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13:25 Publié dans Droit / Constitutions, Entretiens, Théorie politique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : jean-louis harouel, droit, droits de l'homme, entretien, théorie politique, politologie, sciences politiques, philosophie, philosophie politique | | del.icio.us | | Digg | Facebook
par Xavier Raufer
Ex: http://metapoinfos.hautetfort.com
Nous reproduisons ci-dessous un point de vue du criminologue Xavier Raufer, cueilli sur Atlantico et consacré à la déliquescence de la justice française...
Justice, ruine et délires : quand le système judiciaire français coule à pic
Tribunaux surchargés, gardiens de prison débordés, laxisme généralisé : l'institution judiciaire, clé de voûte de la République française, est aujourd'hui dans un triste et inquiétant état.
• A l'intention des persécuteurs stipendiés "Décryptage", "Décodeurs" & co., membres du Taubira-fan-club : tous les faits et chiffres ici mentionnés sont dûment sourcés et bien sûr, à leur entière et inquisitrice disposition.
1) La ruine
Une justice de qualité est-elle encore rendue dans la France de l'automne 2016 ? On peut en douter car le (fort pâle) garde des Sceaux lui-même parle d'une justice "exsangue". Situation d'autant plus grave que, bien sûr, la justice est la clé de voûte de tout Etat de droit.
Commençons par une - affligeante - visite du domaine judiciaire. Déjà, il est bien sous-dimensionné : par rapport à la moyenne de l'Union européenne, la France compte quatre fois moins de procureurs et deux fois moins de juges.
En France même et à l'automne 2015, le président de la conférence des procureurs dénonce "la faillite du service public de la justice" et - fait rarissime - les forts mutiques procureurs généraux élèvent désormais la voix. Tous dénoncent "des retards persistants d'exécution des décisions" et des "difficultés croissantes à faire fonctionner les chambres et fixer les audiences". Ainsi, en juin 2016 "au tribunal de Bobigny, 7 300 peines attendent d'être appliquées".
Avocats d'un côté, syndicalistes de la pénitentiaire de l'autre, tous dénoncent des "juridictions françaises en ruine". Bobigny, on l'a vu, mais aussi Créteil, Nanterre, Brest, Agen, Nantes : postes vacants, exécrables conditions de travail, piètres qualités des jugements ; encore et toujours, énormes délais d'audiencement.
Côté syndical, on constate que les détenus deviennent maîtres des prisons - bandits, islamistes, hybrides (les deux ensemble, type Kouachi-Abdeslam-Coulibaly). Résultat : mutineries et émeutes à répétition, gardiens agressés dans des maisons (d'arrêt ou centrales), où la discipline se perd. Le patron du principal syndicat pénitentiaire parle de "déliquescence du système" et d'"autorité en fuite". Dans les prisons, désormais, "presque chaque détenu possède un portable. Certains en ont plusieurs" - quand c'est bien sûr formellement interdit.
Autre symptôme d'effondrement, les cafouillages dans l'appareil judiciaire ; d'abord, les "libérations intempestives". "Toujours plus de détenus relâchés devant l'impossibilité de s'expliquer devant un juge". Faute d'escortes, des multirécidivistes sont ainsi purement et simplement libérés. Au-delà, des couacs judiciaires en rafales (parmi vingt autres ces derniers mois) :
"Le receleur remis en liberté après une erreur du tribunal"... "Prison : une faute d'orthographe lui permet de sortir et de s'évader"... "Une figure du milieu marseillais libéré pour délai judiciaire dépassé", ainsi de suite.
Autre couac, financier celui-ci. "Victime" d'un premier imbroglio judiciaire, un islamiste de gros calibre reçoit du ministère de la Justice... un chèque de 20 000 euros de dédommagement. L'Obs' - qui n'est pas exactement un brûlot sécuritaire - dénonce une "erreur judiciaire grossière".
A Montargis, des documents de justice confidentiels sont mis à la poubelle et jonchent le trottoir.
Bien sûr, il y a eu les ravages-Taubira, ses expériences libertaires conclues par un bide intégral. Son diaphane successeur finit ainsi par reconnaître l'échec de la "contrainte pénale" (seul acte notable de l'ère Taubira), un "outil peu utilisé par les juridictions". Dit en clair : les magistrats se tapent des inventions de la camarilla-Taubira. S'ajoute à cela le foutoir qui règne depuis lors dans le (pourtant crucial) suivi des condamnés. Dispositif que la Cour des comptes, qui peut avoir la litote cruelle, dénonce en mai 2016 comme "empilement de nombreux acteurs qui peinent à s'organiser et coopérer".
L'idéologie libertaire est bien sûr en cause, mais aussi, une vaste incompétence. Ici, le récent et triste exemple donné par Mme Adeline Hazan, "contrôleuse générale des lieux de privation de liberté" (Inspecteur des prisons, en novlangue socialo). A l'été 2016, la "contrôleuse" déclare ainsi que "plus on construira de places de prison, plus elles seront occupées" - pathétique ânerie sur un banal effet d'optique-statistique, que l'on explique, pour le corriger, aux étudiants en criminologie de première année, vers le deuxième ou troisième cours...
Bazar, idéologie, incompétence... Là-dessus, les bobards de journalistes naïfs ou complices. Après un braquage, combien de fois lit-on dans le journal que "le vol avec usage ou menace d'une arme est puni, au maximum, de vingt ans de réclusion criminelle et de 150 000 euros d'amende". Bon, se dit le lecteur : au moins, un malfaiteur paiera pour ses crimes. Tu parles.
Car sous Taubira & succession, voici comment passe la justice, la vraie, celle du quotidien. Août 2016 : lisons "Le Phare dunkerquois", de ces petits hebdos de province où affleure encore le réel criminel. Omar B. est toxicomane. 27 inscriptions au casier judiciaire. Enième affaire de vol en flagrant délit. Tribunal et sentence : "Le condamné n'est pas maintenu en détention (il sort donc libre)... Sa peine de neuf mois fermes est aménagée (en français, annulée) pour qu'il puisse entrer en post-cure et être opéré du genou". Vous avez bien lu. La justice Taubira & co., désormais appendice de la Sécu.
De telles affaires, chaque semaine.
2) Les délires
Dans les décombres de notre justice, les aberrations se succèdent, le burlesque un jour, l'effrayant le lendemain - le scandaleux, toujours - sur un rythme accéléré.
De ces aberrations, voici la dernière (à ce jour) : Nancy, un criminel incarcéré, en prime, proche d'un "dangereux détenu radicalisé", reçoit par erreur (on l'espère...) les noms des agents pénitentiaires ayant rédigé un rapport sur lui.
Peu auparavant, un autre bandit incarcéré profite d'une "sortie à vélo" pour s'évader et sauter dans la voiture où l'attend son frère, un islamiste fiché.
Et Reda B.
(17 condamnations dont 7 pour braquage) dont on lit qu'il s'est évadé (en 2012) de la prison du Pontet (Vaucluse) "à l'occasion d'un tournoi d'échecs".
Et ces évasions de la prison d'Amiens - deux en quelques mois ! - où des détenus scient les barreaux de leur cellule... Les draps de lit le long de la façade... Le complice dehors qui jette la corde... A l'ancienne, façon Fanfan la Tulipe ! La direction du lieu-dit, par antiphrase, "de privation de liberté", se demande "comment des lames de scie ont pu parvenir jusqu'à eux" - judicieuse question, vraiment.
Et ce tribunal de Grenoble qui, d'abord, prend comme caution d'un caïd de la drogue 500 000 euros en espèces, 1 000 billets de 500 euros "dégageant une forte odeur d'alcool... pour dissiper les traces suspectes".
Parfois, ces foirades confinent au burlesque : "Oise : un cours d'art martial pour les détenus, les surveillants indignés"... "Haute-Garonne : le détenu cachait une piscine gonflable dans sa cellule"... Registre happening, toujours : "Un styliste sans-papiers organise un défilé [de mode] clandestin au Palais de justice de Paris".
Les sportifs maintenant : "Nantes : à peine condamné, un détenu s'évade du tribunal en pleine audience". Le multirécidiviste "bondit hors du box et s'échappe". Les magistrats, bras ballants. Sans doute, ce bondissant "nantais" a-t-il été inspiré par un "collègue" de Colmar qui, plus balèze encore, "A peine condamné, s'évade par la fenêtre du tribunal".
Telle est aujourd'hui la justice, Taubira ou post-Taubira. Car, cette dernière partie jouer les idoles pour médias subventionnés - elle dont, à l'automne 2015, l'action était rejetée par 71% des Français - ça ne va pas mieux.
Un exemple, là encore pris entre dix autres analogues. Février 2016, gare de Lyon : un policier est massacré (triple fracture de la mâchoire, etc.) par un colosse de 110 kilos connu pour trafic de stupéfiants, vols de voiture, rébellion, etc. Arrêtée, la brute épaisse est laissée libre "sous contrôle judiciaire".
A chaque désastre, le transparent garde des Sceaux promet - que faire d'autre ? Tout va s'arranger... Les contrôles seront renforcés... Puis attend, résigné, que le suffrage universel abrège son calvaire.
Voici les dernières convulsions. Au gouvernement, incompétents, idéologues et pragmatiques-largués se déchirent. Suite à une pique du Premier ministre sur la modestie de son bilan effectif, Mme Taubira montre les dents et déclare "Je peux devenir méchante".
Enfin ! Un point sur lequel on peut lui faire pleinement confiance.
Xavier Raufer (Atlantico, 28 septembre 2016)
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Retour sur le droit du sang. Un débat fondamental
par Thomas Ferrier
Ex: http://thomasferrier.hautetfort.com
Le néolithique constitue une rupture considérable dans l’histoire de l’humanité. C’est là que naissent les premières communautés organisées autour de villages puis de cités. Elle oppose irrémédiablement l’homme de l’avenir, qui est le sédentaire, à l’homme du passé qu’est le nomade. Ce qui subsiste du mode de vie nomade, ce sont des asociaux qui vivent aux dépens des populations agricoles. Lorsque dans la mythologie latine, Romulus fonde Rome, il dessine des frontières symboliques définissant le pomœrium, un espace sacré. C’est parce que Remus franchit cette frontière, en élément extérieur donc « nomade », que Romulus le tue. Fonder une cité, c’est en définir les frontières et les habitants légitimes.
A Athènes, le mythe de l’autochtonie définit la citoyenneté. C’est par leur implantation ancienne, sans cesse renouvelée par les générations successives, que le citoyen s’enracine dans sa terre. Cela définit des ayant droits naturels, héritiers de la longue mémoire de la cité mais aussi chargés de la transmettre à leurs descendants. L’introduction de nouveaux citoyens, qui n’en seraient pas les porteurs naturels par l’histoire, serait un élément de rupture dans cette continuité millénaire.
Les Pisistratides, famille de tyrans ayant régné à Athènes, ne voyaient pas dans les Athéniens des citoyens mais des sujets. Peu importe alors que ces derniers soient athéniens « de souche » ou venus d’ailleurs. Au fond, les hommes n’étaient que du bétail et leur provenance ne comptait donc pas. Ce principe se retrouva à la fin de l’empire romain, lorsque les principes de liberté de la république périclitèrent, avec Caracalla qui donna la citoyenneté romaine à tous les hommes libres nés sur le sol impérial en 212 après J.C. C’est un principe qu’on retrouve sous la féodalité, où le droit du sang est réservé aux seigneurs, mais où « tout serf né sur la terre d’un seigneur est serf du dit seigneur ».
Lorsque Périclès est arrivé au pouvoir et a établi les fondements de la démocratie à Athènes, même s’il eut des précurseurs comme Solon et Clisthène, une des premières mesures qu’il prit fut de redonner à la citoyenneté athénienne tout son sens. En 451 avant J.C, il établit ainsi la règle de citoyenneté suivante : « est athénien celui né de deux parents athéniens mariés selon les lois de la cité ». Ses propres enfants, qu’il eut de la grecque Aspasie, qui n’était pas athénienne, ne furent pas citoyens de droit. Il semble néanmoins que, toute exception confirmant la règle, les Athéniens les aient finalement naturalisés à l’issue d’une assemblée plénière, ce qui était exceptionnel.
Il alla plus loin, bravant ce que le droit moderne appelle « principe de non-rétroactivité ». Du fait que les tyrans avaient bradé la citoyenneté athénienne afin de se créer des allégeances en la conférant à des gens qui n’auraient pas pu l’obtenir du peuple, Périclès choisit de remettre en question toutes les naturalisations antérieures à son arrivée au pouvoir. Des milliers de personnes furent ainsi privées de la citoyenneté athénienne, dont ils avaient disposé par les tyrans, et donc implicitement rétablies dans leur citoyenneté d’origine.
A une époque où une forme de néo-nomadisme qu’on appelle « migration internationale » veut s’imposer et briser l’unité des populations sédentaires regroupées en Etats-nations homogènes, afin d’établir un monde sans frontières où régnera sans partage le principe du renard dans le poulailler, selon le cauchemar pensé par les partisans du mondialisme, il est fondamental de rétablir en France et en Europe les principes de citoyenneté propres à une démocratie et destinés à en garantir la pérennité. Face à cette rupture que voudraient imposer les mondialistes, le droit (démocratique) du sang ou « ius sanguinis » est le garant de la continuité entre les générations, le garant du droit inaliénable des autochtones à demeurer eux-mêmes sur la terre de leurs ancêtres.
C’est au service d’intérêts étrangers qu’en Europe, le droit du sang qui dominait alors sans partage, de l’Islande à la Russie, et y compris en France, a été affaibli par la décision des gouvernements successifs qui n’avaient aucun mandat en ce sens et qui se sont bien gardés de demander leur avis aux citoyens, pourtant les premiers concernés, de la même façon qu’ils ont imposé une immigration de peuplement, après avoir pourtant permis une immigration de travail à vocation temporaire, qui aurait dû prendre fin dès les premiers signes d’une montée du chômage.
Certes, l’Etat français avait introduit une forme de droit du sol dès 1889 afin de pallier à son déficit démographique face à l’Allemagne, mais cela ne concernait que des populations européennes, donc de même souche, dans un contexte où les migrations internationales restaient très limitées et uniquement intra-continentales. Ce faisant, malgré tout, il trahissait les intérêts de son peuple en mettant le doigt dans un engrenage qui finit par perdre l’empire romain, même si à l’époque, dans son contexte, cette mesure était sans danger. Elle devait en revanche devenir mortifère avec l’établissement d’un empire colonial en Afrique et en Asie du sud-est puis avec l’immigration post-coloniale qui en résulta dès les années 60.
Dans les années 2000, à la suite d’une propagande continue, le droit du sang, qui était la règle en Allemagne, en Italie et en Grèce, cette dernière respectant alors cette longue tradition athénienne établie par Périclès, fut sabordé. Bien sûr, tout comme en France, il existe toujours mais le mode d’acquisition de la nationalité a été considérablement élargi, et ce à chaque fois par la gauche ralliée par un universalisme tordu aux principes les plus délétères du mondialisme libéral, bien sûr une gauche sans mandat pour agir mais animée par une idéologie folle, et proprement eurocidaire disons le.
Le droit du sang, c’est donc rien de moins que la règle du sédentaire voulant se protéger du nomade, la règle du citoyen pour ne pas être ravalé au rang de sujet, la règle de l’indigène maître chez lui, la règle de l’ayant droit naturel protégé contre toute dépossession de son héritage par un tiers. C’est donc par principe le rejet du mondialisme et c’est pourquoi ce dernier s’attaque à lui et aboie contre toute personne qui voudrait le restaurer dans sa splendeur passé. C’est donc bien un débat fondamental. Enracinement ou néo-nomadisme, droit de l’indigène ou droit du migrant. Le salut de l’Europe passera nécessairement par le rétablissement, sous une forme nationale mais plus vraisemblablement européenne, comme je le prône, du droit du sang comme règle d’accès à la citoyenneté.
Thomas FERRIER (Le Parti des Européens)
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Dans Le Nomos de la Terre (1950), Carl Schmitt montre qu’il ne peut exister d’ordre sans enracinement. Contre la pensée positiviste et l’idéal cosmopolitique, il en appelle à la terre, substrat élémentaire de toute société, pour comprendre le rapport de l’humanité au monde.
[Article initialement paru dans la revue PHILITT #2 consacrée à la terre et à l’enracinement.]
Grande figure de la Révolution conservatrice allemande, Carl Schmitt s’oppose aux héritiers du positivisme d’Auguste Comte, et plus spécifiquement au positivisme juridique dont Hans Kelsen (d’ailleurs contradicteur de Schmitt) est le théoricien le plus célèbre. Celui-ci, dans sa Théorie pure du droit, n’étudie et ne reconnaît comme tel que le droit en vigueur édicté par l’homme, que l’on appelle droit positif, occultant l’origine profonde de ces normes et rejetant l’idée même d’un droit naturel qui serait fondé sur des valeurs éminentes. À l’inverse, s’attachant à en retrouver la source, Schmitt ressuscite la conception d’un droit inhérent à la terre. Si la localisation, l’espace géopolitique délimité, prime dans son étude des rapports de force, sa philosophie du droit nous invite à une lecture très organique, à la connotation écologiste. Alors, sans même invoquer de quelconques valeurs morales, que les positivistes qualifient d’extrinsèques à la matière juridique pour mieux les mépriser, Le Nomos de la Terre met la logique de ces légalistes à l’épreuve du bon sens du paysan : « En premier lieu, la terre féconde porte en elle-même, au sein de sa fécondité, une mesure intérieure. Car la fatigue et le labeur, les semailles et le labour que l’homme consacre à la terre féconde sont rétribués équitablement par la terre sous la forme d’une pousse et d’une récolte. Tout paysan connaît la mesure intérieure de cette justice. » Aussi la terre est-elle délimitée par l’homme qui la travaille, de même que par les reliefs ou les cours d’eau. Enfin, elle est le socle de toutes les clôtures, autant de manifestations visibles de l’ordre social, du pouvoir et de la propriété. On comprend donc que la terre est « triplement liée au droit ». Il existe un ordre particulier, propre et défini par et pour une terre donnée, qui s’impose dès lors que celle-ci est prise. Si les mers sont libres, l’ordre règne sur la terre ferme.
Cette vision d’un enracinement de fait et a priori de l’ordre semble évacuer la posture relativiste consistant à croire que ce sont les États et les nations qui plongent de force, à grands coups d’artifices, de symboles et de discours enflammés, un ordre qu’ils créent de toutes pièces dans le sol qu’ils dominent. Comme si l’enracinement se décrétait, comme s’il s’agissait de donner les attributs d’une force naturelle et le visage rassurant d’un mythe fondateur visant à unir un peuple à sa terre de façon quasi-mystique. Carl Schmitt met en échec ceux qui aujourd’hui encore voudraient voir en la notion d’un enracinement garant de l’ordre une pure abstraction romantique sans prise avec le réel, un outil superflu et ringard à dispositions des politiques, voire un mythe « nationaliste » du « repli sur soi et de la haine de l’autre », selon la formule abjecte désormais consacrée. En réalité nous découvrons que c’est tout l’inverse, car qui n’admet pas qu’une terre particulière est irrémédiablement liée à un ordre particulier – celui qui se prétend citoyen du monde, par exemple – considérerait que l’ordre auquel il consent à se conformer est valable partout : il violerait potentiellement toutes les terres, tous les ordres, tous les droits, à l’exception du sien.
Le pacifique authentique ne peut qu’admettre qu’au moment même où une terre est prise, l’ordre qu’elle porte s’impose et ce aussi bien vers l’intérieur, à ceux qui la prennent, que vers l’extérieur, c’est à dire vers l’étranger qui ne saurait légitimement imposer un ordre différent. Autrement dit, considérer qu’il n’existe pas de lien concret d’enracinement entre un ordre particulier, un droit donné et la terre sur laquelle il règne, en vertu de la prise de cette terre, est une négation des souverainetés qui s’expriment dans la diversité des ordres. L’enracinement n’apparaît donc plus comme un choix, un mythe ou une construction a posteriori, mais d’abord comme une nécessité indépassable du politique : celle de se soumettre à l’ordre que la terre porte et impose à celui qui la prend, la partage et la travaille. Refuser ce postulat ne peut mener qu’à la destruction du substrat élémentaire même de toute société. En employant à dessein le terme de nomos pour « la première mensuration qui fonde toutes les mesures ultérieures, pour la première prise de terres en tant que première partition et division de l’espace, pour la partition et la répartition originelle », l’auteur formule en creux une critique de la pensée positiviste dans son ensemble, que le « mode de naissance » des choses n’intéresse pas et pour qui seule la « loi du phénomène » compte. Cet effort sémantique montre qu’en matière de droit aussi, celui qui méprise l’histoire méprise la terre autant que celui qui méprise la terre méprise l’histoire : il est un déraciné.
Le projet politique idéaliste et universaliste hérité de la Révolution française semble alors absurde, faisant de ce que l’auteur désigne comme des « généralisations philosophiques de l’époque hellénistique faisant de la polis une kosmopolis » une ambition concrète. Et Schmitt d’ajouter qu’ « elles étaient dépourvues de topos, c’est à dire de localisation, et ne constituaient donc pas un ordre concret ». On en vient naturellement à penser que tout projet politique, s’exprimant par le droit, qui ne s’ancre à aucun moment dans la terre ferme et les réalités qu’elle impose, est suspect.
De la pensée hors-sol au mépris destructeur de la terre
Car si le déracinement des positivistes, quand il n’est qu’une hypothèse de travail, une posture intellectuelle d’universitaire n’est a priori pas un danger, les évolutions juridiques et politiques auxquelles s’intéressent Carl Schmitt à la fin du Nomos de la Terre illustrent le désastre auquel ce paradigme conduit. Le « jus publicum europaeum » que la Révolution française commença à remettre en cause avant que la Première Guerre mondiale ne l’achevât, reposait sur l’acceptation de la diversité des ordres juridiques et spatiaux et la reconnaissance de l’ennemi comme justus hostis, autrement dit comme un ennemi légitime à faire la guerre. Mais la pensée hors-sol de la Société des Nations (puis de l’Organisation des Nations unies), l’impérialisme américain parfois masqué sous les traits d’un universalisme bienveillant, conjugués avec les moyens considérables de destruction massive, pourraient avoir rompu l’attachement instinctif et naturel de l’humanité à la terre en introduisant de nouveau la notion autrefois théologique (et soumise à l’arbitrage du Pape) de justa causa dans le rapport à la guerre tout en subventionnant le rêve cosmopolitique. Comme si l’homme aujourd’hui capable de détruire la terre de l’autre (surtout si ce dernier ne peut pas en faire autant) la méprisait profondément. Comme si l’homme capable, aussi, de détruire la planète, ne pouvait avoir soif que de la dominer toute entière pour se préserver. Et l’ambition d’un « nouvel ordre mondial », expression que nous empruntons à George W. Bush lui-même, est le symbole le plus frappant de cette rupture politique et intellectuelle : il ne semble plus y avoir de place pour des ordres politiques et juridiques multiples et divers, liés à leurs propres terres, dont les relations seraient régies par des normes visant simplement à limiter la guerre. Il y aura désormais un ordre unique, universel et cosmopolitique, que l’on imagine naître dans les décombres de la Vieille Europe, prenant symboliquement racine dans les ruines de la cathédrale de Dresde. Un ordre qui n’a pas d’histoire puisqu’il n’a rien pris, un ordre qui n’a pas de terre mais qui a détruit.
Aussi, la guerre ne sera plus limitée, mais criminalisée, et prohibée en principe par l’Organisation des Nations unies. Car un ordre, même mondial, ne peut-être que pacifié. L’humanité s’étant employée à accumuler des moyens suffisants pour réduire le monde en poussière, s’est de ce fait confrontée à la question morale de l’usage de ces armes de destruction massive. On ne peut raisonnablement admettre de les employer que dans des guerres prétendument justes contre un ennemi qu’il faut détruire, et non plus seulement contraindre. Or la guerre aérienne et les très médiatiques opérations de « police bombing » sont l’image du mépris absolu pour la terre. « Le bombardement aérien (…) n’a pour sens et fin que l’anéantissement », constate l’auteur. On voit les avions de chasse comme autant de vecteurs arrogants et fiers de ce nouvel ordre mondial qui s’impose par le haut, méprisant les terres depuis leurs cockpits, eux qui ne connaissent que celle de la maison mère américaine. En prétendant mener une guerre sans jamais fouler le sol du territoire ennemi, on rompt ce lien essentiel aux yeux de Schmitt entre l’occupation, l’obéissance, et la protection. Sans soldat au sol, et donc sans lien concret avec la terre, on ouvre la voie à sa destruction pure et simple depuis les airs. Mais l’opinion est préservée : ses soldats ne meurent plus au champ d’honneur. Une fois encore, le lien à la terre apparaît comme une incontournable et nécessaire source de l’ordre, quand l’usage du seul espace aérien sème le chaos. Il semble que seule la projection d’hommes sur terre, mère et support de tout ordre, soit susceptible de donner des résultats politiques satisfaisants. Mais peu importe, puisqu’il n’y a plus de guerre, puisque tous les ennemis que l’on frappe ne sont pas des États égaux à ceux qui les combattent, mais l’incarnation du Mal ! Or, si comme David Cumin, biographe et spécialiste de Carl Schmitt, aime à le rappeler, l’ennemi est pour ce dernier « la figure de notre propre question », la guerre d’anéantissement interroge le paradigme et la morale des grandes puissances militaires occidentales. Ce nouveau rapport à la terre nous invite à considérer sérieusement la leçon de Carl Schmitt à la fin de sa préface : « C’est aux pacifiques que la terre est promise. L’idée d’un nouveau nomos de la terre ne se révèlera qu’à eux. » Car la guerre moderne et destructrice prive le droit de sa source et de son siège qu’est la terre.
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Carl Schmitt La guerra d’aggressione come crimine internazionale. Il Mulino Bologna 2015 pp. 142, € 16,00.
Nel 1945 il grande industriale tedesco Friedrick Flick, che aveva fondate ragioni di credere di venire accusato dagli alleati per la collaborazione a guerra d’aggressione, richiese a Carl Schmitt un parere per la difesa da tale (eventuale) accusa. Accusa che non venne mai mossa a Flick, il quale fu tuttavia condannato per un “capo d’imputazione” diverso: lo sfruttamento di manodopera straniera deportata dalle S.S..
Schmitt in tale promemoria distingue tra i crimini di guerra tra classi le “violazioni delle regole e degli usi della guerra, commesse principalmente da appartenenti alle forze armate di uno Stato belligerante. Si tratta d’infrazioni del cosiddetto diritto in guerra, lo jus in bello … Tale regole presuppongono che la guerra sia permessa e legale”; “Di natura essenzialmente diversa è il secondo tipo di crimini di guerra che qui deve essere distinto. Si tratta delle atrocities in un senso specifico: uccisioni pianificate e crudeltà disumane, le cui vittime erano uomini inermi”. Neppure la “esimente” dell’esecuzione di un ordine superiore può escludere in tali casi l’imputabilità e la punibilità. Infine la terza “Crimini di guerra nel terzo significato del termine è la guerra di aggressione, concepita come un crimine in sé, vale a dire come un crimine secondo il diritto internazionale. Qui, dunque, la guerra stessa è un crimine e non si tratta propriamente di un crimine di guerra ma, più precisamente, del «crimine di guerra»”.
Schmitt valuta queste tre classi alla luce sia del “politico” che dei principi dello jus publicum europaeum. In primo luogo se la guerra è, nel sistema westphaliano, non solo un fatto pubblico ma che presuppone la distinzione tra pubblico e privato, allora non può farsi carico a un privato (come Flick) di aver concorso ad una guerra di aggressione.
Come scrive Galli nella presentazione, Schmitt considera “la guerra come un atto di sovranità di cui sono responsabili gli Stati – una responsabilità politica soprattutto – e non certo i singoli cittadini, tenuti solo ad obbedire al potere legale. Schmitt recupera quindi l’ordine moderno che egli invece ha descritto, già da una decina d’anni, come periclitante: ovvero lo jus publicum europaeum all’esterno, per cui la guerra è affare di Stato, che non può essere processata; e, all’interno, un rigido positivismo giuridico statocentrico”.
