Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

mercredi, 06 novembre 2013

Un texte du 19ème siècle sur la formation du Samouraï déchiffré

jmkgcmgx.jpg

Un texte du 19ème siècle sur la formation du Samouraï déchiffré

Auteur : Les Découvertes Archéologiques 

Ex: http://www.zejournal.mobi

Un texte d'entraînement, utilisé par une école d'arts martiaux pour enseigner aux membres de la classe bushi (samurai ou samouraï), a été déchiffré. Il révèle les règles que les samouraïs étaient censés suivre et ce qu'il fallait faire pour devenir un véritable maître épéiste.

Le texte est appelé Bugei no jo, ce qui signifie "Introduction aux arts martiaux" et est daté de la 15e année de Tenpo (1844).

Écrit pour les étudiants samouraïs sur le point d'apprendre le Takenouchi-Ryu, un système d'arts martiaux , il devait les préparer pour les défis qui les attendaient.

Une partie du texte traduit donne ceci: "Ces techniques de l'épée, nées à l'âge des dieux, ont été prononcées par la transmission divine. Elles forment une tradition vénérée de par le monde, mais sa magnificence se manifeste seulement quand on a pris connaissance (...). Quand [la connaissance] est arrivée à maturité, l'esprit oublie la main, la main oublie l'épée," un niveau de compétence que peu obtiennent et qui requiert un esprit calme.

Le texte comprend des citations écrites par les anciens maîtres militaires chinois et est écrit dans un style Kanbun formel: un système qui combine des éléments de l'écriture japonaise et chinoise.

Le texte a été publié à l'origine par des chercheurs en 1982, dans sa langue originale, dans un volume de l'ouvrage "Nihon Budo Taikei." Récemment, il a été partiellement traduit en anglais et analysé par Balázs Szabó, du département d'études japonaises de l'Université Eötvös Loránd à Budapest, en Hongrie.

La traduction et l'analyse sont décrites dans la dernière édition de la revue Acta Orientalia Academiae Scientiarum Hungaricae.

Parmi ses nombreux enseignements, le texte dit aux élèves de montrer une grande discipline et de ne pas craindre le nombre d'ennemis. "(...) c'est comme franchir la porte d'où nous voyons l'ennemi, même nombreux, nous les voyons comme quelques uns, donc aucune crainte ne s'éveille, et nous triomphons alors que le combat vient à peine de commencer", citation d'un enseignement Sur les Sept Classiques Militaires de la Chine ancienne.

Le dernier siècle des samouraïs

En 1844, seuls les membres de la classe Samouraï étaient autorisés à recevoir une formation d'arts martiaux. Szabó explique que cette classe était strictement héréditaire et qu'il y avait peu de possibilités pour les non-samurai d'y adhérer.

Les étudiants Samurai, dans la plupart des cas, auraient participé à plusieurs écoles d'arts martiaux et, en outre, auraient appris "l'écriture chinoise, les classiques confucéens et la poésie dans les écoles du domaine ou des écoles privées", a expliqué Szabó.
Les étudiants qui commencent leur formation de Takenouchi-ryu en 1844 ne réalisaient pas qu'ils vivaient à une époque où le Japon était sur ??le point de subir d'énormes changements.

Pendant deux siècles, il y a eu des restrictions sévères sur les Occidentaux entrant au Japon. Cela a pris fin en 1853 quand le commodore américain Matthew Perry est entré dans la baie de Tokyo avec une flotte et a exigé que le Japon signe un traité avec les États-Unis.
Dans les deux décennies qui ont suivi, une série d'événements et de guerres ont éclaté qui on vu la chute du Japon Shogun, la montée d'un nouveau Japon moderne et, finalement, la fin de la classe des Samouraïs.

Les règles Samurai.

Le texte qui vient d'être traduit énonce 12 règles que les membres de l'école de Takenouchi-ryu étaient censés suivre.
Certaines d'entre elles, dont "Ne quittez pas le chemin de l'honneur !" et "Ne commettez pas de turpitude !" étaient des règles éthiques que les samouraïs étaient censés suivre.

 

tradition,traditions,traditionalisme,japon,samourai,asie,castes guerrières

Une règle notable, "Ne laissez pas les enseignements de l'école s'échapper !" a été créé pour protéger les techniques secrètes d'arts martiaux de l'école et à aider les élèves s'ils devaient se trouver au milieu d'un combat.

"Pour une école d'arts martiaux ... afin d'être attrayante, il était nécessaire de disposer de techniques spéciales permettant au combattant d'être efficace même contre un adversaire beaucoup plus fort. Ces techniques sophistiquées faisaient la fierté de l'école et étaient gardées secrètes, car leur fuite aurait causé une perte aussi bien économique que de prestige", écrit Szabó.

Deux autres règles, peut-être plus surprenantes, précisent que les étudiants "ne se concurrencent pas !" et "Ne racontent pas de mauvaises choses sur d'autres écoles !".

Les occidentaux modernes ont une vision populaire des samouraïs s'affrontant régulièrement, mais en 1844, ils n'étaient pas autorisés à se battre entre eux.
Le shogun Tokugawa Tsunayoshi (1646-1709) avait placé une interdiction sur les duels d'arts martiaux et a même réécrit le code que le samouraï devait suivre, en l'adaptant pour une période de paix relative. "L'apprentissage et la compétence militaire, la loyauté et la piété filiale, doit être promue, et les règles de la bienséance doivent être exécutées correctement", expliquait le shogun (traduction du livre "Études sur l'histoire intellectuelle du Japon des Tokugawa," par Masao Maruyama, Princeton University Press, 1974).

Les compétences secrètes.

Le texte propose seulement un faible aperçu des techniques secrètes que les élèves auraient appris à cette école, en séparant les descriptions en deux parties appelées "secrets les plus profonds du combat" et "secrets les plus profonds de l'escrime."

Une partie des techniques secrètes de combat à mains nues est appelé Shinsei no daiji, ce qui se traduit par "techniques divines", indiquant que ces techniques étaient considérées comme les plus puissantes.

Curieusement, une section de techniques secrètes d'escrime est répertoriée comme ?ry?ken, également connu sous le nom IJU ichinin, ce qui signifie "ceux considérés être accordés à une personne" - dans ce cas, l'héritier du directeur.

Le manque de détails décrivant ces techniques dans des cas pratiques n'est pas surprenant pour Szabó. Les directeurs avaient des raisons pour utiliser un langage crypté et l'art du secret.


Non seulement ils protégeaient le prestige de l'école, et les chances des élèves dans un combat, mais ils contribuaient à "maintenir une atmosphère mystique autour de l'école," quelque chose d'important pour un peuple qui tenait l'étude des arts martiaux en haute estime.

 - Source : Les Découvertes Archéologique

La chute de Sfeira près d'Alep

arsyr.jpg

La chute de Sfeira près d'Alep, un changement stratégique majeur

Auteur : Ghaleb Gandy 
 
Ex: http://www.zejournal.mobi

Les échanges d'accusations de trahison et de lâcheté sur les médias des groupes armés en Syrie suffisent à eux seuls à comprendre l'importance stratégique de la libération de la ville de Sfeira, au sud-est d'Alep, par l'Armée arabe syrienne et les unités de la défense nationale.

Ces derniers mois, les groupes armés avaient massé dans cette localité d'importantes troupes, les unités les mieux équipées et celles disposant des plus gros moyens financiers. On y trouvait le Front al-Nosra et l'Etat islamique d'Irak et du Levant, affiliés à Al-Qaïda, Liwaa al-Islam, dirigé par Zahran Allouche, l'homme de Bandar Ben Sultan en Syrie, Ahrar al-Cham, et un conseil militaire local rattaché à l'Armée syrienne libre. Ces groupes jouissaient de lignes de ravitaillement ouvertes vers la frontière avec la Turquie, d'où étaient acheminés armes, munitions, argents et renforts en combattants venus de l'étranger. Le soutien le plus importants provenait d'Arabie saoudite, selon les correspondants de la presse étrangère.

Ces groupes ont jeté toutes leurs forces dans la bataille pour tenter de garder Sfeira en raison de sa position stratégique. Il s'agit en effet d'un nœud important commandant l'accès à la campagne sud-est d'Alep ; elle est située non loin de l'aéroport international d'Alep et de l'aéroport militaire de Koueirès ; elle est proche de la région d'Al-Bab, qui commande l'accès à Alep.

Elle constitue un point d'équilibre décisif à l'intérieur d'Alep et de sa province, car elle est située non loin des industries de la défense et de la route d'approvisionnement, qui relie les provinces de Hama et d'Alep. De plus, elle se trouve sur l'axe de communication routier entre la province d'Alep et des régions de l'est, à Raqqa.

Pour toutes ces raisons, la libération de Sfeira aura des répercussions décisives sur les équilibres militaires dans le pays.

L'Armée arabe syrienne et les unités de la défense civile ont réussi à libérer Sfeira après la reprise de Khanasser et de ses environs, il y a quelques semaines, ce qui lui avait permis de rouvrir la voie approvisionnement Hama-Alep, appelée la "route du désert".

L'avancée rapide de l'armée syrienne est une preuve de ses hautes capacités et de sa solidité, qui surprennent les observateurs. Mais elle confirme, aussi, le changement de l'humeur populaire des Syriens, qui rejettent les exactions des groupes extrémistes, déchirés par des luttes intestines autour des butins. L'effondrement du camp hostile à la Syrie avec l'apparition de profondes divergences entre l'Arabie saoudite d'un côté, le Qatar et la Turquie de l'autre, est un signe supplémentaire de l'échec de la guerre universelle contre la Syrie.

Les groupes armés qui combattent l'Etat syrien, ne sont que des façades pour des puissances étrangères. Ils ont sombré dans une profonde dépression après que les Etats-Unis aient été contraints d'abandonner leur projet d'agression contre la Syrie. Leurs défaites sur le terrain s'accélèrent et la reprise de Sfeira sera suivie d'autres victoires dans les différentes régions du pays.

 - Source : Ghaleb Gandy

Du P.S.

1970.jpg

Du P.S.

par Georges FELTIN-TRACOL

 

Le thème principal du n° 44 (été 2013) de la revue quadrimestrielle Réfléchir et Agir porte sur le socialisme identitaire. À côté de diverses contributions, on peut lire un bref débat sur le mot même de socialisme entre l’ami Eugène Krampon et l’auteur de ces lignes. Eugène soutient la nécessité d’en conserver le terme parce qu’il demeure compréhensible, en dépit de tous les dévoiements imaginables, alors que le solidarisme et le justicialisme restent obscurs pour les populations européennes.

 

La question sémantique garde toute son importance dans la guerre des idées. Si le socialisme devient identitaire ou « européen » comme l’écrivait régulièrement Jean Mabire, il importe néanmoins d’en redéfinir le concept et de lui redonner un sens révolutionnaire, novateur et rebelle, quitte éventuellement à le reformuler à l’aune de la quatrième théorie politique conceptualisée par Alexandre Douguine. Ce travail lexical exige en priorité une claire distinction du Parti socialiste (P.S.) de Flamby, de Jean-Marc (Z)Ayrault et d’Harlem Désir ainsi que de leurs pitoyables homologues sociaux-démocrates.

 

La tâche semble impossible. En réalité, elle est fort simple grâce du fait des reniements successifs des dirigeants du P.S. Lui-même ancien responsable de la formation de Léon Blum, de Guy Mollet et de François Mitterrand, le co-président du Parti de Gauche, Jean-Luc Mélenchon, assène de rudes coups à ses anciens camarades. Favorable à l’« éco-socialisme » dans une perspective développementaliste et industrialiste, Mélenchon s’estime seul véritable héritier de Jean Jaurès et des ténors du socialisme institutionnalisé. Avec la virulence qu’on lui connaît, il ose dénier au P.S. – aujourd’hui au pouvoir – de se qualifier de « socialiste » et préfère le nommer avec un mépris superbe de « solférinien », de la célèbre adresse parisienne de son siège national du P.S., rue de Solférino.

 

Pour une fois, le camarade Mélenchon a raison de contester à son ancien parti l’emploi du mot « socialiste ». Depuis le tournant de la rigueur en 1983, le P.S. s’est plié au Diktat des marchés mondiaux, de la finance planétaire et de l’Oligarchie transnationale. Sa soumission au mondialisme après avoir célébré pendant des décennies un internationalisme éthéré a été récompensée par la nomination à la direction générale de l’O.M.C. et du F.M.I. de Pascal Lamy et de Dominique Strauss-Kahn. Les « solfériniens » ont tué leur socialisme au nom du financiarisme le plus débridé.

 

Cette trahison, en germe dès la naissance de la S.F.I.O. en 1905 avec les possibilistes et les partisans de l’action parlementaire, s’accompagne d’un changement profond de l’électorat « socialiste ». Si les ouvriers, les employés et le gros des catégories populaires et moyennes l’ont délaissé, une compensation s’effectue avec de nouveaux électeurs issus des couches intermédiaires aisées, des catégories sociales à haut revenu et des effets d’une immigration de peuplement massive. Dompté et désormais laquais du fric sans frontières (pléonasme !), le P.S. détourne son désir de révolution en s’attaquant aux normes culturelles traditionnelles européennes.

 

Hantant les coulisses d’un pouvoir légal mais illégitime, les « solfériniens » propagent par différents canaux des thèmes homosexualistes (le mariage inverti), relativistes (réformes judiciaires qui livrent l’Hexagone à la délinquance), libertaires (dépénalisation du cannabis, voire de toutes les drogues) et extrême-féministes (pénalisation des clients de prostituées, interdiction de la fessée et de la gifle adressées aux enfants par leurs parents) qui ne répondent pas aux attentes de la population. Qu’il est loin le temps où les députés socialistes comptaient parmi eux Alfred Gérault-Richard (1860 – 1911) ! D’abord élu du XIIIe arrondissement de Paris entre 1895 et 1898, il sera ensuite le représentant de la Guadeloupe de 1902 jusqu’à sa mort. Cet ami de Jaurès et d’Aristide Briand conviendrait certainement à la fort prude Najat Vallaud-Belkacem, Pasionaria à la petite semaine du néo-puritanisme gauchard. Auteur d’une courte biographie, Bruno Fuligni le qualifie d’« ouvrier tapissier, maquereau, poète, spadassin, maître chanteur, industriel, séparatiste montmartrois… (1) ». Outre qu’on a l’impression qu’il décrit une formation politique particulière, Bruno Fuligni ne cache pas que Alfred Gérault-Richard vécut un temps grâce aux charmes de sa petite amie… On a enfin dénicher la figure tutélaire d’Osez le féminisme et des FemHaine ! Au moins, cet homme-là n’escroquait pas ses électeurs… La volonté effrénée des nouveaux « gardes roses » de sanctionner des comportements ataviques accompagne la mutation anthropologique hyper-individualiste à l’œuvre.

