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mercredi, 15 octobre 2008

Henry Bauchau dans la tourmente du XX siècle

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Henry Bauchau dans la tourmente du XXe siècle

Geneviève Duchenne, Vincent Dujardin et Myriam Watthee-Delmotte publient "Henry Bauchau dans la tourmente du XXe siècle. Configurations historiques et imaginaires" aux éditions Le Cri. 
Né en 1913, Henry Bauchau a traversé le siècle. Il ne publie son premier recueil poétique qu’en 1958. Pourtant, il y a un poète qui s’ignore dans le chroniqueur d’avant-guerre, dans le combattant de 1940, dans le citoyen engagé dans l’action sociale sous l’Occupation ; il y a un être d’action dissimulé dans l’écrivain. Ce sont ces deux pans de la vie de Bauchau qui sont abordés dans ce travail, fruit des efforts conjugués de deux historiens et d’une spécialiste de la littérature contemporaine. Le travail des premiers, – bâti sur la base d’archives pour une bonne part inédites –, trouve son prolongement naturel dans l’analyse de la seconde : aucun des deux objets, historique et imaginaire, n’est indépendant, et leur corrélation permet d’éclairer un parcours certes singulier, mais inscrit dans une dynamique générationnelle.

L'ouvrage sera lancé le jeudi 6 mars 2008 au Musée de Louvain-la-Neuve, lors du vernissage de l'exposition "L'atelier d'Henry Bauchau".

Ce qu'on en dit

"De quels chemins ombrés a surgi la vocation tardive d'Henry Bauchau et de quelle expérience, de quel traumatisme en l'occurrence, s'est nourrie la substance de ses livres ? Deux historiens, Geneviève Duchenne et Vincent Dujardin, tous deux historiens et professeurs à l'UCL, ainsi que Myriam Watthee-Delmotte, professeur de littérature à l'UCL et spécialiste de l'oeuvre d'Henry Bauchau, apportent à ces questions l'éclairage d'une enquête rigoureusement documentée à partir de lettres, d'archives, d'entretiens, de mémoires, de témoignages et faite dans un esprit de collaboration où, aux recherches des premiers, répond en écho l'analyse des textes de la troisième."

Monique Verdussen, "Bauchau avant Bauchau", La Libre Belgique, 18 avril 2008 (article accessible via le site de La Libre)

SYNERGIES EUROPEENNES - Ecole des cadres/Wallonie - Lectures - Octobre 2008

vendredi, 10 octobre 2008

Céline, la danse et les danseuses

Trouvé sur: http://ettuttiquanti.blogspot.com

Céline, la danse et les danseuses

"Il n'était pas évident que cet écrivain qui semble ou prétend n'écrire que pour se délivrer de souvenirs insupportables et décharger sa bile soit sensible à d'autres arts qu'à cette prose narrative dans laquelle il s'est lancé comme malgré lui.

Or sa relation avec plusieurs de ces arts a à voir, quoique pas toujours de la même manière, avec sa pratique de romancier, et tout se passe même comme si ses attirances premières avaient été tournées vers des arts qu'il passe ensuite sous silence, en tout cas dans ce Voyage au bout de la nuit qui dessine pour longtemps son image dans l'opinion.

Aucun ne le hante plus continûment et sous des formes plus diverses que la danse, cette mise en forme et en valeur du corps, pour lui avant tout du corps féminin. Sans doute fait-il cette découverte de la danse, comme il le dit, dans le music-hall londonien au cours de son séjour de 1915-1916. Il le retrouvera plus tard à Paris, dans les intermèdes dansés de séances de cinéma au temps du muet. L'épisode du Tarapout dans Voyage au bout de la nuit se souvient de ces expériences. « Ce que je trouve remarquable, dit Céline d'une des danseuses à un journaliste à qui il a donné rendez-vous dans un de ces cinémas, c'est que l'esprit ne cesse pas de dominer les muscles et le métier.» L'instant d'après, il lui parle de « l'infini de la danse ».



L'émerveillement durable dans lequel le plonge Elizabeth Craig quand il la rencontre en 1926 ne tient pas seulement aux qualités de corps et d'esprit de la jeune femme, mais aussi au fait qu'elle fait entrer la danse dans sa vie. À partir de ce moment, il n'aura plus de relation intime durable qu'avec des danseuses, comme s'il avait besoin d'avoir en permanence auprès de lui ce témoignage d'un accomplissement de la vie. Il en a besoin comme d'un contrepoids aux aspects négatifs de cette vie dont son imaginaire fait la matière des romans qu'il écrit. Il s'intéresse au travail intense auquel se plient ses compagnes pour se maintenir au niveau qu'exige leur art; il fréquente les cours qu'elles suivent pour bénéficier de l'expérience de leurs aînées. C'est à l'un d'entre eux, celui de Mme d'Alessandri, qu'en 1935 il rencontre Lurette Almansor, qui se spécialise dans les danses de caractère, d'inspiration espagnole ou orientale. Il vivra avec elle jusqu'à sa mort.

Ce choix n'est pas seulement affaire de relations féminines, il n'est pas exagéré de le dire existentiel, tant il est enraciné au plus profond de sa sensibilité et de son imaginaire. Dans la danseuse, Céline admire une lutte de chaque jour contre les effets que le temps fait subir au corps humain, en le soumettant toujours plus à la pesanteur et en ne lui laissant plus accomplir que des mouvements de moins en moins harmonieux - lutte donc, au repos, contre l'avachissement, l'affaissement, la perte des formes, lorsque les muscles ne suffisent plus à remplir et à tendre la peau qui auparavant les dessinait à la surface,- dans le mouvement, lutte contre la perte de souplesse qui désaccorde les parties du corps dans leur relation les unes avec les autres danseuse est l'être humain qui mène avec le plus d'évidence contre cette mort avant la mort une action perdue d'avance mais glorieuse.

Il est donc logique que Céline s'intéresse autant, et peut-être plus, au travail à la barre et aux répétitions qu'au spectacle final, et qu'à côté de l'envol et des pointes de la danseuse classique il fasse place dans son empyrée à la danseuse de music-hall.
Les circonstances ont fait que le développement le plus long et le plus lyrique que lui ait inspiré la danse soit situé à l'orée des trois cents pages de fureurs et d'éructations de Bagatelles pour un massacre: « Dans une jambe de danseuse le monde, ses ondes, tous ses rythmes, ses folies, ses voeux sont inscrits!... jamais écrits!... Le plus nuancé poème du monde!... émouvant! [ ... ] Le poème inouï, chaud et fragile comme une jambe de danseuse en mouvant équilibre est en ligne, [ ... ] aux écoutes du plus grand secret, c'est Dieu! C'est Dieu lui-même! Tout simplement! [ ... ] La vie les saisit, pures... les emporte... au moindre élan, je veux aller me perdre avec elles... toute la vie... frémissante, onduleuse... » (Bagatelles pour un massacre)

C'est explicitement la raison pour laquelle il insère trois arguments de ballet (« bagatelles ») dans le texte de ce pamphlet, les deux premiers avant de se déchaîner, le troisième pour terminer le livre dans le calme après tant de violences. Il en attend la possibilité, s'ils étaient mis en musique et dansés, de « se rapprocher des danseuses » et, grâce à elles, de mourir « par une onde... la plus dansante... la plus émue... » (Bagatelles). À l'époque où il écrit ces lignes, il ne manque pas de relations personnelles avec des danseuses. Depuis qu'Elizabeth Craig l'a quitté, il voit régulièrement lors de leurs passages à Paris la Danoise Karen Marie Jensen et ses amies américaines, qui se produisent notamment au Radio City Hall de New York. Mais assister aux répétitions d'un ballet dont il aurait écrit l'argument serait être associé aux danseuses dans leur travail, et même accéder à leur saint des saints, si cela pouvait avoir lieu avec le corps de ballet de l'opéra de Paris.

Auparavant, à l'époque où il vivait avec Elizabeth, il avait tenté de mêler autrement danse et écriture. Ses deux pièces de 1926 et 1927, L'Église et Progrès, qui préfigurent, la première Voyage au bout de la nuit, la seconde Mort à crédit, comprenaient des personnages de danseuses et les faisaient danser sur scène, afin, disait Céline au même journaliste (voir p. 83), qu'en elles «sex-appeal» ou encore «attirance biologique » s'imposent directement au spectateur. Ils agiraient sur lui non, comme habituellement dans les pièces, à travers compliments et commentaires, mais comme des évidences ressenties.

Il est cependant significatif que, lorsqu'à deux reprises Céline reprend sous forme romanesque une histoire dont la plupart des éléments subsistent, en revanche la danse et la danseuse disparaissent. Grâce à son intimité avec des danseuses, il parvient, dans sa vie personnelle, à faire contrepoids à tout ce qui le rebute et le fait souffrir dans la réalité. Mais il n'est pas si facile de juxtaposer le positif et le négatif dans une création artistique fondée sur une représentation de cette réalité. Alors, c'est l'imaginaire qui commande et peut seul, par sa cohérence propre et sa correspondance avec le style, faire la valeur de l'œuvre dans l'ordre de la littérature. En Céline, le sens et le désir de la création littéraire, de même que l'intuition sinon la conscience de ses lois, ne sont pas moins forts que l'attachement à la danse. Rien n'est plus éloquent dans ce domaine que les transformations qu'il fait subir à l'histoire des aventures de Bardamu quand il passe du théâtre au roman : il les fait commencer par l'évocation de la guerre, qui devient la clé du roman tout entier. En revanche, il supprime de l'épisode new-yorkais les danseuses et leurs exercices sur scène.

[Photo : Le cours de Mme d'Alessandri avec Lucette Almansor (au milieu)] Quand L'Église fut jouée dans une mise en scène qui lui rendait justice, en 1992, les spectateurs qui gardaient le roman présent à l'esprit découvraient à quel point le choix d'une danseuse professionnelle pour tenir le rôle d'Elizabeth Craig suffisait à lui seul à déplacer le centre de gravité de l'histoire. Sa présence et les mouvements qu'elle exécutait devant Bardamu - et donc devant les spectateurs -, si ces scènes avaient été maintenues dans le roman, auraient fait perdre au reste des expériences du narrateur une partie de l'impact qu'elles ont à la lecture. La note de violence et de noirceur qui était destinée, pour le meilleur et pour le pire, à devenir la marque de Céline dans la littérature de son temps n'était pas compatible avec l'évidence physique de la danse. Quel que soit le secours que Céline tirait personnellement de celle-ci, dont il n'est pas exagéré de dire qu'elle l'aidait à vivre, il était trop écrivain-né pour ne pas en tirer les conclusions qui s'imposaient."

Source : Henri Godard, Un autre Céline, de la fureur à la féerie, Textuel, 2008.

jeudi, 09 octobre 2008

Bulletin célinien, n°301

Le Bulletin célinien

Sommaire du n° 301, octobre 2008 :

Marc Laudelout : « Sur Céline » de Philippe Alméras
Jean-Pierre Doche : Céline parmi nous
Alain Ajax : Céline au bout du communisme
Marc Laudelout : Céline dans la presse
Tomohiro Hikoe : « Progrès » et le music-hall
Michel P. Schmitt : Toujours à propos du 300ème numéro du BC

Le Bulletin célinien
B P 70
1000 Bruxelles 22
Belgique

http://louisferdinandceline.free.fr
celinebc@skynet.be




Numéro disponible contre 6 € (en timbres-poste ou par chèque à l'ordre de M. Laudelout)

vendredi, 03 octobre 2008

"Ich wollte nicht danebenstehen..."

Bräuninger, "Ich wollte nicht danebenstehen ..."

Werner Bräuninger ist unter den zahllosen Autoren, die sich auch Jahrezehnte nach dessen Untergang mit dem Nationalsozialismus beschäftigen. Er will in seinem Buch Männer und Frauen vorstellen, "deren Namen schon fast ausgelöscht schienen". Seine Darstellungen helfen, jene Zeit zu verstehen, die uns offenbar nicht losläßt.

"Preußische Allgemeine Zeitung 19. Mai 2007"

 

Werner Bräuninger ist unter den zahllosen Autoren, die sich auch Jahrzehnte nach dessen Untergang mit dem Nationalsozialismus beschäftigen, einer der originellsten. Jetzt legt er mit seinem Buch "Ich wollte nicht daneben stehen ..." eine Sammlung von Essays vor, die sich mit Lebensentwürfen von bemerkenswerten Persönlichkeiten befassen, die von vielen Aspekten des Nationalsozialismus wie der Person Adolf Hitlers fasziniert waren, auch wohl in großen Zügen den von ihm verkündeten Zielen zustimmten, wie etwa Deutschland aus seiner tiefen Erniedrigung nach dem Ersten Weltkrieg herauszuführen und die deutsche Parteizwietracht zu überwinden, die sich aber meist der nationalsozialistischen Bewegung nicht anschlossen. Manche verwendeten sich nach den ersten Jahren der NS-Machtausübung enttäuscht ab, keiner war an der praktischen Politik beteiligt.

Da stößt man auf Namen wie dem des politischen Pädagogen und führenden nationalsozialistischen Philosophen Alfred Baeumler, der sich weigerte, Berlin zu verlassen und als Volkssturmmann an der Verteidigung teilnahm; auf Arno Breker, der bis 1945 und dann auch wieder nach Jahrzehnten der Diffamierung als einer der großen Bildhauer des 20. Jahrhunderts anerkannt wurde; auf Ernst Bertram, der in den 20er und 30er Jahren als einer der führenden Gelehrten der Zeit galt, befreundet mit Thomas Mann, dem Stefan-George-Kreis angehörend, der seine ganze Hoffnung auf Hitler setzte, aber nie NSDAP-Mitglied wurde; auf die Engländerin Winifred Wagner, Ehefrau des Richard-Wagner-Sohns Siegfried, die auch nach 1945 zu ihrer Freundschaft zu Adolf Hitler stand. Berichtet wird über den erstaunlichen Gelehrten Ernst Kontorowicz, 1895 in Posen geboren, deutscher Jude, Offizier, im Ersten Weltkrieg hoch dekoriert, Freikorpskämpfer, dessen Hauptwerk über den Staufen-Kaiser Friedrich II. auch heute noch von hoher Bedeutung ist.

Auch er gehörte zum Kreis von Stefan George. Sein Ziel war eine deutsch-jüdische Symbiose. Als er als Professor den Amtseid auf Hitler ablegen mußte, verweigerte er ihn und emigrierte, blieb aber stets Deutschland verbunden.

Ernst Jünger ist ein langes Kapitel gewidmet, Wandervogel, Offizier, Pour-le-Merite-Träger, Autor. Seine Bücher fanden in der intellektuellen Welt höchste Beachtung. Den nationalen Aufbruch hatte er zunächst freudig begrüßt, zog sich aber später enttäuscht zurück. "Krieger und Träumer, Autor und Soldat, radikaler Nationalist und Künder einer neuen Zeit, Dandy und Einzelgänger" apostrophiert ihn Bräuninger.

Leni Riefenstahl ist ein verständnisvolles Kapitel gewidmet, jener genialen deutschen Filmregisseurin, die international mit höchsten Preisen geehrt wurde. Ihr Film über die Olympischen Spiele 1936 wurde als "bester Film der Welt" 1938 in Paris prämiert. Ihr ging es um nichts anderes, als in ihren Filmen "das Schöne, Starke, Gesunde" darzustellen, kurz: "Ich suchen die Harmonie." 1945 wurde auch sie verfemt und boykottiert, bis ihr vor einigen Jahrzehnten eine Renaissance zuerst im Ausland, dann auch in Deutschland Gerechtigkeit widerfahren ließ.

Bereichert werden die Essays durch ein Personenverzeichnis, in dem man intellektuell wichtige Persönlichkeiten aus dem Deutschland des 20. Jahrhunderts findet, deren Leben und Bedeutung kurz skizziert wird.

Bräuninger will in seinem Buch Männer und Frauen vorstellen, "deren Namen schon fast ausgelöscht schienen". Seine Darstellungen helfen, jene Zeit zu vertehen, die uns offenbar nicht losläßt.

"Preußische Allgemeine Zeitung 19. Mai 2007"

mardi, 30 septembre 2008

R. Poulet: "D'un château l'autre"

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Robert Poulet:

« D’un château l’autre »

[1957]

Il est toujours dangereux d’enterrer les gens ; ils ressuscitent à l’improviste et on ne sait plus où les mettre. Depuis Féerie pour une autre fois, on posait en fait que le grand Céline, celui du Voyage au bout de la nuit, était mort. Erreur complète ! Le prétendu défunt détrompe son monde en poussant un nouvel éclat de rire dont les échos ont même réveillé les critiques parisiens, dans leur fauteuil à roulettes. Et ces messieurs en oublient que – par convention tacite, conclue en 1944 – « Céline, ce n’est rien », « un personnage très surfait », grossier comme un chauffeur de car, artificieux, puéril ; d’ailleurs tout à fait inconnu de la jeunesse. Inconnu, justement, parce que pendant dix ans on s’est abstenu de le faire connaître !... Est-ce que les jeunes connaîtraient Proust si la conspiration du silence s’appliquait à la Recherche du temps perdu ?... Pendant qu’Aristarque effaré et irrité s’empêtre ainsi dans ses contradictions, proclamons tranquillement que D’un château l’autre, s’il était signé Tartempion, ferait pousser des hurlements d’admiration et de stupeur à toute l’avant-garde littéraire, dont les choryphées se sont signalés par des innovations qui paraissent imperceptibles au prix de ce discours prodigieux, encore bien plus hardi et plus expressif que celui du Voyage.

Seulement ce livre-là contenait un sentiment, valable pour tous les hommes de ce siècle. Sentiment de découverte furieuse, de scandale qui répond au scandale ; la vie moderne, non plus décrite, mais vomie toute fumante ; et par-dessus le marché la Rigolade : un être qui tombe des nues, qui voit le monde où nous sommes – la civilisation faussée, l’âme salie, l’esprit plein de mensonges – et qui se tord.

Des deux inventions énormes qui constituent (renforcée dans Mort à crédit) la surprise célinienne, il ne reste évidemment que la seconde ; celle qui a pour fin d’introduire dans la littérature le langage de notre temps. Le vrai, non celui que jargonnent les romanciers réalistes, populistes, néo-naturalistes, etc.  Il suffit de contempler le hachis et le pataugis des sous-Céline, dont quelques-uns portent des noms partout vantés, pour mesurer l’habileté cachée de notre homme, faux cacographe, pseudo-débraillé, qui calcule ses diatribes à une virgule près, et qui s’apparente bien plus, pour le souci du style, à José-Maria de Hérédia qu’au Père Duchesne.

Que nous conte-t-il cette fois ? Tout ce qui lui passe par la tête. Et d’abord ses malheurs, ses aventures, ses observations d’émigré malgré lui, en 1944-45. On sait que le père de Bardamu s’enfuit à la Libération, encore qu’en réalité il n’eût même pas mis le bout du doigt dans les engrenages de la Collaboration ; mais, comme il le dit très bien, à Paris on lui aurait arraché les tripes. Grâce à ce malentendu tragi-comique, nous avons ici, sur l’Allemagne aux abois, sur Sigmaringen (où vivaient onze cents condamnés à mort), sur les geôles et les geôliers danois (qui tinrent dans une oubliette, pendant six ans, le pauvre Louis-Ferdinand,  accusé  là-bas d’avoir « vendu les plans de la Ligne Maginot »), sur les rapports  de  l’auteur avec son éditeur, « ce salaud de Gaston » (et l’impossibilité du seigneur Gallimard, tirant à moult exemplaires les injures dont il est abreuvé, ajoute encore à l’effet d’hilarité) un témoignage sans doute inexact – les poètes ni les prophètes ne voient les choses comme elles sont – mais épique. Sur un fond de vociférations, d’hallucinations et de protestations, dans la matière desquelles il n’entre pas une seule phrase : rien que de petits groupes de mots démantibulés, qui hoquètent et qui cliquètent ; dents d’une roue sans fin, que meut un moteur inquiétant, plein d’éclairs et de fumée.

Mais quand le mouvement s’arrête, avec sa charge d’images puissantes, de sarcasmes inouïs et de plaintes enfantines, on s’avise qu’à l’origine de tout ce tumulte, strictement distribué par le génie le plus mécanique de l’ère contemporaine, il pourrait bien y avoir ceci : une forme désespérée de la grandeur d’âme. Une sensibilité, une générosité, qui se mutilent et se meurent elles-mêmes, comme dans le conte d’Edgar Poë.

Robert POULET

(Pan, 26 juillet 1957)

 

dimanche, 28 septembre 2008

Sur "Gobalia" de Jean-Christophe Rufin

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Ecole des cadres - Synergies Européennes - septembre 2008

Sur "Golbalia" de Jean-Christophe Rufin

http://users.skynet.be/pierre.bachy/rufin-globalia.html...

A lire à la suite de nos travaux sur George Orwell et Aldous Huxley

samedi, 27 septembre 2008

A propos du 300ième numéro du Bulletin Célinien

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À propos d'un trois centième numéro du Bulletin célinien

J'ai entendu parler pour la première fois du Bulletin célinien  à l'époque déjà ancienne où j'assurais, au moins nominalement, la présidence de la Société des Études céliniennes naissante. J'en étais en tout cas le parrain pour avoir imaginé l'intitulé. Elle était destinée à servir de liaison entre la poignée de chercheurs qui s'intéressaient alors à Céline, et – après mes expériences américaines – j'y mettais naturellement mes espoirs. C'est pourquoi je me souviens avec netteté des sentiments que suscita à Paris la naissance du Bulletin célinien à Bruxelles. On en parlait avec réserve, pas mal de suspicion, mais comme d'une chose transitoire.

 

Or, voici le 300ème numéro. Le BC a non seulement vécu et survécu mais il s'est imposé, il est devenu une institution ; comment expliquer la chose ?

 

J'y vois d'abord un effet de la distance. Cela ne pouvait sans doute se faire que dans cette Belgique qui, à travers Denoël, Évelyne Pollet et Marc Hanrez, avait élu Céline. On y était suffisamment loin de Paris pour ne pas ressentir le clapotis parisien. Vivant avec tranquillité affrontements et conflits, sa double nature flamande et française lui assure la placidité nécessaire devant les mauvais coups : on sait encaisser.

 

Quand j'ai aperçu Marc Laudelout pour la première fois dans l'un des colloques qui se tint vers là-bas j'avais été surpris par sa jeunesse, mariée à une réserve sénatoriale. Cela contrastait avec la nervosité ou la fébrilité de céliniens rencontrés de part et d'autre de l'Atlantique. Ce tempérament lui a permis de négocier les emballements, les compétitions, les conflits et les paniques périodiques que provoque Céline. Non pas que le directeur du BC ait le cuir épais, je le crois sensible et même ultra sensible aux critiques, mais la périodicité mensuelle lui donne le temps de voir. De Bruxelles-Sirius,  on distingue mieux le qui du quoi.  Chacune des  chapelles  de la cathédrale chante l'évangile à sa façon, et tout en veillant au respect de la lettre, le directeur du BC se garde des procès aux hétérodoxes et aux dissonants, à moins de croire le grand homme attaqué.

 

Il a maintenu ce calme et ce sérieux d'arbitre dans les empoignades qui ont mis périodiquement aux prises les officiants qui s’assomment à coup d'encensoirs  comme les moines des différentes confessions à l’entrée du Saint-Sépulcre. Céliniens de gauche ou de droite, ayants droit, celtisants, passionnés de la virgule et du texte pour le texte, acharnés du  petit fait vrai ou de la mémoire du lieu, experts en exploration d'archives, collectionneurs et marchands de reliques, tous ont reçu leur dû chez lui. Il n'y a eu,  je crois, qu'un chanoine  pour refuser le contact. Ces rares qualités ont permis à Marc Laudelout de tenir la gageure du sujet unique.

 

Encore fallait-il que ce sujet tint lui-même en  haleine, et c'est justement la survie exceptionnelle de Céline qui permet au Bulletin à lui consacré de vivre depuis  trente ans.

 

Il m'a toujours semblé que chacun des admirateurs de Céline élisait l'une de ses qualités ou de ses défauts pour les cultiver dans son laboratoire, certains le misérabilisme, d'autres la folle audace associée à une extrême prudence, d'autres encore la peur des riches et des puissants, je passe sur les mimétiques de la forme,  Laudelout, lui, me paraît avoir élu le désir de vie de l’increvable qui, tout en parlant périodiquement de « se filer au gaz », a sans doute été le moins suicidaire des écrivains du temps.

 

La tentation d’en finir avec ce Bulletin, qui lui apportait à longueur d’année palpitations et vertiges devant le numéro à remplir, à boucler et à payer, a dû se présenter dix fois. Il lui a résisté, il a tenu grâce à celui qui – il faut le constater – n’a pas connu une année de purgatoire depuis la publication de L’Herne, les colloques de J.-P. Dauphin ou le premier numéro du Bulletin célinien.

 

Montherlant s’est lourdement trompé en disant qu’on ne lirait pas plus Céline dans cinquante ans qu’on ne lisait Paul Alexis ou Paul Lombard. On pourrait même croire qu’il a payé son erreur. Et ceci nous amène fatalement à la question inéluctable : pourquoi lit-on l’un et plus l’autre ? Une fois écartée la fausse réponse du style, il faut imaginer le lecteur, jeune ou vieux, gavé de l’aube au crépuscule de bons sentiments, envers les femmes, les immigrés et les sans-papiers, sommé de tenir tous les bipèdes pour ses semblables et convaincu de culpabilités rétrospectives variées, il faut imaginer ce lecteur découvrant la prose lyrique du seul qui sache piétiner nos tabous les plus chers entre deux ballets et trois idylles. L’impunité fournie par le temps et le talent assure la renaissance du phénix.

 

Laudelout s’est fait une spécialité d’évoquer le drôle d’oiseau, et il a encore le temps de voir. Son secret de longue vie tient au fait qu’il n’a rien à prouver, rien à démontrer.

 

Philippe ALMÉRAS

 

Auteur de deux thèses de doctorat sur Céline : L’évolution du langage romanesque de Louis-Ferdinand Céline (Université de Californie [Santa Barbara], 1971) et Les idées de Céline (Université de Paris VII, 1987). Cette thèse a été éditée par la BLFC (1987), puis rééditée par Berg International (1992) et Dualpha (2004).  Auteur d’une biographie, Céline. Entre haines et passion  (Robert Laffont, 1994 ; rééd. Dualpha, 2002) et d’un Dictionnaire Céline. Une œuvre, une vie (Plon, 2004).  Autres livres publiés sur le sujet : Je suis le bouc. Céline et l’antisémitisme (Denoël, 2000) ; Voyager avec Céline (Dualpha, 2003) et Sur Céline (Éditions de Paris, 2008).  A également édité et préfacé Lettres des années noires (Berg International, 1994).

 

     

 

 

 

samedi, 20 septembre 2008

Citation de Gonzague de Reynold

Même avec des bottes de sept lieues...

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On ne vit pas sans s'anémier en dehors de son climat. Vous m'objecterez, vous, hommes de progrès, qu'aujourd'hui le moteur a raccourci les distances physiques : je vous répondrai qu'il a augmenté les distances morales. Vous ajouterez que l'homme contemporain vit d'une manière autrement indépendante de sa terre que l'homme d'autrefois : je vous répondrai que cet homme a fait passer sa terre dans sa conscience, qu'il a reconnu toute l'influence du milieu, qu'il y a des atavismes collectifs, que les origines naturelles ont imprimé à chaque peuple des caractères indélébiles et lui ont assigné une direction initiale et que, même si nous avons des bottes de sept lieues, nous emportons toujours notre sol natal aux clous de nos souliers.

Gonzague de Reynold, Défense et Illustration de l'esprit suisse

mercredi, 17 septembre 2008

Citation de Chateaubriand

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dimanche, 14 septembre 2008

Il volto ambiguo della Rivoluzione Conservatrice tedesca

Il volto ambiguo della Rivoluzione Conservatrice tedesca

Autore: Luca Leonello Rimbotti

La Rivoluzione Conservatrice - fenomeno essenzialmente tedesco, ma non solo - era un bacino di idee, un laboratorio, in cui vennero ad infusione tutti quegli ideali che da una parte rifiutavano il progressismo illuministico dell’Occidente, mentre dall’altra propugnavano il dinamismo di una rivoluzione in grande stile: ma nel senso di un re-volvere, di un ritornare alla tradizione nazionale, all’ordine dei valori naturali, all’eroismo, alla comunità di popolo, all’idea che la vita è tragica ma anche magnifica lotta.

Detlev J.K. Peukert, La Repubblica di Weimar Tra il 1918 e il 1932, questi ideali ebbero decine di sostenitori di alto spessore intellettuale, lungo un ventaglio di variazioni ideologiche molto ampio: dalla piccola minoranza di quanti vedevano nel bolscevismo l’alba di una nuova concezione comunitaria, alla grande maggioranza di coloro che invece si battevano per l’estrema affermazione del destino europeo nell’era della tecnica di massa, mantenendo intatte, anzi rilanciandole in modo rivoluzionario, le qualità tradizionali legate alle origini del popolo: identità, storia, stirpe, terra-patria, cultura. Tra questi ultimi, di gran lunga i più importanti, figuravano personaggi del calibro di Jünger, Schmitt, Moeller van den Bruck, Heidegger, Spengler, Thomas Mann, Sombart, Benn, Scheler, Klages, e molti altri. In quella caotica Sodoma che era la Repubblica di Weimar - dove la crisi del Reich fu letta come la crisi dell’intero Occidente liberale - tutti questi ingegni avevano un denominatore comune: impegnare la lotta per opporsi al disfacimento della civiltà europea, restaurando l’ordine tradizionale su basi moderne, attraverso la rivoluzione. Malauguratamente, nessuno di loro fu mai un politico. E pochi ebbero anche solo cultura politica. Quest’assenza di sensiblerie fu il motivo per cui, al momento giusto, spesso la storia non venne riconosciuta. E, tra i più famosi, solo alcuni capirono che il destino non sempre può avere il volto da noi immaginato nel silenzio dei nostri studi, ma che alle volte appare all’improvviso, parlando il linguaggio semplice e brutale degli eventi.