D’altra parte il giurista di Plettenberg distingue tra il pensiero giuridico inglese (e in larga misura anche americano) da quello continentale in relazione alla guerra d’aggressione come crimine: “si pone anche per la concezione americana la questione di che cosa propriamente sia la novità di un crimine. La conseguenza è che qui si giunge spesso a una sintesi e a una mescolanza di punti di vista morali e giuridici. Per il modo di pensare del giurista di formazione positivistica, continentale, la separazione del punto di vista giuridico da quello morale è familiare da quasi due secoli, proprio rispetto alla questione della penalizzazione di nuove fattispecie di reato. Negli Stati Uniti d’America l’unione dei due punti di vista potrebbe far sì che gli ostacoli che derivano dal principio nullum crimen sine lege siano addirittura meno presenti per il giurista americano di quanto lo siano per un giurista della tradizione inglese pura”.
Per la guerra d’aggressione prosegue: “In questo caso, sia la fattispecie stessa (atto di aggressione e guerra di aggressione) sia la connessione tra il carattere internazionale e quello criminale, rappresentano davvero un novum, la cui particolarità deve essere portata a consapevolezza per mostrare come il principio nullum crimen abbia qui il significato di un limite alla punizione”.
È chiaro che poi l’argomentazione di Schmitt va sul concetto di giusta causa, la quale cancella il requisito dello justus hostis che nel pensiero dei teologi (da Suarez a Bellarmino) andava con quello di conserva: ambedue, insieme allo jus in bello e alla recta intentio, condizioni dello justum bellum.
Nel complesso un libro interessante che completa i numerosi scritti dedicati da Schmitt alla modificazione del concetto di guerra nel XX secolo.
Teodoro Klitsche de la Grange
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Bras de fer invraisemblable auquel se livrent, en Pologne, le Tribunal constitutionnel et la majorité politique, issues des élections de juin et d’octobre 2015, incarnée, respectivement, par le président de la République, Andrzej Duda et Beata Szydlo, tous deux membres du parti populiste Droit et Justice (PiS).
À l’origine, la loi relative au Tribunal constitutionnel, adoptée le 25 juin 2015 par l’ancienne législature (dominée par Plateforme civique [PO]), instaurant une procédure spéciale et dérogatoire de nomination des juges constitutionnels. Officiellement, cette disposition « résultait de la nécessité d’assurer la continuité des travaux du Tribunal en période électorale (le mandat de la VIIe Diète [nom de la chambre basse polonaise, NDLR] devant s’éteindre, au plus tard, le 30 novembre 2015)… », selon le juriste Wojciech Zagorski qui ajoute : « On peut douter de la sincérité du motif officiel. En réalité, la majorité sortante venait de perdre le premier tour du scrutin présidentiel et pressentait la défaite aux élections parlementaires prévues pour l’automne. En modifiant le projet de loi relative au Tribunal, la VIIe Diète s’arrogeait donc la possibilité de nommer cinq nouveaux juges constitutionnels. »
Depuis lors, le pays vit suspendu à un échange politique et juridique des plus tendus entre partisans de l’ancienne majorité au pouvoir (le parti PO, qui a gouverné en coalition avec le parti « paysan » PSL), soutenant le président du Tribunal, le professeur de droit Andrzej Rzepliski et les actuels dirigeants dont Duda qui refuse, notamment, d’assermenter trois juges nommés in extrémis par l’ancienne Diète, le 8 octobre 2015. Pour ne pas alourdir le présent propos, nous nous permettrons de renvoyer le lecteur à notre excellent confrère du Visegràd Post qui narre par le menu ce psychodrame politico-constitutionnel insensé au cœur de l’Europe[1].
On pouvait espérer que les choses s’aplanissent avec le temps, le jeu des institutions comme la bonne volonté des acteurs pouvant conduire, sinon à un règlement définitif de ce conflit, du moins à un consensus politico-judiciaire assimilé à une pax romana, voire à un pacte de non-agression… En attendant les prochaines élections.
Mais c’était sans compter sur la Commission européenne qui, le 1er juin, s’est permis de rendre un avis négatif sur l’État de droit en Pologne, étape préalable, selon Frans Timmermans, premier vice-président de la Commission, pour « orienter le dialogue en cours avec les autorités polonaises, en vue d’aboutir à une solution », ce, dans le cadre du « mécanisme de protection de l’État de droit mis en place par l’UE. »
En application de l’article 7 du traité sur l’Union européenne (TUE), cela signifie, de deux choses l’une : soit la mise en place d’un mécanisme de prévention « s’il existe un ‘‘risque clair de violation grave des valeurs [de l’Union]’’» (se traduisant par un avertissement), soit l’enclenchement d’un mécanisme de sanction « si l’on constate ‘‘l’existence d’une violation grave et persistante’’ des valeurs sur lesquelles se fonde l’Union, y compris l’État de droit » (par exemple, suspension du droit de vote au Conseil, sans que l’État ainsi puni ne puisse se dérober à ses obligations, notamment en se retirant de l’UE). Quoi qu’il advienne, ce serait une première dans l’Union européenne.
Un tel scénario illustre, jusqu’à la caricature, le coup d’État de droit auquel participe activement cet illégitime pouvoir sans représentation démocratique qu’est la Commission de Bruxelles. Rien que de très banal, en définitive, car, toute à sa démarche d’intégration forcée, l’UE (et, avant elle, la CEE), par le truchement de la Cour de justice, son bras armé, se livre à une interprétation « téléologique » des traités fondateurs en extrapolant délibérément le sens littéral de ces derniers, dans une finalité purement idéologique. À ce pronunciamiento normatif s’ajoute celui des juges (notamment ceux des cours suprêmes et constitutionnelles des États membres) se substituant sans mandat aux peuples « qui-votent-mal-et-n’entendent-rien-aux-affaires-européennes. »
Comme le souligne pertinemment Olivier Bault du Visegràd Post, « les fonctionnaires non élus de la Commission européenne, outre qu’ils s’ingèrent dans la politique intérieure d’un État membre en prenant clairement parti pour son opposition libérale et européiste, ont décidé de soutenir le pouvoir arbitraire et illimité de juges non élus.[2]»
En outre, au lieu d’épingler la VIIe Diète qui cherchait visiblement à verrouiller le Tribunal constitutionnel par des magistrats inamovibles pour 9 ans (article 194 de la Constitution polonaise) acquis à la future opposition, l’UE s’évertue à enrayer, a posteriori, le processus authentiquement démocratique qui a donné la victoire à un parti certes conservateur (notamment sur le plan des mœurs), mais pas farouchement eurosceptique et plutôt de tendance atlantiste.
Notes:
[1] http://visegradpost.com/fr/2016/04/23/comprendre-le-conflit-autour-du-tribunal-constitutionnel-polonais/
[2] http://visegradpost.com/fr/2016/06/07/commission-europeenne-contre-democratie-polonaise/
00:05 Publié dans Actualité, Affaires européennes, Droit / Constitutions | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : coup d'etat, état de droit, droit, constituion, constitutionalisme, pologne, europe, affaires européennes, union européenne, europe centrale, mitteleuropa | | del.icio.us | | Digg | Facebook
Les droits de l'homme contre le peuple (de Jean-Louis Harouel)
Ex: http://fboizard.blogspot.com
00:15 Publié dans Actualité, Droit / Constitutions, Livre, Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : jean-louis harouel, droits de l'homme, droits, actualité, livre, philosophie, philosophie politique, théorie politique, politologie, scienes politiques | | del.icio.us | | Digg | Facebook
Diplômé de l’École normale supérieure, Jean-Yves Pranchère est par ailleurs professeur à l’Université libre de Bruxelles et membre du comité de rédaction de la Revue européenne des sciences sociales (Droz, Genève). Son domaine d’étude est la théorie politique, avec un attrait tout particulier pour les auteurs réactionnaires sur lesquels il a notamment travaillé pour sa thèse. Il a récemment publié chez Seuil une somme avec Justine Lacroix (professeure de théorie politique à l’ULB) sur les critiques des droits de l’homme, des contre-révolutionnaires à Hannah Arendt en passant par Marx ou Carl Schmitt : « Le Procès des droits de l’homme. Généalogie du scepticisme démocratique ». Nous avons voulu nous entretenir avec lui car, antilibéraux, nous nous interrogeons nous-mêmes sur le rapport entre droits de l’homme et politique révolutionnaire.
Jean-Yves Pranchère : L’initiative est venue de Justine Lacroix, qui s’est engagée il y a six ans dans le projet d’une étude des résistances contemporaines aux droits de l’homme ; elle en a exposé les attendus dans deux articles programmatiques, « Des droits de l’homme aux droits humains ? » et « Droits de l’homme et politique ». Elle a organisé sur ce sujet, dans le cadre du Centre de Théorie politique qu’elle dirige, un intense travail collectif ; le récent dossier publié par le site Raison publique en est une des traces. Ce travail entrait en résonance avec mes propres recherches sur la tradition contre-révolutionnaire, que je me suis efforcé d’étudier comme une des coordonnées décisives de ce qu’Adorno et Horkheimer ont nommé la « dialectique des Lumières » – qu’il ne faut justement pas concevoir, à la façon des contre-révolutionnaires eux-mêmes, comme la logique nécessaire d’un déclin ou d’une autodestruction de la raison, mais comme le processus pluriel au cours duquel se révèlent, entrent en crise ou s’élucident les ambiguïtés du projet d’autonomie.
Parmi les motifs du livre, que nous avons écrit à deux dans une interaction permanente, je soulignerai la perplexité éprouvée devant le succès d’une critique des droits de l’homme menée au nom de la démocratie.
Le paradoxe est déjà ancien : il surgit dès le retour des droits de l’homme sur l’avant de la scène politique dans les années 1970, à la suite du coup d’État de Pinochet au Chili et des luttes des dissidents des pays de l’Est[i]. Ceux-ci induisirent une large conversion de la gauche, y compris de la gauche dite alors “eurocommuniste”, à un refus définitif de l’idée que la violation des droits fondamentaux pouvait être une étape de la construction du socialisme. Or, cette reconquête du langage des droits de l’homme, accomplie à la fois contre l’effondrement totalitaire du “socialisme réel” et contre le soutien des USA aux régimes tortionnaires d’Amérique latine, s’est presque aussitôt accompagnée d’un discours de méfiance à l’égard desdits “droits de l’homme” ; discours qui n’a cessé de s’amplifier depuis, alors même que ceux qui l’adoptent disent explicitement ne rien opposer aux droits de l’homme. Marcel Gauchet, par exemple, assume en termes très clairs l’impossibilité d’une opposition de principe au droits de l’homme : « Les droits de l’homme sont cette chose rare entre toutes qu’est un principe de légitimité. Ils sont le principe de légitimité qui succède au principe de légitimité religieux. Il n’y en aura eu que deux dans l’histoire, et il y a toutes les raisons de penser qu’il n’y en a que deux possibles, logiquement parlant. À quelle source rapporter ce qui fait norme parmi les êtres, quant à ce qui organise leurs communautés, quant à ce qui les lie, quant à ce qui permet d’établir le juste entre eux, quant à l’origine des pouvoirs chargés de régler l’existence en commun ? À ce problème fondamental, il y a deux façons de répondre et deux seulement. Ou bien cette source est au-delà du domaine des hommes, ou bien elle est en lui — ou bien elle est transcendante, ou bien elle est immanente. »[ii]
On croit comprendre alors que la réserve exprimée envers les droits de l’homme vise uniquement une interprétation illusoire de ceux-ci, selon laquelle ils seraient susceptibles de fournir, non seulement le cadre juridique, mais la substance même de la vie sociale. Comme l’explique encore Marcel Gauchet, dans son tout dernier livre : « Ce n’est pas le principe qu’il y a lieu de condamner : nous sommes bien évidemment tous pour les droits de l’homme. C’est l’usage qu’on en fait qui doit être incriminé ; l’impossibilité pour une société de se réduire à ce principe, qui est par ailleurs vrai. Nous sommes tous pour les droits de l’homme, mais… Tout est dans ce “mais” qu’il est très difficile de faire entendre aux procureurs qui pensent être dans le vrai […]. »[iii]
Cette distinction entre le “principe” et “l’usage” n’est pourtant pas suffisante pour supprimer toute perplexité. Dans la phrase : « les droits de l’homme, mais… », le « mais » porte bel et bien sur le principe qu’on s’efforce de relativiser au moment même où on admet qu’il n’a pas de rival. S’il ne s’agissait que de critiquer un « usage », il n’y aurait aucune nécessité à soumettre le principe à un « mais » ; il suffirait de lui ajouter un “et”, un “avec”, un “de telle manière que…” – bref, de lui ajouter un mode d’emploi. Imagine-t-on un chrétien qui dirait “Aimez-vous les uns les autres, mais…” ou “Soyez justes, mais…” ? Son message en serait immédiatement brouillé.
Force est donc de constater que la critique des droits de l’homme conserve quelque chose de paradoxal et d’équivoque. À preuve le fait que le « mais », dans le propos cité de Marcel Gauchet, n’introduit pas à une spécification de l’idée, mais à l’indétermination de trois points de suspension, suivis de l’esquive facile que constitue la polémique rebattue contre le “politiquement correct” qui, paraît-il, empêche Zemmour, Onfray et Finkielkraut de faire la une des magazines.
“Les droits de l’homme, mais…” Cette rumeur qu’on entend partout, et qui inspire l’accusation vide de “droit-de-l’hommisme”, appelle une question simple : “… mais quoi ?” C’est là l’objet de notre livre.
Je crains de ne pas pouvoir résumer en quelques lignes ce qui nous a demandé un livre entier ! Je serai donc elliptique plutôt que bref. Notre livre part d’un essai de classification des critiques contemporaines des droits de l’homme et dresse l’arrière-plan généalogique de celles-ci. La typologie contemporaine distingue trois grands courants :
Ces différents courants reprennent, sur un mode souvent diffus, des argumentaires qui ont été mis au point, sous des formes extrêmement conséquentes, par de grands théoriciens politiques dont les pensées nous ont paru constituer, pour ainsi dire, des “idéaux-types” réalisés des critiques possibles des droits de l’homme. Il nous a donc semblé nécessaire de confronter les critiques contemporaines à ces modèles antérieurs qui définissent les enjeux dans toute leur acuité.
« La similarité des arguments utilisés par les différents auteurs n’empêche pas la profonde hétérogénéité des dispositifs théoriques. »
Nous avons distingué ainsi une critique réactionnaire, théologico-politique, axée sur les devoirs envers Dieu, dont la version “sociologique” est fournie par Bonald et la version “historiciste” par Maistre ; une critique conservatrice, à la fois libérale et jurisprudentialiste, axée sur les droits de la propriété et de l’héritage, représentée par Burke ; une critique progressiste, utilitariste, axée sur le primat des besoins sur les droits, dont la version individualiste, libérale-démocratique, est donnée par Bentham, et dont la version organiciste, qu’on peut dire en un sens “socialiste”[iv], est donnée par Comte ; une critique révolutionnaire, axée sur le refus de discipliner par le droit l’auto-émancipation sociale, dont la figure éminente est bien entendu le communisme de Marx.
L’étude de ces quatre modèles fait d’abord apparaître que la similarité des arguments utilisés par les différents auteurs n’empêche pas la profonde hétérogénéité des dispositifs théoriques : quoi de commun entre un Burke, qui entend subordonner les droits de l’homme au droit de propriété qui les annule socialement, et un Marx qui entend pousser les droits de l’homme au-delà d’eux-mêmes en tournant leur revendication d’égalité contre le droit de propriété ?
De là une deuxième leçon : les critiques des droits de l’homme sont instables, traversées par des dialectiques qui les conduisent, quand elles ne veulent pas déboucher sur des positions contradictoires ou régressives, à fournir malgré elles les moyens d’un enrichissement ou d’un approfondissement des droits de l’homme.
Cette leçon est illustrée par deux grandes figures antithétiques du XXe siècle : la figure “régressive” de Carl Schmitt, qui dans les années 1920, avant son passage au nazisme, a développé de manière systématique – et, il faut bien le dire, fallacieuse – le thème d’une opposition entre démocratie et État de droit, conduisant à une dénonciation virulente de la fonction “dépolitisante” des droits de l’homme ; et la figure dialectiquement instruite de Hannah Arendt, qui, aux antipodes de la régression nationaliste proposée par Schmitt, a réarticulé l’idée des droits de l’homme sous la forme du “droit à avoir des droits”. Hannah Arendt, nous semble-t-il, indique les voies d’une conception politique des droits de l’homme, qui les lie indissolublement à la citoyenneté sans confondre celle-ci avec la forme de l’État-nation ni céder au mirage d’un État mondial qui en finirait avec la condition politique de la pluralité.
Je vous répondrais volontiers en pastichant le célèbre paragraphe des Considérations sur la France de Maistre contre l’idée de “l’homme” : j’ai vu des partisans et des ennemis des droits de l’homme, mais quant à “on”, je ne l’ai jamais rencontré de ma vie !
Plus sérieusement, les droits de l’homme ne sont ni une idéologie unifiée ni une doxa anonyme sous laquelle on pourrait ranger pêle-mêle des phénomènes aussi différents que les militantismes nationaux et transnationaux en faveur de l’égalité des droits et des solidarités sociales, le rôle de la Cour européenne des droits de l’homme ou du Tribunal pénal international de La Haye (dont l’autorité reste refusée par nombre de grands États), l’architecture démocratique de l’État de droit social, l’influence médiatique de rhétoriques moralisantes dont l’effet est d’émousser la pointe critique des droits de l’homme, ou encore l’existence de falsifications impérialistes éhontées qui font servir le langage des droits de l’homme à la mise en œuvre de leur violation, comme ce fut le cas avec Georges W. Bush.
Cette hétérogénéité est irréductible. Dans la mesure où les droits de l’homme sont « un principe de légitimité », pour reprendre l’expression de Marcel Gauchet, ils ne sont pas tant un “discours” que l’ouverture d’un champ discursif et d’un espace d’action politique. À ce titre, ils tolèrent une multiplicité d’investissements : ils s’exposent aux ruses des faussaires ; ils peuvent subir les distorsions que leur imposent des stratégies intéressées ; mais ils peuvent aussi – et surtout – nourrir des revendications fortes qui réclament que la réalité soit mise en conformité avec l’idéal et que les droits soient établis dans toute leur extension et leur plénitude. Il faut donc renoncer à faire la psychologie imaginaire d’un sujet imaginaire qui serait “l’époque” – le “on”, qui serait en attente de nos leçons de morale –, et se tourner vers l’analyse politique des lignes de force du champ de bataille des “droits de l’homme”.
« La réticence néo-libérale à l’égard des droits de l’homme est cohérente. »
Pour ce qui est de cette “vision” qui oublie les droits du citoyen dans les droits de l’homme, je serais d’accord avec vous pour dire qu’elle est libérale, mais au sens d’un libéralisme très étroit et très appauvri : un libéralisme hayékien, mais pas rawlsien.
En revanche, je suis assez dubitatif devant l’idée que ce libéralisme hayékien détiendrait la clef de la vision dominante des droits de l’homme. Je crois au contraire qu’il ne parle le langage des droits de l’homme qu’à contrecœur, et pour le subvertir. Rappelons-nous que l’offensive ultralibérale a trouvé son premier terrain d’application dans le Chili de la fin des années 1970 et que Hayek, par son soutien à Pinochet, a montré que les droits individuels requis par la liberté du marché n’étaient pas les “droits de l’homme”.
Et, j’ajouterais que la réticence néo-libérale à l’égard des droits de l’homme est cohérente. Elle vient d’une conscience lucide de ce que les “droits du citoyen” n’ont jamais été et ne peuvent jamais être un ”autre versant” des droits de l’homme, à la façon d’un “volet facultatif” : ils sont leur cœur même depuis le début, depuis ce mois d’août 1789 où personne n’était encore “républicain” et ne pouvait imaginer jusqu’où conduirait la radicalité du processus révolutionnaire qui venait de se donner sa justification théorique dans la Déclaration.
Il ne faut pas oublier, en effet, que la Déclaration inscrit en elle l’acte insurrectionnel dont elle procède : elle est le texte par lequel une insurrection politique énonce et réfléchit son droit. Par là s’explique que les énoncés de la Déclaration aient pu constituer une sorte d’événement originaire, en rupture avec ses propres antécédents jusnaturalistes, et initier un développement voué à dépasser les intentions conscientes des rédacteurs. Relisez donc les trois premiers articles : l’affirmation que « les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droit » (article 1) débouche presque immédiatement sur la proclamation de la souveraineté de la nation, comprise comme la communauté politique des individus égaux en droits (article 3). L’égalité des droits induit directement la souveraineté du peuple qui en est la seule forme possible.
Il n’y a pas là deux “versants” ou deux idées, celles de l’homme et du citoyen (auxquels on aurait accordé des droits distincts pour faire plaisir aux uns et aux autres), mais bien une seule et même proposition, qu’Etienne Balibar nomme « la proposition de l’égaliberté »[v] afin de souligner l’identité qu’elle affirme entre égalité et liberté, une identité plus étroite que celle que suggère l’expression “égalité des libertés”. Cette identité entre égalité et liberté implique que l’homme et le citoyen soient indissociables, puisque l’égalité est à la fois la condition et l’objet de la pratique des citoyens en tant qu’ils sont des hommes libres.
Le refus de la sacralisation des droits, au nom du droit (sacré, donc ?) qu’ont les hommes de se donner les lois qu’ils veulent, est le thème central de la critique utilitariste et libérale des Déclarations faite par Bentham. À cette critique, on peut objecter qu’elle repose sur un contresens – qui, il est vrai, a été commis par certains (certains seulement) des révolutionnaires eux-mêmes[vi].
Car, la Déclaration de 1789 n’est pas une “charte de droits sacralisés” ou une énumération de droits absolus : elle est l’effort pour tirer les conséquences de la proclamation de l’égalité des hommes en droit. Elle n’absolutise pas les droits qu’elle énonce : elle décrit la manière dont ils s’équilibrent entre eux sous le principe de l’égalité et de la réciprocité des libertés. Elle est un développement, une explicitation, de la proposition de l’égaliberté – proposition dont les Déclarations ultérieures proposeront des explications qui se voudront, sans toujours l’être, plus complètes et mieux instruites.
Vous m’objecterez que le dernier article de la Déclaration de 1789 insiste bel et bien sur la sacralité du droit de propriété. Assurément ! Il ne s’agit pas de nier que le texte porte en lui, sous l’unité de son geste insurrectionnel si bien analysé par Claude Lefort[vii], les tensions théoriques induites par les désaccords des rédacteurs – tensions superbement étudiées par Marcel Gauchet dans La Révolution des droits de l’homme[viii].
Mais je n’en répondrai pas moins en rappelant que Bentham n’avait peut-être pas tort de voir, dans l’étrange insistance du dernier article à déclarer la propriété sacrée, le signe de ce que nous appelons depuis Freud une dénégation. Bentham pensait que l’égalitarisme professé par la Déclaration de 1789 avait, dans les faits, tellement désacralisé la propriété que les rédacteurs, saisis de peur devant le sens général de leur propre texte, s’étaient crus obligés de nier par un article final les conséquences évidentes des articles précédents. La Déclaration, disait Bentham, « a sacralisé la propriété à la façon dont Jephté s’est senti obligé de sacraliser sa sœur en lui coupant la gorge ». Jaurès ne dira en un sens pas autre chose lorsqu’il expliquera longuement, dans ses Études socialistes de 1901 (publiées par les Cahiers de la quinzaine de Péguy) que la Déclaration allait d’emblée très au-delà des intentions bourgeoises des révolutionnaires et portait en elle le socialisme.
Quoi qu’il en soit, accuser l’idée des droits de l’homme d’être un facteur d’hétéronomie revient à se méprendre sur leur sens, qui est précisément d’énoncer les conditions de l’autonomie individuelle et collective. La seule limite qu’ils imposent à l’autonomie est de ne pas détruire les conditions même qui la rendent possible. Habermas a parfaitement vu ce point quand il a soutenu la thèse de la « co-originarité » des droits de l’homme et de la souveraineté populaire.
Autonomie individuelle et autonomie collective s’impliquent l’une l’autre sous le régime de l’égalité des droits : telle est l’idée des droits de l’homme, le principe de leur énonciation.
Les énoncés de ces droits sont quant à eux les résultats, toujours révisables, de la façon dont la collectivité politique réfléchit les conditions de sa propre autonomie. Ils sont la forme sous laquelle les citoyens se reconnaissent réciproquement comme libres et égaux en se déclarant les uns aux autres leurs droits tels qu’ils les concluent de leur « égaliberté ».
On peut dès lors rester sceptique devant le reproche adressé aux droits de l’homme de “détruire” la politique. Ce thème avait un sens précis chez Carl Schmitt, qui identifiait l’égalité démocratique à l’homogénéité nationale et la politique à la capacité de distinguer ses ennemis, à commencer par ses ennemis intérieurs (que Schmitt désignera clairement en 1933 : les juifs et les communistes). Si la politique consiste, pour un peuple, à être capable d’assumer l’hostilité requise envers l’ennemi extérieur et intérieur, il va de soi que le respect des droits de l’homme désarme la politique. Mais une telle position est inconcevable dans le cadre d’une pensée qui ne confond pas l’autonomie démocratique avec une théologie nationaliste.
Avant de nous pencher sur cette critique, commençons par rappeler qu’aux États-Unis, dans la deuxième moitié des années 1970, les idéologues républicains qui allaient inspirer la “révolution conservatrice” reaganienne, tel Irving Kristol[ix], ont mis en garde contre le danger qu’il y avait à élever des droits de l’homme à la hauteur d’un principe politique (et non d’une simple limite morale). Vouloir modeler la politique sur les droits de l’homme conduisait selon eux à s’enfoncer dans la “crise de gouvernabilité” qui inquiétait alors les économistes libéraux ; cela revenait à encourager un programme de démocratie sociale incompatible avec le bon fonctionnement d’un ordre de marché appuyé sur les vertus du respect de l’autorité et de la fierté patriotique liée au culte de la réussite et de la compétitivité. Notons au passage qu’Irving Kristol, en des termes pas si éloignés de ceux utilisés dix ans plus tard par Régis Debray, définissait la république comme la démocratie corrigée par l’éducation et le savoir (y compris le savoir de la science économique).
À la différence de ces critiques néoconservatrices et néolibérales, le retentissant article de Marcel Gauchet publié en 1980 dans Le Débat sous le titre-slogan « les droits de l’homme ne sont pas une politique » rendait un son nettement social-démocrate[x]. Marcel Gauchet soulignait que le repli sur les droits de l’homme traduisait une « impuissance à concevoir un avenir différent pour cette société », un abandon du « problème social » et du projet « d’une société juste, égale, libre ». En retombant dans « l’ornière et l’impasse d’une pensée de l’individu contre la société », les militants des droits de l’homme se faisaient les promoteurs d’une « aliénation collective », marquée par « le renforcement du rôle de l’État » et « l’aggravation du désintérêt pour la chose publique ». Contre quoi Gauchet soulignait qu’il n’était pas possible de « disjoindre la recherche d’une autonomie individuelle de l’effort vers une autonomie sociale ». Cette expression d’autonomie sociale suggérait qu’il s’agissait de maintenir les idéaux d’un socialisme anti-totalitaire, qu’on pouvait supposer autogestionnaire, contre la renonciation à la transformation sociale qu’impliquait un militantisme confiné à la protection des droits individuels.
Le propos n’allait pourtant pas sans une certaine ambiguïté. D’une part, il était étrange de voir Marcel Gauchet passer sous silence les thèses de celui qui était alors le principal représentant d’une philosophie politique des droits de l’homme, à savoir Claude Lefort. Car Claude Lefort, qui semblait être la cible non nommée de la polémique, ne pouvait certainement pas être tenu pour un penseur de “l’individu contre la société” : sa réhabilitation des droits de l’homme insistait au contraire sur le fait que ces droits n’étaient pas des droits de l’individu, mais bien des droits de la liberté des rapports sociaux. Ce qui était selon lui en jeu dans les droits de l’homme, par opposition au totalitarisme, n’était pas la sécession de l’individu à l’égard du social et du politique, mais la nécessité de ne pas penser la citoyenneté sous le fantasme du Peuple-Un et de la volonté homogène.
