lundi, 31 janvier 2022
Le drame du Kosovo: le berceau de la Serbie est devenu une enclave musulmane
Le drame du Kosovo: le berceau de la Serbie devenu enclave islamique
Enric Ravello Barber
Source: https://www.enricravellobarber.eu/2022/01/el-drama-de-kosovo-la-cuna-de-serbia.html#.YfVml_jjKUk
Erdogan a donné le coup d'envoi de ses activités diplomatiques de 2022 par une visite en Albanie. Le premier ministre turc cherche à consolider son influence dans le pays musulman des Balkans face aux timides tentatives de l'Italie de retrouver son ancienne présence traditionnelle dans la région, interrompue sous le communisme et pendant le régime pro-chinois d'Enver Hoxha.
La puissance croissante de l'Albanie dans la région n'est pas perdue pour les Etats de la région. Le Kosovo, berceau et terre sainte des Serbes, est devenu un territoire à majorité albanaise et musulmane. conséquences de la substitution démographique. La logique conduira à la création d'une Grande Albanie, bientôt rejointe par la zone à majorité albanaise de Macédoine du Nord, qui deviendra un Etat musulman, lié à Washington et Ankara sur la fragile scène des Balkans.
Kosovo, une histoire mouvementée
On trouve au Kosovo des vestiges culturels remontant à la période néolithique, ce qui laisse supposer une population importante et un degré de civilisation significatif dans la région dès les premiers temps.
Les peuples indo-européens de la branche illyro-thrace sont arrivés sur le territoire entre le IVe et le IIIe siècle avant J.-C., et le monde romain s'est imposé à cette population, ce qui a eu un effet d'acculturation important sur la région. Après la chute de l'Empire romain d'Occident, le Kosovo actuel a fait partie de l'Empire romain d'Orient, que les historiens appellent à tort l'Empire byzantin.
Le Kosovo, qui jouxte l'Albanie et la Macédoine, a été l'un des premiers lieux d'implantation des Serbes dans les Balkans aux Ve et VIe siècles. Les Serbes étaient l'une des tribus slaves qui peuplaient la région des Balkans à cette époque, devenant l'élément ethnique majoritaire, bien qu'en symbiose avec le substrat illyrien-latin.
Soumis à ce qu'on appelle l'Empire byzantin (en réalité l'Empire romain d'Orient), les Serbes se sont convertis au christianisme orthodoxe. En 850, ils sont devenus sujets du premier Empire bulgare. Les Bulgares étaient un peuple des steppes apparenté aux Hongrois qui a conquis une partie de la région des Balkans au IXe siècle, laissant peu de traces, seulement le nom et l'appellation de la Bulgarie actuelle, dont les habitants ne descendent pas principalement de ces Bulgares, mais sont slaves par leur ethnie, leur langue et leur religion orthodoxe, et donc étroitement apparentés aux Serbes et aux Russes. Après la chute de l'éphémère empire bulgare, la région a été reconquise par Constantinople (la capitale de l'empire byzantin), mais les différents royaumes serbes ont commencé à lutter pour leur indépendance, faisant du Kosovo la plus forte zone de résistance serbe à la domination impériale.
La Serbie a connu son apogée sous les Nemanides et le règne de leur tsar, Douchan, à la fin du XIVe siècle, ce qui en a fait l'État le plus important des Balkans. Le Kosovo, cœur du royaume serbe, a vu se multiplier les monastères, trésors architecturaux, déclarés sites du patrimoine mondial, dont Pec, qui symbolise l'autorité suprême de l'Église orthodoxe serbe. À l'époque, les Serbes étaient majoritaires dans la région, bien qu'il y ait de petites communautés de Grecs, de Bulgares et de Allemands-Saxons.
L'invasion turque, qui a eu lieu après la chute de Constantinople (aujourd'hui Istanbul), a atteint le Kosovo à la fin du XIVe siècle. Pour arrêter l'avancée turque, une coalition chrétienne dirigée par Lazare Hrbeljanovic est formée, qui comprend des Serbes, des Valaques, des Albanais (l'Albanie n'est pas encore musulmane), des Hongrois et des Serbes. Les Turcs ont progressé rapidement sur le territoire des Balkans et la guerre s'est déroulée dans le champ dit du Kosovo. Les chefs des deux armées, le prince serbe Lazare Hrebeljanovic et le sultan turc Moura, sont tués, mais les troupes turques parviennent à disperser les troupes chrétiennes épuisées.
Selon la tradition serbe, le prince Lazare et la noblesse serbe, qui avaient été faits prisonniers, ont choisi de mourir plutôt que de se convertir à la foi musulmane, préférant la mort dans la liberté à la soumission et à la servitude.
Cette défaite est encore présente dans le cœur de chaque Serbe, et transforme pour eux le Kosovo en un lieu mystique, hors du temps, présent dans la mémoire de chacun d'entre eux. Le Kosovo est la terre sainte où, après avoir connu la puissance et la gloire, les Serbes sont tombés en esclavage.
Pour les Serbes, le Kosovo n'est pas seulement un espace géographique, c'est un territoire métaphysique auquel les Serbes se sentent liés, après plus de six cents ans, par un serment qui proclame le culte des héros et incarne le mystère de la mort et de la résurrection de la nation serbe.
Substitution ethnique : l'albanisation du Kosovo
Pendant la soumission à l'Empire ottoman, le Kosovo était inclus dans la "Roumélie", qui englobait la partie de l'Europe soumise au sultan. Logiquement, durant ces années, l'islamisation du territoire a commencé, et c'est à ce moment-là que les Albanais et les Bosniaques - deux peuples européens - ont commencé à embrasser le Coran.
Le XVIIe siècle voit le début de la guerre entre les Turcs et le Saint Empire romain germanique, qui est déterminé à rendre ces terres à la civilisation européenne. Les contre-offensives turco-musulmanes continues s'accompagnent de terribles pillages, viols et incendies. La répression turque visait principalement les Serbes, dont 30.000 d'entre eux, menés par le patriarche orthodoxe Arsenije III, ont été contraints de se réfugier en Autriche, lors de cet épisode de leur histoire que les Serbes appellent encore la Grande Migration. C'est alors, sous la protection des Turcs, que les Albanais ont commencé à arriver en masse, modifiant la composition ethnique du Kosovo.
Au 19ème siècle, un certain sentiment nationaliste albanais kosovar régnait dans la région. En 1912, après la première guerre des Balkans, le Kosovo a été reconnu internationalement comme une province de la Serbie nouvellement libérée, et le pourcentage de Serbes dans la région dépassait les 50 %. Pendant la Seconde Guerre mondiale, la région est passée sous la souveraineté albanaise, mais à la fin du conflit, elle est revenue à la Serbie, qui est devenue l'une des républiques fédérées de Yougoslavie, mais à cette époque, le pourcentage de Serbes était déjà tombé à 25 %.
Contrairement à une idée reçue, le "coup de grâce" contre les Serbes a été donné par le régime du maréchal Tito, qui a interdit le retour des réfugiés serbes dans la région, alors qu'il cherchait à se rapprocher de l'Albanie dirigée par le maoïste Enver Hoxha. Tito a encouragé la naissance d'Albanais kosovars en devenant le parrain d'un septième enfant né dans une famille albanaise kosovare. Le résultat de cette politique d'inversion démographique a été que, dans les années 1990, le pourcentage de Serbes dans la région est tombé à 10% ; dans les années 2000, les actions terroristes de l'UCK ont ramené ce chiffre à 8%.
UCK : narco-guérilla albanaise kosovare
En 1998, les guérilleros de l'UCK (Armée de libération du Kosovo) ont commencé leur activité armée et leurs actions étaient principalement axées sur le meurtre de civils serbes. Cette organisation terroriste, aux méthodes mafieuses, n'a pas fait de distinction claire entre son activité armée et la criminalité de droit commun. L'UCK serait l'un des maillons les plus importants de la route de la drogue de l'Afghanistan vers l'Europe occidentale via la Turquie et les Balkans. Les liens de l'UCK avec le trafic illégal de voitures et surtout avec le trafic dégoûtant d'organes humains sont bien connus.
En 2008, le procureur serbe chargé des crimes de guerre a enquêté sur des dizaines de rapports concernant des prisonniers serbes capturés par des chefs terroristes de l'UCK, qui ont ensuite fait partie du gouvernement kosovar, tout en étant accusés de trafic d'organes. Le bureau du procureur serbe a reçu des informations du Tribunal de La Haye selon lesquelles des dizaines de Serbes emprisonnés par les Albanais au Kosovo ont été emmenés en Albanie en 1999 et tués, leurs organes prélevés et vendus à des trafiquants internationaux. L'ancien procureur en chef du Tribunal de La Haye, Carla Ponte, a publié un livre sur ce sujet intitulé The Hunt, dans lequel elle note que les victimes serbes ont été capturées de préférence après les bombardements "libérateurs" de l'OTAN dans la région. Une Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe a accusé Hashim Thaci, chef de l'UCK, d'avoir été à la tête de ce réseau criminel. Thaci a été élu deux fois président du Kosovo indépendant.
Le Kosovo est l'épicentre des mafias en Europe
Dans son livre El G9 las mafias del mundo, Jean François Gayraud, expert criminologue, met en garde contre le danger de la montée en puissance de groupes narco-terroristes tels que la guérilla albanaise de l'UCK, un facteur qui menace la paix et la stabilité du monde. Son diagnostic est sans équivoque : "La plus grande symbiose entre l'État et la mafia a lieu dans un pays qui n'existe pas encore : le Kosovo, nous avons laissé émerger une petite Colombie au cœur de l'Europe".
Le Kosovo est devenu le principal foyer de traite des êtres humains, de traite des blanches, de trafic de cigarettes, de voitures volées et de trafic de drogue en Europe.
Plusieurs représentants de ses autorités ont été arrêtés sur la base d'accusations criminelles, comme son ancien premier ministre, Agim Ceku, qui a été détenu à la frontière macédonienne-bulgare lorsque les autorités colombiennes l'ont expulsé de leur pays où il a été déporté par la sécurité locale à la demande du gouvernement de Belgrade qui veut le traduire devant des tribunaux internationaux.
Les États-Unis sont derrière l'instabilité dans les Balkans
Le XXe siècle a été le témoin d'un conflit géopolitique constant : l'instabilité dans les Balkans provoque de l'instabilité et des conflits dans toute l'Europe.
La chute du Mur a entraîné un nouveau scénario international, le "danger communiste" a disparu, le parapluie américain est devenu inutile et un rapprochement entre l'Europe de l'Ouest et de l'Est est possible ; l'équilibre est rompu et l'hégémonie militaire américaine peut être remise en question.
Avec la vieille et infaillible tactique du "diviser pour régner", les stratèges du Pentagone n'ont pas été insensibles à l'éclatement des conflits dans la zone la plus sensible de notre continent où passent les zones d'influence des puissances européennes : Slovénie-Croatie (influence allemande) ; Serbie-Bulgarie-Macédoine (influence russe), en plus de la traditionnelle amitié franco-serbe. Ce qui aurait pu être un point d'union entre les pays européens est devenu un point de confrontation guerrière.
Washington a introduit un élément qui allait complètement déstabiliser la région: l'islamisme politique. Alors que l'islam existait dans la région en tant que religion, c'est le soutien des États-Unis qui l'a transformé en un élément politico-idéologique. Les États-Unis ont utilisé l'islamisme de la même manière qu'ils l'ont fait en Tchétchénie contre la Russie et par le biais du Maroc contre l'Espagne. Cette action du Pentagone s'est traduite par un soutien à la création du premier État musulman d'inspiration islamiste en Europe: la Bosnie-Herzégovine; et plus tard par un soutien clair à la séparation du Kosovo de la Serbie, et à son inclusion dans la Grande Albanie, en tant que deuxième État musulman sur le sol européen (l'Albanie communiste était à majorité islamique, mais pouvait difficilement être qualifiée d'État musulman). La création de cette "dorsale verte" - Albanie-Bosnie - avec des alliances tactiques et idéologiques avec la Turquie, à l'époque fidèle à la politique de Washington, a rompu l'équilibre des Balkans et a créé de façon permanente une zone d'instabilité, la transformant en un nid de frelons.
La Russie et les identitaires européens du côté de la Serbie
La Serbie est, avec la Bulgarie, le grand allié permanent de la Russie, trois pays slaves de religion orthodoxe et aux liens culturels forts. Dans les récentes crises des Balkans, la Serbie a également bénéficié du soutien inconditionnel de pays comme la Roumanie (latine et orthodoxe) et la Grèce (hellénique et orthodoxe). Mais le soutien le plus puissant vient sans aucun doute de Moscou.
La Russie a soutenu diplomatiquement la Serbie, envisageant même une éventuelle réponse militaire Moscou-Belgrade à la proclamation unilatérale d'indépendance du Kosovo. Cependant, le Kremlin n'a pas voulu prendre une telle mesure qui l'aurait ouvertement confronté aux États-Unis. La non-intervention de la Russie au Kosovo a eu son pendant géopolitique en Géorgie, où, à l'été 2008, Moscou a arrêté militairement et avec force l'attaque de la Géorgie contre l'Ossétie du Sud, reconnaissant l'indépendance de ce nouvel État, qui est l'étape préalable à sa réunification avec l'Ossétie du Nord, soit comme une autre région de la Russie.
La percée militaire de la Russie sur le grand échiquier a marqué un nouveau rapport de force. Depuis lors, la Russie a soutenu encore plus ouvertement la position des Serbes au Kosovo, tant sur le plan diplomatique que logistique. Dans les circonstances actuelles, il semble probable que Moscou s'impliquera plus fortement dans une éventuelle nouvelle confrontation entre Albanais et Serbes au sujet de la domination du Kosovo.
En Europe occidentale, il convient de noter le soutien que tous les partis identitaires ont apporté à la Serbie et à la population serbe chrétienne de la région. Lors des pires moments de la crise du Kosovo, les déclarations des dirigeants de ces partis, notamment du FPÖ autrichien et du FN français, étaient claires. Ajoutez des actions et des réponses concrètes, comme l'initiative française Solidarité Kosovo, qui apporte de la nourriture, des soins médicaux et des jouets aux enfants serbes depuis 2011, avec des antennes dans plusieurs pays européens.
Pour ceux d'entre nous qui croient en l'émancipation européenne, la question du Kosovo est toujours d'actualité.
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L'amputation de l'Ukraine est à la Russie ce que l'amputation de la Catalogne serait à l'Espagne
L'amputation de l'Ukraine est à la Russie ce que l'amputation de la Catalogne serait à l'Espagne
Par Juan Manuel de Prada
Ex: https://kontrainfo.com/la-amputacion-de-ucrania-es-para-rusia-como-seria-la-de-cataluna-para-espana-por-juan-manuel-de-prada/
Lorsque les médias de crétinisation de masse évoquent l'Ukraine, ils négligent souvent un détail sans importance. L'ensemble du Levant ukrainien jusqu'à Kiev ne fait pas seulement partie de la Russie, il en est le berceau historique. En même temps que le démantèlement de l'Union soviétique, des dirigeants ineptes comme Eltsine ou des marionnettes d'intérêts étrangers comme Gorbatchev ont permis que leur patrie soit démembrée et mise en vente ; c'est ainsi que l'indépendance de l'Ukraine a été proclamée, où, outre les territoires occidentaux annexés par les Soviétiques, il y avait des régions fondées par les Russes, dans la nuit des temps, puis gagnées dans un grand bain de sang sur l'envahisseur turc.
L'amputation de l'Ukraine est aussi douloureuse pour la Russie que l'amputation de la Catalogne le serait pour l'Espagne ; et il est encore plus douloureux que la Russie doive accepter que, sur des terres qui ont été son berceau historique, l'OTAN installe des bases militaires et place des missiles dirigés vers Moscou.
Pour calculer l'humiliation que subit la Russie, nous ferions bien d'imaginer que demain la Catalogne, profitant de notre effondrement économique, déclare son indépendance avec le soutien de puissances étrangères qui, en plus d'imposer un gouvernement fantoche, placeront des missiles à la frontière, visant le territoire espagnol. La Russie subit patiemment cette humiliation, mais ose avertir que l'adhésion de l'Ukraine à l'OTAN aurait de "graves conséquences".
Toute personne saine d'esprit peut-elle décrier la demande de la Russie de garanties minimales pour sa sécurité ? Si les États-Unis ont le "droit" de placer à la frontière russe des missiles nucléaires qui pourraient volatiliser Moscou en un clin d'œil, la Russie ne pourrait-elle pas, en toute équité, en placer autant à Cuba ou au Venezuela ? Qui, soit dit en passant, ne sont pas limitrophes des États-Unis et n'en sont pas non plus le berceau historique. La servilité pitoyable du Dr Sánchez, qui est autant un larbin et un lèche-bottes des États-Unis qu'Aznar l'était dans le passé, mérite une mention séparée.
Le Dr. Sánchez a toléré les attitudes les plus hostiles du Maroc (de l'appropriation des eaux territoriales à l'envoi massif de "réfugiés") sans recevoir aucune aide de l'OTAN ; aujourd'hui, cependant, il envoie une frégate dans la zone de conflit, dans le plus pur style sepoy. Combien de manifestations le Dr. Sánchez dirigerait-il si cette frégate avait été envoyée par un gouvernement présidé par Aznar ou Rajoy ? Et comme les États-Unis ne le laissent même pas mettre les pieds sur la table, le pauvre bougre ordonne à ses publicitaires de le filmer en train de se ridiculiser au téléphone, tel un Gila habillé par Emidio Tucci.
Soljenitsyne avait raison lorsqu'il écrivait : "Il n'y a aucun espoir pour l'Occident ; en fait, nous ne devons jamais y compter. L'abondance excessive et une atmosphère polluante d'impudeur ont atrophié sa volonté et son jugement". C'est pourquoi nous devons toujours nous souvenir de la prophétie du moine Philothée : "Byzance est la deuxième Rome ; la troisième sera Moscou. Quand elle tombera, il n'y en aura plus".
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L'axe géopolitique Iran-Chine-Russie converge - l'Inde s'y joindra-t-elle ?
L'axe géopolitique Iran-Chine-Russie converge - l'Inde s'y joindra-t-elle?
Par Alfredo Jalife Rahme
Source: https://kontrainfo.com/converge-el-eje-geopolitico-iran-china-y-rusia-se-incorpora-india-por-alfredo-jalife-rahme/
Les visites des dirigeants des quatre grandes puissances eurasiatiques - Russie, Chine, Inde et Iran - ont été activées. Avant la fin de l'année 2021, le tsar Vladimir Poutine a effectué une visite triomphale en Inde (https://bit.ly/3rLH7Uf).
Le nombre de fois où Poutine et le mandarin Xi Jinping se sont rencontrés a déjà été oublié.
Aujourd'hui, Poutine rendra visite à son homologue chinois à l'occasion de l'ouverture des Jeux olympiques d'hiver à Pékin.
Il y a quelques jours, le nouveau président chiite de l'Iran, Ebrahim Raisi, a rendu visite à son homologue russe, au moment même où l'Iran s'est tourné "vers l'Est" alors que les puissances de l'UE et de l'OTAN lui ont bloqué l'accès à la partie orientale de la Méditerranée (à l'exception des côtes de la Syrie et du Liban).
Un "rectangle géostratégique eurasien" transcendantal est configuré, où la Russie entretient des relations optimales avec les trois autres puissances : la Chine, l'Inde et l'Iran. Les relations de l'Iran avec les trois autres piliers sont également excellentes, seules la Chine et l'Inde (qui, elle, est sur le point d'être séduite par l'axe anglo-saxon pour être jetée dans le feu d'une guerre contre Pékin (https://bit.ly/3Iv2CQ9)).
La consolidation du "rectangle géostratégique eurasien" sera graduelle. Après le spectaculaire "accord stratégique" de 25 ans entre la Chine et l'Iran, le choc entre le grand projet de la route de la soie et l'idée de grande réinitialisation anglo-saxonne a donné le ton à un nouveau partenariat stratégique de 20 ans entre la Russie et l'Iran, dont l'objectif principal, d'un point de vue financier, est de renverser le système bancaire SWIFT dominé par les États-Unis et, d'un point de vue géo-économique et géopolitique, de converger avec les aspirations de l'Organisation de coopération de Shanghai (https://bit. ly/2W3XhMX), l'Union économique eurasienne, les 15-RCEP (https://bit.ly/3tOAFyJ) et les BRICS, selon le célèbre géopoliticien brésilien Pepe Escobar (https://bit.ly/35lEstf), qui tient grâce aux projets financiers de la Chine (CIPS) et de la Russie (SPFS), pour éviter l'asphyxie par SWIFT.
Depuis cinq ans, aucun président iranien n'a rencontré son homologue russe. Aujourd'hui, le président iranien a qualifié sa présence au Kremlin de "moment décisif" dans la relation bilatérale, alors que Téhéran poursuit ses négociations triangulées à Vienne avec Biden pour chercher à remédier à la rupture provoquée naguère par Trump qui avait dénoncé l'accord nucléaire, des négociations par ailleurs entravées par les intrigues insidieuses de son ancien allié et désormais ennemi Netanyahu (https://bit.ly/3tQXamx).
Le ministre iranien des affaires étrangères, Amir Abdollahian, a défini la cosmogonie géopolitique de l'Iran comme une "politique centrée sur le bon voisinage, avec une approche politique asiatique tournée vers l'Est et une diplomatie centrée sur l'économie".
Dans son vibrant discours à la Douma, le président Raisi a rappelé qu'"aujourd'hui, la stratégie de domination a échoué, les États-Unis sont dans leur position la plus faible et la puissance des pays indépendants connaît une croissance historique", grâce au "concept de résistance", en tant qu'"élément central des équations de dissuasion", qui a "hissé le drapeau du nationalisme, de l'indépendance et du développement scientifique", malgré toutes les sanctions étouffantes. À l'issue de la visite très médiatisée de M. Raisi en Russie, les exercices militaires trilatéraux Russie/Chine/Iran dans le golfe d'Oman ont immédiatement débuté. Le Global Times, le porte-parole officieux du Parti communiste chinois, a annoncé la fin de l'exercice militaire de trois jours dans le Golfe d'Oman entre les marines de la Russie, de la Chine et de l'Iran (https://bit.ly/3tQTaT3). C'est la deuxième fois que cet exercice militaire trilatéral a lieu alors que les États-Unis affrontent simultanément la Chine dans le détroit de Taïwan et la Russie en Ukraine/mer Noire/Biélorussie.
Le golfe d'Oman est très sensible, car il relie le détroit d'Ormuz, super-stratégique, où transite un tiers du pétrole mondial, au nord de l'océan Indien.
Lors du sommet Poutine-Raisi, la signature, il y a 20 ans, entre la Russie, l'Iran et l'Inde, du "Corridor multimodal Nord-Sud (https://bit.ly/3fOcWqf)" de 7200 kilomètres, qui forme les trois piliers du "rectangle géostratégique eurasien", a-t-elle pris forme ?
Pour suivre le Prof. Alfredo Jalife-Rahme:
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11:07 Publié dans Actualité, Eurasisme, Géopolitique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : inde, russie, chine, iran, eurasie, eurasisme, politique internationale, géopolitique, actualité, route de la soie, asie, affaires asiatiques | | del.icio.us | | Digg | Facebook
dimanche, 30 janvier 2022
Conflit ukrainien: une répartition des rôles peu claire - Le point de vue du journal Junge Freiheit (Berlin)
Conflit ukrainien: une répartition des rôles peu claire
Le point de vue du journal Junge Freiheit (Berlin)
Thorsten Hinz
Ex: https://jungefreiheit.de/debatte/kommentar/2022/ukraine-konflikt/
Les murs entre la Russie et l'Occident n'ont jamais été aussi froids qu'aujourd'hui depuis que le secrétaire général soviétique Mikhaïl Gorbatchev a parlé en 1986 de la "maison commune européenne" et a appelé de toutes parts au désarmement matériel et verbal. Ce n'est qu'en apparence que les rôles sont clairement répartis dans le conflit ukrainien : ici, dit-on, il y a l'Ukraine démocratique éprise de liberté, qui insiste sur son droit souverain à rejoindre l'OTAN et qui reçoit pour cela le soutien de l'Occident, qui porte ainsi haut ses valeurs et idéaux universels. Là-bas, la Russie despotique, qui parle d'encerclement et de menace pour justifier ses réflexes impériaux et qui se prépare à envahir son voisin.
Les Etats-Unis et la Grande-Bretagne livrent des armes à l'Ukraine. En Allemagne, des voix s'élèvent pour demander que l'on s'aligne également derrière la grande puissance américaine et que l'on fasse preuve de fermeté tous ensemble. Un appel lancé dans le journal Die Zeit par quelque 70 experts plus ou moins compétents ès-questions de l'Europe de l'Est exhorte à mettre fin à la "voie particulière de l'Allemagne en matière de politique orientale" et à prendre des "mesures plus efficaces" contre Moscou. Déjà "l'attaque de Poutine contre l'Ukraine en 2014" - il s'agit de l'occupation de la Crimée - serait directement liée à "la passivité de la politique allemande pendant 20 ans face au néo-impérialisme russe" qui l'a précédée.
Dans de tels discours, une conception hypermorale de la politique s'élève jusqu'à l'absurde. Lorsque le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov parle devant les caméras à la novice allemande, qui fait désormais fonction de ministresse des affaires étrangères, de son souhait d'améliorer les "relations russo-américaines" - et non russo-allemandes -, le lapsus linguistique dissimule à peine l'évidente réalité politique, à savoir qui détient véritablement la puissance dans le camp occidental.
Solidarité avec l'Ukraine
Le Berlin officiel exprime sa solidarité avec Kiev pour s'exercer à la realpolitik. L'avertissement de Bismarck, confirmé par les catastrophes historiques, de ne jamais couper les ponts avec la Russie, est toujours d'actualité. En outre, les sociaux-démocrates restent sous l'influence de l'Ostpolitik de Willy Brandt. Le chef de la CSU, Markus Söder, fait preuve d'un grand sens de l'État : la Russie est une grande puissance et, certes, elle est un partenaire difficile, mais non un ennemi. Il refuse son exclusion du système financier Swift et l'abandon du gazoduc Nord Stream 2 en mer Baltique. Même les apparitions d'Annalena Baerbock n'ont plus rien désormais du dogmatisme et de la doxa des Verts.
Egon Bahr (1922-2015), membre de la SPD, jadis en charge de la politique étrangère et bismarckien, a déclaré devant des collégiens : "En politique internationale, il n'est jamais question de démocratie ou de droits de l'homme. Il s'agit des intérêts des Etats. Retenez bien cela, quoi qu'on vous dise en cours d'histoire".
La déclaration de Poutine, jugée scandaleuse en Occident, selon laquelle l'effondrement de l'Union soviétique est "la plus grande catastrophe géopolitique du XXe siècle" est, du point de vue russe, un constat lucide : la Russie a largement perdu l'accès hors glace à la mer Baltique. La sécession de l'Ukraine a affaibli de manière décisive la position russe en mer Noire ; Odessa, la porte d'entrée du commerce avec la Méditerranée et au-delà, a été perdue. L'occupation de la Crimée a donc constitué un "frein d'urgence" pour la politique mondiale.
La Russie et ses conflits épuisants
La constatation de Zbigniew Brzezinski selon laquelle la Russie n'a plus "géographiquement d'accès facile au monde extérieur" et qu'elle est menacée sur ses flancs ouest, sud et est par des conflits épuisants avec les républiques islamiques voisines reste valable. "Seules les régions septentrionales de permafrost, inhabitables et inaccessibles, semblent encore sûres sur le plan géopolitique".
L'étranglement stratégique de l'ancienne superpuissance nous est ainsi révélé. Avec l'adhésion de l'Ukraine à l'OTAN, l'étau se resserrerait encore davantage. Il est démagogique que le ministre américain des Affaires étrangères Antony Blinken demande, lors de sa visite à Berlin : "Quelles troupes encerclent qui ici? Quel pays a revendiqué par la force le territoire d'un autre pays" ? Depuis 1991, les Etats-Unis ont investi des milliards de dollars pour rallier l'Ukraine à leur cause sur le plan intellectuel et économique. Les forces et les financiers occidentaux ont également eu les mains dans le cambouis lors des soulèvements de Maïdan. L'adhésion de Kiev à l'OTAN scellerait militairement la capitulation géostratégique de Moscou.
Le ministre britannique de la Défense Ben Wallace a rejeté l'idée d'un encerclement de la Russie comme une hallucination. Après tout, seuls cinq des 30 alliés ont une frontière commune avec la Russie et seulement un seizième de ses frontières avec l'OTAN. Mais ce rapport changerait brusquement avec l'adhésion de l'Ukraine à l'Alliance Atlantique. Sans le vouloir, Wallace fournit un contre-argument sur le site web de son ministère en rappelant l'ancienne fraternité d'armes russo-britannique qui a vaincu Napoléon et Hitler. Ces victoires étaient essentiellement dues à la profondeur stratégique de la Russie, qui offrait à la Grande Armée et à la Wehrmacht des lignes de ravitaillement démesurées et ingérables. Une avancée de l'OTAN vers la frontière orientale de l'Ukraine réduirait encore cette profondeur de manière dramatique.
L'Allemagne comme facteur de risque
Pour les penseurs anglo-saxons de la géopolitique, Halford Mackinder et Nicholas J. Spykman, la tâche d'une véritable puissance mondiale consistait à s'assurer la domination de la masse continentale eurasienne qui, avec l'Afrique, formait l'"île mondiale". "Celui qui domine l'Europe de l'Est, domine le Heartland ; celui qui domine le Heartland, domine l'île mondiale ; celui qui domine l'île mondiale, domine le monde".
Le "territoire-coeur" comprend la partie européenne de la Russie et la Sibérie occidentale. Mackinder voyait un facteur de risque dans l'Allemagne, très compétente à l'époque sur le plan technique et organisationnel, parce que son lien avec le Heartland russe était en mesure de remettre en question la domination anglo-saxonne.
Aujourd'hui, l'Europe est considérée par les Etats-Unis comme un "tremplin utile" (Brzezinski) pour leurs ambitions géopolitiques. L'ambassadeur ukrainien à Berlin se sent leur porte-parole attitré et se permet d'adopter un ton insolent à l'encontre de son pays d'accueil. Les drapeaux s'entrechoquent également dans le froid entre les partenaires de l'OTAN.
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La revue de presse de CD - 30 janvier 2022
La revue de presse de CD
30 janvier 2022
CHINE
Comment la Chine a fait de l’art contemporain une arme de soft power
Si en Occident la perception principale que l’on peut avoir de la relation entre la Chine et l’art contemporain est la manifeste défiance du régime de Pékin envers un certain nombre d’artistes nationaux, le fait est qu’en [moins de vingt ans…], la Chine est (aussi) devenue un géant du marché de l’art.
The Conversation
DÉSINFORMATION/CORRUPTION
"Le procès du Comité Corona contre Bill Gates, Fauci, BlackRock... devrait commencer le 5 février", annonce Reiner Fuellmich
Reiner Fuellmich, qui s’est fait connaître grâce à ses victoires lors de procès retentissants contre le géant automobile Volkswagen et la Deutsche Bank, nous annonce que le procès public très attendu contre les individus « qui tirent les ficelles » (Bill Gates, le Dr Anthony Fauci, le Dr Drosten, le gestionnaire d’actifs BlackRock, le laboratoire Pfizer…) s’ouvrira le week-end des 5 et 6 février. Confiant dans le fait que les accusés seront reconnus coupables, le Comité Corona intente cette procédure judiciaire avec un groupe d’avocats à l’international.
Francesoir.fr
https://www.francesoir.fr/videos-les-debriefings/reiner-f...
Commission Bronner : nouvelle étape d’exclusion des penseurs dissidents ?
Fin septembre 2021, Gérald Bronner, sociologue, est nommé par Emmanuel Macron à la tête d’une commission, chargée de rendre un rapport fin décembre 2021. Celle-ci intitulée « les Lumières à l’ère numérique » a pour mission de traquer « le complotisme, les contenus haineux sur internet et les fake news ». A lire les déclarations de Gérald Bronner, ne s’agit-il pas d’exclure du débat les penseurs et citoyens dissidents.
Breizh-info.com
https://www.breizh-info.com/2022/01/24/178381/commission-...
A-t-elle une carte de presse ou est-elle la seconde porte-parole macroniste ?
fdesouche.com
https://www.fdesouche.com/2022/01/27/celine-pigalle-direc...
ÉTATS-UNIS
John Kiriakou : « Le patriotisme américain n’est pas moins dangereux que le patriotisme russe »
Cette semaine, le New York Times a affirmé que la Russie était en train de préparer sa population à une éventuelle guerre avec les États-Unis. Selon le Times, Moscou « valorise le patriotisme » en formant les lycéens à l’histoire et à la mémoire militaire, et les médias russes affirment que le pays se considère « entouré d’ennemis » et pourrait être contraint de se défendre « comme il l’a fait contre les Nazis. »
Les-crises.fr
https://www.les-crises.fr/john-kiriakou-le-patriotisme-am...
Ukraine : Interviewer Victoria Nuland ou comment ne rien comprendre à la crise
La Sous-Secrétaire d’État américaine aux Affaires Politiques, Victoria Nuland, qui a piloté le coup d’État de 2014 qui a renversé le gouvernement démocratiquement élu de l’Ukraine et mis en branle la crise actuelle, a été invitée par PBS NewsHour le 7 décembre 2021 afin d’expliquer l’impasse en Ukraine.
les-crises.fr
https://www.les-crises.fr/ukraine-interviewer-victoria-nu...
FRANCE
Les quatre âges de l’islamo-gauchisme
En février 2021, la ministresse de l’Enseignement supérieur, Frédérique Vidal, heurte le microcosme politico-médiatique en dénonçant l’influence de l’islamo-gauchisme dans les universités hexagonales. Elle demande au CNRS, pourtant contaminé par cette infection mentale, d’enquêter sur ce phénomène. En un temps record, soit quelques jours, l’organisme saisi rend ses conclusions. À l’instar de la théorie du genre, l’islamo-gauchisme n’existe pas ! En revanche, les féminicides et le réchauffement climatique sont des faits in-con-tes-tables…
Euro-synergies
http://euro-synergies.hautetfort.com/archive/2022/01/23/l...
