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lundi, 17 juillet 2023

Le traité d'Alaksandu: le mythe de Troie ressuscité dans un document ancien en langue hittite ?

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Le traité d'Alaksandu: le mythe de Troie ressuscité dans un document ancien en langue hittite ?

Marco Scarsini

Source: https://www.ilprimatonazionale.it/cultura/il-trattato-alaksandu-il-mito-di-troia-rivive-in-un-antico-documento-in-lingua-ittita-267006/

Les âpres batailles dans la plaine de Troie racontées par Homère ont façonné l'imaginaire collectif des Européens pendant des millénaires. Nous avons tous lu ou entendu au moins une fois les récits de la colère du puissant Achille, de la fureur de Diomède ou de la loyauté dévouée d'Hector, et nous nous sommes délectés des voyages du rusé Ulysse pour rentrer chez lui après plus de dix ans de guerre. La guerre de Troie occupe une place si importante dans notre patrimoine culturel que, pendant des siècles, les historiens et les érudits se sont efforcés de rechercher sa véracité historique dans des documents ou, comme le grand Heinrich Schliemann, grâce à d'heureuses découvertes archéologiques.

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Le traité d'Alaksandu

En effet, certains indices sur cet événement, qui s'est avéré décidément capital pour les anciens géniteurs de notre civilisation, sont apparus au fil du temps pour matérialiser les rêves des passionnés, jusqu'alors relégués au rang de mythes. C'est le cas du "Traité d'Alaksandu", une inscription en langue hittite qui nous est parvenue en bon état et qui décrit précisément un accord d'amitié et d'alliance entre le roi de Wilusa, Alaksandu, et l'empereur hittite Muwatalli II. Dans ce traité, rédigé par les scribes de Muwatalli, le souverain hittite fait référence à l'ancienne amitié entre Wilusa et Hattuša (la capitale hittite) et à la récente destruction de la cité anatolienne qui, grâce à l'appui hittite, avait été reprise et replacée sous l'autorité du jeune souverain Alaksandu, qui avait échappé à la défaite de son royaume.

Le fait que ce document soit daté de la fin du 13ème siècle avant J.-C. et qu'il évoque la destruction de la ville de Wilusa par des bandes d'Ahhiyawa (terme hittite désignant les Achéens) a conduit de nombreux chercheurs à l'identifier comme le récit historique de la célèbre guerre chantée par Homère, et ce pour plusieurs raisons. Le nom de Wilusa, à la fois en raison de la situation géographique de la ville antique et de l'assonance, est associé à Ilium, l'ancienne Troie ; en outre, Alaksandu, le nom du souverain rétabli sur le trône après sa destruction par les Achéens, ressemble beaucoup à Alexandre, le vrai nom du prince Pâris.

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Divergences avec le mythe de Troie

Certains éléments, cependant, ne cadrent pas, à mon avis, avec cette interprétation. Si cet article ne prétend pas à affirmer la véracité historique, les sources qui nous sont parvenues étant très peu nombreuses et trop circonstancielles pour retracer l'histoire de la "guerre de Troie" en lignes claires, le traité d'Alaksandu présente trop de divergences avec le mythe qu'Homère nous a transmis.

Tout d'abord, la destruction de Wilusa est imputée à un chef de combat du nom de Piyama-Radu ; il apparaît dans plusieurs autres sources parmi les souverains anatoliens de la côte ouest et est décrit davantage comme un brigand et un rebelle contre la souveraineté hittite que comme un grand roi d'une coalition achéenne comme devrait l'être la figure d'Agamemnon. Piyama-Radu nous est également décrit comme le chef d'un contingent achéen, mais certainement pas comme le dirigeant d'une cité, plutôt comme un aventurier, peut-être un mercenaire au service des dirigeants d'Ahhiyawa eux-mêmes. Même le fait que le jeune Alaksandu soit remis sur le trône après la reconquête d'"Ilium" ne coïncide pas avec la version de l'Iliade, puisque Pâris est tué pendant la guerre et, surtout, que toute la lignée de Priam est soit éteinte, soit réduite en esclavage par les souverains achéens. En résumé, si le traité d'Alaksandu se réfère à la chute de Troie, ce qui est probable, il ne s'agit presque certainement pas du même siège que celui chanté par Homère.

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L'autre siège

Mais de quoi parle donc ce document ancien ? C'est une fois de plus la mythologie qui vient à notre secours, car les grands rois achéens, Ulysse, Achille, Ajax, ne sont pas les seuls Grecs célèbres à avoir affronté et conquis la forteresse de Troie, mais avant eux, elle a également été détruite par le grand Héraclès et un petit groupe de fidèles et d'amis guerriers. Selon le mythe, le héros le plus célèbre de la Grèce antique a sauvé la fille de Laomédon, chef perfide de Troie, d'un énorme sacrifice réclamé par la colère des dieux. En échange de ce sauvetage, Héraclès avait réclamé les chevaux divins du roi, mais Laomédon n'a pas tenu sa parole et a poursuivi le héros avec acharnement après que sa fille Hésione a été sauvée. Seul le jeune prince Priam, fils du roi troyen, prend la parole pour défendre l'honorable hôte, mais il est vite réduit au silence.

Quelque temps plus tard, Héraclès revint sous les murs de Troie, non plus en tant qu'ami et invité, mais en tant que conquérant sauvage à la tête d'une petite armée de vaillants héros achéens, dont Telamon (le père de l'Ajax chanté par Homère). Troie tomba bientôt sous la fureur vengeresse d'Héraclès, qui tua Laomédon et tous ses fils, à l'exception du jeune Priam, qui fut épargné pour les paroles aimables qu'il avait autrefois réservées au Grec.

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Analogies avec le traité

Vous ne voyez pas de similitudes avec le traité d'Alaksandu? Le jeune Priam qui, dernier survivant d'une lignée de rois, est reçu sous la protection des plus puissants souverains hittites et rétabli sur le trône, semble ressembler définitivement à la figure d'Alaksandu et à ses vicissitudes ; de même, le mode de guerre du mythe d'Héraclès est très proche de celui rapporté dans les documents qui parlent de cette affaire, puisque l'affrontement est rapide et n'implique pas d'immenses armées et de puissants alliés de part et d'autre comme dans le cas de l'expédition d'Agamemnon. Et puis il y a justement le cas de Piyama-Radu. Ce n'est pas un grand roi, mais un guerrier itinérant, un Achéen (peut-être, ou du moins un parent) qui passe la plupart de son temps sur les terres d'Anatolie et non à régner sur une cité mycénienne. La vie de Piyama-Radu est faite de guerre, d'affrontements, d'aventures, comme celle d'Hercule ! Il est une épine dans le pied des souverains d'Anatolie et des puissants Hittites, précisément parce qu'il ne représente aucun pouvoir institutionnalisé, mais seulement lui-même et, à la limite, son petit contingent de guerriers impitoyables, de guérilleros (tout comme nous sont décrits les héros qui accompagnent Héraclès dans l'accomplissement de sa vengeance).

Le sens des mythes

En somme, si Piyama-Radu doit correspondre à un chef grec, pourquoi serait-ce Agamemnon et non Héraclès, beaucoup plus ressemblant? Le traité d'Alaksandu semble vouloir absolument nous communiquer quelque chose. Il semble nous crier à tous que les mythes, que les aèdes chantaient dans les salles des rois d'Europe il y a des milliers d'années, sont en fait une véritable histoire de nos ancêtres transmise oralement pendant des générations. Il semble nous dire qu'Héraclès n'était pas seulement une belle figure créée pour éduquer les enfants, mais un chef courageux qui a conduit des centaines d'hommes à la guerre et à l'aventure ; il semble nous dire que Troie n'était pas seulement l'heureuse intuition d'un barde d'origine grecque. Serons-nous jamais certains de trouver dans les événements d'Alaksandu et de Piyama-Radu une correspondance avec l'histoire de Priam et d'Héraclès ? Probablement pas, mais bon, n'est-ce point bon de rêver ?

Marco Scarsini

dimanche, 25 novembre 2018

Geopolitics of Turkey in Asia

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Geopolitics of Turkey in Asia

 
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Turkey is a transcontinental power, and, while the European side of the country is secure and calm, the situation could not be more different on the Asian front. The collapse of the Sykes-Picot agreement is disintegrating the territorial borders from within and in the subsequent vacuum of power, major nations seek to carve out their own spheres of influence. All these activities, directly and indirectly, affect Turkey and determine the country’s geopolitical objectives in Asia.
 
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lundi, 30 mai 2016

Los alevíes, del misticismo a la lucha antisistema

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Los alevíes, del misticismo a la lucha antisistema

AVT2_Hac-Bektas-Veli_5345.jpegSin lugar a dudas, a primera vista, el ojo inexperto sería incapaz de distinguir a una persona aleví del resto de musulmanes. Incluso sus centros de culto, decorados en ocasiones con cúpulas y minaretes, podrían pasar, vistos desde el exterior, como una mezquita más. No obstante, a medida que se curiosea con mayor detalle, se dará cuenta de las enormes diferencias existentes entre la comunidad alevi y los suníes y shiíes. Pero, ¿quiénes son los alevíes?