D’autre part, Marcel Gauchet décrivait les effets délétères des droits de l’homme sur la démocratie à travers des formules qui ne permettaient pas de décider de la nature exacte du lien qu’il faisait entre droits et désocialisation. Il parlait ainsi de « la dynamique aliénante de l’individualisme qu’ils [les droits de l’homme] véhiculent comme leur contre-partie naturelle », tournure qui suggérait à la fois que « l’aliénation individualiste » surgissait de la nature même des droits de l’homme et qu’elle leur restait extérieure puisqu’ils n’en étaient qu’un véhicule. Marcel Gauchet donnait à penser que l’effet aliénant des droits n’avait rien de nécessaire quand il écrivait que les droits de l’homme pourraient « devenir une politique » à la condition « qu’on sache reconnaître et qu’on se donne les moyens de surmonter » leur individualisme adjacent.
L’œuvre ultérieure de Marcel Gauchet réduisit l’équivoque en interprétant, de façon plus unilatérale, la menace que faisaient peser les droits de l’homme sur la démocratie comme une menace purement endogène – ce qu’exprime le titre de son recueil de 2002, La démocratie contre elle-même. L’inflexion conservatrice était sensible dans l’article de 2000, « Quand les droits de l’homme deviennent une politique » : « La démocratie n’est plus contestée : elle est juste menacée de devenir fantomatique en perdant sa substance du dedans, sous l’effet de ses propres idéaux [Jean-Yves Pranchère souligne ici]. En s’assurant de ses bases de droit, elle perd de vue la puissance de se gouverner. Le sacre des droits de l’homme marque, en fait, une nouvelle entrée en crise des démocraties en même temps que leur triomphe. »
Selon cette analyse, la crise venait, non pas d’un manque de démocratie, mais de l’excès produit par la pleine réalisation des idéaux démocratiques. L’inquiétude portait donc désormais, comme chez les néolibéraux, sur l’ingouvernabilité induite par la dynamique des droits et aggravée par le contexte de la société française – que la revue Le Débat avait souvent décrite, notamment en 1995, comme trop incapable de réforme en raison de son attachement irrationnel aux archaïsmes de son État social[xi]. L’interprétation de la crise de la démocratie comme une crise imputable à la seule logique de l’extension des droits avait pour effet de détourner l’attention de ce sur quoi, au même moment, un auteur conspué par Marcel Gauchet, à savoir Pierre Bourdieu, centrait quant à lui ses interventions politiques : la montée des inégalités, la généralisation de la précarité, la destruction des solidarités sociales induite par les politiques de dérégulation, bref le recul factuel de la démocratie et des droits sous l’effet d’une offensive néo-libérale qu’un auteur comme Pierre Rosanvallon n’hésite plus aujourd’hui à décrire comme une « véritable contre-révolution ».
Marcel Gauchet a depuis lors réaffirmé, dans son dialogue avec Alain Badiou[xii] ou dans tel article récent, l’orientation sociale-démocrate de sa pensée. Cette orientation est cependant peu visible dans son dernier livre Comprendre le malheur français. Marcel Gauchet y polémique contre le “néolibéralisme”, mais il définit celui-ci comme « un discours de contestation de la possibilité, pour le politique, d’imposer quelque limite que ce soit aux initiatives économiques des acteurs et plus généralement à l’expression de leurs droits », ce qui revient à faire du néolibéralisme un simple cas de la politique des droits. L’argument oublie que les versions les plus fortes du néolibéralisme, comme celle de Friedrich Hayek, ont pour cœur l’efficience du marché et pensent les droits comme les « règles de juste conduite » qui assurent la possibilité de cette efficience[xiii]. Le néolibéralisme ainsi compris est farouchement hostile à tout projet de contrôle démocratique de l’économie et à toute “expression” des droits individuels au-delà de l’objectif abstrait de l’existence d’un ordre légal assurant l’honnêteté des échanges. C’est pourquoi Hayek a toujours salué en Burke un des meilleurs représentants du libéralisme tel qu’il l’entendait – Burke qui, en disciple d’Adam Smith, dénonçait les droits de l’homme au nom des lois de la propriété, de l’héritage et du marché qui font la « richesse des nations« , en même temps qu’au nom du droit particulier de ces nations dont chacune a une identité propre.
Une même thèse court de Burke à Hayek : parce que le marché ne peut constituer un ordre qu’à la condition que ceux qui agissent en lui possèdent les vertus nécessaires à cet ordre, et que la première de ces vertus est la méfiance envers les projets de planification rationnelle, autrement dit le respect de la sagesse inconsciente des développements spontanés qui constituent la tradition, le néo-libéralisme appelle comme son complément naturel un traditionalisme. En règle générale, soutient Hayek, « les règles hérités de la tradition sont ce qui sert le mieux le fonctionnement de la société, plutôt que ce qui est instinctivement reconnu comme bon, et plutôt que ce qui est reconnu comme utile à des fins spécifiques »[xiv].
Ce traditionalisme implique un nationalisme dans la mesure où la “nation” est la forme par excellence de la tradition. L’alliance qu’on observe partout entre néolibéralisme et nationalisme néoconservateur semble d’abord un paradoxe, tant le principe du marché ouvert paraît incapable de justifier l’existence des communautés nationales. L’éloge de Burke par Hayek permet de comprendre que le paradoxe n’en est pas un : le nationalisme est le supplément d’âme dont le “patriotisme du marché” néolibéral a besoin pour se réaliser. Les inégalités sociales, si elles sont un moyen de la grandeur du pays et de la promotion de son identité, ne trouvent-elles pas leur meilleure justification dans l’imaginaire de l’unité nationale ?
Or, les critiques qu’adresse Marcel Gauchet au “néolibéralisme” – confondu avec une sorte de paradoxale anomie des droits – recoupent sur bien des points la critique des droits de l’homme par Burke, c’est-à-dire par un penseur qui est un des grands ancêtres du néolibéralisme contemporain dans sa version conservatrice. Après tout, Burke déclarait déjà ne pas attaquer l’idée des droits de l’homme, mais seulement leur interprétation révolutionnaire : « je suis aussi loin de dénier en théorie les véritables droits des hommes que de les refuser en pratique », disait-il en soulignant que les besoins de la société imposaient à ces droits toutes sortes de « réfractions ».
La critique des effets “dépolitisants” des droits de l’homme est donc, comme telle, très ambiguë : entend-on dire par là que l’idée des droits de l’homme entrave les luttes pour l’égalité ? L’argument est peu crédible. Veut-on dire que cette idée nuit à l’identification des citoyens à leur nation, identification qui seule les rendrait capables d’altruisme et de sacrifice ? Il reste alors à faire la différence entre l’amour de l’ordre établi et l’esprit de solidarité, qui lie autonomie individuelle et autonomie collective sans supprimer la première dans la seconde. À moins qu’on ne veuille, sous le poids de la toute-puissance des marchés financiers, renoncer à la politique de l’égalité et lui substituer une politique de l’identité nationale qui nommerait “république”, non plus le régime de l’égalité des droits et de l’élaboration d’une rationalité partagée, mais le narcissisme collectif d’un sentiment communautaire.
Cette formule sonne comme une proposition ultra-libérale qui demanderait qu’on s’en tienne aux seules libertés négatives ou défensives, “modestes” en ce sens qu’elles ne doivent surtout pas se prolonger dans des droits sociaux ou un projet de démocratie radicale !
Les droits de l’homme ne sont « pompeux » que si on les comprend comme un « catalogue » – ce qu’était la « Magna Carta », catalogue de libertés assurant surtout les privilèges de l’aristocratie anglaise. Mais, encore une fois, cette réduction des droits de l’homme à un catalogue en manque la logique propre. Saisis comme le développement de la « proposition de l’égaliberté », ils constituent une idée somme toute moins « pompeuse », et certainement moins exposée à la tentation totalitaire, que l’idée vague du communisme qui irriguait la critique de Marx.
Il ne faudrait d’ailleurs pas mécomprendre le sens de la déclaration de Marx que détourne Michéa. On lit dans Le Capital que la lutte de la classe ouvrière, lorsqu’elle obtient des mesures imposant des limites à l’exploitation, « remplace le pompeux catalogue des “inaliénables droits de l’homme” par la modeste Magna Carta d’une journée de travail limitée par la loi ». Marx n’entendait certainement pas par là qu’il fallait se contenter de tempérer l’exploitation sans y mettre fin, et renoncer au projet d’une auto-organisation démocratique de la société pour s’en tenir à de “modestes” corrections apportées à la violence des rapports de propriété et de production ! Ce qu’il dénonçait, c’était une interprétation des droits de l’homme qui réduisait ceux-ci à une égalité formelle entre des libertés inégalement réelles. Mais cette dénonciation même reconnaissait paradoxalement la force émancipatrice de la loi et du droit, conformément à la pratique du mouvement ouvrier qui a toujours formulé ses revendications en termes de “droits”[xv].
« Il se trouve que la critique marxienne des droits de l’homme est beaucoup plus complexe et contradictoire que ce qu’en a retenu la catastrophique vulgate léniniste. »
Il se trouve que la critique marxienne des droits de l’homme est beaucoup plus complexe et contradictoire que ce qu’en a retenu la catastrophique vulgate léniniste. La phrase “réformiste” de Marx que vous avez citée suffirait d’ailleurs à montrer que nous n’avons aucune raison de tenir le révolutionnarisme autoritaire de Lénine pour plus “légitime” ou plus “marxiste” que la social-démocratie de Kautsky ou de Jaurès. Mais cet entretien est déjà bien trop long pour que nous entrions dans ces méandres. Sans innocenter Marx ni lui imputer directement les ravages totalitaires causés par la simplification léniniste de sa critique des droits de l’homme, je me contenterai de dire qu’entre la modestie de l’action syndicale et la démesure d’une idée aussi indéterminée que celle d’une “démocratie totale” qui aurait magiquement aboli l’État et le marché, la référence maintenue aux droits de l’homme rappelle la nécessité de penser ensemble l’horizon de l’universel, la condition de la pluralité et les médiations de l’institution – sur le triple plan de l’international, du national et du transnational.
C’est le vieux rêve contre-révolutionnaire : en finir avec les droits de l’homme et avec l’exorbitant processus révolutionnaire qu’ils ont déclenché par leur promesse d’égalité impossible à satisfaire. Bonald disait qu’il fallait « se pénétrer de cette vérité philosophique et la plus philosophique des vérités : que la révolution a commencé par la Déclaration des droits de l’homme, et qu’elle ne finira que par la déclaration des droits de Dieu« . Mais cette position avait son propre horizon “révolutionnaire”, proprement apocalyptique, avoué par Maistre dans le dernier entretien des Soirées de Saint-Pétersbourg qui annonce la fusion des nations dans l’imminence d’une Troisième Révélation divine…
La contre-révolution d’aujourd’hui n’a pas la radicalité d’un Bonald ou d’un Maistre. Elle espère plutôt, comme Barnave en 1791 ou François Furet dans les années 1980, « terminer la révolution » en contenant l’essor des droits de l’homme, en les faisant rentrer dans le rang de ces “libertés négatives” qu’ils ont toujours excédées, à tous les sens de ce mot. Et, à voir la popularité de personnages politiques tels que Trump, Abe, Poutine, Erdogan ou Orban, on peut se demander si le futur ne pourrait pas avoir la forme d’une « (mal)sainte alliance entre Schmitt et Hayek », qui compenserait les duretés de l’inégalité par les satisfactions fantasmatiques de la communion nationale. Mais cela même ne prouverait rien contre les droits de l’homme : nous n’en sentirions que plus vivement la force de leur exigence.
Quant à un “dépassement” des droits de l’homme qui viendrait de la parfaite réalisation de leurs demandes, faut-il vraiment expliquer en détail pourquoi nous en sommes très loin ?
Notes :
[i] Dans son compte rendu de l’ouvrage de Jean-Yves Pranchère et Justine Lacroix, Mark Hunyadi a noté à juste titre que le rôle joué par la mouvement praguois de la “Charte 77” aurait dû être évoqué.
[ii] Marcel Gauchet, « Du bon usage des droits de l’homme », Le Débat, 2009/1, n° 153.
[iii] Marcel Gauchet, Comprendre le malheur français, Paris, Stock, 2016, p. 358.
[iv] Comte ne fut assurément pas “socialiste” au sens propre : il ne demandait pas l’égalité et sa conception de la “propriété sociale” laissait aux capitalistes la propriété privée des moyens de production. Mais il partageait avec le socialisme le souci d’une solidarité sociale débordant les mécanismes du marché et de l’État. Il faut renvoyer ici aux impeccables analyses de Frédéric Brahami, « L’affect socialiste du positivisme. Auguste Comte, le socialisme “politique” et le prolétariat », dans Incidence 11, 2015 qui portait sur « Le sens du socialisme ». Ce numéro entier d’Incidence, pourvu d’une remarquable introduction de Bruno Karsenti, devrait être désormais une référence incontournable de toute discussion sérieuse sur la signification du socialisme.
[v] Etienne Balibar, « Droits de l’homme et droits du citoyen : la dialectique moderne de l’égalité et de la liberté », dans Les Frontières de la démocratie, Paris, La Découverte, 1992 ; La Proposition de l’égaliberté, Paris, PUF, 2010.
[vi] Mais pas par tous. Condorcet disait que les droits de l’homme ne devaient surtout pas être adorés comme des « Tables descendues du ciel ».
[vii] Claude Lefort, L’Invention démocratique, Paris, Fayard, 1981 ; Essais sur le politique, Paris, Seuil, 1986.
[viii] Marcel Gauchet, La Révolution des droits de l’homme, Paris, Gallimard, 1989.
[ix] Voir Irving Kristol, Réflexions d’un néo-conservateur, trad. R. Audouin, Paris, PUF, 1987.
[x] Ce ton social-démocrate caractérise de même le livre de Samuel Moyn paru en 2010, The Last Utopia. Human Rights in History, qui a suscité un vif débat dans le monde anglophone et recoupe largement les analyses de Marcel Gauchet.
[xi] Jacques Rancière, dans son livre de 2005 La Haine de la démocratie, a soumis ce discours à une critique acérée : la dénonciation indéterminée de “l’individualisme” conduit à imputer à la démocratie ce qui relève de logiques qui lui sont exogènes, notamment celle du Capital, et à stigmatiser au titre du “consumérisme” la masse des individus dépossédés – tout en passant sous silence le séparatisme des élites et la captation oligarchique du pouvoir. La psychologie moralisatrice sert à empêcher l’analyse des rapports de force qui configurent l’état de la société.
[xii] Alain Badiou et Marcel Gauchet, Que faire ? Dialogues sur le communisme, le capitalisme et l’avenir de la démocratie, Paris, Philo éditions, 2014.
[xiii] On peut renvoyer, en dépit des corrections de détail qu’il faudrait leur apporter, aux analyses de Michel Foucault dans son cours de 1979 « Naissance de la biopolitique » (Paris, EHESS/Seuil/Gallimard, 2004, p. 40-45), qui montrent de manière lumineuse l’hétérogénéité profonde entre la logique de la gouvernementalité libérale, fondée sur l’ordre spontané du marché et la destitution du pouvoir souverain par le principe d’utilité, et la logique révolutionnaire de la réquisition des droits de l’homme, qui conduit d’elle-même à l’affirmation de la souveraineté de la communauté des citoyens.
[xiv] F. A. Hayek, Droit, législation et liberté 3, trad. R. Audouin, Puf, Paris, 1983, p. 193-199.
[xv] Comme le note Pierre Zaoui dans le numéro 47 de Vacarme : « La lutte de classes est d’abord et essentiellement une lutte pour le droit et par le droit, ce dont témoigneront, en un sens contre leur propre théorie du droit, Marx et Engels, notamment dans les appendices du livre I du Capital, en montrant que la lutte de classe n’a connu de succès que dans et par le droit et les institutions : réduction progressive de la journée légale de travail, interdiction progressive du travail des enfants, institution de sociétés d’assistance mutuelle, etc. »
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Par Sebastian Frehner, conseiller national Bâle (BS)
Ex: http://www.lesobservateurs.ch
Les droits de l'homme ont été intégrés dans les régimes légaux nationaux et internationaux pour défendre l'individu contre l'arbitraire de l'Etat. Depuis de nombreuses années, les juges de la Cour européenne des droits de l'homme ne cessent cependant d'étendre les droits humanitaires pour faire de ce droit de défense un droit de revendication. Ils empiètent en cela sur les compétences du législateur national. L'initiative populaire pour l'autodétermination vise précisément à remettre de l'ordre dans ce système.
Les droits de l'homme, un pilier de notre société
Les droits de l'homme sont par définition les droits accordés individuellement et sans condition à chaque homme pour lui permettre de mener son existence humaine. Ils doivent être compris comme des droits de défense contre l'arbitraire de l'Etat. Presque tous les Etats du monde reconnaissent ces garanties minimales face au pouvoir de l'Etat. Les divergences d'opinions portent sur le détail de ces droits.
Droit international impératif
Il existe un large consensus sur le principe que les Etats doivent s'abstenir de violer ledit droit international impératif. Bien que les avis soient également divergents à ce niveau, on admet généralement que le droit international impératif comprend l'interdiction des actions suivantes: la torture, le génocide, la guerre d'agression, l'esclavage et le refoulement dans un Etat où la personne renvoyée est menacée de mort ou de torture (le principe du non-refoulement).
Ratification de la Convention européenne des droits de l'homme
Il appartient au législateur national de définir les autres droits de l'individu face à l'Etat ou à une organisation supranationale. En Suisse, il s'agit du parlement, du peuple et des cantons. Le législateur helvétique a usé de cette compétence pour ancrer d'autres garanties de ce genre dans la Constitution fédérale. La Suisse a de surcroît conclu plusieurs traités internationaux dans ce sens. Elle a notamment adhéré à la Convention européenne des droits de l'homme (CEDH) en 1974, si bien qu'elle doit appliquer les jugements de la Cour européenne des droits de l'homme.
La Suisse ayant inscrit les garanties de la CEDH dans sa Constitution fédérale et les tribunaux suisses étant liés à la CEDH, on pourrait logiquement partir de l'idée que les jugements du Tribunal fédéral et de la Cour européenne ne se distinguent guère. La réalité est différente, car les juges de Strasbourg ont donné au fil des ans une interprétation de plus en plus large à la CEDH et ne considèrent plus aujourd'hui celle-ci comme un ensemble de garanties minimales face à l'Etat, mais en déduisent d'importants droits de l'individu par rapport aux pouvoirs publics. Ils imposent ainsi aux Etats des obligations que ceux-ci ne veulent pas assumer et neutralisent le processus législatif démocratique.
Le changement de sexe comme une prestation à financer par l'Etat
Les juges de Strasbourg ont par exemple décidé que le changement de sexe devait être financé par l'assurance-maladie obligatoire (LAMal), cassant du même coup un arrêt du Tribunal fédéral suisse. La Cour européenne donne donc une autre interprétation aux normes légales que le Tribunal fédéral. Jamais le législateur suisse n'aurait accepté qu'un tel acte médical soit remboursé par la caisse-maladie obligatoire. C'est dire que la Cour de Strasbourg mine le processus législatif suisse (cf. jugement du 8 janvier 2009; affaire Schlumpf c. Suisse; requête no 29002/96).
Invalidation de l'accord de Dublin
La Cour européenne des droits de l'homme est non seulement une menace pour le processus législatif national ordinaire, mais aussi pour le droit international. Preuve en est ce jugement dans lequel elle interdit le renvoi d'une famille afghane de Suisse en Italie aussi longtemps que ce pays ne peut pas garantir des conditions d'accueil suffisantes. Par cette décision, la Cour de Strasbourg a annulé d'un seul coup les effets de l'accord de Dublin, un traité de droit international conclu par tous les Etats UE et auquel se sont associées l'Islande, la Norvège et la Suisse. Selon cet accord, un requérant d'asile n'a le droit de déposer qu'une seule demande dans un Etat Dublin (le pays du premier accueil). Les 17 juges de Strasbourg torpillent donc la décision des Etats contractants d'établir une politique d'asile cohérente en Europe. Il ne s'agit plus là de la marge interprétative laissée usuellement aux juges, mais de la neutralisation pure et simple par les "17 Sages de Strasbourg" du processus législatif ordinaire conclu par un groupe d'Etats (cf. jugement de la Cour européenne du 4 novembre 2014; case of Tarakhel v. Switzerland; application no. 29217/12).
Initiative pour l'autodétermination
Il n'y a qu'un moyen d'empêcher ces comportements antidémocratiques: il faut décider clairement que la Constitution fédérale est la source suprême du droit suisse, sous réserve du droit international impératif que la Suisse ne conteste pas. Le droit suisse continuera ainsi d'être défini par le parlement, le peuple et les cantons et non pas par une poignée de juges étrangers agissant dans leur tour d'ivoire. Voilà précisément ce qu'exige l'initiative populaire UDC pour l'autodétermination. Dites OUI et signez cette initiative si vous ne l'avez pas encore fait!
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La multiplication des lois scélérates
Les lois scélérates se multiplient dans les pays développés. Sous prétexte de terrorisme, on revient en arrière sur toutes les libertés fondamentales. Mais le terrorisme a bon dos, il sert d'excuse pour épier les citoyens, les mettre sur écoute, les ficher, les normaliser, réduire la liberté d'expression. La multiplication des Lois sert un Projet inconscient du Système : vous mettre en faute perpétuelle afin que vous baissiez la tête. Faire de vous des sujets. Le pouvoir politique est à son comble quand vous êtes laminés, standardisés, tous conformes et que vous réagissez pareillement aux stimulis et aux impulsions des pouvoirs. La mystification est à son apogée quand, comme maintenant , on escamote le politique, on occulte la lutte des groupes et classes sociales pour les remplacer par la guerre des races et celle des religions. Quel meilleur moyen de cliver, de diviser les sociètés que ces conflits de races et de religion ? Le clivage et la divisison sont les armes des tyrans qui faisaient se battre entre eux les esclaves dans l'arène.
En Angleterre, on donne de nouvelles définitions à des mots comme « extremisme », et « terrorisme ». On prétend déceler les enfants déviants qui seraient dangereux pour la société. Et les réduquer. En Espagne , les lois interdisent maintenant de critiquer la police, de la prendre en photo, de filmer ses brutalités. Malheur aux lanceurs d'alerte, aux « whitsle blowrers ». On étend le concept de racisme, on n'a plus le droit de stigmatiser le monde de l'usure. On interdit toute critique de cette pseudo société ouverte et universelle qui incarne le Nouvel Ordre du Monde. Celui qui n'est ni mondialiste, ni globaliste, celui qui aime son pays, son histoire, son identité sa famille , celui là est réduit au silence.
L'opposition doit non seulement être déclarée impossible, mais impensable. Etre minoritaire est déjà un crime. L'idéologie dominante est devenue le collectivisme, qu'il soit dans sa forme communiste, socialiste, nazie, fasciste. C'est la dictature du groupe, la priorité de la masse manipulée sur l'individu grâce au renforcement de l'autorité jusque dans la conduite de la vie privée. La seule chose qui change dans ces dictatures, c'est le mode de désignation apparent de l'autorité. Il masque la similitude, le même processus d'asservisssement. Le but, l'objectif, c'est la docilité, le renoncement , l'aliénation et l'abandon de toute idée même de rebelllion. Il faut, et on le constate quotidiennement, que chacun se dise « à quoi bon, il n'y a rien à faire », il faut que celui qui, simplement, pense autremement se sente et se sache perdant d'avance. Car c'est le grand ressort : la résignation.
La vraie raison de la mise en place de cet arsenal de répression contre les peuples est : la Crise. Contrairement à la propagande des politiciens, des élites et de la classe médiatique, la Crise est là, on n'en parle plus parce qu'il faut faire croire qu'elle est vaincue, que les chefs sont crédibles, que les remèdes sont efficaces. Malgré 6 ans de remèdes exceptionnels, d'austérité et de régression, elle est toujours là, simplement noyée, enfouie sous des montagnes de liquidités et de crédit qui ne pourront jamais être honorés. Malgré cela, le chômage et la déflation s'enracinent, les systèmes de protection sociale et de retraite sont en perdition.
La crise de notre époque n'est guère différente de celles que l'on a connu dans le passé comme en 1873 ou 1929. C'est une crise globale, systèmique, elle touche les fondements même de notre ordre social. La dureté de la Dépression n'a pas été évitée, elle a été retardée, diluée au prix d'un enracinement des causes même de cette crise. La crise exprime, reflète la généralisation des fausses valeurs, l'écart entre les valeurs financières, monétaires, boursières et le monde réel, le monde de l'économie.et de la production de richesses. Toutes les valeurs ont été inflatées, perverties par le crédit, la création monétaire et l'inflation de la masse des promesses, alors que le progès des sciences, des technologies et des procédés de fabrication provoque une tendance continue à la baisse des prix.
A la tendance à la déflation produite par le progrès, les élites veulent s'opposer par l'inflation des valeurs financières, boursières et bancaires. Ils impriment de la fausse monnaie, gonflent les bilans de leurs banques centrales, afin de maintenir en lévitation ces fausses valeurs qui constituent leur fictif capital . Ce qui se passe en ce moment en Chine est, en caricature, en accéléré et en expressionniste ce que nous vivons et allons vivre par petites touches, soft et graduelles. En Chine s'attaquer aux valeurs, vendre sur le marché boursier est devenu motif de prison. La Chine donne à voir ce qui est caché chez nous. Tenir les marchés financiers est devenu partout une priorité publique au mépris de toutes les autres. Ne vous y trompez pas, maintenir des valeurs, des valorisations fausses est une priorité nationale, politique et vouloir s'y opposer sera considéré comme une atteinte à la sécurité des pays.
Il faut nier la Crise pour une autre raison : pour gagner du temps. Le temps de mettre en place les sauvegardes qui seront nécessaire pour maintenir le (dés)ordre ancien quand la Crise s'extériorisera à nouveau. Il faut militariser la police, mettre en place les réseaux de contrôle et de renseignement, prendre les textes et les lois. Le temps présent est celui qui est mis à profit pour encadrer, pour quadriller, pour préparer, se doter de l'arsenal de maintien de l'ordre. Mais pendant ce temps, la crise continue de saper les bases de nos sociétés par le mensonge de la fausse monnaie, des fausses statistiques, et des fausses promesses. Ah 2017 !
En attendant, on met en place le Grand Transfert. Ainsi de la loi qui autorise le pillage des dépôts bancaires des classes moyennes , de celles qui petit à petit restreignent l'usage et la possession du cash. Nous l'avons dit et redit, la seule question intéressante posée par la Crise est de savoir qui va payer quand l'addition, la vraie, la réelle, va être présentée. Si vous en doutez pensez à l'exemple Grec.
Qui va payer ? Les travailleurs sous forme de chômage accru et de rémunérations directes et indirectes amputées ; les classes moyennes sous forme de confiscation d'une partie de leur épargne ; les petites entreprises sous forme d'alourdissement des impôts et taxes ; les grandes entreprises sous forme d'impôts, de nationalisations et confiscation ? A moins que ce ne soient tous ceux qui n'ont pour seul actif q'un peu de monnaie prochainement hyperinflatée.
Le refus de restructurer la finance et ses créances va conduire à des décisions dramatiques. Car les choix sont politiques. Ils sont difficiles, douloureux et surtout déstabilisants. Les précédents historiques sont clairs et instructifs. Ils ne laissent aucun doute sur ce qui va se passer. Le poids des dettes fragmente nos sociétés, les disloque et détruit le tissus social. La construction politique Européenne va vaciller. L'Allemagne va bien entendu refuser de payer pour les autres. A l'intérieur, les consensus vont voler en éclat avec, soit des partis classiques qui se radicalisent, soit des partis nouveaux qui les supplantent..
L'ordre ou ce que les élites dominantes appellent l'ordre va être contesté et c'est à cela qu'ils se préparent. Durement. Comment comprendre autrement la férocité de la lecon qui a été donnée aux Grecs qui ont tenté de se rebeller ?
