mardi, 05 septembre 2023
NYT : parler de paix en Ukraine est devenu tabou
NYT : parler de paix en Ukraine est devenu tabou
Source: https://www.piccolenote.it/mondo/nyt-parlare-di-pace-in-ucraina-e-un-tabu
Stian Jenssen, chef de cabinet du secrétaire général de l'OTAN, a été le dernier à subir de lourdes représailles pour avoir osé affirmer qu'il fallait trouver un moyen de mettre fin à la guerre en Ukraine, en acceptant même, si nécessaire, de céder une partie des territoires actuellement sous le contrôle de Moscou.
Steven Erlanger s'est inspiré de la dure réaction déchaînée contre Stian Jenssen pour rédiger un article réfléchi publié dans le New York Times le 1er septembre avec un titre plus que significatif : "Alors que le conflit ukrainien se poursuit, parler de négociations est devenu presque tabou" (on pourrait supprimer le "presque").
La fermeture de l'espace politico-médiatique
Ainsi le NYT : la réaction brutale subie par Jenssen, "selon certains analystes qui ont été critiqués de la même manière, reflète une fermeture du débat public sur les options possibles pour l'Ukraine au moment même où une diplomatie créative s'avère des plus nécessaires", puisque l'échec de la contre-offensive ukrainienne, que tout le monde pensait gagnante, est désormais évident (à tel point que Zelensky a renvoyé le ministre de la défense, premier bouc-émissaire de cet échec).
Pourtant, "puisque même le président Biden estime que la guerre se terminera probablement par des négociations, Samuel Charap, politologue à la RAND Corporation, estime que dans une démocratie, il devrait y avoir un débat sérieux sur la manière d'y parvenir". Mais même lui a été critiqué pour avoir suggéré que les intérêts de Washington et de Kiev ne coïncident pas toujours et qu'il est important d'évoquer, avec la Russie, une "issue négociée".
Sur ce point, Charles A. Kupchan (photo), professeur à l'université de Georgetown et ancien fonctionnaire d'État américain, a déclaré: "L'atmosphère politique s'est détériorée et, dans l'ensemble, un tabou persiste dans l'espace politique sur la possibilité d'une discussion sérieuse sur la fin de la guerre".
"Kupchan, note Erlanger, sait de quoi il parle. Lui et Richard N. Haass, ancien président du Council on Foreign Relations, ont écrit un article dans Foreign Affairs en avril dans lequel ils exhortaient Washington et ses alliés à élaborer un plan pour passer du théâtre de la guerre à la table des négociations, ce qui leur a valu de nombreuses critiques".
"Ces critiques se sont considérablement intensifiées après que les deux hommes, ainsi que Thomas E. Graham, ancien diplomate américain à Moscou, ont rencontré en privé le ministre russe des affaires étrangères, Sergey V. Lavrov, afin d'explorer la possibilité de négociations."
[...] "Engager une conversation sur un éventuel plan B est une tâche ardue", ajoute M. Kupchan, "comme Jenssen a dû le constater de la manière la plus dure et comme cela nous est arrivé à nous qui essayons d'élaborer des plans B. Nous sommes soumis à des flots de critiques et d'insultes de la part de la communauté internationale. Ce qui était auparavant une sorte de vague tabou est devenu un tabou inviolable".
Constanze Stelzenmüller (photo), de la Brookings Institution, va plus loin en qualifiant d'"immorale" la recherche d'une solution négociée, explicitant ainsi l'implicite de cette dérive. En effet, comme l'indique le mot tabou, il ne s'agit pas d'un déni de nature politique, mais d'un veto, d'un dogme, de nature religieuse, qui n'admet pas d'exception.
Le tabou de la paix et de la guerre éternelle
Ce qui s'est manifesté dans toute son évidence et sa puissance ces derniers mois est issu de l'après 11 septembre et des décennies de guerres sans fin, grâce aussi à la complicité et à la connivence de tant de gens qui sont aujourd'hui horrifiés par le monstre qu'ils ont eux-mêmes créé, le sous-estimant pour certains, l'alimentant pour d'autres.
Au djihad, la guerre sainte, lancé par le fondamentalisme islamique, a répondu la guerre sainte contre la terreur. Des extrémismes opposés qui se sont nourris l'un l'autre et qui, ce n'est pas un hasard, ont trouvé au fil des ans une convergence contre des ennemis communs, comme l'a montré la guerre de Libye, avec Al-Qaïda utilisé comme troupes terrestres de l'OTAN contre Kadhafi ; la guerre du Yémen, avec les milices salafistes en guerre contre les rebelles houtis ; et, enfin (mais on pourrait continuer), la guerre de Syrie, où les islamistes radicaux ont combattu Assad, les milices iraniennes et les Russes.
Ce sont toutes des guerres dans lesquelles l'espace du débat public s'est rétréci, la guerre syrienne devenant une poigne de fer, au sujet de laquelle rien n'était (ou n'est) autorisé à être dit qui diverge de la narration dominante.
Ceux qui ont osé remettre en question les récits dominants au fil du temps ont été évités, marginalisés ou normalisés, même si la plupart d'entre eux ont été contraints de se normaliser pour ne pas perdre leur emploi ou ont embrassé avec enthousiasme le nouveau credo pour les récompenses et les carrières qu'il leur assure.
Ainsi, les guerres sans fin de ces décennies ont également servi de banc d'essai pour façonner un espace politico-médiatique adapté à l'engagement actuel, beaucoup plus difficile que les précédents, qui étaient également prévus depuis des décennies, puisque le moment de la confrontation directe entre l'Empire occidental et l'Empire oriental, plus varié, était l'horizon ultime des guerres sans fin.
Le scénario orwellien de Big Brother se réalise sous une autre forme, où le super-État dirigé par Big Brother, dont les citoyens sont benoîtement enrégimentés, mène une lutte éternelle avec les deux puissances opposées, l'Eurasie et l'Estasie... spes ultima dea.
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samedi, 19 août 2023
Ministre de la défense du Bélarus: l'OTAN occidentale se prépare à la guerre
Ministre de la défense du Bélarus: l'OTAN occidentale se prépare à la guerre
Markku Siira
Source: https://markkusiira.com/2023/08/16/valko-venajan-puolustusministeri-nato-lansi-valmistautuu-sotaan/
Une conférence internationale sur la sécurité s'est tenue à Moscou, à laquelle ont participé les ministres de la défense de nombreux pays avec lesquels la Russie entretient des relations, ainsi qu'un certain nombre d'autres invités.
Pour décrire le tournant anti-russe de la politique finlandaise, seul l'ancien député Ano Turtiainen avait été invité à l'événement. On peut se demander s'il s'agit là d'un message ou d'une gifle à l'élite politique finlandaise.
Je ne parlerai pas de l'ensemble de la conférence, mais je me concentrerai sur le discours de Viktor Khrenin, le ministre biélorusse de la défense, dans lequel il a transmis à l'auditoire son point de vue sur les processus en cours dans le monde, en tentant même d'en révéler les causes sous-jacentes.
Khrenin a commencé par inviter son auditoire à analyser la situation mondiale d'un "point de vue non trivial, différent des évaluations de la plupart des experts".
Le Biélorusse s'est dit convaincu que le cœur du problème du monde moderne était la "mondialisation libérale", qui "n'a pas résolu le problème des inégalités entre les États et les peuples".
Les pays dits du "milliard d'or" (c'est-à-dire l'Occident) ont essayé d'utiliser le modèle libéral "pour assurer leur hégémonie dans un modèle unique qui leur permettrait de contrôler les ressources de la planète entière".
"Ces efforts occidentaux ont provoqué la réaction inverse dans d'autres parties du monde - un passage de la mondialisation au protectionnisme, à la protection des intérêts nationaux", a expliqué M. Khrenin.
De nombreux pays ont déjà rejoint la mêlée et défendent farouchement leur "identité civilisationnelle, leur indépendance, leur souveraineté et leur droit à une interaction constructive dans un monde multipolaire".
Khrenin a noté qu'"aujourd'hui, cette lutte s'est transformée en une confrontation globale entre l'Est et l'Ouest dans la région ukrainienne". Dans le même temps, la guerre par procuration qui s'y déroule a "en fait amené le monde au bord d'une troisième guerre mondiale".
Néanmoins, "certains hommes politiques occidentaux continuent de pousser le monde vers l'abîme". Ils continuent à diviser les régions en "métropoles" et en "colonies" et "font ainsi revivre la traite des esclaves sous une nouvelle forme".
Selon le ministre de la défense, pour ces "néo-colonisateurs", même leurs propres citoyens deviennent des "marchandises vivantes". Les hommes politiques des États dominés par Washington se comportent "comme des marchands d'esclaves médiévaux proposant de jeter leurs peuples dans le hachoir de la guerre pour de l'argent".
Khrenin a cité en exemple "la dernière expansion de l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord", qui est "également une sorte de colonisation de nouveaux territoires afin d'exploiter leurs populations dans une guerre probable avec l'Est".
Dans ce contexte, le mot "Est" doit être compris comme faisant référence à tous les États qui sont prêts à résister à la domination occidentale", a ajouté M. Khrenin.
Selon M. Khrenin (photo), l'élite du pouvoir occidental s'oriente justement vers une telle guerre mondiale contre ses rivaux. Il a fait référence à la rhétorique et aux déclarations des participants au sommet de l'OTAN à Vilnius en juillet.
Pour les Occidentaux de l'OTAN, "les Ukrainiens doivent continuer à mourir au combat afin d'affaiblir militairement la Russie". Pendant ce temps, les élites de l'Union européenne "continuent de zombifier leurs citoyens à travers les médias et poursuivent une politique hostile de division des peuples slaves".
Le bloc occidental ne rassemble pas ses ressources militaires pour la défense, mais pour l'offensive. Il y a une nuance importante dans ce plan : cette armée est créée principalement à partir de la population européenne. "En d'autres termes, une fois de plus, on demande aux citoyens d'autres nations de mourir pour les intérêts des États-Unis".
Les peuples d'Europe ne se rendent même pas compte de ce qui les attend. Les protestations et manifestations occasionnelles en France, en Allemagne, en Italie, en Pologne et dans d'autres pays sont plutôt l'exception à la règle.
"Une grande partie de la société européenne est sous l'influence de la propagande et est tranquillement prête à se sacrifier pour les intérêts d'autrui", déclare M. Khrenin d'un ton sombre.
Afin de satisfaire les intérêts occidentaux et de créer les conditions d'une guerre à grande échelle, l'élite a cherché à démanteler l'architecture de sécurité internationale et le contrôle des armements, "pour avoir les coudées franches".
Du point de vue du Belarus, ce n'est pas non plus une coïncidence si la Pologne a déjà annoncé son intention de "créer l'armée la plus puissante de la région européenne". Les autres pays européens ne sont pas en reste, mais ont "de plus en plus recours à une rhétorique belliqueuse".
Le caractère agressif de la politique militaire occidentale n'est plus caché, mais les documents stratégiques désignent ouvertement les ennemis : la Russie, la Chine et leurs alliés, dont la République du Belarus.
Le ministre biélorusse de la défense tire de cette situation une conclusion sans ambiguïté : "la possibilité d'une confrontation militaire directe avec l'OTAN à l'avenir devient très évidente". "Tous les masques sont tombés et de hauts fonctionnaires parlent déjà ouvertement des véritables plans de l'Occident".
La seule chose qui retient encore les puissances du "milliard d'or" de lancer une guerre à grande échelle est la menace d'une riposte nucléaire. C'est pourquoi le Belarus "considère le retour des armes nucléaires tactiques sur son territoire comme un moyen de dissuasion stratégique efficace".
L'Occident a également tendance à utiliser "des acteurs non étatiques, tels que des organisations terroristes et criminelles, des mouvements religieux radicaux et la cinquième colonne liée aux diasporas à l'étranger, pour détruire les États indésirables et mener des guerres par procuration sur leur territoire".
À titre d'exemple, M. Khrenin a cité "une attaque terroriste soutenue par l'Ukraine et impliquant des combattants des soi-disant forces volontaires russes dans les zones frontalières de la région de Belgorod".
"Les pays voisins de la République du Belarus forment également des combattants armés parmi les criminels qui ont fui le Belarus. En même temps, ils disent secrètement qu'ils ont l'intention de les utiliser pour des attaques militaires contre le Bélarus", a déclaré le ministre de la défense à l'auditoire de la conférence.
En même temps, du point de vue du droit international, il est difficile d'accuser ces "formations pseudo-militaires" (sous le drapeau desquelles des unités professionnelles de soldats occidentaux peuvent également opérer) d'être impliquées dans l'attaque.
"Après tout, ils prétendent dans ce cas que les Bélarussiens se battent contre les Bélarussiens, les Russes contre les Russes, et ainsi de suite", a déclaré M. Khrenin en évoquant les opérations cyniques de l'Occident.
Dans cette situation, M. Khrenin ne peut même pas faire confiance aux "organisations internationales qui ferment passivement les yeux sur les terroristes soutenus par l'Occident". Selon lui, la raison en est que l'Occident a "privatisé les institutions internationales pour servir ses propres intérêts".
Ainsi, le Belarus participe activement aux processus d'intégration de l'Organisation du traité de sécurité collective (OTSC) et de la Communauté des États indépendants (CEI) et cherche à rejoindre l'Organisation de coopération de Shanghai (OCS), ainsi que les BRICS, qu'il considère comme des mécanismes de sécurité alternatifs.
Comme les efforts d'intégration en cours vont à l'encontre des plans de l'Occident, des tentatives sont faites pour créer la discorde entre les États et leur offrir des pots-de-vin financiers afin de les faire adhérer au "modèle de comportement néocolonial occidental".
Dans la situation mondiale actuelle, Khrenin exhorte ses alliés à se serrer les coudes afin de pouvoir "survivre à la phase difficile de la formation d'un nouvel ordre mondial avec le moins de choc possible".
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lundi, 17 juillet 2023
Ukraine: le parti de la guerre dans le chaos
Ukraine: le parti de la guerre dans le chaos
Source: https://www.piccolenote.it/mondo/ucraina-il-partito-della-guerra-nel-caos
Le parti de la guerre ne trouve pas le soutien qu'il espérait. Malgré tous les efforts de Joe Biden pour offrir au monde un spectacle heureux, on se souviendra de Vilnius comme du sommet de l'OTAN où les tensions ont éclaté". C'est ce qu'a déclaré David Saks dans un tweet rappelant ce qui s'est passé lors du sommet.
Un sommet caractérisé par la tirade intempestive de Zelensky contre les dirigeants de l'Alliance atlantique pour ne pas avoir admis l'Ukraine en son sein ; par la colère de ses interlocuteurs, qui lui ont demandé de se calmer ; puis celle des faucons, furieux contre l'administration Biden pour cette décision. Enfin, la rencontre Zelensky-Biden, plutôt discrète, à tel point qu'elle est passée presque inaperçue alors qu'elle aurait dû être le clou du spectacle.
Ces choses sont bien connues et ont été rapportées plus ou moins par tous les médias occidentaux, malgré les euphémismes de circonstance, nécessaires pour ne pas faire sombrer lamentablement le petit théâtre qui se joue depuis un an et demi.
Dans le parti de la guerre, ils commencent à s'entre-déchirer
La conclusion de Saks est intéressante: "La contre-offensive ukrainienne n'a pas répondu aux attentes, le champ de bataille est jonché d'énormes quantités d'armes occidentales très onéreuses, réduites à l'état de débris fumants, les chiffres des pertes ukrainiennes sont horribles et les États-Unis sont à court d'obus d'artillerie de 155 mm, à tel point qu'ils sont contraints de faire le choix dégradant d'envoyer des bombes à fragmentation. L'effort de guerre est de plus en plus chaotique et le parti de la guerre commence à s'entre-déchirer".
Le parti de la guerre ne sait plus quoi faire, toutes ses utopies s'étant effondrées et ayant été vendues au monde comme autant de dogmes incontestables. Il navigue à vue, comme en témoigne l'arrivée surprise du président sud-coréen Yoon Suk Yeol à Kiev, un énième coup de théâtre qui réussira au mieux à débloquer la demande d'armes sud-coréenne jusqu'ici refusée, comme le mentionne la BBC, et qui partira en fumée comme les autres.
Le fait est que, jusqu'à présent, "Washington a essayé d'éviter les choix difficiles", comme l'écrit George Beebe dans Responsible Statecraft. En fait, "nous avons exclu tout compromis qui augmenterait les chances d'une paix négociée avec la Russie, pensant que nous pouvions imposer aux Russes une capitulation à bon compte sans risquer une implication beaucoup plus importante de l'OTAN". Cette stratégie a échoué.
L'impasse et les choix difficiles
Les tenants du parti de la guerre savent que la situation des forces ukrainiennes est dramatique. Ils le savent parfaitement, mieux que quiconque. Même le chef d'état-major du renseignement du ministère américain de la défense, John Kirshhofer, qui, interrogé par Bloomberg, a déclaré: "Nous sommes dans une impasse".
Et ils savent que les armes de l'OTAN - des bombes à fragmentation aux missiles Storm Shadow et autres diableries de ce genre - ne changeront pas la situation. Kirshhofer ajoute : "Aucune de ces armes n'est malheureusement le Saint Graal que les Ukrainiens recherchent pour percer".
Face à l'échec flagrant des théories jusqu'alors dominantes, l'OTAN aurait dû revoir sa stratégie, poursuit M. Beebe, afin de combiner les initiatives de défense de l'Ukraine et de l'Europe avec les efforts diplomatiques pour mettre fin à la guerre.
Nous n'avons pas vu un tel changement à Vilnius", conclut M. Beebe. Et il ajoute: "La rébellion ratée des mercenaires de Wagner le mois dernier a donné à Washington l'espoir de voir la Russie imploser, perdre la guerre en Ukraine et permettre aux États-Unis d'éviter des compromis difficiles. Mais l'espoir, comme on dit, n'est pas une stratégie".
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samedi, 27 mai 2023
Alexandre Douguine: les échecs et la guerre
Les échecs et la guerre
Alexandre Douguine
Source: https://www.geopolitika.ru/en/article/chess-war?fbclid=IwAR2c4dK0IXqIdWCxJT110qVAujss0Rm0Uiqt8BFLjAkzj3dR8E5Orii1t7U
Examinons les principaux acteurs de la guerre qui se déroule en Ukraine. Nous pouvons ici nous référer à la métaphore de "l'échiquier géopolitique" introduite par Zbigniew Brzezinski. Il est évident que le territoire de l'Ukraine, et dans une certaine mesure de la Russie, est un "échiquier" sur lequel se déroule la confrontation géopolitique mondiale. En même temps, Kiev elle-même, comme chacun l'a compris depuis longtemps, n'a pas d'indépendance et ne constitue pas un "sujet politique": l'Ukraine n'est qu'un outil que les principaux acteurs, en premier lieu ceux qui jouent contre la Russie, déplacent à leur guise. Comme toute métaphore, le schéma du "jeu d'échecs géopolitique" que nous proposons a certes des faiblesses et des limites, mais s'il permet d'éclairer ce qui se passe, il justifie à lui seul son existence.
Les échecs de l'apocalypse
Tout schéma simplifie à l'extrême la réalité, mais il tente de mettre en évidence les tendances de fond et les centres de pouvoir réellement décisifs. Il est évident que la Russie est aujourd'hui en guerre contre l'Occident collectif et ce sont ces deux instances géopolitiques que l'on peut considérer comme les deux camps opposés. Sur notre échiquier métaphorique, la Russie est représentée par les Blancs et l'Occident collectif par les Noirs.
Chez les Noirs, les contours de plusieurs pôles puissants et influents se dessinent. Puisque nous parlons d'un jeu d'échecs géopolitique, nous pouvons imaginer chaque pôle comme une sorte de pièce, qui a son propre plan, sa propre logique, sa propre stratégie, ses propres objectifs de guerre. En même temps, chaque pièce géopolitique est limitée dans ses actions par les autres pièces, blanches et noires, les siennes et celles de l'adversaire.
Trois figures principales sont proposées pour chaque camp, le noir et le blanc. Mais ces figures principales généralisent un très grand nombre de centres de décision secondaires, de groupes d'analyse et d'experts, de réseaux d'influence, etc. Ce sont les macro-figures du jeu d'échecs géopolitique de la guerre d'Ukraine, qui pourrait d'ailleurs facilement et rapidement dégénérer en Troisième Guerre mondiale. Le conflit actuel serait donc identifié comme son précurseur ou sa première phase. S'il ne dégénère pas en Troisième Guerre mondiale, l'implication d'acteurs mondiaux et l'échelle mondiale rendent chaque macro-figure responsable du sort de l'humanité. Chaque mouvement de l'une ou l'autre de ces macro-figures, dans les circonstances actuelles, est porteur d'Armageddon. La probabilité d'une confrontation nucléaire directe entre la Russie et le bloc de l'OTAN avec l'utilisation d'armes nucléaires stratégiques (SNW/Strategic Nuclear Weapons) est la toile de fond sur laquelle se joue la partie d'échecs sur l'échiquier qu'est aujourd'hui l'Ukraine (ou la Russie occidentale). Nous sommes donc face aux "échecs de l'Apocalypse".
Les pièces des Noirs
Chez les Noirs, nous pouvons distinguer trois macro-figures principales, qui ne sont pas symétriques les unes par rapport aux autres, mais qui ont chacune un degré de souveraineté suffisant pour influencer activement le cours de toute la confrontation. Nous les avons nommées comme suit :
Le parti de la victoire complète et immédiate sur la Russie.
Le parti de la victoire retardée sur la Russie.
Le parti de l'indifférence à l'égard de la Russie.
Les deux premières macro-figures représentent les factions des mondialistes qui contrôlent aujourd'hui presque entièrement les élites atlantistes des États-Unis et de l'UE, qui sont toutes deux en route vers un gouvernement mondial et n'ont pas de contradictions à cet égard. Ils ne diffèrent que par la rapidité et la radicalité des mesures nécessaires pour atteindre leur objectif commun. Le Parti de la victoire immédiate sur la Russie et le Parti de la victoire différée sont tous deux fermement attachés à un monde unipolaire, à l'idéologie libérale mondialiste et au maintien à tout prix de l'hégémonie occidentale à l'échelle mondiale. En substance, ils constituent une seule et même force, mais leurs deux pôles - le parti de la victoire noire immédiate et le parti de la victoire noire différée - diffèrent considérablement dans leur évaluation de la situation, par les méthodes qu'ils appliquent et par les moyens qu'ils préconisent pour atteindre l'objectif.
Le parti de la victoire totale et immédiate sur la Russie
La partie la plus radicale des mondialistes insiste pour profiter de la situation et de ce qu'ils considèrent comme la faiblesse significative de la Russie démontrée dans la guerre ukrainienne (beaucoup pensent sincèrement que "la Russie a déjà perdu"), pour mettre fin à la situation, infliger une défaite totale et écrasante à la Russie, la forcer à une reddition inconditionnelle, puis pour la plonger dans un chaos sanglant et assurer l'effondrement de la Fédération de Russie le long de toutes les lignes de fracture possibles - sociales, ethniques et confessionnelles, territoriales.
Cette macro-figure est représentée en premier lieu par les services secrets britanniques, qui agissent en étroite relation avec certains centres néo-conservateurs américains (Kagan, Nuland, Kristol) et avec les cercles du Pentagone et de la CIA qui leur sont proches.
Du point de vue de ces institutions, la Russie est extrêmement faible et sa survie politique ne tient qu'à un fil à tous égards. L'impasse sur les fronts, l'indécision ou le report permanent des réformes de mobilisation, la grande tolérance de l'opposition politique et anti-belliciste au sein des élites, la confusion au sein du commandement militaire, la confusion de la société, les effets des sanctions et la nécessité de rechercher une substitution immédiate pour les importations, l'absence d'une idéologie cohérente, l'absence d'une volonté stratégique claire de gagner, sont pour ce parti autant de signes que la Russie est au bord du gouffre et que, si elle est poussée à bout, elle s'écroulera. C'est pourquoi la première macro-figure des Noirs - le parti de la victoire complète et immédiate sur la Russie - planifie et exécute les étapes les plus drastiques de cette guerre: c'est là que sont planifiées et exécutées les attaques terroristes sur les territoires russes, les assassinats, les bombardements, les attaques de drones, les attaques sur l'ancien et le nouveau territoire russe, y compris les attaques contre des cibles civiles sur les territoires frontaliers de la Russie, l'opération visant à faire sauter les approvisionnements en eau du nord et à faire sauter le pont de Crimée. Il s'agit du pôle noir qui vise à saturer au maximum le régime fantoche de Kiev avec toutes sortes d'armes, à fournir des obus à uranium appauvri, à mener de nouvelles attaques terroristes à grande échelle dans les capitales et les villes russes, à radicaliser l'opposition russe interne et à recruter son personnel pour le soulèvement armé, la formation de DRG, etc.
Aucune négociation avec la Russie, aucun cessez-le-feu n'est envisagé par ce pôle. La Russie est prise dans un piège stratégique soigneusement placé et l'ours blessé doit être épuisé maintenant et immédiatement, par tous les moyens nécessaires.
Ce pôle préconise une escalade parabolique des hostilités, en utilisant toute la gamme des moyens et cela, de manière accélérée.
Le principal argument de cette macro-figure est l'hypothèse selon laquelle Poutine n'utilisera en aucun cas des armes nucléaires (NSNW), ni d'ailleurs des armes nucléaires stratégiques (TNW), et la probabilité d'utiliser des armes nucléaires tactiques (TNW) n'est pas fatale du point de vue de ce groupe. Toute suggestion selon laquelle Moscou est prête à répondre par des armes nucléaires dans le cas extrême est considérée par ce groupe des pièces noires de notre échiquier comme un bluff, car, selon lui, le régime existant, en l'absence d'une idéologie brillante, n'est tout simplement pas organiquement capable de franchir cette étape.
Ce même pôle utilise activement des stratégies de réseau, supervise l'IPSO et modère les stratégies d'ingénierie sociale pour la société russe, exploitant habilement toute faille dans la politique russe en matière d'information et d'Internet. On peut dire qu'il orchestre des vagues de terreur mentale à l'aide de diverses méthodes, y compris de nombreuses chaînes d'information censées être "neutres" et "objectives" par nature.
Ce pôle jouera un rôle important dans la contre-attaque planifiée par Kiev et revendique la direction complète de l'opération.
L'objectif - la destruction de la Russie - sera atteint rapidement et durement, dans les plus brefs délais. Des attaques terroristes de masse faisant un grand nombre de victimes civiles et même des attaques de missiles sur Moscou seront autorisées.
Le parti de la victoire retardée sur la Russie
La deuxième macro-figure chez les pièces noires est le parti de la victoire retardée sur la Russie. Ici, l'évaluation de la situation est légèrement différente de celle de la première macro-figure. Ce groupe estime, comme le premier, que la Russie a "déjà perdu" dans cette guerre: les attaques contre le centre de l'Ukraine, et même contre Kharkov et Odessa, ont échoué, le front s'est enlisé même dans le Donbass, les sanctions ont isolé économiquement la Russie de l'Occident, l'indécision ne permettant pas les réformes patriotiques nécessaires a encore affaibli Moscou. Dans cette situation, le programme minimum, selon ce pôle noir, a été atteint. Les pays occidentaux se sont à nouveau unis autour de l'OTAN sous l'égide des États-Unis, le mondialisme a une nouvelle fois renforcé sa position. Le moment est donc venu de faire entrer le conflit dans une phase à long terme. Plus le "statu quo" durera, plus la Russie sera affaiblie. Et alors, voyez-vous, les processus destructeurs s'enclencheront d'eux-mêmes: les effets des sanctions et les difficultés à organiser les importations parallèles et la substitution des importations se feront sentir; les victimes de plus en plus nombreuses de la guerre mineront la confiance dans le gouvernement; et, si nous ne nous dépêchons pas et n'allons pas trop loin, la Russie elle-même, comme un fruit mûr, tombera dans le panier des mondialistes. En réalité, la guerre a déjà été "gagnée" par l'Occident, et l'Ukraine n'était et ne reste qu'un matériau consommable dans ce jeu d'échecs géopolitique - un pion a été sacrifié (et même pas jusqu'au bout), et la situation générale s'est nettement améliorée.
