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mardi, 31 mars 2015

Les mots magiques de la propagande

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Les mots magiques de la propagande

par Ismaël Malamati

Ex: http://www.dedefensa.org

Dans son ouvrage «Propagandes» paru en 1962, Jacques Ellul observait qu’il y avait peu de différences entre la propagande des dites «démocraties» et celle des dites «dictatures» (1) : mêmes méthodes, pratiques et objectifs. La seule grande distinction qu’il établissait était que dans les démocraties parlementaires, la propagande à visée intérieure était tenue par quelques grands groupes médiatiques et non par l’État directement ! Ces conglomérats médiatiques s’alignaient par ailleurs sur les directives gouvernementales pour les questions de politique extérieure, au nom de l’intérêt général de la nation. Cette analyse ne semble pas avoir 53 ans, tant les mass media of communication, hors internet, ne parlent que d’une seule voix dans certains domaines. Par contre, l’explication donnée d’un alignement par «intérêt national» est surannée, car celui-ci n’existe plus en pratique et sa capacité mobilisatrice est devenue faible.

Dans ce livre, Ellul insiste sur le fait que la propagande n’est pas un mensonge (sinon ce serait de la désinformation), mais une information qui provoque chez le propagandé une action et non une réflexion. Elle s’appuie sur des mots vidés de leur sens qui produisent des réactions affectives. D’où l’expression «mots magiques», en référence aux formules des anciens mages zoroastriens détournées de leur contexte par des personnes voulant les utiliser à des fins opérationnelles.

Il rappelle quelques faits intéressants, comme l’impossibilité pour un État moderne de subsister sans propagande ; que ce sont des démocraties parlementaires (France, États-Unis,…) qui l’ont créée (les plus démocrates d’entre nous peuvent la considérer comme leur golem) ; ou bien la difficulté de lutter contre elle, sans en faire soi-même, tant ces techniques sont efficaces. Pour lutter contre la propagation de la manipulation des concepts, nous allons redonner un peu de complexité à certains « mots magiques ».

Lors d’un précédent article, nous avons relevé l’inadéquation de l’usage du terme « terrorisme », par rapport à son sens étymologique, en montrant que techniquement seuls les média sont terroristes ! De nombreux autres concepts renvoient à des images simplistes qui nient leurs sens véritables : Liberté, Égalité, Progrès, Humanisme, Sharî’a, Crise, etc. Ils génèrent des sentiments, bons ou mauvais, qui provoquent une position défensive ou une fermeture d’esprit vis-à-vis de ceux qui osent les discuter.

• La Liberté et l’Égalité ont de multiples sens religieux, politiques et juridiques qui poussent à des discussions sans fin, notamment sur leurs limites ou leur possible antinomie (la liberté pousserait à la loi du plus fort, donc à l’inégalité ; ou pour rendre les individus véritablement égaux, il faudrait les empêcher d’avoir des libertés,…).

• Le Progrès, l’absolu du XIXème siècle, a été porté par le positivisme, mais ce dernier s’est essoufflé, d’où l’utilisation actuelle du terme « Changement » aussi vague dans son objectif qu’insipide dans son contenu. Le moyen (Changement) remplace la finalité (Progrès), comme la Tactique tend à se substituer à la Stratégie...

• L’Humanisme s’oppose au Déisme (ou croyance en un Dieu). Il est absurde que des croyants s’en revendiquent, car il place l’Homme et non Dieu au centre de l’univers.

• La (sic) Sharî’a, qu’on peut traduire par «interprétation philosophique de la Loi divine » ne peut être précédée par l’article défini “la”, puisqu’il n’existe aucune unicité d’interprétation et que cela fait fi des milliers de conflits juridico-religieux de l’islam (chaque juriste ayant sa propre sharî’a !).

On voit que l’entreprise d’«abolition du sens des mots», selon la formule de Léon Bloy, se poursuit. Est-ce un hasard que ceux qui luttent contre cette «abolition» mettent en avant des convictions religieuses et/ou une volonté de réagir face aux abus du modernisme (donc qualifiés par le mot magique à usage souvent péjoratif de «réactionnaires»)?

Cela nous amène au terme «crise» souvent employé à mauvais escient. Krisis en grec signifie «décision à prendre lors d’une période où les enjeux sont importants». Lorsque «crise» est employé par les politiques ou leurs soutiens mainstream, il signifie surtout une période où l’économie est au plus bas. Mais loin d’entraîner des décisions, la magie de ce mot appelle à la passivité populaire, car cette catastrophe pourrait se propager. Priez pour qu’elle ne vous touche pas et laissez-nous gérer, disent-ils en substance! Cette crise réelle ou supposée de l’économie nous terrifie et nous empêche d’agir. Lorsqu’ils évoquent une «crise de l’autorité», il s’agit d’un appel à respecter et suivre leurs injonctions. Cela explique l’omniprésence de ce terme chez les pseudo-gouvernements et surtout la volonté que la crise (dans son sens moderne) soit perpétuelle! En effet, il ne faut pas être expert dans l’étude des marchés, ni en psychologie pour savoir que la confiance est un des moteurs de l’humain et que la relance économique, si elle est vraiment nécessaire, se produira plus facilement s’il n’y a pas de crainte du futur. L’objectif de l’emploi de ce mot est ici de maintenir les individus dans un état léthargique pour les rendre incapables de révolte. Cette propagande pousse donc à l’inaction.

Par contre, lorsque des dissidents emploient ce mot magique, ils invoquent le besoin de décisions individuelles ou collectives pour retourner à un monde plus sain: celui d’une grandeur spirituelle, morale, etc. Le terme «crise» pousse ici à agir contre l’autorité temporelle pour limiter ou mettre fin au désordre de ce monde. Ainsi, il retrouve son sens étymologique, puisque la prise d’une bonne décision permettra de se sortir de cette épreuve crisique.

Ismaël Malamati

Note

(1) Selon les terminologies de la Guerre froide. Aujourd’hui on emploierait l’expression de «régime autoritaire», à croire que les autres gouvernants n’aiment pas et ne favorisent pas leur propre autorité! Le régime autoritaire désigne peut-être en fait un gouvernement qui assume cette volonté d’autorité...

jeudi, 26 mars 2015

La mise en place d’un système de propagande au niveau européen

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La mise en place d’un système de propagande au niveau européen

 

 

 

 

Il y a quelques mois, le média EUobserver signalait l’existence d’un document informel à l’initiative de la Grande-Bretagne, de la Lituanie, de l’Estonie et du Danemark, appelant à doter l’UE de moyens d’informations communs destinés à « déconstruire… la propagande hostile » que représenteraient les médias russes dans le cadre du conflit ukrainien. L’affrontement du bloc américano-occidental et de la Russie, a en effet permis de mettre à jour l’embrigadement des grands médias occidentaux sur les sujets géopolitiques et stratégiques et a permis à de nombreux citoyens européens à la recherche d’une information réaliste et factuelle de s’informer hors de la sphère d’influence américaine par le biais des grands médias russes, comme Russia Today, qui dispose maintenant d’une édition en langue française. La simple comparaison entre les informations déployées à l’intérieur du bloc OTAN et celles circulants hors de la sphère d’influence américano-occidentale, permet effectivement de prendre conscience de la propagande de guerre à l’oeuvre dans les médias européens et de leur manipulation de l’information.

Le document, probablement d’origine états-unienne, prévoyait donc la mise en place au niveau européen d’une « plate forme permanente au sein de laquelle l’UE et l’OTAN pourraient échanger leurs points de vue sur la communication stratégique » et appelait les producteurs médiatiques à « encourager les échanges entre les productions des différents pays (divertissements, films, documentaires) afin de fournir des alternatives compétitives à la production russe sur le marché européen de la télévision. »

Le conseil européen des 19 et 20 mars derniers, a adopté à cet effet une « feuille de route » concernant la mise en place des mesures préconisées par ce document, sous la supervision de la chef de la diplomatie européenne Federica Mogherini, dans le but « de superviser le nouveau programme d’envergure pour contrecarrer le travail des médias russes. »

Cette dernière a notamment déclaré le 19 janvier : “Nous travaillons sur la mise en place d’une stratégie de communication pour faire face à la propagande en langue russe“.

A cet effet, il est prévu de lancer un grand média en langue russe destiné à promouvoir la vision atlantiste dans la sphère d’influence de la Russie et à contrer Russia Today, sur le modèle des anciens médias opérés par la CIA du temps de la guerre froide, comme Radio Liberty ou Radio Free Europe. Le document, qui n’a pas été rendu public et serait classé « secret défense », mais dont certains éléments ont fuité, invite également les journalistes d’investigation à se rapprocher de structures telle que la European Endowment for Democracy, opérée par la CIA.

Russia Today, en tant que premier média international russe, est la cible privilégiée de cette campagne. En Grande-Bretagne, l’Office of communications, la structure de régulation des médias, a formulé en décembre un avertissement à Russia Today en menaçant de lui retirer sa licence si la chaîne ne tenait pas compte de ses remarques.

En début d’année, le rédacteur en chef du quotidien américain The Economist, Edward Lucas, a qualifié les employés de RT « d’excentriques et de propagandistes » et a appelé à leur boycott. Il a notamment affirmé : « Quiconque déposera son CV sur mon bureau et que je vois que cette personne a travaillé chez RT ou Sputnik ou quelque choses comme ça, alors ce CV sera jeté à la poubelle. Nous devons être capables d’humilier ces chaînes, ces personnes et les personnes qui les ont nommés, les producteurs qui les ont lancés et de les repousser en marge du monde des médias pour qu’on ne les considère plus comme de vrais journalistes ou de vraies chaînes mais comme des excentriques et des propagandistes. »

Un premier pas dans la mise en place d’une stratégie européenne de propagande de masse vient d’être effectué avec la signature d’une alliance entre sept grands quotidiens nationaux qui comprend Le Figaro, pour la France, La Republica pour l’Italie, El Pais pour l’Espagne, Le Soir pour la Belgique, La Tribune de Genève et Tages-Anzeiger pour la Suisse, et qui sera dirigée par Javier Moreno, ancien directeur de la rédaction d’El País. Les objectifs officiels sont « la mise en commun des compétences ainsi que la promotion du journalisme de qualité. »

Cette alliance a été nommée Leading European Newspaper Alliance  (LENA) et elle s’est donnée pour objectif opérationnel de mettre en place une « plateforme d’entraide entre éditeurs pour partager leurs expériences à l’ère numérique« , c’est à dire qu’elle proposera une plateforme de mutualisation des contenus. Cette mutualisation aura pour conséquence une réduction de la diversité éditoriale et une uniformisation des contenus à l’échelle européenne, ce qui facilitera l’imposition et la circulation de la propagande atlantiste à l’échelle du continent. L’objectif affiché est ainsi de « faire émerger une opinion publique en Europe« …

Guillaume Borel

lundi, 09 février 2015

Aller vers un monde multipolaire malgré des médias pratiquement à sens unique

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Aller vers un monde multipolaire malgré des médias pratiquement à sens unique

 

Ex: http://arretsurinfo.ch

La grande question de la géopolitique aujourd’hui est de savoir si nous nous dirigeons vers un monde unipolaire totalement dominé par les USA (les Américains, avec fierté et arrogance, appellent cela « Full Spectrum Dominance ») ou si au contraire nous allons vers un monde multipolaire où plusieurs centres de pouvoir coexistent.

D’un point de vue économique, le monde est déjà multipolaire : la part des USA dans la production brute mondiale s’élève à environ 18% (données de 2013), et est en constante diminution. Dans ces conditions, comment se fait-il que les États-Unis exercent une telle domination globale ? Son gigantesque budget militaire n’explique pas tout ; vous ne pouvez pas, en pratique, bombarder le monde entier…

Le premier outil magique que les USA utilisent pour la domination mondiale est le dollar. Le mot « magique » n’est pas un effet de style ici ; le dollar est effectivement une création magique puisque la Réserve fédérale peut en créer en quantité illimitée dans ses ordinateurs, et le monde entier considère ces dollars comme une valeur effective, avec en arrière-pensée les pétrodollars. Cela rend extrêmement aisée pour les USA de financer à coups de milliards de dollars des « révolutions colorées » et d’autres opérations subversives autour du globe. Fondamentalement, cela ne leur coûte rien. C’est l’un des problèmes qui devra être traité pour accéder à un monde multipolaire, quel qu’il soit.

L’autre super-arme utilisée par les USA est leur infamante domination des médias d’information, une hégémonie quasi absolue dont la dimension échappe à la plupart des analystes.

Hollywood est la plus fantastique machine de propagande jamais créée dans le monde. Hollywood exporte vers des milliards de cerveaux les standards hollywoodiens pour appréhender la réalité, qui incluent, mais ne se limitent pas à, la façon de penser, de se comporter, de s’habiller, ce qu’il faut manger, boire, et même la façon d’exprimer sa dissidence. Eh oui, Hollywood est même capable de nous dicter précisément la façon dont nous devons exprimer notre contestation de l’ « American Way of Life ». Pour ne prendre qu’un seul exemple (il y en a d’innombrables), les dissidents occidentaux vous citeront fréquemment le film Matrix lorsqu’ils se réfèrent à un réseau invisible qui contrôle leurs vies, mais même Matrix fait partie de la matrice – si je peux le présenter de cette façon un peu comique. C’est en effet la façon hollywoodienne de conditionner notre compréhension du fait que nous vivons dans  un monde trompeur. En utilisant les allégories fabriquées par les USA, leurs symboles et leurs métaphores, vous faites pleinement partie de leur système, et vous contribuez ainsi à rendre tout cela plus réel.

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Les USA contrôlent aussi les médias grands publics dans le monde entier, la CIA ayant infiltré la plupart des réseaux d’information qui comptent vraiment. Le journaliste Udo Ulfkotte qui a travaillé [pendant 17 ans – NdT] pour le Frankfurter Allgemeine Zeitung, l’un des principaux journaux d’outre-Rhin, a récemment avoué dans son Best-seller « Gekaufte Journalisten » (“Journalistes vendus”) avoir été payé par la CIA pendant des années pour manipuler les informations, et que cela est assez courant dans les médias allemands. On peut être sûr que c’est aussi le cas dans d’autres pays. La main-mise globale sur les médias permet aux USA de transformer le blanc en noir aux yeux du public. Il est particulièrement frappant de voir comment les médias européens sous contrôle US ont complètement déformé les faits durant la récente crise en Ukraine. La junte de Kiev infestée de nazis qui est arrivée au pouvoir par un coup d’État a pu bombarder et tuer ses propres concitoyens pendant des mois [et continue de le faire – NdT] pendant que les médias occidentaux persistent à la dépeindre comme étant  « du bon côt é » -, alors que dans le même temps Poutine est qualifié de « nouvel Hitler »sans que cela ne soit justifié par aucun fait réel.

Pour comprendre à quel point la domination sur l’information en elle-même permet de remodeler la réalité des faits, il faut se souvenir de la phrase de Karl Rove en 2004, lorsqu’il était conseiller en sécurité pour le président George W. Bush : « Nous sommes un empire, maintenant, et lorsque nous agissons, nous créons notre propre réalité. Et pendant que vous étudiez cette réalité, judicieusement, comme vous le souhaitez, nous agissons à nouveau et nous créons d’autres réalités nouvelles, que vous pouvez étudier également, et c’est ainsi que les choses se passent. Nous sommes les acteurs de l’histoire (…). Et vous, vous tous, il ne vous reste qu’à étudier ce que nous faisons. »

Et comme si cela ne suffisait pas, la plupart des informations qui circulent aujourd’hui sont traitées par des ordinateurs tournant sur des systèmes d’exploitation américains (Microsoft et Apple) et les gens – y compris ceux qui s’opposent aux USA – communiquent  entre eux au travers d’outils contrôlés par la CIA comme Facebook, Gmail, etc.

C’est précisément ce quasi-monopole sur l’information qui fait la véritable différence. Et donc, même si l’importance économique des USA a considérablement décliné ces dernières décennies, sa place dans les médias d’information a paradoxalement augmenté. Par conséquent, les pays qui visent vraiment à établir un monde multipolaire devraient revoir leurs priorités et commencer à concurrencer sérieusement les USA sur le plan des moyens d’information, plutôt que se focaliser uniquement sur les problèmes économiques. Aujourd’hui le pouvoir est essentiellement une question de perception, et en la matière, les USA sont encore les maitres incontestés. Nous ne verrons pas de véritable monde multipolaire tant que des compétences et des moyens comparables à ceux des États-Unis n’entreront pas en scène.

Il y a déjà quelques cas de médias non alignés d’excellente qualité et dont l’ambition est une audience globale ; les plus connus sont Russia Today et Press TV. Mais tout cela n’est rien comparé à ce tsunami permanent audio et vidéo de tous les médias alignés qui se répand 24h/24 autour du globe. Russia Today prévoit d’ouvrir des chaines en français et en allemand. C’est un progrès, certes, mais loin d’être suffisant.

Cela ne dérange pas vraiment les USA que des pays fassent du business sans eux, mais ils commencent à s’énerver quand ces pays utilisent une autre monnaie que le dollar pour leurs affaires, et ils deviennent vraiment fous de rage quand d’importants réseaux d’information non-alignés apparaissent sur l’échiquier des médias. Ce qui est assez singulier vu que la liberté de la presse est un point central de la mythologie moderne américaine. Mais toute source d’information non alignée sur les USA frappe de fait leur monopole sur la réalité. C’est la raison pour laquelle ils doivent absolument diaboliser leurs compétiteurs et les faire passer pour des antiaméricains, voire pire. Pourtant, bien souvent les journalistes ou les réseaux d’information non-alignés sont juste une réalité non américaine, et pas nécessairement antiaméricaine. Mais du point de vue des hégémonistes US, toute information non américaine est par définition antiaméricaine, puisque la persistance de leur Empire repose essentiellement sur leur monopole de la réalité perçue. Souvenez-vous de la phrase de Karl Rove.

Voilà pourquoi les pays non-alignés sur les USA qui veulent vraiment un monde multipolaire n’ont pas d’autre choix que de s’inspirer de leur adversaire et d’agir en conséquence. Au-delà de la création de leur propre réseau de médias dans les règles de l’art, ils doivent aussi commencer à soutenir significativement l’information indépendante dans les pays où l’information est actuellement dominée par les USA. De nombreux journalistes, écrivains ou chercheurs indépendants dans les pays occidentaux font leur travail essentiellement par passion civique, et bien souvent de façon bénévole, tout en devant affronter les moqueries publiques généralisées, la marginalisation sociale et les difficultés économiques. Diffamés et calomniés dans leur propre pays, privés de toute aide provenant de pays censés vouloir échapper à la domination américaine, on ne peut pas parler d’un début très brillant si l’on veut mettre fin à la Full Spectrum Dominance américaine.

Il n’y a, et il n’y aura pas de monde vraiment multipolaire sans la création d’un véritable éventail de points de vue multipolaires. Un empire post-moderne est avant tout un état d’esprit. Si notre état d’esprit demeure unipolaire, le monde le restera aussi.

Roberto Quaglia

Article original : FarsNews Agency

Traduit de l’anglais par Christophe pour ilFattoQuotidiano.fr

Source: ilFattoQuotidiano.fr

dimanche, 08 février 2015

Ukraine : le quotidien Le Monde répond à la voix de son maître

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Ukraine : le quotidien Le Monde répond à la voix de son maître

Après l’offensive de propagande médiatique du weekend dernier appelant à armer le gouvernement ukrainien dans une opération punitive contre les indépendantistes de l’est du pays, relayée notamment par les quotidiens Libération, Le Figaro, et le Nouvel Observateur, c’est autour du Monde de répondre à la voix de son maître.

Dans un éditorial paru le 3 février sous le titre « Faut-il armer l’Ukraine ? » le quotidien Le Monde milite en effet pour un soutien armé direct à l’armée ukrainienne. Cet article, comme les précédents, est basé sur une accumulation de mensonges. On peut d’abord lire :

« Chaque jour qui passe, les milices ukrainiennes pro-russes, encadrées sur le terrain par l’armée russe, dépècent un peu plus ce malheureux pays qu’est l’Ukraine. Elles accroissent le pseudo-Etat qu’elles se sont taillé dans l’est du pays. Sauf à se payer de mots, il faut décrire cette réalité pour ce qu’elle est : un pays, la Russie, en agresse un autre, l’Ukraine – par la guerre. Ce n’est pas une guerre froide, c’est une guerre chaude, et qui fait essentiellement des morts parmi les civils. »

Le fait que l’armée russe combatte sur le terrain aux côtés des indépendantistes et qui sous-tend les accusations colportées par les médias occidentaux d’une « agression russe » contre l’Ukraine, a pourtant été démentie ces derniers jours par le chef de l’état-major ukrainien en personne, Viktor Muzhenko, qui a déclaré lors d’un point presse :

« A ce jour nous n’avons que des faits de cas de participation individuelle des citoyens russes dans les actions militaires des groupes armés illégaux. Des actions militaires contre les unités de l’armée russe, nous n’en menons pas non plus à ce jour. »

Le Monde est factuel sur les morts, essentiellement civils, du conflit. Mais ce qu’il omet de préciser, c’est que ces victimes civiles sont des citoyens russophones de l’est du pays qui tombent sous les exactions des bataillons néonazis de la garde nationale ukrainienne, ceux-là même que Le Monde et les médias occidentaux appellent à armer. Pour mémoire, un charnier de 400 corps a été découvert fin septembre 2014 par les forces Armées de Novorossia au nord de Donetsk sur les anciennes positions tenues par la garde nationale ukrainienne.

Le bureau des Nations-Unies chargé de la coordination des affaires humanitaires évaluait en décembre dernier les victimes civiles à plus de 4600 et les personnes déplacées, qui ont essentiellement trouvé refuge en Russie, à plus d’un million.

On retrouve également dans l’article du Monde la fable de « l’annexion » de la Crimée :

« Celles-ci [les sanctions] ont eu un impact certain sur l’économie russe, mais pas au point de dissuader M. Poutine d’amputer l’Ukraine de sa partie orientale après avoir annexé, en 2014, l’ensemble de la Crimée. »

Rappelons donc une fois encore pour les journalistes du Monde que les habitants de Crimée se sont prononcés par référendum pour un rattachement à la Russie. L’annexion par voie référendaire constitue certes un nouveau concept journalistique audacieux, mais cela ne lui donne pas pour autant une quelconque réalité.

« Le Kremlin viole un cessez-le-feu conclu en septembre 2014. Il se refuse à toute négociation sérieuse. Ces dernières semaines, des centaines de chars, pièces d’artillerie autotractées, blindés divers, porte-missiles, stations radars ont été livrés aux milices. Inévitablement, le ton monte aux Etats-Unis. Des voix de plus en plus nombreuses, y compris dans les milieux officiels, se prononcent en faveur d’une livraison massive d’armes défensives à Kiev. »

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Les journalistes du Monde pourront se référer à ce sujet à mon précédent article listant les violations du cessez-le-feu de la part de l’armée ukrainienne, et plus particulièrement les bataillons de la garde nationale, durant l’automne 2014 : « Ukraine: l’armée continue son offensive avec le soutien des États-Unis, en violation des accords de Minsk »

Ils y apprendront notamment que les observateurs de l’OSCE présents sur le terrain ont constaté début novembre 2014 plus de « 2400 violations du cessez-le-feu par des groupes d’activistes », les « groupes d’activistes » désignant principalement les bataillons de la garde nationale ukrainienne.

Le 27 janvier, la correspondante du magazine russe Expert, Marina Akhmedova, interviewait un officier de l’armée régulière ukrainienne près de Slaviansk, sous couvert d’anonymat, voici ce qu’il déclarait :

« […] il y a beaucoup d’unités qui ne respectent tout simplement pas le haut commandement. Il n’y a pas de structure claire. Il y a seulement le ministère de l’Intérieur avec ses propres bataillons de volontaires qui, selon ses dires, est formé par le ministère même. » Le président russe Vladimir Poutine parlait ainsi à propos des bataillons de volontaires de la garde nationale, financés en grande partie par l’oligarque israélo-ukrainien Ihor Kolmoyski, d’une « légion étrangère de l’OTAN ».

Quant aux accusations de livraison de matériel lourd par la Russie, elles relaient là aussi les affabulations du gouvernement ukrainien et du président Poroshenko qui expliquent tous leurs échecs militaires par la présence de troupes russes, que n’ont jamais confirmée les observateurs de l’OSCE présents sur le terrain. Après l’échec de l’offensive de l’armée ukrainienne contre l’aéroport de Donetsk, le 18 janvier, en violation du cessez-le-feu et des accords de Minsk, le président ukrainien déclarait que les insurgés bénéficiaient du soutien de « 9000 soldats de la Fédération de Russie » et de « plus de 500 tanks, pièces d’artillerie lourde et véhicules de transport de troupes ». Ces affirmations ont été démenties par le chef d’état-major de l’armée ukrainienne, le général  Viktor Muzhenko, mais également par les représentants de l’OSCE qui se sont déclarés « incapables de confirmer ou démentir ces informations » et ont ajouté : « qu’avant de faire des déclarations retentissantes, il fallait tenir compte de la guerre de l’information en cours ».

L’éditorial du Monde se termine par un appel à armer le gouvernement ukrainien, sous l’euphémisme manipulateur d’une « assistance technologique » qui répond à la fausse interrogation posée dans le titre :

« Commençons par accéder à cet ensemble de demandes : sanctions, assistance technologique et aide financière. M. Poutine doit savoir que la guerre qu’il mène aura un coût de plus en plus élevé. »

Le fait que cet appel à armer le régime ukrainien soit publié sous la forme d’un éditorial engage la responsabilité collective des journalistes et rédacteurs du Monde qui se retrouvent ainsi embrigadés dans l’offensive de propagande globale menée par la presse française, dans un contexte militaire défavorable au régime ukrainien. Rappelons ici que les Forces Armées de Novorossia ont répliqué à l’attaque de l’armée ukrainienne de la fin janvier en lançant une vaste contre-offensive qui a conduit à la sécurisation de l’aéroport de Donetsk, à la progression vers la ville de Marioupol, et à la reprise de certaines localités de la banlieue de Donestk depuis lesquelles des unités de la garde nationale bombardaient les habitations civiles. 8000 hommes de l’armée régulière sont actuellement sur le point d’être totalement encerclés dans un « chaudron » au niveau de la ville de Debaltsevo.

Dans le même temps, le gouvernement ukrainien ne parvient plus à mobiliser les citoyens dans une guerre qui est de plus en plus largement perçue par la population comme instrumentalisée par les oligarques et contraire aux intérêts de l’Ukraine. Une quatrième vague de mobilisation a été lancée le 12 janvier par le régime de Kiev et se heurte à l’opposition croissante des ukrainiens.

Sur son compte Facebook, cité par la radio russe Sputnik, le conseiller du président Porochenko, Iouri Birioukov rapporte les éléments suivants :

« Les chefs de 14 conseils ruraux de la régon d’Ivano-Frankovsk ont refusé de recevoir les ordres de convocation. 57 % des habitants de la région d’Ivano-Frankovsk astreints au service et ayant reçu un ordre de convocation ne se sont pas rendus à la commission médicale. 37 % des habitants de la région ayant reçu un ordre de convocation ont quitté le territoire de l’Ukraine. »

Un officier de l’armée ukrainienne interviewé par la journaliste russe  Marina Akhmedova près de Slaviansk déclarait également :

« Je ne sais pas ce que pensent les dirigeants… Eux ne veulent sans doute pas que ça se termine. Les commandants des unités qui, avec leurs hommes, pourrissent dans les tranchées…Croyez-moi, nous en avons assez de cette guerre. »

Il y a quelques jours, Viktoria Shilova, leader du mouvement ukrainien « Anti-guerre », députée du conseil régional de la région de Dniepropetrovsk, a publié une vidéo sur Youtube appelant les citoyens ukrainiens à refuser la mobilisation. Elle y qualifie notamment les membres du gouvernement de « criminels de guerre » et déclare que « l’armée ne veut plus faire la guerre ».

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Quels sont les commanditaires de la propagande de guerre dans les médias français ?

Le mardi 27 janvier, le texte d’un appel intitulé « BHL et Soros lancent un SOS pour l’Ukraine » est paru sur le blog de Bernard-Henri Levy « La règle du jeu ». Cet appel a également été publié, « dans douze quotidiens américains et européens, dont en France Libération ».

Levy et Soros présentent le gouvernement ukrainien actuel, décrit par Victoria Shilova précédemment comme composé de « criminels de guerre » comme :

« une expérience rare de démocratie participative et de construction d’une nation par ses citoyens eux-mêmes. C’est une belle et noble aventure menée par un peuple rassemblé dans le projet commun de s’ouvrir à la modernité, à la démocratie, à l’Europe. »

Ils exhortent ensuite les dirigeants de l’Union Européenne à voler au secours du pays, au nom de l’expérience démocratique, confronté selon eux à « une agression russe » :

« Ou bien les dirigeants européens persistent dans leur inquiétante prudence et, alors, non seulement Poutine poursuivra sa double agression, mais il arguera que les problèmes rencontrés par sa propre économie sont dus à l’hostilité de l’Ouest et gagnera ainsi sur tous les tableaux à la fois. »

Les deux auteurs insistent également sur « la mise en place d’une société ouverte fondée sur le système des check and balances » et d’un modèle économique basé sur le libre-échange contre le modèle « soviétique » du « dirigisme d’Etat ».

Il faut noter ici que les réformes menées jusqu’à présent par le gouvernement d’Arseni Iatseniouk ont respecté à la lettre la « feuille de route » de M Georges Soros et Bernard-Henri Levy.

Selon le nouveau programme économique présenté pour la période 2015-2017, le budget de l’état devrait diminuer de 10%. Cet objectif sera atteint notamment en supprimant 10% des effectifs de la fonction publique, dans les secteurs de la santé et de l’éducation. Les dépenses d’éducation devraient ainsi baisser de 20%, notamment par la fermeture d’écoles en milieu rural, et les dépenses de santé de 40%. Cette politique budgétaire est la conséquence de l’octroi par le FMI de différents prêts en échange de « réformes structurelles » et de la nécessité d’augmenter les crédits militaires. L’âge de la retraite a également été porté à 65 ans et les pensions ont été diminuées de 10% pour les fonctionnaires. Elles ne sont plus indexées sur l’inflation, qui atteignait 14% fin 2014. Les prix et le secteur de l’énergie ont  été déréglementés, ce qui s’est traduit pour les ukrainiens par une hausse de 50% du prix du gaz. Une vague de privatisations à grande échelle a touché les secteurs les plus rentables de l’économie, notamment celui du gaz, du charbon, et de l’industrie lourde. 37 mines de charbon vont être privatisées d’ici 2019. La principale société bénéficiaire de cette vague de libéralisations dans le secteur de l’énergie est la Burisma Holding, première compagnie privée. Le fils du vice-président américain Joe Biden, Hunter Biden, a été nommé en mai 2014 à son conseil d’administration…

Pour Bernard-Henri Levy et Georges Soros, cette véritable casse sociale qui a déjà conduit à une paupérisation massive de la population est cependant la preuve que le pays s’est ouvert « à la modernité, à la démocratie, à l’Europe. »

Le fait que Bernard-Henri Levy soit à l’origine de cette offensive médiatique en faveur d’une aide militaire au régime ukrainien est tout sauf une surprise. L’agent d’influence est omniprésent dans la presse française. Il tient une chronique dans l’hebdomadaire Le Point, propriété de François Pinault, et dont son ami Franz-Olivier Giesbert est le directeur. Il fut membre du conseil de surveillance du journal Libération, propriété de Patrick Drahi depuis l’été 2014, suite au rachat du journal par Edouard de Rotschild en 2005, dont il est proche. En 2010, il est entré au conseil de surveillance du journal Le Monde suite à son rachat par le trio Pigasse, Pierre Bergé, et Xavier Niel. On constate donc que Bernard-Henri Levy possède ses entrées dans les principaux organes de presse français sur lesquels il peut exercer, de par ses fonctions d’administrateur et son réseau relationnel, une influence certaine.

