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Au sommaire :
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Lucien Combelle
...Voici bientôt quinze ans qu’il nous a quittés. Je n’ai dû le rencontrer qu’une ou deux fois, rue Monge où il habitait alors. C’était en compagnie de Laurence Granet qui avait soutenu, quelques années auparavant, une thèse de doctorat sur « L’idéologie fasciste dans les œuvres de Brasillach, Drieu La Rochelle, Rebatet ». Le souvenir de ces conversations s’est effacé. Je me souviens seulement du jour où, en public, il évoqua, au risque de lui nuire, son « éditeur fasciste » [sic] qui publia au début des années quatre-vingts ses souvenirs de prison. Cette sortie ne fut pas sans choquer un ami célinien qui fit cette réflexion : « Tout de même, il exagère, c’est lui qui a été fasciste ! ». Longtemps, j’ai cru que, dans son journal Révolution nationale, il s’était montré partisan d’un fascisme « libéral », je veux dire moins radical que celui prôné par ses confrères de la presse parisienne. Jusqu’à cet été 1988 où, pour annoter la correspondance que lui adressa Céline sous l’Occupation, je dépouillai, à la Bibliothèque Royale (de Belgique), la collection complète de cet hebdomadaire. Comme l’a également montré Jeannine Verdès-Leroux, qui s’est livrée au même exercice, Lucien Combelle était, bien au contraire, partisan d’un collaborationnisme sans concessions. C’est dire si Vichy n’était pas ménagé, surtout quand le régime prenait l’initiative, approuvé en cela par l’Église, de censurer en zone non occupée des écrivains jugés délétères : « Valéry, Fargue interdits. Demain Gide et Proust. Et Céline et Marcel Aymé. Et Montherlant. La France officielle semble vouloir retrouver sa beauté en avalant la jouvence de l’abbé Soury, et soigner ses blessures avec de l’eau bénite »¹. On n’est donc pas étonné de le voir dénoncer ensuite l’une des plus hautes autorités du clergé français, « Mgr Gerlier, primat des Gaules – quelle fâcheuse consonance ! – qui se permet de jouer au conseiller d’État et se mêler aux affaires de César. Monseigneur n’aime point l’antisémitisme. Monseigneur n’est pas révolutionnaire. (…) Il est démocrate et pluraliste, comme on dit. Bref, Monseigneur est, à sa manière, un dissident » ². Fustigeant le chef de l’Action française, Combelle n’y allait pas davantage de main morte : « M. Maurras a été antisémite et antidémocrate pour son bonheur et pour le nôtre. Mais, pour son malheur et pour celui de la France, M. Maurras reste germanophobe. La France, pour lui, c’est le félibrige » ³. « Révolution » est sans doute le mot qui revient alors le plus souvent sous sa plume : « Nous sommes, ou les acteurs, ou les témoins, selon une bonne ou une mauvaise fortune, d’une révolution mondiale, d’une révolution qui est née très exactement sur notre continent, dans cette Europe qui, pour notre orgueil, continue à étonner le monde » 4. « Grand garçon, intelligent, très cultivé, avec l’esprit caustique, bon avec les copains, plutôt désagréable avec ceux qui lui avaient fait dans les bottes, Combelle cultivait une pointe de cynisme » 5 : c’est ainsi que le décrit Henry Charbonneau, venu, comme lui, de l’Action française.
Après la guerre, Lucien Combelle présentera naturellement un profil nettement moins tranché. Ainsi, lors de l’émission « Apostrophes » (1978), il évoqua le « jeune fasciste sincère, de bonne foi et naïf » qu’il fut. C’est seulement chez le juge d’instruction, ajouta-t-il, qu’il découvrit ce qu’est la responsabilité des intellectuels. Philippe Alméras, qui l’avait rencontré, lui aussi, dans les années quatre-vingts, garde le souvenir de sa grande prudence : « Comme tous les ébouillantés de la Libération, il craignait l’eau froide 6 ». Céline entretint avec lui une relation du même type (un peu paternelle) que celle qu’il noua avec Henri Poulain, le secrétaire de rédaction de Je suis partout. D’une vingtaine d’années leur aîné, il ne craignait pas de les morigéner dès que paraissait dans leur journal respectif un article qu’il désapprouvait. Ainsi, à propos de cet éditorial sur (ou plutôt contre) Maurras : « Combelle fait l’enfant. Il sait aussi bien que moi l’origine de l’horreur de Maurras pour l’Allemagne – le Racisme 7. » Ou à propos d’un compte rendu du livre, Pétition pour l’histoire, d’Anatole de Monzie : « Tu dédouanes Monzie à présent et son histoire ? La merde est à ton goût ! Rien de plus pourri que ce vieux pitre – membre de la Ligue des Droits de l’Homme – membre de la Lica – grand ami de Lecache et Jean Zay ! » 8. Les exemples sont nombreux… Contrairement à Poulain, exilé en Suisse, Combelle reverra Céline. C’est seulement à la parution d’Un château l’autre qu’il reprit contact. « Tout ceci ne nous rajeunit pas ! » 9, lui répond Céline, une dizaine d’années après la tourmente qui les vit embastillés l’un à Copenhague, l’autre à Fresnes.
Marc LAUDELOUT
Notes
1. Lucien Combelle, « Avec ou sans prières », Révolution nationale, 22 août 1942.
2. Id., « Où en sommes-nous ? », Révolution nationale, 26 septembre 1942.
3. Id., « La France de M. Maurras », Révolution nationale, 31 mai 1942.
4. Id., « Ceci commande cela », Révolution nationale, 8 mai 1943.
5. Henry Charbonneau, Les mémoires de Porthos, La Librairie française, 1981 (rééd.).
6. Philippe Alméras, « Lucien Combelle relaps », Le Bulletin célinien, janvier 2006.
7. Lettre du 31 mai 1942 in L’Année Céline 1995, Du Lérot-Imec Éditions, 1996, p. 122.
8. Lettre du 21 août 1942, Ibidem, p. 127.
9. Lettre du 12 août 1957, Ibid., p. 154.
Bibliographie
Lucien Combelle est l’auteur de six livres : Je dois à André Gide (Frédéric Chambriand, 1951) ; Chansons du Mirador (Frédéric Chambriand, 1951) ; Prisons de l’espérance (ETL, 1952) ; Louis Renault ou un demi-siècle d’automobile française (La Table ronde, 1954) [signé d’un pseudonyme : Lucien Dauvergne] ; Péché d’orgueil (Olivier Orban, 1978) et Liberté à huis clos (La Butte aux cailles, 1983). Sous le titre « Céline, le pérégrin », il a préfacé un recueil de textes de Céline (Le style contre les idées, Complexe, 1987). Il a également écrit le scénario d’une bande dessinée de José Fernandez Bielsa, Quand les héros étaient des dieux (Dargaud, 1969). Au début des années 80, il avait l’intention d’écrire, en collaboration avec Laurence Granet, un Panorama des écrivains de l’Occupation ; le projet n’a pas abouti. En 1997, Pierre Assouline lui a consacré un livre, Le fleuve Combelle (Calmann-Lévy). L’année suivante, Lucien Combelle lui accorda une série de cinq entretiens dans le cadre de l’émission À voix nue sur les ondes de France-Culture (25-29 juillet 1998). Le 1er décembre 1978, à l’occasion de la parution de son livre de souvenirs, Péché d’orgueil, il participa – aux côtés de Henri Amouroux, Raymond Bruckberger, Jean-Luc Maxence et Dominique Desanti – à l’émission Apostrophes de Bernard Pivot sur le thème « Les intellectuels et la collaboration ». Il donna également son témoignage dans le film documentaire d’Alain de Sédouy et Guy Seligmann, Paris l’outragée (Antenne 2, 1989). On trouvera dans L’Année Céline 1995 (Du Lérot, 1996) la correspondance que lui adressa Céline, présentée et annotée par Éric Mazet. Plusieurs ouvrages retracent brièvement son itinéraire : Dictionnaire Céline de Philippe Alméras (Plon, 2004), Dictionnaire commenté de la Collaboration française de Philippe Randa (Jean Picollec, 1997) et Histoire de la Collaboration de Dominique Venner (Pygmalion, 2000). Sur son activité sous l’Occupation, on lira le livre de Jeannine Verdès-Leroux, Refus et violences. Politique et littérature à l’extrême droite des années trente aux retombées de la Libération (Gallimard, 1996), qui s’appuie sur une lecture de ses articles de l’Occupation.
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Archives de SYNERGIES EUROPÉENNES - VOULOIR (Bruxelles) - Mai 1986
Robert Steuckers:
Jacques Marlaud et le renouveau païen en France
Le néo-paganisme européen est une jungle de concepts; pour le comprendre sous tous ses angles, il faut une connaissance approfondie des mythologies européennes, des théologies qui, sous une couverture chrétienne, renouent avec le non-dualisme anté-chrétien (Sigrid HUNKE), des littératures populaires et romantiques qui traduisent de manière romanesque ou poétique des fragments de cette vision inépuisable de l'immanence du divin. La tâche n'est pas mince et l'on n'est pas prêt de découvrir, à l'étal des libraires, une encyclopédie définitive de ce monde foisonnant de diversité.
Heureusement, Jacques MARLAUD vient de combler cette lacune, partiellement seulement (mais c'est une première étape), avec son livre, Le Renouveau païen dans la pensée française (réf. infra). La démarche de MARLAUD débroussaille la partie française contemporaine de ce continent oublié qu'est le paganisme. Sa démarche est ainsi limitée dans le temps ("la pensée contemporaine") et dans l'espace (la France). Son point de départ est la mise en évidence d'une antithèse philosophique: celle de l'idée païenne contre la pensée rationalisante. Aux schémas des rationalismes, MARLAUD oppose le retour du mythe, donc d'un polythéisme, plus apte à saisir la multiplicité du réel. Pour lui, l'utopisme et la désacralisation du monde sont les produits de l'individualisme, avatar idéologique du principe religieux judéo-chrétien du "salut individuel". A l'ère post-rationnelle, le substrat païen resurgit, à travers la croûte, le superstrat judéo-chrétiens. Les modes de vie imprégnés de christianisme, le moralisme rigide, les normes sociales sont désormais battus en brèche et ne créent plus de consensus. Et si le consensus de demain en venait à se référer au "substrat" plutôt qu'au "superstrat"?
Le résultat de ce grouillement néo-païen, c'est l'émergence progressive d'une "philosophie de l'affirmation inconditionnelle du monde", dit Jacques MARLAUD. Elle se repère chez Clément ROSSET, mais seule- ment dans le chef de l'individu et non à l'échelle collective, non chez ceux qui ont volonté de bâtir une autre Cité, imperméable aux absolus étrangers au substrat, aux absolus moribonds du superstrat d'hier.
Après avoir esquissé les grandes lignes de ce néo-paganisme, MARLAUD passe en revue les écrivains contemporains qui se situent dans cette mouvance: MONTHERLANT, GRIPARI (père d'un nihilisme déculpabilisateur qui se gausse avec espièglerie des rationalisations moralisatrices), PAUWELS le Faustien qui a "vacillé" à cause de la reaganite affligeant les médias parisiens et, enfin, Jean CAU l'anti-bourgeois qui a donné un visage enchanteur à cet existentialisme que CAMUS et SARTRE avaient rendu si lugubre.
MARLAUD survole alors la littérature française et y repère les germes de paganisme. Dans ce survol, il n'omet pas le divin RABELAIS. Et pour terminer, il passe en revue le travail de la "Nouvelle Droite" qui a popularisé, en France, les thématiques du paganisme et des racines indo-européennes. Un livre à lire pour fonder le consensus de demain...
R.S.
Jacques MARLAUD, Le Renouveau païen dans la pensée française (Préface de Jean CAU), Le Labyrinthe, Paris, 1986, 271 pages, 145 FF.
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Par Unité Populaire : http://unitepopulaire.org/
« Ça m’étonne. Moi, si passionné par les Noirs américains et si fanatique de l’Afrique en général, je reste de marbre face à l’élection historique de Barack Obama... Ça ne me fait strictement rien. Aucune émotion, pas un tressaillement de bonheur. Suis-je devenu insensible ? Normalement, ça aurait dû me faire plaisir que le petit Blanc McCain se fasse mettre par le grand Noir Obama, je ne comprends pas... Je regarde autour de moi, ce sont des torrents de larmes. Un Noir enfin à la Maison Blanche ! Les plus durs à cuire fondent d’extase. Les incrédules sont à genoux en train de remercier le Ciel, les défaitistes chantent victoire, les revenus de tout y repartent. Pour les uns, l’élection d’Obama, c’est plus fort que le premier homme qui a marché sur la Lune. Pour les autres, c’est plus constructif que la destruction du mur de Berlin. (...)
Tout le monde adore Obama, alors forcément je suis contre... Quel rabat-joie ! Je suis bien bête de ne pas profiter de cette joie mondiale. C’est peut-être à cause de tout ce que j’entends comme conneries...Vincent Cassel dit que "tout à coup, on a envie de vivre aux États-Unis". Rama Yade minaude : "Nous sommes tous Américains, cette fois, on peut le dire dans le sens positif." Le roi du storytelling, Christian Salmon, se pâme : "Avec lui, l’Amérique qu’on aime est de retour ! ". Quant à Dorothée Werner, laide éditorialiste de Elle, elle danse carrément la samba dans sa cuisine : "Comment résister à l’euphorie qui gonfle le monde ? " D’ailleurs, pour toutes les mouilleuses du Elle, Obama c’est Cassius Clay + Robert Redford + Steve McQueen. Pourquoi ne pas ajouter James Dean et Gérard Philippe ? De plus en plus blanc à force d’additions ! Ce qu’elles veulent dire, ces blanchâtres, c’est que, dans leur idéal de Noir, Obama est une somme de soustractions : c’est Malcolm X – George Jackson – Frantz Fanon – Bobby Seale – Angela Davis... Le pompon a été décroché par Philippe Val affirmant sans rire qu’avec Obama élu, c’est enfin le XXIe siècle qui commence ; Ben Laden et son 11-Septembre, c’était encore du XXe ! D’accord, mais que des sans-couilles l’adorent ne suffit pas à expliquer que je ne bande pas. (...)
En France, le racisme est à peine caché sous l’antiracisme consensuel et les tollés des faux-derches franchouillards qui se cabrent au moindre mot de travers. En France, les racistes sont avant tout ceux qui se réjouissent qu’un Noir soit élu du moment qu’il est noir, parce que pour eux tous les Noirs se ressemblent. (...) Fin du racisme, tu parles ! Comme si les Noirs n’allaient plus être persécutés grâce à l’élection d’Obama ! On a vu comment les Arabes vivent sous le règne de Rachida Dati ! Dès qu’un métèque a un petit pouvoir, il ne pense qu’à une chose : faire du zèle contre sa race, pour montrer aux Blancs qu’il n’est pas un métèque justement, et qui paie les pots cassés ? Les autres métèques, ceux sans pouvoir ! Classique. Au pays des antiracistes auto-éblouis, le seul qui reste mesuré dans son obamania, c’est le président... Vexé comme un pou. Obama démode Sarko, Michelle écrase Carla . Premier président juif français, c’est bien. Premier président noir américain, c’est mieux. Sarkozy, qui pensait en 2007 innover dans le genre jeune loup vulgos libéralo-people s’est fait doubler un an et demi après. Comment rattraper le retard soudain pris ? En foutant des Noirs partout ! "Ne me cachez plus ces minorités visibles qu’en temps normal je n’aurais su voir..." (...)
"Obama a réalisé enfin le rêve de Martin Luther King ! " Le hic, c’est que dans son I have a dream, King disait textuellement qu’il ne voulait pas que "les gens soient jugés pour la couleur de leur peau, mais pour le contenu de leur personne". Pour quoi d’autre est jugé Barack Obama aujourd’hui ? Ce sont ses deux grands-mères qui le définissent le mieux. La première est une grosse mama qu’on a vu danser de joie en boubou dans son bidonville de Kogelo... le drapeau yankee flottant sur le Kenya. Le Kenya, terre de safaris pour beaufs, est un des rares pays d’Afrique qui ne présente aucune espèce d’intérêt. Seule la Centrafrique est plus nulle encore. Rien ne peut sortir de bon du Kenya, à part quelques Massaï qui d’ailleurs n’en sortent pas. La seconde grand-mère d’Obama, une Blanche, a toute sa vie tremblé de peur en croisant des Noirs dans les rues de Kansas City. Elle est morte la veille de son élection. Quand elle a senti que c’était inéluctable, mémé a préféré mourir... Elle ne voulait pas voir ça : un négro à la Maison Blanche, fût-ce son petit-fils !