Una fe nacida en las montañas

Los alevíes son fieles pertenencientes a una de las ramas no ortodoxas del Islam. Su tradición bebe de las enseñanzas del místico Hacı Bektaş, que vivió en la península de Anatolia entre 1209 y 1271 d.C. Su filosofía se basaba en el respeto hacia el resto de seres humanos y en la modestia y la equidad como formas de demostrar el amor por Dios y purificar la propia alma. No obstante, lo cierto es que no era teólogo ni llevó a cabo estudios en ninguna madrasa –escuela coránica–, sino que sus conocimientos los adquirió en sus viajes, por sus contactos con diferentes cofradías sufíes y por herencia de las tradiciones de tipo chamánico de su propia tribu, de origen turconamo. De hecho, siempre se mantuvo más cerca de la gente común que de los doctores de la ley islámica.

A Bektaş se le atribuirían poderes de inspiración divina, tales como la adivinación o la sanación, lo que poco a poco iría congregando una cofradía a su alrededor. Así se configuraría un culto que mezclaba ritos islámicos con prácticas chamánicas procedentes de Asia central, a lo que se añadían prolongados períodos de meditación y el uso de sustancias alucinógenas como forma de liberar al espíritu del cuerpo y acercarse a Dios. Todo ello características comunes entre las ramas gnósticas de la religión de Mahoma, presentes en todo el mundo islámico.

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De las tribus turcomanas que seguirían las enseñanzas de Bektaş surgiría la comunidad aleví, la cual se impregnaría, de una forma u otra, de influencias de otros cultos y sectas que arraigarían en la dinámica península de Anatolia. Allí confluirían el shiismo en sus diversas corrientes y el sunismo, además de prácticas ancestrales de origen tribal y procedentes de toda Asia, traídas por las tribus nómadas en sus desplazamientos por el continente. Entre estas influencias se encontraría la de los Ahi, una cofradía religiosa-gremial, creada por el gran maestro Ahi Evren Veli, que bebía de la tradición de la futuwwa, la caballería islámica. Y también los hurufíes, una doctrina islámica cabalística con claras influencias shiíes y con elementos preislámicos.

Posteriormente, diversos acontecimientos reforzarían la autoconciencia de los alevíes como una secta particular. En primer lugar las matanzas de shiíes que el Sultán Selim I el Severo llevó a cabo en la Anatolia ante la amenaza de los persas safávidas –los cuales harían del shiísmo la religión oficial de Irán– y que afectarían a las comunidades alevíes por sus semejanzas doctrinales con esa rama del islam. En segundo término, también en este período, los dirigentes otomanos reforzarían el sunismo y su ortodoxia, hasta ese momento algo ambigua. Todo ello obligaría a los alevíes a huir y esconderse en las zonas montañosas. Allí, separados del resto de la comunidad musulmana, a salvo de la represión imperial y sin influencias de otros cultos, desarrollarían su fe y consolidarían la doctrina aleví. No obstante, es notable comprobar que no se les llamaría como tal hasta el siglo XIX, siendo hasta entonces considerados herejes, blasfemos o, simplemente, ateos.

Un culto particular

En definitiva, en la forja de Anatolia se configuraría una fe muy especial, que si bien compartiría infinidad de creencias, símbolos y prácticas con alguna de las ramas del Islam, diferiría en muchas otras. Así pues, los alevíes creen –de manera similar al Islam shií– en la trinidad formada por Dios, Mahoma y Alí –yerno del profeta–, además de divinizar a diversos personajes, como el propio Hacı Bektaş o el Shah Ismail. Por otra parte, algo curioso de los alevíes es que no creen en la muerte como un hecho definitivo, ni en Dios como un juez que condena al cielo o al infierno en función de los actos en el mundo terrenal, sino en la reencarnación del alma en otro cuerpo tras el fin de cada vida, y en la unidad del mundo con la divinidad. En función de ello consideran a sus grandes héroes y heroínas como reencarnaciones del propio Alí. Asimismo, y aunque como el resto de musulmanes también consideran sagrados la Biblia o la Torá, no usan el mismo Corán que los musulmanes suníes, sino el Corán que supuestamente fue memorizado por Alí.

Por otro lado, no practican rituales fundamentales del Islam suní, tales como el ramadán o las cinco oraciones diarias, sino que tienen su propio ayuno, los doce primeros días del mes de muharram –el primer mes del calendario musulmán–, y además practican ayunos para purificarse cuando sufren alguna dolencia física o espiritual. De la misma forma, el ritual de la oración aleví es distinto, cumpliendo la función tanto de ceremonia religiosa como de reunión social, y llevándose a cabo en medio de bailes y al son de la música. Todo ello configurando un rito cuya función es tanto la de unirse con Dios como la de purificarse del mundo material.

Además, algo muy característico de los alevíes, que remarcaría sus enormes diferencias con el resto de musulmanes, es la concepción igualitaria entre hombres y mujeres dentro del espacio para el culto. Y es que, a diferencia de los que ocurre en las mezquitas suníes o shiíes, no existen espacios separados para cada género en el ineterior de los templos, y tanto mujeres como varones pueden encargarse de dirigir la oración de la comunidad.

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Los otros hijos de Atatürk

En 1919, tras la Primera Guerra Mundial, lo que quedaba del mesmembrado Imperio Otomano, y que constituiría el territorio de la futura República de Turquía, quedaría dividida y ocupada por las potencias vencedoras de la contienda. No obstante, esta situación no iba a durar mucho, pues la resistencia nacionalista, dirigida por Mustafa Kemal Atatürkpadre de los turcos–, se reagruparía en el noroeste, iniciando la guerra de independencia. Los alevíes también se unirían a la guerra, atraídos por los valores que promulgaba el líder turco, tales como el laicismo, el republicanismo o la igualdad de género, el cual además rendiría respetos a su querido santo Hacı Bektaş.

Los turcos saldrían victoriosos del enfrentamiento contra los invasores y en 1923 se proclamaría la República. No obstante, y si bien el Estado turco se construiría impulsado por un nacionalismo de tipo secular, en el cual política y religión debían estar separados en dos ámbitos diferenciados, en la práctica no todas las religionas vendrían a gozar del mismo respeto. El objetivo de Mustafa Kemal no sería tanto el erradicar la religión, consciente de la importancia que tenía ésta para muchos de los habitantes del Estado que pretendía diseñar, construir y gobernar, sino someterla al control burocrático del aparato estatal, adecuándola así a su propósito de configurar una conciencia nacional desde cero. Las instituciones creadas para ello fueron el Directorio de Asuntos Religiosos y el Directorio de Fundaciones Religiosas. No obstante, estas instituciones no representarían la pluralidad religiosa de la nueva república, sino que impondrían el Islam suní mayoritario como la versión verdadera de la fe. Con ello, las comunidades no suníes, entre ellas los alevíes, quedarían totalmente excluidas, los cuales, a pesar de conformar alrededor de un 20% de la población hasta nuestros días, serían obligados a reprimir su identidad cultural, haciéndose pasar por suníes si querían ser tratados como miembros iguales de la nación turca en la esfera pública.

Los alevíes en Turquía se concentran especialmente en la zona central de Anatolia
Los alevíes en Turquía se concentran especialmente en la zona central de Anatolia

A partir de ese momento los alevíes, que se habían visto sometidos a diversos tipos de persecución, comenzarían a experimentar discriminación a muchos niveles. Por ejemplo, sería muy difícil encontrar alevíes en puestos prominentes de la burocracia o el ejército. Y, por supuesto, la educación religiosa que se llevase a cabo en los colegios sería exclusivamente suní. Además, los clérigos suníes y sus mezquitas recibirían sueldos y financiación estatal, un privilegio del que jamás gozarían las comunidades alevíes, cuyos centros de culto, las llamadas cemevis, ni siquiera serían considerados como tal.

Posteriormente, durante las primeras décadas de la república, se producirían una serie de levantamientos protagonizados por el pueblo kurdo, que reclamaba para sí la autodeterminación y la formación de un Estado propio, algo que los tratados internacionales del fin de la guerra les habían negado. Muchos kurdos-alevíes participarían en dichas revueltas –las cuales serían brutalmente aplastadas–, lo que llevaría a que a lo largo de las sucesivas décadas el discurso hegemónico kemalista equiparara a los alevíes con los kurdos, justificando así ataques contra los primeros. Si tenemos en cuenta la articulación del nacionalismo kemalista alrededor de una fuerte identidad étnica turca, que considera a los kurdos como un pueblo atrasado y oscurantista o, en el mejor de los casos, como turcos que han olvidado su turquicidad y que hay que reeducar, podemos entender el estigma con el que los alevíes fueron marcados.

