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samedi, 06 décembre 2008

Japon: polythéisme et homogénéité

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SYNERGIES EUROPÉENNES - VOULOIR (Bruxelles) - Novembre 1988

Les clefs du succès japonais: polythéisme et homogénéité

par Eric BAUTMANS

Kuwabara Takeo nous propose, dans ce recueil d'essais et de conférences, une hypothèse très intéressante: selon lui, les facteurs fondamentaux du suc-cès industriel japonais, issu de la restauration Meiji de 1867, sont l'homogénéité culturelle du peu-ple nippon et le polythéisme ambiant, profondément ancré dans le mental japonais.

Cette dernière hypothèse contraste fortement avec cel-le de Max Weber, pour qui l'éthique protestante est le fondement même du capitalisme moderne.  Ku-wabara Takeo prend position sur cette problématique: "Jeunes, nous pensions que seule l'élimination du bouddhisme assurerait l'amélioration du Ja-pon. Mais à l'heure actuelle, il me semble que les religions monothéistes, qu'il s'agissent du christia-nis-me ou de l'Islam, dans leur recherche d'une division claire et nette entre noir et blanc, ennemi et ami, sont sur le point de nous entraîner vers une guerre nuclé-aire. A la lumière d'une telle menace, nous avons besoin d'admettre l'existence d'autres dieux, de dieux de l'ouverture, de la co-existence pacifique" (p. 151).

Non seulement le monothéisme se trouve être into-lé-rant d'un point de vue idéologique mais il s'est sou-vent opposé à la science moderne. Au Japon, par con-tre, une longue tradition unanime de respect en-vers la science a toujours existé. Cette attitude a, bien évidemment, facilité l'adoption de la technologie européenne.

L'Ere Togukawa

Une des qualités du peuple japonais, selon Kuwa-ba-ra Takeo, est sa séléctivité. Le Japonais n'est pas un imitateur inconditionnel. Ainsi, malgré tous les ef-forts des missionaires chrétiens (1), à partir du XVIè-me siècle, seule une infime minorité de Japo-nais se convertirent.

En 1614, début de l'ère Togukawa, le Japon se fer-me. Seul le comptoir de Nagasaki reste ouvert aux Eu-ropéens. Les dernières innovations en matière d'ar-mements, de mathématiques et de médecine con-ti-nuent à pénétrer au Japon. On trouve également à Na-gasaki une école des Etudes Hollandaises qui tra-duit la majorité des ouvrages de référence techniques publiés en Europe. Il est intéressant de noter que ces aspects sont limités à la sphère scientifique ou techno-logique, le Japon ne s'intéresse pas à la pen-sée politique ou philosophique occidentale.

Pendant ce temps, le confucianisme, code moral de tou-te la nation, permet à l'autorité centrale de mainte-nir l'ordre féodal et de préserver la paix grâce à une politique d'autocentrage longue de deux siècles et de--mi. Au fur et à mesure que la connaissance des clas--siques chinois et japonais se répand à travers tout le pays se forge une culture raffinée partagée par tous.

"Durant le règne des Togukawa, le Japon s'est repo-sé - je ne dirais pas qu'il a dormi. Le pays profita de cet intermède pour ce préparer jusqu'à ce que la né-cessité l'oblige à mobiliser son ingéniosité et sa for-ce pour s'adapter à la civilisation occidentale moder-ne. Nos aïeux ont souffert (2), ils ont travaillé dur et très vite, car ils savaient que leur survie et celle du Japon dépendait du succés de leur entreprise. C'est une révolution culturelle née de l'effort du peuple ja-po-nais tout entier" (p. 77).

La Révolution Meiji

Notre auteur insiste sur le fait qu'il s'agit bien d'une ré-volution, la révolution Meiji, et non d'une restau-ration comme on l'appelle souvent. "Une révolution ne veut pas dire amélioration de ce qui existe déjà, mais le renversement d'un coup brutal de tout ce qui existait. En 1871, l'empereur Meiji proclame une loi en-courageant la consommation de viande et l'adop-tion de la coiffure et de l'habillement occidental" (p.162). D'autres décrets suivirent: abolition (impo-pu--laire) de la vente de jeunes filles, interdiction de se promener nu en public, de porter les sabres dictinc-tifs des samouraïs, etc... Un code civil de type euro-péen fut introduit, une armée de paysans levée, une nou-velle constitution adoptée. Tous ces change-ments cataclysmiques modifièrent de fond en comble la vie du pays.

On a souvent vu des pays sous-developpés, soumis par une invasion ou une colonisation, forcés d'ac-cep-ter une culture et un mode de vie différents des leurs. Ceci ne s'est jamais produit au Japon. D'un point de vue économique, l'Empire du Soleil Levant était sous-développé, au début de l'ère Meiji, mais une culture sophistiquée avait profondément pénétré le peuple. Par la suite, les Japonais se sont mis à ab-sor-ber délibérément des éléments d'autres cultures, tout en maintenant leur indépendance culturelle et po--litique, et réussirent de la sorte à moderniser leur na-tion à une vitesse étonnante.

Homogénéité et citoyenneté

"L'homogénéité qui domina les îles japonaises pen-dant des millénaires, combinée à une société orga-ni-que, rendait toute intervention officielle dans la vie pri--vée des individus plutôt non problématique. Cette tra-dition autoritaire se prolongea au cours de l'ère Mei-ji et propulsa le Japon dans son effort de moder-ni-sation" (p 138).

"En fait, c'est l'holisme  —et non le totalitarisme— qui caractérisa et continue à caractériser la société ja-po-naise; on ne demande pas aux gens d'en faire à leur gré. Dans cette tradition, il n'est pas souhaitable de voir des individus sortir de la norme; c'est, bien sûr, un principe extrêmement utile quand il devient né-cessaire d'entreprendre une tâche collective. Parmi les facteurs expliquant sans doute le mieux la réus-si-te rapide du Japon, il faut citer l'élément holiste et vo-lontariste" (p. 151).

Les paroles d'un ami de Kuwabara Takeo permettent de mieux comprendre l'état d'esprit des Japonais au début de l'époque révolutionnaire: "Yanagito Kunio (1875-1962) m'a dit que, dans sa jeunesse, le mot Ji-yû  (liberté) était utilisé dans le sens de Jiyû Katte ou "fait ce qui te plaît", ce qui était équivalent à Wa-gamama  (égoïsme)" (p. 149).

De même, au Japon, le plus insigne des honneurs qu'un homme puisse porter est celui de citoyen. "Ain--si nommer quelqu'un Shominteki  (citoyen, ci-ta-din) est une marque de respect, c'est lui signifier qu'il est un ami du peuple et en partage ses préoc-cu-pa-tions. Feu le Dr Tomanaga, Prix Nobel de physi-que, était aimé du public japonais et, à ce titre, était ap-pelé Shominteki,  parce qu'il avait la qualité de par-tager les goûts populaires. Au Japon, il existe des différences de niveau social lié à la profession ou à la richesse, mais la culture japonaise pénètre toutes les couches sociales" (p. 183).

Toutes les révolutions réussissent-elles?

"Toutes les révolutions ne réussissent pas. Ainsi, en Afghanistan, le roi Amanullah Khan (règne de 1919-1929) tenta de moderniser par le haut son pays. Mais il se heurta à une telle opposition qu'il dut ab-diquer et fuir" (p.61). On peut également s'étonner du fait que le Japon connut une révolution industriel-le et culturelle au XIXième siècle et non son voisin la Chine, elle aussi en contact avec l'Europe. Kuwa-bara Takeo déclare plus loin, à ce sujet, que "l'exis-tence au Japon d'un Institut des Etudes Hollandaises illustre parfaitement la différence entre les attitudes de la Chine et du Japon envers les civilisations euro-péennes. La Chine, une des plus anciennes civilisations du globe, a été envahie à maintes reprises par des nomades, mais sa culture n'a jamais été réelle-ment menacée. C'est sans doute leur conviction iné-bran-lable dans la supériorité de leur civilisation qui fit en sorte que les Chinois ne ressentirent pas le be-soin de s'intéresser aux innovations occidentales" (p. 129). Rappelons la phrase de Confucius: "Les bar-bares de l'Est et du Nord, malgré leurs chefs avi-sés, sont encore inférieurs aux Chinois privés de tout chef".

Sans conteste cette morgue intellectuelle, encouragée par la dynastie réactionnaire Mandchoue, est en gran-de partie responsable du retard chinois. Rappe-lons également la taille du pays, le centralisme po-li-tique de l'administration et l'intérêt vorace des puis-san-ces occidentales (et ironie du sort, par la suite, du Japon lui-même). Chacun de ces facteurs joua en défa-veur de la Chine.

Mais, "des nombreux facteurs qui expliquent la ra-pi-dité de la modernisation japonaise, je pense que l'é-lé-ment holiste est un des plus importants. Mis à part No--bunaga, il y eut très peu de dictateurs dans l'his-toire du Japon et il n'y en avait pas vraiment besoin car le pays était relativement facile à unir sous un leadership sans devoir recourir à une utilisation ex-ces-sive de la force" (p. 151).

Pour résumer, quels semblent donc, selon Kuwa-ba-ra Takeo, les principaux ingrédients du succès nip-pon? Le polythéisme (la réceptivité), le nationalisme, source de la volonté de progrès (le Japon doit assu-rer son indépendance nationale) et de la force qui sou--tient son effort de redressement et enfin, l'homo-généité ethnoculturelle: le Japon, libre de tout conflit social, culturel ou ethnique, put se consacrer à sa tâ-che de rénovation.

Le Japon et sa spécificité actuelle

Il ne faut pas conclure de ce qui précède que Kuwa-bara Takeo n'est qu'un nostalgique invétéré. "Il y a long-temps, la culture japonaise était symbolisée par le Wabi  et le Shioki,  qui signifient tous deux quel-que chose comme "un goût de la simplicité et de la quié-tude". Cet état d'esprit a disparu depuis belle lurette" (p. 93).

Tout en respectant le théâtre Nô  (4) et un peu moins l'art de l'Haïku  (5), il se présente surtout comme un partisan d'une tradition vivante. D'après lui, il est plus important aujourd'hui pour comprendre la spé-ci-fi-cité japonaise de se pencher sur sa culture actuel-le: celle de la télémanie, de l'excursion de masse, du bis-trot japonais, du journal à énorme diffusion, de la culture de masse; il est plus important de se pencher sur ces aspects que d'étudier les classiques.

Dans son troisième essai, "Tradition contre Modernisation", Kuwabara Takeo nous énonce ses raisons pour ne pas prendre en modèle l'Occident contemporain. Pour lui, chaque culture a ses propres défauts et qualités. Modernisation ne rime pas (ou plus) né-ces-saire-ment avec occidentalisation.

Depuis la fin des années septante, Kuwabara Takeo a insisté sur l'importance de la puissance globale, commerciale, industrielle et financière qui, selon lui, sera comparable, dans le futur, à celle des secteurs militaire ou économique.

Homogénéité et apport culturel

Kuwabara Takeo, par ses thèses holistes et organi-cis-tes, se rapproche de l'école de Kinji Imanishi, le célèbre anthropologue (6), de Tadao Limesao (7) et de Takeshi Umehara (8). L'ancien premier ministre Na-kasone s'inscrit également dans le même mouve-ment: lors d'une allocution prononcée en septembre 86 (9), celui-ci a, en effet, déclaré que le niveau d'é-du-cation au Japon était plus élevé que celui des Etats-Unis, parce que les Japonais forment une race ho-mogène, alors qu'aux Etats-Unis toute une série de minorités se côtoient, avec tous les troubles so-ciaux et raciaux que cela entraîne. 

Kuwabara Takeo démontre amplement dans son li-vre que métissage ou apport culturel n'implique pas mé--tissage ou apport racial. Certains (10), pendant la ré--volution Meiji, avaient préconisé le métissage ra-cial, y voyant une panacée apte à résoudre les pro-blèmes du Japon de l'époque. D'aucuns, aujourd'hui enco-re, dans des pays civilisés, tiennent un dis-cours d'une niaiserie aussi navrante, en refusant de pren-dre acte des réalisations spectaculaires d'un Ja-pon qui manifeste depuis 120 ans une volonté bien arrêtée de conserver son homogénéité.

Eric BAUTMANS.

KUWABARA Takeo, Japan and Western Civilisa-tion,  University of Tokyo Press, 1986, 205 pages, ¥ 3800.

Notes

(1) Les Portugais atteignirent le Japon en 1542. C'est alors que fut tentée l'évangilisation du pays avec le voyage de St. Fran-çois-Xavier (1549). En 1614, le Japon se ferma aux étran-gers et les chrétiens furent persécutés. Le nombre total de chré-tiens était d'environ 600.000 (chiffres des Jésuites). A par-tir de 1858, de nouveaux missionaires furent accueillis. Il y eut même lors de l'occidentalomanie de l'ère Meiji naissante des propositions émanant de personnes et de journaux impor-tants (par exemple, Jiji Shimpo), recommandant la conversion du pays au christianisme.

(2) De très grands maîtres de la peinture classique, Kano Ho-gai et Hoshimoto Gaho, par exemple, mourraient de faim dix ans après la révolution.

(3) En 1957, date de la conférence de Kuwabara.

(4) "Le drame Nô, pour utiliser un exemple classique, n'est pas mort mais il n'est ni contemporain ni classique" (p. 180).

(5) Voir plus particulièrement son onzième essai: "L'art mi-neur du Haïku moderne".

(6) Agé de 85 ans, presque complètement aveugle, il ne reven-dique plus le titre d'anthropologue. Il s'est rendu célèbre par ses études sur les primates. C'est un féroce anti-darwinien. D'a-près Imanishi, l'unité d'évolution ne serait pas l'individu mais l'espèce. Sa thèse sur la ségrégation de l'habitat est très originale.

(7) Directeur du musée d'ethnologie à Osaka.

(8) Anthropologue, responsable de l'établissement d'un centre d'études japonaises à Kyoto.

(9) "M. Nakasone et les Omajiri (métis)" in Le Soir, 26/ XII/86.

(10) Tokahashi Yoshio, publia en 1884 un livre intitulé L'amélioration de la race japonaise.  Il y recommandait le mé-tis-sage entre Occidentaux et Japonais afin d'améliorer la race nippone - le sang européen constituant une "richesse" pour le Ja-pon.

 

vendredi, 28 novembre 2008

Subhash Chandra Bose

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Subhash Chandra Bose
Subhash Chandra Bose werd geboren op 23 januari 1897 in een welstellende Bengaalse familie in Cuttack, Orissa. Zijn vader was een nationalist die lid werd van de Bengaalse Wetgevende Raad. In het voorjaar van 1921 sloot hij zich aan bij het Indisch Nationaal Congres en werd actief in haar jeugdbeweging. Hij kreeg de bijnaam “Netaji”, vrij vertaald “Gerespecteerd Leider”. Tijdens zijn studieperiode begon Subhash te lezen over Swami Vivekananda. Hij raakte onder de indruk van de idealen en opzwepende woorden, die vooral gericht waren aan de Hindu jeugd. Voorts maakte hij een viermaandelijkse “shivir” voor militaire trainingen mee. Hij leerde er geweren te hanteren, paardrijden, taekwondo,… Deze kennis en vaardigheden zouden hem later, bij het oprichten en onderwijzen van de “Azad Hind Fauj”, van pas komen.

Bose voelde zich aangetrokken tot de “Non-Cooperation Movement” van Gandhi, waarbij elke medewerking aan de Britten geweigerd werd. Gandhi stuurde Bose naar Calcutta waar hij samenwerkte met Chittaranjan Das, een andere leider van de Indische nationale strijd. In1921 organiseerde Bose een boycot van de vieringen ter gelegenheid van het bezoek van de Prince of Wales aan India. Hij werd hiervoor gevangen gezet. In 1924 werd hij nogmaals geïnterneerd, ditmaal op verdenking van terrorisme. In januari 1930 werd hij nog maar eens gearresteerd wegens het leiden van een onafhankelijkheidsmanifestatie tegen het Brits gezag in India. Na zijn vrijlating eind september zou hij dankzij zijn populariteit verkozen worden tot burgemeester van de stad Calcutta. Samengevat werd Bose over een periode van twintig jaar elf keer gevangen gezet, zowel in India zelf als in Birma. In het midden van de jaren ’30 werd hij door de Britten uitgewezen en trok hij van 1933 tot 1936 naar Europa om de Indische zaak daar te gaan verdedigen.

Hij trok naar Europa om steun te vragen voor de Indische strijd tegen de Britten, deze steun achtte hij noodzakelijk om het verzet in India te doen slagen. Stalin weigerde, maar de As-mogendheden zegden hun steun toe. Eerder al was Mahatma Gandhi met de nodige egards ontvangen door Mussolini. Bose deed dit nog eens over maar kreeg bovendien steun vanwege het nationaal-socialistische Duitsland. Aan Hitler gaf hij een boek over de Hindu Dharm en cultuur, met daarin het swastika teken verwerkt. Chandra Bose huwde tijdens zijn verblijf in Europa in de jaren ’30 met de Oostenrijkse Emilie Schenkl, die in 1937 zijn secretaresse was. Het koppel huwde in Bad Gastein op 26 December 1937 en kreeg een dochter, Anita, geboren in 1942. Bose onderhield een stevige correspondentie met Schenkl tot in 1942, vele van deze brieven werden later gepubliceerd in ‘Letters to Emilie Schenkl’, uitgegeven door Sisir Kumar Bose en Sugata Bose. 

Bose werd in 1938 verkozen tot voorzitter van het Indisch Nationaal Congres voor twee termijnen maar nam ontslag na ideologische meningsverschillen met Mahatma Gandhi, de apostel van het geweldloos verzet die achter de schermen voortdurend ageerde tegen Bose. Bose heeft ook nooit geloof gehecht aan de tactiek van geweldloos verzet tegen de Britten en predikte actief gewapend verzet. Waar Gandhi beweerde dat wanneer iemand jou slaat, je best jouw andere wang kan aanbieden, meende Bose dat wanneer iemand jou slaat, je twee keer terug mag slaan. Bose stichtte een eigen politieke beweging, het links georiënteerde militant-nationalistische (All India) Forward Bloc. Als symbool kreeg de beweging een tijger op een rood veld met erboven hamer en sikkel. Inhoudelijk was Bose zijn beweging nationaal-revolutionair. Het uitbreken van de Tweede Wereldoorlog zag Chandra Bose als een uitstekende kans om het verzwakte Britse Rijk op de knieën te dwingen in India. Tijdens de befaamde Nagpur-conferentie in juni 1940 werd besloten dat het een socialistische politieke partij zou worden. Kort na de Nagpurconferentie werd Chandra Bose opnieuw gevangen genomen door de Britten. Na de onafhankelijkheid van India werd het een zelfstandige politieke partij met het bolwerk in West-Bengalen.

Bij het uitbreken van de Tweede Wereldoorlog riep Bose op tot massale burgerlijke ongehoorzaamheid uit protest tegen de beslissing van Lord Linlithgow om namens India de oorlog te verklaren. Hij kon Gandhi hier niet van overtuigen, maar toch organiseerde hij massaprotesten in Calcutta. Na een hongerstaking werd hij uit de gevangenis vrijgelaten maar onder huisarrest geplaatst. Subhash kon in januari 1941 de bewakers verschalken en bereikte met de hulp van de Duitse geheime dienst Peshawar door zich als Pathaan te vermommen en zich doofstom voor te doen. Met de hulp van sympathisanten van Aga Khan raakte hij de Afghaanse grens over waarna hij met Duitse hulp tot aan de USSR reisde. Daar nam de NKVD (voorloper van de KGB) Bose mee naar Moskou, maar de USSR kon hem geen steun verschaffen voor de Indische onafhankelijkheidsstrijd. Bose werd bij de Duitse ambassadeur in Moskou ontvangen die hem dadelijk een vliegtuig richting Berlijn aanbood waar minister van Buitenlandse Zaken von Ribbentrop hem de nodige beloften deed. In Berlijn werkte Bose mee aan het oprichten van het Indisch Legioen (in totaal ongeveer 4.500 manschappen) waarvan vele soldaten dienst zouden doen in de bunkers aan de Atlantikwal. Oorspronkelijk werd het Indisch Legioen ondergebracht bij de Wehrmacht, later bij de Waffen SS. Leden legden de volgende eed af waaruit duidelijk blijkt dat Bose als leider van India moest aanzien worden: "Ik zweer bij God deze heilige eed dat ik zal gehoorzamen aan de leider van het Germaanse ras en Rijk, Adolf Hitler, als bevelhebber van de Duitse strijdkrachten in de strijd om India, wiens leider Subhas Chandra Bose is.” De steun en sympathie die Bose genoot bij de As-mogendheden deed de Britten schrikken en uit recent vrijgekomen documenten blijkt dat de Britten opdracht hadden gegeven aan de Special Operations Executive (SOE) van de Britse inlichtingendiensten om Bose te laten vermoorden.

In augustus 1942 verboden de Britse autoriteiten alle activiteiten van het Forward Bloc. In 1943 werd Bose overgebracht naar Azië. Hij reisde aan boord van de Duitse duikboot U-180 langs Kaap de Goede Hoop en mits nog een overstap op een Japanse duikboot naar het Verre Oosten. Daar zou hij de leiding op zich nemen van het Indisch Nationaal Leger (INL), het Azad Hind Fauj, dat op z’n hoogtepunt meer dan 80.000 manschappen zou tellen en aan de zijde van de Japanners vocht tegen de Britten. Het INL was gevormd uit ex-plantagearbeiders uit Singapore, Maleisië… en uit Indische krijgsgevangenen, daarbij had het ook een aparte vrouweneenheid. Zijn soldaten leerde hij de leuze “Jai Hind” (“Overwinning aan India”) te schreeuwen, dat hun enthousiasme zou vergroten. Met Japanse financiële, politieke en diplomatieke hulp vormde hij de Azad Hind Regering in ballingschap, de Voorlopige Regering van Vrij India. Deze werd erkend door negen As-mogendheden en bondgenoten, maar ook door de USSR. Subhash had altijd gehoopt en erop gerekend dat heel wat Indiërs in militaire dienst bij de Britten zouden overlopen naar het INA. Dit heeft zich nauwelijks tot niet voorgedaan, integendeel, toen de oorlog vorderde kreeg het INA zelf meer en meer met desertie te maken. Het Forward Bloc voerde ondertussen verder campagne in India, maar zonder centrale leiding of organisatie. Na de oorlog zou dit één van de voornaamste redenen blijken voor de tweespalt in het Forward Bloc tussen hen die eerder een marxistische lijn volgden, en de volgelingen van Chandra Bose die een mix van nationalisme, socialisme en Indisch spiritualisme verdedigden.