Le général Mark Milley, président de l'état-major interarmées des forces armées américaines, est un excellent exemple de cette position.
La deuxième macro-figure dans les pièces noires est également orientée vers la défaite finale de la Russie, mais cette victoire ne surviendra que graduellement, sera retardée. L'ouverture de négociations de paix, de préférence à des conditions désavantageuses pour la Russie - c'est une honte - et la prolongation de la guerre pendant une longue période, voire une certaine connivence avec les Russes dans des zones locales, sont autorisées ici.
Et surtout : la deuxième macro-figure n'est pas sûre que dans une situation critique - par exemple, en cas d'attaque décisive et précipitée des troupes de Kiev sur les territoires russes - Poutine n'utilisera pas d'armes nucléaires, y compris des armes nucléaires non conventionnelles. L'hypothèse est qu'il s'agit peut-être d'un bluff, mais si ce n'est pas le cas, il pourrait s'avérer qu'il est trop tard. Alors pourquoi risquer tout, la destruction de la planète, juste pour obtenir ce que vous voulez un peu plus vite que vous ne l'obtiendrez de toute façon ?
C'est la position de Biden lui-même et de la plupart des membres de son administration (à l'exception des néoconservateurs extrémistes). Et c'est pourquoi certaines publications de la presse américaine contrôlée par la Maison Blanche rejettent la responsabilité des attaques terroristes en Russie, de l'explosion du gazoduc Nord Stream et de l'escalade en général. Le fait que la responsabilité soit reportée sur Kiev doit être considéré comme un euphémisme, une figure de style. Bien sûr, le sens est autre : les modérés désignent - à travers Kiev - la première macro-figure des noirs, c'est-à-dire le parti de la victoire totale et immédiate sur la Russie
Quelle est la relation entre ces macro-figures ? Il n'est pas facile de l'établir avec certitude. À certains égards, elles sont solidaires - dans leur désir de vaincre la Russie, de perturber le processus conduisant à la multipolarité et de préserver l'hégémonie de l'Occident mondialiste. À d'autres égards, ils diffèrent. Mais dans tous les cas, il s'agit de deux pièces-personnages différent(e)s. Ils ont deux visions et deux programmes différents. Il n'y a pas de hiérarchie claire entre eux: chacun suit sa propre voie, selon ses propres évaluations, méthodes et possibilités. Il peut sembler que l'équilibre entre la première et la deuxième pièce se déplace périodiquement dans un sens ou dans l'autre.
Là encore, l'image du jeu d'échecs nous aide. Chacune des pièces se déplace selon son propre algorithme. L'une est orientée vers l'escalade, l'accélération du temps et le mépris des règles. L'autre agit plus prudemment, essayant de maîtriser l'escalade et prête à prolonger le processus, sûre des résultats déjà obtenus et de la probabilité d'obtenir ce qu'elle veut (l'effondrement de la Russie en tant que puissance souveraine) dans le cours naturel des événements, ce que, bien sûr, l'Occident devrait activement faciliter.
Le parti de l'indifférence
Il existe également une troisième macro-figure parmi les Noirs. Elle est beaucoup moins influente que les deux premières et n'a pas grand-chose à voir avec le fait d'influencer directement le cours des événements. Mais elle est là, et on ne peut l'ignorer. Il s'agit de la position des forces politiques américaines qui n'identifient pas les intérêts américains au mondialisme, qui ne s'appuient pas sur les règles de la géopolitique atlantiste (où l'objectif principal de la civilisation anglo-saxonne de la mer est une victoire écrasante sur la civilisation eurasienne de la terre, c'est-à-dire la Russie souveraine), et qui sont donc indifférentes à la Russie qui, selon une analyse sobrement pragmatique, ne menace pas les intérêts nationaux américains - ni dans le domaine militaire, ni dans le domaine économique - en général. Si nous abandonnons l'équation "États-Unis = globalisme, hégémonie mondiale et libéralisme", que les deux premiers macro-figures noires partagent et que le troisième groupe rejette, l'attitude à l'égard de la guerre en Ukraine change immédiatement. Le résumé de cette attitude est le suivant: les États-Unis ne sont pas du tout intéressés par cette guerre, et l'obsession de la russophobie est liée aux intérêts privés des élites mondialistes qui utilisent les États-Unis et les pays européens de l'OTAN pour leurs propres intérêts économiques.
C'est exactement la position exprimée par l'ancien président américain Donald Trump. Ses affirmations selon lesquelles, s'il redevient président des États-Unis, le conflit en Ukraine cessera immédiatement ne sont pas de la vantardise, mais du pur réalisme. Une fois que l'Occident collectif abandonne la féroce partie d'échecs contre la Russie, tout ce drame devient insignifiant et les États-Unis passent à d'autres problèmes - plus aigus - tels que la rivalité économique avec la Chine, la crise financière et la crise de l'émigration aux États-Unis mêmes, etc.
Parmi les figures noires, c'est aujourd'hui la position la plus faible. Son influence est très limitée. Mais à l'approche des élections présidentielles américaines de 2024, son influence pourrait s'accroître. Toujours pour des raisons pragmatiques, il est probable que les Républicains, dans leur opposition à la politique ukrainienne de Biden, se rabattent sur ce type de logique réaliste. Il n'y a pas la moindre sympathie pour la Russie derrière une telle position, mais objectivement, cela réduirait considérablement les tensions et conduirait à une désescalade.
Parmi les Républicains eux-mêmes, la logique de Trump n'est pas la seule, et certains néoconservateurs soutiendront le scénario atlantiste. Mais d'ores et déjà, pour les intérêts intra-corporatistes de la politique américaine, la carte ukrainienne est si fermement associée aux démocrates et à Biden qu'elle n'a aucune chance d'être reprise par les républicains dans les débats pré-électoraux.
On peut donc prédire avec prudence que d'ici l'automne 2023, et surtout si la Russie réussit l'offensive à venir, le rôle de la troisième macro-figure noire augmentera progressivement.
Il est évident qu'une telle orientation de la politique étrangère américaine, basée sur le réalisme et l'intérêt national des États-Unis en tant que puissance, changera complètement la stratégie du jeu d'échecs du côté noir, même si l'influence des autres macro-figures demeurera. Ce sera déjà un jeu complètement différent, et ce n'est pas une coïncidence si le régime de Kiev déteste tout ce qui est lié à Trump. La force du troisième parti - le parti de l'indifférence à l'égard de la Russie - signifiera la fin de l'Ukraine actuelle.
Les grandes figures des Blancs : le parti de la défaite immédiate
Passons maintenant aux Blancs et à leurs macro-figures. Ici aussi, trois "partis" symétriques peuvent être distingués. Ils correspondent en partie aux macro-figures des Noirs, mais s'en distinguent à certains égards. On peut les nommer conventionnellement comme suit :
Le parti de la défaite immédiate de la Russie.
Le parti de la défaite différée de la Russie.
Le parti de la victoire.
Le parti de la défaite immédiate comprend l'opposition libérale radicale - les structures animées par Navalny qui se sont transformées en terreur pure et simple (avec Darya Trepova, photo ci-dessous), les anciens émigrés politiques (Khodorkovsky, Kasparov, etc.), les représentants des nouveaux émigrés politiques (Chubais), etc., des représentants des nouveaux émigrés politiques (Chubais), économiques (Fridman, Aven), artistiques (Pugacheva, Galkin), victimes de l'ingénierie sociale de l'ennemi, hypnotisés par le slogan "non à la guerre", et, enfin, des agents directs de l'Occident dans diverses structures gouvernementales et sociales, de plus en plus actifs dans le sabotage direct, l'organisation de DRG, la fourniture à l'ennemi d'informations précieuses, etc.
Cette macro-figure est politiquement désignée comme quelque chose d'inacceptable, mais son enracinement profond dans la société et l'État au cours des 30 dernières années où notre pays s'est directement orienté vers l'Occident est si important que l'opposition à cette macro-figure ne concerne jusqu'à présent que la partie émergée de l'iceberg. Les réseaux libéraux d'agents d'influence sont omniprésents en Russie et les Noirs comptent sur cette figure blanche dans leur jeu géopolitique comme l'un des principaux facteurs de leur stratégie. Cette figure n'est "blanche" que formellement, en ce sens qu'il s'agit de Russes, de demi-Russes ou d'anciens Russes. En réalité, en termes d'orientation géopolitique, les libéraux et les Occidentaux, ceux qui sont déjà partis et ceux qui ne sont pas encore partis, servent les intérêts des Noirs. C'est ainsi que les jockeys corrompus perdent délibérément des courses et que les boxeurs corrompus perdent des combats. La première macro-figure des Blancs, le Parti de la Défaite Immédiate, fait essentiellement le jeu des Noirs dans tous les domaines. Et pas seulement des Noirs en général, mais plus particulièrement du parti de la victoire immédiate chez les Noirs, la première macro-figure des Noirs. En fait, cette figure "blanche" est contrôlée par une pièce noire.
Le géopoliticien atlantiste Brzezinski, aujourd'hui décédé, y a fait explicitement allusion lorsqu'à ma question sur les échecs géopolitiques, il a répondu que "les échecs sont un jeu pour un, pas pour deux". Brzezinski avait l'habitude de jouer pour les noirs et de déplacer les pièces blanches. C'est exactement la situation de l'élite russe avant l'OMS (Opération militaire spéciale). Elle était dirigée par l'Occident. Mais après l'OMS, ce modèle est devenu plus inacceptable et les élites libérales qui semblaient "blanches" sont finalement apparues comme des figures dirigées par les Noirs.
D'où l'apparition de représentants directs du MI6, comme Hristo Groziev et ses subordonnés (Navalny et son entourage), à la veille de l'OMS. Les libéraux ont tombé le masque et se sont révélés être des agents directs de l'ennemi dans un conflit meurtrier.
On peut toutefois se demander si les représentants du parti de la défaite immédiate de la Russie sont pleinement connus, identifiés et étiquetés en conséquence. De toute évidence, ils ne le sont pas tous. Mais c'est une question qui devrait être posée aux structures compétentes. Et pour la traiter en profondeur, il serait nécessaire de reconstituer le SMERSH ou quelque chose de similaire.
Il est important de noter que l'élite dirigeante des années 1990 était principalement composée de libéraux radicaux occidentalistes et que, même si certains d'entre eux ont sincèrement changé d'avis pendant la période de souveraineté de Poutine, l'expérience n'a pas été vaine.
Le parti de la défaite différée chez les Blancs
La deuxième macro-figure chez les Blancs est le parti de la défaite différée. Il s'agit de la partie de l'élite russe qui professe une double allégeance: d'une part, ce groupe est loyal envers Poutine et reconnaît la légitimité de son orientation vers la souveraineté et le multipolarisme, ce qui signifie qu'il soutient l'opération militaire spéciale et vise formellement la victoire. Mais d'autre part, l'orientation principale de ce groupe reste l'Occident libéral moderne, sa culture, ses codes, ses technologies, ses pratiques et ses tendances. Par conséquent, cette macro-figure considère la rupture avec l'Occident comme une catastrophe et prévoit la fin du conflit dès que possible et le lancement de processus visant à rétablir les liens rompus. Cette deuxième macro-figure parmi les pièces blanches n'est pas prête pour le sabotage direct, l'espionnage et les activités terroristes contre les autorités. En outre, elle comprend que la souveraineté est une valeur et que sa perte totale signifierait également sa propre disparition en tant qu'élite loyaliste. Mais le parti de la défaite différée ne considère pas la Russie comme une civilisation, n'est pas prêt à tout sacrifier pour le front et ne voit pas d'avenir pour le pays en dehors de l'Occident.
L'OMS a été perçus comme un désastre pour cette macro-figure, mais contrairement au parti blanc de la défaite immédiate, ses représentants sont obligés de rester loyaux envers Poutine et le pays.
Il s'agit d'un groupe très sérieux et influent au sein du gouvernement russe. Il est en partie symétrique au parti de la victoire différée des Noirs. Ses représentants accepteraient les propositions les plus désagréables de l'Occident au nom de la paix. Mais comme le parti de la victoire immédiate des Noirs ne leur laisse aucune chance, ils sont contraints de travailler pour la guerre et de soutenir l'opération. Les conversations privées récemment publiées de certains membres de l'élite décrivent clairement l'état d'esprit de ce groupe: ils ne croient pas à la victoire, ils maudissent l'OMS, ils regrettent amèrement les jours d'avant-guerre et ils sont prêts à accepter presque n'importe quelle condition pour mettre fin au conflit. Dans le même temps, ils sont contraints d'adopter une position officiellement "patriotique", qui est devenue la norme du politiquement correct en Russie même.
Le parti de la victoire retardée aux États-Unis et en Occident en général s'appuie fortement sur le parti de la défaite retardée en Russie, car il bloque activement la mobilisation publique totale et les réformes patriotiques décisives qui n'ont que trop tardé, y compris la proclamation d'une idéologie cohérente et cohésive. Toutefois, cette macro-figure, contrairement à la première, qui n'est en fait pas blanche du tout, reste du côté de la Russie et, dans une confrontation directe et dure, et surtout face à une autre macro-figure de l'ennemi (le parti de la victoire noire immédiate), elle sera elle aussi contrainte d'agir conformément à la logique de la guerre qui lui est livrée.
Le parti de la victoire
La troisième macro-figure des Blancs est le Parti de la Victoire. Il est assez largement présent dans la société russe; en revanche, il a été très minoritaire au sein de l'élite dirigeante jusqu'à une date très récente. Il s'agit de patriotes convaincus et de partisans de la Russie en tant que civilisation originale, porteurs de valeurs traditionnelles favorables à la mission et à l'identité historique de la Russie - sa religion, son peuple, sa souveraineté.
L'OMS a mis en avant le Parti de la Victoire et ce sont ses évaluations, ses perceptions et ses décryptages du conflit radical avec l'Occident collectif qui sont devenus, en fait, la version officielle de ce qui se passe. Les représentants de la deuxième macro-figure blanche sont contraints de répéter cette version, parfois avec force.
Le Parti de la Victoire se concentre sur l'opposition frontale à l'Occident, pour aller jusqu'au bout de la logique de l'OMS et cimenter les conditions stratégiques d'un monde multipolaire où l'hégémonie occidentale n'a pas sa place. C'est cette macro-figure qui considère le conflit militaire avec l'Occident comme un moment décisif dans la bataille pour le prochain ordre mondial et comme l'accomplissement de la mission historique de la Russie. Le parti de la Victoire considère le conflit non pas comme une confrontation conjoncturelle ou un différend régional, mais comme une guerre des civilisations. Pour le parti de la Victoire, la Russie, l'État et la société, doivent donc prendre toutes les mesures nécessaires et payer n'importe quel prix. Le déclenchement de l'OMS, quelles qu'en aient été les raisons, a été la dernière bataille pour la souveraineté et l'existence historique de la Russie. C'est pourquoi des réformes patriotiques immédiates et une mobilisation totale du gouvernement et de la société sont nécessaires. Du point de vue de ce parti, l'utilisation d'armes nucléaires, compte tenu de la gravité de la menace qui pèse sur la Russie, et en particulier dans l'éventualité d'un scénario d'hostilités négatives, est métaphysiquement justifiée et ne constitue en aucun cas un bluff.
Le Pôle Blanc de la Victoire n'est pas encore actuellement le pôle dominant de l'élite, et le Parti de la Défaite Différée le dépasse sur plusieurs plans administratifs. Cela dit, le poids du Parti de la Victoire ne cesse de croître et, au niveau du discours officiel en Russie, c'est son programme, sa stratégie et son appréciation de la situation qui sont considérés comme normatifs.
En tout état de cause, cette macro-figure de l'échiquier géopolitique est présente, contrastée et distinguable.
Consolidation
Réduisons maintenant notre proposition de classification des acteurs à un schéma général.
Chaque macro-figure a devant elle une image assez claire de ce qui se passe, avec laquelle toutes les autres figures sont en principe d'accord. C'est-à-dire qu'ils agissent tous selon certains algorithmes, qui sont inscrits dans la structure objective de la confrontation, sur laquelle ils ne se font pas d'illusions. Tout le monde comprend qui se bat avec qui et pour quels objectifs.
L'Ukraine n'est qu'un territoire, un échiquier - avec ses propres caractéristiques, sa topographie et sa topologie, mais c'est un pur arrière-plan. Elle n'est ni un personnage ni un sujet. Tout se décide en dehors d'elle et indépendamment d'elle.
Les processus militaires, politiques, économiques, sociaux, diplomatiques, informationnels et technologiques sont étroitement liés et forment un système plutôt ordonné, malgré la spontanéité de la guerre. Les six macro-figures peuvent être utilisées pour comprendre comment ces systèmes sont configurés et comment leurs différentes parties sont interconnectées.
Mais cet accord général avec le cadre géopolitique objectif ne va pas plus loin. Chaque sujet du processus décisionnel évolue selon sa propre logique et le fait même de cette évolution est susceptible de modifier l'ensemble du tableau dans certaines circonstances. Par exemple, la décision de mobilisation partielle en Russie, son calendrier et même ses détails, affectent l'ensemble du système. Il est évident que le parti d'une défaite retardée en Russie a trouvé le meilleur écho auprès de l'Occident collectif, mais une fois qu'elle s'est produite, les événements ont commencé à se dérouler à un rythme différent. Il en va de même pour les autres décisions majeures de cette guerre : offensives, retraites, défenses, attaques, attentats, bombardements de cibles militaires et civiles sur le territoire de l'ennemi, etc. L'irrégularité de la situation est que le territoire du véritable ennemi dans cette guerre - l'Occident collectif - reste pour l'instant parfaitement sûr, alors que sur le territoire de la Russie, l'ennemi frappe, jusqu'à la récente attaque de drones contre le Kremlin.
Dans ce diagramme, nous pouvons analyser plus en détail la relation entre les trois pôles noirs, ce qui nous donnera une image plus claire du vecteur global, en tenant compte du moment politique aux États-Unis et des processus plus secondaires dans les pays de l'OTAN - l'Europe et la Turquie. Nous pouvons également examiner la relation et l'équilibre des trois macro-figures blanches. Là encore, il existe une dynamique certaine liée au même moment politique, mais déjà au sein de la Russie. Enfin, il est possible d'analyser comment les attitudes, les décisions et les actions initiées par chaque pôle d'un camp (le camp noir) sont liées aux attitudes, décisions et actions similaires de l'autre (le camp blanc). Mais cela nécessite une autre analyse, plus détaillée. Pour l'instant, il suffit de mettre en évidence et de décrire brièvement les principales macro-figures de cette guerre comparable à une partie d'échecs, qui pourrait devenir la dernière guerre de l'humanité. Tout dépend de ces figures, de leur interaction, de leur corrélation, de leur remplissage de sujets et d'objets, de leur volonté, de leur détermination, de leurs ressources et de leur conviction intérieure de leur justesse.
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mercredi, 19 avril 2023
Un an après le déclenchement de la guerre en Ukraine - Sur le fil du rasoir
Un an après le déclenchement de la guerre en Ukraine
Sur le fil du rasoir
Il ne faut pas présenter la partie adverse comme on l'est soi-même
par Peter Backfisch
Le 24 février 2023 a marqué l'anniversaire du début de la guerre en Ukraine. Soyons clairs: l'attaque de février 2022 a été menée par la Russie ! Toutefois, les deux parties, ainsi que des tiers non impliqués dans les combats, jouent un jeu malsain. La situation doit rester bloquée. Le gouvernement allemand, qui n'est pas une victime de la guerre et qui n'a jamais été menacé, s'est joint dès le début aux cris de guerre de l'OTAN et a ainsi aggravé la situation. Le parti "Bündnis 90/Die Grünen" s'est montré particulièrement excessif. Fondé à la fin des années 1970 en tant que parti pour la paix, entre autres contre la décision de réarmement de l'OTAN, il a parcouru les campagnes allemandes pendant des années avec le slogan "Faire la paix sans armes" ("Frieden schaffen ohne Waffen"). Lors des élections fédérales de 2021, il a présenté sur des panneaux d'affichage géants la promesse électorale "Pas d'armes dans les zones de guerre", sous le portrait d'Annalena Baerbock, autoproclamée "spécialiste du droit international" et future ministre des Affaires étrangères. Depuis, le slogan a changé et est devenu "Construire la paix grâce aux méga-armes".
Créer la paix sans armes (*)
(*) Les exceptions confirment la règle
L'Allemagne, qui a perdu deux guerres mondiales et étaient en ruines en 1945, se voit aujourd'hui à nouveau placée dans une situation qui tend à reproduire le traumatisme d'alors - avec une nouvelle génération de politiciens. On les appelle les "Global Leaders", ce qui indique clairement par quoi ou par qui ils sont dirigés. Le mot a été créé par Klaus Schwab et son Forum économique mondial (WEF). Les jeunes parvenus, enfants gâtés, sont à son service et mettent en pratique le contenu de son livre "COVID-19 - The Great Reset", paru en 2020. Il n'est toutefois pas nécessaire d'aborder ce livre dans le présent article.
Depuis le début, ces politiciens ont fait leur la demande de livraison d'armes au président ukrainien Volodymyr Zelenskyj et ont tout fait pour y répondre immédiatement. Ils ont même accepté l'éventualité d'une guerre nucléaire, la population étant verbalement rassurée par les médias : "Poutine n'osera pas le faire après tout".
Il s'avère d'ores et déjà que les livraisons d'armes ont développé une dynamique propre et sans fin. L'OTAN, sous la pression des États-Unis, a commencé à livrer des systèmes d'artillerie à longue portée très rapidement après le début de la guerre, suivis d'une promesse d'armes lourdes. Les promesses concernant le char de combat Leopard 2 ont laissé place à la question de savoir si l'OTAN n'était pas déjà en guerre. Une extension aux avions de combat est en discussion.
Mais Zelenskyj ne veut pas en rester là et demande que des armes nucléaires soient mises à la disposition de l'Ukraine. Dans le journal suisse Weltwoche du 17 juin 2022, l'expert militaire américain Douglas McGregor a qualifié les livraisons d'armes d'inutiles. Selon lui, les armes ne servent qu'à prolonger la guerre. C'est là un point de vue qui ne peut être toléré dans le débat politique en Allemagne par l'establishment libéral-gauche-vert au pouvoir. Les points de vue différenciés sont punis par le matraquage médiatique et l'exclusion sociale - mais les causes qui, elles, doivent être recherchées dans la politique d'élargissement continu de l'OTAN vers l'Est ne sont pas traitées par les médias.
Prélude à la Première Guerre mondiale
Il n'est pas possible de comparer la guerre en Ukraine à la Première Guerre mondiale, car la Première Guerre mondiale était une guerre de position et de tranchées sans victoire sur le terrain et la guerre en Ukraine est plutôt une guerre de dommages collatéraux chez les belligérants respectifs et chez les personnes non directement impliquées. Mais si l'on se penche sur les antécédents de la Première Guerre mondiale, force est de constater que ceux du conflit russo-ukrainien présentent des similitudes. Comme à l'époque, ce dernier a toutes les chances de mener le monde à un nouveau désastre épouvantable.
Le gouvernement allemand joue à nouveau un rôle majeur, mais cette fois-ci, il veut être parmi les vainqueurs et est prêt à prendre la tête des belligérants européens. Encouragés par les médias, ils font preuve de patriotisme guerrier et sont prêts à faire la guerre.
Le gouvernement allemand ne se rend pas compte que, du point de vue géopolitique de l'OTAN, il ne peut en aucun cas agir de manière indépendante et qu'il joue plutôt le rôle de vassal des États-Unis. Ce qui est frappant ici, c'est l'auto-justification mensongère et la haine aveugle contre la Russie.
Revenons aux leçons à tirer du déclenchement de la Première Guerre mondiale. Dans son ouvrage "Die Schlafwandler" ("Les somnanbules", 2014), l'historien australien Christopher Clark en a décrit minutieusement les antécédents. A l'époque aussi, les responsables vivaient dans un monde complexe où régnaient la méfiance et l'hostilité mutuelles. Les projets d'élargissement et d'expansion ont alimenté les aspirations de l'époque, conduisant à une situation où une étincelle suffisait à déclencher la guerre - ce qui, comme chacun sait, s'est produit. A l'époque, les regards se tournaient vers les foyers de crise dans les Balkans, dans le but d'affaiblir l'Allemagne et l'Autriche-Hongrie.
Dans le langage d'aujourd'hui, on pourrait appeler cela un "déclassement en tant que puissance régionale". De la même manière, on parle actuellement de la Russie, la situation dans le Donbass remplaçant celle des Balkans vers 1912/14. La Crimée joue son propre rôle et ne pourra probablement pas être abandonnée par la Russie, même en cas d'accord de paix. La Russie, la France, et la Grande-Bretagne sont entrées en guerre en 1914 avec des plans de conquête, toujours soucieuses de pouvoir attribuer la véritable responsabilité de la guerre à l'Allemagne: "L'Allemagne était belliqueuse, l'Entente pacifique". Nous retrouvons aujourd'hui une propagande similaire dans la guerre Russie-Ukraine. Une fois de plus, les responsables marchent sur le fil du rasoir, sans vision claire.
L'histoire du début de la Seconde Guerre mondiale, qui a connu un premier point culminant à Stalingrad, témoigne également d'une mauvaise volonté ou plutôt d'une incapacité à rechercher des solutions diplomatiques. Nous recommandons ici la lecture du livre du général à la retraite Gerd Schulze-Rohnhof "1939 - Der Krieg, der viele Väter hatte" (2005). Avec une arrogance hautaine, le gouvernement polonais a tenté de mettre sur le compte de l'Allemagne ses propres nombreuses provocations du printemps 1939 à l'égard des minorités allemandes ; cela a trouvé un terrain fertile en Angleterre et en France. A l'époque également, il n'y avait pas de volonté de négocier, ce qui a plongé toute l'Europe dans le chaos.
Pour éviter que le monde ne soit à nouveau plongé dans une telle catastrophe, il faut ouvrir des espaces de liberté et de négociation. Immédiatement, "dès aujourd'hui" (Roger Waters, début février au Conseil de sécurité de l'ONU) !
Peter Backfisch, né en 1954, est diplômé en pédagogie et travaille depuis 40 ans pour une ONG d'économie sociale. Il y est également conseiller du comité directeur pour la politique internationale. Il a également travaillé en Afrique du Nord, au Moyen-Orient, au Proche-Orient et dans les pays de la CEI jusqu'en 2004. Depuis 2019, il écrit en tant qu'auteur indépendant, par exemple pour Junge Freiheit, Abendland, Wochenblick, Attersee Report et Tumult online.
15:13 Publié dans Actualité, Affaires européennes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : ukraine, russie, verts, bellicisme, politique internationale, europe, affaires européennes | | del.icio.us | | Digg | Facebook
lundi, 05 décembre 2022
Le chant des sirènes de Sanna Marin dans le spectacle belliciste de l'Occident
Le chant des sirènes de Sanna Marin dans le spectacle belliciste de l'Occident
Markku Siira
Source: https://markkusiira.com/2022/11/18/sanna-marinin-seireenin-laulu-lannen-sotaspektaakkelissa/
Slush est un événement international consacré à la technologie et à la croissance des entreprises qui se tient chaque année à Helsinki. L'événement de cette année comportait également une interview de la Première ministre Sanna Marin, qui s'est une fois de plus exprimé comme un néo-conservateur américain pur et dur (il n'est pas étonnant qu'elle ait déjà fait référence à Anne Applebaum et à la "lutte mondiale entre autocraties et démocraties").
