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dimanche, 22 décembre 2024

Les gouvernements démocratiques se moquent de leurs propres peuples

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Les gouvernements démocratiques se moquent de leurs propres peuples

Enrico Toselli

Source: https://electomagazine.it/i-governi-democratici-se-ne-fre...

L'Institut de sondage Censis certifie que deux tiers des Italiens sont opposés à la guerre de Zelensky et au soutien qui lui est offert par le gouvernement de Rome et quiest financé aux frais des contribuables italiens. Pourtant, le ministre de la Défense, Guido Crosetto, envisage une augmentation des dépenses publiques en armement, jusqu’à atteindre 2,5% du PIB. Plus de la moitié des Polonais pensent qu’il faudrait mettre fin à la guerre en restituant à la Russie les régions russophones et russophiles mais le gouvernement de Varsovie veut poursuivre la guerre jusqu’au dernier Ukrainien et jusqu’à l’appauvrissement général des Polonais.

En Roumanie, les élections présidentielles sont annulées parce que le peuple a osé voter pour le candidat qui ne plaît pas à Bruxelles. En Géorgie, la présidente, de nationalité française, refuse de céder son siège parce que les Géorgiens ont voté pour le mauvais candidat. En Moldavie, pour renverser le vote populaire, on a fait appel au vote des Moldaves à l’étranger, mais uniquement de ceux qui ont émigré vers des « pays amis ». En France, le président Macron s’appuie sur un gouvernement minoritaire pour éviter d’accepter le verdict populaire qui l’a spectaculairement désavoué.

En Allemagne, le vote dans l’est du pays favorise la droite de l’AfD, mais un blocage se met en place pour exclure ce parti jugé dérangeant. Et peu importe que cela plaise ou non aux électeurs.

Oui, l’avis des électeurs ne compte plus. Le vote ne compte pas. Dans les urnes, un programme précis est approuvé, mais les élus s’en moquent et ne le respectent pas. « Démocratie, démocratie, c’est votre affaire, pas la mienne », chantait quelqu’un dans les années 1970. Mais malheur à celui qui en dit du mal. Car cette oligarchie – composée de politiciens valets au service des marchands de mort, des spéculateurs et des monopoles occidentaux – n’a rien de démocratique. Et encore moins d’aristocratique. Ce ne sont pas des gouvernements tenus par les meilleurs, ce ne sont pas des gouvernements qui dirigent les nations dans l’intérêt de leurs peuples respectifs.

Ce sont des peuples soumis, effrayés. Qui grognent, mais ne réagissent pas.

mardi, 17 décembre 2024

La démocratie, enfin, si l'on peut dire...

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La démocratie, enfin, si l'on peut dire...

Andrea Zhok

Source: https://www.ariannaeditrice.it/articoli/chiamala-se-vuoi-...

Après le saccage du bureau diplomatique italien à Damas, le ministre des Affaires étrangères Tajani nous dit que « tout est sous contrôle ».

Seule omission négligeable, on ne sait pas très bien sous quel contrôle.

D'un autre côté, si le Premier ministre Giorgia Meloni s'efforce toujours d'« établir la responsabilité » de ceux qui ont tiré sur les troupes italiennes de l'Unifil au Liban, il est au moins aussi plausible de dire que si l'on pille votre ambassade, "tout est sous contrôle".

En fin de compte, le problème de la politique contemporaine est là: les mots ne valent plus l'air chaud qu'ils produisent.

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Les mots ne relèvent que d'une gestuelle dans un acte qui envoie des signaux aux employeurs de ces politiciens-acteurs.

Leur contenu de vérité est nul.

Et tout le monde sait que leur contenu de vérité est parfaitement nul.

Mais en même temps, il y a toute une danse médiatique exécutée par des menteurs professionnels, ironiquement appelés « journalistes », dont la tâche principale est de lubrifier les mensonges les plus épineux pour qu'ils soient quand même gobés.

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Nous sommes donc dans le pur royaume du mensonge illimité, dans lequel trouver des contradictions, des incohérences, des doubles standards est devenu un passe-temps stérile, car ce qui n'est pas un mensonge n'est un mensonge que par accident, comme une horloge cassée donne l'heure exacte deux fois par jour.

Ce qui n'est pas encore bien compris, c'est qu'une sphère publique où il n'y a que des mensonges, des manipulations ou des vérités accidentelles et occasionnelles est une sphère publique qui ne possède aucune autorité. Or, comme tout pouvoir légitimé découle d'une autorité, la sphère publique d'aujourd'hui ne possède plus aucun pouvoir perçu comme légitime.

C'est au fond l'histoire simple de l'Occident contemporain :

1) Les mensonges, les incohérences, les doubles standards, les omissions sélectives, la rhétorique déformante et la manipulation effrénée règnent sans partage sur le discours public.

2) Par conséquent, le discours public semble totalement dépourvu d'autorité et, de ce fait, le pouvoir qu'il exerce est dépourvu de légitimité.

3) En l'absence de la possibilité d'exercer un pouvoir généralement perçu comme légitime, il ne reste que la possibilité de l'exercer sous des formes autoritaires, coercitives, faites de chantage, d'oppression, de fraude, qui sont systématiquement contraires aux besoins et aux volontés de la majorité.

Et, conformément à ce qui précède, cela s'appelle la « démocratie ».

dimanche, 08 décembre 2024

La démocratie à géométrie variable de l’Occident collectif

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La démocratie à géométrie variable de l’Occident collectif

Ala de Granha

Source: https://electomagazine.it/la-democrazia-a-geometria-varia...

Que fait-on lorsqu’on perd les élections? Peut-être un peu d’autocritique, on se questionne sur les raisons de l’échec, on blâme le destin cynique et cruel, ou encore on accuse les électeurs de ne pas avoir compris les propositions des perdants. Des réponses du passé. L’Occident collectif est plus moderne, plus avancé. Alors, tout simplement, il rejette les résultats des urnes.

Et il attribue la faute à d'hypothétiques ingérences russes. Un peu comme les fausses armes chimiques irakiennes utilisées pour justifier l’invasion anglo-américaine et la mort de centaines de milliers d’Irakiens.

Ainsi, en Géorgie, l’Occident collectif organise une protestation spontanée dans la rue pour renverser le gouvernement nouvellement réélu. Réélu grâce à Moscou, bien sûr. Pendant ce temps, dans la démocratique Roumanie, le premier tour de l’élection présidentielle est annulé parce qu’il est inadmissible que le candidat désapprouvé par Bruxelles ait remporté la victoire. Et peu importe qu’il aurait perdu de toute façon au second tour. Mieux vaut ne pas prendre de risques.

Cependant, il est parfaitement acceptable qu’en Moldavie, les électeurs locaux aient rejeté la dirigeante au service de l’OTAN, car les votes par correspondance, provenant uniquement des pays amis, ont ensuite inversé les résultats. Ainsi, la volonté de ceux qui vivent dans leur propre pays ne compte pas, face aux choix de ceux qui l’ont quitté.

Mais malheur à quiconque ose parler de fraude lorsque les « bons » remportent la victoire. Voilà leur démocratie, une démocratie à géométrie variable.

lundi, 16 septembre 2024

Périclès et la démocratie totalitaire

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Périclès et la démocratie totalitaire

Nicolas Bonnal

L’expression "démocratie totalitaire" est de Bertrand de Jouvenel.  Mais son inventeur est le bon vieux Périclès; l’explosion de la dépense publique, les grands travaux du Parthénon, la guerre interminable (pour la Grèce) du Péloponnèse, la transformation d’un grand peuple en plèbe d’assistés et d’accros au théâtre gratuit, c’est lui, idole par ailleurs de nos bons profs d’histoire, tous fonctionnaires.

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John T. Flynn est lui un pamphlétaire de la première moitié du siècle dernier. Il a écrit après la Guerre un best-seller contre Roosevelt, The Roosevelt Myth. Dès les années trente, il reprochait au New Deal sa gabegie, son inutilité, sa dette immonde. Pour lui comme pour Georges Bernanos et les libertariens de haute école, New Deal, fascisme et socialisme incarnaient une seule et même chose, l’Etat moderne qui met fin à notre simple autonomie.

81MPr7gDNjL._AC_UF350,350_QL50_.jpgDans ses Leçons oubliées, Flynn compare Roosevelt au fameux stratège athénien Périclès: dette énorme, gesticulations médiatiques, grands travaux, constructions de prestige, bases, colonies (les bases US !), et une belle guerre mondiale et surtout perpétuelle. Tout rapproche Périclès de Roosevelt, y compris le prestige historique de ces deux grandes et catastrophiques figures. Roosevelt démantela les empires coloniaux et brada notre Europe - comme Périclès la Grèce avec la Guerre du Péloponnèse.

 

Flynn se réfère à Plutarque, au merveilleux Plutarque.

On cite la Vie des hommes illustres, Périclès, chapitre IX et suivants.

« Beaucoup d'autres prétendent que c'est lui qui le premier habitua le peuple aux clérouchies, aux distributions d'argent pour le théâtre et autres indemnités diverses ; mesures qui, de sage et travailleur qu'il était, le rendirent prodigue et indocile. Demandons aux faits eux-mêmes les raisons de cette transformation. »

J’ai déjà cité Démosthène qui un siècle après Périclès se plaint dans la Réforme de la gabegie de l’argent public et du divertissement athénien. Plutarque encore :

« Périclès, vaincu en popularité, eut recours à des largesses faites avec les revenus de l’Etat. Le voilà sur-le-champ qui corrompt en grand toute la multitude avec les fonds des spectacles, avec des salaires attribués aux juges, par toutes sortes d'allocations et de largesses ; puis de cette multitude il se fait une arme contre l'Aréopage. Il n'en était pas membre, le sort ne l'ayant jamais désigné pour les fonctions d'archonte, de roi, de polémarque ou de thesmothète… ».

Périclès déclare des guerres juridiques et administratives, quand il ne chasse pas la concurrence politique par ostracisme:

9782070104529-us.jpg« Ainsi Périclès, fort de l'appui du peuple, abattit la puissance de ce tribunal (l’aréopage). Il se vit dépossédé de la plupart de ses juridictions par l'entremise d'Ephialte; Cimon fut banni comme ami des Lacédémoniens, et ennemi de la démocratie (misodèmon), — Cimon qui ne le cédait à personne en naissance et en richesses, qui avait remporté de brillantes victoires sur les Barbares, qui avait rempli la ville de dépouilles et de trésors, comme je l'ai raconté dans sa Vie. — Tel était sur la multitude l'ascendant de Périclès (kratos en to démo Perikleou) ».

Puis Plutarque s’emporte, qui pourtant est fasciné par Périclès !

« XI Aussi Périclès, de plus en plus, lâcha la bride au peuple, et rechercha la popularité; il s'ingéniait pour qu'il y eût toujours à Athènes des assemblées générales, des banquets, de belles cérémonies, enfin il offrait à la ville toutes sortes de divertissements du meilleur goût. »

Mais ce spectaculaire beurre ne suffit pas. Guerre social-démocrate: on ajoute les canons et on joue au petit soldat, au colonisateur. Comme le disait Rothbard l’Etat militariste accompagne l’Etat socialiste.  

« Chaque année, il envoyait soixante trières montées pendant huit mois par un grand nombre de citoyens qui recevaient un salaire… Il envoya en outre dans la Chersonèse mille colons; à Naxos, cinq cents; à Andros, deux cent cinquante.

En Thrace il prescrivit à mille citoyens d'habiter chez les Bisaltes ; il en envoya d'autres en Italie lors de la reconstruction de Sybaris sous le nom de Thurium: tout cela, pour alléger Athènes d'une populace sans ouvrage, et par là même remuante; pour soulager la misère du peuple et pour installer enfin, auprès des alliés (summaxois), comme garantie contre toute espèce de révolte, des garnisons, et par conséquent la crainte (phobos). »

La force athénienne repose bien sûr sur la terreur. Or quand on est le plus fort, on se sert le premier. On ruine le trésor de Délos pour édifier les babioles que vont adorer les touristes deux mille ans après:

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XII Mais ce qui fit le plus de plaisir à Athènes, et ce qui devint le plus bel ornement de la ville ; ce qui fut pour tout l’univers un objet d’admiration ; la seule chose enfin qui atteste aujourd’hui la vérité de ce qu’on a dit de la puissance de la Grèce et de sa splendeur d’autrefois, ce fut la magnificence des édifices construits par Périclès. »

Certains esprits ne sont pas contents (Plutarque évoque les anciennes élites et les… poètes comiques !) :

« Et la Grèce n’a-t-elle pas raison de se croire insultée, et outrageusement tyrannisée, quand elle voit que les sommes déposées par elle dans le trésor commun, et qu’elle destinait à fournir aux frais des guerres nationales, nous les dépensons, nous, à couvrir notre ville de dorures et d’ornements recherchés, comme une femme coquette accablée sous le poids des pierreries ; à la parsemer de statues ; à construire des temples de mille talents ? »

Le bon Périclès trouve normal de s’être servi. Et comme n’importe quel président US qui nous invite à payer plus pour aller casser la gueule à notre voisin russe:

« Périclès tenait un tout autre langage : « Vous ne devez à vos alliés nul compte de ces deniers, disait-il au peuple, puisque c’est vous qui faites la guerre pour eux, et qui retenez les barbares loin de la Grèce, tandis qu’eux ne vous fournissent pas un cheval, pas un vaisseau, pas un homme, et qu’ils ne contribuent que de leur argent. Or, l’argent, du moment qu’il est donné, n’est plus à celui qui l’a donné, mais à celui qui l’a reçu, pourvu seulement que celui-ci remplisse les engagements qu’il a contractés en le recevant. Or, vous avez rempli tous vos engagements, en ce qui concerne la guerre. »

Les grands travaux occupent tout le monde, comme les gares et les barrages (ça se visite aussi, non?), et les aéroports et toutes les pyramides du Louvre. Périclès :

« Une foule de besoins nouveaux ont été créés, qui ont éveillé tous les talents, occupé tous les bras, et fait, de presque tous les citoyens, des salariés de l’État : ainsi, la ville ne tire que d’elle-même et ses embellissements et sa subsistance. Ceux que leur âge et leurs forces rendent propres au service militaire reçoivent, sur le fonds commun, la paye qui leur est due. Quant à la multitude des ouvriers que leurs professions exemptent présentement du service militaire, j’ai voulu qu’elle ne restât point privée des mêmes avantages, mais sans y faire participer la paresse et l’oisiveté. Voilà pourquoi j’ai entrepris, dans l’intérêt du peuple, ces grandes constructions, ces travaux de tous genres, qui réclament tous les arts et toutes les industries, et qui les réclameront longtemps. »

On ostracise les rares mécontents :

« Enfin, la lutte avec Thucydide (pas l’historien, un rival politique) en vient à un tel point que Périclès se résout à courir les risques de l'ostracisme, obtient le bannissement de son adversaire, qui est suivi de la dissolution du parti. »

Périclès semble gagner son pari avant la peste et les premières défaites. Il est le Roi du Monde façon Roosevelt:

« Il semblait qu’il n’y eût plus d’inimitiés politiques, et qu’il n’y eût désormais, dans Athènes, qu’un même sentiment, une même âme. On pourrait dire qu’alors Athènes, c’était Périclès. Gouvernement, finances, armées, trirèmes, empire des îles et de la mer, puissance absolue sur les Grecs, puissance absolue sur les nations barbares, sur tous les peuples soumis et muets, fortifiée par les amitiés, les alliances des rois puissants, il attira tout à lui, il tenait tout dans ses mains. »

Et la « mégalo-thymie », l’ubris de Fukuyama frappe la cité athénienne :

« Périclès inspirait à ses concitoyens une opinion de plus en plus haute d’eux-mêmes, en sorte qu’ils se croyaient appelés à une puissance plus grande encore. »

En dépit de ses dépenses et ses erreurs, Périclès est resté une figure de légende, comme ce FDR jugé le plus prestigieux des présidents US par la smalah des universitaires et des profs de collège; Roosevelt qui appauvrit son pays et l’endetta, qui aggrava la crise de 29 et la rendit pérenne, Roosevelt enfin qui provoqua le Japon de la manière la plus cynique (Morgenstern), massacra l’Allemagne prête à négocier dès 1943 et donna la moitié de l’Europe à Staline – et la Chine au maoïsme.

Ralph Raico remarque enfin que le complexe militaro-universitaire a fait de Truman un grand président américain: Otan, Corée, Hiroshima. Sans oublier le social et l’antiracisme, à l’armée puis partout.

Sources antiques et libertariennes :

PLUTARQUE, VIE DE PERICLES TRADUIT PAR UNE SOCIETE DE PROFESSEURS ET D’HELLENISTES – PARIS, LIBRAIRIE HACHETTE, 1893 (Gallica BNF)

Edition bilingue. Vie des Hommes Illustres. Traduction Alexis Pierron, 1853 (Remacle.org)

Démosthène – Discours sur les réformes publiques (Remacle.org)

John T. Flynn – A Roosevelt Myth; forgotten lessons. Mises.org

The costs of war; American pyrrhic victories, edited par John V. Denson

Ralph Raico- A libertarian rebuttal (Mises.org).

mercredi, 11 septembre 2024

France et Allemagne: curieuses idées sur la démocratie

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France et Allemagne: curieuses idées sur la démocratie

Augusto Grandi

Source: https://electomagazine.it/francia-e-germania-alle-prese-con-curiose-idee-sulla-democrazia/

"L'élection a été volée". Jean Luc Mélenchon, chef de file de la gauche française, s'indigne que le président Macron ait choisi Michel Barnier comme premier ministre. Un gaulliste, au lieu d'un représentant de la gauche immigrationniste. Et il parle d'un outrage à la démocratie parce que lui, Mélenchon, a gagné les élections. Et là s'ouvre une discussion sur ce qu'est la démocratie.

Car, en termes de votes populaires, de consensus au sein de la population, ce n'est pas la gauche qui a gagné, mais le Rassemblement national de Le Pen et Bardella. Ensuite, par des mécanismes électoraux transalpins, l'alliance de la gauche a obtenu plus de sièges. Parce que 10 millions de Français ont voté pour le Rassemblement et seulement 7 millions pour le Front populaire, mais pour Mélenchon les 3 millions de voix en moins ne comptent pas, il a gagné malgré tout et il est antidémocratique de ne pas le remarquer.

En Thuringe et en Saxe, en revanche, le succès de l'AfD dans les urnes a également été récompensé en termes de sièges. Mais la démocratie à la carte veut qu'un tiers des électeurs allemands ne comptent pour rien, ont le droit de voter mais pas de gouverner. Bref, le vote n'est bon que s'il respecte les paramètres fixés par le politiquement correct.

Ce n'est pas un hasard si l'abstentionnisme progresse en Italie. Car le concept de démocratie était lié à l'existence des partis, sorte de courroie de transmission entre l'électeur et l'élu. Et les partis étaient le lieu d'élaboration de la pensée politique et idéologique. Aujourd'hui, la pensée a été abolie et les partis ne sont plus que des comités d'entreprise. Souvent de malversations, toujours d'affaires qui ne tiennent pas compte de l'électeur.

Le niveau bas de ces dernières années s'est encore abaissé. Les partis ne sont même pas capables de traiter des questions triviales parce que leur personnel est du niveau le plus bas. La compétence a été remplacée par l'arrogance. Aujourd'hui, ceux qui vont voter le font pour Meloni, Schlein, voire Calenda et Renzi. Ou même pour Salis et Soumahoro. Mais pas pour leurs partis respectifs remplis d'incapables, d'infâmes, de traîtres prêts à toutes les bassesses pour tromper leur collègue.

Pour trouver une once de pensée politique, il faut quitter les partis et suivre les activités de certaines associations, fondations, centres d'études. Mais qui, contrairement à ce qui se passe à l'étranger, ne peuvent avoir que peu d'effet sur des partis dont les responsables et les dirigeants sont terrifiés à l'idée que la pensée puisse encore survivre.

mercredi, 28 août 2024

Démocratie, égalité, oligarchies. Un débat toujours ouvert

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Démocratie, égalité, oligarchies. Un débat toujours ouvert

par Emiliano Calemma

Source: https://www.destra.it/home/democrazia-uguaglianza-oligarchie-un-dibattito-sempre-aperto/

Il y a deux éléments perturbateurs dans notre conception de la vie et de la société : une fausse notion de l'égalité humaine et une foi mal placée dans la doctrine de la démocratie. Que tous les hommes soient égaux est une affirmation à laquelle, à toutes les époques de notre histoire sauf aujourd'hui, aucun être humain sain d'esprit n'a jamais souscrit. Dans cette affirmation forte mais chargée de sens, je me trouve en parfait accord avec le célèbre écrivain Aldous Huxley.

Partout sur notre planète, les gens sont différents: compétences, intérêts, intelligence, caractère, apparence physique. Tout le monde le reconnaît, mais de même, ces derniers temps, dans l'histoire de l'humanité, le pouvoir en place insiste sur l'égalité essentielle et inhérente des êtres humains. En citant à nouveau Huxley, les hommes politiques et les philosophes ont souvent parlé de l'égalité humaine comme s'il s'agissait d'une idée nécessaire et inéluctable, une idée à laquelle les êtres humains doivent croire, tout comme ils doivent, de par la nature même de leur constitution physique et mentale, croire à des notions telles que le poids, la chaleur et la lumière. L'homme est par nature libre, égal et indépendant, affirme le dirigeant d'aujourd'hui, avec l'assurance tranquille de celui qui sait qu'il ne peut être contredit. Et il en est ainsi. Il n'y a plus de contradiction.

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Si l'on analyse la question d'un point de vue chrétien, le concept de fraternité n'implique pas un concept d'égalité, pas plus que le fait que nous soyons tous égaux devant Dieu n'implique que les hommes soient égaux les uns aux autres. La science, l'anthropologie, la philosophie, la religion et le bon sens aboutissent tous à la même conclusion : l'égalité des hommes est une erreur et toute idéologie politique fondée sur ce concept est vouée à l'échec.

Regardons les choses en face: le concept d'égalité est en fin de compte destructeur parce qu'il déclare, non seulement que personne n'est pire que personne, mais surtout que personne n'est meilleur que personne. Personne ne peut donc être meilleur. L'amélioration et le dépassement de soi deviennent impossibles si nous sommes tous égaux. Quoi que vous fassiez, vous serez toujours et uniquement l'égal du pire des hommes. Cette doctrine n'est pas seulement fausse, elle est tout à fait méprisable et destructrice. Elle empêche d'atteindre des objectifs plus élevés. Elle signifie la mort de l'humanité. Là où l'on ne s'élève pas, on descend irrémédiablement. Et c'est la société dans laquelle nous vivons aujourd'hui.