Over de politieke visie van Subhash Chandra Bose bestaan diverse versies. In elk geval had hij een hoge dosis Realpolitik in zich, wat voor velen verklaart waarom hij sympathie zocht bij en had voor de As-mogendheden. Toch is dit een te eenzijdig beeld. Uit zijn correspondentie bleek naast zijn afkeer voor gehoorzaamheid aan de Britten ook dat hij een zeker respect vertoonde voor de systematische, methodologische aanpak van en disciplinaire visie op het maatschappelijke leven van de Britten. In Engeland zou hij zelfs van gedachten wisselen over de toekomst van India met leden van de Labour Party en politieke denkers als Lord Halifax, George Lansbury, Clement Attlee, Arthur Greenwood, Harold Laski,... Subhash Chandra Bose meende dat een vrij India nood had aan een autoritair, socialistisch bestuur en had ook voor het nieuwe Turkije van Kemal Atatürk enige sympathie. De Britten weigerden overigens Bose de toelating om Atatürk te ontmoeten in Ankara. Niemand van de Britse Conservatives wilde ooit contact met Bose, gezien hij een aangebrand politicus uit één van de kolonies was en de Conservatives de status van “Dominion” aan India geweigerd hadden in de jaren ’30. Ten slotte blijkt uit zijn geschriften dat Subhash Chandra Bose de raciale politiek van het nationaal-socialisme afkeurde (denken we ook terug aan zijn Oostenrijkse vrouw) en dat hij autoritair bestuur zoals eerder vermeld bewonderde. Geen enkel democratisch bestuur was volgens Bose geschikt om af te rekenen met de zware sociale problemen en armoede in India. Een autoritaire staat achtte hij nodig voor nationale heropbouw.

Subhash stierf in verdachte omstandigheden (een nooit opgehelderd viegtuigongeval) in augustus 1945. Bose was één van de meest gerespecteerde kopstukken van de Indische bevrijdingsbeweging tegen het Brits imperialisme.

jeudi, 13 novembre 2008

J. Parvulesco: Reconnaître le Pôle indien du Grand Continent Eurasiatique

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ARCHIVES DE "SYNERGIES EUROPEENNES" - 1996

 

 

Jean PARVULESCO:

Reconnaître le Pôle Indien du Grand Continent Eurasiatique

 

Nos thèses géopolitiques sont désormais parfaitement connues, qui ouvrent le concept de la plue Grande Europe franco-allemande —le Pôle Carolingien— aux espaces eurasiatiques décisionnels de la Grande Sibérie et du "Projet Continental Grande-Sibérie" (PCGS), du Japon et de l'Inde, à la perspective révolutionnaire totale de ce que nous avons nous-mêmes su appeler l'Empire Eurasiatique de la Fin. A l'heure présente, l'axe fondamental de la politique eurasiatique franco-allemande apparait comme étant oriénté —et d'une manière particulièrement accentuée avec le retour du gaullisme au pouvoir— vers l'Inde, et partant, vers les nouvelles relations spéciales, aussi actives que profondes, en train de s'établir —souterrainement encore, mais comment faire autrement en temps de déréliction— entre la France gaulliste et l'Inde en marche vers l'émergence à terme rapproché de son nouveau Réveil National, voire de son Eveil Final. J'entends des relations spéciales destinées à forger en avant un autre destin du Grand Continent Eurasiatique, un autre destin de future politique planétaire impériale de celui-ci, et dont notre génération se doit à l'heure actuelle d'assumer héroïquement la nomination tragique et toutes les charges révolutionnaires de terrain. Car, devant faire face nuptialement au Pôle Carolingien, il est né, à présent, le Pôle Indien, réminiscence de l'Anabase initiatique de notre Alexandre le Grand, et de la haute lumière aryenne et védique d'avant l'obscurcissement de l'être en nous, et il se développe, inexorablement, au cœur même du mystère vivant de l'histoire mondiale à sa fin.

 

Aussi n'avons-nous plus à le cacher, des forces supérieures sont déjà à l'œuvre, dans notre camp et même hors de notre camp, des forces que l'on doit considérer, pour le moment, comme essentiellement occultes, des forces révolutionnaires mises en convergence par une nouvelle sommation polaire de l'histoire mondiale et qui, toutes, se trouvent engagées en avant dans le cadre du nouveau processus impérial planétaire dont le rapprochement franco-indien proposé, aujourd'hui, par le gaullisme visionnaire plus ou moins déjà en place à Paris, se veut le symbole ardent, la poussée d'avant-garde décisive, conçue pour qu'elle entraîne le reste, avec elle, et tout avec elle, vers les ultimes accomplissements de sa propre définition d'elle-même, et celle-ci déjà à l'œuvre, partout. Voir, à ce sujet, le travail de définition en profondeur, définition en termes de géopolitique impériale et révolutionnaire de l'actuelle histoire active du monde, auquel je me suis moi-même livré dans un récent entretien avec Mary de Rougement, Francis Mader et Nicolas Beaujolin, entretien publié par Vouloir,  Bruxelles, 1995, sous le titre Pourquoi la Géopolitique?, ainsi que tout le faisceau d'approches géopolitiques de combat dont Vouloir  s'est fait le véhicule européen privilégié, et qui se trouve en plein développement.

 

Ainsi se fait-il que, pour nous autres, tout ce qui tend à s'opposer au projet grand-continental révolutionnaire eurasiatique en cours —et plus particulièrement au rapprochement contre-stratégique transcendantal de la France et de l'Inde constituant déjà les fondations vives, irradiantes, l'axe central de toute politique grande-continentale eurasiatique, actuelle et à venir— nous apparaît comme une démarche subversivement concertée contre nous-mêmes, dont il faut que nous prenions immédiatement toutes les mesures visibles et cachées, pour mieux pouvoir en neutraliser la manifestation interceptée, et l'anéantir sur place.

 

Nous sommes en état de guerre politique totale pour la libération ontologique du Grand Continent et pour la domination finale du monde et de l'histoire finale du monde à sa fin, et tout ce qui fait obstacle à notre volonté impériale d'être et de liberté, à notre volonté de liberté ontologique et cosmique, doit être anéanti, et le sera en temps utile.

 

Quelles responsabilités pour l'actuelle crise stratégique franco-indienne?

 

La vigilance, une extrême vigilance de chaque instant, nous semble donc plus que jamais a l'ordre du jour. Car ce n'est quand même pas pour rien que le gouvernement du Premier Ministre indien Narasimha Rao s'est vu dans l'obligation d'annuler —au dernier moment— la réunion, prévue pour novembre 1995, de la "Comission Economique Franco-Indienne", ce qui a également eu pour effet non seulement du suspendre la visite officielle du ministre français de l'Industrie, Yves Galland, mais aussi de bloquer le départ pour New Delhi, organisé, tout comme la visite du ministre de l'Industrie, à l'occasion des travaux de la "Commission Economique Franco-Indienne", d'une cinquantaine de grands patrons représentant les industries françaises de pointe, ainsi que de certains éléments d'encadrement du "Centre National du Patronat Français" (CNPF).

 

L'attitude négative de la partie indienne, plus que justifiée, aura manifestement été provoquée par le fait que, à l'heure actuelle, le Pakistan négocie —très ouvertement, dans une dialectique de sidération— avec Serge Dassault et les délégations françaises à l'armement et certaines autres, l'achat stratégique, pour un montant de base —qui sera sûrement à revoir ultérieurement à la hausse— d'au moins 5 milliards de francs, de 40 Mirages 2000-F armés du nouveau missile français air-air Mica. Dans les milieux politico-militaires, voire diplomatiques, proches du gouvernement d'Islamabad, on prétend —et l'on va s'évertuer même à ce que cela ne tarde pas trop à se savoir— que le feu vert nécessaire, et même que tous les feus verts ont déjà été donnés par les autorités gouvernementales fransaises compétentes, et que la signature définitive de l'accord final interviendrait avant la fin décembre 1995.

 

Le fait est donc certain que, grâce aux vecteurs supersoniques ainsi fournis par la France, New Delhi risque de se trouver bientôt à la portée immédiate d'une intervention nucléaire directe du Pakistan: situé à 300 km de la frontière pakistanaise, New Delhi peut être atteinte en 3 minutes par les Mirage 2000-F supersoniques adaptés à la véctorisation des engins nucléaires pakistanais.

 

Il faut aussi ajouter à cela que le contentieux franco-indien va se révéler déjà alourdi par la fourniture en cours, au Pakistan, de trois sous-marins français conventionnels de la classe Agosta, armés des missiles ultra-modernes SM 39, dernière réalisation majeure de la technologie militaire française actuelle, sous-marins que les chantiers de Cherbourg ont pris en charge pour le compte d'Islamabad.

 

"Les quinze premiers stagiaires du chantier pakistanais KSEW —l'apprend-on par Le Monde, sous la signature réputée significative de Jacques Isnard— viennent d'arriver à l'arsenal de Cherbourg pour y être formés. D'ici à 1999, deux cent quarante Pakistanais passeront par l'arsenal. L'accord prévoit que le premier sous-marin sera construit à Cherbourg. La coque du deuxième bâtiment sera livrée en tronçons montés par le client. Des sections du troisième sous-marin seront assemblées dans les chantiers au Pakistan" (Le Monde, 28.XII.1995).

 

L'actuel gouvernement gaulliste de Paris, dont nous connaissons pourtant les orientations géopolitiques et le projet grand-continental révolutionnaire d'avant-garde, entendrait-il donc soutenir, ainsi, ouvertement, et en quelque sorte contre ses propres positions métapolitiques constitutionnelles de base, le dispositif d'encerclement continental de l'Inde et l'investissement stratégique de l'ensemble méridional, océanique, du Grand Continent, par les forces de la ligne du front islamique fondamentaliste, ligne de front supranationale, subversivement engagée, ces forces, sur l'arc de cercle allant des Philippines et du Pakistan jusqu'au Maghreb destabilisé par le même fondamentalisme révolutionnaire, nocturne, antihumain, et dont l'heure s'annonce aussi comme tout à fait proche —soutenue ou non par la Turquie— sur le flanc Sud des espaces en refondation politique totale ayant appartenu à l'ancienne Union Soviétique où à ses zones de pénétration ou d'influence?

 

Conme une tache douteuse sur un cadavre récemment maquillé, apparaît donc ici une très flagrante contradiction entre les grandes doctrines géopolitiques du gaullisme révolutionnaire actuellement au pouvoir à Paris ne fût-ce qu'en la personne de Jacques Chirac, le gaullisme foncièrement attaché aux projets concernant le proche avenir impérial du Grand Continent eurasiatique et aux engagements de l'Europe à l'égard du Pôle Indien émergeant, et les décisions subversivement aliénantes d'une administration politiques indûment encore en place, non entièrement reconsidérée à cette heure, et qu'il s'agit donc de faire réglementer au plus vite. Et je préciserai, la mettre au plus vite hors de l'état de nuire.

 

N'est-il pas, alors, de notre devoir de publier, ouvertement et tant qu'il est encore temps, une contradiction qui en l'occurrence nous semble des plus troublantes, voire des plus suspectes, et, surtout à suspecter? Or c'est bien ce que nous faisons, nous suspectons certaines instances administratives en place soit d'inadvertence manifeste et dans tous les cas coupables dans la conception même de leurs initiatives, soit de haute trahison car, n'est-ce pas, co-ment appeler autrement le fait de servir les intérêts d'une puissance étrangère mobilisant sa volonté de domination planétaire contre les plus hauts intérêts politico-révolutionnaires nationaux et grands-continentaux eurasiatiques de la France?

 

Et d'autant plus troublante, cette soudaine “obstaculisation” de la politique grande-continentale eurasiatique commune de la France et de l'Inde que les deux portes de verrouillage et de contrôle du flux des décisions administratives supérieures de l'Etat français, le Secrétariat Général de la Présidence de la République et la Direction de Cabinet du Premier Ministre, se trouvent entre les mains de, respectivement, Dominique de Villepin et Maurice Gourdault-Montagne, tous deux des diplomates de carrière ayant effectué des longs séjours en Inde, dont ils connaissent les problèmes actuels, et que l'on connaît comme entièrement acquis à la cause de l'Inde et à la ligne indienne secrète qu'avait en son temps définie, pour ceux du "premier cercle", le Général de Gaulle lui-même. Il nous reste à tirer au clair le contexte profond où s'est développée cette "troublante affaire", et, surtout, ce qui se dissimule spectralement derrière celle-ci, dans une succession de faux-fonds encore plus troublante, obscure et mortelle.

 

Les Etats-Unis poussent la Chine contre le Bloc Eurasiatique

 

Car, en Asie, la terre brûle. Les feux des volcans souterrains de l'histoire grondent à nouveau, les invisibles digues de la paix menacent de voler en éclats. L'avènement au pouvoir, à Paris, d'un Président de la République incarnant une nouvelle rémontée du "grand gaullisme" révolutionnaire et, de par cela même, la soudaine réactivation politico-stratégique du Pôle Carolingien et des projets grands-continentaux eurasiatiques véhiculés par celui-ci, a forcé les Etats-Unis à y répondre par une contre-offensive du même niveau planétaire.

 

Aussi le premier objectif de l'actuelle contre-offensive anti-européenne de Washington apparaîtra-t-il comme étant celui d'installer d'urgence un contre-feu grand-continental eurasiatique en s'engageant à soutenir une nouvelle émergence politico-militaire de la Chine pour faire pièce, sur le Front Sud du Grand Continent, aux mobilisations en cours du Japon, de l'Inde et de la Russie Sibérienne dans le cadre de la nouvelle unité continentale promue par l'Europe du Pôle Carolingien.

 

De même que, avec la Guerre du Golfe, les Etats-Unis avaient déjà essayé de couper l'Europe de l'Ouest de ses sources d'approvisionnement pétrolier les plus immédiates, les Etats-Unis comptent à présent tourner la future identité impériale du Grand Continent Eurasiatique par le Sud, en exacerbant, sur le terrain, le fondamentalisme révolutionnaire islamique tout en faisant semblant —dialectique opérationnelle du leurre— de le combattre à outrance.

 

Une des stratégies opérationnelles spécifiques de la CIA —et autres agences assimilées— exige, en effet, certains l'ont quand même bien compris, que, lors de la mise en marche de toute grande manœuvre politico-stratégique d'ensemble, l'exhibition préliminaire soit prévue d'un écran diversionnel et de contre-assurance: à l'instant même où Washington décide de soutenir la formidable révolution islamique fondamentaliste naissante, les agences de désinformation active de la CIA s'arrangent pour que par la voie des médias sous contrôle ou par des canaux diplomatiques à couvert l'on apprenne que les Etats-Unis s'engagent à fond dans le combat contre la subversion fondamentaliste planétaire, envisageant de conduire des opérations de déstabilisation intérieure en Iran. Un nouveau budget de 20 millions de dollars a même été officiellement approuvé, le 21 décembre 1995, par la Chambre des Représentants, pour "modérer", par des voies plutôt spéciales, ce que le speaker Newt Gingrich appelle, lui, et d'ailleurs à juste titre, la "menace permanente pour la vie présente sur cette planète" venant de la part d'un "Etat terroriste", etc.

 

D'une manière analogue —la même stratégie du leurre, de l'écran en dédoublement diversionnel— au moment précis où Washington avait décidé son opération de déstabilisation intérieure du nouveau pouvoir gaulliste grand-européen en place à Paris, déstabilisation envisagée par l'exacerbation de certains conflits sociaux d'envergure, de nature de plus en plus ouvertement insurrectionnelle, visant jusqu'à la rupture intérieure même de la société française actuelle, des conflits, par ailleurs, manigancés et conduits, secrètement, sur le terrain, par des éléments de la CIA opérationnellement détachés sur Paris et sur toute la France, la CIA montait, en plus, une action d'écran préventionnel où certains de ses éléments —plus ou moins déjà "brûlés"— étaient sacrifiés à dessein —et ce sur des indiscrétions directement filtrées depuis l'Ambassade des Etats-Unis a Paris— dans la cadre d'un montage obligeant quand même les structures françaises de sécurité à procéder au démantèlement d'un soi-disant "réseau américain", fabriqué de toutes pièces, un fantasmagorique "réseau américain de renseignement, de pénétration et d'influence à couvert des milieux gouvernementaux et diplomatiques parisiens", en somme le double en faux du vrai lui aussi là, mais celui-ci profondément secret, et déjà prêt à servir, à passer à l'action.

 

De manière à ce que, ultérieurement, et pour être plus précis à la veille même du déclenchement des grèves insurrectionnelles organisées, en France, en décembre 1995, par la CIA agissant à travers ses entrées spéciales à Force Ouvrière et au sein aussi de certains clans dormants de la nébuleuse trotskyste, Washington puisse annoncer, officiellement, que la CIA se serait vue intimer, sur dispositions supérieures, de renoncer immédiatement à toutes ses activités de renseignement ou d'influence à couvert en territoire français.

 

Enfin, du point de vue de l'impérialisme planétaire grand-océanique des Etats-Unis, la mission géopolitique dérivée de la Chine happée par leur propre dispositif d'intervention vers le cœur du Grand Continent Eurasiatique devient ouvertement une mission anti-continentale, de poussée divergeante et déstabilisatrice, mettant directement en danger les passions communautaires grand-continentales de l'Inde, du Japon, de la Grande Sibérie. Et ne l'oublions pas: la nouvelle émergence politico-militaire de la Chine en tant que superpuissance eurasiatique et planétaire devant faire contre-poids aux projets européens pour l'engagement révolutionnaire impérial du Grand Continent passe, aujourd'hui, par la normalisation —dans le sens brejnevien du terme, le bon, que l'on avait si parfaitement su exploiter, le bel été 1968, à Prague— de l'ensemble de la situation politique du Sud-Est asiatique et, surtout, par l'intégration forcée, à brève échéance, de la "province rénégate" de Taïwan.

 

D'où le formidable regain des mouvements de forces en remontée, encore indéchiffrables, des activités politico-militaires souterraines dans tout le Sud-Est asiatique, mouvements dont le Pakistan sous l'invisible contrôle américain, représente aujourd'hui la plate-forme opérationnelle décisive, lieu de rencontre et de compétition révolutionniare des poussées américano-chinoise et américano-islamiste, en attendant que le troisième terme américain finisse par devenir lui-même invitation à un choix non dialectique, et comme le butoir même de la déflagration finale.

 

Et que revive le Pôle du Soleil Levant!

 

De toute évidence, c'est bien pour répondre au retour en force de la Chine sur la scène de l'histoire actuelle du Grand Continent que le Japon a déjà dû prendre confidentiellement une série de contre-mesures en projet qui, par des paliers successifs, ont fini par faire que, aujourd'hui, l'Empire du Soleil Levant —ce que nous appelons le Pôle du Soleil Levant de notre futur Empire Eurasiatique de la Fin— dispose du deuxième budget militaire national de la planète, immédiatement après les Etats-Unis.

 

D'autre part, Tokyo est à l'heure actuelle en train de procéder —vue la situation de plus en plus dramatiquement préoccupante dans la région, où la Chine ne pourra désormais plus ne pas agir ou, comme on dit, "ne pas commettre l'irréparable" à l'intégration accélérée en une seule structure opérationnelle sommitale des services de renseignements politico-militaires des trois Armées - Terre, Air, Mer de l'Etat-Major Général, et du Ministère de la Défense.

 

En même temps, émanation directe du sommet intégré des services de renseignements militaires, une "délégation spéciale, permanente et secrète" va prendre sous son contrôle immédiat la direction générale du nouvel ensemble en préparation des services civils de la sécurité. Des informations de source tout à fait certaine et amie font en effet état non seulement d'une très prochaine "réorganisation en profondeur" de l'ensemble des forces civiles de la sécurité nationale, mais aussi de la mise sur pied, en urgence, de nouvelles structures de renseignement politico-opérationnel se situant à des niveaux inhabituels, polarisés par les dialectiques spéciales de la "guerre secrète", voire la "guerre occulte" et les zones d'investissement social et des influcnces politiques et culturelles clandestines de celle-ci. De tous ces changements en cours, une assez vertigineuse signification semble se dégager, qui concerne en premier lieu le renouveau intérieur de notre Pôle du Soleil Levant et sa nouvelle émergence impériale actuelle, eurasiatique et planétaire.

 

Le retour, au Japon, des Forces Armées au premier plan du pouvoir politique agissant ne saurait cependant pas être fait ni même envisagé —on le comprendrait à moins— sans l'appel à une couverture tout à fait massive des forces civiles nationales. Ainsi la désignation à la tête du "Parti Libéral Démocrate" (PLD) de Ryutaro Hashimoto, vice-premier ministre, en charge du MITI (Ministère du Commerce International et de l'Industrie), l'homme de la ligne nationale et impériale japonaise la plus intransigeante face aux Etats-Unis, ainsi que l'élection, le 27 décembre dernier, d'Ichiro Ozawa, à la direction du Parti de la Nouvelle Frontière, le Shin-shito, doctrinaire d'une réconsidération totale de la place actuelle du Japon dans le cadre de la nouvelle politique planétaire, prennent-elles soudain une importance qui dépasse de loin le seul plan des affaires politiques intérieures nippones, pour rejoindre la zone décisive suprême où émerge à nouveau le Pôle du Soleil Levant et ses grandes missions eurasiatiques et planétaires.

 

D'ailleurs, dans l'ombre, les jeux sont faits: en avril 1996, ce sera bien Ryutaro Hashimoto qui sera le nouveau Premier Ministre du Japon, le douteux et néfaste Tomiichi Murayama, socialiste, devant passer à la trappe. Ou, peut-être, tout de suite.

 

Les retrouvailles de Jacques Chirac, de Jacques Chirac en tant que Chef de l'Etat français, avec le Japon, porteront donc Jacques Chirac, en juin prochain, à la rencontre de Ryutaro Hashimoto, l'homme du Grand Renouveau, tout comme, pour sa nouvelle rencontre avec l'Allemagne, le nouveau Chef de l'Etat français s'est porté à la rencontre de Helmut Kohl, à Baden-Baden, en décembre 1995, où s'est faite la Nouvelle Europe.

 

Jacques Chirac et Helmut Kohl, à Baden-Baden, décembre 1995

 

Or cette même évolution polaire au sein des services de renseignements militaires, interceptée au Japon, est très vite apparue en Europe aussi: à la suite de la réunion franco-allemande au sommet ayant eu lieu en décembre 1995 à Baden-Baden, entre Jacques Chirac et Helmut Kohl, la France, l'Allemagne, l'Italie et l'Espagne ont à leur tour décidé la mise en piste d'urgence d'une communauté polaire de l'ensemble des services de renseignements militaires européens, le "noyau dur" des quatre de Baden-Baden devant aussi assurer, par la suite, l'accueil des autres services de renseignements militaires des pays intégrant la plus Grande Europe.

 

En plus, lors de cette même réunion franco-allemande de Baden-Baden, il a été également décidé de la mise en commun de l'Aérospatiale française et de la DASA allemande (DASA, Daimler Benz Aerospace) dans le cadre d'un vaste programme européen pour l'industrie des missiles, des satellites et de la poursuite des projets spatiaux grands-européens. Ce programme prévoit la mise en œuvre immédiate du satellite-espion à infra-rouges Hélios II (12 milliards de francs) et du satellite-espion à radar Horus (13 milliards de francs). L'exécution de ces premiers programmes sera confiée, simultanément, aux usines allemandes de Friederichshafen et aux établissements industriels français de Cannes.

 

En fait, c'est bien le 8 décembre 1995, à Baden-Baden, que le noyau politico-militaire originel de notre futur Empire Eurasiatique de la Fin est né, et que "la saison de Yalta" a véritablement pris fin. C'est depuis ce jour-là que nous sommes libres.

 

Baden-Baden c'est en tout état de cause le Contre-Yalta, le triomphe final de l'Europe face à la conspiration géopolitique négative des Puissances Extérieures.