Le thème des propos de Sanna Marin était de réduire les dépendances vis-à-vis des pays autoritaires tels que la Russie et la Chine. Cela aurait été au moins un peu plus plausible si la Finlande ne venait pas d'être visitée par des représentants du gouvernement et des entreprises saoudiennes, afin de renforcer les relations économiques et commerciales bilatérales entre la Finlande et cette monarchie absolue, qui adhère à la stricte charia.
Les liens bien connus de Sanna Marin avec le forum capitaliste technocratique de Davos suggèrent également que l'"autoritarisme" ne la dérange pas vraiment, tant qu'il est d'origine occidentale. L'hégémonisme des années 1990 et le sombre jeu à somme nulle semblent convenir à la pensée de Sanna Marin, même s'il peut sembler étrange d'exprimer de telles opinions lors d'un événement consacré à la technologie et à l'innovation commerciale.
Bien sûr, la sirène sociale-démocrate chante les chansons de son orchestre de fond et ses apparitions publiques font partie du spectacle de la guerre en cours. J'ai d'abord pensé que la santé mentale de Sanna Marin avait été ébranlée, mais peut-être que notre Première ministre assoiffée de pouvoir s'est vu promettre un rôle si attrayant en tant que successeur de l'actuel qu'elle est capable de jouer un monomaniaque détestant la Russie - dans le style de Jussi Halla-aho.
"Cela ne signifie pas que nous devons couper tous les liens économiques avec, disons, la Chine ou tout autre pays. Sauf la Russie", a souligné Marin, canalisant la "colère de deux minutes" de ses auditeurs vers la bonne cible. Alors que la Finlande finalise actuellement le dixième paquet d'aide à l'Ukraine, la Première ministre a ajouté que "nous devons nous assurer que la Russie perde la guerre".
Cette "défaite", Marin l'a souvent espérée par le passé, tout en démontrant son ignorance de l'histoire militaire de la Russie. Mais peut-être le président héroïque des (faux) médias du pouvoir, Zelensky, avec le soutien de l'Occident de l'OTAN, réussira-t-il là où les Mongols, le roi Charles XII de Suède, Napoléon et Hitler n'ont pas réussi ?
Au Slush, Sanna Marin a également fait valoir que l'on a eu tort de maintenir des relations étroites avec la Russie en matière de politique énergétique. La "logique russe" est différente, dit-elle ; "nos amis de Pologne et des pays baltes avaient raison", la Finlande et surtout l'Allemagne avaient tort. De cette façon, Sanna the War - poursuivant le travail de taupe de Sauli Niinistö - fait danser la Finlande, État-providence nordique, dans les rangs enragés des États traumatisés d'Europe de l'Est.
Pendant un moment, Sanna Marin a également joué le rôle d'un eurocrate, en disant que l'Europe ne devrait pas non plus être trop dépendante des États-Unis. Cela ne semblait pas très convaincant dans une situation où les sanctions anti-russes et autres mesures destructrices n'ont servi qu'à renforcer le pouvoir d'occupation américain, au détriment des intérêts propres et de la crédibilité politique de l'Eurocontinent.
Les politiciens finlandais crient maintenant hardiment des obscénités derrière la machine de guerre de l'OTAN, même si, lorsque les jeux sont faits, Washington n'a ni les ressources ni la volonté de protéger ses vassaux autodestructeurs. Mais nous appartenons enfin à l'Occident™, dans le jeu de pouvoir géopolitique où les Finno-ougriens se sont vu réserver le rôle prévisible de pion sacrificiel.
Dans la mythologie grecque, les sirènes étaient des femmes, un mélange d'apparence humaine et d'oiseau de proie, avec des griffes acérées aux pieds comme les chauves-souris. Avec leur chant, les sirènes attiraient les marins vers elles, puis les mettaient en pièces. La menace politique de Sanna Marin pourrait avoir un effet similaire sur l'avenir de la Finlande.
20:00 Publié dans Actualité, Affaires européennes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : sanna marin, finlande, europe, affaires européennes, bellicisme, politique internationale | | del.icio.us | | Digg | Facebook
mercredi, 28 septembre 2022
Les guerres illégales de l’OTAN
Les guerres illégales de l’OTAN
par Yannick Sauveur
Source: Eurasia, 4/2022 - Le guerre illegale della NATO.
Les journaux titrent "La guerre en Europe" tout en se gardant bien de préciser que cette guerre en Ukraine n’a pas démarré le 24 février 2022. En informateurs zélés au service de leurs sponsors occidentaux, ils passent sous silence les tensions qui agitent ce pays au cœur de l’Europe centrale depuis près de 20 ans : révolution orange en 2004, coup d’Etat de 2014, massacre de 14 000 de leurs concitoyens russophones dans le Donbass. Cette guerre n’est pas non plus la première en Europe depuis 1945. Une guerre atroce a accompagné dès 1992 le démantèlement de l’ex-Yougoslavie avec en point d’orgue les bombardements sur Belgrade en 1999.
Cette guerre au cœur de l’Europe rappelle opportunément le rôle de l’OTAN. L’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord ou Traité de Washington est signé à Washington le 4 avril 1949 au début de la guerre froide, en réaction au blocus de Berlin exercé par les Soviétiques (juin-juillet 1948). À l’origine, l’OTAN comprend les Etats-Unis, le Royaume Uni, la France, les pays du Benelux, le Canada, le Danemark, l’Islande, l’Italie, la Norvège, le Portugal. La Grèce et la Turquie rejoignent l’OTAN en 1952 et l’Espagne en 1982. L’OTAN est généralement présentée comme une alliance défensive face à un ennemi, le bloc soviétique. Or, le Pacte de Varsovie (le pendant de l’OTAN) ne prend forme que six ans plus tard. Signé le 14 mai 1955, il l’est en réaction à l’adhésion de l’Allemagne de l’Ouest (RFA) à l’OTAN (6 mai 1955).
Si la « justification » de l’OTAN résidait dans la menace soviétique, celle-ci n’existant plus avec la disparition de l’URSS (1991) et concomitamment la dissolution du Pacte de Varsovie (juillet 1991), en toute logique, l’OTAN n’avait plus sa raison d’être. Or, non seulement, l’OTAN continua d’exister mais de surcroît, elle continua de s’étendre contrairement aux engagements pris.
Il n’est pas inutile de rappeler que James Baker, Secrétaire d’État des États-Unis, sous l’autorité du président Ronald Reagan, avait promis à la Russie, par l’entremise de Mikhail Gorbatchev, que l’OTAN allait exclure toute « expansion de son territoire vers l’Est, ou s’approcher des anciennes frontières soviétiques. » Selon les nombreuses sources présentes, il réitéra lors de la signature cette promesse en s’accordant sur l’affirmation de Gorbatchev, selon laquelle l’expansion de l’OTAN est inacceptable, à présent que la guerre froide est terminée, et l’Europe, la Russie et les États-Unis devraient trouver un terrain d’entente sur la voie amenant à la paix et à la prospérité. Baker avait répondu : « lui et les Étasuniens ont compris que ‘non seulement pour l’Union soviétique, mais aussi pour les autres pays d’Europe, il est important de disposer de garanties selon lesquelles, si les États-Unis maintiennent leur présence en Allemagne dans le cadre de l’OTAN, l’OTAN ne devrait pas bouger vers l’Est, c’est-à-dire ne pas s’étendre vers les pays de l’ancien Pacte de Varsovie. ’
Les pays ayant rejoint l’OTAN postérieurement à la fin de l’Union soviétique sont :
- la Pologne, la Hongrie, la République tchèque (1999),
- la Bulgarie, la Roumanie, la Lituanie, la Lettonie, l’Estonie, la Slovaquie, la Slovénie (2004),
- la Croatie, l’Albanie (2009),
- le Monténégro (2017),
- la Macédoine du Nord (2020).
À ces pays, il faut ajouter la Suède et la Finlande, pays neutres, dont la demande d’adhésion à l’OTAN (2022) a été entérinée par l’ensemble de ses membres. Ce nouvel élargissement de l’OTAN est une provocation supplémentaire à l’égard du voisin russe, la Finlande partageant une frontière de plus de 1300 kms avec la Russie.
Deux autres pays, neutres eux aussi, l’Autriche et la Suisse, bien que ne faisant pas partie de l’OTAN, participent au Partenariat pour la paix (PPP). Pour l’ancien secrétaire à la Défense, William Perry : « La différence entre l’adhésion pleine et entière à l’OTAN et la participation au ˮPartenariat pour la paixʺ doit être aussi ténue qu’une feuille de papier ». Et pour Daniele Ganser, il ne fait aucun doute que ce PPP est un Partenariat pour la guerre et non un Partenariat pour la paix.
Enfin reste le cas de l’Ukraine, considérée comme un « pivot géopolitique » par Zbigniew Brzezinski et dont les velléités d’adhésion à l’OTAN sont anciennes puisque déjà en avril 2008, le sommet de l’OTAN à Bucarest actait le principe de l’adhésion de l’Ukraine. L’ancien conseiller du président Carter (1977-1981) est le véritable concepteur de l’élargissement de l’OTAN : « L’élargissement de l’Europe et de l’OTAN serviront les objectifs aussi bien à court terme qu’à plus long terme de la politique américaine. Une Europe plus vaste permettrait d’accroître la portée de l’influence –et, avec l’admission de nouveaux membres venus d’Europe centrale, multiplierait le nombre d’Etats pro-américains au sein des conseils européens –sans pour autant créer simultanément une Europe assez intégrée politiquement pour pouvoir concurrencer les Etats-Unis dans les régions importantes pour eux, comme le Moyen-Orient. »
L’histoire de l’OTAN est celle d’une succession de guerres depuis 1949 jusqu’à celle en cours de l’Ukraine. Il serait plus juste de parler de l’histoire de l’Empire US car cette « succession de guerres » n’a pas commencé en 1949, loin s’en faut, mais il faudrait remonter à 1846 et à la guerre du Mexique qui a permis aux États-Unis de s’emparer de la moitié du territoire mexicain, qui deviendra le Nouveau-Mexique, l’Utah, l’Arizona, la Californie, le Nevada ainsi qu’une partie du Colorado. Toutes obéissent toujours au même schéma : déstabilisation de pays cibles, vassalisation desdits pays, mise en place de bases militaires avec un seul et même objectif permanent, l’occupation politico-économico militaire au profit des puissances anglo-saxonnes dont les USA. Rappelons tout d’abord que si l’OTAN est une alliance militaire, celle-ci est, dans les faits, dirigée par les USA : « La seule organisation internationale qui ait jamais fonctionné est l’OTAN. Parce que c’est une alliance militaire et que nous la dirigeons. » (Richard Nixon). Le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg, a une fonction essentiellement de relations publiques. C’est à ce titre qu’il est connu dans les médias. En revanche, le pouvoir réel est celui militaire qui est exercé au plus haut sommet par des Américains, à savoir le général Christopher G. Cavoli pour le Supreme Allied Commander Europe (SACEUR). Exercice américain sans partage comme en témoigne la demande de la France de voir le commandement Sud de l’OTAN attribué à un officier européen et à laquelle William Cohen, secrétaire d’Etat à la Défense, répondit sans ambiguïté : « c’est clair, c’est catégorique, ce n’est vraiment pas négociable ».
Dans cette succession de guerres, avant ou après 1949, soit directement, soit par procuration, le mode opératoire de l’Empire US est toujours le même, à base de provocations, de révolutions orange, de mensonges, de corruption, de guerre de l’information (c'est-à-dire de désinformation).
Si nul n’ignore aujourd’hui la propagande éhontée au sujet des armes de destruction massive , prétexte à l’invasion de l’Irak en 2003, il n’est pas inutile de rappeler, quoique de façon non exhaustive, la longue tradition de mensonges qui jalonne l’histoire des Etats-Unis :
- Le 15 février 1898, le cuirassé américain USS Maine explose dans le port de La Havane provoquant la mort de 266 Américains. Le prétexte est idéalement trouvé pour l’entrée en guerre des Etats-Unis contre l’Espagne avec pour conséquence l’annexion de Cuba, de Porto Rico, des Philippines et de l’île de Guam. C’est la première guerre que les Etats-Unis menaient en dehors de leur territoire. En 1911, 13 ans après la fin de la guerre hispano-américaine, l’examen de l’épave USS Maine a montré que les effets conjugués du gaz et de l’électricité avaient détruit le navire de l’intérieur. Les Espagnols n’avaient donc rien à voir avec le naufrage du cuirassé.
- La guerre du Vietnam. Le président Lyndon Johnson, qui venait de succéder à John Fitzgerald Kennedy, et la CIA voulaient un prétexte pour impliquer les Etats-Unis dans une guerre ouverte contre le Vietnam. Lyndon Johnson a prétendu que le Viet Minh avait attaqué un navire de guerre américain, l’USS Maddox, dans le golfe du Tonkin (4 août 1964). Le 5 août, la guerre commençait officiellement avec les bombardements sur le Nord-Vietnam. En 2005, la NSA (Agence de sécurité nationale) a publié plus de 140 documents jusque-là top secret concernant l’incident du golfe du Tonkin, dont une étude de l’historien Robert Hanyok et qui confirme ce que d’autres soupçonnaient depuis longtemps : il n’y a eu aucune action contre des navires américains dans le golfe du Tonkin le 4 août 1964. Du reste, de la bouche même des équipages du destroyer américain, l’attaque dans le golfe du Tonkin était une pure invention.
- Le pillage des couveuses et la guerre du Golfe (1991). Le mensonge des « couveuses » est monté par la société de communication Hill & Knowlton. Le 10 octobre 1990, Nayirah, une jeune fille de 15 ans présentée comme une infirmière témoigne en larmes devant le Comité des droits de l’Homme du Congrès que pendant l’invasion, elle travaillait dans un hôpital koweïti et avait vu des soldats irakiens sortir des bébés des incubateurs et les déposer par terre où ils étaient morts. 312 nouveau-nés seraient morts. En réalité, après la guerre, on apprit que l’histoire des couveuses était un mensonge infâme et que Nayirah s’appelait en réalité Nijirah al-Sabah et était la fille de l’ambassadeur du Koweït à Washington.
Mensonges d’Etat, désinformation, tous les présidents des Etats-Unis impliqués dans des guerres sont des criminels de guerre, qu’il s’agisse d’Eisenhower, Johnson, Nixon, Carter, Reagan, Clinton, Bush père & fils, Obama accessoirement Prix Nobel de la Paix (sic). Aucun de ces présidents n’est allé en prison ou n’a eu à répondre devant la justice des milliers de morts. Il en est de même des dirigeants successifs de la CIA, des conseillers politiques (Madeleine Albright, Henry Kissinger), des chefs d’Etat ou de gouvernement (Margaret Thatcher, Tony Blair). Et la liste est loin d’être exhaustive.
Toutes les guerres de l’OTAN ont été relayées par un unanimisme des medias, de la classe politique, de la majorité des intellectuels, un formatage de l’opinion, le tout sous couvert d’humanitarisme, de bons sentiments moraux avec toujours la même rengaine, l’exportation de la démocratie (cf. ce qu’il advient en Libye, en Irak,…)
Le langage de la propagande ne s’embarrasse pas de subtilités de langage ou de finesse de vocabulaire : Saddam Hussein est un « psychopathe » et/ou un « nouvel Hitler » tout comme le dirigeant libyen Kadhafi. Milosevic est présenté comme un « dictateur sanguinaire » voire « le Führer serbe Milosevic » (Rudolf Scharping, ministre de la Défense allemand) ou « Boucher des Balkans ». Pour les Etats-Unis, la Libye compte avec l’Irak, l’Iran et Cuba parmi les « grands méchants » de la planète. Ces mêmes pays ainsi que la Syrie et le Soudan sont au choix des « Etats-parias » ou « terroristes ». Pour George Schulz, secrétaire d’Etat sous les mandats de Reagan, « Le Nicaragua est un cancer qui s’insinue dans notre territoire, il applique les doctrines de Mein Kampf et menace de prendre le contrôle de tout l’hémisphère ». Quant à Vladimir Poutine, volontiers présenté comme un « dictateur » (Jean-Yves Le Drian, ministre français des affaires étrangères sur TF1), d’aucuns vont jusqu’à faire état d’une continuité supposée entre Joseph Staline et Vladimir Poutine. Pour John McCain, Poutine est un « impérialiste russe et un apparatchik du KGB ». « Fou » ne faisait pas encore partie des éléments de langage, et bien, grâce à Milos Zeman, président de la République tchèque, c’est fait : il a qualifié jeudi l’invasion russe de l’Ukraine d’« acte d’agression non provoqué », estimant que « le fou doit être isolé (…) Il y a quelques jours, j’ai dit que les Russes n’étaient pas fous et qu’ils n’attaqueraient pas l’Ukraine. J’avoue que j’avais tort (…). Le fou doit être isolé. Et il s’agit de ne pas s’en défendre uniquement par des mots, mais par des mesures concrètes ».
À l’inverse, et dans le plus pur style orwellien, les Contras, assassins sanguinaires sont présentés comme des « combattants de la liberté » et la guerre de l’OTAN contre la Serbie est une « guerre humanitaire » !
Le coup d’Etat en Ukraine du 20 février 2014
Les Américains tirent les ficelles et ne s’en cachent pas. John McCain est présent à Kiev dans les semaines qui précèdent le coup d’Etat et exhorte les manifestants à renverser le gouvernement ukrainien. Les manifestations de Maïdan sont exploitées sur place par les multiples visites de responsables américains, les conversations téléphoniques entre Victoria Nuland et Geoffrey Pyatt, l’ambassadeur US en Ukraine, au cours desquelles ils ont discuté de la nouvelle composition du gouvernement. C’est au cours de ces conversations interceptées que Victoria Nuland avait lancé son fameux « Fuck UE ! » Après le putsch, l’objectif des nouveaux gouvernants était de rallier l’Ukraine à l’OTAN.
La position de la Russie est claire et de bon sens : que l’Ukraine n’accueille jamais de missiles américains et qu’elle n’adhère pas à l’OTAN. Ces demandes ont été rejetées par Victoria Nuland qui a déclaré : « Ce sont des décisions qui appartiennent à l’Ukraine et à l’OTAN, pas au Kremlin. » Et Serguei Lavrov résume la situation : « Toutes nos propositions visant à écarter ces menaces sur la base du respect mutuel des intérêts de la sécurité ont été ignorées par les États-Unis, l’UE et l’Otan. Malgré ses assurances antérieures de non-expansion vers l’Est, l’Alliance a rapproché ses frontières de celles de la Russie à cinq reprises. Nous pouvons assister à une situation similaire avec l’Ukraine. Dans ce pays, on a interdit tout ce qui est russe: la langue, l’éducation, la culture, les médias. »
L’objectif évident des USA est d’encercler toujours plus la Russie et, pour ce faire, intégrer l’Ukraine dans l’OTAN. C’est là que se situe la ligne rouge pour Vladimir Poutine pour qui il en va de la sécurité de la Russie et celle-ci a besoin d’un glacis sécurisé. Il semble que les négociations étaient bien avancées avec l’Ukraine en vue de son intégration dans l’OTAN. Or, parallèlement, non seulement les Américains restaient sourds aux demandes de Vladimir Poutine mais en plus ils envoient davantage de troupes américaines chez les alliés d’Europe de l’Est de l’OTAN, les exercices de l’OTAN se déroulent à proximité des frontières de la Russie. Il faut rappeler ce contexte pour comprendre que l’opération militaire russe était l’unique solution pour empêcher l’entrée de l’Ukraine dans l’Otan.
Pour mémoire, on rappellera les quelques dernières guerres de l’OTAN :
- 1991 : agression de la Yougoslavie,
- 1999 : bombardements de la Serbie et du Kosovo,
- 2001 : bombardements massifs en Afghanistan,
- 2003 : sans avoir obtenu l’autorisation du Conseil de sécurité, les Etats-Unis envahissent l’Irak avec comme principaux alliés le Royaume-Uni, l’Australie, l’Italie et l’Espagne. Pour une fois, la France sauve l’honneur,
- 2011 : Intervention en Libye,
- 2011… : Syrie,
- 2014 : Coup d’État en Ukraine,
- 2015 : Le Yémen est attaqué par l’Arabie saoudite sans mandat de l’ONU, avec le soutien des Etats-Unis, de la France et de la Grande-Bretagne, membres de l’OTAN.
Depuis 1945 et la fondation de l’Organisation des Nations Unies (ONU), il est interdit de recourir à la guerre, cette interdiction ne souffrant que deux exceptions : d’une part, le droit à l’autodéfense, d’autre part, l’autorisation d’un mandat explicite du Conseil de sécurité de l’ONU. Il est peu de dire que la Charte des Nations Unies (San Francisco, 26 juin 1945) interdisant à ses membres de recourir à la menace ou à l’emploi de la force, soit contre l’intégrité territoriale ou l’indépendance politique de tout État, soit de toute autre manière incompatible avec les buts des Nations Unies a été superbement ignorée par la plus grande alliance militaire au monde, l’OTAN, qui a conduit le plus de guerres illégales et ce, en toute impunité. Guerres masquées, coups d’État, absence de mandat de l’ONU (Serbie 1999, Irak 2003), détournement d’un mandat de l’ONU (Libye 2011, la résolution de l’ONU autorisait une zone d’exclusion aérienne, afin de protéger la population civile. Elle n’autorisait pas un changement de régime et l’assassinat de Mouammar Kadhafi), l’ONU a montré son impuissance comme avant elle la SDN. Est-ce si étonnant ? Pas vraiment si on en juge par les propos de divers dirigeants américains : Madeleine Albright pour qui « le secrétaire général de l’ONU doit être seulement un administrateur » ou G.W. Bush : « je me demande si l’ONU est indispensable au XXIè siècle (…) ». Noam Chomsky note pour sa part que « Les plus hautes autorités expliquent avec une brutale clarté que la Cour Internationale de justice, l’ONU et les autres organisations internationales sont devenues sans objet, puisqu’elles n’obéissent plus aux ordres de Washington (…) ».
Nous faisons nôtres les constats de Daniele Ganser sur les guerres menées par l’OTAN qui sont des guerres au service de l’impérialisme américain. En revanche, nous sommes réservés sur le concept de « légalité ». La question n’est pas celle des guerres illégales, au regard du Droit, certaines peuvent l’être tout en étant des guerres justes, guerres de libération nationale ou celle de la Russie venant au secours des populations russophones du Donbass et d’autres qui ne le sont pas. Dans le cas qui nous occupe, les guerres décrites ici, celles de l’impérialisme américain, sont naturellement des guerres illégales. L’histoire contemporaine a prouvé que l’ONU est incapable de faire respecter le contenu de sa charte. Avec trois membres permanents de l’OTAN (E.U, G.B., F.) sur cinq au sein du Conseil de Sécurité de l’ONU, à moins d’un veto de la Chine ou de la Russie, le résultat est connu et on a vu, hélas, que dans des cas importants (Libye), la Russie et la Chine choisissent l’abstention. Pour les Etats-Unis, la force prime le droit et, se croyant investis d’une mission universelle, ils continueront à œuvrer comme ils l’ont toujours fait depuis près de 200 ans. L’OTAN a toujours été un outil au service de l’impérialisme américain et le « parapluie » américain en créant une soumission des pays de l’Europe de l’Ouest a empêché que se crée une véritable Europe souveraine et ayant sa propre défense. L’OTAN est une menace pour la paix mondiale et en premier lieu pour l’Europe, territoire convoité mais nain politique et militaire. L’OTAN n’a plus de raison d’être depuis la disparition de l’URSS. Cette organisation guerrière doit être dissoute et à tout le moins sortir de l’Europe. L’intérêt des peuples européens et de la paix en Europe le commande.
Yannick Sauveur
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vendredi, 05 août 2022
Les provocations américaines pour déclencher des guerres par procuration se multiplient. Grâce aux atlantistes
Les provocations américaines pour déclencher des guerres par procuration se multiplient. Grâce aux atlantistes
Augusto Grandi
Source: https://electomagazine.it/si-moltiplicano-le-provocazioni-usa-per-scatenare-guerre-per-procura-grazie-agli-atlantisti/
Les élections de mi-mandat approchent, les sondages sont extrêmement négatifs, et le président Biden tente de gravir les échelons en multipliant les actes de provocation dans toutes les parties du monde. Après avoir provoqué Poutine en Ukraine jusqu'à déclencher la guerre, il tente de faire monter le niveau de tension dans les Balkans et, avec le voyage de provocation de dame Pelosi à Taïwan, il a également envenimé les relations avec la Chine à un niveau très élevé. Tout cela avec l'assentiment servile et obtus des atlantistes.
"Mon impression", explique Daniele Lazzeri, président de la boite à penser italienne Il Nodo di Gordio, "est que la multiplication vertigineuse de nouveaux foyers de crise dans diverses régions de la planète révèle la faiblesse politique et militaire croissante des États-Unis. Les difficultés objectives sur le front ukrainien - qui, malgré les déclarations audacieuses de Zelensky, prouvent l'impossibilité d'offrir une résistance totale à la puissance de feu russe - obligent à mon avis les États-Unis à allumer des foyers de turbulence dangereux dans d'autres pays. Nous le constatons avec la réactivation du conflit balkanique entre le Kosovo et la Serbie quelques mois avant les élections en Bosnie-Herzégovine du 2 octobre prochain et avec la visite soudaine, mais aussi improvisée, de la présidente de la Chambre des représentants, Nancy Pelosi, à Taïwan".
Le risque est que ce ne soit que le début. Et qu'à Washington, on médite sur l'augmentation des zones de conflit, sans avoir besoin d'une intervention américaine directe mais en utilisant la stupidité de serviteurs écervelés.
"L'administration Biden, poursuit Lazzeri, met donc en œuvre une stratégie de désarticulation mondiale par le biais de 'guerres par procuration', de guerres indirectes, qui affectent gravement l'équilibre déjà délicat de certaines lignes de faille géopolitiques qui font l'objet de conflits et de paix gelée. Je ne serais pas surpris si, dans les semaines à venir, nous pouvions assister à de nouvelles tensions dans les territoires du Moyen-Orient et en Afrique du Nord. Je pense notamment à la Syrie et à la Libye où, avec beaucoup de difficultés, une stabilité substantielle avait été obtenue entre les intérêts russes et les influences turques. Les récents succès diplomatiques du président Erdogan constituent toutefois une dangereuse menace pour l'administration Biden. Bien qu'elle soit un rempart de l'OTAN en Méditerranée, une Turquie trop indépendante et autoritaire qui, même ces dernières années, a fait des clins d'œil répétés au Kremlin n'est pas une garantie suffisante pour les stratégies américaines de préservation du pouvoir sur le théâtre euro-méditerranéen.
Et la tension provoquée par l'OTAN au Kosovo va précisément dans ce sens. Parce que Moscou est lié à Belgrade tandis qu'Ankara protège les musulmans kosovars. De même, les atlantistes italiens pourraient favoriser une montée des tensions en Libye où Poutine et Erdogan avaient réussi à trouver une sorte de modus vivendi entre la Tripolitaine et la Cyrénaïque.
Quant aux conséquences de la provocation de Nancy Pelosi, "selon toute vraisemblance", conclut Lazzeri, "la réponse chinoise n'aura pas d'implications militaires immédiates. Il n'est pas dans l'intérêt de Pékin, en fait, de déclencher une confrontation directe avec les États-Unis. On peut plutôt s'attendre à des représailles commerciales et diplomatiques qui renforceront encore les relations que le président chinois Xi Jinping tisse depuis des années non seulement avec Vladimir Poutine mais aussi avec la plupart des pays qui ne sont pas alignés sur l'"Occident" dirigé par les États-Unis.
