jeudi, 29 avril 2010
Biologie et sociologie de l'auto-organisation
Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1988
Biologie et sociologie de l'«auto-organisation»
par Robert STEUCKERS
Le phénomène d'auto-organisation sociale —qui se perçoit en filigrane derrière les théories de la «démocratie organique» (1), nostalgiques de la solidarité holiste des isolats ruraux d'avant la révolution industrielle, derrière l'engouement récent pour le self-help (2) et l'intérêt que celui-ci a suscité chez les Saint-Simoniens, dont notamment le politologue Rosenvallon (3)— a des racines essentiellement cognitivo-biologiques, comme le démontre avec brio Gilbert J.B. Probst (réf. infra).
Mais, dans ce domaine fécond autant qu'interdisciplinaire, il y a d'abord une question de vocabulaire. Lorsque l'on parle d'organisation, on devrait tout de suite songer à «organique» et ne pas simplement penser à un quelconque mode statique de régulation structurelle. Dans l'acception sémantique du terme «organisation», les traditions philosophiques grecque et allemande percevront d'emblée la dimension organique/somatique/cognitivo-biologique, tandis que le gros de la tradition sociologique américaine —qui a le vent en poupe depuis 1945— ne voit derrière le vocable «organisation» qu'un simple fait de gestion mécanique, qu'un procédé de régulation sans ressorts intimes profonds.
De cette différence d'approche et d'acception découle un problème de sociologie: dans les traditions européennes —abstraction faite de la mise au pas «américanotrope»— la notion d'organisation sera organique, donc sera auto-organisation holiste dans les collectivités/communautés, ce qui implique que la logique ultime de l'organisation s'alimentera à une source intérieure et ne sera pas impulsée de l'extérieur; dans la tradition américaine, issue d'un empirisme mécaniciste anglo-saxon, l'organisation sera le fait d'un chef d'orchestre extérieur, manipulant des pions interchangeables pour s'assurer le plus de profit possible. La fusion partielle des deux traditions dans notre après-guerre a de ce fait engendré une confusion sémantique désorientante, que nous allons, avec Gilbert J.B. Probst, tenter de dissiper.
Une vision organique de l'«auto-organisation»
D'où, lorsque nous parlons d'organisation, nous n'entendons pas le résultat de l'action d'une partie d'un tout, ou d'une volonté extérieure non liée somatiquement au tout, qui formerait et dirigerait, mais le fruit d'un faisceau d'interactions constantes au sein même d'un système en tant que tout. De ce fait, un système auto-organisé, c'est-à-dire organisé selon ses lois intérieures propres, comme une plante, une forêt, un processus minéral ou physico-chimique, un regroupement animal comme une fourmilière, une harde de cerfs, un troupeau de buffles, une tribu de singes ou une société humaine, possèdera les qualités suivantes: complexité unitaire dynamique et processuelle, non déterminée et autonome, interactive et faisant référence à soi-même. De ces qualités, il découle que l'organisation n'est jamais une hiérarchie pour la hiérarchie, où la domination s'exerce pour la domination et où règnerait un ordre pour l'ordre. L'organisation n'a donc pas une dimension constructiviste. L'intuition de ce phénomène est ancienne. Les Grecs déjà l'avaient perçu. L'organisation est un «organon», non une institution. L'auto-organisation est toujours d'abord un phénomène processuel et non institutionnel.
Dans les idéologies contemporaines, la notion d'auto-organisation, souvent saisie très confusément, a été appréhendée en trois étapes majeures:
1) L'étape dite de la «main invisible», née au XVIIIième siècle et réchauffée régulièrement de nos jours par les penseurs libéraux.
2) L'étape de la théorie conservatrice organique de l'auto-organisation, s'étendant de 1920 à 1960, avec les écoles organicistes en sociologie dont la plus célèbre fut celle d'Othmar Spann (4).
3) L'étape qui se dessine depuis 1960, où l'auto-organisation n'est plus perçue en tant que procès de rétro-activité stabilisante, comme dans la deuxième étape, mais comme «auto-organisation innovative».
L'approche que nous établissons dans le cadre du présent exposé se place sur le terrain théorique, épistémologique, et non sur le terrain pratique des nouvelles «auto-organisations» spontanées, en marge des structures politiques ou socio-caritatives officielles et destinées à pallier aux lacunes de celles-ci. Ces nouveaux réseaux d'auto-organisation sont notamment les Bürgerinitiativen ouest-allemandes (5), les structures informelles d'entraide entre voisins en Grande-Bretagne (6), les divers modes de self-help (7), etc. Notre objectif n'est pas de recenser ici ces multiples manifestations de solidarité allant au-delà des structures figées et bureaucratiques de l'Etat-Providence, mais d'observer comment fonctionnent les choses au plus profond d'elles-mêmes, de repérer ce qui se passe naturellement, de façon à affiner nos instruments conceptuels et à ne pas succomber aux séductions faciles des slogans de toutes sortes, slogans qui sont trop souvent produits d'une ignorance des ressorts intimes des êtres et des structures vivantes.
La «main invisible»
Les théories organiques de la «main invisible» postulent une spontanéité anarchique, analogue au grouillement désordonné d'une végétation sauvage qui n'en reflète pas moins l'ordre supposé du monde. Cette doctrine de la «main invisible», dans sa facette organique, a été appelée «catallaxie» par le théoricien Friedrich A. von Hayek (8), idole des protagonistes de la vague néo-libérale qui suivit l'arrivée au pouvoir de Thatcher et de Reagan. Pour Hayek, le marché, en tant que grouillement prolixe d'actions économiques, produit spontanément un ordre catallactique, une catallaxie, au sein de laquelle il y a ajustement mutuel de nombreuses économies individuelles. Développant ses arguments en notre siècle, Hayek a quelques notions de cybernétique et sait ce qu'est un feedback, une rétroaction, un rééquilibrage interne. Les pionniers de l'idée libérale du marché, comme Adam Smith ou Mandeville, n'avaient évidemment pas une notion aussi précise de la cybernétique. Et, couplée au progressisme messianique, leur idée d'auto-régulation du marché a perdu son innocence organique et s'est dévoyée dans la linéarité quantitativiste et expansive. L'idée vaguement para-cybernétique de la catallaxie libérale des origines était trop faiblement étayée pour résister à l'emprise d'une idéologie dominante, consistant en un cocktail de rationalisme progressiste, de mécanicisme rigide et d'économisme expansif. La position idéologique de Hayek est dès lors indéfendable: le libéralisme réel, celui que l'on a pratiqué dans l'histoire, était un bricolage idéologique boîteux, incapable de produire une harmonie durable et efficace (donc une «catallaxie») mais, au contraire, générateur de multiples dysfonctionnements sociaux et politiques.
La pensée organiciste conservatrice
La seconde grande phase de la pensée organiciste, qui va de 1920 à 1960, est conservatrice. Contre l'emprise croissante et la faillite morale de l'expansionnisme économiste et rationaliste, la pensée organiciste conservatrice des années 20 et 30 met l'accent sur la stabilité des ordres naturels organiques et sur leur adaptativité constante. Le principal phare intellectuel du conservatisme organiciste est indubitablement l'Autrichien Othmar Spann (1878-1950). L'un de ses biographes récents, Walter Becher (9), résume succinctement les reproches que Spann adresse au libéralisme catallectique, qui est inconscient chez Smith et Mandeville et conscient chez Hayek. Sa critique s'adresse bien sûr à Hayek et a influencé toutes les écoles organicistes solidaristes, appartenant à la mouvance chrétienne-corporatiste d'avant-guerre et, plus partiellement, à la mouvance démocrate-chrétienne personnaliste de notre après-guerre (10).
Pour Spann et les organicistes, le marché n'est pas un «billard neutre» où les boules-marchandises et les boules-services s'entrechoquent mais un terrain précis, variant selon les circonstances géographiques et historiques. Les circonstances déterminent les variables de toute action économique: il n'y a donc pas d'action économique standard, posée par des individus standards, mais des actions économiques variables, posées par des individus différents, c'est-à-dire différenciés par les circonstances spatio-temporelles. Contrairement aux affirmations de l'école néo-libérale, pour Spann et ses disciples, l'agent économique n'agit pas seul face à l'absolu, sans arrière-plan social (familial, régional, national, corporatif, etc.), mais comme représentant d'un réseau d'intérêts collectifs, de sentiments partagés, de mobiles déterminés par l'histoire, etc. Dans l'optique de Hayek, pour faire prospérer l'ordre économique, il faut agir en faisant abstraction de tous contextes et sentiments sociaux et solidaires et ne faire que ce qui va dans le sens des intérêts de ma propre individualité. Pour Spann, il n'y a pas d'acte économique décontextualisé, dégagé d'un tissu social précis, ayant son histoire et ses circonstances. Penser comme Hayek, c'est favoriser la dislocation de l'économie et préparer le terrain aux tentatives totalitaires de type marxiste/communiste.
Outre l'excellence de sa critique apportée au réductionnisme décontextualisant des libéraux, l'organicisme conservateur, assez idéaliste et «platonicien» (11), pose le contexte comme trop fermé sur lui-même, trop stable. Le contexte donné, dans l'optique conservatrice, est là une fois pour toute, juxtaposé à d'autres contextes également fermés sur eux-mêmes. L'étape suivante du développement de la pensée conservatrice organiciste a été celle de la cybernétique de première mouture (que nous conviendrons d'appeler «cybernétique I» dans le présent exposé). Le biologiste Paul Weiss a étudié dans les années 20 les réactions systémiques et les rapports cycliques au sein même des systèmes biologiques. Le tout, dans cette optique, n'était pas la simple somme arithmétique de ses parties; tout système présentait un jeu d'interdépendances circulaires, faisait référence à soi seul. Ludwig von Bertallanffy, en fondant la théorie systémique en biologie, concentra son attention sur les capacités d'auto-régulation dans les systèmes biologiques qu'il percevait désormais comme ouverts (progrès considérable par rapport aux fermetures organicistes antérieures) (12). L'ouverture implique l'interdisciplinarité et le refus non seulement du réductionnisme décontextualisant mais aussi du réductionnisme de la fermeture et de l'isolement.
Dans les années 30 et 40, Norbert Wiener, Walter Cannon et W. Ross Ashby se préoccuperont intensément des mécanismes de rétro-couplage, nécessaires à la stabilisation des systèmes et à leur adaptation. L'objectif de cette biocybernétique, prenant le relais de la pensée organiciste assez incomplète des sociologues conservateurs, restait toutefois de créer un modèle de gestion «homéostasique», tenant en laisse une ou plusieurs variables du système de façon à ne pas permettre de trop fortes déstabilisation.
La «déstabilisation innovative»
L'organicisme conservateur, dans sa phase la plus sophistiquée, celle de la biocybernétique, s'est donc essentiellement concentré sur les phénomènes de rétro-couplage, de servo-mécanisme, de stabilisation, de multi-stabilisation ou d'adaptation. L'objectif de ces recherches, quand elles étaient appliquées aux domaines sociologique et politique, était de maintenir en place les systèmes, de réparer les systèmes «abîmés», de les reconduire à un état de stabilité acceptable et jugé bénéfique, de les contrôler selon des principes correcteurs de déviances.
A partir des observations du Japonais Maruyama, consignées dans un article de la revue American Scientist de 1963 (13), la communauté scientifique internationale a dû conclure à l'existence d'une phase II de la cybernétique («cybernétique II»), se préoccupant davantage des changements, des instabilités, des déviances dues à des procès amplifiants, des flexibilités, des apprentissages et des auto-organisations innovatifs, etc. Maruyama estimait dès 1963 que la cybernétique, au lieu d'être conservatrice, correctrice et stabilisatrice, devrait bien plutôt renforcer les déviances constructives (deviation-amplifying-processes). Les modèles orientés vers la stabilité et l'adaptativité peuvent conduire à la rigidité, donc à l'homéostase pathologique.
Or la santé, dans un corps comme dans un tissu social, c'est précisément de briser les homéostases pathologiques (Cf. Watzlawick) (14). L'anarchisme proliférant de la catallaxie et la stabilité par rétro-couplages constants ne peuvent dès lors plus être perçus comme des modèles optimaux. A la «cybernétique II», Maruyama assigne d'abord la tâche de parfaire un équilibre entre les forces intérieures conservantes et les forces dynamiques instabilisantes mais innovatives. Dès lors une organisation, qu'elle soit organique et propre à la logique interne d'un corps animal ou végétal ou d'un tissu ou d'une collectivité vivante, ou qu'elle soit extérieure, propre à une création humaine comme une entreprise, une association, une armée, etc., n'est jamais un ordre immuable mais bien un organ(ism)e vivant.
Une biocybernétique innovante
Les logiques conservatrices, qui veulent maintenir à tout prix le statu quo, sont condamnées à la disparition: que l'on songe aux exemples historiques que sont certaines facettes de l'Ancien Régime en France et la Kleinstaaterei en Allemagne (division du pays en une mosaïque de petites principautés). Cette logique du «devenir», dépassant les diverses logiques de l'«être», ne se retrouve pas seulement dans les disciplines cybernétiques mais aussi dans les domaines physico-chimique (avec Prigogine, Capra, etc.) et biologique (p. ex. la théorie des «fulgurances» chez Konrad Lorenz et la biologie de la connaissance de Rupert Riedl, etc.). En sociologie, de nombreux auteurs ont tenté de transposer ces éléments d'épistémologie cybernétique dans leurs théories de la pratique; songeons à Edgar Morin, à Luhmann, à Etzioni et bien d'autres.
L'instabilité fondamentale du monde et des choses implique que, pour être efficace, il faut intérioriser une logique à vitesses multiples, capable de faire face à n'importe quel aléa, n'importe quel bouleversement. Le chef d'entreprise, le responsable, l'homme politique ne peuvent plus manipuler des logiques fermées ni conserver des structures obsolètes et rigides mais, au contraire, approfondir leurs connaissances en (bio)cybernétique, se donner une disponibilité d'esprit calquée sur ces connaissances, et être prêts à affronter dans la souplesse les défis de toutes sortes auxquels la praxis quotidienne et l'Ernstfall (l'irruption du tragique imprévu) peuvent les confronter. Deuxième implication de l'«instabilité fondamentale» pour l'homme politique: il doit cesser de percevoir son rôle comme celui d'un constructeur, d'une sorte d'horloger extérieur à une machine qu'il fabrique et manipule. Il doit bien plutôt se considérer comme un catalyseur, un impulseur, un accélérateur des rétro-couplages positifs et des instabilités innovatives.
Un exemple: l'explosion démographique
Friedrich Vester, professeur de biocybernétique pour la plupart des grandes entreprises allemandes (15), montre, à la lumière de quelques exemples très concrets, comment raisonner à l'aide d'une nouvelle logique axée sur les découvertes de la biocybernétique, de la biologie de la connaissance et des méthodologies basées sur les ressorts intimes des structures et des êtres vivants. Parmi les exemples choisis par Vester, il y a l'explosion démographique que connaît aujourd'hui notre planète. En 1830, la Terre comptait 1 milliard d'individus. En 1930, ce chiffre avait doublé et atteignait 2 milliards. En 1960, on passait à 3 milliards. De 1970 à 1980, on est passé de 3,5 à 4,5 milliards, pour atteindre 5 milliards en 1987. Face à ce boom, notre civilisation est évidemment à la croisée des chemins: il s'agit de poser le bon choix ou de courir à la catastrophe en persistant dans des erreurs anciennes. L'accroissement démographique planétaire est dangereusement déstabilisateur dans le monde, tout comme le déclin démographique, fait inverse, est déstabilisateur en Europe (nos législations sociales ont été forgées au moment où nos coupes démographiques étaient ascendantes). La déstabilisation due à l'explosion démographique globale n'est pas innovante, tandis que la déstabilisation due au recul des naissances en Europe et dans le monde développé (16) conduit à un tassement des capacités innovantes de l'humanité.
Quels sont les implications de cette déstabilisation globale? D'abord, l'accroissement démographique provoque un changement très et trop rapide des données, dans tous les domaines imaginables. Du coup, la planification doit se faire sur un terme de plus en plus long, ce qui exige un «saut qualitatif» de notre mémoire. En effet, les structures cognitives de l'homme sont restées au stade atteint il y a 5000 ans. Elles sont inadaptées au bombardement massif de données nouvelles que doit enregistrer notre époque trépidante. Vester nous esquisse brièvement —une brièveté didactique— l'histoire des structures cognitives de l'homme.
Au stade premier, nous avons l'homme primitif, le chasseur-cueilleur imbriqué dans son environnement.
Au stade second, l'homme sédentarisé, retranché de l'immédiateté du monde grâce aux éléments de médiatisation que sont ses outils, l'urbanisation, la technologie, etc.
Au stade troisième, non encore pleinement advenu, nous avons l'homme conscient des ressorts de la cybernétique, qui sait corriger le tir, qui englobe le risque et les aléas dans ses calculs, ce qui lui permet de se passer de toutes les formes de téléologie religieuse ou laïque.
Au stade premier, la planification porte sur une journée.
Au stade second, la planification porte sur une année: on doit prévoir la saison prochaine, les récoltes, etc.
Au stade troisième, la planification devra porter au moins sur 100 ans. Les plans quinquennaux des régimes totalitaires ont été, sur le mode hard, une préfiguration de cette nécessité. Aujourd'hui, dans les grandes entreprises et banques, les plans de financement tablent sur des espaces-temps de 10 ans. La solution totalitaire d'hier et la praxis actuelle des banques corroborent l'inadéquation de la catallexie libérale, laquelle «laisse faire» sans se pencher sur les innombrables paramètres (dont les faits sociaux et collectifs) qui font la trame du monde. L'engouement néo-libéral, assorti de son refus passionnel de toute planification, n'aura été qu'un combat d'arrière-garde, n'englobant même pas dans ses préoccupations des problèmes aussi évidents que la pollution, les explosions ou les déclins démographiques, tous phénomènes qui ne peuvent être réglés que par l'intervention politique... A condition, bien sûr, que le politique soit aux mains de personnes compétentes et non pas de «bricoleurs», animés par quelques slogans idéologiques simplets et une soif de prébendes inextinguible. A titre d'exemple, Vester cite, dans le cadre de l'accroissement anarchique de la population sur le globe, l'épuisement des matières premières qui implique une planification rigoureuse (tant pour l'exploitation des ressources que pour leur distribution) et, surtout, une diversification des sources d'énergies. L'explosion démographique brésilienne provoque la mort de la forêt amazonienne dont l'humanité entière a besoin, vu qu'il s'agit d'une réserve indispensable de chlorophylle, donc du poumon de la Terre (17).
Vers la fin du stade second, nous avions une technologie agressive et conquérante, suscitant une expansion continue déstabilisante, laquelle devra, au stade troisième en advenance, être remplacée par une technologie correctrice, englobant les nouvelles pratiques de recyclage et tenant compte de l'exiguïté territoriale de notre planète surpeuplée. Les défis au politique sont nombreux: peut-on planifier sur le très long terme, sur les 100 années minimales dont parle Vester, quand les élections se déroulent de quatre ans en quatre ans, de six ans en six ans ou de sept ans en sept ans (les septennats de la Présidence française). Les délais sont trop courts, ce qu'avaient déjà perçu les tenants des solutions totalitaires dans les années 30 (Manoïlesco) (18). Sans pouvoir renoncer à la participation politique d'un maximum de citoyens, nous sommes confrontés à la nécessité de planifier sur le très long terme dans le cadre d'une continuité rigoureuse, ne pouvant être soutenue que par une élite non politicienne, dont chaque représentant se forme et renforce son savoir pendant plusieurs décennies de son existence. Les savants devront-ils dicter leurs ordres aux politiciens? Et, si oui, par quels moyens coercitifs?
Les défis de la biocybernétique et des nouvelles recherches en biologie nous permettent
1) de redéfinir l'organicisme méthodologique en le débarrassant de tous ses colifichets romantiques et de ses recours à une hypothétique transcendance.
2) De critiquer les mécanismes électoraux des sociétés contemporaines (19).
3) De mettre en évidence la nécessité des planifications à long terme et, ipso facto, de l'inanité des engouements néo-libéraux.
4) D'inclure le tragique dans tous nos calculs et donc de mettre fin aux reliquats de prophétisme bonheurisant, d'eudémonisme niais, que véhiculent les idéologies occidentales.
Ces quatre pôles de notre interventionnisme métapolitique pourront être sollicités sans plus de fioritures littéraires et donc être «servis» utilement à un public plus vaste et plus sobre, notamment aux techniciens et aux professions médicales. Dans cet orbite, la biologie est mobilisée au profit de notre projet dans un plan plus vaste. La biologie ne sert plus seulement à décrire et énumérer les phénotypes humains, à étayer le discours médical, à socialiser la santé par le biais de l'eugénisme mais sert à asseoir une épistémologie extensible à l'ensemble des disciplines. Notre biohumanisme devient de ce fait moins étriqué.
Robert STEUCKERS.
Gilbert J.B. PROBST, Selbst-Organisation, Ordnungsprozesse in sozialen Systemen aus ganzheitlicher Sicht, Verlag Paul Parey, Berlin/ Hamburg, 1987, 180 S., DM 39,80.
Le texte qui précède est la version écrite d'un cours donné lors d'un séminaire d'avril 1988, dans le cadre des «universités» organisées par le comité de rédaction d'Orientations.
Notes:
(1) Alain de Benoist nous donne une excellente définition de la «démocratie organique» dans son ouvrage: Démocratie: le problème, Ed. Le Labyrinthe, Paris, 1985.
(2) Il convient de se référer à un ouvrage très important du sociologue américain John Naisbitt, Megatrends. Ten New Directions Transforming Our Lives (Futura-Macdonald & Co., London & Sidney, 1984). Une édition française de ce livre est également parue. Ecrit dans la foulée du thatchéro-reaganisme, l'ouvrage cherchait essentiellement à jeter les bases d'une stratégie de survie dans la société qui semblait s'annoncer, c'est-à-dire une société où les institutions de l'Etat-Providence auraient été «déconstruites». Non exempts de relents universalistes (avec, notamment, un plaidoyer pour une «économie mondiale»), les chapitres du livre expliquent et tentent d'accentuer des tendances inéluctables comme l'informatisation de l'industrie et des technologies, une attention accrue pour le long terme, la nécessaire décentralisation des grosses instances politiques et économiques, le recentrage de l'entraide sociale sur les communautés charnelles ou soudées par une «proximité» quelconque, l'assomption des hiérarchies trop rigides au bénéfice des «réseaux communicatifs dynamiques», un déclin des logiques binaires de l'«ou bien... ou bien» au profit des logiques à dimensions multiples, etc. Deux chapitres (le 6 et le 7) concernent en fait l'«organicité» (et sa traduction politique, la «démocratie organique/participative»).
(3) Cf. Pierre Rosanvallon, La crise de l'Etat-Providence, Seuil, 1981. Lire surtout le chapitre trois de cet ouvrage, consacré aux solidarités, où l'auteur plaide pour un «réencastrage» de la solidarité dans la société et un accroissement de la visibilité sociale. Ces mouvements sociaux contribueront, dit-il, à créer un espace «post-social-démocrate»; nous ajouterions que, pour nous, la «post-social-démocratie» signale, implicitement ou explicitement, un effondrement des présupposés mécanicistes de la philosophie politique rationaliste et positiviste que le socialisme, pour son malheur, a hérité de l'illuminisme et du libéralisme. Cet effondrement provoque la réapparition timide d'éléments organicistes, dont le self-help est une expression.
(4) Pour redécouvrir Spann, lire deux ouvrages récents consacrés à son œuvre: 1) Walter Becher, Der Blick aufs Ganze. Das Weltbild Othmar Spanns, Universitas, München, 1985. 2) J. Hanns Pichler (Hg.), Othmar Spann oder die Welt als Ganzes, Böhlau, Wien-Köln-Graz, 1988.
(5) Cf. Alberto Tarozzi, Iniziative nel sociale. Utopie progettuali e nuovi movimenti sui problemi della casa e del nucleare nella Rft, Franco Angeli editore, Milano, 1982. Voir surtout pp. 30 à 53.
(6) Pierre Rosanvallon, op. cit., pp. 128-129.
(7) John Naisbitt, op. cit., pp. 131 à 157.
(8) F.A. Hayek, Droit, législation et liberté, PUF, 1980 (vol. 1) et 1981 (vol. 2). Cf. surtout dans le volume 1, pp. 41 à 65. Et dans le volume 2, pp. 129 à 161.
(9) Walter Becher, op. cit., pp. 169 à 172.
(10) Cf. Michel Bouvier, L'Etat sans politique, tradition et modernité, L.G.D.J., Paris, 1986. L'auteur, avec une remarquable précision, classe les différentes doctrines politiques catholiques du siècle, où l'on retrouve des linéaments d'organicisme. En prenant acte de son panorama, on comprend plus aisément le passage d'une formulation corporatiste, parfois fascisante, à une formulation plus personnaliste, parfois socialisante. Bouvier nous introduit dans l'arsenal des argumentaires catholiques et dévoile ainsi leur souplesse d'adaptation.
(11) Les interprétations de Spann, formulée par la «destra radicale» italienne, mettent l'accent sur la platonisme du sociologue viennois. Cf. l'introduction à Il vero Stato de Spann par le Gruppo di Ar (in Othmar Spann, Il vero Stato, Ar, Padova, 1982).
(12) Cf. Frans Thoen, «La notion de système chez Ludwig von Bertalanffy», in Orientations, n°3, mai-juin 1982. Cf. également, Ludwig von Bertalanffy, «Hasard, nécessité, évolution», in Krisis, n°2, avril 1989.
(13) M. Maruyama, «The Second Cybernetics: Deviation amplifying mutual causal processes», in American Scientist, 51, pp. 164-179. Article cité par G.J.B. Probst, réf. infra.
(14) Cf. l'œuvre de P. Watzlawick en général et, plus précisément, le volume collectif de P. Watzlawick, J. Helmick Beavin et Don D. Jackson, Une logique de la communication, Seuil, 1972.
(15) Cf. Frederic Vester, Neuland des Denkens. Vom technokratischen zum biokybernetischen Zeitalter, Deutsche Verlag-Anstalt, Stuttgart, 1980. Frederic Vester, Unsere Welt - ein vernetztes System, dtv, München, 1983.
(16) Cf. à ce propos, le texte d'un professeur de la University of Pennsylvania, Daniel R. Vining, Jr., «Below-Replacement Fertility in Five Regions of the World», in Mankind Quarterly, Vol. XXIX, 3, 1989, pp. 211-220.
(17) Cf. l'analyse du Professeur Wolfgang Engelhardt, «Drittwelthilfe und Naturschutz» (in Mut, n° 255, November 1988), Directeur Général des Collections de Sciences Naturelles de l'Etat de Bavière. Le Prof. Engelhardt démontre bien à quelles catastrophes peut conduire l'entêtement des dirigeants du Tiers-Monde quand ils veulent absolument construire chez eux des structures industrielles comparables à celles de l'Europe du XIXième siècle. La volonté de la bourgeoisie brésilienne de construire des complexes de hauts-fourneaux fonctionnant au charbon de bois scelle la mort de la forêt amazonienne.
(18) Cf. Mihail Manoilescu (orthographe allemande), Die einzige Partei als politische Institution der neuen Regime, Otto Stollberg, Berlin, 1941. Cf. également, Gottfried Neeße, Partei und Staat, Hanseatische Verlagsanstalt, Hamburg, 1936.
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vendredi, 19 février 2010
USA: l'intégration forcée a-t-elle fait faillite?
Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1995
USA: l'intégration forcée a-t-elle fait faillite?
Louis Farrakhan n'est pas le seul Américain qui exprime aujourd'hui du scepticisme à l'égard de l'idéal d'intégration raciale. Tony Brown, Républicain noir et hôte de la chaîne de télévision PBS, condamne, lui aussi, cette tendance contemporaine à l'“assimilation raciale”. Voici son argument majeur: «Nous pouvons rester séparés racialement tout en maintenant une nation saine et productive». Clarence Thomas, de la Cour Suprême de Justice, a condamné les projets d'intégration scolaire fondés sur le principe que les non-Blancs doivent s'asseoir à côté des Blancs dans les école pour acquérir de l'éducation (!). Tant parmi les Noirs que parmi les Blancs, le projet d'intégration est respecté par conformisme et non plus par conviction réelle, comme l'indique du reste le fait patent que dans tous les domaines sociaux où l'intégration n'est pas imposée par coercition, les races choisissent toutes de vivre séparément. Dans les églises, les prisons, à l'armée, dans les équipes professionnelles d'athlétisme, sur les campus universitaires, les races suivent toutes leur propre voie. Nous avons donc affaire à une ségrégation que les gens, toutes races confondues, s'imposent spontanément à eux-mêmes: reste à savoir si cet état de choses est aussi choquant et aussi indésirable que les commentateurs médiatiques veulent nous le faire croire...
Les Américains Noirs et Blancs vivent dans des univers mentaux fort différents, ce qui les conduit à percevoir hommes et choses de façons différentes. On pouvait s'en apercevoir bien avant les réactions divergentes qui ont secoué les deux communautés à la suite du verdict du procès O.J. Simpson. Les sondages ont montré qu'un grand nombre de Noirs croient aujourd'hui que les armes à feu et les drogues ont été délibérément introduites dans leur communauté par les Blancs, afin d'accélérer leur destruction. Un tiers des Afro-Américains prétendent que le SIDA a été inventé par les Blancs pour exterminer les Non-Blancs.
Que les différences raciales soient d'ordre génétique ou non, une chose est certaine, c'est qu'elles sont profondément ancrées en l'homme. Quarante ans de subventions à grande échelle et d'assistance spéciale en matières juridiques et sociales n'ont pas changé grand'chose à cette réalité. Bien au contraire, les races semblent diverger encore davantage. La sagesse politique la plus largement acceptée répète, de façon finalement fort simpliste: «Nous devons nous montrer plus compréhensifs et apprendre à vivre ensemble». Mais peut-être est-il temps que les Américains tiennent compte du nombre sans cesse croissant de citoyens, toutes races confondues, qui disent: «Notre faculté de comprendre est en ordre, et nous ne désirons plus vivre ensemble».