Le soutien à la démocratie moderne est en fait plus un système de croyance, voire une foi, qu'une chose fondée sur l'histoire, la raison et la philosophie. La démocratie nous est inculquée comme une vertu incontestable, à défendre à tout prix et à répandre dans le monde entier, même par les armes (comprenez-vous à quel point vous êtes à côté de la plaque?). Il s'agit d'une erreur politique fondamentale, basée sur une conception erronée et néfaste de l'égalité humaine, qui doit être surmontée si nous voulons survivre à long terme.

Platon affirmait que la vie de l'homme démocratique n'a ni loi ni ordre; mais l'homme démocratique appelle cette existence distraite: joie, félicité et liberté; et ainsi de suite... et tout n'est qu'égalité... Sa précieuse liberté, compte tenu de la licence débridée et du manque de discipline, se transforme en une quête insensée et confuse du plaisir.

La démocratie est glamour, désordonnée et scintillante. En fin de compte, ce sont toujours les plus riches qui gouvernent. La grande majorité de la population mondiale se berce d'un bien-être sans valeur réelle ou cherche à ressembler à son voisin le plus riche, celui qui mène une vie de fête, jamais le plus intelligent ni le plus vertueux.

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Et c'est précisément le mythe de l'égalité à tout prix qui continuera à niveler ce système par le bas. Au lieu d'être des frères et de s'entraider pour le bien de la collectivité, de choisir les plus valeureux d'entre nous pour diriger les sociétés, nous optons pour la solution de facilité: toi aussi tu ne seras jamais personne, parce que moi je ne vaux rien. Comprenez-vous quelle profonde et triste inhumanité sous-tend notre raisonnement ?

Aristote lui-même qualifiait la démocratie de pire système possible. Mais Platon, Aristote et même Huxley ne seront jamais des témoins pour une multinationale.

jeudi, 22 août 2024

La démocratie des spectateurs

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La démocratie des spectateurs

Par Rainer Mausfeld

Source: https://apolut.net/die-zuschauerdemokratie-von-rainer-mausfeld/

"La "démocratie représentative" est une construction créée dans l'intention de tenir la population à l'écart du pouvoir réel. Extrait exclusif de Die extreme Mitte (="L'extrême centre").

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Nous connaissons tous ce sentiment : maintenant, nous avons élu nos "représentants", mais nous n'avons pas de réelle influence sur les événements. "Ils" font ce qu'ils veulent, que nous applaudissions dans les gradins ou que nous émettions un "bouh" désapprobateur. A quoi sert alors la façade d'un gouvernement populaire ? Rainer Mausfeld considère la démocratie représentative comme un moyen de prévention des révolutions. Elle sert à faire avancer le processus de notre privation de droits quasiment avec notre consentement. La croix, que nous traçons le jour du vote, n'est donc pas un symbole du pouvoir du citoyen en tant que souverain d'une démocratie; au contraire, l'acte de voter confie le pouvoir à des "représentants", de sorte que ce dernier s'éloigne aussitôt du peuple. L'histoire de la démocratie est aussi l'histoire de tentatives de plus en plus imaginatives pour empêcher les élites d'être influencées par une majorité supposée incompétente.

En transposant une conception précapitaliste de la liberté à des rapports de force capitalistes inédits, pour lesquels cette conception de la liberté était pour ainsi dire aveugle aux limites, le libéralisme a pu se transformer en "démocratie libérale", c'est-à-dire en une forme de démocratie qui exclut le domaine de l'économie du contrôle démocratique et libère ainsi le pouvoir capitaliste de tout contrôle et de toute limitation extra-économiques.

Ce faisant, l'idée directrice traditionnelle de la démocratie en tant que socialisation radicale de la domination est remplacée par une expression inédite de la démocratie qui raccourcit à l'extrême le concept initial et va à l'encontre des intentions qui lui étaient initialement associées, à savoir un garde-fou civilisationnel contre un pouvoir du plus fort. Plus encore :

"La caractéristique de l'approche de la démocratie libérale vis-à-vis de cette nouvelle sphère de pouvoir n'est pas de la contrôler, mais de la libérer" <1>.

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La "démocratie libérale" est une démocratie extrêmement limitée, car l'influence du peuple est étroitement limitée par la Constitution et les domaines centraux de la société sont soustraits à toute volonté et organisation démocratiques.

Le libéralisme a redéfini le sens de la "démocratie" comme étant la garantie de "zones d'autonomie privée sans État" pour les citoyens propriétaires et la mise à disposition d'élections libres de représentants d'intérêts politiques issus d'un éventail d'élites prédéfini. Comme le fait remarquer l'historienne sociale Ellen Meiksins Wood (photo, ci-dessous), "la démocratie a été récupérée par le libéralisme" <2>.

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Cette réduction, ce vidage et cette distorsion du concept de démocratie sous l'influence du libéralisme et du capitalisme ont été si profondément ancrés dans la pensée collective qu'aujourd'hui, le mot "démocratie" est presque exclusivement associé aux libertés civiles telles que la protection de la vie privée et de la propriété privée, la liberté d'expression, la liberté de la presse et de réunion, la protection et la reconnaissance des groupes sociaux particuliers, en particulier ceux qui font l'objet de discriminations, et ainsi de suite. Par conséquent, l'expression "démocratie libérale" apparaît aujourd'hui à la plupart presque comme un pléonasme, alors qu'elle est de facto une contradiction dans les termes.

Le mépris des masses - les élections dans le libéralisme

L'idée d'une souveraineté populaire est profondément étrangère au libéralisme, qui se caractérise depuis ses origines historiques par un profond mépris pour le peuple. L'élitisme et le darwinisme social sont inhérents au libéralisme.

"La souveraineté de l'individu libéral, marquée par l'idée de sélection et fondée sur l'élite, constitue donc en réalité une opposition à la 'souveraineté du peuple' radicalement démocratique" <3>.

Cette position antidémocratique était déjà exprimée par John Stuart Mill (1806-1873), économiste national, réformateur social, partisan d'une éthique de l'utilité et l'un des penseurs libéraux les plus influents du 19ème siècle:

"Jamais un gouvernement n'a été ou n'a pu être élevé au-dessus de la médiocrité par une démocratie ou une aristocratie nombreuse, dans ses actions politiques ou dans les opinions, les qualités et l'état d'esprit qu'elles nourrissent, à moins que les nombreux gouvernants - comme ils l'ont toujours fait dans leurs meilleurs moments - ne se laissent guider par les conseils et l'influence d'un ou de quelques-uns plus doués et plus instruits" <4>.

Au sens du libéralisme, le citoyen est le propriétaire de biens, les non-propriétaires restant exclus des droits civiques. Seul celui qui est économiquement indépendant peut se permettre de porter un jugement indépendant. Seul le propriétaire dispose du loisir et de l'éducation nécessaires pour comprendre le contexte social, ce qui lui permet d'exercer des droits politiques. C'est pourquoi les premières constitutions libérales limitaient le droit de vote à ceux qui possédaient, ou plus précisément à l'homme blanc qui possédait. Par conséquent, le libéralisme favorisait le suffrage censitaire traditionnel, dans lequel le droit de vote, le poids électoral et l'accès aux fonctions politiques étaient liés à la possession de biens.

Le libéralisme européen du 19ème siècle se caractérisait également par une attitude hostile au suffrage universel.

"Les libéraux européens ont toujours rejeté le suffrage démocratique. Ne devait être citoyen politique à part entière que celui qui remplissait les critères libéraux du citoyen : un certain niveau d'éducation et d'indépendance économique. Les modèles libéraux étaient taillés sur mesure pour le citoyen indépendant intellectuellement et matériellement, politiquement, socialement, économiquement et aussi culturellement" <5>.

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Le libéralisme a toujours eu pour objectif de protéger une classe de personnes instruites et possédantes contre les exigences d'une politique déterminée par la "médiocrité du grand nombre".

Dans le libéralisme traditionnel, la propriété et l'éducation s'allient contre l'ennemi commun d'une démocratie égalitaire.

"En fait, le libéralisme a essentiellement servi les intérêts d'une classe de privilégiés néo-féodale" <6>.

Au cœur du libéralisme se trouvait donc toujours un ressentiment antidémocratique déterminé. Il a hérité de l'Antiquité la "misodemia" <7>, la haine de la démocratie, ainsi que le mépris des masses qui en découle <8>, et l'a associée à un élitisme de l'éducation et de la propriété, qui cherchait à justifier les prétentions au pouvoir sur la base des performances individuelles. Avec le passage du féodalisme au capitalisme, les titres de domination traditionnels tels que l'ascendance, la richesse héritée ou les références à des constellations de domination de fait ont été de plus en plus remplacés par des titres de domination découlant de critères de "performances" individuelles. Cela a donné naissance à une nouvelle idéologie, la méritocratie, selon laquelle ceux qui ont acquis un mérite par des réalisations sont légitimés à exercer le pouvoir.

Dans le capitalisme, le mérite individuel consiste notamment à se procurer les moyens d'accumuler du capital. L'idéologie capitaliste de la "méritocratie" suggère que la position sociale de chacun est déterminée par le talent et le mérite et que, dans ce sens, la société est juste. Dans une démocratie libérale, selon l'idéologie méritocratique, chaque membre de la société occupe la position sociale qu'il mérite ; les riches ont mérité leur richesse et leur position sociale par leur talent et les pauvres sont pauvres à juste titre pour la même raison. L'idéologie méritocratique contribue à masquer le fait qu'il existe une relation sociale entre les deux.

Ce n'est qu'au 20ème siècle que le mouvement ouvrier a imposé le suffrage universel et égal à grande échelle. Il existe une tension fondamentale avec l'idéologie méritocratique. Le libéralisme n'a pu accepter l'universalisation de sa conception particulariste de la liberté, adaptée aux besoins de la bourgeoisie, et donc le suffrage universel, que dans la mesure où il pouvait garantir, par d'autres mécanismes, que l'influence politique du peuple était maintenue dans des limites très étroites.

De tout temps, les élites au pouvoir ont eu tendance à compenser et à neutraliser en quelque sorte une perte de pouvoir résultant de conquêtes émancipatrices socialement acquises, en créant des mécanismes juridiques et institutionnels appropriés.

De l'Antiquité <9> à nos jours, en passant par la naissance de la Constitution américaine, une telle régularité historique de la dynamique de stabilisation du pouvoir peut être mise en évidence. Elle est même constitutive du libéralisme. Pour stabiliser et étendre l'influence politique de la classe possédante, il a développé un large éventail de mécanismes abstraits et donc largement invisibles pour le public, qui vont entre autres du droit fiscal aux mécanismes constitutionnels en passant par la privatisation des médias.

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La démocratie représentative comme prophylaxie de la révolution

Le principal mécanisme constitutionnel qui permet de limiter très efficacement l'influence politique du peuple est le concept de "démocratie représentative". Ce terme a été introduit pour la première fois en 1777 par Alexander Hamilton, l'un des pères de la Constitution américaine. Le principe de la représentation parlementaire visait à créer un mécanisme de rassemblement des volontés pour l'exercice du pouvoir social, en combinant deux objectifs.

D'une part, il s'agissait de satisfaire le besoin du peuple de se gouverner lui-même. Dans le même temps, un tel mécanisme de représentation était perçu, selon les termes de l'historienne sociale américaine Ellen Meiksins Wood, "comme un moyen de tenir le peuple à l'écart de la politique" et de "maintenir au pouvoir une oligarchie possédante avec le soutien de la masse de la population par le biais des élections " <10>. Cela nécessitait une "redéfinition de la démocratie" qui devait masquer la forme réelle d'une oligarchie électorale d'élite <11 >.

L'objectif stratégique d'une telle redéfinition était en fait évident dès le départ. Par exemple, dès 1786, le juriste de Halle Christian Daniel Voss (1761-1820) expliquait que le néologisme "démocratie représentative" contenait une contradiction en soi et que cette expression devait donc être classée parmi les mots dépourvus de sens <12 >. Rien n'est plus étrange, constatait Voss, que de croire qu'un peuple qui élit les personnes physiques de son gouvernement, en totalité ou pour une ou quelques branches du gouvernement, se gouverne lui-même " <13>. Au contraire, en élisant des représentants, les électeurs "admettent (implicitement) un contrat de soumission totale".

"Une fois que les électeurs ont choisi leur représentant, c'est-à-dire qu'ils se sont soumis, ils n'ont plus aucune part au gouvernement, seule la tromperie et l'illusion peuvent entretenir l'idée que le citoyen qui a donné son vote pour l'élection d'un représentant dans le corps législatif, donne aussi par lui son vote pour l'élection des lois, se donne à lui-même ses lois, impose ses contraintes, et ainsi de suite. Car ce vote n'était rien d'autre, à proprement parler, que son consentement au contrat de soumission que les électeurs passaient avec l'élu" <14>.

De plus, "le représentant se fait le plus souvent élire lui-même, c'est-à-dire qu'il détermine par sa puissance d'esprit les volontés des électeurs à se soumettre à la sienne parmi plusieurs concurrents" <15>.

Dès l'invention de la "démocratie représentative", il était donc clair que cette idée n'était rien de plus qu'un substitut rhétorique de la démocratie, destiné à neutraliser les besoins émancipateurs d'autodétermination. Néanmoins, ce terme a également déployé une grande force de suggestion auprès des personnes soumises au pouvoir, ce qui a permis à cette idée d'entamer sa marche triomphale dans le monde.

Nous nous sommes tellement habitués à la formule de la "démocratie représentative" que nous oublions le plus souvent que cette idée américaine était une nouveauté. Dans sa forme fédéraliste, elle signifiait en tout cas que ce qui était jusqu'alors conçu comme l'antithèse de l'autodétermination démocratique était désormais non seulement compatible avec la démocratie, mais constitutif de celle-ci: non pas l'exercice du pouvoir politique, mais le fait d'y renoncer, de le transférer à d'autres, c'est-à-dire de s'en aliéner" <16>.

L'idée de démocratie représentative a donc servi dès le départ à repousser la démocratie <17 >. C'est pourquoi cette conception de la démocratie des pères fondateurs américains était également caractérisée par un suffrage censitaire. Au 19ème siècle, les démocraties représentatives privilégiaient encore tout naturellement les citoyens possédants.

La démocratie libérale, née comme forme de domination de la bourgeoisie éduquée et possédante, et qui a d'abord tenu la majorité de la population à l'écart de l'influence politique par le biais du suffrage censitaire, a pu intégrer sans risque le suffrage universel sur la base d'une "démocratie représentative". Comme le montre Wood, cela s'explique aussi essentiellement par le fait que "la structure sociale du capitalisme modifie la signification de la citoyenneté, car l'universalité des droits politiques - en particulier le suffrage universel des adultes - laisse intacts les rapports de propriété et le pouvoir d'appropriation sous une forme inconnue jusqu'alors.

Le capitalisme permet une forme de démocratie dans laquelle l'égalité formelle des droits politiques n'a qu'un impact minimal sur les inégalités ou les rapports de domination et d'exploitation dans d'autres domaines" <18>. Dans les structures oligarchiques, comme celles qu'incarne une démocratie d'élite, les élections ne sont pas l'expression d'une socialisation de la domination, mais un instrument de protection de la domination particulièrement adapté pour neutraliser les besoins de changement et les orienter dans la direction souhaitée.

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Les élites au pouvoir, malgré leur méfiance fondamentale à l'égard du peuple, font donc volontiers usage des élections pour exploiter la fonction de pacification sociale qui leur est associée.

La stratégie consistant à faire des concessions démocratiques de façade aux mouvements émancipateurs tout en les "désamorçant" par d'autres moyens s'est révélée extrêmement efficace jusqu'à présent. Comme le concept de démocratie, en tant que socialisation radicale de la domination, est chargé de grandes promesses émancipatrices, il peut être utilisé psychologiquement de manière très efficace comme instrument de domination par une redéfinition appropriée.

Cette redéfinition doit être telle qu'elle donne l'impression d'une autodétermination politique, mais qu'elle déplace en même temps la signification initiale du terme "démocratie" d'une manière à peine perceptible pour le public, de sorte que la "démocratie" ne signifie justement plus une autodétermination politique du peuple, mais une détermination étrangère par des élites politico-économiques.

C'est exactement ce que fait l'idée de "démocratie représentative". Elle suggère en effet que le besoin de liberté des personnes soumises au pouvoir a été pris en compte et que les rapports sociaux existants sont précisément l'expression de la volonté du peuple. Il est difficile d'imaginer une forme plus efficace de prophylaxie de la révolution que l'illusion de l'autodétermination politique.

Sources:

<1> Ellen Meiksins Wood, Demokratie contra Kapitalismus : Beiträge zur Erneuerung des historischen Materialismus (Cologne/Karlsruhe : ISP, 2010), page 236.

<2> ibid., page 231.

<3> Kurt Klotzbach, Das Eliteproblem im politischen Liberalismus : Ein Beitrag zum Staats- und Gesellschaftsbild des 19. Jahrhunderts (Cologne/Opladen : Westdeutscher Verlag, 1966), page 39.

<4> John Stuart Mill, Sur la liberté : un essai (Wiesbaden : Marixverlag, 2014).

<5> Dieter Langewiesche (éditeur), Liberalismus im 19. Jahrhundert : Deutschland im europäischen Vergleich (Göttingen : Vandenhoeck & Ruprecht, 1988), page 14 suivante.

<6> Klotzbach, à l'endroit indiqué, page 12.

<7> Josiah Ober, Political Dissent in Democratic Athens (Princeton : Princeton University Press, 2011), page 285.

<8> Voir : Alex Carey, Taking the Risk out of Democracy : Corporate Propaganda versus Freedom and Liberty (Urbana : University of Illinois Press, 1997), et Joseph V. Femia, Against the Masses : Varieties of Anti-Democratic Thought since the French Revolution (Oxford : University Press, 2001), et Walter Christopher Struve, Elites against Democracy. Leadership Ideals in Bourgeois Political Thought in Germany, 1890-1933 (Princeton : University Press, 1973).

<9> Voir par exemple Matthew Simonton, Classical Greek Oligarchy : A Political History (Princeton University Press, 2017).

<10> Wood, à l'endroit indiqué, page 220.

<11> Cela était en fait facilement reconnaissable dans les documents historiques correspondants et avait déjà été critiqué par des auteurs contemporains. L'historiographie récente a mis en lumière et renforcé ce fait sous un certain nombre d'autres perspectives. Ainsi, Klarman constate que "l'esprit dominant de la convention n'était pas seulement nationaliste mais aussi nettement antidémocratique - même selon les normes de l'époque". (Michael J. Klarman, The Framers' Coup : The Making of the United States Constitution (New York, NY : Oxford University Press, 2016)). Bouton écrit : "Ne vous y trompez pas : l'élite fondatrice a restreint la signification et la pratique de la démocratie de manière fondamentale, ce qui continue à façonner notre gouvernement et notre société aujourd'hui. (...) En transformant la démocratie en un concept qui encourageait l'accumulation de richesse sans entrave plutôt que l'égalité des richesses, l'élite fondatrice (et les générations suivantes d'élites) a tamé ce qu'ils ne pouvaient pas vaincre". (Terry Bouton, Taming Democracy : "The People", the Founders, and the Troubled Ending of the American Revolution/ Terry Bouton. (Oxford : University Press, 2007), pages 261/263.) Jeremy Engels voit dans les conceptions des fédéralistes, et en particulier dans la forme de "démocratie représentative" qu'ils ont développée, une nouvelle variante de l'ancienne "misodémie", la haine de la démocratie : "The Federalist updated and fundamentally altered these ancient misodemic discourses, casting aside the more traditional vocabulary of the few and the many and, instead, medicalizing misodemia, marking democracy as an incubator of the 'diseases' typical of 'public bodies'. (Jeremy D. Engels, "The Trouble with 'Public Bodies' : On the Anti-Democratic Rhetoric of The Federalist", Rhetoric & Public Affairs (2015), 18, 505 à 538.

<12> Christian Daniel Voss, Handbuch der allgemeinen Staatswissenschaft nach Schlözers Grundriss, Band 1. (Leipzig : Weidmann, 1786), page 75.

<13> ibid., page 64.

<14> Cette idée d'un contrat de soumission a ensuite été ouvertement exprimée dans des variantes modernes d'une démocratie représentative, par exemple dans la conception de Max Weber d'une "démocratie plébiscitaire de dirigeants", la conception de Walter Lippmann d'une démocratie d'élites ou la conception de Joseph Schumpeter d'une oligarchie électorale d'élites.

<15> ibid., page 65.

<16> Wood, à l'endroit indiqué, page 219.

<17> Comme l'affirme l'éminente théoricienne de la représentation Hanna Fenichel Pitkin : "Representation, at least as a political idea and practice, emerged only in the early modern period and had nothing at all to do with democracy". (Hanna Fenichel Pitkin, "Representation and Democracy : Uneasy Alliance". Scandinavian Political Studies (2004), 27, 335 à 342.) Les procédures législatives représentatives peuvent tout au plus se justifier par des considérations pragmatiques d'opportunité, à condition de s'assurer que les représentants sont pleinement responsables devant la base sociale (voir Ingeborg Maus, Zur Aufklärung der Demokratiheorie : rechts- und demokratietheoretische Überlegungen im Nach nach Kant (Francfort-sur-le-Main : Suhrkamp, 1992), pages 197 suivantes).

<18> Wood, à l'endroit indiqué, page 226.

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Merci à l'auteur pour le droit de publier cet article.

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Ce billet a été publié pour la première fois le 20 juillet 2024 sur manova.news

jeudi, 08 février 2024

Mythe et sédation démocratique

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Mythe et sédation démocratique

Adriano Segatori

Source: https://electomagazine.it/il-mito-contro-la-sedazione-democratica/

Il existe un gros volume - 738 pages pour être précis - qui mérite d'être étudié, et pas seulement lu. Il a été écrit par Francesco Germinario et s'intitule Totalitarianismo in movimento (Le totalitarisme en mouvement).

ISBN-Copertina-TOTALITARISMO-IN-MOVIMENTO-355x600.jpgLe résumer serait une tâche titanesque, mais je pense qu'il est nécessaire de s'attarder sur un point. La fonction du mythe comme dispositif de rupture d'une vision de l'Histoire comprise comme une succession rationnelle d'événements prédestinés à l'intérieur d'un processus prédéfini et, essentiellement, rationnel et, pourrait-on dire, scientifico-matérialiste.

