vendredi, 31 mai 2013
René Baert: la mesure du monde
par René BAERT (1903-1945)
Ex: http://renebaert.wordpress.com/
N’importe-t-il pas, avant toute chose, non pas d’agir, mais de comprendre le sens de l’acte que l’on va accomplir ? Savoir distinguer est à la fois le premier signe de l’intelligence et le premier échelon de l’éthique. Connaître l’origine, la cause, de la maladie, c’est à quoi s’applique le médecin. De son diagnostic ne dépend pas la guérison, mais la possibilité de choisir une médication appropriée à la nature du mal.
Notre intention n’est pas d’exiger que chacun respire l’air pur des sommets, ni que l’on se donne tout entier à la culture des vertus supérieures: notre tâche se borne à montrer d’où proviennent notre petitesse et notre indignité. n faudrait être le dernier des naïfs pour croire que la dénonciation d’une carence entraînat aussitôt son remplacement par quelque discipline exemplaire. Nous croyons savoir que nous nous adressons à des hommes qui, la plupart du temps, ne méritent même plus ce nom. Dès lors il serait absurde d’imaginer que nos diatribes influençassent, sur-le-champ, un peuple qui chaque jour davantage se distingue par sa bêtise et par son inconséquence. Pourtant, dès qu’un doute monte à l’esprit, dès que l’on s’étonne: on se trouve dans la bonne voie.
Toute grande pensée naquit un jour de la curiosité ; il en va de même de tout acte de noblesse. Si nos misérables compatriotes étaient curieux, si la recherche des causes les sollicitait quelque peu, nous nous sentirions brusquement envahis par une grande espérance. Ce que nous essayons de faire, depuis que nous vivons l’une des plus lamentables pages de notre histoire, n’est rien d’autre que de hâter l’éclosion de cette curiosité. Le mal dont souffrent nos contemporains énervés, leur désarroi devant les faits, leur refus d’adhérer à la marche inéluctable des choses, leur manière ridicule de nier l’évidence, leur arrogance et leur singulier pouvoir de déplacer les problèmes, tout cela trouve son point de départ dans un manque absolu du besoin de connaître.
Il importe de remarquer tout d’abord que nous n’avons la notion de ce qui est mal et terrible, que lorsque ce mal et ce terrible se rapportent à quelque grand fléau social. Une grande guerre, une épidémie, une révolution sanglante, ne manquent jamais de nous indigner profondément et de faire en sorte que nous nous lamentions sur l’abominable condition humaine. L’indignation touche rapidement à son comble. Comment, s’écrie-t-on, de telles aberrations et de tels égarements peuvent-ils encore se produire de nos jours ! On est effrayé par le massacre des innocents que chaque guerre ne manque pas d’entraîner. On crie haro sur ceux que l’on croit responsables de ces hécatombes. On se prend à juger les grands de la terre qui recourent à la violence. On voudrait tenir là, à portée de la main, les quelques hommes qui menèrent les peuples à leur ruine ; mais chose étrange, alors qu’on aperçoit lumineusement les effets, on se perd en conjectures sur la cause ; or, la cause est en nous-même. Car n’est-il pas vrai, que chaque jour, dans le secret de notre âme, nous tolérons les pires désordres, n’est-il pas vrai que la journée d’un homme compte mille petites lâchetés, mille manquements à la dignité ? Ce n’est pas lorsque la tempête éclate qu’il faut pleurer sur la pauvreté de nos moyens de défense, ce n’est pas lorsque le ver est dans le fruit qu’il faut condamner les intentions de la nature ! Regardons tout d’abord en nous-même… et avouons humblement que notre indignation devant les . désastres et les injustices sociales naît d’un esprit d’intolérance que nous n’aurions garde d’appliquer à notre propre cas. Encore une fois, nos paroles n’ont qu’un très vague rapport avec nos actes.
Si, par ailleurs, nous voulons parler de révolution, si notre intention est de collaborer à l’édification d’un monde nouveau, n’oublions pas que ce monde sera exactement ce qu’auront été les hommes. L’homme toujours demeure la véritable mesure du monde. Si la révolution rate, c’est parce qu’elle aura été faite par des ratés. Il convient de mettre de l’ordre dans sa propre maison avant de vouloir changer le cours des choses. Tant que dans nos cœurs la faiblesse l’emportera sur la force et tant que les peuples constitueront des masses abouliques. nous ne devons pas espérer le moindre changement social.
L’esprit révolutionnaire ne vas pas sans une forte discipline intérieure. Il est inadmissible que l’on parle durement aux autres, si l’on n’est pas intransigeant pour soi-même. La révolution n’a que faire de ceux qui se contentent de voir la poutre dans l’œil du voisin. La cause de l’Europe réclame des soldats, mais des soldats qui soient purs. Sans doute, la pureté dont nous voulons parler n’a-t-elle rien de commun avec la sainteté ; nous savons bien que la créature est imparfaite et que l’homme est un composé de bien et de mal. Pourtant, il est indispensable que nous nous accusions avant d’accuser autrui ; et surtout que nous sachions que nos trahisons les plus nombreuses prennent place dans le cadre de notre vie quotidienne. Avant de condamner le siècle, sachons reconnaître ceux qui le firent tel qu’il nous apparaît. Rappelons-nous encore que les premières batailles doivent se livrer dans notre âme. Tant que la révolution ne sera pas dans nos cœurs, il ne sera pas possible de la hisser sur le plan social. La révolution se fait avant tout dans la conscience et c’est la conscience qui doit être réformée si l’on souhaite réformer le monde. Soyons des apôtres et des soldats, soyons durs et impitoyables, mais ne le soyons pas si notre conscience n’est pas en paix ! Il est vain de vouloir opposer un sang impur à un autre sang impur. Travaillons à nous rendre meilleurs. Ce contrôle de soi, cette discipline, cette foi que nous exigeons du monde, demandons-nous tout d’abord s’ils prolongent leur écho dans notre cœur. N’incitons pas autrui à s’engager dans une voie où nous n’avons jamais osé nous aventurer nous-même. Ici, comme ailleurs, il n’y a que le premier pas qui coûte, mais de ce premier pas dépend la vie ou la mort de notre cause ; or, notre cause ne peut vivre que si rien n’entache la pureté de nos intentions.
Baert, R. (1944). A la recherche d’une ethique. Bruxelles: La roue solaire, 9-14
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jeudi, 30 mai 2013
In memoriam Dominique Venner (1935-2013)
JURE VUJIC
In memoriam Dominique Venner (1935-2013)
Testament modernog samuraja
Dominique Venner francuski povjesničar je 21. svibnja počinio samoubojstvo ispred oltara u Pariškoj katedrali Notre Dame. Za one koji su ga poznavali i imali čast s njime surađivati, takva gesta simbolizira ne samo ljudski očaj već i eminentnu političku gestu i poruku. Objavljujem prijevod njegovog pisma-oporuke koji pojašnjava uzroke njegove nagle smrti.
« Duhovno i tjelesno sam zdrav, upotpunjen ljubavlju svoje supruge i djece. Volim život i ništa ne očekujem od nadnaravnog svijeta, jedino opstanak i obnovu moje vrste i duha. Međutim, u zalazu mog života, i ispred golemih ugroza za moju francusku i europsku domovinu, osjećam dužnost da djelujem dok imam još snage. Vjerujem da se trebam žrtvovati kako bi prekinuo s letargijom koja nas muči. Darujem ono što mi preostaje od života u znak protesta i re-fundacije. Odabirem visoko simbolično mjesto, parišku katedralu Notre-Dame koju poštivam i štujem, koju je izgradio genij mojih predaka na mjestu drevnih kultova koji me podsjećaju na moje pramemorijalno podrijetlo.
Kada većina ljudi pristaje biti robovi vlastitog života, moja gesta utjelovljuje jednu etiku volje. Dajem si smrt kako bi razbudio uspavane svijesti. Pobunjujem se protiv fatalnosti. Pobunjujem se protiv otrova duše i individualnih želja koje narušavaju identitarna usidrenja kao što su obitelj, kao intimni stup tisućljetne civilizacije. Kada branim identitet svih naroda, također se bunim protiv zločina koji nastoji zamijeniti naša pučanstva.
Dominantni diskurs nije se u stanju osloboditi svoje toksične dvosmislenosti. Europljanima pripada da snose posljedice. S obzirom da više nemamo identitarnu vjeru na koju se možemo osloniti, dijelimo još od Homera zasebno sjećanje, kao ostavštinu svih vrednota na kojem možemo restaurirati naš budući preporod kao prekid s metafizikom neograničenog, pogubni izvor svih modernih stranputica.
Molim oprost od svih onih koji će patiti zbog moje smrti, a prvenstveno moju suprugu i djecu, kao i nećake i moje vjerne prijatelje. Jednom kad prebole šok patnje, ne sumnjam da će razumjeti smisao moje geste i transcendirati sa ponosom svoju tugu. Želim da se što bolje razumiju kako bih što više trajali. Pronaći ćete u mojim spisima prefiguriranje i pojašnjenje moje geste. «
Dominique Venner rođen je 1935, bio je esejist i povjesničar. Utemeljitelj časopisa „Nouvelle Revue d’histoire“. Objavio je niza knjiga :Le Cœur rebelle, le Dictionnaire amoureux de la ChasseLe Siècle de 1914, Histoire et tradition des Européens). Le Choc de l’Histoire (Editions Via Romana, 2011) L’Imprévu dans l’Histoire (Ed. Pierre-Guillaume de Roux, 2012). Simptomatična činjenica za njegovo samoubojstvo je da bi uskoro trebao izići iz njegov novi esej « Un Samouraï d’Occident. Le bréviaire des insoumis » Samuraj Zapada. Brevijar nepokorenih. » .
Dominique Venner nije bio «ekstremni desničar» kako ga lažno i površno etiketiraju « mainstream » mediji. Iznad umjetne diobe ljevice/desnice, on je u pravom smislu riječi bio aristokrat (aristoi, «među najboljim»), zagovornik «Velike Europe», duhovne, kulturološke i povijesne Europe nacija, naroda, regija, a ne Europe trgovaca, burzovnih mešetara i korporacija. Posvetio je cijeli život obrani indo-europske civilizacije i francuske nacije, a ostat će zapamćen kao simbol ljudske dosljednosti i hrabrosti. Odlazi svojom lucidnom voljom, u maniri drevnih Germana i Rimljana, ponosnih samuraja postmodernog nihilističkog doba, poput japanskog književnika Yukio Mishime, francuskih književnika Drieu la Rochelle i Robert Brasillacha. Samoubojstvo kao posljednji argument otpora. Ultima ratio regis.
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APOTEOSIS DE DOMINIQUE VENNER EN NOTRE DAME
APOTEOSIS DE DOMINIQUE VENNER EN NOTRE DAME
Ex: http://enricravello.blogspot.com/
Del antiguo griego apo (intensidad, presencia) y theos (Dios, de ahí el nombre de Zeus) la apoteosis, es decir el elevarse hasta el nivel de los dioses, era para los antiguos helenos un privilegio sólo al alcance de muy pocos héroes.
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Une époque sans victoire, sans issue, sans rien...
Une époque sans victoire, sans issue, sans rien...
Ex: http://www.dedefensa.org/
23 mai 2013 – Nous parlions il y a quelques jours (voir le 11 mai 2013) d’une “phase dépressive” pour les USA vis-à-vis de la Syrie. Nous aurions pu écrire : “pour le bloc BAO”, ou, d’une façon plus générale, pour toutes les agitations, manigances et manœuvres qui, depuis l’été 2011, caractérisent la situation de la crise syrienne. Nous aurions pu faire encore plus tranchant et simplement constater une “phase dépressive” générale, qui n’épargne personne. Même les Russes, qui s’annoncent comme les grands vainqueurs de cette épreuve syrienne parce qu’ils tiennent sur des principes, même s’ils sortaient renforcés dans la situation générale du Moyen-Orient, comme nous commencions à le constater le 14 mai 2013, même les Russes ne “gagnent” rien parce qu’il s’agit d’une “époque sans victoire”, parce qu’il s’agit d’une “époque sans issue”.
Nous traversons une période singulière, faite à la fois des restes des fureurs et des emportements des narrative du bloc BAO, et des amertumes de plus en plus prégnantes du constat des illusions perdues et des ambitions déçues, – d’ailleurs comme si les unes et les autres, “illusions” et “ambitions”, se confondaient, les ambitions n’étant rien d’autre que de piètres illusions. Les marques de l’amertume qui nous envahit sont celles des catastrophes en cours, qui composent la crise d’effondrement du Système, et qui se signalent partout, – en Syrie certes, mais ailleurs aussi bien, dans une chaîne ininterrompue, dans un contexte impeccablement plaqué sur une infrastructure crisique qui nous tient dans ses griffes.
Nous ne disons pas qu’il s’agit d’un Moment définitif et donc décisif ; il l’est peut-être, il ne l’est peut-être pas... Nous disons que, dans tous les cas et s’il est effectif comme nous le croyons, c’est un moment significatif, qu’il soit ou non définitif et donc décisif. Nous évoquions ce Moment dans notre texte du 22 mai 2013, pourtant sur un tout autre sujet : «Ce sentiment d’un changement de “tonalité” de la crise ne concerne pas seulement le corps de ce message, il implique un jugement général de notre part et il devrait faire l’objet de l’un ou l’autre texte à cet égard, sur ce site. Il s’agit de l’observation que notre “crise d’effondrement“, crise générale par définition, est effectivement entrée dans une phase nouvelle, non pas spécifiquement d’elle-même mais dans la perception que nous en avons. (Le rapport entre les deux, rythme de la crise et notre perception, n’est pas direct ni proportionné parce que la dynamique de la première est constante mais dissimulée [les termites] et que la seconde n’y réagit que par saccades.) Nous pensons que les psychologies, la psychologie collective touchée par les effets des événements et les impressions des grands courants métahistoriques, et par conséquent les psychologies individuelles qui en recueillent elles-mêmes les effets secondaires par le biais du collectif, ont incubé un fait nouveau. Il s’agit bien entendu d’un “fait” méritant des guillemets par rapport au sens commun subverti par le Système et qui lui est hostile, puisque fait non exprimé consciemment, et encore moins répandu dans le système de la communication où les forces du Système ont leurs positions et leurs diktat. Il s’agit, à notre estime qui est de l’ordre de l’intuitif, du fait de l’inéluctabilité de cette crise...»
C’est un de ces moments où nous pouvons mesurer, toucher du doigt, physiquement sentir ce que cette crise a d’irrémédiable, et donc cet événement eschatologique dont nul vainqueur ne peut émerger, dont nulle issue ne peut être conçue par la raison seule et d’ailleurs discréditée par sa subversion par rapport au Système, et cet événement nous confrontant à notre destin. C’est, littéralement, un “Moment eschatologique”, où l’idée terrible s’inscrit brutalement dans nos psychologies qu’il nous faut attendre ce que le sort, ou la Providence, va décider, – et certains esprits acceptant cette confidence de perception de leurs psychologies, les autres (la plupart) la refusant ou la réfutant.
Nous relevons plusieurs signes physiques et politiques, matériels et conceptuels, qui marquent selon notre perception cette amertume. Tout se passe comme si les événements eux-mêmes avaient décidé de s’orienter d’eux-mêmes de telle façon qu’il ne puisse y avoir, dans notre psychologie et dans notre âme, rien d’autre que ce goût acre de l’amertume. Nous sommes littéralement eschatologisés, dans tous les sens, mais également et précisément pour accorder croyances et non-croyances, dans le sens le plus concret du cours des événements terrestres. C’est comme nous l’écrivions le 14 mai 2008 déjà : «[N]ous voulons dire, si nous nous référons à cette définition pratique et concrète, et excellente en tous points, que donne Roger Garaudy de l’eschatologie (à côté de la définition théorique : “Etude des fin dernières de l’homme et du monde”): “L’eschatologie ne consiste pas à dire: voilà où l’on va aboutir, mais à dire: demain peut être différent, c’est-à-dire: tout ne peut pas être réduit à ce qui existe aujourd’hui.”» Veut-on une revue de détail ?
• Aux USA, à Washington, on connaît l’état général du système. On voit également que des formes plus agressives de crises se développent (Scandalgate, dont l’affaire FBI/AP, le 16 mai 2013), qui fragilisent considérablement la position du président. Alors que son second mandat vient à peine de commencer, l’autorité et l’influence d’Obama sont en train de s’affaiblir, d’une façon désormais classique et du type-entropique mais pas plus lente pour autant, à partir d’une situation crisique du pouvoir à Washington déjà elle-même catastrophique. L’hypothèse qu’on nommerait Watergate-II, ou “watergatisation” de Scandalgate, n’est plus de la vaine spéculation mais une possibilité bien réelle. Bien entendu, tout cela se plaque sur la situation générale catastrophique des USA qu’on connaît, qui affecte tous les domaines constituant la structure désormais en voie de dissolution de cette puissance. Depuis au moins 2008, les tensions centrifuges à caractère déstructurant et dissolvant, rejoignant les problèmes de l’origine de ce projet américaniste qui furent brutalement écartés, d’abord par les législateurs de la Constitution puis par les canons du général Grant, se manifestent par toutes les issues possibles, de la haine du “centre” washingtonien à la question de la vente libre des armes. Les crises conjoncturelles de l’ensemble américaniste se concentrent dans cette structure crisique structurelle de la désunion.
• En Europe, le phénomène crisique est également général et touche tous les domaines possibles, dans toutes les dimensions possibles, y compris au niveau des composants du concept ; de la question de la souveraineté et de l’identité des nations devenant des références inexistantes engendrant des angoisses et des souffrances intolérables pour les peuples ; de la question de la paralysie et de l’impuissance bureaucratique grandissante des institutions à prétention supranationale et qui semblent se contracter en des non-actes significatifs à mesure que cette affirmation est de plus en plus proclamée. Les crises conjoncturelles (l’euro et la finance, les crises sociales et sociétales, la crise diplomatique illustré par la Syrie et par l’Iran, les crises culturelles et identitaires) se développent et s’additionnent sans qu’aucune solution pour aucune d’entre elles ne puisse être envisagée, et se connectent directement sur des processus d’effondrement structurels en une infrastructure crisique proprement européenne qui semble bien être la seule création solide du processus européen. L’Europe n’a jamais été aussi présente et étouffante et aussi profondément plongée dans l’impuissance et dans le rejet des populations. C’est toute une civilisation et toute une psychologie qui se trouvent plongées dans l’abîme de la dépression. La seule solution en vue pour les dirigeants-Système, qui font partie d’une sorte de “génération-zombie” d’une manufacture incontestablement européenne, est nécessairement “toujours plus d’Europe”. (Pour une référence raisonnable mais sans aucune illusion sur cette crise, voir William Pfaff sur son site, le 16 mai 2013 : «It is not simply the Eurozone, composed of the 17 European states that have the euro as currency, that is threatened... [...] Now it is the European Union itself that is in danger...» On peut également consulter l’article présenté en Ouverture libre, ce 21 mai 2013.)
• Autour de ce bloc BAO, concepteur, moteur et ordonnateur de la civilisation, qui semble se contracter en une infrastructure crisique, the Rest Of the World (ROW nouvelle formule, d’après-2008) cherche à comprendre une situation où on lui enjoint de suivre une conception générale maximaliste dont le résultat évident et direct est d’accélérer exponentiellement la course à l’effondrement. Lorsqu’il songe à une résistance, sinon à une révolte, ROW se réfère à des structures en formation telles que BRICS ou OCS, mais sans réelle conviction. Dans cet ensemble, la Russie domine conceptuellement par la puissance qualitative de sa démarche ; d’une certaine façon, on pourrait penser que la Russie sait bien qu’elle a raison mais qu’elle sait également que c’est trop tard. Elle développe la diplomatie la plus intelligente du moment, avec un esprit ferme pour concevoir les fondements et les orientations de son exécution (Poutine) et le meilleur ministre des affaires étrangères de son temps, de très loin, pour exécuter cette conception en la comprenant parfaitement (Lavrov), – l’inspirateur de tout cela étant simplement la présence irréfragable du fait national russe qui semble avoir gardé quelque transcendance. Mais ce déploiement opérationnel, qui vaut pour une situation classique où la raison non subvertie aurait encore sa place dans les relations internationales, n’a aucune chance de modifier fondamentalement l’irrésistible courant d’entropisation.
• La Syrie est, pour l’instant, le point de fusion central de ce que nous nommons crise haute, et c’est là que se mesure la différence abyssale entre la diplomatie russe et la pseudo-diplomatie du bloc BAO. Effectivement, les Russes dominent la scène mais, comme nous le constations plus haut et selon notre estimation, «Tout le brio des Russes ne peut rien sur l’essentiel, parce que personne ne peut rien sur l’essentiel.» La Syrie est effectivement un tourbillon de désordre et de chocs divers, où chacun croit disposer d’un plan sûr pour “la victoire” et agit dans un sens qui ne peut qu’accélérer le tourbillon. La méconnaissance des enjeux réels, chez la plupart des acteurs, est littéralement stupéfiante. Une conversation à bâtons rompus d’une heure avec un ministre des affaires étrangères d'un pays du bloc BAO, comme cela fut le cas très récemment, laisse confondu sur le degré d’ignorance de cette sorte de personnage («On a l’impression de parler à un idiot», dit, presque attendri, un participant actif de cette rencontre). En Syrie, à cause des circonstances, des combinaisons de puissance du système de la communication, des pressions diverses (dont celles, terrifiantes, du parti des salonnards), se trouve rassemblée la scène la plus expressive du naufrage intellectuel des directions politiques et des élites-Système de ce que nous nommons la “contre-civilisation”.
• Autour du monde globalisé mais avec des effets jusqu’au cœur de lui-même, les crises eschatologiques se poursuivent, que ce soit celle du simple désordre de nos politiques rendues nécessairement absurdes par des influences insaisissables (Libye), que ce soit celle des effets effrayants du Système sur la situation du monde (la crise climatique et tout ce qui va avec), voire à l’extrême la crise permanente qu’est le machinisme, transmuté décisivement en technologisme catastrophique, et cette crise proche d’arriver au point de rupture. Cela signifie que si, demain, par une sorte de miracle qu’on arriverait malgré tout à mettre à l’actif du Système, tous les affrontements, les mésententes, les coups fourrés cessaient, remplacés par une concorde universelle, nous nous trouverions tout de même devant un empilement de crises eschatologiques sans issue ni solutions.
• Nous terminons in extremis (le Guardian de ce 23 mai 2013) par une observation qui semblera plus anecdotique, moins universelle disons, voire people si l’on a l’esprit mal tourné, l’esprit “peuple-blingbling” de cette époque crépusculaire. Elle nous paraît significative, et pas moins fondamentale que les autres. Il s’agit des remarque d’un acteur-réalisateur, qui fit et continue à faire profession d’avoir une pensée progressiste, Robert Redford, qui est à Cannes pour le film All Is Lost, réalisé par le jeune JC Chandor que Redford a soutenu au travers de son institution (le festival de Sundance du film indépendant) pour la réalisation de Margin Call, – le film le plus profond réalisé sur la crise financière de l’automne 2008. Redford observe à propos de All Is Lost qui est une allégorie de la crise que nous traversons : «Certain things have got lost. Our belief system had holes punched in it by scandals that occurred, whether it was Watergate, the quiz show scandal, or Iran-Contra; it's still going on…Beneath all the propaganda is a big grey area, another America that doesn't get any attention; I decided to make that the subject of my films. [...] We are in a dire situation; the planet is speaking with a very loud voice. In the US we call it Manifest Destiny, where we keep pushing and developing, never mind what you destroy in your wake, whether its Native American culture or the natural environment. [...] I've also seen the relentless pace of technological increase. It's getting faster and faster; and it fascinates me to ask: how long will it go on before it burns out.» Nous observerons que, contrairement à ce qu’il laisse entendre, Redford a évolué : critique de son époque qu’il tendait à réduire à ce qu’il jugeait être la vertu perdue des USA, mais la jugeant réformable comme la vertu des USA elle-même (The President’s Men, sur le Watergate, en 1976), il tend plutôt à parler aujourd’hui du “système” et de “la planète” ; et l’on voit bien qu’il ne croit plus à sa réforme possible (du Système), et qu’il juge qu’il se développe de lui-même jusqu’à son effondrement venant comme un fait inéluctable de lui-même («... and it fascinates me to ask: how long will it go on before it burns out»). Sa psychologie a effectivement incubé, de manière inconsciente, l’inexorabilité de l’effondrement.
Un Moment eschatologique
L’image du Titanic pour figurer le Système est juste, mais l’on comprend évidemment qu'elle ne l’est que partiellement. Lorsque le Titanic sombra, on savait bien que tout continuait après lui, que la catastrophe, outre la cruauté des vies emportées, n’apporterait qu’une occasion de plus pour tel ou tel débat, notamment sur l’application et le bon usage du technologisme naval, et que le reste continuerait. Le Système-Titanic, lui, n’a pas d’après... Le Système-Titanic sombre et, parce qu’il est hermétique et qu’il a happé en lui la globalité du monde, il est assuré que nous ne pouvons savoir ce qui va suivre, et encore moins imaginer puisque l’autorisation de le tenter ne nous est pas parvenue. La cause directe et parfaitement compréhensible de notre ignorance est que ce qui va suivre n’a aucun rapport avec le Système, que l’affirmation et la construction de cette “succession” qui ignore complètement son légataire ne dépendent pas de nous, du sapiens et de ses prodiges, et de sa prodigieuse hubris, – parce que «tout ne peut [...] être réduit à ce qui existe aujourd’hui»... Le Système-Titanic sombre aux accents d’une sorte de “marche eschatologique” exécutée par l’orchestre bien connu, dont on attend qu’il reste à son poste jusqu’au bout.
Observant tout cela et déroulant ces remarques diverses sans fièvre particulière, nous n’avons nullement l’impression, ni d’être excessivement pessimiste, ni d’être disons “catastrophistes”. Nous avons plutôt le sentiment de rendre compte d’une situation qui est singulière, sinon peu ordinaire, essentiellement par l’identification instantanée que nous en avons, et par l’effet de l’accélération de l’Histoire et de la contraction du temps. (Il suffit à cet égard de se rappeler où nous en étions il y a dix ans, quand la plupart des commentateurs et observateurs pensaient précisément dans le sens de cette remarque désormais immortelle d’un “officiel” de l’administration Bush à l’été 2002 : «We're an empire now, and when we act, we create our own reality. And while you're studying that reality — judiciously, as you will – we'll act again, creating other new realities...» [voir notre Glosssaire.dde sur le “virtualisme”, le 27 octobre 2012].) Il faut admettre que la puissance d’un tel basculement de la perception répond à une dynamique des événements si extraordinaire qu’on doit parler de métahistoire, et bouleverse les psychologies à ce point du désordre qui permet d’assumer et de favoriser, la plupart du temps sans la moindre conscience de cela, des bouleversements aussi inouïs que ceux qu’on connaît. Nous voulons dire par là que la transformation et l’affolement des psychologies depuis dix ans font, singulièrement des directions politiques et des élites qui les soutiennent, de ces acteurs-Système qui sont plutôt et de plus en plus des figurants-Système, des outils très efficaces pour aller dans le sens de la dynamique de l’autodestruction et favoriser involontairement, et en croyant éventuellement l’inverse, la crise d’effondrement du Système.
Les commentaires généraux de ces événements nous paraissent manquer d’ampleur et d’audace à cet égard, simplement en n'acceptant pas de considérer des hypothèses que la raison rejette en général, et à cause de cela. (L’état de la raison étant aujourd’hui celui de la complète subversion d’elle-même, cet argument serait plutôt le contraire de ce qu’il veut prouver.) Ces commentaires se font principalement entre les partisans du Système (les figurants-Système, également négationnistes de la crise), qui répètent simplement, en guise d’incantation plus que de démonstration, que tout continue et que le Système est plus cohérent et nécessaire que jamais. Leurs adversaires, qu’on devrait qualifier d’antiSystème mais qui le sont de moins en moins d’un point de vue fondamental, continuent à développer une logique d’affrontement, à parler en termes de victoire-défaite, arguant que des forces se constituent avec de plus en plus de puissance pour inquiéter le Système tel qu’il est. Pour ceux-là et pour prendre le cas événementiel le plus intéressant, l’effondrement des USA dans le sens de l’effondrement du pouvoir central du Système constituerait une victoire décisive à partir de laquelle on pourrait entreprendre une reconstruction et une réforme radicale du Système. Dans cet exemple, nous pouvons dire que nous sommes décisivement d’un avis différent, si l’on veut effectivement développer une dynamique antiSystème. L’effondrement des USA per se ne nous intéresse pas dans le sens qu’il ne peut être considéré à lui seul comme un événement décisif, et que le considérer de la sorte lui enlève tout caractère de décision. (Nous n’avons certainement pas toujours pensé dans ce sens, mais la pensée évolue nécessairement au rythme de l’accélération de l’Histoire. Une évolution de la pensée, même et surtout radicale, est une chose inévitable et nécessaire. On notera que nous avançons cette idée nouvelle du caractère insuffisant du seul effondrement des USA, ou les prémisses de cette idée nouvelle, depuis au moins 2009, – une fois incubé l’événement pour nous rupturiel, et nécessitant un changement d’appréciation, de la crise de l’automne 2008. [C’est à partir de cette époque que nous avons observé la constitution du bloc BAO.] On peut apprécier les prémisses de ce changement conceptuel dans des textes du 3 janvier 2009 et du 14 octobre 2009, au moins.)
Pour poursuivre l’exemple, nous considérons que l’effondrement de l’Amérique ne nous apparaîtrait comme un événement décisif que dans la mesure où il entraînerait l’effondrement du Système. C’est la condition sine qua non pour faire passer l’événement de la catégorie des événements très importants à l’intérieur du Système, à la catégorie de l’événement antiSystème fondamental. (Cela dit, ajoutons cette précision essentielle que, pour nous, il est acquis, disons à 99,95%, que l’effondrement des USA amènerait nécessairement l’effondrement du Système. Mais il est essentiel de comprendre cette nécessité relationnelle entre les deux, pour mieux distinguer les caractères de l’événement, ses orientations, ses effets, etc.)
C’est-à-dire que, pour nous, le point de non-retour est non seulement atteint mais très largement dépassé. Subrepticement et nécessairement pour leur pauvre cause, les partisans du Système, mentionnés plus haut mais brièvement à cause de l’extrême pauvreté de leur pensée, sont passés de l’argument TINA (There Is No Alternative), qui impliquait une sorte de “volontarisme”, de la nécessité optimiste de se battre, d’innover, d’aménager, pour s’adapter à ce Système auquel, selon eux, il n’y avait pas d’alternative ; à l’argument qu’on résumerait sous le sigle TINNOA (There Is No Necessity Of Alternative), qui implique que tout est parfait telles que les choses sont, que le Système représente une sorte de perfection intangible, effectivement la Nécessité universelle réalisée. De ce point de vue, nous sommes au niveau d’une religion (cet exotérisme qui estime le débat clos) demandant à ses adeptes un complet aveuglement ; cette logique religieuse implique que rien d’autre d’humainement et même de “spirituellement” acceptable ne peut se concevoir, et qu’à l’extérieur de cela on ne trouve que la barbarie conceptuelle. Par cette position, et compte tenu de ce qu’est le Système, les partisans-Système représentent eux-mêmes un nihilisme totalement clos et même verrouillé, une sorte de barbarie eux-mêmes, justement selon leur démarche d’inversion, ici d’accuser les autres d’être ce qu’ils sont eux-mêmes en vérité. Il s’agit de la “barbarie postmoderniste” combinant le «barbare intérieur» selon Jean-François Mattéi, et le barbare augmenté de la barbarie faite de technologisme prédateur et de narrative dissimulatrice qui permet de faire avancer l’équation dd&e (déstructuration-dissolution-entropisation) que le Système lui-même exsude et d’accélérer la dissolution de la société produisant elle-même des caractères barbares supplémentaires.