Le Conseil constitutionnel autorise les forces de l'ordre à utiliser les drones pour la surveillance
Après deux années de protection légale contre la surveillance par drones, le Conseil constitutionnel a fini par valider un texte de loi qui autorise à recourir à ce type de technologie, pour l’instant seulement par les forces de l’ordre, excluant les policiers municipaux. Il s'agit d'un des points du projet de loi « relatif à la responsabilité pénale et à la sécurité intérieure ».
francesoir.fr
https://www.francesoir.fr/politique-france/les-forces-de-...
Affaire Kohler : le scandale qui menace Macron
Conflit d'intérêt, subventions publiques et pantouflage au sommet de l'Etat. Comment Alexis Kohler, actuel secrétaire général de l'Elysée et l'un des plus proches collaborateurs d'Emmanuel Macron, a-t-il pu favoriser pendant de nombreuses années les intérêts d'une compagnie maritime Italo-Suisse contrôlée par un proche, dont plusieurs cargos ont été découverts avec d'importantes quantités de cocaïne ? Emmanuel, un homme d'affaires à l'Elysée, une série documentaire d’investigation en neuf épisodes produite par OFF Investigation.
Off Investigation
https://www.youtube.com/watch?v=jf6UBcPKlMM
GAFAM
L'empire technologique : privatisation et piratage de nos esprits
L'explosion des technologies de l'information, de la communication et du contrôle ressemble aujourd'hui à un champignon atomique qui nous laisse aveugles, comme si nous étions remplis d'une radioactivité stupéfiante, incapables de réagir à des changements aussi accélérés qui semblent condamner les gens à leur esclavage et à la plus indigne des passivités. L'informatisation des tâches, la mécanisation et la numérisation de tous les processus, la "dématérialisation" des économies nationales (qui masque en réalité les délocalisations industrielles et l'intensification de la division internationale du travail) ont pris de court tous les mouvements de résistance populaire.
Euro-synergies
http://euro-synergies.hautetfort.com/archive/2022/01/21/l...
GÉOPOLITIQUE
La mémoire longue : retour sur la question des frontières de l’OTAN
Ces dernières semaines, à la faveur des tensions grandissantes de part et d’autre de la frontière entre l’Ukraine et la Russie, il est beaucoup question de malentendus, de promesses non tenues, de trahisons. Du moins c’est ainsi que les autorités russes, Poutine en tête, expliquent leur manque de confiance envers les Européens et les Américains. C’est ainsi qu’ils expliquent la nécessité impérieuse pour eux d’avoir aujourd’hui une garantie écrite sur, entre autres, le non-élargissement des frontières de l’OTAN.
Geopragma
https://geopragma.fr/la-memoire-longue-retour-sur-la-ques...
Guerre froide 2.0 : l'heure est venue pour les périphéries
Ce que les politologues ont appelé la compétition entre les grandes puissances, que le pape François a qualifié de "troisième guerre mondiale par morceaux" et qui, pour beaucoup, n'est rien d'autre que la guerre froide 2.0, est entré dans une nouvelle phase : celle des "périphéries au centre", c'est-à-dire de la concentration et/ou de l'explosion des événements belliqueux aux marges des empires, parmi les satellites, les banlieues et les quartiers dortoirs.
Euro-synergies
http://euro-synergies.hautetfort.com/archive/2022/01/22/g...
ISLAM
ZONE INTERDITE : Face aux dangers de l’Islam radical (vidéo intégrale)
Pour tous ceux qui en douteraient encore, ce magazine d’1h 32 diffusé sur une chaîne grand public montre ce qui fait mal. Une excellente enquête « comme on aimerait en voir plus souvent »… Les réactions sur les réseaux sociaux ne se sont pas faites attendre longtemps : menaces de mort pour la journaliste-présentatrice et pour ceux qui ont osés se montrer sans… voile ! Et c’est ainsi qu’Allah est grand.
6play.fr
https://www.6play.fr/zone-interdite-p_845/face-au-danger-...
RÉFLEXION
La langue trafiquée dans les îlots totalitaires
Nous vivons une époque curieuse, et inédite. Curieuse car nous voyons surgir de toutes parts des îlots totalitaires, dans la sphère du travail, dans les champs économiques, sanitaires et politiques, dans les approches religieuses et spirituelles, mais plus largement, dans toutes les dimensions collectives, au nom d’idéaux antiracistes, anti-misogynes, anti-homophobes, écologiques, etc. Inédite, car si le totalitarisme ancien avait fonctionné à l’idéologie monolithique, c’est aujourd’hui la multiplication des idéologies totalitaires dans le champ social qui tout à la fois surprend et enchaîne, dans ce qu’elles produisent de corruption de la langue.
Arianebilheran.com
https://www.arianebilheran.com/post/la-langue-trafiquee-d...
Michel Geoffroy : « Les Lumières sont à l’origine du chaos migratoire »
Dans Les Lumières et leur « homme rétréci » puis Du temps des Lumières à Napoléon (éd. Dominique Martin Morin), le professeur Xavier Martin, grand spécialiste de cette période, a récemment évoqué l’héritage laissé par les esprits « éclairés ». Pilier de la Fondation Polémia, auteur de La Superclasse mondiale contre les peuples et de La Nouvelle Guerre des mondes (éditions Via Romana), Michel Geoffroy, lui, annonce carrément Le Crépuscule des Lumières.
Polemia
https://www.polemia.com/michel-geoffroy-les-lumieres-sont...
Discours de Giorgio Agamben aux étudiants sur l’état d’exception
« Il y a presque vingt ans, dans un livre qui tentait de fournir une théorie de l'état d'exception, j'ai noté que l'état d'exception était en train de devenir le système normal de gouvernement. Comme vous le savez, l'état d'exception est un espace dans lequel le droit est suspendu, donc un espace anomique, mais qui prétend être inclus dans le système juridique. Mais regardons de plus près ce qui se passe dans l'état d'exception. »
Arianebilheran.com
https://www.arianebilheran.com/post/discours-a-la-confere...
RUSSIE
A l’ONU, les États-Unis et l’Ukraine refusent de condamner le nazisme
En Ukraine, le soutien aux divisions nationalistes ukrainiennes qui ont combattu aux côtés des Nazis est devenu, au cours des huit dernières années, l’idéologie fondatrice de l’État ukrainien moderne de l’après-2013 (qui est très différent de l’État ukrainien diversifié qui a brièvement existé de 1991 à 2013). La résolution complète sur le nazisme et le racisme adoptée par l’Assemblée générale est longue, mais les États-Unis et l’Ukraine en particulier ont voté contre ces dispositions. Les pays de l’UE se sont abstenus, tout comme le Royaume-Uni. La vérité, bien sûr, c’est que l’OTAN a l’intention d’utiliser les descendants des racistes d’Europe de l’Est contre la Russie, un peu comme l’a fait Hitler, du moins dans un contexte de Guerre froide.
Les-crises.fr
https://www.les-crises.fr/a-l-onu-les-etats-unis-et-l-ukr...
Crise ukrainienne : l’Amérique et ses petits valets
Une fois de plus, les « élites » politiques et intellectuelles de notre pays donnent un spectacle parfaitement déplorable. Comme ce fut le cas en 2003 avec l’agression americano-britannique de l’Irak, pays souverain et reconnu comme tel à l’ONU. Un « crime contre la paix » en droit international depuis 1945.
Vu du Droit
https://www.vududroit.com/2022/01/crise-ukrainienne-lamer...
SANTÉ/LIBERTÉ
Angleterre. Le nombre de décès présentés comme dus au Covid-19 largement surestimé selon le ministre de la Santé
Les chiffres communiqués concernant les décès engendrés par le Covid-19 auraient été surestimés en Angleterre et au Pays de Galles selon le ministre de la Santé britannique. Parfois dans de fortes proportions. C’est-à-dire ?
Breizh-info.com
https://www.breizh-info.com/2022/01/23/178402/covid-19-sa...
La nomination de Jérôme Salomon au Conseil d’administration de l’OMS, faux départ et vrai cumul de fonctions
Cette fiche qui présente le directeur général de la santé publique française m’a interpellée. On le voit cumuler des fonctions lourdes qui nécessitent des pleins temps… Comment fait-il ? Cumule-t-il salaires et rétributions ? Est-ce autorisé ? Qui savait que M Salomon était membre du Conseil d’administration de l’OMS ? Etc. Etc. Etc.
Le blog de Liliane Held Khawam
https://lilianeheldkhawam.com/2022/01/24/la-nomination-de...
3 pièges mortels codés dans le passe vaccinal
Une analyse du code du passe sanitaire et vaccinal démontre qu'il contient plusieurs dangers tel que l'arbitraire, la surveillance, l'extension.
Contrepoints
https://www.contrepoints.org/2022/01/28/420308-3-pieges-m...
UNION EUROPÉENNE
L’Europe et le progrès économique : de la lumière à la pénombre !
Du Traité de Rome à la mise en place de l’euro, l’Union européenne a voulu apporter la prospérité économique à sa population. Si cela fonctionna bien dans un premier temps, la machine s’est depuis grippée.
Conflits.com
https://www.revueconflits.com/leurope-et-le-progres-econo...
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samedi, 29 janvier 2022
Crise autour de l'Ukraine : la réalité géopolitique derrière la guerre de communication
Ni les Etats-Unis, ni les Etats-membres de l'OTAN ne souhaitent de conflit frontal avec la Russie à propos de l'Ukraine, qui n'est pas membre de l'OTAN. De plus, la Russie aurait non seulement une position géographique avantageuse lors d'un tel conflit, mais possède aussi des systèmes d'armes, dont l'arme nucléaire, qui la rend invulnérable sur son territoire et ses approches. Les Etats membres de l'OTAN sont aussi divisés et la France et l'Allemagne, au delà des déclarations d'allégeance à l'OTAN ne sont absolument pas prêts à s'engager à un conflit avec la Russie. C'est donc la conflictualité indirecte qui est privilégiée, avec l'Ukraine comme proxy, la guerre de communication et les menaces de sanctions économiques et financières.
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Entretien avec Leonid Savin: "Lorsque les Européens auront retrouvé une identité forte, personne ne pourra les dominer spirituellement et culturellement"
Entretien avec Leonid Savin: "Lorsque les Européens auront retrouvé une identité forte, personne ne pourra les dominer spirituellement et culturellement"
Entretien avec le journal Deutsche Stimme réalisé par Alexander Markovics
Cher Monsieur Savin ! Actuellement, les relations diplomatiques entre l'Occident et la Russie sont tendues. L'UE accuse la Russie et la Biélorussie de mener une guerre hybride. L'Occident déclare craindre une intervention militaire russe en Ukraine et accuse la Russie de vouloir déclencher une guerre alors qu'elle a elle-même rompu les accords de Minsk. La ministre allemande des Affaires étrangères Annalena Baerbock appelle même à l'arrêt du Nord Stream 2. La Russie mène-t-elle une guerre hybride contre l'UE et les Etats-Unis ou les politiques occidentaux accusent-ils le président Poutine de crimes dont ils sont eux-mêmes responsables ?
En fait, l'UE et les Etats-Unis affirment depuis six ans déjà que Moscou mène une guerre hybride et que la Russie est intéressée par la division de la société occidentale. En réalité, les gouvernements occidentaux jouent ce jeu de manière bien plus efficace, en raison des erreurs politiques et idéologiques qu'ils commettent chaque jour et de l'état actuel de la démocratie dans leurs pays (n'oublions pas que les bureaucrates de la Commission européenne ne sont même pas élus par leurs propres peuples). Le coup d'État de 2014 en Ukraine a été organisé par l'Occident (notamment avec le soutien financier et diplomatique des États-Unis) et, lors de la "révolution orange" précédente, en 2004, les pays européens et les États-Unis ont également soutenu des politiciens qu'ils ont choisis dans ce pays. Où est donc ici la "guerre hybride de la Russie" ?
Après le référendum en Crimée qui a conduit à la réunification avec la Russie, l'Occident a affirmé qu'il s'agissait d'une "annexion", mais les pays occidentaux oublient la sécession du Kosovo en 1999, qui a été soutenue par l'OTAN. Lorsque 100 personnes ont été brûlées vives par des néonazis à Odessa et que les autorités ne les ont pas empêchées, l'Occident n'a pas daigné jeter le moindre regard. La Russie ne pouvait pas rester les bras croisés et attendre que le même scénario se produise en Crimée (et c'est en fait ce qui a été préparé par les forces qui ont mené à bien le putsch de février 2014).
Le terme de "guerre hybride" a été inventé à l'origine par la marine américaine pour décrire des situations de combat complexes impliquant différents acteurs. Plus tard, c'est devenu une marque d'infamie politique, qui a été utilisée pour stigmatiser toute forme d'activité russe (économique, politique, diplomatique, etc.). Si Moscou fait un pas quelconque dans ses relations économiques ou initie de nouveaux contacts, l'Occident le qualifie immédiatement de "guerre hybride". Mais je suis tout à fait certain que toute inactivité serait également qualifiée de "guerre hybride". L'Occident affirmerait immédiatement que la Russie est en train d'ériger un nouveau rideau de fer. Nous nous trouvons dans une situation étrange, ne pensez-vous pas ?
Depuis la fin de la guerre froide, l'Occident dirigé par les États-Unis a pris plusieurs mesures unilatérales et a fait la guerre à la Yougoslavie, à l'Irak, à l'Afghanistan et à la Libye. Ce "moment unipolaire" a provoqué le chaos, une violence massive et des mouvements de réfugiés aux quatre coins du globe. Dans votre livre récemment paru Ordo Pluriversalis. The End of Pax Americana & the Rise of Multipolarity, vous vous prononcez en faveur d'un monde multipolaire avec plusieurs centres de pouvoir au lieu de la domination occidentale. Les détracteurs occidentaux de ce concept affirment qu'un ordre mondial multipolaire entraînerait davantage de conflits et une plus grande instabilité dans le monde. Quels sont les avantages d'un système multipolaire par rapport à l'hégémonie occidentale, notamment pour les Européens ?
Du point de vue de l'Occident, la multipolarité sera toujours présentée comme un désordre instable et semi-anarchique, car la vision occidentale de la multipolarité est basée sur l'époque multipolaire précédente, qui était eurocentriste et colonialiste. Aujourd'hui, la situation a changé et le centre de l'économie mondiale s'est déplacé vers l'Asie. Toutefois, la multipolarité n'est pas seulement une question d'équilibre des forces, mais aussi et surtout une question de restauration prudente de l'histoire elle-même, des traditions et du développement du potentiel culturel des groupes ethniques et des peuples du monde entier. Il existe de nombreuses formes uniques de gouvernance, de juridiction et de droits, enracinées dans une expérience millénaire.
Le néolibéralisme (même s'il a malheureusement connu un grand succès dans les années 1990 et jusqu'à récemment) ne peut pas prétendre à une validité mondiale (ce qui vaut bien sûr aussi pour d'autres types d'idéologies politiques). Un seul système peut être valable pour le monde entier, et c'est le pluriversalisme. Celui-ci peut contenir des éléments controversés, mais c'est normal parce que c'est naturel. Regardez la carte du monde et vous verrez que l'Occident politique (l'alliance transatlantique) n'est qu'une partie du monde, et même pas la plus grande ! Jusqu'à présent, il a eu une influence énorme sur le monde entier, mais celle-ci est aujourd'hui en déclin.
Du point de vue européen, la multipolarité signifie davantage de souveraineté et d'indépendance vis-à-vis des États-Unis. Il existe déjà des initiatives pour une autonomie européenne, soutenues par l'Allemagne et la France, mais elles ne sont pas réalisables dans le futur proche tant que l'on ne se sépare pas de Washington. Les Etats-Unis poursuivent leur propre agenda au sein de l'UE et diffusent ainsi une propagande anti-chinoise et anti-russe afin d'attiser diverses craintes chez les Européens. Mais l'Europe est destinée à coopérer avec la Russie (et, dans une moindre mesure, avec la Chine) parce que nous sommes voisins et que nous vivons ensemble sur le continent eurasien. C'est un fait évident.
Dans ce contexte, il est tragique de voir la cancel culture se répandre en Europe et une nouvelle forme de décadence entraîner de nombreux pays vers l'abîme. La reconfiguration du monde dans le cadre de la multipolarité aurait le pouvoir de guérir l'Europe et de l'aider à trouver sa propre place et sa propre voie dans la politique mondiale.
L'avenir des relations internationales et de la géopolitique est un sujet très discuté par les experts. Alors que Samuel Huntington a avancé la thèse du "choc des civilisations", Mohammad Khatami parle d'un "dialogue des civilisations". Selon vous, quelle prédiction est la plus probable et que peuvent faire les militants et partis politiques à tendance antimondialiste pour permettre une coexistence pacifique des civilisations ?
Huntington a parlé du "choc des civilisations" non pas dans le sens d'une fatalité inéluctable, mais comme un avertissement. Beaucoup ne lisent pas correctement son œuvre, voire pas du tout, tout comme beaucoup de libéraux de notre époque ne lisent pas Adam Smith. Mais ce qui est important dans son œuvre, c'est la constatation claire qu'il existe plusieurs civilisations ! Pas une seule, comme l'ont suggéré de nombreux érudits occidentaux auparavant, mais plusieurs ! Une multitude de civilisations signifie à son tour qu'il existe automatiquement une multitude de systèmes politiques différents.
Le problème de nombreux antimondialistes est qu'ils voient la culture politique des autres peuples à travers la lentille de leurs propres modèles d'ennemis. Il s'agit d'une nouvelle forme d'exclusivité. Nous devons oublier le principe de l'ethnocentrisme, qui repose sur le double codage du "groupe du nous" et du "groupe des autres", et commencer à penser à partir d'un point d'inclusion approfondi. Je suis conscient que tout cela n'est pas facile. Mais nous devons enfin commencer ! Si nous avons l'intention de construire un pont entre les civilisations, il est plus sage de parler dans les langues de ces civilisations et de ne pas utiliser le langage de la pseudo-"civilisation" représentée par la société mondiale actuelle de la consommation et du capitalisme financier.
En raison du matérialisme dominant, du chaos social, de l'individualisme et de l'aliénation dans l'Occident moderne, le nombre d'Européens qui cherchent à revenir à la forme traditionnelle de leur civilisation augmente. Dans votre livre Ordo Pluriversalis, vous proposez le concept de pluriversalité pour prouver qu'une alternative à la société capitaliste et moderne de l'Occident est possible. Veuillez expliquer le concept de pluriversité/pluralité et sa signification pour un futur monde multipolaire !
La société capitaliste et moderne est fondée sur l'uniformisation et le nivellement de tout vers un standard unique. D'où le sentiment de supériorité et le racisme profondément enracinés dans la société occidentale. Paradoxalement, cet état d'esprit se développe également dans les sociétés non occidentales. Des phénomènes tels que les traitements médicaux visant à éclaircir la peau dans certains pays arabes sont le résultat de la domination occidentale imposée à cette région (car il existe aussi des personnes à la peau blanche en Yakoutie, au nord-ouest de la Russie, mais elles n'ont jamais conquis le Moyen-Orient).
Lorsque nous parlons de plurivers, nous entendons par là la multiplicité des visions du monde. Dans la région andine de l'Amérique latine et dans l'Afrique profonde, les gens suivent leurs propres traditions ancestrales. Certains éléments ressemblent à la tradition indo-européenne (parce que nous vivons sur la même planète et voyons le même soleil et la même lune), mais d'autres non. Nous pouvons y trouver des systèmes de débat public et des modèles d'auto-organisation politiques et économiques très uniques - tous doivent être préservés et développés. L'expérience d'autres peuples peut également être instructive et utile pour les sociétés "avancées".
Tout d'abord, nous devons considérer les autres peuples comme des entités similaires. Le géographe russe Nikolaï Miklukho-Maklay (photo, ci-dessus) a probablement été le premier anthropologue culturel à contester l'existence d'une hiérarchie raciale et à affirmer que les peuples "primitifs" d'autres régions du monde sont égaux aux Européens. Aujourd'hui, sous l'égide de l'idéologie néolibérale, nous entendons des slogans similaires en Occident, mais dans la pratique, ils ne se manifestent que par des actions telles que "Refugees welcome !", le "Cancel Culture", etc. En fin de compte, nous n'avons pas un seul système politique mondial, car la Terre n'est pas un disque, mais un système composé de nombreux systèmes avec différentes couches d'organisation.
De nombreux détracteurs du mondialisme en Occident ont d'une part une opinion très positive de la résistance russe à l'impérialisme américain, mais sont d'autre part sceptiques quant à une coopération avec la Chine et l'Iran en raison de leurs systèmes politiques et de leurs convictions religieuses divergents. En cas d'alliance, ils craignent une exportation de systèmes comme celle que les Européens ont connue avec l'américanisation. En tant qu'expert en géopolitique et connaisseur des pays musulmans d'Asie, pensez-vous que ces craintes sont justifiées ?
Outre l'Iran et la Chine, l'Asie compte de nombreux autres pays et cultures. Le soufisme se distingue de l'islam sunnite d'inspiration saoudienne. L'islam chiite n'est pas seulement présent en Iran, mais aussi en Azerbaïdjan (où les gens boivent de l'alcool), ainsi que sous des formes spécifiques en Syrie et au Liban, mais aussi en Afghanistan et au Pakistan. Il serait particulièrement simpliste de considérer les pays musulmans d'Asie comme un bloc musulman unique, car il existe en leur sein de nombreuses coutumes et traditions culturelles, qui possèdent à leur tour différents marqueurs en tant que nomades, clans, groupes ethniques et tribus. Chacun d'entre eux a une signification.
Même si nous considérons le monde musulman du point de vue de la multipolarité, il ne se compose pas d'un seul pôle, mais de plusieurs. En Afrique du Nord et en Asie occidentale, nous trouvons un mélange très intéressant de traditions soufies, de culture berbère et de vestiges des empires byzantin et ottoman. En Asie centrale, nous trouvons de très fortes influences d'éléments nomades et de nostalgie postsoviétique, et en Asie du Sud-Ouest, un melting-pot d'éléments indigènes, de nouvelles écoles de renaissance islamique, qui ont vu le jour dans le cadre d'une matrice postcoloniale/anticoloniale. Mais ce qui est important dans tout cela, c'est que toutes les régions mentionnées se trouvent en Eurasie (l'Afrique du Nord y est historiquement et géographiquement liée, c'est pour cette raison que Halford Mackinder a considéré l'Eurasie et l'Afrique comme une unité appelée l'île mondiale).
La Russie se trouve au centre de l'Eurasie. Un mur mythique a été construit par Alexandre le Grand pour se protéger de Gog et Magog sur la côte caspienne près de la ville de Derbent - il s'agit de la ville la plus au sud de la Russie, dans l'actuelle République du Daghestan (en fait, il a emprunté un autre chemin lors de sa campagne en Bactriane et en Inde). C'est la raison pour laquelle la Chine est si intéressée par la construction d'infrastructures dans le cadre de la Nouvelle route de la soie via la Russie, afin d'établir une connexion avec l'Europe.
Le corridor nord-sud relie l'Iran et donne à la Russie un accès à des ports libres de glace. Un corridor similaire sera également créé via le Pakistan. C'est la question de la géopolitique eurasienne et elle ouvre de formidables perspectives. Pour les Européens, tout cela peut sembler un peu suspect. D'un point de vue pragmatique, vous pouvez poser la question suivante : "Qu'allons-nous accomplir dans ces circonstances ?" Le moteur économique du monde n'est plus l'Occident, mais l'Asie.
Enfin, toute exportation de valeurs culturelles et religieuses n'est pas possible si vous la refusez. Par exemple, après l'effondrement de l'Union soviétique, il y avait en Russie beaucoup d'émissaires de sectes occidentales et de religions orientales, mais ils n'ont pas réussi. Les Russes sont en effet retournés à leurs propres racines, le christianisme orthodoxe (il y a bien sûr aussi des adeptes du bouddhisme, de l'islam et du judaïsme chez nous). La Russie est d'ailleurs l'un des pays où l'on trouve des adeptes d'un paganisme traditionnel tel qu'il existait en Europe. Lorsque les Européens auront retrouvé une identité forte, personne ne pourra les dominer spirituellement et culturellement. Vous pouvez étudier l'expérience russe en ce qui concerne la reconquête de sa propre souveraineté spirituelle et nous serons heureux de vous aider !
Merci beaucoup pour cet entretien !
Leonid Savin est chef de l'administration du Mouvement eurasien international, membre de la Société des sciences militaires du ministère de la Défense de la Fédération de Russie et membre du comité directeur du Forum international de lutte contre le terrorisme à Islamabad. Il est l'auteur de nombreux livres, publications scientifiques et études spéciales sur les relations internationales, la philosophie politique, la géopolitique et les conflits internationaux.
14:24 Publié dans Actualité, Affaires européennes, Entretiens, Eurasisme, Géopolitique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : leonid savin, entretien, actualité, russie, europe, affaires européennes, politique internationale, eurasisme, eurasie, géopolitique, plurivers, pluriversum, multipolarité | | del.icio.us | | Digg | Facebook
Cauchemars germaniques
Cauchemars germaniques
par Georges FELTIN-TRACOL
L’attirance des écrivains français pour la germanité est ancienne et tenace. Voltaire discute avec Frédéric II de Prusse. Ernest Renan admire la culture allemande avant les déboires de 1870. Au XXe siècle, Alphonse de Châteaubriant y place tous ses espoirs. Pendant la Guerre froide, les communistes célèbrent la RDA. Quant aux conservateurs chrétiens, ils saluent dans l’Autriche-Hongrie un modèle d’organisation socio-politique exemplaire. Certains vont même jusqu’à s’extasier devant les dernières assemblées de citoyens des cantons alpins en Suisse.
Cet attrait compréhensible laisse maintenant la place à un effroi certain. En Autriche, le «petit prodige» du conservatisme libéral, Sebastian Kurz, chancelier fédéral à 31 ans, a démissionné de ses fonctions et quitté la vie politique, suite à des révélations tonitruantes de détournement de sondages aux frais des contribuables. Qu’on se rassure, Kurz travaille pour le libertarien transhumaniste Peter Thiel et préside un cénacle mémoriel subventionné. N’oublions pas que ce bébé chancelier a souhaité combattre le mouvement identitaire. D’ailleurs, les symboles du réveil albo-européen en Autriche sont prohibés ! Son successeur, Alexander Schallenberg (photo), ne reste que deux mois à ce poste prestigieux avant de regagner le ministère des Affaires étrangères. Ces péripéties n’empêchent pas le maintien de l’entente conclue en 2019 entre les conservateurs et les Verts.
Connu pour son multiculturalisme et son atlantisme, Schallenberg fait hisser au-dessus de son ministère en mai 2021 le drapeau israélien ! Devenu chancelier, Schallenberg considère probablement les non-vaccinés comme des Palestiniens de langue allemande. Il impose à ses compatriotes un strict reconfinement ainsi que l’obligation vaccinale. Les nouveaux pestiférés (ou « covidés » sociologiques) ne peuvent plus par exemple se faire coiffer ou aller acheter un livre. Si attentifs aux droits de l’homme, de la femme et du non-binaire, les Verts autrichiens approuvent cet apartheid sanitaire. Très vite impopulaire, Alexander Schallenberg vient de céder sa place à Karl Nehammer (photo) dont la ligne serait plus conservatrice. Le nouveau chancelier a en effet exprimé une timide intention d’abroger quelques limitations hygiénistes qui pèsent sur les néo-exclus covidiens.
La voisine allemande poursuit sa route vers le despotisme sanitaire. Le 8 décembre 2021 s’achevait enfin seize années de gouvernement d’Angela Merkel. Son vice-chancelier et ministre des Finances, le social-démocrate Olaf Scholz, lui succède et anime pour la première fois une « coalition du feu tricolore » inédite ("Ampel-Koalition"), l’alliance entre la sociale-démocratie rouge, les Verts et le FDP (Parti libéral-démocrate) de couleur jaune.
La « coalition tricolore » coche toutes les cases du politiquement correct. Mieux encore que le macronisme hexagonal, on se trouve en présence d’un gouvernement à la fois multiculturaliste, cosmopolite, gendériste, libéral-libertaire et bankstériste. Bref, c’est un Angela Merkel V en pire. La vice-chancellerie revient au Vert Robert Habeck, par ailleurs ministre de l’Économie et du Climat. À quand un ministère de l’Intérieur et de la Digestion? Les Finances reviennent au chef du FDP, Christian Lindner, qui prône le retour dès l’an prochain à une stricte austérité budgétaire. Le secrétaire d’État à la chancellerie pour les Affaires économiques et européennes, Jörg Kukies (photo), est un ancien coprésident du directoire de Goldman Sachs. Ce gars conseille Scholz en toute indépendance bien évidemment. Le nouveau gouvernement fédéral s’accorde sur la légalisation de la consommation récréative du cannabis, la ratification du traité sur l’interdiction des armes nucléaires, l’achat de drones de combat de nouvelle génération et l’arrêt définitif immédiat des dernières centrales nucléaires.
L’atlantisme se réaffirme avec la Verte Annalena Baerbeck au ministère des Affaires étrangères. Elle met tout en œuvre pour fermer North Stream 2. La portée russophobe de cette entente hétéroclite s’exprime à travers la sociale-démocrate Christine Lambrecht (photo). Le 18 décembre 2021, la nouvelle ministresse de la Défense (un ministère secondaire dans un pays châtré depuis si longtemps !) déclare que « l’Allemagne et ses alliés doivent avoir dans le viseur le président russe Poutine et son entourage ». Des propos quasi-terroristes ! Que n’aurait-on pas protesté si un responsable iranien ou russe avait annoncé avoir dans sa ligne de mire Emmanuel Macron ou Boris Johnson !
Ce bellicisme incantatoire accroît l’instabilité grandissante des marches orientales de l’Europe. Il entre en résonance avec l’autoritarisme intérieur en vigueur. La vaccination obligatoire pour le plus grand bonheur de Big Pharma est prévue dans les prochains mois. Les vaccinés doivent montrer en plus un test négatif pour manger au restaurant. Avec le trio Scholz – Habeck – Lindner, il ne fait pas bon d’être vaccinosceptique. Les élus du FDP restent néanmoins les plus réticents à l’égard de ces contraintes. La répression s’intensifie aussi à l’encontre de la dissidence intellectuelle et civique. Le 15 décembre dernier, lors d’une de ses premières déclarations officielles, Scholz a estimé que « l’extrémisme de droite est la plus grande menace pour la démocratie en Allemagne. Le gouvernement luttera donc de toutes ses forces contre l’extrémisme de droite ». Cette obsession quasi-psychiatrique se traduit dans les faits par un harcèlement quotidien.
Dans Libération du 27 décembre 2021, le journaliste Christophe Bourdoiseau se rend à Freiberg où « en Saxe, les identitaires font main basse sur les antivax ». Les opposants aux vaccins et/ou au passeport vaccinal manifestent avec l’appui résolu des militants issus de l’AfD, de Troisième Voie ou des « Saxons libres ». L’envoyé spécial du quotidien gaucho-bancaire cite un certain Hans Vorländer, politologue à l’université de Dresde – respect ! -, auteur d’un rapport sur « Coronavirus et populisme d’extrême droite ». On attend toujours une enquête sérieuse sur « Sida et gauchisme »...
Diverses régions allemandes interdisent les manifestations de plus de dix personnes. Pour contourner ce viol légal, les opposants traversent sur les passages piétons dans les deux sens, entrent et sortent des supermarchés, se baladent dans les parcs publics. Bref, explique sur un ton sentencieux, l’universitaire bien-pensant, « la force publique est incapable d’imposer une quelconque autorité. L’État est tourné en ridicule. C’est l’expression de leur mépris pour la démocratie ». Ah ! Si c’étaient des migrants…
Deuxième parti d’opposition derrière la CDU et devant Die Linke, l’AfD subit des vexations permanentes de la part des autres groupes. Ainsi des députés de l’AfD devaient-ils présider trois commissions au Bundestag, dont celle de l’Intérieur. Au mépris des habitudes parlementaires, leur désignation se fait à bulletins secrets et les candidats de l’AfD ne sont pas élus. Les présidences restent pour l’heure vacantes. En région, les Offices régionaux de protection de la Constitution, soit la police politique allemande qui cherche à dissoudre tout mouvement patriotique et identitaire, surveillent les sections locales du principal mouvement d’opposition nationale.
En juin 2021, l’Office fédéral de protection de la Constitution a même placé comme « cas suspect » les éditions Antaios. Fondée et animée par Götz Kubitschek et son épouse Ellen Kositza (photo), cette honorable maison d’édition ose publier des penseurs de la Révolution conservatrice et traduire des livres de Jean Raspail, de Renaud Camus, de Richard Millet, d’Alain de Benoist. Père de sept enfants, Götz Kubitschek est une figure importante de la Neue Rechte. Rédacteur au journal Junge Freiheit, il inaugure en compagnie de Karlheinz Weißmann en 2000 l’Institut für Staatspolitik (« Institut pour la politique d’État »), un laboratoire d’idées nationales-conservatrices. En 2003, il lance l’excellente revue Sezession. Toutes ces activités indisposent les autorités régionales et fédérales. Si Götz Kubitschek s’était agité en faveur du bien-être des immigrés clandestins ou pour le rendement optimal du chanvre, le Système l’aurait encouragé. Il préfère plutôt lutter pour l’avenir des siens.
Une vraie guerre culturelle se déroule outre-Rhin. Ce conflit est total. Ses auteurs rêvent de notre extinction en tant qu’Albo-Européens sur notre propre sol ancestral. Il faut réagir et riposter. Établissons dès à présent des liaisons solides avec tous les opposants convaincus au « Vieux Désordre cosmopolite ».
GF-T
- « Vigie d’un monde en ébullition », n° 17, mise en ligne le 25 janvier 2022 sur Radio Méridien Zéro.
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vendredi, 28 janvier 2022
L'armée allemande est-elle pro-russe ? La position étrange de Berlin
L'armée allemande est-elle pro-russe ? La position étrange de Berlin
Francesca Salvatore
Ex: https://it.insideover.com/guerra/il-mondo-militare-tedesco-e-filorusso-la-strana-posizione-di-berlino.html
À la veille de la nouvelle drôle de guerre aux frontières de l'Europe, la position étrange de l'Allemagne vis-à-vis de la Russie continue de susciter embarras et mécontentement. Si jusqu'à présent on pouvait reprocher à Berlin une éventuelle circonlocution entre sa vocation pro-européenne et le controversé gazoduc germano-russe Nord Stream 2, ce sont désormais les hautes sphères militaires qui mettent l'Allemagne dans une situation inconfortable.