I proscritti Scrivevano di una Germania da restaurare nella sua potenza, favoleggiavano di un tipo d’uomo eroico e coraggioso, metallico, che avrebbe dominato il nichilismo dell’epoca moderna; descrivevano la civilizzazione occidentale come il più grande dei mali, il progresso come un dèmone, il capitalismo come una lebbra di usurai, l’egualitarismo e il comunismo come incubi primitivi … e riandavano alle radici del germanesimo, alle fonti dell’identità. Armato di Nietzsche e di antichi miti dionisiaci, c’era persino chi riaccendeva i fuochi di quelle notti primordiali in cui era nato l’uomo europeo… Eppure, quando tutto questo prese vita sotto le loro finestre, quando i miti e le invocazioni assunsero la forma di uomini, di un partito, di una volontà politica, di una voce, quando “l’uomo d’acciaio” descritto nei libri bussava alla loro porta nelle forme stilizzate della politica, molti sguardi si distolsero, molte orecchie cominciarono a non sentirci più… La vecchia sindrome del sognatore, che non vuol essere disturbato neppure dal proprio sogno che si anima… La Rivoluzione Conservatrice tedesca espresse spesso la tragica cecità di molti suoi epigoni dinanzi al prender forma di non poche delle loro costruzioni teoriche.

Giuseppe A. Balistreri, Filosofia della Konservative Revolution: Arthur Moeller van den Bruck Non vollero riconoscere il suono di una campana, i cui rintocchi uscivano in gran parte dai loro stessi libri. Allora, improvvisamente, tutto diventò troppo “demagogico”, troppo “plebeo”. L’intellettuale volle lasciare la militanza, la lotta vera, a quanti accettarono di sporcarsi le mani con i fatti. Alcune derive del Nazionalsocialismo si possono anche storicamente ascrivere alla renitenza di intellettuali e ideologhi, che non parteciparono alla “lotta per i valori” e che, dopo aver lungamente predicato, nel momento dell’azione si appartarono in un piccolo mondo fatto di romanzi e divagazioni. Mentalità da club: “esilio interno” o piuttosto diserzione davanti ai propri stessi ideali? Eppure, un certo spazio critico dovette esistere, poi, anche tra le maglie del regime totalitario, se gli storici riportano di serrate lotte ideologiche intestine durante il Terzo Reich, di polemiche, di divergenze di vedute: Rosenberg non la pensava certo come Klages; Heidegger e Krieck erano avversari politici attestati su sponde lontane… Prendiamo Jünger. Ancora nel 1932, aveva parlato del Dominio, della Gerarchia delle Forme, della Sapienza degli Avi, del Guerriero, del Realismo Eroico, della Forza Primigenia, del Soldato Politico, della “Massa che vede riaffermata la propria esistenza dal Singolo dotato di Grandezza”… Ricordiamo di passata che Jünger negli anni venti collaborò, oltre che con le più note testate del nazionalismo radicale, anche col Völkischer Beobachter, il quotidiano nazionalsocialista e che nel 1923 inviò a Hitler una copia del suo libro Tempeste d’acciaio, con tanto di dedica… Alla luce dei fatti, è forse giunto il momento di considerare quelle proclamazioni solo come buoni esercizi letterari? Nell’infuriare della lotta vera per il Dominio che si ingaggiò di lì a poco, durante gli anni decisivi della Seconda guerra mondiale, noi troviamo Jünger non già nella trincea dove era stato da giovane, ma ai tavoli dei caffè parigini. Qui lo vediamo intento ad irridere Hitler nel segreto del proprio diario, sulle cui paginette si dilettava a chiamarlo col nomignolo di Knièbolo: un po’ poco. Tutto questo fu “fronda” esoterica o immiserimento del talento ideologico? Storico esempio di altèra dissidenza aristocratica o patetico esaurimento di un antico coraggio di militanza?

Oswald Spengler, Il tramonto dell'Occidente E uno Spengler? Anch’egli, dopo aver vaticinato il riarmo del germanesimo e della civiltà bianca, non appena questi postulati ebbero il contorno di un partito politico, che pareva proprio prenderli sul serio, oppose uno sdegnoso distacco. E Gottfried Benn? Dopo aver cantato i destini dell’”uomo superiore che tragicamente combatte”, dopo aver celebrato la “buona razza” dell’uomo tedesco che ha “il sentimento della terra nativa”, come vide che tutto questo diventava uno Stato, una legge, una politica, lasciò cadere la penna…

Ma la Rivoluzione Conservatrice, per la verità, non fu solo questo. Fu anche il socialismo di Moeller, l’antieconomicismo di Sombart, l’idea nazionale e popolare di Heidegger, il filosofo-contadino vicino alle SA. In effetti, la gran parte degli affiliati ai diversi schieramenti rivoluzionario-conservatori confluì nella NSDAP, contribuendo non poco a solidificarne il pensiero politico e, in alcuni casi, diventandone uomini di punta: da Baeumler a Krieck. Secondo Ernst Nolte - il maggiore storico tedesco - la Rivoluzione Conservatrice ebbe l’occasione di essere più una rivoluzione che non una conservazione, soltanto perché si incrociò con la via politica nazionalsocialista: un partito di massa, una moderna propaganda, un capo carismatico in grado di puntare al potere. Tutte cose che ai teorici mancavano. “Non fu il nazionalsocialismo - si è chiesto Nolte -, in quanto negazione della Rivoluzione francese e di quella bolscevico-comunista, una contro-Rivoluzione tanto rivoluzionaria, quanto la Rivoluzione conservatrice non potrà mai essere?”.

Dopo tutto, come ha affermato il più esperto studioso di questi argomenti, Armin Mohler, “il nazionalsocialismo resta pur sempre un tentativo di realizzazione politica delle premesse culturali presenti nella Rivoluzione conservatrice”. Il tentativo postumo di sganciare la RC dalla NSDAP è obiettivamente antistorico: provate a sommare i temi ideologici dei vari movimenti nazional-popolari dell’epoca weimariana, ed avrete l’ideologia nazionalsocialista.

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Tratto da Linea del 25 luglio 2004.


Luca Leonello Rimbotti

samedi, 13 septembre 2008

Comprendere il radicalismo nazionalista di Ernst Jünger

Comprendere il radicalismo nazionalista di Ernst Jünger

Autore: Luca Leonello Rimbotti

Ernst Jünger, Scritti politici e di guerra. 1919-1933. Vol. 3: 1929-1933 La pubblicazione del terzo e ultimo volume degli Scritti politici e di guerra di Ernst Jünger, relativi agli anni 1929-1933, da parte della Libreria Editrice Goriziana, ci permette di mettere a posto, una volta per tutte, la controversa questione del nazionalismo dello scrittore tedesco e dei suoi rapporti con il Nazionalsocialismo. Se, già nel 1923, Jünger aveva scritto parole di apprezzamento per Hitler, cui aveva anche inviato una copia con dedica autografa del suo celebre volume Im Stahlgewittern, e se in quel medesimo periodo aveva anche collaborato al quotidiano della NSDAP Völkischer Beobachter, diretto da Alfred Rosenberg, negli anni a seguire i suoi rapporti con il Partito nazionalsocialista diventeranno più complessi. Ma mai di rottura. Anzi, di cameratesca solidarietà. A volte di critica su questo o quel punto, ma condotta sempre all’interno della galassia nazionalista e con i toni amichevoli del consapevole alleato di lotta.

Uno dei motivi contingenti dell’incomprensione tra alcuni ambienti nazionalisti e NSDAP fu alla fine degli anni venti la situazione dei contadini. Specialmente nella regione settentrionale dello Schleswig-Holstein, a seguito delle misure punitive dei trattati di pace, fortemente penalizzanti l’economia tedesca nel suo complesso, ed anche a seguito della crisi economica, si era avuto il progressivo collasso del ceto rurale, sempre più gravemente scivolato nel gorgo del debito, nella crisi produttiva e nella perdita crescente della piccola proprietà. Da questa situazione era andata prendendo forza una forma di protesta, gestita dalla potente Landvolkbewegung, il movimento contadino a forti tinte nazionaliste ed antisemite che, dal 1928, si rese protagonista anche di alcuni attentati dinamitardi contro la sede del Reichstag. Era una protesta nei confronti dello Stato e del governo, incapaci di garantire agli agricoltori quei sussidi e quelle protezioni dalla concorrenza estera, senza i quali l’economia agricola andava incontro alla rovina. Il movimento contadino trovò immediata sponda negli ambienti nazionalisti. Jünger stesso ne giustificò il terrorismo, prendendo le distanze da Hitler che, invece, pur alleato della protesta, condannò apertamente il ricorso alla violenza. Cosa che non impedì, di lì a poco, che l’intero movimento contadino confluisse nel Partito nazionalsocialista, costituendone anzi uno dei punti di forza sia politici che ideologici: basta pensare al ruolo svolto da Walther Darré.

Condannando la stampa borghese, compattamente ostile ai contadini del Nord, Jünger scrisse frasi pesanti: “È in atto un terrore mediatico di gran lunga più considerevole del terrore generato da qualsiasi bomba”. E condannò ugualmente il moderatismo di Hitler che, come tutti sanno, dopo il Putsch del 1923 era molto attento a marciare lungo i binari della legalità, operando, per tutto il periodo del Kampfzeit, cioè della lotta per il potere, come l’inflessibile elemento moderato che doveva sedare le spinte radicali della sua ala sinistra.

Jünger rimproverava Hitler anche di non essere abbastanza deciso a prendere le distanze da Hugenberg – il capo del Partito Nazionaltedesco – e da tutti gli ambienti reazionari e borghesi. Il fatto sorprendente, che esce a chiare lettere dai suoi scritti di questo periodo, è dunque che Jünger criticava la NSDAP non da “destra”, come si era abituati a pensare e come farà in seguito, bensì da “sinistra”. Ma, in ogni caso, si trattava pur sempre di critiche che non mettevano mai in discussione la consapevolezza che nazionalisti e nazionalsocialisti appartenevano al medesimo schieramento, con i medesimi ideali e i medesimi obiettivi. Si trattava, però, di arrivare al potere non con intermediazioni moderate o conservatrici, ma radicali. Parola di Jünger: “Le risoluzioni prese nell’ambito del partito nazionalsocialista – scrisse su “Wiederstand” dell’ottobre 1929 - non hanno affatto un’importanza esclusiva per questo partito. Dal momento, infatti, che esso attualmente rappresenta l’arma più forte e temibile della volontà nazionale, ogni sua azione o rinuncia andrà necessariamente a colpire tutte le forze che vogliono contribuire all’affermazione di questa volontà in Germania […] ma come ci si può assumere la responsabilità di suscitare la parvenza di un fronte comune con forze la cui vicinanza è intollerabile per un partito intitolato ai lavoratori tedeschi?”.

Domande che, certo, saranno suonate musica alle orecchie delle SA o di un Goebbels, e che non rappresentavano affatto le posizioni del nazionalismo conservatore, ma di quel nazionalismo radicale cui Jünger si era avvicinato tramite Ernst Niekisch, cui lo scrittore era stato presentato dal filosofo Alfred Baeumler. Ma Jünger venne presto accontentato: se si pensa alla rottura, voluta da Hitler, del “fronte di Harzburg” del 1931 – cioè l’alleanza tattica del Nazionalsocialismo con il nazionalismo conservatore, del tipo dello Stahlhelm –, oppure alla liquidazione di tutti gli ambienti conservatori dopo la presa del potere, o alla “purga” del 1934 (che non colpì solo la “sinistra” di Roehm, ma anche la “destra” di Schleicher), se pensiamo poi a come Hitler stesso pose brutalmente fine nel 1944 al conservatorismo junker – e all’esistenza storica della loro casta -, dovremmo riportarne la sensazione che Jünger avesse di che compiacersi dell’operato di Hitler. La storia vuole, invece, che proprio nella lotta di vertice dei conservatori contro il Nazionalsocialismo, Jünger si trovasse – beninteso, in accorta retroguardia - non dalla parte della “sinistra”, bensì della “destra”. Enigmi dell’aristocraticismo…

Jünger era apertamente a-partitico: “rinunciamo a qualsiasi appartenenza partitica…”, aveva scritto, e concepiva romanticamente il nazionalismo come un insieme di centri di lotta, sperando di “veder crescere tutti questi legami in maniera possente, serrata e unitaria, così da raggiungere le dimensioni necessarie al grande confronto…”. La storia ha dimostrato che, in Germania, il nazionalismo di partito non aveva la capacità di crescere fino al punto di diventare egemone. Nei primi anni trenta era chiaro che né Hugenberg né Seldte né tantomeno Niekisch sarebbero andati lontano. Figurarsi semplici ambienti sparsi. Vi andò invece Hitler, ma per vie politiche e non romantiche, e unificando per l’appunto tutti quei movimenti – da quello dei giovani, la Jugendbewegung, a quello contadino sopra ricordato – che, pur essendo nazionalisti, non erano reazionari, ma anzi rivoluzionari.

Ernst Jünger, L'operaio. Dominio e forma Questo, Jünger non lo comprese mai. Non comprese l’identità di un movimento che trovò troppo conservatore nel ’29 e troppo rivoluzionario dal ’33 in poi… mentre la storiografia ha largamente dimostrato – da Nolte a Kershaw – che fu entrambe le cose contemporaneamente, dal 1923 al 1945. Gli amichevoli rimproveri di Jünger agli “amici del partito nazionalsocialista” miravano a scuoterne ciò che allo scrittore pareva eccessiva moderazione, ma che invece, semplicemente, era accortezza politica. Riferendosi ai movimenti nazionalisti intransigenti, Jünger formulò un’esortazione: “speriamo anche che il nazionalsocialismo, anziché combattere quelle forze, ne accetti e riconosca la parentela di fondo”. La parentela di fondo: questa esplicita definizione la dedichiamo a quanti, anche recentemente, non solo hanno negato ogni effusione jüngeriana nei confronti del Nazionalsocialismo, ma persino una sua ideologia nazionalista… E infine leggiamo l’auspicio rivoluzionario: “Al nazionalsocialismo – scrisse nel 1929 Jünger, in pagine che certo provocheranno terribile sconcerto nei suoi attuali ammiratori letterari – auguriamo di cuore la vittoria: conosciamo le sue forze migliori, dal cui entusiasmo trae sostegno e della cui volontà di sacrificio può al di là di ogni dubbio menare vanto. Sappiamo anche, però, che esso potrà combattere per vincere se le sue armi saranno forgiate nel più puro dei metalli, e se rinuncerà al supporto dei fragili resti di un’epoca passata”. Possiamo ribadire che, in questo, Jünger venne accontentato di brutto. I “fragili resti” non solo vennero ignorati, ma proprio distrutti. Il “realismo eroico” propugnato da Jünger altro non era che un radicalismo nazionalista privo di connotati politici. Il suo programma era semplicemente la Germania: “Vogliamo una Germania esattamente com’è”, scrisse nel marzo 1930. Egli conosceva solo un fine, “l’eterna realtà di un Reich che, in questo Paese, non mancò mai di entusiasmare la gioventù”. E un solo progetto: “Qui non c’è niente da augurarsi, allora, vi è piuttosto il rigoroso riconoscimento di un dovere, che trova ora espressione: allora come oggi, essere tedeschi significa essere in lotta”. La differenza tra il nazionalismo di Jünger e il Nazionalsocialismo è insomma la stessa differenza che corre tra il pensiero di un’associazione combattentistica e l’ideologia di un partito rivoluzionario, inteso a ribaltare i rapporti di forza tra le classi e tra le nazioni. Ma il milieu culturale, le aspettative ideali, i fini nazionali, appaiono fratelli: tali, comunque, da non giustificare i continui tentativi di sottrarre Jünger al suo mondo, volendolo ridurre ad agnostico e compassato letterato fine a se stesso.

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Tratto da Linea del 29 maggio 2005.


Luca Leonello Rimbotti

Réflexions sur la figure esthétique et littéraire du dandy

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Réflexions sur la figure esthétique et littéraire du “dandy”

 

Intervention de Robert Steuckers au séminaire de “SYNERGON-Deutschland”, Basse-Saxe, 6 mai 2001

 

Avant d’entrer dans le vif du sujet, je voudrais formuler trois remarques préliminaires:

◊ 1. J’ai hésité à accepter votre invitation à parler de la figure du dandy, car ce type de problématique n’est pas mon sujet de préoccupation privilégié.

 

◊ 2. J’ai finalement accepté parce que j’ai redécouvert un essai aussi magistral que clair d’Otto Mann, paru en Allemagne il y de nombreuses années (i. e. : Dandysmus als konservative Lebensform) (*). Cet essai mériterait d’être à nouveau réédité, avec de bons commentaires.

 

◊ 3. Ma troisième remarque est d’ordre méthodologique et définitionnel. Avant de parler du “dandy”, et de rappeler à ce sujet l’excellent travail d’Otto Mann, il faut énumérer les différentes définitions du “dandy”, qui ont cours, et qui sont contradictoires. Ces définitions sont pour la plupart erronées, ou superficielles et insuffisantes. D’aucuns définissent le dandy comme un “pur phénomène de mode”, comme un personnage élégant, sans plus, soucieux de se vêtir selon les dernières modes vestimentaires. D’autres le définissent comme un personnage superficiel, qui aime la belle vie et pérégrine, oisif, de cabaret en cabaret. Françoise Dolto avait brossé un tableau psychologique du dandy. D’autres encore soulignent, quasi exclusivement, la dimension homosexuelle de certains dandies, tel Oscar Wilde. Plus rarement on assimile le dandy à une sorte d’avatar de Don Juan, qui meuble son ennui en collectionnant les conquêtes féminines. Ces définitions ne sont pas celles d’Otto Mann, que nous faisons nôtres.

 

L’archétype: George Bryan Brummell

 

Notre perspective, à la suite de l’essai d’Otto Mann, est d’attribuer au dandy une dimension culturelle plus profonde que toutes ses superficialités “modieuses”, épicuriennes, hédonistes, homosexuelles ou donjuanesques. Pour Otto Mann, le modèle, l’archétype du dandy, reste George Bryan Brummell, figure du début du 19ième siècle qui demeurait équilibrée. Brummell, contrairement à certains pseudo-dandies ultérieurs, est un homme discret, qui ne cherche pas à se faire remarquer par des excentricités vestimentaires ou comportementales. Brummell évite les couleurs criardes, ne porte pas de bijoux, ne se livre pas à des jeux sociaux de pur artifice. Brummell est distant, sérieux, digne; il n’essaie pas de faire de l’effet, comme le feront, plus tard, des figures aussi différentes qu’Oscar Wilde, que Stefan George ou Henry de Montherlant. Chez lui, les tendances spirituelles dominent. Brummell entretient la société, raconte, narre, manie l’ironie et même la moquerie. Pour parler comme Nietzsche ou Heidegger, nous dirions qu’il se hisse au-dessus de l’«humain, trop humain» ou de la banalité quotidienne (Alltäglichkeit).

 

Brummell, dandy de la première génération, incarne une forme culturelle, une façon d’être, que notre société contemporaine devrait accepter comme valable, voire comme seule valable, mais qu’elle ne génère plus, ou plus suffisamment. Raison pour laquelle le dandy s’oppose à cette société. Les principaux motifs qui sous-tendent son opposition sont les suivants : 1) la société apparaît comme superficielle et marquée de lacunes et d’insuffisances; 2) le dandy, en tant que forme culturelle, qu’incarnation d’une façon d’être, se pose comme supérieur à cette société lacunaire et médiocre; 3) le dandy à la Brummell ne commet aucun acte exagéré, ne commet aucun scandale (par exemple de nature sexuelle), ne commet pas de crime, n’a pas d’engagement politique (contrairement aux dandies de la deuxième génération comme un Lord Byron). Brummell lui-même ne gardera pas cette attitude jusqu’à la fin de ses jours, car il sera criblé de dettes, mourra misérablement à Caen dans un hospice. Il avait, à un certain moment, tourné le dos au fragile équilibre que réclame la posture initiale du dandy, qu’il avait été le premier à incarner.

 

Un idéal de culture, d’équilibre et d’excellence

 

S’il n’y a dans son comportement et sa façon d’être aucune exagération, aucune originalité flamboyante, pourquoi la figure du dandy nous apparaît-elle quand même importante, du moins intéressante? Parce qu’elle incarne un idéal, qui est en quelque sorte, mutatis mutandis, celui de la paiedeia grecque ou de l’humanitas romaine. Chez Evola et chez Jünger, nous avons la nostalgie de la magnanimitas latine, de l’hochmüote des chevaliers germaniques des 12ième et 13ième siècles, avatars romains ou médiévaux d’un modèle proto-historique perse, mis en exergue par Gobineau d’abord, par Henry Corbin ensuite. Le dandy est l’incarnation de cet idéal de culture, d’équilibre et d’excellence dans une période plus triviale de l’histoire, où le bourgeois calculateur et inculte, et l’énergumène militant, de type hébertiste ou jacobin, a pris le pas sur l’aristocrate, le chevalier, le moine et le paysan.

 

A la fin du 18ième siècle, avec la révolution française, ces vertus, issues du plus vieux fond proto-historique de l’humanité européenne, sont complètement remises en question. D’abord par l’idéologie des Lumières et son corrolaire, l’égalitarisme militant, qui veut effacer toutes les traces visibles et invisibles de cet idéal d’excellence. Ensuite, par le Sturm und Drang et le romantisme, qui, par réaction, basculent parfois dans un sentimentalisme incapacitant, parce qu’expression, lui aussi, d’un déséquilibre. Les modèles immémoriaux, parfois estompés et diffus, les attitudes archétypales survivantes disparaissent. C’est en Angleterre qu’on en prend conscience très vite, dès la fin du 17ième, avant même les grands bouleversements de la fin du 18ième : Addison et Steele dans les colonnes du Spectator et du Tatler, constatent qu’il est nécessaire et urgent de conserver et de maintenir un système d’éducation, une culture générale, capables de garantir l’autonomie de l’homme. Une valeur que les médias actuels ne promeuvent pas, preuve discrète que nous avons bel et bien sombré dans un monde orwellien, qui se donne un visage de “bon apôtre démocratique”, inoffensif et “tolérant”, mais traque impitoyablement toutes les espaces et résidus d’autonomie de nos contemporains. Addison et Steele, dans leurs articles successifs, nous ont légué une vision implicite de l’histoire culturelle et intellectuelle de l’Europe.

 

L’idéal de Goethe

 

Le plus haut idéal culturel que l’Europe ait connu est bien entendu celui de la paideia grecque antique. Elle a été réduite à néant par le christianisme primitif, mais, dès le 14ième siècle, on sent, dans toute l’Europe, une volonté de faire renaître les idéaux antiques. Le dandy, et, bien avant son émergence dans le paysage culturel européen, les deux journalistes anglais Steele et Addison, entendent incarner cette nostalgie de la paideia, où l’autonomie de chacun est respectée. Ils tentent en fait de réaliser concrètement dans la société l’objectif de Goethe: inciter leurs contemporains à se forger et se façonner une personnalité, qui sera modérée dans ses besoins, satisfaite de peu, mais surtout capable, par cette ascèse tranquille, d’accéder à l’universel, d’être un modèle pour tous, sans trahir son humus originel (Ausbildung seiner selbst zur universalen und selbstgenugsamen Persönlichkeit). Cet idéal goethéen, partagée  anticipativement par les deux publicistes anglais puis incarné par Brummell, n’est pas passé après les vicissitudes de la révolution française, de la révolution industrielle et des révolutions scientifiques de tous acabits. Sous les coups de cette modernité, irrespectueuse des Anciens, l’Europe se retrouve privée de toute culture substantielle, de toute épine dorsale éthique. On en mesure pleinement les conséquences aujourd’hui, avec la déliquescence de l’enseignement.

 

A partir de 1789, et tout au long du 19ième siècle, le niveau culturel ne cesse de s’effondrer. Le déclin culturel commence au sommet de la pyramide sociale, désormais occupé par la bourgeoisie triomphante qui, contrairement aux classes dominantes des époques antérieures, n’a pas d’assise morale (sittlich) valable pour maintenir un dégré élevé de civilisation; elle n’a pas de fondement religieux, ni de réelle éthique professionnelle, contrairement aux artisans et aux gens de métier, jadis encadrés dans leurs gildes ou corporations (Zünfte). La seule réalisation de cette bourgeoisie est l’accumulation méprisable de numéraire, ce qui nous permet de parler, comme René Guénon, d’un “règne de la quantité”, d’où est bannie toute qualité. Dans les classes défavorisées, au bas de l’échelle sociale, tout élément de culture est éradiqué, tout simplement parce que chez les pseudo-élites, il n’y a déjà plus de modèle culturel; le peuple, aliéné, précarisé, prolétarisé, n’est plus une matrice de valeurs précises, ethniquement déterminées, du moins une matrice capable de générer une contre-culture offensive, qui réduirait rapidement à néant ce que Thomas Carlyle appelait la “cash flow mentality”. En conclusion, nous assistons au déploiement d’une barbarie nantie, à haut niveau économique (eine ökonomisch gehobene Barbarei), mais à niveau culturel nul. On ne peut pas être riche à la mode du bourgeois et, simultanément, raffiné et intelligent. Cette une vérité patente : personne de cultivé n’a envie de se retrouver à table, ou dans un salon, avec des milliardaires de la trempe d’un Bill Gates ou d’un Albert Frère, ni avec un banquier ou un fabricant de moteurs d’automobile ou de frigidaires. Le véritable homme d’esprit, qui se serait égaré dans le voisinage de tels sinistres personnages, devrait sans cesse réprimer des baillements en subissant le vomissement continu de leurs bavardages ineptes, ou, pour ceux qui ont le tempérament plus volcanique, réprimer l’envie d’écraser une assiette bien grasse, ou une tarte à la façon du Gloupier, sur le faciès blet de ces nullités. Le monde serait plus pur —et sûrement plus beau— sans la présence de telles créatures.

 

La mission de l’artiste selon Baudelaire

 

Pour le dandy, il faut réinjecter de l’esthétique dans cette barbarie. En Angleterre, John Ruskin (1819-1899), les Pré-Réphaélites avec Dante Gabriel Rossetti et William Morris, vont s’y employer. Ruskin élaborera des projets architecturaux, destinés à embellir les villes enlaidies par l’industrialisation anarchique de l’époque manchesterienne, qui déboucheront notamment sur la construction de “cités-jardins” (Garden Cities). Les architectes belges et allemands de l’Art Nouveau ou Jugendstil, dont Henry Vandervelde et Victor Horta, prendront le relais. A côté de ces réalisations concrètes  —parce que l’architecture permet plus aisément de passer au concret—  le fossé ne cesse de se creuser entre l’artiste et la société. Le dandy se rapproche de l’artiste. En France, Baudelaire pose, dans ses écrits théoriques, l’artiste comme le nouvel “aristocrate”, dont l’attitude doit être empreinte de froideur distante, dont les sentiments ne doivent jamais s’exciter ni s’irriter outre mesure, dont l’ironie doit être la qualité principale, de même que la capacité à raconter des anecdotes plaisantes. Le dandy artiste prend ses distances par rapport à tous les dadas conventionnels et habituels de la société. Ces positions de Baudelaire se résument dans les paroles d’un personnage d’Ernst Jünger, dans le roman Héliopolis : «Je suis devenu le dandy, qui prend pour important ce qui ne l’est pas, qui se moque de ce qui est important » («Ich wurde zum Dandy, der das Unwichtige wichtig nahm, das Wichtige belächelte»). Le dandy de Baudelaire, à l’instar de Brummell, n’est donc pas un personnage scandaleux et sulfureux à la Oscar Wilde, mais un observateur froid (ou, pour paraphraser Raymond Aron, un “spectateur désengagé”), qui voit le monde comme un simple théâtre, souvent insipide où des personnages sans réelle substance s’agitent et gesticulent. Le dandy baudelérien a quelque peu le goût de la provocation, mais celle-ci reste cantonnée, dans la plupart des cas, à l’ironie.

 

Les exagérations ultérieures, souvent considérées à tort comme expressions du dandysme, ne correspondent pas aux attitudes de Brummell, Baudelaire ou Jünger. Ainsi, un Stefan George, malgré le grand intérêt de son œuvre poétique, pousse l’esthétisme trop loin, à notre avis, pour verser dans ce qu’Otto Mann appelle l’«esthéticisme», caricature  de toute véritable esthétique.Pour Stefan George, c’est un peu la rançon à payer à une époque où la “perte de tout juste milieu” devient la règle (Hans Sedlmayr a explicité clairement dans un livre célèbre sur l’art contemporain, Verlust der Mitte, cette perte du “juste milieu”). Sedlmayr mettait clairement en exergue cette volonté de rechercher le “piquant”. Stefan George le trouvera dans ses mises en scène néo-antiques. Oscar Wilde ne mettra rien d’autre en scène que lui-même, en se proclamant “réformateur esthétique”. L’art, dans sa perspective, n’est plus un espace de contestation destiné à investir totalement, à terme, le réel social, mais devient le seule réalité vraie. La sphère économique, sociale et politique se retrouve dévalorisée; Wilde lui dénie toute substantialité, réalité, concrétude. Si Brummell conservait un goût tout de sobriété, s’il gardait la tête sur les épaules, Oscar Wilde se posait d’emblée comme un demi-dieu, portait des vêtements extravagants, aux couleurs criardes, un peu comme les Incroyables et les Merveilleuses au temps de la révolution française. Provocateur, il a aussi amorcé un processus de mauvaise “féminisation/dévirilisation”, en se promenant dans les rues avec des fleurs à la main. A l’heure des actuelles “gay prides”, on peut le considérer comme un précurseur. Ses poses constituent tout un théâtre, assez éloigné, finalement, de ce sentiment tranquille de supériorité, de dignité virile, de “nil admirari”, du premier Brummell.