A pesar de todo, lo cierto es que los alevíes fueron de los grupos más receptivos a la hora de aceptar la nueva coyuntura, viendo el proceso de secularización impulsado por el Estado como un avance, y no cuestionaron su posición dentro del orden político hasta décadas recientes. De hecho, con la llegada del sistema pluripartidista en los años 40 muchos alevíes votarían al Partido Democrático (DP), heredero de la tradición republicana. Asimismo, aún a día de hoy continúan siendo uno de los apoyos sociales más amplios de los partidos políticos kemalistas.

Cuando las calles se tiñeron de rojo

Más adelante, el aumento de las libertades propiciado por la constitución de 1961 llevaría al desarrollo de organizaciones alevíes, impulsadas además por unas élites intelectuales que comenzarían a fomentar el desarrollo de una identidad particular. No obstante, sería en los 70  cuando la polarización política turca alcanzara su punto culmimante, la época en que los alevíes adquirirían un mayor y más determinante peso político. Durante este tiempo, los partidos conservadores turcos se inclinarían cada vez más hacia la derecha, identificándose política e ideológicamente con el espectro reiligioso suní. A su vez, los partidos de izquierdas de inspiración marxista también se radicalizarían, atrayéndose hacia sí a los grupos nacionalistas kurdos, y también a los alevíes. Serían los particulares años de plomo para Turquía, que vio como las guerrillas de uno y otro bando tomaban las calles, con el ejército y las fuerzas de seguridad del estado participando activamente en las batallas urbanas, apoyando a los grupos de extrema derecha, y con más de 20 asesinatos al día durante la mayor parte de la década.

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Todo ello vendría a ligar irremediablemente a la comunidad aleví con el eje político de la izquierda radical, siendo considerados un grupo subversivo; además se reforzaría su equiparación con el pueblo kurdo, que además en las décadas siguientes vendría a adquirir la connotación de terrorista. Esto tendría una enorme importancia especialmente a partir del golpe de estado de 1980, cuando la represión estatal hacia los movimientos de izquierda, de los kurdos y de cualquier tipo de oposición política se dispararía. Pero de hecho, incluso antes, durante los propios años 70, los grupos de extrema derecha llevarían a cabo progroms contra comunidades alevíes, como es el caso de la masacre ocurrida en 1978 en la ciudad de Kahramanmaraş, perpetrada por los Lobos Grises y que acabaría con la vida de más de cien personas. Este tipo de sucesos se repetirían en las décadas siguientes, como en la masacre de Sivas de 1993, esta vez a manos de un grupo de radicales salafistas.

La síntesis turco-islámica

En definitiva, de nuevo los alevíes se verían definidos por el discurso dominante de las instituciones del Estado como una amenza para la estabilidad de la nación. Un hecho que se uniría a la potenciación por parte de los militares de la síntesis turco-islámica a partir del golpe de Estado de 1980, que pretendía movilizar la religión para combatir la movilización política antiestatal, y que desarrollaría una conciencia nacional turca reforzada con una buena dosis de conservadurismo religiosos de tipo suní, que volvería a situar a la comunidad aleví ante una encrucijada: asimilar el Islam suní mayoritario como propio o verse abocados a la marginación. Los alevíes volvían así a la casilla de salida de los primeros días de la república con Mustafa Kemal.

No obstante, a su vez sería el proceso de neoliberalización económica iniciado en los 80 el que pondría en cuestión el modelo estatocéntrico de modernización, impulsando las posturas que favorecían a los individuos frente al Estado. Una situación fomentada también por las cada vez más estrechas relaciones con la Unión Europea (UE) y la Organización para la Seguridad y la Cooperación Europea (OSCE) en las sucesivas décadas, que pedirían a Turquía aplicar de manera progresiva una serie de criterios fundamentales en materia de derechos humanos. En este contexto, los alevíes, los cuales se sumarían también al éxodo rural hacia los grandes núcleos urbanos turcos, donde les sería complicado seguir con sus rituales tradicionales, empezarían a reclamar con mucha más fuerza su reconocimiento oficial como un colectivo diferenciado de la mayoría suní, lo que llevaría asociado la demanda de una serie de derechos políticos y sociales determinados.

Los alevíes y el nuevo sultán

alev220-BIG.jpgPosteriormente, tras la década de 1990, los movimientos islamistas articularían una identidad nacional alternativa que definiría la nación como una civilización otomana esencialmente islámica, en contraste con la identidad oficial, laica y occidentalizada. De esta nueva concepción de la república turca nacería, en agosto de 2001, el Partido de la Justicia y el Desarrollo  (AKP por sus siglas en turco), liderado por el actual presidente, Recep Tayyip Erdogan. Quince meses después se celebrarían las elecciones, iniciándose una nueva era para la política de la república.  Y es que cuando en 2002 el partido AKP se alzara victorioso en las elecciones, se iniciaría un proceso que cambiaría la política turca hasta la actualidad. Por un lado, el poder que los militares habían ostentado hasta el momento sería puesto bajo control de una forma que no había ocurrido en los casi 70 años de la república turca. Por otro, la cuestión kurda se pondría sobre la mesa con el diálogo de por medio, un cambio fundamental tras una guerra de casi 20 años que se había cobrado decenas de miles de vidas. En definitiva, los discursos frente a temas fundamentales en la historia política turca cambiarían radicalmente.

También respecto a la cuestión aleví habría novedades, pues sería el primer gobierno de la historia de Turquía en tomarse en serio oficialmente el problema aleví. Esta postura se vería plasmada en lo que se denominó el “Alevi Opening” (la Apertura Aleví), celebrándose distintos talleres y reuniones  entre los representantes de la comunidad aleví y los miembros del gobierno, llegando a participar el propio Erdogan en una de las celebraciones de ruptura del ayuno aleví. No obstante, las verdaderas intenciones del líder turco pronto saldrían a la luz, comprobándose que la verdadera voluntad del partido AKP era más la asimilación dentro de la mayoría suní que el reconocimiento de los derechos de la minoría. Así, las cemevi siguen siendo consideradas meros centros culturales –a pesar de que el Directorio de Asuntos Religiosos se financia con los impuestos de todos los habitantes de Turquía, alevíes incluidos– y las llamadas de atención que el Tribunal Europeo de Derechos Humanos ha dado a Turquía respecto a esta cuestión –por ejemplo, respecto a la discriminación que sufren los alevíes en las escuelas al ser obligados a aceptar el programa educativo de religión, exclusivamente suní– no han tenido ningún resultado. Asimismo, la identidad religiosa de los alevíes continuaría utilizándose como arma política contra la oposición y las protestas sociales, dándose casos de puros insultos hacia la comunidad.

Por último, la masiva participación de los alevíes en las protestas sociales que estallaron en 2013, las llamadas protestas de Gezi, su posicionamiento junto a los partidos de izquierda y de oposición frente al conservadurismo de Erdogan, así como la perseverancia de la comunidad en seguir reclamando sus derechos y la postura contraria que han manifestado respecto a la postura del gobierno turco en Siria, han acentuado el antagonismo entre los alevíes y el AKP.

En definitiva, la lucha de la comunidad aleví deberá continuar. No obstante, los esfuerzos asimilatorios de un partido AKP cada vez más beligerante contra el disentimiento interno, dispuesto a fomentar fracturas sociales de todo tipo para asegurar su mantenimiento en las estructuras de poder, no parece presentar un panorama optimista a corto plazo para las reivindicaciones de los alevíes.

mardi, 02 avril 2013

Ivresse turque

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Ivresse turque

Ex: http://www.dedefensa.org/

Depuis la “réconciliation” entre Israël et la Turquie (coup de fil sympa de Netanyahou à Erdogan le 22 mars, excuses pour l’attaque de la “flotille de la paix” en mai 2010, excuses acceptées), l’“idée turque” d’une “Grande Turquie” a envahi les commentateurs en Turquie, surtout des commentateurs proches d’Erdogan, exactement comme le fait une ivresse. Il s’agit par conséquent du reflet fidèle de l’ivresse qui tient effectivement sous son empire les dirigeants turcs, essentiellement Erdogan et son ministre Davutoglu. Mais cette ivresse-là, qu’on pourrait qualifier de “syndrome du printemps” (sans qualificatif nécessaire d’“arabe”, les Turcs étant de la partie), n’est pas spécifique aux Turcs…

• Il y eut donc d’abord les “excuses” de Netanyahou à Erdogan. D’une façon générale, elles ont été présentées en Turquie comme une victoire incontestable de la susdite Turquie. (Certains commentaires émettent parfois des réserves, comme celui de Kadri Gursel, du quotidien Hurriyet, le 26 mars 2013 : «The normalization step between Israel and Turkey has been taken only because Turkey has moderated its tough stance.».) Netanyahou a agi essentiellement sous la pression d’Obama, qui voulait obtenir quelque chose qui puisse être vue comme “propre sur soi”, de façon à pouvoir être véhiculée par le système de la communication comme un résultat diplomatique notable, voire “a diplomatic breakthrough”, à l’issue de son voyage en Israël et alentour. Le “triomphe” turc a donc été particulièrement peu apprécié par les Israéliens… DEBKAFiles résumait ce constat le 23 mars 2013, en expliquant par ailleurs les raisons pour lesquelles c’était bien plus la Turquie qui avait besoin de cette réconciliation, qu’Israël. Dans cette citation, on a le récit de l’intervention de Netanyahou dans une grotesque mise en scène faite pour complaire à Sa Majesté Obama trônant devant Air Force One et, surtout, la tonalité des réactions israéliennes à l’attitude turque (soulignées par nous en gras).

