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mercredi, 13 novembre 2013

Le marché transatlantique va soumettre l’Union Européenne aux USA

TTIP : Le marché transatlantique qui va soumettre l’Union Européenne aux USA

par Roberto Fiorini

Ex: http://fortune.fdesouche.com

Article de Roberto Fiorini initialement publié dans le Magazine Terre et Peuple n°57 – Automne 2013

Des négociations sont en cours pour préparer le grand marché transatlantique, ce nouveau marché unique entre les USA et l’UE. Cette zone de libre échange sans droits de douane, est en préparation depuis des décennies et devrait aboutir d’ici 2015. Les marchands aux commandes nous la présentent comme une évolution, inoffensive et bénéfique pour prolonger une croissance amorphe. Mais il est évident que les USA vont aussi neutraliser (définitivement ?) le potentiel politique de l’Europe, tout en mettant en laisse nos économies.

 

 

Le nom de code de cette opération de soumission de l’UE est désormais TTIP : Transatlantic Trade and Investment Partnership (1). Le volet de négociations qui s’est ouvert le 17 juin 2013, a surtout été médiatisé grâce à l’affaire d’espionnage des américains à l’encontre de leurs « alliés » européens .

L’esprit du projet économique masque d’autres ambitions

L’ensemble économique « occidental » qui va ainsi se constituer rassemblera 820 millions d’habitants et pèsera près de 50 % du PIB mondial, et 30 % des flux commerciaux. L’ «Occident», enfin réalisé, nous éloignera de nos propres intérêts géopolitiques, en consacrant, encore un peu plus, le règne de l’argent.

Les élites des deux entités aux manettes nous disent qu’il faut créer ce nouvel espace libéral afin de redonner un souffle à la croissance: ils espèrent au mieux une progression supplémentaire de 0,5 % du PIB de la zone UE et de 0,4 % pour le PIB des USA. Cette évolution n’est pas à la mesure des enjeux, car pour récréer de l’emploi il faudrait passer les 2 % de progression du PIB par an.


D’après Jacques Sapir, « si l’on regarde le taux de croissance sur longue période de la France, on voit qu’il est passé de 2,6% par an de 1980 à 1989, dans une période de libéralisation régulée des marchés à 1,8% par an de 1990 à 2007, dans une période de libéralisation déréglementée ». (2). Histoire de rappeler que le libéralisme « dérégulé » ne tient pas ses promesses. Pour 2014, on nous prévoit à peine, entre 0,5 et 0,9 % de croissance…

La fin des barrières douanières

Avant que ce projet n’aboutisse, chacune des deux parties devra faire des concessions dans ces négociations dites bilatérales.

Les négociateurs envisagent de supprimer les barrières douanières entre les deux zones, mais ces taxes aux frontières sont déjà faibles (4 % de moyenne). Une baisse potentielle des prix de revient de 4 %, qui ne profitera aux consommateurs que si les industriels concernés, baissent réellement leurs prix de vente. Sinon, cela augmentera leurs marges. Dans le contexte de compétition mondiale où l’air du temps sanctifie la compétitivité, que choisiront-ils à votre avis ?

Pour les états les conséquences seront autres: ces recettes douanières supprimées seront autant de ressources en moins, qui ne seront pas compensées ! Avec ce nouveau manque à gagner pour les caisses du pays, il faudra raboter encore quelques millions sur notre défense, notre santé, où notre sécurité…

L’ambigüité des barrières non tarifaires

Le plus gros changement, et donc le plus grand péril, viendra de la baisse des « barrières non tarifaires », qui sont des normes « qualitatives » qui sont imposées aux entreprises par le législateur européen, afin de façonner le commerce, tel que nous le voulons.

On parle ici de normes de sécurité, écologiques ou sanitaires qui représentent pour certains produits, des surcoûts augmentant le cout final de 10 à 20 %. Ces formes de protectionnisme s’imposaient déjà à nos entreprises, qui en supportaient le coût, face à une concurrence qui n’avait pas autant de contraintes.

Ces normes qui devront être harmonisées à l’issue de l’accord atlantique, que certains appellent déjà accord OTAN, pourront alors s’imposer au reste du monde, comme atout offensif dans la compétition économique mondiale. Ou comme boulet si les autres refusent ce que l’on voudra leur imposer, comme précédemment la taxe carbone, ou toute autre norme de développement durable… Protectionnisme à peine dissimulé.

Dans la vision Anglo-Saxonne du commerce, le principe de précaution est un frein à la liberté d’entreprendre: il faut être le premier à faire du fric avec une idée, et tant pis si au passage, on empoisonne quelques clients trop crédules. Il est donc évident que le principe de précaution instauré par Chirac dans la constitution française devra être abrogé.

Les secteurs visés par la négociation sont nombreux

De nombreux sujets sont posés sur la table des négociations, tous porteurs de leurs risques ou de leurs opportunités, selon que l’on se place d’un côté ou de l’autre: agriculture, agroalimentaire, matières premières, électronique, textiles, chimie, énergie, produits manufacturés, produits pharmaceutiques, accès aux marchés publics…

Sans oublier l’ouverture du secteur des services, (qui pèse 70 % de notre PIB) ou l’exception culturelle, défendue par la France et qui entraverait le déferlement de productions culturelles US sur le vieux continent.

Tout un programme de libéralisation. Mieux qu’un discours de Thatcher ou de Reagan, sans que les peuples aient à donner leur avis ! Mais comme certaines lois pourraient déplaire aux multinationales, ces dernières ont annoncé qu’elles pourraient se pourvoir en justice contre certaines des lois qui naitront dans cet occident Otanien ! La ploutocratie dans toute sa splendeur !

Les commissaires européens, travailleront sur mandats des pays pendant ces négociations ; mais certains points d’accroches sont déjà connus. Sur l’agriculture d’abord et surtout. Il faudrait réduire la PAC (Politique Agricole Commune) et donc la production autochtone européenne, pour se mettre un peu plus en dépendance alimentaire des multinationales US.

L’Europe ouverte à qui veut bien la prendre

15000 entreprises sont officiellement habilitées à faire de la préconisation aux parlementaires européens (lobbying). De nombreuses victoires peuvent être portées à leur actif: certaines entreprises demandaient que les semences non référencées dans le « catalogue » officiel (déterminé par les apprentis sorciers) ne puissent plus être plantées. L’UE leur a donné raison (directive du 12/07/2013) !

Pour le rinçage à l’acide lactique des carcasses de viandes, autorisé aux USA, plus besoin d’attendre, l’UE l’a aussi autorisé depuis mars 2013 ! (3)

Aux USA le lobbying a aussi fait interdire les petits jardins individuels: les peuples devront acheter, un point c’est tout. Produire pour son propre compte sans débourser un centime n’est plus envisageable dans le monde qu’ils nous préparent. Ni ici, ni là bas.

Parmi les grands gagnants, on pense d’abord à Monsanto, qui souhaite nous mettre en esclavage alimentaire, grâce à ses semences stériles, qui doivent être rachetées obligatoirement chaque année. Finie l’autosuffisance de nos agriculteurs, qui replantaient l’année suivante d’anciennes graines.

« Demain, ce sont les lobbies agricoles américains qui exigeront l’ouverture des frontières européennes aux produits OGM. Le blé Monsanto, qui n’avait, parait-il, pas quitté les laboratoires pousse actuellement gaiement dans l’Oregon. »(4) Blé, soja, maïs, tomates transgéniques…

Du côté des normes que l’UE bloque encore, on pense à cette viande bovine aux hormones ou encore à ces poulets rincés à l’eau de javel… en attendant les viandes clônées brevetées !

Dans le domaine numérique, on sait que Facebook, grâce aux lois US, devient propriétaire, à vie, de tout ce qui est publié sur ses pages. Des comportements contestés par l’Europe, mais pour combien de temps encore ? Big Brother a soif de données fiables pour organiser ses révolutions de velours…

Alors pourquoi l’affaire Snowden, à ce moment-là des négociations transatlantiques?

L’affaire d’espionnage est sortie à point nommé pour déstabiliser la délégation US, et renforcer certaines positions Européennes. Qui ignore encore qu’avec le réseau Echelon (5), les USA espionnent qui ils veulent ? Depuis bien longtemps les services de l’intelligence économique française tirent la sonnette d’alarme: grâce aux serveurs de messageries de Microsoft (Outlook, Live, Messenger…), Google, Yahoo, Black Berry, Apple ou Skype, les USA mènent une guerre économique impitoyable en surveillant la correspondance de leurs alliés.

Obama avait menacé la France de représailles massives, si elle maintenait l’exception culturelle. Il fallait rétablir l’équilibre des négociations car Barroso en fidèle toutou de ses vrais commanditaires, était revenu à la charge, dès le 17 juin, rappelant que la France voulait exclure le secteur audiovisuel du mandat des négociations commerciales avec les États-Unis: “Cela fait partie de ce programme antimondialisation que je considère comme totalement réactionnaire” (6).

Les Français ne lâchent pas la culture ? Qu’à cela ne tienne les USA ne veulent pas que l’on touche au secteur des assurances, ni à leur finance (trop pourrie ?). Donnant, donnant ? Ou trop de choses à cacher ?

Les américains pourraient aussi nous imposer leurs normes comptables, avec des conséquences qui sont à évaluer pour nos entreprises.

Les conséquences stratégiques de ces négociations

Au-delà de l’aspect purement commercial, les conséquences d’un tel accord sont mortelles pour l’indépendance politique de la France et de l’UE. C’est même toute l’histoire d’une mise en dépendance organisée des pays du vieux continent qui continue de s’écrire.

Ceux qui préparent le gouvernement mondial travaillent depuis très longtemps à cet ensemble transatlantique. Qui se souvient de l’Union Latine… qui regroupait la France, la Belgique, la Suisse, l’Italie, et la Grèce. Présidée par Félix Esquirou de Parieu, fervent partisan d’une union monétaire « prélude aux fédérations pacifiques du futur » (= étape préalable au gouvernement mondial), celui-ci proposa en 1867 d’introduire une monnaie commune dans une « Union européenne occidentale »,dont le nom pourrait être changé dans le cas où les États-Unis manifesteraient leur désir d’y participer.(7)

De Gaulle ne disait-il pas la même chose dans son discours du 15 mai 1962 ? (8). Il alertait sur la nature de la construction européenne qui se mettait en place. Il voyait bien qu’elle transformerait les pays européens en simples satellites des USA, comme on parlait alors des satellites de l’URSS: des pays dépendants, asservis et soumis, y compris militairement. Il parlait de fédérateur qui viendrait de l’extérieur, sous entendu pour prendre la direction de l’UE !

Bruxelles, Barroso, et la commission européenne travaillent donc à l’harmonisation des normes dans ce nouvel espace qui va naître. On doit limiter les écarts entre les deux continents, pour mieux préparer ce nouvel ordre mondial dont nous serons le socle… s’ils parviennent à leurs fins.

« Elles s’emploieront en outre à assurer la compatibilité de leur réglementation dans des secteurs spécifiques…. » (9)

La chimie américaine bénéficie actuellement d’une baisse des prix du gaz de près de 30%, grâce au gaz de schiste, qui leur fait bénéficier d’un avantage jugé déloyal par les européens. A moins que chez nous aussi la fracturation devienne possible… par soucis d’équité de traitement !

Le projet de loi Fioraso visant à faire de l’Anglais la langue universitaire en France, prépare, sous d’autres aspects, les nécessaires harmonisations pour fusionner les entités. Y compris en abandonnant notre langue !

L’exemple le plus flagrant de l’harmonisation qui est déjà réalisée, ce sont les coupes budgétaires automatiques qui s’imposeront désormais aux états européens, et qui sont constitutionalisées par le TSCG (Traité sur la Stabilité, la Coordination et la Gouvernance). Elles visent à nous aligner sur le modèle des coupes automatiques qui sont réalisées dans les dépenses publiques aux USA, lorsqu’ils sont confrontés au fameux mur budgétaire de la dette. L’asservissement à la dette et à l’usure est ainsi renforcé ! Merci à Giscard et Pompidou pour avoir initié ce chemin avec la loi du 3 janvier 1973.

Pour que cela puisse se poursuivre on nous demandera sous peu, d’aller vers une Europe Fédérale, ainsi seront réalisés les Etats Unis d’Europe, totalement inféodés aux intérêts US, et dépourvus de pouvoirs régaliens. La matrice de la soumission mondiale où chaque état ne décidera quasiment plus rien ! Qui protégera alors les peuples de la cruauté des hommes qui s’auto élisent à la direction des affaires du monde ?

L’évolution du libre échange ; quand le « bilatéral » modifie le visage de la mondialisation

L’entrée de la Chine à l’OMC, en 2001, a bouleversé les équilibres du commerce mondial ; son modèle capitaliste particulier fait trembler le maître américain, qui doit envisager d’autres règles pour tenter de se maintenir. Le cycle de Doha (libre échange multilatéral) est bloqué. Les ententes ne sont plus possibles, tant les intérêts divergents sont désormais inconciliables entre les différents pays, qui subissent à leur base, la pression de peuples mécontents.

Alors les maîtres du jeu modifient la donne et envisagent leur offensive économique sous une autre forme.

« On voit bien que le bilatéralisme se développe à mesure que le multilatéralisme se bloque. Et depuis 2008, qui a vu les négociations du cycle de Doha capoter,… lorsqu’on examine la politique commerciale américaine on voit bien qu’ elle a délibérément choisi d’abandonner le multilatéralisme commercial pour s’engager sur la voie d’un containment de la Chine en mettant en place deux mâchoires commerciales : la mâchoire asiatique avec le TPP (NDLR : accord bilatéral avec le Japon) et la mâchoire Atlantique avec le TTIP…

Les raisons de ce changement sont simples. Les États-Unis n’ont plus la force de soumettre le système commercial mondial à leurs exigences. En revanche ils s’estiment encore assez forts pour pouvoir le contourner. »(10)

Les promesses d’emplois au menu

« Cet accord, le plus important accord commercial bilatéral jamais négocié, pourrait faire économiser des milliards d’euros aux entreprises et créer des centaines de milliers d’emplois. » (1). (NDLR: 2 millions d’emplois sont « espérés » dans l’UE). Quel avenir prometteur ! Que de promesses exaltantes: mais ces promesses n’engagent que ceux qui les écoutent. Quant aux milliards qui seront économisés par les entreprises, iront-ils en hausses de salaires quand les autres salariés du monde sont si peu payés ?

Démantèlement du « modèle social » de l’Europe continentale

Droit du travail, droit syndical, tout doit être laminé ! Supprimer ce qui protège les travailleurs… Ou corrompre !

Bien plus concrètement, il faut harmoniser les protections sociales et revoir à la baisse les ambitions des travailleurs européens. Puisque ces derniers sont désormais crédules, et décérébrés (parce que conditionnés), ils peuvent subir leur nouvelle destinée. Tout sera nivelé par le bas: à commencer par les salaires qui vont pouvoir baisser.

 

 

La protection sociale doit aussi baisser, et ne devra plus peser autant dans les comptes de la nation.

Regardez le graphique intitulé « les dépenses sociales comparées »: vous y verrez l’effort accompli par l’Allemagne depuis 2003 pour se rapprocher des standards Anglais et US. Leurs dépenses sociales convergent aux environs de 15/16 % de leurs PIB respectifs. Italiens et Français dépensent trop d’après la norme libérale: près de 20 % de leurs PIB sont encore réservés aux dépenses sociales.

Des réformes doivent être menées par ceux qui seront « nommés » au pouvoir, tels Monti en son temps, ou Hollande qui devra réduire les budgets sociaux de 4 % pour coller aux autres pays. Cela implique de les baisser de 80 mds € ! Tant pis pour ceux qui souffrent ; pendant ce temps on versera quand même les 50 mds € annuels d’intérêts aux usuriers !

A qui profitera cette baisse de la protection sociale « solidaire » ? Au privé bien sûr. Au fait qui a payé une partie de la campagne présidentielle du sieur Hollande ? Henri de Castries, le PDG d’Axa ; ce groupe qui vit de contrats de protection « privés »…

Sur le dos de qui va se faire ce renversement d’alliance ?

Selon le Wall Street journal: « David Cameron fait le pari que le TTIP, en cas de succès, réduira sensiblement les pressions exercées à son encontre pour qu’il obtienne, avant 2017 (NDLR: référendum de sortie de l’UE), une renégociation complète des conditions de l’affiliation de la Grande-Bretagne à l’UE. [...] » (11)

Die Welt en Allemagne explique que cet accord bénéficierait essentiellement aux USA dont le PIB par habitant pourrait croitre de 13,4 %. (11)

La Frankfurter Allgemeine Zeitung précise que suite à cet accord, les échanges commerciaux au sein de l’UE diminueraient également: « Le volume d’échanges commerciaux entre l’Allemagne et les pays d’Europe du sud baisserait de 30% [...] celui entre l’Allemagne et la France de 23% [...] tandis qu’il doublerait avec les États-Unis. [Ainsi] l’Union douanière [mise en place par l’UE en 1968] perdrait de sa valeur. » (11)

L’Allemagne fera cavalier seul, et délaisse l’UE ? Juste avant l’euro ?

L’Europe sortira laminée et divisée: ni plus ni moins, car l’Allemagne va changer de partenaires (c’est ça le libre échangisme !) et ceux qui vont être délaissés vont en souffrir ! Le commerce interne de l’UE se tasse ? Alors l’Allemagne cherche de meilleurs débouchés économiques pour ses entreprises. Au détriment de la construction européenne. Un choix qui sera lourd de conséquences… N’en doutons pas.

Le dollar favorisera les USA ?

En revanche rares sont les informations qui viendraient nous rappeler l’avantage compétitif incomparable dont disposent les USA avec leur monnaie, ce dollar qu’ils impriment à façon, et qui a une valeur inférieure à l’euro. Un vrai avantage, qui ne sera pas harmonisé pour le coup.

Et nos entreprises vont souffrir, face à la faiblesse du dollar, qui fait en réalité sa force ! Une force injuste, car déloyale du fait des manipulations sans fin qu’opère la FED.

Peuples et entreprises sous le rouleau compresseur

Les entreprises qui ont cru aux bienfaits des premiers temps de la mondialisation, vont désormais subir le rouleau compresseur des multinationales qui ne supportent pas la concurrence et tendent à grandir jusqu’à détenir des monopoles complets, grâce auxquels ils feront alors, seuls, le prix final !

C’est dans le contexte déjà dramatique de 2013 que ce marché transatlantique plante ses jalons. Cette nouvelle vague de libéralisme économique va déferler au moment où l’économie réelle est en train de s’arrêter. Au moment où les faillites d’entreprises sont nombreuses, entrainant des flots de chômeurs qui viennent peser sur les amortisseurs sociaux (déséquilibrés de ce fait).

La crise financière s’est transformée en crise bancaire ; la crise bancaire est devenue crise budgétaire pour les états qui se sont endettés pour les soutenir. La crise budgétaire ne permet pas la relance attendue pour éviter la crise économique (l’époque actuelle), avant de se transformer en quoi, en crise sociale ?

L’avenir n’est pas certain, mais il est évident que toutes les divisions de notre société seront exacerbées par ce qui se prépare ! A chacun de s’y préparer le plus consciemment possible.

Si vous aspirez à un autre destin que la dictature économique promise par les marchands, plus que jamais, il vous faut vous engager, pour militer activement et donner de votre temps pour travailler contre cette entreprise.

Vous avez souffert du marché Unique Européen ? Alors vous n’aimerez pas non plus sa version transatlantique !

Ceux qui voudraient creuser la question du marché transatlantique, et la régression sociale qui l’accompagne, peuvent écouter l’émission n° 140 réalisée par Méridien Zéro sur cette question intitulée l’offensive générale du système.

Notes:

(1) Ec.europa.eu

(2) Atlantico

(3) Le Figaro

(4) Libre échange transatlantique : Les-européens paieront

(5) La Tribune

(6) Le Monde

(7) Félix_Esquirou_de_Parieu

(8) De Gaulle: conférence de presse du 15 mai 1962 sur les questions européennes

(9) Europa.eu

(10) Telos

(11) Presseurop

Divers:

Début des négociations transatlantiques ambiance tendue et points délicats (France info)

L’Europe face aux États-Unis (France Info)

Libre échange : le précédent de 1860 (La Tribune)

dimanche, 10 novembre 2013

Un Nobel d’économie pour avoir créé une crise?

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Un Nobel d’économie pour avoir créé une crise?

par Michel Santi
Ex: http://www.zejournal.mobi

Le Nobel d’économie vient d’être décerné à Eugène Fama, né en 1939, un des pères du monétarisme et de l’idéologie néo-libérale. N’est-ce pas lui qui affirmait péremptoirement « que l’hypothèse des marchés efficients est une affirmation simple qui dit que les prix des titres et des actifs reflètent toutes les informations connues » ? C’est en effet suite aux travaux d’économistes comme Fama, comme Milton Friedman (1912-2006) – lui aussi Nobel en 1976 -, et comme Burton Malkiel, né en 1932, que les marchés financiers subirent dès le début des années 1980 une authentique transfiguration. Avec la participation active des plus hauts responsables politiques de l’époque comme Margaret Thatcher et comme Ronald Reagan qui devait même affirmer dans son discours d’investiture, le 20 janvier 1981 : « l’Etat n’est pas la solution à notre problème, l’Etat est notre problème » !

Dès cette période, le conservatisme économique et la régression sociale devaient régner en maîtres absolus. Le vide laissé par l’État fut tout naturellement comblé par le développement hyperbolique d’un secteur financier dès lors qualifié d’ »efficient », voire de « parfait ». Cette finance était en effet appelée à rendre tous les services à l’économie. Les marchés seraient une sorte de juge de paix qui remettrait de l’ordre dans les finances des entreprises et des ménages en imprimant tous les pans de l’économie de sa bienveillante efficience. Les adorateurs du marché financier étaient même persuadés que ses prix étaient la résultante d’un équilibre rationnel, et que l’emploi n’était en fait qu’une variable au service de l’optimisation des valorisations boursières. C’est en effet Burton Malkiel – qui, lui, n’est pas encore Nobel ! – qui assurait que « la vraie valeur des marchés triomphera en finalité car la bourse est un mécanisme de précision sur le long terme ».

La dérégulation de nos économies et de la finance nous vient donc évidemment en droite ligne de cette hypothèse du marché efficient. Plus besoin de réglementation ni de garde-fous si le marché est efficient, donc optimal. Inutile de brider une bête qui se régule elle-même par le prix, qui élimine les plus faibles – c’est-à-dire ceux qui ont pris les mauvaises décisions – et qui fait gagner les plus forts. C’est donc une authentique « sélection naturelle » qui s’opère par des marchés financiers omniscients et infaillibles. Comme cette autorégulation déroule ses effets bénéfiques sur l’économie, la tâche de l’État doit donc se réduire à sa plus simple expression. Hélas, ce rétrécissement du champ d’action de l’Etat – préalable incontournable à la dérégulation de la finance-, accouche depuis trente ans de crises bancaires et boursières à répétition. Ce laissez-faire ayant essaimé depuis le monde anglo-saxon jusqu’à l’Europe continentale pour ensuite toucher l’Amérique latine et l’Asie, c’est l’ensemble de la planète qui a progressivement été infectée par des bulles spéculatives dont l’implosion fait d’immenses ravages financiers, économiques et bien-sûr humains.

Aujourd’hui, c’est l’ensemble du spectre qui se retrouve contaminé par la financiarisation : l’énergie, l’immobilier, les denrées alimentaires, mais également l’éducation, voire la santé dans certains pays. Toutes les facettes de l’activité économique se retrouvent ainsi enchevêtrées dans une toile complexe tissée par la financiarisation. Voilà par exemple Goldman Sachs qui a investi il y a quelques mois 10 millions de dollars dans les prisons dans l’État de New York, avec les perspectives suivantes : récupérer sa mise si la récidive baisse de 10 %, la doubler si ce taux s’améliore, ou perdre la moitié de sa mise si la criminalité ne s’améliorait pas à New York ! Nos sociétés ont atteint aujourd’hui un tel degré de décadence qu’elles en viennent à déléguer au secteur financier de telles responsabilités, et leurs devoirs les plus élémentaires vis-à-vis de citoyens dans la détresse. Ces « obligations sociales », ou « social impact bonds », démontrent bien que l’obligation morale de la collectivité cède désormais la place aux institutions financières qui lèvent des fonds pour générer des profits, tout en se substituant à l’État.

Dans ce meilleur des mondes où le marché est censé être efficient, les malversations et les escroqueries sont réputées impossibles ! En effet, comme les marchés ne peuvent être efficients en présence de fraude, les actes malhonnêtes ne peuvent tout bonnement plus exister… précisément du fait de l’efficience des marchés ! Pourtant, qui sait que, aujourd’hui en 2013, – en pleine crise européenne et plus de six ans après les subprimes ! -, la nouvelle maxime de Wall Street et de la City est : « I’ll Be Gone, You’ll Be Gone”, soit en français : « je ne serai plus là, vous ne serez plus là » ? Qui signifie clairement que les cataclysmes de demain – inévitables comme conséquence des comportements d’aujourd’hui – ne sont pas le problème des financiers qui ne seront plus ici…et que d’autres devront gérer les problèmes. En réalité, les abus de la finance sont passés dans nos mœurs. Et en fait, les banquiers et les financiers honnêtes ne sont plus de taille à entrer en compétition avec leurs collègues fraudeurs. C’est simple : une banque qui ne chercherait pas à masquer des pertes, ou à vendre des actifs pourris, ou à blanchir de l’argent, ou à influencer le cours d’un produit dérivé… ne serait plus compétitive et serait vouée à terme à faire faillite, ou à sévèrement décrocher en bourse. Dans la nature, la sélection darwinienne nous apprend que les plus forts survivent aux plus faibles. Dans l’univers de la finance, ce sont les malhonnêtes qui restent, voire qui prospèrent, tandis que sont damnés ceux qui se conforment aux règles du jeu.

Ce rouleau compresseur des escroqueries et des malversations porte un nom, la dynamique de « Gresham », qui fut décrite par George Akerlof, né en 1940 et Nobel d’économie 2001 : « Les transactions malhonnêtes tendent à faire disparaître du marché les transactions honnêtes. Voilà pourquoi le coût lié à la malhonnêteté est supérieur au montant de la tricherie ». Cette dynamique de Gresham – devenue aujourd’hui une dominante dans les marchés financiers – a donc pour conséquence une volatilisation de l’éthique au profit de la fraude, qui devient dès lors endémique. Ceux qui respectent la loi et la morale sont donc appelés à disparaître alors que leurs rivaux peu scrupuleux se maintiennent grâce à des artifices et à des manipulations qui compriment leurs coûts, ou qui gonflent leurs bénéfices. En d’autres termes, aujourd’hui, il devient « trop cher » d’être honnête !

Aujourd’hui, et alors même que le comité Nobel vient de distinguer un personnage dont les travaux ont précisément consisté à sacraliser les marchés, nous devons collectivement prendre conscience que ceux-ci ne créent nulle valeur, qu’ils doivent être subordonnés et placés fermement sous la tutelle de l’économie productive. L’éthique doit faire son retour au sein de la banque et de la finance, car cette crise est d’abord une crise morale ! Le préalable étant de tenter de répondre à la question du Nobel d’économie de 1998, Amartya Sen, né en 1933 : “Comment est-il possible qu’une activité aussi utile, comme la finance, soit devenue si immorale »?

- Source : Michel Santi

00:05 Publié dans Economie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : économie, prix nobel | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

vendredi, 08 novembre 2013

La bioéconomie : Vicissitudes d’un concept d’avenir

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La bioéconomie : Vicissitudes d’un concept d’avenir

par Hugo Carton et Agnès Sinaï

Ex: http://fortune.fdesouche.com/

De Nicholas Georgescu-Roegen à la commission européenne


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«Difficulté ne signifie pas impossibilité(1)»

 

 

 

La bioéconomie est un concept qui fleurit aujourd’hui sur les scènes politique et économique internationales. En début d’année 2013, la Commission européenne a mis en place un “observatoire de la bioéconomie”. L’OCDE s’est également saisie du sujet, de même que le gouvernement américain qui a publié en avril 2012 un “blueprint” sur la bioéconomie nationale. Ces institutions prescriptrices du discours croissantiste dominant se seraient-elles converties à la thermodynamique ?

Ironiquement, le concept de bioéconomie est issu des travaux de l’économiste roumain Nicholas Georgescu-Roegen, considéré comme le premier penseur de la décroissance. Ses théories remettent radicalement en cause l’économie libérale prônée par les institutions internationales.  Ce détournement de sens mérite une attention particulière.

La science économique orthodoxe, qu’elle soit néoclassique et libérale ou marxiste, se figure la production et la consommation comme un cycle réversible ayant lieu dans un système complètement clos. Elle ne prend pas en compte les interactions entre le processus économique et l’environnement biosphérique limité de notre planète. L’économie, ainsi habituellement pensée comme un phénomène purement technique, s’inscrit en réalité dans un contexte physique et socioculturel qu’il est impossible d’ignorer sur le long terme.

Nicholas Georgescu-Roegen n’a jamais cessé d’interroger la notion de production et s’est vivement insurgé contre cette conceptualisation abstraite et mécaniste des activités matérielles de l’homme : «toute l’histoire économique de l’humanité prouve sans contredit que la nature elle aussi joue un rôle important dans le processus économique, ainsi que dans la formation de la valeur économique. Il est grand temps, me semble-t-il, d’accepter ce fait et de considérer ses conséquences pour la problématique économique de l’humanité(2)».

Il a insisté tout au long de sa carrière sur le fait que le processus économique intègre des ressources naturelles de valeur et rejette des déchets sans valeur. Du point de vue thermodynamique, l’énergie ou la matière absorbée par le processus économique l’est en état de basse entropie(3) et en sort dans un état de haute entropie.

En effet, la deuxième loi de la thermodynamique statue que l’entropie d’un système clos augmente continuellement vers un maximum. L’homme ne peut utiliser que l’énergie de basse entropie, c’est-à-dire l’énergie libre, qui est organisée. «L’énergie libre implique une certaine structure ordonnée comparable à celle d’un magasin où toutes les viandes se trouvent sur un comptoir, les légumes sur un autre, etc. L’énergie liée est de l’énergie dispersée en désordre, comme le même magasin après avoir été frappé par une tornade(4)». Nous pouvons brûler un morceau de charbon, mais nous ne pourrons pas récupérer la chaleur issue de sa combustion une fois que celle-ci se sera dissipée dans l’atmosphère. Ce processus transforme l’énergie du charbon, libre et utilisable par l’homme en une énergie liée, une chaleur irrécupérable et perdue.

De la même façon, les matériaux exploitables que nous extrayons des entrailles de la terre ont une durée de vie limitée. Ils sont voués à s’altérer et à se dégrader inévitablement sous une forme irrécupérable, et ce, malgré le recyclage. Cette différenciation anthropomorphique entre l’énergie et les matériaux exploitables et ceux qui ne le sont plus, implique une gestion raisonnée des sources de basse entropie non renouvelable.

L’impasse des externalités

Or la science économique orthodoxe rechigne à reconnaître que la loi de l’entropie est à la base de la rareté économique et elle a prouvé son incompétence dans l’exploitation mesurée des ressources limitées de la planète Terre. Ce que Georgescu-Roegen propose, ce n’est pas une simple réforme qui nous permettrait, par exemple, d’internaliser les externalités environnementales en créant des instruments économiques et financiers.

La théorie de l’internalisation est caractéristique de l’impasse dans laquelle se trouve la science économique orthodoxe.

Il y a externalité lorsque l’activité de consommation ou de production d’un agent a une influence sur le bien-être d’un autre sans que cette interaction fasse l’objet d’une transaction économique. Nous l’appelons externalité, positive ou négative d’ailleurs, parce qu’elle est hors du processus économique. Les tenants de l’économie écologique proposent de les internaliser, c’est-à-dire de les associer à une transaction, de les faire entrer dans la sphère de l’économie. Robert Costanza est un des pionniers de l’économie écologique. L’article qu’il publie dans la revue Nature, le 15 mai 1997, évalue à quelque 33 000 milliards de dollars par an (estimation minimale) la totalité des services rendus à l’humanité par les écosystèmes de la planète(5).