Lors de la guerre en Libye en 2011, il fut l’un des principaux agents d’influence occidentaux et a notamment œuvré avec Nicolas Sarkozy afin d’imposer les milices armées, par l’intermédiaire du CNT, comme l’interlocuteur légitime de l’opposition au régime de Kadhafi sur la scène internationale. Ces mêmes milices armées composées de militants takfiristes sèment depuis le chaos et la mort dans le pays. Bernard-Henri Levy milite également depuis le début du conflit syrien pour une intervention occidentale contre Bachar-al-Assad.

Le milliardaire américano-israélien Georges Soros a également été engagé, notamment par l’intermédiaire de sa fondation Open Society, dans toute une série d’actions d’ingérence contre des pays de l’ex-union soviétique et notamment l’Ukraine. Dans une interview sur CNN le 25 mai 2014, il reconnaissait l’implication de sa fondation dans le coup d’état du Maïdan qui avait abouti à la fuite du président Yanoukovitch et à l’accès de la mouvance néonazie au pouvoir. Il déclara notamment au journaliste Fareed Zakaria :

« J’ai créé une fondation en Ukraine avant que cette dernière ne devienne indépendante de la Russie. Cette fondation n’a pas suspendu son activité depuis lors et a joué un rôle important dans les événements auxquels nous avons récemment assisté. »

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L’Open Society de Georges Soros a également financé le mouvement serbe Otpor ayant conduit à la chute du régime de Slobodan Milosevic en 2000, et la révolution dite « des roses » en 2003 en Géorgie qui a débouché sur la démission du président Edouard Chevardnadze et l’accès au pouvoir en 2004 du candidat financé par cette même Open Society, Mikhail Saakachvili.

Les grands organes de presse français se sont donc faits les porte-voix de Bernard-Henri Levy et de Georges Soros, deux agents d’influence qui suivent selon toute vraisemblance l’agenda des néoconservateurs américains en Ukraine. Les médias nationaux sont de fait devenus des officines de propagande destinées à influencer l’opinion publique française dans le sens d’un soutien armé au régime ukrainien. Un régime qui s’est rendu coupable de crimes de guerre et utilise des bataillons de mercenaires néonazis comme principaux outils de la répression militaire engagée depuis bientôt un an contre la rébellion des provinces russophones de l’est du pays. La presse française a fait le choix de la lâcheté, du mensonge et de la collaboration, comme elle l’a déjà fait dans le passé. Elle a failli à sa mission d’information pour se faire la complice de criminels de guerre et se prêter à des opérations d’intoxication à grande échelle.

Guillaume Borel

Source: http://arretsurinfo.ch/ukraine-le-quotidien-le-monde-repond-a-la-voix-de-son-maitre/

dimanche, 28 septembre 2014

Hilarious German Satire of Anti-Russian Propaganda

Hilarious German Satire of Anti-Russian Propaganda

While the German media has been at least as propagandistic as the US/UK media in its resurrection of wild, Cold War-style rhetoric over the Ukraine situation, cracks are beginning to appear. Satire, humor, and ridicule have always been among the best forms of social critique, and the below clip lampooning the information war over Ukraine is among the very best. When people laugh at government propaganda, truth begins to break through. It was true with the Soviet Union and it is true today in the west.  Watch and enjoy — turn subtitles on at the “cc” button on bottom frame:

jeudi, 11 septembre 2014

Neocon Mythmongering About WW1

Neocon Mythmongering About WW1

us_propaganda-7.jpgThe success of neoconservative myth-mongering about World War One was brought home to me for the millionth time this weekend as I picked up our borough weekly The Elizabethtown Advocate. The feature article was supposedly by our Republican congressman, who represents Pennsylvania’s 16th District. Although I don’t want to speak ill of him, I can’t think of anything positive to say about Congressman Joe Pitts, other than the fact that he mails me a nice picture of his family, around Election Day. Like our US Senator Pat Toomey, Pitts is a paradigmatic Republican, who marches in lockstep with his party, particularly in foreign affairs. This now means first and always parroting the Murdoch media and sounding like the Weekly Standard and Victor Davis Hanson in speaking about twentieth century history.

In Pitts’s imagination “the First World War has lessons we can learn one-hundred years later.” Back before the War began, “there were many educated persons who believed that the major European powers had moved past the notion of using armies to settle conflicts” and “trade ties between all the major powers had blossomed.” But then suddenly a Teutonic bee appeared in the ointment: “While business leaders and the general public may have been unprepared for war, the leaders of Germany had been preparing for years. At a secret war council meeting in1912, Kaiser Wilhelm and his top commanders had concluded that was inevitable. They set about finding a way to swiftly deal a knockout blow to France and defeat Russia. They stockpiled materials and trained what became one of the finest fighting forces ever assembled.”  

Allow me to note that I don’t think Pitts produced this garbled account of the antecedents of the Great War. It is too literate and sophisticated for anything that I associate with his persona. Presumably it came from the word processor of a congressional assistant who is steeped in neoconservative talking points. An attempt is made in this literary exercise, but never clearly developed, to link Wilhelm, Hitler and Putin in some kind of rogues’ gallery. But this is hardly original. It seems to be nothing more than a paraphrase of the latest invective of VDH or something that one could easily extract from any neocon publication mentioning the anniversary of the Great War. We are also told that the war unleashed by the Kaiser created such “horror” in the interwar period that the Allies allowed Hitler to run riot across Europe. This continuing fear of war and craving for material security are now producing what for Pitts or his ghost-writer is a new unwillingness to face international challenges.

As an historian of World War One, I continue to wonder what was the ominous meeting that the Kaiser and his General Staff held in 1912, in order to plan a European-wide war, for which they had been “stockpiling” weapons for decades. There were in fact multiple meetings that the General Staff held in 1911 and 1912 with and without Wilhelm and/or his ministers. The idea that there was one meeting in 1912 at which these decisions were reached is a fiction, as Gunter Spraul shows convincingly in Der Fischer Komplex. This charge arose among state-authorized historians in East Germany and then traveled by way of Fritz Fischer and his groupies to West Germany, where the fateful, invented meeting became a staple of the antifascist Left’s brief against their country. Joe Pitts’s imagined meeting then migrated to England where anti-German historians and strangely enough, Mrs. Thatcher picked it up and used it as evidence of an eternal German danger. Not at all surprisingly, the East German Communists abandoned the narrative by then, perhaps for being incompatible with the Marxist-Leninist interpretation that both sides were responsible for the First World War, which had been a struggle for world power among late capitalists.

What really happened is that the Kaiser, the Chief of the General Staff, Helmut von Moltke, and other German political actors were concerned that the French and the Russians were drafting far more soldiers than the Germans and their Austrian allies. There was no plan to launch a European-wide preventive war, unless, as Wilhelm pointed out, the “very existence in Germany hung in the balance.” We know there was a Schlieffen Plan, drafted in the 1890s and then periodically updated, that would allow the Germans to gain the upper hand in a two-front war, since they were in fact encircled by hostile Entente powers. But this was discussed as a last resort, and Moltke expressed the view, in a memorandum in December 1911, that his country should be careful to avoid risks, given the imbalance of forces between them and their enemies. That particular memorandum, according to Spraul, has usually been cited in a garbled form to make it appear that Moltke was actually advocating a preventive war against France and Russia. Significantly, the Jewish social democratic historian Arthur Rosenberg, who was by no means a hardened German nationalist, noted in 1929: “General von Moltke as the head of the military faction never desired any war. Whoever asserts the contrary, knows nothing about the weak character of the first chief of the German general staff, who shuddered at whatever responsibilities were thrust on him.”

In 1912, while the German government was supposedly planning a great war, its leaders sat by passively while the Serbs, Greeks, Romanians and Greeks made war on Germany’s ally Turkey, with Russian support. The Germans also sat on their hands while the Balkan belligerents stripped the Ottoman Empire of most of its European possessions. This situation was a provocation not only for Germany but even more for the Austro-Hungarian Empire, since it allowed a very unfriendly Serbia, in alliance with Russia, to expand in Southeastern Europe. One might ask Congressman Pitts’s ghost-writer why the Germans didn’t mobilize their armies and reach for their long stockpiled weapons to launch a war at that point. Oh, and lest I forget to mention the obvious, the anti-German side had been arming to the teeth for decades. The Germans were not alone in this practice and in fact lagged behind the other side in military manpower as the Guns of August went off.

lundi, 08 septembre 2014

The Insidious Power of Propaganda

The Insidious Power of Propaganda
 
 

Good-evil classification is easy enough when we have imprisoned journalists decapitated by jihadis. Those who “will do something about that” are automatically placed in the ‘good guys’ category. But there is a problem of murkiness in this sample. Syria’s Assad has been listed for years at the top of the bad guy list, and yet he appears to be changing into something of an ally of those who are intent now on setting things straight. On top of which, the fact that the radical Islamists out of which ISIS emerged were funded and encouraged by the United States and its Arab allies is not a deep secret, and the fact that none of this mayhem would now exist were it not for the sorcerer’s apprentice effect of the decapitation of the Iraqi state in 2003 has been pretty much agreed on.

The Ukraine sample is more clear-cut. Here we have fighters for democracy and other Western values in Kiev vs a character who is throwing a spanner in the works, who does not respect the sovereignty of neighbors, and whose intransigence does not lessen, no matter what sanctions you throw at him.

The story of the downed plane with 298 dead people is no longer news, and the investigation as to who shot it down? Don’t hold your breath. Last week Dutch viewers of a TV news program were informed about something that had been doing the rounds on internet samizdat: the countries participating in the MH17 investigation have signed a nondisclosure agreement. Any of the participants (which include Kiev) has the right to veto publication of the results without explanation. The truth about the cause of the horrifying fate of the 298 appears to have been already settled by propaganda. That means that although there has been no shred of evidence that the official story of the ‘rebels’ shooting down the plane with Russian involvement, it remains a justification for sanctions against Russia.

After the crisis slogged along for weeks with further bloodshed and bombing devastation, and anxious NATO grumbling about whether Putin’s white trucks with humanitarian relief supplies could possibly amount to a fifth column, interest in the Ukraine crisis has reached another peak in the mainstream media with an alleged Russian invasion to aid the ‘rebels’. On September 1 st the NY-Times carried an op-ed article announcing that “Russia and Ukraine are now at war.” Another propaganda product? It certainly looks like it. Foreign volunteers, even French ones, appear to have joined the ‘rebels’ and most of them are likely to be Russian – don’t forget that the fighters of Donetsk and Lugansk have neighbors and relations just across the border. But as the new Chairman of the Council of Ministers of the Donetsk National Republic Alexander Zakharchenko answered a foreign reporter at his press conference: if there were Russian military units fighting beside his forces they could already have moved on Kiev. From sparse information one gets the impression that his forces are doing rather well on their own without the Russians. They are also helped along by deserting Kiev troops who lack enthusiasm for killing their Eastern brethren.

Dispassionate editors have hardly any direct means to find out what may be happening on the ground in Donetsk and Lugansk, because they cannot send experienced reporters to where the fighting takes place. The astronomical insurance costs involved cannot be met by their budgets. So we have little more to go on than what we can glean from some internet sites with good track records.

The propaganda line from the State Department and the White House on the MH17 disaster became less emphatic after US intelligence analysts – leaking opinion to reporters – refused to play ball, but it is back in force on the Russian invasion theme, while the good-evil scheme is still maintained and nurtured by sundry American publications. These include some that have a reputation to uphold, like Foreign Policy, or that once were considered relatively liberal-minded beacons, like The New Republic, whose demise as a relatively reliable source of political knowledge we ought to mourn.

It has only been in the last few days that an exceptional article in Foreign Affairs, by the exceptional scholar of geopolitics, John Mearsheimer, is beginning to register. Mearsheimer lays most of the responsibility for the Ukraine crisis where it belongs: Washington and its European allies. “U.S. and European leaders blundered in attempting to turn Ukraine into a Western stronghold on Russia’s border. Now that the consequences have been laid bare, it would be an even greater mistake to continue this misbegotten policy.” It will take time before this analysis reaches and convinces some serious European editors. Another sane voice is Stephen Cohen’s, who ought to be the first author anyone hoping to understand Putin’s Russia should read. But ‘patriotic heretics’, as he calls himself, are now very badly treated in print, with he himself being raked over the coals by the New Republic.

The mark of successful propaganda is the manner in which it creeps up on the unsuspecting reader or TV audience. It does that by means of throwaway remarks, expressing relatively fleeting between-the-lines thinking in reviews of books or films, or articles on practically anything. It is all around us, but take one example from the Harvard Business Review, in which its executive editor, Justin Fox, asks: “Why would Russian President Vladimir Putin push his country into a standoff with the West that is almost certain to hurt its economy?” My question to this author – one with sometimes quite apt economic analysis to his name – “how do you know that Putin is doing the pushing?” Fox quotes Daniel Drezner, and says it may be true that Putin “doesn’t care about the same things the West cares about” and is “perfectly happy to sacrifice economic growth for reputation and nationalist glory.” This kind of drivel is everywhere; it says that when dealing with Putin we are dealing with revanchism, with ambition to re-create the Soviet Union without communism, with macho fantasies, and a politician waylaid by totalitarian ambitions.

What makes propaganda effective is the manner in which, through its between-the-lines existence, it inserts itself into the brain as tacit knowledge. Our tacit understanding of things is by definition not focused, it helps us understand other things. The assumptions it entails are settled, no longer subject to discussion. Tacit knowledge is out of reach for new evidence or improved logical analysis. Bringing its assumptions back into focused consciousness is a tiresome process generally avoided with a sigh of “let’s move on”. Tacit knowledge is highly personal knowledge. It is obviously shared, since it has been derived from what is out there in the way of certainties adopted by society, but it has been turned into our very own knowledge, and therefore into something we are inclined to defend, if necessary with tooth and nail. Less curious minds feel they have a ‘right’ to its truth.

The propaganda that originates in Washington, and continues to be faithfully followed by institutions like the BBC and the vast majority of the European mainstream media, has made no room for the question whether the inhabitants of Donetsk and Lugansk have perhaps a perfectly good reason to be fighting a Russophobe regime with an anti-Russian language strategy that replaced the one they had voted for, a good enough reason to risk the bombings of their public buildings, hospitals and dwellings.

The propaganda line is one of simple Russian aggression. Putin has been fomenting the unrest in the Russian-speaking part of the Ukraine. Nowhere in the mainstream media have I seen reporting and images of the devastation wrought by Kiev troops, which eyewitnesses have compared to what the world was shown of Gaza. The implied opinions of CNN or BBC are taken at face value, the ‘social media’ quoted by a spokesperson for the State Department are taken at face value. All information that does not accord with this successful propaganda must be neutralized which can be done, for example, by labeling Russia Today as Moscow’s propaganda organ.

This dominant propaganda thrives because of Atlanticism, a European faith that holds that the world will not run properly if the United States is not accepted as its primary political conductor, and Europe should not get in America’s way. There is unsophisticated Atlanticism noticeable in the Netherlands, with voices on the radio expressing anguish about the Russian enemy at the gates, and there is sophisticated Atlanticism among defenders of NATO who can come up with a multitude of historical reasons for why it should continue to exist. The first is too silly for words, and the second can easily be rebutted. But one does not deal that easily with the intellectually most seductive kind of Atlanticism that comes with an appeal to reasonableness.

When an earlier wave of propaganda hit Europe 11 years ago, before the invasion of Iraq, sober scholars and commentators, appealing to reasonableness appeared from behind their desks in an effort to repair what was at that time a European crisis of confidence in the political wisdom of an American government. It was then that the principle of “without America it will not work” became enshrined. This Atlanticist tenet is quite understandable among a political elite that after more than half a century of relative safe comfort inside an alliance suddenly must begin contemplating the earlier taken-for-granted security of their own countries. But there was more to it than that. The invocation of a higher understanding of the Atlantic Alliance and the plea for renewed understandings to reinvigorate it, amounted to a poignant cry of decent friends who could not face the reality of their loss.

The hurt required ointment, and that was delivered in large dollops. Venerable European public intellectuals and highly placed officials sent joint open letters to George W. Bush, with urgent pleas to repair relations and formulas of how this might be achieved. On lower levels, editorial writers entered the action as proponents of reasonableness. Amid expressions of disgust with America’s new foreign policy, many wrote and spoke about the need to heal rifts, build bridges, renew mutual understanding, and so on. In the summer of 2003, the unambiguous opponents of a hasty invasion of Iraq appeared to be softening the sharp edges of their earlier positions. My favorite example, the Oxford historian and prolific commentator Timothy Garten Ash, widely viewed as the voice of reason, churned out articles and books overflowing with transatlantic balm. New possibilities were discovered, new leafs and pages were turned. It had “to come from both sides”, so ran the general tenor of these pleas and instructive editorials. Europe had to change as well! But how, in this context, remained unclear. There is no doubt that Europe should have changed. But in the context of American militarism that discussion ought to have revolved around the function of NATO, and its becoming a European liability, not around meeting the United States half-way. That did not happen and, as has been shown this past month, energies for European opposition to the propaganda in 2003 appear now to have dissipated almost completely.

Garten Ash is back at it again, writing in the Guardian of 1 August 2014, with the contention that “most western Europeans slept through Putin’s anschluss of Crimea”. ‘Anschluss’? Are we sinking to Hitler metaphors? He does not have to try very hard this time, not rising above the cliches of a newspaper editorial espousing the necessity of sanctions; importantly, he does not apologize this time for any possible American role in the crisis. The propaganda of this year is given a free reign, through an Atlanticist faith that was restored to greater strength by the fount of illusions that is the Obama presidency. It is tacit knowledge, requiring no special defense because it is what all reasonable people know to be reasonable.

Atlanticism is an affliction that blinds Europe. It does this so effectively that in every salon where the hot topics of today are discussed the ever present elephant is consistently left out of consideration. What I read in mainstream news and commentary about Ukraine is about Kiev and the ‘separatists’ and especially about Putin’s motives. The reason for this half-picture is clear, I think: Atlanticism demands the overlooking of the American factor in world events, except if that factor can be construed as positive. If that is not possible you avoid it. Another reason is simple ignorance. Not enough concerned and educated Dutch people appear to have traced the rise and influence of America’s neocons, or have an inkling that Samantha Power believes that Putin must be eliminated. They have no idea how the various institutions of American government relate to each other, and how much they lead lives of their own, without effective supervision of any central entity that is capable of developing a feasible foreign policy that makes sense for the United States itself.

Propaganda reduces everything to comic book simplicity. This has no room for subtleties, such as what will await the people under the government in Kiev as demands of the IMF are followed up. Think of Greece. It has no room for even the not-so-subtle frequently expressed desire by Putin that there ought to be diplomacy with an eye to achieving a kind of federal arrangement whereby East and West Ukraine remain within the same country, but have a significant amount of self government (something that may no longer be acceptable to the Easterners as Kiev goes on bombing them). Comic book imagery does not allow for the bad guys having good and reasonable ideas. And so the primary wish of Putin, the fundamental reason for his involvement in this crisis at all, that the Ukraine will not become part of NATO, cannot be part of the pictures. The rather obvious and only acceptable condition, and one predictably insisted on by any Russian president who wants to stay in power, is a nonaligned neutral Ukraine.

The instigators of the Ukraine crisis work from desks in Washington. They have designed a shift in American attitudes toward Russia with a decision to turn it into (their language) “a pariah state”. Leading up to the February coup they helped anti-Russian, and rightwing forces hijack a protest movement demanding more democracy. The notion that the Kiev controlled population have been given more democracy is of course ludicrous.

There are serious writers on Russia who have become morally indignant and angry with developments in Russian life in recent years under Putin. This is a different subject from the Ukraine crisis, but their influence helps inform lots of propaganda. Ben Judah, who wrote the abovementioned NY Times oped is a good example. I think I understand their indignation, and I sympathize with them to some extent. I’m familiar with this phenomenon as I’ve seen it often enough among journalists writing about China or even Japan. In the case of China and Russia their indignation is prompted by an accumulation of things that in their eyes have gone entirely wrong because of measures by the authorities that appear to be regressive and diverging from what they were supposed to be doing in consonance with liberal ideas. This indignation can overwhelm everything else. It becomes a mist through which these authors cannot discern how powerholders try to cope with dire situations. In the case of Russia there appears to have been little attention recently to the fact that when Putin inherited a Russia to rule, he inherited a state that was no longer functioning as one, and that demanded first of all a reconcentration of power at the center. Russia was economically ruined under Yeltsin, helped by numerous Western predatory interests and misguided market fundamentalists from Harvard. After abolishing communism, they were seduced to try an instantaneous switch to American style capitalism, while there were no institutions whatsoever to underpin such a thing. They privatized the huge state-owned industries without having a private sector; something you cannot quickly create out of nothing, as is vividly shown by Japanese history. So what they got was kleptocratic capitalism, with stolen state assets, which gave birth to the notorious oligarchs. It as good as destroyed the relatively stable Russian middle class, and made Russian life expectancy plummet.

Of course Putin wants to curtail foreign NGOs. They can do lots of damage by destabilizing his government. Foreign-funded think tanks do not exist for thinking, but for peddling policies in line with the beliefs of the funders that they, not wanting to learn from recent experience, dogmatically assume are good for anyone at any time. It is a subject that at best very tangentially belongs to the current Ukraine story, but it has prepared the intellectual soil for the prevailing propaganda.

Does what I have said make me a Putin fan? I do not know him, and know not enough about him. When I try to remedy this with recent literature, I cannot avoid the impression that I have to wade through a great deal of vilification, and in the mainstream media I see no serious attempt to figure out what Putin may be trying to achieve, except for the nonsense about re-establishing a Russian empire. There has been no evidence at all of imperialist ambitions or the fact that he had his sights set on the Crimea before the coup, and before the NATO ambitions of the Russophobes who came out on top, endangered the Russian naval base there.

Does what I have said make me anti-American? Being accorded that label is almost inevitable, I suppose. I think that the United States is living through a seemingly endless tragedy. And I am deeply sympathetic to those concerned Americans, among them many of my friends, who must wrestle with this.

lundi, 28 juillet 2014

Culpabilité par l’insinuation: Comment fonctionne la propagande américaine

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Culpabilité par l’insinuation: Comment fonctionne la propagande américaine

 
Pourquoi Washington n’a-t-il pas rejoint le président russe Vladimir Poutine pour demander une enquête internationale objective et non politisée au moyen d’experts dans l’affaire de l’avion de ligne de la Malaysia Airline ?

Le gouvernement russe lui, continue à fournir des faits, incluant des photos satellites montrant la présence de missiles anti-aériens Buk ukrainiens dans les zones depuis lesquelles l’avion commercial aurait pu être abattu par le système de missiles, ainsi que la documentation de la présence de chasseur ukrainien Su-25 approchant le Boeing malais avant qu’il n’aille au tapis. Le chef du directorat des opérations du QG militaire russe a dit dans une comnférence de presse aujourd’hui (21 juillet) à Moscou que la présence des chasseurs militaires ukrainiens était confirmée par le centre de contrôle de Rostov.

Le ministère russe de la défense a indiqué qu’au moment de la destruction du vol MH17, un satellite américain se tenait au dessus de la zone. Le gouvernement russe demande expressément que Washington fournisse toutes les photos disponibles et les donnés capturées par le satellite.

Le président Poutine a insisté de manière répétée que l’enquête sur le vol MH17 requiert “un groupe d’experts totalement représentatifs travaillant sur place sous la direction de l’Organisation Internationale de l’Aviation Civile (OIAC).” L’appel de Poutine pour un examen d’expert indépendant de l’OIAC ne semble pas être le désir d’une personne qui a quoi que ce soit à cacher…

Se tournant vers Washington, Poutine a déclaré: “En même temps, personne (pas même la “nation exceptionnelle”) n’a le droit d’utiliser cette tragédie pour parvenir à des buts politiques étriqués et égoïstes.”

Poutine a rappelé à Washington: “Nous avons demandé répétitivement aux camps en conflit d’arrêter l’effusion de sang immédiatement et de s’assoir à la table des négociations. Je peux dire avec confiance que si les opérations militaires n’avaient pas été continuées (par Kiev) le 28 Juin en Ukraine orientale, cette tragédie ne se serait pas déroulée.”

Quelle est la réponse américaine ?

Des mensonges et des insinuations.

Hier (le 20 juillet), le ministre américain des AE, John Kerry, a confirmé que des séparatistes pro-russes étaient impliqués dans l’abattage de l’avion de ligne malais et a dit qu’il “était assez clair que ce système de missiles a été transféré depuis la Russie vers les séparatistes. Nous savons avec confiance, que les Ukrainiens n’avaient pas de système de la sorte près de la zone à ce moment précis, ceci fait donc clairement pointer le doigt vers les séparatistes.”

La déclaration de Kerry n’est qu’un mensonge de plus dans la longue liste de mensonges vociférés par les ministres des AE américains en ce XXI`ème siècle. Qui peut oublier la paquet de mensonges proféré devant l’ONU par Colin Powell au sujet des “armes de destruction massive” de Saddam Hussein ou du mensonge de Kerry répété jusqu’à plus soif qu’Al-Assad avait “utilisé des armes chimiques contre son peuple” ainsi que la litanie sans fin de mensonges au sujet du “nucléaire militaire iranien ?”

Rappelez-vous que Kerry en de multiples occasions, a déclaré que les Etats-Unis avaient la preuve qu’Al-Assad avait “franchi la ligne rouge” en utilisant des armes chimiques. Quoi qu’il en soit, Kerry n’a jamais été capable de fournir des preuves concrètes pour ses affirmations. Les Etats-Unis n’avaient aucune preuve à fournir au premier ministre britannique dont la proposition au parlement de participer avec Washingrton à l’attaque militaire de la Syrie, fut rejetté par vote du parlement. Celui-ci dit alors clairement au premier ministre: “pas de preuve, pas de guerre.”

Pourquoi Washington ne fournit-il pas ses photos satellites ?

La réponse est la même que celle à la question du pourquoi Washington ne fait-il pas publier toutes les vidéos qu’il a confisqué, qu’il clâme pourtant prouver qu’un avion de ligne détourné a percuté le Pentagone le 11 septembre 2001. Les vidéos ne soutiennent en rien la version des faits de Washington tout comme les photos satellites ne soutiennent en rien l’affirmation de Kerry.

Les inspecteurs d’armement de l’ONU sur le terrain en Irak avait rapporté que l’Irak n’avait aucune arme de destruction massive. Mais les faits ne soutenaient pas la propagande de Washington et ils furent ignorés. Washington commença une guerre hautement destructrice basée uniquement sur ses mensonges délibérés. Les inspecteurs de l’AIEA (nucléaire) depuis l’Iran ainsi que les 16 agences de renseignement américaines ont rapporté que l’Iran n’avait aucun programme nucléaire militaire. Mais ce fait ne rentre pas dans la ligne de l’agenda de Washington et fut ignoré à la fois par le gouvernement et par les médias de la pressetituée.

Nous sommes les témoins de la même chose maintenant avec les assertions en l’absence de preuves que la Russie est responsable de l’abattage de l’avion de ligne malais.

Pas tout le monde au sein du gouvernement américain est aussi barjot que Kerry ou McCain. Au lieu de mentir, beaucoup d’officiels américains insinuent.

Ainsi la sénatrice Diane Feinstein en est un parfait exemple. Interviewée sur la chaîne pressetituée de CNN, Feinstein a dit: “Le problème est, où est Poutine ? Je dirai, Poutine, soit un homme. Tu dois dire au monde. Tu dois dire si c’est une erreur, ce que j’espère que cela le fut, mais dis-le.”

Poutine a parlé sans arrêt au monde, a appelé pour une enquête d’experts indépendants non-politisée et Feinstein demande à Poutine pourquoi il se cache derrière le silence ? Nous savons que tu l’as fait, insinue Feinstein, simplement dis-nous si tu l’as planifié ou si c’est un accident.

La façon dont le cycle entier du système d’information a été orchestré pour instantanément blâmer la Russie, longtemps avant même que de véritables informations ne parviennent, suggère que l’abattage de l’avion commercial est une opération de Washington. Il est bien sûr très possible que la pressetituée bien entraînée n’ait pas eu besoin d’une orchestration de Washington afin de mettre le blâme sur la Russie. D’un autre côté, quelques unes des performances médiatiques semblent trop suivre un script pour ne pas avoir été préparées à l’avance.

Nous avons aussi la préparation en avance de la vidéo sur YouTube qui affirme qu’un général russe et des séparatistes ukrainiens discutaient d’avoir abattu par erreur l’avion de ligne civil. Comme je l’ai dit auparavant. Cette vidéo est doublement plombée. Elle était préparée d’avance et en impliquant l’armée russe, elle a omis un fait très important, celui que l’armée russe peut parfaitement faire la différence entre un avion de ligne civil et un avion militaire. L’existence même de cette vidéo implique qu’il y avait un complot pour abattre l’avion de ligne et le blâmer sur la Russie.

J’ai vu des rapports sur le système russe de missiles anti-aériens qui disent que le système possède un système de sécurité intégré qui est capable de contacter le transponder (boîte de données) de l’appareil afin de vérifier de quel type d’appareil il s’agit. Si ces rapports sont corrects et que le transponder de l’appareil est trouvé, le contact sera enregistré.

J’ai lu des rapports disant que le traffic aérien ukrainien a changé la route du vol MH17 et l’a redirigé au dessus de la zone de conflit. Le transponder devrait aussi nous dire si cette information est correcte. Si elle l’est, il y a preuve circonstancielle que l’acte était intentionnel de la part de Kiev, une action qui aurait demandé l’accord préalable de Washington.

Il y a aussi d’autres rapports faisant état d’une profonde divergence entre l’armée ukrainienne et les milices non-officielles formées par les mouvements extrémistes néo-nazis, qui apparemment furent responsables des premières attaques sur les séparatistes d’Ukraine orientale. Il est possible que Washington ait utilisé ces extrémistes pour comploter la destruction de l’avion de ligne afin de faire porter le chapeau à la Russie et utiliser les accusations pour faire pression sur l’UE afin qu’elle s’aligne sur les sanctions unilatérales de Washington envers la Russie. Nous savons que Washington est désespéré de briser la croissance économique et les liens politiques existant entre l’Europe et la Russie.

Si l’abbatage de l’avion de ligne a été planifié, tous les ustensiles de sécurité embarqués sur le missile auraient pu avoir été éteints afin de ne donner aucun signe avant-coureur de la frappe ni possibilité de traçage. C’est peut-être la raison pour laquelle un avion de chasse ukrainien fut envoyé pour inspecter l’avion. Il est possible que la véritable cible ait été l’avion de Poutine et que de l’incompétence dans la réalisation du complot ait résulté la destruction du vol MH17.

Comme il y a un bon nombre d’exlications possibles, nous devons garder un esprit ouvert et résister à la propagande de Washington jusqu’à ce que les faits et preuves soient collectés. Dans le meilleur des cas, Washington est coupable d’avoir utilisé l’incident pour blâmer par avance la Russie sans attendre quelque preuve que ce soit. Tout ce que Washington nous a montré jusqu’ici n’est qu’accusations infondées et insinuations. Si c’est tout ce que continue à nous montrer le gouvernement américain, alors nous saurons qui vraiment blâmer.

Dans le même temps, rappelez-vous l’histoire du petit garçon qui criait toujours “au loup!” Il a tellement menti que lorsque le loup est vraiment arrivé, plus personne ne l’a cru. Ceci sera-t-il la destinée finale de Washington ?

Au lieu de déclarer la guerre à l’Irak, l’Afghasnistan, la Libye, la Somalie, le Yémen et la Syrie, pourquoi Washington s’est-il caché derrière des mensonges ? Si Washington veut la guerre avec l’Iran, la Russie et la Chine, pourquoi tout simplement ne pas leur déclarer la guerre ? La raison pour laquelle la constitution requiert un consentement du congrès pour déclarer la guerre est justement pour prévenir que la branche exécutive n’orchestre des guerres pour des agendas privés En adbiquant sa responsabilité constitutionnelle, le congrès des Etats-Unis est complice des crimes de guerres de la branche exécutive. En approuvant le meurtre prémédité des Palestiniens, le gouvernement américain est complice des crimes de guerre d’Israël.