D'aucuns répondront qu'il s'agit là d'une réaction exagérée, négative et condamnable aux maux d'ordres économique et social qui frappent la nation toute entière. Et ces mêmes personnes vous diront qu'il ne faut pas désespérer, que les tensions interethniques vont diminuer dès que les groupes bénéficieront d'un même niveau de vie élevé, ou dès que le racisme des Blancs disparaîtra, ou dès que les problèmes liés à la pauvreté seront éliminés d'une façon ou d'une autre. Mais même si tous ces objectifs désirables seront un jour atteints, la question demeurera ouverte: les citoyens ont-ils le droit, voire l'obligation, de survivre en première instance en tant que groupe homogène, uni par une identité commune, sur base d'un héritage biologique commun?
En tant que Juif hassidique, mes sympathies vont tout naturellement vers ce désir puissant de conserver, de maintenir et d'entretenir un mode de vie distinct de tous les autres. La culture aujourd'hui dominante aux Etats-Unis tolère de tels sentiments quand ils sont exprimés par des minorités mais considère que ces mêmes sentiments sont “mauvais” quand les Blancs les expriment. Les Noirs et les Hispaniques ont pourtant clairement exprimé leur désir de suivre leurs propres voies dans le domaine de l'instruction publique, dans le maintien de l'ordre et dans les gouvernements locaux; ils veulent par ailleurs que leurs enfants continuent à parler la langue de leurs ancêtres, apprennent la geste de leurs héros nationaux, et soient éduqués selon les critères de leurs propres cultures et non pas selon les critères des Blancs. Ce sont là des sentiments humains bien naturels; sont-ils mauvais? Doivent-ils être tolérés chez les Non-Blancs et refoulés chez les Blancs?
Si l'on interroge l'histoire, on constate que des Américains célèbres comme Abraham Lincoln ou le leader noir Marcus Garvey ont pensé qu'une séparation des races, acceptées par les uns comme par les autres, dans le respect mutuel, était la meilleure solution pour tous les Américains, quelle que soit la race à laquelle ils appartiennent. Les idées de Lincoln et de Garvey pourraient-elles redevenir les nôtres? Une chose est d'ores et déjà certaine, les efforts visant à donner davantage d'espace libre et autonome aux races conduiront à éliminer tous les discours sur la supériorité de telle ou telle race et à affirmer le principe moral que tous les groupes ethniques possèdent un droit égal à l'auto-détermination. Les Non-Blancs semblent plus capables de trouver leur voie et de s'élever au rang d'une culture solide, à part entière, lorsqu'ils se débarrasseront une bonne fois pour toutes de ses béquilles incapacitantes que sont le recours constant au “racisme blanc” et les subsides des contribuables blancs. En avançant ses arguments pour défendre sa notion personnelle de la séparation future entre les races aux Etats-Unis, Tony Brown, le Républicain noir, affirme que les arrangements multiracialistes actuels ne font qu'accentuer le paternalisme blanc et que susciter le racisme violent des Blancs comme des Noirs. Chaque groupe racial, poursuit-il, doit être égal en dignité, dans le respect mutuel.
Aristote croyait, pour sa part, que le ciment qui lie les citoyens d'un pays est constitué par le sens de la communauté et par l'amitié entre tous. Aristote nous a également enseigné que l'amitié ne s'épanouit que lorsque tous les citoyens jouissent plus ou moins d'une égalité de condition. En Amérique, cette égalité de condition pourra sans doute s'obtenir par un abandon de cette politique d'intégration forcée, pratiquée depuis quelques décennies.
Les esprits critiques nous rétorqueront peut-être que, même si elle n'est pas foncièrement immorale en dernière instance, la séparation ne peut être mise en pratique. Je peux très bien admettre cette argumentation, car le processus de séparation des races actuellement mêlées sur le territoire ne se fera pas sans âpres discussions. Chaque groupe doit dire à l'autre: «Oui, c'est évident, vous souhaitez avoir votre propre place pour déployer votre propre socialité, vous voulez des écoles dans votre proximité, où vos enfants pourront étudier et aimer votre culture spécifique. Cela, nous aussi, nous le voulons». Dans la simplicité de cet argument, les hommes de bonne volonté retrouveront aisément le plaidoyer de la plupart des conservateurs en faveur d'un gouvernement décentralisé et les concepts avancés par la “Nouvelle Gauche” qui veut généraliser partout sur le territoire américain le principe de l'“action locale”, seule condition pratique capable de rapprocher les gouvernants des gouvernés.
Accorder à des communautés basées sur des affinités culturelles électives une plus grande auto-détermination implique de délester de leur graisse inutile les léviathans de l'Etat fédéral (i. e. “central” aux USA, ndt). Un premier pas dans ce sens serait de supprimer les lois qui encouragent la discrimination en faveur de certains groupes dans le secteur public, de même que les lois qui interdisent toutes formes de préférence au niveau privé. A long terme, nous allons sans doute voir les comtés, les “voisinages”, les états et les régions se pencher sur les moyens d'organiser une sécession, comme le Québec est en train de le faire actuellement. Certes, les expériences en matière d'intégration mandatée pourront continuer à se faire, dans des circonscriptions ad hoc (mais nous verrons bien combien de familles libérales de gauche blanches opteront réellement pour que leurs enfants y vivent et y fréquentent l'école).
A la lecture de mes arguments, vous pourriez parfaitement me reprocher de naviguer dans l'absurbe. Avec l'oeil d'un citoyen de 1995, c'est peut absurde, en effet. Mais a-t-on envisagé dans les années 60 que l'Amérique deviendrait ce chaudron bouillonnant, prêt à exploser, où les races se regardent en chiens de faïence et sont sur le point de s'affronter? Une prophétie aussi noir aurait été jugée incongrue il y a trente ans.
La séparation dans le respect mutuel ne signifie par l'indifférence à l'égard du sort des autres groupes, car nous pouvons remplir nos devoirs moraux et religieux à l'égard des Autres sans les incorporer de force dans notre propre culture et sans leur imposer nos propres critères de comportement. Ensuite, un abandon de l'intégration forcée ne signifie pour autant que les différences raciales sont la source de tous les échecs culturels et sociaux de notre époque contemporaine. Nous sommes confrontés à des problèmes sociaux de bien plus grande envergure mais je crois que de nouvelles occasions vont s'ouvrir aux Américains, s'ils parviennent à se donner plus de marge de manœuvre en obéissant aux multiples spontanéités qui sont en eux et qu'ils ont héritées de leurs ancêtres si différents les uns des autres. Une intégration forcée dans une société multiraciale artificielle impliquerait un abandon de ce vaste éventail de différences et de potientialités enrichissantes.
Rabbi MAYER-SCHILLER.
(Rabbi M-Sch. enseigne le Talmud à la “Yeshiva University High School”, New York City).
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jeudi, 04 février 2010
L'homme d'aujourd'hui est soumis...
L’homme d’aujourd’hui est soumis…
« Bien loin de l’insurgé qu’étaient Œdipe ou Antigone, l’homme d’aujourd’hui est soumis, docile, obéissant, il est surtout bien intégré à l’immanence de l’appareil. Ainsi les hommes ne travaillent plus au sens plein du terme, mais « doivent se soumettre à un emploi. Ils sont ainsi commandés, concernés par un poste qui en dispose, c’est-à-dire les requiert ». (Heidegger, Le Dispositif, GA 79, p. 26). Ils occupent une fonction précise dans l’appareil et obéissent aux commandement requis par cette position. L’homme est intégralement défini par ses fonctions, et en réalité, il est une fonction de l’appareil : il est le « fonctionnaire de la technique » (Heidegger, Pourquoi des poètes ?, GA 5, p. 294), en ce sens exact qu’il la fait fonctionner et en constitue lui-même une des ses fonctionnalités. Il n’est plus l’existant, il est l’assistant, au double sens du terme, comme spectateur et comme auxiliaire. Il est en permanence mobilisé par une machinerie dont le fonctionnement n’est autre que sa propre circularité : c’est précisément pourquoi il est constamment en mouvement.»
Jean VIOULAC, L’époque de la technique. Marx, Heidegger et l’accomplissement de la métaphysique, Paris, PUF, 2009, p. 160.
Article printed from :: Novopress.info Flandre: http://flandre.novopress.info
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jeudi, 28 janvier 2010
G. Faye: L'Essai sur la violence de M. Maffesoli
Archives « Guillaume Faye » - 1985
Guillaume FAYE:
L’ “Essai sur la violence” de Michel Maffesoli
Michel Maffesoli n’aime pas le “devoir-être”; la sociologie qu’il a fondée, orientée vers l’analyse de la “socialité” quotidienne et imprégnée de paganisme dionysiaque, échappe autant à l’énoncé de solutions historiques et politiques pour notre temps qu’à l’alignement sur les prêts-à-penser idéologiques. “Laissant à d’autres le soin d’être utiles, note-t-il dans la préface de la deuxième édition de ses “Essais sur la violence”, il me semble possible d’envisager les problèmes sociaux sous l’angle métaphorique (…). On est loin de ce qu’il est convenu d’appeler la demande sociale ou autres fariboles de la même eau. C’est de l’esthétisme. Peut-être faut-il en accepter le risque”. Cet esthétisme donne lieu en tous cas à un travail très complet et fort sérieux: la réédition des “essais sur la violence”, publiés en 1978 dans un ouvrage maintenant épuisé (« La violence fondatrice », Ed. du Champs Urbain, Paris, avec une préface de Julien Freund) offre à la réflexion l’une des meilleurs approches sur le statut et la fonction sociale de « cette mystérieuse violence » qui est, dit l’auteur, « peut-être préférable à l’ennui mortifère d’une vie sociale aseptisée ».
Prenant le contre-pied de l’humanisme chrétien qui, comme la plupart des idéologies contemporaines qu’il a innervées, considère la violence —sociale ou politique— comme une anomalie anthropologique. Maffesoli, dans la lignée de Max Weber et de Carl Schmitt, voit dans la violence, la lutte et l’hostilité, « les moteurs principaux du dynamisme des sociétés » (p. 13). A une société « monothéiste » qui prétendrait éliminer toute violence pour uniformiser les valeurs, Maffesoli voit dans la reconnaissance de la violence comme trame du social, la marque d’un esprit polythéiste et antitotalitaire. Analysant la « dynamique » de la violence, son « invariance », son caractère « dionysiaque » et expliquant comment une violence ritualisée et intégrée par la société civile —par le peuple— peut constituer un moyen de défense de la communauté organique contre les impératifs et les normes (autrement violents) de l’Etat égalitaire. Maffesoli met en lumière l’ « ambivalence » de la violence : elle est à la fois structurante —si elle s’avère ritualisée et organique— et déstructurante —si elle s’éprouve comme délinquance chaotique dans une société policée et sécurisée—, libératrice et totalitaire, créatrice et destructrice à l’image du Scorpion, le signe zodiacal de Maffesoli lui-même !
S’appuyant parfois sur les travaux des éthologistes, Maffesoli qui échappe —chose rare aujourd’hui— aux angélismes et aux utopies du siècle, souligne le caractère fondateur de la violence dans la dynamique des rapports sociaux, qu’ils soient institutionnels ou privés, exceptionnels (le « débridement passionnel orgiastique ») ou ressortissant de la banalité de la vie de tous les jours.
Mais, quoiqu’il prétende ne pas toucher à l’idéologie politique, Maffesoli donne tout de même en cette matière une importante leçon. En refusant de légitimer ou de ritualiser la violence, en s’en arrogeant aussi le monopole sous une forme « rationnelle » et « neutre », l’Etat égalitaire moderne fonde paradoxalement « la violence totalitaire, l’abstraction du pouvoir par rapport à la socialité », comme la définit Maffesoli, qui ajoute : « ce qui se dessine (…), c’est que la maîtrise de cette menace organisée, en étant déliée d’un enracinement social, devienne le lot d’un Big Brother anonyme, contrôleur et constructeur de la réalité » (p. 17). Dès lors que la violence est « décommunalisée », abstraitement et légalement détenue par une technocratie et qu’elle n’est plus légitime au sein de la société civile qui savait la ritualiser, dès lors donc que la société est sécurisée par l’Etat, on assiste paradoxalement à l’émergence de la violence irrationnelle, « terrifiante et angoissante », celle de l’insécurité d’aujourd’hui : « La mise en spectacle rituelle de la violence permettrait que celle-ci fût en quelque sorte extériorisée. Sa monopolisation, son devenir rationnel tend au contraire à l’intérioriser » (p. 18).
Guillaume FAYE.
(recension parue dans « Panorama des idées actuelles », mars 1985 ; cette revue des livres et des idées était dirigée par le grand indianiste français Jean Varenne, disparu prématurément en 1997 ; avec l’aimable autorisation de l’auteur).
Michel MAFFESOLI, Essai sur la violence banale et fondatrice, Librairie des Méridiens, paris, 1984, 174 pages.
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mardi, 26 janvier 2010
Opinie: "De moderne mens is lui, verwend en ingeslapen"
Opinie: “De moderne mens is lui, verwend en ingeslapen”
Wanneer ik nog eens het internet afspeurde op zoek naar teksten e.d. van ideologische tegenstanders (ook die moet men immers lezen), viel mijn oog op de volgende tekst. Het is de geschreven versie van een toespraak die door de voorzitter van de noord-Nederlandse JOVD is gegeven naar aanleiding van het nieuwe jaar: http://www.jovd.nl/news/387/15/Nieuwjaarstoespraak-Landelijk-Voorzitter-Martijn-Jonk/. De titel hiervan is “De moderne student is lui, verwend en ingeslapen.“ Na het lezen hiervan had ik, uiteraard want wat had u anders verwacht, enige bedenkingen hierbij die ik hier even neertyp. Voor het gemak heb ik enkele citaten uit de toespraak gehaald die ik individueel zal becommentariëren:
“Wij verkeren in een positie waar wij verworven vrijheden te snel voor lief nemen. Vrijheid maakt lui. Voor ons zijn vrije en eerlijke verkiezingen haast zo vanzelfsprekend als de ochtend na de nacht.
Gelukkig hoeven wij in Nederland niet meer te strijden voor deze basale vrijheden. Hier kiezen wij onze leiders, en hopelijk -ja, hopelijk- kiezen wij dit jaar nog voor nieuwe.“
Democratie beschouw ik als een keuze tussen verschillende visies op de maatschappij. Zo ken men in vroegere tijden, als is het nog niet eens zolang geleden, nog kiezen tussen radicaal verschillende visies op de maatschappij. Men had royalisten, regionalisten, communisten, socialisten, liberalen, liberaal-democraten, katholieken, etc… En al ben ik niet rouwig om het feit dat politieke milities geen vuurgevechten meer houden in de straten, de democratie heeft ook een deel van haar eigenheid verloren in de teloorgang van de ideologieën.
Vandaag de dag kan men niet stellen dat de vrijheid van verkiezingen echt geldt aangezien men een sociale moord pleegt op een deel van de politieke meningen. En dan heb ik het niet over de verachting van mensen voor een partij van pedofielen, dat is immers geen ideologie, maar een perversie, maar over het uitsluiten over bijna gans Europa van radicaal-rechtse nationalisten. Zeker wanneer die partijen een andere richting voorstellen dan het bestaande vormen zij een gevaar, net omdat zij een deel uitmaken van de eigenheid van de democratie: een bestaand systeem en een alternatief daarvoor. Nu kiest men enkel voor een bepaalde fractie binnenin de liberale parlementaire burgerlijke staat. En dat beschouw ik niet als een democratische verwezenlijking, maar een verarming voor de democratie.
“Daarom moet mij als kersvers landelijk voorzitter van het hart dat de moderne student lui, verwend en ingeslapen is. Niet om het bepalen van studieresultaten, het nastreven van toekomstambities of het respecteren van de rechtstaat, maar wel als het gaat om liberale principes. De wereld van de snelle successen, de Wall Street mentaliteit waar snelle winsten en korte termijn visie prevaleren boven een lange termijnvisie, hebben immateriële kernwaarden op de achtergrond gedrukt.“
Het liberale principe stoelt zich, maar verbeter mij gerust als ik fout ben, op de vrijheid van het individu om te kiezen aan welke gemeenschap(pen) hij zich verbindt op vrijwillige basis, maar ook op het recht om nergens voor te streven. Een gevolg van het liberalisme is ook de huidige maatschappij waar materiële, hieronder meer over dit onderwerp, en financiële verwezenlijkingen als het hoogste worden geacht. De Wall Street mentaliteit met snelle winsten en korte termijn visie is trouwens ook een liberaal verschijnsel vanwege de maatschappelijke gevolgen van deze ideologie. Als de mensen enkel hun eigen belang moeten nastreven, is het in hun belang om zoveel mogelijk winst te maken. Elk systeem in de menselijke geschiedenis en van menselijke oorsprong is immers onderhevig aan een herhalende en wederkerende cyclus van opbouw, toppunt en verval. Het is dan ook vanuit deze ideologie bekeken logisch dat men in de eerste twee fases zoveel mogelijk materieel en financieel kapitaal verzamelt om de derde fase te overleven. Nadat men ze ironisch genoeg zelf in gang heeft gezet.
Immateriële waarden zijn trouwens enkel massaal aanwezig in maatschappijen die niet de overvloed hebben die wij vandaag de dag kennen. Of in wereldvisies waar de kern net ligt in een hoger iets zoals een volk of een traditie. Traditionalisten en volksnationalisten zijn bv. vanuit hun kern anti-liberaal (en evenzeer anti-marxistisch). Iedereen die het tegenovergestelde beweert, beseft de gevolgen van zijn ideologie niet of verwart volksnationalisme met anarcho-nationalisme en het naïeve geloof in autonome gemeenschappen.
“We zullen altijd voor blijven liggen op deze twee landen met betrekking tot menserechten, liberale vrijheden zoals de waarde van het individu.“
De liberale vrijheid van het individu is meestal de misdaad van de ontworteling. Het liberale individualisme trekt de mens los uit zijn gemeenschap en uit de ketting van de culturele traditie die de mens met het verleden en de toekomst verbindt. Ook het modernistische concept van dé vrijheid is een onnodige veralgemening aangezien ze niet bestaat. Elk individu heeft zijn eigen vrijheid nodig, waarbij de ene al meer nood (bewust en onbewust) zal hebben aan een identiteitsbeleving in het collectief/de gemeenschap. Het is dan ook eerder nodig om in plaats van dé vrijheid te strijden voor de vrijheden.
“Maar het draait niet alleen om geld, banen en economie. Wij moeten blijven waken voor liberale waarden in Nederland.[...] Daarnaast zullen we vroeg of laat moeten accepteren dat een open en vrije samenleving risico’s met zich meebrengt. Leven is niet zonder risico, en er bestaat niet zoiets als absolute veiligheid. Politici die dit beweren, liegen. Voor liberalen is deze keuze eenvoudig: wij nemen het risico om vrij te zijn.“
Liberale waarden houden in dat men een sociale mobiliteit bereikt wordt door een economische vrijheid. Door die twee aan elkaar te koppelen, en het eerste te laten afhangen van het tweede, wordt de mens ontdaan van hogere idealen en bezigheden. Zo zijn filosofen niet meer nuttig omdat zij geen economische meerwaarde brengen aan de mens en verwordt de natuur tot niets meer dan een productiefactor. Het leven mag dan wel niet zonder risico’s zijn, dit mag op geen enkel moment een vergoeilijking zijn van de enorme sociale wantoestanden die de eerste industriële revolutie met zich meebracht. Enkel door staatsinterventie zijn die problemen opgelost, niet omdat de bedrijfseigenaars vanuit één of andere liberale visie opeens besloten dat het hen beter uitkwam om hun arbeiders te behandelen als mensen.
Vrijheid heeft zijn risico’s en ik geloof niet in de politiestaat. Noch geloof ik dat dingen als een luchthaven volledig te beveiligen zijn. Maar het stellen dat men het risico neemt om vrij te zijn, heeft op meer toepassing dan de (vaak overdreven) veiligheidsmaatregelen op luchthavens.
“Naast Iran zijn er meer plaatsen in de wereld waar vrijheid en bescherming nog alles behalve realiteit zijn. Bijvoorbeeld in Afghanistan. Nederlandse soldaten werken mee aan een zwaar en moeilijk proces. Voor de veiligheid van ons en de Afghanen hebben 21 Nederlandse soldaten hun leven gegeven, en de missie is een aanslag op Nederlands militair materieel. Toch pleit de JOVD voor verlenging.[...] Wij vechten tegen een maatschappij waarin Islamitische fundamentalisten je stenigen als je het gebed mist. Afghanistan is dat cruciale slagveld tegen die militante en fundamentalistische islam.“
Iran is waarschijnlijk één van de meest democratische landen in het Nabije Oosten en de islamitische wereld. Kan men zich inbeelden dat dergelijk straatprotest zou plaatsvinden in Jordanië of Egypte of Saudie-Arabië? Afghanistan wordt dan weer gekenmerkt door een opeenstapeling van cultureel wanbegrip van de kant van de NAVO toe. Een recent voorbeeld is het Amerikaanse idee om 100% vrouwelijke gevechtseenheden te laten patrouilleren. In een maatschappij van mannen en vaak volgens tribale of clanlijnen moet dit toch wel het meest idiote idee zijn dat ze daar in de laatste jaren hebben gehad. Wanneer een stamhoofd en/of -oudste wordt afgeblafd door een vrouwelijke soldaat, dan leg je de kiemen voor een nog grotere terugkeer van de Taliban.
Natuurlijk is het een goed recht om in Afghanistan te gaan pleiten voor de emancipatie van de vrouw, maar als men het op deze manier wilt doen, vergeet men ook de eigen geschiedenis. Hier is de vrouwenemancipatie ook niet van dag één op dag twee gebeurd. Laten we bv. de rol van WOII met de vrouwen in de fabrieken niet vergeten toen bleek dat vrouwen dezelfde arbeid als mannen aankonden. Het is enkel door het verwerven van een economische macht dat men een maatschappelijk en politiek gevolg duurzaam tot stand kan doen komen. Afghanistan is trouwens ook niet het ene cruciale slagveld tegen de militante islam. Het heeft een grote symboolwaarde, dat is waar. Maar de strijd wordt ook in Yemen gevoerd, in Somalië en het noorden van centraal-Afrika. En uiteraard ook in de moslimgemeenschappen van Europa waar nu terroristen “van eigen grond” uit voortkomen.
Tot zover mijn korte bedenkingen bij deze tekst. Uiteraard heb ik een vriendelijk e-postbericht gestuurd naar de voorzitter van de JOVD om hem op de hoogte te brengen van deze tekst. Hoogstens kan er een beschaafde en interessante discussie uit voortvloeien.
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mercredi, 20 janvier 2010
Gender Mainstream - grösstes Umerziehungsprogramm der Menschheit
Gender Mainstreaming – größtes Umerziehungsprogramm der Menschheit
»Irre! Sächsische Linke wollen ›echte Männer‹ abschaffen!« So übertitelte die »Bild-Zeitung« in dieser Woche einen Artikel, der scheinbar harmlos das widerspiegelte, was sich derzeit als die größte, alles umwälzende Umerziehungsmaßnahme des Menschen immer noch fast unbemerkt, jedoch zielgenau, auf der ganzen Welt verankert. Ginge es nach Linke- Fraktionschef André Hahn, erfuhr der erstaunte Leser in Bild, gebe es demnächst ein »Sächsisches Kompetenzzentrum für Gender Mainstreaming«.
Gender was? Sage niemand, er kenne Gender Mainstreaming nicht. Nicht einmal die Windows-Rechtschreibhilfe muckt auf, wenn der Name richtig, also mit Großbuchstaben am Anfang, in den PC getippt wird, denn Windows hat von Gender schon länger Kenntnis! Doch Gender ist kein Pappenstiel. Und nicht einmal fünf Prozent der Bundesbürger wissen in Wirklichkeit über den komplizierten Begriff Bescheid, vor allem jedoch über seine weitreichenden Folgen. Die Antwort, warum kaum jemand im Lande und auch außerhalb Deutschlands je etwas über dieses Welt verändernde Programm gehört hat, gibt der luxemburgische und EU-Allround-Politiker Jean-Claude Juncker, er ließ bereits vor über zehn Jahren (1999) einer der vielen Katzen aus dem Sack. Wörtlich sagte Juncker:
»Wir beschließen etwas, stellen das dann in den Raum und warten einige Zeit ab, ob was passiert. Wenn es dann kein großes Geschrei gibt und keine Aufstände, weil die meisten gar nicht begreifen, was da beschlossen wurde, dann machen wir weiter – Schritt für Schritt, bis es kein Zurück mehr gibt.«
(http://de.wikipedia.org/wiki/Jean-Claude_Juncker, und Der Spiegel 52/1999)
Ist vielleicht den sächsischen Bild-Reportern entgangen, dass Gender Mainstreaming längst bittere Wirklichkeit in deutschen, europäischen, in zahlreichen weltweiten Amtsstuben und dass jede Aufregung darüber schon beinahe zwecklos geworden ist? Dass die Folgen der auf sämtlichen Ebenen der Bundesministerien fest verpflichtenden Programme überall bereits nachhaltig zu spüren sind und Stück für Stück, zielorientiert, umgesetzt werden? Und dass in die Gleichstellungs- und Gender-Programme derzeit Milliarden an Steuergeldern fließen? Was steckt denn nun eigentlich hinter Gender Mainstreaming?
Um diese tatsächlich »irre« Idee in die gesellschaftlichen Strukturen auf nahezu der ganzen Welt zu etablieren, wurde jene Maßnahme im Jahre 1995 auf der UNO-Weltfrauenkonferenz in Peking als Folge eines weitreichenden Weltfeminismus beschlossen und durch den Amsterdamer Vertrag, der am 1. Mai 1999 in Kraft trat, rechtlich verankert. Grundlage und Forderung der Vereinten Nationen und der Europäischen Union: Die Gleichstellung der Geschlechter von Mann und Frau. Hintergrund: Durch Gender-Maßnahmen in allen gesellschaftlichen und politischen Bereichen, die per Gesetz seit Jahren festgeschrieben worden sind, soll die zunehmende Einsicht eines jeden Bürgers auf der ganzen Welt nachhaltig manifestiert werden, dass es das klassische Geschlecht von Mann und Frau in Wirklichkeit gar nicht gibt und es auch noch nie gegeben hat. Deswegen müssen die scheinbar gar nicht existierenden Geschlechter jetzt abgeschafft werden! Alles ist gleich! Alles ist eins. Unique ist schick! Erstaunlich nur, dass dies noch niemandem in den vergangenen Jahrtausenden der Menschheitsgeschichte aufgefallen war.
Jeder Mensch ist also – nach der Gender-Definition der Europäischen Union und der Vereinten Nationen – bei seiner Geburt geschlechtsneutral, es gibt, wie bisher angenommen, DAS Mädchen oder DEN Jungen in Wirklichkeit gar nicht. Typische Männlichkeit und typische Weiblichkeit werden nach Gender Mainstreaming nur durch die Erziehung und das soziale Umfeld »künstlich« entwickelt, hauptsächlich von den Eltern, den Großeltern, Kindergarten, Schule usw., dem sozialen Umfeld eben. Typische Männlichkeit und typische Weiblichkeit sind dementsprechend nun sexistisch! Hier einige Beispiele, wie Gender Mainstreaming derzeit umgesetzt wird:
– Die EU berät ein Gesetz, nachdem in der Fernsehwerbung keine Frauen mehr am Herd und an der Waschmaschine gezeigt werden dürfen, der Grund: Dies ist für die Frauen diskriminierend und entwertend, Sexismus pur! Wer allerdings diese Rolle stattdessen künftig einnehmen könnte, ist auch schon beschlossen: der Mann. Denn er soll durch EU- Gesetzesänderungen und mediale Unterstützung vermehrt durch Hausarbeit und Familienmanagement aus dem Beruf ins Haus verbannt werden, während die Frau (die es ja eigentlich nicht gibt) der Erwerbstätigkeit in jedem Fall den Vorrang vor der Familie geben soll.
– Der deutsche Hausfrauenbund nannte sich vor Kurzem um, denn der Begriff Hausfrau ist in diesem Zusammenhang nach über 90 Jahren nicht mehr modern. Er heißt künftig »DHB – Netzwerk Haushalt, Berufsverband der Haushaltsführenden«. Grund hierfür sind die angeblich veränderten Familienstrukturen sowie die stärkere Einbindung von Vätern in Kindererziehung und Hausarbeit, heißt es. »Die drei Schlagworte Kinder, Kirche, Küche, welche mit unserem Verband seit Jahren in Verbindung gebracht wurden, sind für uns schon lange nicht mehr zeitgemäß«, betonte DHB-Präsidentin Angelika Grözinger.
– Die 2006 erschienene Neuübersetzung der Bibel in gerechter Sprache ist das erste deutschsprachige Projekt, das die in der Zweiten Frauenbewegung erhobene Forderung nach geschlechtergerechter Sprache konsequent umsetzt. In die Neuübersetzung gingen Forschungsergebnisse feministischer-theologischer Bibelwissenschaft und historischer Geschlechterforschung ein, heißt es beim Zentrum für gender studies und feministische Zukunftsforschung auf der Homepage der Phillips-Universität, Marburg.
