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jeudi, 09 mai 2024

On recherche de nouveaux soixante-huitards. Désespérément.

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On recherche de nouveaux soixante-huitards. Désespérément.

Andrea Marcigliano

Source: https://electomagazine.it/68-cercasi-disperatamente/

Un vent étrange souffle. Plein d'échos anciens.

On dirait... le vent de 68.

Mais du vrai 68. Pas celui dont trop de gens se gavent depuis plus d'un demi-siècle. Le (faux) mythe petit-bourgeois des fils à papa qui descendent dans la rue et crient des slogans vides de sens. Pour eux. Contre les policiers et les carabiniers qui étaient souvent, eux, de vrais fils de paysans. Des gens ordinaires, normaux. Comme Pier Paolo Pasolini a eu le courage solitaire de l'écrire.

Non. C'est le vent qui rappelle le vrai 68. Celui des universités américaines. Qui est ensuite venu, en mai, à Paris. Et qui n'a tourné à la farce que plus tard, en Italie.

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À l'époque, la protestation des étudiants de Berkeley et d'autres universités américaines était alimentée par le spectre du Viêt Nam.

Une guerre qui s'intensifiait. Une guerre qui consumait la vie de jeunes Américains.

L'un des exemples les plus flagrants de la stupidité militaire. Et d'exploitation d'une guerre, inutile et sans fin, pour les intérêts de la finance et de l'industrie de la guerre.

Une guerre que Washington ne pouvait pas gagner. Principalement parce qu'elle ne voulait pas la gagner. Comme le dit le Gunny de Clint Eastwood. L'intérêt était dans la guerre. La poursuite de la guerre. Pas la victoire.

C'est l'autre Amérique qui est descendue dans la rue. Blessée par les images de marines revenant dans des sacs de jute. Par les images de la jungle dévorant les vies. Par la révélation des massacres de My Lay.

L'Amérique la plus authentique... bien que peut-être mal représentée par les hippies du campus avec leurs guitares et leurs symboles anarchistes. L'Amérique dont la "chute" a été chantée - ou peut-être prophétisée - par Allen Ginsberg. Et racontée par Kerouac dans Sur la route.

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C'était, en 68, le thermomètre d'une fièvre rampante. Et brûlante. Qui a conduit à cet "effondrement du front intérieur" qui a contraint Nixon à s'extraire du bourbier indochinois. Abandonnant à leur sort les Sud-Vietnamiens qui avaient cru aux promesses de Washington.

Et ce fut un destin tragique.

Mais la guerre, les guerres, aujourd'hui, ne sont plus menées pour gagner. Pour obtenir un résultat. Qu'il soit politique ou géopolitique. C'est un monstre qui se nourrit de lui-même. Qui a besoin de la guerre, et du sang, pour prospérer et s'enrichir.

Le Baal carthaginois en version gigantesque. Et mondial.

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D'où la guerre sans fin en Ukraine. Et celle, d'anéantissement, dans la bande de Gaza. Contre laquelle, surtout, les étudiants américains protestent. Les étudiants juifs aussi. Mais cela ne compte pas. Pour nos médias, ce sont de toute façon des antisémites.

Un nouveau 68 ? Capable d'émouvoir l'opinion publique et de forcer les politiques à mettre fin aux conflits et aux massacres ?

Pour cela, il faudrait qu'il y ait de la politique. Et surtout des hommes politiques. À Washington et en Europe. Capables d'interpréter les humeurs rebelles de leurs pays, qui transparaissent confusément dans ces manifestations, et, surtout, capables de faire des choix. De prendre des décisions de manière autonome.

Ce que les marionnettes ne peuvent pas faire.

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samedi, 16 décembre 2023

Guerres oubliées

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Guerres oubliées

Andrea Marcigliano

Source: https://electomagazine.it/guerre-dimenticate/#google_vignette

La guerre en Ukraine n'est que la dernière... la dernière d'une série, malheureusement longue, de guerres oubliées. Des guerres qui ont connu des moments d'attention médiatique, qui ont été sous les projecteurs des médias, qui ont fait l'objet d'analyses et de discussions... et puis, soudain, elles ont... disparu.

Celle de l'Ukraine, comme je l'ai dit, n'est que la dernière en date. Et, en même temps, le cas exemplaire. Depuis plus d'un an, nous sommes littéralement inondés de nouvelles - plus fausses que réelles - sur l'évolution du conflit. Inondés de reportages d'envoyés spéciaux... le plus souvent filmés loin de la ligne de front. Assaillies par des talk-shows où des experts improvisés discutent de stratégie militaire, annoncent l'effondrement imminent de la Russie, prophétisent la fin de Poutine...

Et Zelensky était emmené partout, comme s'il était la Mère Pèlerine. Nous en étions venus à soupçonner qu'il possédait le don d'ubiquité. Il apparaissait à l'ONU, dans les principales capitales européennes, dans tous les événements mondains et politiques. Il ne manquait pratiquement que le Zecchino d'Oro et le Zero Branco Pepper Festival.

Et puis, il était partout choyé, caressé, bécoté... le chouchou du public et des politiciens occidentaux.

Et puis, soudain, le silence. Un silence assourdissant. L'Ukraine est soudain redevenue une région périphérique. Une "marche frontière" (c'est le sens de son nom) entre l'Est russe et l'Europe centrale, principalement allemande. Une sorte de république d'opérette, une sorte de Pontevedro de la "Veuve joyeuse" de Lehar.

Et Zelenski ? Zelenski qui ? Vous vous entendez déjà répondre. Mais comment ? Zelenski, le héros de l'épopée de la résistance contre la tyrannie russe... Ah, ce monsieur (copyright de feu Silvio Berlusconi) qui se promenait toujours avec cette espèce de T-shirt militaire pas très propre... Eh bien... On n'a plus de nouvelles de lui. Peut-être s'est-il déjà enfui à l'étranger avec une bonne partie de l'argent qui lui a été généreusement prodigué à nos frais....

Quoi qu'il en soit, dira-t-on, la crise de Gaza a explosé. Les médias et l'opinion publique, inévitablement, ont changé d'angle de vue. Ubi maior...

Certes, mais... qui sait pourquoi cet oubli intervient à ce moment précis. Alors qu'il est désormais clair que la fameuse Grande contre-offensive ukrainienne a lamentablement échoué. Et que les forces de Kiev sont complètement désorganisées. Les Russes, avec leur lenteur historique de vieil ours, se préparent à reprendre l'initiative. Et, cette fois, il est très probable qu'au printemps, nous verrons les Tchétchènes de Kadyrov entrer dans la capitale ukrainienne.

Une nouvelle difficile à annoncer, après des mois de récits où les gentils de Zelenski étaient sur le point de s'emparer de Moscou. Et de faire fuir Poutine au-delà de l'Oural.

Film déjà vu. Quand les choses ont commencé à mal tourner en Afghanistan, Kaboul a disparu des médias. Il en a été de même en Irak, en Syrie, en Libye....

Le soft power, vous le savez, est une arme puissante. Et elle est presque entièrement entre les mains de l'Occident. C'est-à-dire de Washington et de ses satellites.

Puissant... mais les guerres se gagnent sur le terrain. Et pas sur des talk-shows et des reportages fabriqués de toutes pièces.

Et il y a, en plus, le risque d'un effet boomerang. Parce que "nous", Occidentaux, sommes tellement habitués à mentir, à falsifier l'actualité et la réalité, que nous risquons de prendre ces mensonges... incommensurables pour vrais et bons.

Nous bercer de l'illusion de victoires et de triomphes qui, en vérité, portent un autre nom: "défaites".

Et celui qui croit à ses propres mensonges est toujours voué au désastre.

samedi, 22 janvier 2022

Le peuple des vétérans des guerres américaines

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Le peuple des vétérans des guerres américaines

Marco Valle

Source: https://it.insideover.com/guerra/il-popolo-dei-veterani-delle-guerre-americane.html?fbclid=IwAR0GpBmbMzA7tnaT4vaZB2P_4BI7vgsVMuknHOwPfoSqRrANIlJ6o01XMu4

Dix-neuf millions d'hommes (89 %) et de femmes (11 %) se sont dispersés dans les États et les territoires associés, une "longue ligne grise" s'étendant entre le Maine et l'Alaska, la Virginie et Porto Rico, le Texas et Hawaï. Il s'agit des vétérans des nombreuses guerres américaines, des anciens combattants de la Seconde Guerre mondiale (en 2021, ils seront encore 220.000, soit 1 %) et de la Corée (5 %), des survivants du Vietnam (31 %) et de ceux, nombreux, qui ont combattu ces trente dernières années sur les différents fronts - Irak, Somalie, Afghanistan, etc. - mal ouverts et mal fermés par les différents présidents de Washington. Ils sont les plus jeunes et les plus nombreux (63%).

pic3.jpgUn fait intéressant est la composition ethnique de la galaxie des anciens combattants, des chiffres qui reflètent les changements en cours aux États-Unis. Les Blancs représentent toujours 74% du total, tandis que les Noirs comptent pour 13%, les Hispaniques pour 8% et les Asiatiques pour 2%. Cet équilibre va changer au cours des vingt prochaines années, lorsque les Blancs tomberont à 62 %, les Hispaniques monteront à 16 % et les Afro-Américains à 15 %.

Le ministère américain des Anciens combattants, qui coordonne une série de services - pensions, soins, assurances, placement, formation - gère 1500 hôpitaux et s'occupe de 151 cimetières (dans le pays et à l'étranger). Une machine énorme et très coûteuse: 387.000 employés (dont un tiers sont des vétérans) avec un budget annuel de 243 milliards de dollars. Des engagements et des chiffres significatifs qui ne gênent heureusement pas les contribuables très patriotes, au contraire. En effet, une enquête du Pew Research Centre a révélé que 72 % des Américains estiment que l'aide aux vieux soldats est une priorité nationale et que les investissements en leur faveur devraient être encore renforcés.

C'est un sentiment largement répandu et bien perçu en politique, notamment grâce au puissant lobby des vétérans dans les palais du pouvoir : 91 des 538 sénateurs et membres du Congrès élus à Washington ont porté le camouflage dans leur jeunesse (ou, dans certains cas, jusqu'à leur retraite) et 991 des 7559 élus dans les parlements des États fédéraux revendiquent fièrement un passé militaire. Évidemment, la grande majorité d'entre eux appartiennent au parti républicain et bénéficient du soutien d'associations très respectées et très populaires telles que VoteVets ou l'American Legion. C'est pourquoi le gouvernement soutient des programmes qui facilitent l'entrée des anciens combattants dans l'administration publique et la police (19% de la force réelle) ou dans la sécurité privée.

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Une somme de mesures qui a permis (à l'inverse de la tendance américaine) de faire baisser le taux de chômage à 3,8 % et de réduire le nombre de vétérans sans abri (de 74.000 en 2010 à 37.000 en 2019) en neuf ans. Un fléau qui a toujours son épicentre en Virginie occidentale et qui s'étend de l'Indiana au Missouri, du Nouveau-Mexique au Montana et à l'Oregon.

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La question de la santé est tout aussi problématique. En 2020, le rapport du ministère américain des Anciens combattants dénombrait un taux de 41 % d'amputés parmi les vétérans d'Irak et d'Afghanistan - les volontaires de l'après-11 septembre 2001 -, des personnes encore jeunes mais désormais incapables ou presque de travailler, et un nombre tout aussi élevé (44 %) de vétérans traumatisés par les combats. Un segment de désespoir qui oscille dans la dépression quotidienne avec des chutes dans l'alcoolisme, la drogue ou pire. Chaque année, plus de six mille anciens militaires, tenaillés par leurs fantômes, choisissent de se suicider. La guerre, toute guerre, est un monstre hideux.

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vendredi, 11 septembre 2015

American False Flags That Started Wars

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American False Flags That Started Wars

In this March 13, 1964 file photo, President Lyndon Johnson, right, talks with Secretary of Defense Robert McNamara, center sitting, after McNamara returned from a fact-finding trip to South Vietnam, at the White House in Washington. Fifty years ago Sunday, Aug. 10, 2014, reacting to reports of a U.S. Navy encounter with enemy warships in the Gulf of Tonkin off Vietnam, reports long since discredited, Johnson signed a resolution passed overwhelmingly by Congress that historians call the crucial catalyst for deep American involvement in the Vietnam War. (AP Photo/File)

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KITCHENER, Ontario — As this is being written, Congress is experiencing extensive and dramatic hand-wringing as it decides between doing what is best for the country and the world or doing what is best for the American Israel Political Affairs Committee. This is no easy task for members of Congress, especially Democrats who, on the one hand, want to assure a “victory” for President Barack Obama, but who are also loathe to displease the Israeli lobby. Whether preventing a war factors into their deliberations is not known.

AIPAC and its countless minions in Congress are painting the recent agreement reached between Iran and the P5+1 (China, France, Russia, the United Kingdom, and the United States, plus Germany), as nothing short of the end of Israel.

If this deal preventing Iran from developing nuclear weapons is approved, they warn darkly, Iran will secretly develop nuclear weapons. This will mean the destruction of Israel, they say. But if it isn’t approved, Iran will develop such weapons. This, they say, will also mean the destruction of Israel. Feel free to re-read those sentences whenever time allows.

From this point of view, the only alternative is war, with the ostensible purpose of destroying Iran’s nuclear capabilities — capabilities that the Islamic Republic has always said are for peaceful energy purposes. Yet the risk of Iran ever having nuclear weapons is too great. If it did obtain them, then Israel would have a hostile nation to counterbalance its power in the Middle East, and, of course, it doesn’t want that competition. And whatever Israel wants, the U.S. wants. Hence the fear-mongering.

This is a tried-and-true method in the U.S. of getting wars started: Tell lies about some situation that can be construed as a threat to U.S. security (or in this case, Israel’s national security, which seems to be threatened by just about everything), get the populace riled up with jingoistic fervor, watch pompous politicians proclaim their great patriotism on the evening news, and then go bomb some country or other.

The U.S. again gets to flex its international muscle, the citizenry is, for some bizarre reason, proud of the destruction the country has caused, the weapons manufacturers spend all their time tallying their astronomical profits, and all is once again right in the twisted world of U.S. governance.

A few examples will suffice to show that this means of starting wars has been used repeatedly. The examples discussed herein do not by any means represent an exhaustive list, but only show that lying to the world to make the citizenry believe that the U.S. or its citizens had been threatened in some way, and that war was the only response, is business as usual in the U.S.

The War of 1812 (June 18, 1812 – Feb. 18, 1815)

Less than 40 years after the American Revolution, the still-new U.S. government felt constrained in areas of international trade, despite tremendous growth in such trade in the years leading up to the war. In 1811, Britain issued an Order-in-Council, excluding American salted fish from the West Indian colonies and imposing heavy duties on other U.S. imports. This, the U.S. could not countenance.

Additionally, although the heady concept of Manifest Destiny would not actually be defined for several more years, territorial expansion was always on the minds of the leaders of the fledgling nation. Canada, with its rich abundance of natural resources and wide expanses of land, was coveted.

The Battle Lake Borgne Hornbrook, War of 1812.

The Battle Lake Borgne Hornbrook, War of 1812.

Yet trade and expansion were not foremost on the minds of the populace, at least not sufficiently for them to support a war. But many nations at this time had a policy of impressment, wherein the ships of another country were boarded, and their sailors kidnapped and forced to work for the kidnapping navy. This was something with which the common man and woman could identify. Although this wasn’t a common occurrence, it was exaggerated and combined with the trade issues to introduce the rallying cry of “Free Trade and Sailor’s Rights,” Carl Benn wrote in his 2003 book “Essential Histories: The War of 1812.” However, this wasn’t a simple, spontaneous cry of justice. It seems to have been promoted by annexationists running the government, and was sufficient for the U.S. to start an unsuccessful war against Canada.

Spanish-American War (April 25, 1898 – Aug 12. 1898)

Fast-forward to the end of the 19th century. On Feb. 15, 1898, the battleship Maine exploded in Havana harbor, killing 266 men. According to Hyman George Rickover, in his 1976 book “How the Battleship Maine was Destroyed”:

“Lieutenant Frank F. Fletcher, on duty at the Bureau of Ordnance, wrote in a personal letter to [Lieutenant Albert] Gleaves: ‘The disaster to the Maine is the one topic here now. Everybody is gradually settling down to the belief that the disaster was due to the position of the magazine next to the coal bunkers in where there must have been spontaneous combustion.’”

Theodore Roosevelt (center front, just left of the flag) and his "Rough Riders," 1898.

Theodore Roosevelt (center front, just left of the flag)
and his “Rough Riders,” 1898.

The official inquiry into the disaster, however, concluded that an underwater mine had been the culprit. With the battle cry “Remember the Maine,” the U.S. quickly declared war on Spain.

But this “inquiry” was more than a bit flawed. Two widely-recognized experts in ordnance volunteered their services for the investigation, but were not invited to participate. One of them, Prof. Philip Alger, had greatly displeased Secretary of the Navy, and future president, Theodore Roosevelt, when he commented on the disaster in an interview for the Washington Evening Star a few days after it happened. He said, in part, the following, as reproduced by Rickover:

“As to the question of the cause of the Maine’s explosion, we know that no torpedo that is known to modern warfare, can of itself cause an explosion of the character of that on board the Maine. We know of no instances where the explosion of a torpedo or mine under a ship’s bottom has exploded the magazine within. It has simply torn a great hole in the side or bottom, through which water entered, and in consequence of which the ship sunk. Magazine explosions, on the contrary, produce effects exactly similar to the effects of the explosion on board the Maine. When it comes to seeking the cause of the explosion of the Maine’s magazine, we should naturally look not for the improbable or unusual causes, but those against which we have had to guard in the past.”

But Roosevelt was anxious to establish the U.S. as a world power, especially in terms of its Navy. By accusing Spain of blowing up the ship, he had the perfect excuse to launch the Spanish-American War.