Alors que des journalistes Allemands sont menacés et accusés de trahison par le Procureur Général pour avoir révélé la mise en place de dispositifs de contrôle et d'écoutes, la presse Britannique a choisi de monter les faits en épingle. Bravo. Cet article est la contribution de quelqu'un qui n'était pas Charlie, alors que Merkel elle, l'était.
Bruno Bertez, 2 août 2015
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La produzione teorica di Carl Schmitt è caratterizzata dalla tendenza dell’autore a spaziare in diversi settori di ricerca e dal rifiuto di assolutizzare un solo fattore o ambito vitale. Nonostante gli siano state rivolte frequenti accuse di ambiguità e asistematicità metodologica – in particolar modo da chi sostiene la “purezza” della scienza del diritto -, in una delle sue ultime interviste, rilasciata nella natia Plettenberg, Schmitt ribadì senza mezzi termini la sua radicale scelta esistenziale: «Mi sento al cento per cento giurista e niente altro. E non voglio essere altro. Io sono giurista e lo rimango e muoio come giurista e tutta la sfortuna del giurista vi è coinvolta» (Lanchester, 1983, pp. 5-34).
Un metodo definito sui generis, distante dalle asettiche teorizzazioni dei fautori del diritto positivo ma non per questo meno orientato alla scienza giuridica, sviscerata fin nelle sue pieghe più riposte per ritrovarne la genesi violenta e i caratteri concreti ed immediati, capaci di imporsi su una realtà che, da “fondamento sfondato”, è minacciata dal baratro del nulla.
In quest’analisi si cercherà di far luce sul rapporto “impuro” tra diritto ed altre discipline, in primis quella politica attraverso cui il diritto stesso si realizza concretamente, e sui volti che questo ha assunto nel corso della sua produzione.
1.
Il pensiero di Schmitt può essere compreso solo se pienamente contestualizzato nell’epoca in cui matura: è dunque doveroso affrontarne gli sviluppi collocandoli in prospettiva diacronica, cercando di individuare delle tappe fondamentali ma evitando rigide schematizzazioni.
Si può comunque affermare con una certa sicurezza che attorno alla fine degli anni ’20 le tesi schmittiane subiscano un’evoluzione da una prima fase incentrata sulla “decisione” a una seconda che volge invece agli “ordini concreti”, per una concezione del diritto più ancorata alla realtà e svincolata non solo dall’eterea astrattezza del normativismo, ma pure dallo “stato d’eccezione”, assenza originaria da cui il diritto stesso nasce restando però co-implicato in essa.
L’obiettivo di Schmitt è riportare il diritto alla sfera storica del Sein – rivelando il medesimo attaccamento all’essere del suo amico e collega Heidegger -, che si oppone non solo al Sollen del suo idolo polemico, Hans Kelsen, ma pure al Nicht-Sein, allo spettro del “Niente” che sopravviveva nell’eccezione, volutamente non esorcizzato ma troppo minaccioso per realizzare una solida costruzione giuridica. La “decisione”, come sottolineò Löwith – che accusò Schmitt di “occasionalismo romantico” – non può pertanto essere un solido pilastro su cui fondare il suo impianto teoretico, essendo essa stessa infondata e slegata «dall’energia di un integro sapere sulle origini del diritto e della giustizia» (Löwith, 1994, p.134). Il decisionismo appariva in precedenza come il tentativo più realistico per creare ordine dal disordine, nell’epoca della secolarizzazione e dell’eclissi delle forme di mediazione: colui che s’impone sullo “stato d’eccezione” è il sovrano, che compie un salto dall’Idea alla Realtà. Quest’atto immediato e violento ha sul piano giuridico la stessa valenza di quella di Dio nell’ambito teologico, tanto da far affermare a Schmitt che «tutti i concetti più pregnanti della moderna dottrina dello Stato sono concetti teologici secolarizzati» (Teologia politica, 1972, p.61). Solo nell’eccezione il problema della sovranità si pone come reale e ineludibile, nelle vesti di chi decide sull’eventuale sospensione dell’ordinamento, ponendosi così sia fuori che dentro di esso. Questa situazione liminale non è però metagiuridica: la regola, infatti, vive «solo nell’eccezione» (Ivi, p.41) e il caso estremo rende superfluo il normativo.
La debolezza di tale tesi sta nel fissarsi su una singola istanza, la “decisione”, che ontologicamente è priva di fondamento, in quanto il soggetto che decide – se si può definire tale – è assolutamente indicibile ed infondabile se non sul solo fatto di essere riuscito a decidere e manifestarsi con la decisione. Contrariamente a quanto si potrebbe pensare, decisionismo non è dunque sinonimo di soggettivismo: a partire dalla consapevolezza della sua ambiguità concettuale, Schmitt rivolge la sua attenzione verso la concretezza della realtà storica, che diviene il perno della sua produzione giuridica.
Un cambio di rotta dovuto pure all’erosione della forma-Stato, evidente nella crisi della “sua” Repubblica di Weimar. Il decisionismo rappresentava un sostrato teorico inadeguato per l’ordinamento giuridico internazionale post-wesfaliano, in cui il tracollo dello Stato[1] spinge Schmitt a individuare nel popolo e nei suoi “ordinamenti concreti” la nuova sede del “politico”.
Arroccato su posizioni anti-universaliste, l’autore elabora tesi che vanno rilette in sostanziale continuità con quelle precedenti ma rielaborate in modo tale da non applicare la prospettiva decisionista a tale paradigma cosmopolitico.
2.
Il modello di teoria giuridica che Schmitt approfondì in questa tappa cruciale del suo itinerario intellettuale è l’istituzionalismo di Maurice Hauriou e Santi Romano, che condividono la definizione del diritto in termini di “organizzazione”. La forte coincidenza tra organizzazione sociale e ordinamento giuridico, accompagnata alla serrata critica del normativismo, esercitò una notevole influenza su Schmitt, che ne vedeva il “filo di Arianna” per fuoriuscire dal caos in cui era precipitato il diritto dopo la scomparsa degli Stati sovrani.
Convinto fin dalle opere giovanili che fosse il diritto a creare lo Stato, la crisi irreversibile di quest’ ultimo indusse l’autore a ricercarne gli elementi essenziali all’interno degli “ordinamenti concreti”. Tralasciando la dottrina di Hauriou, che Schmitt studiò con interesse ma che esula da un’analisi prettamente giuridica in quanto fin troppo incentrata sul piano sociologico, è opportuno soffermarsi sull’insegnamento romaniano e sulle affinità tra questi e il tardo pensiero del Nostro. Il giurista italiano riconduceva infatti il concetto di diritto a quello di società – corrispondono al vero sia l’assunto ubi societas ibi ius che ubi ius ibi societas – dove essa costituisca un’«unità concreta, distinta dagli individui che in essa si comprendono» (Romano, 1946, p.15) e miri alla realizzazione dell’«ordine sociale», escludendo quindi ogni elemento riconducibile all’arbitrio o alla forza. Ciò implica che il diritto prima di essere norma è «organizzazione, struttura, posizione della stessa società in cui si svolge e che esso costituisce come unità» (Ivi, p.27).
La coincidenza tra diritto e istituzione seduce Schmitt, al punto da fargli considerare questa particolare teoria come un’alternativa al binomio normativismo/decisionismo, “terza via” di fronte al crollo delle vecchie certezze del giusnaturalismo e alla vulnerabilità del positivismo. Già a partire da Teologia politica il pensiero di matrice kelseniana era stato demolito dall’impianto epistemologico che ruotava intorno ai concetti di sovranità e decisione, che schiacciano il diritto nella sfera del Sein riducendo il Sollen a «modus di rango secondario della normalità» (Portinaro, 1982, p. 58). Il potere della volontà esistenzialmente presente riposa sul suo essere e la norma non vale più in quanto giusta, tramontato il paradigma giusnaturalistico, ma perché è stabilita positivamente, di modo che la coppia voluntas/auctoritas prevalga su quella ratio/veritas.
L’eclissi della decisione osservabile dai primi scritti degli anni ’30 culmina col saggio I tre tipi di pensiero giuridico, in cui al “nemico” scientifico rappresentato dall’astratto normativista Schmitt non oppone più l’eroico decisionista del caso d’eccezione quanto piuttosto il fautore dell’ “ordinamento concreto”, anch’esso ubicato nella sfera dell’essere di cui la normalità finisce per rappresentare un mero attributo, deprivato di quei connotati di doverosità che finirebbero per contrapporsi a ciò che è esistenzialmente dato. Di qui la coloritura organicistico-comunitaria delle istituzioni che Schmitt analizza, sottolineando che «esse hanno in sé i concetti relativi a ciò che è normale» (I tre tipi di pensiero giuridico, 1972, pp.257-258) e citando a mo’ di esempi modelli di ordinamenti concreti come il matrimonio, la famiglia, la chiesa, il ceto e l’esercito.
Il normativismo viene attaccato per la tendenza a isolare e assolutizzare la norma, ad astrarsi dal contingente e concepire l’ordine solo come «semplice funzione di regole prestabilite, prevedibili, generali» (Ibidem). Ma la novità più rilevante da cogliere nel suddetto saggio è il sotteso allontanamento dall’elemento decisionistico, che rischia di non avere più un ruolo nell’ambito di una normalità dotata di una tale carica fondante.
3.
L’idea di diritto che l’autore oppone sia alla norma che alla decisione è legata alla concretezza del contesto storico, in cui si situa per diventare ordinamento e da cui è possibile ricavare un nuovo nomos della Terra dopo il declino dello Stato-nazione.
Lo Schmitt che scrive negli anni del secondo conflitto mondiale ha ben presente la necessità di trovare un paradigma ermeneutico della politica in grado di contrastare gli esiti della modernità e individuare una concretezza che funga da katechon contro la deriva nichilistica dell’età della tecnica e della meccanizzazione – rappresentata sul piano dei rapporti internazionali dall’universalismo di stampo angloamericano.
Sulla scia delle suggestioni ricavate dall’istituzionalismo, il giurista è consapevole che solo la forza di elementi primordiali ed elementari può costituire la base di un nuovo ordine.
La teoria del nomos sarà l’ultimo nome dato da Schmitt alla genesi della politica, che ormai lontana dagli abissi dello “stato d’eccezione” trova concreta localizzazione nello spazio e in particolare nella sua dimensione tellurica: i lineamenti generali delle nuove tesi si trovano già in Terra e mare del 1942 ma verranno portati a compimento solo con Il nomos della terra del 1950.
Nel primo saggio, pubblicato in forma di racconto dedicato alla figlia Anima, il Nostro si sofferma sull’arcana e mitica opposizione tra terra e mare, caratteristica di quell’ordine affermatosi nell’età moderna a partire dalla scoperta del continente americano. La spazializzazione della politica, chiave di volta del pensiero del tardo Schmitt, si fonda sulla dicotomia tra questi due elementi, ciascuno portatore di una weltanschauung e sviscerati nelle loro profondità ancestrali e mitologiche più che trattati alla stregua di semplici elementi naturali. Il contrasto tra il pensiero terrestre, portatore di senso del confine, del limite e dell’ordine, e pensiero marino, che reputa il mondo una tabula rasa da percorrere e sfruttare in nome del principio della libertà, ha dato forma al nomos della modernità, tanto da poter affermare che «la storia del mondo è la storia della lotta delle potenze terrestri contro le potenze marine» (Terra e mare, 2011, p.18) . Un’interpretazione debitrice delle suggestioni di Ernst Kapp e di Hegel e che si traduceva nel campo geopolitico nel conflitto coevo tra Germania e paesi anglosassoni.
Lo spazio, cardine di quest’impianto teorico, viene analizzato nella sua evoluzione storico-filosofica e con riferimenti alle rivoluzioni che hanno cambiato radicalmente la prospettiva dell’uomo. La modernità si apre infatti con la scoperta del Nuovo Mondo e dello spazio vuoto d’oltreoceano, che disorienta gli europei e li sollecita ad appropriarsi del continente, dividendosi terre sterminate mediante linee di organizzazione e spartizione. Queste rispondono al bisogno di concretezza e si manifestano in un sistema di limiti e misure da inserire in uno spazio considerato ancora come dimensione vuota. È con la nuova rivoluzione spaziale realizzata dal progresso tecnico – nato in Inghilterra con la rivoluzione industriale – che l’idea di spazio esce profondamente modificata, ridotta a dimensione “liscia” e uniforme alla mercé delle invenzioni prodotte dall’uomo quali «elettricità, aviazione e radiotelegrafia», che «produssero un tale sovvertimento di tutte le idee di spazio da portare chiaramente (…) a una seconda rivoluzione spaziale» (Ivi, p.106). Schmitt si oppone a questo cambio di rotta in senso post-classico e, citando la critica heideggeriana alla res extensa, riprende l’idea che è lo spazio ad essere nel mondo e non viceversa. L’originarietà dello spazio, tuttavia, assume in lui connotazioni meno teoretiche, allontanandosi dalla dimensione di “datità” naturale per prendere le forme di determinazione e funzione del “politico”. In questo contesto il rapporto tra idea ed eccezione, ancora minacciato dalla “potenza del Niente” nella produzione precedente, si arricchisce di determinazioni spaziali concrete, facendosi nomos e cogliendo il nesso ontologico che collega giustizia e diritto alla Terra, concetto cardine de Il nomos della terra, che rappresenta per certi versi una nostalgica apologia dello ius publicum europaeum e delle sue storiche conquiste. In quest’opera infatti Schmitt si sofferma nuovamente sulla contrapposizione terra/mare, analizzata stavolta non nei termini polemici ed oppositivi di Terra e mare[2] quanto piuttosto sottolineando il rapporto di equilibrio che ne aveva fatto il cardine del diritto europeo della modernità. Ma è la iustissima tellus, «madre del diritto» (Il nomos della terra, 1991, p.19), la vera protagonista del saggio, summa del pensiero dell’autore e punto d’arrivo dei suoi sforzi per opporre un solido baluardo al nichilismo.
Nel nomos si afferma l’idea di diritto che prende la forma di una forza giuridica non mediata da leggi che s’impone con violenza sul caos. La giustizia della Terra che si manifesta nel nomos è la concretezza di un arbitrio originario che è principio giuridico d’ordine, derivando paradossalmente la territorialità dalla sottrazione, l’ordine dal dis-ordine. Eppure, nonostante s’avverta ancora l’eco “tragica” degli scritti giovanili, il konkrete Ordnung in cui si esprime quest’idea sembra salvarlo dall’infondatezza e dall’occasionalismo di cui erano state accusate le sue teorie precedenti.
Da un punto di vista prettamente giuridico, Schmitt ribadisce la sentita esigenza di concretezza evitando di tradurre il termine nomos con “legge, regola, norma”, triste condanna impartita dal «linguaggio positivistico del tardo secolo XIX» (Ivi, p.60). Bisogna invece risalire al significato primordiale per evidenziarne i connotati concreti e l’origine abissale, la presa di possesso e di legittimità e al contempo l’assenza e l’eccedenza. La catastrofe da cui lo ius publicum europaeum è nato, ossia la fine degli ordinamenti pre-globali, è stata la grandezza del moderno razionalismo politico, capace di avere la propria concretezza nell’impavida constatazione della sua frattura genetica e di perderla con la riduzione del diritto ad astratta norma. Ed è contro il nichilismo del Gesetz che Schmitt si arma, opponendo alla sua “mediatezza”, residuo di una razionalità perduta, l’“immediatezza” del nomos, foriero di una legittimità che «sola conferisce senso alla legalità della mera legge» (Ivi, p.63).
BIBLIOGRAFIA ESSENZIALE
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PORTINARO P. P., La crisi dello jus publicum europaeum. Saggio su Carl Schmitt, Edizioni di Comunità, Milano, 1982
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ID., Land und Meer. Eine weltgeschichtliche Betrachtung, Reclam, Lipsia 1942, trad. it. Terra e mare. Una considerazione sulla storia del mondo raccontata a mia figlia Anima, Adelphi, 2011
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ID., Die Lage der europäischen Rechtswissenschaft, Internationaler Universitätsverlag, Tubinga, 1950, trad. it. La condizione della scienza giuridica europea, Pellicani Editore, Roma, 1996
[1] «Un termine apparentato ad un periodo storico: vale solo da Hobbes ad Hegel», come scrisse in una lettera a Norberto Bobbio, cfr. P. TOMMISSEN, introduzione a C. SCHMITT, Il concetto d’Impero nel diritto internazionale, Settimo Sigillo, Roma, 1996, p.6
[2] Ricchi altresì di significati simbolici espressi mediante le figure veterotestamentali del Leviathan e del Behemoth. Rovesciando l’impostazione hobbesiana, Schmitt sembra prediligere il secondo, mostro terrestre che in battaglia penetra nel territorio nemico anziché annientarlo come fa il soffocante Leviatano (Terra e mare, 2011, pp.18-19). L’analogia con lo scontro in atto tra Germania e paesi angloamericani è lampante (Chiantera-Stutte, 2014, pp.120-121).
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La loi sur le renseignement voulue par le gouvernement suscite la méfiance d’une partie de la société civile qui craint une atteinte grave aux libertés du citoyen. Elle relance l’éternel et légitime débat sur l’équilibre, souvent menacé, entre sécurité nationale et libertés publiques. Ce projet législatif s’inscrit dans une longue tradition de contrôle et de surveillance administrative du pouvoir sur la société. Ce processus répressif a commencé, sous sa forme moderne, il y a deux siècles, par la volonté d’un homme : Joseph Fouché, le sombre génie policier du Consulat et de l’Empire.
Après les attentats terroristes du mois de janvier à Paris, le gouvernement souhaite répondre avec la plus grande fermeté à la menace djihadiste et à ses réseaux. Pour satisfaire une opinion publique avide de fermeté, le gouvernement de Manuel Valls prépare une loi qui pose question à bien des égards. Le pouvoir socialiste, dont la communication est pleine de diatribes contre les ennemis de la République, brise son idéal démocratique au nom d’une menace diffuse, bien que réelle, contre la nation et les intérêts de l’État. La décision du président de la République de faire appel au Conseil Constitutionnel ne semble pas calmer les opposants à ce projet. L’inquiétude de certaines associations, de juristes et des professionnels du web est grande, comme en témoigne l’opérateur internet Mozilla Firefox : « Cette disposition oblige les entreprises à permettre une surveillance gouvernementale de l’activité en ligne de tous leurs utilisateurs à la recherche d’un ensemble obscur de motifs comportementaux suspects. » Certains hébergeurs d’internet évoquent même l’idée d’exiler leurs activités hors de France contre cette mesure qu’ils jugent liberticide.
La République is watching you
Ainsi, le gouvernement, au nom de « l’indépendance nationale, de l’intégrité du territoire et de la défense nationale » et de « la prévention du terrorisme » mais également des « intérêts majeurs de la politique étrangère », souhaite mettre en place un système de surveillance étroite d’internet. Techniquement, cette mesure se concrétiserait par la mise en place de « boîtes noires » surveillant les métadonnées capables de repérer les projets terroristes. Pour adoucir ce que beaucoup considèrent comme un abus d’autorité, la loi met en place certains contre-pouvoirs et crée ainsi une Commission de contrôle. Ce contrôle sera confié à une nouvelle autorité administrative censée être indépendante, la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR), composée de magistrats, de députés et d’experts techniques.
Pour le politologue Thomas Guénolé, vigie républicaine du moment et instigateur d’une pétition qui a déjà recueilli plus de cent mille signatures, ces mesures de protection des libertés fondamentales ne sont qu’illusoires : « Nous dénonçons les contre-vérités du gouvernement sur la fameuse « commission de contrôle » censée protéger les citoyens des abus de surveillance. D’une part, en amont, l’avis de cette commission est consultatif : seul le Premier ministre est décideur. D’autre part, si cette commission n’a pas le temps de se prononcer sous trois jours, elle est automatiquement réputée être d’accord. Enfin, en aval, un citoyen aura besoin de prouver « un intérêt direct et personnel » pour saisir cette commission (ou ensuite, le Conseil d’État) : comment diable le pourrait-il, concernant des opérations secrètes ? Bref, en fait de garde-fous, ce sont des chimères. »
Face à l’hydre terroriste, la balance entre les partisans du tout répressif et les trop angéliques associations de défense des droits de l’homme semble pencher du côté de l’autoritarisme. Ce projet de loi ranime le vieux débat des limites de l’autorité de l’État sur les libertés publiques, un débat au cœur de le politique française depuis près de deux siècles. C’est lors de la naissance de l’État moderne que s’est forgée la capacité du pouvoir à assurer son autorité et son contrôle sur l’ensemble du territoire et des citoyens. Joseph Fouché, ministre de Napoléon Bonaparte, et père de la police moderne, a tenu un rôle fondateur dans cette évolution du pouvoir. D’une police encore embryonnaire issue de l’Ancien Régime et des premières années de la Révolution, il a tissé au début du XIXe siècle une toile de surveillance et de répression sur la société française.
Le contrôle des citoyens
À cette époque, l’ennemi du pouvoir bonapartiste n’a pas l’apparence du djihadiste cagoulé mais celle de l’activiste royaliste et de l’ancien jacobin, acteurs des principaux réseaux factieux du pays. Pour les combattre, Fouché, tout nouveau ministre du Premier Consul Bonaparte, s’appuie alors sur la loi du 17 février 1800 qui crée les préfets et les commissaires de police dans les villes de moins de cinq mille habitants. Il rationalise la police et le contrôle des citoyens par la collecte de données brutes sur les sujets les plus variés : population carcérale, vagabondage, réfractaires au service militaire, revenus des citoyens… Il rend obligatoire l’utilisation du passeport et contrôle ainsi les déplacements sur l’ensemble du territoire. Son ministère n’est pas qu’un outil de répression, il est également une agence de collecte de renseignements statistiques sur la société française.
Pour Fouché, pas de bonne police et de régime stable sans une connaissance approfondie de la société permettant de renseigner l’État sur les atteintes sécuritaires à ses intérêts. Mais pour le ministre de la police de Napoléon Bonaparte, de telles pratiques n’entrent pas en contradiction avec l’idéal démocratique, au contraire : « Il ne faut pas croire qu’une police établie par ces vues puisse inspirer des alarmes à la liberté individuelle, au contraire, elle lui donnerait une nouvelle garantie et une puissance plus pure et plus sûre d’elle-même. » La surveillance administrative du pays devient une des attributions du gouvernement et sera au cœur des attributions de l’État moderne ; une surveillance et un contrôle de l’État qui seront les futurs outils des régimes totalitaires du XXe siècle.
La question du juste équilibre entre autorité et liberté est donc essentielle pour toute forme de pouvoir. Benjamin Constant, esprit libéral et opposant à Napoléon, mettait déjà en garde les gouvernements contre tous risques d’abus de pouvoir : « Toutes les fois que vous donnez à un homme une vocation spéciale, il aime mieux faire plus que moins. Ceux qui sont chargés d’arrêter les vagabonds sur les grandes routes sont tentés de chercher querelle à tous les voyageurs. Quand les espions n’ont rien découvert, ils inventent. Il suffit de créer dans un pays un ministère qui surveille les conspirateurs, pour qu’on entende parler sans cesse de conspirations. » Une mise en garde qui conserve toute sa force aujourd’hui.
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A la fin de sa session printanière, le président du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies a nommé un rapporteur spécial pour mener des investigations au sujet des violations des droits de l’homme lors de mesures coercitives unilatérales (par exemple des sanctions économiques). Cette nomination fut précédée de longues années de débats concernant la mise en cause du droit international par de telles sanctions. (cf. «Horizons et débats» no 6/7 du 9 mars 2015)
Le spécialiste du droit international Alfred de Zayas explique dans l’interview ci-dessous à quel point des sanctions unilatérales portent atteinte au droit international.
Horizons et débats: Dans votre rapport adressé au Conseil des droits de l’homme que vous avez déposé personnellement le 10 septembre 2014, vous mentionnez les mesures coercitives unilatérales, comme par exemple les sanctions économiques, comme étant non-pacifiques et pas en accord avec les objectifs et les principes des Nations Unies. Que vouliez-vous dire par là?
Alfred de Zayas: Non seulement les mesures coercitives unilatérales, mais souvent aussi les mesures multilatérales, violent autant la lettre que l’esprit de la Charte des Nations Unies, notamment le Préambule et les articles 1 et 2. L’organisation repose sur le principe de l’égalité souveraine de tous ses membres. Les sanctions unilatérales et les embargos violent de nombreux accords internationaux et «les principes généraux de droit reconnus par les nations civilisées» (Statuts de la Cour internationale de justice, art. 38).
De quels principes de droit s’agit-il là?
Ce sont notamment le principe de la souveraineté étatique, le principe de non-ingérence dans les affaires intérieures d’autres Etats, la liberté de commerce internationale et, entre autres, la liberté de navigation. En outre, elles violent des principes de droit international, pacta sunt servanda, car les sanctions et les embargos empêchent l’exécution de traités de droit international en vigueur. L’application extraterritoriale de lois nationales représente une nouvelle forme de colonialisme qui revient à l’usurpation de compétences, presque une sorte d’annexion d’autres juridictions par le biais de moyens d’extension de la juridiction nationale.
Y a-t-il aussi des résolutions de l’ONU violées par les mesures coercitives unilatérales?
Plusieurs résolutions de l’Assemblée générale de l’ONU sont violées, entre autres la Résolution 2625 (du 24 octobre 1970) concernant les relations amicales et la coopération entre les Etats, dont le préambule stipule que les Etats ont l’obligation «de s’abstenir d’intervenir dans les affaires de tout autre Etat». C’est «une condition essentielle à remplir pour que les nations vivent en paix les unes avec les autres». En outre, ils ont le devoir «de s’abstenir, dans leurs relations internationales, d’user de contrainte d’ordre militaire, politique, économique ou autre, dirigée contre l’indépendance politique ou l’intégrité territoriale de tout Etat.»
Et l’Assemblée générale de préciser: «Aucun Etat ni groupe d’Etats n’a le droit d’intervenir, directement ou indirectement, pour quelque raison que ce soit, dans les affaires intérieures ou extérieures d’un autre Etat. En conséquence, non seulement l’intervention armée, mais aussi toute autre forme d’ingérence ou toute menace, dirigées contre la personnalité d’un Etat ou contre ses éléments politiques, économiques et culturels, sont contraires au droit international. Aucun Etat ne peut appliquer ni encourager l’usage de mesures économiques, politiques ou de toute autre nature pour contraindre un autre Etat à subordonner l’exercice de ses droits souverains et pour obtenir de lui des avantages de quelque ordre que ce soit.»
Que faut-il entendre par mesures de toute autre nature?
Par exemple un «blocus des ports ou des côtes d’un Etat par les forces armées d’un autre Etat» représente une agression contre le droit international (Assemblée générale, Résolution 3314, article 3?c).
Y a-t-il des prises de position de la communauté internationale à ce sujet?
Les mesures coercitives unilatérales sont régulièrement désignées par la plupart des Etats comme étant contraires au droit international, comme par exemple dans les 23 résolutions de l’Assemblée générale de l’ONU concernant l’embargo contre Cuba (cf. résolution 69/5 du 28 octobre 2014). A l’occasion de l’adoption de cette résolution – 188 Etats étaient en faveur, deux se sont opposés (USA et Israël) et 3 se sont abstenus – plusieurs Etats ont désigné l’embargo explicitement d’«illégal».
C’est une majorité écrasante …
Lors des débats devant l’Assemblée générale, les représentants du continent sud-américain ont tous soutenu Cuba. Au nom de la Communauté d’Etats latino-américains et caraïbes (CELAC), qui comprend les 33 pays des deux Amériques sauf les Etats-Unis et le Canada, l’ambassadeur du Costa Rica auprès de l’ONU, Juan Carlos Mendoza, a dénoncé l’effet ex-territorial des lois de blocus américaines dont sont concernés également des Etats tiers. «Les mesures unilatérales prises dans le contexte du blocus portent atteinte à de nombreuses entreprises qui, en accord avec le droit international, y compris les règles établies par l’Organisation mondiale du commerce (OMC), ont des relations commerciales avec Cuba.» Les représentants du Mouvement des Etats non-alignés ont également précisé que les sanctions contre Cuba étaient «illégales».
Les Etats-Unis sont-ils l’acteur principal en matière de sanctions?