 

En acceptant le « bougisme », le P.S. a récusé le socialisme pour devenir un Parti sociétaliste. Qu’est-ce que le sociétalisme ? C’est une idéologie post-moderniste qui privilégie le sociétal. Expression venue d’outre-Atlantique, « sociétal » se distingue du « social ». Son « emploi correspond à un déplacement des idées au sein de la gauche », indique Chantal Delsol (2). Selon la philosophe libérale-conservatrice, « le social relève de l’organisation et de la distribution de la production. Il est clairement lié à l’économie, aux biens quantifiables et monnayables, et à leur répartition. Tandis que le terme sociétal est employé pour désigner ce qui a trait aux comportements de l’individu et à l’évolution des mœurs – il s’agit des normes et non plus de la redistribution des biens; cela concerne la famille, le couple, la liberté individuelle, la vie privée, le sens de la vie, et non plus le niveau de vie, le confort, la sécurité (3) ». Elle ne saisit toutefois pas que la perception sociétale convient parfaitement à l’essence liquide de l’ultra-modernité libérale.

 

Bénéficiaires de la mondialisation globale, les sociétalistes ont entamé la démolition des dernières résistances à l’indifférenciation mortifère de la vie et du monde. Après avoir rejeté le spirituel, occulté le politique, hypertrophié l’économique et perverti le culturel, les voilà en train de s’affranchir du social afin de privilégier un sociétal compris comme d’une morale universaliste dissolvante. La félonie est donc totale.

 

Face à cette tendance inquiétante, il est temps de redécouvrir le social, cette dimension réelle, concrète, tangible du politique. Contre les métastases du sociétalisme présentes tant chez les « solfériniens » qu’au sein de la fumeuse U.M.P., la nécessité impose de relever un socialisme véritable, de relancer le solidarisme et d’encourager le justicialisme. Les peuples ne vivent pas en société, mais constituent des ensembles complexes de communautés qui perdurent malgré tout sous les gravats individualistes et médiatiques du sociétal délétère.

 

Georges Feltin-Tracol

 

Notes

 

1 : Bruno Fuligni, La Chambre ardente. Aventuriers, utopistes, excentriques du Palais-Bourbon, les Éditions de Paris – Max Chaleil, 2001, p. 213.

 

2 : Chantal Delsol, « La gauche préfère le “ sociétal ” au “ social ” », Le Figaro, 12 août 2013.

 

3 : art. cit.

 


 

Article printed from Europe Maxima: http://www.europemaxima.com

 

URL to article: http://www.europemaxima.com/?p=3421

 

Al Qaeda in China, Islamic Insurgency in Uighur-Xinjiang, China and the US-Saudi-Israeli Plan for the Middle East

xinjiang-500x615.gif

Al Qaeda in China, Islamic Insurgency in Uighur-Xinjiang, China and the US-Saudi-Israeli Plan for the Middle East

 
Global Research, October 30, 2013

THE YINON PLAN LIVES ON

Named after Israel’s minister of foreign affairs at the time of the 1982 invasion of Lebanon and occupation of Beirut, with about 25 000 dead, this divide-and-rule geostrategy plan for the MENA (Middle East and North Africa) lives on.

Already victims of this strategy since 2011 – operated by Israel, the US and Saudi Arabia – we have the divided and weakened states of Iraq, Libya, Yemen and Syria. Egypt and even Tunisia can also possibly be added to the list. Others can be identified as likely short-term target victim countries.

In February 1982 the foreign minister Oded Yinon wrote and published ‘A Strategy for Israel in the Nineteen Eighties‘, which outlined strategies for Israel to become the major regional power in the Middle East. High up the list of his recommendations was to decapitate and dissolve surrounding Arab states into sub-nations, warring between themselves. Called the peace-in-the-feud or simply divide and rule, this was part of Yinon’s strategy for achieving the long-term Zionist goal of extending the borders of Israel, not saying where but potentially a vast region. His strategy was warmly and publicly supported by leading US policy makers with close ties to Israel, like Richard Perle, by the 1990s.

This regional balkanization plan is centred on the exploitation of ethnic, religious, tribal and national divisions within the Arab world. Yinon noted the regional landscape of the MENA was “carved up” mainly by the US, Britain and France after the defeat and collapse of the Ottoman empire in 1917. The hastily traced and arbitrary borders are not faithful to ethnic, religious, and tribal differences between the different peoples in the region – a problem exactly reproduced in Africa, when decolonization started in the 1950s and 1960s. Yinon went on to argue this makes the Arab world a house of cards ready to be pushed over and broken apart into tiny warring states or “chefferies” based on sectarian, ethnic, national, tribal or other divisions.

Central governments would be decapitated and disappear. Power would be held by the warlord chiefs in the new sub-nations or ‘mini-states’. To be sure, this would certainly remove any real opposition to Israel’s coming regional dominance. Yinon said little or nothing about economic “collateral damage”.

To be sure, US and Saudi strategy in the MENA region is claimed to be entirely different, or in the Saudi case similar concerning the means – decapitating central governments – but different concerning the Saudi goal of creating a huge new Caliphate similar to the Ottoman empire. Under the Ottomans nations did not exist, nor their national frontiers, and local governments were weak or very weak.

ISLAMIC INSURGENCY IS WELL KNOWN IN CHINA

China knows plenty about Islamic insurgency and its potential to destroy the nation state. Even in the 1980s and 1990s, some 25 years ago, China had an “Islamic insurgency” threat concentrated in its eastern resource-rich and low population Xinjiang region. Before that, since the early days of the Peoples’ Republic in the 1950s, China has addressed Islamic insurgency with mostly failed policies and strategies but more recently a double strategy of domestic or local repression, but aid and support to Islamic powers thought able to work against djihadi insurgents – outside China – has produced results.

The Chinese strategy runs completely against the drift of Western policy and favours Iran.

A report in ‘Asia Times’, 27 February 2007, said this: “Despite al-Qaeda’s efforts to support Muslim insurgents in China, Beijing has succeeded in limiting (its) popular support….. The latest evidence came when China raided a terrorist facility in the country’s Xinjiang region, near the borders with Pakistan, Afghanistan, Tajikistan and Kirgizstan. According to reports, 18 terrorists were killed and 17 were captured”.

Chinese reporting, even official white papers on defence against terror are notoriously imprecise or simply fabricated. The official line is there is no remaining Islamic insurgency and – if there are isolated incidents – China’s ability to kill or capture militants without social blowback demonstrates the State’s “hearts and minds” policy in Xinjiang, the hearth area for Chinese Muslims, is working.

Chinese official attitudes to Islamic insurgency are mired with veils of propaganda stretching back to the liberation war against anti-communist forces. These featured the Kuomintang which had a large Muslim contingent in its Kuomintang National Revolutionary Army. The Muslim contingent operated against Mao Zedong’s central government forces – and fought the USSR. Its military insurgency against the central government was focused on the provinces of Gansu, Qinghai, Ningxia and Xinjiang and continued for as long as 9 years after Mao took power in Beijing, in 1949.

Adding complexity however, the Muslim armed forces had been especially active against the Soviet Union in the north and west – and by 1959 the Sino-Soviet split was sealed. Armed hostilities by Mao’s PLA against the Red Army of the USSR broke out in several border regions, with PLA forces aided by former Muslim insurgents in some theatres. Outside China, and especially for Arab opinion, Mao was confirmed as a revolutionary nationalist similar to non-aligned Arab leaders of the period, like Colonel Husni al-Zaim of Syria and Colonel Nasser of Egypt.

CHINA’S THREAT TO WESTERN STRATEGY IN THE MENA

Especially today, some Western observers feign “surprise” at China’s total hostility towards UN Security Council approval for “surgical war” strikes against Syria. The reasons for this overlap with Russia’s adamant refusal to go along with US, Saudi Arabian, Turkish and French demands for a UNSC rubber stamp to trigger “regime change” in Syria but are not the same. For China the concept of “regime change” with no clear idea – officially – of what comes next is anathema.

As we know, when or if al Assad falls, only chaos can ensue as the country breaks apart, but this nightmare scenario for China is brushed aside by Western politicians as a subject for “later decision”.

China’s successful efforts to keep the global jihad from spreading into its territory is surely and certainly taken as a real challenge by Saudi-backed insurgents in western China. Various reports indicate the al-Qaeda organization trains about 1 000 mostly Xinjiang-origin Uighurs and other Chinese Muslims every year. Located in camps in Afghanistan, Pakistan, Kirgizstan and elsewhere, this terror training has continued since at least the mid-1990s, for a total of more than 15 years.

The focus on Xinjiang, formerly called Turkestan is no accident. The region’s Russian influence is still strong, reinforced by Muslim migration from Russia in the 19th century, accelerated by the Russian Civil War and 1917 revolution. During China’s warlord era preceding Mao’s rule, the USSR armed and supported the Muslim separatist East Turkestan Republic which only accepted Mao’s rule when the PRC under the Chinese communists was fully established in 1949. The longstanding East Turkestan jihadi movement (ETIM) is highly active today after being relaunched in the early 2000′s, especially since the Iraq war of 2003. It however mainly acts in “external theatres” such as Pakistan’s Baluchistan province. The Baluchi of Pakistan have long-term rebellious relations with the central government in Islamabad, and are allied with Kurd nationalists in Iraq, Syria, Lebanon and Turkey.

The US Council on Foreign Relations in a 29 May 2012 briefing on Xinjiang noted that since the Chinese Qing dynasty collapse of 1912, the region has experienced various types of semi-autonomy and on several occasions declared full independence from China. The Council for example notes that in 1944, factions within Xinjiang declared independence with full support from the USSR, but then cites US State Dept. documents claiming that Uighur-related terrorism has “declined considerably” since the end of the 1990s and China “overreacts to and exaggerates” Islamic insurgency in Xinjiang.

Notably, the US has declassified the ETIM Islamic movement – despite its terror attacks – as a terrorist organization. The ETIM was defined as such during the Bush administration years, but is no longer listed as a Foreign Terrorist Organization (FTO) in the State Dept. FTO list as from January 2012.

China has fully recognized the Islamic insurgency threat, with its potential for drawing in hostile foreign powers seeking to destroy national unity and break the national government. Its concern, shared by Indian strategists and policy makers is to “stop the rot” in the MENA.


THE CHINESE STRATEGY

Unofficially, China regards the US and Saudi strategy in the MENA and Central Asia as “devil’s work” sowing the seeds of long-term insurgency, the collapse of the nation state and with it the economy. The US link with and support to Israel is in no way ignored, notably Israel’s Yinon plan for weakening central governments and dissolving the nation state right across the MENA.

China’s main concern is that Central Asian states will be affected, or infected by radical Islamic jihadi fighters and insurgents drifting in from the West, from the Middle East and North Africa. These will back the existing Islamic insurgent and separatist movement in resource-rich Xinjiang. To keep Central Asian states from fomenting trouble in Xinjiang, China has cultivated close diplomatic ties with its neighbors, notably through the Shanghai Cooperation Organization which has a secretariat concerned with counter-insurgency issues.

US analysts however conclude, very hastily, that China “instinctively supports the status quo” and therefore does not have an active international strategy to combat djihadi violence and anarchy outside China. US analysts say, without any logic, that China will respond to and obediently follow initiatives from Washington and other Western powers – as it has starkly not done in the UN Security Council when it concerns the Western powers’ long drawn out attempt to repeat, for Syria, their success in 2011 for getting UNSC approval to the NATO war in Libya!

China was enraged, and regarded it as betrayal when its support for limited action by NATO in Libya – a rare instance of China compromising on nonintervention – turned into an all-out “turkey shoot” to destroy the Gaddafi clan. Libya was handed over to djihadi militants, who subsequently declared war against central government, an accelerating process resulting in Libya, today, having no central government with any real authority. That experience certainly hardened Beijing’s responses on Syria.

Post-Mao China has restored the concept of Chinese cultural continuity, with a blend of Confucian, Taoist and Buddhist strands which had been been weakened but not completely destroyed in the years of ideologically-driven Communism. For the Communists of Mao’s era “history was bunk”, not even a mixed bag but an unqualified evil that must be smashed. The Chinese attitude to radical Islam as embodied in the ideologies of Wahabism and Salafism is the same – they are treated as a denial of world history and its varied cultures, with immediate and real dangers for China. Its counter-insurgency strategy against Islamic radicals is the logical result.

This strategy ensures closer Tehran-Beijing relations, usually described by Western analysts as a “balancing act” between ties to Washington and growing relations with Iran. China and Iran have developed a broad and deep partnership centered on China’s oil needs, to be sure, but also including significant non-energy economic ties, arms sales, defense cooperation, and Asian and MENA geostrategic balancing as a counterweight to the policies and strategies of the United States and its local allies, Saudi Arabia and Israel. Chinese attention now focuses the Washington-Riyadh axis and its confused and dangerous MENA region geostrategy, resulting in a de facto proliferation of Islamic djihadi insurgents and the attack on the basic concept of the nation state across the region. The Chinese view is that Iran’s version of “Peoples’ Islam” is less violent and anarchic, than the Saudi version.

OPPOSING THE WASHINGTON-RIYADH AXIS

Both Chinese and Indian strategists’ perceptions of the US-Saudi strategy in the MENA, and other Muslim-majority regions and countries is that it is dangerous and irresponsible. Why the Western democracies led by the US would support or even tolerate the Saudi geostrategy and ignore Israel’s Yinon Plan – as presently shown in Syria – is treated by them as almost incomprehensible.

China is Tehran’s largest trading partner and customer for oil exports, taking about 20% of Iran’s total oil exports, but China’s co-operation is seen as critical to the Western, Israeli and Arab Gulf State plan to force Iran to stop uranium enrichment and disable the capacity of its nuclear program to produce nuclear weapons. Repeated high-level attempts to “persuade Beijing” to go along with this plan, such as then-US Treasury Secretary Timothy Geithner’s 2012 visit to Beijing, however result each time in Chinese hosts politely but firmly saying no. This is not only motivated by oil supply issues.

Flashpoints revealing the Chinese-US divide on Iran crop up in world news, for example the US unilateral decision in January 2012 to impose sanction on Chinese refiner Zhuhai Zenrong for refining Iranian oil and supplying refined products back to Iran. This US action was described by China’s Foreign Ministry spokesman as “totally unreasonable”. He went on to say that “China (has) expressed its strong dissatisfaction and adamant opposition”.

At the same time, China’s Xinhua Agency gave prominence to the statement made by Iran’s OPEC delegate Mohamed Ali Khatibi: “If the oil producing nations of the (Arab) Gulf decide to substitute Iran’s oil, then they will be held responsible for what happens”. Chinese analysts explained that China like India was irritated that Iranian oil sanctions opened the way for further de facto dominance of Saudi Arabia in world export supplies of oil, as well as higher prices.

Iran is however only the third-largest supplier of oil to China, after Angola and Saudi Arabia, with Russia its fourth-largest supplier, using EIA data. This makes it necessary for China to run sustainable relations with the Wahabite Kingdom, which are made sustainable by actions like China’s Sinopec in 2012 part-funding the $8.5 billion 400 000 barrels-per-day refinery under construction in the Saudi Red Sea port city of Yanbu.