The Vietnam War (major U.S. involvement: 1964 – 1975)

Off the coast of China and northern Vietnam is the Gulf of Tonkin, which was the staging area for the U.S. Seventh Fleet in the early 1960s. On the evening of Aug. 4, 1964, the U.S. destroyers Maddox and the C. Turner Joy were in the gulf, when the Maddox’s instruments indicated that the ship was under attack or had been attacked. Both ships began firing into the darkness, with support from U.S. warplanes. However, they “later decided they had been shooting at ghost images on their radar. … The preponderance of the available evidence indicates there was no attack.”

U.S. Huey helicopter spraying Agent Orange over Vietnam. (Photo by the U.S. Army Operations in Vietnam R.W. Trewyn, Ph.D.)

U.S. Huey helicopter spraying Agent Orange over Vietnam. (Photo by the U.S. Army Operations in Vietnam R.W. Trewyn, Ph.D.)

Yet something needed to be done about Vietnam, with anti-Communist hysteria still rampant in the U.S., and this gave Congress the perfect ploy to escalate the war. This non-incident was presented to the world as an act of aggression against the U.S. Congress quickly passed the Gulf of Tonkin resolution. By the end of the following year, the number of U.S. soldiers invading Vietnam increased from 23,000 to 184,300. Eleven years later, with over 55,000 U.S. soldiers dead, hundreds of thousands wounded, and, by conservative estimates, 2,000,000 Vietnamese dead, the U.S. fled Vietnam in defeat.

The Gulf War (Aug. 2, 1990 – Feb. 28, 1991)

In order to gain support for the Gulf War of 1990, Congress and President George Bush relied heavily on what is commonly referred to as the Nayirah testimony. In early October 1990, a 15-year-old girl referred to only as “Nayirah,” who claimed to have been a hospital volunteer, testified of seeing babies dumped by Iraqi soldiers from hospital incubators. This, in the eyes of Congress and the president, highlighted the monstrosity of Iraq, and was widely used to gain support for the war.

However, like nearly all of the information the government feeds to the citizenry to start its wars, this testimony was all lies. “Nayirah” was actually the daughter of the Kuwaiti ambassador to the U.S. She later admitted that she had once visited the hospital in question, but only for a few minutes. She did see an infant removed from an incubator, but only very briefly. A group called Citizens for a Free Kuwait had hired one of the world’s foremost public relations firms, Hill and Knowlton, to create the illusion of legitimacy for an invasion. They coached “Nayirah” on what to say and how to say it when she appeared before Congress.

We will do no more than mention the U.S.’s drafting of a letter for Grenada to send to the U.S., requesting military intervention when that small island nation’s government was overthrown in 1983. Nor will we dwell on the weapons of mass destruction that Iraq was said to possess in 2002, which justified in the eyes of U.S. citizens the disastrous 2003 invasion of that nation. But as we look at this ugly record of lies that the U.S. has used to expand its territory, power and/or influence around the world, we must consider that it is once again using the same tactics to march the nation toward war with Iran.

Responding to Iraq's invasion of Kuwait, troops of the U.S. 1st Cavalry Division deploy across the Saudi desert on Nov. 4, 1990 during preparations prior to the Gulf War. (AP Photo/Greg English, File)

Responding to Iraq’s invasion of Kuwait, troops of the U.S. 1st Cavalry Division deploy across the Saudi desert on Nov. 4, 1990 during preparations prior to the Gulf War. (AP Photo)

The U.S. for generations was successful in deceiving its citizens, and a good part of the world, that it was a beacon of freedom and peace, despite the fact that it has been at war for most of its bloody existence. That myth began to crack during the Vietnam War, broke into pieces with the Iraq War, and may have been dealt a fatal blow by the U.S.’s support of Israeli atrocities in 2014.

Robert Fantina 

Regardless of the outcome of the congressional vote on the Iran agreement, the U.S. will find itself less able to lie its way into corporate wars in the future. That capacity diminished during the lead-up to the Iraqi invasion, and while no one ever went broke betting on the gullibility and short-term memory of the U.S. citizenry, people are beginning to wake up. When they finally do, much of the carnage in the world will end. That day cannot come soon enough.

mardi, 25 décembre 2012

Les guerres auto-génératrices des États-Unis

Analyse géopolitique : Les guerres auto-génératrices des États-Unis

 
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Les guerres auto-génératrices des États-Unis

Aujourd’hui, le défi politique le plus pressant au monde est celui d’empêcher que la soi-disant “Pax Americana” ne dégénère progressivement vers un conflit mondial majeur, comme ce fut le cas au dix-neuvième siècle durant la soi-disant “Pax Britannica”. J’emploie le terme “soi-disant” car chacune de ces “pax”, dans ses derniers stades, est devenue de moins en moins pacifique et ordonnée, mais de plus en plus centrée sur l’imposition d’une puissance compétitrice, belliciste et inégalitaire par essence.

Il pourrait sembler prétentieux de considérer la prévention de cette guerre comme un but atteignable. Néanmoins, les mesures pour y parvenir sont loin d’être irréalisables ici même, aux États-Unis. Pour cela, nous n’avons pas besoin d’une nouvelle politique radicale et inédite, mais d’une réévaluation réaliste et indispensable de deux politiques récemment mises en œuvre – qui ont été discréditées et qui se sont avérées contre-productives –. Il faudrait alors nous en désengager progressivement.

Je fais avant tout référence à la soi-disant “guerre contre la terreur” menée par les États-Unis. Dans ce pays, les politiques intérieure et étrangère sont de plus en plus altérées par une guerre contre le terrorisme qui est contre-productive, augmentant en fait le nombre d’auteurs et de victimes d’attaques terroristes. Elle est aussi profondément malhonnête, sachant que les politiques de Washington contribuent en réalité à financer et à armer les jihadistes qui sont normalement censés être des ennemis.

Par-dessus tout, la “guerre contre la terreur” est auto-génératrice puisqu’elle produit plus de terroristes qu’elle n’en élimine, comme de nombreux experts s’en sont alarmés. Et elle est devenue inextricablement liée à la “guerre contre la drogue”, la précédente campagne auto-génératrice et désespérément ingagnable des États-Unis.

En effet, ces deux guerres auto-génératrices n’en font aujourd’hui qu’une seule. En lançant la “guerre contre la drogue”, les États-Unis ont favorisé un para-État organisant la terreur en Colombie (appelé l’AUC, pour Autodéfenses Unies de Colombie), ainsi qu’un règne de l’horreur encore plus sanglant au Mexique (avec 50 000 personnes tuées ces six dernières années). (1) En déclenchant en 2001 une “guerre contre le terrorisme” en Afghanistan, les États-Unis ont contribué à doubler la production d’opium dans ce pays, qui est ainsi devenu la source de 90% de l’héroïne mondiale et de la plus grande part globale du hachich. (2)

Il faudrait que les citoyens des États-Unis prennent conscience de ce schéma général voulant que la production de drogue augmente systématiquement là où leur pays intervient militairement – en Asie du Sud-Est dans les années 1950 et 1960, en Colombie et en Afghanistan ensuite. (La culture de l’opium a aussi augmenté en Irak après l’invasion de ce pays par l’U.S. Army en 2003.) (3) Et le contraire est également avéré : la production de drogue décline là où les États-Unis stoppent leurs interventions militaires, notamment en Asie du Sud-Est depuis les années 1970. (4)

Les deux guerres auto-génératrices des États-Unis sont lucratives pour les intérêts privés qui font du lobbying afin qu’elles se poursuivent. (5) Dans le même temps, elles contribuent toutes deux à amplifier l’insécurité et l’instabilité en Amérique et dans le monde.

Ainsi, à travers une dialectique paradoxale, le Nouvel Ordre Mondial des États-Unis dégénère progressivement vers un Nouveau Désordre Mondial. Par ailleurs, bien que semblant invincible, l’État de sécurité nationale, assailli par des problèmes de pauvreté, de disparité de revenus et de drogue, devient progressivement un État d’insécurité nationale paralysé par des blocages institutionnels.

En utilisant l’analogie des erreurs britanniques de la fin du dix-neuvième siècle, l’objectif de ce travail est de promouvoir un retour progressif à un ordre international plus stable et plus juste par une série de mesures concrètes, dont certaines seraient mises en œuvre par étapes. En utilisant comme exemple le déclin de la Grande-Bretagne, j’espère démontrer que la solution ne peut venir du système actuel centré sur les partis politiques, mais de personnes qui lui sont extérieures.

Les folies de la Pax Britannica

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Les ultimes erreurs des leaders impériaux britanniques sont particulièrement instructives pour comprendre notre situation difficile aujourd’hui. Dans les deux cas, un excès de puissance par rapport aux véritables besoins défensifs a conduit à des expansions d’influence de plus en plus injustes et contre-productives. Mon analyse dans les paragraphes suivants est univoquement négative. En effet, elle ignore les accomplissements positifs du système impérial dans les domaines de la santé et de l’éducation à l’étranger. Cependant, la consolidation de la puissance britannique conduisit à l’appauvrissement de nations autrefois prospères telles que l’Inde. Elle aboutit également à une paupérisation des travailleurs en Grande-Bretagne. (6)

Comme Kevin Phillips l’a démontré, l’une des principales raisons à ce phénomène fut la délocalisation croissante des capitaux d’investissement et de la capacité productive britanniques :

«Ainsi bascula la Grande-Bretagne dans des conditions semblables à celles des États-Unis dans les années 1980 et dans la majeure partie des années 1990 – d’une part, un effondrement du niveau des salaires (hors postes de direction) accompagné d’un déclin des industries de base ; et au sommet de l’échelle, un âge d’or pour les banques, les services financiers et les valeurs boursières, une nette augmentation dans la part du revenu généré par l’investissement, ainsi qu’un impressionnant pourcentage des profits et des ressources se concentrant vers le percentile du sommet.» (7)

Les dangers des disparités croissantes de revenus et de richesses étaient facilement identifiés à cette époque, notamment par le jeune politicien Winston Churchill. (8) Mais seule une minorité avait remarqué l’analyse perspicace de John A. Hobson dans son livre intitulé Imperialism (1902). Selon lui, la recherche immodérée du profit – cause de la délocalisation du capital hors des frontières –, créa le besoin d’établir un appareil de défense surdimensionné pour protéger ce système. À l’étranger, l’une des conséquences de ce phénomène a été un usage plus étendu et brutal des armées britanniques. Hobson définit l’impérialisme de son époque, qui débuta selon lui vers 1870, comme « un affaiblissement […] de l’authentique nationalisme, à travers des tentatives de déborder de nos rivages naturels et d’absorber les territoires proches ou lointains où vivent des peuples récalcitrants et inassimilables. » (9)

Comme l’avait écrit en 1883 Sir John Robert Seeley, un historien de Grande-Bretagne, on pourrait dire de l’Empire britannique qu’il avait été « acquis dans un élan d’inadvertance » (« in a fit of absence of mind »). Mais on ne pourrait l’affirmer au sujet des avancées de Cecil Rhodes en Afrique. L’une des causes premières de l’expansion britannique a été la mauvaise répartition des richesses, et elle en fut également une inévitable conséquence. La majeure partie du livre d’Hobson attaquait l’exploitation occidentale du Tiers-Monde, en particulier en Afrique et en Asie. (10) Il faisait ainsi écho à la description, par Thucydide, de

« comment Athènes fut défaite par la cupidité sans limite (pleonexia) dont elle a fait preuve lors de son expédition inutile en Sicile, une folie présageant celles des États-Unis au Vietnam et en Irak [ainsi que de la Grande-Bretagne en Afghanistan et dans le Transvaal]. Thucydide attribua l’émergence de cette folie aux rapides changements qu’Athènes a connus après la mort de Périclès, et en particulier à la montée en puissance d’une oligarchie prédatrice. » (11)

À la fois l’apogée de l’Empire britannique et le début de son déclin peuvent être situés dans les années 1850. Durant cette décennie, Londres institua un contrôle direct sur l’Inde, remplaçant ainsi la Compagnie des Indes qui avait purement une fonction d’exploiteur.

Mais dans la même décennie, la Grande-Bretagne s’est entendue avec la France ouvertement expansionniste de Napoléon III (et avec l’Empire ottoman) dans ses ambitions hostiles envers le statut de la Russie en Terre Sainte. Bien que la Grande-Bretagne sortît vainqueur de la guerre de Crimée, les historiens ont depuis jugé cette victoire comme l’une des principales causes de la rupture dans l’équilibre des puissances, qui avait prévalu en Europe depuis le Congrès de Vienne en 1815. Ainsi, pour la Grande-Bretagne, l’héritage de cette guerre fut une armée plus efficace et modernisée, mais un monde plus dangereux et instable. (À l’avenir, les historiens pourraient juger que l’aventure libyenne de l’OTAN en 2011 ait joué un rôle comparable dans la fin de la détente entre les États-Unis et la Russie.)

La guerre de Crimée a également vu l’émergence de ce qui fut peut-être le premier mouvement antiguerre important en Grande-Bretagne, bien que l’on s’en souvienne avant tout car il mit fin aux rôles politiques actifs de ses principaux leaders, John Codben et John Bright. (12) En peu de temps, les gouvernements et les dirigeants de Grande-Bretagne se sont radicalisés vers la droite. Ceci conduisit, par exemple, au bombardement de l’Alexandrie par Gladstone en 1882, afin de recouvrer les dettes que les Égyptiens avaient contractées auprès d’investisseurs privés britanniques.

En lisant l’analyse économique d’Hobson à la lumière des écrits de Thucydide, nous pouvons réfléchir sur le facteur moral de la cupidité démesurée (pleonexia) encouragée par une puissance britannique sans limitations. En 1886, la découverte de réserves d’or colossales au sein de la république boer du Transvaal, qui était nominalement indépendante, attira l’attention de Cecil Rhodes – ce dernier s’étant déjà enrichi grâce aux concessions minières et diamantaires qu’il avait malhonnêtement acquises dans le Matabeleland –. Rhodes voyait alors une opportunité de s’accaparer également les champs aurifères dans le Transvaal, en renversant le gouvernement boer avec le soutien des Uitlanders (les étrangers, majoritairement britanniques, qui avaient afflué dans cette région).

En 1895, après l’échec de ses manigances impliquant directement les Uitlanders, Cecil Rhodes, en sa qualité de Premier ministre de la Colonie britannique du Cap, soutint une invasion du Transvaal par ce que l’on appelle le raid Jameson – un groupe hétérogène composé de membres de la police montée et de mercenaires volontaires –. Ce raid n’aboutit pas seulement à un échec, mais également à un scandale : Rhodes fut contraint de démissionner de son poste de Premier ministre, et son frère fut emprisonné. Les détails du raid Jameson et de la guerre des Boers engendrée par cette opération sont trop complexes pour être abordés ici. Néanmoins, le résultat final est qu’à l’issue de cette guerre, Cecil Rhodes s’était accaparé la majeure partie des champs aurifères.

L’étape suivante dans l’expansionnisme abondamment financé de Rhodes fut sa vision d’un chemin de fer entre le Cap et le Caire, qui aurait traversé les colonies contrôlées par la Grande-Bretagne. Comme nous le verrons dans quelques lignes, ce projet engendra la vision française concurrente d’un chemin de fer “est-ouest”, ce qui déclencha une première série de crises attisées par la compétition impériale. Progressivement, ces crises s’intensifièrent jusqu’à engendrer la Première Guerre mondiale.

Selon Carroll Quigley, Cecil Rhodes fonda également une société secrète ayant comme objectif principal une plus large expansion de l’Empire britannique. La Table Ronde (Round Table) en fut une ramification, et elle généra à son tour l’Institut Royal des Relations Internationales (RIIA pour Royal Institute of International Affairs). En 1917, certains membres de la Table Ronde états-unienne contribuèrent également à fonder l’organisation sœur du RIIA, le Conseil des Relations Étrangères basé à New York (CFR pour Council on Foreign Relations). (13)

Certains analystes ont jugé que l’argument de Carroll Quigley était exagéré. Cependant, que l’on soit d’accord ou pas avec ce dernier, nous pouvons observer une continuité entre l’avidité expansionniste de Cecil Rhodes en Afrique dans les années 1890 et celle des entreprises pétrolières britanniques et états-uniennes durant l’après-guerre, lors des coups d’État soutenus par le CFR en Iran (1953), en Indonésie (1965) et au Cambodge (1970).14 Dans tous ces exemples, la cupidité privée (bien qu’elle émanait d’entreprises plutôt que d’individus) imposa la violence d’État et/ou la guerre comme questions de politique publique. Il en résulta l’enrichissement et le renforcement des entreprises privées au sein de ce que j’ai appelé la Machine de guerre américaine, ce processus affaiblissant les institutions qui représentent l’intérêt général.

Mon argument central est que, de façon prévisible, le développement progressif de la marine et des armées britanniques a provoqué un réarmement chez les autres puissances, particulièrement en France et en Allemagne ; et ce processus a rendu inévitable la Première Guerre mondiale (ainsi que la Seconde). Rétrospectivement, il n’est pas difficile de remarquer que ce renforcement des appareils militaires ait contribué, de manière désastreuse, non pas à la sécurité mais à une insécurité de plus en plus dangereuse – pas seulement pour les puissances impériales mais pour le monde entier –. Puisque la suprématie globale des États-Unis surpasse aujourd’hui celle de l’Empire britannique à son apogée, nous n’avons pas observé, jusqu’à présent, de répercussions comparables dans les ambitions concurrentielles d’autres États ; néanmoins, une augmentation des réactions violentes venant de peuples de plus en plus opprimés (ou ce que les médias appellent “le terrorisme”) commence à se faire ressentir.