Cette estimation démontre que la valeur du capital naturel est supérieure au PIB mondial annuel, de l’ordre de 18000 milliards de dollars par an à l’époque. Divisés par six milliards d’individus, ces 33000 milliards offrent environ 5500 dollars par personne et par an de services vitaux «rendus» par les écosystèmes, comme la régulation de la composition de l’atmosphère, du climat, de l’eau, la capacité de résilience, l’offre de ressources en eau, le contrôle de l’érosion, la formation des sols, le recyclage des nutriments, le traitement des déchets, la pollinisation, le contrôle biologique, l’habitat des espèces, la production de nourriture, de matériaux bruts, de ressources génétiques, de divertissement et de support de culture.

Dans le sillage de cette étude pionnière, des économistes tels que Nicholas Stern et son étude sur le prix du climat et Pavan Sukhdev et son économie des écosystèmes et de la biodiversité ont déterminé les valeurs des «services» écosystémiques : valeurs d’usage directes, valeurs d’usage indirectes, taux d’actualisation, valeurs de non usage ou valeurs intrinsèques. En d’autres termes, renoncer à détruire revient-il plus cher que de sauvegarder un bien commun tel que le climat ou la biodiversité ? N’est-ce pas encore nager dans un économisme hors sol que de vouloir comptabiliser la nature ? L’effondrement du marché carbone européen illustre la précarité du mécanisme. Surtout, cette approche ne tient pas compte de l’érosion énergétique induite dans tout processus économique.

Nicholas Georgescu-Roegen propose un tout autre imaginaire. Sa refonte radicale du processus économique consiste à l’assujettir à a sphère écologique et non l’inverse : «[...] le domaine des phénomènes couverts par l’écologie est plus large que celui couvert par la science économique–[...] l’économie devra être absorbée par l’écologie, si jamais une telle fusion se produit(6).»

Le concept de bioéconomie s’impose alors comme la seule alternative économique opérant consciemment dans les limites planétaires imposées par la nature.

L’humanité est la seule espèce dont la survie dépend intrinsèquement de ses instruments exosomatiques c’est-à-dire des instruments produits par l’homme et dont il n’est pas doté à la naissance. L’épée qui prolonge le bras ou la voiture qui se substitue aux jambes par exemple, mais aussi la domestication, l’esclavage et la transplantation d’organes qui découlent directement de cette évolution exosomatique. En transcendant les limites biologiques naturelles qui lui étaient imposées, l’humanité a fait passer sa survie sur un plan totalement différent des autres espèces : elle n’est plus uniquement biologique, mais ne pouvant cependant pas se limiter au plan économique, elle est bioéconomique. L’approche bioéconomique de la survie de l’humanité découle donc directement de l’évolution exosomatique de notre espèce.

Or la fabrication et l’utilisation de nos outils est naturellement conditionnée par l’exploitation des sources de basse entropie disponibles, qu’il s’agisse d’énergie ou de matériaux. L’approche bioéconomique de Nicholas Georgescu-Roegen ne s’envisage et ne s’appréhende donc que dans le cadre défini par les «asymétries» qui conditionnent le rapport humain aux trois sources de basse entropie qu’il peut exploiter et qui constituent sa dot.

Ces trois sources de basse entropie sont constituées de :

-          L’énergie libre – c’est-à-dire disponible et utilisable par l’homme – rayonnée par le soleil et reçue par la terre.

-          L’énergie libre stockée depuis des millions d’années dans les entrailles de la terre sous forme par exemple de charbon, de pétrole et de gaz naturel.

-          Les structures matérielles ordonnées et exploitables comme les minerais.

Les asymétries suivantes constituent le cadre du problème bioéconomique qui est posé à l’humanité :

Première asymétrie : la part terrestre de cette dot est un stock, la part solaire est un flux. Nous pouvons surexploiter les ressources de la terre mais en aucun cas nous ne pourrons empiéter sur la part de rayonnement solaire reçue par nos descendants.

Deuxième asymétrie : Du fait de cette première asymétrie et parce qu’il est impossible de transformer de l’énergie en matière, l’élément le plus critique pour l’humanité d’un point de vue bioéconomique, est la matière disponible et utilisable dans la terre que ce soit du charbon ou du minerai de fer. Le flux d’énergie du soleil continuera à réchauffer notre planète et les forêts continueront de produire du bois bien après la disparition de l’humanité.

Troisième asymétrie : La part d’énergie provenant du flux solaire est infiniment supérieure à celle issue du stock d’énergie libre disponible sur Terre. L’ensemble des réserves des énergies fossiles ne représente qu’environ deux semaines du rayonnement solaire sur le globe(7).

Quatrième asymétrie : L’énergie solaire arrivant sur la Terre est très dispersée et son exploitation industrielle présente donc un immense désavantage par rapport aux réserves énergétiques extrêmement concentrées disponibles sur la planète. Utiliser directement l’énergie solaire reviendrait à utiliser l’énergie cinétique de chaque goutte d’eau de pluie avant qu’elle ne tombe au sol. Les rayons solaires ne forment ni fleuve ni lac qui faciliteraient leur exploitation à l’instar de l’énergie hydraulique(8).

Cinquième asymétrie : L’utilisation de l’énergie solaire est exempte de pollution : le rayonnement, qu’il soit utilisé ou non par l’homme finira, immanquablement sous la forme de chaleur contribuant à l’équilibre thermodynamique de la planète. L’exploitation de toutes les autres sources d’énergie produit inévitablement une pollution irréductible nuisible.

Sixième asymétrie : Tous les êtres vivants sur notre Terre dépendent de l’énergie solaire pour leur survie. La compétition pour cette énergie est la plus féroce dans la nature. L’Homme ne fait pas exception et il a su se rendre impitoyable par l’exploitation accrue de ses outils exosomatiques. Les fusils lui ont par exemple permis d’exterminer les loups qui volaient sa nourriture.

Reconvertir l’économie en énergie

arton60.jpgTout le problème bioéconomique découle de l’arbitrage que nous devons réaliser entre deux sources distinctes de basse entropie. L’une, terrestre, polluante, rare mais concentrée et facile d’accès, provient des entrailles de la terre. L’autre quasi illimitée(9), non polluante mais dispersée et difficilement exploitable, nous arrive tout droit du soleil.

Or depuis plusieurs siècles maintenant, il y a déplacement de la source solaire vers la source terrestre dans l’apport de la basse entropie. Le bœuf, dont la puissance mécanique provient du rayonnement solaire (captée par la photosynthèse), est remplacé par le tracteur, fabriqué et mû grâce à la basse entropie terrestre. Le fumier, disponible à la seule condition que le soleil brille, est remplacé par des engrais chimiques, extrait des mines de phosphates, qui sont déjà en voie d’épuisement(10).

L’agriculture mécaniste moderne, nous dit Georgescu, est peut-être inévitable dans la situation actuelle – surpopulation et exode rural –, mais elle est « antiéconomique » sur le long terme et nous conduira inévitablement à une impasse. L’exemple du secteur agricole est particulièrement parlant mais il en va de même dans tous les secteurs de l’activité humaine.

Parce qu’elle favorise l’exploitation des ressources planétaires finies – énergie et matière libre – et parce qu’elle engendre la pollution irréductible qui lui est associée, l’activité économique de l’homme conditionne celle des générations futures. L’enjeu majeur de l’humanité est alors celui de la répartition de la dot terrestre entre toutes les générations. Cette question se trouve de fait exclue de la science économique traditionnelle qui se limite à l’administration des ressources rares au présent ou dans un futur proche(11). Pour Georgescu-Roegen, la bioéconomie c’est d’abord la reconversion de l’économie de l’énergie. Il faut arrêter de rechercher des moyens toujours plus économiquement rentables d’extraire les énergies minérales et se concentrer sur la recherche et la diffusion de techniques d’utilisation directe de l’énergie solaire. Les techniques déjà maîtrisées, telles que l’agriculture organique qui s’apparente à la permaculture, doivent être communiquées à tous pour que chaque humain puisse les expérimenter lui-même. La bioéconomie de Georgescu-Roegen implique un retour à l’utilisation de l’énergie solaire dans le respect des cycles bio-géophysiques, car il s’agit du seul moyen de garantir aux générations suivantes un confort exosomatique satisfaisant.

Abandonner l’industrialisme

Nicholas Georgescu-Roegen n’est pas partisan du retour à une économie de cueillette(12) mais il exhorte les sociétés occidentales à abandonner l’industrialisme débridé et à adopter un programme bioéconomique minimal qui garantirait la survie de l’humanité sur le long terme :

  1. Interdire la guerre et toute production d’instruments de guerre. Du point de vue de l’exploitation des ressources naturelles, l’industrie militaire est une hérésie totale dont l’éradication permettrait de libérer des forces de production fantastiques tout en élevant moralement l’humanité.
  2. Aider les nations les plus pauvres à accéder à une existence valant la peine d’être vécue mais non point luxueuse.
  3. Diminuer progressivement la population mondiale jusqu’au point où une agriculture organique suffirait à la nourrir convenablement.
  4. Éviter consciencieusement tout gaspillage d’énergie. La sobriété énergétique est primordiale, tant en ce qui concerne le chauffage, la climatisation et l’éclairage que la vitesse.
  5. Nous guérir de notre soif morbide de gadgets extravagants tels que les grosses cylindrées.
  6. Nous débarrasser de la mode(13).
  7. Concevoir les marchandises les plus durables possibles et les concevoir afin qu’elles soient réparables(14).
  8. Se guérir du «cyclondrome du rasoir électrique» qui consiste à se raser plus vite pour avoir plus de temps pour travailler à un appareil qui rase encore plus vite et ainsi de suite à l’infini. Il nous faut comprendre que toute existence digne d’être vécue doit comporter une part incompressible de temps libre oisif.

Il est aujourd’hui impensable de sacrifier notre confort exosomatique à un bénéficiaire non encore existant. L’approche bioéconomique de Georgescu, fondée sur le partage équitable et durable de notre dot en basse entropie entre les générations implique donc une éthique nouvelle et une véritable révolution culturelle. L’homme peut aussi faire le choix de vivre une vie, brève, fiévreuse et excitante dans la consommation débridée des ressources terrestres finies, mais dans ce cas il se doit d’être conscient qu’il abandonnera bientôt la biosphère, dont il est momentanément l’héritier, à des espèces moins avides qui bénéficieront encore de longues années des bienfaits de la lumière solaire.

La pensée bioéconomique de Nicholas Georgescu-Roegen est une pensée eschatologique, pénétrée de l’idée du déclin inéluctable des ressources disponibles d’énergie et de matière. La durée de vie de l’espèce humaine, nécessairement limitée, dépend principalement de sa gestion des sources de basse entropie. Nicholas Georgescu-Roegen a farouchement combattu toutes les théories économiques qui garantissaient à l’humanité une immortalité chimérique. La théorie de l’état stable compte parmi les plus fameuses de ces théories fantasques.

Le mythe de l’état stable

Herman Daly est un économiste américain qui fut élève de Georgescu-Roegen à l’Université Vanderbilt de Nashville dans les années 1960. Il est professeur à la School of Public Policy de l’Université du Maryland et a été économiste en chef du Département Environnement de la Banque mondiale. Il est le premier à avoir développé un concept macroéconomique de l’économie à croissance zéro ou, économie de l’état stable. Cela lui a valu une critique cinglante de la part de Georgescu-Roegen qui, au même titre que la croissance infinie, y voyait un mythe économique ni réalisable ni souhaitable.

La théorie de l’état stable, partagée en son temps par le Club de Rome, peut se résumer de la sorte : à population constante, en équilibrant notre pression sur l’environnement, nous serions à même de mettre fin au conflit écologique de l’humanité dans un état stationnaire se maintenant indéfiniment. Il serait alors possible, à stock de capital constant, de limiter le débit intrant de matières premières et donc la pollution, qui resterait alors dans les limites des capacités assimilative et régénérative de l’écosystème planétaire(15).

Herman Daly définit l’économie de l’Etat stable comme « une économie à population et stock de capital constant, maintenue par un faible flux qui reste dans les capacités régénératives et assimilatives de l’écosystème. Cela implique de faibles taux de naissances égaux aux taux de mortalité et de faibles taux de production égaux aux taux de déplétion(16)».

D’un point de vue thermodynamique, notre planète est un sous-système non pas ouvert mais clos, qui ne peut échanger que de l’énergie – l’énergie solaire – avec son environnement(17). Le stock de matière qui s’y trouve est constant.

La formule fondamentale de la thermodynamique classique établit que dans un système clos à l’état stable, la quantité de travail produit est égale à la quantité de chaleur reçue : n’importe quelle tâche peut être accomplie par une quantité correspondante d’énergie. Puisque le flux d’énergie solaire est quasi infini, nous serions en mesure de pouvoir le transformer intégralement et durablement en travail et ainsi maintenir une activité économique à niveau constant.

Ce raisonnement omet de dire que nulle conversion d’énergie en travail n’est possible sans support matériel. Par frottement, les machines thermiques, qui nous permettent par exemple de capter l’énergie solaire – celle qui nous arrive directement mais aussi l’énergie cinétique du vent et de l’eau –, dissipent non seulement de l’énergie sous forme de chaleur perdue mais aussi de la matière. Cette dégradation continue de la matière est imperceptible à court terme mais s’avère décisive à l’échelle de la survie de l’humanité. Comme le dit Georgescu-Roegen : « Autour de nous, toute chose s’oxyde, se casse, se disperse, s’efface, etc. Il n’y a pas de structures matérielles immuables, parce que la matière tout comme l’énergie se dissipe continuellement et irrévocablement(18).»

Un camion qui transporte des marchandises produit de la chaleur, mais ce n’est pas tout. Il s’use, ses pneus perdent du caoutchouc sur l’asphalte, son châssis rouille, etc. On change les composants usés pendant un temps puis on finit par changer de camion lorsque la matière s’est trop altérée. Une éolienne qui fonctionne dissipe elle aussi continuellement les matériaux dont elle est constituée, sous la forme de particules minuscules irrécupérables.

Irrécupérables ? Vraiment ? Puisqu’il est impossible de créer de la matière à partir de l’énergie seule, la théorie de l’état stable présuppose un recyclage total de la matière que nous dissipons. Moyennant une quantité d’énergie suffisante, serait-il alors possible de rassembler à nouveaux ces molécules éparpillées et ainsi mettre en échec la dispersion de la matière ?

De nombreux écologistes, observant que certaines substances chimiques vitales – oxygène, gaz, carbonique, azote etc. – sont recyclées par des processus naturels fonctionnant grâce à l’énergie solaire, sont convaincus que le recyclage total n’est pas un mirage. Il convient cependant de rappeler que ces cycles naturels ne se font pas sans pertes, mais simplement que les quantités sont tellement grandes que le déficit ne s’observe de manière flagrante que sur de très longues périodes de temps. Ainsi, une faible part du gaz carbonique prend la forme de carbonate de calcium dans les océans et le phosphore contenu dans certains squelettes de poissons se disperse au fond des océans. Ces deux substances sont elles pour autant irrécupérables ?

La réponse de Georgescu-Roegen est limpide : « Mais, pourrait-on soutenir, en pensant à l’interprétation statistique de la thermodynamique, il est assurément possible de rassembler les perles d’un collier cassé qui se sont éparpillées par terre. Or, le recyclage n’est-il pas précisément une opération de ce type ? Pour déceler l’erreur que constitue l’extrapolation d’une échelle à une autre, supposons que ces mêmes perles ont été préalablement dissoutes dans un acide quelconque et que la solution en a été épandue sur les océans – expérience qui retrace ce qui arrive effectivement aux différentes substances matérielles, les unes après le s autres. À supposer même que nous disposions d’autant d’énergie que nous en voulons, nous n’en aurions pas moins besoin d’un temps fantastiquement long et même pratiquement infini pour rassembler les perles en question(19)». Il est donc impossible de récupérer la matière dissipée. D’un autre côté, les activités économiques produisent aussi de la matière qui n’est pas réutilisable directement mais qui peut le devenir. Ce sont les vêtements usés, les bouteilles cassées, les vieux moteurs etc. Seuls ces rejets, ni matière dissipée ni déchets sont recyclables et doivent l’être au maximum. Il ainsi possible de ralentir drastiquement la déplétion des sources de matière mais aucunement d’annuler cette dépletion par un recyclage total. La théorie de l’état stable est contredite par la déperdition inéluctable d’énergie et de matière lors du processus économique.

Certains économistes voient en l’état stable la possibilité de mettre un terme à la lutte de l’homme contre l’homme pour l’énergie et la matière, si caractéristique de notre société de consommation. Nicholas Georgescu-Roegen reconnaît l’importance de cet objectif pour l’humanité, mais précise que la négation de la société de croissance ne peut pas déboucher sur l’état stable – dont les théoriciens échouent d’ailleurs à déterminer les niveaux soutenables de population et de niveaux de vie.

L’analyse thermodynamique nous montre que seule une bioéconomie de décroissance est souhaitable, au sens de soutenable sur le très long terme, et que la seule grandeur optimale qui peut nous guider est le niveau de population qu’il est possible de nourrir avec une agriculture entièrement organique.

Vivement critiqué par son maître au début de sa carrière, Daly a beaucoup fait pour propager la vision bioéconomique subversive de Georgescu et notamment l’idée qu’il ne faut pas confondre croissance et développement, et qu’il ne peut plus y avoir, à l’échelle écologique globale du “monde fini” de la Biosphère, de croissance mondiale durable(20).

La croissance, c’est produire plus ; le développement, c’est produire autrement. Cette distinction a d’abord été établie par Schumpeter, qui fut le professeur de Georgescu-Roegen. Dans la perspective bioéconomique de Georgescu-Roegen, à laquelle contribue grandement Herman Daly, les croissances économique et démographique mondiales doivent être stabilisées et inversées. C’est là le seul moyen de garantir à l’humanité une planète habitable durablement.

De quelques détournements récents

Le concept de bioéconomie semble aujourd’hui séduire certaines institutions politiques internationales. Ainsi, l’Union Européenne vient récemment de se doter d’un observatoire dédié à la bioéconomie. En annonçant sa création lors d’une conférence sur la bioéconomie à Dublin le 14 février dernier, Máire Geoghegan-Quinn, la commissaire européen pour la Recherche, a réaffirmé la volonté de l’Europe de poursuivre – ou plutôt d’entamer – son élan vers une économie basée sur l’utilisation intelligente des ressources de la terre et de la mer. L’observatoire mettra ses données et ses analyses à disposition du public par le biais d’un portail Web dédié – tachant ainsi de soutenir les stratégies régionales et nationales en cours d’élaboration dans les pays de l’UE.

Le 13 mars 2012, la Commission européenne avait déjà rendu publique une note stratégique sur la bioéconomie intitulée « L’innovation au service d’une croissance durable: une bioéconomie pour l’Europe ». Le titre univoque indique clairement que c’est en priorité la croissance qu’il faut rendre soutenable. La bioéconomie telle que l’entendent les instances européennes ne serait-elle alors qu’un avatar du fameux oxymore du développement durable, qui, comme l’a si bien dit Gilbert Rist, est, dans la bouche des dirigeants, synonyme de pérennisation du développement et de la croissance économique(21) ? C’est ce que pense Hervé Kempf qui demeure sceptique sur l’idée de la bioéconomie que se font les « technocrates de Bruxelles(22)». L’état des lieux que dresse la Commission européenne est des plus justes : une population en rapide augmentation, des pressions environnementales insoutenables, la déplétion rapide de très nombreuses ressources naturelles, dont les énergies fossiles, un changement climatique inéluctable, des dommages irréversibles à la biodiversité etc. Jusque là, rien de bien novateur, soulignons simplement le fait que le constat a le mérite d’être lucide quant à l’urgence et la criticité de la situation. Le développement de la bioéconomie à l’échelle européenne est alors présenté comme la clé de l’avenir qui nous permettra de passer à une société post-pétrole tout en maintenant une croissance économique soutenable.

Pas de définition claire et nette de la bioéconomie par la Commission, mais toute une série d’« orientations stratégiques » qui permettent de délimiter les contours flous de ce nouveau paradigme. Le document regorge de positions apparemment novatrices qu’il est rare de trouver dans la novlangue technocratique : freiner l’artificialisation des sols, rester vigilant à la compétition sur les terres arables entre les productions de nourriture et d’agro-carburant, populariser des régimes alimentaires plus sains et plus respectueux de l’environnement, gérer durablement les sols, limiter la taille des circuits alimentaires, développer des techniques agricoles alternatives, biologiques et à faible quantité d’intrants, etc.

Le texte affirme l’importance de prendre en compte les savoirs locaux et tacites, de lutter contre le gaspillage, de mettre l’accent sur la sobriété et de favoriser l’efficacité des chaînes alimentaires et énergétiques.

Toute une partie concerne même la science et son rapport avec la société civile. Il y est dit que la recherche scientifique et les considérations sociales ne peuvent plus être découplées et que la société civile doit être informée et systématiquement impliquée dans les choix technologiques sociétaux. L’orientation stratégique met l’accent sur la nécessité de prendre en compte la valeur non marchande de nombreux biens publics écologiques et sociaux tels que le paysage et la récréation, la pollinisation, la prévention du lessivage des nutriments du sol, etc.

Mais le document stratégique est aussi perclus d’orientations technologistes et de logiques prédatrices et compétitrices auxquelles les discours technocratiques nous ont habitués. Les biotechnologies, la biologie de synthèse et les nanobiotechnologies sont ainsi présentées comme les voies inéluctables de sortie de la crise écologique.

Par exemple, pour adapter la production de viande à la demande future, le document prévoit d’explorer et d’exploiter intensément les possibilités de la génétique afin de sélectionner et modifier les races de bétail les plus productives et les plus à même de s’adapter au changement climatique. La compétitivité de l’Europe semble être l’objectif principal de la Commission : le progrès technologique reste au centre de sa démarche bioéconomique.

Il apparaît probable que le dialogue entre la recherche scientifique et la société civile se limite à l’« acceptation par le consommateur des nouvelles technologies ». Le doute persiste quant à la manière dont les biens communs vont être pris en compte en bioéconomie mais il semblerait que la solution de facilité consistera à les intégrer tant bien que mal dans des les analyses coûts – bénéfices classiques.

La note stratégique européenne sur la bioéconomie contient donc des propositions véritablement novatrices mais elle demeure sclérosée par le scientisme et le technologisme ambiant. Faut-il se réjouir du fait que certaines recommandations vont dans le sens d’une société plus sobre, plus respectueuse de l’environnement et des hommes et ce malgré les allusions constantes à la croissance et à la compétitivité donc les technocrates n’arrivent pas à s’affranchir ? Ou, au contraire, faut-il y voir un signe que le paradigme de la croissance va reprendre à son compte et annihiler toutes les alternatives économiques émergentes ? En attendant d’avoir la réponse, il faudra que la société civile se saisisse du concept et participe à l’élaboration de la bioéconomie dont on ne saurait laisser le soin de la définition à la seule Commission européenne ni aux multinationales.

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Notes :

1 Nicholas Georgescu-Roegen, La décroissance, Entropie – Écologie – Économie (1979). Présentation et traduction de MM. Jacques Grinevald et Ivo Rens. Nouvelle édition, 1995. [Première édition, 979]. Paris, Éditions Sang de la terre, 1995, 254 p.

2 Nicholas Georgescu-Roegen, La décroissance, Entropie – Écologie – Économie (1979). Présentation et traduction de MM. Jacques Grinevald et Ivo Rens. Nouvelle édition, 1995. [Première édition, 979]. Paris, Éditions Sang de la terre, 1995, p.43.

3 L’entropie, dont les définitions varient, peut se définir comme un indice de la quantité d’énergie inutilisable contenue dans un système thermodynamique à un moment donné de son évolution.

4 Nicholas Georgescu-Roegen, La décroissance, Entropie – Écologie – Économie (1979). Présentation et traduction de MM. Jacques Grinevald et Ivo Rens. Nouvelle édition, 1995. [Première édition, 979]. Paris, Éditions Sang de la terre, 1995, p.46.

5 Robert Costanza et al., « The value of the World’s Ecosystem Services and natural capital », Nature, n°387, 1997.

6 Nicholas Georgescu-Roegen, La décroissance, Entropie – Écologie – Économie (1979). Présentation et traduction de MM. Jacques Grinevald et Ivo Rens. Nouvelle édition, 1995. [Première édition, 1979]. Paris, Éditions Sang de la terre, 1995, p.100.

7 Voir Nicholas Georgescu-Roegen, La décroissance, Entropie – Écologie – Économie (1979). Présentation et traduction de MM. Jacques Grinevald et Ivo Rens. Nouvelle édition, 1995. [Première édition, 1979]. Paris, Éditions Sang de la terre, 1995, p.93. pour le détail du calcul et pour une revue du potentiel des différentes sources énergétiques terrestres exploitables par l’homme. Il s’agit là d’estimations approximatives réalisées à partir des données disponibles à l’époque mais l’ordre de grandeur ne se trouverait pas significativement changé par une quelconque mise à jour du calcul.

8 Nous pouvons considérer que l’énergie chimique des plantes ainsi que les l’énergie cinétique du vent et des chutes d’eau sont directement dues au rayonnement solaire. Dans ces cas-là, l’exploitation énergétique est plus aisée.

9 Notons que si l’énergie de basse entropie d’origine solaire est quasi infinie pour l’homme, les moyens mécaniques dont nous disposons pour la transformer en travail consomment, eux, des sources de basse entropie terrestres et limitées.

10 Selon une étude conduite par Dana Cordell, de l’Université Linköpings, basée en Suède, les réserves de phosphates pourraient avoir passé leur pic avant 2040, pour décroître inexorablement au cours de la seconde moitié du XXIème siècle. De nombreux observateurs considèrent que cette estimation déjà très optimiste.

11 L’Homo œconomicus va parfois jusqu’à prendre en compte l’avenir de ses enfants et de ses petits enfants mais jamais plus.

12 Seule une économie de cueillette annule complètement notre pression sur les ressources naturelles limitées, sous réserve d’une régulation démographique.

13 Ce point rentre directement en écho avec le concept d’obsolescence programmée. Bien que Georgescu ne parle ici que de la mode ou obsolescence psychologique, nous devons y associer l’obsolescence programmée ou la fabrication délibérée d’objets conçus pour ne pas durer.

14 L’éco-conception permet par exemple de fabriquer des produits modulaires qui permettent de récupérer tous leurs composants qui en eux fonctionnent encore. Sur ce dernier point et le précédent voir l’interview de Serge Latouche réalisée par l’Institut Momentum : http://www.institutmomentum.org/2013/04/face-a-lobsolescence-programmee-la-decroissance-emerge-comme-un-horizon-de-sensentretien-avec-serge-latouche-2/

15 Herman E. Daly , A Steady-State Economy A failed growth economy and a steady-state economy are not the same thing; they are the very different alternatives we face, Sustainable Development Commission, UK (April 24, 2008), School of Public Policy University of Maryland College Park

16 Herman Daly, A Steady-State Economy, papier présenté au Comité Britannique du Développement Durable (UK Sustainable Development Commission) le 24 avril 2008. Consultable à l’adresse suivante : http://www.sd-commission.org.uk/data/files/publications/Herman_Daly_thinkpiece.pdf

17 La Terre reçoit une abondance d’énergie solaire c’est pourquoi il a souvent été reproché à Nicholas Georgescu-Roegen de considérer la Terre comme un système clos. La Terre est effectivement un système ouvert du point de vue de l’écologie et des cycles biogéochimiques. Mais l’économie n’est pas purement écologique. Du fait de la technologie, des instruments exosomatiques, l’activité économique de l’espèce humaine “modernisée” se base sur l’exploitation massive des ressources géologiques du sous-sol. L’économie sort donc des limites du cycle vital de la Biosphère qui inclut les sols, mais pas le sous-sol entièrement minéral. L’échelle d’observation et d’intelligibilité est importante pour bien définir le “sous-système” économique (ouvert) au sein du système environnemental global, à savoir le système Terre, lequel est clos, à l’échelle pratique de l’économie humaine.

18 Nicholas Georgescu-Roegen, La décroissance, Entropie-Écologie-Économie (1979). Présentation et traduction de MM. Jacques Grinevald et Ivo Rens. Nouvelle édition, 1995. [Première édition, 1979]. Paris, Éditions Sang de la terre, 1995, p. 123.

19 Georgescu-Roegen, Energy and Economic Myths, New York, Pergamon Press, 1976.

20 Jacques Grinevald, Georgescu-Roegen : Bioéconomie et biosphère, Institut d’études économiques et sociales pour la décroissance soutenable, disponible à l’adresse suivante : http://www.decroissance.org/textes/grinevald.pdf

21 Gilbert Rist, Le développement, histoire d’une croyance occidentale, 3e édition revue et augmentée, Paris, Presses de Sciences Po, coll. « Références inédites », 1996, p. 30 – 31.

22 Hervé Kempf, « Cours de bioéconomie », Le Monde, 17 – 18 février 2013.

Texte écrit par Hugo Carton et Agnès Sinaï. via Momentum institut

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lundi, 21 octobre 2013

La croissance est morte dans les années 70...

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La croissance est morte dans les années 70...

Entretien avec Serge Latouche

Propos recueillis par Kevin Victoire

Ex: http://metapoinfos.hautetfort.com

Nous reproduisons ci-dessous un long entretien avec Serge Latouche, cueilli sur Ragemag. Economiste, sociologue et fondateur du MAUSS (Mouvement anti-utilitariste en sciences sociales), Serge Latouche est le principal théoricien français de la décroissance et dirige la revue Entropia. Il a publié de nombreux essais, dont, notamment,  L'occidentalisation du monde (La découverte, 1989 ), La mégamachine (La découverte, 1995), Le Pari de la décroissance (Fayard, 2006) et Sortir de la société de consommation (Les liens qui libèrent, 2010).

 

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Serge Latouche : « La croissance est morte dans les années 1970. »

Les statistiques de croissance du PIB au 2e trimestre viennent d’être publiées [NDLR : l’interview a été réalisée le 20 septembre] et il semblerait que la zone euro retrouve le chemin de la croissance : qu’en pensez-vous ?

Je pense que c’est totalement bidon ! D’une part, savoir si la croissance est de +0,5% ou -0,5% n’a pas de sens : n’importe quelle personne qui a fait des statistiques et de l’économie sait que pour que cela soit significatif, il faut des chiffres plus grands. Ensuite, de quelle croissance s’agit-il ? Nous avons affaire à cette croissance que nous connaissons depuis les années 1970, à savoir une croissance tirée par la spéculation boursière et immobilière. Dans le même temps, le chômage continue de croître et la qualité de vie continue de se dégrader dangereusement. Il faut bien comprendre que la croissance est morte dans les années 1970 environ. Depuis, elle est comparable aux étoiles mortes qui sont à des années-lumière de nous et dont nous percevons encore la lumière. La croissance que notre société a connue durant les Trente Glorieuses a disparu et ne reviendra pas !

La récession était-elle l’occasion idéale pour jeter les bases d’une transition économique ?

Oui et non : le paradoxe de la récession est qu’elle offre les possibilités de remettre en question un système grippé, mais en même temps, le refus de l’oligarchie dominante de se remettre en cause – ou de se suicider – la pousse à maintenir la fiction d’une société de croissance sans croissance. Par conséquent, elle rend encore plus illisible le projet de la décroissance. Depuis le début de la crise, il y a un tel délire obsessionnel autour de la croissance que les projets alternatifs ne sont pas audibles auprès des politiques. Il faut donc chercher de manière plus souterraine.

La décroissance est souvent amalgamée à la récession. Pourtant, vous affirmez que celle-ci n’est qu’une décroissance dans une société de croissance et qu’une vraie décroissance doit se faire au sein d’une société qui s’est départie de l’imaginaire de la croissance. Pouvez-vous détailler ?