The Saudi news and propaganda outlet Al Arabiya repeatedly criticises China and India for their purchase of Iranian oil and refusal to fully apply US-inspired sanctions. A typical broadside of February 2013 was titled “Why is China still dealing with Iran?”, and notably cited US analysts operating in Saudi-funded or aided policy institutes, such as Washington’s Institute for Near East Policy as saying: “It’s time we wised up to this dangerous game. From Beijing’s perspective, Iran serves as an important strategic partner and point of leverage against the United States”. US analysts favourable to the Saudi strategy in the MENA – described with approval by President Eisenhower in the 1950s as able to establish a Hollywood style Saudi royal “Islamic Pope” for Muslim lands from Spain to Indonesia – say that Iran is also seen by China as a geopolitical partner able to help China countering US-Saudi and Israeli strategic action in the Middle East.

A 2012 study by US think tank RAND put it bluntly: “Isolated Iran locked in conflict with the United States provides China with a unique opportunity to expand its influence in the Middle East and could pull down the US military in the Gulf.” The RAND study noted that in the past two decades, Chinese engineers have built housing, bridges, dams, tunnels, railroads, pipelines, steelworks and power plants throughout Iran. The Tehran metro system completed between 2000 and 2006 was a major Chinese engineering project.

THE BIG PICTURE

China’s Iran policy and strategy can be called “big picture”. Iranian aid and support to mostly but not exclusively Shia political movements, and insurgents stretches from SE Asia and South Asia, to West and Central Asia, Afghanistan, the Caspian region, and SE Europe to the MENA. It is however focused on the Arabian peninsula and is inevitably opposed to Saudi geostrategy. This is a known flashpoint and is able to literally trigger a third world war. Avoiding this is the big picture – for China.

Li Weijian, the director of the Research Center of Asian and African Studies at the Shanghai Institute for International Studies puts it so: “China’s stance on the Iranian nuclear issue is not subject to Beijing’s demand for Iranian oil imports, but based on judgment of the whole picture.” China is guided in foreign relations by two basic principles, both of them reflecting domestic priorities. First, China wants a stable international environment so it can pursue domestic economic development without external shocks. Second, China is very sensitive to international policies that ‘interfere in or hamper sovereign decisions”, ultimately tracing to its experience in the 19th and 20th centuries at the hands of Western powers, and the USSR, before and after the emergence of the PRC. It adamantly opposes foreign interference in Taiwan, Tibet, and Xinjiang.

This includes radical Islamist or djihadi interference, backed by any foreign power. While China has on occasions suspected Tehran of stirring Islamic insurgency inside its borders it sees the US-Saudi geostrategy of employing djihadists to do their dirty work as a critical danger, and as wanton interference. Indian attitudes although not yet so firm, are evolving in the same general direction. Both are nuclear weapons powers with massive land armies and more than able to defend themselves.

Claims by Western, mostly US analysts that China views Iran as exhibiting “unpredictable behaviour” in response to US-led sanctions and that Iran is “challenging China’s relations with its regional partners” can be dismissed. In particular and concerning oil, China is well aware that Iran will need many years of oil-sector development to return to anything like pre-Islamic revolution output of more than 5 million barrels a day. Unless oil sanctions are lifted, Iran’s oil output will go on declining, further increasing the power of the Gulf States led by Saudi Arabia, and Shia-governed but insurgency threatened Iraq to dictate export prices.

China dismisses the claim that its policies have hampered US and other Western political effort to dissuade Iran from developing nuclear weapons capability.

China’s distaste for toppling almost any central government, even those run by dictatorial strongmen springs from a deep sense of history – marked by insecurity about the uncertain political legitimacy of governments arising from civil war and revolution – like the PRC. At its extreme, this Chinese nightmare extends to fears that if the US-Saudi geostrategy can topple governments in the Middle East almost overnight, what will stop them from working to bring down China’s government one day? Unlike almost all MENA countries minus the oil exporters, China has scored impressive victories in the fight against poverty. Its economy although slowing creates abundant jobs and opportunity.

For China, this is the only way to progress.

HARDENING POLICIES AND POSITIONS

The emerging Chinese anti-Islamist strategy also underlines a menacing reality for the US and other Western powers. China rejects the belief there is still only one superpower in today’s world—the USA. The USA’s weakened economy and uncontrollable national debt, its confused and cowardly drone war, its slavish support to Israeli and Saudi whims do not impress China – or India.

To be sure China’s classic-conventional weapons development programs lag far behind the US. The Chinese military strategy for pushing back US dominance focuses global reach ballistic missiles, tactical nuclear weapons, drones, submarines, and military space and cyberwarfare capabilities.

With the PLA it possesses the biggest land army in the world. No US warmonger, at least saner versions would “take on China”.

China has invested heavily in Iraq, Saudi Arabia and other Gulf states, as well as Iran. It does not want to see its investment effort destroyed by deliberately promoted Islamic anarchy. Also, its Middle Eastern presence will continue due to the fact that while US dependence on oil imports is declining, China overtook the US as the world’s largest oil importer on a daily basis, this year, several years ahead of analysts’ consensus forecasts.

The likely result is that China is now poised and almost certain to strengthen relations with Iran. The intensifying Syrian crisis as well as the dangerously out of control US-Saudi-Israeli djihadi strategy, of fomenting sectarian conflict and destroying the nation state in the MENA, will likely prompt China to soon take major initiatives.

House of Saud May Throw Oily Spanner into US-Iran Talks Gambit

House of Saud May Throw Oily Spanner into US-Iran Talks Gambit

by Finian Cunningham

Ex: http://www.strategic-culture.org/

Obama-and-Hassan-Rohani.jpgThe Saudi spat with its historic Washington ally has several ways of playing out. Jilted over American «double standards» in the Middle East (how ironic is that?), senior members of the House of Saud, including intelligence chief Prince Bandar bin Sultan, have hinted that the oil-rich kingdom may shop elsewhere for its billion-dollar weapons toys that it traditionally sources from Washington. Given the parlous state of the US industrial economy, such a loss of exports in a key revenue sector, would be a nasty blow... 

Another line for a Saudi sting against the «feckless Americans» might be to throw an oily spanner into US-Iran talks over the long-running nuclear dispute. Specifically, Saudi Arabia – the main productive force in the OPEC oil cartel – could make sanctions relief for Iran a problematic order.

Not that Washington cares too much about affording sanctions relief per se, but the Saudi recalcitrance could damage what appears to be a cynical gambit by the US to engage with Iran diplomatically for geo-strategic reasons. 

For the Saudis, this opportunity for vandalism would be sweet revenge for their exasperation with perceived American flip-flopping on Syria and Iran. The Wahhabi Saudi kingdom is obsessed with the defeat of Shia Islam represented by Iran and its allies in Syria and the Hezbollah militia in Lebanon. That obsession is borne out of arcane sectarian religious animosity and also out of more mundane political rivalry. The prestige of the Iranian revolution across the Middle East and its trenchant anti-imperialism are dangerous inspirations to the Arab Street, from the House of Saud’s point of view. 

So, the apparent about-turn in US policy, first in baulking at the launch of an all-out military strike on Syria last month, and then secondly, the surprise US-led rapprochement towards Tehran over the decade-old nuclear dispute, has provoked Saudi ire to its very theocratic foundations. 

That explains the extraordinary huff expressed recently by Prince Bandar, the Saudi spymaster. Given his close contacts with the Washington establishment owing to his role as ambassador for 22 years (1983-2005), we can be sure that Bandar’s reported griping and threat-making to Western diplomats was designed to send a stern message from the House of Saud to senior US government figures. The Saudis are not merely disgruntled with their American patron; they are aggrieved by what they perceive as betrayal.

From the House of Saud’s precarious position as unelected rulers of the world’s biggest oil-exporting country – where elite wealth sits incongruously alongside massive poverty among the 20 million indigenous population – there stems an intense zero-sum mentality. Any perceived setback to the rulers or concession to rivals is intolerable to the despotic regime’s sense of its own insecure authority, both at home and regionally. That is why its reactions are so vehement, such as the furious rejection earlier this month of a non-permanent member seat on the UN Security Council – again, another action aimed at showing displeasure with Washington. 

Saudi animosity towards Iran, Syria and Hezbollah – the Shia Crescent – is of course nothing new. Such geopolitical envy can be traced back to the Islamic Revolution of 1979. For its own hegemonic reasons, Washington has cultivated the Saudi rivalry with Iran, viewing the Saudi-led Sunni monarchies of the Persian Gulf as a bulwark against Iranian-inspired popular uprisings. Bahrain is perhaps the best example, where the US and Saudi Arabia have colluded in crushing the pro-democracy movement in Bahrain that arose during the Arab Spring of 2011. The counter-insurgency propaganda of the Bahraini and Saudi regimes, with tacit approval from Washington, blames the uprising on the subversive agency of Iran and Hezbollah. Iran denies any such political interference in the internal affairs of the Sunni monarchies. Tehran maintains, with sound reasoning, that the unrest in Bahrain, Saudi Arabia and the other oil sheikhdoms is simply a reflection of the gross democratic deficit in these fascistic states. 

The Arab Spring also gave the House of Saud a golden opportunity to hit back against the Shia Crescent by joining in the Western-led covert war for regime change in Syria. By unseating the government of President Bashar al-Assad that would, so the logic went, deliver a powerful blow to Iran’s regional influence. 

But the military option against Syria and Iran has proven to be a blunt instrument that has yielded little result, as far as Western strategic objectives are concerned. Both Syrian and Iranian governments remain unbowed despite years of brutal aggression in the form of proxy mercenary armies against the former and a barrage of economic sanctions on the latter.   

This would explain why Washington and its Western allies, Britain and France, now seem prepared to exercise the political option through diplomatic negotiations. It’s not that Washington has given up on its strategic objectives of thwarting both Syria and Iran. It is just that the tactics are shifting, from military aggression to political wrestling. As Prussian military theorist Carl Von Clausewitz (1780-1831) aptly put it, war is but a continuation of politics by other means, and vice versa. 

From Washington’s point of view, this shift would kill two strategic birds with one stone. By engaging Iran and Syria into a political process, concessions might be traded one against another, with the all-important result of undermining both governments. A potential point of attack would be Iran’s urgent need for economic sanctions to be lifted.

The alacrity of Iran’s new diplomatic push over the nuclear deadlock shows that the Islamic Republic has an acute need to remove the Western embargo on its economy. It is reckoned that the combination of US and European Union sanctions imposed on Iran in mid-2012 alone has hit oil exports by more than half, resulting in a loss of revenues of $35 billion over the past year. That can only be described as devastating, to say nothing of criminal aggression.

The Iranian election of President Hassan Rouhani in mid-June and the appointment of Western-educated Mohammed Javad Zarif as foreign minister have brought a sea-change in Iran’s relations with Washington, the P5+1 group of UN Security Council members plus Germany, the EU and the UN’s atomic watchdog, the International Atomic Energy Agency. Talks with the IAEA this week in Vienna were described as «serious and earnest». All such talks have been reported as «constructive» and «progressive». This dramatic change can largely be seen as a manifestation of Iran’s pressing need to alleviate Western strictures on its economy.

But this diplomatic development can also be viewed as Washington and its Western allies wanting to engage Iran politically for their own pressing tactical reasons, with regards to realizing strategic objectives towards both Iran and Syria. 

Following the first round of negotiations between Iran and the P5+1 group in Geneva last month, there was dizzying high praise from Washington and European powers. But ahead of the second round of talks scheduled in Geneva next week, there have been assorted signals that Washington and the Europeans are reverting to playing hardball. 

The Obama administration is saying that there will no sanctions relief any time soon and that Iran will have to present concrete evidence that it is not pursuing nuclear weapons. The US Congress is also preparing to pass a bill that will ratchet up the sanctions regime even more, while the EU is reportedly stepping up enforcement of its embargoes on Iranian shipping and finance. 

The effect of this hardball will make Iran amenable to acceding to political concessions, especially as it gains the tantalizing whiff of sanctions relief. Here Iran has to tread carefully because of its own domestic population who are deeply suspicious of Western intentions. So far, the Rouhani presidency insists that the country’s right to enrich uranium at the 20 per cent level for civilian purposes is non-negotiable. It is inconceivable that the government in Tehran would survive politically if it were to give way on such a redline issue. That raises the question of what other concessions the West might demand from Iran for the latter’s much-needed sanctions relief?

Perhaps the Iranians might be asked to act as an interlocutor to enable the West to extract concessions from the government in Damascus regarding the imposition of a transitional government there.  

In pursuing its political machinations, the West has to proceed smartly and delicately too. For one thing, it has to appear to be giving the Iranians something, otherwise Iran will not engage, or the Iranian masses will demand complete withdrawal from a futile process. 

In that regard, it is significant that the White House is saying that it is considering the unfreezing of Iranian assets worth up to $50 billion. That amount would more than compensate for the loss in oil revenues for Iran over the past year. 

And it seems that Iran is anticipating a return to international oil markets because of the warmer diplomatic climate. The Reuters news agency reported last week: «Iran is reaching out to its old oil buyers and is ready to cut prices if Western sanctions against it are eased.»

The report added: «New Iranian President Hassan Rouhani's ‘charm offensive’ at the United Nations last month, coupled with a historic phone call with US President Barack Obama, revived market hopes that Iranian barrels could return with a vengeance if the diplomatic mood music translates into a breakthrough in the standoff over Tehran's disputed nuclear program.»

Reuters quoted a senior oil trader as saying: «The Iranians are calling around already saying ‘let's talk’ ... You have to be careful, of course, but there is no law against talking.»

Now, here is where the Saudis smarting over US «betrayal» could play havoc with Washington’s tactical engagement with Iran and Syria. 

Iran’s forced withdrawal from oil markets due to Western sanctions has been replaced by a spike in Saudi oil production, which has helped to maintain market prices at around $100 a barrel over the past year. Saudi oil output is said to be at an all-time high, towards its full capacity of 12 million barrels a day. 

For Washington to engage Iran in a political process, even for entirely cynical reasons, it will need to show a certain degree of flexibility in allowing Iran to resume at least a portion of vital oil exports. However, that overture is, as it turns out, the prerogative of Saudi Arabia, whose extra oil output has covered the global shortfall from sanctioned Iranian supplies. The Saudis are unlikely to facilitate any resumption of Iranian oil business. 

In that way, the Saudis have the power to throw a very oily spanner in the diplomatic wheels that Washington is trying to turn with Iran.




