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vendredi, 17 février 2012

Les Etats-Unis et la Grande-Bretagne dressent des obstacles à l'Abkhazi

Le racket de l'Occident exercé sur les pays qui reconnaitraient l'indépendance de l'Abkhazie ne fonctionnera pas éternellement. D'ailleurs, la Belgique avait déjà reconnu, de facto, l'Ossétie du Sud en 2008 par son aide financière.

Les Etats-Unis et la Grande-Bretagne dressent des obstacles à l'Abkhazie

 

 

Photo: RIA Novosti
     

Les Etats-Unis et la Grande-Bretagne torpillent sciemment la reconnaissance de l'Abkhazie. Sans la pression de leur part la souveraineté d'Abkhazie serait officiellement approuvée, au cours de cette dernière année, au moins par 20 pays de la région Asie-Pacifique. Iouris Goulbis, ambassadeur en mission spéciale du ministère des Affaires étrangères d'Abkhazie, en est convaincu.

La tactique de Washington et de Londres est simple. Ils disent sans dissimuler aux pays qui commencent à établir les relations avec Soukhoum que ces pays ne doivent pas le faire. La désobéissance étant menacée de dures sanctions économiques, raconte Iouris Goulbis.

Les grandes puissances à savoir les Etats-Unis, la Grande-Bretagne et l'Union européenne prise dans son ensemble soutiennent la Géorgie et négligent complètement la position d'Abkhazie. Celle-ci a le droit entier d'être reconnue comme pays indépendant. Cela étant, Tbilissi réclame sa restitution. Les grandes puissances quant à elles s'efforcent de mettre en échec nos plans et nos possibilités de reconnaissance.

Les petits Etats insulaires ayant déjà reconnu l'Abkhazie se sont retrouvés dans une situation particulièrement compliquée. Il s'agit notamment de Nauru, du Vanuatu et des Tuvalu. L'Occident a tout simplement arrêté le financement des projets d'une importance vitale pour ces pays. Par là il ne punit pas seulement les habitants de ces pays, mais aussi laisse entendre les autres quelle attitude les attend dans l'hypothèse de la reconnaissance de l'Abkhazie.

Cependant tous ne cèdent pas au chantage. Au moins 12 pays de la région Asie-Pacifique ayant accédé à l'indépendance ces 30-50 dernières années saluent l'aspiration de l'Abkhazie à la liberté. Bien qu'ils ne soient pas encore prêts à établir les rapports diplomatiques à part entière avec l'Abkhazie, ils ne dissimulent pas leur sympathie, note Iouris Goulbis.

Ils reconnaissent que l'Abkhazie existe, qu'un gouvernement d'Abkhazie existe et que l'Abkhazie a sa population. Ils comprennent qu'à l'heure actuelle il y a un conflit lequel, je l'espère, sera réglé dans un proche avenir. Lors des votes à l'ONU, ils ne se prononcent pas contre nous, mais soit gardent une neutralité, soit donnent leur voix en notre faveur.

La négation par les pays occidentaux de la souveraineté d'Abkhazie sur le fond du lobbying intense de la séparation du Kosovo vis-à-vis de la Sérbie met en évidence leurs raisons. C'est que Washington, Londres et l'Union européenne poursuivent leurs intérêts géopolitiques et jouent la carte de Géorgie-Abkhazie pour affaiblir le prestige de la Russie dans l'arène internationale, estime Evguénia Voïko, expert au Centre de la conjecture politique.

Dès qu'un pays reconnaît l'indépendance de l'Ossétie du Sud et de l'Abkhazie cela confirme que la décision de la direction de Russie prise en 2008 de reconnaître leur souveraineté était juste. Il va de soi que les Etats-Unis et l'Union européenne font feu de tout bois pour que le nombre de pays prêts à reconnaître l'indépendance de ces républiques caucasiennes à présent ou dans un futur proche ne croisse pas.

Néanmoins Iouris Goulbis est convaincu que dès l'année en cours les pays à reconnaître l'indépendance d'Abkhazie et d'Ossétie du Sud seront plus nombreux. Un travail intense est mené dans cette direction, a communiqué le diplomate. Il a cependant refusé de nommer les pays avec lesquels les documents appropriés peuvent être signés dans l'avenir le plus proche. Car beaucoup ne ménagent pas leurs efforts pour torpiller les accords. Aussi préférons-nous garder le secret le plus longtemps possible, a noté l'ambassadeur.

jeudi, 26 mai 2011

Adzharian Dance - Horumi / Igor Moiseev's Ballet

Adzharian Dance - Horumi

Igor Moiseev's Ballet

lundi, 11 octobre 2010

Gli Osseti e la cinica Europa

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Gli osseti e la cinica Europa

di Giulietto Chiesa

Fonte: megachip [scheda fonte]

Tzkhinval, cos’era?, o cos’è? Se uscite di casa e, una volta superate le asperità della pronuncia, chiedete ai primi dieci passanti se hanno un’idea a proposito di questa parola, nessuno saprà rispondere. La risposta è: la capitale dell’Ossetia del Sud. Resta da chiarire dov’è e cos’è questo paese. Si trova sul versante sud del Caucaso ed era, fino a 20 anni fa, nei confini della Repubblica Socialista Sovietica di Georgia.


Il 20 settembre l’Ossetia del Sud ha celebrato i suoi 20 anni di indipendenza dalla Georgia. Ma c’è un problema: la Georgia non ha mai accettato la loro indipendenza e, in tutto il secolo XX, ha ripetutamente cercato di schiacciare gli osseti, sia cacciandoli da quella terra, sia assoggettandoli, sia - quando non gli è riuscita nè l’una nè l’altra cosa - sterminandoli.

 

Il perché è complicato da spiegare e da raccontare in poche righe, ma forse basta elencare alcune specificità.

La prima è che gli osseti non sono mai stati “georgiani”.

La seconda è che parlano una lingua che non ha nessuna parentela con il georgiano (ed è questa una discreta prova che provengono da un’altra storia, alla quale non vogliono rinunciare, avendone pieno diritto).

La terza è che sono stati divisi in due parti, gli osseti, da una storia crudele e più forte di loro: la parte più grande è rimasta dentro i confini della attuale Federazione Russa, è una repubblica autonoma, con capitale Vladikavkaz, e sta a nord della imponente catena montuosa del Caucaso. La parte più piccola è invece a sud del Caucaso, con una popolazione di circa 70 mila persone, esseri viventi all’incirca uguali a noi (anche se facciamo finta di non saperlo). Fino a che i due pezzi fecero parte di un unico Stato, l’Unione Sovietica, la divisione fu meno dolorosa e i piccoli “sudisti” si sentirono relativamente protetti dal Grande Fratello ortodosso. I guai riesplosero con la fine dell’Urss.

Chiesero, ma non ottennero, la autonomia da una Georgia che si dichiarava ora “democratica”, cioè non più socialista, ma che si proponeva ancora una volta di liquidarli. Subirono tre massacri, l’ultimo dei quali nella “guerra dei tre giorni” scatenata contro di loro la notte tra il 7 e l’8 agosto del 2008 dal “democratico” presidente della Georgia, con l’aiuto dell’allora presidente, anche lui molto democratico, dell’Ucraina.

La Russia di Medvedev e Putin, che molto democratici (secondo i nostri metri) non sono, intervenne in forze e, sconfitta la Georgia, riconobbe la Repubblica dell’Ossetia del Sud come sovrana e indipendente e mise la sue armata a presidio di un tale riconoscimento. Che, allo stato dei fatti elenca solo quattro paesi: Russia, Nicaragua, Venezuela, Nauru (chi vuole saperne di più vada a vedere dalle parti della Nuova Zelanda).

Ma non ha molta importanza, perchè nessuno è ora in condizione di cambiare il mazzo di carte.

Come testimone diretto delle guerre di questi ultimi venti anni sono stato invitato a partecipare ai festeggiamenti. Il problema è che l’Europa e gli Usa, e con loro tutto l’Occidente, non riconoscono nè l’esistenza dell’Ossetia del Sud, nè quella, parallela e contemporanea, dell’Abkhazia, altra regione che non ne vuole più sapere della Georgia. Entrambi pezzi non dell’ambizione russa, ma della stupidità sesquipedale dei leader georgiani. Perché?

Ufficialmente per il principio della intangibilità delle frontiere, sancito dalle Nazioni Unite. In realtà perché gli Usa vogliono includere la Georgia nella Nato, estendendo a sud l’accerchiamento della Russia, che perseguono dal momento della caduta dell’Urss.

L’Europa, come al solito, segue fedelmente. Gli altri, variamente ricattati, fanno altrettanto. Eppure c’è un altro principio che sarebbe utile non dimenticare, anche quando la Realpolitik impone di seguire il dettato dell’Impero: quello dell’autodeterminazione dei popoli.

 Chi non ha la memoria troppo corta si ricorderà che fu proprio questo principio che venne invocato, pochi mesi prima della guerra contro l’Ossetia del Sud, da tutti i paesi occidentali che avevano una gran fretta di riconoscere la indipendenza del Kosovo dalla Serbia.

 


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mercredi, 09 juin 2010

L'internationale secrète qui ébranle les dictatures de l'Est

otpor.jpgSYNERGIES EUROPEENNES – BRUXELLES / GENEVE - Décembre 2004


Chers amis,
Voici l’excellent dossier que consacre le quotidien de Suisse romande, “Le Temps”, aux événements qui ébranlent l’Ukraine aujourd’hui et qui sont en fait la répétition des événements antérieurs qui ont agité la Serbie, la Géorgie et la Biélorussie (où la tentative de subversion générale avait échoué). L’article interroge les acteurs de ces “putschs” déguisés et en apparence pacifiques et dévoile utilement certaines de leurs tactiques. Ces tactiques sont déployées pour le bénéfice de l’impérialisme américain, qui applique tout simplement la stratégie Brzezinski, qui consiste à fractionner les franges de la puissance qui détient la “Terre du Milieu” et d’éloigner cette dernière des littoraux des mers chaudes. L’objectif est aussi de rendre inopérant tout Axe Paris-Berlin-Moscou, en introduisant entre l’Allemagne et la Russie une sorte de nouveau  “cordon sanitaire”, comme le voulait, après la révolution bolchevique, Lord Curzon. Les atlantistes, les trotskistes, les fondamentalistes islamistes et les néo-conservateurs (de l’entourage de Bush, qui sont, dans la plupart des cas, d’anciens trotskistes) orchestrent, à gauche et à droite de  l’échiquier politique, l’application de la doctrine Brzezinski. Pour le plus grand malheur de l’Europe et de ses enfants, qui vivront dans un monde infernal et dans un espace politique n’autorisant aucun développement ni épanouissement. La prise de conscience de cette situation doit nous conduire à combattre sans relâche ni pitié les canailles atlantistes, alliées objectives de la crapule gaucho-trotskiste, qui souillent encore, de leur présence et de leur indécrottable bêtise, le milieu identitaire. L’atlantiste, le trotskiste, le fondamentaliste islamiste et le néo-conservateur sont des ennemis mortels de notre civilisation, de la Vieille Europe, de tout ce qui nous est cher. Ils ne méritent que la haine et le mépris : une créature qui ose, en Europe aujourd’hui, se dire pro-américaine, ne mérite plus l’honneur d’être un citoyen d’Europe, ne mérite plus d’être considérée comme héritière et partie intégrante de notre civilisation, car elle nie la valeur de tous nos héritages et prépare un  monde de mort et de misère pour nos enfants. Le quotidien suisse “Le Temps”  —sans nul doute grâce à la neutralité helvétique, où l’atlantisme n’est pas aussi puissant que dans les pays de l’OTAN—  nous donne des armes pour résister et pour comprendre comment fonctionnent les mécanismes qui conduisent à notre asservissement.   
L’internationale secrète qui ébranle les dictatures de l’Est


La Serbie en 2000, la Géorgie en 2003, l’Ukraine en 2004: trois pays, trois révolutions populaires. Mais derrière les foules de manifestants s’active une nébuleuse d’activistes internationaux, de théoriciens de la non-violence et de financiers proches du gouvernement américain. Enquête.

Les manifestants installés depuis dix-huit jours dans le centre de Kiev imposeront-ils le réformateur Viktor Iouchtchenko à la tête de l’Ukraine? Ou leur mouvement sera-t-il finalement étouffé par les manœuvres du président sortant Leonid Koutchma? A des centaines de kilomètres de là, dans le centre de Belgrade, une poignée de jeunes Serbes se posent et se reposent cette question avec fébrilité. Membres de l’ancien mouvement étudiant Otpor («Résistance»), fer de lance du mouvement qui a chassé du pouvoir en 2000 le président yougoslave Slobodan Milosevic, ils ne se reconnaissent pas seulement dans les protestataires aujourd’hui à l’œuvre, ils les connaissent très bien pour leur avoir porté assistance ces derniers mois.

C’est que tous les anciens d’Otpor n’ont pas quitté la scène politique après la chute de «leur» dictateur. Bien conscients que d’autres peuples d’Europe orientale continuaient à vivre sous d’autres régimes autoritaires, un certain nombre d’entre eux ont décidé d’exporter leur combat et de se reconvertir en militants internationalistes de la révolution non violente. Certains sont allés en Géorgie l’an dernier pour prodiguer leurs conseils aux jeunes militants du mouvement étudiant de désobéissance civile Kmara («Assez!»), qui a contribué à renverser l’ancien président Edouard Chevardnadze et à porter au pouvoir le réformateur démocrate Mikhaïl Saakachvili. D’autres se sont rendus plus récemment en Ukraine dans l’espoir d’y rééditer leur exploit. «Nous y avons été 26 fois entre les printemps 2003 et 2004», se souvient Aleksandar.

Sur ce dernier terrain, les militants du Centre Otpor de résistance non violente sont à l’origine de deux organisations subversives. La première, Pora («C’est l’heure»), a été chargée de conduire une campagne de communication «négative», en dénonçant les inégalités: «Il s’agissait de pointer du doigt des problèmes sociaux, explique l’un d’eux. Des attaques contre les dysfonctionnements politiques n’auraient mobilisé qu’une minorité d’Ukrainiens.» L’autre organisation, Znayu («Je sais»), a reçu pour mission de mener une campagne «positive», en expliquant comment éviter les détournements de voix, vérifier les listes électorales, s’inscrire pour la première fois, etc.

Les activistes serbes sont d’autant plus habiles et efficaces qu’ils sont solidement encadrés. Ils ont ainsi bénéficié en Ukraine du soutien financier d’une organisation basée à Washington et très proche du gouvernement américain, Freedom House, qui se trouvait déjà à leur côté en Serbie à l’automne 2000 et qui les a aidés à former, mais sans succès pour le moment, des jeunes biélorusses du mouvement Zubr («Le Taureau»). En Géorgie l’an dernier, l’Open Society Institute (OSI) du financier George Soros a pareillement pris en charge la formation des militants de Kmara.

Et ce n’est pas tout. L’aide étrangère apportée aux activistes démocrates d’Europe orientale s’étend également à la formation. Ainsi, des séminaires de «formation des formateurs» ont été organisés outre-Atlantique – l’un d’eux a eu lieu le 9 mars dernier à Washington. Ces réunions, qui permettent des échanges d’expérience, réunissent de jeunes militants de terrain, tels ceux d’Otpor, ainsi que des anciens, tel Mukhuseli Jack, un acteur de la lutte anti-apartheid en Afrique du Sud. Ils attirent aussi des théoriciens de la lutte non violente, dont Jack DuVall, producteur d’un documentaire, Comment renverser un dictateur, qui a circulé sous le manteau dans de nombreux pays du monde, de la Géorgie à l’Iran, en passant par Cuba… Sans oublier certains proches du principal théoricien du mouvement, Gene Sharp, auteur d’un manuel traduit dans près de vingt langues, De la dictature à la démocratie.

Les organisations de base comme Otpor ne sont bien sûr pas capables d’imposer seules des révolutions. Pour provoquer un changement de régime, elles doivent cohabiter avec une opposition politique classique déterminée et s’appuyer sur un fort désir de changement au sein de la société. Il est parallèlement nécessaire que les régimes qu’elles affrontent leur laissent une liberté de mouvement minimale. A ces conditions cependant, fortes de leur courage juvénile et de leur art consommé de la subversion, elles sont devenues aujourd’hui le cauchemar de nombreux dictateurs.

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Les hommes forts de la région s’organisent

Une anecdote raconte qu’en décembre 2003, lors des funérailles du président azerbaïdjanais Heydar Aliev auxquelles assistaient tous les dirigeants de la CEI, Vladimir Poutine aurait commenté la Révolution des Roses en déclarant de façon très crue à sa nouvelle homologue géorgienne par intérim Nino Burdzhanadze que «tous les dirigeants font dans leur pantalon» à l’idée qu’un mouvement similaire puisse survenir chez eux.

De fait, nombreux sont les régimes autoritaires de la région à prendre des mesures contre la contagion du modèle non violent. La coopération avec les services secrets russes a permis la rédaction d’une liste noire d’activistes que détiennent le KGB Biélorusse et le FBU ukrainien, et qui a servi à expulser de ces pays au moins trois membres d’Otpor entre juillet et octobre. Autre exemple, plus médiatique, celui du chef d’Etat Kirghiz, Askar Akaev, qui s’est fendu d’un article dans le journal russe Rossiiskaya Gazeta, le 8 juin dernier, pour dénoncer «les nouvelles technologies internationales (pour organiser) des révolutions de velours».

Vladimir Poutine a envoyé de son côté des conseillers politiques russes pour soutenir la campagne de son protégé ukrainien Viktor Ianoukovitch contre ce qu’il a lui-même appelé une intervention «coloniale» de l’Occident. Mais son geste s’est révélé parfaitement inefficace.

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Gene Sharp: «L’essentiel est de diviser le camp adverse»

Le principal théoricien du mouvement, Gene Sharp, a quelques dizaines d’années d’expérience derrière lui. Et une volonté farouche de peser sur le cours des événements.

A 86 ans, Gene Sharp apparaît comme le principal théoricien du réseau international de révolution non violente à l’œuvre dans les pays d’Europe orientale. Pacifiste de la première heure durant la Seconde Guerre mondiale, il a approfondi sa réflexion en correspondant notamment avec Albert Einstein, avant de mettre ses théories à l’épreuve des faits sur des terrains aussi durs que la Birmanie. Interview.

Le Temps: Ainsi, la non-violence peut résoudre des conflits…

Gene Sharp: Soyons clairs: nous ne parlons pas de résolution de conflit mais de conflit tout court, de combat qu’il s’agit de gagner. Notre rhétorique s’apparente plus à celle de la guerre qu’à celle de la négociation. La méthode convaincra si elle est efficace. Mon travail a consisté à chercher dans le passé des exemples de soulèvement pacifistes susceptibles d’améliorer nos méthodes dans l’avenir. La chute du mur de Berlin a apporté une multitude de cas d’étude. Les Tchèques, les Polonais, les Allemands de l’Est, les Baltes ont beaucoup improvisé, mais avec succès. Le Printemps de Pékin a échoué de peu. La société parallèle albanaise du Kosovo des années 90, ainsi que les protestations serbes de 91 et 96 se sont en revanche avérées trop symboliques: jolies, mais pas efficaces. Otpor, en 2000, a eu une approche beaucoup plus technique. Ils ont compris qu’il ne servait pas à grand-chose de clamer le bien ou de critiquer le mal. L’essentiel est de diviser le camp adverse, pour affaiblir sa police, son armée, ses différents piliers, pour le saper jusqu’à l’effondrement.

– Comment avez-vous commencé votre recherche sur la lutte non violente?

– L’Holocauste venait, en 1945, de se produire. Nous assistions impuissants à la pérennisation de la tyrannie stalinienne et à l’explosion de la première bombe atomique. Le monde faisait face à une immense violence. Comme beaucoup de jeunes de ma génération, je me suis engagé à l’époque dans des mouvements pacifistes mais j’ai vite dû déchanter. Aucun n’avait de réponse à la violence extrême ou aux dictatures. Bien souvent, ils n’étaient même pas intéressés par la question. J’ai alors découvert le pacifisme actif dans l’histoire. La non-violence n’est pas nouvelle. Le concept existait déjà dans la Chine antique! Gandhi est un exemple incontournable mais il y en a d’autres, des gens qui ignoraient souvent ce qu’ils faisaient, qui se voyaient perdus d’avance mais qui, parfois, gagnaient. J’étais alors journaliste à Londres, mais mes recherches me passionnaient. Je suis passé à l’université de philosophie d’Oslo, puis à Oxford, où j’ai trouvé un livre de Karl Deutcher, un philosophe allemand qui analysait les faiblesses des dictatures. J’ai pensé qu’on pourrait se concentrer sur ces faiblesses. J’ai aussi découvert les «sources de pouvoir»: Hitler, Staline et leurs semblables n’étaient que des pauvres types, mais ils s’appuyaient sur des structures. Si on peut étouffer ces dernières, alors les dictatures s’effondrent d’elles-mêmes.

– Quels sont vos projets?

