour effet, de résoudre partiellement le problème de la diffusion.
 
Après s’être essayé à la publication de textes relativement courts : "Enez Eussa" de Gilles Fournel, "Marna" d’Yvon Le Menn, "la Main à plume" de Philippe Le Guillou, suivront une vingtaine de livres dont "Ys dans la rumeur des vagues" de Michel Le Bris, ou "Les Guerriers de Finn" de Michel Cazenave. Des albums sont consacrés à des peintres, des sculpteurs, des graveurs, des photographes (Yvon Boëlle, Jean Hervoche, Carmelo de la Pinta, Bernard Louedin, Sophie Busson, Jean Lemonnier, Geneviève Gourivaud).  
 
Avec Pierre Joannon, nous éditerons un gros album, "L’Irlande ou les musiques de l’âme", une somme menant de la protohistoire à la genèse de l’Irlande contemporaine, que reprendront les éditions Ouest-France. Toujours à l’affut des méandres de la création, sous la direction de Jacqueline Genêt, de l’université de Caen, nous avons publié les variations des écrivains de la renaissance culturelle irlandaise, autour de la légende de Deirdre. 
 

Pierre Joannon
 
Depuis ces temps de fondation, d’autres livres bien sûr sont parus, parfois en coédition avec Hoëbeke ou Siloë. Citons "Arrée, l’archange et le dragon", "Des Bretagne très intérieures", "Une Rhapsodie irlandaise", plus récemment "Lanval" et ,dernier en date, "Les îles au nord du monde", un texte de Marc Nagels illustré par Didier Graffet, avec des photographies de Vincent Munier.
 
Un numéro spécial avait marqué un tournant dans l’histoire d’Artus. Ce n’était déjà plus le fascicule habituel, mais un véritable album titré "Brocéliande ou l’obscur des forêts". Il allait nous conduire vers une autre direction : une heureuse conjonction permit à Claudine de créer et d’asseoir" au château de Comper" le Centre de l’Imaginaire Arthurien. Mais cela est une autre histoire, et je ne voudrais pas m’approprier abusivement ce qui appartient à une fraternité sûrement plus vaste que la mienne, sinon en rappelant ce que pourrait être… une errance arthurienne.
 
Vagabondage dans l’espace arthurien
 
Histoire des hommes et de leur imaginaire, rêves, foi, mythes, voilà un terrain de pérégrinations assez inépuisable, au milieu duquel l’héritage celtique et la légende arthurienne brillent, aujourd’hui, d’un éclat particulier, avec leur cortège de prouesses et d’enchantements, dont le moindre n’est pas la promesse de la quête.
 
Le roman arthurien n’a pas inventé la quête, mais il lui a donné une couleur et une dimension renouvelées. La quête chevaleresque n’est ni la descente aux Enfers d’Orphée ou de Virgile, la fuite d’Énée ou la dérive involontaire d’Ulysse. À travers d’innombrables épreuves, dont on ne sait dans quelle réalité elles se déroulent, elle unit, à un voyage qui porte ordre et lumière là où règne le chaos, un cheminement intérieur, recherche de perfection ou d’absolu.
 
Au centre de la cour arthurienne, la Table Ronde rassemble les meilleurs chevaliers, venus du monde entier briguer l’honneur de servir. Alors, commencent les expéditions, entreprises sur un signe, une requête, un récit marqué d'étrangeté. Lorsqu’il prend la route, chaque chevalier devient, à lui seul, l’honneur de la Table Ronde et la gloire du roi. Il forme l'essence même de la chevalerie arthurienne, affirmant la nécessité de l'errance, le dédain des communes terreurs, la solitude, qui ne s’accompagne que d’un cheval et d’une épée. Il ne sait ni le chemin à suivre, ni les épreuves qui l'attendent. Un seule règle, absolue, lui dicte de « prendre les aventures comme elles arrivent, bonnes ou mauvaises ». Il ne se perd pas, tant qu’il suit la droite voie, celle de l'honneur, du code la chevalerie.
 
La nécessité de la Quête est partie intégrante du monde arthurien. Au hasard de sa route, le chevalier vient à bout des forces hostiles. Il fait naître l’harmonie, l’âge d’or de la paix arthurienne dans son permanent va et vient entre ce monde-ci et l’Autre Monde, car l’aventure, où il éprouve sa valeur, ne vaut que si elle croise le chemin des merveilles. Sinon elle n’est qu’exploit guerrier, bravoure utilitaire. Seul, le monde surnaturel, qui attend derrière le voile du réel, l’attire, et lui seul est qualifiant.
 
Les poètes recueillent la Matière de Bretagne vers le XIIe siècle, de la bouche même des bardes gallois et, sans doute, bretons. Malgré le prestige du monde antique et des romans qu’il inspire et qui ne manquent pas de prodiges, la société cultivée découvre, fascinée, les légendes des Bretons (aujourd’hui nous parlerions des Celtes), un univers culturel perçu comme tout autre, d’une étrangeté absolue. Le roman, cette forme nouvelle nourrie de mythes anciens, donne naissance à des mythes nouveaux, la Table Ronde, le Graal, l’amour de Tristan pour Iseult, Merlin… Parmi les référents culturels de l’Europe, en train de naître, elle s’impose en quelques dizaines d’années, du Portugal à l’Islande, de la Sicile à l’Écosse.
 
La légende celtique, mêlée d’influences romanes ou germaniques, constitue une composante fondamentale pour l’Europe en quête d’une identité qui transcende les nécessités économiques et politiques. Mais le thème de la quête représente, plus fondamentalement croyons-nous, un itinéraire proprement spirituel, initiatique ou mystique même, pour certains. Elle manifeste, aussi, un besoin d’enracinement, la recherche de valeurs anciennes, prouesse, courtoisie, fidélité, largesse, l’aspiration à l’image idéale de ce que nous pourrions être.
 
Une fois de plus, le roi Arthur revient : non pas la figure royale, mais l’univers de liberté et d’imaginaire qu’il convoie. A qui s’interroge sur cette postérité tenace, sur ces résurrections insistantes, on peut trouver des raisons, dans le désordre, culturelles, patrimoniales, psychanalytique, politiques, artistiques. Pour nous, nous dirons, simplement et très partialement, qu’il s’agit de la plus belle histoire du monde, et qu’il suffit de revenir au récit, à ces mots qui voyagent vers nous, depuis plus de huit siècles, pour comprendre que les enchantements de Bretagne ne sont pas près de prendre fin."

dimanche, 21 août 2011

Il culto della dea madre in Nord Europa

Il culto della dea madre in Nord Europa

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Ex: http://www.centrostudilaruna.it/

Come già altrove osservato per quanto riguarda la civiltà romana, anche nelle civiltà nordiche, specificatamente quella celtica e quella norrena, si potrebbe pensare che, riflettendo quelle che, nell’immaginario collettivo, si strutturano come  società guerriere, il pantheon religioso finisse per escludere la presenza di figure femminili in posizioni di particolare rilievo.

In realtà, già l’idea di “società guerriere” per quanto riguarda le civiltà menzionate andrebbe ampiamente riveduta rispetto all’immaginario collettivo: se, infatti, in entrambe risulta presente, come in qualunque altro contesto del mondo antico, una componente guerriera legata a necessità espansive, predatorie o difensive, non è in alcun modo possibile paragonare né la società celtica né quella norrena a contesti come, ad esempio, quello spartano o quello di Roma alto-imperiale, in cui la funzione bellica risultava normalmente prevalente.