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samedi, 30 juillet 2022
Sur les visions changeantes de l'ennemi en Occident
Sur les visions changeantes de l'ennemi en Occident
Jürgen Todenhöfer
Source: https://www.nachdenkseiten.de/?p=86365
La haine du emainstream nvers la Russie facilite la vie de l'Occident. Lorsque la Russie est le mal, il est beaucoup plus facile de présenter ses propres guerres comme une lutte courageuse pour les droits de l'homme et la démocratie. Nous sommes alors toujours les bons, qui doivent parfois être sévères envers les méchants.
Ainsi, après la Seconde Guerre mondiale, l'Union soviétique communiste était l'ennemie préférée de l'Occident, ce qui a grandement facilité les guerres barbares menées simultanément par les États-Unis en Corée et au Vietnam. Nous, les bons, luttions contre un mal inexcusable, qui nous faisait toujours la faveur de ne pas reculer non plus devant la brutalité.
Lorsque l'Union soviétique s'est effondrée au début des années 1990, l'Islam est devenu le nouvel ennemi. Le prétexte invoqué était alors l'attaque terroriste, diaboliquement géniale, contre le World Trade Center le 11 septembre 2001. Le nombre de victimes du terrorisme "islamiste" en Occident est toujours inférieur à 5.000 - y compris les morts du 9/11 - alors que les guerres antiterroristes occidentales ont tué des centaines de milliers de civils musulmans. L'Islam - et pas seulement la terreur islamiste - a été un ennemi extrêmement efficace. Plus d'une demi-douzaine de guerres sanglantes ont été justifiées par lui.
Comme les guerres antiterroristes se terminaient toutes de manière assez chaotique et souvent par une défaite, elles commençaient à ennuyer l'électorat américain. Il fallait donc trouver une autre image de l'ennemi.
Le choix s'est porté sur la Russie, qui, comme tous les "ennemis" précédents, a finalement fourni aux États-Unis un prétexte parfait. Provoquée pendant des années par les États-Unis à coup de sanctions et de promesses non tenues, elle a envahi l'Ukraine en février 2022.
Pour les États-Unis, cette guerre est arrivée à point nommé. Ils n'ont toujours pas de stratégie convaincante face à leur principal rival, la Chine. L'élimination de la Russie, le principal allié potentiel de la Chine, affaiblirait également cette dernière, ce qui serait en tout cas un objectif intermédiaire souhaitable dans la lutte pour défendre l'hégémonisme mondial des Etats-Unis.
En exerçant une pression douce, les États-Unis ont réussi à convaincre les Européens de livrer des armes à l'Ukraine. Mais leur coup de génie a été d'inciter les Européens à prendre des sanctions qui leur faisaient plus de mal qu'à la Russie. Cela n'a pas seulement affaibli le rival russe, mais aussi les alliés européens, dont les succès économiques n'ont pas toujours fait le bonheur des États-Unis.
Les États-Unis et l'OTAN, qu'ils dominent, ont également réussi à faire passer la Russie, puissance moyenne, pour un géant militaire, ce qui est un coup de génie. Bien que le budget militaire de l'OTAN soit 17,9 fois plus élevé que le budget d'armement de la Russie, qui a désarmé ces dernières années pour des raisons économiques (1180 milliards contre 65,9 milliards de dollars).
Il aurait été du devoir des médias occidentaux de montrer les véritables rapports de force. Mais la plupart des médias occidentaux, comme les médias russes par exemple, se considèrent comme faisant partie du système et non comme le contrôlant. Ainsi, selon nos médias, ce sont toujours les soldats russes qui tuent, violent et torturent, jamais les Ukrainiens.
Sans le soutien des médias dominants, l'invention d'images de l'ennemi et la multiplication des guerres dans le monde ne seraient pas possibles.
Il n'est pas difficile de deviner qui sera le prochain ennemi. La Chine a de bonnes chances de jouer ce rôle dangereux dans les relations internationales. On trouvera bien un prétexte au bon moment. Comme lors des légendaires guerres de l'opium de 1840 et 1842, lorsque la Grande-Bretagne et la France ont envahi la Chine parce que l'empereur chinois refusait d'importer des quantités croissantes d'opium britannique.
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lundi, 25 juillet 2022
Slavoj Žižek et la gauche comme défenseurs du capitalisme de guerre occidental de l'OTAN
Slavoj Žižek et la gauche comme défenseurs du capitalisme de guerre occidental de l'OTAN
Markku Siira
Source: https://markkusiira.com/2022/07/25/slavoj-zizek-ja-vasemmisto-nato-lannen-sotakapitalismin-puolustajina/
"Le moins que nous devions à l'Ukraine est notre soutien total, et pour cela nous avons besoin d'une OTAN plus forte [...] Aujourd'hui, vous ne pouvez pas être de gauche si vous ne soutenez pas sans équivoque l'Ukraine", déclare l'élitiste de gauche "hégéliano-marxiste" Slavoj Žižek dans The Guardian.
Comme le souligne Nikos Mottas, l'opinion de Žižek sur l'Ukraine n'aurait eu aucune importance si le penseur et théoricien culturel slovène n'avait pas bénéficié d'une telle publicité dans les médias occidentaux et ne s'était pas imposé comme l'un des "intellectuels vivants les plus importants".
Depuis plus de deux décennies, Žižek est une figure de premier plan non seulement dans les médias grand public, mais aussi dans les institutions universitaires et les groupes de réflexion les plus prestigieux d'Europe et des États-Unis. Cela illustre la décadence intellectuelle croissante de l'Occident.
En réalité, Žižek est "l'incarnation d'une fourberie pseudo-marxiste qui tente de blanchir le système d'exploitation capitaliste par des analyses pompeuses, des absurdités philosophiques incohérentes et souvent contradictoires".
Ce n'est pas une coïncidence si le même faussaire qui appelle maintenant à une "OTAN plus forte" pour défendre l'Ukraine préconisait déjà ouvertement une intervention militaire de l'OTAN en 1999, faisant l'éloge du bombardement de la Yougoslavie, rappelle Mottas.
Slavoj, partisan déclaré des crimes horribles commis par l'OTAN en Yougoslavie, n'était cependant pas satisfait de la barbarie infligée au peuple serbe. Selon lui, les Serbes ont été bombardés trop tard, et pas suffisamment. Apparemment, il aurait fallu tuer tous les Serbes pour satisfaire le "critique culturel" slovène.
Après les attaques terroristes de Paris en 2015, Žižek a suggéré que l'antidote à l'impasse du capitalisme mondial était la "militarisation de la société". Puisque, selon Žižek, les gens ne savent pas ce qu'ils veulent (ou ils veulent les "mauvaises choses"), les droits civils devraient être réduits et le pouvoir de décision de la "politique émancipatrice" devrait être concentré entre les mains d'une élite technocratique libérale-mondiale. Donc juste davantage d'eurobureaucratie, d'occidentalisation et d'hégémonie américaine ?
Žižek n'est en aucun cas un penseur radical, il représente le courant dominant libéral. Selon Mottas, le philosophe pop slovène est "un apologiste de la barbarie capitaliste qui dénigre le socialisme du 20ème siècle, attaque sans vergogne Lénine et promeut, ouvertement ou secrètement, l'alliance impérialiste et meurtrière de l'OTAN".
Même lorsqu'il prétend défendre le communisme, Žižek ne le fait qu'au niveau de la théorie abstraite, sans se soucier de l'application sociale et politique de l'idée. Si l'alliance occidentale des États-Unis commençait à bombarder la Chine, Žižek défendrait probablement aussi cette attaque et trouverait un moyen de condamner le "socialisme aux caractéristiques chinoises".
Mottas ironise sur la façon dont Žižek et d'autres "intellectuels marxistes" comme lui (comme Alain Badiou, Antonio Negri, Terry Eagleton, etc.) veulent une "révolution décaféinée qui ne sent pas la révolution", convenant aux libéraux aux âmes sensibles. Sous un tel vernis gauchiste, il est bon de se prélasser devant les médias et de défendre le système capitaliste.
En effet, la boucle est bouclée : en Occident, tant à gauche qu'à droite, les politiciens de carrière, les universitaires et divers influenceurs hybrides du courant dominant et de la frange, distribuent ensemble l'opium de l'OTAN au peuple, appellent à la chute de la Russie et attendent avec impatience un nouvel essor du capitalisme dirigé par l'Occident sur les cendres du libéralisme.
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lundi, 18 juillet 2022
Tocqueville, Thucydide et le messianisme belliqueux des démocraties occidentales
Tocqueville, Thucydide et le messianisme belliqueux des démocraties occidentales
Nicolas Bonnal
Le messianisme démocratique ne connait plus de limites : guerre nucléaire, reset et changement de sexe.
Nous sommes en guerre contre les Russes, contre la Chine, contre les souverainistes, contre les terroristes, contre le nucléaire ; contre la grippe aviaire, contre le racisme, contre le machisme, contre tout le reste.
Et pourquoi ? Comment expliquer ce dynamisme ?
Régime messianique et parfait devant l'éternité, la démocratie impose des devoirs. La démocratie se doit de montrer l'exemple et de châtier le contrevenant. Ce n'est pas moi qui l'écrit, mais Thucydide via l’archange Périclès.
Dans sa Guerre du Péloponnèse, il raconte la Guerre de Trente ans menée par les Athéniens contre le reste de la Grèce et, s'ils l'avaient pu, contre le reste du monde. Thucydide cite au livre II (chapitres XXXV-XL) les grandes lignes du discours du stratège Périclès, qui convainc son peuple de démarrer la guerre. J'en cite les principaux points, où Périclès ne cesse de marteler son message : la supériorité ontologique de la démocratie qui lui fait un devoir d'éliminer tout adversaire. En effet,
« Notre constitution politique n'a rien à envier aux lois qui régissent nos voisins ; loin d'imiter les autres, nous donnons l'exemple à suivre. »
Cette excellence du modèle démocratique suppose une supériorité ontologique citoyenne. La race devient supérieure si elle est démocrate. Le citoyen est exemplaire :
« Nous obéissons toujours aux magistrats et aux lois et, parmi celles-ci, surtout à celles qui assurent la défense des opprimés et qui, tout en n'étant pas codifiées, impriment à celui qui les viole un mépris universel ».
Périclès oppose non pas Athènes à Sparte, mais Athènes et sa démocratie à la Grèce entière, à tout le monde en fait. Qu'on en juge :
«Voici donc en quoi nous nous distinguons : nous savons à la fois apporter de l'audace et de la réflexion dans nos entreprises. Les autres, l'ignorance les rend hardis, la réflexion indécis».
Après le bâton, la carotte. Périclès lie déjà la démocratie à la jouissance matérielle, qui frappera tant Tocqueville lors de son voyage en Amérique. La démocratie athénienne a déjà inventé la société des loisirs :
« En outre pour dissiper tant de fatigues, nous avons ménagé à l'âme des délassements nombreux ; nous avons institué des jeux et des fêtes qui se succèdent d'un bout de l'année à l'autre, de merveilleux divertissements particuliers dont l'agrément journalier bannit la tristesse. »
Rappelons que les Athéniens se faisaient payer pour aller au théâtre.
Périclès célèbre, comme plus tard Voltaire, le commerce et la mondialisation :
« L'importance de la cité y fait affluer toutes les ressources de la terre et nous jouissons aussi bien des productions de l'univers que de celles de notre pays. »
D'ailleurs, si la richesse est importante, tout le monde doit devenir riche.
« Chez nous, il n'est pas honteux d'avouer sa pauvreté ; il l'est bien davantage de ne pas chercher à l'éviter. »
Le messianisme démocratique est métaphysique et belliciste, donnant raison au cher Héraclite, pour qui la guerre était la mère de toute chose !
Périclès pérore tout joyeux :
« Nous avons forcé la terre et la mer entières à devenir accessibles à notre audace, partout nous avons laissé des monuments éternels des défaites infligées à nos ennemis et de nos victoires. »
Ce tableau narcissique, digne de celui du discours d'Obama à West Point, justifie toutes les guerres :
« Telle est la cité dont, avec raison, ces hommes n'ont pas voulu se laisser dépouiller et pour laquelle ils ont péri courageusement dans le combat ; pour sa défense nos descendants consentiront à tout souffrir. »
Ou comme dit le « penseur néocon » Kagan, les Américains — les démocraties, en fait — viennent de Mars. Les Iraniens, les Russes, les Chinois et les... Vénusiens n'ont qu'à bien se tenir.
Quant à la morale des peuples démocratiques, on laisse juges nos lecteurs avec la note sur le Discours de la réforme de Démosthène (disponible sur Remacle.org) :
« Après la mort d'Épaminondas, dit Justin, les Athéniens n'employèrent plus, comme autrefois, les revenus de l'État à l'équipement des flottes et à l'entretien des armées : ils les dissipèrent en fêtes et en jeux publics ; et, préférant un théâtre à un camp, un faiseur de vers à un général, ils se mêlèrent sur la scène aux poètes et aux acteurs célèbres. Le trésor public, destiné naguère aux troupes de terre et de mer, fut partagé à la populace qui remplissait la ville». Cet usage, fruit pernicieux de la politique de Périclès, avait donc introduit dans une petite république une profusion qui, proportion gardée, ne le cédait pas au faste des cours les plus somptueuses.
Tocqueville avait deviné, lui, l’agressivité américaine : pourtant la géographie avait bien isolé les Etats-Unis !
« La fortune, qui a fait des choses si particulières en faveur des habitants des États-Unis, les a placés au milieu d'un désert où ils n'ont, pour ainsi dire, pas de voisins. Quelques milliers de soldats leur suffisent, mais ceci est américain et point démocratique. »
Ce qui est démocratique, c’est d’avoir déclenché 200 guerres et bâti mille bases de par le monde.
Car gare aux armées démocratiques. Tocqueville :
« Tous les ambitieux que contient une armée démocratique souhaitent donc la guerre avec véhémence, parce que la guerre vide les places et permet enfin de violer ce droit de l'ancienneté, qui est le seul privilège naturel à la démocratie… Nous arrivons ainsi à cette conséquence singulière que, de toutes les armées, celles qui désirent le plus ardemment la guerre sont les armées démocratiques. »
Enfin l'historien révèle la vraie raison. C’est la même arrogance que celle de Périclès soulignée plus haut (II, troisième partie, chapitre 16) :
« Les Américains, dans leurs rapports avec les étrangers, paraissent impatients de la moindre censure et insatiables de louanges. Le plus mince éloge leur agrée, et le plus grand suffit rarement à les satisfaire ; ils vous harcèlent à tout moment pour obtenir de vous d'être loués ; et, si vous résistez à leurs instances, ils se louent eux-mêmes. On dirait que, doutant de leur propre mérite, ils veulent à chaque instant en avoir le tableau sous leurs yeux. Leur vanité n'est pas seulement avide, elle est inquiète et envieuse. Elle n'accorde rien en demandant sans cesse. Elle est quêteuse et querelleuse à la fois. »
Cette agressivité humanitaire se transmet à une von der Leyen ou à un Macron. Qu’on trouve un tzar ou un grand khan, et nous sommes prêts pour une énième croisade.
On sait aussi le rôle que joue la presse en démocratie. Je fournis la guerre, avait dit l’autre (Randolph Hearst, alias Citizen Kane), quand il s’agit de voler Cuba aux Espagnols avec le beau résultat que l’on sait (Battista, Castro, les missiles...). L’historien Joseph Stromberg a montré que le but de cette guerre était la Chine - via les Philippines. Et ils y sont toujours ces buts…
Revenons à notre plus grand esprit.
Dans le dernier et splendide chapitre de ses Souvenirs, Tocqueville insiste sur le rôle de la presse qui pousse toujours à la guerre en démocratie. On est en 1849 en Angleterre, ce beau pays qui laisse crever ses Irlandais tout en continuant d’exporter viandes et blés de la verte Erin. Mais on veut faire la guerre à la Russie et à l’Autriche pour défendre… la sainte Turquie qui défend l’humanité et les droits de l’homme ! Et c’est pendant l’été… Tocqueville ajoute au passage que les réfugiés politiques hongrois dévastent la sinistre république helvétique qui leur a donné asile. Les Allemands en riraient aujourd’hui… Mais passons.
« Pendant cet intervalle, toute la presse anglaise, sans distinction de parti, prit feu. Elle s’emporta contre les deux empereurs et enflamma l’opinion publique en faveur de la Turquie. Le gouvernement anglais, ainsi chauffé, prit aussitôt son parti. Cette fois il n’hésitait point, car il s’agissait, comme il le disait lui-même, non seulement du sultan, mais de l’influence de l’Angleterre dans le monde. Il décida donc : 1° qu’on ferait des représentations à la Russie et à l’Autriche ; 2° que l’escadre anglaise de la Méditerranée se rendrait devant les Dardanelles, pour donner confiance au sultan et défendre, au besoin, Constantinople. On nous invita à faire de même et à agir en commun. Le soir même, l’ordre de faire marcher la flotte anglaise fut expédié. »
La France républicaine toujours soumise aux Anglo-Saxons était invitée à emboîter le pas. Six ans plus tard le second empire faisait la guerre à la Russie, dix ans plus tard à l’Autriche. On comprend pourquoi le coup d’Etat de Badinguet n’avait pas dérangé Londres et Palmerston, premier grand architecte du nouvel ordre mondial. Badinguet fit la guerre à la Russie comme à l’Autriche et créa l’Allemagne et l’Italie (qui nous fit autant la guerre que la précédente).
La création de l’UE par les Américains et leurs agents comme l’ineffable Jean Monnet semble n’avoir dès le début qu’un but lointain et précis : une guerre d’extermination continentale et démocratique. Rassurons les imbéciles, on y est presque.
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lundi, 11 juillet 2022
Les bellicistes éco-durables
Les bellicistes éco-durables
par Andrea Zhok
Source : Andrea Zhok & https://www.ariannaeditrice.it/articoli/i-bellicisti-eco-sostenibili
Parmi les milliers de choses qui m'échappent dans le cheminement de la pensée des dirigeants occidentaux, il en est une qui concerne le sujet séculaire du réchauffement climatique.
Supposons que la contribution anthropique au réchauffement climatique soit effectivement déterminante (je sais que ce n'est pas facile à prouver, mais c'est une possibilité à envisager).
À la lumière de ce constat, il serait en effet judicieux de réduire la portée mondiale d'un certain nombre de productions et de systèmes de production à fort impact (non seulement en ce qui concerne les gaz à effet de serre, mais en général la pollution atmosphérique qui sévit dans de nombreuses agglomérations urbaines).
Maintenant, si l'urgence première est effectivement d'endiguer ces processus à l'échelle mondiale, ma question est la suivante : mais provoquer une rupture par une guerre mondiale de quelque manière que ce soit, avec une course aux armements associée, est-ce vraiment une voie astucieuse ?
Je veux dire, vous conviendrez que pour obtenir un quelconque résultat mondial, nous avons besoin d'un niveau élevé d'accord mondial sur les stratégies. Sinon, si les quelque 800 millions d'Occidentaux adoptent la stratégie environnementale X et que les 6,5 milliards de non-Occidentaux adoptent la stratégie environnementale non-X, on n'obtiendra pratiquement aucun résultat.
Donc, si je comprends bien, vous nous demandez, à nous Occidentaux, de faire du vélo, d'éteindre les barbecues, de réintroduire ou de développer l'énergie nucléaire, de mettre au rebut les voitures à combustion, etc. etc. alors que dans le même temps, vous nous obligez à nous isoler, en tant qu'Occidentaux, de la majorité de la population de la planète, à entamer une course aux armements avec eux (une industrie proverbialement energivore), à fomenter des conflits directs comme en Ukraine (quelqu'un veut faire le calcul des "émissions nocives" d'une guerre où l'artillerie joue un rôle prépondérant ?), avec pour conséquence le recours d'urgence à toutes les sources d'énergie qui étaient taboues jusqu'à hier matin (du charbon au fracking) ?
En termes plus simples.
Croyez-vous vraiment que le réchauffement climatique d'origine anthropique est l'horizon d'une catastrophe future ? Eh bien, alors nous avons sacrément besoin de concorde internationale et de pactes coordonnés, et vous devez tout faire pour y parvenir.
Si, en revanche, vous cherchez systématiquement les ennuis, provoquez la plus grande puissance nucléaire du monde de quelque manière que ce soit (de Maidan à Kaliningrad), exigez que les conflits ne prennent fin qu'avec la défaite finale de l'un des prétendants, déclarez que la Chine est une menace pour la sécurité internationale et ordonnez à "votre peuple" de rompre tous les liens culturels, économiques et diplomatiques avec les BRICS, eh bien, cher ami, permettez-nous de douter que vous considériez le réchauffement climatique comme la menace que vous dites être.
Alors, on peut bien faire du vélo parce que c'est la santé, mais pour ne savoir ni lire ni écrire, on croira aux stratégies climatiques occidentales quand on verra un comportement cohérent au sommet.
Et un comportement cohérent ne consiste pas à se déguiser en prophètes écologistes pendant que vous alimentez la troisième guerre mondiale.
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dimanche, 03 juillet 2022
L'Ukraine, le dernier projet catastrophe des néoconservateurs américains
L'Ukraine, le dernier projet catastrophe des néoconservateurs américains
Markku Siira
Source: https://markkusiira.com/2022/07/01/ukraina-amerikan-neokonservatiivien-viimeisin-katastrofihanke/
La crise ukrainienne est l'aboutissement d'un projet de domination concocté depuis 30 ans par le mouvement néoconservateur juif américain. L'administration de Joe Biden est truffée des mêmes figures qui ont soutenu les frappes américaines en Serbie (1999), en Afghanistan (2001), en Irak (2003), en Syrie (2011) et en Libye (2011) et qui ont tout fait pour provoquer la Russie au sujet de l'Ukraine.
Ces opinions ne sont plus seulement le fait des théoriciens de la conspiration, des opposants à l'impérialisme américain ou des commentateurs politiques extrémistes, mais ont été abordées franchement par l'économiste et politologue américain Jeffrey D. Sachs, par exemple.
Le bilan des néoconservateurs est, selon Sachs, "un désastre complet, et pourtant le président Biden a encore renforcé son équipe par des néoconservateurs". En conséquence, Biden dirige l'Ukraine, les États-Unis et l'Union européenne vers un nouveau désastre géopolitique. "Si l'Europe avait un peu de bon sens, elle se détacherait de ces désastres de la politique étrangère américaine", affirme Sachs.
Le mouvement néoconservateur est né dans les années 1970 autour d'un petit groupe central, dont plusieurs ont été influencés par le politologue Leo Strauss de l'Université de Chicago et le professeur Donald Kagan de l'Université de Yale (photo, ci-dessous).
Parmi les leaders néoconservateurs figurent Norman Podhoretz, Irving Kristol, Paul Wolfowitz, Robert Kagan (fils de Donald), Frederick Kagan (fils de Donald), Victoria Nuland (épouse de Robert), Elliott Cohen, Elliott Abrams et Kimberley Allen Kagan (épouse de Frederick). Tous ont des origines familiales en Europe de l'Est, dans l'ancienne Union soviétique.
Le principal message des néo-conservateurs est que les États-Unis doivent dominer militairement toutes les régions du monde et qu'ils doivent affronter les puissances régionales émergentes qui pourraient un jour contester l'hégémonie américaine. À cette fin, les forces militaires américaines devraient être déployées à l'avance dans des centaines de bases militaires à travers le monde et les États-Unis devraient être prêts à mener des guerres choisies contre des puissances rivales.
Les institutions internationales doivent également rester subordonnées aux intérêts de Washington. L'ONU, par exemple, ne devrait être utilisée "que lorsqu'elle est utile aux objectifs des États-Unis", sinon ceux-ci devraient suivre leur propre chemin, ignorant délibérément les traités internationaux.
Cette approche a été proposée pour la première fois par Paul Wolfowitz dans son projet d'orientation de la politique de sécurité au ministère de la Défense en 2002, lorsqu'il était secrétaire adjoint à la Défense. Le projet prévoyait une expansion du "réseau de sécurité" dirigé par les États-Unis en Europe centrale et orientale, malgré la promesse explicite faite en 1990 par le ministre allemand des Affaires étrangères de l'époque, Hans-Dietrich Genscher, que la réunification allemande ne serait pas suivie par l'expansion de l'OTAN vers l'est.
Wolfowitz (photo) s'est également prononcé en faveur des guerres lancées par les États-Unis, défendant le droit de Washington à agir de manière indépendante, voire seule, en réponse à des crises qui concernent l'État profond. Selon le général à la retraite Wesley Clark, Wolfowitz lui a fait comprendre dès mai 1991 que les États-Unis dirigeraient les opérations de partage du pouvoir en Irak, en Syrie et chez d'autres anciens alliés soviétiques.
Les néo-conservateurs ont soutenu l'expansion de l'OTAN en Ukraine avant même que cela ne devienne la politique officielle des États-Unis. Ils considéraient l'adhésion de l'Ukraine à l'OTAN comme un facteur clé pour la suprématie régionale et mondiale des États-Unis. En avril 2006, l'historien et commentateur politique Robert Kagan a exposé la justification néoconservatrice de l'expansion de l'OTAN :
"Les Russes et les Chinois ne voient rien de naturel dans [les "révolutions de couleur" de l'ancienne Union soviétique], mais seulement dans les coups d'État soutenus visant à promouvoir l'influence occidentale dans des régions du monde stratégiquement vitales. Ont-ils tort alors ? La libération réussie de l'Ukraine, encouragée et soutenue par les démocraties occidentales, ne pourrait-elle pas être le prélude à son adhésion à l'OTAN et à l'Union européenne - en bref, à l'expansion de l'hégémonie libérale occidentale ?"
Kagan a reconnu les graves conséquences de l'élargissement de l'OTAN. Il a également cité Dmitry Trenin, un expert de la Russie au sein du groupe de réflexion Carnegie, qui a déclaré que "le Kremlin se prépare sérieusement à la 'bataille pour l'Ukraine'".
Sachs affirme qu'après l'effondrement de l'Union soviétique, les États-Unis et la Russie auraient dû chercher à établir une "Ukraine neutre comme état-tampon prudent et comme soupape de sécurité". Au lieu de cela, les néo-conservateurs voulaient maintenir l'"hégémonie" et les Russes sont partis en guerre, en partie pour se défendre et en partie pour poursuivre leurs propres fins.
Robert Kagan a écrit l'article à titre privé lorsque son épouse Victoria Nuland était ambassadrice américaine auprès de l'OTAN pendant l'administration de George W. Bush. J'ai déjà abordé le contexte de l'ancienne combattante déstabilisatrice Nuland et la haine historique des néoconservateurs envers la Russie, mais un bref rappel ne sera pas superflu.
"En tant qu'agent des néoconservateurs, Nuland n'a pas son pareil", déclare Sachs. En plus d'avoir été l'envoyée de Bush à l'OTAN, Nuland a été la "secrétaire d'État adjointe aux affaires européennes et eurasiennes" du président Barack Obama de 2013 à 2017, a contribué à l'éviction du président ukrainien Viktor Ianoukovitch et est aujourd'hui la secrétaire d'État adjointe de l'administration Biden, dirigeant la politique américaine sur le conflit Russie-Ukraine.
Le point de vue néoconservateur repose sur le principe que la supériorité militaire, financière, technologique et économique des États-Unis leur permet de dicter leurs conditions dans toutes les régions du monde. "C'est une position qui contient à la fois une arrogance considérable et un mépris des faits", évalue Sachs.
"Depuis les années 1950, les États-Unis se sont mis en difficulté ou ont perdu dans presque tous les conflits régionaux dans lesquels ils ont été impliqués", souligne le chercheur. Pourtant, dans la "bataille pour l'Ukraine", les néoconservateurs étaient prêts à provoquer une confrontation militaire avec la Russie en élargissant l'alliance militaire, croyant fermement que la Russie serait vaincue par des sanctions économiques et par les armes de l'OTAN.