Republishing is welcomed with reference to Strategic Culture Foundation on-line journal www.strategic-culture.org.

mardi, 05 novembre 2013

Uylenspiegelfeesten, Gent

Moi aussi je soutiens les bonnets rouges bretons

la-manifestation-des-bonnets-rouges-a-quimper-a-rassemble-entre-11024709ufkuh_1713.jpg

Moi aussi je soutiens les bonnets rouges bretons

Samedi 2 novembre, à l’appel du « collectif pour l’emploi en Bretagne » et du collectif « révolte bretonne », mais aussi de nombreuses organisations syndicales, associatives, politiques, ce sont des dizaines de milliers de Bretons qui vont défiler dans les rues de Quimper, pour dénoncer l’agonie économique et sociale dans laquelle est actuellement plongée la Bretagne.
Paysans, marins-pêcheurs, ouvriers, artisans, chefs d’entreprise seront tous réunis et soudés pour défendre le droit de vivre et de travailler au pays, ce droit que les dirigeants politiques au pouvoir refusent aux Bretons, comme ils le refuseront demain à tous ceux qui refusent les licenciements, la mondialisation forcenée, la fiscalité démesurée, le grand remplacement de population.
C’est en solidarité avec ces nouveaux chouans, avec ces nouveaux bonnets rouges, que je signe cette pétition, qui sera adressée au premier ministre Jean Marc Ayrault. C’est en solidarité avec ces révoltés que je diffuse la pétition tout autour de moi.
Les Bretons entrent en résistance, suivons-les, soutenons-les, aidons-les
Solidarité avec les Bonnets-Rouges
 
Pour faire suivre ce message, utilisez forward page Vous pouvez vous désinscrire opt-out completely de notre base de donnée.

La Turquie déjà en Europe grâce au Kosovo

La Turquie déjà en Europe grâce au Kosovo
 
Erdogan jette le masque

Jean Bonnevey
Ex: http://metamag.fr
1372453379-people-in-kosovo-protest-in-favor-of-turkish-pm-erdogan_2203285.jpgLes turcs ne se sentent certes pas européens mais ils sont en Europe physiquement déjà et de plus en plus. L’Europe s’est laissée entraîner par les Usa et l’Otan dans une guerre stupide contre la Serbie, contre le dictateur Milosevic pour les gentils kosovars.

C’était objectivement faire le jeu des musulmans contre les chrétiens dans une région d’affrontement historique entre la civilisation helléno- judéo-chrétienne et la civilisation arabo musulmane. Le perdre de vue était totalement stupide. La reconquête de la quasi-totalité des Balkans sur les turcs qui ont achevé contre l’empire romain d’orient ce que les arabes avaient commencé, est comparable à la reconquista espagnole.
 
Le Kosovo, patrie d’origine des Serbes, devenu un état musulman kosovar, c’est une chose terrible et parlante au niveau du poids de la démographie et des migrations de remplacement. La revendication de cette terre, au nom d’un passé commun, par la Turquie est plus terrifiante encore et rappellera, à certains démocrates sourcilleux, des thèses de l’époque la plus sombre de notre histoire.

En visite officielle au Kosovo à l’occasion de l’inauguration de l’aéroport de Pristina, le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan a lâché une petite bombe en déclarant : « la Turquie, c’est le Kosovo, et le Kosovo, c’est la Turquie ». Le chef du gouvernement turc a déclaré que les citoyens du Kosovo et de Turquie faisaient toujours partie d’un même pays. « Chers frères et amis, nous partageons la même histoire culturelle et la même civilisation. N’oubliez pas que la Turquie, c’est le Kosovo et que le Kosovo, c’est la Turquie. Nous sommes à ce point proches que l’auteur de l’hymne turque, Mehmet Akif Ersoj, est originaire du Kosovo, de la ville d’Ipek-Peć-Peja », s’est exclamé Recep Tayyip Erdoğan. 

 
Hashim Thaçi, le Premier ministre du Kosovo, a remercié son homologue turc de la qualité de la coopération entre les deux pays et a rappelé que la Turquie était le premier pays à avoir reconnu l’indépendance du Kosovo. Le Premier ministre albanais, Edi Rama a, quant à lui, déclaré que les citoyens du Kosovo et de la Turquie, Albanais et Turques, étaient des peuples frères, qui devaient travailler ensemble à construire un avenir meilleur. Banques, autoroutes, aéroport de Pristina : la Turquie est le premier investisseur étranger au Kosovo. Cette présence économique massive alimente toutes les théories du complot. Le Kosovo serait-il, comme certains le prétendent, le « point d’ancrage » dans les Balkans d’une Turquie, qui aurait retrouvé ses ambitions impériales ?

Du côté de Belgrade, les propos de Recep Tayyip Erdoğan ont provoqué de très vives réactions. « Je considère ces déclarations scandaleuses  et j’attends des excuses rapides de la Turquie et de son Premier ministre. Ce comportement est inacceptable et incompatible avec de bonnes relations diplomatiques », a déclaré jeudi 24 octobre le vice-Premier ministre Aleksandar Vučić, avant d’ajouter que la Turquie savait très bien que le Kosovo n’était plus turc « depuis les Guerres balkaniques ».

Ce que semble oublier ce premier ministre très pro-occidental, c’est que les guerres balkaniques ont repris, menées par l’occident contre la Serbie et apparemment au profit de l’ottoman. Détruire la grande Serbie pour instaurera au cœur de l’Europe une nouvelle grande Turquie, ça c’est bien joué !

En de laatste Duitser is Ethiopisch

En de laatste Duitser is Ethiopisch

 
Asfa-Wossen AsserateEx: Nieuwsbrief / Deltastichting, Nr. 76, Oktober 2013

Een wat provocatieve titel? Allicht wel, maar dat zal allicht misschien zelfs de bedoeling zijn van Asfa-Wossen Asserate. Nog nooit van gehoord, zegt u? Dat zou kunnen, maar ik meen mij te herinneren dat ik in TeKoS een tijd geleden van deze auteur – tevens Ethiopische prins en volle neef van de voormalige keizer van Ethiopië Haile Selaissie – het boekje Manieren heb besproken, in Duitsland in elk geval een bestseller in 2003. Het boekje was niets meer maar ook niets minder dan een schatkist vol goede manieren, het laatste compendium van de nette, burgerlijke manieren, intussen helemaal losstaand van de multiculturele massamaatschappij waarin we met z’n allen leven.

Asserate verzamelde in dit eerste boekje een schat aan anekdotes en kritische bedenkingen, volgens bepaalde commentaren stond het bol van de cultuurkritiek. Hij schreef met veel liefde en genegenheid neer dat Duitse burgerlijkheid niets te maken had met ‘donkere kantjes van het bestaan’, met ‘lompheid’ of onderworpenheid, maar alles met fijnzinnigheid, oprechtheid en een zekere culturele erfenis. Eén van zijn boeken, Draussen nur Kännchen. Meine deutschen Fundstücke, is een échte liefdesverklaring , waarmee de prins wil bijdragen om de reserves van de Duitsers voor hun eigen geschiedenis en hun eigen identiteit af te bouwen. De Duitsers moeten begrijpen én erkennen “in welk fantastisch land zij leven en tot welk cultuurvolk zij eigenlijk behoren”, aldus de auteur. Ook zijn jongste boek, Deutsche Tugenden Von Anmut bis Weltschmerz (Uitgeverij C.H. Beck, München 2013, ISBN 978-3-406-64504-4), leest als een zeer interessante kijk van buitenaf op de ziel van de Duitser.

Asfa-Wossen Asserate werd in 1948 in Addis-Abeba geboren en kwam in 1968 naar Duitsland studeren. Hij werd er Corpsstudent in Tübingen en trad dus toe tot de Duitse Burschenschaften. De communistische omwenteling in zijn thuisland in 1974 zorgde ervoor dat hij in Duitsland zou blijven, waar hij intussen een gedreven bedrijfsconsulent werd. De keizersspruit met een familiestamboom van meer dan duizend jaar oud werd een Duits staatsburger, en ontpopte zich zelfs tot een enthousiast patriot en Avondlander.

Hij beseft maar al te goed dat hij een  ‘aangespoelde’ Duitser is, een nieuwe Duitser. Hij wil de Duitsers nochtans dringend aanzetten om hun eigen identiteit terug met warmte te omhelzen. Zijn boodschap is zeer duidelijk: zonder tradities geen waarden, en zonder manieren geen identiteit.  Zonder de beide is er geen zelfrespect.

Is de titel bovenaan dan zo misplaatst?
 
Peter Logghe

lundi, 04 novembre 2013

Big Brother is watching you !

 

L'EUROPE DOIT ETRE UNE PUISSANCE

Leopard2A6Tarn.jpg

L'EUROPE DOIT ETRE UNE PUISSANCE
 
Redevenons optimistes !

Georges Maurice*
Ex: http://metamag.fr
Les années actuelles nous ont légué une ironie de principe, un nihilisme ricaneur. Tout se vaut dans un monde dominé par la marchandise ... Or, on assiste à une sorte de saturation de modèle individualiste, car les valeurs de rationalité issues du Siècle des Lumières, c'est à dire le progrès, l'individu, la raison, l'universel, n'enchantent plus le monde. Bien plus, les concepts « universalisables » de mondialisation, voire d'Humanité, attirent et inquiètent à la fois, car les forces qui poussent vers l'universel ne sont plus humanistes mais économiques ; dominées par l'hyper puissance américaine, ces forces effrayent et n'a-raisonnent plus les territoires du monde. A l'homogénisation du monde répondent les mots d'identité, de tribalisme mais les lignes de métamorphoses existent. (M. Maffesoli, La violence totalitaire, éd. Des clefs de Brouwer 1999).


Cette tribalisation est-elle l'annonce de la fin de l'individualisme ? Certains auteurs évoquent une « reféodalisation » de la Société ou encore d'un nouveau moyen-âge . Il est clair que la renaissance des communautés, que l'aspiration à l'authentique, au patrimoine, à la bonne bouffe selon José Bové participent des traits de la post modernité. Cette dernière fait et fera coexister technologie de pointe et références « archaïques ».

Si l'on admet que le lien social ne peut faire retour que dans l'instance du collectif, alors on assiste bien aujourd'hui à une véritable prolifération identitaire. Elle est aujourd'hui une donnée de base de la socialité, post moderne » : love parade, gay pride, techno parade, promenades collective en rollers, déferlent dans les rues de nos mégapoles ... C'est à la fois un narcissisme collectif et la fin de l'individualisme calculateur. 


Ces mécanismes identitaires ont connu plusieurs vagues. Des années 60 au années 80, ce fut la revendication éthnoculturelle et régionaliste. C'était le renouveau des appartenances locales, le retour des traditions. La seconde période fut celle des années 80. La crise s'installait, les plus fragiles, notamment ceux issus de l'immigration, cherchent un sens et une unité que la Société globale ne leur accorde pas. Ils renouent avec leurs origines, et constituent des communautés alliant la promotion d'intérêts particuliers à l'affirmation d'une culture spécifique, (c'est l'éthnic - business). Les années 90 accentuent le repli communautaire, tous les secteurs de la Société sont touchés ... Pour les uns, immigrés souvent, c'est une demande égalitaire formulée au nom de la différence (Fred Constant : La citoyenneté, clé Montchrestien 2000). Pour les autres, c'est une volonté de ne partager qu'entre soi. Depuis tout s’est aggravé. 

Ainsi, soit la communauté d'appartenance (de couleur, de race, de religion...), permet de revendiquer un droit à une dignité collective ; soit elle permet de revendiquer le droit à l'indifférence. Le temps des allégeances multiples est arrivé, sauf que par définition, la République ne reconnaît pas les minorités, mais que des citoyens.

Téléscopage de certitude qui voit s'opposer le citoyen héritier au consommateur de citoyenneté ! Les nouveaux chefs de ces identités concurrentes ont des ambitions parfois contradictoire. Ils peuvent contribuer à l'explosion de ce que l'on appelle pudiquement « les incivilités » alors qu'il s'agit de viser la rupture du lien social supérieur. Pourtant, des indices font apparaître dans ces « incivilités » les atteintes aux biens sont en constante augmentation de même que la juvénilisation.  Ce phénomène des bandes s'exprime aussi par une dimension contestataire de l'ordre établi.


En tout cas, ces nouveaux chefs démontrent tous les jours que la puissance publique n'est ni puissante, ni publique. On assiste alors inéluctablement à une privatisation de la sécurité, tandis que les quartiers difficiles sont devenus le no man's land de la Société (Philippe Cohen, Protéger ou disparaître : les élites face à la montée de l’insécurité, Ed. Gallimard 1999). Dans ces lieux, il est convenu de parler de politique de la ville qui en fait n'est rien d'autre que l'achat de la paix sociale au prix fort en instrumentalisant notamment les chefs de bande, comme naguère on le faisait avec les fils de chefs ... dans l'Afrique coloniale ! Toutefois, la différence est de taille, on exige plus que soit apprise la langue française ! Le business ethnique dans les banlieues, les disparitions des sanctuaires (on vole, on racket, on tue même à l'Ecole ....), les transports en commun sous contrôle policier, l'explosion de la délinquance des mineurs annoncent l'apparition de Seigneurs de guerre comme au temps de la Chine à la fin de la dynastie mandchoue. L'individu narcisse se réveille de son euphorie pour découvrir que les mafia sont devenues un mode de socialisation concurrents des Etats .

La communautarisation produit un monde en peau de léopard, à côté des zones prospères offrant les capitaux par une fiscalité douce, on voit se multiplier des « zones grises » qui valorisent les matières premières du crime: drogue, armes, êtres humains… La classe dirigeante s'est dissoute dans un individualisme ambiant dont elle a organisé le triomphe. Elle s'est déracinée, diluant ses responsabilités dans un espace indéterminé, sorte de hub mondial, d'où elle regarde ébahie le monde changer. Tandis que la caméra filme avec douceur les horreurs, rythmant ses découvertes obligés de jeux imbécile ouvrant la voie du hub à quelques gagnants éberlués. La classe dirigeante « deshistoricisée » ... a choisi d'être le spectateur désengagé de l'effroi sans fin dans lequel s'installent nos Sociétés en peau de léopard.

La reconfiguration d'un monde en commun demeure-t-elle encore possible ? 

Les lignes de la métamorphose européenne sont éternelles. Elles ne passent pas par la nostalgie mais par la volonté de l'optimisme. La douceur amère de la nostalgie a toujours séduit les spectateurs lucides mais fatigués car incarnant une fin de race ; esthètes et fascinés à la fois par leur propre vulnérabilité.

On connaît leurs phrases dont le désarroi émeut : « tout a changé, la vie va trop vite... nous ne savons plus quoi transmettre... il y a plus en plus d'étrangers... je ne me sens plus chez moi... bientôt on ne pourra plus être Français... ». Il existe même une certaine fierté à regarder un monde qui mime l'occident... mais est-il encore Européen, cet occident ? Il est déjà cette Californie qui devient l'épicentre de l'occident hollywoodien.

Certains plus volontaristes revendiquent, au nom d'un judo intellectuel, une sorte de communautarisation territoriale par un fédéralisme généralisé où l'organique reviendrait par les canaux de l'affectif patrimonial. En fait c'est méconnaître la formidable juvénilité des peuples européens. Ils n'en sont pas à une révolution près, ni à une renaissance. Mais les lames de fond qui agitent les peuples qui font et défont les empires sont les métamorphoses.