Selon les informations du Trésor américain, les Etats Unis entretiennent actuellement 26 «Sanctions Programs» (www.treasury.gov/resource-center/sanctions/Programs).
L’application ex-territoriale de lois nationales, tel par exemple le Helms-Burton Act du 12 mars 1996, violent également les droits de nombreux d’Etats tiers et ont souvent été condamnées par la communauté des Etats comme violant le droit international.
Selon vos explications, il est évident que les sanctions unilatérales portent massivement atteinte au droit international.
Oui, la question de leur illégalité est claire. Le problème reste de savoir comment le droit international peut être appliqué de façon effective. Jusqu’à présent, il n’y a pas de possibilité pour l’ONU de forcer l’un des cinq membres permanents du Conseil de sécurité à se comporter en conformité avec le droit international. Ils ont une impunité de fait.
On pourrait toutefois lancer une procédure de réclamation d’un Etat auprès du Comité des droits de l’homme de l’ONU, selon l’article 41 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, ce qui forcerait l’ONU à prendre la chose en main, au moins pour discuter la situation et trancher, même si rien ne change. Une condamnation a quand même une certaine valeur morale.
Quelles normes relatives aux droits de l’homme peuvent être violées par des sanctions?
Le droit à la vie (article 6 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques). Les sanctions contre l’Irak, l’Iran, Cuba, le Soudan, le Venezuela, le Zimbabwe, etc. ont aggravé la situation de l’approvisionnement dans ces pays. Des gens sont morts par manque de nourriture, d’eau potable, de soins médicaux et de médicaments. Par ailleurs, l’exercice des droits économiques et sociaux, protégé par le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, se voit ainsi bafoué. Les sanctions peuvent également être en violation des Conventions de Genève et d’autres traités de droit international humanitaire.
Dans ce cas, les nouvelles sanctions contre la Russie sont également problématiques?
Une décision juridique éclairante sur cette question serait souhaitable comme, par exemple, un avis de la Cour internationale de justice conformément à l’art. 96 de la Charte des Nations Unies. Cela serait utile pour l’analyse plus détaillée des divers aspects des sanctions et de leurs implications pour les droits de l’homme.
Si les sanctions sont illégales, qu’est-ce que cela signifie pour les Etats qui les soutiennent?
Il en naît le devoir de se racheter, en particulier lorsque les droits de l’homme sont violés; quand, par exemple, les sanctions mènent à une famine, à l’utilisation de la force, à une immigration de masse ou au nettoyage ethnique. Selon le principe erga omnes (concernant tous les Etats), les Etats n’ont pas le droit de reconnaître les violations du droit par d’autres Etats ou d’y apporter un quelconque soutien, par exemple financier. Mais comme je l’ai dit ci-dessus, le droit international n’est pas automatiquement mis en application. Pour cela, nous avons besoin de la volonté politique de la communauté internationale. Mais hélas, la solidarité internationale n’est pas coutume et la plupart des medias jouent le jeu des puissants.
Quand peut-on dire que des sanctions sont «légales»? Cette notion ne se cristallise-t-elle pas toujours dans une zone grise?
Bien qu’il existe de nombreuses «zones grises» dans le droit international, la situation est un peu plus claire ici. Conformément à l’article 41 de la Charte des Nations Unies, le Conseil de sécurité peut imposer des sanctions économiques, mais seulement après s’être assuré, sous l’égide de l’article 39 de la Charte, que la paix a été compromise. Celles-ci ont été utilisées avec succès par exemple dans la lutte contre le colonialisme, le racisme et l’apartheid en Rhodésie/Zimbabwe et en Afrique du Sud.
Un embargo sur les armes pourrait être absolument légal si le but final est de promouvoir la paix et de permettre une solution diplomatique à un conflit. Un embargo sur les armes devrait être imposé à toutes les parties d’un conflit, et la communauté internationale doit s’engager activement pour un cessez-le-feu et des négociations de bonne foi. Mais la plupart des sanctions ne sont pas efficaces ou s’avèrent même contre-productives. Les sanctions par le Conseil de sécurité des Nations Unies peuvent dégrader considérablement non seulement la situation des droits de l’homme dans un Etat, mais aussi faciliter ou y mener à la corruption et à la criminalité.
Qu’est ce qu’on peut dire en conclusion jusqu’à présent?
Tout régime de sanctions – unilatéral ou multilatéral – doit être soumis aux contrôles réguliers et sa conformité avec le droit international doit être jugé par un système légal compétent. En outre, il ne suffit pas que les sanctions soient juridiquement légales; elles doivent également poursuivre un but concis, légitime, servir la paix et respecter le principe de proportionnalité. Les régimes de sanctions doivent être vérifiés régulièrement – et s’ils violent les droits humains et n’apportent aucun effet positif, ils doivent être supprimés. Dans un monde globalisé, les sanctions ne peuvent être imposées en raison d’intérêts géopolitiques ou économiques, et si elles blessent les droits des personnes et des Etats, c’est alors qu’émerge pour l’émetteur le devoir de compensation adéquate envers les victimes de ces sanctions.
Quels sont les derniers développements sur cette question à l’ONU?
En mai 2014, le Conseil des droits de l’homme a organisé une conférence sur les sanctions unilatérales et multilatérales, à laquelle j’ai participé activement. Denis Halliday, ancien coordinateur humanitaire en Irak, y a dénoncé les sanctions insensées contre l’Irak de 1991 à 2003, ayant coûté la vie à plus d’un million de personnes. Le rapport de cet atelier a été discuté lors de la 27e session du Conseil des droits de l’homme en septembre 2014. Par la suite, le Comité consultatif du Conseil des droits de l’homme de l’ONU a été invité à réaliser une étude et à préparer des recommandations, qui viennent maintenant d’être présentées au Conseil dans sa 28e session. Le 28 mars, en outre, Idriss Jazairy (ancien Ambassadeur de l’Algérie auprès des Nations Unies) a été nommé Rapporteur spécial sur les conséquences négatives des mesures coercitives unilatérales par rapport aux droits de l’homme.
Sinon, que peut-on faire contre de telles sanctions?
Les médias doivent également participer. Dans la plupart des cas, les populations ne savent pas quels crimes sont commis en leur nom, quelles mesures nos Etats prennent, causant alors des conséquences terribles pour les populations d’autres pays. Il est aussi de notre responsabilité, en tant que citoyens, de protester là-contre: «Pas en notre nom!» Le 19 mars 2015 a eu lieu une réunion scientifique à Londres, où j’ai participé avec plusieurs professeurs d’Oxford, de Londres, de Paris, etc. Le consensus était que les régimes de sanctions soulèvent davantage de problèmes qu’ils ne peuvent en résoudre et que le dialogue et la médiation de l’ONU sont meilleurs que des mesures punitives affectant principalement les populations civiles et causant beaucoup de souffrances.
Monsieur le Professeur, merci beaucoup de cette interview.
(Interview réalisée par Thomas Kaiser)
* La conversation correspond à l’opinion personnelle
du professeur de Zayas et n’a pas été officiellement tenue en sa qualité de Rapporteur spécial.
Cf. www.alfreddezayas.com et
http://dezayasalfred.wordpress.com
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Interview mit Prof. Dr. iur. et phil. Alfred de Zayas, Genf*
Ex: http://www.zeit-fragen.ch
Der Präsident des Uno-Menschenrechtsrates hat am Ende der Frühjahrssession einen Sonderberichterstatter ernannt, der die Verletzungen der Menschenrechte bei einseitigen Zwangsmassnahmen (zum Beispiel Wirtschaftssanktionen) untersuchen soll. Dieser Ernennung geht eine jahrelange Auseinandersetzung um die Völkerrechtswidrigkeit dieser Sanktionen voraus, die hiermit einen vorläufigen Abschluss gefunden hat. (vgl. Zeit-Fragen vom 3. März) Der Völkerrechtler Alfred de Zayas gibt im folgenden Interview Auskunft darüber, inwieweit durch solche einseitigen Massnahmen das Völkerrecht verletzt wird.
Zeit-Fragen: In Ihrem Bericht an den Menschenrechtsrat, den Sie am 10. September 2014 persönlich vorlegten, erwähnen Sie die unilateralen Zwangsmassnahmen, wie zum Beispiel Wirtschaftssanktionen, als nicht friedlich und nicht in Übereinstimmung mit den Zielen und den Prinzipien der Vereinten Nationen. Was heisst das?
Prof. Dr. Alfred de Zayas: Nicht nur die unilateralen Zwangsmassnahmen, sondern häufig auch die multilateralen, verletzen die Uno-Charta, sowohl ihren Buchstaben als auch ihren Geist, vor allem verstossen sie gegen ihre Präambel und gegen Artikel 1 und 2. Die Organisation beruht auf dem Grundsatz der souveränen Gleichheit aller ihrer Mitglieder. Unilaterale Sanktionen und Embargos verletzen zahlreiche internationale Verträge und «die von den Kulturvölkern anerkannten Rechtsgrundsätze» (Satzung des Internationalen Gerichtshofs, Art. 38).
Welche Rechtsgrundsätze sind das?
Das Prinzip der Staatssouveränität, das Prinzip der Nichteinmischung in die inneren Angelegenheiten von anderen Staaten, die internationale Handelsfreiheit und die Freiheit der Schiffahrt unter anderem. Ausserdem verstossen sie gegen völkerrechtliche Prinzipien wie pacta sunt servanda, denn Sanktionen und Embargos hindern die völkerrechtliche Ausführung von gültigen völkerrechtlichen Verträgen. Die extraterritoriale Anwendung von nationalen Gesetzen stellt eine neue Form von Kolonialismus dar, sie bewirkt eine Usurpierung von Kompetenzen, beinahe eine Art von Annexion durch juristische Übertretung.
Gibt es auch Uno-Resolutionen, die durch unilaterale Zwangsmassnahmen verletzt werden?
Etliche Resolutionen der Uno-Generalversammlung werden verletzt, unter anderem die Resolution 2625 betreffend freundschaftliche Beziehungen zwischen den Staaten (24. Oktober 1970), in deren Präambel sich die Staaten verpflichten, «nicht in die Angelegenheiten eines anderen Staates einzugreifen». Dies ist «eine wesentliche Voraussetzung für das friedliche Zusammenleben der Nationen». Ferner verpflichten sie sich, «in ihren internationalen Beziehungen jeden gegen die politische Unabhängigkeit oder die territoriale Unversehrtheit eines Staates gerichteten militärischen, politischen, wirtschaftlichen oder sonstigen Zwang zu unterlassen …»
Die Generalversammlung macht es deutlich: «Kein Staat und keine Staatengruppe hat das Recht, unmittelbar oder mittelbar, gleichviel aus welchem Grund, in die inneren oder äusseren Angelegenheiten eines anderen Staates einzugreifen. Folglich sind die bewaffnete Intervention und alle anderen Formen der Einmischung oder Drohversuche gegen die Rechtspersönlichkeit eines Staates oder gegen seine politischen, wirtschaftlichen und kulturellen Teilelemente völkerrechtswidrig. Ein Staat darf keine wirtschaftlichen, politischen oder sonstigen Massnahmen gegen einen anderen Staat ergreifen oder ihre Anwendung begünstigen, um von ihm die Unterordnung bei der Ausübung seiner souveränen Rechte zu erlangen oder von ihm Vorteile irgendwelcher Art zu erwirken.»
Was muss man unter sonstigen Massnahmen verstehen?
Zum Beispiel stellt eine «Blockade der Häfen oder Küsten eines Staates durch die Streitkräfte eines anderen Staates» eine völkerrechtswidrige Aggression dar (Generalversammlung Resolution 3314, Artikel 3 c).
Gibt es Stellungnahmen der internationalen Gemeinschaft dazu?
Unilaterale Zwangsmassnahmen werden regelmässig von der Mehrheit der Staaten als völkerrechtswidrig bezeichnet, so zum Beispiel in den 23 Resolutionen der Uno-Generalversammlung zum Embargo gegen Kuba (siehe Resolution 69/5 vom 28. Oktober 2014). Anlässlich der Annahme dieser Resolution – 188 Staaten stimmten dafür, zwei dagegen (USA und Israel) und 3 enthielten sich – haben mehrere Staaten das Embargo expressis verbis als «illegal» bezeichnet.
Das ist eine überwältigende Mehrheit …
In der Debatte vor der Generalversammlung stellten sich die Vertreter des südamerikanischen Kontinents hinter Kuba. Für die Lateinamerikanische und Karibische Staatengemeinschaft (Celac), die alle 33 Länder Amerikas ausser den USA und Kanada umfasst, prangerte Costa Ricas UN-Botschafter, Juan Carlos Mendoza, die exterritoriale Wirkung der US-Blockadegesetze an, von denen auch Drittstaaten betroffen sind. «Die einseitigen Massnahmen, die als Teil der Blockade ergriffen worden sind, beeinträchtigen zahlreiche Unternehmen, die in Übereinstimmung mit dem Völkerrecht einschliesslich der von der Welthandelsorganisation WTO aufgestellten Regeln mit Kuba Handel treiben.» Auch die Vertreter der Bewegung der Blockfreien Staaten nannten die Sanktionen gegen Kuba «illegal».
Hauptsanktioneur sind die Vereinigten Staaten?
Nach Informationen des US-Treasury unterhalten die Vereinigten Staaten zurzeit 26 «Sanctions Programs» (www.treasury.gov/resource-center/sanctions/Programs).
Die exterritoriale Anwendung von Nationalgesetzen, wie zum Beispiel der Helms-Burton Act vom 12. März 1996, verletzen auch die Rechte von vielen Drittstaaten und sind häufig von der Staatengemeinschaft als völkerrechtswidrig verurteilt worden.
Nach Ihren Ausführungen wird deutlich, dass mit unilateralen Sanktionen internationales Recht erheblich verletzt wird.
Ja, die Frage ihrer Illegalität ist klar. Das Problem bleibt, wie das Völkerrecht in die Tat umgesetzt werden kann. Es gibt bis jetzt keine Möglichkeit, Uno-Massnahmen oder Sanktionen gegen eines der fünf ständigen Mitglieder des Sicherheitsrates zu verhängen.
Man könnte allerdings die Staaten-Beschwerdeprozedur des UN-Menschenrechtsausschusses gemäss Artikel 41 des Uno-Paktes über Bürgerliche und Politische Rechte engagieren, und die Uno müsste sich der Sache annehmen.
Welche menschenrechtlichen Normen können durch Sanktionen verletzt werden?
Das Recht auf Leben (Artikel 6 des Uno-Paktes über Bürgerliche und Politische Rechte). Die Sanktionen gegen den Irak, Iran, Kuba, Sudan, Venezuela, Zimbabwe usw. haben die Versorgungslage in diesen Staaten arg getroffen. Menschen sind am Mangel von Lebensmitteln, von sauberem Trinkwasser, von Arzneimitteln, von medizinischer Versorgung umgekommen. Ausserdem ist natürlich die Ausübung der wirtschaftlichen und sozialen Rechte, die im Internationalen Pakt über die Wirtschaftlichen, Sozialen und Kulturellen Rechte geschützt werden, verhindert. Sanktionen können auch gegen die Genfer Konventionen und andere Verträge des Humanitären Rechts verstossen.
In diesem Fall sind die neuerlichen Sanktionen gegen Russland ebenfalls problematisch?
Eine klärende juristische Entscheidung zu dieser Frage wäre wünschenswert, zum Beispiel wäre eine Stellungnahme durch den Internationalen Gerichtshof gemäss Art. 96 der Uno-Charta sehr nützlich, um die verschiedenen Aspekte der Sanktionen und ihrer menschenrechtlichen Konsequenzen genauer zu untersuchen.
Wenn Sanktionen illegal sind, was bedeutet das für die Staaten, die diese unterstützen?
Daraus entsteht die Verpflichtung, Wiedergutmachung zu leisten, vor allem, wenn Menschenrechte verletzt werden, zum Beispiel wenn Sanktionen eine Hungersnot verursachen, zu Gewaltanwendung, Massenmigration oder ethnischer Säuberung führen. Nach dem Erga-omnes-Prinzip (alle Staaten betreffend) dürfen Staaten die Rechtsverletzungen von anderen Staaten nicht anerkennen oder diese finanziell oder sonst wie unterstützen. Aber wie oben gesagt – das Völkerrecht wird nicht automatisch in die Tat umgesetzt. Dafür braucht man den politischen Willen der Weltgemeinschaft. Leider ist es mit der internationalen Solidarität nicht gut bestellt.
Wann sind Sanktionen «legal», oder bewegt man sich hier immer in einem Graubereich?
Obwohl es viele «Graubereiche» im Völkerrecht gibt, ist die Lage hier etwas klarer. Gemäss Artikel 41 der Uno-Charta kann der Sicherheitsrat wirtschaftliche Sanktionen verhängen, allerdings erst, nachdem der Sicherheitsrat unter Artikel 39 der Charta eine Feststellung getroffen hat, dass der Friede gefährdet worden ist. Solche wurden zum Beispiel erfolgreich im Kampf gegen Kolonialismus, Rassismus und die Apartheid in Rhodesien/Zimbabwe und in Südafrika eingesetzt.
Ein Waffenembargo kann durchaus legal sein, wenn nämlich der Zweck darin besteht, den Frieden zu fördern und die diplomatische Lösung eines Konflikts zu ermöglichen. Ein Waffenembargo sollte gegen alle an einem Konflikt beteiligten Parteien verhängt werden, und die internationale Gesellschaft sollte sich aktiv für einen Waffenstillstand und für Verhandlungen im guten Glauben einsetzen. Meistens aber sind Sanktionen nicht wirksam oder erweisen sich sogar als kontraproduktiv. Sanktionen durch den Uno-Sicherheitsrat können nicht nur die menschenrechtliche Situation in einem Staat erheblich verschlechtern – sie können sogar die Korruption und Kriminalität in einem Staat fördern.
Was lässt sich bis jetzt abschliessend sagen?
Alle Sanktionsregimes – ob unilaterale oder multilaterale – müssen nach ihrer völkerrechtlichen Rechtfertigung untersucht werden. Ausserdem müssen Sanktionen nicht nur formell legal sein – sie müssen auch ein begrenztes, legitimes Ziel verfolgen, dem Frieden zu dienen und das Prinzip der Verhältnismässigkeit zu respektieren. Sanktionsregimes müssen regelmässig geprüft werden – und wenn sie die Menschenrechte verletzen oder gar keine positive Wirkung bringen, müssen sie gestrichen werden. In einer globalisierten Welt dürfen Sanktionen nicht wegen geopolitischen oder wirtschaftlichen Interessen verhängt werden, und wenn sie die Rechte von Menschen und Staaten verletzen, so entsteht eine staatliche Haftung für angemessene Wiedergutmachung für die Opfer.
Was sind die neuesten Entwicklungen in der Uno zu dieser Frage?
Im Mai 2014 hat der Menschenrechtsrat eine Konferenz zu unilateralen und multilateralen Sanktionen durchgeführt, an welcher ich aktiv teilgenommen habe. Denis Halliday, ehemaliger Humanitärer Koordinator im Irak, hat vor allem die sinnlosen Sanktionen gegen den Irak 1991–2003 angeprangert, die mehr als eine Million Menschenleben kosteten. Der Bericht dieser Arbeitstagung wurde während der 27. Sitzungsperiode des Menschenrechtsrates im September 2014 diskutiert. Daraufhin wurde das Konsultativkomitee des Uno-Menschenrechtsrates damit beauftragt, eine Studie durchzuführen und Empfehlungen auszuarbeiten, die gerade jetzt dem Rat in seiner 28. Sitzungsperiode vorgelegt worden sind. Ausserdem wurde am 28. März Idris Jasairy als Sonderberichterstatter über die menschenrechtlichen Konsequenzen von Sanktionsregimes ernannt.
Was kann man sonst gegen solche Sanktionen tun?
Die Medien müssen auch mitmachen. Meistens wissen die Bürger nicht, was für Verbrechen in ihrem Namen geschehen, was für Massnahmen unsere Regierungen beschliessen, die dann fürchterliche Konsequenzen für die Bevölkerungen von anderen Staaten verursachen. Es ist auch unsere Verantwortung, als Bürger dagegen zu protestieren: «Not in our Name!» Am 19. März fand eine wissenschaftliche Tagung in London statt, an der ich und etliche Professoren aus Oxford, London, Paris usw. teilgenommen haben. Der Konsensus war, dass Sanktionsregimes mehr Probleme aufwerfen, als sie lösen können, und dass Dialog und UN-Vermittlung besser sind als Strafmassnahmen, die vor allem die Zivilbevölkerung treffen und viel Leid verursachen.
Herr Professor de Zayas, vielen Dank für das Gespräch. •
(Interview Thomas Kaiser)
* Das Gespräch entspricht der persönlichen Meinung von Professor de Zayas und wurde nicht offiziell in seiner Eigenschaft als Sonderberichterstatter geführt. Siehe auch www.alfreddezayas.com und http://dezayasalfred.wordpress.com.
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Démocratie bourgeoise contre démocratie populaire : un enjeu au cœur de la Constitution de 1958
Je poursuis ici nos investigations dans les documents de mise en oeuvre de la Constitution de la Cinquième République telle qu’elle a été portée sur les fonts baptismaux par Charles de Gaulle en 1958.
(Cf.http://reseauinternational.net/quand-le-vote-populaire-bloque-a-lextreme-gauche-en-1958-revient-par-lextreme-droite-un-demi-siecle-plus-tard/ )
Nous avions laissé Edmond Barrachin au moment où il s’inquiétait d’obtenir du général de Gaulle et de son gouvernement que soit mise en place, par le biais d’une loi organique dûment prévue dans la nouvelle Constitution, une barrière à l’expression des voix communistes. Cela se passait à l’occasion de la séance du 31 juillet 1958 du Comité consultatif constitutionnel, et concernait la rédaction de l’article 23 dont la première phrase était ainsi libellée :
« Une loi organique fixe la durée des pouvoirs de chaque Assemblée, le nombre de ses membres, leur mode d’élection et le calcul de leur indemnité. » (Volume II, page 576)
Nous apprenons que, dans sa réunion spécialisée du 1er août 1958, le groupe de travail a reçu communication d’une suggestion d’amendement tendant à retoucher, non plus l’article 23 qui traite de cette loi organique, mais l’article 2 qui définit la « souveraineté nationale », en lui adjoignant un article 2bis dont voici la première phrase :
« La liberté de pensée, d’expression ou d’association, considérée comme une conquête essentielle et inaliénable, est garantie à tous. » (Vol. II, page 118)
Jusqu’à cet endroit, il n’y a rien à redire. Au contraire, il vaut la peine de noter l’extrême importance des éléments qui sont ici rassemblés : liberté de pensée, d’expression ou d’association. En tant que tel, un peuple peut-il renoncer à quoi que ce soit sur ce terrain-là ? Non, certainement. Ou bien alors, c’est qu’il est question de se référer à un système étatique dans lequel le peuple est subordonné à une autorité sur laquelle il est censé n’avoir pas la moindre prise. Mieux : entravé dans sa liberté de penser, de s’exprimer et de s’associer, il se trouverait sous un diktat permanent en ce qui concerne ses allées et venues, ses paroles et son for intérieur.
À le tenir ainsi, on le soumet à une dictature qui risque de ne plus avoir de fin et qui pourra tout se permettre, puisque, au moindre dérapage de quelque individu que ce soit et dans quelque direction que ce soit, il y aura une infraction à sanctionner, jusques et y compris dans le cerveau de quiconque.
Voici, alors, ce contre quoi met en garde la suite de l’amendement proposé :
« Cependant, cette liberté ne saurait être invoquée pour couvrir les idéologies ou entreprises qui tendent à l’abolir. »
Ici, la contradiction est criante. Il s’agit d’abolir la liberté dans les cas où elle-même risquerait d’être abolie… Mais qui décide d’abolir quoi ? De fait, l’amendement organise l’une des abolitions au détriment de l’autre : à quel titre ? C’est ce que la suite nous apprendra :
« Les partis politiques et tout groupement dont le programme intéresse le corps social sont libres. Mais leurs structures et leur vie intérieure doivent être limitées et ils ne doivent avoir aucune obédience envers les États étrangers. » (Vol. II, page 118)
La liberté est donc « limitée ». Rappelons qu’il s’agit de la liberté de se réunir, de s’exprimer et même de penser… Voilà ce qu’il faut « limiter ».
Mais, « structures » et « vie intérieure » des partis en question… Y aura-t-il la moindre « limite » à l’ensemble de ces « limites »-là ?
Non, dès qu’il y a soupçon d’ »obédience envers les États étrangers« . Lesquels ? Les États-Unis ? L’U.R.S.S. ? La Chine ?
Pour l’instant, nous n’en savons rien… La suite et fin de l’amendement nous en disent-ils davantage ?
« Une loi organique fixe les obligations de civisme auxquelles doivent satisfaire les groupements pour qu’ils puissent devenir une menace pour la souveraineté publique, la liberté d’opinion et l’indépendance nationale. La participation des individus ou des groupements à l’exercice de l’autorité est réglementée par la loi. » (Vol II, page 118)
Ne sera donc « citoyen » que l’individu répondant à certaines « obligations de civisme« . Et lui seul ou les groupements soumis aux mêmes « obligations de civisme » pourront interférer dans « l’exercice de l’autorité« .
Maintenant que nous tenons la bride qu’il s’agit d’ajouter à l’article 2, revenons vers celui-ci… Dans son état initial, cet article décisif est remarquable pour ses trois premiers alinéas :
« La souveraineté nationale appartient au peuple.
Aucune section du peuple ni aucun individu ne peut s’en attribuer l’exercice.
Le peuple l’exerce par ses représentants et par le référendum. » (Vol. II, page 564) On le voit : le peuple est ici indivisible. Sans doute est-ce trop démocratique…
Voici maintenant la version définitive de l’amendement tendant à anéantir cette indivisibilité par un article 2bis ainsi libellé :
« La liberté d’opinion et d’expression est garantie à tous. Toutefois les associations et groupements politiques doivent s’inspirer de principes démocratiques et n’accepter aucune obédience étrangère. » (Vol II, page 118)
Ils étaient trois à faire ce sale boulot, et nous reconnaissons l’un d’eux : MM. Bruyneel et Barrachin (Indépendants et paysans d’action sociale) et M. Chardonnet (professeur à l’Institut d’Études politiques de Paris), membre désigné par le chef du gouvernement, Charles de Gaulle…
- Source : Michel J. Cuny
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L’avocat Jacques Vergès est le mythe fondateur de la stratégie de rupture. Née en 1957, lors de la bataille d’Alger, cette stratégie renvoie la technique juridique au second plan et la routine judiciaire au placard. En choisissant la rupture, Maître Vergès n’engage pas seulement sa robe, sa fonction. Il investit sa personne, mise sa réputation, et jusqu’à sa vie, pour défendre une cause. Le dialogue avec le juge étant devenu impossible, il porte le débat devant l’opinion. Il dérange, car il retourne la force de l’accusation contre elle-même.
Plus d’un après sa mort le 15 août 2013, Vergès est toujours le défenseur médiatique le moins défendu. Nombreux sont ceux qui pensent qu’il y a des accusés indéfendables, et qu’il vaut toujours mieux prendre le parti de la veuve et de l’orphelin. Ou plutôt, que la défense d’un bourreau doit se faire dans l’ombre et le silence de la justice. À ceux-là Vergès répond deux fois non : il défendra les présumés coupables quels qu’ils soient. Et que cela se sache ! Tant pis pour le mauvais genre, la mauvaise presse, la mauvaise réputation : Vergès décide d’être radicalement avocat. Pas d’indéfendable, peu d’impardonnables.
La première rupture est celle du juge
Nombreux sont ceux qui pensent que la rupture est un artifice marketing licencieux destiné à faire la publicité d’un avocat mondain. C’est méconnaître le fonctionnement de ces procès : la première rupture est toujours celle du juge. Lorsque celui-ci, qui se doit de dire le droit, s’éloigne de sa mission pour dire la version officielle (l’opinion majoritaire) et décide de ce qui est « bien », alors la rupture de l’avocat s’impose. Vergès attrape le juge par le col pour le ramener dans le prétoire. Face à une justice qui dysfonctionne, la rupture choisie par Vergès est d’une grande noblesse : rompre, plutôt que corrompre. S’adresser au peuple au nom de qui la justice est rendue lorsque le juge s’apprête à signer, en son nom, sa version de l’Histoire.