Le projet alternatif de la décroissance ne devait pas être confondu avec le phénomène concret de ce que les économistes appellent « croissance négative », formulation étrange de leur jargon pour désigner une situation critique dans laquelle nous assistons à un recul de l’indice fétiche des sociétés de croissance, à savoir le PIB. Il s’agit, en d’autres termes, d’une récession ou d’une dépression, voire du déclin ou de l’effondrement d’une économie moderne. Le projet d’une société de décroissance est radicalement différent du phénomène d’une croissance négative. La décroissance, comme symbole, renvoie à une sortie de la société de consommation. A l’extrême limite, nous pourrions opposer la décroissance « choisie » à la décroissance « subie ». La première est comparable à une cure d’austérité entreprise volontairement pour améliorer son bien-être, lorsque l’hyperconsommation en vient à nous menacer d’obésité. La seconde est la diète forcée pouvant mener à la mort par famine.

Nous savons, en effet, que le simple ralentissement de la croissance plonge nos sociétés dans le désarroi, en raison du chômage, de l’accroissement de l’écart qui sépare riches et pauvres, des atteintes au pouvoir d’achat des plus démunis et de l’abandon des programmes sociaux, sanitaires, éducatifs, culturels et environnementaux qui assurent un minimum de qualité de vie. Nous pouvons imaginer quelle catastrophe serait un taux de croissance négatif ! Mais cette régression sociale et civilisationnelle est précisément ce que nous commençons déjà à connaître.

Depuis la récession de 2009, l’écart entre la croissance du PIB et celle de la production industrielle s’est accentué dans les pays développés : sommes-nous entrés dans une nouvelle phase de la société technicienne ?

Oui et non là encore. Oui, dans la mesure où depuis de nombreuses années, on parle de « nouvelle économie », « d’économie immatérielle », « d’économie de nouvelles technologies » ou encore « d’économie numérique ». On nous a aussi parlé de « société de services ». Nous voyons bien que ce phénomène n’est pas nouveau et qu’il y avait déjà dans les sociétés industrielles un phénomène de désindustrialisation. Pourtant, ce n’était pas un changement dans le sens où l’industrialisation existe toujours. Mais elle est partie en Inde, en Chine ou dans les « BRICS ». Il y a eu une délocalisation du secteur secondaire, ce qui nous amène à réimporter, à un chômage très important et à cette croissance spéculative. Nos économies se sont spécialisées dans les services haut de gamme : les services financiers, les marques, les brevets, etc. La production est délocalisée tout en conservant la marque, ce qui est plus rentable. Mais nous assistons aussi à un développement par en bas des services dégradés ou à la personne et à une nouvelle forme de domesticité qui se développe avec cette désindustrialisation.

Est-ce que vous confirmeriez les prévisions de Jacques Ellul qui voyait la naissance d’une dichotomie entre d’un côté les « nations-capitalistes » du Nord et de l’autre les « nations-prolétaires » du Sud ?

Cela n’est pas nouveau, ni totalement exact ! Les nations occidentales se prolétarisent aussi. Avec la mondialisation, nous assistons surtout à une tiers-mondisation des pays du Nord et un embourgeoisement des pays du Sud. Il y a par exemple aujourd’hui 100 à 200 millions de Chinois qui appartiennent à la classe moyenne mondiale, voire riche.

Le 20 août dernier, nous avons épuisé les ressources de la Terre pour 2013 et nous vivons donc à « crédit » vis-à-vis de celle-ci jusqu’à la fin de l’année. Il faudrait donc réduire d’environ un tiers notre consommation en ressources naturelles si nous voulons préserver notre planète. N’a-t-on pas atteint le point de non-retour ? La décroissance se fera-t-elle aux dépens des pays en voie de développement ?

Déjà soyons clairs, la décroissance est avant tout un slogan qui s’oppose à la société d’abondance. Ensuite, il ne s’agit surtout pas de régler les problèmes des pays du Nord aux dépens de ceux du Tiers-Monde. Il faudra résoudre simultanément les problèmes et du Nord et ceux du Sud. Évidemment, ce que vous évoquez, et que l’on appelle l’over shoot day, n’est qu’une moyenne globale. La réduction de l’empreinte écologique pour un pays comme la France n’est pas de l’ordre de 30%, mais de 75%. Une fois explicité comme cela, les gens se disent que ça va être dramatique. Justement, ce n’est pas nécessaire : nos modes de vie sont basés sur un gaspillage fantastique de la consommation et encore plus de la production, donc des ressources naturelles. Il ne faudra donc pas forcément consommer moins, mais consommer mieux. Tout d’abord, la logique consumériste pousse à accélérer l’obsolescence des produits. Il ne s’agit donc pas forcément de consommer moins mais de produire moins en consommant mieux.

Au lieu de consommer une seule machine à laver dans notre vie, nous en consommons 10 ou 15, de même pour les réfrigérateurs et je ne parle même pas des ordinateurs ! Il faut donc un mode de production où les individus ne consomment qu’une seule voiture, une seule machine à laver, etc. Cela réduirait déjà énormément l’empreinte écologique. Nous savons aussi que la grande distribution entraîne un grand gaspillage alimentaire. Environ 40% de la nourriture va à la poubelle, soit à cause des dates de péremptions dans les magasins, soit chez les particuliers qui ont emmagasiné de la nourriture qui finit par périmer. L’idée n’est pas de décroître aux dépens des pays pauvres, qui eux doivent au contraire augmenter leur consommation et leur production, mais de changer cette logique de gaspillage forcenée et de fausse abondance.

Nicholas Georgescu-Roegen, affirmait : « Chaque fois que nous produisons une voiture, nous le faisons au prix d’une baisse du nombre de vies à venir. » La décroissance doit-elle être accompagnée d’un contrôle démographique pour être soutenable ?

Il est toujours délicat d’aborder la question démographique. Les prises de position sur le sujet sont toujours passionnelles car touchant à la fois aux croyances religieuses, au problème du droit à la vie, à l’optimisme de la modernité avec son culte de la science et du progrès, elles peuvent déraper très vite vers l’eugénisme, voire le racisme au nom d’un darwinisme rationalisé. La menace démographique, vraie ou imaginaire, peut donc être facilement instrumentalisée pour mettre en place des formes d’écototalitarisme. Il importe donc de cerner les différentes dimensions du problème et de peser les arguments en présence, avant de se prononcer sur la taille d’une humanité « soutenable ».

Si l’insuffisance des ressources naturelles et les limites de la capacité de régénération de la biosphère nous condamnent à remettre en question notre mode de vie, la solution paresseuse consisterait, en effet, à réduire le nombre des ayants droit afin de rétablir une situation soutenable. Cette solution convient assez bien aux grands de ce monde puisqu’elle ne porte pas atteinte aux rapports sociaux et aux logiques de fonctionnement du système. Pour résoudre le problème écologique, il suffirait d’ajuster la taille de l’humanité aux potentialités de la planète en faisant une règle de trois. Telle n’est évidemment pas la position des objecteurs de croissance, ce qui n’empêche qu’ils soient taxés de malthusianisme parfois par ceux-là mêmes qui condamnent les deux tiers de l’humanité à l’extermination.

Il est clair que si une croissance infinie est incompatible avec un monde fini, cela concerne aussi la croissance de la population. La planète, qui n’a que 55 milliards d’hectares, ne peut pas supporter un nombre d’habitants illimité. C’est la raison pour laquelle presque tous les auteurs de référence de la décroissance, ceux qui ont mis en évidence les limites de la croissance (Jacques Ellul, Nicholas Georgescu-Roegen, Ivan Illich, René Dumont, entre autres) ont tiré le signal d’alarme de la surpopulation. Et pourtant, ce ne sont pas, pour la plupart, des défenseurs du système… Même pour Castoriadis, « la relation entre l’explosion démographique et les problèmes de l’environnement est manifeste ».

Cela étant, ce que la décroissance remet en cause, c’est avant tout la logique de la croissance pour la croissance de la production matérielle. Même si la population était considérablement réduite, la croissance infinie des besoins entraînerait une empreinte écologique excessive. L’Italie en est un bon exemple. La population diminue, mais l’empreinte écologique, la production, la consommation, la destruction de la nature, des paysages, le mitage du territoire par la construction, la cimentification continuent de croître. On a pu calculer que si tout le monde vivait comme les Burkinabés, la planète pourrait supporter 23 milliards d’individus, tandis que si tout le monde vivait comme les Australiens, d’ores et déjà le monde serait surpeuplé et il faudrait éliminer les neuf dixièmes de la population. Il ne pourrait pas faire vivre plus de 500 millions de personnes. Qu’il y ait 10 millions d’habitants sur Terre ou 10 milliards, note Murray Bookchin, la dynamique du « marche ou crève » de l’économie de marché capitaliste ne manquerait pas de dévorer toute la biosphère. Pour l’instant, ce ne sont pas tant les hommes qui sont trop nombreux que les automobiles… Une fois retrouvé le sens des limites et de la mesure, la démographie est un problème qu’il convient d’affronter avec sérénité.

Si une croissance infinie est incompatible avec un monde fini, cela concerne aussi la croissance démographique. La population ne peut, elle non plus, croître indéfiniment. La réduction brutale du nombre des consommateurs ne changerait pas la nature du système, mais une société de décroissance ne peut pas évacuer la question du régime démographique soutenable.

Que faire pour changer de régime ? Combattre l’individualisme ?

Les gens accusent souvent les partisans de la décroissance d’être des passéistes. Pourtant, nous ne souhaitons pas un retour en arrière. Mais, comme le préconisaient Ivan Illich ou même Castoriadis, il s’agit d’inventer un futur où nous retenons certains aspects du passé qui ont été détruits par la modernité. Sur ce sujet, un grand sociologue français, Alain Touraine, vient de sortir un livre intitulé La Fin des sociétés. C’est vrai qu’avec la mondialisation, on assiste à la fin des sociétés.

À ce sujet, un ancien Premier ministre anglais, Margareth Thatcher, a dit : « Il n’existe pas de société, il n’existe que des individus ». C’est énorme de dire cela ! Donc, dans le projet de la décroissance, il ne s’agit pas de retrouver une ancienne société disparue, mais d’inventer une nouvelle société de solidarité. C’est-à-dire qu’il faut réinventer du lien social, parfois par la force des choses comme avec la fin du pétrole, sur la base d’une économie de proximité, avec une relocalisation de la totalité de la vie. Ce n’est pas un repli sur soi, mais une nouvelle redécouverte de la culture, de la vie, de la politique et de l’économie.

Justement, relocaliser les activités humaines serait une nécessité écologique. Mais la réindustrialisation potentielle qui en découlerait ne serait-elle pas une entrave à la décroissance ?

Non, parce qu’il ne s’agit pas de la réindustrialisation prônée par notre système. Madame Lagarde, quand elle était ministre de l’Économie, avait inventé le néologisme « rilance » : de la rigueur et de la relance. Pour nous, c’est exactement le contraire : nous ne voulons ni rigueur, ni relance, ni austérité. Évidemment qu’il faut sortir de la récession et récréer des emplois, non pas pour retrouver une croissance illimitée, mais pour satisfaire les besoins de la population. En fait, la réindustrialisation dans une optique de décroissance est plus artisanale qu’industrielle. Il faut se débarrasser des grosses entreprises au profit d’une économie composée de petites unités à dimensions humaines. Ces dernières peuvent être techniquement très avancées mais ne doivent en aucun cas être les monstres transnationaux que nous connaissons actuellement. Elles doivent être plus industrieuses qu’industrielles, plus entreprenantes qu’entrepreneuses et plus coopératives que capitalistes. C’est tout un projet à inventer.

L’État moderne se comporte toujours comme un soutien au productivisme, soit en favorisant l’offre pour les libéraux, soit en favorisant la demande pour les keynésiens. La décroissance a-t-elle besoin d’une disparition de l’État ?

Cela dépend de ce que nous mettons derrière le mot « État ». Même si l’objectif n’est pas de maintenir cet État-nation, bien sûr qu’une société de décroissance devra inventer ses propres institutions. Elles devront être plus proches du citoyen avec une coordination au niveau transnational. Celle-ci est vitale, car beaucoup de phénomènes environnementaux sont globaux : il est alors impossible d’imaginer un repli total. Il faudra donc inventer de nouvelles formes qui diffèrent de l’appareil bureaucratique moderne.

La décroissance implique aussi un changement de mode de vie. Comment faire pour lutter contre la société marchande sans se marginaliser ?

Effectivement, il faut les deux. Il y a d’ailleurs dans les objecteurs de croissance des gens très investis dans des coopératives alternatives comme des écovillages. De plus, il faut tenir les deux bouts de la chaîne : une société ne change pas du jour au lendemain. Il faut donc penser la transition sans attendre un changement global simultané. Les meilleurs exemples sont les villes en transition où l’on essaie de réorganiser l’endroit où l’on vit afin de faire face aux défis de demain comme la fin du pétrole. Ce qui m’intéresse surtout dans les villes en transition, c’est leur mot d’ordre : « résilience », qui consiste à résister aux agressions de notre société. Mais cela n’implique pas de revenir à l’âge de pierre, comme les Amish. Au contraire, cela implique une qualité de vie maximale sans détruire la planète.

Changer de régime économique est-il possible pour un pays seul ? Une initiative isolée ?

Ça rappelle le vieux débat qui a opposé Staline à Trotsky pour savoir si le socialisme pouvait se faire dans un seul pays. Mais en réalité, la réponse n’est pas « oui » ou « non ». La question ne peut pas être posée de façon manichéenne, simplement parce que nous ne pouvons pas changer le monde du jour au lendemain et il faut bien commencer ! Donc, le commencement se fait petit à petit, au niveau local, en visant le global. La parole d’ordre des écologistes fut pendant longtemps : « Penser globalement, agir localement ». Ce n’est pas qu’il ne faille pas agir globalement, mais c’est plus compliqué. Donc le point de départ est local pour une visée plus large. De toute manière, le projet ne se réalisera ni totalement ni globalement. La société de décroissance est un horizon de sens, mais pas un projet clé en main réalisable de façon technocratique.

La décroissance, selon vous, commencerait-elle par une démondialisation pour tendre vers une forme d’altermondialisme ?

Je n’aime pas le terme « altermondialisme ». Il s’agit évidemment d’une démondialisation, qui n’est pas une suppression des rapports entre les pays. Mais qu’est-ce que la mondialisation que nous vivons ? Ce n’est pas la mondialisation des marchés mais la marchandisation du Monde. Ce processus a commencé au moins en 1492 quand les Amérindiens ont découvert Christophe Colomb (rires). Démondialiser veut surtout dire retrouver l’inscription territoriale de la vie face au déménagement plantaire que nous connaissons. Car la mondialisation est surtout un jeu de massacres ! C’est-à-dire que nous détruisons ce qui fonctionnait traditionnellement bien dans les différents pays pour les asservir aux marchés. Par exemple, l’agriculture était fleurissante en Chine mais le capitalisme occidental a déraciné la majorité des paysans qui sont devenus des min gong : des ouvriers qui s’entassent en périphérie des grandes villes, comme Pékin ou Shanghai. Mais, dans le même temps, ces ouvriers chinois détruisent nos emplois et notre industrie. Nous nous détruisons mutuellement. Il faut au contraire que nous nous reconstruisons les uns les autres. La solution est une relocalisation concertée par un dialogue interculturel et non pas par l’imposition de l’universalisme occidental.

Les nouvelles technologies, et plus globalement la technique et la science, peuvent-elles être employées contre l’oligarchie ou sont-elles intrinsèquement néfastes ?

Ça c’est une très grande question, très difficile. Jacques Ellul avait énormément réfléchi dessus et n’avait jamais dit qu’elles étaient intrinsèquement mauvaises. Il pensait même que, dans certaines situations, elles pouvaient être utiles à la société d’avenir. Celle qui est, selon lui, intrinsèquement mauvaise, c’est la structure sociale dans laquelle la technique et la science sont produites et utilisées. Alors bien évidemment, il faut les détourner et c’est ce que certains font. Il y a une sorte de guérilla. Sur internet, par exemple, nous le voyons. Dans ma jeunesse, nous parlions de retourner les armes contre l’ennemi. Dans une société de décroissance, qui n’est plus une société dominée par la marchandisation et le capital, ces techniques fonctionneraient autrement. Il y a aussi plein de choses intéressantes créées par le génie humain qui ne sont pas utilisées, car elles ne correspondent pas à logique du système. Nous aurons besoin de ces derniers dans une société différente. Nous devons, en réalité, surtout concevoir un nouvel esprit. Notre système est dominé – d’un point de vue technico-scientifique – par un esprit prométhéen de maîtrise de la nature, que nous ne maîtrisons pourtant pas. Il faudra donc se réinsérer dans une vision plus harmonieuse des rapports entre l’Homme et la nature.

Jacques Ellul estimait que le travail était aliénant. Est-ce à dire que la décroissance doit passer par l’abolition du salariat ?

 

Il n’y a pas d’urgence à l’abolir. Dans l’immédiat, il faut surtout créer les postes de salariés nécessaires. Il faut surtout réduire l’emprise de la nécessité en développant notamment la gratuité. Je pense que l’idée d’un revenu universel, ou au moins d’un revenu minimal assurant la survie, n’est pas une mauvaise chose car il réduirait l’espace de la nécessité. Dans une société de décroissance, il faudra des échanges d’activités et d’œuvres qui auront remplacé le travail. Mais ce n’est évidemment plus l’échange marchand obsédé par le profit. Il faut réintroduire l’esprit du don – qui n’a pas totalement disparu – dans les rapports de clientèle et dans les marchandages. En Afrique, par exemple, il existe encore une sorte de métissage entre la logique marchande et celle du don. Ce qu’il faut surtout abolir, c’est le travail salarié en tant qu’abstraction inhumaine.

Pensez-vous que la monnaie s’oppose à la logique du don et qu’en conséquence, une société de décroissance doit abolir le système monétaire ?

Sûrement pas ! Par contre, il doit y avoir l’abolition de certaines fonctions de la monnaie. Il faut par exemple en finir avec la monnaie qui engendre de la monnaie, car l’accumulation monétaire est très perverse. Mais la monnaie comme instrument de mesure et d’échange est une nécessité dans une société complexe. Je dirais même que c’est un acquis de la civilisation.

Des personnalités de gauche comme de droite se revendiquent aujourd’hui de la décroissance. Qu’en pensez-vous ?

Que la décroissance soit un projet politique de gauche constitue, pour la plupart des objecteurs de croissance, une évidence, même s’il en existe aussi une version de droite. Allons plus loin : il s’agit du seul projet politique capable de redonner sens à la gauche. Pourtant, ce message-là se heurte à une résistance très forte et récurrente. La décroissance constitue un projet politique de gauche parce qu’elle se fonde sur une critique radicale du libéralisme, renoue avec l’inspiration originelle du socialisme en dénonçant l’industrialisation et remet en cause le capitalisme conformément à la plus stricte orthodoxie marxiste.

Tout d’abord, la décroissance est bien évidemment une critique radicale du libéralisme, celui-ci entendu comme l’ensemble des valeurs qui sous-tendent la société de consommation. On le voit dans le projet politique de l’utopie concrète de la décroissance en huit R (Réévaluer, Reconceptualiser, Restructurer, Relocaliser, Redistribuer, Réduire, Réutiliser, Recycler). Deux d’entre eux, réévaluer et redistribuer, actualisent tout particulièrement cette critique. Réévaluer, cela signifie, en effet, revoir les valeurs auxquelles nous croyons, sur lesquelles nous organisons notre vie, et changer celles qui conduisent au désastre. L’altruisme devrait prendre le pas sur l’égoïsme, la coopération sur la compétition effrénée, l’importance de la vie sociale sur la consommation illimitée, le local sur le global, l’autonomie sur l’hétéronomie, le raisonnable sur le rationnel, le relationnel sur le matériel, etc. Surtout, il s’agit de remettre en cause le prométhéisme de la modernité tel qu’exprimé par Descartes (l’homme « comme maître et possesseur de la nature ») ou Bacon (asservir la nature). Il s’agit tout simplement d’un changement de paradigme. Redistribuer s’entend de la répartition des richesses et de l’accès au patrimoine naturel entre le Nord et le Sud comme à l’intérieur de chaque société. Le partage des richesses est la solution normale du problème social. C’est parce que le partage est la valeur éthique cardinale de la gauche que le mode de production capitaliste, fondé sur l’inégalité d’accès aux moyens de production et engendrant toujours plus d’inégalités de richesses, doit être aboli.

Dans un deuxième temps, la décroissance renoue avec l’inspiration première du socialisme, poursuivie chez des penseurs indépendants comme Elisée Reclus ou Paul Lafargue. La décroissance retrouve à travers ses inspirateurs, Jacques Ellul et Ivan Illich, les fortes critiques des précurseurs du socialisme contre l’industrialisation. Une relecture de ces penseurs comme William Morris, voire une réévaluation du luddisme, permettent de redonner sens à l’écologie politique telle qu’elle a été développée chez André Gorz ou Bernard Charbonneau. L’éloge de la qualité des produits, le refus de la laideur, une vision poétique et esthétique de la vie sont probablement une nécessité pour redonner sens au projet communiste.

Pour finir, la décroissance constitue une critique radicale de la société de consommation et du développement, la décroissance est une critique ipso facto du capitalisme. Paradoxalement, on pourrait même présenter la décroissance comme un projet radicalement marxiste, projet que le marxisme (et peut-être Marx lui-même) aurait trahi. La croissance n’est, en effet, que le nom « vulgaire » de ce que Marx a analysé comme accumulation illimitée de capital, source de toutes les impasses et injustices du capitalisme. Pour sortir de la crise qui est inextricablement écologique et sociale, il faut sortir de cette logique d’accumulation sans fin du capital et de la subordination de l’essentiel des décisions à la logique du profit. C’est la raison pour laquelle la gauche, sous peine de se renier, devrait se rallier sans réserve aux thèses de la décroissance.

Tout le monde se souvient de l’échec de la commission Stiglitz-Sen mise en place par l’ex-Président Sarkozy dans le but de trouver un indicateur de « bien-être » autre que le simple PIB. Le problème ne viendrait-il pas de l’obsession des mesures quantitatives ?

Il est certain que nous devons nous débarrasser de l’obsession des mesures quantitatives. Notre objectif n’est pas de mesurer le bonheur puisque cet objectif n’est par définition pas mesurable. Mais je ne crois pas que nous puissions parler d’échec de la commission Stiglitz-Sen, puisqu’elle a quand même proposé des indicateurs alternatifs pertinents. D’un autre côté, et malgré toutes les critiques qui peuvent lui être adressées, le PIB est tout à fait fonctionnel dans la logique de la société mondialisée de croissance. Il existe bien sûr d’autres indicateurs intéressants comme l’Happy Planet Index (HPI) mis au point par la fondation anglaise New Economics Foundation, mais ce dernier n’est pas fonctionnel dans notre système. Il est cependant intéressant comme indicateur critique du PIB. Pourquoi ? Parce que les États-Unis est en termes de PIB au 1er rang mondial, en termes de PIB par tête au 4ème rang et en termes de bonheur au 150ème rang ! La France se situe dans les mêmes ordres de grandeur. Tout cela signifie que si nous mesurons le bonheur par l’espérance de vie, l’empreinte écologique et le sentiment subjectif du bonheur — qui sont les trois critères du HPI —, les pays qui arrivent en tête sont le Vanuatu, le Honduras, le Venezuela et d’autres pays de ce type [ndlr : le trio de tête de 2012 est composé, dans l’ordre, du Costa Rica, du Vietnam et de la Colombie] . Malheureusement, il n’est pas fonctionnel dans notre système. Un autre indice de ce type qui pourrait être retenu, c’est l’empreinte écologique qui est elle-même synthétique. Le problème n’est pas de trouver l’indicateur miracle mais bel et bien de changer la société. Ces indices ne sont que des thermomètres et ce n’est pas en cassant le thermomètre que la température du malade change.

La rupture avec la croissance n’est-elle pas aussi une rupture avec l’économie comme science au profit d’autres disciplines comme la philosophie ou la sociologie ?

Oui, il s’agit bien d’une rupture avec l’économie. Mais celle-ci ne s’effectue pas seulement avec l’économie en tant que science mais aussi avec l’économie en tant que pratique. Il faut réenchâsser l’économique dans le social, au niveau théorique mais surtout au niveau pratique. Au niveau théorique d’abord parce que la « science économique » est une fausse science, et que la manière de vivre des Hommes appartient à l’éthique au sens aristotélicien du terme et donc à la philosophie ou à la sociologie. Sinon, pour paraphraser Lévi-Strauss, il n’existe qu’une seule science humaine : l’anthropologie. Au niveau pratique ensuite, en réintroduisant l’économique dans les pratiques de la vie et pas ne pas la laisser dans l’obsession du quantitatif avec la valorisation de l’argent, du profit ou du PIB.

Serge Latouche, propos recueillis par Kévin Victoire (Ragemag, 15 octobre 2013)

mardi, 15 octobre 2013

L'allemand Siemens investira plus d'un milliard d'euros en Russie

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L'allemand Siemens investira plus d'un milliard d'euros en Russie

Joe Käser
 
Ex: http://fr.ria.ru
TOUAPSE, 11 octobre - RIA Novosti

Le consortium allemand Siemens AG continuera d'investir en Russie en dépassant le montant d'un milliard d'euros prévu pour 2013-2015, a déclaré vendredi à Touapse (littoral russe de la mer Noire) le président de Siemens AG Joe Käser, lors d'une rencontre avec le président russe Vladimir Poutine.

"Il est toujours difficile d'investir le premier milliard, mais cela devient plus facile avec le deuxième (…). Nous continuerons d'investir dans l'industrialisation de la Russie, l'efficacité énergétique de l'industrie russe et les technologies médicales. J'estime que nous pouvons élargir notre partenariat pour le bien des habitants de la Russie et de notre consortium bien sûr", a indiqué M.Käser.

M.Poutine a pour sa part déclaré que le consortium allemand pouvait également coopérer avec les sociétés russes en Allemagne. "Vous avez mentionné le groupe pétrolier Rosneft parmi vos partenaires. Rosneft est déjà actionnaire de quatre entreprises en Allemagne", a rappelé le président russe.

L'Amérique et les hypothèques de Dieu...

L'Amérique et les hypothèques de Dieu...

Jean-Philippe Immarigeon

Ex: http://metapoinfos.hautetfort.com

Nous reproduisons ci-dessous un point de vue de Jean-Philippe Immarigeon, cueilli sur son blog American Parano et consacré à la crise de la dette américaine.

Avocat, bon connaisseur des Etats-Unis, Jean-Philippe Immarigeon est l'auteur de plusieurs essais d'une grande lucidité comme American parano (Bourin, 2006), Sarko l'Américain, (Bourin, 2007), L'imposture américaine (Bourin, 2009) ou Pour en finir avec la Françamérique (Ellipses, 2012). Il collabore régulièrement à la revue Défense Nationale.

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L'Amérique et les hypothèques de Dieu

L’Amérique est paralysée, l’Amérique s’enfonce dans une crise autrement plus profonde que simplement financière. Mais l’Amérique est en crise parce qu’elle n’est qu’une crise permanente, elle est cette expulsion de la vieille Europe d’avant l’Europe, celle des Pilgrims du Mayflower, réfugiée dans ce que j’ai déjà nommé Feodalic Park. Elevés dans l’idée, conceptualisée par Thomas Paine, que leur île-continent se devait d’être découverte pour que s’y réfugiât ces sectes calvinistes dans lesquelles Max Weber vit le terreau du capitalisme, les Américains se sont installés dans ce don de Dieu comme dans la forteresse du choral de Luther, Ein feste Burg ist unser Gott. Refuge, réclusion, retranchement, ils n’en sont jamais sortis que pour forcer The Rest of the World à leur ressembler, de gré ou de force. La guerre d’Irak, et tout le substrat idéologique que les néocons lui ont donnée et qu’on n’a pas voulu prendre pour ce qu’il était, à savoir l’Amérique des origines qui se réalise et non un simple et très passager pétage de plombs, a mis fin à ce rêve. Il ne lui reste plus qu’à se replier sur son île-continent, et à revenir à la lettre du Farewell Address de George Washington : ne jamais être tributaire de l’Etranger.

Or la dette est l’intrusion de l’Etranger dans les affaires américaines. C’est cela qui est refusé, c’est cette rébellion qui est derrière le Tea Party dont la raison sociale plonge dans cet incident de Boston de novembre 1773, ce que tout le monde sait, sauf qu’il s’agissait ni plus ni moins d’un réflexe de prophylaxie. Thé anglais, livres français ou dollars chinois, l’Etranger est forcément intrusif, symbolisant le Mal dont l’Amérique s’est séparé en 1620 puis en 1776. La séquestration, le refus de relever le plafond de la dette, c’est le refus de l’Autre qui n’est que la manifestation la plus tangible du repli d’une nation dont les dirigeants disent qu’elle est fatiguée, sans que les nôtres ne comprennent que ce mot entre en résonnance avec la raison fondatrice de l’Amérique. Il veut dire qu’un troisième abandon du monde, une troisième séparation après celles de 1620 et 1776, sous-tend la crise actuelle, et en est l’achèvement logique, historique et irrépressible.

Cette faillite acceptée et assumée, ce refus d’honorer la dette sera le signal de la banqueroute universelle : tous les débiteurs vont dire merde à leurs créanciers. Bonne nouvelle. Catastrophe, s’affolent d’autres. De ceci l’Amérique se préoccupe comme d’une guigne. Elle ne déstructure pas le monde puisqu’elle ne l’a jamais pensé, qu’elle n’a jamais pensé qu’elle-même. Elle ne se sent liée à aucune obligation, à aucun principe qui ne soit le sien. Elle n’a jamais rien prévu que pour elle-même, et ce qu’elle veut aujourd’hui c’est avoir la paix, qu’on lui foute la paix.

Hantée par l’idée de sa disparition, qu’elle a déjà frôlée lors de la Grande Dépression, cette nation de cowboys dépressifs qui a cru pouvoir se garantir de tous les maux en accumulant une puissance sans égale, découvre que l’Histoire est aussi amorale que la nature chez Darwin. Si d’épouvantables défaites peuvent faire basculer en une nuit les trônes les plus assurés, les empires ne tombent pas d’une déchéance qui se mesure et qu’on peut réparer parce qu’on la détecterait. Ce serait si facile, il suffirait de colmater et l’on serait au-dessus de Pharaon, du Khan, du Grand Moghol, de l’Aztèque ou de la Sublime Porte. Ils meurent d’hystérie lorsqu’ils se découvrent désarmés au spectacle de l’impuissance de leur puissance soudainement inopérante, inutile et vaniteuse autant que vaine.

« Nous avons tous vu des empires s’effondrer, et les plus solides, écrivait Jean Giraudoux dans Sodome et Gomorrhe, et les plus habiles à croître et les plus justifiés à durer, et ceux qui ornaient cette terre et ses créatures. Au zénith de l’invention et du talent, dans l’ivresse de l’illustration de la vie et de l’exploitation du monde, alors que l’armée est belle et neuve, les caves pleines, les théâtres sonnants, que dans les teintureries on découvre la pourpre ou le blanc pur, dans les mines le diamant, dans les cellules l’atome, que de l’air on fait des symphonies, des mers de la santé, que mille systèmes ont été trouvés pour protéger les piétons contre les voitures, et les remèdes au froid et à la nuit et à la laideur, alors que les alliances protègent contre la guerre, les assurances et poisons contre la maladie des vignes et les insectes, alors que le grêlon qui tombe est prévu par les lois et annulé, soudain en quelques heures un mal attaque ce corps sain entre les sains, heureux entre les bienheureux. C’est le mal des empires. Il est mortel. Alors tout l’or est là, entassé dans les banques, mais le sou et le liard eux-mêmes se vident de leur force. Tous les bœufs et vaches et moutons sont là, mais c’est la famine. Tout se rue sur l’empire, de la chenille à l’ennemi héréditaire et aux hypothèques de Dieu. Le mal surgit là même d’où il était délogé pour toujours, le loup au centre de la ville, le pou sur le crâne du milliardaire. Et les fleuves tournent, les armées tournent, le sang et l’or tournent, et dans la tourmente, l’inondation et la guerre des guerres, il ne reste plus que la faillite, la honte, un visage d’enfant crispé de famine, une femme folle qui hurle, et la mort. »

La faillite, la honte, et la mort. Que la crise actuelle se résolve, temporairement, ou qu’elle permettre d’ici 2015 d’en finir enfin avec le XXe siècle, il nous faut d'urgence, pour ceux qui ne l'auraient pas encore fait faute de me lire, penser un monde sans l’Amérique.