«Israeli Prime Minister Binyamin Netanyahu granted the Turkish Prime Minister Tayyip Erdogan a face-saver for ending their three-year rift out of willingness to crown US President Barack Obama’s three-day visit with an impressive diplomatic breakthrough. He swallowed Israel and its army’s pride and, at the airport, with Obama looking on, picked up the phone to Erdogan and apologized for the killing by Israeli soldiers of nine Turkish pro-Palestinian activists in 2010 aboard the Mavi Marmara, which was leading a flotilla bound on busting the Israeli blockade of the Hamas-ruled Gaza Strip. The crowing comment by Turkish Foreign Minister Ahmet Davutoglu - “Turkey’s basic demands have been met; we got what we wanted” – was out of place, spiteful and ill-mannered

• Un journaliste turc au cuir tanné par l’expérience montre effectivement une certaine retenue dans la description de cette “réconciliation”, triomphale du point de vue turc… Voici les quelques considérations que nous propose Hüsnü Mahalli, dans Al-Akhbar, le 26 mars 2013 :

«Erdogan and his foreign minister Ahmet Davutoglu wanted to leave behind all these complex calculations by strengthening their alliance with the US. This meant a reconciliation with Tel Aviv, according to the conditions set during US Secretary of State John Kerry’s latest visit to Ankara. This could be the reason behind last week’s backtracking by Erdogan on his former statements on Zionism, announcing that he had not meant what he said and that he is neither against Judaism nor Zionism, but opposed to the policies of Israel concerning the rights of Palestinians.

»This new position was enough for US President Barack Obama to convince Israeli PM Benjamin Netanyahu to call Erdogan and apologize for the Israeli army’s actions against the Mavi Marmara ship in May 2010. But Netanyahu only gave verbal promises about lifting the siege on Gaza, which was the third fundamental condition set by Turkey for reconciliation with Israel.

»However, these indicators are not the only reason for Israel’s apology to Turkey. Ankara does not hide its dire need for the support of the Jewish Lobby in the US, which had threatened to sabotage Erdogan’s visit to Washington at the end of this month unless he reconciles with Tel Aviv. It is expected that the reconciliation will be reinforced with a surprise visit to Ankara by Netanyahu very soon and before Erdogan’s visit to the US.»

• Quoi qu’il en soit des modalités des “excuses” israéliennes, la presse turque fut aussitôt envahie de grandioses descriptions de l’avenir du Moyen-Orient sous la férule et l’inspiration d’Erdogan, y compris avec des cartes décrivant la nouvelle situation, comme celle de Taha Akyol, le 25 mars, lors d’une émission de la BBC. Depuis les cartes des neocons largement diffusées dans les années 2002-2004 sur le “nouveau Moyen-Orient” redessiné par la démocratie américaniste, on a pris l’habitude de se lasser de cette sorte de représentation à la fois graphique, enfantine et hypothétique des grands événements préparés par des maîtres-cerveaux, maîtres du monde. Cette fois, donc, il s’agit du cerveau d’Erdogan, et l’article de Bülent Kenes, rédacteur-en-chef de Today's Zamman, du 26 mars 2013, est significatif. Le quotidien est le premier de Turquie, et décrit comme très proche des milieux gouvernementaux. L’article décrit une nouvelle “Grande Turquie”, éventuellement une “Grande Nation Sunnite” puisqu’on y est, la création d’une nation kurde et l’éclatement de la Syrie et de l’Irak (ceci expliquant cela et l’ensemble étant évidemment connecté de causes en effets). Les circonstances, le thème développé, la position du journal, tout indique donc qu’il s’agit d’un reflet très précis de la pensée de la direction turque, Erdogan-Davutoglu. Voici l’entame et la conclusion de l’article…

«The region is changing at an incredible pace. It is as if the socio-political energy built up over the century is bursting in geopolitical volcanic eruptions. The artificial geopolitical straight jacket, tailored by France and England for the region in the wake of the First World War, is proving unfit. We are at the threshold, or even right in the middle of, a process where similar transformations will occur or are already occurring in the Middle East after more than 20 years since the end of the Cold War, which radically altered the political and strategic map of the world. The signs are everywhere that a new Middle East is emerging. But what sort of Middle East? Will it be “The New Middle East” described by Shimon Peres in his book written in the 1990s? Or will it be a Middle East with completely different dynamics and effects? […]

»…It is possible that the Kurdish entities in Iraq and Syria may be one of the founding elements of the New Turkey, which may come to adopt a federal character through radical changes to its political and administrative system. In the end, the emerging conditions, circumstances and alliances of the New Middle East in the making may leave no choice to Iraqi and Syrian Kurds other than to collaborate with Turkey to establish a common future and share a common fate. Furthermore, this may put Turkey in a position where it has to confront Iran and the wider Arab world, and also trigger existential concerns in Israel, thereby making these two countries in need of each other once again. I think it wouldn't be an overstatement to suggest that Israel's apology and Turkey's eagerness to normalize its ties with Israel should be seen within the context of this scenario. What do you think?»

What do we think ? Bof… La description des lendemains turcs qui chantent implique énormément de conditions et d’acceptations tacites, sinon d’encouragements de la part de divers protagonistes, voisins, etc., dont nombre ont les dents longues et leurs propres idées. Elle implique la participation active des Kurdes, lesquels n’ont pas montré grand enthousiasme ces derniers jours. Le Weekly Comment de l’institut Conflicts Forum de Beyrouth, du 29 mars 2013, remet certaines perspectives en ordre, en y introduisant les petits calculs qui se cachent souvent derrière les grandes manifestations théâtrales…

«Turkey’s Acceptance of an Israeli apology, and the PKK Peace Process: These two events are not unconnected to the angry divisions within the anti-Assad camp, described above: there is presently a surfeit of hubris in the Arab world over who is the leader of the Sunni world: with Erdogan, the Emir of Qatar and the Saudi king all claiming the title. Erdogan and the Emir, though suspicious of each other, nonetheless are bound by a common interest in seeing the Muslim Brotherhood come to power in the region. They believe that it is they who should be directing and stage-managing President Assad’s downfall, in the wider interests of the MB coming to power. Ranged against them are Saudi Arabia and the Emirates, who reject this claim, to insist that it is they, rather, who should manage the overthrow of President Assad, but in the interests of the MB not coming to power. President Obama seems undecided who to anoint, but Washington, over recent months, has noticeably cooled towards Turkey’s stewardship of the northern front against Syria. (The US Ambassador in Ankara has publicly criticised Turkish facilitation of the al-Nusra Front, which the US regards as an al-Qae’da offshoot). This drift by the US away from Erdogan, has caused anxiety in Ankara, and the sense was that this strategic relationship needed to be repaired. Erdogan is due to visit Washington shortly, but the ‘lobby’ (AIPAC) has been threatening to disrupt the smooth running of Erdogan’s DC visit, to protest at his anti-Israeli rhetoric. Erdogan’s somewhat triumphant acceptance of Netanyahu’s apology (which has irritated the Israelis considerably), is hoped to allow Turkey to again become central in the US calculations on Syria, and central to the future of the Kurds…»

…Décidément, que reste-t-il de la politique triomphante d’Erdogan, jusqu’à l’été 2011 ? Il semble y avoir une dérive impétueuse et inarrêtable vers une sorte de climat de mégalomanie parcourue de schizophrénies et paranoïas diverses, qui caractérise aujourd’hui l’état d’esprit général au Moyen-Orient, notamment des dirigeants du camp musulman allié au bloc BAO. A croire que la pensée-Système et bloquée du bloc BAO ne cesse d’infecter tout ce qu’elle touche, – mais c’est tout cru, sinon tout vu, d’ailleurs. Il en résulte que l’hubris règne, ajoutant au désordre des situations celui des esprits et des ambitions et créant un climat de déstabilisation générale dans cette région qui fut considérée longtemps comme si fragile pour qu’on pût envisager d'y susciter le moindre changement ; et une déstabilisation générale qui, de plus en plus systématiquement, prend la liberté de se retourner très souvent contre les déstabilisateurs eux-mêmes, par conséquent elle aussi animé d’un caractère de très profond désordre par rapport à elle-même et à l'orientation qu'on lui donne.