En regardant en arrière, nous pouvons également constater que l’appauvrissement progressif de l’Inde et d’autres colonies assura le fait que l’Empire britannique deviendrait de plus en plus instable, et qu’il serait finalement condamné à disparaître. Cela ne semblait pas évident à cette époque ; et au dix-neuvième siècle, comparativement à aujourd’hui, peu de Britanniques autres que John A. Hobson remettaient en cause les décisions politiques qui conduisirent leur pays de la Longue Dépression des années 1870 jusqu’à la “ruée vers l’Afrique” et la course aux armements correspondante. (15) Pourtant, lorsque l’on examine aujourd’hui ces décisions, on ne peut que s’étonner de l’étroitesse d’esprit, de la stupidité et de la courte vue des prétendus hommes d’État de cette époque. Les crises absurdes mais alarmantes que leurs décisions ont généré dans des contrées lointaines d’Afrique, comme à Fachoda (1898) ou à Agadir (1911), renforcent cette idée. (16)

Nous pouvons également remarquer comment des crises internationales ont pu être initialement provoquées par de très petites factions bureaucratiques hors de contrôle. La crise de Fachoda, au Sud-Soudan, impliqua une troupe insignifiante de 132 officiers et soldats français. Ces derniers, après un périple de 14 mois, étaient animés par le vain espoir d’établir une présence française d’est en ouest à travers l’Afrique (projetant ainsi de contrecarrer la vision qu’avait Rhodes d’une présence britannique s’étendant du nord au sud du continent africain). (17) Lors de ce que l’on appelle le “coup d’Agadir” (ou Panzersprung), l’arrivée provocatrice de la canonnière allemande SMS Panzer dans cette ville marocaine était une idée insensée d’un secrétaire adjoint aux Affaires étrangères ; sa principale conséquence fut de cimenter l’Entente cordiale franco-anglaise, contribuant ainsi à la défaite de l’Allemagne durant la Première Guerre mondiale. (18)

La Pax Americana à l’aune de la Pax Britannica

Le monde n’est pas condamné à répéter la tragédie d’une guerre mondiale à l’époque de la Pax Americana. L’interdépendance globale, et par-dessus tout les communications, ont connu une importante amélioration. Nous possédons le savoir, les compétences et les motivations pour comprendre les processus historiques avec plus de maîtrise qu’auparavant. Essentiellement, il est de plus en plus évident pour une minorité globale que l’hyper-militarisme des États-Unis, justifié par des motifs sécuritaires, devient en fait une menace pour la sécurité de ce pays et du monde entier. En effet, cette tendance belliciste suscite et déclenche des guerres de plus en plus vastes – ce qui rappelle l’hyper-militarisme britannique du dix-neuvième siècle.

Au milieu de ce déséquilibre global grandissant, il existe un motif de consolation pour le peuple des États-Unis. Puisque les causes de l’insécurité mondiale se situent de plus en plus dans leur pays, les remèdes à ce problème s’y trouvent également. Bien plus que leurs prédécesseurs britanniques, et contrairement aux autres peuples aujourd’hui, les citoyens des États-Unis ont l’opportunité de réduire les tensions globales et d’évoluer ainsi vers un ordre international plus équitable. Bien entendu, nul ne peut prédire qu’une telle restauration puisse être accomplie. Toutefois, la fin catastrophique de la Pax Britannica et le fardeau de plus en plus lourd que doivent supporter les citoyens états-uniens suggèrent qu’elle est nécessaire. En effet, l’expansionnisme unilatéral de leur pays, comme celui de la Grande-Bretagne autrefois, contribue actuellement à rompre les ententes et les arrangements juridiques internationaux qui ont apporté une relative stabilité pendant des décennies – notamment ceux de la Charte des Nations Unies.

Il doit être clairement affirmé que l’actuel renforcement de l’appareil militaire des États-Unis est la principale cause du réarmement global. De façon préoccupante, ce processus rappelle la course aux armements alimentée par l’industrie militaire britannique, qui conduisit au coup d’Agadir en 1911 et, peu après, à la Première Guerre mondiale. Cependant, le réarmement actuel ne peut être qualifié de “course aux armements”. En effet, les États-Unis – et leurs alliés de l’OTAN, dont la politique requiert de posséder des armements compatibles –, dominent tellement le marché militaire mondial que les ventes d’armes correspondantes de la Russie et de la Chine apparaissent dérisoires en comparaison :

«En 2010 […] les États-Unis ont maintenu leur position dominante dans la foire globale de l’armement, signant pour 21,3 milliards de dollars d’exportations d’armes, soit une part de 52,7% [du marché international] […].

La Russie occupait la deuxième position, avec des ventes d’armements à hauteur de 7,8 milliards en 2010, soit 19,3% du marché, contre 12,8 milliards de dollars en 2009. En termes de ventes, derrière les États-Unis et la Russie, on retrouve la France, la Grande-Bretagne, la Chine, l’Allemagne et l’Italie.» (19)

Un an plus tard, l’ampleur de l’hégémonie absolue des États-Unis dans les exportations d’armements avait plus que doublé, pour représenter 79% des ventes d’armes globales :

« L’année dernière, les exportations d’armes des États-Unis ont totalisé 66,3 milliards [de dollars], soit plus des trois quarts du marché mondial de l’armement, estimé à 85,3 milliards en 2011. Bien qu’étant en deuxième position, la Russie était loin derrière, enregistrant des ventes à hauteur de 4,8 milliards. » (20)

Et actuellement, quelle est la principale activité de l’OTAN nécessitant des armes ? Non pas la défense contre la Russie, mais le soutien des États-Unis pour leur guerre auto-génératrice contre le terrorisme, en Afghanistan comme autrefois en Irak. La “guerre contre la terreur” devrait être perçue comme ce qu’elle est réellement : un prétexte pour maintenir une armée US dangereusement hypertrophiée, à travers un exercice injuste du pouvoir qui s’avère de plus en plus instable.

En d’autres termes, les États-Unis sont aujourd’hui, et de loin, le premier pays à inonder le monde avec de l’armement. Les citoyens de ce pays doivent impérativement exiger une réévaluation de ce facteur d’aggravation de la pauvreté et de l’insécurité. Nous devons nous remémorer la célèbre mise en garde d’Eisenhower en 1953, selon laquelle «[c]haque fusil qui est fabriqué, chaque navire de guerre déployé, chaque roquette tirée signifie – est, dans son sens ultime, – un vol perpétré contre ceux qui ont faim et qui ne peuvent se nourrir, contre ceux qui ont froid et qui ne peuvent se vêtir». (21)

Il est nécessaire de rappeler que le Président Kennedy, dans son discours prononcé le 10 juin 1963 à l’American University, esquissa une vision de paix qui ne serait pas explicitement «une Pax Americana imposée au monde par les armes de guerre américaines». (22) Bien qu’éphémère, sa vision était sage. Soixante ans après la genèse du système de sécurité US – la soi-disant Pax Americana –, les États-Unis eux-mêmes se retrouvent piégés dans une situation d’insécurité psychologique de plus en plus marquée par la paranoïa. Les caractéristiques traditionnelles de la culture états-unienne, comme le respect de l’habeas corpus et du droit international, sont en train d’être abandonnées à cause d’une prétendue menace terroriste qui, pourtant, est en grande partie engendrée par les États-Unis. Et ce phénomène est observable au sein même de ce pays autant qu’à l’étranger.

L’alliance secrète USA-Arabie

OBAMA ET ABDALLAH POUR UNE SOLUTION À DEUX ÉTATS AU PROCHE-ORIENT

Des 66,3 milliards de dollars d’exportations d’armes US en 2011, plus de la moitié était destinée à l’Arabie saoudite, ce qui représente 33,4 milliards de dollars. Ces ventes incluaient des dizaines d’hélicoptères de types Apache et Black Hawk qui, selon le New York Times, sont nécessaires à l’Arabie saoudite pour se défendre contre l’Iran. Néanmoins, ils correspondent davantage à l’implication croissante de ce pays dans des guerres asymétriques et agressives (par exemple en Syrie). (23)

Ces ventes d’armes à l’Arabie saoudite n’étaient pas fortuites ; elles sont le fruit d’un accord entre les deux pays destiné à compenser l’afflux de dollars US utilisés pour payer le pétrole saoudien. Durant les chocs pétroliers de 1971 et de 1973, le Président Nixon et Henry Kissinger négocièrent un accord avec l’Arabie saoudite et l’Iran afin de payer le pétrole brut à des prix bien plus élevés, mais à condition que ces deux pays recyclent leurs pétrodollars de différentes manières – principalement par des achats d’armements US . (24)

La richesse des États-Unis et celle de l’Arabie saoudite sont devenues plus interdépendantes que jamais, ce qui est ironique. En effet, pour reprendre les termes d’un câble diplomatique ayant fuité, «[l]es donateurs saoudiens restent les principaux financeurs de groupes extrémistes comme al-Qaïda». (25) La Rabita (ou Ligue Islamique Mondiale), lancée et massivement financée par la famille royale saoudienne, a fourni un lieu pour les rencontres internationales de salafistes mondialement actifs, incluant certains leaders d’al-Qaïda. (26)

En résumé, les richesses générées par la relation entre les États-Unis et l’Arabie saoudite financent autant les jihadistes apparentés à al-Qaïda qui opèrent à travers le monde que les guerres auto-génératrices menées contre ces derniers par les forces US. Il en découle une militarisation croissante aussi bien à l’étranger qu’aux États-Unis, à mesure qu’apparaissent de nouveaux fronts dans la soi-disant “guerre contre la terreur” au sein de régions autrefois paisibles, telles que le Mali – cette évolution étant initialement prévisible.

Les médias ont tendance à présenter la “guerre contre la terreur” comme un conflit opposant des gouvernements légitimes à des fondamentalistes islamistes fanatiques et hostiles à la paix. En réalité, la plupart des pays collaborent périodiquement avec les mêmes forces qu’ils combattent à d’autres occasions, et ce depuis longtemps. Les États-Unis et la Grande-Bretagne ne font pas figure d’exception à cette règle.

Aujourd’hui, la politique étrangère des États-Unis est de plus en plus chaotique, en particulier leurs opérations clandestines. Dans certains pays, notamment en Afghanistan, les États-Unis sont en train de combattre des jihadistes que la CIA avait soutenus dans les années 1980, et qui bénéficient encore du soutien de nos alliés nominaux que sont l’Arabie saoudite et le Pakistan. Dans d’autres nations, comme en Libye, les États-Unis ont apporté leur protection et leur appui indirect au même genre d’islamistes. Il existe également des pays, notamment le Kosovo, au sein desquels les États-Unis ont aidé les fondamentalistes à accéder au pouvoir. (27)

Au Yémen, les autorités US ont concédé que leurs clients y soutenaient des jihadistes. Comme l’a rapporté l’universitaire Christopher Boucek il y a quelques années, s’exprimant devant la fondation Carnegie Endowment of International Peace,

« [l]’extrémisme islamiste au Yémen résulte d’un processus long et complexe. Dans les années 1980, un grand nombre de Yéménites ont participé au jihad antisoviétique en Afghanistan. Après la fin de l’occupation soviétique, le gouvernement yéménite encouragea ses citoyens à revenir, et il permit également aux vétérans étrangers de s’installer au Yémen. La plupart de ces Arabes afghans furent cooptés par le régime et intégrés au sein des différentes administrations sécuritaires de l’État. Ce genre de cooptation fut également mené au profit d’individus emprisonnés par le gouvernement yéménite après les attaques terroristes du 11-Septembre. Dès 1993, dans un rapport des renseignements aujourd’hui déclassifié, le Département d’État US avait relevé que le Yémen était en train de devenir un important point de chute pour de nombreux combattants ayant quitté l’Afghanistan. Ce rapport assurait également que le gouvernement yéménite était soit réticent, soit incapable de restreindre leurs activités. Durant les années 1980 et 1990, l’islamisme et les activités qui en résultaient furent utilisés par le régime afin de supprimer les opposants intérieurs. Par ailleurs, durant la guerre civile de 1994, les islamistes combattirent les forces du sud.» (28)

En mars 2011, ce même universitaire observa que la guerre des États-Unis contre le terrorisme avait eu comme résultat de soutenir un gouvernement impopulaire, l’aidant ainsi à éviter de mettre en œuvre des réformes nécessaires :

«Eh bien, je pense qu’en ce qui concerne – que notre politique au Yémen a été [exclusivement centrée sur] le terrorisme – [qu’elle s’est focalisée sur] le terrorisme et la sécurité et al-Qaïda dans la péninsule arabique [AQPA], excluant quasiment tout le reste. Je pense que malgré ce que – ce que disent les gens dans l’administration, nous sommes concentrés sur le terrorisme –. Nous n’avons pas porté notre attention sur les défis systémiques que doit affronter le Yémen : le chômage, les abus dans la gouvernance, la corruption. Je pense que ce sont les facteurs qui conduiront à l’effondrement de l’État. Ce n’est pas AQPA. […] [T]out le monde au Yémen voit que nous soutenons [ces] régimes, aux dépens du peuple yéménite.» (29)

Dans des termes plus abrupts, la « guerre contre la terreur » des États-Unis est l’une des principales raisons expliquant pourquoi le Yémen, comme d’autres pays, reste sous-développé et demeure un terrain fertile pour le terrorisme jihadiste.

Mais la politique étrangère des États-Unis, dans les domaines sécuritaires, n’est pas la seule à contribuer à la crise yéménite. L’Arabie saoudite a des intérêts dans le renforcement de l’influence jihadiste au sein du Yémen républicain. Ce fut le cas depuis les années 1960, lorsque la famille royale saoudienne eut recours à des tribus conservatrices des collines du nord du Yémen afin de repousser une attaque contre le sud de l’Arabie saoudite par le gouvernement yéménite – républicain et soutenu par Nasser. (30)

Ces machinations des différents gouvernements et de leurs agences de renseignement peuvent créer des situations d’une obscurité impénétrable. Par exemple, comme l’a rapporté le sénateur John Kerry, l’un des principaux leaders d’al-Qaïda dans la péninsule arabique (AQPA) «est un citoyen saoudien qui a été rapatrié en Arabie saoudite au mois de novembre 2007 [après avoir été emprisonné à] Guantanamo[,] et qui a repris des activités radicales [au Yémen] après avoir suivi un parcours de réhabilitation dans son pays.» (31)

Comme d’autres nations, les États-Unis peuvent être amenés à nouer des ententes avec les jihadistes d’al-Qaïda pour les aider à combattre dans des zones d’intérêt mutuel à l’étranger, comme en Bosnie. La condition de cette collaboration est que ces terroristes ne se retournent pas contre eux. Cette pratique a clairement contribué à l’attentat à la bombe de 1993 contre le World Trade Center, lorsqu’au moins deux de ses auteurs avaient été mis à l’abri de toute arrestation. Ils furent ainsi protégés par les autorités US car ils participaient à un programme basé au centre al-Kifah de Brooklyn, qui visait à préparer des islamistes à la guerre en Bosnie. En 1994, au Canada, le FBI assura la libération d’Ali Mohamed, un agent double des États-Unis et d’al-Qaïda opérant au sein du centre al-Kifah. Peu après, Mohamed se rendit au Kenya où, selon le Rapport de la Commission sur le 11-Septembre, il “dirigea” les organisateurs de l’attentat de 1998 contre l’ambassade des États-Unis à Nairobi. (32)

Le soutien de l’Arabie saoudite aux terroristes

Dans ce sombre jeu, le plus important acteur est probablement l’Arabie saoudite. En effet, ce pays n’a pas seulement exporté des jihadistes aux quatre coins du globe, mais il les a également financés – comme nous l’avons vu précédemment –, parfois en coordination avec les États-Unis. Un article sur les fuites des transmissions diplomatiques états-uniennes, paru en 2010 dans le New York Times, révélait en citant l’un de ces câbles que «[l]es donateurs saoudiens restent les principaux financeurs de groupes extrémistes comme al-Qaïda». (33)

En 2007, le Sunday Times rapporta également que

« […] les riches Saoudiens restent les principaux financeurs des réseaux terroristes internationaux. ‘Si je pouvais en quelques sortes claquer des doigts et couper les subventions [des activités terroristes] par un pays, je viserais l’Arabie saoudite’ déclara Stuart Levey, le fonctionnaire du Département du Trésor américain chargé de surveiller le financement du terrorisme. » (34)

Selon Rachel Ehrenfeld, des rapports similaires, faisant état d’un financement saoudien du terrorisme, ont émané des autorités irakiennes, pakistanaises et afghanes :

«En 2009, la police pakistanaise a rapporté que les organisations caritatives saoudiennes continuaient de financer al-Qaïda, les Talibans et le Lashkar-e-Taiba. Selon ce rapport, les Saoudiens ont donné 15 millions de dollars aux jihadistes, incluant les responsables des attaques suicides au Pakistan et de la mort de Benazir Bhutto, l’ancien Premier ministre pakistanais.

En mai 2010, Buratha News Agency, une source journalistique indépendante basée en Irak, parla d’«un document des renseignements saoudiens ayant fuité. Celui-ci

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démontrait un soutien continu d’al-Qaïda en Irak par le gouvernement d’Arabie saoudite. Ce soutien prenait la forme d’argent liquide et d’armes. […] Un article paru le 31 mai 2010 dans The Sunday Times de Londres a révélé que, selon le pôle financier du renseignement afghan (FinTRACA), au moins 1,5 milliards de dollars venant d’Arabie saoudite avaient pénétré clandestinement en Afghanistan depuis 2006. Cet argent était très probablement destiné aux Talibans.» (35)

Cependant, selon le Times, le soutien saoudien en faveur d’al-Qaïda ne se limitait pas au financement :

« Ces derniers mois, des prédicateurs saoudiens ont provoqué la consternation en Irak et Iran après avoir publié des fatwas appelant à la destruction des grands mausolées chiites à Nadjaf et à Kerbala, en Irak – certains ayant déjà été ciblés par des attentats à la bombe –. Et tandis que des membres importants de la dynastie régnante des Saoud expriment régulièrement leur aversion pour le terrorisme, certains responsables qui défendent l’extrémisme sont tolérés au sein du royaume.