 

Ce jour-là, c'est la vérité de notre propre vérité qui nous a donc rendus libres, et les pouvoirs de projection historique directe de cette vérité déjà agissante-là, déjà à l'œuvre. Tombée, à Yalta, sous la domination des Puissances Extérieures dont, en premier lieu, les Etats-Unis et l'Union Soviétique, ainsi qu'en en subissant, dans l'ombre, le terrible assujetissement aux puissances occultes se tenant derriere celles-ci et les manipulant à des fins encore et toujours inavouables, l'Europe —la plus Grande Europe— retrouve donc à présent sa place dans la nouvelle histoire révolutionnaire du monde, et sa souveraineté entière, à Baden-Baden, où, tout comme le Général de Gaulle avait donné à la France sa liberté nucléaire, Jacques Chirac a donné à l'Europe sa liberté spatiale et supraspatiale ultime. Ainsi voit-on qu'il n'y a de liberté que militaire, qu'il n'y de liberté qu'impériale.

 

Quelque part, tout se passe comme si, forcé par les délais de la contrainte extérieure et les circonstances négatives intérieures que l'on vient de voir à l'œuvre, Jacques Chirac ait compris que, pour faire l'Europe —la Grande Europe— en temps encore utile, ce n'est pas l'Europe économique, ni même l'Europe politique, voire l'Europe des cultures qu'il faille envisager de faire, mais l'Europe Militaire. Idée impériale s'il en fut, à laquelle tous les partenaires européens de la France et l'ensemble des Pôles de Soutènement de la future grande entité impériale eurasiatique —le Japon, l'Inde— ne peuvent pas ne pas répondre immédiatement, et idée par laquelle la France y trouve automatiquement sa place centrale, décisive, sa place prédestinée. C'est l'dée pour laquelle il fallait se battre à mort. Et c'est pourquoi Jacques Chirac s'est battu à mort. Avec, à ses côtés, Helmut Kohl, jusqu'à la fin.

 

L'Europe Militaire, c'est l'Europe de l'Espace. Pour que l'on puisse se rendre compte de la portée profondément cachée, inavouable, des enjeux régis par la rencontre et les décisions au sommet prises en décembre 1995, à Baden-Baden, par Jacques Chirac et Helmut Kohl, il suffit de savoir que le fort suspect John Deutch, directeur démocrate de la CIA démocrate de Bill Clinton, s'est lui-même déplacé, par quatre fois, à Bonn, pour essayer de dissuader Helmut Kohl de suivre Jacques Chirac dans ses projets métapolitiques visionnaires concernant le Grand Continent Eurasiatique commis en chantier par le gaullisme révolutionnaire. De son côté, Bill Clinton n'a pas hésité à téléphoner lui-même, à plusieurs reprises, à Helmut Kohl, auprès duquel il dépêcha aussi, au moment culminant, l'étrange secrétaire d'Etat Richard Holbrooke ("l'homme sans bagages et de tous les chantages"). Mais rien n'y fit.

 

La vision gaulliste révolutionnaire hantant Jacques Chirac, la vision de la plus Grande Europe et de ses futures destinées impériales eurasiatiques, et la résolution inspirée, fidèle et géniale, allemande, de Helmut Kohl, sont parvenues, ensemble, à donner un nouveau commencement à l'histoire européenne du monde et aux destinées planétaires de l'Europe interdite d'histoire depuis 1945.

 

En décembre 1995, grâce à Jacques Chirac et à Helmut Kohl, une nouvelle superpuissance planétaire est née, la plus Grande Europe, mobilisant, pour commencer, 400 millions d'hommes et se trouvant déjà en mesure d'aligner une puissance politico-militaire, économique, démographique et culturelle face à laquelle les Etats-Unis se retrouvent dans une situation de seconde, voire de troisième position, situation que Washington et les tenants de la puissance américaine intérieure, occulte, sont loin de pouvoir accepter, même devant le fait accompli. La troisième guerre mondiale est donc en principe là.

 

Il est donc grand temps que la communauté polaire des renseignements militaires de l'Europe de l'Ouest —dont les buts plus proprement politiques sont encore tenus sous réserve— puisse passer au stade suivant, déjà. Stade où, dans la perspective de ce que nous appelons, nous, le projet de l'Empire Eurasiatique de la Fin, cette communauté polaire du renseignement militaire européen vienne à intégrer, aussi, les représentations au sommet des services analogues de la Russie, du Japon et de l'Inde.

 

''La Quatrième Clef de Voûte"

 

On voit bien à présent par où passe la ligne de front. Toujours indiscernable pour les regards non prévenus, un même ennemi —toujours le même— se tient à l'affût derrière tout ce qui s'oppose à l'actuelle volonté impériale grande-européenne de la France gaulliste et de ceux qui se sentent appartenir à la même communauté de haut destin, appelés par la même mission secrète suprahistorique.

 

Les grèves insurrectionnelles antinationales et anti-européennes de décembre 1995 en France, le sabotage des relations stratégiques de la France avec le Pôle Indien portent, nous nous en sommes quand même aperçus à temps, les traces corrosives de la même griffe. Il faut seulement réapprendre à voir, toutes les grandes batailles vont être, désormais, comme toutes les guerres vraiment grandes, de plus en plus occultes, de plus en plus située dans les territoires de l'invisible. Il faudra donc que nous nous y fassions, et tout de suite.

 

Ainsi, laissant brutalement de côté les prétextes de diversion nécessaires à la circonstancialisation de toute manœuvre poursuivie jusque sur le terrain, les grèves insurrectionnelles "françaises" de décembre 1995 n'avaient en réalité qu'un seul but, un but qui expliquera les étranges complicités de fait dont celles-ci avaient bénéficié de la part de qui l'on s'eût attendu vraiment le moins: car, en réalité, ce but stratégique de pointe était celui de saboter —sur le coup même, et en même temps d'installer les conditions d'une continuité de cette même action de sabotage dans le futur— l'actuelle politique totale d'intégration grande-européenne de la France gaulliste et partant d'empêcher la naissance de ce que Hervé de Charette, le ministre des Affaires Etrangères de Jacques Chirac, appelait, dans son extraordinaire entretien avec Le Figaro  du 20 décembre 1995, la Nouvelle Europe. Hervé de Charette: "Pour la première fois de notre histoire, nous allons réaliser l'unité de notre continent. Ce sera mieux que Charles Quint".

 

Dans Le Figaro  encore, Michel Massenet, Conseiller d'Etat, écrivait bien clairement, le 18 décembre dernier, au sujet de Marc Blondel: le leader FO vise l'Europe au cœur, et il le sait. Mais nous aussi on le sait.

 

Or tout cela devient d'une gravité ultime, dramatique, provocante, mais incontournable aussi, quand on a compris que dans les plans des agitateurs conspirationnels socialo-communistes et trotskystes le mois de janvier 1996 les masques devront tomber, tous, et que les mouvements insurrectionnels soi-disant syndicalistes vont se présenter ouvertement comme un "Front Social uni" contre l'Europe ("contre l'Europe et pour l'emploi", etc).

 

Il faudra donc faire le nécessaire. Car ces rassemblements de toutes les conspirations, de tous les complots anti-français et anti-européens mobilisés pour appuyer le grèves insurrectionnelles de janvier devront alors être tirés au clair, et il y aura dans ce cas des surprises exécrables et immenses à faire prendre en compte même chez certains de nos plus proches amis. L'histoire de France s'apprête à devoir vomir un long passé de ténèbres, et ce sera son rituel vomitto negro, toutes les boues noires de l'ancienne tragédie française et le grand renouveau salutaire.

 

D'autre part, nous avons tenu à situer dans son contexte profond l'actuel sabotage des relations stratégiques franco-indiennes. Point n'est-il donc besoin d'insister pour que l'on comprenne que, dans l'horizon dialectique de cet ensemble de considérations finales, l'inconcevable dérapage administratif français convaincu de fournir à un Etat qui, comme le Pakistan, appartient à la ligne de front des puissances subversivement engagées contre la France et contre la totalité agissante de la grande politique eurasiatique de la France gaulliste, du matériel stratégique hautement significatif, destiné à assumer un rôle singulièrement décisif dans les déroulements prévisibles d'une crise désormais sans doute prochaine, devient, en quelque sorte symboliquement même, une action dont il faut signaler, et produire, aussi, en direction de nos compagnons et camarades du régime gaulliste révolutionnaire actuellement en place à Paris, le suivi des culpabilités cachées, les mesures d'arrêt et de démantèlement de l'opération en cours, défaire donc par fidélité ce qui a été fait ou a failli se faire par trahison, envisager les sanctions exigées ne fût-ce que par l'extrême gravités des enjeux et de l'heure.

 

Telle est notre tâche, notre devoir et notre volonté d'être là, précisément, où nous appellent les missions qui sont nôtres. La sécurité politico-révolutionnaire qu'une entreprise géopolitique continentale de la taille de celle dont nous nous voulons et nous sommes l'avant-garde idéologique et activiste ne se divise pas, de même que ne se divise le principe agissant de l'Imperium dont nous annonçons le prochain avènement et dont le Pôle Indien est la quatrième clef de voûte, la clef de voûte tournée vers la lumière antérieure de notre propre être, de notre plus haute conscience révolutionnaire et impériale à venir.

 

Jean PARVULESCO.

 

vendredi, 03 octobre 2008

Histoire des Sikhs

 

Synergies Européennes - Ecole des cadres - Wallonie/Lorraine - Octobre 2008 - Ouvrages à lire

Table des matières

DU NANAK PANTH AU KHALSA
Le Panjab : région, histoire et cultures
Les débuts du Panth (vers 1500-1606)
La transformation du Panth et la formation du Khâlsâ (1606-1708)
DE LA CONQUETE DU PANJAB A LA PARTITION
Des révoltes paysannes au royaume du Panjab et aux guerres anglo-sikhes (1708-1849)
De l'annexion du Panjab aux lendemains de la Grande Guerre (1849-1919)
Dans la lutte pour l'interdépendance (1920-1947)
DE L'INDEPENDANCE A NOS JOURS
Les sikhs dans l'Inde indépendante
Les sikhs dans la société indienne et dans le monde
Pratiques religieuses et culture

Broché
Paru le: 02/04/2008
Editeur : Albin Michel
Collection : Planète Inde
ISBN : 978-2-226-18282-1
EAN : 9782226182821
Nb. de pages : 375 pages
Prix: 24,00 Euro

samedi, 06 septembre 2008

La lezione di K. Haushofer e la discreta presenza di G. Tucci nel dibattito geopolitico

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Giuseppe Tucci

 

LA LEZIONE DI KARL HAUSHOFER E LA DISCRETA PRESENZA DI GIUSEPPE TUCCI NEL DIBATTITO GEOPOLITICO DEGLI ANNI TRENTA

di Tiberio Graziani

 

 

Karl Haushofer, Italia, Germania, Giappone, a cura di Carlo Terracciano, Edizioni all'Insegna del Veltro, Parma 2004; pag. 34 + tavola illustrata a colori, Euro 5

 

Con la pubblicazione del testo di una conferenza del geopolitico tedesco Karl Haushofer1, dedicata alle affinità culturali tra l’Italia, la Germania e il Giappone, viene inaugurata, a cura delle Edizioni all’insegna del Veltro, la collana “Quaderni di Geopolitica”.

 

La conferenza “Analogie di sviluppo politico e culturale in Italia, Germania e Giappone“ venne tenuta dal professore tedesco, su invito del grande orientalista e tibetologo italiano Giuseppe Tucci2, il 12 marzo 1937, a Roma, presso l’Istituto per il Medio ed Estremo Oriente (ISMEO) 3.

 

Essa si inserisce, storicamente, come peraltro puntualmente evidenziato dal curatore del Quaderno, Carlo Terracciano, nel contesto delle attività culturali volte a informare e sensibilizzare l’intellighenzia italiana sulle opportunità e necessità, nonché problematicità, sottese all’accordo politico-militare relativo all’asse Roma-Berlino, siglato tra Italia e Germania il 24 ottobre 1936, e a quello antikomintern firmato, nello stesso periodo, tra Germania e Giappone. Ma testimonia soprattutto un aspetto, ancora poco esplorato dagli storici della cultura e della politica estera italiana, quello delle attività dell’ISMEO, ed in particolare del suo fondatore e vicepresidente, Giuseppe Tucci - originale ed inascoltato assertore dell’unità geopolitica dell’Eurasia4 - orientate alla promozione di una visione culturale, geopoliticamente fondante, dei rapporti tra l’Europa e il continente asiatico.

 

Un’impostazione, quella del Tucci, che si contraddistingue per essere non solo puramente culturale, accademica e, occasionalmente, di supporto alla nuova politica dell’appena nato impero italiano, ma per operare una sorta di svecchiamento, sia in ambito culturale che politico, dell’ancora persistente mentalità piccolo nazionalista sabauda che, nel solco della prassi colonialista italiana dei primi del Novecento, tentava di condizionare il nuovo corso impresso dal governo di Mussolini alla politica estera. A questo riguardo è utile riportare l’acuta osservazione di Alessandro Grossato che, sulla base di una lunga e profonda consuetudine con l’opera di G. Tucci, ritiene il fondatore dell’ISMEO un vero e proprio eurasiatista ed afferma che l’espressione “Eurasia, un continente” veniva intesa dall’orientalista marchigiano in un’accezione “soprattutto culturale, volendo [con essa] sottolineare le grandi identità di fondo fra civiltà solo in apparenza così distanti nello spazio e nella mentalità”5.

 

Il convincimento di Tucci sulla culturale identità di fondo delle civiltà eurasiane suppone un’adesione, da parte dello studioso italiano, a quel sistema di pensiero che interpreta le singole culture quali autonome ed autoconsistenti manifestazioni storiche di un unico sapere primordiale e ad esso le riconduce al fine di coglierne gli aspetti autenticamente fondativi. Il ricondurre le varie espressioni culturali ad un’unica tradizione primordiale si traduce, sul piano della ricerca storica e dell’analisi geopolitica, in un procedimento comparativo, che Haushofer, (inconsapevolmente e) magistralmente, adotta e utilizza in questa breve conferenza dedicata a individuare le analogie tra l’Italia, la Germania e il Giappone. Haushofer, pur basandosi su criteri oggettivi e “scientifici”, quali sono quelli della geopolitica, sorprendentemente6, perviene agli stessi risultati cui sembra essere giunto Tucci. Il geopolitico tedesco, infatti, nella sintetica e veloce conclusione di questa conferenza, si augura che “Possa questo modo di vedere i popoli [l’essersi cioè egli adoperato, nella sua prolusione, a porre in piena luce le armonie e le analogie che possono facilitare la comprensione reciproca dei grandi popoli tedesco, italiano e giapponese] superare qualunque tempesta d’odio di razza e di classe, soprattutto tra i sostegni del futuro.”

 

Certo, chi è abituato a sentir parlare di Haushofer come un rappresentante del cieco e rozzo pangermanesimo, o del cosiddetto imperialismo germanico, rimarrà stupito nel leggere questa frase appena citata.

 

Sarà proprio il fallimento della naturale alleanza eurasiatica, preconizzata negli anni Trenta dagli Haushofer, dai Tucci e dai Konoe7, a far precipitare i popoli e le nazioni dell’intero globo in una tempesta di cui ancora, dopo oltre sessanta anni, non si intravede la fine e che, anzi, è continuamente alimentata dall’odierna politica neocolonialista dei governi di Washington e Londra e dai propagandisti dello scontro di civiltà.

 

Il procedimento comparativo adottato da Haushofer lungi dall’appiattire le differenze tra i popoli presi in considerazione e dallo svilirne le appartenenze etniche, in virtù della generica appartenenza al genere umano e secondo la triste e riduttiva visione individualista, valorizza armonicamente, al contrario, le affinità e le differenze, e le riconduce ad un’analoga condivisione, pur con sensibilità diverse, di valori che potremmo definire ad un tempo etici ed estetici, cioè “nobili”. Essi si esprimono, nella visione haushoferiana, sia per il Giappone, sia per la Germania, l’Italia e la Russia in una loro precisa funzione geopolitica, quella di concorrere all’unificazione della massa continentale e di difenderne pertanto il limes, al fine di poter sviluppare armonicamente le potenzialità delle popolazioni che vi abitano. Si contrappongono dunque alle “invasioni” degli uomini del mare, del commercio, della morale individualistica, del lusso e del consumo, ai predatori delle risorse naturali.

 

Il testo di Haushofer si contraddistingue per la sua chiarezza e semplicità, ed in questo senso rappresenta un documento didattico di rilevante importanza per gli studiosi di geopolitica. Da scienziato della geopolitica, egli evidenzia gli elementi geografici che hanno influito sulla storia e sulla politica dei tre popoli in esame, soffermandosi brevemente sulla analoga formazione delle cellule regionali avvenuta in Germania e in Giappone, e sulla fondazione di Roma, Berlino e Tokyo, città fondate originariamente sul confine nordest delle loro regioni, e “debitrici di una parte del loro splendore alla circostanza che la loro posizione di margine, in origine coloniale, si rivelò più tardi favorevolissima agli scambi ed ebbe funzione di ponte. Il flavus Tiberis, l’originaria valle di congiunzione dell’Oder coll’Elba, e il Kwanto col ponte Nihon provvedono alle città rispettive una posizione similmente favorevole e sono loro debitrici di analoga protezione.” Ma accanto ai dettami del determinismo geopolitico, Haushofer sottolinea le affinità culturali tra Italia, Germania e Giappone, che nota soprattutto nel “ghibellin fuggiasco” Dante Alighieri, araldo dell’idea imperiale, in Chikafusa8, un altro grande fuggiasco nonché impareggiabile autore del Jinnoshiki, e nei Minnesaenger tedeschi “fedeli all’Imperatore e al popolo”. Altre affinità colte da Haushofer sono quella tra lo spirito della Cavalleria occidentale e il Bushido giapponese e quella dei comportamenti tra coloro che egli chiama gli eroi fondatori del risorgimento nazionale: Ota Nobunaga, Sickingen-Wallestein, Cesare Borgia.

Haushofer sostiene che si possa parlare anche per il Giappone, come per l’Italia e la Germania di un periodo romanico, gotico, rinascimentale, barocco, di un rococò, di un romanticismo e financo di uno stile impero.

 

Un termine che ricorre spesso negli scritti Haushofer è quello di “destino”. E’ forse nel sintagma “destino comune” che si esprimono più compiutamente le affinità di popoli (apparentemente) tanto diversi sul piano culturale e etnicamente differenti su quello fisico. La coscienza di un destino comune dei popoli e delle nazioni che vivono nel “paesaggio” eurasiatico è la sola arma che abbiamo per sconfiggere la civilizzazione occidentalistica e talassocratica dei predoni del XXI secolo.

 

1) Karl Haushofer (Monaco, 27 agosto 1869 – Berlino, 10 marzo 1946), fondatore della rivista Zeitschrift für Geopolitik ed autore di numerose opere di geopolitica, fu assertore dell’unità geopolitica della massa continentale eurasiatica. Demonizzato come ideologo del cosiddetto espansionismo hitleriano, fu invece autenticamente antimperialista. Secondo lo studioso belga Robert Steuckers, “la geopolitica di Haushofer era essenzialmente anti-imperialista, nel senso che essa si opponeva agli intrighi di dominio delle potenze talassocratiche anglosassoni. Queste ultime impedivano l’armonioso sviluppo dei popoli da loro sottomessi e dividevano inutilmente i continenti”. In traduzione italiana è disponibile l’opera di Haushofer Il Giappone costruisce il suo impero, a cura di Carlo Terracciano, Edizioni all’insegna del Veltro, Parma, 1999.

 

2) Giuseppe Tucci (Macerata, 5 giugno 1894 - San Polo dei Cavalieri (Tivoli), 5 aprile 1984) ritenuto il più grande orientalista italiano del Novecento, e fra i massimi tibetologi a livello internazionale, nel 1930 diviene docente di lingua e letteratura cinese all'Università di Napoli, e nel 1932 insegna religione e filosofia dell'Estremo Oriente all'Ateneo di Roma. Nel 1933 fonda l'Istituto italiano per il Medio ed Estremo Oriente. “L'attenzione rivolta anche agli aspetti politico-economici è documentata, oltre che dalle numerose pubblicazioni dell'Istituto come i periodici Bollettino dell'Istituto italiano per il Medio ed Estremo Oriente (1935) e Asiatica (1936-1943), dallo specifico interesse di Tucci per la geopolitica dell'Asia in un periodo cruciale della sua storia, e dalla sua amicizia personale con Karl Haushofer, che invita a tenere importanti conferenze su questa materia. Tucci concentra i suoi viaggi di ricerca nella vasta regione himalayana, quale naturale crocevia storico fra tutte le diverse culture dell'Asia, raccogliendo sistematicamente materiale archeologico, artistico, letterario, di documentazione storica e altro. Risultati eccezionali vengono così ottenuti dalle sue lunghe spedizioni in Tibet fra il 1929 e il 1948, anno in cui l'Is.M.E.O. riprende in pieno la sua attività postbellica sotto la sua diretta presidenza, destinata a durare fino al 1978. Tra il 1950 e il 1955 egli organizza nuove spedizioni in Nepal, seguite dalle campagne archeologiche in Pakistan ('56), in Afghanistan nel ('57) ed in Iran ('59). Sempre nel 1950 avvia il prestigioso periodico in lingua inglese East and West, e nel 1957 fonda il Museo Nazionale di Arte Orientale di Roma. Tra i suoi numerosi ed importanti scritti ricorderemo solamente, sia i sette volumi di Indo-tibetica (Accademia d'Italia, 1932-1942) che i due di Tibetan Painted Scrolls (Libreria dello Stato, 1949) per la loro ampiezza documentaria, e la Storia della filosofia indiana (Laterza, 1957) per la sua portata innovativa, specie per quanto riguarda la logica indiana. Ma Giuseppe Tucci ci ha soprattutto trasmesso la sua appassionata ed intelligente dimostrazione dell'unità culturale dell'Eurasia, e una lucida consapevolezza del fatto che, giunti come siamo ad un capolinea della storia, essa dovrà tradursi anche in un'effettiva unità geopolitica.” (Alessandro Grossato, Giuseppe Tucci in http://www.ideazione.com/settimanale/78-20-12-2002/78tucc...).

 

3) L’Istituto per il Medio ed Estremo Oriente venne fondato nel 1933 su iniziativa del tibetologo Giuseppe Tucci e di Giovanni Gentile, che ne assunsero rispettivamente la vicepresidenza e la presidenza, con lo scopo di “promuovere e sviluppare i rapporti culturali fra l'Italia e i paesi dell'Asia Centrale, Meridionale ed Orientale ed altresì di attendere all'esame dei problemi economici interessanti i Paesi medesimi”.

Nel 1995 l’Ismeo è stato accorpato all’Istituto Italo Africano (IIA) dando origine all’Istituto Italiano per l’Africa e l’Oriente (IsIAO), che ne ha raccolto l’eredità e gli scopi culturali nonché la prestigiosa biblioteca.

 

4) Confronta Alessandro Grossato, Il libro dei simboli. Metamorfosi dell’umano tra Oriente e Occidente Mondatori, 1999.

 

5) A. Grossato, op. cit. p.10

 

6) Haushofer venne invitato dall’ISMEO per una seconda conferenza, che si tenne il 6 marzo 1941. Il testo della conferenza “Lo sviluppo dell’ideale imperiale nipponico” è, attualmente, in corso di stampa per le Edizioni all’insegna del Veltro.