Jean-Philippe Immarigeon (American Parano, 12 octobre 2013)

samedi, 05 octobre 2013

Qual è il vero significato delle «Favola delle api» di Bernard Mandeville?

Qual è il vero significato delle «Favola delle api» di Bernard Mandeville?

di Francesco Lamendola

Fonte: Arianna Editrice [scheda fonte]

mandeville1-1.jpgIl successo, la ricchezza, la potenza degli individui e delle nazioni, si possono ottenere con la pratica intransigente della virtù; oppure l’egoismo, l’inganno e la violenza sono gli ingredienti necessari per raggiungerle e conservarle?

Bella domanda; domanda impertinente. E impertinente, infatti - anzi, sommamente impertinente, per non dire irritante - è «La favola delle api» di Bernard Mandeville (1670-1733), un medico di origine olandese trasferitosi in Inghilterra, che trasse la sua opera filosofica più famosa da quella che era, in origine, una poesia: «The Grumbling Hive: or, Knaves Turn’d  Honest», che, dopo un processo di gestazione e rielaborazione durato quasi cinque lustri, vide infine la luce a Londra, nel 1729, con il titolo definitivo di «The Fable of the Bees: or, Private Vices, Public Benefits».

Per farsi un’idea della spregiudicatezza del tono adottato dall’Autore, basterà riportare qui la conclusione (da: B. Mandeville, «La favola delle api», traduzione dall’inglese di Maria Goretti, Firenze, Casa Editrice Felice Le Monnier, 1969, XXXI, vv. 409-433, pp. 54-55):

«Lasciate, quindi, le lamentele! Soltanto gli sciocchi si sforzano di fare del grande alveare del mondo un alveare onesto. Godere delle gioie della terra, essere rinomati nella guerra, e ancora vivere in pace, sena grandi vizi è soltanto utopia vana, esistente solo nell’immaginazione. È necessario che la frode, il lusso e la vanità sussistano, se noi vogliamo averne in benefici: allo stesso modo la fame è certo un terribile tormento, ma come digerire e prosperare senza di essa? Non dobbiamo il vino alla vigna, magra, brutta, contorta? La stessa, se i polloni sono lasciati stare, soffoca altre piante e diviene solo legna da bruciare; ma se i rami sono pareggiati e tagliati, subito diviene fecondo e ci dà la benedizione del suo nobile frutto: allo stesso modo il vizio risulta beneficio, purché sia rattenuto e nettato del superfluo dalla Giustizia; anzi, qualora un popolo voglia essere grande, il vizio è necessario in uno Stato come la fame è necessaria per obbligarci a mangiare. La sua pura virtù non può rendere mai una nazione celebre e gloriosa; coloro che vorrebbero far rivivere l’età dell’oro debbono accettare con la virtù il cibo dei porci.»

Ce n’è abbastanza per mettere tremendamente a disagio il lettore, tanto più se questi appartiene alla specie degli ipocriti, abituati a predicare bene e razzolare male, ma niente affatto disposti a vedersi smascherati così brutalmente dal primo venuto; e Dio sa se, nella Londra e nell’Inghilterra dei primi decenni del Settecento, in piena espansione commerciale e finanziaria, e già in procinto di varare, con mezzo secolo di anticipo sul resto del continente, la propria rivoluzione industriale, una tale specie umana non era ampiamente diffusa e generosamente rappresentata sia nella società civile, che nelle istituzioni e nel Parlamento.

Mai come in questo caso, infatti, per comprendere il senso di uno scritto filosofico – che pure ci sottopone una questione di portata universale – è necessario contestualizzarlo: perché si rischierebbe di non comprendere i veri termini della questione, o, peggio, di fraintenderli completamente, se non si tenesse presente a quale genere di pubblico aveva l’ardire di rivolgersi il suo autore; vale a dire, quale razza di farisei ipocriti aveva deciso di prendere di mira e di sferzare senza troppi complimenti.

Un Paese in piena espansione, dunque; un Paese che si stava giocando, e che stava vincendo, niente meno che la grande partita per il controllo dei traffici internazionali, forte della marina più agguerrita e numerosa del mondo; un Paese governato con un singolare miscuglio d’intraprendenza, audacia, fortuna e assoluta mancanza di scrupoli, unite a una buona dose d’improntitudine; le cui banche stavano allungando i loro tentacoli sul mondo, le cui navi stavano saccheggiando le materie prime dei cinque continenti, le cui merci ad alto costo stavano invadendo i mercati del globo terracqueo, e le cui dottrine politiche liberali e costituzionali si stavano diffondendo con pari successo, magari al rombo dei cannoni, e preparavano il terreno per potersi poi imporre, con la calma, ma con piglio sicuro, uno dopo l’altro in tutti i Paesi del mondo, presentando sé stesso come modello inarrivabile di benessere, di progresso, di civiltà.

Ma ci piace dare la parola al filosofo Emanuele Riverso, abbastanza recentemente scomparso, per la chiarezza e la lucidità del quadro che sa tratteggiare sia della società inglese, sia del modo in cui fu accolto il capolavoro di Mandeville (da: E. Riverso, «Forme culturali e paradigmi umani. Le tappe del pensiero filosofico e pedagogico nella cultura occidentale», Roma, Edizioni Borla, 1988, vol. 2, pp. 304-305):

«L’opera suscitò un putiferio, perché fu accusata di essere una esaltazione o descrizione cinica del vizio. In realtà essa lacerava quel velo di autocompiacimento»e di auto-approvazione morale che gli scrittori dotti, i pubblicisti politici e gli autori di orientamento religioso distendevano sulla società del tempo, creando la buona coscienza in quanti spregiudicatamente si dedicavano alle speculazioni ed agli affari, sconvolgendo le antiche strutture rurali, urbane, produttive, commerciali e morali e creando masse di diseredati, di frustrati, di angosciati, che si addensavano intorno ai centri urbani e presso i nuovi centri minerari e industriali.

Mandeville volle soltanto spiegare che l’enorme prosperità globale dell’Inghilterra del tempo non poteva essere considerata come un premio o la conseguenza di una benedizione divina (secondo la tesi puritana e calvinista in genere che faceva della prosperità materiale un segno di benedizione e di predestinazione), ma nasceva dal cumulo e dall’interazione di attività e intenzioni individuali che, singolarmente prese, e dal punto di vista cristiano,non potevano essere considerate altro che vizi: i vizi privati (avidità, egoismo, spregiudicatezza, avarizia, lussuria) nel contesto libertario dell’Inghilterra dell’epoca, davano luogo a un dinamismo globale, che nel suo insieme produceva ricchezza e prosperità. Era una tesi realistica, l’esame realistico di una società che, al di sotto delle dichiarazioni ufficiali conformi ai valori cristiani, si andava adattando a valori nuovi di profitto, di ricchezza, di dominio e di prestigio economico. Non era meglio esaminare il fatto sociale per quello che realmente era anziché utilizzare finzioni ed ipotesi normative? Non era meglio tener conto delle reali intenzioni delle persone, quando si doveva procedere a iniziative pubbliche, e mettere da parte le ipocrisie, per ordinare in modo più efficace le azioni di governo?

Scrittori, ecclesiastici, moralisti e letterati reagirono violentemente allo scritto di Mandeville, accusandolo di essere un difensore del vizio. Uno di loro, John Dennis, disse di lui che “il vizio e la lussuria hanno trovato un campione e difensore che mai prima avevano trovato; un altro, William Law, disse che l’intento di Mandeville  era quello di “liberare l’uomo dalla SAGACIA dei moralisti dal dominio della virtù e ricollocarlo nei diritti e privilegi della brutalità; di richiamarlo dalle vertiginose altezze della dignità razionale e della rassomiglianza  con gli Angeli, per farlo andare nell’erba o a rotolarsi nel fango” (in “Remarks upon a Late Book, entituled, The Fable of the Bees, London 1726, p. 6).

Come si presenta oggi, l’opera di Mandeville, che è una delle più significative della storia del pensiero del settecento, comprende una prefazione, una composizione poetica in trenta strofe intitolata “L’alveare brontolone” o “Gli schiavi divenuti onesti”, in cui descrive la vita inglese del settecento con le assurdità, le angosce, gli sconvolgimenti, gli egoismi, la spietatezza tipici del tempo in cui andavano maturando le condizioni per la prima rivoluzione industriale. Segue una breve Introduzione ed una “Ricerca sulla natura della società”. La sua conclusione era che “né le qualità amichevoli e gli affetti gentili che sono naturali agli uomini, né le virtù reali che egli è capace di acquisire mediante la ragione e l’abnegazione, sono il fondamento della società; ma ciò che chiamiamo Male in questo mondo, tanto morale che naturale, è il grande principio che ci rende creature sociali, la solida base, la vita ed il sostegno di tutti i commerci e le attività senza eccezione: è lì che dobbiamo cercar la vera origine di tutte le arti e le scienze e nel momento in ci il Male cessa, la società so deve impoverite, se non dissolversi” (Mandeville, “The Fable of the Bees”,  Pelican 1970, p. 370).»

Ammirevole franchezza, dunque; alla quale non ci sentiamo di aggiungere se non che il trionfo del male nelle attività economiche non è una condizione fatale e necessaria, ma il risultato di un certo modello di economia (e di politica): perché una cosa è, ad esempio, una organizzazione economica, giuridica e sociale che, come quella medievale e pre-moderna, proibisce o scoraggia l’usura e che fonda, con il Banco dei Paschi di Siena, la prima banca non speculativa del mondo; e un’altra cosa, e ben diversa, è una organizzazione economica, giuridica e sociale, come quella del nascente capitalismo inglese, che innalza la più spietata concorrenza al rango di legge ineluttabile e universale, che indica il profitto quale unico criterio di misura della bontà di una determinata iniziativa, che fonda la prima grande banca speculativa del mondo.

Insomma: non è un fatto di natura che lo sviluppo dell’economia si fondi sull’egoismo, sulla brutalità, sul cinismo: non qualunque tipo di economia porta a tali esiti, o non nella stessa misura; si tratta, invece, di una caratteristica specifica di un determinati modello di economia, quello basato sullo strapotere finanziario, sulla massimizzazione dei profitti ad ogni costo, sulla riduzione e la degradazione dell’uomo e del lavoro in una merce come qualunque altra. E non è certo un caso se, mezzo secolo dopo che era apparso lo “scandaloso” apologo di Mandeville, l’economista Adam Smith avrebbe teorizzato che dalla somma degli egoismi individuali discende, misteriosamente, anche la prosperità collettiva; e avrebbe tirato in ballo, con pochissimo rigore logico, una non meglio specificata “mano invisibile” per illustrare tale concetto. Perché nella cultura inglese, e specialmente in quella di matrice calvinista, è sempre stata vivissimo il bisogno di drappeggiare il nudo e crudo perseguimento dell’interesse individuale, squisitamente egoistico, di belle formule miranti a dimostrare che non c’è alcuna contraddizione con l’esigenza del bene comune. Non aveva John Locke posto la proprietà privata fra i diritti NATURALI dell’uomo? Ogni azione egoistica dell’individuo, purché questi sia formalmente timorato di Dio (il Dio dei puritani), trova sempre la sua giustificazione e perfino la sua glorificazione, in nome del progresso e del benessere collettivi. Così, ad esempio, gli “Highlanders” scozzesi, e con loro gli ultimi giacobiti, venivano massacrati fino all’ultimo sangue, perché anche le aree più “arretrate” delle Isole Britanniche si aprissero agli incomparabili vantaggi della modernità, del commercio e dell’industria; così i Pellerossa del Nord America venivano irretiti in trattati menzogneri, ingannati e, infine, braccati come bestie feroci, a maggior gloria dei Padri pellegrini e del manifesto destino civilizzatore dei coloni britannici.

La cultura nordamericana ha ereditato in pieno questa tendenza all’autocompiacimento ipocrita e non ha saputo nemmeno sbarazzarsi dell’ormai logoro paravento religioso: basta ascoltare il discorso di insediamento di un qualsiasi presidente degli Stati Uniti; basta udire le invocazioni a Dio affinché benedica l’America, nel momento in cui essa si appresta a perpetrare delle ingiustificabili guerre di aggressione, con la scusa di voler diffondere la democrazia e la libertà di commercio (cioè la libertà d’imporre un commercio ineguale, a tutto svantaggio degli altri), per udire la stesa nota falsa e stridente, per avvertire immediatamente la stessa sfacciata ipocrisia che si nascondeva dietro i bei discorsi di un William Pitt il Vecchio durante la guerra dei Sette Anni.

Non la sfrontatezza di Mandeville nel celebrare il vizio, dunque, ma la sua aspra sincerità nel mostrare «di lacrime grondi e di che sangue» la formula del successo economico e politico, è la cifra giusta per comprendere la «Favola delle api»; anche se permane – perché negarlo? – una vaga sensazione di ambiguità circa le sue reali intenzioni. Così come ci si è chiesti, infatti, sino a che punto George Berkeley aborrisca da quel libero pensiero che aggredisce con argomenti così pericolosamente simili a quelli dei suoi avversari, ci si può chiedere - e la domanda non è indiscreta - fino a che punto Mandeville abbia voluto davvero indossare i panni severi del moralista.  Tuttavia, perché fare il processo alle intenzioni? È più importante che almeno una voce, nell’Inghilterra del XVIII secolo, abbia avuto la franchezza di scoprire gli altarini d’una classe dirigente cinica e falsa...


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mardi, 24 septembre 2013

Dette abyssale : pourquoi ?

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Dette abyssale : pourquoi ? Que risque-t-il de se passer ?

par Guillaume Faye

Ex: http://www.gfaye.com

La dette souveraine française va bientôt atteindre les 2000 milliards d’euros, c’est-à-dire 95,1% du PIB fin 2014, soit 30.000 € par Français. Bombe à retardement. Il y a dix ans, elle atteignait 1.000 milliards et l’on criait déjà à la catastrophe. Mais personne n’a rien fait. Depuis 1974 ( !) aucun budget n’a été en équilibre : tous déficitaires. Les multiples rapports, comme ceux de la Cour des Comptes, ont tous été jetés au panier. Chaque année, il faut rembourser 50 milliards d’euros d’intérêts, deuxième budget de l’État.

Mais pourquoi s’endette-t-on ? Certainement pas pour investir (et donc pouvoir rembourser par les gains escomptés) (1), mais pour les raisons suivantes : A) Payer une fonction publique pléthorique et surnuméraire, qui ne cesse d’enfler. B) Régler les prestations sociales d’un État Providence qui suit (droite et gauche confondues) les préceptes absurdes du collectivisme (2). Parmi ces prestations, on note les allocations chômage les plus généreuses au monde qui, paradoxalement, provoquent l’accroissement du chômage et dissuadent les embauches ; le coût croissant des allocations aux immigrés d’origine et aux étrangers les plus divers, y compris clandestins et fraudeurs (type AME), pris en charge comme nulle part ailleurs au monde ; l’absurdité totale des emplois aidés – pour les mêmes populations – qui ne créent aucune valeur ajoutée. C) L’endettement sert aussi à payer les intérêts de la dette ! Absurdité économique totale, qui ne choque pas la cervelle de nos énarques. On creuse un trou pour en boucher (sans succès d’ailleurs) un autre.(3) 

L’Allemagne, elle, a rééquilibré son budget et voit décroître sa dette. Elle mène une politique d’austérité d’expansion, incompréhensible pour les dirigeants français, incapables d’envisager le moindre effort et abonnés au déni de réalité. Et, contrairement à une certaine propagande, pas du tout au prix d’une paupérisation de la société par rapport à la France. Je parlerai du cas de l’Allemagne dans un prochain article. Maintenant, quels risques majeurs font courir à la France cet endettement colossal et croissant (4) ?

A) L’agence France Trésor qui emprunte actuellement à taux bas va automatiquement se voir imposer très bientôt des taux à plus de 5%. Donc on ne pourra plus emprunter autant. B) Il semble évident que, si l’on peut encore rembourser les intérêts, on ne pourra jamais rembourser le ”principal”, même en 100 ans. Point très grave. Un peu comme les  emprunts russes d’avant 1914. C) Cette situation aboutira à la ”faillite souveraine”, avec pour conséquence l’effondrement mécanique, brutal et massif, de toutes les prestations sociales de l’État Providence, des salaires des fonctionnaires, des pensions de retraite, etc. D) La France sera donc soumise au bon vouloir de ses créanciers et contrainte de solliciter l’aide d’urgence du FMI, de la BCE et, partant de l’Allemagne, voire de la Fed américaine… Indépendance nationale au niveau zéro, mise sous tutelle. (5) E) Une position débitrice insolvable de la France, seconde économie européenne, provoquera un choc économique international d’ampleur lourde – rien à voir avec la Grèce. F) Paupérisation et déclassement dans tous les domaines : plus question d’entretenir les lignes SNCF ou d’investir dans la recherche et les budgets militaires, etc. G) Enfin, surtout avec des masses d’allogènes entretenues et qu’on ne pourra plus entretenir, cette situation pourra déboucher sur une explosion intérieure qu’on n’a encore jamais imaginée – sauf votre serviteur et quelques autres.

Et encore, on n’a pas mentionné ici la dette de la Sécurité sociale et celles des collectivités locales, en proie à une gestion dispendieuse, irresponsable, incompétente. L’impôt ne pourra plus rien compenser car il a largement atteint son seuil marginal d’inversion de rendement. Mais enfin, le mariage des homos, la punition contre le régime syrien, la suppression des peines de prison pour les criminels, ne sont-ils pas des sujets nettement plus urgents et intéressants ? Un ami russe, membre de l’Académie des Sciences de son pays, me disait récemment, à Moscou : « je ne comprends plus votre chère nation. Vous n’êtes pas dirigés par des despotes, mais par des fous ».

(1) Depuis Colbert jusqu’aux enseignements basiques de toutes les écoles de commerce, on sait qu’un endettement ne peut être que d’investissement et surtout pas de fonctionnement ou de consommation. Qu’il s’agisse d’entreprises, de ménages, de communes, de régions ou d’États. Autrement, on ne pourra jamais le rembourser et ce sera la faillite. Une célèbre Fable de La Fontaine l’avait expliqué aux enfants : La cigale et la fourmi. La fourmi refuse de lui prêter pour consommer pendant l’hiver car elle sait qu’elle ne sera jamais remboursée puisque la cigale chante gratuitement et ne travaille pas. En revanche, si la cigale lui avait demandé un prêt pour organiser une tournée de chant payante, la fourmi aurait accepté. Logique économique basique, hors idéologie.

(2) Le collectivisme peut fonctionner plusieurs décennies dans une économie entièrement socialisée, sans secteur privé, comme on l’a vu en URSS et dans le défunt ”bloc socialiste”. Au prix, évidemment, d’un système de troc autarcique. Pourquoi pas ? Mais l’expérience (plus forte que les idées pures des idéologues) a démontré que ce système est hyperfragile sur la durée car il nécessite un système politique pyramidal et de forte contrainte, et provoque une austérité générale que les populations ne supportent pas objectivement, en dépit de tous les discours et utopies des intellectuels. Mais l’aberration française, c’est d’entretenir un système intérieur collectiviste dans un environnement européen et international mercantile et ouvert. Du socialisme à l’échelle d’un petit pays dans un énorme écosystème libéral. Cette contradiction est fatale : c’est un oxymore économique. Ça ne pourra pas durer. L’énorme Chine elle, peut surmonter ce paradoxe : un régime pseudo-communiste, anti-collectiviste, mais animé par un capitalisme d’État. Mais c’est la Chine…Inclassable.

(3) Aberration supplémentaire: la France s’endette pour prêter aux pays du sud de l’UE endettés afin qu’ils puissent payer les intérêts de leur dette ! On creuse des trous les uns derrière les autres pour pouvoir reboucher le précédent. Le « Plan de soutien financier à la zone euro » à augmenté la dette française de 48 milliards d’euros et culminera en cumulé à 68,7 milliards en 2014. Emprunter pour rembourser ses dettes ou celles de ses amis, ou, pire les intérêts desdites dettes, cela à un nom : la cavalerie.

(4) Contrairement à qu’on entend un peu partout, la dette ne peut que croître en volume principal, même si le déficit passe en dessous du chiffre pseudo-vertueux des 3% négocié avec Bruxelles. La créance brute ne décroît que si le budget du débiteur est définitivement à l’équilibre, voire excédentaire, pendant plusieurs années – et encore cet excédent doit-il est majoré en fonction des taux d’intérêt. Arithmétique de base, qu’on n’enseigne probablement pas à l’ENA. 

(5) La solution du Front national – sortir de l’Euro, reprendre le Franc, retrouver une politique monétaire indépendante, pouvoir dévaluer (bon pour l’exportation), pouvoir faire fonctionner la planche à billets librement comme la Fed, s’endetter par des émissions auprès de la Banque de France et non plus des marchés – est irréaliste. Pour deux raisons techniques : d’abord parce que l’économie française n’a pas la taille mondiale de l’économie américaine qui est en situation de ”monétarisation autonome” (self money decision) ; ensuite, et pour cette raison, parce qu’une telle politique, même si elle ferait baisser la charge de la dette, aurait pour conséquence mécanique un effondrement de l’épargne et des avoirs fiduciaires des Français, en termes non pas nominaux mais marchands. ”Vous aviez 100.000 € en banque, le mois dernier, avant le retour au Franc ? En compte courant, assurance vie, épargne populaire, etc ? Désolé, en Francs, il ne vous reste plus que l’équivalent de 50.000.” Politiquement dévastateur. La seule solution (voir mon essai Mon Programme, Éd. du Lore) est de bouleverser le fonctionnement de la BCE, dont l’indépendance est une hérésie, et d’envisager une dévaluation de l’Euro.

lundi, 23 septembre 2013

Réflexion sur l’État dans l’économie

Qu’est-ce que le vrai colbertisme?

Réflexion sur l’État dans l’économie

Par Guillaume Faye

Ex: http://www.gfaye.com

Colbert_mg_8446.jpgPar manque de formation historique et économique, on présente le « colbertisme » comme de l’interventionnisme étatique à la façon de l’État Providence ou des velléités de notre bruyant ministre du ”Redressement productif ”, M. Montebourg. Première erreur. On s’imagine aussi que le colbertisme est un dirigisme anti-libéral, le choix d’une économie bureaucratique et administrée, sous prétexte de ”volontarisme” anti-marché.  Seconde erreur. Le colbertisme n’a rien à voir avec ces clichés, bien au contraire. Dans l’histoire de France récente, les véritables politiques colbertistes ont été menées par De Gaulle et Pompidou, mais certainement pas par les socialistes. Explications.

Colbert, homme pragmatique, principal ministre de Louis XIV, était révulsé par l’économie corporatiste, héritée de la période médiévale, avec ses corsets réglementaires, coutumiers, paralysants, fiscalistes. Un type d’économie archaïque que défendent, en fait, aujourd’hui les socialistes au pouvoir et les féodalités syndicales. Colbert était un adepte du mercantilisme anglais : il ne faut pas entraver le commerce, même avec les meilleures mais stupides intentions,  mais le favoriser, afin d’augmenter la richesse et la prospérité. Mais Colbert ajouta une french touch, comme on dit : l’État ne doit pas seulement veiller à laisser en paix les acteurs économiques, à ne pas les assommer de règlements, les imposer, les contraindre, mais aussi à les aider et à leur construire un environnement favorable et à mener de grands projets d’investissement ciblés, et énormes pour l’époque : la manufacture de Saint-Gobain,  celle des Gobelins, celle de Sèvres, le canal du Midi, les grandes routes royales (1), le pavage de Paris, les grands chantiers et commandes artistiques somptueuses, vitrines de la France, etc.

Colbert développa ainsi l’idée d’investissements d’État productifs : les manufactures, les infrastructures et les comptoirs coloniaux. Ces ”grands projets” constituaient à la fois un appel d’offre pour les entrepreneurs privés mais s’inscrivaient dans la doctrine mercantiliste anglo-hollandaise : créer un environnement propice à l’expansion commerciale et à l’exportation – plus d’ailleurs qu’à l’industrie. Loin de lui l’idée de faire de l’État royal  un acteur interventionniste, mais plutôt un ”facilitateur”. Pour Colbert, l’État devait être économe, avec des comptes équilibrés, d’où son conflit avec le dispendieux Louvois. L’État colbertiste est libéral et initiateur à la fois. Il limite les impôts. Il favorise le commerce maritime avec les comptoirs.   

Le bricolage économique et industriel des socialistes n’a donc rien à voir avec le colbertisme dont l’approximatif M. Montebourg se réclame. Le gouvernement socialiste veut au contraire (mythe marxiste de la ”nationalisation”) que l’État bureaucratique se substitue aux entreprises,  les dirige avec prétention et incompétence, tout en les assommant de charges par ailleurs. D’où par exemple le prétentieux et inutile programme étatique en 34 plans techno-industriels (septembre 2013) qualifié avec cuistrerie de « troisième révolution industrielle », par lequel l’État  va « faire naître les inventions de demain, les usines de demain, les produits de demain ».  Les dirigeants de Google ou de X Space doivent bien rigoler. Ce projet coûtera 3,7 milliards d’euros. Ce sera un coup d’épée dans l’eau. Car les élus et les fonctionnaires sont les plus mal placés pour définir les axes de recherche-développement du secteur industriel marchand. Ce dernier sait faire son job tout seul. À ce propos, Yves de Kerdrel écrit (2) : « à quoi bon mettre l’accent sur la production de textiles intelligents lorsque dans le même temps des industriels de ce secteur se voient refuser l’autorisation d’ouvrir un site de production dans telle friche industrielle sous prétexte qu’on y aurait aperçu une espèce protégée d’escargots. » (3)

De même, la création de la récente banque publique d’investissements est une usine à gaz bureaucratique et coûteuse. L’État ferait mieux non pas de se mêler de créer des emplois, mais de faciliter leur création, non pas de subventionner ça et là des entreprises de pointe mais de cesser de pressurer de taxes, de paralyser par des règlementations l’ensemble des entreprises, d’assouplir le marché du travail, etc. L’État français socialisé est un fossoyeur qui se fait passer pour un infirmier, un destructeur d’industries qui se pose en sauveur de l’industrie. (4) 

Tout autre est le véritable colbertisme, ou plutôt le néo-colbertisme de l’ère gaullo-pompidolienne. En ce temps-là (1958-1974), le budget était en équilibre. Ce qui n’empêchait l’État d’aider au financement (lui seul pouvait le faire) de grands projets structurants pour l’avenir, avec une vraie vision, pour la France et pour l’Europe. Nous sommes toujours les héritiers de ces projets, qui n’ont plus de successeurs à la hauteur.

Mentionnons pour mémoire : le programme nucléaire des 58 réacteurs (indépendance énergétique et électricité propre), le Concorde (échec commercial franco-britannique mais énormes retombées technologiques), le programme spatial (Arianespace, leader mondial), le TGV, le réseau autoroutier, Airbus, l’avionique militaire française et tant d’autres initiatives. Bien sûr il y eut des échecs cruels. (5) Le néo-colbertisme se caractérise donc par une action de l’État dans deux domaines essentiels : fournir aux entrepreneurs, forces vives d’une nation, les infrastructures nécessaires à grande échelle ; passer des commandes d’État ou proposer des partenariats dans des domaines stratégiques. Pas ”bricoler” avec des boîtes à outils socialistes, avec de la ”com” (propagande mensongère) à la rescousse.    

Maintenant, pour conclure, n’oublions pas que l’État américain fédéral   pratique le néo-colbertisme dans certains domaines, avec la NASA ou le pilotage du complexe militaro-industriel. L’Union européenne, elle, adepte d’un fédéralisme mou, bureaucratique, ”libéral” au mauvais sens du terme, n’a aucun projet techno-industriel de grande ampleur, et mobilisateur. Le colbertisme suppose une volonté nationale et l’Union européenne ne se pense toujours pas véritablement comme nation. Très probablement – c’est l’enseignement de l’Histoire – elle ne le fera que si  l’alchimie explosive se fait entre une menace et un leader. La menace existe, et le leader européen pas encore.

Notes:

(1) Au début du XVIIe siècle, il fallait trois fois plus de temps pour aller de Paris à Marseille ou à Bordeaux que du temps de l’Empereur Trajan, à la fin du Ier siècle, lorsque les voies romaines étaient entretenues. Après les investissements routiers de Colbert, cette différence n’existe plus. Dans le Paris de Henri IV, le confort urbain était inférieur à celui de Rome ou de Pompéi : pas de rues pavées, pas d’égouts, très peu d’apports hydrauliques non phréatiques.

(2) Le Figaro, 18/09/2013, in « Colbert, reviens ! Ils sont devenus fous », p. 15, article stimulant qui m’a donné l’idée d’écrire celui-ci. 

(3) Toujours le principe de précaution, frilosité écolo, que Claude Allègre a dénoncé. Voir l’interdiction, en France, même des recherches sur l’exploitation propre des gaz et huiles de schiste. Les escargots valent mieux que les emplois. Le lobby écologiste (même fanatisme que les islamistes) est dans l’utopie contre le réel. Hélas, il est écouté.

(4) La cause principale de la désindustrialisation de la France est la perte de compétitivité des entreprises industrielles, du fait du fiscalisme pseudo-social étatique, et non pas la recherche de la maximisation des profits par les ”patrons”, contrairement au discours paléo-marxiste. 

(5). Par exemple, le “Plan Calcul“ gaulliste des années soixante, maladroit et trop étatiste, qui n’a pas empêché l’informatique mondiale d’être dominée par les Américains. Ou encore notre bon vieux Minitel, lui aussi trop piloté par l’État (sub regnum Mitterrandis), trop cher, balayé par l’Internet US, en dépit de ses innovations et de ses avantages.

mardi, 17 septembre 2013

EU maakt weg vrij voor geheime bankreddingen met belastinggeld

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EU maakt weg vrij voor geheime bankreddingen met belastinggeld

'De Duitsers kunnen een groot deel van hun auto-export net zo goed op een boot laden en deze bij Hamburg tot zinken brengen. Dat zou net zoveel opleveren als het verkopen van Audi's in ruil voor schuldbekentenissen (IOU's) van de bankroete (euro)landen.'

De kogel is door de kerk. Waar we al lange tijd voor waarschuwen is nu door het Europese parlement mogelijk gemaakt: banken kunnen, in tegenstelling tot alle eerdere beloftes, voortaan met de miljarden van het Europese Stabilisatie Mechanisme (ESM) worden gered. Bovendien blijven deze 'reddingen' geheim voor het publiek. Brussel heeft hiermee een succesvolle, door de media onopgemerkte greep naar het belastinggeld van de Nederlanders en alle andere Europeanen gedaan.

 

ESM gaat tóch voor banken worden gebruikt

 

'Onze' politici zwijgen er het liefste over als het graf, maar u herinnert zich vast nog wel dat het volk werd verzekerd dat het ESM beslist niet voor het redden van de banken zou worden gebruikt. Rutte, Dijsselbloem en hun Brusselse bazen beloofden dat de lasten in de toekomst op de aandeelhouders, investeerders en banken zelf zouden worden afgewenteld.

 

Loze beloften en holle woorden, zo vreesden critici. Ze blijken gelijk te hebben gehad. Met 556 ja-stemmen, 54 nee-stemmen en 28 onthoudingen is het Europese (schijn-)parlement akkoord gegaan met een compromis over het Europese bankentoezicht. De Europarlementariërs krijgen op papier enkel het recht om uit minstens twee kandidaten het hoofd van de toezichthoudende instelling te kiezen, die twee keer per jaar verantwoording aan het EP moet afleggen. Verder krijgt de chef van de financiële commissie van het EP het recht op een 'niet openbare dialoog' met de hoofd-toezichthouder.