– Beim Überfahren der Grenze Deutschland–Österreich, am Grenzübergang Kiefersfelden, lockt ein feministischer Gruß in großen Lettern in das Alpenland: »Grüß Göttin!«
Gender Mainstreaming ist inzwischen in allen Einrichtungen der öffentlichen Hand, in allen Bundes- und Landesministerien, in den Kommunen, Kirchen, Schulen, Universitäten, Behörden, öffentlich-rechtlichen Sendern, Unternehmen usw. verpflichtend zur rechtlichen Grundlage geworden. Wer also noch von sich behaupten will, zum alten Schlage zu gehören und ein echter Mann zu sein, der muss sich heute den politisch korrekten Vorwurf gefallen lassen, er sei sexistisch! Damit Mann künftig nicht mehr behaupten kann, nur Mann zu sein, wurde Gender Mainstreaming entwickelt. Auch das typische Weibliche gibt es nicht mehr, Frau kann und soll (!) ebenso Fußball spielen, Flugzeugingenieur oder Bundeskanzler werden. Beispiele dafür gibt es inzwischen genügend.
Was über tausende Jahre geschlechtsspezifisch aufgeteilt war in typisch männliches und weibliches, ist passé. Innerhalb weniger Jahrzehnte wurde die Bedeutung und die Wahrnehmung von Mann und Frau durch das feministische Gender-Programm nachhaltig verändert. Auf nahezu dem gesamten Globus wurden seit den vergangenen 15 bis 20 Jahren die Grundforderungen des Gender Mainstreaming, es wird auch als Gleichstellung der Geschlechter bezeichnet, in die Regierungsprogramme fest verbindlich eingeschrieben. Gleichstellung heißt in diesem Zusammenhang jedoch in erster Linie Gleichmacherei!
Die rechtlichen und politischen Voraussetzungen und Vorgaben des Amsterdamer Vertrages lauten nach der aktuellen Webseite des Bundesfamilienministeriums unter anderem folgendermaßen:
»Auf EU-Ebene wurde der Gender-Mainstreaming-Ansatz zum ersten Mal im Amsterdamer Vertrag, der am 1. Mai 1999 in Kraft trat, rechtlich verbindlich festgeschrieben. Art. 2 und Art. 3 Absatz 2 dieses EG-Vertrags verpflichten die Mitgliedstaaten zu einer aktiven Gleichstellungspolitik im Sinne des Gender Mainstreaming.«
Art. 2 des Amsterdamer Vertrages: »Aufgabe der Gemeinschaft ist es, durch die Errichtung eines Gemeinsamen Marktes und einer Wirtschafts- und Währungsunion sowie durch die Durchführung der in den Artikeln 3 und 4 genannten gemeinsamen Politiken und Maßnahmen in der ganzen Gemeinschaft (...) die Gleichstellung von Männern und Frauen (...) zu fördern.«
Art. 3 des Amsterdamer Vertrages: »Bei allen in diesem Artikel genannten Tätigkeiten wirkt die Gemeinschaft darauf hin, Ungleichheiten zu beseitigen und die Gleichstellung von Männern und Frauen zu fördern.«
Grundgesetz
Auch aus dem deutschen Verfassungsrecht ergibt sich eine Verpflichtung des Staates für eine aktive und wirkungsvolle Gleichstellungspolitik. Art. 3 Abs. 2 Grundgesetz (GG) bestimmt nach der Änderung von 1994 nicht nur: »Männer und Frauen sind gleichberechtigt« (Art. 3 Abs. 2 S. 1 GG), sondern nimmt den Staat nunmehr ausdrücklich in die Pflicht,»die tatsächliche Durchsetzung der Gleichberechtigung von Frauen und Männern« zu fördern und »auf die Beseitigung bestehender Nachteile« hinzuwirken (Art. 3 Abs. 2 S. 2 GG).
Bundesgesetze
Daneben findet sich die Verpflichtung zur Umsetzung und Beachtung von Gleichstellung im Sinne des Gender Mainstreaming auch in Bundesgesetzen wie dem Sozialgesetzbuch VIII
– § 9 Nr. 3 SGB VIII – Kinder- und Jugendhilfe: Bei der Aufgabenerfüllung im Bereich der Kinder- und Jugendhilfe müssen die unterschiedlichen Lebenslagen von Mädchen und Jungen berücksichtigt, Benachteiligungen abgebaut und die Gleichberechtigung von Mädchen und Jungen gefördert werden – und dem Gleichstellungsdurchsetzungsgesetz für die Bundesverwaltung
– § 2 BGleiG: Alle Beschäftigten in der Bundesverwaltung, insbesondere Führungskräfte, müssen die Gleichstellung von Frauen und Männern fördern; diese Aufgabe ist durchgängiges Leitprinzip in allen Aufgabenbereichen.
Auch mit der Änderung des SGB III durch das sog. Job-AQTIV-Gesetz ist durch § 1 Abs. 1 S. 3 klargestellt, dass in der Arbeitsförderung die Gleichstellung von Frauen und Männern als durchgängiges Prinzip zu verfolgen ist. Hinzuwirken ist auf die Überwindung des geschlechtsspezifischen Ausbildungs- und Arbeitsmarktes, um die Chancen beider Geschlechter auf dem Arbeitsmarkt zu verbessern (§ 8 Abs. 1).
Gemeinsame Geschäftsordnung der Bundesministerien
Die Novellierung der Gemeinsamen Geschäftsordnung der Bundesministerien durch Kabinettbeschluss vom 26. Juli 2000 ist ein weiterer Schritt zur Verankerung von Gender Mainstreaming. Der neue § 2 GGO stellt alle Ressorts der Bundesregierung vor die Aufgabe, den Gender-Mainstreaming-Ansatz bei allen politischen, normgebenden und verwaltenden Maßnahmen der Bundesregierung zu berücksichtigen.
Diese europarechtlichen und nationalen Regelungen bedeuten, dass Gleichstellungspolitik und Gender Mainstreaming rechtlich – und nicht nur politisch! – geboten sind. Das heißt, sie verlieren auch bei einem Wechsel an der Spitze von Verwaltung und Politik nicht ihre Gültigkeit.
Politische Vorgaben
Mit dem Kabinettbeschluss der Bundesregierung vom 23. Juni 1999 wurde eine wichtige politische Voraussetzung für die Einführung von Gender Mainstreaming geschaffen. In dem Beschluss erkennt das Bundeskabinett die Gleichstellung von Frauen und Männern als durchgängiges Leitprinzip der Bundesregierung an und bestimmt, diese Aufgabe mittels der Strategie des Gender Mainstreaming zu fördern.
Auch in verschiedenen Bundesländern wurden Kabinettbeschlüsse zur konsequenten Umsetzung von Gender Mainstreaming in Landespolitik und -verwaltung getroffen, so z.B. in Niedersachsen, Sachsen-Anhalt, Rheinland-Pfalz, Mecklenburg-Vorpommern, Hamburg.«
Soweit das Bundesministerium für Familie, Senioren, Frauen und Jugend. Wer sich jetzt noch wundert, aus welchen Gründen die Erwerbstätigkeit der Frau zum Hohelied der Moderne geworden ist, wer immer noch nicht verstanden hat, warum DDR-Kinderkrippen, die in den 1980er-Jahren von den Wessies kopfschüttelnd und mitleidig belächelt wurden, seit Anfang 2000 wie ein plötzlich entfachter Flächenbrand im ganzen Lande wüten und nun plötzlich die Sehnsuchtserfüllung der Karrierefrau 750-tausendfach darzustellen scheinen, der schaue sich den Beginn dieser Horrorentwicklung etwas genauer an.
Die ehemalige Feministin Simone de Beauvoir wird dieser ganze Prozess nämlich posthum freuen. So legte sie einst als eine der wichtigsten Vorzeige-Feministinnen Europas das Fundament für diese »irre« (Bild) Idee und formulierte 1951 in ihrem feministischen Werk Das andere Geschlecht die Sache gendermäßig doch schon auf den Punkt: »Man wird nicht als Frau geboren, man wird dazu gemacht!« Die deutsche Feministin Alice Schwarzer klemmte sich in den 1970er-Jahren begeistert in den öffentlichen Windschatten der Beauvoir-Ikone, kupferte etliches aus dem »anderen Geschlecht« in ihr eigenes Manifest Der kleine Unterschied und seine großen Folgen hinüber und trat mit dieser Idee von der Gleichheit von Mann und Frau ebenso in die deutschsprachige Öffentlichkeit, um auch hier schon mal klarzumachen, wo der Hammer hängt – oder eben auch nicht!
Männer und Frauen sind gleich, und wenn sie es immer noch nicht sind, müssen sie weiterhin so lange gleich gemacht werden, bis es auch der letzte Depp verstanden hat. Dies war das Fundament, auf dem auch die sich in den 68ern formierende Frauenbewegung, der heutige Feminismus, mit all seinen Facetten, baute. Denn die neu verkündete Gleichheit wischte alle Thesen von der Tafel, die Psychologen und Analytiker in der Tradition Sigmund Freuds über die Natur des Weiblichen aufgestellt hatten – über diese hatte sich Alice Schwarzer dann auch noch nachträglich in ihrem o.g. Buch beklagt: »Anstatt die Instrumente, die ihnen zur Verfügung stehen, zu nutzen, um aufzuzeigen, wie Menschen zu Männern und Frauen deformiert werden, machten sie sich zu Handlangern des Patriarchats. Sie wurden der Männergesellschaft liebster Einpeitscher beim Drill zur Weiblichkeit.«
Die grausige Ideologie der Gleichheit von Mann und Frau nahm in den 1960er-, 1970er-Jahren ihren ersten, erschütternden Höhepunkt. Zwar gab es noch nicht das rechtlich verankerte Gender Mainstreaming, weltweite Einigkeit der Feministinnen bestand jedoch allemal. Nun fehlte nur noch ein wissenschaftlicher Beweis, der die Austauschbarkeit männlicher und weiblicher Verhaltensmuster belegte. In diesem aufgeheizten Klima wurde ein bestürzendes, ein tragisches Experiment mit einem Menschen bekannt, das auf Betreiben eines gewissenlosen Arztes stattfand, der jedoch gleichzeitig der erste Anhänger und Forscher über Geschlechteridentitäten und Geschlechterrollen war. Der US-Professor für medizinische Psychologie, John Money, vom John-Hopkins-Hospital in Baltimore, war ein Pionier der gender studies, er war einer der ersten Ärzte, die wissenschaftlich zu beweisen versuchten, dass Geschlecht nur erlernt sei. Da kam ihm eine geeignete Gelegenheit zuhilfe:
Ein kanadisches Zwillingspaar, zwei Jungen namens Bruce und Brian Reimers, wurden 1966 geboren, zwei Jungen. Als die Babys gut sieben Monate alte waren, geschah während einer Beschneidungsoperation das Unglück: Der Penis von Bruce wurde von einem Laser so stark verletzt, dass er irreparabel war. Man kann sich die Verzweiflung der Eltern vorstellen.
Sie schrieben damals dem anerkannten Psychologen und Sexualforscher John Money, der sofort Kontakt aufnahm. Money war ein glühender Anhänger eben jener Theorie, nach welcher allein die Erziehung in den frühen Lebensjahren für die Ausprägung einer sexuellen und geschlechtsspezifischen Identität eine Rolle spielt, dem heutigen Gender Mainstreaming. Deshalb riet er den Eltern zu einer Geschlechtsumwandlung. Und so wurde aus dem kleinen Bruce kurzerhand Brenda. Das Kind wurde kastriert, mit weiblichen Hormonen behandelt, in Kleider gesteckt und als Mädchen erzogen. Es sollte niemand erfahren, dass es eigentlich gar kein Mädchen war.
Die deutsche Feministin Alice Schwarzer übrigens feierte diese Geschlechtsumwandlung als Beweis ihrer These, dass die Gebärfähigkeit die einzige spezifisch weibliche Eigenschaft sei. »Alles andere«, triumphierte sie, »ist künstlich aufgesetzt, ist eine Frage der geformten seelischen Identität.«
Bruce/Brenda kam in die Pubertät, wurde mit immer stärkeren Hormongaben gefüttert und hatte deshalb bereits einen Busen. Doch als die Ärzte ihm auch noch eine Kunstscheide einsetzen wollten, wehrte er sich. Mit zunehmendem Alter und erwachendem Bewusstsein hatte er gespürt, dass etwas nicht stimmte. Er riss sich seine Röcke vom Leibe, urinierte im Stehen und prügelte sich mit Jungen. Zunehmend lehnte er seinen Körper ab, ohne zu wissen, warum. Ständig war er in psychiatrischer Behandlung.
Die Familie war verunsichert, doch sie wollte alles richtig machen und vertraute dem Professor. So wurden die Eltern auf verheerende Weise fehlgeleitet und sagten dem verstörten Jungen nicht die Wahrheit. Aber weder zahlreiche Hormonbehandlungen noch Kleider machten aus Bruce ein Mädchen. Brenda wurde von Money übrigens in dieser Zeit als »normales, glückliches Mädchen« beschrieben. Brenda selbst sowie die Familie und Freunde jedoch beschrieben sie als ein zutiefst unglückliches Kind mit großen sozialen Problemen.
Die Schwierigkeiten wurden immer heftiger. Schließlich wusste man sich nicht anders zu helfen und eröffnete dem verzweifelten Jungen, was geschehen war. Zu diesem Zeitpunkt war er 14 Jahre alt. Der Schock saß tief! Als erstes zündete Bruce seinen Kleiderschrank an. Fortan lebte er als Junge und nannte sich David.
Der Horror war damit nicht zu Ende. In qualvollen Operationen ließ David die Brüste entfernen und bestand auf einem Kunstpenis, um wieder »ein ganzer Mann zu sein«. Doch das Experiment hatte ihn tief traumatisiert. Zusammen mit dem Autor John Colapinto dokumentierte er seinen tragischen Fall in dem aufsehenerregenden Buch Der Junge, der als Mädchen aufwuchs.
Die Theorie, Geschlechterrollen seien lediglich erlernt, eine Behauptung, die weltweit von der Frauenbewegung begeistert aufgenommen worden war, hatte sich durch dieses Beispiel zwar als haltlos erwiesen, doch wen interessierte das schon? Wer ahnte, welcher Plan hinter dieser tragischen Geschichte steckte?
Mit 23 Jahren heiratete David übrigens eine Frau, mit 38 Jahren erschoss er sich. Die erlittenen seelischen und körperlichen Qualen hatten ihn zerstört. Er sei jahrelang psychisch terrorisiert worden wie bei einer Gehirnwäsche, lautete eine seiner Aussagen. Auch für seinen Zwillingsbruder Brian endete der eitle Ehrgeiz der Mediziner und Psychologen in einer Katastrophe: Schon zwei Jahre vor seinem Bruder wählte er den Freitod, weil er Davids Leben nicht mehr ertrug. Dr. John Money und weitere Anhänger seiner Theorien wie Alice Schwarzer lehnten auch angesichts des Selbstmordes von Bruce Reimer eine Korrektur ihrer Überlegungen weiterhin ab. Schwarzer nimmt – im Gegenteil – noch einmal Stellung in ihrem 2008 erschienen Buch Die Antwort, in dem sie beharrlich erklärt, dass die ersten 17 Lebensmonate des Menschen (woher immer sie auch diese Zahl haben mag) als wesentlich für die soziale Geschlechtsrollenausprägung verantwortlich seien und dass Bruce einen großen Teil dieser Zeit, nämlich bis zum siebten Monat seines Lebens, als Junge sozialisiert worden sei. Ansonsten: Schweigen zu dem Freitod.
Der Psychiater John Money hat übrigens einer unbekannten Anzahl weiterer Kinder mit fehlgebildeten Genitalien ein Geschlecht »zugewiesen«. Er errichtete als Leiter der Psychologie am John-Hopkins-Krankenhaus eine darauf spezialisierte Klinik, die von seinem Nachfolger 1979 allerdings geschlossen wurde. Viele seiner ehemaligen Patienten gründeten Selbsthilfegruppen.
John Money wurde 2002 von der Deutschen Gesellschaft für sozialwissenschaftliche Sexualforschung, für die er arbeitete, mit der Magnus-Hirschfeld-Medaille ausgezeichnet!
Das traurige Beispiel von Bruce Reimer sowie etliche andere menschliche Dramen ändern nichts an dem derzeitigen Siegeszug von Gender Mainstreaming. Wer heute weiterhin noch von einer typisch weiblichen oder typisch männlichen Verhaltensweise spricht, befindet sich bereits auf wackeligem Terrain. Denn solche Äußerungen sind »sexistisch« und sorgen für unzulässige »sexistische Stereotypen«.
Zu Gender gehören jedoch noch weitere Auswüchse, die einem normal denkenden Menschen unvorstellbar erscheinen. Denn nach dieser Ideologie existiert nicht nur kein spezifisches Geschlecht, sondern jeder ist heutzutage in der Wahl seines Geschlechtes frei, und da gibt es eine große Auswahl: männlich, weiblich, bisexuell, transsexuell, homosexuell und mehr. An der Universität Wien wurde ein Wettbewerb ausgelobt, wer die ungewöhnlichsten Geschlechtervorschläge machen könne. Derzeit sollen acht unterschiedliche Entwürfe vorliegen. Und wer sich heute männlich fühlt, morgen bisexuell und übermorgen homosexuell, liegt absolut im Trend. Wer damit allerdings nicht klarkommt, sollte mit etwaigen missbilligenden Äußerungen vorsichtig sein, denn er unterliegt damit dem Straftatbestand der »Homophobie«. Homophobie bezeichnet eine soziale, gegen Lesben und Schwule gerichtete Aversion bzw. Feindseligkeit oder die »irrationale, weil sachlich durch nichts zu begründende Angst vor homosexuellen Menschen und ihren Lebensweisen …« Hohe Geldstrafen, Gefängnis und Umerziehungslager stehen auf der Vergeltungsliste von Homophobie.
Und damit Gender Mainstreaming früh genug erlernt werden kann und die Kinder später nicht müheselig umerzogen werden müssen, bekommen die Kleinen, die ohnehin früh in die Krippe gegeben werden sollten, damit ihre Mutter so schnell wie möglich in die Erwerbstätigkeit zurückkehren kann, auch hier schon Aufklärungsunterricht. Das besorgt die Bundeszentrale für gesundheitliche Aufklärung (BZgA).
Die Abteilung für Sexualaufklärung untersteht dem Familienministerium, alles übrige dem Gesundheitsministerium. Die BZgA verteilte bis 2007 ihre Schriften kostenlos an Eltern, Lehrer, Erzieher, an Schulen und Schüler. Jeder konnte sie über die Internetseite bestellen und dort auch einsehen, bis die BzgA diese Broschüren wegen entrüsteter Proteste und mutiger Veröffentlichungen der Autorin und Soziologin Gabriele Kuby vom Markt nehmen musste.
Hier einige Beispiele aus ihrer Kritik: Der Ratgeber für Eltern zur kindlichen Sexualerziehung vom 1. bis zum 3. Lebensjahr fordert Mütter und Väter dazu auf, »das Notwendige mit dem Angenehmen zu verbinden, indem das Kind beim Saubermachen gekitzelt, gestreichelt, liebkost, an den verschiedensten Stellen geküsst wird«. »Scheide und vor allem Klitoris erfahren kaum Beachtung durch Benennung und zärtliche Berührung (weder seitens des Vaters noch der Mutter) und erschweren es damit für das Mädchen, Stolz auf seine Geschlechtlichkeit zu entwickeln.« Kindliche Erkundungen der Genitalien Erwachsener können »manchmal Erregungsgefühle bei den Erwachsenen auslösen«. »Es ist ein Zeichen der gesunden Entwicklung Ihres Kindes, wenn es die Möglichkeit, sich selbst Lust und Befriedigung zu verschaffen, ausgiebig nutzt.« Wenn Mädchen (ein bis drei Jahre!) »dabei eher Gegenstände zur Hilfe nehmen«, dann soll man das nicht »als Vorwand benutzen, um die Masturbation zu verhindern«. Der Ratgeber fände es »erfreulich, wenn auch Väter, Großmütter, Onkel oder Kinderfrauen einen Blick in diese Informationsschrift werfen würden und sich anregen ließen – fühlen Sie sich bitte alle angesprochen!«
Weiter geht’s im Kindergarten. Mit dem Lieder- und Notenheft Nase, Bauch und Po singen Kinder Lieder wie diese: »Wenn ich meinen Körper anschau’ und berühr’, entdeck’ ich immer mal, was alles an mir eigen ist … wir haben eine Scheide, denn wir sind ja Mädchen. Sie ist hier unterm Bauch, zwischen meinen Beinen. Sie ist nicht nur zum Pullern da, und wenn ich sie berühr’, ja ja, dann kribbelt sie ganz fein. ›Nein‹ kannst du sagen, ›Ja‹ kannst du sagen, ›Halt‹ kannst du sagen, oder ›Noch mal genauso‹, ›Das mag ich nicht‹, ›Das gefällt mir gut‹, ›Oho, mach weiter so.‹«
In der Broschüre Mädchen-Sache(n) wird Mädchen beigebracht, dass gleichgeschlechtliche Liebe völlig normal ist: »So wie die meisten Menschen beim Thema Sex neugierig sind, fragen sich viele auch, was lesbische Frauen im Bett (oder sonstwo …) machen. Bei Mädchen, die mit Mädchen zusammen sind, ist es nicht anders als bei anderen Paaren auch: Sie machen alles, worauf sie Lust haben. Das kann Küssen oder Streicheln sein, mit dem Mund, der Zunge oder den Fingern.
Wie beim Sex zwischen Mann und Frau hängt es von der Fantasie, den Erfahrungen und dem gegenseitigen Vertrauen ab, wie weit beide gehen möchten. ›Wenigstens haben Lesben keine Probleme mit Aids‹, mögen manche denken. Klar, sie müssen, wenn sie nur mit Frauen zusammen sind, nicht an Schwangerschaftsverhütung denken.«
Ab zehn Jahren setzen in den Schulen die Werbe- und Schulungsmaßnahmen zur Homosexualität (genauer: lesbisch, schwul, bi und trans) ein, noch nicht überall so krass wie in Berlin, Hamburg und München, aber mit einheitlicher Tendenz. Eine 198-seitige Handreichung für weiterführende Schulen des Senats von Berlin zum Thema »Lesbische und schwule Lebensweisen« bietet eine ausgefeilte Anleitung zur Homosexualisierung der Schüler, auszuführen in »Biologie, Deutsch, Englisch, Ethik, Geschichte/Sozialkunde, Latein, Psychologie«.
Dies sind nur Kostproben. Alle Schriften der BZgA für alle Altersgruppen propagierten und propagieren die Sexualisierung der Kinder und Jugendlichen ab einem (!) Jahr. Sie unterminieren die elterliche Autorität. Sie verführen Kinder und Jugendliche zu einer auf Lustbefriedigung reduzierten Sexualität ohne eheliche Bindung.
Wer nun aber glaubt, dass die Gender-Liste nun beendet wird, sollte noch einen wichtigen Punkt mitnehmen: Gender fördert alleine nur Frauen. An keiner einzigen Stelle aller weltweiten Programme ist die Förderung von Männern vorgesehen. In den Programmen von Gender Mainstreaming ist man der der einhelligen Ansicht, dass Männer lange genug die Nase vorn hatten, und dass aus diesem Grunde die Gleichstellung der Geschlechter »durchaus auch einmal ungerecht gegen Männer ausfallen könnte«!
Es ist also kein Wunder, wenn sich sowohl eine ehemalige Bundesfamilienministerin, die Mutter von sieben Kindern ist, ebenso wie auch eine EKD-Vorsitzende und Bischöfin, Mutter vierer Kinder, aus für den Bürger unverständlichen Gründen FÜR die Erwerbstätigkeit der Frau ausspricht, und FÜR die ganztägige Fremdbetreuung möglichst aller Kinder. Denn dies ist Gender in Reinform: Wer das natürliche Geschlecht abschaffen will, muss als erstes die Familie zerschlagen und den Mann in seine Grenzen weisen!
Wer für Gender ist, muss auch gegen Kinder sein, gegen den Mann, gegen die Ehe, gegen die Familie! Gender Mainstreaming ist Hauptbestandteil der »Familienpolitik« eines Staates, der von der demographischen Krise in seiner Existenz massiv bedroht ist. Doch wen stört es schon? Diese Familienpolitik ist keine Politik für Familien, sondern zerstört sie vorsätzlich. Der Mann, der »echte« Mann, spielt dabei schon längst keine Rolle mehr, außer zunehmend jene des Gender- Hausmuttchens.
Das sollten auch die entrüsteten Bild-Redakteure aus Sachsen wissen, wenn sie wieder einmal auf den Begriff Gender Mainstreaming stoßen und darüber jaulen, dass die echten Männer abgeschafft werden sollen. Politisch sind sie es längst!
Freitag, 15.01.2010
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lundi, 18 janvier 2010
Bernard Stiegler: sur la consommation et la dépendance
Bernard Stiegler : sur la consommation et la dépendance |
« Ce que nous vivons aujourd’hui me semble être plus qu’une fatigue de la consommation. C’est un véritable épuisement. En 2004, j’ai lu dans Le Monde les résultats d’une enquête sur la grande distribution française réalisée par un cabinet de marketing américain. Les hypermarchés étaient alors confrontés à un problème : on observait une baisse de la vente des produits de grande consommation alors qu’aucun facteur économique, comme un recul du pouvoir d’achat, n’était en mesure d’expliquer ce phénomène. La réponse proposée par cette enquête avançait l’idée qu’une nouvelle race de consommateurs était née : les “alter-consommateurs”, c’est-à-dire des consommateurs qui voudraient ne plus consommer. La même année, Télérama a publié les résultats d’une autre enquête sur les téléspectateurs français : 56% d’entre eux disaient ne pas aimer les programmes de la chaîne qu’ils regardaient le plus. Dans les deux cas, s’est exprimé un même désamour pour la consommation. Les gens sont d’autant moins heureux de consommer qu’ils sont de grands consommateurs. Pour de plus en plus de gens, le fait de consommer apparaît aujourd’hui comme le symptôme d’un malaise que la consommation tente de combler, mais qu’elle aggrave en réalité. Mon hypothèse, c’est que les consommateurs sont devenus dépendants de la consommation comme les drogués le sont de leur drogue. Et cette dépendance leur apporte de moins en moins de bonheur, comme chez l’héroïnomane arrivé au dernier stade de l’intoxication : quand il devient incapable de se passer de l’héroïne alors qu’elle ne lui procure plus aucun plaisir. Il faudrait évidemment raffiner l’analyse. Il existe de grandes différences entre la consommation culturelle, alimentaire ou d’hydrocarbures. Mais, grosso modo, la question reste la même: celle d’une structure devenue addictive. Prenez un consommateur lambda, qui est d’abord un téléspectateur puisque la télévision a organisé le consumérisme comme mode de vie depuis l’après-guerre. Selon les derniers chiffres dont je dispose, un Français passe chaque jour 3 heures et 35 minutes devant sa télévision. Pour un père de famille, cela signifie qu’il n’a absolument pas le temps de parler à ses enfants ou à sa femme. La durée moyenne qu’une famille consacre à la discussion a d’ailleurs diminué des deux tiers depuis une quinzaine d’années. Le temps que le consommateur passe à absorber des images se substitue donc à toutes sortes d’activités sociales – les relations familiales par exemple ou les relations avec des amis. La consommation développe ainsi des processus de désinvestissement et détruit les circuits sociaux. Résultat : le consommateur est devenu un irresponsable, comme l’a révélé la crise de 2008. C’est quelqu’un qui se moque de son environnement, qui se fiche des conséquences de son comportement sur ses enfants. Je ne dis pas cela pour accuser le consommateur ; j’en suis un comme tout le monde. Mais ça ne peut plus durer. Cela faisait des années que nous en souffrions plus ou moins consciemment, mais l’année 2008 aura été l’explosion de la gueule de bois. Ce qu’on a découvert alors, c’est que ce système de l’hyperconsommation est allé de pair avec le développement d’une hyperspéculation. Le spéculateur est d’ailleurs lui-même un capitaliste qui serait devenu addict. Les golden boys marchent souvent à la cocaïne, tout le monde sait ça. Ce sont des gens qui ne peuvent plus se passer du stress extraordinaire qu’ils éprouvent en donnant des ordres d’achat ou de vente d’actions. Tout cela forme un système qui est aujourd’hui en train de s’écrouler. »
Bernard Stiegler, interviewé par L’Hebdo, 29 décembre 2009 |
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vendredi, 15 janvier 2010
Frankreich: Die Feindin in meinem Bett
Frankreich: Die Feindin in meinem Bett
Auf französische Männer kommen harte Zeiten zu. Es wird eine Straftat, Frauen nicht gebührend anzuschauen, ihnen unangenehme Dinge zu sagen und sich mal richtig auszusprechen. Das gibt es in keinem anderen Land der Welt.
In jedem Kulturkreis gibt es bei den Beziehungen zwischen Männern und Frauen nicht nur gute Stunden. Das liegt offenkundig in der Natur der Beziehungen zwischen den Geschlechtern. Und beim Übergang von einer schlechten zu einer guten Stunde sagt man als Mann oder Frau manchmal Dinge, die weniger schön sind. Oder man sagt einfach gar nichts, spricht nicht miteinander und schaut sich einige Stunden gar nicht an. Versöhnung nach einem kleinen Gewitter gehört zur Liebe wie die Luft zum Leben. Es gibt wahrscheinlich auf der ganzen Welt nicht eine einzige lang anhaltende Beziehung, in der man nicht auch schon mal irgendwann zumindest einmal einen kleinen Streit gehabt hätte. In Frankreich wird das jetzt allerdings künftig völlig anders.
Denn jeder Ehestreit fällt in Frankreich künftig – nach dem Willen des Gesetzgebers – unter die Rubrik Ehe-Grausamkeit, ist in jedem Einzelfall künftig in Frankreich eine schlimme Straftat, die von den Polizeibehörden bedingungslos verfolgt werden muss. Wenn ein Mann seine Frau nicht liebevoll anschaut – droht der offene Vollzug. Wenn ein Mann einer Frau ein Kompliment verweigert – droht der offene Strafvollzug. Wenn ein Mann beim Streit gar eine Äußerung an den Kopf wirft, die als Beleidigung aufgefasst werden könnte – kommt ebenfalls die Polizei. Ja, man darf bei einer Auseinandersetzungen dann als Mann auch nicht mehr die Stimme erheben! Die Franzosen wollen dieses Gesetz allen Ernstes durchsetzen. Als erstes und einziges Land der Welt.