C’est son programme peut-être qui me débecquette... Sa gestion de la crise financière ne laisse aucun doute : monsieur ne pense qu’à subventionner les banques, il veut réparer le capitalisme lui aussi, mais à l’avantage des riches. Sa priorité : rassurer les gros portefeuilles provisoirement à sec. Comme tout pratiquant du capitalisme, il est à genoux devant les banques avec l’excuse que la Banque n’est pas plus démocrate que républicaine, elle est la Banque. C’est comme Dieu, il n’est ni de gauche ni de droite, il est Dieu. Et aujourd’hui, Dieu, ce sont les trusts. Sur le dollar, il y aura bientôt écrit : In Trust we trust. C’est le pantin de l’Usure. Obama veut "sauver l’économie", c’est-à-dire les firmes et entreprises, avec la même rengaine fredonnée partout depuis le krach de septembre 2008 : "Sauvons les patrons et ils vous trouveront du boulot !" sauf que une fois que les pauvres auront aidé les riches à se renflouer, Obama et les autres chefs leur diront : "Sorry ! Il ne reste plus rien pour vous, chers pauvres... Next time ! " Pauvres pauvres !
Sur le plan international, Obama va être pire que Bush. Il suffit de voir son équipe. Tout ce qu’il a trouvé, c’est Hillary Clinton et Mme Albright, toutes les deux hyper contre Saddam, faiseuses d’anges irakiens, archi pour les guerres de 1991 et de 2003... Obama a même poussé le vice jusqu’à vouloir engager Colin Powell ! Oui la salope de l’anthrax ! Juste parce qu’il est noir, soi-disant... Pourquoi pas Condoleezza Rice ? Elle aussi est bronzata, comme dirait Berlusconi. Quel raciste, cet Obama ! Sans arrêter de sourire, il enverra plus de Noirs sur la chaise électrique, histoire qu’on ne l’accuse pas de chouchoutage... Obama va aussi travailler avec les mecs de McCain et prendre comme conseiller Joseph Biden, le stratège de John Kerry... James Jones à la Sécurité, Robert Gates à la Défense, Timothy Geithner au Trésor... Jolis messieurs ! Ce n’est plus de l’ouverture, c’est de la béance... Et ça prouve bien que dans son esprit de collabo, la politique c’est bonnet noir, noir bonnet. Tout l’espoir d’une "nouvelle Amérique" a été absorbé par sa stupéfaction d’avoir élu un Noir. Il n’y aura plus de place pour un autre "changement". Ça m’étonnerait beaucoup que le nouveau président annule le Patriot Act. À la limite, il fermera Guantanamo, qu’est-ce que ça peut lui foutre puisque d’autres pénitenciers arbitraires s’ouvriront ailleurs, directement dans les pays ennemis. Il parle déjà de rayer l’Iran de la carte. (...)
L’Irak. Obama annonce un retrait définitif des troupes pour 2011. Évidemment, ce sera reculé à 2012 où il sera remplacé par un autre salaud qui, lui, les maintiendra ! Pour le reste, son objectif est avoué dès le début : capturer Ben Laden ! Oui, cet abruti d’Hawaïen en est resté là. L’Afghanistan. Obama va y envoyer bien plus de soldats encore que Bush et ceux-là seront prélevés en Irak. Vases communicants ! Et s’il n’y en a pas assez, il en tapera à ses chers alliés qui ne pourront rien refuser à un Noir président de l’Amérique, ce pays exemplaire ! Pour finir, son directeur de cabinet est déjà nommé : Rahm Emmanuel, un engagé volontaire dans l’armée israélienne en 1991... Soyons clair : une rampouille sioniste à se damner. Pendant toute sa campagne, Obama a réitéré son soutien indéfectible à Israël. Il veut une Jérusalem israélienne, et des renforts de troupes sur le saint terrain occupé par ces sales Palestiniens... Tout pour Israël ! 78 % de Juifs Amerloques ont voté pour lui. On peut leur faire confiance: ils n’auraient pas élu un nègre s’ils n’avaient pas été sûrs qu’il soit leur man ... Non, tout ça, c’est encore du procès d’intention...
Ça y est. J’ai trouvé. Ce qui me gêne chez Obama, c’est que grâce à lui l’Amérique va redorer son blason de merde ! Yes he can, ce con. J’ai compris à quoi il va servir, ce faux Noir. L’Amérique reprend du poil de la bête, autant dire qu’elle va bientôt s’arracher les cheveux puisque la bête, c’est elle. "L’Amérique se réconcilie avec elle même et avec le monde ! " Ah, bon ? Je connais des milliards d’individus qui n’ont pas du tout envie de se réconcilier avec ce pays d’ordures... Pour en arriver à élire un Noir, c’est que les Yankees étaient à bout... Obama n’a pas été élu parce qu’il était Noir, mais parce que les Blancs au pouvoir ont compris qu’en mettant un Noir devant, l’Amérique allait pouvoir revenir au 1er rang en effaçant ses saloperies. Son image était tellement noircie par ses crimes qu’il fallait bien un Noir pour la nettoyer. Obama blanchit l’Amérique. Obama ne s’en cache pas : il veut redonner "la stature morale" de l’Amérique. En a-t-elle déjà eu une depuis le premier jour où les Espagnols débarquant ont tiré à l’arquebuse sur les Indiens venus leur apporter des fleurs sur la plage ? L’Amérique sera toujours porteuse de guerre et de mort. Kafka avait tout compris: au début de son roman L’Amérique (1911), ce n’est pas un flambeau que le héros voit dans la main de la statue de la Liberté, mais un glaive...
L’Amérique se fout d’Obama, ce qu’elle voulait, c’est faire semblant aux yeux des autres de se laver de Bush alors qu’elle l’a plébiscité deux impardonnables fois. Ne pas oublier que les pires bushistes sont ceux-là mêmes qui ont voté Obama. Logiquement, il ne devrait pas y avoir assez d’oreilles pour mettre toutes les puces dedans. Personne ne semble trouver anormal que les néoconservateurs pro-Bush se soient métamorphosés en obamiens de la vingt-cinquième heure. Il y a pourtant une raison à cela : pour mieux ré-enculer le monde, il fallait à l’Amérique un nouveau gode. Une rédemption de l’Amérique par un Noir ? Je n’y crois pas une seconde. C’est le plus mauvais cadeau fait aux vrais Afro-Américains. (...)
Il va déculpabiliser l’Amérique à peu de prix, car on s’extasie qu’il ait pu devenir président, mais qu’est-ce que c’est qu’être président des États-Unis ? C’est rien comme honneur dans le monde, c’est minable comme fonction, c’est la grosse honte ! Le plus beau jour de la vie d’un Noir, c’est d’entrer à la Maison Blanche, c’est ça le summum de la gloire ? C’est encore se soumettre en esclave, se faire reconnaître par le maître blanc, lui prouver qu’on est respectable comme lui, qu’on est son égal. Il n’était pas esclave, il vient de le devenir. Il a l’air ravi d’être enfin devenu l’esclave de l’Amérique. Le métis avait un complexe de n’être pas un bon nègre au service du maître. "Oncle Tom cherche Oncle Sam ! " Le Destin a répondu à sa petite annonce. Je sais maintenant pourquoi ce Noir me laisse froid. »
Marc-Edouard Nabe, 20 janvier 2009 (ce texte a été placardé sur les murs de Paris sous forme d’une grande affiche, selon la grande tradition révolutionnaire du pamphlet)
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La revelación de Emile Ciorán
Abel Posse
Después de muchas horas de diálogo con Emile Ciorán, me pregunté cuál es el secreto de su atracción intelectual.
Aparentemente su negación de la filosofía académica y su defensa de un pensamiento Independiente hasta el borde de lo anárquico, podría parecer más bien un episodio final del modernismo romántico. ¿Por qué inquieta Ciorán? ¿Por qué crea adeptos mas bien rechazándoles? Se deslizó durante décadas como un antifilósofo, estimado por escritores y por un público heterogéneo pero ninguneado en el plano de la filosofía oficial, académica, "seria". ¿Cuál es la clave de su sobrevivencia y de su éxito final?
La fascinación de Ciorán a través de sus libros (y particularmente de esa obra central que es La Tentación de Existir, que acaba de ser reeditada por "Tauruo" en la magnífica traducción de Fernando Savater) se entra en subversiva sospecha del autor contra la sacralidad, la intocabilidad, el orgullo, de la condición humana misma.
Lo que nos deja Ciorán, después de la lectura de La Tentación de Existir, La Caída en el Tiempo o El Aciago Demiurgo es la de que el hombre bien podría ser tratado como un animal descastado, un indigno cósmico, en vez del semidiós, "la criatura, a su imagen y semejanza", etc,.a que se tiene acostumbrado. Es como si el hombre, a partir de Ciorán, empezase a ser considerado como una pieza de discordia cósmica, un tonto o un energúmeno infatuado que en el fondo lleva a la enfermedad y la destrucción de todo lo que toca: sean sus, pares o el planeta mismo que habita.
Lo que creo que no se expresó claramente en torno a Ciorán es que es tino de los primeros filósofos que nos dice que el hombre es una causa detestable, un asesino que se cree lleno he cualidades bondadosas.
La ética, hasta ahora, fue la respuesta creada por el hombre ante la sospecha (y la evidencia) de sus malas inclinaciones. Más allá de la respuesta de la ética está Ciorán ?que aunque no lo quiera está directamente ligado a Nietzsche? y que nos dice que el factor criminal del hombre, su destructividad, es la verdadera revelación del siglo XX: el hombre, a través de la tecnología, manifestó su verdadera faz inmoral, definitivamente pérfida: esto es el siglo de los campos de concentración, del hipócrita y cotidiano genocidio, Norte-Sur, de Hiroshima, y más que nada de la destrucción, del orden natural del planeta Tierra a través del desequilibrio ecológico, la contaminación, el definitivo avasallamiento del ritmo de la biosfera, de los animales y las plantas: por una especie triste, neurótica, infatuada, que ni siquiera obtiene placer de sus crímenes.
No es extraño que el ensayo La Tentación de Existir sea una crítico de ese, supuesto favorable a la vida humana y a la bondad del hombre que baña su hipocresía toda la cultura o incultura de Occidente.
Dice Ciorán: “Habiendo agotado mas reservas de negociación, y quizás la negociación misma, ¿por qué no debería yo salir a la calle a gritar hasta desgañitarme que me encuentro en el umbral de una verdad, de la única válida?"
Esa verdad que conmueve a Ciorán, lo separará para siempre de los bien pensantes del mundo (desde Sartre hasta Russell).
La solitaria repulsa de Ciorán se origina en este hecho central: al descalificar al hombre como ente privilegiado, loable, admirable y salvable, condena a muerte la tarea de esos filósofos del hombre, habitantes del ghetto del optimismo.
Ciorán en realidad es el primer filósofo que deja de ser "oficialista" del partido del hombre. Se pone más allá de esa obligatoria y engreída "conciencia de humanidad". Rompe el contrato, invita a que nos unamos a la opinión que de nosotros podrían tener nuestras víctimas: las plantas, los mares, los exterminados tigres de bengala, los místicos, las aves.
¿Por qué el hombre no va a ser algo prescindible en el orden de lo creado?
¿Cuál es la verdadera lectura de ese libro que sigue siendo secreto y que se llama la Biblia: qué quiere decir la parábola del ángel rebelde, la de Caín, la de la expulsión del Paraíso? ¿hemos leído bien la Biblia?
Ciorán niega al hombre actual seguir postulándose arrogantemente y sin dudas como candidato al Paraíso. Ciorán nos dice lo que muchos podemos sentir al culminar este siglo involutivo: el hombre no solamente no merece el Paraíso sino que lo saquea y destruye. Es definitivamente un animal dañoso con peligrosísimas aptitudes...
En un tiempo de pensamiento público pervertido por el lenguaje equívoco de la política y de los grandes intereses, la filosofía -la fracasada Filosofía, arrinconada a mera materia de examen, o a prestigiosa antigualla?, cobra una importancia dramática: junto con el arte y la religión son los únicos espacios de resistencia que nos quedan ante la presión cosificadora. Cosificadora no sólo por el materialismo de una "sociedad de cosas" sino porque esa sociedad termina cosificando a su protagonista, el que debería haber sido su beneficiario.)
La filosofía es guerrilla, como afirma Gilles Deleuze. Es resistencia y ataque ante un enemigo demasiado poderoso, por el momento de apariencia invencible. La guerrilla se arma en silencio y golpea cuando y donde puede.
Es el retorno al Ser y a sentirnos ser pese a la desolada, sometida versión de nuestro ser social, mejor: de nuestro aparecer.
El desdoblamiento entre el yopúblico, como escribió Bergson y el yo profundo, es un fenómeno cultural que se agudiza en este tiempo de extraordinarias y velocísimas mutaciones.
La reflexión es el mecanismo natural, privadísimo, de soldar esa peligrosa ruptura. Filosofar empieza por ser un poner esa reflexión, saber conducirla hacia objetivos. Nuestro sentimiento de existir en cuanto yo (y no en cuanto ese otro del yo publico). Filosofar es existir. En la reflexión íntima nos sentimos existir, nos sentimos en el mundo. La reflexión en estos tiempos tiene in valor similar al de la oración en este caso correo el sentimiento intimo del estar con dios, sin Dios o ante Dios).
Filosofar es existir. Nunca como ahora, en tiempos del yo volcado hacia afuera, vale y tiene tanto peso aquel cartesiano cogito, ergo sum (pienso, luego existo).
Ciorán es el gran guerrillero. Es un ejemplo de resistencia pensante. Piensa como resultado de una reflexión necesaria en un mundo en que la vida que se nos propone, tanto como las ideas hechas en torno a las que nos seguirnos moviendo, nos llevan a la despersonalización, a ese mundo de no?yos, de yos de los otros.
Frente al pensamiento de los frívolos y ruidosos noveaux philosophes de la decadencia cultural francesa, o ante las parrafadas previsibles de Popper (que en nombre del liberalismo democrático oculta la realidad del genocidio económico del tercer mundo), Ciorán se alza como el representante privadísimo e insobornable de la verdadera filosofía: coraje para el compromiso con la verdad, o mejor, con lo verdadero. Hemos llegado a tal punto de ceguera subcultural que Ciorán, el negativo se erige en posibilidad de dignificación.
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À propos de Céline et Karl Epting
On conviendra qu’en étant l’éditeur, il m’est difficile de commenter le livre sur Céline et Epting ¹. Aussi je me bornerai à évoquer quelques réactions vues dans la presse et surtout sur la toile. Le tirage limité imposa un service de presse réduit et, ipso facto, la réception critique.
P.-L. Moudenc note que « Céline épistolier s'y montre tel qu'avec la plupart de ses autres interlocuteurs : surtout préoccupé de réalités matérielles, obtention de papier pour la publication de ses livres, visas pour se rendre au Danemark en passant par Berlin, paiement de droits d'auteur par son éditeur allemand. À l'occasion, il présente une requête pour un ami victime de la censure. S'il se risque à des considérations plus générales, c'est pour déplorer, en juillet 1943, que la collaboration ait été ratée “ par erreur et sottise dès le début, et entêtement et prétention par la suite ”. Nul propos antisémite ou vraiment raciste — sinon une interrogation sur l'hypothétique ascendance de Racine “ dont le théâtre n'est qu'une fougueuse apologie de la Juiverie ”, antienne reprise depuis Bagatelles. En ce domaine, pas grand-chose à se mettre sous la dent. Tant pis pour les ennemis forcenés d'un Ferdinand prétendu doctrinaire. Voire, comme le prétendait l'Agité du bocal (Sartre), stipendié par les nazis. Les textes d'Epting, écrits entre 1944 et 1963, sont ceux d'un témoin qui a saisi l'importance quasi universelle de l'écrivain dans la littérature de son siècle : “La critique culturelle de Céline, écrit-il à juste titre, représente l'un des grands contrepoints au développement de la civilisation rationaliste, technique et industrielle des années 1930 et 40, au témoignage plus profond et humain que des centaines d'analyses sociologiques, dont nous avons pu prendre connaissance depuis.” » ².