 

7) “Il leader degli Eurasiani giapponesi era il principe Konoe, uno dei politici più in vista del Giappone d’anteguerra, primo ministro dal 1937 al 1939 e dal 1940 al 1941; ministro di Stato nel 1939; membro di gabinetto nel 1945 del principe Hikasikuni (gabinetto che firmò la capitolazione e fu, pressoché interamente, arrestato dagli Americani). Konoe era sostenitore della maggiore integrazione possibile con la Cina, dell’unione con la Germania ed era un risoluto avversario della guerra contro l’Unione Sovietica (il patto di non aggressione fu firmato quando egli era primo ministro). Konoe odiava gli Americani e si suicidò nell’autunno del 1945 alla vigilia del suo arresto. Ancora oggi, egli gode di una grande notorietà in Giappone e la sua personalità suscita sempre rispetto.” (da una lettera del nippologo russo Vassili Molodiakov al geopolitico e filosofo Alexander Dughin, pubblicata in Elementy, n.3 - http://www.asslimes.com/documenti/mondialismo/giappone.htm).

 

8) Kitabatake Chikafusa (1293-1354), nell’opera classica (Jinnoshiki) del pensiero politico giapponese, fissava, in coerenza con la tradizione shintoista, i principi di legittimità della discendenza imperiale

 

 

vendredi, 08 août 2008

Du symbolisme de la couleur safran en Inde

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Karlheinz WEISSMANN:

Du symbolisme de la couleur safran en Inde

 

Les productions de “Bollywood” bénéficient depuis un petit temps déjà d’un engouement certain en Occident. Mais cet intérêt intellectuel n’est pas exempt d’une ironie un peu grinçante: on se moque de ce cinéma indien quand il aborde des thèmes que les Indiens prennent au sérieux, thèmes que l’on juge “dépassé” dans cet Occident qui allie permissivité et progressisme. Raison pour laquelle, il s’avèrera intéressant d’observer quelles réactions suscitera une nouvelle série intitulée “La couleur safran” dans les cinémas allemands. La série traite d’un aspect fort peu connu de la lutte indienne pour la liberté contre la domination coloniale britannique, d’une part, et de l’ampleur de la corruption et de l’arbitraire politique en Inde à l’heure actuelle, d’autre part. “La couleur safran” symbolise dès lors la nostalgie que cultive le peuple indien pour l’autonomie sociale et politique et pour la préservation de ses héritages.

 

L’Inde est restée jusque aujourd’hui le principal producteur de safran, avec l’Arabie Saoudite et le Maroc. Cette plante, dans la tradition, n’a pas qu’une signification pratique, elle est aussi un symbole. Cet honneur qu’on lui réserve dérive certes de sa rareté et de sa grande valeur; elle était déjà connue et appréciée dans les grandes cultures de l’antiquité, y compris dans l’espace méditerranéen. C’était un produit typique de l’Asie.

 

La rareté, et donc la cherté, du safran explique pourquoi on ne l’utilise en grande quantité qu’à des occasions exceptionnelles et lors d’importantes cérémonies. Lors de certaines fêtes, les femmes indiennes remplacent la marque qu’elles portent généralement sur le front par une marque de couleur safran. Le riz est de cette couleur lors des repas de mariage ou lors des fêtes données en l’honneur des dieux. Seuls les dieux disposent du safran en abondance, ce qui explique pourquoi les dieux du panthéon hindou sont souvent représentés avec une peau de couleur safran. Ceux qui se rapprochent d’eux, surtout les ascètes sadhous, peuvent porter des robes de cette couleur divine. C’est cette tradition vestimentaire que les moines bouddhistes et les Sikhs ont repris à leur compte pour leurs effets traditionnels.

 

La couleur safran demeure néanmoins une couleur propre aux cultes hindous. Sur le drapeau national indien, la bande supérieure est de couleur safran et y représente la religion dominante de l’Union Indienne. Le blanc du drapeau est la couleur des bouddhistes et le vert celle des Musulmans. Les rapports entre ces trois grandes religions ont toujours été tendus. Beaucoup d’Hindous pensent aujourd’hui que l’Inde devrait être un “Hindustan”, car seule la tradition immémoriale aryenne devrait guider la marche de la nation. D’après les protagonistes les plus radicaux de cette vision, tout véritable Indien devrait suivre les préceptes de la religion héritée des ancêtres. 

 

Des groupes militants tels le “Shiv Sena”, l’ “Armée de Shiva”, argumentent de la sorte. On considère en Inde que leurs adeptes forment les “brigades safran” car ils défilent en portant des vêtements variant du jaune à l’orange, derrière des fanions consacrés aux dieux, également de couleur safran ou rouge. Ces fanions étaient déjà mentionnés dans le Bhagavadgita: aujourd’hui, on les orne de svastikas ou du signe désignant la syllabe sacrée “Om”, comme sur les temples. Certaines de ces formations militantes sont armées et leurs adversaires les désignent comme les “fascistes en safran”. On les accuse de perpétrer des attentats contre les Musulmans et les Chrétiens et de détruire des locaux ou des bâtiments appartenant à des adeptes de ces religions. Sur le long terme, ces actes de violence sont bien moins importants que le mouvement de fond qui “safranise” l’Inde, qui compénètre toute la société et que véhiculent ces groupes de militants hindouistes. Cet ensemble est coordonné par le “Sangh Parivar”, terme qui veut plus ou moins dire “la communauté nationale de tous les Hindous”, une organisation qui chapeaute un grand nombre de groupes et de formations et qui a été fondée en 1925 déjà, du temps de la colonisation britannique. Son influence croissante aujourd’hui s’explique parce qu’elle reçoit désormais l’appui et la protection du BJP au pouvoir (ou “Bharatiya Janata Party”). Le BJP, parti populaire hindou, s’est développé depuis que le Parti du Congrès a perdu de son influence; il est devenu la principale force politique à l’intérieur de l’Union Indienne. La croissance du BJP ne s’est pas soldée uniquement par un changement de parti au pouvoir mais surtout par une remise en question du concept de nation que Nehru et les autres chefs du Parti du Congrès avaient voulu promouvoir depuis l’indépendance de l’Inde. 

 

La “couleur safran” ne symbolise donc pas l’Inde en tant que concept géographique, territorial, en tant qu’entité étatique, mais indique une revendication identitaire portée par la religion et la culture, capable d’une virulence explosive.

 

Karlheinz WEISSMANN.

(article paru dans “Junge Freiheit”, Berlin, n°31-32/2006; trad. franç.: Robert Steuckers).

mardi, 05 août 2008

J. Parvulesco: J. Koizumi et le grand réveil du Japon

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Jean PARVULESCO

 

Junichiro Koizumi et le grand réveil du Japon

 

Il s'est donc en apparence définitivement refermé sur nous le formidable piège planétaire tendu par la conspiration mondiale des Etats-Unis et de ce qui se tient, dans l'ombre, derrière ceux-ci, saisissant dans ses mâchoires d'acier les nations de l'Europe grand-continentale et de l'Amérique Latine, dont la liberté vivante, le destin eschatologique et l'intégration politico-historique finale pourraient représenter très effectivement un péril absolument critique, un péril mortel pour le "grand dessein" en cours de l'impérialisme hégémonique américain, dont les préliminaires obscurcissent déjà l'horizon de la proche histoire mondiale à venir.

 

Cependant, alors que les nations encore libres de l'Europe de l'Ouest sembleraient avoir cessé de se débattre sous l'étreinte aliénante, dévastatrice, de la conspiration mondialiste à l'œuvre, des nations eurasiatiques grand-continentales, comme l'Inde et le Japon, viennent de se libérer de celle-ci, par leurs propres moyens, et de se donner —ou d'être en train de se donner—  un autre destin, fondé sur leur propre liberté reconquise.

 

Car ce qu'Atal Béhari Vaypajee à réussi à faire en Inde, Junichiro Koizumi se trouve en train de le faire, aussi, au Japon : l'un et l'autre portés démocratiquement au pouvoir par des immenses vagues de prise de conscience national révolutionnaire, n'ont pas un seul instant hésité, une fois au pouvoir, d'entamer abruptement le processus de libération intérieure de leur pays de sous l'emprise subversive extérieure de la conspiration mondialiste.

 

Ainsi se fait-il que, tout comme la "Nouvelle Russie" de Vladimir Poutine, l'Inde d'Atal Béhari Vajpayee et le Japon de Junichiro Koizumi, se retrouvent, à l'heure actuelle, ensemble, sur la ligne de front de l'ébranlement sismique abyssal poussant le "Grand Continent" eurasiatique à retrouver son être propre et sa prédestinée originelle, archaïque, ébranlement qui suscite, mobilise, assure et affirme les fondations actives du mouvement de libération impériale engageant, en profondeur, l'ensemble du "Grand Continent" eurasiatique en train de se réveiller, et qui finalement l'emportera.

 

Dans un fort important article intitulé "Les relations récentes entre la Russie et l'Inde", Gilles Troude, chercheur au DESC de la Sorbonne , écrit, dans Géostratégiques (Paris) de mars 2001 : " ... face au monde unipolaire dominé par la puissance écrasante des Etats-Unis, qui ne connaissent plus aucun rival non seulement sur le plan économique, mais aussi dans les domaines militaire et politique, ne s'oriente-t-on pas lentement vers un triangle stratégique Inde-Chine-Russie, seul capable de rivaliser avec la super-puissance qui se veut maîtresse du monde?".

 

"C'est ce que redoutent les spécialistes américains en affaires internationales, qui ont perçu les signes d'une coopération accrue entre la Russie , la Chine et l'Inde, et d'un sentiment croissant dans ces trois pays, spécialement après la campagne de bombardements de l'OTAN en Yougoslavie au printemps 1999, que la puissance américaine devait d'une manière ou d'une autre être tenue en échec. Bien que ces trois pays soient encore très loin de fusionner en un Axe eurasien anti-OTAN, ces analystes se disent inquiets du fait de l'apparition d'une menace potentiellement très grave : une alliance qui regrouperait environ deux milliards et demi d'êtres humains, une puissance militaire formidable et un stock impressionnant d'armes nucléaires —puisque l'Inde est maintenant officiellement une puissance nucléaire—  le ciment de cette coalition étant de contrer la domination globale de l'Amérique".

 

"Ce serait un désastre pour les Etats-Unis".

 

"Si ce tissu de relations progresse, a déclaré Charles William Maynes, président de la Fondation Eurasia , think tank basé à Washington, alors vous aurez le cœur continental du monde (heartland) —deux milliards de personnes en Chine et en Inde allié à la formidable puissance technologique que représente la Russie. Ce serait un désastre pour les Etats-Unis".

 

Et encore, Gilles Troude, tout en se méprenant sur le sens final de la situation politique propre, réelle, de la Chine actuelle et à venir, de la ligne de destin préconçue de celle-ci, qui l'exclut d'avance de l'unité, de la réintégration impériale grand-continentale eurasiatique, ne tient-il étrangement pas compte non plus dans ses analyses, du "grand réveil" national du Japon en train d'avoir lieu à l'heure présente. Dont le rôle apparaît déjà comme absolument décisif dans la mobilisation en cours d'un front grand-continental eurasiatique d'opposition politico-stratégique totale aux desseins de la conspiration mondialiste menée par Washington.

 

En réalité, c'est l'extraordinaire puissance vitale innée, profonde, secrète, du peuple japonais qui a rendu possible, et pu assurer l'avènement au pouvoir, à l'heure précise où il fallait que cela se fasse, de l'homme providentiel, du "concept absolu" qu'est Junichiro Koizumi, porteur charismatique du nouveau grand destin du Japon. Quelqu'un devait venir, et la volonté du peuple japonais a fait qu'il vienne.

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Avec Junichiro Koizumi, la loi providentielle se trouve une nouvelle fois vérifiée qui veut que les pays finissent toujours par trouver les dirigeants prédestinés qu'ils méritent, et cela est entièrement certain aussi pour Vladimir Poutine et sa "Nouvelle Russie", tout comme pour Atal Béhari Vajpayee et l' "Inde Terminale" en train d'émerger actuellement à la face de l'histoire.

 

Aussi est-il grand temps que l'on finisse par comprendre, en Europe, qui est réellement Junichiro Koizumi, et de quel grand destin révolutionnaire est-il porteur.

 

Junichiro Koizumi, porteur d'un nouveau destin pour le Japon

 

Junichiro Koizumi est en effet l'homme chargé par le destin —et par 75 % des Japonais— d'opérer les retrouvailles finales du Japon d'aujourd'hui avec l'histoire antérieure du "Grand Japon", l'homme chargé de renouer avec l'identité impériale du Japon, intemporelle, que l'on avait dû faire semblant de suspendre le 15 août 1945, le jour de la "capitulation".

 

Car il est chose désormais notoire que Junichiro Koizumi se fait ouvertement prévaloir de sa fidélité tout entière à la ligne nationale, traditionnelle et impériale de son prédécesseur et maître à penser, l'ancien premier ministre, membre aussi du PDL, Yasuhiro Nakasone (1982-1987), qui, le premier, avait osé briser le tabou démocratique concernant le temple shintoïste Yasukuni, à Tokyo, en s'y rendant en pèlerinage le 15 août 1985. Ce qui avait provoqué alors une vague de violences protestataires, menées en sous-main par les services secrets politiques de la Chine communiste, dans plusieurs pays de l'Asie ayant connu l'occupation japonaise. Car le temple shintoïste Yasukuni, à Tokyo, est le très haut sanctuaire de la mémoire nationale japonaise, le symbole suprême de son identité profonde, intacte, hors d' atteinte, qui ne tient compte en rien de la vaste campagne de désinformation montée par les Etats-Unis après la fin de la dernière guerre au sujet des "culpabilités" du Japon.

 

De son côté, Junichiro Koizumi avait déjà affirmé, à plusieurs reprises, lui aussi, sa ferme intention de se rendre, le 15 août 2001, anniversaire de la "capitulation" du Japon en 1945, au temple Yasukuni, pour participer aux cérémonies religieuses "en hommage à la mémoire des héros tombés pour la défense du Japon". Un geste dont la portée symbolique apparaît comme évidente de par elle-même, et d'une évidence décisive. Et irréversible.

 

Mais, en fait, c'est le 13 août qu'il s'y est rendu, essayant ainsi de relativement désinvestir la montée des protestations plus ou moins artificiellement soulevée par sa décision. Car les forces réunies de la réaction et du Front Rouge s'étaient en effet saisies de l'occasion pour lancer un tir de barrage intensif contre la décision du premier ministre Junichiro Koizumi de se rendre officiellement en pèlerinage au temple Yasukuni. Mais rien n'y fait. Tout comme rien n'avait pu le convaincre de revenir sur son décret autorisant  —et incitant—  que les manuels scolaires d'histoire adoptent des positions ouvertement "révisionnistes" au sujet des "responsabilités" du Japon lors de la dernière guerre.

 

Situé au centre de Tokyo, près du Palais Impérial, sur la colline du Kudan, le temple shintoïste Yasukuni est en effet consacré à la mémoire des 2,5 millions de combattants japonais tombés face à l'ennemi, dont les âmes —y inclus celles des treize "criminels de guerre"— ou soi-disant tels— pendus par les Forces Américaines d'occupation, avec, en premier lieu, le général Hideki Tojo, le premier ministre de l'empereur Hirohito— s'y trouvent rassemblées, dans l'invisible, autour du miroir liturgique, suprêmement sacré, qui en constitue le pivot cosmique. Yasukuni est, dans l'invisible, une immense mer d'âmes en perpétuelle réverbération, veillant sur l'Empire.

 

Il est tout à fait certain qu'une majorité décisive de Japonais estiment que leur pays à été, lors de la dernière guerre, la victime d'un complot concerté, de dimensions planétaires, mené par les Etats-Unis, qui visaient à interdire la présence effective du Japon en Asie et dans le Pacifique; face à quoi, le Japon n'a rien fait d'autre que de se battre pour sa survie, aux abois, dans les termes d'un combat à la fois final et total. Dont on connaît la conclusion apocalyptique de Hiroshima et de Nagasaki.

 

Dans les dépendances du temple Yasukuni, un musée consacré à la mémoire nationale japonaise présente actuellement une grande exposition officielle intitulée "Comment nous avons combattu" (en anglais, "La guerre et les soldats du Japon"), exposition dont le témoignage fondamental est axé sur le souvenir des milliers de kamikazes ayant offert leurs jeunes vies pour la sauvegarde de l'Empire. "Rendez-vous à Yasukuni !", s'écriaient-ils en s'envolant pour le sacrifice suprême. Dans le film qui en montre les exploits héroïques, surhumains —divinisants, en termes de shintoïsme— on affirme : "Beaucoup de gens pensent que, dans la guerre d'il y a cinquante ans, le Japon avait été gravement dans son tort: cela est absolument faux. Ainsi le procès de Tokyo est-il nul et non avenu. Le commandant en chef de nos Armées, le général Hideki Tojo a été accusé de "crimes contre l'humanité" et pendu par les Forces Armées d'occupation, les Etats-Unis ayant été les seuls à exiger sa condamnation à mort. Il est temps que le Japon se réveille! Il est grand temps que le Japon reconnaisse la vraie réalité de sa propre histoire! Japon, réveille-toi!".

 

On sait que la doctrine de gouvernement de Junichiro Koizumi se trouve être fort proche de la vision d'ensemble qui est celle de Shintaro Ishihara, élu, en 1999, gouverneur de Tokyo avec une écrasante majorité, "par un vote quasi-plébiscitaire sur des positions ultra-nationalistes, anti-américaines, ouvertement partisan de la transformation du "Corps de Défense" en une nouvelle grande Armée Japonaise, et auteur d'un livre de grand succès, "Le Japon qui sait dire non", ainsi que d'un roman aux thèses non-conformistes, "La saison du soleil" (Tayô no kietsu). Et l'on sait également que le groupe de jeunes idéologues et des intellectuels qui se tiennent actuellement derrière Junichiro Koizumi est mené au combat par le professeur Fujiuka Nobukatsu, de l'Université de Tokyo, dont la pensée se veut orientée vers la recherche renouvelante, révolutionnaire, des fondations cachées constituant la prédestination originelle du Japon, du "Grand Japon".

 

Quant au train des réformes totalement bouleversantes que le premier ministre Junichiro Koizumi compte imposer, d'urgence, au Japon, la formule décisive appartient au professeur de l'Université de Tokyo, Yoshiro Tanaka, qui déclarait, récemment, que ce que l'on attend de celui-ci, c'est "qu'il fasse la "Troisième Révolution", après celles de l'ère des Meiji, et de l'après-guerre de 1945". Car, ainsi que nous en avertit Heizo Takenaka, ministre chargé de la politique économique dans l'actuel gouvernement de Junichiro Koizumi, "... si nous engageons maintenant les réformes qui s'imposent, nous devrons accepter aussi les douleurs qui s'ensuivront, et qui seront des plus grandes; mais, si ces réformes, nous les repoussions encore, cela peut nous mener directement à la mort". Car telle est, aujourd'hui, dans sa réalité immédiate, et la plus profonde, la situation socialo-économique du Japon qui, en fait, se trouve au bord du gouffre. Contrairement à toutes les apparences, et c'est bien ce qu'il faut quand même ne pas ignorer. Car des anciennes pesanteurs dissimulées sont à présent venues à échéance, et coûte que coûte il faudra faire face.

 

Le recours salvateur aux Forces Armées

 

Cependant, outre le train de réformes qui devront bouleverser de fond en comble les actuelles infrastructures politico-administratives et économiques du Japon, ce qui équivaut, en effet, à une rupture intérieure comme celle qui s'était produite à l'ère des Meiji, Junichiro Koizumi nourrit aussi —et sans doute surtout— le "grand dessein" de redonner aux Forces Armées nationales la place qui doit être fondamentalement la leur, c'est-à-dire tout à fait la première dans la configuration politico-historique du pays ayant retrouvé son propre centre de gravité en lui-même, hors de tout assujettissement, hors de toute ingérence ou domination étrangères.

 

Même si, pour cela, il faudrait que Junichiro Koizumi parvienne à faire réviser l'actuelle Constitution japonaise, dont le fameux "article 9" interdit au Japon de pouvoir disposer d'une "Armée Nationale". Or c'est bien ce à quoi Junichiro Koizumi est très fermement décidé à faire aboutir son action politique de gouvernement dont la clef de voûte est précisément constituée par le retour du Japon à son identité politico-militaire antérieure, avec tout ce que cela implique au niveau de la "grande histoire", des grandes décisions historiques et politiques immédiatement à venir, en Asie et dans le Pacifique et, aussi, dans le cadre des futurs choix du Japon par rapport à l'unité grand-continentale eurasiatique émergente.

 

Dans son retour qui n'est politiquement pas dépourvu de tout danger sur le coup même, mais qu'il entend poursuivre d'une manière tout à fait résolue, vers la reconstitution d'urgence des Forces Armées nationales du Japon, Junichiro Koizumi retrouve le mouvement fondamental de toute entreprise de salut et de délivrance nationale révolutionnaire face à la mainmise subversive, aliénante, des conspirations mondialistes et socialo-gauchistes d'infrastructure trotskiste —toujours "la réaction et le front rouge"— qui détiennent aujourd'hui très effectivement le pouvoir politique, économico-social et culturel partout dans le monde. En se tournant, comme il est en train de le faire, vers les Forces Armées nationales du Japon, Junichiro Koizumi ne fait, à son tour, que ce qu'avait fait Vladimir Poutine en Russie, Atal Béhari Vajpayee en Inde et Vojislav Kostuniça en Serbie, ce que tente de faire, souterrainement, à l'heure actuelle, Silvio Berlusconi en Italie: le recours aux Forces Armées est, toujours, la toute dernière chance des instances persistantes de l'Être en train de succomber aux manœuvres d'encerclement, de pénétration intérieure et d'anéantissement menées par les agences d'investissement et de désappropriation du non-être en marche vers l'établissement final de l'anti-monde et de l'Anti-Empire d'au-delà de la fin.

 

Et c'est ainsi que l'entreprise de redressement national révolutionnaire de Junichiro Koizumi, actuellement en cours, appartient déjà, en fait, au vaste front contre-stratégique grand-continental eurasiatique  —et latino-américain aussi— d'opposition désormais irréversible à l'entreprise de subversion anti-historique accélérée poursuivie par la conspiration planétaire "mondialiste" au service de la "Superpuissance Planétaire" des Etats-Unis et de ce qui se tient caché derrière ceux-ci.

 

Car, en tout état de cause, il faudra comprendre que le retour de Junichiro Koizumi vers le recours aux Forces Armées représente, aussi, la décision sous-entendue —mais désormais sans retour— de l'éloignement et, à terme, de la rupture du pacte d'assujettissement implicite —à la fois sur le plan militaire, économique et idéologico-culturel— du Japon à l'égard des Etats-Unis, et, de par cela même, sa nouvelle orientation fondamentale, d'une part, vers l'Asie et le Pacifique et, d'autre part, vers le "Grand Continent" eurasiatique, et vers sa future adhésion —déjà décidée—  à l'Axe grand-continental Paris-Berlin-Moscou.