Posez-vous cette simple questionLe monde ne serait-il pas un endroit plus sûr, moins meurtrier, avec moins de destruction et de gens déplacés, sujet à plus de vérité et de justice si les Etats-Unis et Israël n’existaient pas ?

Paul Craig Roberts

Article original en anglais :

How American Propaganda Works: “Guilt By Insinuation”, publié le 21 juillet 2014

vendredi, 25 juillet 2014

Guerre en Ukraine. Les grands média français mentent délibérément

Guerre en Ukraine. Les grands média français mentent délibérément

par Jean-Paul Baquiast
 
N'ayons pas peur des mots. Ils sont volontairement complices d'un mensonge d'Etat. Réfléchissons-y ensemble.


Philippe Grasset vient de publier ce jour un article qu'il faut lire « MH17 et l'insaisissable BUK russe » http://www.dedefensa.org/forum-mh17_et_l_insaisissable_buk_russe_21_07_2014.html  Il cite lui-même un article de Robert Parry, qui dirige et anime le site ConsortiumNews http://consortiumnews.com/2014/07/20/what-did-us-spy-satellites-see-in-ukraine/

Ce dernier , dont la réputation de sérieux n'est plus à faire, évoque des informations à lui fournies par des analystes de la CIA. Les observations d'un satellite de reconnaissance américain montre que le missile BUK ayant détruit l'avion de la Malaysian Airlines avait été tiré d'un site occupé par les militaires du régime de Kiev, paraissant d'ailleurs en état d'ébriété vu les bouteilles de bière vides répandues sur le terrain (Oui, les satellites militaires américains peuvent voir ce type de détail) Some CIA analysts cite U.S. satellite reconnaissance photos suggesting that the anti-aircraft missile that brought down Flight 17 was fired by Ukrainian troops from a government battery, not by ethnic Russian .

Cette information remet immédiatement en cause le discours de tout le monde occidental selon lequel ce serait les pro-russes, et derrière eux Vladimir Poutine, qui auraient causé, involontairement ou volontairement, l'accident. Elle pourrait être critiquée, encore faudrait-il qu'elle soit évoquée. Or, comme je l'ai remarqué dans un commentaire fait à l'article de Philippe Grasset, il est scandaleux que les représentants des médias français, qui comprennent le français et doivent normalement lire tous les jours De defensa, comme je le fais moi-même, n'en aient pas encore parlé. Je doute d'ailleurs qu'ils en parlent ce soir ou demain ou jamais.

Ceci veut dire que ces médias français mentent volontairement à des dizaines de millions de citoyens français. Ils sont complices d'un mensonge d'Etat visant à accuser Poutine d'avoir commis le crime. Ils sont complices aussi d'un autre mensonge d'Etat visant à ne pas rechercher ailleurs les causes de l'attentat, pourquoi pas auprès des troupes spéciales américaines et mercenaires opérant en Ukraine au service de John Kerry, avec l'accord d'Obama.

Comme l'écrit Philippe Grasset, mais renvoyons les lecteur à son article « La dénonciation constante d'un même et seul coupable possible constitue le point stratégique central. Il n'est pas le résultat de quelque chose, quelque processus que ce soit, enquête, etc., mais bien la condition sine qua non, la prémisse fondamentale autour de laquelle le reste doit évoluer tactiquement...Il va sans dire que ce “point stratégique central” est la culpabilité de la Russie, à considérer comme une prémisse, un principe de réflexion et de communication, et nullement quelque chose à établir ou même seulement à affirmer » 

En l'espèce le coupable obligé est non seulement la Russie mais Poutine, et tout doit être fait pour qu'aucune autre hypothèse ne soit émise. Comment s'étonner qu'avec de pareilles désinformations, de pareilles manipulations des opinions publiques, celles-ci ne se résignent pas finalement à la perspective d'une guerre contre la Russie.

Il nous avait semblé ces derniers jours que Merkel et Hollande refusaient d'entrer complètement dans ce jeu. Il semble bien ce soir qu'ils aient renoncé à toute indépendance de jugement vis-à-vis des bellicistes washingtoniens.


21/07/2014

jeudi, 01 mai 2014

Notes sur le passé recomposé en narrative

Notes sur le passé recomposé en narrative

Ex: http://www.dedefensa.org

Parmi l’avalanche de nouvelles, d’initiatives, de montages, de false flag, de narrative qui caractérise la crise ukrainienne, on en distingue certaines qui conduisent à une hypothèse centrale. Le Système aux abois, dans le chef de l’américanisme et de la présidence BHO qui sont dans la même situation, jouent leur va-tout dans une tentative paradoxale de ressusciter le passé pour imposer définitivement “leur avenir” au monde. Il s’agit du tournant ultime, du quitte ou double, du tout au rien. La pièce ainsi montée, – comme l’on dit d’une “pièce montée” qui couronne un mariage, – est celle d’une “nouvelle Guerre froide” qui prend corps sous la forme d’articles divers, d’un rapport pour la Maison-Blanche, d’une fuite opportune vers le toujours-utile New York Times et ainsi de suite. La narrative prend forme. On croit revivre.

Il s’agit donc bien de cela : une deuxième Guerre froide, le futur par le retour vers le passé, le passé qui est le retour à la case-départ. L’occasion en est cette crise ukrainienne dont on ne finit pas de découvrir l’ampleur, l’extension, l’universalisation, – la crise ukrainienne, catastrophe en elle-même et catastrophique bouée de sauvetage pour une direction-Système des USA en perdition.

Parmi les diverses initiatives et mesures qui confortent cette hypothèse et l’interprétation que nous en offrons, nous en choisissons deux qui ont une puissante signification. L’une donne une appréciation générale de la conception générale en train de se mettre en place à Washington, l’autre une appréciation opérationnelle montrant un début d’application de cette appréciation ; mais, certes, si nous choisissions deux événements liés l’un à l’autre par une logique qui suggérerait une planification précise, une élaboration rationnelle, notre conviction est qu’il s’agit plutôt d’une agglomération de mesures et d’événements différents qui se sont imposés sans la moindre cohésion et, en fait, montrant que les événements dictent leur loi, plus que jamais. Pour mieux mettre en évidence ce constat fondamental, nous allons renverser l’ordre suggéré par la description que nous développons pour restituer la vraie chronologie qui est l’inverse que celle que nous suggérerait l’identification des deux événements.

La marionnette type-courroie de transmission

... Ainsi, le premier sujet abordé semblerait la conséquence du second qui suivra, mais il ne l’est pas. Il constitue un événement incontrôlé suscité par d’autres événements incontrôlés depuis la mise en action de la crise ukrainienne, amenant des réactions des directions politiques et directions-Système concernées pour le développement d’une nouvelle situation opérationnelle. Cette nouvelle situation opérationnelle, qu’on croirait enfantée par la “nouvelle conception générale en train de se mettre en place à Washington” (nous refusons de la baptiser “nouvelle stratégie” ou “nouvelle doctrine”, qui impliquerait une notion d’ordre et de logique, et de planification, qui est absolument et totalement absente du propos à son origine), se matérialise essentiellement par l’annonce de l’envoi de troupes US dans des pays bordant la Russie, évidemment présentées comme “défensives”. Il s’agit essentiellement de la Pologne et des pays baltes ; on comprend aussitôt, sans étonnement particulier, que c’est bien la Pologne qui joue un rôle fondamental dans ce bouleversement.

La nouvelle concerne donc l’envoi de troupes US en Pologne, – 10 000 hommes au minimum, voudraient les Polonais, 5 000 au plus selon la position de départ du Pentagone. On négocie... WSWS.org donne le 19 avril 2014 les détails des circonstances accompagnant le début de l’officialisation du déploiement des troupes US en Pologne, avec d’autres éléments militaires, par le biais des confidences sonores du ministre polonais de la défense visitant le Washington Post après une rencontre avec le secrétaire à la défense Chuck Hagel, – signes, tout cela, que la Pologne est de plus en plus la courroie de transmission, la “marionnette” mais aussi le partenaire actif et va-t’en-guerre des USA en Europe centrale.

«According to the Post, Polish Defense Minister Tomasz Siemoniak, visiting the newspaper after meeting with US Secretary of Defense Chuck Hagel at the Pentagon, said, “the decision has been made on a political level and that military planners are working out details.” The article continued: “There will also be intensified cooperation in air defense, special forces, cyberdefense and other areas. Poland will play a leading regional role, ‘under US patronage,’ he said.”

»The report makes clear that the US entered into the Geneva agreement with Russia, purportedly to “deescalate tensions” in Ukraine, in bad faith, intending to use Russia’s supposed breach of the deal as justification for expanded sanctions and a further aggressive buildup of US and NATO forces in Eastern Europe aimed at encircling and strangling Russia...»

La marionnette qui rugissait

Du côté polonais, les choses sont simples : c’est la fièvre de la guerre, avec l’affirmation furieuse de l’“ennemi russe”. Nous sommes à des années-lumière de la tentative de réconciliation Pologne-Russie du printemps 2010 (voir, par exemple, le 19 avril 2010). La Pologne est retombée dans la russophobie guerrière, en s’appuyant sur les USA dont elle estime qu’elle est en voie de devenir le “meilleur vassal” en Europe. La dialectique retrouve les accents des phases les plus agressives de l’histoire des relations entre la Pologne et la Russie. La Pologne veut évoluer vers une place privilégiée : bien que membre de l’OTAN et de l’UE, c’est d’abord en tant que “partenaire” bilatéral et interlocuteur européen privilégié des USA qu’elle veut traiter avec les USA.

Cette prétention, ce n’est pas rien. Elle risque autant d’irriter les partenaires européens de la Pologne, autant que de l’en éloigner dans certaines circonstances dont la plus aigue est évidemment d’une possibilité d’affrontement avec la Russie. (On verra ce qu’il restera, dans cette occurrence, du “Triangle de Weimar”, qui prétendait établir un lien de sécurité spécifique France-Allemagne-Pologne.) Les Allemands sont très loin d’être partisans d’un affrontement avec la Russie, comme l’a très récemment montré leur ministre des affaires étrangères suggérant que l’énergie dépensée à trouver de nouvelles sanctions contre la Russie serait mieux employée à chercher une véritable désescalade en Ukraine ; ils pourraient très vite s’impatienter, à mesure que cette position spécifique et bombastique de la Pologne s’affirmerait. Cela fait partie des tendances de divisions en Europe, entre Européens et entre l’Europe et les USA (voir le 14 avril 2014).

Le JCS et le “proconsul”

Du côté US, les choses ne sont pas plus simples et peut-être même sont-elles plus compliquées. Restons-en pour l’instant à la seule position du Pentagone, la Maison-Blanche et le département d’État ayant basculé dans le maximalisme compulsif irradiant de leurs conseillers d’influence venus de l’équipe neocons-R2P (voir le 22 avril 2014). Le Pentagone préférerait 5 000 soldats US en Pologne, et encore parce que le président demande des renforts, aux “10 000 hommes minimum” réclamés par les Polonais. La raison essentielle de cette pusillanimité est que le Pentagone ne dispose pas de réserves suffisantes, parce que les forces US sont déjà engagées partout, très diminuées, extrêmement limitées. L’autre “raison essentielle” (l’essentialité est élastique, par le temps qui courent et bondissent), c’est que le Pentagone ne se sent pas vraiment d’attaque pour tout faire pour défier les Russes et risquer une chose très, très sérieuse. On verra qui l’emportera lorsque le volume du contingent US en Pologne sera déterminé, et sous quelle forme.

Il y a déjà là un conflit interne qui se dessine. Les dernières péripéties, le silence des uns et les déclarations des autres, montrent qu’il s’agit d’un conflit des plus classiques, entre la maison-mère, le Joint Chiefs of Staff (JCS) et son président le général Dempsey au Pentagone d’une part, et d’autre part le général Breedlove, commandant en chef suprême en Europe (SACEUR) de la structure OTAN et chef du Central Command Europe (commandement national US). En temps de crise plus particulièrement, les relations entre la direction de Washington et le “proconsul” militaire US en Europe ont toujours été délicates. Le “proconsul” a tendance à soutenir les revendications des “vassaux européens” (la Pologne en l’occurrence, pour le cas qui nous occupe) tandis que le Pentagone défend ses intérêts généraux. (Un tel conflit a eu lieu à plusieurs reprises, notamment avec les SACEUR Goodpaster en 1973, Haig en 1976, Rogers en 1983, etc. Le dernier en date et l’un des plus fameux est celui des rapports exécrables entre le SACEUR, le général Wesley Clark, et le JCS de Washington lors de la guerre du Kosovo, cela menant jusqu’à une mise à pied à peine dissimulée de Clark en 2000.)

Le Pentagone sur les genoux

Ici, on mettra l’accent sur une situation qui se répercute sur toutes les crises, de diverses façons. A la différence de 1947-1948, à laquelle le document évoqué plus bas fait allusion comme référence d’une “nouvelle Guerre froide”, la situation de la puissance militaire US est aujourd’hui dans une situation radicalement différente. En 1947-1948, le budget du Pentagone, littéralement pulvérisé à partir de la victoire sur le Japon, était si bas que l’industrie aéronautique US dans sa quasi-entièreté était au bord de l’effondrement. (Certains jugent même, avec des arguments extrêmement convaincants, et une enquête minutieuse pour le cas invoqué, que la Guerre froide fut lancée du côté US à partir de ce qui fut en bonne partie un montage, pour sauver spécifiquement cette industrie à partir de commandes publiques massives et urgentes d’avions militaires. Voir notre texte du 12 février 2003 extrait de La Lettre d’analyse dd&e du 10 avril 1995, reprenant une analyse d’un livre de Frank Kofsky publié en 1994 sur cette affaire : Harry S. Truman and the War Scare of 1948, A Successful Campaign to Deceive the Nation.)

Aujourd’hui, par contre, le budget du Pentagone est colossal : nominalement autour de $650 milliard, il dépasse en réalité les $1 000 milliards une fois prises en compte des dépenses affectées à d’autre poste (renseignement, énergie avec le développement nucléaire, etc.). Malgré cette monstruosité budgétaire, les capacités militaires US ne cessent de se réduire, au point où l’US Army est aujourd’hui quasiment au niveau des effectifs de 1940, alors au sommet de la politique isolationniste de désengagement (voir le 3 mars 2014). Une “mobilisation” pour une “nouvelle Guerre froide”, comme celle de 1948 pour la Guerre froide initiale, impliquerait, dans une bonne logique américaniste, un “réarmement”, c’est-à-dire une augmentation substantielle du budget militaire. Dans les conditions actuelles, une telle perspective est, successivement, extraordinairement et paradoxalement incertaine ; d’abord, par ses implications budgétaires catastrophiques alors que la dette menace l’équilibre du gouvernement US ; ensuite par les contraintes légales (“séquestration”) existantes pour au contraire réduire ce budget ; enfin, par l’incertitude où l’on se trouve concernant les capacités du Pentagone, empire du gaspillage et de la gestion catastrophique, de savoir si des augmentations conséquentes du budget ne conduiraient pas à un surcroît de gaspillage, de corruption et de gestion catastrophique, plutôt qu’à une augmentation des capacités. (La question est : les USA sont-ils encore capables de mobiliser, dans le vrai sens du mot ?) Les chefs du Pentagone, arcboutés sur leur puissance bureaucratique, devinent cela et ne sont pas nécessairement partisans d’une telle augmentation qui menacerait tout l’édifice, en même temps que le gouvernement US, pour une cause dont on a vu plus haut que ces chefs-là ne l’apprécient guère.

The Rest Of the World contre la Russie

Le deuxième point que nous voulons mentionner constitue l’essentiel en matière de communication. Il est exposé dans un article qui vient de paraître dans le New York Times, le 20 avril 2014, et c’est sans nul doute le plat de résistance. Il s’agit d’une nouvelle posture, – que d’aucuns qualifieront de “stratégie”, voire de “doctrine” s’ils en ont le goût, – de l’administration Obama vis-à-vis de la Russie. Nous parlons donc, comme on l’a signalé, d’une “nouvelle Guerre froide” basée sur les conceptions US de l’immédiat après-guerre, et précisément sur la stratégie du containment élaborée par George Kennan, qui occupait à cette époque le poste de la direction de la planification au département d’État. Le passage où cette référence est proposée se termine par une phrase explicitant l’opérationnalisation du concept, qui consiste à “isoler” la Russie du reste du monde ; l’aspect sidérant et surréaliste de cette opérationnalisation est que les USA se proposent de former une alliance générale quasiment du reste du monde contre la Russie, y compris la Chine, qu’entretemps le secrétaire à la défense Hagel est allé avertir de ne pas trop irriter le Japon au risque de voir les USA se dresser contre elle, quasi-opérationnellement (Eric Margolis, le 20 avril 2014 sur UNZ.com : «[Bismarck] would have been horrified to see Washington foolishly making enemies of Russia and China at the same time»)... Sans doute, même si cela ne nous est pas précisé, Obama compte-t-il convaincre également la Syrie, l’Iran, les autres BRICS, tous les pays qui se sont abstenus de voter à l'ONU pour la condamnation du référendum de Crimée (voir le 28 mars 2014), etc., de s’inscrire dans cette croisade internationale contre la Russie, où la Russie se retrouvera seule on vous l’assure.

«In effect, Mr. Obama is retrofitting for a new age the approach to Moscow that was first set out by the diplomat George F. Kennan in 1947 and that dominated American strategy through the fall of the Soviet Union. The administration’s priority is to hold together an international consensus against Russia, including even China, its longtime supporter on the United Nations Security Council.»

L’initiative de l’administration Obama est donc présentée comme une rupture fondamentale avec ce qui a précédé dans les relations des USA avec la Russie. Considérant, selon l’habituel penchant de la psychologie US pour l’inculpabilité (voir notamment le 26 mars 2014), que les USA ont tout fait pour “éduquer” la Russie, pour la rendre “civilisée”, et étant à ce point déçue par la fourberie de son élève, l’administration Obama décide d’une façon impériale mais qu’on devine pleine d’une immense sagesse qu’“assez c’est assez”. On écarte d’un geste négligent sinon nonchalant l’agacement ukrainien et l’on parle à l’échelle qui convient, qui est celle du monde cela va de soi... «Even as the crisis in Ukraine continues to defy easy resolution, President Obama and his national security team are looking beyond the immediate conflict to forge a new long-term approach to Russia that applies an updated version of the Cold War strategy of containment.

»Just as the United States resolved in the aftermath of World War II to counter the Soviet Union and its global ambitions, Mr. Obama is focused on isolating President Vladimir V. Putin’s Russia by cutting off its economic and political ties to the outside world, limiting its expansionist ambitions in its own neighborhood and effectively making it a pariah state. Mr. Obama has concluded that even if there is a resolution to the current standoff over Crimea and eastern Ukraine, he will never have a constructive relationship with Mr. Putin, aides said. As a result, Mr. Obama will spend his final two and a half years in office trying to minimize the disruption Mr. Putin can cause, preserve whatever marginal cooperation can be saved and otherwise ignore the master of the Kremlin in favor of other foreign policy areas where progress remains possible.

»“That is the strategy we ought to be pursuing,” said Ivo H. Daalder, formerly Mr. Obama’s ambassador to NATO and now president of the Chicago Council on Global Affairs. “If you just stand there, be confident and raise the cost gradually and increasingly to Russia, that doesn’t solve your Crimea problem and it probably doesn’t solve your eastern Ukraine problem. But it may solve your Russia problem.”»

En attendant que cette “stratégie” soit mise en place et rende ses premiers effets, quelque part entre 2100 et 2200, le président Obama a décidé de se retirer sous sa tente et de ne plus songer aux manigances de Poutine, faisant ainsi comme s’il n’existait plus, Poutine, rien de moins, et le plongeant par conséquent dans un cruel embarras. Drapé dans sa dignité et dans sa puissance, Obama ignore désormais la Russie en attendant que celle-ci, complètement isolée, étranglée par sa propre infamie, privée de l’amicale camaraderie du reste du monde et du Système, tombe comme un fuit déjà blet. D’ici là, bien entendu, on vous l’assure sans souci de la contradiction interne du propos, la population russe, ayant compris où est son intérêt et où se trouve la vertu, aura renvoyé le tyran pourrir dans un Goulag quelconque.

«The prevailing view in the West Wing, though, is that while Mr. Putin seems for now to be enjoying the glow of success, he will eventually discover how much economic harm he has brought on his country. Mr. Obama’s aides noted the fall of the Russian stock market and the ruble, capital flight from the country and the increasing reluctance of foreign investors to expand that while American and European sanctions have not yet targeted wide parts of the Russian economy, they have sent a message to international businesses, and that just the threat of broader measures has produced a chilling effect. If the Russian economy suffers over the long term, senior American officials said, then Mr. Putin’s implicit compact with the Russian public promising growth for political control could be sundered.

»That may not happen quickly, however, and in the meantime, Mr. Obama seems intent on not letting Russia dominate his presidency. While Mr. Obama spends a lot of time on the Ukraine crisis, it does not seem to absorb him. Speaking privately with visitors, he is more likely to bring up topics like health care and the Republicans in Congress than Mr. Putin. Ukraine, he tells people, is not a major concern for most Americans, who are focused on the economy...»

 

Une tranquille schizophrénie

Ce texte est remarquable de schizophrénie tranquille développée sur le ton d’une élégante suffisance, dans sa description d’un monde enchanteur où le roi-Obama trône sur le “phare de la liberté” et sur l’“arsenal de la puissance et de la vertu”, acclamé par le reste du monde, – saut l’épouvantable Poutine, le cancre de la classe, le monstre quasi-hitlérien. La puissance de la transmutation de l’habituelle pompe américaniste en une sottise bombastique à prétention doctrinale et géopolitique est époustouflante. On retrouve, comme en une caricature, tous les travers de cette psychologie pervertie, son réductionnisme, son cloisonnement, son incapacité de tenir compte des relations de cause à effet ni même d’imaginer une telle chose, l’omniprésence étouffante de la suffisance américaniste, – tout cela transmutée en inculture, en ignorance, en préjugés.

Lorsqu’un Daalder énonce son jugement si sophistiqué («That is the strategy we ought to be pursuing. If you just stand there, be confident and raise the cost gradually and increasingly to Russia, that doesn’t solve your Crimea problem and it probably doesn’t solve your eastern Ukraine problem. But it may solve your Russia problem»), il pourrait aussi bien nous dire, avec sa maîtrise du tour sophistique transcrite en une analyse tranchante caractérisée par une complète idiotie, phénomène devenu à cet instant presque émouvant après tout, à force de conviction-Système : “Cela ne résout peut-être pas le problème du Pentagone et de notre dette qui nous écrase, cela ne résout peut-être pas le problème de la dissolution des USA, cela ne résout peut-être pas le problème du chaos que nous favorisons au Moyen-Orient, cela ne résout peut-être pas le problème du dollar qui prend eau de toutes parts, cela ne résout peut-être pas le problème de la catastrophe de l’environnement, cela ne résout peut-être pas le problème de la Fin des Temps, etc., mais cela pourrait résoudre le problème de la Russie...”

Trahison et inversion de la référence

Bien entendu, la nouvelle Guerre froide dont il est question dans cet article n’a rien à voir avec la “néo-Guerre froide” que nous définissions le 20 mars 2014. Ce n’est plus une néo-Guerre froide qu’imposeraient les événements mais une nouvelle Guerre froide “conçue et réalisée” par les équipes de communication de la Maison-Blanche, une “Guerre froide-narrative” si l'on veut. Pour autant, le lien est évident et l’on pourrait dire que la “Guerre froide-narrative” présentée comme une réaction extrêmement habile de la Maison-Blanche à la crise ukrainienne, constitue une sorte de “ce que je ne peux étouffer, je l’embrasse”.

Bien entendu, là s’arrête l’analogie faite par la Maison-Blanche avec la vraie Guerre froide qui nous est servie comme référence. Les conditions sont complètement différentes. Les USA ont une position relative extrêmement inférieure à celle qu’ils avaient en 1945 ; directement au niveau de leur puissance relative (les USA dominaient le monde ravagée par la guerre alors qu’eux-mêmes avaient au contraire développé exponentiellement leur puissance grâce à la guerre) ; indirectement au niveau de l’état de l’URSS dévastée par la guerre en 1945 (alors que la Russie est aujourd’hui en beaucoup plus forte position) et alors que leurs alliés européens et asiatiques, également dévastés, dépendaient complètement d’eux.

De même, les “stratégies” envisagées dans l’article cité ne correspondent pas aux schémas de la Guerre froide. L’idée de poursuivre les coopérations avec la Russie là où elles existent, tout en attaquant frontalement la Russie par divers moyens de pressions, d’influence, de sanctions, ne répond en rien au schéma de la Guerre froide, au contraire il le trahit. Cette idée, nommée durant la Guerre froide “de-linkage” (ne pas lier les différents dossiers entre eux, ce qui permet une mésentente ici et une coopération là) impliquait nécessairement une entente générale de principe USA-URSS, notamment au niveau de l’“équilibre de la terreur” (le nucléaire), c’est-à-dire l’absence d’hostilité directe, affichée et opérationnalisée par des mesures effectives. Ce n’est pas le cas dans la situation actuelle USA-Russie et dans la pseudo-“stratégie” envisagée.

Simulacre de crise

Il y a deux interprétations nécessaires à ce développement venu des USA concernant la crise ukrainienne, devenue brusquement dans le chef des USA la Grande Crise entre les USA et la Russie, – comme poursuite et conclusion finale et triomphale de la Guerre froide sous forme de “nouvelle Guerre froide”. Ces deux interprétations ne se contredisent en rien ni ne sont en rien exclusives l’une de l’autre ; elles se complètent, se renforcent, s’explicitent l’une l’autre. La première de ces interprétations est la plus intimiste et la plus objective, dans la mesure où elle conduit à analyser le comportement de la direction-Système de l’américanisme, et particulièrement de son représentant Obama, au travers des appréciations diverses qu’on lit dans le New York Times. Il s’agit d’une évaluation essentiellement psychologique et de communication, bien entendu autour d’une narrative...

On pourrait en effet conjecturer, avec nombre d’arguments dans ce sens, que ce document laisse transparaître une sorte de portrait d’Obama qui est en même temps une peinture de la psychologie-Système dominante à Washington. Bien évidemment, tout est bâti autour d’une posture quasi “impériale” du président des USA, trônant au bureau ovale et orientant la marche du monde à sa guise. Mais à force d’appuyer le trait on verse dans la caricature, qui devient dans ce cadre de l’influence du Système, une inversion complète.

Cette posture impériale, dans ce cas se situant elle-même “au-dessus de la mêlée” initiée évidemment et spécifiquement par le cancre de la classe (Poutine), entraîne le fait que le “message” devient effectivement inversion complète, et le détachement du maître totale irresponsabilité. A lire ces mots, – «...Mr. Obama seems intent on not letting Russia dominate his presidency. While Mr. Obama spends a lot of time on the Ukraine crisis, it does not seem to absorb him...», – on ne peut pas ne pas finir par conclure que le sujet de cette hagiographie, œuvre des “officiels” dispensant la bonne parole comme du NYT lui-même, présente comme une vertu le fait de se désintéresser du problème crisique central de notre temps d’effondrement, tout en laissant paraître un mépris extrême pour le “partenaire” de cet épisode fondamental. Au moins, pendant la Guerre froide, la vraie, les dirigeants US ne cachaient pas que l’absolue priorité de leur direction devait se concentrer sur les relations avec l’autre acteur stratégique nucléaire, en essayant au maximum de diffuser les tensions pouvant naître d’avatars de communication. Pour poursuivre l’analogie du “cancre de la classe” (Poutine) en la renversant, Obama apparaît comme un adolescent bouffie de vanité et de prétention, qui refuse l’essentiel de la tâche qu’il a prétendu accomplir parce qu’il n’est pas assuré d’y figurer à son complet avantage. Objectivement, cette inversion témoigne d’une effrayante schizophrénie qui laisse à penser sur ce que sera, – sur ce continuera à être en s’amplifiant, puisqu’il n’y a rien de nouveau à cet égard sinon l’outrance, les réactions des USA aux inévitables accidents, tensions imprévues, événements inattendus, etc., qui vont continuer à marquer la crise ukrainienne et tout ce qui se rapproche de près ou de loin de la dynamique de tension entre les USA et la Russie.

On comprend alors qu’il n’y a rien, dans le chef de Washington, ni d’une “stratégie” ni d’une “doctrine” là-dedans. Il s’agit de pure communication, autour d’une narrative sur laquelle l’American Century ne se couche jamais, comme l’on dit du soleil sur le fameux Empire qu’on sait, comme si la formule nietzschéenne de l’éternel retour avait trouvé son opérationnalité. On comprend, au-delà, que Washington n’est plus capable d’accoucher, ni d’une “stratégie”, ni d’une “doctrine”, que la projection sous forme de narrative hollywoodienne du film “The American Century, – le retour” suffit à entretenir sa conviction pathologique. La schizophrénie est complète, achevée, bouclée. Le président Barack Obama règne.

Accélération de la crise (suite)

Le précédent nous dit beaucoup de la crise à Washington, de la crise du pouvoir, de l’épuisement de la psychologie des principaux acteurs, mais pas grand’chose, certes, de la Grande Crise USA-Russie et de tout ce qui l’accompagne, et du flux dans laquelle elle se place, qui est l’épisode final de la crise d’effondrement du Système. Comme dirait le crétin couvert de privilèges-Système cité ci-dessus “cela ne résoudra pas le problème de la crise générale d’effondrement où les USA ont la place centrale mais cela résoudra le problème de l’identification de la schizophrénie à Washington”, – et nous voici devant la seconde interprétation nécessaire...

En déclenchant toute cette agitation, en exposant ces considérations qui prétendent au rang de “stratégie” ou à celui de “doctrine”, les spécialistes de la communication à Washington n’ont rien créé de spécifique ni de substantiel. On ne s’installe pas dans la crise en l’élargissant aux relations fondamentales entre les USA et la Russie comme le fait Washington pas simple manipulation, selon une simple démarche technique et bureaucratique dans le seul domaine de la communication. On s’installe dans une crise en paraissant l’élargir “aux relations fondamentales entre les USA et la Russie”, simplement parce que cette crise est déjà élargie à cette dimension. En ce sens, la démarche washingtonienne a son utilité, puisqu’elle nous montre qu’effectivement la crise ukrainienne a d’ores et déjà accouché d’une énorme crise entre les deux puissances nucléaires stratégiques, qui est aussi une énorme crise d’antagonisme culturel et conceptuel, une énorme crise s’inscrivant dans le cadre d’une crise de civilisation. On a à cet égard suffisamment d’indications et d’analyses pour nous permettre de conclure à cette stature imposante de la crise, et la “nouvelle Guerre froide” venue de Washington en est tout simplement, à la fois la confirmation et la conséquence, en même temps qu’une tentative maladroite d’une utilisation faussaire. Les stratèges en communication de Washington n’ont fait qu’acter un événement qui s’est fait lui-même, dont les causes et les effets dépassent largement leurs interprétations puisqu’il s’agit effectivement d’une opérationnalisation de la crise générale de notre civilisation. De ce point de vue, la “nouvelle Guerre froide” n’a vraiment rien à voir avec son faux modèle précédent, et au lieu d’une certaine complicité comme on en connut entre les USA et l’URSS de ce temps-là, on trouve au contraire tous les éléments de fécondation rapide de l’aggravation des relations.

Dans le même sens, la démarche washingtonienne a également son utilité, en nous montrant le comportement de Washington allant chercher sa référence dans un passé spécifique, extrêmement bien identifié, et qui a une très grande signification symbolique et de puissance pour les USA. Ce rappel, c’est une incantation à la “résurrection” d’une époque où les USA, alors avec une réputation sans tâche pour les parties du monde au-delà des océans, dominaient le monde d’une façon écrasante, incontestable, extraordinaire, – presque divine et dans tous les cas immensément vertueuse. Alors que les échos sonores de la retraite et de la décadence des USA faisaient débat sonore à Washington en même temps que la crise ukrainienne éclatait (voir le 28 février 2014), et avant que Washington, toujours de plus en plus lent, ait réalisé l’importance de la dite-crise, cette fixation symbolique à une référence de cette importance et de cette signification apparaît comme une sorte d’exorcisme : l’image des USA réparée, la narrative peut continuer à être dévidée. Ainsi, le président des Etats-Unis Barack Obama, ayant fixé l’image définitive des USA dans sa confrontation avec la Russie renouvelant la grande victoire du XXème siècle et de l’American Century, peut-il s’en retourner vaquer à ses occupations («Speaking privately with visitors, he is more likely to bring up topics like health care and the Republicans in Congress than Mr. Putin. Ukraine, he tells people, is not a major concern for most Americans...»).