Ce que Moudenc trouve négligeable est, au contraire, mis en évidence par Pierre Assouline sur son blog. Son commentaire est, en effet, intitulé : « Quand Louis-Ferdinand Céline dénonçait Racine aux Allemands ». À propos de la publication de cette correspondance, il estime qu’elle vaut le détour pour deux raisons : « D’abord parce que l’auteur Frank-Rutger Hausmann, professeur de langue et littérature française à l’université de Fribourg-en-Brisgau, y apporte l’éclairage qui manquait sur la personnalité et les idées de Karl Epting, personnage clé de la collaboration intellectuelle franco-allemande sous l’Occupation, directeur de l’Institut allemand qui ouvrit ses portes dès le 1er septembre 1940 en l’hôtel Sagan, rue de Talleyrand (VIIème) afin d’y organiser des expositions, des conférences, des concerts et y recevoir le gratin littéraire parisien qui le bouda d’autant moins que la propagande pour la Nouvelle Europe avait le bon goût de n’y être pas ostentatoire. Epting, parfait francophone (difficile de parler de francophilie quand celle-ci arrive juchée sur des chars) fut un célinien inconditionnel dès la parution du Voyage au bout de la nuit en 1932 et le resta jusqu’à sa mort. Manifestement “ensorcelé” par l’écrivain, il admirait en lui l’héritier de Rabelais. Il ne cessera de le défendre contre ses compatriotes (Abetz, Payr…) qui lui reprochait son style hystérique, vulgaire, populaire et ordurier, pour ne rien dire de l’immoralité du fond. Quelques articles de ce célinien absolu sont reproduits à la fin. » À propos des soupçons de Céline à l’égard de Racine, il précise que « naturellement, la généalogie de Jean Racine a été maintes fois étudiée, par Raymond Picard notamment, et cette spéculation y est évoquée comme peu probable, ainsi que l’indique Arina Istratova dans ses précieuses notes en bas de page. Elle y rappelle également, en puisant aux meilleures sources, que si la Comédie-Française a bien monté entre 1940 et 1944 huit pièces de Molière et six de Corneille, il n’y en eut que deux de Racine (Andromaque et Phèdre) ³ ». L’intérêt du blog d’Assouline, l’un des plus fréquentés de la blogosphère, c’est qu’il reproduit les commentaires des internautes. Cette note de lecture en a suscité d’abondants, le pire côtoyant le meilleur. Comme on s’en doute les anticéliniens primaires n’ont pas manqué de se déchaîner. Bref florilège : « Je suis toujours étonné, pour ne pas dire scandalisé, que l’on puisse encore apprécier un tel type !!! » ; « Comment un esprit aussi épais dans sa vie ne le serait-il pas dans ses écrits et, de fait, il l’est, épais, son style est époustouflant mais sa voix d’auteur est obsessionnelle, paranoïaque, elle le révèle. » ; « Ce type relevait de la psychiatrie et d’un traitement carabiné. » ; « Ce vieux couillon blême de Céline, s’il avait pu lire, de Shlomo Sand, Comment le peuple juif fut inventé (Fayard), il l’aurait sans doute moins ramené sur le sujet… » ; « Encore Céline ! Cet espèce de con monstrueux, avare et grossier personnage ! Les propos de Céline sont toujours du même niveau, et dans tous les domaines. Il faut vraiment en avoir une sacré dose pour croire que cet idiot ait été un écrivain. Lâchez nous un peu les baskets avec ce monstre de foire ! ». Fermez le ban !
Assurément plus nuancé, et tout aussi révélateur, le commentaire suivant : « Je me souviens, ayant lu Les Idées de Céline d’Alméras et sa biographie, n’avoir pu rouvrir aucun des livres de Céline pendant des années, rejet que n’avaient produit ni le Vitoux ni le Gibault. C’est l’enthousiasme d’un de mes amis, relisant Mort à crédit, qui m’a incité à le reprendre. Je l’ai relu en deux jours, estomaqué par son génie. En fait, le problème de Céline est insoluble. Il est sans excuses et il est immense. Il est aussi souvent délirant, c’est très frappant dans les Lettres de prison, comme s’il était allé trop loin dans l’exploration de la réalité, si loin qu’il ne s’agit plus du tout de réalité mais d’un magma puant d’où s’exhalent de préférence les pires saloperies. La question de Racine semble au premier abord à part, bouffonne, sans grande portée. Est-ce qu’il ne se fout pas un peu du monde en dénonçant un écrivain mort depuis près de 250 ans ? Sinon, je serais tenté d’y voir un acte de soumission absolue au vainqueur, un reniement total de sa propre culture et de ses fondements, à peu près sans exemple, bien moins drôle qu’il n’y paraît d’abord et finalement très grave. Imagine-t-on un Allemand, au cas où la France aurait occupé l’Allemagne, allant dénoncer Goethe ? ».
Sur un autre blog 4, un célinien, lui aussi anonyme mais reconnaissable entre tous comme nous l’avons déjà écrit, s’interroge : « Epting, francophile ? C'est passer sous silence les livres qu'il écrivit contre les Français entre 1934 et 1940 sous divers pseudonymes. Epting, “conservateur chrétien” parce qu'il écrit après guerre dans un journal qui a pour titre Christ und Welt – mais qui était dirigé par l'ancien rédacteur en chef de Signal 5 ? Hum… C'est blanchir Epting pour noircir Céline ? Ce n'est pas de sang dont parle Céline à propos de Racine, mais de nom, d'ancêtres, et d'inspiration poétique, d'un théâtre reposant sur le thème de l'amour, en opposition aux pièces de Corneille ou de Molière. » Quant à Philippe Alméras, cité par Assouline dans son commentaire, notre internaute ne décolère pas et en profite pour cibler, mais sans les nommer ceux-là, de prétendus céliniens : « Alméras, spécialiste de Céline ?... Pas moins qu'un autre… mais pas plus qu'un autre… et on en compte un nouveau tous les ans, tous les six mois, de spécialiste de Céline… à chaque nouveau livre... Il suffit de ressortir des lettres déjà publiées il y a vingt ans, d'y ajouter trois photos jusque là éparpillées dans diverses publications, d'appeler le tout “dossier inédit”, d'envoyer le tout à divers journalistes qui n'ont pas le temps de vérifier la qualité de la marchandise, et vous voilà consacré “spécialiste de Céline” auprès des néophytes. Ce n'est pas très nouveau. C'est la loi du commerce et de la publicité. C'est ce qu'on appelle aussi de la compilation et de la divulgation. Rien à voir avec la recherche. De la divulgation, il en faut, bien sûr... C'est même essentiel... Mais faudrait tout de même pas confondre. Le Dictionnaire Céline d'Alméras, sous son beau ramage et son beau plumage, est inutilisable par les étudiants ou les chercheurs céliniens tant il recèle d'erreurs, de contrevérités, de partis pris, d'approximations, de citations tronquées, d'interprétations fallacieuses et spécieuses. Un livre entièrement à refaire. Pas à corriger ! à refaire ! Les gens sérieux pourront faire la comparaison avec le Dictionnaire de Gaël Richard. Les jésuites diront : “C'est pas pareil...” En effet, ce n'est pas pareil ! Il y a le travail de première main et celui de seconde main. La recherche et la compilation. »
Revenons à Epting à propos duquel Frédéric Saenen se demande si « les premiers germes d’un célinisme digne de ce nom » ne seraient pas apparus sous sa plume : « On serait en droit de se poser la question, au vu de la pertinence des analyses qu’il développe, notamment dans ses articles au quotidien Christ und Welt. Sa vision de l’homme-Céline est elle aussi empreinte d’une lucidité confondante. Epting, en intitulant sa contribution aux Cahiers de L’Herne de 1963 « Il ne nous aimait pas », allait lancer une formule qui tranchait définitivement avec l’image d’un Céline thuriféraire du Grand Reich et de la Germanité. Il en profite aussi pour souligner la dynamique de cette si étonnante « contradiction intérieure » qui rendait le personnage à la fois attachant et infréquentable : « le contraste profond entre sa prise de position à l’égard des collectivités impersonnelles […], dans laquelle il pouvait être d’une cruauté qui, dans ses propos, allait jusqu’au paroxysme et son comportement à l’égard de l’individu concret, homme ou bête, dans lequel il n’a jamais cessé de rester le médecin et le protecteur. » Et Saenen de conclure : « Céline ? Un Docteur Jekyll et un Écrivain Hyde ! Cela fait soixante ans qu’on vous le dit… 6 »
Marc LAUDELOUT
Notes
1. Frank-Rutger Hausmann, L.-F. Céline et Karl Epting, Le Bulletin célinien, 2008, 146 p. Édition établie par Arina Istratova. Tirage limité à 410 exemplaires. 35 €, franco.
2. P.-L. Moudenc, « La bibliothèque célinienne s’enrichit encore », Rivarol, 19 décembre 2008.
3. Pierre Assouline, « Quand Louis-Ferdinand Céline dénonçait Racine aux Allemands », La République des livres, 12 décembre 2008 [http://passouline.blog.lemonde.fr]
4. Commentaire anonyme, 15 décembre 2008, à propos de « “ Quand Céline dénonçait Racine aux Allemands ” par Pierre Assouline », Entre guillemets…,13 décembre 2008 [http://ettuttiquanti.blogspot.com].
5. Ce sont naturellement les divers arrticles de Karl Epting publiés après la guerre qui ont permis de le qualifier de la sorte. Voir notamment sa contribution au colloque consacré, six ans avant sa mort, à Simone Weil.
6. Frédéric Saenen (article à paraître dans Le Magazine des livres).
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La hantise dont Céline est le bâtard par Philippe Delaroche :
"La lecture du Voyage au bout de la nuit produit une commotion. "Quand j'ai lu le Voyage, raconte Paul Yonnet, j'ai été traversé par ce livre, coupé en deux, en trois, en dix..." Il cessa de lire. Et il prit la route - parce que mourir ou partir, il faut choisir. Revenu à la lecture, il continua à s'interdire le Voyage. Jusqu'au jour où, menacé de cécité, le sociologue redouta d'entrer dans la nuit définitive sans avoir dissipé un doute. Il réappareilla à bord du Voyage. Même ravissement ! Livre de la révolte, "le plus complet et le plus achevé de tous les manifestes de l'Anarchie", où la vie des pauvres et la domestication - "le soldat gratuit, ça c'est du nouveau" - prend un relief inouï, le Voyage témoigne du temps où Céline invente une syntaxe pour "la douleur individuelle d'exister" des sociétés modernes.
Mais il a tout dit. L'effet de souffle est perdu dans Mort à Crédit - "roman à tics". Après quoi, toujours plus retranché, Céline vocifère et délire dans la pire solitude "car, explique Yonnet, c'est une solitude qui désidentifie". Mais l'oeuvre n'est pas née de rien. Elle condense destin personnel et fatalité collective. Céline a vingt ans en 1914. La Grande Guerre lui causa une infirmité et des bourdonnements. Il est pacifiste. Que les surenchères nationalistes relancent la guerre, voilà sa hantise. Il deviendra raciste, au motif qu'une même race vivrait en paix et, qu'à l'inverse, les nations métissées, et par là même "contre-nature", seraient des foyers de guerre civile. Manipulées par les Juifs, elles ne songeraient qu'à s'entretuer.
Ce n'est pas parce que le discours est inqualifiable qu'il faut ignorer les ressorts du délire. Chateaubriand prévoyait chez les solitaires des temps futurs "une misanthropie orgueilleuse, qui les conduira à la folie, ou à la mort". Voici Céline et sa torrentueuse colère. Ce qui le rapproche et le distingue de Zola est avéré, Georges Bernanos, autre survivant de 14-18 et issu d'un autre horizon, salua ainsi le Voyage : "Pour nous la question n'est pas de savoir si la peinture de M. Céline est atroce, nous demandons si elle vraie. Elle l'est. " L'accent de vérité s'épuisa, pas l'atrocité du traumatisme. Paul Yonnet rappelle comment, pour avoir vécu ou dénoncé un péril trop écrasant, certains écrivains ont parfois tout perdu - jusqu'à la raison."
Paul Yonnet, Le testament de Céline, Editions de Fallois, 2009.
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Ce volume constitue une édition revue et mise à jour de Céline, paru aux éditions Belfond en 1987.
Présentation de l'éditeur
" Chaque écrivain, chaque intellectuel, chaque maître à penser veut désormais se mesurer à l'auteur du Voyage, le jauger, le juger, l'accabler ou le louer ", estime Frédéric Vitoux, qui fut l'un des premiers à se risquer à cet exercice et qui pose aujourd'hui la question : " Céline serait-il l'auteur le plus notoirement méconnu de la littérature moderne ? " Ecrivain maudit ? Il était célèbre dès la publication de Voyage au bout de la nuit, en 1932. Ecrivain controversé ? Sa gloire n'a cessé de croître depuis sa mort, au point qu'il est aujourd'hui l'un des Français les plus traduits dans le monde. Ecrivain ordurier ? Son style ajouré, éclaté comme de la dentelle, en fait aussi l'un des plus précieux de notre littérature. Ecrivain consacré ? Son œuvre, à l'exception de ses deux premiers romans, reste largement ignorée. Aborder sans jargon les singularités de l'écriture célinienne. Raconter les principales étapes de sa vie. Evoquer sans complaisance aucune le signataire de pamphlets antisémites d'une violence et d'une outrance telles qu'elles indignèrent ou décontenancèrent ses détracteurs comme ses amis : tel est le triple défi relevé par ce livre. Etude objective et dépassionnée, Céline, l'homme en colère se complète de témoignages, d'une bibliographie et d'un index.
Frédéric Vitoux, Céline, l'homme en colère, Ed.Ecriture, 2009.
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Un blog consacré à Céline
Céliniens qui êtes aussi des internautes, oyez ! Un blog consacré à Céline est désormais disponible sur la toile. Il propose les entretiens filmés, des émissions télévisées et radiophoniques mais aussi des commentaires variés, des articles de presse, des photographies, des portraits, bref tout ce qu’il est possible de mettre sur Internet ¹.
L’animateur de ce blog, Matthias Gadret, n’est pas (encore) connu des céliniens. La trentaine, licencié en philosophie, « gratte-papier » dans la banlieue parisienne, il se considère comme un simple lecteur de Céline. Simple lecteur peut-être mais passionné si l’on en juge par la richesse de son blog qui accumule les informations en tous genres sur celui qu’il considère de toute évidence comme le contemporain capital. Si on lui demande quel est l’objectif de ce blog, il répond modestement : « Offrir chaque jour un petit quelque chose sur notre auteur favori ». Le plus étonnant, c’est qu’il y parvient si bien que le réflexe quotidien d’aller visiter ce blog devient familier aux internautes céliniens qui le connaissent déjà. L’avantage du blog, dit-il, est que l’outil, simple et souple à utiliser, ne nécessite aucune connaissance technique particulière. Il permet surtout aux lecteurs de réagir aisément à chaque information mise en ligne en déposant un commentaire. À ce propos, Matthias déplore que les internautes céliniens soient aussi discrets alors même que l’anonymat leur est garanti. Le fait que ce blog soit plutôt de droite – particularité peu commune parmi les céliniens déclarés – ne suscite pas davantage de réactions. Il est vrai qu’il se divise en plusieurs sections, dont l’une, centrée sur l’actualité, est davantage lue que les autres. Pas que Céline, en effet : ce fervent du 7ème art en général et de Michel Audiard en particulier propose de savoureux extraits de films mettant en valeur tout le talent du dialoguiste qui était aussi, comme on le sait, un célinien patenté.
Proche de la sensibilité identitaire, Matthias met aussi en ligne d’intéressants documents sur notre patrimoine européen. Fasciné par le Japon, il consacre aussi une part intéressante de son travail à l’empire du Soleil levant. La partie consacrée à la photographie donne à voir de beaux nus artistiques. Celle centrée sur la musique propose classique, chanson française, rock’n’roll’, airs traditionnels, etc. Bref, un blog éclectique à souhait.
En ce qui concerne Céline (qui occupe tout de même une part privilégiée avec plus de 400 « posts »), Matthias Gadret déplore que l’image de l’écrivain se résume encore aujourd’hui à celle d’un « horrible écrivain collabo-nazi-antisémite ». Il n’en veut pour preuve que l’incident survenu récemment à la Médiathèque André Malraux de Strasbourg : une citation bien anodine extraite de Rigodon a dû être effacée en catastrophe suite aux pressions émanant d’une seule personne ². Notre blogueur pense qu’il sera difficile d’aller plus loin dans la bêtise. Et de commenter sur le mode ironique : « “Dieu qu’ils étaient lourds !”, nous disait Céline il y a environ 50 ans. Ils continuent, les bougres... ». Son souhait, pour conclure : « Voir des céliniens avertis (relativement rares sur internet) réagir plus souvent, pour créer le débat, partager leurs impressions, chaque célinien ayant son Céline. » Lecteurs du BC, vous savez ce qu’il vous reste à faire…
Marc LAUDELOUT
1. Blog « Entre guillemets... » ( http://ettuttiquanti.blogspot.com ) comportant dix sections : actualités – Louis-Ferdinand Céline – livres – musique – mémoire – images – japon – humour – film – mots et proverbes.
2. Pour plus de détails, voir Le Bulletin célinien, n° 302, novembre 2008, p. 3.
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14 janvier 2009 : http://ettuttiquanti.blogspot.com/
"D'entrée de jeu, soulignons le double niveau d'interprétation qu'on peut donner à cette oeuvre : Féerie est l'expression, par l'image, d'un drame personnel de Ferdinand confondu avec Céline. En outre, ce qui arrive au narrateur, personnage cosmocentrique par excellence, adviendra au reste du monde. Féerie contient des vues sur le passé, le présent, le présent, et l'Histoire future. C'est une Apocalypse - au sens de Révélation - selon Ferdinand.