La Turquie et ses ambitions hégémoniques s’inscrivent donc dans un contexte général de désordre, particulièrement dans les psychologies des dirigeants, éventuellement avec l’aide des poings lorsqu’il s’agit des Saoudiens et des Qatariens, et sous l’aile d’une politique US évanescente et partagée d’une façon chaque fois différente entre la Maison-Blanche, le département d’État, peut-être le Pentagone à mesure de l’installation de Hagel, et bien sûr le duo Congrès-AIPAC. On finirait par croire que le courant “le désordre précédant les causes du désordre” prend également une dimension géographique pas loin d’être invertie… Aujourd’hui, le désordre psychologique est plus autour de la Syrie, dans la coalition anti-Assad, que dans le camp d’Assad en Syrie même. A cet égard, on doit évidemment ajouter les manœuvres à l’intérieur du camp rebelle et la psychose islamistes des divers pays du bloc BAO. DEBKAFiles signale (le 30 mars 2013) que le bloc BAO fait évoluer son embargo des armes en songeant à l’étendre du seul Assad aux rebelles eux-mêmes, pour empêcher une revente aux islamistes des armes données aux “modérés”. Hier, on se battait pour lever l’embargo, aujourd’hui on se mobiliserait plutôt pour le resserrer… Les nouvelles positions qui seraient acquises par les rebelles sur la frontière syro-jordanienne et syro-israélienne, variant selon les sources (DEBKAFiles le 25 mars 2013 et Antiwar.com le 30 mars 2013), font craindre que des islamistes trouvent des bases sur ces frontières et menacent par conséquent la Jordanie et Israël ; de là à imaginer qu’Assad pourrait juger avantageux de laisser aux islamistes quelques points stratégiques sur les frontières sensibles de la Syrie pour exporter le désordre en précipitant encore plus les psychologies de ses adversaires dans le susdit désordre.

…Ainsi cohabitent étrangement, dans les pays coalisés pour avoir raison de la Syrie, les ambitions les plus échevelées concernant une région entière débarrassée de la Syrie, et les pulsions extérieures de désordre de la “guerre syrienne” venues de Syrie vers eux qui veulent s’en débarrasser. Ce n’est finalement que rajouter du désordre au désordre, – sans savoir rien de plus, toujours, du sort de sa cause originelle...

vendredi, 13 mai 2011

Anatolia: Una indoeuropeizacion frustrada

por Olegario de las Eras
 

La herencia indoeuropea, concretada en una jerarquía de valores y principios y en un tipo humano determinado que desde la Prehistoria han dado forma a ciclos de civilización análogos, conforma el nervio de la comunidad constituida por los pueblos europeos, comunidad sentida y vivida más allá de las contingentes «fronteras nacionales». En efecto, es un hecho que las sucesivas oleadas de pueblos septentrionales, migrando en grupos masivos y compactos, de celtas a eslavos de helenos a germanos, fueron los materiales sobre los que en el transcurso de milenios cristalizaron la práctica totalidad de pueblos de nuestro continente. Siendo esto así, resulta aparentemente contradictorio que un territorio como el de la península de Anatolia en el que se documenta una presencia indoeuropea desde fines del III milenio a. n. e. y que ha visto sobre su suelo a hititas, luvitas, helenos, tracios, frigios, persas, gálatas o latinos entre otros, se perciba por parte de los europeos como algo ajeno. Pero la realidad es que los indoeuropeos no pudieron permanecer en todas partes donde llegaron: «Los indoeuropeos no siempre han vencido»: no tenemos más remedio que dar la razón, aunque sea por una vez, a J. P. Mallory.

     La llegada a las costas del Mediterráneo de grupos indoeuropeos produjo siempre necesariamente enfrentamientos con las poblaciones autóctonas: de la derrota y sometimiento de éstas dependió la posibilidad de supervivencia de aquellos. En realidad, la historia de las civilizaciones indoeuropeas del Mediterráneo (Hélade, Roma, la Céltica...) es la historia de una incesante lucha contra el elemento humano y espiritual aborigen1. Éste fue el caso también de los pueblos que hablaban las lenguas indoeuropeas del grupo anatolio, pueblos que conservaban firmemente su tradición religiosa y jurídico-política indoeuropea en el momento de asentarse en sus sedes históricas2. A su llegada la península se encontraba densamente poblada por gentes pertenecientes al complejo racial mediterráneo, su cultura calcolítica, cuyas raíces se encuentran en el creciente fértil,  se estructuraba en esos momentos alrededor de centros urbanos que dominaban amplios espacios y su religión, omnipresente en el registro, estaba determinada por los cultos ctónios y de fecundidad. Con toda probabilidad la lengua hablada fue la que posteriormente será conocida como hático. Si bien los resultados de su inmigración fueron devastadores3, el impacto demográfico no alteró el predominio del substrato neolítico como han demostrado los trabajos de M. Senyürek: el impacto numérico del elemento indoeuropeo, étnicamente nórdico4, fue demasiado pequeño como para perdurar física y espiritualmente por demasiado tiempo. Con el transcurso de los siglos, la dünne Herrenschicht, el delgado estrato señorial hitita, resultó fatalmente «hurritizado», «mesopotamizado» y «haticizado» y la destrucción del Imperio a fines del II milenio por obra de grupos frigios procedentes de más allá del Helesponto signará la desaparición de la propia lengua hitita. Los llamados reinos neohititas surgidos tras el desastre en el borde meridional del antiguo Imperio utilizarán el luvita en sus textos. Esta lengua, hablada en las zonas occidental y meridional de la península por comunidades en las que el elemento indoeuropeo parece haber presentado una mayor densidad,  resistió el embate, sobreviviendo en el licio5.

    A ojos del observador contemporáneo podría parecer que la presencia de los helenos en  áreas de la franja costera occidental, de los grupos licios y lidios y los aportes indoeuropeos de las invasiones del 1200 acabaría por vincular el Asia Menor a Europa. Sin embargo, tanto los propios testimonios lingüísticos, que nos hablan de la profunda acción del sustrato no indoeuropeo en las lenguas del grupo anatolio, tanto antiguas como recientes, como las influencias no helénicas que podemos descubrir cada vez con mayor peso en toda la Jonia nos demuestran que el destino de los hititas volvía a repetirse en el occidente y el sur peninsular: en ambos ámbitos los cultos de naturaleza telúrica, enraizados en el neolítico anatolio, van recobrando fuerza mostrando la abrumadora presencia de una población «no receptiva» a las concepciones espirituales indoeuropeas6.

     Tras el periodo de dominio persa, las conquistas de Alejandro y de Roma son los últimos empujes en la historia de Anatolia de raíz occidental7. Empujes políticos que tienen como efecto la integración de este territorio en la ecúmene helenística y en el Imperio pero una escasa relevancia en términos étnicos8. Y es en época romana cuando se constata un fenómeno ciertamente revelador: la muy temprana y fácil cristianización del ámbito anatolio que contrasta con el carácter de secta y muy minoritario de los seguidores del Galileo en la parte occidental del Imperio y la misma Grecia9, fenómeno paralelo al resto de áreas no europeas del Imperio.

     El fracaso de la renovatio imperii de Justiniano y las posteriores concepciones teocráticas de lejanas raíces próximo-orientales preludian el destino «no europeo» de Anatolia: Bizancio se percibe por los occidentales romano-germánicos como algo profundamente ajeno: la matanza de latinos de 1182 y las conquistas cruzadas jalonan este desencuentro. Pero este destino quedará sellado a partir de 1071 cuando los selyúcidas ocupen la mitad oriental de Anatolia. Tres siglos después toda Anatolia pertenece a los otomanos. Los procesos de «turquización» étnica y lingüística y de islamización comenzados en el siglo XI, que culminan con las masivas deportaciones contemporáneas de griegos y armenios, borrarán todo resto lingüístico (excepción hecha del pueblo kurdo, cuya lengua pertenece al grupo iranio, que está padeciendo un etnocidio por parte del estado turco del cual no es este lugar para hablar) e ideológico indoeuropeo de la península. Sólo los rasgos nórdicos que muy de tarde en tarde se pueden observar en algún campesino de Capadocia, probablemente de sangre gálata, dan testimonio de aquellos antiguos ciclos de civilización hoy completamente agotados.    

 



1 Véase J. Evola, Rebelión contra el mundo moderno, Buenos Aires 1994, especialmente la Parte II capítulos V-X y la recopilación de textos del mismo autor sobre esta cuestión publicada por Ed. di Ar bajo el título La Tradizione Romana.

2 Véase, por ejemplo, E. Masson, Le combat pour L’inmortalité. Héritage indo-europeen dans la mytologie anatolienne, París 1991 y O. J. Gurney, Los hititas, Barcelona 1995, especialmente pp. 72 y ss.

3 P. Garelli, El Próximo oriente asiático, Barcelona 1982, pp. 27 y A. Romualdi, Los indoeuropeos. Orígenes y migraciones, Barcelona 2002, p. 173 n. 50.