En partant de Sorel, en passant par Gramsci, Lénine, Schmitt, Hitler, Mussolini et d'autres - avec les distinctions naturelles et les clarifications évidentes - tous les penseurs arrivent à la même conclusion, en identifiant le point essentiel du mythe dans la production de deux actions importantes: la mobilisation des masses et le décisionnisme d'un leader charismatique.

Contre une démocratie représentative qui prive le peuple de tout protagonisme politique, à l'exception de celui, fictif et peu concluant, du cirque électoral ou, pire encore, comme à l'époque contemporaine, qui confisque même le droit à la vie privée et à la liberté d'expression; contre une démocratie "discutidora" et chaotique - pour reprendre l'expression de Donoso Cortés - qui s'auto-suffit dans le procéduralisme et le bureaucratisme, ainsi que dans les médiations épuisantes entre des partis politiques uniquement intéressés par leurs propres positions et la défense de leurs propres intérêts; contre une démocratie en proie à l'hésitation et à l'incertitude provoquées par les enchevêtrements administratifs et les formalismes réglementaires, contre cela et surtout contre l'enfermement de l'Histoire dans une voie binaire de prévisibilité et de rationalité, la réanimation d'un mythe, et son incarnation dans une personnalité évocatrice qui décide de son pouvoir politique, détermine l'arrachement à ce qui est considéré comme acquis et l'ouverture vers une réalité nouvelle et inattendue.

L'activation du mythe s'accompagne d'une "radicalisation de la dialectique" : finis les compromis, les médiations, les négociations. L'ennemi est identifié de manière schmittienne et, dans la mobilisation des masses, la souveraineté du peuple est établie.

La superstition de l'argument est remplacée par la foi en la volonté, et l'autre superstition, celle d'un progrès pacifiste et apprivoisé, mais aussi anesthésiant et donc violent de manière déguisée, est ainsi brisée.

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Pourquoi tous les principaux penseurs politiques cités dans l'essai - à l'exception d'un contingent marxiste en désaccord avec cette perspective - n'ont-ils pas envisagé la possibilité d'une rectification vitaliste de la démocratie de l'intérieur de ses appareils ? Tout simplement parce que la démocratie, dans sa genèse même, est porteuse d'indolence sociale, de paresse morale, d'affaiblissement de tout élan vital. La démocratie apprend au peuple la résilience face aux décisions du pouvoir, et c'est pourquoi elle veille toujours à endormir, à soumettre les masses bruyantes et contestataires.

Face à une démocratie qui a toujours le ton monotone de la narration rassurante et hypnotique de l'Histoire, le mythe politique "ne s'attache pas à la narration, mais à l'action". Il ne s'intéresse pas à la gestion et au maintien du présent, mais veut et prétend construire un avenir, selon ses propres principes et sa propre vision.

Germinario cite la pensée de Caillois selon laquelle "le mythe appartient par définition au collectif, il justifie, soutient et inspire l'existence et l'action d'une communauté". C'est pourquoi la démocratie se divise - vax/novax, gauche/droite, etc. - parce qu'elle a peur de la communauté et qu'elle est terrifiée par la possibilité d'une renaissance du mythe, comme ce fut le cas avec le "fascisme [qui] a réussi à retravailler et à fusionner des thèmes de gauche et de droite [dans] une vision mythique de la politique". Pour savoir pourquoi les choses se sont passées ainsi, posez directement la question à la démocratie.

mercredi, 22 novembre 2023

A propos de "Capitalisme, socialisme et démocratie" de Joseph A. Schumpeter

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A propos de "Capitalisme, socialisme et démocratie" de Joseph A. Schumpeter

par Andrea Fumagalli

Source: https://www.sinistrainrete.info/articoli-brevi/26793-andrea-fumagalli-a-proposito-di-capitalismo-socialismo-e-democrazia-di-joseph-a-schumpeter.html

Grâce à l'intercession de Massimiliano Guareschi et surtout au travail d'Adelino Zanini (éditeur et correcteur) et à la traduction d'Emilio Zuffi, les éditions Meltemi rééditent un ouvrage fondamental pour le débat économique et politique du 20ème siècle : Capitalisme, Socialisme et Démocratie de Joseph A. Schumpeter.

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Il s'agit du dernier grand ouvrage de l'économiste autrichien, qui a émigré à Harvard en 1932, peu avant la montée du nazisme en Allemagne (Hitler est devenu chancelier le 30 janvier de l'année suivante). Il s'agit également d'une sorte de testament politique, dans lequel on peut discerner les pierres angulaires de sa pensée économique, imprégnée d'un certain pessimisme quant au destin du capitalisme. Schumpeter a été (avec Marx et Keynes) l'un des trois plus grands analystes du système capitaliste. Le hasard a voulu qu'ils soient liés depuis 1883, année de la mort de Marx mais aussi de la naissance de Keynes et de Schumpeter, presque un passage de témoin.

Contrairement à Keynes (qui n'avait jamais lu Marx), Schumpeter était un proche de la pensée marxienne. Ce n'est pas un hasard si la première partie de Capitalisme, socialisme et démocratie est consacrée à une analyse critique du philosophe de Trèves. Si, d'une part, Schumpeter reconnaît à Marx le mérite d'avoir été le premier à analyser le capitalisme dans une perspective dynamique et non statique [1], avec une logique opposée à celle présente dans les modèles walrasiens d'équilibre général basés sur le concept de "Kreislauf" (flux circulaire), d'autre part, l'économiste autrichien critique l'approche marxienne basée sur le concept de lutte des classes. Schumpeter écrit (p. 75) :

"... Marx essaie de montrer comment, dans la lutte des classes, les capitalistes se détruisent les uns les autres et, à long terme, détruisent le système capitaliste lui-même. Il essaie également de montrer comment la propriété du capital conduit à une accumulation supplémentaire".

Mais voici la critique de Schumpeter :

"Mais cette façon d'argumenter, et la définition même qui élève la propriété au rang de caractéristique distinctive d'une classe sociale, ne font qu'accroître l'importance du problème de "l'accumulation primitive", c'est-à-dire de la façon dont les capitalistes ont réussi en premier lieu à le devenir, ou de la façon dont ils ont pris possession de la masse de marchandises qui, selon la doctrine marxienne, était nécessaire pour leur permettre d'initier l'exploitation. Sur ce point, Marx est beaucoup moins explicite (p. 75)".

Marx rejette l'idée que l'entrepreneur-capitaliste est doté de vertus particulières (talent, esprit d'entreprise et intelligence). Il s'agit d'une "fable bourgeoise" (Kinderfiebel). Or, selon Schumpeter

"quiconque regarde les faits historiques et contemporains avec un esprit dégagé de tout préjugé reconnaîtra que cette fable, si elle est loin de dire toute la vérité, en dit néanmoins une grande partie. Le succès industriel et surtout la fondation d'entreprises industrielles solides s'expliquent dans neuf cas sur dix par une intelligence et une énergie supérieures (p. 76)".

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Si l'accumulation primitive peut être le résultat d'un processus de déprédation, de violence et d'exploitation, une fois établi historiquement, le capitalisme se caractérise également par sa capacité à se transformer continuellement grâce à un esprit d'entreprise innovant. La référence au processus de destruction créatrice que Schumpeter avait déjà décrit dans la Théorie du développement économique en 1911 (il n'avait pas encore 30 ans) est évidente ici. L'influence de Max Weber et de Werner Sombart est également perceptible. Le désaccord avec Marx est profond et Schumpeter estime que la figure de l'entrepreneur innovateur représente une "subjectivité" capable de redéfinir en permanence les rapports de production. Il n'y a pas de différence, de ce point de vue, entre structure et superstructure et le profit est la juste rémunération non pas d'un acte d'exploitation mais de la capacité entrepreneuriale à faire croître le capitalisme.

Dans la deuxième partie, Schumpeter évoque ensuite le sort du capitalisme : "Le capitalisme peut-il survivre ? Non, je ne le pense pas" (p.139). Une conclusion qui s'inscrit donc dans la continuité de la pensée marxienne. Mais les motivations sont évidemment différentes. Pour Schumpeter, le capitalisme sera victime de son propre triomphe. La capacité dynamique d'un tel système est la condition de sa survie, mais plus l'accumulation augmente (que Schumpeter définit comme le taux d'accroissement de la production réelle, chap. 5), grâce au pouvoir d'innovation de la classe des entrepreneurs, plus sa stabilité diminue et les conditions endogènes qui conduiront à sa fin apparaissent. Contrairement au Schumpeter des débuts, au Schumpeter de la jeunesse de la théorie du développement économique, le Schumpeter de la maturité est forcé de réaliser que le processus de destruction créatrice a cédé la place au capitalisme monopolistique. La transition clé est la révolution managériale et la Grande Dépression du début des années 1930 qui a suivi l'avènement du paradigme tayloriste. La nécessité d'exploiter les économies d'échelle statiques associées au paradigme tayloriste a entraîné l'augmentation de la taille des entreprises et la concentration des marchés dans les principaux secteurs de production. Cette évolution a entraîné la disparition de la figure de l'entrepreneur innovant et sa tendance à être remplacée par une bureaucratie managériale visant davantage à exploiter les rentes de situation qu'à favoriser les politiques innovantes.

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La philosophie politique de Schumpeter est d'autant plus conservatrice que sa philosophie économique est innovante et hétérodoxe. Le Schumpeter politique est nostalgique d'un capitalisme concurrentiel, composé de nombreuses petites entreprises, dont la compétitivité et le processus de sélection qui en découle est le moteur de sa capacité de transformation. Mais c'est précisément cette charge d'innovation qui a produit la bureaucratisation de l'entreprise que Schumpeter voit comme l'antichambre de la fin. Comme pour Marx, la recherche spasmodique du profit (plus-value) conduira l'évolution organisationnelle à marquer le déclin du capitalisme.

Mais contrairement à Marx, la fin du capitalisme ne conduira pas à une rupture révolutionnaire qui facilitera la transition vers une société plus juste et plus respectueuse de l'homme. Pour Schumpeter, l'euthanasie du capitalisme monopolistique conduira à une forme de socialisme. En fait, la transition vers le socialisme ne se fera pas par une révolution violente, comme l'ont prophétisé les marxistes et comme l'ont réalisé les bolcheviks, mais par un processus graduel, par voie parlementaire, et donnera naissance à un système socialiste compatible avec la démocratie, dans lequel la concurrence entre les groupes d'entreprises sera régulée non plus par le marché, mais par l'État.

Comme le souligne à juste titre Adelino Zanini dans sa savante et exhaustive préface :

"C'est ici que Schumpeter se livre à une "expérience de pensée" qui introduit l'un des points forts de Capitalisme, socialisme et démocratie, à savoir l'idée de la démocratie en tant que méthode politique" (p. 23).

Selon Schumpeter :

"un instrument constitutionnel pour parvenir à des décisions politiques - législatives et administratives - incapable, par conséquent, d'être une fin en soi, indépendamment de ce que ces décisions produiront dans des conditions historiques données" (p. 406).

C'est ainsi que l'on peut combiner le socialisme et la démocratie. La société socialiste est la fin, la démocratie la méthode.

* * * * *

Plus de 80 ans se sont écoulés depuis la publication de l'ouvrage de Schumpeter, et le thème de la survie du capitalisme est toujours d'actualité, rendu encore plus pressant aujourd'hui par la crise environnementale, qui voit l'effondrement du capitalisme coïncider avec la fin de la vie humaine. En revanche, la discussion sur la manière d'imaginer une transition vers une société non capitaliste et socialiste semble moins d'actualité. En ces temps de pensée unique militaire, associer socialisme et démocratie relève du blasphème.

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La pensée de Schumpeter peut être considérée, à cet égard, comme paradoxale, non exempte de contradictions, mais, peut-être pour cette raison, très stimulante. Après la crise des années 1930, le pacte social fordiste à la sauce keynésienne représentait la sortie de ces années, garantissant cette stabilité économique historiquement exceptionnelle grâce à la croissance simultanée des profits et des salaires, capable d'assurer un équilibre dynamique entre production de masse et consommation de masse (mais aussi au détriment des conditions de travail de l'ouvrier de masse). Pourtant, pour Schumpeter, le triomphe du fordisme est la cause principale du déclin du système capitaliste.

Le paradigme fordiste est entré en crise à la fin des années 1960 aux États-Unis et dans les années 1970 en Europe et au Japon. Les causes sont en partie celles prophétisées par Schumpeter (la bureaucratisation croissante des grandes entreprises), mais aussi celles préconisées par Marx : l'émergence d'un conflit de classes.

Mais à la fin des années 70 et dans les années 80, un nouveau processus de destruction créatrice s'est répandu, favorisant l'émergence du nouveau paradigme technologique des TIC (technologies de l'information et de la communication). D'une part, l'hypothèse de l'onde longue de Kondratieff (à laquelle Schumpeter avait fait allusion dans son ouvrage de 1939 intitulé Les cycles économiques) a été confirmée, mais d'autre part, la prédiction selon laquelle le gigantisme industriel conduirait à la disparition du capitalisme a été discréditée.

La nouvelle phase du capitalisme, que certains appellent capitalisme bio-cognitif ou capitalisme de plateforme, a su développer une nouvelle puissance innovatrice, technologique et organisationnelle qui a transformé structurellement les processus de valorisation et d'accumulation entre la financiarisation d'une part, et l'internationalisation sélective de la production et de la logistique d'autre part.

Il s'ensuit que le système capitaliste ne peut survivre que s'il est capable de mettre en œuvre un processus constant de métamorphose. Schumpeter suggère que ce processus n'est pas le résultat de son devenir. En d'autres termes, le capitalisme ne peut se sauver seul. Il a besoin de stimuli extérieurs, qui obligent le système capitaliste à modifier les routines d'accumulation établies, car il n'est plus capable d'obtenir des résultats satisfaisants. C'est là qu'intervient Marx qui, contrairement à Schumpeter, pense que des facteurs exogènes au capitalisme peuvent en modifier la structure, avec la possibilité de compenser sa dérive.

Que ce sont les forces anticapitalistes qui garantissent la survie du capitalisme lui-même ?

Note :

[1] Ce concept est également bien exprimé dans la préface de l'édition japonaise de 1937 de la "Théorie du développement économique". Marx est considéré par Schumpeter comme un spécialiste du développement économique et, en particulier, il se réfère à sa conception d'un tel développement comme étant basé sur un mécanisme d'auto-propulsion. Dans la préface de l'auteur à l'édition japonaise de l'ouvrage, Schumpeter a entrepris de formuler : "une théorie économique pure du développement économique, qui ne repose pas uniquement sur les facteurs externes susceptibles de propulser le système économique d'un équilibre à un autre... cette idée et cette intention sont exactement les mêmes que celles qui sous-tendent la doctrine économique de Karl Marx. En effet, ce qui le distingue des économistes de son temps comme de ceux qui l'ont précédé, c'est une conception de l'évolution économique comme processus particulier généré par le système économique lui-même (Schumpeter 1937, p. LX)".

mardi, 04 juillet 2023

La fin de la démocratie et la montée de la pensée unique

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La fin de la démocratie et la montée de la pensée unique

par Fabrizio Pezzani

Source : Fabrizio Pezzani & https://www.ariannaeditrice.it/articoli/la-fine-della-democrazia-e-l-affermazione-del-pensiero-unico

L'État éthique est défini comme la forme institutionnalisée par les philosophes Hobbes et Hegel, dans laquelle l'institution étatique est la fin ultime vers laquelle les actions des individus doivent tendre pour la réalisation d'un bien universel.

Au fil du temps, cependant, le concept d'État éthique a pris une composition différente et en est venu à revêtir une dimension totalitaire dans laquelle le bien et le mal sont le résultat d'une imposition indépendante de ce qui devrait être le contrat de base entre l'État et le citoyen. Thomas Hobbes est considéré comme le père de la philosophie politique moderne avec sa prise de distance par rapport à la réflexion du monde classique sur la socialité et la politique de l'homme ; Hobbes inaugure la méthode contractualiste où les hommes trouveront des règles communes en sacrifiant une partie de leur liberté en échange de la protection et du respect des règles établies et se référeront à un seul grand représentant institutionnel qu'il définit comme le Léviathan ; en ce sens, Hobbes est défini comme le principal théoricien de l'État absolu ou de l'absolutisme dans lequel le souverain est considéré comme étant au-dessus de la loi universelle.

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Après Hobbes, Hegel (illustration, ci-dessus), le philosophe idéaliste, définit l'État comme une substance éthique consciente d'elle-même ; l'État est la plus haute expression de l'éthique, une théorie qui contraste fortement avec le droit naturel et le contractualisme de la philosophie politique moderne. L'État, affirme Hegel, est la source de la liberté et de la norme éthique pour l'individu, il est la fin suprême et l'arbitre absolu du bien et du mal.

Cependant, l'État hégélien n'est pas un véritable État absolutiste et totalitaire, mais une unité organique vivante qui doit s'adapter aux circonstances évolutives naturelles de la société humaine. Pour Hegel, l'État éthique est le dernier moment de l'esprit subjectif et objectif, Hegel affirme que la liberté est et reste à tout moment la condition historique de la philosophie depuis la Grèce antique. Pour Hegel, une combinaison du bien commun et du bien personnel doit être trouvée dans l'État dans les limites dues à l'interaction des individus. La position de Hegel a ensuite été contrée par la critique de Karl Popper, qui a défini l'État éthique comme une société fermée, par opposition à l'État de droit propre à une société ouverte.

La théorie de l'État éthique a ensuite été reprise au 20ème siècle pour expliquer les États fasciste et communiste, qui étaient en fait des États totalitaires dans lesquels les libertés individuelles étaient réprimées selon les règles supérieures du "Léviathan" de Hobbes.

Les constitutions démocratiques successives qui ont régi l'État de droit jusqu'au siècle dernier fondent leur existence sur un équilibre fragile entre le droit et la liberté, entre l'intérêt général et la protection des minorités qui s'oppose à la pensée unique.

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Aujourd'hui, nous nous trouvons dans un état éthique oppressif car si la démocratie libérale reconnaît et défend la liberté d'expression avec comme limite la protection de la dignité humaine, l'extrémisme progressiste voudrait, au contraire, censurer tout ce qui n'est pas conforme à la pensée unique proposée par une élite qui semble viser une gouvernance mondiale et impose ses propres règles du bien et du mal qu'elle définit en fonction d'un changement culturel qui répond à des intérêts supérieurs. La culture de l'annulation (cancel culture) est la représentation la plus destructrice d'un monopole culturel qui efface la liberté d'expression et la véritable démocratie dont la survie est de plus en plus en jeu.

La culture de l'annulation sévit dans les universités où l'on interdit aux enseignants non alignés de s'exprimer, sur les places où l'on démolit des statues comme celle de Churchill déclaré fasciste et celles de Lincoln posé comme raciste et de Colomb également campé comme raciste, et même dans le journalisme où l'on impose des modes d'expression qui ne heurtent la sensibilité de personne, puis dans la politique qui chevauche la pensée unique et le débat sur le genre et l'économie verte deviennent les chevaux de bataille d'une pensée unique qui, dans la non-pensée de la société, devient un despotisme culturel sans freins. Entendre la secrétaire du DP faire l'éloge d'une société libre sans freins sur le genre, énumérer plus de dix acronymes auxquels elle pourrait ajouter les Indiens Apaches, les Mescaleros, les Hutus, les pygmées de Bornéo, sans faire de bruit mais en se montrant comme un exemple d'universalité, tout cela a du sens. C'est ainsi que l'on passe de l'Etat de droit à l'Etat éthique absolutiste où la censure, la démission, la répression et la mise au pilori sont la fin des non-alignés ; le phénomène est endémique dans les pays anglo-saxons sans repères éthiques et moraux, prompts à gommer le peu de culture qu'ils possèdent.

L'attaque contre la démocratie libérale s'appuie sur un populisme sécuritaire qui redécouvre l'État fort qui protège le citoyen de plus en plus seul, sans défense et désorienté, mais aussi plus facile à dominer et à gouverner, et donc l'État éthique entre de force dans la vie des particuliers, proposant des modèles absolus à suivre de manière ordonnée, perturbant le système social qui est à la merci de la pensée unique.

A côté du genre, mythe et bible, l'économie verte sert des intérêts supérieurs mais risque de ruiner la classe moyenne et de bouleverser la hiérarchie sociale où les super-riches imposent leur "culture de l'annulation", indifférents aux drames sociaux qu'ils sont en train de créer.

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Le monde occidental est en train de creuser sa propre tombe avec une forme de nihilisme extrême et désespéré qui prône un mondialisme sans règles morales. Le mondialisme est une idéologie complexe qui oppose une apparente liberté débridée à un contrôle social invasif et parfois criminel et à un contrôle toujours plus profond et invasif des opinions exprimées par les acteurs sociaux. Nous vivons dans une liberté éphémère qui devient condamnable si nous allons au-delà des opinions autorisées et des idées politiquement correctes, nous vivons dans une illusion de liberté sans limites, hédoniste sans limites morales qui sont l'expression d'un minimum de décence mais gouvernée par une oligarchie étroite qui contrôle, guide et punit sans pitié les pauvres et innocents transgresseurs.

Nous sommes dans un monde éthéré, fait de jeux et d'illusions, mais en proie à une pensée unique qui s'est donné pour objectif de changer le monde ; pourtant, face à cette descente aux enfers, il ne semble pas y avoir une seule voix de protestation, mais un troupeau sans fin de lemmings qui se jettent dans le ravin. 

 

mercredi, 07 juin 2023

Information, libre pensée et démocratie

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Information, libre pensée et démocratie

par Tiziano Tanari

Source: https://www.ideeazione.com/informazione-libero-pensiero-e-democrazia/

À l'ère de la mondialisation, une information correcte revêt une importance vitale car elle nous permet de connaître les dynamiques politiques, géopolitiques, sociales et culturelles qui affectent notre société et nous relient au monde entier, un monde qui semble toutefois avoir annulé les identités, le respect et la protection des pays individuels : chaque pays est contraint de s'adapter aux processus de cette mondialisation sans tenir compte de ses intérêts, de ses besoins et de ses potentialités. Il s'agit d'une réalité amplifiée dans laquelle un pays individuel a d'énormes difficultés à s'intégrer, aussi et surtout parce que ses citoyens sont privés des informations qui pourraient garantir la possibilité d'évaluer les choix politiques les plus avantageux pour eux-mêmes et pour la nation dans son ensemble. Je dirais que le principe de base de la démocratie réside précisément là, dans la capacité d'un peuple non seulement de pouvoir choisir mais de savoir choisir, c'est-à-dire de connaître les faits avec leurs implications conséquentes pour la compréhension réelle des propositions qui nous sont progressivement offertes par la politique, la politique qui devra ensuite nous représenter au Parlement et dans le gouvernement du pays.