Plus que jamais, le produit du Système, l’équation dd&e, est implicitement présenté selon la formule-narrative du “chaos créateur”. Mais ce chaos, qui est effectif, est désormais exclusivement producteur de nihilisme (sa forme opérationnelle est l’entropisation), c’est-à-dire un chaos producteur d’un chaos de lui-même. Il est indiscutable qu’un monde “organisé” selon de tels déséquilibres insensés en constante accélération, et par conséquent en constante aggravation de leur instructure de déséquilibre et de non-sens, et par conséquent ce monde de plus en plus condamné à se trouver enfermé dans ces déséquilibres, il est indiscutable qu’un tel monde ne peut survivre en aucune façon. Il s’oppose hermétiquement à toutes les lois concevables, qu’elles soient physiques ou métaphysiques. C’est la situation où nous nous trouvons présentement, qui nous apparaît effectivement, dans sa phase autodestructrice, comme la formule d’accélération ultime de la crise d’effondrement du Système. Pour autant, nous ne savons et ne pouvons savoir quand et comment s’accomplira cet événement dans sa finalité.
Ce n’est pas être particulièrement pessimiste qu’affirmer cela, mais simplement faire un constat réaliste d’une situation qui s’exprime de toutes les façons possibles. La question inévitable que l’“esprit de l’époque” nous conduit quasiment comme une obligation à poser est, non seulement d’envisager, mais de connaître ce qui va suivre : cette connaissance de l’avenir, même catastrophique et post-catastrophique, c’est-à-dire même eschatologique, est impossible, ce qui contrevient au diktat nécessaire de la modernité qui est la maîtrise, et donc la connaissance de l’avenir. La crise étant évidemment eschatologique, aucune réponse ne peut être apportée ; cela explique notre profond désarroi par rapport à l’“esprit de l’époque” et la réaction la plus marquée répondant au diktat de la modernité est de nier la vérité de cette crise, y compris ce que certains considèrent comme sa nécessité au sens métaphysique. (Cas du négationnisme de la crise.) Cet état d’esprit, qui fut considéré comme une immense victoire humaine, apparaît aujourd’hui comme un terrible handicap, par exemple par rapport aux sociétés anciennes qui ignoraient évidemment, et rejetaient in fine par leurs conceptions, le diktat moderniste de la maîtrise et de la connaissance de l’avenir. Dans son discours de réception à l’Académie d’Athènes, en 1997, consacré à La pensée grecque (dans L’homme qui riait avec les dieux, Albin Michel, 2013), Lucien Jerphagnon exposait ceci qui était à la gloire de cette “pensée grecque”: «Ainsi, cette dialectique de l’un et du multiple, de l’illimité et de la limite, de l’absolu et du relatif, de l’universel et du particulier, du parfait et de l’imparfait, exorcisait d’avance le mauvais démon de l’hybrys, de la démesure qui aimerait s’affranchir des limites du possible, et qui voudrait faire porter au discours humain une charge d’absolu qu’il ne peut contenir.»
Ces conceptions rejoignent en les nourrissant de l’antique sagesse notre propre approche de l’inconnaissance. Cela était exprimée d’une façon “opérationnelle” qui pourrait être proposée comme l’attitude à observer face au tumulte du temps présent et à l’énigme de l’après cette crise d’effondrement du Système, dans la Chronique du 19 courant... du 19 avril 2013 : «L’inconnaissance se dégage d’elle-même avec l’âge si l’élan de la pensée y pousse, et l’âge conduit effectivement à trouver, non comme une porte de sortie mais comme une fenêtre ouverte sur un nouvel élan, une activité qui avait pris comme mot d’ordre “le savoir” satisfait de lui-même et qui ne s’en satisfait plus. Il y a une certaine ironie, qui est, comme on dit aux jeunes gens irrespectueux, le “privilège de l’âge”, à pouvoir dire : “oui, oui, ‘je sais’, mais je sais aussi qu’il est préférable de ne pas s’attacher à ce savoir et de lui préférer ‘je sais que je ne sais pas’” ; et, disant cela (“je sais que je ne sais pas”), poursuivre en constatant que “ce savoir-là vaut bien plus que le savoir tout court”...» Nous sommes dans un temps qui nous impose nécessairement le constat que nous ne pouvons pas savoir (que nous ne savons pas), et l’occasion est belle, et liquidant ainsi définitivement le diktat (l’hybrys) de la modernité, d’en faire une gloire de l’esprit sous la forme de l’inconnaissance («la métaphysique et la spiritualité les plus hautes qu’on puisse imaginer», selon le texte référencé).
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Gustave de Beaumont et la critique radicale de la démocratie américaine
Gustave de Beaumont et la critique radicale de la démocratie américaine
Comme je le dis parfois, nous vivons dans un présent permanent depuis environ deux siècles. Les années 1830 sont déjà notre société et nous ne les quitterons qu’à la prochaine comète qui s’écrasera sur notre vieille planète. Ce n’est pas un hasard. Le progrès et la blafarde modernité ont paralysé l’histoire de l’humanité. Pronostiquée par Hegel en 1806, la Fin de l’Histoire n’en finit pas de prendre son congé.
Gustave de Beaumont est le célèbre accompagnateur de Tocqueville en Amérique. Ils allaient y étudier les établissements pénitentiaires (c’est prémonitoire, il y a trois millions de détenus là-bas, et les matons forment le premier syndicat dans une dizaine d’Etats). Je n’avais jamais pensé à le lire mais c’est Karl Marx qui le cite ! Ma curiosité éveillée, je trouve sur un site québécois son très beau livre (avec une partie romanesque un peu niaise et trop copiée sur Manon Lescaut) sur Marie et l’esclavage, où Gustave de Beaumont révèle une lucidité française bien digne de Tocqueville et un style d’exception digne de Chateaubriand, du Lamartine de Graziella (texte préféré de Joyce en français) et plus généralement de l’aristocrate qu’il était – après ce sera fini avec Balzac ; après la prose sentira la roture, je le dis comme je le pense.
Les jugements de Beaumont sont encore plus durs que ceux de Tocqueville. Il ne digère pas l’hypocrisie éhontée de l’esclavage dans une nation libre et donneuse de leçons, et aussi beaucoup d’autres choses. J’ai picoré ces réflexions çà et là dans son si beau texte :
Les Américains des États-Unis sont peut-être la seule de toutes les nations qui n’a point eu d’enfance mystérieuse.
Là, on est bien d’accord. Le prosaïsme américain a écœuré toutes les grandes âmes yankees, Poe (Colloque entre Monos et Una), Melville (Pierre), Hawthorne (lisez l’admirable Petite fille de neige) entre autres. Encore qu’en analysant mieux le caractère Illuminati du dollar qui continue de fasciner l’humanité alors que l’Amérique est en faillite…
Il est clair en tout cas que pour Beaumont l’argent fait le bonheur des Américains, qui réifient tout, comme disent aussi les marxistes : la nature c’est de l’environnement, et l’environnement ça sert d’abord à faire de l’argent.
Absorbé par des calculs, l’habitant des campagnes, aux États-Unis, ne perd point de temps en plaisirs ; les champs ne disent rien à son cœur ; le soleil qui féconde ses coteaux n’échauffe point son âme. Il prend la terre comme une matière industrielle ; il vit dans sa chaumière comme dans une fabrique.
Vrai Saroumane, l’Américain déteste la nature et en particulier la forêt (on se souvient du beau poème de Ronsard sur la destruction des bois du Gâtinais) :
Les Américains considèrent la forêt comme le type de la nature sauvage (wilderness), et partant de la barbarie ; aussi c’est contre le bois que se dirigent toutes leurs attaques. Chez nous, on le coupe pour s’en servir ; en Amérique, pour le détruire. L’habitant des campagnes passe la moitié de sa vie à combattre son ennemi naturel, la forêt ; il le poursuit sans relâche ; ses enfants en bas âge apprennent déjà l’usage de la serpe et de la hache… l’absence de bois est, à leurs yeux, le signe de la civilisation, comme les arbres sont l’annonce de la barbarie.
Beaumont comprend comme Baudelaire et aussi Edgar Poe qu’avec l’Amérique on entre dans un nouvel âge du monde : l’âge de l’intérêt matériel, du conformisme moral (la tyrannie de la majorité) et de la standardisation industrielle.
Tout d’ailleurs s’était rapetissé dans le monde, les choses comme les hommes. On voyait des instruments de pouvoir, faits pour des géants, et maniés par des pygmées, des traditions de force exploitées par des infirmes, et des essais de gloire tentés par des médiocrités.
Beaumont a raison : le monde moderne c’est Lilliput.
La force d’imprégnation américaine est elle qu’elle uniformise toutes les nations immigrées chez elles. Cela est intéressant car cela se passe bien avant la machine à broyer hollywoodienne ou l’irruption de la télévision. L’Amérique c’est l’anti-Babel, le système à tuer les différences que la chrétienté avait si bien su préservé.
Chose étrange ! La nation américaine se recrute chez tous les peuples de la terre, et nul ne présente dans son ensemble une pareille uniformité de traits et de caractères.
Le rapport sacré à la terre n’existe bien sûr pas. On n’y connaît pas le paysan de Heidegger (Beaumont explique que le Tasse et Homère ne seraient pas riches, alors…). Tout n’est qu’investissement immobilier au paradis du déracinement libéral :
L’Américain de race anglaise ne subit d’autre penchant que celui de l’intérêt ; rien ne l’enchaîne au lieu qu’il habite, ni liens de famille, ni tendres affections… Toujours prêt à quitter sa demeure pour une autre, il la vend à qui lui donne un dollar de profit.
C’était bien avant les sub-primes !
Une des grandes victimes de la civilisation américaine est alors la femme (avec les noirs et les indiens dont Beaumont parle très bien, et objectivement). Ce n’est pas pour rien que toutes les cultures du ressentiment au sens nietzschéen, l’antiracisme, la théorie du genre, le féminisme, le sectarisme sont nés aux USA au dix-neuvième siècle et après :
Sa vie est intellectuelle. Ce jeune homme et cette jeune fille si dissemblables s’unissent un jour par le mariage. Le premier, suivant le cours de ses habitudes, passe son temps à la banque ou dans son magasin ; la seconde, qui tombe dans l’isolement le jour où elle prend un époux, compare la vie réelle qui lui est échue à l’existence qu’elle avait rêvée. Comme rien dans ce monde nouveau qui s’offre à elle ne parle à son cœur, elle se nourrit de chimères, et lit des romans. Ayant peu de bonheur, elle est très religieuse, et lit des sermons.
On dirait notre bonne vieille Emma ! Tout cela ne fait pas le bonheur des femmes, qui n’ont pas encore le féminisme et la pension alimentaire pour bien se rattraper. L’Amérique invente madame Bovary plus vite que Flaubert (l’adaptation de Minnelli avec Jennifer Jones est éblouissante d’ailleurs) et le couple qui n’a rien à se dire – sauf devant l’avocat ou le psy, comme Mr and Mrs Smith (ils veulent bien se parler, mais il faut qu’ils paient !). La famille US est déjà telle que nous la connaissons aujourd’hui : quand elle n’est pas recomposée ou divisée, elle n’est pas ; Et cela sans qu’il y ait eu besoin de la télévision, du frigidaire et du portable pour abrutir et isoler tout le monde. Beaumont ajoute qu’il n’y a aucune affection, c’est cela le plus moderne – et donc choquant.
Ainsi se passent ses jours. Le soir, l’Américain rentre chez lui, soucieux, inquiet, accablé de fatigue ; il apporte à sa femme le fruit de son travail, et rêve déjà aux spéculations du lendemain. Il demande le dîner, et ne profère plus une seule parole ; sa femme ne sait rien des affaires qui le préoccupent ; en présence de son mari, elle ne cesse pas d’être isolée. L’aspect de sa femme et de ses enfants n’arrache point l’Américain au monde positif, et il est si rare qu’il leur donne une marque de tendresse et d’affection, qu’on donne un sobriquet aux ménages dans lesquels le mari, après une absence, embrasse sa femme et ses enfants ; on les appelle the kissing families.
L’obsession de l’argent qui crée des crises et de banqueroutes continuelles est continuelle : on n’a pas attendu Greenspan, Bernanke et les bulles de la Fed pour se ruiner – ou refaire fortune.
Le spectacle des fortunes rapides enivre les spéculateurs, et on court en aveugle vers le but : c’est là la cause de ruine. Ainsi tous les Américains sont commerçants, parce que tous voient dans le négoce un moyen de s’enrichir ; tous font banqueroute, parce qu’ils veulent s’enrichir trop vite.
Voyons la religion dont on a fait si grand cas là-bas. Si la femme est une « associée », un partner, comme on dit là-bas, l’homme religieux est un homme d’affaires. Beaumont est ici excellent dans son observation (c’est le passage que cite Marx dans un fameux petit essai) :
Le ministère religieux devient une carrière dans laquelle on entre à tout âge, dans toute position et selon les circonstances. Tel que vous voyez à la tête d’une congrégation respectable a commencé par être marchand ; son commerce étant tombé, il s’est fait ministre ; cet autre a débuté par le sacerdoce, mais dès qu’il a eu quelque somme d’argent à sa disposition, il a laissé la chaire pour le négoce. Aux yeux d’un grand nombre, le ministère religieux est une véritable carrière industrielle. Le ministre protestant n’offre aucun trait de ressemblance avec le curé catholique.
On s’en serait douté ! La religion évangélique comme business et comme programmation mentale malheureusement a un beau futur devant elle.
Beaumont n’a pas vu de western mais on va voir qu’il aurait pu en écrire les scénarios.
En Amérique, le duel a toujours une cause grave, et le plus souvent une issue funeste ; ce n’est pas une mode, un préjugé, c’est un moyen de prendre la vie de son ennemi. Chez nous, le duel le plus sérieux s’arrête en général au premier sang ; rarement il cesse en Amérique autrement que par la mort de l’un des combattants.
Il y a dans le caractère de l’Américain un mélange de violence et de froideur qui répand sur ses passions une teinte sombre et cruelle… On trouve, dans l’Ouest, des États demi-sauvages où le duel, par ses formes barbares, se rapproche de l’assassinat.
Il ne manque plus que Liberty Valance, que Wayne abat d’ailleurs comme un chien dans le classique postmoderne de Ford. Comme on voit, la situation réelle est aussi sinistre que celle décrit dans bien des films (contrairement à ce qu’une histoire révisionniste – il y en a pour tous les genres – a voulu nous faire croire).
Venons-en au thème de son ouvrage.
Scandalisé par l’esclavage et par le préjugé auto-entretenu qui lui sert de base, Beaumont comprend très bien le rôle du capitalisme – et surtout du christianisme – mal digéré :
L’exploitation de sa terre est une entreprise industrielle ; ses esclaves sont des instruments de culture. Il a soin de chacun d’eux comme un fabricant a soin des machines qu’il emploie ; il les nourrit et les soigne comme on conserve une usine en bon état ; il calcule la force de chacun, fait mouvoir sans relâche les plus forts et laisse reposer ceux qu’un plus long usage briserait. Ce n’est pas là une tyrannie de sang et de supplices, c’est la tyrannie la plus froide et la plus intelligente qui jamais ait été exercée par le maître sur l’esclave.
Voir Tocqueville et son analyse de l’extermination légale et philanthropique des Indiens (« On ne saurait détruire les hommes en respectant mieux les lois de l’humanité »). S’il n’y a vite eu plus d’Indiens, il y avait en tout cas 700 000 africains en 1799, quatre millions lors de la Guerre civile (qui tue 3% de la population, ruine puis pille le Sud, et endette le pays), 40 millions aujourd’hui ! L’esclavage est un beau calcul !
Beaumont constate que racisme finit par découler de l’esclavage ce qui n’était pas le cas avant. Cela aura des conséquences importantes dans les années vingt du siècle, quand les Allemands décrèteront que les Ukrainiens sont bons à leur servir d’esclaves ou que les Polonais peuvent être remplacés parce que moins techniques et moins universitaires (comme on sait l’antisémitisme a d’autres fondements). Ils avaient moins de « lumières », comme disait Washington à propos des Indiens ou Ferry à propos des « races inférieures » – on en dit quoi dans les loges du mariage pour tous ?
Faudrait-il, parce qu’on reconnaîtrait à l’homme d’Europe un degré d’intelligence de plus qu’à l’Africain, en conclure que le second est destiné par la nature à servir le premier ? Mais où mènerait une pareille théorie ?
Il y a aussi parmi les blancs des intelligences inégales : tout être moins éclairé sera-t-il l’esclave de celui qui aura plus de lumières ? Et qui déterminera le degré des intelligences ?
Le grand ennemi spirituel des sectes protestantes souvent athées ou folles (les quakers par exemple : « rien dans cette cérémonie burlesque ne fait rire, parce que tout fait pitié ») qui se partagent le pays est bien sûr le catholicisme. Ici Beaumont va aussi plus loin que Tocqueville :
Au milieu des sectes innombrables qui existent aux États Unis, le catholicisme est le seul culte dont le principe soit contraire à celui des autres.
On dirait du Chesterton. L’Eglise fait enrager tout le monde, et cela n’a pas changé !
L’unité du catholicisme, le principe de l’autorité dont il procède, l’immobilité de ses doctrines au milieu des sectes protestantes qui se divisent, et de leurs théories qui sont contraires entre elles, quoique partant d’un principe commun, qui est le droit de discussion et d’examen ; toutes ces causes tendent à exciter parmi les protestants quelques sentiments hostiles envers les catholiques.
La haine du catholicisme devient alors le seul commun dénominateur (on se doutait que ce n’était pas Jésus !) du discours américain, comme de tout discours moderne en général (c’est ce que disait notre ami Muray et il avait bien raison !)
Il paraît bien constant qu’aux États-Unis le catholicisme est en progrès, et que sans cesse il grossit ses rangs, tandis que les autres communions tendent à se diviser. Aussi est-il vrai de dire que, si les sectes protestantes se jalousent entre elles, toutes haïssent le catholicisme, leur ennemi commun.
L’Etat américain n’est bien sûr pas chrétien, il est comme dit Marx judaïque – on dira vétérotestamentaire (on jure sur la Bible, on ignore toujours l’Evangile ; vous avez déjà vu une allusion à la naissance du Christ pour le fête de Noël en Amérique ?), et il a même inventé la laïcité, aujourd’hui battue en brèche par le ressentiment communautariste venu aussi d’Amérique.
Ainsi il n’existe aux États-Unis ni religion de l’État, ni religion déclarée celle de la majorité, ni prééminence d’un culte sur un autre. L’État est étranger à tous les cultes.
Enfin Beaumont trouve que les Américains deviendront dangereux avec leur orgueil ; et que l’on pourrait même arrêter de trop critiquer sa pauvre vieille France !
Je blâme cet aveuglement de l’orgueil national des Américains, qui leur fait admirer tout ce qui se passe dans leur pays, mais j’aime encore moins la disposition des habitants de certaine contrée, qui, chez eux, trouvent toujours tout mal.
Il n’y a pas de quoi s’en faire, si l’on trouve que Gustave Beaumont exagère, qu’il est un hystérique opposé à l’Obama-land ou à la marche du progrès. Car comme disait mon ami l’éditeur Yves Berger, l’Amérique est partout maintenant ! On a Lady Gaga, le shopping centre et le dernier Apple ! Alors consolez-vous !
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mercredi, 29 mai 2013
Von Michel Mourre zu Dominique Venner
Von Michel Mourre zu Dominique Venner
von Martin Lichtmesz
Ex: http://www.sezession.de/
Auf der Netzseite der Jungen Freiheit [2]ist ein Nachruf auf Dominique Venner von Karlheinz Weißmann erschienen. Weißmann unterscheidet darin Venners „Geste“ des Freitods von jener der geistesverwandten Schriftsteller Drieu la Rochelle, Henry de Montherlant und Yukio Mishima.
… man scheut sich, ihn ohne weiteres in diese Reihe einzuordnen. Offenbar hat Venner nicht gehandelt in Reaktion auf den Zusammenbruch seiner ideologischen Hoffnungen, nicht aus einem Widerwillen gegen die Miserabilität des Daseins und auch nicht um der schönen Geste willen. Das Wort „Geste“ kommt zwar bei ihm vor, aber doch im Sinn der – großen – Tat, die am Anfang alles Neuen steht.
In einem Buch, das er vor Jahren über den französischen Widerstand während des Zweiten Weltkriegs geschrieben hat, sprach er über die Notwendigkeit des „starken Bildes, das bleiben wird“. Es entstehe nur durch jene Akte, die Zugang eröffnen zu den „tiefen und geheimnisvollen Kräften, die das Überdauern der Völker sichern“.
In dem finalen Eintrag [3] auf seinem Blog schrieb Venner:
Es bedarf vor allem einer tiefgehenden „intellektuellen und moralischen Reform“, um es mit Renan zu sagen. Diese müßte zur einer Wiedergewinnung der vergessenen französischen und europäischen Identität führen, deren Notwendigkeit immer noch nicht in aller Klarheit wahrgenommen wird.
Dazu müssen gewiß neue Ausdrucksformen gefunden werden, spektakulär und symbolisch, um die Schlaftrunkenen wachzurütteln, um das betäubte Bewußtsein zu erschüttern und die Erinnerung an unsere Wurzeln zu wecken. Wir werden in eine Zeit eintreten, in der Worte durch Taten bekräftigt werden müssen.
Wir sollten uns auch erinnern, daß, wie es auf geniale Weise Heidegger in „Sein und Zeit“ formuliert hat, die Essenz des Menschen in seinem Dasein und nicht in einer „anderen Welt“ liegt. Es ist im Hier und Jetzt, wo sich unser Schicksal bis zur letzten Sekunde erfüllt. Und diese allerletzte Sekunde hat genauso viel Bedeutung wie der Rest eines Lebens. Darum muß man bis zum letzten Augenblick man selbst bleiben. Nur indem man selbst entscheidet und sein Schicksal wahrhaftig bejaht, besiegt man das Nichts. Angesichts dieser Herausforderung gibt es keine Ausrede, da wir nur dieses eine Leben haben, in welchem es von uns abhängt, ob wir entweder ein Nichts oder ganz wir selbst sind.
Venners nächster Wahlverwandter war jedoch zweifellos Ernst Jünger, mit dem er das „abenteuerliche Herz“ der Jugendjahre und die militärische Erfahrung teilte, sowie die seltene Fähigkeit „Feder und Schwert“ – also Wort und Tat – in Einklang zu bringen. In einem Interview [4]mit der JF pries Venner Jünger als Prototypen des „guten Europäers“:
Aus seiner Lebensgeschichte lassen sich unendlich viele Lehren ziehen über die europäischen Dramen dieser Zeit. Sein ritterlicher Geist und seine Haltung waren unverwüstlich. In seiner Körperhaltung drückte sich seine geistige Haltung aus. Haltung zu haben, heißt auch, Distanz zu wahren: Distanz zu den niederen Leidenschaften wie zur Niedertracht der Leidenschaften. Jünger gab sich nicht mit dem Schreiben zufrieden, sondern er lebte, was er schrieb. Ich sehe in ihm ein Vorbild für eine Erneuerung, eine Renaissance.
Im selben Interview beschrieb Venner die heutige Zivilisation Europas als fehlgeleitet und selbstmörderisch:
Hier in Europa erleben wir eine beginnende Verweigerung des wahnwitzigen Konsums und eine Sehnsucht, sich ein authentischeres Leben aufzubauen, um mit Heidegger zu sprechen. Immer mehr Menschen kommen zu der Überzeugung, daß man, um besser zu leben, weniger konsumieren muß. Das ist ein zutiefst revolutionärer Gedanke. Wir beginnen zu sehen, daß die Produktivität um jeden Preis zerstörerisch ist. Das zeigt zum Beispiel eine französische Statistik vom Herbst 2009 über Selbstmorde bei der Arbeit. Die neuen Arbeitsformen und der Leistungswettbewerb, dem die Kosmokratie das „Humankapital“ unterwirft, treiben demnach Menschen in den Freitod!
Von hier aus führt eine unterirdische Verbindungslinie in ein anderes Kapitel und eine andere Schule der französischen Dissidenz. Dazu müssen wir ein wenig ausholen.
Diese Distanz wird auch spürbar in den Zeilen seiner Abschiedsnote:
Ich wähle einen hochsymbolischen Ort, die Kathedrale von Notre Dame de Paris, die ich respektiere und bewundere: das Genie meiner Vorfahren hat sie auf einer Kultsstätte errichtet, die viel älter ist und an unsere weit in die Geschichte zurückreichenden Wurzeln erinnert.
Hat seine Tat also frisches Blut in alte Kathedralen fließen lassen, auf daß sich erneut Götter auf ihre verlassenen Altäre niederlassen? Die Dome Frankreichs, Deutschlands und Italiens gehören in der Tat zu den herrlichsten Zeugen des europäischen Geistes. Aber sie scheinen heute, da sich der christliche Glaube säkularisiert und historisiert hat, nur mehr als Museen und touristische Schaustücke der Großstädte weiterzubestehen, nicht anders als die zwar prächtige, aber keinen Gott (inzwischen auch keinen Allah) mehr preisende Hagia Sophia im ehemaligen Konstantinopel.
Nietzsche schrieb in seinem berühmten Gleichnis vom „tollen Menschen“, der auf den Straßen den „Tod Gottes“ verkündigt:
Man erzählt noch, dass der tolle Mensch desselbigen Tages in verschiedenen Kirchen eingedrungen sei und darin sein Requiem aeternam deo angestimmt habe. Hinausgeführt und zur Rede gesetzt, habe er immer nur dies entgegnet: „Was sind denn diese Kirchen noch, wenn sie nicht die Gräber und die Grabmäler Gottes sind?“
In diesem Geiste tat sich im Jahre 1950 eine Gruppe junger Männer zusammen, um die Ostersonntagsmesse in Notre-Dame mit einem schockartigen Überfall [5] zu stören. Ihr Kopf, der 21jährige Michel Mourre, [6] erschien auf der Kanzel im Ornat eines Dominikanermönches und hielt eine flammende Rede, im Stile eher Zarathustras als des „tollen Menschen“:
Wahrlich, ich sage euch: Gott ist tot. / Wir speien die Lauheit eurer Gebete aus, / Denn eure Gebete waren der schmierige Rauch über den Schlachtfeldern unseres Europa. / Geht fort in die tragische und erhabene Wüste einer Welt, in der Gott tot ist, / bis die Erde erneuert ist mit euren bloßen Händen, / Mit euren stolzen Händen, / Mit euren Händen, die nicht beten. / Heute, Ostern des Heiligen Jahres, / hier unter dem Zeichen von Notre Dame de Paris, / Verkünden wir den Tod des Christengottes, auf daß der Mensch lebe zuletzt.
Die Störenfriede wurden verhaftet, und Mourre für zwei Wochen in die Psychiatrie gesteckt. Der Skandal wurde zum Gegenstand monatelanger Debatten in den französischen Feuilletons, an denen sich zahlreiche Geistesgrößen von André Breton bis Gabriel Marcel beteiligten. Man kann allerdings der Rede entnehmen, daß Mourre alles anderer als platter, pöbelnder Ikonoklast war – die Differenz zu steindummen und vermutlich von interessierter Seite gesponserten „letzten Menschen“ wie den Nacktweibern von „Pussy Riot“, die vor ein paar Monaten vor Notre-Dame einem abgetretenen Papst hinterherspuckten, ist immens.
Mourres Predigt richtete sich explizit an die „Lauwarmen“, die nach dem berühmten Wort aus der Johannesoffenbarung „weder heiß noch kalt“ sind, und die der Herr aus seinem Mund „ausspucken“ wird. Mourres eigener Lebensweg verlief sehr eigenwillig. Der Sohn eines bürgerlichen Sozialisten und „Pfaffenfressers“ hatte sich als Jugendlicher noch in der Phase des Zusammenbruchs der Kollaboration angeschlossen. Dafür mußte er nach Kriegsende im Gefängnis büßen, wo er die Schriften von Charles Maurras entdeckte (Venner schrieb übrigens eine bedeutende „Geschichte der Kollaboration“).
Es folgte eine katholisch-royalistische Phase, die er mit dem Eintritt in den Dominikanerorden besiegelte. Sein spiritueller Durst nach dem Absoluten wurde jedoch auch dort nicht gestillt. Schließlich verlor er vollständig den Glauben, und schloß sich den von dem Exilrumänen Isidore Isou gegründeten „Lettristen“, einer Künstlergruppe in der Tradition der Dadaisten und Surrealisten, an. Karlheinz Weißmann [6] schrieb dazu:
Mourre zog auch jetzt die Konsequenz, verließ den Orden, ging wieder nach Paris, verbummelte seine Tage in den Cafés von Saint Germain des Prés, ein Bohémien unter Bohémiens. Darf man den Schilderungen seines Freundes Armin Mohler glauben, waren seine Lebensumstände mehr als abenteuerlich. Aber fertig war er noch nicht mit der letzten großen Sache, der er sich verschrieben hatte. Vielleicht fiel der Entschluß zu der Aktion in Notre Dame tatsächlich erst zwei Tage vorher, aber der Wunsch, sich an Gott zu rächen, muß längst schon mächtig gewesen sein.
Danach verschwand Mourre in der Obskurität, und widmete sich fortan der geisteswissenschaftlichen Arbeit.
Mourre wurde nach vierzehn Tagen aus der Psychiatrie entlassen, gab den Kontakt zu seinen alten Freunden auf, schloß sich in seiner Bibliothek ein und begann ein Buch über seine Entwicklung zu schreiben, das unter dem Titel „Malgré le blasphème“ erschien.
Der deutsche Titel „Gott ist tot?“ wirkt nichtssagender, ohne daß das dem Erfolg geschadet hätte. Die Übersetzung erschien in einem renommierten katholischen Verlag und wurde zum Anlaß einer intensiven Diskussion, nicht nur in kirchlichen Kreisen der Bundesrepublik. Aber der Ruhm verging rasch. In Deutschland blieben Mourre nur einige Bewunderer, darunter Carl Schmitt und Ernst Jünger. (…)
Nur ein paar Anarchisten bewahren ihm ein ehrendes Andenken. Er selbst lebte ein exzentrisches, jedenfalls rastloses Leben und hat die innere Ruhe, die er so ersehnte, wohl nie gefunden. Michel Mourre starb 1977, nur neunundfünfzig Jahre alt, an einem Gehirntumor.
Die Lettristen aber spalteten sich nach der Notre-Dame-Aktion in „Künstler“ und „Aktivisten“. Dem zweiteren, radikaleren Flügel schloß sich der junge Guy Debord an, der später zu einem bedeutenden Kritiker des Konsumgesellschaft und der Massenmedien wurde. 1985 schrieb Debord einen scharfkantigen Text [7]über den Identitätsverlust Frankreichs und das Problem der Masseneinwanderung, in dem es viele Berührungspunkte zu Dominique Venner gibt.
Debord gebrauchte oft das Bild einer Gesellschaft von „Schlafwandlern“ , [8]die vom „Spektakel“ [9] im Tiefschlaf gehalten wird; 2013 gebrauchte Venner ein ähnliches Bild, als er seine Tat als gezielten Schock konzipierte, um die Gesellschaft aus einer fatalen Bewußtlosigkeit und Lethargie, aus einem tödlichen Schlummer zu reißen.
Wie Venner wählte übrigens auch der (gleich Michel Mourre rastlose) Debord den Freitod – allerdings aus Lebensüberdruß infolge einer schweren Krankheit, die die Quittung für jahrzehntelange Alkoholexzesse war. Alle drei Genannten entstammten ungefähr derselben Generation: Mourre war Jahrgang 1928, Debord 1931, Venner 1935.