4 V. Christian, «Die frühesten Spuren der Indogermanen in Vorderasien», en Rasse 1935 2ª año, nº 4, p. 121 y ss. y H.F.K. Günther, Rassenkunde des Jüdischen Volkes, Munich 1930, pp. 50-54. La extensión del rito de incineración ha dificultado enormemente el diagnóstico tipológico de los grupos conquistadores indoeuropeos: Gurney (op. cit., pp. 160 y ss.) llama la atención sobre las semejanzas entre los ritos de incineración descritos en las tablillas hititas y los homéricos. Entre las nuevas poblaciones que no incineran a sus muertos también se documentan tipos alpinos, inexistentes en Anatolia con anterioridad. Por otro lado, el proceso de «hurritización» del Imperio hitita se ve acompañado por una difusión desde el este del tipo armenoide o pre-asiático, actualmente muy bien representado entre la población turca (H.F.K. Günther op. cit., pp. 20-40).

5 Para una breve visión de conjunto de la problemática de las lenguas indoeuropeas del grupo anatolio véase F. Villar, Los indoeuropeos y los orígenes de Europa, Madrid 1996, pp.289 y ss. 

6 Baste recordar el culto de Ártemis Efesia como diosa de la fertilidad, el de Attys o el de la «frigia» Cibeles. 

7 Es preciso mencionar la aventura gálata que se inicia con los movimientos de diferentes grupos célticos en el siglo IV a. n. e. Algunos de estos grupos, apenas unos 20.000 individuos en su conjunto, de los cuales unos 10.000 guerreros, tras numerosas vicisitudes fueron asentados por Antíoco Soter en las llanuras frigias y sobre el Halys, tierras que desde entonces recibirán el nombre de Galacia. Derrotados por Atalo I, a cuyo sepulcro pertenecen las impresionantes estatuas helenísticas del guerrero gálata moribundo y de su caudillo quitándose la vida, fueron concentrados en su territorio donde dominarán a una población anatolia mucho más densa. Se helenizarán progresivamente pero conservarán su lengua hasta la cristianización. Sobre los gálatas véase H. Hubert, Los celtas y la civilización céltica, Madrid 1988, pp. 297-307.

8 Una aproximación muy interesante a los estados helenísticos en el que se aplican las categorías interpretativas de G. Dumézil puede verse en C. Preaux, El mundo helenístico, Barcelona 1984, 2 volúmenes.

9 Véase, por ejemplo, M. Simon y A. Benoit, El judaísmo y le cristianismo antiguo, Barcelona 1972, pp. 54.

samedi, 29 août 2009

La chauve-souris turque, sa propagande, sa diplomatie

La chauve-souris turque, sa propagande et sa diplomatie

du pacte germano-soviétique jusqu'à nos jours

090823a090823090823b"Je suis oiseau voyez mes ailes. Je suis souris vivent les rats". (La Fontaine, fable "La Chauve-souris et les deux Belettes")

D'un naturel optimiste, on imagine volontiers, écrivant à la veille du 70e anniversaire du pacte germano-soviétique, toutes les vérités que nos médiats ne manqueront pas de rappeler autour de ce 23 août 1939. On pense donc aux innombrables et chaleureuses recensions qu'aurait méritées le film de Wajda "Katyn". N'ayant pas été écrites, encore moins publiées par les gros journaux parisiens, elles demeurent en réserve pour cette occasion. Au talent près du cinéaste, l'information de base ne diffère pas.

Quant à moi, m'étant exprimé sur le partage soviéto-hitlérien de la Pologne de 1939, je ne puis ici que renvoyer à l'expression précédente de mes sentiments invariants. (1)

Les lignes qui suivent chercheront seulement à compléter, aujourd'hui, tant soit peu l'information de mes lecteurs, auditeurs, amis et concitoyens, autour d'un aspect particulier de cette fresque tragique de la Seconde guerre mondiale, au travers de la diplomatie turque, et de l'étonnante complaisance de l'occident à son égard. On peut admirer techniquement la continuité de cet État oriental (2).

En occident, il existe une abondante documentation sur tous les événements que nous évoquerons. Physiquement libres d'y recourir, généralement capables de la comprendre, les historiens et commentateurs agréés ne méritent aucune excuse, deux générations plus tard, quand ils se refusent à tenir compte des faits. La nullité intrinsèque des gens qui se disent journalistes ne saurait, non plus, tenir lieu de justification à leur silence servile. Car, en somme, pour eux, dans sa froideur impavide et sélective, la méthode de l'Histoire de la Seconde guerre mondiale de Sir Basil Lidell Hart, monumentale mais partiale et partielle (3), continue de faire secrètement autorité. Voilà un domaine où les choix arbitraires ne se discutent pas.

Pour les bons esprits, l'alliance entre l'occident et l'URSS paraît aller rétrospectivement de soi, et tous les incidents de parcours n'en demeurent que points de détail.

Commençons donc par rappeler que l'alliance initiale entre cette même Union Soviétique, dirigée par Staline, et l'Allemagne nazie a bel et bien fonctionné, à balles réelles, à chaud et à sable, entre 1939 et 1941.

Rendant possible la mainmise de Hitler sur la moitié du continent, elle porte la responsabilité de toutes les conséquences qu'elle a entraînées. Évoquons notamment l'horreur la plus couramment citée : la déportation et l'extermination des Juifs de l'Europe occupée. Tautologie à mémoriser : sans cette occupation, rendue elle-même possible par l'alliance de Staline, le génocide n'aurait jamais eu lieu sur une telle échelle. Souvenons-nous bien aussi qu'on ne sache pas que le mouvement communiste international ait rompu le 22 juin 1941 l'accord de 1939 scrupuleusement respecté par lui. Mais, à la grande surprise du secrétaire général du parti le génial Staline, son déloyal partenaire déclencha l'Opération Barbarossa. On n'est jamais trahi que par les siens.

On ne doit donc pas s'étonner, la réalité globale de cette alliance étant systématiquement occultée, que ni ses causes lointaines, ni ses conséquences particulières ne soient ordinairement tenues pour dignes d'intérêt. Ainsi, devant la rareté des commentaires sur le film Katyn, sachant le silence étouffant le souvenir de l'héroïque guerre d'hiver des Finlandais, mesurant la réprobation dont une propagande post-soviétique continue de poursuivre la résistance au stalinisme de peuples entiers, comment s'étonner de l'obscurité qui entoure, aujourd'hui encore la ligne suivie par le gouvernement turc pendant la Seconde guerre mondiale. Ceux-là même qui feignent de le considérer comme européen, s'obstinent paradoxalement, à ne rien vouloir connaître de l'Histoire contemporaine de cet État.

Ce 19 septembre, on pourra commémorer le 70e anniversaire de la jonction entre les armées  de Staline et de Hitler à Brest-Litovsk. Gageons que l'on demeurera généralement plutôt sobre sur ce point oublié.

Les événements périphériques n'en passeront que plus aisément à la trappe.

Varsovie tombe le 27 septembre. Le 28 septembre est signé le traité d'amitié germano-soviétique scellant le partage de la Pologne entre hitlériens et staliniens.

Il se trouve que le même jour exactement on paraphait le traité anglo-franco-turc d'Ankara.

Or les historiens ont pris l'habitude de dater du 19 octobre cet accord tripartite: mais il s'agit de la date de ratification du document. La négociation, préparée de longtemps par les trois diplomaties, se déroule en fait exactement entre la signature de l'alliance entre l'URSS et le Reich, et la prise de la capitale polonaise.

Les papiers Hoppenot (4) en fournissent l'avancée en détail, mais on peut aussi trouver les reflets de la face émergée de cet iceberg dans n'importe quelle collection de l'Illustration, avec photo pleine page du plénipotentiaire français, le général Weygand. On voit jour après jour la progression des tractations. Le légendaire "sauveur de la Pologne" en 1920 (5), se trouve à Ankara en septembre 1939.

À ce même moment la diplomatie turque est dirigée par un personnage essentiel de l'Histoire contemporaine de son pays, Mehmet Sükrü Saradjoglou (6). En juillet 1942, au décès du président du conseil, le Dr Refik Saydam, il prendra les rênes du gouvernement. Et il les conservera jusqu'en août 1946. Les curieux trouveront en annexe (7) de cette chronique le texte publié en 1946 du rapport secret de Von Papen à la Wilhelmstraße relatant leur entretien à Ankara en août 1942.

Le comportement de la Turquie s'est fondé, pendant toute la durée de la guerre, sur une pratique de la "neutralité active" qui se nomme aussi "double jeu".

Dans la fable de La Fontaine "La Chauve-souris et les deux Belettes" la première déclare ainsi : "Je suis oiseau voyez mes ailes. Je suis souris vivent les rats".

Or, à la différence du théoricien et praticien français oublié de ce même "double jeu", Marcel Bucard, qui sera fusillé en 1945, la mémoire de l'habile Saradjoglou s'immortalise dans la pierre, ou plutôt dans le béton précontraint du stade de 50 000 places qui porte son nom et accueille à Istanbul l'équipe de podosphère de Fenerbahce. En effet, dès le 23 février 1945, 10 jours après le bombardement de Dresde et appliquant les dispositions du traité signé en 1939 avec la France et la Grande-Bretagne son gouvernement déclara courageusement la guerre à ce qui restait des puissances de l'Axe.