L'affaire
Dans la soirée du 22 janvier, le vice-amiral Kay-Achim Schönbach a démissionné avec effet immédiat : lui qui avait notamment qualifié d'idiote l'idée que la Russie voulait envahir l'Ukraine, a soutenu lors d'une conférence à New Delhi, dans le cadre d'un échange de vues organisé par un groupe de réflexion, que "l'Ukraine ne parviendra jamais à récupérer la Crimée" et que "le respect qu'il mérite doit être accordé" au président russe Vladimir Poutine.
Comme si cela ne suffisait pas, Schoenbach s'est décrit comme un "radical chrétien" et a souligné les racines religieuses communes entre l'Allemagne et la Russie, avec lesquelles elles devraient coopérer pour lutter contre Pékin. Une vidéo capturant les déclarations délicates s'est retrouvée sur Twitter et a commencé à faire le tour du net, provoquant un tollé chez nous. Ainsi, après les vives protestations à Kiev et après une conversation entre Schönbach lui-même et l'inspecteur général de la Bundeswehr, la plus haute instance militaire qui coordonne les forces armées et les services de renseignement, la démission a été officialisée pour "éviter tout dommage supplémentaire".
Les incohérences de ces derniers jours
De l'extérieur, l'affaire Schönbach pourrait être attribuée à l'un des nombreux dérapages auxquels les personnalités publiques nous ont habitués à l'ère du village global : elle trahit cependant un sentiment répandu dans les hautes sphères allemandes, y compris les forces armées, ainsi que dans l'appareil gouvernemental, contraint entre raisons d'État et opportunisme. Il y a quelques jours seulement, la ministre allemande des affaires étrangères, Annalena Baerbock, a déclaré que le gazoduc russo-allemand Nord Stream 2 ne serait pas encore "entièrement conforme" aux réglementations de l'UE, avertissant Moscou que Berlin prendrait des "mesures appropriées" en cas d'escalade en Ukraine. M. Baerbock a exhorté la Fédération de Russie à cesser son attitude provocatrice à l'égard de l'Ukraine, affirmant que le pays, ainsi que ses partenaires européens, est "prêt à prendre les mesures conjointes appropriées" en réponse à une escalade.
Et puis, à nouveau, dessinant presque un manège schizophrénique, le refus de l'Allemagne de se joindre aux autres membres de l'OTAN pour fournir des armes à l'Ukraine. La question est apparue le week-end dernier, à la suite d'une information selon laquelle Berlin serait allé jusqu'à empêcher l'Estonie de fournir à Kiev de vieux obusiers allemands pour se défendre contre les troupes russes massées près de la frontière ukrainienne.
"La position de l'Allemagne sur les livraisons d'armes ne correspond pas au niveau de nos relations et à la situation sécuritaire actuelle", a déclaré sur Twitter le ministre ukrainien des Affaires étrangères, Dmytro Kuleba. S'adressant aux journalistes lundi à Berlin, le chancelier allemand Olaf Scholz a nié qu'une décision ait été prise concernant les obusiers et a insisté sur le fait que son pays se tient aux côtés de ses alliés de l'OTAN et de l'UE pour s'opposer à toute incursion russe en Ukraine. "Si cette situation se produit, nous agirons ensemble", a-t-il déclaré aux journalistes. "Il y aurait un prix élevé. Cependant, alors que l'Allemagne continuerait à fournir une aide à l'Ukraine, il y aurait une exception : nous ne fournirions pas d'armes létales."
Les sociaux-démocrates, les Verts et les fantômes du passé
Au-delà des intérêts pragmatiques liés au gaz et autres, il apparaît que, face à une escalade militaire, l'Allemagne est toujours confrontée à ses propres fantômes : "l'héritage de la militarisation de l'Allemagne en Europe pendant les deux guerres mondiales a conduit de nombreux dirigeants allemands à considérer toute réponse militaire comme un dernier recours", explique Rachel Ellehuus, directrice adjointe du programme Europe, Russie et Eurasie du Center for Strategic and International Studies. Et si, par le passé, l'Allemagne a souligné sa position restrictive sur les exportations d'armes vers les zones de conflit, les analystes affirment que la règle n'a pas été appliquée de manière cohérente : il y a toujours eu des cas limites, comme la guerre du Kosovo ou le soutien aux Kurdes contre l'ISIS en Syrie.
Pour l'heure, le pays semble donc être pris en tenaille entre les sociaux-démocrates de Scholz, imprégnés de l'héritage de Willy Brandt, et les Verts, ancrés dans une tradition de pacifisme anti-russe : le ministre Baerbock adopte toutefois un ton de plus en plus pragmatique. À l'occasion de sa rencontre aux États-Unis avec Anthony Blinken, elle a répété à plusieurs reprises que l'Allemagne est favorable au dialogue et se considère comme un instrument de l'Occident dans ses relations avec Moscou : elle est bien plus Merkel que les Verts de fer.
La fête de Scholz
Entre-temps, les principaux médias allemands ont fait la promotion agressive du contraste avec la Russie pendant des jours. Alors que Scholz et Baerbock ont jusqu'à présent officiellement exclu la livraison d'armes allemandes à l'Ukraine, d'autres représentants de partis gouvernementaux appellent à cette livraison. "La livraison d'armes défensives pourrait être un moyen de soutenir l'Ukraine", a déclaré Marie-Agnes Strack-Zimmermann (Démocrates libres, FDP), présidente de la commission parlementaire de la défense, dans une interview accordée à t-online.de. Dans une interview accordée au Tagesspiegel, l'ancien ministre des affaires étrangères Sigmar Gabriel (SPD) a adopté un ton similaire et a appelé à une réponse plus agressive du gouvernement fédéral et de l'Union européenne contre la Russie. Par ailleurs, le parti de M. Scholz, partenaire principal de la coalition, possède une aile gauche puissante qui soutient le rapprochement avec Moscou et son chef de file parlementaire, Rolf Mützenich (photo, ci-dessous), a plaidé en faveur d'un nouvel "ordre de paix européen incluant la Russie". Même les ténors modérés du SPD hésitent à mener une politique anti-russe dure, faisant au contraire appel à la détente et au dialogue.
Cependant, même les appels à une médiation stricte ne parviennent pas à calmer la fureur des Ukrainiens. Kiev estime que les remarques de l'amiral Schönbach reflètent la pensée d'une grande partie de l'establishment allemand et demande maintenant à Berlin de modifier rapidement sa position sur le conflit.
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Douguine: "Avec l'administration Biden, le conflit est devenu inéluctable"
"Avec l'administration Biden, le conflit est devenu inéluctable"
Entretien d'Alexandre Douguine avec l'hebdomadaire viennois zur Zeit
Propos recueillis par Berhard Tomaschitz
Ex: https://zurzeit.at/index.php/mit-biden-regierung-wurde-der-konflikt-unausweichlich/
Le politologue russe Alexander Douguine évoque les causes et le contexte du conflit ukrainien, la lutte des élites mondialistes contre la Russie de Poutine et le rôle des Européens.
Professeur Dugin, le conflit sur l'Ukraine entre les Etats-Unis et l'OTAN d'une part et la Russie d'autre part ne cesse de s'aggraver. Quelles sont les causes de ce conflit ?
Alexander Geljewitsch Dugin : Il est surtout lié à l'administration américaine du président Biden. Naguère, des figures de proue comme le secrétaire d'État Biden ou la secrétaire d'État Nuland étaient impliquées dans tous les problèmes post-soviétiques, elles ont tenté d'encercler la Russie et elles ont suivi une stratégie néoconservatrice définie par Zbigniew Brzezinski et les soi-disant faucons libéraux. Ce que nous voyons aujourd'hui dans l'administration Biden, c'est une alliance entre les néoconservateurs et les faucons libéraux. Et cette alliance est unie par leur haine de Donald Trump, contre le concept "Make America great again", à laquelle s'ajoute l'opposition classique entre puissance maritime et puissance terrestre et l'idée d'intégrer des territoires dans l'espace post-soviétique à sa propre sphère d'influence afin d'affaiblir la position de la Russie et d'empêcher une croissance future de la position de la Russie en tant que pôle souverain dans un monde redevenu multipolaire. Cela remonte à la stratégie dite du "grand échiquier" de Brzezinski, dans laquelle l'objectif principal de l'OTAN et de l'atlantisme était clairement défini comme étant la lutte contre la Russie assortie de l'occupation militaire de l'Ukraine. Trump, en revanche, a suivi une autre approche vis-à-vis de la Russie : pour lui, le monde islamique, l'Iran et la Chine étaient des sphères plus importantes, dont il fallait s'occuper, tandis que Biden est revenu à la géopolitique atlantiste classique de Mackinder et Brzezinski.
Et qu'est-ce que cela signifie exactement pour la politique étrangère américaine ?
Douguine : Cela signifie que la lutte principale est désormais dirigée contre l'Eurasie, contre le "Heartland" ou "coeur du monde". Cette stratégie de l'anaconda pour encercler l'ennemi a été utilisée pour la première fois pendant la guerre civile américaine pour interdire l'accès aux mers, à l'océan. C'est une politique atlantiste classique, mais aujourd'hui, la Russie est en pleine ascension. Lorsque cette politique dite du "grand échiquier" a été appliquée dans les années 1990, la Russie était en déclin - c'était la défaite de l'Union soviétique, la destruction de l'espace impérial en Eurasie, traditionnellement contrôlé par la Russie. Et l'Occident a saisi l'occasion d'attiser les contradictions entre l'Ukraine et la Russie. La Russie était très faible et n'a pas protesté contre cette situation qui lui était de facto imposée.
Mais aujourd'hui, nous sommes dans une situation totalement différente et Poutine ne peut plus tolérer la poursuite de cette stratégie, et c'est pourquoi je pense que dans la crise actuelle, la Russie tente de renverser la tendance atlantiste existante. Avec Trump, la Russie a pu mener des discussions sur un accord mutuel sur des objectifs régionaux, ce qui a permis à Poutine d'éviter une confrontation directe avec Trump. Mais avec l'administration Biden et son cortège mêlant faucons libéraux et néoconservateurs, le conflit est devenu inévitable. Je pense que la Russie joue ici un rôle actif, car elle tente d'arrêter ce conflit, et cela n'est possible qu'en changeant le régime politique en Ukraine ou l'équilibre géopolitique, car dans la situation actuelle, la Russie n'a pas les moyens d'empêcher l'Ukraine d'adhérer à l'OTAN ou du moins d'empêcher l'installation de bases militaires de l'OTAN ou des États-Unis sur le territoire ukrainien. La Russie devrait avoir la possibilité de contrôler ces menaces, ce qui signifie que ce conflit est inévitable.
Le fait est que le dernier président soviétique, Gorbatchev, a été trop crédule vis-à-vis des Etats-Unis à la veille de la réunification allemande. La Russie se venge-t-elle à présent ? En février 1990, le secrétaire d'Etat américain Baker avait assuré à Gorbatchev que l'OTAN n'avancerait "pas d'un pouce" vers l'est.
Douguine : J'ai personnellement rencontré Zbigniew Brzezinski à Washington en 2005 et je lui ai demandé pourquoi l'Occident n'avait pas suivi les accords passés avec Gorbatchev de ne pas étendre l'OTAN vers l'Est. Brzezinski m'a répondu ouvertement que "nous l'avons mis (Gorbatchev, ndlr) en boîte". C'est le style de la politique occidentale, c'est la stratégie anglo-saxonne de ruser, de mentir et de tromper l'autre. C'est la pratique quotidienne du colonialisme anglo-saxon. Gorbatchev n'était pas faible, mais il est considéré en Russie comme un idiot et un traître parce qu'il a trahi les intérêts nationaux de la Russie. Il a cru aux mensonges de l'Occident, des États-Unis, et nous avons perdu toute notre zone de sécurité autour du noyau russe.
Et c'est ce que Poutine veut désormais changer ...
Douguine : ... Poutine tente désormais de restaurer la grandeur russe, c'est pourquoi il est prêt à défier la situation actuelle, car le pays de Poutine est un nouveau pays, un pays différent de la Russie des années 1990. Le pays est souverain, le pays est indépendant, le pays est un pôle du système multipolaire. Un tel pays ne peut tolérer la position dans laquelle il a été placé à l'époque de Gorbatchev et d'Eltsine. Ces deux anciens dirigeants sont vraiment détestés aujourd'hui au sein de la Fédération de Russie.
Je pense que la Russie est aujourd'hui contrainte de prouver son nouveau statut. Et ce statut est celui d'un pôle indépendant dans un système multipolaire, qui pose l'exigence tout à fait justifiée de sécuriser les frontières nationales et d'éloigner les menaces immédiates des frontières. Je pense que la Russie a préparé de nombreuses réponses symétriques et asymétriques, y compris l'extension de sa présence militaire et stratégique en Amérique centrale et en Amérique du Sud, une nouvelle stratégie en Europe occidentale, une alliance avec la Chine et l'Iran et peut-être avec le Pakistan et la Turquie.
Vous avez dit tout à l'heure que le conflit ukrainien était inéluctable, ce qui semble très pessimiste. Voyez-vous des possibilités de résoudre ce conflit ?
Douguine : Je ne vois pas de moyens raisonnables et sensés, parce que l'Occident ne peut pas laisser la Russie gagner cette escalade dans les relations diplomatiques et ne peut pas accepter publiquement un accord dans lequel il est écrit que l'Ukraine n'adhérera jamais à l'OTAN.
Cela signifierait à son tour la fin de l'OTAN, car si l'OTAN ne peut pas poursuivre son objectif militaire, la valeur de cette alliance est proche de zéro. La Russie a maintenant formulé une demande (pas d'adhésion de l'Ukraine à l'OTAN, ndlr) que l'Occident ne peut tout simplement pas accepter et je pense que cette demande a été formulée intentionnellement et qu'il ne s'agit pas d'un malentendu sur les positions occidentales. Poutine a radicalement modifié l'équilibre des pouvoirs et il souhaite rétablir la grandeur de la Russie en tant que puissance eurasienne indépendante. C'est la cause de l'escalade car Biden veut exactement le contraire.
Comment voyez-vous le rôle de l'UE dans le conflit ukrainien ?
Douguine : Elle n'a visiblement aucun intérêt à une escalade. L'Union européenne a seulement envie de se tenir à l'écart et de rester en dehors du conflit. Mais l'Union européenne dépend trop des Etats-Unis, la plupart de ses membres font également partie de l'OTAN. L'Union européenne est également victime de ce conflit, car la position atlantiste radicale des Etats-Unis n'est pas seulement dirigée contre la Russie, mais aussi contre une éventuelle transformation de l'Union européenne en un pôle indépendant. Il s'agit donc aussi d'une guerre spécifique de l'Amérique contre l'Europe. Je pense que Washington - dont le mot-clé est "sanctions" - veut forcer l'Europe à rejoindre les rangs des Américains dans ce conflit. Mais je pense que ce n'est pas dans l'intérêt des peuples et des États-nations européens. Une élite mondialiste veut empêcher qu'une alliance se forme entre la Russie et une Europe indépendante. Une telle alliance est possible, mais uniquement avec une Europe indépendante et non avec une Europe entièrement sous le contrôle d'une puissance extra-européenne, comme c'est le cas avec l'OTAN ou la communauté transatlantique.
Je pense que cela va aggraver le conflit au sein des pays européens, parce que l'élite libérale, mondialiste et atlantiste qui gouverne aujourd'hui l'Europe ne correspond pas à la majorité des citoyens moyens, qui ne voient pas la Russie comme un ennemi, ne veulent pas être ennuyés par le sort de l'Ukraine et ne partagent pas cet agenda ultralibéral.
Si un conflit devait commencer, nous serions dans une toute nouvelle réalité et beaucoup de choses changeraient radicalement. Je pense que nous nous approchons d'un point historique très important, un point irréversible de changement radical dans l'équilibre du pouvoir. Cela peut déboucher sur une guerre - pas seulement une guerre locale, mais une guerre plus terrible.
L'entretien a été mené par Bernhard Tomaschitz.
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Quand l'ours russe montre ses griffes
Quand l'ours russe montre ses griffes
par Andreas Mölzer
Source : https://andreasmoelzer.wordpress.com/2022/01/27/wenn-der-russische-bar-seine-krallen-zeigt/
Vladimir Poutine, le maître du Kremlin, est un autocrate. Un autocrate, comme il y en avait qui exerçaient le pouvoir en Russie depuis l'époque d'Ivan le Terrible jusqu'à Leonid Brejnev. Et Vladimir Poutine est un nationaliste russe, un Grand-Russe qui s'inscrit dans la tradition de Pierre le Grand et peut-être même de Joseph Staline lorsqu'il s'agit de défendre les intérêts géopolitiques du pays. Mais Poutine est aussi un réaliste. Un réaliste politique qui n'a peut-être pas joué un rôle modérateur dans les conflits mondiaux de ces deux dernières décennies, mais un rôle prévisible.
L'affirmation souvent formulée actuellement dans les médias et dans les déclarations des hommes politiques occidentaux, selon laquelle Vladimir Poutine serait actuellement en train de déclencher une grande guerre européenne en envahissant l'Ukraine, est donc peu crédible. Certes, il a mis en place une menace militaire à l'encontre de l'État voisin qui a fait partie de l'empire russe, puis soviétique, pendant des siècles. Un décor de menace qui doit manifestement empêcher ce grand pays, l'Ukraine justement, de rejoindre l'alliance militaire occidentale de l'OTAN. Une menace qui indique également que Poutine et les Russes dans leur ensemble ne sont manifestement pas disposés à accepter l'élargissement de l'OTAN à l'est jusqu'aux frontières du territoire russe. Une menace que Poutine considère manifestement comme une réponse à la promesse non tenue de 1989/90, selon laquelle l'OTAN ne s'aventurerait pas sur l'ancien territoire soviétique.
Mais dans l'ensemble, Vladimir Poutine s'inscrit naturellement dans la tradition de la politique de la Grande Russie telle que nous la connaissons depuis des siècles. Le plus grand Etat de la planète a toujours été attiré par les détroits, les océans ouverts, au nord vers la mer de glace via Mourmansk, dans la mer Baltique via les pays baltes et au sud vers les Dardanelles. Le fait que la nouvelle Russie de Poutine ait perdu les Etats baltes a toutefois été bien accepté au Kremlin. L'autonomie des peuples baltes, soutenue par l'appartenance à l'OTAN, est un fait. Un fait qui est toutefois relativisé par l'importance numérique des minorités russes dans ces Etats. Renforcer leurs droits civiques devrait être une préoccupation de l'Union européenne, si l'on ne veut pas que le Kremlin, puissance protectrice de la Russie, l'impose.
Lorsque l'Union soviétique s'est effondrée et que l'Etat central russe a dû abandonner des régions périphériques, le Kremlin était sur la défensive pendant la période de Boris Eltsine. Ce n'est que sous Vladimir Poutine que l'ours russe a été en mesure de se lever de son lit d'hôpital politique et d'aiguiser peu à peu ses griffes. Outre l'alliance que la Russie a établie avec la Biélorussie et d'autres régions qui faisaient autrefois partie de la Russie, il s'agit sans aucun doute d'une sorte de revendication de puissance en direction de tous les territoires anciennement soviétiques, le Kremlin lorgnant sans aucun doute aussi sur les régions et les Etats qui faisaient partie du pacte de Varsovie.
Compte tenu de cette réalité historique et géopolitique, la raison a voulu que les anciens pays du bloc de l'Est adhèrent à l'UE et à l'OTAN de manière presque précipitée. Pendant des décennies, ils ont subi le sort des pays satellites de l'Union soviétique et se trouvaient donc face aux Russes: dès lors, se tourner vers l'Europe était désormais l'alternative logique qui offrait également la sécurité. Et il en allait naturellement de même pour les trois États baltes.
Il est toutefois évident que le Kremlin a dû développer un sentiment d'encerclement suite à l'élargissement de l'OTAN. Lorsque, dans les années 60, l'Union soviétique a installé des missiles à Cuba, les Américains se sont sentis tellement menacés que cela a presque conduit à une guerre nucléaire. Si des systèmes d'armes modernes sont aujourd'hui déployés en Pologne, il est donc normal que le Kremlin y soit également allergique. Une intervention de l'OTAN en Ukraine constituerait toutefois une véritable incursion de l'alliance militaire occidentale dans une région de l'ancienne Union soviétique, dont l'est est en outre en grande partie peuplé de Russes. Reste à savoir si Vladimir Poutine ira effectivement jusqu'à occuper militairement cet est de l'Ukraine dominé par les Russes et à l'annexer à la Fédération de Russie comme il y a quelques années en Crimée. En imposant un plébiscite dans la partie orientale du pays, une telle mesure pourrait même être garantie a posteriori, conformément au principe du droit des peuples à l'autodétermination.
Les tensions actuelles entre la Russie et l'OTAN ne devraient toutefois pas détourner l'attention des questions géopolitiques fondamentales. Et le problème central est de savoir comment l'Europe de l'UE se comportera à l'avenir vis-à-vis de la Russie. Il ne faut pas oublier que les Russes, avec près de 140 millions d'habitants, sont le peuple européen le plus puissant, même s'ils sont en partie installés sur le sol asiatique. Parmi eux, 115 millions vivent en Russie même et 23 millions dans d'autres pays voisins. Il est légitime que le Kremlin se considère comme la puissance protectrice de ces personnes. La question de savoir dans quelle mesure il est possible d'intervenir dans la souveraineté d'autres Etats et de modifier les frontières est toutefois une autre question.
D'un point de vue historique, il est quelque peu paradoxal que le plus grand peuple européen, les Russes slaves, qui sont en outre un peuple chrétien, soit exclu de l'intégration européenne. Bien sûr, le plus grand État de la planète n'est pas aussi facile à intégrer dans le modèle de l'Union européenne que la Slovaquie ou un grand pays comme la Pologne. Et bien sûr, on peut se demander dans quelle mesure un pays aussi grand et militairement puissant n'aurait pas des prétentions hégémoniques dans le cadre d'une telle intégration. Il est néanmoins évident que l'Union européenne devrait avoir des relations spéciales et plus étroites avec le plus grand peuple européen, avec cet autre État de l'Europe, qu'avec n'importe quel autre Etat lointain ou transocéanique sur cette planète.
De cette manière, l'UE, qui ne peut actuellement jouer qu'un rôle de figurant dans la lutte mondiale pour le pouvoir, pourrait devenir un véritable "acteur" de la politique mondiale. Une alliance entre l'Europe et la Russie constituerait un véritable contrepoids aux Etats-Unis, menacés de déclassement, et au géant rouge chinois, de plus en plus offensif.
Il y a bien sûr le problème du manque de démocratie et de la menace récurrente pour les droits de l'homme en Russie. Le Kremlin devrait s'atteler à la remise en question et à l'élimination des anciennes tendances autocratiques moscovites. Dans l'Union européenne, il faudrait toutefois descendre de ses grands chevaux et faire preuve de moins d'autosatisfaction face aux déficits démocratiques de la Russie.
D'un autre côté, il serait possible que le modèle de société conservateur qui domine dans la Russie de Poutine, l'accent mis sur le patriotisme, le sens de la famille et la préservation de la propre culture, ait un effet fertilisant sur les sociétés quelque peu décadentes de l'UE-Europe.
Les traditions des Lumières telles qu'elles ont été développées en Europe et la profondeur de l'âme russe devraient ici permettre, sur la base de la culture européenne chrétienne, un développement commun prometteur pour les peuples de culture en Europe. Un modèle qui pourrait servir de contre-projet à l'esprit hyperdécadent des évolutions sociales américaines avec la "political correctness", le "me too", le black lives matter", la "wokeness", etc. d'une part, et au système totalitaire capitaliste d'État chinois d'autre part. Il est toutefois peu probable qu'un tel modèle soit envisageable au vu des conditions réelles actuelles, de l'aggravation de la confrontation entre la Russie et l'Occident, comme nous devons le vivre ces jours-ci - malheureusement !
14:33 Publié dans Actualité, Affaires européennes, Géopolitique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, affaires européennes, europe, russie, andreas mölzer, politique internationale, ukraine, géopolitique | | del.icio.us | | Digg | Facebook
jeudi, 27 janvier 2022
L'infantilisme, dénominateur commun de notre époque
L'infantilisme, dénominateur commun de notre époque
par Eduard Alcàntara
Ex: https://grupominerva.com.ar/2022/01/el-infantilismo-denominador-comun-de-nuestros-tiempos/
Il est difficile de concevoir comment, à l'heure actuelle, on peut encore parler si fort, et de manière si généralisée, de progrès quand on analyse certaines des nombreuses évolutions qui se produisent de nos jours et certaines des nombreuses manifestations qui sont typiques de notre époque détraquée. Malheureusement, pour analyser, il faut avoir la capacité de le faire, et nous craignons que la majorité de nos semblables, dans ce monde de mondialisation et de pensée unique et "politiquement correcte", ne puissent montrer qu'ils ont des neurones solides dans les questions liées à leur économie personnelle ou domestique : pour le prouver il y a les chiffres des multiples hypothèques contractées pour acquérir le dernier modèle de voiture, ou pour pouvoir "profiter" de vacances dans une station balnéaire bondée, ou pour acquérir une maison plus grande et plus luxueuse que celle qu'ils possèdent déjà.
En dehors de ce genre de choses, le pouvoir d'analyse de cet homme ordinaire, qui erre sans but autour de nous, frise la nullité. Lui demander d'analyser ce qui se passe autour de lui et d'évaluer si c'est édifiant ou angoissant, c'est lui demander quelque chose qui dépasse largement ses capacités. En l'absence de sa propre analyse, il se pliera sans broncher à un discours officiel pour lequel tout ce qui se passe réaffirme la "certitude" que nous vivons immergés dans un progrès sans fin.
Demander à nos semblables de s'arrêter et de réfléchir à la superficialité de leur vie, c'est comme demander des poires à un orme. Leur demander si leur comportement, leurs habitudes et leurs loisirs ne sont pas puérils, c'est leur poser une question sur laquelle ils ne feront preuve d'aucune capacité de réflexion, car pour qu'ils fassent preuve d'une telle capacité, il faudrait qu'ils aient des points de référence à partir desquels peser et comparer les constantes et les différents détails de leur existence quotidienne. Et, malheureusement, ils n'ont pas ces référents de base, reposant, en dernière instance, sur des Vérités absolues et qui répondent à des Réalités suprasensibles qui sont bien au-dessus - et à l'origine - de ces autres réalités dont l'individu des temps ordinaires est exclusivement conscient et qui se réduisent aux plans physique et psychique.
Malheureusement, nos malheureux congénères ne connaissent pas d'autre façon de "vivre" que celle dans laquelle ils se trouvent en ces temps crépusculaires de notre monde moderne décrépit. C'est pourquoi ils ne pourront jamais comprendre combien leur vie est banale et combien ils sont puérils.
Notre homme commun agit de manière infantile en étant capricieux. Il est capricieux sur les nouveautés qui se présentent à ses sens : il les veut. Il veut les posséder et les posséder instantanément ; immédiatement. Il manifeste une soif irrépressible de possession. Il est pris de convulsions pour s'en emparer. Son empressement compulsif le fait sortir de lui-même et le projette sur l'objet de son désir. Il "vit" en dehors de lui-même.
Conformément à son comportement infantile, il peut se mettre en colère et devenir furieux à des niveaux pathétiques pour les banalités les plus absurdes de la vie quotidienne. Des disputes énormes surgissent souvent pour les raisons les plus insignifiantes. Des raisons totalement insignifiantes peuvent donner lieu à de terribles controverses, voire à des bagarres.
Il manque à notre homme commun une vision et un sens de l'existence profonds et supérieurs qui, s'il les contemplait, minimiseraient complètement le poids que les contingences de la vie doivent avoir sur son existence.
Il est bien connu que les États-Unis d'Amérique sont considérés comme un peuple jeune. Une nation jeune si l'on considère qu'elle n'est devenue indépendante qu'il y a un peu plus de deux siècles. Cependant, à notre avis, jeune n'est pas le terme le plus approprié pour définir ce pays, mais plutôt infantile. Sa naissance à une époque marquée, en Occident, par le mercantilisme est intimement liée aux fondements libéraux-capitalistes de sa constitution fondatrice de 1787. Le protestantisme de ses pères fondateurs a ouvert une grande partie du chemin qui a inévitablement conduit à cette vision économiste de la vie. Pour cette religion, la richesse matérielle est un don divin. La foi en Dieu est suffisante pour le salut éternel.
Il n'est donc pas surprenant qu'une vision profondément matérialiste se soit progressivement enracinée dans l'âme du peuple américain. Un matérialisme qui entraîne une conception unidimensionnelle de l'existence et, en définitive, un réductionnisme qui finit, à la longue, par ignorer le plan de la Transcendance et - comme nous l'avons déjà souligné - par accorder, comme conséquence logique, une valeur absolue aux choses insignifiantes et banales inhérentes à la vie quotidienne et qui finit par conduire à ces attitudes capricieuses, et donc puériles, caractérisées par la soif compulsive de posséder des objets de désir dans l'ici et maintenant.
Il existe de nombreux exemples de ce comportement enfantin. Par exemple, pour un esprit qui n'est pas encore submergé par ces comportements puérils, il semble peu mature de contempler des individus adultes - dont beaucoup de parents - portant des casquettes de baseball au lieu des chapeaux ou des casquettes que leurs grands-parents portaient il y a des décennies et qui trahissaient le statut social de ceux qui les portaient. Il est tout aussi immature de voir combien d'individus - dont certains ont largement dépassé l'âge de la retraite - se saluent en se frappant les mains dans des mouvements qui partent de différentes directions. De même qu'il est embarrassant de contempler comment non seulement les enfants mais aussi les parents vivent avec passion (en levant des banderoles et en criant avec ferveur) ces simulacres de cirque de la lutte authentique que l'on appelle le catch ou le pressing. Ou comment les équipes qui concourent dans les différentes disciplines sportives mises en œuvre dans ce pays sont toutes adjectivées comme pour enthousiasmer davantage les fans qui, vu le type d'adjectivation utilisé, pourraient sembler être exclusivement des enfants : galaxie, faucons, taureaux, géants,... Malgré le degré extrême de décadence que connaît l'Europe, il serait difficile pour ses citoyens de concevoir que les clubs sportifs dont ils sont fans ne continuent pas à être nommés, comme ils l'ont toujours été, par le nom de la ville dans laquelle ils sont basés, avec des ajouts aussi peu impressionnants que "club de football", "sportif" ou "athlétique".
Nous pouvons considérer les citoyens américains, pour tout ce qui a été expliqué et pour les exemples donnés, comme des paradigmes d'hommes infantiles (permettez-nous le paradoxe), mais nous devons au moins faire le triste constat que cet infantilisme a déjà dépassé les frontières de leur pays et s'est installé, de manière accélérée, dans les consciences des petits hommes de tout ce monde dit globalisé qui partagent les mêmes intérêts matérialistes et les mêmes préoccupations éphémères. Les hobbies, les attitudes et les postures communes au citoyen moyen des États-Unis, qui, il y a quelques décennies, auraient provoqué l'hilarité dans de nombreux autres pays, sont aujourd'hui, au contraire, des hobbies partagés - ou commencent à l'être - par des millions d'individus sur notre planète de plus en plus uniformisée et sécularisée. Symptôme décourageant !
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mercredi, 26 janvier 2022
La sécurité en Europe et les stratagèmes impériaux américains
La sécurité en Europe et les stratagèmes impériaux américains
Leonid Savin
Source: https://www.geopolitica.ru/article/bezopasnost-v-evrope-i-imperskie-uhvatki-ssha
Sclérose géopolitique
Alors que les responsables du département d'État américain cherchent des compromis favorables aux États-Unis avec Moscou sur la sécurité européenne (la question est compliquée - il faut sauver la face), le lobby russophobe s'agite.
Ainsi, l'ancien officier de renseignement, un officier de carrière, Christopher Borth du Centre Carnegie proclame: "Peu d'Occidentaux brûlent d'envie de s'entendre avec Poutine sur ses accords... Même si les gouvernements occidentaux pouvaient faire des compromis sur des positions clés, comme fermer les portes ouvertes de l'OTAN à l'Ukraine ou s'abstenir de critiquer les violations des droits de l'homme en Russie, on suppose qu'il [Poutine] teste simplement ses interlocuteurs pour déceler des signes de faiblesse et qu'il n'a aucune intention de respecter sa part du marché".
Le vice-président du CSIS, Seth Jones, co-écrit ses articles avec Philip Wasilewski, membre du personnel des opérations militaires de la CIA, spécule sur "l'invasion de l'Ukraine" par la Russie. Ils proposent un ensemble de mesures comprenant la fourniture gratuite de renseignements, de matériel et d'équipements militaires à l'Ukraine, ainsi qu'une action secrète par l'intermédiaire de la CIA si la législation ne passe pas au Congrès américain.
Daniel Kochis et Luke Coffey de la Fondation Heritage déclarent : "Le temps joue en faveur des États-Unis et de leurs alliés : la Russie ne peut pas, pour des raisons financières et politiques intérieures, renforcer indéfiniment ses forces près de l'Ukraine... Ayant accepté de négocier avec la Russie, les États-Unis et leurs alliés devraient en sortir avec le moins de dommages possible, puis s'atteler à la tâche de renforcer davantage la défense collective de l'OTAN et la capacité de l'Ukraine à se "défendre elle-même".
Cochise et Coffey proposent une formule à sept règles :
1. Les États-Unis et leurs alliés doivent faire savoir clairement que la politique de la porte ouverte de l'OTAN reste inchangée.
2. Le plus grand atout de l'Amérique est son réseau d'alliances, et le lubrifiant qui soutient ces alliances est, militairement parlant, des exercices réguliers qui aident les alliés à développer leur cohésion et leur conscience opérationnelle commune.
3. Ne pas permettre à la Russie de dicter quand, où et avec qui les États-Unis effectuent des exercices.
4. Ne pas négocier le droit de l'Ukraine à l'autodéfense... Les États-Unis devraient allouer des fonds pour accroître leur assistance à l'armée ukrainienne, notamment davantage d'armes antichars, d'armes antiaériennes et d'armes légères avec des restrictions moins nombreuses ou plus souples... Les États-Unis devraient chercher des moyens de soutenir le développement et les capacités de la marine ukrainienne.
5. Ne pas retirer les troupes américaines d'Europe.
6. Une autre concession clé exigée par la Russie est le retrait des troupes et des systèmes d'armes américains et alliés qui ont rejoint l'alliance après 1997. Les États-Unis et l'OTAN doivent rejeter les exigences de la Russie, qui toucheraient près de la moitié des membres de l'alliance.