Per quanto i Celti, la componente guerriera era, in fin dei conti, ristretta alla scelta di un capo (“Ri”) di ogni clan (“Tauath”) tra le diverse famiglie componenti (“Fine”) capace di guidare gli uomini in una eventuale guerra e di stipulare alleanze con altri clan, ma, già all’interno del clan stesso, la nobiltà non era necessariamente dedita alle armi, essendo formata in buona parte da proprietari terrieri (le altre due classi sociali erano date da artisti e druidi e da contadini e artigiani)[1].

Il valore del singolo (il cosiddetto “prezzo d’onore” in base al quale si stabilivano punizioni e ammende) non veniva attribuito sulla base dei successi guerreschi quanto su elementi ben differenti, che andavano dalle capacità lavorative (in particolare per quanto riguardava il possesso di tecniche artigianali) alle conoscenze sacre (tanto che aedi e druidi erano esentati da qualunque attività militare), alle ricchezze materiali (misurate in termini di terre e capi di bestiame posseduti) fino alle doti estetiche (sia uomini che donne erano attentissimi al loro aspetto e alla loro forma fisica)[2]. Anche gli insediamenti non mostrano una particolare visione virile e marziale dell’esistenza: ogni “Fine” viveva per lo più in fattorie isolate e non in aree fortificate, che venivano utilizzate solo nel caso in cui un “Tauath” si trovasse in guerra, così come, a conti fatti, le tecniche agricole e zootecniche celtiche, che comprendevano la rotazione biennale e l’addomesticamento di pressoché ogni animale, ci appaiono oggi ben più sviluppate delle tecniche belliche, che includevano unicamente l’attacco frontale non protetto[3].

In più, anche le numerose “guerre tra clan” ci appaiono oggi più che altro dispute territoriali risolte da una prima “componente scenografica” in cui linee di guerrieri di entrambe le parti si fronteggiavano in assetto da guerra (cioè nudi, con spade e giavellotti e coperti di monili e colori di guerra) insultandosi lungamente ma poi tutto veniva deciso dallo scontro di due “campioni”[4]. Insomma, rispetto a certe immagini moderne, i Celti risultano molto più un popolo piuttosto pacifico di agricoltori, allevatori e abili mercanti (la loro rete commerciale era estesissima) con, in più, uno sviluppatissimo senso religioso che si differenziava tra una spiritualità popolare, con un ampio pantheon di divinità in gran parte legate ad ogni “tuath”, ed una religiosità alta, tipicamente druidica, che si concentrava su un culto delle forze naturali[5].

Sebbene con un diverso (ma non inferiore) livello di speculazione filosofico-religiosa, considerazioni non dissimili si adattano anche alla società norrena. Pur disegnati dalle cronache medievali come guerrieri feroci (come, in realtà, divenivano in caso di guerra) e predoni sanguinari (cosa anche questa veritiera, ma legata, più che altro, a necessità di sopravvivenza in momenti di estrema improduttività di zone già normalmente piuttosto sterili), i Vichinghi facevano parte di una società, così come descritta nel Rígsþula, eminentemente agricola e, a differenza di strutturazioni fortemente gerarchico-piramidali e rigide tipiche di popoli bellicosi, notevolmente fluida. La grande maggioranza dei norreni appartenevano alla classe media, la classe dei “Karls”, formata da artigiani e piccoli proprietari terrieri. Gli “Jarls”, i nobili (per altro non presenti in alcune zone particolari come l’Islanda), si distinguevano per la loro ricchezza, misurata in termini di seguaci, tesori, navi, e, soprattutto, tenute agricole e non per particolari doti guerriere, se non quelle legate alla difesa dei seguaci stessi. Il compito essenziale dello Jarl era, infatti, quello di sostenere la sicurezza, la prosperità, e l’onore dei suoi seguaci e per questo si serviva di un gruppo molto ristretto di “soldati professionisti”, per lo più giovani, detti “hirðmaðr”, ma nella sua carica le abilità di amministrazione agricola e di espressione oratoria erano molto più importanti che il saper maneggiare  le armi.

Sotto entrambe le classi vi erano i “þræll”, i servi e gli schiavi, più normalmente finiti in tali condizioni per debiti che per essere frutto di raid bellicosi.

Anche all’interno dei popoli norreni, così come tra i Celti, la cultura era tenuta in gran conto: i poeti, in uno status simile a quello reale e molto spesso i Godi, i capi locali che avevano compiti giuridici e amministrativi (in particolare in Islanda) venivano scelti tra i sacerdoti della religione odinica, considerati come esseri che avevano un rapporto speciale con gli dei. Di fatto, però, il vero potere si basava sul possesso di terra e sul numero di capi di bestiame allevati o, nel caso dei commercianti, sul valore delle loro ricchezze[6].

Insomma, anche in questo caso siamo di fronte ad una società eminentemente agricolo-commerciale e solo occasionalmente guerriera.

Per molti versi, le caratteristiche meno “marziali” di quanto certa epica hollywoodiana vorrebbe far credere su Celti e soprattutto Vichinghi, si riflettono sulla condizione della donna in entrambe le società.

Sebbene le fonti classiche (latine e greche) non ci dicano molto sulle donne nella società celtica, sia dalle saghe che dai reperti archeologici possiamo evincere che esse godessero, in paragone al mondo classico mediterraneo, di libertà notevoli e, in alcune occasioni, anche di grande potenza: certamente tutta la produzione alimentare e l’intera gamma della produzione artigianale (ceramica, vimini, lavorazione del cuoio, tessitura delle stoffe) erano, infatti, loro appannaggio, spesso portando a notevoli ricchezze e, come visto, la ricchezza portava a potere politico, così che non sono infrequenti i casi di capiclan donne o, addirittura, di regine (si pensi a Boudica) nel corso della storia celtica. Sebbene siano probabilmente erronee le idee di una poligamia sia maschile che femminile, anche il matrimonio ​​era visto più in forma di collaborazione paritaria rispetto al modello di proprietà dei Greci e dei Romani, una collaborazione consensuale che poteva essere interrotta in qualsiasi momento anche da parte della donna, che aveva la piena possibilità di lasciare un cattivo matrimonio portando con sé tutto quello che aveva portato in dote. e se è, altresì, falso dire che il mondo celtico fosse matriarcale, nondimeno la discendenza matrilineare era importante quanto e forse più di quella della linea maschile[7].

Il campo in cui l’alta considerazione delle donne si esprimeva più chiaramente era, però, quello religioso.

Come è noto, nell’antica società celtica i druidi e le druidesse formavano una élite intellettuale esperta, dopo uno studio ventennale, di letteratura, poesia, storia, legge, astronomia, erboristeria e medicina e, naturalmente di tutto quanto riguardasse la sfera del sacro.

Nei primi documenti romani riguardanti i Celti non si fa menzione, come giustamente osserva Jones[8], di figure sacerdotali femminili, probabilmente a causa dell’impossibilità per gli scrittori di  Roma di concepire una indifferenziazione sessuale nelle cariche pubbliche ma, finalmente, nel I secolo d.C., è Tacito che ci informa che “i Celti non facevano alcuna distinzione tra governanti maschi e femmine[9]. Essendo quella celtica una cultura orale, è difficile per noi oggi comprendere se tale governo fosse soprattutto spirituale o vi fosse una commistione tra potere religioso e temporale. Di fatto, alcune sepolture trovate a Vix e Reinham mostrano che le donne celtiche, in alcuni casi, potevano esercitare un forte potere politico, ma sono soprattutto le saghe come il Mito di Finn a dirci della presenza di druidesse e “donne sagge” nel mondo celtico: veggenti, incantattrici e persino addette a sacrifici sacrali sono comuni nelle leggende folkloristiche e ci dicono di una totale pariteticità di ruoli spirituali tra uomini e donne[10] .