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[1] Image: http://www.sezession.de/38863/von-michel-mourre-zu-dominique-venner.html/eccehomo
[2] Jungen Freiheit : http://www.jungefreiheit.de/Single-News-Display-mit-Komm.154+M50456d2e59c.0.html
[3] Eintrag : http://www.dominiquevenner.fr/2013/05/la-manif-du-26-mai-et-heidegger/
[4] Interview : http://www.jungefreiheit.de/Archiv.611.0.html?jf-archiv.de/archiv10/201012031955.htm
[5] schockartigen Überfall: http://en.wikipedia.org/wiki/Notre-Dame_Affair
[6] Michel Mourre,: http://www.jungefreiheit.de/Archiv.611.0.html?jf-archiv.de/archiv10/201014040245.htm
[7] scharfkantigen Text : http://www.sezession.de/38260/guy-debord-uber-identitat-und-einwanderung-fundstucke-15.html
[8] „Schlafwandlern“ , : http://www.youtube.com/watch?v=3TNurvWW4_0
[9] „Spektakel“: http://de.wikipedia.org/wiki/Die_Gesellschaft_des_Spektakels
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Dominique Venner – Von „Vorbildern“ und Haltungen
Ein Gestörter?
von Manfred Kleine-Hartlage
Ex: http://www.sezession.de/
Ich will die Haltung, die der eine oder andere politische Kommentator anläßlich von Dominique Venners Selbsttötung [2]bekundet, nicht gerade zum Gesinnungs-Lackmustest erklären, aber bezeichnend ist doch, wie sich gerade an dieser Tat die Geister scheiden: Was für den einen eine politische Tat ist, die ihre Erklärung in sich trägt und daher der Erläuterung nicht bedarf, erscheint dem anderen als ein Akt bloßer Verrücktheit, als eine „schreckliche und unnötige“, eine „gewaltsame und schlimme Geste eines Gestörten“ [3].
Daß es Ersteren – auch mir – schwerfällt, Letzteren zu erklären, was es mit dieser Tat auf sich hat, hängt auch damit zusammen, daß man es solchen Adressaten im Grunde nicht erklären will.
Ja, man könnte durchaus aufwendig und mit analytischer Gründlichkeit zeigen, daß sie eine politische Wirkung hat, oder daß es doch zumindest nicht abwegig ist, auf eine solche zu spekulieren; schließlich bemißt sich in einer Mediengesellschaft die Wirkung einer Tat an den Schlagzeilen, die sie produziert. Man könnte zum Vergleich die tibetischen Unabhängigkeitskämpfer heranziehen, die regelmäßig durch spektakuläre Selbstverbrennungen auf ihr Anliegen aufmerksam machen, ohne daß irgendjemand sie deshalb als Verrückte abtun würde. Man könnte darlegen, warum die demonstrative Selbsttötung eine Waffe sein kann, die einem (zumal in einer Gesellschaft, die einen am liebsten mundtot machen würde) das letzte Wort sichert. Man könnte das alles tun. Aber es erschiene mir unangemessen, kleinkariert und letztlich sinnlos.
Sinnlos einer Gesellschaft gegenüber, die eine solche Tat nicht versteht, sondern bestenfalls durch sie verstört wird: Sie zu verstören, war ja genau der Sinn der Sache. Diejenigen, die es dann genauer verstehen wollen, werden ihren Weg zum Verständnis schon finden.
Sinnlos aber vor allem den konservativen Kritikern gegenüber, die durch ihre hektische Abwehr unfreiwillig zu verstehen geben, wie genau sie verstanden haben, worum es Venner ging – und die es genau deshalb ablehnen.
Ich habe, als ich von der Selbsttötung hörte, keine Sekunde daran gezweifelt, daß – wer auch immer „wir“ sind – Venner einer von „uns“ ist. Die Tat verstehen heißt nicht ihre Wirkung analysieren, sondern die innere Haltung verstehen und bejahen, der sie entspringt:
Es ist nämlich inkonsequent, dem drohenden Untergang des Abendlandes nicht in einem Geist und einer Haltung zu begegnen, die der Größe dieser Gefahr angemessen ist, deren absehbare Folgen jeden Vergleich mit denen aushalten, die der Untergang des Römischen Reiches nach sich zog.
Dem existentiellen Ernst der Lage, in die die Zustände uns bringen, muß die Ernsthaftigkeit der Opposition entsprechen, und die Radikalität der Opposition muß der Radikalität der Herrschenden wenigstens gleichkommen. Wer dem de facto existierenden politischen Ausnahmezustand mit der Anwendung bewährter Regeln begegnen möchte (bürgerlicher Lebensregeln, die auf den Normalzustand zugeschnitten sind und dort ihren Sinn haben), hat nicht nur ein Glaubwürdigkeitsproblem, weil sein tatsächliches Handeln nicht zu seiner theoretischen Wirklichkeitsbeschreibung paßt; er signalisiert, daß seine Opposition dem Gegner und seiner Skrupellosigkeit nicht gewachsen ist und deshalb von diesem nicht ernstgenommen zu werden braucht.
Henning Hoffgaard hat im Blog der Jungen Freiheit die Mentalität dieser Art von Opposition exemplarisch zum Ausdruck gebracht [3]. Nicht sein unbedeutendstes Argument ist die Behauptung, daß
der Historiker seinem eigentlichen Anliegen nur geschadet hat. Die konservative familienbejahende Bewegung steht plötzlich unter dem Verdacht der Radikalität.
Für diese Art Opposition gilt es, bereits den „Verdacht der Radikalität“ – und folgerichtig erst recht die Radikalität selbst – zu scheuen. Nun gut, Menschen sind verschieden, und Radikalität ist nicht jedermanns Sache. Das ist weder verdienstvoll noch verwerflich. Durchaus verwerflich, und zwar nach den von Hoffgaard selbst hochgehaltenen Maßstäben der bürgerlichen Moral, ist es, einem Toten hinterherzuspucken:
Kein Wunder also, daß die Initiatorin der Demonstrationen gegen die Homo-Ehe, Frigide Barjot, auf Distanz geht und von einer „gewaltsamen und schlimme Geste eines Gestörten“ spricht.
Dominique Venner hat keine Bewunderung verdient. Sondern Mitleid.
Der herablassende Gestus ist nicht einfach nur pietätlos (das ist er auch), und der Grund für die kaum verhohlene Aggressivität liegt erkennbar nicht in der Sache. Über Sinn oder Unsinn der Tat Venners kann man mit Argumenten diskutieren; es geht aber eben nicht um die Tat, sondern um die Haltung: um die Haltung Venners und um die seiner Kritiker. Hoffgaard gibt Auskunft:
Besonders verstörend ist die merkwürdige Selbstüberhöhung Venners, die in Sätzen wie „Meine Tat dagegen verkörpert eine Ethik des Willens“ zum Ausdruck kommt. Sie zeugt von Arroganz und erklärt diejenigen, die diesem vermeintlichen „Vorbild“ nicht folgen wollen, zu willenlosen Sklaven.
Tatsache ist, daß Venner dies mit keiner Silbe geschrieben oder auch nur angedeutet hat. Auch dürfte es kaum seine Absicht gewesen sein, einen Werther-Effekt auszulösen oder Gleichgesinnten die öffentliche Selbsttötung als Waffe der Wahl vorzuschreiben. Nicht Venner ist arrogant, sondern Hoffgaard spürt die Größe, die Ernsthaftigkeit, die Unbedingtheit, die Hingabe seiner Haltung und steht ihr befremdet gegenüber.
Ob es dem Verstorbenen bewußt war oder nicht: Sein dramatischer Abgang konfrontiert jeden Einzelnen mit einem Maßstab, dem er gerecht werden kann oder auch nicht. Es ist keine Schande, ihm nicht gerecht zu werden. Es ist keine Schande, mittelmäßig zu sein, zumal es ohne das Mittelmaß als Normalfall so etwas wie Größe gar nicht gäbe. Verachtenswert ist das Mittelmaß erst dann, wenn es sich selbst zum Maßstab erhebt, das Große nicht als solches anerkennt und dem Herausragenden den ihm zustehenden Respekt verweigert.
Dominique Venner – Von „Vorbildern“ und Haltungen
von Martin Lichtmesz
Um mich dem Kommentar [2] von Manfred Kleine-Hartlage apropos Dominique Venner anzuschließen: die Bedeutung und den Sinn einer solchen „Geste“ versteht man entweder auf Anhieb, oder eben nicht. Mit denen, die sie nicht verstehen, erübrigt sich jeder weitere Dialog. Das ist eine Frage der Haltung, die man je nach Verfassung des Charakters einnehmen kann oder nicht.
Ein Kommentar wie jener von Henning Hoffgaard, [3]bedauerlicherweise auf der Netzseite der Jungen Freiheit erschienen, ist dagegen vor allem eine Frage der Abwehrhaltung, mit anderen Worten eines ängstlichen Manövers, um bloß nicht die Deckung gewisser konservativer Lebenslügen aufgeben zu müssen. Auch das hat selbstverständlich mit Charakter zu tun.
Ich frage mich, ob der Autor auch imstande wäre, sich neben einem Jan Palach [4] oder einem brennenden tibetanischen [5] oder vietnamesischen Mönch aufzustellen, und diesen mit sorgenvoll gerunzelter Stirn, erhobenem Zeigefinger, gerichteter Krawatte und biederer Miene zu belehren, wie unkonservativ und unnötig und generell garstig radikal ein solcher Akt doch sei, im schönsten treuherzigsten Glauben, er würde nun munter aus der Quelle des „gesunden Menschenverstandes“ schöpfen.
Warum „diskutiert“ denn dieser arme, geistesgestörte Mönch nicht lieber mit seinen Besatzern oder geht grundgesetzdemokratisch gegen sie demonstrieren oder warum gründet er keine konservative Partei oder warum geht er nicht nach Hause, läßt friedlich die Gebetsmühle rotieren, damit die Götter alles wieder richten? „Gesunder Menschenverstand“ in diesem Sinne genügt nicht. Man muß auch wissen, wovon man redet, ehe man die Losschwatzsicherung entriegelt.
Ich will lieber nicht wissen, wie die Antwort vermutlich ausfallen würde. Und wenn wir schon die Maßstäbe „konservativer“ Wohlanständigkeit und Bedachtsamkeit an eine Ausnahmetat (die selbstverständlich nicht im buchstäblichen Sinne „vorbildhaft“ sein kann) anlegen, dann erstaunt einen doch die gedankenlose Herablassung, mit der hier der Tod und das Selbstopfer eines Menschen bagatellisiert werden.
Daß man einer solchen Attitüde ausgerechnet in einer Zeitung begegnet, die das Andenken an den 20. Juli so grandios bewahrt wie kein anderes Medium in Deutschland, ist schon traurig genug. Wer nun mit dem Einwand kommt, daß wir uns doch im Gegensatz zu Stauffenberg nicht mitten in einem schrecklichen Krieg und in einer offenen Tyrannis oder Diktatur befinden, hat nicht begriffen, daß es hier um grundsätzliche Haltungen geht, und wohl ebensowenig, was das überhaupt ist: eine Haltung.
Das Ausmaß des Mißverständnisses über die Natur des „Konservatismus“ offenbart sich aber erst so richtig in dem letzten Satz, in dem Hoffgaard, zweifellos „gut gemeint“, de facto aber herabschauend und arrogant, zu „Mitleid“ für Venner aufruft. Das ist, wohl unbemerkt vom Autor, fast so ekelerregend wie der höhnische Auftritt einer plärrenden, tittenschwingenden Dummnudel [6] in Notre-Dame kurz nach dem Freitod Venners. „Mitleid“ und Nasenschleim, erst recht von den bien-pensants, ist nun wirklich das Allerletzte, das ein Mann wie Venner gewollt oder gar verdient hätte.
Hoffgaard scheint überhaupt nicht die geringste Ahnung davon zu haben, mit was für einem Mann er es hier zu tun hat, was er indessen auch in der Jungen Freiheit [7] selbst hätte nachlesen können. Die Behauptung, Venner habe „es sich furchtbar einfach gemacht“ ist so unverschämt, daß sie nach Satisfaktion verlangt, nicht nur wegen seines geistigen Kalibers, sondern auch, weil niemand es „sich einfach macht“, der bereit ist, sich sein Leben zu nehmen.
Letzteres ist nichts anderes als ein Kinderpfeifen im finstern Walde, die klassische Ente all jener Arg- und Ahnungslosen, die es nötig haben, ihrer Angst vor gewissen Dingen jenseits des bürgerlichen Sandkastens mit Verharmlosung zu begegnen. Können Leute dieser Art auch verstehen, daß es Menschen gibt, die sich nicht versöhnen und abfinden wollen, die in sich Überzeugungen tragen, die sich nicht kaufen und abkaufen lassen?
Vor allem sprechen wir hier nicht von jemandem, der einen Suizid aus pathologischem Lebensüberdruß begangen hat, genausowenig wie die tibetanischen Nonnen und Mönche. Ob Hoffgaard auch schon mal etwas von Sokrates oder Seneca gehört hat? Venner, ein eingefleischter, europäischer Heide, starb wie ein antiker Stoiker.
Venners Tat sei „kein Vorbild für niemanden“. „Vorbild“, auch das ist ein Ausdruck, der nach dem Fundus pädagogischer Artigkeit schmeckt. Kids, don’t try this at home! [8] Wer redet eigentlich von „Vorbildern“? Ich will hier nicht darauf eingehen, was für diejenigen, die nun den Hut vor Venner ziehen, wirklich „vorbildlich“ ist und was nicht. Es ist, wie gesagt, etwas, das man entweder auf Anhieb versteht oder nicht. Niemand muß Venners Tat gut, sinnvoll oder „vorbildhaft“ finden. Aber es gibt Grenzen der Besserwisserei, die insbesondere vor dem Grab eines Menschen gezogen werden müssen.
Der Kern dieser schiefen Sicht ist, wie oben angedeutet, wohl eine autohypnotische Fehleinschätzung der Lage. Venner hat nicht, wie vielfach grob vereinfachend berichtet wurde, bloß gegen die von der Linksregierung durchgedrückte „Homo-Ehe“ protestiert (die, nebenbei gesagt, weder mit Homosexuellen noch mit „Ehe“ das Geringste zu tun hat). Seine Abschiedsnoten verweisen deutlich auf eine Lage, in der es um das Ganze Frankreichs und Europas geht.
Wer die Bilder von den Demonstrationen in Frankreich inhaliert wie Opium, gierig nach dem Sauerstoff der Hoffnung, hat noch nicht begriffen, daß die überwiegende Mehrheit der Franzosen ihrem „grand replacement“, wie es der (übrigens offen homosexuelle) Schriftsteller Renaud Camus formuliert hat, also dem großen demographischen „Bevölkerungsaustausch“ im Namen der globalistischen Utopie mit passiver Lethargie gegenübersteht.
Venner hat eben nicht „vor den nicht in Stein gemeißelten Umständen kapituliert“, wie Hoffgaard vermutet, der sich offenbar nicht einmal die Mühe gemacht hat, die entsprechenden Erklärungen [9] zu lesen. Au contraire:
Ich erhebe mich gegen den Fatalismus. Ich erhebe mich gegen die seelenzerstörenden Gifte und gegen den Angriff individueller Begierden auf die Anker unserer Identität, besonders auf die Familie, der intimen Säule unserer jahrtausendealten Zivilisation. Ebenso wie ich für die Identität aller Völker in ihren Heimatländern eintrete, erhebe ich mich des weiteren gegen das vor unseren Augen begangene Verbrechen der Ersetzung unserer Völker durch andere.
Was Venner nicht geteilt hat, war lediglich die Illusion, daß ein paar „artige Demonstrationen“ („gentilles manifestations“) genügen würden, um das Ruder herumzureißen. Und wie recht er damit hat, bestätigt die Reaktion der „Initiatorin der Demonstrationen gegen die Homo-Ehe“, die es für angebracht hielt, dem Toten ins Grab nachzuspucken, und anbiedernd-konformistisch von der „schlimmen Geste eines Gestörten“ sprach.
Diese „Initiatorin“ tritt übrigens unter einem Pseudonym auf, das offenbar aus einer Transvestiten-Show geklaut wurde: „Frigide Barjot“ [10] ist eine nicht allzu subtile Verballhornung von „Brigitte Bardot“, und heißt soviel wie „frigide Durchgeknallte“. Barjot, die aus dem Show-Biz kommt und auch äußerlich reichlich „durchgeknallt“ (oder gar „gestört“?) wirkt, ist das weibliche Pendant zu Beppe Grillo, und hat auch mal ein die Bardot parodierendes Lied mit dem Titel „Fais-moi l‘amour avec deux doigts“ (das lasse ich mal unübersetzt), was unter ihren vielen konservativ-katholischen Anhängern sicher ein beliebter Schlager ist.
Fast könnte man hier den Verdacht einer „controlled opposition“ schöpfen. Man kann „Barjots“ Namen kaum zitieren, ohne das Gefühl zu haben, in einer Live-Satire oder einer Szene aus Raspails „Heerlager der Heiligen“ gelandet zu sein. Das gibt auch Hoffgaards Anrufung der Kronzeugin eine nicht umkomische Note. „Venner hat sich erschossen, aber Frigida Ziege und Lady Gaga finden das gestört und uncool, Klappe zu, Affe tot.“
Im April dieses Jahres bezeichnete „Barjot“ Frankreich übrigens als „Diktatur“ (Wie unter Stauffenberg? Wie in Tibet?), und scheute nicht vor markigen, womöglich radikalismusverdachterweckenden Sprüchen zurück: „Hollande veut du sang, il en aura ! “ – „Hollande will Blut sehen, und das wird er bekommen!“ Blut? Jenes Blut etwa, das nun tatsächlich vor dem Altar von Notre-Dame geflossen ist?
Und einer solchen Figur läuft die „konservative familienbejahende Bewegung“ Frankreichs hinterher.
Article printed from Sezession im Netz: http://www.sezession.de
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[1] Image: http://www.sezession.de/38913/ein-gestorter.html/220px-notre-dame-de-paris_-_rosace_sud
[2] Kommentar: http://www.sezession.de/38913/ein-gestorter.html
[3] Henning Hoffgaard, : http://www.jungefreiheit.de/Single-News-Display-mit-Komm.154+M5a655a77084.0.html
[4] Jan Palach: http://de.wikipedia.org/wiki/Jan_Palach
[5] tibetanischen: http://www.abendblatt.de/politik/ausland/article2289544/Erstmals-Selbstverbrennungen-in-Tibets-Hauptstadt-Lhasa.html
[6] Dummnudel: http://www.bild.de/politik/ausland/femen/nach-suizid-in-notre-dame-femen-frau-zieht-blank-gegen-rechts-30502082.bild.html
[7] Jungen Freiheit: http://www.jungefreiheit.de/Archiv.611.0.html?jf-archiv.de/archiv10/201012031955.htm
[8] Kids, don’t try this at home! : http://en.wikipedia.org/wiki/Don%27t_Try_This_at_Home
[9] entsprechenden Erklärungen: http://www.sezession.de/38857/begrundung-fur-einen-freitod-dominique-venners-erklarung.html
[10] „Frigide Barjot“: http://fr.wikipedia.org/wiki/Frigide_Barjot
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Venner: symbolish, männlich, frei und hart
Venner: symbolish, männlich, frei und hart
von Götz Kubitschek
Ex: http://www.sezession.de/
Indem der 79jährige Historiker Dominique Venner sich am 21. Mai in der Kathedrale Notre Dame zu Paris erschoß, reagierte er radikal auf den Weg ins Verderben, den sein Vaterland und Europa seit Jahrzehnten beschreiten. Er reagierte dabei nicht so, wie es uns das liberale System und die offene Gesellschaft nahelegen: ertragend, selbstkritisch, ausweichend, akzeptierend, weich, anknüpfungsbereit.
Venners Reaktion war überlegt [3], symbolisch, männlich, frei und hart. Sie war schockierend für all jene, die das Leben quantitativ und nicht qualitativ, individualistisch und nicht eingebettet, hedonistisch und nicht in erster Linie als Dienst auffassen. Was Venner am Altar der Kathedrale tat, begreift man entweder sofort oder gar nicht: Es umgibt sein Leben und seine Argumentation mit der Aura radikaler Unabhängigkeit und jäher Fremdheit, und alle Versuche, seine Tat zu instrumentalisieren, sind peinlich und müssen scheitern, auch jene von unserer Seite. Man muß schweigen können beim Blick auf etwas, das so weit entfernt von dem ist, was wir uns vorgenommen und was wir Tag für Tag zu tun haben.
18:12 Publié dans Actualité, Nouvelle Droite | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : nouvelle droite, dominique venner, mort volontaire, actualité, france, paris | | del.icio.us | | Digg | Facebook
Suicide in the Cathedral: The Death of Dominique Venner
Suicide in the Cathedral:
The Death of Dominique Venner
By Greg Johnson
Ex: http://www.counter-currents.com/
Dominique Venner is too big for me to judge. Thus I am not going to criticize or second-guess his decision to end his life with a bullet at the altar of the Cathedral of Notre Dame on May 21, 2013.
But I have no qualms about judging the reactions of smaller men to his suicide.
1. Venner’s Suicide was not a Protest Against Gay Marriage
Venner made it clear in his final blog post [2] that he believed that the gay marriage protests were merely a distraction. Venner was opposed to gay marriage, but without passion and without “homophobia [3].” He was, however, intrigued by the massive protests, as well as France’s pervasive cynicism [4] about the political establishment, phenomena that he judged to have revolutionary potential [5]. But he believed that this potential was being wasted on the issue of gay marriage when a much greater threat to France was looming unopposed: the replacement of the French people with non-white immigrants organized under the banner of Islam. Venner made it clear that his suicide was not a protest against gay marriage but an attempt to awaken people to the danger of demographic displacement.
The gay marriage statute, after all, is only a law. Laws can be changed. And this particular law clearly will be abolished, along with the rest of liberalism, when Sharia law is imposed by France’s rising Muslim majority. Sharia law, of course, is not forever either. But Sharia law will be imposed only by the demographic swamping of the French, which will lead to their genetic and cultural obliteration. And extinction is forever.
Of course the mainstream media wish to keep our people unaware of this very danger. So naturally they are reporting that Venner killed himself simply to protest gay marriage. Venner has even been described as a traditionalist Catholic, although a traditionalist Catholic would not commit suicide at all, much less at the altar of Notre Dame. Beyond that, Venner makes it clear in his final writings that he was an atheist and a cultural pagan.
But when people on the Right, who should be both sympathetic to Venner and skeptical of the press, repeat these false claims at face value, what is their excuse?
2. “One more bullet that will not be fired at the enemy.”
Many of Venner’s Right-wing critics fault him for killing himself rather than one of our enemies. But Venner was right, for two reasons. First, as I have argued elsewhere [6], revolutionary violence today is premature and thus pointless. Second, if Venner had killed another individual, the primary focus would be on the victim, and Venner himself would simply be dismissed as another crazed, embittered Right-wing loser. By killing himself, he knew that he would still be vilified and mocked. But he also knew that it would be far more likely that at least some people would actually take his ideas seriously. Very few people have convictions they will die for, thus some people will want to learn what those convictions were.
3. Venner’s Career as Activist and Intellectual
Some of Venner’s Right-wing critics reproach him for killing himself, as opposed to engaging in political or metapolitical activism. But from 1956 to 1971, Dominique Venner was very much a political and metapolitical activist.
According to Wikipedia [7] – which all of Venner’s critics could have read before attacking him in online forums — after serving in the Algerian War, Venner was demobilized in 1956 and joined the Jeune Nation [8] (Young Nation) movement, which later folded into the Organisation de l’Armée Secrète [9] (OAS, Secret Army Organization). On November 7, 1956, Venner took part in the ransacking of the office of the French Communist Party as a protest against the Soviet repression of the Hungarian Revolution. Venner then helped found a short-lived Parti Nationaliste (Nationalist Party).
Venner strongly opposed the French decolonization of Algeria. Thus he took part in General Chassin’s pro-colonist Mouvement populaire du 13-mai [10] (Popular Movement of May 13). Venner was also a member of the OAS, which used bombings and assassinations to try to halt the betrayal of European colonists in Algeria. Members of the OAS took part in the attempted military coup of April 1961 and tried to assassinate Charles De Gaulle in August of 1962. Because of his OAS membership, Venner was jailed for 18 months and was released in 1962.
After prison, Venner became increasingly involved in metapolitics: writing essays and books; founding intellectual organizations, journals, and publishing houses; networking with other Right-wing intellectuals, and the like. In the autumn of 1962, Venner wrote For a Positive Critique [11] (online at Counter-Currents), a manifesto analyzing the failure of the coup and outlining a new, somewhat “Leninist” model for a revolutionary, militant Right wing.
In January of 1963, Venner and Alain de Benoist created a movement and magazine called Europe-Action. Venner then founded the publisher Éditions Saint-Just, which was associated with Europe-Action. Venner was also an early member of the flagship organization of the French New Right, Alain de Benoist’s Groupement de recherche et d’études pour la civilisation européenne (GRECE) (Research and Study Group for European Civilization) from its beginning until the 1970s. With Thierry Maulnier, Venner founded the Institut d’études occidentales (IEO) (Institute of Western Studies), and its journal, Cité-Liberté (City-Liberty), founded in 1970.
In 1971, the IEO was dissolved and Venner withdrew from political entanglements to focus entirely on his career as a historian, a metapolitical activity in itself. He wrote and edited some 50 books, edited two journals, authored countless essays, gave many print and broadcast interviews, and mentored and promoted numerous writers.
In short, at the age of 78, Dominique Venner had done more for our people as a writer or political activist than practically anyone else. Thus it is absurd, if not obscene, to claim that “he could have done more” and that his suicide was somehow a dereliction of duty.
4. The Rationale for a Revolutionary Suicide
Venner decided, evidently after long deliberation, that there was one more thing he could do for his people, i.e., that a spectacular public suicide would (a) raise public awareness of the danger of white race replacement, and (b) encourage people who are already aware of the danger to do more to stop it.
And maybe, just maybe, Venner thought, his death would be enough to make a difference.
Because as a historian, Venner knew that individual actions can and do change history. But as a historian, he also knew that such actions and their consequences are contingent and thus unpredictable [12]. Thus, in the end, it was a gamble. But it was his own life that he was gambling with, and I, for one, do not feel it is my right to second-guess him.
I should note, however, that the first of Venner’s predictions has already been proven right. His death has won enormous publicity for our cause. That can be verified by anyone with a simple web search. But I have additional evidence: because Counter-Currents/North American New Right is the primary source of English translations of Venner’s essays, our traffic increased dramatically due to his death. Indeed, on Tuesday the 21st and Wednesday the 22nd we had the highest traffic in our history so far.
As for Venner’s second prediction: whether he is proved right or wrong is in your hands, dear reader. No, Venner did not wish to inspire the rest of us to take our lives, which would be absurd. But he did want to inspire us to take courage in moving our flag forward. All of us know of some constructive steps toward saving our race, constructive steps that we could take if only we were not afraid. But if Dominique Venner conquered the fear of death to serve our people, then surely you can conquer the lesser fears that are holding you back. Our duty is to make sure that his sacrifice was not in vain.
Article printed from Counter-Currents Publishing: http://www.counter-currents.com
URL to article: http://www.counter-currents.com/2013/05/suicide-in-the-cathedralthe-death-of-dominique-venner/
URLs in this post:
[1] Image: http://www.counter-currents.com/wp-content/uploads/2013/05/VennerNotreDame.jpg
[2] final blog post: http://www.counter-currents.com/2013/05/the-may-26-protests-and-heidegger/
[3] without passion and without “homophobia: http://www.counter-currents.com/2012/12/are-marriage-and-children-consumer-goods/
[4] pervasive cynicism: http://www.counter-currents.com/2013/04/theyre-all-rotten/
[5] revolutionary potential: http://www.counter-currents.com/2013/04/how-are-revolutions-born/
[6] argued elsewhere: http://www.counter-currents.com/2013/05/on-violence-2/
[7] Wikipedia: https://en.wikipedia.org/wiki/Dominique_Venner
[8] Jeune Nation: https://en.wikipedia.org/wiki/Jeune_Nation
[9] Organisation de l’Armée Secrète: https://en.wikipedia.org/wiki/Organisation_de_l%27arm%C3%A9e_secr%C3%A8te
[10] Mouvement populaire du 13-mai: https://fr.wikipedia.org/wiki/Mouvement_populaire_du_13-Mai
[11] For a Positive Critique: http://www.counter-currents.com/tag/for-a-positive-critique/
[12] unpredictable: http://www.counter-currents.com/2011/11/the-unforeseen-the-chinese-and-the-favorable-moment/
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L'occidentalisme contre l'Europe
L'occidentalisme contre l'Europe
Ex: http://www.europe-identite.com/
Tomislav Sunic
Conférence prononcée à Lyon le 25 mai 2013 („GUD-Europe Identité“)
Le terme « occidentalisme » n’existe qu’en langue française et il a une signification bien particulière. Souvent les mots « Occident » et « occidentalisme » reçoivent leurs sens particulier en fonction de son utilisateur et de son état des lieux. Le terme « occidentalisme » ne s’utilise guère en langue allemande ou en langue anglaise. Même le vocable français « Occident » possédant une signification largement géographique est traduit en allemand comme « l’Ouest », à savoir « der Westen. Il en va de même pour l’anglais où le terme français « Occident » est traduit en anglais par « the West », le sujet auquel on a consacré pas mal de livres et de traductions. À ce propos, Patrick Buchanan, ancien conseiller de Ronald Reagan et écrivain conservateur ẚ gros tirage a publié y il a une dizaine d’années le bestseller « Death of the West » (La Mort de l’Occident) où il se lamente sur le sort de l’Ouest envahi par des millions d’immigrés non chrétiens. Dans sa prose, l’Amérique et l’Europe sont mises dans le même sac.
Or nous savons fort bien que l’Amérique et l’Europe ne sont pas synonymes – ni par leur notion des grands espaces, ni par leurs volontés hégémoniques – quoique ces deux continents soient pour l’heure toujours peuplés d’une majorité d’Européens de souche. Fort souvent dans notre histoire récente, ces deux grands espaces, malgré leurs populations quasi identiques, se sont livré des guerres atroces.
Dans les langues slaves, le substantif « Occident » et l’adjectif « occidental » n’existent pas non plus. À la place « d’Occident », les Croates, les Tchèques ou les Russes utilisent le substantif « zapad » qui signifie « l’Ouest ».
Le substantif français « occidentalisme », indique une notion de processus, une motion, à savoir une idéologie, et non l’idée d’une entité stable dans le temps et dans l’espace comme c’est le cas avec le substantif « Occident ». Je vous rappelle que le titre français du livre d’Oswald Spengler, Der Untergang des Abandlandes, ou en français Le déclin de l’Occident, ne reflète pas exactement le sens du titre allemand. Le mot allemand « der Untergang » signifie, en effet, la fin des fins, une sorte de débâcle finale, et il est plus fort que le terme français «déclin » qui sous-entend une gradation, donc une « déclinaison du mal », et qui laisse envisager pourtant une possibilité de demi-tour, une fin qu’on peut renverser au dernier moment. Tel n’est pas le cas en allemand où le substantif « Untergang » porte un signifié final à sens unique, irréversible et tragique. La même chose vaut pour le substantif allemand « das Abendland », qui traduit en français, signifie « le pays du soleil couchant » et qui porte en langue allemande une signification largement métaphysique.
Je dois vous rappeler ces nuances lexicales afin que nous puissions bien conceptualiser notre sujet, en l’occurrence l’occidentalisme. Il faut être bien conscient que les termes, « L’Occident « et « l’Ouest », dans les différentes langues européennes, portent souvent des significations différentes lesquelles engendrent souvent des malentendus.
Nul doute que les termes « Occident » et « occidentalisme » ont subi un glissement sémantique. Au cours de ces quarante ans, ils ont pris en français une connotation associée au mondialisme, à l’américanisme vulgaire, au libéralisme sauvage et au « monothéisme du marché », très bien décrit par Roger Garaudy. On est loin des années soixante et soixante-dix, quand le journal Défense de l’Occident sortait en France contenant des plumes bien connues dans nos milieux. La même chose vaut pour le mouvement politico–culturel français « Occident » qui portait dans les années soixante une certaine promesse tant pour les nationalistes français que pour toute la jeunesse nationaliste européenne.