7. N'acceptez pas de vagues promesses que les États-Unis pourraient regretter à l'avenir.
Le Conseil atlantique, ce groupe de réflexion de l'OTAN, a adopté une position ferme à l'égard de la Russie, qui est réticente. Daniel Fried, membre du personnel de l'Atlantic Council, a écrit le 17 janvier au sujet des négociations entre la Russie et l'OTAN : "Les États-Unis et l'Europe sont bien placés pour l'emporter dans cette confrontation si, sous la pression, ils maintiennent leur détermination et leur force... La société russe ne semble pas enthousiaste à l'idée d'une guerre prolongée contre l'Ukraine. La libérer serait un geste risqué pour Poutine. Si le Kremlin agit de la sorte ou provoque l'Occident d'une autre manière, il risque de provoquer une contre-pression soutenue qui se terminera mal pour lui... Les États-Unis et l'Europe ... doivent être patients, décisifs et fermes dans leur réponse aux provocations. Le Kremlin pourrait alors trouver le moyen de dépasser les ultimatums pour engager une discussion plus productive sur la sécurité européenne... Il y a encore beaucoup de travail à faire, les semaines à venir pourraient être difficiles."
Christopher Scaluba et Conor Rodihan du Centre for Strategy and Security de l'Atlantic Council*** suggèrent que l'absence de consensus sécuritaire avec la Russie n'est pas un problème ; l'OTAN est une alliance solide.
Samuel Charapa, de RAND, adopte un point de vue un peu plus équilibré. Il écrit : "En décembre 1996, les alliés de l'OTAN ont déclaré qu'ils n'avaient 'aucune intention, aucun plan et aucune raison de déployer des armes nucléaires sur le territoire des nouveaux membres' - les 'trois non'. Cette déclaration a été faite avant qu'aucun des nouveaux membres ne rejoigne l'alliance. S'il était acceptable pour l'OTAN de prendre un tel engagement de retenue il y a 25 ans, cela devrait être acceptable aujourd'hui". C'est tout à fait juste.
Cependant, pour une raison quelconque, personne aux États-Unis et en Europe ne se souvient que, même avant 1996, les dirigeants soviétiques avaient déclaré qu'après la réunification de l'Allemagne, l'alliance nord-atlantique ne s'étendrait pas à l'Est. Il a ensuite été complètement oublié. Une sorte de sclérose géopolitique.
13:36 Publié dans Actualité, Affaires européennes, Géopolitique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : europe, affaires européennes, stratégie américaine, politique internationale, actualité, géopolitique | | del.icio.us | | Digg | Facebook
mardi, 25 janvier 2022
Wang Huning et la souveraineté culturelle
Wang Huning et la souveraineté culturelle
Par Daniele Perra
Ex: https://www.eurasia-rivista.com/wang-huning-e-la-sovranita-culturale/
Le titre de cet article est tiré d'un essai de 1994 de Wang Huning lui-même intitulé Expansion culturelle et souveraineté culturelle: un défi au concept de souveraineté.
Il y aurait beaucoup à dire sur le destin de ce brillant théoricien, ancien professeur de la prestigieuse université Fudan de Shanghai. Ses premiers ouvrages, Souveraineté nationale et Analyse politique comparative, ont fait forte impression sur Jiang Zemin, qui le voulait à ses côtés pour développer la "théorie des trois représentations". Huning, dont le nom signifie littéralement "tranquillité de Shanghai", a en effet centré son parcours théorique sur le concept de souveraineté. Sa thèse, comme il fallait s'y attendre, s'intitulait De Bodin à Maritain : les théories de la souveraineté développées par la bourgeoisie occidentale.
En particulier dans Souveraineté nationale (Guoja Zhuquan), Huning réaffirme l'idée que la souveraineté doit nécessairement être fondée sur deux aspects interconnectés : la suprématie nationale et l'indépendance extérieure. Écrit au plus fort de la popularité du dengisme, le livre présentait déjà la thèse selon laquelle les réformes politiques et économiques ne devraient jamais être soutenues au détriment de la stabilité interne. Selon Wang, les réformes ne pouvaient être menées à bien que par une autorité rigidement centralisée, capable d'englober les six principales fonctions du gouvernement: a) contrôle ; b) coordination ; c) orientation ; d) promotion ; e) service ; et f) équilibre [1].
Cependant, la suprématie intérieure est impensable sans indépendance extérieure. L'essai Cultural Expansion and Cultural Sovereignty, rédigé quelques années après le "tumulte" de Tiananmen, porte précisément sur cette question. Plus précisément, Wang, convaincu de la vulnérabilité de la Chine populaire à la pénétration d'idées étrangères par le biais des instruments du "soft power", se concentre sur la manière de renforcer le socialisme face aux forces de la mondialisation occidentale. Face à la fin ruineuse de l'Union soviétique (c'est-à-dire l'adieu à un monde complexe, bien que bipolaire, et l'entrée dans une phase encore plus complexe), la question qu'il pose ouvertement est la suivante : comment protéger la souveraineté nationale ?
Avec la fin de la guerre froide, les conflits militaires sont rapidement remplacés par des conflits culturels. En utilisant une terminologie empruntée directement à l'anglosphère, on pourrait dire que le hard power est rapidement remplacé par le soft power. Dans ce contexte, la confrontation géopolitique entre l'Est et l'Ouest se présente comme une lutte pour défendre sa propre culture contre l'hégémonie culturelle occidentale ; ou plutôt, contre l'expansionnisme culturel occidental. Cette forme plus insidieuse d'expansionnisme, selon Wang, ne peut être contrée que par la réaffirmation de la souveraineté culturelle spécifique de chacun (qui pourrait également être définie en termes de "conservatisme culturel", si l'on garde à l'esprit que cela n'a rien à voir avec le "conservatisme" libéral de l'"Occident").
La souveraineté culturelle, dans la perspective du théoricien chinois, est une forme de pouvoir de l'État. La souveraineté culturelle est avant tout une question de sécurité. Et le garant de cette sécurité ne peut être que le Parti, dont la tâche est également de renforcer la puissance chinoise : c'est-à-dire de produire un modèle de modernisation capable de fusionner avec un système de valeurs traditionnelles responsable du maintien d'institutions fortes et solides (dans ce cas, on reconnaît l'empreinte de la tradition légiste de la pensée traditionnelle chinoise) [2]. La sécurité et la défense culturelles ne peuvent toutefois pas devenir une excuse pour l'isolement. La souveraineté culturelle signifie également la capacité de dialoguer avec des cultures étrangères sans s'imposer ou se soumettre à qui que ce soit. C'est l'exact opposé de l'expansionnisme culturel que, dans ces mêmes années, l'administration Bush (père) a adopté comme moyen d'étendre les valeurs nord-américaines à l'échelle mondiale. Ce que le chercheur néerlandais Cees J. Hamelink (photo) a défini en termes de "synchronisation culturelle" [3]. Il ne s'agit de rien d'autre qu'une forme d'impérialisme culturel, dont l'expansion peut se faire selon deux axes : l'imposition forcée (sens vertical, du haut vers le bas) ; la pénétration culturelle (sens horizontal) par le biais des instruments du "soft power" susmentionné.
Wang Huning reconnaît dans les théories de Francis Fukuyama (qui prétendent expliquer l'histoire humaine à travers le prisme de l'histoire occidentale) la plus haute expression de l'expansionnisme culturel. En ce sens, sa perspective se rapproche de celle de Samuel P. Huntington, auquel il reconnaît avoir bien compris le défi que la culture traditionnelle chinoise millénaire et intacte aurait posé au modèle expansionniste occidental. En effet, si l'idée de la "fin de l'histoire" élaborée par Fukuyama s'est avérée fatalement fallacieuse (du moins à court terme), il en va autrement de l'affirmation toujours ininterrompue de la "culture occidentale" comme "culture globale" (le remplacement de la colonisation par la "coca-colonisation"). Ici, Wang Huning va même jusqu'à adopter des positions quasi nietzschéennes. L'évolution du capitalisme à l'échelle mondiale a en effet conduit l'homme à abandonner les valeurs et la culture, réduisant ses besoins à la simple matière. Elle a transformé l'homme en "dernier homme" : celui qui a renoncé à être humain. Fukuyama, désireux d'éviter un retour en arrière, contrairement à Huning, défend ouvertement le "dernier homme" comme stade définitif de l'évolution humaine. Le "retour au passé" (au "premier homme") est empêché par le développement technologique qui, en satisfaisant les désirs matériels immédiats (y compris ceux que l'homme ne connaît pas encore, puisqu'ils sont déterminés par les modes du moment), détourne l'homme du regard vers l'abîme: en termes heideggériens, du vertige abyssal du Néant dans lequel résonne l'appel de l'Être.
L'analyse de Wang sur l'omniprésence du modèle culturel expansionniste occidental part de son expérience d'étude aux États-Unis, qui a conduit à la publication du livre America versus America (1991). Dans ce travail, Wang, en utilisant le schéma interprétatif de l'un de ses textes précédents (l'Analyse Politique-Comparative déjà mentionnée), étudie la gestion des processus politico-sociaux de la société américaine sur un plan historico-culturel. Le développement et le déroulement historique de la société, selon cette approche, sont indissociables de la politique et de la manière dont elle est gérée. Il n'est pas possible d'interpréter le "phénomène américain" (une nation qui, en seulement deux cents ans d'histoire, est devenue la plus grande puissance du monde) en recourant uniquement aux schémas dogmatiques du marxisme centrés sur la plus-value et la dictature bourgeoise du capital. Marx et Engels, rappelle Wang, disaient que la société bourgeoise creusait sa propre tombe. Lénine, au début du 20e siècle, a prédit le déclin de l'impérialisme. Cependant, l'impérialisme et la société bourgeoise sont toujours là, et la force motrice de l'"empire" américain (aussi déclinant soit-il) nécessite une analyse des conditions historiques et culturelles spécifiques dans lesquelles (et grâce auxquelles) cet "empire" s'est établi.
S'il est vrai que la force économique est ce qui accroît le statut d'un pays sur la scène internationale, il est tout aussi vrai que le développement d'une société n'est pas le résultat de forces purement économiques. En ce sens, selon Wang, il est nécessaire d'opposer l'Amérique imaginaire (ou idéalisée) à l'Amérique réelle, en partant du constat que la "plus grande démocratie du monde" n'est pas du tout une démocratie. La "culture" spécifique de l'Amérique est ici cruciale. Ayant un sens très limité de l'histoire, le regard américain est toujours orienté vers l'avenir. Le progrès et la tradition en Amérique sont une seule et même chose. La tradition n'est rien d'autre que l'innovation d'il y a vingt ou trente ans. Tout est évalué en termes quantitatifs et pragmatiques. La religion elle-même est imprégnée d'une vision matérialiste qui, sur la base d'interprétations littérales des Saintes Écritures [4], voit dans la richesse un signe de la bienveillance divine. Cela souligne naturellement la prétention américaine à la supériorité morale sur les autres peuples. Même si les Américains eux-mêmes, écrit Wang, "adorent le succès plus que Dieu" [5].
Ainsi, il est nécessaire d'explorer les contradictions de la société et de la "culture" américaines afin de mieux comprendre comment s'y opposer (6). La première chose qui saute aux yeux du théoricien chinois au cours de son voyage est la différence substantielle entre les zones rurales et les métropoles (et entre le centre et la périphérie à l'intérieur de ces mêmes métropoles) : une division persistante qui, selon Wang, s'accentuera encore au fil du temps, devenant un enjeu majeur pour l'avenir. Cependant, les principales contradictions se révèlent au niveau "politique" (et avec elles, le sort de tout l'"Occident" sous le contrôle hégémonique et la suprématie culturelle de l'Amérique du Nord).
À cet égard, Wang se réfère une fois de plus à Samuel P. Huntington et à son article de 1981 intitulé American Politics : the promise of disharmony (Harvard University Press). Le credo politique américain, selon Huntington, repose sur cinq piliers : a) la liberté ; b) l'égalité ; c) l'individualisme ; d) la démocratie ; et e) l'État de droit.
L'analyse de l'actuel conseiller de Xi Jinping part du constat que le choix de ces piliers fondateurs découle du fait que, en l'absence de contenu bien défini, ils sont extrêmement faciles à appliquer. Cependant, ils sont en contradiction l'un avec l'autre. Il existe, par exemple, une tension profonde entre la liberté et l'égalité, ainsi qu'entre l'individualisme et la démocratie. Wang est surpris de constater que les inégalités économiques actuelles au sein de la société américaine sont considérées comme une forme d'égalité. L'égalité, en fait, est surtout considérée comme une sorte de "mythe fondateur" : une égalité de départ dans laquelle s'est installé le principe méritocratique de l'individu qui construit sa propre richesse par lui-même, grâce à ses capacités et à la bienveillance divine susmentionnée. Ce modèle d'égalité s'effondre vertigineusement dès lors qu'il est appliqué aux minorités présentes ou apparues sur le territoire américain : la population indigène (soumise à un génocide), la population noire (rappelons que l'idée de Lincoln était de ne donner aux esclaves noirs que la liberté et non de leur garantir des droits égaux à ceux des Blancs), ou encore les vagues migratoires successives.
Ici, la perspective de Wang prend un caractère purement schmittien. Comme le juriste allemand, le théoricien chinois est convaincu que l'idée d'égalité ne peut être satisfaite par des concepts libéraux abstraits. L'idée libérale de l'égalité se heurte naturellement à l'idée démocratique de l'égalité. Pour être traités sur un pied d'égalité, les citoyens d'un État démocratique doivent faire partie d'une "substance commune". L'idée démocratique d'égalité exige nécessairement une distinction entre ceux qui appartiennent au demos et ceux qui n'y appartiennent pas. Elle (l'idée démocratique d'égalité), indépendamment des abstractions libérales sur l'égalité des hommes, existe néanmoins en raison de la contrepartie nécessaire de l'inégalité.
Sans cette "substance commune", l'État démocratique se réduit à une simple association d'individus. Carl Schmitt écrit :
"Si l'État devient un État pluraliste en termes de partis, l'unité de l'État ne peut être maintenue que tant que deux ou plusieurs partis s'accordent sur la reconnaissance de prémisses communes. Cette unité réside alors en particulier dans la constitution, qui est reconnue par toutes les parties et doit être respectée sans réserve comme condition préalable à la création commune. L'éthique de l'État devient alors une éthique constitutionnelle. C'est en fonction de la substantialité, de l'univocité et de l'autorité de la constitution que l'on peut trouver une unité réelle et effective. Mais il peut aussi arriver que la Constitution se consume en simples règles du jeu, son éthique de l'État en une simple éthique du fair-play ; et cela, finalement, dans la dissolution pluraliste de l'unité du politique dans sa totalité. Cela conduit inévitablement au point où l'unité n'est qu'un agglomérat de changements d'alliances entre groupes hétérogènes. L'éthique constitutionnelle s'amenuise donc encore davantage, au point que l'éthique de l'État se réduit à la proposition pacta sunt servanda" (7).
A partir de cette réflexion schmittienne, on peut commencer à élaborer une critique radicale du système américain. Wang, dans son texte, rapporte un épisode assez emblématique. Face à la question explicite "quelle est l'idéologie américaine ?", ses interlocuteurs américains répondent : "l'idéologie, c'est la Constitution". Il va sans dire que cette affirmation est, une fois encore, particulièrement abstraite, étant donné que l'idéologie ne peut jamais avoir force de loi, quels que soient les efforts déployés pour la traduire sous forme de normes et de règles. Cependant, la Constitution, entendue au sens idéologique, est à même de créer et de développer cette homogénéité qui, dans le cas américain (peu après l'instant de la fondation), n'existait plus en termes de "substance commune" que grâce à l'appel pseudo-religieux de la "destinée manifeste".
Est-il donc correct de supposer, comme le font les interlocuteurs de Wang, que l'idéologie américaine se trouve dans la Charte constitutionnelle ? La réponse est oui. Pour le simple fait que cette Constitution n'est (à la manière schmittienne) qu'un simple recueil de règles du jeu : c'est-à-dire le fondement d'un système dans lequel le politique est enfermé dans un modèle techno-économique précis.
On a évoqué précédemment l'affinité substantielle entre les concepts de progrès et de tradition au sein de la société nord-américaine (ce n'est pas un hasard si les États-Unis sont nés en pleine révolution industrielle). Cet accent mis sur le développement technologique a souvent été associé (plutôt à tort) à une expansion de la liberté individuelle. Wang écrit à ce sujet :
"Les États-Unis sont le pays où tout le monde révère l'individualisme, où l'individualisme règne en maître, et où aucun pouvoir ne peut s'y opposer" [8].
Cependant, Wang poursuit en soulignant une autre contradiction ouverte, un ordre purement techno-économique restreint considérablement la suprématie de l'individu mentionnée ci-dessus. L'innovation technologique augmente la capacité de contrôle structurel de la société, et non la diminue. En ce sens, il rend le capital capable de contrôler la société elle-même à tous égards. La logique dictée par la superstructure technique (et non idéologique) du capital est précisément de conduire le peuple (les gens) à être gouverné (s) et dirigé(s) sans coup férir. L'ordre technique n'est pas un ordre politique, malgré le fait qu'Aristote, dans l'Éthique à Nicomaque, identifie la science politique comme une forme de Τέχνη (plus précisément comme "la plus autorisée et architecturale des sciences pratiques") [9]. Cela nécessite une organisation croissante au sein de laquelle chaque individu a un rôle précis, puisque le début du travail est séparé de sa fin. Contrairement au processus de production traditionnel, dans lequel l'artisan construisait lui-même la totalité de l'objet, l'homme de l'ordre technique n'en produit qu'une partie. Et, ce faisant, il obéit et est plus facilement sensible au stimulus technique qu'au stimulus proprement politique.
L'homogénéité susmentionnée est donc déterminée par une homologation technique et ne découle plus d'une communion spirituelle ou lignagère, ce qui la rend facilement exportable hors des frontières américaines ou "occidentales". La société elle-même est transformée en une techno-structure, dans laquelle le rôle des dirigeants devient essentiellement apolitique. Les partis nord-américains, par exemple, sont essentiellement indiscernables et dépourvus de théories systématiques. Ce sont des masses agrégées (Wang Huning les désigne par le terme péjoratif de "populace") qui ne s'unissent qu'au moment des élections : le seul moment où le peuple a la présomption de pouvoir compter pour quelque chose. Cependant, ils ne restent que des spectateurs du pouvoir ; ils n'y participent en aucune façon. Le pouvoir est géré par trois groupes interconnectés et complémentaires : a) les sociétés industrielles et financières ; b) l'armée (à laquelle est réservée la plus grande partie des dépenses publiques) ; c) les dirigeants politiques. Selon les calculs du chercheur Thomas R. Dye (photo, ci-dessous), le présumé pluralisme démocratique nord-américain serait réduit à la gestion des affaires publiques et à la prise de décision par environ 5000 personnes [10].
Ainsi, la politique (ou ce qu'il en reste) est gérée et pensée comme une activité économique et mécanique. Les dirigeants politiques sont eux-mêmes un rouage de la techno-structure. La politique devient impensable sans la technologie. Et la technologie, comprise de cette manière, devient le pouvoir ultime, et non l'homme (bien que celui-ci reste dans la boîte). En ce sens, l'obsession nord-américaine pour la suprématie technologique n'est pas surprenante. Il y a plus de 30 ans, Wang constatait déjà que tous les centres de recherche et d'études stratégiques nord-américains étaient focalisés sur le même sujet : combien de temps les Etats-Unis seraient-ils capables de maintenir leur position hégémonique dans le domaine technologique et, par conséquent, leur hégémonie mondiale, alors que la concurrence des pays émergents devenait de plus en plus intense, agressive et diversifiée.
Face à l'envahissement et à l'expansionnisme de ce système homogénéisant, la solution proposée par Wang (du moins en ce qui concerne la Chine) était (et est toujours) d'étendre la foi dans le Parti (le seul instrument capable de guider politiquement la technologie et de ne pas se laisser brider par elle) et dans le socialisme pour recalibrer le processus de mondialisation afin de placer le système international à un niveau multipolaire qui permet la survie de cultures et de systèmes différents. Mais l'élargissement de la foi dans le Parti exige son dévouement total à deux causes : a) la préservation de la souveraineté et de la culture nationales ; b) l'enrichissement matériel et culturel du peuple.
À cet égard, Deng Xiaoping a déclaré en 1984 :
"Qu'est-ce que le socialisme et qu'est-ce que le marxisme ? Nous n'avons pas été très clairs à ce sujet par le passé. Le marxisme attache la plus grande importance au développement des forces productives. Nous avons dit que le socialisme est le stade primaire du communisme et qu'au stade avancé, le principe "de chacun selon ses capacités, à chacun selon ses besoins" s'appliquera. Cela nécessite des forces productives hautement développées et une abondance écrasante de richesses matérielles. Par conséquent, la tâche fondamentale de la phase socialiste est de développer les forces productives. La supériorité du système socialiste est finalement démontrée par le développement plus rapide et plus important de ces forces par rapport au système capitaliste. Au fur et à mesure de leur développement, la vie matérielle et culturelle des gens s'améliore constamment. L'une de nos lacunes depuis la fondation de la République populaire est que nous n'avons pas accordé suffisamment d'attention au développement des forces productives. Le socialisme signifie l'élimination de la pauvreté. Le paupérisme n'est pas le socialisme, encore moins le communisme" [11].
NOTES:
[1] Wang Huning, National Sovereignty, People’s Publishing, Pechino 1987, p. 57.
[2] La théorie politique du légisme se concentre sur l'autorité de la guidance politique qui doit se rendre capable de maintenir le contrôle de la société par le truchement de trois idées-force: a) par sa propre position en tant qu'autorité (Shi); b) par des techniques administratives bien définies (Shu); c) par le droit et les lois (Fa). Le rôle de l'autorité souveraine, en fait, est celui de créer et de promulguer des "lois idéales", capables de garantire le fonctionnement régulier du gouvernement.
[3] Voir C. J. Hamelink, The politics of world communication, SAGE Publication LTD, New York 1994; J. Tomlinson, Cultural imperialism: a critical introduction, John Hopkins University Press 1991.
[4] En particulier ce passage de Jean (10,10): “Je suis venu pour que vous ayiez la vie, et vous l'aurez en grande abondance"; Epitre aux Philippiens (4,19): “Mon Dieu vous forunira tout ce qui vous sera nécessaire, selon sa richesse, avec la gloire de Jésus-Christ".
[5] Wang Huning, America against America, Shanghai Arts Press, Shanghai 1991, p. 87.
[6] L'analyse de Wang Huning porte également sur des phénomènes qui semblent en totale opposition avec la culture américaine vouée au progrès et à l'individualisme : par exemple, la secte religieuse des Amish (qui rejette totalement le progrès lui-même) ou d'autres formes de collectivisme agricole.
[7] C. Schmitt, Staatsethik und pluralisticher Staat, Kantstudien, Berlino 1930, p. 145.
[8] America against America, ivi cit., p. 136. À cet égard, Wang est aussi particulièrement surpris par le traitement des personnes âgées jetées dans des maisons de retraite par la "culture" individualiste nord-américaine. Ce qui contraste totalement avec le profond respect que leur voue la tradition chinoise.
[9] Aristotele, Etica Nicomachea, I, 1, 1094a-b.
[10] Ces thèses sont résumées dans la série d'ouvrages Who's running America ? dans lesquels le politologue nord-américain examine les structures du pouvoir américain de l'ère Carter à nos jours.
[11]Deng Xiaoping, Opere scelte (vol. III), Edizioni in lingue estere, Pechino 1994, p. 73.
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dimanche, 23 janvier 2022
Les quatre âges de l’islamo-gauchisme
Les quatre âges de l’islamo-gauchisme
par Georges FELTIN-TRACOL
En février 2021, la ministresse de l’Enseignement supérieur, Frédérique Vidal, heurte le microcosme politico-médiatique en dénonçant l’influence de l’islamo-gauchisme dans les universités hexagonales. Elle demande au CNRS, pourtant contaminé par cette infection mentale, d’enquêter sur ce phénomène. En un temps record, soit quelques jours, l’organisme saisi rend ses conclusions. À l’instar de la théorie du genre, l’islamo-gauchisme n’existe pas ! En revanche, les féminicides et le réchauffement climatique sont des faits in-con-tes-tables…
Bastien Brestap, un jeune militant royaliste maurrassien qui participa en mars 2021 à l’invasion pacifique du conseil régional d’Occitanie, déclare dans le mensuel Le Bien commun de mai 2021 que « l’islamo-gauchisme, tout simplement, c’est la collaboration de la gauche républicaine en France et de l’Islam ». On pourrait lui rétorquer : « C’est un peu court, jeune homme ! ». En effet, l’islamo-gauchisme est une réalité déjà ancienne. Substituons-nous par conséquent à quelques chercheurs professionnels qui ne trouvent rien, à des doctorants et autres thésards en sciences mollassonnes pour revenir sur la généalogie de cette idée, bien sûr fantôme.
Il existe à l’origine de réelles divergences entre, d’une part, la gauche, le marxisme et les gauchismes et, d’autre part, la religion musulmane. Les marxistes considèrent en effet les croyances comme l’opium du peuple. Ils professent souvent un athéisme virulent, ce qui ne peut que déplaire aux masses mahométanes. Toutefois, pendant la révolution bolchevique, les communistes russes comprennent tout l’intérêt tactique de se servir de l’islam dans leur lutte contre les puissances occidentales nanties. Ils veulent investir un milieu récalcitrant à leurs idéaux révolutionnaires prolétariens. En septembre 1920 se tient à leur initiative le congrès de Bakou (ou « Congrès des peuples d’Orient »). Le bolchevik tatar russe Sultan-Galiev appelle à la « guerre sainte » et voit dans le message égalitaire de l’islam une préfiguration de la société sans classe rêvé par le communisme. Les intentions bolcheviques percutent cependant les ambitions pantouraniennes d’Enver Pacha qui trouve la mort en 1922 face à l’Armée rouge. Des militants communistes montent de nombreuses cellules clandestines dans tout le Moyen-Orient et en Afrique du Nord. C’est la préhistoire de l’islamo-gauchisme. La germination va durer trois décennies...
Le premier âge se déroule dans les années 1950 - 1960, en particulier en Algérie où s’agite un parti communiste groupusculaire différent du PCF. Les indépendantistes du FLN ne cachent pas leur idéologie tiers-mondiste, socialiste et développementaliste qui se concrétise sous Houari Boumédiène entre 1965 et 1978. Toutefois, les terroristes algériens s’inspirent aussi pour l’occasion de leur grand ennemi interne, Messali Hadj (photo,ci-dessous), qui n’hésite pas à lier des thèses révolutionnaires à un vocabulaire musulman à travers des mouvements tels l’Étoile nord-africaine, le Parti du peuple algérien ou le Mouvement national algérien. Avec l’appui de certaines chapelles trotskystes françaises, il veut se faire comprendre des populations indigènes. Malgré ce cas, l’islam demeure cependant un prétexte pour favoriser et attiser la révolution internationaliste à venir.
Le deuxième âge islamo-gauchiste se passe dans la décennie 1970 sur trois théâtres géographiques différents. Avec le détournement spectaculaire d’avions de ligne et des prises d’otages parfois sanglantes, la cause palestinienne prend une audience planétaire. Soutenue par les États arabes (et musulmans) du « Front du refus » proches de l’URSS (Syrie, Irak, Yémen du Sud), la résistance palestinienne s’inscrit avec le Fatah de Yasser Arafat et le FPLP (Front populaire de libération de la Palestine) de Georges Habache dans une démarche révolutionnaire. L’interaction entre la cause palestinienne et l’islam politique est alors presque inexistante. Or éclate en 1975 la guerre au Liban. Les raids palestiniennes contre Israël lancés à partir de l’État du Cèdre et les violentes ripostes militaires de l’État hébreu indisposent les responsables chrétiens libanais qui s’inquiètent de la croissance démographique élevée dans les camps de réfugiés palestiniens. Les forces armées chrétiennes affrontent les unités armées des partis de gauche, des Palestiniens et des communautés sunnite et druze. De cet amalgame surgit un « islamo-progressisme » dont la figure symbolique reste Carlos alias Ilich Ramírez Sánchez, l’activiste révolutionnaire vénézuélien converti à l’islam (dessin, ci-dessous, lors de l'un de ses procès). En 1975 commence la parution en Libye du Livre vert de Mouammar Kadhafi. Il imagine la « troisième théorie universelle » au-delà du capitalisme et du marxisme. Le guide libyen cherche une synthèse inspirée de la sociologie profonde des tribus et des clans en Libye entre l’anarcho-syndicalisme, le socialisme sorélien et l’islam, d’où son étonnant régime politique de démocratie directe charismatique.
L’islamo-gauchisme entame son troisième âge dans les années 1980 – 1990 avec le succès en 1979 de la Révolution islamique iranienne. Persécutés et opprimés, les chiites ont élaboré toute une martyrologie qui sous-tend, le cas échéant, une volonté de subversion radicale. Au cours de la révolution iranienne s’allient contre le Shah d’Iran le clergé chiite, les étudiants, les vieux partisans de Mossadegh et les militants du Tudeh, le puissant parti communiste iranien. Fin stratège, Rouhollah Khomeyni se débarrasse aussi vite des communistes, des libéraux et des nationalistes. Il canalise les puissantes aspirations révolutionnaires populaires en autorisant une forme d’autogestion dans les entreprises et en les tournant vers l’étranger.
L’entente paradoxale entre les islamistes et les gauchistes en Iran revient à Ali Shariati (1933 – 1977) (photo, ci-dessus). Cet ami de Jean-Paul Sartre correspond avec Frantz Fanon et traduit le Che. Ali Shariati devient le principal théoricien local d’un « islamo-gauchisme » iranien. Aurait-il approuvé le régime du jurisconsulte ou bien aurait-il été un ardent opposant aux mollah ? L’Organisation des moudjahiddines du peuple iranien a contribué à la chute du régime impérial. Influencée par les écrits de Shariati, elle a très tôt refusé le projet théocratique. Elle a perpétré de nombreux attentats et rallié l’Irak baassiste de Saddam Hussein pendant la Première Guerre du Golfe (1980 – 1988). Leur doctrine concilie marxisme et islamisme. On parle à leur sujet d’« islamo-marxisme ».
Dans les années 1990 – 2000, au Soudan, le principal penseur du régime islamique, le Frère musulman Hassan al-Tourabi, ancien étudiant à Londres et à la Sorbonne, propose à son tour une combinaison entre l’islam sunnite, des revendications panarabes et un esprit révolutionnaire para-marxiste pour mieux lutter contre le « Nouvel Ordre mondial » occidental américanomorphe. Mais il ne s’agit pas d’islamo-gauchisme à proprement parler.
Vers la fin de la décennie 1990, l’islamo-gauchisme subit la concurrence redoutable des talibans en Afghanistan et au Pakistan ainsi que d’Al-Qaïda d’Oussama Ben Laden. Tous se défient de l’idéologie révolutionnaire. N’oublions jamais que Ben Laden a d’abord servi les Étatsuniens en Afghanistan contre les Soviétiques au nom du djihad. L’islamo-gauchisme pâtit de l’effondrement du bloc soviétique et de l’échec militaire des États laïques arabes face à Israël. Le « Printemps arabe » de 2010 – 2011 se fait au nom d’un islam de marché, d’une démocratie aux normes occidentales ou, à la rigueur, d’une hypothétique « démocratie musulmane ». Quand il occupe maintes contrées irakiennes et syriennes, l’État islamique s’affilie d’autant mieux à la tradition politique musulmane qu’il combat, d’un côté, l’armée syrienne et les milices populaires chiites irakiennes, et, de l’autre, des Kurdes féministes, écologistes, indépendantistes, anti-capitalistes et hyper-inclusifs.
C’est paradoxalement hors de la Oumma, en Occident, que l’islamo-gauchisme atteint son quatrième âge sous l’impulsion décisive des gender studies, du féminisme radical et de l’intersectionnalité. En France, porté par une série de lois mémorielles hémiplégiques et des mesures légales liberticides, le très mal-nommé Parti des indigènes de la République (PIR) conçoit un discours victimaire revendicatif qui entend associer les catégories « racisées » aux classes prolétariennes. Ce n’est pas un hasard si Houria Bouteldja, la Pasionaria du PIR (photo, ci-dessus), soutient la troisième candidature de Jean-Luc Mélenchon en 2022. Pour les islamo-gauchistes, fort nombreux parmi les étudiants qui ont obtenu un bac au rabais, les nouveaux « damnés de la terre » ne peuvent être que des minorités extra-européennes. Ce nouvel âge islamo-gauchiste prolifère grâce à la lâcheté du corps enseignant et à la généralisation du civiquement correct. Cette nouvelle idéologie gangrène déjà les savoirs et ravage bien des cerveaux malléables après treize années consécutives d’embrigadement dans le système scolaire républicain. Il s’agit de la dénaturation occidentale de la gauche islamique initiale. Cet islamo-gauchisme charrie des miasmes idéologiques sortis directement des facultés anglo-saxonnes et françaises. Soucieux d’une respectabilité auprès des « Bo-bo » hyperurbanisés et « sur-Netflixés », il se veut coulant. Il en est donc plus que pernicieux.
L’actuel islamo-gauchisme présent en Europe et aussi ailleurs en Occident contribue ainsi à la guerre culturelle contre les Albo-Européens. On ne doit donc pas le ménager, mais au contraire s’y confronter ici et maintenant !
GF-T
- « Vigie d’un monde en ébullition », n° 16, mise en ligne le 19 janvier 2022 sur Radio Méridien Zéro.
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La revue de presse de CD - 23 janvier 2022
La revue de presse de CD
23 janvier 2022
DÉSINFORMATION/CORRUPTION
La complaisante interview du PDG de Pfizer sur BFMTV
La neutralité d’un journaliste peut se déterminer au travers des questions posées à l’invité et des réactions à ses propos. Si celui-ci n’adresse aucune question sensible ou n’oppose aucune réaction aux affirmations de son invité, il est raisonnable d’en déduire un parti pris. L’entretien du PDG de Pfizer, Albert Bourla, sur BFMTV ce lundi, est un cas d’école de ces pratiques qui contreviennent à la déontologie journalistique. Au cours de son interview, celui-ci a pourtant fait plusieurs déclarations de poids qui auraient mérité d’être traitées de façon critique, sur le fond comme sur la forme.
Francesoir.fr
https://www.francesoir.fr/opinions-tribunes/interview-pdg...
ÉCOLOGIE DESTRUCTRICE
Contre Bruxelles, Carlos Tavares annonce le chaos social. Et s’il avait raison ?