La situazione non è esattamente identica nelle aree norrene. I ruoli di uomini e donne nella società norrena erano ben distinti ed erano i primi ad avere il dominio: le donne difficilmente partecipavano alle incursioni (anche se chiaramente parteciparono a viaggi di esplorazione e insediamento in posti come Islanda e Vinland) e alcuni comportamenti “mascolini” (indossare abiti maschili, tagliarsi i capelli corti, portare armi) erano loro severamente vietati dalla legge. Difficilmente partecipavano all’attività politica (non potevano essere Godi o giudici), di norma non potevano parlare nel “Thing” (assembla di clan) e, formalmente erano sottoposte all’autorità paterna. Ugualmente, però, è impossibile non vedere come le donne fossero molto rispettate nella società vichinga e avessero una grande libertà, soprattutto se paragonata ad altre società europee di quel periodo: gestivano le finanze della famiglia, dirigevano la fattoria in assenza del marito, in caso di vedovanza potevano diventare ricche e importanti proprietarie terriere ed erano ampiamente legalmente protette da una vasta gamma di attenzioni indesiderate. Significativo è che i personaggi femminili delle saghe siano lodati per la bellezza ma più spesso per la loro saggezza: in moltissimi casi emerge come siano le donne il potere neppure troppo occulto dietro le decisioni maschili e come la loro influenza sia quasi sempre positiva. Anche all’interno del nucleo familiare una donna poteva usare la minaccia di divorzio come un mezzo per stimolare il marito in azione: ottenere il divorzio era relativamente facile e poteva dar luogo a gravi oneri finanziari per il marito. Inoltre, le donne erano spesso viste come depositarie della magia “bianca” (e, come tali, erano spesso temute anche dai personaggi più importanti del “Thing” dei quali diventavano ascoltate consigliere) e delle conoscenze medico-erboristiche di origine divina[11].

In entrambe le società, dunque, è possibile notare come, nell’immaginario collettivo, l’elemento femminile avesse una sorta di “legame speciale” con il sacro. Da dove derivava questa diffusa credenza? Naturalmente, come in ogni altra società umana, lasciando da parte le caratteristiche tipicamente “lunari” di riflessività, “insight” e intuitività, dal potere femminile per eccellenza: quello generativo-creativo.

Non stupisce, allora, che, in un comune gioco di riflessi tra “supra” e “infra”, sia possibile reperire elementi chiaramente legati al femminino sacro in entrambe le culture.

All’interno del mondo celtico e della sua ricchissima strutturazione religiosa, al di là di rielaborazioni fantasiose e romanzesche su Avalon e le sue sacerdotesse e di teorie new e next age di stampo Wicca, due figure sacre rispecchiano più di tutte le altre (numerose) divinità femminili il femminino sacro declinato nel suo senso generativo-maternale, con tutto ciò che, in termini di creazione e alimentazione fisica e spirituale dell’essere umano ciò comporta: Rhiannon e Cerridwen.

La dea Rhiannon è una dea lunare gallese il cui nome significa Grande (o divina) Regina. Per molti versi è una figura di potere assoluto, sovrana degli dei e, a livello filosoficamente più alto, rappresentante simbolica della natura. All’interno della religiosità popolare la sua immagine è fortemente associata con gli equini: nella storia di Rhiannon, così come raccontata dalle saghe folkloristiche i cavalli svolgono un ruolo importante dal momento che essa prima cattura l’attenzione del suo futuro sposo mentre è cavallo, cavalcando con lui ne conquista l’amore e, allorché ingiustamente accusata (e poi riabilitata) della morte del figlio da lui concepito, sopporta il peso della punizione con grazia e dignità, mostrando, come sottolineato proprio dai testi mitologici,  una energia equina di resistenza[12]. Questo accostamento può apparire sconcertante, ma solo se decontestualizziamo il racconto dal suo background d’origine, rappresentato da allevatori di pony: come dea dei cavalli, infatti, Rhiannon viene a rappresentare sia la generatività naturale, che perpetua le mandrie di generazione in generazione, sia il sostentamento umano, che proprio su tale generatività si basa. Rhiannon è, comunque, una divinità multifunzionale, che racchiude in sé anche il senso dell’ordine naturale delle cose e della giustizia distributiva e retributiva maternale propria, appunto, della natura così come percepita dai Celti con la sua capacità di trascendere l’ingiustizia, avendo compassione e comprensione per coloro che falsamente l’accusano.

Ancora in sintonia con l’immagine della madre, la dea è nota per avere uccelli magici che cantano canzoni incantate che riportano sonni tranquilli agli esseri umani (i suoi figli) e, infine, ritornando al suo ruolo creativo anche sul piano simbolico, agisce come una Musa, portando l’energia illuminante di ispirazione per scrittori, poeti, musicisti e artisti[13].

Si è già altrove avuto modo di osservare come, però, la figura della “dea madre” non sia sempre positiva a tutto tondo, includendo, nella sua valenza simbolica di rappresentante della natura, anche tutti quegli aspetti violenti e pericolosi propri della natura stessa e incarnando il pericolo del potere femminile di stampo sessuale.

Ebbene, nella mitologia celtica, in particolare gallese, l’aspetto più oscuro della dea è rappresentato da Cerridwen, la vegliarda che ha poteri di profezia ed è custode del calderone della conoscenza e dell’ispirazione negli Inferi. Come è tipico delle dee celtiche, essa ha due figli: la figlia Crearwy è giusta e solare e il figlio Afagddu (chiamato anche Morfran) è scuro, brutto e malvagio, a voler simboleggiare la maternità incondizionata di tutto il genere umano e la dedizione maternale della dea verso chiunque[14].

Perché, dunque, si è parlato di “lato oscuro”?

Perché Cerridwen incarna il lato “stregonesco” e sessuale (quindi potenzialmente pericoloso rispetto a Rhiannon, nella quale questo aspetto viene “depotenziato” con l’affermazione di una sua mai completamente delineata verginità) della dea madre a partire dalla prima leggenda fondativa che la riguarda contenuta nel Mabinogion, il ciclo dei miti gallesi: in esso si racconta come la dea fermenti una pozione nel suo calderone magico per darla al figlio Afagddu e migliorarne le fattezze; avendo posto il giovane Gwion a custodia del calderone, tre gocce della sostanza in esso contenuta cadono su un dito del ragazzo, che diventa onnisciente e viene per questo perseguitato dalla dea attraverso un ciclo di stagioni fino a quando, sotto forma di una gallina, essa non riesce a catturalo e ingoiarlo mentre si nasconde tramutato in una spiga di grano, finendo nove mesi dopo, per partorire Taliesen, il più grande di tutti i poeti gallesi[15].

Come è facile notare, le istanze di trasformazione sono molto presenti lungo tutta la leggenda, con i due protagonisti che si mutano in un numero notevole di animali e piante, con un forte simbolismo legato alle trasformazioni cicliche della natura e del mondo, ma anche altri elementi rivestono un notevole interesse: in particolare, allorché, dopo la nascita di Taliesen la dea contempla l’uccisione del bambino, ma, cambiando idea, decide invece di gettarlo in mare, dove è salvato dal principe celtico Elffin, risulta evidente il rimando ai cicli cosmici di morte e rinascita, dei quali, tra l’altro, il calderone sacro della dea (che, secondo alcuni, sarà il primo nucleo del mito del Graal), risulta, con il suo potere rigenerativo, paradigma ultimativo[16].

Dunque, nella cultura celtica, la figura della dea madre, epitome del femminino sacro, risulta ben presente, ma anche  multiforme e sfaccettata, specchio di una società in cui la donna ha grande possibilità di movimento e, conseguentemente, di espressione di tutti gli aspetti del dominio lunare.

Nel mondo norreno, indubbiamente caratterizzato da aspetti meno filosofico-speculativi e più pratici, tutto si semplifica notevolmente e la figura della dea madre diviene più lineare e a tutto tondo, venendo incarnata da Frigga.