Une bonne information de base et le désir de participer à une politique active peuvent donner au peuple les outils indispensables pour contrôler le travail de son gouvernement, mettant ainsi pleinement en œuvre ce que l'on appelle le "pouvoir de commandement", une prérogative fondamentale pour être considéré comme un peuple libre et autodéterminé. Dans cette perspective, l'importance d'une information correcte, pilier irremplaçable d'une conscience collective saine et responsable, apparaît fondamentale.

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C'est du peuple que naissent les hommes politiques et c'est d'eux que se forment les gouvernements ; ce rapport entre les citoyens et leurs représentants est un lien vital qui doit être entretenu et renforcé par de nouvelles formules permettant une interaction constante et dynamique en termes exclusifs, sans interférence de puissances tierces. Malheureusement, suite à l'entrée dans l'Union européenne et à l'application de lois de facto de laissez-faire, le contact du citoyen avec la politique s'éloigne de plus en plus, provoquant, comme premier effet néfaste, des niveaux d'abstentionnisme jamais vus dans le passé.

Cette déconnexion toujours plus grande entre le peuple et le pouvoir politique, cette dépendance et cette soumission de la politique nationale à des pouvoirs supranationaux auxquels elle est de plus en plus inféodée, avec une information manipulée et instrumentalisée par ces mêmes pouvoirs, rend le peuple incapable de comprendre la réalité mais, plus grave encore, le rend victime d'un conditionnement par des techniques de communication qui, entre fausses nouvelles et fake news, créent un substrat mental programmé et très difficile à ébranler. Mark Twain disait : "Il est beaucoup plus facile de tromper les gens que de les convaincre qu'ils ont été trompés". Cette distorsion préméditée de la réalité nous conduit à la fin de la démocratie.

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Le principe devient décisif que sans la participation du peuple, on ne peut espérer la reprise concrète d'un processus véritablement démocratique qui ramènera la liberté, la prospérité et la justice, plus que jamais menacées par les puissances barbares mondialistes et la complicité coupable de nos institutions.

Pour pouvoir contrer cette dérive liberticide, il est indispensable de redonner du pouvoir à l'Etat afin qu'il puisse enfin faire rempart à ces forces supranationales procédant d'une matrice privée. La seule façon de redonner de la force à la puissance publique est l'action coordonnée et monolithique de son peuple qui, conscient des dangers et des opportunités, sait s'orienter dans un processus unitaire qui le verra dépasser les clivages idéologiques et partisans et lui permettra de "décharger" toute sa force démocratique débordante, de manière univoque et coordonnée, vers la politique qui n'a rien d'autre à faire que de servir le Peuple et de protéger ses droits comme un impératif absolu. Lev Tolstoï nous rappelle que : Un peuple uni est plus fort que n'importe quelle armée".

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C'est ce dont nous avons besoin : un peuple uni qui, par le biais de processus démocratiques et d'une information correcte, peut constituer le rempart insurmontable aux intérêts privés de la finance et des multinationales. Pour cette nouvelle prise de conscience et la renaissance d'une véritable pensée critique, il est nécessaire de dépasser les sources d'information institutionnelles actuelles, qui sont aujourd'hui complètement monopolisées et asservies aux pouvoirs mondialistes, et de créer de nouveaux canaux et des systèmes d'information alternatifs, en améliorant et en renforçant ceux qui existent déjà. Nous nous trouvons à un moment décisif pour sauvegarder l'information libre, car c'est précisément à notre époque qu'une nouvelle stratégie du pouvoir émerge pour délégitimer comme fausse et non fiable l'information qui se développe en dehors des canaux institutionnels et sur les réseaux sociaux. (https://www.agendadigitale.eu/cultura-digitale/disinformazione-online-e-costruzione-dellopinione-pubblica-se-in-pericolo-e-la-tenuta-delle-democrazie/)

Il est également primordial que de nouvelles forces politiques ("un front de la dissidence"?) entrent dans l'arène politique en essayant de s'organiser de la manière la plus cohérente possible afin de contribuer à la diffusion des bonnes informations et à la formation d'une nouvelle conscience collective sans laquelle toute forme de rédemption reste impossible; on ne peut plus se fier à l'information et aux institutions publiques. Nous avons tous des intérêts communs et faisons partie d'un système qui, s'il est bien géré, peut garantir le bien-être et la justice pour tous. Une nouvelle culture sociale ne peut être véhiculée que par une politique saine et une information correcte, et cela doit être l'engagement premier de tous : informer, éduquer et participer à la gestion de la Polis, nous ne pouvons plus nous permettre de laisser notre vie et celle des générations futures entre les mains des nouveaux barbares cosmopolites planétaires pour qui il n'y a plus de peuples, d'États ou d'éthique, mais seulement leurs intérêts et leur soif délirante de pouvoir. Information, unité, planification, action, voilà le chemin pour redevenir libre.

Publié en partenariat sur ComeDonChisciotte 

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dimanche, 02 octobre 2022

L'ancien chef de l'Office allemand de protection de la constitution, Hans-Georg Maassen, met en garde: l'Allemagne est en route vers une "dictature écosocialiste"

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L'ancien chef de l'Office allemand de protection de la constitution, Hans-Georg Maassen, met en garde: l'Allemagne est en route vers une "dictature écosocialiste"

Source: https://zuerst.de/2022/09/30/frueher-vs-chef-maassen-warnt-deutschland-auf-dem-weg-in-die-oekosozialistische-diktatur/

Berlin. L'ancien chef du Service fédéral de protection de la Constitution, Hans-Georg Maassen, estime que l'Allemagne est sur une pente glissante vers une dictature de gauche. Dans un article pour le blog du journaliste indépendant Alexander Wallasch, Maassen avertit que des politiciens incompétents et des fanatiques politiques font de l'Allemagne "un terrain d'expérimentation pour une transformation verte en une dictature écosocialiste".

Dans ce contexte, le personnel en place n'est pas seulement incompétent ou naïf. De nombreux acteurs agissent en toute connaissance de cause. Maassen: "Je suis fermement convaincu que ces gens veulent aussi détruire beaucoup de choses, car leur motivation est de réaliser une transformation (sociale sous le signe de l'idéologie) verte, qui n'est possible que si le système social existant est détruit et qu'un nouveau système est construit".

Selon lui, les cercles qui font autorité aujourd'hui en Allemagne ont une conception de la démocratie similaire à celle qui prévalait jadis en RDA. Ils n'acceptent les processus démocratiques que tant qu'ils sont utiles à leurs objectifs idéologiques. Dès que cela n'est plus garanti, la volonté du peuple ne leur apparait plus pertinente.

Maassen estime qu'il est possible que l'Allemagne "désapprenne la liberté". L'ère Merkel a conduit à une érosion sans précédent de la liberté d'expression. Il "ressent cette haine profonde de ces gens qui ne peuvent tout simplement pas supporter d'être confrontés à la vérité (factuelle). Je me demande désormais jusqu'où ces gens sont prêts à aller".

Selon lui, le journalisme, de plus en plus mauvais en Allemagne, caractérisé par des reportages uniformes et un alarmisme tapageur, un suivisme et un conformisme navrants, est également en partie responsable de ce désastre. Parallèlement, il existe une mentalité propre à une foule collective et hystérique lorsqu'il s'agit de "matraquer des personnes sans défense à travers des articles de presse".

Toutefois, même les milieux responsables de la gauche et du mouvement vert sont désormais gagnés par l'insécurité et la peur de l'avenir. Un indice en est que les politiques demandent désormais ouvertement à l'ensemble de la population de se préparer à un black-out, ce qui n'était pas imaginable auparavant. (st)

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vendredi, 19 août 2022

La démocratie malade du libéralisme

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Les archives de "Synergies Européennes"

Pierre Le Vigan (Juin 2009):

La démocratie malade du libéralisme

Année 2009. Une fois de plus, le taux d’abstention aux élections européennes a battu des records. Il a été en France de près de 60 %, et de 57 % sur l’ensemble des pays de l’Union. Le taux de participation n’a cessé de baisser depuis 1979, la première date d’élection au suffrage universel des députés européens. Ce phénomène d’abstention, qui concerne surtout les milieux populaires, et d’autres phénomènes, tels l’importance des votes, du moins jusqu’en 2007, pour des partis éloignés de l’espérance de gouverner, ont amené beaucoup d’observateurs à parler de déclin de la démocratie.

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Guy Hermet (photo), politologue, professeur à l’Université de Montréal, parle de « crépuscule démocratique », d’ « hiver de la démocratie ».  La démocratie se viderait elle-même de sa substance. Les formes ne recouvriraient plus des pratiques et des engagements. Emmanuel Todd explique de son coté que notre époque est celle d’ « après la démocratie » : une post-démocratie. On peut bien sûr lier ce phénomène au contrôle social généralisé, au fichage et « flicage » sans précédent. Il serait l’effet d’une désaffection vis-à-vis des institutions. Mais ce ne sont là que des conséquences de l’atonie citoyenne. 

La démocratie est née libérale. La loi Le Chapelier de 1791 a interdit les coalitions c’est à dire les associations ouvrières en même temps que les corporations. Napoléon 1er, reprenant une disposition de la fin de l’Ancien Régime,  a soumis l’ouvrier à la possession d’un livret précisant ses différents patrons successifs et gardé par le patron tant qu’il était dans l’entreprise. La démocratie ne s’installe durablement qu’avec la IIIe République. Elle est préparée par le Second Empire avec, en 1864, le droit de coalition ouvrière et l’autorisation du droit de grève. Le droit d’association ouvrière ne sera complet – ce qui ne veut pas dire sans entrave – qu’en 1884 avec la loi Waldeck-Rousseau.  Le postulat dominant de la Révolution française n’était pas la démocratie au sens où nous l’entendons. C’était les droits de l’individu. Celui-ci était considéré comme préexistant à la société. La Révolution française, c’est d’abord  l’individualisme libéral, matrice de notre monde moderne. 

C’est dire que la démocratie était mal partie. Partie sur le mode de la négation de la notion de bien commun à construire par le politique et sur la négation de la régulation sociale. Les individus avant la solidarité : cela commençait mal. Il y eu certes, après des décennies de libéralisme sauvage, quelque 40 ans de libéralisme tempéré par des doses de démocratie sociale. Des années 40 aux années 80. Ce fut le fordisme (du nom d’Henry Ford) : régime économique et social marqué par l’idée que les salariés doivent participer aux fruits de la croissance et y être associés. Ainsi, la récupération sociale était associée à l’ouverture de nouveaux marchés. Le peuple devenait consommateur et oubliait un peu ses revendications de producteur.  Une façon de faire mentir la théorie marxiste de la lutte des classes. Avec le néo-libéralisme ou pour mieux dire avec le mondialisme et l’hyper-capitalisme, ce phénomène est accru. Sous l’effet de la vision libérale de la société qui marchandise tous les champs de l’activité humaine, le producteur et le citoyen ont été réduits au consommateur. « Le libéralisme met la démocratie en crise », remarque l’historien Marcel Gauchet.  

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Le fordisme a laissé la place à l’ultralibéralisme et à sa déréglementation dans le domaine économique à partir des années 1980, avec Thatcher en Grande–Bretagne, Reagan aux Etats-Unis, et Mitterrand en France. A partir de 1983, la politique s’est alors rabattue sur la surface extensible à l’infini des « droits de l’homme », des droits qui sont pour la plupart souhaitables mais dont l’affirmation répétée liquide en fait le droit lui-même. En effet, les droits de telles ou telles catégories finissent par se heurter et être tout simplement illisibles. En outre, ce ne sont pas l’affirmation des droits qui résolvent les problèmes mais les politiques réellement engagées. L’habitant d’une zone rurale a moins besoin d’une énième affirmation du droit à la santé sur papier à en tête de la République que d’un médecin à moins de 20 km de chez lui.  Ce régime de prolifération de droits parcellaires coupe l’individu lui-même en petits morceaux en fonction de caractéristiques qui n’épuisent pas pour autant la multitude des facettes de l’identité de chacun.

Si le droit lui-même se liquéfie sous l’effet de cette « sociétalisation » du droit c’est-à-dire son rabattement sur des enjeux,  voire des micro-enjeux de société, le politique s’effondre littéralement, ce dont donne la mesure les vagues d’abstentions massives aux élections qui déferlent régulièrement ou le vote pour des partis radicaux. « Une politique fondée sur l’addition des intérêts particuliers s’apparente plutôt à une anarchie, c’est-à-dire à une non-politique. La démocratie consiste au contraire à laisser définir plusieurs versions de l’intérêt général, que la souveraineté populaire hisse à la représentation alternativement », indique la philosophe Chantal Delsol (photo).

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Mais la politique actuelle a cessé d’être le lieu des décisions qui tranchent, à l’image de notre politique extérieure qui s’émeut de tout mais ne s’engage sur rien. La politique devient un « impouvoir » selon le mot de Marcel Gauchet. Le lieu de l’impuissance du pouvoir. La démocratie s’effondre ainsi sous son propre poids ou plutôt sous celui de ses excroissances qui l’ont en fait dénaturée. Les droits de l’individu ont remplacé ceux du peuple. L’universalisme abstrait des droits de l’homme a remplacé le droit concret des hommes réels. La démocratie dite libérale est devenue le fossoyeur de la démocratie réelle. « Elle s’en est prise au principe du pouvoir en général et partout. Elle a universellement sapé les bases de l’autorité du collectif au nom de la liberté. (...) Elle a fait passer au premier plan l’exercice des droits individuels, jusqu’au point de confondre l’idée de démocratie avec lui et de faire oublier l’exigence de maîtrise collective qu’elle comporte », écrit Marcel Gauchet (photo), qui a engagé la réalisation  d’une vaste fresque historique sur la démocratie.

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L’universalisme des droits de l’homme tend à dissoudre le citoyen dans une société d’ayant-droits. Citoyen devient un adjectif (« une conduite citoyenne », « un tri citoyen des ordures ») mais cesse d’être un sujet. La politique est réduite aux droits et ceux-ci sont réduits à de bonnes intentions morales. Il n’y a plus ainsi ni droite ni gauche ou du moins, droite et gauche ne se distinguent pas plus que Total et Shell. Ce sont des marques commerciales, des produits marketing. C’est ce que pointait le député P.S Manuel Valls dans une polémique cet été. « Nous ne sommes pas capables d'assumer théoriquement ce que nous faisons ensuite quand nous gouvernons » (…) « Avec Lionel Jospin au pouvoir, nous avons privatisé beaucoup d'entreprises ». « Mais ensuite, nous n'acceptons pas du tout le rôle de la nouvelle économie. » (Le Point, 28 juillet 2009). Cela avait un seul mérite : celui de la franchise. C’était une façon de dire que le PS est social-libéral mais ne l’assume pas. Il est vrai que la social-démocratie a cessé d’être une marche, fut-elle lente, au socialisme mais est au mieux un ralentissement de la marche au turbo-capitalisme voire – c’est arrivé – une accélération de cette marche, la caution de gauche servant d’alibi.

Dés lors que le citoyen n’a plus le choix entre diverses lignes politiques, il n’y a plus de démocratie. Face à cela certains mettent en cause, notamment du coté des anarcho-libertaires, ou chez les nostalgiques de droite (et parfois de gauche) d’un « ordre naturel », le principe même de la démocratie représentative. Toute délégation de pouvoir serait à proscrire. Au minimum, les élus devraient être liées par un mandat impératif, n’agir qu’en fonction de leurs engagements. Le maximum de questions devraient être réglées par la démocratie directe ou encore démocratie de base. Cela n’est guère réalisable.

Bien entendu, la démocratie la plus locale possible, la plus décentralisée possible est souhaitable. Mais le mandat ne peut être impératif sauf à imaginer que l’histoire s’arrête et qu’un programme puisse suppléer à tout. Les référendums d’initiative populaire sont sans doute très souhaitables mais ne sauraient s’appliquer à tout : aucun référendum n’aurait, en 1940,  mandaté de Gaulle pour qu’il anime la résistance à Londres. L’initiative personnelle et historique est à un moment donné irremplaçable. Le principe de la délégation de pouvoir reste indispensable. Ce qui pose problème, c’est la personnalisation excessive. Qu’un camp ait un leader qui se dégage comme dominant à tel moment, c’est bien naturel et c’est souhaitable. Mais qu’une élection se fasse sur une bataille d’image, voilà qui est devenu la norme et qui est le contraire d’une bonne pratique démocratique, car le choc des images supplée à l’affrontement des idées.  Ce sont alors les communicants qui prennent le pouvoir. Et chacun sait qu’ils sont interchangeables entre droite et gauche.

L’apparition du thème de la société civile et de la gouvernance (toujours « nouvelle », aurait écrit Gustave Flaubert dans son Dictionnaire des idées reçues) est significatif. A la base, la notion de « société civile » ne veut rien dire d’autre que « ce qui n’est pas la société militaire ».  Or, l’ouverture du politique à la « société civile » ne se traduit pas par autre chose que par l’ouverture au monde des affaires : hier, Bernard Tapie ou Francis Mer, aujourd’hui Christine Lagarde. Comme si le peuple ne faisait pas partie de la « société civile ».

De même, la notion de « gouvernance » envahit le champ politique alors que ce n’est pas son registre. Appliquée aux entreprises ou aux associations, la notion de gouvernance désigne une gestion qui a l’ambition d’être à long terme et d’être l’outil d’un projet. La notion de gouvernance est ainsi parfaitement légitime dans le domaine du tiers secteur économique comme l’économie sociale et solidaire (coopératives, associations, fondations, etc). Cette notion est beaucoup plus contestable dans le registre du politique ou il ne s’agit pas tant de « gérer » que d’incarner un peuple, d’assumer son destin, de maintenir le lien social.

9782711743384.jpgAvec le discours de la gouvernance, c’est encore la pensée unique, celle du « il n’y a qu’une seule politique possible » qui s’exprime, et ce d’une manière d’autant plus contraignante qu’il s’agit de faire « converger les gouvernances ». C’est-à-dire qu’il n’y a plus qu’une politique possible et que celle-ci est mondiale, c’est une toile unique qui enserre dans ses filets les libertés des hommes et des peuples.  There is no alternative. D’autant que cette gouvernance se veut concertée entre les Etats, les grandes entreprises, les institutions internationales telles le F.M.I.  Comme l’écrit l’ancien secrétaire d’Etat américain au travail sous Clinton, Robert Reich, auteur de Supercapitalisme – le sous titre est explicite : « Le choc entre le système économique émergent et la démocratie » – (Vuibert, 2007), « aucune compagnie ne peut sacrifier son rendement au bien commun ».

C’est l’hyper-économie, la chrématistique qu’Aristote, Sismondi et d’autres avaient déjà critiquée qui a tué à petit feu la démocratie. C’est pourquoi la renaissance de la démocratie ne peut venir que d’une autre économie. Le tiers secteur de l’économie sociale et solidaire participe de l’invention de cette autre économie, une économie réencastrée dans le social, selon le souhait de Karl Polanyi. Bien entendu, le tiers secteur est enserré dans une économie elle-même principalement capitaliste. Mais il montre qu’entre l’administration bureaucratique de l’économie et la gestion capitaliste cherchant avant tout la rétribution de l’actionnaire, il y a une autre voie non seulement possible mais porteuse d’espoir.

Toutefois, la nouvelle économie comme la renaissance de la démocratie sont soumises à une condition: retrouver les vertus du citoyen. Ces vertus sont été mises à mal par l’idéologie du désir lié à un « capitalisme de la séduction » (Michel Clouscard), capitalisme qui s’est mis en place à partir des années 1970. C’est l’état d’esprit libéral-libertaire qui est en cause : il est  jouisseur, hédoniste, et il dévalorise le travail. Or, un métier n’est pas un « job ». C’est bien plus et bien mieux que cela. C’est l’état d’esprit libéral-libertaire qui est arrivé en bout de course.

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■ Guy Hermet, L’hiver de la démocratie ou le nouveau régime, Armand Colin, 2007.

Selon l’auteur, nous sommes au crépuscule d’une époque. Un populisme « people », une sorte de bougisme donne encore l’illusion qu’il se passe quelque chose.  Mais la démocratie s’est vidée de son contenu. La question est de savoir ce qui sortira de la métamorphose  en cours.

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■ Emmanuel Todd, Après la démocratie, Gallimard, 2008.

L’auteur dénonce le vide idéologique des grands partis, l’isolement de la classe dominante (l’hyperclasse) et ne voit comme solution pour refaire une démocratie qu’un protectionnisme à l’échelle européenne.

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■ Marcel Gauchet, L’avènement de la démocratie, Gallimard, 2007

Sur quatre tomes prévus, deux sont parus : “La Révolution moderne” (tome I) et “La crise du libéralisme” (tome II). Une enquête rigoureuse sur l’émergence de la forme politique démocratique en Occident.

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■ Michel Clouscard, Néo-fascisme et idéologie du désir, 1973 et rééd. Delga, 2007.

Le premier livre de critique de l’idéologie « libérale-libertaire ». Il sera suivi par beaucoup d’autres – notamment ceux d’Alain Soral - sur le même thème. Malgré le caractère un peu systématique de la critique, qui sous-estime sans doute les aspirations vraiment émancipatrices de Mai 68, l’auteur montre bien la formidable capacité du système marchand à récupérer les aspirations à « vivre mieux » pour les réduire à « consommer plus ».

lundi, 25 juillet 2022

Habermas: un exemple de démocratie utopiste et anti-démocratique

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Habermas: un exemple de démocratie utopiste et anti-démocratique

par l'équipe de Blocco Studentesco

Rédactrice: Elena

Source: https://www.bloccostudentesco.org/2022/07/14/bs-esempio-di-democrazia-utopistica-e-antidemocratica/

Il existe de nombreux types de démocraties et aucune d'entre elles ne parvient à exceller sur l'autre, aucune ne s'avère donc moins imparfaite que l'autre. L'idéal démocratique est une rengaine de l'époque contemporaine selon laquelle les gens croient qu'il s'agit du meilleur de tous les systèmes de gouvernement possibles, comme se pose l'univers leibnizien.