L'Institute for the Study of War, un groupe de réflexion néoconservateur fondé en 2007 et dirigé par Kimberley Allen Kagan (et soutenu par des entreprises de défense telles que General Dynamics et Raytheon), promet toujours que "l'Ukraine va gagner". Sur l'avancée russe, l'Institut fait un commentaire typique :
"Quel que soit le camp qui tient la ville (de Severodonetsk), l'offensive russe au niveau opérationnel et stratégique est susceptible de culminer, permettant à l'Ukraine de reprendre sa contre-offensive au niveau opérationnel pour repousser les forces russes."
Cependant, malgré le jeu de langage politico-sécuritaire et la guerre de l'information, les faits sur le terrain suggèrent le contraire. Les sanctions économiques occidentales n'ont pas encore eu un grand impact négatif sur la Russie, alors que leur "effet boomerang" sur le reste du monde a été assez important. C'est également l'avis de l'économiste Sachs.
En outre, la capacité de production limitée des États-Unis et les chaînes d'approvisionnement brisées entravent la capacité de Washington à fournir à l'Ukraine des munitions et des armes. La capacité industrielle de la Russie est, bien entendu, supérieure à celle de l'Ukraine. Le PIB de la Russie était environ dix fois supérieur à celui de l'Ukraine avant le conflit et l'Ukraine a maintenant perdu une grande partie de sa capacité industrielle.
L'issue la plus probable des combats actuels est que la Russie va conquérir une grande partie de l'Ukraine. L'Ukraine restante deviendra un pays enclavé et rétréci, sans accès direct à la mer.
La frustration en Europe et aux États-Unis face aux défaites militaires et aux effets inflationnistes de la guerre et des sanctions va s'accroître. Sachs craint que les conséquences soient désastreuses, surtout si un "démagogue de droite promettant de restaurer la gloire militaire fanée des États-Unis par une escalade dangereuse" prend le pouvoir aux États-Unis (ou dans le cas de Donald Trump, revient au pouvoir).
Pour éviter le désastre, Sachs propose une solution raisonnable mais, dans l'état actuel des choses, elle est quelque peu irréaliste: les États-Unis devraient simplement renoncer à leurs "fantasmes néo-conservateurs" et faire le deuil de leur position dominante. En outre, l'OTAN devrait s'engager à renoncer à ses ambitions expansionnistes. En contrepartie, la Russie s'engagerait à faire la paix et le conflit en Ukraine prendrait fin.
"C'est la fin de l'histoire", disait-on à la fin des contes de fées, mais la vraie réalité politique est probablement différente. Il est peu probable que Washington, dominé par les néo-conservateurs, renonce à ses ambitions sans "forcer la paix" de manière active. Le sentiment anti-russe (et anti-européen) des "kaganistes" ne risque pas de s'atténuer tant qu'ils respireront encore.
16:14 Publié dans Actualité, Affaires européennes, Géopolitique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : états-unis, néoconservateurs, néocons, bellicisme, robert kagan, donald kagan, victoria nuland, paul wolfowitz, ukraine, russie, europe, affaires européennes, politique internationale, géopolitique | | del.icio.us | | Digg | Facebook
samedi, 02 juillet 2022
Le syndrome Churchill et la catastrophique guerre occidentale
Le syndrome Churchill et la catastrophique guerre occidentale
Nicolas Bonnal
On a vu le niveau de débilité, d’incompétence et même d’incorrection, vestimentaire ou autre, des leaders du G7. Macron est en perdition, Trudeau aussi et Biden va prendre une raclée, n’en déplaise aux catastrophistes. Mais mon sujet est le syndrome Churchill : Churchill est l’homme politique le plus nul possible (voir le livre de John Charmley) sur le plan pratique, et qui ne se sentait à l’aise que dans des guerres totales et d’extermination contre les Allemands, qui étaient la cible de l’époque. Or sur ordre des néocons beaucoup plus inspirés par Churchill que par Strauss les hommes politiques nuls ou même obscènes que nous avons en Occident veulent se lancer dans une guerre éternelle de type orwellien contre la Russie ; dans l’espoir que ces chefs de guerre insensés seront célébrés par des foules toujours plus abruties. Ils oublient que Churchill fut jeté dehors par ses électeurs british en 1945, preuve sans doute que la satisfaction n’était pas à la hauteur des aspirations du chéri des journalistes néocons.
On va citer le capitaine Grenfell, ami de John Buchan, sur les buts aberrants de Churchill, car ce dernier se met à déifier le stalinisme pour écraser l’hitlérisme (qui lui a proposé dix fois la paix). Je cite la traduction de mes amis du Saker francophone :
« Mais, en supposant que la suppression par la force des tyrannies dans des pays étrangers constituât le devoir des Britanniques, pourquoi trouvait-on une autre tyrannie, partenaire des Britanniques dans ce processus? La tyrannie communiste, en Russie, était pire que la tyrannie nazie en Allemagne ; les conditions générales de vie du peuple russe était largement inférieures à celles des Allemands ; le travail de forçat en Russie était employé à grande échelle, en comparaison à la même pratique sur le sol allemand, la cruauté n'y avait rien à envier à celle du côté allemand, et de nombreux observateurs la décrivent même comme bien plus importante. La technique répugnante des purges, des interrogatoires brutaux amenant à "confession", et l'espionnage domestique généralisé était déjà à l'œuvre en Russie depuis des années avant que Hitler n'introduise ces mêmes méthodes en Allemagne, qu'il copia probablement de l'exemple russe. Mais M. Churchill encensait la Russie comme allié des plus bienvenus, quand elle se trouva embarquée dans la guerre. »
Plus loin Grenfell souligne le bilan effrayant de cette guerre pour l’Angleterre et son empire (qui n’a pas été détruit par le nazisme mais par la guerre contre le nazisme) :
« Il s'était montré prêt à tout sacrifier pour parvenir à cette victoire, et les sacrifices consentis par lui laissèrent ses co-vainqueurs britanniques à moitié ruinés, rationnés, emprisonnés financièrement dans le camp de concentration de leur île, assistant à la désintégration de leur Empire, leur propre pays occupé par des soldats américains, et leur économie nationale dépendant de la charité étasunienne. Tout cela pour quoi ? Pour que les Allemands se vissent désarmés de manière permanente? À peine trois ou quatre années passées, nous suppliions les Allemands de se réarmer aussi rapidement que possible. »
Grenfell a tout résumé là : on a détruit le pays et l’Europe pour rien, pour se retrouver avec une URSS plus forte que jamais. Puis avec une Europe anglo-américaine plus belliciste que jamais…
Ce n’est pas un hasard si Orwell a écrit son 1984 pendant cette triste époque. Voyez l’enfant aux cheveux verts de Losey ; on est passé de l’Angleterre edwardienne maîtresse du monde vers 1900 à un pays prolétarisé et clochardisé y compris sur le plan culturel et sociétal. Et c’est Churchill et sa rage guerrière qui ont précipité tout cela. Mais puisqu’on vous dit qu’il a sauvé le monde et la paix…
Les nazis volaient des territoires ? Grenfell, qui n’est pas russophile pour un sou, remarque justement (et cela explique la claque de Kaliningrad…) :
« Pourtant, à Yalta, il accepta que des centaines de milliers de kilomètres carrés de territoire polonais (sans parler des territoires lettons, lituaniens ou estoniens) fussent accordés, sans l'aval des habitants, aux gâteurs d'âme, en désaccord flagrant de la Charte Atlantique que lui-même et le président des USA avaient claironné au monde au cours de la même guerre, et en déni flagrant de la déclaration de guerre britannique contre l'Allemagne de 1939, qui précisément garantissait l'inviolabilité du territoire polonais. En outre, les compensations accordées aux Polonais sous forme de territoire d'Allemagne orientale, et l'allocation de la moitié du reste de l'Allemagne à une occupation russe, eurent pour effet de supprimer la zone tampon historique entre Moscou et les pays bordant l'Atlantique. »
Et Grenfell d’ajouter justement :
« Aucune raison réaliste n'existait de considérer l'alliance de la Russie comme loyale et digne de confiance. »
Sur Roosevelt, Grenfell rejoint les libertariens américains :
« On peut également admettre que le président Roosevelt, à cette époque, était dans un état d'hallucination fascinée quant à la pureté virginale des motivations du maréchal Staline… »
Revenons à la situation présente : nos « élites » (ouaf ouaf) s’inspirent d’un homme qui fut prêt à tout pour gagner une guerre déshonorante (un million de civils allemands carbonisés sous les bombes) et déplorable sur le plan des résultats.
Comprenez donc qu’ils vous affameront, vous priveront d’eau (cf. le ministre teuton), d’électricité, de bagnole, de liberté (mais pas de vaccin !), et qu’ils continueront dans leur aberration guerrière jusqu’au bout. Tout sera bon pour exterminer la Russie qui a remplacé l’Allemagne. Mais restons optimistes : le peuple se réveillera !
Source:
Grenfell – Haine inconditionnelle (lesakerfrancophone.fr)
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mardi, 31 mai 2022
Remarques fatiguées sur l’infatigable puissance maléfique américaine
Remarques fatiguées sur l’infatigable puissance maléfique américaine
Nicolas Bonnal
Biden et sa folle administration (on se croirait dans un Mel Brooks) veut faire la guerre à la Chine et à la Russie, anéantir l’Europe vassale et terroriser le reste du monde. Ces Amerloques sont infatigables. Ils me font parfois penser à Tom Cruise dans Collatéral, tueur enragé qui doit exterminer tout un petit monde pendant une nuit disco et qui ne s’arrête que faute de munitions. Là il s’assoit (on est dans le métro) et il meurt. Qui viendra VRAIMENT à bout des munitions américaines ? Ce pays empoisonne le monde depuis deux siècles, qu’il soit aux ordres des Illuminati ou des prédateurs extraterrestres (cf. Castaneda) et ce sur le plan énergétique, militaire, juridique, militaire ou culturel. Ce pays qui n’en est pas un (Etats-Unis d’Amérique ?) est une nuisance, il est là pour mettre fin au monde ; des dizaines de grands esprits l’ont dit, y compris américains (de Poe à Miller en passant par London ou Sinclair), chacun à leur manière ; mais c’est Dostoïevski qui remarque que l’Amérique jouit d’un charisme extraordinaire digne d’Oz ; elle emmène le monde à sa suite c’est-à-dire à sa destruction ontologique et spirituelle, comme le charmeur de Hamelin emmène ses rats.
Dostoïevski évoquant des « libéraux russes » :
« Il a légué toute son immense fortune aux fabriques et aux sciences positives, son squelette à l’académie de la ville où il résidait, et sa peau pour faire un tambour, à condition que nuit et jour on exécuterait sur ce tambour l’hymne national de l’Amérique. Hélas ! nous sommes des pygmées comparativement aux citoyens des États-Unis ; la Russie est un jeu de la nature et non de l’esprit. »
Dostoïevski encore :
« Loin de là, dès le début, nous avions posé en principe, Kiriloff et moi, que nous autres Russes, nous étions vis-à-vis des Américains comme de petits enfants, et qu’il fallait être né en Amérique ou du moins y avoir vécu de longues années pour se trouver au niveau de ce peuple. Que vous dirai-je ? Quand, pour un objet d’un kopek, on nous demandait un dollar, nous payions non seulement avec plaisir, mais même avec enthousiasme. Nous admirions tout : le spiritisme, la loi de Lynch, les revolvers, les vagabonds. »
Tout est dit, et il n’y a rien à faire : si le plus grand écrivain du monde le dit…Les cons adoreront toujours l’Amérique, ils la diviniseront. Et si l’Amérique a donné l’ordre à Ursula (qui d’ailleurs est Américaine) d’exterminer les Européens, elle le fera, et tous les vaccinés Pfizer-Netflix seront d’accord.
Le problème est que l’Amérique restera nocive même si elle prend une branlée en Ukraine après en avoir pris une en Afghanistan et ailleurs : car cette entité n’est pas un empire mais une matrice. Et au temps de l’intelligence ou plutôt de l’inintelligence artificielle cette matrice nous renvoie comme elle veut à l’âge de pierre (dixit Kilgore). L’anéantissement culturel occidental est fait sur ordre et Macron est là pour en terminer avec la France, ce territoire repeuplé par un peuple nouveau, toujours très occupé et adorant l’être.
Si vous pensez que j’exagère, lisez les grands historiens libertariens Beard, Flynn, Denson, Raico ou Shaffer Butler. Sur cet appétit de guerre humanitaire et cette imbécillité ontologique, lisez aussi le brillant historien Howard Zinn. Il rappelle dans son histoire populaire de l’Amérique :
« La guerre avait été menée par un gouvernement dont les principaux bénéficiaires - en dépit d'un certain nombre de réformes - étaient les membres de l'élite fortunée de la nation. L’alliance tissée entre le gouvernement et les milieux d'affaires les plus influents remontait aux premières mesures présentées au Congrès par Alexander Hamilton, immédiatement après la guerre d'Indépendance. Quand la Seconde Guerre mondiale survint, cette alliance s'était développée et consolidée (p. 472). »
Depuis Hamilton et la guerre d’indépendance menée par des marchands et des propriétaires esclavagistes (ancêtres de Leyen d’ailleurs), les jeux sont faits. Zinn (photo) ajoute après Tocqueville que l’Amérique va adorer la guerre :
« Illustration d'une vieille leçon apprise par les gouvernements : la guerre règle les problèmes de maintien de l'ordre. Charles Wilson, président de la General Electric Corporation, fut si satisfait de la situation en temps de guerre qu'il proposait de perpétuer l'alliance du militaire et de l'économique afin de pratiquer une « économie de guerre permanente ».
Ralph Raico a parlé de l’épouvantable rôle de Truman, rôle souligné ensuite par Kennan en personne (rappelons que les démocrates sont toujours plus dangereux que les républicains, y compris, rappelle Zinn, quand il s’agit de baisser jusqu’à extinction les impôts des oligarques et milliardaires) :
« Et c'est ce qui eut lieu. Lorsque, immédiatement après la guerre, l'opinion publique américaine, lassée par les combats, sembla favorable à la démobilisation et au désarmement, l'administration Truman (Roosevelt était mort en avril 1945) travailla à créer une atmosphère de crise et de guerre froide. Certes, la rivalité avec l'Union soviétique était bien réelle - ce pays, sorti du conflit avec une économie effondrée et vingt millions de morts, était en train de faire un incroyable retour en reconstruisant son industrie et en confortant sa puissance militaire. Pourtant, l'administration Truman préférait présenter l'Union soviétique non comme un simple rival mais comme une menace immédiate. »
La guerre sert à faire marcher, même mal, l’économie ; mais la guerre sert aussi à entretenir la peur, qu’elle soit contre le climat, la Russie, la Chine ou le « terrorisme islamique » ; Zinn ajoute :
« Par une série d'actions, elle instaura un climat de peur - et une véritable hystérie vis-à-vis du communisme - qui entraîna l'escalade progressive du budget de l'armée et la stimulation de l'économie nationale par le biais des commandes militaires. Cette combinaison permettait d'engager des actions plus agressives à l'étranger et plus répressives à l'intérieur du pays (p. 482). »
Parfois on va un peu trop loin (on est tombé sur un os en Ukraine, quoiqu’en pense les généraux Gamelin ou le colonel yoga – ou Yoda ?…) ; alors le public râle un peu et on fait marche arrière :
« En juillet de la même année, un sondage évaluant la confiance du public à l'égard du gouvernement entre 1966 et 1975 révélait que la confiance en r armée était passée de 62 % à 29 %, la confiance dans le monde des affaires de 55 % à 18 % et la confiance envers le président et le Congrès de 42 % à 13 %. Peu après, un autre sondage révélait que « 65 % des Américains [s'opposaient] à l'idée d'une aide militaire américaine à l'étranger parce qu'ils [pensaient] qu'elle permet aux dictateurs d'opprimer leurs populations (p. 625). »
Rassurez-vous, ce peuple bigarré américain qui est par excellence le peuple nouveau mondialisé-remixé-concassé a aussi une mémoire de poisson rouge. Alors on remet ça, et on en est à 200 guerres (Oliver Stone) menées par le démocratique Oncle Sam. Zinn cite des dizaines d’opérations militaires en Amérique du sud et en Asie (pensons au Japon) dès le dix-neuvième siècle : car on est là pour emmerder le monde, pour le « corriger » dans tous les sens du terme. Oh, cette scène de Shining quand le père sévère explique dans sa pissotière comment il a corrigé ses petites filles…
On termine avec Orwell, qui explique génialement la guerre interminable :
« La guerre, si nous la jugeons sur le modèle des guerres antérieures, est une simple imposture. Elle ressemble aux batailles entre certains ruminants dont les cornes sont plantées à un angle tel qu’ils sont incapables de se blesser l’un l’autre. Mais, bien qu’irréelle, elle n’est pas sans signification. Elle dévore le surplus des produits de consommation et elle aide à préserver l’atmosphère mentale spéciale dont a besoin une société hiérarchisée. »
Pour l’élite totalitaire américaine comme pour l’élite totalitaire européenne, la guerre est une affaire intérieure, destinée à faire plier la masse :
« Ainsi qu’on le verra, la guerre est une affaire purement intérieure. Anciennement, les groupes dirigeants de tous les pays, bien qu’il leur fût possible de reconnaître leur intérêt commun et, par conséquent, de limiter les dégâts de la guerre, luttaient réellement les uns contre les autres, et celui qui était victorieux pillait toujours le vaincu. De nos jours, ils ne luttent pas du tout les uns contre les autres. La guerre est engagée par chaque groupe dirigeant contre ses propres sujets et l’objet de la guerre n’est pas de faire ou d’empêcher des conquêtes de territoires, mais de maintenir intacte la structure de la société. »
Orwell ajoute même qu’on entre dans un état de cauchemar permanent (pensez à leurs guerres contre l’humain polluant, le pétrole, le gaz, le russe et le virus, etc.) :
« Le mot « guerre », lui-même, est devenu erroné. Il serait probablement plus exact de dire qu’en devenant continue, la guerre a cessé d’exister (p. 243). »
Tu l’as voulu, Georges Dandin…
Références:
https://inventin.lautre.net/livres/Orwell-1984.pdf
https://jugurtha.noblogs.org/files/2018/05/HowardZinn-His...
https://maxencecaron.fr/wp-content/uploads/2010/08/Les-po...
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jeudi, 19 mai 2022
George F. Kennan ou Leo Strauss?
Matteo Luca Andriola:
George F. Kennan ou Leo Strauss?
Source: https://novaresistencia.org/2022/05/16/george-f-kennan-ou-leo-strauss/
Des années 1950 à 1997, les États-Unis ont pratiqué une politique d'endiguement à l'encontre de l'URSS et de son successeur, la Russie. La stratégie consistait à limiter l'influence de l'adversaire sans l'affronter directement. C'était la prescription de George F. Kennan. À partir des années 1990, cependant, l'influence néo-conservatrice au sein du département d'État américain a commencé à croître, lorsque des disciples de Leo Strauss ont accédé à des postes importants, favorisant l'expansion de l'OTAN et un encerclement de plus en plus serré contre la Russie.
"...l'expansion de l'OTAN serait l'erreur la plus fatale de la politique américaine de toute la période de l'après-guerre froide. On peut s'attendre à ce qu'une telle décision enflamme les tendances nationalistes, anti-occidentales et militaristes de l'opinion publique russe ; à ce qu'elle ait un effet négatif sur le développement de la démocratie russe ; à ce qu'elle ramène l'atmosphère de guerre froide dans les relations Est-Ouest ; et à ce qu'elle pousse la politique étrangère russe dans des directions résolument contraires à notre sensibilité..."
[Extrait de George F. Kennan, "A Fateful Error", New York Times, 5 février 1997].
La personne qui dit ces choses est George F. Kennan (1904-2005), connu comme "le père de la politique d'endiguement", une figure clé de la période émergente de la guerre froide, dont les écrits ont inspiré la doctrine Truman et la politique étrangère américaine visant à "contenir" l'Union soviétique. En effet, en 1947, c'est lui qui a dit :
"...l'élément principal de la politique américaine à l'égard de l'Union soviétique doit être un long, patient, mais ferme et vigilant endiguement des tendances expansionnistes russes... La pression soviétique contre les institutions libres du monde occidental est quelque chose qui peut être contenu par l'application habile et vigilante de contre-mesures qui répondent aux manœuvres politiques des Soviétiques." [George F. Kennan, "The Sources of Soviet Conduct", Foreign Affairs, XXV, juillet 1947, pp. 575, 576].
Qu'est-ce qui a changé depuis 1997 ? Pourquoi les propos d'un spécialiste aussi respecté de la géopolitique et de la géostratégie militaire américaines, au même titre que Zbigniew Brzezinski et Henry Kissinger, ont-ils été ignorés ? Car entre-temps, un lobby, celui des "straussiens", a prévalu dans l'establishment américain. Qui sont-ils ?
Le philosophe allemand d'origine juive, Leo Strauss, qui s'est réfugié aux États-Unis à l'arrivée des nazis au pouvoir, est devenu professeur de philosophie à l'université de Chicago et, à partir de réflexions platoniciennes et d'une conception hobbesienne du droit naturel, a donné naissance à une école de pensée qui est encore aujourd'hui hégémonique dans la politique américaine, chez les républicains et les démocrates, qui est l'école néo-con. Un grand groupe de disciples se forme autour de Strauss, d'abord tous de gauche.
Le groupe politique, une sorte de lobby, a été fondé en 1972, un an avant la mort du philosophe. Ils faisaient tous partie de l'équipe du sénateur démocrate Henry "Scoop" Jackson, en particulier Elliott Abrams, Richard Perle et Paul Wolfowitz. Ils étaient tous liés à un groupe de journalistes trotskystes, également juifs, qui se sont rencontrés au City College de New York et ont publié le magazine Commentary. On les appelait "les intellectuels de New York". Tant les straussiens que les intellectuels new-yorkais étaient étroitement liés à la CIA, mais aussi, grâce au beau-père de Perle, Albert Wohlstetter (un stratège militaire américain), à la Rand Corporation, le think tank du complexe militaro-industriel (celui dénoncé par Manlio Dinucci avant d'être censuré par Il Manifesto). Beaucoup de ces jeunes gens se sont mariés, jusqu'à former un groupe compact d'une centaine de personnes, toutes issues de la classe moyenne supérieure libérale juive américaine.
En plein scandale du Watergate (1974), le clan rédige et adopte l'"amendement Jackson-Vanik", qui oblige l'Union soviétique à autoriser l'émigration de la population juive vers Israël sous la menace de sanctions économiques. C'était son acte fondateur. En 1976, Wolfowitz est l'un des architectes de l'équipe B, chargée par le président Gerald Ford d'évaluer la menace soviétique. Le résultat serait d'accuser l'URSS de vouloir acquérir une "hégémonie mondiale", ce qui conduirait l'establishment américain à mettre en veilleuse la politique élaborée par George F. Kennan sur l'endiguement, mais à affronter Moscou, à l'épuiser et à sauver le "monde libre", comme ils l'ont fait, en l'occurrence, avec la guerre en Afghanistan.
Les "Straussiens" et les intellectuels new-yorkais, tous de gauche, se sont mis au service des présidents de droite Ronald Reagan et Bush père, pour être momentanément évincés du pouvoir pendant le mandat de Bill Clinton, et ont ainsi commencé à envahir les think tanks de Washington, pour consolider progressivement une hégémonie visant à donner aux États-Unis une vision belliciste des relations internationales.
En effet, c'est en 1992 que William Kristol et Robert Kagan (photo) (le mari de Victoria Nuland) publient un article dans Foreign Affairs dans lequel ils déplorent la politique étrangère timide du président Clinton et appellent à un renouveau de "l'hégémonie désintéressée des Etats-Unis" ; c'est en 1993 que l'American Enterprise Institute, dirigé par les "straussiens" Schmitt, Shulsky et Wolfowitz, avec lesquels Francis Fukuyama sera lié, publie le Project for a New American Century. Ce sera le "straussien" Richard Perle qui servira de conseiller en 1994 au leader islamiste Alija Izetbebovič en Bosnie-Herzégovine pour faciliter l'entrée de militants djihadistes d'Afghanistan liés au réseau Al-Qaeda pour combattre la République fédérale de Yougoslavie du leader du Parti socialiste de Serbie Slobodan Milošević. En 1996, les exposants "straussiens" du Projet pour un nouveau siècle américain, tels que Richard Perle, Douglas Feith et David Wurmser, ont rédigé une étude au sein de l'Institute for Advanced Strategic and Policy Studies pour le compte du nouveau Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu du Likoud, qui recommandait l'élimination du leader palestinien Yasser Arafat, l'annexion des territoires palestiniens et une guerre contre l'Irak pour déplacer ensuite les Palestiniens.
Le groupe s'est également appuyé sur les réflexions de Ze'ev Jabotinsky, fondateur du "sionisme révisionniste", une variante nationaliste du sionisme, dont le père de Netanyahu était le secrétaire spécial et qui a été formé en Italie par l'armée mussolinienne, évidemment dans un but anti-britannique. Le même groupe a dépensé de l'argent pour la candidature de George W. Bush, publiant un célèbre rapport, Rebuilding America's Defences, qui appelait à une catastrophe de type Pearl Harbor, devant servir de prétexte pour pousser les États-Unis dans une guerre pour l'hégémonie mondiale: exactement les termes utilisés le 11 septembre 2001 par le secrétaire à la Défense Donald Rumsfeld, lui-même un "straussien" et membre du Project for a New American Century.
Comme nous le disions, le lobby "straussien" ne cherche que le pouvoir, et s'est tourné vers les démocrates pour favoriser d'abord Barack Obama - avec Hillary Clinton comme principal représentant des faucons - et aujourd'hui Joe Biden. On comprend pourquoi les propos de George F. Kennan, durs dans les années 1940 mais modérés et sensés dans les années 1990, étaient dictés par la Realpolitik: il était logique, dans une perspective atlantiste et libérale, de s'opposer à l'Union soviétique et de la contenir, l'un des objectifs de la géopolitique américaine depuis l'époque de Nicholas J. Spykman, mais quel était l'intérêt d'étendre l'OTAN vers l'est et de provoquer les Russes, au risque d'enflammer leur chauvinisme ? N'ont-ils pas été battus en 1989/1991 ?
Eh bien, on peut constater que le lobby néocon "straussien", qui a aujourd'hui l'hégémonie de l'establishment américain - et je dirais européen - est d'un avis différent. Ce qui prévaut aujourd'hui au sein de l'establishment, ce n'est pas la Realpolitik et le réalisme à la George J. Kennan, mais le projet unipolaire américain, esquissé dans les années 1970, hégémonique dans les années 1990, mais qui est entré en crise avec l'avènement de nouvelles puissances émergentes, de la Russie de Vladimir Poutine à la Chine populaire de Xi Jinping, et qui voudrait s'affirmer à tout prix, même avec une troisième guerre mondiale.
18:25 Publié dans Actualité, Géopolitique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : straussiens, néocons, néoconservateurs, leo strauss, georges f kennan, états-unis, bellicisme, bellicisme américaine, politique internationales, relations internationales | | del.icio.us | | Digg | Facebook
mercredi, 18 mai 2022
L'ingérence américaine et la haine historique de la Russie
L'ingérence américaine et la haine historique de la Russie
Markku Siira
Source: https://markkusiira.com/2022/05/05/amerikkalaismietteita-ja-historiallista-venaja-vihaa/
Le réalisateur Oliver Stone se demande sur Facebook "si les États-Unis préparent le terrain pour une explosion nucléaire de faible puissance quelque part dans le Donbass qui tuerait des milliers d'Ukrainiens".