– J’ai écrit une vingtaine de livres sur la non-violence. Certains sont traduits en 30 langues et disponibles sur Internet. Le Centre Albert-Einstein pour la non-violence, que j’ai créé à Boston, collabore avec Freedom House, le Centre des conflits non violents, l’Open Society Institute… Nous avons des contacts avec les Nations unies. Aujourd’hui, je ne suis plus tout jeune. Je verrais bien Otpor assurer la relève…

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Milos, militant de l’ombre

Personne ne contestera à ce grand blond aux yeux bleus ses origines slaves. Milos Milenkovic a été membre fondateur d’Otpor en 1998, à l’âge de 19 ans. Depuis, il a participé à toutes les révolutions non violentes qu’a connues, de Belgrade à Kiev, sa région. Et s’il dirige aujourd’hui une ONG culturelle à Belgrade, il se tient prêt à aider d’autres oppositions si le besoin se fait sentir.

«L’Ukraine? J’y suis interdit de séjour jusqu’au premier janvier de l’an 3000, assure-t-il. Le pouvoir a fini par repérer nos ateliers de formation, trop tard pour lui. J’y suis allé une vingtaine de fois à partir d’avril 2001. Nous avons eu nos premiers contacts avec les Ukrainiens à Minsk, quand nous avons entrepris de former les ONG biélorusses, dont Zubr. Ils avaient été invités en tant qu’observateurs à notre séminaire.»

Lors de ses premiers voyages en Ukraine, Milos n’a que 23 ans mais il possède déjà une grande expérience de la révolution. L’an 2000, il l’a passé à former les nouvelles recrues d’Otpor, avant de diriger les 35 000 étudiants qui ont donné l’assaut à la dictature de Milosevic, le 5 octobre. Ses débuts de «consultant en révolutions non violentes» n’ont pas été faciles. Beaucoup de ses interlocuteurs doutaient de son utilité et prenaient plus au sérieux les instructeurs occidentaux. «Nous, les Serbes, avons l’avantage de présenter un point de vue différent, commente le militant. Nous avons plus l’habitude de travailler dans des conditions difficiles, avec des budgets limités et sous une surveillance constante. D’ailleurs, avant de nous attaquer à notre propre dictature, nous avions nous-mêmes rencontré des Polonais de Solidarnosc et des Slovaques d’OK Campaign, qui nous ont bien aidés.»

L’engagement de Milos est total. Les budgets de ces premiers séminaires – expérimentaux – sont réduits, et comme les autres formateurs serbes de l’époque, le militant est bénévole. Mais il ne regrette rien. «J’ai eu beaucoup de problèmes, j’ai perdu mes jobs d’étudiant, les services secrets serbes m’ont passé à tabac plusieurs fois. Mais on a gagné.»

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Quelques règles de base pour réussir sa révolution

Un harcèlement continuel vaut mieux qu’une attaque frontale, le rire que la force.

Cocktail nouveau composé d’ingrédients anciens, les révolutions qui ébranlent depuis quatre ans l’Europe de l’Est mêlent intimement une base théorique inspirée des travaux de l’Institut Einstein et des trouvailles d’une bande de camarades de faculté qui ont cru, dans le Belgrade des années 90, que la dérision était l’arme la mieux adaptée à la quête d’une vie meilleure.

D’abord comprendre

Mais avant d’attaquer un régime autoritaire, il convient de comprendre comment il fonctionne. «La dictature de grand papa, où un tyran règne sans partage sur un pays asservi n’existe presque plus, explique Slobodan, la trentaine, ancien d’Otpor et de la Géorgie. A la place, nous avons aujourd’hui des fausses démocraties où des élections sont organisées, où une opposition vivote mais où, au final, la même tête se retrouve toujours au sommet, sous un titre ou un autre.» La description convient au Serbe Slobodan Milosevic, qui a alterné les postes de président serbe et yougoslave, comme à l’Ukrainien Leonid Koutchma qui multiplie les manœuvres pour trahir la vox populi.

Or, ces dictatures s’appuient sur un certain nombre de piliers: police, armée, médias serviles, justice aux ordres, population obéissante… L’idée fondamentale de nos révolutionnaires est qu’un renversement du pouvoir passe par l’affaiblissement préalable de ces soutiens. Dans cette lutte, les coups les plus divers peuvent servir. En Serbie, dans les petites villes où tout le monde se connaît, les mères de militants arrêtés harcelaient la police locale de coups de téléphone implorant le pardon pour leurs adolescents de fils. A Kiev, de jolies jeunes filles ont fleuri les boucliers du cordon de sécurité du palais présidentiel, en demandant aux jeunes policiers s’ils allaient «vraiment les frapper». Le rire est une autre arme redoutable. Otpor a fait la quête pour «payer Milosevic afin qu’il quitte le pouvoir»; l’opposition Orange pour financer l’enterrement de Koutchma. Mais attention! La communication doit aller crescendo. Et puis il y a une multitude de petits trucs à connaître. «Un autocollant s’arrache en un instant, note Slobodan. Mais si vous le lacérez à coup de rasoir, il s’effritera sous les doigts de ceux qui voudront le décoller et il en restera toujours un morceau…»

Plus largement, les révolutions de Kiev, Tbilissi et Belgrade se sont articulées sur deux campagnes de communication. L’une, négative, critique les travers du pouvoir: corruption, pauvreté, manque de libertés… L’autre, positive, incite l’électorat à se mobiliser. Elle se base sur un calcul simple: «Les partisans du pouvoir votent de toute façon, explique un employé du Cesid, une ONG serbe spécialisée dans la surveillance des élections. Le tout est donc d’amener les autres aux urnes.»

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Succès et échecs

La Révolution d’octobre en Serbie

En janvier 2000, les organisations non gouvernementales serbes imposent leur réunification à une opposition politique divisée, qui entame une reconquête du pouvoir en s’appuyant sur un mouvement étudiant très populaire, Otpor. En juillet, le président Milosevic décide par surprise de remettre en jeu son poste de président de Yougoslavie. Après le scrutin truqué du 24 septembre, une grève générale s’organise et paralyse le pays. Le 5 octobre, la «Marche sur Belgrade» de 700 000 personnes (10% de la population) aboutit, en 5 heures d’insurrection populaire, à la prise du parlement et à l’effondrement du régime.

La révolution des Roses en Géorgie

En novembre 2002, des ONG géorgiennes contactent Otpor pour s’inspirer de l’expérience serbe. Des rencontres sont organisées par l’Open Society Institute (OSI) du milliardaire américain d’origine hongroise George Soros. Un réseau d’activistes et le mouvement étudiant Kmara se construisent, avec l’aide de l’OSI et du National Democratic Institute, une fondation politique américaine liée au Parti démocrate. Ces militants et l’opposition politique réunie derrière Mikhail Saakachvili contestent pendant 3 semaines le résultat des élections du 2 novembre et, le 22 décembre, la rose à la main, une foule envahit le parlement. Le président Edouard Chevardnadze prend la fuite.

Tentatives ratées en Biélorussie

Tentée en 2001 et 2004, la contestation en Biélorussie, qui s’appuie notamment sur le mouvement étudiant Zubr («Le Taureau») a échoué pour le moment. L’opposition politique harcelée par le pouvoir ne réussit pas à se renforcer. Le pouvoir entretient un sentiment de peur du changement dans les campagnes, s’assurant ainsi un réservoir de voix appréciable. Le 17 octobre au soir, jour d’élection, une manifestation d’environ 2000 personnes s’est formée dans le centre de Minsk, avant d’être violemment dispersée par les forces de sécurité, qui ont procédé à des arrestations. Le président Alexandre Loukachenko est accusé de graves violations des droits de l’Homme.

La révolution orange d’Ukraine

Préparée depuis le printemps 2003, la Révolution Orange aurait dû avoir lieu aux élections législatives de 2006, car ni l’opposition ni les ONG d’activistes n’étaient unies face au président sortant. Il a fallu le résultat contesté du premier tour pour que les socialistes se joignent à Iouchtchenko et que les organisations concurrentes «Pora jaune» et «Pora noir» s’unissent. Le mouvement a failli triompher lors d’une prise du parlement par Youlia Timochenko, numéro 2 de la liste «Notre Ukraine», le 30 novembre. Organisé par une population peu habituée à la contestation, le soulèvement a fortement ébranlé le pouvoir mais ne l’a pas (encore?) abattu.

source: letemps.ch

jeudi, 20 mai 2010

Les trois épicentres de la révolution eurasienne

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Pietro FIOCCHI:

 

Les trois épicentres de la révolution eurasienne

 

L’ambassadeur russe auprès de l’OTAN, Dmitri Rogozine, possède une sorte de sixième sens pour toutes les questions atlantiques: “Selon moi”, a-t-il dit le 4 mai 2010, “la Géorgie n’a pas encore de réelle prospective en vue pour son adhésion à l’Alliance parce que les problèmes qu’elle affronte en Abkhazie et en Ossétie du Sud demeurent irrésolus” et, par conséquent, “un pays qui n’a pas de frontières définies et est continuellement secoué de guerres civiles ne peut devenir membre de l’OTAN”.

 

La Géorgie dans le Caucase

 

L’ambassadeur fait référence au cas des deux républiques qui, il y a vingt ans, se sont déclarées indépendantes du gouvernement géorgien et qui, depuis 2008 jusque aujourd’hui, ont été reconnues par la Russie, le Nicaragua, le Vénézuela et Nauru. L’Abkhazie et l’Ossétie du Sud sont toutefois considérées comme des “territoires occupés” par les Géorgiens et aussi par l’eurocratie bruxelloise et par Washington qui, en bonne diligence, ont promis à leur allié Saakashvili de l’aider à remettre les “choses en place”. On veut donc que les deux républiques, ou “territoires occupés”, reviennent sous le contrôle de la Géorgie. En pratique, tout pas en cette direction augmente les possibilités d’un affrontement avec la Russie: le Kremlin, en effet, a promis de protéger la souveraineté territoriale des deux républiques caucasiennes, en vertu d’accords conclus et par la présence de bases militaires aujourd’hui en construction.

 

Si la Géorgie entrait effectivement au sein de l’Alliance atlantique, les tensions augmenteraient et présenteraient un réel danger. Pour éviter la guerre, il faut avoir conscience des positions antagonistes et percevoir qu’elles recèlent de fait le danger de mondialiser le conflit.

 

Dans cette optique, Rogozine a mis en exergue les dynamiques possibles dans la région: “les Géorgiens seront exploités au maximum afin qu’ils envoient des troupes en Afghanistan; ils seront traités comme des animaux auxquels on fait miroiter une carotte en la balançant sous leur museau. Tbilissi ne peut adhérer à l’OTAN parce que la Géorgie ne peut en devenir membre; l’Alliance atlantique devra ou reconnaître l’indépendance de l’Abkhazie et de l’Ossétie du Sud ou accepter les anciennes frontières de la Géorgie, tracées par Staline. C’est là une éventualité impensable, donc Tbilissi restera partenaire de l’OTAN mais son adhésion ne se fera pas dans un futur proche”.

 

Incertitudes au Kirghizistan

 

Passons maintenant du Caucase à l’Asie centrale: nous débouchons dans un espace où la Russie et les intérêts atlantistes s’opposent.

 

Cas atypique et, depuis le récent coup d’Etat, objet de toutes les attentions: le Kirghizistan. Dans cette ex-république soviétique cohabitent très proches les unes des autres des troupes russes et américaines, respectivement stationnées dans les bases de Kant et de Manas. Nous avons là un paradoxe qui pourrait bien ne plus durer très longtemps. Une fois les élections politiques et présidentielles, prévues pour le prochain automne, Bichkek prendra une décision définitive.

 

Aujourd’hui déjà, le gouvernement des Etats-Unis doit débloquer 15 millions de dollars qui serviront à payer partiellement le loyer de la base aérienne concédée aux Américains. Pour terminer, Washingbton devra débourser un total de 60 millions de dollars (c’est-à-dire trois fois autant que la somme déboursée jusqu’à l’an passé). Cette somme devra être payée chaque année sinon les locataires seront expulsés. Au Kirghizistan, la situation est donc précaire aussi.

 

Coopération russo-kazakh

 

En revanche, la coopération russo-kazakh, elle, semble de bonne augure. Les rapports entre les deux pays se sont consolidés. Moscou et Astana, depuis l’été, ont scellé un nouvel accord sur l’enrichissement de l’uranium à usage civil. C’est une nouveauté: les pays qui voudront développer leur industrie nucléaire pourront accéder aux technologies d’enrichissement disponibles. C’est tout à la fois une invitation à Téhéran et une garantie pour l’Iran à aller de l’avant dans son programme atomique.

 

Pietro FIOCCHI / p.fiocchi@rinascita.eu .

(article paru dans “Rinascita”, Rome, 5 mai 2010; trad. franç.: Robert Steuckers ; cf.: http://www.rinascita.eu  ).

vendredi, 08 janvier 2010

La technique du coup d'Etat coloré

bringing-795257.gifLa technique du coup d'Etat coloré

par John Laughland

La technique des coups d’État colorés trouve son origine dans une abondante littérature du début du XXe siècle. Elle a été mise en application avec succès par les néo-conservateurs états-uniens pour « changer les régimes » de plusieurs États post-soviétiques. Elle a par contre échoué dans des univers culturels différents (Venezuela, Liban, Iran). John Laughland, qui couvrit certaines de ces opérations pour le Guardian, revient sur ce phénomène.

Au cours de ces dernières années, une série de « révolutions » ont éclaté en différents endroits du monde.

Georgie

En novembre 2003, le président Edouard Chevardnadze a été renversé à la suite de manifestations et d’allégations d’élections truquées.

Ukraine

En novembre 2004, des manifestations – la « Révolution orange » – commencèrent au moment où des accusations similaires d’élections truquées étaient formulées. Il en résulta que le pays perdit son ancien rôle géopolitique de pont entre l’Est et l’Ouest et fut poussé vers une adhésion à l’OTAN et à l’UE. Étant donné que la Rus de Kiev fut le premier État russe et que l’Ukraine s’est maintenant tournée contre la Russie, il s’agit là d’un événement historique. Mais, comme le disait George Bush, « vous êtes soit avec nous soit contre nous ». Bien que l’Ukraine ait envoyé des troupes en Irak, elle était manifestement considérée comme trop amie de Moscou.

Liban

Peu après que les États-Unis et l’ONU aient déclaré que les troupes syriennes devaient se retirer du Liban et suite à l’assassinat de Ra?k Hariri, les manifestations de Beyrouth ont été présentées comme la « Révolution du Cèdre ». Une énorme contre-manifestation du Hezbollah, le plus important parti pro-syrien, fut passée sous silence alors que la télévision montrait sans ?n la foule anti-syrienne. Exemple particulièrement énorme de mauvaise foi orwellienne, la BBC expliqua aux téléspectateurs que « le Hezbollah, le plus grand parti politique du Liban, est jusqu’ici la seule voix dissidente qui souhaite que les Syriens restent au Liban ». Comment la majorité populaire peut-elle être une « voix dissidente » ? [1]

Kirghizistan

Après les « révolutions géorgienne et ukrainienne, nombreux sont ceux qui prédisaient que la vague de « révolutions » allait s’étendre aux anciens États soviétiques d’Asie centrale. Et c’est ce qui arriva. Les commentateurs semblaient divisés sur la question de savoir quelle couleur attribuer au soulèvement de Bichkek : révolution « citron » ou « tulipe » ? Ils n’ont pas pu se décider. Mais ils étaient tous d’accord sur un point : ces révolutions sont cool, même quand elles sont violentes. Le président du pays, Askar Akaïev, fut renversé le 24 mars 2005 et les contestataires prirent d’assaut le palais présidentiel et le mirent à sac.

Ouzbékistan

Lorsque des rebelles armés s’emparèrent des bâtiments gouvernementaux, libérèrent des prisonniers et prirent des otages dans la nuit du 12 au 13 mai dans la ville ouzbek d’Andijan (située dans la vallée de Ferghana où les troubles avaient également commencé au Kirghizistan voisin), la police et l’armée encerclèrent les rebelles et il en résulta une impasse de longue durée. On entreprit des négociations avec les rebelles qui ne cessèrent d’augmenter leurs revendications. Quand les forces gouvernementales les attaquèrent, les combats ?rent quelque 160 morts dont 30 parmi les forces de la police et de l’armée. Pourtant les médias occidentaux présentèrent immédiatement ces affrontements violents de manière déformée, prétendant que les forces gouvernementales avaient ouvert le feu sur des contestataires non armés, sur « le peuple ».

Ce mythe sans cesse répété de la révolte populaire contre un gouvernement dictatorial est populaire à gauche comme à droite de l’éventail politique. Autrefois, le mythe de la révolution était manifestement réservé à la gauche, mais lorsque le putsch violent eut lieu au Kirghizistan, le Times s’enthousiasma à propos des scènes de Bichkek qui lui rappelaient les ?lms d’Eisenstein sur la révolution bolchévique ; le Daily Telegraph exalta le « pouvoir pris par le peuple » et le Financial Times eut recours à une métaphore maoïste bien connue lorsqu’il vanta la « longue marche du Kirghizistan vers la liberté ».

Une des idées clés à la base de ce mythe est manifestement que le « peuple » est derrière les événements et que ces derniers sont spontanés. En réalité, bien sûr, ce sont des opérations très organisées, souvent mises en scène pour les médias et habituellement créés et contrôlés par les réseaux transnationaux d’« ONG » qui sont des instruments du pouvoir occidental.

La littérature sur les coups d’État

Le mythe de la révolution populaire spontanée perd de sa prégnance en raison de l’ample littérature sur les coups d’État et les principales tactiques utilisées pour les provoquer. C’est bien entendu Lénine qui a développé la structure organisationnelle vouée au renversement d’un régime que nous connaissons maintenant sous le nom de parti politique. Il différait de Marx en ce qu’il ne pensait pas que le changement historique était le résultat de forces anonymes inéluctables. Il pensait qu’il fallait le provoquer.

Mais ce fut probablement Curzio Malaparte qui le premier, dans Technique du coup d’État, donna une forme célèbre à ces idées [2]. Publié en 1931, ce livre présente le changement de régime comme une technique. Malaparte était en désaccord avec ceux qui pensaient que les changements de régime étaient spontanés. Il commence son livre en rapportant une discussion entre des diplomates à Varsovie au printemps 1920 : La Pologne a été envahie par l’armée rouge de Trotski (la Pologne avait elle-même envahi l’Union soviétique, prenant Kiev en avril 1920) et les bolcheviques étaient aux portes de Varsovie. La discussion avait lieu entre le ministre de Grande-Bretagne, Sir Horace Rumbold, le Nonce papal, Monseigneur Ambrogio Damiano Achille Ratti (lequel fut élu pape deux ans plus tard sous le nom de Pie XI). L’Anglais disait que la situation politique intérieure de la Pologne était si chaotique qu’une révolution était inévitable et que le corps diplomatique devait fuir la capitale et se rendre à Poznan. Le Nonce n’était pas d’accord, insistant sur le fait qu’une révolution était tout aussi possible dans un pays civilisé comme l’Angleterre, la Hollande ou la Suisse que dans un pays en état d’anarchie. Naturellement, l’Anglais était choqué à l’idée qu’une révolution pût éclater en Angleterre. « Jamais ! » s’exclama-t-il. Les faits lui ont donné tort car il n’y eut aucune révolution en Pologne et cela, selon Malaparte parce que les forces révolutionnaires n’étaient pas suf?samment bien organisées.

Cette anecdote permet à Malaparte d’aborder les différences entre Lénine et Trotski, deux praticiens du coup d’État. Il montre que le futur pape avait raison et qu’il était faux de dire que certaines conditions sont nécessaires pour qu’il y ait révolution. Pour Malaparte, comme pour Trotski, on peut provoquer un changement de régime dans n’importe quel pays, y compris dans les démocraties stables d’Europe occidentale à condition qu’il y ait un groupe d’hommes suf?samment déterminés à l’effectuer.

Fabriquer le consentement

Cela nous amène à d’autres textes relatifs à la manipulation médiatique. Malaparte luimême n’aborde pas cet aspect mais celui-ci est a) très important et b) constitue un élément de la technique utilisée pour les changements de régime aujourd’hui. À vrai dire, le contrôle des médias durant un changement de régime est si important qu’une des caractéristiques de ces révolutions est la création d’une réalité virtuelle. Le contrôle de cette réalité est lui-même un instrument du pouvoir, si bien que lors des coups d’États classiques des républiques bananières, la première chose dont s’emparent les révolutionnaires est la radio.

Les gens éprouvent une forte répugnance à accepter l’idée que les événements politiques, aujourd’hui, sont délibérément manipulés. Cette répugnance est elle-même un produit de l’idéologie de l’ère de l’information qui ?atte la vanité des gens et les incite à croire qu’ils ont accès à une somme considérable d’informations. En fait, l’apparente diversité de l’information médiatique moderne cache une extrême pauvreté de sources originales, de même qu’une rue entière de restaurants sur un rivage grec peut cacher la réalité d’une seule cuisine à l’arrière. Les informations sur les événements importants proviennent souvent d’une source unique, souvent une agence de presse et même des diffuseurs d’informations comme la BBC se contentent de recycler les informations reçues de ces agences tout en les présentant comme étant les leurs. Les correspondants de la BBC sont souvent dans leurs chambres d’hôtel lorsqu’ils envoient leurs dépêches, lisant souvent pour le studio de Londres l’information que leur ont transmise leur collègues en Angleterre, qui les ont à leur tour reçues des agences de presse. Un second facteur expliquant la répugnance à croire à la manipulation des médias est lié au sentiment d’omniscience que notre époque de mass média aime ?atter : critiquer les informations de la presse, c’est dire aux gens qu’ils sont crédules et ce message n’est pas agréable à recevoir.