 

Auto-satisfaction et sur-dimensionnement du “moi”

 

Pour Otto Mann, cette citation de Wilde est emblématique : « Les dieux m’ont presque tout donné. J’avais du génie, un nom illustre, une position sociale élevée, la gloire, l’éclat, l’audace intellectuelle ; j’ai fait de l’art une philosophie et de la philosophie un art; j’ai appris aux hommes à penser autrement et j’ai donné aux choses d’autres couleurs... Tout ce que j’ai touché s’est drapé dans de nouveaux effets de beauté; à la vérité, je me suis attribué, à juste titre, le faux comme domaine et j’ai démontré que le faux, tout comme le vrai, n’est qu’une simple forme d’existence postulée par l’intellect. J’ai traité l’art comme la vérité suprême, et la vie comme une branche de la poésie et de la littérature. J’ai éveillé la fantaisie en mon siècle, si bien qu’il a créé, autour de moi, des mythes et des légendes. J’ai résumé tous les systèmes philosophiques en un seul épigramme. Et à côté de tout cela, j’avais encore d’autres atouts». L’auto-satisfaction, le sur-dimensionnement du “moi” sont patents, vont jusqu’à la mystification.

 

Ces exagérations iront croissant, même dans l’orbite de cette virilité stoïque, chère à Montherlant. Celui-ci, à son tour, exagère dans les poses qu’il prend, en pratiquant une tauromachie fort ostentatoire ou en se faisant photographier, paré du masque d’un empereur romain. Le risque est de voir des adeptes minables verser dans un “lookisme” tapageur et de mauvais goût, de formaliser à l’extrême ces attitudes ou ces postures du poète ou de l’écrivain. En aucun cas, elles n’apportent une solution au phénomène de la décadence. En matière de dandysme, la seule issue est de revenir calmement à Brummell lui-même, avant qu’il ne sombre dans les déboires financiers. Car ce retour au premier Brummell équivaut, si l’on se souvient des exhortations antérieures d’Addison et Steele, à une forme plus moderne, plus civile et peut-être plus triviale de paideia ou d’humanitas. Mais, trivialité ou non, ces valeurs seraient ainsi maintenues, continueraient à exister et à façonner les esprits. Ce mixte de bon sens et d’esthétique dandy permettrait de dégager un objectif politique pratique : défendre l’école au sens classique du terme, augmenter sa capacité à transmettreles legs de l’antiquité hellénique et romaine, prévoir une pédagogie nouvelle et efficace, qui serait un mixte d’idéalisme à la Schiller, de méthodes traditionnelles et de méthodes inspirées par Pestalozzi.

 

Retour à la religion ou “conscience malheureuse”?

 

La figure du dandy doit donc être replacée dans le contexte du 18ième siècle, où les idéaux et les modèles classiques de l’Europe traditionnelle s’érodent et disparaissent sous les coups d’une modernité équarissante et arasante. Les substances religieuses, chrétiennes ou pré-chrétiennes sous vernis chrétien, se vident et s’épuisent. Les Modernes prennent le pas sur les Anciens. Ce processus conduit forcément à une crise existentielle au sein de l’écoumène civilisationnel européen. Deux pistes s’offrent à ceux qui tentent d’échapper à ce triste destin : 1) Le retour à la  religion, ou à la tradition, piste importante mais qui n’est pas notre propos aujourd’hui, tant elle représente un continent de la pensée, fort vaste, méritant un séminaire complet à elle seule. 2) Cultiver ce que les romantiques appelaient la Weltschmerz, la douleur que suscitait ce monde désenchanté, ce qui revient à camper sur une position critique permanente à l’endroit des manifestations de la modernité, à développer une conscience malheureuse, génératrice d’une culture volontairement en marge, mais où l’esprit politiquepeut puiser des thématiques offensives et contestatrices.

 

Pour le dandy et le romantique, qui oscille entre le retour à la religion et le sentiment de Weltschmerz, cette dernière est surtout ressentie de l’intérieur. C’est dans l’intériorité du poète ou de l’artiste que ce sentiment va mûrir, s’accroître, se développer. Jusqu’au point de devenir dur, de dompter le regard et d’éviter ainsi les langueurs ou les colères suscitées par la conscience malheureuse. En bout de course, le dandy doit devenir un observateur froid et impartial, qui a dominé ses sentiments et ses émotions. Si le sang a bouillonné face aux “horreurs économiques”, il doit rapidement se refroidir, conduire à l’impassibilité, pour pouvoir les affronter efficacement. Le dandy, qui a subi ce processus, atteint ainsi une double impassibilité : rien d’extérieur ne peut plus l’ébranler; mais aucune émotion intérieure non plus. Pierre Drieu La Rochelle ne parviendra jamais à un tel équilibre, ce qui donne une touche très particulière et très séduisante à son œuvre, tout simplement parce qu’elle nous dévoile ce processus, en train de se réaliser, vaille que vaille, avec des ressacs, des enlisements et des avancées. Drieu souffre du monde, s’essaie aux avant-gardes, est séduit par la discipline et les aspects “métalliques” du fascisme “immense et rouge”, en marche à son époque, accepte mentalement la même discipline chez les communistes et les staliniens, mais n’arrive pas vraiment à devenir un “observateur froid et impartial” (Benjamin Constant). L’œuvre de Drieu La Rochelle est justement immortelle parce qu’elle révèle cette tension permanente, cette crainte de retomber dans les ornières d’une émotion inféconde, cette joie de voir des sorties vigoureuses hors des torpeurs modernes, comme le fascisme, ou la gouaille d’un Doriot.

 

Blinder le mental et le caractère

 

En résumé, le processus de deconstruction des idéaux de la paideia antique, et de déliquescence des substantialités religieuses immémoriales, qui s’amorce à la fin du 18ième siècle, équivaut à une crise existentielle généralisée à tous les pays occidentaux. La réponse de l’intelligence à cette crise est double : ou bien elle appelle un retour à la religion ou bien elle suscite, au fond des  âmes, une douleur profondément ancrée, la fameuse Weltschmerz des romantiques. La Weltschmerz se ressent dans l’intériorité profonde de l’homme qui fait face à cette crise, mais c’est aussi dans son intériorité qu’il travaille silencieusement à dépasser cette douleur, à en faire le matériel premier pour forger la réponse et l’alternative à cette épouvantable déperdition de substantialité, surplombée par un économicisme délétère. Il faut donc se blinder le mental et le caractère, face aux affres qu’implique la déperdition de substantialité, sans pour autant inventer de toutes pièces des Ersätze plus ou moins boîteux à la substantialité de jadis. Baudelaire et Wilde pensent, tous deux à leur manière, que l’art va offrir une alternative, plus souple et plus mouvante que les anciennes substantialités, ce qui est quasiment exact sur toute la ligne, mais, dans ce cas, l’art ne doit pas être entendu comme simple esthétisme. Le blindage du mental et du caractère doit servir, in fine, à combattre l’économicisme ambiant, à lutter contre ceux qui l’incarnent, l’acceptent et mettent leurs énergies à son service. Ce blindage doit servir de socle moral et psychologique dur aux idéaux de combat politique et métapolique. Ce blindage doit être la carapace de ce qu’Evola appelait l’«homme différencié», celui qui “chevauche le tigre”, qui erre, imperturbé et imperturbable, “au milieu des ruines”, ou que Jünger désignait sous le vocable d’«anarque». “L’homme différencié qui chevauche le tigre au milieu des ruines” ou “l’anarque” sont posés d’emblée comme des observateurs froids, impartiaux, impassibles. Ces hommes différenciés, blindés, se sont hissés au-dessus de deux catégories d’obstacles : les obstacles extérieurs et les obstacles générés par leur propre intériorité. C’est-à-dire les barrages dressés par les “hommes de moindre valeur”  et les alanguissements de l’âme en détresse.

 

Figures tchandaliennes de la décadence

 

La crise existentielle, qui débute vers le milieu du 18ième siècle, débouche donc sur un nihilisme, très judicieusement défini par Nietzsche comme un “épuisement de la vie”, comme “une dévalorisation des plus hautes valeurs”, qui s’exprime souvent par une agitation frénétique sans capacité de jouir royalement de l’otium, agitation qui accélère le processus d’épuisement. La mise en schémas de l’existence est l’indice patent que nos “sociétés”ne forment plus des “corps”, mais constituent, dit Nietzsche, des “conglomérats de Tchandalas”, chez qui s’accumulent les maladies nerveuses et psychiques, signe que la puissance défensive des fortes natures n’est plus qu’un souvenir. C’est justement cette “puissance défensive” que l’homme “différencié” doit, au bout de sa démarche, de sa quête dans les arcanes des traditions, reconstituer en lui. Nietzsche énumère très clairement les vices du Tchandala, figure emblématique de la décadence européenne, issue de la crise existentielle et du nihilisme: le Tchandala est affecté de pathologies diverses, sur fond d’une augmentation de la criminalité, de célibat  généralisée et de stérilité voulue, d’hystérie, d’affaiblissement constant de la volonté, d’alcoolisme (et de toxicomanies diverses ajouterions-nous), de doute systématique, d’une destruction méthodique et acharnée des résidus de force. Parmi les figures tchandaliennes de cette décadence et de ce nihilisme, Nietzsche compte ceux qu’il appelle les “nomades étatiques” (Staatsnomaden) que sont les fonctionnaires, sans patrie réelle, serviteurs du “monstre froid”, au mental mis en schémas et, subséquemment, générateurs de toujours davantage de schémas, dont l’existence parasitaire engendre, par leur effroyable pesanteur en progression constante, le déclin des familles, dans un environnement fait de diversités contradictoires et émiettées, où l’on trouve

 

-         le “disciplinage” (Züchtung) des caractères pour servir les abstractions du monstre froid,

-         la lubricité généralisée comme forme de nervosité et comme expression d’un besoin insatiable et compensatoire de stimuli et d’excitations,

-         les névroses en tous genres,

-         les fascinations morbides pour les mécanismes et pour les enchaînements, limités, de sèches causalités sans levain,

-         le présentisme politique (Augenblickdienerei) où ne dominent plus, souverainement, ni longue mémoire ni perspectives profondes ni sens naturel et instinctif du bon droit,

-         le sensibilisme pathologique,

-         les doutes inféconds procédant d’un effroi morbide face aux forces impassables qui ont fait et feront encore l’histoire-puissance,

-         une peur d’arraisonner le réel, de saisir les choses tangibles de ce monde.

 

Victor Segalen en Océanie, Ernst Jünger en Afrique

 

Dans ce complexe de froideur, d’immobilisme agité, de frénésies infécondes, de névroses, une première réponse au nihilisme est d’exalter et de concrétiser le principe de l’aventure, où le contestataire quittera le monde bourgeois tissé d’artifices, pour s’en aller vers des espaces vierges, intacts, authentiques, ouverts, mystérieux. Gauguin part pour les îles du Pacifique. Victor Segalen, à sa suite, chante l’Océanie primordiale et la Chine impériale qui se meurt sous les coups de l’occidentalisme. Segalen demeure breton, opère ce qu’il appelait le “retour à l’os ancestral”, dénonce l’envahissement de Tahiti par les “romances américaines”, ces “parasites immondes”, rédige un “Essai sur l’exotisme” et “Une esthétique du divers”. Le rejet des brics et brocs sans passé profond ont valu à Segalen un ostracisme injustifié dans sa patrie : il reste un auteur à redécouvrir, dans la perspective qui est nôtre.

 

Le jeune Jünger, encore adolescent, rêve de l’Afrique, du continent où vivent les éléphants et d’autres animaux fabuleux, où les espaces et les paysages ne sont pas meurtris par l’industrialisation, où la nature et les peuples indigènes ont conservé une formidable virginité, permettant encore tous les possibles. Le jeune Jünger s’engage dans la Légion Etrangère pour concrétiser ce rêve, pour pouvoir débarquer dans ce continent nouveau, perclus de mystères et de vitalité. 1914 lui donnera, à lui et à toute sa génération, l’occasion de sortir d’une existence alanguissante. Dans la même veine, Drieu La Rochelle parlera de l’élan de Charleroi. Et plus tard, Malraux, de “Voie Royale”. A “gauche” (pour autant que cette dichotomie politicienne ait un sens), on parlera plutôt d’ “engagement”, où ce même enthousiasme se retrouvera surtout lors de la Guerre d’Espagne, où Hemingway, Orwell, Koestler, Simone Weil s’engageront dans le camp des Républicains, et Campbell dans le camp des Nationalistes, qui fut aussi, comme on le sait, chanté par Robert Brasillach. L’aventure et l’engagement, dans l’uniforme du soldat ou des milices phalangistes, dans les rangs des brigades internationales ou des partisans, sont perçus comme antidotes à l’hyperformalisme d’une vie civile sans couleurs. “I was tired of civilian life, therefore I joined the IRA”), est-il dit dans un chant nationaliste irlandais, qui, dans son contexte particulier, proclame, avec une musique primesautière, cette grande envolée existentialiste du début du 20ième siècle avec toute la désinvolture, la verdeur, le rythme et la gouaille de la Verte Eirinn.

 

Ivresses? Drogues? Amoralisme?

 

Mais si l’engagement politique ou militaire procure, à ceux que le formalisme d’une vie civile, sans plus aucun relief ni équilibre traditionnel, ennuie, le supplément d’âme recherché, le rejet de tout formalisme peut conduire à d’autres attitudes, moins positives. Le dandy, qui quitte la pose équilibrée de Brummell ou la critique bien ciselée de Baudelaire, va vouloir expérimenter toujours davantage d’excitations, pour le seul plaisir stérile d’en éprouver. La drogue, la toxicomanie, la consommation exagérée d’alcools vont constituer des échappatoires possibles: la figure romanesque créée par Huysmans, Des Esseintes, fuira dans les liqueurs. Thomas De Quincey évoquera les “mangeurs d’opium” (“The Opiumeaters”). Baudelaire lui-même goûtera l’opium et le haschisch. Ce basculement dans les toxicomanies s’explique par la fermeture du monde, après la colonisation de l’Afrique et d’autres espaces jugés vierges; l’aventure réelle, dangereuse, n’y est plus possible. La guerre, expérimentée par Jünger, quasi en même temps que les “drogues et les ivresses”, cesse d’attirer car la figure du guerrier devient un anachronisme quand les guerres se professionnalisent, se mécanisent et se technicisent  à outrance.

 

Autre échappatoire sans aucune positivité : l’amoralisme et l’anti-moralisme. Oscar Wilde fréquentera des bars louches, exhibera de manière très ostentatoire son homosexualité. Son personnage Dorian Gray devient criminel, afin de transgresser toujours davantage ce qui a déjà été transgressé, avec une sorte d’hybris pitoyable. On se souviendra de la fin pénible de Montherlant et on gardera en mémoire l’héritage douteux que véhicule encore aujourd’hui son exécuteur testamentaire, Gabriel Matzneff, dont le style littéraire est certes fort brillant mais dans le sillage duquel de bien tristes scénarios se déroulent, montés en catimini, dans des cercles fermés et d’autant plus pervers et ridicules que la révolution sexuelle des années 60 permet tout de même de goûter sans moralisme étriqué à beaucoup de voluptés gaillardes et goliardes. Ces drogues, transgressions et sexomanies bouffonnes constituent autant d’apories, de culs-de-sac existentiels où aboutissent lamentablement quelques détraqués, en quête d’un “supplément d’âme”, qu’ils veulent “transgresseur”, mais qui, pour l’observateur ironique, n’est rien d’autre que le triste indice d’une vie ratée, d’une absence de grand élan véritable, de frustrations sexuelles dues à des défauts ou des infirmités physiques. Décidément, ne “chevauche pas le  Tirgre” qui veut et on ne voit pas très bien quel “Tigre” il y a à chevaucher dans les salons où le vieux beau Matzneff laisse quelques miettes de ses agapes sexuelles à ses admirateurs un peu torves...

 

Ascèse religieuse

 

L’alternative véritable, face au monde bourgeois, des “petits jobs” et des “petits calculs”, moqués par Hannah Arendt, dans un monde désormais fermé, où aventures et découvertes ne sont plus que répétitions, où la guerre est “high tech” et non plus chevaleresque, réside dans l’ascèse religieuse, dans un certain retour au monachisme de méditation, dans le recours aux traditions (Evola, Guénon, Schuon). Drieu la Rochelle évoque cette piste dans son “Journal”, après ses déceptions politiques, et rend compte de sa lecture de Guénon. Les frères Schuon sont exemplaires à ce titre : Frithjof part à la Légion Etrangère, arpente le Sahara, fait connaissance avec les soufis et les marabouts du désert ou de l’Atlas, adhère à une mystique soufie islamisée, part ensuite dans les réserves de Sioux aux Etats-Unis, laisse une œuvre picturale étonnante et époustouflante. Son frère, nommé le “Père Galle”, arpente les réserve améridiennes d’Amérique du Nord, traduit les évangiles en langue sioux, se retire dans une trappe wallonne, y dresse des jeunes chevaux à la mode indienne, y rencontre Hergé et se lie d’amitié avec lui. Des existences qui prouvent que l’aventure et l’évasion totale hors du monde frelaté de l’occidentisme (Zinoviev) demeure possible et féconde.

 

Car la rébellion est légitime, si elle ne bascule pas dans les apories ou ne débouche pas sur un satanisme de mauvais aloi, comme dans certaines sectes néo-païennes, plus ou moins inspirées par les faits et gestes d’un Alistair Crowley. Ce dérapage s’explique : la rébellion, faute de cause, devient hélas service à Satan, lorsque le mal en soi  —ou ce qui passe pour le “mal en soi”—  est devenu l’excitation existentielle considérée comme la plus osée. Dans un monde désenchanté, comme le nôtre, livré aux plaisirs stupides et passifs fournis par les médias, ce satanisme, avec son cortège sinistre de gesticulations absurdes et infécondes, séduit des esprits faibles, comme ceux qui traînent, par puritanisme mal digéré et mal surmonté, dans les salons où agit Matzneff et “passivent” ses voyeurs d’admirateurs. Ce n’est en tout cas pas l’attitude que souhaitait généraliser Brummell.

 

Robert STEUCKERS,

Forest/Flotzenberg, Vlotho im Weserbergland, mai 2001.

 

Note:

(*) : Otto MANN, “Dandysmus als konservative Lebensform” in: Gerd-Klaus KALTENBRUNNER (Hrsg.), Konservatismus International, Seewald Verlag, Stuttgart, 1973, ISBN 3-51200327-3, pp.156-170.

mardi, 02 septembre 2008

A. J. Langbehn: le prophète solitaire de la simplicité

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August Julius Langbehn: le prophète solitaire de la simplicité

Hommage à l'Allemand qui aimait Rembrandt à l'occasion du 90ième anniversaire de sa mort

 

Dans les années 90 du siècle passé, la bourgeoisie cultivée allemande, la Bildungsbürgertum, a été saisie par un malaise culturel, qui s'était lentement insinué dans les esprits à partir de la fondation du IIième Reich et avait atteint son point culminant dans l'atmosphère “fin-de-siècle” vers 1900. Dans cette époque de désorientement culturel où l'on recherchait de nouvelles voies, un nouveau livre est paru avec un titre tout aussi prophétique que mystérieux: Rembrandt als Erzieher - Vom einen Deutschen (= Rembrandt comme éducateur. Par un Allemand). L'auteur restait en effet anonyme. Mais son livre deviendra vite l'un des plus gros succès de librairie du siècle. Edité pour la première fois en 1890, il connaîtra 43 éditions rien que dans les trois années suivantes.

 

L'auteur, August Julius Langbehn, est pratiquement tombé dans l'oubli aujourd'hui. Né en 1851 dans le Nord du Slesvig/Schleswig dans la famille d'un vice-recteur de Gymnasium, Langbehn sombra vite dans la détresse matérielle après la mort prématurée de son père, ce qui ne l'empêcha pas, à terme, de s'inscrire dans les universités de Kiel et de Munich dès 1869, où il termina des études de philologie et de science naturelle. Après un long voyage en Italie, il se tourna finalement vers l'archéologie des premiers âges de la Grèce antique. Il termine ces études en 1880 et rédige un mémoire. Pendant et après ses études, qui ont duré dix ans, Langbehn a vécu une existence nomade, instable et très précaire. Mais jamais il n'a exercé de profession parallèle; pendant longtemps, il n'a vécu que de petites publications ou des dons de quelques mécènes comme le peintre Wilhelm Leibl et Hans Thoma.

 

Le livre Rembrandt als Erzieher  est le reflet de la conception que Langbehn se faisait de la vie. En plein milieu d'un siècle scientifique, perclus de positivisme et de modernité, d'un siècle qui voit émerger partout des mégapoles où croît démesurément l'importance de l'économie et du capital, Langbehn voulait annoncer et préfigurer une ère nouvelle placée sous l'enseigne de cet esprit prémoderne que fut l'idéalisme, un esprit qu'il espérait capable de propulser dans l'avenir le meilleur de la culture allemande. En écrivant ce livre, Langbehn était l'un des premiers en Allemagne à affirmer ouvertement, dans un langage clair, ce qu'une grande partie des bourgeois cultivés allemands ressentait confusément. Langbehn écrivait ainsi avec ses propres mots  —et portés par d'autres intentions—  ce qu'avant lui Nietzsche et Paul de Lagarde avaient exprimé dans leurs critiques de la culture européenne: à l'effondrement du système des valeurs qui avait dominé jusque là, il fallait répondre par un retour conscient aux valeurs spécifiques de son propre peuple. Pour Langbehn, outre le retour aux sources de la paysannerie allemande, il fallait aussi s'adonner totalement à l'art. Un art véritable, pensait-il, ne pouvait émerger et s'amplifier qu'au départ de cette force intacte du paysannat allemand, non encore appauvri dans ses instincts. C'est la raison pour laquelle les attaques critiques de Langbehn contre la culture dominante concernaient en première instance le scientisme. Par haine contre toutes les formes d'intellectualisme, il avait déchiré son propre diplôme de doctorat et l'avait renvoyé chez le doyen de l'université de Munich, afin d'être rayé de la liste des diplômés. A une culture trop savante et trop compilatoire, il opposait la simplicité comme “médicament pour les maux du présent”.

 

Bien que Langbehn se soit considéré comme un aristocrate, il était un défenseur véhément de la “communauté populaire” (Volksgemeinschaft). Très tôt, il souleva la question sociale et voulut dépasser les clivages entre classes. Peu sensible aux contradictions, il réclamait l'avènement d'un Ständestaat  et un retour de l'aristocratie au pouvoir, de façon “à ce que chacun puisse conserver sa dignité à sa place et faire valoir sa personnalité”, et “se soumettre volontairement à ceux qui sont au-dessus de lui”.

 

Le catholicisme d'un éternel enfant

 

A juste titre, on a reproché à Langbehn d'avoir produit un mauvais livre à l'écriture trop pathétique, un livre illisible véhiculant dans ses idées beaucoup trop de contradictions: une “rhapsodie d'irrationalisme” (Fritz Stern). D'autres en revanche le nommaient un “visionnaire”, un “homme à la quête de Dieu” ou un “héraut dans le désert”. C'est un fait: pendant toute sa vie, Langbehn a cherché. Issu d'un foyer au protestantisme strict, il se convertit en 1900 au catholicisme, dans l'espoir d'y trouver l'“holicité originelle perdue”. A ce propos, il a dit: “J'ai toujours été enfant et c'est en tant qu'enfant que je me sens attiré par la nature maternelle de l'église catholique”. C'est justement parce que le nationalisme et l'idée grande-allemande chez Langbehn ont pris ultérieurement des formes plus catholiques et que sa critique de la culture dominante s'en ressentait, que les nationaux-socialistes ont pris leurs distances par rapport à son œuvre. Son ouvrage principal, Rembrandt als Erzieher, a encore connu une édition en 1943  —sans doute parce qu'il avait des connotations antisémites—  mais depuis longtemps déjà la diffusion de ses ouvrages ne recevait plus aucun soutien.

 

Mais c'est essentiellement dans le mouvement de jeunesse que l'influence de Langbehn a duré le plus longtemps sans fléchir. Le fondateur du mouvement Wandervogel, Karl Fischer, le pédagogue et réformateur Ludwig Gurlitt, de même que Hans Blüher, étaient des disciples de Langbehn. Après la mort de Langbehn lors de son voyage à Rosenheim en 1907, il fut, selon ses vœux, enterré dans le village de Puch, près de Fürstenfeldbruck, sous un tilleul qui avait servi de toit à Sainte-Edigna au moyen-âge. Les garçons et les filles du mouvement de jeunesse ont fait de cette tombe un lieu de pélérinage. Ils voulaient honorer le “Rembrandtdeutscher” et se souvenir de lui.

 

Frank LISSON.

(texte paru dans Junge Freiheit, n°18/1997; trad. franç.: Robert Steuckers).

 

jeudi, 28 août 2008

Brève note sur Heimito von Doderer

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Brève note sur Heimito von Doderer

Né le 5 septembre 1896, sous le nom de Franz Carl Heimito, Chevalier von Doderer, à Hadersdorf-Weidlingau et mort à Vienne le 23 décembre 1966, Heimito von Doderer fut un é­crivain autrichien, fils d'un architecte et entrepreneur de tra­vaux de construction. Il a servi comme aspirant dans un régiment de dragons pendant la première guerre mondiale. Il a été prisonnier pendant quatre ans en Russie [ndt: plus exac­tement, en Sibérie]. En 1920, il revient en Autriche, où il étudie l'histoire à Vienne, notamment sous la férule du Che­valier Heinrich von Srbik [ndt: et obtient son diplôme en 1925]. Sous la forte influence d'Albert Paris Gütersloh, il tente de s'initier au difficile métier d'écrivain. Il a com­men­cé, ainsi, mais sans grand succès, par publier des poèmes, de brèves nouvelles et des romans. En 1933, il adhère à la NSDAP, qui est interdite en Autriche à l'époque, mais la quit­te en 1938. Cette année-là, il accède enfin à une plus vaste notoriété grâce au roman Ein Mord den jeder begeht. En 1940, après sa conversion, il est accepté au sein de l'E­glise catholique. Pendant la seconde guerre mondiale, il sert en tant qu'officier de la force aérienne. Finalement, il acquiert la gloire par la publication de deux grands romans à thématique sociale, Die Strudlhofstiege (1951) et Die Dä­monen (1956).

La prose de Doderer se caractérise par une langue imagée, totalement inédite. Une série de motifs revient sans cesse dans son écriture, dont une critique systématique du pro­grès technique et de la civilisation moderne des grandes mé­tropoles; Doderer rejette aussi tous les linéaments de l'è­re des masses, qui empêchent, dit-il, le déploiement op­ti­mal de l'individualité personnelle. Il écrit, à ce propos: «Ce­lui qui appartient aux "masses", a d'ores et déjà perdu la liberté et peut s'installer où il veut».

Une adhésion à la plénitude complète du réel

[ndt: Le style littéraire de Doderer est largement influencé par Marcel Proust et Robert Musil, dans la mesure où, tout entier, il part, lui aussi, à la "recherche du temps perdu"; chez lui, cette recherche vise à retrouver les innombrables fractions de bonheur de l'Autriche-Hongrie d'avant 1914, en replongeant dans l'histoire sociale des hommes et des familles. Pour Doderer, le chaos de la société moderne ex­prime la crise de l'universalité, raison pour laquelle la tâ­che de l'écrivain doit être d'esquisser une nouvelle univer­salité, qui n'est évidemment pas un universalisme idéolo­gique à côté d'autres universalismes idéologiques, mais une adhésion à la plénitude complète du réel, comme on l'é­prou­vait généralement sans détours dans l'ancien empire da­nubien austro-hongrois. L'homme universel n'est pas un mo­dèle abstrait, taillé sur mesure une fois pour toutes, mais un être qui se manifeste sous des "variations multi­ples". En revanche, plongé dans le carcan étroit d'une "réa­lité seconde", faite de restrictions mutilantes de nature idéo­logique, il perd et son universalité et ses variations pour n'être plus qu'un instrument au service des pires bar­baries politisées de l'histoire. Heimito von Doderer dénonce l'idiotie immanente de toutes les positions doctrinaires, quel­les qu'elles soient. En cela, Doderer est disciple de Hoff­mansthal, qui disait: «L'idiotie, comme l'indique l'éty­mologie de ce mot étranger, n'est rien d'autre que l'auto-li­mitation de l'homme par lui-même». Une telle posture im­pli­que de revaloriser les communautés humaines, avec leurs échelles variables de formes sociales et de classes, contre l'uniformité grise des sociétés totalitaires, plaide si­mul­tanément pour une restauration des qualités humaines contre les affres de la quantité (Musil, Guénon). Uni­ver­sa­lité, variété et qualité impliquent de ce fait de respecter et de conserver le jeu des interpénétrations créatrices entre les éléments contradictoires du réel prolixe pour unir l'esprit conservateur et l'esprit émancipateur dans une quê­te permanente de la "totalité" (Ganzheit) ou, comme on le dit plus justement aujourd'hui en philosophie, l'"holicité" - RS].

Dans les ouvrages de Doderer, nous trouvons donc trois con­cepts centraux, présentés sous des facettes diverses: celui d'"aperception" (Apperzeption), celui de "seconde réalité" (zweite Wirklichkeit) et celui du "devenir-homme" (Mensch­werdung). Celui qui refuse de percevoir la réalité (telle qu'elle est), c'est-à-dire la réalité première, dit Doderer, fait éclore en lui, justement par ce refus de l'aperception, une seconde réalité, sous la forme d'une représentation fi­xiste (fixe Vorstellung) ou d'une idée-corset ou idée-cangue (Zwangsidee), ce qui correspond à une image du donné vi­ciée par l'idéologie. Doderer considère que l'Etat totalitaire constitue une "seconde réalité" de ce type, de même que ces volontés révolutionnaires et fébriles de vouloir tout changer, que le primat accordé névrotiquement à la politi­que, que les complexes d'ordre sexuel, que les névroses et que l'attachement forcené à certains systèmes et ordres.

La vie telle qu'elle est

Une bonne partie des personnages de l'univers romanesque de Doderer sont en lutte contre les formes de "seconde réa­lité". Les dépasser n'est possible que par un processus de "de­venir-homme", soit par le fait que l'homme revient ainsi à sa véritable destination, en s'ouvrant, de manière incon­ditionnelle, à la première réalité, la seule vraie, qui, pour Do­derer, est la vie civile naturelle, sans fard et sans exci­tations artificielles. Dans ce contexte, Doderer se réclame "de la vie telle qu'elle est" et nous enjoint de l'accepter. Il faut dès lors se détourner des fixismes idéologiques —qu'il désigne comme les "hémorroïdes de l'esprit"— des convic­tions et des idéaux qui sont soi-disant sublimes, pour s'a­don­ner à l'aperception pleine et entière du réel. Cette a­per­ception est essentiellement conservante  —ici, Doderer ar­ticule clairement sa position—  car celui qui adopte cette po­sition ne souhaite pas voir modifier ce qu'il aime ré­cep­tionner par "aperception" et se trouve autour de lui. Raison pour laquelle Doderer dit: «L'attitude fondamentale de l'hom­me apercevant est conservatrice».