 

Aussi dois-je faire état, à ce sujet, des confidences que vient de me faire Alexandre Douguine à la suite de son récent voyage officiel d'information au Japon, où il avait pu constater la très exceptionnelle attention avec laquelle des hautes instances politico-administratives du Ministère des Affaires Etrangères suivent aujourd'hui la marche en avant de certains projets européens grand-continentaux concernant la mise en situation, en premier lieu, de l'Axe Paris-Berlin-Moscou, projets auxquels le Japon serait disposé à apporter un soutien politico-diplomatique inconditionnel et suractivé: pour le Japon, la prolongation —et l'achèvement— de l'axe grand-continental européen Paris-Berlin-Moscou jusqu'à New Delhi et Tokyo constitue déjà une nécessité allant de soi, inéluctablement. De toutes les façons, pour aussi confidentielles qu'elles puissent se vouloir momentanément, la présence économique active et l'assistance politico-militaire du Japon en Inde est désormais une réalité de laquelle on ne saurait en aucun cas pas ne pas tenir compte d'une manière fort significative. Des grandes choses décisives sont en train de se passer là-bas, souterrainement, entre Tokyo et New Delhi, dont les conséquences ne tarderont pas d'agir en profondeur. Le tout sans doute à l'instigation, ou tout au moins avec l'aval agissant de Moscou, Vladimir Poutine s'y trouvant personnellement engagé dans la suite de cette entreprise de l'ombre: c'est la grande géopolitique, il faut le comprendre, qui constitue les fondements dissimulés de l'histoire en marche. Aujourd'hui comme hier.

 

Le tracé mystique de nos futurs combats

 

Tout concourt donc à prouver, déjà, que l'usage qu'entend faire Junichiro Koizumi du pouvoir qui vient de lui être démocratiquement confié par le peuple japonais, sera celui d'une reprise politico-historique révolutionnaire totale des destinées profondes de celui-ci, ouvertement reconnues comme telles ou ne fut-ce que partiellement tenues encore pour secrètes. Car il y a une eschatologie occulte de l'histoire nationale japonaise, dont les horizons intérieurs s'ouvrent à une double intelligence, à la fois supra-historique et cosmique, de ce monde-ci à son terme et de son au-delà caché: c'est ce qui constitue la véritable force supra-historique collective du Japon, et c'est aussi ce qui fait que le Japon s'identifie lui-même, totalement, à la conscience transcendantale commune de l'ensemble des peuples du "Grand Continent" eurasiatique, réunis dans la certitude visionnaire, préontologique, de la dimension fondamentalement eschatologique de l'histoire dans son ensemble final. La conscience archaïque commune, abyssale, des peuples du "Grand Continent" eurasiatique considère l'histoire comme le lieu même du salut supra-historique de la fin d'au-delà de la fin, la sainteté suprême étant, pour ces peuples, celle de l'héroïsme des combattants humains et suprahumains devant conduire à cette fin et au-delà de cette fin.

 

Aussi la réunification politique —la réintégration— grand-continentale eurasiatique mise actuellement en piste par le projet de l'axe contre-stratégique Paris-Berlin-Moscou-New Delhi-Tokyo devra-t-elle se trouver dédoublée, en profondeur, par une nouvelle prise de conscience commune quant à l'identité de la prédestination spirituelle, polaire, de l'ensemble des peuples de l'espace impérial eurasiatique. Or l'avènement de cette prise de conscience spirituelle, à la fois impériale et polaire eurasiatique, c'est ce que va constituer, désormais, la tâche des combattants idéologiques pour la plus Grande Europe et de leurs engagements politico-historiques de haut niveau. Une grande mystique combattante vient ainsi d'être née, qui à présent est en cours de développement révolutionnaire, "destinée à changer la face du monde".

 

Dans ce développement en cours, la part des "groupes géopolitiques" va devoir être des plus décisives: en effet, s'il y a une nouvelle prise de conscience civilisationnelle de dimensions grand-continentales eurasiatiques, ce sera en premier lieu aux "groupes géopolitiques" que celle-ci sera due, à leurs engagements héroïques de la période nocturne de la clandestinité, à leur travaux d'agitation, d'affermissement et d'affirmation révolutionnaire suractivée qu'ils devront livrer, à présent, en plein jour, une fois que la doctrine de la libération grand-continentale sera ouvertement appelée à devenir la volonté agissante de l'ensemble des peuples appartenant à l'espace originel d'une même communauté d'Être polaire et de destin eschatologique final.

 

Dans l'immense bataille révolutionnaire qui s'annonce pour une nouvelle prise de conscience historique commune de l'espace intérieur eurasiatique, les "groupes géopolitiques" seront donc les cellules de base de la marée montante de l'éthos vivant, de la conscientisation en marche vers le changement total, vers la transfiguration finale d'une civilisation à prédestination apocalyptique: la grande heure des "groupes géopolitiques" sera venue quand l'unité d'être de l'ensemble grand-continental eurasiatique sera reconnue comme la suprême valeur agissante de sa propre histoire terminale, en même temps que de sa propre histoire recommencée.

 

D'autre part, d'une manière plus concrète, plus immédiatement objective, il est tout à fait certain que, dans l'état actuel des choses, ce dont nous aurons le plus besoin, c'est d'un certain nombre de centres d'études, de recherches et de documentation (CERD) visant les profondeurs en même temps que réellement exhaustifs quand à leurs objectifs propres, d'un certain nombre de "foyers de rayonnement" au service de notre connaissance active, à jour, de la situation et des réalités actuelles de l'Inde, du Tibet et du Japon, de la partie à proprement parler asiatique du "Grand Continent", vers laquelle devront désormais se porter tous nos efforts de rapprochement, de réactualisation politico-historique et de ré-identification spirituelle de stade final avec ces peuples appartenant à la même communauté de destin profond.

 

D'ailleurs, le problème des relations continentales Europe/Asie n'est pas du tout nouveau. Déjà en 1940, dans son essai géopolitique aussi fondamental que décisif, Le bloc continental Europe Centrale-Eurasie-Japon, "imprimé mais non distribué", Karl Haushofer déplorait vivement l'absence flagrante, catastrophique, de centres européens d'étude et de recherches de haut niveau sur l'Inde, le Japon et l'Eurasie en général. Karl Haushofer pouvait cependant se féliciter de l'existence et des activités, à plusieurs égards exemplaires, de l'"Institut pour le Moyen et l'Extrême-Orient" de l'Italie mussolinienne, fonctionnant "sous la direction du Sénateur Gentile, de l'archiduc Tucci, du duc d'Avarna, fils de l'ancien ambassadeur d'Italie à la cour de Vienne".

 

Dans la situation d'émergence spéciale qui est la nôtre aujourd'hui, il faudrait donc qu'au moins six de ces Instituts pour le Moyen et l'Extrême-Orient soient installés d'urgence, deux en France, deux en Allemagne, un en Italie et un en Espagne. La Russie devant être, pour le moment, considérée à part, où plusieurs de ces genres d'Instituts existent déjà, et qu'il s'agirait alors plutôt de réorganiser, de restructurer et d'en intensifier les activités en cours d'une manière nouvellement significative.

 

Dans l'ensemble, la zone de problèmes concernant la Chine se devra d'être, cependant, étudiée à part, suivant une disposition d'esprit offensive, préventivement contre-stratégique. Car, située à l'intérieur de l'espace grand-continental eurasiatique, la Chine représente, pourtant, géopolitiquement, une tête de pont du monde "extérieur", "océanique". Relevant d'une vocation irréductiblement auto-centrée, la Chine se trouve de par cela même assujettie à l'"influence extérieure" des Etats-Unis et aux conspirations mondialistes anti-continentales, "océaniques", d'encerclement et d'investissement offensif du "Grand Continent" eurasiatique. La Chine se trouve préontologiquement engagée dans le camp ennemi du "Grand Continent", dans le "camp océanique" du Léviathan, du "non-être".

 

D'autre part, la rencontre finale entre les destinées spirituelles profondes de l'Europe et certaines prédestinations encore cachées de l'Asie se maintenant dans l'ombre ne trouvent-elles pas un domaine de jonction spécifique à travers des convergences ardentes qui s'imposent en matière de religion vivante, de religion en marche? N'est-ce pas dans l'invisible que viennent à se faire les grandes rencontres spirituelles, le Feu de l'Esprit ne se révèle-t-il pas irrationnellement dans les visions spéciales de ses élus secrets?

 

On sait que saint Maximilien Kolbe, le martyre d'Auschwitz, avait visionnairement pressenti le double cheminement de l'Inde et du Japon vers le catholicisme. Ayant lui-même séjourné au Japon, et notamment à Hiroshima et à Nagasaki —et l'on peut ainsi mieux comprendre les raisons du choix de ces deux villes pour cibles du feu nucléaire en août 1945, quand on sait qu'il s'agissait des deux villes catholiques du Japon— il y avait en effet acquis la certitude intérieure du grand avenir catholique du Japon.

 

En même temps, sans avoir pu réellement donner cours à son brûlant désir de se rendre personnellement comme missionnaire en Inde aussi, les relations personnelles de saint Maximilien Kolbe avec certains tenants de l'hindouisme initiatique l'avaient amené à penser la même chose de l'Inde: non pas dans les termes d'un raisonnement concerté, mais dans la perspective fondamentalement irrationnelle d'une vision spirituelle propre, d'une grâce de voyance à ce sujet, à laquelle il avait eu l'accès en tant que porteur d'une mission spéciale, ultérieure, décisive. Une mission occultement prophétique.

 

En ce qui concerne le Japon, il est vrai que le shintoïsme initiatique se prête à des rapprochements doctrinaux assez flagrants avec le grand catholicisme mystique. Dans la figure ensoleillante d'Amatarasu, ne pourrait-on pas distinguer une préfiguration enclose de l'Immaculée Conception? De même que les trois objets du culte impérial shintoïste —le "miroir", le "poignard" et le "joyaux"— pourraient également trouver des correspondances extrêmement révélatrices dans le catholicisme. Ainsi le "Miroir" —fondamentalement présent à Yasukuni— rappelle le Miroir du Cœur Immaculé de Marie, alors que le "Poignard" peut être identifié à l'Epée du Verbe Vivant. "Alors l'Impie se révèlera, et le Seigneur le fera disparaître par le souffle de sa bouche, l'anéantira par la manifestation de sa Venue", II Th., II, 8. Et, quant au "Joyau", cette figure polaire, centrale, conduit au mystère nuptial suprême de l'Aedificium Caritatis. Il faut savoir oser pénétrer derrière le voile.

 

Car c'est bien dans cet horizon spirituel ultime qu'il fait situer l'actuelle tentative révolutionnaire entreprise et poursuivie par Junichiro Koizumi au Japon, pays secret s'il en fut. Toutes ses initiatives politico-administratives comportent un dédoublement spirituel occulte, un répondant immédiat sur le plan de l'invisible. C'est l'autre monde qui, aujourd'hui, agit au Japon, à des fins très hautes.

 

Jean PARVULESCO.

jeudi, 17 juillet 2008

Nehru et l'indépendantisme indien

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Luigi Carlo SCHIAVONE:

 

Jawaharlal Nehru et l’indépendantisme indien

Jawaharlal Nehru, l’un des pères du mouvement national indien, publia une autobiographie en 1936, avec, pour objectif, outre de narrer la vie de celui qui deviendra le premier leader de l’Inde indépendante, de faire comprendre au lecteur quels furent les prémisses qui ont incité le peuple indien à s’unir contre l’oppresseur britannique. En effet, quand Nehru parlait de l’impérialisme britannique, il disait: “il était naturel et inévitable que le nationalisme indien réagisse un jour contre la domination étrangère”; mais Nehru demeurait néanmoins déconcerté par les positions des milieux intellectuels indiens qui, à la fin du 19ième siècle, semblaient tous avoir pleinement accepté l’idéologie impériale britannique. Pour Nehru, il s’agit d’une déviance due à l’influence considérable qu’exerçait l’établissement britannique sur le peuple indien, par le truchement du système scolaire qui cherchait systématiquement à souligner les mérites des colonisateurs, en soulignant toujours les lacunes de l’antique savoir indien. C’est dans un tel contexte, écrivait Nehru, que les étudiants indiens n’avaient aucune base rationnelle, aucun instrument conceptuel valide selon les critères du rationalisme occidental, pour contester les leçons administrées par leurs maîtres britanniques, à moins de se contenter d’un retour consolateur au nationalisme religieux, parce que, ajoutait Nehru, “au moins, dans la sphère religieuse et philosophique, les Indiens ne devaient céder la première place à aucun peuple de la Terre ”.

Après avoir pris acte de la situation, les premiers noyaux de dissidents indiens commencèrent à jeter la suspicion et à examiner en profondeur les affirmations de leurs professeurs britanniques. Ils réussirent ainsi à créer une véritable anthologie originale de matériaux conceptuels anti-britanniques, rédigés par des auteurs au ton modéré. C’est ainsi que le nationalisme indien a réussi, au départ, à se doter d’un corpus de fond, en matières politiques et économiques.

Mais, en dépit de cet acte de défi, Nehru déplore que ce corpus contestataire mais modéré finissait par acquérir une fonction spécifique dans le système de fonctionnement du pouvoir britannique. Cette fonctionnalité de la première contestation indienne découlait tout simplement des positions libérales de la plupart des membres du Congrès National Indien qui ne cherchaient en général qu’une seule chose: obtenir les plus hautes charges sans comprendre qu’ainsi rien ne changerait; simplement, les représentants officiels du “changement”, en cas de désordres, auraient été protégés par ceux-là même qu’ils tentaient de mettre échec et mat. Par ailleurs, les paroles  critiques du leader Nehru à l’endroit des idées libérales sont bien claires: “L’idéologie libérale est incapable de comprendre l’idée de la liberté indienne dans la mesure où les positions de l’une et de l’autre sont fondamentalement irréconciliables”. La critique des jeunes étudiants nationalistes indiens aux“vieux messieurs” du système éducatif britannique, ne se limitait pas, toutefois, aux seuls établissements d’enseignement. Nehru entrevoyait dans les attitudes des Britanniques, à la fin du 19ième siècle, un fondement messianique, perceptible dans la conviction, autrefois partagée par d’autres peuples, de se prendre pour les “élus du Seigneur”, honneur accessible à tous ceux qui accepteraient de se faire encadrer par la classe dirigeante britannique, qui prétendait que son empire était l’instance représentatrice du Règne de Dieu sur la terre. Cette vision messianique justifiait la rudesse des punitions infligées dans les Dominions à tous ceux qui s’opposaient à la loi britannique.

“Comme les inquisiteurs du passé, ils se sentaient destinés à nous sauver, indépendamment du fait que nous le désirions ou non”. C’est avec ces mots que Nehru commence son chapître où il décrit les pratiques mises en oeuvre par les colonisateurs pour transformer l’Inde en le pays le plus brillamment adapté aux structures impériales anglaises. Sur le modèle britannique, les autorités coloniales avaient choisi un groupe d’Indiens, l’avaient formé, dans le but de soutenir les premiers balbutiements d’un Etat autonome; ces Indiens “homologués” étaient censés amener le pays au “self-government” et à la “liberté”, “mais, ajoute Nehru, auraient dû démontrer et garantir que ce self-government et cette liberté ne se seraient exercés que selon les desiderata des Britanniques”.

Au fil de son ouvrage, Nehru poursuit l’âpre critique qu’il adresse au système imposé à son pays par les colonisateurs anglais. Son analyse n’épargne personne, ni même l’immense majorité du peuple anglais, coupable, selon Nehru, de n’avoir jamais voulu véritablement comprendre l’Inde. Si l’on soulève le voile de misère et de déclin qui recouvre la terre indienne, considérée comme “la perle de la couronne britannique”, on  peut encore découvrir la royauté intrinsèque de l’âme d’une vieille nation qui a pérégriné à travers les âges, en vivant des jours de gloire et de décadence, tout en restant toujours liée et attachée à sa très ancienne culture, tirant des ressources profondes de celle-ci force et vitalité, les partageant avec de nombreux pays. En s’appuyant sur ce constat, le premier futur leader de l’Inde indépendante se lance dans une surprenante comparaison avec l’Italie. Selon Nehru, les deux pays sont fils d’une culture plurimillénaire où le concept de nation, malgré les innombrables difficultés ou vicissitudes malheureuses, n’a jamais disparu, même s’il s’est abreuvé à d’autres sèves au fil des siècles. Exaltant les dons de Rome et de l’Italie, Nehru leur reconnait le mérite d’avoir toujours été les principaux centres de culture en Europe; il attribue, dans la foulée, les mêmes mérites à l’Inde en Asie. Les deux pays, selon Nehru, présentent bien des similitudes, y compris dans les malheurs: il rappelle ainsi que Metternich définissait l’Italie comme une simple “expression géographique”; bon nombre d’émules de cet homme politique autrichien ont considéré l’Inde de la même manière.

Après cette parenthèse sur l’Italie, Nehru, dans son ouvrage, revient sur le sort de son propre peuple. Il explique, avec moults détails, combien étroit est le rapport ancestral entre les Indiens et l’idée de leur propre nation, révélant, dans ces explications, toute cette verve politique, qui est la sienne, et qui l’a toujours distingué de Gandhi. Nehru parle de la “Bharat Mata”, de la “Mère Inde”. Il rappelle à ses lecteurs l’Inde d’avant la colonisation où il y avait certes d’innombrables conflits entre castes mais où subsistait, intensément, un vif et puissant lien commun, dont les traces étaient encore perceptibles dans l’Inde de son temps. Ces liens forts permettent d’articuler une résistance grâce à leur vitalité intrinsèque et, ajoute-t-il, il serait erroné de croire que cette vitalité est telle uniquement parce qu’elle découle d’une tradition plurimillénaire: ses origines, il faut plutôt les retrouver dans ce principe de soutien mutuel qui soude la communauté indienne toute entière quand il s’agit de faire face à de puissantes influences étrangères. Mais toute cette vigueur, pourtant, n’a pas permis de conserver la liberté et l’unité politique, ni l’une ni l’autre de ces valeurs n’ayant été considérées jusqu’alors comme dignes de soutenir des efforts constants. C’est cette négligence qui est responsable des souffrances successives du peuple indien, négligence dont les sources doivent être recherchées dans un antique idéal indien qui n’a jamais glorifié les triomphe politique et militaire, a toujours méprisé l’argent et ceux qui l’accumulaient, en n’accordant honneur et respect qu’à ceux-là seuls qui servaient la communauté pour de maigres compensations congrues. Ces attitudes font que la communauté collabore au Bien Commun et l’honore, ce qui, selon Nehru, correspond à l’idéal socialiste, qu’il considère lui-même comme l’antidote au système capitaliste occidental. En effet, écrit-il, “il se pourrait bien que lorsque l’Inde se revêtira d’oripeaux nouveaux, parce que ses anciennes frusques sont usées et élimées, elle prendra pour modèle de ses nouveaux effets le mode socialiste de gérer la société, afin de la rendre plus conforme tant aux conditions actuelles qu’aux critères de sa pensée plurimillénaire. Les idées que l’Inde adoptera, elle devra les faire vivre et revivre sur son propre terreau”.

En août 1947, quand l’Inde accède enfin à l’indépendance, Nehru en devient le Premier Ministre et gardera cette fonction jusqu’à sa mort en 1964. Pendant toutes ces années, il a dû affronter une situation intérieure difficile, née des clivages profonds entre groupes ethniques et religieux et de la pauvreté chronique des zones rurales. Mais il a réussi, en même temps, a acquérir une grande popularité au niveau international, en se plaçant aux côtés de Tito et de Nasser, constituant ainsi, en quelque sorte, un triumvirat pour le mouvement des “pays non alignés”, patronant l’idée d’un Tiers Monde distinct de l’Est comme de l’Ouest, mouvement qui avait connu son apogée lors de la conférence afro-asiatique de Bandung en avril 1955.

Luigi Carlo SCHIAVONE.

(article paru dans le quotidien romain “Rinascita”, 15-16 septembre 2007; trad. franç.: Robert Steuckers).

 

 

 

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lundi, 14 juillet 2008

Un opuscule didactique sur le Tibet

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Robert Steuckers:

Sur un opuscule didactique sur le Tibet

 

Paru en avril 2008, le volume sur le Tibet de la célèbre collection “Que sais-je?” des Presses Universitaires de France (n°3808) est dû à la plume de Claude B. Levenson, qui est une spécialiste incontestée de la région himalayenne, comme l’attestent les très nombreux ouvrages qu’elle a déjà consacrés au Tibet depuis une bonne vingtaine d’années. Le Tibet, constate-t-elle, est lié spirituellement à l’Inde, patrie d’origine du bouddhisme. Sa “Grande Porte” est celle qui donne sur le sud, sa porte de service est celle qui donne sur l’est, soit sur la Chine. La conquête chinoise a contribué à fermer de force cette porte méridionale et à faire de la “porte de service” la seule porte autorisée pour le Tibet sinisé.

 

L’auteur rappelle le long isolement du Tibet, surtout avant l’arrivée de l’expédition britannique de Younghusband en 1904, sur fond de rivalité en Asie entre l’Empire des Tsars et l’Empire britannique, maître des Indes. A l’époque, la France , dominant l’Indochoine dont les grands  fleuves prennent leurs sources dans le massif tibétain, tentait timidement d’avancer au nord du Laos, avant d’abandonner toute initiative. Les Etats-Unis sont absents de la compétition: à l’époque, seule la Chine riveraine du Pacifique les intéresse, en tant que débouché potentiel, avec des dizaines de millions de consommateurs en perspective. C’est dans le cadre de la seconde guerre mondiale que le Tibet commence à susciter leurs intérêts stratégiques car la maîtrise des voies de communication dans l’Himalaya leur aurait permis d’apporter un soutien logistique sans faille aux nationalistes de Tchang Kai Tchek, aux prises avec les Japonais d’abord, avec les armées communistes de Mao ensuite.

 

Après l’indépendance de l’Inde en 1947 et l’éclatement de l’ancien Raj britannique en un Etat musulman (le Pakistan) et un Etat hindou (l’Inde), Mao, dès son accession au pouvoir en 1949, est le premier, et le seul finalement, à comprendre l’enjeu géopolitique primordial que représente le Tibet, “Toit du Monde”. Il mènera, dès  le début de son pouvoir sur la Chine , une politique d’expansion vers le Tibet, que poursuivront ses successeurs d’avant et d’après le passage de la Chine à l’économie globale de marché. Sa tâche a été aisée: il a bénéficié, dans les années 50, du soutien soviétique; l’Angleterre, épuisée par la seconde guerre mondiale, et les Etats-Unis se retranchent derrière l’avis de Nehru, qui, lui, préfère garder la neutralité face à la Chine. Nehru n’avait d’ailleurs pas les moyens de pratiquer une autre politique, l’Inde étant coincée entre deux entités musulmanes, les deux Pakistan, l’occidnetal et l’oriental (qui deviendra le Bengla Desh), avec un front coûteux pour une puissance en voie de développement, situé dans l’Himalaya, au Cachemire, jusqu’à 6000 m d’altitude. Dans ce contexte, nehru parie sur une hypothétique fraternité sino-indienne sous le signe de l’anti-impérialisme. Il faudra attendre la pénétration inattendue de troupes chinoises dans l’Aksaï Chin (au nord-ouest de l’Inde) en 1962 et le conflit sino-indien qui s’ensuivit aussitôt, pour modifier la position indienne et faire fondre comme neige au soleil l’idée d’un partenariat anti-impérialiste entre New Delhi et Pékin. Récemment, en cette première décennie du 21ième siècle, les revendicatios chinoises sur l’Arunachal Pradesh, jadis territoire tibétain, envenimment encore davantage les relations déjà tendues entre les deux nouveaux géants économiques de l’Asie.