Ainsi allume-t-on la mèche d’une énorme bombe qu’on a soi-même fabriquée et posée là où elle se trouve, avant de s’en retourner en s’en lavant les mains ; et s’en retournant, certes, en ignorant que cette bombe, en explosant, ne manquera pas de vous emporter, vous le premier, vous l’allumeur de mèches...

lundi, 13 janvier 2014

Composants et caractéristiques de la stratégie de désinformation

Composants et caractéristiques de la stratégie de désinformation

L’utilisation de stratégies indirectes dans la guerre n’est pas nouvelle. En effet, dès le IVe siècle avant notre ère, le penseur chinois Sun Tzu souligne l’importance de l’application de différents moyens de la stratégie psychologique (1), en affirmant que « l‘arme suprême de la guerre, c’est soumettre l’ennemi sans combat ».

La désinformation peut être définie comme la manipulation de l’opinion publique à des fins politiques, militaires ou économiques, à l’aide d’une information traitée par des moyens détournés. Elle désigne une technique qui consiste à fournir à des tiers des informations générales erronées, qui les conduisent à commettre des actes collectifs ou à diffuser des jugements souhaités par les désinformateurs.(2)

Les composants principaux de la désinformation

Dans une stratégie de désinformation, il existe quatre composants principaux :

  • pouvoir émetteur de désinformation
  • thème
  • récepteur ciblé
  • transmission de la désinformation (3).

L’émetteur désigne ceux qui décident de pratiquer la désinformation pour influencer l’opinion publique dans la direction souhaitée par le désinformateur, afin d’atteindre des objectifs stratégiques cachés. L’émetteur se réfère donc à un pouvoir politique, militaire ou économique. Au début de la campagne de désinformation, il s’agit de choisir un thème et ensuite de le traiter. Le thème doit être simple, facile à comprendre par l’opinion publique. Par exemple, pendant la guerre froide le « désir de la paix de l’URSS », ou lors de la guerre d’invasion d’Irak en 2003, les « armes de destruction massive » ont été utilisé comme thèmes centraux de communication.

La stratégie de prétexte est souvent utilisée pour renforcer la crédibilité du thème. Il s’agit de créer un prétexte qui sert à justifier les prises de position politiques ou les opérations militaires. En 1941, les avions allemands portant des marquages soviétiques ont bombardé la ville hongroise de Kassa (NDLR : l’identité réelle des avions n’a pas été établie officiellement et fait encore aujourd’hui l’objet d’un débat). La propagande hongroise et allemande ont attribué cette attaque à l’Armée rouge. Le but était de mobiliser l’opinion publique hongroise en faveur de la guerre contre l’Union soviétique.

La désinformation peut traiter un thème de plusieurs manières :

  • l’omission, c’est-à-dire la non-diffusion d’une information
  • la diffusion d’une information incomplète
  • la diffusion d’une fausse information
  • la diffusion d’une information partiellement fausse et la surinformation.

L’opinion publique est le récepteur ciblé du pouvoir « désinformateur ». Il est très important de bien connaître la mentalité du groupe ciblé afin d’être en mesure de prévoir ses réactions à la campagne de désinformation. On peut considérer la mentalité d’un groupe humain comme l’expression de son identité culturelle. Le système de valeurs, les normes et la perception du monde sont à retenir en stratégie, car elles exercent une influence très importante sur le comportement. Dans ce contexte, la désinformation intègre certains éléments de la publicité. En effet, pour vendre un produit dans les pays différents, il faut prendre en considération les cultures respectives de chaque nation dans une stratégie de marketing.

La transmission de désinformation comporte trois éléments essentiels :

  • les agents d’influence ou sociétés privées de communication
  • les relais
  • les supports (4).

Le thème est généralement confié à un agent d’influence, ou une société privée de communication. Le premier cas était la norme durant la guerre froide, la seconde est devenue une pratique répandue depuis la fin de celle-ci. Leur rôle est de trouver le moyen de faire passer le thème au public. L’agent d’influence peut d’abord transmettre le message dans ses réseaux personnels, qui sont ses relais: journalistes, intellectuels, politiciens, amis etc. Les réseau personnels sont essentiels car ceux-ci peuvent assurer que la transmission du thème sera effectuée par des moyens détournés. Aussi est-il très difficile de démasquer la source, c’est-à-dire l’émetteur/désinformateur et l’agent d’influence. Les personnes participant à la transmission (réseaux primaires de l’agent d’influence) peuvent le faire à leur insu. Par exemple, un journaliste peu expérimenté envoyé dans une zone de conflit peut transmettre des informations « manipulées », tout en croyant à la justesse de la cause en question.

Depuis la fin de la guerre froide, les thèmes des stratégies de désinformation sont souvent confiés à des agences privées de communication ou de relations publiques. Par exemple, en 1991, avant le début des opérations militaires américaines au Kuwait, un reportage a été diffusé sur les grandes chaînes de télévision américaines. Une jeune et jolie femme en larmes racontait les exactions des soldats irakiens au Koweït. L’objectif visé a été de créer un certain esprit au sein de l’opinion publique américaine, afin de faciliter l’acceptation de l’engagement militaire américain.

Or on sait aujourd’hui que le film a été tourné par l’agence de relations publiques Hill and Knowlton et, plus grave: la jeune femme n’était autre que la fille de l’ambassadeur du Koweït aux Nations Unies.

Dans un deuxième temps, il s’agit de la transmission et de la diffusion du message (le thème de la désinformation) du réseau primaire vers les médias, à savoir les journaux, la radio, la télévision, les partis politiques notamment. L’objectif recherché est de faire diffuser le message à un segment de la population le plus large possible. La concentration du pouvoir dans les réseaux médiatiques facilite la diffusion de l’information manipulée sur une grande échelle.

Les supports sont les faits mineurs qui sont vrais ou censés être vrais. L’utilisation d’une partie de la vérité dans un certain contexte peut amener le public à croire le message. Il s’agit de la transmission d’une information qui ne correspond que partiellement à la vérité au sujet du thème, mais qui est traitée de telle façon qu’elle devient le support de la désinformation. L’objectif de l’utilisation des supports est le renforcement de la crédibilité du thème.

Les caractéristiques de la stratégie de désinformation

1. Préparation de l’opinion publique avant le début d’opérations militaires

Nous l’avons dit, la guerre moderne est aujourd’hui avant tout psychologique (5). Une partie du processus de désinformation avec les autres moyens de la guerre psychologique se déroule avant le début du conflit armé pour préparer un certain état d’esprit dans l’opinion publique. Une première action consiste à créer des préjugés dans l’opinion publique qui seront favorables au déroulement de la future campagne de désinformation. Le conflit yougoslave et la guerre du Golfe illustrent d’ailleurs cette préparation psychologique de l’opinion publique. En effet, Slobodan Milosevic et Saddam Hussein ont fréquemment été comparés à la figure d’Adolf Hitler.

2. Personnalisation du conflit

Il s’agit de présenter les événements selon une vision réductionniste, en faisant une interprétation en « noir et blanc » du thème de la désinformation. En désignant le « bon » et le « méchant », l’objectif visé est d’empêcher une réflexion globale et approfondie sur les véritables motivations des acteurs qui ont lancé la campagne de désinformation. L’impact de cette technique peut conduire à un fanatisme intellectuel, caractérisé par la catégorisation des positions entre deux extrêmes. Il faut choisir son camp et se ranger, soit dans le camp des bons, soit dans celui des méchants. Une troisième voie n’existe pas. Le traitement des critiques émises à l’égard de la Guerre de Golfe et le bombardement de la Yougoslavie en 1999 par l’OTAN ont illustré ce phénomène. Les auteurs qui ont critiqué la position officielle de la prétendue communauté internationale ont été considérés comme des défenseurs de la position de Saddam Hussein ou de Slobodan Milosevic. La formule « avec nous ou contre nous » reflète bien cette polarisation, visée par le pouvoir émetteur de la désinformation.

3. Provocation de réactions immédiates

L’information transmise peut provoquer dans l’opinion publique de réactions émotionnelles immédiates. La transmission d’images est un élément important dans ce processus. L’objectif est la création d’un état d’irrationalité, voire de psychose dans l’opinion publique. L’émotion prime sur la rationalité. Un jugement influencé par les émotions réduit la capacité analytique des personnes. Comme le soulignait Gustave Le Bon il y a plus d’un siècle, dans son livre sur la psychologie des foules (6), la pensée et le comportement de ces dernières sont largement influencés par les images. Cette observation est également valable pour la désinformation contemporaine. Ainsi, on peut parler d’une véritable guerre d’images dans les mass média mondialisés. Il faut également prendre en considération la facilité qu’offre la technologie actuelle pour retoucher des images prises par satellite ou un appareil photo ou vidéo digital.

Après l’image, il faut mentionner le rôle du langage dans la désinformation. L’imposition d’un certain vocabulaire ou d’une structure linguistique visent à influer la structure cognitive et affective des gens, pour orienter leurs réactions. Ce phénomène a été exploré par George Orwell dans son livre 1984 (7), dans lequel l’auteur présente comment le « Novlangue », la langue officielle de l’Océanie, un État totalitaire, est utilisé dans l’endoctrinement idéologique des citoyens. Sur le bâtiment du parti unique de cet État totalitaire, les slogans suivants ont été affichés: « La guerre c’est la Paix , La Liberté c’est l’esclavage, L’Ignorance c’est la force. »

Vladimir Volkoff, dans son livre La Désinformation, Arme de Guerre (8), analyse l’utilisation répondue des logomachies dans les campagnes de désinformation. La puissance des mots liée aux images qu’ils évoquent sont tout à fait indépendants de leur signification réelle. Les mots comme « démocratie», « liberté », « réactionnaire », « ennemi du peuple », « anti-américain » « anti-européen » peuvent devenir des logomachies et susciter des réflexes pavloviens au sein de l’opinion publique, lorsque on utilise certains de ces mots dans un contexte particulier. Par exemple, on peut constater une véritable dérive intellectuelle sur la question de l’intégration européenne : critiquer la construction européenne de Maastricht, c’est être « contre l’Europe ». D’où l’amalgame entre l’Europe de Maastricht et l’Europe tout court. La signification réelle des mots n’a plus d’importance. Ce qui compte, c’est de faire passer le message au public en évoquant des images liées à ce mot.

L’utilisation fréquente de ces logomachies dans le processus de désinformation permet de faire passer le thème dans le public.

4. Maintien de l’ignorance et confusion

Le succès de la désinformation est inversement proportionnel au niveau de connaissance du public cible par rapport au sujet de la désinformation. Si l’on songe à la complexité des conflits contemporains, à la façon de les présenter dans le média et au conformisme intellectuel qui règne dans nos sociétés, on peut tirer certaines conclusions concernant l’efficacité de la désinformation. On peut noter le recul du journalisme d’investigation et du temps consacré aux commentaires politiques, la toute-puissance de l’image sur l’écrit et l’importance croissante du phénomène de « marketing politique » dans nos sociétés contemporaines.

5. Orientation des flux d’information conduisant à l’omission et surinformation

L’utilisation de la surinformation et de l’omission par l’orientation des flux d’information permettent de parler d’un sujet tout en passant les autres sous silence. L’agenda setting, c’est-à-dire la surreprésentation d’un événement dans les médias, combinée avec l’omission de l’information sur d’autres événements, sert cet objectif. L’opinion publique peut être bombardée par les images présentant la situation du Kosovo, Irak, Bosnie. En revanche, on n’a quasiment pas mentionné d’autres conflits se déroulant au même moment. Le génocide au Rwanda, qui a produit environ un demi-million de morts, n’a été filmé par aucune équipe de télévision. Il en est de même lorsque 300’000 Serbes ont été chassés de la Krajina par les Croates en été 1995. Cette orientation de flux d’information est facilitée par la puissance de certains réseaux mondialisés de télécommunication, à l’instar de chaînes d’information télévisées: CNN, Euronews, etc.

L’impact de la désinformation est renforcé par la capacité de transmission de l’information ou de la désinformation, par les moyens de télécommunication à l’échelle mondiale. Il faut également mentionner la question de la concentration de pouvoir dans les médias. Ces derniers sont souvent contrôlés par les pouvoirs économiques, politiques ou le complexe militaro-industriel.

Gyula Csurgai est Directeur du Centre international d’études géopolitiques (CIEG)

__________________________

(1) Sun Tzu, L’art de la guerre, Flammarion, 1972.

(2) Vladimir Volkoff, Petite Histoire de la désinformation, Rocher, Monaco, 1999, p.32.

(3) Voir une analyse détaillée sur les composants de la désinformation dans Vladimir Volkoff, La désinformation arme de guerre, L’Age d’Homme, Lausanne, 1986, 2004.

(4) Vladimir Volkoff, Petite Histoire de la désinformation, Op.Cit., p. 143-149.

(5) A ce sujet l’ouvrage de Roger Mucchielli, La Subversion, CLC, 1972, présente une analyse fort intéressante.

(6) Gustave Le Bon, Psychologie des foules, PUF, Paris, 1995.

(7) George Orwell, 1984, Gallimard, Paris, 1950.

(8) Vladimir Volkoff, La désinformation arme de guerre, L’Age d’Homme, Lausanne, 1986, 2004.

Revue Militaire Suisse (via Theatrum Belli)

jeudi, 21 mars 2013

The New Propaganda Is Liberal

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The New Propaganda Is Liberal

 
 
What is modern propaganda? For many, it is the lies of a totalitarian state. In the 1970s, I met Leni Riefenstahl and asked her about her epic films that glorified the Nazis. Using revolutionary camera and lighting techniques, she produced a documentary form that mesmerized Germans; her Triumph of the Will cast Hitler’s spell.

She told me that the “messages” of her films were dependent not on “orders from above,” but on the “submissive void” of the German public. Did that include the liberal, educated bourgeoisie? “Everyone,” she said.

Today, we prefer to believe that there is no submissive void. “Choice” is ubiquitous. Phones are “platforms” that launch every half-thought. There is Google from outer space if you need it. Caressed like rosary beads, the precious devices are borne heads-down, relentlessly monitored and prioritised. Their dominant theme is the self. Me. My needs. Riefenstahl’s submissive void is today’s digital slavery.

Edward Said described this wired state in ‘Culture and Imperialism’ as taking imperialism where navies could never reach. It is the ultimate means of social control because it is voluntary, addictive and shrouded in illusions of personal freedom.

Today’s “message” of grotesque inequality, social injustice and war is the propaganda of liberal democracies. By any measure of human behavior, this is extremism. When Hugo Chavez challenged it, he was abused in bad faith; and his successor will be subverted by the same zealots of the American Enterprise Institute, Harvard’s Kennedy School and the “human rights” organisations that have appropriated American liberalism and underpin its propaganda. The historian Norman Pollack calls this “liberal fascism.” He wrote, “All is normality on display. For [Nazi] goose-steppers, substitute the seemingly more innocuous militarization of the total culture. And for the bombastic leader, we have the reformer manque, blithely at work [in the White House], planning and executing assassination, smiling all the while.”

Whereas a generation ago, dissent and biting satire were allowed in the “mainstream,” today their counterfeits are acceptable and a fake moral zeitgeist rules. “Identity” is all, mutating feminism and declaring class obsolete. Just as collateral damage covers for mass murder, “austerity” has become an acceptable lie. Beneath the veneer of consumerism, a quarter of Greater Manchester is reported to be living in “extreme poverty.”

The militarist violence perpetrated against hundreds of thousands of nameless men, women and children by “our” governments is never a crime against humanity. Interviewing Tony Blair 10 years on from his criminal invasion of Iraq, the BBC’s Kirsty Wark gifted him a moment he could only dream of. She allowed Blair to agonise over his “difficult” decision rather than call him to account for the monumental lies and bloodbath he launched. One is reminded of Albert Speer.

Hollywood has returned to its cold war role, led by liberals. Ben Affleck’s Oscar-winning Argo is the first feature film so integrated into the propaganda system that its subliminal warning of Iran’s “threat” is offered as Obama is preparing, yet again, to attack Iran. That Affleck’s “true story” of good-guys-vs-bad-Muslims is as much a fabrication as Obama’s justification for his war plans is lost in PR-managed plaudits. As the independent critic Andrew O’Hehir points out, Argo is “a propaganda movie in the truest sense, one that claims to be innocent of all ideology.” That is, it debases the art of film-making to reflect an image of the power it serves.

The true story is that, for 34 years, the US foreign policy elite have seethed with revenge for the loss of the shah of Iran, their beloved tyrant, and his CIA-designed state of torture. When Iranian students occupied the US embassy in Tehran in 1979, they found a trove of incriminating documents, which revealed that an Israeli spy network was operating inside the US, stealing top scientific and military secrets. Today, the duplicitous Zionist ally – not Iran – is the one and only nuclear threat in the Middle East.

In 1977, Carl Bernstein, famed for his Watergate reporting, disclosed that more than 400 journalists and executives of mostly liberal US media organizations had worked for the CIA in the past 25 years. They included journalists from the New York Times, Time, and the big TV broadcasters. These days, such a formal nefarious workforce is quite unnecessary. In 2010, the New York Times made no secret of its collusion with the White House in censoring the WikiLeaks war logs. The CIA has an “entertainment industry liaison office” that helps producers and directors remake its image from that of a lawless gang that assassinates, overthrows governments and runs drugs. As Obama’s CIA commits multiple murder by drone, Affleck lauds the “clandestine service… that is making sacrifices on behalf of Americans every day… I want to thank them very much.” The 2010 Oscar-winner Kathryn Bigelow’s Zero Dark Thirty, a torture-apology, was all but licensed by the Pentagon.

The US market share of cinema box-office takings in Britain often reaches 80 percent, and the small UK share is mainly for US co-productions. Films from Europe and the rest of the world account for a tiny fraction of those we are allowed to see. In my own film-making career, I have never known a time when dissenting voices in the visual arts are so few and silent.

For all the hand-wringing induced by the Leveson inquiry, the “Murdoch mold” remains intact. Phone-hacking was always a distraction, a misdemeanor compared to the media-wide drumbeat for criminal wars. According to Gallup, 99 percent of Americans believe Iran is a threat to them, just as the majority believed Iraq was responsible for the 9/11 attacks. “Propaganda always wins,” said Leni Riefenstahl, “if you allow it.”

Read more by John Pilger

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vendredi, 23 novembre 2012

Propaganda : Comment manipuler l’opinion en démocratie

«Propaganda : Comment manipuler l’opinion en démocratie», par Edward Bernays

 

Qui a dit : « L’ingénierie du consentement est l’essence même de la démocratie, la liberté de persuader et de suggérer » ?

Non, la propagande politique au XXème siècle n’est pas née dans les régimes totalitaires, mais au cœur même de la démocratie libérale américaine ; elle est née d’Edward Bernays, l’auteur de cette phrase.

Le père de la propagande

edward-bernays.jpgEdward Bernays (1891-1995), neveu de Sigmund Freud émigré aux Etats-Unis, est considéré comme le père de la propagande politique institutionnelle et de l’industrie des relations publiques, dont il met au point les méthodes pour des firmes comme Lucky Strike. Son œuvre aborde des thèmes communs à celle de Walter Lippmann, notamment celui de la manipulation de l’opinion publique. Il fit à ce titre partie du Committee on Public Information créé par Woodrow Wilson [président des Etats-Unis - NDLR] pour gagner l’opinion publique américaine à l’entrée en guerre des États-Unis en 1917.

Conseiller pour de grandes compagnies américaines, Bernays a mis au point les techniques publicitaires modernes. Au début des années 1950, il orchestra des campagnes de déstabilisation politique en Amérique latine, qui accompagnèrent notamment le renversement du gouvernement du Guatemala, main dans la main avec la CIA.

Il a inventé cette technique moderne qui consiste à plier nos esprits aux projets de certains, technique que l’on nomme communément « propagande ».

Pour Bernays, la démocratie doit être pilotée par la minorité intelligente, c’est-à-dire, par l’élite…

Les méthodes de Bernays : de la théorie à la pratique.

En combinant les idées de Gustave Le Bon et Wilfred Trotter sur la psychologie des foules avec les idées sur la psychanalyse de son oncle maternel, Sigmund Freud, Eddy Bernays a été un des premiers à vendre des méthodes pour utiliser la psychologie du subconscient dans le but de manipuler l’opinion publique.

Pour lui, une foule ne peut pas être considérée comme pensante, seul le ça s’y exprime, les pulsions inconscientes. Il s’y adresse pour vendre de l’image dans des publicités, pour le tabac par exemple, où il utilise le symbole phallique. À la demande de l’industrie cigarettière, qui cherchait à faire tomber le tabou de la consommation du tabac par les femmes, il a notamment organisé des défilés très médiatisés de « fumeuses » jeunes et jolies qui affirmaient leur indépendance et leur modernité par l’acte de fumer en public (« Les torches de la liberté »…).

En politique, il « vend » l’image des personnalités publiques, en créant par exemple le petit-déjeuner du président, où celui-ci rencontre des personnalités du show-biz. Il considère qu’une minorité intelligente doit avoir le pouvoir « démocratique » et que la masse populaire doit être modelée pour l’accepter.

L’exemple de la première guerre mondiale

Des techniques de propagande ont été codifiées et appliquées la première fois d’une façon scientifique par le journaliste Walter Lippmann et le psychologue Edward Bernays au début du XXème siècle.

Pendant la Première Guerre mondiale, Lippman et Bernays furent engagés par le président des États-Unis Woodrow Wilson pour faire basculer une opinion américaine traditionnellement isolationniste vers l’interventionnisme. Pour cela, il fit appel aux Comités pour l’information du public (Commitee on Public Information) dirigés par le journaliste George Creel, « privatisant » ainsi la propagande de guerre.

La campagne de propagande de Creel, Lippman et Bernays effectuée pendant six mois fut si intense que l’hystérie anti-allemande générée a impressionné l’industrie américaine, qui découvrait tout à coup les immenses ressources que l’on pouvait déployer pour influencer l’opinion publique d’un pays entier. Bernays a inventé les termes d’esprit de groupe et d’ingénierie du consentement, des concepts importants en propagande appliquée.

Lord Ponsonby, un aristocrate anglais, socialiste et pacifiste, résuma ainsi les méthodes utilisées pendant le conflit (y compris par son propre pays) : il faut faire croire :

  1. que notre camp ne veut pas la guerre
  2. que l’adversaire en est responsable
  3. qu’il est moralement condamnable
  4. que la guerre a de nobles buts
  5. que l’ennemi commet des atrocités délibérées (pas nous)
  6. qu’il subit bien plus de pertes que nous
  7. que Dieu est avec nous
  8. que le monde de l’art et de la culture approuve notre combat
  9. que l’ennemi utilise des armes illicites (pas nous)
  10. que ceux qui doutent des neuf premiers points sont soit des traitres, soit des victimes des mensonges adverses (car l’ennemi, contrairement à nous qui informons, fait de la propagande).

L’historienne Anne Morelli a montré que cette grille pouvait s’appliquer encore aux conflits de la fin du XXème siècle. Certains soulignent aussi leur adéquation avec des conflits très actuels.

Les relations publiques, dont usent les États et les entreprises, s’inspirent directement des travaux de Lippman et Bernays.

En 1928, Bernays publie Propaganda

L’analyse de Chomsky :

« Le manuel classique de l’industrie des relations publiques », selon Noam Chomsky. Véritable petite guide pratique écrit en 1928 par le neveu américain de Sigmund Freud. Ce livre expose cyniquement et sans détour les grands principes de la manipulation mentale de masse ou de ce que Bernays appelait la « fabrique du consentement ».

Comment imposer une nouvelle marque de lessive ? Comment faire élire un président ? Dans la logique des « démocraties de marché », ces questions se confondent.

Bernays assume pleinement ce constat : les choix des masses étant déterminants, ceux qui viendront à les influencer détiendront réellement le pouvoir. La démocratie moderne implique une nouvelle forme de gouvernement, invisible : la propagande. Loin d’en faire la critique, l’auteur se propose d’en perfectionner et d’en systématiser les techniques à partir des acquis de la psychanalyse.

L’analyse de Blandine Josselin :

edw bern.jpgCar l’homme fait partie de ce « gouvernement de l’ombre », aujourd’hui « spin doctors » et autres conseillers en relation publique, qui régit toutes les activités humaines, du choix de nos lessives aux décisions de nos chefs d’Etat. A travers ses multiples exemples aux allures de complot, son oeuvre, Propaganda, est tout à la fois une théorie des relations publiques et le guide pratique de cette « ingénierie du consentement ».

Explicitant avec une clarté étonnante les multiples techniques et ressorts psychologiques de la propagande (le cher oncle n’est jamais bien loin !), cette oeuvre écrite en 1928 apparaît aujourd’hui comme un témoignage édifiant et profondément actuel, qui aurait toute sa place dans un cours de self-défense civique.

Précieux, ce «manuel» l’est par son absence totale de langue de bois. A la manière d’un Patrick Le Lay des grands jours, Bernays revendique sans même rosir son mépris pour le «troupeau» et son goût pour l’autorité. Si l’auteur choque aujourd’hui, il désarçonne aussi par tant de candeur et de ferveur pour ce qu’il chérit comme un progrès pour l’humanité.

Il pousse surtout à réfléchir sur la réalisation de l’idéal démocratique, tant la transparence et la consternante «bonne foi» de son argumentaire en trois temps paraît infaillible. Selon lui, la propagande n’est pas un vilain mot, car l’action de dominer et manipuler les foules est inévitable, nécessaire pour «organiser le chaos» et même profitable pour «guider» la masse «égarée», ainsi soulagée de l’éreintante tâche de penser par soi-même. Bernays fonde tout son argument sur l’évacuation de l’individu et la fatalité du consentement populaire.

————————

Edward Bernays, Propaganda : Comment manipuler l’opinion en démocratie, Editeur Zones, octobre 2007, traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Oristelle Bonis et préfacé par Normand Baillargeon, philosophe, professeur à l’université du Québec à Montréal, et auteur d’un Petit cours d’autodéfense intellectuelle paru chez Lux en 2007.

Sources : evene.fr et agoravox.fr

Polémia

dimanche, 27 mai 2012

NATO. "1984" rivisitato. Quando "La guerra è pace"

NATO. "1984" rivisitato. Quando "La guerra è pace"

di Ross Ruthenberg
Global Research

1984Considerando lo stato attuale della pace nel mondo e della politica della Responsabilità di Proteggere  (R2P) della NATO e per mantenere un giusto senso di equilibrio, il libro di George Orwell "1984" dovrebbe essere rivisitato periodicamente. Nello spirito del vertice NATO di Chicago, vi presento alcune citazioni di quel libro di testo-per-domani:

* "Se il Partito poteva impossessarsi del passato e dire, di questo o quell'av-venimento, che non era mai accaduto, ciò non era forse ancora più terribile della tortura o della morte?."

* "Non capisci che lo scopo principale a cui tende la neolingua è quello di restringere al massimo la sfera d'azione del pensiero?
Hai mai pensato, Winston, che entro il 2050, al massimo, nessun essere umano potrebbe capire una conversazione come quella che stiamo tenendo noi due adesso? Sarà diverso anche tutto ciò che si accompagna all'attività del pensiero. In effetti il pensiero non esisterà più, almeno non come lo intendiamo ora. Ortodossia significa non pensare, non dover pensare. Ortodossia è incoscienza. "

* "Gli uomini di governo di tutte le epoche hanno sempre tentato d'imporre una concezione del mondo assolutamente arbitraria ai loro seguaci".

* Poi il volto del Grande Fratello si dissolse, per lasciare il posto ai tre slogan del Partito, vergati in lettere maiuscole:

LA GUERRA È PACE
LA LIBERTÀ È SCHIAVITÙ
L'IGNORANZA È FORZA
"

* Una volta che gli capitò di accennare alla guerra contro l'Eurasia, lei lo lasciò di stucco affermando con noncuranza che secondo lei questa guerra non esisteva. Le bombe a razzo che cadevano tutti i giorni su Londra erano probabilmente sganciate dallo stesso governo dell'Oceania, «per mantenere la gente nella paura». Un'idea del genere non lo aveva mai neanche sfiorato."

* Lo scopo di condurre una guerra è sempre quello di poter partire da posizioni di vantaggio nella guerra successiva.

* Lo scopo essenziale della guerra è la distruzione, non necessariamente di vite umane, ma di quanto viene prodotto dal lavoro degli uomini. La guerra è un modo per mandare in frantumi, scaraventare nella stratosfera, affondare negli abissi marini, materiali che altrimenti potrebbero essere usati per rendere le masse troppo agiate e, a lungo andare, troppo intelligenti.

* Il Ministero della Pace si occupa della guerra, il Ministero della Verità fabbrica menzogne, il Ministero dell'Amore pratica la tortura, il Ministe-ro dell'Abbondanza è responsabile della generale penuria di beni. Queste contraddizioni non sono casuali, né si originano dalla semplice ipocrisia: sono meditati esercizi di Bipensiero. È infatti solo conciliando gli opposti che diviene possibile conservare il potere all'infinito."

* Ha detto anche che sbagliavano ad equiparare l'alleanza militare ad una "macchina da guerra". "Se questa è la base per le proteste, in realtà è basata sulla mancanza di conoscenza. La nostra organizzazione è un movimento per la pace."

[Oh, aspetta! Questo non è il Ministero della Verità che parla, è il segretario generale della NATO Anders Fogh Rasmussen! [1]]

rasmussen
Segretario generale della NATO Anders Fogh Rasmussen

Io e tanti altri abbiamo fatto fatica a capire perché abbiamo bisogno di una "macchina da guerra" mondiale nella società di oggi e, finalmente, Fogh Rasmussen, leader titolare della NATO, ha fornito l'illuminazione:

La NATO è un "movimento per la pace"!

Ora capisco che la NATO lanciando il  più grande numero di bombe dalla seconda guerra mondiale, in Jugoslavia nei primi anni '90 in realtà stava solo coprendo la zona con lanci di pace.

Adesso è chiara la recente iniziativa di pace della NATO in Libia, vale a dire esercitare semplicemente la loro responsabilità di proteggere, utilizzando gli strumenti della pace, come missili, bombe, ecc

La missione decennale della NATO in Afghanistan in realtà appare chiara come una missione di "diffusione della pace" vicino e lontano, mentre rimproverava duramente gli indigeni, se non capivano.

Poi c'è  in corso la marcia verso la pace in Siria sostenuta da Stati Uniti e NATO, con l'aiuto di molti amici della Siria come l'Arabia Saudita. Non sembra che il  leader della Siria, Assad, se la beva che la Guerra è Pace e la pace è ciò che viene riversato su di lui e il suo paese, proveniente dalla Turchia, Iraq, ecc

La Russia non dovrebbe essere preoccupata per l'accerchiamento di sistemi missilistici Aegis dispiegati intorno a loro, in quanto si tratta semplicemente di un "amichevole anello di pace".

Infine, beh, non proprio alla fine, come  ci ricorda "1984" "Lo scopo di condurre una guerra è sempre quello di poter partire da posizioni di vantaggio nella guerra successiva." (promemoria: la guerra è pace), cosa che rende ormai chiaro a me e, auspicabilmente, ai milioni di cittadini iraniani che dovrebbero solo tenere duro durante le numerose sanzioni debilitanti imposte su di loro, perché la pace è in arrivo!

La NATO e gli amici/partner ora stanno anche preparando le loro offerte di pace e gli strumenti di consegna, perché pienamente consapevoli della responsabilità di proteggeri! Pace a tutti!