Elles mettent en jeu des forces géopolitiques, démographiques, culturelles, militaires, technologiques. Elles ne sont ni des progrès, ni des décadences, mais des mouvements d'immenses mutations par lesquelles les peuples répondent aux défis de l'histoire. Il y a des peuples qui restent immobiles, figés dans les banquises de leurs traditions mortes... ils meurent dès que les défis du monde les provoquent. Mais il y a aussi les peuples qui combattent, qui font sur eux-mêmes des révisions déchirantes et qui connaissent des mutations. C'est à ces peuples et à leurs mutations que l'Europe doit d'être toujours présente dans l'arène du monde.

Depuis l'aube de son Destin, la civilisation Européenne a connu trois grandes métamorphoses : la première vit des tribus nomades indo europénnes se muer en peuples celtes, germains, hellène, latins et éclore en hautes civilisations antiques païennes. La seconde, sous l'assaut du christianisme contraignit les peuples européens à un syncrétisme religieux et à l'établissement des royaumes médiévaux. La troisième fut la transformation de l'Europe en occident. Transformation d'abord positive, puis négative.

Redevenir optimistes


Nous sommes donc appelés à notre quatrième métamorphose, ce que Claude Imbert, dans « Ce que je crois » Ed Grasset,  a appelé le grand passage... c'est le recommencement grec... en esthétique, en politique, en science, en philosophie, la civilisation européenne saccage et reconstruit, elle est métamorphique par essence. Ce tragique mouvement de l'histoire, nous habite.

Réfléchissons encore ! L'Europe est plus qu'une culture, plus qu'une civilisation... N'y a-t-il pas entre Mycènes, Chartres et la fusée Ariane, entre la société italienne et les moeurs suédois, entre l'art flamand de XVllème siècle et l'esthétique classique française, à la fois une immense distance et une mystérieuse unité. L'Europe est selon le génie italien une civiltà, rencontre détonante de stabilité et de mouvement. Aussi, le premier travail à accomplir est celui d'une métamorphose mentale de nous-même. Redevenons optimistes !

Redevenir optimistes c'est d'abord ne pas avoir peur de nos faiblesses. C'est faire l'inventaire de nos forces et d'engager les reconquêtes. Nos forces sont puissantes ! Prenons seulement l'exemple de la France que les français par autoflagellation se plaisent à sous-estimer. L'hexagone est par sa superficie le plus grand pays d'Europe, peuplé comme la Grande Bretagne dont le territoire est deux fois moindre, il compterait 120 millions d'habitants ! La forte natalité des 30 glorieuses (1945 - 1974) lui assure encore pour dix ans « une inertie démographique positive ». Si on avait le courage d'engager une politique nataliste et familiale, nous n'aurions aucune difficulté à régler à terme la question des retraites, plutôt que d'envisager l'importation d'immigrés ! Puissance militaire non négligeable, la France est présente partout sur le globe. Puissance commerciale, puissance linguistique, création cinématographique, maîtrise des hautes technologie, confèrent à la France un rôle essentiel dans la promotion du thème de l'Europe puissance.

Car l'Europe peut et doit être une puissance... 

La métamorphose commence déjà dans les esprits : elle progresse dans quatre domaines distincts social, culturel, idéologique, et géopolitique. Un trop plein d'égalitarisme a créé les prémices d'un mouvement en retour : regain des idées anti-égalitaires dans l'éducation, renouveau des écoles technoréalistes de peinture, apparition d'écoles de pensées plus centrées sur l'imaginaire et l'irrationnel. Dans le domaine idéologique, de nouvelles configurations, de nouveaux clivages apparaissent opposants droits de l'homme et droits des citoyens ou posant la question de la résistance à la mondialisation ou à l'homogénisation culturelle.

Sur le plan géopolitique et économique, on ressent une volonté de construire autre chose que la société de Mac World, celle qui fait du commerce l'alpha et l'omega du monde. Il faudra oser appeler l'Amérique le Vieux continent par rapport à la jeune Europe ! Ce jour là, la métamorphose aura lieu, les reconquêtes seront assumées. Reconquête de notre propre vitalité démographique, condition essentielle de notre pérennité par l'aristocratie de la jeunesse. Reconquête spacio-temporelle enfin.

Il y a bien en effet deux façon d'envisager l'homme et la société. Ou bien la valeur fondamentale est placée dans l'individu et par suite dans l'humanité ou bien la valeur fondamentale, ce sont les peuples et les cultures. Dans un cas l'humanité est la somme des hommes, dans le second cas l'humanité est l'ensemble des appartenances de chacun. D'un côté l'individu revendique la liberté intimité, dans l'autre il exige la liberté participation.

Le choix de la métamorphose, c'est-à-dire du sens, s'inscrit dans une démonstration simple. En effet, une société et un peuple sont en forme quand ils restent conscients de leurs origines et de leur histoire ; quand ils peuvent s'incarner dans un système de symboles ; quand ils conservent le courage de désigner leur ennemi ; Poser le problème de la forme qui définit une société, c'est poser le problème du sens et donc donner à nouveau son manteau de majesté à l'Auctoritas.

Le sens est une notion qui s'adresse au groupe afin qu'il puisse clairement identifier les valeurs partagées... Il n'y a pas de cohérence du groupe parce qu'il y a un sens aux choses, mais il y a du sens parce qu'il y a cohésion du groupe. Or, cette cohésion vient du retour de l'Histoire, or le retour de l'Histoire c'est l'acceptation du Tragique, de la Mort et donc la volonté de vivre en sculptant le futur. C'est peut-être encore au Cid qu'il appartiendra d'incarner le Destin des peuples Européens mais c'est à la techné grecque que reviendra le soin de forger les armes de la reconquête.

Puisse ceux qui nous gouvernent, retrouver le sens de leur Histoire. 

* Professeur des Facultés de Droit

Et si on portait tous un bonnet rouge ?

bonnets-rouges-quimper_4521062.jpg

Et si on portait tous un bonnet rouge ?

Fiscalité : le retour des irréductibles bretons pour réveiller les gaulois

Raoul Fougax
Ex: http://metamag.fr
 
« Ils sont pires que sous l’ancien régime ». Cette référence historique d’un manifestant breton a sans doute peu interpellé les incultes de notre histoire notamment régionale qui nous gouvernent. Mais ceux qui savent ont dû prendre en pleine face cette comparaison particulièrement dure pour un républicain de gauche.

La Révolte du papier timbré est une révolte antifiscale d’Ancien Régime, qui s’est produite dans l’ouest de la France, sous le règne de Louis XIV (d’avril à septembre 1675). La révolte eut plus d’ampleur en Basse-Bretagne, notamment en prenant un tour anti-seigneurial sous le nom spécifique de révolte des Bonnets rouges. Elle est déclenchée par une hausse des taxes, dont celle sur le papier timbré, nécessaire pour les actes authentiques. Elle est appelée révolte des Bonnets rouges pour sa partie bretonne, car certains insurgés portaient des bonnets bleus ou rouges selon la région.
 
Cette fois, ce n’est pas une révolte des sondages et des urnes. C’est une vraie révolte avec des gens de pays, enracinés et fiers de l’être, une révolte française contre un régime qui applique une fiscalité décidée par rapport aux soumissions internationales ou pour ménager les alliés écologistes.

Que s'était il passé alors en Bretagne ?

 
La Bretagne était très peuplée (environ 10 % de la population du royaume), et épargnée par les disettes et les épidémies depuis les années 1640. Dans les années 1660-1670, elle entre dans une phase de difficultés économiques, largement liées aux premiers effets de la politique de guerre économique de Louis XIV, de l'augmentation sensible et simultanée des impôts et de faiblesses structurelles: par exemple, diminution des deux tiers du commerce du vin et des toiles d’après le duc de Chaulnes , gouverneur de Bretagne. Les revenus issus de la terre (fermages) diminuent eux aussi d’un tiers, entraînant une déflation généralisée. Arthur Le Moyne de La Borderie voit dans la révolte du papier timbré une révolte anti-fiscale contre les nouveaux impôts.
 
Et aujourd’hui ?

Les manifestants, dont certains encagoulés, ont lancé l’assaut, jetant des pneus en feu et d'autres projectiles, provoquant une réplique de lacrymogènes. Au milieu des fumées, des tracteurs se sont dirigés vers le barrage des forces de l'ordre, arrachant les traverses de la voie express. Des scènes de guérilla ont alors commencé sur les collines qui entourent le portique avec plusieurs blessés à déplorer du côté des manifestants, dont un homme qui a eu la main arrachée et a été évacué par hélicoptère, selon les pompiers.

Les manifestants avaient pour certains recouvert leurs plaques minéralogiques d'autocollants reproduisant la plaque de la voiture présidentielle de François Hollande, CB-455-VH, mais avec le numéro du département du Finistère, le 29, selon des organisateurs.

Une autre manifestation eut lieu samedi contre un portique écotaxe dans le Morbihan. Une centaine de manifestants ont organisé un barrage filtrant sous le portique de Saint-Allouestre (Morbihan), sur la RN24, avec distribution de tracts et de produits bretons. Dans la nuit de vendredi à samedi des agriculteurs, avec 14 tracteurs équipés de remorques, ont aussi mené une action coup de poing à Morlaix (Finistère) en déversant vers minuit devant le centre des impôts des palettes, des choux-fleurs et du fumier, selon une source policière. Les agriculteurs ont écrit sur le sol "Ici repose l'écotaxe".

Ces actions deviennent de plus en plus tendues alors que le gouvernement reste inflexible sur la date de mise en application de l'écotaxe au 1er janvier 2014, assurant cependant à la Bretagne un abattement de 50% en raison de son éloignement du reste de l'espace européen.

Une réunion  à Rennes à la préfecture de région n'a pas suffi à apaiser les tensions. Le collectif des acteurs économiques bretons, qui affirme représenter 150.000 entreprises, a boycotté cette réunion, exigeant au préalable à toute discussion le report sine die de l'écotaxe.

Selon un sondage Ifop paru dans Dimanche Ouest-France, les Bretons sont à 74% « vent debout contre l'écotaxe », principalement ceux du Morbihan (82%) et du Finistère (81%).« Je trouve ces taxes scandaleuses et je comprends très bien qu'on puisse manifester contre elles », a affirmé quant à elle samedi matin la présidente du Front national Marine Le Pen, à l'occasion d'un déplacement en Bretagne, à Fougères (Ille-et-Vilaine).

Contre les  taxalistes roses et les  talibans verts, si on  se mettait à porter tous des bérets rouges ? Il y en a bien qui ont des foulards et d’autres des casquettes à l’envers non ?
 

6577790-bretagne-le-bonnet-rouge-symbole-de-revolte-depuis-3-siecles.jpg

Het jongste Kuifje is Schots

tintinscott.jpg

Het jongste Kuifje is Schots

Ex: nieuwsbrief / Deltastichting, Nr. 76, Oktober 2013
 
Europa is pluriformiteit, is een veelheid, een lappendeken van talen, culturen, dialecten, ondergroepen, tussengroepen – en conflicten. Een aantal van die lokale culturen, die in vorige eeuwen in een groter, multicultureel geheel waren ondergebracht, en dat bijna moesten bekopen met het verdwijnen van hun eigen cultuur en taal, zijn duidelijk aan een hergeboorte, aan een renaissance begonnen: we denken aan de Catalanen, aan de Schotten, aan de Zuid-Tirolers. En laat ons daar maar voor het gemak ook de Zuid-Nederlanders, de Vlamingen bij rekenen.

Dat nieuwe culturele, economische en dus ook politieke zelfbewustzijn laat zich soms zien op de meest eigenaardige plaatsen. In stripland bijvoorbeeld. De avonturen van Kuifje, de stripheld van Hergé, en tevens een van de mooiste en schitterendste voorbeelden van de “klare lijn”, werden gepubliceerd in meer dan 70 talen. In totaal werden er meer dan 200 miljoen exemplaren van verkocht.  Maar voor de eerste keer werden woorden als “caw cannie” (wees voorzichtig), “haud yer wheesht” (wees stil) en “help ma boab” (goeie hemel!), woorden en uitdrukkingen uit het Schots-Engelse dialect, in een album opgenomen. De vertaling van “De Zwarte Rotsen” werd verzorgd door Susan Rennie, Kelvin Smith Research Fellow aan de universiteit van Glasgow, die het boek vertaalde uit de originele taal, het Frans.  Het werd dus “The Derk Isle”.

De vertaling werd voorgesteld samen met een nieuwe uitgave van de Gaelicversie, “An t-Eilean Dubh”. Het hondje, Milou in het Frans, werd Bobbie in het Nederlands, Terry in het Deens en het Noors en Tobbi in het Ijslands. Voor het Schots koos de vertaler voor het woord Tarrie. En natuurlijk doen ook de detectives mee, de “twa glaikit detetives Nisbet an Nesbit”.

Het stripalbum begint alvast zo: “Tintin an his faithfu dug, Tarrie, are on the trail o an international gang o conterfaiters. Forby, they themsels are bein follaed by the twa glaikit detectives Nisbet an Nesbit”.  Wie het luidop leest, zal geen énkel probleem ondervinden om het Schots-Engels te begrijpen.
 
Peter Logghe

tintingael.jpg


LIBIA: El descrédito de la democracia


LIBIA
El descrédito de la democracia
 

POR EDUARDO VELASCO
 
Prólogo de Manuel Galiana
 
Diseño: Fernando Lutz
Maquetación: Manuel Q.
Colección: Helénica
Papel blanco 90gr.
Páginas: 146
Tamaño: 21 x 13’5 cm
Edición en rústica (cosido) con solapas de 8 cm
P.V.P.: 14’5 €
(Gastos de envío no incluidos)
 
ISBN: 978-84-940846-7-6 
 
 
Sabadell-CAM: 0081 3176 22 0006048819
 
 
La Primavera Árabe en general y la Guerra de Libia en particular, son los acontecimientos estelares del 2011, junto con los movimientos de protesta supuestamente espontáneos que están teniendo lugar en todo Occidente. A diferencia de Iraq, con Libia no se han visto a las masas populares gritando "No a la guerra". Existen varios motivos. Uno de los más importantes es que la Guerra de Libia no ataca a los intereses de la oligarquía capitalista de Francia, sino que los defiende. El otro es la desinformación: según nuestros medios de comunicación, el mundo árabe ha decidido "perrofláuticamente" que quiere ser demócrata como sus "admirados" prohombres de Occidente, y Gadafi era simplemente un "sátrapa" que había que derribar. Pero ¿acaso no lo era Saddam Hussein? ¿Y no lo siguen siendo Mohamed VI (…) y el rey saudí Abdulá? ¿Y qué pasa con las dictaduras de Qatar, Kuwait, Emiratos Árabes Unidos y Bahréin? ¿Por qué ha atacado la OTAN a Libia y por qué se ha armado, en tiempo récord, un extraño movimiento "rebelde", que en buena parte no es ni siquiera libio?
 