La manipulation médiatique a plusieurs aspects. L’un des plus importants est l’iconographie politique. C’est un instrument très important utilisé pour défendre la légitimité des régimes qui ont pris le pouvoir par la révolution. Il suf?t de penser à des événements emblématiques comme la prise de la Bastille le 14 juillet 1789, l’assaut du Palais d’Hiver pendant la révolution d’octobre 1917 ou la marche de Mussolini sur Rome en 1922 pour se rendre compte que certains événements peuvent être élevés au rang de sources presque éternelles de légitimité.

Cependant, l’importance de l’imagerie politique va bien au-delà de l’invention d’un emblème pour chaque révolution. Elle implique un contrôle beaucoup plus rigoureux des médias et généralement ce contrôle doit être exercé sur une longue période, pas seulement au moment du changement de régime. Il est vraiment essentiel que la ligne du parti soit répétée ad nauseam. Un aspect de la culture médiatique d’aujourd’hui que de nombreux dissidents dénoncent à la légère est que les opinions dissidentes peuvent être exprimées et publiées, mais c’est précisément parce que, n’étant que des gouttes d’eau dans l’océan, elles ne représentent jamais une menace pour la marée propagandiste.

Willy Münzenberg

Un des maîtres modernes du contrôle des médias fut le communiste allemand avec qui Goebbels apprit son métier, Willy Münzenberg. Il n’est pas seulement l’inventeur de la manipulation mais aussi le premier à avoir mis au point l’art de créer un réseau de journalistes formateurs de l’opinion qui propagèrent des idées correspondant aux besoins du Parti communiste allemand et à l’Union soviétique. Il ?t fortune en édi?ant un vaste empire médiatique.

Il était très impliqué dans le projet communiste dès le début. Il appartenait aux proches de Lénine à Zurich et en 1917, il accompagna le futur chef de la révolution bolchévique de la gare centrale de Zurich à la gare de Finlande à Saint-Pétersbourg dans un train plombé, avec l’aide des autorités impériales allemandes. Lénine demanda à Münzenberg de combattre la publicité épouvantable suscitée par le fait qu’en 1921, 25 millions de paysans de la région de la Volga commencèrent à souffrir de la famine qui frappait l’État soviétique nouvellement créé. Münzenberg, qui était alors rentré à Berlin où il fut plus tard élu député communiste au Reichstag, fut chargé de créer une œuvre de bienfaisance ouvrière factice, le Foreign Committee for the Organisation of Worker Relief for the Hungry in Soviet Russia dont le but était de faire croire que les secours humanitaires provenaient d’autres sources que de la Herbert Hoover’s American Relief Administration. Lénine craignait non seulement que Hoover utilise son projet humanitaire pour envoyer des espions en URSS (ce qu’il ?t) mais également – chose peut-être plus importante – que le premier État communiste au monde ne souffre fatalement de la publicité négative due au fait que l’Amérique capitaliste lui venait en aide à quelques années de la Révolution.

Après s’être fait la main en « vendant » la mort de millions de personnes causée par les bolcheviques, Münzenberg se tourna vers des activités de propagande plus générales. Il édi?a un vaste empire médiatique connu sous le nom de Trust Münzenberg qui possédait deux quotidiens de masse en Allemagne, un hebdomadaire de masse et avait des intérêts dans d’autres publications dans le monde. Il s’illustra particulièrement en mobilisant l’opinion mondiale contre l’Amérique lors du procès de Sacco et Vanzetti (deux immigrés italiens anarchistes condamnés à mort pour meurtre dans le Massachusetts en 1921) et pour contrebalancer l’idée propagée par les nazis selon laquelle l’incendie du Reichstag en 1933, était l’œuvre d’un complot communiste. Rappelons que les nazis prirent prétexte de cet incendie pour procéder à des arrestations et à des exécutions en masse de communistes. (On pense maintenant que le feu a en réalité été mis à titre individuel par l’homme qui fut arrêté dans le bâtiment à l’époque, le pyromane Martinus van der Lubbe). Münzenberg réussit à convaincre une partie importante de l’opinion d’un mensonge opposé à celui des nazis, c’est-à-dire que ceux-ci avaient mis le feu eux-mêmes a?n d’avoir un prétexte pour se débarrasser de leurs principaux adversaires.

Le fait le plus signi?catif pour notre époque est que Münzenberg comprit combien il est important d’in?uencer les faiseurs d’opinion. Il avait essentiellement pour cible les intellectuels, partant de l’idée qu’ils étaient faciles à in?uencer en raison de leur grande vanité. Il avait notamment des contacts avec un grand nombre de personnalités littéraires des années 1930. Il en encouragea beaucoup à soutenir les Républicains lors de la guerre civile espagnole et d’en faire une cause célèbre de l’anti-fascisme communiste. La tactique de Münzenberg revêt une grande importance dans la manipulation de l’opinion en faveur du Nouvel ordre mondial aujourd’hui. Plus que jamais, des « experts » apparaissent sur nos petits écrans pour nous expliquer les événements et ils sont toujours des véhicules de la ligne of?cielle du parti. On les contrôle de différentes manières, généralement avec de l’argent ou par la ?atterie.

Psychologie de la manipulation de l’opinion

Il existe une série d’ouvrages qui mettent le doigt sur un aspect un peu différent de la technique spéci?que mise au point par Münzenberg. Il concerne la manière d’amener les gens à agir collectivement en recourant à des stimuli psychologiques. Peut-être que le premier théoricien important en fut le neveu de Freud, Edward Bernays, qui écrivait dans son ouvrage Propaganda, paru en 1928, qu’il était tout à fait naturel et justi?é que les gouvernements façonnent l’opinion publique à des ?ns politiques [3]. Le premier chapitre porte le titre révélateur suivant : « Organiser le chaos ». Pour Bernays, la manipulation consciente et intelligente des opinions et des habitudes des masses est un élément important des sociétés démocratiques. Ceux qui manipulent les mécanismes cachés de la société constituent un gouvernement invisible qui représente le vrai pouvoir. Nous sommes dirigés, nos esprits sont façonnés, nos goûts formés, nos idées suggérées essentiellement par des hommes dont nous n’avons jamais entendu parler. C’est la conséquence logique de la manière dont notre société démocratique est organisée. Un grand nombre d’êtres humains doivent coopérer a?n de vivre ensemble dans une société qui fonctionne bien. Dans presque tous les actes de notre vie quotidienne, qu’il s’agisse de la sphère politique, des affaires, de nos comportements sociaux ou de nos conceptions éthiques, nous sommes dominés par un nombre relativement réduit de personnes qui connaissent les processus mentaux et les caractéristiques sociales des masses. Ce sont elles qui contrôlent l’opinion.

Pour Bernays, très souvent les membres du gouvernement invisible ne savent même pas qui en sont les autres membres. La propagande est le seul moyen d’empêcher l’opinion publique de sombrer dans le chaos. Bernays continua de travailler sur le sujet après la guerre et a publié, en 1947, The Engineering of Consent [4], titre auquel Edward Herman et Noam Chomsky faisaient allusion lorsqu’ils publièrent leur ouvrage majeur La fabrique du consentement en 1988 [5]. Le rapport avec Freud est important parce que, comme nous allons le voir, la psychologie est un outil capital pour in?uencer l’opinion publique. Selon deux des auteurs ayant collaboré à La fabrique du consentement, Doris E. Fleischmann et Howard Walden Cutler écrivent que chaque chef politique doit faire appel à des émotions humaines de base a?n de manipuler l’opinion. L’instinct de conservation, l’ambition, l’orgueil, la faim, l’amour de la famille et des enfants, le patriotisme, l’esprit d’imitation, le désir de commander, le goût du jeu ainsi que d’autres besoins sont les matières brutes psychologiques que chaque leader doit prendre en compte dans ses efforts pour gagner l’opinion publique à ses idées. Pour préserver leur con?ance en eux, la plupart des gens ont besoin d’être certains que tout ce qu’ils croient est vrai.

C’est ce que Münzenberg avait bien compris : le besoin fondamental des hommes de croire ce qu’ils veulent croire. Thomas Mann faisait allusion à ce phénomène quand il attribua l’ascension d’Hitler au désir collectif du peuple allemand de croire à un « conte de fées » dissimulant la laide réalité.

À ce sujet, d’autres ouvrages méritant d’être mentionnés concernent moins la propagande électronique moderne que la psychologie des foules. Les classiques, ici, sont Psychologie des foules de Gustave Le Bon (1895) [6], Masse et puissance d’Elias Canetti (1960) [7] et Le viol des foules par la propagande politique de Serge Tchakhotine (1939) [8]. Tous ces livres font abondamment appel à la psychologie et à l’anthropologie. Il y a également le magni?que ouvrage de l’anthropologue René Girard dont les écrits sur la logique de l’imitation (mimesis) et sur les actions violentes collectives sont d’excellents outils pour comprendre pourquoi l’opinion publique peut si facilement être amenée à soutenir la guerre et d’autres formes de violence politique.

La suite sur Vigile.net [2]


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[1] Image: http://www.voltairenet.org/article163449.html

[2] Vigile.net: http://vigile.net/La-technique-du-coup-d-Etat-colore

samedi, 25 juillet 2009

Les drônes géorgiens survolent l'Abkhazie

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Les drônes géorgiens survolent l’Abkhazie

 

 

La république indépendante d’Abkhazie, qui était auparavant une région autonome de la  Géorgie, ne trouve pas la  paix: des drônes envoyés par le gouvernement de Tbilissi recommencent à survoler continuellement  le territoire, a annoncé le 8 juillet dernier un communiqué du ministère abkhaze des affaires étrangères. D’après ce ministère, quatre de ces appareils télécommandés sont entrés dans l’espace aérien abkhaze. Si la Serbie avait envoyé des drônes au-dessus du Kosovo, tous aurait crié au scandale et décrété que Belgrade violait la souveraineté d’un Etat légitime. Deux poids, deux mesures.

 

(article paru dans “Rinascita”, Rome, 09  juillet 2009).

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mardi, 12 mai 2009

Géorgie: la rue réclame la démission de Saakachvili

Géorgie : la rue réclame la démission de Saakachvili

Image Hosted by ImageShack.us10/05/2009 – 10h00
TBILISSI (NOVOpress) –
Pour le 30e jour consécutif, 20 000 Géorgiens se sont rassemblés samedi devant le Parlement de Tbilissi afin de réclamer la démission du président pro-américain Mikhaïl Saakachvili, au lendemain de l’échec de pourparlers avec les autorités. Les manifestants criaient « Misha va-t-en », à l’adresse du chef de l’Etat, alors que l’opposition n’a pas pu rencontrer le président comme elle l’avait réclamé lors de pourparlers vendredi avec des représentants du pouvoir.

« Après 30 jours, c’est la nation entière qui est debout ici pour que ce président autoproclamé reconnaisse qu’il y a une crise dans ce pays, et qu’il s’agit d’une crise très sérieuse », a déclaré l’une des chefs de l’opposition, Salomé Zourabichvili, s’adressant à la foule des manifestants. L’opposition réclame la démission de Saakachvili, accusé d’avoir mal géré le conflit du mois d’août dernier avec la Russie sur l’Ossétie du Sud et de dérive autoritaire.

« Si nous ne recevons pas une réponse aujourd’hui et qu’une rencontre [avec Saakachvili] n’a pas lieu dans un jour ou deux, cela veut dire tout simplement que le président ne veut pas d’un dialogue », a déclaré à la presse, Nino Bourjanadze, une des leaders de l’opposition. Cette rencontre « doit intervenir dans les meilleurs délais, mais je ne pense pas qu’il soit utile de créer des barrières artificielles en lançant des ultimatums », a estimé pour sa part l’ex-ambassadeur de Géorgie à l’ONU, Irakli Alassania, considéré comme un modéré au sein de l’opposition.

Les négociations vendredi et la manifestation samedi interviennent alors que la Géorgie vient de connaître mardi une brève mutinerie militaire alors que des manœuvres de l’Otan, dénoncés par la Russie, étaient sur le point de commencer. Entrer dans le giron de l’Otan, comme le souhaite Saakachvili, n’est pas un gage de paix sociale…


[cc] Novopress.info, 2009, Dépêches libres de copie et diffusion sous réserve de mention de la source d’origine
[
http://fr.novopress.info]


 

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mercredi, 29 avril 2009

Vuelve la tension al Caucaso

Vuelve la tensión al Cáucaso

Ex: http://labanderanegra.wordpress.com/

A una veintena de kilómetros de la capital georgiana, Tiflis, se encuentra la base militar de Vaziani, que hasta mediados del año 2001 albergó unidades militares soviéticas, herencia de los años en que Georgia fue una república constitutiva de la URSS. Fue devuelta al Gobierno georgiano, que en ella instaló algunas de sus unidades de reacción rápida.

Precisamente en esa base tuvieron lugar en el verano de 2008 unos ejercicios combinados con las Fuerzas Armadas de EEUU, financiados por el Pentágono, justo un par de semanas antes de que estallara el conflicto ruso-georgiano. Éste, irreflexivamente provocado por el presidente Saakashvili en relación con los territorios independentistas de Osetia del Sur y Abjasia, elevó peligrosamente la tensión en tan crítica zona del Cáucaso y deterioró las relaciones entre Rusia, la OTAN y EEUU, como es de sobra sabido.


Tras el relevo en la Casa Blanca y los nuevos esfuerzos desplegados por Washington y Moscú para mejorar el entendimiento entre ambas potencias, la tensión internacional parecía haberse reducido en esa zona, aunque el descontento popular con el Gobierno de Saakashvili no ha dejado de manifestarse periódicamente a través de una oposición política cada vez más activa.

En estas circunstancias, la OTAN ha anunciado que no modificará sus planes para desarrollar unos ejercicios militares en colaboración con Georgia, previstos para el próximo mes de mayo. El hecho de que esos ejercicios se centrarán en la citada base de Vaziani, de claras connotaciones relacionadas con la guerra del año pasado, añade un crítico interés al asunto, al que no son ajenos los medios de comunicación georgianos.

La televisión local concede amplios espacios al acontecimiento, que las autoridades del país valoran como un claro indicativo de que Georgia tiene gran importancia estratégica para Occidente. El ministro de Defensa declaró que “los ejercicios militares sirven para situar a Georgia más cerca de las estructuras euro-atlánticas y mejorar el cumplimiento de los estándares occidentales”.

Conocedor del peculiar modo de actuar del presidente georgiano, el representante de Rusia en la OTAN sospecha que aquél “considerará la presencia de tropas y equipos militares de la OTAN en su territorio como un renovado beneplácito para atacar a las repúblicas vecinas de Abjasia y Osetia del Sur”. Y añadió: “Estos ejercicios parecen ser un apoyo moral y armado al régimen de Saakashvili”. En la misma línea, Moscú ha decidido no participar en el próximo Consejo Rusia-OTAN, previsto para el 7 de mayo, si las maniobras no son suspendidas.

La OTAN intenta quitar hierro al asunto aduciendo que tales maniobras no implican el empleo de material militar pesado y recordando que estaban planeadas con anterioridad a la guerra del Cáucaso del año pasado. Por su parte, Tiflis denuncia a su vez otras actividades militares que Rusia está llevando a cabo con ambas repúblicas independentistas. El Gobierno georgiano alega que lo que Moscú persigue con esto es que su país aparezca a los ojos del mundo como “un Estado agresivo, con el que no es aconsejable tener tratos”.

Desde Tiflis, un analista georgiano considera que no se deberían esperar “grandes dividendos” de las maniobras, pues la OTAN no quiere perjudicar sus relaciones con Rusia, dados los problemas que tiene pendientes en Afganistán: “La OTAN está más interesada en obtener la cooperación rusa que Rusia en cooperar con la Alianza”. Basa su opinión en el hecho de que Rusia no aspira a entrar en la OTAN, no depende de ésta para su seguridad y no considera prioritarias las relaciones con la organización atlántica.

En Moscú se advierte del riesgo de que se produzcan en Georgia actos de provocación contra las tropas de la OTAN, que se atribuirían a los servicios secretos rusos, para enconar la ya complicada situación. El citado representante de Rusia en la OTAN opina que Saakashvili anhela internacionalizar el conflicto como modo de reforzar su inestable posición política: “Este hombre es peligroso para el mundo”, declaró.

Por último, el ministro ruso de Asuntos Exteriores declaró a una agencia local de noticias: “La OTAN ha vuelto a la Guerra Fría y a la lógica de la confrontación. Pero la guerra tiene sus propias reglas, como todos sabemos”.

Es probable que se trate solo de un desahogo verbal, a tono con la situación, pero los términos del conflicto están ya sobre la mesa y las posturas negociadoras parecen sofocadas bajo una arriesgada dinámica militar, propia y peculiar de la organización atlántica, que habrá que vigilar muy de cerca. La oscura sombra de Afganistán se cierne también sobre el Cáucaso, para una OTAN que parece crear más problemas que los que resuelve.

Alberto Piris

lundi, 29 décembre 2008

Kosovo, Osetia del Sur y Abjasia: precedentes que cambiaron el panorama geopolitico

Kosovo, Osetia del Sur y Abjasia: precedentes que cambiaron el panorama geopolítico

Debido a los acontecimientos de gran envergadura que sucedieron este año bisiesto: las elecciones presidenciales en Rusia, los Juegos Olímpicos en Pekín, la crisis económico-financiera desatada a nivel mundial, la muerte del Patriarca de Moscú y toda Rusia, Alexis II, el 2008 será recordado por millones de personas.

De todas formas, la agresión de Georgia contra Osetia del Sur (Cáucaso del Norte) ocupa un lugar especial en la serie de acontecimientos importantes. Esta tragedia segó las vidas de miles de personas. La agresión agravó la ya delicada situación en esta región clave del planeta y marcó el inicio de los más significativos cambios geopolíticos desde el término de la Segunda Guerra Mundial.


Sobre los planes de Georgia, suministrada por los EE.UU., en lo que respecta al Cáucaso, se sabía ya desde abril. Desde ese entonces la situación en las fronteras entre Georgia y Osetia del Sur era más que alarmante. En la zona de conflicto se concentraron tropas. Las localidades de Osetia del Sur estaban sometidas a un intenso fuego artillero. En las fronteras de Abjasia se respiraba un aire de intranquilidad y nerviosismo. El Ejército georgiano para ese entonces se encontraba en el desfiladero del Kodori, territorio de Abjasia. El denominado “Gobierno legítimo” de Abjasia, reconocido por Tbilisi, declaró que estaba listo para tomar las “riendas del país”. Las provocaciones por parte de Georgia con respecto a las autonomías, no cesaban. Sobre sus espacios aéreos volaban aviones de espionaje no pilotados de procedencia norteamericana, que las autoridades oficiales de Tbilisi los hacían pasar como aviones rusos.

Por televisión Mijaíl Saakashvili aseguraba al pueblo de Osetia que el conflicto se resolvería rápidamente por la vía pacífica. En esos momentos tenía lugar en Pekín la ceremonia de inauguración de los Juegos Olímpicos. Por tradición histórica, debe haber un alto al fuego entre las partes bélicas mientras se llevan a cabo los mencionados juegos. Pero precisamente en esos días por orden del Comandante en Jefe el ejército georgiano sometió a un intenso y masivo fuego artillero a Tsjinvali (capital de Osetia del Sur) y otras localidades surosetas haciendo utilidad de artillería pesada, lanzamisiles múltiples “Grad”, tanques etc. Se inició la operación “campo despejado”. Según los planes de Georgia, en cuestión de 24 horas después de iniciada la operación, Tsjinvali había de desaparecer de la faz de la tierra; y su población, ser eliminada o desterrada. Operación similar se preparaba para atacar a Abjasia, pero la diferencia consistía en que sería de mayor magnitud.

Es curioso saber, ¿en Moscú estarían enterados de la agresión que Georgia tenía en mente?, aunque qué tiene que ver aquí Rusia, si Osetia del Sur y Abjasia forman parte de Georgia. Al juzgar por las innumerables notas diplomáticas que el Ministerio de Relaciones Exteriores de la Federación Rusa envió a Tbilisi; por lo activamente que se discutía en el Consejo de la Federación, en la Duma, el Ministerio de Defensa y las autoridades rusas reiteradas veces intentaron detener el desarrollo de tales acontecimientos; de advertir a Tbilisi sobre las consecuencias de sus acciones.

Moscú advirtió insistentemente al Consejo de Europa, a la ONU, a los líderes de las más grandes potencias sobre la posible complicación de la situación en el Cáucaso. Pero nadie prestaba la debida importancia o Europa se hacía la que no entendía la gravedad de la situación. Como resultado del conflicto armado, en el Cáucaso plenamente tuvo lugar el denominado “efecto dominó” del que ya había advertido Rusia después del precedente de Kosovo. Las consecuencias del conflicto son conocidas. Decenas de soldados del ejército de paz ruso, cientos de soldados georgianos, cientos de civiles murieron. Tsjinvali y muchas localidades de Osetia del Sur quedaron destruidas, decenas de miles de refugiados. Pasará mucho tiempo para reparar los efectos de esta catástrofe humanitaria.