Wenn Sie also demnächst mit Ihrer Frau nach Frankreich fahren oder auf der Durchreise sind, legen Sie sich einen Vorrat an charmanten Komplimenten an und verhalten Sie sich zurückhaltend und untertänig in Gegenwart Ihrer Gattin, um heil wieder aus dem Land zu kommen. Sagen Sie am besten im Minutentakt zu Ihrer Gattin: »In der Kathedrale meines Herzens wird immer eine Kerze für Dich brennen!« Und hören Sie damit vielleicht besser sofort auf, wenn Sie die Landesgrenze wieder überschritten haben und außer Reichweite der Franzosen sind. Sie könnten sonst schnell in einer geschlossenen Abteilung landen.
Mittwoch, 06.01.2010
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mercredi, 25 novembre 2009
Pour sortir de l'hyperconsommation
Pour sortir de l'hyperconsommation |
« La définition du bien-vivre a profondément changé au cours de ces dernières années, de même que l’importance accordée à la réussite économique et à la consommation ostentatoire. Que faut-il changer aujourd’hui ? Selon moi, il faut éradiquer ou, à tout le moins, largement tempérer cette obsession de l’achat qui est devenue le principe organisateur de la vie occidentale. […] Le lien avec la crise économique actuelle est évident. Dans une culture où l’envie impérieuse de consommer domine la psychologie des citoyens, les gens sont prêts à tout pour se donner les moyens d’acheter : trimer comme des esclaves, faire preuve de rapacité au travail et même enfreindre les règles pour maximiser leurs gains. C’est également pour cela qu’ils achètent des maisons au-dessus de leurs moyens et multiplient les crédits. On peut dire sans risque de se tromper que l’hyperconsommation a elle aussi joué un rôle dans le désastre économique. Toutefois, il ne suffit pas de la pointer du doigt pour la faire disparaître du cœur de nos sociétés. Il faut la remplacer par quelque chose d’autre. […] L’expérience montre que, lorsque la consommation sert de substitut à l’objet des besoins supérieurs, elle est semblable au tonneau des Danaïdes. Plusieurs études ont révélé que, dans les pays où le revenu annuel moyen par habitant est supérieur à 20’000 dollars, il n’y a aucune corrélation entre l’augmentation des revenus et le bien-être des populations. Ces travaux indiquent en outre qu’une grande partie des habitants des pays capitalistes se sentent insatisfaits, pour ne pas dire profondément malheureux, quel que soit leur pouvoir d’achat, parce que d’autres personnes gagnent et dépensent encore plus qu’eux. Ce n’est pas la privation objective qui compte, mais le sentiment relatif de privation. Et comme, par définition, la plupart des gens ne peuvent pas consommer davantage que les autres, l’hyperconsommation nous renvoie toujours à ce dilemme. […] L’hyperconsommation ne touche pas seulement la classe dominante des sociétés d’abondance ; les classes moyennes et populaires sont elles aussi concernées. Un grand nombre de personnes, toutes catégories sociales confondues, ont le sentiment de travailler pour tout juste parvenir à joindre les deux bouts. Pourtant, un examen attentif de leur liste courses et de leurs garde-robe révèle qu’elles consacrent une bonne part de leurs revenus à l’achat de biens liés au statut social, comme des vêtements de marque et autres produits dont le besoin n’est pas réel. Cette mentalité peut sembler tellement ancrée dans la culture occidentale que toute résistance serait vaine. Mais la récession économique a déjà poussé bon nombre d’individus à acheter moins de produits de luxe, à freiner sur les fêtes somptueuses et même à accepter de réduire leur salaire ou de prendre des congés sans solde. Jusqu’à présent, la plupart de ces comportements ne sont pas volontaires ; ils sont dictés par la nécessité économique. Il faut toutefois voir là l’occasion d’aider les gens à comprendre qu’une consommation réduite ne reflète pas un échec personnel. C’est le moment ou jamais d’abandonner l’hyperconsommation pour se consacrer à autre chose ! […] Une société qui résisterait au consumérisme au profit d’autres principes organisateurs ne se contenterait pas de réduire la menace d’une crise économique et de rendre ses membres plus heureux. Elle présenterait également d’autres avantages. Elle consommerait par exemple moins de ressources matérielles et aurait donc beaucoup moins d’effets nocifs sur l’environnement. Elle favoriserait aussi une plus grande justice sociale. »
Amitai Etzioni, Prospect (Londres), janvier 2009 |
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jeudi, 12 novembre 2009
"Walkaways" - Nomadentum als neue Gesellschaftsstruktur in den USA
»Walkaways« – Nomadentum als neue Gesellschaftsstruktur in den USA
Die Medien in den USA vermelden erfreut, dass die Anzahl der Zwangsvollstreckungen auf dem Immobilienmarkt bis zu 20 Prozent rückläufig sei. Das deute auf eine deutliche Erholung hin und sei ein Silberstreif am Horizont. Regionale Websites und Lokalblätter in den USA zeichnen im Gegensatz zu diesen scheinbar so positiven Zahlen ein ganz anderes Bild: Der Rückgang der Zwangsvollstreckungen und Versteigerungen ist nur die Folge davon, dass selbst die vorgesehenen Strukturen der geordneten Abwicklung eines Immobilienmarktzusammenbruches erodieren.
Man lässt zunehmend einfach alles stehen und liegen, sowohl vonseiten der Hauseigentümer als auch vonseiten der Kreditgeber. Ein Hauseigentümer, der sein Eigenheim für beispielsweise 300.000 Dollar gekauft und voll finanziert hat, muss natürlich die hohe Abzahlungsrate für die Kaufsumme weiterhin bezahlen, obwohl die Immobilie nicht einmal mehr ein Drittel des Wertes hat. Da der Kreditvertrag mit der Bank oft mit der Rückgabe des belasteten Objektes gekündigt werden kann, ziehen immer mehr Hauseigentümer aus der teuren Immobilie einfach aus, schicken den Hausschlüssel an die Bank und verschwinden auf Nimmerwiedersehen in einen anderen Bundesstaat.
In den Staaten gibt es keine Meldepflicht wie in Deutschland. Zieht der säumige Kreditnehmer einfach leise, still und heimlich aus, ist er nur durch aufwendige Suche auffindbar. Bei den Größenordungen, in denen das Phänomen mittlerweile auftritt, ein aussichtsloses Unterfangen für die Banken.
Manche der weglaufenden Hausbesitzer können mit einer relativ geringen Summe, die man aus den nicht gezahlten Raten zusammensparen konnte, sogar an einem anderen Ort ein Haus in einer Zwangsversteigerung nun billig und schuldenfrei erwerben.
Nicht selten merkt die Bank bei heimlichem Wegzug erst nach Monaten und mehreren Anschreiben, dass in der teuer finanzierten Immobilie keiner mehr wohnt. Die Holzhäuser fallen schnell dem Vandalismus und dem Zerfall anheim. Dann steht die Bank vor einem wertlosen Trümmerhaufen, der nur noch Kosten brächte, würde sie ihn übernehmen.
Das übliche Vorgehen, eine Zwangsvollstreckung anzumelden und die Immobilie dann in einer Zwangsversteigerung zu verkaufen, wird deshalb von den kreditgebenden Banken immer weniger durchgezogen. Mittlerweile wird dieses Verfahren immer öfter mittendrin abgebrochen oder überhaupt nicht angefangen.
Die Diskrepanz zwischen der Anzahl Hypothekenkündigungen und der Zahl der Zwangsversteigerungen gibt einen kleinen Anhaltspunkt dafür, wie viele Häuser einfach von allen Beteiligten aufgegeben werden. Genaues weiß aber niemand, eine Statistik gibt es nirgends.
Die Dayton Daily News nannte den dramatischen Rückgang der Hausversteigerungen »sehr, sehr angsteinflößend«. Über 20 Prozent sind die Zwangsversteigerungen zurückgegangen, berichtet das Blatt, und beschreibt dann, welche Probleme sich daraus ergeben, dass viele der Eigenheime schlicht dem Zerfall überlassen werden.
In Montgomery County würden nur noch etwa 40 Prozent der geräumten Häuser auch von der kreditgebenden Bank in Besitz genommen, schreibt eine regionale Website.
John Carter, der »housing inspector« der Stadt Dayton, erzählt, dass die Leerstände von Häusern immer weiter zunehmen. Aber die Hälfte der Häuser, die er mit Bretterverschlägen vor Vagabanden und Vandalen schützen muss, haben noch laufende Hypothekenverträge und sind nicht einmal zur Zwangsvollstreckung angemeldet. Die kreditgebenden Banken haben kein Interesse daran.
Die Städte und Gemeinden sehen sich nun immer öfter vor dem Problem, dass sie ganze Wohnviertel leerstehender Häuser in allen Stufen des Verfalls haben, trostlose Ruinengegenden, in denen allerlei ungebetene Gäste ihr Unwesen treiben. Mit der Abrissbirne wird dem Elend Abhilfe geschaffen. Reparabel sind die Holzhäuser meistens nicht mehr. Die Kosten würden den Wert meist übersteigen, wenn denn überhaupt ein Käufer zu finden wäre.
Die Kosten des Abrisses muss der Eigentümer tragen. Solange die Bank nicht die Prozedur der Zwangsvollstreckung vollzieht, bleibt der Käufer immer noch Eigentümer und muss auch für den Abriss des verlassenen Hauses aufkommen, so man ihn denn findet. Meistens ahnt er noch nicht einmal etwas davon. Für die Städte und Gemeinden türmen sich dadurch immense Kosten und Verluste auf. Denn auch wenn das Haus nicht abgerissen wird: Die anfallenden Steuern und Abgaben laufen weiter und akkumulieren zu gewaltigen Beträgen. In Buffalo haben diese Zustände nach Angaben der Stadtverwaltung mittlerweile epidemische Ausmaße angenommen. Die Stadt verklagte 37 Banken auf Schadensersatz der Kosten, die der Stadt entstanden waren. Die klagende Stadt begründete das damit, dass die Banken durch ihre verfehlte Geldpolitik verantwortlich seien für den Verfall der Häuser. Eine ganze Wohngegend von mindestens 57 verlassenen Häusern wurde in einer Sammelklage als Beispiel vor Gericht angeführt.
Aber auch dieser Verantwortung entziehen sich die Banken geschickt. Oft ist die kreditgebende Bank selbst schon längst bankrott. Oder, falls eine andere Bank übernommen hat, findet diese dann keinerlei Papiere mehr über den Kreditvertrag oder die Immobilie.
Eine Rechtsanwältin aus Kansas, spezialisiert auf Immobilien, stellt auch in dieser Stadt fest, dass solche Bank-Walkaways rasant zunehmen, und die »papertrails« – also die zu einer Immobilien gehörenden Verträge und Papiere – unauffindbar sind.
Die Erholung am Immobilienmarkt, die die sinkenden Zwangsversteigerungszahlen zu signalisieren scheinen, entpuppt sich bei näherem Hinsehen daher als die nächste Stufe des Gesellschaftszerfalls. Durch die rasant steigende Arbeitslosigkeit haben die Menschen einerseits nicht mehr die Mittel, ihre Häuser zu halten, sind aber andererseits auch nicht mehr an den Ort gebunden. Was also liegt näher, als einfach vor den Problemen wegzulaufen? Vielleicht sind die Wiesen ja woanders grüner?
Apropos grün: Amerika ist auch im Zerfall noch das Land der unbegrenzten Möglichkeiten. Um bei leerstehenden Häusern, die noch einen Wert haben, die Verkaufschancen zu erhöhen, gibt es Firmen, die die vertrockneten und verdorrten unansehlichen Vorgärten wieder auf Zack bringen: Rasen und Grünpflanzen werden mit wetterfester Farbe saftig grün gespritzt. Das trocknet in zwei Stunden und hält drei Monate. Und färbt nicht ab. Dann sieht das Anwesen doch gleich wieder appetitlich und gepflegt aus und erzielt einen weit besseren Preis.
__________
Quellen:
http://www.daytondailynews.com/news/dayton-news/drop-in-foreclosures-called-very-scary-352689.html
http://youwalkaway.com/ywarecentarticle.php?id=24
Mittwoch, 28.10.2009
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mardi, 20 octobre 2009
Comportement social japonais
Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1992
L'anatomie de la dépendance
L'interprétation du comportement social des Japonais par Takeo Doi
par Stefano BONINSEGNI
Edité au Japon en 1971, ce recueil d'articles écrits par un éminent psychiatre japonais se veut avant toute chose une contribution à la théorie psychanalytique, portée par une réflexion nouvelle sur le terme japonais amae —que l'on pourrait traduire, grosso modo, par «pulsion de dépendance». L'amae semble imprégner tous les aspects de la mentalité et de la pensée nipponnes. Le livre de Takeo Doi donne en bout de course une interprétation globale des comportements sociaux du peuple de l'Empire du Soleil Levant, comme le suggère d'ailleurs son sous-titre.
Prémisse de l'auteur: la psychologie spécifique d'un peuple, quel qu'il soit, ne peut s'étudier qu'en se familiarisant avec sa langue, car celle-ci englobe déjà tous les éléments intrinsèques de l'âme d'une nation. A toute langue correspondent des besoins et une vision du monde particulière. La langue japonaise étant radicalement différente des langues occidentales, les différences culturelles entre les mondes occidental et nippon sont très profondes. Par ailleurs, argumente Doi, il faut savoir que des pulsions et des émotions préexistent à l'émergence d'une langue; et le fait que la langue japonaise, à la différence de toutes les autres langues, possède le terme d'amae, lequel se réfère pourtant à une pulsion qui est en soi universelle, constitue un point de départ pour la réflexion, permettant de formuler des hypothèses suggestives, non seulement sur la mentalité japonaise mais aussi sur les différences de fond qui existent entre les cultures d'Occident et d'Orient.
La pulsion de dépendance surgit dès que le bébé perçoit, dans la douleur, la séparation entre son soi et le reste, c'est-à-dire sa mère. L'amae est la tentative de nier cette séparation douloureuse, de la même façon que le bébé, en s'attachant au sein de sa mère, satisfait (momentanément) son désir de subordination. Cette tentative d'échapper à ce détachement par rapport à un «tout originaire» façonne et conditionne la mentalité et la pensée japonaises. Les oppositions typiques qui structurent les langues occidentales —interne/externe, individuel/collectif, privé/public, etc.— sont toutes inadéquates pour cerner cette psychologie «infantile», qui idéalise la capacité de compter sur l'indulgence maximale d'autrui (amaeru), ce qui, en de nombreux cas, peut mal tourner.
Le modèle idéal de rapports, pour un Japonais, est celui qui unit géniteurs (en particulier la mère) et enfants, où la propension à la dépendance s'exprime de manière maximale. A l'opposé, face aux tanin (1), c'est-à-dire aux étrangers, l'amae n'est plus présente. Entre ces deux extrêmes, nous trouvons plusieurs groupes d'appartenance. Outre l'entourage immédiat d'un individu (uchi), les rapports se définissent par le ninjo (l'obligation sociale, le lien social), dans lequel sont présents et l'amae et l'enryo (la réserve, la distance tenue volontairement). Exemples: face à un collègue ou à un supérieur dans l'entreprise (qui est la «communauté» centrale dans la vie japonaise), le Japonais attend une certaine dose d'indulgence et de compréhension; par ailleurs, il se sent contraint de faire usage de sa réserve pour ne pas donner l'impression d'abuser de la condescendance d'autrui, sinon un conflit contraire aux intérêts de l'amae pourrait survenir. Le Japonais veut maintenir l'«harmonie».
L'idéal nippon dans le champ des rapports sociaux est toujours de pouvoir exprimer un maximum d'amaeru; en ce sens, l'enryo est perçu comme une douloureuse nécessité. Dans ce contexte mental et culturel, l'individualité vue comme séparation n'est pas considérée comme une valeur (la langue japonaise a dû introduire des termes spécifiques pour traduire plus ou moins les mots «individu» et «personnalité», vocables qui ne sont apparus qu'à l'ère de la modernisation au siècle passé). Ensuite, le «genre humain universel» n'est pas envisagé: seul le groupe et ses intérêts prévalent. Déjà, le Japon médiéval pouvait être considéré comme un ensemble de grands groupes (de clans) qui formaient un clan plus grand, la tribu Japon, dont l'Empereur est le symbole sacré de l'unité.
Dans la psychologie japonaise, il n'est pas possible d'envisager un conflit intérieur entre l'instance individuelle et le devoir public (chose fréquente, en revanche, dans la mentalité occidentale). Le conflit surgit bien plutôt entre les devoirs de l'individu à l'égard de différents niveaux d'appartenance, par exemple entre son entourage le plus intime et la nation. Selon Takeo Doi, c'est parce que la mentalité définie par l'amae est enracinée dans une histoire japonaise qui n'a jamais connu, même sous forme diffuse, une culture fondée sur les valeurs de l'individu. Tandis qu'en Occident l'individu a pris son envol par le christianisme, en Orient, et en particulier au Japon, s'est affirmée une culture de la communauté, ancrée dans une éthique de la fidélité au groupe, dont l'intérêt est toujours considéré comme supérieur.
Takeo Doi nous confirme en outre, dans les grandes lignes, l'idée qui se répand de plus en plus en Occident, selon laquelle le Japon, après avoir assimilé sans interruption des cultures ou des religions étrangères, aurait maintenu tout de même une identité de fond que la modernisation capitaliste n'a pas réussi à entamer de façon significative. Sur ce plan, justement, l'amae et son impact jouent un rôle fondamental. Le fait que le peuple japonais a été et, surtout, est encore enclin à assimiler des éléments de culture d'origine étrangère est du à cette pulsion de dépendance à l'égard d'autrui, dans la mesure où la fonction d'assimilation en est un mode opératoire caractéristique. Tout ce qui est assimilé est mis au service du groupe d'appartenance et de ses intérêts.
Nakamura Hajime, en prenant l'exemple de la religion, a cherché à expliquer cette attitude dans les termes suivants: «En règle générale, quand ils ont adopté des éléments issus de religions étrangères, les Japonais possédaient déjà un cadre éthique et pratique qu'ils considéraient comme absolu; ils n'ont donc recueilli ces éléments et ne les ont adaptés que dans la mesure où ces nouveautés ne menaçaient pas le cadre existant; au contraire, ils ne les adoptaient que s'ils encourageaient, renforçaient et développaient ce qui existait déjà chez eux [...]. Sans aucun doute, ceux qui embrassaient avec certitude les nouvelles religions le faisaient avec une piété sincère, mais il n'en demeurait pas moins vrai que la société japonaise se bornait en gros à adapter ces éléments pour atteindre plus facilement ces propres objectifs».
Takeo Doi, lui, donne une explication légèrement différente: «Pour m'exprimer en des termes légèrement différents de ceux qu'emploie Nakamura, je pourrais affirmer que, si les Japonais, au premier abord, semblaient accepter sans critique une culture étrangère, en fait, sur un mode tout à fait paradoxal, cette attitude les aidait à préserver la psychologie de l'amae, dans le sens où ce mode d'action, consistant à adopter et à accepter, est, en soi, une conséquence de cette mentalité».
Ensuite, par le fait de l'amae, la société et la mentalité japonaises se montrent extrêmement conservatrices, en dépit des convulsions profondes qui ont bouleversé, au cours de notre après-guerre, les institutions et les valeurs traditionnelles. Malgré ces mutations, il est possible de percevoir à quels moments de son histoire la mentalité japonaise a été entièrement compénétrée de cette pulsion de dépendance. Ainsi, tout fait penser, selon Doi, que même dans l'Empire du Soleil Levant, tôt ou tard, la tradition cèdera le pas à l'individualisme et à ses excès désagrégateurs: c'est une perspective qui rassure ceux qui craignent la résurgence du nationalisme et de l'expansionnisme nippons (aux Etats-Unis, la psychose va croissante!).
Que derrière le développement industriel et financier du Japon puisse se cacher et se réactiver un esprit belliciste et expansionniste indompté est admis partiellement, voire implicitement, par plus d'un observateur du monde nippon. Tant Antonio Marazzi que Guglielmo Zucconi, par exemple, perçoivent dans les attitudes des Japonais d'aujourd'hui, surtout dans leur univers du travail, une transfiguration moderne de l'esprit samouraï (2), qui prouve ainsi sa persistence. Selon cette interprétation, le facteur décisif, dans l'incroyable développement économique du pays, ne doit pas être recherché dans une quelconque qualité spéciale inhérente aux managers japonais ou dans l'utilisation massive et sophistiquée des technologies les plus modernes, mais bien plutôt dans le matériel humain japonais, caractérisé par un sens absolu du devoir du travailleur, vis-à-vis de son activité particulière, de son entreprise et de la «plus grande entreprise Japon».
Tout cela, selon Doi, ne correspond que superficiellement à la vérité; l'assiduité japonaise n'est rien d'autre que le résultat de la ki ga soumanaï, une tendance obsessionnelle qui dérive de la frustration d'amae: «Pour citer un seul exemple, la fameuse assiduité japonaise au travail pourrait très bien être liée à ce trait de caractère de nature obsessionnelle: si paysans, ouvriers et employés se jettent à corps perdu dans le travail, ce n'est pas tant par nécessité économique, mais plutôt parce que s'ils agissaient autrement, ils provoqueraient la ki ga soumanaï. Bien peu de salariés japonais se préoccupent de la signification de leur travail ou du bénéfice que la société, dans son ensemble, eux-mêmes et leur famille pourraient en tirer. Et pourtant, ils n'hésitent pas à se sacrifier. Cette attitude avantage évidemment le travail, même s'il est difficile de bien faire quelque chose sans une certaine dose d'enthousiasme».
Face à des observations de ce genre, on doit au moins remarquer qu'en dépit de ses origines, l'auteur se laisse contaminer par le vice européen, trop européen, de la psychanalyse, vice qui consiste à étendre démesurément les méthodes psychanalytiques, pour expliquer globalement tous les phénomènes d'ordre individuel ou social. Rappelons, au risque d'être répétitifs, que, en matière de conception du travail, la conception japonaise revêt au moins un aspect “sacré” qui transcende en tous points les visions actuelles et conventionnelles de l'Occident. Josei Toda, second président de la Soka Gakkaï (3), en pleine période de reconstruction, après la guerre en 1955, s'est adressé en ces termes à ses disciples: «Dès que l'on a compris le sentiment du Vrai Bouddha, comme est-il possible de négliger son travail? Pensez-y» (4). Il ne s'agit pas d'une apologie camouflée du capitalisme. Toda voulait mettre en exergue cet aspect bouddhique du don de soi absolu, idée qui, dans la mentalité occidentale est associée à la sphère religieuse ou à la rhétorique militaire. Il nous est difficile de croire qu'un tel esprit, qui s'est révélé essentiel pour arracher ce pays asiatique des décombres de la défaite et le projetter vers les sommets des statistiques de la production et du développement, ne hante plus aujourd'hui les coulisses de la «planète Japon», si complexe et si riche en contrastes.
Stefano BONINSEGNI.
Notes:
(1) L'indifférence à l'égard des tanin a des conséquences particulièrement désagréables pour les Coréens installés depuis des générations sur le territoire nippon et pour les eta, c'est-à-dire tous les Japonais qui exercent des professions considérées comme «impures» (bouchers et ouvriers des abattoirs, tanneurs, poissonniers, etc.).
(2) Cfr. Guglielmo ZUCCONI, Il Giappone tra noi, Garzanti, Milano, 1986; Antonio MARAZZI, Mi Rai. Il futuro in Giappone ha un cuore antico, Sansoni, Firenze, 1990.
(3) A la différence de ce que l'on dit et que l'on écrit, la Soka Gakkaï n'est pas, en fait, une nouvelle secte religieuse, mais une grande organisation laïque qui se réfère au clergé séculier bouddhiste de la Nichiren Shoshu. Récemment, ce clergé a destitué la Soka Gakkaï de ses prérogatives, en lui enlevant, entre autres choses, le droit de le représenter officiellement dans les milieux laïques et de diffuser le bouddhisme Nichiren. Au-delà des motivations exclusivement religieuses de cette dissension, il faut mentionner le fait que la Soka Gakkaï, sous la présidence de Daisaku Ikeda, a ajouté à sa mission traditionnelle de diffuser le bouddhisme un militantisme réformiste sur le plan social et des prises de position inspirées par un pacifisme absolu, qui déplaisaient forcément au clergé. Cette situation est révélatrice quant à l'atmosphère qui règne dans le Japon d'aujourd'hui.
(4) Cf. Il Nuovo Rinascimento, août 1991, p. 15.
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vendredi, 04 septembre 2009
Vers l'infantilisation et l'américanisation de la société française
Vers l'infantilisation et l'américanisation de la société française.
Labourage et pâturage ne sont plus depuis longtemps les deux mamelles de la France. Elles sont aujourd’hui devenues Psychologie et Judiciaire. A chaque semaine sa nouvelle loi ou son nouveau règlement en réponse à chaque dernier fait divers. A chaque nouvel incident, sa horde de psychologues s’abattant tel un vol de criquets pèlerins sur les « victimes » aux frais de l’Etat et des collectivités locales. Autour de nous, ce n’est que procès, plainte, récrimination et victimisation. Tout devient judiciaire, on ne sait plus se parler et répondre par le bon sens ou le courage aux petits inconvénients de la vie. La plainte est l’avenir de l’homme aurait dit Aragon en rimant sur notre triste époque. Et ce qui n’est pas judiciarisé est psychiatrisé dans le mauvais sens du terme.
Il n’est pas un jour où l’on lise dans la presse ou sur Internet, où l’on voit à la télévision ou que l’on entende à la radio que la désormais célèbre « cellule psychologique d’urgence » a sévi. Passager du car qui s’est renversé, familles et voisins du petit loubard heurté par un voiture de police, enfants, parents et personnel de la crèche où l’enseignante s’est pendue, de la piscine où le gérant a pris un coup de couteau, tous y on droit sans discrimination.
Jadis, ceux qui supportaient mal les vicissitudes de l’existence, les mauvais coups et les traumatismes soit faisaient avec tant bien que mal, soit s’engageaient dans la voie volontaire et payante de la psychanalyse ou de la psychothérapie.
Maintenant, il n’est même plus nécessaire de demander, le psychologue et sa cellule de crise arrivent quasiment avant les flics et les pompiers sur les lieux du drame. Etre pris en charge psychologiquement devrait être une démarche individuelle et réfléchie. Or que voyons nous le plus souvent, des individus à qui certes il est arrivé quelque chose de fâcheux, mais le plus souvent de simples témoins qui s’en remettraient d’eux même la plupart du temps. Ils vont subir les poncifs et les lieux communs de soit disant professionnels du malheur pour les aider à supporter le choc. Et puis, comme les pouvoirs publics du plus haut de l’Etat au maire de la plus petite commune ne veulent pas passer pour des irresponsables et se montrer compatissants et ne pas être impliqués, on envoie l’équipe de psychologues qui le plus souvent ne fera qu’un séance collective tout près de la carcasse du bus, de la chapelle ardente ou de la cage d’escalier du HLM qui a pris feu. Résultat nul au niveau du soutien, car seul une écoute prolongée et structurée peut être efficace pour des personnes psychologiquement fragiles. Et puis, quand un autocar rempli de Slovènes se rendant Portugal s’écrase dans un fossé à trois heures du matin du côté de Sauveterre en Guyenne, on peut se demander où le maire va trouver à cette heure une équipe de soutien psychologique maîtrisant la langue des occupants du véhicule accidenté.
De plus, ce soutien est gratuit, même s’il coûte à l’Etat. Les « victimes » ne faisant pas de démarche volontaire et ne déboursant pas le moindre euro, l’impact psychologique est différent de celui créé par la relation avec un thérapeute que l’on a choisi et que l’on rémunère, quelque soit sa formation. Il y a fort à craindre que l’assistance tous azimuts, dispensée larga manu, peut avoir plus d’effets secondaires que prévu. D’abord la fixation de la scène traumatisante à force d’en avoir parlé. L’oubli est aussi utile à la reconstruction se soi après un traumatisme. Ensuite peut se greffer l’idée que « si l’on s’intéresse à moi, c’est qu’il y a eu faute ». Cela débouche rapidement sur la revendication et dans certains cas sur une pathologie revendicative appelée sinistrose, avec des effets encore pire que quelques possibles mauvais rêves post traumatiques.
A croire que les pouvoirs publics veulent venir en aide à la profession des psychologues qui pourtant est loin d’être sinistrée. Déjà les entreprises y ont recours tant au niveau du recrutement que de la gestion des ressources humaines. Mais là au moins, c’est le patronat qui paie, pas le contribuable. Et puis, le service rendu aux victimes, aux témoins de drames n’en est peut être pas véritablement un. Il y a aussi des risques de fixation du traumatisme subit indirectement quand on vient vous expliquez que vous venez d’en subir un et que vous risquez d’en souffrir toute votre vie si vous ne vous exprimez pas en vidant votre sac devant un professionnel.
Le recours au tout psychologique a pour corollaire l’inflation du tout judiciaire. En effet, lorsque l’on vous a fait comprendre que vous êtes quelqu’un digne d’intérêt parce que votre voisin a été tué à coups de hache, ou que votre car ne se serait pas retrouvé dans le fossé si la compagnie de transport avait suivi toutes les procédures de sécurité, que le maire du patelin aurait dû faire établir des ronds-points à grand frais dans sa commune et qu’à cause de ces irresponsables vous allez souffrir psychologiquement pendant des années parce que votre voisin de siège s’est cassé la clavicule dans l’accident, alors il vous vient rapidement le désir revendicatif et l’espoir de toucher quelque chose au titre du préjudice moral.