(Eduardo Velasco, extracto introducción)
 
ÍNDICE
                                              
I – Tragedia en el Mare Nostrum                                   
II – Proyectos coloniales en África: Italia y Rusia                
III – El rey Idris y la Revolución Verde                       
IV – Poderoso caballero es don petróleo: La política petrolera de Gadafi
V – Nivel de vida en Libia y políticas sociales de Gadafi      
VI – El problema del Agua: resuelto                             
VII – La cuestión identitaria: Gadafi y las tribus libias         
VIII – Gadafi y la religión                                    
IX – Terrorismo patrocinado por Libia                        
X – El fracaso del panarabismo y el éxito del Panafricanismo: Los Estados Unidos de África
XI – El Dinar-Oro y el dominio de África : La conexión Strauss-Kahn y Libia “Des-gadafización” del sistema financiero Libio y rentabilidad de la guerra.
XII – Quienes están detrás de la guerra de Libia                    
XIII - ¿Quiénes son “los rebeldes libios”?                                
XIV – Comienza la guerra                                    
XV – Organización Terrorista del Atlántico Norte: Crímenes de guerra de la OTAN en Libia            
XVI – Libia en el gran tablero: La atlantización del Mediterraneo                        
XVII – Futuro de Libia y próximos pasos del atlantismo en África: España y Argelia                          
XVIII – Africom y el proyecto atlantista para África 
XIX – Conclusiones                                                           

dimanche, 03 novembre 2013

Les leçons de Peter Koslowski face à la post-modernité

Les leçons de Peter Koslowski face à la post-modernité

par Jacques-Henri Doellmans

Peter Koslowski.jpgPeter Koslowski, jeune philosophe allemand né en 1952, est professeur de philosophie et d'économie politique à l'Université de Witten/Herdecke, président de l'Institut CIVITAS, Directeur de l'Institut de Recherches en Philosophie de l'Université de Hanovre. Son objectif est de déployer une critique fondée de la modernité et de tous ses avatars institutionalisés (en politique comme en économie). Ses arguments, solidement étayés, ne sont pas d'une lecture facile. Rien de son œuvre, déjà considérable, n'a été traduit et nous, francophones, avons peu de chances de trouver bientôt en librairie des traductions de ce philosophe traditionnel et catholique d'aujourd'hui, tant la rigueur de ses arguments ruine les assises de la pensée néo-gnosticiste, libérale et permissive dominante, surtout dans les rédactions parisiennes!

Koslowski est également un philosophe prolixe, dont l'éventail des préoccupations est vaste: de la philosophie à la pratique de l'économie, de l'éthique à l'esthétique et de la métaphysique aux questions religieuses. Koslowski est toutefois un philosophe incarné: la réflexion doit servir à organiser la vie réelle pour le bien de nos prochains, à gommer les dysfonctionnements qui l'affectent. Pour atteindre cet optimum pratique, elle doit être interdisciplinaire, éviter l'impasse des spécialisations trop exigües, produits d'une pensée trop analytique et pas assez organique.

Pour la rédaction d'un article, l'interdisciplinarité préconisée par Koslowski fait problème, dans la mesure où elle ferait allègrement sauter les limites qui me sont imparties. Bornons-nous, ici, à évoquer la présentation critique que nous donne Koslowki de la “postmodernité” et des phénomènes dits “postmodernes”.

La “modernité” a d'abord été chrétienne, dans le sens où les chrétiens de l'antiquité tardive se désignaient par l'adjectif moderni, pour se distinguer des païens qu'ils appelaient les antiqui. Dans cette acception, la modernité correspond au saeculum de Saint-Augustin, soit le temps entre la Chute et l'Accomplissement, sur lequel l'homme n'a pas de prise, seul Dieu étant maître du temps. Cette conception se heurte à celle des gnostiques, constate Koslowski, qui protestent contre l'impuissance de l'homme à exercer un quelconque pouvoir sur le temps et la mort. Le gnosticisme  —qu'on ne confondra pas avec ce que Koslowski appelle “la vraie gnose”—  prétendra qu'en nommant le temps (ou des segments précis et définis du temps), l'homme parviendra à exercer sa puissance sur le temps et sur l'histoire. Par “nommer le temps”, par le fait de donner des noms à des périodes circonscrites du temps, l'homme gnostique a la prétention d'exercer une certaine maîtrise sur ce flux qui lui échappe. La division du temps en “ères” antique, médiévale et moderne donne l'illusion d'une marche en avant vers une maîtrise de plus en plus assurée et complète sur le temps. Telle est la logique gnostique, qui se répétera, nous allons le voir, dans les “grands récits” de Hegel et de Marx, mais en dehors de toute référence à Dieu ou au Fils de Dieu incarné dans la chair des hommes.

Parallèlement à cette volonté d'arracher à Dieu la maîtrise du temps, le gnosticisme, surtout dans sa version docétiste, nie le caractère historique de la vie de Jésus, rejette le fait qu'il soit réellement devenu homme et chair. Le gnosticisme spiritualise et dés-historise l'Incarnation du Christ et introduit de la sorte une anthropologie désincarnée, que refusera l'Eglise. Ce refus de l'Eglise permet d'éviter l'écueil de l'escapisme vers des empyrées irréelles, de déboucher dans l'affabulation phantasmagorique et spiritualiste. L'Incarnation revalorise le corps réel de l'homme, puisque le Christ a partagé cette condition. Cette revalorisation implique, par le biais de la caritas  active, une mission sociale pour l'homme politique chrétien et conduit à affirmer une religion qui tient pleinement compte de la communauté humaine (paroissiale, urbaine, régionale, nationale, continentale ou écouménique). L'homme a dès lors un rôle à jouer dans le drame du saeculum,  mais non pas un rôle de pur sujet autonome et arbitraire. Si les gnostiques de l'antiquité avaient nié toute valeur au monde en refusant l'Incarnation, l'avatar moderne du gnosticisme idolâtrera le monde, tout en le désacralisant; le monde n'aura plus de valeur qu'en tant que matériau, que masse de matières premières, mises à la totale disposition de l'homme, jetées en pâture à son arbitraire le plus complet. Le gnosticisme moderne débouche ainsi sur la “faisabilité” totale et sur la catastrophe écologique.

Si le premier concept de modernité était celui de la chrétienté imbriquée dans le saeculum  (selon Saint-Augustin), la deuxième acception du terme “modernité” est celle de la philosophie des Lumières, dans ses seuls avatars progressistes. Koslowski s'insurge contre la démarche de Jürgen Habermas qui a érigé, au cours de ces deux dernières décennies, ces “Lumières progressistes” au rang de seul projet valable de la modernité. Habermas perpétue ainsi la superstition du progressisme des gauches et jette un soupçon permanent sur tout ce qui ne relève pas de ces “Lumières progressistes”. L'idée d'un progrès matériel et technique infini provient du premier principe (galiléen) de la thermodynamique, qui veut que l'énergie se maintient en toutes circonstances et s'éparpille sans jamais se perdre au travers du monde. Dans une telle optique, l'accroissement de complexité, et non la diminution de complexité ou la régression, est la “normalité” des temps modernes. Mais, à partir de 1875, émerge le second principe de la thermodynamique, qui constate la déperdition de l'énergie, ce qui permet d'envisager la décadence, le déclin, la mort des systèmes, la finitude des ressources naturelles. Le projet moderne de dominer entièrement la nature s'effondre: l'homme gnostique/moderne ne prendra donc pas la place de Dieu, il ne sera pas, à la place de Dieu, le maître du temps. Dans ce sens, la postmodernité commence en 1875, comme le notait déjà Toynbee, mais ce fait de la déperdition n'est pas pris en compte par les idéologies politiques dominantes. Partis, idéologues, décideurs politiques agissent encore et toujours comme si ce second principe de la thermodynamique n'avait jamais été énoncé.

Pourtant, malgré les 122 ans qui se sont écoulés depuis 1875, l'usage du vocable “postmoderne” est venu bien plus tard et révèle l'existence d'un autre débat, parti du constat de l'effondrement de ce que Jean-François Lyotard appelait les “grands récits”. Pour Lyotard, les “grands récits” sont représentés par les doctrines de Hegel et de Marx. Ils participent, selon Koslowski, d'une “immanentisation radicale” et d'une “historicisation” de Dieu, où l'histoire du monde devient synonyme de la marche en avant de l'absolu, libérant l'homme de sa prison mondaine et de son enveloppe charnelle. Pour Marx, cette marche en avant de l'absolu équivaut à l'émancipation de l'homme, qui, en bout de course, ne sera plus exploité par l'homme ni assujetti au donné naturel. Lyotard déclarera caducs ces deux “grands récits”, expressions d'un avatar contemporain du filon gnostique.

A la suite de cette caducité proclamée par Lyotard, le philosophe allemand Odo Marquard embraye sur cette idée et annonce le remplacement des deux “grands récits” de la modernité européenne par une myriade de “petits récits”, qu'il appelle (erronément) des “mythes”. Le marxisme, l'idéalisme hégélien et le christianisme, dans l'optique de Marquard, sont “redimensionnés” et deviennent des “petits récits”, à côté d'autres “petits récits” (notamment ceux du “New Age”), auquel il octroie la même valeur. C'est le règne de la “polymythie”, écrit Koslowski, que Marquard érige au rang d'obligation éthique. Le jeu de la concurrence entre ces “mythes”, que Koslowski nomme plus justement des “fables”, devient la catégorie fondamentale du réel. La concurrence et l'affrontement entre les “petits récits”, le débat de tous avec tous, le jeu stérile des discussions aimables non assorties de décisions constituent la variante anarcho-libérale de la postmodernité, conclut Koslowski. Ce néo-polythéisme et cet engouement naïf pour les débats entre tous et n'importe qui dévoile vite ses insuffisances car: 1) La vie est unique et ne peut pas être inscrite exclusivement sous le signe du jeu, sans tomber dans l'aberration, ni sous le signe de la discussion perpétuelle, ce qui serait sans issue; 2) Totaliser ce type de jeu est une aberration, car s'il est totalisé, il perd automatiquement son caractère ludique; 3) Cette polymythie, théorisée par Marquard, se méprend sur le caractère intrinsèque des “grands récits”; contrairement aux “petits récits”, alignés par Marquard, ils ne sont pas des “fables” ou de sympathiques “historiettes”, mais un “mélange hybride d'histoire et de philosophie spéculative”, qui est “spéculation dogmatique” et ne se laisse pas impliquer dans des “débats” ou des “jeux discursifs”, si ce n'est par intérêt stratégique ponctuel. La polymythie de Marquard n'affirme rien, ne souhaite même pas maintenir les différences qui distinguent les “petits récits” les uns des autres, mais a pour seul effet de mélanger tous les genres et d'estomper les limites entre toutes les catégories. Les ratiocinations évoquant une hypothétique “pluralité” qui serait indépassable ne conduisent qu'à renoncer à toute hiérarchisation des valeurs et s'avèrent pure accumulation de fables et d'affabulations sans fondement ni épaisseur.

Après la “polymythie” de Marquard, le second volet de l'offensive postmoderne en philosophie est représentée par le filon “déconstructiviste”. En annonçant la fin des “grands récits”, Lyotard a jeté les bases d'une vaste entreprise de “déconstruction” de toutes les institutions, instances, initiatives, que ces “grands récits” avaient générées au fil du temps et imposées aux sociétés humaines. Procédant effectivement de cette “spéculation dogmatique” assimilable à un néo-gnosticisme, les “grands récits” ont été “constructivistes”  —ils relevaient de ce que Joseph de Maistre appelait “l'esprit de fabrication”—  et ont installé, dit Koslowski, des “cages d'acier” pour y enfermer les hommes et, aussi, les mettre à l'abri de tout appel de l'Absolu. Ces “cages d'acier” doivent être démantelées, ce qui légitime la théorie et la pratique de la “déconstruction”, du moins jusqu'à un certain point. Si déconstruire les cages d'acier est une nécessité pour tous ceux qui veulent une restauration des valeurs (traditionnelles), faire du “déconstructivisme” une fin en soi est un errement de plus de la modernité. Toujours hostile aux avatars du gnosticisme antique, à l'instar du penseur conservateur Erich Voegelin, Koslowski rappelle que pour les gnoses extrêmes, le réel est toujours “faux”, “inauthentique”, “erratique”, etc. et, derrière lui, se trouvent le “surnaturel”, le “tout-autre”, l'“inattendu”, le “nouveau”, l'“étranger”, toujours plus “vrais” que le réel. Pour Lyotard et Derrida, le philosophe doit toujours placer ce “tout-autre” au centre de ses préoccupations, lui octroyer d'office toute la place, au détriment du réel, toujours considéré comme insuffisant et imparfait, dépourvu de valeur. Lyotard veut privilégier les “discontinuités” et les “hétérogénéités” contre les “continuités” et les “homogénéités”, car elles témoignent du caractère “déchiré” du monde, dans lequel jamais aucun ordre ne peut se déployer. L'idée d'ordre  —et non seulement la “cage d'acier”—   est un danger pour les déconstructivistes et non pas la chance qui s'offre à l'homme de s'accomplir au service des autres, de la Cité, du prochain, etc.

Pour Koslowski, cette logique “anarchisante” dérive de Georges Bataille, récemment “redécouvert” par la “nouvelle droite”. Bataille, notamment dans La littérature et le mal, explique que la souveraineté consiste à accroître la liberté jusqu'à obtenir un “être-pour-soi” absolu, car toute activité consistant à maintenir l'ordre est signe d'escalavage, d'une “conscience d'esclave”, servile à l'égard de l'“objectivité”. L'homme ne peut être souverain, pour Bataille, que s'il se libère du langage et de la vie, donc s'il est capable de s'auto-détruire. Le moi de Bataille renonce de façon absolue à défendre et à maintenir la vie (laquelle n'a pas de valeur comme le monde n'avait pas de valeur pour les gnostiques de la fin de l'antiquité, qui refusaient le mystère de l'Incarnation). L'apologie du “gaspillage”, antonyme total de la “conservation”, et la “mystique du moi” chez Bataille débouchent donc sur une “mystique de la mort”. En ce sens, elle surprivilégie la dispersio des mystiques médiévaux, lui accorde un statut ontologique, sans affirmer en contre-partie l'unio mystica.

Telle est la critique qu'adresse Koslowski à la philosophie postmoderne. Elle ne s'est pas contenté de “déconstruire” les structures imposées par la modernité, elle n'a pas rétabli l'unio mystica, elle a généralisé un “déconstructivisme” athée et nihiliste, qui ne débouche sur rien d'autre que la mort, comme le prouve l'œuvre de Bataille. Mais si Koslowski s'insurge contre le refus du réel qui part du gnosticisme pour aboutir au déconstructivisme de Derrida, que propose-t-il pour ré-ancrer la philosophie dans le réel, et pour dégager de ce ré-ancrage une philosophie politique pratique et une économie qui permette de donner à chacun son dû?