En agosto del presente año, la muerte de miles de civiles de Osetia del Sur fue catalogado por el gobierno de Rusia como “genocidio”. Será o no tal definición, objetiva, el tiempo lo dirá. Las investigaciones oficiales de tales trágicos sucesos en el Cáucaso todavía no están por terminar. Las investigaciones están siendo llevadas tanto por las fuerzas del orden público rusas como por las instituciones europeas. Es muy posible que en el 2009 se de una apreciación jurídica merecida de los nefastos hechos de agosto último y que los culpables sean procesados con todo el peso de ley. Inevitablemente se mencionarán los nombres de los cómplices de Saakashvili que armaron al agresor violando las leyes internacionales en detrimento de la propia seguridad nacional.

Después de lo acontecido en el Cáucaso, la posición inicial de los países occidentales que acusaban a Rusia de agredir a Georgia, cambió radicalmente gracias a los esfuerzos de los diplomáticos rusos y los medios de comunicación. El mismo hecho de que la OTAN no haya incluido en sus filas a Georgia y Ucrania en el 2008, evidencia el cambio de su posición inicial con respecto a Rusia. Países influyentes de la Alianza Atlántica como Gran Bretaña, Francia, Alemania y otros decidieron no incluir a países cuya política haya empeorado la situación político-militar en una región tan importante y estratégica como es el Cáucaso. En sólo 5 días de acciones bélicas no solamente en la región del Cáucaso cambió el panorama geopolítico. En el mapamundi aparecieron dos nuevos Estados: Osetia del Sur y Abjasia. Por primera vez se ven modificadas las fronteras de las repúblicas de la Comunidad de Estados Independientes (CEI), creadas en tiempos soviéticos como intergubernamentales. Apareció un nuevo tipo de formación de Estados: los parcialmente reconocidos. De hecho Osetia del Sur y Abjasia han sido reconocidos de jure por Rusia y algunos otros países. Varios politólogos rusos y occidentales consideran que pasarán unos cuantos años y el número de nuevos estados aumentará. Valga como ejemplo el tema de Kosovo que hasta el día de hoy ha sido reconocido por más de 50 países miembros de la ONU, pero no lo ha sido por dos miembros permanentes del Consejo de Seguridad de esta institución: Rusia y China. Esto significa que Kosovo, al igual que Osetia del Sur y Abjasia, es un estado parcialmente reconocido. La misma definición puede ser aplicada para Chipre del Norte y Taiwán.

Los precedentes de Kosovo, Osetia del Sur y Abjasia contribuyeron a la redefinición del existente sistema de relaciones internacionales y del Derecho Internacional. Ya que en el planeta algunos conflictos “congelados” corren el peligro del “efecto dominó”. Por ejemplo, Pekín teme seriamente al problema de la intensificación de las tendencias separatistas del mismo Taiwán y en la región autónoma de Xingjian Uighur (al oeste de China). En lo que respecta a la CEI podemos citar como ejemplo a Chisinau y Alto Karabaj. En diciembre de este año los rusinos (grupo etnográfico de los ucranianos que habitan en Transcarpatia, región más occidental de Ucrania) anunciaron su deseo de independizarse y crear su propio Estado.

“Los acontecimientos de agosto en el Cáucaso seriamente influenciaron en lo que respecta a los temas de zonas de conflicto en la CEI”, declaró Sergei Markedónov, Jefe del Departamento de problemas de relaciones interétnicos del Instituto de análisis político y militar. La imposición de la paz que se llevó a cabo en el Cáucaso es una señal clara para Bakú en lo que se refiere a su política relativa a Alto Karabaj. Azerbaidzhan ha visto que los intentos de Georgia por resolver de manera unilateral el estatus quo en el Cáucaso, se han encontrado con la fuerte posición de Rusia, y que una política poco perspicaz en lo concerniente al tema de Alto Karabaj puede conducir a malos resultados. Actualmente Bakú tiende a hacer apreciaciones más políticas que militares y optar por métodos más adecuados en su política con respecto a “territorios no reconocidos”.

Según la opinión de Markedónov, se ha presentado también la posibilidad de arreglar otros conflictos en el Cáucaso. Las investigaciones del Instituto de análisis político y militar, demuestran que la proclamación de independencia de Osetia del Sur y de Abjasia en el Cáucaso del Norte, así como el hecho de que Rusia durante el conflicto de agosto haya apoyado a Osetia del Sur y llevado a cabo la operación de imposición de paz, son acogidos absolutamente como correctos.

Dmitri Evláshkov

Extraído de RIA Novosti.

mardi, 04 novembre 2008

Entretien avec L. Pirveli, opposition géorgienne

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Entretien avec Levan Pirveli, Président de l’opposition extra-parlementaire géorgienne

 

 

Q.:  Monsieur Pirveli, en tant que président de l’opposition extra-parlementaire géorgienne, comment jugez-vous la crise du Caucase et la guerre avec la Russie?

 

LP: Sur le plan historique, il n’y avait aucune raison de faire la guerre à la Russie, car jamais dans le passé, la Géorgie ne s’est trouvée en état de belligérance avec son grand voisin. Nous devons chercher les raisons du conflit actuel dans le seul présent. Avant toute chose, les origines de cette guerre résident dans des intérêts stratégiques et économiques que l’on veut faire valoir dans le dos des Géorgiens. Ces intérêts étrangers se concentrent dans les oléoducs et gazoducs, qui se trouvent désormais sous contrôle américain, ce qui suscite la mauvaise humeur des Russes. L’expansion américaine dans le Caucase plonge, de fait, la Russie dans une situation dangereuse, ce que je peux parfaitement comprendre. Il ne faut pas oublier que la Russie accumule les problèmes avec certains peuples vivant sur le flanc nord du Caucase.

 

Q.: Quel rôle joue le président Saakachvili dans ce conflit?

 

LP: Il n’est qu’une marionnette des Américains et, nous, les Géorgiens, sommes les victimes de ce jeu, nous sommes les victimes de notre propre gouvernement et de l’expansionnisme américain. Et, bien entendu, nous sommes aussi les victimes des Russes qui, malheureusement, ont dû combattre l’expansionnisme américain sur notre territoire. Pour ce qui concerne les oléoducs et gazoducs, l’enjeu réside dans les ressources de la région caspienne, qui sont importantes, non seulement pour la Russie, mais aussi pour l’Europe, pour les Etats-Unis et pour la Chine. Il faut tout de même savoir qu’aucune décision n’a encore été prise quant à la destination de ces ressources: seront-elles acheminées vers l’Ouest, donc vers l’Europe, ou vers l’Est, donc vers la Chine. Rien n’a été décidé encore quant à savoir qui contrôlera ces ressources. Aucun de ces quatre concurrents ne peut gagner la mise seul, mais il est plus que probable que deux d’entre eux l’emporteront, s’ils joignent leurs forces.

 

Q.: Quelle collusion sera dès lors possible?

 

LP: Ni les Etats-Unis ni la Russie n’ont besoin des ressources de la région caspienne pour eux-mêmes. Cependant, tant l’Europe que la Chine ont besoin de ce pétrole et de ce gaz pour leurs  marchés. De ce fait, trois collusions sont possibles. La collusion euro-américaine: dans ce cas, les ressources de la Caspienne iront à l’Europe mais sous contrôle américain. Ensuite, autre collusion possible, la collusion sino-russe, ce qui serait une très mauvaise chose pour l’Europe. Enfin, troisième hypothèse, un tandem euro-russe. Dans ce cas, la Russie contrôlerait la situation dans l’espace autour de la Mer Caspienne et assurerait les approvisionnement énergétiques de l’Europe. A mon avis, cette troisième collusion serait la meilleure pour la stabilité du Caucase, parce que la Russie, elle aussi, est une partie constitutive de ce Caucase et possède une expérience séculaire dans la région, qui lui permet d’y gérer les affaires courantes qui demeurent incompréhensibles pour les puissances extérieures à cet espace complexe, comme les Etats-Unis.

 

Q.: Si je vous comprends bien, la seule possibilité pour la Géorgie, c’est de coopérer avec la Russie?

 

LP: Oui, vraiment, la meilleure solution est une coopération étroite avec la Russie et avec l’Europe. Quant à la Russie et l’Europe, elles ont toutes deux intérêts à travailler de concert avec la Géorgie, parce que le Caucase est une région particulièrement dangereuse pour la Russie; l’Europe, elle, doit tendre la main à la Géorgie, tout simplement parce que la Géorgie fait partie de l’Europe et que toute déstabilisation dans le Caucase nuit aux intérêts de l’Europe. Par ailleurs, les autres concurrents en lice, la Chine et les Etats-Unis, ne sont pas directement touchés par les troubles qui surviennent dans le Caucase.

 

Q.: Pourquoi les Américains veulent-ils contrôler cette région?

 

LP: Tout simplement parce qu’ils veulent faire pression sur l’Europe.

 

Q.: Passons maintenant à un autre sujet: dans les médias occidentaux, le Président Saakachvili est présenté à tous comme un démocrate exemplaire. Pouvez-vous me dire ce qui se passe réellement en Géorgie, et m’éclairer sur la politique de Saakachvili?

 

LP: Je suis très étonné de constater qu’en Europe, le Président Saakachvili soit décrit comme un démocrate. Quand il est arrivé au pouvoir en novembre 2003, ce changement de régime ne s’est pas passé selon les règles de la démocratie: ce fut un coup d’Etat appuyé par les Etats-Unis. De plus, il n’y a jamais eu de véritables élections libres. Il y a un an, Saakachvili a fait matraquer les manifestants, qui protestaient contre son néo-libéralisme, et les a fait poursuivre par sa police non seulement dans les rues, mais jusqu’en leurs foyers et même jusque dans les églises. Et quand il s’est représenté aux élections, afin d’être réélu, il a commencé par faire fermer les principales chaînes de télévision de l’opposition et a déployé son armée dans les rues. Les hommes politiques de l’opposition ont été diffamés et traités d’agents russes: des procès leur ont même été intenté. Après toutes ces mesures d’intimidation, Saakachvili a gagné les “élections”,  alors que si celles-ci avaient été régulières, il n’aurait probablement pas obtenu plus de 25%. Je m’étonne dès lors de l’attitude des Européens car Dieter Boden, qui avait observé les élections géorgiennes pour le compte de l’OSCE et rédigé un rapport négatif sur celles-ci, a déclaré dans un interview accordé à la presse allemande, que ce furent pour lui les pires élections qu’il avait jamais observé dans sa vie.

 

(entretien  paru dans “zur Zeit”, Vienne, n°43/2008; propos recueillis par Bernhard Tomaschitz; trad. française: Robert Steuckers).

vendredi, 24 octobre 2008

Géopolitique du Caucase

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Géopolitique du Caucase
Revue Hérodote, N°81, octobre 1996, Géopolitique du Caucase.
Les anciens numéros de la revue peuvent être commandés (Editions La Découverte, 9 bis rue Abel-Hovelacque, 75013 Paris).
Les passages écrits en italique sont des citations tirées des articles.

Il ne vous aura pas échappé que la couverture médiatique des récents évènements touchant la Transcaucasie n’est pas particulièrement objective. Notre « presse nationale », c'est-à-dire la grosse presse financée par la publicité et citée dans les médias audio-visuels, apparaît, une fois n’est pas coutume, totalement en accord avec notre président de la république, qui au titre de président tournant de l’union européenne, se fait le porte-parole de la diplomatie confédérale, et au-delà de celle de l’ « Occident », c'est-à-dire des Etats-Unis et d’Israël.

Résumons les griefs tenus par cette grosse presse unanime (comme toujours). Premier grief, les Russes se livrent à des menées impérialistes. Deuxième grief, ils annexent de manière injuste les territoires appartenant à l’Etat libre de Géorgie.

La revue Hérodote, fondée par le géographe Yves Lacoste, ne se veut pas particulièrement engagée. Du moins, on peut affirmer qu’elle n’est, par exemple, en rien « identitaire ».
Elle fait le plus souvent possible appel à des spécialistes, dont les travaux sont peu répercutés par les grands médias qui préfèrent en appeler généralement à la poignée des habituels « experts » hantant depuis des lustres les plateaux des débats télévisés.

Ce numéro 81, dont le titre est Géopolitique du Caucase, est paru en octobre 1996. Il ne suit l’actualité de l’époque que sur un seul point : la situation tchétchène. Les autres mises au point n’intéressant que les spécialistes, le ton en est totalement dépassionné.
Il est donc utile d’avoir recours aujourd’hui à cette référence car elle fait autorité sur le plan scientifique, et comme elle est déjà ancienne, le propos n’est pas pollué par l’excitation des partis pris qui s’expriment aujourd’hui.

La question ethnique est donc évoquée par Stéphane Yérasimos, collaborateur régulier de la revue, sous le titre Transcaucasie : le retour de la Russie.

On y apprend d’abord que les Russes se sont désengagés de la région au moment de la guerre civile de 1918-22. Immédiatement, il y avait eu une invasion turque, poussant à travers l’Arménie jusqu’à Bakou et au-delà vers le Daghestan [versant Nord du Caucase, aujourd’hui inclus dans la fédération de Russie] et une occupation britannique. En somme, la situation est assez proche de celle d’aujourd’hui : soit cette petite région est sous la coupe de la Russie, soit sous celle des thalassocraties anglo-saxonnes qui font sous-traiter leurs affaires par leurs amis musulmans. On pourra par la même, rappeler à nos amis Français atlantistes, que la présence française y était, comme aujourd’hui, à peu près nulle.

La Géorgie fut conquise par les Tsars, perdue quelques années pendant la guerre civile qui suivit la révolution bolchévique, puis réintégrée à l’URSS. On apprend que la Géorgie soviétique comprenait deux républiques autonomes, celles de l’Abkhazie et de l’Adjarie [Sud-Ouest, à la frontière turque], et la région autonome de l’Ossétie du Sud (…).

On apprend également que Les Abkhazes sont un peuple caucasien attesté depuis l’antiquité sur les rivages nord-est de la mer Noire. Il y a donc bien un peuple abkhaze, qui est chez lui en Abkhazie, et qui, conformément au droit des peuples, qui est internationalement reconnu,  a la liberté de disposer de lui-même, c'est-à-dire de proclamer un Etat indépendant. Historiquement, toutefois, leurs princes furent vassaux des rois géorgiens du XIV° eu XIX° siècle. Le pays est ensuite disputé entre les Russes et les Turcs : une bonne partie de la paysannerie s’islamisa à la suite des efforts ottomans visant à freiner la poussée russe.  C’est suite à une révolte contre l’occupation russe en 1866, qu’une majorité des Abkhazes musulmans se réfugia en Turquie et fut remplacée par des Géorgiens, des Russes et des Arméniens. (…) Les Abkhazes constituaient en 1926 environ 20% de la population de leur république. Une fois intégrés à l’empire des Tsars, c’est sous influence géorgienne qu’ils repassèrent : ils durent accepter en 1938 le remplacement de l’alphabet cyrillique –récemment imposé [par les Russes] - par l’alphabet géorgien, tandis qu’en 1945-46 les écoles en langue abkhaze étaient fermées et la radio abkhaze cessait d’émettre. Ce qui menace l’identité de cette minorité dès lors rattachée à la Géorgie, c’est, tout comme aujourd’hui, l’impérialisme géorgien. Comme les plus chauds partisans des Turcs ont quitté le pays pour se fondre dans l’empire ottoman, ceux des Abkhazes qui demeurent dans leur pays, tant chrétiens que musulmans, se tournent plutôt vers la Russie, considérée désormais comme une puissance tutélaire mais plus comme une menace : ils lancent en 1978 la première campagne pour la sécession de leur république et son rattachement à la fédération russe. Plus tard, grâce à la perestroïka, le Forum Abkhaze, en mai 1989 organise (…) une manifestation qui réunit quelques 30 000 personnes, lesquelles signent une pétition demandant que l’Abkhazie devienne un Etat de l’Union soviétique. Ces mouvements sont en Géorgie, déjà, perçus comme autant de cinquièmes colonnes manipulées par Moscou. En juillet 1989, Abkhazes et Géorgiens s’affrontent en Abkhazie. Les premiers en appellent à la solidarité de tous les peuples du Nord Caucase et à l’arbitrage de Moscou. Yérasimos conclut : on voit apparaître la double constante de l’association d’intérêts des peuples du Nord-Caucase (…) : fidélité à la Russie, et opposition à l’ « impérialisme géorgien ».

Le second peuple secouru par la Russie au mois d’août 2008 est celui des Ossètes du Sud.
Les Ossètes, seul peuple du nord du Caucase à langue indo-européenne (de la branche iranienne) et en grande partie chrétiens (…) sont des descendants des Alains, peuple qui s’installa au VI° siècle sur le versant nord [du Caucase] et descendirent progressivement à partir du XVIII°siècle vers le sud (…).

Le même scénario que celui observé pour les Abkhazes se déroule au moment du délitement de l’autorité soviétique. Au printemps 1989, le Front populaire ossète, nouvellement constitué, alarmé des mesures nationalistes du Parti communiste géorgien (…) annonçait son appui au mouvement abkhaze, s’attirant le courroux géorgien. (…) Les « irréconciliables », nationalistes géorgiens réunis autour de Zviad Gamsakhourdia, provoqueront les premiers affontements avec les Ossètes (…). Quatre cents cars remplis de sympathisants des « irréconciliables », (…) convergeaient vers Tskhinvali, capitale de l’Ossétie du Sud. Et déjà, tout comme aujourd’hui, les troupes soviétiques prévinrent un affrontement direct, mais les attaques continuèrent pendant les mois suivants, les Ossètes accusant les Géorgiens d’ « atrocités ». Déjà, les Abkhazes et les Ossètes (…) votent l’indépendance de leurs républiques, tout en demandant leur adhésion à ce titre à l’Union soviétique. (…)Mikhaïl Gorbatchev (encensé alors par la grosse presse occidentale autant que Poutine est par elle aujourd’hui décrié) répliqua par un décret déclarant cette abolition inconstitutionnelle et demandant le retrait des troupes géorgiennes de la région. Déjà, Tbilissi refusa de s’y soumettre (…) et la guérilla devint endémique en Ossétie du Sud. Des centaines de personnes furent tuées et des milliers d’Ossètes se réfugièrent en Ossétie du Nord (territoire administrativement russe). Dans ces conditions, Abkhazes et Ossètes votèrent massivement au référendum du 17 mars 1991 pour le maintien de l’Union soviétique, sans doute pas par conviction communiste, mais bien plutôt pour continuer de bénéficier de la protection des Russes. Pour s’affranchir de Moscou, le président géorgien Gamsakhourdia semblait envisager la création d’un commonwealth caucasien, en prenant contact avec l’indépendantiste tchétchène Djokar Doudaev. Or, le soulèvement tchétchène au Nord Caucase, sur fond d’islamisme, est alors un souci pour Moscou. La Géorgie, pourtant chrétienne, s’engage donc dans un mouvement de rapprochement avec des puissances musulmanes. N’oublions pas que son peuple, chrétien, a subi longtemps le joug ottoman. Aussi, le despotisme de Gamsakhourdia provoquait l’opposition de la classe politique géorgienne.

Après avoir évoqué la renaissance du sentiment national en Abkhazie et Ossétie, il convient de traiter de la géopolitique de la Russie dans cette région.  

Un article très détaillé de Viatcheslav Avioutskii, du centre de recherches et d’analyses géopolitiques de l’université Paris VIII, traite, dans le même revue cette question, en étudiant le cas des Cosaques du Nord-Caucase.

Peut-être est-il ici nécessaire de préciser que la Russie est un Etat sans frontières naturelles, qui parti des clairières de la petite Moscovie s’est étendu sur une large partie de l’Eurosibérie, devenant ainsi le premier Etat du monde par sa superficie. Le moteur de cette expansion formidable fut en grande partie les communautés cosaques : c’est initialement sur les confins de l’Empire russe, en Ukraine (…) puis dans le sud de la plaine russe, au contact –plus ou moins conflictuel- avec des peuples nomades ou semi-nomades, que se constituèrent des groupes armés(…). Ils ont marqué par les lignes de leurs stanitsas [établissements], la progression de l’Empire russe. Les anciennes lignes cosaques marquent les limites (…) de la zone de peuplement à majorité russe, face à la périphérie asiatique ou caucasienne. (…)Pour résumer 400 ans de colonisation cosaque du Nord-Caucase, ce limes [ligne fortifiée semblable à la frontière de l’empire romain] suivait l’avancée des troupes des tsars vers le sud. La veille de la Première Guerre mondiale fut l’apogée de la progression cosaque. Même en période de paix, les « allogènes » (sic, il s’agit en fait des indigènes) habitaient dans des sortes de « réserves » (…). La Révolution, suivie d’une guerre civile particulièrement sanglante, a mis fin à la prospérité des cosaques. (…)Les bolchéviks (…) ont organisé les déplacements des stanitsas cosaques et le transfert de leurs terres aux montagnards [musulmans caucasiens]. (…) A l’époque bolchévique, la descente des montagnards vers les plaines s’intensifie. (…) Selon l’ataman [chef] des cosaques de Stavropol, Piotr Fedossov, en déportant les cosaques de la Sounja (district de Prigorodny en Ossétie du Nord), et en détruisant par là les « barrages » entre les ethnies adverses, une mine à retardement a été déposée sur les conflits ethniques actuels. Mais selon lui, les cosaques restent le seul « berceau historique » des Russes dans le piémont caucasien et la seule barrière contenant l’avancée du « Sud asiatique » vers le « Nord industriel et civilisé ». L’actuelle renaissance des cosaques s’explique par la tendance instinctive des Russes à reconstituer le limes les séparant des ethnies musulmanes. (…)Les cosaques se considèrent comme les défenseurs des Slaves.