Souvent, après avoir été requinqué par le psychologue, le témoin, le rescapé, bref celui ou celle qui n’a pas souffert grand-chose est mûr pour devenir plaignant. Un plaignant qui va au tribunal stimulé par une démarche bipolaire. D’abord, le désir vindicatif et punitif le motive, mais le versant mercantile de la plainte n’est pas à négliger, même s’il se drape dans les oripeaux de la juste revendication.
La société française entière a été gangrenée par un recours au légal, au pénal pour un oui ou pour un non. La victime expiatoire a été remplacée par le coupable expiatoire qui permet à la fois de toucher des indemnités sonnantes et trébuchantes, mais aussi de considérer la justice comme l’émonctoire de la peur. Il y a aussi de nos jours, du Millénarisme dans le recours au juridique ainsi que du sacré. Le citoyen a une peur irraisonnée de Fin du Monde, d’Apocalypse et de Jugement dernier. L’environnement, de potentiellement dangereux, devient ressenti comme obligatoirement hostile. Manger un fruit, un bonbon, une salade ou un kebab, c’est s’exposer aux pesticides, aux cancérigènes et aux germes et de ce fait rechercher un bouc émissaire à dénoncer avant même le premier incident. Aller dans un parking toute seule, c’est prendre le risque d’un viol. Envoyer ses enfants en car scolaire, c’est la très forte probabilité de l’accident « qui aurait pu être évité » ou alors de tomber sur un chauffeur pédophile. Les exemples se ressemblent tous dans leur essence. La peur règne en maître, elle est érigée en dogme et débitée ad libitum durant les journaux télévisés. Le citoyen pense qu’il peut, qu’il doit se protéger de l’adversité en portant plainte, espérant ainsi une juste compensation. Cette forme d’exorcisme place l’action judiciaire au niveau du sacré, si ce n’est du magique et du sacrifice propriatoire. Le recours au psychologue le renforce dans cette dérive.
Les inconvénients de la vie ordinaire n’ont cependant pas tous le tragique d’un drame atridien. Les prud’hommes, le civil et le pénal sont utiles, mais pas à tout bout de champ. Il existe des licenciements abusifs évidents, certains inconscients peuvent laisser déambuler une meute de bergers allemands sans surveillance devant une école maternelle. Le viol, l’attaque à main armée et le meurtre, fût il petit et entre amis doivent avoir une réponse pénale avec sanction et réparation matérielle, c’est évident.
Mais en plus de la démarche individuelle, il se développe une stratégie collective de la plainte. Les associations de consommateurs et de victimes se comportent de plus en plus en associations de malfaisants, si ce n’est de malfaiteurs. Ces groupes se portent partie civile, le plus souvent non pour faire éclater la vérité et faire châtier le coupable, mais pour faire condamner un responsable avant tout solvable. Il est remarquable de constater que les « lampistes » ne paient quasiment jamais, même quand ils sont véritablement impliqués dans une affaire pouvant déboucher sur des dommages et intérêts. Les associations savent que les subalternes ne sont pas solvables et sont souvent défendus bec et ongles par les syndicats. Il est nettement plus rentable de se retourner contre l’Etat, une compagnie aérienne, une grosse entreprise, un médecin, un maire ou un architecte si on espère une forte indemnisation. Ce comportement participe à l’inflation judiciaire et à la pénalisation, mais aussi à l’inflation tout court, car les coupables potentiels sont obligés de se couvrir en s’assurant et en créant des provisions pour frais de justice.
Par contre, le « Respect pour Farid ! » scandé aux alentours d’une cité après le décès d’un délinquant est beaucoup plus significatif d’un désir revendicatif incantatoire, d’une recherche de reconnaissance, voire d’une forme de victimisation. A l’inverse, il ne s’agit pas de l’influence de la télévision sur le citoyen, mais de l’imprégnation des médias et de la classe politique par un cri venu du peuple. Le mot respect étant ensuite récupéré avec démagogie à des fins électorales par les politiciens de tous bords.
De nos jours, le milieu judiciaire lui permet d’exprimer sa citoyenneté. Le Français rejoint le thème aphorique, « Je plaide donc je suis ! ». Plaider reviendrait à une démarche identitaire individuelle.
L’accent mis sur le lien ressenti par le plaideur entre la sanction et le dédommagement. Le « quelqu’un doit payer » est devenu le leitmotiv du plaignant. On a gloussé sur le fameux « responsable mais pas coupable ». Personnellement, je ne vois pas le mal dans cette réplique, peut-être du bon sens. En terme trivial, on pourrait dire : « Si je ne peux obtenir les cinq mois ferme minimum requis contre le coupable, je veux au moins un gros paquet de fric ! Les deux ensembles, ça ne serait pas plus mal ! » Cette dérive explique en parti pourquoi de nombreux maires de petites communes hésitent à se représenter, craignant de se retrouver au pilori et leur compte en banque vidé à la suite de la chute d’un arbre sur une poussette par jour de grand vent.
L’ « américanisation » des comportements de la société française est de plus en plus visible dans le domaine médical. Les plaintes sont de plus en plus fréquentes et le médecin n’est plus le notable respecté de jadis mais une volaille à plumer. Les vrais canailles médicales, cependant passent encore entre les gouttes car bien organisées. Mais les malchanceux, responsables de fautes professionnelles, condamnables mais compréhensibles sont de plus en plus attaqués. On n’a cependant pas atteint en France le niveau américain avec ses avocats véreux attendant les patients à la sortie de la clinique avec un formulaire pré rempli. La première conséquence de cette dérive procédurière se retrouve dans les tarifs des assurances des professionnels de santé et de ce fait dans le déficit de la sécurité sociale.
La solution passerait donc par une éducation juridique du citoyen. Beaucoup de français n’ont qu’une idée très vague de la différence entre une infraction, un délit et un crime. Peu savent ce qui relève du civil, du pénal ou des assises. Cet enseignement devrait être acquis à l’école, mais on lui préfère les activités d’éveil. On est mal parti quand on regarde la télévision ou bien quand on lit la presse populaire qui a érigé le fait divers en fait historique. La pire catégorie de ces nouveaux Fouquier-Tinville veut pénaliser tout ce qui est potentiellement agressif même au niveau subjectif. Tirer un colvert hors saison, stationner sur une place de handicapé, ne pas indiquer un colorant sur un emballage, ne sont que des infractions bénignes ne méritant qu’une simple amende quelquefois amnistiable. Mais, ces adulateurs dévoyés du droit voudraient les voir pénalisées et sanctionnées, regrettant le temps des galères et du bagne pour le vol d’un pain.
La France s’américanise au niveau de ses comportements : recours au religieux, au psychologique, au pénal, au règlement en permanence. De nombreuses plaintes qui finalement entravent l’application de la justice, la recherche de coupables et de responsables à tout prix paralyse les institutions. Les Français s’orientent vers cette dérive américaine qui les rend de plus en plus processifs et intolérants et de moins en moins résistants à l’adversité.
Peut-être en arriverons nous un jour à un pays de geignards et de procéduriers, totalement incapables de réagir aux moindres vicissitudes et inconvénients de la vie quotidienne
Georges Yang
12/08/2009
http://www.agoravox.fr/actualites/societe/article/vers-l-infantilisation-et-l-60107
« Citoyen français. Entre Nairobi et Paris, mais me tenant au courant de l’actualité ! Médecin vivant dans le monde arabe et en Afrique centrale et de l’est depuis 1976
Intéressé autant par mon métier que par les diversités culturelles quoique hostile au métissage culturel synonyme de Mc Donald en Afrique, de pizzeria à Athènes et d’appauvrissement de la langue en banlieue »
Correspondance Polémia
19/08/2009
Georges Yang
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mardi, 01 septembre 2009
Sur la famille: citation de Talcott Parsons
Citation de Talcott Parsons:
“Que peut-on dire des fonctions de la famille, c’est-à-dire de la famille nucléaire et isolée?
Les fonctions de la famille dans une société hautement différenciée ne doivent pas s’interpréter comme des fonctions qui impliquent directement la société mais qui impliquent plutôt la personnalité... C’est parce que la personnalité humaine n’est pas simplement “née” mais doit être “faite” par le truchement d’un processus de socialisation que la famille est nécessaire en première instance. Les familles sont les ateliers qui produisent les personnalités humaines.
Nous suggérons dès lors que les fonctions de base, les fonctions irréductibles, de la famille sont au nombre de deux: d’abord, elles assurent la première socialisation des enfants jusqu’au moment où ceux-ci peuvent devenir des membres à part entière de la société au sein de laquelle ils sont nés; ensuite, elles contribuent à stabiliser les personnalités adultes de cette même société”.
00:15 Publié dans Sociologie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : famille, citations, sociologie, talcott parsons | | del.icio.us | | Digg | Facebook
samedi, 20 juin 2009
Un brusque retour au stade du sauvage
"Un brusque retour au stade du sauvage" |
« Ce que certains appellent la "culture" de la rue, mais qui est en fait un modèle d'inculture, de violence, de machisme et de cruauté, se caractérise par trois traits saillants : l'identification vestimentaire (on s'habille selon le code de la rue), l'identification linguistique (on parle un langage simplifié à l'extrême) et l'identification territoriale (on règne sans partage sur un quartier ou une banlieue, d'où on peut organiser des opérations punitives).
Trois images fortes : le costume, la langue, le lieu. Théâtre ! Comme dans tout spectacle, la rue métamorphose le faux en vrai ; la laideur en beauté. Mais pour se rendre crédible, il est nécessaire de s'assurer d'un public. On va donc filmer ces scènes de rue. Et il va falloir surjouer les rôles : le happy slapping est le cœur de ce système de surenchère. On peut traduire cette activité hautement culturelle par "joyeuses baffes" : il s'agit de filmer sur son téléphone portable des scènes de violence gratuite, des coups ou des viols, dans le décor hyper-culturel du terrain vague, du passage sous voies, du métro, de la gare, de la galerie marchande, du préau. Le voyou y devient acteur masqué, brutal, lâche. Le tout est ensuite envoyé sur Internet : chacun peut se faire spectateur de l'indignité humaine.
Or cela serait impossible sans la technique actuelle : téléphone portable, vidéo, Internet. Comment ne pas voir que le happy slapping n'est que la pointe d'un monde suburbain et violent, qui a banni toute dimension autre que technique ? Notre stade d'évolution est parvenu à sa phase hyper technique, et qui sait si ce n'est pas celle du brusque retour au stade du sauvage ? On assiste au retour du crétin avec sa cohorte de violences, de gorilleries et de borborygmes inarticulés que les intermittents de l'intelligence s'obstinent à appeler culture. »
Jean Romain, philosophe, Le Matin Dimanche, 14 juin 2009 |
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mercredi, 13 mai 2009
le mariage transformé par ses célibataires mêmes
Le mariage transformé par ses célibataires mêmes
par Philippe Muray, écrivain* - Ex: http://www.communautarisme.net
Par-delà le néo-mariage, et quelques autres revendications divertissantes, c’est la réduction au silence du moindre propos hétérodoxe qui se profile, c’est l’écrasement légal des derniers vestiges de la liberté d’expression, c’est la mise en examen automatique pour délit de lucidité.
Le mariage est une invention qui remonte à la plus haute antiquité. Je parle du mariage à l’ancienne, cette institution conformiste, vermoulue et petite-bourgeoise qui véhicule depuis la nuit des temps « les valeurs hétéro-patriarcales et familialistes » pour m’exprimer comme Christophe Girard et Clémentine Autain. Sauf erreur de ma part, cette mémorable conquête n’a pas été arrachée, l’arme à la main, de nuit, dans la précipitation et sous la menace des pires représailles, par une petite bande de fanatiques de la nuptialité bien décidés à se servir de la lâcheté des uns, de l’ambition des autres, de la démagogie tremblotante de tous, pour faire triompher leur cause. Nulle part ce type de mariage ne paraît avoir été imposé par la force. Ni en jetant à l’opinion publique un fatras précipité de raisonnements contradictoires afin d’extorquer d’elle, par sondage, une approbation apeurée. Il n’est pas davantage le fruit d’une volonté claironnée de mettre à genoux le pouvoir politique. Aucun gouvernement, à ma connaissance, n’a cédé aux partisans de la conjugalité dans la crainte de se voir accusé de gamophobie (du grec gamos, mariage).
Y a-t-il même eu « débat », à propos de cette importante « question de société », chez les Égyptiens pharaoniques, à Babylone, en Inde, à Lascaux, entre psychanalystes lacustres, sociologues troglodytes, militants de l’un ou l’autre bord ? En a-t-on discuté, dans le désert de Chaldée, à la lueur de la Grande Ourse ? A-t-on menacé de ringardisation les adversaires de cette nouveauté ? Les a-t-on accusés de ne rien comprendre à l’évolution des mœurs, de s’accrocher à des modèles désuets, d’alimenter la nostalgie d’un ordre soi-disant naturel qui ne relève que de la culture ? La Guerre des Games (de gamos, mariage, je ne le répéterai plus) a-t-elle eu lieu ?
Il semble bien que non. La chose, c’est horrible à dire, s’est faite toute seule, suivant la pente de l’espèce, laquelle sait si bien jouer sur les deux tableaux pour protéger ses intérêts, manier en même temps la carotte et le bâton, l’appât et l’hameçon, le désir de satisfaction sexuelle des individus et ses propres nécessités vitales de perpétuation, et emballer cela dans les mirages vaporeux de la pastorale romantique.
On a tout essayé, par la suite, avec le mariage. On l’a plié dans tous les sens. On a tâté de la polygamie, de la bigamie, de la monogamie, de l’adultère, du divorce à répétition, du mariage forcé, du mariage civil, du mariage religieux, du mariage d’argent, du mariage raté. On a même vu des mariages heureux. On a vu des mariages stériles et d’autres féconds, des unions dramatiques et des noces de sang. On en a fait des vaudevilles et des tragédies. Avec des placards pleins d’amants, des cocus en caleçon, des maîtresses acariâtres. Le mariage, en résumé, n’a été inventé que pour fournir des sujets de romans et pour assurer la chaîne sans fin des générations ainsi que le veut l’espèce.
Il n’en va pas exactement de même du futur mariage homosexuel, dont la genèse aura laissé tant de traces, à l’inverse de l’autre, qu’il sera aisé de la reconstituer. C’est que cette nouveauté ne va pas de soi, comme d’ailleurs la plupart des opérations expérimentales de notre temps. L’époque moderne, dont l’essence même est le soupçon dans tous les domaines, explose en cette affaire dans une sorte d’opéra-bouffe stupéfiant où la mauvaise foi et le chantage se donnent la réplique inlassablement. C’est d’abord le code civil qui a été instrumenté. On a prétendu qu’il n’y était stipulé nulle part que le mariage était réservé aux personnes de sexe opposé. Les homosexuels militants se sont engouffrés dans cet « oubli » pour exiger, au nom de l’égalité des droits, « l’accès des gays et des lesbiennes au mariage et à l’adoption ». L’exigence d’égalité est la grosse artillerie qui renverse toutes les murailles de Chine. La marche sans fin vers l’égalité absolue remplace, chez les minorités dominantes et furibondes, le défunt sens de l’Histoire. Pour ce qui est du code civil, d’abord paré de toutes les vertus, il n’a plus été qu’une sorte d’opuscule diffamatoire sitôt qu’on découvrit l’article 75, qui détermine que le mariage consiste à « se prendre pour mari et femme ». Peu soucieux de logique, les militants de la nouvelle union conclurent aussitôt à l’urgence d’une refonte de ce code que, l’instant d’avant, ils portaient aux nues. Et, en somme, puisque la loi est contre les homos, il faut dissoudre la loi.
En quelques jours apparurent les étonnantes notions de « mariage fermé » (antipathique, hétéro) et de « mariage ouvert » (sympathique) puis « universel » (supersympa). On publia des sondages dans lesquels la société française déclarait qu’elle était d’accord pour applaudir aux évolutions de la société française, mais de grâce, qu’on arrête de lui brailler dans les oreilles. Les partisans du néo-mariage expliquèrent à la fois qu’il ne fallait pas interpréter leur demande comme une volonté de normalisation ou comme un désir d’imitation mais qu’il y avait de ça quand même, et que d’ailleurs ils se moquaient des institutions dont ils étaient exclus, sauf que le seul fait d’en être exclus leur apparaissait comme un outrage. Réclamant en même temps le droit à la différence et à la similitude, exigeant de pouvoir se marier par conformisme subversif et pour faire « un pied de nez à la conception traditionnelle du mariage » (comme l’écrivent encore les impayables Christophe Girard et Clémentine Autain), ils affirmaient aussi que ce même mariage, à la fois convoité et moqué, revendiqué pour être rejeté, et de toute façon transformé s’ils y accédaient jusqu’à en être méconnaissable, serait un remède souverain contre « l’alarmant taux de suicide » qui sévit chez les jeunes homosexuels, ce qui laisse supposer que ces derniers se suicident tous par désespoir de ne pouvoir convoler officiellement. On aurait pu imaginer d’autres motifs.
Mais ces réflexions tomberont très bientôt sous le coup des lois anti-homophobie qu’un gouvernement vassalisé par les associations se prépare en toute sottise à faire voter. Mieux vaut donc se taire. Par-delà le néo-mariage, en effet, et quelques autres revendications divertissantes (suppression de la mention relative au sexe sur les papiers d’identité afin d’en terminer avec les « problèmes kafkaïens rencontrés par les individus de sexe mixte, hermaphrodites, transsexuels, transgenres », ou encore « dépsychiatrisation des opérations de changement de sexe »), c’est la réduction au silence du moindre propos hétérodoxe qui se profile, c’est l’écrasement légal des derniers vestiges de la liberté d’expression, c’est la mise en examen automatique pour délit de lucidité. Il est urgent que personne ne l’ouvre pendant que se dérouleront les grandes métamorphoses qui s’annoncent, dont ce petit débat sur l’effacement de la différence sexuelle est l’avant-propos. Le néo-mariage, dans cette affaire, n’est que l’arbre baroque qui cache la prison.
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Ce texte a été publié dans une version légèrement réduite sous le titre "La guerre du mariage a-t-elle eu lieu ?" dans Marianne (18/09/2004, page 79). Cette version intégrale est reproduite avec l'autorisation de l'auteur.
*Philippe Muray est l'auteur de nombreux ouvrages, dont Après l'histoire, Belles Lettres, 2002.
Voir aussi sur le site de l'Observatoire du communautarisme : Les démons, par Philippe Muray
Photo de Philippe Muray : droits réservés (HANNAH/OPALE - 18, rue des Quatre Fils - 75003 Paris)
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dimanche, 26 avril 2009
La tyrannie technologique - Critique de la société numérique
La Tyrannie technologique :
Critique de la société numérique
Présentation de l'éditeur
Après le travail et le sommeil, la troisième activité des Occidentaux est de regarder la télévision. 80% de la population française possède un téléphone portable contre moins de 5% dix ans plus tôt. Créée en 1998 dans un garage, la société Google est aujourd'hui cotée en bourse et valorisée à plusieurs milliards de dollars. Au cours des dix dernières années, les ventes d'antidépresseurs ont doublé. Les nouvelles technologies, fer de lance et alibi d'une industrie obsédée par la rentabilité, participent chaque jour un peu plus à la destruction du lien social et à la disparition des formes anciennes de sociabilité, d'organisation du travail et de la pensée. Leur diffusion massive et leur omniprésence posent les bases d'une véritable mutation anthropologique comparable à l'apparition de l'écriture. Si l'alphabétisation fut bien souvent la compagne de l'émancipation, les technologies contemporaines préparent et organisent un monde fondé sur la vitesse, l'immédiateté, la superficialité, le profit et la mort. Ecrit par plusieurs auteurs tirant leurs réflexions de leurs travaux militants ou universitaires, La Tyrannie technologique dresse un panorama lucide et percutant de l'emprise des nouvelles technologies sur notre vie quotidienne.
Collectif, La Tyrannie technologique : Critique de la société numérique, Ed. L'échappée, 2007.
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jeudi, 09 avril 2009
Image de la femme dans les médias: nocif pour les jeunes filles
Image de la femme dans les médias : nocif pour les jeunes filles
Le rapport définit la « sexualisation » comme le fait de présenter la femme comme un objet sexuel qui n’aurait d’autre valeur que l’attirance qu’elle exerce à travers son comportement. Les effets nocifs que la « sexualisation » entraîne vont des troubles alimentaires à la dépression. L’étude ne se penche que sur les effets nocifs physiques, n’entrant pas dans le domaine moral qu’il est nécessaire cependant de rappeler ici : l’image dégradante de la femme répandue par les médias et une très forte incitation à une conduite sexuelle désordonnée et immorale.
Exemples de « sexualisation » dénoncés par le rapport :
– Les jeunes « pops stars » présentées comme des objets sexuels
– Les poupées vêtues de façon racoleuse, ainsi que les mêmes « vêtements » pour petite-fille de sept ans : bustiers, bas-filet, etc.
– Les modèles féminins adultes habillées comme des petites filles.
Le groupe d’étude s’est constitué à la suite d’une inquiétude répandue aujourd’hui dans le public familial à la vue des « modèles » présentées par les médias pour les petites filles et les adolescentes. Le Dr Eileen Zurbriggen, qui a dirigé le groupe d’étude de l’American Psychological Association, et qui est professeur associée à l’Université Santa Cruz de Californie déclare : « les conséquences de la sexualisation des filles par les médias sont très réelles. Nous avons d’amples preuves pour conclure que la sexualisation entraîne des effets négatifs dans un grand nombre de domaines, incluant le fonctionnement des connaissances et la santé physique et mentale ». En conséquence, le groupe d’étude recommande aux parents, aux éducateurs et aux professionnels de santé d’être en alerte sur l’impact que celle-ci peut avoir sur les petites filles et les adolescentes. D’un simple point de vue de santé psychologique, il est urgent de combattre les images représentant les filles comme des objets sexuels.
Un exemple parmi bien d’autres cités, est celui d’une publicité avec la pop-star Christina Aguilera habillée en écolière, la chemise largement déboutonnée et une sucette dans la bouche. Le Dr Zurbriggen ajoute : « En tant que société, nous devons remplacer toutes ces images sexualisées par d’autres, montrant la compétence et les valeurs propres aux filles. Le but devrait être de délivrer un message, aussi bien pour les garçons que pour les filles conduisant à un développement du comportement beaucoup plus sain.»
Les recherches systématisées par ce groupe d’étude montrent que ces images et la promotion des filles comme des objets sexuels entraînent de nombreuses conséquences nocives pour la santé psychologique et le développement des jeunes filles.
« Les magazines pour adolescentes ne parlent que de sexualité »
Le Pr. Andrew Hill, professeur de psychologie médicale à l’Université de Leeds, a déclaré qu’il était difficile d’être en désaccord avec les conclusions du rapport. « Si vous regardez les magazines pour adolescentes, on n’y parle que de sexe », a-t-il notamment déclaré. « Nous sommes une société absorbée par le « visuel ». Notre opinion sur les personnes est dominée par leur apparence, la façon dont elles se présentent ». Pour lui, l’utilisation par les médias de l’image des femmes comme des objets sexuels est un sujet important à résoudre.
« Seulement 18% de ce que regardent les enfants à la télévision correspond à l’horaire et aux programmes qui leur sont destinés et la législation ne peut pas être la solution pour tout. « Une des clés est la responsabilité sociale, celle des annonceurs et des médias. Ils doivent être conscients que leurs produits et les images associées avec ces produits ont un impact et que ce n’est pas toujours un bon impact ».
Source : Avenir de la culture
Via Novopress Quebec
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jeudi, 26 mars 2009
Sogni casalinghi per i figli della crisi
di Claudio Risé - 10/03/2009
Fonte: Claudio Risè [scheda fonte]
Anche se gli episodi di cronaca fanno grande impressione, la devianza giovanile perde, complessivamente, slancio e attrattiva. Come illustrato, naturalmente, dallo star system, dove tra i giovani vende, e vince premi, l’acqua e sapone Arisa, con i suoi occhialoni, cantando come ami sognare «una casa/con un balconcino con le piante/ e un angolo cottura bello grande». Aspirazione per nulla trasgressiva, o eversiva. A cosa dobbiamo questa imprevista mutazione nei sogni e stili giovanili?
Anche questa è una conseguenza di ciò che sta accadendo nel mondo. Quando le risorse diminuiscono bruscamente, a essere abbandonati (o almeno a ridursi notevolmente) sono innanzitutto i comportamenti estremi, quelli più lontani da dove scorre il flusso vitale. Come nelle piante: quando una rosa si ammala, il giardiniere comincia a tagliare le propaggini più lontane, per ridare vitalità al fusto.
Nel corpo sociale ciò avviene naturalmente: quando le energie diminuiscono, i comportamenti distruttivi, che nei periodi di abbondanza appaiono quasi irresistibili ai giovani non ancora entrati nel ciclo produttivo, diventano improvvisamente meno attraenti. Non si tratta di mode: quelle vi si costruiscono sopra, quando si scopre che il reggae casalingo di Elisa interessa (e vende) più di quello degli eroi della disperazione e dell’invettiva che spopolavano fino a ieri.
Sotto però c’è qualcosa di più profondo: per usare una parola un po’ grossa (ma non inappropriata) vediamo già qui in azione lo spirito del tempo (Zeitgeist). O, dal punto di vista psicologico, l’inconscio collettivo: insomma ciò che la maggior parte delle persone prova in un determinato momento storico.
L’inconscio collettivo di oggi è turbato dall’incubo della povertà, così come fino ad ieri era ipnotizzato dall’archetipo della ricchezza e della sua anche grossolana dimostrazione. Questo nuovo terrore degli adulti sposta, riposiziona, anche le aspirazioni e l’orizzonte giovanile.
Prima, quando il mondo dei «grandi» era affascinato dal grande lusso (dalle supervacanze ai «derivati» finanziari), i giovani protestavano teorizzando l’emarginazione creativa, l’opposizione politica, i costumi alternativi, la vita a rischio. Adesso, che gli adulti temono di non sapere più come andare avanti, e sembrano aver perso ogni sicurezza, i giovani (o almeno molti di loro) mettono le loro energie nel recupero dei sogni che una volta venivano definiti «piccolo borghesi».
Così mentre Arisa getta nel cestino l’immaginario delle «comuni» giovanili, cantando: «Sono stufa di vivere in una stanza in condivisione, ora quello che voglio è una casa tutta mia»; il giovane autore Christian Frascella racconta in «mia sorella è una foca monaca» un percorso di formazione di un ragazzo che invece di scolarsi una birra dopo l’altra, si trova un lavoro, una brava fidanzata e quasi è davvero felice.
È un fenomeno ricorrente nella storia umana: alla fase dello spreco succede quella della rigenerazione, del risanamento della pianta, della riattivazione delle radici. Gli interpreti più convinti di questa svolta sono sempre, per forza di cose, i giovani: quelli appunto la cui stessa vita dipende dal risanamento della pianta ammalata.
Ecco perché la trasgressione come sistema, i comportamenti a rischio, le distruzioni o imbrattamenti dei centri cittadini, sono destinati a diminuire, anche se non di colpo. Poiché infatti la vita deve continuare, proprio nell’interesse dei più giovani, che devono ancora viverla, l’attrattiva giovanile per gli immaginari distruttivi si sta riducendo rapidamente. Mentre tornano impegni e speranze.
Tante altre notizie su www.ariannaeditrice.it
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mercredi, 25 mars 2009
Gewelddadige spellen
Gewelddadige spellen
Geplaatst door yvespernet
Naar aanleiding van de schietpartijen in scholen is het debat weer opgelaaid over gewelddadige spellen. Nu zouden er weer extra controlemechanismen moeten komen op spellen en anderen willen dan weer dat gewelddadige spellen gewoon niet meer op de markt komen. De daders van deze gruweldaden zouden immers geïnspireerd zijn door gewelddadige spellen en de oplossing zou dan toch simpel zijn? Gewoon heel die boel afschaffen en de overblijvende spellen sterk laten controleren.
Wel beste mensen, die controlemechanismen op spellen bestaan al. Die controlemechanismen heten verantwoordelijke ouders die weten waarmee hun kinderen bezig zijn. Ouders die interesse tonen in wat hun kinderen doen. Natuurlijk heeft elk kind ook geheimen voor zijn of haar ouders, maar als ouder is het maar een zeer kleine moeite om te zien welke beelden verschijnen op het televisie- of computerscherm. Er zullen altijd zonderlingen zijn die geschift zijn en dan daarenboven ook gewelddadige spellen spelen. Maar volgens mij zijn het eerder de daders van zulke daden die zich aangetrokken voelen tot gewelddadige spellen dan de spellen die mensen zouden aanzetten tot het plegen van extreme gewelddaden. Ouders van zulke figuren kunnen natuurlijk zeer weinig doen tegen de daden van hun kinderen, maar zij kunnen wel een rol spelen bij gewone kinderen om het geweld te kaderen en in te grijpen waar nodig. Ik zeg niet dat bij de schietpartijen ouders hun verantwoordelijkheid hebben ontlopen, verre van zelfs. Maar het waren dan ook personen met grote mentale problemen, niet gewone mensen die na een paar spelletjes te spelen opeens bedachten dat hun school overhoop schieten wel eens “tof” zou kunnen zijn.
Persoonlijk ben ik een relatieve “hardcore gamer”. Ik heb dan ook vele “extreem gewelddadige” spellen gespeeld. Noem ze maar op en er is een grote kans dat ik gespeeld heb en nog steeds in mijn bezit heb. Carmageddon I en II, de GTA-serie, Counterstrike, Diablo I & II, Manhunt, etc… Nooit heb ik echter de neiging gevoeld om mijn school overhoop te gaan schieten, mensen op straat voor punten te gaan dood rijden of andere extreme gewelddaden. Dat sommigen vol overtuiging wijzen naar die spellen is mijn inziens dan ook een ontlopen van verantwoordelijkheden. De beste controlemechanismen zijn de ouders. Als men een spel koopt, staat het al vol met waarschuwingen. Zo ben ik een grote fan van de Europa Universalis-reeks. Daar worden rijken gebouwd, legers de dood ingestuurd en mensen al dan niet vrijwillig tot een bepaalde godsdienst bekeerd. Het is minder grafisch dan een Counterstrike, maar in de kern is het wel pakken erger.