Or les deux termes – « Occident » et « occidentalisme » – qui sont aujourd’hui fustigés par les cercles identitaires et nationalistes français sont toujours objet d’éloges chez les identitaires et les nationalistes est-européens qui souffrent d’un complexe d’infériorité quant à leur nouvelle identité postcommuniste et européenne. En Pologne, en Hongrie ou en Croatie par exemple, se dire de « l’Ouest » est souvent une manière de mettre en lumière sa grande culture ou bien de se targuer de son style d’homme du monde.
Je vous rappelle qu’à l’époque communiste, les Européens de l’Est se sentaient non seulement vexés par les brimades et les oukases communistes, mais également par leur statut d’Européens de deuxième classe lorsque les Occidentaux, à savoir les Francophones et les Anglais utilisaient le terme « l’Est » pour désigner leur coin d’Europe, à savoir l'Europe de l'Est c’est-à-dire, « Eastern Europe ». D’ailleurs, en français, on utilise parallèlement l’adjectif « orientale » – à savoir « l’Europe orientale » – pour désigner l’Europe de l’Est, un adjectif dont l’homonymie rend les Européens de l'Est franchement furieux. L’adjectif « oriental » rappelle aux Européens de l’Est l’Orient, la Turquie, l’Arabie, l’islam, des notions avec lesquelles ils ne veulent absolument pas être rangés. Même les Européens de l’Est qui maîtrisent parfaitement la langue française et connaissent la culture française préfèrent, faute de mieux, que les Francophones, au lieu d’« Europe orientale », désignent leur coin d’Europe, comme « l’Europe de l’Est ».
Balkanisation et Globalisation
L’histoire des mots et les glissements sémantiques ne s’arrêtent pas là. Tous les Européens de l’Est, qu’ils soient de gauche ou de droite, les globalistes ou les anti-globalistes, et même la classe politique au pouvoir en Europe de l’Est aiment bien se désigner comme membres de la « Mitteleuropa » et non comme citoyens de l’Europe de l’Est. Le terme allemand Mitteleuropa veut dire « l’Europe du centre », terme qui renvoie aux beaux temps nostalgiques de l’Empire habsbourgeois, au biedermeier, à la douceur de vie assurée autrefois par la Maison d’Autriche et à laquelle les Slovaques, les Polonais, les Croates, les Hongrois, et mêmes les Roumains et les Ukrainiens appartenaient il n’y pas si longtemps.
La notion d’appartenance à l’Europe, surtout dans ce coin de l’Est européen s’aggrave davantage par les vocables utilisés par mégarde. Ainsi le terme « Balkans » et l’adjectif « balkanique », utilisés dans un sens neutre en France pour désigner l’Europe du sud-est, ont une connotation injurieuse dans la culture croate même si cette désignation ne véhicule aucune signification péjorative. La perception que les Croates se font d’eux-mêmes va souvent à l’encontre de celle qui provient de l’Autre, à savoir de leurs voisins serbes ou bosniaques. Aux yeux des Croates, les termes « Balkans » et « balkanisation » signifient non seulement une dislocation géopolitique de l’Europe ; le vocable « Balkans », qui peut porter un signifiant tout à fait neutre en français ou en anglais, et qui est souvent utilisé dans des études géopolitiques, provoque souvent chez les nationalistes et identitaires croates des sentiments associés au comportement barbare, des complexes d’infériorité politique, et l’image de dégénérescence raciale de leur identité blanche. De plus le terme « balkanique » en croate induit souvent un sentiment négatif où se mélangent et se confondent diverses identités raciales et culturelles venues de l’Asie et non de l’Europe. On entend souvent les Croates de n’importe quel bord, se lancer mutuellement pour leurs prétendu mauvais comportement, la boutade : « Ah t’es un vrai Balkanique !». Ce qui veut dire, dans le langage populaire croate, avoir un comportement non civilisé, ou être un « plouc » tout simplement. En Serbie, ce n’est pas le cas, l’identité serbe étant bien réelle et bien ancrée dans le temps et dans l’espace des Balkans et ne portant aucune signification péjorative.
Les Allemands, qui connaissent le mieux la psychologie des peuples de l’Europe centrale et des Balkans, sont très au courant de ces identités conflictuelles chez les peuples de l’Europe de l’Est et des Balkans. D’ailleurs, le terme « der Balkanezer » possède une signification fortement injurieuse dans le lexique allemand.
Quelle Europe ?
Passons à l'Europe. A la fameuse Union européenne, bien sûr. Alors, qu’est que cela veut dire être un bon Européen aujourd’hui ? Soyons honnêtes. Compte tenu de l’afflux massif d’immigrés non-européens, surtout du Moyen Orient, tous les Européens – que ce soient les Français de souche, ou les Anglais de souche et les « souchiens » de toute l’Europe, sont en train de devenir de bons « balkanesques Balkaniques. » En effet, qu’est-ce que cela veut dire aujourd’hui, être Allemand, Français, ou bien Américain, vu le fait que plus de 10 à 15 pour cent d’Allemands et de Français et plus de 30 pour cent des citoyens américains sont d’origine non–européenne, donc non-blanche ? En passant par Marseille on a l’impression de visiter la ville algérienne ; l’aéroport de Francfort ressemble à celui de Hongkong. Les alentours de Neukölln à Berlin charrient les parfums de la casbah libanaise. La glèbe, le terroir, la terre et le sang, si chères à Maurice Barrès, si chers à nous tous, qu’est-ce que cela veut dire aujourd’hui ? Strictement rien.
On a beau prendre maintenant les allogènes comme coupables. Force est de constater que ce sont nous, les Européens, qui sommes les premiers responsables de l’occidentalisation et donc de la perte de notre identité. Ce faisant on a beau vilipender la prétendue inculture des Américains, au moins ils ne sont pas tiraillés par le petit tribalisme intra-européen. Les Américains de souche européenne peuvent demain, à la rigueur, devenir le fer de lance de la renaissance d’une nouvelle identité euro-blanche. Force et de constater que les sentiments d’identité raciale chez les nationalistes blancs américains sont plus forts que chez les nationalistes européens.
Or en Europe de demain, dans le meilleur des mondes européens, même sans aucun allogène, il est douteux que le climat sera d’emblée propice à des grandes embrassades fraternelles entre les Irlandais et les Anglais, entre les Basques et les Castillans, entre les Serbes et les Croates, entre les Corses et les Français. Soyons francs. Toute l’histoire de l’Europe, toute l’histoire des Européens, au cours de ces deux millénaires s’est soldée par des guerres fratricides interminables. Cela vaut toujours pour L’Europe orientale, à savoir « l’Europe de l’Est, » qui continue toujours d’être en proie à la haine interethnique. Le dernier conflit en date fut la guerre récente entre deux peuples similaires, les Serbes et les Croates. Qui peut nous garantir le contraire demain, même si l’afflux des Asiatiques et les Africains devait prendre subitement fin ?
Se dire « être un bon Européen » aujourd’hui, ne veut rien dire. Se proclamer un « bon Occidental » non plus. Etre enraciné dans son terroir dans un monde globaliste n’a strictement aucun sens aujourd’hui, vu que nos quartiers sont peuplés d’allogènes qui avec nous sont soumis à la même culture marchande. Il y a au moins quelque chose de paradoxal avec l’arrivée des non-Européens : les interminables guerres et les disputes entre les grands discours des nationalistes européens, entre les Polonais et les Allemands, entre les Serbes et les Croates, entre les Irlandais et les Anglais – semblent devenus dérisoires. L’afflux constant de non-Européens dans nos contrées européennes fait de la désignation « L’Europe européenne » une absurdité lexicale.
Ce qu’il nous reste à nous tous à faire c’est le devoir de nous définir tout d’abord comme héritiers de la mémoire européenne, même si nous vivons hors d’Europe, même en Australie, au Chili, ou en Amérique et même sur une autre planète. Force est de constater que nous tous « les bons Européens » au sens nietzschéen, nous pouvons changer notre religion, nos habitudes, nos opinions politiques, notre terroir, notre nationalité, voir même nos passeports, mais nous ne pouvons jamais échapper à notre hérédité européenne.
Non les allogènes, mais les capitalistes, les banksters, les « antifas » et les architectes des meilleurs des mondes, sont désormais nos principaux ennemis. Pour leur résister, il nous incombe de ressusciter notre conscience raciale et notre héritage culturel. Tous les deux vont de pair. La réalité de notre race et culture blanche ne peut pas être niée. Nous tous, nous pouvons tout changer et même aller sur une autre planète. Mais notre hérédité, à savoir notre fond génétique, on ne peut jamais changer.
La race, comme Julius Evola ou Ludwig Clauss nous l’enseignent, n’est pas seulement la donnée biologique – notre race est aussi notre responsabilité spirituelle qui seule peut assurer notre survie européenne.
Tomislav Sunic ( www.tomsunic.com)est écrivain et membre du Conseil d’Administration de American Freedom Party. http://a3p.me/leadership
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mardi, 28 mai 2013
Dominique Venner, la lueur sacrée de l’arme
Dominique Venner, la lueur sacrée de l’arme
par Claude BOURRINET
Le mardi, Dominique Venner s’est tiré une balle dans la bouche, peu après 16 heures, dans le chœur de Notre-Dame de Paris, ce haut monument de la grandeur française, de sa spiritualité, de son génie, après avoir glissé un message sur l’autel. On a retrouvé sur lui six enveloppes cachetées adressées à ses proches. La presse, rapidement, a identifié le « désespéré » comme étant un « essayiste et ancien membre de l’O.A.S., proche de la mouvance des anti-mariage gay ». Fiche signalétique un peu courte. Dominique Venner était, par ses ouvrages historiques, la Nouvelle Revue d’Histoire, qu’il animait, ses interventions, sa personne, son personnage, une figure importante de la constellation nationale, un phare pour certains, un témoin capital pour tous.
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Dominique Venner ou la fondation de l’avenir
Dominique Venner ou la fondation de l’avenir
par Georges FELTIN-TRACOL
Le 21 septembre 1972, jour de l’équinoxe d’automne, se suicidait Henry de Montherlant. C’est au lendemain de la Pentecôte chrétienne qui marque la montée du Christ au Ciel, un mardi – jour de Mars – et au mois de la Vierge Marie – mai -, que Dominique Venner s’est donné la mort dans « un lieu hautement symbolique, la cathédrale Notre Dame de Paris que je respecte et admire », précise-t-il dans son testament politique.
À 78 ans, Dominique Venner a librement choisi de se retirer définitivement de ce monde dont il voyait poindre l’avènement du nihilisme triomphant. Il est mort comme il a toujours vécu : en homme debout qui ne plia jamais face à l’adversité. Toute sa vie, il a montré, il a été l’exemple même de la virilité, et pratiqué cette virtu chère à Machiavel et aux vieux Romains. La verticalité faisait sens en lui et a ordonné son existence jusqu’à la fin.
Le jeune parachutiste volontaire qui traquait le fellagha dans le djebel, l’expert renommé des armes, l’activiste pro-Algérie française qui rêvait de renverser par l’opération « Gerfaut » la Ve République naissante, le militant politique qui sut renouer et réinscrire la tradition française dans la continuité européenne, le chasseur réputé dont le patronyme se rapproche si symboliquement de la vénerie, l’écrivain et l’historien à la riche bibliographie, le fondateur et responsable d’Enquête sur l’Histoire, puis de La Nouvelle Revue d’Histoire, l’homme privé, père et grand-père heureux, représentent diverses facettes qui, loin de se contredire, expriment en réalité une cohérence intérieure d’une rare intensité.
En observateur attentif de la longue durée des peuples, Dominique Venner s’inquiétait des signes chaque jour plus visibles de la langueur mortifère de ses compatriotes autochtones. Ce guetteur de l’imprévu historique désirait les voir se réveiller le moment venu. C’est dans cette perspective salvatrice qu’il commit en pleine lucidité un acte ultime.
Par cette action sacrificielle, il a voulu secouer la psyché des Européens, car toute guerre est d’abord psychologique, culturelle, idéologique. Il savait que ce serait le don de soi absolu, l’affranchissement total des siens, de leur amour et de leur amitié, et l’acceptation sereine que son sang vienne, tel un nouveau Saint Chrême, oindre une mémoire collective pas encore amnésique.
« Dans toute guerre, des hommes sont volontaires pour des missions sacrifiées, note-t-il dans Le cœur rebelle (p. 85) ». Cette décision héroïque, Dominique Venner l’a nourrie, méditée, réfléchie patiemment. Dans son billet du 23 avril 2013, « Salut à toi, rebelle Chevalier ! », interrogeant, après Jean Cau, la superbe gravure d’Albrecht Dürer Le Chevalier, la Mort et le Diable, il conclut que « l’image du stoïque chevalier m’a souvent accompagné dans mes révoltes. Il est vrai que je suis un cœur rebelle et que je n’ai pas cessé de m’insurger contre la laideur envahissante, contre la bassesse promue en vertu et contre les mensonges élevés au rang de vérités. Je n’ai pas cessé de m’insurger contre ceux qui, sous nos yeux, ont voulu la mort de l’Europe, notre civilisation millénaire, sans laquelle je ne serais rien ». Il comprend que, au-delà de l’adoption du mariage contre-nature, s’opère un changement d’essence civilisationnelle contre lequel seule peut contrecarrer une ardente et ferme résolution.
S’il a commis le geste irréparable devant l’autel de Notre Dame de Paris, lui le païen qui ne se sentait aucune affinité avec le monothéisme, c’est peut-être parce qu’il a saisi l’urgence du Katékhon, cette figure eschatologique qui retient l’Antéchrist afin de maintenir l’ordre normal du cosmos.
« Alors que tant d’hommes se font les esclaves de leur vie, mon geste incarne une éthique de la volonté. » Il ajoute dans son ultime billet, « La manif du 26 mai et Heidegger », mis en ligne sur son blogue ce mardi 21 mai dans la matinée qu’« il faudra certainement des gestes nouveaux, spectaculaires et symboliques pour ébranler les somnolences, secouer les consciences anesthésiées et réveiller la mémoire de nos origines. Nous entrons dans un temps où les paroles doivent être authentifiées par des actes ». Il y souligne en outre qu’on trouvera « dans mes écrits récents la préfiguration et les explications de mon geste ».
Dominique Venner n’était pas un désespéré. Il en était même aux antipodes. Déjà, dans Le cœur rebelle, il insistait, lui l’admirateur de Maurice Pinguet, auteur de La mort volontaire au Japon, sur la haute figure du samouraï et de sa dernière métamorphose historique, le kamikaze, le combattant d’assaut qui, au nom de ses principes, se dépasse une dernière fois. « Mourir en soldat, avec la loi pour soi, exige moins d’imagination et d’audace morale que de mourir en rebelle solitaire, dans une opération suicide, sans autre justification intime que l’orgueilleuse certitude qu’on est le seul à pouvoir accomplir ce qui doit être fait (Le cœur rebelle, p. 85) ». Dans des circonstances qu’il a estimées propices, il a proclamé qu’« il faudrait nous souvenir aussi, comme l’a génialement formulé Heidegger (Être et Temps) que l’essence de l’homme est dans son existence et non dans un “ autre monde ”. C’est ici et maintenant que se joue notre destin jusqu’à la dernière seconde. Et cette seconde ultime a autant d’importance que le reste d’une vie. C’est pourquoi il faut être soi-même jusqu’au dernier instant. C’est en décidant soi-même, en voulant vraiment son destin que l’on est vainqueur du néant. Et il n’y a pas d’échappatoire à cette exigence puisque nous n’avons que cette vie dans laquelle il nous appartient d’être entièrement nous-mêmes ou de n’être rien ». « Je me sens le devoir d’agir tant que j’en ai encore la force. Je crois nécessaire de me sacrifier pour rompre la léthargie qui nous accable », répond-il par avance à tous ses détracteurs.
« On ne meurt pas chacun pour soi, mais les uns pour les autres, ou même les uns à la place des autres (p. 57) » rappelle Georges Bernanos dans Le Dialogues des Carmélites. L’altruisme héroïque, combattant et radical défendu par Dominique Venner se concrétise par un acte décisif qui transcende toute une œuvre d’écriture et de réflexions pour rejoindre les antiques préceptes des vieux Romains, en particulier ceux du stoïcien Sénèque pour qui « bien mourir, c’est échapper au danger de mal vivre ». Or, ce mal vivre, par-delà la simple condition personnelle, affecte toute la société française et européenne. Arrive le temps que, « le discours dominant ne pouvant sortir de ses ambiguïtés toxiques, il appartient aux Européens d’en tirer les conséquences. À défaut de posséder une religion identitaire à laquelle nous amarrer, nous avons en partage depuis Homère une mémoire propre, dépôt de toutes les valeurs sur lesquelles refonder notre future renaissance en rupture avec la métaphysique de l’illimité, source néfaste de toutes les dérives modernes ». Dans ce contexte mortel pour l’esprit et pour les âmes, « apprendre aux gens à bien mourir est la grande affaire du stoïcisme, écrit Gabriel Matzneff (« La mort volontaire chez les Romains » dans Le Défi, p. 147) ».
Gabriel Matzneff distingue par ailleurs qu’« il y a ceux qui se tuent au nom d’une certaine idée qu’ils se font de la morale privée et publique, au nom d’une certaine idée qu’ils se font de l’homme : ils quittent un monde où les valeurs à quoi ils sont attachés n’ont plus cours et où partout triomphent celles qu’ils méprisent (pp. 164 – 165) ». Dominique Venner appartient à ces derniers. Il récuse en effet avec vigueur l’antagonisme artificiel et fallacieux entre le postmodernisme sociétal hyper-individualiste et le holisme conquérant de communautés allogènes, parfois musulmanes, sur notre continent. Il s’élève contre cette submersion migratoire qui bouleverse la physionomie européenne habituelle. « Alors que je défends l’identité de tous les peuples chez eux, je m’insurge contre le crime visant au remplacement de nos populations. »
En mettant fin à ses jours, Dominique Venner témoigne qu’une troisième voie autochtone identitaire française et européenne est la seule apte à préserver nos traditions plurimillénaires. Non, ce n’est pas en entérinant l’institution de l’homosexualité, de la famille monoparentale et de l’avortement de masse qu’on fera reculer l’islam et l’immigration extra-européenne. Et ce n’est pas en acceptant l’implantation de minorités étrangères aux mœurs exotiques qu’on rétablira les principes traditionnels de l’Être européen. C’est en les affrontant simultanément que les Européens ne sombreront pas dans le néant de l’histoire. Mais il faudra beaucoup de force morale pour mener de front ce double combat.
Dominique Venner n’a pas manqué de force morale. En allant, une arme à la main, jusqu’au chœur d’un espace consacré, depuis longtemps profané par des masses de touristes, il a resacralisé le lieu. Avait-il en ses derniers instants le souvenir du seppuku du Japonais Yukio Mishima en novembre 1970, et des immolations anti-communistes du Tchèque Jan Palach en janvier 1969 et du militant solidariste français Alain Escoffier en février 1977 ? Plus que marquer l’opinion, Dominique Venner qui savait que toute fondation pérenne exige un sacrifice préalable a surtout semé par sa disparition assumée les germes d’un renouveau continental et poser les assises d’un nouveau cycle boréen au XXIe siècle.
Georges Feltin-Tracol
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dimanche, 26 mai 2013
Algérie : danger extrême tous azimuts
Algérie : danger extrême tous azimuts
Un après-Bouteflika de tous les périls
Jean Bonnevey
Ex: http://www.metamag.fr/
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samedi, 25 mai 2013
Afscheidsbrief van Dominique Venner
Ik hou van het leven en verwacht niets meer daarna tenzij dat mijn ras moge blijven bestaan en dat mijn geest zou overleven.
Geconfronteerd met de grote gevaren die vandaag de dag mijn Frans en mijn Europees vaderland bedreigen, beschouw ik het, nu de avond van dat leven is aangevangen, als mijn plicht tot actie over te gaan, zolang ik daar de kracht toe heb.
Ik denk dat het nodig is dat ik mij opoffer om de slaperigheid die ons overrompelt, te doorbreken.
Wat mij van leven overblijft, wil ik dus wegschenken als een vorm van protest maar ook ten bate van de heropbouw van onze beschaving.
Ik heb een bijzonder symbolische plek gekozen om dit te doen, de Notre Dame kathedraal van Parijs waar ik eerbied en bewondering voor koester. Ze werd door onze voorouders met het genie dat hun eigen was, opgericht op een eiland dat al eerder werd gebruikt voor een cultus die naar onze oudste wortels verwijst.
Daar waar zoveel mensen aan hun eigen leven verslaafd zijn, wil ik met dit gebaar getuigenis afleggen ten gunste van de ethiek van de wilskracht.
Mijn zelfgekozen dood is bedoeld om slapende gewetens wakker te maken.
Ik kom op tegen fatalisme.
Ik kom op tegen de vergiftiging van onze zielen en tegen de invasie van persoonlijke verlangens die onze identiteitsverankering zwaar aantasten en zich onder meer vergrijpen aan het gezin, dat nochtans de intieme onderbouw vormt van onze duizendjarige beschaving.
Ik verdedig de identiteit van alle volkeren op hun eigen grondgebied en kom dus in opstand tegen de misdaad die de vervanging van onze bevolking op het oog heeft.
Vermits de heersende ideologieën hun toxische ambiguïteit niet kwijt geraken, moeten wij Europeanen hieruit de nodige consequenties trekken.
We moeten beseffen dat wij, bij gebrek aan een eigen identiteitsreligie die ons houvast zou kunnen zijn, al sinds Homeros beschikken over een gemeenschappelijk geheugen als bergplaats voor alle waarden waarop wij onze toekomstige renaissance zullen heropbouwen, bevrijd van de metafysica van het grenzeloze, die de nefaste oorzaak van al de moderne afwijkingen is.
Ik vraag bij voorbaat vergiffenis aan al wie mijn dood pijn zal doen. Eerst en vooral aan mijn vrouw, aan mijn kinderen, kleinkinderen, en ook aan mijn vrienden en getrouwen.
Ik ben er echter van overtuigd dat, wanneer de schok van de pijn zal beginnen wegdeemsteren, zij de betekenis van het door mij gestelde gebaar zullen begrijpen en dat hun lijden dan stilaan in trots zal worden omgezet.
Ik wens dat ze met elkaar overleggen om te blijven voortbestaan.
Ze zullen in wat ik recent heb geschreven de prefiguratie en de verklaring van mijn daad terugvinden.
Voor bijkomende informatie kan steeds beroep worden gedaan op mijn uitgever Pierre-Guillame de Roux die niet op de hoogte was maar mij al zeer lang kent.
Dominique Venner
16 april 1935 - 21 mei 2013
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vendredi, 24 mai 2013
Infoavond met Fernand Keuleneer in Leuven
Infoavond
met Fernand Keuleneer
in Leuven
31 mei 2013
.
Vrijdag 31 mei 2013 om 20 uur
Infoavond
Syrië, een typisch 21ste-eeuws conflict?
Beschouwingen over internationaal recht, mensenrechten, republiek en religie
Met als gastspreker:
Fernand KEULENEER
Advocaat aan de balie te Brussel
.
Plaats: Stellazaal Café Tempo
Baron August de Becker Remyplein 52
3010 Kessel-Lo.
Aan de achterkant van het station van Leuven.
Vrije toegang mits twee consumpties per persoon.
Organisatie: Mediawerkgroep Syrië – Email: info@MWSyria.com – Blog: http://MWSyria.com – Facebook: http://www.facebook.com/MWSyria – Twitter: @MWSyria
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Réflexions générales sur l’état de la “démocratie” en Belgique
Robert Steuckers:
Réflexions générales sur l’état de la “démocratie” en Belgique
Conférence prononcée à Louvain, Salle Maria-Theresa, 22 mars 2012
Traduction française du script original néerlandais
A Jean E. van der Taelen (1917-1996), qui a lutté jusqu’à son dernier souffle pour une “démocratie directe et décisionnaire”.
“Qu’est-ce que la démocratie?” et “Qu’est-ce que la démocratie dans l’Etat belge aujourd’hui?” sont les deux questions auxquelles vous m’avez demandé de répondre dans le cadre de cette modeste conférence. Chacun semble savoir ce qu’est la démocratie mais force est de constater que la grande majorité de nos concitoyens, qu’ils soient Flamands, Wallons ou Allemands ne savent pas trop bien comment fonctionnent les mécanismes de l’Etat où ils vivent, Etat qui est théoriquement une “démocratie”.
Cet Etat est né en 1830, je ne vous apprends rien, et a voulu d’emblée se créer comme une démocratie modèle, en imitant paradoxalement certaines effervescences révolutionnaires françaises (plutôt celles de juillet 1830 que celles de 1789) tout en conservant des modes non démocratiques de fonctionnement, émanant du centralisme jacobin et bonapartiste, qui avaient pourtant été maintenus sous le régime du Royaume-Uni des Pays-Bas (1815-1830). Le nouvel Etat belge de 1830 combine de manière quelque peu incohérente des aspirations démocratiques, voire anarchisantes, avec une volonté de se référer à des modèles français tout en s’en défiant (notamment dans les milieux catholiques). La “révolution belge” de 1830 n’est donc pas un phénomène homogène: s’y téléscopent une volonté démocratique et constitutionaliste (que l’on repère surtout dans les pays allemands, en rébellion contre un certain centralisme prussien et contre la volonté anti-révolutionnaire de Metternich), une révolte populaire et anarchique pour le pain à Bruxelles à la fin de l’été 1830, un espoir d’ascension sociale plus rapide chez les catégories de la population qui avaient bénéficié du régime bonapartiste (observable chez les Libéraux de l’époque), un élément réactionnaire catholique qui refuse d’obéir à un Prince protestant de la dynastie des Orange-Nassau (et est prêt à s’allier avec le “diable” libéral pour s’en débarrasser), etc. Ce noeud inextricable de contradictions ira en s’accentuant, connaîtra parfois des périodes de relatif apaisement, pour aboutir au chaos tranquille et à l’indifférence généralisée d’aujourd’hui, face à un pouvoir dont les fondements religieux ou philosophiques et les rouages du fonctionnement apparaissent de plus en plus opaques.
A l’origine du fait belge: des troupes hétéroclites de mercenaires
Le député et historien Karim Van Overmeire a publié récemment, au sein du mouvement flamand, une histoire très fouillée de cette révolution de 1830, en rappelant notamment qu’il a fallu, comme en Syrie aujourd’hui, faire appel à des mercenaires issus des bas-fonds de Paris (la “Légion belge” du faux Marquis Doulcet de Pontécoulant) ou de Londres (les compagnies de Lecharlier) pour conquérir les Flandres, que ces mercenaires pilleront à l’occasion quand les caisses du nouvel Etat ne pouvait pas encore les payer décemment. Parmi ces mercenaires, on trouvait certes des Belges émigrés pour toutes sortes de motifs (relevant généralement du droit commun) mais aussi de nombreux Français, quelques Britanniques ou Irlandais, beaucoup d’Allemands, quelques Italiens et Ibériques. L’évocation de ces mercenaires turbulents est une rengaine du mouvement flamand, me diront sans doute mes lecteurs francophones, soucieux de se démarquer de ce “mouvement flamand” qu’ils craignent, souvent de manière irrationnelle. Cependant, la plus belle histoire de ces troupes a été écrite par Pierre Nothomb, l’arrière-grand-père d’Amélie Nothomb, écrivain en vue aujourd’hui, qui était un défenseur catholique de l’Etat belge, un adversaire des autonomistes flamands et un germanophobe dans la première phase de sa carrière. Dans un recueil de “bons textes”, établi en 1942 et intitulé “Curieux personnages” (éd. “Les Oeuvres”), Pierre Nothomb narre les tribulations de Pierre-Joseph Lecharlier, celui qui a levé les “volontaires belges de Londres” en 1830. Sous-officier du RU des Pays-Bas à Mons en 1817, Lecharlier se fait remarquer pour son inconduite, est ensuite incorporé dans un régiment disciplinaire à Hardenwijck; il déserte, rejoint une compagnie étrangère de l’armée française à Paris puis déserte une nouvelle fois —car il s’ennuie dans l’armée de la Restauration— pour se retrouver à Londres en 1824. Ses biographes sont étrangement silencieux sur ses activités en Angleterre: on chuchote qu’il a été contrebandier. En 1830, il lève des volontaires en Angleterre (mais, parmi eux, aucun Anglais!) et débarque à Bruxelles le 5 octobre, juste après les “journées de septembre”. La troupe de Pontécoulant y est déjà, composée en majorité de Parisiens recrutés dans le “Café belge”, rue Saint-Honoré. Le reste de cette petite armée privée compte des volontaires de toutes les nations. Doulcet de Pontécoulant connaissait la guerre, et même la “petite guerre”, le “Kleinkrieg” des partisans: il devait, au moment de l’effondrement de l’empire napoléonien, commander les francs tireurs de la Haute Saône contre les armées autrichiennes qui venaient de franchir les Vosges alsaciennes (un tableau gigantesque évoque ce passage au Musée militaire de Vienne); mis à pied au retour de Louis XVIII, il sert quelques années dans l’armée brésilienne. D’autres équipes de déclassés et d’aventuriers sont présentes (celles de Coché, Bauwens, Maréchal et Molesini-Sautel), en tout 700 à 900 hommes. Ces hommes s’emparent ensuite de Gand où Bauwens manque d’occire un magistrat de la ville, ce que l’oblige à quitter la troupe avec une trentaine de compagnons qui pillent la Flandre rurale pour subvenir à leurs besoins et pour se constituer une petite cagnotte.
Après les Flandres, l’Algarve
Doulcet de Pontécoulant tentera aussi de conquérir la Flandre Zéelandaise pour dégager l’Escaut et permettre au nouveau royaume en gestation de profiter des avantages du port d’Anvers, toujours tenu par la garnison loyaliste. Ces aventuriers turbulents participent ensuite aux combats de 1831-32 et, une fois la paix revenue, le gouvernement les encourage vivement à s’engager dans une “légion étrangère” portugaise, où se bousculaient déjà, au service du parti des “constitutionnels”, des troupes hétéroclites et hautes en couleur, anglaises, françaises, germaniques et écossaises. Le 6 octobre 1833, les volontaires issus des troupes de Pontécoulant, de Lecharlier et des autres capitaines de fortune qui avaient sévi en Flandre, s’embarquent à Ostende, sous le commandement de Lecharlier, et prennent la direction du Portugal, où des volontaires de toutes nationalités s’étaient déjà rassemblés, dont le Colonel Borso, un Italien de Gènes, le major polonais Urbansky et l’officier de cavalerie anglais Bacon. Lecharlier fera, pour Dona Maria, la Reine constitutionaliste, la conquête de l’Algarve contre les soldats de Don Miguel, posé comme “réactionnaire” et comme “tyran”, parce que partisan de maintenir certains dispositifs de l’ancien régime.
Le 1 mai 1835, le gouvernement intègre dans la nouvelle armée belge les officiers de la troupe de Lecharlier, qui avaient combattu au Portugal, sauf leur chef, jugé trop turbulent et indiscipliné. Lecharlier entreprend des démarches pour se faire intégrer dans l’armée: en vain! Dépité par les refus successifs qu’il encaisse, il quitte l’Europe pour chercher l’aventure en Amérique centrale mais disparaît dans le naufrage de son navire. Nothomb raconte avec lyrisme et grand talent littéraire l’aventure de Lecharlier, tout en laissant bien sous-entendre que le personnage, indubitablement pittoresque, ne convenait pas au bon fonctionnement d’une armée normale dans un Etat qui voulait bien vite acquérir un statut de normalité en Europe et se défaire de sa mauvaise réputation “révolutionnaire”.