 

Overleg en besluiten blijven geheim

 

Het publiek mag hier echter niet van op de hoogte worden gebracht. Zowel de parlementariërs als de chef van de financiële commissie krijgen geheimhoudingsplicht opgelegd. Als de ECB-raad niet instemt met een besluit van de bankentoezichthouder, dan krijgen enkel ECB-president Draghi en EP-voorzitter Schulz dit te horen. De ECB-raad hoeft echter niet alle besproken zaken aan het parlement mee te delen.

 

Ook de protocollen van de zittingen van de commissie van het bankentoezicht worden geheim gehouden. Het EP krijgt slechts een 'gedetailleerde samenvatting' van wat er besproken is. Onofficiële informatie over de betroffen banken, die de ECB en de toezichthouder niet naar buiten willen brengen, krijgt ook het parlement niet te weten.

 

De reden van de geheimhouding is duidelijk: als bekend wordt welke banken in de problemen verkeren, dan dreigt net als op Cyprus paniek en vervolgens een bankrun te ontstaan.

 

'Meest verstrekkende stap EU ooit'

 

Europarlementariër Sven Giegold (Duitse Groenen), die zich tenminste voor minimale controle had ingezet, spreekt van de 'meest verstrekkende stap die de EU sinds de invoering' heeft genomen. Het Europese bankentoezicht wordt echter dermate vaag en ondoorzichtig opgezet, en het parlement krijgt hierbij een zo'n nietszeggende rol, dat van enige democratische legitimering geen enkele sprake is.

 

Het bankentoezicht betekent niets anders dat Europese banken voortaan uit het met belastinggeld gefinancierde ESM-fonds kunnen worden gered. Nogmaals: het ESM werd uitsluitend opgezet om in problemen geraakt lidstaten te ondersteunen. Het (her)kapitaliseren van de banken werd hierbij uitdrukkelijk uitgesloten.

 

Bankroete landen staan al in de rij

 

Vorig jaar juni besloten de minister van Financiën om het ESM ook voor de banken in te zetten, zogenaamd omdat men niet langer belastinggeld voor deze doeleinden wilde gebruiken. Spanje en Italië drongen het meeste aan op het inzetten van het ESM. Duitsland ging 'onder voorwaarden' akkoord.

 

Die voorwaarden zijn nu vervuld. Het bankentoezicht wordt vanaf de herfst van 2014 actief. Aangezien het Europese parlement al heeft ingestemd, is het onduidelijk of er nu al ESM-gelden naar de banken zullen vloeien, of dat men toch tot de officiële ingangsdatum in 2014 wacht.

 

Hoe dan ook, Griekenland, Ierland, Portugal, Spanje en Slovenië staan al in de rij om hun banken door het ESM -dus wel degelijk met het belastinggeld van de burgers- te laten 'redden', in de hoop het staatsbankroet te kunnen ontlopen. (1)

 

Ergste achter de rug?

 

Media en financiële instellingen, zoals kredietbeoordelaar Moody's, zeggen dan ook dat het ergste voor de banken achter de rug is. ECB-directeur Jörg Asmussen waarschuwde deze week echter dat er nog altijd geen zekerheid is dat we geen tweede 'Lehman Brothers' (het begin van de financiële crisis in 2008) zullen meemaken.

 

De Europese banken bouwen weliswaar hun portefeuilles met Zuid-Europese staatsschulden af, maar als de schuldencrisis zich verergert, zullen er wel degelijk nieuwe belastingmiljarden 'nodig' zijn om de banken overeind te houden. De crisis is daarom nog lang niet voorbij (2), wat EU-Commissiepresident José Manuel Barroso ook moge beweren.

 

Overigens kreeg salonmarxist Barroso deze week opnieuw de wind van voren van de Britse Europarlementariër Nigel Farrage, die hem verantwoordelijk stelde voor 'de ramp die de EU voor de armen en werkelozen' is geworden.

 

'Bezuinigingen zullen dramatisch mislukken'

 

Volgens de onafhankelijke financiële advies- en onderzoeksfirma GaveKal Research pompt de EU feitelijk waardeloze schuldpapieren in de Unie rond, en weet inmiddels niemand meer wie hier uiteindelijk voor moet opdraaien (wij wel: u, ik en alle andere gewone burgers).

 

'Het gevolg (van de grote renteverschillen) is dat de private sector massaal hun leningen verminderen, wat gecompenseerd wordt door een enorme toename van de overheidsuitgaven in onder andere Frankrijk, Italië en Spanje. De logica van dit systeem is inherent in strijd met de begrotingsregels van 'Maastricht', want zolang de rente ver boven de (economische) groei ligt, kunnen bezuinigingen alleen maar dramatisch mislukken.'

 

'Duitsers kunnen hun auto-export net zo goed tot zinken brengen'

 

'Het systeem veroorzaakt onverbiddelijk de vernietiging van de industriële basis in Italië, Frankrijk, Spanje en andere landen,' vervolgt Charles Gave. Dat de Duitse industrie hier nu van profiteert, is tijdelijke schijn. 'De Duitsers kunnen een groot deel van hun auto's net zo goed op een boot laden en deze bij Hamburg tot zinken brengen. Dat zou net zoveel opleveren als het verkopen van Audi's in ruil voor schuldbekentenissen (IOU's) van de bankroete (euro)landen.'

 

Deze IOU's duiken bij de ECB op in de vorm van de op deze site al vaak besproken beruchte, door de politieke doodgezwegen Target-2 balansen. 'Dat betekent dat niemand weet wie er uiteindelijk voor het verlies gaat opdraaien. Het spel gaat dus verder... totdat de soevereine landen binnen en buiten de EU stoppen met het accepteren van dit waardeloze papier.'

 

Crisis niet afgewend, maar versterkt

 

The Hamiltonian constateert dan ook dat de zogenaamde 'afgewende' crisis in werkelijkheid een versterkte crisis is. Het structurele probleem in Europa, het systeem waarin de Europese politieke, bureaucratische, media-, academische en financiële elite onderling met elkaar verbonden is, wordt niet opgelost. De EU stevent dan ook op een permanente Transferunie af, waarin landen zoals Duitsland en Nederland de andere lidstaten met miljarden overeind moeten houden, wat blijvend ten koste van hun eigen welvaart zal gaan.

 

Tenslotte deelde The Hamiltonian ook nog een forse sneer uit naar Barroso: 'Zijn opmerkingen afgelopen avond, dat iedere stap terug van 'Europa' dezelfde omstandigheden zal veroorzaken die leidden tot de Eerste Wereldoorlog, zijn niet alleen belachelijk verkeerd -hij zit er 180 graden naast- maar ronduit obsceen.' (3)

 

Xander

 

(1) Deutsche Wirtschafts Nachrichten
(2) KOPP
(3) Zero Hedge

mercredi, 28 août 2013

El fin de la Unión Europea

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El fin de la Unión Europea

El próximo miércoles Durao Barroso “recomendará” a Mariano Rajoy las “reformas” que debe implementar para luchar contra la crisis. Mientras tanto, un grupo de diputados de ERC “pagan” sus impuestos en una “Agencia Tributaria Catalana”, demostrando así lo poco que entienden de lo que pasa y lo mucho que les gustaría tener su propio cortijo. La actitud de estos sujetos, paradigma de la estupidez, la incompetencia y la ignorancia – ERC ha dado en su historia buena prueba de todo ello- es un caso bastante ilustrativo de la clase política europea en general, especialmente en los últimos 25 años.

No puede ser de otra manera: tras llenarse la boca con el asunto de la “construcción europea” hasta machacar los oídos del más insensible, el efecto y las consecuencias de las políticas apoyadas, por activa y por pasiva, por esa misma clase política está conduciendo a la Unión Europea a una desintegración ahora incipiente pero inexorable. Inexorable porque no se ven las palancas por las cuales esa misma Unión Europea puede resurgir y pesar en el conjunto de la escena multipolar del mundo del siglo XXI. En el extremo de esta incompetencia se halla gente como los diputados de ERC que, no solo es que apuesten por las delirantes tesis del nacionalismo catalán, sino que buscan la atomización de algo ya de por si pequeño y, en consecuencia, sujetarnos más aún a la pérdida de soberanía y de libertad que la Unión Europea ha supuesto desde que en 1985 el PSOE nos apuntara a tan singular club.

El hecho puede argumentarse mejor a raíz del último informe del Pew Research Global Attitudes Project (PRGAP). Los informes del PRGAP deben siempre tenerse en cuenta, en primer lugar, por la amplitud de problemáticas que se abordan; en segundo lugar por la variedad de colectivos en los que muestrean, llegando en algunos casos a realizar encuestas de proporciones planetarias. En el caso que nos ocupa, el pasado 13 de mayo, el Pew Research Center hizo público un estudio conducido en 7 países europeos, sobre una muestra de 7,646, encuestados entre el 2 y el 27 de marzo pasados. Los países considerados en el estudio fueron Alemania, Francia, Italia, España, Reino Unido, Polonia, Grecia y República Checa. A los participantes se les preguntó acerca de cómo percibían la situación actual de la UE. Los técnicos del célebre “fact tank”, subsidiario del Pew Charitable Trusts, han apuntado algunas conclusiones inquietantes para el futuro de uno de los principales puntales de la globalización: en primer lugar, la desafección general de los europeos respecto de la UE, siendo ésta máxima en Francia y en España. Se observa, además, un debilitamiento de la integración europea, tal y como es percibida por los europeos.

En segundo lugar, se aprecia una divergencia creciente entre alemanes y franceses y una desconfianza mutua. En tercer lugar, entre 2013 y 2013, ha crecido la desconfianza de los ciudadanos hacia sus líderes –personificados en el presidente del gobierno-, siendo máxima, y por éste orden, en Francia, Italia y España. En cuarto lugar, el pesimismo respecto la situación económica respecto de 2007, se ha incrementado en un 61%, un 54% y un 22% en España, Gran Bretaña e Italia, respectivamente. La situación es especialmente alarmante en lo que los autores del informe denominan “el desafío del sur” (“Southern Challenge”); es decir, España, Grecia e Italia. Pese a ello, el apoyo al euro ha crecido en España y en Italia, si bien aproximadamente un 30% de los encuestados en los siete países apuestan por volver a sus monedas originales.

Naturalmente, el informe es amplio y denso pero el resultado es bastante claro y los técnicos del Pew Research Center hablan de “tendencias centrífugas” en la UE. Curiosamente, preguntados acerca de la manera en que la UE saldría de la crisis, aproximadamente un 70% de los encuestados ha respondido que “recortando gastos”, mientras que solo un 30% apostó por políticas de estímulo. Sin duda, la “austeridad” goza de mucho predicamento entre la misma población que la sufre. Al margen de lo que opine la gente, las directrices económicas de la Comisión, y también de la “troika”, han sido un rotundo fracaso, como se desprende de los índices de paro y precariedad galopantes.

Próximamente, el miércoles esa misma comisión va a recomendar al presidente Rajoy que realice “reformas” en el mercado laboral, que suba los impuestos –especialmente el IVA- porque “hay margen”, que “reforme” las pensiones, en el sentido de desligarlas del IPC y otras medidas similares. Es obvio que supone un gran lastre, por ejemplo, operar con 42 tipos de contrato laboral o que se gasten millones de euros en administraciones duplicadas y a menudo inoperantes. Pero el problema que acarreamos no es un caso de mala gestión, aunque ello pueda contribuir, dado que los mismos problemas existen en la práctica totalidad de los estados europeos. Se trata más bien de una fracaso del modelo económico que apuesta por una financiación cara y escasa de la que se lucran los que controlan esas mismas fuentes de financiación; es decir, del capital privado. Se prima la economía especulativa frente a la productiva.

Gracias a la política del BCE y de la “troika” se está produciendo en las últimas décadas, y especialmente con motivo de esta crisis, un gigantesco trasvase de recursos de los bolsillos de los contribuyentes –asalariados y empresas- al sector privado financiero. Los costos de este trasvase se evidencian en forma de intereses elevados por una financiación que podría obtenerse mucho más barata directamente del instituto emisor en última instancia –el BCE-, evitando el encarecimiento que supone la presencia de intermediarios ávidos de beneficio. El sobrecoste se repercute en los bolsillos de las clases populares en forma de impuestos o en forma de “recortes” de los salarios, mayormente.

Pese a ello, la Comisión sigue pensando que la medicina no es mala sino que es escasa. El hecho de la crisis y el desánimo se intentan conjurar con la promesa de una recuperación que nunca llega. De hecho, de vez en cuando las tesis oficiales –aireadas gracias a una prensa servil para con el partido encargado de gestionar la política económica del momento- sufren el aldabonazo de algún estudio que se filtra pero que jamás tiene consecuencias. Recientemente, la OCDE pronostica un 28% de paro para España en 2014, solo por detrás, y ligeramente, de Grecia. El Ejecutivo calcula que solo se creará empleo en 2016 cuando crezcamos al 1,3%, algo que parece hoy inalcanzable, pero para los analistas de Aspain11, según informa la web finanzas.com, esta cifra debe situarse en realidad en el 2.8% para que nuestro país cree verdaderamente empleo.

¿Qué se deriva de todo esto? Pues que el futuro económico es negro y que la crisis va a seguir por donde ya está. En estas condiciones las turbulencias políticas van a aumentar y las opciones heterodoxas ganarán masa crítica. En el mundo real, los eurócratas tendrán menos apoyo cada vez y es muy posible que la salida de la UE, que hoy es una opinión cada vez menos marginal y más generalizada, acabe desintegrando la Unión por la fuerza de los hechos. Aunque pese a la Comisión, y como sucede en Grecia, no se puede pedir que un país se suicide para ajustar el déficit o salvar una moneda.

Lamentablemente, en un mundo en el que cada vez Occidente pesa menos, el fin de Europa como entidad económica supondrá una indiscutible pérdida de peso político, algo notablemente nocivo para Occidente en su conjunto. Las fuerzas centrífugas antes mencionadas son en los tiempos actuales una pésima noticia, concomitante a la desintegración social y a la crisis espiritual que padecemos. A esto es a lo que un grupo de majaderos en Barcelona está contribuyendo sin ni siquiera saberlo.

mardi, 27 août 2013

La Réserve Fédérale des Etats-Unis empêche l’Allemagne de rapatrier son or

La Réserve Fédérale des Etats-Unis empêche l’Allemagne de rapatrier son or

Ex: Telesur

Les Etats-Unis refusent de rendre l’or que l’Allemagne a mis à l’abri dans la Réserve Fédérale des USA et a, par ailleurs, empêché les représentants allemands de visiter le coffre de la Banque Centrale de ce pays pour vérifier l’état des tonnes d’or entreposées.

 

 

La méfiance par rapport au dollar pourrait s’intensifier après que la Bundesbank allemande ait demandé le rapatriement de son or entreposé dans la Réserve Fédérale des États-Unis, mais que Washington ait refusé de le faire avant 2020.

L’agence d’information russe, RT, a publié que les représentants allemands se sont vus refuser le permis de visiter le coffre de la Banque Centrale des États-Unis.

« L’Allemagne, qui y a entreposé près de la moitié de ses réserves en or, a de bonnes raisons de s’inquiéter. En général, les institutions financières des USA sont connues pour vendre ce qui n’existe pas réellement », écrit RT sur la publication de son portail Web.

Ils citent l’exemple de 2012, lorsque la banque Goldman Sachs vendait des certificats d’or en assurant qu’ils étaient garantis par l’or authentique de ses coffres. Cependant, comme cela s’est su par après, il n’y avait pas d’or dans ces coffres, et la banque travaillait sur base d’un système de réserve fractionnaire, en supposant que peu de dépositaires exigeraient de récupérer leur or.

Le fondateur et président de l’Association Allemande de Métaux Précieux, Peter Boehringer, considère que ce refus des États-Unis est un mauvais signe.

« Nous avons exercé beaucoup de pression sur la Bundesbank, nous lui avons envoyé énormément de questions, ainsi que d’autres entités. Nous voulons savoir pourquoi elle n’agit pas en tant qu’audit approprié, pourquoi ils ne font pas pression sur la banque centrale de son partenaire, tout particulièrement sur la Réserve Fédérale, pour qu’elle soit un audit adéquat. Pourquoi n’est-il pas possible de rapatrier cet or ? Il y a donc énormément de questions sans réponses », dit-il.

« Les USA et la Réserve Fédérale financent actuellement entre 60 et 80% de la dette fédérale récemment publiée, les bons du Trésor. Et son achat libre est une mauvaise nouvelle pour la dette des USA. Cela met en évidence que quelque chose va mal pour la qualité du dollar des États-Unis comme monnaie de réserve. La Chine et l’Inde vont probablement consommer 2.300 tonnes d’or conjointement cette année, ce qui équivaut presque à 100% de la production mondiale », explique-t’il.

La Réserve Fédérale des États-Unis est une des organisations les plus secrètes au monde. Depuis bien des années, elle entrepose de grandes quantités d’or de différents pays. Si auparavant elle était considérée comme l’endroit le plus sûr pour les réserves de beaucoup de pays, maintenant la situation a changé, puisque l’or qui y est entreposé s’épuise du fait de sa vente, son cautionnement ou son utilisation comme garantie financière.

En janvier de cette année, la Bundesbank allemande a informé de sa décision de rapatrier 674 tonnes des réserves officielles d’or déposées à l’étranger d’ici 2020.

Jusqu’au 31 décembre 2012, la banque allemande conservait 31% de son or sur le sol allemand. Avec cette mesure, ils estiment que cette quantité s’élève à 50% avant le 31 décembre 2020.

« Les réserves d’or d’une banque centrale créent de la confiance », indique l’entité financière dans un communiqué qui assure que cette mesure augmentera la confiance en sa propre économie.

L’Allemagne possède la seconde plus grande réserve d’or au monde ; 3.396 tonnes. Au cours des prochaines huit années, 674 tonnes vont être rapatriées depuis New-York et Paris, avec pour objectif que 50% de cet or soit entreposé sur le sol allemand. 13% des réserves d’or allemandes sont entreposée à Londres et y resteront entreposées. Les réserves d’or déposées à New-York devraient passer de 45% à 37%. Les 374 tonnes actuellement entreposées à la Banque de France à Paris retourneront sur le sol allemand.

Source : Telesur

Traduit par SanFelice pour Investig'Action

dimanche, 25 août 2013

Inde : économie et société

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Gilbert ETIENNE:

Inde : économie et société

Ex: http://aucoeurdunationalisme.blogspot.com

Gilbert Etienne est Professeur honoraire d’économie du développement à l’IHEID Genève. Auteur de nombreux livres sur l’Afghanistan, l’Asie du Sud, la Chine et de diverses publications sur l’Afrique subsaharienne, ex. Repenser le Développement, Messages d’Asie (Afghanistan, Pakistan, Inde, Chine), Paris, A. Colin, 2009

L’année financière (avril de l’année « n » à mars de l’année« n+1 ») 2010-2011 s’est terminée en beauté : le PIB indien a crû de 8,6 %, après un creux suscité par la crise mondiale. Le commerce extérieur se porte bien, les firmes indiennes investissent de plus en plus à l’étranger et la société de consommation s’affirme. Les « Grands » de la planète se succèdent à New Delhi : les présidents Obama et Sarkozy, les premiers ministres David Cameron et Wen Jiabo. Que l’Inde soit bel et bien un pays émergent est évident, mais Amartya Sen et d’autres Indiens rappellent que subsistent de larges pans d’extrême pauvreté dans le pays. L’agriculture, qui occupe encore environ 50 % de la population active, progresse trop faiblement. Les infrastructures (transports, électricité) sont encore très défaillantes, suscitant de lourds surcoûts pour l’économie. Depuis l’automne 2010, plusieurs scandales de corruption ont ébranlé le gouvernement central, créant un climat de suspicion et le ralentissement des prises de décision.

L’économie indienne a le vent en poupe

INTRODUITES à partir de 1980, les réformes se sont très largement amplifiées en 1991 en Inde, grâce à Manmohan Singh, alors Ministre des Finances. Le PIB a enregistré des progressions annuelles de 5 % puis 7 %, voire 8 à 9 %, contre une hausse annuelle moyenne de 3,5 % entre 1950 et 1980. Ouverture, libéralisation, allégements de la bureaucratie, dévaluation de la roupie ont créé un mouvement irréversible. Les gouvernements opposés au Parti du Congrès, qui lui succèderont au pouvoir de 1996 à 2004, ont globalement suivi la même voie. Avec les élections de 2004, le parti du Congrès a repris le pouvoir, mais à la tête d’une coalition disparate de plusieurs partis, ce qui a freiné la poursuite des réformes. Manmohan Singh, devenu Premier ministre, a de nouveau gagné les élections de 2009, mais il doit toujours gouverner avec une coalition de partis alliés.

De nombreux succès sont apparus sur les dernières décennies : modernisation des usines existantes grâce à de nouveaux équipements, floraison de nouvelles entreprises, en particulier dans les technologies de l’information où l’on trouve autant de PME que de sociétés qui démarrent avec quelques milliers de dollars et deviennent des multinationales. Plusieurs unités du secteur public, entre autres SAIL, gros groupe sidérurgique, et BHEL (équipements électriques) se modernisent et s’agrandissent. Le secteur automobile accueille de nombreuses firmes étrangères en joint ventures. Les ventes de voitures explosent, suivant celles de scooters et de motocyclettes, avec pour corollaire un accroissement des embouteillages. Dans l’électroménager, la production, qui s’est affermie entre 1980 et 1991, poursuit sur sa lancée. L’industrie pharmaceutique enregistre des succès en Inde et à l’étranger. Le tourisme médical apparaît, avec d’excellents médecins opérant dans des hôpitaux très bien équipés. Modernisation et innovations débordent des métropoles vers les villes de province.

La construction urbaine bat son plein, après des décennies au cours desquelles le taux de construction de nouveaux immeubles était l’un des plus bas du monde (moins de la moitié de celui de la Thaïlande, trois fois moins qu’en Chine). Dans les districts avancés de Révolution verte (Cf. Infra), apparaissent les premières voitures privées après les motos. La cuisine au gaz remplace la bouse de vache séchée et les femmes font moudre le blé dans un moulin local, au lieu de passer des heures à moudre le grain dans la meule de pierre. Les taux d’épargne et d’investissement indiens se situent désormais autour de 35 % du PIB, contre 22 % pour le premier en 1991.


Les produits indiens deviennent plus compétitifs sur le marché mondial. La catégorie engineering (machines, acier) représente jusqu’à 22 % des exportations, dont 70 % sont assurées par des produits manufacturés. Les produits agricoles totalisent 8,5 % des exportations, les minerais 4,3 %, les produits pétroliers 17,3 % (une partie du pétrole brut importé est raffiné puis exporté). Au sein des importations, le pétrole vient en tête avec 33 %, en forte hausse car la production indienne stagne depuis 2000 autour de 33 millions de tonnes. Viennent ensuite les biens d’équipement, qui représentent 15 % des importations. Fidèle à ses traditions, l’Inde continue à importer de l’or, tandis que de grosses quantités de diamants sont également importées, taillées sur place et exportées. Légumineuses et huiles comestibles représentent 3,7 % des importations.


Les exportations de services sont stimulées par les technologies de l’information et les activités des firmes indiennes pour les entreprises étrangères. Avec les assurances et les transports, les exportations totales de services sont passées de 16 milliards de dollars en 2000/2001 à 96 milliards aujourd’hui, tandis que les importations passaient sur la même période de 15 à 60 milliards. Le commerce extérieur, qui représentait 15 % du PIB en 1990, atteint 35 % vingt ans plus tard. Les principaux pays clients de l’Inde sont l’Asie, avec 57 milliards de dollars, le Moyen-Orient (40 milliards), l’Union européenne (36 %), les États-Unis (19 %). Les exportations indiennes se sont élevées à 179 milliards de dollars sur l’année fiscale 2009/2010. Du côté des importations, le Moyen-Orient est le principal partenaire de l’Inde, avec 81 milliards de dollars (pétrole). Viennent ensuite l’Union européenne (38 milliards), les États- Unis (19 milliards) et l’Asie (90 milliards). Les importations totales s’élèvent ainsi à 288 milliards de dollars. À noter la faiblesse des échanges francoindiens : la France réalise 4 milliards de dollars d’importations et 4 milliards de dollars d’exportations avec l’Inde. À l’inverse, le commerce extérieur de l’Inde se caractérise par un accroissement des exportations chinoises vers l’Inde (31 milliards de dollars) ainsi que par une progression des échanges de l’Inde avec l’Afrique (dont des importations de pétrole) et avec l’Amérique latine.


Très limités dans les années 1970, les investissements privés étrangers (FDI) atteignent 281 milliards de dollars cumulés de 1980 à 2010. Un net ralentissement est apparu en 2010. Est-il simplement conjoncturel ou lié au climat politique actuel (Cf. Infra). Les investissements de portefeuille ont, quant à eux, chuté sous l’effet de la crise financière en 2008 et 2009, avant de remonter à 35 milliards de dollars en 2010-2011. En sens inverse, les entreprises publiques ou privées indiennes investissent à l’étranger, dans l’industrie et les services dans les pays occidentaux, dans les matières premières - notamment le pétrole - en Afrique. De 2000 à 2010, ces investissements ont atteint 133 milliards de dollars.


La société de consommation s’affirme


Comme la Chine, l’Inde subit les ombres de notre révolution industrielle avec toutes sortes d’abus, corruption, coulage, etc. et, dans le même temps, découvre les prémisses de la société de consommation que nous avons connue en Europe occidentale dans les Trente Glorieuses de l’après 1945 (J. Fourastié).


Il existe néanmoins des différences sensibles. Notre niveau de vie en 1945-1950 était très supérieur à celui de l’Inde aujourd’hui. La croissance démographique, même tombée à + 1,5 % l’an, dépasse de loin notre baby boom. Par ailleurs, le taux de croissance économique de l’Inde aujourd’hui est très supérieur au nôtre à l’époque. Mais il faut noter un manque croissant de cadres supérieurs et d’ouvriers qualifiés dans tous les domaines : aux côtés des Instituts de technologie de haut niveau, les universités n’assurent, dans l’ensemble, qu’un enseignement médiocre, ce qui oblige nombre d’entreprises à organiser leurs propres formations de jeunes cadres.


Le développement de la société de consommation se traduit par une amélioration de l’alimentation de la population (lait, fruits, légumes, éventuellement poulet, etc.), ainsi que par des modifications de l’habillement (accroissement du port de jeans pour les garçons et les filles) et une hausse des dépenses en cosmétiques des femmes. Les familles constituant les classes moyennes ou supérieures avec des revenus annuels de 7 000 à 37 000 dollars par an représenteraient environ 13 % de la population totale, soit 160 millions d’âmes. On ne saurait oublier les loisirs : 100 millions de touristes indiens visitent leur propre pays chaque année, sans parler de ceux, nombreux, qui vont à l’étranger. Les repas au restaurant deviennent également à la mode, tout comme la lune de miel pour les jeunes mariés…


27 à 30 % des Indiens ont beau connaître encore l’extrême pauvreté, les aspirations des classes montantes vont constituer un puissant moteur de croissance pour l’Inde pendant encore des décennies, jusqu’à ce que de plus larges couches de la population en profitent.


Le monde rural a besoin de plus d’attention


Le monde rural conserve un très grand rôle dans l’économie indienne, puisqu’il représente encore 69 % de la population totale. L’agriculture emploie environ 50 % du total des actifs et assure 14-15 % du PIB. Des progrès considérables ont été atteints depuis l’indépendance : routes en dur, électricité, croissance agricole d’abord lente, avant que ne soit mise en place la Révolution verte (RV) en 1965.


Le processus de la RV était basé sur des variétés de céréales qui réagissent beaucoup mieux à l’engrais chimique que les semences traditionnelles. Mais qui dit doses relativement élevées d’engrais chimiques dit une exigence en eau plus importante, voire en système d’irrigation. C’est dire que les vastes régions de l’Inde péninsulaire, aux pluies incertaines et aux faibles capacités d’irrigation, se trouvaient - et demeurent encore - en dehors de la Révolution verte. En revanche, dans les plaines irriguées, nombre de paysans, souvent illettrés, ont doublé leurs rendements de blé ou de riz décortiqué en une année pour atteindre 2t/ha dans un premier temps et 3 à 4 t/ha aujourd’hui. En quelques années, l’Inde a ainsi fortement réduit son déficit en céréales, tout en appliquant une politique de stockage d’une partie du grain par l’État en prévision des mauvaises moussons ainsi que pour une distribution de grains à prix modérés.


Autour de 1980, les efforts dans l’agriculture, l’électricité, les routes se sont relâchés, avec une baisse des investissements publics et des dépenses d’entretien. Si l’on observe une plus grande diversité de la production agricole (élevage et lait, fruits et légumes), stimulée par la hausse des revenus, force est de constater que la croissance agricole baisse : la recherche manque de fonds ; les services agricoles sont en plein déclin ; le manque d’électricité affecte les vastes régions dont l’irrigation dépend de puits à pompes électriques ; les canaux d’irrigation sont mal entretenus, tout comme les nouvelles routes ; quant aux investissements dans de nouvelles infrastructures, ils sont très insuffisants.


Au total, les districts concernés par la Révolution verte s’essoufflent et les rendements plafonnent. Qui plus est, les pertes après les récoltes atteignent 30 % pour les fruits et les légumes : lenteur des transports, manque de chambres froides, emballages défectueux, parasites sont autant de nuisances qui plombent la production. Il est non moins urgent de stimuler en particulier les plaines du bas Gange, d’Assam et d’Orissa, encore très peu irriguées malgré un énorme potentiel. Peu développées sous les Britanniques, elles n’ont enregistré que de faibles progressions de leur production depuis 1947, ce qui se traduit par une pauvreté qui reste très aigüe… De gros efforts s’imposent aussi dans les vastes zones de cultures pluviales.


Les infrastructures sont toujours à la peine


Les infrastructures ont joué un rôle décisif de 1950 à 1980, en ville comme à la campagne, pour le développement de l’Inde. Depuis lors, elles sont devenues des freins à la croissance : les plans quinquennaux 1992-2007 n’ont atteint que la moitié de leurs objectifs pour l’électricité ; le plan actuel (2007-2012) ne tient pas non plus l’horaire. Le manque d’investissements et de dépenses pour l’entretien des centrales et des réseaux de transmission et de distribution perdure. Viennent ensuite les vols de courant. Le manque d’électricité aux heures de pointe est passé de 7,5 % en 2001/2002 à 11 % à l’été 2010. Les coupures de courant de plusieurs heures par jour sont fréquentes dans les villes ; elles sont encore plus longues dans les campagnes. 40 à 45 % du courant seraient ainsi perdus sur l’ensemble du territoire. À Bangalore, grand centre du High Tech, les pertes dues au manque d’électricité représentent 12 à 15 % de la production des entreprises informatiques. Des chantiers de grandes centrales ont été ouverts mais les constructions annoncent de nouveaux retards.


Ces défauts sont aussi provoqués par un manque de coordination entre services concernés, des livraisons d’équipement défaillantes, un manque de cadres. Dans ces conditions, les riches installent un petit générateur chez eux, les entreprises en acquièrent de plus gros ou créent parfois leur propre centrale, ce qui grève leurs coûts. La question des matières premières devient délicate : manque de pétrole, de gaz, de charbon pour les centrales électriques et pour d’autres usines. De gros gisements de gaz ont heureusement été découverts au large des deltas de la Godavari et de la Krishna (sud-est de l’Inde) et l’on vient de découvrir des dépôts d’uranium en Andhra qui pourraient être les plus riches du monde : ils sont estimés à 44 000 tonnes.


Autre talon d’Achille de l’Inde, les transports avec, ici aussi, un manque d’investissements et de dépenses d’entretien patents : routes encombrées, souvent étroites, multiplicité des contrôles routiers, au point que les camions ne dépassent guère 25 km/h de moyenne. Le bilan des chemins de fer n’est guère plus brillant, les trains de marchandises roulant eux aussi à 25 km/h. Transports et logistique représentent 20 % des coûts finaux de production en Inde, contre 4 à 5 % en Europe. Les ports sont également sous pression et les coûts d’exportation par container sont de 1 053 dollars, contre 456 à Singapour. Ces insuffisances dans les transports correspondraient à près de 1 % du PIB par an, soit 14 milliards de dollars.