"Tutto è svanito nella nebbia. Il passato è stato cancellato, la cancellazione è stata dimenticata, la menzogna è diventata verità".

Ross Ruthenberg è un analista politico di di Chicago rossersurf@comcast.net
Nota

[1] Estratto da: "The stage is set for summit, protests", di Bob Secter, reporter del Chicago Tribune, 20 maggio 2012

Andy Thayer, uno degli organizzatori, ha detto che lui e i suoi colleghi Giovedi hanno incontrato brevemente un alto ufficiale della NATO chee gli ha detto: "siamo molto consapevoli dell'immensa violenza e dell'oppressione che gli Stati Uniti e gli Stati Uniti nella loro veste NATO, fanno al mondo, e che nessuna parola della NATO o pronunciamento del vertice stesso potranno mettere in ombra questo ".

Parlando al comitato di redazione del Tribune Sabato, il segretario generale della Nato Anders Fogh Rasmussen ha detto che riconosce il diritto dei manifestanti di esprimersi, ma ha detto anche che sbagliavano ad equiparare l'alleanza militare ad una "macchina da guerra".

"Se questa è la base per le proteste, in realtà è basata sulla mancanza di conoscenza. La nostra organizzazione è un movimento per la pace.", ha detto Rasmussen, ex primo ministro della Danimarca.

"Durante più di 60 anni, la NATO è stata il fondamento della sicurezza in Europa e Nord America. E grazie alla NATO, abbiamo mantenuto la pace e la stabilità in Europa durante quel lungo periodo, dalla 2° Guerra Mondiale. E' il più lungo periodo di pace nella storia d'Europa. Questo è un bel successo. Questo è quello che io chiamo un movimento per la pace", ha detto.

Citando il ruolo della NATO nel contribuire a riunificare l'Europa, sviluppare nuove democrazie dopo la caduta del comunismo e sviluppare azioni per proteggere i civili in Libia, Rasmussen ha detto: "Non è giustificato chiamare la NATO una macchina da guerra. Ma ancora una volta, in una società libera, è un diritto costituzionale esprimersi  - anche se le vostre dichiarazioni non sono giustificate o errate o imprecise ".
http://www.chicagotribune.com/news/local/ct-met-hd-nato-chicago-0520-20120520,0,1571541.story

Fonte: Global Research 21 Maggio 2012
Traduzione: Anna Moffa per
ilupidieinstein.blogspot.it

dimanche, 27 mars 2011

Libye: le "médiamensonge", arme suprême

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Libye : le « médiamensonge » arme suprême

Ex: http://www.polemia.com/

Michel Collon a plublié sur son site un article assez virulent en cinq points, dans lequel il dénonce la médiatisation complaisante et partisane des événements libyens. Nous ne partageons pas forcément l’intégralité du contenu, mais nous invitons nos lecteurs à se rendre sur ce site pour en prendre connaissance. Il est très éclairant.

Au moment où Polémia organise sa deuxième cérémonie des Bobards d’Or le 5 avril prochain, il nous paraît intéressant de le leur signaler. En plus et en avant goût de notre manifestation, nous reproduisons le point 5 qui traite d’un sujet qui nous est cher : le « médiamensonge », que l’on retrouve pratiquement à l’origine de chaque conflit. C’est le thème de Michel Collon.

En fin d’article, on trouvera  les références de cette publication qui a pour titre : 

Cinq remarques sur l’intervention contre la Libye
et dont les cinq points sont :

  1. Humanitaire, mon œil !
  2. Qui a le droit de « changer de régime » ?
  3. Les buts cachés
  4. La « communauté internationale » existe-t-elle ?
  5. Chaque guerre est précédée d’un grand médiamensonge

Chaque guerre est précédée d’un grand médiamensonge.

Même dans la gauche européenne, on constate une certaine confusion : intervenir ou pas ? L’argument massue « Kadhafi bombarde les civils » a pourtant été démenti par des sources occidentales et des sources de l’opposition libyenne. Mais répété des centaines de fois, il finit par s’imposer.

Etes-vous certains de savoir ce qui se passe vraiment en Libye ? Quand l’Empire décide une guerre, l’info qui provient de ses médias est-elle neutre ? N’est-il pas utile de se rappeler que chaque grande guerre a été précédée d’un grand médiamensonge pour faire basculer l’opinion ? Quand les USA ont attaqué le Vietnam, ils ont prétendu que celui-ci avait attaqué deux navires US. Faux, ont-ils reconnu des années plus tard. Quand ils ont attaqué l’Irak, ils ont invoqué le vol des couveuses, la présence d’Al-Qaida, les armes de destruction massive. Tout faux. Quand ils ont bombardé la Yougoslavie, ils ont parlé d’un génocide. Faux également. Quand ils ont envahi l’Afghanistan, ce fut en prétendant qu’il était responsable des attentats du 11 septembre. Bidon aussi.

S’informer est la clé.

Il est temps d’apprendre des grands médiamensonges qui ont rendu possibles les guerres précédentes.

Michel Collon
20/03/2011

Source :

Cinq remarques sur l’intervention contre la Libye, à lire sur :
http://www.michelcollon.info/Cinq-remarques-sur-l-intervention.html

Correspondance Polémia – 22/03/2011

samedi, 25 septembre 2010

Las 10 estrategias de manipulacion mediatica

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Las 10 estrategias de manipulación mediática

El lingüista Noam Chomsky elaboró la lista de las “10 Estrategias de Manipulación” a través de los medios

Ex: http://causarevolucionaria.wordpress.com/

1. La estrategia de la distracción El elemento primordial del control social es la estrategia de la distracción que consiste en desviar la atención del público de los problemas importantes y de los cambios decididos por las elites políticas y económicas, mediante la técnica del diluvio o inundación de continuas distracciones y de informaciones insignificantes.


La estrategia de la distracción es igualmente indispensable para impedir al público interesarse por los conocimientos esenciales, en el área de la ciencia, la economía, la psicología, la neurobiología y la cibernética. ”Mantener la Atención del público distraída, lejos de los verdaderos problemas sociales, cautivada por temas sin importancia real. Mantener al público ocupado, ocupado, ocupado, sin ningún tiempo para pensar; de vuelta a granja como los otros animales (cita del texto ‘Armas silenciosas para guerras tranquilas)”.

2. Crear problemas y después ofrecer soluciones. Este método también es llamado “problema-reacción-solución”. Se crea un problema, una “situación” prevista para causar cierta reacción en el público, a fin de que éste sea el mandante de las medidas que se desea hacer aceptar. Por ejemplo: dejar que se desenvuelva o se intensifique la violencia urbana, u organizar atentados sangrientos, a fin de que el público sea el demandante de leyes de seguridad y políticas en perjuicio de la libertad. O también: crear una crisis económica para hacer aceptar como un mal necesario el retroceso de los derechos sociales y el desmantelamiento de los servicios públicos.

3. La estrategia de la gradualidad. Para hacer que se acepte una medida inaceptable, basta aplicarla gradualmente, a cuentagotas, por años consecutivos. Es de esa manera que condiciones socioeconómicas radicalmente nuevas (neoliberalismo) fueron impuestas durante las décadas de 1980 y 1990: Estado mínimo, privatizaciones, precariedad, flexibilidad, desempleo en masa, salarios que ya no aseguran ingresos decentes, tantos cambios que hubieran provocado una revolución si hubiesen sido aplicadas de una sola vez.

4. La estrategia de diferir. Otra manera de hacer aceptar una decisión impopular es la de presentarla como “dolorosa y necesaria”, obteniendo la aceptación pública, en el momento, para una aplicación futura. Es más fácil aceptar un sacrificio futuro que un sacrificio inmediato. Primero, porque el esfuerzo no es empleado inmediatamente. Luego, porque el público, la masa, tiene siempre la tendencia a esperar ingenuamente que “todo irá mejorar mañana” y que el sacrificio exigido podrá ser evitado. Esto da más tiempo al público para acostumbrarse a la idea del cambio y de aceptarla con resignación cuando llegue el momento.

5. Dirigirse al público como criaturas de poca edad. La mayoría de la publicidad dirigida al gran público utiliza discurso, argumentos, personajes y entonación particularmente infantiles, muchas veces próximos a la debilidad, como si el espectador fuese una criatura de poca edad o un deficiente mental. Cuanto más se intente buscar engañar al espectador, más se tiende a adoptar un tono infantilizante. Por qué? “Si uno se dirige a una persona como si ella tuviese la edad de 12 años o menos, entonces, en razón de la sugestionabilidad, ella tenderá, con cierta probabilidad, a una respuesta o reacción también desprovista de un sentido crítico como la de una persona de 12 años o menos de edad (ver “Armas silenciosas para guerras tranquilas”)”.

6. Utilizar el aspecto emocional mucho más que la reflexión. Hacer uso del aspecto emocional es una técnica clásica para causar un corto circuito en el análisis racional, y finalmente al sentido critico de los individuos. Por otra parte, la utilización del registro emocional permite abrir la puerta de acceso al inconsciente para implantar o injertar ideas, deseos, miedos y temores, compulsiones, o inducir comportamientos…

7. Mantener al público en la ignorancia y la mediocridad. Hacer que el público sea incapaz de comprender las tecnologías y los métodos utilizados para su control y su esclavitud. “La calidad de la educación dada a las clases sociales inferiores debe ser la más pobre y mediocre posible, de forma que la distancia de la ignorancia que planea entre las clases inferiores y las clases sociales superiores sea y permanezca imposibles de alcanzar para las clases inferiores (ver ‘Armas silenciosas para guerras tranquilas)”.

8. Estimular al público a ser complaciente con la mediocridad. Promover al público a creer que es moda el hecho de ser estúpido, vulgar e inculto…

9. Reforzar la autoculpabilidad. Hacer creer al individuo que es solamente él el culpable por su propia desgracia, por causa de la insuficiencia de su inteligencia, de sus capacidades, o de sus esfuerzos. Así, en lugar de rebelarse contra el sistema económico, el individuo se autodesvalida y se culpa, lo que genera un estado depresivo, uno de cuyos efectos es la inhibición de su acción. Y, sin acción, no hay revolución!

10. Conocer a los individuos mejor de lo que ellos mismos se conocen. En el transcurso de los últimos 50 años, los avances acelerados de la ciencia han generado una creciente brecha entre los conocimientos del público y aquellos poseídas y utilizados por las elites dominantes. Gracias a la biología, la neurobiología y la psicología aplicada, el “sistema” ha disfrutado de un conocimiento avanzado del ser humano, tanto de forma física como psicológicamente. El sistema ha conseguido conocer mejor al individuo común de lo que él se conoce a sí mismo. Esto significa que, en la mayoría de los casos, el sistema ejerce un control mayor y un gran poder sobre los individuos, mayor que el de los individuos sobre sí mismos.

Fuente

vendredi, 18 juin 2010

Gutmenschen-Propaganda

meolzer340x.jpgGutmenschen-Propaganda

Die EU-„Grundrechte-Agentur“ diffamiert die Europäer

Ex: http://www.andreas-moelzer.at/

Vergangene Woche wurde der neue Jahresbericht der EU-„Grundrechte-Agentur“ vorgestellt. In dem 174seitigen Bericht erfährt der Leser, daß Europa ein Hort von Rassismus und Fremdenfeindlichkeit sei und Zuwanderer sowie Randgruppen wie Homosexuelle systematisch diskriminiert würden. Offen bleibt freilich die Frage, warum jährlich Abertausende aus der Dritten Welt nach Europa strömen, wo hier doch die Gäste aus aller Herren Länder angeblich so schlecht behandelt werden.

So werden etwa Beispiele wie Stellenanzeigen, mit denen Bewerber mit „deutscher Muttersprache“ gesucht werden, als Beispiele für „Diskriminierung“ angeführt. Oder Deutschland wird an den Pranger gestellt, weil acht Bundesländer moslemischen Lehrerinnen verbieten, während des Unterrichts ihr Kopftuch zu tragen. Dadurch würden sie gezwungen, so die Behauptung, zwischen ihrer Anstellung und ihren religiösen Überzeugungen wählen zu müssen. Aber auch die Lage illegaler Zuwanderer, die hier zum Zwecke der Rückkehr in ihre Heimatländer festgehalten werden, treibt den am Wiener Schwarzenbergplatz residierenden Gutmenschen die Sorgenfalten ins Gesicht.

Keine Beachtung schenkt die „Grundrechte-Agentur“ der Entstehung von Parallelgesellschaften in unzähligen europäischen Großstädten sowie dem immer ärger werdenden Problem der Ausländergewalt. Kein Wunder, schließlich passen diese durch die ungezügelte Massenzuwanderung hervorgerufenen Mißstände nicht ins Bild einer multikulturellen Idylle, die nur durch die bösen Einheimischen, die an ihrer angestammten nationalen Identität festhalten wollen, gestört wird. Da wird schon lieber ein Loblied auf das Ausländerwahlrecht auf kommunaler Ebene gesungen und die Bevorzugung von Zuwanderern im öffentlichen Dienst als „beispielhaft“ angepriesen.

Somit steht fest, daß es nicht die Aufgabe der „Grundrechte-Agentur“ ist, etwa die in Europa von den Dogmen der politischen Korrektheit bedrohte Meinungs- und Pressefreiheit zu verteidigen. Ganz im Gegenteil, diese für die Bürger vollkommen unnütze EU-Einrichtung ist selbst eine Speerspitze linkslinker Moral- und Tugendwächter und soll dem Aufgehen der europäischen Völker in einer multikulturellen Gesellschaft propagandistisch den Boden bereiten. Um nicht noch mehr Schaden anzurichten, ist die „Grundrechte-Agentur“ daher zu schließen. Immerhin würden sich die europäischen Steuerzahler dadurch allein in den beiden Folgejahren 42 Millionen Euro ersparen.

[24/10;14]

dimanche, 06 juin 2010

"Propaganda: Comment manipuler l'opinion en démocratie"

neo_propagande_(67).jpg« Propaganda : Comment manipuler l'opinion en démocratie »

par Edward Bernays

Ex: http://www.polemia.com/

Qui a dit : « L’ingénierie du consentement est l’essence même de la démocratie, la liberté de persuader et de suggérer » ?

Non, la propagande politique au XXe siècle n’est pas née dans les régimes totalitaires, mais au cœur même de la démocratie libérale américaine ; elle est née d’Edward Bernays, l’auteur de cette phrase.

Le père de la propagande

Edward Bernays (1891-1995), neveu de Sigmund Freud émigré aux Etats-Unis, est considéré comme le père de la propagande politique institutionnelle et de l’industrie des relations publiques, dont il met au point les méthodes pour des firmes comme Lucky Strike. Son œuvre aborde des thèmes communs à celle de Walter Lippmann, notamment celui de la manipulation de l’opinion publique. Il fit à ce titre partie du Committee on Public Information créé par Woodrow Wilson [président des Etats-Unis NDLR] pour gagner l’opinion publique américaine à l’entrée en guerre des États-Unis en 1917.

Conseiller pour de grandes compagnies américaines, Bernays a mis au point les techniques publicitaires modernes. Au début des années 1950, il orchestra des campagnes de déstabilisation politique en Amérique latine, qui accompagnèrent notamment le renversement du gouvernement du Guatemala, main dans la main avec la CIA.

Il a inventé cette technique moderne qui consiste à plier nos esprits aux projets de certains, technique que l’on nomme communément « propagande ».

Pour Bernays, la démocratie doit être pilotée par la minorité intelligente, c’est-à-dire, par l’élite...

Les méthodes de Bernays : de la théorie à la pratique.

En combinant les idées de Gustave Le Bon et Wilfred Trotter sur la psychologie des foules avec les idées sur la psychanalyse de son oncle maternel, Sigmund Freud, Eddy Bernays a été un des premiers à vendre des méthodes pour utiliser la psychologie du subconscient dans le but de manipuler l’opinion publique.

Pour lui, une foule ne peut pas être considérée comme pensante, seul le ça s’y exprime, les pulsions inconscientes. Il s’y adresse pour vendre de l’image dans des publicités, pour le tabac par exemple, où il utilise le symbole phallique. À la demande de l’industrie cigarettière, qui cherchait à faire tomber le tabou de la consommation du tabac par les femmes, il a notamment organisé des défilés très médiatisés de « fumeuses » jeunes et jolies qui affirmaient leur indépendance et leur modernité par l’acte de fumer en public (« Les torches de la liberté »...).

En politique, il « vend » l’image des personnalités publiques, en créant par exemple le petit-déjeuner du président, où celui-ci rencontre des personnalités du show-biz. Il considère qu’une minorité intelligente doit avoir le pouvoir « démocratique » et que la masse populaire doit être modelée pour l’accepter.

L’exemple de la première guerre mondiale

Des techniques de propagande ont été codifiées et appliquées la première fois d’une façon scientifique par le journaliste Walter Lippmann et le psychologue Edward Bernays au début du XXe siècle.

Pendant la Première Guerre mondiale, Lippman et Bernays furent engagés par le président des États-Unis Woodrow Wilson pour faire basculer une opinion américaine traditionnellement isolationniste vers l’interventionnisme. Pour cela, il fit appel aux Comités pour l’information du public (Comitee for Public Information) dirigés par le journaliste George Creel, « privatisant » ainsi la propagande de guerre.

La campagne de propagande de Creel, Lippman et Bernays effectuée pendant six mois fut si intense que l’hystérie anti-allemande générée a impressionné l’industrie américaine, qui découvrait tout à coup les immenses ressources que l’on pouvait déployer pour influencer l’opinion publique d’un pays entier. Bernays a inventé les termes d’esprit de groupe et d’ingénierie du consentement, des concepts importants en propagande appliquée.

Lord Ponsonby, un aristocrate anglais, socialiste et pacifiste, résuma ainsi les méthodes utilisées pendant le conflit (y compris par son propre pays) : Il faut faire croire :

  1. que notre camp ne veut pas la guerre
  2.  que l’adversaire en est responsable
  3.  qu’il est moralement condamnable
  4.  que la guerre a de nobles buts
  5.  que l’ennemi commet des atrocités délibérées (pas nous)
  6. .qu’il subit bien plus de pertes que nous
  7.  que Dieu est avec nous
  8.  que le monde de l’art et de la culture approuve notre combat
  9.  que l’ennemi utilise des armes illicites (pas nous)
  10.  que ceux qui doutent des neuf premiers points sont soit des traitres, soit des victimes des mensonges adverses (car l’ennemi, contrairement à nous qui informons, fait de la propagande).

L’historienne Anne Morelli a montré que cette grille pouvait s’appliquer encore aux conflits de la fin du XXe siècle. Certains soulignent aussi leur adéquations avec des conflits très actuels.

Les relations publiques, dont usent les États et les entreprises, s’inspirent directement des travaux de Lippman et Bernays.

En 1928, Bernays publie Propaganda

L’analyse de Chomsky :

« Le manuel classique de l’industrie des relations publiques », selon Noam Chomsky. Véritable petite guide pratique écrit en 1928 par le neveu américain de Sigmund Freud. Ce livre expose cyniquement et sans détour les grands principes de la manipulation mentale de masse ou de ce que Bernays appelait la « fabrique du consentement ».

Comment imposer une nouvelle marque de lessive ? Comment faire élire un président ? Dans la logique des « démocraties de marché », ces questions se confondent.

Bernays assume pleinement ce constat : les choix des masses étant déterminants, ceux qui viendront à les influencer détiendront réellement le pouvoir. La démocratie moderne implique une nouvelle forme de gouvernement, invisible : la propagande. Loin d’en faire la critique, l’auteur se propose d’en perfectionner et d’en systématiser les techniques à partir des acquis de la psychanalyse.

L’analyse de Blandine Josselin :

Car l’homme fait partie de ce « gouvernement de l’ombre », aujourd’hui « spin doctors » et autres conseillers en relation publique, qui régit toutes les activités humaines, du choix de nos lessives aux décisions de nos chefs d’Etat. A travers ses multiples exemples aux allures de complot, son oeuvre, Propaganda, est tout à la fois une théorie des relations publiques et le guide pratique de cette « ingénierie du consentement ».

Explicitant avec une clarté étonnante les multiples techniques et ressorts psychologiques de la propagande (le cher oncle n’est jamais bien loin !), cette oeuvre écrite en 1928 apparaît aujourd’hui comme un témoignage édifiant et profondément actuel qui aurait toute sa place dans un cours de self-défense civique. Précieux, ce « manuel » l’est par son absence totale de langue de bois. A la manière d’un Patrick Le Lay des grands jours, Bernays revendique sans même rosir son mépris pour le « troupeau » et son goût pour l’autorité. Si l’auteur choque aujourd’hui, il désarçonne aussi par tant de candeur et de ferveur pour ce qu’il chérit comme un progrès pour l’humanité. Il pousse surtout à réfléchir sur la réalisation de l’idéal démocratique tant la transparence et la consternante « bonne foi » de son argumentaire en trois temps paraît infaillible. Selon lui, la propagande n’est pas un vilain mot car l’action de dominer et manipuler les foules est inévitable, nécessaire pour « organiser le chaos » et même profitable pour « guider » la masse « égarée », ainsi soulagée de l’éreintante tâche de penser par soi-même. Bernays fonde tout son argument sur l’évacuation de l’individu et la fatalité du consentement populaire.

Anonymus

24/05/2010

Edward Bernays, Propaganda : Comment manipuler l'opinion en démocratie, Editeur Zones, octobre 2007, traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Oristelle Bonis et préfacé par Normand Baillargeon, philosophe, professeur à l'université du Québec à Montréal, et auteur d'un Petit cours d'autodéfense intellectuelle paru chez Lux en 2007.

Sources :

evene.fr et agoravox.fr

dimanche, 09 mai 2010

Propaganda y construccion del consenso: Walt Disney y la Segunda Guerra

Propaganda y construcción del consenso: Walt Disney y la Segunda Guerra

Por Giovanni B. Krähe

Ex: http://geviert.wordpress.com/

Entre los clásicos de la propaganda americana para el público infantil durante la Segunda Guerra Mundial tenemos las producciones de Walt Disney Der Fürher´s Faces (1943, premiada con un Oscar), la disdascálica Education for Death (1943) o la ilustrativa On the Front Lines-Victory through Air Power (1943). Todo este interesante material, histórico ahora (disponible online, ver links), tenía entonces precisos objetivos políticos-militares de mantenimiento del consenso en el frente civil interno durante la Segunda Guerra Mundial (salvo los SNAFU, ver más adelante). Es necesario considerar también los programas de apoyo fiscal al ejercito, los denominados Income Tax Propaganda. Luego de la Guerra, todo este material fue mantenido archivado y censurado por un considerable periodo, hasta su difusión relativamente reciente como material documental, de “historia” de la misma Disney. Publicamos algunos apuntes sueltos sobre el primer material, Der Führer’s Faces.

Der Führer´s Faces: Estrategia y lenguaje icónico

La estrategia principal de la propaganda americana en esta interesante producción es neutralizar y despolitizar, a través de la descontextualización por asociación, símbolos y contenidos mitopoiéticos utilizados hábilmente por la propaganda alemana para sus propios objetivos de consenso. El lenguaje de descontextualización es la ironía, a la cual se añade una representación icónica simple y una narración-guía en off de fácil interpretación para su rápida decodificación por el espectador. Entre cada momento de descontextualización (cada situación que el personaje Donald tiene que soportar) es posible notar una musicalización, un jingle digamos, que prepara el inicio y el final de cada breve situación. La música tiene la función de crear una “pausa mental”, para que el espectador pueda distinguir cada segmento del mensaje sin arrastrar las emociones de un segmento al otro.

Dado que el mensaje del grupo Disney se dirige al espectador americano medio (infantil y adulto) con finalidades de consenso, la representación icónica de la ironía es asociada en el mensaje de forma simple, breve y eficaz. La técnica es la asociación por diferencia-distinción entre un contenido americano y uno alemán, codificado a través de estereotipos, representaciones, bias, prejuicios, lugares comunes de fácil y rápido reconocimiento para el espectador.  Tenemos, por ejemplo, por un lado, contenidos pertenecientes a la cotidianidad, al espacio privado (ver imagen abajo), a la persona (dimensión psicológica) o individual (dimensión social). A esto se añaden símbolos colectivos o contenidos semánticos reconocidos como típicos por el espectador americano (“la estatua de la libertad”, ver al final del video). Por el otro lado tenemos los contenidos alemanes, objetivo de la neutralización. Estos contenidos alemanes deben ser también reconocibles y distinguibles por el espectador  americano medio para que el mensaje sea icónicamente eficaz. Observemos por ejemplo que el material inicia con una sobretematización (primer plano) del preußischer Paradeschrittel, el paso marcial prusiano (ver imagen arriba y abajo). Todos los contenidos alemanes van asociados, como ya mencionado, a estereotipos, prejuicios o lugares comunes del mismo espectador americano, para facilitar su decodificación y comprensión inmediata.

El público o target de los contenidos de Walt Disney durante la Guerra fueron siempre niños y adultos, hubieron, sin embargo, producciones especiales para uso interno, es decir, sólo para los soldados en el frente (cfr. los SNAFU). En términos de análisis mediológico (aislando el medium icónico por un lado y los símbolos por el otro) es posible, entonces, reconstruir tanto el contenido propagandístico (el objeto del mensaje) como el perfil de su espectador (el receptor del mensaje). En este sentido, la propaganda de Disney es muy interesante porque nos permite comprender también el perfil psicológico del público americano que se expone a estos contenidos con finalidades de consenso.

Ejercicio de análisis

Las situaciones-eje del plano narrativo en The Führer´s Faces son:

(jingle, preparación del interés)

1) inicio: contraposición entre espacio público/espacio privado. Donald duerme, la banda de música nazi irrumpe.

(jingle, pausa mental)

2) vida cotidiana: desayuno, etc.

(música)

3) mundo del trabajo (producción)

(música)

4) conciencia individual, identidad

(música)

6) identidad colectiva (nacional).

Algunas rápidas reflexiones y notas sueltas de un borrador sobre este material. Es interesante notar,  por ejemplo,  que la  estrategia de Walt Disney es asociar principalmente el código del mensaje a dos contenidos mediáticos del Nacionalsocialismo (NS) reconocibles rápidamente por el espectador americano de la época: el saludo NS y la Hakenkreuz, la esvástica. Para el periodo que estamos tratando, la esvástica, a la par de los demás símbolos nacionales, tenía una difusión mediática en América como reconocimiento del país, objeto de la propaganda. Esta estrategia de asociación se realiza icónicamente a través de la máxima generalización de la esvástica en la dimensión social y privada de Donald, sin distinciones, para representar el anulamiento violento de ambas dimensiones: la historia inicia  con el progresivo  anulamiento de la dimensión privada, cuotidiana (dimensión individual, psicológica) y  luego pública (espacio público, político) representado por los exteriores del dormitorio de Donald. El espacio público (la banda de música al inicio) irrumpe arbitrariamente en el espacio privado-individual (Donald duerme y es molestado). Se observe al inicio el fondo del paisaje, detrás de la banda de música, las nubes y los árboles. Esta “totalidad” del símbolo NS  anulará luego la distinción entre público y privado de Donald (ver imagen arriba) a través de la irrupción de la banda de música. Otro detalle interesante se da durante el desayuno de Donald: este debe ocultar su desayuno (dimensión privada) y modificar su conducta, puesto que no es le es permitido por el imperativo político: el café con un aroma artificial, el pan duro, son el resultado como efectos negativos. Es interesante notar cómo el director de Disney escoge la contextualización de momentos típicamente cotidianos para  hacer converger el lenguaje icónico, cromático y sonoro.  En efecto, se puede notar que el desayuno “normal” del personaje Donald  (café, periódico, tranquilidad) se debe esconder detrás de un retrato de Hitler (dimesión política, pública). Finalmente el periódico matutino es remplazado arbitrariamente por el “Mein Kampf”. (continuará).


mardi, 02 février 2010

Fabriquer l'ennemi allemand

Doris NEUJAHR:

 

Fabriquer l’ennemi allemand de l’humanité: propagande alliée pendant et après la première guerre mondiale

 

Le postulat de la “singularité” allemande sert à marquer certains épisodes bien précis de l’histoire germanique; récemment, on le retrouve dans une décision du Tribunal Fédéral Constitutionnel (Bundesverfassungsgericht) concernant le paragraphe 130 du Code pénal. Il a acquis le statut de l’évidence et pourtant… Déjà, immédiatement après la première guerre mondiale, ce postulat avait été bel et bien établi, figé dans ses contours: bon nombre d’horreurs de guerre commises par les Allemands n’existaient en fait que dans la seule propagande alliée puis, graduellement, revêtaient un statut d’évidence, admis par tous. Au niveau de la propagande, l’image du barbare singulier était donc bien assise dans les esprits, comme l’histoire des mains tranchées des garçonnets belges. Mais au niveau politique, elle était également devenue un “topos” incontesté.

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Dans une note du premier Ministre français Georges Clémenceau, datée du 16 juin 1919 et remise à la délégation allemande à Versailles, il est dit, textuellement, que l’Allemagne « a voulu satisfaire sa passion de la tyrannie par la guerre » et que son comportement « constitue le plus grand crime contre l’humanité et contre la liberté des peuples qu’ait jamais commis, en pleine conscience, une nation se prétendant civilisée ». Ce comportement était déclaré « sans exemple dans l’histoire ».

 

Sur le plan philosophique, ce fut notamment l’Américain John Dewey qui contribua à consolider cette image négative de l’Allemagne par un pamphlet germanophobe intitulé « Philosophie allemande et politique allemande ». Dewey fait remonter le mal allemand à Kant et, en terminant son pamphlet, il écrit, le ton menaçant : « En soi et pour soi, l’idée (kantienne) de paix est une idée négative, une idée policière », qui ne connaît aucune limite, ni même une « limite nationale ». Ce pamphlet date de l’année 1915 et a été réédité en 1942, sans aucune modification, avec le simple ajout d’une préface et d’un chapitre consacrés au national-socialisme.

 

Les Allemands reprennent à leur compte la propagande alliée

 

Bien avant sa défaite militaire de la première guerre mondiale, l’Allemagne avait perdu la bataille de la propagande. Le Reich n’a jamais trouvé la parade contre le droit coutumier anglais, contre l’art britannique de maquiller ses intérêts matériels et ses intérêts de puissance impériale sous les oripeaux d’une morale décrétée supérieure et universelle. Cette habitude d’octroyer bonne conscience au désir ardent de faire du profit et de poursuivre des objectifs de puissance, s’enracine dans le puritanisme et est ressenti subjectivement comme « honnête » et « normal ». Comme cette habitude de penser et de ressentir était liée organiquement à une puissance globale, elle est devenue un fait accepté au niveau international.

 

Les hommes politiques et les publicistes allemands ont réagi à cette attitude générale anglaise en niant explicitement tout fondement et toute substance aux justifications morales et en affirmant un réalisme politique, posé, lui, comme dépourvu de toute hypocrisie. Mais, par la suite, personne n’a considéré que cette position allemande était juste et honnête : au contraire, on a dit tout de go que ce réalisme confirmait le droit moral des Britanniques et révélait le non droit allemand. La supériorité géostratégique des Alliés a payé sur le plan de la propagande. Le blocus britannique, destiné à affamer l’Allemagne, s’est montré cruellement efficace, mais s’est déroulé de manière quasi naturelle, sans dramatisation aucune. La guerre sous-marine, qui constitua la riposte allemande, fut amplement dramatisée et chaque torpillage de navire, acte de guerre spectaculaire, fut considéré comme la preuve tangible de la barbarie allemande.

 

hes_watching_you.jpgAprès la seconde guerre mondiale, ces réflexes devinrent habituels : les Allemands reprenaient à leur compte les descriptions inamicales que produisaient les propagandes alliées pour les dénigrer et les stigmatiser. Mais ce n’était pas nouveau. On a connu quelques précédents lors de la première guerre mondiale. Le plus emblématique nous est fourni par le philosophe Ernst Bloch (1885-1977), réformé du service militaire allemand pour raisons de santé ; pour poursuivre ses études, on l’avait même autorisé à séjourner en Suisse. Il y créa un forum sous la forme d’un journal édité à Berne, la « Freie Zeitung », dont le premier numéro sortit de presse le 14 avril 1917, cinq jours après la déclaration de guerre des Etats-Unis au Reich. Cette publication cessa de paraître le 27 mars 1920. On ne sait pas grand chose de son financement. On estime que des sommes d’argent sont venues de France et des Etats-Unis. Parmi les collaborateurs de ce journal, dont les noms sont encore connus aujourd’hui, nous retrouvons Kurt Eisner, futur premier ministre bavarois, le publiciste Maximilian Harden et Carl von Ossietzky, futur éditeur de « Weltbühne ».