 

L’Inde craint d’être prise en tenaille par une alliance sino-pakistanaise, où Karachi  autorise les Chinois à  construire un solide appui naval en Mer d’Arabie, à l’ouest de l’Inde. Ensuite, l’Inde a toutes les raisons de  craindre d’autres mouvements stratégiques chinois allant au détriments de ses intérêts géopolitiques: le passage de l’ancien royaume du Népal à une république d’inspiration plus ou moins néo-maoïste et l’appui de la  Chine à la junte birmane qui, elle, autorise la marine de Pékin à mouiller dans les bases des Iles Cocos dans le Golfe du Bengale (qu’on ne confondra pas avec les Iles Cocos administrées par l’Australie, plus  au sud  dans l’Océan Indien; les Cocos birmanes, où la Chine entretient des bases navales, se situent au nord de l’archipel indien des Andamanes).

 

La question du Tibet ressurgit à l’avant-plan de l’actualité dès la mise en oeuvre de la voie ferrée Pékin-Lhassa en 2006, 47 ans après l’annexion complète et définitive du Tibet à la Chine et la fuite du Dalaï-Lama en Inde. Grâce à ce système de communication classique  —les voies de chemin de fer et leur tracé demeurent encore et toujours des enjeux et des atouts stratégiques de premier ordre—  la Chine peut renforcer encore sa présence au Tibet, y  acheminer plus rapidement davantage de troupes ou d’ouvriers le long de la frontière tibéto-indienne et peser ainsi lourdement sur le Sud de l’Asie, de l’Indochine au Pakistan.

 

L’enjeu le plus important, selon Claude B. Levenson, reste toutefois la maîtrise du “Château d’eau de l’Asie” que représente le Tibet. La Chine a besoin d’eau potable en abondance pour alimenter ses villes tentaculaires, pour obtenir une autarcie alimentaire (seule garante de l’indépendance réelle d’une  puissance) en irriguant des zones semi-désertiques au nord et au nord-est du Tibet, pour pallier la pollution de ses fleuves suite à une industrialisation anarchique et trop rapide, peu soucieuse de critères écologiques. Par ailleurs, il y a les projets hydrauliques chinois, ceux des méga-barrages, réalisés, en voie de réalisation ou au stade de la planification. Ces travaux sont qualifiés de “pharaoniques” par notre auteur. Ces barrages gigantesques en amont des grands fleuves d’Asie, dont les rives hébergent 47% de la ppulation du globe, risquent bien de placer l’ensemble territorial indien, birman, thai et indochinois entièrement sous la coupe de la Chine , abstraction faite des catastrophes écologiques possibles. L’Inde et le Bengla Desh, par exemple, craignent principalement un  détournement des eaux du Brahmapoutre qui les mettrait tous deux à la merci des Chinois. Le Vietnam craint, pour sa part,un détournement des eaux du Mékong. En 2000, les régions indiennes de l’Himanchal Pradesh et de l’Arunachal Pradesh ont été brutalement inondées par des eaux venues du Tibet: il a fallu attendre 2006 pour que les Chinois avouent avoir construit des barrages, responsables de cette catastrophe. Les voisins de la Chine craignent essentiellement ce genre de politique du “fait accompli”.

 

Pour conclure, quelle attitude prendre face à la question tibétaine? A l’évidence, les Etats-Unis jouent aujourd’hui, avec leur cynisme habituel, la carte de la liberté tibétaine pour mettre des bâtons dans les roues d’une Chine qui, par ses investissements, prend trop d’importance dans la vie économique américaine ou se montre trop autarcique pour permettre la pénétration de son marché par les Etats-Unis et les multinationales. Face à cette problématique, nous sommes évidemment du côté chinois, toute puissance ou tout bloc de nations ayant le droit de se créer une autarcie alimentaire et industrielle. Cependant, une Chine qui tiendrait l’Inde entièrement sous sa coupe, en ne lui laissant plus aucune marge de manoeuvre, ne va pas dans le sens de nos intérêts: raisonnant en termes d’espace indo-européen, récapitulant dans notre synthèse géopolitique les raisonnements stratégiques du général tsariste puis bolchévique Senassarev et de l’indépendantiste indien Roy, la voie doit être libre du coeur germanique de l’Europe au sous-continent indien, en passant par les plaines scythes d’Ukraine et l’ancien espace indo-européen (sarmate, etc.) d’Asie centrale avant son occupation par les peuplades turco-mongoles; aucune intervention d’une géopolitique globale non indo-européenne ne peut briser la ligne Rotterdam-Calcutta, que cette intervention soit turco-mongole (partant d’Oulan Bator pour s’élancer jusqu’au Bosphore) ou arabo-sémitique (partant du coeur du désert arabique pour s’élancer vers le Maghreb et l’Espagne, d’un côté, et vers le Turkestan chinois, de l’autre). A fortiori, nous ne pourrons tolérer l’émergence d’une Chine sortant de son pré carré, où elle était toujours sagement restée, pour créer ex nihilo une nouvelle dynamique géo-spatiale partant du Tibet pour s’élancer vers le sud indien, vers le Turkestan ex-soviétique et atteindre ainsi l’Oural et les zones de peuplement kalmouk sur le cours inférieur de la Volga , empruntant le même chemin que les hordes turco-mongoles. Dans ce cas, il y aurait lieu de parler d’un réel “péril jaune”. Les rodomontades sinophobes du Kaiser Guillaume II, à l’époque du siège des légations par les Boxers en 1900, finiraient-elles par acquérir un sens, face à une Chine saisie par la démesure de l’industrialisation outrancière et de l’expansion économique néo-libérale et globaliste?

 

Robert STEUCKERS.

(Claude B. LEVENSON, “Le Tibet”, PUF (QSJ?, n°3808), Paris, avril 2008).

mercredi, 11 juin 2008

Les Etats-Unis financent l'agitation tibétaine

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Les Etats-Unis financent l’agitation tibétaine

 

D’après un article de la “Süddeutsche Zeitung” (SDZ), le caucus “National Endowment for Democracy” (NED), qui, bien que privé, reçoit de larges subsides du gouvernement américain, aurait payé, rien que l’an passé, 45.000 dollars à l’“International Tibet Support Network” (Réseau international de soutien au Tibet) qui a notamment coordonné les protestations très médiatisées contre les Jeux olympiques prévus cet été à Pékin, principalement à l’occasion des courses avec la flamme olympique.

 

L’argent du contribuable américain est allé dans l’escarcelle des groupes tibétains que le gouvernement chinois considère comme insurrectionnels. L’intermédiaire, assurant le transit des fonds, n’a pas toujours été la NED, mais elle l’a été souvent.

 

Rien qu’au cours de l’année 2006, cette organisation privée, selon ses propres déclarations, aurait versé 293.000 dollars à des groupes tibétains que Pékin accuse d’avoir co-planifié le soulèvement de Lhasa, il y a deux mois.

 

Sur le plan politique, ce soutien financier ne manque pas de piquant parce que la NED reçoit la plupart de ses subsides du Congrès américain. Les Etats-Unis financent ainsi directement des actions que Pékin juge déstabilisantes ou diffamantes à la veille des Jeux olympiques,  explique le journaliste du SDZ.

 

Dans les années qui viennent de s’écouler, le Congrès a de fait libéré toujours davantage de fonds pour soutenir des “programmes de démocratisation” en Chine et au Tibet. Pour l’année 2006 seulement, le montant s’élève à 23 millions de dollars. Des organisations privées comme la NED sont devenues d’importants instruments de la politique étrangère américaine.

 

Le journal de Munich cite les propres paroles de l’ancien directeur de la NED, Weinstein: “Beaucoup d’actions que nous lançons maintenant auraient été secrètement menées, il y a vingt-cinq ans, par la CIA”. Les instituts américains de ce type auraient, poursuivent les  rédacteurs de la SDZ, également soutenu financièrement la “révolution orange” en Ukraine et la “révolution des roses” en Géorgie, deux “remaniements politiques” clairement dirigés contre les intérêts de la Russie.

 

Le président du Venezuela, Hugo Chavez, a ouvertement reproché aux Etats-Unis de soutenir la violence au Tibet. En menant une telle politique, Washington entend saboter les Jeux olympiques de Pékin, a déclaré Chavez lors de l’un de ses discours, tenu récemment à Caracas. Les Etats-Unis veulent, par tous les moyens, fractionner le territoire actuellement sous souveraineté chinoise. Derrière les désordres du Tibet se profilent les intérêts de l’impérialisme américain, pense le président du Venezuela, qui a appelé à soutenir la Chine dans cette épreuve, de même que les Jeux olympiques.

 

K. KRIWAT.

(article tiré de DNZ/n°23/2008; source: Jean-François Susbielle, “China/USA – Der programmierte Krieg”; édition allemande de: J.-F. Susbielle, “Chine-USA. La guerre programmée. Le XXI° siècle sera-t-il le siècle de la revanche chinoise?”, First Editions, Paris, 2006,ISBN 2-75400-149-2).

mercredi, 04 juin 2008

Les Hindous comme "païens indiens"

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SYNERGIES EUROPéENNES – BRUXELLES – MAI 2004
COMMISSION “TRADITIONS”

Les hindous comme "païens indiens"

Par Koenraad Elst

Définition historique de « Hindou »

Dans les écritures hindoues, le mot « hindou » est introuvable. Pourtant, longtemps avant que les spécialistes occidentaux s’assoient pour inventer des définitions de « hindou », le terme était déjà porteur d’un sens déterminé. La procédure normale devrait être d’entendre cette version originale en premier. Elle fut apportée en Inde par les envahisseurs islamiques, et signifiait : « païen indien ».

Le terme « Hindou » est l’équivalent persan du terme indo-aryen « sindhu », « rivière », « l’Indus ». L’équivalence est une simple application de la relation phonétique régulière entre les branches indo-aryenne et iranienne de la famille linguistique indo-européenne : l’initiale [s] est conservée en indo-aryen mais se transforme en [h] en iranien, alors que les terminaisons aspirées comme [dh] sont conservées en indo-aryen mais perdent leur aspiration en iranien. Les Iraniens utilisaient le mot Hindu pour désigner la rivière Sindhu et les pays et populations situées autour et au-delà du Sindhu. Aux Perses, les Grecs empruntèrent le nom de la rivière et en firent Indos et le nom des gens et en firent Indoi, d’où l’anglais Indus, India, Indian.

Les Indiens de l’Asie du Sud-Est ne furent jamais connus sous le nom d’« hindous », mais les Arabes, les Turcs, les Mongols et les autres étrangers du nord et de l’ouest adoptèrent le nom perse pour désigner l’« Inde » et les « Indiens », c’est-à-dire Hind en arabe, Hindistan en turc. Xuan Zang (Huen Tsang, 7ème siècle apr. JC), qui était entré en Inde en passant par l’Asie Centrale de langue perse, mentionne à de nombreuses reprises que le nom Xin-du (chinois régulier venant du perse Hindu [1]) ou, comme il le corrige, Yin-du, est utilisé en-dehors de l’Inde mais est inconnu à l’intérieur du pays, parce que les natifs l’appellent Aryadesh ou Brahmarashtra [2]. Comme le dit Sita Ram Goel : « On peut donc dire que le mot ‘Hindu’ a acquis une connotation nationale, depuis l’époque de l’Avesta, bien que cela le fut seulement aux yeux des étrangers » [3]. Dans les prochains paragraphes, nous résumons ses découvertes concernant la préhistoire de l’actuel terme hindu.
Quand le bouddhisme s’implanta en Asie Centrale, et que les temples bouddhistes furent construits pour le culte des statues de Bouddha, les mazdéens donnèrent aux fidèles de cette religion indienne le nom de but-parast, « adorateurs de Bouddha », par opposition au mazdéen âtish-parast ou « adorateurs du feu ». Le terme but-parast en arriva à signifier plus généralement « adorateur d’idole », car à l’époque des invasions musulmanes, but était devenu le terme générique pour « idole », d’où but-khana, « temple à idole », et but-shikan, « briseur d’idole ». Ils ne faisaient aucune distinction entre les différentes sectes basées en Inde, et à l’époque où les Arabes et les Turcs persianisés envahirent l’Inde, le mot but-parast était appliqué au hasard à tous les incroyants indiens. Voyant que les brahmanes avaient des cérémonies du feu tout comme les mazdéens, les musulmans incluaient occasionnellement les païens indiens aussi dans la catégorie âtish-parast, à nouveau sans se préoccuper des distinctions entre les différentes sectes.

Les envahisseurs musulmans donnaient parfois aux païens d’Inde le nom de « Kafirs », incroyants en général, c’est-à-dire la même désignation religieuse qui fut utilisée pour les polythéistes d’Arabie ; mais souvent ils les appelaient « hindous », habitants de l’Hindoustan, c’est-à-dire une désignation ethno-géographique. Ainsi, ils donnèrent un contenu religieux précis à ce terme géographique : un hindou est tout Indien qui n’est pas juif, chrétien, musulman ou zoroastrien. En d’autres mots : tout Indien « païen », c’est-à-dire un Indien qui n’est ni un croyant des religions abrahamiques ni un païen iranien, est un hindou. Dans sa définition de « paganisme indien », l’hindouisme inclut toute la gamme depuis le culte animal jusqu’à la philosophie moniste des Upanishads, et depuis le sacrifice sanglant de la Shakti jusqu’à la non-violence extrême des jaïns.

Le terme Hindu était utilisé pour tous les Indiens qui étaient incroyants ou adorateurs d’idoles, incluant les bouddhistes, les jaïns, les « animistes » et plus tard les Sikhs, mais en les distinguant des Indiens chrétiens (ahl-i Nasâra ou Isâî), juifs (ahl-î-Yahûd ou banû Isrâîl), mazdéens (ahl-i Majûs ou âtish-parast) et bien sûr des musulmans eux-mêmes. De cette manière, au moins à l’époque de Al Biruni (début du 11ème siècle), le mot Hindu avait une signification religieuse-géographique distincte : un hindou est un Indien qui n’est ni musulman, ni juif, ni chrétien, ni zoroastrien [4].

Un critère sans ambiguïté

Les hindous ne s’appelèrent jamais eux-mêmes « hindous » avant que les envahisseurs musulmans n’arrivent et ne les désignent par ce terme persan [5]. Il ne s’ensuit pas que ceux que nous appellerions hindous par rétrospective n’avaient aucun sens de leur unité culturelle pan-hindoue, comme certains pourraient le conclure hâtivement ; simplement que le terme hindou n’était pas encore en usage. De même, les hindous appelaient ces nouveaux-venus des Turcs, mais cela n’exclut pas la reconnaissance de leur spécificité religieuse en tant que musulmans. Au contraire, même Timur, qui déclara très clairement dans ses mémoires qu’il venait en Inde pour mener une guerre religieuse contre les Incroyants, et qui libérait les captifs musulmans d’une cité conquise avant de passer les hindous survivants au fil de l’épée, parlait de ses propres forces comme des « Turcs », une désignation ethnique, plutôt que comme des « musulmans » [6]. Il ne faut pas confondre le terme avec le concept : l’absence du terme hindou ne prouve pas la non-existence d’un concept énoncé plus tard comme « Dharma hindou ».

D’autre part, pour ceux qui maintiennent qu’il n’y avait pas d’identité hindoue auparavant, la genèse du label hindou devrait suggérer une analogie avec le récit séculariste de la genèse de la nationalité indienne : les Indiens n’existent pas, mais la nationalité indienne fut forgée dans le creuset de la lutte commune contre les Britanniques [7]. De même, si l’hindouisme n’avait pas existé auparavant, alors rien n’aurait été plus efficace pour créer un sens commun de l’hindouité que d’être attaqués ensemble par le même ennemi, britannique ou musulman. Comme l’écrivit Veer Savarkar : « Les ennemis [islamiques] nous haïssaient en tant qu’hindous, et toute la famille de peuples et de races, de sectes et de croyances qui florissaient d’Attock à Cuttack fut soudain individualisée en un seul Etre » [8]. Ce n’est pas historique dans ses détails, mais c’est néanmoins en accord avec une vision largement répandue de la manière dont les nations sont créées : par une expérience commune, comme l’expérience profondément impliquante d’une guerre contre un ennemi commun.

Ainsi, un hindou n’était par définition ni un membre des religions abrahamiques, ni du paganisme quasi-monothéiste perse (le mazdéisme, mieux connu sous le nom de zoroastrisme). Mais un bouddhiste, un jaïn, un membre d’une tribu, étaient tous inclus dans le domaine sémantique du terme hindou. Bien que les premiers écrivains musulmans en Inde notèrent une différence superficielle entre brahmanes et bouddhistes, appelant ces derniers les « brahmanes au crâne rasé », ils ne virent pas d’opposition entre « hindous et bouddhistes » ou entre « hindous et membres des tribus », et plus tard les souverains musulmans ne virent pas non plus d’opposition entre « hindous et sikhs ». Au contraire, Al Biruni classe les bouddhistes parmi les sectes hindoues idolâtres : il décrit comment les idoles de Vishnou, de Surya, de Shiva, des « huit mères » et du Bouddha sont adorées par les Bhagavatas, c’est-à-dire les mages, les sadhous, les brahmanes et les chamans [9].
Tous les Indiens qui n’étaient ni des parsis, ni des juifs, ni des chrétiens ni des musulmans, étaient automatiquement des hindous. Ainsi, la définition originelle de hindou est : un Indien païen. Depuis le premier usage du terme hindou en Inde, une définition claire en a été donnée, et pour chaque communauté on peut facilement décider si elle cadre avec cette définition ou non. Tant pis si vous n’aimez pas l’étiquette : si vous cadrez avec la définition, vous tombez dans la catégorie hindoue. Les hindous n’ont pas choisi d’être appelés hindous : d’autres ont conçu le terme et sa définition, et les hindous se trouvèrent simplement porter ce label et l’acceptèrent progressivement.

Comme dans les manipulations de catégories de recensement de E.A. Gait, cette définition implique un « test » par lequel nous pouvons décider si quelqu’un est un hindou, sans s’occuper de savoir s’il utilise ou accepte lui-même le label. La différence est qu’ici le test ne fut pas conçu ad hoc pour prouver un point. C’est une authentique définition, générée par la rencontre, dans la vie réelle, des envahisseurs musulmans avec leur Autre : les Indiens païens natifs.

Qu’est-ce que le paganisme ?

Le terme païen est généralement utilisé pour les gens n’appartenant pas aux religions abrahamiques: le judaïsme, le christianisme et l’islam. Mais mieux qu’une simple convention, il pourrait y avoir une définition du terme païen. Et cette définition est facilement suggérée par la signification basique du mot. Comme son équivalent germanique Heathen, le mot latin paganus signifie littéralement : rural. Le christianisme commença comme un mouvement strictement urbain, et c’est seulement après avoir pris le pouvoir dans l’Empire Romain en 313 apr. JC qu’il commença à conquérir les campagnes [10].

L’association de chrétien avec urbain, de païen avec rural, est plus qu’un simple accident historique. Il est parfaitement logique que le paganisme soit né dans un environnement naturel, longtemps avant que l’homme ne vive dans des cités, et que le christianisme se répande dans les cités, où une grande population était concentrée. La raison est que le paganisme est basé sur la réalité immédiate, sur l’expérience humaine de la vie cyclique, des puissances de la nature, des phénomènes célestes : n’importe qui vivant n’importe où peut être frappé d’émerveillement devant ces réalités. Par contraste, le christianisme est quelque chose qui n’a jamais été découvert par quiconque : vous devez en avoir entendu parler par quelqu’un, par des prédicateurs qui allaient sur la place du marché où ils pouvaient trouver une large audience.

Les systèmes de croyance basés sur la « Révélation divine » se répandirent d’abord dans les centres de population, où un message pouvait être communiqué. Dans les campagnes européennes, les croyances et les pratiques païennes (bien que n’étant pas les plus sophistiquées, celles-ci ayant disparu en même temps que les élites païennes, souvent les premières à être converties) continuèrent, parfois sous un habillage chrétien, jusqu’à ce qu’elles soient rendues démodées durant les deux derniers siècles, non par le christianisme mais par la modernité.

Dans une certaine mesure, la même relation a existé entre le bouddhisme et l’hindouisme : le bouddhisme prosélyte fut un phénomène urbain, en grande partie parce qu’il était dépendant du patronage des marchands, des princes et de la charité ordinaire, et des concentrations humaines pour le recrutement de nouveaux moines. Le bouddhisme est un peu un cas hybride. C’est une « religion naturelle » en ce que tout individu pouvait s’asseoir sous un arbre et découvrir le processus de méditation par lui-même. De cette manière, le paganisme en tant que « religion naturelle » ou « spiritualité cosmique » s’étend des rituels orientés vers la nature aux hauteurs de la méditation, excluant seulement les révélations exclusives du monothéisme prophétique.

D’un autre coté, l’expérience de l’Illumination est une expérience beaucoup plus rare que l’expérience du cycle de vie ou du cycle de l’année, et dans cette mesure, le bouddhisme devait être prêché et propagé. Pour ce trait missionnaire, et pour son désintérêt basique envers les panthéons (ni à vénérer ni à rejeter), le bouddhisme est souvent traité comme séparé du paganisme ; les auteurs chrétiens hésitent aujourd’hui à l’appeler païen [11].

Le paganisme peut ainsi être défini comme tout le spectre de la religion « cosmique » (ou « universalisme ») par opposition aux religions « révélées », dont le message n’est pas intrinsèque à l’ordre du monde. Le monothéisme prophétique désacralise le cosmos en concentrant exclusivement le sacré dans une déité extra-cosmique : « N’adorez pas le soleil et la lune, mais adorez Allah qui les a créés » [12]. Le paganisme voit le sacré dans des manifestations d’ordre cosmique, de puissance cosmique, de beauté cosmique. Si la religion est définie comme une question de croyance en une révélation divine, alors on devrait dire qu’il existe une culture hindoue, mais pas de religion hindoue. En effet, des indologues perspicaces comme Frits Staal ont remarqué qu’à la différence du christianisme et de l’islam, l’hindouisme n’est en aucune manière une « religion » dans le sens d’un « système de croyance » [13].

Le point a aussi été fait par de nombreux représentants du renouveau hindou et sera répété plusieurs fois dans ces pages, mais pour l’instant nous citerons une formulation de quelqu’un qui était un rénovateur hindou dans le sens le plus constructif tout en restant éloigné des polémiques : le regretté Ekkirala Krishnamacharya, physicien, éducateur et Kulapati (recteur) du World Teacher Trust de Visakhapatnam, centre lié à la Théosophie. A une question sur « l’ancienne religion de l’Inde », il répondit :
« Il n’y avait pas de religion dans ce pays, et les Indiens n’avaient pas non plus besoin d’une religion. Les anciens Indiens avaient un code de lois à suivre. Il était établi en accord avec diverses vérités à l’œuvre dans la nature. La loi d’existence de la nature et de sa création était observée dans tous ses détails et la loi à suivre était copiée en accord avec elle. Cela était appelé Dharma. Le terme signifie ce qui porte et protège. C’est ce qui porte et protège quand nous le suivons. L’homme est honoré quand il l’honore. Il reçoit protection quand il le protège. Cela fut transformé en une constitution appelée Bharata Dharma. C’était le chemin de vie communément accepté dans tout le pays. Toute tentative de religion est naturellement limitée et étroite si on la compare à cela » [14].
Ainsi, le Dharma est ici défini comme le simple fait de vivre en accord avec les lois de la nature. Nous pouvons accepter cela comme une définition générale même avant de discuter ce que ces lois pourraient être précisément.