Ces anecdotes, peu évoquées, sur les événements de 1830-31, démontrent que l’avènement de la “démocratie” officielle en Belgique ne s’est pas fait avec l’assentiment du gros du peuple, généralement acceptant et peu intéressé à la politique (contrairement à ses voisins français ou allemands) mais 1) par le déclic d’une révolte locale anarchisante sans projet politique défini, uniquement pour le pain, à Bruxelles et 2) par le truchement de troupes aventurières, recrutées dans les bas-fonds de villes étrangères comme Paris, Londres ou Roubaix, comme on recrute aujourd’hui à Molenbeek ou à Schaerbeek des djihadistes qui luttent contre le pouvoir établi en Syrie. L’avènement, dans la violence également et avec les mêmes acteurs, du “constitutionalisme” au Portugal participe du même schéma opératoire: les puissances occidentales, subversives dans leurs fondements, recrutent des déclassés pour forcer des pays limitrophes à adopter des principes de gouvernement semblables aux leurs, pour mettre en selle des régimes prêts à faire leur politique et surtout peu susceptibles de s’allier avec les puissances traditionnelles du coeur du continent.
Opposition au système Metternich – L’oeuvre politique d’Ernst Moritz Arndt
Il n’empêche qu’au cours des trois ou quatre premières décennies du 19ème siècle, les peuples d’Europe aspiraient à bénéficier d’une constitution démocratique et voulaient un élargissement du droit de vote aux catégories plus modestes de la population. Les peuples avaient été mobilisés pour faire la guerre contre Napoléon, surtout en Prusse où les bataillons de volontaires de 1813 s’étaient recrutés dans toutes les strates de la population, sans aucune distinction de classe. L’obligation de verser son sang, aux yeux des anciens soldats, devait être compensée par le droit d’intervenir “démocratiquement” dans la formation des gouvernements, des pouvoirs législatifs et exécutifs. Plusieurs petits soulèvements locaux ont ainsi secoué l’Allemagne entre 1825 et 1835: tous portaient, en signe de ralliement, un drapeau rouge-noir-or, symbole de “démocratie” dans les pays germaniques. Ces couleurs ressemblent à celles dites du Brabant, rouge-jaune-noir, utilisées lors de la “révolution” de 1789 contre les réformes éclairées de l’Empereur Joseph II. La différence, de taille, c’est que la révolte anti-joséphienne de 1789 était ultra-réactionnaire, dirigée contre les “Lumières” du despotisme éclairé, et ne comprenait qu’une aile minoritaire libérale, dite “vonckiste”, rapidement mise hors circuit par le déchaînement, dans la rue, d’une violence inouïe. Celle de 1830 a toutes les apparences du libéralisme du début du 19ème, affublé de quelques oripeaux romantiques (la “Muette de Portici”) mais sans l’atout de la politique et de la pensée romantiques, telles que les a décrites un Georges Gusdorf, éminent professeur de l’université de Strasbourg, dans ses multiples volumes consacrés à l’évolution de la pensée du 18ème au 19ème. Et sans la rigueur et la concision de la pensée d’Ernst Moritz Arndt, populiste réclamant une constitution, à la manière des Lumières et du libéralisme du début du 19ème, mais sans la folie révolutionnaire française de vouloir faire table rase de tous les legs du passé ethno-national, enclenchant de la sorte un “processus de dégénérescence” irréversible, faisant basculer les Lumières dans l’ “Ungeist”, le “non-esprit”; en effet, dans son ouvrage “Deutsche Volkwerdung” (= “Le devenir-peuple des Allemands”), il démontre et explique qu’un peuple ne devient peuple que s’il transforme tous ses ressortissants en “zoon politikon” (= “politische Menschen”), ce qui implique d’abjurer les idées et les attitudes réactionnaires qui le minorisent (Kant!), de refuser le cosmopolitisme (expression d’impolitisme dégénéré, déduit d’une coquetterie volontairement inattentive à tout ce qui relève du “hic et nunc”), de refuser avec la même vigueur les pensées mécanicistes et inorganiques (celles de la révolution française qui ne font que laïciser et républicaniser l’absolutisme anti-populaire). Le peuple, en l’occurrence le peuple allemand, ne devient un vrai peuple, à l’instar des Suédois (la Suède est le modèle d’Arndt), donc un peuple politique, que s’il respecte et cultive l’héritage de ses pères, génère une vie artistique qui lui soit propre, adhère aux valeurs héroïques et conserve une vigueur vitale qui en fait en permanence un peuple jeune, challengeur face à toutes les décrépitudes. Enfin, un peuple n’est peuple que si le droit qu’il se donne puise dans les traditions juridiques qui sont les siennes et ne se réfère jamais à des modèles juridiques étrangers (allusion au droit néo-romain du Code Napoléon). Ernst Moritz Arndt était perçu comme un “jacobin”, comme un dangereux révolutionnaire, comme un “démagogue”, par les forces réactionnaires de son époque. On doit plutôt le considérer comme un combattant de la liberté, une liberté qui ne doit rien à la chimère de la “méthodologie individualiste” mais s’inscrit dans le cadre d’un destin collectif, auquel aucun citoyen ne peut se soustraire.
Les effervescences constitutionalistes en pays allemands
Le cycle révolutionnaire-national-constitutionaliste-démocrate en Europe du Nord commence sans doute le 26 mai 1818, quand le Roi Maximilien-Joseph de Bavière accorde une constitution à ses sujets, assortie d’une représentation bicamérale, avec un sénat composé de représentants de la haute noblesse et une chambre basse, composée de la petite noblesse, de la bourgeoisie et de la paysannerie, ce qui impliquait un élargissement très généreux du cens électoral. Le 22 août de la même année, le Grand-Duc Charles de Bade accorde une constitution encore plus libérale à ses sujets. Le 25 septembre 1819, c’est au tour du Roi Guillaume de Wurtemberg d’octroyer à son peuple une constitution similaire à celles de Bavière et de Bade. Dans le reste des pays allemands, la répression s’organise autour d’une “Commission centrale d’enquête” basée à Mayence et frappe les intellectuels. Metternich fait réaffirmer le “principe monarchique” et cherche à dépouiller les chambres de leurs prérogatives, à les réduire à de simples organes de consultation. Malgré cette pression, le Grand-Duc de Hesse-Darmstadt est contraint d’élargir le cens et de modifier la constitution dans un sens plus démocratique, le 18 mars 1820. Au printemps 1830, fin mars, le Grand-Duché de Bade, avant les soulèvements de Paris et de Bruxelles, évolue vers un libéralisme plus souple encore. En juillet 1830, la France devient une monarchie constitutionnelle. En septembre 1830, comme à Bruxelles, les Brunswickois se révoltent et chassent leur Duc, qu’ils s’étaient mis à haïr. Le 5 janvier 1831, le Prince électeur Guillaume II de Hesse accorde une constitution à ses sujets où le “Landtag” dispose à lui seul du droit de lancer toute initiative d’ordre législatif, de contrôler entièrement le budget et de révoquer les ministres. Le 26 mai 1831, le “Landtag” bavarois oblige le Roi à révoquer le ministre de l’intérieur, Edouard von Schenck. Le 4 septembre 1831, un an après les barricades de Bruxelles, le Roi Antoine de Saxe est contraint d’octroyer à son tour une Constitution. Le 31 décembre 1831, les réformes en pays de Bade prennent de l’ampleur: l’ordonnance réglementant le fonctionnement des communes équivaut presque à autonomiser celles-ci et à politiser de plus larges strates de la population.
Hambach: du constitutionalisme à la révolution
Du 27 au 30 mai 1832 se tiennent les “fêtes nationales” de Hambach, auxquelles participent plus de 30.000 personnes, venues surtout de l’Allemagne du Sud-Ouest, donc de pays bénéficiant déjà d’un régime constitutionnel. Deux délégations étrangères y participent: l’une vient de France, l’autre de Pologne (où la révolte de 1830-31 a été écrasée par les forces prussiennes et russes, garantes de l’ordre voulu par Metternich). Les orateurs réclament cette fois l’abolition du principe monarchique qui maintient, disent-ils, la division de l’Allemagne en petits duchés et principautés. Un république unie, juxtaposée à d’autres républiques nationales en Europe, rassemblerait tous les Allemands en un seul Etat. La “fraternité démocratique” entre les peuples remplacerait la “Sainte Alliance” des empereurs, rois et princes, reposant sur le principe monarchique. Avec Hambach se clot l’ère des revendications constitutionalistes au sein d’Etats, petits ou grands, qui pouvaient rester, dans l’optique des contestataires eux-mêmes, des monarchies. C’est un pas que la “révolution belge”, la “Belgische omwenteling” de Maurits Josson, n’a pas franchi: les révoltés cherchaient un roi... (sur Hambach, cf. Wolfgang Strauss, “Ein Volk, das seine Ketten bricht – 150 Jahre Hambach – Parteienfestival oder revolutionäre Erneuerung?”, in: “Mut”, n°177, Mai 1982).
Les troubles qui ont conduit à l’indépendance belge s’inscrivent donc dans un contexte européen de revendications nationales-constitutionalistes (plutôt que “nationales-libérales”) et de contestation de l’ordre établi au Congrès de Vienne en 1815 sous l’impulsion du Prince Metternich, soucieux de ne plus jamais livrer l’Europe aux “démagogues”. Vu l’analphabétisme assez répandu dans les anciens Pays-Bas autrichiens, après un 17ème et un 18ème sans productions culturelles notables (cf. H. J. Elias, “Geschiedenis van de Vlaams Gedachte”, vol. 1), il n’est pas sûr que le gros de la population des provinces belges cherchait un ordre constitutionnel car une telle vision politique aurait impliqué un taux d’alphabétisation plus élevé, justement comme dans les provinces d’Allemagne du Sud (Bade, Bavière, Wurtemberg), auxquelles les souverains avaient concédé des constitutions, ou, à la limite, comme dans l’ex-Duché du Luxembourg, inféodé au Royaume-Uni des Pays-Bas (RUPB), seule région où l’alphabétisation était largement répandue à l’époque. Le RUPB disposait certes d’une constitution, la ‘Grondwet”, mais la volonté royale de moderniser les deux composantes du pays était perçue comme “anti-démocratique” par les libéraux francophiles et post-bonapartistes et par les catholiques, hostiles à toute immixtion royale-protestante dans les affaires scolaires et religieuses des ex-Pays-Bas autrichiens. Les libéraux, majoritairement francophones et culturellement tournés vers la France, contestaient la politique linguistique du Roi Guillaume des Pays-Bas, qui accordait une place prépondérante au néerlandais. Les catholiques voulaient un Etat majoritairement catholique, ce qu’il était, mais cette majorité catholique devait —à leurs yeux et à une époque marquée par l’ultramontanisme— s’imposer sans le moindre partage, être libérée de toute présence protestante-calviniste (et accessoirement de toute influence libérale trop prépondérante). Les catholiques de 1830 se retrouvent plus ou moins sur la même ligne que les révoltés de 1789, les “Statistes” fédéralistes, harangués par un fanatique religieux, le chanoine van Eupen. Les autres, les libéraux francophiles, souvent issus du fonctionnariat napoléonien, veulent s’aligner sur des modèles français, parfois dans l’espoir d’une annexion ultérieure, ou, du moins, espèrent l’avènement d’une monarchie constitutionnelle similaire à celle de la France de Louis-Philippe. Ces deux forces dominantes, après avoir liquidé par corruption la révolte prolétarienne pour le pain à Bruxelles (cf. les travaux de Maurice Bologne), vont donner le ton: les influences diffuses des nationaux-constitutionalistes allemands réémergeront, de manière seulement fragmentaire, dans deux filons contestataires du 19ème siècle (et partiellement du 20ème), le mouvement flamand émergent et les libéraux dits de “gauche” (dont une fraction, allié à d’autres forces situées plus à “gauche”, donnera ensuite naissance au pilier socialiste). Ces deux mouvements militeront notamment pour une alphabétisation générale dans la langue du peuple.
Les avatars du drapeau
L’histoire du drapeau belge témoigne des atermoiements entre factions différentes: quand des mercenaires français hissent le drapeau tricolore bleu-blanc-rouge sur l’Hôtel de Ville de Bruxelles, celui-ci est aussitôt arraché par la garde urbaine, placée à ce moment-là des événements sous la direction de Ducpétiaux et Jottrand, et remplacé par un drapeau rouge-jaune-noir, considéré comme “brabançon”: dans ces couleurs se mêlent le souvenir (sans doute fort diffus et ténu en 1830) des événements de 1789 et une vague adhésion au démocratisme constitutionaliste des pays d’Allemagne du Sud. Au départ, les couleurs sont disposées horizontalement, comme le drapeau de la “révolution brabançonne” de 1789 et comme l’étendard de ralliement des démocrates allemands de l’ère de la Restauration. Les couleurs seront ensuite placées en position verticale, par une sorte de compromis: on ne veut pas du jacobinisme français, forme laïque et révolutionnaire d’absolutisme, mais on ne veut pas davantage du démocratisme allemand; on est constitutionaliste, soit en faveur d’une monarchie constitutionnelle, mais on n’est pas nationaliste: ni à la manière de la bourgeoisie louis-philipparde (cf. Heinz-Gerhard Haupt, “Nationalismus und Demokratie – Zur Geschichte der Bourgeoisie im Frankreich der Restauration”, Europäische Verlagsanstalt, Frankfurt am Main, 1980) ni à la manière des révolutionnaires nationaux-démocratiques qui ont défilé lors des “fêtes” de Hambach en 1832. Ce premier compromis à la belge est symbolisé par les avatars successifs du drapeau du nouvel Etat: couleurs verticales pour montrer que l’on ne va pas trop loin dans la révolte (Gendebien sur le soulèvement prolétarien de Bruxelles: “Une mauvaise farce d’écoliers”), que l’on maintient une partie du fonctionnariat bonapartiste (resté en place à l’époque du RUPB et noyau dur du libéralisme maçonnique belge), que l’on conserve le droit romain à la sauce Bonaparte et que l’on ne revient pas aux traditions juridiques des Flandres et du Brabant (ce qu’un Arndt aurait demandé...), que l’on permet au Roi d’exercer certaines prérogatives d’ancien régime mais que l’on reste néanmoins dans la tradition constitutionaliste. Ce système sera même un modèle pour les députés de l’éphémère parlement de Francfort de 1848: pour l’Allemagne unie, ils ont voulu un régime de monarchie constitutionnelle à la belge voire le Roi Léopold I comme nouvel empereur constitutionnel!
Un noeud gordien que l’on ne peut plus trancher
Le noeud de contradictions demeure irrésolu après l’indépendance de la Belgique et ne peut être tranché (ne sera jamais tranché), à la manière d’Alexandre, parce qu’il n’existe pas de culture politique commune à tous, ni aux communautés linguistiques ni aux factions qui divisent et le pays et chacune de ces communautés, et que les tentatives littéraires de forger un esprit national se sont heurtées à l’indifférence d’une bourgeoisie dominante mais matérialiste et, partant, totalement inculte (cf. le désintérêt pour l’oeuvre de Charles Decoster puis pour les réalisations architecturales de Victor Horta et de son équipe, édifices que l’on commençait déjà à détruire du vivant de l’architecte parce qu’on ne les trouvait pas assez “utiles”!!). La révolte des “libéraux de gauche”, et l’abnégation admirable de jeunes instituteurs cherchant à alphabétiser les masses, notamment à Bruxelles, permettront certes de développer, tardivement, une politique scolaire digne d’un Etat moderne, mais une politique qui se heurtera de manière récurrente à un matérialisme borné et tenace, à des sectarismes totalement anachroniques, à une haine féroce contre tout ce qui relève de la culture humaniste, hier moquée par les “réalistes”, par les suffisants qui qualifiaient les matières scolaires relevant de la culture générale, comme la géographie ou l’histoire, ou des humanités classiques —le grec et le latin— d’inutilités (“ça sert à rien”); aujourd’hui culture générale et joyaux misérablement résiduaires de l’éducation classique sont noyées dans un festivisme hostile à toute qualité et dans un relativisme “interculturel” qui nous fait sombrer dans la barbarie la plus obscurantiste (pour saisir de manière poignante ce que fut l’apostolat de jeunes instituteurs flamands et laïques à Bruxelles au 19ème, lire: Eliane Gubin, “Bruxelles au XIXe siècle: berceau d’un flamingantisme démocratique, 1840-1873”, Crédit communal de Belgique, Coll. “Histoire Pro Civitate”, n°56, 1979).
Pour expliquer l’évolution des “choses démocratiques” dans l’espace devenu belge après la scission du RUPB, il faut rappeler certains principes de la Constitution de ce royaume qui, uni, n’a duré que quinze ans. Cette constitution fonctionnait avec un “peuple-électeur” quantitativement très limité. Cependant certaines dispositions de cette “loi fondamentale” étaient peut-être plus démocratiques que les dispositions actuelles: ainsi, les élections communales avaient lieu tous les six ans, comme aujourd’hui, mais la constitution, jusqu’au début de l’histoire belge proprement dite, prévoyait le renouvellement d’un tiers du collège tous les deux ans, permettant un contrôle plus étroit des mandataires et l’élimination des farceurs et des “bras cassés”, ce qui n’est plus possible aujourd’hui. L’élargissement du cens électoral n’a pas permis de pérenniser ce système plus démocratique: impossible, budgétairement parlant, de réorganiser des élections tous les deux ans dans chacune des communes du royaume. Comment la situation a-t-elle dès lors évolué? L’évolution ultérieure s’explique par des motifs nombreux et divers, qu’il est impossible d’évoquer, même succinctement, dans le cadre de cette causerie. La révolution industrielle, qui prend son envol en Belgique plus rapidement que dans d’autres régions d’Europe continentale, Allemagne comprise, génère un prolétariat déraciné (exode des campagnes vers les villes) et privé de droits politiques. En marge du parti libéral d’abord, dans certains cénacles ultramontains (hostiles au manchestérisme industriel et capitaliste) puis, enfin, dans le parti socialiste, le prolétariat urbain va réclamer un élargissement du cens électoral pour pouvoir voter ou faire voter des lois qui puissent améliorer son sort. Ces revendications seront toujours assorties d’une volonté de conquérir le suffrage universel, “pur et simple” et non pas “universel, capacitaire et familial”. Mais l’augmentation du nombre des électeurs fait qu’il devient impossible de procéder à des élections intermédiaires, tous les deux ans, pour renouveler, le cas échéant, le tiers des conseils communaux, ou de procéder de manière analogue pour les autres assemblées. Paradoxalement, l’idée du suffrage élargi puis universel permet un contrôle démocratique moindre que certains aspects du suffrage censitaire... Une contradiction à laquelle plus personne ne réfléchit sérieusement...
Luciano Canfora et le paradoxe de Condorcet
La question du suffrage universel est abordée dans un ouvrage de référence fort bien charpenté du professeur italien Luciano Canfora, intitulé “La democrazia – Storia di un’ideologia” (Ed. Laterza, Roma/Bari, 2004, 3ième éd., 2010). Le Prof. Canfora enseigne la philologie classique à l’Université de Bari et est le directeur de la revue “Quaderni di storia”: à ce titre, il plonge sans cesse dans les archétypes les plus fructueux de nos héritages grecs et latins et s’immerge, armé de cette formidable panoplie intellectuelle, dans le flux du réel contemporain. Dans “La democrazia”, Canfora explique que la revendication du suffrage universel s’est déployée, dans l’histoire européenne, en trois étapes: 1) lors de la révolution française, 2) à la fin de la II° République en France (et donne un pouvoir personnel et césarien au futur Napoléon III), 3) immédiatement après l’effondrement du tsarisme en Russie, pour donner le pouvoir aux commissaires bolcheviques puis, en Allemagne, après la parenthèse de la République de Weimar, à la NSDAP. Pour Canfora, le suffrage universel, bien que nécessaire à la démocratie, est aussi, simultanément, l’instrument qui l’annulle face à des événements forts, exigeant des prises de décision plus rapides. Canfora explique le mécanisme d’annulation démocratique en se référant à un texte de Condorcet, écrit en 1785, le trop peu connu “Essai sur l’application de l’analyse à la probabilité des décisions rendues à la pluralité des voix”. Dans cet essai, qui précède la révolution française de quatre petites années seulement, Condorcet démontre que, s’il y a plus de deux choix, il est impossible d’obtenir un résultat politique cohérent, c’est-à-dire, “d’étendre la transitivité des préférences individuelles aux préférences sociales”. Ainsi, prenons trois électeurs, Messieurs X, Y et Z. La transitivité s’opère aisément si tous votent, par exemple, comme Monsieur X, qui préfère le parti A au parti B, et le parti B au parti C. Mais si X choisit cet ordre ABC tandis qu’Y préfère l’ordre BCA et Z, l’ordre CAB, aucune transitivité parfaite n’est possible: le résultat électoral, traduit en sièges, ne reflètera en aucun cas les opinions ou desiderata de tous les citoyens. C’est là le “noeud gordien” qu’il nous est désormais impossible à trancher selon des procédés démocratiques, sauf à recourir à une nouvelle mouture du césarisme de Napoléon III, aux commissaires bolcheviques (but du nouveau PTB?) ou à un système de parti unique avec chef incontesté, comme l’était la NSDAP allemande.
Le socialisme: de la volonté de bâtir une “autre société” à la barbarie et l’inculture
La longue marche des socialistes belges vers le pouvoir fait émerger un phénomène typiquement belge (et néerlandais), celui dit de la “pillarisation”, soit l’émergence de ce que les politologues néerlandophones nomment les “zuilen” ou ‘”piliers” de la société. Ces “zuilen” sont constituée par l’ensemble des organisations, associations, etc. qui gravitent autour des trois principaux partis du royaume, les catholiques (bénéficiant d’un antécédant vu l’organisation des paroisses), les libéraux (dont le “pilier” sera toujours moins lourd que les autres) et les socialistes (qui construiront leur pilier pour le rendre presque aussi efficace que celui des catholiques, ou plus efficace encore, dans les régions les plus industrialisées de la Wallonie). Au début de son histoire, le “pilier” socialiste propose ainsi une “autre société”, démarche qui s’exprime partiellement par le mouvement “art nouveau”, avec un Horta qui édifie une “Maison du Peuple” extraordinaire (que les socialistes ultérieurs s’empresseront de faire démolir, preuve la plus emblématique de la barbarie et de l’inculture dans lesquelles ce “pilier” a chaviré!) et par la volonté de créer des écoles, à la suite des pétitions demeurées sans succés des libéraux populistes, soucieux du maintien de la culture: leurs aspirations, leurs démarches, leurs organisations modestes (mais admirables) sont désormais un phénomène politique définitivement disparu. Le flamingantisme premier est issu de ce libéralisme populaire, parfois orangiste et plus rarement bismarckien, surtout à Bruxelles.
La Maison du Peuple de Bruxelles, oeuvre d'Horta, détruit par les socialistes à la fin des années 50
Après l’effondrement du système scolaire efficace et bien conçu, mis en place par le Roi Guillaume I des Pays-Bas Unis, après la dispariton des lois scolaires du RUPB, l’Etat belge, à ses origines, est un exemple de barbarie effroyable: il n’y a plus, dans ce royaume, de système scolaire digne de ce nom, comme l’explique l’historienne liégeoise Eliane Gubin, spécialiste du flamingantisme démocratique bruxellois du 19ème siècle (cf. également le chapitre consacré à l’analphabétisme, résultat des “révolutions française et industrielle” dans le livre du Prof. Dr. Fernand Lehouck, “Van apathie tot strijdbaarheid – Schets van een geschiedenis van de Belgische vakbeweging 1830-1914”, Orion, Brugge, 1980; le Prof. Lehouck rappelle notamment l’enquête Ducpétiaux de 1843 où 648 ouvriers et ouvrières sur 1000 étaient totalement analphabètes; à Bruges en 1886, 19.179 habitants sur 47.497 demeuraient analphabètes; entre 1868 et 1886, entre 5,6% et 7,8% des enfants en âge d’école primaire fréquentaient les écoles gratuites). Sans écoles bien organisées, il n’y a pas de transmission possible: ce qui explique l’état d’amnésie dans lequel le “machin Belgique” a toujours végété, avec seulement quelques lueurs passagères, comme la volonté de créer une littérature “racique” avec Decoster et Lemonnier, l’émergence du “mythe bourguignon” (Hommel, Colin), le souvenir de Charles-Quint dans des cercles académiques restreints (De Boom, Géoris, Blockmans, Verbrugge, etc.), les tentatives un peu simplistes de Jo Gérard, les efforts des historiens de la littérature (Aron, Quaghebeur, Klinkenberg, Joiret, etc, flanqués des Canadiens Biron et Grutman) dans un milieu qui hélas, lui aussi, n’est qu’académique: rien n’est fait pour insuffler au grand public un sens de l’histoire conforme aux époques les plus sublimes du passé d’entre-Somme-et-Rhin. La preuve? On a supprimé les subsides pour l’un des deux défilés annuels de l’Ommegang (souvenir sublime de Charles-Quint et hommage poignant au principe impérial) pour les affecter à la “Gay Pride” et à la “Zinneken Parade”. Le spectacle n’est plus diffus, comme le disait Guy Debord à propos des démocraties occidentales, il est à nouveau visibilisé et outrancier, comme dans les fascismes, nazismes et autres stalinismes nord-coréens... mais sans bottes ni baudriers ni pas de l’oie. On s’y tortille le cul au rythme des sambas les plus lascives, fessards flasques impudiquement recouverts d’un simple string. On a mieux depuis 2012: les “femens”, dont les charmants gargamels sont maculés de slogans hideux, badigeonnés sans le moindre effort calligraphique, ce qui fait, hélas oublier la Vénus de Milo ou les sculptures de Praxitèle et ôte toute d’envie d’aller les poutouner, dans un grand élan coquin et rabelaisien.
“Autres Lumières” et Kulturstaat
Revenons au 19ème siècle. La reconstitution d’écoles a donc relévé du pur apostolat, de l’abnégation et du dévouement de personnes privées, qui n’ont reçu aucun soutien des autorités en place. Cette posture anti-scolaire, cette attitude de barbarie moderne qu’incarnait le nouvel Etat, né suite aux brutalités des mercenaires recrutés dans les bas-fonds de Londres et de Paris, explique le sentiment anti-belge qui perdurera chez les intellectuels, à commencer par ces instituteurs jeunes et volontaires, idéalistes au sens le plus pur du terme. Ici, il est bon, me semble-t-il, de faire une petite digression, amorce d’une causerie future: un Etat véritablement “démocratique”, au sens que lui aurait donné un philosophe des “autres Lumières” comme Herder, ne devrait-il pas être le “Kulturstaat”, soit l’Etat qui met la préservation de la culture au-dessus de toute autre considération? Ne faut-il pas souhaiter un Etat porté par un idée organique et généreuse (classée à ce titre à gauche de l’échiquier politique!) comme celle théorisée au 19ème par le Norvégien Johan Ernst Sars (cf. Bernhard P. Falk, “Geschichtsschreibung und nationale Ideologie - Der norwegische Historiker J. E. Sars”, Carl Winter Verlag, Heidelberg, 1991)? Cette idée est présente dans bons nombres d’esprits en Allemagne mais n’a jamais trouvé de concrétisation dans les pays germaniques continentaux (en Scandinavie, notamment par l’impact d’un Sars, les choses sont moins dramatiques, la notion d’enracinement est toujours palpable et résiste tant bien que mal à tous les assauts des forces porteuses du déclin irrémédiable de la culture européenne). Elle est très présente toutefois dans le socialisme (Connolly) et le nationalisme (Davis, Pearse) irlandais: même après le second conflit mondial, le Président Eamon de Valera et son ministre Sean MacBride ont répété très souvent, dans les congrès dits “panceltiques” ou à la tribune d’instances internationales, que la mission de l’Irlande dans le monde était de défendre les héritages culturels, garants de l’équilibre international, garants aussi du bonheur des peuples, qui pourront ainsi être en accord avec leur “coeur profond”. Mieux: le recteur de l’Université de Dublin a le droit d’opposer son veto aux lois votées par le Parlement, si ces lois lui semblent des aberrations, imaginées par des échaudés ou des têtes brûlées comme les petits mondes politiciens en produisent tant. Des modèles à méditer.
Paul Belien et le “coup de Loppem ”
Pour un polémiste de la trempe de Paul Belien, la Belgique “pilarisée” d’aujourd’hui a trouvé sa forme en 1919, à la suite du “compromis de Loppem ”, ou “coup de Loppem ”, diront à l’époque les catholiques, pourtant unitaristes et royalistes. Dans le château de Loppem, près de Bruges, les chefs de file des partis libéral, socialiste et catholique, flanqués des représentants du patronat et de la classe ouvrière, décident d’un nouvel agencement de la vie politique du royaume, avec l’approbation du Roi Albert I, soucieux d’éviter tous conflits sociaux et toute contagion par contact avec les “conseils” des soldats allemands révolutionnaires qui avaient fraternisé avec les travailleurs belges dans les villes industrielles (notamment à Liège) en 1918, situation analogue à celle qui avait animé les rues de Strasbourg avant le retour des armées françaises: sur le palais de justice de la métropole alsacienne, on peut toujours, aujourd’hui, apercevoir les impacts des balles et des obus légers, tirés par les Français pour en déloger les “spartakistes” des conseils d’ouvriers et de soldats et leurs alliés locaux. Le Roi craignait aussi la fusion du socialisme révolutionnaire (voire du communisme) avec le nationalisme flamand, parfaitement envisageable en cette période de chaotisation totale des sociétés européennes. Les soldats flamands n’avaient-ils pas crié à l’adresse des officiers français en visite sur le front de l’Yser: “A bas la France! Vivent les Soviets! Vivent les Boches! Vive Lénine! Vive le Kaiser! Vive la Révolution!” (cf. les travaux du Prof. Guido Provoost). Le Roi avait profité de cette “aubaine” pour éviter toute inféodation de l’armée belge au commandement suprême allié, toujours prompt à lancer des offensives inconsidérées et très sanglantes: un Roi demeure soucieux du sang de ses sujets; une république à la française s’en soucie comme d’un guigne! Si le souci du Roi était louable pendant les hostilités, où il souhaitait épargner le sang de ses soldats et demeurer un “belligérant” mais non un “allié” de l’Entente (il n’a prêté de soldats qu’au Tsar), ses craintes de 1919, quand il pensait qu’une révolution était imminente, ont conduit à l’adoption d’un système figé, celui du “coup de Loppem”, qui n’autorise quasiment plus de renouvellement des élites par voie électorale, le suffrage universel pur et simple, voulu par les socialistes, s’avérant plus “bloquant” que les autres formes de suffrage. Si le bourgeois borné et affairiste vote sans cesse pour les mêmes programmes conservateurs de ses avantages, les masses prolétarisées, maintenues analphabètes et manipulées à tire-larigot, votent également pour les mêmes démagogues: le vote des vraies élites culturelles, qui détiennent la longue mémoire, est noyé dans un magma démagogique qui est toujours conservateur et jamais rénovateur ou innovateur. C’est là, sans nul doute, sur le long terme, un effet “hétérotélique” (Jules Monnerot).
Depuis 1919, le système de Loppem barre encore et toujours la route aux challengeurs de la troïka libérale/socialiste/démocrate-chrétienne, en utilisant des méthodes qui ne sont guère reluisantes (et dont se sont servi allègrement les ignares et les pignoufs de la “Sureté de l’Etat”, analphabètes bornés et sans nuances comme le sont les Dupont-Dupond d’Hergé). Dans le pilier catholique, pourtant sûr de faire toujours partie de la troïka vu ses scores impressionnants, des voix se sont élevées pour dénoncer ce partage du pouvoir à trois, surtout qu’il rendait possible, par le suffrage universel pur et simple, introduit après la première conflagration mondiale du 20ème siècle, des tandems catholiques/socialistes (perçus par les critiques catholiques rangés derrière le Cardinal Mercier, d’obédience maurrassienne, comme des aberrations) ou, pire, des majorités libérales/socialistes, portées en coulisses par des ennemis de l’Eglise et du catholicisme. Ces voix étaient plus conservatrices que démocrates-chrétiennes: elles tenteront de se maintenir dans les majorités gouvernementales, même composées avec les socialistes; certains de ces conservateurs —parfois conservateurs de valeurs anciennes et non modernes, tout en étant de vigoureux militants ouvriéristes n’ayant aucune leçon de progressisme social à recevoir des gauches— auront des tentations rexistes mais le rexisme sera très rapidement évincé, après son éphémère succès électoral de 1936.