Frigga (noto anche come Frigg, “l’amata”) era la dea dell’amore coniugale, del matrimonio e del destino, la moglie del potente signore degli dei Odino. Responsabile della tessitura delle nuvole (e quindi, in un tipico attributo della dea madre, del sole e della pioggia, quindi della fertilità dei raccolti), e dei destini di tutti i viventi, Frigga era una veggente (sebbene non potesse cambiare gli eventi che vedeva) ed era, con palese riferimento lunare, la dea della notte, perché proprio di notte, in un richiamo sessuale “pacificato” (rispetto alla sessualità “pericolosa” e conturbante, che era appannaggio di Freya, dea della bellezza sensuale), dispensava la vita, tanto che la sua benedizione veniva invocata dalle partorienti.

Madre amorevole di tutto il creato, la  sua capacità di vedere nel futuro le avrebbe causato il più grande dolore, avendo previsto la morte del suo figlio prediletto Baldur: pur sapendo di non poter cambiare il suo destino, Frigga aveva fatto promettere a tutte le cose di non fare del male al figlio, ma purtroppo aveva trascurato una cosa, il vischio, che sembrava troppo insignificante per essere pericoloso e il malvagio Loki, scoperta questa dimenticanza, aveva collocato nelle mani di Hodor, fratello di Baldur, una freccia di vischio, facendogliela scagliare, durante una sessione di apprendimento di tiro con l’arco, nel cuore del “più perfetto tra gli dei”[17]. In alcune versioni del mito, a questo punto, interviene un’altra caratteristica della “dea madre” Frigga, quella rigenerativa (della natura, dei frutti della terra, etc.), che riesce a riportare Baldur in vita, mentre un’altra caratteristica è presente in tutte le saghe che la riguardano, quella di fornire nutrimento materno agli esseri umani, tanto che in Germania veniva venerata come la dea Holda o Bertha (la dea dell’allattamento e dei raccolti), in seguito modello per la favola di “Mamma Oca”.

Infine, all’apice dei suoi tratti simbolici, Frigga era anche dea della fertilità femminile e del matrimonio e, in quanto tale, era pregata dalle mogli sterili e dalle ragazze in età da marito[18].


[1] B. Cunliffe, The Ancient Celts, Penguin 2000, pp. 56 ss.

[2] Ivi, pp. 34-36

[3] K. Ralls-MacLeod, I. Robertson, The Quest for the Celtic Key, Luath Press Limited 2005, pp. 49 ss.

[4] [4] B. Cunliffe, Citato, pp. 79-87

[5] J. A. MacCulloch, The Religion of the Ancient Celts, General Books LLC 2010, pp.23-24

[6] H. Adams Bellows,  The Poetic Edda, CreateSpace 2011, pp. 61 ss.passim

[7] P. Berresford Ellis, Celtic Women: Women in Celtic Society & Literature, Trans-Atlantic Pub. 1996, passim

[8] L. Jones, Druid-Shaman-Priest: Metaphors of Celtic Paganism, Hisarlik Press 1998, pp. 45 ss.

[9] Citato ivi, p.48

[10] P. Berresford Ellis, Citato, p.77

[11] J. Jochens, Women in Old Norse Society, Cornell University Press 1998, passim

[12] M.J. Aldhouse-Green, Celtic Goddesses: Warriors, Virgins and Mothers, George Braziller 1996, pp. 107 ss.

[13] Ivi, pp. 121 ss.

[14]Ivi, pp. 172 ss.

[16] Ivi, pp. 111 ss.

[17] M. Pope Osborne, Favorite Norse Myths, Scholastic 2001, pp. 51-52

[18] J. Green, Gods and Goddesses in the Daily Life of the Vikings, Hodder Wayland 2003, pp. 31 ss


jeudi, 17 mars 2011

Vintur, le dieu lumineux des montagnes provençales

 

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Vintur, le dieu lumineux des montagnes provençales

Ex: http://tpprovence.wordpress.com/

Le nom Vintur, présent uniquement en Provence, apparaît sur trois inscriptions votives datant du IIe siècle. La première a été découverte au XVIIIe siècle, à Mirabel-aux-Baronnies, dans la Drôme, sur le site de Notre-Dame de Beaulieu, par Esprit Calvet. Elle indique VENTVRI/CADIENSES/VSLM (1). La deuxième a été relevée à Apt, dans le Vaucluse, en 1700, par Joseph-François de Rémerville, qui nota : VENTVRI/VSLM/M.VIBIVUS (2). La troisième enfin, fut exhumée, également dans le Vaucluse, lors de fouilles effectuées en 1993 à la Chapelle Saint-Véran, près de Goult : seul VINTVRI restait encore lisible sur un fragment (3). Une question se pose alors : qui était ce mystérieux Vintur, honoré par ces inscriptions ?

Apollon, le Bélénos gaulois

L’on peut lire dans La Provence antique de J.P. Clébert : « Il y a aussi des dieux des sommets comme le fameux Ventur, dieu du vent, qui a donné son nom au mont Ventoux, et à celui de la Sainte Victoire (Vencturus) et probablement dieu Mistral » (4). De même, Patrice Arcelin, dans un article du magazine Dossier Archeologia sur les « Croyances et les idées religieuses en Gaule méridionale », précise à propos des divinités associées aux montagnes : « Les sommets ont également été l’objet de dévotion. On connaît plusieurs noms de divinités qui leur sont liés : le dieu Vintur, d’après une dédicace de Mirabel (Drôme) pour le mont Ventoux : le même nom se retrouve à Buoux dans le Luberon » (5).

Comme souvent, le recours à l’étymologie permet d’éclaircir la question. C’est ainsi que Claude Sterckx explique : « Le théonyme Vintur(os) a été très peu étudié jusqu’à présent. L’alternance Vint/Vind apparaît bien attestée par la série de théonymes certainement apparentés : Vindios/Vintios-Vindonnod/Vintoros. Ils semblent tous basés sur l’adjectif gaulois Vindos : “ blanc, brillant, clair “ ». Interrogé par nos soins, Jean Haudry nous a précisé : « La présence de formes en vind- à côté des formes en vint- me semble favoriser le rattachement à l’adjectif vindos « blanc », mais le flottement entre t et d est surprenant: les diverses formes qui se attachent à vindos ont toujours nd. D’autre part, je ne connais pas de formes en -ur- à côté de formes en -o-. L’étymologie de vindos est incertaine : le rattachement habituel à *weyd- « savoir », « trouver » n’est pas très bon pour le sens, le rattachement à *sweyd- « briller » serait préférable de ce point de vue, mais le *s de cette racine n’est pas un *s- mobile ».

Pour sa part, Claude Sterckx conclut : « Vintur(os) serait donc à comprendre comme “le petit blanc“, “le petit lumineux“, et donc comme une épiclèse vraisemblablement de l’Apollon gaulois dont les autres désignations (Bélénos, Vindios, Albius) ont exactement le même sens (sans la finale hypocoristique) ». Avis partagé par tous ceux qui se sont penchés sur le cas Vintur.

Le théonyme celtique Bélénos est attesté dans l’ensemble du monde celtique continental, puisque des inscriptions ont été retrouvées en Gaule cisalpine et transalpine, en Illyrie et en Norique. Mais c’est dans le sud de la Gaule, en Provence, que son culte était prééminent. Dans son ouvrage de référence La Religion des Celtes, de Vries indique qu’il était à l’honneur surtout chez les Salyens, des Celto-ligures installés précisément en Provence. Le fait que Bélénos soit, selon l’interprétation romaine, le nom de l’Apollon gaulois, divinité « solaire », a fait comprendre cet appellatif comme « le lumineux, le brillant ». Ainsi, selon de Vries, « l’Apollon gaulois a, lui aussi, d’étroits rapports avec le soleil ; son surnom de Belenus suffirait à l’indiquer » (6). On étymologise ensuite par des racines indo-européennes imaginaires, *gwel-« briller ». En réalité, comme le démontre Xavier Delamarre dans son Dictionnaire de la langue gauloise, le théonyme Belenos vient tout simplement de *belo, *bello, « fort, puissant » (7).