 

Pour Ernst Bloch, alors âgé de 32 ans, il était clair qu’après l’entrée en guerre des Etats-Unis, l’Allemagne ne pouvait plus gagner la partie. Le maximum qu’elle pouvait escompter, c’était une paix avec pertes territoriales et économiques « supportables ». Toutefois, il acceptait le projet de Clémenceau de poursuivre la guerre à outrance jusqu’à la défaite définitive de l’Allemagne, contrairement à l’avis émis par le pacifiste Helmut von Quidde, qui demandait une paix honorable basée sur l’entente et le compromis entre les parties. Comment Bloch justifiait-il sa position ? Parce que, affirmait-il dans les colonnes de son journal, l’Allemagne était « le pays, où la guerre avait été érigée en principe nécessaire et constitutif de l’Etat, et où cet état de chose demeurerait [si on n’y portait remède]». Pour Bloch, l’Empire allemand, et surtout sa composante prussienne, n’incarnaient pas des systèmes simplement critiquables mais étaient bel et bien l’incarnation du « mal en soi ». Il y régnait, disait-il, l’infamie, l’immoralité, le machiavélisme sans scrupules, le mensonge sans limite et l’opportunisme.

 

Bloch hissait au rang d’axiome intangible la « vérité » d’une culpabilité exclusive de l’Allemagne dans le déclenchement des hostilités et dans les crimes de guerre. « Les Allemands ont commis des crimes abominables. Les autres se sont défendus. Ils se sont défendus par nécessité ». La guerre des Alliés avait pour but d’affronter « la substance générée par toutes les années criminelles de l’Allemagne et de la Prusse », cause de la guerre : elle affrontait dès lors un « mal radical ».

 

Il faut placer l’Allemagne devant un « parlement mondial et moral »

 

Si les Allemands se montraient incapables de faire leur devoir, c’est-à-dire d’abattre par eux-mêmes le régime impérial, alors il fallait bien que leurs ennemis prennent cette tâche nécessaire en charge. En janvier 1918, Bloch critique le Président américain Woodrow Wilson, lorsque celui-ci suggéra de faire la différence entre les diverses factions politiques allemandes afin d’aboutir éventuellement à des négociations de paix. L’Allemagne, prétendait Bloch, « n’est rien d’autre d’un seul et unique camp militaire (…), une nation égocentrique, agitée par la fringale de puissance la plus brutale et la plus élémentaire qui soit ». Il ajoutait : « les nuances qui peuvent exister entre Hindenburg et le social-démocrate Scheidemann sont tout au plus de nature ‘tactique’ ». L’alternative à la défaite allemande ne serait rien d’autre qu’une « défaite de l’humanité », entrainant une « dépression générale de celle-ci ».

 

De « ce mal radical des puissances centrales, de ce mal purement élémentaire qu’est ce matérialisme de puissance, étranger au christianisme », l’ensemble du peuple allemand est partie prenante, car « il s’est tu, et même, il a acclamé pendant quatre longues années les actes les plus honteux et les plus diaboliques de son gouvernement ». L’Allemagne, posée ainsi comme « ennemie de l’humanité », devait être traduite devant un « parlement mondial aux effectifs complets et aux objectifs moralisants », où le seul « droit principal et décisif de tout Allemand aurait été de manifester son repentir et de ressentir sa culpabilité ». La culpabilité allemande dans le déclenchement de la guerre n’avait pas à être prouvée au départ de faits avérés mais devant surtout recevoir une interprétation morale. Pour Bloch, il y avait profondément ancrée en chaque Allemand une virulente propension à la destruction.

 

Bloch concédait certes qu’il y avait de multiples causes à la guerre, des causes économiques, diplomatiques, politiques et « relevant de l’humain en général, vu que toute cette époque s’était éloignée de Dieu ». Cependant, ce faisceau de causes variées ne « devait nullement dispenser tout spécialement et tout particulièrement l’homme allemand et l’ensemble du peuple allemand de s’interroger sur la responsabilité de cette guerre ».

 

Ses espoirs en l’avenir, Bloch les plaçaient alors dans les Etats-Unis d’Amérique, dirigés par le Président Woodrow Wilson, et dans la Russie. Ces deux Etats constituent, ensemble, « la nouvelle masse intellectuelle de l’avenir » et représentent la « nouvelle universalité intellectuelle de la communauté humaine ». Une « nouvelle mystique de la fraternité et de la communion des hommes jaillit de la jeunesse ouverte de l’Amérique et de la chaleur humaine russe, une mystique toute de profondeur et d’espoir christique ; depuis la fraicheur aurorale de ces deux empires, le Bien radical illumine le monde ».

 

bloch.jpgA cette toute-puissance, désormais partout perceptible, l’Allemand doit se soumettre car il n’a pas d’autre alternative. Bloch louait les initiatives du nouveau premier ministre bavarois Kurt Eisner, qui, le 25 novembre 1918, avait fait publier unilatéralement des documents issus du ministère bavarois des affaires étrangères, pour attester de la responsabilité allemande dans le déclenchement de la guerre : c’était, aux yeux de Bloch, un « acte moral » et une tentative « d’apporter enfin une flamme éthique incandescente et de provoquer une rénovation fondamentale du peuple dans cette Allemagne pourrie ». Mais tout cela ne suffisait pas ; il ne fallait pas seulement des actions politiques démonstratives. « Par le repentir, c’est-à-dire en vivant intérieurement la culpabilité allemande, en se sentent humblement coresponsable de l’injustice commise, en inversant les voies jadis empruntées, en changeant les prémisses intérieures qui avaient conduit les Allemands à prendre l’initiative de déclencher les hostilités, chacun, individuellement, dans l’Allemagne prussienne (…) doit s’engager dans cette voie ». La culpabilité allemande relève « d’une substance psycho-éthique », à laquelle seul le repentir peut mettre un terme, car il rejetterait « l’acte et ses racines, les extirperait du centre vital même de la personne, des sentiments communs ». Dans ces phrases, tout est déjà esquissé, tout ce que Karl Jaspers a expliqué en détail dans son écrit de 1945/46, « Die Schuldfrage » (« La question de la culpabilité »). On peut évidemment rétorquer que Bloch a exagéré mais qu’il a tout de même repéré une vérité intérieure, qui s’est révélée en 1945.

 

C’est aussi l’argumentation choisie par l’historien Jörg Später qui, à la fin de la monographie qu’il consacre à Robert Vansittart et où il évoque les tirades germanophobes de l’homme politique britannique, écrit : « L’opinion qu’il avait des Allemands est devenue idée générale parce que le monde objectif s’est rapproché de l’image, celle que la folie persécutrice a esquissé au départ de ce monde». Cela sonne comme une brillante réflexion mais ce n’est qu’une dialectique fort superficielle, car les actions des Allemands y sont expliquées comme issues d’un esprit immanent, qui ne s’auto-réalise que dans le crime, alors que tout raisonnement cohérent se devrait de relier esprit et actions de manière dialectique dans le contexte international.

 

Carl Schmitt a écrit en 1948, en évoquant les crimes commis lors des révolutions et en abordant la thématique des « crimes contre l’humanité » : « Ce sont des crimes d’opinion venu du côté négatif. Ils devaient immanquablement survenir, par nécessité dialectique, après que, par humanisme, on ait découvert les crimes d’opinion commis par la bonne opinion. En d’autres termes, ce sont des actions nées d’opinions misanthropes, c’est-à-dire c’est tout ce que fait celui qui a été déclaré ennemi de l’humanité ».

 

L’Allemagne a donc été déclarée ennemie de l’humanité bien avant la prise de pouvoir par les nationaux-socialistes. Pour les historiens, ce devrait être captivant de chercher à savoir si, par là même, une situation a été favorisée et dans quelle mesure et si cette situation a conduit à commettre des crimes du type de ceux que l’on a attribué faussement à l’Allemagne lors de la première guerre mondiale. Sur le plan scientifique, ce serait plus fécond que de s’accrocher au vieux postulat de la singularité.

 

Doris NEUJAHR.

(article paru dans « Junge Freiheit », Berlin, n°2/2010).

 

 

samedi, 12 décembre 2009

Les principes élémentaires de la propagande de guerre

anne_morelli_(600_x_600).jpgSYNERGIES EUROPEENNES - Ecole des cadres/Wallonie

Section de Liège

 

Rapport de réunion mensuel : Dimanche 17.11.2002.

 

Objet : MORELLI (Anne), Principes élémentaires de propagande de guerre.- Bruxelles, Editions Labor, 2001.

 

Les principes élémentaires de la propagande de guerre

 

 

 

Intérêt de l’ouvrage ?

 

Une nouvelle fois, c’est un ouvrage rédigé par un auteur d’extrême gauche qui monopolise notre attention.  Anne Morelli est professeur à l’Université Libre de Bruxelles où elle est notamment à la tête de la chaire de critique historique ; elle est également spécialiste en histoire des religions.   Elle est proche du P.T.B. (Parti des Travailleurs de Belgique) à l’idéologie communiste et « immigrophile » ouvertement revendiquée.  Anne Morelli est ainsi l’auteur de toute une série d’ouvrages historiques louant les bienfaits de l’immigration en Belgique.  Nous connaissions déjà au sein de cette mouvance les ouvrages (Monopoly, Poker Menteur…) du journaliste Michel Collon critiquant avec virulence la superpuissance américaine, ouvrages dans lesquels cette autre figure de proue du P.T.B. dénonce avec brio la désinformation opérée par les médias occidentaux inféodés aux agences de presse américaines lors de la guerre du Golfe ou du Kosovo.  Principes élémentaires de propagande de guerre appartient indéniablement à la même veine et constitue un ouvrage didactique intéressant pour se familiariser avec les techniques de propagande utilisées « en cas de guerre froide, chaude ou tiède » comme le suggère le sous-titre en page de couverture.  Anne Morelli utilise des exemples historiques bien connus pour illustrer chacun de ces principes et laisse la porte ouverte pour l’avenir ; car en effet tout l’intérêt de l’ouvrage réside dans le fait que, désormais, le lecteur averti pourra reconnaître au cours des guerres futures, les mécanismes de désinformation utilisés par les Etats pour manipuler l’opinion publique.  Nous invitons d’ailleurs nos cadres à procéder au petit jeu consistant à détecter ces grands principes dans nos informations quotidiennes.  Une fois entraînés, vous verrez, vous citerez le numéro du principe sans même avoir besoin de l’expliquer.  Tiens, Bush a encore utilisé le principe n°8…  Une bonne manière à notre sens de filtrer l’information !

 

Genèse de l’ouvrage.   

 

En réalité, Anne Morelli ne revendique pas la paternité de la dénonciation des dix principes évoqués dans son livre.  L’essentiel de sa réflexion, elle le doit à l’ouvrage du pacifiste anglais Arthur Ponsonby publié à Londres en 1928 et intitulé Falsehood in Wartime.   L’ouvrage a été traduit en français sous le titre Les faussaires à l’œuvre en temps de guerre.  Comme il dénonçait principalement les fausses informations produites par les alliés durant la guerre 14-18, le livre n’était pas pour déplaire aux Allemands et la traduction française est parue à Bruxelles en 1941, ce qui a longtemps conféré à l’œuvre une réputation d’ouvrage de collaboration.  Ce livre contestataire par rapport à la version officielle de la guerre 14-18 s’inscrit en réalité dans un mouvement pacifiste qui a gagné toute l’Europe durant l’entre-deux-guerres.  Nous sommes effectivement à l’époque de la Société des Nations ou encore du Pacte Briand-Kellog condamnant le recours à la force en cas de conflit.  Ainsi, quelques auteurs se risquent à remettre en question le récit mythologique construit autour de la Première guerre mondiale par les Alliés.  Lord Ponsonby fait partie de ces auteurs contestataires mais signalons également l’ouvrage célèbre de Jean Norton Cru analysant de manière très critique les témoignages des poilus de la Grande Guerre[1] et le livre de Georges Demartial édité en 1922, intitulé La guerre de 1914.  Comment on mobilisa les consciences.

 

Principales idées dégagées par Anne Morelli.

 

L’ouvrage d’Anne Morelli est divisé en dix parties, chacune développant un principe de propagande de guerre.  Notre réunion s’est organisée autour de cette structure.  Xavier a reformulé chacun des principes en les ponctuant d’exemples.  Chaque personne participant à la réunion a été invitée à donner son avis ou des exemples personnels de manipulation médiatique.

 

1. Nous ne voulons pas la guerre.

 

Il est évident que dans notre société aux valeurs pacifistes, il n’est pas très populaire de se déclarer ouvertement en faveur de la guerre.  Anne Morelli remarque avec raison qu’à la veille de chaque conflit, tous les dirigeants se prononcent en faveur de la paix pour rassurer leur opinion publique ; si par malheur ces derniers décident  quand même de faire la guerre, ils déclarent généralement qu’ils la feront « contraints et forcés » par les circonstances.  De plus, il est important de noter qu’au sein de l’historiographie postérieure à chaque conflit, c’est toujours le vainqueur qui impose sa propre vision de la guerre au vaincu.  La production historique du vainqueur devient alors dominante et colle une étiquette belliciste sur le camp du vaincu.  Les deux guerres mondiales ont à ce titre toujours été présentées dans notre historiographie comme ayant été désirées ardemment par le Reich, les Alliés n’ayant fait que se défendre face au « bellicisme allemand ». Ainsi, dans le récit de la Première guerre mondiale, on insiste par exemple rarement  sur le fait que la mobilisation allemande était en partie provoquée par la mobilisation russe et l’étau géopolitique que constituaient alors les puissances de l’Entente.  De même, lorsqu’on évoque la Guerre 40-45, il n’est pas si inutile de rappeler au néophyte que c’est la France qui, la première, a déclaré la guerre à l’Allemagne en 1939 et non l’inverse, tant l’image populaire de la terrifiante Allemagne nazie la rend à priori totalement responsable du second conflit mondial !  Ce principe est aisément transposable à l’actualité la plus récente.  Lorsque les Etats-Unis désignent des pays tels l’Irak ou la Corée du Nord comme faisant partie de l’ « Axe du Mal », ils justifient à l’avance que les futures guerres projetées par le Pentagone se feront à l’encontre de pays bellicistes  menaçant la paix mondiale : les Etats-Unis ne veulent donc pas la guerre mais se battront s’il le faut pour « imposer la paix »… cherchez le paradoxe !

 

greuelprop3.jpg2. Le camp adverse est seul responsable de la guerre.

 

Ce principe est évidemment lié au premier.  Si nous ne voulons pas ou n’avons pas voulu la guerre, c’est qu’il faut imputer à l’ennemi la responsabilité entière de toutes les atrocités qui caractérisent un conflit.  Anne Morelli cite à ce titre toute la propagande faite en 14-18 autour de la violation de la neutralité de la Poor little Belgium par l’ « Ogre Allemand ».  La violation du traité des XXIV articles de 1839 par l’Allemagne l’a condamné à être désignée par les Alliés comme la nation parjure par excellence, responsable du conflit car non respectueuse des traités internationaux.  Par opposition, l’Angleterre a été présentée à l’opinion publique des pays alliés comme une nation fidèle et honorable volant au secours de la Belgique.  Cette basse propagande constituant à responsabiliser l’Allemagne et son « plan Schlieffen » est facilement démontable lorsqu’on sait que le « plan XVII » du Général Joffre avait prévu une pénétration des troupes françaises sur le territoire belge en violation flagrante du Traité de 1839 qui importait peu à l’époque aux puissances belligérantes, plus soucieuses d’un côté comme de l’autre de s’assurer un avantage stratégique sur l’armée ennemie au début de la guerre de mouvement.  Les Anglais eux-mêmes avaient cherché à se concilier les faveurs de la Belgique avant le déclenchement du conflit pour obtenir l’autorisation d’un « débarquement préventif » sur notre territoire en cas de mouvement des troupes allemandes.  Aux yeux des Anglais, le respect de la parole donnée comptait finalement fort peu et c’est surtout la nécessité de conserver la Belgique, « pistolet pointé vers l’Angleterre », et plus particulièrement le port d’Anvers hors d’atteinte de l’armée allemande qui a justifié l’entrée en guerre des troupes de Sa Majesté.   Anne Morelli rappelle aussi que rien n’obligeait la France à soutenir la Tchécoslovaquie en 1939 : le pacte franco-tchécoslovaque ne prévoyait pas forcément d’engagement militaire français en cas d’invasion du territoire tchécoslovaque ; ce pacte était d’ailleurs lié à celui de Locarno de 1925 rendu caduc depuis qu’il avait été dénoncé par plusieurs des puissances signataires.  Le soutien nécessaire de la France à la Tchécoslovaquie a pourtant servi de prétexte (à postériori) à l’époque pour justifier auprès de l’opinion publique française l’entrée en guerre de l’Hexagone.

 

A nouveau il est intéressant de faire un parallèle avec les événements les plus récents.  Lors de la guerre du Kosovo, lorsque la France et l’Allemagne, de concert avec les Etats-Unis, « ont négocié » avec Milosevic le traité de Rambouillet, sensé être un plan de « conciliation », les médias occidentaux ont sauté sur le refus du dirigeant serbe pour justifier les frappes de l’OTAN.  Peu de journalistes ont pris la peine de noter que ce fameux plan de « conciliation » réclamait, en vue d’un soi-disant règlement pacifique du conflit, la présence sur le sol serbe des forces de l’Alliance Atlantique (et non des Nations Unies), ce qui aurait constitué pour la Serbie une atteinte grave à sa souveraineté.  Mais l’occasion était trop belle dans le « camp de la paix » de faire passer Milosevic pour le « seul responsable » des bombardements de l’OTAN.

 

3. L’ennemi a le visage du diable (ou « L’affreux de service »).

 

Il est généralement assez difficile de haïr un peuple dans sa globalité.  Quoique la nation allemande ait eu à souffrir au cours du XXe siècle des pires adjectifs de la part de l’opinion publique française, belge, anglaise ou américaine (Boches, Vandales, Huns, Barbares, etc.), les esprits les plus lucides étaient cependant obligés d’admettre que la démarche intellectuelle consistant à identifier l’ensemble d’une population à de simples stéréotypes était parfaitement idiote.  C’est pourquoi la propagande de guerre a trouvé un subterfuge pour mobiliser la haine des plus récalcitrants.  Elle canalise généralement toute l’attention de l’opinion publique sur l’élite dirigeante de l’ennemi.  Celle-ci est présentée d’une telle façon que l’on ne peut éprouver à son égard que le mépris le plus profond.  La presse à sensation n’hésite d’ailleurs pas à rentrer dans l’intimité des dirigeants, usant parfois de théories psychanalytiques fumeuses.  Lors de la guerre du Kosovo, certains médias ont ainsi affirmer que si Milosevic était un va-t-en-guerre invétéré, c’est parce qu’il avait été battu par son père durant sa prime enfance.  La plupart du temps, les dirigeants ennemis sont jugés parfaitement fréquentables avant le déclenchement des hostilités puis ils deviennent subitement des brutes, des fous, des monstres sanguinaires assoiffés de sang dès que le premier coup de fusil a éclaté.  Avant que la Première Guerre mondiale n’éclate, Guillaume II et l’Empereur François-Joseph entretenaient des relations régulières avec la famille royale belge ; à partir d’août 1914, la presse belge n’a cessé de les décrire comme des fous sanguinaires tout en se gardant bien de rappeler leurs anciens contacts avec nos souverains . 

 

Mais Hitler est sans nul doute le personnage qui aura le plus abondamment subi l’ire et  l’acharnement de l’historiographie contemporaine.  Il ne se passe pas un mois sans qu’une nouvelle biographie sur Hitler ne soit exposée sur les rayons « les plus sérieux » de nos libraires.  Chacune a de nouvelles révélations à faire sur « le plus grand monstre de l’histoire », révélations toujours plus débiles les unes que les autres : le führer aurait eu des relations incestueuses avec sa mère à moins qu’il n’ait été homosexuel, juif, impuissant… ou même frustré de n’avoir pu réussir une carrière d’artiste peintre.  Vous n’y êtes pas du tout, Hitler était un extraterrestre !

 

Il est d’ailleurs significatif que depuis la guerre 40-45, de nombreux « dictateurs » aient été présentés par la presse sous les traits de tonton Adolphe.  Anne Morelli met bien en évidence cette « reductio ad Hitlerum » et cite notamment le cas de Saddam Hussein dont les moustaches ont été remodelées durant la guerre du Golfe par quelques ignobles feuilles de chou anglo-saxonnes.  Rappelons nous aussi le nom de Milosevic « subtilement » transformé en « Hitlerosevic ».  La méthode de personnalisation est à ce point ancrée que les manifestants anti-guerre du Golfe attaquent la politique américaine sous les traits de son seul président Georges W. Bush et n’ont pas hésité à l’affubler d’une certaine petite moustache sur leurs calicots ou ont remplacé les étoiles du drapeau américain par la croix gammée.  Ce processus de personnification de l’ennemi sous les traits du démon et la canalisation de la haine publique ne sont pas sans rappeler la « minute de la haine » décrite par G. Orwell dans son roman 1984.[2] 

 

4. C’est une cause noble que nous défendons et non des intérêts particuliers.

 

            L’histoire est là pour nous montrer que toute guerre répond à des intérêts politiques bien précis : gain de territoire, affaiblissement du potentiel militaire, économique ou démographique de l’ennemi, contrôle d’une région stratégique-clef, etc.  Considérer la guerre en ses termes constitue d’ailleurs un principe sain d’analyse des conflits.  Au contraire, entacher la guerre de slogans idéologiques revient à dénaturer l’essence première des guerres.  Un des arguments récurrents de la propagande de guerre à notre époque est la défense des droits de l’homme et de la démocratie, véritable religion laïque justifiant à elle seule tous les conflits.  Ainsi, alors que le prétexte premier de la deuxième guerre du Golfe était la menace représentée par les soi-disant armes de destruction massive iraquiennes.  Ne découvrant malheureusement pas la moindre trace de ces armes sur le territoire iraquien, les responsables de la coalition, relayés docilement par les médias, ont subitement transformé leurs objectifs en « rétablissement de la démocratie » en Irak.  Comme on avait invoqué les noms saints de « démocratie », de « liberté » et de « droits de l’homme », la critique s’est tue car qui pourrait-être contre ?

 

5. L’ennemi provoque sciemment des atrocités ; si nous commettons des bavures, c’est involontairement.

 

            L’histoire du XXe siècle est riche en faits propres à illustrer cette maxime.  Durant la Première Guerre mondiale, selon la propagande alliée, ce sont surtout les Allemands qui ont provoqué le plus grand nombre d’atrocités.  On accusait par exemple de nombreux soldats de l’armée allemande de couper les mains des jeunes enfants belges, d’utiliser la graisse des cadavres alliés pour fabriquer du savon ou encore de rudoyer et de violer systématiquement les jeunes femmes des pays occupés.  Par contre cette même propagande passe fatalement sous silence le blocus alimentaire meurtrier de l’Allemagne pendant et après la guerre 14-18[3], elle passe sous silence les bombardements de terreur des anglo-saxons sur les villes allemandes et japonaises en 40-45.  La terreur vis-à-vis des civils était d’ailleurs un des moyens clairement revendiqués et assumés par le Haut Etat Major allié ; en témoigne ce tract lancé sur les villes japonaises par les bombardiers américains en août 45 : « Ces tracts sont lancés pour vous notifier que votre ville fait partie d’une liste de villes qui seront détruites par notre puissante armée de l’air.  Le bombardement débutera dans 72 heures. (…) Nous notifions ceci à la clique militaire [diabolisation de l’ennemi] parce que nous savons qu’elle ne peut rien faire pour arrêter notre puissance considérable ni notre détermination inébranlable.  Nous voulons que vous constatiez combien vos militaires sont impuissants à vous protéger.  Nous détruirons systématiquement vos villes, les unes après les autres, tant que vous suivrez aveuglément vos dirigeants militaires… »[4]  Si la légende des mains coupées trouvait un écho certain durant l’entre-deux-guerres, elle a perdu à l’heure actuelle tout son crédit, tant elle était dénuée de fondements.  Cependant, plus insidieuses sont les idées patiemment distillées à la population consistant à assimiler le soldat « au casque à pointe » à une brute épaisse où à criminaliser les armes allemandes « non conformes » aux lois de la guerre, tels les sous-marins, les V.1 et les V.2.  Ces idées restent très solidement ancrées dans la mémoire populaire et il faudrait une propagande tout aussi acharnée que celle qui a contribué à les installer, pour pouvoir les supprimer.

 

6. L’ennemi utilise des armes non autorisées.

 

« De la massue à la bombe atomique, en passant par le canon et le fusil automatique, toutes les armes ont été successivement considérées par les perdants comme indignes d’une guerre vraiment chevaleresque, parce que leur usage unilatéral condamnait automatiquement leur camp à la défaite. »[5]  Anne Morelli signale la propagande faite autour de l’emploi des gaz asphyxiants par l’armée allemande et l’utilisation des armes citées ci-dessus.  A l’heure actuelle, on se focalise surtout sur la détention des armes de destruction massive dont il n’est même plus nécessaire de faire usage pour être un criminel de guerre et un ennemi de l’humanité.  La seconde guerre du Golfe a montré qu’il s’agissait d’un prétexte rêvé pour justifier l’impérialisme américain.  Il est d’ailleurs piquant de constater que, si nos souvenirs sont exacts, la seule puissance qui ait fait usage, et d’ailleurs contre des civils, de telles armes est celle qui les dénonce avec le plus de virulence aujourd’hui.  Certains rétorqueront qu’une puissance belliqueuse telle l’Irak est une menace bien plus sérieuse que des régimes aussi pacifiques que ceux des Etats-Unis d’Amérique et d’Israël, ce qui ne manque pas de prêter à sourire.

 

7. Nous subissons très peu de pertes, les pertes de l’ennemi sont énormes.

 

 

Il n’est pas nécessaire d’expliquer en quoi il est utile d’affirmer que les pertes de l’ennemi sont énormes tandis que les nôtres sont  négligeables.  Si les pertes de l’ennemi sont énormes, sa défaite est certaine et comme nos pertes à nous sont faibles, cela justifie auprès de la population et des troupes, un dernier effort de guerre pour remporter une victoire définitive.  « La guerre de 1914-1918 a -déjà- été une guerre de communiqués ou parfois d’absence de communiqués.  Ainsi, un mois après le début des opérations, les pertes françaises s’élevaient déjà à 313.000 tués environ.  Mais l’Etat-Major français n’a jamais avoué la perte d’un cheval et ne publiait pas (au contraire des Anglais et des Allemands) la liste nominative des morts.  Sans doute pour ne pas saper le moral des troupes et de l’arrière que l’annonce de cette hécatombe aurait peut-être induit à réclamer une paix honorable plutôt que la poursuite de la guerre. »[6]  Plus près de nous, lors de la guerre du Kosovo, les pertes que les Américains se targuaient d’avoir infligé aux Yougoslaves, fondirent comme neige au soleil après le conflit.  Dans la récente guerre en Irak, même s’il faut reconnaître à la supériorité technologique américaine le fait que la superpuissance ne compte pas énormément de morts dans ses rangs, les chiffres annoncés officiellement sont tellement peu élevés qu’ils en deviennent suspects.

 

8. Les artistes et les intellectuels soutiennent notre cause.

 

Dans l’histoire du second conflit mondial, on nous présente toujours la classe intellectuelle comme ralliée à la cause des Alliés.  D’ailleurs, il est de notoriété publique[7] qu’il n’y avait pas d’intellectuels nazis ou fascistes et que ceux qui se présentaient comme tels n’étaient que des médiocres et des imposteurs achetés ou vendus au pouvoir.  Cette vision de l’ennemi justifie la victoire morale et intellectuelle de « La Civilisation » contre ce camp de barbares incultes et primitifs.  Le plus grave avec ces procédés est que la culture de l’ennemi est diabolisée.  Dans le cas allemand, nombreux sont les intellectuels bien pensant d’après guerre qui ont démontré « savamment » que le nazisme était consubstantiel à la culture allemande et que Nietzsche, Wagner et bien d’autres étaient responsables de la barbarie nazie qu’ils avaient préfigurée. Cette vision justifie à l’égard de l’Allemagne toutes les atrocités puisqu’en regard du droit international, elle n’est plus un justus hostis mais un injustus hostis.  Anne Morelli montre que les intellectuels font des pétitions en faveur de leur camp ou contre l’ennemi, que les artistes participent à la propagande en caricaturant ou stéréotypant l’adversaire.  Ceux qui ne participeraient pas à ces pétitions verraient leur notoriété médiatiquement mise à mal et pour éviter ce sort pénible, ils s’alignent sur la position dominante.  Car, il faut le remarquer, les « intellectuels » font souvent preuve d’une lâcheté à la hauteur de leur orgueil et inversement proportionnelle à leur courage physique légendaire.  Anne Morelli se garde bien de mettre en lumière à quel point le rôle des intellectuels dépasse ce simple aspect pétitionnaire et mobilisateur pour investir le champ de la justification intellectuelle, morale et philosophique de la guerre en cours ou de celles à venir.  Ainsi Bernard Henri Lévy et consorts ont tricoté le cache-sexe humanitaire de l’impérialisme le plus abject sous la forme du droit d’ingérence.

 

9. Notre cause a un caractère sacré.

 

Anne Morelli dénonce dans son ouvrage les liens de la propagande de guerre avec la religion.  Si nous sommes d’accord pour la suivre dans sa condamnation de l’instrumentalisation de la religion par les propagandistes des Etats belligérants, nous nous garderons bien toutefois de jeter le bébé, c’est-à-dire la religion, avec l’eau du bain.  Si dans les démocraties de marché, il n’y a guère plus que les Etats-Unis pour encore invoquer la religion dans leur propagande guerrière, les autres Etats ont trouvé dans les droits de l’homme, la démocratie et leur sainte trinité « liberté, égalité, fraternité », la nouvelle religion bien terrestre permettant de sacraliser toutes les manœuvres perfides de leur politique extérieure. 