En 2004, le cheikh Saleh al-Luhaidan, le haut magistrat qui supervise les procès relatifs au terrorisme, fut enregistré dans une mosquée alors qu’il encourageait les hommes [suffisamment] jeunes à combattre en Irak. ‘Aujourd’hui, pénétrer sur le sol irakien est devenu risqué’, mit-t-il en garde. ‘Il faut éviter ces satellites maléfiques et ces drones aériens, qui occupent chaque parcelle du ciel irakien. Si quelqu’un se sent capable d’entrer en Irak afin de rejoindre le combat, et si son intention est de faire triompher la parole de Dieu, alors il est libre de le faire.’ » (36)

L’exemple du Mali

Aujourd’hui, un processus comparable est en train de dérouler en Afrique, où le fondamentalisme wahhabite saoudien « s’est répandu ces dernières années au Mali[,] par le biais de jeunes imams revenant de leurs études [religieuses suivies] dans la péninsule arabique. » (37) La presse internationale, incluant Al-Jazira, a rapporté la destruction de mausolées historiques par des jihadistes locaux :

«Selon des témoins, deux mausolées de l’ancienne mosquée de terre [du cimetière] de Djingareyber, à Tombouctou, ont été détruits par des combattants d’Ansar Dine, un groupe lié à al-Qaïda qui contrôle le nord du Mali. Ce site classé au patrimoine mondial [de l’UNESCO] est donc menacé. […] Cette nouvelle démolition survient après les attaques de la semaine dernière contre d’autres monuments historiques et religieux de Tombouctou, actions qualifiées de ‘destruction insensée’ par l’UNESCO. Ansar Dine a déclaré que les anciens mausolées étaient ‘haram’, ou interdits par l’Islam. La mosquée de Djingareyber est l’une des plus importantes à Tombouctou, et elle a été l’une des principales attractions de cette ville légendaire avant que la région ne devienne une zone interdite pour les touristes. Ansar Dine a juré de continuer à détruire tous les mausolées ‘sans exception’, au beau milieu d’un déferlement de tristesse et d’indignation aussi bien au Mali qu’à l’étranger.» (38)

Néanmoins, les auteurs de la plupart de ces récits – y compris celui d’Al-Jazira –, n’ont pas souligné le fait que la destruction des tombeaux avait été une vieille pratique wahhabite, pas seulement soutenue mais perpétrée par le gouvernement saoudien :

«Entre 1801 et 1802, sous le règne d’Abdelaziz ben Mohammed ben Saoud, les wahhabites saoudiens attaquèrent et envahirent les villes saintes de Kerbala et de Nadjaf, en Irak. Ils y massacrèrent une partie de la population musulmane et y détruisirent les tombeaux d’Husayn ibn Ali, le petit fils de Mahomet et le fils d’Ali (Ali ibn Abi Talib, le gendre de Mahomet). Entre 1803 et 1804, les Saoudiens s’emparèrent de La Mecque et de Médine où ils démolirent des monuments historiques, ainsi que divers sites et lieux saints musulmans – tels que le mausolée construit sur le tombeau de Fatima, la fille de Mahomet –. Ils avaient même l’intention de démolir la tombe de Mahomet lui-même, la jugeant idolâtre. En 1998, les Saoudiens détruisirent au bulldozer et brulèrent la tombe d’Amina bint Wahb, la mère de Mahomet, provoquant l’indignation à travers le monde musulman.» (39)

Une opportunité pour la paix

Aujourd’hui, nous devons établir une distinction entre le royaume d’Arabie saoudite et le wahhabisme promu par de hauts dignitaires religieux saoudiens et par certains membres de la famille royale. En particulier, le roi Abdallah a tendu la main à d’autres religions, visitant le Vatican en 2007 et encourageant la tenue d’une conférence interconfessionnelle avec des responsables chrétiens et juifs, qui s’est déroulée l’année suivante.

En 2002, alors qu’il était prince héritier, Abdallah fit également une proposition pour parvenir à la paix entre Israël et ses voisins lors d’un sommet des nations de la Ligue arabe. Son plan, qui a été soutenu à de nombreuses reprises par les gouvernements de cette organisation, appelait à la normalisation des relations entre l’ensemble des pays arabes et Israël, en échange d’un retrait complet des territoires occupés (incluant Jérusalem-Est) ainsi que d’un “règlement équitable” de la crise des réfugiés palestiniens basé sur la Résolution 194 de l’ONU. En 2002, ce plan a été rejeté par Ariel Sharon, alors Premier ministre d’Israël, ainsi que par George W. Bush et Dick Cheney, qui étaient déterminés à entrer en guerre contre l’Irak. Néanmoins, comme l’a relevé David Ottaway du Woodrow Wilson Center,

«Le plan de paix proposé par Abdallah en 2002 reste une fascinante base pour une possible coopération entre les États-Unis et l’Arabie saoudite sur la question israélo-palestinienne. La proposition d’Abdallah fut soutenue par l’ensemble de la Ligue arabe durant son sommet de 2002 ; Le Président israélien Shimon Peres et [celui qui était alors le Premier ministre Ehud] Olmert en ont parlé favorablement ; et Barack Obama, qui avait choisi la chaîne de télévision saoudienne Al-Arabiya pour sa première interview après sa prise de fonction, félicita Abdallah pour le “grand courage” dont il avait fait preuve en élaborant cette proposition de paix. Toutefois, Benjamin Netanyahou, qui est pressenti pour être le nouveau Premier ministre israélien, s’est fermement opposé à ce plan saoudien, en particulier à l’idée que Jérusalem-Est devrait être la capitale d’un État palestinien. » (40)

En 2012, ce plan est gelé, Israël laissant transparaître sa volonté d’action armée contre l’Iran et les États-Unis étant paralysés par une année électorale. Cependant, le Président israélien Shimon Peres a accueilli favorablement cette initiative en 2009 ; et George Mitchell, lorsqu’il était l’envoyé spécial du Président Obama au Moyen-Orient, annonça cette même année que l’administration Obama avait l’intention d’“incorporer” cette initiative dans sa politique moyen-orientale. (41)

Ces soutiens ainsi exprimés démontrent qu’un accord de paix au Moyen-Orient est théoriquement possible. Toutefois, ils sont loin de rendre probable son application. En effet, tout accord de paix nécessiterait la confiance mutuelle, mais il est difficile d’y parvenir lorsqu’un sentiment d’insécurité quant à l’avenir de sa propre nation hante chacune des parties. Certains commentateurs pro-sionistes tels que Charles Krauthammer rappellent que, durant les 30 années précédant les accords de Camp David, la destruction d’Israël était «le but unanime de la Ligue arabe». (42) De nombreux Palestiniens, ainsi que la majeure partie du Hamas, craignent qu’un accord de paix soit insatisfaisant et qu’il étoufferait en réalité leurs aspirations à un règlement équitable des différends.

Au Moyen-Orient, l’insécurité est particulièrement répandue à cause d’un ressentiment largement partagé. Celui-ci est engendré par l’injustice, elle-même alimentée et propagée par l’insécurité. L’actuel statu quo international trouve ses principales origines dans les injustices. Mais celle qui touche le Moyen-Orient s’avère – dans tous ses aspects – extrême, récente et permanente. Je le signale simplement pour donner ce conseil aux États-Unis : il faut se souvenir que les questions de sécurité et de justice ne peuvent être traitées séparément.

Par-dessus tout, il nous faut faire preuve de compassion. En tant qu’Américains, nous devons comprendre que les Israéliens autant que les Palestiniens vivent dans des conditions proches d’un état de guerre ; pourtant, ces deux peuples ont des raisons de craindre qu’un accord de paix puisse les laisser dans une situation encore pire que celle où ils se trouvent actuellement. Trop de civils innocents ont été tués au Moyen-Orient. Il faudrait que les actions des États-Unis n’aggravent pas ce lourd bilan humain.

Ce sentiment d’insécurité, qui est le principal obstacle à la paix, ne se limite pas au Moyen-Orient. Depuis le 11-Septembre, le peuple des États-Unis a ressenti l’angoisse de l’insécurité, et c’est la principale raison expliquant pourquoi il oppose si peu de résistance aux folies évidentes de la “guerre contre la terreur” de Bush, Cheney et Obama.

Ceux qui mènent cette guerre promettent de faire des États-Unis un endroit plus sûr. Pourtant, celle-ci continue d’assurer la prolifération des terroristes censés être les ennemis de l’Amérique. Elle continue également de disséminer la guerre à travers de nouveaux champs de bataille, notamment au Pakistan ou au Yémen. Générant ainsi ses propres ennemis, il semble probable que la “guerre contre la terreur” se poursuive sans relâche, puisqu’elle est aujourd’hui solidement enracinée dans l’inertie bureaucratique. De ce fait, elle ressemble beaucoup à la “guerre contre la drogue”, une politique irréfléchie qui maintient à un niveau élevé les coûts et les revenus narcotiques, ce qui attire de nouveaux trafiquants.

Par ailleurs, cette guerre contre le terrorisme amplifie surtout l’insécurité chez les musulmans, sachant qu’ils sont de plus en plus nombreux à affronter la crainte que des civils, et pas seulement des terroristes jihadistes, soient victimes d’attaques de drones. L’insécurité dans le Moyen-Orient est le principal obstacle à la paix dans cette région. Les Palestiniens vivent avec la peur quotidienne de l’oppression par les colons de Cisjordanie ainsi que des représailles de l’État hébreu. Les Israéliens vivent en craignant constamment leurs voisins hostiles. La famille royale saoudienne partage cette crainte. Ainsi, depuis le 11-Septembre et le déclenchement de la “guerre contre la terreur”, l’insécurité et l’instabilité se sont simultanément amplifiées.

L’insécurité moyen-orientale se répercute sur une échelle de plus en plus vaste. La peur d’Israël vis-à-vis de l’Iran et du Hezbollah trouve son écho dans la crainte iranienne d’attaques massives contre ses installations nucléaires, du fait des menaces israéliennes. Par ailleurs, d’anciens faucons états-uniens comme Zbigniew Brzezinski ont récemment averti qu’une attaque israélienne contre l’Iran pouvait aboutir à une guerre plus longue qu’annoncé – ce conflit pouvant s’étendre à d’autres pays. (43)

Selon moi, les citoyens des États-Unis devraient surtout craindre l’insécurité engendrée par les attaques de drones menées par leur pays. Si elles ne sont pas rapidement stoppées, ces frappes risquent d’avoir le même résultat que les attaques nucléaires US de 1945 : nous conduire vers un monde où de nombreuses puissances, et non plus une seule, possèdent cette arme. Elles pourraient alors être amenées à l’utiliser. Dans ce cas, les États-Unis seraient de loin la nouvelle cible la plus probable.

Je me demande combien de temps faudra-t-il aux citoyens de ce pays pour comprendre le cours prévisible de cette guerre auto-génératrice, et pour qu’ils se mobilisent contre celle-ci en constituant une force prévalente.

Que doit-on faire ?

En utilisant l’analogie des erreurs britanniques de la fin du dix-neuvième siècle, cet article a défendu un retour progressif vers un ordre international plus stable et plus juste par une série d’étapes concrètes, dont certaines sont graduelles :

 

1) Une réduction progressive des énormes budgets de la défense et du renseignement. Elle s’ajouterait alors à celle qui est actuellement envisagée pour des raisons financières, et elle devrait être de plus grande ampleur.

2) Une suppression graduelle des aspects violents de la soi-disant “guerre contre la terreur”, mais un maintien des moyens policiers traditionnels de lutte contre le terrorisme.

3) La récente intensification du militarisme US peut être attribuée en grande partie à l’“état d’urgence” décrété le 14 septembre 2001, et renouvelé chaque année depuis cette date par les présidents des États-Unis successifs. Cet état d’urgence doit être immédiatement interrompu, et ce que l’on appelle les mesures de “continuité du gouvernement” (COG pour Continuity of Government) qui lui sont associées doivent être réévaluées. Elles incluent la surveillance et les détentions sans mandats, ainsi que la militarisation de la sécurité intérieure aux États-Unis. (44)

4) Un retour aux stratégies qui dépendent essentiellement de la police civile et du renseignement pour traiter le problème du terrorisme.

Quarante ans plus tôt, j’en aurais appelé au Congrès pour qu’il entreprenne ces démarches nécessaires à dissiper l’état de paranoïa dans lequel nous vivons actuellement. Aujourd’hui, j’en suis arrivé à penser que cette institution est elle-même dominée par les cercles de pouvoir qui tirent profit de ce que j’ai nommé la Machine de guerre globale des États-Unis. Dans ce pays, les soi-disant “hommes d’État” sont autant impliqués dans le maintien de la suprématie de leur nation que ne l’étaient leurs prédécesseurs britanniques.

Toutefois, mentionner cela ne revient pas à désespérer de la capacité qu’ont les États-Unis à changer de direction. Nous devrions garder à l’esprit que les protestations politiques intérieures ont joué un rôle déterminant pour stopper une guerre injustifiée au Vietnam il y a quarante ans. Il est vrai qu’en 2003, des manifestations comparables – impliquant un million de personnes aux États-Unis – n’ont pas suffi à empêcher l’entrée de leur pays dans une guerre illégale en Irak. Néanmoins, ce grand nombre de manifestants, rassemblés dans une période relativement courte, était impressionnant. La question est aujourd’hui de savoir si les militants peuvent adapter leurs tactiques aux nouvelles réalités afin de monter une campagne de protestation durable et efficace.

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Pendant quarante ans, sous l’apparence de la planification pour la continuité du gouvernement (COG), La Machine de guerre américaine s’est préparée à neutraliser les manifestations urbaines contre la guerre. En comprenant ce processus, et en utilisant l’exemple des folies de l’hyper-militarisme britannique, les mouvements antiguerre actuels doivent apprendre à exercer des pressions coordonnées au sein des institutions des États-Unis – pas seulement en “occupant” les rues avec l’aide des sans-abri –. Il ne suffit pas de dénoncer les disparités de revenus croissantes entre les riches et pauvres, comme le faisait Winston Churchill en 1908. Nous devons aller plus loin afin de comprendre que les origines de ces inégalités résident dans des arrangements institutionnels qui peuvent être corrigés – bien que les institutions soient dysfonctionnelles –. Et l’un des principaux arrangements dont il est ici question est la soi-disant “guerre contre la terreur”.

Il est impossible de prédire le succès d’un tel mouvement. Mais je crois que les développements globaux persuaderont un nombre croissant de citoyens des États-Unis que celui-ci est nécessaire. Il devrait rassembler un large éventail de l’électorat, des lecteurs progressistes de ZNet et de Democracy Now aux partisans libertariens de Murray Rothbard et de Ron Paul.

Et je crois également qu’une minorité antiguerre bien coordonnée et non-violente peut l’emporter. Elle regrouperait entre deux et cinq millions de personnes, leur action s’appuyant sur les ressources de la vérité et du bon sens. Aujourd’hui, les institutions politiques clés des États-Unis sont à la fois dysfonctionnelles et impopulaires. En particulier, le Congrès a un taux d’approbation d’environ 10%. La résistance acharnée du monde de la richesse personnelle et entrepreneuriale face aux réformes raisonnables est un problème encore plus grave ; mais plus les riches montrent ouvertement leur influence antidémocratique, plus la nécessité de restreindre leurs abus deviendra évidente. Récemment, ils ont ciblé des membres du Congrès pour les exclure de cette institution, ces derniers étant « coupables » de s’être compromis pour résoudre des problèmes gouvernementaux. Dans ce pays, il existe certainement une majorité de citoyens à mobiliser pour que l’on en revienne à la défense du bien commun.

De nouvelles stratégies et techniques de protestation seront clairement nécessaires. Le but de cet article n’est pas de les définir. Toutefois, il est à prévoir que les futures manifestations – ou cyber-manifestations – feront un usage plus habile d’Internet.

Encore une fois, nul ne peut prédire avec confiance la victoire dans cette lutte pour le bien commun contre les intérêts particuliers et les idéologues ignorants. Mais avec le danger croissant d’un conflit international désastreux, la nécessité de se mobiliser pour défendre l’intérêt général est de plus en plus évidente. L’étude de l’Histoire est l’un des meilleurs moyens d’éviter sa répétition.

Ces espoirs de voir émerger un mouvement de protestation sont-ils irréalistes ? Très probablement. Mais quoi qu’il en soit, je suis convaincu que ce mouvement est nécessaire. 

 

Peter Dale Scott

lire :

La Machine de guerre américaine, de Peter Dale Scott,

Notes

1. Oliver Villar et Drew Cottle, MI>Cocaine, Death Squads, and the War on Terror: U.S. Imperialism and Class Struggle in Colombia (Monthly Review Press, New York, 2011) ; Peter Watt et Roberto Zepeda, Drug War Mexico: Politics, Neoliberalism and Violence in the New Narcoeconomy (Zed Books, Londres, 2012) ; Mark Karlin, « How the Militarized War on Drugs in Latin America Benefits Transnational Corporations and Undermines Democracy », Truthout, 5 août 2012.

2. Peter Dale Scott, La Machine de guerre américaine : la Politique profonde, la CIA, la drogue, l’Afghanistan… (Éditions Demi-Lune, Plogastel Saint-Germain, 2012), pp.317-41.

3. Patrick Cockburn, «Opium: Iraq’s deadly new export», Independent (Londres), 23 mai 2007.

4. Scott, La Machine de guerre américaine, pp.204-12.

5. Voir Mark Karlin, « How the Militarized War on Drugs in Latin America Benefits Transnational Corporations and Undermines Democracy», Truthout, 5 août 2012.

6. Sekhara Bandyopadhyaya, From Plassey to Partition: A History of Modern India (Orient Longman, New Delhi, 2004), p.231.

7. Kevin Phillips, Wealth and Democracy: A Political History of the American Rich (Broadway Books, New York, 2002), p.185.