Bélénos n’en est pas moins un dieu lumineux, dont les principales fonctions étaient la médecine et les arts. Il était honoré lors de la fête de Beltaine, qui marquait une rupture dans l’année, le passage de la saison sombre à la saison claire, lumineuse. Parmi ses surnoms plus spécifiquement gaulois, l’on remarque « Iovancocarus » (Juvent- : jeunesse), dieu rayonnant de jeunesse.

En Irlande, Bélénos s’appelait Oengus, le Mac-Oc, c’est à dire le « dieu jeune », décrit dans les récits médiévaux comme « un jeune guerrier monté sur un cheval blanc ». Le Mac-Oc irlandais se nomme Madon au Pays de Galles : les contes gallois insistent sur son caractère solaire, car il est décrit comme « un jeune guerrier monté sur un cheval blanc ». On peut aussi assimiler Bélénos au dieu médecin de la mythologie irlandaise, Diancecht.

Il faut aussi rapprocher Bélénos du dieu germanique Balder (vieil islandais Baldr), dieu de la jeunesse décrit dans l’Edda de Snorri Sturlusson, comme « si beau d’apparence et si clair qu’il en est lumineux ». Joseph Chérade Montbron soulignait, dès le XIXe siècle : « Il est probable que ce Balder est le même que le Belen ou Belenos qu’adoraient les Gaulois. Selon Rudbek, l’étymologie de Balder ou Belenos vient de Bella, se bien porter (…) De là Bol, Bold, Baal et Baldur, puissant, sain » (8). On retrouve là l’étymologie donnée par Xavier Delamarre.

En outre, Bélénos est assimilé à l’Apollon du panthéon classique gréco-romain, dieu du chant, de la musique et de la poésie, mais aussi des purifications et de la guérison. Revenant chaque année au printemps du pays des hyperboréens, situé à l’extrême nord, il était le dieu de la lumière. Sa fonction éminemment solaire est confirmée par ses surnoms : « le blond », « le dieu aux cheveux d’or », « Phoibos », c’est à dire « le brillant », dont les Romains firent Phébus. A en croire l’hymne homérique, Apollon « a l’apparence d’un astre qui luit en plein jour. Des feux sans nombre jaillissent de sa personne, l’éclat en va jusqu’au ciel ». Dieu guérisseur, il était nommé, en Grèce, « Apotropaïos », « celui qui éloigne les maladies » ; à Rome, un premier temple lui fut érigé à la suite d’une épidémie, en 443 av JC et y port le nom d’Apollo Medicus (9). Dans son interprétation romaine du panthéon gaulois, César qualifiait ainsi Bélénos : « Apolinem morbos depellerre », soit « ils croient qu’Apollon chasse les maladies » (10).

Sous le nom de Vintur, qui n’est qu’une épiclèse, c’est à dire une épithète par laquelle nos ancêtres désignaient le dieu dont le nom devait rester occulté, se cache donc le Bélénos gaulois, le Diancecht des Irlandais, l’Apollon des Grecs, l’Apollo Medicus des Romains.

Le Mont-Ventoux

J. Whatmough, dans The dialects of Ancient Gaul, suggère un apparentement entre le nom de Vintur et celui du Mont-Ventoux (11). Il est vrai qu’en Occitan provençal, Mont-Ventoux se dit Mont Ventor selon la norme classique ou Mount Ventour selon la norme mistralienne.

Dès 1904, dans les Annales de la société d’Etudes Provençales, C.M. Clerc écrivait : « Le vrai nom du Mont Ventoux, sur les cartes du XVIIIe s est, non pas Ventoux, mais Ventour. Ce nom dérive indubitablement du nom d’une divinité, Venturius, à laquelle sont dédiées deux inscriptions romaines tracées, l’une à Mirabel, près de Vaison, l’autre à Buoux, au nord du Luberon. Il n’est pas impossible que cette divinité ait été non seulement celle du Ventoux, mais la divinité générale des montagnes de toute la région provençale, divinité d’origine celte ou plutôt ligure. Ce nom dérive, sans doute d’une racine analogue au latin Ventus ».

Si le Ventoux doit bien son appellation à Vintur, celui-ci est nullement le dieu du vent ou du Mistral, ni un dieu local. En effet, il n’existe pas de divinités topiques dans la religion gauloise. Les Gaulois ne divinisaient pas leurs forêts, leurs fleuves ou leurs montagnes. Si le nom de Sequona est associé à la Seine, Matrona à la Marne ou Vosegos aux Vosges, c’est uniquement que ces lieux étaient consacrés à ces divinités et portaient leur nom…

Le sommet du Mont-Ventoux, enneigé tout au long de l’hiver, et recouvert de pierres blanches le reste de l’année, a été consacré à Vintur, le dieu solaire, « le blanc », « le brillant », « le lumineux », en raison de sa blancheur persistance. Quant à la célèbre source du Groseau, au pied du Ventoux, elle a été considérée comme salutaire car protégée par le dieu guérisseur Vintur.

La Sainte-Victoire

De nombreux érudits ont rapproché la toponymie du Mont-Ventoux avec celle d’un autre géant de Provence, tout aussi fameux : la Sainte-Victoire.

Passons rapidement sur la légende qui rattache l’appellation de la montagne à la victoire de Marius sur les Teutons, en 102 av JC. Elle remonte au XIXe s, et fut forgée de toutes pièces par quelques écrivains et journalistes locaux. Walter Scott, qui situe à la Sainte-Victoire un chapitre de son roman Charles Le Téméraire ou Anne de Geierstein, écrit en 1829, donne l’explication (?) suivante : « Le nom de la Montagne, écrit-il, avait été donné par suite d’une grande victoire qu’un général romain nommé Caio Mario avait remporté sur deux grandes armées de Sarrasins portant des noms ultramontains, probablement les Teutons et les Cimbres. En reconnaissance de cette victoire Caio Mario fit vœu de bâtir un monastère sur cette montagne et de le dédier à la Vierge Marie, en l’honneur de laquelle il avait été baptisé ». Défense de rire !

Pour redevenir sérieux, notons que le nom de Sainte-Victoire est inconnu dans les documents avant le XVIIe s.  Le terme de « Victoire » est mentionné pour la première fois en 1653, quand un bourgeois d’Aix-en-Provence, Honoré Lambert, fait le vœu, au cours d’une grave maladie, de restaurer la chapelle et l’ermitage situés au sommet de la montagne, sous le nom de « Notre-dame de la Victoire », et de s’y retirer pour se consacrer à une vie de prière et de contemplation. On ne sait pas si, avec un tel nom, il s’agit de commémorer la victoire de Louis XIII sur les Protestants, ou la bataille victorieuse de Lépante contre les Turcs, même si la première hypothèse semble la plus plausible.

Dans la période précédente, le nom de la montagne est « Venture » ou, sous une forme chrétienne, « Sainte-Venture » ou « Sainte-Adventure », cette appellation figurant encore sur des cartes du début du XVIIIe s, et il n’est question dans les textes que d’un chemin menant à Sainte Adventure (Itinere sancte Adventuro) en 1390, ou à Sainte-Venturie (Sancte Venturie) en 1345.