Une opération sous faux drapeau aussi choquante est possible, car les médias occidentaux, attelés à la guerre de l'information, ont déjà entraîné de nombreuses personnes à n'imaginer que le pire de la Russie. Le bouc émissaire a déjà été choisi à l'avance, Poutine, que l'on a traité de fou, sans tenir compte de qui pourrait réellement mener une attaque aussi tragique.
"Il faudrait probablement quelques jours pour découvrir la vérité, mais la vérité n'a pas d'importance", dit Stone. Les perceptions sont, le cinéaste le sait, et admet que les États-Unis "mènent une guerre des images avec une grande habileté et une force éprouvée", saturant les chaînes CNN et Fox et les pays satellites de Washington en Europe et en Asie d'une manière que même Stone n'a jamais vue auparavant.
Une frappe nucléaire choquante nous rapprocherait un peu plus du désir des États-Unis de renverser le régime russe actuel et de le remplacer par un régime fantoche pro-occidental dirigé par un "nouvel Eltsine". Plus important encore, cela isolerait également la Chine de la Russie.
Comme je l'ai déjà affirmé, la Chine est la prochaine cible de l'Occident si la Russie tombe. C'est le scénario de rêve des fauteurs de guerre néo-conservateurs américains, conçu pour créer ce qu'ils considèrent comme une version améliorée et actualisée de "l'ordre international fondé sur des règles".
La superpuissance anti-russe en cours nous dit tout ce que nous devons savoir sur les objectifs et les ambitions hégémoniques des néoconservateurs. Les "kaganistes" (du nom du belliciste Robert Kagan) agissant au nom de Biden ont clairement fait savoir qu'ils mènent une guerre contre la Russie, avec la crise ukrainienne comme mandataire, dans le but d'épuiser la Russie et d'éliminer Poutine.
Un événement sous faux drapeau n'est pas le seul moyen de déclencher une guerre majeure. L'expansion de l'OTAN en Finlande et en Suède en est une autre, a observé Paul Craig Roberts. Il affirme que "Washington ne se contente pas de faire pression sur les gouvernements pour qu'ils demandent l'adhésion à l'OTAN, mais qu'il soudoie également des fonctionnaires suédois et finlandais pour qu'ils le fassent."
Considérons un instant cet élargissement de l'OTAN. L'une des raisons de l'intervention de la Russie en Ukraine est le refus obstiné de Washington et de l'OTAN de prendre au sérieux les préoccupations de la Russie en matière de sécurité. L'adhésion de l'Ukraine à l'OTAN constitue une ligne rouge pour la Russie, alors pourquoi l'a-t-on favorisée? Alors que l'intervention occidentale en Ukraine menace de faire dérailler le conflit, pourquoi verser de l'huile sur le feu en faisant entrer la Finlande et la Suède dans l'OTAN?
Pour l'instant, la Scandinavie et la Baltique sont dénucléarisées. L'adhésion de la Finlande à l'alliance militaire amènerait "plus d'OTAN" à la frontière russe et le Kremlin a déclaré qu'une telle évolution était inacceptable. "En accumulant les provocations, Washington et l'OTAN intensifient un conflit qui est délibérément créé", critique M. Roberts.
L'auteur américain estime qu'il est "irresponsable pour la Finlande et la Suède de déstabiliser davantage la situation en rejoignant l'OTAN". Même l'ancien président russe, Dmitri Medvedev, de l'aile libérale du régime, a clairement indiqué que "l'adhésion à l'OTAN signifierait la fin des États baltes dénucléarisés".
Le renforcement de la présence de l'OTAN aux frontières de la Russie crée un déséquilibre que la Russie devra corriger d'une manière ou d'une autre. "Comment est-il possible que les gouvernements finlandais et suédois croient que l'adhésion à l'OTAN renforcera la sécurité alors que le résultat est que des armes nucléaires sont dirigées contre eux?" demande Roberts avec étonnement.
La Finlande et la Suède ne risquent pas d'être attaquées par la Russie si elles restent en dehors de l'OTAN. Personne de sensé ne verrait dans l'adhésion de la Finlande et de la Suède à l'OTAN autre chose qu'une démarche imprudente qui accroîtra l'instabilité sécuritaire dans la région.
La Finlande, comme la Suisse, a bénéficié de sa neutralité passée, mais il semble maintenant que les longues années du président Sauli Niinistö à promouvoir les intérêts occidentaux commencent à porter des fruits et des fruits radioactifs. La Finlande officielle semble prête à devenir la ligne de front de l'OTAN-Occident contre la Russie.
Mais revenons aux néo-conservateurs américains qui se déchaînent maintenant dans l'administration Biden. Au cœur des fantasmes de suprématie des néo-conservateurs américains semble se trouver une idéologie extrémiste expansionniste.
L'empire mondial américain s'étend vers la Russie et la Chine, car l'élite dirigeante de l'Occident ne tolère aucun rival et veut dominer seule la planète entière et ses ressources. Pour atteindre cet objectif, le cartel des banques centrales et ses sbires, les "kaganistes" de l'administration Biden, sont prêts à détruire l'Europe en même temps.
Selon une conversation ayant fait l'objet d'une fuite anonyme du département d'État américain, la vétérane de la déstabilisation de l'Ukraine, la sous-secrétaire d'État aux affaires politiques Victoria Nuland, déteste les Russes plus que les Européens.
Il n'y a rien de nouveau en soi. Les Juifs influents d'origine est-européenne vivant en Amérique, qui, dans les années 1960, sont passés de la gauche trotskiste anti-stalinienne aux deux camps, le démocrate et le républicain, ont un profond ressentiment historique à l'égard des Russes et des Européens.
Il est donc plutôt désagréable de voir les mêmes Européens que ces néocons méprisent soutenir avec enthousiasme une guerre hybride contre la Russie qui, en cas de succès, détruirait également l'Europe.
Même la Finlande, qui est territorialement plus grande que ne l'est son poids réel, est impliquée dans ce projet délirant des anciens trotskistes, et le sorcier occidental toujours prêt Petteri Orpo du Parti de la coalition a déjà laissé entendre que "la Finlande, en tant que membre de l'alliance de défense de l'OTAN, ne devrait pas refuser catégoriquement d'accueillir des armes nucléaires sur son territoire".
Malgré ce que les médias du pouvoir local essaient de nous dire, la Russie a très longtemps fait confiance à la raison, à la négociation et à la bonne volonté dans sa politique, même si le Kremlin n'a reçu aucune réponse à sa diplomatie de la part de l'Occident.
Même l'opération militaire limitée en Ukraine n'a pas réussi à convaincre l'Occident d'abandonner sa politique de provocation. "Il semble que Washington poursuivra ses provocations jusqu'à ce que la limite fatale soit franchie", estime également M. Roberts.
18:36 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, finlande, suède, mer baltique, états-unis, bellicisme, bellicisme américain, néoconservateurs, kaganistes, politique internationale, europe, affaires européennes | | del.icio.us | | Digg | Facebook
Les philosophes de cour de l'Alliance belliciste
Les philosophes de cour de l'Alliance belliciste
Markku Siira
Source: https://markkusiira.com/2022/05/11/hyokkaysliiton-hovifilosofit/
On a parfois spéculé sur les penseurs qui sont des "philosophes de Poutine" dont les opinions ont contribué à construire la vision géopolitique du président russe et l'ont "inspiré à envahir l'Ukraine" (les noms de Vladislav Surkov, Ivan Ilyin et Aleksandr Douguine ont été évoqués, par exemple).
Mais pourquoi se limiter à examiner les penseurs qui ont pu inspirer Poutine, alors que les causes du conflit ukrainien sont plus complexes que les affirmations unilatérales des médias occidentaux. Après tout, Poutine a déclaré que l'"opération spéciale" qui a débuté en février était due à l'expansion continue de l'"alliance agressive", dite de l'Atlantique Nord, soit l'OTAN, en direction du territoire russe.
Alors, qu'est-ce qui a inspiré l'OTAN à agir de la sorte ? Qui étaient les penseurs derrière les stratégies de l'alliance militaire occidentale qui ont ouvert la voie à un conflit qui a tué des milliers de personnes, déplacé des millions d'autres et fait planer la perspective d'une guerre nucléaire, tout comme dans l'ancienne guerre froide ?
Comme pour les stratégies du Kremlin, il est vraiment impossible de lier toute stratégie de l'Occident de l'OTAN à une philosophie particulière. Il est toutefois possible que les positions théoriques et les arguments idéologiques de certains penseurs aient inspiré, légitimé ou motivé les acteurs de l'alliance militaire dirigée par les États-Unis.
Pour le professeur Santiago Zabala (photo), au moins quatre philosophes occidentaux peuvent nous permettre de mieux comprendre comment s'est déroulé le conflit actuel en Ukraine. Zabala met dans le même sac Jürgen Habermas, Francis Fukuyama, Michael Walzer et Bernard Henri-Lévy.
La principale notion qui unit ces philosophes de l'Occident collectif est, selon Zabala, "la croyance que le rationalisme est une structure universelle enracinée dans l'âme de toute l'humanité - ils attribuent une universalité à leurs idées, mais en réalité ils ne font que promouvoir des idéaux strictement occidentaux".
Zabala estime que c'est le philosophe allemand Jürgen Habermas qui peut nous aider à "comprendre les actions et les motivations de l'OTAN à l'approche de la guerre en Ukraine".
Habermas s'est opposé à l'invasion de l'Irak en 2003, mais a soutenu le bombardement de la Yougoslavie par l'OTAN en 1999 sans l'approbation de l'ONU (deux actes barbares tout aussi inacceptables d'un point de vue juridique).
Dans le contexte de la guerre en Ukraine, il a appelé à un "compromis qui sauverait la face des deux parties" en raison de la menace nucléaire. Ces positions apparemment contradictoires montrent que la philosophie de Harbemas est basée sur "la réserve anti-universaliste et le pragmatisme".
Malgré cela, Zabala considère qu'Habermas "promeut un modèle de démocratie sociale qui transcende les États-nations - la démocratie cosmopolite comme ordre politique mondial".
Au cœur du "pragmatisme et du rationalisme guidé par la réflexion historique" de Habermas demeure "la croyance en l'universalité et la supériorité de la démocratie libérale occidentale et de sa perspective individualiste".
Malgré le relativisme de la pensée de Habermas, il s'appuie sur l'idée d'un universalisme centré sur l'Occident, c'est-à-dire qu'il soutient lui aussi un "ordre international fondé sur des règles" dirigé par les États-Unis, qui doit déterminer "qui est dedans et qui est dehors", qui a raison et qui a tort.
Zabala affirme que cette façon de penser est "à bien des égards la philosophie et la vision du monde de l'Occident et de l'OTAN - une vision du monde qui a historiquement eu tendance à s'imposer par l'usage de la force".
Un autre penseur qui peut expliquer les motifs et l'état d'esprit qui sous-tendent les stratégies de l'OTAN au cours des dernières décennies est le philosophe, économiste politique et auteur américain Francis Fukuyama.
Selon Fukuyama, le modèle atlantique a prouvé sa supériorité après la guerre froide, lorsque la démocratie libérale occidentale avait vaincu l'Union soviétique. Pour Fukuyama, c'était la "fin de l'histoire" - la fin de l'évolution idéologique de l'humanité.
Pour le penseur américain, la démocratie libérale occidentale est "la dernière et la meilleure forme de gouvernement humain que l'on puisse espérer". Fidèle à ses idées, Fukuyama a soutenu l'invasion brutale de l'Irak par l'administration Bush et la soi-disant "démocratisation" en 2003.
Bien que Fukuyama ait récemment reconnu que les démocraties occidentales peuvent également dégénérer - régresser jusqu'à un certain point - son espoir de voir le libéralisme triompher a été ravivé par l'escalade de la crise ukrainienne. L'administration Biden semble poursuivre les lignes néo-conservatrices de l'ère Bush.
Fukuyama craint que si "les États-Unis et le reste de l'Occident" n'empêchent pas "la Russie, la Chine et d'autres puissances non démocratiques" de dominer le monde, nous pourrions être confrontés à la "fin de l'histoire", à la fin de l'ordre dirigé par l'Occident. C'est pourquoi il a fait l'éloge des "projets de la Finlande et de la Suède de rejoindre l'OTAN en réponse à l'invasion de l'Ukraine par Poutine".
Manifestement, Fukuyama ne considère pas l'expansion de l'OTAN dans les années 1990 et 2000 comme une violation des engagements pris par l'Occident envers la Russie après l'effondrement de l'Union soviétique. Il ne reconnaît pas non plus le fait que la Russie était depuis longtemps convaincue que de telles actions conduiraient à la confrontation actuelle.
Tout cela indique à Zabala que Fukuyama, en tant que philosophe de cour, défenseur de l'éthos libéral de l'Occident, fait "partie de la croisade idéologique pour l'alliance militaire et peut-être même l'un de ses architectes". Sa réflexion peut donc nous aider à comprendre comment cette situation s'est produite.
Le troisième penseur présenté par Zabala est le philosophe politique américain et expert de la moralité de la guerre, Michael Walzer. Selon Waltzer, la guerre ukrainienne démontre une fois de plus la valeur durable de la théorie de la "guerre juste".
Cette théorie a été utilisée, du moins dans une certaine mesure, pour justifier de nombreuses interventions douteuses de l'OTAN au cours des dernières décennies. Walzer a précédemment soutenu les arguments de "guerre juste" d'Israël contre la Palestine, ce qui a suscité de nombreuses critiques, mais il préconise désormais d'armer l'Ukraine plutôt que de chercher des solutions diplomatiques au conflit.
"Toute issue maintenant passe par une victoire militaire", a récemment déclaré Walzer. Selon M. Zabala, sa vision du conflit ukrainien comme "une guerre juste qui doit être menée" peut nous aider à comprendre comment l'OTAN et ses alliés occidentaux abordent la lutte en cours. Personnellement, je considère que les idées de Walzer découlent de rancunes historiques envers la Russie.
Les idées de Habermas, Fukuyama et Walzer peuvent bien refléter l'approche et le rôle de l'OTAN dans le conflit en cours, mais les idées du belliciste français Bernard-Henri Lévy (BHL en abrégé, comme il est communément appelé) expliquent peut-être le mieux la position de l'alliance militaire. Lévy s'est également rendu en Ukraine à plusieurs reprises pendant la crise qui a débuté en 2014.
Selon ce Français, "les interventions de l'OTAN contre la Russie en Syrie, en Libye et maintenant en Ukraine" ont été non seulement justifiées mais aussi vitales car le monde occidental "n'a pas d'alternative en tant que porteur de valeurs universelles".
Partisan des guerres de coalition menées par les États-Unis et des opérations de partage du pouvoir, Lévy estime que l'Occident a un rôle clé à jouer dans la "défense de toutes les valeurs qui comptent".
BHL est généralement toujours favorable à une "intervention militaire", car il estime que toute victoire et toute domination exercée par les "autres civilisations" (russes, chinoises ou musulmanes) sur la planète constituent toujours une plus grande menace pour l'Occident que la guerre - aussi coûteuse et destructrice soit-elle.
Le professeur Zabala soutient que la vision du monde de Lévy - et celle de l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord - reflète une mentalité américaniste, toujours en noir et blanc, avec l'inévitable lutte du "bien contre le mal". En effet, il est typique des récits occidentaux de déshumaniser les concurrents comme des forces malveillantes, nuisibles au monde entier.
Bien sûr, aucun professeur ou journaliste ne peut affirmer de manière crédible, sans l'ombre d'un doute, que le président russe Vladimir Poutine s'est en fait inspiré des théories d'Ilyin, Surkov ou Douguine avant de lancer l'opération en Ukraine.
De même, nous ne pouvons pas être sûrs que les responsables de l'OTAN se sont réellement tournés vers les idées de Habermas, Fukuyama, Walzer ou BHL lorsqu'ils ont décidé de leurs plans de guerre.
Zabala a toutefois raison de dire que les idées de ces penseurs semblent surtout correspondre à ce que fait l'alliance militaire occidentale - et à la manière dont elle légitime et explique ses manœuvres.
L'Europe dispose encore d'une petite fenêtre d'opportunité pour choisir d'accepter le spectacle sanglant de la "lutte contre la Russie jusqu'au dernier ukrainien", dirigée par les États-Unis et la Grande-Bretagne, ou de rechercher une "solution diplomatique", même si cela implique de céder à certaines des exigences de la Russie.
Washington n'a aucun appétit pour un tel compromis, et les pays européens de l'OTAN (à quelques exceptions près) semblent prêts à détruire leurs propres économies afin de promouvoir les intérêts anglo-américains.
Chercher une solution diplomatique pour mettre fin à la guerre signifierait se réveiller non pas devant l'agitation du drapeau ukrainien et les bons signaux, mais devant la tentative de l'Occident de renforcer sa position affaiblie dans le grand jeu géopolitique dans lequel les Ukrainiens sont prêts à se sacrifier pour déstabiliser la Russie.
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mardi, 10 mai 2022
Les néoconservateurs et leur idéologie
"Jeter un pays contre un mur de temps en temps"
Les néoconservateurs et leur idéologie
par Thomas Bargatzky
Source: https://www.geolitico.de/2022/05/10/die-neokonservativen-und-ihre-ideologie/
Les néoconservateurs américains ont-ils raison lorsqu'ils affirment que c'est précisément la guerre de la Russie contre l'Ukraine qui montre que la politique néoconservatrice est juste ?
Des intérêts divergents peuvent conduire des États sur une trajectoire de collision qui, a posteriori, semble inévitable, comme par exemple le "somnambulisme" de l'Europe vers la catastrophe de la Première Guerre mondiale, décrit par l'historien australien Christopher Clark. Cependant, derrière de tels processus, il y a toujours des idées et des décisions prises par des élites qui auraient pu être différentes. Cela devrait aiguiser notre regard sur les élites, leur action et leur influence sur la projection du pouvoir politique dans le contexte mondial.
Les néoconservateurs (Neocons) des deux partis politiques américains sont une élite qui a exercé une influence fatale sur la politique étrangère des États-Unis au cours des dernières décennies, comme peu d'autres. Les néocons vont et viennent entre le gouvernement, le Conseil de sécurité nationale, diverses organisations non gouvernementales et des "think tanks", en tant que conseillers politiques, employés de think tanks, journalistes et membres du gouvernement. Dans leur quête de la domination mondiale des États-Unis et de leur non-respect des intérêts des autres pays, ils laissent partout leur empreinte. Ils sont toujours présents, quel que soit le parti présidentiel ou celui qui détient la majorité dans les deux chambres du Congrès.
Par exemple, Victoria Nuland: alors sous-secrétaire d'État aux affaires européennes au département d'État américain sous la présidence de Barack Obama, elle a parrainé le soulèvement de Maïdan à Kiev. Elle a acquis une certaine notoriété lorsque, début février 2014, une conversation téléphonique interceptée avec l'ambassadeur américain en Ukraine, Geoffrey Pyatt, a été rendue publique. Cette conversation portait notamment sur le personnel dirigeant que l'Occident devait installer en Ukraine. En réponse à Pyatt qui évoquait les souhaits de l'UE, Nuland a eu la réplique suivante: "Fuck the EU" [1]. Aujourd'hui, elle est de retour dans l'administration Biden.
Trotski et les néoconservateurs
Sommaire
- Trotsky et les néoconservateurs
- L'Irak doit servir d'exemple
- Les néoconservateurs et Carl Schmitt
- Le War Party de Washington
Ce qui se passe dans la tête des néoconservateurs a été révélé par le journaliste d'investigation et lauréat du prix Pulitzer Ron Suskind (photo). Suskind rapporte une conversation qu'il a eue avec un conseiller en chef du président George W. Bush au cours de l'été 2002. Ce que ce dernier lui a dit révèle les pensées des cercles qui déterminent l'action de la première puissance mondiale depuis la fin de la guerre froide et l'effondrement de l'Union soviétique.
Le conseiller a déclaré que des personnes comme Suskind "font partie de la 'communauté des personnes attachées à la réalité' ('reality-based community')", qu'il a définie comme des personnes 'convaincues que la résolution des problèmes repose sur un examen minutieux de la réalité'. J'ai hoché la tête et marmonné quelque chose à propos des principes des Lumières et de la pénétration scientifique du monde de l'expérience ("empiricism"). Il m'a coupé la parole. "Mais le monde ne fonctionne plus ainsi", a-t-il poursuivi. Nous sommes désormais un empire, et lorsque nous agissons, nous créons notre propre réalité. Et pendant que vous examinez cette réalité - soigneusement si vous le souhaitez - nous agissons à nouveau et créons d'autres nouvelles réalités que vous pouvez ensuite examiner à nouveau. C'est ainsi que les choses se passent. C'est nous qui déterminons ce qui se passe dans l'histoire... et vous, vous tous, n'avez qu'à examiner ce que nous faisons" [2]. Nous créons la réalité telle qu'elle nous plaît.
La pensée des néoconservateurs est bizarrement liée à une école de pensée universaliste qui a eu une grande influence sur la politique et la philosophie au XXe siècle, mais que l'on n'associe généralement pas aux intérêts de la politique de puissance des États-Unis. L'affirmation suivante est typique de cette école de pensée: la tâche "imposée par l'histoire" est "d'organiser l'économie ... de manière planifiée sur toute la surface de notre planète". Celui qui a écrit cela s'appelait Léon Trotsky [3].
Trotsky plaidait pour une révolution mondiale permanente, s'opposant ainsi fortement à Joseph Staline et à la doctrine défendue par les représentants du communisme soviétique réel, qui consistait à construire le socialisme d'abord dans un seul pays, avant de passer à la révolution mondiale sur cette base. Pour réaliser le communisme, Trotsky et ses partisans pensaient au contraire qu'il ne fallait pas se concentrer sur un seul pays comme base de départ. Seule l'application uniforme du communisme à l'échelle mondiale était un gage de succès.
Les idées trotskistes sur la révolution permanente rappellent celles que les néoconservateurs américains ne cessent de propager, bien que sous d'autres auspices capitalistes: non pas le communisme mondial, mais le marché mondial et le "leadership américain"; au lieu de l'Union soviétique comme "précurseur", les États-Unis comme "hégémon bienveillant". La conviction néoconservatrice selon laquelle les Etats-Unis ne sont en sécurité que dans un monde uniformément réorganisé selon le modèle américain et que la démocratie américaine et l'économie de marché libre ne peuvent s'épanouir en tant que garants de cet ordre mondial que dans un tel "nouvel ordre mondial", rappelle également les idées trotskistes sur la nécessaire unité de l'environnement mondial. La parenté d'essence entre le trotskisme et l'universalisme et l'unilatéralisme néoconservateurs fait qu'il semble beaucoup plus approprié de parler de "néo-trotskistes" plutôt que de "néoconservateurs".
Irving Kristol (1920-2009), l'un des "inventeurs" de l'idéologie néoconservatrice et père de William Kristol, autre néocon très influent, était un trotskiste déclaré dans sa jeunesse avant la Seconde Guerre mondiale. En 1940, Irving Kristol a obtenu un B.A. au City College de New York, mais l'honneur qu'il chérissait le plus était son appartenance à la "Young People's Socialist League" (Quatrième Internationale) trotskiste, comme il le confessait volontiers dans un article de magazine en 1977. Il était aussi "a member in good standing" [4], c'est-à-dire un membre à part entière, qui avait fait ses preuves et qui était en bonne position, ajoutait-il. Je ne regrette pas cet épisode de ma vie". Rejoindre un mouvement radical quand on est jeune, c'est un peu comme tomber amoureux quand on est jeune".
L'Irak doit servir d'exemple
Aujourd'hui, les néoconservateurs préfèrent ne pas se référer à Léon Trotsky, mais aux enseignements d'un autre Léon, le philosophe germano-américain Leo Strauss (1899-1973) [5]. Plusieurs néoconservateurs de premier plan, comme William Kristol et Paul Wolfowitz, ont été des élèves de Strauss ou ont été influencés par sa pensée, d'où leur appellation de "straussiens" [6]. La partialité avant la vérité - c'est ainsi qu'ils comprennent (ou se méprennent ?) leur mentor.
Wolfowitz, qui a suivi des séminaires sur Platon et Montesquieu auprès de Leo Strauss à Chicago, est à l'origine de la réécriture de la stratégie militaire globale des États-Unis, menée depuis 1992 sous le nom de "Defense Planning Guidance", qui vise à assurer la suprématie absolue de la "seule puissance mondiale" [7]. Zbigniew Brzezinski, gourou et éminence grise de la politique de sécurité américaine, a popularisé cette doctrine dite "de Wolfowitz" dans son livre "The Grand Chessboard", après l'avoir rendue publique [8].
La deuxième guerre en Irak a été l'œuvre de "hardliners" néoconservateurs. Ils voulaient, par la guerre et le changement de régime qui s'ensuivit, d'une part répartir les champs pétrolifères irakiens entre les entreprises occidentales pour les exploiter, et d'autre part dissuader d'autres Etats de s'opposer à la volonté de domination mondiale des Etats-Unis. On pensait notamment à la Chine, à la Russie, à la Corée du Nord et à l'Iran. L'Irak devait servir d'exemple, car il était "faisable": "Iraq is doable", a dit Paul Wolfowitz au président Bush [9].
Cela rappelle ce que l'on appelle la "doctrine Ledeen", attribuée à l'intellectuel néocon Michael Ledeen (photo), qui dit que "les États-Unis doivent choisir un petit pays de merde tous les dix ans environ et le jeter contre un mur, juste pour montrer au monde que nous sommes sérieux" [10]. Ledeen s'est également fait une place de choix dans la chronique des efforts de déstabilisation des néoconservateurs sur la scène politique mondiale avec sa variante du concept de "destruction créative": "Chaque jour, nous détruisons l'ordre ancien, à la fois dans notre propre société et à l'étranger. Nos ennemis ont toujours détesté ce tourbillon d'énergie et de créativité qui menace leurs traditions" [11].
Léon Trotsky n'est donc pas le seul à inspirer profondément les fantasmes de pouvoir des néoconservateurs, comme nous pouvons le déduire de ces mots, Mao Tsé-toung et sa "révolution culturelle", qui ne voulait laisser aucune pierre familière sur le sol, semble également l'avoir fait: le néoconservatisme en tant que maoïsme à l'enseigne du capitalisme. Condoleezza Rice, alors secrétaire d'État américaine, a clairement expliqué ce qu'il fallait entendre par "destruction créative" au sens pratique du terme, en commentant par exemple en 2006 les destructions dans la bande de Gaza et au Liban après les attaques israéliennes par la phrase tristement célèbre selon laquelle on assistait aux "douleurs de l'accouchement d'un nouveau Moyen-Orient" [12].
Abram Shulsky, un autre intellectuel néoconservateur, a obtenu son doctorat sous la direction de Leo Strauss à Chicago. Il a d'abord été employé par la "RAND Corporation", l'influent think tank créé après la Seconde Guerre mondiale pour conseiller les forces armées américaines et dans lequel certains critiques voient un actif de la CIA [13]. Shulsky a été nommé à la tête de l'"Office of Special Plans" (OSP). Les "purs et durs" du Pentagone ont créé ce bureau après le 11 septembre 2001, convaincus que la CIA et d'autres agences de renseignement n'étaient pas au courant des plans de Saddam Hussein pour développer des armes de destruction massive ou qu'elles avaient minimisé les informations à ce sujet. L'OSP avait notamment pour mission de s'occuper du "maquillage" des informations des services de renseignement afin de justifier la guerre en Irak du président George W. Bush en "prouvant" l'inexistence d'armes de destruction massive. Ils ont été déçus par le travail des services de renseignement qui, malgré les pressions exercées sur les agents de renseignement, notamment par le vice-président Cheney en personne, n'ont pas pu fournir de preuves solides de collusion entre Saddam Hussein et Al-Qaïda [14].