Dr. Ulrich E. ZELLENBERG.

(extrait de "Lexikon des Konservatismus" - Caspar v. Schrenck-Notzing /Hrsg. - Leopold Stocker Verlag, Graz, 1996 - ISBN 3-7020-0760-1; trad. franç.: Robert Steuckers).

 

jeudi, 21 août 2008

Le grand bouleau est tombé... Hommage à A. Soljénitsyne

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“De Brave Hendrik” /  ’t Pallieterke:

Le grand bouleau est tombé...

Hommage à Alexandre Soljénitsyne (1918-2008)

Le bouleau est un type d’arbre à l’écorce blanche argentée, dont le bois est fort clair et très dur. En Sibérie et dans de nombreuses régions de l’immense plaine russe, avec ses marécages gelés et enneigés, cet arbre est familier, appartient au paysage. La barbe et les cheveux gris de Soljénitsyne, écrivain, chrétien orthodoxe que Staline n’était pas parvenu à éliminer, rappelaient, depuis quelques années déjà, les couleurs de cet arbre si emblématique, qui jaillit partout de la terre russe.

Sa vie connut un premier bouleversement en 1945, lorsque, dans une lettre à un camarade, il décrit “l’homme à la moustache” (= Staline) comme incompétent sur le plan militaire. Soljénitsyne était alors en Prusse orientale et participait aux combats pour prendre la ville de Königsberg (que l’on appelle aujourd’hui Kaliningrad, dans l’enclave russe sur les rives de la Baltique). Il est arrêté: une routine sous la terreur soviétique de l’époque. Il ne sera libéré que huit ans plus tard, en 1953, à l’époque où la paranoïa du dictateur atteignait des proportions à peine imaginables, tandis que sa santé diminuait à vue d’oeil. Staline ne voyait alors dans son entourage que complots juifs ou américains; de 1953 à 1956, Soljénitsyne, professeur de mathématiques de son état, réside, libre mais banni, au Kazakhstan. En 1956, on le réhabilite et en 1962, il amorce véritablement sa carrière d’écrivain en publiant dans la revue “Novi Mir” une nouvelle, “Une journée dans la vie d’Ivan Denissovitch”. Mais c’est en 1968 que ce dissident acquiert la  notoriété internationale, à cinquante ans, quand sortent de presse “Le pavillon des cancéreux” et “Le premier cercle”; il a réussi à faire passer clandestinement ses manuscrits à l’étranger; rapidement, ils sont connus dans le monde entier, par des traductions qui révèlent l’atrocité de son vécu de bagnard dans l’Archipel du goulag. En 1970, il est le deuxième Russe (le premier fut Ivan Bounine) à recevoir le Prix Nobel de littérature.

Celui qui veut comprendre et apprendre un maximum de choses sur la littérature russe dans l’espace linguistique néerlandophone, doit lire les écrits du grand slaviste Karel van het Reve (1921-1999), car celui-ci, mieux que quiconque, a pu, dans ses nombreux livres et essais, décrypter les mystères russes. Mais sa “Geschiedenis van de Russissche literatuur” (1) s’arrête malheureusement à Anton Tchekhov. Pour mieux comprendre la dissidence et l’intelligentsia russes, il me paraît toutefois utile de relire les travaux de ce slaviste, dont les titres sont éloquents: “Met twee potten pindakaas naar Moskou” (1970; “Avec deux pots de crème de cacahouète à Moscou”), “Lenin heeft echt bestaan” (1972; “Lénine a vraiment existé”) et “Freud, Stalin en Dostojevski” (1982; “Freud, Staline et Dostoïevski”). Dans un ouvrage posthume, paru en 2003, et intitulé “Ik heb nooit iets gelezen” (= “Je n’ai jamais rien lu”), ce grand connaisseur de la Russie, au regard froid et objectif mais néanmoins très original, émet force assertions qui témoignent de sa connaissance profonde des lettres russes. De son essai “De ondergang van het morgenland” (1990; “Le déclin de l’Orient”), je ne glanerai qu’une seule et unique phrase: “Selon le régime, en 1917, c’est la classe ouvrière, que l’on appelle également le prolétariat, qui est arrivée au pouvoir, alliée, comme on le prétend officiellement, aux paysans. C’est là une déclaration dont nous n’avons pas à nous préoccuper, si nous entendons demeurer sérieux. Surtout, ces paysans, que l’ont a tirés et hissés dans la mythologie révolutionnaire, font piètre figure, prêtent à rire (jaune): le régime a justement exterminé une bonne part du paysannat. Pour ce qui concerne les ouvriers, il est bien clair que ce groupe au sein de la population n’a quasiment rien à dire dans un régime communiste, et sûrement beaucoup moins que sous Nicolas II ou sous Lubbers et Kok aux Pays-Bas”.

Un changement qui doit surgir de l’intérieur même du pays...

Soljénitsyne n’était pas homme à se laisser jeter de la poudre aux yeux; prophète slavophile, il a progressivement appris à détester les faiblesses spirituelles et le matérialisme de l’Occident, pour comprendre, au bout de ses réflexions, que l’effondrement de l’Union Soviétique ne pouvait pas venir d’une force importée mais devait surgir de l’intérieur même du pays. La révolution, comme on le sait trop bien, dévore ses propres enfants. Le régime soviétique, lui, avec la “glasnost”, a commencé à accepter et à exhiber ses propres faiblesses, si bien que les credos marxistes ont fini par chanceler et le régime par chavirer. Déjà en 1975, la revue “Kontinent”, épaisse comme un livre, qui était un forum indépendant d’écrivains russes et est-européens, avait amorcé un débat sur l’idéologie en URSS en se référant à la “Lettre aux dirigeants de l’Union Soviétique” de Soljénitsyne, en la commentant à fond, avec des arguments de haut niveau. Un poète fidèle au régime avait même déclaré, à propos de ce débat: “Nous avons fusillé la Russie, cette paysanne au gros postérieur, pour que le ‘Messie communisme’ puisse marcher sur son cadavre et ainsi, y pénétrer”.

Pour donner un exemple du ton de Soljénitsyne, impavide et inébranlable, courageux et solide, j’aime citer une réponse claire qu’il adressa un jour à son compatriote Sakharov, une réponse qui garde toute sa validité aujourd’hui: “Nous devrions plutôt trouver une issue à tout ce capharnaüm omniprésent de termes tels impérialisme, chauvinisme intolérant, nationalisme arrogant et patriotisme timide (c’est-à-dire vouloir rendre avec amour service à son propre peuple, posture intellectuelle combinée avec des regrets sincères pour les péchés qu’il a commis; cette définition s’adresse également à Sakharov)”. Et il y a cette citation plus humaine encore: “Cette hypocrisie ne suffit-elle pas? Comme un électrode rouge, elle a laminé nos âmes pendant cinquante-cinq ans...”.

Les meilleurs livres de Soljénitsyne sont sans doute ceux qui sont le moins connus: je pense surtout à “Lénine à Zurich” (1975) et “Les erreurs de l’Occident” (1980). Quoi qu’il en soit, cet homme a surtout eu le grand mérite d’avoir, à temps et sans cesse, ouvert nos yeux, à nous ressortissants du riche Occident, alors qu’ils étaient aveuglés ou trompés; de nous avoir apporté son témoignage sur son époque et sa patrie (l’Orient ou la “Petite Mère Russie”) dans ses livres tout ruisselants d’authenticité; de nous avoir ainsi libérés des griffes du communisme, idéologie catastrophique et inhumaine.

Il a pu être enterré solennellement dans le sol de sa patrie russe et non pas en Suisse ou en cette lointaine Amérique, ses terres d’exil. Personne ne l’aurait cru, n’aurait osé le prévoir, il y a vingt ou trente ans.

“De brave Hendrik”,

(article paru dans “ ’t Pallieterke”, Anvers, 13  août 2008, trad. franç. : Robert Steuckers).

Note:

(1) paru à Amsterdam chez van Oorschot, cinquième édition revue et corrigée, 1990.

mercredi, 20 août 2008

Refuser le mensonge: hommage à A. Soljénitsyne

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J.K.: ’t Pallieterke :

Refuser le mensonge: hommage à Soljénitsyne

“C’est justement ici que se trouve la clef, celle que nous négligeons le plus, la clef la plus simple, la plus accessible pour accéder à notre libération: ne pas participer nous-mêmes au mensonge! Le mensonge peut avoir tout recouvert, peut régner sur tout, ce sera au plus petit niveau que nous résisterons: qu’ils règnent et dominent, mais sans ma collaboration!”.

Ces phrases sont tirées d’un essai de Soljénitsyne, intitulé “Ne vis pas avec le mensonge!”. Elles caractérisent parfaitement l’écrivain russe, décédé début août 2008. Il avait été le plus célèbre des dissidents et Prix Nobel de littérature. Il n’a pas participé au mensonge, effectivement, ce qui lui permit de donner une impulsion à la résistance contre le régime soviétique, impulsion qui, à terme, a conduit à l’effondrement de l’Etat totalitaire alors que, jadis, il avait semblé si invincible. 

“Ce fut Alexandre Soljénitsyne qui ouvrit les yeux du monde sur la réalité du système soviétique. C’est pourquoi, son vécu a une dimension universelle”, a déclaré le président français Sarközy après avoir appris la mort de l’écrivain. Les réactions officielles post mortem n’ont généralement rien de bien substantiel. Quoi qu’il en soit, en France, le pays de Sarközy, l’oeuvre littéraire de Soljénitsyne avait provoqué un gigantesque retournement des esprits. Gramsci, marxiste italien, savait que toute société est dirigée par ceux qui influencent la pensée. En France, dans le sillage de mai 68, fourmillaient les “compagnons de route”, souvent des intellectuels bien intentionnés, qui voyaient dans l’Etat soviétique la réalisation du paradis sur la Terre. La publication de “L’Archipel Goulag”, oeuvre littéraire monumentale où Soljénitsyne règle ses comptes avec le régime de terreur communiste, ouvre les yeux à de nombreux intellectuels français. C’est le début de la fin pour le communisme, en France et en dehors des frontières de l’Hexagone. Plus que n’importe quel autre écrivain, Soljénitsyne dévoila la vérité quant à l’oppression subie par son peuple sous la dictature communiste. Parce qu’il ne voulait pas participer au mensonge.

Qui connait encore Soljénitsyne?

La biographie de Soljénitsyne a été révélée dans ses grandes lignes dans notre presse flamande. Soldat de l’Armée Rouge, il est fait prisonnier par sa propre hiérarchie et déporté en Sibérie parce qu’il avait émis des critiques contre Staline dans une lettre à un ami; il fut condamné à huit années de camp de travail et ensuite à cinq années de bannissement intérieur. Auteur d’ouvrages critiques à l’endroit du régime, il oeuvre dans un premier temps avec l’accord de Khrouchtchev, leader du parti, qui espère tirer un profit personnel en autorisant certaines critiques contre Staline. Plus tard, contre l’avis des autorités soviétiques, Soljénitsyne obtint le Prix Nobel de littérature; il n’ira pas lui-même le chercher de crainte de ne pouvoir rentrer en Russie; il sera malgré tout banni du pays après la publication en Occident de “L’Archipel Goulag”. Pendant des années, il vivra reclus aux Etats-Unis, dans une propriété enneigée et plantée de pins dont les allures lui rappellaient la Russie. Réhabilité après la chute du communisme, il revient en Russie en 1994, où il se posera, une fois de plus, comme un critique non conformiste, hostile aux pouvoirs établis.

La presse flamande n’a pas raconté beaucoup d’autres choses à la suite de son décès. “La Libre Belgique” en a fait son grand titre, exactement comme “Le Monde” à Paris et d’autres quotidiens de qualité ailleurs en Europe. Chez nous, seulement de brefs articulets, quelques analyses toutes de platitude dans les pages intérieures des journaux. Rik van Cauwelaert fit exception dans les colonnes de l’hebdomadaire “Knack”, où un éditorial bien ficelé fut entièrement consacré à Soljénitsyne.

D’où question: nos journalistes ne connaissent-ils plus Soljénitsyne? L’ont-ils jamais lu? Ou bien, l’appellation de “fossoyeur du régime soviétique”, dont on l’a si souvent gratifié, les effraie-t-elle? La Flandre a démontré, la semaine dernière, sa petitesse.

Pourtant, il n’en a pas toujours été ainsi dans nos régions. “Le premier cercle” contenait, en page 202 de son édition néerlandaise, un phrase caractéristique: “Il y a toujours eu l'une de ces idées pour fermer la bouche à ceux qui voulaient crier la vérité ou monter sur la brèche pour la justice”. “Le pavillon des cancéreux”, “Lénine à Zurich”, “La Russie sous l’avalanche”, “La fille d’amour et l’innocent”, “Flamme au vent”, “Pour le bien de la cause”, “Août 1914”, “Une journée dans la vie d’Ivan Denissovitch”, “L’Archipel Goulag”, “Le chêne et le veau”, “Lettre ouverte aux dirigeants de l’Union Soviétique”, “Discours américains”, etc., tous furent rapidement traduits en néerlandais et connurent de réels succès éditoriaux. Les éditions successives se bousculaient à un rythme constant.

Aujourd’hui, on ne peut plus acheter neuf qu’”Une journée dans la vie d’Ivan Denissovitch” en librairie.  Même “L’Archipel Goulag” est épuisé.

Le mensonge en lui-même

Partout dans le monde, l’intérêt pour l’auteur et ses idées s’est rapidement estompé après son bannissement à l’Ouest. Pour les clans de la gauche, Soljénitsyne resta suspect, alors que, pourtant, l’Amérique libérale, à son tour, était devenue la cible de ses critiques. La prise du pouvoir par les communistes, il l’a toujours considérée comme une “importation occidentale” (Marx était allemand) qui, par voie de conséquence, s’opposait diamétralement aux ressorts de l’âme russe. Le capitalisme était pour lui une horreur. Mais après la chute du communisme, il ne ménagea pas ses critiques à l’encontre de Gorbatchev et surtout d’Eltsine, qui, selon lui, vendaient le pays aux plus offrants et le transformaient en un marécage sordide où dominait une culture glauque, décadente, sans contenu réel.

En 1999, Soljénitsyne écrit “L’effondrement de la Russie”, une synthèse de toutes les idées qui ont émaillé son oeuvre. Il règle ses comptes avec l’idéologie de la privatisation et déplore le déclin du patriotisme. La nouvelle norme est hélas devenue la suivante, elle se résume en une question: “Qu’est-ce que cela rapporte?”. Pour Soljénitsyne, le patriotisme est un sentiment organique, “la conviction que l’Etat vous protège dans les moments difficiles”. La patrie jouait un grand rôle pour Soljénitsyne. Mais Dieu aussi. Et Dieu disparaît également, ou alors on n’écrit plus son nom qu’avec un “d” minuscule.

La ligne de démarcation

Il est clair que Soljénitsyne ne visait pas le succès auprès des détenteurs du pouvoir. Mais les intellectuels contemporains, ceux qui se targuent d’être dans le vent, n’aiment pas  davantage ce conservateur fondamental, avec sa tête et son visage comme taillés dans du bois de chêne. “Il est dépassé”: tel est sans doute le commentaire le plus courant et le plus aimable qu’on a entendu à son propos. La plupart le rejetait en ne tenant compte que de la caricature que l’on avait faite de lui.

Il a survécu à l’Union Soviétique mais est revenu dans une Russie où toutes les non valeurs, comme la corruption, le matérialisme, la superficialité et la décadence étaient omniprésents.

Dans une recension remarquable, aux arguments solides comme l’acier, Hubert Smeets, dans les colonnes du “NRC-Handelsblad” (15 janvier 1999), évoque Wayne Allensworth qui était, dans les années Clinton, analyste auprès du “Foreign Broadcast Information Service”, une officine gouvernementale américaine qui suit la presse non anglophone du monde entier. Wayne Allensworth y défendait Soljénitsyne contre tous les critiques américains et étrangers. Selon Allensworth, en effet, Soljénitsyne était logique avec lui-même, suivait toujours sa même piste: la lutte contre LE mensonge, “contre la croyance en la possibilité qu’aurait l’homme de transformer sa propre nature, de manipuler l’univers et de créer un paradis sur la Terre”. C’est dans ce grand mensonge-là que se retrouvent, tous ensemble, les communistes, les capitalistes, les révolutionnaires et les libéraux.

“Ce que les Occidentaux, convaincus de la supériorité du capitalisme, devraient comprendre, c’est que Soljénitsyne ne perçoit pas les racines de la misère économique et écologique de la Russie dans le socialisme en soi, mais dans le manque d’humilité de l’humanité moderne”.

Pour Allensworth, on ne peut dès lors pas considérer Soljénitsyne comme un slavophile, simple héritier et imitateur des slavophiles russes du 19ème siècle, ni comme un idéologue “Blut-und-Boden” (à la mode allemande) mais comme un personnaliste contemporain, se situant dans la tradition d’Edmund Burke, James Burnham ou Christopher Lash.

Concluons en citant Soljénitsyne lui-même: “La ligne de démarcation entre le bien et le mal ne passe pas entre les Etats, les classes ou les partis, mais à l’intérieur même de chaque coeur d’homme”. Le coeur de Soljénitsyne, lui, s’est arrêté de battre à 89 ans.

J. K.

(article paru dans “’t Pallieterke”, Anvers, 13 août 2008; trad. franç.: Robert Steuckers).

jeudi, 07 août 2008

Révolution conservatrice et "fondamentalisme esthétique"

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Révolution conservatrice et "fondamentalisme esthétique"

Qu'est-ce que le “fondamentalisme esthétique”? Il convient de répondre d'emblée à cette question, pour comprendre ce que l'on entend par là. Le “fondamentalisme esthétique”, d'après Stefan Breuer, est une attitude d'opposition contre la culture et la technique modernes, c'est une critique pure et dure de la civilisation. En ce sens, il est part intégrante d'une tradition intellectuelle qui n'a pas cessé d'être active depuis le romantisme jusqu'aux critiques contemporaines du “pan-technicisme”. Le “fondamentalisme esthétique” a connu son apogée entre 1890 et 1910. Dans son livre consacré à ce filon de l'histoire intellectuelle allemande, Breuer aborde surtout les auteurs de cette époque.

Au centre de son enquête figurent essentiellement le poète Stefan George et sa revue Blätter für die Kunst. Ensuite, il aborde d'autres personnalités importantes et d'autres cercles de la fin du XIXième et du début du XXième: Hugo von Hofmannsthal, les “Cosmiques”, le philosophe-écologue Ludwig Klages, le “théoricien de la sagesse” Georg Simmel et l'“anti-roi” par rapport à George, Rudolf Borchardt, pour n'en citer que quelques-uns. Breuer analyse la personnalité des “maîtres” et des “disciplnes” et examine les structures de domination qui en découlent, de même que l'impact extérieur de ces groupes.

Au centre de cette enquête, nous trouvons un questionnement sur la signification politique de ces poètes et penseurs. Breuer lui-même souligne qu'il serait faux de voir dans ce “fondamentalisme esthétique” un courant parallèle à la “révolution conservatrice”. Hugo von Hofmannsthal a certes forgé le concept de “révolution conservatrice”, mais il entendait par là un “conservatisme culturel” dirigé contre la civilisation moderne, c'est-à-dire quelque chose “de totalement différent du néo-nationalisme qui opérait sous la même étiquette” et qui “rien que pour mener jusqu'au bout sa politique d'expansion devait exploiter à fond les atouts de la civilisation moderne” (p. 5). Les “esthètes fondamentaux” de ce conservatisme n'ont dès lors pas été en 1914 des adeptes du patriotisme belliciste, car des “esprits pertinents comme George ou Klages ne se sont jamais fait d'illusion: cette guerre allait être menée avec les moyens de la civilisation et même dans le cas d'une victoire improbable de l'Allemagne, la question fondamentale n'aurait pas reçu de réponse décisive: que faire de la civilisation et de ses effets dans notre pays même...?” (p. 212).

 

Nous avons donc affaire à des esthètes conservateurs, dont l'hostilité à la modernité doit éveiller l'attention des écologistes. La vision du monde de Klages représente en effet un fondamentalisme écologique radical et tout-à-fait pur, souligne Breuer: «Pour Klages, les choses étaient claires: les sciences exactes, et l'idée de “progrès” qui en dérivait, dépendaient étroitement d'un ordre économique centré sur l'argent et le capital... Comme en témoignent ses écrits posthumes, c'est dans son œuvre que, longtemps avant que n'existe le cercle de George, Klages s'était intensément préoccupé des relations entre le christianisme, le capitalisme et le rationalisme; c'est également dans cette œuvre de Klages que le désavantage majeur des Allemands, leur “barbarité” (Barbarentum), a été inversé en une positivité” (pp. 196 et ss.).

 

La pire des barbarités n'était pas pour ces esthètes fondamentaux l'“arriération culturelle” mais la sur-exploitation moderne du monde: c'est la raison pour laquelle les cercles tournant autour des personnalités de George et de Klages ont salué l'“instinctuel” et le “tellurique” comme les qualités essentielles des Allemands, tandis que le protestantisme et le prussianisme étaient radicalement dévalorisés au titre d'expressions de la modernité rationaliste. George, en se référant à Max Weber, soulignait qu'il existait un lien étroit entre le protestantisme et le capitalisme: «Partout où la forme protestante du christianisme trouve accès, elle capitalise, industrialise et modernise les peuples» (p. 200).

 

Il m'apparait particulièrement intéressant de suivre la tentative de Breuer de classer ces penseurs et poètes dans le paysage politique de la première moitié du XXième siècle: «Le fondamentalisme esthétique, empiriquement parlant, comme le montre l'exemple de la “république des poètes” de Bavière en 1919, peut parfaitement se manifester sous une forme de “gauche”. Mais nous voyons alors éclore une tension entre les orientations universalistes-éthiques et les orientations esthétiques, où les premières finissent par avoir le dessus, si bien que les formes de gauche sont le plus souvent des formes de transition, tandis que la qualité spécifiquement esthétique et a-éthique postule une attitude particulariste, laquelle, traduite en option politique, révèle une affinité avec la droite politique» (p. 226).

 

Breuer examine de ce fait les intersections possibles entre le fondamentalisme esthétique et les prémisses de droite de la “révolution conservatrice”, du nationalisme et du national-socialisme. Mais dans l'enquête de Breuer manque (ndlr: comme d'habitude serait-on tenté de dire...) la référence aux diverses formes du fédéralisme qui, au début du XXième siècle, n'était nullement un phénomène marginal en Allemagne du Sud. La “version populaire” de l'esthétisme des cercles conservateurs, le “Heimatkunst” (l'art du terroir), cultivait de fortes sympathies pour ce fédéralisme. Ni George ni Hofmannsthal n'ont été actifs dans les mouvements régionalistes, mais ce non-engagement ne constitue pas une preuve, car ils ne se sont pas engagés davantage dans les formations nationalistes.

 

Ensuite, on peut affirmer sans se tromper que leur vision du monde était en opposition très nette avec celle de la “révolution conservatrice”. Quand Ernst Jünger manifestait une ivresse de technophilie et quand Moeller van den Bruck, dans le but de construire une Allemagne puissante, acceptait sans hésitation et sans a priori des phénomènes tels la croissance exponentielle de la population, les mégapoles, l'industrie et le prolétariat, “dans les cercles du fondamentalisme esthétique, ces phénomènes étaient jugés purement et simplement comme les expressions du ‘contre-monde‘” (p. 230).

 

En bref: «L'objectif (de la révolution conservatrice) était de voir éclore une autre modernité ou plutôt une modernité autre» (p. 230). Tandis que les fondamentalistes esthétiques exigeaient la “négation totale de la modernité”, allant jusqu'à postuler, avec Borchardt, “de réduire en poussière les mégapoles allemandes”.

 

Dans cette hostilité de principe contre toutes les manifestations et les phénomènes de la modernité, nous trouvons, clairement exprimée, la différence qui oppose ce fondamentalisme esthétique au national-socialisme, car, écrit Breuer, “le national-socialisme se distingue du fondamentalisme esthétique par le fait qu'il accepte pleinement l'esprit du temps. Le national-socialisme ne procède pas, comme l'ont répété sur le mode du moulin à prière tibétain Thomas Mann et Georges Lukacs, d'une vulgarisation de l'anti-rationalisme ou de l'irrationalisme, mais, bien au contraire, d'une vulgarisation du rationalisme; il ne nie pas fondamentalement la modernité, mais ne la nie que sectoriellement” (p. 237).

 

Ce constat posé par Breuer est très important: il campe clairement les véritables clivages politiques de notre époque contemporaine, où nous avons, d'un côté, des progressistes et des rationalistes de droite et de gauche et, de l'autre, des conservateurs. Raison pour laquelle les “esthètes” peuvent être considérés non pas comme les précurseurs des bruns, mais comme les précurseurs des verts. “Avec le national-socialisme, nous avons un mouvement qui accède au pouvoir, en poursuivant en bien des points celui du XIXième siècle, dont les adeptes voulaient frapper George à mort et faisaient de cette intention l'une de leurs missions les plus urgentes. Ce mouvement comprenait les goûts artistiques petits-bourgeois de Hitler et, plus encore, sa conception positiviste des sciences, son enthousiasme pour la technique moderne et, en tout premier lieu, son obsession pour les idées d'eugénisme et d'hygiène raciale” (p. 233).

 

En même temps, cette critique fondamentale du progressisme chez les “esthètes” les distinguent des pires manifestations que l'on observe dans le camp conservateur, notamment cette propension à croire que la technique, le rationalisme et la politique de puissance ne sont pas mauvais en soi, mais qu'il importe qu'ils tombent dans de bonnes mains (c'est-à-dire dans des mains allemandes).

 

Ce qui rapproche les esthètes des fascistes, pense Breuer, “c'est la grande valorisation de la dimension charismatique” (p. 238). Mais les preuves qu'il avance pour soutenir ce point de vue laissent à désirer et son argumentation est nébuleuse. Elle semble cadrer avec cette douteuse tradition intellectuelle qui fait miroiter à l'horizon une “ligne” au-delà de laquelle se situerait le “malheur”, le “mal”, l'“innommable”. Type de raisonnement que les scientifiques feraient bien d'oublier...

 

La conclusion de Breuer, toutefois, est pertinente: le fondamentalisme esthétique est effectivement le concept qui s'oppose le plus “purement” et le plus radicalement à toutes les tendances progressistes, cherchant à imposer la modernisation (p. 241). Breuer admet qu'à une époque comme la nôtre où la crise écologique est d'une indéniable évidence, où les ressources se raréfient, où le prix à payer pour survivre est de plus en plus élevé, pour maintenir à flot cette foi déraisonnable dans les progrès techniques et autres, l'idée progressiste se grève de lourds paradoxes. Raison pour laquelle, nous devons reconnaître que les œuvres de Klages, George et Hofmannsthal “ont reconnu bien avant le mouvement écologiste les dangers que recelait cette idée” (p. 242).

 

Heinz-Siegfried STRELOW.

 

(article paru dans Ökologie, n°1/1997; trad. franç.: Robert Steuckers).

 

Stefan BREUER, Ästhetischer Fundamentalismus. Stefan George und der deutsche Antimodernismus, Wissenschaftliche Buchgesellschaft, Darmstadt, 1995.

 

mardi, 05 août 2008

J. Parvulesco: J. Koizumi et le grand réveil du Japon

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Jean PARVULESCO

 

Junichiro Koizumi et le grand réveil du Japon

 

Il s'est donc en apparence définitivement refermé sur nous le formidable piège planétaire tendu par la conspiration mondiale des Etats-Unis et de ce qui se tient, dans l'ombre, derrière ceux-ci, saisissant dans ses mâchoires d'acier les nations de l'Europe grand-continentale et de l'Amérique Latine, dont la liberté vivante, le destin eschatologique et l'intégration politico-historique finale pourraient représenter très effectivement un péril absolument critique, un péril mortel pour le "grand dessein" en cours de l'impérialisme hégémonique américain, dont les préliminaires obscurcissent déjà l'horizon de la proche histoire mondiale à venir.

 

Cependant, alors que les nations encore libres de l'Europe de l'Ouest sembleraient avoir cessé de se débattre sous l'étreinte aliénante, dévastatrice, de la conspiration mondialiste à l'œuvre, des nations eurasiatiques grand-continentales, comme l'Inde et le Japon, viennent de se libérer de celle-ci, par leurs propres moyens, et de se donner —ou d'être en train de se donner—  un autre destin, fondé sur leur propre liberté reconquise.

 

Car ce qu'Atal Béhari Vaypajee à réussi à faire en Inde, Junichiro Koizumi se trouve en train de le faire, aussi, au Japon : l'un et l'autre portés démocratiquement au pouvoir par des immenses vagues de prise de conscience national révolutionnaire, n'ont pas un seul instant hésité, une fois au pouvoir, d'entamer abruptement le processus de libération intérieure de leur pays de sous l'emprise subversive extérieure de la conspiration mondialiste.

 

Ainsi se fait-il que, tout comme la "Nouvelle Russie" de Vladimir Poutine, l'Inde d'Atal Béhari Vajpayee et le Japon de Junichiro Koizumi, se retrouvent, à l'heure actuelle, ensemble, sur la ligne de front de l'ébranlement sismique abyssal poussant le "Grand Continent" eurasiatique à retrouver son être propre et sa prédestinée originelle, archaïque, ébranlement qui suscite, mobilise, assure et affirme les fondations actives du mouvement de libération impériale engageant, en profondeur, l'ensemble du "Grand Continent" eurasiatique en train de se réveiller, et qui finalement l'emportera.