D’où l’hypothèse émise par Camille Jullian, en 1899, dans les colonnes de la Revue d’Etudes Anciennes : « Sainte-Victoire vient d’un mot celtique, ou ligure, comme Venturi, Venturius ou quelque chose d’approchant. Le nom même de la montagne n’a jamais été Victoria. Lorsqu’on trouve son nom sous sa vraie forme locale et provençale, elle s’appelle Venturi, du latin Ventur et Venturius comme le vrai nom et le nom primitif de Sainte-Victoire. Venturi, Ventoux, c’est tout un. Et dans le passé la distance entre ces deux mots diminue encore. Le Ventoux s’appelle dans les chartes Venturius, et à l’époque romaine, Vintur. Sainte-Victoire et le Ventoux ont donc porté, à l’origine, le même nom celtique ou ligure, nom fort approprié à des sommets d’où semblent partir nuages et vent ». Comme Camille jullian, Charles Rostaing et de nombreux érudits n’ont eu de cesse de rapprocher la toponymie de la montagne Sainte-Victoire de celle d’un autre sommet tout aussi célèbre : le Mont-Ventoux.

Par ailleurs, l’on retrouve en Provence d’autres toponymes dérivant du théonyme gaulois Vintur. Charles Rostaing cite l’exemple du village de Venterol, dans les Alpes de Haute Provence, dont le nom dérive, selon lui, du dieu gaulois. Hypothèse confirmée par le site de construction de l’ancien village : un piton à 1185 mètres d’altitude (12).

Jean-François Delfini, Grande Provence, hiver 2010, n°2.

NOTES

(1)  CIL 12, 1341.

(2)  CIL 12, 1104.

(3)  ILN 04, 143.

(4)  J.P. Clébert, La Provence antique, II, Robert Laffont, 1966.

(5)  Dossier Archeologia, juin 1979, n°35.

(6)  De Vries, La Religion des Celtes, Payot, 1962, 45.

(7)  X. Delamarre, Dictionnaire de la langue gauloise, Errance, 2001, p. 62.

(8)  J. Chérade Montbron, Les Scandinaves : poëme, Maradan, 1801, p. 522.

(9) Tite-Live, IV, 25.3 ; XL, 51.6.

(10) Jules César, De bello gallico, 6,7.2.

(11)  J. Whatmough, The dialects of Ancient Gaul, Cambridge, 1970, p. 117.

(12)  C. Rostaing, Essai sur la toponymie de la Provence (depuis les origines jusqu’aux invasions barbares), Laffitte reprints, Marseille, 1973, p. 295.

http://www.grandeprovence.fr/

vendredi, 18 juin 2010

Cù Chulainn in the GPO: The Mythic Imagination of Patrick Pearse

cuchulainn.jpgCù Chulainn in the GPO:
The Mythic Imagination of Patrick Pearse

Michael O'MEARA

Ex: http://www.counter-currents.com/

padraic_pearse.jpgOn Easter Monday, April 24, 1916, while all Europe was mobilized for the first of its terrible civil wars, Patrick Pearse, James Connolly, and several hundred “militia men” from the Irish Citizen Army and the Nationalist Volunteers commandeered the General Post Office on Dublin’s O’Connell (then Sackville) Street.

Once a defensive parameter was established around the stately, neo-classical symbol of British rule, the tall, lanky 37-year-old Pearse, titular head of the self-proclaimed “provisional government of the Irish Republic,” appeared on the GPO’s steps to read out to a small crowd of bewildered and skeptical by-standers a proclamation.

“Irishmen and Irishwomen: In the name of God and the dead generations from which she receives her old tradition of nationhood, Ireland, through us, summons her children to her flag and strikes for her freedom.”

This line — the entire proclamation, even — is a work of art.

Some say the Uprising itself was a work of art.

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As the GPO was being fortified on the 24th, 700 or 800 lightly-armed rebels, most with shotguns and home-made bombs, some with rifles secretly obtained from Germany — (the same “gallant ally in Europe” who allied with the IRA in the next European civil war) — spread out across Dublin, occupying other public buildings and sites associated with the Crown.

The Uprising was not a direct military assault on British authority per se (the rebels lacked the fire power).  It was nevertheless an armed assertion of Irish authority — an authority however poorly armed that was nevertheless imbued with a powerful idea — the idea that does not tire or break and that imparts “its mantle of strength upon those in its service” — the idea of destiny (Francis Parker Yockey).

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The English garrison in Ireland, larger than the garrison that held India, was caught entirely off-guard by the insurrection.

There was good reason for this.

In 1914 the Irish Parliamentary Party had not only pledged to support the British government, as Germany challenged its supremacy on the killing fields of Flanders and Northern France, the party called on its paramilitary wing, the 170,000 strong Irish Volunteers, to enlist in the British army.  (The ten to twenty thousand Volunteers who refused to follow the IPP’s lead, those rechristened “the Nationalist Volunteers,” were to be the Uprising’s principal military arm, though their mobilization, for reasons too complicated to explain here, was countermanded at the last moment).

The Irish people, one of the most dispossessed and economically distressful of Europe’s peoples, were enjoying a brief spell of good times, as employment and agriculture flourished in the wake of the British war effort.

Westminster had also promised to implement Home Rule, once the war ended.

Ireland never seemed more securely in English hands.

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The rebellion was greeted with surprise and rage — by both the British government and the Irish population.

This would change, as the government turned the rebels into martyrs, “snatching political defeat from the jaws of military victory.”

In the view of much of the world, especially among the popular classes of nationalist-minded Irish-America, the forces of the crown were seen as reacting with characteristic English brutality, as their powerful naval guns pounded Britain’s second most important city, destroying the GPO and much of the city’s heart, as well as wounding or killing a thousand civilians

James Connolly, that most Aryan of Marxists, had thought the British forces, beholden to English capital, would never turn their guns on their own commercial property: Little did he know — and little did he realize that his sophisticated understanding of urban warfare would crumble before this fact.

Ground troops, supported by field artillery, then suppressed the lingering rebellion on the streets — though not before Pearse ordered a general surrender, once it was clear civilians were the main victim of Britain’s crushing counter-attack.

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Like most of the six armed rebellions the Irish had raised in the previous 200 years, there was a good deal of futility and desperation in the Easter Uprising — begun on Monday and extinguished, at least so everyone thought, by the following Saturday.

Pearse, Connolly, and much of the Irish Republican Brotherhood responsible for the insurrection had, in fact, no illusion that they would succeed or even survive the Uprising.

Once rounded up, the fifteen nationalist leaders of the revolt were court martialed and shot.

“Dear, dirty Dublin” came, then, to resemble the war-ravaged towns and cities along the Franco-German front, as the cause of Irish freedom seemed to suffer another damning setback.

Yet five years later, Ireland was a nation once again.

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Like much of the Uprising’s revolutionary nationalist leadership, Pearse sought a path that led away not just from British rule, but from British modernity — which, like its larger civilizational expression, seemed to suffocate everything heroic and great in life.

Against the empire’s cold mechanical forces, he arrayed the powerful mythic pulse of the ancient Gaels.

As Carl Schmitt might have described it: “Against the mercantilist image of balance there appears another vision, the warlike image of a bloody, definitive, destructive, decisive battle.”

Pearse was not alone in thinking myth superior to matter.

Indeed, his Ireland was Europe in microcosm — the Europe struggling against the forces of the coming anti-Europe.

In Germany, no less than in Ireland, powerful cultural movements based on “peasant” mythology and traditional culture had arisen to repulse the modern world — movements which did much to revive the spirit of Western Civilization (before it was again struck down by the ethnocidal Pax Americana).

In Germany this movement frontally challenged the continental status quo, in Ireland it challenged the British Empire.

Lacking a political alternative, the frustrated national unity of 19th-century “Germany” had looked to increase its cultural cohesion and self-consciousness.