Ce 18 janvier, le patron du jeune groupe automobile Stellantis n’a pas mâché ses mots à l’encontre de la politique industrielle imposée de la Commission européenne. Il lui adresse – par le biais d’une interview faite à Paris et publiée simultanément par quatre journaux européens (Les Échos, Handelsblatt, Corriere della Sera, El Mundo) - une sévère mise en garde quant aux conséquences sociales graves que risque d’entraîner son plan de décarbonation de l’industrie automobile par le tout électrique.
Boulevard Voltaire
https://www.bvoltaire.fr/contre-bruxelles-carlos-tavares-...
Les véhicules hybrides rechargeables sont une arnaque, affirme une étude valaisanne
Et si les véhicules hybrides rechargeables n'étaient pas aussi verts qu'on le pense ? C'est ce que montre une étude publiée mardi et réalisée par Impact Living sur mandat du canton du Valais. Ce dernier réagit en supprimant les subventions pour ce type de propulsion. Ce rapport d'Impact Living, une entreprise qui vise l'accélération de la transition énergétique, se concentre sur les véhicules équipés d'un moteur thermique traditionnel et d'un moteur électrique, avec une batterie rechargeable à la prise. Il conclut que ces voitures, présentées comme un premier pas vers l'électrique, constituent en réalité un "piège climatique", puisqu'elles augmentent les émissions au lieu de les réduire.
rts.ch
https://www.rts.ch/info/economie/12780853-les-vehicules-h...
ÉCONOMIE
Réindustrialisation : comment impliquer les multinationales françaises ?
Le tissu économique français se caractérise par le poids de ses grandes firmes internationales qui ont davantage délocalisé leur production à l’étranger ces dernières années que leurs homologues européennes. Comment, dès lors, les associer au mouvement de réindustrialisation souhaité par les pouvoirs publics ? Vincent Vicard, adjoint au directeur du Centre d’études prospectives et d’informations internationales (CEPII), détaille les leviers à disposition en répondant aux questions d’Isabelle Bensidoun, économiste et adjointe au directeur du CEPII.
The Conversation
https://theconversation.com/reindustrialisation-comment-i...
Puissance et économie : les impasses de la France
Il n’y a pas de puissance sans économie forte. Non seulement celle-ci assure une place mondiale aux pays qui affichent de bonnes dispositions économiques, mais la vitalité économique permet de financer les attributs de la puissance, notamment l’armée. En s’enferrant dans une impasse économique constante, la France se condamne donc à amollir sa puissance.
Conflits
https://www.revueconflits.com/puissance-et-economie-les-i...
ÉNERGIE
EDF va racheter son électricité jusqu'à 300 euros le MWh… et la revendre à 46,20 euros à ses concurrents
Les circonvolutions du gouvernement autour du protocole sanitaire applicable dans les écoles ne pourraient être qu’une aimable mise en jambes. Son plan pour limiter la hausse de l’électricité à 4 % en 2022, promesse de Jean Castex faite septembre, risque lui d'être un véritable marathon pour la communication gouvernementale. Il va devoir expliquer qu’il demande à EDF de racheter aux prix vertigineux de 2022 l’électricité qu’il a déjà vendue pas cher, pour ensuite la brader à ses concurrents à un prix six fois inférieur.
Marianne
https://www.marianne.net/economie/economie-francaise/edf-...
ÉTATS-UNIS
L’intervention humanitaire est un faux nez de l’agression militaire
À la fin des années 1990 et au début des années 2000, la doctrine de « l’intervention humanitaire » a été mise en avant pour justifier les aventures militaires menées par les États-Unis dans les Balkans et au Moyen-Orient. Le souvenir de ces débats a été ravivé par un certain nombre d’événements récents, qu’il s’agisse du retrait ignominieux des États-Unis d’Afghanistan, alors même que la date du vingtième anniversaire des attentats du 11 Septembre était imminente, ou de la mort de hauts responsables de l’administration Bush Donald Rumsfeld et Colin Powell pour ne pas les nommer.
Les-crises.fr
https://www.les-crises.fr/l-intervention-humanitaire-est-...
FRANCE
L'appel solennel du "Collectif des maires résistants"
"L'heure est grave", lance le "Collectif des maires résistants" en introduction d'un appel solennel qu'ils lancent aux Français. Fabrice Marchand et Thierry Renaux sont tous deux maires de petites communes rurales dans les Ardennes. Aujourd'hui, le projet gouvernemental de pass vaccinal les conduit à passer la vitesse supérieure. Leur constat d'une démocratie confisquée, et même "trahie", d'un pays dans lequel Emmanuel Macron instaure un "pouvoir absolu", avec le concours d'une partie des médias qui alimentent une "vérité sous influence", les conduit à appeler leurs concitoyens à "redevenir les maîtres de leur destin, les capitaines de leurs âmes".
Francesoir.fr
https://www.francesoir.fr/videos-le-defi-de-la-verite/lap...
Pécresse n’est pas un clone de Macron. Elle est bien pire
Bénéficiant du soutien qu’on devine déjà servile et obséquieux d’une presse qui a amplement démontré tout l’aplaventrisme dont elle était capable sous Macron, elle aura aussi l’immense avantage de bien mieux connaître les rouages politiciens et administratifs du pays pour les avoir longuement pratiqués (au contraire du blanc-bec qui guignolise à l’Élysée actuellement). N’ayant aucun frein ni à la Chambre basse, ni à la Chambre haute, les médias devenus inféodés lui mangeant dans la main, les administrations l’acceptant sans mal plutôt que tout autre candidat, elle aura un boulevard pour faire absolument n’importe quoi, le pire inclus.
Contrepoints
https://www.contrepoints.org/2022/01/21/419744-pecresse-n...
GAFAM
TMTG : Trump attaque les GAFAM sur leur propre terrain
Oui, Trump veut concurrencer Facebook, Twitter, YouTube. Il espère pénétrer le cloud en certains domaines, et a un œil sur les monnaies virtuelles numériques, et les activités d’édition/distribution, voire aussi la téléphonie. Bref, en ces périodes de purge politique orwellienne, cela peut avoir un effet d’entraînement considérable. Il va de soi cette initiative est déjà harcelée. Ainsi, parmi d’autres, la sénatrice Elizabeth Warren a demandé à la SEC (l’équivalent de la commission des opérations de bourse), d’enquêter sur le projet afin de vérifier si Trump a bien respecté la loi. Afin de faire durer le doute pendant suffisamment longtemps pour le rendre obsolète : une sorte de Nordstream2, en somme.
OJIM
https://www.ojim.fr/trump-tmtg-attaque-les-gafam-sur-leur...
GÉOPOLITIQUE
Le retour des talibans : répercussions pour l’Asie du Sud
20 ans de guerre, 2 000 milliards de dollars dépensés et près de 2 400 soldats morts, pour une sorte de retour à la case départ. Le retour des talibans en Afghanistan touche l’ensemble de l’Asie du sud-est. En réorganisant les relations avec le Pakistan et la Chine, ce retour oblige aussi l’Inde à se repositionner.
Conflits
https://www.revueconflits.com/le-retour-des-talibans-repe...
Asie du Sud et de l'Est : tendances et perspectives pour 2022
Le 24 septembre 2021, la première réunion en face à face du dialogue de sécurité quadrilatéral (États-Unis, Japon, Inde et Australie) s'est tenue à Washington et une nouvelle alliance (Australie, Royaume-Uni, États-Unis) a été formée - toutes deux dirigées contre la Chine. "Le Quatuor (Quad) a été créé il y a relativement longtemps - en 2007 - mais jusqu'à récemment, il était peu actif. Ce n'est qu'en 2020 que l'alliance a été relancée et que de nouvelles réunions et de nouveaux accords ont été prévus.
Euro-synergies
http://euro-synergies.hautetfort.com/archive/2022/01/13/a...
SANTÉ/LIBERTÉ
Dites « Non ! », « Espace numérique de santé » : comment refuser le pillage automatisé de vos données
Tandis que le Covid-19 sature notre attention, la technocratie accélère la virtualisation et la déshumanisation de nos vies en toute discrétion. Depuis le début janvier 2022, l’administration française1 ouvre automatiquement un « Espace numérique de santé » (ENS) à chaque usager du système de soin. Cet espace virtuel, nommé « Mon espace santé » donne accès à votre « dossier médical partagé » (DMP). Celui-ci est disponible, pour les usagers volontaires, depuis la « loi de modernisation du système de santé » de Marisol Touraine, ministre de François Hollande (janvier 2016).
Pièces et Main d’oeuvre
https://www.piecesetmaindoeuvre.com/IMG/pdf/refus_espace_...
Covid et vaccins : ce qu’il ne faut pas voir
Le Sars-Cov-2 aura rendu idiot un pays tout entier, du haut en bas de l’échelle. Guignol et le sapeur Camembert, personnages de comédies bien français, sont devenus réalités et ne font plus rire. Le pays des lumières est devenu celui de l’obscurantisme. Les décisions actuelles, notamment celles de l’impasse vaccinale, évoquent celles des personnages du sapeur Camembert, simplet qui s’illustrait par exemple en creusant un trou pour y mettre la terre d’un premier trou, et qui était alors dépassé en bêtise par son supérieur, le sergent Bitur, qui lui reprochait de ne pas avoir fait le deuxième trou assez grand pour qu’on puisse y mettre sa terre avec celle du premier. Le vaccin ne marche pas assez bien car vous n’en avez pas fait assez.
covid-factuel
https://www.covid-factuel.fr/2022/01/18/covid-et-vaccins-...
La fiche wikipedia du président de Pfizer
Sans commentaire…
Wikipedia.org
https://fr.wikipedia.org/wiki/Albert_Bourla
Covid et "Spike syndrome" : à ne pas confondre !
Le présent article a pour but de préciser la "maladie" qui est inoculée par la production de la protéine Spike, induite par les vaccins. Il fait suite à un précédent article du 7 octobre 2021 : « En faisant produire la protéine Spike par les cellules, vacciner revient à inoculer la maladie ». Sans oublier un point important : l’absence de reconnaissance des test PCR.
francesoir.fr
https://www.francesoir.fr/societe-sante/covid-et-spike-sy...
UNION EUROPÉENNE
En 2021, l’immigration clandestine vers l’UE en hausse de 57 % !
Une déferlante : voilà comment on pourrait qualifier la vague d’immigration clandestine à destination des pays de l’Union européenne. En 2021, l’agence Frontex a recensé pas moins de 200 000 franchissements illégaux des frontières extérieures de l’Union européenne, soit une augmentation de 57 % par rapport à 2020.
Polémia
https://www.polemia.com/2021-immigration-clandestine-vers...
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samedi, 22 janvier 2022
L'ère hyperindustrielle et la misère du symbolique
L'ère hyperindustrielle et la misère du symbolique
Sur la parution en Italie d'un livre de Bernard Stiegler, qui s'est donné la mort en août 2020
par Giovanni Sessa
Source : Barbadillo & https://www.ariannaeditrice.it/articoli/l-era-iperindustriale-e-la-miseria-del-simbolico
Depuis quelque temps, nous soutenons qu'il serait nécessaire de se débarrasser de l'idée néfaste de la fin de l'histoire. La société contemporaine n'est pas le "meilleur des mondes possibles", elle est surmontable et amendable. Nous avons été confortés dans cette position par la lecture d'un récent ouvrage du philosophe français Bernard Stiegler, La miseria symbolica. L'epoca iperindustriale, publié par Meltemi (pour les commandes : redazione@meltemieditore.it ; 02/22471892, pp. 164, euro 16.00). Le volume comprend une introduction de Rossella Corda, une postface de Giuseppe Allegri et un essai du Gruppo di ricerca Ippolita, qui édite les œuvres de Stiegler en Italie.
Le lecteur doit savoir que le penseur français ne se limite pas à élaborer un diagnostic des causes qui ont produit l'ère hyperindustrielle, mais propose une thérapie pour le malaise individuel et communautaire qui caractérise les relations humaines en son sein. En premier lieu, il se débarrasse du cliché de la post-modernité lyotardienne et baumanienne, qui porte implicitement en soi la référence à un prétendu post-industrialisme, trompeur pour l'exégèse du présent. Il serait plutôt approprié d'utiliser l'expression d'âge hyper-industriel pour désigner notre époque: elle permet de comprendre l'ingérabilité de la tèchne et, surtout, le lien qui unit l'esthétique et le politique en un seul. Notre époque est celle de la misère du symbolique.
Ce paupérisme ne conduit pas à la définition "du je et du nous, à partir de la pauvreté d'un imaginaire colonisé ou surexploité par les technologies hyper-médiatiques [...] qui invalident la prolifération d'un narcissisme primaire physiologique" (p.9). Conscient de la leçon de Deleuze, Post-scriptum sur les sociétés de contrôle et, en ce qui concerne les processus d'individuation, de celle de Simondon, Stiegler présente une analyse de la pensée symbolique comme pharmakon, poison et antidote à la fois: "dans le sillage de cette longue tradition qui part de Platon" (p. 10), conclut Corda.
Certes, ni les guerres conventionnelles ni les conflits sociaux n'ont disparu, mais le monde contemporain connaît une guerre plus envahissante, celle qui se déroule dans la sphère "esthétique", où la con-sistance symbolique est en jeu. Pour Stiegler, le terme "esthétique" désigne le "sentiment" en général. Le politique vise la construction d'un pathos commun "qui intègre notre partialité-singularité réciproque [...] en vue d'un devenir-un" (p. 11), par l'établissement de relations de sympathie, fondées aristotéliciennement sur la philia. On peut en déduire que la politique est un acte esthétique basé sur "la participation e-motive-créative" (p. 11), visant à la construction du corps social. Elle peut induire la réalisation du nous ou ouvrir des échappatoires dissolvantes. La seconde hypothèse se produit lorsque les "affects" sont pris au piège de l'exploitation menée par la Forme-Capital qui, colonisant l'imaginaire par le marketing, dirige la dimension désirante de l'homme et marchandise la vie.
Le capitalisme cognitif et la société de contrôle, son corrélat historique, vivent de cet abus esthétique, si subtilement puissant qu'il détermine la mise à zéro de la honte prométhéenne qui, selon Anders, aurait accompagné, en tant que trait "affectif", l'âge de la technologie. Il est nécessaire, souligne passionnément le penseur, d'échapper à l'emprise de l'hétéro-direction socio-existentielle et "de remettre en mouvement les processus de désir actif " (p. 11). La guerre esthétique peut être gagnée à condition de connaître les substrats complexes de rétentions sur lesquels se structure la production imaginale. Il ne suffit pas de s'arrêter aux rétentions primaires et secondaires analysées par Husserl. Les premières se constituent sur le présent de la perception (l'écoute d'une symphonie), les secondes sur les processus d'image (le souvenir de cette écoute), mais les plus pertinentes, dans la phase actuelle, sont les rétentions tertiaires, produites par la mémoire externalisée que nous fournit la technologie. Dans ce contexte, nous avons affaire à des "objets temporels industriels", qui donnent lieu à la répétition infinie des expériences et des perceptions et qui influencent la définition du moi et du nous: "ils se déposent dans une sorte d'archive de base, à la fois physique [...] et abstraite" (p. 13). De cette façon, nous atteignons le point d'écouter sans plus entendre, nous écoutons mécaniquement, comme des magnétophones humains.
Cette situation, et son possible renversement, peut être déduite, selon Stiegler, du film de Resnais, On connaît la chanson. La rétention tertiaire a ici le visage de la répétition du refrain des chansons, devenues "mémoire collective", non pas d'un "nous consolidé", mais du "on social inauthentique", dont Heidegger a parlé magistralement. En même temps, les protagonistes de ce film visent à transvaloriser, à transformer leur "souffrance" symbolique en une action symbolique. C'est la possibilité esthético-politique cachée dans la misère imaginaire. Le penseur stimule le trait poïétique des hommes, afin qu'ils adhèrent à "une autre capacité d'imaginer" (p. 15), qui ne peut se fonder sur un retour à un passé donné, non touché par le système technique, mais qui doit en découler. Le Gestell doit être considéré comme un lieu de décision : on peut y procéder à la mise à l'écart définitive du je et du nous (l'état actuel des choses) ou à leur re-constitution, au-delà de la marchandisation universelle en cours (cette position ne semble pas différente de celle du Travailleur de Jünger).
Seule l'adhésion à une philosophie imaginaire, a-logique, comme l'idéalisme magique évolutif, peut permettre au poietes de se sentir perpétuellement exposé au novum, aux rythmes de la physis et au fondement qui la constitue : la liberté.
Nous avons trouvé la lecture du livre stimulante. Nous ne pouvons pas être d'accord avec l'auteur lorsqu'il affirme que la misère symbolique du présent s'est manifestée clairement dans le succès électoral des Lepénistes le 21 avril 2002. Peut-être pouvons-nous lire dans ce vote une réponse "instinctive" à la misère symbolique, qui nous semble au contraire incarnée de manière paradigmatique par le mouvement "En marche" d'Emmmanuel Macron, dans lequel les certitudes "solides" de la gauche se sont dissoutes.
Une dernière considération : il est paradoxal que des auteurs, issus de mondes intellectuels très éloignés de celui de Bernard Stiegler, partagent certaines de ses analyses. Sur ce sujet, nous attendons des contributions des représentants de la pensée de la Tradition, trop souvent engagés dans la répétition de vieilles leçons.
14:09 Publié dans Actualité, Livre, Livre, Philosophie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : livre, actualité, bernard stiegler, philosophie, sociologie | | del.icio.us | | Digg | Facebook
Des tsars aux héros nationaux : la "Russie éternelle" dans la politique culturelle de Poutine
Des tsars aux héros nationaux : la "Russie éternelle" dans la politique culturelle de Poutine
Par Tommaso Minotti
Source: https://osservatorioglobalizzazione.it/osservatorio/dagli-zar-agli-eroi-nazionali-la-russia-eterna-nella-politica-culturale-di-putin/
L'une des pierres angulaires d'un État-nation est sa conscience historique. Celle-ci se construit en partie à travers l'étude, la reconstruction et, surtout, la célébration du passé. Cela nécessite une politique culturelle. C'est essentiel si la nation ne veut pas perdre l'idée de l'histoire. Vladimir Poutine et ses collaborateurs ont développé au fil des ans une politique culturelle très intéressante. Le Moscou contemporain s'inscrit en fait dans une très longue tradition d'attention à la culture de la part des autorités qui ont gouverné l'immense territoire eurasien. Malgré l'oppression des tsars, la grande littérature russe s'est épanouie, incarnée par Alexandre Pouchkine parmi de nombreuses autres figures illustres. Après la révolution de 1917, l'Union soviétique a accordé une attention particulière au monde de la culture et, malgré des désaccords avec certains intellectuels, a essayé de faire connaître ce dernier au peuple.
Poutine et la stratégie culturelle du Kremlin
Poutine, qui est arrivé au pouvoir à la fin de la période confuse d'Eltsine, a ravivé l'intérêt de l'État pour cette question cruciale. Le leader de la Russie unie a agi ainsi en sachant que sa nation ne devait pas s'effondrer sous l'effet des forces centrifuges. Il était donc crucial de renforcer le patriotisme des citoyens russes grâce également à des choix de mémoire historique et culturelle. Poutine poursuit ses initiatives en mettant l'accent sur les musées et le cinéma. Mais sa politique culturelle comprend également un travail monumental intensif, notamment la construction de statues.
Aux États-Unis, la destruction de monuments célébrant des esclavagistes, des explorateurs et des personnages clés de l'histoire américaine a suscité une vive controverse. Il s'agit également d'une politique culturelle grossière, menée directement par une partie du peuple. Le but est de cacher un certain type de passé. En Turquie, de plus en plus d'églises ou de musées sont transformés en mosquées, un cas célèbre étant celui de Sainte-Sophie. Ce ne sont là que quelques exemples de politiques culturelles. La Russie a vu à la fois des monuments détruits par des foules en colère et, surtout au cours de la dernière période, une nouvelle politique culturelle plus constructive. Poutine est parmi ceux qui accordent le plus d'attention à cet aspect fondamental et le font de manière raffinée.
Financement et musées
Lors de son discours du 21 avril 2021, M. Poutine a affirmé sa volonté d'allouer des fonds aux musées et aux lieux de culture de la Russie rurale. On peut dire qu'il s'agit de la dernière étape d'un processus de longue haleine visant à mettre en œuvre une politique culturelle minutieuse. L'ancien officier du KGB a voulu aborder la question différemment de ses prédécesseurs immédiats. Jusque dans les années 1970, l'intelligentsia soviétique considérait la culture comme un moyen d'ennoblir la vie sociale. Au cours de la décennie susmentionnée, la conception a changé et les processus de démocratisation ont pris le dessus. Poutine, quant à lui, considère la culture comme un soutien aux programmes politiques et un moyen de développement social. Et c'est précisément dans le sillage de cette réflexion que se greffe le document publié en 2014 intitulé "Les fondamentaux de la politique culturelle de l'État".
Les idées principales embrassent la thèse très correcte que l'industrie de la culture est centrale à la société moderne. Par conséquent, le développement humanitaire et culturel est perçu comme la base de la prospérité économique et de la souveraineté de l'État, le fondement de l'identité civile et de l'unité nationale. Pour mieux comprendre ce que cela signifie, il y a les propres mots de Poutine: "Préserver notre identité est extrêmement important dans l'ère turbulente du changement technologique, il est impossible de surestimer le rôle de la culture, qui est notre code de civilisation nationale qui débloque le potentiel créatif humain". La dernière partie est un héritage clair de la volonté soviétique de déployer pleinement les capacités de l'individu. Poutine déclare à nouveau: "dans le but de consolider les efforts de l'État et de la société civile pour créer les conditions permettant d'encourager les gens à réaliser leur potentiel créatif, de préserver les valeurs culturelles, d'assurer la diffusion de la culture russe et de contribuer au développement du potentiel culturel des régions russes".
Mais les manifestes idéologiques ne suffisent pas à soutenir la culture, il faut aussi des fonds. En plus des investissements susmentionnés dans les musées et les sites culturels ruraux, Poutine a créé en 2016 un fonds destiné à soutenir des activités, des initiatives et des projets dans divers domaines. De nombreux documents officiels circulant au sein du ministère russe de la culture et du gouvernement lui-même expriment la volonté d'augmenter les fonds alloués à la culture. L'objectif est de porter les dépenses culturelles à 1,4 % du PIB d'ici à 2030. Toutefois, l'augmentation des fonds alloués à ce domaine n'est pas la seule manœuvre prévue par le gouvernement russe. Poutine prévoit des réductions d'impôts, des budgets et des capitaux dédiés à toutes les activités culturelles : cinéma, théâtre, musées et expositions.
Statues et monuments
Ces dernières années, la Russie a connu une vague de nouvelles statues et de nouveaux monuments. Et grâce à eux, nous pouvons voir qui Poutine choisit pour façonner une nouvelle identité pour son pays, vieux et jeune à la fois. Le choix des héros nationaux n'est en rien anodin et, à travers l'analyse de leur vie et de leurs actions, on peut déterminer l'orientation de la Russie elle-même. Poutine porte une attention particulière au tsar Alexandre III, qui est considéré par beaucoup comme une sorte d'exemple dont l'ancien membre du KGB s'inspire souvent. Alexandre III a été tsar de 1881 à l'année de sa mort en 1894. Il a succédé à son père, Alexandre II, qui avait été tué par les populistes du mouvement Narodjana Volja. Alexandre III abroge toutes les timides ouvertures de son prédécesseur. Surnommé "le pacificateur", il poursuit des projets de russification de vastes territoires non russes et est un fervent partisan de la religion orthodoxe. Alexandre III a des vues panslaves et exploite la faiblesse de l'Empire ottoman pour protéger, ou influencer, les populations orthodoxes vivant dans la grande maladie de l'Europe. En politique étrangère, il est très proche de la France de la Troisième République. Sous son règne, le gigantesque projet de chemin de fer transsibérien a également été achevé.
La figure d'Alexandre III fait l'objet d'un processus de réévaluation depuis le début des années 1990, notamment grâce à l'opinion favorable de Poutine. Poutine l'a décrit comme un exemple de combinaison harmonieuse entre la modernisation du système de production et la fidélité à la tradition. Poutine a inauguré pas moins de deux monuments dédiés au Tsar. Le premier a été dévoilé en novembre 2017 en Crimée, ce qui n'est pas un hasard, et le second en juin 2021 à Gatchina, au sud de Saint-Pétersbourg.
Un autre épisode significatif s'est produit le 4 novembre 2021, jour de l'unité nationale. À cette date, M. Poutine a déposé des fleurs devant le monument à la fin de la guerre civile construit à Sébastopol, en Crimée. Un autre choix mûrement réfléchi. Pour Poutine, les morts des affrontements entre Blancs et Rouges sont parfaitement égaux, car ce sont des Russes. L'intention est de donner une interprétation unifiée de l'histoire russe, sans divisions considérées comme des accidents de l'histoire et sans l'influence néfaste de l'idéologie.
Un autre monument dédié aux soldats russes tombés au combat est celui inauguré à Vladivostok le 27 avril 2021. Les protagonistes de l'œuvre, financée par l'appareil d'État, sont les soldats morts dans le conflit contre la Chine sur l'île Damansky en 1969 (photo, ci-dessus). Il y a quelques années encore, on ne parlait pas de ces affrontements, mais on les redécouvre aujourd'hui sur un ton patriotique. De même, le monument d'Archangelsk dédié aux courageux géologues qui ont exploré le nord-ouest inhospitalier de la Russie est inspiré par le désir d'insuffler un sentiment d'unité à la population. L'URSS l'avait mis "entre parenthèses".
Une unité qui semble se briser lorsque les citoyens russes sont confrontés à leur passé soviétique. Selon un sondage Levada, 48% des habitants de la Russie sont favorables à un monument à Staline. Ce chiffre est le plus élevé depuis que la Russie contemporaine existe. Pas moins de 60 % des personnes interrogées souhaitent la création d'un musée consacré à Koba. À Bor, près de Nijni Novgorod, un centre de loisirs a été dédié à Staline, à l'incrédulité de quelques-uns et à la satisfaction de beaucoup de ceux qui se souviennent de la lutte titanesque de la Grande Guerre patriotique. Les habitants de Moscou sont beaucoup plus divisés, puisqu'ils ont été invités ces derniers mois à décider quelle statue placer sur la place centrale de la Loubianka. Le choix était entre un nouveau monument à Nevksy ou la reconstruction de celui démoli en 1991 représentant Feliks Dzerzinsky. Il est le fondateur de la Tcheka, surnommé "Feliks de fer" pour son honnêteté ou "Jacobin prolétarien" pour sa célèbre incorruptibilité, ce qui le rapproche de Robespierre. Le référendum a donné 55% des voix au héros russe, mais Dzerzinsky a obtenu un solide 45%. Cela a conduit le maire de Moscou, M. Sobjanin, à déclarer la consultation nulle et non avenue, l'incertitude étant trop grande parmi les Moscovites. La place de la Loubianka reste sans monument alors que les Russes sont divisés sur ce qu'il faut sauver, et qui, de leur encombrant passé soviétique.
Le panthéon de Poutine
Mais de nombreuses autres statues ont été dédiées à des personnages cruciaux de l'histoire russe, Nevsky en tête. Le dernier monument a été inauguré le 11 septembre 2021 sur le lac Chudskoe par M. Poutine et le patriarche Kirill. Nevsky était prince de Novgorod et de Vladimir. Il a porté ses principautés à leur plus grande splendeur. En 1240, il a vaincu les catholiques suédois, en infériorité numérique. Puis il s'est exilé pour avoir été trop puissant. Fervent défenseur de l'orthodoxie russe, Nevsky retourne à Novgorod. Il a été rappelé de son buen retiro, un peu comme Cincinnatus, pour sauver son peuple. Il a réussi à vaincre les chevaliers teutoniques lors de la légendaire bataille du lac gelé en 1242. Grâce à son succès décisif, Nevsky a préservé la religion orthodoxe, qui avait été mise en danger par la volonté de conversion des Allemands. Sa mémoire a été utilisée par Pierre le Grand et Staline comme un symbole de la Russie. Le cas de l'Ordre Nevsky est particulier. C'est un honneur conçu par les tsars, aboli par Lénine et recréé par Koba. Poutine l'a conservé, en le rapprochant du symbolisme tsariste. Le président russe considère Nevsky comme l'un des plus grands exemples de patriotisme et de dévouement à la patrie.
Un autre personnage auquel un monument a été dédié en octobre 2016 est Ivan IV, le Terrible. Sa statue se dresse au sud de Moscou. Il est le premier à se faire appeler "tsar" et prône une politique très centralisée. Ivan IV réorganise l'économie, l'administration publique et l'armée. Il a vaincu et subjugué les Tatars à plusieurs reprises et a conquis Kazan. Un mois après la statue du Terrible, une statue de Vladimir Ier le Grand a également été dévoilée. Le monument se trouve près du Kremlin et célèbre un prince de Kiev. Le signal est clair : l'Ukraine et la Russie ont une même origine. Vladimir a porté sa principauté au plus haut niveau et a même réussi à convertir son peuple au christianisme en 988. Son mariage avec la princesse byzantine Anna, sœur de Constantin VIII et de Basile III, est un grand succès. Grâce à cette démarche, la Russie s'est rapprochée de la religion orthodoxe et a revendiqué, sur le plan idéologique, d'être reconnue comme la "troisième Rome".
Conclusion
Ce n'est pas une coïncidence si le personnage historique qui inspire le plus Poutine est Alexandre III. Empereur autocratique mais modernisateur, il a pu diriger ses vastes territoires avec confiance, en laissant de côté les influences extérieures. Le leitmotiv qui lie toute la politique culturelle de Poutine est la volonté de souligner l'importance cruciale de l'unité, du patriotisme, du sens de la continuité historique et de la religion orthodoxe. L'unité est cruciale car la Russie a subi, et subit toujours, des pressions centrifuges. Le patriotisme, quant à lui, adopte l'héritage du marxisme-léninisme comme idéologie directrice de l'État. La continuité historique légitime le nouvel ordre, lui donne une solidité et le place en lien direct avec les grandes figures du passé. La nécessité, dans ce cas, est de faire comprendre aux Russes que leur nation a une histoire millénaire derrière elle, et non trente ans. Enfin, la religion orthodoxe est perçue comme l'instrumentum regni par excellence, une sorte d'allié indispensable de l'État. La relation symbiotique entre "le trône et l'autel" est un héritage partiel du césaropapisme tsariste, lui-même issu d'influences byzantines déterminantes. En ce sens, la période soviétique est une parenthèse. Le travail que Poutine mène avec beaucoup d'attention est en fait une re-nationalisation des masses qui se sont égarées après les turbulences des années 1990. Le fait est que la complexité du défi auquel la classe dirigeante russe est confrontée est énorme.
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vendredi, 21 janvier 2022
L'empire technologique : privatisation et piratage de nos esprits
L'empire technologique: privatisation et piratage de nos esprits
Par Carlos X. Blanco
Source: https://decadenciadeeuropa.blogspot.com/2022/01/el-imperio-de-las-tecnologicas.html
Nous vivons dans un monde technologique et en souffrons. Techné, la première partie du mot, fait référence aux "arts appliqués". De nos jours, nous pensons immédiatement aux robots, aux ordinateurs et aux laboratoires pharmaceutiques ou au génie génétique, mais dans le monde antique, ces "arts" étaient des métiers manuels.
Pour sa part, la deuxième racine grecque du mot, logos, renvoie au discours rationnel qui, dans ce cas, donne corps et compréhension à l'ensemble des arts appliqués de chaque époque. À partir du XVIIIe siècle, contrairement au monde classique et médiéval, la technologie fait référence à l'utilisation des ressources naturelles, d'une part, et à la rationalisation du travail productif, d'autre part. C'est dans ce siècle de la révolution industrielle et des "lumières", le XVIIIe siècle, comme Marx l'a bien compris, qu'a eu lieu la gestation de l'idée de production.
Ce n'est qu'avec cette idée traversant diverses catégories techniques et scientifiques que la science de l'économie politique a pu naître. Dans la Production, les aspects physico-naturels de la vie économique des peuples (énergie, transformations énergétiques dans l'environnement) et les aspects anthropologiques (relations sociales de production, organisation du travail) sont imbriqués de manière unique et irréductible (car cela même est une Idée ontologique).
L'explosion des technologies de l'information, de la communication et du contrôle ressemble aujourd'hui à un champignon atomique qui nous laisse aveugles, comme si nous étions remplis d'une radioactivité stupéfiante, incapables de réagir à des changements aussi accélérés qui semblent condamner les gens à leur esclavage et à la plus indigne des passivités. L'informatisation des tâches, la mécanisation et la numérisation de tous les processus, la "dématérialisation" des économies nationales (qui masque en réalité les délocalisations industrielles et l'intensification de la division internationale du travail) ont pris de court tous les mouvements de résistance populaire.
Une grande partie de la gauche, surtout en Occident, s'est laissée emporter par les illusions de la "dématérialisation". Dans la mesure où, dans les pays jusqu'ici riches, le capital a aboli la quasi-totalité de la jeunesse active, ainsi qu'une partie importante des adultes, en les séparant des processus productifs primaires et secondaires, cette illusion n'a fait que croître. La dissolution du concept de "prolétariat" n'a rien à voir avec la dissolution de l'exploitation. Cette exploitation se poursuit, et s'est même intensifiée au cours des dernières décennies, mais au prix d'une plus grande division internationale du travail et de la création de couches inactives toujours plus importantes dans le monde riche. En Europe, le prolétariat d'usine est à peine visible, mais il existe de nombreuses classes multiformes d'exploités et de victimes du nouveau capitalisme.
Le monde riche est en train de cesser d'être riche, surtout en Europe. L'Europe s'enfonce de plus en plus, incapable de soutenir son faible taux de natalité (de mauvais augure pour la vie productive de ses nations) et l'invasion de contingents humains difficilement exploitable pour le travail (ce que, désormais, on appelle l'"intégration"). La délocalisation des industries et les attaques contre les campagnes entraînent la création de couches de plus en plus grandes de population "sans ressources", couches qui sont en partie déguisées statistiquement par a) une pseudo-éducation, une formation très prolongée dans le temps, b) l'endoctrinement dans la "culture" des loisirs et du divertissement, afin d'éviter qu'ils ne deviennent des fautrices de troubles sociaux et d'agitation, un objectif qu'ils tentent d'atteindre au moyen des distractions bon marché qui leur sont fournies ("panem et circenses"). Ces nouvelles couches de parasites fonctionnent comme des agents du système circulatoire, comme des consommateurs improductifs, de cette même industrie aliénante.