 

Dans un fort important article intitulé "Les relations récentes entre la Russie et l'Inde", Gilles Troude, chercheur au DESC de la Sorbonne , écrit, dans Géostratégiques (Paris) de mars 2001 : " ... face au monde unipolaire dominé par la puissance écrasante des Etats-Unis, qui ne connaissent plus aucun rival non seulement sur le plan économique, mais aussi dans les domaines militaire et politique, ne s'oriente-t-on pas lentement vers un triangle stratégique Inde-Chine-Russie, seul capable de rivaliser avec la super-puissance qui se veut maîtresse du monde?".

 

"C'est ce que redoutent les spécialistes américains en affaires internationales, qui ont perçu les signes d'une coopération accrue entre la Russie , la Chine et l'Inde, et d'un sentiment croissant dans ces trois pays, spécialement après la campagne de bombardements de l'OTAN en Yougoslavie au printemps 1999, que la puissance américaine devait d'une manière ou d'une autre être tenue en échec. Bien que ces trois pays soient encore très loin de fusionner en un Axe eurasien anti-OTAN, ces analystes se disent inquiets du fait de l'apparition d'une menace potentiellement très grave : une alliance qui regrouperait environ deux milliards et demi d'êtres humains, une puissance militaire formidable et un stock impressionnant d'armes nucléaires —puisque l'Inde est maintenant officiellement une puissance nucléaire—  le ciment de cette coalition étant de contrer la domination globale de l'Amérique".

 

"Ce serait un désastre pour les Etats-Unis".

 

"Si ce tissu de relations progresse, a déclaré Charles William Maynes, président de la Fondation Eurasia , think tank basé à Washington, alors vous aurez le cœur continental du monde (heartland) —deux milliards de personnes en Chine et en Inde allié à la formidable puissance technologique que représente la Russie. Ce serait un désastre pour les Etats-Unis".

 

Et encore, Gilles Troude, tout en se méprenant sur le sens final de la situation politique propre, réelle, de la Chine actuelle et à venir, de la ligne de destin préconçue de celle-ci, qui l'exclut d'avance de l'unité, de la réintégration impériale grand-continentale eurasiatique, ne tient-il étrangement pas compte non plus dans ses analyses, du "grand réveil" national du Japon en train d'avoir lieu à l'heure présente. Dont le rôle apparaît déjà comme absolument décisif dans la mobilisation en cours d'un front grand-continental eurasiatique d'opposition politico-stratégique totale aux desseins de la conspiration mondialiste menée par Washington.

 

En réalité, c'est l'extraordinaire puissance vitale innée, profonde, secrète, du peuple japonais qui a rendu possible, et pu assurer l'avènement au pouvoir, à l'heure précise où il fallait que cela se fasse, de l'homme providentiel, du "concept absolu" qu'est Junichiro Koizumi, porteur charismatique du nouveau grand destin du Japon. Quelqu'un devait venir, et la volonté du peuple japonais a fait qu'il vienne.

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Avec Junichiro Koizumi, la loi providentielle se trouve une nouvelle fois vérifiée qui veut que les pays finissent toujours par trouver les dirigeants prédestinés qu'ils méritent, et cela est entièrement certain aussi pour Vladimir Poutine et sa "Nouvelle Russie", tout comme pour Atal Béhari Vajpayee et l' "Inde Terminale" en train d'émerger actuellement à la face de l'histoire.

 

Aussi est-il grand temps que l'on finisse par comprendre, en Europe, qui est réellement Junichiro Koizumi, et de quel grand destin révolutionnaire est-il porteur.

 

Junichiro Koizumi, porteur d'un nouveau destin pour le Japon

 

Junichiro Koizumi est en effet l'homme chargé par le destin —et par 75 % des Japonais— d'opérer les retrouvailles finales du Japon d'aujourd'hui avec l'histoire antérieure du "Grand Japon", l'homme chargé de renouer avec l'identité impériale du Japon, intemporelle, que l'on avait dû faire semblant de suspendre le 15 août 1945, le jour de la "capitulation".

 

Car il est chose désormais notoire que Junichiro Koizumi se fait ouvertement prévaloir de sa fidélité tout entière à la ligne nationale, traditionnelle et impériale de son prédécesseur et maître à penser, l'ancien premier ministre, membre aussi du PDL, Yasuhiro Nakasone (1982-1987), qui, le premier, avait osé briser le tabou démocratique concernant le temple shintoïste Yasukuni, à Tokyo, en s'y rendant en pèlerinage le 15 août 1985. Ce qui avait provoqué alors une vague de violences protestataires, menées en sous-main par les services secrets politiques de la Chine communiste, dans plusieurs pays de l'Asie ayant connu l'occupation japonaise. Car le temple shintoïste Yasukuni, à Tokyo, est le très haut sanctuaire de la mémoire nationale japonaise, le symbole suprême de son identité profonde, intacte, hors d' atteinte, qui ne tient compte en rien de la vaste campagne de désinformation montée par les Etats-Unis après la fin de la dernière guerre au sujet des "culpabilités" du Japon.

 

De son côté, Junichiro Koizumi avait déjà affirmé, à plusieurs reprises, lui aussi, sa ferme intention de se rendre, le 15 août 2001, anniversaire de la "capitulation" du Japon en 1945, au temple Yasukuni, pour participer aux cérémonies religieuses "en hommage à la mémoire des héros tombés pour la défense du Japon". Un geste dont la portée symbolique apparaît comme évidente de par elle-même, et d'une évidence décisive. Et irréversible.

 

Mais, en fait, c'est le 13 août qu'il s'y est rendu, essayant ainsi de relativement désinvestir la montée des protestations plus ou moins artificiellement soulevée par sa décision. Car les forces réunies de la réaction et du Front Rouge s'étaient en effet saisies de l'occasion pour lancer un tir de barrage intensif contre la décision du premier ministre Junichiro Koizumi de se rendre officiellement en pèlerinage au temple Yasukuni. Mais rien n'y fait. Tout comme rien n'avait pu le convaincre de revenir sur son décret autorisant  —et incitant—  que les manuels scolaires d'histoire adoptent des positions ouvertement "révisionnistes" au sujet des "responsabilités" du Japon lors de la dernière guerre.

 

Situé au centre de Tokyo, près du Palais Impérial, sur la colline du Kudan, le temple shintoïste Yasukuni est en effet consacré à la mémoire des 2,5 millions de combattants japonais tombés face à l'ennemi, dont les âmes —y inclus celles des treize "criminels de guerre"— ou soi-disant tels— pendus par les Forces Américaines d'occupation, avec, en premier lieu, le général Hideki Tojo, le premier ministre de l'empereur Hirohito— s'y trouvent rassemblées, dans l'invisible, autour du miroir liturgique, suprêmement sacré, qui en constitue le pivot cosmique. Yasukuni est, dans l'invisible, une immense mer d'âmes en perpétuelle réverbération, veillant sur l'Empire.

 

Il est tout à fait certain qu'une majorité décisive de Japonais estiment que leur pays à été, lors de la dernière guerre, la victime d'un complot concerté, de dimensions planétaires, mené par les Etats-Unis, qui visaient à interdire la présence effective du Japon en Asie et dans le Pacifique; face à quoi, le Japon n'a rien fait d'autre que de se battre pour sa survie, aux abois, dans les termes d'un combat à la fois final et total. Dont on connaît la conclusion apocalyptique de Hiroshima et de Nagasaki.

 

Dans les dépendances du temple Yasukuni, un musée consacré à la mémoire nationale japonaise présente actuellement une grande exposition officielle intitulée "Comment nous avons combattu" (en anglais, "La guerre et les soldats du Japon"), exposition dont le témoignage fondamental est axé sur le souvenir des milliers de kamikazes ayant offert leurs jeunes vies pour la sauvegarde de l'Empire. "Rendez-vous à Yasukuni !", s'écriaient-ils en s'envolant pour le sacrifice suprême. Dans le film qui en montre les exploits héroïques, surhumains —divinisants, en termes de shintoïsme— on affirme : "Beaucoup de gens pensent que, dans la guerre d'il y a cinquante ans, le Japon avait été gravement dans son tort: cela est absolument faux. Ainsi le procès de Tokyo est-il nul et non avenu. Le commandant en chef de nos Armées, le général Hideki Tojo a été accusé de "crimes contre l'humanité" et pendu par les Forces Armées d'occupation, les Etats-Unis ayant été les seuls à exiger sa condamnation à mort. Il est temps que le Japon se réveille! Il est grand temps que le Japon reconnaisse la vraie réalité de sa propre histoire! Japon, réveille-toi!".

 

On sait que la doctrine de gouvernement de Junichiro Koizumi se trouve être fort proche de la vision d'ensemble qui est celle de Shintaro Ishihara, élu, en 1999, gouverneur de Tokyo avec une écrasante majorité, "par un vote quasi-plébiscitaire sur des positions ultra-nationalistes, anti-américaines, ouvertement partisan de la transformation du "Corps de Défense" en une nouvelle grande Armée Japonaise, et auteur d'un livre de grand succès, "Le Japon qui sait dire non", ainsi que d'un roman aux thèses non-conformistes, "La saison du soleil" (Tayô no kietsu). Et l'on sait également que le groupe de jeunes idéologues et des intellectuels qui se tiennent actuellement derrière Junichiro Koizumi est mené au combat par le professeur Fujiuka Nobukatsu, de l'Université de Tokyo, dont la pensée se veut orientée vers la recherche renouvelante, révolutionnaire, des fondations cachées constituant la prédestination originelle du Japon, du "Grand Japon".

 

Quant au train des réformes totalement bouleversantes que le premier ministre Junichiro Koizumi compte imposer, d'urgence, au Japon, la formule décisive appartient au professeur de l'Université de Tokyo, Yoshiro Tanaka, qui déclarait, récemment, que ce que l'on attend de celui-ci, c'est "qu'il fasse la "Troisième Révolution", après celles de l'ère des Meiji, et de l'après-guerre de 1945". Car, ainsi que nous en avertit Heizo Takenaka, ministre chargé de la politique économique dans l'actuel gouvernement de Junichiro Koizumi, "... si nous engageons maintenant les réformes qui s'imposent, nous devrons accepter aussi les douleurs qui s'ensuivront, et qui seront des plus grandes; mais, si ces réformes, nous les repoussions encore, cela peut nous mener directement à la mort". Car telle est, aujourd'hui, dans sa réalité immédiate, et la plus profonde, la situation socialo-économique du Japon qui, en fait, se trouve au bord du gouffre. Contrairement à toutes les apparences, et c'est bien ce qu'il faut quand même ne pas ignorer. Car des anciennes pesanteurs dissimulées sont à présent venues à échéance, et coûte que coûte il faudra faire face.

 

Le recours salvateur aux Forces Armées

 

Cependant, outre le train de réformes qui devront bouleverser de fond en comble les actuelles infrastructures politico-administratives et économiques du Japon, ce qui équivaut, en effet, à une rupture intérieure comme celle qui s'était produite à l'ère des Meiji, Junichiro Koizumi nourrit aussi —et sans doute surtout— le "grand dessein" de redonner aux Forces Armées nationales la place qui doit être fondamentalement la leur, c'est-à-dire tout à fait la première dans la configuration politico-historique du pays ayant retrouvé son propre centre de gravité en lui-même, hors de tout assujettissement, hors de toute ingérence ou domination étrangères.

 

Même si, pour cela, il faudrait que Junichiro Koizumi parvienne à faire réviser l'actuelle Constitution japonaise, dont le fameux "article 9" interdit au Japon de pouvoir disposer d'une "Armée Nationale". Or c'est bien ce à quoi Junichiro Koizumi est très fermement décidé à faire aboutir son action politique de gouvernement dont la clef de voûte est précisément constituée par le retour du Japon à son identité politico-militaire antérieure, avec tout ce que cela implique au niveau de la "grande histoire", des grandes décisions historiques et politiques immédiatement à venir, en Asie et dans le Pacifique et, aussi, dans le cadre des futurs choix du Japon par rapport à l'unité grand-continentale eurasiatique émergente.

 

Dans son retour qui n'est politiquement pas dépourvu de tout danger sur le coup même, mais qu'il entend poursuivre d'une manière tout à fait résolue, vers la reconstitution d'urgence des Forces Armées nationales du Japon, Junichiro Koizumi retrouve le mouvement fondamental de toute entreprise de salut et de délivrance nationale révolutionnaire face à la mainmise subversive, aliénante, des conspirations mondialistes et socialo-gauchistes d'infrastructure trotskiste —toujours "la réaction et le front rouge"— qui détiennent aujourd'hui très effectivement le pouvoir politique, économico-social et culturel partout dans le monde. En se tournant, comme il est en train de le faire, vers les Forces Armées nationales du Japon, Junichiro Koizumi ne fait, à son tour, que ce qu'avait fait Vladimir Poutine en Russie, Atal Béhari Vajpayee en Inde et Vojislav Kostuniça en Serbie, ce que tente de faire, souterrainement, à l'heure actuelle, Silvio Berlusconi en Italie: le recours aux Forces Armées est, toujours, la toute dernière chance des instances persistantes de l'Être en train de succomber aux manœuvres d'encerclement, de pénétration intérieure et d'anéantissement menées par les agences d'investissement et de désappropriation du non-être en marche vers l'établissement final de l'anti-monde et de l'Anti-Empire d'au-delà de la fin.

 

Et c'est ainsi que l'entreprise de redressement national révolutionnaire de Junichiro Koizumi, actuellement en cours, appartient déjà, en fait, au vaste front contre-stratégique grand-continental eurasiatique  —et latino-américain aussi— d'opposition désormais irréversible à l'entreprise de subversion anti-historique accélérée poursuivie par la conspiration planétaire "mondialiste" au service de la "Superpuissance Planétaire" des Etats-Unis et de ce qui se tient caché derrière ceux-ci.

 

Car, en tout état de cause, il faudra comprendre que le retour de Junichiro Koizumi vers le recours aux Forces Armées représente, aussi, la décision sous-entendue —mais désormais sans retour— de l'éloignement et, à terme, de la rupture du pacte d'assujettissement implicite —à la fois sur le plan militaire, économique et idéologico-culturel— du Japon à l'égard des Etats-Unis, et, de par cela même, sa nouvelle orientation fondamentale, d'une part, vers l'Asie et le Pacifique et, d'autre part, vers le "Grand Continent" eurasiatique, et vers sa future adhésion —déjà décidée—  à l'Axe grand-continental Paris-Berlin-Moscou.

 

Aussi dois-je faire état, à ce sujet, des confidences que vient de me faire Alexandre Douguine à la suite de son récent voyage officiel d'information au Japon, où il avait pu constater la très exceptionnelle attention avec laquelle des hautes instances politico-administratives du Ministère des Affaires Etrangères suivent aujourd'hui la marche en avant de certains projets européens grand-continentaux concernant la mise en situation, en premier lieu, de l'Axe Paris-Berlin-Moscou, projets auxquels le Japon serait disposé à apporter un soutien politico-diplomatique inconditionnel et suractivé: pour le Japon, la prolongation —et l'achèvement— de l'axe grand-continental européen Paris-Berlin-Moscou jusqu'à New Delhi et Tokyo constitue déjà une nécessité allant de soi, inéluctablement. De toutes les façons, pour aussi confidentielles qu'elles puissent se vouloir momentanément, la présence économique active et l'assistance politico-militaire du Japon en Inde est désormais une réalité de laquelle on ne saurait en aucun cas pas ne pas tenir compte d'une manière fort significative. Des grandes choses décisives sont en train de se passer là-bas, souterrainement, entre Tokyo et New Delhi, dont les conséquences ne tarderont pas d'agir en profondeur. Le tout sans doute à l'instigation, ou tout au moins avec l'aval agissant de Moscou, Vladimir Poutine s'y trouvant personnellement engagé dans la suite de cette entreprise de l'ombre: c'est la grande géopolitique, il faut le comprendre, qui constitue les fondements dissimulés de l'histoire en marche. Aujourd'hui comme hier.

 

Le tracé mystique de nos futurs combats

 

Tout concourt donc à prouver, déjà, que l'usage qu'entend faire Junichiro Koizumi du pouvoir qui vient de lui être démocratiquement confié par le peuple japonais, sera celui d'une reprise politico-historique révolutionnaire totale des destinées profondes de celui-ci, ouvertement reconnues comme telles ou ne fut-ce que partiellement tenues encore pour secrètes. Car il y a une eschatologie occulte de l'histoire nationale japonaise, dont les horizons intérieurs s'ouvrent à une double intelligence, à la fois supra-historique et cosmique, de ce monde-ci à son terme et de son au-delà caché: c'est ce qui constitue la véritable force supra-historique collective du Japon, et c'est aussi ce qui fait que le Japon s'identifie lui-même, totalement, à la conscience transcendantale commune de l'ensemble des peuples du "Grand Continent" eurasiatique, réunis dans la certitude visionnaire, préontologique, de la dimension fondamentalement eschatologique de l'histoire dans son ensemble final. La conscience archaïque commune, abyssale, des peuples du "Grand Continent" eurasiatique considère l'histoire comme le lieu même du salut supra-historique de la fin d'au-delà de la fin, la sainteté suprême étant, pour ces peuples, celle de l'héroïsme des combattants humains et suprahumains devant conduire à cette fin et au-delà de cette fin.

 

Aussi la réunification politique —la réintégration— grand-continentale eurasiatique mise actuellement en piste par le projet de l'axe contre-stratégique Paris-Berlin-Moscou-New Delhi-Tokyo devra-t-elle se trouver dédoublée, en profondeur, par une nouvelle prise de conscience commune quant à l'identité de la prédestination spirituelle, polaire, de l'ensemble des peuples de l'espace impérial eurasiatique. Or l'avènement de cette prise de conscience spirituelle, à la fois impériale et polaire eurasiatique, c'est ce que va constituer, désormais, la tâche des combattants idéologiques pour la plus Grande Europe et de leurs engagements politico-historiques de haut niveau. Une grande mystique combattante vient ainsi d'être née, qui à présent est en cours de développement révolutionnaire, "destinée à changer la face du monde".

 

Dans ce développement en cours, la part des "groupes géopolitiques" va devoir être des plus décisives: en effet, s'il y a une nouvelle prise de conscience civilisationnelle de dimensions grand-continentales eurasiatiques, ce sera en premier lieu aux "groupes géopolitiques" que celle-ci sera due, à leurs engagements héroïques de la période nocturne de la clandestinité, à leur travaux d'agitation, d'affermissement et d'affirmation révolutionnaire suractivée qu'ils devront livrer, à présent, en plein jour, une fois que la doctrine de la libération grand-continentale sera ouvertement appelée à devenir la volonté agissante de l'ensemble des peuples appartenant à l'espace originel d'une même communauté d'Être polaire et de destin eschatologique final.

 

Dans l'immense bataille révolutionnaire qui s'annonce pour une nouvelle prise de conscience historique commune de l'espace intérieur eurasiatique, les "groupes géopolitiques" seront donc les cellules de base de la marée montante de l'éthos vivant, de la conscientisation en marche vers le changement total, vers la transfiguration finale d'une civilisation à prédestination apocalyptique: la grande heure des "groupes géopolitiques" sera venue quand l'unité d'être de l'ensemble grand-continental eurasiatique sera reconnue comme la suprême valeur agissante de sa propre histoire terminale, en même temps que de sa propre histoire recommencée.

 

D'autre part, d'une manière plus concrète, plus immédiatement objective, il est tout à fait certain que, dans l'état actuel des choses, ce dont nous aurons le plus besoin, c'est d'un certain nombre de centres d'études, de recherches et de documentation (CERD) visant les profondeurs en même temps que réellement exhaustifs quand à leurs objectifs propres, d'un certain nombre de "foyers de rayonnement" au service de notre connaissance active, à jour, de la situation et des réalités actuelles de l'Inde, du Tibet et du Japon, de la partie à proprement parler asiatique du "Grand Continent", vers laquelle devront désormais se porter tous nos efforts de rapprochement, de réactualisation politico-historique et de ré-identification spirituelle de stade final avec ces peuples appartenant à la même communauté de destin profond.

 

D'ailleurs, le problème des relations continentales Europe/Asie n'est pas du tout nouveau. Déjà en 1940, dans son essai géopolitique aussi fondamental que décisif, Le bloc continental Europe Centrale-Eurasie-Japon, "imprimé mais non distribué", Karl Haushofer déplorait vivement l'absence flagrante, catastrophique, de centres européens d'étude et de recherches de haut niveau sur l'Inde, le Japon et l'Eurasie en général. Karl Haushofer pouvait cependant se féliciter de l'existence et des activités, à plusieurs égards exemplaires, de l'"Institut pour le Moyen et l'Extrême-Orient" de l'Italie mussolinienne, fonctionnant "sous la direction du Sénateur Gentile, de l'archiduc Tucci, du duc d'Avarna, fils de l'ancien ambassadeur d'Italie à la cour de Vienne".

 

Dans la situation d'émergence spéciale qui est la nôtre aujourd'hui, il faudrait donc qu'au moins six de ces Instituts pour le Moyen et l'Extrême-Orient soient installés d'urgence, deux en France, deux en Allemagne, un en Italie et un en Espagne. La Russie devant être, pour le moment, considérée à part, où plusieurs de ces genres d'Instituts existent déjà, et qu'il s'agirait alors plutôt de réorganiser, de restructurer et d'en intensifier les activités en cours d'une manière nouvellement significative.

 

Dans l'ensemble, la zone de problèmes concernant la Chine se devra d'être, cependant, étudiée à part, suivant une disposition d'esprit offensive, préventivement contre-stratégique. Car, située à l'intérieur de l'espace grand-continental eurasiatique, la Chine représente, pourtant, géopolitiquement, une tête de pont du monde "extérieur", "océanique". Relevant d'une vocation irréductiblement auto-centrée, la Chine se trouve de par cela même assujettie à l'"influence extérieure" des Etats-Unis et aux conspirations mondialistes anti-continentales, "océaniques", d'encerclement et d'investissement offensif du "Grand Continent" eurasiatique. La Chine se trouve préontologiquement engagée dans le camp ennemi du "Grand Continent", dans le "camp océanique" du Léviathan, du "non-être".

 

D'autre part, la rencontre finale entre les destinées spirituelles profondes de l'Europe et certaines prédestinations encore cachées de l'Asie se maintenant dans l'ombre ne trouvent-elles pas un domaine de jonction spécifique à travers des convergences ardentes qui s'imposent en matière de religion vivante, de religion en marche? N'est-ce pas dans l'invisible que viennent à se faire les grandes rencontres spirituelles, le Feu de l'Esprit ne se révèle-t-il pas irrationnellement dans les visions spéciales de ses élus secrets?

 

On sait que saint Maximilien Kolbe, le martyre d'Auschwitz, avait visionnairement pressenti le double cheminement de l'Inde et du Japon vers le catholicisme. Ayant lui-même séjourné au Japon, et notamment à Hiroshima et à Nagasaki —et l'on peut ainsi mieux comprendre les raisons du choix de ces deux villes pour cibles du feu nucléaire en août 1945, quand on sait qu'il s'agissait des deux villes catholiques du Japon— il y avait en effet acquis la certitude intérieure du grand avenir catholique du Japon.

 

En même temps, sans avoir pu réellement donner cours à son brûlant désir de se rendre personnellement comme missionnaire en Inde aussi, les relations personnelles de saint Maximilien Kolbe avec certains tenants de l'hindouisme initiatique l'avaient amené à penser la même chose de l'Inde: non pas dans les termes d'un raisonnement concerté, mais dans la perspective fondamentalement irrationnelle d'une vision spirituelle propre, d'une grâce de voyance à ce sujet, à laquelle il avait eu l'accès en tant que porteur d'une mission spéciale, ultérieure, décisive. Une mission occultement prophétique.

 

En ce qui concerne le Japon, il est vrai que le shintoïsme initiatique se prête à des rapprochements doctrinaux assez flagrants avec le grand catholicisme mystique. Dans la figure ensoleillante d'Amatarasu, ne pourrait-on pas distinguer une préfiguration enclose de l'Immaculée Conception? De même que les trois objets du culte impérial shintoïste —le "miroir", le "poignard" et le "joyaux"— pourraient également trouver des correspondances extrêmement révélatrices dans le catholicisme. Ainsi le "Miroir" —fondamentalement présent à Yasukuni— rappelle le Miroir du Cœur Immaculé de Marie, alors que le "Poignard" peut être identifié à l'Epée du Verbe Vivant. "Alors l'Impie se révèlera, et le Seigneur le fera disparaître par le souffle de sa bouche, l'anéantira par la manifestation de sa Venue", II Th., II, 8. Et, quant au "Joyau", cette figure polaire, centrale, conduit au mystère nuptial suprême de l'Aedificium Caritatis. Il faut savoir oser pénétrer derrière le voile.

 

Car c'est bien dans cet horizon spirituel ultime qu'il fait situer l'actuelle tentative révolutionnaire entreprise et poursuivie par Junichiro Koizumi au Japon, pays secret s'il en fut. Toutes ses initiatives politico-administratives comportent un dédoublement spirituel occulte, un répondant immédiat sur le plan de l'invisible. C'est l'autre monde qui, aujourd'hui, agit au Japon, à des fins très hautes.

 

Jean PARVULESCO.

jeudi, 31 juillet 2008

Omero nel Baltico

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Carlo Terracciano

 

OMERO NEL BALTICO

 

Felice Vinci, Omero nel Baltico

Saggio sulla geografia omerica

Palombi Editori, Roma, 2002 (Terza edizione aggiornata), Pp.512, euro 22,50

 

Dove era situata veramente l’antica Troia che nell’Iliade destava l’ira funesta del pelìde Achille e di legioni di studenti costretti a studiarne le gesta? In Finlandia, naturalmente..! E Itaca ventosa, patria dell’astuto Ulisse (quello del “cavallo di Troia” appunto), alla quale l’eroe dell’Odissea tornò dopo anni di peregrinazioni per terra e per mare, a compiervi la nota vendetta su quei porci dei Proci, mentre Penelope [non] filava (salvo poi rifuggirsene via verso il folle volo di dantesca memoria)? Ma è ovvio: in Danimarca, patria d’origine di Nessuno ben qualche millennio prima che del principe Amleto. E l’Olimpo? A nord dello Stige e a sud dell’Ade, praticamente… sul Circolo Polare Artico! Per non parlare dell’Eden, della mitica “terra promessa”, stillante latte e miele alla confluenza dei quattro fiumi che si dipartono dal Paradiso Terrestre, il Pison, il Gihon, il Tigri e l’Eufrate; niente a che vedere con il nostro Medio Oriente oggi in fiamme. Qui siamo addirittura poco sotto Capo Nord, in piena Lapponia. Ci sono nella storia dello scibile umano delle opere, teorie, scoperte che improvvisamente ribaltano le conoscenze, presunte,  le radicate convinzioni di generazioni e generazioni durante i  secoli.

 

E la loro validità è data intuitivamente anche dal fatto che, leggendole come un romanzo appassionante, tutto ci sembra chiaro, lineare, consequenziale; e ci si meraviglia semmai di non averci pensato prima, tanto era evidente (a posteriori) quello che stava sotto gli occhi di tutti e, forse proprio per questo, non si era mai notato.  “Omero nel Baltico” di Felice Vinci (un nome un fato) è una di queste opere che con naturalezza e scientificità ribalta completamente tremila anni di cultura classica euro-mediterranea.  Il contenuto rivoluzionario di questo testo, arrivato in breve alla terza edizione, è sintetizzato dallo stesso autore in poche righe poste all’inizio delle “Conclusioni”: “Il reale scenario dell’Iliade e dell’Odissea è identificabile non nel mar Mediterraneo, ma nel nord dell’Europa. Le saghe che hanno dato origine ai due poemi provengono dal Baltico e dalla Scandinavia, dove nel II millennio a.C. fioriva l’età del bronzo e dove sono tuttora identificabili molti luoghi omerici, fra cui Troia e Itaca; le portarono in Grecia, in seguito al tracollo dell’ "optimum climatico", i grandi navigatori che nel XVI secolo a.C. fondarono la civiltà micenea: essi ricostruirono nel Mediterraneo il loro mondo originario, in cui si era svolta la guerra di Troia e le altre vicende della mitologia greca, e perpetuarono di generazione in generazione, trasmettendolo poi alle epoche successive, il ricordo dei tempi eroici e delle gesta compiute dai loro antenati nella patria perduta.

 

Ecco, in estrema sintesi, le conclusioni della nostra ricerca”. Un sintetico riassunto di cinquecento fitte pagine frutto di dieci anni di lavoro di un ingegnere romano di cinquantasette anni, appassionato ma critico conoscitore di quei classici sui quali si basa la nostra cultura europea. Felice Vinci prende spunto dalla segnalazione di Plutarco sulla collocazione geografica dell’isola di Ogigia, a lungo dimora di Odisseo trattenutovi dalla dea Calipso, “a cinque giorni dalla Britannia” per iniziare la sua indagine e ribaltare la geografia mediterraneo dei due poemi attribuiti al cieco Omero, ma notoriamente di diversi autori, spostando le gesta guerriere della conquista di Troia ed il viaggio di ritorno a casa di Ulisse dalle nostre latitudini a quelle nordiche: il Baltico in primis, la penisola scandinava, l’estremo nord circumpolare.

 

Ecco allora che ritroviamo la Colchide , le Sirene, Scilla e Cariddi e la stessa Trinacria lungo le frastagliate coste della Norvegia settentrionale, tra fiordi e la Corrente del Golfo. Mentre le originarie Cipro, Lemno, Chio, il Peloponneso, ma anche Atene o Sparta per fare solo qualche esempio, ritrovano l’originaria collocazione tutt’intorno al Mar Baltico. E Troia dalle imponenti mura, a controllare lo stretto strategico dei Dardanelli, le rotte tra Mar Nero e Mediterraneo? Uno sperduto, tranquillo paesino della Finlandia meridionale, a cento chilometri dalla capitale Helsinki: l’attuale Toija, risvegliata dalla silenziosa quiete plurimillenaria e proiettata da un ingegnere italiano dalle brume dell’oblio sotto i riflettori della cronaca. Più precisamente su un’altura boscosa tra Toija e la vicina Kisko si svolsero le battaglia tra Achei e Troiani per i begli occhi di Elena, anche se bisogna dimenticare le ciclopiche mura dell’area dell’attuale Hissarlik in Turchia e la scoperta di Schliemann, per più modesti fossati e palizzate di solido legno dei boschi circostanti, quelli dei tempi dell’età del bronzo. Biondi guerrieri nordici dagli occhi cerulei, coperti di mantelli e armature adeguate ad un clima non certo mediterraneo, anche se meno rigido dell’attuale, combattevano con spade di bronzo e asce di pietra.