Dans un débat qui l'opposait à Claus Offe, politologue allemand visant à maintenir une démocratie de facture moderne, Koslowski indiquait les pistes à suivre pour se dégager de l'impasse moderne. Offe avait constaté que les processus de modernisation, en s'amplifiant, en démultipliant les différenciations, en accélérant outrancièrement les prestations des systèmes et sous-systèmes, confisquaient aux structures et aux institutions de la modernité le caractère normatif de cette même modernité. Différenciations et accélérations finissent par empêcher la modernité d'être émancipatrice, alors qu'au départ son éthique foncière visait justement l'émancipation totale (i.e.: échapper à la prison du réel pour les gnostiques, s'émanciper de la tyrannie du donné naturel chez Marx). Pour réintroduire au centre des préoccupations de nos contemporains cette idée d'émancipation, Offe prône l'arrêt des accumulations, différenciations et accélérations, soit une “option nulle”. Offe veut la modernité sans progrès, parce que le progrès fini par générer des structures gigantesques, incontrôlables et non démocratiques. Il réconcilie ainsi la gauche post-industrielle et les paléo-conservateurs, du moins ceux qui se contentent de ce constat somme toute assez facile. Effectivement, constate Koslowski, Offe démontre à juste titre qu'une accumulation incessante de différenciations diminue la vitalité et la robustesse de la société, surtout si les sous-systèmes du système sont chacun monofonctionnels et s'avèrent incapables de régler des problèmes complexes, chevauchant plusieurs types de compétences. Si les principes de vérité, de justice et de beauté s'éloignent les uns des autres par suite du processus de différenciation, nous aurons, comme l'avait prévu Max Weber, une vérité injuste et laide, une justice fausse et laide et une esthétique immorale et fausse. De même, le divorce entre économie, politique et solidarité, conduit à une économie impolitique et non solidaire, à une politique anti-économique et non solidaire, à une solidarité anti-économique et impolitique. Ces différenciations infécondes de la modernité doivent être dépassées grâce à une pratique de l'“interpénétration” générale, conduisant à une polyfonctionalité des institutions dans lesquelles les individus seront organiquement imbriqués, car l'individu n'est pas seulement une unité économique, par exemple, mais est simultanément ouvrier d'usine, artiste amateur, père de famille, etc. Chaque institution doit pouvoir répondre tout de suite, sans médiation inutile, à chacune des facettes de la personnalité de ce “père-artiste-ouvrier”. Offe considère que l'“interpénétration” pourrait porter atteinte au principe de la séparation des pouvoirs. Koslowski rétorque que cette séparation des pouvoirs serait d'autant plus vivante avec des institutions polyfonctionnelles et plus robustes, taillées à la mesure d'hommes réels et complexes. L'“option nulle” est un constat d'échec. L'effondrement de la modernité politique et des espoirs qu'elle a fait naître provoque la déprime. Un monde à l'enseigne de l'“option nulle” est un monde sans perspective d'avenir. Un système qui ne peut plus croître, s'atrophie.

Pour Koslowski, c'est le matérialisme, donc la pensée économiciste,  —la sphère de l'économie dans laquelle la modernité matérialiste avait placé tous ses espoirs—  qui est contrainte d'adopter l'“option nulle”. Comme cette pensée a fait l'impasse sur la culture, la religion, l'art et la science, elle est incapable de générer des développements dans ces domaines et d'y susciter des effets de compensation, pourtant essentiels à l'équilibre humain et social. L'impasse, le sur-place du domaine socio-économique doit être un appel à investir des énergies créatrices et des générosités dans les dimensions religieuses, artistiques et scientifiques, conclut Koslowski.

Telle est bien son intention et Koslowski ne se contente pas d'émettre le vœu d'une économie plus conforme aux principes de conservation et d'équilibre des philosophies non modernes. Deux livres très denses témoignent de sa volonté de sauver l'économie et le social de la stagnation et du déclin induits par l'“option nulle”, constatée par Offe, un politologue déçu de la modernité mais qui veut à tout prix la sauver, en dépit de ses échecs patents. Dans cette optique, Koslowski a écrit Wirtschaft als Kultur  (1989) et Die Ordnung der Wirtschaft  (1994) (réf. infra). Ces deux ouvrages sont si fondamentaux que nous serons contraints d'y revenir: retenons, ici, que Koslowski, dans Wirtschaft als Kultur, part du constat que les réserves naturelles de la planète s'épuisent, qu'elles sont limitées, que cette limite doit être prise en compte dans toutes nos actions, qu'elle implique ipso facto que le progrès accumulatif illimité est une impossibilité pratique. A ce progressisme qui avait structuré toute la pensée moderne, Koslowski oppose les idées d'une “justice” et d'une “réciprocité” dans les échanges entre l'homme et la nature. Ensuite, il plaide pour une réinsertion de la pensée économique dans une culture plus globale, laissant une large place à l'éthique du devoir. Il esquisse ensuite les contours de l'Etat social postmoderne, qui doit être “subsidiaire” et prévoir une solidarité en tous sens entre les générations. Cet Etat postmoderne et subsidiaire doit participer, de concert avec ses homologues, à la restauration d'un marché intérieur européen, prélude à la naissance d'une “nation européenne”, capable d'organiser ses différences ethniques et culturelles sans sombrer dans le nivellement des valeurs qu'un certain discours sur la “multiculturalité” appelle de ses vœux (Koslowski se montre très sévère à l'égard de cet engouement pour la “multiculture”).

Dans Die Ordnung der Wirtschaft, ouvrage très solidement charpenté, Koslowski jette les bases d'un néo-aristotélisme, où s'allient “philosophie pratique” et “économie éthique-politique”. Cette alliance part d'une “interpénétration” et d'une “compénétration” des rationalités éthique, économique et politique. Ainsi, la “bonne politique” est celle qui ne répond pas seulement aux impératifs politiques (conservation du pouvoir, évitement des conflits), mais vise le bien commun et la couverture optimale de tous les besoins vitaux. Les structures économiques, toujours selon cette logique néo-aristotélicienne, doivent également répondre à des critères politiques et éthiques. Quant à l'éthique, elle ne saurait être ni anti-économique ni anti-politique. Cette volonté de ne pas valoriser un domaine d'activité humaine au détriment d'une autre postule de recombiner ce que la modernité avait voulu penser séparément. La philosophie pratique d'Aristote entend également conserver les liens d'amitié politique (philia politike)  entre les citoyens et les communautés de citoyens, qui fondent le sens du devoir et de la réciprocité. Koslowski relie ce principe cardinal de la pensée politique aristotélicienne aux travaux de la nouvelle école communautarienne américaine (A. MacIntyre, M. Walzer, Ch. Taylor, etc.). Le néoaristotélisme met l'accent sur le retour indispensable de la vertu grecque de phronesis:  l'intelligence pratique, capable de discerner ce qui est bon et utile pour la Cité, dans le contexte propre de cette Cité. En effet, la rationalité pure, sur laquelle l'hypermodernité avait parié, exclut le contexte. L'application de cette rationalité décontextualisante dans le domaine de l'économie a conduit à une impasse voire à des catastrophes: une rationalité économique réelle et globale exige une immersion herméneutique dans le tissu social, où se conjuguent actions économiques et politiques. Enfin, le réel est le fondement premier de la philosophie pratique et non le “discours” ou l'“agir communicationnel” (cher à Habermas ou à Apel), car tout ne procède pas de l'agir et du parler: l'Etre transcende l'action et ses déterminations précèdent l'acte de parler ou de discourir.

La pensée philosophique et économique de Koslowski constitue une réponse aux épreuves que nous a infligées la modernité: elle représente la facette positive, le complément constructif, de sa critique de la modernité gnosticiste. Elle est un chantier vers lequel nous allons immanquablement devoir retourner. Puisse cette modeste introduction éveiller l'attention du public francophone pour cette œuvre qui n'a pas encore été découverte en France et qui complèterait celles de Taylor, MacIntyre, Spaemann, déjà traduites.

Bibliographie:

- Peter KOSLOWSKI, «Sein-lassen-können als Überwindung des Modernismus. Kommentar zu Claus Offe», in Peter KOSLOWSKI, Robert SPAEMANN, Reinhard LÖW, Moderne oder Postmoderne?, Acta Humaniora/VCH, Weinheim, 1986.

- Peter KOSLOWSKI, Wirtschaft als Kultur. Wirtschaftskultur und Wirtschaftsethik in der Postmoderne, Edition Passagen, Wien, 1989.

- Peter KOSLOWSKI, Die Prüfungen der Neuzeit. Über Postmodernität. Philosophie der Geschichte, Metaphysik, Gnosis, Edition Passagen, Wien, 1989.

- Peter KOSLOWSKI, «Supermoderne oder Postmoderne? Dekonstruktion und Mystik in den zwei Postmodernen», in Günther EIFLER, Otto SAAME (Hrsg.), Postmoderne. Anspruche einer neuen Epoche. Eine interdisziplinäre Erörterung, Edition Passagen, Wien, 1990.

- Peter KOSLOWSKI, Die Ordnung der Wirtschaft, Mohr/Siebeck, Tübingen, 1994.

 

samedi, 02 novembre 2013

Types de civilisation et paramètres géopolitiques

Types de civilisation et paramètres géopolitiques

Esquisses historiosophiques

par Vladimir Wiedemann

INTRODUCTION      

Le boom géopolitique, qui a gagné ces dix dernières années l’espace opérationnel de la pensée politologique russe, rappelle, dans un certain sens, le boom du marxisme au début de ce siècle.

Il est très curieux qu’aujourd'hui en Russie la géopolitique ne soit pas encore une discipline scientifique spécialisée, mais ne constitue qu'un nouveau symbole de croyance qui a donné les réponses à toutes les questions que l’on se posait depuis longtemps, y compris les questions à caractère spirituel que l'on n'avait jamais abordées avec le marxisme. Dans notre article, nous n’avons pas pour objectif de révéler les parallèles ultérieurs entre l’influence du marxisme et de la géopolitique sur la mythologie de la conscience populaire en Russie. Notre objectif est plutôt de dégager la nouvelle inclinaison de la pensée géopolitique russe en particulier (non dans le sens du symbole de croyance) vers la grande objectivité factuelle en ce qui concerne le discours général de la géopolitique et en particulier en tant que science spécialisée

En géopolitique, il y a une idée standard, la notion/l’idée qu'il existe dans l’histoire deux types fondamentaux de civilisation : la thalasso-civilisation (civilisation maritime) et la civilisation tellurique (la civilisation continentale). Dans le monde règne, pour ainsi dire, une situation générale, mais comme on le sait, l’essentiel de tout processus est toujours dissimulé par des détails, et ce sont ces détails en particulier, qui, à notre avis, s'imposent aux esprits, souvent au détriment de « l’inviolabilité » du paradigme métaphysique fondamental, où tout est blanc ou noir (c'est le cas pour la thèse, fort répandue, qui souligne le contraste fondamental entre thalassocratie et tellurocratie, notamment dans une variante plus concrète: entre l’atlantisme et l’eurasisme. En fait, l’image de l’opposition des civilisations dans le monde est excessivement complexe et paradoxalement très dynamique (en l'occurrence, plutôt agir/fonctionner avec des codes binaires et non deux codes). 

Même la logique élémentaire suggère que le type le plus universel de civilisation apparaîtra où l’on aura atteint l’union la plus harmonieuse des « vents » marins et continentaux de l’histoire, et avec cela sans perdre leur contrôle.

Plus concrètement, ce sont les différences —mais en même temps les similitudes— entre les différents types de civilisations qui nous exposent l’histoire des puissances coloniales. En fait, ici nous pouvons observer les formes les plus diverses de colonisation de l'espace habitable, la colonisation maritime comme la colonisation continentale. Nous allons aborder des exemples concrets.

L’ANTIQUITE          

Déjà, dès les débuts de l’histoire, on voit des peuples accomplir des expansions maritimes et continentales. Ainsi, la colonisation de la Palestine par l’antique peuple d'Israël est un bon exemple d’expansion continentale et son soulèvement contre le « peuple de la mer » est un des prototypes du conflit historique entre thalassocratie et tellurocratie. En outre, la puissance assyrienne illustre très bien l’impérialisme continental et la puissance phénicienne s’illustre sur la mer. Mais il faut ajouter que pour asseoir n’importe quelle puissance assez consolidée, il est nécessaire de contrôler les réseaux de communications correspondants : les réseaux maritimes, continentaux et autres. Pendant l’Antiquité, c’étaient, avant tout, les voies fluviales qui assuraient le pouvoir sur le continent, et, par après, petit à petit, l’importance des voies terrestres a également augmenté. Le pouvoir de la thalassocratie était déterminé par le contrôle des zones de navigation côtière, à laquelle s’ajouteront plus tard les détroits et les courants marins. Depuis des temps immémoriaux, les rivières relient la mer aux profondeurs du continent, les cultures côtières et continentales.     

La Grèce, en tant qu’exemple d’une authentique universalité, est un cas particulier : la civilisation grecque a commencé par être maritime (c’était une civilisation de police côtière et insulaire), et au fil du temps, elle devint la force continentale la plus puissante. Avant tout, nous voulons ici parler de l’expansion coloniale terrestre de l’hellénisme vers l’Est, et ce, jusqu’aux profondeurs continentales de l’Asie centrale. L’Empire romain a lui aussi connu ce type de civilisation universelle : la flotte romaine ne valait pas moins sur la mer Méditerranée que les légionnaires romains ne l’étaient sur les étendues continentales de l’Europe, de l’Asie et de l’Afrique. Par la suite, Byzance applique cette même tradition géopolitique des « deux composantes » (la symphonie de la Mer et de la Terre).

MOYEN AGE

Avec le début du Moyen Âge commençait une nouvelle étape de l’opposition géopolitique des peuples et des civilisations. L’espace de l’Empire romain, en tant que civilisation universelle de l’Antiquité, s’est exposé à une expansion coloniale prolongée autant sur terre que sur mer, ce qui entraîna, dans chaque cas, l’apparition de formes particulières de cultures nouvelles. « Les peuples de la mer » de l’Europe du Moyen Âge sont des conquérants normands-varègues, qui s’étaient emparé de l’Empire suite à des encerclements militaires. Partis en campagne depuis les étendues de l’Europe du Nord (baltique) s’imposèrent sur le « front occidental » atlantique depuis l’Angleterre jusqu’à l’Afrique du Nord et l’Italie du Sud ; alors que les Varègues, sur le « front oriental », affirmèrent leur pouvoir le long de toute la route continentale des Varègues et des Grecs, de la Baltique à la mer Noire, et jusqu’à Constantinople elle-même.

C’est ainsi que l’Europe donna lieu à plusieurs genres de cultures coloniales aux tendances géopolitiques différentes. C’est alors au tour de Venise, héritière originale de Byzance, de devenir, et pour longtemps, le type de thalassocratie le plus authentique. Les célèbres Croisades, continuation de la tradition des invasions normandes, furent l’instrument de la politique de Venise, qui avait pour objectif final un contrôle géopolitique total des bassins de la Méditerranée orientale et de la Mer Noire. Byzance fut la seule, de par sa nature, à être la plus thalassocratique, attitude qui fut cependant déterminée, non pas par un refus de son élite politique pour les principes de l’universalisme antique, mais héritée de circonstances bien concrètes : la perte d’une grande partie du territoire (en tant que facteur « continental ») suite aux expansions arabe et turque.