Qu’il s’agisse de corruption des esprits, des États ou des opinions, la rupture naît quand l’avocat se fait procureur, accusation. En Algérie, lorsque l’accusateur et l’accusé n’ont plus rien en commun pour se comprendre et fonder une décision saine. L’un parle de rébellion, l’autre de résistance à l’occupant. Vergès fait tenir les portes qui donnent sur la meute de loups enragés que deviennent parfois les hommes, au moment de juger les hommes. Car à la fin, c’est toujours le juge ou le jury qui rend sa décision, pas Vergès, pas l’avocat.
La défense à visage humain
La rupture ne se provoque ni ne se fabrique. Elle s’impose. Son ambition première consiste à rappeler qu’un procès n’est jamais que le procès d’un homme. Quoi de pire que de faire, à travers le procès d’un individu, celui d’une idéologie et d’une guerre ? La rupture n’est pas une abomination, elle est la défense inconditionnelle et passionnée de tous ceux qui ont fauté. Quel argument moral peut-on opposer à cette louable intention ?
On peut certes nous faire la liste des clients de Jacques Vergès, crier « fasciste ». Mais on ne peut pas honnêtement dire qu’en défendant le FLN ou Barbie, l’avocat défend le terrorisme ou le nazisme. Double peine en réalité pour ce raisonnement sophistique : l’avocat ne se confond jamais avec sa cause, pas même lorsqu’il opte pour la rupture. L’avocat va chercher au fond de l’âme humaine, sans jugement, pour défendre un homme quand tant d’autres voudraient condamner un chien. Vergès, engagé dans la Résistance à l’âge de 17 ans, accepte de défendre Klaus Barbie, ancien dignitaire nazi en charge de la traque des partisans. Car il voit en lui l’homme jeté en pâture. Lorsque l’on a compris cela, la morale larmoyante des objecteurs de conscience ne résiste pas. Ou bien elle n’est pas une morale, mais un dogme.
Une défense pour l’Histoire
La cause de Vergès est toujours la même : le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, le refus de la colonisation et la préservation de la dignité humaine. Vergès met la bien-pensance face à ses contradictions : si l’on veut croire aux Droits de l’Homme – droits absolus, naturels, indépassables – il faut les reconnaître en chaque homme. Ainsi, à l’occasion du procès Barbie, il pointera la contradiction majeure d’un procès de Nuremberg fait au nom de l’humanité quand les peuples d’Afrique, parties et victimes de la seconde guerre mondiale, n’y avaient pas leur place. Or c’est là, que naît la notion de crime contre l’humanité.
Parfois, le prétoire, l’hermine et les robes ne sont pas à la mesure de l’enjeu. Le décorum s’efface, il faut un vrai spectacle, une vraie performance, une catharsis. Quand Vergès défend Klaus Barbie à Lyon en 1987, qu’il se bat contre la qualification qu’il estime « obscène », « abjecte » de crime contre l’humanité, il s’adresse aux citoyens pour leur suggérer de réfléchir sur ce qui est une question éminemment politique : quelles sont nos lois ? Quelles sont les normes qui régissent la vie de la cité ? Quels sont les principes en vertu desquels on condamne ? Il porte le centre de gravité du débat à sa juste place : dans le peuple. La rupture n’est donc pas qu’une stratégie martyre destinée à glorifier les causes perdues, c’est une stratégie gagnante en Algérie sur le plan judiciaire. Souvent gagnante au-delà du procès.
Il y a certes encore de nos jours des procès médiatiques, mais combien nous disent vraiment quelque chose de notre société ? De nos lois ? Combien font l’Histoire ? L’européanisation du droit, la multiplication des recours et le contrôle de plus en plus prégnant de la libre pensée semblent dissoudre un peu le risque d’être confronté à des « emmerdeurs » de la trempe de Vergès.
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Nous assistons actuellement à une dérive inquiétante du Droit pénal. Plusieurs nouvelles lois visent un même but: condamner le citoyen ordinaire à des peines d'emprisonnement, même lorsqu'il n'a commis aucun crime...
La criminalisation de la vie quotidienne
Alors que le "monde d'en-haut" bénéficie d'une impunité sans limite pour ses crimes financiers, économiques, écologiques ou sociaux, le "monde d'en-bas" est soumis à un contrôle incessant et à une répression disproportionnée par rapports aux actes.
Depuis 2 ans, des lois nouvelles sont apparues simultanément dans les pays occidentaux: leur but est que le citoyen ordinaire devienne condamnable à la prison pour des actes de la vie quotidienne.
Prison pour les parents dont les enfants ne sont pas allés à l'école.
Prison pour ceux qui n'ont pas acheté leur billet de train.
Prison pour les exclus du système économique, mendiants ou squatters.
Prison pour excès de vitesse. (Au début du mois de Décembre, un automobiliste a été condamné à 2 ans de prison ferme pour un simple excès de vitesse, sans avoir causé d'accident)
Prison si l'un de vos proches qui vous accompagnait est mort à cause de votre erreur de conduite.
Prison si l'un de vos amis a causé un accident de voiture après être parti ivre de chez vous.
(en décembre 2003, un couple a été inculpé pour ce motif en France - voir les archives des "brèves nouvelles du monde" pour les détails)
Prison si vous causez la mort d'un tiers dans un accident de la route (10 ans de prison, soit davantage que certaines condamnations prononcées -ou réellement exécutées- dans des cas de violences préméditées, viols, actes de torture, ou assassinats)
Causer la mort d'une personne dans un accident routier est un drame, mais ce n'est pas un crime intentionnel et cela ne doit pas être puni comme tel. Vouloir éliminer tout risque d'accident est un but illusoire, car les risques d'accident existeront tant qu'il y aura des voitures. Une société doit être capable d'accepter une part de risque, car le risque est inhérent à la vie. Dès lors qu'on est vivant, on risque de mourrir. Quand il n'y a plus de risque, c'est qu'on est mort. Et il en est de même pour une société. Une société qui a éliminé tout risque est une société morte.
Dans l'ordre nouveau qui s'instaure actuellement sans susciter d'opposition réelle, le citoyen ordinaire du monde d'en-bas sera soumis à une oppression permanente, une surveillance électronique constante, et une peur omniprésente. Car qui sème la peur récolte la soumission.
L'invention du concept de "dangerosité"
Depuis une dizaine d'années, les médias ont introduit progressivement un mot et un concept qui n'existaient pas précédemment: la "dangerosité". Comme George Orwell l'avait prévu dans "1984", l'introduction de mots nouveaux ou la suppression de mots anciens dans le langage sont un puissant moyen de manipulation des esprits.
Plutôt que de parler tout simplement de "danger", les médias ont donc inventé (ou plutôt "relayé") ce concept de "dangerosité". L'idée est que même si quelque chose ou quelqu'un n'est pas réellement et objectivement dangereux, il pourrait l'être potentiellement. L'appréciation du danger potentiel étant d'ordre subjectif, tout innocent devient potentiellement coupable.
Une dérive inquiétante du Droit
Une fois que les médias ont préparé le terrain et introduit ce nouveau concept, les gouvernements ont créé des nouvelles lois et des nouveaux délits basés sur des notions juridiques floues. On a ainsi créé des peines de prison pour la "mise en danger d'autrui". En vertu cette loi, une personne peut être emprisonnée même si elle n'a causé aucun dommage réel à autrui.
Grâce au prétexte du 11 Septembre, une étape supplémentaire a été franchie aux Etats-Unis, avec le principe des "arrestations préventives". En matière de terrorisme, vous pouvez désormais être emprisonné pour une durée illimitée (sans jugement et sans limite de délai pour votre jugement), si on pense que vous "pourriez" commettre un acte de terrorisme. Par exemple, posséder des livres sur l'écologie peut faire supposer que vous "pourriez" commettre des actes de terrorisme écologique. La notion d'acte terroriste peut être ainsi étendue à des faits qui n'ont rien à voir avec le terrorisme.
Cette dérive inquiétante du Droit consiste en la pénalisation des INTENTIONS et non des ACTES.
Elle est absolument contraire à l'état de droit, à la démocratie, et aux droits de l'homme les plus élémentaires. La pénalisation des actes ou des intentions est exactement ce qui différencie la démocratie du fascisme.
La pénalisation des intentions est l'outil juridique qui va permettre aux Maitres du Monde de passer à la prochaine étape de leur plan: emprisonner des personnes pour leurs opinions.
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Was Roman Citizenship Based on Laws for “All of Humanity”?
By Ricardo Duchesne
Ex: http://www.counter-currents.com
The claim that the Roman empire was a legally sanctioned multiracial state is another common trope used by cultural Marxists to create an image of the West as a civilization long working itself toward the creation of a universal race-mixed humanity. This is a lie to which patriots of Western Civ must not yield.
The majority of scholars agree that Rome’s greatest contribution to Western Civilization was the development of a formal-rational type of legal order characterized by the logical consistency of its laws, the precise classification of its different types of law, the precise definition of its terms, and by its method of arriving at the formulation of specific rules wherein questions were posed, various answers from jurists were collected, and consistent solutions were offered. It was a legal order committed to legal decisions based on fairness and equity for all citizens.
The early Romans, before the Republic was established in 509 BC, lived according to laws established through centuries of custom, much like every other culture in the world, each with their own traditions, each ruled by what Max Weber called “traditional law,” a type of authority legitimated by the sanctity of age-old practices. Traditional law tended to be inconsistent and irrational in its application. During Republican times, the Romans created, in 451 BC, their famous Twelve Tables, which established in written form (lex) their centuries-old customary laws (ius). The Twelve Tables [2] covered civil matters that applied to private citizens as well as public laws and religious laws that applied to social fields of activity and institutions. These Tables were customary but they also constituted an effort to create a code of law, a document aiming to cover all the laws in a definite and consistent manner.
Roman Legal Rationalism
Weber associated “formal-rational authority” with the rise of the modern bureaucratic states in the sixteenth century, but legal historians now recognize that he understated the “formal-rational” elements of both medieval Canon Law and Roman Law. (Harold Berman and Charles Reid, “Max Weber as Legal Historian,” in The Cambridge Companion to Max Weber, ed. Stephen Turner, 2000). By the time we get to the writings of Q. Mucius Scaevola [3], who died in 82 BC, and his fellow jurists, we are dealing with attempts to systematically classify Roman civil law into four main divisions: the law of inheritance, the law of persons, the law of things, and the law of of obligations, with each of these subdivided into a variety of kinds of laws, with rational methods specified as to how to arrive at the formulation of particular rules. These techniques to create and apply Roman law in a rationally consistent and fair manner were refined and developed through the first centuries AD, culminating in what is known as Justinian’s Code, a compilation of all existing Roman law into one written body of work, commissioned by the emperor Justinian I, who ruled the Eastern side of the empire from 527 to 565 AD. Initially known as the Code of Justinian, it consisted of i) the Digest, a collection of several centuries of legal commentary on Roman law, ii) the Code, an outline of the actual law of the empire, constitutions, pronouncements, and iii) the Institutes, a handbook of basic Roman law for students. A fourth part, the Novels, was created a few decades later to update the Code.
This legal work is now known Corpus of Civil Law, considered to be one of the most influential texts [4] in the making of Western civilization. More specifically, some see it as the foundation of the “Papal Revolution” of the years 1050-1150, which Harold Berman has identified as the most important transformation in the history of the West. The ecclesiastical scholars who made this legal revolution, by separating the Church’s corporate autonomy, its right to exercise legal authority within its own domain, and by analyzing and synthesizing all authoritative statements concerning the nature of law, the various sources of law, and the definitions and relationships between different kinds of laws, and encouraging whole new types of laws, created not only the modern legal system, but modern culture itself. This is the thesis of Berman’s book, Law and Revolution: The Formation of the Western Legal Tradition [5] (1983).
There are flaws with Berman’s great book (simply stated, he underestimated much of what was accomplished before and after 1050-1150), but he is right to emphasize not just this Papal revolution but the common Western legal heritage of the peoples of Europe neglected by the nationalist historians of the nineteenth century, and, of course, by some New Right intellectuals who prefer “pagan” law.
Here I want to criticize recent works which argue that the Roman legal system broke decisively with any notion of ethnic identity by formulating a legal system “for all of humanity.” This is not easy; there is a universalizing logic inherent to Western civilization, which becomes all the more evident in the development of Roman law, which deliberated and encoded legal principles in reference to all human beings as possessors of reason in common and as inhabitants of a multiethnic Roman community. I don’t intent to fabricate arguments about the racial self-awareness of Romans and the particularistic language of Roman law. But I will nevertheless try to show that Roman legal ideas cannot be used to make the claim that they invented a legal system for a “multicultural and a multiethnic state” — teleologically pointing towards the creation of our current immigrant state in which racial identities are abolished and a raceless humanity is created. There is vast temporal and cultural space between Rome and our current state of affairs.
This argument will come in two parts, with a second part coming later, focusing on the Stoic idea of the “world citizen.” Now I will focus on Philippe Nemo’s argument on the “Invention of Universal Law in the Multiethnic Roman State,” presented in his book, What is the West? (2006). As I said in my last essay [6], Nemo is a French [7] liberal right political philosopher. In the chapter on Rome, he contradicts his earlier assertion that Greek citizenship was “regardless of ethnicity,” as he admits that Greek city-states were “ethnically homogeneous” (p. 17). But Nemo now thinks he has a tight case to persuade us that with their contribution to law “the Romans revolutionized our understanding of man and the human person” wherein all reference to ethnicity was disregarded. His first line of argument is that, as the Romans expanded beyond Italy and created a multiethnic empire, and foreign subjects came under their sovereignty,
it became necessary to use ordinary words and formulas without reference to the religions or institutions of specific ethnic groups so that they could be understood by everyone. This, in turn, encouraged the formulation of an increasingly abstract legal vocabulary. (p. 19)
I would express the implications of this expansion across multiple ethnic lands as follows: with non-citizens inhabiting the empire, to whom the current laws for citizens did not apply, jurists developed “laws of nations” or laws that applied to all people, foreigners and non-citizens as well as citizens. In connection to this they also began to reason about the common principles by which all peoples should live by, the laws that should be “natural” to all humans (rooted in “natural law”). But this form of reasoning about law was not merely a circumstantial reaction to the problem of ruling over many different categories of people; it was a form of reasoning implicit in the process of reasoning itself. The development of an increasingly abstract vocabulary resulted from the application of reason (as opposed to customary thinking) to the development of law; abstraction is inherent to the process of reasoning and results from the process of generating definitions, classifications, and concepts, recognizing common features in particular instances and individual cases, and generating different types of laws and different terms. As Aristotle writes in his Posterior Analytics, inductive reasoning “exhibits the universal as implicit in the clearly known particular” (Book I: Ch.1).
Essentially what the Romans did was to apply Greek philosophy, particularly the Aristotelian inductive logic of moving from experience to certainty or probability by coalescing together in one’s mind the common elements in the particular cases observed. Romans jurists were trained to be very practical about their legal reasoning, and rather than debating ultimate questions about justice, they went about deciding what was the best legal course of action in light of the stated facts, and, in this vein, they classified Roman law into different kinds of law in a systematic fashion, as was evident in the treatises of Q. Mucius Scaevola.
The point I am driving at is that just because the Romans were developing legal concepts that were increasingly abstract and without reference to customs by particular groups, it does not mean they were trying to create a multiracial state with a common system of law, or a nation dedicated to racial equality. There is clearly a connection between rationalization and universalization which engenders an abstract language that bespeaks of a common humanity. That is why Western thinkers always write in terms of “man,” “humanity,” “mankind” even if they are really thinking of themselves, be they Greeks, Romans, or Germans. Westerners created a universal language in the course of becoming the only people in this planet — as I will argue in a future essay — self-conscious of the “human” capacity to employ its rational faculties in a self-legislating manner in terms of its own precepts, rising above the particularities of time, custom, and lineage and learning how to reason about the universal questions of “life” and the “cosmos.” Europeans are the true thinkers of this planet, the only ones who freed their minds from extra-rational burdens and requirements, addressing the big questions “objectively” from the standpoint of the “view from nowhere,” that is nobody’s in particular. But we should realize that it is the view of European man only.
Romanitas
Now, it is also the case, as Nemo points out, that with the emergence of the Hellenistic world after Alexander the Great’s conquests (323-31 BC), Greek Stoics philosophized about a common humanity (in the context of the combination of Greeks, Persians, Syrians, Egyptians, and other groups within this world) with a common nature. It is also the case that Stoicism was very influential among Romans, who produced their own Stoics, Marcus Aurelius and Seneca. Influenced by the Stoics, Roman jurists developed the idea of natural law, which, in the words of Cicero, means:
True law is right reason in agreement with nature; it is of universal application. . . . And there will not be different laws at Rome and at Athens, or different laws now and in the future, but one eternal and unchangeable law will be valid for all nations and all times, and there will be one master and ruler, that is God, over us all, for he is the author of this law . . . (cited by Nemo, p. 21).
How can one disagree with Nemo that the Romans bequeathed to us the idea that we should envision a New World order in which all the peoples of the earth are ruled by universal laws regardless of ethnicity and other particularities? Add to this the fact that with the Edict of Caracalla issued in 212 AD, all free men in the Roman Empire were given Roman citizenship. Citizenship had long been reserved for the free inhabitants of Rome, and then extended to the free inhabitants of Italy, but this edict extended citizenship to multiple ethnic groups.
Still, it would be a great mistake to envision Roman citizenship as a conscious effort on the part of ethnic Romans to recognize the common humanity of all ethnic groups. Firstly, the extension of citizenship was part of the process of Romanization [8], of acculturation and integration of conquered peoples into the empire; it was intended as a political measure to ensure the loyalty of conquered peoples, and the acquisition of citizenship came in graduated levels with promises of further rights with increased assimilation; and, right till the end, not all Roman citizens had the same rights, with Romans and Italians generally enjoying a higher status. Secondly, it is worth noticing that this process of Romanization and expansion of citizenship was effective only in the Western (Indo-European) half of the Empire, where inhabitants were White; whereas in the East, in relation to the non-Italian residents of Egypt, Mesopotamia, Judea, and Syria, it had only superficial effects.
It has been argued, to the contrary, that Roman political culture itself fell prey to “orientalizing” motifs coming from the eastern side. Bill Warwick’s book, Rome in the East (2000), shows that Roman rule in the regions of Syria, Jordan, and northern Iraq was “a story of the East more than of the West,” and states flatly that these lands were responsible for the “orientalizing” of Rome (p. 443). Thus, it would be wrong to argue that, as a result of extending citizenship to non-Romans, “a single nation and uniform culture developed [10].”
Thirdly, keep in mind that, before Caracalla’s edict of 212 AD, the vast majority of those who held Roman citizenship were from Italy; in other words, Romans only agreed to grant citizenship to non-Italians close to the last period of their empire; and historians agree that the only reason Caracalla extended citizenship was to expand the Roman tax base. In fact, it took a full-scale civil war, or, as it is known by historians, a Social War [11] or Marsic War [Lat. socii = allies], 91–88 BC, for Romans to agree to share citizenship with their Italian allies who had long fought on their side helping them create the empire. It is no accident that the roots of the word “patriot” go back to Roman antiquity, the city of Rome, expressed in such terms as patria and patrius, which indicate city, fatherland, native, or familiar place, and worship of ancestors [12]. Roman ethnic identity was strongly tied to the city of Rome for centuries, and when it did extend beyond this city, it did so almost exclusively in relation to closely related ethnic groups in Italy [13] and southern Gaul.
Therefore, it would be anachronistic to project back to the Romans a program akin to our current immigration/diversity reality, implemented with the conscious purpose of undermining European pride and identity and creating a race-mixed population. The cultural Marxists in control of our universities are simply using deceptive arguments to make Europeans think that what is happening today is part of the natural course of Western Civ. This form of intellectual manipulation of students is now rampant in academia.
In a second part [14] of this essay, I will question some of the incredibly absurd lengths to which the Stoic ideal of a cosmopolitan citizen has been willfully misinterpreted and misapplied by our “major” scholars as a “program of education” to be implemented across the West in order for white children to overcome their racism and sexism and accept mass immigration and matriarchy.
Reprinted from: http://www.eurocanadian.ca/2014/10/was-roman-citizenship-based-on-laws-for.html [15]
Article printed from Counter-Currents Publishing: http://www.counter-currents.com
URL to article: http://www.counter-currents.com/2014/11/was-roman-citizenship-based-on-laws-for-all-of-humanity/
URLs in this post:
[1] Image: http://www.counter-currents.com/wp-content/uploads/2014/11/corpus-iuris-civilis.jpg
[2] Twelve Tables: http://thelatinlibrary.com/law/12tables.html
[3] Q. Mucius Scaevola: http://books.google.ca/books?id=Tk52EsGqNUgC&pg=PA312&lpg=PA312&dq=Q.+Mucius+Scaevola&source=bl&ots=CyPPloBw39&sig=KfckI1HVc6jriVX5C-O7IbPX6sE&hl=en&sa=X&ei=NFVKVLmBHsSYyATfl4CQCA&ved=0CFUQ6AEwBw#v=onepage&q=Q.%20Mucius%20Scaevola&f=false
[4] most influential texts: http://www.cambridge.org/us/academic/subjects/law/legal-history/roman-law-european-history
[5] Law and Revolution: The Formation of the Western Legal Tradition: http://www.amazon.com/gp/product/0674517768/ref=as_li_tl?ie=UTF8&camp=1789&creative=390957&creativeASIN=0674517768&linkCode=as2&tag=countecurrenp-20&linkId=2MXE7J4XLZ34ULXY
[6] my last essay: http://www.eurocanadian.ca/2014/10/acclaiming-greek-invention-of-civic.html
[7] French: http://muse.jhu.edu/journals/scs/summary/v004/4.1astell.html
[8] process of Romanization: http://en.wikipedia.org/wiki/Roman_citizenship
[9] Image: http://www.counter-currents.com/wp-content/uploads/2014/11/RomanEmpire-e1416255262305.jpg
[10] a single nation and uniform culture developed: http://anthrojournal.com/issue/october-2011/article/romanization-the-materiality-of-an-immaterial-concept
[11] Social War: http://ocw.nd.edu/classics/history-of-ancient-rome/eduCommons/classics/history-of-ancient-rome/lectures-1/marius-vs.-sulla-romes-social-wars
[12] worship of ancestors: http://www.veryshortintroductions.com/view/10.1093/actrade/9780192853882.001.0001/actrade-9780192853882-chapter-3
[13] closely related ethnic groups in Italy: http://bmcr.brynmawr.edu/2008/2008-04-25.html
[14] second part: http://www.counter-currents.com/2014/11/martha-nussbaum-premier-citizen-of-the-world/
[15] http://www.eurocanadian.ca/2014/10/was-roman-citizenship-based-on-laws-for.html: http://www.eurocanadian.ca/2014/10/was-roman-citizenship-based-on-laws-for.html
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La France a toujours manifesté une réticence certaine à l'égard du pouvoir des juges, comme en témoigne encore notre Constitution, qui préfère le terme d'« autorité judiciaire » à celui de « pouvoir judiciaire ». Toutefois, les choses ont beaucoup évolué depuis la présidence gaullienne.
Déjà, à la fin de l'Ancien Régime, les rois de France s'efforcèrent d'éviter la sanction judiciaire de leurs actes. En 1641, dans son énergique édit de Saint-Germain-en-Laye, Louis XIII « défend aux parlements et autres cours de justice de prendre à l'avenir connaissance des affaires d'État et d'administration ». Les révolutionnaires, méfiants à l'égard de cours composées d'aristocrates suspectés de constituer une force réactionnaire d'opposition aux réformes, ont ensuite confirmé, dans la loi des 16 et 24 août 1790, l'interdiction faite aux tribunaux de connaître du contentieux administratif. Ce principe devait donner naissance, en l'an VIII, à notre juridiction administrative, coiffée par le Conseil d'État initialement placé « sous la direction des consuls » et dont les membres étaient nommés et révoqués « à volonté » par le premier d'entre eux.
Dans le même esprit, l'idée d'un contrôle de la loi par les tribunaux a toujours été considérée comme iconoclaste dans un pays pétri de l'idée rousseauiste selon laquelle « la loi est l'expression de la volonté générale ». La loi des 16 et 24 août, confirmée par la Constitution de 1791, ajoute donc : « Les tribunaux ne pourront, ni directement ni indirectement prendre part à l'exercice du pouvoir législatif, ni empêcher ou suspendre l'exécution des décrets du corps législatif sanctionnés par le Roi, à peine de forfaiture. » Le Code pénal de 1810 punira de dégradation civique les magistrats coupables d'une telle lèse majesté démocratique. Cette même loi de 1790 avait aussi prévu l'élection de tous les juges pour « véritablement purifier le passé ».
Dans une conception révolutionnaire qui révoque la tradition et la coutume pour consacrer des individus doués de conscience et de raison, libres de toute appartenance, seule la loi, expression de la volonté du peuple ou de ses représentants, peut-être source de droit.
Les juges doivent donc se borner, dans les litiges qui leur sont soumis, à être les « bouches de la loi », c'est-à-dire à appliquer servilement la volonté de la nation. C'est la raison pour laquelle, chaque fois qu'un contrôle de constitutionnalité de la loi a cependant été envisagé, il a été confié à un organe politique et non pas aux tribunaux.
C'est sous l'influence anglo-saxonne et celle d'un droit européen d'inspiration germanique que la méfiance à l'égard des juges s'est progressivement estompée après la Seconde Guerre mondiale. Toutefois, la personnalité du général de Gaulle et les circonstances de la naissance de la Ve République ont encore perpétué, au début du régime, une forte prégnance de la raison d'État et une hiérarchie des valeurs que le Général exprimait en ces termes : « Souvenez-vous de ceci : il y a d'abord la France, ensuite l'État, enfin, autant que les intérêts majeurs des deux sont sauvegardés, le droit »1. C'est donc après la disparition du Général que les juridictions de tous niveaux ont progressivement réinvesti l'espace.
Dès 1964, la Cour de justice des communautés européennes (CJCE), ancêtre de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE), émet une série d'oukases affirmant la primauté inconditionnelle du droit européen (traités, règlements, directives, décisions …) sur le droit interne, y compris constitutionnel, des États-membres. L'audace et l'obsession uniformisatrice des juges de Luxembourg, qui ne se sont guère démenties depuis, seront complétées par celles des juges de Strasbourg – qui commencent d'ailleurs à agacer beaucoup de monde.
La France est alors accusée d'être en retard, nous sommes régulièrement désignés comme le pays à la traîne, le mauvais élève qui lambine sur la voie du progrès inéluctable. On répète que « c'est seulement en 1974 » que la France a ratifié la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales signée en 1950, comme si ces vingt-cinq années avaient été « perdues » pour cause de honteuse indifférence aux droits de l'homme. Ce ne sont évidemment pas les libertés mentionnées dans ce texte qui gênaient nos dirigeants, mais le fait que le contrôle de son application soit confié à une Cour européenne siégeant à Strasbourg, dont la jurisprudence allait s'imposer aux États signataires. Jean Foyer avait mis le général de Gaulle en garde contre le risque qu'il y avait à placer ainsi la France sous tutelle de juges européens. Au Conseil des ministres suivant, après que Couve de Murville eut exposé l'intérêt de ratifier la Convention, le Général conclut, en s'adressant à son garde des Sceaux : « J'ai lu votre note. Vous m'avez convaincu. La Convention ne sera pas ratifiée. La séance est levée. » La France a fini par rejoindre ensuite docilement le troupeau. Mais nous vérifions depuis lors combien de Gaulle et Foyer avaient vu juste, puisque 99 % du droit dit « de la Convention » est purement jurisprudentiel et intégralement composé des interprétations fort subjectives de la Cour, souvent fondées sur des méthodes aussi fantaisistes qu'imprévisibles. Les protestations étatiques se multiplient et la Cour fait l'objet de critiques récurrentes et vives. À la suite du tollé provoqué par la condamnation de l'Italie pour la présence de crucifix dans les salles de classe et celle de la Grande-Bretagne pour la privation du droit de vote des détenus, les Anglais ont même voulu profiter de leur présidence du Conseil de l'Europe pour organiser à Brighton, en avril 2012, une conférence dont le but explicite était de réduire les pouvoirs de la Cour en exigeant qu'elle respecte davantage la subsidiarité et la marge nationale d'appréciation des États dans l'interprétation de la Convention.