"Apocalypse" ne signifie pas seulement les tribulations catastrophiques de la fin des temps, mais la Révélation Johannique - "tout est dans saint Jean!" (1) - qui donne leur sens aux motifs tragiques. [...]
Le prophète de Féerie narre ce qu'il a vu en se disant simple témoin : le point de départ est un bombardement longuement décrit. Céline, qui se réclame de Pline l'Ancien (2) pour son esprit de sacrifice et la minutie de son observation, précise que sa perception des jardins à l'envers de Jules est "rétinien(ne)"... "du phénomène physique (3)". La vision est à la fois naturelle et surnaturelle, car elle s'inscrit dans le temps des devins :
"Confusion des lieux, des temps! Merde! C'est la féerie vous comprenez... Féerie c'est ça... l'avenir! Passé! Faux! Vrai! " (4)
L'Apocalypse célinienne concerne tous les hommes au-delà des continents historiques, tous les temps, elle embrasse présent, passé, avenir. Ainsi, après ce bombardement donné pour authentique, l'un des personnages de Féerie, le baron Solstrice, nie la réalité des faits et s'écrie:
"Il ne s'est rien passé!... vous confondez tout! (...) Il va se passer! oui! certes! il va! il va se passer! (5)
Plus tard, précise le narrateur-prophète, quand viendra le Temps, les hommes comprendront; ils conviendront alors du sérieux de l'observation:
"ils achèteront plus tard mes livres, beaucoup plus tard, quand je serai mort, pour étudier ce que furent les premiers séismes de la fin, (...) Ils savaient pas, ils sauront!..." (6)
"... quand ils déferleront au coeur! quand Técel aura été dit... Pharès! Manès!... alors on entendra quelque chose!... alors les yeux sortiront... "(7)
Source : Denise Aebersold, Goétie de Céline, SEC, 2008.
Notes
1- Féerie pour une autre fois I, p. 81, Pléiade.
2- Pline l'Ancien ou "le naturaliste" (23-79 ap.JC), auteur d'une Histoire naturelle, commandait la flotte romaine de Misène, près de Naples, lorsque eut lieu l'éruption du Vésuve qui anéantit la ville de Pompéi. Voulant observer le volcan de près, il mourut asphyxié par les émanations. L'hommage qui lui est rendu repose sur l'idée sous-jacente qu'un écrivain digne de ce nom paie un lourd tribut à la connaissance... à distance du cratère de feu s'il s'agit de Ferdinand.
3- Féerie II, p.191
4- Féerie I p15
5- Féerie II p144
6- Féerie II p191
7- Féerie II p195
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"Breton, je suis mystique, messianique, fanatique tout naturellement - sans effort - absurde - j'ai été élevé tout naturellement en catholique = baptême, première communion, mariage à l'église, etc. (comme 38 millions de Français) La foi ? hum ! c'est autre chose - comme Renan, hélas, comme Chateaubriand, en désespoir... Pire, je suis médecin - Et puis païen par mon adoration absolue pour la beauté physique, pour la santé - Je hais la maladie, la pénitence, le morbide - grec à cet égard totalement - J'adule l'enfance saine - je m'en Pâme - je tomberai facilement éperdument amoureux - je dis amoureux - d'une petite fille de 4 ans en pleine grâce et beauté blonde et santé - je hais la boisson, la fumée, les toxiques - je comprends, je crois l'enthousiasme des Grecs - Cela est fort rare en somme - Ni Popol ni tant d'autres artistes infiniment mieux doués que moi ne ressentent l'appel irrésistible de la jeunesse (même l'extrême jeunesse - saine et joyeuse) pour cela j'ai tant aimé l'Amérique ! la félinité des femmes ! Ah ! Hollywood - Ah - Goldwyn Mayer ! J'aurais donné 10 ans de ma vie pour occuper leurs fauteuils un instant ! Toutes ces déesses à ma merci ! (Renoir était bien aussi de cet avis) - Etalon très modéré, la vue, le palper, m'enchantent à souhait, m'enivrent, m'inspirent - Je donnerais tout Baudelaire pour une nageuse olympique !"
Louis-Ferdinand Céline, lettre à Milton Hindus du 23/08/1947, in Milton Hindus, LF Céline tel que je l'ai vu, L'Herne. (réédité en 2008 sous le titre Rencontre à Copenhague)
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[Céline par Gen Paul - 1936]
"Céline dit plus d'une fois qu'il n'est pas peintre, en ce sens qu'il ne se sent pas personnellement concerné par la peinture comme il l'est par tout ce qui touche à la littérature. En peinture, il n'est au mieux qu'un amateur, et encore, moins sensible aux qualités proprement picturales qu'aux effets affectifs, voire sentimentaux. «Mon Dieu, un Meissonnier moi ça ne me gêne pas, déclare-t-il dans un entretien de 1959, moi je trouve ça joli, moi, La Retraite de Russie, nom de Dieu je ne suis pas capable d'en faire autant. On me montrera un beau chromo, moi, même l'almanach des Postes, je vois ça très bien [...] c'est gentil même. L'Angelus de Millet, moi je trouve pas ça mal du tout (1). »
Tout autodidacte qu'il est, il n'est pourtant pas sans connaissances en matière de peinture. Dans Voyage au bout de la nuit, il cite les noms de Claude Lorrain et de Fragonard, mais chaque fois pour des raisons extra-picturales. De même sa référence cent fois réitérée à l'impressionnisme ne concerne-t-elle pas la peinture en elle-même. Il ne s'agit que de faire comprendre, par comparaison, la révolution qu'il a réalisée dans la prose française en y réintroduisant, sinon la langue parlée populaire, du moins quelque chose de son ton et de sa démarche,de même que l'impressionnisme, en choisissant le plein air, avait rejeté dans le passé la peinture en atelier.
Ce n'est pas qu'il soit dépourvu de goûts personnels, mais les prédilections qu'il marque vont toujours à un sujet ou à une thématique plutôt qu'à une facture ou à un style. Il n'y a guère lieu de s'attarder sur celle qu'il affirme pour Vlaminck (« parmi les peintres, celui qui se rapproche le plus de mon idéal (2) »: elle peut tenir à la fréquentation du peintre chez Lucien Descaves.
La peinture flamande
La prédilection la plus notable et la plus convaincante, parce qu'elle touche à l'imaginaire qui se révèle dans ses romans, est son attachement durable et souvent réaffirmé à la peinture flamande. En décembre 1932, alors qu'il vient de publier Voyage au bout de la nuit, les Bruegel du musée de Vienne sont pour lui une révélation. Il en fait part aussitôt dans une lettre à Léon Daudet, l'un des trois aimés qui l'ont soutenu dans l'affaire du prix Goncourt contre les autres membres du jury. Tout est significatif dans ce passage: le tableau de Bruegel qu'il choisit parmi tous ceux que présente le musée, le titre qu'il substitue à son titre habituel et le commentaire qu'il en fait: «Vous connaissez certainement, Maître, l'énorme fête des Fous de P. Brughel [sic]. Elle est à Vienne. Tout le problème n'est pas ailleurs pour moi.../ je voudrais bien comprendre autre chose -je ne comprends pas autre chose. je ne peux pas. / Tout mon délire est dans ce sens et je n'ai guère d'autres délires (3). »
La gaucherie et l'insistance de la rédaction témoignent de l'impact qu'a eu sur lui le tableau, en relation étroite avec sa propre inspiration. Il ne peut s'agir que du tableau traditionnellement intitulé Le Combat de Carnaval et de Carême, scène de place publique où d'innombrables petits personnages sont dispersés autour de deux d'entre eux figurés à plus grande échelle, l'un ventru et rubicond, l'autre squelettique et sinistre, tous deux assis, l'un sur un tonneau posé sur des roulettes et poussé par deux acolytes, l'autre sur une plate-forme roulante tirée par un moine et une nonne. Hormis un certain nombre de personnages qui, comme participants d'une fête populaire, relèvent d'une scène de genre, tous les autres, mendiants et estropiés, composent une humanité pitoyable. Cette fête de mi-carême, malgré les déguisements de quelques-uns et les jeux de quelques autres, est tout sauf joyeuse. La vue de ces malheureux qui s'efforcent et font semblant de s'amuser, beaucoup déjà atteints dans leur corps, laisse le spectateur partagé entre la pitié envers leur état et la répulsion qu'inspire la cruauté spontanée de la plupart de leurs amusements. Consciemment ou inconsciemment, Céline retrouve pour les acteurs de cette scène, malgré le décor de place de village, le mot de « fous » qui figure dans le titre donné par Jérôme Bosch - que Céline découvrira apparemment après Bruegel - à un tableau allégorique, La Nef des fous. Il sait qu'une telle vision est le produit d'un «délire »- le mot même qu'il emploie régulièrement pour désigner l'inspiration qui anime ses romans. Trois mois plus tard, il le répétera dans un autre contexte en se disant « bien Brughelien par instinct (4) ». Souligné par les répétitions, le mouvement qui anime les lignes de la lettre à Léon Daudet est déjà celui d'une défense contre le reproche qu'on a commencé à lui faire à propos de Voyage au bout de la nuit, celui de se complaire à évoquer misères et turpitudes des hommes. « Je voudrais bien comprendre autre chose. [ ... ] Je ne peux pas. » Il y reviendra quelques années plus tard dans le prologue de Mort à crédit. Son domaine à lui, comme celui de Bruegel, est celui du grotesque dont l'humanité présente le tableau lorsque, sujette à la mort, elle tente sans le savoir de s'en divertir en faisant souffrir son semblable. Quittant Vienne, Céline voudra garder cette toile sous les yeux dans son appartement parisien sous la forme d'une reproduction qu'il demande à son amie viennoise de lui envoyer. À ce moment, il s'est si bien persuadé de cette proximité artistique avec Bruegel qu'il a oublié qu'il ne l'a découvert qu'après la publication de Voyage au bout de la nuit et que, dans un entretien, il le présente - avec Balzac et Freud ! -comme son maître dans l'écriture du roman (6).
Il fera de même avec un autre tableau de Bruegel qu'il découvrira quelque temps plus tard, à Anvers où il est venu voir une autre amie (7). Le sujet de Dulle Griet le touche sans doute de plus près encore, puisqu'il s'agit de scènes de guerre dans lesquelles la légendaire géante « Margot l'Enragée» (désignation habituelle du tableau en français) entraîne ses compatriotes flamandes. Ce que révélait déjà sur les hommes la pacifique « fête des Fous » est ici pleinement et irrécusablement mis en valeur.
L'intérêt pour la peinture flamande ne se démentira pas. En janvier 1936, il visitera l'exposition de l'Orangerie en compagnie de son amie Lucienne Delforge, qui, dans un témoignage, parlera plus tard de l'admiration de Céline pour « la justesse des attitudes, la subtilité du geste ou de l'expression qui permettaient de pénétrer la psychologie des personnages peints par l'artiste, en dehors de la splendeur des couleurs (8)». Ce que Lucienne Delforge nomme ici la« psychologie » est la« folie » humaine que Céline ne se lasse pas de voir illustrée par cette école de peinture. Même lorsqu'il est le plus touché par un peintre, c'est encore davantage par la représentation que par le style.
Dans les années suivantes, peut-être à la suite de cette exposition ou bien après avoir vu ou revu au Louvre La Nef des fous, il remontera jusqu'au maître de Bruegel, Jérôme Bosch. Il s'interrogera sur ce qu'a pu être la vie du peintre pour qu'il en arrive à peindre de tels tableaux. À la même amie anversoise, il demande « quelques renseignements sur la vie de Jérôme Bosch, juste quelques idées (9) », (Et lui, quelle avait été sa vie pour qu'il écrive ces romans?) À la réflexion, il jugera le maître supérieur à l'élève. En 1947, quand il voudra donner une idée de la peinture européenne à son admirateur et défenseur américain Milton Hindus, il écrira: « Bosch Jérôme, le peintre, surpasse de beaucoup Breughel à mon avis - il ose davantage"). »
Deux amis peintres auraient pu offrir à Céline un autre contact avec la peinture, mais, à en croire les lettres de lui qui ont été conservées, il ne s'entretenait guère de peinture avec eux. Avec le peintre décorateur Henri Mahé, son cadet, la complicité repose sur leurs origines bretonnes et sur un échange de propos sur les femmes et le sexe. C'est pour accompagner les fresques dont Mahé avait décoré une maison de plaisir que Céline écrit un petit texte licencieux, « 31 cité d'Antin » (l'adresse parisienne de la maison).
Gen Paul
L'intimité va beaucoup plus loin avec l'autre peintre, son voisin montmartrois, Gen Paul. Elle est à la fois profonde et ambivalente, comme le montrera leur brouille d'après-guerre qui se traduira, de la part de Céline, par une évocation très négative de l'artiste, sous le nom de «Jules», dans la seconde partie de son roman Féerie pour une autre fois. Avec lui, pourtant, Céline avait touché de plus près la peinture, et la création plastique en général. Non que, jusqu'à la guerre, il entre si peu que ce soit dans l'expressionnisme violent de la manière de Gen Paul à cette époque, qui le rapproche de Soutine. Mais, déjà, Céline est sensible dans ses dessins à une affinité avec ce que lui-même réalise avec les mots. Deux textes témoignent de son admiration et font de l'artiste l'illustrateur privilégié de ses romans: «J'avoue que Gen Paul avec ses cartons me fait grand plaisir. J'attends chaque nouveau. Je frétille du bout... C'est la seule glace qui me convienne. je m'y retrouve tout immonde et sans dégoût (11).» Deux ans plus tard, il écrira, pour présenter une exposition de Gen Paul prévue à New York, un texte dans lequel il donnera sa peinture comme « authentiquement représentative d'une manière qui est purement et essentiellement française - irrévérencieuse, moqueuse, franche - et pourtant gracieuse, vive et joyeuse (12)».
On ne sait de quelle série de peintures de Gen Paul parle ici Céline. Sur sa manière expressionniste antérieure, il portera dans Féerie pour une autre fois un jugement beaucoup plus défavorable. Mais il se passe alors un phénomène paradoxal qui le rapproche bon gré mal gré de cette peinture.
[Gen Paul, Le Sacré-Coeur, 1927]
Le bouleversement cosmique que produit sous ses yeux le bombardement en cours, qui est le sujet de ce roman, lui apparaît comme la réalisation concrète, et même encore exagérée, de cette manière de « jules ». Il ne rappelle d'abord ses premières impressions que pour reconnaître que les événements de cette nuit d'avril 1944 leur apporte rétrospectivement un démenti, dans la mesure où ils réalisent bel et bien, et même davantage encore, ce qu'il prenait alors pour de la pure provocation. « je l'avais vu vernisser ses toiles... moi parfait plouc, aucune autorité d'art, je m'étais dit à moi-même: il le fait exprès! il bluffe le bourgeois! il leur peint des autobus sur la mer de Glace... et les Alpes elles-mêmes en neiges mauve, orange, carmin, et les vaches paissant des couteaux!... des lames d'acier! des poignards en fait d'herbe tendre!...» Mais la réalité est en train de dépasser la fiction - en l'occurrence la vision -, jugée alors artificielle, des tableaux de jules, ce que Céline traduit en termes romanesques en imaginant celui-ci non plus en train de peindre, mais de présider au bombardement par ses gestes du haut de la plate-forme du Moulin de la Galette: «... maintenant il nous sorcelait autre chose! des aravions tonnants, grondants, des escadres entières, et des déluges de mines réelles qui foutaient un bordel au sol, que les immeubles déchaussaient, et les monuments! les mairies! que tout ça s'envolait aux cieux, à la queue leu leu à l'envers! et les couvents! c'était plus terrible que ses gouaches! c'était un petit peu plus osé ! (13) »
À quelqu'un qui, comme lui, ne s'intéressait pas à la peinture pour elle-même et n'avait pas suivi son évolution au XXe siècle, la déformation du réel dans les peintures expressionnistes de Gen Paul avait pu à l'époque paraître gratuite, mais le moment était venu où elle se révélait prophétique, face au tohu-bohu auquel était réduit le monde par l'action conjuguée des bombardiers, avec leurs piqués, leurs loopings, leurs lâchers de bombes, et de la DCA, avec ses pinceaux lumineux et ses tirs. Contre les préjugés de l'ignorance, la peinture trouvait sa justification. Mais le dernier mot restait à la transposition de cette peinture dans le monde du langage, dont Céline prouverait, dans ces quatre romans de l'apocalypse, que la littérature était capable."
Source : Henri Godard, Un autre Céline, de la fureur à la féerie, Ed.Textuel, 2008.
Sur le sujet:
>>> Louis-Ferdinand Céline - Bruegel
Notes
1-Voir aussi l'entretien avec Francine Bloch et Julien Alvard, Cahiers Céline 7, p.435 et 459.