 

La coalizione di popoli baltici contro Ilio era sbarcata da agili navi con doppia prua che possiamo immaginare molto simili a quelle vichinghe di duemila anni dopo. E non deve sembrare ardita l’ipotesi di marinai e guerrieri che, quattromila anni fa, corrono i flutti oceanici nord-atlantici fino all’Islanda e oltre, se solo si pensa a quello che riuscirono a fare i loro pronipoti vichinghi prima e dopo l’anno Mille; arrivare da una parte in America del nord ( la Groenlandia “Terra verde” e la Vinlandia , “Terra della vite”, a dimostrazione di un breve periodo di mutamento climatico favorevole) e dall’altra attraversare tutta la Russia fino al Mar Nero e Bisanzio. Per non parlare dell’epopea Normanna in Sicilia e nel Mediterraneo.

 

Oltre allo studio pignolo della toponomastica comparata, il Vinci poggia le basi delle sue straordinarie scoperte non solo sulle concordanze dei nomi, ma anche su solide basi geografiche, morfologiche, climatiche, descrittive, nonché storiche e mitologiche: una cultura di tipo olistico, veramente enciclopedica, che lo porta a smantellare pezzo per pezzo, passo per passo, riferimento per riferimento, mito per mito, l’ambientazione mediterranea dei poemi omerici, per ricollocarli nell’habitat originario, la Scandinavia ed il Baltico appunto. Uno dei punti di riferimento di Vinci è l’opera di Lokamanya Ba˘l Gangâdhar THILAK (1856-1920) il bramino e patriota indiano autore de “La dimora artica dei Veda” e “Orione.

 

A proposito dell’antichità dei Veda”. Secondo il Tilak il sacro testo dell’India, il più antico, come il popolo che lo creò, avrebbero avuto origine dal Polo Nord, che naturalmente in un lontano passato era terraferma ed aveva una temperatura mite. Uno sconvolgimento climatico forse dovuto allo spostamento dell’asse terrestre costrinse i nostri lontani progenitori, gli Arya, ad una migrazione ovviamente verso sud. Un ramo si diresse verso l’attuale penisola scandinava, la Finlandia ed il Baltico: proprio quello che Felice Vinci identifica con i popoli dell’elenco delle navi dell’Iliade ed i loro avversari alleati dei troiani. Altri rami sarebbero discesi, lungo i fiumi eurosiberiani sempre più a sud e ad est, dando quindi origine alle varie civiltà del Medio Oriente (i Sumeri ?), Persia (l’Avesta è quindi complementare ai Veda, sotto tale aspetto descrittivo di una sede artica originaria), India (con la sovrapposizione alle popolazioni scure precedenti, da cui nascerebbe poi il sistema castale), fino alla Cina e al Giappone (gli Ainu). E si possono ipotizzare anche scenari simili per le Americhe con il successivo sorgere di civiltà come quella Tolteca, Atzeca o pre-incaica del Lago Titicaca. Insomma in uno stesso periodo di tempo sorgono quasi d’incanto civiltà raffinate, templi imponenti, le piramidi, gli imperi da cui proviene la nostra civiltà eurasiatica.

 

Così i popoli dell’area baltico-nord atlantica, alla fine dell’optimum climatico dell’età del bronzo migrano ad ondate verso i territori più caldi ed il Mediterraneo, ma portandosi appresso la memoria storica delle aree d’origine, le saghe, le leggende, i miti e gli Dei. Un ricordo dei primordi che si riverserà in una trasposizione toponomastica dalle terre originarie  a quelle di nuova acquisizione tutt’attorno al Mediterraneo. Un’operazione di preservazione della propria memoria storica che d’altra parte non poteva essere perfettamente collimante, data la diversità sia geografica che climatica tra i due scenari geopolitici. Per tale motivo troviamo nell’Iliade e nell’Odissea una serie di riferimenti geografici, di collocazioni e ambientazioni completamente fuori luogo rispetto al Mediterraneo, ma che si adattano perfettamente alle latitudini nordiche; e questa è la grande “scoperta” di Felice Vinci destinata a rivoluzionare le nostre conoscenze classiche. E’ più che naturale, quasi ovvio, che un simile ribaltamento dell’impianto dei due poemi epici troverà una chiusura pressoché assoluta nel mondo accademico, tra i professoroni di greco e latino che hanno sempre pontificato sull’argomento.

 

Questo “Omero nel Baltico” sarà deriso e/o trattato con sprezzante sufficienza, quando non violentemente attaccato, anche perché un profano, un “ingegnere” è arrivato dove i cultori della classicità neanche supponevano si potesse ricercare. Peggio ancora  si tenterà di seppellire queste geniali intuizioni sotto il silenzio. Un’opera di ostracismo culturale già iniziata, se solo si consideri che questo testo così “sconvolgente” e rivoluzionario non è ancora stato neanche preso in considerazione dalla pseudocultura ex-cathedra. E non ultimo anche per certe implicazioni d’ordine storico e politico.

 

Per fare solo un esempio l’autore, ricollocando all’estremo nord l’area mesopotamica d’origine di Abramo e del monoteismo, la “Terra Promessa”, tende a ridare unità originaria alle stirpi “bibliche”, rispettivamente discese da Sem, Cam e Jafet. Anche il famoso “diluvio universale” potrebbe aver avuto un differente scenario, con la fine dell’optimum climatico, e l’Ararat con la sua Arca incagliata una verosimiglianza maggiore nel mutato contesto fisico e geografico. I cosiddetti “semiti” poi, ebrei compresi, sarebbero loro stessi nordici (a parte la conversione dei Cazari del VII-VIII secolo d.C.) e la loro “terra promessa” non sarebbe quindi la Palestina bensì l’estremo Nord, tra Norvegia e Finlandia: la Lapponia !

 

Tutto questo, è ovvio, non avrà particolari conseguenze politiche attuali, specie per il povero popolo palestinese d’oggi (i Filistei d’origine indoeuropea); tuttavia, fossi nei panni dei Lapponi, comincerei a preoccuparmi… Comunque sia  la verità di certe scoperte ha una tale forza d’impatto, una tale intrinseca vitalità per cui anche la congiura del silenzio sarà prima o poi destinata ad infrangersi. Lo dimostrano le tre edizioni in brevissimo tempo che hanno fatto di “Omero nel Baltico” un successo editoriale, senza bisogno di molta pubblicità o di una editrice di grido. Il testo di Felice Vinci è anche correlato di numerose cartine geografiche esplicative e, alla fine, di varie pagine di foto anche aeree che ci offrono l’immagine odierna dei luoghi trattati nel testo. Nella pianura ora allagata di Aijala correvano, tra Toija e il mare, gli eserciti di Achei e Troiani, tra un attacco ed una ritirata. Ai piedi di un’altura boscosa della Finlandia meridionale, in vista delle scure acque del Baltico Ettore e Achille si affrontavano 3500 anni or sono  in un epico duello mortale che sarebbe stato cantato attorno al fuoco dagli aedi a venire, fino ad approdare sotto un altro cielo, in un’altra terra, su un altro mare: il nostro, il Mediterraneo.

Carlo Terracciano 

 

mercredi, 30 juillet 2008

Conversing with Alexander Zinoviev

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Conversing with Alexander Zinoviev

 

We all remember the great Soviet dissident Alexander Zinoviev, a lucid analyst not only of all the odds of the Soviet regime but also and especially of all the odds of the human soul, which lead unequivocally to all those forms of rigid totalitarianism. Today Zinoviev criticizes ”Westernikism” with an equal vigor as he criticized Soviet power before. “Westernikism” is in his eyes an American version of a Gleichschaltung of the human soul, which is equally mutilating as the former Soviet version. Because he formulated his sharp critiques under Breshnev's Soviet Union , he was deprived of his Soviet citizenship in the Seventies. Zinoviev was compelled to live a long exile abroad, in Munich in Bavaria , a City which gave a safe harbour to many more Russian emigrations. Zinoviev is now disgusted by the dominant "Westernikism" in the world and cannot accept its haughtiness. He decided thus to leave the West to go back to his Russian homeland. His last work published in Switzerland, La grande rupture (The Big Rupture; ed. L'Age d'Homme, Lausanne) is pushing and assaulting, but without any illusion, full of bitterness and lucidity. A lucidity that will lead him soon to be deprived of his access right to the main media, for having asserted clearly and sharply some truths that aren't universally accepted. Our correspondent in Paris, Xavier Cheneseau, met ex-Soviet dissident Zinoviev during one of his last stays in the French capital. Zinoviev was attended by his publisher and interpreter Slobodan Despot, who translated into French the Russian answers of the philosopher.

Q.: What do you mean by a "Big Rupture" in your book and which is the central topic of it?

AZ: The Western-European civilization is doubtless the greatest civilization of history. Its apex was incarnated by the development of the main Nation-States as Germany, Italy, Britain and France . At the beginning of the 20th century, the idea appeared of a definitive decay of this civilization, that from then on was perceived as exhausted and mortal. Today one thing is certain: after having allowed the development of a superior organization system, the Western European civilization undergoes history and is not making it anymore. The rupture, that I define in my book, appeared immediately after the Western victory in the Cold War, followed by the crumbling down of the Soviet Block and the transformation of the United States in the only remaining Super-State of our Planet, ruling the entire Western world without any serious challenger.

Q.: According to you, how things evolved towards this situation?

AZ: You can explain it by saying that a new level of an organization that is superior than the one ruling the Western societies, was created, also by the fact that all Western societies were integrated in one single unity, which is a super-civilization, in comparison with the Western civilization, and, endly, by the fact that a World Order was instaured under the leading of the Western world. I was astonished some years ago to state that there was a real and a virtual dimension in every thing. The virtual world is now the dominant culture of nowadays people. In fact, people today perceive the real world through the expedient of this virtual world. They only perceive what the virtual world authorizes them to see. The virtual world doen't express the world as it is in plain reality.

Q.: According to you, do we still live in a democracy in the context of what you are describing us?

AZ: If you want a democracy to exist actually, you need to accept the possibility of a choice, thus you need plurality. During the Cold World, there was a plurality in the world, i. e. the actual possibility of a democracy: you had the coexistence of a communist system, of a capitalist system and of a group of other countries, which were named the "non-aligned". The Soviet Block was influenced by the critiques from the West and the West was influenced by the Soviet Union, due to the fact that communist parties were active on the political checkboards of the Western States. Today, you have only one ideology left, which serves exclusively the one-worldists. The belief that the future of human kind doesn't lay in communism anymore but in americanism (the superior form of Westernikism) is a belief shared by a majority of Westerners.

Q.: Nevertheless in Europe and notably in France , you find, despite of all, political forces that still oppose this general trend…

AZ: The shear existence of those forces is only virtual, it is not real. Look and you will see that this kind of opposition is more and more formal. As a proof, look at the attitude of the European political class during the war against Serbia . Almost unanimously, this political class supported the aggression against this sovereign and free nation.

Q.: Are we then allowed to talk about totalitarianism?

AZ: Totalitarianism spreads itself everywhere because the supranational structure impose its rule and law to all nations. There is a non democratic superstructure, which is giving orders, punishes, organizes blocades, bombs and lets people starve. Financial totalitarianism submitted the political powers. Totalitarianism is a cold ideology. It has no feelings and expresses no pity. Besides, we must accept the fact that people do not resist a bank, but can eventually compel any political dictature to handle or leave power.

 

Q.: Nevertheless, we can say that the system can explode due to the social situation in our countries…

 

AZ: Please, don't display naively illusions. Movements of that sort aren't possible anymore, because the working class has been replaced by the workless, who are in an extremely weak position, and only aspire to one thing; to get a job.

 

Q.: If I follow your words, you tell me that our societies aren't democratic…

 

AZ: The historical period of the all-pervading democracy of Western style belongs now to the past, because the end of communism introduced us fully in the post-democratic era.

 

Q.: Which is the role and the power of the media in such a situation?

 

AZ: The role of the media is that of a very important bolt that can work owing to a genuine sphere, which extends without measure the presence and the activity of the capital and the State's interests. It's one of the main pillars on which the Western system settles. The media represent the most powerful instrument to shape the tastes and the forms of knowledge shared by the big mass of people in the world. Today the media represent a real instrument to influence directly the masses. The media interfere in all the sphres of society: sports, everyday life, economics and, of course, politics. Everything becomes an aim for the media. They exert a totalitarian power on the people living nowadays, and even worse, they arrogated for themselves the function of the great arbitrator in the ideological choices.

 

Q.: How can we in your eyes organize the struggle against this "media-cracy" that surrounds us?

 

AZ: It's an historical struggle. We are the witnesses of history but we also take a part in it. We have to take into account the historical time because we have to bring thousands and even millions of people into movement, without having the certainty to win the battle. We have to take into account the fact that millions of people are today the victims of the mediatic contagion. We simply have to take the exemple of the war against Serbia to state that the number of contaminated people is huge. Moreover we must be always on the look-out in order that our attention may not be deviated by the mediatic smoke curtain.

 

Q.: How do you see the access to power of Vladimir Putin?

 

AZ: Putin's access to power is indeed the first sign of an interior resistance against globalization and americanization. But Putin's success depends in the end and despite of all from factors that are exterior to Russia.

 

Q.: We hear a lot about a survival of communist ideology in Russia today…

 

AZ: What do yo mean? Ideas are eternal. The marxist form of communism in Russia has been severely defeated. It survives marginally but isn't operational anymore. Today you cannot start anything with this ideology. As a proof, I would mention the Russian Communist Party itself, which doesn't evoke the Revolution anymore. The communists don't refer to the dictature of the proletariat and evolve even towards liberalism in a certain way.

 

Q.: Mr. Zinoviev, we thank you for this interview.

 

(Interview taken for "Synergon" by Xavier Cheneseau and translated into French by Slobodan Despot and into English by Robert Steuckers).      

 

mardi, 29 juillet 2008

Sur "La Stratégie des Ténèbres" de J. Parvulesco

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Sur "La stratégie des Ténèbres" de Jean PARVULESCO

Un roman dangereux - un livre pour tous et pour personne

 

N'a-t- il pas été dit que Tout est Pur aux Purs? (Le RP Jean-René de Valsan à Liana Carducci)

 

Si je dirigeais un service politique ou une faculté de théologie  —mais des plus confidentielles—  parmi les textes et les livres auxquels je soumettrais mes hommes, car ce sont les livres qui nous soumettent et non l'inverse, je leur donnerais à méditer le dernier roman de Jean Parvulesco, La Stratégie des Ténèbres.

 

Roman d'espionnage, roman politico-stratégique, songe cinématographique, œuvre de haute magie et de hardiesse théologique tout à la fois… Mais ne me l'avait-il pas dit : C'est un roman dangereux… Oui, en effet, dangereux, mais, ceux qui veulent s'approcher du Salut, de la grande salvation, doivent aussi s'approcher du Danger. Toujours. Il n'est pas d'autre voie.

 

Dernier roman et assurément l'un des plus grands, sinon peut-être le meilleur. En effet, avec cet opus, Parvulesco monte au faîte de son art; l'ouvrage rejoint à mon avis son autre chef d'œuvre qu'était et que reste le songe de combat, L'Etoile de L'Empire Invisible.

 

Dans La stratégie des Ténèbres, le rythme de l'action et de l'écriture porte véritablement l'œuvre, les séquences nous entraînent les unes après les autres vers une horreur et un dévoilement aussi décisif qu'hallucinatoire, hallucinatoire car il s'agit de sortir du cauchemar dans lequel vit la France et, par delà, notre misérable condition humaine actuelle, bref on aura compris qu'il s'agit d'une vision salvatrice, peut-être de celle qui sauve, car si savoir, c'est pouvoir, savoir, c'est aussi avoir vu.

 

Le rythme donc, mais d'ailleurs tout l'ouvrage semble avoir été écrit pour le cinématographe… Ah ! Je rêve d'un réalisateur qui accepterait d'adapter La stratégie des Ténèbres!  Cet élément fondamental et essentiel de l'univers parvulesquien, comme souvent, est omniprésent dans l'œuvre, sur l'œuvre et au-delà de l'œuvre. C'est son écriture, qui le sous-tend mais aussi la comédienne Armande Béjan et son adaptation de la figure de Jeanne d'Arc, personnage qui hante le cinéma depuis Carl Theodor Dreyer  en passant par Robert Bresson.

 

Le cinéma donc : souvenez-vous des ambiances melvilliennes de L'Etoile de L'Empire invisible  quand Jean Parvulesco décrivait des zones banlieusardes d'un autre âge, sillonnées par des Citroën DS noires plus ou moins clandestines qui venaient s'y réfugier, des zones qui flanquaient sérieusement la trouille puisqu'elles interpellaient la longue disparition de nous-mêmes… que d'autres espaces, d'autres lieux; tout autant vénusiens que géopolitiques et eurasiens qui venaient suractiver et contre-attaquer jusqu'à la rupture même et l'éradication de la Balance; de tout Balance of Power…

 

Mais revenons à La Stratégie des Ténèbres, réussite du rythme et du découpage, où l'action se resserre, en France certes, mais aussi à l'extérieur du territoire. On retrouve, l'univers des Villas parisiennes, de Neuilly ou de Saint-Cloud, de ces Villas qui atteignent l'orée des Bois, du Bois de Boulogne notamment, ces villas où se jouent si souvent tout et rien, et c'est là une position des plus troublantes, ce “tout et rien”… De ces réceptions mondaines, plus ou moins sorties de l'univers d'Eric Rohmer  et donc de la vie parisienne elle-même; qui entremêle si bien cinéma et réalité, pour le meilleur et pour le pire.

 

Les héros du roman vont devoir contrer l'œuvre du Mal Absolu qui court sur le Territoire et qui ressere son emprise toujours plus fort, toujours au plus mal, le mal de la Malemort. J'aimerais dire combien les scènes qui entourent la fugue mystique de la comédienne Armande Bejan sont d'une grande, d'une très grande réussite, notamment quant à l'entrée en scène du Mal; et c'est un lecteur de Raoul de Warren et de Lovecraft qui vous le dit; c'est dire si je pèse mes mots. L'apparition du diable, d'un Satan sodomiste , abominablement repoussant et puant,  suintant à travers les pages même du livre, est un coup de maître, non teinté d'une certaine  dose d'humour, car à ce moment-là du livre on peut encore rire (surtout quand, comme moi, on croit reconnaître le jean-foutre qui a servi de modèle, ainsi que sa jeune victime; dont la vie deviendra une non-vie à partir du  moment de sa contre-initiation rectale, furibarde et diabolique, une errance d'écorce morte sera alors le lot du jeune Damanski…).

 

A propos de peur montante et environnante, c'est avec un talent, qui rejoint celui de Raoul de Warren, que Parvulesco nous plonge par la suite dans une inquiétude des plus vivaces quant au cœur du mal, qui ronge et qui grandit et notamment les campagnes du Pays de France… Il me vient des frissons face à une apparition maléfique d'une sarabande de sorcières hideuses; témoignage de la transe du Mal et de ses suppôts disséminés.

 

Mais après l'inquiétude et l'angoisse, le décor ainsi planté, c'est bel et bien l'horreur la plus noire, la plus abjecte, la plus totale qui vit et qui se joue —et contre laquelle vont décider de s'activer des hommes qui savent, que derrière la mise en place de la sexualité la plus déviante, la plus abjecte et inhumaine (contre laquelle Parvulesco développe toujours —et je dirais “contre-offensivement”; car l'homme n'est pas un bigot et connaît bien la Chair, une sexualité surhumaine, incandescente qui, dans les épanchements les plus sensuels et charnels, découvre le mystère de l'Incendium Amoris); car il s'agit bien des pires perversions, de la mutilation, de la destruction tortionnaire et totale des corps de jeunes filles voire de jeunes enfants, perversion  filmée, vomissant du chaos de monstrueux snuff-movies.

 

Perversions, mutilations et destructions “filmées”, disais-je: comprend-on donc bien l'enjeu de ce qui se joue là, du combat absolument irréductible et du signe qui nous est jeté, entre notre propre devenir et le devenir même d'un cinéma toujours plus nécrosé… Je ne veux en dire plus ici, mais je rappelle simplement que c'est par son film L'Argent que Robert Bresson a terminé son œuvre, à moins que ce ne soit l'argent et la mort, tous deux, ensemble, qui l'aient achevé…

 

Dans cette situation, les héros du roman vont passer à l'action;  ce qui va les amener à toute une série d'opérations  risquées afin de lutter contre ce mal absolument maléfique. Et c'est ici que Parvulesco apparaît comme un écrivain qui prend ses responsabilités à la différence de bien des baudruches qui flagornent ou qui se coupent totalement de notre contemporéanéité; funeste erreur pour un romancier. Ainsi, il incorpore le motif littéraire d'une sexualité à rebours de toute sexualité, d'une morbidité rampante et galopante  dont témoigne  ces pratiques monstrueuses, qui ne viennent pas de nulle part, car… nulle part c'est tout de même quelque part.

 

Le Néant et le Non-Etre sont donc localisables dans la géographie sacrée et dans la géopolitique mystique des romans de Jean Parvulesco, mais cette fois-ci, c'est le lieu du mal qu'il désigne.

 

L'auteur montre à travers l'action de ses héros que les abominations qui ensanglantent le territoire ainsi qu'une certaine jeunesse, sacrifiée dans les pires conditions et pour les pires conditions à venir, et ce, à travers des réseaux des plus criminels,  proviennent d'une action pensée et voulue par les forces du Néantissement, du Vomito Nero le plus noir.

 

Quelles sont-elles? Je ne veux ni ne peux le dire ici, mais, que l'on sache qu'Alexandre Malar et ses compagnons François d'Espart et le fameux Tony Richmont vont avoir recours à l'aide, à l'appui et au soutien méta-stratégique de Jean le Chardonnais, dont l'identité dogmatique a reçu sa vivification indo-christianique sur les Hauts Plateaux himalayens.

 

Ce Jean le Chardonnais, le bien nommé, anime le Mouvement Social Européen d'Empire, le MSEE, qui devra venir en aide au Département Evaluation Stratégie (DES) que nos compagnons représentent  avec l'appui, solitaire, du Président de la République.

 

Il faudrait encore signaler les présences de ces contre-feux méta-théologiques que sont le RP Valsan, jésuite des plus hétérodoxes, prêt à allumer le brasier d'une nouvelle théologie de la Chair aimante et irradiante, ainsi que l'influence et le corps d'enjeu que signale la présence de Raymond Abellio, lui aussi, foyer contre-stratégique dans la lutte contre le mystère d'Iniquité qui rampe et qui, en ces Temps, entend cesser sa reptation pour se dresser. Face à lui , il trouvera un autre Mystère, celui de l'Incendium Amoris et de ses fidèles, les Fidèles d'Amour (*).

 

Et ces Fidèles d'Amour, qu'il faut savoir toujours reconnaître dans la réalité triviale qui nous entoure, qui nous encercle toujours plus, sont ceux qui forment le groupe rejoint par Alexandre Malar; ces Fidèles d'Amour seront transfigurés par le combat contre l'«Homme noir à la tête d'insecte», épicentre ontique du Mal Absolu; ces Fidèles d'Amour, ne sont-ils pas les incarnations hohenstaufiques d'un certain Catholicisme marial et dantesque au service de «La Révolution Eurasiatique du Grand Renouveau Final», dont les bannières invisibles se gonflent du vent divin issu des Hauts Plateaux de l'Himalaya?

Fidèles d'amours vous disais-je!

Le vent souffle, où il veut.

 

Max STEENS

(Bruxelles, juillet 2003).

 

(*) (ndlr) Et ceux qui savent, parmi nous, reconnaîtront le leitmotiv cardinal de l'action, à la fois ouverte et souterraine, de René Baert, martyrisé par les Iniques, et de Marc. Eemans, condamné par les mêmes Iniques à l'errance éveillée, à un ostracisme cruellement dosé, où on l'a forcé à voir comment on tuait l'esprit de Dante et de Frédéric II de Hohenstaufen, auquel il a consacré un manuscrit, toujours inédit, mais qui attend son heure, pour lancer sa charge contre les hordes hurlantes du Non-Etre.

 

 

 

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lundi, 28 juillet 2008

Pour la Vie, contre les structures abstraites!

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Intervention lors de la 8ième Université d'Eté de "Synergies Européennes", Trente, 1998

 

Pour la Vie, contre les structures abstraites !

 

Maïtre Jure Vujic

 

Que signifie au juste la revendication de la vie face aux structures ab­straites? Dans le cadre d'une ap­pro­che philosophique, cela conduit vers une intention de réduire la portée des démarches de la pensée consciente et de ses médiations, et de po­ten­tia­liser celle de l'inconscient ou de la vie immédiate par une saisie de la réalité humaine en deça des formes et des constructions sociales et po­litiques artificielles et abstraites par essence, des traditions historiques désuètes et des cristallisations cul­turelles stéri­les.

 

Cette démarche philosophique que l'on pourrait qualifier soit d'“irra­tio­naliste” soit de “vitaliste” sous-entend même l'importance de la philosophie de Kant constatant les limites de la raison théorique et dont les prolon­gements critiques engendrent un double courant: l'un axé sur la volonté morale et sur une dialectisation de la raison (Fichte et Hegel) qui débouche par réaction dans le marxisme et le “matérialisme dialectique”; l'autre, qui revendique l'immédiateté de la vie, l'intuitionisme et le primat de l'instinct, procède du courant de pensée engendré par Schopenhauer, véritable père de l'irrationalisme contemporain, et trouve ses rami­fi­cations philosophiques chez Nietz­sche, Jung, Adler et même Freud, l'existentialisme français de Sartre et la philosophie existentielle de la vie que l'on retrouve chez Bergson, Schel­ling, Kierkegaard, Maurice Blon­del. L'école allemande, avec Wil­helm Dilthey, G. Misch, B. Groet­huysen, Ed. Spranger, Hans Leise­gang, A. Dempf, R. Eucken, E. Troeltsch, G. Simmel, ainsi que la phi­losophie naturaliste de la vie d'Os­wald Spengler et Ludwig Klages.

 

Le dénominateur commun que l’on retrouve dans chacun de ces courants de pensée hétéroclites et qui réside dans la revendication du principe de vie face au constructivisme abstrait, étant donné la diversité des pers­pectives qui l’expriment, ne se laisse pas enfermer dans un schéma d’interprétation global à la manière dont procède Georges Lukacs, le célèbre marxiste hongrois, qui considère la pensée irrationaliste allemande comme typiquement bourgeoise et « réactionnaire », en tenant pour définitivement acquis que l’histoire des idées est subordonnée à des forces primaires agissantes : situation et développement des forces de production, évolution de la société, caractère de la lutte des classes, etc…

 

Ce qui est certain, c’est que ce cou­rant de pensée vitaliste ou « irra­tionaliste » remet en question l’idée de progrès historique, la linéarité et le mythe progressiste, et qu’il re­pré­sente ainsi la contrepartie du courant de pensée qui, du XVIIIième siècle français à travers Kant et la révolution française, débouche dans la dialec­tique hégélienne et marxiste ; con­tre­partie dans la mesure où il déprécie le pouvoir de la raison, que ce soit en contestant  l’objectivité  du réel, que ce soit en réduisant  la connaissance intellectuelle à son efficacité techni­que, que ce soit en se réclamant d’une saisie mystique de la réa­lité « absolue »,  décrétée  irration­nelle dans son essence. La lutte contre l’abstraction et la raison a des formes aussi variées que les mo­tivations qui l’engendrent. Elle peut notamment aboutir à faire un principe de la notion d’absurde qui a surgi chez Scho­penhauer et plus tard chez Cioran.

 

De Leibniz à Kant et Schopenhauer

 

A l’opposé du rationalisme de la pensée occidentale, du principe de raison suffisante énoncé par Leibniz, du cartésianisme, la revendication de la vie dont Schopenhauer se fera le principal promoteur, sous-entend que l’intelligence ou la raison n’est pas à la racine de toute chose, qu’elle a surgi d’un monde opaque, et que les principes qu’elle introduit demeurent irrémédiablement à la surface de la réalité, puisqu’ils lui sont, comme l’intelligence elle-même, surajoutés. Le corollaire d’une telle conception est que la réalité qui fonde toutes les existences particulières est elle-même sans fondement, sans raison, sans cause (générale), que notre manière de raisonner, dès lors, est valable seulement pour ce qui est des rapports que les êtres et les choses entretiennent dans l’espace et dans le temps.

 

Au-delà d’un impératif absolu de la loi morale de type kantien, qui fonde le constructivisme de type ontologique et abstrait, Schopenhauer se fait le chantre d’une sourde impulsion à vivre, antérieure à toute activité logique, que l’on peut saisir au plus profond de soi-même pour une appréhension directe avant sa déformation abstraite dans les cadres de l’espace et du temps, et qui se révèle comme une tendance im­pulsive et inconsciente. Schopen­hauer, dans sa réflexion,  reprend  des motifs  hérités du « divin Platon » dans l’allégorie de la caverne qui nous révèle que le monde que nous percevons est un monde d’images mouvantes.

 

Schopenhauer et le « Voile de Maya »

 

D’autre part, il empruntera à la tradition de l’Inde l’idée que les êtres humains sont enveloppés dans le « voile de Maya », c’est-à-dire plon­gés dans un monde illusoire. Scho­penhauer restera persuadé que les fonctions  psychiques ne repré­sen­tent, par rapport à la réalité primaire et absolue du vouloir-vivre (Wille zum Leben)   qu’un aspect secon­dai­re, une adjonction,  une superstruc­ture  abstraite. A la tentation de l’il­lusoire, de l’abstrait et de l’absurde, que l’on menait vers un pessimisme radicale, Schopenhauer proposait le remède de la négation du vouloir-vivre, une forme supérieure d’ascé­tisme.