8. « Les graines de la ruine impériale et du déclin national – le fossé anormal entre les riches et les pauvres […] la croissance fulgurante d’un luxe vulgaire et oisif – sont les ennemis de la Grande-Bretagne » (Winston Churchill, cité dans Phillips, Wealth and Democracy, p.171).

9. John A. Hobson, Imperialism (Allen and Unwin, Londres, 1902 ; réimpression de 1948), p.6. À cette époque, le principal impact de ce livre en Grande-Bretagne fut de stopper définitivement la carrière d’économiste de John A. Hobson.

10. Hobson, Imperialism, p.12. Cf. Arthur M. Eckstein, « Is There a ‘Hobson–Lenin Thesis’ on Late Nineteenth-Century Colonial Expansion? », Economic History Review, mai 1991, pp.297-318 ; voir en particulier pp.298-300.

11. Peter Dale Scott, «The Doomsday Project, Deep Events, and the Shrinking of American Democracy, Asia-Pacific Journal: Japan Focus, 21 janvier 2011.

12. Voir Ralph Raico, Introduction, Great Wars and Great Leaders: A Libertarian Rebuttal (Mises Institute, Auburn, AL, 2010).

13. Carroll Quigley, Tragedy and Hope: A History of the World in Our Time (G,S,G, & Associates, 1975) ; Carroll Quigley, The Anglo-American Establishment (GSG Associates publishers, 1981). Discussion dans Laurence H. Shoup et William Minter, The Imperial Brain Trust: The Council on Foreign Relations & United States Foreign Policy (Monthly Review Press, New York, 1977), pp.12-14 ; Michael Parenti, Contrary Notions: The Michael Parenti Reader (City Lights Publishers, San Francisco, CA, 2007), p.332.

14. Au sujet des intérêts – peu remarqués par les observateurs –, des compagnies pétrolières dans les champs pétrolifères offshore du Cambodge, voir Peter Dale Scott, The War Conspiracy: JFK, 9/11, and the Deep Politics of War (Mary Ferrell Foundation, Ipswich, MA, 2008), pp.216-37.

15. Thomas Pakenham, Scramble for Africa: The White Man’s Conquest of the Dark Continent from 1876-1912 (Random House, New York, 1991).

16. Voir les différents livres de Barbara Tuchman, notamment The March of Folly: From Troy to Vietnam (Knopf, New York, 1984).

17. Pakenham, ibidem.

18. E. Oncken, Panzersprung nach Agadir. Die deutsche Politik wtihrend der zweiten Marokkokrise 1911 (Dusseldorf, 1981). En allemand, l’expression Panzersprung est devenue une métaphore pour toute démonstration gratuite de diplomatie de la canonnière.

19. Thom Shanker, «Global Arms Sales Dropped Sharply in 2010, Study Finds», New York Times, 23 septembre 2011.

20. Thom Shanker, «U.S. Arms Sales Make Up Most of Global Market», New York Times, 27 août 2012.

21. Stephen Ambrose, Eisenhower: Soldier and President (Simon and Schuster, New York, 1990), p.325.

22. Robert Dallek, An unfinished life: John F. Kennedy, 1917-1963 (Little, Brown and Co., Boston, 2003.), p.50.

23. Shanker, «U.S. Arms Sales Make Up Most of Global Market», New York Times, 27 août 2012.

24. Peter Dale Scott, La Route vers le Nouveau Désordre Mondial : 50 ans d’ambitions secrètes des Etats-Unis, (Éditions Demi-Lune, Paris, 2010), pp.66-72.

25. Scott Shane et Andrew W. Lehren, «Leaked Cables Offer Raw Look at U.S. Diplomacy», New York Times, 29 novembre 2010. Cf. Nick Fielding et Sarah Baxter, «Saudi Arabia is hub of world terror: The desert kingdom supplies the cash and the killers», Sunday Times (Londres), 4 novembre 2007.

26. Les Nations Unies ont listé les antennes de l’International Islamic Relief Organization (l’IIRO, une filiale de la Rabita) en Indonésie et aux Philippines comme propriétés ou partenaires d’al-Qaïda.

27. Voir Peter Dale Scott, «La Bosnie, le Kosovo et à présent la Libye : les coûts humains de la collusion perpétuelle entre Washington et les terroristes», Mondialisation.ca, 17 octobre 2011 ; voir également William Blum, «The United States and Its Comrade-in-Arms, Al Qaeda», Counterpunch, 13 août 2012.

28. Christopher Boucek, «Yemen: Avoiding a Downward Spiral», Carnegie Endowment for International Peace, p.12.

29. « In Yemen, ‘Too Many Guns and Too Many Grievances’ as President Clings to Power», PBS Newshour, 21 mars 2011.

30. Robert Lacey, The Kingdom: Arabia and the House of Sa’ud (Avon, New York, 1981), pp.346-47, p.361.

31. John Kerry, Al Qaeda in Yemen and Somalia: A Ticking Time Bomb: a Report to the Committee on Foreign Relations (U.S. G.P.O., Washington, 2010), p.10.

32. Scott, La Route vers le Nouveau Désordre Mondial, pp.214-20.

33. Scott Shane et Andrew W. Lehren, «Leaked Cables Offer Raw Look at U.S. Diplomacy», New York Times, 29 novembre 2010.

34. Nick Fielding et Sarah Baxter, «Saudi Arabia is hub of world terror: The desert kingdom supplies the cash and the killers», Sunday Times (Londres), 4 novembre 2007 : « Des religieux extrémistes envoient une multitude de recrues dans certains des points chauds les plus violents au monde. Une analyse de NBC News suggère que les Saoudiens représentent 55% des combattants étrangers en Irak. On les retrouve également parmi les plus intransigeants et les plus militants. »

35. Rachel Ehrenfeld, «Al-Qaeda’s Source of Funding from Drugs and Extortion Little Affected by bin Laden’s Death», Cutting Edge, 9 mai 2011.

36. Sunday Times (Londres), 4 novembre 2007.

37. BBC, 17 juillet 2012,.

 

38. Al-Jazira, 19 juillet 2012.

39. The Weekly Standard, 30 mai 2005. Cf. Newsweek, 30 mai 2005. Adapté d’Hilmi Isik, Advice for the Muslim (Hakikat Kitabevi, Istanbul).

40. David Ottaway, «The King and Us: U.S.-Saudi Relations in the Wake of 9/11», Foreign Affairs, mai-juin 2009.

41. Barak Ravid, «U.S. Envoy: Arab Peace Initiative Will Be Part of Obama Policy», Haaretz, 5 avril 2009. David Ottaway, «The King and Us: U.S.-Saudi Relations in the Wake of 9/11», Foreign Affairs, mai-juin 2009.

42. Charles Krauthammer, «At Last, Zion: Israel and the Fate of the Jews», Weekly Standard, 11 mai 1998.

43. «Nous n’avons aucune idée de comment finirait une telle guerre», déclara [Brzezinski]. «L’Iran a des moyens militaires, il pourrait riposter en déstabilisant l’Irak» (Salon 14 mars 2012).

44. Voir Scott, La Route vers le Nouveau Désordre Mondial, pp.257-331 ; Peter Dale Scott, «La continuité du gouvernement étasunien: L’état d’urgence supplante-t-il la Constitution? », Mondialisation.ca, 6 décembre 2010.

dimanche, 05 février 2012

Presencia de Gaston Bouthoul en la Argentina

Ex: http://disenso.org/
Presencia de Gaston Bouthoul en la Argentina

 

Por Horacio Cagni*

9782228883627.jpgEn su prólogo a la edición española del Tratado de Polemología de Gaston BouthoulEnrique Jarnés Bergua, señala que esta obra no tenía una primera edición en 1951. “Entonces tenía otro título: Las Guerras y un subtítulo Elementos dePolemología. Este libro fue traducido al español. El que ahora consideramos es una nueva edición de aquél, puesta al día, publicada por Payot en 1970, cuando Bouthoul había podido apreciar ya un crecimiento y una proliferación de su semilla.” 2

Efectivamente, temprano, en la década del cincuenta, la obra más significativa del polemólogo francés había sido publicada, en dos volúmenes, por la editorial del ejército argentino.La obra es la misma, pero faltan, en la edición sudamericana, la décima parte -“Problemática, desarrollo e investigaciones en la polemología”- y las Conclusiones -“Obstáculos, opciones metodológicas. Investigaciones. Métodos y programas. Investigaciones y logros”- más el Indice de Nombres (capítulo único). Sin duda, por ser antecesora en el tiempo a la edición definitiva de Payot de 1970.

No es casual que la obra de Bouthoul haya sido editada oportunamente por el Círculo Militar argentino. Esta publicación fue fundada en 1918 por iniciativa del General de División D. Rodolfo Martínez Pita, y hasta el presente difundió la obra de los mayores expertos nacionales y extranjeros sobre la ciencia militar, memorias, manuales de instrucción, de táctica y estrategia, incluso temas de historia militar y de relaciones internacionales. Autores muy conocidos, no sólo de las grandes potencias beligerantes en ambas guerras mundiales, sino protagonistas menores, tuvieron acogida en esta editorial. Los viejos ejemplares de los clásicos del arte militar aún son buscados por los especialistas.

En su prólogo a la edición argentina, el traductor Manrique Mom reconoce que hacía tiempo que los militares argentinos insistían, con profusión de argumentos, sobre la necesidad del profesional de superar en sus estudios los límites de la ciencia militar propiamente dicha, y así aumentar el panorama intelectual, captando y comprendiendo

en amplitud los problemas que hacen a su función específica. La obra de Bouthoul vendría a conjurar esa inquietud, al abordar la guerra como fenómeno social por excelencia, obligando a la comprensión de diversas disciplinas y modos de abordaje de una problemática tan compleja.4

En realidad, la fama y peso del Tratado de Polemología -o Las Guerras- ha obrado en detrimento de otros aportes excelentes de Bouthoul, de modo que éste pareciera ser autor de un solo libro. No obstante, en la Argentina sólo ha tenido peso esta obra, y a ella debemos referirnos específicamente.

Si el esfuerzo editorial de publicar el voluminoso tratado de Bouthoul en Argentina fue grande, más difícil es considerar su impacto. La polemología, en primer lugar, pretende ser una ciencia: “el estudio científico de la guerra, la paz y los conflictos, esclarecer el entorno sociológico de las actividades de paz y su salvaguardia. De los fenómenos conflictivos del pasado y del presente estudia la naturaleza y morfología, la localización en el tiempo y el espacio, la periodicidad, la intensidad, las causas, el encadenamiento y las funciones, la tipología….busca analizar las causas estructurales (demográficas, económicas, geográficas, mentales) que engendran la agresividad colectiva…cuidándose de tomar partido, de llevar los juicios de orden sicológico y moral sobre las responsabilidades de alguno de los dos campos, de dar toda la razón a uno y ninguna al otro, sabiendo que los argumentos son siempre subjetivos, falaces e interesados…”.5

La obra de Bouthoul aparece en la Argentina en un momento clave en la formación intelectual de los oficiales de su ejército. Se trata de la influencia de la llamada “escuela francesa”, en detrimento de la estadounidense, protagonista principal en Occidente de la “Guerra Fría”. La formación del ejército argentino, tanto en los aspectos tácticos y de estrategia, como en la historia militar, había sido mayormente alemana -más específicamente prusiana- desde principios del S. XX hasta la Segunda Guerra Mundial, pero cada vez más matizada de ingredientes franceses, italianos y anglosajones. El desenlace llevó a la entronización creciente de la influencia de los Estados Unidos. Pero el proceso de descolonización, con las operaciones de guerrilla y contraguerrilla que le acompañaron, ubicó a las enseñanzas de la “escuela francesa” como principal protagonista.

Precisamente en 1957 se inician en el Ejército argentino los estudios sobre la guerra revolucionaria comunista, con asesoramiento de oficiales franceses, en base a las experiencias recogidas en Indochina y Argelia. Esta doctrina de guerra se denominará “guerra antisubversiva” o “guerra revolucionaria”, a diferencia de los demás ejércitos latinoamericanos, que la denominan “guerra de contrainsurgencia”, acorde a los postulados de la Escuela de las Américas.6

La nueva técnica de guerra -que la hace diferir de la guerra de guerrillas tradicional- es la unión entre acciones militares y programa político-social; aquí la población es determinante, como lo es la propaganda y las formas de movilización de la gente. “Como es obvio, los franceses no encuadraban esta guerra como el proceso de descolonización que liberaba a estos pueblos del dominio europeo, sino que consideraban que era parte de la Guerra Fría y una forma de operar de los soviéticos, que dejaban de lado la intervención directa para operar en forma indirecta. Se establece sólidamente el maniqueísmo, que el sistema bipolar propicia como visión de la realidad política internacional….aparece la nueva lógica militar que implementan los franceses: la guerrilla es comunista, y como es irregular se refugia en la población, el enemigo será entonces un “enemigo interno.7

Dado que la demonización del adversario justifica la plena violencia, la tortura para conseguir información, los campos de clandestinos, la desaparición de personas, las iniciativas descentralizadas con dilución de responsabilidad de mando, son todos aspectos de este nuevo tipo de conflicto, con las secuelas bien conocidas por las sociedades de países “periféricos” que hayan pasado por esta situación histórica. Como el “enemigo interior” no es fácilmente identificable, el nuevo tipo de guerra necesita del control de las herramientas del gobierno por el ejército, pues la naturaleza del político es la negociación y la permisividad. La línea amigo-enemigo, en flagrante oposición al apotegma schmittiano, se traslada al interior de la unidad nacional, pues es una línea ideológica, donde todo lo que está con el subversivo es también enemigo.8

Claro está que Bouthoul reconoce el valor de la propaganda, la difamación del enemigo recordando sus crímenes -reales o inventados- recelos, “aspecto repugnante”, etc. Y que, frente a “un adversario cuya cohesión es total, sea por la unanimidad que existe en sus creencias ideológicas, por la certeza que tienen de estar del lado de la buena causa, o por la antipatía que les inspira el enemigo, no hay otro medio que el de sembrar el abatimiento y el temor”.Pero entonces Bouthoul hablaba de belluminter pares; se refiere a unidades políticas concretas en estado de beligerancia.

Al apuntar la relación con el equilibrio demográfico y las guerras, afirma que la mayor belicosidad de Europa a partir de fines del S. XVIII -excedente de población y dignificación del conflicto- puede ser heredada por los Estados Unidos y la Unión Soviética, malgrado sus diferencias. El horizonte del polemólogo se limita al albor de la Guerra Fría y cuando aborda la tipología de las guerras concluye que la última forma es la guerra imperialista.10 Sencillamente, la guerra de contrainsurgencia o antisubversiva no había aparecido en escena en toda su fuerza antes de la década del 50, y el recuerdo de los grandes conflictos mundiales abarcaba el horizonte. Fue Dien-Bien-Phu el shock que provoca la ruptura del paradigma bélico.

Pero entonces, ¿existió una lectura sesgada de Bouthoul en la Argentina con la edición pionera de su principal tratado? El gran polemólogo no abre juicio, establece diagnósticos. La guerra es una institución de la humanidad, un fenómeno social de causas naturales y automáticas, diríamos “fatales”. Tiene una función destructora que puede considerarse connatural al ser humano y hasta necesaria, sin importar señalar si es buena o malo que ocurra, simplemente es. Pero también apunta que la guerra en sí es necesaria porque no se encuentra otra institución pacífica que la sustituya en su “función relajante”, y este es su deseo sincero y formal.

Puede existir un reacomodamiento de la obra de Bouthoul a las exigencias de la nueva guerra antisubversiva, toda vez que esta obra inaugura la creciente influencia de la “escuela francesa” en el ejército argentino? Alguna pista se puede rastrear en quienes más conocieron a Bouthoul, los oficiales traductores del francés para el Círculo Militar de entonces. El Coronel -luego General- Carlos Jorge “Chivo” Rosas tradujo al Mayor Gral. Eahay -Arte de la Guerra Moderna- publicado en francés por la Escuela Superior de Guerra del Ejercito Belga, Bruselas, febrero de 1958. No sólo lo tradujo sino que lo adaptó, ocupando un número entero del órgano de la Escuela Superior de Guerra del

ejército argentino.11 El general Rosas fue uno de los mayores impulsores de la recepción intelectual de los oficiales franceses, pionero en los viajes a la École deGuerre. Subdirector de la Escuela Superior de Guerra argentina en tiempos de Juan D. Perón, en 1966 colaboró activamente con el golpe de Estado del Gral. Juan C. Onganía.

Pero es el traductor de Bouthoul, el coronel Manrique Miguel Mom quien aún más se convirtió en un difusor por aquella época. Sus reflexiones sobre el empleo estratégico de la guerrilla, las características y condiciones que la posibilitan y su modo de accionar, así como la guerrilla en el marco de la estrategia militar -guerrilla enemiga y “propia”- ocuparon varias veces las páginas de la Revista de la Escuela Superior de Guerra. Por ejemplo, la traducción y adaptación de Esta guerra denuestro tiempo, del comandante J. Haggard.12 El coronel Mom señala: “El conflicto mundial en curso no es, pues, ni “ideológico” ni “psicológico”, ni “frío”, ni “tibio”, ni “caliente”. Es la guerra, en la que cada adversario emplea todas sus fuerzas disponibles, violentas y noviolentas, para hacer ceder al otro beligerante, conquistarle u obligarle a renunciar a sus objetivos políticos… ¿Por qué el calificativo de revolucionaria? La guerra es hoy día lo que ha sido siempre. Simplemente, reviste las características y amplitud que le exigen las condiciones del momento”.13 Son palabras de clara influencia bouthoultiana, pero conlleva el viraje hacia, precisamente, las condiciones momentáneas.