Dans le Caucase, les cosaques ont pris le parti des Ossètes, non seulement parce qu’ils partagent la même religion, mais parce qu’ils étaient alliés depuis l’époque de la grande guerre caucasienne [fin du XIX°s.]. Avant la révolution de 1917, Mozdok [forteresse et centre spirituel orthodoxe sur la rive gauche du fleuve Terek] était le lieu où se trouvait l’icône sacrée de la Mère de Dieu de l’Ivérie (nom ancien de la Géorgie). Il existait en Russie quatre principales icônes : celles protégeant contre les invasions des ennemis venant de quatre directions, dont les plus célèbres étaient l’icône de la Mère de Dieu de Kazan, protégeant la Sainte Russie des invasions venant de l’est, et l’icône sacrée de la Mère de Dieu de l’Ivérie, gardant les frontières du sud de la Russie. L’Ossétie orthodoxe représente un barrage aux liaisons entre les deux parties musulmanes du Caucase. Elle sert aussi de pont entre la Transcaucasie chrétienne (la Géorgie et l’Arménie) et la Russie orthodoxe. La route militaire géorgienne traverse l’Ossétie du Nord. Elle représente la voie la plus importante de pénétration des Russes en Transcaucasie. (…) Pendant le conflit armé entre Tskhinvali [Ossétie du sud] et Tbilissi [Géorgie] - cf. précédent paragraphe -, L’Ossétie du Nord a fourni des armes, des volontaires et a accueilli 100 000 réfugiés. Aujourd’hui [1996], les troupes russes, séparant les deux parties en conflit à Tskhinvali [comme en 2008 !] place en fait la situation sous la férule directe de Vladikavkaz [ville et place forte russe du côté nord de la chaîne du Caucase], car l’Ossétie du Sud souhaite réellement son intégration à la fédération de Russie [comme aujourd’hui]. En réalité, tout cela sous-entend la réunification des deux Osséties et la modification de l’équilibre des forces dans tout le Caucase.
Pour résumer, le « cordon ombilical » de l’orthodoxie constituera, comme autrefois, un vecteur de force par le biais duquel la Russie pourra contenir la poussée turque vers la Transcaucasie (…).

Résumons, également. Tout d’abord, les deux peuples secourus cet été par les Russes, à savoir les Abkhazes et les Ossètes du sud, ont droit, comme tout peuple à leur indépendance : une terre, un peuple ! Il n’y aurait là un problème en droit international, que si l’on s’attachait au dogme de l’intangibilité des frontières. Mais, les « Occidentaux » ont montré que ce dogme n’était plus d’actualité, en arrachant le Kosovo à la Serbie (cf. Terre et Peuple, solstice d’hiver 2006). Dès lors, comment justifier que ce qui vaut pour les musulmans kosovars (pourtant devenus majoritaires très récemment et dans des conditions plus que discutables) serait interdit à des Ossètes chrétiens ? Rappelons par ailleurs que la Russie n’a pas de visée annexionniste sur le reste de la Géorgie, puisque les troupes qui s’y trouvaient au mois d’août évacuent les lieux.

Ensuite, on aura constaté bien sûr que le peuple russe a connu une expansion territoriale remarquable depuis les clairières de Moscovie jusqu’à l’empire des Tsars. Mais sans la présence des Russes, ces vastes territoires n’auraient pas été laissés à l’abandon. D’autres peuples les ont d’ailleurs occupé autrefois, particulièrement les nomades turcophones, qui menacèrent l’Europe au XIII°siècle, et l’envahirent au V° : sans l’union des Romains d’Aetius et des Germains, sans le coup d’arrêt des champs catalauniques (près de Chalons en Champagne) en 451 qui vit le recul des Huns d’Attila, qui sait si l’Europe aurait survécu ? Après eux, ce sont les Turcs musulmans qui occupèrent l’Ukraine et la Russie du sud. Et au moindre recul des Russes (comme en 1918, cf. plus haut), ce sont à nouveau eux qui déferlèrent sur la région. Le peuple géorgien, peuple européen qui mérite amitié et respect, doit méditer cela, lui qui a subi aussi la longue nuit du joug ottoman. Pour quelques royalties obtenues grâce au passage d’un gazoduc sur son territoire, il risque d’entrer durablement dans l’orbite turque, et pour longtemps ; ce ne sont pas les Anglo-saxons qui se sacrifieraient pour l’en délivrer ; ses voisins Arméniens l’ont bien compris, qui eux, sont fidèles à l’alliance avec Moscou.

Il convient donc de faire des choix. En quoi la présence d’un peuple blanc indo-européen et chrétien sur ce vaste glacis de l’Eurasie gênerait-il les Européens de l’Ouest ?  Sont-ce les Russes qui nous dictent notre politique ? qui nous inondent de leurs films ? qui nous colonisent au moyen de migrations de masse ? qui nous imposent de reconnaître des enclaves musulmanes en Europe balkanique ? qui nous imposent d’intégrer la Turquie en Europe ?

S’informer sérieusement, c’est se donner les moyens de répondre à ces questions, c’est se donner les moyens de choisir librement son destin.

Robert Dragan.

 

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mardi, 14 octobre 2008

Les Ossètes ont manifesté à Strasbourg

LES OSSETES ONT MANIFESTE A STRASBOURG POUR LA VERITE

Les Ossètes ont manifesté durant près d’une semaine devant le conseil de l’Europe à Strasbourg. Le lundi 30 septembre, les membres de cette petite communauté étaient près d’une centaine, venus de Paris, Bordeaux, Lyon en autocar mais aussi d’Allemagne ou directement d’Ossétie. Parmi eux se trouvaient aussi quelques Abkhazes, qui ont eux aussi fait sécession de la Géorgie avec le soutien de la Russie. Jusqu’à jeudi les Ossètes qui ont pu rester sur Strasbourg ont continué à brandir leurs couleurs blanche, rouge et jaune face au bâtiment symbole d’une communauté internationale qui, après les Kosovars, fait passer les Géorgiens et leur gouvernement pour des victimes.

Drapeaux au vent et pacifiquement, mais largement entourés de policiers, les Ossètes sont venus tout d’abord exprimer leur indignation suite à la façon honteuse dont le conflit osséto-géorgien (devenu géorgo-russe) a été présenté dans les médias occidentaux, qui n’ont de cesse de distiller une propagande anti-russe. Celle-ci visait et vise toujours à faire passer les Russes pour les bourreaux des Géorgiens, alors qu’en intervenant la Russie a sauvé le peuple ossète d’un génocide certain. Certes, derrière cela, il y a des intérêts géostratégiques évident pour la Russie en Abhkazie et en Ossétie, mais ce fait ne doit pas en occulter un autre : les Géorgiens n’ont eu de cesse de tenter d’éliminer culturellement mais aussi physiquement les Ossètes, sans que cela n’ait pour autant dérangé ni le Conseil de l’Europe, ni l’Union européenne, ni la Cour européenne des Droits de l’Homme. Les Géorgiens ont toujours refusé aux Ossètes non pas seulement l’indépendance, mais aussi la simple autonomie, niant leur existence même sur le territoire géorgien. Cette rhétorique nationaliste que l’Une et indivisible France jacobine ne renierait pas a engendré le pilonnement de Tskhinvali (capitale de l’Ossétie) du 8 août 2008, justifiant l’intervention russe. La France, inspirée par le nationalisme de Rénan qui voit la Nation comme un “plébiscite de tous les jours”, n’a pas d’ailleurs pas daigné accorder d’importance au référendum de 2006 au cours duquel 90% des Ossètes se sont prononcés en faveur de l’indépendance. Sarkozy, en bon jacobin, s’est indigné que l’”intégrité territoriale” de la Géorgie ne soit pas respectée, preuve encore s’il en est que les beaux principes intellectuels de la République n’ont de valeur que quand elle y trouve son intérêt…

La Géorgie se réarmait activement depuis 2006, avec l’aide des Etats-Unis, dissimulée dans un “programme d’assistance militaire aux pays étrangers”, 93 millions de dollars ayant été transférés vers un “fond pour le développement de l’armée géorgienne” (Sakartvelos Jaris Ganvitarebis Fondi Angarishis nomeri : 140070276 for USD transfer : intermediary Citibank N.A. 111). L’armée géorgienne a été entraînée par des instructeurs Américains, des Israéliens mais aussi des Polonais, des Turcs ou des Bulgares. Une semaine avant l’opération en Ossétie ce sont des troupes spéciales du ministère de la défense ukrainien et même des mercenaires d’Afrique et d’Asie qui sont arrivés en Géorgie. On peut se douter qu’ils ne comptaient pas y faire du tourisme !

Il y a donc eu un véritable contrat pour éliminer les irrévérencieux ossètes, ce contrat a échoué grâce à la résistance de la jeunesse de Tskhinvali arme à la main et à l’arrivée des troupes russes qui ont évité un véritable génocide. Et notons à quelle point la perfidie fut poussée à travers un exemple concret : des images diffusées à la télévision sous l’appellation de Gori (ville géorgienne) étaient en fait celles de la capitale ossète détruite, comme l’a notamment souligné Dimitri, membre de l’association Ossetia Accuses, dont de nombreux manifestants portaient le t-shirt. Evidemment, puisque peu de monde connaît les immeubles de la ville ossète, la manipulation est passée comme une lettre à la poste et les gens, qui n’avaient pour la plupart jamais entendu parler de l’Ossétie auparavant, n’y ont vu que du feu et ont eu avant de l’empathie pour les civils géorgiens. Le livre South Ossetia, Chronicle of Contract Murder édité par le mouvement Soprotivlenie est un bon support pour ceux qui voudraient aller plus loin pour comprendre la vaste manipulation médiatique.

Voici donc la véritable histoire de ce conflit, l’histoire que les médias se contentent de taire, en insistant sur les représailles russes et en ne mettant pas instant en avant le caractère légitime de la riposte de Medvedev et Poutine. D’ailleurs, pour la manifestation des Ossètes, les médias français n’étaient pas là, ils avaient pourtant été prévenus. A part quatre lignes méprisantes des DNA dans un article sur les débats au Conseil de l’Europe à propos du conflit, aucune mention n’est faite dans la presse française de cette manifestation, aucun journaliste n’est venu interviewer ces gens qui ont parfois traversé l’Europe pour exprimer ce sentiment d’injustice qu’ils ont sur le coeur. Il fallait compter sur Ria Novosti, agence russe d’information internationale, pour relayer l’information. On peut aisément imaginer que si une dizaine de Kosovars en avaient fait de même il y a quelques années les medias français se seraient précipités. La télévision russe a quant à elle interviewé les manifestants et des députés présents au Conseil de l’Europe sont venus leur apporter leur soutien.

Comme les Ossètes l’avaient prévu lundi, les Géorgiens sont venus contre-manifester les jours suivants. Ossètes 042.JPGPlus nombreux que les Ossètes - la communauté géorgienne sur place est naturellement plus importante - ils ont tenté de les provoquer mais les Ossètes n’ont pas répliqué aux provocations nationalistes des Géorgiens, qui bien sûr traitaient Vladimir Poutine de “facho” et se faisaient passer pour les victimes. Comme leur obséquieux Président, Saakachvili, ils jouent la carte de l’Union Européenne à fond, puisque celle-ci a malheureusement choisi d’être anti-russe et pro-américaine. Ils avaient donc un drapeau de l’Union européenne mais aussi un drapeau tricolore français, histoire probablement de montrer leur admiration à la République française qui a su par le biais d’un génocide culturel réprimer les identités que l’on appelle sobrement “régionales”.

D’un point de vue d’Alsacien et d’Européen plus généralement, il fut intéressant de partager avec les Ossètes l’histoire de l’Alsace et une vision de l’Europe. C’est dans ces moments d’échanges humains riches que l’on se rend compte que l’Union Européenne prend le mauvais chemin mais que la Russie ne doit pas se détourner de l’Europe pour autant. Au contraire, elle devrait avoir un rôle de moteur dans une Europe que l’on rêve forte, et son fédéralisme devrait être un modèle à suivre. On se rend compte aussi que nos histoires se ressemblent et qu’elles ont façonné tant une vision communautaire que tolérante entre peuples européens, broyés par les machines étatiques administratives et les nationalismes expansionnistes.

Les Ossètes ont découvert qu’en Alsace qu’il y avait un drapeau historique (Rot un Wiss et drapeau ossète ont d’ailleurs flotté côte à côte !), une tradition de résistance au centralisme et surtout une langue, l’alsacien. Et les Bretons découvriront quant à eux que certains mots de leur langue viennent de l’ossète !

mercredi, 08 octobre 2008

E. Todd: la Russie n'est pas une menace pour l'Europe de l'Ouest

emmanuel-todd_pf.jpg

Emmanuel Todd : la Russie n’est pas une menace pour l’Europe de l’Ouest
5 octobre 2008

Emmanuel  Todd  plaide  pour une approche plus équilibrée envers la Russie.
L’interdépendance  géopolitique  entre  l’UE  et  cette grande nation et la
redistribution  des rapports de forces entre nations développées et nations
émergentes  devraient  nous  conduire  à nous rapprocher de la Russie, dont
selon  lui  «  l’histoire  démontre que sa vision du monde est spontanément
égalitaire  et  multipolaire.  A  l’inverse  des Etats-Unis qui se trouvent
aujourd’hui  dans  un  rapport asymétrique d’exploitation du monde. » Il en
déplore d’autant plus le récent tropisme Atlantique français alors même que
la  prééminence  des  USA est compromise. « La France aurait dû s’en rendre
compte  et  se  rapprocher  des  puissances émergentes plutôt que de suivre
l’Amérique dans une sorte de crispation « occidentaliste ». Le gouvernement
français  me  fait  penser à un rat qui monterait sur un navire en train de
couler. »

Emmanuel Todd s’entretient avec Inna Soldatenko, le Courrier de Russie,
30
Septembre 2008

Le Courrier de Russie : A qui faut-il imputer la faute dans la crise
géorgienne ? Aux Russes, aux Géorgiens ou aux Ossètes ?

Emmanuel Todd : Je propose d’observer le problème de la crise géorgienne
d’une façon plus large, dans le cadre des enjeux géopolitiques
internationaux. Il faut se rappeler qu’après la chute de l’URSS et le repli
stratégique de la Russie, les Etats-Unis sont devenus l’unique
superpuissance mondiale. Ils ont adopté, à partir de 1996-97 un
comportement agressif vis-à-vis d’autres pays du monde. On en a vu les
manifestations dans l’invasion de l’Irak, dans la campagne anti-iranienne
de l’administration américaine ou encore dans l’attaque menée par Israël,
pays satellite des Etats-Unis, au sud-Liban. La crise géorgienne n’est
qu’une étape supplémentaire dans cette séquence agressive du système
américain.

LCDR : Pourquoi une telle hostilité ?

E.T. : Les Etats-Unis se comportent de façon agressive parce qu’ils sentent
leur puissance s’affaiblir. Le monde américain subit une crise économique,
sociale et culturelle grave. L’effondrement financier actuel n’en est
qu’une nouvelle preuve. Entre-temps, nous observons d’autres pays du monde
regagner leur puissance. On assiste à une montée spectaculaire de l’Inde et
de la Chine. On voit également le rétablissement de la Russie qui retrouve
son équilibre économique et enregistre des taux de croissance élevés. Le
monde change à grande vitesse, mais tous ne s’en rendent pas compte. On
trouve encore beaucoup de gens inconscients du déclin industriel des
Etats-Unis et de la fragilité de leur système. Ce fut justement le cas des
Géorgiens qui se sont lancés dans la conquête de l’Ossétie se croyant
soutenus par le camp « occidental » mais se sont retrouvés victimes de
l’impuissance matérielle de leur allié américain. Mikhaïl Saakachvili a
sous-éstimé la nouvelle capacité d’action de la Russie. Celle-ci ne
souhaite pas voir l’OTAN s’installer à toutes ses frontières et n’hésite
plus pas à utiliser son armée pour faire entendre son « non ».

LCDR : Croyez-vous que les Etats-Unis aient incité la Géorgie à attaquer
l’Ossétie ?

E.T. : On ne sait pas exactement comment la décision a été prise et,
probablement ne le saura-t-on jamais. Mais la vraie question, c’est comment
la Géorgie a-t-elle pu s’imaginer qu’elle allait faire plier la Russie ?
Comment Saakachvili a-t-il pu envoyer ses troupes en Ossétie, alors que la
partie la mieux équipée de l’armée géorgienne était en train de soutenir
les Américains en Irak ?

LCDR : Pourtant, la Géorgie a été écrasée par l’armée russe et les
Etats-Unis, à supposer qu’ils ont effectivement joué un rôle dans le
conflit, auraient dû prévoir ce scénario...

E.T. : Il faut se rappeler que l’on ne connaît toujours pas l’issue de la
crise. Elle semble avoir conduit les Polonais à finalement accepter
l’installation du système anti-missile américain sur leur territoire. Elle
pourrait pousser les gouvernements européens à affaiblir leurs liens avec
la Russie et se rapprocher encore plus des Etats-Unis. Qui sait si les
stratèges américains n’ont pas espéré entraîner la Russie elle-même dans
une séquence agressive, la conduisant à adopter une posture revancharde et
conquérante nuisible à son statut international. L’administration
américaine aurait pu sacrifier le pion géorgien pour améliorer sa situation
sur la scène internationale. Les Américains jouent au poker, vous savez.
Les Russes jouent aux échecs. Ils ont pris le pion géorgien, montré que
l’Amérique ne les impressionnait plus, mais ils ont fait du maintien de
relations paisibles et utiles avec l’Europe de l’Ouest leur priorité.

LCDR : Comment expliquer la réaction de l’Europe au conflit géorgien ?

E.T. : Les gouvernements européens sont pris dans un dilemme entre les
intérêts de leurs peuples et ceux de leurs élites. Ce n’est pas un grand
secret : les oligarchies occidentales sympathisent avec les Américains et
soutiennent leur politique. Les peuples européens non. L’intérêt
géopolitique de la France en tant que puissance moyenne et européenne
serait une entente cordiale et stratégique avec la Russie.

LCDR : Pourtant, dans la société occidentale, on parle plus souvent de la
menace russe...

E.T. : La Russie n’est pas une menace pour l’Europe de l’Ouest. Je dis
consciemment « Europe de l’Ouest » parce que les Russes sont des Européens.
La Russie a terriblement souffert de la deuxième guerre mondiale et ne
cherchera pas, j’en suis convaincu, à déclencher de nouveaux conflits. La
Russie a par ailleurs constaté, du temps de l’URSS, que l’Empire était une
entreprise peu rentable. Son déclin démographique interdit de toute façon
un fantasme expansionniste. La menace militaire russe est un mythe. La mise
au pas de la minuscule Géorgie ne démontre pas que l’armée russe est
toute-puissante. Elle démontre simplement que, dans le Caucase, la
puissance militaire américaine n’existe pas.

LCDR : Mais outre la sécurité militaire, il existe la sécurité
énergétique...

E.T. : Il ne faut pas oublier que la Russie et l’Europe de l’Ouest se
retrouvent en état d’interdépendance. L’Europe a toujours besoin du gaz
russe, mais la Russie a besoin des biens d’équipement européens, de
technologies et de savoir-faire. Et ce n’est pas par hasard que les
producteurs d’automobiles européens s’implantent en Russie et y travaillent
avec beaucoup de succès.

LCDR : Si la France est intéressée à maintenir ses liens avec la Russie,
pourquoi la presse occidentale adopte-t-elle une attitude aussi critique à
son égard, notamment dans la couverture du conflit géorgien ?

E.T. : Les journalistes européens se montrent souvent hostiles à l’égard de
la Russie au nom d’une sorte de maximalisme libéral. Peu conscients de ce
qu’ils vivent eux-mêmes dans des systèmes certes forts libéraux, mais de
plus en plus inégalitaires, oligarchiques même, ils se croient obligés
d’exiger, hors de chez eux, des démocraties parfaites, tout de suite,
indépendamment du contexte économique ou social de transition. Avouons le
aussi, les journalistes européens sont rarement compétents en géopolitique.
Il sont souvent très naïfs. On pourrait aussi citer comme explication le
peu d’efforts du Kremlin visant à séduire la presse occidentale. Habitués à
l’attitude beaucoup plus séductrice de leurs propres hommes politiques, les
journalistes européens et américains ne peuvent qu’être déçus par ce manque
de ménagements. Pourtant, je peux vous assurer qu’en France, dans la
communauté des experts, on trouve beaucoup de personnes qualifiées qui
apprécient à sa juste valeur le rôle de la Russie dans le rétablissement de
l’équilibre mondial.

LCDR : On trouve beaucoup d’adeptes de l’idée selon laquelle la Russie
porte toujours l’héritage de l’Empire du Mal qu’elle représentait encore il
y a une trentaine d’années...