 

A l’idée d’humanité, qui lui paraît absurde, il oppose des « modèles » éter­nels qu’il empruntera au pla­to­nisme. Cet emprunt lui sert à ex­pli­quer les types de phénomènes du vouloir dans l’espace et dans le temps, phénomènes reproduisant incessamment des modèles, des formes, des idées éternelles et immuables. Il y a des idées infé­rieu­res, ou des degrés élémentaires, de la manifestation du vouloir : pe­san­teur, impénétrabilité,   solidité,  fluidi­té, élasticité,  magnétisme, chimis­me ; et les idées supérieures qui appa­rais­sent dans  le  monde orga­nique et dont  la  série  s’achève dans l’hom­me  concret.

 

Transformant la primauté du vouloir-vivre schopenhauerien en primauté de la volonté de puissance, opposant au renoncement préconisé par Scho­penhauer une affirmation-glori­fication de la volonté, Nietzsche se fait l’annonciateur de l’homme vital, de l’homme créateur de valeurs, de l’homme-instance-suprême,    en mê­me temps que de grands bou­leversements qui préfigurèrent le nihilisme européen  du XXième siè­cle. Et cela, au temps du positivisme abstrait et du constructivisme, c’est-à-dire à un moment où la prudence l’emporte et où la vie humaine paraît confortablement ancrée dans des institutions sécurisantes. Sur le chemin où l’homme européen s’est trouvé engagé jusqu’à présent, déterminé par l’héritage de l’Antiquité et par l’avènement du christianisme, la revendication de la vie chez Friedrich Nietzsche qui, par sa critique radicale et impitoyable de la religion, de la philosophie de la science, de la morale s’exprime à travers sa phrase lancinante : « Je ne suis pas un homme, je suis de la dynamite ».

 

Nietzsche : vitalisme et tragique

 

Le  vitalisme de Nietzsche se ré­vélera tout d’abord dans son œuvre La naissance de la tragédie, puis à travers la dichotomie qu’il institue entre l’esprit apollinien, créateur d’images de beauté et d’harmonie, et l’état dionysiaque, sorte d’ivresse où l’homme  brise  et dépasse les li­mites de son individualité. Apollon, symbole de l’instinct plastique, dieu du jour, de la clarté, de la mesure, force plastique du rêve créateur ; Dionysos, dieu de la nuit, du chaos démesuré, de l’informe, est pour Nietzsche le grand élan de la vie qui répugne à tous les calculs et à tous les décrets de la raison. Les deux figures archétypales sont pour Nietzsche la révélation de la nature véritable de la réalité suprême, l’an­tidote contre les structures existen­tielles  et  psychologiques  abstraites et sclérosées. C’est  dans  cette  opti­que que Nietzsche con­damnera la révo­lution  rationnelle de Socrate, dont il pense qu’elle  a tué l’esprit tragique au profit de la raison,  de l’homme  ab­strait  et  théorique.

 

Pour Nietzsche, être forcé de lutter contre les instincts, c’est la formule de la décadence : tant que la vie est ascendante, bonheur et instinct sont identiques. Avec Socrate et, après lui, le christianisme venant aggraver le processus, l’existence s’est, selon Nietzsche, banalisée  sur la  base d’un immense   malentendu qui ré­side dans la morale chrétienne de perfectionnement, ce que Deleuze nommera plus tard la morale des dettes et des récompenses.

 

Ce que Nietzsche veut dévoiler, c’est la toute-puissance de l’instinct, qu’il tient pour fondamental : celui qui tend à élargir la vie, instinct plus fort que l’instinct de conservation tendant au repos, que la crainte alimente et qui dirige les facultés intellectuelles abstraites. La volonté créatrice chez l’individu  est ce par quoi il se dé­passe et  va  au-delà  de lui-même ; il s’agit de se transcender et de s’é­prouver comme un passage ou com­me un pont. Le vitalisme de type héroïque conduira Nietzsche à dé­noncer le nihilisme européen en y contribuant par sa philosophie « à coups de marteau » à se faire, à coups d’extases, l’annonciateur du surhomme  et de l’Eternel  retour  face à l’homme abstrait et théorique et au mythe progressiste de l’hu­manité.

 

C’est ce qui fera dire à l’écrivain grec Nikos Kazantzaki qui appellera Nietzsche  le « grand martyr », parce que  Nietzsche  lui a appris à se dé­fier de toute théorie optimiste et abstraite.

 

Freud, apologiste des instincts vitaux

 

Avec Freud, nous pouvons quitter le domaine de la philosophie puisqu’il s’agit d’un médecin spécialisé en neuro-psychiatrie, dont toutes les théories en appellent à son expé­rience clinique. Mais il convient d’ob­server que les deux plans, celui de la réflexion philosophique et celui des sciences humaines ne peuvent être séparée  abstraitement. Freud for­gera,  pour qualifier l’élargissement de ses théories,  le terme de mé­ta­psy­cho­logie, en estimant que la réa­lité qu’il désigne est celle des pro­cessus inconscients de la vie psy­chique, qui permet de dévoiler ceux qui déterminent, par projection, les constructions   métaphysiques. Freud, irrationaliste au sens onto­logique du terme et apologiste des instincts vitaux du subconscient hu­main restera néanmoins un pes­simiste biologique.

 

C’est ainsi qu’au regard des deux grands   dissidents de la psychana­lyse qu’il a créée, son pessimisme diffèrera  de la confiance  d’Adler dans  la force ascensionnelle de la vie, comme de la vague nostalgie d’un  paradis  perdu  qui  imprègnera la pensée de Jung. Pour Adler, le besoin de s’affirmer chez l’être humain  reste  prédéterminant dans sa pensée, la vie est une lutte dans laquelle il faut nécessairement triompher ou succomber. Face aux abstractions de la raison qui nous menacent,  la  poussée  vitale,  ne peut  être valablement    appréhendée que  d’une manière  dynamique sous la forme  de  tendances,  d’impul­sions,  de  développement.  L’essen­tiel pour comprendre l’être humain, ce n’est pas la libido et ses trans­formations, c’est la volonté de puis­sance sous ses formes diverses : auto-affirmation, amour-propre, be­soin  d’affirmer son  moi, besoin de se mettre en valeur.

 

L’idée de communauté chez Adler

 

Adler identifie au sentiment social la force originelle qui a présidé à la formation de buts religieux régu­lateurs, en parvenant à lier d’une certaine manière entre eux les êtres humains. Le sentiment représente avant tout pour lui une tendance vers une forme de collectivité qu’il con­vient d’imaginer éternelle. Quand Adler parle de la communauté, il ne s’agit jamais pour lui d’une col­lectivité abstraite de type sociétaire actuel, ni d’une forme politique ou religieuse  déterminée. Il faut en­tendre le terme au sens d’une com­munauté  organique   idéale  qui  se­rait comme l’ultime réalisation de l’évolution  chez  Carl Gustav Jung ; le pouvoir  des archétypes n’est que la projection de l’affirmation de la vie face à la superstructure psycholo­gique conditionnée par les contin­gences externes et abstraites.

 

Jung : l’inconscient originaire, source de vie

 

Jung  dispose  d’une  véritable « vi­sion du monde » à partir de données intra­psychiques  et  qui sont à la base de sa  métapsychologie,  ainsi  que  de  sa psychologie analytique. Jung in­siste sur l’origine même de la conscience,  émergence  dont il pen­se  qu’elle s’est  lentement dévelop­pée  par  retrait  des  projections, ain­si que sur l’autonomie créatrice d’un inconscient impénétrable par un ou­tillage biologique. Toutes ses élu­cidations sont inscrites dans la per­spective d’un inconscient originaire, source de « vie », d’une ampleur in­commensurable, et d’où surgit quel­que chose de vrai. Pour lui, aucune théorie  ne peut vraiment expliquer les rêves, dont  certains plongent dans  les profondeurs de l’incons­cient. Il faut les prendre tels qu’ils sont : produits  spontanés,   naturels et objectifs de la psyché qui est elle-même la mère et la condition du conscient.

 

La doctrine de Jung postule l’exis­tence  de l’inconscient collectif, sour­ce des archétypes qui mani­festent des images et des symboles indé­pendants  du temps et de l’es­pace. Pour Jung, le psychisme in­dividuel baigne dans l’inconscient collectif, source  primaire  de l’éner­gie  psy­chique à l’instar de l’élan vital de Bergson. Selon Jung, l’homme mo­derne qui se trouve plongé dans des virtualités abstraites, a eu le tort de  se couper de l’inconscient   col­lec­tif, réalité vitale et objective, ce qui aurait  creusé un hiatus entre savoir et croire.

 

Animisme, instinctivisme, symbolique ontologique

 

La sagesse   jungienne   débouche  sur un anti-modernisme dont la con­dition de validité est que le monde eût été meilleur dans les époques à mentalité magique, qui privilégiait l’animisme, l’instinctivisme et le sym­­­bolisme   ontologique  par  rap­port au rationalisme abstrait et em­pirique des temps modernes. Avant d’aborder    une succincte présen­ta­tion de la philosophie à proprement parler  existentielle, il convient de faire un détour sur une certaine  forme  d’irrationalisme  philosophi­que que l’on peut qualifier d’exis­tentialisme  ou  d’humanisme crispé et dont  la figure de proue  reste  Jean-Paul Sartre.

 

La raison dialectique, issue de la ré­volution française, de Hegel à Marx, implique une critique de la raison classique, plus spécifiquement de la manière dont celle-ci concevait les principes d’identité et de non-con­tradiction ;  et sa visée n’est plus de se détacher de la réalité historique et sociale pour la penser en dehors du temps, mais, au contraire,  d’ex­pri­mer l’orientation même de cette réa­lité. C’est ainsi que Karl Marx décré­tait, dans ses fameuses thèses sur Feuerbach,  qu’il ne s’agit plus d’in­ter­­­préter le monde, mais de le transformer.

 

Sartre et la totale liberté de l’homme

 

Ces remarques visent à situer l’at­titude de Jean-Paul Sartre,  philoso­phe  existentialiste  de  l’engagement et de la liberté, hostile à tout retrait hors  de la réalité historique et so­ciale. Promoteur au départ d’une conception  irrationaliste  de  la li­ber­té, il a voulu, à partir d’elle, exercer une action politique et sociale révo­lutionnaire, ce qui l’a forcément con­duit à se rapprocher du courant de pensée communiste. Dans L’Etre et le Néant, Sartre entreprend de dé­monter la totale liberté de l’homme. Il veut prouver que la liberté humaine surgit dans un monde « d’existants bruts » et « absurdes ». La liberté, c’est l’homme lui-même et les choses au milieu desquelles elle apparaît : lieu, époque, etc., con­stituant la situation. Lorsque Sartre nous  dit que  l’homme  est  con­dam­né à la vie et à la liberté, il faut entendre que celle-ci n’est pas fa­cultative, qu’il faut choisir inces­sam­ment, que la liberté est la réalité mê­me de l’existence humaine.

 

Quant aux choses abstraites dans lesquelles  cette  liberté  se ma­nifes­te,  elles  sont  contingentes au sens d’être là, tout simplement, sans rai­son, sans nécessité. Il y a donc pour Sartre, sur le plan ontologique, une dualité radicale entre la liberté (le pour-soi) et le monde (l’en-soi). Il n’en  demeure   pas moins que l’en­ga­gement  marxiste-léniniste de Sartre dénote chez lui une certaine intégration  dans  les  circuits ab­straits  d’une idéologie contestatrice pour ses débuts ; et réactionnaire dans l’après-68.

 

Chez Sartre, l’existentialisme con­sistait à intégrer dans le souci d’ex­ercer  une action politique et sociale et de la justifier, l’apport du courant hégélo-marxiste à une théorie ayant d’abord consacré le primat de la vie immédiate comme liberté absolue au sein d’une réalité parfaitement opa­que ; effort qui confère à son hu­manisme  une  singulière crispation et le conduit   irrémédiablement   dans les méandres de l’abstraction idéologique.

 

A l’instar de cet existentialisme de type sartrien, la « philosophie de la vie » qui se développera du 19ième au 20ième siècle en Allemagne et en France privilégie les notions de vi­talisme, de personnalisme, d’ir­réversibilité,  d’irrationnel  par  rap­port au statisme, à la logique, à l’ab­strait, à la généralité et au schéma­tisme. C’est dans ce courant de pen­sée que s’inscrit Henri Bergson, promoteur de l’idée « d’élan vital », qui s’oppose au mécanicisme, au matérialisme et au déterminisme.

 

L’Etre est conçu comme une force vitale qui s’inscrit dans son propre rythme,  dans  une donnée onto­logique spécifique. L’intuition reste l’impératif  pour  tout être humain pour appréhender l’intériorité et la totalité.  La vie reste et transcende la matière,  la conscience  et  la mé­moi­re et appelle l’élan d’amour qui seul est à même de valoriser l’intériorité, la liberté et la volonté créatrice.

 

Le vitalisme de Maurice Blondel

 

Le vitalisme de Maurice Blondel ré­side dans l’affirmation et la su­pré­matie de l’action qui est la véritable force motrice de toute pensée. On peut déceler dans les conditions existentielles de l’action l’interaction d’une pensée cosmique, et Blondel proclamera que la vie « est encore plus que la vie ». Parallèlement à ce courant  de  pensée français s’in­sé­rant dans la philosophie de la vie, se développera   une philosophie de la vie purement allemande, de type scien­tifico-spirituel,  qui appréhen­dera   le phénomène de la vie dans ses  formes  historiques,   spirituelles et constituant  une véritable école d’in­terprétation des phénomènes spirituels dans le cadre de la phi­losophie,  de la pédagogie, de l’his­toire et de la littérature.

 

Wilhelm Dilthey assimilera le phé­nomène de la vie sans a priori mé­taphysique au concept de la « com­préhension » (Verstehen), avec des prolongements structuralistes et typologiques. Dans le sillage de son école  se distingueront    des pen­seurs tels que G. Mische, B. Groet­huysen, Ed. Spranger, Hans Lei­segang, A. Dempf. Dans cette continuité,  Georg Simmel  concluera que la vie, qui est par essence informe, ne peut devenir un phé­nomène que lorsqu’elle adopte une forme, ce qui suppose qu’elle doit elle-même se transcender pour être au-dessus  de  la vie. Dans le cadre de l’école  structuraliste de la philo­sophie de la vie allemande, s’illu­streront  Oswald Spengler, qui dé­crivit le déclin de l’Occident comme une morphologie de l’histoire de l’humanité,  et  surtout  Ludwig Kla­ges, qui prophétisera la ruine du monde au nom de la suprématie de l’esprit,  car l’esprit étant  l’ennemi de la vie anéantit la croissance et l’é­panouissement  de la nature in­no­cente et originelle.

 

De Chateaubriand à Berdiaeff

 

Chateaubriand disait, dans Les Mémoires d’Outre-tombe : « La mode est aujourd’hui d’accueillir la liberté d’un rire sardonique, de la regarder comme une vieillerie tombée en désuétude avec l’honneur. Je ne suis point  à  la mode,  je pense que,  sans la liberté, il n’y a rien dans le monde ; elle donne du prix à la vie ; dussé-je rester le dernier à la défendre, je ne cesserai de proclamer ses droits ». Nul autre penseur et écrivain que Nicolas Berdiaeff, le mystique aristo­crate russe du 20ième siècle ne don­nera autant de résonance à ces paroles  en insistant constamment sur  l’étroite  correspondance  entre  la liberté et l’impératif de la vie face aux diverses séductions des struc­ures  abstraites de la pensée, de la psychologie, de l’idéologie qui en­gendrent diverses formes d’escla­vagisme. L’homme est tour à tour esclave de l’être, de Dieu, de la na­ture, de la société, de la civilisation, de l’individualisme, de la guerre, du nationalisme, de la propriété et de l’argent, de la révolution, du collec­tivisme, du sexe, de l’esthétique, etc.

 

Les mobiles internes de la phi­lo­sophie  de  Berdiaeff restent  con­stants  depuis  le début : primauté de la liberté sur l’être, de l’esprit sur la nature, du sujet sur l’objet, de la personne  sur le général et l’univer­sel, de la création sur l’évolution, du dualisme  sur le monisme, de l’a­mour sur la loi. La principale source de l’esclavage de l’homme et du processus  engendré  par l’abstrac­tion  et  l’illusion constructiviste ré­side dans l’objectivation et la socia­lisation à outrance de l’Etre, dans l’atomisation sociétaire et indivi-dualiste qui détruit les formes or­ganiques de la communauté ; cette dernière est fondée sur l’affirmation de l’idée personnaliste et au­then­tiquement aristocratique, donc diffé­rencialiste ;  l’affirmation  de  la qua­lité en opposition avec la quantité, la reconnaissance  de  la  primauté  de la personne impliquant bien celle d’une  inégalité   métaphysique,   d’u­ne diversité,  celle  des distinc­tions, la désapprobation de tout mé­lange.

 

Berdiaeff, en  dénonçant  toute  forme de statolâtrie, a  considéré  que la plus grande séduction de l’histoire humaine est celle de l’Etat dont la force assimilante est telle qu’on lui résiste  malaisément.  L’Etat n’est pas une personne, ni un être, ni un organisme,  ni une essentia ; il n’a pas son existence propre, car il n’existe  que  dans  et par les hom­mes dont il se compose et qui re­présentent, eux, de vrais centres existentiels. L’Etat n’est qu’une pro­jection, une extériorisation, une ob­jectivation des états propres aux hom­mes eux-mêmes. L’Etat qui fait reposer  sa  grandeur  et sa puis­sance sur les instincts les plus bas peut  être  considéré comme le pro­duit d’une objectivation comportant une  perte complète de la per­son­nalité, de la liberté et de la ressem­blance humaine. C’est l’expression extrême de la chute. La base mé­taphysique de l’anti-étatisme chez Berdiaeff  est  constituée  par le pri­mat de la vie et de la liberté de l’être, de la personne, sur  la  société.

 

Miguel de Unamuno et l’homme concret

 

Dans  le prolongement  de  Berdiaeff, et pour conclure, Miguel de Una­mu­no, dans son œuvre Le sentiment tragique de la vie, proclamera la suprématie de la concrétude de la personne  face  à  l’humanité  ab­straite par cette phrase : « Nullum hominem  a  me  alienum puto ». Pour lui, rien ne vaut, ni l’humain ni l’humanité, ni l’adjectif simple ni le substantif  abstrait,  mais  le substan­tif concret : l’homme. L’homme con­cret, en chair et en os, qui doit être à la  base  de toute philosophie vraie, qui  se  préoccupe  du  sentimental, du  volitionnel, de la projection dans l’infini intérieur de l’homme donc de la vie et d’un certain sentiment tra­gique de la vie qui sous-entend  le pro­blème de notre destinée indi­vi­duelle et personnelle et de l’im­mor­talité de l’âme.

 

Maître Jure VUJIC.

vendredi, 25 juillet 2008

Tolkien over financierders

Tolkien over financierders

 

“De ware vergelijking is: “democratie” = regering door wereldfinancierders… Het hoofdkenmerk van moderne regeringen is dat wij niet weten wie regeert, zowel de facto als de jure. Wij zien de politicus en niet zijn beschermheer; nog minder de beschermheer van de beschermheer of wat het belangrijkste van allemaal is: de bankier van de beschermheer. Getroond boven allen, op een manier zonder gelijke in heel het verleden, is de versluierde profeet van de financiën. Hij beheerst alle levende mensen door een soort van magie en levert orakels in een taal niet begrepen door de mensen”.

J.R.R. Tolkien,
Candour Magazine, 13 July 1956, p. 12

J. Parvulesco: Dans la Forêt de Fontainebleau

Dans la forêt de Fontainebleau
Sur "Dans la Forêt de Fontainebleau" de Jean Parvulesco
D’origine roumaine, Jean Parvulesco, né en 1929, est un écrivain français, catholique de Tradition. Il fut l’ami de Raymond Abellio, Mircea Eliade, Jacques Bergier, Dominique de Roux, Guy Dupré et de nombreux autres. Il eut des contacts avec Martin Heidegger, Ezra Pound et Julius Evola. Réfléchir et Agir ainsi que Le Libre Journal ont publié de remarquables papiers sur lui dont, dans le premier, Vladimir Poutine et l’Eurasie et, dans le second, le papier de Nicolas Bonnal[1] : Jean Parvulesco : Le Sentier perdu.
           
Dans le n° 26 de la revue Rebellion (septembre-octobre 2007), sous le titre « La troisème guerre mondiale est commencée » que vous trouverez en archives 2007 (octobre) sur le site : http://rebellion.hautetfort.com , vous trouverez la citation suivante de Jean Parvulesco : « En même temps, il ne faut au aucun cas oublier que, mystérieusement, c’est en France et à partir de la France que la partie finale va devoir se jouer, parce que c’est ainsi qu’il en a été décidé ‘depuis les ultimes hauteurs des cieux’. Ce sera donc dans les soubassements inconscients d’une certaine France profonde, dissimulée, que réside la décisions salvatrice, et peu importe alors l’état d’abominable dégénérescence spirituelle et politico-historique de la France, parce que des puissances d’un autre ordre vont avoir à y mener la ‘bataille finale’. Il est donc urgent que les nôtres – quelque soit leur nombre – se rassemblent déjà, et ce tiennent prêts à se saisir de la grande vague montante ».
           
C’est cette phrase que Jean Parvulesco développe en 430 pages dans cet onzième grand roman métaphysique La forêt de Fontainebleau, l’escatologie se rencontre de chapitre en chapitre. Le style est à mi chemin entre celui de Raymond Abellio et de Maurice G.Dantec : curieux, désorientant, occulte, empli de ce que Jean Pauwels nommait des coincidences troublantes.
           
J’avoue que les cent premières pages m’ont été difficiles à lire et je comprends que certains lecteurs en restent là. Ils ont tort. La suite devient, peu à peu, d’abord captivante, ensuite passionnante.
           
Ce que n’avait pas vu Francis Parker Yockey[2], et que souligne Parvulesco, c’est que l’Imperium grand continental (auquel j’aspire tout comme Jean Parvulesco) dépendra toujours de la situation suprahistorique de la France. Il faut que la France retrouve le fil de « sa propre histoire profonde » crimellement interrompue par la décapitation de Louis XVI et de Marie-Antoinette.
           
Le roman imagine Marie-Antoinette et Louis XVII rescuscités en notre temps et cachés dans la forêt de Fontainebeau jusqu’à ce que « le jour vienne ». Or le jour est venu. Il n’était pas dans les vues de l’auteur de nous conter de quelle manière la Renaissance de l’Impérium se passera mais de nous conter les fort nombreuses traces qui permettent, souterrainement, d’y accéder. Et, pour cela, bravo l’artiste !
           
« … je ne parle pas de certeins rêves prophétiques, dont on doit comprendre qu’ils ne sont pas des rêves mais de visions commandées depuis l’au-delà, qui n’ont que l’apparence du rêve, dont ils ne font qu’emprunter les voies, à des fins autres, entièrement différentes ».
           
« Là, je ferai un rapprochement. Avec un fragment d’un roman qui n’a pas été publié, et qui risque de ne jamais l’être, Les Chats Bottés de Nicolas Bonnal, fragment qui fait état de l’apprentissage spirituel de Bérénice par Frantz l’initiant au langage des oiseaux, au mystérieux carmina galli, ‘langue angélique ou des états supérieurs de l’être’. »
« Le secret de tout n’est-il pas là ? À travers les noires broussailles, il y a un sentier oublié y menant. »
           
« … mais encore faudrait-il avoir au moins pressenti, si ce n’est déjà su comprendre en profondeur, quel est l’ultime mystère arthurien[3] du roman, de la ‘romance occidentale’ ; tâche gigantesque, suprahumaine, dévastatrice ; qu’l s’agit de poursuivre sur les confins glaciaires de la ligne de partage d’être et du non-être. »
«  (Je tiens de ‘Laurence de Saint-Germain’ que, pareille à un tumulus de la steppe cachant les restes d’un prince scythe anonyme, la ‘colline’ en pleine terre s’élevant au milieu de la belle cour intérieure de la ‘mason d’édition’ hantant mes rêves, garde secrètement de la jeune maîtresse française d’un général allemand violéee et assassinée, cher elle, par la ‘résistance’, l’été de 1943 ; celle-ci, fille des anciens propriétaires de l’immeuble, se serait appelée Marie-Christine, et l’on dit une messe en sa mémoire, à l’église Saint Thomas d’Aquin, toute proche, chaque 26 juillet[4], jour anniversaire de son supplice et de sa mort ; quand, parfois, se laissant surprendre à dessein, elle ‘apparaît’) »
           
« La littérature en action, arme occulte de la Parousie[5] »
           
« Cependant, aujourd’hui, ce 26 juillet, la canicule semblait avoir quelque peu cédé. J’y pressens un signe menteur, le pire est sans doute encore à venir. Dans toute ma vie, ce qui m’est arrivé d’extraordinaire, c’est à chaque fois en juillet que cela s’était passé. Sans aucune exception, toujours en juillet. »
           
C’est  ainsi qu’en 2007, ma maman est morte le 19 juillet, a été enterrée le 22 juillet (et je tiens ici à remercier mes amis Jacqueline De Beukelaer, Michel Cuykens et que le 26 juillet, jour de mon
           
« … je l’avais chérie comme une Yvonne de Galais[6] ‘glissant près des étangs’, comme l’ombre d’une jeune princesse du haut moyen-âge réincarnée clandestinement en ce temps de dépravation sans bornes, de misère et de honte abjectissimes ».
           
« Par rapport au non-être, lêtre sera toujours en situation de ‘camp retranché’. Ce n’est qu’en se reournant sur lui-même, séparé de tout ce qu’il n’est pas, que lêtre peut faire face à l’encerclement du non-être. Car l’être se trouve en permanece encerclé par le non-être[7] ».
           
Après, comme je l’ai dit, avoir dépassé les cent premières pages, « … je commençais à pouvoir mieux déchiffrer les arrangements occultes qui s’étaient mis en marche aurour de moi à partir de l’instant où je m’étais trouvé brusquement happé dans la ‘voie sans retour’ de l’allégeance à la centrale conspirative inconnue qui, depuis ‘l’autre monde’, menait si étroitement le jeu dans lequel je me voyais à présent engagé : tout à fait malgré moi, au départ ; mais, depuis,m’étant de plus en plus laissé prendre. » Exactement comme moi.
            « Des ‘portes induites’[8] il y en a, certainement, d’autres au monde ; mais pas autant qu’on pourrait le croire, et même bien moins, la plupart s’étant refermées avec l’obscurcissement accéléré des temps actuels ; et quand il n’y en aura plus aucune, c’est que la fin sera imminente, et sans doute déjà là. »
           
« L’amiral avait raison, avec l’apparition de ‘Régine’ et de Louis au ‘Manoir des Roses’, apparition imprévue, et soudaine s’il en fut, notre combat entrait vraiment dans sa « phase finale’. Ce qui impliquait que, désormais, il nous faudra de plus en plus agir, ou faire agir à visage découvert, accepter toutes les conditions de l’action politique directe, action d’encadrement idéologico-organisationnel et de sur-activation permanente des groupes disposés – que nous allions prédisposer nous-mêmes – à s’engager à nos côtés, totalement. Car à nouveau la dialectique tragique destinée à ramener les masses sous l’influence irrésistible des minorités agissantes viendra à battre son plein, sans trêve ni aucune échappatoire. Aucune. »
           
« Mais une reine de France est faite pour être adorée, et celle-ci plus que n’importe quelle autre. Il faut aussi, pour que l’on puisse mieux comprendre les choses, que l’âge qui paraissait être celui de ‘Régine’ n’était pas du tout celui qu’elle avait la veille de la date fatale du 16 octobre 1793, mais celui de ses 25 ou 28 ans. »
Dans ce roman, qui est, en réalité, plus un Journal qu’un Roman, Jean Parvulesco nous promène de lieu en lieu, de Suisse, en Vaucluse, en Berry, à Paris, en Vendée, en Italie. Il nous parle de plusieurs personnages, il est, en réalité un fabuleux metteur en scène, connaissant à merveille l’art du play back. Jugez-en :
           
Coire[9], « ville chère, très chère à mon cœur, avit été la première ville impériale qui avait reçu et salué Frédéric II Hohenstaufen, ses étendards et ses oriflammes, avec une ardeur annonçant les sommets lumineux, enflammés du bref Regnum Sacrum qui allait venir, et qui restera dans l’immémoire abyssale des nôtres comme la dernière grande saison d’ensoleillement cosmique de l’histoire occidentale du monde (…) Oui, je souviens de la ville de Coire, de la secrète ville de Coire, comme si j’y étais encore, où pour la première fois j’avais respiré l’air vivifiant et bûlant, le très limpide air d’une ‘zone libérée’. L’air de la ‘Citadelle de l’Ardente Foi’. »
           
« … je l’ai traversée, moi aussi, ma ‘Saison aux Enfers’, je les ai connus, les Enfers, et j’ai vu que ce n’était quand même pas grand-chose ; la Foi sera toujours plus forte que tous les Enfers ; il suffit d’avoir la vraie Foi, ou que la Foi vous ait vraiment… ».
La Foi chrétienne et le rêve d’un Impérium sont les points forts de ce livre.
           
« Pour nous autres, l’Impérium Ultimum devra être constitué, dans sa première phase historique, par l’intégration impériale finale de l’Europe de l’Ouest, de l’Europe de l’Est, de la Russie, du Tibet, de l’Inde e du Japon. Impérium Ultimum axé également – il n’y a pas ‘dEmpire Final’ sans une nouvelle ‘Religion Finale’ – sur la réintégration des deux grandes religions européennes, le catholicisme et l’orthodoxie, le protestantisme ne comptant pas, en une seule ‘Religion Impériale Finale’, à laquelle viendront s’adjoindre – dans le cadre de ‘l’Empire Eurasiatique de la Fin’ – d’une manière ou d’une autre, le ‘grand shintoïsme japonais et le ‘grand hindouisme’ indien de la fin. »
Jean Parvulesco n’hésite pas à faire figurer le pape Jean-Paul II dans son Journal :
           
« D’une voix toute basse, et lente, mais sans aucune interruption, le Saint-Père en vint ensuite à dresser, devant nous, la vision du ministère occulte, du ministère eschatologique final de la France, d’une certine ‘France Secrète’, ministère concernat les destinées de l’ensemble de la civilisation chrétienne européenne, Russie y comprise, à part entière. (…) afin que l’Europe puisse revenir à son identité totale retrouvée – à la fois antérieure et ultime, ‘finale’ – à sa double identité ontologique, sacrée et impériale.»
           