La alineación de este pensamiento emergente con las determinantes de la Guerra Fría es evidente. En otro artículo, Mom vuelve a traducir, adaptar y reformular conceptos, párrafos y hasta textos completos de autores del momento.14 “En la guerra revolucionaria comunista -apunta Mom- la población representa a su vez elmedio (el terreno podríamos decir) en donde se libra la lucha, la materialización del objetivo de los dos adversarios, y uno de los principales instrumentos de acción. Tanto para destruir

como para construir, la revolución recurre, cada vez que es necesario, a la militarización de la sociedad revolucionaria.”15

Por supuesto que el apotegma de Bouthoul -la guerra es un homicidio organizado, “la lucha armada y sangrienta entre grupos organizados”- funciona en todo tipo de conflicto. Incluso en la guerra civil global, si entendemos como tal la aplicación del concepto medular de la guerra a una misma unidad de civilización, en este caso planetaria. No obstante, el alcance y los límites de esa lucha entre grupos organizados se presentan en cierto modo difusos en el caso del terrorismo -subversivo y de Estado- y en las “nuevas guerras”, al decir de Mary Kaldor, conflictos étnicos e identitarios, crimen organizado, narcotráfico y narcoterrorismo, tráfico de personas y de especies protegidas, etc. El fenómeno de la globalización ha obligado a la redefinición del concepto de soberanía, toda vez que toda frontera se presenta ambigua y difusa. Precisamente, la reconfiguración territorial, la integración y desintegración de distintas formas políticas, y la secesión y conformación de Estados -como ocurrió en los Balcanes luego de la caída del Muro-, pone sobre el tapete la vigencia de la expresión “guerra civil”. Además, la quiebra del paradigma clausewitziano ha entronizado a la “guerra posmoderna”. “Se trata de una forma de guerra en la que el Estado deja de ser el único decisor respecto de la enemistad y el objetivo político, y aparecen otras unidades políticas competidoras…se pierde la separación moderna de las funciones en la guerra atribuidas al gobierno, el ejército y el pueblo, con la creación de una nueva unidad política, militar y pasional en la figura del partisano y, consiguientemente, las distinciones entre regular e irregular, militar y civil, público y privado, adentro y afuera, se hacen borrosas”.16

 

Si bien la difusión del concepto “guerra civil mundial” se debe a Ernst Nolte, fueron autores como Ernst Jünger y Carl Schmitt quienes lo esbozaron antes. Este conflicto global entre revolución y reacción se da a partir de las revoluciones de 1789 y 1917, la “contraguerra civil” del nazifascismo y la “Guerra Fría”, clausurada con la caída del Muro de Berlín. Hemos apuntado antes que Iberoamérica se convirtió en este proceso, particularmente en el bipolarismo, en campo de batalla de ambas superpotencias y sus agentes regionales. A la sombra de las doctrinas de seguridad nacional y hemisférica, de un lado, y de guerra de liberación, del otro, se mataban entre

hermanos dentro de un mismo país. Si bien dentro de un cuadro más complejo, los militares que iban a la Ecole de Guerre o la Escuela de Panamá y los guerrilleros que se entrenaban en Cuba eran las dos caras de una misma tragedia dialéctica.

En el caso argentino, debemos agregar la debilidad del Estado, es decir la institución que determina el casus belli. La guerra partisana se ejerce dentro de las unidades políticas, es una guerra de enemistad absoluta e ilimitada. Este tipo de conflicto genera la represión total y la represalia, pero en las acciones punitivas de ejércitos en operaciones hay detrás una decisión responsable del mando militar y político. La dictadura argentina se caracterizó por la ausencia de estatalidad, pues admitió la existencia de bandas armadas propias y permitió que las fuerzas armadas y de seguridad actuaran como grupos armados al igual que los partisanos, con absoluta dilución de la responsabilidad política.17

Es decir, los militares argentinos dieron un paso más adelante que sus mentores franceses, pues las atrocidades cometidas por Francia en sus territorios coloniales tenían, en última instancia, un Estado responsable detrás, mientras que las aberraciones de la dictadura argentina eran cometidas dentro del propio país y contra el propio pueblo, donde la estatalidad decisoria era difusa o simplemente no asumida. Bouthoul jamás sostuvo que la guerra pudiera desaparecer como fenómeno humano, y se preguntaba qué otras instituciones sociales podrían reemplazar su función esencial “relajadora”, la eliminación del excedente demográfico. El advenimiento de la era atómica y sus implicancias en las técnicas de destrucción masiva le convencieron de la necesidad urgente de “salvar” la guerra convencional, hasta el reemplazo de este estado patológico social por algún sustituto válido, tal como lo planteó en Sauver la guerre (1962) y que le valió el Premio Internacional de la Paz.18

A la larga, la influencia residual de Bouthoul en la Argentina se ha mantenido, con altibajos, merced al conocimiento temprano de su obra capital. Y ello a pesar de las

 políticas de desmilitarización que acompañó al retorno de la democracia en algunos países iberoamericanos, luego de la desgraciada experiencia de las dictaduras militares. La cátedra de Defensa Nacional de la Escuela Nacional de Defensa de la Argentina tiene a Las Guerras como bibliografía básica, al lado de las obras de Clausewitz, Raymond Aron y Jean Guitton.19 La cátedra de Relaciones Internacionales de la Facultad de Ciencia Política de la Universidad del Salvador también tiene esta obra en su bibliografía obligatoria. Dentro del material de estudio actualmente disponible para los oficiales de Estado Mayor del ejército argentino, figura una enjundiosa obra de un autor paraguayo - graduado en la Escuela Militar de Asunción- que constituye un inestimable manual dedicado a la exégesis de notables teóricos y expertos en la temática de la guerra. Al lado de nombres como Clausewitz, John Fuller y Basil Liddel Hart, entre otros, un capítulo se ocupa de Gastón Bouthoul.20

El coronel Cáceres hace una prolija exégesis de la obra máxima del polemólogo francés, parte por parte, de un modo tan claro que prácticamente la resume. No obstante, añade de continuo algunas observaciones breves, propias y de otros clásicos. Reconoce que emprender el estudio del fenómeno guerra sólo desde el punto de vista militar es una falacia. “Es una obra -el Tratado de Polemología- destinada a realizar el estudio objetivo de los conflictos bélicos, diferenciándose de aquellas que analizan la guerra desde un punto de vista estrictamente militar, tal como generalmente se hace en las academias de las fuerzas armadas y en los estados mayores”. Y a veces añade datos ilustrativos interesantes, como cuando retoma a John Fuller, quien después del segundo conflicto mundial sostuvo: “son las armas, una vez descubierto cuáles son las mas convenientes, las que en un 99% obtienen la victoria…la estrategia, el comando, los jefes, el valor, la disciplina, el abastecimiento, la organización y todo el bagaje moral y psíquico no significan nada ante una gran superioridad del armamento…a lo más forman el 1% restante.”21

A pesar de la relativa indiferencia de las nuevas promociones de oficiales y catedráticos de demografía, ciencia política y relaciones internacionales -un aspecto en relación a la obra de Bouthoul bastante generalizado y no circunscripto a algún país en particular-, está siendo reivindicado por algunos especialistas, particularmente después del 11 de septiembre de 2001 y en relación con la “guerra global antiterrorista”.

El general (R) Heriberto J. Auel, del ejército argentino, es actualmente un gran defensor y propagador del pensamiento de Bouthoul, adaptado -quizá un poco forzadamente- a los nuevos tiempos. Reivindica del polemólogo francés el concepto de guerra como “transición acelerada”, “portal de casi todas las nuevas civilizaciones” y “sanción de supremacía, por un tiempo, de un tipo de sociedad a la cabeza de la humanidad”. Considera descripta en esos ítems la causa profunda de la “Guerra Mundial Antiterrorista” en acto, que el “crimen organizado internacional” y sus asociados regionales iniciaron el 11 de setiembre de 2001.

Emparenta a Bouthoul con el documento del gobierno de EE.UU. titulado “Laestrategia nacional para combatir el terrorismo”, del 14/2/2003, que señala: “El enemigo no es una sola persona. No es un régimen político único. Por cierto, no es una religión. El enemigo es el terrorismo: la violencia premeditada, políticamente motivada, perpetrada contra objetivos no combatientes por grupos subnacionales o agentes clandestinos… La Estrategia de Seguridad Nacional previene los ataques terroristas dentro de EE.UU.….y se concentra en identificar y desactivar las amenazas antes que lleguen a nuestras fronteras.”22 Es una clara alusión a la “guerra preventiva”.

En un seminario en Madrid23, Auel reivindica a Bouthoul, quien en 1971 sostenía: “porqué la guerra, que hace más victimas ella sola que todas las calamidades juntas, no ha sugerido la creación, hasta el presente, del más mínimo Instituto de Investigaciones?” El general argentino es presidente del Instituto de Estudios Estratégicos de Buenos Aires, que ha desarrollado una activa labor polemológica, si bien los intentos de establecer una carrera de grado -y un postgrado a distancia- en una universidad privada hasta ahora no han sido satisfactorios. En una conferencia en el COFA -Círculo de Oficiales de las Fuerzas Armadas- en Buenos Aires, Auel insiste en que el S. XXI se presenta como altamente conflictivo,

donde el terrorismo postindustrial actúa en una “guerra asimétrica” (células dispersas en red), siempre haciendo mención de la vigencia de Bouthoul.24 La Argentina -sostiene- no está a la altura de una defensa nacional y regional, pues con la “modernización” de sus Fuerzas Armadas, a partir de 1988 se anuló todo planteamiento estratégico. Las F.F.A.A. argentinas fueron reducidas a un mero rol de policía militar en el exterior, al servicio de organismos internacionales. No sólo integran los Cascos Azules de las Naciones Unidas en diversas “operaciones de paz”, también conforman -desde la presidencia de Carlos S. Menem en los noventa del recientemente pasado siglo- los Cascos Blancos, de ayuda humanitaria. Si bien es una tendencia global y epocal, la previsión ante probables amenazas y agresiones estratégicas -insiste Auel- “han quedado en manos de nadie”.

Para Auel, estamos en la etapa de la transición de la civilización industrial a la postindustrial y -acorde a Bouthoul- entraríamos al portal donde el orbe globalizado vive el proceso de su condigna “guerra mundial”. Lo emparenta con Jean Baudrillard - El espíritu del terrorismo- quien señala que esta guerra mundial no es la tercera sino la cuarta y única verdadera, donde está en juego la globalización misma. La primera puso fin al colonialismo y al eurocentrismo, la segunda a los fascismos desafiantes, la tercera a la Guerra Fría y al comunismo. La cuarta enfrenta al orden mundial como hegemon. Para el compatriota de Bouthoul, si el Islam dominara el mundo, el terrorismo se levantaría en su contra.

Pero Bouthoul -sostiene Auel- ha contabilizado doce guerras mundiales en los últimos cinco siglos, y son tales porque está en juego la disputa por el poder imperial, no por su extensión.25 Claro está que asistimos, actualmente, a un conflicto planetario; es absurdo suponer que la globalización no traería consigo globalizar también la disidencia violenta. El terrorismo se ha desterritorializado y puede contar con armas sofisticadas, incluso de destrucción masiva, dado que la tecnología no tiene ideología y el fin del bipolarismo favoreció la dispersión de armas sofisticadas sin control real. Sea como fuere, continúa un interesante debate en el cual el polemólogo galo no está ausente. 

*Politólogo especializado en Relaciones Internacionales. Ensayista.

NOTAS

1 Gaston Bouthoul: Tratado de Polemología (Sociología de las Guerras) Ediciones Ejército. Servicio de

Publicaciones del E.M.E. -Payot, Paris- Impreso en España (Fuentebrada) 1984.

2 Id. pg.20.

3 Gaston Bouthoul: Las Guerras. Circulo Militar. Biblioteca del Oficial, Buenos Aires. Tomo I, Vol. 456, diciembre 1956 (Abarca las partes I a V, 453 pgs.) Tomo II, Vol. 457, enero 1957. (Abarca las partes VI a IX, 504 pgs.) Traducción del Teniente Coronel Manrique Miguel Mom del original francés Les Guerres. Eléments de Polemologie. Payot, Paris 1951.

4 PrólogodelTcnel. ManriqueMom,pgs. 17-29 deLasGuerras. Ed. Cit.

5 Gaston Bouthoul - René Carrére: Le defi de la guerre 1740-1974. Presses Universitaries de France, Vendóme 1976. pg. 34

6 Marie-Monique Robin: Escuadrones de la muerte: La escuela francesa. Sudamericana, Buenos Aires

2005, pg. 318

7 Alfredo Mason: Sindicalismo y Dictadura. Una historia poco conocida. Ed. Biblos. Buenos Aires 2007, pg. 43. Este excelente trabajo rastrea todas las influencias lejanas en la doctrina militar argentina que

culminará en el Proceso de Reorganización Nacional, la dictadura de las Fuerzas Armadas Argentinas

entre1976y1983.

8 M.M.Robin: op. cit. pg.80. A. Mason: op. cit. pgs. 46-47

9 GastonBouthoul:LasGuerras. Ed. cit. TomoI,pg.314

10Gaston Bouthoul: Las Guerras. Ed. cit. Tomo II, pgs. 155 y 384-385

11Revista de la Escuela Superior de Guerra. Ejército argentino. Nº 332, Buenos Aires enero-marzo 1959 (205 pgs.)

12 El artículo original en la Revista de Defensa Nacional de Francia. Agosto-setiembre 1958, pgs. 1306-

1319. Mom la completa con otros elementos de juicio, la mayoría franceses, en la Revista de la Escuela

Superior de Guerra. Ejército Argentino Nº 331, octubre-diciembre 1958, pgs 641-664, con el nombre

Guerrarevolucionaria. El conflictomundialendesarrollo.

13RevistadelaEscuelaSuperiordeGuerra.Id.ant. pgs.645y664.

14 Coronel M. M. Mom: “Guerra revolucionaria. Causas, procesos, desarrollo”. Revista de la Escuela Superior de Guerra. Ejército Argentino. Nº 334, julio-setiembre 1959, pgs. 489-515. Hay síntesis comentadas de los siguientes textos, muy significativos, además de las reuniones a las que asistió Mom:

A. Pietlre: “Estudio crítico del marxismo”. Conferencia en 1958 en la Ecole Superieur de Guerre, Francia. Cte. J. Haggard: “La guerra revolucionaria”. Conferencia del 25/3/58, id. anterior.

Cte. J. Haggard: “Apuntes de clases”. Ecole Superieur de Guerre 1958

Revista militar de información (Francia) Nº 280/281/286/289/290/291.

Mao Tsé Tung: Obras escogidas. Tomo I y II. Ediciones Sociales, Paris 1955.

15Id. pgs.505-506.Los subrayadosson delautor.

16 Jorge Giraldo Ramírez: Guerra Civil Posmoderna. Siglo del Hombre Editores-Universidad de

Antioquia. Bogotá 2009, pg. 63

17Horacio Cagni: “La guerra civil mundial y nosotros”. La Nueva Provincia, Bahía Blanca, 11/5/1995, pg. 7. Podemos aventurar, siguiendo el profundo análisis de Bouthoul de los “elementos sicológicos de las guerras”, que muchos represores encuadrados en las FF.AA y de seguridad argentinas -y de otros países iberoamericanos donde hubo dictadura- constituyen el tipo del fanático. Este se deleita con la masacre y entra en un conflicto con la intención de recibir y dispensar martirio. Es una desviación de la conciencia del soldado de ejercer un noble oficio, unida a la exigencia de la mágica reverencia por llevar armas y administrar la muerte, como “privilegio” de una clase dirigente salvífica de la cual se considera una emanación. La sensación de poder omnímodo e ilimitado que esta convicción provee es innegable.

18 Al respecto, Jerónimo Molina: “El polemólogo Gastón Bouthoul”, en Horacio Cagni (comp.):

Conflicto, Tecnología y Sociedad. Universidad Nacional de Lomas de Zamora, Buenos Aires 2009, pg.62.

19 PDGS. Partnership for Democratic Governence and Security. Tittle: Catedra de Defensa Nacional. Escuela Nacional de Defensa de Argentina. www.pdgs.gov.ar

20 Cirilo Cáceres-Carisimo: La Guerra. Macrosíntesis. Para una aproximación multipolar a la fenomenología de los conflictos. 2 volúmenes. Ed. Litocolor, Asunción 1982. En el Volumen I, el capítulo 18 -“Tratado de Sociología. Las Guerras. Elementos de Polemología”- pgs. 243-286, está dedicado a Bouthoul.

21Id. Pgs. 243 y 255. El Gral. Fuller conlleva mucha razón, pero exagera. Quizá estaba muy impresionado por la efectividad de la guerra de material y la doctrina de victoria aplastante de estadounidenses y soviéticos, que habían derrotado en el segundo conflicto mundial a Alemania a pesar de la excelente preparación de sus efectivos y su magnífico armamento.

22 www.harrymagazine.com/lacuestiónmilitar.

23 Universidad Nacional de Educación a Distancia, Madrid. Instituto Universitario “Gral. Gutierrez Mellado”. El Escenario Estratégico Internacional/Seguridad y Defensa en Iberoamérica/Panel 2: “La institucionalidad de seguridad y defensa en Iberoamérica” (ponencia del Gral. Auel) Disponible en Internet.

24 “El nuevo ordenamiento internacional posterior a la intervención de EE.UU. y sus aliados en Irak”. Conferencia en el COFA el 21/5/2003, disponible en Internet.

25 “Las guerras del S. XXI en nuestra Argentina encapsulada”. El Malvinense. 7/2/2010. Disponible en Internet.

lundi, 10 janvier 2011

Force et Honneur

Force et Honneur

« Le calendrier mémoriel de nos pères était, autrefois, parsemé de noms de saints, de soldats héroïques et aussi de grandes batailles. Ces noms, gravés dans l’histoire des peuples, étaient toujours évocateurs : ils constituaient une mémoire collective et forgeaient les identités nationales », écrit Jean-Pierre Papadacci, « Français d’Empire », en préface à un ouvrage intitulé « Force et honneur ».