Qu'on ne se méprenne pas cependant : si Saradjoglou a pu chercher à tromper les Allemands, et notamment l'ambassadeur Von Papen, son propos reposait sur la volonté d'observer la ligne constante du kémalisme. Le fondement en est posé par l'accord soviéto-turc de 1921. Celui-ci avait été théorisé au sein de l'Internationale communiste dès 1920 par Radek et par la conférence de Bakou. Dans la pratique, le soutien léniniste avait permis la victoire définitive de Mustafa Kémal en 1922. Les communistes s'étaient partagé l'Asie mineure et le Caucase avec les kémalistes en 1920-1922 comme ils se partageront l'Europe orientale avec les hitlériens en 1939-1940. Aujourd'hui encore dans la Mémoire officielle de l'État turc on appelle cela guerre de libération. Il s'agit du premier acte du tiers-mondisme.

Ainsi avaient été détruits en 1921 les trois États indépendants du Sud Caucase : l’Azerbaïdjan, l’Arménie et la Géorgie. Le 31 mai, l’Azerbaïdjan est occupé par la 11e Armée rouge. Quatre mois plus tard, l’Arménie doit céder la moitié de son territoire à l’envahisseur turc, le reste passant sous le contrôle de l’Armée rouge. Quant au dernier pays, la Géorgie, bastion occidental entre kémalistes et soviétiques, il tombe à son tour face au projet soviéto-turc pour le Caucase. Les populations grecques d'Asie mineure (Smyrne et son hinterland, Trébizonde et la république du Pont) seront symétriquement éliminées par la "grande catastrophe" de 1922. Au cours de la même année les 3 pays sud-caucasiens sont inclus dans une prétendue "République socialiste fédérative soviétique de Transcaucasie".

Certes, tant qu'il demeura partagé entre l'influence des deux régimes totalitaires de Berlin et de Moscou, le gouvernement Saradjoglou saura faire preuve d'éclectisme. Ainsi au premier il empruntera un souci de liquidation des minorités auquel il ajoutera une notion fiscale inscrite dans la loi 4305 du 12 novembre 1942 établissant un impôt exceptionnel sur le capital au taux différencié selon la religion des contribuables : les musulmans (groupe M) payeront 5 % ; les juifs "dönmeh" convertis à l'islam (groupe D) 20 % ; les chrétiens et les non-musulmans (groupe G comme "giaours" infidèles) 50 % et jusqu'à 236 %; les 8 000 personnes qui ne purent payer furent envoyées en camp de travail près d'Erzurum. On n'a jamais entendu dire ni que le gouvernement d'Ankara ait jamais fait repentance de cette législation discriminatire, ni qu'il ait accepté d'en dédommager les victimes, ni que l'on envisage de débaptiser le stade Saradjoglou. Les critères de Copenhague ne posent d'ailleurs aucune de ces conditions.

En feuilletant les papiers jaunis de septembre 1939, on découvre que Saradjoglou s'était rendu en URSS pour examiner les conséquences du pacte Molotov-Ribbentrop. Il publia une déclaration datée d'Odessa le 24 septembre. À cette date Weygand se trouvait en Turquie, représentant la IIIe république. Une chose préoccupait Saradjoglou. En son absence, mais en son nom, on allait traiter avec les occidentaux. Cet accord devait se révéler extrêmement profitable pour son pays. Le projet comportait l'obligation future d'entrer en guerre (ce que la Turquie fit, en février 1945 comme indiqué plus haut). Mais il fallait ne pas contrarier en quoi que ce soit les accords fondamentaux soviéto-turcs de 1921. Or cette position ne résultait aucunement du secret diplomatique : on la trouve clairement exposée dans "l'Illustration" qui n'y voit rien à redire, lors même que l'URSS s'apprête à dépecer la Pologne, liée à la France et à l'Angleterre, mais aussi la Roumanie, liée à Ankara par les fragiles et incompréhensibles accords balkaniques.

Or on doit se représenter que l'entrée en guerre, contre l'Allemagne mais très tardivement, s'échangeait contre l'annexion par la république kémaliste d'un territoire appelé depuis septembre 1938 république du Hatay. La France avait accepté en juin de le céder aux Turcs comme gage unilatéral d'amitié. Simplement cette actuelle province turque avait, jusqu'en 1936, fait partie de la Syrie confiée à la France puissance mandataire au lendemain de la première guerre mondiale sous le nom de sandjak d'Alexandrette. Cette province constitue aujourd'hui encore une pièce du contentieux turco-syrien. À l'époque, le recensement français donnait sur 220 000 habitants, seulement 85 000 Turcs contre 108 000 Syriens (62 000 alaouites, 24 000 chrétiens et 22 000 sunnites), plus 25 000 Arméniens, 5 000 Kurdes et 1 000 Circassiens. Ce petit district allait donc être abandonné, au mépris du droit des gens, contre l'avis de ses habitants dans le but de faire de la Turquie une alliée.

Or, cette générosité, à sens unique, si bien conseillée par l'Empire britannique, qui lui-même ne cédait rien, se révélait aussi illusoire que déshonorante. La diplomatie turque de la chauve-souris disait aux démocrates occidentaux : "je partage vos valeurs" ; aux puissances totalitaires elle déclarait admirer leurs belles réussites. Toujours : "Je suis oiseau voyez mes ailes. Je suis souris vivent les rats"…

Aujourd'hui elle tient le même discours à l'Union européenne et à l'Organisation de la Conférence islamique auxquelles elle prétend appartenir simultanément. Encore et toujours : "Je suis oiseau voyez mes ailes. Je suis souris vivent les rats".

Car la recette constante de la politique extérieure d'Ankara plus encore que celle de la Sublime Porte, consiste à ne jamais contracter quelque chose qui ressemble à une alliance permanente et générale. Elle ne conclut que des accords ponctuels, limités dans le temps. Strictement souverainiste et jacobine, elle ne peut donc s'identifier à une communauté supranationale, à l'Europe moins qu'aucune autre. Pour cette raison et pour un certain nombre d'autres, on ne peut que récuser la candidature de ce pays à l'Union européenne.

Apostilles

  1. cf L'Insolent des 8 avril Katyn un film magnifique de Wajda et 9 avril Katyn le poids historique du mensonge et du crime.
  2. Soulignons qu'il dispose de traditions diplomatiques plus anciennement ininterrompues que celles de l'Angleterre. Ce qui, chez celle-ci remonte à Élizabeth Ire et surtout à Cromwell (XVIIe siècle) s'enracine en Turquie dans un tuf déjà riche et puissant à l'époque de la prise de Constantinople (XVe siècle) dont la Sublime Porte n'a jamais dédaigné non plus de gérer, en partie, l'héritage. À côté de cela, la France, dont chacune des ruptures historiques successives, en 1792, en 1815, en 1879, en 1944, et enfin la décolonisation, a lobotomisé l'intelligence officielle, fait figure d'une enfant naïve et docile.Il devrait aller de soi que la Chine, autrement dit la "république populaire" fondée en 1949, souvent présentée pour État millénaire, supporte encore moins la comparaison : ses élites n'ont de l'Étranger qu'une vision complètement caricaturale et une information à peine supérieure à celle de l'Américain moyen.
  3. Ce qui figure dans les 729 pages lumineuses de l'édition française passionnera certainement le lecteur mais on s'étonnera aussi de ce à quoi l'auteur ne consacre pas une seule ligne.
  4. Henri Hoppenot, diplomate français qui rallia la France libre, fit don en 1978 de ses dossiers aux Archives Diplomatiques où ils sont classés à la rubrique "Papiers d'envoyés".
  5. Le général Weygand fut, entre les deux guerres, considéré comme le "sauveur de la Pologne" par les Français, aux yeux des Polonais le vainqueur de la guerre polono-soviétique s'appelait Pilsudski.
  6. Mehmet Sükrü Saradjoglou (1887-1953) ancien cadre jeune-turc, siégea dans tous les gouvernements kémalistes de 1924 à 1946. Il présidera jusqu'en 1950 le club de Fenerbahce, et mourra dans son lit en 1953. On orthographiera de préférence à l'ancienne manière, puisqu'elle existe, car elle se révèle plus proche en français de la prononciation du phonème turc. La graphie "Saracoglu", agrémentée de signes diacritiques inconnus de l'orthographe française, prête trop à confusion.
  7. cf. texte du Rapport secret de Von Papen publié en 1946.

JG Malliarakis

samedi, 16 mai 2009

La face sombre de la Turquie, incompatible avec l'Europe "bien-pensante"

La face sombre de la Turquie, incompatible avec l'Europe 'bien pensante'

090509"Douleur et honte", titrait le quotidien turc Milliyet le 6 mai. La veille 44 personnes avaient été massacrées au cours d'une noce dans le village kurde de Bilge. Et le même journal déplorait dès lors que "la face sombre de la Turquie" ait scandalisé l'opinion mondiale.

Le ministre de l'Intérieur évoque, comme motivation "l'hostilité entre deux clans familiaux" liés aux protecteurs de village. Besir Atalay, déclare : "Cet acte ne s'est pas produit par hasard. On ne peut pas expliquer cet événement par un coup de folie, il a été prémédité".