Like its German counterpart, Ireland’s Celtic Twilight was part of a larger European movement — of a romantic and romanticizing nationalism — to revive the ancient Volk culture in its struggle against the anti-national forces of money and modernity.

Though the Famine had delayed the movement’s advent in Ireland, it came.

The cultural phase of Irish nationalism formally began with Parnell’s fall in 1889.  Turning away from the personal and political tragedy of their uncrowned king, nationalists started re-thinking their destiny in other than political terms.

If the Germans, in the cultural assertion of their nationalism, had to free themselves from the overwhelming hegemony of French culture, the Irish had to turn away from the English, who considered them barbarians.

In rejected liberal modernity, these barbarians sought to recapture something of the archaic, Aryan spirit still evident in the Táin Bó Cuailnge and in Wagner’s Ring des Nibelingen — the spirit distilled today in Guillaume Faye’s “archeofuturism.”

***

Before Parnell, Irish resistance to English subjugation (with the exception of O’Connell’s movement) had taken the form of numerous, rather badly planned military defeats.

But the Irish had little recourse, especially in law.  (Indeed, the only justice for the Irishman in Ireland came from his shillelagh, whenever it took precedent over the judge’s gravel).

Centuries of Irish violence and resistance had convinced the English of Irish lawlessness and of their incapacity for self-rule.

Savage English repression begot savage Irish resistance, which, in turn, begot savage repression and so on: The long, unfortunate, blood-soaked dialectic of Anglo-Irish relations.

The empire’s violence was legitimated in the name of cultural superiority.  Throughout British society, which thought itself the height of Western civilization, it was held that Ireland before the Norman Conquest had lacked any form of civilization or High Culture — even the learned David Hume held this view.  Indeed, the Irish were seen as yet fully civilized.

In British eyes this “race” was a lesser breed, somewhat like a nonwhite one, like wild Indians, and imperial conflict with it was something like conflict with a savage tribe — it was not the relationship Paris had to her provinces, it was not even what the German Hapsburgs had to their Slavic nations.

The Catholic Irish are famous in 19th-century English periodicals for their simian features.

The lawless Celts (the very word comes from the Greek for “fighter”), so obviously inferior to the civilized “Saxons,” brought upon themselves thus the rent racking, the enclosures, and the garrison state that came with the English occupation (the so-called “Union”).

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William Butler Yeats, Lady Gregory, John Millington Synge, and other gifted members of the Anglo-Irish Ascendancy had no love for the world’s workshop, longing, as they did, for “the integral community of the old manorial days.”

The Irish Literary Renaissance was launched, following Parnell’s fall, with “The Wanderings of Oisin,” in which Yeats called for “a new literature, a new philosophy, and a new nationalism.”

Irish folklore for Yeats was not simply Irish, but the conservator of “an ancient, sacred worldview overwhelmed by the abstract, highly differentiated,” and generally ignoble forms of modern bourgeois life (forms, as we Americans have learned, that have, among other negative things, imbued money-changing aliens with great power over us).

For Ireland’s cultural nationalists, the past was a realm of meaning — prefiguring a future to rebuke the present.  And a great past, which the culturalist nationalists soon enough discovered, beckoned, as William Irwin Thompson surmised, “a future fit for an exalted heritage.”

The romanticized “peasant,” along with the medieval knight and the gentleman cavalier, were celebrated in Yeats’ poetic rebellion against the modern world.

This “nationalization” of the people’s heritage appealed to nationalists disgusted with things English; its moralistic rejection of decadence and empire also appealed to the emerging Irish Catholic lower-middle class; at the highest, most important, level, its mythic vision organically merged with “a culture that renews itself by reference to its mythology.”

By the early 20th century, a new ideology gripped Ireland, Germany, and many European nations, an ideology which defined the nation in racialist, romantic, and anti-modernist terms centered on certain cultural polarities: viz., anti-liberal versus liberal, past v. present, agricultural community v. industrial society, small moral nation v. decadent world empire, myth v. reason, quality v. quantity, Gaelic v. English, German v. French, Ireland v. England, Europeans v. Anglo-Americans, etc.

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The hard men of the Irish Republican Brotherhood — (the Fenians, the progenitors of the many factions making up today’s IRA, were very unlike the genteel Anglo-Irish artists who made Dublin a cultural capital of the Anglophone world) — but they too were part of the general revolt against liberal civilization — against the devirilizing tenets of positivist thought, against the primacy of monetary values, against the spirit-killing effects of mechanization, massification, and deracination, and, above all, against the empire’s imposition on everything native to Irish identity.

In France, Italy, and Spain rebels opposing liberalism’s realm of “consummate meaninglessness” threw bombs, in Ireland, where the cult of violence was ancient, they made up an army of bomb-throwers — for it was the nation seeking to be born, “ourselves alone,” not the solitary resister, who filled the rebel ranks.

Violence and self-sacrifice, as such, needed no justification in Catholic Ireland (though they seemed totally alien and barbaric to England’s liberal Protestants).

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Ireland’s brave rebels are best seen against a European backdrop.

At its center was the Sorelian myth of violence, imagining the overthrow of Cromwell’s cursed regime.

This myth of violence was no ideology, but a Nietzschean assertion of will.

Its dreamscape was the apocalyptic catastrophe in which all things became possible.

Its promised violence wasn’t aimless or nihilistic, like that of a Negro hoodlum, but soteriological, seeking the salvation of man’s soul in a world made especially evil by the efficacy of science and reason.

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Violence here — in the mythic context of Pearse’s imagination and in the social-political world of late 19th-century, early 20th-century Europe — became “a path to a new faith” — a path that ran over the ruins of modernity, as it endeavored to redeem it.

The Irish cosmological view, in Patrick O’Farrell’s study, perceived England as a secular, unethical, money-grubbing power that had “violated” Caithlin Ni Houlihan — the Old Woman of Beare, Roisin Dubb, Shan Van Vocht, Deidre of the Sorrows, Queen Sive, and all the feminine symbols personifying Ireland’s perennial spirit.

In such a cosmology, national liberation was eschatological, millennarian, and, above all, mythic.

For here myth seizes the mind of the faithful as it prepares them to act.  Its idea is “apocalyptic, looking toward a future that can come about only through a violent destruction of what already exists.”

Pearse’s myth was of a noble Ireland won by violent, resolute, virile action — nothing less would merit his blood sacrifice.

Fusing the unique synergy of millennarian Catholicism (with its martyrs), ancient pagan myth (with its heroes), and a spirit of redemptive violence (couched in every recess of Irish culture) — his myth has since become the ideological justification for the physical force tradition of Irish republicanism — a tradition which holds that no nation can gain its freedom except through force of arms — that is, by taking it — by forthrightly asserting it in the Heideggerian sense of realizing the truth of its being.

Pearse’s allegiance to armed struggle came with his disgust with parliamentary politics.  He thought Parnell’s party “had sat too long at the English table” — that it had come to regard Irish nationality “as a negotiable rather than a spiritual thing.”

All states, he considered, rested on force.  If Ireland should be “freed” through Home Rule, that is, under British auspices, it would make the Irish smug and loyal — and British.

With the advent of the Great War of 1914 and the Burgfrieden negotiated between the parliamentary nationalists of the IPP and the British government, the flame of Ireland’s national spirit began to dim.

The violent break with Britain, which Pearse and other revolutionary nationalists sought, was inspired by the conviction that every compromise weakened Ireland’s soul and strength — that the flame had always to burn heroically — that the spirit had to be pure — otherwise the sacramental lustre of the Republican cause would be lost.

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The tradition of armed resistance of which Pearse became the leading Irish symbol was not unique to Ireland, but part the same European tradition that inspired the Slavic Communist storming of the Winter Palace, the same that guided the anti-liberal, fascist, and national socialist opposition to liberalism’s interwar regimes — the same that appears still on the hard streets of Northern Ireland and in the minds of a small number of exceptional Europeans.