Dans le monde opulent qui cesse de l'être, les gens se laissent endoctriner par les grandes entreprises technologiques qui mettent à la disposition de leurs sujets des appareils électroniques "intelligents" de plus en plus conçus pour le loisir et non pour la production, ainsi que des applications informatiques, des plateformes numériques, des messageries électroniques, etc. qui ne répondent que partiellement aux besoins et aux avantages commerciaux, académiques, etc. et servent surtout au "divertissement". Ces grandes entreprises, notamment celles qui intègrent des outils d'intelligence artificielle, procèdent à un véritable piratage des cerveaux et des esprits humains. Ce piratage de l'esprit consiste:
1) à distraire les esprits humains de la nécessité de penser et de mémoriser par eux-mêmes,
2) à distraire les esprits humains de la capacité de générer leurs propres idées, y compris les idées critiques nécessaires pour subvertir le Système à mesure qu'il atteint des degrés de totalitarisme et d'autoperpétuation, et
3) à retirer de grandes masses de la population de la culture du travail productif et de l'autosuffisance.
Big Brother" sera en même temps le "Big Redistributeur" : à partir des miettes de la plus-value produite dans les nouvelles formes d'"industrie immatérielle" ou de "société de la connaissance", suffisamment de "contenu numérique" (y compris la violence, la pornographie, les jeux addictifs et l'endoctrinement) sera fourni à un nombre suffisant de personnes pour faire tourner l'entreprise. L'économie "matérielle" se déplace vers l'arrière-boutique, comme cela est évident et nécessaire dans le capitalisme depuis le tout début, et l'arrière-boutique est l'ensemble des pays "en développement" où il n'y a pas tant d'obstacles juridiques à l'exploitation dans les branches de production où l'on a encore besoin de mains, de corps, de matières premières, etc.
Les grandes entreprises technologiques de "l'information et de la connaissance", les GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon...) réalisent un véritable piratage de la connaissance humaine faite par et pour les gens. Par inadvertance, chaque fois qu'une personne publie du contenu sur le web, elle fait plus que simplement "partager" des informations : elle les donne gratuitement à ces entreprises qui, à leur tour, les redistribueront en fonction de leurs intérêts. Du simple "like" au rapport réfléchi, tout ce qui est "partagé" est exploitable par ces pirates du savoir.
Nous tous, utilisateurs, cédons nos informations et notre part de travail neuronal à des entreprises qui les convertiront en capital. Par analogie avec le système primitif du capitalisme à domicile, dans lequel les travailleurs effectuaient une partie du processus chez eux et à leurs frais, bien avant l'apparition des grandes usines, nous assistons aujourd'hui à des formes de travail libre, voire inconscient, qui sont prestées à leur insu au service des grandes entreprises technologiques. La pandémie de COVID a servi à accélérer ce nouveau "travail à domicile".
Il convient de noter que ces entreprises technologiques privatisent même l'enseignement. En Espagne, on a déjà détecté des cas où ces géants contactent des écoles publiques et promettent des "cadeaux" à leurs équipes de direction ou aux enseignants qui adhèrent à certains programmes de "classe virtuelle". Dans le cadre de la mise en œuvre obligatoire de certains programmes d'utilisation de tablettes électroniques dans les écoles (par exemple, en Castille-La Manche, le projet "Carmenta"), reléguant les livres en papier au second plan, nous observons avec inquiétude comment certaines entreprises privées, telles que Google, s'emparent soudainement des données de milliers d'enfants qui disposent de leurs propres comptes pour accéder à la messagerie, au cloud et aux comptes Google, avec tous les utilitaires. Google est apparemment en train de "donner" aux enfants et aux administrations scolaires des outils gratuits pour virtualiser l'enseignement.
En réalité, Google ne fait que recruter des milliers et des milliers d'utilisateurs avec l'aide du gouvernement et avec le caractère coercitif présent dans les étapes de la scolarité qui, étant obligatoires (primaire et secondaire), incluent également l'utilisation obligatoire de certains outils.
Des outils, d'ailleurs, qui, comme l'ont souligné certains experts (le Dr Manfred Spitzer, par exemple), ne présentent aucun avantage scientifiquement démontrable par rapport aux méthodes traditionnelles, non numériques. Au contraire, ce sont des outils très nocifs, qui empêchent le cerveau de faire un effort de mémorisation, de résolution autonome de tâches complexes, qui provoquent l'hyperactivité, l'incapacité d'attention, la dépendance, ainsi qu'une foule de symptômes qui coïncident avec une véritable démence.
Les GAFAM piratent le savoir collectif fait par le peuple et à partir du peuple, et eux, une fois devenus des intermédiaires parasites, deviennent des entreprises qui peuvent redistribuer le savoir de tous en prétendant être nécessaires.
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Stabilité contestée et guerres hégémoniques
Stabilité contestée et guerres hégémoniques
Conflits limités ou affrontement global ?
Irnerio Seminatore
Source: https://www.ieri.be/
Stabilité contestée et dislocation de l'ordre
Réalisme et interdépendance en leur portée explicative
Geist, élites et leadership
Rivalité systémique
Vision régionalisée de la sécurité et politique d'alliances
Crise ukrainienne. Conflit limité ou affrontement global?
STABILITÉ CONTESTÉE ET DISLOCATION DE L’ORDRE
Il peut apparaître paradoxal de parler d'hégémonie établie, dans une situation internationale turbulente et chaotique, en Europe, en Afrique et en Asie, lorsque s’aggravent les signes d’une dislocation progressive de l’ordre existant et se précisent les prolégomènes d'un conflit de grande intensité et de portée systémique.
Avec l'effondrement de l’URSS et la brève période d’unipolarisme américain, s’est mis en place progressivement un système d'interactions non-hiérarchiques, où le parcours incertain de l’Amérique a privé le monde d’un leader incontesté, capable d’imposer un arbitrage planétaire. Ce phénomène signale l’entrée dans une phase de transition systémique et d’alternance du leadership. Dès lors, l’étude de l’hégémonie et des cycles hégémoniques devient l’objet primordial des préoccupations de la communauté des politistes, car cette étude a des répercussions sur les réalités et les métamorphoses de la puissance. Elle influe directement sur les stratégies qui concourent à la maintenir et à la préserver, ou en revanche, à la contraster et à l'abattre.
Ainsi, si le concept de l’hégémonie peut être reconduit au paradigme de l’acteur rationnel et sa conduite est susceptible d’être abordée en termes de fonction, de conjoncture et de système, l'étude de la puissance peut se prévaloir aujourd'hui de deux approches théoriques, réaliste et transnationale, dont la divergence relativise leur portée explicative.
REALISME ET INTERDEPENDANCE EN LEUR PORTEE EXPLICATIVE
Dans le cadre de cette opposition, l'approche réaliste présente les traits suivants :
- la prééminence du politique et l'importance de la rivalité de puissance au cœur d'un environnement hétérogène
- l'hégémonie comme principe régulateur « hard » de l'ordre global.
- l’anarchie, comme univers de relations dépourvues d’autorité centrale.
- l’existence de structures et d’institutions intermédiaires, conditionnant la liberté d’action des États.
- l'omniprésence virtuelle du conflit, comme facteur de remodelage de la scène planétaire, étatique et sub-étatique.
- la théorie, comme modèle explicatif prééminent et souhaitable.
En faveur des approches transnationales et de la conception de l'hégémonie comme pouvoir d'influence on repère les paradigmes qui suit:
- la théorie de l’interdépendance et du social international
- l’autonomie croissante des flux, échappant au contrôle des États vis-à-vis des acteurs de régulation traditionnels encore soumis à la sphère inter-étatique.
- le recours à la société civile et à ses acteurs
- la dialectique contradictoire de la globalisation et du localisme.
- la décentralisation des juridictions et des activités, en dehors des cadres de la souveraineté territoriale, apparaissant sous forme de réseaux régionaux.
- la sociologie et non la théorie, comme cadre d’intelligibilité envisageable.
C'est dans un pareil contexte que peuvent se comprendre les relations politiques de la scène internationale actuelle, relations dont la spécificité ne s’impose pas de manière évidente et dont la fragmentation cognitive découle d’une absence d’accord sur les centres d'intérêt essentiels, ou sur la signification à assigner aux phénomènes.
Ainsi l'autonomie de chaque discipline renvoie à des enjeux politiques qui demeurent des sources d'inspiration contradictoires pour les analystes et les hommes d’État.
On peut conclure que l'hégémonie est le pivot analytique vers lequel convergent de manière contradictoires les grands courants du réalisme et de l'interdépendance. Ainsi, l'utopie d'un gouvernement mondial ou d'une autorité supranationale efficace et contraignante résulte paradoxalement de l'égoïsme et de la rationalité de l’État, comme acteur virtuellement hégémonique. Dans cette hypothèse, la logique des « régimes internationaux » et de gouvernance globale, ne peuvent être compris que comme tentatives d'explication d'un ordre international non-hégémonique. Afin d'approfondir la conception de l'hégémonie et sa portée, il nous semble nécessaire de procéder par des essais de définition conceptuels.
GEIST, ELITES ET LEADERSHIP
L'hégémonie apparait comme l’imprégnation de la puissance sociétale par le pays qui l’incarne et désigne historiquement la créativité globale d’une nation ou d’un peuple et, plus en profondeur, la réalisation de son « Geist ». Le leadership frappe par la capacité (ou l'incapacité) de direction d'une oligarchie ou d’une élite et se focalise autour de l'art d'orienter l'ensemble de l'agir collectif par un « sens » (idée historique, cause universelle ou grandes conceptions du monde).
Il faut conclure que le concept d'hégémonie est de nature sociologique et téléologique, celui de leadership de nature politique et stratégique. Le premier tient à l'épanouissement d'une société par la puissance. Le deuxième à l'affirmation d'une volonté par les rivalités de pouvoir et par la maîtrise d'un dessein. De surcroit, le leadership est un art de la contingence, l'hégémonie une permanence culturelle assurée par la durée.
L’objectif primordial du leadership est de devancer les rivaux, de prendre des risques, de calculer les avantages et les coûts et, in fine, d'imposer un ordre. Le leadership se propose comme une entreprise aventureuse car il définit une ligne directrice et à risque, en fixe les modalités et les moyens et force un ensemble organisé à s'y tenir.
L'hégémonie exprime une évidence dynamique objective et constitue le socle du leadership. Ce dernier en suggère et élabore le mouvement et l'action, la prééminence et la hiérarchie. Du point de vue interne, le leadership est la projection vers l'extérieur d'une ambition personnelle ou de groupe, tendanciellement individualiste et anti-égalitariste. Sa raison d'être est l'arbitrage, son horizon des objectifs larges, sa force entraînante une forte capacité de mobilisation sociale, sa finalité la confiance interne et internationale, son but ultime le succès, la victoire ou la gloire.
Or, puisque la lutte et la rivalité entre les unités politiques comportent toujours une dimension idéologique, la lutte pour l'Hégémonie se configure, dans la plupart des cas, comme une affirmation de primauté culturelle, informationnelle et militaire. Or la primauté culturelle est perçue en termes d’attirance pour un certain « mode de vie » et comme modèle d'excellence dans les domaines éducatif et scientifique. La primauté militaire s'oppose à la liberté inconditionnelle des rivaux et apparaît très peu conforme aux aspirations originelles de liberté des autres unités politiques. Elle se heurte ainsi au respect conservateur de la légalité internationale dans l'exercice du pouvoir dominant, respect qui est souvent bafoué et qui n'apparaît ni évident ni fréquent au cours de l'histoire
RIVALITÉ SYSTÉMIQUE
Le rival systémique d'Hégémon est, du point de vue stratégique, son «peer compétiteur» (Carthage pour Rome, Sparte pour Athènes, l'URSS pour les USA, la Chine pour l'Occident). C'est l'acteur montant qu'il faut isoler, diviser, encercler ou rabaisser. Le modèle de conflit d'Hégémon est systémique et global et son référent culturel est une civilisation. En effet est hégémonique l'acteur historique qui a universalisé ses intérêts et ses valeurs. L'Hégémonie n'est pas l'impérialisme comme domination directe, occupation territoriale et confiscation de la souveraineté, mais l’action d’endiguement qui assure la poursuite de buts communs et coopte d'autres alliés dans l’isolement puis dans l’élimination de l’adversaire.
VISION REGIONALISEE DE LA SECURITE ET POLITIQUE D’ALLIANCES
« Hégémon » fut la désignation, dans le monde hellène, du « commandement suprême » et d'une domination consentie. L'élément primordial d'une hégémonie historique est sa suprématie militaire, le « sine qua non » de son affirmation et de sa durée. Cette suprématie a deux fonctions : dissuader et contraindre. La force militaire qui lui est consubstantielle doit être écrasante, soit pour décourager un rival ou une coalition de rivaux, soit pour les vaincre et les punir, en cas d'échec de la dissuasion, face à une menace imminente ou en situation d'affrontement inévitable.
La supériorité militaire doit se traduire en une vision régionalisée de la sécurité et donc en une géopolitique d'alliances ou de coalitions (Serge Sur), appuyées sur des bases militaires, mobilisables en cas de besoin. Toute régionalisation de la sécurité ne doit pas contredire à la logique des équilibres mondiaux, ni aux intérêts stratégique et géopolitiques d'Hégémon.
La vision régionalisée de la sécurité est assurée aujourd'hui :
– par une diplomatie totale et par une série d'outils comme les institutions supranationales ou régionales de sécurité (ONU, OSCE, UEA, OTCS, etc) ou par des instances de coopération multinationales (BM, FMI, OIC).
– par la transformation de la puissance matérielle ou classique en puissance immatérielle et globale et, par conséquent, par l'intelligence et le Linkage vertical et horizontal qui constituent des transformations structurelles de l'hégémonie.
- par une association de la diplomatie et de la stratégie de la menace, allant jusqu’au risque nucléaire- Brinkmanship-
– par l'importance acquise par le « soft power » comme producteur de « sens » et comme facteur d'unification des valeurs et des pratiques sociales innovantes (l’éducation, la science et la culture).
L'idée de convertir le pouvoir militaire en pouvoir civil est confiée, en situations d'exception, à la légitimité acquise par l'exercice de la coercition et de la force, qui deviennent sur le long terme les sources du droit. La mesure de l'hégémonie interne a comme critère de référence l'asymétrie de statut, l'obéissance critique ou l'adhésion enthousiaste. Celle du pouvoir international, la supériorité de puissance et la capacité de structurer le champ d'action des autres unités politiques, par la définition unilatérale des règles de conduite et par le pouvoir de sanction qui leur est assigné. Lorsque l'hégémonie se prévaut du consensus et d'un système de légitimité fondé sur la culture ou sur le ralliement à un « modèle de vie », la force de l'hégémonie se mesure à la créativité d'une société et à sa capacité à proposer des images, des plans et des projets d’amélioration et d’ordre aux autres forces sociales et à d'autres unités politiques. Elle apparaît ainsi comme « Soft Power » (Joseph Nye).
CRISE UKRAINIENNE, CONFLIT LIMITE OU AFFRONTEMENT GLOBAL
La plupart des analystes occidentaux, interrogés sur les issues des tensions et des menaces que se renvoient les unes les autres à propos de la crise ukrainienne, justifient leurs prévisions sur le sens et les intérêts du président de la Fédération de Russie, évoquant l’hypothèse d’une gesticulation et faisant appel à la logique de l’acteur rationnel et donc au poids de l’aléas encouru. Ils en tirent la conviction que la montée en puissance de troupes et de matériel militaire obéit à une pression psychologique permettant d’obtenir les objectifs poursuivis, pesant sur les négociations diplomatiques et sans combattre. A l’opposé de cette hypothèse, l’argument contraire prétend évoquer le risque d’un conflit global et dans la faible possibilité de contenir et limiter la guerre en Europe du Sud- Est. La raison en est la menace à la sécurité existentielle de la Russie, à proximité de ses frontières, portée par l’OTAN et la puissance globale dominante, les Etats-Unis. Un conflit indirect, par personne interposé, conçu dans le but de donner une double leçon, aujourd’hui à la Russie et aux européens et demain à la Chine. En complément de la thèse théorique de Gilpin, selon lequel on peut parvenir à une stabilité globale par une guerre locale, G.Modelski fait intervenir une hypothèse concurrente, celle des cycles longs, afin d’expliquer la durée des phénomènes hégémoniques ( 80-100ans ) et décrit le lien qui existe entre le cycle des guerres, la suprématie économique et les aspects politiques et économiques du leadership mondial. En ce sens les guerres seraient des phénomènes physiologiques et naturelles du système international qui interviennent à intervalles réguliers. En effet, depuis 1500 et le début de l’ère moderne, les guerres font partie à chaque fois d’un système global plus large du simple système régional et impliquent des répercussions non seulement stratégiques mais systémiques et civilisationnelles ;
Ainsi les acteurs majeurs ne peuvent faire retrait à l’occasion d’un pari ou d’une grande aventure historique. Ils doivent jouer le jeu qu’ils ont entrepris et qui les portent, par une escalade systémique, à s’engager dans une épreuve de plus en plus périlleuse. Les considérations locales et d’ordre tactique portent en soi -l’horloge de l’histoire et poussent les facteurs de la stratégie à ramifier en direction de la grande politique et à concerner le système dans son ensemble.
Le danger vient alors de la transformation du conflit local en affrontement global, car l’acteur hégémonique ne peut jouer une pièce importante, restant cachés derrière les rideaux de l’Histoire et les frontières de la menace.
Bruxelles-Bucarest, 23 Décembre 2021
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Visite de Raisi à Moscou : le pacte russo-iranien
Visite de Raisi à Moscou : le pacte russo-iranien
Alexandre Douguine
Source: https://www.geopolitica.ru/article/vizit-raisi-v-moskvu-russko-iranskiy-pakt
La visite du président iranien Ibrahim Raisi en Russie se déroule dans des circonstances particulières. La Russie se trouve dans une confrontation sans précédent avec l'Occident, jamais atteinte au cours des dernières décennies. L'Iran se trouve dans une situation similaire depuis la révolution de juillet, qui était strictement dirigée contre la gestion externe du pays par l'Occident. Cela prédétermine le rapprochement objectif entre les deux pays, qui a été entravé à la fois par la position pro-occidentale de la sixième colonne en Russie, qui a saboté le développement du partenariat russo-iranien, notamment dans le domaine économique et financier, et par les orientations de politique étrangère des réformateurs iraniens, qui tentaient contre vents et marées (et sans succès!) de rétablir la coopération avec les États-Unis.
Aujourd'hui, ces deux obstacles ont été objectivement levés : dans une situation de forte escalade dans les relations entre Moscou et l'OTAN - qui sont en fait au bord d'un affrontement militaire direct - la sixième colonne en Russie s'est littéralement mordue la langue ou a même commencé à se déguiser en "patriotes". En Iran, en revanche, les réformistes ont perdu les élections et un représentant de l'aile conservatrice est devenu président, poursuivant strictement la ligne originelle de la révolution iranienne. A l'égard de l'Occident, et surtout des Etats-Unis, cette ligne a toujours été plus que tranchante. On peut se rappeler les mots de l'Imam Khomeini, leader de la Révolution de Juillet: "Si vous avez un mauvais pressentiment dans votre âme, et que des pensées noires et des doutes vous rongent, tournez votre visage vers l'Occident et criez : maudite soit l'Amérique !".
Dans la Russie d'aujourd'hui, l'humeur est plus ou moins la même.
Et c'est dans cet environnement que se déroule la visite du président iranien en Russie. Son invitation à s'adresser à la Douma est symbolique - une occasion sans précédent.
Ainsi, sous nos yeux, l'alliance russo-iranienne, retardée depuis de nombreuses décennies, mais attendue depuis longtemps et testée par l'alliance militaire en Syrie, acquiert désormais une expression visible.
Il est important de rappeler qu'en matière de stratégie internationale, la Russie et l'Iran ont beaucoup en commun. Tout d'abord, la Russie et l'Iran défendent un monde multipolaire. Il est multipolaire, non bi-polaire et non "a-polaire". Dans un tel monde, il existe déjà au moins trois pôles tout à fait indépendants et souverains - l'Occident, la Russie et la Chine. L'ampleur de la civilisation islamique et même de sa partie chiite, dont la tête de pont est un Iran souverain, est telle qu'elle aspire clairement au rôle de devenir un autre pôle, voire à constituer plusieurs nouveaux pôles. La Russie y a un intérêt vital, car tout nouveau pôle constituerait un fait de monde supplémentaire à articuler dans l'opposition à l'hégémonie occidentale et aux tentatives désespérées des États-Unis de sauver à tout prix - même au prix d'une guerre nucléaire ! - un ordre mondial unipolaire et mondialiste. La Russie a un besoin vital d'alliés dans le monde islamique. Une grande puissance comme l'Iran, avec une position résolument anti-occidentale et une énorme influence dans le monde chiite et dans la région de l'Asie centrale en général, est l'atout le plus important. Il est donc facile de comprendre l'importance de la visite de M. Raisi en Russie. Il ne s'agit pas d'un événement protocolaire de routine, mais du début d'un partenariat stratégique à part entière, qui a été repoussé pendant si longtemps.
Une alliance à part entière avec l'Iran offre des possibilités uniques pour la stratégie russe, notamment l'accès aux mers chaudes, tant souhaité par les analystes géopolitiques russes depuis l'empire des Tsars jusqu'à l'Union soviétique. La simple possibilité d'une base navale russe dans le golfe Persique provoquerait une crise cardiaque chez les politiciens atlantistes. Nous envisageons à juste titre de placer nos bases militaires à Cuba, au Nicaragua et au Venezuela, mais le golfe Persique est la clé non seulement du Moyen-Orient, mais aussi de la sécurité de toute l'Eurasie. Je le répète: Téhéran est tout à fait mûr pour discuter de tels projets, et le principal obstacle à leur développement, du moins jusqu'il y a peu de temps, a été précisément les agents d'influence occidentaux au sein du pouvoir russe, qui ont constamment saboté l'alliance russo-iranienne.
À plusieurs reprises, il a été proposé que l'Iran passe au rouble, au rial iranien ou à d'autres monnaies pour éviter le système du dollar. Il est grand temps de mettre cela en pratique, en ignorant les cris des libéraux russes. Nous sommes déjà à la veille de nouvelles sanctions économiques et nous devrions avoir une longueur d'avance. C'est la bonne chose à faire, même si, finalement, aucune sanction n'est imposée.
Le partenariat énergétique doit être poursuivi et développé - comme dans le cas de la centrale nucléaire de Bushehr. Nous sommes bien sûr contre la prolifération nucléaire, mais l'Occident fait souvent des exceptions pour ses proches alliés - autrefois le Pakistan, et encore Israël. Devrions-nous, nous aussi, fermer les yeux sur certains développements iraniens dans ce domaine ? L'allié de Washington, Israël, le peut, mais l'allié de la Russie, l'Iran, ne le peut pas ? Pourquoi, en effet ?
La Russie et l'Iran ont également partagé des défis communs concernant l'arrivée au pouvoir des Talibans (une organisation interdite dans la Fédération de Russie) en Afghanistan. Les talibans (une organisation interdite dans la Fédération de Russie) sont des sunnites radicaux, intolérants à l'égard de l'islam chiite et de l'islam soufi traditionnel - même pour les Pachtounes. Cela crée des problèmes potentiels pour l'Iran. La Russie, quant à elle, est attaquée en raison de la probabilité qu'une nouvelle vague d'islam radical se propage en Asie centrale, notre zone de responsabilité. C'était manifestement l'intention de l'administration de l'atlantiste Biden qui a délibérément laissé l'Afghanistan aux Talibans, interdits en Russie. La Russie, de concert avec l'Iran - ainsi qu'avec le Pakistan, qui cherche à se rapprocher de Moscou, et la Chine - devrait élaborer sa propre feuille de route pour l'Afghanistan : établir une relation constructive avec le gouvernement actuel, mais aussi éviter les excès et contrecarrer les activités terroristes et extrémistes dans la région.
Téhéran s'inquiète de l'activisme d'Ankara en Asie centrale et, en particulier, de son initiative de créer l'Organisation des États turcs. C'est compréhensible, mais peut-être que la réponse n'est pas de protester, mais de développer un projet symétrique, celui d'organiser une conférence des "nations iraniennes", par exemple à Douchanbé, où inviter non seulement les Perses, les Lurs et les Tadjiks, mais aussi les Pachtounes, les Baloutches, les Ossètes, les Kurdes, les Talyshs et d'autres ressortissants de pays ou de régions de langue iranienne. Moscou pourrait faire de même - en convoquant un congrès des peuples slaves. L'initiative turque, bien que culturellement légitime, se retrouverait alors dans un plus vaste contexte de projets similaires, ce qui mettrait fin à sa dimension géopolitique douteuse (très probablement imposée par les structures de pouvoir anglo-saxonnes en Turquie même).
Aujourd'hui, Moscou et Téhéran discutent d'un ensemble de projets de transport communs, à commencer par la mer Caspienne, où un énorme hub de transport maritime est en cours de déploiement à Astrakhan, conjointement au projet ferroviaire Nord-Sud. Un projet grandiose de transport nord-sud unirait l'Eurasie le long du méridien - encore une fois jusqu'au golfe Persique et à l'océan Indien, ce qui serait - positivement ! - et, dans un sens, complémentaire aux initiatives de transport turco-azerbaïdjanaises et s'inscrirait parfaitement dans le plan chinois One Road, One Belt étendu à l'échelle de la Grande Eurasie. Nous ne devrions pas nous indigner de ce que font les autres, mais faire nous-mêmes quelque chose d'important et d'utile.
La Russie et l'Iran ont un terrain d'entente au Moyen-Orient presque partout. En Syrie, c'est évident : Assad, la Russie et l'Iran ont un ennemi commun, qui a été largement vaincu grâce à nos efforts conjoints. L'Irak est à l'ordre du jour dans un avenir proche. Avec le départ des forces américaines, tôt ou tard, il est important de commencer à réfléchir à la relance de cette grande puissance régionale dont la population est majoritairement chiite (arabe), où les Kurdes iranophones jouent un rôle important et qui entretient traditionnellement de bonnes relations amicales avec la Russie. Moscou et Téhéran devraient assumer la responsabilité de la reconstruction de l'Irak. Bien sûr, cela ne doit pas exclure le géant économique qu'est la Chine ni la Turquie, stratégiquement importante. Mais l'Occident peut et doit être exclu, car c'est nécessaire. Ils ont ruiné le pays et sont incapables d'y instaurer un quelconque ordre (le plus probable est qu'ils n'allaient pas le faire). La seule chose qui leur reste à faire est de s'en aller, honteux et avec des regards de haine dans le dos.
La guerre au Yémen, où une autre force régionale importante est impliquée - l'Arabie saoudite, rival traditionnel de l'Iran - est également à l'ordre du jour. Avec la Russie, en revanche, Riyad a récemment cherché à établir des relations constructives. Cela rend la position de Moscou unique en ce qui concerne le conflit au Yémen également. Les Saoudiens soutiennent un camp, les Iraniens l'autre, et la Russie, qui entretient de bonnes relations avec les deux, se trouve dans une position optimale pour promouvoir une paix rapide.
La visite de M. Raisi s'inscrit dans un nouvel environnement géopolitique. C'est pourquoi on peut en attendre des résultats réellement révolutionnaires.
10:53 Publié dans Actualité, Eurasisme, Géopolitique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, politique internationale, géopolitique, russie, iran, eurasie, eurasisme, moyen-orient | | del.icio.us | | Digg | Facebook
jeudi, 20 janvier 2022
Le plan américain pour un Afghanistan en Europe & Que vise la stratégie américaine en Ukraine?
Deux textes sur les dangers qui pointent aujourd'hui en Ukraine
Le plan américain pour un Afghanistan en Europe
par Manlio Dinucci
Source : The Manifesto & https://www.ariannaeditrice.it/articoli/il-piano-usa-di-un-afghanistan-dentro-l-europa
Des soldats en tenue de combat et des véhicules de combat blindés ont été déployés par la Suède à Gotland, l'île de la mer Baltique située à 90 km de sa côte orientale. Le ministère de la défense affirme avoir agi ainsi pour défendre l'île contre les navires de débarquement russes menaçants qui traversent la mer Baltique. Ainsi, la Suède contribue également, en tant que partenaire, à la campagne frénétique des États-Unis et de l'OTAN qui, en inversant la réalité, présente la Russie comme une puissance agressive se préparant à envahir l'Europe.
À 130 km à l'est de Gotland, la Lettonie est en alerte, ainsi que la Lituanie et l'Estonie, contre l'ennemi inventé qui est sur le point d'envahir. En guise de "défense contre la menace russe", l'OTAN a déployé quatre bataillons multinationaux dans les trois républiques baltes et en Pologne. L'Italie participe au bataillon en Lettonie avec des centaines de soldats et des véhicules blindés.
L'Italie est également le seul pays à avoir participé à toutes les missions de "police du ciel" de l'OTAN à partir de bases situées en Lituanie et en Estonie, et le premier à utiliser des avions de combat F-35 pour intercepter des avions russes en vol dans le couloir aérien international au-dessus de la Baltique. Les F-35 et autres avions de chasse déployés dans cette région proche du territoire russe sont des appareils dotés d'une double capacité conventionnelle et nucléaire.
Cependant, les trois républiques baltes ne se sentent pas suffisamment "protégées par la présence renforcée de l'OTAN". Le ministre letton de la défense, Artis Pabriks, a demandé une présence militaire américaine permanente dans son pays : les forces américaines - dont les experts expliquent qu'elles sont basées sur un scénario de film hollywoodien - n'arriveraient pas à temps d'Allemagne pour arrêter les forces blindées russes qui, après avoir submergé les trois républiques baltes, les couperaient de l'Union européenne et de l'OTAN, en occupant le corridor de Suwalki entre la Pologne et la Lituanie.
L'Ukraine, partenaire mais de facto déjà membre de l'OTAN, a le rôle de premier acteur en tant que pays attaqué. Le gouvernement dénonce, sur sa parole d'honneur, qu'il a été frappé par une cyberattaque, attribuée bien sûr à la Russie, et l'OTAN se précipite, avec l'UE, pour aider l'Ukraine à combattre la cyber-guerre. Washington dénonce le fait que l'Ukraine est désormais encerclée de trois côtés par les forces russes et, en prévision du blocage des livraisons de gaz russe à l'Europe, se prépare généreusement à les remplacer par des livraisons massives de gaz naturel liquéfié américain.
L'attaque russe - informe la Maison Blanche sur la base de nouvelles dont la véracité est garantie par la CIA - serait préparée par une opération false flag : des agents russes, infiltrés dans l'est de l'Ukraine, mèneraient des attaques sanglantes contre les habitants russes du Donbass, attribuant la responsabilité à Kiev comme prétexte à l'invasion. La Maison Blanche ne se souvient pas qu'en décembre, le ministre russe de la Défense, Sergei Shoigu, a dénoncé la présence de mercenaires américains munis d'armes chimiques dans l'est de l'Ukraine.
Les États-Unis - rapporte le New York Times - ont déclaré aux Alliés que "toute victoire rapide de la Russie en Ukraine serait suivie d'une insurrection sanglante semblable à celle qui a contraint l'Union soviétique à se retirer d'Afghanistan" et que "la CIA (secrètement) et le Pentagone (ouvertement) la soutiendraient". Les États-Unis - rappelle James Stavridis, ancien commandant suprême des forces alliées en Europe - savent comment s'y prendre : à la fin des années 1970 et dans les années 1980, ils ont armé et entraîné les moudjahidines contre les troupes soviétiques en Afghanistan, mais "le niveau de soutien militaire américain à une insurrection ukrainienne ferait passer pour une bagatelle ce que nous avons fait en Afghanistan contre l'Union soviétique".
Le dessein stratégique de Washington est évident : précipiter la crise ukrainienne, délibérément provoquée en 2014, afin de forcer la Russie à intervenir militairement pour défendre les Russes du Donbass, pour aboutir à une situation similaire à celle de l'Afghanistan dans laquelle l'URSS s'est enlisée. Un Afghanistan à l'intérieur de l'Europe, qui provoquerait un état de crise permanent, à l'avantage des États-Unis qui renforceraient leur influence et leur présence dans la région.
Que vise la stratégie américaine en Ukraine ?
par Fabio Falchi
Source : Fabio Falchi & https://www.ariannaeditrice.it/articoli/a-che-mira-la-strategia-americana-in-ucraina
Quel est l'objectif de la stratégie américaine en Ukraine ? Il peut y avoir de nombreuses raisons pour lesquelles les États-Unis exercent une pression aussi forte sur la Russie. Certes, pour l'Amérique, afin de justifier son hégémonie sur l'Europe, il est nécessaire que la Russie soit considérée comme un ennemi dangereux du Vieux Continent.
Néanmoins, il faut également garder à l'esprit que plusieurs analystes et politiciens américains sont convaincus qu'il est possible aujourd'hui de répéter, mutatis mutandis, ce qui s'est passé dans les années 1980, lorsque le bras de fer entre l'Amérique et l'Union soviétique s'est terminé par la défaite de l'Union soviétique.
En d'autres termes, on pense que la Russie de Poutine est lourdement pénalisée par les sanctions économiques, entourée de voisins hostiles et contrainte à des dépenses militaires excessives en raison des politiques de Poutine, de sorte qu'il suffirait d'une "pression" continue contre la Russie pour provoquer une crise sociale et politique qui obligerait le Kremlin à jeter l'éponge.
En bref, on pense que la pression exercée sur la Russie pourrait conduire à un changement de régime, car la Russie ne peut pas risquer une confrontation avec l'OTAN ni "réagir militairement" aux provocations de l'Ukraine sans subir de nouvelles sanctions, qui auraient des conséquences désastreuses pour l'économie russe. De ce point de vue, Poutine serait pratiquement "tombé dans un piège", également parce qu'il ne peut pas compter sur la Chine pour gagner la partie qui se joue en Europe de l'Est (une zone géopolitique, par ailleurs, très différente de celle du Moyen-Orient, également du point de vue militaire).
Toutefois, la comparaison entre l'Union soviétique des années 80 et la Russie de Poutine est sans fondement. L'Union soviétique des années 1980 était peut-être plus forte militairement que la Russie d'aujourd'hui, mais c'était une puissance en déclin, déchirée par des conflits internes et des "poussées centrifuges" de toutes sortes que Moscou n'était plus en mesure de contrôler. C'est donc un empire qui s'effondre, et non un État qui se défend contre une agression extérieure ou, en tout cas, contre une menace étrangère. En outre, il est très difficile de croire que les conditions sont désormais réunies pour l'établissement d'un régime pro-occidental en Russie. Il existe sans aucun doute des cinquièmes colonnes pro-occidentales en Russie, mais à l'heure actuelle, elles ne comptent pas ou peu sur le plan politique et social.