2- Bagatelles pour un massacre, p.216.
3-Lettre à Léon Daudet du 30 décembre 1932, in Appendices, Romans, T.1, p.1108.
4- Lettre à Evelyne Pollet du 5 juin 1933, Cahiers Céline 5, p.166.
5- Lettre à Cillie Ambor du 10 janvier 1933, CAhiers Céline 5, p.91.
6- Cahiers Céline 1, p.41.
7- Lettre à Evelyne Pollet du 5 juin 1933, Cahiers Céline 5, p.171.
8- Cahiers Céline 5, p.258.
9- Lettre à Evelyne Pollet du 20 novembre 1937 Cahiers Céline 5, p.194.
10- Milton Hindus, LF Céline tel que je l'ai vu, lettre du 12 juin 1947.
11- Texte écrit en 1935 pour le bulletin de souscription d'une édition illustrée du Voyage qui ne sera pas réalisée à cette date.
12- Le texte n'étant connu que par sa traduction en anglais, ces mots ne sont pas ceux de Céline mais d'une retraduction en français, Année Céline 1996, p.19.
13- Féerie pour une autre fois, p.223.
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Au sommaire du n°304 - janvier 2009 :
Marc Laudelout : Bloc-notes
Henri Godard : Un monument célinien ("Dictionnaire des personnages dans l'œuvre romanesque de Céline")
Marc Laudelout : Le monde de la dédicace
André Rousseaux : Justice pour Céline écrivain (1961)
Deux lettres de Céline à André Rousseaux
Marc Laudelout : À propos de Céline et Karl Epting
Vera Maurice : Les paradoxes de la Rose des Vents
Marc Laudelout : Un blog consacré à Céline
Bulletin célinien
B. P. 70
B 1000 Bruxelles 22
celinebc@skynet.be
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Extrait de Les idées politiques de Louis-Ferdinand Céline de Jacqueline Morand, 1972 :
Le paradoxe. Céline engagé volontaire des deux guerres.
« Ce pacifiste forcené, qui dénonçait si violemment la guerre, la déliant d'un mépris gigantesque, qui allait jusqu'à faire l'apologie de la lâcheté et de la roublardise dans son premier roman et se déclarait en 1938 « objecteur de conscience 700 pour 100 » fut un volontaire des deux guerres, médaillé militaire en 1914, cité à l’Ordre de l'armée, mutilé 75 %. Là réside le paradoxe, la réelle contradiction entre l'œuvre de Céline et sa vie. Un patriotisme d'Epinal ne cessa jamais au fond de l'habiter. Cette première guerre mondiale qu'il jugeait monstrueuse, absurde, et haïssable, il était fier de l'avoir faite avec bravoure, fier des blessures reçues au service de son pays, versant dans ces « sentiments » dont il disait devoir se méfier.
Les dernières pages de Mort à crédit présentent l'engagement à l’armée du jeune L.F. Destouches comme la révolte d'un adolescent qui pense échapper ainsi à l'emprise devenue pesante de sa famille. De fait Céline s'engagea volontairement en 1912 pour une durée de 3 ans. Il put choisir sa garnison, Rambouillet, 12è régiment de cuirassiers. Il avait 18 ans. Maréchal des logis sur le front des Flandres, il fut en novembre 1914 volontaire pour une mission dangereuse à Poekapelle en Flandre occidentale dont il se tira avec bravoure. Grièvement blessé au bras et à la tête, considéré comme invalide à 75%, il fut cité à l’ordre du jour de l’armée et reçut la Médaille militaire. Cet acte héroïque lui valut d’être représenté en couverture de L’Illustré national (10). La gravure montre le jeune Destouches galopant à cheval sous le feu nourri de l’ennemi. La légende inscrite au bas de la gravure explique :
« Le maréchal des logis Destouches, du 12è régiment de cui¬rassiers, a reçu la médaille militaire pour s'être offert spontané¬ment (alors qu'il était en liaison entre un régiment d'infanterie et sa brigade) pour porter, sous un feu violent, un ordre que les agents de liaison d'infanterie hésitaient à transmettre. Après avoir porté cet ordre, il fut malheureusement grièvement blessé au retour de sa mission. »
Ces blessures expliquent qu'il fût affecté, début 1915, à Londres, comme attaché au bureau des passeports, ce qui lui occasionna des rencontres étranges, celle de Mata-Hari entre autres. Il fut, en 1916, envoyé au Cameroun, réformé temporairement et retourna à Londres, versé dans les services de l'Armement. Il obtint en 1917 son deuxième baccalauréat à Bordeaux, fit des tournées de conférences en Bretagne pour la Fondation Rockfeller, en vue de la propagande anti-tuberculeuse, et commença en 1918 ses études de médecine à Rennes. En 1939, Céline, âgé de 45 ans, reprend volontairement du service dans l'armée. Il devient médecin de la marine de guerre (3è classe) et embarque à bord du Shella, un paquebot de la compagnie « Paquet ». Lors d'un trajet Casablanca-Marseille, le bateau est touché par une torpille allemande au large de Gibraltar ; il entre ensuite en collision avec un patrouilleur anglais, le Kingston Cornelian et les deux navires font naufrage. Renfloué, le Shella est coulé par les Allemands en regagnant Marseille.
Où irai-je ? s'interroge Céline dans une lettre envoyée de Gibraltar le 9 jan¬vier 1940 à un de ses amis.
Ah ! le destin se montre féroce en ces jours courants. J'espère que vu ma vaillance et ma discipline, on me découvrira une nouvelle planque où je finirai bien par gagner la timbale des bonnes vies bien mouvementées.
Et de poursuivre avec amertume :
De toi à moi, jamais je ne me suis tant ennuyé. La belle époque tu vois c'était le XVIIIè. On y faisait facilement une vie par semaine. De nos jours dits rapides, on guerroye en limace.
A son retour en France, Céline remplace le médecin mobilisé du dispensaire de Sartrouville. Il accompagne sur les routes de l'exode jusqu'à La Rochelle une ambulance d'enfants qu'il ramènera à Sartrouville en octobre (11). Durant l'occupation, il vit à Paris, rue Girardon et travaille au dispensaire de Bezons. Il quittera Paris pour l'Allemagne, en juillet 1944.
Il y a donc désaccord entre les idées pacifistes de Céline qui logiquement aurait dû le conduire à l'objection de conscience et les réflexes qui le poussèrent à s'engager volontairement une fois la guerre déclarée. Cette contradiction correspond chez lui à l'oppo¬sition entre un antimilitarisme ardent et un patriotisme à la Déroulède, et dans cet affrontement entre l'antimilitarisme qui chez lui tient plutôt de l'idée, et le patriotisme qui relève surtout du sentiment, c'est ce dernier qui l'emporta. Il est à noter aussi que les deux guerres l'ont très différemment marqué : la guerre de 1914 l'a poussé ainsi qu'un grand nombre d'intellectuels de sa génération à un pacifisme véhément. La guerre de 1940 l'a laissé plus indifférent, détachement que procure l'âge, lassitude que crée l'habitude. Le pacifisme de Céline reste étroitement lié à la guerre de 1914, aux corps à corps des poilus, et aux champs couverts de jeunes cadavres en uniformes bleu horizon.
Mais le refus forcené du romancier du Voyage atteint à l'intemporalité et à l'universalité. Il semble inspirer le pacifisme intransigeant de certains mouvements de jeunes des années 1970, en réplique à l'optimisme quelque peu pervers de « la paix par la terreur » ? Au-delà de la soif de fraternité entre les hommes, au-delà des bons sentiments, face à la menace atomique et à la banalisation de la guerre, l'impulsion angoissée de Bardamu s'arroge le droit d'envahir nos sociétés contemporaines. »
Notes
10. Voir, L'Illustré national, Histoire anecdotique de la guerre européenne, novembre 1914.
11. Durant quinze jours, Céline sera médecin à l'hôpital de La Rochelle. On lui proposa alors d'embarquer à bord d'un bateau en par¬tance pour l'Angleterre. Il refusa, ne voulant pas abandonner son ambulance.
A lire:
>>> Les idées politiques de Louis-Ferdinand Céline par J. Morand (1)
>>> Les idées politiques de Louis-Ferdinand Céline par J. Morand (2)
>>> Les idées politiques de Louis-Ferdinand Céline par J. Morand (3)
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by Tomislav Sunic
Speech held by the author at the European Synergies' Summer Conference in 2002 (Low Saxony, Germany)
Historical pessimism and the sense of the tragic are recurrent motives in European literature. From Heraclitus to Heidegger, from Sophocles to Schopenhauer, the exponents of the tragic view of life point out that the shortness of human existence can only be overcome by the heroic intensity of living. The philosophy of the tragic is incompatible with the Christian dogma of salvation or the optimism of some modern ideologies. Many modern political theologies and ideologies set out from the assumption that "the radiant future" is always somewhere around the corner, and that existential fear can best be subdued by the acceptance of a linear and progressive concept of history. It is interesting to observe that individuals and masses in our post-modernity increasingly avoid allusions to death and dying. Processions and wakes, which not long ago honored the postmortem communion between the dead and the living, are rapidly falling into oblivion. In a cold and super-rational society of today, someone's death causes embarrassment, as if death should have never occurred, and as if death could be postponed by a deliberate "pursuit of happiness." The belief that death can be outwitted through the search for the elixir of eternal youth and the "ideology of good looks", is widespread in modern TV-oriented society. This belief has become a formula for social and political conduct.
The French-Rumanian essayist, Emile Cioran, suggests that the awareness of existential futility represents the sole weapon against theological and ideological deliriums that have been rocking Europe for centuries. Born in Rumania in 1911, Cioran very early came to terms with the old European proverb that geography means destiny. From his native region which was once roamed by Scythian and Sarmatian hordes, and in which more recently, secular vampires and political Draculas are taking turns, he inherited a typically "balkanesque" talent for survival. Scores of ancient Greeks shunned this area of Europe, and when political circumstances forced them to flee, they preferred to search for a new homeland in Sicily or Italy--or today, like Cioran, in France. "Our epoch, writes Cioran, "will be marked by the romanticism of stateless persons. Already the picture of the universe is in the making in which nobody will have civic rights."[1] Similar to his exiled compatriots Eugène Ionesco, Stephen Lupasco, Mircea Eliade, and many others, Cioran came to realize very early that the sense of existential futility can best by cured by the belief in a cyclical concept of history, which excludes any notion of the arrival of a new messiah or the continuation of techno-economic progress.
Cioran's political, esthetic and existential attitude towards being and time is an effort to restore the pre-Socratic thought, which Christianity, and then the heritage of rationalism and positivism, pushed into the periphery of philosophical speculation. In his essays and aphorisms, Cioran attempts to cast the foundation of a philosophy of life that, paradoxically, consists of total refutation of all living. In an age of accelerated history it appears to him senseless to speculate about human betterment or the "end of history." "Future," writes Cioran, "go and see it for yourselves if you really wish to. I prefer to cling to the unbelievable present and the unbelievable past. I leave to you the opportunity to face the very Unbelievable."[2] Before man ventures into daydreams about his futuristic society, he should first immerse himself in the nothingness of his being, and finally restore life to what it is all about: a working hypothesis. On one of his lithographs, the 16th century French painter, J. Valverde, sketched a man who had skinned himself off his own anatomic skin. This awesome man, holding a knife in one hand and his freshly peeled off skin in the other, resembles Cioran, who now teaches his readers how best to shed their hide of political illusions. Man feels fear only on his skin, not on his skeleton. How would it be for a change, asks Cioran, if man could have thought of something unrelated to being? Has not everything that transpires caused stubborn headaches? "And I think about all those whom I have known," writes Cioran, "all those who are no longer alive, long since wallowing in their coffins, for ever exempt of their flesh--and fear."[3]
The interesting feature about Cioran is his attempt to fight existential nihilism by means of nihilism. Unlike many of his contemporaries, Cioran is averse to the voguish pessimism of modern intellectuals who bemoan lost paradises, and who continue pontificating about endless economic progress. Unquestionably, the literary discourse of modernity has contributed to this mood of false pessimism, although such pessimism seems to be more induced by frustrated economic appetites, and less by what Cioran calls, "metaphysical alienation." Contrary to J.P. Sartre's existentialism that focuses on the rupture between being and non-being, Cioran regrets the split between the language and reality, and therefore the difficulty to fully convey the vision of existential nothingness. In a kind of alienation popularized by modern writers, Cioran detects the fashionable offshoot of "Parisianism" that elegantly masks a warmed-up version of a thwarted belief in progress. Such a critical attitude towards his contemporaries is maybe the reason why Cioran has never had eulogies heaped upon him, and why his enemies like to dub him "reactionary." To label Cioran a philopsher of nihilism may be more appropriate in view of the fact that Cioran is a stubborn blasphemer who never tires from calling Christ, St. Paul, and all Christian clergymen, as well as their secular Freudo-Marxian successors outright liars and masters of illusion. To reduce Cioran to some preconceived intellectual and ideological category cannot do justice to his complex temperament, nor can it objectively reflect his complicated political philosophy. Each society, be it democratic or despotic, as a rule, tries to silence those who incarnate the denial of its sacrosanct political theology. For Cioran all systems must be rejected for the simple reason that they all glorify man as an ultimate creature. Only in the praise of non-being, and in the thorough denial of life, argues Ciroan, man's existence becomes bearable. The great advantage of Cioran is, as he says, is that "I live only because it is in my power to die whenever I want; without the idea of suicide I would have killed myself long time ago."[4] These words testify to Cioran's alienation from the philosophy of Sisyphus, as well as his disapproval of the moral pathos of the dung-infested Job. Hardly any biblical or modern democratic character would be willing to contemplate in a similar manner the possibility of breaking away from the cycle of time. As Cioran says, the paramount sense of beatitude is achievable only when man realizes that he can at any time terminate his life; only at that moment will this mean a new "temptation to exist." In other words, it could be said that Cioran draws his life force from the constant flow of the images of salutary death, thereby rendering irrelevant all attempts of any ethical or political commitment. Man should, for a change, argues Cioran, attempt to function as some form of saprophytic bacteria; or better yet as some amoebae from Paleozoic era. Such primeval forms of existence can endure the terror of being and time more easily. In a protoplasm, or lower species, there is more beauty then in all philosophies of life. And to reiterate this point, Cioran adds: "Oh, how I would like to be a plant, even if I would have to attend to someone's excrement!"[5]
Perhaps Cioran could be depicted as a trouble maker, or as the French call it a "trouble fête", whose suicidal aphorisms offend bourgeois society, but whose words also shock modern socialist day-dreamers. In view of his acceptance of the idea of death, as well as his rejection of all political doctrines, it is no wonder that Cioran no longer feels bound to egoistical love of life. Hence, there is no reason for him to ponder over the strategy of living; one should rather start thinking about the methodology of dying, or better yet how never to be born. "Mankind has regressed so much," writes Cioran, and "nothing proves it better than the impossibility to encounter a single nation or a tribe in which a birth of a child causes mourning and lamentation."[6] Where are those sacred times, inquires Cioran, when Balkan Bogumils and France's Cathares saw in child's birth a divine punishment? Today's generations, instead of rejoicing when their loved ones are about to die, are stunned with horror and disbelief at the vision of death. Instead of wailing and grieving when their offsprings are about to be born, they organize mass festivities:
If attachment is an evil, the cause of this evil must be sought in the scandal of birth--because to be born means to be attached. The purpose of someone's detachment should be the effacement of all traces of this scandal--the ominous and the least tolerable of all scandals.[7]
Cioran's philosophy bears a strong imprint of Friedrich Nietzsche and Indian Upanishads. Although his inveterate pessimism often recalls Nietzsche's "Weltschmerz," his classical language and rigid syntax rarely tolerates romantic or lyrical narrative, nor the sentimental outbursts that one often finds in Nietzsche's prose. Instead of resorting to thundering gloom, Cioran's paradoxical humor expresses something which in the first place should have never been verbally construed. The weakness of Cioran prose lies probably in his lack of thematic organization. At time his aphorisms read as broken-off scores of a well-designed musical master piece, and sometimes his language is so hermetic that the reader is left to grope for meaning.
When one reads Cioran's prose the reader is confronted by an author who imposes a climate of cold apocalypse that thoroughly contradicts the heritage of progress. Real joy lies in non-being, says Cioran, that is, in the conviction that each willful act of creation perpetuates cosmic chaos. There is no purpose in endless deliberations about higher meaning of life. The entire history, be it the recorded history or mythical history, is replete with the cacophony of theological and ideological tautologies. Everything is "éternel retour," a historical carousel, with those who are today on top, ending tomorrow at the bottom.