En tout état de cause le scénario brille par sa sauvagerie. La cérémonie de mariage se terminait, quand  les assaillants, armés de fusils mitrailleurs et de grenades, ont fait feu, pendant plus d'un quart d'heure, sur des gens désarmés. Ils ont arrosé de balles les habitants de plusieurs maisons. Au nombre des victimes tuées : la jeune mariée, son époux, les parents, la petite sœur âgée de quatre ans, et l'imam du village, ainsi que 16 femmes, dont 3 enceintes. Au total, plus de 40 orphelins. Deux jeunes filles rescapées ont sauvé leur vie en se cachant sous les cadavres des victimes, jusqu'au départ des tueurs. Ceux-ci ont pris la fuite à la tombée de la nuit, à la faveur d'une tempête de sable.

Dès le lendemain, les médiats turcs utilisaient une technique toujours efficace : la surinformation. Et de citer une série de conflits récents entre clans rivaux. On emploie ainsi le mot passe-partout de règlement de comptes. Les actes de vendetta constitueraient, assure-t-on, une pratique coutumière dans la région. Ils font des dizaines de victimes chaque année. On parle aussi de "crime d'honneur".

Cette expression n'excuse pas la barbarie. Mais elle permet de mettre tout cela commodément au débit de l'arriération régionale de l'est anatolien. On emploie cette expression géographique, pour esquiver son caractère ethnique. Les statistiques mondiales diffusées par la CIA donnaient, en avril 2009, le nombre  très précis de 76 805 524 pour évaluer le compte futur des habitants, à fin juillet, de la république unitaire forgée par Mustapha Kemal. Mais le pourcentage des Kurdes n'est indiqué que de façon beaucoup plus vague, "autour de 20 %" . L'identité nationale des "Turcs de la montagne" n'est toujours pas reconnue officiellement par Ankara (1), sauf quand il s'agit d'expliquer, en les leur imputant, certains faits d'apparence particulièrement choquante.

Un des suspects, lors de son interrogatoire, aurait servi une version trop vite reprise par la complaisance de certains médiats, y compris occidentaux. L'attaque s'expliquerait en tant que représailles exercées par sa famille à l'encontre de celle de la mariée. Celle-ci aurait préféré donner en mariage la jeune femme à un groupe rival. "Quelqu'un de la famille de la fiancée avait violé une fille de notre famille. Nous avions demandé que la fiancée nous soit donnée en mariage. Ils ont refusé et ont en fait donné la fille à une famille qui est ennemie de la nôtre".

Selon le ministre de la Justice Sadullah Ergin, la question d'honneur concernant une femme ne saurait constituer le vrai motif. "Il existe nécessairement, dit-il un mobile financier". Et il évoque un conflit pour des élevages de poissons près du village.

Sur onze personnes interpellées, onze versions différentes.

Et un universitaire, spécialiste des traditions ancestrales de la région, interrogé par le quotidien Hurriyet, souligne par ailleurs l'incompatibilité absolue du mode opératoire de ce massacre abominable avec les règles du "crime d'honneur".

Les suspects ont été arrêtés avec leurs armes. Or le matériel de guerre ainsi utilisé fait partie de la dotation allouée par le gouvernement d'Ankara aux quelque 60 000 auxiliaires kurdes recrutés depuis 1985 afin de lutter, contre la guérilla marxiste-léniniste du PKK, qui endeuille le pays depuis maintenant 25 ans.

Ces milices n'ont certes pas inventé les armes à feu . Elles n'en détiennent pas non plus le monopole. Mais leur existence permet de les faire circuler légalement dans toute la région. Les bons esprits demandent donc la dissolution de ces groupes, arguant aussi du fait que leurs hommes de main se trouvent régulièrement impliqués dans des affaires de drogue ou de viols.

C'est bien en cela que Milliyet a raison de parler de "la face noire de la Turquie". L'expression qui prévaut, depuis 1996-1997, désigne "l'État profond". Cette réalité occulte régente le pays, sous le drapeau de sa "laïcité" et de son idéologie jacobine.

Car depuis 1996, la preuve matérielle a été administrée, de façon spectaculaire, de l'existence bien concrète et de la nature de cet "État profond".

Des liens étroits associent en un même système mafieux, un certain nombre de forces réputées laïques, au service desquelles, ailleurs les "loups gris", comme, ici, les milices de "protecteurs de villages" exécutent certaines basses œuvres. Ceux-ci en assurent la sous-traitance dans le sud-est anatolien, où sévit la rébellion kurde du PKK.

Que s'est-il passé en novembre 1996 pour faire date dans la révélation de ces réseaux de pouvoir ?

Rappelons qu'à l'époque la bien-pensance européenne ciblait uniquement les activités criminelles attribuées aux rebelles du Kurdistan. Or, un malencontreux accident de la route renversa toutes les insinuations des dirigeants et des propagandistes d'Ankara.

Il révélait qu'en fait l'État turc lui-même opérait en relation avec la mafia.

L'événement clef se produisit fortuitement, près de Susurluk, dans la charmante province de Balikesir, sur la route menant de la capitale au port égéen appelé aujourd'hui Izmir. Le 3 novembre, bêtement, une Mercedes un peu trop rapide était percutée par un camion. Dans le coffre du véhicule en lambeaux, les gendarmes allaient bientôt découvrir 5 pistolets de différents types et calibres, deux mitrailleuses MP-5, des silencieux pour ces armes et deux appareils d'écoutes.

Lorsqu'on identifia les corps, on découvrit qu'il s'agissait de personnages dont l'association n'était pas prévue par les programmes officiels. Se trouvaient à bord, en premier lieu un chef policier Hüseyin Kocadag et un ancien dirigeant des loups gris recherché vainement depuis 18 ans par les forces de la sûreté. Ce dernier, Abdullah Catli, disposait sous une identité falsifiée d'un authentique "passeport vert", réservé en principe aux représentants officiels de l'État. Sa maîtresse Gonca Uz considérée comme un agent du MIT, le service de renseignement militaire turc, se trouvait également à bord.

Curieusement le ministre de l'Intérieur de l'époque, Mehmet Agar, qui était directeur général de la police avant d'être élu au parlement sur la liste de Mme Ciller, contribua par ses déclarations à géométrie variable à soulever encore plus de suspicions à propos de l'accident. Agar nia tout d'abord la présence de Catli dans la voiture. Plus tard, il devait affirmer, non moins faussement, que Kocadag et le quatrième personnage, un excellent parlementaire, étaient en train d'emmener Catli à Istanbul pour le livrer aux forces de sécurité.

Seul survivant du drame, l'honorable député Sedat Bucak s'en tira avec une fracture de crâne et une jambe cassée. Membre du parti gouvernemental de Mme Tansu Ciller, élu de la belle région d'Urfa, il n'était autre que le chef de la tribu Bucak. Celle-ci fournit en nombre les rangs des forces paramilitaires connues sous le nom de "gardiens de villages". Alors qu'il était emmené à l'hôpital il prévint ses hommes de main qui récupérèrent dans la voiture un sac blanc contenant 10 milliards de livres turques.

En octobre 2005, l'insoupçonnable Sedat Bucak interviendra comme témoin lors du procès de Leyla Zana. Il cherchera à enfoncer cette courageuse ancienne députée du parti kurde DEP, affirmant qu'elle représentait ou qu'elle opérait une liaison permanente avec le PKK.

D'effroyables règlements de compte continueront donc pendant de longues années encore à endeuiller le sud est anatolien.

On voit mal comment l'eurocratie avec ses beaux principes politiquement corrects pourrait s'entremettre entre les opérateurs armés. L'armée turque, jusqu'à nouvel ordre représente une part de la légitimité internationale et même de la crédibilité du pays. Elle se montre encore décidée à utiliser tous les moyens pour maintenir l'unité de l'État, y compris en s'alliant avec des chefs tribaux et les réseaux violents et mafieux. Ainsi le 8 mai, on apprenait qu'à Ankara le porte-parole de l'Etat-Major récusait les critiques, suscitées par "l'incident" du 5 mai, à l'endroit des protecteurs de villages. De son côté, le parti islamo-conservateur utilise les procédures de l'Europe pour contre carrer le reliquat militaire kémaliste. Et, enfin, la guérilla, avant tout dédiée à la cause révolutionnaire, persistera à incendier et ensanglanter la montagne kurde.

Pour toutes ces raisons, et quelques autres, je crois franchement très prématuré de laisser entrer la Turquie dans l'Union européenne.

 

Apostilles

  1. Quoique les deux concepts "kurde" et "alevi" ne se recoupent que très partiellement, il en va de même pour la minorité religieuse alevi. Henri Lammens tend à démontrer que cette branche hérétique tardive de l'islam est crypto-chrétienne. Systématiquement persécutée par les fonctionnaires de la "Diyanet", direction des Affaires religieuses, cette minorité ne semble guère préoccuper les grandes consciences professionnelles.
JG Malliarakis