Un article publié par Shulsky en 1999 - en collaboration avec Gary J. Schmitt, un membre du groupe de réflexion néoconservateur Project for the New American Century - donne un autre aperçu de l'univers de pensée des élites néoconservatrices. Il s'agit du lien entre les services secrets et la philosophie [15]. Le penchant des néoconservateurs pour un philosophe politique comme Leo Strauss est compréhensible si l'on tient compte des messages qu'ils tirent de l'œuvre de Strauss pour leurs activités. La tendance anti-historique du rejet du relativisme culturel, c'est-à-dire de la tentative de comprendre le monde du point de vue des autres, a exercé une grande attraction. De plus, la conviction de pouvoir faire une distinction précise entre le bien et le mal. La vision du monde attribuée à Strauss a fourni aux néoconservateurs la légitimation de leurs propres prétentions au pouvoir et les a encouragés à discréditer et à éliminer, par la "destruction créatrice", les anciennes élites et traditions culturelles qui font obstacle à leur projection de pouvoir global dans le but de créer un "nouvel ordre mondial" [16]. Le travail de renseignement, qui joue un rôle important dans cette quête, reçoit donc à leurs yeux la consécration d'une justification supérieure à la lumière de l'œuvre de Leo Strauss [17].
Les néoconservateurs et Carl Schmitt
Mais l'influence de la pensée de Trotsky et de Strauss sur les convictions des néoconservateurs ne s'arrête pas là, si l'on suit les propos du néocon renégat Francis Fukuyama, qui a renoncé au néoconservatisme en 2006 dans le New York Times. [18] Selon lui, son livre "The End of History" (La fin de l'histoire) défendait en quelque sorte une "thèse marxiste" et l'existence d'un processus d'évolution sociale de longue durée - certes, un processus qui débouche sur la démocratie libérale universelle et non sur le communisme. D'autres intellectuels néoconservateurs de premier plan, comme William Kristol et Robert Kagan, époux de la notoire Victoria Nuland, défendraient au contraire une position "léniniste": Ils croient, comme Lénine, que l'histoire peut progresser grâce à un bon usage du pouvoir et de la volonté.
"Pouvoir", "volonté": derrière ces termes se cache une autre source d'inspiration de la pensée néoconservatrice, mais pas nécessairement de gauche. Les relations entre Leo Strauss et Carl Schmitt et l'importance de Schmitt pour la compréhension de la politique américaine contemporaine ont également été portées à l'attention des lecteurs américains en 2004 [19]. Strauss et Schmitt se connaissaient; Schmitt a soutenu la candidature de Strauss à une fellowship, c'est-à-dire une bourse de recherche de la "Rockefeller Foundation" à Paris en 1932. La même année, Strauss a publié un compte-rendu détaillé de l'ouvrage fondamental de Schmitt en matière de théorie politique, "Der Begriff des Politischen" [20]. Peu après, comme on le sait, leurs chemins se sont séparés: Strauss a émigré aux États-Unis et Schmitt est devenu membre du parti national-socialiste en 1933. L'affinité des néoconservateurs avec Schmitt se comprend par le concept de politique de Schmitt, qui ramène la politique à la stricte séparation entre amis et ennemis.
Le parti de guerre de Washington
Si vous lisez la prose politique américaine officielle et officieuse écrite depuis 1992 dans un esprit et avec une plume néoconservateurs, dans laquelle les cercles dominants du War Party de Washington font part de leurs intentions, vous rencontrerez constamment cette dichotomie: nous et nos alliés sommes du bon côté de l'histoire, pour le bien, pour la démocratie et la liberté; eux, les adversaires, sont du mauvais côté, pour la tyrannie et le manque de liberté. La "liberté" et la "démocratie" ne sont pas définies; elles servent de formules vides pour distinguer l'ami de l'ennemi.
La crise en Ukraine et la guerre de la Russie sont un "moment néoconservateur", selon John Podhoretz, le fils de Norman Podhoretz, également un intellectuel de premier plan du mouvement néocon. John Podhoretz a notamment servi de rédacteur de discours pour les présidents Ronald Reagan et George H.W. Bush. Selon lui, la guerre de la Russie contre l'Ukraine justifie le néoconservatisme, car elle montre que l'approche néoconservatrice est juste et que la cause néoconservatrice est juste ("our approach is right and our cause is just"). Si vous cherchez des réflexions sur le lien entre l'élargissement de l'OTAN à l'Est et la réaction de la Russie à cet élargissement, vous ne les trouverez pas chez Podhoretz, mais vous trouverez en revanche l'affirmation que l'Amérique est une force pour le bien et qu'elle doit continuer à l'être [21].
Tant que les néoconservateurs donneront le ton dans la politique étrangère des États-Unis, il n'y aura pas de paix. Nulle part.
Notes:
[1] Gregor Peter Schmitz : Faux pas d'une diplomate américaine : "Fuck the EU". Spiegel Online, 6 février 2014. https://www.spiegel.de/politik/ausland/diplomatischer-fauxpas-von-obama-beraterin-nuland-fuck-the-eu-a-952005.html. Consulté le 23 décembre 2019 Les passages correspondants de la conversation peuvent être écoutés sur "You Tube".
[2] Ron Suskind : Faith, Certainty and the Presidency of George W. Bush. The New York Times Magazine, 17 octobre 2004. https://www.nytimes.com/2004/10/17/magazine/faith-certainty-and-the-presidency-of-george-w-bush.html. Consulté le 12 décembre 2019. Traduction de moi-même, ThB.
[3] Léon Trotsky : La révolution trahie. Zurich 1937, in Le communisme soviétique. Documents Vol. I, p. 233.
[4] Irving Kristol : Memoirs of a Trotskyist. New York Times Magazine, 23 janvier 1977. https://www.nytimes.com/1977/01/23/archives/memoirs-of-a-trotskyist-memoirs.html. Consulté le 25 août 2015.
[5] Claes G. Ryn : Leo Strauss et l'histoire : le philosophe comme conspirateur. Humanitas 18 (1-2), 2005.
[6] Thierry Meyssan : La Russie déclare la guerre aux straussiens. Réseau Voltaire, 8 mars 2022. https://www.voltairenet.org/article215903.html. consulté le 19 avril 2022.
[7] Voir Thomas Bargatzky, La grande illusion. La nouvelle guerre froide et les illusions de l'Occident. - Baden-Baden : Tectum/Nomos 2020, p. 131-153.
[8] Zbigniew Brzezinski : Le grand échiquier. La primauté américaine et ses impératifs géostratégiques. - New York : Basic Books 1997, dont le titre français est significativement "La seule puissance mondiale" !
[9] Ron Suskind : The Price of Loyalty. George W. Bush, la Maison Blanche, et l'éducation de Paul O'Neill. - New York : Simon & Schuster 2004, p.187 et suivantes.
[10] "Tous les dix ans ou presque, les États-Unis ont besoin de ramasser un petit pays crapuleux et de le jeter contre le mur, juste pour montrer au monde ce que sont les affaires". Jonah Goldberg : Baghdad Delenda Est, deuxième partie. National Review, 23 avril 2002. https://www.nationalreview.com/2002/04/baghdad-delenda-est-part-two-jonah-goldberg/. consulté le 6 décembre 2019 ; voir aussi Ajsan I. Butt : Why did Bush go to war in Iraq ? Al Jazeera, 20 mars 2019. https://www.aljazeera.com/indepth/opinion/bush-war-iraq-190318150236739.html. consulté le 6 décembre 2019.
[11] Michael A. Ledeen : The War Against the Terror Masters. Pourquoi cela s'est produit. Où nous en sommes aujourd'hui. Comment nous allons gagner. - New York : St. Martin's Press 2002, p. 212 et suivantes. Traduction par mes soins, ThB.
[12] Special Briefing on the travel to the Middle East and Europe of Secretary Condoleezza Rice. - Conférence de presse, Département d'Etat américain, Washington D.C., 21 juillet 2006.
[13] Paul Craig Roberts : L'élection présidentielle américaine de novembre amènera-t-elle la fin du monde ? PaulCraigRoberts.org, 24 mai 2016. https://www.paulcraigroberts.org/2016/05/24/will-the-november-us-presidential-election-bring-the-end-of-the-world-paul-craig-roberts/. Consulté le 12 décembre 2019.
[14] Voir Seymour M. Hersh : Intelligence sélective - Donald Rumsfeld a ses propres sources spéciales. Sont-elles fiables ? The New Yorker, 12 mai 2003. https://www.newyorker.com/magazine/2003/05/12/selective-intelligence. Consulté le 13 décembre 2019 ; Walter Pincus et Dana Priest : Some Iraq Analysts Felt Pressure From Cheney Visits. The Washington Post, 5 juin 2003. https://www.washingtonpost.com/archive/politics/2003/06/05/some-iraq-analysts-felt-pressure-from-cheney-visits/4afb2009-20e7-4619-b40f-669c9d94dcf3/ Accès 24 février 2020.
[15] Gary J. Schmitt et Abram Shulsky : Leo Strauss and the World of Intelligence (By Which We Do Not Mean Nous). Dans : Kenneth L. Deutsch et John Albert Murley (éd.) : Leo Strauss, the Straussians, and the American Regime. - Lanham (Maryland) : Rowman & Littlefield 1999, p. 407-412.
[16] N'étant pas suffisamment familiarisé avec l'œuvre complexe de Leo Strauss, je ne peux pas évaluer dans quelle mesure ses disciples et partisans, qui font partie des néoconservateurs, comprennent, comprennent mal ou utilisent son œuvre pour servir leur idéologie. Loin de moi donc l'idée d'émettre un jugement sur la pensée de Strauss.
[17] Voir James Mann : Rise of the Vulcans, 2004, p. 27-31.
[18] Francis Fukuyama : After Neoconservatism. The New York Times, 19 février 2006. http://zfacts.com/zfacts.com/metaPage/lib/Fukuyama-2006-After-Neoconservatism.pdf. Consulté le 30 juin 2017.
[19] Alan Wolfe : Un philosophe fasciste aide à comprendre la politique contemporaine. The Chronicle of Higher Education - The Chronicle Review. 2 avril 2004. https://web.stanford.edu/~weiler/Wolfe_on_Schmitt_044.pdf. Consulté le 13 décembre 2019.
[20] Carl Schmitt : Le concept de politique. - Berlin : Duncker & Humblot, 1932 - Le texte de Strauss "Anmerkungen zu Carl Schmitt, Der Begriff des Politischen" est d'abord paru dans Archiv für Sozialwissenschaften und Sozialpolitik, Volume 67 (Heft 6), 1932, p. 732-749. Réimpression dans Heinrich Meier : Carl Schmitt, Leo Strauss und "Der Begriff des Politischen". Vers un dialogue entre absents. - Stuttgart : J.B. Metzler 1998, p. 97-125.
[21] John Podhoretz : Neoconservatism : A Vindication. Commentary, avril 2022. https://www.commentary.org/articles/john-podhoretz/neoconservatism-ukraine-russia/ Accès le 20 avril 2022.
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vendredi, 06 mai 2022
Exemples de bellicisme hollywoodien
Exemples de bellicisme hollywoodien
par Georges FELTIN-TRACOL
En 2003, les éditions Autrement publient un essai magistral de Jean-Michel Valantin, Hollywood, le Pentagone et Washington. Les trois acteurs d’une stratégie globale. Ce livre dévoile de profondes, solides et vieilles complicités entre le milieu cinématographique et le puissant complexe militaro-industriel présents aux États-Unis d’Amérique. L’auteur se focalise sur l’imbrication totale entre différents plans (personnalités, récits, financements) au point qu’il qualifie l’ensemble ainsi étudié de « complexe militaro-cinématographique » et de « cinéma de sécurité nationale ».
Depuis la parution de ce maître-ouvrage, ce complexe discret a encore entendu son influence. Sous le premier mandat (2009 – 2013) de Barack Obama, Jonathan « Jon » Favreau animait l’équipe des « plumes » du 44e président avant de se lancer dans une carrière de scénariste à Hollywood. Ainsi a-t-il écrit le scénario de la série 1600 Penn. Attention toutefois au risque de confusion avec un homonyme, Jon Favreau, lui aussi scénariste des plusieurs films et séries (la franchise Marvel, Le Loup de Wall Street ou The Mandalorian). Sous Donald Trump (2017 - 2021), un ancien cadre de Goldman Sachs, Steven Mnuchin, occupe le poste de secrétaire au Trésor. Avant cette incursion politique, il avait produit des films comme Edge of Tomorrow (2014), Mad Max. Fury Road (2015) ou Batman vs Superman. L’aube de la justice (2016).
Ennemis désignés
Les liens structurels entre le cinéma de sécurité nationale et l’identité stratégique étatsunienne sont si prégnants qu’il faut de temps en temps les contester sur le grand écran. En 2013, Roland Emmerich réalise White House Down. Candidat recalé du Secret Service, John Cale (Channing Tatum) et sa fille Emily se retrouvent en pleine prise d’otage à la Maison Blanche. Ancien Marine, Cage sauve le président – noir – des États-Unis, James Sawyer (Jamie Foxx). Financés par les industries militaires qui ne désirent aucun règlement de paix durable au Moyen-Orient, les terroristes proviennent des mouvances d’« extrême droite ». Or, l’un des assaillants, Carl Killick (Kevin Rankin), au comportement de parfait psychopathe, qui doit surveiller une trentaine d’otages, porte en tatouage le A cerclé des anarchistes. L’anarchisme serait-il selon les critères hollywoodiens une variante du fascisme ou du nationalisme blanc ?
L’assaut de la résidence officielle du chef de l’État yankee fait aussi l’objet d’un autre film, le premier d’une trilogie, intitulé La chute de la Maison Blanche (2013) d’Antoine Fuqua. Ce ne sont plus de très vilains fascistes qui s’emparent du célèbre bâtiment et de la personne du président Benjamin Asher (Aaron Eckhart), mais un commando nord-coréen très efficace. Et pourquoi pas des Suédois ? Ce parti-pris ne surprend pas. Ce film contribue à travers la distraction et le divertissement à la manipulation des masses qui ne peuvent envisager la République populaire démocratique de Corée qu’en tant que menace existentielle pour la paix mondiale… La Corée du Nord est aussi dénoncée dans le film de Lee Tamahori, Mourir un autre jour (2002). L’intrigue commence sur une plage coréenne du Nord où débarque en toute discrétion l’agent britannique 007 James Bond. Il est vrai qu’il peut ensuite passer inaperçu dans les campagnes de ce pays…
Autre cible cinématographique du complexe militaro-cinématographique : le Bélarus. Réalisé en 2017 par Patrick Hughes, Hitman and Bodyguard raconte l’alliance de circonstance entre deux ennemis intimes. Le garde du corps Michael Bryce (Ryan Reynolds) doit protéger le redoutable tueur à gage Darius Kincaid (Samuel L. Jackson) afin qu’il puisse témoigner devant la Cour pénale internationale de La Haye des crimes contre l’humanité commis par le dirigeant bélarussien Vladislav Dukhovich. Pourquoi le Bélarus et non pas l’Arabie Saoudite qui, c’est bien connu, apporte un bonheur certain au Yémen depuis plusieurs années ?
Gary Oldman joue le président Dukhovich. En 1997, cet acteur interprète Korchunov, le chef des « méchants » dans le film germano-étatsunien de Wolfgang Petersen Air Force One. C’est le premier film qui met en scène le président des États-Unis. La source ne tarira plus avec White House Down où James Sawyer manipule un lance-roquette pendant une poursuite automobile dans le parc de la Maison Blanche ou dans des séries télévisées telles que The West Wing (À la Maison-Blanche), Commander in Chief (Commandant en chef) ou Designated Survivor (Survivant désigné).
Un modèle du genre
Air Force One s’ouvre sur une opération des forces spéciales yankees qui s’emparent au Kazakhstan du général Ivan Radek joué par Jürgen Prochnow, le commandant de sous-marin allemand dans Le Bâteau de Wolfgang Petersen, et le duc Leto Atreides dans Dune de David Lynch. En visite d’État en Russie quelques semaines plus tard, le président James Marshall (Harrison Ford) prononce un discours musclé devant des hôtes ravis. Dorénavant, les États-Unis ne discuteront plus avec les « États voyous »; ils les combattront jusqu’au dernier. Le dirigeant occidental doit retourner à Washington à bord de l’avion présidentiel qui donne son titre au film. Son épouse Grace et leur fille Alice l’accompagnent. Bénéficiant de l’aide du responsable de l’équipe de protection présidentielle du Secret Service, Gibbs, six faux journalistes montent à bord et s’emparent de l’avion. Ils exigent la libération immédiate du général Radek jugé ultra-nationaliste, mais qui sort de la prison au son de L’Internationale chantée par les détenus avant d’être abattu au dernier moment. Ivan Radek incarne aux yeux du scénariste Andrew W. Marlowe la quintessence du militarisme rouge – brun national-soviétique…
Ancien vétéran du Vietnam où il pilotait des hélicoptères, James Marshall ne se laisse pas faire. Il combat les preneurs d’otages. Pendant ce temps à la Maison Blanche, des divergences apparaissent vite entre la vice-présidente Kathryn Bennett (Glenn Close) – une première à l’écran de féminiser ce poste ! - et le secrétaire à la Défense Walter Dean. Qui prend les décisions urgentes en cas d’empêchement du président ? Bennett intervient en présidente par intérim alors que Dean veut invoquer le XXVe amendement qui permet la déposition du président en exercice par la majorité des membres du gouvernement. Le film pose donc une vraie question d’ordre constitutionnel nullement résolue.
Par ailleurs, par les bons soins du scénariste, lors d’une courte conversation avec Alice Marshall, Korchunov lui dit qu’il tue des innocents à l’instar de son président de père qui ordonne des frappes dévastatrices et des bombardements aveugles qui font de nombreuses victimes… Finalement, incurable optimisme oblige, James Marshall rétablit la situation et sauve sa famille. En 2016, un sondage du Wall Street Journal distinguait James Marshall comme le plus grand président fictif des États-Unis ! C’est sûr que ce ne serait pas le valétudinaire Joe Biden qui cognerait l’un des assaillants dans la soute de l’appareil !
Air Force One annonce les thrillers qui propageront la vue du monde néo-conservatrice, cette propension inacceptable à vouloir imposer un bonheur matériel consumériste et hédoniste à tous les peuples de la Terre enfin soumis au mantra des « droits de l’homme ». Depuis la sortie de ce film aux scènes haletantes, le complexe militaro-cinématographique continue à répandre une propagande incessante qui ne fait qu’alimenter l’hubris belliciste de l’Occident globalitaire américanomorphe.
Georges Feltin-Tracol.
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mardi, 22 février 2022
Ukraine : l'hystérie guerrière du mainstream
Stefan Schubert
Ukraine : l'hystérie guerrière des médias mainstream
Source: https://kopp-report.de/ukraine-die-kriegshysterie-des-mainstreams/
Ces dernières semaines, les médias mainstream occidentaux ont fait preuve d'un bellicisme sans précédent. Pour ce faire, ils s'appuient sur des informations anonymes - et non étayées - fournies par les services de renseignement américains, sans procéder à une vérification indépendante des faits. Cette révélation journalistique illustre une fois de plus l'état alarmant des médias. Sur la base d'une campagne américaine anonyme, les médias de gauche et verts diffusent sans sourciller l'image de l'ennemi, le méchant Russe. Il est évident qu'outre la diffamation de ce concurrent géopolitique, les Américains cherchent avant tout à imposer leurs intérêts économiques.
L'auteur a déjà démontré ici que la Russie est le troisième plus grand fournisseur de pétrole des États-Unis.
Alors que "Sleepy Joe" a l'audace d'annoncer devant la presse mondiale rassemblée la fin du pipeline germano-russe Nord Stream 2, il refuse de répondre à toute question sur les immenses livraisons de pétrole aux Etats-Unis eux-mêmes, en provenance de l'État prétendument voyou qu'est la Russie. Ces livraisons massives de pétrole augmentent rapidement depuis des années et ne figurent pas sur la liste des sanctions de l'administration américaine. Or, les entreprises et les États européens dont les Américains veulent détruire les activités en Russie y figurent tout particulièrement. Comme l'industrie allemande l'a déjà appris à ses dépens ces dernières années, les sanctions imposées par les Américains visent particulièrement les relations d'affaires germano-russes étroites qui existent depuis des décennies.
Outre la diffamation de la Russie commanditée par les États-Unis, les Allemands se sont donc également faits les larbins du complexe militaro-industriel américain. Il ne s'agit pas ici d'une canonisation de Vladimir Poutine. Comme l'ont montré la Tchétchénie, la Géorgie et, il y a quelques semaines, le Kazakhstan, le seuil d'inhibition du Kremlin pour l'utilisation de la force militaire doit être considéré comme très bas - une appréciation qui s'applique également au gouvernement américain, comme le prouvent non seulement le nombre élevé de victimes en Afghanistan, en Irak et en Syrie. Mais, si l'on considère les dernières semaines sans les cris de guerre hystériques des médias, que s'est-il réellement passé ?
Un pays a organisé des manœuvres militaires de grande envergure à l'intérieur de ses frontières. Rien de plus, rien de moins. Quand on voit ce que les Américains font sur tous les continents, souvent avec des dizaines de milliers de soldats de l'OTAN, la double morale de l'Occident saute aux yeux comme un missile Pershing II. Les grandes manœuvres occidentales sont en outre publiquement qualifiées de défense de leurs propres intérêts et de menaces non dissimulées contre la Chine et la Russie. Cette procédure récurrente démontre que le bellicisme actuel des médias et des politiques est particulièrement perfide. Les interventions politiques publiques des Verts et de la CDU/CSU ressemblent à des communiqués de presse du Pentagone. Le fait que cette campagne ait été préparée et orchestrée par des réseaux transatlantiques comme le Pont de l'Atlantique ne peut bien sûr être qu'une théorie du complot.
L'intérêt de l'Allemagne pour une relation stable avec la Russie
Alors que la ministre allemande des Affaires étrangères Annalena Baerbock trébuche à travers l'histoire mondiale et déclare que toutes les ambassades d'Allemagne sont des bases de l'hystérie climatique des Verts, le chancelier Olaf Scholz se fait traiter comme un écolier dans le bureau ovale.
Que les Américains veuillent importer leur gaz liquide sale et cher en Allemagne, que la Pologne et l'Ukraine gagnent beaucoup d'argent en faisant passer du gaz russe en Allemagne par le gazoduc existant et qu'elles essaient pour cette seule raison d'empêcher et de saboter Nord Stream 2 autant que possible, tout cela est compréhensible dans une certaine mesure entre pays "amis".
Mais le fait qu'aucun membre du gouvernement allemand ne se présente avec assurance devant les caméras pour articuler et défendre les intérêts allemands dans ce conflit aux multiples facettes est une situation honteuse.
De plus, lors des négociations sur la réunification, la Russie a reçu l'assurance qu'il n'y aurait pas d'élargissement de l'OTAN vers l'Est. Cet engagement a déjà été rompu à plusieurs reprises, comme dans les pays baltes et en Pologne. Malgré cela, la politique et les médias diffament la Russie en la qualifiant d'agresseur unilatéral, simplement parce que la grande puissance veut empêcher, pour des raisons compréhensibles, un déploiement de troupes de l'OTAN à la frontière russo-ukrainienne. En outre, il n'est pas dans l'intérêt de l'Europe et de l'Allemagne de séparer la Russie de l'Europe et de la pousser toujours plus loin dans les bras de la puissance impériale mondiale qu'est la Chine. La Russie peut également vendre son gaz à l'Est, tandis que l'Allemagne, en particulier, a un besoin urgent de son voisin oriental riche en matières premières en raison de sa transition énergétique autodestructrice.
Le président américain Joe Biden a obtenu des résultats plus mauvais dans les sondages américains que Donald Trump n'en a jamais eu. Alors que les médias mainstream allemands ont fait un scandale de chaque message de Trump sur Twitter, les journalistes de conviction ont complètement passé sous silence l'échec de l'administration Biden. Le bellicisme de Washington, outre les intérêts économiques et géopolitiques évoqués, sert en outre de diversion ciblée aux problèmes de politique intérieure.
Même une escalade et une guerre réelle entre la Russie et l'Ukraine pourraient être considérées comme un scénario souhaitable pour les faucons américains du Pentagone, pour les raisons décrites ci-dessus. Une escalade pourrait survenir à tout moment à la suite d'opérations sous faux drapeau ou de cyberattaques massives et intraçables. Si les premiers coups de feu étaient tirés, les médias et les politiciens allemands auraient également contribué dans une large mesure à la guerre au cœur de l'Europe par leur bellicisme.
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vendredi, 11 février 2022
Biden et les bellicistes antirusses : ils rejouent Bush, Clinton et Obama
Biden et les bellicistes antirusses : ils rejouent Bush, Clinton et Obama
Noriko Watanabe et Lee Jay Walker
Une analyse de "Modern Tokyo Times"
Source: http://moderntokyotimes.com/biden-and-anti-russia-warmongers-play-it-again-bush-and-obama/
Durant son administration, Donald Trump a eu un comportement rare dans l'histoire américaine récente. En effet, il n'a pas déclenché une guerre ni incité à en lancer une. Encore récemment, l'administration de Barack Obama avait déstabilisé la Libye et la Syrie - avec les habituelles puissances alliées de l'OTAN et du Moyen-Orient. Les administrations de Bill Clinton et de George Bush junior ont également semé la mort et la misère sur plusieurs continents. Par conséquent, l'option bipartisane et hostile à la Fédération de Russie aux États-Unis incite une fois de plus à déclencher une autre guerre - sous l'administration du président Joe Biden.
Feu Stephen F. Cohen (1938-2020) a déclaré en 2019 : "Pendant des siècles et encore aujourd'hui, la Russie et de grandes parties de l'Ukraine ont eu beaucoup de liens en commun - une longue frontière territoriale, une histoire commune, des affinités ethniques, linguistiques et culturelles, des relations personnelles intimes, des échanges économiques substantiels, etc. Même après les années d'escalade du conflit entre Kiev et Moscou depuis 2014, de nombreux Russes et Ukrainiens se considèrent toujours membres d'une même famille. Les États-Unis n'ont pratiquement aucun de ces points communs avec l'Ukraine".
Biden jette les bases d'une méfiance accrue avec la Fédération de Russie, alors que l'Amérique s'est récemment retirée de l'Afghanistan. En outre, l'administration Biden se met de plus en plus à dos la Chine avec une rhétorique sans fin visant à contenir cette nation. Par conséquent, l'arrière-cour géopolitique de l'Amérique s'applique à faire adopter aux puissances européennes de l'OTAN et à d'autres, jusqu'au Japon, une attitude hostile visant la Fédération de Russie - et cherche l'appui du Japon et d'autres nations de l'Asie-Pacifique qui sont anti-chinoises, pour parfaire sa stratégie "humanitaire" qu'elle considère utile et qu'elle manipule".
L'Amérique - ironiquement - subit actuellement 100.000 décès dus aux opioïdes, rien qu'au cours des 12 derniers mois, sans parler des décès dus au Covid-19 qui atteindront 900.000 cas la semaine prochaine; de surcroît, elle est marquée par des différences culturelles internes croissantes provoquées par les démocrates (du piège racial à la confusion des genres), par des problèmes d'inflation, et par le fait que plusieurs villes sont en train de s'effilocher à cause des sans-abri, de la criminalité et du programme de financement de la police des riches démocrates qui jouent la "carte raciale". Par conséquent, pourquoi Biden ne se concentre-t-il pas sur ces questions et sur la frontière de l'Amérique plutôt que de chercher à déclencher une nouvelle guerre froide avec la Chine et la Fédération de Russie ?
Robert Menendez et d'autres bellicistes hostiles à la Fédération de Russie - qu'ils soient démocrates ou républicains - enflamment la situation en usant d'une rhétorique sans fin. Voice of America rapporte : "En outre, Menendez a dit qu'il s'attend à ce que le Sénat approuve une "assistance supplémentaire à l'Ukraine" sous la forme d'une livraison d'armes létales, ainsi que des sanctions économiques sur des secteurs clés de l'économie russe, et une interdiction pour la Russie de vendre sa dette souveraine sur les marchés internationaux".