Enfin, mentionnons l’eau dans les villes, dont la fourniture est souvent interrompue et dont seuls 13 à 18 % des eaux usées sont traités. Du point de vue environnemental, les fonds consacrés à la lutte contre la pollution des eaux et de l’air, à l’érosion des sols ou encore aux risques liés au changement climatique sont très insuffisants. Les dommages annuels se situeraient entre 3,5 et 7 % du PIB.


Gouvernance et malaises déstabilisent la vie politique


Une avalanche de scandales se sont succédés depuis l’automne 2010 : pots de vin considérables et détournements touchent le gouvernement et l’administration, des hommes d’affaires, des militaires, etc. La société civile ainsi que de grands industriels donnent de la voix ; les media se déchainent ; même des religieux font la grève de la faim… Il n’est néanmoins pas certain que le coulage et la corruption aient beaucoup augmenté. Lorsqu’il était au pouvoir, en 2001, le Premier ministre Vajpayee du BJP, opposé au Congrès, parlait d’un véritable « cancer ».


La répression des abus a été faible jusqu’à maintenant. Un ministre du gouvernement central est sous les verrous, un autre a été mis à pied, ce qui ne calme pas les critiques, malgré l’intégrité du Premier ministre Manmohan Singh. Un climat de malaise s’est étendu sur New Delhi ; la Chambre du Peuple est secouée de désordres ce qui conduit à de fréquentes suspensions de séance…, le tout étant aggravé par une inflation à 9 % et un ralentissement de la croissance économique depuis le printemps 2011 : + 7,7 % (avril-juin). Les inégalités se creusent. De vastes régions rurales très pauvres, les bidonvilles, une mortalité infantile encore élevée suscitent de légitimes inquiétudes pour l’avenir du pays.


Les inégalités sont également marquées entre les États. Plusieurs d’entre eux, dont l’imposant Uttar Pradesh, sont mal gérés et se développent mal. Au Gujrat, la croissance prend, à l’inverse, des allures à la chinoise. Le Bihar est sorti d’une longue période de pourrissement grâce au gouvernement de Nitish Kumar, depuis les élections de 2005 et 2010. Le Tamil Nadu, malgré beaucoup de corruption, attire toujours plus les grandes firmes de l’automobile. La région de Gurgaon près de Delhi est en plein boom. Le gouvernement central peine plus que jamais à réduire les dépenses et les subventions, à imposer de nouvelles réformes sous le poids des affaires et des dissensions au sein de la coalition. Il faut aussi compter avec le poids de Sonia Gandhi, présidente du parti du Congrès. Depuis 2007, par exemple, est en discussion au Parlement le nouveau Land Acquisition Act pour remplacer celui de 1894 ! Entre temps, conflits, retards se succèdent pour créer des usines, exploiter de nouvelles mines de fer, de bauxite, de manganèse dans l’angle nord-est de la péninsule. Les gouvernements des États concernés perdent des rentrées de fonds, les habitants locaux peuvent être malmenés dans leur opposition, les investisseurs indiens comme Tata ou les firmes étrangères comme POSCO (Corée du Sud) perdent de l’argent alors qu’ils sont prêts à créer de nouvelles aciéries. Une vingtaine de milliards de dollars sont ainsi en attente d’investissement.


En conclusion, malgré le ralentissement actuel, l’économie indienne conserve de solides atouts et presque personne ne conteste le système démocratique du pays en dépit de sérieuses failles. Il serait néanmoins urgent, pour que l’Inde puisse poursuivre son développement, de sortir de la crise de gouvernance qui lèse aujourd’hui l’économie et de réduire l’inflation. Rahul Gandhi, fils de Sonia Gandhi, Présidente du parti du Congrès, actuellement aux États-Unis (pour des soins, semble-t-il), va-t-il quitter ses fonctions au sein du parti pour succéder à Manmohan Singh ? Et si oui, réussira t-il à sortir son pays de la difficile phase d’aujourd’hui ?

Gilbert Etienne (Diploweb)

lundi, 12 août 2013

Zone euro

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Laurent OZON:

Zone euro: En Europe, la gouvernance économique a surtout besoin d'une gouvernance politique

Ex: http://www.newsring.fr/

 

François Hollande a proposé l'instauration d'un gouvernement économique de la zone euro lors de la deuxième conférence de presse de son quinquennat, le 16 mai 2013. Pour Laurent Ozon, le problème de l'euro provient de notre incapacité à lui assigner une direction politique.

L'actuelle crise de l'euro est le résultat d'une opération d'instabilisation menée par le monde financier et le gouvernement profond US pour maintenir le statut du dollar comme monnaie de change internationale. Cet outil monétaire (le dollar) est ce qui permet aux USA de continuer à financer leur domination par une dette contractée sur le monde entier dans une unité de change qui n'a que la valeur du papier sur laquelle elle est imprimée. De fait, le problème de l'euro est celui de notre incapacité à lui assigner une direction politique et cette difficulté provient en premier lieu de la difficulté d'une organisation politique comme l'UE à définir les contours d'une volonté politique claire, tiraillée entre les volontés contradictoires de ses membres, les empiètements des multinationales, les tentatives répétées de sabotage des USA (via ses satellites) etc.

De fait, toute monnaie non adossée à une volonté politique est un outil problématique. Ceci est valable pour toutes les monnaies, qu'elles soient nationales ou européennes. La question fondamentale est donc bien de savoir où peut se constituer une volonté politique capable d'une direction économico-financière souveraine et conforme à ses intérêts. La seconde question qui découle immédiatement de la première est: quels seront ses moyens réels d'action (en matière monétaire et au delà) face à une hégémonie financiaro-militaire de plus en plus agressive.

La nation par son unité héritée de l'histoire, peut apparemment fournir un environnement de pouvoir mieux maîtrisé et donc un potentiel de volonté politique opérationnel plus simple à obtenir qu'une fédération d'États aux intérêts parfois contradictoires comme l'UE. En clair, la France, par exemple, peut imaginer se donner une monnaie et lier les conditions de sa politique monétaire à ses intérêts souverains. La question qui se posera secondairement sera: quel poids aura la France face à cette hégémonie, compte tenu de son niveau d'autonomie vivrière, énergétique, militaire, médiatico-culturelle, économique et financière ? Un poids faible à n'en pas douter. D'autant plus faible que le niveau d'intégration de la France dans l'économie mondiale ne repose pas seulement sur sa monnaie mais sur un dispositif d'imbrication beaucoup plus vaste et infiniment plus profond que ne le croient ceux qui rêvent d'un destin politique retrouvé, l'œil dans le rétroviseur. C'est un partisan du protectionnisme et de la relocalisation qui l'affirme, dans l'état actuel des choses, il faudra des efforts immenses et du temps à une France isolée des grands systèmes monétaires et des sphères d'influence correspondantes, pour pouvoir résister aux pressions du système financier et militaire de la première puissance mondiale, pour ne pas évoquer les autres.

Confrontée probablement dans les vingts années à venir à une crise civile grave, dépendante de ses importations, sans autonomie industrielle (pièces, technologies, etc.) et sans puissance militaire de premier ordre ni ressources capables d'impacter les rapports de forces géopolitiques mondiaux, la France ne profitera de sa liberté monétaire que bien peu de temps. Celui de s'enfoncer dans la guerre et la ruine, sort qu'elle ne pourra in fine conjurer qu'en passant sous contrôle total d'une puissance dont elle pensait s'affranchir.

De fait, je le pense, la France n'a pas les moyens de faire cavalier-seul. Adossée aux centaines de millions d'européens tournée vers la Russie, elle pourrait se donner dans l'UE, les moyens d'une politique monétaire conforme aux intérêts de son économie. Car ce qui peut être fait en France peut être fait en Europe, certes dans un premier temps plus difficilement, mais à la condition préalable d'une vigoureuse refondation des institutions communautaires qui permettrait à une Europe débarrassée du Royaume-Uni et autres satellites US, de retrouver les moyens de son retour à l'histoire dans un monde multipolaire et de défendre ses choix avec plus de poids que celui d'un pays en pré-guerre civile ne disposant pas des moyens de puissance pour maîtriser, isolé, les conséquences de ses coups de mentons monétaires.

En bref, évoquer la question de la sortie de l'euro sans évoquer celui des rapports de forces internationaux et des implications vitales induites relève au mieux de l'amateurisme politique. De ce point de vue, un gouvernement économique de la zone euro pourrait être une solution, si il n'associait pas les habituels porte-avions américains au sein de l'UE et si la France et l'Allemagne s'engageaient à ajouter une dorsale russe à l'axe Carolingien... 

C'est en tous cas le moment, à quelques mois des élections européennes d'ouvrir sérieusement le débat non ?

lundi, 22 juillet 2013

CHARLES ROBIN ou "Le libéralisme comme volonté et comme représentation"

 

CHARLES ROBIN -  Le libéralisme comme volonté et comme représentation

CHARLES ROBIN ou "Le libéralisme comme volonté et comme représentation"

Pierre Le Vigan
Ex: http://metamag.fr
« L’une des confusions habituelles de l’extrême gauche contemporaine (…) réside dans cette idée que le libéralisme ne désignerait rien d’autre qu’un système d’organisation économique de la société (fondé sur la propriété privée des moyens de production et la liberté intégrale des échanges marchands), qui trouverait ses adeptes les plus enthousiasmes, en France, sur la rive droite de l’échiquier politique. » Or, ce qu’explique Charles Robin, dans la veine de Jean-Claude Michéa et de Dany-Robert Dufour, c’est qu’en fait, l’extension indéfinie de l’économie de marché, va obligatoirement avec une société de marché dont l’un des éléments essentiels est l’extension continue des « droits individuels », ces mêmes droits dont l’illimitation est soutenue résolument par l’extrême gauche.
 
La neutralité axiologique du libéralisme aboutit à ce que le seul critère de légitimité des actions sociales soit l’intérêt et la maximisation des satisfactions matérielles. La doctrine du droit naturel – qui seraient des droits qui tiennent à la nature même de l’homme - , qui fonde celle des droits de l’homme, postule l’auto-institution nécessaire et suffisante de la société- la fameuse « société civile » chère aux libéraux – et donc l’inanité de la recherche d’une « société bonne ». 
 
Le libéralisme prend les hommes comme ils sont, et il les prend même tels qu’ils sont, le pire. Dans la vision libérale, la société bonne, ou même seulement meilleure, ne peut avoir de place, non plus que l’idée de la nécessaire amélioration morale de l’homme, ou l’idée d’excellence morale, notamment par l’éducation, et par une élévation des idéaux mis en valeur ou portés en exemple. Les humanités sont ainsi naturellement appelées à disparaître dans une société libérale – et c’est bien ce que l’on observe. Le vrai législateur tout comme le vrai éducateur deviennent, en société libérale, le Marché et l’Argent. 

Tout comme Jean-Claude Michéa, Charles Robin insiste sur l’unité du libéralisme : il est économique et culturel. Il ne serait pas efficacement économique s’il n’était culturel. Etymologiquement, le commerce (neg-otium) c’est le contraire du loisir. Entendons le loisir au sens où il est liberté, ouverture à la contemplation, rendez-vous avec soi-même.
 
On le constate en pratique tous les jours : la société libérale distrait chacun mais empêche le vrai loisir, celui qui permet de prendre du recul en soi. Le libéralisme postule que la liberté consiste en fait dans la capacité de se déraciner continuellement. Charles Robin tout comme Jean-Claude Michéa fait remonter cette vision à Kant et à Rousseau. Elle est aujourd’hui parfaitement illustrée par Vincent Peillon pour qui « l’école doit dépouiller l’enfant de toutes ses attaches [pré-républicaines]».
 
Quoi de plus naturel, si l’homme est détaché de toutes attaches, en apesanteur, hors-sol, qu’il n’ait plus comme référence que le « souci de soi », vite devenu le « je ne me soucie que de moi ». L’inconvénient c’est notamment que le souci de soi d’hommes sans passé ne draine pas beaucoup de richesses humaines collectives.  Il arase les diversités. En effet, seul celui qui a des traditions peut comprendre celles des autres. C’est pourquoi la diversité de l’homme en apesanteur est réduite à peu de choses. C’est une diversité-alibi d’un aplatissement généralisé. L’Européen est réduit à un Blanc, l’Africain ou l’Antillais est réduit à un Noir (et même un « black »). Le Français est réduit à un citoyen de « la patrie des droits de l’homme » (rappelons que c’est le pays qui a inventé le génocide avec la Vendée). Cette réduction des authentiques différences se fait au nom de l’autonomie de l’individu mais au mépris du sens exact de ce principe qui ne signifie aucunement « faire sans les autres » ou « se passer des autres » mais choisir librement la règle que l’on se donne. C’est tout cela, et encore bien d’autres choses, que Charles Robin, de solide formation philosophique, nous donne à comprendre en un livre non seulement important mais essentiel.

jeudi, 20 juin 2013

EL TRATADO DE LIBRE COMERCIO ESTADOS UNIDOS – UNIÓN EUROPEA OTRO PASO HACIA LA GLOBALIZACIÓN

 

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EL TRATADO DE LIBRE COMERCIO ESTADOS UNIDOS – UNIÓN EUROPEA OTRO PASO HACIA LA GLOBALIZACIÓN
 
 
Enrique Ravello
Ex: http://enricravello.blogspot.com/

Jean Baptiste Collbert, fue ministro  de fianzas de Luis XIV, el llamado “Rey Sol”, orador, inteligente, eficaz, gran parte del esplendor del reinado de Luis XIV se debió a su brillante  gestión. Collbert, impulsó una política económica llamada “colbertismo” o de forma más genérica, mercantilismo, su aplicación estuvo asociada al fortalecimiento de la monarquía absoluta y por lo tanto a la centralización del poder, y la capacidad e dirigir la economía del mismo.
El mercantilismo –aplicado también en otros estados europeos– se basa en un intervención dirigista del poder político en la actividad económica y el control de la moneda por parte del Estado, así como en la unificación del mercado interno, el aumento de la producción propia -controlando recursos naturales y mercados-,  la protección de la producción local ante la competencia extranjera, la imposición de aranceles a los productos extranjeros y el incremento de la oferta monetaria. Estas actuaciones tuvieron como finalidad última la formación de Estados lo más fuertes posible, lo que permitió un aumento de la riqueza, una mejora de la calidad de vida y el aumento de la población europea.
 
 
Proteccionismo frente a liberalismo
 
El mercantilismo como concepción tuvo su antítesis en el liberalismo, el hecho de que las potencias que defendía uno y otro modelo económico (Francia y Reino Unido) pugnasen por el dominio del comercio mundial, hizo de este enfrentamiento algo más que una cuestión ideológica. El liberalismo se fundamenta en el principio ideológico  de que  el individuo prima por encima del interés colectivo, la economía debe ser una vector independiente y alejado del control político, confiando de forma inconsciente en el “mercado” que mediante un “mecanismo invisible” (sic) autorregula sus diferencias y corrige las desigualdades sociales, de donde deriva su economicismo antipolítico. El mundo debe convertirse en un mercado mundial donde ni leyes ni estado, ni aranceles coarten su funcionamiento. No es de extrañar que los dos principales críticos del mercantilismo fueran los pensadores de referencia del liberalismo: Adam Smith y especialmente Ricardo.
La pugnas entra las dos concepciones se en el  XVIII y  XIX,  y la primera parte del siglo XX, en el que el liberalismo se fue imponiendo pero con fuertes resistencias en amplias zonas de Europa.
 
De la OMC al Tratado Interatlántico, la creación de un mercando mundial
 
Tras el final de la Segunda Guerra Mundial, se asiste a una liberalización continua del comercio mundial bajo el impulso de las grandes instituciones librecambistas y mundialistas como la Organización Mundial del Comercio (OMC), el Banco Mundial o el Fondo Monetario Internacional (FMI). 
 
En esos años el gobierno de los Estados Unidos propone a varios otros gobiernos la convocatoria de una Conferencia Internacional sobre el Comercio. En 1947 la ONU recoge esta iniciativa, eligiendo la ciudad de La Habana para celebrarla, en esa reunión establece el Acuerdo General de Arancel y Comercio (GATT), suscrito finalmente en Ginebra el 30 de octubre 1947 por 30 estados. Este GATT se basa en el principio del libre comercio internacional y en la progresiva supresión de aranceles y medidas proteccionista.  El GATT ha organizado sucesivas rondas en las que ha ido modelando su política neoliberal y aumentando el número de países firmantes. En la última ronda (Uruguay-Marrakesch 1986-1993) el número de estados firmantes llega a 120 y se constituye la Organización Mundial del Comercio (OMC) organismo que encargado de unificar las nomenclaturas arancelarias y de promover el librecambio a nivel mundial, los gobiernos de los estos miembros de OMC obedecen ciegamente las instrucciones de la OMC cuyo fin es la unificación del mercado mundial; hay que destacar que  Bruselas (UE) destaca en este nivel de sumisión al GATT, a pesar de ser Europa la zona más perjudica del mundo en la aplicación de  las directrices que emana de este organismo,  dejando a nuestras economías sin defensa ante el dumping social y económico de los productos llegados desde el tercer mundo.
 
Es en esta doble dinámica -creación de un mercado mundial y empobrecimiento de la economía europea- en el que se sitúa el nuevo Tratado de Libre Comercio entre la UE y EEUU, en cuyo texto se incluyen artículo que dicen cosas de este tipo:
 
Una estrecha asociación transatlántica es un instrumento clave para favorecer la mundializaicón basada en nuestros valores comunes y en la perspectiva  de un orden mundial equilibrado en materia económica y política.(Ya sabemos la idea de “equilibro” que tienen las élites mundialistas)
…reforzar el proceso de integración económica transatlántico… mediante la adopción de un marco en el que progresar en la integración económica entre la UE y los EEUU mediante la creación de un Consejo Económico Transatlántico (CET)
El acuerdo ya ha recibido la “luz verde” por parte de David Cameron y Angela Merkel tras la visita del secretario de Estado norteamericano, John Kerry en gira por Europa, que también le llevó a París donde fue recibido con fumata blanca por el sumiso François Hollande, que prometió también el apoyo de Francia al nuevo tratado.
 
El acuerdo, además de perpetuar la sumisión económica y política de la UE ante EEUU, pretende eliminar las restricciones europeas sobre la importación y comercialización de productos OMG, las desregularización en materia de protección de datos en favor de compañías como Google, Facebook o Amazoon, así como la derogación de la legislación en materia de medio ambiente y no contaminación.
 
En su sitio de internet el político y sociólogo Vicenç Navarro se sorprende la poca atención mediática que está teniendo la aprobación de esta tratado, que –como el también afirma– tendrá fatales consecuencias sobre la capacidad económica y calidad de vida de las clases populares de la UE. Navarro señala que –como siempre ocurre en este tipo de tratados– los únicos beneficiados serán las grandes empresas financieras y de servicios, cuyos lobbies presionan en Washington y Bruselas para acelerar la firma del proyecto. Además el Tratado prohibirá el monopolio de los servicios públicos, como en el terreno de la sanidad por ejemplo, lo que dejará abierta la puerta abierta al desmantelamiento de la Seguridad Social y la privatización total del sector.
 
Que la clase dirigente europea esté dispuesta a aceptar y firmar este Tratado que condena a la economía europea a la sumisión, provocará la pauperización de nuestra clases medias y populares, autorizará el desmoronamiento del sector público y permitirá atentados contra nuestra salud, es una prueba más de la necesidad de un cambio de paradigma político profundo y urgente en clava ecologista, social e identitaria.
 
Enric Ravello
Secretario de relaciones nacionales e internacionales de Plataforma per Catalunya.

mercredi, 12 juin 2013

Chute programmée du système financier

Entretien avec Pierre Jovanovic :

chute programmée du système financier

lundi, 10 juin 2013

P. Jovanovic : "Sommes-nous au bord du précipice ?"

Pierre Jovanovic : "Sommes-nous au bord du précipice ?"

lundi, 03 juin 2013

La economía no es el destino

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La economía no es el destino

Archivio 1979 - Ex: http://www.nuevaderecha.org/

«Las únicas realidades que cuentan para nuestro futuro son de orden económico», declaraba durante un debate un ministro, que es también, al parecer, el mejor economista de Francia. «Estoy totalmente de acuerdo con usted», le replicaba el adversario político al que se oponía, pero usted es un gestor muy malo y somos más fuertes que usted en economía.

Diálogo revelador.

Como Nietzsche, sepamos descubrir a los falsos sabios bajo la máxima de «especialistas», destrocemos los ídolos, pues la falsa ciencia –la metafísica también– de nuestra época, y la primera de sus ídolos, es la economía.

«Vivimos en sociedades, anota Louis Pauwels, para las cuales la economía es el único destino. Limitamos nuestros intereses a la historia inmediata, y limitamos ésta a los hechos económicos». Nuestra civilización, por supuesto –que no es más una «cultura»– está fundada sobre una concepción del mundo exclusivamente económica. Las ideologías liberales, socialistas o marxistas, se unen en su interpretación «economista» del hombre y de la sociedad. Postulan todas que el ideal humano es la abundancia económica individual; aunque se diferencian por los medios de cómo llegar a ese estado, admiten unánimemente que un pueblo no es más que una «sociedad», reducen su destino a la exclusiva consecución del bienestar económico, explican su historia y elaboran su política sólo a través de la economía.

Es lo que en el GRECE negamos. Rechazamos esta reducción de lo humano a lo económico, esta única dimensión de la Historia. Para nosotros, los pueblos deben primero asegurar su destino: es decir su duración histórica y política y su especificidad. La historia no está determinada, y menos con relaciones y mecanismos económicos. La voluntad humana hace la historia. No la economía.

La economía para nosotros no debería ser ni una contradicción ni una teoría, sino una estrategia, indispensable, pero subordinada a lo político. Administrar los recursos de una comunidad según criterios primero políticos, ese es el sitio de la economía.

Entonces, entre las opciones liberales o socialistas y nosotros, no hay entente posible. Anti-reduccionistas, no creemos que la «felicidad» merezca ser un ideal social exclusivo. Al igual que los etólogos modernos, pensamos que las comunidades humanas sólo sobreviven físicamente si tienen un destino espiritual y cultural.

Podemos incluso demostrar que privilegiando la economía y la búsqueda del bienestar personal, llegamos a sistemas tiranos, a la desculturización de los pueblos, y a corto plazo, a una mala gestión económica. Ya que la economía funciona mejor cuando no ocupa el primer lugar, cuando no usurpa la función política.

Por lo tanto hay que asumir un cambió intelectual en economía, como en otros campos. Otra visión de la economía, según los desafíos contemporáneos, y ya no fundada sobre axiomas de burgueses del siglo XIX, será posiblemente la Economía Orgánica, objeto de nuestras investigaciones actuales.

La revuelta «en el sentido que Julius Evola da a este término» se impone contra esta dictadura de la economía, fruto de una dominación de los ideales burgueses y de una hipertrofia de una función social. Para nosotros europeos del oeste, es una revuelta contra el liberalismo.

«Nuestra época –escribía ya Nietzsche en Aurora– que tanto habla de economía es muy derrochadora; derrocha el espíritu». Fue profeta: hoy, un Presidente de la República se atreve a declarar: «El problema mayor de nuestra época, es el consumo». El mismo, a estos «ciudadanos» reducidos a simples consumidores, afirmar que desea el «nacimiento de una inmensa clase media, unificada por el nivel de vida». También el mismo se ha felicitado de la sumisión de la cultura a la economía mercante: «La difusión masiva –esta palabra que tanto le gusta– del audiovisual lleva a la población a compartir los mismos bienes culturales. Buenos o malos, es otra cuestión (sic) pero en todo caso por primera vez los mismos».

Clara apología, del jefe de fila de los liberales, del rebajamiento de la cultura al tráfico. Así, lo político desciende hasta el nivel de la gestión, fenómeno bien descrito por el politólogo Carl Schmitt. El dominio obsesivo de las preocupaciones económicas no corresponde, sin embargo, al antiguo psiquismo de los pueblos europeos. En efecto, las tres funciones sociales milenarias de los indoeuropeos, funciones de soberanía política y religiosa, de guerra, y en tercer lugar de fecundidad y de producción, supondrían un dominio de los valores de las dos primeras funciones, hechos puestos a la luz por G. Dumézil y E. Benveniste. Pero, no sólo la función de producción se encuentra hoy dominada por una de sus sub-funciones, la economía, sino que ésta, a su vez, está dominada por la sub-función «mercante». Por consiguiente el organismo social está, patológicamente, sumiso a los valores que produce la función mercante.

Según los conceptos del sociólogo F. Tonnies, este mundo al revés pierde su carácter «orgánico» y vivo y se convierte en «sociedad mecánica». Tenemos que reinventar una «comunidad orgánica». Así el liberalismo económico y su colaborador político adquieren su significado histórico: esta ideología ha sido la coartada teórica de una clase económica y social para «librarse» de toda tutela de la función soberana y política, e imponer sus valores –sus intereses materiales– en vez y en lugar del «interés general» de la Comunidad entera.

Solamente la función soberana y sus valores propios pueden asegurar el interés general. La única revolución ha sido la del liberalismo, que ha usurpado la soberanía en interés de la función económica, revindicando primero la «igualdad» con los otros valores, pretexto para marginarlos después.

Según un proceso cercano al marxismo, el liberalismo ha construido un reduccionismo económico. Los hombres sólo son significativos para él como participantes abstractos en el mercado: clientes, consumidores, unidades de mano de obra; las especificidades culturales, étnicas, políticas, constituyen tantos obstáculos, de «anomalías provisionales» hacia la Utopía a realizar: el mercado mundial, sin fronteras, sin razas, sin singularidades; esta utopía es más peligrosa que la del igualitarismo «comunista» ya que es más extremista todavía, y más pragmática. El liberalismo americano y su sueño de fin de la Historia en el mismo way of life comercial planetario, constituye la principal amenaza.

Así señalamos claramente a nuestro enemigo. Tenemos costumbre de designar como «sociedad de mercado» a la realizada según la ideología liberal; podemos señalar que el marxismo y el socialismo nunca han conseguido, ellos, a realizar su proyecto igualitario, la «sociedad comunista», y aparecen así menos revolucionarios que el liberalismo, menos «reales».

Esta «sociedad de mercado» se nos aparece pues como el objeto actual y concreto de crítica y de destrucción. Nuestra sociedad es «de mercado», pero no especialmente mercantil. La república de Venecia, las ciudades hanseáticas vivían de un sistema económico mercantil pero no constituían sociedades «de mercado». Pues el término «mercado» no designa estructuras socioeconómicas sino una mentalidad colectiva, un sistema de valores que caracteriza no sólo la economía pero todas las instituciones.

Los valores del mercado, indispensables a su único nivel, determinan el comportamiento de todas las esferas sociales y de Estado, e incluso la función puramente productiva de la economía.

Se juzga –y al Estado en primer lugar– desde un punto de vista totalmente mercantil. Esto no quiere decir que dominación mercante signifique «dominación por el dinero», no planteamos una condena moral del dinero no del beneficio del empresario. Hay que admitir el comportamiento mercantil o provechoso si acepta subordinarse a otros valores. No hay que ver pues en nuestra posición un «odio de la economía» o un nuevo reduccionismo opuesto a la ganancia y a la función mercantil como tales. No somos moralizadores cristianos. Sociedad de mercando significa pues sociedad donde los valores sólo son mercantiles. Podemos clasificarles en tres figuras «mayores»: la mentalidad determinista, el espíritu de cálculo y la dictadura del bienestar económico individual.

La mentalidad determinista, útil sólo para la única actividad mercantil, tiende a eliminar los riesgos y a minimizar los vaivenes. Pero, adoptada por el conjunto de una sociedad y en particular por los decididotes políticos y económicos, la mentalidad determinista se convierte en coartada intelectual para no actuar ni arriesgar. Sólo el mercante (comerciante) puede por derecho, para maximizar sus ganancias, subordinar sus actos a determinismos: leyes del mercado, coyunturas, curvas de precios, etc… Pero el poder político, no más que la economía nacional no deberían, como un comerciante, someterse o «dejarse llevar» por una racionalidad excesiva que dispensa de todo «juego de riesgo». La sociedad mercante se «administra» a corto plazo, bajo la hegemonía de las «previsiones económicas» pseudos científicas (la industrialización «ineludible» del Tercer Mundo, la mundialización de la competencia internacional, la tasa de crecimiento de las rentas y del PNB, etc.), pero paradójicamente no tiene en cuenta las más elementales de las evoluciones políticas a medio plazo: por ejemplo el oligopolio de los poseedores del petróleo.

Por lo tanto, nada menos «independiente» que las naciones mercantes. Los gestores liberales van en el sentido de lo que creen mecánicamente determinado (por estar racionalmente formulado) haciendo la economía de la imaginación y de la voluntad.

En el siglo de la perspectiva, de la previsión estadística e informática, nos dejamos llevar por el corto plazo y se prevé menos que los soberanos de los siglos pasados. Todo pasa como si las evoluciones sociales demográficas, geopolíticas no existieran y no fuesen a tener efectos mayores. Lo igual en todos los sitos – según la fórmula estúpida de los economistas liberales- solamente son tomadas en cuenta por los que deciden las restricciones o pseudos previsiones económicas a corto plazo. (original francés Toutes choses égales par allieurs –selon la formule stupide des économistes libéraux- seules son prises en compte par les décideurs, les contraintes ou pseudo-prévisions économiques à court terme)

La sociedad mercante es pues ciega. Sometida a las evoluciones y a las voluntades exteriores, porque cree en el determinismo histórico, trata a los pueblos europeos como objetos de la historia.

Segundo rasgo de la mentalidad mercante: el espíritu de cálculo. Adaptado al comerciante, este espíritu no conviene a los comportamientos colectivos. Hegemonía de lo cuantificable sobre lo cualificable, es decir, sobre los valores, dominio de lo mecánico sobre lo orgánico, el espíritu de cálculo aplica a todo la tabla única del valor económico. No pensamos que el «dinero» se haya convertido en la norma general: sino que todo lo que no se puede medir «ya no cuenta».

Se pretende calcularlo todo, incluso lo no-económico: se «programan» los momentos de jubilación, las horas de trabajo, los tiempos de ocio, los salarios, en el mismo nivel –pero mucho antes– los niños que van a tener. Existe incluso un «coste de la vida humana» tomado en cuenta para ciertas inversiones. Pero todo lo que escapa al cálculo de los costes, es decir precisamente lo que más importa, es rechazado, los aspectos incontables económicamente de los hechos socio-culturales (como los costes sociales de la pérdida de raíces resultante de la inmigración) llegan a ser indescifrables e insignificantes para los «tecnomercantes».

Incluso en economía, el exceso de cálculo perjudica: ¿cuántas inversiones útiles a largo plazo, pero que un cálculo de previsión declara no rentables a corto plazo, son abandonadas?

El individuo, seguro, «calcula» su existencia, pero ya no piensa en su herencia, en su descendencia. Los Estados obsesionados por la gestión a corto plazo, sólo toman en consideración los aspectos «calculables» y cifrables de su acción. Estos «hombres de negocios» demagogos sólo actúan ahí donde se pueden «rendir cuentas» y sobre todo en lo inmediato, incluso si es necesario falsificando algunas cifras.

¿Una región muere de anemia cultural? ¿Qué importa si por el turismo de masas, su tasa de crecimiento es positiva? Y, entre adversarios políticos, el argumento político se reduce a batallas de porcentajes.