Ce livre, auquel ont collaboré une trentaine d’auteurs, raconte « ces batailles qui ont fait la grandeur de la France et de l’Europe ». Sans doute certaines manquent-elles, comme Fontenoy, mais on y trouve beaucoup de rencontres qui ont compté, depuis la bataille de Marathon au début du Ve siècle avant Jésus-Christ jusqu’au siège de Sarajevo à la fin du XXe siècle de notre ère.

Le lecteur y trouvera, entre autres, les Thermopyles, Bouvines, le siège de Vienne, Torfou, Austerlitz, le siège de l’alcazar, la bataille d’Alger…

Tous les textes ne sont pas d’égale facture, mais la plupart sont bien écrits et intéressants. Citons notamment le récit de la prise de Jérusalem par les croisés, par Pierre Vial, la bataille d’Azincourt, par Jean Denègre, la levée du siège d’Orléans, par Thierry Bouzard, Lépante, par Robert Steuckers, Camerone, par Alain Sanders, Verdun, par Philippe Conrad, Dien Bien Phu par Eric Fornal, un récit de l’insurrection de Budapest par Vitéz Marton Lajos…

Le livre se conclut sur une série d’entretiens avec des officiers français : le général Yves Derville, qui participa à la première guerre du Golfe ; le colonel Jean Luciani, ancien des FFI et vétéran de Dien Bien Phu ; le capitaine Dominique Bonelliancien du 1er BEP puis du 1er REP en Indochine et en Algérie ; l’adjudant-chef Jean Laraque, les sergents Alexis Arette et Roger Holeindre, le caporal-chef Trogne, autres « sentinelles de l’Empire ».

« Nous savons que nous sommes des débiteurs et que nous avons le devoir de faire fructifier et de transmettre le patrimoine que nous avons reçu », écrit encore Jean-Pierre Papadacci dans sa préface. Nul doute que ce livre, destiné prioritairement aux adolescents, y contribue.

Force et honneur, ces batailles qui ont fait la grandeur de la France et de l’Europe, Les amis du livre européen ed.

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mercredi, 20 octobre 2010

Force et Honneur

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SOMMAIRE

 

1ère partie : des batailles…

         Préface de Jean-Pierre Papadacci

1.     Les Thermopyles par Christian Segré – 480 avant J.C.

2.     Marathon par Romain Lecap – 490 avant J.C.

3.     Issos par Quentin Hélène – 331 avant J.C.

4.     Gergovie par Joseph Maie Joly – 52 avant J.C.

5.     Zama par André Lama – 202 avant J.C.

6.     Teutoburger Wald par Pascal Lassalle – 9 après J.C.

7.     Tolbiac par Hubert Kohler – 496 après J.C.

8.     Les champs catalauniques par Arnaud Derville – 541 après J.C.

9.     La bataille de Toulouse et la bataille de Poitiers par Gilbert Sincyr – 732 après J.C.

10.  Hastings par Erik Fuchs – 1066 après J.C.

11.  La prise de Jérusalem par Pierre Vial – 1099 après J.C.

12.  Las Navas de Tolosa par Jean Kapel– 16 juillet 1212

13.  La bataille de Bouvines par Jean-Christophe Hartmann − 1215

14.  Tannenberg par Arthur Lorc’h − 1242

15.  Azincourt ou la mort de la chevalerie française par Jean Denègre – 25 octobre 1415

16.  La prise d'Orléans par Thierry Bouzard – 1429

17.  Le siège de Vienne par Philippe Conrad – 1529

18.  La bataille de Lépante par Robert Steuckers – 7 octobre 1571

19.  La bataille de Torfou par Arthur de Lascaux − 1793

20.  Austerlitz, la bataille des trois empereurs par Louis Samagne − 1805

21.  Camerone par Alain Sanders – 30 avril 1863

22.  Mourir pour Verdun par Philippe Fraimbois – 1916

23.  Le siège de l’Alvazar de Tolède par Olivier Grimaldi – 1936

24.  Stalingrad par Pierre Gilieth – 2 février 1943

25.  Le débarquement du commando Kieffer par Jean André − 1944

26.  La bataille de Berlin par Chris Chatelet – avril 1945

27.  Dien Bien Phu par Éric Fornal – 7 mai 1954

28.  L’insurrection de Budapest par Lajos Marton – octobre 1956

29.  La bataille d'Alger par François-Xavier Sidos– janvier à mars 1957

30.  Le siège de Sarajevo par Pierre-Henri Bunel – 1992 

 

2ème partie : et des hommes de guerre

1.     Général Yves Dervilles

2.     Colonel Jean Luciani

3.     Capitaine Dominique Boneli

4.     Jean Laraque

5.     Alexis Arette

6.     Roger Holeindre

7.     Aimé Trocmé

 

« C’est la guerre qui a fait des hommes et des temps ce qu’ils sont…Et toujours, si longtemps que la roue de la vie danse en nous sa ronde puissante, cette guerre sera l’essieu autour duquel elle vrombit. »

Ernst Jünger, La guerre notre mère

 

 « On ne se dérobe pas à la loi du combat, parce que c’est la loi de la vie. »

Pierre Drieu la Rochelle

 

 « L’avenir appartient à qui recueille et sème l’éternelle fleur du passé. »

Charles MAURRAS.

 

« La vie d’une grande nation n’est qu’un combat. Elle a ses jours d’épreuve.

Mais comme l’a dit Montaigne : l’adversité est une fournaise à recuire l’âme. »

Maxime WEYGAND

Le calendrier mémoriel de nos pères était, autrefois, parsemé de noms de saints, de soldats héroïques et aussi de grandes batailles. Ces noms,  gravés dans l’histoire des peuples, étaient toujours évocateurs : Ils constituaient une mémoire collective et  forgeaient  les identités nationales. Chaque  nation vénérait ses saints, exaltait ses héros et communiait dans le souvenir  de  ses grandes batailles. Le souvenir de celles-ci, gagnées ou perdues, était perpétué par des cérémonies patriotiques, véritables liturgies, qui cimentaient les peuples en reliant les vivants et les morts.

  Aujourd’hui,  ce culte de la mémoire, propre aux vieilles nations historiques, est contrôlé, contesté pour ne pas dire condamné car il dérange les tenants du nouvel ordre mondial. L’idéologie universaliste règne désormais en maîtresse, elle déforme, révise, détourne  le passé en attendant de le faire disparaître. C’est dans cet esprit que le bicentenaire de la victoire  d’Austerlitz a été  effacé, ignoré et  que  la commémoration du 90ième  anniversaire de la fin de la Première Guerre mondiale  a été transformée en promotion de l’union européenne et de son prétendu «  avenir radieux ». On  n’évoque plus les guerres que pour les condamner ou pour jeter l’opprobre sur les combattants. On  réhabilite les mutins, on glorifie les déserteurs, les traîtres, les objecteurs de conscience et on les offre en modèle. Les combats futurs ne se dérouleront plus que dans les stades ou dans les temples de la Bourse et les héros ne seront plus que des sportifs ou des traders. On nous promet un univers de paix et de prospérité qui  implique l’oubli de notre identité et  l’abandon de  notre nationalité : le monde n’est plus qu’un marché soumis à la religion du Veau d’Or  et notre avenir est assuré à jamais à condition d’en devenir les consommateurs.

  Beaucoup de ceux qui confondent rêves et réalités peuvent  se convertir aux utopies mondialistes  mais  nous, qui fûmes les enfants de Dien-Bien-Phu et de Budapest, nous refusons d’entrer dans ce marché de dupes. Nous savons que la vie  ne sera jamais un long fleuve tranquille.  Nous savons que nous sommes les héritiers de générations qui ont œuvré, souffert et parfois  sacrifié leur vie pour nous transmettre une patrie. Nous savons  que notre nationalité est un titre de propriété sur notre terre,  sur nos biens et  sur notre culture. Nous savons que  nous sommes des débiteurs et que nous avons le devoir de faire fructifier et de transmettre le patrimoine que nous avons reçu. Nous  savons qu’il  ne serait pas digne d’oublier les sacrifices de  nos anciens et encore moins de les stigmatiser ou de les renier. Enfin nous sommes convaincus que la nation reste la clef de voûte de l’ordre mondial. C’est pourquoi nous avons décidé de relater les grandes batailles qui ont marqué l’histoire des nations. Elles rappelleront à ceux qui l’oublient que la vie est avant tout un combat et que  notre premier  devoir est de rester fidèles à tous nos compatriotes qui, au cours des siècles, n’ont pas hésité  à donner leur vie pour assurer la pérennité de leur nation.

Jean-Pierre PAPADACCI.

Français d’Empire. 

jeudi, 09 septembre 2010

Deux ouvrages de V. D. Hanson en poche

GUERRES : Deux ouvrages de Victor Davis Hanson viennent de paraître au format poche

La guerre du Péloponnèse

 

Aucun conflit, dans l’Histoire, n’est aussi riche d’enseignements pour notre époque que la guerre du Péloponnèse  » : cette conviction est au cœur de l’enquête menée par l’historien Victor Davis Hanson sur la lutte qui opposa, il y a près de deux mille cinq cents ans, Sparte et Athènes. Car la guerre du Péloponnèse préfigure nombre de conflits modernes : ce fut un affrontement titanesque entre deux superpuissances et leurs alliés, une sorte de guerre mondiale à l’échelle de la Grèce ancienne ; ce fut aussi une sanglante guerre civile, puisqu’elle mit aux prises des hommes qui adoraient les mêmes dieux et parlaient la même langue ; ce fut surtout une guerre sale, qui inventa de nouvelles méthodes de terreur, bien éloignées du traditionnel combat d’hoplites. Sièges, coups de main, meurtres d’otages, massacres de civils et de prisonniers s’enchaînèrent pendant vingt-sept ans, jusqu’à la capitulation d’Athènes : la Grèce de l’âge d’or n’était plus. Pour raconter le premier conflit total de l’Histoire, ce livre, s’inspirant de Thucydide, nous fait toucher du doigt la chair même de la guerre : le sort d’Athènes livrée à une peste meurtrière, l’effroi d’assiégés mourant de faim, le recours à d’effroyables techniques militaires, le désespoir de généraux illustres comme la mort, loin de chez eux, d’humbles soldats paysans…

Carnage et culture

La supériorité militaire de l’Occident, depuis l’Antiquité, semble reposer sur une conception particulière de la guerre et de la mort. Car l’issue d’une guerre ne dépend pas toujours du nombre de combattants, de la connaissance du terrain, ou même de la stratégie des chefs militaires. À l’analyse tactique ou géopolitique, Victor Davis Hanson oppose une théorie quelque peu iconoclaste : la victoire, sur le champ de bataille, tient à la cristallisation de valeurs économiques, politiques et culturelles. Ce sont l’individualisme, la démocratie, le rationalisme et l’esprit d’entreprise qui firent plier, en maints endroits du monde, les armées ennemies. Ce fut encore l’Occident qui accoucha des conceptions les plus radicales et les plus meurtrières de la guerre : la guerre « juste » ou la guerre d’anéantissement, par exemple.

À travers le récit de neuf batailles décisives (Salamine, 480 avant J.-C. ; Gaugamèles, 331 avant J.-C. ; Cannes, 216 avant J.-C. ; Poitiers, 732 ; Tenochtitlan, 1520-1521 ; Lépante, 1571 ; Rorke’s Drift, 1879 ; Midway, 1942 et Tet, 1968), Victor Davis Hanson explore les multiples facettes d’une suprématie guerrière inégalée. Profondément polémique, cette histoire de la « supériorité » occidentale permet de lire en filigrane son envers te plus sombre : le cannibalisme politique et religieux des Européens au fil des siècles.

 

Source : Theatrum Belli [1]


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samedi, 10 octobre 2009

M. van Creveld: un regard sur les causes des victoires et des défaites au 20ème siècle

Michael WIESBERG:

Martin van Creveld: un regard sur les causes des victoires et des défaites au 20ème siècle

 

Martin van Creveld est Israélien: il vit à Jérusalem et est historien militaire de réputation internationale. Dans les démonstrations de son ouvrage le plus récent, il reste fidèle à lui-même en analysant les conflits armés qui ont sévi sur la Terre depuis 1900. Etre fidèle à soi-même signifie, ici, conserver en toute conscience un argumentaire froid, dépourvu d’émotions, qui ne tient quasiment pas compte des habituels aspects “moralisateurs”, car ceux-ci ne s’avèrent jamais pertinents. Le point de départ de toute l’argumentation de van Creveld est uniquement celui de l’efficacité militaire, ce qui irritera à nouveau tous ceux qui ont pris l’habitude de poser l’histoire des conflits comme l’équivalente de l’histoire des crimes de guerre.

 

Ce point de départ conduit van Creveld à examiner l’armée impériale allemande et la Wehrmacht sur base de leurs seules vertus militaires et de leurs seules capacités à résister jusqu’au bout: il ne tient compte d’aucun autre critère. Ce n’est pas la première fois que l’on découvre une telle approche sous la plume de van Creveld: déjà, dans son livre intitulé “Kampfkraft” (= “Force combattive”), où il compare la Wehrmacht et l’US Army, il exprime son respect pour les forces allemandes parce qu’elles avaient une plus puissante “force combattive” que leurs adversaires, même lors de la phase finale du conflit. Dans son nouvel ouvrage, van Creveld n’évoque qu’en marge les conditions préalables à cette “force combattive”, notamment ce qu’il appelle “l’institutionalisation des hautes prestations militaires” par l’état-major général allemand et que l’historien militaire américain Trevor N. Dupuy avait dûment examiné dans son livre “Der Genius des Krieges” (= “Le génie de la  guerre).

 

Le nouvel ouvrage de van Creveld tourne essentiellement autour d’une question: quelles sont les raisons décisives qui font que l’on gagne ou que l’on perd une guerre? Pour y répondre, van Creveld nous offre une promenade dans l’histoire militaire du 20ème siècle, partant de la Bataille de la Marne pour aboutir à l’invasion américaine de l’Irak. Au cours de cette promenade, il fait une pause et nous résume brièvement sa thèse pour la première moitié du 20ème siècle: “L’histoire de l’art de la guerre de 1914 à 1945 correspond (...) pour une bonne part à l’histoire de l’armée allemande, à ses manières de procéder et aux réactions de ses adversaires face à ses initiatives”.

 

Mais, alors, deuxième question, pourquoi l’armée impériale de Guillaume II et ensuite la Wehrmacht ont-elles finalement échoué? Martin van Creveld explique principalement cet échec par la situation géopolitique de l’Allemagne, une situation géopolitique difficile dont les sphères politiques, qui gouvernaient l’Allemagne, n’ont pas tenu suffisamment compte. A titre d’exemple contraire, notre auteur cite l’Angleterre: face à cette puissance, située en marge du continent européen mais ouverte sur toutes les mers du globe, les Allemands n’ont ni prévu ni mis en oeuvre une  stratégie cohérente visant son élimination définitive, ni pendant la première guerre mondiale ni pendant la seconde. Pour y parvenir, les Allemands auraient dû déployer une stratégie globale, qui aurait mis l’Angleterre en échec sur le plan économique. Cette impéritie géopolitique allemande dérive certainement du fait que ni l’Allemagne impériale ni l’Allemagne hitlérienne ne voulaient au départ faire la guerre à l’Angleterre. Cette bienveillance allemande, poursuit van Creveld dans sa démonstration, n’excuse nullement l’impéritie, dont le Reich a fait preuve, deux fois  consécutivement, car, en effet, les infléchissements de la politique allemande, juste avant 1914 et juste avant 1939, laissaient bel et bien prévoir un heurt avec l’Angleterre. Les Allemands n’ont donc pas, selon van Creveld, développé un programme politique et géopolitique cohérent, appelé à connaître le succès, pour l’éventualité d’une guerre contre l’Angleterre; c’est là qu’il faut voir l’une des raisons majeures de la défaite décisive subie par l’Allemagne lors des deux guerres mondiales.

 

Dans son livre, van Creveld démontre avec brio que le visage de la guerre s’est modifié rapidement au cours de la première moitié du 20ème siècle, vu les innovations techniques. Mais, en dépit de la nouvelle donne qu’elles constituent, les innovations techniques ne sont qu’une face de la médaille; l’autre face, c’est la puissance économique et la capacité à déployer une production de masse, qui y est liée. C’est ce que van Creveld appelle la “mobilisation des ressources”. C’est bien sûr cette capacité-là qui a fait la décision au cours des deux guerres mondiales. Les ingénieurs allemands ont peut-être été les plus créatifs mais le rouleau compresseur matériel des Alliés, surtout après l’entrée en guerre des Etats-Unis, s’est montré irrésistible. Martin van Creveld rappelle: “Du point de vue technique, les Allemands se sont montrés très inventifs. Et, de fait, nombreux sont ceux qui affirment que tous les systèmes d’armement qui ont été déployés de 1945 à 1991 (...) avaient déjà été ébauchés en 1944/1945 dans des bureaux d’étude allemands”.

 

Mais cette inventivité foisonnante avait aussi un revers: “Elle a eu pour résultat qu’un très grand nombre de modèles, types et versions différents de ces armements a été fabriqué”, ce qui a entraîné de fréquentes modifications dans les cycles de production et d’interminables problèmes d’entretien. Pour ne citer qu’un seul chiffre, rien que le groupe d’armées du Centre avait besoin, à la fin de l’année 1941, d’un million de pièces de rechange pour être à même de poursuivre le combat.

 

En outre, ce fut Erich Ludendorff, qui, très influent du côté allemand pendant la première guerre mondiale, avait prévu, de la manière la plus réaliste, la forme que prendrait bientôt la “guerre totale”. Les “visions” ludendorffiennes de la “seconde guerre mondiale” se sont parfaitement concrétisées. Le fait de citer ainsi Ludendorff prouve l’impartialité de van Creveld, car Ludendorff demeure encore et toujours une personnalité stigmatisée. Et van Creveld ne se borne pas à la citer mais, en plus, commente ses thèses de manière positive.