Absence navrante de références italiennes
Belien a donc raison d’incriminer le “compromis de Loppem”, comme étant un dispositif destiné à geler toute circulation des élites, à tuer dans l’oeuf toute émergence de nouvelles donnes (en dépit des concessions accordées, par la force des choses, à la Volksunie de Schilz et au FDF de Lagasse dans les années 70). Il campe dès lors le système belge comme “non démocratique”, puisqu’il ne laisse aucune tribune d’expression politique dans les assemblées législatives aux forces politiques challengeuses (surtout flamandes et dès lors majoritaires aux niveaux régional et communautaire de la Flandre), pour lesquelles on fabrique des “cordons sanitaires”; Belien a toutefois la naïveté d’en appeler sans cesse au monde anglo-saxon (une bonne partie de son oeuvre livresque et journalistique est rédigée en anglais), pour qu’il aide la Flandre à trouver une “bonne gouvernance”, selon les théories se voulant “démocratiques” qui sont énoncées dans le monde intellectuel britannique ou américain. Belien oublie cependant que, pendant la première guerre mondiale, des lois d’exception, des décrets circonvenant les parlements, ont été adoptés chez tous les belligérants, y compris chez les Anglo-Saxons, et que ce mode de “gouvernance” s’est maintenu en temps de paix, jusqu’à nos jours. Belien, comme, hélas, beaucoup d’intellectuels flamands, ne s’est jamais mis à l’écoute du monde intellectuel italien, dont les productions, innombrables, étudient avec toute la rigueur académique voulue comment circonvenir des partitocraties figées, comme celles qui ont corrompu l’Italie depuis son émergence tardive en tant qu’Etat unitaire sur la scène européenne et comme celle qui sévit en Belgique depuis 1919. Cette habilité à miner le pouvoir des “conformistes” et des “établis” en tous genres a donné successivement l’éclectisme mussolinien, le qualunquisme d’après 1945, et après les “années de plomb” et de répression orchestrée contre toutes les forces challengeuses, l’opération “mani pulite” des années 90 et l’arrivée au pouvoir de trois forces non conventionnelles, la Lega Nord d’Umberto Bossi, l’Alliance Nationale de Gianfranco Fini et “Forza Italia” de Silvio Berlusconi, même si ces deux dernières formations ont sombré dans un conformisme nouveau au bout de quelques mois à peine... Cette habilité explique aussi deux phénomènes relativement neufs: 1) l’apparition à Rome, puis dans toutes les autres villes italiennes, du mouvement “Casa Pound”, classé plutôt à tort qu’à raison dans le sillage du “néo-fascisme” et 2) l’émergence de Beppe Grillo et de son mouvement “va-fanculo” (ce que l’on a bien envie de dire, même en liégeois —“vas’ti fére arrêdjî”— aux di Rupo, Verhofstadt, Decroo, Onkelinks, Dehaene entre autres sinistres personnages).
Belien ne s’est donc pas branché sur les débats italiens, bien plus utiles à son “mouvement flamand” que les pesanteurs ou les simplismes du gourou de Margaret Thatcher, le philosophe moraliste Oakshott (dont Verhofstadt, le nouveau copain de Cohn-Bendit dans les coulisses du Parlement Européen, s’entichait, à l’époque où les vieux syndicalistes gantois, véreux et corrompus, le traitaient de “gamin de merde” – “dââ joeng”), bien plus utiles aussi que les théories des Chicago Boys, que les travestissements boiteux de la pensée de Friedrich von Hayek par le “common sense” des “shopkeepers” presbytériens ou méthodistes, que la pensée “ras-des-pâquerettes” du Tea Party ou que les lapalissades des paléo-conservateurs à la Sarah Palin ou que les conneries retentissantes des “télé-évangélistes”, pour ne pas évoquer le bellicisme outrancier et intransposable des néo-conservateurs (vieux trostskistes recyclés suite au reaganisme). Tout ce fourbi, issu de pensées qui n’ont ni la profondeur ni la richesse des traditions philosophiques continentales (surtout allemandes), n’est pas importable; s’y intéresser ou s’en revendiquer, équivaut à produire du pilpoul, à faire le malin, à se soustraire à toute concrétude, à se vautrer dans l’impolitisme, aurait dit Julien Freund. Par conséquent, on peut tranquillement émettre l’hypothèse que le dissident Belien, très content de maîtriser la langue de Shakespaere de la manière la plus parfaite qui soit, n’a sans doute jamais ouvert un livre de Giorgio Agamben, philosophe de réputation internationale, à la pensée pointue et à l’écriture agile, dont la hauteur de vue permet de consolider des arguments plus basiques, même si l’on n’est pas d’accord avec toutes les conclusions philosophiques de cet auteur, professeur d’esthétique auprès de l’Institut universitaire d’architecture de Venise.
Giorgio Agamben et la notion d’“état d’exception”
Dans “Stato di eccezione” (Bollati Boringhieri, Turin, 2003), Giorgio Agamben souligne d’emblée que les démocraties en général, celles que l’on considère comme étant de “bonne gouvernance” dans le langage des pontes du “politiquement correct”, gouvernent très souvent par le truchement de “pleins pouvoirs”, accordant à l’exécutif la possibilité, euphémiquement posée comme “exceptionnelle”, de réglementer totalement la vie politique d’un pays, de se doter d’un arsenal législatif très ample, surtout quand ces “pleins pouvoirs” permettent de modifier ou d’abroger des lois en vigueur. Agamben se réfère à H. Tingsten et à son livre “Les pleins pouvoirs. L’expansion de pouvoirs gouvernementaux pendant et après la Grande Guerre” (Stock, Paris, 1934). L’exercice sans mesure de “pleins pouvoirs” a éliminé le mode de fonctionnement démocratique, y compris dans les “démocraties” qui se revendiquent comme telles. Tingsten, et à sa suite, Agamben, rappellent que Poincaré émet le 2 août 1914 un décret mettant l’ensemble du territoire français en état de siège, décret coulé en loi deux jours plus tard. Cet état de siège durera jusqu’au 12 octobre 1919, nonobstant le fait que les activités du Parlement aient repris leur cours normal en janvier 1915. Le pouvoir législatif français de 1914 a ainsi délégué une bonne partie de ses prérogatives et compétences à l’exécutif, ce qu’illustre de manière encore plus patente le vote du 10 février 1918 qui accorde au gouvernement des pouvoirs absolus: il pouvait dorénavant réglementer par décrets la production et le commerce des denrées alimentaires. L’exécutif devient ainsi le législatif, ce qui constitue une entorse flagrante au principe de la séparation des pouvoirs, théorisé au 18ème siècle par Montesquieu, un principe qui doit être, de nos jours, l’indice, pour les tenants du “politiquement correct”, d’une “bonne gouvernance”, du moins en théorie, car les représentants du “politiquement correct” ne sont pas prêts à laisser des libertés parlementaires à ceux qui pourraient contredire, même partiellement, leurs dogmes et leurs lubies. La fin des hostilités, le 11 novembre 1918, ne met pas un terme à ces pratiques: en 1924, le gouvernement Poincaré reçoit du Parlement les pleins pouvoirs en matières financières, suite à une crise grave qui ébranle le franc. En 1935, le gouvernement Laval énonce cinquante-cinq décrets “ayant force de loi” pour éviter la dévaluation du franc. L’opposition de gauche rejette certes ces mesures déclarées “fascistes” mais, aussitôt arrivé aux affaires par les urnes, Blum, le chef de file des gauches, recourt aux mêmes expédients: en juin 1937, il demande à son tour les pleins pouvoirs au Parlement pour sauver le franc. Les mesures d’exception, parfaitement compréhensibles en tant de guerre, ne cessent donc pas d’être appliquées, une fois la paix revenue mais, question légitime, est-ce une vraie paix? Ou est-ce la guerre qui continue par d’autres moyens? Ne vivons-nous pas, depuis août 1914, dans une ère de guerre totale et permanente, qui n’emploie pas toujours des moyens militaires pour arriver à ses fins ou porter préjudice aux ennemis? Gouverner un pays, théoriquement “démocratique”, par décrets devient donc la normalité, y compris dans les nations dites “libérales”.
L’Angleterre, modèle de démocratie pour Belien, n’échappe pas à la règle: le 4 août 1914, le “Defence of Realm Act”, en abrégé “DORA”, donne au gouvernement des pouvoirs très étendus pour réglementer la production de guerre et pour suspendre les droits civils (les tribunaux militaires peuvent désormais juger des civils, ce qui est une pratique contraire aux lois coutumières du Royaume-Uni, celles découlant de la jurisprudence relative à la “martial law” et aux “Mutiny Acts”). Le DORA permettra ainsi la répression en Irlande et l’exécution de seize révoltés des Pâques 1916. Après la Grande Guerre, le Parlement consent à accorder au gouvernement l’ “Emergency Powers Act”, le 29 octobre 1920, pour faire face à de graves troubles sociaux. Cet “Act” prévoyait aussi l’installation de “Courts of summary jurisdiction” pour tous ceux qui transgressaient l’ordre de ne pas entraver la distribution de vivres, d’eau ou de carburant.
Résistances américaines au faux démocratisme de Wilson: le combat de Gerorge Norris et de Robert M. LaFollette
La résistance aux “pouvoirs spéciaux” votés en temps de guerre est particulièrement intéressante à observer dans l’histoire politique américaine. Toute une phalange de sénateurs et d’hommes politiques, essentiellement issus du Middle West et de Californie, se dresseront contre les manoeuvres du pouvoir central (“fédéral”), au point de recevoir l’appellation d’“insurgents” par leurs adversaires “wilsoniens”. Parmi eux, le Sénateur George Norris, qui fustigeait “les banquiers de Wall Street, assis derrière leurs bureaux en acajou et calculant comment convertir les misères de la guerre en or pour remplir leurs sales poches”. Pour Norris, il était désormais impossible de réconcilier les valeurs traditionnelles de la République américaine avec l’aventurisme militaire et son corollaire, la centralisation et la corruption du pouvoir gouvernemental”. Cette résistance, qui s’enracinait dans une fronde paysanne antérieure à 1914, craignait par dessus tout l’émergence d’une élite militaire et professionnelle qui ne devrait plus rendre de comptes au contrôle démocratique. De même, les “insurgents” tels Robert M. LaFollette (photo) et George Norris, interviennent au Congrès pour empêcher le vote de la motion Lansing (août 1915), visant à autoriser des prêts à la Grande-Bretagne et à la France, sous prétexte qu’il s’agissait de “parier unilatéralement sur la victoire de l’Entente”, ce qui risquait d’entraîner les Etats-Unis dans la guerre et “de sacrifier des vies humaines pour des bénéfices privés” sous la forme de contrats juteux. En 1916, LaFollette veut que les livraisons d’armes et de munitions aux belligérants soient définitivement interrompues: face à cette requête, le Président Wilson estime que les affaires étrangères relèvent d’une prérogative exclusive de l’Exécutif, indépendamment de tout apport parlementaire. Wilson estimait que les traditions parlementaires devaient céder le pas face à son grand projet de bâtir une “paix universelle” dès la fin des hostilités. LaFollette, pour sa part, pensait qu’un contrôle démocratique de la politique étrangère, telle qu’elle était menée par la Présidence, constituait une garantie de maintenir un maximum de paix dans le monde. Mieux: la non intervention des Etats-Unis dans la guerre aurait permis, pensait LaFollette, de maintenir, dans la société américaine, le monde paysan et honnête —la saine ruralité du Wisconsin— qu’il avait cherché à préserver dans ses combats d’avant la conflagration de 1914.
La “Croisade” de Wilson, “to make the world safe for democracy”, n’était pas autre chose, aux yeux de LaFollette, que le triomphe de Wall Street sur les “instincts naturels du peuple”. Hiram Johnson, Sénateur de Californie, était sur la même longueur d’ondes que son collège LaFollette du Wisconsin: “Nous ne serons plus jamais la même nation (...) Je doute fort que la République que nous avons connue dans le passé ne revienne jamais”. Johnson visait la coercition gouvernementale en marche, qui profitait de l’aubaine offerte par la guerre, la mainmise sur la vie publique des experts et des bureaux et, surtout, l’installation, dans la société américaine, d’une obsession née de la guerre, celle de l’efficacité et de l’urgence à tout prix et à tout moment. Hiram Johnson notait la croissance des pouvoirs factuels de l’administration et de l’industrie à l’abri de tout contrôle parlementaire. De même, il craignait l’extension du pouvoir exécutif aux dépens du législatif: les bureaucrates fédéraux, expliquait-il à ses électeurs, vont évoquer à tout bout de champ le besoin de sécurité pour briser les prérogatives du Congrès. La seule victoire (mitigée) qu’obtiennent toutefois les “insurgents” fut d’annuler un projet de Wilson de contrôler la distribution des journaux, en imposant une censure depuis les services postaux (ce qui a d’ailleurs été tenté en Belgique aussi, dans les années 90, pour juguler la distribution de dépliants et de revuettes émanant d’un parti considéré naguère comme challengeur de l’”Ordre de Loppem”). LaFollette essuie alors une campagne de presse virulente qui conduit une instance gouvernementale, la “Minnesota Commission of Public Safety”, à demander son expulsion du Sénat, arguant qu’il était “un professeur de déloyauté et de sédition procurant aide et facilité à nos ennemis”. On le brûle en effigie, on lui tend une corde avec noeud coulant dans les couloirs du Congrès: bref, on cherche à le briser moralement. La démarche de la “Minnesota Commission” n’aboutira pas: LaFollette sera sauvé par la signature de l’armistice du 11 novembre 1918. Il reprend aussitôt le combat contre le Traité de Versailles, où Wilson, disait-il, menait une “diplomatie personnelle” allant dans le sens des puissances impérialistes “qui avaient précipité l’Europe dans l’holocauste (des tranchées)”. LaFollette craignait aussi que l’Allemagne, réduite par les réparations à un espace de misère noire, connaîtrait tôt ou tard une révolution fatidique. Les Alliés, surtout la France, exigeaient des réparations astronomiques pour la simple et bonne raison qu’ils ne souhaitaient pas taxer leurs propres citoyens pour payer les frais de guerre. LaFollette s’est même avéré prophète: les projets de fusionner les flottes britannique et américaine au sein d’une “monster navy” destinée à protéger les investissements et les prêts accordés dans des zones “non développées”, conduiront à exploiter et à voler les peuples faibles et, par voie de conséquences, à instaurer sur la planète un état de guerre permanente (pour une étude minutieuse de cet aspect de l’histoire politique américaine, cf. David A. Horowitz, “Beyond Left & Right – Insurgency and the Establishment”, University of Illinois Press, Urbana/Chicago, 1997). Par la suite, Franklin Delano Roosevelt fera largement usage de ce type d’expédient, non démocratique, pour asseoir son pouvoir: songeons au “National Recovery Act” du 16 juin 1933, accordant au Président des pouvoirs quasi illimités pour gérer l’économie du pays.
Mussolini, Hitler et la notion d’“état d’exception permanent”
Les “démocraties” française, anglaise et américaine étaient victorieuses en 1918 et disposaient de colonies, capables de fournir aux métropoles des biens de toutes natures, matières premières comme denrées alimentaires. Mais les règles de guerre ont néanmoins été appliquées après les hostilités. Exactement comme en Italie, pays floué à Versailles malgré le sang versé, où le fascisme mussolinien avouera ne gouverner que par décrets (Mussolini: “La dictature fait en six heures ce que la démocratie fait en six ans”). Plus tard, après la parenthèse de la République de Weimar, démocratie exemplaire sur le plan théorique mais dont le fonctionnement n’a connu que des ratés, l’Allemagne adoptera, à son tour, un mode de fonctionnement fondé sur l’“Ausnahmezustand” permanent (= état d’exception), notamment sur base de théories proches de celles de Carl Schmitt, qui se bornent finalement à imiter des modèles français ou britannique, ou, pour le dire avec ironie, ... Hitler, élève de Poincaré (cf. Christoph Gusy, “Die Lehre vom Parteienstaat in der Weimarer Republik”, Nomos Verlagsgesellschaft, Baden-Baden, 1993). L’Allemagne avait toutefois l’excuse d’être un pays vaincu, ne disposant plus de colonies et obligé de payer des réparations aux montants astronomiques. Dans un tel cadre, elle était effectivement dans un “état d’exception” permanent.
Dans ce contexte affectant toutes les “démocraties” occidentales, le “coup de Loppem” s’explique mais ne s’excuse nullement sur le long terme, surtout s’il justifie des transpositions indues et une pérennisation infondée en des époques de non belligérance. Les traits autoritaires de la “gouvernance”, dans l’entre-deux-guerres, font qu’il n’existe plus, depuis lors, de démocraties pures. Immédiatement après la première guerre mondiale, il y avait parfois peu de différences entre la façon de gouverner une démocratie occidentale par décrets et “pouvoirs spéciaux” et le mode de fonctionnement d’une dictature à l’italienne ou à l’allemande, sans même mentionner les autres formes politiques autoritaires, observables en d’autres pays d’Europe pendant l’entre-deux-guerres. Il n’existe donc pas, objectivement parlant, de ligne séparant en toute netteté les démocraties rénovées à coup de décrets et les régimes plus ou moins fascistes. Cette vision d’une hypothétique séparation bien nette entre “démocraties” et “fascismes” est une lubie des bateleurs d’estrades médiatiques, clowns chargés de jeter de la poudre aux yeux des citoyens, voire “chiens de garde du système” (Serge Halimi).
Diverses voix s’élèvent contre le “coup de Loppem ”
Revenons à 1919, aux années 20, dès le lendemain du “coup de Loppem”. En marge des partis ronronnants —véritables machines tournant à vide et hostiles, par définition, à toutes formes de nouveauté et à toutes tentatives de redéfinir objectivement et positivement la politique sur le plan intellectuel— des voix diverses s’élèveront, dès le début de l’entre-deux-guerres, pour tenter de contester le nouvel agencement de l’Etat. Parmi ces voix, il faut compter:
1) Les communistes, galvanisés par les victoires de Lénine et de Trotsky, qui sentent d’instinct que le “coup de Loppem” entrave d’avance toute tentative, par un éventuel Lénine flamand ou wallon, de bouleverser le régime belge. Plusieurs artistes d’avant-garde seront au départ des compagnons de route des premiers communistes belges, pour devenir par la suite des “flamingants”, comme l’expressionniste Wies Moens et le surréaliste Marc Eemans, ou comme Paul Van Ostaijen et War Van Overstraeten. La césure entre communisme (marxiste) et nationalisme flamand n’est pas encore clairement affirmée au début des années 20. Le phénomène s’observe aussi dans d’autres pays européens.
2) Les flamingants du “Frontbeweging”, qui estiment que l’on n’a pas demandé l’avis des soldats du front, majoritairement recrutés dans les deux provinces de Flandre orientale et de Flandre occidentale, voire dans les communes rurales du Brabant et à Bruxelles (où les monuments aux morts présentent des listes aussi impressionnantes qu’en France). Un Joris van Severen ne peut pas tolérer, par exemple, que la génération du front ait été évincée du compromis et que les revendications flamandes, formulées par des soldats du contingent après trois ou quatre ans de tranchées dans les boues ouest-flamandes, n’y trouvent aucun créneau d’expression.
3) Les francophones de la “Légion Nationale”, issue elle aussi des anciens combattants et flanquée de jeunes gens venus de l’aile la plus conservatrice du parti catholique, contestent également le dispositif de Loppem, dans la mesure où il ne donne pas une voix privilégiée aux anciens combattants, aux “arditi” belges (dont Hoornaert et Poulet), désireux d’imiter leurs homologues italiens ou de faire le “coup de Fiume” perpétré par Gabriele d’Annunzio (un poète-soldat admiré par le socialiste Jules Destrée). Au sein de cette mouvance de la “Légion Nationale” d’Hoornaert et au sein de l’aile conservatrice du parti catholique, une fragmentation graduelle aura lieu: certains conservateurs resteront dans le bercail catholique (Harmel, Hommel, du Bus de Warnaffe, etc.), d’autres seront tentés par le rexisme (Pierre Daye) ou par le technocratisme de Van Zeeland (jugé idéologiquement “neutre” et plus apte pour gouverner avec les socialistes). D’autres encore demeureront fidèles à la “Légion Nationale”: celle-ci connaîtra, dès 1940, une aile majoritairement résistancialiste et une aile minoritaire collaborationniste (l’officier Henri Derriks au sein de la “Légion Wallonie”). L’historien liégeois Francis Balace est le seul résidu actuel de cet esprit, bien qu’édulcoré par l’ambiance consumériste et festiviste de notre époque; il est le fils d’un ancien “légionnaire national” et défend l’esprit de cette “Légion belge” au sein de la “Légion Wallonie” de la Wehrmacht allemande et de la Waffen SS, contre les “degrelliens”, avec l’appui zélé de son élève, l’historien Eddy De Bruyne, très productif en ces matières désormais complètement “historicisées”.
4) Parmi les opposants au système de Loppem, il faut aussi compter les nombreux non conformistes de toutes catégories, non inféodés à des organisations ou des partis, adeptes d’un joyeux anarchisme contestataire, visant par le rire et la provocation à faire la nique aux bourgeois. Ces catégories avaient été “oubliées” des historiens des idées jusqu’à la parution du livre du Prof. Jean-François Füeg, “Le Rouge et le Noir – La tribune bruxelloise non-conformiste des années 30” (Quorum, Ottignies LLN, 1995); cet ouvrage relate les aléas d’un club non politique, qui se pose comme anarchisant et anti-autoritaire et qui a animé la vie intellectuelle bruxelloise de la fin des années 20 à 1940. Cette gauche non conformiste (“orwellienne” dans le sens où l’entend aujourd’hui, en France, un Jean-Claude Michéa) connaîtra des lézardes en son sein à partir de la guerre d’Espagne, où, comme Orwell, elle déplore la répression commise par les communistes staliniens contre les gauches anarchistes et indépendantes à Barcelone. Un anti-communisme de gauche voit le jour à Bruxelles suite aux événements d’Espagne. L’artiste War Van Overstraete (son portrait d’Henry Bauchau rappelle la “patte” du vorticiste anglais Wyndham Lewis), qui est d’abord un sympathisant communiste, prend ses distances avec le “Komintern” dès l’effondrement du front de Barcelone, exactement comme le font alors Orwell ou Koestler, et retourne à ses idées originales, celles d’une “renaissance du socialisme”, qu’il avait couchées sur le papier en 1933. Un Gabriel Figeys, connu sous le pseudonyme de Miel Zankin, anarcho-communiste, soutiendra la politique royale de neutralité, énoncée en octobre 1936 par Léopold III, en dénonçant avec toute la virulence voulue “l’internationale des charognards”, puis rejoindra les rangs collaborationnistes, tandis que d’autres, tels Pierre Fontaine, auteur d’un pamphlet anti-rexiste en 1937, se retireront dans leur cabinet pendant la seconde guerre mondiale, mais réémergeront après cette deuxième grande conflagration intereuropéenne pour fonder le seul hebdomadaire de droite anti-communiste après 1945, “Europe-Magazine”. Les tribulations du “Rouge et Noir” montrent bien que les marginalisés de “gauche” comme de “droite” tournent, exclus, autour du bloc conformiste et fermé sur lui-même, le bloc de Loppem, un bloc aujourd’hui en implosion, parce qu’il n’a jamais pu ni intégrer ni assimiler les véritables porteurs de sang neuf (à part quelques opportunistes vite neutralisés à coups de “fromages” et de “prébendes”). Juste avant d’être exclu avec fracas du PCF, du temps de Georges Marchais, Roger Garaudy avait placé ses espoirs dans une alliance générale de ces marginalisés et de ces exclus pour assiéger le bastion conformiste français mitterrando-chiraquien et le faire tomber; ses voeux ne se sont pas exaucés malgré sa participation à des initiatives vite qualifiées de “rouges-brunes” par les “chiens de garde du système”, sous prétexte qu’y avait participé, plutôt de loin que de près, un vieux pitre pusillanime, cherchant à fourrer son groin partout, le néo-droitiste Alain de Benoist.
Lottizzazione, Proporz et amigocratie
Le “coup de Loppem” instaure donc ce que l’on appelle la partitocratie belge, étendue à toutes les associations, clubs, syndicats, mutuelles ou ligues formant les trois “piliers” du monde politique du royaume. Puisqu’il y a trois parties prenantes dans ce dispositif, on a coutume, dans la presse subsidiée et pondue par les “chiens de garde”, de déclarer le système “pluraliste”. Ce pluralisme est hypocrite: il y a un système en trois partis, comme le catéchisme des temps jadis nous enseignait qu’il y avait un Dieu en trois personnes. Nous avons bien plutôt la juxtaposition de trois totalitarismes qui ne sont en concurrence que pour satisfaire les apparences. En effet, au fil du temps, on s’est aperçu que ce dispositif ternaire ne tolérait plus l’autonomie des députés, se mêlait de tous les aspects de la vie privée des administrés, restreignait la liberté de travailler et de s’épanouir professionnellement, y compris au niveau académique, mettait subrepticement un terme à toutes les formes de “droit de résistance” (dont Agamben constate et déplore la disparition), procédait pour se maintenir ad vitam aeternam, par l’expédient que les Italiens nomment la “lottizzazione”, les Autrichiens le “Proporz” et les analystes flamands de la “verzuiling/pilarisation” l’“amigocratie”, soit la manie de distribuer, au pro rata des voix obtenues, les postes administratifs, des plus lucratifs aux plus modestes, dans les ministères ou dans les “para-stataux” (chemins de fer, poste, voies aériennes du temps de la SABENA, etc.) aux petits camarades du parti, souvent les lèche-cul les plus obséquieux du “chef”, à coup sûr toujours moins brillants et moins efficaces que leurs homologues qui se désintéressent des vulgarités et des intrigues politiciennes et triment dur dans la société civile laquelle ne fait pas de cadeaux.
“Come cambiare?” du Prof. Gianfranco Miglio
Pour résoudre ce problème de “mauvaise gouvernance”, pour éliminer ce “tonneau des Danaïdes” qui engloutit des budgets pharamineux, on ne cherchera pas, comme le pauvre Belien ou le Verhofstadt des temps jadis, des modèles en Angleterre ou aux Etats-Unis, ou en France, comme l’a tenté, avec ses “petits moyens”, le piètre vicaire campinois —à barbiche de Mennonite— du Parigot Alain de Benoist, ou aux Pays-Bas comme le voudraient quelques rescapés de l’orangisme ou même en Allemagne comme le souhaiteraient les quelques rares germanophiles subsistants en ce royaume et même en Flandre (à moins de potasser consciencieusement et d’adapter, bon an mal an, au cadre belge le contenu critique de certains ouvrages de Hans Herbert von Arnim, de Walter Lutz ou d’Erwin Scheuch, consacrés aux blocages du système, à la déperdition de la notion de liberté et aux modes de corruption). Il faut donc le répéter inlassablement: les sources d’inspiration les plus fécondes, nous les trouverons uniquement, une fois de plus, en Italie et en Autriche. L’observation minutieuse de la vie politique italienne et autrichienne s’avère dès lors un impératif pour tout observateur ou “would be” acteur du théâtre politique belge. L’Italie présente en effet le même système partitocratique corrompu que la Belgique mais les réactions contre ce déplorable état de choses sont plus virulentes et plus fines dans la péninsule que dans notre royaume d’endormis et de braves “Lamme Goedzakken” (équivalents flamands du “Deutscher Michel”). Au sein de la “Lega Nord” d’Umberto Bossi, le Prof. Gianfranco Miglio, éminent spécialiste ès-sciences politiques, de réputation mondiale, au charisme sombre et indiscutable, avait lancé le manifeste emblématique des années effervescentes de l’opération “mains propres”, vers 1992-1994, un manifeste qu’il avait intitulé “Come cambiare?” (= “Comment changer?”). Miglio énonçait les recettes politiques glanées dans tout l’héritage de la politologie italienne, de Gaetano Mosca à Vilfredo Pareto, en passant par la critique des oligarchies et des partitocraties, que l’on trouve chez le socialiste germano-italien Roberto Michels ou, plus récemment, chez le politologue américain Juan Linz, critique des démocraties dégénérées en “polyarchies pluralistes partitocratiques”. Conclusion de Miglio: l’Etat italien est inguérissable, res sic stantibus, par voie de conséquence, les provinces les plus saines, les moins gangrénées par le phénomène mafieux, doivent accéder à l’autonomie la plus large possible voire à l’indépendance, quitte à créer un nouvel Etat fédéral largement décentralisé, avec un Nord, un Centre, un Sud et des Iles (Sardaigne, Sicile) autonomes. Un discours que Belien, et ses amis du “mouvement flamand”, auraient très bien pu avaler comme un succulent nectar!
“Come resistere?” d’Oliveiro Beha
Plus tard, quand le “berlusconisme” et les compromis à la Fini font basculer l’Italie dans un nouveau marais putride, le journaliste Oliveiro Beha (né en 1949) se lance à l’assaut “d’un pays qui coule sous les coups d’une classe dirigeante toujours plus prodigue de mauvais exemples, qui entre dans un désert axiologique; le pouvoir italien est désormais barricadé dans une ‘Résidence’ privée de culture et qui efface la réalité pour la remplacer par sa propre représentation télévisuelle; l’Italie mafieuse d’aujourd’hui est une Italie qui a largement dépassé celle des mafias traditionnelles dans la manière d’articuler ses intérêts et ses comportements”. Beha propose dans ses livres, dans ses articles et dans ses émissions radiophoniques et télévisées (“Radio Zorro”, “Va’ pensiero”) de mettre bas “une société en pièces”, d’organiser “une nouvelle résistance”. Beha paiera le prix: éloigné de la RAI au temps d’un pouvoir de centre-gauche, il y revient en 1998 pour en être à nouveau chassé en 2004, sous un gouvernement de centre-droit. Finalement, il enseigne la sociologie des processus culturels et communicatifs à l’Université de Rome-La Sapienza. Citation: “La mafia a mafiaïsé l’Italie: tous peuvent le constater dans leur propre vie quotidienne s’ils ont le courage et le tonus intellectuels pour garder les yeux ouverts. Cette Italie mafiaïsée, naturellement, est celle de la nomenklatura ou, mieux, des nomenklaturas... Soit un pays qui s’est adonné à la fabrication d’une sorte de ‘welfare mafieux’, tout en le consolidant sans cesse, c’est-à-dire à la constitution d’un Etat social miné en permanence par la soumission de tous au clientélisme politique...”. Les termes qu’emploie Beha pour fustiger le marais politicien italien peuvent parfaitement convenir à la situation belge (cf. son anthologie d’articles intitulée “Come resistere nella palude di Italiopoli”, Chiarelettere editore, Milano, 2007; préface de Beppe Grillo!).