Esta superficialidad de la «gestión tecnocrática» (ersatz mercante de la función soberana) puede incluso desembocar en el «marketing político», reducción de la política al «negocio» comercial. Hoy, Francia o Alemania, son más o menos asimiladas por sus gobiernos a sociedades anónimas por acciones. La Casa Francia con sus ciudadanos asalariados. Ni que decir que, también, la política exterior e incluso la política de defensa, están determinadas por intereses de salidas comerciales inmediatas. Incluso para la economía no es lo mejor ya que este mercantilismo a corto plazo resulta ser aleatorio y no sustituye una política económica. Cuando los Jefes de Estado en visita se convierten en V.R.P., como verdaderos VRP, se rinden bajo la dependencia de sus clientes. (original francés pone V. R. P. ¿qué es eso)

La sociedad de mercando puede describirse como una «dictadura del bienestar individual» según los términos de Arnold Huelen; dictadura porque el individuo, obligado a entrar en el sistema providencialista del Estado, ve desintegrarse su personalidad en el ambiente consumista. Paradójicamente, el Estado-providencia liberal castiga la iniciativa productiva (cargas sociales excesivas) y desanima indirectamente la iniciativa individual. Asegurados sociales, asalariados, parados remunerados: ya no dominan su destino. Inmenso desprecio de su pueblo por el Estado-providencia, el «monstruo frío» de Nietzsche. Tiranía suave.

¿Cómo extrañarse entonces que se desprecie un soberano transformado en dispensador de entretenimientos? El Politólogo Julián Freund habla justamente del fallecimiento político del Estado.

El liberalismo produce un doble reduccionismo: por una parte el Estado y la sociedad sólo deben responder a las necesidades económicas de los pueblos; y, por otra, estas necesidades son reducidas al «nivel de vida» individual. En el liberalismo mercante se prohíbe, en parte por interés, juzgar si estas necesidades son deseables o no: sólo cuentan los medios técnicos a poner en marcha para conseguirlas.

De ahí el predominio político del nivel de vida y por necesidad igualitaria: sueño burgués – y americano– de pueblos nivelados e igualados por el mismo nivel de vida.

Los pueblos y los hombres siendo todos semejantes para un liberal, la única desigualdad subsistente es la del poder adquisitivo: para obtener la igualdad, es pues suficiente difundir a través del mundo el modo de vida mercante. Así, ahí están reconciliadas milagrosamente (la mano invisible de Adam Smith) el humanismo universalista y los «negocios», la justicia y los intereses, como confesaba puerilmente Jimmy Carter; Bible and Business.

Los particularismos culturales, étnicos, lingüísticos, las «personalidades», son obstáculos para la sociedad mercantil. Lo que explica que la ideología moralizadora de los liberalismos políticos lleva al universalismo, a la mezcla de los pueblos y de las culturas, y a las diversas formas de centralismo.

La sociedad mercantil y el modelo americano amenazan a todas las culturas de la Tierra. En Europa o en Japón la cultura ha sido reducida a un «modo de vida» («way of life») que es justo lo inverso a un estilo de vida.

El hombre es así clasificado, es decir reducido a las cosas económicas que compra, produce o recibe, según el mismo proceso (pero más intensamente aún) que en los sistemas comunistas. Su personalidad se acaba en los bienes económicos que solos estructuran su individualidad. Cambiamos de personaje cuando cambiamos de moda. Ya no estamos caracterizados por nuestros orígenes (reducidas al «folclore») ni por nuestras obras, sino por nuestros consumos, nuestro «standing». En el sistema mercantil, los modelos cívicos dominantes son el consumidor, el asegurado, el asistido; y no el productor, el inversor, el empresario. No hablemos de los tipos no-económicos: el jurista, el médico, el soldado, que se han convertido en tipos sociales secundarios.

La sociedad mercantil difunde un tipo de valores cotidianos perjudiciales respecto al trabajo como tal: vender y consumir el capital parece más importante que construirlo. Y no hay nada más igualitario que la función de consumo. Los productores, los empresarios, se diferencian por sus actos; ponen en juego capacidades desiguales. Pero consumir, es el no-acto al que todo el mundo, sean sus capacidades las que sean, o su origen, puede acceder. Una economía de consumo se mete en una vía inhumana en la medida en que el hombre es etológicamente un ser de acción y de construcción. Así, paradójicamente la alta productividad de las industrias europeas subsiste a pesar de la sociedad liberal mercantil y no a causa de ella. ¿Por cuánto tiempo? Hay que precisar que nuestra crítica de la sociedad mercantil no es un rechazo, muy al contrario, de la industrialización o de la tecnología. La noción de comunidad orgánica, que oponemos a la sociedad mercantil, no tiene nada que ver con la «sociedad de convivencia original francés: conviviale» de los neo-rousseanistas (Illich, etc…)

La técnica es para nosotros una adquisición cultural europea, pero debe ser considerada como una herramienta de poder y de dominio del medio y ya no como una droga al servicio del bienestar. Entonces no compartimos las críticas izquierdistas con resonancia bíblica, sobre la «maldición del dinero» y sobre la «voluntad de poder» de la sociedad contemporánea. La sociedad mercantil no afirma ninguna voluntad, ni en el nivel del destino global, ni siquiera en el de una estrategia económica.

Las consecuencias de esta civilización de la economía son graves para el destino de nuestra especie, y al mismo tiempo, para nuestro futuro político y económico. Honrad Lorenz ve en la «unidad de los factores de selección», todos de naturaleza económica, una amenaza de empobrecimiento humano. «Una contra-selección está en marcha –revela Lorenz en Nouvelle Ecole– que reduce las diversidades de la humanidad y le impone pensar exclusivamente en términos de rentabilidad económica a corto plazo. Las ideologías economistas, que son tecnomórficas, hacen del hombre una máquina manipulable. Los hombres, unidades económicas, son cada vez más iguales, como máquinas precisamente».

Para Lorenz, la subordinación de los valores no económicos es una catástrofe, no sólo cultural sino biológica. El consumir constituye una amenaza psicológica para los pueblos. Lorenz, como médico, habla de patología colectiva. Morimos de arteriosclerosis. La civilización del bienestar económico nos lleva lentamente, según Lorenz, hacia la muerte templada. Escribe: «hipersensibles al no placer, nuestras capacidades de gozar se debilitan».

La neofilia, este gusto siempre insatisfecho de nuevos consumos, tiene, para los antropólogos, efectos biológicos nefastos y desconocidos. Pero, ¿qué es la supervivencia de la especie al lado de la subida del precio de los croissants de mantequilla? En fin, si nadie piensa en estos problemas, nosotros sí.

Muerte templada, pero también declive demográfico. La dictadura de la economía ha hecho de nosotros europeos unos pueblos corto-vivientes según el análisis de Raymond Ruyer. Atacados a nuestras preocupaciones económicas inmediatas, nos hemos convertido en objetos y en victimas de la historia biológica.

Nuestros economistas son sensibles al declive demográfico solamente porque comprometerá la financiación de la jubilación. «Nuestra civilización economista –escribe Raymond Ruyer– es por esencia anti-natalista y suicida porque es, por esencia, anti-vital, anti-instintiva».

Pero el consumo de masas ha convertido a la cultura en «primitiva». Los mercaderes de bienes de consumo poseen un poder cultural, que se ejerce en el sentido de un desarraigo, y de una masificación igualitaria. No son los consumidores quienes eligen su estilo de vida –mito democrático querido por los liberales– sino son firmas mercantes quienes crean comportamientos de masa destruyendo las tradiciones específicas de los pueblos. Mediante el «marketing», mucho más que por la propaganda política, se impone casi científicamente un nuevo comportamiento, jugando sobre el mimetismo de las masas desculturizadas. Una sub-cultura mundial está naciendo, proyección del modelo americano. Se orientaliza o se americaniza a voluntad. Desde el final de la primera guerra mundial, del «new look» a la moda «disco», un proceso coherente de condicionamiento sub-cultural está en marcha. El rasgo común: el mimetismo de los comportamientos lanzados por los mercantes americanos. Así, la economía se ha convertido en uno de los fundamentos cualitativos de la nueva cultura, sobrepasando ampliamente su función de satisfacción de las necesidades materiales.

Incluso en el plano estrictamente económico, que no es, según nuestro punto de vista, capital, el fracaso del sistema mercantil dado hace algunos años es patente. No hablemos ya del paro y de la inflación, sería muy fácil. Jean Fourastié anota: «la indigencia de las ciencias económicas actuales, liberal o marxista» y las acusa de usurpación científica. «Asistimos – dice– sobre todo desde 1973, a la carencia de los economistas y al inmenso naufragio de su ciencia». Añade: «los economistas liberales o socialistas han pensado siempre que sólo lo racional permitía conocer lo real. Sus modelos matemáticos se han construido sobre la ignorancia o el odio de las realidades elementales. Ahora bien, en cualquier ciencia, lo elemental es lo más difícil. Se llega a ser despreciarlo porque no se presta a los ejercicios clásicos sobre los que los economistas universitarios se otorgan sus diplomas. Fourastié concluye: «Nuestro pueblo, nuestros economistas, nuestros dirigentes viven sobre las ideas del siglo XIX. Los impasses de la racionalidad empiezan a ser visibles. El hombre vive al final de las ilusiones de la inteligencia».

Un reciente premio Nobel de economía, Herbert Simon, acaba de demostrar que en sus comportamientos económicos u otros, el hombre, a pesar del ordenador, no podría optimizar sus elecciones y comportarse racionalmente. Así, la «Teoría de los Juegos y del Comportamiento Económico» de Von Neumann y Morgenstern, una de las bases del liberalismo, se revela falsa. La elección razonada y óptima no existe. Herbert Simon ha demostrado que las elecciones económicas eran primer término, al azar, arriesgadas, voluntaristas.

Estas ilusiones de la inteligencia han causado a los liberales graves fracasos; cojamos algunos al azar: El sistema liberal mercante despilfarra la innovación y utiliza mal la acción técnica. Esto es, como lo había visto Wagemann, porque la contabilidad en términos de provecho financiero a corto plazo (y no en términos de «excedente» global) frena cualquier inversión y cualquier innovación no vendible y no rentable a corto plazo.

Otro fracaso, con consecuencias incalculables: la llamada a la inmigración extranjera masiva. Los provechos inmediatos, estrictamente financieros, resultado de una mano de obra explotable y maleable es los que ha contado frente a los «costes sociales» a largo plazo de la inmigración, que nunca han sido considerados por el Estado y por la patronal. La codicia inmediata de los importadores de mano de obra no ha hecho pensar en lo «que no se gana» en términos de «no modernización» provocado por esa elección económica absurda.

El responsable de una gran empresa me decía recientemente con un tono despectivo que su ciudad estaba «rellena de inmigrantes» y que esto le molestaba personalmente. Pero después de algunos minutos de conversación, me confesaba con muy buena conciencia que diez años antes, había «sondeado» en el extranjero para «importar» mano de obra que fuese barata. Tal inconsciencia se asemeja a una nueva esclavitud. Es impresionante constatar que incluso la ideología marxista, a pesar de su desprecio a las diversidades culturales y étnicas, no se ha atrevido, como el liberalismo, a utilizar para su provecho el desenrazamiento masivo de las poblaciones rurales de los países en vías de desarrollo.

Gobiernos irresponsables y una patronal ignorando las realidades económicas, y desprovistos del menor sentido cívico y ético, han garantizado una práctica neo-esclavista cuyas consecuencias políticas, culturales, históricas –e incluso económicas– son incalculables (precisamente) para los países de acogida y sobre todo para los países que proporcionan la mano de obra.

Más preocupados de los «negocios» y del «bienestar», los liberales no se han enfrentado a los desafíos más elementales: crisis de la energía, crisis del patrón dólar, subida de los costes europeos y competencia catastrófica de los países del Este y de Extremo-Oriente.

¿Quién se preocupa de ello? ¿Quién propone una nueva estrategia industrial? ¿Quién piensa en que el final de la prosperidad ya ha empezado? La respuesta a los desafíos gigantes del final del siglo sólo es posible en contra de las prácticas liberales. Solamente una óptica económica fundada en las elecciones de un espacio económico europeo semi-autárquico, de una planificación de una nueva política de sustitución energética a medio plazo, y de una retirada del sistema monetario internacional, se adaptaría a las realidades actuales.

Los dogmas liberales o «libertarios» del libre intercambio, de la división internacional del trabajo, y del equilibrio monetario se revelan no solamente económicamente utópicos (y estamos dispuestos a demostrarlo técnicamente) sino también incompatibles sobre todo con la elección política de un destino autónomo para Europa.

Como para los nuevos filósofos que se contentaban en reactualizar a Rousseau, hay que tomar conciencia de la impostura de la operación publicitaria de los «nuevos economistas».

No se trata ni más ni menos que de una vuelta a las tesis bien conocidas de Adam Smith. Pero los nuevos economistas franceses (Jenny, Rosa, Fourcans, Lepage) no son nada por ellos mismos y sólo vulgarizan las tesis americanas. Miremos del lado de sus maestros.

Partiendo de una crítica pertinente, es verdad, del «Welfare State» (el Estado providencia burocrático aunque neoliberal), la escuela de Chicago, monetarista y conservadora, con Friedmann, Feldstein, Moore, etc., predica un retorno a la ley micro-económica del mercado, rechaza cualquier obligación del Estado hacia grandes empresas, reencontrando así la despreocupación de los liberales del siglo XIX hacia el paro y las cuestiones sociales. Y la escuela de Virginia, con Rothbard, David Friedman, Tullock, etc… quiere ser «anarco-capitalista», partidaria del estallido del Estado y de la reducción total de la vida social y política a la competencia y a la única búsqueda del provecho mercantil.

Se puede criticar estas tesis, conocidas y «recalentadas» desde el punto de vista económico. Pero que sea suficiente decir que, para nosotros europeos, incluso realizable y «próspero», un programa tal significa la muerte definitiva como pueblos históricos. Los «friedmanianos» y los «libertarios» nos proponen la sumisión al sistema del mercado mundial dominado por leyes que favorecen a la sociedad americana pero que son incompatibles con la elección que debemos tomar, de permanecer como naciones políticas y pueblos evolucionando en sus historias específicas.

La economía orgánica no quiere ser una Teoría. Sino una estrategia, que se corresponde únicamente con la elección, en la Europa del siglo XX, de sociedades donde el destino político y la identidad cultural se sitúan antes que la prosperidad de la economía. Subsidiariamente, la función económica es además mejor dominada.

Reflexionamos, en el GRECE, sobre esta nueva visión de la economía, a partir de los trabajos de Tomar Spann y de Ernst Wagemann en Alemania, Johan Akerman en Suecia y François Perroux en Francia. Wagemann compara la economía liberal a un cuerpo sin cerebro, y la economía marxista a un cerebro subido en zancos. La economía orgánica, modelo práctico que no pretendemos exportar, quiere adaptarse a la tradición trifuncional orgánica de los europeos. Según los trabajos de Bertalanffy sobre los sistemas, la función económica se consideraba como un organismo parcial del organismo general de la comunidad. Según los sectores y las coyunturas, la función económica puede estar planificada o actuar según las leyes del mercado. Adaptable y flexible, admite el marcado y el beneficio, pero los subordina a la política nacional. El Estado deja a las empresas, en el marco nacional, actuar según las restricciones del mercado pero puede, si las circunstancias lo exigen, imponer con medios no económicos la política de interés nacional.

Las nociones irreales de «macro y micro economía» dejan paso a la realidad de la «economía nacional», también las nociones de sector público y privado pierden sentido, ya que todo es a la vez «privado» en el nivel de la gestión y «público» en el sentido de la orientación política.

Los bienes colectivos duraderos son preferibles, y no la producción de bienes individuales obsoletos y energéticamente costosos. Los mecanismos y manipulaciones económicos son considerados como poco eficaces para regular la economía con respecto a la búsqueda psicológica del consenso de los productores.

La noción contable de excedente y de coste social sustituye los conceptos criticables de «rentabilidad» y de «provecho». Por su elección de centros económicos autoritariamente descentralizados, y de un espacio europeo de gran escala y semi-autárquico (caso de los EE. UU. de 1900 a 1975) la economía orgánica puede pretender una potencia de inversión y de innovación técnica superior a lo que autoriza el sistema liberal, frenado por las fluctuaciones monetarias y la competencia internacional total (dogma reduccionista del libre intercambio según el cual la competencia exterior sería siempre estimulante).

En última instancia, la economía orgánica prefiere el empresario al financiero, el trabajador al asistido, el político al burócrata, los mercados públicos y las inversiones colectivas, al difícil mercado de los consumidores individuales. Más que las manipulaciones monetarias, la energía del trabajo nacional de un pueblo específico nos parece como lo único capaz de asegurar a largo plazo el dinamismo económico.

La economía orgánica no es en sí misma la finalidad de su propio éxito. Pero quiere ser uno de los medios de asegurar a los pueblos europeos el destino, entre otros posibles (lit: parmi d´autres posibles), de pueblos con larga vida.

Para concluir, habría que citar la conclusión que el economista Sombart ha dado en su tratado El Burgués, pero sólo mencionaremos el pasaje más profético: «En un sistema fundado en la organización burocrática, donde el espíritu de empresa habrá desaparecido, el gigante convertido en ciego estará condenado a arrastrar el carro de la civilización democrática. A lo mejor asistiremos entonces al crepúsculo de los dioses y el Oro será devuelto a las aguas del Rin».

François Perroux ha escrito también que deseaba el fin del culto de Mamón que «brilla hoy con una prodigiosa luz».

Hemos elegido contribuir al fin de este culto (francés: Nous avons choisi de contribuir à la fin de ce culte), asegurar el relevo del último hombre, el de la civilización de la economía, de la que el Zaratustra de Nietzsche decía:

«¿Amor, creación, deseo, estrella?

¿Qué es eso?

Así pregunta el último hombre y guiña el ojo.

La tierra se hará más exigua y sobre ella saltará el último hombre, este que reduce todo.

Hemos inventado la Felicidad, dicen los últimos hombres.

Y guiñan el ojo».

mercredi, 22 mai 2013

Pas d’orchidées pour Mrs Thatcher !

Pas d’orchidées pour Mrs Thatcher !

Le fossoyeur de l'Angleterre

Auran Derien
Ex: http://metamag.fr/

La spécialité de la finance anglo-saxonne est le mensonge et l’inversion des valeurs.  Au décès de Mrs Thatcher, les perroquets médiatiques autorisés ont voulu nous faire croire qu’elle était la miss Blandish de la politique. Des penseurs plus pénétrants et scrupuleux révèlent qu’elle fut plutôt la Mama Grisson. Revenons à la réalité de son action car nous comprenons mieux ainsi l’horreur de l’Occident contemporain.

La fondatrice du totalitarisme occidental 

 
L’école autrichienne, la pensée de Hayek, n’ont rien à voir avec ce que promeut la globalisation. Les agités du bocal qui donnaient les conseils ou les ordres à Mrs Thatcher n’ont jamais lu ces auteurs. D’ailleurs, ils ne lisent rien. A quoi bon? N’exhalent-ils pas la vérité révélée? Ils se sont contentés d’écouter et d’appliquer les prédications de Milton Friedman, lequel a ratiociné à partir du modèle d’équilibre général. Ça n’a rien de libéral...
 
  
 
La société du spectacle a mis en scène Mrs Thatcher, pour que le public vote en sa faveur. Derrière elle, s’activait en réalité tout un groupe de banquiers et autres fanatiques, à la recherche de politiciens aptes à prendre des mesures qui leur assureraient enfin le statut de gérant du monde pour mille ans. Parmi les créatures qui contrôlaient la pseudo dame de fer, citons le banquier Victor Rothschild (1910-1990) dont le Dr.Tarpley rappelle qu’il servit de spécialiste de la sécurité pour Royal Dutch Shell et qu’il avait formé un think tank dont le gouvernement britannique s’inspirait. Entre lui, Keith Joseph, le cerveau politique, et Alfred Sherman, ils géraient MrsThatcher. Sherman, communiste à l’origine, était allé en Espagne durant la guerre civile. Puis il avait conseillé le premier ministre israélien Ben-Gurion avant de fonder, en 1974, avec Joseph et Thatcher le Center for Policy Studies qui fut le centre de production des idées que prétendit ensuite mettre en œuvre Mme Thatcher, une fois premier ministre. 
 
On voit que l’emballage hayékien ne correspond en rien aux obsessions profondes des employeurs  de Mrs Thatcher. Elle fut mise en orbite pour détruire la société britannique et n’arrêta pas de tourner  en chantant une demi-douzaine de slogans très primitifs basés sur un darwinisme social des plus sordides. Il semble que ce soit  keith Joseph qui ait le plus contribué à une des mesures fondamentales : réduire les salaires des enseignants ;  car pour les trafiquants, la connaissance est inutile voire dangereuse. La population ne doit pas étudier, du moins rien de fondamental. Les enseignants ne doivent pas pouvoir constituer une profession où chacun vit dignement de son salaire. Sinon, la révolution en faveur du soviet de la finance ne serait pas possible. Il faut abattre la culture pour que le bétail de la ferme des animaux suive la caste des chargés de mission du bien en soi…
 
L’accession au pouvoir de cette fausse Miss Blandish ne fut possible qu’avec l’utilisation des méthodes de marketing, importées des USA par l’agence de publicité Saatchi & Saatchi. Elles innovaient dans un contexte de crise sociale déclenchée en 1973 (hausse du pétrole) alors que les prédicateurs économiques de Chicago parcouraient le monde avec l’appui de Kissinger afin de duper le plus de gouvernants possibles. 
 
Thatcher applique les insanités friedmaniennes
 
Pour les riches, l’inflation de l’époque paraissait indésirable car elle favorisait les classes moyennes dont elle amortissait les dettes automatiquement. Aussi, fut-il décidé de prendre au sérieux les élucubrations de Friedman, en bloquant l’offre de monnaie pour démarrer une récession qui créa un chômage massif. La restriction monétaire fit monter la livre et l’industrie commença à disparaître. Seuls les banquiers de la City profitèrent de la livre surévaluée pour s’offrir des actifs à travers le monde…
 

Milton Friedman et Ronald Reagen
 
La réforme fiscale fut aussi brutale. La TVA monta et, face aux critiques de cette politique de néantisation du peuple anglais, il lui fallut chercher une guerre capable de redorer son blason ; de faire naître temporairement autour d’elle un nationalisme factice, trompeur et niais.  Cela lui réussit. La guerre des Malouines, en 1982, fut son tremplin pour une nouvelle période  économique. Appliquant les mesures de Friedman, elle devint naturellement la grande amie du général chilien Pinochet, lui même fanatique partisan des mesures des impenseurs de l’Ecole de Chicago. Elle devait aussi promouvoir Gorbachev, qui fut transformé en coqueluche de l’Occident au fur et à mesure qu’il trahissait le peuple russe. On relira sur ce point l’excellent ouvrage de Alexandre Zinoviev : Perestroika et contre-Perestroika. O.Orban. 1991. “Gorbatchev est devenu le héros de l’occident, qui l’a couvert d’honneurs et de louanges pour ses mérites, non envers l’URSS, mais envers les occidentaux”.
 
L’obsession de “privatiser” en faveur des financiers, seule ligne de conduite permanente de la dame, correspondait-elle à des accords qui liaient la Grande-Bretagne? Fallait-il solder des dettes qui remontaient à la seconde guerre mondiale? Etait-ce une contrepartie aux aides du FMI signées en 1976?  Elle a finalement exercé le rôle de Mama Grisson, organisant le hold-up du siècle sur une contrée désormais victime de la tyrannie obscurantiste d’une bande de financiers parvenus. 
 
La véritable noblesse est morte
 
Mrs Thatcher a détruit un monde à base de solidarités professionnelles pour livrer le tout aux démons de la City. La justification à partir des penseurs autrichiens, notamment Hayek, est totalement erronée. Il n’y a pas et il n’y aura jamais d’ordre cattalactique quand la mafia financière règne. Le discours monétariste et l’obsession des privatisations sont destinés à justifier le vol en faveur de ceux qui se sont préparés pour la grande orgie de pillage. On ne saurait oublier qu’elle a couvert, en 1986, la destruction des règles financières qui assuraient encore un peu d’harmonie dans ces métiers de gangster. 
 
En échange, elle a terminé dans la nouvelle noblesse, celle d’une époque Orwellienne où les voyous s’achètent les titres puisque la dernière véritable noblesse européenne est morte en 1914-1918.

mardi, 21 mai 2013

PASSET-626x220.jpg René Passet : « Il faut prendre du recul pour voir qu’un autre monde est en train de naître »

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René Passet : « Il faut prendre du recul pour voir qu’un autre monde est en train de naître »

 






Basta !  : Notre manière de penser l’économie dépend de notre perception du monde. Et varie totalement en fonction des époques et du progrès technique. Dans votre dernier ouvrage, vous proposez de relire l’histoire économique à la lumière de ces mutations. Quelles sont les grandes étapes de cette longue histoire ?

René Passet [1] : Ceux qui voient le monde comme une mécanique, une horloge, ne considèrent pas l’économie de la même façon que ceux qui le voient comme un système énergétique qui se dégrade. Les mêmes astronomes, armés des mêmes instruments, ne perçoivent pas les mêmes choses dans le ciel, avant et après Copernic. Quand l’homme n’a que ses sens pour comprendre le monde, l’univers lui apparaît mystérieux.

C’est un univers qui chante, qui le nourrit, qui gronde aussi parfois. Des forces jaillissent de partout. Il pense que des êtres mystérieux et supérieurs le jugent, l’approuvent ou le punissent. Avant même le Néolithique, l’homme s’aperçoit que la plante dont il se nourrit pousse mieux dans les milieux humides. Ou que les déchets organiques favorisent la végétation. Il découvre ainsi les forces productives de la nature et les régularités du monde naturel. Cela va faire reculer les esprits, qui se réfugient sur les sommets des montages, comme l’Olympe.

Les dieux succèdent aux esprits, le monde mythique au monde magique. La civilisation grecque marque le basculement de l’esprit vers la conceptualisation. Un tournant décisif, le début d’une réflexion sur la nature des choses, avec la philosophie, science première. On passe ensuite des dieux au pluriel à un dieu au singulier. L’activité économique est encore une activité pour le salut des âmes, dans la perspective chrétienne. Si vous ne voulez pas finir vos jours dans les lieux infernaux, il faut vivre selon les préceptes économiques des théologiens.

Peu à peu la rationalité l’emporte, et la science se laïcise. Pour Descartes et Newton, le monde fonctionne comme une horloge. C’est dans cette société « mécaniste », que naît l’école libérale classique. Au 18e siècle, Adam Smith, qui était aussi astronome [2], propose une théorie gravitationnelle de l’équilibre : le prix du marché gravite autour du « prix naturel », qui est le coût de production de l’objet, exactement comme les astres gravitent autour du soleil.

Avec la machine à vapeur apparaît une nouvelle représentation du monde…

En 1824, le physicien Sadi Carnot découvre les lois de la thermodynamique : le principe de conservation et le principe de dégradation. Imaginez un morceau de charbon. Il brûle, mais ne disparaît pas : tous ses éléments constitutifs se conservent, répandus dans l’univers. Et s’il a produit du mouvement, jamais plus il n’en produira, car il est désormais déstructuré, « dégradé ».

A ce moment de l’histoire, on passe d’une représentation mécanique du monde à la société énergétique. Alors que chez Adam Smith, chez Newton, c’est l’équilibre – statique – qui compte, les lois de l’énergie sont des lois de probabilité. Quand on répand un gaz dans un volume, il va dans tous les sens, et le hasard fait qu’il se répand partout de manière homogène.

Au niveau de l’individu, il n’y a pas de déterminisme apparent, mais au niveau des grands nombres, les mouvements se compensent : ce sont les lois de probabilité. On change de causalité, et d’univers : le monde est en mouvement, comme le montre aussi Darwin. Au même moment dans l’histoire économique, Marx et les socialistes se mettent à penser non pas en terme d’équilibre mais d’évolution.

Ce passage d’une représentation mécanique du monde à la société énergétique a-t-il un impact sur la vie des idées ?

Le mouvement des idées part alors dans trois directions. Avec Léon Walras, qui invente « l’équilibre général » des marchés, c’est la loi de conservation qui prime. La deuxième loi, celle de la dégradation entropique, amène à la théorie de l’autodestruction du système capitaliste, par Karl Marx. Au fil du temps, le système entropique et le système capitaliste suivent un même cheminement, ils se dégradent, se désorganisent.

La loi de probabilité, on la retrouve chez Keynes [3]. Sa théorie est celle de l’incertitude radicale : les acteurs économiques agissent dans un monde incertain, dont ils ont une connaissance imparfaite. Une vision à l’opposé des analyses classiques sur la rationalité des marchés.

Vient ensuite le temps de l’immatériel et de l’information…

La société énergétique, celle de la grande industrie, fonctionne par l’accumulation de capitaux et le développement du secteur financier et bancaire. La vraie rupture entre les classes sociales apparaît. La société s’organise hiérarchiquement. Au début des années 1970 deux événements vont marquer un tournant important : la première crise du pétrole et la sortie du microprocesseur Intel. L’informatique pour tous, et nous voici dans la société informationnelle (dans le sens de « donner une forme »).

Dans cet univers, la force productive est l’esprit humain. Les modes d’organisation changent complètement. De l’entreprise au monde entier, l’économie est organisée en réseaux. Le monde se vit comme unité, en temps réel. On gomme le temps et l’espace.

Est-ce l’avènement de la financiarisation de l’économie ?

L’ordinateur nous a donné le moyen du contact immédiat et la logique financière nous pousse vers une économie de rendement immédiat. Avec la politique de libération des mouvements de capitaux dans le monde, on assiste à une concentration de capital, et à la naissance d’une puissance financière supérieure à celle des États. Avec des effets désastreux pour l’économie réelle.

Un exemple ? L’entreprise pharmaceutique Sanofi gagne des sommes colossales, licencie pourtant ses chercheurs et n’invente plus rien, depuis que son PDG est issu du secteur de la finance. La finalité ? Produire du dividende et non plus du médicament. On relève la barre de rentabilité, on externalise la recherche et pour le reste, on dégraisse. Les chercheurs sont désespérés, ils ne font plus leur métier.

« L’humanité est en train de résoudre son problème économique », disait Keynes, envisageant un avenir prochain où l’homme pourrait travailler trois heures par jour, grâce à l’augmentation de la productivité. Nous en sommes très loin… Avons-nous raté quelque chose ?

A toute époque, le progrès technique a pour effet d’augmenter la productivité du travail humain. La productivité accroît la quantité de valeur ajoutée. Mais la façon dont celle-ci est partagée dépend du rapport de force dans la société. Dans la vision fordiste, les intérêts des salariés et des entrepreneurs sont convergents.

Henry Ford le dit très bien : « Si vous voulez vendre vos bagnoles, payez vos ouvriers ». Progrès économique et progrès social vont alors de pair. Lorsque c’est le pouvoir de la finance qui domine, le dividende se nourrit de la ponction qu’il effectue sur les autres revenus.

La logique ? Réduire l’État, les salaires, le nombre de salariés, les protections sociales. L’augmentation de la productivité a été compensée par cette logique de la rémunération des actionnaires. Keynes a raison ! Et la semaine de 32 heures est aujourd’hui un des moyens pour rétablir le plein emploi. Keynes évoque aussi les risques psychologiques de cette évolution. Pour la première fois depuis sa création, l’homme devra faire face à son problème véritable : comment employer sa liberté arrachée aux contraintes économiques ?

Vous expliquez comment nous avons successivement fait tomber les barrières, entre espace terrestre et céleste avec Galilée, entre l’homme et l’animal avec Darwin, entre conscience et rationalité avec Freud. Que pensez-vous de cette nouvelle convergence qui s’opère, entre le vivant et la machine, avec les biotechnologies, dont vous décrivez l’importance dans votre ouvrage ?

Je ne crois pas à la fin de l’histoire, mais à la fin de l’homme. Avec les nanotechnologies et le concept « d’homme augmenté », on prévoit d’introduire dans notre sang des robots qui vont nous réparer. Et nous ne saurons bientôt plus quelle est la part humaine et quelle est la part robotique en l’homme. Nous aurons dans le cerveau des puces avec de la mémoire. Est-ce que la puce va appartenir à l’homme, ou bien le modifier ?

Lorsque je m’interrogerai, la réponse arrivera un peu plus vite. Mais est-ce vraiment moi qui répondrai, ou bien est-ce l’encyclopédie Universalis, à ma disposition dans mon cerveau ? Quelles seront les conséquences de tout cela ? L’homme se crée lui-même par les efforts qu’il fournit, en travaillant pour acquérir des connaissances, en transformant le monde, comme disaient Hegel ou Marx. S’il dispose de prothèses pour faire le travail à sa place, je crains que l’homme ne se diminue lui-même. Toute prothèse est atrophiante.