La démocratie aurait pour but et pour distinction d'être le système de gouvernement le plus inclusif, car elle permettrait à chaque citoyen d'avoir son mot à dire. Mais est-ce vraiment le cas ? Comme tant d'autres systèmes de gouvernement, la démocratie aussi cédera tôt ou tard la place à autre chose, mais d'ici là, nous pouvons nous réjouir de parler des nombreuses propositions avancées par les théoriciens de la morale qui sont des défenseurs de l'idéal démocratique.

Jürgen Habermas, membre allemand de l'École de Francfort, s'est engagé au 20ème siècle dans la défense de la démocratie, en particulier de la démocratie délibérative. Pour Habermas, alors que les libéraux sont trop attachés aux théories économiques et que les républicains favorisent l'émergence d'un certain communautarisme, la forme délibérative est la meilleure solution pour garantir la participation des citoyens à la vie politique.

Mais comment la démocratie délibérative fonctionne-t-elle pour Habermas ? L'idée centrale est de faire participer les citoyens dans toute la mesure du possible à la vie politique. Chaque citoyen devrait donc participer à des assemblées pour discuter des problèmes de toutes sortes dans le but d'atteindre la vérité (c'est-à-dire celle de la majorité, bien sûr, et, dès lors, quelqu'un, par suite, sera toujours exclu).

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Par l'action communicative, les interlocuteurs entrent en communication les uns avec les autres dans le but de parvenir à une compréhension (ou du moins à une compréhension mutuelle). La compréhension doit créer un consensus puis convaincre en évitant l'échec. Quel beau rêve ! Cet objectif ne peut être atteint que si tous les citoyens s'engagent à participer activement à la vie politique, à proposer et à débattre, à abroger et à promouvoir.

Comme il est clair, les acteurs sociaux de cette communauté imaginaire auront tendance à poursuivre leurs propres objectifs personnels et non le bien et la santé de la communauté, ils s'accorderont et se dissoudront donc en fonction de la réalisation de leurs objectifs. Nous ne pouvons pas supposer que la communauté entière accepte éthiquement son rôle social actif dans une assemblée, car nous oublierions alors complètement la subjectivité humaine qui porte en elle l'instinct de conservation et d'autodétermination. Ce faisant, nous démontons de fait la thèse que le but d'une délibération est le bien commun. En amont encore, nous pouvons objecter que l'on ne peut pas contraindre l'ensemble des citoyens à une participation politique par des moyens "démocratiques".

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Aujourd'hui, de nombreuses objections peuvent être soulevées à l'encontre de Habermas. L'une d'entre ces objections est certainement liée aux médias de masse, objection déjà connue de l'auteur (et manifestement ignorée dans ses démonstrations). Une personne qui apparaît fréquemment dans les médias a une influence sur les individus et cela ne peut que déplacer l'attention des masses qui ne seront donc pas entièrement elles-mêmes lorsqu'il s'agira de choisir de promouvoir ou non une proposition politique.

En substance, chers amis démocrates, du haut de votre piédestal, essayez de voir au-delà du banc de brouillard que vous avez construit en dessous. Les libertés ne sont pas des slogans.

samedi, 23 juillet 2022

Il n'a jamais été question de démocratie contre autocratie

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Il n'a jamais été question de démocratie contre autocratie

par Emanuel Pietrobon

Source : Emanuel Pietrobon & https://www.ariannaeditrice.it/articoli/non-e-mai-stata-una-questione-di-democrazia-contro-autocrazia

La ligne de Biden qui évoque la dualité "démocraties contre autocraties" avait peu d'espoir de succès au départ, chiffres en main, mais elle a été sabordée une fois pour toutes par la guerre en Ukraine.

Un coup porté à l'image de Biden, et à celle de son parti, dont on pourra mesurer les dégâts à la mi-mandat.

Mais voyons pourquoi la bataille de Biden avait peu de sens avant les opérations russes en Ukraine et encore moins maintenant.

Selon l'indice de démocratie de 2021 (Democracy Index 21 - DI21), il n'y a que 21 démocraties accomplies dans le monde. 21! Et les Etats-Unis ne font même pas partie de cette catégorie, ayant été placés par DI21 parmi les "démocraties imparfaites", qui ne sont pas moins de 53.

Et le reste du monde ? Divisé entre les régimes hybrides (34) et les régimes autoritaires (59). Dont le nombre est en baisse, car DI21 n'a pas pu calculer la nature démocratique de réalités étatiques ou semi-étatiques telles que le Sahara occidental, la Somalie, le Sud-Soudan, etc.

21 États contre 93. Ou 74 contre 93. Mais peut-on considérer les démocraties imparfaites (comme la Serbie, la Hongrie, les Philippines, etc.) comme des alliées des démocraties "pures" ? Question de perspectives.

Mais ce n'est pas (seulement) sur une question de chiffres que Biden a perdu cette bataille, lancée seulement l'année dernière avec le Sommet pour la démocratie et déjà née en voie d'obsolescence. C'est à cause d'un manque de sens de la réalité.

Les démocraties seules ne peuvent rien faire, ni combattre qui que ce soit. En partie parce que, qu'on le veuille ou non, l'histoire a montré que la démocratie n'est pas un système exportable. Un peu parce que les démocraties, pour amortir le choc de la guerre en Ukraine, ont été obligées d'ouvrir grand les bras aux régimes hybrides et autoritaires, qui, comme par hasard, sont riches en ressources qui nous sont utiles pour maintenir notre train de vie élevé : gaz, pétrole, terres rares, métaux, etc.

On pense à Mario Draghi, qui a traité Erdogan de dictateur l'année dernière et qui s'est rendu aujourd'hui à Ankara pour présenter des excuses informelles, chapeau à la main.

Pensez à la Suède et à la Finlande, modèles pour toute démocratie libérale, qui ont dû faire un compromis éthique avec la Turquie en échange de la levée du veto sur leur entrée dans l'OTAN.

Pensez aux États-Unis eux-mêmes, où Biden avait promis qu'il ferait de l'Arabie saoudite un paria dans les relations internationales et s'y est maintenant rendu, également comme un fils prodigue en quête de pardon et de rédemption, pour demander un soutien dans la lutte contre l'énergie chère. Sans parler du Venezuela : un changement de régime sacrifié sur l'autel de la Realpolitik.

La bataille entre les démocraties et les autocraties est perdue, elle n'a jamais eu la moindre chance, mais cela ne signifie pas qu'elle sera abandonnée.

La "guerre économique" contre la Russie, par exemple, est motivée par des raisons éthico-morales : les gens désinvestissent et quittent le marché russe à cause de l'agression contre l'Ukraine.

Et l'autre guerre froide, avec la Chine, a aussi un côté éthique-moral assez prononcé : le désinvestissement se fait à cause des conditions de vie imposées aux Ouïghours, mais aussi aux Tibétains et aux Hongkongais.

Tout cela pour faire passer un message : ne cédez jamais à la tentation de ce que le pape François a appelé le "format du petit chaperon rouge". Car, très souvent, le loup se déguise en agneau et crie ensuite au loup. Et beaucoup mordent à l'hameçon.

Il n'a jamais été question de démocratie contre autocratie, mais de moment unipolaire contre transition multipolaire.

mardi, 25 janvier 2022

Le discours dogmatique américain sur la démocratie et la pratique démocratique de la Chine

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Le discours dogmatique américain sur la démocratie et la pratique démocratique de la Chine

Elif İlhamoğlu*

Ex: http://www.elespiadigital.com/index.php/noticias/politica/36311-2021-12-24-15-56-00

The Atlantic, un site d'information et d'analyse bien connu aux États-Unis, a publié un article de fond la semaine dernière. La phrase mise en exergue dans l'article de synthèse d'Anne Applebaum intitulé "Les méchants gagnent" résume parfaitement le problème : "Si le XXe siècle a été l'histoire d'une progression lente et inégale vers la victoire de la démocratie libérale sur d'autres idéologies - communisme, fascisme, nationalisme virulent -, le XXIe siècle est, jusqu'à présent, une histoire inverse" (1). Ces observations et d'autres semblables sont devenues monnaie courante dans les médias et les groupes de réflexion occidentaux. On peut les lire dans les médias presque chaque semaine, voire chaque jour.

Il ne fait aucun doute qu'il y a une intention derrière ces publications. En effet, la stratégie actuelle de l'administration américaine est basée sur l'objectif de polariser le monde sous couvert d'un "discours démocratique". Par conséquent, il y a d'un côté les États-Unis et leurs alliés, qui appliquent la démocratie de style occidental, et de l'autre, les États qui ne se conforment pas à ces normes et qui sont classés comme rivaux ou adversaires. Le président américain Joe Biden, qui a ouvertement exprimé cette stratégie depuis son entrée en fonction, a prononcé les mots suivants en juin de cette année : "Les démocraties occidentales sont dans une course pour concurrencer les gouvernements autocratiques" (2).

Démocratie occidentale dogmatique

L'essence de cette stratégie repose sur la création d'un climat de peur et d'une image (négative) de l'ennemi. À cette fin, les discours sont créés à partir d'un point de vue dogmatique. Le dogme central est que "la bonne administration de l'État n'est possible que dans les démocraties de type occidental" ! Il s'agit d'une tentative de monopoliser le concept de "démocratie", que les États-Unis imposent selon leurs propres critères. Les États-Unis déterminent si un pays est démocratique ou non. Naturellement, cela a conduit à une polarisation mondiale, la Chine étant positionnée comme le principal adversaire ; sans parler du recours fréquent à la désinformation dans la poursuite de cette politique.

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Le dernier livre de Kishore Mahbubani (photo, ci-dessus), ancien bureaucrate singapourien et professeur bien connu et respecté en Occident, fait l'objet de nombreuses discussions depuis des mois. Connaissant bien l'Occident et l'Asie, Mahbubani a interprété le point de vue dogmatique américain dans son livre Has China Won ? de manière surprenante : "Est-il sage de croire qu'il existe une voie unique que toutes les sociétés doivent suivre si elles veulent croître et progresser ? Sommes-nous en train de prendre un nouveau tournant dans l'histoire de l'humanité où des modèles alternatifs de développement social et économique émergent ? ... Les penseurs et les intellectuels publics américains sont particulièrement fermés lorsqu'il s'agit de saisir et de comprendre la Chine. Lorsqu'il s'agit d'analyser les systèmes politiques, les analystes américains ont tendance à adopter une vision du monde en noir et blanc : société ouverte ou fermée, société démocratique ou totalitaire, libérale ou autoritaire. Pourtant, alors même que nous nous éloignons d'une odieuse domination occidentale de deux cents ans sur l'histoire du monde, nous nous éloignons également d'un monde en noir et blanc" (3).

Le droit de l'homme le plus vital

En quelques points simples, il est possible de rejeter le postulat américain selon lequel "la Chine n'est pas démocratique". Premièrement, le peuple chinois est à l'avant-garde des sociétés dont le niveau de bien-être croît le plus rapidement aujourd'hui. Dans la lutte contre la pauvreté et le progrès économique, des réalisations historiques ont été accomplies. En Chine, aucune personne ne vit dans la pauvreté absolue depuis 2020. 100 millions de personnes ont été sorties de la pauvreté au cours des huit dernières années, et plus de 700 millions de personnes ont été sorties de la pauvreté au cours des 40 dernières années. L'espérance de vie moyenne a augmenté (de 44 ans en 1960, elle approche aujourd'hui les 80 ans), l'accès à l'éducation s'est accru et les taux de malnutrition ont diminué. La Chine est devenue le premier pays au monde à éradiquer la pauvreté absolue. La réduction de la pauvreté est l'un des principaux objectifs de l'Agenda 2030 des Nations unies pour le développement durable.

En Chine, le revenu disponible (annuel) par habitant est passé de 98 yuans en 1956 à 171 yuans en 1978 et à 28.228 yuans l'année dernière. Cela représente une croissance annuelle de 6,1 %. Grâce à toutes ces avancées économiques, la Chine a connu le plus grand enrichissement de son histoire et possède aujourd'hui la plus grande classe moyenne du monde. Selon une étude de McKinsey, en 2000, seulement 4 % de la population urbaine chinoise faisait partie de la classe moyenne, mais en 2012, ce pourcentage était passé à 68 % (4). Il convient de noter, à titre de contraste intéressant, que si l'on considère la moitié à faible revenu de la société, les États-Unis sont le seul pays industrialisé dont le revenu moyen a diminué au cours des 30 dernières années.

Comme le stipule la Déclaration universelle des droits de l'homme des Nations unies, toute personne a droit à la sécurité sociale, au travail, à la protection contre le chômage, à une rémunération équitable lui assurant une existence conforme à la dignité humaine, au logement, à la santé et à l'éducation (articles 22 à 26). C'est le devoir premier et fondamental de tout État qui se veut démocratique.

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Liberté économique et créativité

Alors que le nombre de touristes chinois voyageant à l'étranger était d'environ 5 millions en 1995, ce nombre a atteint 169 millions en 2019 (5). Ces données indiquent sans équivoque que les revenus de la population chinoise ont augmenté. Plus important encore, chacun de ces 169 millions de touristes chinois est rentré chez lui. Ils ont choisi de ne pas s'installer ou de ne pas chercher refuge dans les pays occidentaux où ils se sont rendus. Ils ne seraient pas retournés en Chine s'ils vivaient sous une pression extrême et s'ils étaient privés de liberté dans leur propre pays, comme cela a été dit. Parallèlement, il convient de noter que 145 millions de touristes étrangers ont visité la Chine la même année. L'enseignement supérieur présente une autre statistique intéressante. Lorsque l'on regarde les chiffres de 2011, seulement la moitié des Chinois ayant étudié à l'étranger sont rentrés chez eux, aujourd'hui ce taux a dépassé les 80%.

D'autre part, certaines données sur la vie des entreprises sont également indicatives. Selon les données de l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI), la Chine s'est classée première dans la liste des pays ayant le plus grand nombre de demandes de brevets en 2020. Alors que la Chine compte 68.720 demandes en 2020, les États-Unis en comptent 60.000 (6). Créer une entreprise et faire des affaires est devenu plus facile en Chine, surtout ces dernières années. Un important rapport publié par la Banque mondiale en 2019 pointe du doigt les facilités accordées notamment aux petites et moyennes entreprises (7). Ces données et d'autres semblables montrent la vitalité de la société chinoise et le haut niveau de créativité individuelle. Une personne qui ne se sent pas libre et ne voit pas la possibilité de prendre des décisions indépendantes prend-elle des risques économiques ou commerciaux ?

Le soutien de la population au gouvernement

Les résultats de l'enquête, qui reposent sur des entretiens en face à face avec plus de 31.000 personnes issues de zones urbaines et rurales en Chine entre 2003 et 2016 et qui examinent la perception qu'ont les Chinois du Parti communiste chinois et de l'État, ont été publiés en 2020. Alors que 86,1 % des Chinois se déclaraient satisfaits du PCC et du gouvernement en 2003, date du début de l'étude, ce taux a atteint un niveau record de 93,1 % au cours de la dernière année de l'étude. L'enquête, préparée par le Ash Center for Democratic Governance and Innovation de la Harvard Kennedy School, révèle que les citoyens chinois considèrent que les cadres du PCC et le gouvernement sont plus compétents et plus influents que jamais sur de nombreuses questions (8).

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Selon le Pew Research Center, 85 % des Chinois en 2013 étaient satisfaits de leur gouvernement, alors que seulement 35 % des Américains avaient le même sentiment à son égard. En mai 2020, une enquête de l'Université de Californie a révélé que 88 % des Chinois préféraient le système politique de leur pays. Selon le rapport Edelman Global Trust Barometer, le taux de confiance du public dans le gouvernement chinois était de 84 % en 2018, 86 % en 2019 et 90 % en 2020. Au cours de la même période, la confiance des Américains dans le gouvernement américain a oscillé entre 37% et 40%. Ces enquêtes sont menées par des organisations occidentales.

Mécanismes de prise de décision

"En Chine, le système de gouvernement est composé de congrès du peuple à tous les niveaux : des villages aux régions et des régions au gouvernement national. Les plus petites unités de gouvernement sont les comités de village dans les zones rurales et les comités de quartier dans les villes. Pour être candidat à ces comités, il n'est pas nécessaire d'être membre du CPC. L'élection des comités de village et de quartier se fait au scrutin secret avec vote ouvert. L'organe de gouvernement suprême est le Congrès du peuple. Il n'est pas nécessaire d'être membre d'un parti pour être élu. Le Congrès du peuple se tient au moins deux fois par an. L'autorité gouvernementale est assumée par un "comité permanent" élu au Congrès du peuple. Les présidents des collectivités locales sont nommés par le comité permanent et approuvés par le Congrès du peuple (9).

Dans la structure administrative de la Chine, les plus hautes autorités législatives et consultatives du pays jouent un rôle crucial. Le plus haut organe consultatif politique de la Chine, la Conférence consultative politique du peuple chinois (CCPPC), se compose de 2158 membres issus de divers segments de la société. Ces membres soumettent des propositions sur diverses questions et celles qui sont approuvées sont transmises aux services gouvernementaux. La CCPPC n'a pas de pouvoir législatif, mais son influence sur la politique chinoise est croissante. Avec l'amendement constitutionnel de mars 2019, la CCPPC a reçu le pouvoir de préparer des projets de loi. Le rôle de la CCPPC peut se résumer à mettre les préoccupations et les attentes des citoyens ordinaires à l'ordre du jour du gouvernement.

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Le Congrès national du peuple (CNP), l'organe législatif suprême de la Chine, est chargé de réglementer les lois. Il nomme les principaux fonctionnaires de l'État et les responsables des unités administratives. Le CNP est composé de 2980 délégués, dont 742 sont des femmes et 468 des ouvriers et des agriculteurs. Les représentants de l'APN, l'organe législatif suprême de la Chine, sont composés de représentants élus des provinces, des régions autonomes, des villes centrales et de l'armée. Les membres de la CPPCC sont élus par les partis politiques et les indépendants. D'autre part, il existe un mécanisme appelé "mécanisme des deux sessions", un terme qui désigne les réunions annuelles des principaux organes législatifs et consultatifs de la Chine.

Conclusion

Chaque système a ses propres avantages et inconvénients, qui peuvent être discutés. Toutefois, le débat doit se poursuivre à l'aide de données scientifiques et réelles. Dire qu'il n'existe pas d'administration démocratique en Chine, que les élections ne sont pas organisées, que les processus de négociation politique ne sont pas mis en œuvre et que les gens ne disposent pas de libertés individuelles peut être dû à l'ignorance ou aux préjugés. Les intellectuels et les hommes politiques occidentaux devraient accepter que la "démocratie de style occidental" n'est pas la seule option correcte pour les sociétés du monde.

En conséquence, la société chinoise contemporaine est plus vivante et dynamique que jamais. Laissons le dernier mot à Kishore Mahbubani. Dans son ouvrage le plus récent, Mahbubani, un intellectuel qui connaît bien toutes les géographies du monde, a fourni l'évaluation succincte suivante de la nature des sociétés, en particulier de la Chine d'aujourd'hui : "En fin de compte, une société ne peut prospérer que lorsque les gens sentent qu'ils ont suffisamment de liberté pour poursuivre leurs rêves personnels" (10).

Notes:

1 https://www.theatlantic.com/magazine/archive/2021/12/the-autocrats-are-winning/620526/

2 https://www.reuters.com/world/biden-democratic-nations-race-compete-with-autocratic-governments-2021-06-13/

3 Mahbubani Kishore, La Chine a-t-elle gagné ? China's challenge to US primacy, Public Affairs, 2020, art. 172-173.

4 https://www.mckinsey.com/industries/retail/our-insights/mapping-chinas-middle-class

5 https://www.statista.com/estadísticas/277250/número-de-viajes-de-turistas-chinos/

6 https://www.reuters.com/article/us-un-patents-idUSKCN2AU0TM

7 https://www.worldbank.org/en/news/press-release/2018/10/31/doing-business-report-china-carries-out-record-business-reforms-edges-into-top-50 -économies

8 https://ash.harvard.edu/publications/understanding-ccp-resilience-surveying-chinese-public-opinion-through-time

9 https://unitedworldint.com/9600-democrat-elements-of-the-chinese-system/

10 Mahbubani Kishore, La Chine a-t-elle gagné ? China's challenge to US primacy, Public Affairs, 2020, art. 166.

*Elif İlhamoğlu est politologue et journaliste (Turquie). Il prépare un doctorat au département des sciences politiques et des relations internationales de l'université d'Istanbul (études du Moyen-Orient). Il s'est rendu à plusieurs reprises dans les pays du Moyen-Orient, en Syrie, au Liban et en Iran, et a réalisé des entretiens avec des dirigeants tels que Mahmoud Ahmadinejad, Hilal al-Hilal, secrétaire général du parti Ba'ath syrien.

Source : https://uwidata.com/22182-us-dogmatic-discourse-of-democracy-and-chinas-democratic-practice/

11:03 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : politique internationale, démocratie, états-unis, chine | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

dimanche, 27 juin 2021

Une démocratie mal entendue, la ruine du peuple (Ernest Renan)

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Une démocratie mal entendue, la ruine du peuple (Ernest Renan)

 
Dans cette vidéo, nous nous intéressons à un auteur fameux, plus souvent cité que lu de nos jours : Ernest Renan et son livre fondamental, "la Réforme intellectuelle et morale". Ce livre, capital, fut écrit à la suite de la défaite française de 1870 et l'auteur s'interroge sur les causes de la faiblesse de la France. Contrairement à ce qu'on pourrait croire, ce texte, loin d'être dépassé, est plus actuel que jamais : les mêmes causes engendrent les mêmes effets.
 
 
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Musiques utilisées dans la vidéo :
- Felix Mendelssohn : Les Hébrides, ouverture
- Gabriel Fauré : Pavane, Op. 50
- Franz Schubert : Trio op. 100
- Andante con moto
 
Pour vous procurer le livre d'Henri Levavasseur : https://nouvelle-librairie.com/boutiq...

dimanche, 06 juin 2021

Il n'y a pas de démocraties ni d'autocraties, seulement des gouvernements

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Il n'y a pas de démocraties ni d'autocraties, seulement des gouvernements

Andrew Korybko

Ex : http://oneworld.press/?module=articles&action=view&am...