Ook het focussen op Counterstrike is compleet onnodig. Dat is een onschuldige mod van de Half Life-serie waar het er nog heel braafjes aantoe gaat. Het is wel enorm bekend en enorm graag gespeeld, maar om nu te zeggen dat het extreem gewelddadig is… Dan is bv Manhunt of GTA pakken “erger”, maar ik blijf erbij dat zo’n spellen mensen niet aanzetten tot moorden. Een spel als voornoemden kan volgens mij zelf als uitlaatklep dienen. Daarbij, als ze de grote sector van videospellen nog meer willen reglementeren, een sector die trouwens nog wel winst kent, dan gaan ze wel op internet spellen zoeken. Gamefudge.com, kongregate.com, etc… Er zijn nog tonnen meer websteks waar je gratis Flash-spellen kan spelen die bij momenten honderd keer gewelddadiger zijn dan wat je in de winkel kan kopen.
00:30 Publié dans Sociologie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : jeux violents, violence, actualité, sociologie, phénomènes de société | | del.icio.us | | Digg | Facebook
vendredi, 20 mars 2009
Sociologie de la violence des jeunes
Sociologie de la violence des jeunes |
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« Il y a un manque d'autorité qui structure le caractère. Aujourd'hui, les parents sont souvent les amis-confidents de leurs enfants. Ce qui nie un rapport générationnel indispensable. Avant, on recevait une éducation basée sur l'interdit. Cela permettait d'apprendre les limites. Il est important, entre autres, de pouvoir s'opposer à ses parents à une certaine période de sa vie, de pouvoir se révolter. Cela contribue à structurer son identité et à développer un sens moral mais aussi d'appartenance sociale. […]
Les jeunes vivent de plus en plus devant leurs ordinateurs. Certains parmi eux ont peu de contacts avec l'extérieur, se retrouvent isolés. Les adolescents qui disjonctent sont souvent des personnes inhibées, qui se replient face à l'écran. Ils n'ont plus de relations avec l'autre, ne le sentent plus. Bref, l'autre est désincarné. Par ailleurs, quand on est mal à l'aise avec ses propres sentiments, on peut réagir par la violence ou l'on s'organise autour d'elle. C'est ce qu'on voit dans Orange Mécanique, qui était un film précurseur.
professeur Panteleimon Giannakopoulos, psychiatre aux Hôpitaux universitaires de Genève, interviewé par Le Matin, 13 mars 2009 |
00:44 Publié dans Sociologie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : sociologie, actualité, moeurs contemporaines, psychologie, violence, jeunes, jeunesse, éducation, école | | del.icio.us | | Digg | Facebook
vendredi, 27 février 2009
Introduction à la novlinguistique
Métapolitique - Introduction à la novlinguistique
par Georges Feltin-Tracol - http://www.europemaxima.com
Depuis sa création en 2002, la fondation Polémia animée par Jean-Yves Le Gallou mène un combat permanent contre la pensée conforme et la volonté mondialiste d’indifférenciation des peuples, des cultures, des États, des personnes et des traditions.
N’hésitant pas à braver les oukases du politiquement correct, Polémia conduit une véritable guérilla métapolitique dont bien des actions détonnent sur le champ de bataille des idées. Pour preuve, la parution dernière du Dictionnaire de novlangue accompagné de La Bataille du vocabulaire. Disponible à la fois en format informatique et en fascicule, l’essai dénonce le détournement des mots et l’abêtissement de nos compatriotes qui s’en suit.
Achevé en janvier 2009, ce Dictionnaire connut un premier succès cet été quand certaines définitions furent publiées sur le site Novopress. La réussite de la première journée d’étude sur la réinformation du 25 octobre 2008 a incité Polémia à le publier. Saluons cette nouvelle arme dans la guerre culturelle en cours !
Novlangue est un clin d’œil à l’expression d’Orwell dans son célèbre roman 1984 ; c’est aussi un appel au réveil des Français d’Europe contre l’insidieux conditionnement sémantique ambiant. Il faut comprendre que « le novlangue, essentiellement une “ langue parlée ”, pour ne pas dire un sabir incompréhensible pour tout non-initié, est en permanence évolutif et ne demande qu’à grandir au détriment de la belle langue française si riche en nuances au service de l’écrit et de l’oral ». Il se combine souvent à l’anglicisme, voire au franglais, afin de donner à son message un air de modernité et de sophistication.
Pourquoi est-il si important de s’intéresser à cette novlinguistique ? Comme le rappelle La Bataille du vocabulaire, « le taux d’exposition des citoyens aux médias est élevé et tend à augmenter ». Le Français moyen passe environ trois heures par jour devant la lucarne allumée. Et il faut maintenant comptabiliser le temps passé devant l’écran d’ordinateur non pas pour consulter l’excellent site de Polémia ou Europe Maxima (ou d’autres sites amis), mais plus sûrement pour aller sur des sites commerciaux quand il ne s’agit pas de sites porno !
Le sens des mots est primordial dans un combat culturel et identitaire, spécialement quand le discours officiel proclame la fin des idéologies. En fait, « nous vivons dans un monde idéologique, c’est-à-dire façonné par l’idéologie dominante qui définit seule la normalité. L’idéologie dominante est au service de la super-classe mondiale et de son projet, en particulier du projet qu’elle a pour les peuples européens. Le fait qu’elle ait progressivement presque éliminé toute expression contraire pourrait donner à penser que cette idéologie n’en est pas une et qu’elle traduit tout simplement “ la vérité ” ».
Décrypter la portée exacte des mots de la novlangue (la brochure emploie le masculin, nous le féminin, preuve de son caractère profondément indifférencié) contribue à contester cette vérité univoque et totalitaire.
Comment donc procéder ? Cinq catégories lexicales servent de repères :
« - les mots trompeurs, qui ont changé de sens et qui signifient souvent le contraire de ce qu’ils exprimaient auparavant ; » (l’un des plus anciens et des plus connus n’est autre que le fameux énervement qui signifie le contraire de ce qu’on croît aujourd’hui) ;
« - les mots subliminaux, qui sont utilisés pour produire certains effets de répulsion ou d’approbation chez le récepteur ;
— les mots marqueurs, qui expriment l’idéologie dominante et traduisent le fait que celui qui les emploie fait partie de la classe dominante ;
— les mots tabous, qui correspondent à des concepts que l’idéologie dominante s’efforce de supprimer ;
— les mots sidérants, qui visent à disqualifier les adversaires du Système ».
Voici un petit échantillon :
• « BLOND, BLONDE. Qualificatif subliminal dévalorisant aux yeux de la nouvelle classe dominante, qui préfère les Noirs et les métis ; curieusement les histoires anti-blondes ne gênent pas les féministes ni les antiracistes professionnels. »
Ajoutons que ces histoires « blondophobes » s’apparentent aux fameuses blagues belges qui pourraient être jugées pour le moins xénophobes et discriminatoires. À quand donc une législation pour réprimer ces manifestations de racisme ? Gageons que féministes extrémistes et antiracistes alimentaires y verraient une atteinte à la liberté d’expression et au droit à l’humour…
• « CITOYEN. Mot trompeur : ce substantif, devenu adjectif, caractérise ce qui se conforme à l’idéologie dominante (ex. : trier ses déchets est un “ comportement citoyen ”) (trad. : moutonnier, docile). »
On peut se demander si, de nos jours, Panurge n’aurait pas troqué son troupeau pour des citoyens…
• « INGÉRENCE. Terme marqueur : connoté positivement désormais dès lors qu’elle prétend se faire au nom de “ l’humanitarisme ” ou du “ maintien de la paix ” (trad. : violation). »
On continuerait ainsi la lecture des quelques trois cents définitions tout aussi coruscantes les unes que les autres. Par cette brochure, Polémia éclaire le travestissement et la mutation de la sémantique par l’idéologie dominante dont les mots d’ordre (de désordre plutôt) sont ensuite repris et répercutés par les médias, les entreprises, l’école, le sport…
Saluons enfin la volonté de l’opuscule de s’inscrire dans notre époque et non au siècle dernier. À l’article « droite, gauche », on lit en effet avec plaisir : « Termes trompeurs ayant perdu toute pertinence à la fin du XXe siècle depuis que la gauche socialiste et communiste s’est ralliée à l’économie de marché et que la droite a adopté l’idéologie égalitaire et cosmopolite des socialistes. Ne désigne plus que des itinéraires personnels et des ancrages locaux différents (trad. : partis au pouvoir). » Ce clivage politicien et électoraliste est désormais désuet, d’autant que l’idéologie dominante, elle, « emprunte à la fois à la mémoire de gauche (égalitarisme, cosmopolitisme, ingénierie sociale) ; et à la doctrine libérale anglo-saxonne (discours sur la dérégulation [aïe ! bonjour l’anglicisme pour « déréglementation » !], la réduction de l’État, la mondialisation, l’ouverture des sociétés, la volonté de substituer la morale et le pouvoir des juges à la souveraineté politique). […] On notera que cette idéologie correspond parfaitement à la sociologie du monde médiatique qui est intellectuellement de gauche […] lié à l’univers marchand ».
Dorénavant et pour les prochaines décennies, la ligne de fracture s’organisera autour des notions d’identité et de mondialisme, d’altérité et d’uniformité. Pour le camp identitaire, c’est un impératif de maîtriser le vocabulaire, car son âme en dépend. Le Dictionnaire de novlangue est donc un auxiliaire précieux.
Georges Feltin-Tracol
• Polémia, Dictionnaire de novlangue suivi de La Bataille du vocabulaire, 2009, 63 p., 10 €, à télécharger sur son site (www.polemia.com) ou à commander pour 15 € (port inclus) à Polémia, 60 ter, rue Jean-Jacques-Rousseau, F - 92 500 Rueil-Malmaison, France.
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mercredi, 04 février 2009
Negras perspectivas para el hombre europeo
Negras perspectivas para el hombre europeo
http://elfrentenegro.blogspot.com/
Oswald Spengler, ya sabía lo que iba a pasar. Lo decía con un tono, que a pesar suyo, era profético. Y digo a pesar suyo porque "Años decisivos”es un libro que ha sido escrito con descarnada objetividad. No nos impone nada, no nos quiere convencer de lo que dice, lo sabe cierto, no necesita un esfuerzo retórico para convencernos de lo que el autor sabe que será real, sino sólo decirlo bellamente. Los que lo pueden entender lo entenderán, los otros, no lo entenderán nunca. Todo está escrito allí, en 1933. Así son los sabios, los magos, los profetas.
Me resistí a la tentación de citar algunos pasajes del libro. Hubiera sido una falta de respeto, porque todo el libro es una sola cita. Confieso que me corrió un frío por la espalda al releer algunos párrafos. Una cosa es aventurar que algo va a ocurrir, y otra cosa es verlo frente a nuestras narices, exactamente como alguien lo anticipó, hace ya setenta y cinco años.
Todo lo que se gesta en la historia es algo que los adelantados a su época dicen que va a pasar, y casi nadie los escucha. Luego, los hechos aparecen en la realidad, y todos se miran entre sí sin saber qué hacer.
Vemos que la mayoría de la descendencia europea son personas por lo general más preocupadas por el modelo de sus automóviles que por sus propios hijos, si es que los tienen, ya que tener hijos afecta su nivel de vida y a su hedonismo. Son unos soberbios desagradables, convencidos que su tarjeta de crédito es el pasaporte al paraíso.
Las clases medias son todavía, en Europa o en América del Sur, en su mayoría de origen europeo, y ésa es la trampa, el vaciamiento y la traición, porque se han convertido en gente sin voluntad de nada que no sea consumir y girar en la rueda de la economía capitalista, porque piensan que ellos van a girar siempre con ella.
Abandonaron toda la historia de sus antepasados, por la tarjeta de crédito y un automóvil, y por otras cosas peores; pero hay algo que ellos no saben, y es que aún para conservar ciertos beneficios materiales, se necesita la capacidad de defenderlos, y esa capacidad, ya casi ningún descendiente de europeo la conserva. Tienen el dinero vacío que el sistema les da, pero lo perderán como perdieron todo lo demás. Sólo les funciona la cabeza para hacer unos numerillos que en el fondo los angustian, porque están llenos de incertidumbre, y para alejarla, se despiertan un día, enamorados de Obama, repitiendo que un mundo mejor ha llegado, y que a ellos nunca les va a pasar nada.
Ellos están siempre prontos a convertirse en cualquier cosa, para mantenerse a flote, pero para eso, uno tiene que ser admitido, por esa otra cosa en que se ha convertido.
Sudamericanos más blancos que muchos europeos actuales se convierten en indios, se arrastran, se disfrazan, pero quizá los indios no los quieran como amigos, sino como esclavos.
Los españoles pueden disfrazarse de “subsaharianos”, como se les dice ahora culposamente a los negros, pero puede ser que los negros no quieran, sino vengarse de los blancos, aunque los esclavistas fueran empresas mixtas de cazadores negros y corsarios blancos, que operaban en común, con la misma mafia comercial que luego explotaría a los obreros blancos.
Los franceses pueden ser todos progresistas, pero los descendientes de argelinos musulmanes no quieren progresistas, sino mandar ellos según sus propios principios.
Todos los europeos y su descendencia tendrán que pagar caro ser lo que son. No importa que un grupo de financieros y capitalistas de diversas razas —y no ellos— hayan sido siempre el real motivo de la explotación del hombre por el hombre.
Cuando los mercaderes vivían en Europa, eran llamados opresores, cuando trasladaron sus bases a otros continentes, y no tienen nada que ver con la verdadera Europa, todo parece estar bien. La injusticia de otros, puede considerarse parte de la revancha de las razas oprimidas, porque el racismo ha establecido que la raza blanca es deleznable en su conjunto.
No es el caso analizar ahora si los mercaderes y banqueros de la historia fueron negros, semitas o asiáticos, además de blancos, el caso es que el nuevo racismo está instalado, y es el más viejo del mundo,es el racismo de los revanchistas y de los resentidos, al servicio del poder global.
Pero recuerden los descendientes de los antiguos europeos que si bien pueden usufructuar todavía las bondades del capitalismo, no es eso lo que los diferencia de otros hombres; claro que viviendo bajo el igualitarismo de la ideología dominante lo habrán olvidado.
En el futuro, seguramente otros disfrutarán en su lugar del capitalismo, por ser más ordenados y eficientes, más astutos, o mejores esclavos, o simplemente por mantener una voluntad de lucha, incluso mediante la violencia desnuda, como la vemos hoy en las calles de cualquier ciudad del mundo.
En el futuro, los vacíos, los blandos, los consumistas progresistas, los blancos defensores de la ideología del automóvil último modelo, de la tarjeta de crédito, de los racismos ajenos, y de la revancha de los pueblos oprimidos, tendrán por fin su merecido por haber abandonado su destino trascendente, pero ya será tarde para reaccionar:perecerán del mismo modo materialista, vacío y miserable en que han elegido vivir.
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dimanche, 01 février 2009
"Signes de mort, signes de vie": identités et territoires face au mondialisme
« Signes de mort, signes de vie » : identités et territoires face au mondialisme
« Les signes de mort sont signes de vie, c’est aussi leur fonction essentielle », nous dit Jean Raspail. Les signes que nous impose chaque jour Ouest-France, que sont-ils, sinon « signes de mort » ? Mort de notre culture, de notre IDENTITE ? Il n’est que de se référer à Ouest-France du 8 décembre 2008, qui évoquait les ambitions iconoclastes de Sam Abi, agent immobilier « d’origine libanaise ». Il n’est que de se référer aux nombreux articles du même Ouest-France qui chantent les mérites de l’immigration britannique en Bretagne. Ces deux cas, au-delà de leurs différences, que révèlent-ils, sinon l’affrontement entre la liberté des marchés et celle des peuples ?
« Il part vendre les manoirs bretons aux émirats », proclame Ouest-France du 8 décembre 2008. Et d’évoquer Sam Abi, « Riécois d’origine libanaise ». Celui-ci, agent immobilier à Riec-Sur-Belon, se dit, avec un associé de Dubai, « décidé à commercialiser aux EMIRS les magnifiques demeures bretonnes de son catalogue », car « beaucoup de riches Arabes cherchent à acquérir des châteaux et des manoirs ». Et, après Dubai, « un autre marché au parfum de pétrole et de gaz : la Russie ». « Si les acheteurs sont sur la Lune, j’irai sur la Lune ! »
Depuis dix ans et plus, Ouest-France évoque l’achat massif de biens immobiliers par des étrangers, à plus de 80% anglophones. En Pays de Rance, en Centre-Bretagne et ailleurs, de véritables « colonies » britanniques. Plus de 60 000 personnes à ce jour, avec leurs journaux (Brit’Mag, Central Brittany Journal, Talking Point), leurs associations (Integration Kreiz Breizh), leurs émissions radiophoniques… et leurs agences immobilières (Brittany Immobilier) !
Cette vague britannique, c’est l’arbre qui cache la forêt. Car l’immigration en Bretagne, légale ou clandestine, est désormais issue du monde entier : Europe, Afrique, Asie et Amérique dite « latine ». D’autres ruptures et inflexions : une féminisation accrue, une explosion du « regroupement familial » et une tertiarisation importante des groupes sociaux. Il en est résulté une forte pression sur l’immobilier rural, sur celui du « rural profond », portée spectaculairement par l’immigration britannique, mais aussi, on le sait moins, sur l’immobilier périurbain.
Et Ouest-France nous annonce que va désormais se manifester une pression tout aussi forte sur notre immobilier patrimonial d’intérêt architectural et historique. Ce journal illustre cette pression par les ambitions de Sam Abi. Mais devons-nous pour autant négliger celles d’autres professionnels, moins exotiques et moins arrogants, mais aussi actifs ?
D’un côté, Ouest-France nous annonce les milliardaires en pétrodollars du Moyen-Orient et les oligarques russes, nouveaux acteurs de notre dépossession. D’un autre côté, le même quotidien continue de chanter ces colonies anglophones qui se constituent en enclaves protégées en zones vertes. Quel rapport entre eux, dira-t-on ? Il en existe bien un, qui est au cœur de cette stratégie mondialiste. Que se propose-t-elle ? Elle se propose d’éradiquer sur son propre territoire toute nation enracinée. Et d’y substituer de nouvelles populations qui n’obéissent qu’à leurs propres règles. Car l’ordre existant ne suscite aucun intérêt de la part du capitalisme sauvage. Nous sommes ici dans le libre marché. Il ne saurait triompher, en Bretagne comme ailleurs, sans oblitérer notre mémoire, notre culture, notre histoire, sans oblitérer notre IDENTITE. La voie royale, pour le libre marché, passe par la TABLE RASE : l’effacement, chez nous en Bretagne, de la mémoire profonde d’une culture millénaire. Il lui faut disposer d’une PAGE BLANCHE où écrire une nouvelle histoire. Les objectifs : éradiquer hommes, cultures, identités ; et d’abord vaincre la capacité de résistance de la population, éliminer les anticorps avant qu’ils ne puissent devenir actifs.
Allons-nous ainsi vers « Le pire des mondes possibles » de Mike Davis ? Ou y sommes-nous déjà ? En sommes-nous à la « déterritorialisation » : la désinsertion hors de l’espace public et l’exclusion de tout vestige de vie citoyenne ? Ou la Bretagne ne se construit-elle pas dès aujourd’hui une pseudo-territorialisation « hors-sol », parcourue de flux de populations et d’informations sans aucune cohésion sociale, technique, morale, ethnique ? Sans aucune cohésion IDENTITAIRE, en un mot.
« Les signes de mort sont signes de vie, c’est aussi leur fonction essentielle », nous dit Jean Raspail. Ne nous donne-t-il pas ainsi une raison d’espérer ? Et nous rallierons-nous à cet espoir du grand historien Arnold Toynbee : « La genèse et la croissance des civilisations obéissent à certaines lois et notamment aux impulsions de la minorité créatrice jusqu’au jour où, né de contradictions internes ou de formes extérieures, un défi est lancé que la civilisation devra relever sous peine de décomposition. » Saurons-nous et voudrons-nous être cette minorité créatrice ? Si oui, comment ferons-nous des signes de mort des signes de vie ?
Christian Beuzec pour Novopress Breizh
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Contradictions et abîmes de la communication de masse
Archives de SYNERGIES EUROPÉENNES - PUNTO Y COMA (Madrid) - ORIENTATIONS (Bruxelles) - Mars 1988
Contradictions et abîme de la communication de masses
par Javier ESPARZA
Traits caractéristiques de la modernité: exigence de communication, nécessité d'une transparence, demande d'un flux libre d'informations. A contrario, la post-modernité se caractérise, entre moults autres choses, par une critique à l'encontre de cette communication de masse, par des doutes à l'endroit de la transparence, par l'inquiétude face au débordement du flux informatif. Cette communication qui, depuis le XVIIIème siècle était considérée comme un facteur de libération, nous apparaît désormais comme un instrument de domination. D'énormes contradictions sociales et culturelles naissent de l'information de masse et surtout depuis l'application des techniques modernes de communication. La télévision s'assied sur le banc des accusés. Pourtant, jamais inculpé ne fut aussi sûr de se tirer si facilement d'affaire: l'Occident accuse la communication de masse tout en regardant un vidéo-clip. Narcisse est de retour mais cette fois il ne s'agit pas d'un jeune homme qui admire son reflet dans les eaux calmes d'un étang mais d'une masse informe qui égratigne l'écran de ses téléviseurs en essayant d'atteindre ce qui, pour elle, a déjà cessé d'exister: la réalité, l'histoire, la vie.
La société de l'information
Ce nouveau monde qui naît avec l'explosion des techni-ques de communication et la culture de masse a reçu le nom de "société de l'information". Les ter-mes contemporains "société post-industrielle" et "so-ciété post-moderne" ou "Nouvelle Société de Con-sommation" (Faye) sont peu à peu utilisés de-puis la moitié des années 70 pour désigner les so-ciétés occidentales en tant que réseaux de flux in-for-matifs: Daniel Bell, Alvin Toffler, S. Nora et Alain Minc, James Martin, J. McHale, Yoneji Misuda ou J.Naisbitt, entre autres, ont popularisé le concept.
En Espagne, l'un des premiers à introduire ce terme dans le monde universitaire en tant qu'objet d'étude —et à éditer des travaux à ce sujet— a été Francisco Javier Bernal. Salvador Giner accorde une cer-taine importance à ce terme; pour lui, "le faisceau de phénomènes évoqué par l'expression “société de l'information” est d'une telle ampleur qu'il faut se de-mander s'il n'est pas en train de se forger ce que, traditionnellement, on avait coutume d'appeler un “mo-de de production”, un mode de domination et un or-dre culturel distincts, sous ce nom, sous un terme proche ou sous un synonyme". Pour Giner, ce "fais----ceau de phénomènes" serait constitué de la télé-matique, de l'informatique, de la microélectronique, de la robotique, de l'intelligence artificielle, etc. Il ne cite pas d'éléments aussi décisifs que la multipli-ca-tion de l'offre propre à la télévision (chaînes privées, antenne parabolique) ou la publicité. De toute façon, pour Giner, l'expression "société de l'information" n'est qu'"une candidate de plus, parmi d'autres expressions également attirantes, à la définition de ce qui est essentiel aux étapes futures de la modernité".
Bien que l'on puisse douter que la modernité (en tant que telle) soit encore à même de nous offrir des "pha-ses futures", l'importance croissante de l'information au sein des structures socio-économiques de l'Occident est indiscutable. D'après Román Gubern, au cours des trente dernières années de ce siècle, le sec-teur électronico-informatique a dépassé celui des in-dustries lourdes comme la pétrochimie et l'auto-mo-bile. Pour l'an 2000, on estime que, dans les pays développés, 90% de la population active tra-vaillera dans le secteur des services et la moitié de ces personnes dans des systèmes d'information ou des réseaux informatisés. Cette conséquence pra-ti-que de l'extension de l'univers médiatique se con-ju-gue, d'autre part, avec une légitimation sociale (et mê-me psychologique) de son utilisation: dans une so-ciété atomisée et individualiste, les média joue-raient le rôle (et c'est ce qu'ils font effectivement) de "thérapeutes sociaux" de l'individu, en essayant de compenser la carence d'une communauté réelle.
Universalisation et résistance
Comme l'écrivent Faye et Rizzi, "les média sont l'une des causes majeures de l'isolement individuel actuel mais, en même temps, leur fonction et leur pré-tention sont d'y apporter un remède. Facteurs d'a-tomisation -une atomisation dont la société de con-sommation a besoin pour survivre- ils se pré-sen-tent pourtant à nous comme des antidotes contre l'ato-misation". Nous pourrions dire que la "so-ciété de l'information" est celle dans laquelle la so-ciété est remplacée par l'information ou, plus pré-ci-sément, cel-le dans laquelle la transmission technique de l'in-for-mation joue le rôle que la société elle-même déte-nait auparavant: définition d'objectifs, normation de rè-gles de conduite, imposition culturelle de modè-les, de formes de production économique, d'échelles de valeurs morales…
Les conséquences sont évidentes: la société dispa-raît, s'évanouit dans le réseau technique de la com-mu-nication de masse. Les cosmovisions particu-lières et enracinées sont remplacées par une culture de masse homogène qui met fin aux cultures tradition-nel-les. La communication se met ainsi au service du néo-colonialisme post-industriel et de la cosmopolis marchande. Comme l'affirme le publicitaire David Vic-toroff, "grâce aux images de marque, la publicité tend à construire de nouvelles valeurs symboliques, communes à la totalité du groupe social, et ce, sur les ruines des systèmes de valeurs et de symboles ca-ractéristiques des sous-groupes particuliers". Un nou-vel imaginaire collectif, universaliste, s'ins-tal-le dans nos sociétés à l'abri de ce que Abraham Mo-les a appelé "l'opulence communicationnelle". Mais ce-la ne se passe pas sans résistances. Un fort cou-rant cri-tique verra dans la communication de masse —et concrètement dans la communication techni-que— un abîme insondable vers lequel notre so-ciété se précipite inéluctablement.
Le regard de la Méduse
Evidemment, les critiques qui s'adressent à la com-munication de masse prirent leur envol bien avant l'usage généralisé des moyens technologiques les plus sophistiqués. Dans les années 40 et 50, une cer-taine critique que, par convention, nous appele-rons "de gauche", a accusé la publicité et la propagande d'asservir les masses: Max Horkheimer, Theo-dor W. Adorno, Dwight MacDonald, Irving Ho--we ou Leo Löwenthal, voyaient, dans la cul-tu-re de masse, un facteur de création d'une "fausse cons-cience" dans les classes populaires, qui annulait leur puissance révolutionnaire et les intégrait dans un système d'exploitation; au fond, ils ne critiquaient pas la communication de masse mais son utilisation sociale.
La perspective de droite, qui leur était antérieure, était différente, elle ne critiquait pas tant la commu-nication que son caractère massif et technique, com-me on peut le voir chez Ortega y Gasset ou Carl Schmitt. Entre les années 60 et 70 et malgré ces cri-ti-ques, la communication de masse s'est développée à une vitesse incroyable et elle ne manqua pas de pro-tecteurs pour la légitimer: tantôt on alléguait la pos-sibilité d'une rétroaction et d'une rétroalimenta-tion (feed-back) qui affirmait que le récepteur pou-vait con-tester le message en agissant selon son libre ar-bitre; tantôt on disait que, grâce à la communi-ca-tion de masse, l'homme moderne pouvait se déta-cher de la terre à laquelle il était lié et entrer dans une société où il manifesterait librement ses goûts cultu-rels. Ce fut là la position défendue notamment par Edward Shils, Herbert Gans, Raymond Williams, Hans M. Enzensberger ou même Walter Benjamin. Parallèle-ment, et à partir du développement à grande échelle de moyens audiovisuels, des auteurs apparaissaient qui se montraient ouvertement criti-ques envers la TV: Jerry Mander écrivait ses célè-bres Quatre arguments pour éliminer la Télévision qui jouirent d'une influence notable. La télé-vi-sion devenait le prin-cipal accusé. Il y a quelques an-nées, David Mata identifiait l'effet paralysateur de la télé au regard terrifiant de la Méduse mythique.
La culture de masse serait intimement liée à la démocratie bourgeoise
Nonobstant, ses défenseurs continuent à insister: pour beaucoup d'entre eux, la culture de masse est in-timement liée à la modernité occidentale, à la civi-li-sa-tion marchande et à la démocratie bourgeoise. Dans cet agencement complexe, faire abstraction d'un élément impliquerait l'oubli des autres. De là, di-verses tentatives visant à concilier démocratie et technologie communicationnelle. C'est notamment l'ob-jectif poursuivi par Manuel Castelles sur le plan de l'informatique; pour cet auteur, les nouvelles techno-logies, qui, effectivement, favorisent le con-trô-le du citoyen par l'Etat, pourraient agir inver-sé-ment en informatisant les procédés de l'Admi-nis-tra-tion et en les ramenant au niveau du citoyen, favo-ri-sant ainsi une transparence publique toujours plus grande.
Pourtant, ces espoirs de "démocratisation" sont peu nombreux, que nous parlions de la TV, de l'infor-ma-tique ou de la publicité (tout cela forme la "société de l'information"). Christopher Lasch pense que la cul-ture de masse, propre des sociétés modernes, ho-mo-généisée comme elle l'est, n'engendre abso-lu-ment pas une mentalité éclairée et indépendante mais, au contraire, la passivité intellectuelle, la con-fu-sion et l'amnésie collective.