Vous n’êtes pas très optimiste…

Je suis très inquiet pour l’avenir de l’humain. J’ai peur qu’arrive, dans une humanité mécanisée, robotisée, un autre homme dont on ne saura plus très bien ce qu’il est. Le grand cybernéticien Alan Turing (1912-1954) a parié qu’aux environs de l’an 2000 on ne serait plus capable, dans une conversation téléphonique, de faire la différence entre un homme et un robot. C’est une autre limite, une autre frontière. Est-ce le sens de l’évolution ? Cela a-t-il une signification ? Je n’en sais rien.

Pouvons-nous maîtriser ces bifurcations de civilisation ?

Avons-nous maîtrisé les bifurcations précédentes ? Elles sont venues au fil de l’évolution, et nous les avons suivies. Nous ne les comprenons qu’après coup, et nous nous adaptons à une nouvelle normalité qui s’établit. Les gens les ont vécues comme la fin d’un monde, sans comprendre où allait le monde nouveau. Il faut prendre du recul pour voir qu’un autre monde est en train de naître. Nous vivons aujourd’hui une confusion entre crise et mutation. Nous mélangeons deux types de crises.

L’évolution est faite de ruptures et de normalité. La crise dans la normalité, c’est lorsque dans le système établi apparaissent des dysfonctionnements qui nous éloignent de la norme. C’est la crise au sens propre du terme, conjoncturelle. Le problème est alors de revenir à la norme. Si le sous-emploi est conjoncturel, on va essayer de rétablir le plein-emploi dans les normes traditionnelles, avec les moyens traditionnels.

Les crises de mutation, c’est passer d’un système à un autre. Et c’est ce que nous vivons aujourd’hui. Ce n’est pas une crise économique, mais une crise du système néolibéral. C’est la logique même du système qui a provoqué la crise des subprimes en 2008. Notre vrai problème est aujourd’hui de réussir la mutation. Or nous avons chaussé les lunettes de la crise du court terme.

Un exemple : rigueur ou relance ? Tous les gouvernements raisonnent dans une logique de court terme ! Le pouvoir financier impose sa vision du temps court. Cela fausse tout, nous raisonnons à partir d’une économie complètement tronquée.

Quelles en sont les conséquences ?

Dans le temps court, le salaire n’est qu’une charge pour les entreprises, et la protection sociale, une charge pour la société. L’impôt, c’est un prélèvement et rien d’autre. Si vous abordez le problème avec cette vision, cela vous amène forcément à la rigueur : il faut restreindre la dépense publique. Même si la crise ne vient pas de la dépense publique mais du secteur privé, en premier lieu des banques avec la crise des subprimes.

Il faut comprimer les salaires, travailler plus pour gagner moins ! Le résultat ? Un cercle vicieux. Le second effet apparaît dans un temps plus long : le salaire, c’est le support d’un revenu qui alimente la dépense de consommation. L’impôt, c’est le support de la dépense publique. Il ne se perd pas dans les sables du désert ! Toute cette dimension nous manque. Les gouvernements sont piégés dans cette logique de court terme, alors que le vrai problème est celui de la réussite de la mutation.

« L’homme des cavernes pouvait difficilement – à la lumière de son expérience – se faire une conception de l’univers autre que magique », écrivez-vous. Alors que les marchés sont aujourd’hui présentés comme des oracles, ne serions-nous pas capables de faire mieux que l’homme des cavernes ?

Dans une vision à court terme, la tendance est de défendre les structures existantes. Avec de très bonnes intentions, on s’enferme dans des contradictions totales. Les gouvernements mènent une politique de réduction des dépenses énergétiques, et de l’autre côté, n’acceptent pas la diminution du nombre de raffineries, qui découle de cette politique. Le problème n’est pas que les salariés des raffineries restent raffineurs, mais de les employer dans de nouvelles structures, et de voir quelles sont les structures nécessaires à la poursuite de la mutation.

En essayant de régler un problème de long terme avec des instruments de court terme, nous nous enfonçons de plus en plus dans la crise, à force de prendre des décisions à contre-sens. Au contraire, anticiper ces transitions, cette mutation, devrait pourtant inspirer non pas le discours des politiques, mais leur action. On se trompera forcément, mais par tâtonnement nous finirons par trouver la voie pour nous engager dans un cercle vertueux.

Vous définissez la science économique comme un « système de pensée nombriliste, clos sur lui-même, replié sur la contemplation inlassable des mêmes équilibres et des mêmes procédures d’optimisation ». De quelle science économique avons-nous besoin aujourd’hui ?

Lorsque j’ai publié mon livre L’économique et le vivant en 1979, les économistes m’ont dit : « Qu’est-ce que c’est que ce truc ? Ce n’est pas de l’économie. » Depuis, beaucoup ont compris l’importance de la transdisciplinarité. Confrontés aux mêmes réalités, chaque discipline interroge le monde sous un angle différent. La nature de mes questions me définit comme économiste.

C’est le lieu d’où je questionne le monde, mais ce n’est pas une prison ! Si les chercheurs refusent de se hasarder dans les zones d’interférences, certains problèmes ne seront jamais abordés. C’est pourtant dans ces zones que se joue aujourd’hui la survie de l’humanité.

Comment recréer des espaces de réflexion interdisciplinaires ?

Il y a aujourd’hui des courants intéressants, comme celui des Économistes atterrés. On parle en ce moment de la reconstitution d’une structure qui ressemblerait à celle du Plan, avec une ambition de prospective. J’étais très favorable à la planification française, souple. Les objectifs des secteurs stratégiques – sidérurgie, transports, énergie,…– étaient définis au sein des Commissions du Plan, qui réunissaient des grands fonctionnaires, des intellectuels, mais aussi des syndicats ouvriers et patronaux. Une concertation sociale permanente.

C’est ce qui nous manque le plus aujourd’hui. De cette rencontre sortaient des objectifs, ensuite arbitrés par l’État. On n’avait pas besoin de faire des grands discours sur la concertation, on la faisait !

Vous défendez le principe de bioéconomie. En quoi cela consiste-t-il ?

Ce n’est pas une nouvelle branche de l’économie : c’est l’économie qui doit se faire bio. La destruction de la biosphère menace actuellement l’humanité. Et si on détruit la biosphère, cela ne sert à rien de disserter sur le Plan et l’avenir de l’humanité : il n’y aura pas d’avenir, pas d’économie. Le monde est arrivé à ce moment où il atteint et dépasse la capacité de charge de la biosphère. Toutes les conventions sur lesquelles était fondée l’économie sont remises en cause.

La nature était considérée comme inépuisable ? Elle devient un facteur rare que l’on épuise. Et c’est une des conventions fondatrices de l’économie qui disparaît. Quand on cherche la combinaison optimale de facteurs de production, ou de biens de consommation qui vont vous donner le maximum de satisfaction, on procède par substitution de biens. C’est la deuxième convention de base de l’économie : on optimise en substituant.

Cela n’est plus vrai aujourd’hui : quand vous atteignez les limites de la biosphère, certaines ressources ne peuvent plus être augmentés. La substituabilité disparaît. Troisième convention : « Le plus est le mieux » – c’est en consommant davantage que l’on accroît le bien-être. Nous atteignons aussi la limite où ce n’est plus vrai. Le paradoxe d’Easterlin montre que dans les nations les plus riches le bien-être et le revenu ne vont plus de pair. Il arrive un moment où la relation s’inverse carrément.

Comment l’économie peut-elle intégrer la question de la reproduction des ressources et du vivant ?

L’économie est faite pour optimiser – ce n’est pas un vilain mot !. Cela veut dire tirer le maximum de résultats, de choses positives, de satisfaction, à partir des moyens limités dont nous disposons. Mais elle doit intégrer ces stratégies d’optimisation (de production et de consommation) dans les limites des mécanismes de reproduction du système.

Par exemple les rythmes de reproduction des matières premières, des ressources renouvelables : « Voilà, on peut piocher dans les réserves jusque ce niveau, mais pas plus ». Ou des rythmes de prélèvement des ressources non renouvelables compatibles avec des perspectives de relève, de remplacement de ces ressources. L’économie retrouve alors sa vraie vocation : une science d’optimisation sous contrainte. Sans limites, il n’y a pas d’économie, car cela veut dire que l’on peut faire n’importe quoi !

Le système économique actuel peut-il s’adapter à cette contrainte ?

Certains économistes voudraient que l’économie soit une science qui prenne en compte toutes les contraintes, sauf celles de l’environnement ! Dans un système vivant, vous avez une finalité qui domine, c’est la finalité du système tout entier : maintenir et reproduire sa structure dans le temps, alors que les lois physiques, les lois d’entropie voudraient qu’il se désagrège. Cette finalité est supérieure à toutes les autres.

Dans une horloge, vous avez une seule loi, du ressort à la mécanique entière. C’est très différent dans le vivant : on fait un saut dans le vivant, en passant de la molécule à la cellule, c’est une autre logique qui s’applique. Et la logique de l’organe est différente de la somme des logiques des cellules. La pensée n’est pas la somme des atomes du cerveau.

En économie, c’est pareil. C’est le paradoxe de Condorcet : il faut un choix à un moment donné, la logique du tout n’est pas la somme des logiques particulières. On est loin de la « main invisible du marché » d’Adam Smith, qui transforme mécaniquement les intérêts individuels en intérêt général.

Vous parlez de « point critique », ce moment qui nous fait basculer dans un autre univers. Sommes-nous en train d’atteindre un tel point critique ?

Nous vivons une crise de civilisation, mais le dépérissement du système sera long, car trop d’intérêts sont en jeu. Pour l’univers de la finance, ce système n’est pas mauvais : quand tout va bien, il engrange les bénéfices, et quand tout va mal, la charge retombe sur la collectivité.

La faillite d’un paradigme n’implique pas qu’il disparaisse immédiatement. Il faut qu’une théorie concurrente soit prête à prendre la place, comme le dit l’historien Thomas Kuhn. Le point critique, c’est lorsqu’un écart évolutif, au lieu d’être ramené vers la moyenne, bifurque de manière totalement imprévisible vers une nouvelle voie d’évolution.

Tout progrès est ambigu, à la fois chance et péril. C’est nous qui choisissons. Le progrès technique nous donne actuellement la possibilité de gagner plus, de vivre mieux, de travailler moins. Et comme nous avons libéré la cupidité des hommes, avec la libéralisation du secteur financier, ce sont les effets pervers qui l’emportent. Ce qui devrait être un instrument de libération des hommes devient un moyen d’asservissement. L’homme devient la variable d’ajustement de l’augmentation des dividendes.

Tant qu’on n’aura pas tranché le nœud gordien du pouvoir de la finance, rien ne sera possible. Parce que le rapport de force agira toujours dans cette direction, et le côté pervers du progrès technique l’emportera toujours. Sous la pression des événements et des drames qui se multiplieront, serons-nous amenés à le faire à temps ? Sans cela, nous courrons à la catastrophe. Il faut continuer à alerter et à travailler dans ce sens.

Notes

A lire : René Passet, Les Grandes Représentations du monde et de l’économie à travers l’histoire, éditions LLL Les liens qui libèrent, 950 pages, 38 euros.

Notes

[1René Passet, économiste spécialiste du développement et professeur émérite à la Sorbonne, a été membre du Groupe des Dix, constitué à l’initiative de Jacques Robin et de Robert Buron, au sein duquel il a travaillé avec des biologistes, des physiciens, des sociologues, des anthropologues, des informaticiens. Il a été le premier président du Conseil scientifique de l’association Attac.

[2Auteur de l’ouvrage Histoire de l’astronomie.

[3Qui a écrit un traité des probabilités avant de se pencher sur l’économie.

Basta Mag

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Allemagne: récession imminente?

Andrea PERRONE:

Allemagne: récession imminente?

 

Berlin amorce un déclin lent, à cause d’une croissance en net recul qui met en danger l’avenir de toute la zone-euro!

 

L’économie de toute la zone-euro poursuit son ressac et l’Allemagne, à son tour, devient sujet de préoccupation, car l’état de l’économie allemande empire. Ce n’est pas un hasard si l’économie allemande n’accuse qu’une très misérable croissance de 0,1% seulement au cours de ces trois derniers mois, tandis que la France, elle, a déjà basculé dans la récession, comme le signalent les données d’Eurostat. Avec un recul de 0,2% au cours des trois premiers mois de l’année 2013, l’économie de la zone-euro est bel et bien, désormais, en récession et cela, depuis un an et demi: c’est là la période de récession la plus longue depuis 1995, année à partir de laquelle Eurostat a commencé à rassembler des données. L’Etat de la zone-euro qui se trouve dans la pire des situations est bien entendu la Grèce, dont l’économie s’est réduite de 5,3%. Elle est suivie du Portugal, qui accuse une récession de –3,9% par rapport à la même période l’an passé.

 

La France aussi est officiellement en récession après que son économie se soit réduite de 0,2% au cours de ces six derniers mois, avec, en fond, un taux de chômage supérieur à 10%, assorti d’une perte de confiance des entreprises et des consommateurs. Entretemps, l’Allemagne a repris une croissance, après une récession de trois mois à la fin de l’année 2012, mais cette faible reprise s’avère bien trop lente et insuffisante, atteignant seulement le chiffre de 0,1%, surtout à cause d’une augmentation des dépenses de la part des consommateurs. Ce chiffre ne suffit pas, bien entendu, pour faire redémarrer l’économie de la zone-euro en général, qui se débat encore et toujours dans une crise qui perdure.

 

Les données d’Eurostat montrent que l’économie allemande s’est réduite de 0,3% par rapport à la même période l’an passé. Le bureau allemand des statistiques met ce faible rendement sur le compte d’un “climat hivernal extrême” qui a duré jusqu’en avril. A l’opposé, la Lettonie a enregistré une croissance de 5,6% et la Lituanie de 4,1% par rapport à la même période en 2012. Les deux pays espèrent adhérer à la zone-euro très bientôt: la Lettonie en janvier 2014 et la Lituanie en 2015. L’Estonie voisine, qui a adhéré à la zone-euro en 2011 a enregistré la croissance la plus élevée de la zone par rapport à l’an passé, avec +1,2%. Mais par rapport aux trois mois qui viennent de s’écouler, l’économie estonienne, à son tour, s’est réduite d’un pourcent.

 

Pour ce qui concerne Chypre, les chiffres montrent que l’économie de l’île a considérablement empiré pendant la période où l’on négociait son plan de sauvetage: son économie a chuté de 4,1% par rapport au trimestre de janvier-mars 2012. La situation économique de l’Italie, de l’Espagne, de la Finlande et des Pays-Bas est préoccupante car tous ces pays ont vu, eux aussi, se rétrécir leur assiette économique par rapport au trimestre précédent et à l’an passé, comme d’ailleurs toute les économies de la zone-euro. La Banque centrale européenne, au début mai 2013, a abaissé le taux de référence à son minimum historique de 0,5%, tentant ainsi de faire redémarrer l’économie de la zone-euro. Mais tout prêt avantageux demeure une chimère, surtout pour les banques des pays de l’Europe méridionale qui continuent à emprunter de l’argent à des taux d’intérêt beaucoup plus élevés que le taux de référence: même le président de la BCE, Mario Draghi, a souligné que les prêts à bon marché ne se sont jamais avéré bons pour l’économie réelle.

 

Andrea PERRONE.

(article paru dans “Rinascita”, Rome, 17 mai 2013 – http://www.rinascita.eu/ ).

vendredi, 17 mai 2013

ETRE OU NE PAS ETRE AVEC LES GLOBALITAIRES ?

ETRE OU NE PAS ETRE AVEC LES GLOBALITAIRES ?

Le dilemme des incertitudes chinoises


Auran Derien
Ex: http://metamag.fr/
Pour les européens, deux points de vue sur la Chine sont plausibles : Prendre au pied de la lettre la phrase de Mao qui affirma au moment de sa prise de pouvoir, que plus jamais la Chine ne serait esclave et le point de vue de Naomi Klein, pour qui une partie de la direction chinoise a déjà été convertie aux horreurs globalitaires et marche main dans la main avec cette inhumanité. Ce dilemme conditionne l’avenir de l’Europe.
 
Les Chinois ont-ils une stratégie?
 
Première possibilité, dans la lignée de Mao : Les Chinois ont une stratégie. Elle s’observe tant dans le domaine spatial que maritime puisque, devenue une nation commerçante de tout premier plan, la liberté des voies maritimes est désormais d’une importance cruciale. Elle a aussi une dimension géoéconomique. Alors que chacun sait à quel point la Réserve Fédérale utilise la planche à billet pour accaparer tous les biens réels que les européides leur offrent, les Chinois ont accepté longtemps d’acheter des bons du trésor US qui ne valent rien (ils ne seront jamais remboursés) parce qu’ils mettaient la main sur le savoir technique et scientifique des Américains.
 
 
Sortie du premier Airbus chinois
 
Rappelons que Westinghouse l’a emporté sur les Européens pour la fourniture de centrales atomiques, contrat qui prévoyait la livraison des plans et leur permettra ensuite de les construire sans aide. Les connaissances sont une valeur que les occidentalistes sont incapables de défendre. Ils n’ont pas compris que les financiers se moquaient complètement de la destruction économique des pays. Comme mafia s’auto-proclamant race supérieure, leur intérêt ne recouvre pas celui des populations qu’ils pillent. Les Chinois achètent donc ce qui les intéresse tant aux USA qu’en Europe, et il s’agit de “know how”. Parmi les conséquences, nous citerons la présence de troupes d’élite de la police chinoise partout dans le monde pour protéger leurs actifs. Ils savent que les Etats occidentaux sont détruits  et ces Etats, désormais, ne sont plus capables de protéger les biens des chinois.
 
Ont-ils une stratégie spécifique en Europe ?
 
Vis-à-vis de l’Europe, la première phase de leur stratégie fut de permettre aux multinationales de s’installer en Chine pour économiser les coûts de main d’œuvre tout en continuant à vendre les produits finis aux prix européens. La phase intermédiaire fut le cas Airbus qui a construit une usine en Chine au capital à 51% chinois. Un avion a disparu, pour être disséqué. La fin est déjà connue : la Chine produira tout ce dont le monde a besoin. Les européides se sont transformés en médiocres trafiquants : ils vendent, distribuent ce qui est produit ailleurs... Ainsi toute l’Europe va tomber au niveau économique de la Chine de 1950. Et les cadres, en génocidant leur peuple, prennent la suite de l’inhumanité bolchévique. Les Européens de vieille souche sont désormais dans la situation des Néandertaliens : en voie de disparition et, en tenant compte des différences de comportement selon les peuples et cultures, ils seront remplacés par des Hans...
 
Les Chinois sont-ils acculturés?
 
Ceux d’aujourd’hui ignorent profondément la culture chinoise. La transmission écrite et orale s'est interrompue sous le communisme et la "révolution culturelle" a été mortelle. Ils se fixent aujourd'hui, comme modèle, la "culture" occidentale c’est-à-dire celle des Etats-Unis et même, plus précisément, de la Californie. Les “business school” abondent (en 2010 on en recensait 345). On a vu, aux jeux Olympiques, la vulgarité américaine déborder sur la Chine. La greffe prendra-t-elle? Noami Klein prétend que si.
 

La stratégie du choc : le livre et le film 
 
Dans son ouvrage sur la doctrine du Choc  elle explique qu’une faction de fanatiques a convaincu les chinois de pratiquer ce mélange entre capitalisme et communisme, dans lequel l’Etat « totalitaire » protège une petite élite économique. C’est évidemment le modèle qui fascine les anglo-saxons puisqu’il correspond au discours que tiennent les sectes religieuses : L’Etat totalitaire doit être au service des banquiers et des prédicateurs, ces derniers formant une caste. L’aplatissement du monde est inhérent aux idéologies totalitaires. Selon N.Klein, Deng Xiaoping a invité, en 1980, Milton Friedman pour transmettre la pensée de l’école de Chicago aux “élites” chinoises. La privatisation, là-bas comme ici (et comme partout) est faite au profit des autorités du moment, de leurs amis et familiers, notamment en faveur de gangs qui s’auto-proclament « le bien en soi », sur le modèle des maçonneries occidentales. La Police Populaire armée créée en 1983 est destinée à écraser toute manifestation de rébellion. Et, toujours selon N.Klein, Milton Friedman donna les mêmes conseils aux dirigeants chinois et au chilien Pinochet.
 
Un chemin apparaitra
 
Si les ennemis du genre humain qui ont mis la main sur l’Occident font alliance avec une partie du pouvoir Chinois, notre compte est bon. A l’aune de ces problèmes, on voit clairement la nullité du personnel européen. Ils sont déjà à plat ventre devant les deux pouvoirs : la tyrannie bigote, l’obéissance aux désirs des investisseurs chinois….Puisque c’est la situation de toute la commission de Bruxelles, nous savons que chez les gérants français cela est pire. Le voyage en Chine de François Hollande n’a été qu’une visite de fripier vendant les oripeaux d’un pays. 
 
Les “business school” abondent en Chine
 
Ou alors, cette alliance entre les producteurs-exploiteurs asiatiques et les pillards de la supra classe occidentale débouche, rapidement, sur des catastrophes de toutes sortes : pollution de l’eau avec des conflits pour s’en procurer ; pollution atmosphérique due à l’énergie nécessaire ; production alimentaire nocive et insuffisante, etc. L’écologie fait trébucher l’inhumanité en marche. C’est le charme des effets d’hétérotélie. Travaillons dans cette direction, car là où se manifestera une volonté apparaîtra un chemin.

mercredi, 08 mai 2013

L’Ue resta alla mercé delle agenzie di rating americane

L’Ue resta alla mercé delle agenzie di rating americane

Non riesce la strategia di rompere il monopolio delle agenzie private statunitensi. Dopo molti tentativi la società di consulenza Berger getta la spugna e i tecnocrati europei non favellano

Andrea Perrone

Fallisce il disegno europeo di rompere il monopolio delle agenzie di rating statunitensi. L’intenzione di lanciare un’agenzia indipendente tutta europea non ha avuto seguito per non aver suscitato l’interesse sperato nel mondo delle imprese. Dopo tre anni di sforzi, ha dichiarato il suo cofondatore si è rinunciato ai piani, come si evince da un’intervista pubblicata dal quotidiano tedesco Handelsblatt. “Non c’erano abbastanza investitori”, ha commentato nel corso di una serie di domande il quarantanovenne Markus Krall (nella foto), ex partner tedesco della società di consulenza Roland Berger e ipotetico presidente della naufragata – ancor prima di nascere – agenzia di rating europea.

La società Berger aveva previsto di contribuire a lanciare l’impresa attraverso una ricerca di ben 30 investitori per creare una fondazione con circa 300 milioni di euro di capitale iniziale. I progetti di Krall avevano immaginato un’agenzia in grado di competere alla pari con le statunitensi Standard&Poor’s, Moody’s e Fitch. Tutte e tre le agenzie statunitensi agiscono a scopo di lucro per i loro clienti e per questo Krall aveva tentato di sfidarle nel tentativo di creare un’agenzia di rating Ue sul modello di una Fondazione, affinché contrastasse attivamente e positivamente lo strapotere delle tre Parche della finanza apolide e cosmopolita al servizio dell’usura internazionale, che elevano o affossano Stati e istituti di credito a loro piacimento. Gli investitori, mutuatari, e le amministrazioni pubbliche utilizzano i rapporti di agenzia per contribuire a rendere decisioni di investimento e finanziarie. Tuttavia non va dimenticato il dominio a livello globale dell’impero a stelle e strisce non soltanto politico-militare, ma come conseguenza di questo anche economico fondato sulla potenza del biglietto verde. Le agenzie statunitensi infatti dominano infatti il 95 per cento del mercato globale che ancora usa come moneta di riferimento per il peso a livello globale il dollaro Usa. Tutte e tre hanno subito delle dure critiche in passato per il modo in cui non hanno saputo valutare gli inizi  della crisi finanziaria nel 2008. Standard&Poor’s e Moody’s ha avuto una serie di cause legali stabilirono con l’Abu Dhabi Commercial Bank e la King County di Washington, nei giorni scorsi accettando di pagare dei crediti con l’accusa di aver truffato degli investitori poco prima della crisi immobiliare statunitense, come ha riportato il quotidiano della City, Financial Times. Standard&Poor’s ha precisato che l’insediamento non è un’ammissione di colpa. Il dipartimento di Giustizia degli Stati Uniti è stato anche citato in giudizio da Standard&’sPoor’s per una somma pari a 5 miliardi di euro per aver preteso la concessione di rating migliori sui mutui subprime sulle grandi spese pur conoscendo i pericoli insiti nella loro natura finanziaria. E così i Signori del danaro, i banksters, quelli che speculano ignobilmente sulle miserie dei popoli riescono sempre a farla franca, grazie naturalmente al sostegno palese o velato dei politicanti di tutto il mondo, come dei tecnocrati di Bruxelles e Strasburgo.


Nel gennaio di quest’anno, infatti, l’Europarlamento ha votato nuove regole su quando e come le agenzie di rating possono votare i debiti dello Stato e allo stesso tempo valutare la salute finanziaria delle aziende private. Le nuove regole – affermano gli eurocrati – permetteranno agli investitori privati ​​di citare in giudizio le agenzie per eventuali negligenze, omissioni o attacchi indiscriminati. In più si è posto anche un limite alla partecipazione di un’agenzia di rating nelle aziende valutate, per evitare conflitti di interessi e quindi di valutazione. “Le nuove regole contribuiranno ad una maggiore concorrenza nel settore del rating dominato da pochi operatori di mercato”, ha osservato con poca verve il commissario Ue al Mercato interno Michel Barnier, in linea con il voto espresso dall’Assemblea di Strasburgo. Insomma gli eurocrati sono soddisfatti dell’insuccesso, che lascia lo stesso libertà di movimento in favore dell’usura internazionale alle agenzie di rating made in Usa. I tecnocrati preferiscono lo status quo per restare legati mani e piedi a Signori del danaro, quelli che speculano ignobilmente sui prestiti ad usura, così come all’impero a stelle e strisce, che laddove non arriva a conquistare nuovi mercati causando la povertà con l’oppressione del dollaro, giunge nei luoghi prefissati con i cacciabombardieri a portare la morte.


03 Maggio 2013 12:00:00 - http://rinascita.eu/index.php?action=news&id=20688

samedi, 20 avril 2013

Vers la fin de l’aliénation des peuples

Vers la fin de l’aliénation des peuples

Les BRICS peuvent-ils endiguer l’infâme?

par Auran Derien

 
Voltaire désigna la tyrannie bigote sous le nom d’infâme. Quand reviennent la superstition, la haine contre les humains qui pensent et la mentalité primitive pré-logique, alors le mot de Voltaire retrouve toute sa pertinence: la finance mondialiste globalitaire est aujourd’hui l’INFÂME.
 
Les BRICS et leur taux de croissance
 
La dernière réunion du BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) a été concomitante d’un conseil provenant de Russie, celui de retirer tous ses avoirs des banques afin que la partie encore un peu civilisée de l’humanité soit épargnée par les vols et autres crimes qu’est disposé à perpétrer la finance. Si l’horreur Chypriote peut être évoquée comme cause immédiate d’un tel conseil, il nous semble plutôt que la cause efficiente en est la volonté du groupe BRICS d’endiguer les excès de la finance mondialiste.

 
 
Les réunions des BRICS permettent d’observer une évolution dans l’attitude de pays qui furent victimes des financiers occidentaux. L’Inde a été pillée et sa culture salie par les britanniques. La Chine fut empoisonnée par les marchands de drogues. L’Afrique du Sud a dû privatiser ses richesses en faveur de quelques multinationales, lorsqu’elle paya les campagnes qui permirent l’arrivée au pouvoir de Mandela. Le Brésil a toujours été agressé par les forces globalitaires, responsables et coupables, en Amérique latine, des régimes militaires qui organisèrent l’éradication des élites patriotes et la vente des économies aux multinationales. Il semble qu’enfin la phase de servilité, d’aliénation et de collaboration sordide touche à sa fin.
 
Un projet de Banque entre BRICS
 
Un grand projet de création d’une banque de développement des BRICS, qui avait été présenté au sommet de New Delhi en 2012, devrait prendre corps sous peu pour permettre le financement et le développement de projets entre entrepreneurs de ces pays. Dans la situation de parasitisme organisé par le système occidental, dont sont victimes les populations, la création d’un tel établissement est souhaitable. Mais les difficultés traditionnelles de toute coopération justifient des avancées prudentes. Le premier pas, tout naturellement, sera le financement d’infrastructures tant dans les pays des BRICS qu’en dehors. Les banques de développement sont des institutions publiques dans lesquelle l’Etat donne sa garantie de financement. En apprenant à travailler ensemble, selon une logique de bien commun, le discours niais et bête que bêle le FMI, la banque mondiale et les européides de l’Union Européenne, finira par tourner toujours plus à vide.
 
Mais l’Empire du néant veille

Ce projet sera discuté lors de la prochaine rencontre, en septembre, car l’accord n’a pu se faire pour l’instant. Il faut y voir, en arrière-plan, la main fort visible des mafias fiancières. Le Brésil, l’Afrique du Sud et l’Inde ont été désignés comme des cibles prioritaires. Les USA cherchent à s’emparer des marchés de ces pays et à contrôler les technologies de pointe. Un système de financement qui s’éloigne peu à peu de la nécessité d’utiliser la monnaie dollar et qui favorise les échanges sans passer par les multinationales déclenche nécessairement leur opposition.
 
 
Un projet de Banque de développement ne serait qu’un début. Il conduirait tout naturellement à envisager d’autres coopérations, voire d’autres institutions financières. Surtout que s’approche le moment où l’hyperinflation occidentale frappera les pays. Il conviendrait alors de pouvoir effectuer des transferts entre banques centrales des BRICS voire, après l’éclatement de l’hyperinflation, créer une monnaie de compte commune pour leurs transactions.  Ces évolutions seront naturelles une fois que la Perestroïka occidentale, destinée à détruire les Etats actuels de l’occident, aura exercé ses effets chaotiques. D’ailleurs, au-delà des BRICS, d’autres pays en relation avec la Chine, tels l’Australie, envisagent de laisser la monnaie américaine.
 
La Syrie a aussi demandé de l’aide 

Comme les monarchies obscurantistes du golfe sont alliées à l’occident dans divers trafics et soutiens entre oligarchies, la Syrie a demandé au BRICS qu’ils interviennent pour la sauvegarde du peuple syrien. Il est probable que, à l’inverse des européides, les élites du BRICS n’aient pas oublié l’inhumanité qui caractérise la finance mondialiste dont ils eurent à souffrir en des époques différentes. La Syrie vient d’innover. Elle sera très rapidement suivie par d’autres pays excédés par cette finance qui contrôle aujourd’hui l’occident.
 
Un devoir de mémoire
 
L’occident est dominé par le binôme “bible and business”. Un ancien candidat à la présidence des États-Unis, Al Gore, en avait énoncé une fois de plus la définition du temps où il était vice-président. « La sécurité et la prospérité des États-Unis et du monde entier dépendent du succès de la communauté des nations à bâtir de fortes économies basées sur les règles de la loi » (déclaration faite en février 1999). Nous remarquons que cette déclaration évoque la loi et non des lois ou des règles. Seul le “légal” tombé du ciel, loi divine, révélée et autre calembredaine a de l’importance. Le légal est le bien et le vrai. 
 
Cet aplatissement du monde est typique des castes marchandes. Le marchand a vocation à être sans scrupules pour s’enrichir. Il lui faut donc une loi qui justifie toutes les infamies. Ses qualités diffèrent de celles qui inspirent les artistes, les savants, les religieux ou les élites politiques. Lorsqu’ils monopolisent le pouvoir, les marchands instaurent une tyrannie. Il appartient aux européens d’entretenir la mémoire de cette inhumanité afin d’en repousser les acteurs dans les bas-fonds dont ils n’auraient jamais dû sortir.