 

10. Ceux qui mettent en doute la propagande sont des traîtres.

 

            Un article de l’Evenement (29 avril-5 mai 1999) paru durant la guerre du Kosovo, illustre à merveille ce principe.  Nous pouvons y lire en gros titre : Soljenitsyne, Marie-France Garaud, Max Gallo, Peter Handke : ils ont choisi de brandir l’étendard grand-serbe. LES COMPLICES DE MILOSEVIC.  L’hebdomadaire a classé tous les « partisans de Milosevic », entendez ceux qui ont choisi de critiquer plus ou moins ouvertement la propagande anti-serbe, en six grandes familles : La famille « anti-américaine » (Pierre Bourdieu), la famille « pacifiste intégriste » (Renaud), la famille « souverainiste » (Charles Pasqua), la famille « serbophile » (Peter Handke), la famille « rouge-brun » (Le journal La Grosse Bertha) et la famille « croisade orthodoxe » (Alexandre Soljenitsyne).  Tous les intellectuels qui se sont positionnés au sein d’une de ses grandes familles ou derrière un de leurs patriarches sont par conséquent considérés comme des traîtres et des imbéciles parce qu’ils n’ont pas compris le caractère hautement humanitaire de l’intervention otanienne.[8]  On remarquera au passage l’orgueil démesuré de ce genre d’article brandissant la bannière du « politiquement correct » pour mieux mépriser ses contradicteurs.  Anne Morelli met bien lumière ce dixième principe ; elle ne se limite pas aux guerres passées mais n’hésite pas à rentrer dans le vif du sujet en dénonçant la propagande durant la guerre du Kosovo ou durant la Première guerre du Golfe.  Anne Morelli reconnaît ouvertement que la propagande n’est pas le propre des régimes nazis ou fascistes mais qu’elle affecte aussi nos régimes démocratiques.  Dans une de ses notes, elle fustige d’ailleurs l’historienne de l’U.C.L., Laurence Van Ypersele, pour ses propos tenus dans la revue de Louvain n° 107 (avril 2000) affirmant que ce sont « les régimes totalitaires qui sont passés maîtres dans la falsification de l’histoire par l’image (…)  L’avantage des démocraties est de n’avoir jamais eu le monopole absolu sur la production et la diffusion des images (…)  Cette production (…) émanait de plusieurs centres parfois contradictoires, laissant la place à des contre-discours possibles. »  Selon Anne Morelli, ces propositions sont « fausses au moins en temps de guerre. »[9] 

 

Cette dernière remarque de Anne Morelli montre une certaine forme d’indépendance d’esprit, se complaisant toutefois dans les carcans idéologiques imposés par le système.  Madame Morelli peut se permettre de critiquer la propagande présente dans les régimes démocratiques en se référant à des auteurs de gauche ou d’extrême gauche, elle n’en risque pas pour autant sa place à l’Université Libre de Bruxelles en tant que titulaire de la chaire de critique historique.  Mais, si elle allait plus en avant dans sa critique, le recteur de cette université « libre » ne manquerait pas de la rappeler à l’ordre et sans doute sentirait-elle alors peser sur ses épaules tout le poids du totalitarisme démocratique.  Il est finalement très facile et peu risqué de dénoncer les carences de la démocratie en temps de guerre, il est par contre très dangereux et interdit d’affirmer à quel point la démocratie est en réalité, autant en temps de guerre qu’en temps de paix, un système totalitaire à la fois plus subtil et plus achevé que ceux habituellement cités.  Un système plus subtil et plus achevé car il diffuse son idéologie dans l’esprit des gens sans que ceux-ci en aient conscience.  Alors que dans un régime totalitaire comme l’U.R.S.S. l’ensemble du peuple n’ignorait pas les moyens mis en œuvre par l’Etat pour le manipuler : un parti unique, une presse unique… la démocratie sous couvert du multipartisme et de la liberté de la presse n’en fonctionne pas moins selon les mêmes principes.  La prétendue pluralité des partis n’est qu’un vernis superficiel recouvrant une même foi en la « sainte démocratie » qu’il serait vain de vouloir remettre en question.  Quant à la diversité de l’information tant vantée pour distinguer nos régimes des régimes totalitaires, il devient patent aux yeux d’un nombre sans cesse croissant d’analystes médiatiques qu’il s’agit tout au plus d’un slogan destiné à maintenir les gens dans l’illusion de la liberté de pensée.  Le système est à ce point fermé que la seule critique possible à l’égard des principes gouvernementaux qui nous dirigent est en réalité une critique « guimauve » du type : nos gouvernements nous manipulent et ne respectent pas assez les règles de la démocratie.  Entendez : vous avez le droit de critiquer le système mais pas en dehors des règles imposées par celui-ci, vous pouvez sermonner la démocratie mais vous ne pouvez le faire qu’au nom des principes démocratiques, il est permis de contester la démocratie pour l’améliorer mais non pour en critiquer l’essence.  Nous sommes sûrs qu’un Staline n’aurait finalement pas trop dédaigné un pareil système.  Il aurait créé à côté du Parti communiste et de la Pravda quelques autres partis et journaux.  Les lecteurs russes auraient ainsi eu le choix entre l’idéologie marxiste, marxiste-léniniste, stalinienne, trotskiste ou encore plus tard maoïste.  Ces différences idéologiques minimes permettant au peuple russe de s’illusionner sur sa liberté de penser.  Sans doute Staline aurait-il d’ailleurs préféré le totalitarisme mou incarné par nos démocraties modernes au totalitarisme trop fermé qu’il a choisi de soutenir à l’époque.  Un tel choix lui aurait ainsi évité de dépenser inutilement l’argent de l’Etat dans la répression idéologique et les déportations en Sibérie. 

 

C’est pourquoi, dans le contexte des régimes démocratiques, ce dixième principe devrait à notre sens être complété.  Les intellectuels qui critiquent la propagande officielle, pendant la guerre mais aussi en dehors, sont non seulement des traîtres mais aussi des fous, des égarés à la pensée irrationnelle, des idiots…bref ce ne sont pas des intellectuels ! La démocratie se présentant comme un régime où la pensée s’exerce librement, ceux qui s’égarent de la ligne officielle ne pensent pas vraiment !

 

card6.jpgConclusion.

 

Nous considérons ce livre comme un ouvrage pratique, distrayant, un classique du genre qui a sa place dans toute bonne bibliothèque s’intéressant à la propagande.  Toutefois cette analyse sommaire de la propagande est selon nous elle-même vérolée par le virus démocratique.  Anne Morelli a effectivement passé sous silence une des questions les plus élémentaires concernant la propagande de guerre : « Quelle est l’origine, la cause rendant nécessaire un tel phénomène ? »  D’aucuns affirmeront que la propagande de guerre a existé de tout temps.  Certes, nous leur répondrons toutefois : jamais avec une telle ampleur qu’au cours de ces deux derniers siècles.  Avant 1789, un noble, un guerrier, un mercenaire n’avait pas spécifiquement besoin de véritables « raisons » pour se battre, il le faisait soit par allégeance, soit par intérêt calculé, mais rarement par passion ou sentimentalisme.  Par contre, le peuple, lorsqu’il combat, a besoin de moteurs beaucoup plus puissants.  Pourquoi ?  Parce que le peuple répugne à la fois à s’exposer à la mort et à user de la violence.  Il lui faut donc une raison personnelle : la haine ; alors que les guerriers, élevés dans l’esprit du combat, non nullement besoin de personnifier ainsi la guerre.  Pour lever les réticences de la population, il faut agir sur ses sentiments et provoquer en elle une pulsion de meurtre qui justifie son engagement sous les drapeaux.  L’ennemi devient par conséquent un ennemi absolu, l’incarnation du mal avec laquelle nulle trêve, négociation ou paix n’est désormais possible.  Parmi les moteurs puissants mettant le peuple en mouvement, citons la religion[10] et surtout les idéologies ; ces dernières ont été le moteur réel des guerres et des massacres au cours de « la soi-disant période de progrès que l’humanité a connue depuis qu’elle a été libérée du joug des monarques absolus » : nationalisme français (« Aux armes citoyens ! »[11] ), communisme (« Prolétaires de tous les pays, unissez vous ! »), fascisme (« Tout pour l’Etat, tout par l’Etat »), etc.  Tout chef de guerre sait à quel point le patriotisme et le nationalisme sont des moteurs importants pour maintenir la cohésion des troupes et chacun des grands conflits de ces deux derniers siècles nous donne des renseignements précieux sur la manière dont les dirigeants ont procédé pour « mouvoir le peuple ».  Anne Morelli est passé à notre sens à côté de cet élément essentiel : la propagande de guerre est étroitement liée à l’émergence des nationalismes au dix-neuvième siècle[12] et plus spécifiquement des régimes démocratiques.  La propagande de guerre est donc bien à notre sens un phénomène historique visant essentiellement à toucher le peuple dans la mesure où celui-ci est désormais (théoriquement) associé au pouvoir ! Et la propagande de guerre est orientée de telle manière que le peuple continue à soutenir ses dirigeants dans les crises les plus graves.  C’est ce qui fait à la fois la force et la faiblesse d’un pouvoir politique qui s’appuie sur le peuple.  Les victoires napoléoniennes étaient ainsi dues non seulement aux qualités exceptionnelles de stratège de l’illustre officier corse mais surtout à l’étonnante capacité que la France possédait depuis la Révolution de lever des troupes « au nom de la nation en péril ».  Le peuple confère indéniablement une puissance importante en terme quantitatif !  Toutefois, les dirigeants de semblables régimes se trouvent dans une position délicate une fois qu’ils ont utilisé leur botte secrète.  Le peuple, la « nation en arme »,  la « masse » sont par définition des éléments instables[13] qu’il faut sans cesse rassurer, entendez par-là manipuler.  Dans ces conditions une guerre trop longue, trop coûteuse en vies humaines a tôt fait de retirer aux dirigeants la confiance qu’ils détenaient de la base.  L’avènement des « guerres totales » (c’est-à-dire réclamant la participation de l’ensemble de la nation à la guerre, y compris la population civile - d’où le concept d’économie de guerre) et l’essor des télécommunications ont encore accru cette faiblesse du système démocratique.  Lors de la guerre du Vietnam, beaucoup d’observateurs ont déclaré que c’était le choc des images télévisuelles montrant des cadavres américains rapatriés en avion dans des « sacs plastiques » qui avait provoqué la défaite des Etats-Unis pourtant largement supérieurs en matière de technologie militaire.   Semblable constat implique forcément la nécessité pour tout « pouvoir démocratique » de contrôler la presse en cas de crise aiguë au risque de perdre toute légitimité auprès de son opinion publique.  La propagande de guerre est donc bien un phénomène ayant pour origine directe l’avènement de régimes politiques s’appuyant sur le peuple, obligés de contrôler le quatrième pouvoir.  Osons l’affirmer, les régimes démocratiques constituent la cause première de la manipulation médiatique dont nous faisons aujourd’hui les frais. 

 

La propagande est d’ailleurs passée à notre époque à un stade supérieur.  Nous avons dit au début de notre conclusion qu’elle s’est adressée primitivement au classes populaires.  Un tel phénomène étant cyniquement légitimé par la nécessité d’ « éduquer les masses ».  Il est toujours piquant de rappeler ainsi que « l’école pour tous », tant vantée par les révolutionnaires français, ne répond pas seulement à des objectifs philanthropiques mais surtout à des nécessités économiques et politiques.  Il convient de donner à « l’enfant du peuple » des connaissances techniques suffisantes afin qu’il puisse faire tourner plus efficacement nos industries, il convient de lui donner une éducation politique orientée afin qu’il participe (et donc souscrive) aux règles de la nouvelle gouvernance qui a été mise sur pied.  Et si nos démocraties montrent particulièrement pendant les conflits armés des défauts monstrueux, au point que des intellectuelles comme Anne Morelli puissent s’émouvoir, c’est parce que les nécessités du danger qui les menacent leur font battre pour un court instant le masque recouvrant leurs vrais visages, le visage du plus cynique des totalitarismes, ce que Madame Morelli s’est bien gardée de conclure !

 

« La propagande est à la société démocratique ce que la matraque est à l’Etat totalitaire ».[14]

 

 



[1] Le livre a connu deux versions.  La première forte de 727 pages (Témoins.  Essais d’analyse et de critique des combattants édités en français de 1915 à 1928, Paris, 1929) a déclenché de très virulentes réactions (positives ou négatives) lors de sa parution.  La deuxième s’intitule Du Témoignage.  Il s’agit d’une édition abrégée parue en 1930 et reprenant l’essentiel des idées développées dans la première édition.  L’ouvrage de Norton Cru a fait l’objet d’un colloque au Musée de l’Armée de Bruxelles à la fin de l’année 1999.

[2] Ce roman a  fait jadis l’objet d’une des réunions mensuelles de notre école des cadres.

[3] La stratégie du blocus est particulièrement prisée par les puissances thalassocratiques.  Elle permet un minimum d’engagement et un maximum d’effet puisque les morts tués de façon violente lors d’opérations militaires sont beaucoup plus voyants et traumatisants que les morts « doux » dispersés dans l’espace et le temps au fur et à mesure que l’embargo produit son effet.  L’exemple iraquien de la dernière décennie est de ce point de vue exemplaire et témoigne de la cruauté des « droits de l’hommistes internationalistes » qui l’appliquent.

[4] MERARI (Ariel), Du terrorisme comme stratégie d’insurrection, dans CHALIAND (Gérard) (dir.), Les stratégies du terrorisme.- Paris, Desclée de Brouwer, 1999, pp. 76-77.

[5] MORELLI (Anne), Principes élémentaires de propagande de guerre.- Bruxelles, Editions Labor, 2001, p. 49.

[6] Idem, p. 54.

[7] Les cours d’histoire du secondaire présentent le plus souvent l’Allemagne nazie comme une terre dépourvue de penseurs et d’intellectuels puisque ceux qui y étaient avaient fui le régime.  Einstein constitue le choux gras dont se délectent nos professeurs d’histoire « à la page ».

[8] Cité dans HALIMI (Serge) et VIDAL (Dominique), L’opinion ça se travaille.- Marseille, Agone, Comeau & Nadeau, 2000, p. 102-103.

[9] MORELLI (Anne), Principes élémentaires de propagande de guerre.- Bruxelles, Editions Labor, 2001, p. 92.

[10] A nos yeux, il s’agit toutefois du meilleur des motifs pour faire la guerre.  Mais le rôle de la religion dans la guerre devrait faire l’objet d’une étude ultérieure.

[11] Les paroles de la Marseillaise « Abreuvons du sang impur nos sillons » montrent bien jusqu’à quel point conduit l’idéal démocratique. 

[12] Le principe de la « nation en arme » apparaît lors de la révolution française et va bouleverser la manière de faire la guerre. 

[13] Voir à ce sujet le classique de Gustave LEBON, Psychologie des Foules.

[14] CHOMSKY (Noam), Propaganda.- France, Editions du Félin, 2002, p.20.

mardi, 17 février 2009

Influence, contre-influence, manipulation et propagande

Influence, contre-influence, manipulation et propagande

Les techniques de manipulation, de propagande et d’influence ont longtemps été cantonnées aux temps de guerre. Avec l’explosion des technologies, les vieilles recettes sont remises au goût du jour pour être utilisées en temps de paix, avec toujours ce même et unique objectif : vendre. Vendre une guerre, vendre un programme politique, vendre un produit, vendre une idée…

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Plusieurs ouvrages ont été publiés fin 2008 pour aborder cette question, et notamment “Maîtres du faire croire ” de François-Bernard Huyghe qui retrace l’histoire et l’évolution de la propagande à travers les siècles. L’auteur revient sur ce qui a caractérisé l’influence, époques après époques,et c’est ainsi qu’il analyse les techniques des missionnaires (convertir des âmes), des philosophes (persuader), des guerriers (vaincre), des politiques (diriger)… En retraçant les différents siècles, il aborde les notions d’influence et de manipulation à notre époque de sociétés en réseau et de la société civile. Les ONG, les think-tanks, les organisations terroristes… toutes ont adapté d’anciennes techniques pour vendre des schémas de pensée ou de la peur.

François-Bernard Huyghe présentera son ouvrage au Press Club de France (8 rue Jean Goujon, 75008 Paris) le 12 février 2009 de 8h 45 à 10h.

Un autre ouvrage mérite toute notre attention, il s’agit de “150 petites expériences de psychologie des médias pour mieux comprendre comment on vous manipule” de Sébastien Bohler. Cet ouvrage se présente sous forme de fiches qui expliquent nos réactions face aux média (publicité, politique, croyances…) en les étayant systématiquement d’éxperiences scientifiques. Ainsi l’on comprendra mieux nos propres réactions de peur face à une pandémie de grippe aviaire après avoir regardé les informations (et que l’on n’y pense plus dès que les médias n’en parlent plus…) ; pourquoi l’on croit plus les informations qui passent en boucle ou que l’on a plus de sympathie pour une personne que l’on voit souvent dans les médias ; pourquoi l’on ne supporte pas les discours de certains hommes politiques ; pourquoi l’on pense que tous les hommes politiques sont corrompus ; comment l’on arrive à vous vendre des voitures en jouant sur l’estime de soi des consommateurs… Un ouvrage essentiel pour ne plus être victime de ses propres réactions provoquées par d’autres.

Notons également l’article “Influence sur Internet” de Didier Heiderich (auteur de Rumeur sur Internet). Sur son site Communication Sensible, Didier Heiderich s’est fait une expertise de la gestion de crise sous toutes ses formes. Dans son article “Influence sur Internet”, il analyse les mécanismes d’influence spécifiques à Internet, à savoir imposer aux internautes un parcours de liens qui mènent vers du contenu visant à forger l’opinion et les perceptions. L’article aborde certaines de ces techniques visant à maîtriser les comportement cognitifs sur Internet : positionnement élevé dans les moteurs de recherche, recommandations de connaissances ou d’autres internautes, appropriation du contenu pour le propager ensuite… Article fort intéressant qui délimite bien les fondamentaux de l’influence sur Internet.

Source : Infoguerre

 

mercredi, 24 décembre 2008

L'Agence US CANVAS organise les manifestations anti-Chavez

 

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Ferdinando CALDA:

 

L’agence américaine CANVAS organise les manifestations anti-Chavez au Venezuela

Qui se profile donc derrière le mouvement étudiant qui, depuis des mois, manifeste au Venezuela contre le gouvernement de Chavez? Qui organise ces manifestations? Qui sont ces étudiants qui scandent leur slogans sur les places publiques pour protester contre un régime qu’ils qualifient de “dictatorial”?  La réponse est claire: c’est le “Centre for Applied NonViolent Action & Strategies” ou CANVAS.

CANVAS n’est pas autre chose qu’un avatar récent du mouvement OTPOR (qui signifie “Résistance”), un mouvement étudiant serbe qui, à partir d’octobre 2000, se profilait derrière toutes les manifestations hostiles au Président serbe Slobodan Milosevic et avait finalement provoqué sa chute, parce que sa politique était contraire aux intérêts de Washington. Le symbole de CANVAS est le même que celui d’OTPOR: un poing fermé en signe de révolte et de protestation. Simple différence: il est entouré de trois flèches signifiant le “recyclage”. Sur le site du Centre CANVAS, les responsables de l’organisation donnent la Serbie en exemple car OTPOR y a obtenu “une victoire de la guerre non violente contre Milosevic”, victoire “qui a finalement ouvert les portes à la démocratie et à la possibilité de forger un avenir meilleur pour le pays”.

Mais il ne faut pas oublier qu’avant d’arriver au Venezuela, le symbole du poing fermé d’OTPOR a d’abord transité par la Géorgie, où, à partir de novembre 2003, la dite “révolution des roses” a porté au pouvoir l’américanophile Mikhail Saakachvili, si sûr d’obtenir toujours le soutien de Washington, qu’il n’a pas hésité à attaquer la Russie en Ossétie du Sud, au mois d’août dernier. Dans le cas de la “révolution des roses”, ce sont les étudiants du mouvement “KMARA” (terme qui signifie “ça suffit!” en géorgien) qui ont téléguidé les protestations contre les prétendues embrouilles électorales du Président Edouard Chevarnadzé; eux aussi avaient pour symbole le poing fermé d’OTPOR, non plus blanc sur fond noir, mais bleu sur fond orange.

Les vétérans d’OTPOR ont également organisé un mouvement étudiant en Biélorussie, hostile au pouvoir en place. En effet, en novembre 2004, ces étudiants, rassemblés au sein du mouvement ZUBR (terme qui signifie “Bison” en biélorusse), ont protesté lors du référendum tenu pour prolonger le mandat du président Alexandre Loukachenko. A Minsk, toutefois, le mouvement n’a enregistré aucun succès. Outre en Serbie et en Géorgie, CANVAS se profile également derrière ce que ses organisateurs appellent eux-mêmes une “concrétisation parfaite de l’action stratégique non violente”, soit la “révolution orange” en Ukraine. En Ukraine, ce sont aussi les instructeurs de l’agence CANVAS qui ont instruit les jeunes du mouvement “PORA” (“C’est l’heure!”), pour qu’ils puissent porter en avant leur “lutte non violente” et réussir leur coup. En Ukraine, les élections présidentielles du 21 novembre 2004 ont vu s’affronter le premier ministre pro-russe Victor Yanoukovitch et le candidat de l’opposition Victor Iouchtchenko, plus proche des intérêts “occidentaux”. Fort des résultats des sondages, Iouchtchenko a immédiatement contesté les résultats des élections qui avaient donné l’avantage au parti du premier ministre Yanoukovitch. Ces élections furent d’emblée décrétées “frauduleuses”. Après de nombreuses journées de protestations et de manifestations, la Cour suprême d’Ukraine a invalidé les résultats électoraux et a ordonné que de nouvelles élections soient tenues le 26 décembre. Cette fois-là, Iouchtchenko, candidat pro-occidental, a obtenu la victoire.

Aujourd’hui, CANVAS opère sur deux “champs de bataille”: le Zimbabwé de Mugabe et le Venezuela de Chavez. Mais question: qui se trouve de fait derrière ces véritables mercenaires de la révolution fabriquée? Qui porte en avant et finance ces organisations protestataires, portées par des groupes très réduits d’activistes qui parviennent pourtant à déstabiliser tout gouvernement considéré à Washington comme “illégitime”? Quels sont les financiers de ces opérations médiatiques colossales, qui paie tous ces drapeaux, T-shirts, auto-collants et autres gadgets permettant une identification immédiate, de type publicitaire, du bon camp “révolutionnaire et démocratique”? Sur le site de CANVAS, on trouve tout de suite une piste car on y indique quelles sont les “organisations qui pourraient être utiles pour apporter aides et/ou soutiens aux mouvements non violents”. Ces organisations sont: “Albert Einstein Institution”, “National Endowment for Democracy” (NED), “International Republican Institute”, “National Democratic Institute for International Affairs”. Ces deux dernières organisations dépendent respectivement du parti républicain et du parti démocrate américains et reçoivent des financements du NED. Cette dernière est une organisation privée, créée en 1983 dans le but, lit-on sur le site, de “renforcer les institutions démocratiques dans le monde par le biais d’actions non gouvernementales”.

Les financements qui soutiennent le NED proviennent directement du gouvernement américain. Dans un entretien accordé au “Washington Post”, le 2 mars 2008, le Sénateur de l’Illinois, Barack Obama, promettait “d’augmenter substantiellement les fonds à accorder au ‘National Endowment for Democracy’ et aux autres  organisations non gouvernementales qui soutiennent les activistes qui militent dans les sociétés répressives”. Parmi les organisations non gouvernementales qui s’efforcent d’exporter la “démocratie” et dont parlait Obama dans son interview, il y a la “Albert Einstein Institution” (AEI), fondée en 1983 par Gene Sharp, un homme influent que beaucoup considèrent comme l’inspirateur des “révolutions colorées”. Sharp, dans ses livres, analyse en fait tous les instruments susceptibles de faire modifier ou chuter un gouvernement par le truchement de la lutte non violente. L’AEI se vante très ouvertement d’avoir eu de nombreux contacts avec les étudiants d’OTPOR. Ensuite, parmi bien d’autres choses avouées, on apprend qu’en avril 2003 deux consultants de l’AEI, Chris Miller et Robert Helvey (ancien officier de l’armée américaine), se sont rendus à Caracas pour rencontrer les représentants de l’opposition anti-Chavez. Le but de ces quelques journées de consultation, explique l’AEI, a été de “fournir à l’opposition démocratique vénézuélienne la capacité de développer une stratégie non violente pour réinstaller à terme la démocratie dans le pays”.

Parmi les autres organisations non gouvernementales particulièrement actives en ce domaine: la “Freedom House” (FH). “Que ce soit en Ukraine ou en Serbie’, lit-on sur le site, “la Freedom House a travaillé étroitement avec des groupes locaux, responsables des révolutions pacifiques et démocratiques. Au Venezuela, elle a travaillé avec ceux qui cherchent à défendre et à promouvoir les droits de l’homme dans une situation politique difficile”. Ce n’est donc pas un hasard si la Freedom House emploie deux membres d’OTPOR, les Serbes Aleksandar Maric et Stanko Lazendic, comme “conseillers spéciaux” pour l’Ukraine. A signaler également l’ “Open Society Institute” de Georges Sörös, qui fut tout particulièrement actif en Serbie et en Géorgie (avec l’ “Open Society Georgia Foundation”).

Comment agissent ces organisations pour culbuter les gouvernements considérés comme “peu démocratiques”? Les exemples de la Serbie, de la Géorgie, de l’Ukraine et, plus récemment, du Venezuela, montrent qu’elles ont une capacité notoire à organiser de véritables campagnes médiatiques internationales qui permettent au monde entier d’identifier immédiatement un “symbole” ou une couleur qui distingue, de manière totalement fabriquée, la “révolution” colorée et démocratique aux yeux de l’opinion publique mondiale. Elles sont aussi capables de produire des “sondages” qui suggèrent toujours que l’exécutif visé perd toute légitimité populaire.

Autre protagoniste dans ce champ d’action: la société américaine “Penn, Schoen & Berland Associates” (PSBA), qui s’est spécialisée, comme elle l’explique elle-même, dans l’art de “former la perception que le groupe, visant le pouvoir dans le pays en question, bénéficie d’une ample popularité”. La PSBA a été célébrée dans la presse américaine comme l’une des chevilles ouvrières majeures des mutations non violentes en Serbie, contre Milosevic, et comme un élément clef dans les bouleversements qui ont eu lieu ou devront avoir lieu en Ukraine et au Venezuela. En août 2004, la PSBA se distingue négativement en faisant montre d’un comportement emblématique qui explique toutefois fort bien les “modi operandi” du système mis au point à Washington. A l’occasion du référendum anti-Chavez, la PSBA a diffusé un “exit poll”, soit des résultats, alors que les urnes n’avaient pas encore été closes, en violation de la loi. Dans ces résultats purement fictifs, l’agence annonçait la victoire du “oui” et, par conséquent, la défaite du président Chavez, alors que ce dernier a finalement obtenu la victoire avec 58% des votes. La note diffusée par la PSBA risquait d’alimenter des tensions dangereuses pour la stabilité et la paix civile dans le pays.

Une autre société spécialisée dans les “sondages” se distingue généralement en Amérique latine: l’ “Ecoanalistica Opinion Publica” (EOP). L’EOP avait diffusé, au cours des jours précédant le vote référendaire vénézuélien, un sondage affirmant que 65% des Vénézuéliens étaient opposés à la réélection présidentielle illimitée. Malgré que ce sondage avait été “commissionné” plus ou moins trois mois auparavant, ces résultats ont été publiés seulement après que le Président Chavez ait formulé son intention de procéder à sa réélection.

Face à tous ces événements et si l’on songe aux enseignements de Gene Sharp qui sont fidèlement repris par CANVAS, on pourra repérer facilement la logique d’airain qui sous-tend l’ensemble de ces actions de déstabilisation. En fait, dès le moment où un gouvernement, quelque part sur la Terre, en vient à être considéré comme “illégitime”, tous les moyens “non violents” pour le déstabiliser deviennent “légitimes”. Le but évident de l’action lancée est alors de frapper ceux que l’on définit comme les “piliers de soutien du pouvoir”. Ces piliers sont la police, la bureaucratie, le système éducatif et les organisations religieuses.

En résumé, le gouvernement des Etats-Unis finance toute une série d’organisations non gouvernementales qui ont pour objectif de s’immiscer dans la politique quotidienne des Etats jugés non suffisamment démocratiques, dans le but évident de promouvoir des actions de déstabilisation contre les gouvernements retenus comme “illégitimes”.

Tout ce que les médias présentent comme des manifestations du peuple contre des gouvernements posés a priori comme “despotiques” et “corrompus” sont en réalité des actions téléguidées par une seule et même régie, soutenue par les même financiers.

Ferdinando CALDA.

(article paru dans “Rinascita”, Rome, 13-14 décembre 2008; traduction française: Robert Steuckers). 

 

 

mardi, 02 décembre 2008

Désolante uniformité idéologique du paysage médiatique contemporain

La désolante uniformité idéologique du paysage médiatique contemporain

Ex: http://metapoinfos.hautetfort.com

Une citation tirée de La double pensée de Jean-Claude Michéa (Champs Flammarion, 2008) :

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"[L'] uniformité idéologique [du paysage médiatique contemporain] atteint son degré d'intensité maximal chaque fois que les institutions capitalistes sont confrontées à une menace réelle (par exemple lors des référendums sur le traité de Maastricht et sur le projet de Constitution européenne), ou même simplement fantasmée (par exemple lors des élections présidentielles d'avril 2002). Le synchronisme absolu des commentaires politiques, l'ampleur des mensonges diffusés et l'inévitable mobilisation des artistes officiels peuvent alors être comparés, sans la moindre exagération, à la propagande normale des Etats totalitaires. C'est d'ailleurs dans ces moments privilégiés - quand chacun est tenu de hurler avec les loups et que les derniers masques tombent - qu'on peut se faire une idée précise du courage personnel, de la probité intellectuelle et de la valeur morale des professionnels des médias et du spectacle."

mercredi, 29 octobre 2008

1933: la radio devient l'instrument privilégié des propagandes

1933 : La radio devient l'instrument privilégié des propagandes

par Jean-Jacques Ledos

trouvé sur: http://www.gavroche.info


(Gavroche n° 129-130, mai-août 2003, p. 30 à 37)



« La propagande est l'ensemble des méthodes utilisées par un groupe organisé en vue de faire participer activement ou passivement à son action, une masse d'individus psychologiquement unifiés par des manipulations psychologiques et encadrés dans une organisation. » Jacques Ellul définissait ainsi le souci, pour un pouvoir, politique ou affairiste, de transmettre des messages ou des opinions à une collectivité que la radiodiffusion permettait d'atteindre immédiatement. La pratique par les pouvoirs développera la tentation d'un usage discrétionnaire, c'est-à-dire unilatéral et progressivement fermé à la discussion ou à la contestation.
Lénine avait été le premier à évaluer le pouvoir de la radio (1). Dans un autre modèle de société, ce sont les entrepreneurs, soucieux de faire connaître leurs produits à un public étendu, qui, les premiers, au début des années 1920, en saisirent l'efficacité pour diffuser la publicité au moment où les stations de radiodiffusion commençaient d'émettre, aux États-Unis, puis en Grande-Bretagne, à destination d'un public global mais indifférencié. Le même projet, en France, était alors combattu par les défenseurs du service public opposés à une démarche purement commerciale (2).

La naissance de la propagande par la radio
À l'occasion de l'élection présidentielle aux États-Unis, en novembre 1920, un journal de Pittsburgh utilisa une station expérimentale (KDKA) pour diffuser la victoire de Warren Harding, avant la presse imprimée. L'exploitation de l'événement a fait oublier l'initiative d'un ingénieur néerlandais qui diffusait déjà depuis un an des programmes musicaux à la Haye (PCCG). En 1924, une chaîne américaine de radio retransmettra la Convention du parti Démocrate mais, d'une manière générale les pouvoirs politiques manifestent de la méfiance à l'égard d'un moyen de communiquer l'information qu'ils ne contrôlent pas encore.

Grande-Bretagne : une royale démocratie
En Grande-Bretagne, le roi George V s'exprime pour la première fois, en 1924, à la BBC, à l'occasion d'une exposition consacrée à l'Empire britannique. Il prendra l'habitude, à partir de 1932, d'adresser ses vœux à ses vingt millions de sujets par ce même canal. Quatre ans plus tard, c'est à la radio que son fils aîné, appelé à lui succéder sous le nom d'Édouard VIII, annoncera qu'il renonce, par amour, à la Couronne. Aussi, et en particulier grâce à ses stations d'ondes courtes, les cérémonies du couronnement de George VI, deuxième fils du défunt George V, auront les honneurs de la jeune télévision anglaise dont c'est le premier grand reportage en direct. Il s'agit d'entretenir la ferveur nationale à l'égard de l'institution monarchique mais la radio est aussi le lien entre le pouvoir central et les territoires éloignés de l'Empire.

Les hésitations françaises
En France, en 1924, le ministre des finances, Étienne Clémentel, qui avait prévu de présenter sur Radio-Paris un projet d'emprunt, en fut empêché par son collègue des PTT. En 1928, Raymond Poincaré interdit toute intervention politique à la radio pendant la campagne électorale. Le premier homme politique à s'adresser aux Français sera, en 1930, André Tardieu, Président du Conseil ouvert à la modernité. Sa présence jugée excessive par ses adversaires politiques lui vaudra le surnom « d'Homme au micro entre les dents » (3). Deux ans plus tard, l'un de ses successeurs, Gaston Doumergue, s'y exprimera régulièrement pour rendre compte de son action.