Vasily Nebenzya, l'ambassadeur de la Fédération de Russie auprès des Nations Unies, a déclaré que l'Amérique "provoque une escalade". L'ambassadeur a poursuivi en laissant entendre que l'Amérique "attise l'hystérie" à l'encontre de la Fédération de Russie.
Le président de la Fédération de Russie, Vladimir Poutine, est découragé par les réponses obtenues par l'Amérique et l'OTAN concernant les préoccupations géopolitiques de la Fédération de Russie. Il a déclaré : "Permettez-moi de noter que nous analysons de près les réponses écrites reçues des États-Unis et de l'OTAN le 26 janvier. Cependant, il est déjà clair, et j'en ai informé M. le Premier ministre, que les préoccupations fondamentales de la Russie ont été ignorées."
Selon TASS News, M. Poutine "...a expliqué que Moscou n'avait vu aucune réponse adéquate à trois demandes clés - empêcher l'expansion de l'OTAN, ne pas déployer de systèmes d'armes de frappe près des frontières russes et ramener l'infrastructure militaire de l'OTAN en Europe aux positions existantes en 1997, lorsque l'Acte fondateur Russie-OTAN a été signé."
Le très respecté Stephen F. Cohen a reproché à Bill Clinton d'avoir commencé à étendre l'OTAN plus à l'est vers la Fédération de Russie. Il a déclaré : "La réponse courte mais essentielle fut la décision de Washington, prise par le président Bill Clinton dans les années 1990, d'étendre l'OTAN vers l'est à partir de l'Allemagne et finalement jusqu'à l'Ukraine elle-même. Depuis lors, tant les démocrates que les républicains ont insisté sur le fait que l'Ukraine est d'un "intérêt national vital pour les États-Unis". Ceux d'entre nous qui se sont opposés à cette folie ont prévenu qu'elle conduirait à des conflits dangereux avec Moscou, voire à la guerre. Imaginez la réaction de Washington, disions-nous, si des bases militaires russes commençaient à apparaître aux frontières du Canada ou du Mexique avec les États-Unis. Nous n'avions pas tort : On estime que 13.000 personnes sont déjà mortes dans la guerre ukraino-russe dans le Donbass et que quelque 2 millions de personnes ont été déplacées."
The Guardian (Simon Jenkins), à propos de feu Boris Eltsine plaidant auprès des puissances de l'OTAN pour qu'elles ne se déplacent pas en direction des frontières de la Russie, adopte un point de vue similaire à celui de feu Stephen F. Cohen. Il rapporte : "L'Occident a ouvertement tourné en dérision ce conseil. Les dirigeants de l'OTAN ont savouré leur victoire, recrutant des membres à l'est, en passant par la Pologne, la République tchèque, la Hongrie et les États baltes. Les supplications des modérés russes ont été ignorées, tandis que Londres ouvrait ses portes aux richesses volées de la Russie. Le résultat était prévisible. En 1999, Vladimir Poutine a pris le pouvoir sur un programme populiste et patriotique. Pour l'ancien ambassadeur britannique à Moscou, Rodric Braithwaite, Poutine est passé maître dans l'art d'exprimer "le sentiment d'humiliation ressenti par les Russes après l'effondrement de l'Union soviétique". Il a exploité l'expansionnisme agressif de l'OTAN pour ce qu'il valait. Lorsqu'en 2008, l'Américain George W. Bush a soutenu l'extension de l'adhésion à l'OTAN de la Géorgie et de l'Ukraine (une décision à laquelle l'Allemagne et la France ont opposé leur veto), Poutine s'est emparé de territoires dans ces deux pays".
Il est temps pour l'Amérique - et à un moindre degré pour le Royaume-Uni - de se concentrer sur leurs questions internes qui doivent être traitées. Les élites politiques de Washington et de Londres se sont ingérées partout et ont semé le chaos international en s'immisçant sans fin dans d'innombrables conflits nationaux et internationaux au cours des dernières décennies. Cela concerne toujours l'instigation à commencer des conflits loin des rivages des deux nations.
Le Modern Tokyo Times a récemment déclaré : "Les États-Unis (US) et le Royaume-Uni (UK) se sont impliqués dans la déstabilisation de nombreuses nations - avec d'autres puissances de l'OTAN (la France en Libye et la Turquie en Syrie) - pendant de nombreuses décennies. Ainsi, du soutien au démembrement de la Yougoslavie puis de la Serbie (avec la sécession du Kosovo) - aux intrigues en Afghanistan, en Irak, en Libye, en Syrie et en d'autres conflits - des vagues migratoires massives ont eu lieu. Cela est lié aux États défaillants, au chaos, au terrorisme, aux persécutions ethniques et à d'autres facteurs négatifs".
Le monde a besoin d'une pause dans les conflits constants qui émanent des mêmes puissances. L'Amérique, la France, les États-Unis, la Turquie et d'autres pays continuent de s'ingérer dans les affaires internationales - tous sont des puissances de l'OTAN. Il est donc temps pour l'OTAN et la Fédération de Russie d'avoir un véritable dialogue qui réponde aux préoccupations naturelles de la Fédération de Russie et qui apaise la crise actuelle qui est attisée par Washington et par Londres.
Les effusions de sang se poursuivent dans plusieurs pays qui subissent les conséquences des actes des puissances de l'OTAN. Il s'agit de la poursuite de la déstabilisation de la région du Sahel après que la guerre contre la Libye a fait de cette nation un État en faillite, il s'agit ensuite des convulsions en cours en Irak et en Syrie, de l'occupation continue de la partie nord de Chypre par la Turquie, de l'ingérence de la Turquie dans la région du Haut-Karabakh qui a vu des islamistes être transportés dans la zone de guerre pour tuer des chrétiens arméniens, et d'autres convulsions liées à l'Afghanistan, à l'immigration massive en Europe et au nettoyage des minorités religieuses (chrétiens et yézidis dans certaines parties de l'Irak et de la Syrie). Par conséquent, ce chaos collectif est responsable d'un grand nombre de décès - tout en créant des millions de réfugiés et en déclenchant une immigration massive.
Sources:
https://www.voanews.com/a/us-senate-contemplates-mother-of-all-sanctions-if-russia-invades-ukraine/6421270.html
https://mises.org/wire/why-die-ukraine
https://tass.com/world/1396205
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lundi, 06 septembre 2021
La grande hypocrisie sur la fin de la "guerre sans fin"
La grande hypocrisie sur la fin de la "guerre sans fin"
Lorenzo Vita
Ex: https://it.insideover.com/politica/la-grande-ipocrisia-sulla-fine-della-guerra-infinita.html
Les guerres sans fin ne sont pas terminées. L'une d'entre elles est terminée, celle de l'Afghanistan, mais il est difficile de croire que la "guerre" que les États-Unis ont menée, mènent et veulent mener est réellement terminée. Ni contre le terrorisme, ni contre d'autres ennemis stratégiques que Washington a depuis longtemps identifiés comme des cibles.
Le Président des Etats-Unis, Joe Biden, s'est empressé ces dernières heures de rappeler un concept: la volonté de mettre fin à ces conflits dont on ne comprend pas la fin et, surtout, les moyens d'y mettre fin. L'Afghanistan en était devenu le symbole: une guerre qui durait depuis vingt ans, avec des objectifs complètement différents, et qui avait atteint le paradoxe selon lequel Washington remettait le pouvoir à ceux-là mêmes qu'il avait chassés de Kaboul et combattus. Un exemple plastique de l'hétérogénéité des finalités qui a fait comprendre, mieux que tout, ce qu'est devenu en pratique le long conflit afghan du point de vue américain.
Cette perception court toutefois le risque d'aller dans le sens de l'idée que l'Amérique a mis fin à une guerre qui s'est terminée en raison de l'absence d'objectifs ou d'ennemis. Une façon de penser risquée, pour la simple raison que le président des États-Unis lui-même a tenté de faire comprendre à son pays que la guerre contre le terrorisme sera simplement menée sous d'autres formes, et qu'il existe d'autres rivaux stratégiques vers lesquels son Amérique se tournera. En bref, la guerre est loin d'être terminée. Elle a simplement mis fin à une forme de cette grande guerre: au mieux, sa plus longue bataille, ou, dans un sens plus large, son front le plus sanglant et le plus coûteux.
Les experts commencent donc à se demander s'il est vraiment nécessaire de considérer comme terminée une guerre qui n'a en fait jamais pris fin. DefenseOne, l'un des sites américains les plus connus traitant des questions stratégiques, a même accusé la politique américaine dans son ensemble de raconter des mensonges aux électeurs. Il l'a fait dans un éditorial cinglant de son rédacteur en chef, Kevin Baron. Foreign Affairs, le magazine américain qui fait autorité, a publié un article au titre illustratif, "The Good Enough Doctrine", que l'on pourrait traduire par la doctrine du "suffisant" ou du "bon".
En substance, le concept exprimé est qu'il faut accepter la coexistence avec le terrorisme, comprendre qu'il existera toujours une forme de terrorisme de matrice islamiste capable de frapper dans le monde et que la seule chose que l'on puisse faire est de le limiter en le rendant inoffensif par rapport à la sécurité des États-Unis. Le général Mark McKilley, chef d'état-major interarmées des États-Unis, a également repris ce thème. Lors de son point de presse, parlant de l'Afghanistan, il a admis qu'"au cours des 20 dernières années, il n'y a pas eu d'attaque sérieuse contre notre pays, et il nous incombe maintenant de veiller à ce que nous poursuivions nos efforts en matière de renseignement, nos efforts de lutte contre le terrorisme, nos efforts militaires pour protéger le peuple américain au cours des 20 prochaines années, et nous, les militaires américains, sommes déterminés à le faire". Des phrases qui, associées à l'image des talibans entrant triomphants dans Kaboul, révèlent très clairement qu'aucune mission n'a été achevée, ni que la guerre contre l'islamisme a été gagnée. D'autant plus que certains pensent qu'il s'agit désormais d'un mal endémique avec lequel l'Occident, incapable de le vaincre, ne peut qu'apprendre à vivre.
Une coexistence qui, toutefois, met à nu une certaine hypocrisie qui sous-tend les phrases avec lesquelles Biden et la politique américaine ont décidé de décrire le retrait d'Afghanistan. Alors que les raids dans la Corne de l'Afrique se poursuivent, que les porte-avions américains se déplacent en mer d'Arabie pour frapper, dans le cadre d'opérations "au-delà de l'horizon", les bastions de l'autoproclamé État islamique, et alors que des questions restent ouvertes avec l'Irak et la Syrie et que les acronymes de la terreur n'ont pas disparu, ce que Washington veut, c'est simplement arrêter l'hémorragie de l'argent des contribuables et des vies humaines dans une confrontation avec ses propres unités sur le terrain. Mais la guerre "sans fin" est restée telle quelle.
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samedi, 05 juin 2021
Biden déploie sa machine de guerre
Biden déploie sa machine de guerre
Par Alexander Markovics
« Nous devons nous attendre à une guerre nucléaire ». Ce qui ressemble à un gros titre datant de l'apogée de la guerre froide est aujourd’hui une déclaration tirée du rapport annuel du commandement stratégique américain. En charge des forces nucléaires américaines, les généraux des Etats-Unis considèrent la guerre nucléaire avec la Russie et la Chine comme une possibilité "dans le spectre actuel des conflits". Dans le même temps, 28.000 soldats de 26 nations se déploient sous la direction des États-Unis en Europe de l'Est, à la frontière sud avec la Russie, dans le cadre des manœuvres "Defender Europe 2021", qui se dérouleront du 1er mai au 14 juin. L'Allemagne ne se contente pas de participer à cet exercice de grande envergure, qui peut littéralement être considéré comme un pistolet braqué sur la poitrine de la Russie, mais sert avant tout de zone de déploiement pour les autres pays de l'OTAN et notamment pour les États-Unis. Mais quel est le contexte politique du déploiement ordonné par Biden en Europe ?
Volodymyr Zelensky - un belliciste dos au mur
A Kiev, le président Zelenskyj bat à nouveau le tambour pour une reconquête du Donbass. En 2014, lorsque l'Occident a organisé un coup d'État contre le président sortant Ianoukovitch et a commencé à organiser des pogroms contre la population russe dans l'est et le sud-est du pays pour forcer une guerre avec la Russie, non seulement la Crimée mais aussi certaines parties du Donbass se sont séparées suite à un soulèvement populaire. L'accord de Minsk qui a suivi a établi un cessez-le-feu entre l'Ukraine et les républiques populaires de Donetsk et de Lougansk à l'est. Outre le retrait des armes lourdes de la région frontalière et un échange de prisonniers, Kiev s'est engagé à réviser sa propre constitution et à accorder aux deux États de l'Est une autonomie qui conduirait à terme à leur réadmission dans l'Ukraine. Mais la réalité est loin de ce qui est écrit dans l'accord de Minsk: chaque jour, de pauvres gens meurent dans le Donbass sous les tirs d'artillerie et, plus récemment, de drones des soldats de Kiev. Plus récemment, un enfant de cinq ans y a été tué par des drones. Même un amendement constitutionnel contenant l'autonomie promise ne s'est pas concrétisé jusqu'à présent. La marionnette de Washington à Kiev, Volodymyr Zelenskyj, a quelque chose de tout à fait différent en tête: ce comédien télégénique qu’est Zelenskyj était devenu célèbre en tant qu'artiste de cabaret, il veut maintenant "résoudre" le conflit dans le Donbass avec l'aide de l'OTAN, comme il l'a déclaré début avril. L'Ukraine ne peut plus attendre d'être acceptée dans l'alliance militaire occidentale, a-t-il déclaré, elle veut aussi rejoindre l'UE. Car sur le plan politique, il a désespérément besoin de succès: depuis son écrasante victoire électorale, il a déçu ses électeurs. Ainsi, pour 42% des Ukrainiens, il a été la grosse déception de 2020, ne pouvant ni lutter contre la corruption dans le pays, ni mettre en œuvre la paix promise.
La crise du coronavirus a encore aggravé la situation économique de l'Ukraine. Les scandales tels que les allégations de corruption à l'encontre du fils du président américain Hunter Biden, qui font passer l'Ukraine pour un bordel et une colonie américaine, font le reste. L'Ukraine est plus dépendante que jamais de l'aide financière de l'Occident, et pas seulement dans le secteur de l'armement. Il perd également de plus en plus de partisans dans le pays même, dont récemment l'oligarque Ihor Kolomojskyj. Par suite, une nouvelle flambée de la guerre lui conviendrait parfaitement. Les officiers de l'armée ukrainienne s'efforcent également depuis des mois d'obtenir un soutien pour une guerre contre l'Est. L'armée ukrainienne, disent-ils, est prête, surtout après sa mise à niveau avec des drones et d'autres matériels de guerre provenant de l'Ouest. En clair, au lieu de la paix et du retrait des armes, cela signifierait l'expulsion et le génocide. Mais lorsque, en réponse, Moscou a massé des troupes à la frontière avec l'Ukraine et en Crimée, Zelenskyi s'est attiré les foudres du public. Soudain, l'Ukraine a été menacée par la Russie. Le président ukrainien a alors imploré l'Occident de lui venir en aide. Ce faisant, il a fait le jeu du nouveau chef de guerre à Washington.
Car depuis l'investiture du nouveau président américain, le ton des Etats-Unis contre la Russie s'est durci. Si Hillary Clinton ne pouvait expliquer sa défaite face à Donald Trump que par le fantasme de "l'ingérence russe dans l'élection présidentielle", Biden a également eu recours à cet argument non prouvé pour alimenter la peur de la Russie aux États-Unis. De plus, le 15 avril de cette année, Joe Biden a même fait déclarer l'état d'urgence aux États-Unis parce que le service de renseignement extérieur russe, le SWR, aurait été coupable d'une attaque informatique contre les États-Unis. Cette décision a été suivie de l'expulsion de dix diplomates russes et de l'interdiction de négocier des obligations d'État russes. Lorsque, dans le même souffle, Biden souligne qu'il ne cherche pas une escalade avec la Russie, mais veut seulement "réagir de manière appropriée", cela ne peut être compris que comme une farce.
Une crise diplomatique mise en scène
Cette action a entraîné le début d'une crise diplomatique entre l'Occident et la Russie. En Europe également, les États-Unis instrumentalisent leurs alliés pour exercer une pression accrue sur la Russie. L'explosion d'un dépôt de munitions en 2014 a soudainement été utilisée par Prague comme une occasion d'expulser le personnel de l'ambassade russe de la République tchèque. Dans une réaction en chaîne de "solidarité", des diplomates russes ont également été expulsés dans les trois États baltes et en Roumanie. Moscou ne s'est pas laissé faire et a répondu à son tour en expulsant sept diplomates de l'UE. Le point culminant de l'escalade occidentale contre la Russie et ses alliés a finalement été la planification d'une tentative d'assassinat contre le président biélorusse Loukachenko, qui a pu être empêchée par les services russes et biélorusses - plus d'informations à ce sujet dans la rubrique "Objection" de ce numéro de Deutsche Stimme. Le point commun de toutes ces provocations est le fait qu'elles proviennent de l'Occident et sont dirigées contre la Russie. Tout cela ne présage rien de bon pour les futures relations entre la Russie et l'Europe, qui, elle, est devenue un champ de bataille potentiel entre les États-Unis et la Russie et qui demeure dominée par les États-Unis en matière de politique étrangère.
Un déploiement sous le signe de la grande réinitialisation
Globalement, on peut affirmer que les actions et la rhétorique de l'alliance occidentale sous la direction de Joe Biden sont devenues de plus en plus vociférantes et menacent actuellement de dépasser toutes limites. D'un côté, nous voyons un secrétaire américain à la défense transsexuel, un président américain dégringolant des escaliers et lançant des accusations non prouvées d'ingérence dans les élections et dans les affaires américaines. Ce qui semble complètement ridicule à première vue est cependant étayé par des mesures percutantes du côté occidental: les récentes déclarations sur la possibilité d'une guerre nucléaire avec la Russie et la Chine, les expulsions de diplomates russes, le déploiement de l'OTAN dans le sud-est de l'Europe et en mer Noire, ainsi que la tentative d'assassinat d'Alexandre Loukachenko sont autant de quasi-déclarations de guerre contre la Russie qui n'ont pas encore été suivies d'une escalade totale, ce que nous devons avant tout aux nerfs d'acier de Vladimir Poutine et à la retenue de la Russie. Tout cela se déroule sur fond de Great Reset. Deutsche Stimme a consacré un numéro séparé à ce sujet - qui, dans les affaires intérieures des États occidentaux, impose des mesures toujours plus totalitaires de restructuration de la société sous le couvert de la politique ‘’covidiste’’; dans le domaine de la politique étrangère, cela signifie une confrontation toujours plus vive avec des puissances altermondialistes comme la Chine, l'Iran, mais surtout la Russie.
L'Allemagne a beaucoup d'enjeux dans ce conflit. L'enjeu n'est pas seulement le gazoduc Nord Stream 2, qui revêt une importance considérable pour la sécurité énergétique du pays, mais l'existence même du peuple allemand. En octobre 2020, l'armée de l'air allemande s'est entraînée à larguer des bombes nucléaires américaines sur le territoire allemand dans le cadre de l'exercice "Steadfast Noon". Sachant que les bellicistes du Pentagone et leurs marionnettes à Kiev travaillent à une escalade ouverte avec la Russie et que l'Occident est apparemment prêt pour la guerre nucléaire, une seule mauvaise décision peut conduire à l'anéantissement nucléaire de l'Allemagne et de l'Europe, comme aux beaux jours de la guerre froide. Dans le contexte des développements actuels, il est d'autant plus important que nous ne nous laissions pas atteler à la charrette de Washington, mais que nous nous prononcions inébranlablement pour un retrait de l'OTAN et pour la paix en Europe. Maintenant que les Verts, la gauche et même une grande partie de l'AfD sont attachés au traité de l'Atlantique Nord et au transatlantisme, c'est la seule tâche de l'opposition nationale de mener une authentique politique de paix pour un futur monde multipolaire.
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lundi, 14 décembre 2020
L'OTAN cherche le conflit
L'OTAN cherche le conflit
Par Finian Cunningham
Source : https://www.ariannaeditrice.it
L'alliance militaire queconstitue l'OTAN, dirigée par les États-Unis, est comme un junkie belliciste qui a besoin d'injecter des conflits et des tensions pour obtenir une "justification" de son existence.
La dépendance pathologique de l'OTAN à cette drogue belliciste s’est révélée à l’évidence avec la publication, la semaine dernière, de sa déclaration intitulée "OTAN 2030 - Unis pour une ère nouvelle".
En lisant entre les lignes de cette déclaration, il est clair que les planificateurs de l'alliance cherchent désespérément une justification officielle "pour pouvoir demeurer pertinents", plus de 70 ans après la création du bloc militaire en 1949, au début de la guerre froide avec l'Union soviétique.
Et les dirigeants de l’OTAN trouvent "justification" à leur existence en parlant de menaces imaginaires, posées par la Russie et la Chine. La guerre froide doit être maintenue, sinon l'OTAN deviendra lettre morte. Et les drogués au bellicisme ne peuvent pas laisser cela se produire.
Dans ses discours, Jens Stoltenberg, dirigeant civil de l'OTAN, a exagéré la menace d'agression en accusant la Russie et la Chine de "se rapprocher de nous" de "l'Arctique à l'Atlantique". Selon le chef de l'OTAN, le remède pour relever ce "défi" consiste, pour l'alliance, à déployer encore plus de forces et de bases militaires aux frontières de la Russie et probablement aussi de la Chine.
En guise de rappel à la réalité, le Commandement de la flotte russe de la Baltique a publié cette semaine des données montrant qu'au cours des douze derniers mois, les États-Unis ont multiplié par cinq les vols de bombardiers stratégiques près des frontières occidentales de la Russie par rapport à l'année précédente. Ces avions sont capables de lancer des armes nucléaires. Cela s'est fait sous la présidence de Trump qui était censé être "modéré" face à la Russie et essayait de "normaliser" les relations bilatérales (selon ses critiques libéraux).
En outre, les États-Unis et la Pologne, membres de l'OTAN, ainsi que la Roumanie, déploient des missiles balistiques capables de frapper la Russie dans les minutes qui suivent leur lancement.
Pendant ce temps, Washington a mis au rebut une autre institution de contrôle des armements, le traité "Ciel ouvert", ce qui signifie que la Russie a été empêchée d'effectuer des vols de surveillance réguliers pour surveiller l'éventuelle montée en puissance de l'armée américaine.
Ce qui précède fait suite à la destruction, l'année dernière, par l'administration Trump du traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire (FNI) de l'époque de la guerre froide, qui pourrait ouvrir la voie au déploiement par les Américains d'armes nucléaires dites "tactiques" en Europe, dirigées contre la Russie. Une fois de plus, Trump, selon les médias mainstream, était censé être un "larbin" de la Russie. Arrêtez la propagande !
Les États-Unis et leurs alliés de l'OTAN ont également l'intention de déployer davantage d'armes nucléaires tactiques près du territoire chinois. Cela expliquerait pourquoi Washington a abandonné le traité FNI. Alors que les Américains accusaient la Russie de violer ce traité, la vraie raison était que Washington se donnait carte blanche pour déployer des armes qui auraient été interdites dans des positions offensives vis-à-vis de la Chine.
Alors, qui menace qui ? La "déclaration d'intention" de l'OTAN accusant la Russie et la Chine de représenter une menace croissante est manifestement absurde. Elle met la réalité sens dessus dessous et l'articule avec une double pensée flagrante, ou une duplicité pure et simple.
L'OTAN est accro à la création d'ennemis parce qu'elle doit trouver un moyen de justifier les dépenses de près d'un trillion de dollars par an en armements militaires. Il s'agit des dépenses combinées de "défense" des États-Unis et de leurs alliés de l'OTAN. Ces dépenses représentent environ 20 fois celles de la Russie et de ses forces armées et cinq fois celles de la Chine.
Le complexe militaro-industriel est une composante essentielle de la politique économique du capitalisme occidental. Les lobbyistes de l'industrie et les pots-de-vin substantiels font en sorte que les politiciens de Washington et de l'Europe sont achetés pour danser joyeusement au son des flûtes atlantistes et ainsi, pour maintenir en vie tout le racket de l'argent militaire. Cela explique les achats très onéreux de chasseurs-bombardiers F-35 et le remplacement des armes nucléaires en Italie, en Belgique et en Allemagne.
Mais au-delà de tout cela, l'OTAN n’est rien d’autre que le fer de lance de l'impérialisme américain. Sans la couverture politique de l'OTAN, Washington n'a pas le vernis du "multilatéralisme" quand il veut lancer des guerres à travers la planète. Garder l'OTAN unie, ou "rester pertinente" comme le disent par euphémisme ses planificateurs, est essentiel pour blanchir les opérations criminelles de l'impérialisme américain.
Avec une audacieuse distorsion orwellienne de la réalité, l'OTAN se retourne ensuite et accuse la Russie et la Chine de menacer la paix et la sécurité mondiales.
Le président élu Joe Biden parle de renforcer l'alliance de l'OTAN tout en pointant du doigt la Russie et la Chine, ce qui est inquiétant. Et les laquais euro-américains semblent disparaître du débat face à la perspective d'un plus grand aventurisme de l'OTAN. L'Amérique "est de retour", comme le déclare Biden, et les larbins européens sont ravis d'être impliqués dans de nouvelles guerres et de nouvelles agressions (celles perpétrées en Irak, en Afghanistan, en Somalie, en Libye, en Syrie, n'ont pas suffi).
Les fous bellicistes s'agitent dans cet asile qu’est devenu l'OTAN. Les camés bellicistes aspirent à une solution apocalyptique.
Avec les économies capitalistes occidentales en pleine crise et les problèmes sociaux en hausse, le danger est bien réel que les hallucinations de l'OTAN sur la Russie et la Chine finissent par déclencher des guerres.
Les gouvernements imbéciles d'Europe sont tous, autant qu’ils sont, à la merci de Washington et des centres de commandement de l'OTAN ; ils acceptent les mensonges de la propagande et les font leur, niant ainsi la réalité. L'exemple le plus frappant est la complicité de l'OTAN avec les groupes terroristes djihadistes sur les théâtres du Moyen-Orient, en particulier en Libye et en Syrie, où l'OTAN a utilisé ces fanatiques pour renverser des gouvernements légitimes que Washington n'aime pas, pour ensuite devoir faire face au retour de ces terroristes, ceux qui ont quitté l'Europe (les fameux combattants étrangers) et tirer la sonnette d'alarme sur le danger d'attentats, qui se sont régulièrement produits en France, en Allemagne, en Belgique et en Grande-Bretagne. Cependant, la leçon de ces épisodes n'est jamais apprise par les laquais européens de Washington et de l'OTAN.
Note sur l’auteur :
*Finian Cunningham a beaucoup écrit sur les questions internationales, avec des articles publiés dans plusieurs langues. Il est diplômé en chimie agricole et a travaillé comme rédacteur scientifique pour la Royal Society of Chemistry, à Cambridge, en Angleterre, avant de poursuivre une carrière de journaliste d'investigation. Il est également musicien et auteur de chansons. Pendant près de 20 ans, il a travaillé comme rédacteur et écrivain dans des médias de premier plan, dont The Mirror, Irish Times et Independent.
Source : Information Clearing House
Traduction et note de bas de page : Luciano Lago
00:15 Publié dans Actualité, Affaires européennes, Géopolitique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : oran, atlantisme, occidentalisme, bellicisme, europe, affaires européennes, états-unis | | del.icio.us | | Digg | Facebook