I cannot excuse myself for being born. It is as if, when insinuating myself in this world, I profaned some mystery, betrayed some very important engagement, made a mistake of indescribable gravity.[8]
This does not mean that Cioran is completely insulated from physical and mental torments. Aware of the possible cosmic disaster, and neurotically persuaded that some other predator may at any time deprive him of his well-planned privilege to die, he relentlessly evokes the set of death bed pictures. Is this not a truly aristocratic method to alleviate the impossibility of being?:
In order to vanquish dread or tenacious anxiety, there is nothing better than to imagine one's own funeral: efficient method, accessible to all. In order to avoid resorting to it during the day, the best is to indulge in its virtues right after getting up. Or perhaps make use of it on special occasions, similar to Pope Innocent IX who ordered the picture of himself painted on his death-bed. He would cast a glance at his picture every time he had to reach an important decision... [9]
At first, one may be tempted to say that Cioran is fond of wallowing in his neuroses and morbid ideas, as if they could be used to inspire his literary creativity. So exhilarating does he find his distaste for life that he suggests that, "he who succeeds in acquiring them has a future which makes everything prosper; success as well as defeat."[10] Such frank description of his emotional spasms makes him confess that success for him is as difficult to bear as much as a failure. One and the other cause him headache.
The feeling of sublime futility with regard to everything that life entails goes hand in hand with Cioran's pessimistic attitude towards the rise and fall of states and empires. His vision of the circulation of historical time recalls Vico's corsi e ricorsi, and his cynicism about human nature draws on Spengler's "biology" of history. Everything is a merry-go-round, and each system is doomed to perish the moment it makes its entrance onto the historical scene. One can detect in Cioran's gloomy prophecies the forebodings of the Roman stoic and emperor Marcus Aurelius, who heard in the distance of the Noricum the gallop of the barbarian horses, and who discerned through the haze of Panonia the pending ruin of the Roman empire. Although today the actors are different, the setting remains similar; millions of new barbarians have begun to pound at the gates of Europe, and will soon take possession of what lies inside:
Regardless of what the world will look like in the future, Westerners will assume the role of the Graeculi of the Roman empire. Needed and despised by new conquerors, they will not have anything to offer except the jugglery of their intelligence, or the glitter of their past. [11]
Now is the time for the opulent Europe to pack up and leave, and cede the historical scene to other more virile peoples. Civilization becomes decadent when it takes freedom for granted; its disaster is imminent when it becomes too tolerant of every uncouth outsider. Yet, despite the fact that political tornados are lurking on the horizon, Cioran, like Marcus Aurelius, is determined to die with style. His sense of the tragic has taught him the strategy of ars moriendi, making him well prepared for all surprises, irrespective of their magnitude. Victors and victims, heroes and henchmen, do they not all take turns in this carnival of history, bemoaning and bewailing their fate while at the bottom, while taking revenge when on top? Two thousand years of Greco-Christian history is a mere trifle in comparison to eternity. One caricatural civilization is now taking shape, writes Cioran, in which those who are creating it are helping those wishing to destroy it. History has no meaning, and therefore, attempting to render it meaningful, or expecting from it a final burst of theophany, is a self-defeating chimera. For Cioran, there is more truth in occult sciences than in all philosophies that attempt to give meaning to life. Man will finally become free when he takes off the straitjacket of finalism and determinism, and when he realizes that life is an accidental mistake that sprang up from one bewildering astral circumstance. Proof? A little twist of the head clearly shows that "history, in fact, boils down to the classification of the police: "After all, does not the historian deal with the image which people have about the policeman throughout epochs ?"[12] To succeed in mobilizing masses in the name of some obscure ideas, to enable them to sniff blood, is a certain avenue to political success. Had not the same masses which carried on their shouldered the French revolution in the name of equality and fraternity, several years later also brought on their shoulders an emperor with new clothes--an emperor on whose behalf they ran barefoot from Paris to Moscow, from Jena to Dubrovnik? For Cioran, when a society runs out of political utopia there is no more hope, and consequently there cannot be any more life. Without utopia, writes Cioran, people would be forced to commit suicide; thanks to utopia they commit homicides.
Today there are no more utopias in stock. Mass democracy has taken their place. Without democracy life makes little sense; yet democracy has no life of its own. After all, argues Cioran, had it not been for a young lunatic from the Galilee, the world would be today a very boring place. Alas, how many such lunatics are hatching today their self-styled theological and ideological derivatives! "Society is badly organized, writes Cioran, "it does nothing against lunatics who die so young."[13] Probably all prophets and political soothsayers should immediately be put to death, "because when the mob accepts a myth--get ready for massacres or better yet for a new religion."[14]
Unmistakable as Cioran's resentments against utopia may appear, he is far from deriding its creative importance. Nothing could be more loathsome to him than the vague cliche of modernity that associates the quest for happiness with a peaceful pleasure-seeking society. Demystified, disenchanted, castrated, and unable to weather the upcoming storm, modern society is doomed to spiritual exhaustion and slow death. It is incapable of believing in anything except in the purported humanity of its future blood-suckers. If a society truly wishes to preserve its biological well-being, argues Cioran, its paramount task is to harness and nurture its "substantial calamity;" it must keep a tally of its own capacity for destruction. After all, have not his native Balkans, in which secular vampires are today again dancing to the tune of butchery, also generated a pool of sturdy specimen ready for tomorrow's cataclysms? In this area of Europe, which is endlessly marred by political tremors and real earthquakes, a new history is today in the making--a history which will probably reward its populace for the past suffering.
Whatever their past was, and irrespective of their civilization, these countries possess a biological stock which one cannot find in the West. Maltreated, disinherited, precipitated in the anonymous martyrdom, torn apart between wretchedness and sedition, they will perhaps know in the future a reward for so many ordeals, so much humiliation and for so much cowardice.[15]
Is this not the best portrayal of that anonymous "eastern" Europe which according to Cioran is ready today to speed up the world history? The death of communism in Eastern Europe might probably inaugurate the return of history for all of Europe. Conversely, the "better half" of Europe, the one that wallows in air-conditioned and aseptic salons, that Europe is depleted of robust ideas. It is incapable of hating and suffering, and therefore of leading. For Cioran, society becomes consolidated in danger and it atrophies in peace: "In those places where peace, hygiene and leisure ravage, psychoses also multiply... I come from a country which, while never learning to know the meaning of happiness, has also never produced a single psychoanalyst."[16] The raw manners of new east European cannibals, not "peace and love" will determine the course of tomorrow's history. Those who have passed through hell are more likely to outlive those who have only known the cozy climate of a secular paradise.
These words of Cioran are aimed at the decadent France la Doulce in which afternoon chats about someone's obesity or sexual impotence have become major preoccupations on the hit-parade of daily concerns. Unable to put up resistance against tomorrow's conquerors, this western Europe, according to Cioran, deserves to be punished in the same manner as the noblesse of theancien régime which, on the eve of the French Revolution, laughed at its own image, while praising the image of the bon sauvage. How many among those good-natured French aristocrats were aware that the same bon sauvage was about to roll their heads down the streets of Paris? "In the future, writes Cioran, "if mankind is to start all over again, it will be with the outcasts, with the mongols from all parts, with the dregs of the continents.."[17] Europe is hiding in its own imbecility in front of an approaching catastrophe. Europe? "The rots that smell nice, a perfumed corpse." [18]
Despite gathering storms Cioran is comforted by the notion that he at least is the last heir to the vanishing "end of history." Tomorrow, when the real apocalypse begins, and as the dangers of titanic proportions take final shape on the horizon, then, even the word "regret" will disappear from our vocabulary. "My vision of the future," continues Cioran is so clear, "that if I had children I would strangle them immediately."[19]
*~*~*~*~*~*~*
After a good reading of Cioran's opus one must conclude that Cioran is essentially a satirist who ridicules the stupid existential shiver of modern masses. One may be tempted to argue that Cioran offers aan elegant vade-mecum for suicide designed for those, who like him, have thoroughly delegitimized the value of life. But as Cioran says, suicide is committed by those who are no longer capable of acting out optimism, e.g. those whose thread of joy and happiness breaks into pieces. Those like him, the cautious pessimists, "given that they have no reason to live, why would they have a reason to die?" [20] The striking ambivalence of Cioran's literary work consists of the apocalyptic forebodings on the one hand, and enthusiastic evocations of horrors on the other. He believes that violence and destruction are the main ingredients of history, because the world without violence is bound to collapse. Yet, one wonders why is Cioran so opposed to the world of peace if, according to his logic, this peaceful world could help accelerate his own much craved demise, and thus facilitate his immersion into nothingness? Of course, Cioran never moralizes about the necessity of violence; rather, in accordance with the canons of his beloved reactionary predecessors Josephe de Maistre and Nicolo Machiavelli, he asserts that "authority, not verity, makes the law," and that consequently, the credibility of a political lie will also determine the magnitude of political justice. Granted that this is correct, how does he explain the fact that authority, at least the way he sees it, only perpetuates this odious being from which he so dearly wishes to absolve himself? This mystery will never be known other than to him. Cioran admits however, that despite his abhorrence of violence, every man, including himself is an integral part of it, and that every man has at least once in his life contemplated how to roast somebody alive, or how to chop off someone's head:
Convinced that troubles in our society come from old people, I conceived the plan of liquidating all citizens past their forties--the beginning of sclerosis and mummification. I came to believe that this was the turning point when each human becomes an insult to his nation and a burden to his community... Those who listened to this did not appreciate this discourse and they considered me a cannibal... Must this intent of mine be condemned? It only expresses something which each man, who is attached to his country desires in the bottom of his heart: liquidation of one half of his compatriots.[21]
Cioran's literary elitism is unparalleled in modern literature, and for that reason he often appears as a nuisance for modern and sentimental ears poised for the lullaby words of eternal earthly or spiritual bliss. Cioran's hatred of the present and the future, his disrespect for life, will certainly continue to antagonize the apostles of modernity who never tire of chanting vague promises about the "better here-and-now." His paradoxical humor is so devastating that one cannot take it at face value, especially when Cioran describes his own self. His formalism in language, his impeccable choice of words, despite some similarities with modern authors of the same elitist caliber, make him sometimes difficult to follow. One wonders whether Cioran's arsenal of words such as "abulia," "schizophrenia," "apathy," etc., truly depict a nevrosé which he claims to be.
If one could reduce the portrayal of Cioran to one short paragraph, then one must depict him as an author who sees in the modern veneration of the intellect a blueprint for spiritual gulags and the uglification of the world. Indeed, for Cioran, man's task is to wash himself in the school of existential futility, for futility is not hopelessness; futility is a reward for those wishing to rid themselves of the epidemic of life and the virus of hope. Probably, this picture best befits the man who describes himself as a fanatic without any convictions--a stranded accident in the cosmos who casts nostalgic looks towards his quick disappearance.
To be free is to rid oneself forever from the notion of reward; to expect nothing from people or gods; to renounce not only this world and all worlds, but salvation itself; to break up even the idea of this chain among chains. (Le mauvais demiurge, p. 88.)
Notes:
[1] Emile Cioran, "Syllogismes de l'amertume" (Paris: Gallimard, 1952), p. 72 (my translation) return to text
[2] "De l'inconvénient d'être né" (Paris: Gallimard, 1973), p. 161-162. (my translation) (The Trouble with Being Born, translated by Richard Howard: Seaver Bks., 1981) return to text
[3] Cioran, "Le mauvais démiurge" ( Paris: Gallimard, 1969), p. 63. (my translation) return to text
[4] "Syllogismes de l'amertume", p. 87. (my trans.) return to text
[5] Ibid., p. 176. return to text
[6] "De l'inconvénient d'être né", p. 11. (my trans.) return to text
[7] Ibid., p. 29. return to text
[8] Ibid., p. 23. return to text
[9] Ibid., p. 141. return to text
[10] "Syllogismes de l'amertume", p. 61. (my trans.) return to text
[11] "La tentation d'exister", (Paris: Gallimard, 1956), p. 37-38. (my trans.) (The temptation to exist, translated by Richard Howard; Seaver Bks., 1986) return to text
[12] "Syllogismes de l'amertume", p. 151. (my trans.) return to text
[13] Ibid., p. 156. return to text
[14] Ibid., p. 158. return to text
[15] "Histoire et utopie" (Paris: Gallimard, 1960), p. 59. (my trans.) ( History and Utopia, trans. by Richard Howard, Seaver Bks., 1987). return to text
[16] Syllogismes de l'amertume, p. 154. (my trans.) return to text
[17] Ibid., p. 86. return to text
[18] "De l'inconvénient d'être né", p. 154. (my trans.) return to text
[19] Ibid. p. 155. return to text
[20] "Syllogismes de l'amertume", p. 109. return to text
[21] "Histoire et utopie" (Paris: Gallimard, 1960), p. 14. (my trans.) return to text
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Entretien avec André Murcie et Luc-Olivier d'Algange, éditeurs de Jean Parvulesco
propos recueillis par Hugues RONDEAU
Amateurs de prose et de vers ajourés, André Murcie et Luc-Olivier d'Algange ne partagent cependant pas l'éthylique détachement de Rimbaud ou la talentueuse indifférence d'Hölderlin.
Pour eux, la poésie est le flambeau de leur combat. Courageux ou téméraires, ils se dépensent sans compter pour la survie d'une petite maison d'édition, les Nouvelles Littératures Européennes. Sous ce label sont déjà parus une revue au parfum de la grande littérature, un roman de Luc-Olivier d'Algange (Le Secret d'or) et surtout un cahier d'hommage à Jean Parvulesco.
Trois cent quarante-quatre pages de témoignages et d'articles inédits font de ce volume, l'indispensable lexique de l'œuvre de l'auteur de La Servante portugaise.
Editer Parvulesco ou avoir opté pour la subversion par le talent.
- En prenant la décision d'éditer Jean Parvulesco, génial trublion du la littérature francophone, vous avez pris un risque certain. Poête et essayiste, géopoéticien aurait dit Kenneth White, écrivain rebelle et ésotériste inspiré, Parvulesco ouvre les yeux des prédestinés mais demeure inconnu du grand public. Votre initiative avait-elle pour but de le rendre populaire ?
- Luc-Olivier d'Algange: Je dois avouer que mon engouement pour les écrits de Jean Parvulesco est né de la lecture en 1984 de son Traité de la chasse au faucon. Il m'apportait la preuve attendue qu'une haute poésie était possible —et même nécessaire— dans cette époque pénombreuse où nous avons disgrâce de vivre. La disgrâce, mais aussi, dirai-je, la chance extraordinaire, car, en vertu de la loi des contrastes, c'est dans l'époque la plus dérélictoire et la plus vaine que l'espoir nous est offert de connaître la joie la plus laborieuse et, dans sa splendeur absolue (Style), l'exaucement de la volonté divine.
Tel était le message que me semblait apporter la poésie de Jean Parvulesco. Or, sachant qu'André Murcie poursuivait une quête parallèle à la mienne et qu'il envisageait en outre de lancer la revue Style, il m'a semblé utile de lui faire part de ma découverte. C'est ainsi que dès le premier numéro, avec un poême intitulé Le Privilège des justes secrets, Jean Parvulesco devint une voie essentielle de la revue Style. Celle-ci devait encore publier le vaste et fameux poème, Le Pacifique , nouvel axe du monde ainsi que le Rapport secret à la nonciature, qui est un admirable récit visionnaire sur les apparitions de Medjugorge et de nombreux autres poèmes. Tout cela avant d'élargir encore son dessein, en créant les éditions des Nouvelles Littératures Européennes, et de publier un Cahier Jean Parvulesco, récapitulation en une succession de plans de l'univers de Parvulesco, en ses divers aspects, poétiques, philosophiques, esthétiques, architecturaux, cinématographiques ou politiques.
- André Murcie: En effet et ceci répond de façon plus précise à votre question, il est clair que Parvulesco va à contre-courant de ses contemporains. Jean Parvulesco n'est en aucune façon un spécialiste. Il est, au contraire, de cette race d'auteurs qui font une œuvre, embrassement de l'infinité des apparences et de cette autre infini qui est derrière les apparences. C'est là la différence soulignée par Evola entre «l'opus», l'œuvre, et le «labor», le labeur. Avec Parvulesco, nous sommes aux antipodes d'un quelconque «travail du texte», c'est à dire que nous sommes au cœur de l'œuvre et même du Grand œuvre, ainsi que l'illustre d'ailleurs le premier essai, publié dans le Cahier dans la série des dévoilements: Alchimie et grande poésie.
Ce texte est sans doute, depuis les Demeures philosophales de Fulcanelli, l'approche la plus lumineuse de ces arcanes et tous ceux qui cherchent à préciser les rapports qui unissent la création littéraire et la science d'Hermès trouveront, sans nul doute, en ces pages, des informations précieuses et, mieux que des informations, des traces - au sens où Heidegger disait que nous devions maintenant nous interroger sur la trace des Dieux enfuis.