Par conséquent, coincer Poutine - en supposant que Washington y parvienne - signifie coincer la Russie elle-même, c'est-à-dire à la fois les Russes qui soutiennent Poutine et la grande majorité des Russes qui sont les opposants politiques de Poutine. Et quiconque connaît l'histoire de la Russie devrait savoir comment celle-ci "réagit" lorsque sa sécurité nationale est en jeu, ou croit qu'elle est en jeu.
14:51 Publié dans Actualité, Affaires européennes, Géopolitique | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : ukraine, russie, europe, affaires européennes, politique internationale, géopolitique, actualité | | del.icio.us | | Digg | Facebook
L'histoire est finie et l'apocalypse a disparu
L'histoire est finie et l'apocalypse a disparu
par Marcello Veneziani
Source : Marcello Veneziani & https://www.ariannaeditrice.it/articoli/la-storia-e-finita-ma-l-apocalisse-e-svanita
Le temps de l'histoire est terminé, mais pas celui de la prophétie, qui accompagne généralement les effondrements historiques et ouvre la porte aux visions apocalyptiques. Sans le savoir, nous vivons dans la posthistoire. L'histoire ayant cessé d'exister, et avec elle la mémoire historique, la passion pour l'histoire, et la pertinence historique des événements a été remplacée par une pertinence globale, nous vivons dans cet espace posthumain indéfinissable.
La posthistoire est une définition que j'ai trouvée il y a de nombreuses années dans un poème de Pier Paolo Pasolini. Ce fut comme un coup de tonnerre de lire les vers de Un solo rudere, récités par Orson Welles dans La Ricotta et rassemblés dans Poesie in forma di rosa. Je l'ai mentionné dans l'un de mes livres du dernier millénaire et je l'ai souvent cité au fil des ans, le considérant comme le manifeste douloureux de la tradition mourante. "Je suis une force du passé. Mon amour n'existe que dans la tradition. Je viens des ruines, des églises, des retables, des villages oubliés... où les frères ont vécu". Comme lui, j'ai erré "le long de la Tuscolana comme un fou, le long de la voie Appienne comme un chien sans maître" et je me sentais comme un survivant, un "foetus adulte" "né des entrailles d'une femme morte", "à l'extrême limite d'un âge enfoui". Moi aussi, j'ai considéré le crépuscule romain "comme les premiers actes de la posthistoire". La voici, l'après-histoire. Un historien professionnel, Roberto Pertici (Dall'Ottocento alla Dopostoria, ed. Studium), lui a consacré le titre pasolinien d'un livre, en approfondissant certains thèmes et personnalités des deux derniers siècles. La tâche de l'historien, dit-il, est de "chercher les frères qui ne sont plus là", selon l'expression poétique de Pasolini ; et cela place l'historien parmi les forces du Passé, à l'avènement de la Posthistoire.
Mais qu'est-ce que la posthistoire ? Ce n'est pas la fin des événements, des tragédies collectives, des grands bouleversements d'époque, qui se poursuivent encore. Ce n'est pas la fin de l'histoire au sens hégélien ou marxien du terme. C'est la perception d'être entré dans une étape qui ne connaît plus de liens vivants avec le passé et donc avec l'avenir. Un temps suspendu et permanent, qui n'entre dans aucune séquence, n'a pas d'héritage à transmettre, et procède par force d'inertie. Il ne fait pas de distinction entre la chronique et l'histoire, entre la réalité et la représentation virtuelle, entre le réel et la publicité. Nous vivons l'histoire à papa, à distance, en distanciel, pour le dire en jargon scolaire pandémique. La posthistoire est l'avènement de l'infini du présent global.
Cette année est le centenaire de la naissance de Pasolini, mais l'occasion est superflue pour se souvenir de lui puisque Pasolini n'a jamais disparu, il est sans cesse cité, remis en question. En revanche, ce qui a disparu chez Pasolini, c'est sa vision apocalyptique ; il n'a laissé aucun héritier ou continuateur de cette pensée prophétique et de ses dénonciations sincères.
Après Pasolini, cependant, il y a eu d'autres écrivains apocalyptiques, mais ils se so,nt aventurés dans des territoires auxquels Pasolini n'appartenait pas, plus proches de l'esprit religieux. Pour me limiter à notre pays, je citerais au moins trois autres personnes qui sont mortes bien des années après Pasolini. Ces auteurs ont été définis par les critiques catholiques comme "la bande des gnostiques" des éditions Adelphi.
Guido Ceronetti était un apocalyptique, même si son apocalypse n'avait pas une connotation historique-civile prépondérante comme celle de Pasolini, mais une connotation biblique-littéraire. Aussi anti-moderne que Pasolini, sa vision apocalyptique devient parfois grotesque et même drôle, un peu comme la prose de Cioran. Alors que Pasolini décrivait les ruines de l'Italie, Ceronetti a consacré un livre à Italoshima, la péninsule détruite comme par une bombe atomique, comme Hiroshima.
Apocalyptique, mais dans une version plus étroitement liée au christianisme et à la tragédie de son retrait du monde, fut Sergio Quinzio, théologien et bibliste, qui a consacré son regard à la religion de la Croix au moment de la mort de Dieu, dans l'histoire et dans la vie contemporaine. Dans sa vision prophétique, Quinzio raconte la faiblesse de Dieu, son silence et sa défaite dans le monde, et préfigure la disparition de l'Église. Commentant l'Apocalypse, Quinzio considère que le salut de l'humanité est désespéré.
Elémire Zolla, écrivain et spécialiste des religions, des traditions initiatiques et des mystiques, était aussi un apocalyptique. Il était l'apocalyptique par excellence, comme le mentionne Umberto Eco dans son célèbre essai Apocalyptiques et intégrés, en même temps que Theodor Adorno et l'École de Francfort. Zolla était le chef de file de nos apocalypstes face à la société séculaire de masse. Traditionnel, il cherche néanmoins à se distinguer des auteurs traditionalistes, tels que René Guénon et surtout Julius Evola, ainsi que des traditionalistes catholiques.
Pasolini, Ceronetti, Quinzio et Zolla étaient les quatre chevaliers de l'Apocalypse italiens. Avec leur disparition, toute trace de la pensée post-historique, prophétique et apocalyptique a été perdue. Ce qui est resté, c'est peut-être Massimo Cacciari, et en partie Giorgio Agamben, avec leur lecture du Katechon, de Dieu, du Sacré, du christianisme. Ils abordent tous deux, en dehors de la foi, le double thème de l'Église du Christ, du pouvoir temporel qui séduit et du pouvoir qui freine, retarde ou retient la ruine, c'est-à-dire le Katechon. Ils se placent devant la fin des temps, le mysterium iniquitatis et l'avènement de l'Antéchrist qui viendra séduire ceux qui sont morts dans l'âme. Mais sans révélations salvatrices.
Chez Cacciari, le mot clé de sa pensée tragique est Catastrophe plutôt qu'Apocalypse. Et de toute façon, Cacciari et Agamben sont aujourd'hui réduits à des critiques du système de santé plutôt qu'à des apocalyptiques.
La pensée apocalyptique ne semble pas avoir d'héritiers. Ni dans le camp pasolinien ni dans le camp néo-gnostique et chrétien. Non seulement l'histoire a disparu, mais aussi l'élaboration spirituelle de son deuil, la vision prophétique d'être en présence de la fin des temps, l'eschatologie et la révélation. A la fin de l'histoire, le grand final a également été supprimé. L'histoire se termine et les gens prennent des selfies.
13:55 Publié dans Actualité, Philosophie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, philosophie, posthistoire, apocalypse, pier paolo pasolini, pasolini, élémire zolla, sergio quinzio, guido ceronetti, marcello veneziani | | del.icio.us | | Digg | Facebook
Techno-géopolitique : tendances mondiales
Techno-géopolitique : tendances mondiales
Leonid Savin
Source: https://www.geopolitica.ru/en/article/techno-geopolitics-global-trends
La confrontation actuelle entre les États-Unis et la Chine révèle de nouvelles tendances dans la politique mondiale.
Dans son ouvrage classique Idéaux démocratiques et réalité, Halford Mackinder a souligné que le développement de l'économie de la Grande-Bretagne et de l'Allemagne au XIXe siècle et les actions ultérieures des gouvernements de ces pays qui ont conduit à la Première Guerre mondiale ont été influencés par la même source - il s'agit du livre d'Adam Smith La richesse des nations.
En raison d'attitudes culturelles différentes, des conclusions différentes ont été tirées et des méthodes différentes ont été utilisées. La Grande-Bretagne était une nation insulaire et utilisait sa puissance maritime pour protéger ses intérêts, souvent au détriment des peuples colonisés. Bien que l'Allemagne ait également eu des colonies dans diverses parties du monde, elle a davantage donné le ton à des projets continentaux - d'où l'émergence de l'union douanière et des projets de construction de chemins de fer, avant même les quelques aventures coloniales du Reich.
Avec le changement actuel de l'ordre technologique mondial, nous observons un phénomène similaire dans différentes régions - malgré les 30 années précédentes de mondialisation active, il y a des signes évidents de protectionnisme national tant dans les pays industrialisés que dans les États qui sont encore en train de les rattraper. Seulement, l'accent est désormais mis sur d'autres technologies.
Selon un rapport réalisé par le Boston Consulting Group et Hello Tomorrow, les technologies profondes peuvent "transformer le monde comme l'a fait Internet". Les investissements dans ce domaine aux États-Unis ont quadruplé depuis 2016 dans des secteurs tels que la biologie synthétique, les matériaux avancés, la photonique et l'électronique, les drones et la robotique, et l'informatique quantique, en plus de l'intelligence artificielle. Bien que le rapport affirme que la technologie profonde n'existe pas et qu'il n'y a qu'une approche technologique profonde [i].
Les entreprises de technologie profonde ont quatre caractéristiques communes : elles sont orientées vers les problèmes (elles ne commencent pas par la technologie pour ensuite chercher des opportunités ou ce qui peut être résolu) ; elles sont à l'intersection des approches (science, technologie et design) et de la technologie (96 % des entreprises de technologie profonde aux États-Unis utilisent au moins deux technologies, et 66 % utilisent plus d'une technologie avancée) ; elles sont centrées autour de trois clusters (matière et énergie, calcul et cognition, et détection, c'est-à-dire capteurs et mouvement) ; et elles sont centrées sur la technologie profonde. Ils sont centrés sur trois groupes (matière et énergie, calcul et cognition, et détection, c'est-à-dire capteurs et mouvement) et vivent dans un écosystème complexe ; 83 % d'entre eux fabriquent un produit comportant un composant matériel, notamment des capteurs et de gros ordinateurs.
Elles font partie d'une nouvelle ère industrielle. Ces projets entrepreneuriaux reposent sur un écosystème de participants étroitement liés. Elles impliquent des centaines ou des milliers de personnes dans des dizaines d'universités et de laboratoires de recherche. Par exemple, Moderna et l'alliance BioNTech avec Pfizer ont utilisé le séquençage du génome pour mettre sur le marché leurs vaccins COVID-19 respectifs en moins d'un an.
Ces entreprises ont bénéficié des efforts de nombreuses autres personnes issues du monde universitaire, de grandes entreprises et du soutien du secteur public. Toutes ces entreprises, ainsi que les États-nations, sont des acteurs majeurs de cette vague de grandes technologies qui est déjà en cours aux États-Unis, en Chine et dans d'autres pays, ainsi que dans l'UE et ses États membres [ii].
Quant aux technologies, les composants nécessaires à leur mise en œuvre, comme les métaux des terres rares et les semi-conducteurs, ainsi que les produits eux-mêmes, comme l'informatique quantique et l'intelligence artificielle, les systèmes sans pilote et automatisés - voilà ce qui est en jeu dans la confrontation géopolitique des grandes puissances (et pas seulement).
La formule de Mackinder pour le pouvoir sur le monde peut désormais être interprétée de manière quelque peu différente. Le maître du monde n'est pas celui qui contrôle l'Europe de l'Est, mais celui qui contrôle les technologies critiques et nouvelles.
L'affrontement entre la Chine et les États-Unis
En octobre 2021, le bureau du directeur du renseignement national des États-Unis a publié un certificat sur les nouvelles technologies critiques. On peut y lire qu'"avec un terrain de jeu technologique plus équitable, prévu à l'avenir, les nouveaux développements technologiques émergeront de plus en plus de plusieurs pays et avec moins d'avertissement préalable. Si la démocratisation de ces technologies peut être bénéfique, elle peut aussi être déstabilisante sur le plan économique, militaire et social.
C'est pourquoi les avancées dans des technologies telles que l'informatique, la biotechnologie, l'intelligence artificielle et la fabrication méritent une attention particulière pour anticiper les trajectoires des technologies émergentes et comprendre leurs implications pour la sécurité" [iii]. Les agences de renseignement américaines accordent une attention particulière aux semi-conducteurs, à la bioéconomie, aux systèmes autonomes et aux ordinateurs quantiques.
Auparavant, en juillet 2021, le président américain Joe Biden a publié un décret sur l'encouragement de la concurrence dans l'économie américaine [iv]. Ce décret est intervenu dans le cadre de discussions sur la nécessité de dominer la force croissante des grandes plates-formes technologiques, dont le pouvoir paralyse la concurrence dans l'économie américaine, et sur la nécessité d'aider à maintenir la position des États-Unis en tant que leader technologique mondial compte tenu de la concurrence croissante de la Chine.
Dans un communiqué de presse de la Maison Blanche datant d'avril 2021, le président a reconnu l'importance du leadership dans des domaines technologiques critiques tels que les technologies sans fil et les normes de cinquième génération (5G), annonçant un nouveau partenariat public-privé entre la National Science Foundation et le ministère de la défense pour soutenir la recherche sur les réseaux et systèmes de prochaine génération [v].
Néanmoins, les chercheurs du Renewing American Innovation Project estiment que le décret soutient le leadership de la Chine dans la 5G et crée ainsi un risque inutile pour la sécurité nationale, mettant le leadership américain dans cet espace dans une position vulnérable. Dans le même temps, la Chine reconnaît à la fois le pouvoir du renforcement des droits de propriété intellectuelle (PI) pour encourager ses inventeurs, et le pouvoir des lois antitrust comme outil de politique industrielle, tout en préservant la capacité de ses propres entreprises [vi].
Les brevets sont reconnus comme l'un des seuls outils dont disposent les startups, les petites entreprises et les inventeurs pour protéger leurs idées, tandis que les grandes plateformes technologiques disposent de divers autres moyens pour protéger et monétiser leurs idées, tels que l'intégration verticale et la formation de conglomérats, qui sont les moteurs de l'économie des grandes plateformes.
Selon les recherches, c'est précisément la raison pour laquelle les grandes plateformes technologiques se sont traditionnellement opposées à l'intelligence artificielle au Congrès et dans les tribunaux, en faisant du lobbying pour défendre leur position [vii]. Les petites entreprises et les inventeurs individuels ne disposent souvent pas des investissements et des capitaux nécessaires pour traduire leurs intentions en produits et services de base à grande échelle ou pour les monétiser sur des marchés connexes.
Au contraire, ils créent souvent des prototypes, espérant trouver d'autres développeurs pour fabriquer et commercialiser leurs inventions et récupérer leur investissement en recherche et développement (R&D) en concédant des licences d'exploitation de leurs inventions à ces développeurs. Et cela est vrai non seulement pour les États-Unis, mais aussi pour d'autres pays, dont la Russie.
La tendance actuelle est que la réglementation des brevets aidera la Chine à long terme, car elle dissuadera les investissements des entreprises américaines et permettra à Pékin de prendre le leadership dans les normes critiques de la 5G (et de la future 6G).
Selon la communauté du renseignement américain, si davantage de réseaux mondiaux dans le monde fonctionnent sur Huawei et d'autres technologies chinoises, alors la Chine aura la possibilité de voler des secrets commerciaux, de collecter des renseignements et d'influencer ses concurrents en désactivant les infrastructures de communication et en punissant les critiques.
Cela peut être attribué aux politiques anti-chinoises de Washington et à la manipulation des données reflétant l'implication croissante de la Chine. Toutefois, si l'on s'en tient à des statistiques objectives, le nombre de délégués associés à des organisations chinoises participant au projet de partenariat de troisième génération (3GPP) a considérablement augmenté ces dernières années.
Ce projet, lancé en 1988, est un organisme de normalisation dont les membres sont les plus grandes entreprises de télécommunications du monde. Ayant gagné en influence au fil du temps avec l'introduction de la 4G, et maintenant de la 5G, le 3GPP s'est retrouvé au centre d'un débat géopolitique sur l'importance de la 5G pour l'économie mondiale.
Actuellement, c'est la Chine qui compte le plus grand nombre de représentants parmi les autres pays. Et en novembre 2021, Huawei possédait le plus grand portefeuille 5G et annonçait la présence du plus grand nombre de familles de brevets (un ensemble de brevets obtenus dans différents pays pour protéger une invention), devenant ainsi le leader et laissant derrière lui des acteurs tels que Qualcomm aux États-Unis, Samsung en Corée du Sud et Nokia en Finlande.
Aucune entreprise ni aucun pays ne peut combler aussi rapidement l'écart en matière de leadership technologique, bien qu'à l'heure actuelle, les États-Unis et l'Union européenne conservent leur leadership en matière de participation aux normes et à certaines technologies. Bien que le nombre de contributions et de divulgations de brevets ne soit pas un indicateur de pertinence ou de qualité, ces modèles illustrent l'investissement croissant de la Chine dans la technologie cellulaire pour combler l'écart avec ses concurrents.
Les États-Unis tentent de contrer la Chine, directement et indirectement, en créant de nouvelles initiatives avec leurs partenaires.
Le Conseil du commerce et de la technologie a été lancé lors du sommet États-Unis-UE de juin 2021 [vii], [viii].
Ses objectifs déclarés sont les suivants :
- Développer et approfondir le commerce et les investissements bilatéraux ;
- Éviter de nouveaux obstacles techniques au commerce ;
- Coopérer sur les politiques clés en matière de technologie, de questions numériques et de chaînes d'approvisionnement ;
- Soutenir la recherche collaborative ;
- Coopérer à l'élaboration de normes compatibles et internationales ;
- Faciliter la coopération en matière de politique réglementaire et de mise en œuvre ;
- promouvoir l'innovation et le leadership des entreprises européennes et américaines.
Le Conseil comprendra initialement les groupes de travail suivants, qui traduiront les décisions politiques en résultats concrets, coordonneront les travaux techniques et rendront compte au niveau politique :
- Coopération en matière de normes technologiques (y compris l'IA et l'Internet des objets, entre autres technologies émergentes) ;
- Climat et technologies vertes ;
- Chaînes d'approvisionnement sécurisées, y compris les semi-conducteurs ;
- Sécurité et compétitivité des TIC ;
- La gouvernance des données et les plateformes technologiques ;
- L'utilisation abusive de technologies menaçant la sécurité et les droits de l'homme ;
- Contrôles des exportations ;
- Contrôle des investissements ;
- Promotion de l'accès des PME aux technologies numériques et de leur utilisation ;
- les défis du commerce mondial.
Parallèlement, l'UE et les États-Unis ont mis en place un dialogue conjoint sur la politique de concurrence en matière de technologie, qui se concentrera sur l'élaboration d'approches communes et le renforcement de la coopération en matière de politique de concurrence et d'application des règles dans les secteurs technologiques.
Le 3 décembre 2021, une déclaration conjointe a été publiée par le département d'État américain et le service d'action extérieure de l'UE concernant les consultations de haut niveau sur la région indo-pacifique. Outre les déclarations sur les valeurs et les intérêts communs, notamment les tendances actuelles liées à la pandémie du coronavirus et au changement climatique, on y trouve un certain nombre d'aspects techniques, tels que les normes de travail, les infrastructures, les technologies critiques et émergentes, la cybersécurité, etc.
Il est également fait mention de l'approfondissement de la coopération avec Taïwan et de l'intégration des initiatives d'infrastructures régionales Build Back Better World et EU Global Gateway. Le premier est piloté par les États-Unis et le second par l'UE, respectivement [ix]. [Bien entendu, tout cela est fait pour contenir la Chine, y compris l'initiative Belt and Road.
Il existe également des exemples de confrontations explicites qui conduisent à ce que l'on appelle le découplage, c'est-à-dire une rupture des relations commerciales et économiques.
Le 24 novembre 2021, le ministère américain du commerce a annoncé l'introduction de contrôles à l'exportation pour huit entreprises chinoises spécialisées dans l'informatique quantique. Une semaine plus tôt, Bloomberg a fait état de nouveaux contrôles à l'importation créés par un groupe industriel chinois quasi-étatique connu sous le nom de Comité Xinchuang, qui a effectivement mis sur une liste noire les entreprises technologiques détenues à plus de 25 % par des sociétés étrangères qui fournissent des industries sensibles [x].
Dans un communiqué de presse, le ministère du commerce a déclaré qu'il avait ajouté huit entreprises chinoises spécialisées dans l'informatique quantique à la liste afin "d'empêcher l'utilisation de nouvelles technologies américaines pour les efforts de l'armée chinoise en matière d'informatique quantique".
Il est interdit aux entreprises américaines d'exporter certains produits vers des entreprises figurant sur la liste des entités juridiques sans demander une licence spéciale au ministère du commerce, et ces licences sont rarement délivrées. La liste a été créée à la fin des années 1990 pour faire face au problème de la prolifération des armes, mais depuis lors, elle est devenue un outil général de pression des États-Unis sous couvert de protection de leurs intérêts économiques.
Et cela a entraîné une réaction correspondante de la Chine, comme dans le cas des sanctions contre la Russie. Selon les analystes chinois, la création du Comité Xinchuang et la poussée de la Chine vers l'indépendance technologique sont le résultat direct des contrôles américains des exportations. La société chinoise de recherche sur Internet iResearch a déclaré que "la politique américaine d'endiguement, telle qu'elle est illustrée par la liste des organisations, a été un catalyseur direct qui a poussé la Chine à créer le secteur Xinchuang..... [La liste des organisations] a mis en évidence le besoin urgent pour la Chine d'investir davantage dans l'innovation technologique et de produire des technologies clés en Chine même".
Il est également affirmé que l'appel du président chinois Xi Jinping à une plus grande indépendance technologique a été en partie motivé par le fait qu'il a vu l'impact des restrictions américaines à l'exportation sur Huawei.
En novembre, il a été rapporté que le régulateur central chinois de l'Internet a demandé aux hauts responsables du géant Didi Chuxing de proposer un plan pour retirer l'entreprise de la Bourse de New York pour des raisons de sécurité des données. Ces démarches indiquent que le fossé technologique entre les États-Unis et la Chine va se poursuivre, malgré les déclarations des deux dirigeants selon lesquelles ils sont prêts à résoudre les différends.
Les partenaires européens des États-Unis au sein de l'OTAN s'impliquent également dans la politique anti-chinoise. "La Chine représente une menace non seulement du point de vue de la défense, mais aussi du point de vue économique, et elle crée des problèmes à court et moyen terme pour la reprise post-pandémique et le processus de transition vers une énergie propre. Ce domaine est la sécurité de l'approvisionnement en matières premières critiques et, en particulier, en éléments de terres rares (ETR)", peut-on lire sur le site web du Centre international pour la défense et la sécurité d'Estonie [xi].
Il existe un groupe de 17 éléments du tableau périodique qui sont utilisés dans la production de biens de haute technologie, de supraconducteurs, d'aimants et d'armes (et récemment dans la production d'énergie respectueuse de l'environnement). L'utilisation de ces minéraux a donc considérablement augmenté la demande, mais leur extraction et leur approvisionnement dépendent largement de la Chine.
La Commission européenne a déjà mis au point un système d'information sur les matières premières et continuera à le mettre à jour et à l'améliorer, mais il faut faire davantage. La Commission renforcera sa collaboration avec les réseaux de prévision stratégique afin d'élaborer des données fiables et de planifier des scénarios concernant l'offre, la demande et l'utilisation des matières premières dans les secteurs stratégiques.
Ces réseaux assurent une coordination politique à long terme entre toutes les directions générales de la Commission européenne. La méthodologie utilisée pour évaluer la criticité de certaines ressources pourra également être révisée en 2023 afin d'intégrer les dernières connaissances [xii].
Relever les défis
Mitre, une entreprise de haute technologie qui est l'un des contractants du Pentagone, a publié en août 2021 un rapport sur la rivalité croissante entre les États-Unis et la Chine. Il y est question de préparer une action au niveau national - c'est-à-dire des efforts conjoints impliquant le gouvernement, l'industrie et le monde universitaire - pour répondre aux défis technologiques posés aux États-Unis par les réalisations et les ambitions chinoises [xiii].
Nous avons identifié trois recommandations qui sont de nature universelle, c'est-à-dire qu'elles peuvent être appliquées à n'importe quel État, y compris en Russie, en les ajustant aux réalités nationales.
1. "Ne pas aller trop loin". Plutôt que de présumer que quiconque peut identifier et gérer les nombreux facteurs qui contribuent à catalyser l'innovation et l'adoption de la technologie dans l'ensemble de l'économie américaine, une politique fédérale judicieuse en matière de S-T devrait se concentrer sur ce qui est le plus nécessaire pour assurer le succès concurrentiel national dans le domaine de la haute technologie - y compris remédier aux défaillances réelles et identifiables du marché...
Nous devons également remédier au sous-financement dans la "vallée de la mort" intermédiaire du cycle de vie technologique, entre la recherche fondamentale et la commercialisation tardive, c'est-à-dire les phases au cours desquelles les nouvelles connaissances technologiques sont validées et démontrées dans un environnement pertinent. Cette zone correspond grosso modo à la zone située entre le "sweet spot" académique traditionnel de la recherche fondamentale et la zone de confort de l'industrie privée dans le prototypage et le déploiement de nouvelles applications.
2. Assurer une focalisation sur le "technosystème". Une stratégie technologique efficace ne doit pas se limiter à la mise au point de nouveaux gadgets, mais doit également tenir compte des facteurs juridiques, réglementaires, institutionnels, politiques et même sociologiques liés à l'adoption effective de la technologie et au développement de nouveaux cas d'utilisation.
Cela nécessite une réflexion de type "système de systèmes de systèmes" qui englobe également des questions plus pratiques sur le fonctionnement de l'économie technologique au sens large. À travers ce prisme, la gouvernance technologique - par exemple, les normes techniques, les incitatifs fiscaux, la sécurité de la chaîne d'approvisionnement, les contrôles technologiques, la surveillance et la vérification du financement de la R-D et les questions de qualité de la main-d'œuvre - peut être aussi importante pour le succès que les idées techniques les plus brillantes.
Dans le cadre d'une stratégie nationale de S&T, le gouvernement a ici un rôle particulier à jouer, car ces questions de " technosystème " impliquent souvent des problèmes et des facteurs - ou des préoccupations purement nationales ou systémiques, comme la sécurité nationale ou le changement climatique - auxquels les acteurs du secteur privé peuvent être peu incités (ou capables) d'accorder leur attention et leurs ressources.
3. "Maintenir la cohérence avec nos valeurs". La publication indique que face aux énormes défis économiques et technologiques de la Chine, les États-Unis ne peuvent pas appliquer une stratégie analogue à la "fusion militaro-civile" de Pékin, car les dirigeants américains ne devraient pas utiliser la coercition de l'État pour la coopération intersectorielle et l'utilisation des mécanismes du marché à des fins étatiques (en fait, de telles méthodes ont été utilisées dans l'histoire des États-Unis, notamment pendant la Seconde Guerre mondiale - note de l'auteur).
Il est demandé de veiller à ce que toutes les formes soient prises pour coordonner les efforts nationaux visant à renforcer la coopération innovante et volontaire entre le public, le secteur privé et le processus éducatif, ainsi que le financement fédéral de la recherche et du développement des entreprises, avec le rôle crucial des courtiers à but non lucratif qui encouragent la coopération et gèrent les différences entre les intérêts concurrents.
Outre les décisions politiques, une approche idéologique peut également être utilisée. Eileen Donahue, directrice exécutive du Global Digital Policy Incubator basé à Stanford et ancienne ambassadrice des États-Unis auprès des Nations unies, estime que la numérisation et, en particulier, l'intelligence artificielle peuvent contribuer à renforcer la démocratie libérale et, par conséquent, la puissance des États-Unis. Elle suggère de considérer la concurrence dans le cyberespace sous l'angle de la rivalité systémique, où la Chine est considérée comme un régime autoritaire qui représente une menace.
Selon elle, "les pratiques technologiques que nous présentons dans notre contexte national, les normes que nous défendons dans les forums technologiques internationaux et les investissements que nous faisons dans les technologies émergentes et les infrastructures d'information démocratiques se renforceront mutuellement". Si cet ensemble complexe de tâches est pris en charge et abordé avec le sentiment d'urgence et la détermination qu'il mérite, un avenir démocratique prospère et sûr peut être consolidé.
Ce sont les éléments essentiels à partir desquels nous pouvons construire une société numérique démocratique" [xiv]. Bien que, compte tenu du nombre considérable de contradictions au sein des États-Unis, il n'est pas évident de savoir comment mettre cela en pratique.
Énergie, semi-conducteurs et stockage en cloud
L'énergie propre est un autre domaine technologique prometteur.
Selon une étude réalisée par le centre américain CSIS sur la production d'énergie propre aux États-Unis, une analyse et une évaluation sérieuses de la diversification énergétique et économique sont nécessaires pour optimiser les stratégies actuelles [xv].
Actuellement, les sources sans carbone - renouvelables et nucléaires - fournissent un petit pourcentage des électrons qui alimentent les bâtiments et le secteur des transports. Mais à mesure que le temps passe et que la demande d'énergie augmente, les sources d'énergie sans carbone représenteront une part plus importante de la production. D'ores et déjà, 21 % des entreprises privées et 61 % des gouvernements nationaux se sont fixé des objectifs ambitieux de décarbonisation ou d'émissions nulles.
Selon l'Agence internationale de l'énergie, d'ici 2040, grâce à la forte croissance de la production d'énergie éolienne et solaire, les énergies renouvelables représenteront environ 47 % du marché mondial de l'électricité, contre 29 % aujourd'hui (voir graphique). En 2050, les sources d'énergie renouvelables représenteront plus de 90 % de la production totale d'énergie, tandis que les combustibles fossiles en représenteront moins de 10 % [xvi].
Et la transition vers de nouveaux types d'énergie entraînera inévitablement la création d'un nouveau paysage technologique pour les flux énergétiques mondiaux. Actuellement, les chaînes d'approvisionnement complexes et puissantes qui relient la production et la consommation sont constituées d'oléoducs et de gazoducs et de routes maritimes avec des infrastructures pour les pétroliers et les gaziers.
Il est déjà question d'exporter de l'hydrogène vert vers l'Europe depuis des endroits où l'électricité renouvelable bon marché est abondante, comme le Moyen-Orient et l'Islande, ou depuis l'Australie vers le Japon. Il existe déjà des projets de construction de réseaux de transmission d'électricité depuis des zones offrant d'énormes possibilités de production d'électricité renouvelable jusqu'aux centres de demande, comme la ligne de transmission Australie-ANASE, qui reliera l'Australie à Singapour.
Les technologies de l'informatique dématérialisée, qui offrent une plus grande puissance de calcul et une meilleure capacité de stockage des données, constituent un autre domaine essentiel.
Actuellement, les États-Unis représentent près de 40 % des principaux centres de données en cloud et sur Internet, mais l'Europe, le Moyen-Orient, l'Afrique et l'Asie-Pacifique affichent des taux de croissance plus élevés. Aujourd'hui, la Chine, le Japon, le Royaume-Uni, l'Allemagne et l'Australie représentent collectivement 29 % du total. Les fournisseurs mondiaux de centres de données en cloud hyper évolutifs ne sont présents que dans une poignée de grands marchés émergents, comme le Brésil et l'Afrique du Sud.
Ils sont principalement situés dans des pays à revenu élevé et à revenu moyen supérieur. Parmi les opérateurs hyperscale, Amazon, Microsoft et Google représentent collectivement plus de la moitié de tous les grands centres de données, avec d'autres acteurs clés comme Oracle, IBM, Salesforce, Alibaba et Tencent. Les plus grands fournisseurs de services en cloud gèrent des centres de données dans le monde entier, segmentant les clients en différentes régions qui peuvent s'étendre sur plusieurs pays, voire des continents entiers.
Les semi-conducteurs figurent également sur la liste des technologies critiques. Récemment, un terme spécial "chipageddon" est apparu, qui reflète la pénurie mondiale de puces informatiques survenue au cours de l'année écoulée [xvii].
Comme nous l'avons indiqué, tout a commencé par le fait que la demande d'électronique grand public a augmenté en raison du confinement, car beaucoup ont été contraints de travailler et d'étudier à la maison.
Les puces semi-conductrices sont également utilisées dans les appareils ménagers, les moniteurs et les automobiles. Par exemple, une voiture moderne peut comporter plus d'une centaine de puces.
Et Taïwan produit 60 à 70% des puces à semi-conducteurs du monde et 90% des puces les plus avancées. En 2021, le déficit qui en résulte a été attribué à diverses circonstances. Mais en fait, la raison était la sécheresse qui a sévi sur l'île en 2020. Le fait est que la fabrication de puces informatiques prend beaucoup de temps - il faut environ 8000 litres d'eau pour produire une seule plaque avec une puce.
Bien que les restrictions les plus sévères en 2020 aient touché le secteur agroalimentaire de Taïwan, les entreprises de fabrication de puces à semi-conducteurs ont également réduit leurs volumes de production.
Dans ce contexte, l'environnement géographique environnant devient un environnement technostratégique. Compte tenu de l'utilisation de technologies à double usage dans la sphère militaire et de l'importance de l'innovation dans la défense, les armées des pays leaders mettent également l'accent sur les priorités technologiques.
Le ministère américain de la défense a identifié onze domaines - systèmes de gestion de combat entièrement en réseau, 5G, technologies hypersoniques, guerre cybernétique/guerre de l'information, énergie dirigée, microélectronique, autonomie, IA/apprentissage machine, science quantique, espace et biotechnologie - dans lesquels les investissements sont activement attirés [xviii].