E.T. : Quant à moi, je considère que la Russie a joué un rôle plutôt
positif dans l’histoire universelle. J’appartiens à la génération qui se
rappelle encore que l’issue de la deuxième guerre mondiale s’est jouée à
Stalingrad et que c’est aux Russes que nous devons notre liberté.
L’histoire de la Russie démontre que sa vision du monde est spontanément
égalitaire et multipolaire. A l’inverse des Etats-Unis qui se trouvent
aujourd’hui dans un rapport asymétrique d’exploitation du monde. La France
aurait dû s’en rendre compte et se rapprocher des puissances émergentes
plutôt que de suivre l’Amérique dans une sorte de crispation «
occidentaliste ». Le gouvernement français me fait penser à un rat qui
monterait sur un navire en train de couler.

LCDR : Les Russes, ont-ils eu raison de reconnaître l’indépendance de
l’Abkhazie et de l’Ossétie du Sud ?

E.T. : Bien évidemment.

LCDR : Pourtant, juridiquement, ce sont deux provinces géorgiennes...

E.T. : Dans le cas de l’Abkhazie et de l’Ossétie du Sud, nous assistions à
une non coïncidence devenue dramatique entre l’état des faits réels et
l’état juridique. Les populations de ces deux pays ne souhaitent pas être
géorgiennes. Au stade actuel, la seule solution de paix à long terme est
l’acceptation de la réa-lité. Sinon, le gouvernement géorgien va continuer
d’envisager des solutions violentes, de domination ou même de nettoyage
ethnique. Or l’intérêt réel des Géorgiens c’est la paix, le développement
économique et une relation stable et positive avec la Russie dont ils ont
tant besoin. En reconnaissant l’Abkhazie et l’Ossétie du Sud, les Européens
de l’Ouest libéreraient les Géorgiens eux-mêmes du fardeau de leur histoire
et de leur rancune.

LCDR : La France devrait-elle reconnaître l’indépendance de ces deux états
?

E.T. : C’est mon souhait le plus cher. Si je deviens président de la
République, ce sera l’une de mes premières décisions.

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lundi, 29 septembre 2008

Deux parlementaires belges accusent la Géorgie de crimes de guerre

 

Deux parlementaires belges

 

 

accusent la Géorgie de crimes de guerre

 

 

Christine Defraigne.
Josy Dubié.

7S7 mise à jour   Deux parlementaires belges accusent la Géorgie du président Mikhaïl Saakashvili de "crimes de guerre" en Ossétie du sud, qualifiant Tbilissi d'"agresseur" dans le conflit intervenu au mois d'août dans le Caucase.

"Il y a bien eu crime de guerre"
"Il me semble effectivement établi qu'il y a bien eu crime de guerre", a indiqué jeudi le sénateur Josy Dubié (Ecolo) rejoint à cet égard par sa collègue Christine Defraigne, chef de groupe MR à la Haute assemblée. Les deux parlementaires demandent une enquête internationale, estimant que la Cour pénale internationale doit être saisie.

Mme Defraigne et M. Dubié se sont rendus cinq jours en Ossétie du sud dans le cadre d'une mission qu'ils qualifient d'indépendante.
Dénonçant un contexte de désinformation, notamment dans le chef de la presse occidentale, ils ont organisé jeudi au parlement une conférence de presse intitulée "La vérité a ses droits". Les deux parlementaires pointent Tbilissi comme premier responsable du conflit avec la Russie.

Saakashvili "instigateur" de l'invasion
"Nous concluons sans hésitation, sans ambages que ce sont les Géorgiens qui sont l'agresseur", a notamment indiqué Christine Defraigne, présentant le président Saakashvili comme "l'instigateur de cette invasion brutale qui s'est accompagnée de violations du droit international".

Les deux sénateurs disent avoir recueilli suffisamment de témoignages et constaté sur place les conséquences de bombardements intensifs et répétés, dans le chef de l'armée géorgienne, visant des logements habités par des civils, un hôpital, un jardin d'enfants, des réfugiés en fuite, un bâtiment de la Croix rouge, une caserne abritant des "peace-keepers russes", et le parlement ossète dont il ne reste plus que les murs.

Civils délibérément visés
"Le quartier juif à Tskhinvali, la capitale ossète, a été complètement détruit à l'exception de la synagogue", ont-ils relevé. "Nous avons constaté la destruction quasi-complète d'un village dénommé Tsunar et d'un autre, Kmitogurovo", ont-ils précisé. Selon Josy Dubié, les traces de char repérées dans ce dernier village et les témoignages attestent de ce que les forces géorgiennes ont délibérément visé des habitations qui n'étaient pas vides, et qui n'abritaient pas de militaires.

Compte tenu de ce qu'ils ont vu et entendu, les parlementaires belges ont estimé "vraisemblables" le nombre de 1.500 victimes russes et ossètes avancé par les autorités locales. Mme Defraigne et M. Dubié ont été en mesure d'examiner une partie de l'armement géorgien pris par les Russes. Selon eux, il s'agit de matériel sophistiqué. Ils ont notamment du matériel léger américain, cinq chars T72 de dernière génération fabriqués en Ukraine, équipés de matériel de visée nocturne israélien, ont-ils dit.

Une enquête auto-financée et indépendante
Les sénateurs ont dit avoir pu agir en toute liberté durant leur enquête, et ont assuré avoir financé eux-mêmes leurs déplacements. Ils ont tenu à remettre les pendules à l'heure quant aux origines du conflit en Ossétie du sud, l'exactitude des faits perpétrés et la responsabilité des exactions. Les sénateurs ont dénoncé la "désinformation" à l'oeuvre dans les médias occidentaux mais aussi dans le chef de responsables politiques.

Une délégation de parlementaires belges composée d'Anne-Marie Lizin (PS), Jean-Luc Crucke (MR) et Sabine de Béthune (CD&V), avait dénoncé l'installation de l'armée russe en territoire géorgien. "Chacun sa sensibilité, on ne peut pas la leur reprocher vu l'importance de la propagande organisée par M. Saakashvili", a indiqué Mme Defraigne, épinglant par ailleurs "une propension européenne à exprimer généralement une sensibilité plutôt pro-américaine".

"Nous ne sommes pas des agents du FSB"
Les deux élus se sont défendus d'exprimer un point de vue unilatéral pro-russe. "Nous ne sommes pas des agents du FSB", ont-ils souligné, rappelant qu'ils avaient dénoncé la situation des droits de l'Homme en Russie et la politique poursuivie par Moscou en Tchétchénie. "Et nous continuerons à le faire. Mais il faut aussi savoir reconnaître quand les choses évoluent dans le bon sens", ont-ils dit, soulignant par ailleurs qu'ils se sont rendus à Beslan durant leur séjour, où, selon eux, la population s'exprime aujourd'hui librement, n'hésitant pas, notamment, à critiquer ouvertement le Premier ministre Vladimir Poutine.

Mme Defraigne et M. Dubié sont d'avis que la Belgique devrait participer à la mission d'observation européenne en Géorgie, le ministre des Affaires étrangères, Karel De Gucht étant réticent à cet égard. Les deux sénateurs divergent en revanche dans leur rapport quant à l'idée de reconnaître l'indépendance de l'Ossétie du sud comme l'a fait la Russie. "C'est clairement non", a indiqué jeudi Josy Dubié justifiant son point de vue par la nécessité de respecter le droit international (M. Dubié rappelle qu'il était contre la reconnaissance du Kosovo). Mme Defraigne est plus nuancée. "Peut-on retirer aux peuples le droit de vouloir disposer d'eux-mêmes pour autant que le processus soit pacifique?", s'interroge-t-elle. (belga/7sur7)

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samedi, 27 septembre 2008

Caucaso: Storia di una regione tra Europa e Asia

Caucaso: Storia di una regione tra Europa e Asia
http://www.eurasia-rivista.org/
carte-caucase.jpg

di Ninni Radicini

Il recente conflitto russo-georgiano va inquadrato nello sviluppo storico del Caucaso e nella sua millenaria complessità geopolitica. La prima volta che l'opinione pubblica italiana ne ebbe segnale fu nel febbraio 1988 quando televisioni e giornali riportarono la notizia di scontri tra armeni e azeri, prodromo della implosione dell'Urss. Frontiera tra Vicino Oriente, steppe euro-asiatiche e Mediterraneo orientale, il Caucaso ha subito profondamente il passaggio di popolazioni dall'Asia centrale e l'espansionismo degli imperi e delle potenze confinanti.
I conseguenti spostamenti degli autoctoni dalle valli alla montagne, da Nord a Sud e viceversa, hanno frammentato la disposizione delle etnie e determinato differenze nell'evoluzione tra la parte settentrionale e quella meridionale (Subcaucasia), dove fin al VI sec. a.C si costituirono entità statali comunitarie, che beneficiarono degli esempi mesopotamici e persiani, oltre che della prossimità con il mondo ellenico e poi con quello romano ("Breve Storia del Caucaso", di Aldo Ferrari, 2007). Georgiani e Armeni fondarono regni indipendenti, con il Cristianesimo religione prevalente già nel IV sec. In seguito il Caucaso fu conteso tra bizantini, persiani, arabi, turchi, soggetto a parziale islamizzazione, scomposizione dei regni e mutamento del quadro etnico a causa di deportazioni di massa, subite in particolare dal popolo armeno.
Nell'impossibilità logistica per le potenze europee di allestire una spedizione militare che avrebbe dovuto attraversare il Mediterraneo orientale, allora sotto totale controllo turco-ottomano, l'unica potenza in grado di liberare la regione era la Russia. Dopo la vittoria di Ivan IV il Terribile sui Tartari nel Caucaso settentrionale, Pietro il Grande rafforzò i rapporti con georgiani e armeni, a partire dalla comune religione cristiana ortodossa, e nel 1772 si ebbe la prima grande avanzata fino a Baku (Azerbaijan). La fase decisiva iniziò con Caterina II che lanciò la campagna per la liberazione della Subcaucasia (guerra russo-turca 1764-68). La Russia oltre all'impero ottomano dovette affrontare i persiani: entrambi sostenuti da Francia e Inghilterra, allora nemiche in Europa ma alleate nel Caucaso.
Nonostante tale schieramento, intorno al 1830 l'esercito zarista portò a termine la missione. Si era in epoca Romantica e quanto accaduto ebbe riferimenti notevoli nella produzione letteraria (Tolstoj, Puskin) e nella cultura popolare. I rapporti con georgiani, armeni, e azeri furono caratterizzati in parte di incomprensioni, dovute alla volontà di affermazione delle rispettive autonomie. Ma tutti popoli dell'area erano consapevoli che il nuovo clima di sicurezza era la migliore garanzia per la rinascita economica.
I problemi maggiori arrivavano dal Caucaso settentrionale, abitato da popolazioni bellicose che i russi chiamavano "gorci" (montanari). Nella Subcaucasia la rivoluzione del 1905 ebbe carattere nazionale oltre che di classe e ogni popolo si diede un partito rappresentativo: il Dashnaktsuthiun per gli armeni, il Partito socialdemocratico menscevico per i georgiani; il Musavat per gli azeri. Nel '21 le tre repubbliche aderirono all'Unione Sovietica, con parità di diritti e prospettiva di riequilibrio economico. Dopo la Seconda guerra mondiale (quando i nazisti arrivarono fino al Caucaso nord-occidentale) la Georgia puntò sulla difesa della lingua e rispetto all'Armenia ebbe un rapporto più difficile con Mosca. In Azerbaijan cominciò a farsi strada un nazionalismo che rivendicava l'eredità dell'antico popolo degli Albani. L'affermazione della nazionalità trovò vigore a metà degli anni '80 con la Perestroika e la Glasnost di Mikhail Gorbaciov.
All'inizio degli anni '90, dopo le dichiarazioni d'indipendenza delle varie repubbliche, il Caucaso - in particolare la Subcaucasia - si trovò al centro degli interessi di Russia, Usa, Turchia, Iran, con parziale coinvolgimento dell'Ue, data la presenza di rilevanti giacimenti petroliferi e la collocazione, che la rende percorso alternativo per il trasporto delle risorse energetiche dell'Asia centrale verso il Mediterraneo. Seppure parte integrante della Russia, nello stesso periodo anche il Nord caucasico fu attraversato da conflitti etnico-religiosi, come quello tra ingusci (musulmani) e osseti (cristiani ortodossi), e insurrezioni nelle repubbliche di Karacaj-Circassia e Cabarda-Balcaria. Ma il territorio più ostile alla presenza russa fu la Cecenia.
La Georgia, dopo l'indipendenza, fu a sua volta soggetta alle spinte centrifughe delle Repubbliche di Abkhazia e Ossetia del Sud, di fatto autonome dal '93 con la supervisione di Mosca, e delle regioni di Agiaria - abitata da georgiani musulmani - e dello Javakheti, a maggioranza armena. Da sempre oscillante tra Oriente e Occidente, fino al '04 è stata governata da Edward Sheverndze, già ministro degli Esteri di Gorbaciov, che la fece aderire alla Csi (Comunità Stati Indipendenti) rafforzando allo stesso tempo i legami con Ue e Usa. Nel '96 Georgia, Armenia e Azerbaigian firmano l'Accordo di partenariato e cooperazione con l'Ue e nel '99 entrano nel Consiglio d'Europa. La tensione con la Russia è aumentata a partire dal gennaio '04, quando la cosiddetta "Rivoluzione delle Rose" porta al potere Mikhail Saakasvili, sostenitore dell'ingresso nella Nato e di un rapporto più stretto con gli Usa.
La risposta di Mosca all'attacco georgiano nella Ossezia del Sud nell'agosto '08 ha determinato un raffreddamento dei rapporti tra Usa e Russia, la scelta della Polonia e degli stati baltici di configurarsi ancora più come ultimo baluardo dell'Occidente euro-americano, e prefigurato ripercussioni nel settore energetico. E' la dimostrazione che quanto avviene nella regione caucasica non sia circoscrivibile e debba essere sempre valutato in un quadro internazionale molto ampio.

http://www.ninniradicini.it/articoli/caucaso_russia_georg...

00:29 Publié dans Géopolitique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : histoire, caucase, géorgie, arménie, abkhazie, ossétie, russie | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Pour la constitution d'un nouveau mouvement pacifiste

mechtersheimer.jpg

 

Dr. Alfred MERCHTERSHEIMER:

 

 

Pour la  constitution d’un nouveau mouvement pacifiste !

 

Les leçons à tirer de la Guerre de Géorgie

 

Le Dr. Alfred Mechtersheimer, politologue, ancien Lieutenant-Colonel, ancien député du Bundestag fut l’un des animateurs les plus zélés du mouvement pacifiste allemand dans les années 80. Aujourd’hui, inlassable, il continue à diriger le “Friedenskomitee 2000”, le “Comité 2000 pour la paix”,  après avoir mis sur pied l’ “Institut für Friedenspolitik” à Starnberg.

 

La fraction belliciste à Washington ne veut tout simplement pas admettre que la Guerre froide  ne sera pas suivie de la domination exclusive des Etats-Unis sur la planète. Aujourd’hui cette fraction belliciste mise sur un vétéran de la Guerre du Vietnam, John McCain, et fait tout pour empêcher son rival, Barack Obama, d’accéder à la Maison Blanche. Celui-ci, en effet, pourrait diminuer les dépenses en matière d’armement et se montrer moins belliciste dans un monde perçu comme multipolaire. Voilà pourquoi la fraction belliciste a besoin d’un maximum de confrontations dans le monde pour faire passer son candidat à la présidence.

 

Le rôle du provocateur

 

La guerre contre l’Iran, préparée de longue date avec l’appui israélien, serait une entreprise trop risquée et pourrait renforcer le désir de paix chez l’électeur américain. C’est la raison pour laquelle on a fait jouer le rôle du provocateur à la Géorgie, où l’on avait préalablement installé et armé un régime vassal. La Russie était contrainte de réagir après l’attaque géorgienne contre Tskhinvali en Ossétie du Sud, les 7 et 8  août derniers. Question: la Russie a-t-elle eu une réaction disproportionnée?

 

On ne peut répondre à cette question que si l’on réexamine l’évolution des relations américano-russes de ces vingt dernières années. Les Etats-Unis ont certes été les vainqueurs de la Guerre Froide, mais depuis  cette victoire, ils perdent sans cesse plus d’influence et de puissance sur les plans politique et économique, tandis que la Russie, grâce aux richesses de son sol, vit un boom économique unique. A la place de l’ancienne bipolarité, nous avons un monde multipolaire avec de nouveaux centres économiques et politiques et l’islamisme comme nouvelle force globale. Ces deux éléments de la nouvelle donne continuent sans cesse d’affaiblir les positions américaines. Dans le monde entier, le poids de la politique et de l’économie penche en défaveur des Etats-Unis, comme on le voit en Amérique latine, dans le monde arabo-musulman, en Irak, très récemment au Pakistan et maintenant dans le Caucase.

 

Moscou avait dû subir humiliation sur humiliation

 

Washington ne peut s’affirmer que là où les services américains peuvent envenimer les conflits ethniques ou autres entre Moscou et les Etats issus du démantèlement de l’URSS. Si les Américains réussissent à faire passer les Russes pour des agresseurs, cela les aide sur tous les autres fronts, comme en Europe orientale, où, peu de temps après la guerre de six jours en Géorgie, le gouvernement polonais, à Varsovie, abandonnait ses dernières réticences à l’installation de fusées américaines dans les régions septentrionales de la Pologne.

 

Dans ce jeux de conflits et d’intérêts, Washington a besoin de foyers de désordre pour pouvoir s’affirmer contre la Russie qui est une nouvelle grande puissance montante. Voilà pourquoi l’émergence d’une nouvelle Guerre Froide est de l’ordre du possible,surtout si l’on songe au fait que la première Guerre Froide a laissé derrière elle bon nombre de conflits potentiels. Au lieu de mettre sur pied un système de sécurité couvrant l’Europe tout entière, l’OTAN avance ses pions toujours davantage à proximité de la frontière russe. Tandis que les troupes russes quittaient l’ex-RDA, le territoire allemand devenait de plus en plus une base américaine; il abrite même, aujourd’hui, le commandement US pour l’Afrique!

 

Sous Eltsine, la Russie était un vassal des Etats-Unis et devait accepter humiliation sur humiliation. Poutine a mis rapidement un holà au pillage de ses richesses géologiques.  Aujourd’hui, la situation est telle: les dirigeants russes disposent de réserves colossales de matières premières, voient leurs potentiels politique et militaire se renforcer, avec l’assentiment général du peuple russe; il n’y a donc plus de raison qu’ils acceptent de se laisser traiter comme les vaincus de la Guerre Froide.

 

Le danger d’une nouvelle Guerre Froide est grand car aucun des deux camps n’a tiré les  leçons de la première Guerre Froide. On ne reconnaît pas à temps l’émergence de foyers de  crise, on ne perçoit pas les intérêts économiques communs et, plus dangereux encore, en cas de crise, personne ne cherche à apaiser les conflits, au contraire, on cherche à les envenimer. La France et la Grande-Bretagne veulent des sanctions; Madame la Chancelière Merkel évoque l’adhésion de la Géorgie à l’OTAN, alors qu’elle s’y était opposée auparavant! Berlin n’a aucun projet en matières de politique étrangère et l’UE encore moins! La politique étrangère se réduit à une seule question: va-t-on suivre les Etats-Unis ou non?

 

Le peuple est contre toute Guerre Froide !

 

Ce qui fait peur, c’est la réaction d’une grande part des media. La presse allemande ressort du placard des réflexes anti-russes que l’on croyait depuis longtemps évacués des têtes. L’hebdomadaire “Die Zeit” perçoit à nouveau un “danger russe” et on voit réapparaître sur les écrans de nos télévisions d’anciens bellicistes de la première Guerre Froide comme l’américaniste Josef Joffe. Même le “Spiegel” titre: “Le voisin dangereux”. Contrairement à l’immense majorité du peuple, on le constate, bon nombre de politiciens et de journalistes attendaient impatiemment que les vieux schémas binaires de la première Guerre Froide retrouvent vigueur et virulence. La réaction musclée du Kremlin est sans doute une erreur mais une erreur qui peut s’expliquer par l’histoire: en aucun cas, elle ne prouve une nouvelle politique étrangère agressive.

 

En CONCLUSION: il nous paraît nécessaire de constituer un nouveau mouvement pacifiste en Allemagne et dans toute l’Europe. Car si les peuples ne manifestent pas leur volonté de paix, l’UE suivra les errements de la fraction belliciste de Washington jusqu’à la guerre. Vingt-cinq ans après le blocus de la base américaine de Mutlangen, à laquelle j’avais participé avec Günther Grass et Volker Schlöndorff, le peuple doit à nouveau se dresser pour qu’advienne une Europe de la paix, Russie comprise, et faire de la guerre et de la paix des thèmes à débattre dans toutes les élections décisives.

 

Dr. Alfred MECHTERSHEIMER.

(article tiré de “DNZ”, Munich, n°38/2008, sept. 2008, trad. franç. : Robert Steuckers).