Encerclés par les juges européens, nous le sommes aussi par les juges nationaux qui se sont considérablement enhardis depuis les débuts de la Ve République, d'autant que la construction européenne, très inspirée du modèle allemand, a inoculé en France le culte germanique de l'État de droit (Rechtsstaat). La « prééminence du droit », sans cesse rappelée dans les traités et la jurisprudence européens, a fini par triompher de la gaullienne et souverainiste raison d'État – et peut-être de la démocratie qui allait avec.
Le 16 juillet 1971, quelques mois après la mort du général de Gaulle, le Conseil constitutionnel, initialement conçu pour défendre les prérogatives de l'exécutif, commet un « coup d'État de droit ». Il se reconnaît en effet soudain compétent pour contrôler, non plus seulement les règles de compétence et procédure parlementaires, mais aussi la conformité du contenu des lois au préambule de la Constitution où sont mentionnés les principaux droits et libertés des citoyens et censure en l'espèce une disposition législative qu'il juge contraire à la liberté d'association. Il s'arroge donc ainsi désormais le droit de contrôler les choix politiques du législateur. Puis Valéry Giscard d'Estaing étend la saisine du Conseil à 60 députés ou 60 sénateurs, c'est-à-dire à l'opposition parlementaire qui ne va pas se priver de cette nouvelle arme. Enfin, la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, initiée par Nicolas Sarkozy, boucle la boucle en créant la question prioritaire de constitutionnalité (QPC) – le rêve de Robert Badinter est réalisé. Celle-ci permet à tout justiciable qui soutient que la loi applicable à son procès contient une disposition contraire aux droits et libertés garantis par la Constitution de demander le renvoi de cette question au Conseil constitutionnel après un filtrage par le Conseil d'État ou la Cour de cassation. Si le Conseil estime qu'il y a bien une violation, il abroge purement et simplement la disposition de loi en cause. Autrement dit, il « corrige » a posteriori le travail du Parlement.
Pour compléter le tableau, peu de temps après la fameuse décision de 1971 et sur invitation du Conseil constitutionnel, la Cour de cassation (1975), puis le Conseil d'État (1989) se sont lancés dans le contrôle de conformité des lois au droit international et européen. En clair : n'importe quel juge judiciaire ou administratif de base peut désormais écarter, dans un litige qui lui est soumis, l'application d'une loi française qu'il juge contraire au droit international ou au droit européen, c'est-à-dire, en réalité, à la jurisprudence de juges européens parfaitement inconnus des Français, qui n'ont de compte à rendre à personne et dont on ne s'inquiète peut-être pas assez de la « traçabilité ».
Autant dire qu'à l'absolutisme démocratique de Rousseau selon lequel la loi est « toujours droite et ne peut errer » s'est substituée une méfiance généralisée à l'égard du législateur qui conduit à l'enserrer dans un filet de normes posées par des juges non élus et politiquement irresponsables. Les normes de référence dont se servent ces juges pour censurer la loi (ou la valider, selon leur bon plaisir du jour) sont extrêmement vagues et floues (liberté, égalité, dignité, nécessité, ordre public, etc.) et leur confèrent un pouvoir d'appréciation absolument discrétionnaire. La Cour européenne des droits de l'homme « invente » le droit qui lui plaît à longueur d'arrêts. Sauf dans les très rares cas où la Constitution est précise, il en va de même du Conseil constitutionnel qui extrait les principes qu'il veut (ou ignore ceux dont il ne veut pas) du préambule de la Constitution. Lors de l'inauguration de la QPC, le 1er mars 2010, le président Sarkozy a prononcé devant le Conseil un discours parfaitement schizophrène vantant les mérites de l'État de droit et du contrôle des lois tout en mettant aussitôt en garde contre le « gouvernement des juges »… qu'il venait pourtant officiellement d'aggraver !
Quant aux magistrats qui rendent la justice au quotidien, il convient de replacer leur pouvoir dans le contexte sociologique et juridique existant, indépendamment de la « politisation » et des excès de zèle de certaines individualités légèrement sectaires.
Des lois mal écrites, dont certaines votées sur ordre de lobbies vindicatifs mus par le ressentiment et l'« envie du pénal », confondant le juge et le psychothérapeute, abandonnent chaque jour aux tribunaux le soin de procéder à l'application de notions parfaitement subjectives qu'ils manipulent avec plus ou moins de maladresse. Les juges n'ont jamais que les pouvoirs qu'on leur donne, et il est certain que plus les textes qu'ils doivent appliquer sont flous, contradictoires, lacunaires, confus, incohérents voire inintelligibles, plus ils sont livrés à leur subjectivité et parfois contraints de « gouverner ». Ceci est vrai à tous les niveaux et dans toutes les juridictions. Quand le législateur ne règle pas convenablement la question du port des insignes religieux dans le secteur privé et que le Conseil constitutionnel lui-même donne une définition obscure de la laïcité, le juge ordinaire fait ce qu'il peut pour trouver un critère et les politiciens ont ensuite beau jeu de condamner son choix. Quand la loi pénale abandonne discrétionnairement l'application des peines à des magistrats qui peuvent les réduire à volonté de telle sorte que la peine exécutée n'a plus rien à voir avec la peine prononcée et que le sentiment d'incohérence judiciaire grandit, la responsabilité en incombe sans doute autant à ceux qui votent la loi qu'à ceux qui l'appliquent.
Pour autant, la lecture des rapports annuels de la Cour de cassation ne trompe pas sur la revendication des magistrats contemporains d'initier et de créer le droit en concurrence avec le législateur, voire même parfois contre la volonté de celui-ci. L'activisme judiciaire à tous les niveaux rappelle les comportements judiciaires corporatistes de l'Ancien Régime2.
Il est, à cet égard, parfaitement symptomatique que chaque fois qu'est remise au goût du jour l'idée d'une démocratisation de la désignation des juges par un système électif approprié, les magistrats poussent immédiatement des cris d'orfraie en invoquant la « technicité » de la fonction et donc le nécessaire maintien du mode de recrutement et de formation actuels. Ceux qui ont l'audace de suggérer une forme d'électivité des juges, pourtant empruntée à l'idéologie de gauche, font l'objet des sarcasmes judiciaires et se trouvent épinglés sur le « mur des cons » du syndicat de la magistrature ! Touche pas à mon corps ! Tout démocrate devrait conserver à l'esprit la formule de Roederer à la Constituante : « Le pouvoir judiciaire, le pouvoir d'appliquer les lois est le plus voisin du pouvoir de les faire : il y touche de si près qu'il ne peut jamais être aliéné par le peuple. » C'est pourtant cette aliénation que consacre la post-démocratie contemporaine.
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par Thomas Ferrier
Ex: http://thomasferrier.hautetfort.com
Depuis plusieurs décennies, les pouvoirs politiques à la tête des différents états d’Europe ont pris, sans consulter le peuple et/ou sans veiller à lui livrer une information objective et complète des enjeux et des conséquences de leur politique, des décisions qui mettent en danger l’avenir de notre civilisation, de notre continent. Par irresponsabilité, par incapacité de voir plus loin que le bout de leur nez, ou au service conscient au contraire d’une idéologie liberticide, ils ont engagé l’Europe dans un processus mortifère et ce dans tous les domaines. Ils ont en clair créé en Europe les conditions propices à l’effondrement de notre civilisation, à la fois en ouvrant les frontières du continent à des flux migratoires post-coloniaux qui portent atteinte à notre identité de peuple européen, et en favorisant en interne les matérialisations classiques de la décadence telles que dénoncées déjà il y a près de deux millénaires par Juvénal dans ses Satires. Le « mariage pour tous » en est une illustration parmi tant d’autres.
Pour involuer ce déclin, un pouvoir politique national devrait engager un programme qui contreviendrait à un des principes fondamentaux du droit, qui est le principe de non-rétroactivité. Certes, il le ferait au nom d’une légitimité populaire, mais en dehors du cadre de la légalité. Il n’est donc simplement pas possible d’envisager dans le cadre national, que cela soit celui de la France ou de l’Allemagne, de revenir en arrière. Aucun gouvernement, même nationaliste, n’envisagera sérieusement d’annuler les décisions prises par ses prédecesseurs. Ainsi on sait très bien que l’UMP ne reviendra pas sur le « mariage pour tous » ni sur les politiques migratoires passées depuis trois ou quatre décennies. Mais on sait aussi que le FN, même s’il prétend en paroles le contraire, n’en ferait rien non plus, à supposer qu’il puisse arriver au pouvoir.
Si une politique n’est pas possible dans le cadre d’un référentiel politique donné, elle est possible si on choisit un tout autre cadre, par exemple celui d’un nouvel Etat qui ne saurait être la continuité de l’Etat précédent. En droit international, il existe un principe de continuité juridique liée à une continuité territoriale. Pour être plus clair, un Etat est contraint d’assumer la politique de l’Etat qui existait précédemment sur le même territoire. Même la révolution française en 1789 a maintenu de nombreux cadres de l’ancienne monarchie. Elle n’a pas pu faire table rase, même si elle a innové sur de nombreux sujets.
L’idée générale est donc que l’Europe naisse en tant qu’état-nation, à partir de l’Union Européenne actuelle, mais élargie à l’ensemble du continent. Cette nouvelle nation, qui se constituera ex nihilo, même si elle reposera par ailleurs sur une base objective, sera vierge juridiquement. Elle ne sera en soi liée à aucune politique décidée par les anciens Etats, qui auront cessé purement et simplement d’exister. C’est ce que j’appelle la table rase juridique européenne.
L’Europe se construira politiquement sans être engagée par les moindres traités ou conventions internationales, que ce soit les traités « européens » ou les constitutions nationales. Elle n’aura pas à « assumer » les politiques néfastes qu’auront auparavant décidées des gouvernements « nationaux » que ce soit en matière de définition de la nationalité ou bien de définition du mariage. Les politiques migratoires passées ou les innovations « matrimoniales » comme le « mariage pour tous » n’auront plus aucune valeur puisqu’elles auront été décidés par des Etats qui n’existent plus, et que le nouvel Etat, l’Europe unie, n’en tiendra donc pas compte. Un autre avantage de l’émergence de cet Etat vierge du point de vue du droit, c’est qu’il n’aura pas de dettes extérieures, alors que les Etats européens actuels sont globalement endettés.
L’Europe unie a une réelle légitimité d’existence en raison de la profonde parenté qu’il existe entre les Européens, au-delà de particularismes réels qu’il convient bien sûr de préserver. Les nations en tant qu’identités nationales et/ou régionales existent. Mais les Etats ne sont que des conventions institutionnelles qui peuvent apparaître ou disparaître au gré de l’histoire. L’Etat européen unitaire pourrait réussir là où les anciens Etats « nationaux » ont échoué. Et il permettrait surtout un redémarrage, un « reboot » total, où tout redeviendrait possible, où la politique que nous estimons absolument nécessaire pourrait être menée dans le respect du droit.
Cela s’apparente d’une certaine manière au passage d’un système informatique à un autre. Comment fait-on ? On sauvegarde d’abord toutes les données qu’on souhaite conserver et uniquement celles-là. Ensuite on réinitialise le disque dur, effaçant l’ancien système ainsi que toutes ses caractéristiques. Puis on installe un nouveau système et on y recopie les données sauvées. Ces données, c’est la civilisation européenne, sa culture, son patrimoine, son histoire, la population de notre continent d’avant ce que nous estimerons être son dévoiement. Le nouveau système informatique c’est l’Etat européen. Il aura ses règles et ses particularités, ses institutions, sa nationalité et son état civil. Ce ne seront pas ceux des anciens Etats, qui auront disparu avec les données endommagées et que nous n’avons donc pas conservées.
La table rase juridique permettra concrètement à l’Europe de reprendre sa marche en avant, considérant comme nuls et non avenus les égarements coupables des anciens Etats et les multiples trahisons des anciens gouvernements « nationaux ». Elle est d’un point de vue juridique la solution la plus satisfaisante.
Thomas FERRIER (PSUNE)
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Victims of the most serious crimes recognized by mankind have no legal remedy to seek justice and compensation. International treaties, international law, supra-national tribunals and courts like the ICJ and the ICC are without consequence for the victims of crimes against peace, war crimes and crimes against humanity. The European Court of Human Rights can issue advisory opinions. Legal remedy for the victims is today, despite charters, treaties, statutes and courts as elusive, as it was under the tyranny of feudal regimes.
The Charter of the United Nations enshrines principles of international law and justice which, in part, are based on the post-WWII Nuremberg Tribunals. The victors of the war decided that nobody, not even a head of state or those who followed illegal orders were above the law and exempt from accountability, prosecution and punishment. The Charter should regulate the peaceful coexistence of sovereign nations. It should criminalize the planning of and crimes against peace, war crimes and crimes against humanity. The Universal Declaration of Human Rights should guarantee that people can exercise certain rights and freedoms, free from oppression and persecution.
The International Court of Justice (ICJ) was established to settle legal disputes among nations. Quasi-legal tribunals such as the International Tribunal for Yugoslavia became the precursors of the Rome Statute and the International Criminal Court ICC). Along with them came the controversial principles of humanitarian interventions and the responsibility to protect. Ironically, neither the United States, nor China or Russia signed the Rome Statute. The ICC is, in other words, a UN court system that has no jurisdiction over citizens of the three most powerful, permanent members of the UN Security Council. Russia and China never referred any alleged perpetrators of the most serious crimes to a special tribunal or the ICC. The United States and its NATO allies for their part, have used the special tribunals and the ICC in politically charged trials against heads of state who were ousted in western-backed coup d’État. Experts in international law and governance who are aware of the injustice discuss whether one should reject the ICC all together, or whether one should lodge complaints against alleged war criminals from NATO member states or their proxies to demonstrate that the ICC is highly selective with regard to whom it prosecutes.
The role of the victims of torture, rape, the destruction of their property, the death or maiming of their spouse or children is limited to testifying in what often amounts to political show trials which may result in the conviction of alleged war criminals. The ICC is screening victims who testify to exclude those who may not be able to testify without suffering additional trauma, or so it claims. The fact is, any victim whose testimony is used in politicized trials without offering actual legal remedy and compensation to the victim itself, unavoidably, suffers additional trauma. The message which the ICC conveys to these victims translates into:
”We need your testimony to serve our political purpose. When we are through with you, you can return to your devastated life and don’t expect justice; not from us, or from anyone else”.
The value of human rights and international justice for those who use and abuse them for political purposes is considerable. For the victims themselves, they are worthless words on paper at best. This is the state of affairs with regards to human rights and international justice, in all of its grotesque clarity. To mention but a few examples.
The war against the former Republic of Yugoslavia was, according to the retired French Brigadier General Pierre Marie Gallois planned by NATO member states since the mid-1970s. (here & here). Gallois admits that he was involved in the planning of the crime against peace and implicates others, including the late German Defense Minister Franz Josef Strauss as well as British and French officials. None of them have ever been charged with crimes against peace and the war crimes which were committed during the war. The former President of Yugoslavia, Slobodan Milosevic, was arrested and charged with war crimes at the ICTY. Milosevic died in prison while he was in the custody of the ICTY. Alexander Mezyaev and Christopher Black raise serious questions about the Milosevic trial and his death in their article ”Death of President Slobodan Milosevic in NATO Prison Remains a Central Question in International Justice”.
In 2010 the Ivorian President Laurent Gbagbo was ousted in a coup d’État. One of the first official acts of Gbagbo was to order that the tunnel between the French Embassy and the Presidential Palace would be closed with a concrete wall. Gbagbo discussed the creation of a gold-backed, Pan-African currency with the Libyan head of State Muammar Qadaffi. The initiative would have ended the virtually absolute French control over the national economies of its fifteen former African colonies. Qaddafi was murdered in 2011. Gbagbo was transferred to the ICC awaiting victors justice.
The European Union established the European Court of Human Rights (ECHR). Lodging a complaint about human rights abuses has become increasingly complicated. The ECHR severely complicated the rules about the admissibility of complaints, claiming a large number of plaintiffs abused the court’s possibility to sue for example one’s government. That said, the ECHR does not provide actual legal remedy for citizens either. The court’s authority is limited to issuing advisory opinions. It is necessary to exemplify the bearing of the court’s right to issue advisory opinions. Imagine the court issued an advisory opinion about a regime that is notorious for torture, including the systematic rape of female political prisoners. Then imagine the victim of such abuse ”win a case” as the ECHR and return back home, armed with the protection of an advisory opinion.
The lack of a credible international justice system has led to initiatives such as the Kuala Lumpur War Crimes Tribunal. The tribunal found members of the U.S. Administration of George W. Bush guilty of war crimes. The tribunal issued a verdict against Israel on charges of genocide. The initiative does help raise awareness about certain crimes but it is, arguably, as selective in its prosecution as the ICC. Moreover, the Kuala Lumpur Tribunals have no other than moral authority. It is hardly sufficient to deter a multi-trillion per year military-industrial lobby, members of think tanks and members of governments who plan wars to co-opt resources or gain geopolitical advantages from planning the next crime against peace. Moreover, non of their victims receives any form of compensation.
The sobering matter of fact is that human rights and international justice are the play-thing of those who have a sufficient degree of political, economic and military power to abuse them. Considering the fact that non of the three most powerful permanent members of the UN Security Council signed the Rome Statutes, it is highly improbable that the ICC is reformable. The question is whether it would be possible to establish an alternative to the ICC that avoids selective prosecution and provides legal remedy, directly to those who have been affected by the most serious crimes.
One proposed solution would be the establishment of an association of sovereign States who adopt international jurisdiction for the most serious crimes, and who establish a permanent institution or bureau, that investigates these alleged crimes. In cases where allegations can be substantiated, the bureau would forward suggestions for the indictment of alleged criminals to the prosecutor-generals of member States. International, diplomatic initiatives for the establishment of bilateral and multilateral assurances of solidarity in cases where the prosecution leads to political, economic, or in the worst case military reprisals would be required. Diplomatic initiatives aimed at the development of bilateral and multilateral treaties which regulate legal processes in such a manner that no State, no prosecutor, judge or court could be considered a direct or indirect party to the legal dispute would have to be taken. Treaties should include provisions to guarantee the safety of those who lodge cases as well as witnesses, if necessary by granting political asylum.
It would be paramount that measures would be adopted to guarantee that alleged perpetrators are tried in fair, independent and transparent trials and sentenced if found guilty beyond a reasonable doubt. Assets of those convicted of the most serious crimes recognized by mankind could be frozen or confiscated to compensate the victims for documented losses. Persons who don’t appear in court and are sentenced in absentia will be informed that they risk being arrested if they enter the territory of States who have adopted international legislation. The information would be made publicly available to signal that the international community does not tolerate impunity with regards to the most serious crimes, regardless of who committed them. Finally, such an initiative would not be complete without including a permanent working group that confronts those who are planning crimes against peace with available evidence, and a group that is tasked with ”preemptive” conflict resolution.
The initiation of the so-called global war on terror in 2001 has led to the exponentially accelerating erosion of international law. About 40 percent of the Syrian population has been displaced by mercenary brigades which are overtly and covertly sub-contracted, financed, and armed by state actors and rogue networks which are embedded in governments and international organizations. Statements, like that of the former French Foreign Minister Roland Dumas, who said that top-British officials approached him in 2009, admitting that they planned to invade Syria with the help of ”rebels”, and the ICC’s abject failure to investigate, show with all possible clarity that international law and human rights are non-existent or empty words for the victims of the crimes.
Arguably, the question whether a sufficiently strong group of sovereign nations decides to work towards the establishment of a new, international justice system or not determines whether the world continues to decline towards tyranny, impunity and a new dark age or not. Alternatives exist, the question is, whether the political will exists among those who don’t abuse the ICC and reject it, without offering an alternative that provides legal remedy to the victims of the most serious crimes.
Dr. Christof Lehmann an independent political consultant on conflict and conflict resolution and the founder and editor in chief of nsnbc, exclusively for the online magazine “New Eastern Outlook”.
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Ex: http://horizons-et-debats.ch
thk. La situation mondiale actuelle montre très clairement qu’il faut engager les plus grands efforts pour préserver les générations futures du «fléau de la guerre» comme le déclare le préambule de la Charte des Nations Unies. Le professeur de Zayas, est «expert indépendant des Nations Unies pour la promotion d’un ordre international démocratique et équitable». Au cours de l’interview qui suit, il se prononce sur son mandat, mais également sur des questions brûlantes de la politique internationale.
Horizons et débats: A l’issue de la session de printemps, diverses résolutions ont été adoptées au Conseil des droits de l’homme. L’une d’elles concernait votre mandat au sein de l’ONU. Etes-vous satisfait du résultat?
Alfred de Zayas: La résolution sur mon mandat pour la promotion d’un ordre international démocratique et équitable n’a pas été adoptée à l’unanimité mais à une très grande majorité et ainsi les Résolutions 18/6 et 21/9 antérieures ont été confirmées et renforcées. Il va de soi que ce n’est pas satisfaisant qu’il y ait des Etats restant sceptiques sur ce sujet si fondamental pour les buts et principes des Nations Unies. Ce mandat est universel, il représente une synthèse des droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels. Dans mes rapports adressés à l’Assemblée générale et au Conseil des droits de l’homme, j’ai montré cette convergence et entamé les diverses tâches qui en résultent. Je ne dirais pas résolu ces tâches, car la thématique est beaucoup trop complexe et ambitieuse. Mais j’ai identifié les défis et formulé des propositions pragmatiques et concrètes à l’adresse de l’Assemblée générale et du Conseil des droits de l’homme. Je travaille déjà à mon rapport de cette année pour le Conseil des droits de l’homme dans lequel je présente la nécessité du désarmement comme condition préalable à l’installation d’un ordre international pacifique, démocratique et équitable.
Comment faut-il comprendre le fait qu’il y a des pays qui ne soutiennent pas les efforts de paix exprimés dans votre mandat?
Il n’y a pas de consensus concernant mon mandat, tout comme il n’y a pas de consensus concernant le mandat de la solidarité internationale ou les résolutions du droit à la paix. Une des raisons est l’influence des lobbys de l’armement dans un certain nombre de pays qui tiennent absolument à maintenir la guerre et le désordre pour pouvoir continuer à faire des affaires et à réaliser des profits. Ils veulent produire des drones, des avions, des sous-marins, des mines antipersonnels etc. Ils veulent des conflits permanents pour que les armes soient utilisées et qu’ils puissent constamment en reproduire et en revendre. Ce n’est cependant pas ainsi qu’on instaure un ordre mondial plus pacifique, plus démocratique et plus équitable, tout au contraire, on instaure un ordre défini par l’agression, la peur, la terreur et l’instabilité. Espérons qu’il sera peu à peu possible de persuader les Etats sceptiques que mon mandat apporte une «valeur ajoutée» c’est-à-dire qu’il amène des avantages pour tous. Les Etats occidentaux veulent plus de démocratie, plus de liberté de la presse, plus de liberté pour manifester et s’organiser. Voilà ce qui est promu par mon mandat et mes rapports.
D’un autre côté, on voudrait un ordre mondial plus équitable. Cela revient à dire qu’il faut arrêter d’exploiter les pays pauvres, qu’il faut partager les richesses du monde de façon plus juste, qu’il faut stopper toutes spéculations des marchés portant sur les récoltes et les ressources naturelles. Il faut également aider les pays pauvres car ils ont un droit au développement. Il faut promouvoir ce droit, ce qui n’est possible qu’en se réorientant; il faut désarmer pour libérer les moyens nécessaires à favoriser la paix et les droits de l’homme – non pas l’espionnage, l’agitation belliciste, les interventions et les guerres. Mon mandat est le mandat de réconciliation en soi. Il fait du bien au Nord et au Sud, à l’Ouest et à l’Est.
Quel pourrait être un pas vers plus de paix et de justice?
Les Etats doivent diminuer radicalement leurs dépenses militaires. Pour cela, ces dépenses doivent être rendues transparentes et il faut consulter le peuple à ce sujet. Depuis le 11 septembre 2001, aux Etats-Unis, (et pas seulement dans ce pays), on dépense d’énormes sommes pour l’armement et des soi-disant mesures de sécurité nationale, mais personne ne connaît exactement, ni le montant des sommes, ni de quelle manière elles sont utilisées. Il y a des «black budgets» et des «slush funds». Je signale que lundi 14 avril, on observe la Journée d'action mondiale sur les dépenses militiares (Global Day of Action on Military Spending). Avant Eduard Snowden, personne ne savait que le gouvernement américain espionnait aussi les citoyens américains; nous ne savions pas que l’argent du contribuable était utilisé pour des activités d’espionnage au niveau mondial. La NSA emploie environ 35 000 collaborateurs à cette tâche. Il n’y a aucun processus démocratique. Il aurait fallu en informer la population avant que ces activités commencent. Dans toute démocratie, il existe une obligation d’information positive de la part du gouvernement. La population doit avoir la possibilité de décider des finalités auxquelles est destinée la dépense de son argent. Il faut en débattre publiquement, si l’on désire surveiller le courrier électronique privé de presque chaque citoyen. C’était une mesure arbitraire prise par le gouvernement, ce qui viole la Constitution américaine et est illégal et illégitime. La prétendue guerre contre le terrorisme ne peut être utilisée pour bafouer les droits humains et pour détruire la sphère de la vie privée des gens. De cette manière, on a violé l’article 17 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. D’ailleurs, nous voulons également savoir quelles armes nous nous procurons et quelle en est l’utilisation. Le peuple doit avoir voix au chapitre, comme c’est le cas en Suisse. Si l’on avait tenu, aux Etats-Unis, un référendum sur les activités de la NSA, 80% de la population l’auraient rejeté. Jamais la population n’aurait accepté de dépenser de telles sommes prises de l’argent du contribuable pour de l’espionnage au lieu de les attribuer aux écoles ou les hôpitaux.
Ne dépense-t-on pas également d’énormes sommes pour l’Alliance militaire de l’Atlantique nord?
Beaucoup trop et sans justification. Au fond, l’OTAN devrait servir exclusivement à la défense et non pas à l’agression ou à l’ingérence dans les affaires internes d’autres Etats. Les pays membres ont des engagements au sein de l’OTAN et l’OTAN attend que tout pays membre engage de grosses sommes d’argent dans son armement. Au début, c’était une alliance défensive. Elle a été créée, après la Seconde Guerre mondiale, dans le cadre de la guerre froide comme rempart contre une éventuelle expansion du communisme vers l’Ouest. Mais au plus tard dès 1990/91, l’ancienne menace que représentait l’Union soviétique a disparu. Le Pacte de Varsovie est dissous et on aurait pu s’attendre à la dissolution de l’OTAN. Mais elle n’a pas été dissoute, elle a été élargie. Les dépenses militaires de l’OTAN continuent à grimper et les pays membres sont soumis à de fortes pressions politiques pour consacrer une part plus élevée de leur budget aux dépenses militaires. Si la dissolution de l’OTAN n’avait pas été souhaitée afin de pouvoir la transformer en «troupes de la paix», dans le sens défini par les objectifs des Nations Unies, on aurait pu ainsi inviter d’autres membres des Nations Unies, par exemple la Biélorussie ou la Russie, à adhérer à l’OTAN, des Etats susceptibles de se sentir menacés par l’OTAN. De cette façon, l’Alliance serait plus compatible avec l’ONU et ne serait pas ressentie comme un danger par les Etats non-membres. On doit poser la question si l’existence et le comportement de l’OTAN ne constitue pas une «menace contre la paix» dans le sens de l’article 39 de la Charte des Nations Unies.
L’OTAN est-elle encore une alliance défensive?