La division du monde en "démocraties" et en "autocraties" est un reflet inexact de la réalité. Il n'y a que des gouvernements, et chacun d'entre eux comporte des éléments de ces deux catégories, bien qu'à des degrés divers selon les particularités du modèle national effectivement en vigueur.

Le président américain Joe Biden a déclaré aux membres des services américains à la fin du mois dernier que "nous sommes dans une bataille entre les démocraties et les autocraties". Il a également exploité ses nombreux contacts personnels avec le président chinois Xi Jinping pour se présenter comme une autorité pour juger la vision globale du dirigeant chinois. Biden a faussement affirmé que le président Xi "croit fermement que la Chine, avant les années 2030, 2035, va posséder l'Amérique parce que les autocraties peuvent prendre des décisions rapides". Bien qu'il ne s'agisse que de détails très mineurs dans un discours beaucoup plus vaste, ils méritent un examen plus approfondi car ils révèlent beaucoup de choses sur les conceptions géostratégiques contemporaines de l'Amérique.

La direction du pays, aujourd’hui dirigée par les Démocrates, est ouvertement idéologique et considère que le monde est divisé entre "démocraties et autocraties", les États-Unis et la Chine étant respectivement à la tête de l’un de ces camps. Le but de cette vision est d'établir la base idéologique et structurelle d'une nouvelle guerre froide. Elle sert également de prétexte aux États-Unis pour faire pression sur les pays qui ne cèdent pas leurs intérêts souverains à l'Amérique, sous prétexte qu'il s'agit d'"autocraties" qui ont donc vraisemblablement besoin d'une "démocratie" (généralement violente) soutenue par les États-Unis. En d'autres termes, ce n'est rien de plus que de la rhétorique pour dissimuler des objectifs de politique étrangère intéressés.

La raison pour laquelle il s'agit d'une telle ruse est qu'il n'existe plus vraiment de démocraties ou d'autocraties bien définies, mais seulement des gouvernements. En théorie, la démocratie dans sa forme la plus pure et la plus classique n'existe au niveau national dans aucun pays. Il n'est pas pratique pour les citoyens d'avoir la possibilité de voter sur chaque décision prise à chaque niveau de leur gouvernement, d'où la nécessité de ce que l'on appelle la démocratie représentative. Mais même ce système est imparfait car il n'y a pas grand-chose à faire avant le prochain tour des élections pour retenir les politiciens responsables s'ils mentent au peuple pendant leur campagne.

Une autre critique que l'on peut formuler à l'encontre du concept de démocratie est que les bureaucraties permanentes axées sur la sécurité nationale, telles que l'armée, les services de renseignement et la diplomatie, ne peuvent pas être démocratiques de manière réaliste compte tenu de leurs missions, même si leurs décisions ont un impact sur tous les autres habitants du pays et parfois même au-delà. Le concept de démocratie lui-même a plutôt été exploité à des fins de gestion de la perception pour pouvoir contrôler le plus grand nombre de personnes, que ce soit pour le meilleur ou pour le pire, en fonction du contexte national particulier dont question et aussi en fonction de leur vision idéale de la société.

Quant aux autocraties, ce terme a également été déformé au-delà de son sens premier. Il n'existe aucun pays au monde où un seul individu exerce le pouvoir suprême. C'est tout simplement impossible. Aucun être humain ne peut prendre toutes les décisions nécessaires au quotidien pour faire fonctionner un pays. Il existe cependant un leadership centralisé et décisif, qui est plus courant dans les systèmes politiques non occidentaux que dans les systèmes occidentaux (dits "démocratiques"), mais même ces derniers confèrent parfois légalement de larges pouvoirs à certaines personnalités, comme la Constitution américaine le fait pour le président. La présence ou l'absence de ces droits est simplement une différence entre les systèmes politiques.

Les soi-disant autocraties délèguent les responsabilités à l'ensemble de la société, mais parfois pas de manière électorale mais méritocratique. Il n'y a rien de mal à cela non plus, c'est simplement une autre différence entre la façon dont certains pays sont gérés. Néanmoins, les États-Unis ont tendance à mépriser ces systèmes parce qu'ils sont plus difficiles à manipuler de l'extérieur par des moyens politiques tels que l'ingérence dans les élections et les mouvements de protestation armés. Il semble également que ces types de systèmes soient dirigés par des dirigeants et/ou des partis qui accordent plus d'importance à la souveraineté nationale et au bien-être de leur peuple qu'au profit des sociétés transnationales.

La division du monde en "démocraties" et "autocraties" est donc un reflet inexact de la réalité. Il n'y a que des gouvernements, et chacun d'entre eux comporte des éléments relevant de ces deux catégories, bien qu'à des degrés divers selon les particularités du modèle national effectivement en vigueur. Tenter d'établir une hiérarchie des systèmes de gouvernement est une tâche intrinsèquement subjective et sujette aux préjugés, exactement comme le serait l'établissement d'une hiérarchie des ethnies. Au lieu d'être obsédé par les différences de certains gouvernements, tout le monde devrait accepter leur diversité, tout comme on devrait le faire pour les nombreuses ethnies du monde.

Par Andrew Korybko

jeudi, 20 mai 2021

La démocratie comme mystique impériale

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La démocratie comme mystique impériale

Petru Romosan

Ex : https://flux.md/

La démocratie telle que nous la connaissons dans les principaux pays de cette tradition (Royaume-Uni, France, États-Unis) est imparfaite, car rien d'humain n'est parfait, la perfection n'appartient qu'à Dieu. Il y a aussi la célèbre phrase de Winston Churchill, citée par tous - "la démocratie est la pire forme de gouvernement, à l'exception de toutes les autres" - que nous avons tendance à considérer comme une vérité absolue. Il est vrai que Winston Churchill et la Grande-Bretagne, ainsi que (surtout) I.V. Staline et l'URSS, et F.D. Roosevelt et l'Amérique, ont battu Adolf Hitler et fait tomber l'Allemagne nazie. Mais ce fait est encore loin de faire du rejeton des ducs de Marlborough une sorte de député de Dieu qui produit des vérités inattaquables.

Churchill a prononcé la célèbre phrase devant la Chambre des communes le 11 novembre 1947, mais il citait alors un prédécesseur non identifié. Voyons le contexte plus large: "De nombreuses formes de gouvernement ont été essayées, et seront essayées dans ce monde de péché et de malheur. Personne ne prétend que la démocratie est parfaite ou omnisciente. En effet, il a été dit que la démocratie est la pire forme de gouvernement, à l'exception de toutes les autres formes qui ont été essayées de temps à autre...". Personne ne prétend que la démocratie est parfaite ou infaillible. Il a été dit, en effet, que la démocratie est la pire forme de gouvernement, à l'exception de toutes les autres formes qui ont été essayées de temps à autre..." - extrait du volume d'aphorismes Churchill by Himself, PublicAffairs, 2011).

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Alors, la démocratie est-elle imparfaite, comme l'oligarchie ou comme la dictature et la tyrannie, ou est-elle juste un peu imparfaite, contrairement aux autres formes de gouvernement, qui sont absolument imparfaites? Une chose que personne n'a clarifiée jusqu'à aujourd'hui. Des États-Unis de Joe Biden à la France d'Emmanuel Macron en passant par la Roumanie de Klaus Iohannis, la démocratie apparaît de plus en plus dépourvue de contenu, ne reposant que sur des formes vides (élections, vote), qui ne peuvent évidemment pas contenir de contenu. Une vraie forme sans substance, pour rappeler Titu Maiorescu. La démocratie s'est transformée, lentement mais sûrement, par l'intelligence et la perfidie du peuple, en son contraire, l'oligarchie.

Car derrière les "élus", il y a les "électeurs", il y a la presse mainstream, payée et contrôlée, les services secrets ou l'État profond (aux services secrets s'ajoutent les hauts fonctionnaires inamovibles) et surtout les oligarques, les grandes fortunes. Les décisions des oligarques à huis clos annulent et ridiculisent le vote populaire. Et la démocratie n'est plus "le gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple", comme l'appelait Abraham Lincoln dans son discours de Gettysburg du 19 novembre 1863. Les élus ne sont que les marionnettes du grand capital accumulé, légalisé et inattaquable. Et, bien sûr, les "représentants" du peuple satisfont en même temps, par le trafic d'influence et la trahison du vote, leurs intérêts mesquins et privés, ce qu'on appelle communément la "corruption".

La remise en cause de l'organisation de la vie publique, de la politique, de la démocratie vient de partout, notamment après les élections de 2020 aux USA, et revêt même souvent des aspects techniques. "Un autre résultat (des changements nécessaires - n.n.) devrait être qu'il met fin aux efforts visant à bloquer une véritable réforme du vote aux États-Unis. Cela devrait signifier qu'il y aura toujours plus de machines à voter informatisées de mauvaise qualité comme les systèmes Dominion et Smartmatic que les lobbyistes ont vendus dans 28 États, souvent en versant un généreux pot-de-vin [...]. Rien ne décidera si seuls des imbéciles et des crapules brigueront les hautes fonctions dans ce pays, mais au moins, ils pourront être élus équitablement" (James Howard Kunstler - Don't look now, kunstler.com, 26.04.2021).

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Mais la décadence et la misère de la démocratie, ces derniers temps, sont sans fin. Il n'est pas du tout clair, bien qu'il soit facile de le comprendre, comment presque tous les politiciens, presque tous les représentants du peuple et, avec eux, la plupart des fonctionnaires publics sont des gens sans travail, des gens sans loi et des gens sans Dieu. Il devrait pourtant être facile de comprendre que les oligarques et leurs sbires aux États-Unis, en France et en Roumanie ne peuvent choisir leurs marionnettes politiques et leurs hauts fonctionnaires que parmi des personnes sans convictions fortes, habituées à enfreindre la loi, que l'on peut faire chanter avec leurs propres dossiers, des personnes ayant une formation médiocre, ce qui les rend peu compétitives sur le vrai marché du travail.

Le manque de cohérence et de responsabilité du vote "démocratique" qui nous donne les représentants du peuple ne s'arrête pas aux élus. Ceux qui choisissent ou prétendent choisir devraient également être interrogés. N'oublions pas non plus les "absents", car l'absentéisme est en hausse dans le monde entier. Si les élus ne respectent pas leurs programmes, les promesses faites pendant la campagne, ils ne sont pas sanctionnés d'une quelconque manière. Ils ne seront sanctionnés que "politiquement". Ce qui, bien sûr, n'est qu'une mauvaise blague. C'est un moyen de faire sortir les escrocs par la porte arrière pour faire de la place à d'autres escrocs. Et depuis le haut. Et les "électeurs", les citoyens, se réconcilient facilement avec cette comédie burlesque et passent à l'élection suivante sans trop de mal de tête ni de souvenirs.

Mais les suggestions pour "réparer" la démocratie viennent aussi d'un peu partout. "Je pense que les hommes politiques doivent assumer l'entière responsabilité de leurs paroles comme de leurs actes, et que cette responsabilité doit être mise en œuvre par le biais du droit administratif et pénal. Les politiciens doivent assumer la responsabilité personnelle et matérielle de toutes les promesses qu'ils font pendant la campagne, et le non-respect de ces promesses devrait être assimilé à une rupture de contrat et à une négligence criminelle. [...] Je trouve déraisonnable d'espérer qu'un électorat irresponsable et incompétent puisse élire des hommes politiques responsables et compétents" (Dmitry Orlov - "Mon credo politique", cluborlov.blogspot.com, 8.05.2021).

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Mais le système dit "démocratique" est encore plus pervers. Le vote est secret (avec toute une cérémonie d'isolement des électeurs), et le secret sera généralement gardé pendant toute la durée du mandat du mauvais élu. Pourquoi le vote n'est-il pas public, ouvert et avec une responsabilité publique pour votre choix ? Pourquoi la personne qui a mal voté, de manière intéressée ( ?), pour un candidat minable n'est-elle pas prise à partie, éventuellement avec une responsabilité concrète ? Et les journalistes, sociologues et autres flagorneurs qui ont aboyé pendant tout un mandat pour leur favori (on se souvient des "intellectuels de Băsescu" - aussi appelés "steakers de Băsescu" - de Evenimentul zilei, Cotidianul ou Revista 22 de l'époque), déversant mensonges et sophismes, attaques contre les opposants, etc..., ils n'ont aucune responsabilité? Peuvent-ils recommencer avec le prochain "élu" Klaus Iohannis, par exemple?

La démocratie, telle qu'elle est pratiquée depuis la Seconde Guerre mondiale en Europe occidentale sous l'influence américaine, s'apparente davantage à une narcose, et ressemble beaucoup à la religion, voire au dogmatisme. De l'autre côté du rideau de fer se trouvait la "démocratie populaire", le pouvoir du parti unique. Les États-Unis ont construit leur vaste empire et, après 1989, l'ont étendu à l'Europe de l'Est, exportant avant tout la "démocratie", un produit véritablement mystique. Jusqu'aux récentes élections américaines de 2020, disputées entre Donald Trump-Joe Biden, avec leurs machines "volantes" (Dominion, Scytle, Smartmatic, Hammer, Scorecard...), le concept de démocratie avait une force religieuse. Vous ne pouviez pas exprimer le moindre doute car vous étiez automatiquement mis hors jeu, qualifié de "communiste", de "sécuritariste", d'"amoureux de la dictature". Ce n'est qu'en 2020 que l'on a découvert que des machines à voter ont été utilisées dans d'autres élections, dans d'autres pays. La Roumanie a été citée (sur la carte Scytle), et récemment l'élection de Macron en 2017 en France est remise en question.

L'invention des "machines à voter", "soft", a été liée au 11 septembre 2001, à l'attaque des tours jumelles, date à laquelle le 20e siècle s'est achevé et la fin de la démocratie en Occident a commencé. Mais n'oublions pas que d'autres méthodes de truquage des votes, d'intoxication primitive de l'électorat (avec des sondages, avec des talk-shows, avec des interviews, avec de l'argent...), surtout des moins ou pas du tout préparés, sont utilisées depuis les âges sombres et l'illusion démocratique. Comme Ion Iliescu a été élu plusieurs fois après 1989 en Roumanie. Mais une enquête sérieuse donnerait des résultats surprenants, même dans les grandes maisons des démocraties occidentales.

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La démocratie ne peut pas être parfaite parce qu'elle est faite par des hommes, mais que faire si la merveilleuse démocratie n'existe plus depuis un certain temps, plus du tout? Ou, pire, est-elle devenue le contraire de ce qu'elle prétend être - une oligarchie? Sparte se réclame d'Athènes, et Athènes est devenue, loin s'en faut, la Sparte oligarchique. Ou, pour en venir à notre époque, les États-Unis imitent à la lettre la Chine, avec son parti unique. Le parti démocrate de Joe Biden, Hillary Clinton, Nancy Pelosi, Kamala Harris est incapable d'accepter l'existence de deux partis et vise à mettre hors la loi le parti républicain.

Quelqu'un croira-t-il à l'avenir à la démocratie comme il l'a fait au cours des 70 dernières années? Si l'on dit qu'un poète est un homme qui a oublié tous ses métiers, nous constatons que les politiciens démocratiques d'aujourd'hui, souvent décrits comme des "professionnels", sont généralement des personnes qui n'ont jamais eu de métier. Que mettra-t-on à la place de la démocratie qui s'est vidée de son sens, de son contenu ? Les cinquante prochaines années apporteront inévitablement plusieurs réponses: démocratie participative (comme en Suisse), technocratie (Union européenne), autocratie (comme en Russie), dictatures ou tyrannies, militaires ou civils ?

Le débat sur la démocratie ne peut être achevé en quelques pages. Il faut voir comment les empires britannique, français et américain, qui pratiquaient la démocratie réelle dans la métropole, la revendiquaient aussi avec propagande dans leurs colonies, imposant en fait leurs satrapes, leurs affidés locaux. La démocratie est-elle un luxe que seuls les empires peuvent se permettre ? Et, bien sûr, seulement au centre ? Mais il y a aussi le mystère de l'Inde, la plus grande démocratie de ces 70 dernières années, née seulement après que les Indiens aient chassé les impérialistes britanniques. Les prétentions tragi-comiques des Etats-Unis à faire de la démocratie avec l'armée, avec la guerre, comme en Irak ou en Afghanistan, par exemple, ont déjà été largement analysées. Y a-t-il une démocratie en Roumanie aujourd'hui ? Grand serait l’homme qui parviendrait à donner la bonne réponse et à l'argumenter !

Petru Romoșan.

mardi, 16 mars 2021

Démocratie et coups d'Etat

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Démocratie et coups d'Etat

Dominus Wernerius von Lothringen

Magister in artibus

Rester dans la légalité?

La conquête de la majorité au Parlement est le but stratégique du Coup d’État légal en Occident. En effet le pouvoir législatif, où se forme la volonté populaire est le seul lieu où s'incarne la liberté d'une nation et prend forme un débat constitutionnel. C'est la seule institution où la liberté est en jeu et peut être mise en péril.

C'est pourquoi la conquête du Parlement accorde la sanction de la légalité au pouvoir, majoritaire ou séditieux, qui n'avait été jusqu'ici qu'exclusivement légitime. Or la légalité de cette majorité est instrumentale, car la vulnérabilité des Parlements repose sur l'illusion de défendre l’État par la seule liberté, vue cependant avec les yeux des partis. Erreur très grave, puisque le Parlement a besoin de la complicité du détenteur de la Souveraineté, le Chef de l’État, pour décider, gouverner et régner. Le Chef de l’État italien, Sergio Mattarella, Imperator et Deus ex Machina de la structure constitutionnelle a montré d'être l'ultime recours de la légitimité des partis, divisés et querelleurs et, au lieu de dissoudre le Parlement, obsolète, et de faire appel au suffrage, repoussé plus loin, a ouvert la voie à un garant du salut public, Mario Draghi, Prince inattendu et nouveau premier Consul de la république romaine. L'investiture d'en haut, légale, a remplacé celle d'en bas, légitime. Du point de vue comparatif, ce même Coup d’État a comporté en Amérique le blocage de l'appareil fédéral, la violence d'une intervention séditieuse et la mise au ban du Chef catilinaire suprême, le Président Trump lui même. A l'extérieur du pouvoir impérial, par une offensive simultanée et prolongée les médias et la presse, ont montré d'être farouchement anti-catilinaires. Cette offensive a frappé les esprits, les attentes et la morale publique et a dressé, par réaction, la violence et la révolte, contre le pouvoir élu, car cela fait partie du jeu et du pari de la conquête du pouvoir d’État, qui ne connaissent qu'une loi : la réussite. La légitimité, contestée, a désarçonné la légalité, résiliente, massive et populaire.

Machiavel, Cromwell, Napoléon ou Trotski, grands catilinaires d'antan auraient ajouté à la dynamique des Coups d"État, l'inconnue de l'incertitude, de l'accident et de la Fortune. Or, tous les éléments d'un coup monté étaient réunis aux États-Unis et en Italie pour descendre Trump et pour installer Draghi. Cependant la dialectique permanente de la légalité et de la légitimité, liée à la vie historique rend aléatoire toute prévision sur la durée de l'expérience et sur les modèles politiques proposés. Il est clair que la transition entre les trois formes de régime classiques, selon Aristote, la monarchie, l'aristocratie et la démocratie, autrement dit, le gouvernement de un, de peu et de tous, en leurs deux formes, pures et corrompues, ont conduit, au tout début du XXème siècle à la découverte de la "loi de fer" de toute organisation, celle de la classe politique et de l'oligarchie (Pareto, Mosca et Michels), qui jouent un rôle important dans la conservation du pouvoir. Changer de régime a toujours exigé la recherche d'un "sens" et une vocation militante pour la passation du pouvoir et le changement n'a jamais été purement technique ou rationnel, mais toujours complexe, partisan et personnel. Il a toujours été associé à un débat sur la meilleure forme du gouvernement, destiné à témoigner, chez les grands historiens du passé (Tacite, Plutarque, Suétone ou Tite-Live) et dans leurs Annales, sur les vices de l'homme, les maux de la société et les opportunités de la conjoncture. Assumant la thèse que nous sommes dans une situation, commune à tout l'Occident, de mutation d'époque, de nouveaux équilibres internationaux et d'autoritarismes montants, la démocratie est, en sa forme pure, derrière nous et une forme inédite de celle-ci, méconnaissable, opaque et inversée, émerge, au sein de la logique des contre-pouvoirs entre conservation et innovation. Dans ce cadre, la grande malade de notre temps apparaît ainsi la société, incapable de se renouveler dans la stabilité. Cette société, nationale-globaliste, post-moderne et post-démocratique exige un autre modèle de gouvernance, aujourd'hui peu clair. La crise est-elle si grave qu'un coup d’État peut s'organiser dans la légalité et transformer l'ordre social dans son ensemble ? Dans la société européenne et mondiale, la divinisation des pouvoirs concerne les autocraties montantes et leurs Césars. Cependant ce qui rend actuelle la pratique des Coups d’État, c'est la volonté de résoudre par la légalité et dans le respect formel de la légalité des problèmes qui concernent le dépassement de ses limites et qui étaient autrefois résolus par les armes. Le concept de démocratie en est terni et son modèle de gouvernance déconsidéré. Parmi les dangers n'y a-t-il pas l'ordre constitutionnel, les prérogatives du Parlement et la défense de l’État ? Bref, l'idée de Liberté ?