Pour Jean Parvulesco, il ne fait aucun doute que la lettre est la trace de l'esprit. C'est ainsi que son œuvre nous délivre des idolâtries du Nouveau Roman et autres littératures subalternes qui réduisent les mots à leur propre pouvoir dans une sorte de ressassement narcissique. Pour Jean Parvulesco, la littérature n'a de sens que parce qu'elle débute avant la page écrite et s'achève après elle.
- Il est signicatif que ces propos sur l'alchimie soient, dans le même chapitre du Cahier, suivis par un essai intitulé: «La langue française, le sentier de l'honneur»...
- Luc-Olivier d'Algange: Trace de l'esprit, trace du divin, la langue française retrouve en effet, dans la prose ardente et limpide de Jean Parvulesco, sa fonction oraculaire. Ses écrits démentent l'idée reçue selon laquelle la langue française serait celle de la commune mesure, de la tiédeur, de l'anecdote futile. Jean Parvulesco est là pour nous rappeler que dans la tradition de Scève, de Nerval, de Rimbaud, de Lautréamont ou d'Artaud, la langue française est celle du plus haut risque métaphysique.
«Langue de grands spirituels et de mystiques, écrit Jean Parvulesco, charitablement emportés vers le sacrifice permanent et joyeux, d'aristocrates et de rêveurs prédestinés, faiseurs de nouveaux mondes et parfois même de mondes nouveaux, langue surtout, de paysans, de forestiers conspirateurs et nervaliens, engagés dans le cheminement de leurs obscures survivances transcendantales, occultes en tout, langue de la poésie absolue...».
C'est exactement en ce sens qu'il faudra comprendre le dessein littéraire qui est à l'origine du Cahier - véritable table d'orientation d'un monde nouveau, d'une autre culture, qui n'entretient plus aucun rapport, même lointain, avec ce que l'on entend ordinairement sous ce nom. Car il va sans dire que la «Culture» selon Parvulesco n'est certes pas ce qui se laisse associer à la «Communication» mais un principe, à la fois subversif et royal, qui n'a pas d'autre but que d'outrepasser la condition humaine.
Tel est sans doute le sens du chant intitulé Les douzes colonnes de la Liberté Absolue que l'on peut lire vers la fin du Cahier: «...que nous chantons, que nous chantons, par ces volumes conceptuels d'air s'appelant étangs, ou blancs corbeaux, autour de l'immaculation des Douzes Colonnes, vertiges s'ouvrant sur les Portes d'Or et indigo de l'Atlantis Magna, chuchotement circulaire et lent, je suis la Liberté absolue».
L'œuvre doit ainsi accomplir, par une intime transmutation, cette vocation surhumaniste, qui, dans la pensée de Jean Parvulesco, ne contredit point la Tradition, mais s'y inscrit, de façon, dirai-je, clandestine; toute vérité n'étant pas destinée à n'importe qui. Mais c'est là, la raison d'être de l'ésotérisme et du secret, qui, de fait, est un secret de nature et non point un secret de convention.
- Vous avez donné une large place dans le Cahier aux rêves et prémonitions métapolitiques de Jean Parvulesco.
- André Murcie: En ce qui concerne le domaine politique, nous avons republié dans le Cahier, un ensemble d'articles de géopolitique que Parvulesco publia naguère dans le journal Combat et qui eurent à l'époque un rententissement tout à fait extraodinaire. Ce fut, à dire vrai, une occasion de polémiques furieuses. A la lumière d'évènements récents, concernant la réunification de l'Allemagne, les changements intervenus à l'Est, ces articles retrouvent brusquement une actualité brûlante. Il semblerait que seul celui qui expérimente les avènements de l'âme soit destiné à comprendre les évènements du monde. Ainsi des études comme L'Allemagne et les destinés actuelles de l'Europe ou encore Géopolitique de la Méditerranée occidentale donnent à relire les évènements ultérieurs dans une perspective différente.
- Le Cahier s'enrichit aussi des reflexions peu banales de Parvulesco sur le cinéma.
- Luc-Olivier d'Algange: Je crois que nous mesurons encore mal l'influence de Jean Parvulesco sur le cinéma français et européen. On sait qu'il fut personnage dans certains films de Jean-Luc Godard - en particulier dans A bout de souffle, et qu'il fut aussi, par ailleurs, acteur et scénariste. A cet égard, le Cahier contient divers témoignages passionnants concernant, plus particulièrement, Jean-Pierre Melville et Werner Schrœter dont nul, mieux que l'auteur des Mystères de la villa Atlantis, ne connait les véritables motivations.
Il nous propose là une relecture cinématographique dans une perspective métapolitique qui dépasse de toute évidence les niaiseries que nous réserve habituellement la critique cinématographique.
- André Murcie: L'intérêt extrême des témoignages de Jean Parvulesco concernant l'univers du cinéma est d'être à la fois en prise directe et prodigieusement lointain. C'est à dire, en somme, de voir le cinéma de l'intérieur, comme une vision, en sympathie profonde avec le cinéaste lui-même, et non point telle la glose inapte d'un quelconque cinéphile. C'est ainsi que Nietzsche ou Thomas Mann parlèrent de Wagner.
- D'autres textes, publiés dans ce Cahier ont également cette vertu du témoignage direct, qui nous donne à pressentir une réalité singulière. Ainsi en est-il des récits portant sur Arno Brecker et Ezra Pound.
- Luc-Olivier d'Algange: J'ai été pour ma part très sensible à l'hommage que Jean Parvulesco sut rendre à Ezra Pound dont Dominique de Roux disait qu'il n'était rien moins que «le représentant de Dieu sur la terre». Hélas, cette recherche de la poésie absolue était jusqu'alors mal comprise, livrée aux maniaques du «travail du texte» et autres adeptes du lit de Procuste, acharnés à faire le silence sur les miroitements italiens de l'œuvre de Pound.
Cette italianité fit d'alilleurs d'Ezra Pound une sorte d'apostat, alors que, par cette fidélité essentielle, il rejoignait au contraire, au-delà des appartenances spécifiantes, sa véritable patrie spirituelle qui, en aucun cas ne pouvait être cette contrée où Edgard Poe et Lovecraft connurent les affres du plus impitoyable exil.
Mais je laisse la parole à Jean Parvulesco lui-même: «Ce qu'Ezra Pound, l'homme sur qui le soleil est descendu, cherchait en Italie, on l'a compris, c'est le Paradis. Toscane, Ombrie, Ezra Pound avait accédé à la certitude inspirée, initiatique, abyssale, que le Paradis était descendu, en Italie, pendant le haut moyen âge et que, très occultement, il s'y trouvait encore. Pour en trouver la passe interdite, il suffisait de se laisser conduire en avant, aveuglément - et nuptialement aveuglé - par la secretissima, par une certaine lumière italienne de toujours ».
Propos recueillis
par Hugues Rondeau.
Cahier Jean Parvulesco, 350 pages, Nouvelles Littératures Européennes, 1989.
Luc-Olivier d'Algange, né en 1955 à Göttingen (Allemagne) a publié :
Le Rivage, la nuit unanime (épuisé)
Médiances du Prince Horoscopale (Cééditions 1978)
Manifeste baroque (Cééditions, 1981)
Les ardoises de Walpurgis (Cahiers du losange, 1984)
Stances diluviennes (Le Jeu des T, 1986)
Heurs et cendres d'une traversée lysergique (Le Jeu des T, 1986)
Co-fondateur, avec F.J Ossang, de la revue CEE (Christian Bourgois éditeur)
Rédacteur de PICTURA EDELWEISS et PICTURA MAGAZINE
Textes parus dans :
Recoupes; Erres; L'Ether Vague; CEE; Encres Vives; Phé; Libertés; Sphinx; Evasion; Le Miroir du Verbe; Dismisura; Bunker; Le Cheval rouge; Devil-Paradis; Anthologie de la poésie initiatique vivante; Claron; Le Jeu des Tombes; Question de; Vers la Tradition; La Poire d'Angoisse; Camouflage; Strass-Polymorphe; Phréatique, Asturgie-Onirie; Pictura; Mensuel 25; Matulu, Place royale, L'Autre Monde.
André Murcie né en 1951
- Poèmes de poésie (1967-1985)
- Poème pour la démesure d'André Murcie
- Poèmes de la démesure (Work in progress).
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Le retour de Jacques d’Arribehaude
Dans la nouvelle livraison de son journal, qui englobe la première moitié des années 80, Jacques d’Arribehaude écrit ceci qui mérite d’être relevé : « En fin de compte, je n’aimerais pas être considéré, uniquement, pour les propos, si remarquables soient-ils, que j’enregistrais à Meudon auprès de Céline peu avant sa mort. Je sais ma dette envers Céline, j’admire son génie visionnaire et pamphlétaire, mais mon vrai modèle est Saint-Simon. Je ne prétends évidemment pas me situer à son niveau, et loin de moi l’idée d’établir une quelconque échelle de valeurs artistiques et littéraires, mais Saint-Simon, en décalage complet avec son siècle comme je le suis avec mon époque, avait résolu de s’adresser à d’autres générations que la sienne, et de s’en remettre à la providence pour être lu et reconnu bien après sa mort. » Et de préciser : « Je m’attache à cet exemple parce qu’il m’offre un espoir, qu’il me reste une œuvre à écrire, susceptible de quelque intérêt par la suite, et que je garde obstinément au fond du cœur, moi aussi, la foi de mon enfance. » S’il est vrai que Jacques d’Arribehaude n’est connu de la plupart des céliniens que pour les entretiens que le grand homme voulut bien lui accorder, à lui et à son complice Jean Guenot, il est aussi apprécié de quelques amateurs d’écrits intimes pour cette somme foisonnante composée de plusieurs opus aux titres évocateurs : Une saison à Cadix, L’encre du salut, Complainte mandingue, Le royaume des Algarves, Un Français libre et, à présent, S’en fout la vie. L’auteur nous apprend que ces mots figuraient sur de grands écriteaux pavoisant certains véhicules surchargés pour défier l’adversité le long des pistes d’Afrique noire. Cette expression correspond aussi, on l’aura compris, à la manière aventureuse et désinvolte avec laquelle l’auteur a mené sa propre existence.
À défaut de rencontrer au moment de sa sortie un succès de librairie, cette œuvre a été saluée par la critique. Ainsi, Pol Vandromme : « Ce journal est d’un homme libre. Libre devant les intimidations du siècle comme devant celle des mantes religieuses et des benêts pâmés. Libre comme on a désappris à l’être aujourd’hui : en esprit fort et en vivant magnifique. » On peut parier que, dans quelques années, il se trouvera de fervents lecteurs de Jacques d’Arribehaude comme aujourd’hui on en compte de Paul Léautaud, même si leur univers n’est en rien comparable. Le premier, grand voyageur, fut un amoureux impénitent ; le second, sédentaire résolu, se révéla un sentimental refoulé, prônant avec conviction le seul amour sensuel. Rien de commun avec Arribehaude, chantre de l’amour absolu : « Je ne suis sensible, qu’au naturel du désir – et du plaisir – librement partagés dans la simplicité et la pureté d’une émotion réciproque, entre deux êtres qui s’aiment vraiment ». Impossible, quand on le lit, de ne pas trouver attachant ce diariste sensitif. Surtout lorsqu’il nous confie avec une franche ingénuité ses désarrois sentimentaux ou son refus du carriérisme dans ce monde de la télévision qui en est l’exemplaire illustration. Comme Léautaud, c’est un rêveur épris d’indépendance et de liberté. Autre point commun : le style, superbe et délié, d’un naturel parfait. Au risque de contrarier l’auteur – mais la nature de ce bulletin a ses contraintes –, comment ne pas constater que Céline occupe, une fois encore, une place de choix dans ce volume alors qu’il est bien éloigné le temps où l’auteur gravissait la route des Gardes pour recueillir les propos désabusés du génial anachorète. Nulle complaisance envers lui dans ce journal ; il relève ses propos très durs envers Robert Brasillach et l’équipe de Je suis partout. « Même attitude rageuse de Céline à l’égard de Drieu, mis par lui dans le même sac que Brasillach, coupable de n’avoir songé qu’à se livrer ou au suicide », ajoute-t-il. Lisant le journal de Jünger, il note que « le Paris où il lui était si plaisant de flâner à sa guise avec le plus grand détachement, de rencontrer un petit nombre de merveilleux amis, de garder, malgré la guerre, sa fidélité à cet idéal chrétien et chevaleresque que je m’obstine moi-même à respecter depuis l’enfance, tout cela me touche. Mais il n’a manifestement pas compris Céline et l’a rejeté, ce qui surprend quand on le voit par ailleurs sensible à l’œuvre de Léon Bloy qui fut un écorché et un imprécateur de même espèce. »
Ne dédaignant pas les propos politiquement (très) incorrects, il relate un déjeuner chez Jean et Monette Guenot, en compagnie de Pierre Monnier et de Maurice Ciantar. À propos de celui-ci, il souligne que « rien, dans son apparence, sa tenue stricte et soignée, qui puisse déceler la bohème anarchique et désordonnée de ses premiers textes, et voilà que, l’âge venu, nous aboutissons aux mêmes conclusions. La décomposition de l’Occident est conforme aux visions prophétiques de Céline et justifie ses pamphlets sur l’impuissance des démocraties, leur niaiserie bénisseuse dans l’incapacité d’admettre la pérennité du mal et la nécessité de s’en préserver pour que le progrès technique cesse d’être un leurre et un instrument de crétinisation définitive de l’espèce humaine ». La maîtresse de maison n’est pas en reste qui « confie, en souriant que, de tout Céline, elle admirait par-dessus tout la puissance et la verve des pamphlets. » Revenant sur le sujet peu de temps après, celui qui rallia à dix-huit ans les « Forces Françaises Libres » écrit : « Je ne dissimule pas l’horreur du nazisme, mais je comprends que, dans le chaos économique, la corruption et la misère des années 20 en Allemagne, il ait pu naître, faire illusion, et séduire par ses réformes sociales non seulement le peuple, mais aussi la fine fleur de grands esprits, philosophes, artistes, savants, intellectuels de tous bords célèbres dans le monde entier, et dont l’énumération serait longue. Et je comprends mieux les hurlements de Céline contre une guerre que nous ne pouvions que perdre et que nous aurions pu et dû éviter, l’objectif d’Hitler étant essentiellement l’espace russe, son fameux Lebensraum, où il était voué à l’usure et à l’échec. » Comparant Céline à Drieu, il relève, après avoir relu Gilles, qu’il y avait « une belle naïveté dans les attitudes de Drieu devant la guerre. Il est très loin ici de Céline, qui a osé rire et faire rire à propos de sa frousse éperdue face aux boucheries inconcevables de 14-18, et sa volonté forcenée de s’y soustraire. C’est cela, qui a manqué à Drieu. La vraie distance qui permet l’humour et peut faire de toute tragédie une farce. Du moins admirait-il Céline et lui rendait-il hommage, là où, on y revient, un autre combattant de 14-18, Jünger, n’a ressenti devant Céline que roide incompréhension, aversion spontanée, haine viscérale. » Certains diraient que ce fut sans doute réciproque. S’il n’a jamais rencontré Jünger, l’auteur a bien connu Dominique de Roux qui « se plaisait à croire que ce monde n’est fait que d’apparence et que, très loin de l’apparence, la réalité du pouvoir appartient à un petit nombre d’initiés très secrets, qu’il se piquait de découvrir. À la source de la puissance créatrice et visionnaire de Céline, il voyait une importance démesurée dans l’appartenance aussi fugitive que superficielle de l’auteur du Voyage aux services secrets durant son séjour à Londres en 1916. Il en rêvait tout haut. Il aurait pu en parler des heures. » À mettre en parallèle avec cette interview télévisée que Dominique de Roux fit de Marcel Brochard ; la période londonienne l’intriguait de toute évidence. Mais Brochard, n’ayant connu Louis Destouches qu’à partir de l’époque rennaise, soit quatre ans plus tard, laissa le fondateur des cahiers de L’Herne sur sa faim…
On a parfois commenté sur un ton désapprobateur le refus de Céline, à la fin de sa vie, de voir ses petits-enfants. Nul blâme ici : « Je comprends Céline d’avoir concentré ses faibles forces et ses émotions jusqu’au refus de tout contact avec sa fille et ses petits-enfants. Il n’avait d’autre choix que de les sacrifier à son œuvre, s’il voulait l’achever. Même chose pour Proust, qui fut le vide autour de lui pour terminer fébrilement avant de mourir les ultimes pages de la Recherche et du Temps retrouvé. » Comme on le voit, les résonances de l’œuvre célinienne sont nombreuses dans ce journal. Mais celui-ci vaut surtout par sa peinture acerbe du milieu télévisuel ébranlé par l’arrivée de la gauche au pouvoir en 1981. Sa valeur tient aussi au fait que Jacques d’Arribehaude n’enjolive jamais, ne dissimule rien du mal-être qui l’étreint, des joies intenses mais éphémères, des déboires sans cesse renouvelés et de cette quête si difficile de la sérénité.