La Russie devrait également tirer certaines leçons de la concurrence technologique. Un protectionnisme approprié, la promotion de nos propres développements et le soutien au secteur scientifique et technique ne sont plus des questions d'économie nationale, mais de géopolitique mondiale.
Notes:
[I] https://hello-tomorrow.org/bcg-deep-tech-the-great-wave-o...
[ii] https://www.bcg.com/publications/2021/deep-tech-innovation
[iii] https://www.dni.gov/files/NCSC/documents/SafeguardingOurF...
[iv] https://www.whitehouse.gov/briefing-room/statements-relea...
[v] https://www.whitehouse.gov/ostp/news-updates/2021/04/27/t...
[vi] https://www.csis.org/analysis/promoting-competition-ameri...
[vii] https://papers.ssrn.com/sol3/papers.cfm?abstract_id=3909528
[viii] https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/en/IP_...
[ix] https://www.state.gov/eu-u-s-joint-press-release-by-the-e...
[x] https://www.lawfareblog.com/us-china-tech-decoupling-acce...
[xi] https://icds.ee/en/chinas-rare-earth-dominance-is-a-secur...
[xii] https://hcss.nl/report/energy-transition-europe-and-geopo...
[xiii] https://www.mitre.org/sites/default/files/publications/pr...
[xiv] https://www.justsecurity.org/78381/system-rivalry-how-dem...
[xv] https://csis-website-prod.s3.amazonaws.com/s3fs-public/pu...
[xvi] https://www.strategy-business.com/article/State-of-flux
[xvii] https://www.abc.net.au/news/2021-05-07/what-does-chipaged...
[xviii] https://cimsec.org/the-influence-of-technology-on-fleet-a...
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mercredi, 19 janvier 2022
Asie du Sud et de l'Est : tendances et perspectives pour 2022
Asie du Sud et de l'Est : tendances et perspectives pour 2022
par l'équipe de Katehon.com
Ex: https://www.geopolitica.ru/article/yugo-vostochnaya-aziya-tendencii-i-prognoz-na-2022-g
En 2021, le Rimland d'Asie a connu des processus actifs directement liés à la géopolitique mondiale. La Chine étant un pôle nouveau et activement émergent du futur ordre mondial, de nombreux événements étaient directement ou indirectement liés à ce pays. Le découplage, c'est-à-dire la rupture des liens économiques et politiques, a été clairement visible dans les relations avec les États-Unis. Les revendications de souveraineté en mer de Chine méridionale ainsi que la tentative d'unification avec Taïwan (que Pékin considère comme son territoire) ont encouragé les États-Unis et leurs satellites dans la région à intensifier leur coopération et à former ouvertement une coalition anti-chinoise. Le 24 septembre 2021, la première réunion en face à face du dialogue de sécurité quadrilatéral (États-Unis, Japon, Inde et Australie) s'est tenue à Washington et une nouvelle alliance (Australie, Royaume-Uni, États-Unis) a été formée - toutes deux dirigées contre la Chine. "Le Quatuor (Quad) a été créé il y a relativement longtemps - en 2007 - mais jusqu'à récemment, il était peu actif. Ce n'est qu'en 2020 que l'alliance a été relancée et que de nouvelles réunions et de nouveaux accords ont été prévus.
Certains médias ont décrit le Quad comme rien de moins qu'une "OTAN asiatique", bien que cette caractérisation soit plutôt exagérée. De toute évidence, le principal moteur de l'alliance est les États-Unis, qui exploitent habilement les craintes des autres membres à l'égard de la Chine. Mais si l'accord AUKUS est ajouté à ce quatuor, avec la présence du Pentagone dans l'Indo-Pacifique et un certain nombre d'accords bilatéraux, cela ressemble à un pilier supplémentaire pour renforcer la position de l'atlantisme. Et dans un tel format, le Quad sape la sécurité dans la région et la confiance entre les pays qui la composent.
En janvier 2021, l'USS Theodore Roosevelt, un groupe d'attaque centré sur un porte-avions, est entré dans la mer de Chine méridionale pour des opérations de routine, notamment des exercices navals et un entraînement tactique coordonné entre les unités de surface et aériennes.
La nouvelle loi chinoise sur les garde-côtes, qui est entrée en vigueur le 1er février, a été qualifiée par les experts occidentaux et les représentants des pays qui ont des différends territoriaux avec Pékin d'escalade inquiétante des conflits en mer de Chine méridionale.
Les tensions militaires dans la région du Pacifique autour de Taïwan, de Hong Kong et de la mer de Chine méridionale se sont intensifiées à la mi-2021. Les États-Unis ont lancé une série d'exercices dans la région. Les manœuvres, orchestrées par ce fer de lance du Pacifique, se sont déroulées à Guam et dans les îles Mariannes du Nord, avec une démonstration d'une impressionnante puissance aérienne, terrestre et maritime. Il y a également eu un exercice conjoint de deux ans en Australie, appelé Talisman Saber, auquel ont participé 17.000 soldats des États-Unis et de pays alliés.
À la fin de l'année, il était clair que Washington tentait d'inciter ses alliés et partenaires dans la région - Australie, Nouvelle-Zélande, Japon et Corée du Sud - à élaborer une stratégie commune pour contrer la Chine.
Chine
Le sommet du PCC et le plénum du comité central du PCC sont deux événements importants de la politique intérieure chinoise.
Le 6 juillet 2021, un sommet du Parti communiste chinois a été organisé. Lors de ce sommet ouvert du PCC, le 6 juillet, le président chinois Xi Jinping a affirmé la nécessité de s'opposer à une politique de force et d'unilatéralisme dans le monde, et de combattre l'hégémonisme et l'abus de pouvoir politique. "Alors que le monde est entré dans une période de grandes turbulences et de changements, l'humanité est confrontée à divers risques. L'étroite interaction sino-russe constitue un exemple à suivre et un modèle pour l'élaboration d'un nouveau type de relations internationales. Nous apprécions cela", a déclaré Xi Jinping.
Le 6e plénum du 19e Comité central du Parti communiste chinois s'est tenu à Pékin du 8 au 11 novembre 2021.
Selon le communiqué du plénum, le Parti a défini le rôle du camarade Xi Jinping en tant que noyau dirigeant du Comité central du PCC et de l'ensemble du Parti, et a affirmé le rôle directeur des idées de Xi Jinping sur le socialisme aux caractéristiques chinoises dans la nouvelle ère.
En politique étrangère, il y a tout d'abord le découplage avec les États-Unis, qui s'intensifie en raison des changements du modèle économique chinois ainsi que de la perception différente de l'ordre mondial par la RPC et les États-Unis. Tant que les États-Unis suppriment les droits de douane supplémentaires sur les produits chinois, les prix des produits manufacturés, fabriqués en Chine, se situent dans une fourchette de prix moyenne, mais peuvent également baisser de manière significative, ce qui ralentit l'inflation. Toutefois, les États-Unis restent une superpuissance et ne peuvent donc pas éliminer les droits de douane de manière unilatérale.
Dans le cas où l'administration Biden lève les droits de douane supplémentaires sans aucune condition pour la Chine, on peut considérer que Biden a capitulé devant la Chine. Le gouvernement américain exige donc que la Chine augmente ses achats de biens en provenance des États-Unis et mette en œuvre la première phase de l'accord commercial.
Sinon, l'administration actuelle de Biden aura à cœur de poursuivre les politiques de Trump. En d'autres termes, les États-Unis menacent la Chine. Si la Chine n'augmente pas ses achats de biens aux États-Unis conformément à l'accord, les États-Unis continueront à déclencher la guerre commerciale qui a débuté en 2015. Toutefois, si la Chine augmente ses achats de produits en provenance des États-Unis conformément à l'accord, les États-Unis lèveront les droits de douane déjà imposés sur certains produits chinois.
Les États-Unis utilisent également des tactiques de "propagation de rumeurs" contre la Chine. Il a été signalé publiquement et à plusieurs reprises que la Chine a restreint la production et l'exportation de matériel, produisant des équipements et des dispositifs médicaux de qualité inférieure. Cela a accru la méfiance à l'égard de la chaîne de fabrication chinoise dans de nombreux pays du monde, entraînant une "dé-sinisation de la chaîne de fabrication".
La Chine a également été blâmée pour la chaîne d'approvisionnement "hégémonique" des produits médicaux et de l'industrie automobile chinois, qui serait à l'origine de dommages sanitaires. Le 9 avril 2021, le conseiller économique de la Maison Blanche, Larry Kudlow, a exhorté toutes les entreprises américaines à quitter la Chine et à revenir aux États-Unis, proposant de "compléter" les entreprises pour leur retour dans leur pays d'origine.
Les États-Unis ont lancé une alliance de partenariat appelée Economic Prosperity Network, dont on parle depuis avant Trump. Il encourage la réorganisation des chaînes d'approvisionnement chinoises dans des domaines clés, tels que les infrastructures, etc., dans le but de se débarrasser complètement de la dépendance chinoise. Avec le soutien des États-Unis, le Japon a alloué 2,3 milliards de dollars américains et 108.000 milliards de yens (environ 989 milliards de dollars américains) pour financer des entreprises qui transfèrent des lignes de production de la Chine vers le Japon ou vers d'autres pays.
Cette année 2021 marque exactement les 20 ans de la signature du Traité de bon voisinage, d'amitié et de coopération entre la Fédération de Russie et la République populaire de Chine par Vladimir Poutine et Jiang Zemin à Moscou le 16 juillet 2001 (photo). Aujourd'hui encore, la coopération avec la Chine joue un rôle clé dans la politique étrangère de la Russie. De nombreux analystes et politiciens nationaux présentent la Chine comme un allié géopolitique important.
Lors d'une réunion en ligne entre les deux chefs d'État, Vladimir Poutine a souligné l'importance de la coopération conjointe : "Dans un contexte de turbulences géopolitiques croissantes, de rupture des accords de contrôle des armements et d'augmentation du potentiel de conflit dans diverses régions du monde, la coordination russo-chinoise joue un rôle stabilisateur dans les affaires mondiales. Y compris sur des questions urgentes de l'agenda international telles que la résolution de la situation dans la péninsule coréenne, en Syrie, en Afghanistan, et le renouvellement du plan d'action conjoint sur le programme nucléaire iranien".
Bien qu'il n'y ait pas de croissance particulière du commerce entre la Chine et la Russie. Et ce, malgré le nombre important de projets conjoints sino-russes dans le domaine de la sécurité énergétique, de la coopération dans le cadre de l'initiative "Une ceinture, une route", au sein de l'OCS, de la lutte conjointe contre le terrorisme, etc.
Dans le voisinage immédiat, la Chine a continué à mettre en œuvre des projets d'infrastructure. Au Laos, par exemple, la construction d'une voie ferrée à grande vitesse de 420 km de long, dirigée par la Chine, a été achevée. Les travaux ont commencé en 2016 pour relier la ville de Kunming, dans le sud de la Chine, à la capitale laotienne de Vientiane. Tout cela fait partie de la vision plus large de Pékin concernant un éventuel chemin de fer panasiatique qui s'étendrait au sud jusqu'à Singapour. En tant que projet central de l'initiative "Ceinture et Route", la route fait également partie de la vision stratégique du Laos, qui souhaite passer d'un pays enclavé à un pays "relié à la terre" et combler le fossé de développement dicté par le fait que le Laos est un pays montagneux intérieur.
Il existe une dépendance à l'égard de la Chine dans un contexte d'endettement croissant, mais Vientiane entend rattraper des décennies de développement rapide dans la région. Un autre projet, la construction du port sec de Thanaleng (TDP) et du parc logistique de Vientiane (VLP), est un exemple de la manière dont la dépendance excessive du Laos vis-à-vis de la Chine peut être réduite. Approuvé par une résolution de la Commission économique et sociale des Nations unies pour l'Asie et le Pacifique (CESAP) en 2013, le projet est financé principalement par des sponsors privés et vise à relier le Laos aux routes commerciales maritimes.
Inde
En 2021, l'Inde tente de manœuvrer entre les grands centres géopolitiques, comme auparavant, tout en essayant d'asseoir sa propre influence. Les problèmes de coronavirus freinent l'économie indienne.
Dans le même temps, la victoire des talibans (interdits en Russie) en Afghanistan a obligé New Delhi à modifier ses plans pour l'Asie centrale et l'endiguement du Pakistan. Tout le personnel diplomatique indien et les membres de leurs familles ont été évacués d'Afghanistan, qui avait auparavant été utilisé comme une plateforme pour étendre son influence, y compris dans les périphéries pakistanaises du Baloutchistan et des territoires majoritairement pachtounes.
En février 2021, le différend territorial avec la Chine dans la région montagneuse du Ladakh, où un conflit armé avait eu lieu la veille, a été temporairement résolu. Cependant, les deux parties ont continué à renforcer leur présence militaire à la frontière. À l'automne, un affrontement a eu lieu entre des patrouilles frontalières dans le secteur de Tawang, en Arunachal Pradesh. Le 12 janvier 2022, une nouvelle série de pourparlers a eu lieu entre les commandants de corps d'armée des forces armées indiennes et l'Armée populaire de libération de la Chine. Les tensions devraient se poursuivre tout au long de l'année 2022.
Dans le cadre de la stratégie indo-pacifique, les États-Unis ont continué à attirer l'Inde dans leur sphère d'influence. En septembre 2021, les forces aériennes américaines et indiennes ont signé un nouvel accord de coopération pour développer des véhicules aériens sans pilote. L'objectif de cette collaboration est de "concevoir, développer, démontrer, tester et évaluer des technologies, y compris des équipements physiques tels que des petits véhicules aériens sans pilote, des systèmes d'avionique, d'alimentation de charge utile, de propulsion et de lancement, par le biais du prototypage, qui répondent aux exigences opérationnelles des forces aériennes indiennes et américaines". Le coût prévu de ce projet est de 22 millions de dollars, qui seront répartis à parts égales. Le Pentagone a déjà qualifié l'accord de "plus important de l'histoire" des relations entre les deux pays.
Kelly Seybolt, sous-secrétaire américain de l'armée de l'air pour les affaires internationales, a déclaré : "Les États-Unis et l'Inde partagent une vision commune d'une région indo-pacifique libre et ouverte. Cet accord de développement conjoint renforce encore le statut de l'Inde en tant que partenaire majeur en matière de défense et s'appuie sur notre solide coopération existante dans ce domaine."
Le nouvel accord a été signé sous l'égide de l'initiative américano-indienne en matière de technologie et de commerce de la défense, ou DDTI. Ce projet a débuté en 2012 et était l'un des projets favoris du sous-secrétaire à la défense de l'époque, Ash Carter. Lorsque Carter est devenu ministre en 2015, il a intensifié ses efforts. Ellen Lord, qui a dirigé les achats du Pentagone pour l'administration Trump, a également été un grand défenseur du renforcement des liens de développement avec l'Inde.
Selon le SIPRI, l'Inde était le deuxième plus grand importateur d'équipements militaires et de systèmes d'armes en 2020 et représentait environ 9,5 % de tous les achats d'armes mondiaux. En 2018, les expéditions en provenance des États-Unis ont représenté 12 % de cette part.
Pour changer ce rapport, sous Donald Trump, une exception a même été faite pour que l'Inde coopère avec la Russie. La même année, les responsables du ministère indien ont déclaré qu'ils allaient abandonner les systèmes de défense aérienne russes Pechora et investir un milliard de dollars dans leur équivalent américain, le NASAMS-II.
Et en septembre 2018, les États-Unis et l'Inde ont signé un accord de coopération militaire spécial, l'accord de compatibilité et de sécurité des communications (COMCASA). Il implique le partage de données, l'intensification des exercices conjoints et la fourniture par les États-Unis de types d'armes spécifiques à l'Inde. Bien sûr, l'accord visait également à établir un monopole par les États-Unis. En décembre 2018, l'Inde a inauguré le centre d'information conjoint maritime avec l'aide des États-Unis.
Il est déjà évident que cet accord dans le domaine du développement des forces aériennes entre les deux pays mettait en péril les liens russo-indiens en matière de technologie militaire et de fourniture d'armes. L'Inde aurait pu justifier cela par la nécessité de passer à des produits nationaux.
A la fin de l'année, cependant, la Russie avait effectué une démarche en direction de l'Inde. La visite du président russe Vladimir Poutine en Inde le 6 décembre et les discussions parallèles dans le format 2+2 (ministres des affaires étrangères et de la défense des deux États) ont permis de renouveler plusieurs anciens traités et de signer de nouveaux accords. Alors que la coopération entre Moscou et New Delhi s'est ralentie ces dernières années, le nouveau paquet indique la volonté des deux parties de rattraper le temps perdu, tout en étendant considérablement l'ancien cadre.
Comme indiqué dans la déclaration conjointe sur la réunion, "les parties ont adopté une vision positive des relations multiformes entre l'Inde et la Russie, qui couvrent divers domaines de coopération, notamment la politique et la planification stratégique, l'économie, l'énergie, l'armée et la sécurité, la science et la technologie, la culture et l'interaction humanitaire.
Parmi les accords importants, il convient de mentionner le passage à des règlements mutuels en monnaie nationale, qui constitue une suite logique de la politique russe de sortie de la dépendance au dollar.
L'Inde a également invité la Russie dans le secteur de la défense. Auparavant, les retards dans la signature des contrats entre les parties ont été interprétés comme un désintérêt de New Delhi pour les armements russes et la crainte de sanctions américaines. Mais le sujet de la coopération militaro-technique est également présent dans le nouveau bloc d'accords. Il est révélateur qu'en dépit du programme indien de production de défense nationale, les entreprises russes ont également leur place dans ce secteur. L'expérience antérieure de la coopération entre l'Inde et Israël avait montré qu'une telle entrée sur le marché intérieur indien était possible.
Le Kremlin vise toutefois à trouver un format pratique et acceptable pour que la troïka Russie-Inde-Chine puisse coopérer activement à l'avenir. Il serait bon d'y associer le Pakistan, d'autant que les relations entre Islamabad et New Delhi s'améliorent : la veille, les deux parties ont commencé à s'accorder des visas pour le personnel diplomatique et ont opté pour une désescalade militaire.
Si l'on s'inquiète toujours de l'influence de l'Inde sur les États-Unis, notamment en ce qui concerne la stratégie indo-pacifique, Moscou doit être proactive et proposer elle-même de nouveaux formats d'engagement. En outre, il est nécessaire de surveiller les actions de Washington à cet égard. Jusqu'à présent, rien n'indique clairement qu'il y aura une forte influence sur New Delhi, mais dans le cadre de la politique anti-chinoise globale des États-Unis, ils tenteront de conserver leurs partenaires par le biais de diverses préférences et stratagèmes diplomatiques.
Pakistan
Le Pakistan a intensifié sa politique étrangère en 2021. À la suite du changement de régime en Afghanistan, le Pakistan a déployé des efforts considérables pour normaliser la situation et des responsables ont engagé des pourparlers avec les talibans. Les militaires, y compris l'Inter-Services Intelligence (ISI) du Pakistan, ont également participé au processus. Il est important pour le Pakistan d'établir des liens amicaux avec les talibans en tant que force légitime afin de pouvoir influencer la politique pachtoune dans son propre pays. Les talibans pakistanais agissant comme une organisation autonome et étant interdits au Pakistan, Islamabad doit disposer de garanties et d'un levier fiable sur ses zones frontalières peuplées de Pachtounes.
À la fin de l'année, Islamabad a accueilli une réunion de l'Organisation de la coopération islamique, qui a également porté sur un règlement afghan.
Mais la percée la plus importante a été faite dans la direction de la Russie.
Début avril 2021, Sergey Lavrov s'est rendu à Islamabad pour discuter d'un large éventail de coopération entre les deux pays, allant des questions militaires et techniques à la résolution de la situation dans l'Afghanistan voisin. Évidemment, ce voyage a précipité la signature d'un accord sur un gazoduc (l'autre sujet dans le domaine énergétique était l'atome pacifique). Un message du président russe Vladimir Poutine a également été transmis aux dirigeants pakistanais, indiquant qu'ils étaient prêts à "faire table rase" dans les relations bilatérales.
Le 28 mai, un accord bilatéral sur la construction du gazoduc Pakistan Stream a été signé à Moscou. Du côté russe, le document a été signé par le ministre russe de l'énergie Nikolay Shulginov et, du côté pakistanais, par l'ambassadeur Shafqat Ali Khan.
L'accord est en préparation depuis 2015 sous le nom initial de gazoduc Nord-Sud et revêt une grande importance géopolitique pour les deux pays.
Le nouveau pipeline aura une longueur de 1 100 kilomètres. La capacité sera de 12,3 milliards de mètres cubes par an. Le coût est estimé à 2,5 milliards de dollars. Le gazoduc reliera les terminaux de gaz naturel liquéfié de Karachi et de Gwadar, dans les ports du sud du Pakistan, aux centrales électriques et aux installations industrielles du nord. Initialement, la Russie devait détenir une participation de 51 % et l'exploiter pendant 25 ans. Mais les sanctions occidentales ont bouleversé ces plans. La participation russe sera désormais de 26 %. Mais la partie russe aura un droit de regard décisif sur le choix des contractants, sur la conception, l'ingénierie, les fournitures et la construction.
Le Pakistan a encore deux projets potentiels, le gazoduc iranien, qui n'a pas encore été construit, et le gazoduc Turkmenistan-Afghanistan-Pakistan-Inde (TAPI), qui a fait l'objet d'une grande publicité mais n'a jamais été mis en service. Ce dernier projet a été gelé en raison de la situation instable en Afghanistan. Par conséquent, le Pakistan Stream est le plus prometteur en termes d'attente d'un retour immédiat une fois sa construction achevée.
Pour la Russie, la participation au projet procure un certain nombre d'avantages directs et indirects.
Premièrement, la participation même de la Russie au projet vise à obtenir certains dividendes.
Deuxièmement, la participation de la Russie doit également être considérée sous l'angle de la politique d'image.
Troisièmement, la Russie équilibrera la présence excessive de la Chine au Pakistan, car Pékin est le principal donateur et participant à ces projets d'infrastructure depuis de nombreuses années.
Quatrièmement, la Russie ferait mieux d'explorer les possibilités du corridor économique Chine-Pakistan pour y participer et l'utiliser comme une porte maritime méridionale pour l'UEE (le port en eau profonde de Gwadar). Le gazoduc Pakistan Stream suivrait essentiellement le même itinéraire.
Cinquièmement, étant donné les réserves de gaz naturel au Pakistan même (province du Baloutchistan), la Russie, qui s'est révélée être un partenaire fiable disposant de l'expertise technique nécessaire, pourra, dans un certain temps, participer au développement des champs de gaz nationaux également.
Sixièmement, la présence de la Russie facilitera automatiquement la participation à d'autres projets bilatéraux - avec l'économie dynamique et la croissance démographique du Pakistan, elle élargit les options en matière de commerce, d'industrie et d'affaires.
Septièmement, notre présence renforce la tendance à la multipolarité, en particulier dans une situation où l'Inde suit les États-Unis et s'engage dans divers projets suspects et déstabilisants de type quadrilatéral (comme l'a mentionné le ministre russe des affaires étrangères Sergey Lavrov).
L'amélioration et le développement des contacts avec ce pays sont importants pour la Russie en raison de sa position géostratégique. Tant dans le cadre de l'intégration eurasienne actuelle, y compris en liaison avec l'initiative chinoise "Une ceinture, une route", que dans le cadre de l'intégration continentale à venir.
En 2022, il y a des chances que les relations Pakistan-Russie se développent davantage. La coopération avec la Chine et les autres grands partenaires du Pakistan, la Turquie et l'Arabie saoudite, se poursuivra également.
Japon
En 2021, le Japon a continué à approfondir sa coopération avec les États-Unis en matière de défense et d'économie. Un accord a été conclu selon lequel les coûts d'entretien des bases américaines seront partiellement couverts par le budget du Japon.
À la mi-juillet 2021, le ministère japonais de la défense a publié un livre blanc, qui a suscité l'attention des responsables et des experts des pays voisins ainsi que des États-Unis. Un certain nombre de caractéristiques de ce document indiquent la dynamique de changement dans la planification politico-militaire de cette nation, indiquant que, tout en incitant Washington et en s'engageant dans des projets régionaux tels que le dialogue quadrilatéral sur la sécurité, le Japon reste un satellite fidèle des États-Unis, mettant l'accent sur des préoccupations identiques.
D'après l'introduction du Livre blanc, il semble que le Japon ait désormais deux menaces principales - la Chine et la Corée du Nord.
C'est la première fois que le ministère japonais de la défense supprime Taïwan de la carte de la Chine. Les années précédentes, le livre blanc regroupait Taïwan et la Chine dans un même chapitre et sur une même carte, ce qui suscitait des critiques de la part des Taïwanais vivant au Japon. Toutefois, la dernière version souligne la distinction entre les deux, ce qui indique un changement de politique de la part du ministre japonais de la Défense, Nobuo Kishi.
Le document souligne que "la stabilisation de la situation autour de Taïwan est importante pour la sécurité du Japon et la stabilité de la communauté internationale." Le document ajoute : "Il est donc plus que jamais nécessaire que nous accordions une attention particulière à la situation à l'approche de la crise."
En ce qui concerne les secteurs préoccupants, les préoccupations du Japon sont les suivantes :
- la défense d'îles éloignées ;
- organiser une réponse efficace à d'éventuelles attaques de missiles ;
- la possibilité d'agir dans l'espace ;
- sécuriser les cyber-systèmes ;
- le développement des capacités du spectre électromagnétique ;
- la réponse aux grandes catastrophes et aux calamités naturelles (y compris l'épidémie de coronavirus).
Il y a eu peu de changement dans la politique intérieure. Le 31 octobre 2021, des élections législatives ont eu lieu au Japon. Selon la procédure, un premier ministre a été nommé. Le Premier ministre sortant, Fumio Kishida, a conservé son poste, le parti qu'il dirige ayant conservé la majorité des sièges au Parlement.
Myanmar
Le 1er février 2021, un coup d'État au Myanmar a renversé un gouvernement civil dirigé par la Ligue nationale pour la démocratie (LND), conduite par Aung San Suu Kyi et Win Myint. Les militaires du pays, les Tatmadaw, ont instauré une dictature dans l'État. Le nouveau gouvernement militaire a promis d'organiser des élections générales dans un an ou deux, puis de remettre le pouvoir au vainqueur.
Les députés de la NLD, qui ont conservé leur liberté, ont formé un comité d'ici avril 2021 pour représenter le Parlement de l'Union, un organe parallèle au gouvernement, que le gouvernement militaire a déclaré association illégale et a accusé ses membres de haute trahison. Aung San Suu Kyi a été arrêtée et jugée.
En juin 2021, le généralissime Min Aung Hline a conduit une délégation du Myanmar en Russie pour assister à la conférence de Moscou sur la sécurité internationale.
Min Aung Hline s'est déjà rendu plusieurs fois en Russie, mais c'est la première fois en tant que chef d'État. Min Aung Hline a toujours soutenu le développement des relations avec notre pays, en particulier dans les domaines militaire et militaro-technique. Au début des années 2000, il a élaboré un programme de formation pour les militaires birmans de la Fédération de Russie (plus de 7000 officiers ont étudié dans les universités russes au cours de ces années). Sous sa direction, le Myanmar a commencé à acheter des avions d'entraînement au combat Yak-130, des chasseurs polyvalents Su-30SM, des véhicules blindés, etc.
Cette visite a coïncidé avec un regain de pression internationale sur le Myanmar : le vendredi 18 juin, l'Assemblée générale des Nations unies a condamné les actions de l'armée au Myanmar. 119 pays ont soutenu la proposition visant à rétablir la transition démocratique dans le pays, le Belarus s'y est opposé et 36 pays (dont la Russie et la Chine) se sont abstenus.
Pour la Russie elle-même, la coopération avec le Myanmar est bénéfique non seulement en termes de fourniture d'équipements militaires et de formation du personnel militaire du pays asiatique. Le soutien politique (ou la neutralité) de Moscou souligne la ligne générale de sa politique étrangère - non-ingérence dans les affaires intérieures des autres États et respect de la souveraineté - tout en rejetant le concept occidental de "protection des valeurs démocratiques". Le rôle d'une sorte d'équilibre, d'équilibrage de l'influence chinoise, est également assez commode pour Moscou. Et dans le contexte de la géopolitique mondiale, il suffit de regarder la carte pour comprendre l'importance stratégique de cet État d'une superficie de 678.000 kilomètres carrés, situé au centre de l'Asie du Sud-Est et ayant accès à l'océan Indien.
Projets régionaux-mondiaux
Le 9 janvier 2021, le site web du Conseil d'État de la République populaire de Chine a publié une annonce selon laquelle la Chine va étendre son réseau de libre-échange dans le monde. Selon le ministre du commerce Wang Wentao, la Chine intensifiera ses efforts pour accroître son réseau de zones de libre-échange avec ses partenaires du monde entier afin d'élargir son "cercle d'amis", tout en éliminant les droits de douane supplémentaires sur les marchandises et en facilitant les investissements et l'accès au marché pour le commerce des services.
Wang a déclaré à l'agence de presse Xinhua, dans une récente interview, que ces efforts favoriseraient l'ouverture à un niveau supérieur. Il a ajouté que le pays allait promouvoir les négociations sur un accord de libre-échange entre la Chine, le Japon et la République de Corée, les négociations avec le Conseil de coopération Chine-Golfe, ainsi que les accords de libre-échange (ALE) Chine-Norvège et Chine-Israël. En outre, l'adhésion à l'accord global et progressif de partenariat transpacifique sera envisagée.
Les chiffres officiels montrent que la Chine a signé des ALE avec 26 pays et régions, les ALE représentant 35 % du commerce extérieur total du pays.
La création d'un réseau de zones de libre-échange d'envergure mondiale est conforme à l'objectif de la Chine de créer un nouveau niveau d'ouverture à l'échelle mondiale, comme le soulignent les propositions de la direction du parti pour le 14e plan quinquennal (2021-2025) de développement économique et social national et les objectifs à long terme jusqu'en 2035.
La signature d'un plus grand nombre d'ALE aiderait la Chine à étendre et à stabiliser ses marchés étrangers et à atteindre un niveau d'ouverture plus élevé, surtout si le pays procède activement à des ajustements pour répondre aux exigences nécessaires, comme l'adoption de réglementations environnementales plus strictes et l'égalisation des conditions de concurrence pour tous les acteurs du marché.
En plus de faciliter le commerce des biens et des services, les ALE constituent également des plateformes permettant d'établir des règles largement acceptées et reconnues dans des domaines tels que l'économie numérique et la protection de l'environnement.
La Chine a fait des progrès notables dans la promotion du commerce multilatéral en 2020, en signant un partenariat économique global régional à la mi-novembre et en concluant les négociations sur le traité d'investissement Chine-UE plus tard dans l'année.
Le 1er janvier 2022, l'accord sur la plus grande zone de libre-échange du monde - le Partenariat économique global régional - est entré en vigueur (l'accord a été signé en novembre 2020). L'accord couvre 10 États membres de l'Association des nations de l'Asie du Sud-Est et 5 États avec lesquels l'ANASE a déjà signé des accords de libre-échange. Le RCEP comprend 3 pays développés et 12 pays en développement.
La région Asie-Pacifique est aujourd'hui la première région de croissance économique du monde, offrant de grandes possibilités de commerce et d'expansion. Certains pays pensent que leurs entreprises peuvent prendre de l'avance dans la course à la concurrence grâce à l'accord global et progressif sur le partenariat transpacifique (CPTPP) - un accord de libre-échange entre 11 pays de la région Asie-Pacifique : Australie, Brunei, Chili, Canada, Japon, Malaisie, Mexique, Nouvelle-Zélande, Pérou, Singapour et Vietnam.
En substance, le CPTPP est un accord de libre-échange ambitieux et de grande qualité qui couvre pratiquement tous les aspects du commerce et de l'investissement. L'accord comprend des engagements en matière d'accès au marché pour le commerce des biens et des services, des engagements en matière d'investissement, de mobilité de la main-d'œuvre et de marchés publics. L'accord établit également des règles claires pour aider à créer un environnement cohérent, transparent et équitable pour faire des affaires sur les marchés du CPTPP, avec des chapitres dédiés couvrant des questions clés telles que les obstacles techniques au commerce, les mesures sanitaires et phytosanitaires, l'administration douanière, la transparence et les entreprises d'État.
Un État qui souhaite adhérer doit en informer le gouvernement néo-zélandais (le dépositaire de l'accord), qui informera ensuite les autres membres. La Commission du CPTPP décide ensuite de lancer ou non le processus d'adhésion. S'il décide de lancer le processus, un groupe de travail sera formé. Dans les 30 jours suivant la première réunion du groupe de travail, le candidat devra soumettre ses propositions en matière d'accès au marché : réductions tarifaires ; listes des secteurs de services dont il a proposé d'exclure les membres du CPTPP ; et parties des marchés publics qui ne seront pas ouvertes aux propositions des autres membres du CPTPP. Le processus de négociation commencera alors. Une fois que tous les participants existants sont satisfaits, la Commission invitera officiellement un candidat à devenir membre.
Au début de l'année 2021, la Grande-Bretagne a demandé à adhérer au CPTPP. Cependant, on n'a toujours pas de nouvelles sur l'état d'avancement des aspirations de Londres. Tout ce que l'on sait, c'est que les négociations ont été lancées en juin.
En janvier 2021, la Corée du Sud a également déclaré son désir de rejoindre le CPTPP. Pour ce faire, une procédure a été lancée pour examiner ses propres règlements et lois afin de vérifier leur conformité avec le CPTPP. La Thaïlande a également manifesté son intérêt pour le partenariat.
Et en septembre 2021, la Chine s'est portée candidate. Cela s'est produit quelques jours seulement après la signature du traité AUKUS.
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En 2022, la région restera une zone d'intérêts contradictoires entre les puissances mondiales. Le Cachemire continuera d'être un point de conflit (la zone de contrôle indienne est la plus problématique, car New Delhi ne permet à aucune tierce partie de participer au règlement), mais une escalade est peu probable sans provocations graves. Nous ne devons pas non plus nous attendre à une invasion chinoise de Taïwan, comme le disent les politiciens américains et leurs médias contrôlés. Les États-Unis et leurs partenaires poursuivront les exercices militaires de routine et tenteront de former une coalition anti-chinoise plus impressionnante.
16:21 Publié dans Actualité, Géopolitique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : chine, inde, myanmar, pakistan, japon, asie, affaires asiatiques, actualité, politique internationale, géopolitique | | del.icio.us | | Digg | Facebook