Le cas autrichien
En Autriche, pays avec lequel nous partageons un passé commun, celui du 18ème siècle, règnaient à peu près les mêmes “piliers” qu’en Belgique. Les libéraux, les “Bleus”, avaient été marginalisés et ne servaient que d’appendices mineurs aux coalitions, tantôt dominées par les socialistes de la SPÖ, tantôt par les conservateurs chrétiens de l’ÖVP. Sous l’impulsion de Jörg Haider qui a nettoyé le parti des vieux caciques issus de la NSDAP et soucieux de gouverner en permanence avec les socialistes (!), les libéraux —soit le “tiers parti” ou le “troisième camp” (Dritter Lager)— lancent des campagnes anti-partitocratiques, anti-Proporz (cf. supra), anti-corruption, sur base d’un programme-manifeste de 414 articles d’une précision ahurissante (!) et d’un livre-bréviaire, rédigé en bonne partie par le député européen actuel de la FPÖ, Andreas Mölzer, et intitulé “Die Freiheit, die ich meine” (= “La liberté, telle que je la conçois”). Le parti libéral, la FPÖ, retourne ainsi au peuple, aux bases populaires déçues par la corruption: de libéral, il devient populiste et national. On traduit erronément “freiheitlich” par “libéral”: le terme “freiheitlich” insiste sur les libertés individuelles et collectives et ne se réfère pas uniquement à une doctrine économique et sociale qui ne génére, en bout de course, que la déliquescence inexorable des polities. La notion de liberté que la “Freiheitlichkeit” véhicule est une notion de liberté ordonnée qui cherche en permanence à s’émanciper des dogmes politiques (et religieux) qui transforment les citoyens en moutons de Panurge, en réceptacles de péroraisons vides de sens et purement manipulatrices et annihilent, ipso facto, leur qualité de “zoon politikon” (car la liberté, la seule liberté digne de ce nom qui soit, c’est celle de pouvoir être pleinement un “zoon politikon”). La FPÖ doit ses succès électoraux à sa lutte contre le “Proporz”, terme autrichien désignant notre “amigocratie”, à laquelle nos libéraux n’échappaient pas, à rebours de leurs discours (creux) sur les libertés quand ils fustigeaient en apparence les socialistes ou les démocrates-chrétiens, pour aller s’allier avec eux, dès le lendemain des élections. Il suffit de lire les pages savoureuses qu’a écrites Derk-Jan Eppink, un journaliste néerlandais en poste à Bruxelles, sur sa visite au libéral ost-flamand Herman Decroo, le père d’Alexander, dont la villa riante et cossue abrite des caves imposantes où trônent tous les dossiers “amigocratiques”, en souffrance... Bref: un “libéralisme” tel que Haider ne le concevait pas...
De la guerre contre l’ennemi à la guerre contre le peuple
Dans une partitocratie “amigocratique”, les principes de base de la démocratie représentative sont minés, plus encore qu’après la cascade de “lois d’exception” votées à la hâte, en temps de guerre comme en temps de paix pour faire face à des aléas fâcheux (cf. supra, nos réflexions sur un livre d’Agamben). Si les principes valides en cas de situation exceptionnelle (guerre, catastrophe, etc.) sont pérennisés quand bien même la situation normale est rétablie depuis plusieurs années, voire plusieurs décennies, cela signifie qu’après avoir mobilisé le peuple pour faire la guerre, le système, après les temps cruels du conflit, entre, dès le retour à la paix, en guerre permanente contre ses propres anciens soldats et contre leurs familles (leurs descendants), exactement comme le système de Metternich refusait d’accorder la représentation aux soldats levés en Prusse et ailleurs pour éliminer le danger napoléonien. Les revendications populaires au début du 19ème siècle étaient décrétés “jacobines” par les tenants du système Metternich, donc liées mentalement à l’ennemi vaincu; aujourd’hui, elles sont décrétées “populistes”, et le populisme est assimilé au “fascisme” ou au “nazisme”, donc également à un ennemi vaincu, de surcroît totalement diabolisé par le gigantesque appareil médiatique planétaire. En 1919, on élimine des sphères réelles (et légales) du pouvoir les revendications légitimes d’une bonne part de la population. Si les établis de 1919 à aujourd’hui ne sont plus les mêmes qu’hier du temps de Metternich, et si les uns et les autres diffèrent sur l’essentiel, la stratégie de ces établis actuels et passés qui consiste à bétonner des “cordons sanitaires” demeure de même nature.
Le fonctionnement pseudo-démocratique par décrets (Dehaene en était un spécialiste; il était l’homme des “pouvoirs spéciaux” pour installer son système purement “gabégique”, reposant sur les pires élucubrations idéologiques nées du rejet de toutes les attitudes de bienséance et, par conséquence, de toute éthique du devoir et de l’action, théorisée par Kant, Blondel et Mercier); ensuite, l’entêtement à vouloir ériger des “cordons sanitaires” (contre le Vlaams Blok/Belang, la NVA ou le PTB) ne correspondent nullement aux idéaux démocratiques de Montesquieu, dont le principe cardinal est la fameuse “séparation des pouvoirs” (législatif, exécutif et judiciaire). On vient de voir, avec Agamben, que l’exécutif s’est progressivement superposé au législatif depuis la première guerre mondiale; les ministres étant généralement les présidents ou les pontes dominants des partis politiques, le législatif n’ose plus aller à l’encontre de leur desiderata; pire, les magistrats sont nommés, comme tous les autres fonctionnaires, au pro rata des voix obtenues par leur parti, tant et si bien que l’indépendance de la magistrature, donc du pouvoir judiciaire, n’est plus qu’un souvenir, qu’une rêvasserie nostalgique des vieux libéraux qui croient encore —ou veulent encore croire— à la nature démocratique du système dans lequel ils vivent. Les députés doivent suivre les ukases des dirigeants de leur parti, faute de quoi ils ne seront plus placés en ordre utile sur les listes électorales ou seront réduits au silence. Les parlements ne sont plus constitués de tribuns populaires mais de “yesmen”, des hommes lavettes qui n’ont pas le courage de défendre leurs électeurs.
Tocqueville et le “spoil system”
Tocqueville, autre figure de proue de l’idéal démocratique et libéral, avait observé le fonctionnement de la démocratie nord-américaine, lors de son long voyage d’exploration aux Etats-Unis. Cette démocratie, plus étendue au sein de la population qu’en Europe, était marquée par le “lobbying” et les “caucuses”, par une démagogie, qui l’étonnait et l’inquiétait et par une véritable folie de vouloir instaurer l’égalité de tous, envers et contre tout. Cette rage de vouloir tout “égaliser” allait à l’encontre du principe de liberté: en effet, l’égalité, qui n’est pas l’équité, ne tolère pas d’exceptions, même si ces exceptions permettent d’ouvrir de la nouveauté, d’élargir les horizons, de prévoir sur le long terme. A cet état de choses, qui n’a pas beaucoup changé aujourd’hui, s’ajoute toutefois l’intrusion des médias qui biaisent les décisions des simples aux raisonnements bancals (et ces “simples” représentent plus de 95% de la population, intellectuels et techniciens compris): des “récits” sont produits par des professionnels de l’agitprop, de la persuasion (publicitaire et/ou clandestine; cf. l’oeuvre de Vance Packard), qui vicient automatiquement les jugements de nos contemporains. En effet, on constate qu’aux Etats-Unis, les partis politiques nouveaux et challengeurs ne parviennent jamais à démarrer, à se créer des niches durables dans l’électorat ni au sein des états ni au sein de l’Union. Les Etats-Unis sont marqués par une bipolarisation permanente autour des partis républicain et démocrate, autour des “éléphants” et des “ânes”. Le dernier sursaut intéressant date, à mes yeux, des années 20 du 20ème siècle, quand le père Robert LaFolette Senior et les fils Robert Junior et Philipp M. LaFolette ont mobilisé de larges strates de la population autour de thèmes que l’on qualifierait aujourd’hui de “populistes” (avec toute la charge péjorative que ce terme recouvre désormais...). L’aventure “populiste” de Robert M. LaFolette père commence avant la première guerre mondiale, dans le Wisconsin agraire: il y défend les producteurs agricoles, fond sain du peuple américain. Après 1918, il lutte contre l’extension inquiétante du pouvoir exécutif aux dépens du législatif: au sein du mouvement des “Non partisans” et des “Progressives”, ils lutteront contre le “wilsonisme”, contre l’emprise des banques, contre le “New Deal” de Roosevelt et contre le bellicisme de ce dernier. Si les Etats-Unis comptent encore des centaines de clubs, associations, revues qui ne partagent pas les positions du gouvernement central (“fédéral”) et développent une culture politique contestatrice très riche sur le plan intellectuel, cette richesse ne parvient pas à franchir la ligne qui sépare l’aire où peuple réel est tenu isolé, aire dont ces clubs sont l’expression, et le domaine fermé du pouvoir qui vicie les esprits par sa propagande médiatique. La rationalité potentielle du “zoon politikon” américain (et occidental) est noyée dans une soupe idéologique faite de slogans forts, qui oblitèrent chez l’électeur toute réaction utile. La démocratie américaine se révèle un leurre quand on sait qu’aux dernières élections présidentielles, par exemple, le candidat démocrate Obama a reçu trois fois plus d’argent que tous les autres candidats réunis, on en conclut bien logiquement que les instances (plus ou moins cachées) qui tiennent les véritables rênes du pouvoir souhaitent désormais des mandats présidentiels de huit années, au moment même où la France passe du septennat au quinquennat, se privant ainsi d’une continuité politique nécessaire, au nom d’une réduction du pouvoir présidentiel (gaullien, donc haï à Londres et à Washington), réduction perpétrée, bien évidemment, au nom d’un (faux) “idéal démocratique”. La puissance hégémonique veut garder pour elle l’arme de la continuité politique et laisser aux “alien audiences”, fussent-elles théoriquement “alliées”, le handicap des mandats courts, plongeant ces puissances subalternes dans la discontinuité politique, donc dans l’incohérence diplomatique et stratégique (Bonjour, Sun Tzu!).
Max Weber, le fonctionnariat à la prussienne et l’Obrigkeitstaat
Max Weber est un philosophe et un sociologue incontournable pour qui veut étudier le fonctionnement du politique, mais aussi un philosophe-sociologue que l’on commence curieusement à négliger (au profit de banalités statistiques) dans les programmes universitaires de sciences politiques en ce pays. Le travail de Raymond Aron, intitulé “Les grands courants de la sociologie contemporaines”, avec son chapitre substantiel sur Weber, n’est plus potassé dans les établissements où l’on enseigne les sciences politiques... L’oeuvre de Max Weber s’enracine dans la tradition prussienne et luthérienne pour laquelle un Etat doit avoir pour épine dorsale un fonctionnariat pur, éloigné de toute corruption, animé par le sens du service, recruté par des établissements d’enseignement se plaçant au-dessus de la mêlée politicienne et, même, cultivant un certain mépris pour le gent politicienne. Pour Weber, tout fonctionnaire doit être totalement indépendant des partis. Les fonctionnaires forment une caste efficace et nécessaire, à côté de l’armée et de la noblesse terrienne; ensemble, ces trois piliers structurent l’Obrigkeitstaat, le noyau dur et intangible de l’Etat, lequel est toutefois flanqué d’un parlement qui vote les budgets et gère les affaires économiques et sociales. La “sanctuarisation” du fonctionnariat, de l’armée et de la noblesse (soit la cohésion des terres collectives, arables et consacrées à la sylviculture) s’avère nécessaire pour la bonne marche de l’appareil étatique, de type “Obrigkeitstaat”, mis en place par le génie politique de Bismarck. L’Obrigkeitstaat n’exclut pas le fonctionnement d’une démocratie parlementaire mais celle-ci demeure encadrée, en “haut”, par les structures stabilisantes que sont la vieille noblesse terrienne, le paysannat libre (qui en est l’échelon le plus bas, la réserve où se recruteront les futurs “aristocrates”), l’armée (dont le recrutement de base était essentiellement “paysan”), la diplomatie et le fonctionnariat (non issu des partis). Structures auxquelles on pourrait ajouter les “ordres”, comme l’Ordre des médecins, des pharmaciens, des architectes, etc. et, bien sûr, les universités (que le système Metternich excluait de toute décision ou même de toute consultation).
Les partis, pour Weber comme pour Tocqueville, risquent à tout moment de basculer dans le “spoil system” à l’américaine, à la différence toutefois, qu’aux Etats-Unis, il faut l’avouer, les collaborateurs payés des ministres ou des parlementaires et sénateurs, sont renvoyés à la “vie civile” si leur parti, démocrate ou républicain, perd les élections. Le phénomène des “cabinettards”, typique des partitocraties belge et italienne, n’existe pas Outre-Atlantique. Ces “cabinettards” sont en place pendant une législature, deux si leur “patron” est réélu, mais en cas d’échec électoral, ils sont renvoyés dans la société, à proximité de leurs militants et électeurs, plongés dans leurs soucis quotidiennes, dans leurs souffrances réelles et tangibles. Dans “Politik als Beruf” (en français: “Le savant et la politique”), Max Weber dénonce, de manière virulente, la pratique de la “Proporzionalität” en Pays de Bade (d’où le terme péjoratif de “Proporz” dans le vocabulaire offensif de Jörg Haider au temps de la marche en avant de la FPÖ autrichienne). Dans ce duché de l’Allemagne du Sud, très tôt “démocratisé”, comme on vient de le voir (cf. supra), le “Zentrum” catholique, proche à certains égards du démagogisme démocrate-chrétien et précurseur d’un Dehaene, avait exigé la distribution des emplois de fonctionnaires au pro rata des voix obtenues, sans qu’il n’ait été exigé de ces candidats à la fonction publique des compétences dûment attestées. La voie était ouverte à tous les abus: on l’a constaté en Belgique, en Autriche, en Italie, en Espagne... Le Zentrum de Bade prétendait pouvoir agir de la sorte parce que les socialistes tentaient d’en faire autant... C’est là un prélude aux dualismes socialistes/démocrates-chrétiens qui ont marqué la vie politique de bon nombre de pays européens au 20ème siècle et où la chasse aux prébendes était perpétuellement ouverte et bien juteuse. Le “Mouvement flamand”, avec Lucien Jottrand (Wallon comme son nom l’indique...), s’opposait en ce sens à l’unionisme (alliance des Libéraux et des Catholiques dans la Belgique d’avant 1885, date qui marque l’arrivée dans la course des socialistes) car l’unionisme figeait le phénomène naturel qu’est la circulation des élites, nécessité vitale pour toute politie vigoureuse, comme l’ont démontré Gaetano Mosca et Vilfredo Pareto. Jottrand plaidait pour le suffrage universel car il croyait briser ce dualisme, cette dualité binômique répétitive et bétonnante: en bout de course, ce suffrage universel, tant espéré, en a généré une autre, qui n’est peut-être plus binômique (trinômique?) mais qui demeure quasi inamovible et “in-réformable”.
Marco Minghetti et les tares de la partitocratie
Le ministre italien Marco Minghetti, à la fin du 19ème siècle, dans les premières décennies de l’Italie unifiée par Cavour et Garibaldi, voyait dans le développement précoce de la partitocratie italienne, un triple danger: 1) pour la justice, car toute partitocratie tend à effacer la séparation des pouvoirs en installant ses sbires dans la sphère judiciaire, 2) pour l’administration, car la partitocratie force celle-ci à engager des fonctionnaires inefficaces, dont le seul atout est de disposer d’une “carte d’affiliation”; 3) pour l’indépendance de la représentation populaire, car les députés sont inféodés à des machines qui cherchent toujours le plus petit commun dénominateur commun, ne tolèrent aucune originalité personnelle, et obligent les représentants du peuple à s’aligner sur les ukases de la “centrale”, en dépit des nécessités pratiques qui ont poussé les électeurs d’une circonscription donnée à voter pour telle ou telle personnalité, bien branchée sur des problèmes locaux, intransposables dans d’autres circonscriptions, où leurs solutions pourraient s’avérer impopulaires. Ces “personnalités”, freinées par la hiérarchie de leur parti, ne pourront pas, dès lors, oeuvrer de manière optimale pour le bien de leurs électeurs: le lien affectif entre élus et électeurs est dès lors dangereusement biaisé. Pour Minghetti, toute partitocratie présente quatre “tares”:
1) Elle chasse les personnalités compétentes hors de l’administration des choses publiques;
2) elle génère trop de juristes que l’on case dans les rouages de l’Etat, contribuant de la sorte à “formaliser” à l’extrême les rapports entre citoyens et entre ceux-ci et l’administration, sans qu’il n’y ait plus “ouverture” à des problématiques plus complexes, non prévues par les codes, ou à de l’innovation qui bouleverse les donnes en place. Dans la sphère du droit, la pléthore envahissante de juristes, qui ne sont pas tous bien formés ni cultivés comme il le faudrait, provoque une avalanche de “jugements posés mécaniquement”. Minghetti a prévu, dès la fin du 19ème siècle, ce qu’a constaté en Belgique, il y a une quinzaine d’années, le Recteur François Ost, des Facultés Universitaires Saint-Louis de Bruxelles: l’absence de plus en plus évidente de culture littéraire, historique et philosophique chez les jeunes juristes des années 60, 70 et 80, produits en masse par les établissements d’enseignement, génère dans la pratique quotidienne un droit abstrait et abscons, éloigné du réel, qui, ajouterions-nous, suscite méfiance et dégoût pour la justice dans la population, ce qui conduit à une situation malsaine. La réponse à ce problème, de plus en plus patent, est la reconstitution des tribunaux prudhommiques, constitués d’hommes branchés réellement sur les problèmes générés par les litiges, et le retour, à l’école secondaire, du grec et du latin, des “humanités” au sens renaissanciste du terme voire au sens où l’entendait les “tacitistes” autour de Juste Lipse et de ses disciples espagnols, d’une culture philosophique qui n’oublierait ni Platon ni Aristote; comment peut-on devenir un bon juriste sans avoir été frottés à cet arsenal classique?
3) Elle introduit le syndicalisme, légitime et nécessaire dans la sphère privé, dans le fonctionnariat administratif, ce qui permet de bloquer toute réforme qui égratignerait les avantages réels ou imaginaires des fonctionnaires; par la syndicalisation du fonctionnariat, aucun Etat n’est plus ni améliorable ni viable;
4) elle ruine l’indépendance de la magistrature; nous l’avons déjà évoqué.
L’oeuvre de Moisei Ostrogorski
De Minghetti à Roberto Michels et à bien d’autres critiques sérieux des dysfonctionnements propres aux partitocraties, la nature durable, l’inscription dans la durée des partis est en fait ce qui pose problème. Le hiatus n’est pas la constitution en soi de partis, créés par des citoyens soucieux de faire valoir leurs droits ou leurs revendications, c’est la transformation, au fil du temps, des partis en de sortes de nouvelles églises qui vicient, par leur poids, le fonctionnement optimal de l’Etat démocratique. Moshe (ou: Moisei) Ostrogorski (1854-1919), qui avait été actif dans le parti libéral des “Cadets” dans les dernières années de paix du tsarisme (avant la catastrophe d’août 1914), est sans nul doute l’auteur, le politologue, qui a le plus réfléchi à la nuisance pour la démocratie que représentent des partis qui s’inscrivent trop longtemps dans la durée. Outre son action sur la scène politique russe, Ostrogorski a étudié en France et aux Etats-Unis. Dans son maître-ouvrage, “La démocratie et les partis politiques” (Esprit de la Cité/Fayard, 1993), Ostrogorski démontre que l’extension dans le temps de l’existence de partis politiques au sein d’un Etat démocratique génère des effets pervers fort préoccupants: manipulations de l’opinion (renforcée dès les années 20 par l’avènement des mass médias radiophoniques et, quatre décennies plus tard, télévisuels), corruptions en tous genres, déresponsabilisation des citoyens, appauvrissement du débat public. Pour Ostrogorski, les partis sont donc tout à la fois indispensables et préjudiciables à la vie démocratique d’une nation. Poursuivant son raisonnement, Ostrogorski, cet ancien activiste du parti des “Cadets” en Russie tsariste, admet la nécessité démocratique des partis mais conteste leur permanence sur le long terme. Il prône un système démocratique reposant non pas sur des partis permanents, qui dureraient des décennies voire un siècle entier ou plus, mais sur des “ligues” ou des partis “ad-hoc”, créés pour des motifs concrets par des citoyens se mobilisant pour faire valoir des revendications précises mais que l’on dissoudrait immédiatement après le triomphe de ces revendications, après l’institutionalisation de leurs solutions dans la vie de la Cité. Les mécanismes de cette création à intervalles réguliers de partis —et de la dissolution concomitante des partis ou ligues ayant réalisé leurs projets— doivent bien entendu être déterminés par des règles constitutionnelles correctement balisées, assorties d’autres correctifs tels le référendum (comme en Suisse, ou plus récemment, suite à la crise de l’automne 2008, en Islande) ou le droit de veto des recteurs d’Université (comme en Irlande).
La permanence des partis dans des sociétés partitocratiques (et donc non démocratiques) comme la Belgique ou l’Italie ou encore, dans une moindre mesure, l’Allemagne ou l’Autriche (avant le nettoyage opéré par Haider), conduit au blocage irrémédiable de l’Etat qui chavire alors dans la corruption et l’insignifiance politique. En Turquie, quand les partis plongent l’Etat dans un stade de déliquescence dangereux pour sa survie et sa santé morale, l’armée (expression de l’“Etat profond” comme on le dit depuis l’affaire “Ergenekon”) oblige ces partis à s’auto-dissoudre pour que la société civile en refonde de nouveaux, avec des hommes neufs, quelques mois ou deux ou trois ans plus tard. Cet expédient n’est évidemment pas de mise en Europe occidentale, où l’armée ne représente pas (ou plus) l’ “Etat profond” et où, il faut bien l’avouer, il n’y a même plus quelque chose qui ressemble à un “Etat profond”, comme c’était le cas encore en France, dans les dernières années du gaullisme, après la guerre d’Algérie, mais depuis Sarközy et Hollande qui ont sabordé délibérément l’édifice gaullien, le naufrage, en France, de tout équivalent, fût-il édulcoré, de l’“Etat profond” turc est patent. Seul élément du cas turc à retenir dans notre propos: la caducité potentielle des appareils partisans; de ce fait, heureusement pour la santé de l’Etat turc, les partis politiques turcs ne peuvent prétendre, comme les nôtres, à cette pérennité qui leur permet de saborder continuellement le cadre étatique, auquel ils tentent de se superposer, et de ruiner la société, en réalisant des dépenses inconsidérées, résultats de leur propre démagogie. L’histoire jugera les efforts d’Erdogan pour briser les reins de l’“Etat profond” kémaliste/militaire; l’AKP parviendra-t-elle à créer un autre “Etat profond” (rénovation ou ersatz du califat abrogé en 1924?): telle est la question qu’il convient de poser.
Les critiques de Panfilo Gentile
Panfilo Gentile (1889-1971) était un observateur avisé de la politique italienne et l’héritier intellectuel de Marco Minghetti. Ce politologue a choisi la stratégie du journalisme, par volonté pédagogique, afin d’avertir, jour après jour, ses compatriotes des effets pervers d’une démocratie dévoyée en partitocratie. Ses arguments sont grosso modo ceux de l’école italienne de politologie, notamment ceux de Marco Minghetti et sans doute aussi de Moshe Ostrogorski. Il ajoute, pour l’après-guerre post-fasciste, l’effet dévastateur du “wishful thinking” où les politiciens de la partitocratie, en Italie comme en Belgique (notamment avec le plan Spitaels pour l’emploi dans la fonction publique), promettent tout ce qu’il est possible de promettre sans que les moyens matériels ne soient réellement disponibles ou ne soient disponibles que par recours à des artifices inflationnistes ou à une fiscalité trop lourde sur le long terme, etc. La partitocratie se mue dès lors en une juxtaposition parallèle de partis, en apparence concurrents, tous totalitaires dans les attitudes qu’ils prennent vis-à-vis de leurs propres mandataires et militants, des partis qui n’ont donc qu’un seul objectif, diamétralement contraire au Bien commun, celui d’amasser le maximum de privilèges et d’occuper le plus de prébendes possibles. Face à cet éventail restreint d’appareils totalitaires, encore renforcés en Belgique par le dispositif tacite mais bien réel mis en place lors du “coup de Loppem”, il n’y a pas vraiment d’opposition: les éventuels challengeurs sont vite marginalisés, financièrement mis à sec dans des délais fort brefs, ignorés des médias ou moqués par la presse aux ordres. Plus récemment, on a inventé les procès pour “racisme”...
Panfilo Gentile constate aussi dans son oeuvre que les médias du 20ème siècle, à commencer par la radio, suivie de la télévision, permettent à ceux qui les détiennent d’exclure de facto de la compétition tous les challengeurs ou de mener des campagnes féroces contre eux, sans qu’ils ne puissent se défendre, au nom, bien entendu de la “liberté de la presse”: on l’a vu pour les Etats-Unis avec les mésaventures de la famille LaFollette; on constate qu’en Angleterre, les challengeurs du binôme Labour/Tories —en perpétuelle alternance comme si c’était un perpetuum mobile— ont toujours eu bien du mal à conquérir des sièges aux Communes (à la seule exception récente des Liberal-Democrats ou, en Ecosse, du SNP); la “Special Branch” étant, elle aussi à l’instar de nos “Dupont-Dupond”, spécialisée en coups tordus, avec l’aide, notamment, de l’”Anti-Nazi League” (car il est bien entendu que tout challengeur, fût-il un hippy chevelu et tolstoïen ou un israélite inspiré par Martin Buber, devient automatiquement un “nazi”, par l’effet imparable des “simsalabims” éructés par les chiens de garde du système...), d’où l’utilité, partout en Europe, d’un anti-nazisme virulent, bien médiatisé et récompensé par de généreux subsides tirés de l’escarcelle du contribuable, alors que tous les nazis de chair et de sang sont morts et enterrés...; en Allemagne, les éléments challengeurs ne se sont jamais inscrits dans la moyenne ou la longue durée, perpétuant, dans les hémicycles officiels, une alternance lancinante avec pour seuls acteurs réels les démocrates-chrétiens et les socialistes, etc. Le système démocratique, dont le but était, au départ, de représenter l’effervescence de la vie populaire et les changements à l’oeuvre dans la société, en organisant des élections à intervalles réguliers pour exprimer ces changements constants de donne, ne joue plus ce rôle dès qu’il devient partitocratie. La partitocratie, avec ses partis figés et permanents, est donc bel et bien un déni de démocratie, car elle refuse tout changement de donne, tout défi, tous challengeurs.
En Espagne
En Espagne, Gonzalo Fernandez de la Mora, issu de la garde des “technocrates”, appelés à remplacer les “vieilles chemises” dans les dernières années du franquisme, avait été ministre des travaux publics dans les derniers gouvernements du Généralissime; fondateur de la revue “Razon Española”, il a fustigé sans relâche l’installation de moeurs belgo-italiennes dans les sphères politiques nationales et régionales espagnoles, depuis le retour à la monarchie constitutionnelle et l’émergence de “l’Etat asymétrique des régions et communautés autonomes”. Depuis son décès, hélas prématuré, ce grand esprit, cet héritier du meilleur de la politologie hispanique, a eu des successeurs, notamment José Manuel Otero Novas, juriste et constitutionaliste de haut vol, aujourd’hui en marge de la politique politicienne qui, velléitaire et pusillanime, se passe bien sûr de tels grands esprits. Otero Novas vient de publier “Mitos del pensamiento dominante – Paz, Democracia y Razón” (Libros Libres, Madrid, 2011), où il fustige les facteurs qui “soumettent la démocratie à distorsions”; il reprend l’idée d’Ostrogorski en démontrant que les partis sont tout à la fois des instruments (nécessaires) à la démocratie mais aussi les obstacles majeurs à son développement optimal; il dénonce, sans doute en bon élève de Carl Schmitt, les “pouvoirs indirects”, qui n’agissent pas en toute “visibilité”, dont la maçonnerie qui, après son éclipse sous la férule franquiste, réinstalle ses dispositifs en Espagne, comme elle les a installés depuis 1830 en Belgique, sans que des réactions rationnelles, visant le Bien commun, n’aient été repérées dans notre histoire politique. En Italie, le professeur de sciences politiques Alberto Vannucci (Université de Pise), a fait le lien entre corruption partitocratique, réseaux mafieux et maçonnerie, notamment dans le cas de la fameuse Loge P2 de Licio Gelli (cf. A. Vannucci, “Il mercato della corruzione – I meccanismi dello scambio occulto in Italia”, Società aperta Ed., Milano, 1997). Pour la Belgique, un synopsis intéressant des mafias à l’oeuvre a été établi par Freddy De Pauw, un journaliste du “Standaard” (cf. bibliographie).
Le combat isolé d’Alain Destexhe en Belgique
Nous venons de voyager dans l’histoire des premières décennies de l’Etat belge, dans les années 10, 20 et 30 des démocraties occidentales (où les exécutifs se sont largement substitué au législatif) et dans l’univers de la politologie, surtout italienne, mais quid hic et nunc? Qu’en est-il ici, en ce pays, à l’heure actuelle? La politologie critique est quasi inexistante, à la seule et notable exception des travaux du Sénateur MR (libéral) Alain Destexhe. Cet homme politique libéral de la Région de Bruxelles-Capitale possède son ancrage communal à Auderghem (Oudergem), où, récemment, il a eu maille à partir avec son co-listier Didier Gosuin, étiquetté FDF (“Front des Francophones”), lors d’une campagne électorale pour les communales: des sbires du FDF l’auraient maxaudé lors d’une altercation, survenue entre deux groupes de colleurs d’affiches, l’un MR, soutenant Destexhe, et l’autre FDF, soutenant Gosuin. Destexhe a subi une campagne médiatique haineuse, suite à la scandaleuse vandalisation de la station de métro Horta à Saint-Gilles. Sur un blog ou sur Facebook (que Nanabozo le Grand Lapin nous en préserve!), Destexhe avait envoyé un mot rageur, et sûrement un peu malheureux, à une amie: “Encore un coup de tes amis norvégiens...”. Tout le monde sait, à Bruxelles, que lorsqu’on parle d’“amis norvégiens” ou “finlandais”, on désigne les trublions maghrébins, qui ne sont considérés ni comme “amis”, ni comme “norvégiens” ou “finlandais” par ceux qui utilisent cette expression un peu simpliste, histoire de contourner les ukases du “politiquement correct” et de tromper la vigilance des cinglés obsessionnels du “Centre pour l’égalité des chances et des longueurs de zizi et pour la lutte contre le racisme, la myxomatose et le phylloxéra”. Bref, cette note anodine —sûrement proférée mutatis mutandis par des milliers de Bruxellois à la vue de la belle station de métro, maculée de jets de peintures de toutes couleurs “flashy”— a sans doute été exprimée à tort contre les “Norvégiens” putatifs car le forfait semble plutôt l’oeuvre de camés disjonctés (par crack, speed, coke ou autre mescaline) sans distinction de race ou de classe, mais elle a permis à toute une clique de véreux vexés d’orchestrer une cabale virulente contre le pauvre Destexhe qu’on cherche à chasser de tous les aréopages politiques de la Région et du Fédéral. Pourquoi cette hargne? Parce Destexhe a écrit les meilleurs livres critiques —encore que fort gentils par rapport à ce qui ce publie en Flandre— sur les dysfonctionnements de la Belgique: il a commencé par rédiger un livre bien ficelé sur les aberrations de l’enseignement francophone belge, dont les résultats aux sondages PISA sont désastreux et devraient faire honte à la clique des faux pédagogues obtus, vieux gauchards débraillés, incultes et stupides qui imposent leurs lubies délétères aux pauvres gosses, aux parents et à tous les gens de bon sens qui subsistent vaille que vaille dans cette institution (cf. Alain Destexhe, Vincent Vandenberghe & Guy Vlaeminck, “L’école de l’échec: comment la réformer? Du pédagogisme à la gouvernance”, Ed. Labor, Bruxelles, 2004). Ce livre était un premier coup de pied dans la fourmilière. Destexhe va récidiver.