1933 : les nazis s'emparent de la radio
Le Traité de Versailles, signé à Versailles en 1919, redécoupait l'Europe et imposait à l'Allemagne vaincue une occupation et des limitations de souveraineté qui eut pour effet d'exacerber le sentiment national. Un habile ambitieux, Adolf Hitler, trouva sur ce terrain l'occasion de développer son désir de pouvoir. Dans Mein Kampf publié en 1925, il exploitait ainsi les frustrations de ses compatriotes et développait ses projets de gouvernement. La propagande serait l'instrument privilégié de la réalisation de ces projets grâce un usage à la fois brutal et répétitif de messages dont le livre constitue le catalogue.
La fonction de la propagande y était décrite en termes simplistes et méprisants voire insultants pour ceux auxquels elle était destinée :
« Ne voit-on pas la tâche d'un dirigeant moins dans la conception d'un plan que dans l'art de faire comprendre à un troupeau de moutons à têtes vides, pour mendier ensuite leur bienveillante approbation ? […] La grande masse d'un peuple se soumet toujours à la puissance de la parole. » (chap. III) … « Toute propagande doit être populaire et placer son niveau spirituel dans la limite des facultés d'assimilation du plus borné parmi ceux auxquels elle doit s'adresser. Dans ces conditions, son niveau spirituel doit être situé d'autant plus bas que la masse des hommes à atteindre est plus nombreuse » [La masse] « a toujours besoin, dans sa lourdeur, d'un certain temps pour se trouver prête à prendre connaissance d'une idée, et n'ouvrira sa mémoire qu'après la répétition mille fois renouvelée des notions les plus simples… »[chap. VI].
L'auteur soulignait ailleurs la « bestialité » des masses.

En janvier 1933, les élections législatives ne donnèrent au Parti nazi qu'une majorité relative. C'était suffisant pour que le vieux Maréchal Hindenburg, Président de la République dite de Weimar, désigne comme Chancelier Adolf Hitler qui avait développé depuis dix ans un parti présenté comme national et socialiste, sur les bases d'un mécontentement populaire amplifié par une crise économique sans précédent. Il est alors aisé de désigner dans le gouvernement social-démocrate l'absence d'une volonté clairement exprimée et d'en imputer la responsabilité, d'une manière non démontrée, aux Juifs dont la présence est loin d'être majoritaire dans les instances de pouvoir. La démagogie ne s'est jamais encombrée d'évidences.

Le projet hitlérien peut être résumé selon deux thèmes essentiels: la propagande intensive et l'antisémitisme. Hitler se disait obsédé par la propagande des Alliés, cause essentielle – pour lui – de la défaite allemande pendant la première guerre mondiale. Pour faire passer son message nationaliste et socialiste, Hitler désigne des coupables : les Juifs, dans un pays où l'antisémitisme est récurrent.
Après la parution de Mein Kampf, les thèmes essentiels seront constamment répétés, parfois édulcorés, dans les assemblées du parti national-socialiste (NSADP ).
Le projet des nazis, dans lequel le cynisme l'emporte sur le simplisme, trouvera son application dans le déploiement d'une propagande qu'on dirait aujourd'hui « multimédia » parmi lesquels la radio va occuper une place essentielle.

L'Allemagne disposait déjà, avant la première guerre mondiale, de puissantes stations radiotélégraphiques intercontinentales. Elle poursuivit, après sa défaite, son équipement dans le domaine de la radiophonie qui permettait de diffuser des messages au plus grand nombre. L'exploitation pratique : puissance des émetteurs, équipement des foyers, était affaire de moyens. Les pays à l'économie la plus avancée s'employèrent à les développer.
Dans le gouvernement du IIIe Reich, l'organisation de la propagande sera confiée à Josef Gœbbels qui, depuis plusieurs années, a déjà désigné à destination d'une opinion inquiète les cibles responsables de tous les désordres, les Juifs et les communistes. Un auteur allemand l'a désigné comme le « cerveau de cette manipulation des âmes » n'hésitant pas à reconnaître en lui l'un des rares hommes intéressants du Troisième Reich. Il s'y révélera comme un maître de la haine dans la pratique du pouvoir exercée dans le mépris des autres.

La radio, dont le réseau couvre déjà la totalité du territoire allemand, Prusse orientale comprise, s'impose comme un moyen de communication de masse que le pouvoir nazi va investir en priorité. Elle est au cœur du dispositif de propagande préparé par Goebbels, organisateur de la propagande du Parti. On sait que les émissions peuvent être reçues sans qu'une dépense importante soit imposée aux auditeurs. La fabrication et la commercialisation à faible prix d'un récepteur populaire (Volksempfänger) favorisera bientôt l'équipement des foyers. Son utilisation discrétionnaire s'inscrit dans une pratique totalitaire entretenue par une propagande constante puis par la terreur. Les élites bourgeoises de la nation ont déjà adhéré au projet d'un rétablissement des valeurs de la nation et de l'ordre. Elles soutiennent un projet qui préserve leurs intérêts et rétablit leur pouvoir sur la sphère économique.

La radio est développée comme un moyen de démocratie directe mais unilatérale. Le Führer s'adresse sans intermédiaire au peuple dont les contestations ne sont pas admises à l'antenne.
Le 1er février, au lendemain de sa désignation comme Chancelier, Hitler prononce sa première déclaration, Aufruf an das deutsche Volk (Proclamation au peuple allemand) à la radio et non devant le Reichstag, comme la tradition et la courtoisie parlementaires l'avaient établi.
Quelques mois plus tard, dans un discours prononcé à Berlin à l'occasion de l'inauguration, en août, de l'exposition annuelle de la radio, Gœbbels désignera la radio comme le « huitième pouvoir ».

Le nouveau directeur de la radio, Eugen Hadamovsky, doit sa nomination à un militantisme récent mais actif au service du Parti nazi plutôt qu'à une expérience acquise dans le domaine de la radiophonie. Il a organisé la diffusion radiophonique des réunions électorales de Hitler. Il est un de ces « hommes nouveaux » qui doivent « bannir toutes les conceptions anciennes de la radio qui doit devenir cent pour cent nationale-socialiste, de manière à ce qu'elle serve à imprégner entièrement la nation de l'esprit nouveau. » Dès l'installation du Führer à la Chancellerie, il publie les « Directives officielles pour les émissions de la Radiodiffusion allemande ».
Il expose également son projet d'une radio mise au service du Parti : « Ein Volk! Ein Reich! Ein Rundfunk! (4) » dans Propaganda und nationale Macht (Propagande et pouvoir national) : il associe habilement à l'encadrement des représentants sélectionnés des auditeurs «…Cette corporation doit englober la radiodiffusion dans sa totalité ; elle sera alors le plus fort élément pour la formation de la volonté nationale. » C'est aussi une mise en pratique d'une propagande active et non plus seulement passive telle que Goebbels l'esquissait en mars : « Nous avons créé un ministère de l'Éducation populaire et de la Propagande. Ces deux titres ne signifient pas la même chose. L'éducation populaire est essentiellement quelque chose de passif ; la propagande, elle, est quelque chose d'actif… »

La parole nazie comme la retransmission des premières grandes manifestations du Parti sont quotidiennement présentes sur les ondes voire diffusées plusieurs fois. « Les nazis ont su utiliser l'incertitude et la paresse [de l'opinion] face aux situations complexes et aux problèmes apparemment insolubles. Le vide se fait alors dans l'opinion publique. On le comble par ces succédanés que sont les slogans dont on martèle inlassablement les esprits. »
Le contenu des programmes quotidiens d'information est décidé au ministère de la Propagande. La vérité officielle est encadrée de telle manière que le recours aux procédés habituels de la désinformation – vérités partielles, omission, comparaisons douteuses – est inutile.

Une émission régulière, L'heure de la nation, doit développer le sentiment patriotique par « des chants, discours ou conférences, évocation des épisodes glorieux du passé ». Les programmes exaltant la valeur militaire se multiplient dans le cadre d'un mouvement de « régénération ».
Désormais les manifestations de masse mises en scène par le ministère de Gœbbels sont retransmises. Elles doivent entretenir le sentiment de cohésion nationale qui est l'un des thèmes essentiels de la propagande. Lorsque les grands rassemblements hitlériens seront diffusés, il sera recommandé aux possesseurs de poste d'ouvrir leurs fenêtres et de pousser le niveau sonore d'écoute afin que les voisins ou les promeneurs puissent entendre la voix du Führer. L'écoute de la radio devient un devoir civique. Pour unifier la diffusion, une coordination associe trois stations qui disposaient précédemment d'une certaine indépendance, Cologne, Francfort-sur-le-Main et Stuttgart.

La radio sera aussi un instrument de propagande sinon une arme vers l'étranger. « La radio ne reconnaît pas les frontières créées par la Nature ou par l'Homme. Elle s'insinue dans le territoire des autres peuples » déclarera un dignitaire nazi. Les pays de culture germanique sont visés en premier lieu ainsi que l'affirmera l'un des reponsables : « Nos émissions s'adressent à tous les peuples de langue et de culture allemande où qu'ils soient… »
Dès le 18 mars 1933, une personnalité nazie a adressé par la radio un salut aux « camarades » autrichiens. Les émissions de propagande seront ensuite relayées à Vienne où la police découvre un émetteur clandestin exploité par des nazis autrichiens. En 1938, la radio coordonnera les opérations d'occupation de l'Autriche (Anschluss).

En 1934, une campagne ardente a été dirigée vers le Territoire de la Sarre qui doit se prononcer par référendum sur le rattachement ou non au IIIe Reich. C'est de ce territoire réintégré en 1935 dans le Vaterland que le gouvernement nazi lancera en direction de l'Alsace et de la Lorraine une campagne plus perfide au moyen d'émissions dramatiques, Hörspiele, dans lesquelles les auteurs rappelaient la (pseudo)-« germanité » historique des deux provinces de l'Est français. Deux magazines, l'un, quotidien, Echo de la frontière, l'autre, hebdomadaire, Programme alsacien, constituent l'ordinaire de la propagande.
Après quelques années de pratique, un bilan d'étape établira que « la radio a été complètement politisée et est devenue la voix de la nation ». «C'est la plus moderne, la plus puissante et la plus révolutionnaire arme que nous possédions pour combattre un monde ancien et fini… »

L'Italie fasciste
Benito Mussolini gouverne l'Italie depuis octobre 1922 avec le soutien du Parti national fasciste (Partito Nazionale Fascista, fort de plus de 300 000 adhérents à la fin de 1921). Le Duce a conquis le pouvoir contre un régime démocratique dépourvu d'autorité face aux désordres. La parole démagogique séduit d'emblée par un emprunt provisoire au discours socialiste dont elle dénonce, par ailleurs, l'avatar révolutionnaire circonstanciel. Toutefois, le fascisme ne dispose pas d'un corpus doctrinal ni de partisans nombreux comme le NSDAP hitlérien (5).

Un Service de Presse (Uffizio Stampa) a été créé dès 1922. C'est l'organe de la propagande du gouvernement. La prise de contrôle des moyens d'informations sera plus lente qu'en Allemagne mais stimulée par le modèle nazi à partir de 1933.
Au début des années 30, l'Italie, qui compte à peine 40 millions d'habitants, est un pays en retard de développement. La radiodiffusion, en particulier, ne couvre pas encore l'ensemble du territoire. On compte environ 300 000 postes récepteurs pour une population d'environ 41 millions d'habitants, soit 7,3 postes pour 1 000 habitants. Pour compenser une production insuffisante de l'industrie radioélectrique, l'Italie importe les récepteurs populaires Volksempfänger que l'Allemagne nazie a commencé de fabriquer.

Divers observateurs, italiens et étrangers, s'accordent pour reconnaître que le régime de Mussolini n'a guère utilisé la radio comme instrument de propagande, avant 1930 : « Pendant quelques années, l'Eiar ne fut pas un domaine relevant de l'action de propagande fasciste […] Le gouvernement se contentait de contrôler la radio comme l'une des activités du pays parmi d'autres. »
Le régime fasciste n'en a pas moins encadré la jeune radio. Des fidèles, des proches, mais aussi des représentants de l'industrie électrique ont ainsi été placés aux postes de responsabilité. Ces derniers se sont engagés derrière le Duce dont le programme politique et les méthodes de gouvernement conviennent à leurs intérêts. À la fin des années 20, leur présence fait presque oublier la finalité de la radiodiffusion. Le directeur de l'EIAR, Arnaldo Mussolini, rend public un programme riche de bonnes intentions: « À partir d'aujourd'hui, l'Eiar place dans son vaste programme un nouvel élément qui pourra avoir une grande efficacité dans les domaine de l'idéal et de la morale […] Nous sommes persuadés que la radio-diffusion – cette nouvelle chaire qui vient se placer entre l'école et le journal – et qui va connaître un développement rapide – peut donner des résultats de grande valeur dans la culture, les missions d'éducation, afin d'élever […] en chacun la vie de l'intelligence et de l'esprit (6) »

Le discours sera tout à fait différent lorsque le Duce haranguera les foules depuis le balcon du Palais de Venise (Piazza Venezia, à Rome). On imagine l'impact qu'aurait eue la télévision chargée de retransmettre les gesticulations et les mouvements de menton. Mussolini avait, comme tout dictateur, le sens des effets visuels. À l'époque, seul le micro pouvait répercuter dans une rhétorique caricaturale réduite à de courtes phrases un discours qui exprimait en quelques idées simples mais démagogiques les menaces proférées envers les adversaires ou les ennemis, l'exaltation d'un nationalisme primaire qui séduit les masses.
Des chroniques ciblées seront bientôt diffusées, à destination de la jeunesse, des paysans, des ouvriers et plus généralement des citoyens. Leur titre révèle les objectifs du régime : Dalla civiltà liberale a la civilta facista in Chronache del regime (De la civilisation libérale à la civilisation fasciste, « Programme national », 23 septembre 1936), Politica colonizzatrice del regime (Politique colonisatrice du régime) in Cronache dell'agricolture (28 janvier 1939), Motivi essenziali della difesa della razza (Motifs essentiels de la défense de la race , « Programme national », 22 janvier 1940).

Le régime fasciste est soucieux de faire passer son message politique mais surtout d'imposer une pratique gouvernementale. L'écoute de la radio est un devoir civique, comme en d'autres régimes totalitaires. La radio que Marinetti a désignée comme la « parole électrique » doit former la nouvelle conscience politique. En novembre 1933, une émission de commentaires d'actualité trouve sa place dans les programmes : Cronache del regime ( « Chroniques du régime »)
L'information est, bien entendu, sous le contrôle étroit du pouvoir fasciste. Chaque jour, les stations doivent consacrer deux heures aux communications du gouvernement qui peut aussi intervenir par nécessité. Les interventions sur des sujets politiques, économiques ou financiers sont soumises à autorisation. Le régime a le souci de faire passer son message et sa volonté au plus grand nombre des italiens et, plus tard, aux voisins ou aux colonisés.

Mussolini soulevait l'enthousiasme des foules rassemblées Piazza Venezia, à Rome lorsqu'il annonçait une « Italie fasciste et impériale… » (7). Le projet colonial a l'Éthiopie pour cible. Suivant encore le modèle d'un Reich expansionniste, le Duce occupera l'Albanie en 1939. La propagande radiophonique a préparé l'opinion des pays concernés. C'est la mission de Radio Bari, installée en 1932 sur la côte orientale de l'Italie méridionale. Elle diffuse à partir d'août 1933 un programme d'information en albanais, Gazeta Shqipetare, soutenu par la Chambre de commerce italo-orientale. L'année suivante, la station sera la première, dans le bassin méditerranéen, à émettre en langue arabe à destination de l'Afrique du nord.

Afin d'entretenir le nationalisme, associé dans la conscience itailenne à la primauté de la Ville éternelle, comme centre mondial de la chrétienté, la radio diffuse de nombreuses causeries religieuses. Le pape Pie XI s'est exprimé sur les ondes pour la première fois en 1931. Le Saint-Siège, dont la station radiophonique a été inaugurée en 1931, en developpe les moyens d'émission afin d'assurer la diffusion universelle de sa mission.
Le 1er avril, le début de « l'Année sainte » (d'une durée de six mois) est l'occasion d'une diffusion en plusieurs langues – italien, anglais, français – par un émetteur en ondes courtes inauguré deux mois plus tôt. En juin, la visite d'une délégation de catholiques chinois est l'occasion pour le pape Pie XI de s'adresser à une communauté lointaine.

Espagne : la radio déstabilise la République
La Constitution adoptée en 1931 a mis en place à Madrid un gouvernement républicain. L'événement a été annoncé par la station Unión Madrid de Barcelone. Ce gouvernement de gauche affronte une opposition de droite qu'il tente de contenir par des mesures maladroites de ses responsables. En août 1932, l'un de deux-ci, le général Sanjurjo, tente de soulever ses partisans par un appel à l'insurrection depuis la station de Séville. Sans succès mais quatre ans plus tard, un autre général, Franco, lance un appel radiodiffusé depuis l'une des îles Canaries. C'est le « Manifeste de Las Palmas », première étape d'une conquête qui s'achèvera 7 ans plus tard par l'établissement de la dictature.

États-Unis : un discours « démocrate »
Franklin Delano Roosevelt est élu en novembre 1932 au moment où la dépression engendrée par le crack boursier de 1929 est à son maximum. Son premier souci est de rétablir la confiance, puits de dynamisme des entreprises, du commerce et des consommateurs. La première urgence est de réduire le nombre des chômeurs.
Il a évalué le profit politique de l'usage de la radio à l'occasion de la campagne électorale de 1928 en soutenant la candidature d'Al Smith (battu par le républicain Herbert Hoover) : « J'ai tenté l'expérience d'écrire et de prononcer mon discours pour le seul bénéfice de l'auditoire radiophonique et pour la presse plutôt que pour l'effet qu'il pourrait avoir sur les délégués à la convention… » (8) Élu Gouverneur de l'État de New York, Roosevelt s'adressera à ses concitoyens par l'intermédiaire des stations locales.

Roosevelt installé dans ses nouvelles fonctions le 4 mars 1933 choisit de rendre compte directement à ses concitoyens. En décembre 1932, le réseau NBC a offert au nouveau Président la possibilité de s'exprimer chaque semaine, s'il le souhaite, pendant un quart d'heure. La première intervention est diffusée depuis la Maison Blanche, le 12 mars à 22 heures. Elle a pour objet de redonner confiance aux Américains dans leur système bancaire en leur expliquant sa nécessité et son fonctionnement : « J'ai conscience que les nombreuses déclarations des assemblées des États ou de Washington, la législation, les règlementations du Trésor exprimées le plus souvent en langage bancaire ou législatif doivent être expliquées au citoyen moyen… »
« Différant par le ton des émissions de Hitler et de Mussolini, qui étaient reçues par le public sur un fond de foules hystériques, les causeries de Roosevelt ressemblaient à un échange d'idées dans une sorte de conseil de famille. » En renouvelant la forme de la communication politique, le Président rend compte avec pédagogie des premières décisions qu'il a déjà prises. C'est un succès. un demi-million de lettres parviennent à la Maison Blanche au cours de la semaine suivante. Marshall Mc Luhan dira plus tard que cette nouveauté médiatique avait « forgé une nouvelle unité tribale… ».
C'est le début de la « démocratie directe ». Au moment où il prenait l'habitude de s'adresser directement au pays, Hitler lui rendait cet hommage : « J'ai de la sympathie pour Mr Roosevelt, parce qu'il va droit à son but par-dessus le Congrès, les lobbies et la démocratie… »

Dans une nouvelle intervention, deux mois plus tard, le 7 mai, le Président esquisse une personnalisation du pouvoir que l'urgence des décisions à prendre impose, de son point de vue. Une sorte d'économie organisée est engagée : « La législation adoptée ou en cours de promulgation peut-être vraiment considérée comme la partie d'un plan bien établi… » Dans le cadre de cette nouvelle volonté, les grandes lignes de ce que l'on connaît comme le New Deal sont exposées : « Nous allons demander au Congrès des lois qui permettent au Gouvernement de soutenir des travaux d'intérêt collectif afin de stimuler l'emploi, directement et indirectement. »
Des programmes de soutien au monde agricole (Farm Relief Bill), d'augmentation des salaires ouvriers (a more fair wage return), de limitation de la durée du travail et de la surproduction sont annoncés. Une réorganisation des transports ferroviaires sera envisagée avec l'assistance du Gouvernement mais le Président se défend du soupçon d'interventionnisme : « On aurait grand tort de considérer les mesures que nous avons prises dans le domaine agricole, l'industrie et les transports comme un contrôle gouvernemental. Il s'agit plutôt d'un partenariat, non dans le domaine des profits qui sont réservés aux citoyens, mais plutôt un partenariat dans la programmation et dans la surveillance de son exécution. »

La propagande de guerre
Le Front populaire, en France, n'a pas su – ou voulu – utiliser à son profit la radio dont le socialisme révolutionnaire avait la charge. Un ministre de la propagande, Ludovic-Oscar Frossard, figure pour la première fois sous ce titre dans le deuxième cabinet Blum (mars-avril 1938). En 1939, le gouvernement Daladier confie l'organisation des contenus de l'information radiodiffusée dans une situation de guerre à un jeune écrivain, Paul Vialar qui suggère de confisquer les postes récepteurs pour limiter les effets de la propagande allemande. En 1940, un Haut-commissariat à l'information sera institué et confié à un écrivain illustre, Jean Giraudoux.

À partir de 1933, les stations allemandes ne se contentent plus de diffuser la propagande nazie à usage interne. L'expansionnisme du IIIe Reich utilise ses émetteurs frontaliers pour préparer certains de ses voisins à une guerre de conquête. La station de Stuttgart diffuse en français les interventions pro-nazies de Gabriel Ferdonnet. Correspondant à Berlin de divers journaux depuis 1927, il sera connu, en France, comme le « traître de Stuttgart » pour avoir rédigé les textes de propagande nazie que lisait un speaker sur l'antenne de cette station. Il sera condamné à mort, pour collaboration, par un tribunal français, en 1945.
Depuis 1936, le gouvernement français a mis en place, discrètement, des contre-feux à l'initiative de deux germanophones, Pierre Berteaux et Pascal Copeau dont les émissions sont, depuis Strasbourg, une réponse à celles de Ferdonnet (9). Leur programme doit contrer l'intense propagande nazie.

Les Anglais reçoivent de Hambourg ou de Berlin les harangues d'un américain converti au nazisme, Lord Haw-Haw (William Joyce). La propagande nazie diffuse également depuis le Luxembourg un programme dont le titre Radio-Humanité tente de tromper l'auditoire communiste. Pendant les années de guerre, la BBC organisera la réponse en utilisant les services d'un journaliste également germanophone, Sefton Demler, présenté sous le pseudonyme de Gustav Siegfried Eins. Les Soviétiques, de leur côté, ne manquent pas d'entretenir l'ardeur des anti-nazis en Allemagne.

La déclaration de guerre en 1939 a pour cause immédiate l'invasion de la Pologne par les armées allemandes, le 1er septembre. Une fausse information est à l'origine de cette intervention. Le 31 août, des hommes de main nazis ont investi le studio d'une petite station, Glivice, proche de l'émetteur de Katowice, en Silésie, à proximité de la frontière avec la Tchécoslovaquie, pour diffuser une proclamation anti-allemande qui ne sera pas transmise mais néanmoins relayée par les grandes stations du Reich et dénoncée comme une provocation qui justifie l'attaque de la Pologne.
C'est le début d'une guerre mondialisée pendant laquelle la radio tiendra un rôle essentiel d'information, de désinformation et de contre-désinformation.

La guerre des ondes
Le Maréchal Pétain, Président du Conseil – le dernier de la IIIe République – désigné le 16 juillet 1940 par le Président de la République Albert Lebrun, s'adresse le lendemain à la nation, par la radio, depuis Bordeaux. Il y prononce la fameuse phrase : « je fais à la France le don de ma personne pour atténuer ses malheurs… »
Il n'est pas illogique que chacun des pays engagés dans la guerre diffuse les informations qui servent sa cause nationale. Ce souci sera, à l'occasion, étendu à la necessité de persuader l'auditoire de l'excellence de son action par une propagande dont le monopole ou le champ de diffusion assureront le succès.

Être réellement informé sera, dès lors, affaire de foi ou seulement de crédulité, mais sûrement une question de patience à la recherche de messages venus de loin ou cryptés par un brouillage.
Les émissions de la France Libre, transmises de Londres par la BBC, sont à cet égard exemplaires. L'appel du général de Gaulle, le 18 juin 1940, a été peu entendu. Les rendez-vous répétés que l'équipe française de Londres entretiendra chez les Français au cours des années suivantes entretiendront l'esprit de résistance qui conduira à la défaite du Reich.

La ligne de démarcation entre la zone sud et la zone nord inclut l'un des deux puissants émetteurs en ondes longues d'Allouis, inauguré en 1939. Il sera affecté à partir de 1941 à la diffusion de programmes à destination des pays occupés. Le second émetteur sera utilisé au brouillage des émissions de la BBC. Deux émetteurs diffusent vers l'Angleterre des émissions de propagande habilement noyée dans une programmation où domine la musique de jazz. Certains auditeurs se souviennent de l'annonce : « Hier spricht Calais ! » (Ici Calais).

De la victoire des alliés à la guerre froide
L'armistice de mai 1945, s'il met fin aux combats, introduit l'opposition entre deux modèles de société, le capitalisme et le collectivisme. Chacune des options aura, pendant près de quatre décennies, le souci de persuader l'opinion de sa supériorité. La radio en sera l'instrument.
L'URSS, dans la tradition de la Révolution d'octobre, a développé très tôt les moyens de diffuser l'idéologie communiste dans des programmes émis dans de nombreuses langues. L'émetteur en grandes ondes de Moscou, Radio-Komintern, a été inauguré en 1927. (10)

Après la fin de la deuxième guerre mondiale, les États-Unis ont entretenu et développé les stations que leur logistique avait apportées au profit des armées en campagne pour la libération de l'Europe tel l'AFN – American Forces Network – qui s'installera durablement en Europe pour opposer un modèle à l'autre, communiste. D'autres le complèteront, VOA – Voice of America –, Radio Free Europe et Radio Liberty. À Berlin, les Américains installent une puissante station, RIAS – Radio in American Sektor – émettant en allemand et en anglais. Les programmes, composés de musique de variétés et de jazz, sont attractifs pour les auditeurs des deux Allemagnes (et au-delà…). Ils fournissent au bloc de l'Est les informations dont les populations sont privées. L'écoute de ces stations peut difficilement être interdite quelle que soit la dissuasion tentée par les gouvernements qui la dénoncent comme « crime idéologique ». On n'est pas, alors, avare d'emphase.

Les pays sous obédience communiste ont, de leur côté, installé de nombreuses stations qui diffusent leur propagande. Elle a peu d'effet en Europe, sinon à l'égard des militants crédules. Elle est mieux accueillie par le petit nombre des auditeurs du Tiers Monde qui y trouvent l'encouragement à un changement de nature révolutionnaire.
« En 1948, une enquête de la BBC montrait que les principales émissions internationales provenaient dans l'ordre de leur importance, de : la Grande-Bretagne, les États-Unis, la Russie, la France, l'Australie, la Hollande, la Belgique, le Canada, la Yougoslavie, la Tchécoslovaquie, l'Italie, l'Espagne, le Portugal, la Roumanie, la Turquie, la Bulgarie, la Pologne, l'Albanie. » (11)
À partir de 1950, la Chine populaire aura le souci de brouiller les émissions du camp adverse. Son activité de propagande internationale réjouira, davantage peut-être, les amateurs à la recherche d'une écoute lointaine sur les ondes courtes que les militants maoïstes !
En Amérique centrale, Che Guevara soulignera dès 1959, le rôle mobilisateur de la radio.

La Conférence de Bandoung qui a réuni, en 1955, les pays dit « non-alignés » parce qu'ils ne se réclament d'aucun des deux blocs – capitaliste ou communiste – développe leur souci d'affranchissement à l'égard des puissances anciennement coloniales qui ont conservé des liens économiques dominants. Le Caire, où le général Nasser a renversé la monarchie égyptienne en 1952, devient le centre de ces mouvements indépendantistes. La radio est un instrument essentiel des mouvements de libération. La station à vocation internationale La voix des Arabes est inaugurée en juillet 1953. Elle diffuse des programmes en cinq langues (arabe, anglais, français, grec, italien). En 1960, on en comptera 22, plus que la France n'en diffuse (19) .

Dans la plupart des pays européens, la radio est exploitée par le secteur public qui les préserve alors d'une autre propagande envahissante, la publicité. Le renouveau libéral, à partir des années 70, a fait disparaître ces obstacles à la liberté d'entreprendre… ou de manipuler les consciences. La publicité qui a envahi les « grilles » de programmes est une forme de propagande dont les bonnes intentions restent à démontrer.

La radio bousculée par l'arrivée de la télévision : prééminence de l'image
On peut tenter d'évaluer l'impact des propagandes totalitaires des années 30, si leurs opérateurs avaient disposé de la transmission de l'image et surtout de l'intervention sur les images.
À la veille de la Deuxième Guerre mondiale, la télévision promet de contribuer à la vérité de l'information grâce à la réalité des images diffusées en direct. La transmission du couronnement du roi d'Angleterre, George VI, en 1937 est une mise en scène élaborée entre le protocole de la monarchie et les exigences des techniciens. Elle indique déjà que le reportage peut être mis en scène.

Le nouveau média se développera dans le grand public en Europe à partir des années 50 dans des institutions de service public qui laissent aux majorités de gouvernement le contrôle des programmes. La continuité de la diffusion en direct laisse (théoriquement) peu d'opportunité de dissimulation de l'événement. Seule la présence d'esprit de celui qui choisit les images à transmettre peut occulter certains épisodes. On doit à cette réaction immédiate des opérateurs de n'avoir jamais vu le général de Gaulle, affligé d'une mauvaise vue, trébucher en descendant d'une estrade. En revanche, voir Khrouchtchev frapper le pupitre de l'ONU de son soulier est un événement médiatique spectaculaire sinon diplomatique.

L'enregistrement magnétique à partir de 1960, puis, une décennie plus tard, les moyens d'intervention a posteriori – montage et effets spéciaux (trucages électroniques et post-production) – permettront la diffusion de contenus satisfaisants pour les pouvoirs, politique puis affairiste lorsque la publicité imposera les contraintes de l'entrepreneur commanditaire.
Depuis les dernières années du vingtième siècle, le développement des images virtuelles permet de créer des images dont la conformité ne cessera de se distancier par rapport à la réalité.
Jean-Jacques Ledos


1. Voir « La radio en U.R.S.S. » in Gavroche n° 61, janver-févier. 1992)
2. Nikola Tesla, un grand savant injustement ignoré dans la galerie des célébrités qui ont développé la radio, avait projeté de construire, en 1900, sur la côte est des États-Unis une station de diffusion mondiale.
3. Détournement de « l'homme au couteau entre les dents ».
4. « Un peuple, un Reich, une Radio ! » sur le modèle de « Ein Volk! Ein Reich! Ein Führer »
5. Selon Hannah Arendt, Mussolini « qui aimait tant l'expression d'"État totalitaire", n'essaya pas d'établir un régime complètement totalitaire et se contenta de la dictature et du parti unique. »
6. Mussolini Arnaldo: Gli eroi della volontà (Les héros de de la volonté). Déclaration sur Radio-Milan le 6 février 1930.
7. « Una ora solenne ha scocàtta per l'Italia fascista e impériale… » depuis le balcon d'où jadis Laetizia Bonaparte assistait au triomphe de son fils Napoléon.
8. Déclaration à Walter Lippmann, citée par André Kaspi in Frankin Roosevelt (Fayard, 1988).
9. « Un Allemand hitlérien, speaker à la Radiodiffusion française (1937-1940) » in Gavroche n° 57/58 (Mai-août 1991).
10. « La radio en URSS » in Gavroche n° 61, janv.-fév. 1992.
11. Fouad Benhalla : « La guerre radiophonique » (Revue Politique et Parlementaire, 1984).