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L'instabilité permanente et le doute. Une "Glasnost" à la Richelieu et à la Deng Tsiao Ping mais pas à la Gorbatchev

L'éternisation parlementaire dans la recherche d'une coalition que supporte une majorité de gouvernement et les disputes et querelles entre les hommes et les partis a généré auprès du Président de la République un doute grandissant sur la possibilité de trouver une solution par une "décision" parlementaire et par un emploi normal de la représentation politique. Rompant avec la tactique ordinaire du choix entre les politiques et les grands commis de l’État, Mattarella a fait appel à un sursaut national et unitaire, qui éloigne les partis de la voie conflictuelle, pour prendre de l'ascendant sur une situation dégénérative et risquée. L'option du salut public et le doute grandissant sur les capacités d'auto- correction de la Chambre, ont fait choisir au Président l'option de la "légalité d'exception" et d'un armistice provisoire dans une dispute où l'ennemi principal était la réforme de l’État, la victoire contre la pandémie et la relance de l'économie. Combattre pour la survie voulait dire opérer une distinction entre la difficile guerre totale au système bureaucratique, inefficace, et une guerre limitée au parlementarisme, incapable d'avancer dans la division. Le premier but de guerre fut donc de réduire l'implication des passions et de fixer des objectifs praticables. La grande conséquence de la "Glasnost" politique à l'italienne, qui venait d'être lancée, incluant la toute jeune "Perestroïka économique" de l'Union Européenne, a été la recomposition du système politique. Une recomposition qui vise le renouvellement des partis et, globalement, de l'échiquier parlementaire, autrement dit, l'instauration d'une nouvelle oligarchie et une libéralisation de la structure administrative, sans la " terreur révolutionnaire du mérite", comme critère de réforme et de modernisation. Cela a voulu dire, pour Draghi, d'être avec Richelieu et Louis XIV et de rassembler davantage à Deng Tsiao Ping plutôt qu'au réformiste-visionnaire Gorbatchev. Libéraliser et moderniser certes, sous le contrôle du système politique, version ENA et Macron, mais expurger tout souverainisme à la de Gaulle. La recomposition du système politique, qui est en cours parallèlement en Espagne et en France, investit avant tout la gauche, dispersée et sans idées, sclérosée et dépourvue du vaccin contre le virus des divisions et des luttes intestines. Le Partito Democratico (PD), pour continuer à exister au delà des seules apparences discursives, devrait fusionner avec le M5S, autour du triumvirat Conti, Grillo et di Maio, la Greta Thunberg de l'économie verte. Cependant nous sommes loin du "Pacte de pacification" de 1921 entre Ivanohe Bonomi e Benito Mussolini. Il n'existe pas aujourd'hui de danger de révolte extrémiste comparable à celle du "parti armé" de l'époque, menaçant de brutaliser la politique. Il existe par contre l'idée de Grillo que "les fraises sont mûres", pour faire adopter l'option d'une légitimité du transformisme parlementaire. Le danger de la violence n'existe pas et le contrôle des masses devenues apathique et anti-politiques, renforce les partis de droite et, en particulier Fratelli d'Italia de Giorgia Meloni, très combative.

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Pas d'ennemi, pas de violence !

Pas d'ennemi, pas de violence! Pas de réarmement militant et d'affrontement physique et donc pas de défense armée de l’État ! L'État peut être défendu par le droit et par le respect de la légalité parlementaire. Le Coup d’État pour changer la République pourra se faire sans la violence et dans un cadre légal. En France et dans la clandestinité il n'y a que l’État islamique et, parmi les "hors la loi", il n'y a que les Djihadistes et le "Mouvement identitaire", mis au ban par Darmanin ! Pour éliminer les Fillon, les Sarkozy, les Berlusconi, les Orban il a suffi d'une magistrature d'obédience politique. Il n'y a plus de révolution en vue, il n'y a plus de négation du droit des peuples, ni d'injure permanente des vainqueurs sur les vaincus, hormis la période coloniale, ressassée à la sauce islamo-gauchiste. La colonne Vendôme n'a pas été abattue et la Commune de Paris n'a pas arrêté les communards devant la Banque de France par respect envers la Patrie. En Italie c'est le représentant de la Banque Centrale Européenne qui va vers le peuple, vers les classes moyennes et les entrepreneurs ! C'est comme si Versailles, compassionnelle, allait vers les prolétaires de la Commune de Paris ! Il n'est plus de militaires impitoyables et donc plus de gestes glorieux face aux pelotons d'exécution de Thiers, ni de chansons ardentes, semblables à l'Internationale de Pottier ! Il n'y a pas une grande défaite à venger mais un Parlement, une Assemblée ou des Cortés déjà épuisés, à asservir et déjà pliées, prêtes à se mettre en marche sous la discipline des règlements et des groupes parlementaires! Pour ces radicaux de polichinelle, amadoués par les strapontins parlementaires, le droit constitutionnel suffit et la légalité est respectée sans effusions de sang. L'Italie apparaît ainsi le laboratoire de l'Occident et un exemple indéniable pour la France ou l'Espagne, mais elle constitue néanmoins l'anti-modèle des États-Unis.

Brennus à Rome et QAnon et KU KLUX KLAN à Washington

Lors du sac de Rome au IV siècle avant Jésus-Christ, Brennus, Chef des Gaulois, négociant la rançon en or pour la libération de la ville avait jeté là avec mépris la fameuse phrase : "Vae Victis!" (Malheur aux vaincus!) La valeur de cette maxime persiste. Elle prouve la signification persistante de la force et des rapports de force et justifie, aux États-Unis l'importance de la conspiration et du complot pour conquérir et pour conserver le pouvoir. Dans le cadre des élections perdues, Trump aurait essayé de prévenir un coup d’État, monté par Barack Obama, Hillary Clinton et George Soros.

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Après sa défaite électorale en 2020, de nombreux partisans de la mouvance QAnon auraient recommandé au président de "franchir le Rubicon" et de conserver le pouvoir, en invoquant la loi martiale. Les croyances QAnon deviennent un partie intégrante des tentatives de renverser des élections présidentielles américaines de 2020, et cela sur la base de l'incapacité de la mouvance démocrate de respecter la légitimité du pacte constitutionnel et donc de la voie des urnes, sans tricher. En particulier, sur la base du préjudice qui découle, pour les minorités religieuses, sexuelles et raciales, de vivre à égalité avec l'actuelle majorité blanche. L'égalité serait un faux concept et une fiction juridique trompeuse, bref une utopie, marquée par l'idée d'affranchissement et de rattrapage d'une arriération, vis à vis de la supériorité raciale blanche. Les démocrates seraient prêts à tout pour faire franchir aux minorités cette frontière invisible, qui amènerait à une prépondérance de couleur. Or, puisque cette égalité est fictive et qu'elle masque une inégalité naturelle et réelle, toutes les pratiques de subversion deviendraient légitimes, la tricherie ou le Coup d’État. En effet là où est remis en cause un rapport de force originel et essentiel entre groupes sociaux, il ne peut y avoir que violence, puisque serait ainsi renversé le pacte constitutionnel du "vivre ensemble".

Nature et société

L'idée constitutive d'identité et de société en aurait à pâtir selon l'image de l'Amérique des confédérés de QAnon, du Ku Klux Klan, de Griffith et de son chef d’œuvre "La naissance d'une Nation". C'est le dilemme historique des fondements premiers et originels de la Cité sur la colline et du fait associatif américain, l'homogénéité ou l'hétérogénéité ethnique et tribale, qui précède toute autre distinction de droit et montre un aperçu de la société américaine et sa vulnérabilité.

La remise en cause de cette identité originelle ne peut être que violente et sanglante, car elle a son origine dans le sang et point dans la loi. Dès lors, renverser les rapports de force, en invoquant la loi martiale (QAnon..), le Coup d’État (Obama, Clinton, Soros), ou le prix de la soumission (Brennus), c'est se heurter au "fundamenta inconcussa", le vieux rapport de l'homme à la nature humaine, à la société constituée et à l'Histoire.

A partir de là, tricher au jeu électoral devient un enjeu de confrontation constitutionnelle et post-démocratique dans la maison de cyborg, le mode d'une impossible contestation politique, de la même façon que le couteau ou le coup de canif, décrivent les premiers pas de l'assimilation par les adolescents des migrations et leur plume à écrire pour l'initiation scolaire dans la maison de Descartes.

Si le modèle du Coup d’État légal et non violent des temps actuels, est désormais, pour l'Europe, le laboratoire politique de l'Italie, la contestation ethnique, sexuelle et raciale des États-Unis, deviendra peut-être le modèle violent et tribal de la condition humaine pour l'Europe et le monde ?

Dans une attente toujours fatale, la pétition dramatique de Tite Live retentira dans les consciences des décideurs d'Occident "Dum Romae Consulitur, Saguntum expugnatur !" (Alors qu'à Rome on débattait, Sagonte était prise!) (Tite-Live, Ab Urbe Condita).

Bruxelles le 15 mars 2021

mercredi, 18 novembre 2020

Tocqueville et la démocratie comme prison historique

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Tocqueville et la démocratie comme prison historique

par Nicolas Bonnal

Ex: https://reseauinternational.net

Depuis 1815 l’humanité vit dans un présent permanent ; c’est une peine perpétuelle, que j’ai compris jeune en découvrant la conclusion des Mémoires d’outre-tombe. Une génération plus tard, un autre aristocrate français, Tocqueville, devine dans sa Démocratie en Amérique et surtout ailleurs que les carottes sont cuites ; il sera suivi par une certain Kojève, qui analyse tout lui à partir de Hegel et deux dates françaises : 1792 et 1806. Même un matheux dont j’ai parlé ici même et nommé Cournot comprend vers 1860 que nous entrons dans la posthistoire. Raison pourquoi nous pouvons appliquer aussi facilement Marx et d’autres analystes du dix-neuvième siècle (Michels, Engels, Drumont, Sorel, Pareto…) aux situations que nous vivons en ce moment ; tout semble bouger alors que tout est immobile. Tout est devenu de l’actualité, pas de l’histoire. Même les guerres mondiales voulues par l’empire britannique n’ont fait que renforcer un état de choses devenu universel et inévitable. Il fallait mettre l’aristocratie prussienne au pas, a dit Alexandre Kojève (« démocratisation de l’Allemagne impériale »).

Je relisais Tocqueville l’autre nuit en attendant mon vaccin, mon badge et le NWO qui datent de 1815 ; et je me disais : « vous n’avez jamais été vaccinés ? Vous n’avez jamais été massacrés lors des guerres truquées ? Vous n’avez jamais été victimes des banquiers ? Vous n’avez jamais été cocufiés aux élections ? Vous n’avez jamais lu Octave Mirbeau ? Vous n’avez jamais été désinformés par la presse ? Allez, le monde moderne est une colossale tromperie pour zombis. Et comme on ne peut pas tuer ce qui est mort (dixit Michelet), on n’en a pas fini avec lui et sa démocratie, et sa dette immonde, et sa laideur pantomime. »

la-da-de-tocqueville-2.jpgPour imposer cela il a fallu rendre les gens bêtes. On est passé de Racine et Mozart au rap et au rock. Tocqueville écrit :

« Ils aiment les livres qu’on se procure sans peine, qui se lisent vite, qui n’exigent point de recherches savantes pour être compris. Ils demandent des beautés faciles qui se livrent d’elles-mêmes et dont on puisse jouir sur l’heure ; il leur faut surtout de l’inattendu et du nouveau. Habitués à une existence pratique, contestée, monotone, ils ont besoin d’émotions vives et rapides, de clartés soudaines, de vérités ou d’erreurs brillantes qui les tirent à l’instant d’eux-mêmes et les introduisent tout à coup, et comme par violence, au milieu du sujet. »

Et Tocqueville  évoque ensuite notre sujet – le présent permanent –  ici : « comment l’aspect de la société, aux États-Unis, est tout à la fois agité et monotone ».

Sous l’impression d’agitation, Tocqueville note l’immobilité :

« Il semble que rien ne soit plus propre à exciter et à nourrir la curiosité que l’aspect des États-Unis. Les fortunes, les idées, les lois y varient sans cesse. On dirait que l’immobile nature elle-même est mobile, tant elle se transforme chaque jour sous la main de l’homme. À la longue cependant la vue de cette société si agitée paraît monotone et, après avoir contemplé quelque temps ce tableau si mouvant, le spectateur s’ennuie. »

Après c’est l’éternel retour et il me semble qu’on comprendrait mieux Nietzsche en appliquant cette notion à notre situation démocratique, si lucidement dénoncée par Zarathoustra (le dernier homme…) :

« Ils sont sujets, il est vrai, à de grandes et continuelles vicissitudes ; mais, comme les mêmes succès et les mêmes revers reviennent continuellement, le nom des acteurs seul est différent, la pièce est la même. L’aspect de la société américaine est agité, parce que les hommes et les choses changent constamment ; et il est monotone, parce que tous les changements sont pareils. »

L’homme moderne ou démocratique fabrique des objets industriels. Et avant Chaplin, Ellul ou Taylor, Tocqueville comprend que cela le transforme en mécanique industrielle :

« Or, l’industrie, qui amène souvent de si grands désordres et de si grands désastres, ne saurait cependant prospérer qu’à l’aide d’habitudes très régulières et par une longue succession de petits actes très uniformes. Les habitudes sont d’autant plus régulières et les actes plus uniformes que la passion est plus vive. »

Plus sinistre, l’unification du monde. Chateaubriand posait déjà une question :

« Quelle serait une société universelle qui n’aurait point de pays particulier, qui ne serait ni française, ni anglaise, ni allemande, ni espagnole, ni portugaise, ni italienne ? Ni russe, ni tartare, ni turque, ni persane, ni indienne, ni chinoise, ni américaine, ou plutôt qui serait à la fois toutes ces sociétés ? »

Tocqueville remarque de même :

« Ce que je dis de l’Amérique s’applique du reste à presque tous les hommes de nos jours. La variété disparaît du sein de l’espèce humaine ; les mêmes manières d’agir, de penser et de sentir se retrouvent dans tous les coins du monde. Cela ne vient pas seulement de ce que tous les peuples se pratiquent davantage et se copient plus fidèlement, mais de ce qu’en chaque pays les hommes, s’écartant de plus en plus des idées et des sentiments particuliers à une caste, à une profession, à une famille, arrivent simultanément à ce qui tient de plus près à la constitution de l’homme, qui est partout la même. »

75810b374bc1a86311acdee063179394.jpgEt Tocqueville de conclure sur cette mondialisation industrielle et marchande des médiocrités partagées :

« S’il était permis enfin de supposer que toutes les races se confondissent et que tous les peuples du monde en vinssent à ce point d’avoir les mêmes intérêts, les mêmes besoins, et de ne plus se distinguer les uns des autres par aucun trait caractéristique, on cesserait entièrement d’attribuer une valeur conventionnelle aux actions humaines ; tous les envisageraient sous le même jour ; les besoins généraux de l’humanité, que la conscience révèle à chaque homme, seraient la commune mesure. Alors, on ne rencontrerait plus dans ce monde que les simples et générales notions du bien et du mal, auxquelles s’attacheraient, par un lien naturel et nécessaire, les idées de louange ou de blâme. »

La dramatique tragédie (qui est en fait une absence de tragédie bien au sens médical-démocratique) que nous vivons en ce moment couronne le piège historique et terminal que représente l’avènement de la démocratie sur cette planète. C’est bien Tocqueville qui a parlé du pouvoir tutélaire et doux, et du troupeau bien docile, pas vrai ? Avec comme modèle non plus l’occident aristocratique anéanti en 1945 (dixit Kojève), mais la Chine et son totalitarisme basé sur la gouvernance eunuque depuis des siècles.

Nicolas Bonnal

Chroniques sur la Fin de l’Histoire

mardi, 09 juin 2020

Privilège blanc : discrimination positive et démocratie

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Privilège blanc : discrimination positive et démocratie

par Bernard PLOUVIER

La subversion soixante-huitarde a détruit l’État régi par le Droit napoléonien, l’une des rares choses et idées utiles que la soi-disant « Grande » Révolution française nous ait apportée.

Après tout, le christianisme nous avait assez enquiquinés avec les notions d’Égalité et de Fraternité, plus d’un millénaire et demi avant les fous furieux des années 1789-95. Quant à la Liberté, elle fut foulée aux pieds, plus que jamais, de 1792 à 1815… et il n’est pas trop assuré que la Liberté d’exprimer sa pensée aie jamais été présente en France, quel qu’en ait été le régime… depuis 1972, une foule de lois limite la sus-dite « Liberté d’expression », au point qu’elle en paraît une totale utopie en France ripoublicaine.

De la Révolution, l’on peut retenir le système métrique et le camembert (soit la transposition au Pays d’Auge d’une certaine façon de fabriquer le fromage de vache, apprise à une pieuse Normande par un prêtre briard caché des fous furieux sans-culottes… une ancêtre de ces Bas-Normands qui ont caché en 1943-44 une foule de réfractaires au STO).

Revenons à nos prodigieux Soixante-Huitards. Certains de ces beaux esprits (variante : de ces GGG – grandes gueules grotesques, au gré du lecteur), après avoir solubilisé leur marxisme dans l’alcool, l’hédonisme et le consumérisme globalo-mondialiste, après avoir épuisé les joies de leur nouvelle trinité : Haschisch-Cocaïne-LSD-Ecstasy (chacun sait que les Trois Mousquetaires étaient Quatre), ont inventé toutes sortes de nouvelles « béquilles sociales » pour les moins aptes de nos contemporains, dont le plus beau fleuron demeure sans conteste la « discrimination positive ».

De tout temps, il a existé des ascenseurs sociaux. Certains se marient pour épouser une dot ou une influence familiale ; on entre au Grand-Orient, comme autrefois dans l’armée ou en religion ; on se prostitue allègrement : la promotion canapé n’a nullement effrayé le grandiose Jules César lui-même ; on fait dans la Finance ou le Négoce comme d’autres dans la Politique : des activités qui, à toute époque et en tous lieux, ont trop souvent participé de la Grande Truanderie.

Depuis l’An 1945, l’Année Zéro de la réflexion politique et historique, l’on nous a bassiné avec la honteuse discrimination raciale et/ou sexiste : celle des vilains Blancs et des vilains mâles envers les pauvres colorés et les pauvresses du sexe faible. On nous refit le coup avec le couplet sur les « handicapés » de toutes sortes.

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Et, grâce au zèle infatigable des « élus » et « élues » – pires encore que les mâles -, cela se transforma en une grande conquête sociale, officiellement patronnée par Dame Démocratie… soit une donzelle guère plus recommandable et vertueuse que ses sœurs Liberté, Droits de l’Homme ou la fausse Pucelle nommée Demoiselle Écologie.

Dans certaines Universités des USA – il aura fallu une dure campagne électorale entre Démagogues et Républicains pour qu’on l’apprenne en France -, 25% des étudiants sont admis non par ordre de mérite, mais en raison de leur race, de leur couleur de peau ou de la pauvreté de leurs parents… Liberty for all s’est mué en Black and Latinos are beautiful.

En France, dès l’Ancien Régime, existaient des bourses d’études pour les plus pauvres (Napoléon Bonaparte en avait bénéficié) et l’Église catholique a toujours assuré l’enseignement quasi-gratuit pour ses ouailles méritantes les moins riches. Chacun concourrait ensuite selon ses mérites et sa force de caractère.

Mais c’était avant la plus basse démagogie des champions de la revanche des médiocres. De nos jours, on exige des « places réservées » dans les Grandes Écoles ou dans les Universités pour des enfants d’immigrés, quand bien même il faudrait rejeter de brillants fils d’autochtones pour faite de la place aux nouveaux recommandés.

Le même principe de « Discrimination positive » est appliqué à l’octroi de places et de postes financés avec l’argent public.

Une fois de plus, les profonds penseurs, les grandes penseuses et les bizarres de sexe-genre indéterminable, qui sévissent dans les débats télévisés et au Parlement semblent avoir oublié – s’ils les ont jamais sus – les fondements de la Démocratie, la vraie, pas celle des pitres.

Ils sont au nombre de deux sur ce point particulier. La Loi doit être égale pour tous les citoyens (riches et pauvres ; dominants et dominés ; élus et administrés). Toute fonction, toute admission à un poste financé par l’État – gestionnaire du Bien Commun – doit se faire en fonction des mérites du candidat et non par piston racial, religieux ou maçonnique, non par l’effet du népotisme ou du « léchage de bottes » – voire plus si affinités.

Si l’on s’en tient à la stricte définition de la Démocratie – qui n’a rien à voir avec le type de régime politique, n’en déplaise aux sectaires – une discrimination (si l’on préfère un choix biaisé par l’effet d’un quelconque favoritisme) est absolument, totalement, irrémédiablement un non-sens. La discrimination, quel que soit le signe arithmétique qu’on lui attribue, est le triomphe de l’arbitraire.

Les contribuables et les épargnants qui alimentent le budget de l’État, ceux qui créent et entretiennent le Bien Commun, ont un devoir : celui de protester contre des lois iniques, contraires à toute éthique, quelle que puisse être la motivation pseudo-humanitaire affirmée par les clowns qui les proposent et les politicien démagogues qui les votent.

En cas de persistance dans l’erreur, en cas de dénis répétés de Démocratie, la seule démarche citoyenne qui s’impose est de s’insurger contre un Pouvoir abusif, contre des tyrans qui n’ont ni sens moral ni dignité dans l’exercice de leurs fonctions électives.

vendredi, 21 février 2020

Les juges contre la démocratie...

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Les juges contre la démocratie...

Entretien avec Anne-Marie Le Pourhiet 
Ex: http://metapoinfos.hautetfort.com

Nous reproduisons ci-dessous un entretien avec Anne-Marie Le Pourhiet, cueilli sur Figaro Vox et consacré à la montée en puissance des pouvoirs juridictionnels face à la souveraineté des États et à l’auto-détermination de leurs peuples. Anne-Marie Le Pourhiet est professeur de droit public à l’université Rennes-I et vice-président de l’Association française de droit constitutionnel.

Salvini devant les tribunaux: les juges contre la démocratie?

FIGAROVOX.- Le Sénat italien, à la suite d’une demande d’un tribunal de Catane, a décidé de renvoyer en justice Matteo Salvini pour séquestration de migrants, celui-ci ayant bloqué un bateau de migrants au large de la Sicile lorsqu’il était ministre de l’intérieur. De telles mesures visant à limiter l’immigration clandestine sont pourtant soutenues par une majorité des Italiens. Cette décision révèle-t-elle un retournement du droit contre la volonté générale?

Anne-Marie LE POURHIET: C’est beaucoup dire. S’il s’agissait d’un contentieux administratif tendant à faire admettre la responsabilité de l’État italien pour faute résultant de la violation du droit international humanitaire ou des normes européennes, on pourrait parler de conflit entre la démocratie et le droit. Mais ici, il s’agit de poursuites pénales visant la personne d’un ex-ministre de l’intérieur (et vice-président du Conseil) engagées sur le fondement du Code pénal italien pour «abus de pouvoir et séquestration de personnes», ce qui est pour le moins fantaisiste. C’est d’autant plus étonnant qu’un décret-loi (équivalent des ordonnances françaises) adopté en juin 2019 par le gouvernement Conte avait justement renforcé les pouvoirs du ministre de l’intérieur pour refuser l’entrée des navires de migrants dans les ports italiens. Ce n’est pas la première ni la dernière procédure de ce type engagée par des procureurs siciliens contre Matteo Salvini. Ce qui change c’est qu’à la faveur du renversement de coalition politique opéré l’été dernier, le Sénat a, cette fois, levé l’immunité, dans un revirement parfaitement cocasse digne de la commedia dell’arte où l’on voit les parlementaires «Cinq étoiles» voter exactement en février le contraire de ce qu’ils avaient voté en mars pour lâcher aujourd’hui le vice-président du gouvernement qu’ils soutenaient hier.