“Politique” et “politisation”
Cette récidive prend la forme d’un nouveau livre, intitulé significativement “Démocratie ou partitocratie? 120 propositions pour refonder le système belge” (Labor, Bruxelles, 2003). Destexhe l’a rédigé de conserve avec le Prof. Alain Eraly (ULB) et Eric Gillet. Dans le cadre belge, il convient de rappeler que Destexhe demeure un libéral, qu’il n’est absolument pas “raciste” (et sa vie quotidienne le prouve amplement) et qu’il n’est pas séparatiste (il croit au cadre étatique belge, tel qu’il existe aujourd’hui): inutile de s’évertuer à faire de Destexhe un comploteur fanatique, appartenant à une idéologie dissidente enragée de ne pas être appelée à co-gérer les affaires du royaume. Non: Destexhe est un homme politique qui se veut loyal à l’endroit de son propre “pilier libéral”. L’intérêt premier de ce livre est de faire la distinction entre “politique” et “politisation”. Le terme “politique” est chargé d’une connotation positive dans l’ouvrage de Destexhe, Eraly et Gillet. La politique est inscrite dans l’essence de l’homme, en tant que “zoon politikon”. Si elle se déploie dans une continuité temporelle harmonieuse, elle s’avère essentielle pour le Bien public, pour la communauté nationale ou le “commonwealth”. Le terme “politisation” est, lui, chargé d’une connotation négative dans le livre: il signifie l’immixtion permanente du monde politicien dans la vie quotidienne, dans l’espace privé des citoyens, dans les modes de pensée spontanés de l’homme de la rue (qui ne peut plus rien dire, ne peut plus ironiser, caricaturer, jouer son petit Diogène au comptoir du bistrot ou sur le mur virtuel de Facebook sous peine d’être accusé de sexisme, de racisme et, bien entendu, de “nazisme”). La “politisation” pourrait être un facteur positif si elle favorisait l’accès au statut de “zoon politikon”. Ce n’est pas le cas en Belgique car la “politisation”, telle que la dénoncent nos trois auteurs, sert justement à maintenir le citoyen hors de ce statut, pourtant ontologique. Destexhe, Eraly et Gillet énumèrent ensuite les cinq tares du système belge qu’ils ont décidé de mettre en exergue: 1) la “particratie” (ils ne disent pas la “partitocratie”, terme exact, propre aux sciences politologiques, l’autre, pour lequel ils optent, étant polémique); 2) la politisation, au sens péjoratif qu’ils accordent à ce vocable; 3) le clientélisme (que leurs homologues flamands, autour de Luc Huyse et Chris Deschouwer, appellent l’“amigocratie”; 4) l’hyper-complexité des institutions qui en découle; 5) la culture du compromis, présentée comme un atout, alors qu’elle bloque irrémédiablement le processus de décision.
Cinq tares
Pour notre trio de politologues, la “particratie”, première des cinq tares du machin Belgique, conduit à un “contrôle général” de la population. Nos auteurs mettent tout particulièrement un danger en exergue: les artistes de talent, les universitaires bardés de diplômes de haut niveau scientifique, qui veulent obtenir quelque chose doivent devenir membre d’un parti, jurer fidélité à des politicards, fussent-ils des ivrognes, des prostituées recyclées, des abonnés à la Gay Pride, des tenanciers de maison de tolérance, des escrocs notoires, etc. et, pire, soulignent-ils, doivent s’humilier devant de telles créatures comme dans les systèmes totalitaires pourtant décriés à qui mieux-mieux dans les gazettes du régime, sur les ondes et à la télévision. S’ils refusent de s’humilier devant ces imbéciles vulgaires, ils sont souvent contraints à l’émigration vers des pays qui les accueillent évidemment à bras ouverts et où les recteurs des universités ne doivent pas passer sous les fourches caudines d’une canaille comme celle qui nous gouverne en maintenant à son profit exclusif le dispositif du “coup de Loppem”. C’est dans cette obligation de s’humilier en permanence que nos trois auteurs perçoivent le pire danger que la “particratie” fait courir à la démocratie, au bien commun et à l’honneur des citoyens, surtout les plus insignes. En effet, des individus méprisables, de mauvais aloi mais qui détiennent le pouvoir, contraignent de plus en plus de personnalités de grande valeur à la marginalité ou à l’émigration, si ces personnalités refusent de s’humilier. Le pays se vide ainsi de talents précieux pour accueillir ensuite, par centaines de milliers, de pauvres hères, venus de partout et de nulle part, qui ne trouveront jamais un boulot utile et créatif dans nos industries et services, comme le souligne par ailleurs, cette fois pour l’Allemagne, le socialiste berlinois Thilo Sarrazin, auteur d’un best-seller sur le déclin de l’Allemagne contemporaine qui a été vendu à plus d’un million d’exemplaires.
Le seconde tare, mise en exergue, concerne la “politisation”, concept négatif aux yeux de nos auteurs. L’effet le plus préoccupant de cette “politisation” découle du fait qu’il n’existe pas d’examens d’Etat pour recruter les fonctionnaires. Il existe certes des fonctionnaires statutaires, récrutés sur base de leurs diplômes acquis dans les établissements d’enseignement, mais ils sont flanqués d’autant, sinon plus, de “cabinettards”, c’est-à-dire de collaborateurs de parlementaires et de ministres placés suite aux résultats électoraux et forcément tous membres de partis: dans la plupart des cas leur carte d’affiliation pesant plus lourd que leurs diplômes (s’ils en ont...). En théorie, les cabinettards sont placés à leurs postes pour servir le ministre ou le parlementaire dans l’exercice de ses fonctions, mais celles-ci sont limitées dans le temps (celui d’une législature); en Belgique toutefois, on a pris la mauvaise habitude de les nommer définitivement, même après le départ du ministre vers d’autres fonctions ou après un échec électoral. D’autres cabinettards sont casés dans des institutions parallèles, financées par les deniers publics. Le prix de la fonction publique, justifié s’il s’agit de fonctionnaires statutaires recrutés sur base de diplômes dûment acquis, cesse d’être justifiable quand une pléthore de militants, ex-cabinettards ou bénéficiaires de divers passe-droit, s’y incruste tant et si bien qu’elle devient tentaculaire, trop obèse pour agir dans la souplesse requise. Pire: la présence inamovible de ces milliers de cabinettards dans les rouages de l’Etat fait que l’Etat et le fonctionnariat cessent d’être, comme le voulait Max Weber (qui avait en tête le vieux système prussien), des instances neutres, objectives, aux yeux du public. Cette manie de nommer définitivement les cabinettards, comme s’ils étaient des fonctionnaires statutaires, crée dans l’opinion publique, avec d’autres facteurs générant dégoût ou désillusion, une attitude hostile à l’Etat, diffuse, inexprimée et sournoise. Jean-Luc Dehaene, figure emblématique des travers de la partitocratie, version démocrate-chrétienne, appelait cette attitude de rejet ou d’indifférence l’“anti-politiek” et la fustigeait comme l’anti-chambre du populisme. On perçoit tout de suite la perversion de son discours: c’est bien plutôt l’attitude populaire qui est “politique”, au sens positif où l’entendent Destexhe et ses amis, puisqu’elle refuse une “politisation” qui engendre quantité de dysfonctionnements. L’attitude de Dehaene, qui se prétend “politique”, est en réalité “politicide” puisqu’elle ruine la politie où elle exerce ses ravages. Nous avons là une inversion sémantique, quasi orwellienne, où les héritiers indignes de la troïka de Loppem appellent “politique” leurs jeux néfastes qui ruinent la Cité. Et fustigent comme “anti-politiek” le désir diffus de mettre un terme aux dysfonctionnements patents d’un Etat à la dérive.
Clientèlisme et compromis
La troisième tare dénoncée par Destexhe est le clientélisme, omniprésent en Belgique, surtout dans la Wallonie socialiste. La quatrième tare est l’installation ubiquitaire d’institutions au fonctionnement trop compliqué: cette complexification croissante des rouages de l’Etat est à son tour un déni de démocratie, vu que le citoyen n’en comprend pas le fonctionnement, en vient à ignorer certaines lois ou à n’en comprendre que trop vaguement la signification. Qui dit démocratie, dit transparence (au meilleur sens du terme), dit clarté et visibilité du jeu politique. Cette visibilité s’estompe, si bien que l’on ne peut plus, sans mentir, parler de démocratie.
La cinquième tare est celle des compromis. On vante souvent, dans la presse et les médias aux ordres, la capacité à sceller des compromis comme une “vertu politique” typiquement belge. Dehaene, surnommé le “plombier” à cause de son habilité légendaire à imaginer et imposer des tuyauteries alambiquées pour faire fonctionner le “machin” après d’interminables négociations, est un virtuose de ces compromis opaques où l’on ne retient que les plus petits dénominateurs communs entre partis et idéologies sous-jacentes (du moins ce qu’il en reste), au détriment de questions importantes, escamotées ou mises au placard. Cet art de faire des compromis permet surtout de remettre aux calendes grecques les dossiers importants qui devraient pourtant être réglés dans des délais aussi brefs que possibles. Rien n’est décidé: les décrets, par lesquels Dehaene aimait gouverner, ne servent pas à décider dans les dossiers épineux et urgents: ils servent à faire passer dans nos réalités politiques et quotidiennes l’architecture branlante des “plomberies”, au détriment des vraies décisions qui nous permettraient de sortir des impasses où les inévitables aléas du temps nous fourvoient à intervalles réguliers, les lois éternelles de l’usure des institutions et de l’accumulation graduelle des problèmes étant incontournables, générant de telles impasses dont le politique, le vrai, devrait normalement nous sortir dans des délais aussi brefs que possible. Dans une telle situation, le processus de décision politique, essentiel pour le bon fonctionnement d’un Etat, devient trop lent ou se voit irrémédiablement bloqué. Ce blocage est dû à l’absence de clarté dans les concepts de gouvernement, à l’absence de “grandes idées incontestables” (Hauriou), à la disparition d’un héritage classique commun où l’équilibre entre principes aristotéliciens et visions platoniciennes, rhétorique cicéronienne et annales tacitistes, permettait à tous de trouver des bases d’accord solides. Toutes choses que le libéralisme, dont Destexhe est encore existentiellement tributaire, a contribué à ruiner dans toute l’Europe, au profit de “pragmatismes” sans profondeur et d’un “économisme/commercialisme” qui conduit à l’anarchie douce et à la mort du politique.
Toute critique positive du dysfonctionnement de la “démocratie” en Belgique peut bien entendu se baser sur le livre simple, clair, didactique, de Destexhe, Eraly et Gillet. C’est un premier tremplin pour renouer avec les grandes traditions de la pensée politique critique, de Mosca à Pareto, de Weber à Michels, de Schmitt à Freund, de Haider à Sarrazin, de Miglio à Otero Novas, etc. Il faut cependant tenir compte de la longue crise politique belge entre 2007 et 2010, postérieure à la rédaction du livre-manifeste de nos trois auteurs, où le système partitocratique est entré dans une phase de blocage inédite, qu’il ne pourra pas répéter une seconde ou une troisième fois sans s’asphyxier définitivement et sans faire éclater le royaume, au beau milieu d’une Europe qui se délite, suite à la crise financière de 2008 et au vacillement de l’euro, sans nul doute parce qu’elle a voulu obstinément suivre une “norme” sans disposer de la “force” (militaire et satellitaire) nécessaire pour consolider la monnaie d’un espace sinon “impérial” du moins “continental” ou “sub-continental” (Zaki Laïdi).
Période d’endormissement
Les blocages de la machine partitocratique nous font sombrer dans ce que Hannah Arendt, suite à l’idée heideggerienne du “règne du on”, nommait une “période d’endormissement”, où les pesanteurs accumulées nous empêchent tous de mener une réelle “vita activa”, donc une vie de “zoon politikon”, une vie véritablement “citoyenne”, au sens du “civis” romain. Le paradoxe de notre époque est que les Tchandalas dominants n’ont que le terme “citoyen” à la bouche, alors qu’ils empêchent par leurs manoeuvres contrôlantes et bloquantes l’éclosion d’une véritable citoyenneté! C’est une situation comme l’imaginait Orwell dans son célèbre roman “1984”, où “la vérité est mensonge” et “la paix est la guerre”. Jos De Man (photo), en Flandre, le démontre dans un volume épais, paru chez le prestigieux éditeur ASP de Bruxelles (“Academic and Scientific Publishers”): nous assistons, sous les coups du “politiquement correct” qui sert le système figé créé par la partitocratie (issue du “coup de Loppem”), à l’éclipse du citoyen, qui cède la place, de plus en plus rapidement, à une nouvelle forme de “sujet” (onderdaan, Untertan), non pas actif, comme le serait un “sujet de l’histoire” ou l’exposant d’une “vita activa” (selon Hannah Arendt), mais amorphe, passif, saoûlé de discours médiatiques ineptes ou empêché d’exprimer avis, opinion, état d’âme, legs ataviques, religiosité immémoriale, etc.
Mais le but premier reste l’espoir de Jean Eugène van der Taelen, à qui je dédie cet essai: rendre la démocratie plus directe, en instaurant chez nous le principe du référendum sur le mode helvétique, permettant justement d’imposer par la base la décision au sommet, sans passer par le filtre des partis tout en restant pleinement démocratique. Mieux: en étant plus démocratique que les partitocrates qui ne sont jamais que des démocrates auto-proclamés, dont le système exhibe de plus en plus de lézardes!
Robert Steuckers.
(essai préparé en mars 2012; rédaction finale, mai 2013).
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Wolfgang MOMMSEN, Max Weber. Gesellschaft, Politik und Geschichte, Suhrkamp, Frankfurt am Main, 1974.
Walter NUTZ, Vom Mythos der Freiheit – Von Plato bis Nietzsche – Verfall der Demokratien am Ende des 20. Jahrhunderts, Edition Q, Berlin, 1995.
Moisei OSTROGORSKI, La démocratie et les partis politiques, L’Esprit de la Cité/Fayard, Paris, 1993.
José Manuel OTERO NOVAS, Mitos del pensamiento dominante – Paz, Democracia y Razón, Libros Libres, Madrid, 2011.
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Marco REVELLI, Finale di partito, Giulio Einaudi, Torino, 2013.
Giuseppe SCHIAVONE (a cura di), La democrazia diretta – Un progetto politico per la società di giustizia, Ed. Dedalo, Bari, 1997 (dans ce volume, cf.: Giuseppe SCHIAVONE, “La democrazia rappresentativa, apporti e limiti”; Ronald CREAGH, “Gli infortuni della democrazia”; Gian Paolo PRANDSTRALLER, “partito e movimento”; Arrigo COLOMBO, “Principi di autogoverno politico”; etc.).
Gustav SICHELSCHMIDT, Ernst Moritz Arndt, Stapp Verlag, Berlin, 1981.
Robert STEUCKERS, “Des effets pervers de la partitocratie”, in: Nouvelles de Synergies européennes, n°41, juillet-août 1999.
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jeudi, 23 mai 2013
Dominique Venner : le sacrifice...
Dominique Venner : le sacrifice...
Il y a un peu plus de 20 ans, paraissait le premier numéro de la revue "Enquête sur l'Histoire" créée par Dominique Venner et consacré à "40 siècles d'identité française". Dans son éditorial, il évoquait la corbeille d'un châpiteau de la basilique Saint-Andoche de Saulieu décorée d'un feuillage stylisé et qui était présentée aux visiteurs comme révèlant une influence orientale... comme si chez un tailleur de pierre bourguignon du XIIe siècle n'avait pu germer l'idée de sculpter des branchages d'aulne pour agrémenter un châpiteau. Dominique Venner n'a eu de cesse de dénoncer la supercherie idéologique qui - par le biais d'une Histoire officielle manipulée - entend faire accroire que la civilisation européenne n'a pu s'épanouir que sur les modèles et par les apports de civilisations exotiques.
Notre camarade s'est fait le chantre de notre mémoire historique et l'ardent défenseur de notre identité civilisationnelle européenne qui est d'un âge immense comme l'a écrit Carl Jung. Une civilisation pluri-millénaire qui s'est enrichie des apports, non du judéo-christianisme, mais du catholicisme romain et de l'orthodoxie grecque devenus les plus païennes des sectes chrétiennes. Une civilisation à la beauté créatrice, à la force conquérante et à l'incomparable grandeur qui s'est perpétuée sans rupture radicale pendant des millénaires et qui est aujourd'hui menacée tant par l'invasion migratoire allogène que par les dérives idéologiques des collabos d'un Système mondialiste acharné à détruire les peuples et les nations.
C'est face à l'autel de la cathédrale Notre-Dame de Paris, là ou se dressait celui de Jupiter dans la Lutèce gallo-romaine, que notre camarade Dominique Venner a choisi de s'immoler. Ce fut là peut-être un pied de nez aux enchasublés modernistes qui pervertissent et trahissent la foi de leurs ancêtres, ce fut là certainement un sacrifice exemplaire pour réveiller nos frères de peuple. Avant de partir rejoindre les dieux - et comme ont dit si bien Carl Lang et Pierre Vial - Dominique Venner a sonné le tocsin : l'alerte est donnée, il nous reste maintenant à trompetter le boute-selle et le sonne-tambour. Le sacrifice de Dominique Venner est un appel au combat !
Yves Darchicourt
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Hommage à Dominique Venner - Paris
Hommage à Dominique Venner - Paris
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Dominique Venner : la force de l’effet produit
Dominique Venner : la force de l’effet produit
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La mort de Dominique Venner, ce 21 mai, donne déjà lieu à de nombreux hommages mérités. Compagnons d’armes ou de plume, ses vieux camarades servent sa mémoire, racontent sa geste et témoignent de l’homme qu’il fut.
Parce que la différence d’âge a fait de nous des camarades de ses enfants plus que de lui-même, nous pensons que le meilleur hommage à lui rendre est de saluer le choix, rayonnant d’intelligence et de puissance, de son sacrifice.
Dominique Venner croyait à l’Histoire. Il savait que celle-ci se forge autour de longues et patientes évolutions, mais plus souvent encore par l’irruption de l’imprévu, de l’inattendu, de l’événement qui embrase tout, précipite les choses – au sens chimique – pour assurer le basculement d’un monde ancien vers un nouvel ordre à bâtir.
La seconde passion de Dominique Venner, c’était la patiente recherche du meilleur effet produit. Sans illusion sur la dureté des temps, il a, toute sa vie durant, après avoir connu l’ivresse des combats, militaires puis militants, cherché à peser et être utile au meilleur endroit, au meilleur moment, avec les meilleures armes politiques, intellectuelles, esthétiques ou morales.
Le choix de sa mort est, à ce titre, troublant de pertinence. Elle lui ressemble totalement.
Il a choisi un acte pur, romain, sans peur ni faiblesse. Quelles que soient les analyses médiatiques qui seront faites, la nudité et la pureté de son acte ne pourront être salis et, dans notre inconscient engourdi de Vieux Européens, cette mort volontaire nous saisit plus fortement que nous le pensons nous-mêmes. Elle nous rappelle le sens du tragique, à tous ces moments de l’histoire où nos ancêtres ont eu leur propre vie entre leurs mains, bien loin des douceurs émollientes de notre époque d’enfants gâtés.
Il a choisi un lieu d’une puissance évocatrice exceptionnelle. Un lieu symbolique de la Chrétienté, si fortement malmenée depuis longtemps et pourtant si puissamment réveillée, ces derniers temps, par le sursaut de ces centaines de milliers de manifestants qui, partout en France, défendent une certaine conception de la civilisation européenne et chrétienne sans être nécessairement de fervents catholiques. Un lieu laïc aussi, car Notre-Dame est la cathédrale de Paris, capitale de la France, ce qui permet à tous de s’y identifier, quelles que soient leurs options intellectuelles, philosophiques, morales ou religieuses.
Il a choisi un moment opportun. Celui où, dans le sillage des grands cortèges de la Manif pour Tous, de jeunes générations s’éveillent au combat militant et à la défense de leurs valeurs, face au silence des immobiles, au mépris des médias ou aux mensonges de l’Etat. Dominique Venner a vu, lui, que ces jeunes sont un levain, un ferment, l’avant-garde d’une nouvelle génération de Français et d’Européens qui, inconsciemment ou non, tardivement peut-être, ont décidé de ne pas abdiquer le droit de vivre leurs vies d’hommes dans la fidélité à leur identité. Lui, l’observateur des joutes politiques trop souvent stériles, a compris que ces jeunes gens ont besoin de repères, d’illustrations, de symboles. De quelque chose qui parle à leur Etre.
Il a, enfin, choisi l’humilité. Sa renommée et la force de sa plume auraient pu lui faire préférer l’écriture d’un nouveau bréviaire pour jeunes militants, ou d’un livre définitif sur sa vision de l’histoire et de notre devenir. Il a choisi de ne donner qu’un seul signe, qu’un seul exemple. En rappelant que toute cause ne vaut que si le sacrifice ultime fait partie des options, que toute cause n’est véritablement sacrée que si elle engage sa vie même, il a offert aujourd’hui la sienne pour que vivent, demain, dans la fierté retrouvée, de nouvelles générations d’Européens.
En ce sens, nous qui n’avons pas partagé avec Dominique Venner les passions de sa jeunesse, nous qui n’avons pas, pour nous réchauffer de son absence, les souvenirs des combats du passé, nous voulons dire combien nous nous inclinons devant la lumineuse intelligence de sa dernière action, sans doute la plus politique de ses vingt dernières années.
Nous n’avons pas de peine. Nous sommes frappés par la lucidité de son choix et le courage de son acte. Ce qu’il nous reste, c’est la joie de l’avoir suffisamment connu pour comprendre la puissance de cet acte et apprécier la force de l’effet produit. Il nous faudra désormais rester fidèles et être à la hauteur.
Philippe Christèle et Grégoire Gambier
22/05/2013
© Polemia
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mercredi, 22 mai 2013
La mort d’un samouraï d’Occident
La mort d’un samouraï d’Occident
Ex: http://cerclenonconforme.hautetfort.com/
Quel geste ! Quelle grandeur ! Faisant suite à la stupéfaction et à une grande tristesse, c’est immédiatement ce à quoi nous avons pensé lorsque nous avons appris, en ce 21 mai 2013, l’annonce du suicide de Dominique Venner.
Le geste en lui-même est très parlant et répond à une certaine logique pour qui connait un minimum les écrits de celui qui était véritablement, pour nous au Cercle Non Conforme, un de nos maîtres à penser. Dominique Venner s’est donné la mort dans un lieu hautement symbolique de l’histoire de France et du génie européen : la cathédrale gothique de Notre-Dame de Paris. Grand connaisseur des armes à feu, c’est avec l’une d’entre elles qu’il s’est tiré une balle dans la bouche…
Dominique Venner a suivi en cela ses idées. Il était un grand Européen, conscient et affecté de la décadence actuelle de son continent. Pour lui, ce terrible déclin n’était pas inéluctable, l’Europe étant « en dormition »… Cette « dormition » se révélant au fil du temps peut être plus profonde qu’on ne le pensait, l’ « historien contemplatif » qu’il était s’est certainement résolu à passer à l’acte. Pourquoi ? Car ce suicide n’est pas l’œuvre d’un "dérangé" ou d'un "désespéré" comme le pense certains, il est un acte de protestation héroïque contre le monde moderne, contre cette Europe actuelle dégénérée et coupée de ses racines, négation totale de ce qu’elle est réellement. C’est un acte, pour nous Français, que nous devons considérer de la même manière que les Japonais considèrent le suicide de Mishima. C’est une mort digne, désintéressée, grandiose quelque part, romaine en un mot. Dominique Venner rejoint ici Lucrèce, Caton le Jeune et Publius Spendius mais aussi tant d’autres grands personnages de notre histoire dont le suicide fut une protestation contre le délitement de leur époque : pensons en premier lieu à Drieu la Rochelle.
Il l’écrivait lui-même dans sa dernière lettre : « Je me sens le devoir d’agir tant que j’en ai encore la force. Je crois nécessaire de me sacrifier pour rompre la léthargie qui nous accable. Je choisis un lieu hautement symbolique, que je respecte et j’admire. Mon geste incarne une éthique de la volonté. Je me donne la mort pour réveiller les consciences assoupies. Alors que je défends l’identité de tous les peuples chez eux, je m’insurge contre le crime visant au remplacement de nos populations. »
Nous l’avons dit, Dominique Venner était (et restera) pour nous une source d’inspiration infinie, tant de par ses réflexions historico-culturelles que par sa vision du militantisme politique. Lui qui avait abandonné celui-ci pour voguer vers d’autres cieux depuis des décennies, il a mis fin à sa vie par l’acte militant par excellent : le sacrifice. Le côté tragique de son choix ne fait qu’en renforcer la portée et la fierté qui brûle en nous d’avoir comme guide un tel homme.
Le Cercle Non Conforme
Note du C.N.C.: Toute reproduction éventuelle de ce contenu doit mentionner la source.
Déclaration de Dominique Venner
Les raisons d’une mort volontaire
Je suis sain de corps et d’esprit, et suis comblé d’amour par ma femme et mes enfants. J’aime la vie et n’attend rien au-delà, sinon la perpétuation de ma race et de mon esprit. Pourtant, au soir de cette vie, devant des périls immenses pour ma patrie française et européenne, je me sens le devoir d’agir tant que j’en ai encore la force. Je crois nécessaire de me sacrifier pour rompre la léthargie qui nous accable. J’offre ce qui me reste de vie dans une intention de protestation et de fondation. Je choisis un lieu hautement symbolique, la cathédrale Notre Dame de Paris que je respecte et admire, elle qui fut édifiée par le génie de mes aïeux sur des lieux de cultes plus anciens, rappelant nos origines immémoriales.
Alors que tant d’hommes se font les esclaves de leur vie, mon geste incarne une éthique de la volonté. Je me donne la mort afin de réveiller les consciences assoupies. Je m’insurge contre la fatalité. Je m’insurge contre les poisons de l’âme et contre les désirs individuels envahissants qui détruisent nos ancrages identitaires et notamment la famille, socle intime de notre civilisation multimillénaire. Alors que je défends l’identité de tous les peuples chez eux, je m’insurge aussi contre le crime visant au remplacement de nos populations.
Le discours dominant ne pouvant sortir de ses ambiguïtés toxiques, il appartient aux Européens d’en tirer les conséquences. À défaut de posséder une religion identitaire à laquelle nous amarrer, nous avons en partage depuis Homère une mémoire propre, dépôt de toutes les valeurs sur lesquelles refonder notre future renaissance en rupture avec la métaphysique de l’illimité, source néfaste de toutes les dérives modernes.
Je demande pardon par avance à tous ceux que ma mort fera souffrir, et d’abord à ma femme, à mes enfants et petits-enfants, ainsi qu’à mes amis et fidèles. Mais, une fois estompé le choc de la douleur, je ne doute pas que les uns et les autres comprendront le sens de mon geste et transcenderont leur peine en fierté. Je souhaite que ceux-là se concertent pour durer. Ils trouveront dans mes écrits récents la préfiguration et l’explication de mon geste.
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As Razões para uma Morte Voluntária
As Razões para uma Morte Voluntária
14:43 Publié dans Actualité, Hommages, Nouvelle Droite | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : dominique venner, mort volontaire, actualité, nouvelle droite, france | | del.icio.us | | Digg | Facebook
Pas d’orchidées pour Mrs Thatcher !
Pas d’orchidées pour Mrs Thatcher !
Le fossoyeur de l'Angleterre
Auran Derien
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La spécialité de la finance anglo-saxonne est le mensonge et l’inversion des valeurs. Au décès de Mrs Thatcher, les perroquets médiatiques autorisés ont voulu nous faire croire qu’elle était la miss Blandish de la politique. Des penseurs plus pénétrants et scrupuleux révèlent qu’elle fut plutôt la Mama Grisson. Revenons à la réalité de son action car nous comprenons mieux ainsi l’horreur de l’Occident contemporain.
La fondatrice du totalitarisme occidental
Milton Friedman et Ronald Reagen
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Soral/Blanchonnet: France Monarchie
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mardi, 21 mai 2013
Rébellion n°58
La critique moralisante
La rue abattra les tyrans !
Découragement ? par zentropa
Venezuela. Viva Chavez !
Elections Italiennes. Entre populisme et paralysie par Xavier Eman
Le Printemps arabe change-t-il la géopolitique du Proche-Orient ? par Terouga
Alexandre Douguine. Révolte contre le monde post-moderne.
CULTURE
Rap & Business. Qui veut la part du Ghetto ?
Rencontre avec Mathias Cardet. L'effroyable imposture du Rap.
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Allemagne: récession imminente?
Andrea PERRONE:
Allemagne: récession imminente?
Berlin amorce un déclin lent, à cause d’une croissance en net recul qui met en danger l’avenir de toute la zone-euro!
L’économie de toute la zone-euro poursuit son ressac et l’Allemagne, à son tour, devient sujet de préoccupation, car l’état de l’économie allemande empire. Ce n’est pas un hasard si l’économie allemande n’accuse qu’une très misérable croissance de 0,1% seulement au cours de ces trois derniers mois, tandis que la France, elle, a déjà basculé dans la récession, comme le signalent les données d’Eurostat. Avec un recul de 0,2% au cours des trois premiers mois de l’année 2013, l’économie de la zone-euro est bel et bien, désormais, en récession et cela, depuis un an et demi: c’est là la période de récession la plus longue depuis 1995, année à partir de laquelle Eurostat a commencé à rassembler des données. L’Etat de la zone-euro qui se trouve dans la pire des situations est bien entendu la Grèce, dont l’économie s’est réduite de 5,3%. Elle est suivie du Portugal, qui accuse une récession de –3,9% par rapport à la même période l’an passé.
La France aussi est officiellement en récession après que son économie se soit réduite de 0,2% au cours de ces six derniers mois, avec, en fond, un taux de chômage supérieur à 10%, assorti d’une perte de confiance des entreprises et des consommateurs. Entretemps, l’Allemagne a repris une croissance, après une récession de trois mois à la fin de l’année 2012, mais cette faible reprise s’avère bien trop lente et insuffisante, atteignant seulement le chiffre de 0,1%, surtout à cause d’une augmentation des dépenses de la part des consommateurs. Ce chiffre ne suffit pas, bien entendu, pour faire redémarrer l’économie de la zone-euro en général, qui se débat encore et toujours dans une crise qui perdure.
Les données d’Eurostat montrent que l’économie allemande s’est réduite de 0,3% par rapport à la même période l’an passé. Le bureau allemand des statistiques met ce faible rendement sur le compte d’un “climat hivernal extrême” qui a duré jusqu’en avril. A l’opposé, la Lettonie a enregistré une croissance de 5,6% et la Lituanie de 4,1% par rapport à la même période en 2012. Les deux pays espèrent adhérer à la zone-euro très bientôt: la Lettonie en janvier 2014 et la Lituanie en 2015. L’Estonie voisine, qui a adhéré à la zone-euro en 2011 a enregistré la croissance la plus élevée de la zone par rapport à l’an passé, avec +1,2%. Mais par rapport aux trois mois qui viennent de s’écouler, l’économie estonienne, à son tour, s’est réduite d’un pourcent.
Pour ce qui concerne Chypre, les chiffres montrent que l’économie de l’île a considérablement empiré pendant la période où l’on négociait son plan de sauvetage: son économie a chuté de 4,1% par rapport au trimestre de janvier-mars 2012. La situation économique de l’Italie, de l’Espagne, de la Finlande et des Pays-Bas est préoccupante car tous ces pays ont vu, eux aussi, se rétrécir leur assiette économique par rapport au trimestre précédent et à l’an passé, comme d’ailleurs toute les économies de la zone-euro. La Banque centrale européenne, au début mai 2013, a abaissé le taux de référence à son minimum historique de 0,5%, tentant ainsi de faire redémarrer l’économie de la zone-euro. Mais tout prêt avantageux demeure une chimère, surtout pour les banques des pays de l’Europe méridionale qui continuent à emprunter de l’argent à des taux d’intérêt beaucoup plus élevés que le taux de référence: même le président de la BCE, Mario Draghi, a souligné que les prêts à bon marché ne se sont jamais avéré bons pour l’économie réelle.
Andrea PERRONE.
(article paru dans “Rinascita”, Rome, 17 mai 2013 – http://www.rinascita.eu/ ).
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