Néanmoins, le terme général païen ne doit pas être pris pour indiquer une seule « religion naturelle » : à l’intérieur du champ des traditions païennes, il y a aussi d’importantes différences, par ex. du végétarisme au cannibalisme. La différence réside dans la perception grossière ou subtile de ce qui constitue précisément les lois de la nature, l’ordre cosmique (ce que les Vedas appellent Rita). A un niveau très primitif, on pourrait dire que la « survie du meilleur » ou « le gros poisson mange le petit poisson » est la loi de la nature devant être suivie : cela donne au paganisme une forme caricaturale [15]. A un niveau plus civilisé, disons celui de la philosophie grecque, une compréhension convenablement plus raffinée des lois de la nature et de l’éthique humaine concomitante est développée. La distinction à laquelle prétend l’hindouisme est que par le yoga il a affiné la sensibilité humaine et rendu l’homme réceptif aux lois cosmiques plus subtiles, telles que l’unité ultime de tous les êtres sensibles, d’où la nécessité de la dayâ ou karunâ, la compassion.

Païens et hindous

En tant que concept, le paganisme est une corne d’abondance avec des phénomènes très divergents. Quand nous faisons un survol de la scène « néo-païenne » dans l’Occident moderne, nous trouvons un vaste champ de tendances : depuis les imitations carnavalesques des druides et des sorcières jusqu’aux efforts intellectuels à l’authenticité historique certifiée, et s’étendant sur tout le spectre politique, des néo-nazis et des rénovateurs ethniques aux féministes, aux écologistes et aux anarchistes hippies, tout autour d’un noyau principal de chercheurs apolitiques [16]. La grande finesse de la philosophie du Védanta, ou de la philosophie grecque « païenne », n’est en aucune façon un héritage commun de toutes les traditions païennes.

Pourtant, on pourrait dire que toutes ont une inspiration commune, et certains penseurs hindous ont développé la position selon laquelle l’hindouisme devrait tendre la main aux autres cultures et mouvements païens. Ram Swarup appelle les peuples qui ont perdu leur héritage païen à cause de l’invasion chrétienne ou islamique à « faire un pèlerinage à travers le temps » pour redécouvrir leurs anciens dieux [17]. A la différence de la plupart des nationalistes hindous dont l’horizon est limité aux frontières de l’Inde, il montre aussi une certaine connaissance des mouvements en Occident explorant réellement une renaissance de la spiritualité pré-chrétienne [18]. Ces dernières années, le VHP [Vishva Hindu Parishad, Union Mondiale Hindoue] a tenté d’établir des contacts avec le néo-paganisme organisé, mais il est trop tôt pour parler de résultats solides.

Il semblerait que pour une coopération réelle, les eaux entre le néo-paganisme occidental et l’hindouisme soient encore très profondes. De nombreux néo-païens rejettent des éléments du christianisme qui se trouvent être chers aux hindous sérieux, comme la sobriété et la retenue en matière de moralité sexuelle, et connaissent souvent très mal les traditions hindoues d’ascèse et de méditation. Les néo-païens racistes ne seraient de toute façon pas très intéressés à rencontrer des immigrés hindous à la peau sombre, et les néo-païens de gauche sont découragés par les reportages de journaux sur les pratiques obscurantistes et les conditions non-féministes dans la société hindoue. Mais le rapprochement hindou-païen a certainement un potentiel et pourrait bien s’épanouir dans un futur pas trop éloigné.

Polythéisme et monothéisme

Le livre de Ram Swarup : The Word as Revelation : Names of Gods [La parole en tant que révélation: les noms des dieux] est ce que vous pouvez trouver de plus proche d’une apologie du polythéisme, bien qu’il fasse aussi une place au monothéisme. Dans certains écrits « néo-païens » occidentaux, nous trouvons un rejet explicite du monothéisme en faveur du polythéisme [19]. En plus de cela, les auteurs néo-païens acceptent la vision chrétienne selon laquelle le christianisme est monothéiste alors que le paganisme est polythéiste ; ils acceptent les termes d’un débat dans lequel le christianisme proclame sa supériorité.

Par contraste, les philosophes hindous qui connaissent leur tradition ne tombent pas dans cette dichotomie du « mono-poly » : « Dans cette approche plus profonde, la distinction n’est pas entre un Vrai Dieu Unique et de Nombreux Faux Dieux ; elle est entre une voie de culte véridique et une voie de culte erronée. Partout où il y a de la sincérité, de la vérité et du don de soi dans le culte, ce culte atteint le vrai autel, quel que soit le nom que nous pouvons lui donner et quelle que soit la manière dont nous pouvons le concevoir. Mais s’il n’est pas sans désir, s’il y a de l’ego, de la fausseté, de la vanité et de la tromperie en lui, alors il est inutile même s’il est offert au Vrai Dieu, théologiquement parlant » [20].

Ce n’est pas soit « un » soit « beaucoup », c’est les deux à la fois : « comme le monothéisme, le polythéisme aussi a son motif spirituel. Si le monothéisme représente l’intuition de l’homme pour l’unité, le polythéisme représente son besoin de différenciation. La vie spirituelle est une mais elle est vaste et riche dans son expression (…) seule une certaine forme de polythéisme peut rendre justice à cette variété et à cette richesse (…) Un pur Dieu monothéiste, sans le soutien d’éléments polythéistes, tend à devenir sans vie et abstrait » [21]. Ram Swarup argue que cela est implicitement admis par les religions monothéistes, qui réintroduisent la diversité dans leur Dieu unique en donnant 101 noms différents à Allah, en Le laissant « émaner » dans la création à travers les étapes de « l’Arbre de Vie » dans la Kabbale juive, ou en percevant en lui une Trinité, ou en l’entourant d’une Vierge Mère et d’une foule céleste d’anges et de saints.

Cependant, « le monothéisme n’est pas complet sans un motif spirituel. L’Esprit est une unité. Il n’adore rien de moins que le Suprême. Le monothéisme exprime, bien que d’une manière inadéquate, cette intuition de l’homme pour le Suprême. » [22]. Une partie de la critique monothéiste envers le polythéisme est aussi bien prise : « De même, des dieux purement polythéistes sans aucun principe d’unité parmi eux perdent leur cohérence interne. Ils se désagrègent et ne servent aucun but spirituel » [23].

Mais d’après Ram Swarup, l’hindouisme a depuis longtemps dépassé les maladies d’enfance du polythéisme, dont des panthéons plus faibles sont affligés : « L’approche védique est probablement la meilleure. Elle apporte l’unité sans sacrifier la diversité. En fait, elle apporte une unité et une diversité plus profondes hors de la portée du monothéisme et du polythéisme ordinaires. Elle ne fait qu’un avec l’approche yogique ou mystique » [24].

De même, Sri Aurobindo avait déjà écrit : « Le polythéisme indien n’est pas le polythéisme populaire de l’ancienne Europe ; car ici l’adorateur de nombreux dieux sait toujours que toutes ses divinités sont des formes, des noms, des aspects et des pouvoirs de l’Unique ; ses dieux viennent de l’unique Purusha, ses déesses sont des énergies de l’unique Force divine ». Il ajoute une brève défense de l’« idolâtrie » : « Le culte indien des images n’est pas l’idolâtrie venant d’un esprit barbare ou sous-développé, car même le plus ignorant sait que l’image est un symbole et un support et qu’on peut la jeter quand on a fini de l’utiliser » [25]. Des dévots de dieux non-hindous diraient probablement la même chose pour leur propre tradition. En tous cas, dans le cas d’une renaissance païenne à l’échelle mondiale, l’hindouisme peut prétendre à un rôle de leadership naturel.

Le paganisme en danger, l’hindouisme à la rescousse

En même temps que d’autres représentants du renouveau hindou, Shrikant Talageri place l’hindouisme dans un continuum mondial du paganisme : « L’hindouisme est le nom de la forme territoriale indienne du Sanâtanism [religion éternelle] mondial (appelons-le paganisme). L’idéologie de l’Hindutva devrait donc être une idéologie universelle », et les représentants du renouveau hindou devraient être « le fer de lance d’une renaissance, d’un rajeunissement et d’une résurgence mondiale du spiritualisme, et de toutes les religions et cultures du monde qui existaient dans le monde entier avant l’arrivée d’idéologies impérialistes comme le christianisme, l’islam, le fascisme, le marxisme, etc. » [26]. Un peu comme Moscou pour le mouvement communiste mondial, l’Inde deviendrait le centre mondial de la renaissance païenne.

Pour mettre cette solidarité païenne en pratique, les rédacteurs du journal Young India suggèrent de créer deux, trois ou de nombreux Ayodhyas : « Il y a quelque 600 ans il y avait un grand temple païen au pied d’une colline sacrée à Vilnius, la capitale de la Lituanie. Il fut démoli, le grand prêtre fut banni (certains disent, tué), et une cathédrale fut construite à la place. Nous appelons le pape à rendre le lieu aux païens de Lituanie qui sont les possesseurs originels et historiques légaux de ce site sacré. Nous appelons aussi le pape à ne pas approuver plus longtemps cette profanation. Cela ne peut pas plaire à son Seigneur, Jésus Christ dans les Cieux, qui abhorrait la profanation et l’occupation des lieux saints des autres » [27]. Ce n’est peut-être pas le genre de renaissance religieuse que le monde attend ; ce n’est du moins pas le centre d’intérêt de Talageri dans le paganisme mondial.

Par « paganisme », les représentants du renouveau hindou ne désignent pas seulement les formes indo-européennes (donc liées au Veda) de la religion pré-chrétienne : « Les aborigènes d’Australie, les Indiens Rouges d’Amérique, les païens pré-islamiques d’Arabie, les Nègres d’Afrique regardent vers la société hindoue avec attente et espoir. Ils sont pleins d’espoir parce que seule la société hindoue de l’Inde a pu survivre aux tueries conjointes de l’islam, du christianisme et du marxisme » [28].
Un article remarquable dans cette liste est « les païens pré-islamiques d’Arabie ». Ils n’existent plus depuis le 7ème siècle, et à la différence de l’Europe, on ne connaît aucun mouvement de renouveau païen en Arabie. Ce n’est donc peut-être rien de plus qu’un exercice symbolique, mais les rénovateurs hindous veulent rendre justice au paganisme disparu d’Arabie.

Il est très commun de mentionner les païens d’Arabie, les ennemis du prophète Mahomet, en termes purement péjoratifs. Que cela soit fait dans des écrits islamiques est prévisible ; que des sécularistes indiens en fassent autant n’est guère surprenant. Mais c’est aussi très commun dans les publications spécialisées occidentales, par ex. un célèbre islamologue hollandais écrit : « La religion arabe était un polythéisme primitif, pauvre en religiosité réelle » [29]. De plus, il prend aussi pour argent comptant l’affirmation islamique selon laquelle la religion arabe était une dégénérescence de ce qui était originellement un monothéisme prophétique fondé par Abraham à la Mecque, une forme originelle de l’islam : « A travers le temps, parmi les Arabes, ce monothéisme originel a dégénéré en paganisme : la vraie connaissance a été perdue » [30].

Face à ce quasi-monopole de la version islamique de la nature du paganisme arabe du passé, quelques rénovateurs hindous, en particulier Sita Ram Goel, ont tenté de reconstruire le point de vue des païens arabes. Le sujet est digne d’un traitement détaillé, car c’est incontestablement l’une des contributions les plus originales du renouveau hindou, d’une importance universelle pour toute compréhension de la carrière du prophète et de l’islam ; cependant, je me limiterai ici à quelques points généraux.

Loin d’être à l’origine une forme du monothéisme abrahamique, le paganisme arabe était une religion cosmique, se concentrant largement sur le ciel étoilé, tout comme sa religion-sœur « sémitique » de Babylone, ou comme la religion védique [31]. Les Arabes avaient un panthéon comparable à celui des anciens Grecs ou Hindous, incarnant des notions métaphysiques, cosmologiques et éthiques. Tout comme l’Inde, « la totalité de leur pays était recouvertes de temples et de sanctuaires abritant des centaines de divinités avec de nombreux noms et formes » [32]. Après avoir énuméré ce qu’on connaît réellement du paganisme arabe, ainsi qu’une liste des déités arabes, Goel conclut : « Les déités énumérées dans les pages précédentes pourront sembler trop nombreuses aux esprits sous le charme du monothéisme. Le fait, cependant, est qu’elles sont bien trop peu nombreuses et qu’elles représentent seulement ce qui a été sauvé par l’érudition moderne à partir des immenses ruines causées par l’islam » [33].

La déité principale de la Kaaba, le lieu saint national arabe, était une déité mâle de la lune, Hubal, qui présente de nombreuses similarités avec Shiva ; en particulier le fait que dans les temples de ces deux déités, la mûrti (idole) centrale est une pierre non-sculptée. S’il serait exagéré de dire que la Kaaba était un temple de Shiva (une position prise par l’historien excentrique P.N. Oak), il y a une indéniable parenté typologique entre l’hindouisme et le paganisme arabe.

Si nous considérons les Grecs et les Hindous polythéistes comme des civilisés, Goel, qui rejette la description aujourd’hui classique des païens arabes comme étant une « populace querelleuse s’adonnant au culte des idoles », nous enjoint d’y réfléchir à deux fois avant de considérer les païens arabes comme des sauvages ayant un besoin urgent de la mission civilisatrice de Mahomet : « Ce n’est rien de moins qu’une calomnie de dire que les Arabes pré-islamiques étaient des barbares dépourvus de religion et de culture, à moins d’entendre par religion et culture ce que les théologiens musulmans entendent » [34].

Les Arabes païens eux-mêmes, pour le moins, se considéraient eux-mêmes comme très religieux, bien que pas au sens de « croyants ». Goel cite la réponse d’un prince arabe au roi de Perse qui lui avait dit à quel point il considérait les Arabes comme inférieurs : « Quelle nation pourrait-elle être mise avant les Arabes pour la force ou la beauté ou la piété, le courage, la générosité, la sagesse, la fierté ou la fidélité ? (…) Il était si généreux qu’il aurait tué le chameau qui était sa seule richesse pour donner un repas à l’étranger qui venait à lui la nuit. Aucun autre peuple n’avait une poésie si élaborée ou un langage si expressif que les leurs (…) Ils étaient si fidèles aux ordonnances de leur religion que si un homme rencontrait le meurtrier de son père, sans armes pendant l’un des mois sacrés, il ne lui faisait aucun mal. Un signe ou un regard de leur part constituait un engagement qui était absolument inviolable » [35].

Encore une fois, nous ne pouvons pas entrer ici dans les détails, mais il est important de noter que cette tendance non-nationaliste à l’intérieur du mouvement du renouveau hindou pense en termes mondiaux. L’un de ses objectifs, bien que pour l’instant conçu comme éloigné et théorique, est la restauration en Arabie, sinon de son ancienne religion, du moins d’une certaine forme de religion non-prophétique pluraliste. Il faut noter à quel point cette tendance ambitieuse est éloignée de la psychologie défensive et sombre de « l’hindouisme assiégé », bien qu’elle soit largement exprimée par les mêmes individus.

Notes:

 

[1] La transcription chinoise , aujourd’hui prononcée comme un [sh] cérébral, vient souvent d’un /h/ fortement aspiré, /x/. En chinois moderne, le nom de l’Inde est devenu Yin-du, sur la base de la prononciation non-aspirée proposée par Xuan Zang lui-même.
[2] Surendranath Sen: India though Chinese Eyes, p.59.
[3] S.R. Goel: Hindu Temples, vol.2 (2nd ed.), p.396. Le chapitre concerné a aussi été publié séparément : Hindus and Hinduism, Manipulation of Meanings (1993).
[4] L’existence pré-moderne du terme « hindou » fut reconnue, devant une audience déçue d’indologues (qui enseignent et écrivent habituellement que l’hindouisme est une « construction orientaliste » récente) par le Prof. David Lorenzen, dans un article sur la définition de « hindou », lu lors de la Conférence sur l’Asie du Sud en 1995 à Madison, Wisconsin.
[5] Je renonce à discuter des diverses propositions excentriques par des hindous pour expliquer Hindu comme un mot sanscrit, à savoir que Hindu serait dérivé du sanscrit hîna, « humble » (comme dans Hînayâna, le « petit véhicule »), ou la petite idée de Xuan Zang selon laquelle il serait dérivé de indu, « lune ».
[6] Une traduction anglaise de l’autobiographie de Timur, Malfuzat-i-Timuri, est donnée dans Elliott & Dowson: History of India, vol-3, 389-477. De même, durant la guerre civile yougoslave, les Serbes appelaient les musulmans les « Turcs », bien qu’ils ne parlaient pas de gens parlant le turc mais de gens professant l’islam.
[7] Non que je croie à ce récit. Que la nationalité indienne soit née ailleurs que dans la lutte pour la liberté est impliqué par le fait que la nation indienne ne fut en aucun cas unie dans cette lutte : de nombreux Indiens collaborèrent de tout cœur avec les Britanniques. Mais cela ne nie pas non plus leur nationalité commune, tout comme la division des Français en collaborateurs et en résistants sous l’occupation allemande (1940-44) ne prouve pas la non-existence de la nation française.
[8] V.D. Savarkar: Hindutva, p.45.
[9] Al Biruni : India, vol. 1, p. 121. Il attribue la division des hommes en sectes à nul autre que Rama. Les « Mages » sont les Maga Brahmanes, qui sont en effet des adorateurs de Surya, le soleil ; les « huit mères » sont les ashta-Lakshmî, habituellement décrites en même temps que le Sri Yantra (quatre triangles avec la pointe en haut et cinq avec la pointe en bas, entrelacés), et adorées par ex. dans le temple de Kanchi Shankaracharya.
[10] Un autre sens parfois donné à paganisme, et pas approfondi ici, est l’attachement religieux à des éléments « matériels » comme les prescriptions rituelles, par opposition à l’accent mis par les chrétiens sur « l’esprit » (en morale, sur « l’intention ») ; selon ce critère, le pur bouddhisme Theravada n’est pas païen, alors que le judaïsme orthodoxe l’est ; l’hindouisme du Védanta n’est pas païen, alors que l’hindouisme tantrique l’est ; les formes les plus austères du protestantisme ne sont pas païennes, alors que le catholicisme l’est avec ses sacrements.
[11] Par un exemple typique, Karen Armstrong, ancienne nonne catholique et aujourd’hui fidèle de l’islam, s’appelle elle-même une « monothéiste free-lance avec une influence bouddhiste » (parlant avec Ludo Abicht à la radio flamande, 1996).
[12] Coran 41:37.
[13] F. Staal: Een Wijsgeer in bet Oosten, p. 107-108. De même, dans son livre Le Corps Taoïste, Kristofer Schipper a fait la même remarque sur le taoïsme.
[14] E. Krishnamacharya: Our Heritage, p. 16.
[15] Dans ce sens, le communisme et le nazisme pourraient tous deux être considérés comme des formes (séculières, pseudo-scientifiques) de « paganisme », comme cela est fréquemment fait dans les textes chrétiens, par ex. dans le document du Vatican sur la responsabilité chrétienne pour l’Holocauste, mars 1998. Je trouve cet usage déroutant et donc indésirable, mais le point valable est que les deux idéologies se basaient elle-mêmes sur les « lois de la nature » (comprises d’un point de vue séculier), plus précisément comme les « lois de l’histoire » dans le cas du communisme.
[16] See e.g. G. Harvey & C. Hardman: Paganism Today, Vivianne Crowley: Principles of Paganism; G. Harvey: Speaking Earth, Listening People.
[17] Ram Swarup: The Word as Revelation: Names of Gods, p. 132.
[18] Ram Swarup correspondait avec Prudence Jones, deux fois présidente de la Pagan Federation, et avec Gudrun Kristin Magnusdottir, païenne islandaise auteur du livre Odsmal, qui relie la religion Asatru germanique à la méditation transcendantale et à d’autres traditions orientales. Son article « Of Hindus, Pagans and the Return of the Gods » (Hinduism Today, oct. 1991) a été reproduit dans le magazine anarcho-païen californien Green Egg, Noël 1991 et à nouveau en mars 1998.
[19] Par ex. Alain de Benoist : Comment peut-on être païen ?, un aspect de la polémique « mono-poly » qui anima les salons parisiens autour de 1980, où Bernard-Henry Lévy défendait le monothéisme, bien qu’un « monothéisme sans Dieu » : Le Testament de Dieu.
[20] Ram Swarup: Word as Revelation, p. 129.
[21] Ram Swarup: Word as Revelation, p. 128.
[22] Ram Swarup: Word as Revelation, p. 126.
[23] Ram Swarup: Word as Revelation, p. 128.
[24] Ram Swarup: Word as Revelation, p. 128.
[25] Sri Aurobindo: Foundations of Indian Culture, p. 135.
[26] S. Talageri dans S.R. Goel: Time for Stock-Taking, p.227. Sanâtanism : d’après Sanâtana Dharma, la religion « éternelle », l’auto-dénomination de l’hindouisme.
[27] Young India, April 1998, dernière page ; souligné dans l’original.
[28] Mayank Jain: "Let us fulfil the Sardar’s mission", Organiser, 21-12-1997.
[29] J.H. Kramers: De Koran (Dutch), p.viii.
[30] J.H. Kramers: De Koran, p.x.
[31] S.R. Goel: Hindu Temples, vol.2, p.266 et p.273-296, avec référence à F. Hommel dans The First Encyclopaedia of Islam, vol.1, p.377 ff., et à Shaikh Inayatullah: "Pre-Islamic Arabian Thought", dans M.M. Sharif, ed.: A History of Muslim Philosophy, Lahore 1961.
[32] S.R. Goel: Hindu Temples, vol.2, p.294.
[33] S.R. Goel: Hindu Temples, vol.2, p.294.
[34] S.R. Goel: Hindu Temples, vol.2, p.272.
[35] Cité dans D.S. Margoliouth: Mohammed and the Rise of Islam, p. 2-3, et dans Goel: Hindu Temples, vol. 2, p. 270
Cet article constitue le chapitre II du livre de Koenraad Elst : « Who is a Hindu ? »
   

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mardi, 06 mai 2008

Tibet: le "Grand Jeu" et la CIA

Tibet, le « Grand Jeu », et la CIA

 
Etant donné le contexte historique de l'agitation au Tibet, il existe une raison de croire que Beijing a été pris par surprise lors des manifestations récentes pour la simple raison que leur planification a eu lieu en dehors du Tibet et que la direction des manifestants est aussi entre les mains d'organisateurs anti-chinois, qui se trouvent en sécurité et hors de portée, au Népal et en Inde du Nord.

De même, le financement et le contrôle général de l'agitation sont liés au dirigeant spirituel tibétain, le Dalaï Lama, et par voie de conséquence à la CIA, à cause de la coopération rapprochée du Dalaï Lama avec le renseignement US depuis plus de 50 ans.

Effectivement, compte tenu de l'implication profonde de la CIA avec le Mouvement Free Tibet (Mouvement Liberer le Tibet) et son financement de Radio Free Asia suspicieusement bien informée, il semble peu probable que toute révolte puisse avoir été planifiée ou puisse avoir eu lieu sans que le National Clandestine Service ( Service National Clandestin auparavant connu sous le nom de Directorate of Opérations - Directoire des Opérations), qui se trouve aux quartiers généraux de la CIA à Langley, n'en ait eu au préalable connaissance.