Marc LAUDELOUT
Jacques d’ARRIBEHAUDE, S’en fout la vie, The Book Edition, 2008, 418 pages (25 €, franco). On peut commander ce livre sur Internet : www.thebookedition.com ou auprès de Pierre-Vincent Guitard, 76 bd Saint-Marcel, 75005 Paris.
Les volumes précédents du journal ont été édités à L’Age d’homme, où l’on trouve aussi la réédition de ses deux plus beaux romans, Semelles de vent (1959) et Adieu Néri (Prix Cazes, 1978).
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Sommaire du Bulletin célinien n°303 de décembre 2008 :
* Marc Laudelout : Bloc-notes
* Marc Laudelout : Hans et Arletty
* Robert Le Blanc : Face à Céline : BHL, Houellebecq, Stéphane Denis...
* Jessie Aitken : Un aspect inattendu de Guy de Girard de Charbonnières
* Marc Laudelout : Enivrante Corona (Jeanne Loviton)
* Dossier : Elisabeth Porquerol et Céline
* Pol Vandromme : "Une allégresse amère et sauvage" (1969)
* Marc Laudelout : Hommage à Pascal Pia
* Marc Laudelout : Céline et Carco
* Marc Laudelout : Le Paris de la Collaboration
Un numéro de 24 pages, 5 illustrations, 6 € franco de port.
Le Bulletin célinien
BP 70
B1000 Bruxelles
http://louisferdinandceline.free.fr
celinebc@skynet.be
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Autolâtre et stupide
« C’est une chose curieuse comme l’humanité, à mesure qu’elle se fait autolâtre, devient stupide ».
Gustave FLAUBERT, Lettre à Louise Colet, 26 mai 1853.
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Céline dans la presse : approximations et légendes
C’est naturellement la foisonnante actualité éditoriale sur Céline qui suscite à chaque fois un important dossier de presse. Ainsi, le livre Céline à Bezons a encore récolté quelques articles, dont un signé de l’historien de cinéma, Philippe d’Hugues. Il relève que « l’activité du docteur Destouches a occupé dans la vie de l’écrivain un temps plus important que celui qu’il consacra à son œuvre littéraire » ¹. Pas tellement plus important en fait, car, pratiquant une médecine de dispensaire, il bénéficiait de pas mal de temps libre. Ainsi, à Clichy, il officiait tous les jours une heure et demie en fin d’après-midi et à Bezons, il ne consultait que trois après-midi par semaine. Les contraintes de l’exil firent qu’il dût abandonner la profession dès l’âge de 50 ans. Il ne la reprit très épisodiquement que pour quelques années, de 1953 à 1959 afin de pouvoir bénéficier d’une pension de retraite. Tout cela est bien connu des céliniens...
Frédéric Saenen note que « David Alliot semble avoir trouvé un juste milieu entre approche littéraire de pointe et de proximité. Son travail, cela devient coutume, ravira les amateurs comme les spécialistes. Qui se grattent déjà le crâne en se demandant quelle surprise leur est réservée pour la prochaine fois... » ². Entre-temps, on la connaît : cet album iconographique sur Céline au Danemark, réalisé en collaboration avec François Marchetti, dont nous reproduisons ci-contre la préface de Claude Duneton qui situe bien le climat politique de l’immédiat après-guerre.
Le recueil d’articles de Philippe Alméras, Sur Céline, a suscité un dossier de presse nettement moins consistant. On y relève une erreur d’ordre biographique commise par Joël Prieur : « Contrairement à ce que montre l’image d’Épinal, l’essentiel de la carrière médicale de Céline s’effectue à Genève, en Amérique et en Afrique, dans le cadre de missions officielles pour ce qui deviendra l’OMS » ³. Or, chaque lecteur de ce bulletin sait que le docteur Destouches ne travailla que quatre ans pour la Société des Nations. En fait, on n’en finirait pas de relever toutes les erreurs ou approximations relatives à Céline dans la presse. Ainsi, la revue Europe, au glorieux passé stalinien, rendant compte de la énième réédition de Nausée de Céline, conclut en l’estimant « indispensable pour contribuer à démystifier le discours trompeur des hagiographes inconditionnels de l’auteur du Voyage (qui fut aussi, faut-il le rappeler, le délateur de Robert Desnos…) » 4. Jean-Paul Louis a naguère fait litière de cette accusation. Rappelons seulement que la polémique Desnos-Céline, dans le journal collaborationniste Aujourd’hui (qui employait RD), date de février 1941 et que Desnos fut arrêté trois ans plus tard.
Commentant l’éviction de Céline de la médiathèque André-Malraux de Strasbourg (voir en page 3), Claude Lorne note avec ironie que ces actes de censure « ne sauraient concerner Louis Aragon qui, dans ses poèmes, célébrait “le Guépéou nécessaire de France” (…) ni Jean-Paul Sartre qui professait que “tout anticommuniste est un chien” 5.
Marc LAUDELOUT
1. Philippe d’Hugues, « Céline-Destouches, 1940-1944 », La Nouvelle Revue d’Histoire, septembre-octobre 2008.
2. Frédéric Saenen, « “Chanter Bezons, voici l’épreuve !” », La Presse littéraire, septembre-octobre-novembre 2008.
3. Joël Prieur, « Céline ou la politique des chromosomes », Minute, 30 juillet 2008.
4. Ménaché, « Notes de lecture. Jean-Pierre Richard : “Nausée de Céline” », Europe, mai 2008. Voir Jean-Paul Louis, « Desnos et Céline, le pur et l’impur », Histoires littéraires, janvier-février-mars 2001 & Marc Laudelout, « D comme diffamation », Le Bulletin célinien, novembre 2002.
5. Claude Lorne, « Chronique de la censure citoyenne », Rivarol, 3 octobre 2008.
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Un savetier chantait du matin jusqu'au soir:
C'était merveille de le voir,
Merveille de l'ouïr: il faisait des passages,
Plus content qu'aucun des sept sages.
Son voisin, au contraire, étant tout cousu d'or,
Chantait peu, dormait moins encore.
C'était un homme de finance.
Si sur le point du jour parfois il sommeillait,
Le Savetier alors en chantant l'éveillait;
Et le Financier se plaignait
Que les soins de la Providence
N'eussent pas au marché fait vendre le dormir,
Comme le manger et le boire.
En son hôtel il fait venir
Le chanteur, et lui dit: or, ça, sire Grégoire,
Que gagnez-vous par an ? Par an ? ma foi, monsieur,
Dit avec un ton de rieur
Le gaillard Savetier, ce n'est point ma manière
De compter de la sorte; et je n'entasse guère
Un jour sur l'autre: il suffit qu'à la fin
J'attrape le bout de l'année:
Chaque jour amène son pain.
Et bien, que gagnez-vous, dites-moi, par journée?
Tantôt plus, tantôt moins: le mal est que toujours,
(Et sans cela nos gains seraient assez honnêtes)
Le mal est que dans l'an s'entremêlent des jours
Qu'ils faut chommer: on nous ruine en Fêtes.
L'une fait tort à l'autre: et monsieur le Curé,
De quelque nouveau Saint charge toujours son prône.
Le Financier riant de sa naïveté,
Lui dit: je vous veux mettre aujourd'hui sur le trône.
Prenez ces cent écus: gardez-les avec soin,
Pour vous en servir au besoin.
Le Savetier crut voir tout l'argent que la terre
Avait, depuis plus de cent ans,
Produit pour l'usage des gens.
Il retourne chez lui: dans sa cave il enserre
L'argent et sa joie à la fois.
Plus de chant: il perdit la voix
Du moment qu'il gagna ce qui cause nos peines.
Le sommeil quitta son logis,
Il eut pour hôtes les soucis,
Les soupçons, les alarmes vaines.
Tout le jour il avait l'oeil au guet: et la nuit,
Si quelque chat faisait du bruit;
Le chat prenait l'argent. A la fin le pauvre homme
S'en courut chez celui qu'il ne réveillait plus.
Rendez-moi, lui dit-il, mes chansons et mon somme,
Et reprenez vos cent écus.
Jean de la Fontaine, Le savetier et le financier, Fable II, Livre Huitième.
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Laurent SCHANG:
André Malraux ou la quête de sens
Pour ceux qui aujourd'hui encore ne verraient en André Malraux que l'agent littéraire le plus talentueux de la IIIième Internationale, les éditions Gallimard ont eu l'heureuse idée de publier dans la collection “Folio” le texte longtemps inexploité de l'enfant chéri des lettres françaises, Les Noyers de l'Altenburg. Généreuse intention s'il en est, qui présente l'extrême intérêt pour les passionnés de l'auteur de L'espoir d'éclairer d'un jour nouveau le passage radical et trop longuement resté confiné dans les ténèbres de sa biographie, de son militantisme communiste à son action de protecteur des Arts gaulliste, évolution frappée du sceau impitoyable de la seconde guerre mondiale, dont le tourbillon déprédateur aura au moins eu l'effet salutaire de révéler Malraux à lui-même. De fait, Les Noyers de l'Altenburg constituent, plus qu'une étape, un tournant dans l'œuvre de l'écrivain. Ecrit en 1941, cet «anti-rornan», tant Malraux semble y avoir abandonné tout projet romanesque, peut à bon droit se présenter comme le bilan d'une vie avant la mue définitive vers une autre dimension, spirituelle et métaphysique. D'une structure relativement lâche, touffue, sans unité marquée, la fascination opérée par Les Noyers... ne provient pas tant du récit intrinsèque que de la métamorphose et de la mise à nu de son auteur, transfiguration nourrie, comme à l'habitude, par l'immensité des réflexions, que celles-ci soient religieuses, intellectuelles, politiques, historiques ou personnelles. De La Condition Humaine aux Anti-Mémoires, il n'y avait qu'un pas. Le voici franchi par Les Noyers de l'Altenburg.
Un appel à l'homme, à la civilisation, à l'esprit
Dans sa courte introduction, Marius-François Guyard note avec raison: «La vraie leçon des Noyers, c'est la mort de toute idéologie qui refuse le mystère de l'homme et ignore les realités «charnelles», pour parler comme Péguy. Une référence au maître des Cahiers de la Quinzaine fort à propos, pour ce roman inauguré dans la cathédrale de Chartres, en ce 21 juin 1940 de debâcle française. Prisonnier détenu dans ce vaisseau de pierre, abattu, écrasé par la fulgurance de la défaite, le narrateur (un Alsacien derrière lequel se dissimule à peine Malraux) se détache de sa sordide condition d'humilié pour se remémorer vingt-cinq ans plus tôt l'expérience parallèle de son père et trouver de nouvelles raisons d'espérer devant le chaos existentiel provoqué par la soudaine réalité du vrombissement des colonnes blindées allemandes.
Les préoccupations essentielles de le pensée de Malraux ressurgissent au milieu de ses congénères que ne préoccupent que l'instinct de survie, plus prégnants que jamais: l'Homme, la pensée, l'action. «Je sais maintenant qu'un intellectuel n'est pas seulement celui à qui les livres sont nécessaires, mais tout homme dont une idée, si élémentaire soit-elle, engage et ordonne toute la vie. Ceux qui m'entourent, eux, vivent au jour le jour depuis des millénaires». Ce père, Vincent Berger, l'éminence grise du jeune colonel Enver Pacha délégué par le Ministère des Affaires Etrangères allemand à Constantinople en pleine décadence ottomane, c'est aussi Malraux. Diplômé en langues orientales, pétri de références nietzschéennes, «dans sa philosophie de l'action —l'action passait avant la philosophie»— mais converti au socialisme, sorte d'anti-Lawrence d'Arabie germano-turc parti en croisade pour le mirage touranien, joué par la duplicité du IIième Reich, tout chez lui rappelle le passé communiste et militant du «premier» Malraux, engagé dans la guerre d'Espagne, propagandiste infatigable mais peu considéré de l'Internationale, pour qui son appel à l'Homme, à la civilisation, à l'esprit n'était que “verbiage petit-bourgeois”. «Il avait pris son parti d'une erreur qui avait tant engagé de lui-même; mais avec le retour de la santé la haine venait: comme s'il eût été trompé, non par lui-même, mais par cette Asie centrale menteuse, idiote et qui se refusait à son propre destin —et par tous ceux dont il avait partagé sa foi». Eloquent.
Le sens de la vie se trouve au-delà de la dialectique
Et puis toujours, obsessionnelle, fatale, la quête de sens, la marche vers une civilisation spirituelle autre, sacrée mais sans dogme ni rituel, transcendante. La fin de sa révolte, Malraux l'imagine puissamment par la traversée du désert du père de son héros, perdu sous la voûte des nuages caucasiens, se ruinant la santé sur les pistes qui mènent à Samarcande, mais élevant son âme vers l'infini, le divin. Antoine de Saint Exupéry, autre Perceval saharien, ne formulera pas autrement ce face-à-face dépouillé avec l'éternité dans le gigantisme des mers de sable. Cette révélation universelle, «un secret qui était bien moins celui de la mort que celui de la vie —un secret qui n'eût pas été moins poignant si l'homme eût été immortel», le mythe primordial qui confèrerait à l'homme un sens à sa vie bien supérieur au péché originel, Nietzsche s'y est brûlé les yeux, qui devint fou d'avoir percé le mystère... Descente aux Enfers magnifiquement retranscrite à laquelle a assisté Walter Berger, l'oncle de Vincent, ami du prophète de Sils-Maria et maître de céremonie des colloques de l'Altenburg, prieuré cerné de noyers où l'on disserte à l'envi sous l'égide des grands penseurs de ce monde: Nietzsche (bien sûr), Weber, Freud, George, Durckheim, mais aussi Pascal, Tacite, Mommsen, Platon. Dans les discours fumeux, gavés de la vaniteuse connaissance universitaire de penseurs par procuration n'écoutant qu'eux-mêmes, Vincent, revenu étranger dans un monde moderne qui le rebute en cette veille d'août 14, comprend, lui l'intellectuel, que le sens de la vie se trouve au-delà de la dialectique.
«Une civilisation n'est pas un ornement, mais une structure»
Si «l'homme est (toujours) ce qu'il fait» (cf Tchen dans La Condition Humaine), André Malraux sait désormais qu'une dimension infiniment supérieure l'habite, qu'il discerne sous les traits de la civilisation, évoquée comme annonciation du Nous universel par la transcendance du Moi. «Autrement dit, sous les croyances, les mythes, et surtout sous la mutiplicité des structures mentales, peut-on isoler une donnée permanente, valable à travers les lieux, valable à travers l'bistoire, sur quoi puisse se fonder la notion d'homme?» Approche qui défère au livre de Malraux une connotation éminemment contemplative, traditionnelle et guénonienne. L'immortalité, thème qui revient avec insistance («les millénaires n'ont pas suffi à l'homme pour apprendre à mourir», «On ne s'habitue pas à mourir»), Vincent la découvrira en juin 1915, les genoux et les mains plongés dans la terre gluante des plaines des bords de la Vistule irrémédiablement putréfiée par les gaz asphyxiants. Le progrès scientifique n'est qu'un leurre, «l'homme fondamental est un mythe, un rêve d'intellectuels», l'homme n'existe, vérité insoutenable pour le penseur, que parce qu'il est peuple de chair, non d'idée, un être pauvre, nu, sans force mais riche de sa communion magique avec la nature. Si pour l'intellectuel «la culture est une religion», le sens de la vie pour le commun des mortels réside dans sa capacité à ordonner la civilisation en harmonie avec les forces de la terre, seule part d'éternité où l'homme-shaman (un terme qui revient lancinant au fil du récit) trouve sa place dans la joie et la grandeur originelle recouvrées. «Une civilisation n'est pas un ornement, mais une structure». Vincent sera emporté par les gaz, seuls résisteront sur le champ de mort aux vapeurs des combats, hiératiques, les noyers...
Le colonel Berger pouvait dès lors apparaître
Le roman s'achèvera sur le retour au narrateur, et ses souvenirs de chef de blindés devant la ruée de mai-juin 1940, son attente, pleine de pitié, de dénuement et d'acceptation sereine d'une mort qu'il croit certaine: «Ainsi, peut-être, Dieu regarda le premier homme».
Roman charnière dans l'ouvre et la vie d'André Malraux, Les Noyers de l'Altenburg devait inaugurer une quadrilogie intitulée La Lutte avec l'Ange, projet inachevé, les manuscrits ayant été saisis par la Gestapo en 1943. Aux questions existentielles posées par le tout jeune Malraux de La Tentation de l'Occident, ce livre répond tout en annonçant chez l'auteur la transition d'avec les trois dates-clés de son «adolescence»: 1923, 1936 et 1940. Le colonel Berger (pseudonyme guerrier du Malraux de la brigade Alsace-Lorraine) pouvait dès lors apparaître.
Laurent SCHANG.
Les Noyers de l'Altenburg, Folio Gallimard, cat. 3, n°2997.
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