Le message de Baudrillard
En fait, le problème ne réside pas dans ce que dit l'ins-trument de masse mais dans la manière dont il agit et dans les effets qu'il crée. Comme l'écrit Jean Bau-drillard: "Le message de la TV n'est pas consti-tué des images qu'elle transmet mais des nouveaux modes de perception et de relation qu'elle impose: le changement dans les structures traditionnelles de la famille et du groupe. De plus, dans le cas de la TV et des mass-media modernes, ce qui est perçu, assi-mi-lé, consommé, n'est pas tant le spectacle que la vir-tua-lité de tous les spectacles. La vérité des moyens de masse est donc la suivante: sa fonction est de neu-traliser le caractère vivant, unique, événémentiel du monde pour le remplacer par un univers multiple de medias homogènes les uns par rapport aux autres en tant que tels, qui ont de la signification les uns pour les autres et qui renvoient les uns aux autres. En dernière instance, les médias deviennent le contenu réciproque les uns des autres -et c'est là que se trouve le message totalitaire d'une société de consommation".
C'est pour cette raison que toute analyse de la médiation technique ne peut se réduire à une simple posologie, ni se limiter à formuler son "utilisation idéale". Les média ne dépendent pas uniquement de la manière dont on les utilise. D'une certaine façon, c'est comme s'ils étaient supérieurs à leur propre instrumentalisation.
Information et inhibition
La fonction que, dans la culture politique dérivée de l'Il-luminisme (des "Lumières"), on attribuait à l'information, c'était de créer une opinion publique ca-pa-ble de discuter les problèmes de gouvernement, de choisir judicieusement ses gouvernants et de décider librement ce qui convenait ou non à la société. On pré-tendait ainsi créer un espace de liberté à la base, per-mettant la coexistence démocratique. Les lois ré-gis--sant la presse, en vigueur au siècle passé et au dé-but de ce siècle, obéissaient à cette logique. Jürgen Ha--ber-mas a rapporté tout cela de manière fort ex-haustive dans Strukturwandel der Öffentlichkeit .
Mais, tout comme la naissance de l'information est liée au commerce, à la banque et au pouvoir éco-no-mique, son développement a continué à dépen-dre de ce type ou d'autres types de pouvoir. Ainsi, au XXè-me siècle, l'information se met au service d'une relation "offre-demande" qui sature le récep-teur: d'abord, il l'inonde de discours au point de le transformer en automate, puis il le bombarde d'in-for-mations jusqu'au moment où il ne répond plus et se noie dans l'indifférence. On est passé du désir de participation, encore vivant dans la modernité, à l'in-hibition complète des masses.
L'hypersollicitation et l'implosion du sens
Et cette situation débouche sur une grave contra-dic-tion sociale: "Partout, on cherche à faire parler les mas-ses", écrit Baudrillard, "on les presse d'exister so-cialement, électoralement, syndicalement, sexuellement, dans la participation, dans la fête, dans l'ex-pression libre, etc. Il faut conjurer le spectre, et qu'il dise son nom. Rien ne montre avec plus d'éclat que le seul véritable problème aujourd'hui est le silence de la masse, le silence de la majorité silencieuse". Et plus on insiste, moins de résultats l'on obtient. La mas-se ne participe pas, non qu'elle ne le veuil-le pas mais parce que cela lui importe peu. L'in-formation n'a jamais connu un tel développement et pourtant le narcissime moderne, comme l'explique Li-povetski, "apparaît comme une forme inédite d'a-pathie, faite de sensibilisation épidermique au monde en même temps que d'une indifférence profonde en-vers celui-ci, paradoxe qui s'explique partiellement par la plé-tho-re d'informations qui nous accablent et par la rapidité avec laquelle les événements traités par les mass-média se succèdent, empêchant toute émo-tion durable". L'individu actuel est com-plè-tement indif-fé-rent au monde qui l'entoure, non parce qu'il ne le con-nait pas mais parce qu'il le connait trop: "L'in-dif-férence postmoderne -poursuit Lipo-vetski- l'est par excès, non par défaut, par hy-persollicitation, non par privation".
Ce comportement a une explication anthropologique. D'après Arnold Gehlen, l'excès d'informations en-traîne un effet de "sollicitation excessive" provoquant une insensibilité progressive; le procesus de per-te de sens ne cesse donc de s'accentuer. Toute l'in-géniosité dont l'homme fait preuve pour structu-rer le monde en fonction des signaux qu'il en per-çoit, finit par disparaître (ou s'amenuise considé-ra-ble-ment) lorsque ces signaux se succèdent à une vi-tese et dans une quantité telles qu'il ne peut plus les appréhender. Aussi toute possibilité de signification dis-paraît-elle devant l'omniprésence de ce que Kon-rad Lorenz a appelé la "formation indoctrinée" et qui constitue un de nos huit péchés capitaux (Cf. Les huit péchés capitaux de notre civilisation, Flam-ma-rion). Et ainsi, l'idée de la participation, issue des "Lu-mières" devient, à travers l'information, à l'ère de la technique, une pure chimère; l'indifférence dé-truit le vieux rêve de la raison. Pour parler comme Bau-drillard, le sens implose.
Sociabilité et narcissisme
On observe une contradiction lorsque nous passons au domaine des comportements en société et à la ré-per-cussion qu'a, sur eux, la communication de mas-se. Dans l'optique moderne de la communicaiton, c'est un lieu commun de dire que celle-ci sert à en-ve-lopper ce que l'on appelle en sociologie le "pro-ces-sus de socialisation"; en d'autres mots, il s'agit des pro-cessus grâce auxquels l'individu apprend à s'in-té-grer dans la société qui l'entoure. Les théories les plus récentes —surtout après la condamnation des to-ta-litarismes par l'Ecole de Francfort— prétendent que cette socialisation est libre et accroît le sens criti-que de l'individu vis-à-vis des valeurs sociales do-mi-nantes.
Dans cette perspective, l'information devrait jouer un rôle important puisqu'elle dote l'individu des élé-ments de jugement qui lui sont nécessaires pour se mouvoir de manière critique parmi les valeurs de sa société. Cependant, non seulement on n'observe pas une plus grande intégration de l'individu mais il sem-ble même que, plus l'individu reçoit d'infor-ma-tions, plus il ressent des difficultés à "se socialiser", à s'intégrer dans la vie sociale.
La critique développée par les conservateurs fait fré-quemment allusion à une "crise des valeurs" qui fe-rait de la société contemporaine un lieu indésirable et dangereux. Pour Lipovetski, une telle carence des va-leurs n'existe pas, on assiste plutôt à la prédo-mi-nan-ce d'une valeur suprême, celle de l'individu et de son "désir de se réaliser", d'"être libre dans la me-sure où les techniques de contrôle social déploient des dispositifs de plus en plus sophistiqués et hu-mains". C'est cette valeur suprême, née pré-ci-sément de l'hypervaloration du sens critique de l'in-dividu fa-ce à la société qui fait que l'individu s'isole et se fa-çonne une sorte de petit monde ambiant. "Le sen-ti-ment communautaire —écrivent Faye et Rizzi— dis-paraît. L'Autre devient une abstraction. Les capa-ci--tés de sociabilité s'évanouissent. De nombreuses en-quêtes ont démontré jusqu'à quel point la télé a con-tribué à l'extinction des formes de vie com-mu-nau-taires. L'homme moderne ne sait plus ce qu'est l'en-vironnement, cette communauté de proches qui lui est éthologiquement indispensable".
Culture de masses et infra-culture
Une des fonctions primordiales attribuée par la cri-ti-que illuministe à l'information était de faire parvenir la vérité (la raison, la lumière) au plus grand nombre possible d'êtres. Elle pourrait garantir le bonheur de l'homme dans la mesure où elle lui permettrait d'ac-cé-der, de plus en plus, à la connaissance du monde. Mais le résultat en a été fort différent. Non seule-ment on n'a pas accédé à la connaissance du monde mais plus on prétend accroître l'audience d'un mes-sa-ge, moins le niveau culturel en est élevé. Il existe une proportion inverse entre la hauteur des messages culturels et l'ampleur possible de l'audience. Plus le message est élevé, moins il y a de gens pour le com-prendre. Plus on veut jouir d'une large audience, moins le niveau du message devra être élevé. D'une cer-taine manière, il s'agit d'une incompatibilité entre ce qui est étendu et ce qui est intense.
De cette situation découle un abaissement général du niveau culturel. D'après Habermas, "les effets de la com-munication de masse sont culturellement régres-sifs". Pour Régis Debray, "les mass-media as-su-rent la plus grande socialisation de l'ignorance pri-vée". Bau-drillard conclut: "L'information, au lieu de trans-former la masse en énergie, produit en-core plus de masse".
L'origine de ces dysfonctions se trouve dans deux théo-rèmes du système de pensée moderne. Le pre-mier est la croyance que l'ordre naturel de la vie (et, partant, de la culure également) fonctionne comme un marché: le meilleur produit culturel, comme le meil-leur homme politique ou la meilleure brosse à dents, sera celui qui suscitera l'unanimité la plus gran-de dans le public.
De la Vox populi à "l'effet Coluche"
Le deuxième théorème (nous pourrions presque dire "mythème") est celui qui donne origine au premier, comme à toutes les constructions théoriques qui concernent l'"opinion publique" et que l'on peut résu-mer par une expression ancienne: Vox populi, vox dei, "la voix du peuple est la voix de Dieu", expres-sion qui possède un sens quand, par peuple, on en-tend communauté, mais également un sens fort dif-fé-rent si, par peuple, on entend classe productrice (en termes chers à Dumézil: la troisième fonction). La bourgoisie a fait ample usage de cette expression à partir du XVIIème siècle en lui attribuant un sens qui corresponde à ses aspirations. Comme dit Julio Ca-ro Baroja, "nous avons tant de raisons de penser que la voix du peuple est la voix de Dieu que d'esti-mer que c'est la voix du Diable ou la voix des imbéciles".
Nous connaissons bien le résultat de cette manipu-la-tion: quantitativement, l'opinion d'un acteur ou d'un présentateur suscite plus de considération que celle d'un professeur, d'un philosophe ou d'un scientifi-que, non en raison de la personnalité du sujet mais en raison de sa fonction sociale, qui consiste à di-vert-ir le particulier. En France, on a appelé ce phé-no-mène "l'effet Coluche", du nom de ce pitre qui, grâ-ce à un discours hyper-humanitaire, prétendit de-ve-nir Président de la République. Quand cette logi-que se transplante sur le terrain culturel, la culture, com-me le politique ou le social, devient une marchandise.
Transparences et stratégies
Le quatrième cauchemar qui angoisse la société mé-diatique provient du rêve irréalisé de la raison: l'im-possibilité de transparence dans la communicaiton entre êtres humains. Toutes les idéologies des XVIIIè-me et XIXème siècles soulignaient la néces-sité d'élucider, en prenant la raison comme base, le réseau complexe de la vie, en abandonnant les cro-yan-ces irrationnelles et superstitieuses et en accédant à un niveau supérieur, celui de la connaissance trans-parente, par le truchement de laquelle les hom-mes parviendront à la compréhension rationelle, tout en dialoguant sans aucun préjugé.
Sur le plan politique, cette situation s'est traduite dans la transparence administrative; sur le plan inter-per-sonnel, la transparence se manifeste dans l'ab-sence de formalités, dans le tutoiement, dans l'indis-crétion. On doit tout connaître; s'y opposer, c'est agir contre la raison. La société de la communication totale n'est que le stade ultime de cette soif de transparence; pour Baudrillard, le processus historique qui domine avec la société médiatique est "cette lon-gue voie vers une traductibilité totale", chemin qui est celui de "la transparence superficielle de toutes les choses, de leur publicité absolue".
Cependant, la vie n'est pas transparente, les hom-mes non plus et, par conséquent, la communication ne peut l'être. La psychologie (surtout la psycho-lo-gie jungienne et la néo-jungienne) a prouvé à quel point, dans l'esprit de chaque homme, on trouve des prédispositions déterminées qui rendent totalement opaque son intimité ultime; et, simultanément, ces prédispositions agissent de telle sorte que cet homme aborde l'autre interlocuteur de front comme s'il s'a-gissait d'un combat. Ces attitudes ont été appelées "stra-tégies" bien que la majorité d'entre elles soient inconscientes.
L'Ecole de Palo Alto
Les théoriciens de l'Ecole de Palo Alto (Bateson, Watz-lawick) ont démontré de quelle manière tout co-de de communication est en soi "un régulateur de relations de pouvoir" inséparable du système culturel auquel il appartient. Les éthologistes en ont donné une bonne explication. La transparence n'existe pas et encore moins dans les milieux de masse, où la règle est la stratégie du communicateur. De cette ma-nière, une stratégie faisant face à une stratégie, la com-munication dans la société de masses devient un flux circulaire de discours irréductibles. Le con-sen-sus est une illusion. Jürgen Habermas a essayé d'es-qui-ver cet écueil en proposant un "horizon commu-ni-catif" qui pourrait faciliter le consensus à l'ombre de la Raison Universelle. Cette attitude ne relè-ve que d'une pure accélération dans le vide car si quel-que chose démontre bien l'impossibilité de la trans-parence, ce quelque chose, c'est précisément l'inexis-tence d'une telle raison.
Expériences de seconde main
Le problème ne se situerait pas dans la communi-cation mais, comme on l'a noté auparavant, dans le canal technique de masses, dans la mesure où celui-ci isole l'individu de la réalité en l'empêchant de l'ex--périmenter. De cette façon, l'homme "technifié" est un autre type d'homme dont les capacités pour la perception et pour une assimilation de la réalité sont fort différentes de celles de l'homme qui vivait il y a seulement quelques générations. Cette mutation an-thro-pologique est facilement perceptible aujourd'hui chez les enfants. "L'enfant est abandonné dans un con-texte permissif, seul et libre face aux médias et aux appareils électroniques. Il erre parmi une jungle de signes, qu'il peut comprendre techniquement mais dont il n'obtient aucune sens. Il devient un néo-primitif. Drogué par les médias, il voit sans ces-se un écran artificiel dressé entre lui et le mon-de… Il faut craindre que les générations qui ont re-çu ce type d'éducation ne soient plus capables d'é-valuer la réalité, de décoder le monde extérieur: la pas-sivité collective naît de l'abrutissement individuel".
Serait-il saugrenu de mettre ceci en relation avec l'in-dice élevé d'échecs scolaires que l'on peut noter parmi les générations éduquées, dès leur plus jeune âge, devant le téléviseur? La communication média-ti-sée par la technique crée des expériences de seconde main dont l'effet se devine: culturellement involutif et individuellement domesticateur.
Déréalisation et fragilité
C'est l'anthropologue allemand Arnold Gehlen qui a vu à quel point l'hypermédiatisation ne laissait sub-sis-ter de la vie que ces expériences de seconde main. Gehlen signale que, sans expérimentation directe, l'hom-me cesse de s'auto-construire. Il tombe dans un état de dépendance psychologique. Les sociétés oc-ci-dentales, par conséquent, se trompent en se cro-yant mûres; elles ne se rendent pas compte de leur extraordinaire fragilité physiologique, fragilité qui les laisserait sans recours si, subitement, les techni-ques de médiatisation venaient à manquer. "Aujour-d'hui, tout est sens dessus dessous: les media sup-pri-ment facilement le vécu et le symbolisent de ma-niè-re incomplète. De là, une fragilité plus grande de l'homme contemporain face à la mort, le combat, la peine, la crise collective…".
Tout cela crée des mentalités très particulières. Une de celles-ci, peut-être la plus frappante, est l'attitude qui se situe à mi-chemin entre le nihilisme et le stoï-cisme que Mario Perniola croit discerner dans le mou-vement punk. Ce mouvement serait un ré-sul-tat du bombardement médiatique et de l'indifféren-ce qui en découle. Il naît ainsi un comportement de refus aveugle et passif, dépourvu de sens mais qui, de temps à autre, se fait bruyamment entendre. Tout ce-la provient de l'impossibilité du système mé-dia-tique à fabriquer la réalité et à la doter de sens. Comme l'explique Baudrillard, "la demande d'ob-jets et de ser-vices peut toujours être suscitée artifi-ciel-lement… mais le désir de signification, quand il est absent, le désir de réalité, quand il se met à man-quer de tous côtés, ne peuvent être comblés et cons-ti-tuent un abîme définitif". Nous sommes plon-gés dans cet abî-me. La technique nous y a mis; et la technique ne nous laisse pas en sortir. Le problème se situe-t-il dans la technique elle-même, dans son es-sence, dans son utilisation sociale ou, même, dans la manière de concevoir la technique et la commu-nication?
Le problème de la technique
Carl Schmitt disait que "culturellement, la technique aveugle". En effet, si elle ne rend pas aveugle, il est in-discutable que la technique moderne, appli-quée à la communication, amenuise considéra-ble-ment les ca-pacités de l'homme à appréhender le mon-de. Tout me-dia, tout élément que nous utilisons pour intercé-der entre nous et le monde, modifie no-tre perception de celui-ci et même la relation physio-lo-gique que nous entretenons avec lui. Le cerveau prend note de cette modification et la met en prati-que, il la fait se répercuter dans le comportement or-ga-nique.
Ce processus s'est déroulé avec la première hache en silex et se répète exactement de la même façon avec l'ordinateur: le nouveau système de médiation conti-nue à exercer des transformations sur l'organisme et le psychisme. En réalité, la différence se situe dans le fait que les nouveaux médiateurs ont remplacé les précédents avec une rapidité inouïe (il n'a fallu qu'une génération) et dans le fait que leur pouvoir quantitatif de transformation de l'organisme puisse toucher toutes les cultures d'un seul coup.
Konrad Lorenz a examiné ce phénomène avec une inquiétude explicite: "Si le développement culturel poursuit sa course à une vitesse supérieure à celle du développement phylogénétique et, malgré tout, obéit à des lois similaires, il est très probable qu'il (le dé-veloppement culturel) puisse mener à une phylogé-nè-se allant dans son sens, c'est-à-dire, dans une di-rec-tion similaire. Vu les circonstances de notre or-dre technocratique mondial, cette direction semble con-dui-re, sans nul doute, vers le bas".
L'analphabétisme informatisé des handicapés réceptifs
Ces nouvelles formes de mass-médiatisation accen-tuent la distance qui nous sépare de la "nature", mais, en plus, elles nous éloignent également de no-tre corps. Il ne s'agit pas seulement qu'apparaisse ce que Joseph Weizenbaum appelle l'"analphabétisme informatisé", c'est-à-dire, l'analphabétisme de ceux qui sont considérablement incultes sur le plan géné-ral mais très compétents en informatique —c'est ce qu'Ortega y Gasset a appelé la "barbarie du spécia-liste". Le problème ne se situe pas non plus unique-ment dans le fait que —comme l'écrit Ri-cheri— "l'usage de l'ordinateur favorise une repré-sentation linéaire et non dialectique de la réalité et in-hibe la capacité critique de celui qui l'utilise".
Le véritable problème, la question réellement préoc-cu-pante que soulève la technique d'information de mas-ses, en tant qu'intermédiaire entre nous et le mon-de, est qu'elle nous éloigne de notre propre cer-veau, de notre propre capacité à donner forme au mon-de que nous voyons et à créer les modèles permettant de l'appréhender. Faye et Rizzi écrivent: "Nous pouvons déjà voir à quel point les individus nés dans un environnement hyper-médiatisé (environnemental et audiovisuel) sont des handicapés ré-cep-tifs, équipés de gadgets technologiques qui leur per-mettent de survivre".
Nous avons créé des formes de connaissance qui se développent plus rapidement que nous, qui nous sup-plantent et qui nous convertissent en êtres limités par rapport à un état antérieur. La communication de masse, au sein d'une société dans laquelle dominent le quantitatif, l'hédonisme et la conception marchan-de de la connaissance, se transforme en un facteur me-naçant de décomposition. D'une certaine façon, c'est comme si nous devions reculer organiquement alors que nous sommes allés si loin d'un point de vue technologique. Qui a parlé de progrès?
La technique pour quelles valeurs?
Cependant et comme on l'a déjà signalé, il serait er-ro-né de faire endosser à la technique la respon-sa-bi-li-té de tous les maux. Toutes les théories définissant la technique comme un "mal", oublient que le fait techni-que est consubstantiel à la nature humaine et que l'homme ne serait pas homme sans ces éléments techniques, qu'il s'agisse du char à bœufs ou du té-les-cope. Pourtant, il serait naïf de croire, à l'instar de certains courants libéraux et marxistes, que la techni-que est un élément neutre en soi, et que tout dépend de son utilisateur et de ses objectifs, en pré-sup-poant que la technique sera bonne si on l'utilise au nom du progrès et mauvaise si on l'emploie pour exercer une domination ou quelque chose de sem-bla-ble. Ce point de vue est naïf car, d'abord, de nom-breux crimes ont été commis au nom du progrès et, ensuite, parce qu'un des traits caractéristiqes de la technique dans le monde moderne est d'être, en soi, un instrument de domination, en marge de celui qui l'utilise.
La solution serait peut être de voir dans la technique un fait de civilisation, la manifestation d'une manière déterminée de voir le monde; cette manifestation peut revêtir l'une ou l'autre forme ne dépendant pas de l'utilisateur mais de l'ordre des valeurs dominant. D'a-près Heidegger, dans le monde grec, la techni-que avait une fonction révélatrice de la réalité, de con-naissance, mais pas de domination du monde (ou du moins de faible domination, de domination sans possession); dans le monde moderne, au contraire, elle a une fonction exclusive de domination et toute connaissance s'y subordonne. Ce changement d'une conception à une autre est, de fait, parallèle à l'essor des conceptions modernes pour lesquelles toute l'his-toire est une ligne ascendante qui conduira l'hom-me à la domination du monde et au bonheur, dans une utopie universellmeent réalisée. C'est pré-ci-sément la même idéologie progressiste, indivi-dua-liste et universaliste qui a donné naissance à toutes les contradictions mentionnées ci-dessus.
En effet, toutes les dysfonctions qui affectent la so-ciété de l'information ne constituent pas tant un pro-duit direct de la communication à travers la techni-que, qu'un résultat, celui d'une manière déterminée de comprendre le monde. Une façon de comprendre le monde définie par l'individualisme, l'universa-lis-me, la tendance à l'homogénéisation, la foi aveugle dans la raison et la science, le sens quantitatif des cho-ses, la prétention progressiste à faire advenir une utopie rationnelle. Une manière de comprendre le mon-de qui, en termes généraux, correspond à ce que nous pourrions appeler "idéologie de la modernité" et qu'aujourd'hui, on nous désigne comme une idéologie largement hétérotélique où la distance en-tre l'objectif à atteindre et le but réellement atteint est énorme.
Vers l'implosion finale?
Et comme cet abîme est incontournable, la commu-ni-cation technique essaie de le surmonter en offrant des simulacres, des farces, le spectacle omniprésent de "ce qui devrait être". En vain. L'individu cher-che, dans les media, le "monde ouvert", la "so-ciété transparente" dont on lui parle. Il ne trouve rien. Et comme plus il se sent isolé, plus il s'a-bandonne aux media, "sa personne, disent Faye et Riz-zi, se ferme dans l'illusion dramatique de l'ouver-ture… Pareils à des mouches enfermées dans un bo-cal renversé, les individus s'efforcent de toucher ce monde extérieur, cette société ouverte, qu'ils voient mais qui n'existe pas".
Ainsi, il s'agit d'un problème de conception du mon-de. Et concrètement, la question de savoir com-ment dépasser la vision moderne du monde. Des solutions? Peut-être n'y en a-t-il pas. Peut-être cela exi-gerait-il des efforts et des volontés collectives qui ont déjà disparu de notre civilisation. Peut-être, par conséquent, serons-nous condamnés à voir, sur no-tre téléviseur, le simulacre gigantesque de ces socié-tés qui, dépourvues de tout sens historique et de tou-te capacité de mobilisation, ont perdu la possibilité de s'auto-représenter et attendent l'implosion finale comme ultime et définitif spectacle - mais qui sera peut-être le plus beau.
Javier ESPARZA.
(texte tiré de Punto Y Coma n°8, 1987. Traduction française de Nicole Bruhwyler).
Adresse de Punto y Coma, Apartado de Correos 50.404, E-28.080 Madrid.
Bibliographie:
Nous renvoyons le lecteur à l'édition originale de ce texte pour les références espagnoles. Ci-dessus, le lec--teur trouvera une bi--blio-graphie succincte, se rap-portant au thème et son exploi-ta-tion.
Daniel BELL, Les contradictions culturelles du capitalisme, PUF, Paris, 1979.
John NAISBITT, Megatrends. Ten New Directions Trans-for-ming Our Lives, Futura/Mac Donald, London/Sidney, 1984.
Régis DEBRAY, Le pouvoir intellectuel en France, Ramsay, Pa-ris, 1979.
Gilles LIPOVETSKY, L'ère du vide. Essais sur l'indivi-dua-lisme contemporain, Gallimard, Paris, 1983.
Jürgen HABERMAS, Strukturwandel der Öffentlichkeit, Luch-ter-hand, 1962-80.
Jean BAUDRILLARD, La société de consommation, Galli-mard, coll. "Idées" n°316, 1974.
Jean BAUDRILLARD, A l'ombre des majorités silencieuses ou la fin du social, Utopie, Paris, 1978. 2ème éd.: Denoël/ Gon-thier, coll. Médiations n°226, Paris, 1982.
Christopher LASCH, Le complexe de Narcisse. La nouvelle sensibilité américaine, Robert Laffont, Paris, 1981.
Guillaume FAYE et Patrick RIZZI, "Vers la médiatisation totale", in: Nouvelle Ecole, n°39, automne 1982.
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samedi, 31 janvier 2009
"Pour une sociologie de l'ethnicité"
« Pour une sociologie de l’ethnicité » : un sociologue rompt le tabou de l’ethnie
Albert Bastenier est professeur au département des sciences politiques et sociales de l’Université catholique de Louvain (Belgique). Dans le (long) article reproduit ci-dessous, il prend acte des effets de l’immigration massive en Europe de populations issues du tiers-Monde, à la différence de certains démographes et politiques qui s’efforcent de nier cette substitution de population. L’auteur voit dans ce bouleversement démographique un phénomène irréversible et ne cherche pas à dissimuler les implications considérables qu’il génère. Loin du discours publicitaire sur les beautés du métissage, il ne porte aucun jugement de valeur sur ce phénomène qu’il se contente d’enregistrer froidement (avec un indubitable fatalisme) en s’efforçant d’en tirer un certain nombre de conclusions. Affirmant que l’intégration républicaine traditionnelle est morte il propose de réévaluer la notion d’ethnicité, mise à mal par les universalistes républicains qui y voient le syndrome de la « peste communautaire » ou du « racisme ». Un discours en rupture (partielle) avec l’idéologie dominante.
Au cours des derniers mois, La vie des idées a publié diverses contributions consacrées au thème de l’identité, dont récemment un texte de Mirna Safi intitulé « L’usage des catégories ethniques en débat ». Il rendait compte du dossier que la Revue Française de Sociologie (2008, 49/1) a consacré aux discussions à propos de l’usage des catégories ethniques dans les sciences sociales. Il y était surtout question de la controverse au sujet du recueil de statistiques ethniques. Dans une perspective complémentaire, nous voudrions revenir sur la question en l’élargissant pour montrer que, comme catégorie d’analyse du social, l’ethnicité est loin de ne concerner que les statistiques.
S’il est vrai que la légitimité de l’instrument de recherche que constituent les statistiques ethniques devrait normalement finir par emporter l’adhésion, à lui seul il ne saurait toutefois prétendre englober l’ensemble des raisons qui justifient une réévaluation de la notion d’ethnicité dans le cadre des discussions que mènent les sciences sociales au sujet des identités. Réduite à cela, la question de l’ethnicité risque même de ne pas voir exploité tout le potentiel intellectuel qu’elle contient. On perdrait en tout cas une grande partie de son bénéfice si on ne voyait pas que, loin de ne permettre qu’un meilleur ciblage des politiques sociales antidiscriminatoires, elle jette aussi les bases d’une réflexion qui permet de mieux comprendre certains des rapports sociaux parmi les plus caractéristiques que génère actuellement l’Europe des migrations.
Ce ne sont, en effet, rien moins que les sources du peuplement continental lui-même qui sont occupées à se transformer par le biais des flux de population que la mondialisation intensifie et diversifie. Et parce qu’elle entraîne une recomposition et une requalification des interactions sociales au sein des populations du vieux continent, c’est de cette nouvelle donne démographique qu’il s’agit de saisir tous les enjeux.
Que les sources et les modalités du peuplement européen connaissent actuellement une profonde mutation, même les chercheurs peu enclins à accorder leurs faveurs aux thèses du multiculturalisme, l’admettent : liée au phénomène de leur vieillissement et de leur fécondité faible, la dépendance démographique des sociétés européennes est de plus en plus évidente. Selon Michèle Tribalat [1], ne fût-ce que le maintien de la population à son niveau actuel ne pourra venir que de la permanence d’un apport démographique externe. En outre, les données fournies par Eurostat permettent de dire que même dans le scénario d’une croissance démographique faible de l’Union à l’horizon 2030 (de 463 à 469 millions pour UE-25), celle-ci sera à mettre au seul crédit de l’immigration. On a là un véritable processus de substitution démographique et, en l’absence d’une hypothétique revivification de la fécondité des Européens, l’immigration est donc, selon l’expression suggestive de M. Tribalat, un « médicament à vie ». Elle souligne enfin que l’immigration suppose évidemment des répercussions importantes au sein des sociétés européennes, notamment sur la reconstruction des codes sociaux dans l’espace public.
Les conclusions auxquelles parvient François Héran [2] expriment des choses fort proches quoique avec un accent un peu différent : la démographie, dit-il, fait partie de ces instruments libérateurs qui permettent de s’extraire des vues étroites et voir que la part croissante des migrations dans la population européenne est un phénomène inéluctable. Le brassage des populations est en marche et rien ne l’arrêtera. Il n’y a pas à se demander s’il faut être pour ou contre. La seule question qui vaille est de savoir comment l’aider à se réaliser dans les meilleures conditions. Mieux vaut se préparer à ce brassage des natifs et des immigrés que de s’enfermer dans sa dénégation volontariste. C’est ensemble qu’il leur faudra croître et vieillir et, au lieu d’agiter l’image d’un spectre qu’il faudrait écarter, la sagesse est d’amener les esprits à y faire face.