 

Aux Etats-Unis, cette mobilisation totale de toutes les ressources a débouché, en fin de compte, sur la bombe atomique dont l’utilisation, le 6 août 1945, représente, pour van Creveld, une mutation définitive dans l’histoire de la chose militaire. Après le lancement de cette première bombe nucléaire, il n’y a plus eu de confrontations directes entre grandes puissances militaires; on a assisté, tout au plus, à des “guerres par acteurs interposés”, dans les zones périphériques du monde. Lorsqu’une grande puissance militaire ou une superpuissance partait en guerre, c’était contre un adversaire qui, au mieux, était une puissance de second rang.

 

La seconde moitié du livre se penche, pour une bonne part, sur le phénomène de la “guerre asymétrique” et sur une question très actuelle: pourquoi les confrontations avec les groupes terroristes ou insurrectionnels ont-elles été perdues, malgré l’écrasante supériorité de leurs adversaires? Une raison: si ces conflits durent trop longtemps, alors intervient une phase d’usure et de démoralisation: les soldats les plus motivés sombrent alors dans la résignation, contre laquelle même la mobilisation la plus intense des armes de haute technologie ne peut rien faire.

 

Une telle situation doit s’éviter à tout prix. Pour tenter de nous expliquer comment y parvenir, van Creveld ne cite que deux exemples: d’abord, la stratégie adoptée par les Britanniques en Irlande du Nord contre l’IRA; ensuite, le procédé utilisé par le régime d’Assad en Syrie contre les frères musulmans locaux. Les Britanniques ont réussi, en renonçant consciemment à toutes armes lourdes, à reconquérir petit à petit la sympathie des Irlandais du Nord et de couper ainsi l’herbe sous les pieds de l’IRA. Le procédé utilisé par Assad contre la ville de Hama relève d’une stratégie toute différente: cette ville ayant été le centre névralgique des frères musulmans en Syrie, Assad l’a fait complètement raser, en exterminant bon nombre de ses habitants. Selon les critères de bienséance, nous avons affaire ici à un massacre pur et simple. Mais Assad a eu la paix et ce résultat lui donne raison a posteriori, constate sèchement van Creveld. On ne s’étonnera pas, dès lors, que le politologue berlinois Herfried Münkler, en lisant de telles thèses, écrit, dans une recension parue dans “Die Zeit” (Hambourg) qu’on peut certes tirer profit de la lecture du livre de van Creveld mais qu’elle s’avère aussi “accablante et irritante”.

 

Michael WIESBERG.

(recension parue dans “Junge Freiheit”, Berlin, n°40/2009; trad. franç.: Robert Steuckers).

 

Références:

Martin van CREVELD, “Gesichter des Krieges – Der Wandel bewaffneter Konflikte von 1900 bis heute”, wjs-Verlag, Berlin, 2009, 352 p., 22,95 euro.

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mardi, 10 mars 2009

Un nouvel écrit libre dirigé par A. Chauprade

Un nouvel écrit libre dirigé par Aymeric Chauprade

 

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lundi, 09 mars 2009

Choc des civilisations: le slogan et la réalité

Choc des civilisations : le slogan et la réalité

Ex: http://soutien-chauprade.hautetfort.com/

« Le conflit réveille des tensions et des violences très fortes. Si nous ne faisons rien, nous risquons d'avoir un choc des civilisations, des guerres de religion qui mèneront le monde au bord de la catastrophe, et l'Europe en particulier, parce qu'elle est sur la ligne de fracture des civilisations. » En pleine offensive israélienne contre la bande de Gaza, Henri Guaino, conseiller spécial de Nicolas Sarkozy, s'inquiétait ainsi, dans un entretien au Monde (daté du 6 janvier), des répercussions possibles de cette attaque meurtrière jusqu'au sein des sociétés européennes. En effet, durant les trois semaines de l'opération « Plomb durci », les tensions, plus ou moins récurrentes depuis quelques années - notamment en France -, entre les communautés musulmane - immigrée ou d'origine immigrée - et juive se sont soudain exacerbées, l'une s'identifiant au peuple palestinien « agressé », l'autre au peuple israélien en état de « légitime défense » contre le « terrorisme ». Dans le même temps, du Marocau Pakistan, en passant par les pays du Proche-Orient, les foules musulmanes manifestaient une nouvelle fois leur colère contre l'Etat hébreu et la « complicité » de la « communauté internationale » - Etats-Unis et Union européenne en tête -à son égard.

couv553.pngRégulièrement évoquée depuis les attentats du 11 septembre 2001 à New York et à Washington, la menace d'un « choc des civilisations » offrait ainsi, aux yeux de maints observateurs, une nouvelle illustration quelques jours, seulement, après la disparition, le 24 décembre2008, à l'âge de quatre-vingt-un ans, de son principal théoricien, le politologue américain Samuel Philips Huntington, et juste avant l'installation à la Maison-Blanche de Barack Obama.

Dans la foulée, un des principaux représentants de la jeune école française de géopolitique, Aymeric Chauprade, directeur de cours au Collège interarmées de défense (CID), professeur à l'université de Neuchâtel et invité dans de nombreuses universités étrangères, publie aujourd'hui Chronique du choc des civilisations. Sous-titré « Actualité, analyses géopolitiques et cartes pour comprendre le monde après le 11-Septembre », richement illustré, cet ouvrage présente un décryptage à ce jour le plus complet, le plus clair et le plus précis des nouveaux enjeux planétaires. Resituant ceux-ci dans la longue durée historique, il justifie son titre grâce à une grille d'analyse originale qui permet de mieux appréhender un thème autour duquel est entretenue une certaine confusion.

C'est en 1993 que Samuel P. Huntington, professeur de sciences politiques à Harvard, où il dirige le John M. Olin Institute of Strategic Studies, devient célèbre en publiant, dans la revue Foreign Affairs, un article intitulé de façon interrogative : « The clash of civilizations ? ». Son écho est tel qu'il entreprend de développer son propos dans un livre, publié trois ans plus tard sous le titre : The Clash of Civilizations and the Remaking of World Order. Le point d'interrogation a disparu. Les débats passionnés suscités par l'article sortent des cercles spécialisés. Best-seller mondial, l'ouvrage sera traduit en trente-neuf langues. Paru en France, en 1997, sous le titre le Choc des civilisations, il sera plusieurs fois réédité.

Que dit Huntington ? Que « la culture, les identités culturelles qui, à un niveau grossier, sont des identités de civilisation, déterminent les structures de cohésion, de désintégration et de conflits dans le monde d'après la guerre froide ».

Autrement dit que, depuis l'effondrement de l'Union soviétique, les rapports internationaux ne sont plus régis par des logiques strictement étatiques - ni même économiques ou idéologiques -, mais par des logiques civilisationnelles. « La rivalité entre grandes puissances, écrit-il, est remplacée par le choc des civilisations. Dans ce monde nouveau, les conflits les plus étendus, les plus importants et les plus dangereux n'auront pas lieu entre classes sociales, entre riches et pauvres, entre groupes définis selon des critères économiques, mais entre peuples appartenant à différentes entités culturelles. »

L'ouvrage de Huntington peut se lire à deux niveaux. Le premier concerne l'affirmation que le monde est constitué de civilisations différentes, que celles-ci ne sont pas destinées à disparaître et qu'il existe entre elles des lignes de fracture qui ont jalonné l'histoire de l'humanité avec plus ou moins d'intensité, et qui sont en train de se réveiller.

Ce faisant, Huntington n'a rien inventé. « L'histoire du monde est l'histoire des grandes civilisations », soulignait déjà Oswald Spengler dans son célèbre Déclin de l'Occident (1928). Max Weber, Emile Durkheim, Marcel Mauss, Arnold Toynbee, Immanuel Wallerstein, Fernand Braudel et bien d'autres ont consacré une grande partie de leur vie à l'étude comparée des civilisations et, parfois, aux conflits qui ont pu les opposer.

« Pour toute personne qui s'intéresse au monde contemporain et à plus forte raison qui veut agir sur le monde, remarquait déjà Braudel dans ses Ecrits sur l'histoire (1969), il est "payant" de savoir reconnaître sur une mappemonde quelles civilisations existent aujourd'hui, d'être capable de définir leurs frontières, leur centre et leur périphérie, leurs provinces et l'air qu'on y respire, les formes générales et particulières qui existent et qui s'associent en leur sein. Autrement, quelle catastrophique confusion de perspective pourrait s'ensuivre. »

Et le grand historien notait, à propos de la bataille de Lépante (1571) qui, à l'entrée du golfe de Corinthe, opposa la flotte chrétienne de la Sainte Ligue à l'armada ottomane d'Ali Pacha, qu'elle fut un « de ces chocs sourds, violents, répétés, que se portent les bêtes puissantes que sont les civilisations ». « Le choc des civilisations, écrit pour sa part Aymeric Chauprade, traverse les siècles, et même, pour certaines civilisations, les millénaires ; il s'apaise, puis reprend, et donne à l'histoire des chocs sourds et puissants, comme si des plaques tectoniques venaient à en découdre, causant d'immenses secousses dans l'humanité. »

Le premier exemple répertorié de ces « chocs » se situe en 1280 avant J.-C. : il s'agit de la bataille de Kadesh, qui opposa l'empire égyptien de Ramsès II aux Hittites. La liste des « chocs » qui ont suivi est longue. On peut énumérer, entre autres, l'affrontement, au début du Ve siècle avant J.-C., entre le monde grec (l'Europe) et le monde perse (l'Asie) lors des guerres médiques ; les guerres puniques entre Rome et Carthage, aux IIIe et IIe siècles avant notre ère, mettant aux prises une nouvelle fois l'Europe et l'Asie, mais encore indiquait Braudel, « un peuple essentiellement maritime et marchand [Carthage] et un peuple essentiellement terrien, guerrier et paysan [Rome] » ; la lutte millénaire entre l'islam et la chrétienté, ponctuée d'épisodes qui ont profondément laissé leur empreinte dans les mémoires collectives : Poitiers (732), les croisades (XIe-XIIIe siècles), les huit siècles de la Reconquista espagnole, la prise de Constantinople par les Ottomans (1453), Lépante (1571), déjà cité, le siège de Vienne par les Turcs (1683) ; la quasi-disparition des civilisations précolombiennes d'Amérique du Sud, consécutive à l'arrivée des conquistadors ibériques ; le quasi-génocide des Indiens d'Amérique du Nord lors de la conquête de l'Ouest ; la pénétration du christianisme en Chine et au Japon à partir de la fin du XVIe siècle, puis, au XIXe , le dépouillement de l'empire du Milieu par les puissances européennes.

En remettant ainsi au premier plan la réalité civilisationnelle, sa pluralité et sa conflictualité, Samuel P. Huntington allait à rebours d'un certain universalisme occidental qui considère l'humanité comme une abstraction dépouillée de ses appartenances profondes. D'où l'effet de scandale créé par son livre.

Celui-ci (et l'article qui l'a précédé) a été souvent considéré comme une réponse à un autre ouvrage retentissant, paru quatre ans avant le sien, la Fin de l'Histoire et le dernier homme (1992) -précédé, lui aussi, par un article (publié en 1989 dans la revue National Interest) - de son jeune collègue Francis Fukuyama, professeur d'économie et de sciences politiques à l'université Johns Hopkins de Washington.

Empruntant l'idée de « fin de l'Histoire » à Hegel, Fukuyama prophétisait que la chute du mur de Berlin ouvrirait la voie au triomphe universel du modèle démocratique occidental, de l'économie de marché et de l'idéologie des droits de l'homme, mettant ainsi un point final aux conflits du passé.

La guerre de Yougoslavie, les conflits dans le Caucase et l'Asie centrale post-soviétiques, le génocide rwandais - pour ne prendre que ces exemples - n'ont pas tardé à démentir Fukuyama et à donner du crédit à Huntington. Crédit que sembleront confirmer, ensuite, la dégradation continue de la situation au Proche-Orient, la montée du fondamentalisme islamique et les attentats spectaculaires du 11 septembre 2001. C'est là qu'intervient le second niveau de lecture de sa thèse, niveau non plus descriptif mais normatif.

Car Samuel P. Huntington n'était pas seulement professeur de sciences politiques. Longtemps appointé par la CIA, proche de Zbigniew Brezinski, le grand théoricien du roll back, du refoulement de la puissance russe vers l'intérieur de l'Eurasie, il occupa, sous l'administration Carter, un poste important au Conseil national de sécurité, avant de travailler comme conseiller au département d'Etat sous les administrations Reagan et Bush père. Par ailleurs, cofondateur de la revue Foreign Affairs - celle-là même où il publia son article en 1993 et émanation du Council for Foreign Relations -, il fut l'un de ceux qui pensèrent la politique extérieure américaine au cours des trente-cinq dernières années.

Le Choc des civilisations n'est pas une étude désintéressée à la manière de Braudel, mais une contribution (certes personnelle) à la redéfinition des objectifs stratégiques des Etats-Unis après l'effondrement de l'URSS. Tout comme l'avait été, en son temps, la Fin de l'Histoire, de Francis Fukuyama. Les deux ouvrages, en effet, correspondent à deux moments de l'après-guerre froide. Le premier de ces moments - très bref - est celui du « nouvel ordre mondial » lancé par George Bush père, celui de la « mondialisation heureuse » sous l'égide « bienveillante » de l'Amérique, annonciatrice de « la fin de l'Histoire ». Le second est dominé par les difficultés de plus en plus grandes rencontrées par Washington à faire triompher ce programme, à maîtriser l'évolution du monde ; ce moment est celui de la « guerre contre le terrorisme ».

Promoteurs, après le 11 septembre 2001, de cette « guerre contre le terrorisme », les néoconservateurs qui entourent alors George W. Bush vont puiser chez Huntington de quoi justifier leur rhétorique et leur action, faisant du « choc des civilisations » un slogan mobilisateur. Parfois au corps défendant de l'intéressé. En effet, celui-ci ne partage pas la politique impérialiste agressive de l'administration Bush. « Pour éviter une guerre majeure entre civilisations, souligne-t-il au contraire, il est nécessaire que les Etats-noyaux s'abstiennent d'intervenir dans des conflits survenant dans d'autres civilisations. » S'abritant derrière le renom médiatique de Huntington, les néoconservateurs sont, en réalité, plus directement inspirés par les travaux de l'islamologue britannique Bernard Lewis. C'est d'ailleurs lui le véritable inventeur de l'expression « choc des civilisations » : « La crise au Proche-Orient [...] ne surgit pas d'une querelle entre États, mais d'un choc des civilisations », lança-t-il en 1964. Désignant exclusivement, sous sa plume, l'opposition entre l'« Islam » et l'« Occident », elle s'identifie parfaitement à la logique binaire néoconservatrice. Et à celle de son double et rival mimétique, le djihadisme de Ben Laden. Installé aux Etats-Unis depuis 1974, proche de la droite israélienne, Bernard Lewis sera, notamment, l'inspirateur du plan américain de Grand Moyen-Orient.

Reste que le livre de Huntington prête le flanc à l'instrumentalisation. Ne serait-ce que par ses raccourcis et simplifications, notamment en posant les civilisations comme des ensembles homogènes et unitaires, ce qu'elles ne sont pas. Surtout, son découpage du monde en neuf civilisations constitue en lui-même une instrumentalisation de la réalité civilisationnelle au service des permanences géostratégiques des Etats-Unis. Ainsi lorsqu'il intègre, sous le nom d'« Occident », l'Europe occidentale et l'Amérique du Nord au sein d'une même communauté de destin transatlantique : ignorant délibérément que la seconde s'est construite en rupture avec la première, cette intégration répond, en revanche, parfaitement à l'impératif de Washington d'empêcher l'émergence d'une Europe puissance continentale qui associerait ses parties occidentale (catholique et protestante) et orientale (orthodoxe). Ou encore, lorsqu'il établit une distinction entre civilisation « japonaise » et civilisation « chinoise », c'est pour mieux légitimer l'alliance américano-nippone destinée à contenir la montée en puissance de la Chine.

La montée en puissance de la Chine : telle est précisément l'obsession de la géopolitique américaine depuis la fin de la guerre froide, ainsi que le montre Aymeric Chauprade dans son ouvrage. La stratégie globale déployée par les Etats-Unis depuis l'effondrement de l'URSS a consisté à contrôler la dépendance énergétique de l'empire du Milieu, à l'encercler par un nouveau réseau d'alliés, à soutenir les séparatismes en son sein (Xingiang, Tibet), à affaiblir la dissuasion nucléaire dans le monde par le développement du bouclier antimissile. La guerre en Afghanistan et en Irak, la volonté d'empêcher la sanctuarisation nucléaire de l'Iran s'inscrivent dans cette stratégie. Dans cette optique, la « guerre contre le terrorisme » islamiste ne serait, en réalité, que le paravent d'une guerre contre les puissances eurasiatiques, dont le 11-Septembre aura été l'accélérateur : la Chine comme cible, la Russie comme enjeu.

De l'orientation stratégique de la Russie dépend, en effet, la réussite de cette stratégie globale. Or, après avoir cru pouvoir faire « tomber » la Russie de son côté à la faveur du chaos post-soviétique des années Eltsine, Washington a dû déchanter depuis l'accession au pouvoir, en 2000, de Vladimir Poutine. Ayant entrepris de redresser la puissance russe en s'appuyant sur la civilisation orthodoxe et les richesses énergétiques du pays (pétrole et gaz), Poutine (et, depuis 2008, le tandem Medvedev-Poutine) est peut-être en train déjouer le rêve unipolaire américain au profit d'un monde multipolaire. S'étant rapprochée de la Chine, la Russie voit déjà des alliances se former autour d'elle, de l'Iran au Venezuela, en passant par le Nicaragua. Alliances de puissances, mais aussi, conclut Aymeric Chauprade, de civilisations qui « se dressent contre le mondialisme américain et le refusent car elles ont désormais les moyens de le refuser [...] ».

Christian BROSIO