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jeudi, 25 septembre 2008

Georgie, Victima de los Cantos de Sirena de Occidente

Georgia, Víctima de los Cantos de Sirena de Occidente

Por José Luis Orella

www.diarioya.es

Los georgianos son uno de los pueblos más antiguos del Cáucaso, uno de cuyos reinos fue la primitiva Iberia, de la cual hay teorías que harían descender de esta vétera región a los primitivos iberos, nuestros ancestros, cuyo residuo lingüístico actual sería el vasco. Los georgianos son un pueblo que ha tenido que saber defenderse por su situación fronteriza, frente a los mongoles en el siglo XIII, y en el XVI frente a los persas y los turcos otomanos. Pero su situación limítrofe con el Imperio Otomano ofrecía una clara situación de peligro ante una expansión turca. Los georgianos, como pueblo cristiano ortodoxo, pidieron la protección del Imperio Ruso, que sería materializado bajo el reinado de Pablo I. En 1801 era proclamada la anexión de la pequeña Georgia al imperio ruso. Durante el resto del siglo XIX, las avanzadillas rusas fueron anexionando territorios en el Cáucaso frente a persas y turcos. Fue en esos momentos cuando la Georgia rusa fue ampliada hasta la costa del Mar Negro, asumiendo pueblos no georgianos.

La caída del Imperio y la posterior revolución rusa proporcionaron la oportunidad de la independencia de Georgia en 1918. Sin embargo, cuando los bolcheviques ganaron la guerra civil rusa, Georgia fue junto a Ucrania y el Asia central, nuevamente anexionada a la naciente URSS. En 1936 nacía la república soviética de Georgia, y tuvo que sufrir la misma represión que el resto de los pueblos de Rusia, bajo la dura dictadura de Josif Vissarionovic Dzhugashvili “Stalin”, el georgiano más conocido de la historia, y uno de sus mayores asesinos. Entre los directores del temido KGB estaría otro tristemente célebre georgiano, Lavrenti Beria. No obstante, Stalin se comportó como un ruso, aceptando la rusificación del extenso imperio comunista como la única posibilidad de dar cierta uniformidad, favoreciendo a la nacionalidad mayoritaria.


¿Por qué nadie condena el comunismo asesino?


Cuando Mijail Gorbachov desarrolló la Perestroika, que traería como consecuencia el fin del comunismo, otro hijo de Georgia se transformaría en la imagen exterior de la nueva URSS, Eduard Shevardnadze. Pero cuando la URSS se disolvió, Georgia recuperó la independencia perdida en 1991. La borrachera nacionalista siguiente causó la subida al poder del mingreliano Zviad Gamsajurdia, un exaltado nacionalista que evocaba con su populismo la occidentalidad de la personalidad georgiana. Una isla cristiana rodeada de pueblos islámicos de las montañas, financiados por los restos comunistas del KGB. La debilidad de las instituciones georgianas favoreció las ambiciones de otros caudillos nacionalistas, que con la colaboración de sus milicias armadas, derrocaron al presidente y se inició una guerra civil que duró hasta 1995. Ese año, Eduard Shevardnadze, como única figura internacional respetable, volvió a su país para hacerse cargo de la presidencia.


 


Pero la situación estaba gangrenada desde antiguo. Durante la Segunda Guerra Mundial, algunos pueblos montañeses habían sido deportados por orden de Stalin por desconfianza a una posible colaboración con los alemanes. En 1943, la ofensiva del Cáucaso proporcionó la mitad norte de la península a las fuerzas germano-rumanas de Von Manstein. El hueco dejado por aquellos fue colonizado por georgianos desplazados. Las luchas que se iniciaron en 1992 proporcionaron el momento propicio a los minoritarios abjacios (musulmanes de la costa) y osetios del sur (cristianos, los antiguos alanos) para tomar el control de sus respectivas regiones. Las expulsiones de las comunidades alógenas recordaron las escenas terribles de los Balcanes después de la Primera Guerra Mundial.

La situación caótica pareció resolverse en el 2003, cuando Mijail Saakashvili protagonizó la "revolución de las rosas", una de las primeras revoluciones prooccidentales que debía proporcionar una administración favorable a un alineamiento pronorteamericano en defensa y economía. El derrocamiento de Shevardnadze fue aplaudido por las democracias occidentales, y los nuevos aurigas de Georgia resaltaron un discurso nacionalista-populista que debía restablecer el control de las regiones rebeldes. El nuevo gobierno ha contado con asesores turcos y norteamericanos, ha comprado material israelí, y junto a Ucrania, son los dos países de la ex URSS que más hacen por acelerar el proceso de su integración en la OTAN. Sin embargo, esta evolución de los hechos ha ido de forma paralela con la recuperación internacional de Rusia, de manos de Vladimir Putin.


 


El presidente georgiano ha gozado de una inmensa popularidad, pero su país se encuentra hundido económicamente, la inestabilidad política es constante y un futuro trágico como el del primer estadista georgiano Gamsajurdia, puede ser posible, teniendo en cuenta que el propio presidente actual subió mediante un golpe de fuerza. Por estas razones, a inicios de agosto de este año, emprendía una fuerte ofensiva contra los osetios del sur, causando una masacre de civiles, ante la esperanza de que los rusos no intervinieran por su proximidad con los Estados Unidos.

No obstante, desde el proceso de independencia de Kosovo, el ejemplo estaba servido a favor de unas regiones rebeldes que habían tomado la precaución de obtener la nacionalidad rusa de forma masiva. El ejército ruso no tuvo más que emprender una rápida ofensiva para aplastar a las masas de milicianos inexpertos georgianos, liberar las dos regiones rebeldes y destruir las instalaciones militares y energéticas del país. El reconocimiento de la independencia de Abjasia y Osetia del Sur, que puede incluso terminar con su anexión, pedida de manera mayoritaria por sus habitantes, permite a Rusia recuperar su posición estratégica en el Mar Negro, gracias al control del puerto de Sujumi. La inhabilitación económica de Georgia hace peligrar el traslado del petróleo azerí a través de su geografía. Por otro lado, es un serio aviso a Ucrania, en su evolución occidental hacia su integración en la Unión Europea y la OTAN. Rusia vuelve a reivindicar su posición de potencia regional, y no va a permitir que la OTAN, carente de finalidad después del fin de la guerra fría, aglutine a los vecinos próximos en un anillo mortal contra la nueva Rusia democrática.

 

Vladimir Putin
Eduard Shevardnadze

mardi, 23 septembre 2008

Paroles d'Edouard Kokoïty

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Parole d’Edouard Kokoïty, Président d’Ossétie du Sud:

 

“Vous, les Européens, vous parlez tous de la petite Géorgie mais mon  pays est encore plus  petit et vous l’oubliez. C’est ça, défendre les droits de l’homme?”

 

Cité dans “Paris-Match”, 4-10 sept. 2008.

 

A signaler également, dans cette édition de “Paris-Match”, les propos d’Hubert Védrine sur les relations euro-russes et euro-américaines: la position de Bush n’est pas tenable et Saakachvili est un “excité”. La diplomatie de la “Vieille Europe” se rébiffe.

dimanche, 14 septembre 2008

Derrière le prétendu impérialisme russe: le pétrole qui sent l'impérialisme américain

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Derrière le prétendu impérialisme russe :

le pétrole qui sent l’impérialisme américain

Comme aux plus belles heures de la guerre du Kosovo, les médias « occidentaux » (c’est-à-dire ceux des pays inféodés à l’Oncle Sam) balancent des images en pagaille aux yeux des spectateurs (des images présentées comme celles de la guerre en Géorgie pourraient venir du Liban que personne ne s’en rendrait compte…), avec la traditionnelle répartition des rôles (Russie = puissance impérialiste cruelle, Géorgie = victime innocente et Etats-Unis/ « Communauté internationale » = grands frères protecteurs) et la scène peut être montée : avec la France dans le rôle pathétique des porteurs de riz et les Etats-Unis dans celui de l’acteur que l’on prend au sérieux, parce qu’il a les moyens de ses ambitions (contrairement au coq tricolore qui a renoncé à toute « ambition »). Il est particulièrement risible d’entendre parler « d’impérialisme » à propos de la Russie alors que la Géorgie (qui souhaite adhérer à l’OTAN) est depuis des années le chien fidèle, pour ne pas dire une colonie, des Etats-Unis (ce qui démontre que l’impérialisme n’est pas tant du côté russe qu’américain). Par ailleurs, le président Bush n’a pas craint le ridicule en appelant au respect le plus solennel de « l’intégrité territoriale » de la Géorgie ; on notera toutefois que le vol du Kosovo et le charcutage de « l’intégrité territoriale » de la Serbie n’ont pas particulièrement troublé le sommeil de la diplomatie US ces derniers mois… Joies et délices de l’hypocrisie américaine.

Derrière les pleurnicheries du président géorgien Mikheïl Saakachvili qui veut faire passer son pays pour la victime d’un nettoyage ethnique façon Darfour (il y a des « nettoyages ethniques » dans tous les conflits de nos jours, c’est merveilleux !) et la promptitude du bon samaritain américain à voler au secours de la Géorgie, il y a la réalité froide et incontournable des intérêts pétroliers américains et de leurs vassaux : en effet la Géorgie est l’intermédiaire entre l’axe atlantique (Etats-Unis/Europe de l’ouest) et les hydrocarbures d’Azerbaïdjan, situation bien pratique qui permet de contourner la Russie pour s’approvisionner en pétrole et ainsi accroître la tutelle américaine sur le continent européen grâce au pion géorgien… D’où l’inquiétude des Américains et de leurs alliés. De l’Irak à la Géorgie : rien de nouveau sous le soleil !

Enfin, dans cette affaire où les peuples des deux côtés de l’Atlantique sont pris pour des imbéciles par leurs élites médiatico-politiques, on remarquera cette propension bien journalistique à parler avec emphase de « communauté internationale » comme pour justifier les ingérences insupportables des élites américaines : la « communauté internationale » intervient ici, la « communauté internationale » fait cela… Et on oublie que derrière cette expression en trompe-l’œil (notion floue, sans aucun fondement juridique) se trouve l’œil de Washington puisque les Etats-Unis ont un poids considérable dans les décisions de l’OTAN (organisation politico-militaire héritée de la guerre froide et alliant les Etats-Unis et l’Europe occidentale pour la défense de cette dernière contre l’URSS). Chose qu’avait compris De Gaulle en retirant la France de sa structure militaire intégrée et de sa direction en 1966, se méfiant des arrières pensées du « grand frère américain ». Leçon oubliée par Nicolas Sarkozy qui annonce en 2008 le retour de l’hexagone dans le commandement intégré de l’OTAN. Attention donc aux termes tarte à la crème tels que « la communauté internationale » qui sous-entend de manière sournoise que la décision prise, parce qu’elle est « internationale », l’a été à l’unanimité ou est le résultat d’un consensus, alors que la plupart du temps ce sont les Etats-Unis qui ont le dernier mot (fait admis de tous).

La réémergence de la Russie sur la scène mondiale, débarrassée des scories du communisme, ardent défenseur du Kosovo serbe, impitoyable envers le terrorisme islamique et décidée à en finir avec la pax americana, devrait plutôt exciter la curiosité et la sympathie des Européens au lieu de se laisser bêtement prendre au piège de l’épouvantail soviétique agité par les Etats-Unis. L’âme de l’Europe, si elle est encore bien vivante, est très forte dans cette Russie orthodoxe fière de ses racines et de son identité.

La construction européenne, pour être crédible, ne peut pas se faire sans la Russie : revenir à la situation de la Guerre froide, avec un bloc américain à l’ouest et une Europe occidentale qui lui est totalement soumise (la seule différence aujourd’hui est que la sphère d’influence américaine s’étend jusqu’aux pays de l’est inclus), et un bloc russe d’autre part, serait, plus qu’un retour en arrière en forme de pied de nez historique, un insupportable gâchis ! Ne ratons pas cette occasion historique.

Julien Langella

 

jeudi, 04 septembre 2008

V.Dachitchev : les Etats-Unis veulent la guerre

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Géorgie: les Etats-Unis veulent la guerre

Entretien avec le Professeur Viatcheslav Dachitchev, ancien conseiller de Gorbatchev

 

Q.: Professeur Dachitchev, avez-vous été étonné de l’escalade en Géorgie?

 

VD: Non, à plusieurs reprises j’avais prévu qu’une guerre allait survenir dans la région. Depuis que Mikhail Saakachvili a pris le pouvoir en Géorgie, ce pays est devenu un satellite des Etats-Unis. Les dirigeants américains veulent la guerre dans le Caucase. Le but est d’abord de chasser la Russie du Caucase et des rives de la Mer Noire, ensuite d’y attiser un foyer de conflictualité permanente et de l’exporter en Asie centrale.

 

Q.: Cette guerre aurait-elle pu être évitée?

 

VD: Probablement. Les dirigeants russes auraient du reconnaître l’Abkhazie et l’Ossétie du Sud comme des Etats pleinement indépendants et forger avec eux une alliance défensive. Cela ne s’est pas passé: j’estime que c’est une grave erreur.

 

Q.: Exactement comme l’Occident a reconnu  le Kosovo...

VD: Bien entendu.

 

Q.: Pourquoi cela ne s’est-il pas passé?

 

VD: Parce que jusqu’ici le Kremlin avait parié pour une politique d’apaisement face à Washinton, même si l’OTAN se rapprochait toujours davantage du territoire russe. S’il n’avait fallu tenir compte que de la volonté américaine, la Géorgie aurait été depuis  longtemps membre de l’OTAN. Cette politique américaine d’agression pourrait mener à une guerre mondiale.

 

Q.: Comment?

 

VD: Il y a cinq ans déjà, j’évoquais une crise de pré-belligérance, dans laquelle nous nous trouvons toujours. Tous les paramètres le confirment. La comparaison avec les situations qui règnaient avant les première et deuxième guerres mondiales est possible. Jusqu’à présent, Washington a parié pour l’ “approche indirecte” (“indirect approach”), telle que l’avait décrite l’historien militaire Basil Liddell Hart. Le but était d’affaiblir la Russie de manière si décisive qu’on aurait pu la dominer de l’intérieur et l’éliminer en tant que contrepoids militaire et politique des Etats-Unis. Cette stratégie de l’approche indirecte peut cependant déboucher rapidement sur une “guerre chaude”, comme viennent de le démontrer les événements de Géorgie. Les Etats-Unis ne se contentent pas de susciter des conflits dans le Caucase: ils le font aussi au Proche Orient, en Iran, en Pologne et en Lituanie et surtout, ce qui est le pire aux yeux des Russes, en Ukraine.

 

Q.: Quelle sera l’issue du conflit russo-géorgien?

 

VD: Saakachvili a fort mal calculé son coup. Depuis longtemps, on prêche la haine de la Russie en Géorgie et l’on y développe une progagande virulente et hostile à notre pays. Mais les Ossètes du Sud se réclament de la Russie et la plupart d’entre eux possède la citoyenneté russe. Les Abkhazes sont musulmans mais se réclament, eux aussi, de la Russie. Poutine ne peut plus se retirer de ces régions, sans perdre la face.

 

Q.: Une guerre contre l’Iran est-elle encore à l’ordre du jour?

 

VD: Oui. L’opinion publique est préparée de manière optimale pour accepter une attaque contre l’Iran. Depuis deux ans, la menace est militairement bien présente dans la région. Le monde commence à se lasser de cette question iranienne: c’est quand  cette lassitude aura atteint un point “x” que l’attaque surviendra, soudainement.

 

Q.: Pourriez-vous nous dire dans quelle mesure vous avez apprécié Alexandre Soljénitsyne, le Prix Nobel de littérature, récemment décédé?

VD: Soljénitsyne a critiqué le système stalinien de manière virulente et, simultanément, il  s’est avéré un grand patriote. C’est pour cette raison qu’il n’a pas pu rester aux Etats-Unis. Il s’opposait à fond à la politique hégémonique poursuivie par les Etats-Unis et ne cessait de souligner la spécificité des peuples. Lorsqu’Eltsine a voulu lui  octroyer la plus haute distinction russe, l’Ordre de Saint-André, il a refusé de l’accepter, car c’était Eltsine qui avait ruiné le pays.

 

Q.: Estimez-vous fondé le reproche d’antisémitisme que l’on adresse à Soljénitsyne, pour ses deux ouvrages “Les juifs en Union Soviétique” et “Deux siècles ensemble” (trois tomes qui relatent les rapports entre Russes et Juifs au cours de l’histoire récente de la Russie)?

 

VD: J’ai lu ces ouvrages et je les tiens pour équilibrés et pondérés. Si l’étude des faits révèle un rôle négatif des juifs dans la révolution de février ou dans la révolution d’octobre, cela ne signifie nullement que leur simple évocation relève de l’antisémitisme.

 

Q.: Vous étiez officier dans l’Armée Rouge en 1945, tout comme Soljénitsyne. Avez-vous lu les rapports qu’il a écrits, à l’époque, sur l’entrée de cette Armée Rouge en Prusse orientale?

 

VD: Oui. Mais à la différence de Soljénitsyne et de Lev Kopelev, que j’ai personnellement bien connu, mon unité n’a pas été engagée en Prusse orientale, mais en Slovaquie.

 

(entretien paru dans DNZ, Munich, n°34/2008 – août 2008 – trad. franç.: Robert Steuckers).

lundi, 01 septembre 2008

Guerre du Caucase: chronologie des événements

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Soldats géorgiens en manoeuvre

 

Andreï ARECHEV:

Guerre du Caucase: chronologie des événements

 

Dans la chronologie des événements, qui ont précédé l’agression géorgienne contre l’Ossétie du Sud, il y a un aspect qui mérite tout particulièrement notre attention: le 31 juillet s’étaient clôturées des manoeuvres communes, regroupant unités géorgiennes et unités américaines, que l’on avait baptisées “Immediate Response 2008”; au cours de ces exercices, les instructeurs américains avaient entraîné les forces armées géorgiennes à parachever des “opérations de nettoyage” contre des terroristes embusqués en zones résidentielles. Les exercices comprenaient des actions comme nettoyer un village des terroristes qui s’y dissimulaient, probablement en vue des engagements futurs des soldats géorgiens en Irak, et de mettre en lieu sûr les populations civiles; Les atrocités commises par les forces géorgiennes à Tskhinvali sont donc le résultat de l’entraînement qu’elles ont reçues de leurs instructeurs occidentaux sous la couverture cynique de “lutte contre le terrorisme”. Les véritables objectifs sont bien entendu complètement différents. L’ancien ministre géorgien des affaires étrangères, Salome Zurabishvili, qui est indubitablement une personnalité bien informée, a déclaré que la présence des Etats-Unis en Géorgie impliquait le déploiement d’une vaste gamme d’activités, parmi lesquelles l’instruction des forces armées et le contrôle du corridor de grande importance stratégique qui passe par le Caucase, où est notamment installé le tracé de l’oléoduc Bakou-Tbilisi-Ceyhan. Selon Zurabishvili, c’est là l’objectif principal du conflit actuel, qui oppose la Géorgie à la Russie et renforce simultanément la loyauté qu’éprouvent désormais les Géorgiens à l’égard des Etats-Unis et de la Grande-Bretagne, ce qui permet à ces deux dernières puissances de contrôler la Géorgie et, par voie de conséquence, l’ensemble du versant méridional du Caucase.

 

Il faut également noter que l’intensification du conflit caucasien, aux confins méridionaux de la Russie, a coïncidé avec les tensions qui ont agité la région autonome chinoise du Xinjiang, où, alors que commençaient les Jeux Olympiques, une attaque terroriste a été commise. Quelques jours auparavant, à Bishkek, la capitale du Kirghizistan, on avait découvert un dépôt illégal d’armes, près duquel résidaient une dizaine de militaires américains et plusieurs diplomates de l’ambassade des Etats-Unis dans ce pays  d’Asie centrale. L’agression de la Géorgie contre l’Ossétie du Sud est un acte de guerre, dans une guerre qui se déroulera dans l’intérêt de tierces puissances et où les Géorgiens sont destinés à jouer le rôle de chair à canon. Si l’agression contre cette petite région caucasienne ne trouve pas rapidement bonne fin, d’autres conflits régionaux seront inévitables et prendront à coup sûr une ampleur bien plus dramatique.

 

Andreï ARECHEV.

(extrait d’un article paru dans “Rinascita”, Rome, 12  août 2008; trad. franç.: Robert Steuckers).

samedi, 23 août 2008

Géorgie: les racines du conflit

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Günther DESCHNER:

Géorgie: les racines du conflit

 

C’est dans une constellation “triangulaire” de tensions, entre Tiflis (Tbilisi), Washington et Moscou qu’il faut aller rechercher les déclencheurs de la “Guerre d’août” dans le Caucase, guerre qu’a ordonnée le président Mikhail Saakachvili pour ramener de force dans l’ordre étatique de la Géorgie la “République d’Ossétie du Sud” qui avait fait sécession et n’avait pas été reconnue en tant que telle par l’ordre politique international. Cette action a donné à la Russie le prétexte d’une intervention militaire de grande ampleur. Finalement, les raisons profondes de cette “Guerre d’août” résident dans la lutte géostratégique que mènent les Etats-Unis et d’autres puissances pour contrôler les ressources pétrolières et gazières des régions caucasienne et caspienne.

 

Mais ce conflit a d’autres racines et il faut remonter loin dans le passé pour les découvrir et les comprendre. Au 18ième siècle, l’Empire des Tsars, en pleine expansion, absorbe, dans le Caucase du Sud les territoires habités par les Abkhazes, les Géorgiens et les Ossètes, qui deviennent une province russe. En Ossétie, plus exactement sur le territoire actuel de l’Ossétie du Nord/Alanie, qui appartient à la Fédération de Russie, la “Commission du Caucase” fit construire une forteresse en 1784, qui deviendra la capitale de la région, en portant le nom significatif de “Vladikavkaz” (= “Qui domine le Caucase”).