Nous sommes davantage ici face à un phénomène de procureurs militants qui opèrent sur fond de querelles politiciennes incohérentes. On ne sait pas non plus s’il y a des ONG derrière les poursuites pénales du parquet de Catane, mais c’est assez probable, sachant que Salvini est évidemment la bête noire des militants pro-migrants.

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Ces pressions sont-elles particulièrement fortes sur la question migratoire? On se souvient du Pacte de Marrakech qui présentait les migrations comme des «facteurs de prospérité, d’innovation et de développement durable». Plus récemment, un collège d’experts a remis à Emmanuel Macron et au gouvernement un rapport appelant à amender une politique migratoire jugée trop restrictive...

Il y a évidemment une pression idéologique très forte en Europe, dirigée contre le modèle wesphalien d’État-Nation et contre la protection qu’il suppose de la souveraineté et des frontières nationales. Les «valeurs» de l’Union européenne inscrites à l’article 2 du traité nous imposent la «tolérance», le respect des droits de l’homme «y compris des droits des personnes appartenant à des minorités» et surtout l’incontournable «non-discrimination» conçue comme une abolition de toutes les distinctions et hiérarchies, à commencer par celles qui séparent le national de l’étranger.

Le rapport du Parlement européen du 4 juillet 2018 invitant à ouvrir une procédure de sanction contre la Hongrie pour violation des «valeurs» de l’Union contient trois pages consacrés aux «Droits fondamentaux des migrants, des demandeurs d’asile et des réfugiés» mettant en cause notamment le législateur hongrois qui ne serait pas suffisamment accueillant ni pour les migrants ni pour les ONG qui les soutiennent. Comme par hasard, juste deux jours après la publication du rapport Sargentini, le Conseil constitutionnel français censurait une disposition législative réprimant l’aide aux migrants illégaux au nom d’un principe de fraternité universelle sorti de nulle part mais ressemblant comme deux gouttes d’eau au sans-frontiérisme dominant dans les institutions européennes et dans les ONG qui les influencent.

Cette montée en puissance du pouvoir juridictionnel répond manifestement à une logique d’importation. D’où vient-elle historiquement?

Elle est avant tout d’origine anglo-saxonne car la common law fait depuis toujours la part belle à la jurisprudence alors que le droit romain imprègne davantage le droit continental. Mais c’est évidemment la construction européenne qui est devenue l’élément moteur de ce gouvernement des juges puisque c’est sur leur servilité que repose entièrement le système de primauté des normes européennes sur le droit national. Or ces normes européennes véhiculent justement le modèle multiculturel nord-américain hyper-individualiste. C’est pour cela que la Hongrie et la Pologne, en particulier, sont dans le collimateur de l’Union au sujet du statut et de la composition de leurs tribunaux supérieurs. La commission européenne redoute que les pouvoirs polonais ou hongrois ne désignent des juges peu favorables aux normes européennes.

Pire, ce sont les constitutions mêmes de ces États, c’est-à-dire leurs lois fondamentales souveraines qui sont critiquées et accusées de ne pas correspondre aux «valeurs» de l’Union. Le rapport Sargentini reproche ainsi à la Constitution hongroise de retenir, entre autres abominations, une «conception obsolète de la famille». De son côté, la France a eu le droit, en 2008, à un rapport hallucinant de l’«experte indépendante» du Conseil des droits de l’homme de l’ONU, Mme Gay McDougall, clouant au pilori le modèle républicain français jugé insuffisamment favorable aux droits des minorités et nous enjoignant de modifier la Constitution ou au moins son interprétation! La souveraineté des États et l’auto-détermination de leurs peuples n’existent plus pour les ONG et les institutions supranationales qu’elles manipulent.

En quoi cette évolution s’inscrit-elle à rebours du modèle historique français?

En France, la Révolution française, dans la continuité des monarques de l’Ancien régime, a fermement interdit aux juges de s’immiscer dans l’exercice des pouvoirs législatif et exécutif. Le juge, chez nous, doit être la simple «bouche de la loi», elle-même votée par les citoyens ou leurs représentants, qui l’applique fidèlement et objectivement dans les litiges. La loi des 16 et 27 août 1790 dispose: «Les tribunaux ne pourront ni directement, ni indirectement, prendre part à l’exercice du pouvoir législatif, ni empêcher ou suspendre l’exécution des décrets du corps législatif sanctionnés par le Roi, à peine de forfaiture». Il s’agissait, bien entendu, d’empêcher des cours aristocratiques, réputées réactionnaires, de s’opposer à l’application de la loi «expression de la volonté générale» dans un nouveau régime qui se voulait démocratique. Le Code pénal de 1810 punit même de la dégradation civique le magistrat qui aura suspendu l’exécution d’une loi.

Quand on voit aujourd’hui nos juges, nationaux comme européens, passer leur temps à écarter les lois françaises au motif que leur application porterait, selon leur appréciation toute subjective, une atteinte disproportionnée aux «droits» individuels, notamment ceux des migrants, on mesure l’inversion vertigineuse accomplie depuis le XVIIIe siècle. Contrairement à ce qui est généralement affirmé, ce gouvernement des juges est aux antipodes de la notion d’État de droit telle qu’elle a été conçue par les juristes allemands du XIXe siècle qui voulaient, au contraire, éliminer l’arbitraire des juges et des fonctionnaires.

Anne-Marie Le Pourhiet, propos recueillis par Joachim Imad (Figaro Vox, 14 février 2020)

vendredi, 15 novembre 2019

Démocratie illibérale ou démocratie libérale?...

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Démocratie illibérale ou démocratie libérale?...
 
par Hervé Juvin
Ex: http://metapoinfos.hautetfort.com

Nous reproduisons ci-dessous un point de vue d'Hervé Juvin, cueilli sur son site personnel et consacré au libéralisme comme ferment de dissolution de la démocratie. Économiste de formation, vice-président de Géopragma et député européen, Hervé Juvin est notamment l'auteur de deux essais essentiels, Le renversement du monde (Gallimard, 2010) et La grande séparation - Pour une écologie des civilisations (Gallimard, 2013). Candidat aux élections européennes sur la liste du Rassemblement national, il a publié récemment un manifeste intitulé France, le moment politique (Rocher, 2018).

Démocratie illibérale ou démocratie libérale ?

Publiée à l’initiative de l’ONG « Open society », une récente étude conduite dans six pays de l’Est européen traduit une défiance croissante envers la démocratie, accusée de ne pas tenir ses promesses. L’étude fait écho aux déplorations rituelles entendues au Parlement européen au sujet des menaces sur la démocratie que feraient naître les populismes, les nationalismes et les régimes autoritaires. Sont visés les habituels suspects : la Hongrie, la Pologne et autres démocraties désignées comme « illibérales » par leurs accusateurs.

La démocratie libérale en « Occident »

La démocratie se porte mal, chacun le constate. Mais tous oublient de définir leur sujet ; qu’est-ce que la démocratie ?

L’histoire de longue période répond, c’est l’autonomie des peuples. Leur capacité à décider eux-mêmes de leurs lois, de leurs mœurs, des conditions d’accès à leur territoire, de qui les dirige. Et c’est la conquête des Lumières et de la liberté politique, contre l’hétéronomie qui fait tomber la loi d’en haut, du Roi, de Dieu ou du Coran.

Si démocratie signifie autonomie du peuple et respect de la volonté populaire, c’est sûr, la démocratie se porte mal. Des exemples ?

Aux États-Unis, la CIA prétend défendre la démocratie contre un Président élu. Dans un entretien surréaliste, Paul Brennan et l’ancien directeur de la CIA affirment leur légitimité à défendre les États-Unis contre le Président Trump. Chacun sait la part que FBI et CIA, devenus États dans l’État, jouent dans la succession de complots visant à destituer le Président élu. Au nom d’une légitimité procédant d’un autre ordre que celui de l’élection et manifestement supérieure à elle ; désignés par Dieu, sans doute ?

Partout en Europe, en particulier en Hongrie, des ONG et des Fondations financées de l’étranger, notamment par MM. George Soros, Bill Gates, les Clinton et quelques autres, prétendent changer la culture et l’identité des peuples européens à coup de milliards et des réseaux qui contrôlent une grande partie de la presse, des élus et des think tanks européens.

Démocratie ? Non, usurpation du pouvoir. Capacité de nuire par l’achat des consciences et des lois. Ploutocratie manipulant les minorités bruyantes pour terroriser les majorités. Et nouvelle hétéronomie qui donne le pouvoir à l’argent, et permet aux mafias de la gestion financière, des big pharma ou de l’agro business de choisir les dirigeants avant tout vote — voir le Brésil, ou la France.

En Grande-Bretagne, le Parlement britannique a fait échouer toutes les tentatives de rendre effective une décision votée par referendum à une claire majorité ; sortir de l’Union européenne. Face à Theresa May comme à Boris Johnson, le Parlement croit agir au nom de mandats qui délèguent aux députés le pouvoir de voter au nom du peuple ce qu’ils jugent bon, contre la volonté du peuple, alors que les Tories demandent que le Parlement respecte la volonté du peuple exprimée par referendum.

Chaque jour ou presque, au nom de l’idéologie de l’individu qui ignore le citoyen, au nom des « LGBTQ+ » qui priment la famille, au nom de l’industrie du vivant qui entend faire de la reproduction humaine et du corps humain un produit comme les autres, le Parlement européen déclare, dispose et vote des textes contre lesquels la majorité des peuples européens se dresse. Chaque jour ou presque, des juges, des cours et des comités bafouent le sens commun, l’opinion et la volonté de la majorité des Européens. Et chaque jour, le droit de l’individu détruit un peu plus ce qui reste de la démocratie en Europe.

Libéralisme contre démocratie ?

La situation est sans ambigüité ; le libéralisme est devenu le pire ennemi de la démocratie. La liberté de l’individu qui nie le citoyen et détruit l’unité de la Nation en finit avec la liberté politique, la seule qui compte vraiment. Car les droits de l’individu sont devenus une nouvelle hétéronomie, dont les juges sont les imams et les tribunaux, les mosquées d’où émanent les fatwas contre tous ceux qui osent mettre en cause l’individu tout puissant, sa pompe et ses œuvres. De sorte que ce sont aujourd’hui les démocraties dites « illibérales » qui portent le combat pour la démocratie en Europe, le combat pour la loi de la majorité contre la dictature des minorités.

Dans l’Union européenne comme ailleurs dans le monde, ce ne sont pas les démocraties illibérales qui sont le danger, c’est l’autoproclamation des juges et des cours constitutionnelles en censeurs du vote et des élus.

Qui croit que les lois votées en France ou les directives européennes ont quoi que ce soit à voir avec la volonté des Européens ? Quelle majorité pour l’invasion migratoire, pour la ruine des territoires par les traités de libre-échange, pour la destruction des sols et de la vie par les usuriers du vivant, pour le commerce du corps humain ?

Le coup d’État du droit qui permet aux juges constitutionnels d’invalider n’importe quelle loi votée par les Assemblées, au nom d’une interprétation libre de préambules lyriques et verbeux qui ne disent rien et qui peuvent tout justifier (rappelons qu’en vertu des préjugés de l’époque, les Déclarations des Droits américaines de 1776 ou françaises de 1789 ne s’appliquaient ni aux femmes, ni aux esclaves, ni aux peuples colonisés, invisibles aux constituants ; qui saura dire quels préjugés de notre époque donnent lieu aux mêmes aveuglements dans nos interprétations actuelles ?).

Voilà la nouvelle hétéronomie qui assujettit les Nations, muselle les peuples et explique la montée délétère de l’abstention — il ne sert à rien de voter, puisqu’un juge pourra invalider votre vote, et l’argent d’un corrupteur étranger pourra changer la loi !

La démocratie illibérale, l’avenir ?

Les démocraties illibérales le seraient-elles seulement parce qu’elles répondent à la volonté de la Nation, pas à celle d’une poignée de milliardaires et de leurs complices assurés du monopole du Bien ? Seraient-elles alors tout ce qui reste en Europe de démocratie, de Nation et de liberté politique ? La question appelle une réponse nuancée ; les démocraties illibérales sont bel et bien des démocraties si elles respectent le principe du suffrage universel, si elles acceptent l’alternance et si elles refusent le recours à la force, celle de l’armée ou de milices. 

Il y a urgence à restaurer la démocratie en Europe. Face à la tentative de conquête islamiste de territoires en Europe, face à l’intensification des opérations de soumission européenne aux ordres de l’étranger, rendre le pouvoir au peuple est la révolution démocratique à venir. Elle passe par le dessaisissement des cours constitutionnelles du pouvoir d’interpréter la Déclaration des Droits de l’Homme, par le rétablissement du gouvernement des hommes sur la gouvernance des choses, par la restauration des liens entre le droit, l’État, et la Nation.

Elle passe par le contrôle des ONG et des Fondations qui doivent rentrer dans les frontières, dans les Nations et dans la loi. Elles passent par la nationalisation d’Internet, qui ne peut être le lieu de la destruction de l’unité nationale et de la liberté politique — la liberté de ne pas être conforme, la liberté de rester soi-même, la liberté de dire « nous ». La lutte anti corruption, anti-blanchiment, anti-ingérence, commence par la transparence sur la provenance des fonds des ONG, sur leurs liens avec des journalistes et des médias, sur l’indépendance des sources d’information. Le temps est venu de réaffirmer cette condition de la démocratie ; l’argent ne donne aucun droit à l’influence ni au pouvoir. La ploutocratie est la ruine de la liberté politique.

Ceux qui n’ont que le mot de « démocratie » à la bouche devraient y réfléchir à deux fois. Car la révolution démocratique est en marche. Elle vient de l’Est, elle vient de ceux qui savent ce que « demeurer » veut dire, elle nous conduit vers des horizons inconnus — soigneusement cachés. Mais les âmes sensibles et les esprits libres voient déjà la lumière qui se lève en Europe, et qui va rendre à la démocratie son tranchant et son fil.

Hervé Juvin (Site officiel d'Hervé Juvin, 7 novembre 2019)

samedi, 18 mai 2019

Agir en conformité avec la nature profonde du politique

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Agir en conformité avec la nature profonde du politique

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Parmi les causes qui expliquent la crise du politique dans notre pays, il y a sans conteste la méconnaissance de la nature profonde du politique. Une méconnaissance qui touche, et c’est bien normal, la population tout entière, mais qui affecte aussi, plus curieusement, ceux qui s’engagent en politique, qu’ils soient simples adhérents ou élus. Ligne droite estime donc nécessaire que les militants de la droite nouvelle soient initiés à ce qui fait la spécificité du politique et donc à sa nature profonde.

La définition du politique : garantir le bien commun de la cité

Le terme de politique est construit à partir de polis, le mot grec qui désignait la cité État. Aussi le politique est-il l’art et la pratique du gouvernement des sociétés humaines. Il a pour but de garantir leur survie et de faire prévaloir l’intérêt général, c’est-à-dire plus globalement d’œuvrer au bien commun. Aujourd’hui en France cet objectif est largement perdu de vue car  les intérêts privés liés aux minorités comme au marché prennent le pas sur l’intérêt public. Une situation qui résulte de l’individualisme radical sécrété par l’idéologie libérale/libertaire du Système et dans laquelle, les individus étant seuls à exister, le bien commun disparaît, le politique s’efface et le chaos s’installe.

Les fondements du politique : un peuple, une terre, une loi

Le politique n’a en effet pas  sa place partout. Pour qu’il y ait politique, il faut que trois conditions soient réunies. Un peuple d’abord, car l’homme est par nature un être social et, à ce titre, il est voué à vivre en société. «Hors de la cité, l’homme est une bête ou un dieu», disait Aristote. Aussi doit-il vivre avec ses semblables au sein d’un peuple, c’est-à-dire d’une collectivité homogène de personnes ayant une histoire commune et la volonté de la prolonger dans le temps.

Mais il faut aussi une terre, car c’est en fonction du sol qu’il a conquis et dont il a hérité qu’un peuple s’organise, vit et se développe. Tant il est vrai que la civilisation qu’il construit dépend largement des liens qu’il établit avec sa terre.

Enfin, une loi, car attaché à son sol, le peuple définit les règles qui lui permettent de vivre le plus harmonieusement possible en garantissant, au-delà des modes et des circonstances, les conditions de sa survie.

Sans ces trois impératifs, il n’est pas de politique possible. Un peuple sans terre ou une terre sans loi ou encore une terre sans peuple, constituent autant de configurations d’où la dimension politique est exclue. Aussi est-il essentiel que la France conserve ces trois fondements. Car si demain, en raison de l’idéologie mondialiste du Système, notre pays n’était plus qu’un hexagone où vivraient des individus étrangers les uns aux autres, il ne pourrait plus connaître les bienfaits de la régulation politique. Aussi, en ignorant les fondements du politique, le Système qui nous dirige risque-t-il de faire sombrer la France dans le chaos.

La nature du politique : le commandement et l’obéissance

Le politique est par ailleurs défini par l’impératif du commandement et de l’obéissance. Deux notions qui peuvent paraître aujourd’hui brutales et déconnectées des sociétés contemporaines. Et, pourtant, dans tous les régimes, que l’organisation institutionnelle soit autoritaire ou démocratique, le politique passe par le commandement. C’est-à-dire par une relation hiérarchique à travers laquelle une volonté particulière exerce sa puissance sur les autres. Et loin d’être une forme d’autoritarisme d’un autre âge, cette réalité d’ordre politique s’avère à la fois nécessaire et bénéfique car c’est par la puissance de cette volonté propre au commandement que se forme l’unité politique d’une nation. En ce sens la puissance est positive puisqu’elle unifie et ordonne. Aussi est-il essentiel que celui qui exerce le commandement dispose de la puissance car, quelle que soit la source de sa légitimité, c’est elle qui lui permet d’agir, de rassembler, de mettre en ordre et de créer une harmonie.

La crise du politique qui affecte aujourd’hui notre pays s’explique largement par l’effacement de ce principe. Limités dans leur pouvoir par les médias, les juges, les eurocrates et la super classe mondiale, les dirigeants de la France manquent de puissance pour assurer leurs fonctions politiques. Dès lors, l’unité de la nation se fissure et le désordre apparaît. Un désordre d’autant plus marqué que, dans le même temps, le principe d’obéissance se trouve lui aussi affaibli.

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Or, le politique exige l’obéissance. Une obéissance qui ne s’apparente nullement à une soumission ou à un rapport d’inférieur à supérieur. Car il n’y a rien d’arbitraire dans cette relation mais seulement l’acceptation des règles et obligations qui s’imposent à tous dans l’intérêt commun. Là encore, la crise du politique conduit à une remise en cause de ce principe d’obéissance, lequel sera d’ailleurs d’autant moins observé que le commandement ne sera plus respecté.

Le champ du politique : le public et le privé

Le domaine du politique est de plus caractérisé par la bonne articulation entre la sphère privée et la sphère publique. La première concerne l’individu dans ses relations avec ses semblables, qu’elles soient d’ordre familial, économique, associatif ou autre. Quant à la seconde, elle relève de tout ce qui concerne la sécurité, l’ordre et l’harmonie de la collectivité, c’est-à-dire la poursuite du bien commun.

Le politique, qui est en charge de la sphère publique et d’elle seule, doit donc veiller à la séparation des deux sphères. Car si le domaine du politique se trouve occupé par des éléments illégitimes ou si, au contraire, le politique interfère dans ce qui n’est pas de son ressort, si donc il y a interpénétration des deux sphères, le politique se trouve dénaturé et le désordre s’installe.

C’est là encore ce que l’on observe dans la France d’aujourd’hui avec un État qui envahit la sphère privée, s’occupant de régenter de A à Z la vie quotidienne des Français pendant que, de l’autre côté, des fonctionnaires, des financiers ou des journalistes s’immiscent dans les affaires publiques pour dicter leur loi à nos dirigeants. Une dénaturation du politique qui est l’une des causes majeures du déclin de notre pays.

L’essence du politique : l’ami et l’ennemi

Le politique est enfin d’essence conflictuelle. Son rôle est de traiter les antagonismes et de trancher les conflits. Aussi la notion d’ennemi est-elle indissolublement liée au politique. Encore faut-il dans ce domaine établir une distinction fondamentale entre deux catégories d’ennemis. Une distinction que les Romains avaient consacrée par l’usage de deux mots différents : inimicus et hostis. L’inimicus est l’ennemi privé, celui que l’on peut se faire dans sa vie personnelle et auquel on voue souvent des sentiments aussi passionnels qu’irrationnels. L’hostis désigne de son côté l’ennemi collectif, celui qui menace la nation, ses intérêts ou ses ressortissants. Il s’impose quant à lui pour des raisons objectives et c’est bien sûr de ce type d’adversaire que traite le politique.

Car le politique se distingue avant tout comme l’activité humaine régie par les relations conflictuelles entre amis et ennemis. Si la morale est le domaine du bien et du mal, l’art celui du beau et du laid, le politique est par excellence le domaine de l’ami et de l’ennemi.

Là encore, cette notion peut paraître dure et brutale mais elle doit cependant être nuancée car, si le critère spécifique du politique tient à sa nature polémique, le but du politique n’est pas de susciter des hostilités mais de vaincre l’ennemi pour faire régner la concorde et l’harmonie. Pour autant, il importe d’être lucide et de savoir désigner son ennemi car, si on ne le fait pas, lui le fera et se placera dès lors en position de supériorité.

De même, il est impératif de ne pas mélanger morale et politique. Car, à vouloir appliquer les règles de la morale au domaine politique, on abandonne celles qui sont spécifiques du politique et on multiplie les erreurs. Et, là encore, de telles erreurs sont régulièrement commises par les dirigeants de notre pays. N’est-ce pas en effet au nom de la morale qu’ils imposent aux Français d’accueillir toujours plus de migrants, alors que les règles du politique devraient au contraire les conduire à les en préserver pour sauvegarder l’identité et l’intégrité de notre peuple ?

On le voit, la plupart des graves problèmes que connaît notre nation sont dus à une méconnaissance de l’essence même du politique. C’est donc aussi en réhabilitant le politique au sens noble du terme que la droite nouvelle pourra assurer le redressement de notre nation et de notre civilisation.