Mais précisément, pour faire face, de quels discours disposons-nous ? A l’aide de quels concepts et cadre intellectuel cherchons-nous à penser l’avenir et les phénomènes collectifs complexes, souvent mal vécus, qui se développent dans le sillage des flux migratoires ? A ce monde neuf, de plus en plus hétérogène et caractérisé par la coprésence de plusieurs cultures sur le même espace, il faut fournir les moyens de se connaître, de jeter un regard lucide sur la réalité plutôt que de le laisser vivre dans la nostalgie d’un modèle d’intégration sociale qui ne fonctionne que de plus en plus mal.
C’est à cet égard qu’il y aurait avantage à en venir à une prise en considération dépassionnée de la potentialité intellectuelle contenue dans les catégories de l’ethnicité [3]. Dès lors que l’on admet que l’immigration fait partie des sources du peuplement européen, il s’impose de réfléchir, comme le dit M. Tribalat, sur les principes qu’adoptera l’Union dans la gestion de la diversité ethnoculturelle. Toutefois, même si on peut formuler des réserves à l’égard du multiculturalisme radical [4], n’est-ce pas une désinvolture peu propice à une telle réflexion que de se contenter, comme elle le fait, de qualifier les immigrés de simples « pièces rapportées » dans les sociétés européennes ? La théorie politique du multiculturalisme mérite plus qu’une mise en congé expéditive et, en l’occurrence, les catégories de l’ethnicité peuvent contribuer à l’approfondir et problématiser avec lucidité le nouveau monde social auquel nous avons affaire.
Même si elle commence par déplaire à beaucoup qui n’y voient qu’une atteinte à leur modernité et une concession à ce qu’ils appellent la « peste communautaire », l’anthropologie contemporaine – à commencer par la contribution décisive de Fredrik Barth [5] – nous a fourni des motifs suffisants pour revisiter la notion d’ethnicité. En ceci notamment que, si l’on veut bien abandonner la perspective intellectuelle statique et substantialiste qui en fait un quasi-équivalent de la race, on est loin de devoir comprendre cette notion comme une concession au communautarisme qui s’oppose aux idéaux républicains. En envisageant l’ethnicité non pas comme un patrimoine culturel statufié qui enchaîne les individus, mais de manière dynamique comme un processus social – c’est-à-dire comme une forme de l’action- au travers duquel les différents groupes humains devenus coprésents sur un même espace se perçoivent, se maintiennent ou transforment leurs frontières et leurs sentiments d’appartenance, on peut y discerner tout autre chose que l’expression d’un archaïsme cherchant à préserver des traditions culturelles rétives au compromis.
La tradition sociologique nous a tellement persuadés que l’évolution vers la modernité équivalait à un passage des communautés ethniques vers les sociétés nationales, que nous éprouvons quelque difficulté à accepter que l’on puisse aller aujourd’hui de la nation vers l’ethnicité. Et pourtant, il a une logique à ce qu’elle revienne au centre de la réflexion sociale dès lors que la mondialisation nous place dans une séquence historique où la coprésence de multiples cultures sur un même territoire devient un phénomène socialement aussi important que l’ancienne situation où les cultures différentes restaient pour l’essentiel confinées dans des espaces distincts. Ce sont donc les sociétés les plus modernes qui ne sont plus ethniquement homogènes et qui, en cela, diffèrent des sociétés traditionnelles et des tribus qui, elles, pouvaient l’être.
Face à cette situation, il ne s’agit pas de développer une rhétorique enthousiaste sur les beautés de l’hétérogénéité culturelle, mais d’y reconnaître la réalité en se demandant si, en utilisant la notion d’ethnicité, on ne parvient pas à mieux comprendre les enjeux liés à l’hétérogénéisation du vieux continent. Et à intervenir aussi avec plus de lucidité dans des situations et des luttes que l’on rejoint non pas en fonction de ses goûts et préférences, mais en raison de leur existence et de leur urgence.
Mais tentons d’abord de définir ces situations et ces luttes. Le dernier quart du XXe siècle, avec la tiers-mondisation des flux migratoires, fut le moment où commencèrent à être perceptibles certaines implications culturelles de la mondialisation. Ces flux ont en effet entraîné une recomposition culturelle de la population plus intense que le vieux continent n’en avait connue depuis longtemps. Ils ont également introduit les ingrédients d’une situation qui peut être qualifiée de postcoloniale parce que, parmi les immigrés, le ressentiment culturel des anciens colonisés parvient à se manifester sur la scène publique. Comme le montrent les « études postcoloniales » [6], c’est sur la trame d’un tel contentieux que se reconstruisent localement les identifications collectives et les rapports entre anciens mentors et pupilles coloniaux. Dans cette nouvelle séquence de l’histoire des sociétés européennes qui se reconfigurent en même temps qu’elles se repeuplent, il ne viendrait évidemment à l’esprit de personne de nier l’importance des composantes économiques et politiques qui hiérarchisent les différents groupes mis durablement en présence. On ne peut néanmoins minimiser l’importance de la dimension culturelle qui s’y adjoint et, surtout, ne pas observer qu’il y a des cultures qui confèrent de la dignité et de la puissance sociale tandis que d’autres confinent dans la faiblesse et la subalternité.
Toutefois, pour une sociologie réaliste qui quitte le terrain de la société conceptuelle pour rejoindre celui de la société réelle, il n’y a à vrai dire pas là une grande découverte : les sociétés humaines sont et restent des ensembles complexes de pratiques économiques, politiques et culturelles enchevêtrées, inégalement et imparfaitement unifiées, impliquant en même temps des solidarités et des antagonismes. Cependant, si un tel ensemble est générateur de conflits, il rend aussi particulièrement délicat tout discours sur l’intégration. Toujours cette dernière est poursuivie comme un bien souhaitable, mais elle n’est jamais qu’une intégration conflictuelle et partielle, à la manière du travail historique de la liberté qui lui-même prend souvent la forme d’une opposition à la domination. Ce qui compte le plus à partir de là, c’est de voir que, dans l’Europe actuelle, les appartenances culturelles en sont venues à jouer un rôle stratégique. Chacun des groupes en présence a tendance à réutiliser dans son patrimoine culturel et son passé – réel ou imaginaire – ce qu’il juge le plus approprié en vue d’affronter les défis du présent. Ceci revient à dire que les rapports de hiérarchisation culturelle dans l’Europe contemporaine résultent d’une coprésence spatiale où aucun des groupes en présence n’est plus à même d’être lui-même indépendamment de l’autre.
Ce constat nous place au cœur du processus de catégorisation mutuelle qu’est la logique ethnique. De part et d’autre, les acteurs cherchent à se positionner à l’aide, notamment, des représentations qu’ils se forgent au sujet de leur propre culture et de celle des autres. Les anciens Européens et les nouveaux arrivants suscitent ou transforment des identités, des affiliations et des appartenances en fonction d’objectifs qui ont du sens pour eux. Du côté des uns pour défendre les droits acquis de l’autochtonie. Et du côté des autres pour revendiquer une place respectable dans la société de leur transplantation. A l’aide d’un ensemble de traits culturels, spirituels et matériels parmi lesquels on peut retenir des choses comme la langue, le style de vie, une histoire partagée, la religion ou aussi des critères vus comme ceux de la dignité morale, tous ces acteurs réutilisent les dimensions symboliques de leur mémoire en vue de mieux affronter les enjeux de leur monde actuel. Pourquoi d’ailleurs faudrait-il s’en étonner jusqu’au point de ne pas l’admettre ? Aux côtés des déterminants économiques et politiques, en le combinant avec eux, ne convient-il pas de prendre en compte l’impact du facteur culturel comme source de différenciation et de hiérarchisation sociales ? Et pourquoi dans le domaine des pratiques culturelles davantage que dans celui des pratiques économiques ou politiques faudrait-il postuler que, pour fonctionner, les sociétés devraient disposer d’une assise épargnée par les tensions et les rapports de force ? Ce qui empêche de le penser, ne serait-ce pas le fait que, dans la sociologie française, sur fond d’universalisme abstrait et de jacobinisme, l’idée d’intégration républicaine a intellectuellement joué un rôle comparable à celui qu’avait joué l’idée de dictature du prolétariat dans la sociologie marxiste orthodoxe ?
S’il est exact qu’en adoptant la notion d’ethnicité l’analyse ne se préoccupe plus d’abord de savoir selon quelles procédures les immigrés abandonnent leur identité d’origine en vue de s’intégrer, ce n’est pas pour autant que l’on abandonne l’idée qu’il faut explorer les mécanismes qui président à la réintégration globale des sociétés élargies par l’immigration. La problématique est toutefois renversée : on se demande plutôt pour quelles raisons il ne faut plus s’attendre à ce que les immigrés, par une démarche d’assimilation, se transforment comme autrefois en autochtones. Et ceci non pas parce que, comme catégorie analytique de l’action, la notion d’ethnicité viserait à comprendre la rémanence d’identités intangibles qui auraient été réprimées et demanderaient à être réhabilitées. Ni non plus parce qu’elle affirmerait une volonté de sauvegarde des cultures comme on cherche à assurer la survie d’espèces naturelles menacées. Parce que nous sommes placés tout autrement qu’hier face à la question de la rencontre des cultures, ce que l’on cherche à comprendre, ce sont plutôt les interactions qui se construisent entre des acteurs culturellement différents mais placés dans une situation d’interdépendance irréversible. À l’opposé d’un passéisme, l’ethnogenèse dont il est question est donc synchrone avec la mondialisation qui signe la fin du monoculturalisme et fait passer l’Europe contemporaine dans une situation de pluriculturalité.
Il faudra bien finir par admettre qu’appeler unilatéralement les immigrés à s’intégrer aux sociétés européennes telles qu’elles fonctionnent actuellement, revient à leur demander de rallier la culture dominante comme on se convertirait à une religion. Et pour les sciences sociales, c’est continuer à faire comme si elles ne savaient pas que nombre de sociétés qui ont cherché ou cherchent encore à se bâtir sur la seule affirmation des exigences intégratrices d’une citoyenneté qui n’existe pas vraiment, choisissent en réalité de fonctionner sur l’inégalité, l’injustice et même l’ostracisme contre lesquels elles disent pourtant vouloir lutter. Si ces sciences veulent tenir un discours qui ait du sens, ce devra donc en être un autre, qui parvienne à montrer comment des populations diverses par leurs origines mais rassemblées sur le même territoire, se brassent et s’agrègent tout en développant entre elles les contradictions de la différenciation et de la hiérarchisation sociales où interagissent des différences culturelles, des inégalités économiques et les statuts politiques des uns et des autres. Tant du côté de la majorité que des minorités, les nouvelles solidarités et affiliations surgissent toujours en réponse aux lacunes ou aux échecs de la représentation démocratique, créant pour cela des stratégies de reconnaissance.
Ce n’est bien entendu que dans la mesure où elles rendent plus intelligibles les pratiques sociales caractéristiques des sociétés où les appartenances culturelles connaissent un nouveau développement que les catégories de l’ethnicité s’avèrent utiles. C’est-à-dire en référence avec un principe d’organisation de la totalité sociale qui fait ressortir la logique structurelle de la saillance ethnique. C’est pour ce faire qu’il faut réinterroger la théorie de l’action et s’enquérir du rôle qu’elle reconnaît à la culture dans la construction des rapports sociaux, c’est-à-dire aux acteurs comme sujets réflexifs et imaginatifs, producteurs de signes et de représentations à l’aide de quoi ils cherchent à orienter leur monde plutôt que de simplement le subir. Dans une visée heuristique, on peut alors appeler société ethnique celle où la dimension culturelle de l’agir humain s’affirme comme un ressort spécifique des processus collectifs et où de nombreux acteurs sont placés dans des rapports qui les incitent à remanier leurs identités, concevoir de nouvelles appartenances symboliques et produire divers dispositifs organisationnels qui en sont l’expression.
Pour expliciter cela d’une manière analogique, on pourrait dire que de la même manière que l’on a pu appeler société de classe celle qui, à partir du XIXe siècle et sur arrière-fond d’industrialisation capitaliste, a organisé socialement la conflictualité des statuts économiques, on peut appeler société ethnique celle qui, à la fin du XXe et sur arrière-fond de mondialisation, organise socialement la conflictualité entre les différents statuts culturels. Et que la conscience que l’on a de cette situation dans les différents segments de la population y supplante celle de la classe comme médium principal à partir de quoi les acteurs systématisent leur condition. Il ne faut pas prétendre que le facteur culturel en vient à se substituer au facteur économique dans la hiérarchisation sociale. Mais admettre qu’il y joue toutefois un rôle de plus en plus important qui complexifie davantage les rapports sociaux. On peut y voir une nouvelle configuration de la question sociale.
Dans le domaine scolaire, par exemple, l’analyse ethnique met en lumière que l’on s’y trouve aux prises avec l’une des institutions emblématiques par excellence des enjeux de la culture. Elle est chargée de la double mission de qualifier culturellement les individus qu’elle instruit en même temps que de disqualifier ceux qui ne répondent pas à ses exigences. Et parce que les établissements scolaires fonctionnent selon une logique de quasi-marché, on sait depuis longtemps qu’ils ne distribuent pas équitablement leurs bienfaits. En reconnaissant la chose, on n’a toutefois encore rien dit à propos des opinions qui expriment leur consternation au sujet d’une baisse du niveau scolaire liée à la présence des enfants d’immigrés. Pourtant, là est perceptible la compétition ethnique pour la captation des ressources éducatives. Les dires majoritaires témoignent d’une transformation de leurs attentes sociales. Ils veulent que les établissements scolaires concrétisent une différenciation entre eux et les « autres ». Leur souci est de garder le contrôle sur l’accès aux établissements les plus convoités, au cœur de la machine ethnonationale distributrice des prestiges de la culture. La préoccupation d’un statut avantageux durable se traduit dans une stratégie scolaire du groupe majoritaire qui vise à entretenir la frontière qui le sépare du groupe minoritaire. Se donne ainsi à voir le jeu des compatibilités et des incompatibilités symboliques au centre du processus ethnique. Par contre, pour nombre d’écoliers issus de l’immigration, les interactions sociales propres à l’enfance qui devaient être leur parcours initial dans la citoyenneté deviennent un détour par l’échec, l’épreuve publique que, jeunes encore, ils font de leur dévalorisation culturelle. L’école, dit Françoise Lorcerie [7], enferme les jeunes minoritaires dans les frontières de leurs origines. Il ne suffit donc pas de dire que l’école voit le processus ethnique pénétrer par capillarité dans ses murs. Elle est elle-même l’un des espaces où, au travers d’expériences scolaires hiérarchisées, ce processus pose les bases de sa construction. Et on ne s’étonnera pas que, pour ces jeunes, l’école soit fréquemment perçue comme une imposition sociale humiliante qu’ils vivent comme la domination culturelle toujours active des sociétés ex-colonisatrices. La considération dérisoire qu’affichent régulièrement les jeunes minoritaires à l’égard de l’école ou, plus gravement, la violence qu’y font exister certains, peut alors être vue comme l’expression réactive à l’humiliation qu’ils y éprouvent.
Que l’affaire du foulard se soit déclarée, elle aussi, dans l’enceinte scolaire n’est pas chose anodine. Ce n’est pas par hasard que ce soit sur cette scène éminemment symbolique que des jeunes filles ont tenté d’introduire cette pièce d’habillement. Elle est, en effet, expressive d’un défi ethnique adressé à la laïcité, elle-même non moins expressive de l’identité ethnique républicaine. Certes, il y a une diversité de motivations dans le port du voile islamique. Il s’agit d’une pratique complexe qu’il serait téméraire de réduire à une univocité de signification. Mais si, ici, on accorde prioritairement l’attention à l’antagonisme identitaire qui s’y manifeste plutôt qu’aux divers contenus que ses partisans ou ses adversaires y discernent, c’est parce que, à partir du paradigme ethnique, la dimension polémique entre les valeurs invoquées de part et d’autre n’a valeur que d’instrument : le motif que l’on se donne pour édifier des frontières et organiser socialement la différence. La pièce vestimentaire que d’un côté on exhibe et à laquelle de l’autre on s’oppose, est surchargée de messages contradictoires et vise, paradoxalement, soit par l’affirmation soit par l’interdiction, d’abolir les sources d’une ségrégation. Les portes de l’école deviennent ainsi la frontière de l’universalisme égalitaire, tandis que le voile devient le symbole frontalier d’une exigence de respect des identités différentes. Aux yeux de la majorité, la perception des minoritaires en est transformée : par leurs filles, ils font publiquement état de ce qu’ils vont jusqu’à prétendre à une renégociation de ce qui définit les sphères du privé et du public. Nacira Guénif-Souilamas [8] a bien mis en lumière l’ambivalence de cette situation, montrant que, lorsque l’interdit est placé sur certaines manifestations symboliques de la dignité culturelle des origines, la domination ethnique des majoritaires est contestée par la confrontation dont ces jeunes filles se font les protagonistes. Dans cette opposition, il n’y a pas ceux qui ont raison et ceux qui ont tort. Il y a deux légitimités culturelles qui s’affrontent et qui prennent les filles à témoin du malentendu en les sommant de prendre parti. On peut penser que, d’abord déchirées par ce choix impossible, elles mettent ensuite en scène à l’école l’ébauche des réponses personnelles actuellement possibles et, sur la ligne de crête entre une ethnicité subie et une ethnicité voulue, elles tentent finalement d’ouvrir un espace de liberté.
Outre le rôle d’acteur ethnique joué respectivement par l’État-nation auquel la religion musulmane répond à la manière d’une « patrie portative », d’autres exemples d’interactions pourraient encore être évoqués. Il en va ainsi des politiques urbaines dans les « villes globales », où la conflictualité entre les classes sociales semble en définitive ne plus être ressentie comme aussi menaçante pour la démocratie que celle entre les cultures. On pourrait parler aussi de l’ethnostratification du marché du travail dont témoignent le différentiel des salaires et la discrimination à l’embauche. Si la rivalité entre salariés autochtones et immigrés n’a pas été sans entraîner des contradictions au sein des organisations syndicales elles-mêmes, c’est parce que la question sociale y est restée durablement posée dans des termes exclusivement socioéconomiques, ce qui postulait que, pour y trouver leur place, les immigrés devaient accepter d’oublier leur identité ethnoculturelle au profit de celle de travailleur.
Ainsi, au cours des dernières décennies, diverses expressions de l’ethnicité ont transparu dans les rapports entre majorité et minorité culturelles [9]. Elles tendent certes à définir des frontières entre « eux » et « nous », mais elles montrent en même temps que cette forme de relations clôturées relève moins d’une pure logique de séparation que d’une tension dans l’interdépendance. Les frontières ne font donc pas que séparer et ségréguer. Elles organisent aussi l’interaction dans la contiguïté dès lors que les différents groupes ne disparaissent pas par la simple absorption de l’un par l’autre. On peut donc dire que, même si c’est dans la rivalité et le conflit, l’ethnicité est un mode d’organisation sociale de la différence. Les acteurs se différencient certes sur base d’un contentieux où s’intriquent des facteurs tout à la fois économiques, politiques et culturels. Mais ce que ce mélange de facteurs révèle, c’est, d’une part, que les frontières ethniques ne sont jamais séparables d’un état global de l’organisation sociale et peuvent donc évoluer en fonction de sa transformation, et, d’autre part, que l’ethnicité est moins liée à la matérialité des ressources culturelles mobilisées par les acteurs qu’à la signification qui leur est donnée dans les interactions actuelles de leur monde. L’ethnicité n’organise donc pas des niches culturelles inexpugnables, mais la dramaturgie d’une société qui doit globalement se réintégrer, reconstituer des rapports sociaux qui apparaissent comme défaits, où chacun est renvoyé à son identité personnelle, mais qui demandent à être réarticulés dans une nouvelle identité collective.
S’il est vrai que l’usage des catégories de l’ethnicité va croissant dans les travaux des sciences sociales, on ne manque pas de constater néanmoins que, lorsqu’il n’est pas exclusivement dénonciateur des périls du communautarisme, il en reste le plus souvent à une vision partielle du phénomène où le vocable ethnique désigne exclusivement les autres. L’ethnicisation des relations sociales que l’on y envisage concerne les seules minorités qui ne sont considérées que comme les victimes d’une stigmatisation qu’elles ne font que subir. Un tel usage équivaut en fait à une simple dénonciation de l’imposition identitaire unilatérale dont l’ancien racisme colonial était capable. Or, n’est-on pas dans une nouvelle séquence historique qui, pour les sciences sociales tout au moins, devrait mettre un terme à cet usage unilatéral ? Comme le suggère l’anthropologue indien Arjun Appadurai [10], ne faut-il pas admettre qu’après le colonialisme, la grande question pour les sciences sociales n’est plus principalement de traquer les suites de la colonisation telles qu’elles peuvent se perpétuer dans les discriminations des sociétés européennes, mais d’arriver à une pensée transformée, au-delà de la logique à l’œuvre dans les prétentions intellectuelles de la période coloniale qui substantifiait l’ethnicité et ne l’appliquait qu’aux autres ? Il s’agit, dit-il, non pas de se contenter de penser l’après-colonialisme mais surtout de parvenir à penser après le colonialisme en purgeant la pensée de ce qui reste en elle de son unilatéralisme intellectuel ancien. Ce qui invite à analyser les interactions sociales propres à l’Europe multiculturelle en tenant compte de ce que, comme y insiste F. Barth, on n’assiste jamais à l’apparition d’une affirmation ethnique isolée, mais à un système d’affirmations ethniques indissociables qui, par le truchement d’imputations identitaires croisées, se répondent en vue d’organiser les appartenances, les frontières et les rapports entre les anciens établis majoritaires et les nouveaux entrants minoritaires.
Hélène Bertheleu [11] a fort bien identifié les résistances qu’il y a en France à franchir le pas d’une telle démarche. Elle souligne que tout au long des années 1990, beaucoup d’intellectuels furent convaincus qu’il fallait résister à la montée des particularismes qui équivalaient à leurs yeux à une fragmentation ou une balkanisation de la société française. De leur point de vue, rejeter l’usage de la notion d’ethnicité participait directement au soutien de la pensée républicaine universaliste. Et si au cours des années plus récentes l’expression « ethnicisation des relations sociales » est entrée malgré tout dans le vocabulaire des sciences sociales, ce n’est toutefois qu’au prix d’une sérieuse réduction de sa portée. C’est-à-dire en en restant au seul point de vue de la majorité et des soucis que peut inspirer aux mandataires publics la gestion d’une société de plus en plus composite au sein de laquelle la stigmatisation ethnique des minorités vient anormalement redoubler l’exclusion économique et politique dont elles pâtissent déjà. En creux s’affiche ainsi l’idée que l’on aurait dû normalement en rester à la perspective assimilationniste du traitement de la question migratoire. Mais ce qui est surtout obtenu grâce à cette manière d’utiliser la notion d’ethnicité, c’est que la catégorie nationale française elle-même ne soit pas ramenée au rang de groupe ethnique. Une telle manière de raisonner équivaut cependant à occulter les dimensions constructiviste et interactionniste qui constituaient le principal du potentiel théorique de l’ethnicité comme catégorie analytique de l’action. Elle demeure donc largement impensée dans ce pays, conclut H. Bertheleu.
Dans l’Europe qui voit s’élargir les sources de son peuplement en même temps que la question des identités y prend une forme inédite, il s’agit de parvenir à gérer une nouvelle configuration de la conflictualité sociale. Et il faut parler d’une réintégration de la société globale parce que l’idée d’intégration n’est pas une idée dynamique, capable de nous éclairer au sujet des processus socioculturels en cours dans une société dont l’histoire n’est pas finie. On ne peut s’en remettre à une conception monumentaliste de la société, qui la voit comme un ensemble achevé et quasi immuable, imposant et admirable dans lequel les immigrés ne pourraient aspirer qu’à faire disparaître leurs identités d’origine. Si pour penser la nouvelle conflictualité sociale il n’y a eu longtemps, particulièrement en France, aucune place pour le paradigme ethnique, c’est notamment parce que la question de la citoyenneté y a été phagocytée par celle de la nationalité qui faisait de l’intégration un impératif capable de dissimuler les modalités complexes de la construction des appartenances collectives. Mais la nationalité, qui est elle-même une notion politico-culturelle historiquement située, n’est plus à même de remplir cette fonction aujourd’hui. Et comme le fait valoir Herman van Gunsteren [12], l’alternative culturelle entre le communautarisme et l’universalisme est précisément ce dont la théorie politique de la citoyenneté doit chercher à sortir aujourd’hui. Car la communauté de destin des individus rassemblés par l’histoire sur un même territoire n’a donné naissance qu’à une « citoyenneté imparfaite ». C’est-à-dire à un type d’accomplissement politique qui, au travers d’une multiplicité d’identifications sociales reliant entre eux les individus en même temps qu’elles les opposent, n’assure que provisoirement une maîtrise du lien collectif jugée acceptable. En d’autres termes, les contenus de la citoyenneté confondus avec la conformité culturelle de la nationalité n’ont jamais constitué une réalité achevée, située en dehors des tensions sociales et des rapports de pouvoir. Ils ne correspondent pas à une norme définitivement établie et font continuellement l’objet de luttes non seulement pour les défendre, mais aussi pour les réinterpréter et les étendre.
Le travail du chercheur n’est pas de juger et de prescrire, mais d’abord de comprendre. Dans la présente note, on a simplement voulu montrer que les catégories de l’ethnicité n’ont pas qu’une utilité statistique et qu’elles peuvent constituer un paradigme fécond qui apporte un nouvel éclairage au moment où, sans qu’il soit nécessaire de prétendre que tous les rapports sociaux relèvent d’elles, dans les sociétés européennes contemporaines elles mettent néanmoins en lumière des clivages basés sur une différenciation sociale autre que celles plus traditionnelles de la classe, du sexe ou de l’âge. La reconnaissance de ces clivages ouvre une perspective supplémentaire à l’étude de l’espace public vu tout à la fois comme espace de risque et espace d’accomplissement social. Les catégories de l’ethnicité permettent de comprendre comment naissent, se croisent et deviennent politiques des pratiques consécutives au rassemblement de différentes identités culturelles dans un même espace. Et que ce n’est pas de la bienveillance des uns pour les autres mais au contraire de l’émoi et des désaccords face à ce qui, de part et d’autre, est perçu comme une menace ou comme un risque, que, dépassant leurs contradictions, les sociétés ethniques s’attèlent à la construction d’un nouveau faisceau de normes communes. C’est par le biais de compromis successifs qu’est donc progressivement rediscutée l’autoréférentialité dont spontanément les différentes cultures se réclament et que se créent des possibilités d’action commune entre des parties qui, au départ, s’évitaient par l’érection de frontières entre elles. Ainsi se prépare la mise en forme d’institutions politiques autres que celles qui régissaient les sociétés monoculturelles.
Il est temps de sortir des faux procès en hérésie culturaliste et cesser d’agiter le spectre du communautarisme que la notion d’ethnicité n’est pas soupçonnable de couvrir. Car elle vise précisément à établir que, si la référence à la culture est distincte et ne peut être réduite à n’être qu’une fausse conscience dérivée de l’économique et du politique, cette référence n’a néanmoins pas d’existence en dehors de ses rapports avec ces autres éléments constitutifs de l’agir humain. Avec l’ethnicité, il ne s’agit pas de privilégier le domaine des pratiques culturelles, mais d’affirmer que la vie est action et qu’elle est, notamment, culturelle dans son action. Il faut conférer sa place à la culture dans l’analyse de la dynamique sociale au sein de laquelle, avec les domaines économique et politique, elle donne sa forme à ce que Marcel Mauss appelle le « fait social total ».
par Albert Bastenier [14-10-2008]
Notes
[1] Michèle Tribalat, « Hétérogénéité ethnoculturelle et cohésion sociale », dans [Futuribles, juillet-août 2007, n°332, pp. 71-84.
[2] François Héran, Le temps des immigrés. Essai sur le destin de la population française, Seuil, La république des idées, 2007.
[3] J’ai tenté de montrer la fécondité intellectuelle de ces notions dans mon ouvrage Qu’est-ce qu’une société ethnique ? Ethnicité et racisme dans les sociétés européennes d’immigration, P.U.F., Coll. Sociologie d’aujourd’hui, 2004.
[4] Citant David Miller (Citizenship and National Identity, Cambridge, Polity Press, 2000), M. Tribalat définit le multiculturalisme radical comme une politique uniquement soucieuse de la préservation des différences sans souci pour l’identification avec la communauté nationale et l’État.
[5] Fredrik Barth, « Les groupes ethniques et leurs frontières », traduction française dans P. Poutignat et J. Streiff-Fenart, Théories de l’ethnicité, PUF, 1995.
[6] Parmi tous les auteurs qu’il faudrait citer, on retiendra Stuart Hall, Paul Gilroy, Achille Mbembe, Homi Bhabha, Arjun Appadurai.
[7] Françoise Lorcerie, L’école et le défi ethnique. Éducation et intégration, INRP-ESF, 2003.
[8] Nacira Guénif-Souilamas, « Les beurettes aujourd’hui », dans F. Lorcerie , 2003, op. cit.
[9] Dans mon ouvrage sur la société ethnique, j’ai consacré de longs développements aux expressions concrètes de la conscience identitaire tant de la majorité que de la minorité ethniques.
[10] Arjun Appadurai, Après le colonialisme. Les conséquences culturelles de la globalisation, Payot, 2001.
[11] Hélène Bertheleu, « Sens et usage de l’ethnicisation. Le regard majoritaire sur les rapports sociaux ethniques », dans Revue Européenne des Migrations Internationales, 2007, vol.23, n°2, pp. 7-26.
[12] Herman van Gunsteren, A Theory of Citizenship. Organizing Plurality in Contemporary Democracies, Westview Press, 1998.
Source : http://www.laviedesidees.fr
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