« Et j’ai retenu aussi, entre bien d’autres, une fort saisissante confidence du cardinal A.T. sur Jean-Paul II, lequel, miraculeusement échappé à la mort lors de l’attentat contre sa personne de la Place Saint-Pierre, le 13 mai 1981, et croyant intraitablement à une intervention, ce jour-là, en sa faveur, de Notre-Dame de Fatima, aurait proposé aussitôt à la Vierge un ‘pacte de survivance commandé’, pour qu’Il soit ‘maintenu en vie’ jusqu’à ce qu’Il finisse par vraiment pouvoir ‘accomplir sa mission’ ; ‘jusqu’au bout’. Mais de quelle mission s’agissait-il ? Peut-être celle de la réintégration finale du catholocisme et de l’orthodoxie dans une seule ‘religion impériale’, faisant suite à une future œuvre de ‘nouvelle évangélisation’ du contient européen dans son ensemble, œuvre poursuivie, en profondeur, et qu’il faudra totalement achever, tant en Europe de l’Ouest qu’en Europe de l’Est. »
           
« Et tout cela pour qu’il finisse par me confier en continuité que Jean-Paul II ne déserpérait pas de nourrir, au fond de Lu-Même l’ardent désir – toujours, pour le moment, profondément caché – d’arriver, un jour, à pouvoir procéder, personnellement, à la canonisation finale de Louis XVI et de la famille martyre de celui-ci. La mystérieuse ‘réapparition’ de ‘Marie’ et de son fils ‘Louis’ ayant, cependant, suspendu le processus de cette canonisation secrètement en cours d’émergence à la lumière du jour ».
           
« Et il y avait même bien plus encore : à ce qu’il semblerait, le Saint-Père commençait à se laisser convaincre par deux de ses ‘conseillers secrets’ -- un espagnol et un ukrainien – de l’éventualité à envisager, un jour, de la canonisation de Corneliu Codreanu, le chef de la Légion de l’Archange Michel. »
De Rome, nous passons, sans transition, dans le Cher :
           
« Jusqu’à ce que nous rencontrâmes, devant nous, soudain le cours de la Louque, et que je ne sais pas comment nous escaladâmes, ensuite – mais comment avions-nous pu passer la Louque – la haute pente abrupte remontant vers le village de Lignière. »
« Ne jamais croire aux apparences, au grand jamais. Toutes les apparences, même les plus apparentes, sont fausses ; toujours. »
« … dans les ténèbres cosmologiques immenses d’un monde réduit actuellement à la totale mainmise subversive, sur lui, du non-être, une ‘toute petite flamme’ persiste donc néanmoins à luire, qui est celle du feu sacré de l’être qu’entretiennent encore les derniers groupements engagés à perpétuer clandestinement le souffle vivant de ce qui n’est déjà plus… or, c’est bien de cette perpétuation disqualifiée, à peine symbolique, de ces restes sacrés, de ce qui n’est déjà plus, ou déjà presque plus, que devront surgir les avancées abyssales du futur renouvellement cosmologique, s’affirmer le mystèreagissant d’un prochain retour de l’être, et de ce futur surgissement de l’être c’est à nous autres qu’il appartient d’assurer, de mener et de conduire en avant la marche révolutionnaire de son avènement souterrain… et cela en reconstruisant, dans l’invisible,une ‘nouvelle centrale de l’être’, une ‘forteresse ontologique occulte’ devant fournir le ‘lieu-même’ du futur achèvement de celui-ci, le ‘lieu même’ de sa propre émergence, d’où tout recommancera (…) il nous faudra donc faire œuvre de surhommes… or je pense que, secrètement, nous sommes déjà des surhommes à l’œuvre…(…) in nous revient à nous autres d’instituer, révolutionnairement, le Règne à venir, le Regnum Sanctum.»
           
« Et si, quelque part, le double domaine du visible et de l’invisible n’en faisait qu’un? »
Comme l’écrit si justement Frederick van Eeden : Le soleil accepte bien de passer par de petites fenêtres.  Et Jean Parvulesco d’affirmer : « À la fin, ce qui commande tout, c’est l’héraldique. »
           
« Pour des raisons que j’ignore, Manuel de Richter semblerait s’intéresser beaucoup aux Bourbons-Parme. Il est par contre animé, et à juste titre, je crois, d’une véritable haine à l’égard des Orléans. »
           
« Si le supérieur commande à l’inférieur, par le retour sur nous-mêmes et le ‘changement de régime’ que ce retour implique, nous fournirons, Marie et moi, au combat actuel des nôtres pour la promotion impériale finale du ‘Grand Continent’ eurasiatque, ses dimensions trnzdcendantales suprêmes,’polaires. (…) Car c’est l’actuelle ‘conspiration cosmique’ (…) qui décidera du prochain renversement de ce monde et de l’avènement du Regnum Sanctum, de son établissement imépérial révolutionnaire (…) Désormais, tout est renversement, même si celui-ci n’apparît pas encore en pleine lumière du jour. »
           
« …je me demandais (…) ce qu’il fallait penser (…) de la récente escapade à l’hôtel Le Coq de Bruyère, chez Julie Landrève, au village de Lignières, sur la frontière secrète du Vieux Pays[10] (…) à l’intérieur même du Vieux Pays, de l’autre monde. »
           
« Une certaine littérature agit par en dessous sur les développements de la ‘grande histoire’ dans sa marche en avant, détient un pouvoir propre d’irradiation transcendantale qui intervient à part entière dans les plus secrets combats de l’être contre les conspirations du non-être. »
Me vient ici en mémoire cette citation de Cicéron : L’histoire est le témoin des temps, la lumière de la vérité, la vie de la mémoire, l’institutrice de la vie, la messagère de l’antiquité.
           
« À l’heure présente, le Vaucluse se trouve travaillé par en dessous par des forces tout à fait considérables, encore inconnues – non identifiables encore, mais, qui, bientôt, le seront pleinement – dont le tumulte à couvert annonce des redoutables orages, des rensversements à la fois inattendus et suprêmement décisifs. »
           
Je me permets, ici, une citation de Guy Rommand, 10 octobre 2007 dans : www.lesmanantsduroi.com
 « … la Bléone qui rejoint à Digue le cours moins trouble de la Durance »
Revenons à Jean Parvulesco et à ses mots sur le Vaucluse où je troovais il y a deux mois à peine.
           
« Mais je n’y ai pas coupé, je me suis quand même mis à étudier le dossier en cours de constitution du ‘nouveau pouvoir du Vaucluse’ (…) {qui} s’appuierait fondamentalement sur une action révolutionnaire métapolitique occulte, action déjà en cours dans la région (…) ‘conspiration des Bories’, du nom du village ‘archaïque’, ‘paléolitique’ des Bories, situé à quatre kilomètres de Gordes[11]. (…) Ce ‘nouveau pouvoir du Vaucluse’ contrôle donc la totalité du Midi de la France, l’ensemble de sa côte méditerranéenne ; un contrôle pour le moment encore souterrain, et qui entend le rester ; mais jusqu’à une certaine date seulement, que l’on ignore, nous autres. »
           
« L’apparition, pour le moment encore spectrale, de ce que nous appelons à présent le ‘nouvel ordre du Vaucluse’ serait ainsi un signe avant-coureur de la prochaine émergence historique -- et de toutes les façons suprahistorique aussi – de notre propre Imperium Ultimum, du Regnum Sacrum de la nouvelle Grande Europe impériale continentale, ‘eurasiatique’. »
           
«  (…) au ‘nouveau pouvoir du Vaucluse’ devant répondre, en temps dû, l’établissement analogued’un ‘nouveau pouvoir en Alsace’, ou en Vendée, ou dans le ‘Grand Paris et la région parisienne. »
           
« C’est dans le Vaucluse que, aujourd’hui, se forgent secrètement les prochaines destinées millénaires de la plus Grande Europe continentale, eurasiatique (…) alors qu’ (…) à Avignon, une association fort active, ‘Les étudiants du Vaucluse pour le Tibet Libre’[12]  (…) ce qui se passe dans le Vaucluse est une forme tout à fait nouvelle de la dialectique essentiellement révolutionnaire des ‘minorités agissantes’. (…) Et tout cela comme si de rien n’ééétait ; dans le Vaucluse, l’invisible intervient directement. Cela par une relation particulière entre les cieux et les humains. »
           
« La voûte étoilée au-dessus du Vaucluse a certainement quelque chose de particulier, des arrangements chiffrés, des figures théurgiquement actives ayant un ministère secret, aux répondants cosmiques inouïs. Toute rencontre faite dans le Vaucluse, n’est-elle pas réputée définitive ? Et cela depuis des temps immémoriaux ? »
           
« Et j’ai aussi l’impression que tôt ou tard, il faudra que l’on se résigne à envisager l’intégration des deux zones de problèmes qui nous mobilisent tous actuellement : celle de nos survivants royaux, ‘Marie-Antoinette’ et son fils ‘Mgr[13] Louis’, et celle du ‘nouveau pouvoir du Vaucluse’ ».
« Dionysos serait-il en train de renaître dans le Vaucluse ? »
           
« … dans le Vaucluse le Groupement d’Action et de Recherche Géopolitiques Avancées, organisation contre-stratégique supranationale engagée à promouvoir l’intégration impériale révolutionnaire de la plus Grande Europe continentale, ‘eurasiatique’, suivant la doctrine g éopolitique d’avant-garde de l’axe ParisBerlin-Moscou- New Delhi – Tokio ». Mon ami Robert Steuckers appréciera.
           
Puis, Jean Parvulesco étend son réseau à la France entière :
           
« Or, dans l’état actuel de la situation politique de la France, Jean d’Altavilla savait pouvoir compter sur environ treize instances opérationnelles actives, ou plut^to activées, qu’il s’avouait en état de tout de suite intégrer au Projet l’Archipel : compter, donc, sur le ‘Manoir des Roses’, tout comme sur le ‘nouveau pouvoir du Vaucluse[14]’, et la ‘Vendée souterraine’ ; sur les organisations national-révolutionnaires en place en Bretagne et en Alsace ; sur la ‘forteresse’ du Coq de Bruyère, le village de Lgnières ainsi que, à travers celui-ci, sur le ‘Vieux Pays’[15], sur le point, peut-être, d’émerger à l’histoire visible ; sur la centrale de Rennes-le-Château, qui n’est pas celle que l’on pense : sur la nébuleuse du ‘groupe’ de l’Étoile Vénisienne dirigée par Armando Weill ; sur des ‘groupes’ secrètement organisés de paras, de nageurs de combat, des ‘forces spéciales’ ; et, enfin, dur des fractions activistes secrètes avancées de la police, RG et DST ; sur d’importants élémentys de la gendarmerie, dont un nombre considérable[16] de cadres supérieurs. La France, à l’heure actuelle, se trouve en fait, dans un état de révolution immédiat et avancé, tout en l’ignorant complètement : c’est ainsi que ces choses-là se passent, toujours.De chacune de ces instances déjà en action, mais en action, pour le moment, séparément, chacune plus ou moins pour son propre compte, Jean d’Altavilla allait donc s’efforcer, dans un premier temps, de dégager des dirigeants spécifiques de la trempe d’un Richard Kitaeff, d’un Hubert de Salm, d’un Armando Weill et, une fois ceux-ci identifiés sur place, les intégrer dans un ‘conseil unitaire de commandement’ devant constituer l’ infrastructure opérationnelle spéciale du projet l’Archipel. Avant de passer réellement à l’action, le ‘Manoir des Roses’ entedait établir un réseau souterrain d’influences et de contacts lui garantissant le contrôle à couvert de l’ensemble de l’espace sur lequel il allait avoir à exercer son pouvoir révolutionnaire nouveau, avant que le projet l’Archipel ne soit à même de pouvoir prendre les choses en main pour son propre compte. Avant la tombée définitive des marsques et sachant que l’espace sur lequel le ‘Manoir des Roses’ comptait exercer complètement son pouvoir était celui de la France. Pour commencer, parce que le but final concernait l’espace géopolitique[17] propre de la plus Grande Europe à l’ordre de la ligne impériale Paris-Berlin-Moscou[18]-New Delhy[19]-Tokyo. Pour la plus grand Europe, il fallait enclencher le travail à faire par la mise en œuvre du processus d’intégration politique otale de la France et de l’Allemagne, qui ne devront plus constituer qu’un seul État, en attendant aussi, que celui-ci vienne se trouver intégré dans la plus Grande Europe continentale impériale, ‘eurasiatique. »
Le samedi 1er décembre 2007, au Château Coloma, Alain Soral, Eddy Hermie, Pierre Vial, Hervé Van Lathem, Alian Escada, Robert Steuckers et Kris Romans ont, les uns et les autres, différemment, parlé dans ce sens à l’invitation de Georges Hupin. Au solstice d’hiver, le vendredi 21 décembre 2007 au Cercle des Renards, Pierre-Émile Blairon ajoutait sa pierre à cet édifice. Le samedi 22 décembre 2007 au pied du Mont des Cats, Robert Steuckers en évoquant l’histoire et l’actualité de l’Iran évoquait Alexandre le Grand et son Emprie.
           
« Les Richter croyaient que seul le rétablissement ontologique, révolutionnaire et nuptial, d’un ‘centre polaire absolu’ – d’un nouveau ‘centre polaire absolu’ – du monde et de l’histoire permettrait que l’on retrouvât le souffle, la lumière vive et le règne reconnu pour ce qu’il est à travers ce qu’il n’est pas. »e originel de lêtre, ce qui ferait alors que le sens de l’histoire en sera renversé, et le monde changé dans son entier, définitivement. Alors que Jean d’Altavilla, lui, pense, au contraire, qu’il fallait commencer par renverser révolutionnairement le sens de l’histoire, changer la face du monde et jusqu’aux états mêmes de la condition humaine ; et qu’ensuite seulment pourrait se poser effectivement le problème du retour à l’être. Autrement dit, les Richter entendaient agir nuptialement sur l’Esprit pour changer l’histoire, et Jean d’Altavilla changer l’histoire pour aboutir au retour de l’Esprit, pour qu’un accès nous soit à nouveau donné vers le Règle de l’esprit, vers le Regnum Sanctum. Quant à moi {Jean Parvulesco}, je suis persuadé que pour arriver au Sanctum, il faut que le ‘Manoir des Roses’ ait simultanément recours aux deux positions antagonistes : utiliser l’Esprit pour changer l’histoire, et changer l’histoire pour retrouver l’Esqprit. »
           
« Quel est le ‘signe de feu’ selon lequel on doit pouvoir reconnaître la véritable identité du ‘prince providentiel’, de son émergence de l’au-delà ? C’est que, lors de son apparition – lors de sa présentation – tout le monde doit se rendre, comme par miracle à l’évidence incontournable de son ‘identité providentielle’. Il sera donc ‘celui que l’on attendait’, parce qu’il apparaîtra d’emblée et tout à fait indéniablement, comme ‘celui que l’on attendait’, et que personne ne pourra en aucun cas douter de cela. Et ce sera, alors, précisément le cas de celui qui apparaîtra comme le ‘prince de la Forêt de Fontainebeau’, et qui sera, en réalité, Mgr Louis, gardant en lui, occultement, l’identité providentielle du ‘sauveur attendu’ et qui, comme tel, sera reconnu pour ce qu’il est à travers ce qu’il n’est pas. »
Ici, une citation de Bernard Werber : Nous ne sommes que des grains de sable mais nous sommes ensemble. Nous sommes comme les grains de sable sur la plage mais sans les grains de sable la plage n’existerait pas.
           
« Une chose m’apparaît, et d’affirme comme absolument certaine : il n’y a pas, il ne se peut en aucun casqu’il y ait un ‘Nouvel Empire’ total –l’Imperium Novissimum – sans une ‘Nouvelle Religion’ impériale, émanation et fondation active de celui-ci. »
           
« … épousailles (…) se trouvant ainsi orientées non pas vers un certain passé révolu, mais, au contraire, vers un certain avenir non encorte advenu ; mais qu’il faut quand même tenir, désormais, pour imminent. C’est ce j’appelle, moi, le ‘décalage en avant du Vaucluse ». »
           
« Louis voit en lady Laura l’incarnation providentielle du Regnum, le soleil rayonnant de la conclusion eschatologique de ‘histoire, de ‘l’histoire à sa fin’ … il faut que vous sachiez reconnaître en Louis le ‘concept absolu’ de la révolution impériale grand-européenne, l’homme du Regnum Christi… il est un héros mystique, la réincarnation – en quelque sorte – d’un chevalier du haut Moyen-Âge, un homme secrètement transmuté, e qui le mystère transcendantal, ‘divin’, de sa race est parvenu à définitivement s’accomplir… il a été fait par la Divine Providence pour être ce qu’il est… pour vos ‘grands desseins conspirationnels suprahistoriques’, vous ne pouvez pas trouver mieux, et là tout est dit… »
Alphonse II, n’a-t-il pas déclaré  le 18 avril 1986 : Je n'ai pas choisi d'être l'aîné, mais je dois conserver allumée une flamme qui vient du fond des âges, c'est-à-dire du baptême de Clovis, du couronnement de Charlemagne et de l'élection d'Hugues Capet, il y a pour ainsi dire mille ans. C'est une flamme qui a éclairé le monde et qui pourrait rendre bien des services à nos contemporains.
Et Parvulesco de préciser sa pensée :
            « Et comment aurais-je pu ne pas me laisser convaincre par un être qui, en réalité, est une ‘Étoile’ ? Je le sais, une étoile limpide et scintillante, logée au cœur même du firmament qui se tient au dessus de nous (je dévoile là un grand secret).[20] »
           
« Ils ne savent pas ce qui les attend les détenteurs en place de l’actuel pouvoir politico-historique de ce monde, les ‘puissants du jour’. Mais nous autres, déjà, nous le savons. Parce que c’est bien à nous autres qu’il revient d’agir à présent, d’assumer opérativement l’immense tournant politico-historique, culturel et spirituel, religieux qu’il faut déjà tenir pour imminent, et qui représente le renversement révolutionnaire total de l’actuelle conjoncture planétaire finale. Le monde rt son histoire en cours devront changer jusqu’à ce que leur contraire suraffirmé vienne à s’installer inconditionnellement à la place de ce qu’ils avaient été jusqu’à présent, l’héritahe de la soi-disant Révolution Française définitivement anéanti. Attention donc : pour nous autres, l’heure de l’action est venue, l’heure de l’action révolutionnaire ‘ultime et totale’. Désormais, pour nous autres, c’est une question de jours, voire même une question d’heures. »
           
« … je peux même me charger personnellement à organiser votre visite dans le Vaucluse, et je peux également vous dévoiler que l’on m’a effectivemment demandé de le faire… et par la même occasion, je vous livre aussi l’information -- à mon avis extraordinairement significative – selon laquelle l’actuel Père Abbé de Sénanque est le demi-frère cadet du ‘Tono’, du ‘Seigneur’ de la grande confrérie initiatique ultra-secrète japonaise de la ‘Cime Polaire Resplandissante’, la Hokkayoko no mabushii ch_oj_o … et que bien c’est l’actuel ‘Tono’ de la Hokkayoko no mabushii ch_oj_o (…) qui l’a instruit dans les doctrines opératives de la confrérie, et lui a fait confier les pouvoirs occultes considérables qui s’y attachent… vous voyez donc comme tout se tient… »
           
« … celui-ci est sur le point d’établir l’emprise révolutionnaire souterraine sur l’ensemble du Vaucluse. »
           
« Dans ce qu’il est désormais convenu d’appeler le ‘Vieux Pays’, Hubert de Salm vient de réussir non seulement à établir d’une manière inconditionnelle son propre dispositif d’emprise souterraine politico-historique sur place, tant dans le ‘Vieux Pays’ lui-même qu’outre Louque, dans le village libre et les bois de Lignières, mais aussi à obtenir la reconnaissance implicite de cette situation de fait de la part de certaines puissances politiques européennes. »
           
« En même temps, en Vendée – en ‘Vendée Libre’[21] – les choses prennent de plus en plus une allure ouvertement ‘insurrectionnelle’. Le 21 janvier 2005, (…) huit cents personnes ont manifesté, à midi, sous un vaste déploiement de drapeaux blancs à l’effigie du Sacré Cœur Rouge (…) manifestation placée sous le signe du retour en force de la vendée – de la Vendée Secrète – à la monarchie catholique et traditionnelle, intégrée dans la plus Grande Europe engagée autour de l’axe géopolitique Paris-Berlin-Moscou. « 
           
« Tout est en place, tout est prêt, tout se tient : il ne manquera donc plus que seule l’apparition du ‘prince providentiel’ pour que la super-déferante révolutionnaire finale des nôttres l’emporte. Définitivement.(…)  Finalement, l’heure est là, le piège se referme, le piège cosmique tendu par les nôtres. Le ‘prince providentiel’ se trouve déjà dans la Forêt de Fontinebleau. Tout comme l’Étoile du Nord dans la Grande Ourse. »
           
« Quand l’heure viendra, le ‘prince providentiel’ se déclarera comme tel, ouvertement, et de par cela même il sera immédiatement reconnu, par tout le monde, pour ce qu’il est, et la déferlante révolutionnaire des places-fortes constituant l’Archipel contre-stratégique européen grand-continental souterrainement mis en place par nous autres l’emportera sur tout, balayant tout devant elle, et l’Empire Européen de la Fin se trouvera ainsi installé, dans la grande histoire ainsi que dans dans l’histoire d’au-delà de l’histoire. Ensuite ‘d’autres temps viendront’. »
           
« Mais il se fit aussi que, à force de le regarder, moi aussi, de mon côté, attiré avec force par son visage, il commença à m’apparaître de plus en plus comme si je le connaissais déjà, comme s’il eût pu m’être en quelque sorte familier, je ne sais pas d’où ; ni comment ; pour qu’à un certain moment d’un seul coup, j’ai su voir qu’il ‘avait la tête de César‘ ; que lui-même, c’était César ; que c’était bien une apparition de Khaesar qui se tenait là devant moi ; c’était donc ça le secret de sa personnalité, du trouble provoqué par sa présence, par son extraordinaire prédestination pressentie ; par ses pouvoirs magnétiques voilés, par son aura si insoutenablement intense. Difficilement croyable que tout cela. Nous attendions secrètement un César, et maintenant il était là, à table, devant nous. C’est ainsi que j’avais compris que les temps étaient venus. »
J’avoue que je suis impressionné : César, Arthur, les grands parmi les grands, et maintenant Louis (celui de Sire de Jean Raspail ou celui de Jean Parvulesco, peu importe). Quel bonheur !
Ivan de Duve, 30 décembre 2007
Jean Parvulesco
Dans la forêt de Fontainebeau
Alexipharmaque
ISBN : 978-2-9525875-6-3
EAN : 9782952587563

De Nicolas Bonnal, lire, entre autres, Le voyageur éveillé, Les Belles Lettres, 2002 (ISBN 978-2251442235)
Francis Parker Yockey Le prophète de l’Imperium Éditions Avatar, ISBN 0-9544652-3-7
Sur le grand roi Arthur, voir notamment :
Jean Mabire
Thulé
Robert Laffont
Réédition : Pardès
Jean Mabire
Godefroy de Harcourt
Les éditions du Lore
Jeanne Bourin
Le grand feu
La Table Ronde
Anne Dudant
Le Cycle d’Harold, Chevalier de la Table Ronde et Guerrier Impie
Édition Nox, Vielsam, Belgique
Gillian Bradshaw
La légende arthurienne
Nestiveqnen

00:05 Publié dans Jean Parvulesco | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, lettres, livre, france, europe | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

jeudi, 24 juillet 2008

"Pages bourguignonnes" de Johannès Thomasset

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Sur un livre mythique de Johannès Thomasset : Pages Bourguignonnes

 

Recueil d’articles parus dans Le bien public, Les cahiers de Bourgogne, La Bourgogne d’or ou encore Les Cahiers Lu­xem­bourgeois, Pages bourguignonnes est une ode à la dif­fé­rence enracinée, écrite par Johannès Thomasset, que l’on présente souvent comme le poète païen refondateur du mythe burgonde.

 

Cette différence enracinée, c’est d’être bourguignon, ou Burgonde et de souhaiter l’avènement d’un nouvel ordre politique que Yann Fouéré a appelé "L’Europe au cent Dra­peaux". En somme l’une des dernières façons de se sentir et d’être aristocrate.

 

Profondément attaché à la terre de ses ancêtres, Johannès Thomasset proclamait bien fort qu’“En des temps d’op­pro­bre, il sied de se tourner vers les héros. Pour nous, habi­tants de la Bourgogne aimée des Dieux, il faut songer par­fois au dernier souverain. Oublié des uns, maudit des au­tres, Monseigneur Charles de Bourgogne, dit le Hardi, plus tard le Téméraire, n’a point eu bonne part à la justice de l’histoire… Que Charles, mauvais politique, ait gouverné fol­­lement son duché, cela ne se met en doute. Mais il a tout ce qu’il faut pour être un héros national, une grande fi­gure d’épopée. Brave, chevauché de chimère, fastueux, redoutable, ce très haut prince fut un poète de l’action. Il sied à nous Bourguignons, non pas de chérir sa mémoire, mais d’exalter son image, de dresser sa silhouette grandio­se sur le ciel trouble d’aujourd’hui”.

 

Entouré de mystères pesant sur son auteur Pages Bour­gui­gnonnes appelle à l’insurrection salvatrice et rédemptrice à l’égard du jacobinisme, sorte de religion révélée en 1789. Alors que nos Rois parlaient des peuples de France et que Charles Maurras soutenait contre tous, même contre les siens, l’idée d’une France fédérale, les nouveaux clercs de la Sorbonne défendaient l’idée d’une république “Une est indivisible” et massificatrice. Le moule ou la tôle en quel­que sorte.

 

Loin de cette conception totalitaire en dehors de laquelle il ne peut exister d’autre avenir pour les peuples, Thomasset rê­vait.  A la lecture des Nibelungen, il affirmait : “Nous par­lions français pendant que notre histoire s’écrivait en al­le­mand… La formidable légende burgonde s’est cristalli­sée trop tard; les héros étaient en fuite, découragés, é­pui­sés. Ils avaient oublié leur patrie et leur langue… Le poème des Nibelungen, dont presque tous les héros sont burgon­des, c’est-à-dire actuellement français, est devenu poème na­tional allemand… Les Allemands étudient dès l’école le Ni­belungenlied et savent que les Burgondes sont une des plus nobles tribus germaniques. Mais peut-être ne savent-ils pas ensuite que leurs descendants vivent en Gaule ? De mê­me que nous ne voulons pas savoir que nos pères vécurent en Germanie.”

 

Loin d’un certain régionalisme musée, Johannès Thomasset dénonce à la Noël 1932, dans les colonnes de La Bourgogne d’or “Les défilés et les danses en costumes de jadis tour­nent vraiment à la mascarade. On ne fait pas revivre ainsi la fierté d’un peuple. Au lieu de vivifier la tradition, ces mœurs ne font qu’en souligner la mort… Exhumer de vieil­les coiffes et organiser des cavalcades est un peu ridicule, tout à fait inutile et souverainement triste.” Le régionalis­me musée étant la plus simple expression laissée par les ja­cobins à ceux qui souhaitent voir renaître les patries char­nelles.

 

Publiées en 1938, à Bruxelles, Pages Bourguignonnes trou­vent alors naturellement sa place dans la bibliothèque des régionalistes, des séparatistes et des autonomismes  qui s’op­posent alors à la chape de plomb jacobine qui sera aussi défendue après l’armistice de 1940. Johannès Tho­mas­set, à l’instar de l’abbé Gantois ou d’un Olier Mordrel pense que cette nouvelle guerre ne le concerne pas. Tho­masset se retrouve alors conduit à être assimilé à un camp qui n’était pas naturellement le sien, cela dans le simple espoir de voir naître une large Europe basée sur les pro­vinces ou patries charnelles et non plus sur les Etats nations souvent issus de traités sans grande valeur au regard de l’histoire des Peuples qui composent l’Europe.

 

Traduit en Allemand en 1942, c’est sous le titre de Ver­hüll­tes Licht. Geist und Landschaft von Burgund que  Pages Bourguignonnes devient alors le livre de chevet de tout ceux qui aspirent à la restauration de la Lotharingie , terre médiane, espace d'intersection entre Gaule et Germanie.

 

En 1935, Thomasset signait un article dans lequel on pou­vait y lire notamment : “Il avait dépassé la patrie et re­trou­vé la race… Mais les patries sont encore inscrites dans les frontières et il est téméraire de suivre son sang plutôt que son drapeau.”

 

Aujourd’hui, nous sommes nombreux à penser que cette phra­se de Thomasset était prémonitoire et que son combat identitaire et enraciné reste d’actualité.

 

“Là où il existe une volonté, il existe un chemin !” affir­mait Guillaume d’Orange, le chemin existe, reste à trouver en nous la volonté.

 

Lorsque, aujourd’hui, tous peuvent être Français, nous som­mes fiers de nous dire Bourguignons, Basques, Fla­mands, Normands, Provençaux, Alsaciens, Corses, Bretons…

 

C’est notre façon à nous de rester fidèles à notre terre et à nos morts en attendant la fondation prochaine d’une Europe respectueuse des différences, et qui au-delà des nations-prison protège l’âme et l’esprit de l’Homme d’Eu­ro­pe qui aspire à retrouver son empire.

 

Jean VOUILLÉ.

 

Johannes THOMASSET, Pages bourguignonnes, Ed. de l'Hom­­me Libre, Paris, juin 2001, 193 pages, 120 FF, ISBN 2-912104-18-1

◊ Cette édition est composée du volume inti­tulé Pages Bourguignonnes, publié à Bruxelles en 1938, et com­plétée de deux articles parus en 1938 et en 1943 dans la revue indépendantiste bretonne Stur d'Olier Mordrel.