L'ex haut responsable des services secrets indou et journaliste respecté, B Raman, a fait le 21 mars le commentaire suivant : « sur la base de preuves disponibles, c'est raisonnablement possible d'affirmer avec conviction que le soulèvement initial à Lhasa le 14 mars a été pré-planifié et bien orchestré. »

Se pourrait-il qu'il y ait une base factuelle suggérant que les principaux bénéficiaires de la mort et de la destruction qui a balayé le Tibet sont à Washington ? L'Histoire suggère que c'est effectivement une possibilité.

La CIA a mené une campagne d'actions clandestines de grande envergure contre la Chine communiste au Tibet et ce dés 1956. Cela a conduit à un désastreux soulèvement sanglant en 1959, faisant des dizaines de milliers de morts parmi les Tibétains, tandis que le Dalaï Lama et environ 100 000 de ses adeptes ont été obligés de fuir au Népal et en Inde en passant par les passages dangereux de l'Himalaya.

La CIA a établi un camp militaire secret d'entraînement pour les combattants de la résistance du Dalaï Lama à Camp Hale près de Leadville au Colorado aux US. Les guérilléros tibétains ont été entraînés et équipés par la CIA pour mener des opérations de guérillas et de sabotage contre les Chinois communistes.

Les guérilléros entraînés par les US ont mené régulièrement des raids à l'intérieur du Tibet, occasionnellement dirigés par des mercenaires sous contrat avec la CIA, et soutenus par des avions de la CIA. Le programme initial d'entraînement s'est terminé en décembre 1961, bien qu'il semble que le camp du Colorado soit resté ouvert au moins jusqu'en 1966.

La Force d'Intervention Tibétaine de la CIA crée par Roger E. McCarthy, parallèlement à l'armée tibétaine de guérilléros a continué à mener des opérations sous le nom de code ST CIRCUS, pour harasser les forces d'occupation chinoises pendant 15 ans jusqu'en 1974, puis l'implication approuvée officiellement s'est arrêtée.

McCarthy, qui a aussi dirigé la Force d'Intervention pour le Tibet lors du pic de ses activités de 1959 jusqu'en 1961, a continué plus tard à mener des opérations identiques au Vietnam et au Laos.

A mi chemin des années 60, la CIA avait remplacé sa stratégie de parachutage de combattants de la guérilla et d'agents des services secrets à l'intérieur du Tibet, par celle de la mise sur pied de l'armée de guérilléros, Chusi Gangdrük, comprenant 2000 combattants d'origine ethnique Khamba, regroupés sur des bases comme celle de Mustang au Népal.

Cette base n'a seulement été fermée par le gouvernement népalais qu'en 1974, après une formidable pression de Beijing.

Après la guerre Indo-Chinoise de 1962, la CIA a développé une relation rapprochée avec les services de renseignements indous, à la fois pour entraîner et fournir des agents au Tibet.

Kenneth Conboy et James Morrison dans leur livre The CIA's secret War in Tibet » révélent que la CIA et les services de renseignements indous ont coopéré dans l'entraînement et pour équiper des agents tibétains et des troupes de forces spéciales et pour former des unités aériennes spéciales de renseignements telles que l'Aviation Research Center (Centre de Recherche pour l'Aviation) et le Spécial Center (Centre Special).

Cette collaboration a continué pendant une grande partie des années 70 et certains des programmes qu'ils ont soutenus, spécialement celui concernant l'Unité des Forces Spéciales des réfugiés tibétains, qui deviendra une partie importante de la Force Frontalière Spéciale Indoue, est toujours présentement actif.

C'est la détérioration des relations avec l'Inde, qui a coïncidé avec celle de l'amélioration Inde - Beijing, qui a mis fin à la plupart des opérations conjointes CIA –Inde.

Bien que Washington est rétrogradé en matière de soutien aux guérilléros tibétains depuis 1968, on pense que la fin du soutien officiel pour la résistance s'est produite lors de rencontres à Beijing en février 1972, entre le président Richard Nixon et la direction communiste chinoise.

Victor Marchetti, un ancien officier de la CIA a décrit l'outrage ressenti par de nombreux agents de terrain quand Washington à effectuer finalement le déconnection, ajoutant qu'un certain nombre « se sont même mis, pour se consoler, aux prières tibétaines, qu'ils avaient apprises pendant ces années passées avec le Dalaï Lama ».

L'ancien chef de la Force d'Intervention Tibétaine de la CIA de 1958 à 1965, John Kenneth Knaus, a été cité disant : « ce n'était pas une opération « trou noir » de la CIA ». Il a ajouté : « l'initiative venait de …tout le gouvernement US. »

Dans son livre, « Orphans of the Cold War « (Orphelins de la Guerre Froide), Knaus décrit le sentiment américain d'obligation concernant la cause de l'indépendance du Tibet de la Chine. Il ajoute, significativement, que sa réalisation « justifierait les motifs les plus défendables que nous ayons eu d'essayer de les aider à réaliser ce but pendant plus de 40 ans. Cela soulagerait également certains de la culpabilité d'avoir participer à ces efforts, qui ont coûtés leurs vies à d'autres, mais qui était le fait d'une aventure menée principalement par nous. »

Malgré le manque de soutien officiel, des rumeurs circulent largement sur l'implication de la CIA, ne serait que par le biais de proxy, lors d'une autre révolte ayant échoué en 1987, l'agitation qui a suivi, et, conséquence, la répression chinoise qui a continué jusqu'à mai 1993.

Le moment choisi pour une autre tentative sérieuse de déstabiliser l'emprise chinoise sur le Tibet, est semble-t-il propice pour la CIA, et Langley gardera certainement toutes les options ouvertes.

La Chine est confrontée à des problèmes significatifs, avec les musulmans Uighur dans la province du Xinjiang, les activités des Falun Gong, parmi de nombreux groupes dissidents, et bien sûr le souci croissant d'assurer la sécurité des jeux olympiques de cet été en août.

La Chine est vue par Washington comme une menace majeure, à la fois économiquement et militairement, non pas seulement en Asie, mais aussi en Afrique et en Amérique Latine.

La CIA voit également la Chine comme « n'aidant pas » dans la « guerre contre le terrorisme », offrant peu ou pas de coopération et aucune action positive menée pour stopper le flux d'armes et d'hommes venant des zones musulmanes de l'Ouest de la Chine en soutien aux mouvements islamistes extrémistes en Afghanistan et dans les états d'Asie Centrale.

Pour beaucoup à Washington cela semble l'opportunité idéale pour déstabiliser le gouvernement de Beijing car le Tibet est toujours considéré comme le point faible potentiel de la Chine.

La CIA s'assurera sans nul doute que ses empreintes ne soient pas trouvées partout sur cette révolte ascendante. Des agents isolés, et des proxy seront utilisés parmi les réfugiés tibétains au Népal et dans les zones frontalières du Nord de l'Inde.

En fait, la CIA peut s'attendre à un niveau significatif de soutien de la part d'un certain nombre d'organisations de sécurité à la fois en Inde et au Népal, et n'aura aucun problème à fournir au mouvement de la résistance, conseil, argent et par-dessus tout, publicité.

Cependant, aucune arme ne sera autorisée à faire surface, tant que l'agitation ne s'accompagnera pas de signes révélateurs d'une révolte ouverte en devenir de la grande masse ethnique des Tibétains contre les Chinois Han et les Musulmans Hui.

D'importantes quantités d'armes légères et d'explosifs venant de l'ancien bloc de l'Est ont été introduites clandestinement au Tibet ces 30 dernières années, mais il y a de fortes chances qu'elles restent cachées, en sécurité, jusqu'à ce que le bon moment se présente pour les sortir.

Les armes ont été acquises sur les marchés mondiaux, ou de stocks sur lesquels les forces armées US et israéliennes ont mis la main. Elles ont été expurgées et ne présentent aucune trace pouvant les faire remonter jusqu'à la CIA.

Des armes de ce type ont également l'avantage d'être interchangeables avec celles utilisées par les forces armées chinoises et bien sûr elles utilisent les mêmes munitions, diminuant le problème de réapprovisionnement lors de tout conflit futur.

Bien que le soutien officiel pour la résistance tibétaine se soit terminé il y a 30 ans, la CIA a conservé ouvertes ses lignes de communication, et continuent de financer en grande partie le Tibetan Freedom Mouvement (Mouvement Liberté pour le Tibet).

Ainsi donc, la CIA est-elle une nouvelle fois entrain de jouer le « Grand Jeu » au Tibet ?

Elle en a certainement la capacité, avec une présence significative des renseignements et de forces paramilitaires dans la région. D'importantes bases existent en Afghanistan, en Irak, au Pakistan, et dans plusieurs états d'Asie Centrale.

On ne peut pas douter du fait que la CIA a un intérêt à saper la Chine, de même que la cible plus visible qu'est l'Iran.

Donc probablement que la réponse est oui, et effectivement, ce serait plutôt surprenant si la CIA ne manifestait qu'un intérêt passager pour le Tibet. C'est après tout ce pour quoi elle est payée.

Depuis le 11 septembre 2001, il y a eu une vague énorme de changement dans les attitudes des renseignements US, leurs exigences et leurs capacités. De vieux plans opérationnels ont été dépoussiérés et mis à jour. D'anciens atouts ont été réactivés. Le Tibet et une faiblesse repérée dans la position de Beijing là bas ont probablement été complètement réévalués.

Pour Washington et la CIA, cela peut apparaître comme une opportunité divine de créer un moyen de pression contre Beijing, sans gros risque pour les intérêts américains, une simple situation de gagnant- gagnant.

Le gouvernement chinois serait, à l'autre bout, celui sujet à une condamnation mondiale pour sa répression continuelle et sa violation des droits de l'homme et ce serait les jeunes tibétains qui mourraient dans les rues de Lhassa plutôt qu'encore plus de gamins américains en uniforme.

Cependant, les conséquences de toute révolte ouverte contre Beijing, sont une nouvelle fois la crainte que des arrestations, tortures et même des éxécutions se propagent à la fois dans tous les coins du Tibet et des provinces voisines où existent d'importantes populations tibétaines, comme le Gansu, Quinghai et le Sichuan.

Et le Mouvement Libérer le Tibet a toujours peu de possibilité, à long terme, de réussir à obtenir une amélioration significative de la part du pouvoir politique central chinois, et absolument aucune chance de faire cesser son contrôle sur Lhasa et son pays.

Une nouvelle fois, il apparaîtra que le peuple tibétain va se retrouver pris au piège entre l'oppresseur Beijing, et un Washington manipulateur.

La crainte que les US, la Grande Bretagne, et d'autres pays occidentaux puissent essayer de montrer le Tibet comme un autre Kosovo, peut en partie expliquer la raison pour laquelle les autorités chinoises ont réagi comme si elles étaient confrontées à de véritables révoltes de masse plutôt que leur description officielle d'un court soulèvement du à des mécontents soutenant le Dalaï Lama.

En effet, Beijing a pris tellement au sérieux la situation qu'une unité spéciale de coordination sécuritaire , le 110 Command Center (Centre 110 de Commande) a été installé à Lhassa, avec comme objectif principal de supprimer les troubles et restaurer complètement l'autorité du gouvernement central.

Ce Centre semble être sous le contrôle direct de Zhang Qingli, le premier secrétaire du Parti du Tibet, et un loyaliste du Président Hu Jintao. Zhang est aussi l'ancien vice secrétaire du parti Xinjiang, avec une expérience considérable en matière d'opérations de contre terrorisme dans la région.

Les autres qui occupent des positions importantes à Lhasa sont Zhang Xinfeng, secrétaire d'état au Ministère de la Securité Publique Centrale, et Zhen Yi, vice commandant des quartiers généraux de la Police Armée du Peuple à Beijing.

Le sérieux avec lequel Beijing traite l'actuelle agitation se retrouve de plus avec le déploiement d'un grand nombre d'unités de l'armée de la Région militaire de Chengdu, dont les brigades de la 149 ème Division d'Infanterie Mécanisée, qui agissent comme force d'intervention rapide de la région.

Selon un article de United Press International, des unités d'élite terrestres de l'Armée de Libération du Peuple ont été impliquées à Lhasa, et les nouveaux véhicules blindés de transports de troupes T-90, et d'autres véhicules blindés y ont été déployés. Selon l'article, la Chine a nié la participation de l'armée à la répression, disant qu'elle avait été menée par des unités de la police armée. « Cependant, de tels équipements tels que mentionnés ci-dessus, n'ont jamais été déployés par la police armée chinoise ».

Le soutien aérien est fourni par le 2ème régiment de l'armée de l'air, basé à Fenghuangshan, Chengdu, et la province de Sichuan. Il opère avec un mélange d'hélicoptères et d'avions de transport STOL, d'une base située sur le front près de Lhasa. Le soutien au combat aérien pourrait être rapidement mis à disposition grâce à des bataillons de combattants de l'infanterie d'attaque basés dans la région du Chengdu. Le District Militaire de Xizang forme la garnison du Tibet, qui a deux unités d'infanterie de montagne : la 52 ème brigade basée à Linzhi, et la 53 ème brigade à Yaoxian Shannxi. Elles sont soutenues par la 8ème Division Motorisée d'Infanterie et une brigade d'artillerie à Shawan, Xinjiang.

Le Tibet n'est plus si éloigné ou difficile à réapprovisionner pour l'armée chinoise. La construction de la première ligne de chemin de fer entre 2001 et 2007, a facilité significativement les problèmes de mouvement d'un nombre important de troupes et d'équipement, de Qunghai jusqu'au plateau accidenté tibétain.

D'autres précautions contre une résurgence des révoltes durables des années précédentes des Tibétains a conduit à une situation d'auto suffisance considérable en matière de logistique et de réparation de véhicules, et à une augmentation du nombre de petits aéroports construits pour permettre à des unités d'intervention rapide d'avoir accès aux zones les plus reculées.

On pense que le Ministère de la Sécurité chinoise et les services de renseignements ont eu une présence suffocante dans la province, et effectivement la capacité de détecter tout mouvement de protestation sérieux et de supprimer la résistance.

notes

Richard M Bennett, consultant en renseignement et sécurité AFI Research.
Copyright 2008 Richard M Bennett
Publié le 26/03/08 sur www.atimes.com
Traduction Mireille Delamarre pour www.planetenonviolence.org

Richard M Bennett

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lundi, 28 avril 2008

Bhim Rao Ambedkar

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Bhim Rao Ambedkar

Christophe Jaffrelot publie le premier livre en français sur le Dr Ambedkar (1891-1956). Voici la présentation de l'édi­teur: «Bhim Rao Ambedkar fut longtemps seul contre tous, et notamment contre Gandhi, pour qui les intouchables de­vaient demeurer partie intégrante de la société hindoue. Cela ne l'empêchera pas de participer au premier gouver­ne­ment de Nehru et d'être chargé de rédiger la Constitution de l'Inde en 1947, en raison de ses talents de juriste. Il uti­li­sera ces fonctions pour contenir l'influence du gandhisme et au mieux des intérêts des intouchables. Homme d'état, Am­bedkar était aussi un penseur. Son action politique repo­sait sur une analyse sociologique de système des castes dont il conclut qu'il était consubstantiel à l'hindouisme et que les divisions des castes inférieures interdisaient la for­mation d'une classe laborieuse, dont les marxistes indiens espéraient encore l'avènement. D'où les deux stratégies qu'il mettra en œuvre dès les années 1920. La première vi­sait à améliorer la position des intouchables dans l'espace pu­blic, en les mobilisant à travers un parti politique et en ob­tenant pour eux des concessions auprès des Britanniques puis du Congrès. La seconde n'était autre que la conversion à une autre religion, perçue comme une migration collec­tive vecteur d'émancipation sociale dès lors qu'elle permet­tait d'échapper au monde hindou». Ambedkar se convertira au bouddhisme quelques mois avant sa mort. Nous rappel­le­rons que les éléments essentiels d'une compréhension du système des castes se trouvent dans le livre Castes et races de F. Schuon (Editions Arché) (JdB).

Christophe JAFFRELOT, Dr Ambedkar, 2000, Presses de Scien­ces Po, 256 pages, 155 FF.

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dimanche, 06 avril 2008

Comment fonctionne la pensée racialisante en Chine?

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Moestasjrik/’t Pallieterke :

Comment fonctionne la pensée racialisante en Chine

 

La pensée chinoise pré-moderne, quand elle aborde la question des peuples étrangers, oscille entre deux pôles : elle se présente parfois comme un ethno-racisme, la plupart du temps comme un « universalisme de civilisation ». Cet « universalisme de civilisation » est l’idéal du confucianisme : la civilisation du milieu intègre graduellement toutes les tribus de la périphérie, soit les barbares des « si yi », ou des « quatre directions (du vent) ». Cette approche des barbares s’appelait « yong xia bian yi », soit « utiliser les mœurs chinoises pour transformer les barbares ». Les minorités intérieures « hanhua », deviennent chinoises, tandis que les étrangers « laihua », vont et viennent.

 

Les étrangers, hors milieu, dans une telle vision, n’ont pas d’identité digne d’être mentionnée, sauf qu’ils ne sont pas chinois ou ne sont qu’au début du processus qui fera à terme d’eux des Chinois. Si tout se déroule correctement, l’ensemble de l’humanité finira par participer à la civilisation (chinoise). L’harmonie universelle sera alors un fait acquis, et chacun sera heureux. Je vous le dis directement : je trouve que ce scénario est lumineux. Mutatis mutandis, nous pourrions nous-mêmes reprendre cette approche pour résoudre la problématique de nos propres relations difficiles avec les peuples qui sont nos voisins et que nous jugeons moins civilisés, de même qu’avec nos immigrés. L’Empire romain a du reste mené une politique similaire à l’endroit des Germains, Sarmates et autres peuples cavaliers turbulents.

 

Le grand exemple historique d’une intégration réussie des barbares au sein de la civilisation chinoise est celui de la dynastie Zhou (du 12ième au 3ième siècle av. J. C.). Pendant le deuxième millénaire avant J. C., cette dynastie relevait d’une tribu barbare errant le long de la frontière occidentale de l’Empire chinois qui s’est progressivement sinisée en servant l’Empereur Shang ; cette tribu montait la garde sur les marges de l’Empire face aux « vrais barbares ». Dans le langage de l’Europe féodale, nous dirions que le chef Zhou était un « markgraaf », un « comte des marches ». Lorsque les Shang entrèrent en décadence, les Zhou commirent un coup d’Etat, péripétie de l’histoire chinoise qui forme l’arrière-plan du livre des oracles bien connu, le Yijing (ou « I Tjing »), ou « Livre des Transformations ». Les débuts du régime des Zhou seront considérés plus tard par le confucianisme féodal et conservateur comme l’idéal d’une société ordonnée et équilibrée.

 

Cependant, tous les peuples barbares ne se laissèrent pas aussi aisément domestiquer. Certains d’entre eux restèrent menaçants, pendant des siècles, le long des frontières, comme les Huns contre qui la Grand Muraille de Chine fut construite. D’autres réussirent même à occuper certaines parties de l’Empire. Deux d’entre eux purent même soumettre la Chine toute entière : les Mongols, qui formèrent par après la dynastie Yuan (1277-1367) et les Mandchous qui donnèrent la dynastie Qing (1644-1911). Ces deux peuples menèrent, en tant que castes dominantes, une sorte de politique d’apartheid à l’encontre des Chinois. Sous la République populaire, ils furent rapidement sinisés, une promotion que l’on réservait également aux Tibétains. Quand un long combat opposait la Chine à des peuples étrangers ou quand elle était occupée par ces derniers, une sorte de conscience raciale émergeait. Dans la pensée racialisante qui en découlait, on se mit rapidement à faire le lien entre l’aspect (physique) de l’étranger et son manque de culture chinoise : « S’il n’est pas de notre race, alors son cœur et son esprit sont autres », dit une chronique féodale du 4ième siècle avant J.C.

 

Caractéristiques et couleurs

 

Les barbares vivant dans la sphère d’influence chinoise sont désignés par leur propre nom ethnique, ou désignés collectivement par l’expression de « barbares cuits » ; les barbares de l’extérieur sont, eux, les « barbares crus », ou, plus habituellement, les « diables » ou les « bêtes ». Dans les idéogrammes chinois, on ajoutait à la graphie de leur nom le signe signifiant « reptile » pour désigner les barbares du sud, ou les signes signifiant « chèvre » ou « chien » pour les barbares du nord. Les Japonais et leurs collaborateurs chinois, pendant la seconde guerre mondiale, firent de même avec les caractères « Ying », pour les Anglais, et « Mei », pour les Américains. Cette façon de procéder perpétuait en fait l’habitude primitive et universelle de ne considérer que son propre peuple comme humain.

 

Parfois les barbares sont désignés par des caractéristiques corporelles. Pour ce qui concerne les couleurs, le blanc, pour la peau, est la couleur des Chinois, à côté du jaune solaire, couleur symbolique du « milieu ». Le noir ou toute autre couleur sombre désigne les divers peuples barbares : par exemple, les méridionaux foncés d’Indonésie et, après les importations d’esclaves par les Portugais, les étrangers venus d’Afrique. Les couleurs sombres désignent aussi les ressortissants d’Asie centrale qui sont à peine plus basanés que les Chinois, notamment les robustes Tibétains, qui leur font peur. Les étiquettes colorées, attribuées aux peuples, étaient donc fantaisistes : ainsi les peuples d’Inde méridionale et d’Arabie étaient décrits comme « violets ». Les esclaves, quelle qu’ait été leur race, qui travaillaient en plein soleil, se voyaient attribuer le terme de « faces de suie ». Les Blancs étaient décrits comme froids, grands, velus, barbus, roux, « blancs comme la cendre » et « aux yeux de couleur ». Parfois les peuples se voyaient attribuer une couleur qui n’était pas celle de leur peau, de leur aspect extérieur, mais qui faisait référence au point cardinal dont ils provenaient : ceux de l’Est étaient « verts-bleus », ceux du sud, « rouges », ceux de l’ouest, « blancs », ceux du nord, « noirs » et ceux du milieu, « jaunes ». Sans doute parce que les Mongols utilisaient le même langage pour leur propre Empire, le terme de « Russie Blanche » ou « Biélorussie », signifierait en fait « Russie occidentale ».

 

Mis à part les invasions militaires étrangères, l’introduction pacifique du bouddhisme indien en Chine donna lieu à des spéculations inamicales relatives aux différences raciales. D’après les exposants du taoïsme chinois, le bouddhisme était inadapté à la nature raciale des Chinois. Bouddha avait dû inventer des règles très strictes contre la violence, l’avidité et le vice parce que son propre peuple était un ramassis de sauvages et ne connaissait pas la mesure, alors que les Chinois, eux, possédaient par eux-mêmes le sens de la mesure et de l’harmonie.

 

En bref, comme le reste de l’humanité, les Chinois ont eu tendance, eux aussi, à procéder à des distinctions d’ordre racial. Aux 19ième et 20ième siècles, ce racisme de circonstances, dépourvu de systématicité, deviendra une pensée racialiste quasi scientifique.

 

Moestasjrik / ‘t Pallieterke.

(article paru dans « ‘ t Pallieterke », Anvers, 26 mars 2008, traduction française : Robert Steuckers).

 

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