En réalité, c’est différent. Depuis la guerre contre la Serbie en 1999, l’OTAN mène également des guerres d’agression, soit en tant qu’alliance ou sous forme d’une «coalition de volontaires» (Coalition of the Willing)comme en 2003 contre l’Irak, une guerre qui a été désignée par M. Kofi Annan, secrétaire général de l’ONU, et divers spécialistes du droit international comme étant contraire à la Charte des Nations Unies et au droit international. La guerre contre la Libye a également été menée principalement par l’OTAN. Tous ces milliards dépensés pour l’OTAN et ses guerres auraient pu être attribués pour le respect du droit au développement. On aurait pu aider de multiples manières les pays pauvres par le transfert technique, la formation et le développement des infrastructures. On aurait pu atteindre les objectifs de développement du Millenium (Millennium Development Goals) longtemps avant 2015. Le droit au développement pourrait, à l’avenir, nous apporter beaucoup d’aspects positifs. Pour pouvoir récolter des fruits – dans le sens de la paix, de la justice et de la solidarité internationale –, nous devons changer nos priorités et engager toutes nos forces et nos ressources en faveur de la paix dans le monde.
Pourquoi ne le fait-on pas?
Parce que le complexe militaro-industriel n’en veut pas. L’industrie de l’armement n’a qu’une chose en tête, ce sont les profits en permanence. C’est pourquoi on gaspille l’argent du contribuable pour le développement et la production d’armes, mais aussi pour leur démantèlement. Quant je pense aux anciennes armes nucléaires, elles représentent des coûts et des risques énormes. Dans mon rapport à l’Assemblée générale, j’ai souligné cette problématique que Mikhaïl Gorbatchev avait déjà abordée: la problématique d’une guerre nucléaire qui ne se déclenche pas suite à une menace concrète, mais tout simplement suite à une erreur humaine ou technique, électronique ou informatique, ne laissant pas assez de temps aux hommes politiques de reconnaître s’il s’agit d’une «fausse alerte» ou d’une réelle attaque avant que la réaction soit déclenchée. De tels dangers doivent être bannis une fois pour toute afin de protéger l’humanité.
Dans quelle mesure, le désarmement est-il un devoir au niveau du droit international?
L’article 26 de la Charte des Nations Unies prévoit le désarmement. En outre, l’article 2 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques l’article 2 du Pacte relatifs aux droits économiques, sociaux et culturels stipulent que tous les Etats membres doivent réaliser tous les droits humains mentionnés dans ces pactes, ce qui inclut nécessairement les devoirs de désarmer et d’empêcher les guerres, car on ne peut garantir le droit à la vie autrement. Dans ce sens, on a créé la Conférence de l’ONU sur le désarmement et à UNIDIR (Institut des Nations Unies pour la recherche sur le désarmement) afin de définir les modalités pour remplir au mieux ces devoirs de désarmement.
N’y a-t-il pas de contradiction avec le droit de l’autodéfense?
Non, en aucun cas. Bien entendu toute agression est déja interdite par l’article 2, alinéa 4 de la Charte. C’est l’affaire des Nations Unies et du Conseil de sécurité d’empêcher les agressions et de punir les agresseurs. Il va de soi que tout Etat possède le droit à l’autodéfense, tel que cela est défini dans l’article 51 de la Charte. Chaque Etat doit protéger ses citoyens d’agressions et de menaces venant de l’extérieur. C’est légitime et cela fait partie des fonctions fondamentales de tout Etat. Mais il n’y a pas de droit à la «guerre préventive», uniquement un droit à la défense, en cas d’agression – et là seulement jusqu’à ce que le Conseil de sécurité prend responsabilité sur l’affaire. Naturellement, la défense et la préparation à la défense ne sont pas gratuites, mais cela ne veut pas dire qu’il faille dépenser d’autres milliards pour des armes nucléaires qu’il faut constamment renouveler. Nous avons actuellement déjà la capacité de détruire la planète plusieurs fois, c’est l’«Overkill», c’est un gaspillage énorme des ressources financières. De telles dépenses astronomiques doivent être discutées en toute transparence. Il faut mettre sur la table tous les faits.
Mais en mettant les faits sur la table, on n’a pas encore banni l’utilisation de ces armes.
C’est vrai. La population doit, comme c’est le cas ici en Suisse, voter et demander des comptes aux hommes politiques s’ils gaspillent de façon désinvolte l’argent du contribuable. Ce n’est qu’ainsi qu’on arrivera à davantage de paix et de justice.
Ce serait, évidemment, un pas très important.
Le problème de ces soi-disant démocraties «modernes», soumises à des groupes d’influence, est que ces groupes non élus au pouvoir, notamment le complexe militaro-industriel, exercent une influence directe sur les sénateurs et les membres du Congrès. On prend alors des décisions au Congrès, qui n’ont jamais été discutées avec la population et sans tenir compte de son avis. Il faut absolument changer cela, si nous aspirons à un ordre mondial démocratique et équitable.
Le droit des peuples à l’autodétermination n’en fait t-il pas partie?
L’ordre mondial se base à la fois sur la souveraineté des Etats et sur le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. L’autodétermination est un droit, qui est reconnu par la plupart des professeurs de droit international public comme jus cogens, c’est-à-dire comme droit international impératif et contraignant. L’Article 1 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques ainsi que l’article 1 du Pacte relatif aux droits économiques, sociaux et culturels considère le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes comme un des droits fondamentaux de l’ordre mondial.
Y a-t-il de l’opposition à ce sujet?
Comme dans la vie normale, il existe aussi dans le droit international des droits et des intérêts concurrents. Pour la stabilité de l’ordre mondial, nous voulons des frontières étatiques stables. Nous voulons garantir à l’aide de la diplomatie et de négociations un ordre mondial stable, qui respecte les frontières des Etats. Si dans un Etat il y a un chaos ou l’anarchie, la stabilité est détruite. C’est alors qu’on déploie souvent de multiples efforts pour modifier les frontières. L’exemple classique est un pays avec des groupes de population qui se sentent opprimés, discriminés ou mal représentés. Ceux-ci espèrent souvent obtenir davantage d’autonomie ou le droit de se séparer et d'être indépendants.
Pourriez-vous nous citer un exemple historique concret?
Considérons la situation de la Yougoslavie dans les années 1991/95. C’était une nation implosée parce que la population de Slovénie, de Bosnie et Herzégovine, de Croatie, de Macédoine, du Monténégro et finalement également du Kosovo aspiraient à l’indépendance. Jusque là, le droit international prévoyait l’autodétermination dans le cadre de la décolonisation en Afrique et en Asie, mais pas concernant les aspirations sécessionnistes au sein d’Etats européens.
Alors, il s’agissait à cette époque d’un nouveau développement?
Oui, en quelque sorte. Le droit international est dynamique, c’est un système juridique vivant. Lors d’évolutions, comme par exemple l’effondrement de l’Union soviétique en 1991, lorsque les 15 diverses Républiques se sont déclarées indépendantes, cela allait certainement de pair avec le principe de l’autodétermination. L’intégrité territoriale de l’Union soviétique a été terminée par la secession de ses Républiques. Ainsi, en Yougoslavie, les Slovènes, les Croates et les Bosniaques ont réussi à se séparer de l’ancienne Yougoslavie, et cela a détruit bien sûr l’intégrité territoriale du pays, tout en correspondant au droit à l’autodétermination. Dans le droit international moderne, lors d’intérêts concurrents, l’intégrité territoriale versus l’autodétermination, on donne souvent la priorité au droit humain à disposer de lui-même.
Comment doit-on juger cette étape au niveau du droit international?
L’intégrité territoriale ne doit pas être préservée à tout prix. Ce n’est pas quelque chose d’irrévocable ou pour l’éternité. Cependant, un changement doit avoir lieu à l’aide de moyens pacifiques et de négociations.
Si nous transposons cela à la situation de l’Ukraine, qu’est-ce que cela signifie?
Dans ce cas, nous avions un gouvernement élu démocratiquement qui a été menacé par des manifestants violents et qui a finalement été renversé par un coup d’Etat. Le gouvernement ukrainien avait le droit de résoudre cette situation, d’abord de façon interne, de manière pacifique et à l’aide de négociations. Cela a en partie eu lieu. Le gouvernement Ianoukovitch s’est montré prêt à négocier avec les manifestants, qui agissaient en partie de manière très violente, tout en ayant obtenu du soutien de l’étranger. Malheureusement, plusieurs Etats se sont massivement mêlés de l’affaire, ce qui a enfreint plusieurs principes du droit international.
A quoi pensez-vous en disant cela?
L’entretien enregistré de la vice-ministre américaine Victoria Nuland avec l’ambassadeur américain en Ukraine illustre de manière éloquente une «culture de l’ingérence» dans les affaires intérieures d’autres Etats. Si les autres Etats avaient respecté le droit de l’Ukraine à l’autodétermination et avaient laissé les Ukrainiens négocier seuls, le tout aurait probablement évolué différemment.
Le gouvernement Ianoukovitch était-il prêt à faire un compromis?
Le 21 février, les ministres des Affaires étrangères français, polonais et allemand se sont rencontrés avec Ianoukovitch et les représentants des insurgés, de l’opposition. Là, on s’est mis d’accord sur une feuille de route commune. Elle était raisonnable et prévoyait de nouvelles élections avancées et une transition graduelle. L’accord aurait du être respecté par toutes les parties selon l’Article 26 de la Convention de Vienne sur le droit des traités. En premier lieu par les Etats qui se sont engagés, tels l’Allemagne, la Pologne et la France, mais aussi par Ianoukovitch et l’opposition.
Qui a rompu le traité?
L’opposition ukrainienne. Le Président Ianoukovitch a dû fuir le pays parce que sa vie était en danger. C’était un réel coup d’Etat, un putsch. Cela n’a aucune légitimité. Il est regrettable que cet accord du 21 février, conforme au droit international, n’ait été ni protégé ni mis en pratique par les Etats signataires. Au lieu de se baser sur la mise en œuvre de l’accord et de soutenir le Président légitime, les Etats occidentaux ont reconnu l’opposition, qui venait de rompre l’accord. C’est une situation absolument anormale qui représente un grave précédent d’interventionnisme dans les affaires internes d’un Etat indépendant.
Qu’est-ce que cela signifie pour un pays, quand un Président élu démocratiquement est renversé?
Il est clair que certaines parties de la population de l’Ukraine sont en soucis. En particulier ceux qui possédaient déjà une certaine autonomie dans le pays et, comme dans le cas de la Crimée, également un Parlement à eux. Les gens se sont demandés, comment cela allait continuer. Les représentants de la population en Crimée ont décidé, que dans cette situation, où la population russe de la région était menacée par les nouvelles forces au pouvoir, leur propre sécurité figurait au premier rang. Ils ne voulaient pas coopérer avec les putschistes et se sont déclarés indépendants.
Etait-ce une situation similaire au Kosovo?
Là, il y a eu uniquement une déclaration d’indépendance par le Parlement du Kosovo. Selon la Cour internationale de justice, cette déclaration du Parlement kosovar du 17 février 2008, était conforme au droit international.
La population a-t-elle pu s’exprimer au Kosovo?
Au Kosovo, il n’y a pas eu de plébiscite, mais une déclaration d’indépendance par le Parlement, qui a été tout de suite reconnue par les Etats-Unis et une série d’Etats européens. Entre-temps ce sont 108 Etats qui ont reconnu le Kosovo. Cependant cela n’est en aucune façon conforme à la résolution 1244 du Conseil de sécurité, qui considère le Kosovo comme une partie de l’ancienne Yougoslavie, c’est-à-dire de la Serbie et qui garantit les frontières de ce pays. L’intégrité nationale de la Serbie a été violée – et le monde l’a accepté.
Comment cela a-t-il pu se passer?
On a donné la priorité au droit à l’autodétermination et l’a placé au-dessus de l’intégrité territoriale de la Serbie. Cela a des conséquences automatiques et contraignantes pour le droit international. Le fait que cela ait été possible sans référendum au Kosovo, uniquement sur la base d’une décision parlementaire, de se séparer d’un Etat souverain, signifie que c’est également possible dans d’autres régions du monde. De ce fait, le principe de l’intégrité territoriale des Etats n’est pas un absolu.
Comment cela s’est-il passé en Crimée?
Selon les informations existantes, la décision du Parlement a été prise librement, sans pression militaire de l’extérieur. Le plébiscite s’est déroulé de manière pacifique avec une grande participation. Plus de 80% sont allés voter et 96% se sont prononcés en faveur de l’indépendance de la Crimée respectivement pour sa réinsertion dans la Russie. Dans cette situation, en se basant sur le précédent du Kosovo, on doit dire que cela a une plus grande légitimité démocratique, parce que la population a été consultée. Bien sûr, il y a des experts en droit international qui disent que c’est illégitime, parce qu’ils n’aiment pas la Russie ou parce qu’ils n’aiment pas la personne de Poutine. Mais la plupart des spécialistes en la matière approuvera la conformité avec le droit international.
Mais ici, vous êtes en contradiction avec votre Président?
C’est gênant quand on doit créer des faits parce qu’en réalité ils n’existent pas. A Bruxelles, le président des Etats-Unis a affirmé, que le procédé au Kosovo était légal et que celui en Crimée était illégal et qu’au Kosovo un référendum reconnu par la communauté internationale avait eu lieu. Nous savons tous qu’il n’y a pas eu de référendum au Kosovo. Néanmoins, on a crée des faits accomplis. Je ne pense pas qu’on puisse encore changer la situation au Kosovo. Je dis seulement qu’au Kosovo, on a produit un précédent qui aura des conséquences. Ce n’est pas seulement important pour la Crimée, mais également pour l’Ossétie du Sud, l’Abkhazie, la Transnistrie, le Haut-Karabakh. Il est difficile de s’imaginer que l’on puisse revenir en arrière. Ce serait une menace pour la paix internationale contraire à l’article 39 de la Charte de l’ONU et serait en même temps antidémocratique et contre la volonté des populations concernées.
Dans quelle mesure d’autres populations sont-elles touchées?
Par exemple, les populations en Corse, en Catalogne, les Kurdes, les Tamouls, les Ibos du Biafra (Nigéria), les Moluques, les Papous de l’Ouest, les autochthones polynésiens de Rapa Nui (Iles de Pâques) et divers autres groupes populaires, qui aspirent à l’indépendance.
Que faut-il faire dans cette situation?
Ma proposition est de négocier, de discuter selon la Charte de l’ONU et de retrouver des possibilités d’une vie commune paisible. Cela peut être réalisé à condition qu’on travaille de bonne foi et qu’on veuille réellement trouver une solution pacifique. N’oublions pas que tous les Etats membres de l’ONU se sont engagés selon l’article 2, alinéa 3 de la Charte à régler «leurs différends internationaux par des moyens pacifiques, de telle manière que la paix et la sécurité internationales ainsi que la justice ne soient pas mises en danger». Il existe donc une obligation à négocier, ce qui est également sensé pour la situation générale de l’Ukraine.
Cela veut dire qu’il faut un dialogue sincère?
Oui, le dialogue franc et sincère. Il ne faut pas vouloir forcer un autre Etat, au moyen de menaces ou de sanctions unilatérales, à faire quelque chose qu’il ne veut pas et que la population du pays concerné ne veut pas non plus. Je suis optimiste que la situation va se calmer, je ne crois pas que les Etats baltes sont en danger. Je vois plutôt un danger dans l’incitation à la guerre, soutenue par de nombreux médias. Cette incitation à la guerre signifie une menace de la paix dans le sens de l’article 39 de la Charte de l’ONU.
L’incitation à la guerre n’est-elle pas en contradiction avec le droit international?
Bien sûr. Elle représente une violation de l’article 20 du Pacte relatif aux droits civils et politiques. L’article 20 interdit l’incitation à la guerre et à la propagande en faveur de la guerre. Il est regrettable qu’actuellement de nombreux médias pratiquent cela et jouent les oiseaux de mauvais augure. Ils sèment la panique en éveillant l’impression que la Russie se prépare à attaquer les Etats baltes et à occuper toute l’Ukraine ou d’autres pays encore. On diabolise le gouvernement russe et la personne de Poutine bien que celui-ci ait proposé à maintes reprises une conférence internationale en exigeant le dialogue. Suite à la Charte de l’ONU, nous sommes contraints à résoudre tous les différends par des moyens pacifiques. C’est aussi l’objectif de mon mandat: parvenir à davantage de paix et de justice grâce à un dialogue franc et sincère. Il n’existe pas d’autres voies, l’histoire l’a largement prouvé.
Je veux espérer que dans les années à venir, s’installera un consensus au sujet de mon mandat et que les sceptiques seront finalement convaincus qu’un ordre mondial pacifique, démocratique et équitable est possible.
Monsieur de Zayas, merci beaucoup de cet entretien sincère.
(Interview réalisée par Thomas Kaiser)
Cet entretien correspond à l’opinion personnelle du Professeur de Zayas et n’a pas été mené en sa fonction de rapporteur spécial.
Voir aussi www.alfreddezayas.com et http://dezayasalfred.wordpress.com/
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La Chine vient de publier un rapport officiel alarmant sur la situation des droits-de-l’homme aux États-Unis
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Ex: http://www.attackthesystem.com
Over on io9, we posted a map of all the weirdest sex laws in the U.S.A. We didn’t have room for every weird sex law we found, and some of them we had to shorten a bit to make them fit. So here’s the complete, unedited list of sex laws!
Alabama
Incestuous marriages are legal.
Alaska
Moose are banned from having sex on city streets (in Fairbanks).
Arizona
You may not have more than two dildos in the same house.
Arkansas
Flirtation and “lascivious banter” between men and women on the streets may result in a 30-day jailterm. (in Little Rock.)
California
It’s illegal to sell stuffed items resembling breasts (“boobie pillows”) within 1000 feet of a highway.
No man shall dress as a woman without the written permission of the sheriff. (In Walnut, CA)
Colorado
Male massage parlor workers must wear all white clothing. (In Adams County).
Keeping a house where unmarried persons are allowed to have sex is prohibited.
Florida
Married couples (as well as singles) cannot engage in open “lewdness or lascivious behavior”
Georgia
The term “sadomasochistic abuse” is defined so broadly, that it could possibly be applied to a person handcuffing another in a clown suit.
All sex toys are banned.
Illinois
If you sell a reptile, you must give a written warning not to “nuzzle or kiss” them.
It’s prohibited by law to “suffer any bitch or slut” (referring to dogs) (in Minooka.)
Indiana
It is illegal for a man to be sexually aroused in public.
Iowa
Kisses may last for no more than five minutes.
Kansas
Illegal “sodomy” includes oral sex, but anal penetration with a finger is allowed under specified circumstances.
Kentucky
Dogs must not molest property or people.
Until 1975, people wearing bathing suits on any city street were required have a police escort.
Louisiana
Necrophilia is legal.
It’s illegal to use fortune-telling, astrology or palmistry to “settle lovers quarrels.” (In New Orleans.)
Massachusetts
Making noise in a public library is a crime against “chastity, morality, decency and good order.”
Michigan
A man who seduces or corrupts an unmarried woman faces five years in prison.
Low-riding pants that expose underwear are a Class B offense. But if they expose butt cleavage, they’re a Class A offense. (In Flint.)
Mississippi
It’s illegal to teach others what polygamy is.
Adultery or premarital sex results in a fine of $500 or 6 months in prison.
Montana
Prostitution is a “crime against the family.”
Nebraska
You can’t get married if you have gonorrhea
Nevada
Sale of sex toys is illegal.
New Hampshire
Lingerie must not be hung on a clothesline at the airport, unless there’s a screen concealing it. (In Kidderville.)
New Jersey
Flirting is illegal. (In Haddon Township, NJ)
New Mexico
Nudity is allowed as long as genitals and female nipples are covered.
New York
Adultery is illegal.
North Carolina
Adultery is illegal. And so is pretending to be married in order to share a hotel room.
North Dakota
It was illegal to swim naked in the Red River between 8 AM and 8 PM. (In Fargo.)
It’s against the law to fail to confine a dog or cat in heat. (In Grand Forks.)
Ohio
No person shall solicit sex from another of the same gender if it offends the second person.
Oklahoma
It is illegal for the owner of a bar to allow anyone inside to engage in “acts, or simulated acts, of sexual intercourse, masturbation, sodomy, bestiality, oral copulation, flagellation, or any sexual acts which are otherwise prohibited by law.” So, no simulated intercourse or animal sex.
Oregon
It’s illegal to lie down in a public restroom, or for two people to share a stall meant for one.
Pennsylvania
Oral and anal sex are illegal. You cannot cohabit with an “ancestor or descendant.”
South Carolina
If a man promises to marry a woman and she sleeps with him, the marriage must take place.
South Dakota
Public erections are illegal.
Tennessee
Students may not hold hands in school.
Texas
It’s illegal to own more than six dildos.
Utah
It’s illegal to marry your first cousin before the age of 65 — or 55 if you can prove both parties are infertile.
An adult cannot show sex paraphernalia to a minor, unless they’re your own child. (In Salt Lake City.)
Virginia
Adultery is a misdemeanor.
Obscenity is a bigger crime if you use a computer.
Washington
If you give a sex worker a ride to work, your car can be confiscated.
West Virginia
An unmarried couple who lived together and “lewdly associated” could face up to a year in jail. (Recently repealed.)
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thk. La question de la souveraineté des Etats se pose aujourd’hui avec acuité. Les grands Etats tentent constamment de mettre les petits sous pression et de les faire chanter. En regardant l’histoire suisse, on se rend compte qu’il n’y a rien de neuf sous le soleil et qu’il faut savoir résister afin que celui qui se croit le plus fort se rende compte de ses limites. La Suisse en a apporté de nombreuses preuves au cours des temps.
L’accord FATCA avec les Etats-Unis est lui aussi une tentative de mise sous pression, comme cela est révélé dans l’interview de l’Américain Jim Jatras. Nous devrions reprendre le droit américain qui n’a strictement rien à voir avec notre propre conception du droit, mais qui est l’image du despotisme américain. Etant donné que le système juridique américain n’a rien à voir avec la conception européenne, et donc helvétique du droit, il est indéfendable de reprendre ce droit étranger dans notre propre droit.
En Suisse nous avons cet avantage énorme, dû à notre démocratie directe, que c’est le peuple qui est appelé à défendre sa liberté et son indépendance ainsi que la souveraineté étatique quand les représentants politiques se soumettent presque tous, absolument sans raisons, aux exigences étrangères. Le référendum contre l’accord FATCA fait partie de cette résistance. Le conseiller national Pirmin Schwander soutient ce référendum et explique les dessous de cet accord désastreux.
Horizons et débats: Pourquoi la Suisse se trouve-t-elle aujourd’hui placée devant la question de reprendre du droit étranger? Pourquoi le Parlement ne s’y est pas opposé? Lors de la session d’été, on avait pris des décisions très différentes.
Pirmin Schwander: C’est vrai. Le Conseil national a, lors de sa session d’été, refusé par 126 voix contre 67, l’accord fiscal entre la Suisse et les Etats-Unis, ce qui signifie que nous avons refusé cet accord et l’avons enterré définitivement.
De quoi s’agissait-il dans cet accord?
Il s’agissait d’abroger temporairement notre propre droit, donc le droit suisse.
Est-ce différent avec l’accord FATCA?
Quelques semaines plus tard, nous avons obtenu, au Parlement, le projet de l’accord FATCA. La même Chambre a accepté cet accord à une grande majorité, il me semble 112 voix contre 51, alors même qu’il va beaucoup plus loin que l’accord fiscal avec les Etats-Unis et s’immisce bien plus dans la souveraineté de notre pays. FATCA ne signifie rien d’autre que d’accepter un droit étranger dans notre pays, dans notre jurisprudence, et de devoir l’appliquer sans limitation de durée. L’accord fiscal demandait la même chose – c’est pourquoi il fallait le refuser – mais seulement temporairement et dans quelques cas précis. L’accord FATCA nous contraint à reprendre du droit étranger sans limitation de durée. Personne ne sait si cette décision sera un jour annulée, tout comme pour beaucoup d’autres accords internationaux.
Comment comprendre cette affaire?
Pour moi, il s’agit d’un poids, deux mesures. D’une part, le Parlement refuse dans un concert d’exclamations un accord limité dans le temps et de portée réduite – peut-être pour jouer un sale tour aux Américains ou pour leur marquer notre opposition; d’autre part, nous sommes tout disposés à accepter des Etats-Unis un accord bien plus étendu et portant gravement atteinte à notre pays et à notre souveraineté.
Quelles seraient les conséquences d’une acceptation de FATCA?
Nous devrions accepter non seulement un système de droit qui n’a rien à voir avec le nôtre, mais aussi les modifications ultérieures qu’il faudrait appliquer. Nous devrions réaliser tout ce que les Etats-Unis nous dicteraient, sans la moindre possibilité de participation aux décisions.
Y a-t-il un retour de droit? Que nous offrent les Etats-Unis en contrepartie?
Rien. On laisse les Etats-Unis mettre leur nez dans les données, non seulement des citoyens américains vivant dans notre pays, mais aussi dans celles des citoyens suisses ayant une relation avec les Etats-Unis.
Est-ce que les Etats-Unis exigeront ces données également de leurs propres citoyens?
On ne sait pas encore si ce sera le cas, mais en attendant, c’est nous qui livrerons toutes nos données aux Etats-Unis. Nous avons connu la même situation en 2009 déjà, lorsque nous avions livré des données de clients bancaires, alors que les Etats-Unis n’exigeaient rien au sein de leur pays.
Mais, c’est absurde.
Oui, nous respectons nos décisions et appliquons le droit au profit d’un Etat étranger, lequel n’applique pas chez lui ce qu’il exige de nous. En fait, c’est inouï.
Que reste-t-il de la souveraineté d’un Etat qui accepte le droit étranger?
Il faudrait poser la question aux Etats-Unis. Je ne pense pas qu’ils accepteraient cela chez eux. Ce qu’ils exigent des autres Etats est l’expression d’une prétention au pouvoir mondiale. Je doute que la Chine ou la Russie accepteraient cela. Il faudrait attendre d’avoir la preuve que d’autres grandes puissances accepteraient cette manière de faire.
Il est inadmissible que les Etats-Unis dictent aux autres pays leur comportement. La Russie et la Chine devraient alors avoir le même droit de s’immiscer dans le système législatif des autres pays. L’accepterions-nous sans autre? J’en doute fort.
Il s’agit donc une fois de plus d’un poids, deux mesures.
Oui. Au niveau du droit international, on déclare constamment que la souveraineté de chaque Etat reste garantie. Mais en réalité, les grands Etats agissent à leur guise et mettent les petits sous pression, les clouant parfois au pilori. Quelle est alors la différence entre la Russie et les Etats-Unis en ce qui concerne l’Etat de droit et la démocratie?
Qu’entendez-vous par là?
Nous ne pouvons pas comparer notre démocratie, avec ses droits populaires, à celle des Etats-Unis. Il n’est pas non plus possible d’établir une comparaison entre l’Etat de droit américain et la conception européenne de l’Etat de droit. Nous avons une vision totalement différente du droit et de la jurisprudence.
Cet aspect est souvent totalement occulté.
Il ne faut pas croire que tout va pour le mieux quand on a conclu un accord avec les Etats-Unis. Lorsqu’on envisage un accord de libre échange avec la Chine ou la Russie, on entend des cris et des hurlements, mais jamais quand il s’agit des Etats-Unis.
Non, au sujet de ce pays, on ne parle pas de violations des droits de l’homme.
On ne dénonce la peine de mort que pour la Chine, pas pour les Etats-Unis. Il semble que ce sont deux choses différentes.
Je n’arrive pas à comprendre pourquoi la gauche se montre toujours et encore si américanophile, comme si le capitalisme lui tenait à cœur.
J’ai le sentiment que la gauche participe volontiers quand il s’agit de s’en prendre aux banques suisses, sans se préoccuper de savoir d’où viennent les coups et du pourquoi.
Il ressort donc clairement que cet accord ne doit pas être ratifié.
Oui, nous devons l’empêcher si nous voulons garder notre souveraineté.
Monsieur le conseiller national, nous vous remercions pour cet entretien. •
Interview réalisée par Thomas Kaiser.
00:05 Publié dans Droit / Constitutions | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : droit, droit américain, europe, affaires européennes | | del.icio.us | | Digg | Facebook