For Pearse, the Uprising was more than a blow struck for Irish freedom, it was “a revolt against the materialistic, rationalistic, and all-too-modern world” of the British Empire.

Pearse was not unlike Charles Péguy, who too conceived of a national myth “to stand against the modernist tide.”

Péguy: “Nothing is as murderous as weakness and cowardice / Nothing is as humane as firmness.”

This was Pearse’s thought, exactly.

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Such a mythic conviction came, though, at a high cost, for it required a willful self-immolation and the promise of death, however heroic.

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Pearse’s conviction sprang from Ireland’s long history of resistance and the Aryo-European spirit it reflected, but it also came from the old sagas, from the stories and legends of the ancient Gaels, that celebrated the values and traditions of Ireland’s heroic age.

Prior to the modern age Ireland’s Gaelic vernacular literature was the largest of any European peoples, except that of the Greeks and Romans.

The Irish loved to tell stories, a great many of which their monks wrote down a thousand years ago.

Like other Gaelic-speaking nationalists, Pearse was especially affected by the Ulster Cycle of legends and myths associated with Cù Chulainn — the symbol of Ireland — the symbol of one powerful man standing alone against a terrible, overwhelming force — the Irish Achilles — whose heroic temper was a rebuke to the corruptions and weaknesses of the modern age.

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In August 1915, a year into the European civil war, and three-quarters of a year before the Easter Uprising, the IRB staged a ceremonial burial for one of its own — in a country where ceremonial burials have often given birth to new forms of life.

In his funeral oration at the grave side of the dead Fenian, O’Donovan Rossa, the Cù Chulainn (who would soon fight his epic battle in the GPO) augured that: “Life springs from death and from the graves of patriot men and women spring nations. . . .  They [the English] think that they have pacified Ireland.  They think that they have pacified half of us and intimidated the other half.  They think that they have provided against everything: but the fools, the fools, the fools! — they have left us our Fenian dead, and while Ireland holds these graves, Ireland unfree shall never be at peace.”

Man, in Pearse’s mythic imagination, doesn’t act on the chance of being successful, but for the sake of doing what needs to be done.  The nationalist movement, united in hatred of the English ruling class, was full of such men.

Their doing, their sacrifice — like that of Jesus on the cross or the tragic Cù Chulainn burying his son in the indifferent sea tide — was of utmost importance.

For everything, the rebels knew, would follow from it — the slaughtered sheep brightening the sacramental flame of their spirit.

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Some historians claim Pearse’s “suicidal” insurrection bequeathed “a sense of moral conviction to revolutionaries all over the world.”

From a military perspective, the Uprising, of course, was a categorical failure.  But morally, it became something of a world-changing force — which wasn’t surprising in a country like Ireland, whose mythology had long favored ennobling failures.

As Pearse told the military tribunal that condemned him to death: “We seem to have lost.  We have not lost.  To refuse to fight would have been to lose.  We have kept faith with the past, and handed down a tradition to the future.”

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In the course of the extraordinary events following The Proclamation (as the rebels kept faith with their past), mind, imagination, and myth fused into a synergetic force of unprecedented brilliance and power — the terrible beauty being born.

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Patrick Pearse fell before the English guns soon after Easter, but the ennobling image of him standing upright in the burning GPO lives on in the heritage he willed not just to Irishmen but to all white men.

For of the insurgents, at least fifty of them, including Pearse himself, were of mixed Irish-English parentage.

They fought the cruel empire not just for Ireland’s sake, but for the sake of redeeming, in themselves, something of the old Aryo-Gaelic ways.

April 24, 2010

Sources:

Thomas M. Coffey, Agony at Easter: The 1916 Irish Uprising (Baltimore: Penguin, 1971).

Ruth Dudley Edwards, Patrick Pearse: The Triumph of Failure (New York: Taplinger, 1978).

Sean Farrell Moran, Patrick Pearse and the Politics of Redemption (Washington: Catholic University Press of America, 1994).

Joseph O’Brien, Dear, Dirty Dublin: 18991916 (Berkeley: University of California Press, 1982).

Patrick O’Farrell, Ireland’s English Question (New York: Schocken, 1971).

Dáithí Ó hÓgáin, The Lore of Ireland (Cork: Boydell, 2006).

William Irwin Thompson, The Imagination of an Insurrection: Dublin, Easter 1916 (New York: Harper, 1967).

samedi, 25 juillet 2009

A propos de Merlin

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A propos de Merlin

 

par Julia O'Laughlin

 

Merlin était un magicien druidique, un «homme sau­­vage des forêts», ayant des dons pour la pro­phétie et le chamanisme. D'autres noms lui ont été donnés: Lailoken, Myrrdin et Ambrosius. Ce der­nier nom l'associe à l'«ambrosia», donnée par la Reine-Fée aux bardes et aux magiciens qu'elles avaient choisis comme les meilleurs.

 

Merlin a été engendré par la fille d'un roi, demeu­rée vierge, et qui reçut une nuit la visite d'un beau jeune homme mystérieux dans sa cellule de non­ne. Les scribes chrétiens prétendent que ce jeune homme était en fait un incube et que, de ce fait, Mer­lin a été conçu délibérément pour devenir l'An­­téchrist.

 

La lutte des dragons

 

Pendant la construction du temple du Roi Vor­ti­gern dans la plaine de Salisbury, la structure architecturale ne cessait de s'effondrer. Les astro­logues du Roi prétendirent qu'il fallait un sacri­fice, en l'occurrence le sang d'un enfant qui n'a­vait pas de père. Les regards se tournèrent vers Merlin. Heureusement pour lui, ses qualités de vi­sionnaire le sauvèrent. Il vit en songe un dra­gon rouge et un dragon blanc en lutte dans un é­tang, en dessous des fondations du temple. Il put ain­si correctement prophétiser que Vortigern, le dra­gon rouge gallois, serait vaincu par Uther Pen­dragon, le dragon blanc britannique. Merlin utilisa ensuite sa magie pour construire le temple de Stonehenge en une seule nuit, faisant venir des pierres de Tipperary en Irlande par la force des chants qu'il entonna.

 

La Table Ronde

 

Merlin était également un forgeron et un artisan. C'est lui qui forgea l'armure magique du Roi Arthur, ainsi qu'une coupe miraculeuse que l'on a identifiée au Saint Graal. C'est lui aussi qui fit la Table Ronde, symbole de la Terre, avec l'i­ma­ge de la Grande Déesse au centre et son ca­lendrier païen lunaire. Le premier nombre de Chevaliers qui s'assemblèrent autour de la table Ronde était de 28, ce qui correspond au mois lu­naire.

 

Le culte de la Grande Déesse

 

Merlin a appris ses qualités de magicien auprès de la Grande Déesse qui nous apparaît sous de mul­tiples avatars: la Fée Morgane, Viviane (= «celle qui vit») et la Dame du Lac. A la fin de sa vie, il re­­tourna à la grotte sacrée pour y rester immobile, pris dans un sommeil enchanté, jusqu'à son pro­chain retour. Nos ancêtres croyaient que nous re­tournions, le jour de notre mort, dans la matrice de la Déesse Mère, symbolisée par une grotte.

 

Merlin est étroitement lié au culte de la Grande Dées­se. L'abondance de la littérature «merli­ni­que», jugée critique à l'égard de l'Eglise et de ses enseignements, fit que le Concile de Trente plaça le Livre des Prédictions de Merlin à l'index des li­vres interdits. Cet index est resté en vigueur jus­qu'en 1966, lorsque le Pape Paul VI le supprima.

 

Julia O'Laughlin.