 

Après la chute des tsars et la révolution d’Octobre qui s’ensuivit, on vit d’abord se constituer dans la région une “République Fédérative et Démocratique de Transcaucasie”, qui s’est rapidement disloquée. Finalement, à côté d’une nouvelle Arménie et d’un nouvel Azerbaïdjan, une “République Démocratique de Géorgie” proclame son indépendance en 1918. Le Reich allemand contribua directement à l’émergence de cette république géorgienne, notamment par l’action du général bavarois Kress von Kressenstein, qui appartenait à l’encadrement allemand de l’armée ottomane, alors alliée de Berlin. Les Géorgiens espéraient à l’époque que les Allemands l’emporteraient sur les Russes, victoire qui leur garantirait l’indépendance. Ce fut partiellement le cas. Les objectifs allemands en Géorgie étaient de lier le pays à l’Allemagne par le truchement de traités économiques et de conventions militaires.

 

Ces plans allemands ne pouvaient se réaliser que si la Géorgie accédait à la pleine indépendance; dès lors, on assista à une convergence des intérêts allemands et géorgiens dans la région. En avril 1918, Berlin s’immisca directement dans les événements. L’Allemagne et la Géorgie signent un accord, où les parties reconnaissent les frontirèes de la Géorgie; pour sa part, l’Allemagne promet de jouer un rôle d’intermédiaire entre la Géorgie, la nouvelle Russie et l’Empire ottoman. Pour appuyer l’indépendance de la Géorgie, l’Allemagne envoie trois mille soldats. L’Allemagne a ainsi parrainé l’indépendance géorgienne qui n’a duré que jusqu’en 1921. Les bonnes relations germano-géorgiennes, qui persistent encore, sont dues partiellement à ce souvenir historique.

 

Suite aux vicissitudes de la guerre civile russe, entre Blancs et Rouges, la Géorgie glisse, elle aussi, sous l’autorité des Bolcheviks; elle est conquise, toutefois après que les Abkhazes et les Ossètes aient proclamé leurs propres républiques soviétiques. Au départ, ces deux républiques ont constitué des “oblast” autonomes de la grande “République Soviétique de Transcaucasie”, à laquelle appartenait aussi la Géorgie. En 1936, Joseph Staline dissout cette république transcaucasienne.

 

C’est justement lui, un Géorgien, qui a tracé arbitrairement les frontières des républiques soviétiques. La nouvelle “République Socialiste Soviétique de Géorgie”, selon la volonté de Staline, reprenait à son compte les territoires inclus dans cette Géorgie qui s’était proclamée indépendante en 1918; l’Abkhazie et l’Ossétie du Sud devinrent dès lors parties intégrantes de la RSS de Géorgie, mais jouissaient d’une très large autonomie.

 

Par ce processus, les Ossètes furent partagés en deux entités, l’une au Nord du Caucase, l’autre au Sud. Les uns appartenaient désormais à la République Socialiste Soviétique Fédérative de Russie, tandis que les autres se retrouvaient au sein de la nouvelle RSS de Géorgie, ce qui, à l’époque, n’avait guère d’importance pour la vie quotidienne du peuple ossète. Les choses ont changé lorsque la Géorgie, dans les années 90 du 20ième siècle, a retrouvé une nouvelle fois son indépendance, au moment de l’effondrement de l’URSS. Dès ce moment, les Ossètes ont été véritablement séparés les uns des autres, car la frontière, internationalement reconnue, passait alors au beau milieu de leur territoire.

 

Dans l’ivresse de leur indépendance retrouvée, les Géorgiens ne se sont pas rendus compte que d’autres peuples vivaient sur le territoire de leur république et aspiraient à une autonomie politique dans les limites de leur propre espace vital. L’un des premiers chefs d’Etat de la nouvelle Géorgie, l’ancien ministre soviétique des affaires étrangères, Edouard Chevarnadzé, comprenait les aspirations abkhazes et ossètes, s’était montré conciliant face aux frictions et aux tensions inter-ethniques, tandis que son successeur Saakachvili, lui, se pose comme un “dur”, un “hardliner”.

 

L’Occident, sur lequel Saakachvili a tant parié, n’a cessé de cultiver les ambigüités et n’a rien fait pour améliorer la situation, bien au contraire, il a tout fait pour envenimer les choses. L’Occident proclame qu’il est pour l’ “intégrité territoriale” de la Géorgie, mais ne souffle mot quant à la façon dont le gouvernement géorgien s’y prend pour maintenir cette “intégrité territoriale”. La Géorgie, ex-république de l’Union Soviétique, s’est proclamée indépendante lors de l’effondrement de l’URSS, ce qui entre parfaitement dans le cadre du droit des gens.

 

Les républiques autonomes d’Abkhazie et d’Ossétie du Sud, du coup, n’ont plus eu la possibilité de se déclarer indépendantes de la Géorgie selon le droit international. Nous sommes là face à une contradiction non résolue. Qui a débouché, en 1992, sur une guerre de sécession sanglante, qui a duré un an. Crimes de guerre, massacres et expulsions furent à l’ordre du jour; des milliers de Géorgiens, d’Abkhazes et d’Ossètes ont été chassés de leurs lieux de résidence. En 1992, un armistice est signé avec l’Ossétie du Sud et, deux ans plus tard, avec l’Abkhazie, armistice qui prévoit que des troupes des Etats de la CEI y maintiendront la paix et y feront taire les armes. En Abkhazie, la Russie a envoyé 3000 militaires, qui ont quasiment constitué le seul contingent de “soldats de la paix” jusqu’à ce qu’éclate la “Guerre d’août”.

 

De facto, l’Abkhazie et l’Ossétie du Sud sont des républiques agissant en toute autonomie même si elles ne sont pas reconnues sur le plan international et continuent d’appartenir à la Géorgie selon le droit des gens. Le conflit persistant entre la Russie et la Géorgie a poussé petit à petit les deux républiques dans les bras de la Russie. Quand la Géorgie a décrété, par sottise, un embargo économique général contre les deux républiques, la Russie a eu beau jeu de placer les deux régions sous sa propre tutelle économique. Les deux républiques se posent certes comme “indépendantes” mais elles ne le sont pas car leur survie sur les plans économique, politique et militaire dépend directement de leur grand voisin russe, avec lequel elles aimeraient d’ailleurs fusionner. Mais sans l’accord de la Géorgie, cet “Anschluss” est tout aussi impossible sur le plan du droit des gens que leur déclaration unilatérale d’indépendance. La plupart des habitants des deux régions sécessionnistes ont d’ailleurs déjà reçu des passeports russes. Quant au président sud-ossète Edouard Kokoity, il souhaite que se constitue une Ossétie unie.

 

Les parallèles et les différences entre ce conflit et celui du Kossovo sont étonnants. Dans les deux cas, nous avons affaire à des régions autonomes, où l’Etat titulaire réclame le droit d’exercer sa souveraineté, en se basant sur une interprétation stricte du droit des gens, tandis que ce sont des soldats de la paix venus d’autres pays qui y assurent la sécurité. Quand l’Occident a reconnu le Kosovo, à l’évidence, la Russie allait, dans l’avenir proche, soutenir l’indépendantisme abkhaze et sud-ossète, surtout si cela nuisait à la Géorgie et présentait un intérêt dans l’opposition géostratégique générale entre Washington et Moscou.

 

Dans cette logique, en avril 2008, deux mois après la reconnaissance du Kosovo, Vladimir Poutine, qui était encore le président russe à l’époque, ordonne de “soutenir substantiellement” l’Abkhazie et l’Ossétie du Sud, tandis que la Douma préconisait de reconnaître les deux républiques. Depuis lors, les autorités russes ont reconnu tous les documents émis par ces deux républiques et permis l’établissement de relations consulaires. La Russie a donc reconnu de facto les deux républiques sécessionnistes, ce que la Géorgie interprète comme une annexion déguisée. C’est cela qui a donné le prétexte à Saakachvili de se lancer dans cette aventure militaire, dont l’issue conduira à l’émergence de réalités nouvelles dans la région.

 

Günther DESCHNER.

(artcle tiré de “Junge Freiheit”, Berlin, n°34/2008, trad. franç.: Robert Steuckers).

jeudi, 21 août 2008

Guerre du Caucase: entretien avec A. Rahr

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Guerre du Caucase: entretien avec Alexander Rahr

Propos recueillis par Moritz Schwarz

 

Alexander Rahr est le directeur du programme “Russie/Eurasie” auprès de la “Société allemande de politique étrangère” (Deutsche Gesellschaft für Auswärtige Politik) à Berlin. Il est un spécialiste de réputation internationale pour toutes les questions eurasiennes.

 

Q.:  Monsieur Rahr, à quoi pensait, dans le fond, le Président Saakachvili en poussant ses troupes à entrer en Ossétie du Sud

 

AR: Votre question est pertinente. Car lundi, après seulement deux jours de guerre, il a capitulé. Toute l’opération s’est révélée un parfait désastre, comme c’était à prévoir. Saakachvili a tout raté, sur toute la ligne.

 

Q.: Manifestement, Saakachvili n’a pas cru à une intervention russe. Etait-ce une position réaliste?

 

AR:  Non. Ou bien cet homme est totalement stupide ou bien il a été inspiré par des dilettantes. Voici les faits: la Géorgie veut devenir membre de l’OTAN le plus vite possible. Bush a déjà promis l’adhésion à Saakachvili, mais, si Obama devient président, cet objectif sera bien plus difficile à atteindre. La condition posée pour une adhésion rapide, c’est qu’il n’y ait plus de conflits inter-ethniques, car l’Aliance atlantique cherche à les éviter. Saakachvili a voulu régler le problème par une politique à la hussarde. Manifestement, il est parti du principe que l’intervention russe serait moins totale, plus ponctuelle; il pensait gagner du temps pour entraîner les Etats-Unis dans le conflit.

 

Q.: Là, il a pratiquement réussi son coup...

 

AR: A peine. Les réactions agressives de Bush démontrent plutôt son désarroi. Toutes les ONG, téléguidées par les Etats-Unis, qui ont tenté, au cours de ces dernières années, de mettre sur pied, avec la Géorgie, une “Alliance de la Mer Noire” alignée sur l’atlantisme et dont les objectifs auraient été d’éloigner au maximum les Russes de la région maritime pontique, sont désormais devant des ruines, leurs efforts n’ayant conduit à rien.

 

Q.: Dans les sphères de l’UE, beaucoup rêvaient aussi de faire de la Mer Noire une nouvelle mer intérieure européenne...

 

AR: Tous ces rêves se sont évanouis, ce qui rend un tas de gens furieux. En ce qui concerne la Géorgie, les Etats-Unis sont allés beaucoup trop loin au cours de ces dernières années. Maintenant, ils ne peuvent plus laisser leurs alliés dans le pétrin. Mais, par ailleurs, ils sont suffisamment intelligents pour ne pas se laisser entraîner. Les Etats-Unis ont besoin de la Russie en plusieurs domaines: dans le dossier de la non prolifération des armes non conventionnelles, dans la lutte contre le terrorisme, dans la stratégie de l’endiguement de l’Iran et de la Chine, etc. Toutes ces questions sont bien plus importantes que les humeurs de Saakachvili. Malgré toute la colère et toute la déception qui affectent les cercles stratégistes de Washington, personne aux Etats-Unis n’est prêt à déclencher une troisième guerre mondiale pour lui. En outre, bon nombre de responsables à Washington doivent être furieux contre Saakachvili car il a mis les Etats-Unis dans une posture fort embarrassante.

 

Q.: Comment, à votre avis, s’achèvera le conflit?

 

AR: Les Géorgiens ne parviendront sans doute plus jamais à recomposer leur pays. Le conflit va geler vraisemblablement. Pour Moscou, ce serait là la meilleure solution. Ainsi, le rôle de la Russie en tant que puissance génératrice d’ordre demeurera tel, à l’arrière-plan.

 

Q.: Saakachvili survivra-t-il à cette défaite, en politique intérieure géorgienne?

 

AR: Il s’est probablement posé la question lui-même. Car, à l’avance, il ne pouvait pas sortir gagnant de cette opération, qui a coûté inutilement la vie à une grande quantité de soldats géorgiens.

 

Q.: Les Russes se frottent-ils les mains parce qu’ils ont eu l’occasion de faire une démonstration de force ou se sentent-ils blessés dans leur propre sphère d’intérêt?

 

AR: Les cris de triomphe se font entendre partout en Russie, c’est évident, car on attendait cette heure depuis de longues années: dans les années 90, les Russes devaient constater, sans pouvoir agir, comment l’Occident réorganisait à sa guise les Balkans; maintenant, ils peuvent montrer dans le Caucase que l’Occident est désormais à son tour dans le rôle du spectateur impuissant, tandis que la Russie agit. Il y a trois ans, la Russie avait obtenu que les bases militaires américaines quittent l’Asie centrale; maintenant, les Russes ont remis les Américains à leur place dans le Caucase. Il est possible que l’Allemagne récupère bientôt son rôle d’intermédiaire. Berlin a de bonnes relations avec la Russie et peut influencer plus profondément le nouveau président russe Medvedev que n’importe quel autre Etat de l’UE.

 

(entretien paru dans “Junge Freiheit”, Berlin, n°34/2008;  trad. franç.: Robert Steuckers).

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Géorgie: les intérêts américains et russes se télescopent dans le Caucase

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Günther DESCHNER:

Géorgie: les intérêts américains et russes se télescopent dans le Caucase

A peine les premiers obus de la “Guerre d’août” dans le Caucase avaient-ils explosé que Mamouka Kourachvili expliquait ce qui se passait, en termes passablement nébuleux: l’armée géorgienne aurait ainsi lancé une grande offensive “pour rétablir l’ordre constitutionnel dans la province séparatiste d’Ossétie du Sud”. Le président géorgien Mikhail Saakachvili n’a ni rappelé son général à l’ordre ni démenti ses dires.

 

Le conflit pour l’avenir de l’Abkhazie et de l’Ossétie du Sud n’avait cessé de s’amplifier au cours de ces dernières années, entre la Géorgie, tournée vers l’atlantisme, et la Russie. Les deux camps utilisant des cartes truquées. Depuis des mois, on sentait venir la guerre. La portée de ce conflit nous amène bien loin du Caucase. En effet, les deux républiques, qui entendent faire sécession et se séparer de la Géorgie, sont de sérieuses pommes de discorde entre les Etats-Unis et la Russie, constituent quasiment des points de rupture.

 

Depuis la fin de l’Union Soviétique et depuis que les statégistes américains avaient défini le Caucase du Sud comme appartenant à la sphère d’influence américaine, Washington avait élu la Géorgie comme son partenaire privilégié dans la région. La raison réelle de ce choix réside toute entière dans le conflit géostratégique dont les enjeux sont 1) l’accès au gaz et au pétrole de la région de la Mer Caspienne et 2) le contrôle des grands oléoducs et gazoducs. L’enjeu principal est surtout constitué par la ligne d’oléoducs BTC, longue de 1800 km, qui part de Bakou en Azerbaïdjan, pour passer par Tiflis (Tbilisi) en Géorgie et aboutir à Ceyhan en Turquie, sur la côte méditerranéenne. Washington privilégie cette voie pour faire venir le pétrole de la Caspienne à l’Ouest, car elle ne passe ni par la Russie ni par l’Iran, ce qui empêche ipso facto ces deux puissances d’intervenir sur le tracé des oléoducs et gazoducs. C’est là qu’il faut trouver la raison majeure de l’appui apporté par les Etats-Unis, depuis tant d’années, à Mikhail Saakachvili, lequel vise à aligner totalement son pays sur la politique américaine. Il veut à tout prix que la Géorgie fasse partie de l’OTAN; pour y parvenir, il a fait du contingent géorgien le troisième contingent en importance numérique en Irak dans la fameuse “coalition des bonnes volontés” de Bush.

 

L’objectif de Moscou est de déstabiliser la Géorgie et d’y installer un gouvernement qui tienne davantage compte des intérêts de son grand voisin russe. C’est clair comme de l’eau de roche. C’est la tradition de grande puissance que la Russie a réactivée depuis Poutine, ce qui a pour conséquence que Moscou s’efforce de déconstruire toutes les positions atlantistes qui se sont incrustées sur les flancs de l’ancien empire russe et/ou soviétique. Dans le cas de la Géorgie, la Russie dispose d’un bon instrument en soutenant les mouvements sécessionnistes en Abkhazie et en Ossétie du Sud.

 

L’offensive déclenchée par Saakchvili contre les Ossètes du Sud relève donc de la naïveté et de la stupidité politique. Il offrait ainsi au Kremlin un prétexte en or pour une intervention militaire musclée. Le bellâtre de la “révolutions des roses” y perdra sans nul doute ses fonctions et les deux provinces sécessionnistes risquent bel et bien d’être définitivement perdues pour la Géorgie. Près de vingt ans après l’effondrement de l’Union Soviétique, cette dernière guerre du Caucase a démontré clairement que la Russie, grande puissance renée de ses cendres, estime que ce glacis régional caucasien appartient à sa sphère d’intérêt. Aux yeux des Russes, l’action musclée était parfaitement appropriée, dotée de sens. Une réaction sciemment disproportionnée et mise en scène de la sorte, a donné une leçon au voisin, qu’il n’oubliera pas de sitôt, et démontré aux puissances occidentales que la Russie, elle aussi, a des intérêts de grande puissance, et qu’elle est bien décidée et capable de les faire valoir. Personne ne doit feindre la surprise. Tous auraient dû y penser: la reconnaissance unilatérale du Kosovo par l’Occident allait tout naturellement conduire la Russie, à la première occasion, à rendre la pareille, selon l’adage “J’agis comme tu agis”.

 

Mais la stratégie choisie par Moscou n’est pas exempte de dangers. On sait, sous les murs du Kremlin, que plusieurs foyers de conflit demeurent potentiellement virulents sur le flanc nord du massif caucasien. Moscou ne peut se permettre de voir ressurgir une escalade de violence en Ingouchie, en Tchétchénie et au Daghestan. La position géostratégique de la Géorgie, corridor en direction de la Caspienne, rend son territoire très intéressant à contrôler pour les puissances occidentales. Sans la Géorgie, les oléoducs et gazoducs devraient passer par le territoire de la Russie pour arriver en Europe occidentale ou par l’Iran (ndt : pour arriver en Asie orientale), ce qui est inacceptable pour les Etats-Unis.

 

Les intérêts stratégiques des Etats-Unis sont clairs: la Géorgie est non seulement un maillon important dans la chaîne d’Etats et de bases qui doivent parfaire l’encerclement de la Russie, mais aussi une base très bien située pour mener tout guerre future contre l’Iran fort proche. Depuis que la Turquie n’est plus qu’un acteur peu fiable pour l’atlantisme dans la question iranienne, les Américains ont parié sur la Géorgie et se sont faits les avocats de son adhésion à l’OTAN. La Géorgie offre aussi des ports en eaux profondes, dans une région hautement stratégique, où l’OTAN et les Américains pourraient installer des bases militaires et des points d’appui pour leurs forces aériennes.

 

Les Etats-Unis et l’UE auraient pu rappeler les Géorgiens à l’ordre et les empêcher ainsi de se jeter dans la gueule du loup. Ils ne l’ont pas fait. Ainsi, Moscou a profité de l’occasion que lui offrait Saakachvili, en prenant l’OTAN de court et en démontant qu’elle n’était qu’un tigre de papier. L’alliance dont les Etats-Unis sont l’hegemon perd de son pouvoir d’attraction auprès d’autres candidats potentiels. Toute politique des “doux yeux” à l’adresse de l’OTAN peut désormais s’avérer dangereuse. A Kiev, à Bakou et dans d’autres capitales, l’intervention russe en Ossétie du Sud aura eu l’effet d’un avertissement, dont il faudra impérativement tenir compte. 

 

Washinton applique la “Doctrine de Monroe” et considère que l’Amérique latine est son arrière-cour, où les Etats-Unis peuvent intervenir à leur guise; face à cette “Doctrine de Monroe”, nous voyons désormais émerger une sorte de “Doctrine de Poutine” qui veut que les Etats, se trouvant sur la périphérie de la Russie, sur ses anciens glacis, sont importants pour la politique étrangère et pour la sécurité de la Russie. Manifestement, le retour de la Russie à de tels principes géostratégiques conduit à un nouvel affrontement froid entre Washington et Moscou. Du moins dans l’optique des Russes, l’intervention en Ossétie du Sud constitue un acte de vengeance contre la politique de Washington qui, depuis des années, ne s’occupent que d’encercler la Russie au lieu de l’intégrer.

 

Dès le début, les choses étaient claires: la “Guerre d’août” au Caucase n’allait nullement être le prélude d’une guerre russe de reconquête. Elle a pour conséquence que les facteurs politiques de la région doivent être réexaminés et réévalués. Règle normale de toute Realpolitik.

 

Günther DESCHNER.

(article paru dans “Junge Freiheit”, Berlin, Nr. 34/2008; trad. franç.: Robert Steuckers).