La colonisation arabe, à son tour, est un exemple à l’opposé de l’hellénisme; elle est la transformation de l’espace civilisationnel du tellurocratique profond (continentalisme d’Arabie) à l’universel. De même, la colonisation arabe s’est propagée autant par voies terrestres (du Maroc à l’Asie centrale) que par voies maritimes (de célèbres navigateurs arabes n’ont pas été que des concurrents sérieux pour les Vénitiens, ils ont aussi contrôlé presque tout le bassin de l’Océan Indien). Et il faut attendre l’invasion mongole, la tellurocratie la plus radicale du Moyen Âge, pour voir la fin de l’universalisme arabe.

Par la suite, la colonisation turque  était elle aussi, de par sa nature, tellurocratique, vu sa propre prétention à l’universalisme. Si les Mongols, dont les territoires côtiers conquis ne relevaient pas de l’universalisme civilisationnel, s’étaient de nouveau retirés dans les profondeurs du continent, c’était de la faute des Turcs, issus de ces mêmes profondeurs, qui, historiquement, avaient conservé leur accès à la mer et qui avaient tenté de s’approprier/d’imiter la tradition de l’universalisme géopolitique des Arabes et des Byzantins. Toute fois, l’Empire d’Osman resta davantage une puissance tellurocratique. L’avantage de conserver ce statut géopolitique (et en même temps par contrainte technique pour un développement adéquat de l’universalisme ottoman) a servi de circonstance pour que la Sublime Porte se concentre considérablement sur sa politique extérieure pour s’opposer à la tellurocratie européenne la plus fondamentale du Moyen Âge, le Saint Empire romain germanique (conflit au-delà du bassin danubien).

Le Saint Empire romain germanique fut le résultat d’une expansion coloniale germanique en Europe. Cette expansion avait un caractère double : elle était maritime et terrestre. Nous avons déjà parlé d’une thalassocratie germanique antique (les invasions normandes). À l’origine, les Goths, et ensuite les Francs, constituaient la tellurocratie germanique. Initialement, la nation de Charlemagne était une puissance très continentale, où le pouvoir tellurocratique assurait le contrôle sur les bassins des voies fluviales les plus importantes du Nord-Ouest de l’Europe (y compris les embouchures et les courants moyens du Danube). Malgré la tentative de la Rome latine d’introduire en Allemagne par les terres « le virus » de l’universalisme antique (Charlemagne proclamé Empereur romain), l’Etat de Carolingiens resta fidèle à ses principes tellurocratiques, ce qui, plus tard confirma sa division par Charlemagne lui-même en trois parties qui correspondaient en fait, aux trois « bassins de contrôle » : la France, la Germanie et l’Italie du Nord. Par la suite (Xe siècle), la Germanie et l’Italie du Nord constituaient la partie principale du nouvel Etat européen, qui nominalement, issus des traditions impériales des Romains et des Carolingiens, celles du Saint Empire romain germanique.

La colonisation germanique sur le pourtour de la Baltique possédait principalement un caractère thalassocratique, issu des traditions des troupes de Normands et de Varègues et s’est maintenue lors de la Ligue hanséatique des villes. En ce qui concerne les territoires baltes germanisés, ils n’ont jamais été officiellement repris dans l’Empire germanique médiéval bien qu’ils en dépendaient politiquement. La flotte hanséatique opérait de la même manière sur la Baltique et les mers du Nord que les Vénitiens sur la Méditerranée. L’Europe, située entre les mers du Nord et du Sud, était dirigée par l’élite tellurocratique germanique qui menait une implantation coloniale successive dans les profondeurs du continent vers l’Est, jusqu’aux frontières de la sphère d’influence géopolitique de la Russie.

L’ancienne Russie fut une variante très originale de l’universalisme géopolitique et s’institua surtout une élite thalassocratique (la Russie varègue) qui se retrouva au beau milieu d’un entourage hautement tellurocratique (khanat Khazar et Empire germanique). Suite à l’invasion mongole, la Russie s’est divisée en trois composantes : la Russie occidentale (Kiev), la Russie orientale (Moscou) et la Russie du Nord (Novgorod). La Russie occidentale qui s’est retrouvée enclavée dans les tenailles germano-turco-mongoles, perdit la possibilité d’une expansion coloniale propre et qui s’est transformée en périphérie, en confins, géopolitiques (Ukraine). La Russie orientale, dont l’accès à la mer fut coupé par les Tataro-Mongols, prit les traits typiques d’une puissance tellurocratique (le pouvoir des grands Princes moscovites s’est basé sur le contrôle des sources et des courants moyens d’une série de rivières importantes du massif de la Russie ancienne), et, jusqu’au XVIe siècle, la Russie du Nord conserva ses traits universalistes anciens (thalasso-tellurocratique) rappelant d’une certaine manière l’Empire germanique : un commerce maritime (sur les mers Baltique et Blanche) ajouté à une assimilation systématique des nouveaux espaces continentaux à l’Est, jusqu’à la "ceinture de pierre" (Oural).   

L’unification des Russies de Novgorod et de Moscou fut un puissant stimulant pour le développement  de l’universalisme géopolitique russe spécifique, historiquement exprimée dans l’idée de la Troisième Rome. Suite à l’accès de l’Etat russe aux mers Baltique et Blanche au Nord-Ouest, et de même aux mers Noire et Caspienne au Sud-Est, fut introduite dans la politique russe l’intuition thalassocratique avec une force particulière, déployée par Pierre le Grand. En même temps, la colonisation russe continua dans les espaces continentaux internes, et de cette manière, la combinaison harmonieuse des vecteurs "thalasso" et "telluro" dans la politique coloniale russe mena à la création d’un empire universel sans précédent de par son échelle, un réseau géopolitique qui est paradoxalement exprimé dans la formule : « Moscou, le port aux cinq mers ».

LES TEMPS MODERNES

Les grandes découvertes géographiques des 15ième et 16ième siècles ont entraîné une expansion coloniale mondiale des nations européennes : le monde entier devient l’objectif de leurs stratégies géopolitiques. Nous observons ici, avant tout, l’établissement de deux puissances coloniales universalistes : l’Espagne et le Portugal. L’universalisme latin, incarné par ces deux puissances, possédait trois composantes historiques : l’universalisme impériale antique de Rome (Eglise romaine), les gènes tellurocratiques de l’aristocratie espagnole (issue des traditions de la colonisation terrestre de la Germanie antique et des Goths occidentaux), et le thalassocratisme méditerranéen (vénitien) apporté par les croisés, les templiers qui s’y étaient réfugiés après le début de la répression de l’Ordre en Europe au 14ième siècle et qui, par la suite, ont activement participé au projet de colonisation de l’Amérique. Christophe Colomb (un Génois d’origine) représenta le thalassocratisme méditerranéen.

Il faut attirer une nouvelle fois l’attention sur le fait que, malgré une flotte mondiale plus puissante en ce temps-là, l’Espagne ne se transforma pas en puissance thalassocratique avec une stratégie géopolitique logique propre au vrai thalassocratisme. La colonisation espagnole de l’Amérique portait surtout le caractère d’une colonisation continentale et elle n’était pas seulement la mise en œuvre des régions côtières clefs. À cet égard, la colonisation portugaise des côtes d’Amérique, d’Afrique et d’Asie fut la plus thalassocratique. Ce sont justement les Portugais qui se sont les premiers heurtés aux intérêts de la nouvelle thalassocratie européenne, c'est-à-dire la Hollande, qui est entrée dans l’arène mondiale de l’époque des Temps Modernes.

La thalassocratie hollandaise, malgré la situation continentale des Néerlandais, est, si l’on peut s’exprimer ainsi, la plus classique. Au 17ième siècle, Amsterdam devint la nouvelle Venise d’Europe. La colonisation hollandaise visait, avant tout, le contrôle des voies marchandes maritimes et des points stratégiques le long des côtes de l’Afrique du Nord jusqu’au Japon y compris ainsi que le long des côtes de l’Amérique du Nord et centrale. Les points stratégiques pour soutenir la politique coloniale hollandaise : Nieuw Amsterdam (qui deviendra plus tard New York), le Cap (l’extrémité sud de l’Afrique, position-clef sur la route maritime de l’Europe à l’Océan Indien), Java (contrôle sur l’archipel indonésien et les détroits de la route maritime de l’Inde à la Chine).

La stratégie coloniale hollandaise fut appliquée ultérieurement avec succès par la Grande-Bretagne et, avant tout, contre la Hollande elle-même dans la lutte pour la primauté mondiale sur les océans. C’est ainsi que la Grande Bretagne s’empare de Nieuw Amsterdam et continue la colonisation entreprise par les Hollandais des côtes orientales de l’Amérique du Nord (Nouvelle Angleterre) ; s’empare d’une série de péninsules clefs dans les Caraïbes et de territoires côtiers de l’Amérique centrale ; s’implante en Afrique du Sud (tire le verrou à Cape Town, etc) ; s’introduit dans l’Océan Indien, assurant le contrôle sur les côtes d’Afrique orientale (prise de Zanzibar, etc) et s’implante en Inde et en Malaisie (routes maritimes entre l’Inde et la Chine) et enfin, en Chine même (Hong Kong). 

La colonisation britannique est typiquement thalassocratique quand elle ne se passe pas au plus profond des continents (l’Australie est intensément colonisée sur ses côtes, c’est le caractère thalassocratique, mais dans le cas de l’Inde, on parle non seulement de colonisation civilisationnelle mais aussi politique – voir l'accord entre la Grande Bretagne et le Grand Moghol. À cet égard, l’histoire de l’assimilation de l’Amérique du Nord fut tout aussi exemplaire. Là, la colonisation thalassocratique britannique se limitait, strictement parlant, aux zones côtières de la Nouvelle Angleterre, alors que les étendues intérieures du continent nord-américain avaient d’abord été occupés par les Espagnols (Californie, Texas) et les Français (Louisiane). Dans les territoires plus intérieurs encore, les Etats-Unis se sont constitués plus spécialement, avec pour matériel humain, les descendants des colons germaniques (jusqu’à la création des Etats-Unis, ils constituaient la moitié de la population du pays) et les immigrants d’Europe occidentale à la mentalité « européenne ».

La tradition géopolitique américaine contient, ainsi, des éléments contradictoires qui constituent en même temps les prémisses d’un universalisme propre à l’Amérique. Jusqu’à présent, les Etats-Unis restent dominés par l’élite thalassocratique d’origine anglo-hollandaise dont le fondement politico-spirituel est constitué par l'atlantisme. Cependant, il existe aussi une forte « opposition continentale » contre l’atlantisme, représentée par les « patriotes », les fondamentalistes-nativistes, auxquels on peut également ajouter les Indiens. Certes, pour finir, les Etats-Unis imitèrent la stratégie géopolitique de la Grande Bretagne qui comprenait la dernière structure néo-coloniale propre, sortant du cadre du véritable atlantisme.

Les autres voies de la colonisation. La victoire historique de la flotte britannique sur l’Espagne marqua un renforcement de la position géopolitique de la nouvelle thalassocratie anglo-saxonne, et dans le monde romain (latin), un nouveau projet universaliste vit le jour, l’universalisme français.

La colonisation française est, d’une certaine mesure, le cumul, la réunion, des types de colonisation espagnole (continentale) et portugaise (maritime). D’une part, les Français se sont assidûment battus pour le contrôle des détroits et des péninsules, suivant ainsi une logique purement thalassocratique. Pendant ce temps, leur implantation était plus continentale que celle des Anglais. À part la Louisiane et le Québec en Amérique du Nord, les Français maîtrisèrent un immense espace continental en Afrique. Cependant, la France manquait de forces propres pour mener cette double tâche et asseoir son impérialisme universel auquel Napoléon aspirait jusqu'à la folie.

La colonisation allemande fut encore moins thalassocratique et plus tellurocratique que celle de la France. Jusqu’à la fin du 19ième siècle, l’Allemagne ne se décida pas à mener une politique de colonisation d’outre-mer et Bismarck, plongé dans des incertitudes, ne donna pas son accord pour la création d’un espace colonial germanique. Les pressentiments de Bismarck se révélèrent vrais : en principe, cette politique n’apporta aucun succès à l’Allemagne. Le colonialisme d’outre-mer italien et belge avait aussi un caractère très continental ; il consistait en l’occupation et l’exploitation de régions délimitées en Afrique (Congo, Libye, Erythrée).

Le colonialisme  russe était  loin d’être d’outre-mer, il était très continental ; et ce n’est qu’après la Deuxième Guerre Mondiale qu’en Russie (URSS), qu’apparurent des points d’appui stratégiques en dehors de l’Eurasie : en Amérique (Cuba, Nicaragua) et en Afrique (Egypte, Somalie, Libye, Ethiopie, Angola, etc). aujourd'hui, tous ces pays sont pratiquement déchirés. Mais, il existe un colonialisme continental encore plus fondamental, c’est celui de type turco-mongol (de Gengis Khan) qui s’est manifesté historiquement au sein des territoires de Gengis Khan et de ses descendants : la Chine Han, la Horde d’or, l’Etat de Timour, l’empire des Grands Mongols.

Le colonialisme chinois (non pas le colonialisme mongolo-han mais plutôt khano-confucéen) est plus penché vers l’universalisme tel que par exemple une colonisation chinoise active des côtes et des péninsules en Asie du Sud-Est et un développement important de la navigation côtière. Pendant ce temps, la colonisation continentale des vastes régions de l’Asie médiévale et centrale maintient la Chine en tant que puissance tellurocratique principalement. Le colonialisme japonais lui aussi avait un caractère double, et même radicalement double. Ce radicalisme était dû à deux vecteurs opposés : un vecteur tellurocratique visant une colonisation des régions intérieures du continent (Mandchourie, Mongolie, Tibet) et un autre thalassocratique, fondé sur une colonisation très thalassocratique de tout le bassin de l’Océan Pacifique.

Après la Deuxième Guerre Mondiale, les conditions générales de la réalité géopolitique se sont essentiellement transformées en rapport avec le progrès important des nouvelles formes visant à s’assurer une communication mondiale. Les voies de communications fluviales et terrestres du monde ont été ébranlées par l’aviation et, plus tard, par l’astronautique. L’introduction du facteur « aérien » dans la géopolitique amena la notion « d’aérocratie ». Les possibilités techniques actuelles permettent déjà, en principe, de ne pas dépendre (au niveau militaire) de l’aviation pour autant que les satellites armés dirigés à partir d’un tableau de commandes pourraient pratiquement assurer une extinction totale de n’importe quel objectif sur n’importe quel point de la planète. Pour mettre hors service la logistique d’un adversaire, il n’est plus nécessaire de transférer les grandes ressources humaines et techniques vers de vastes étendues, il suffit de mettre hors service son système énergétique, d’éliminer « avec précision » les nœuds stratégiques du gouvernement.

A l’heure actuelle, les Etats-Unis se révèlent être la principale force aérienne au monde et forment une alliance étroite avec la Grande Bretagne et l’OTAN. Le porte-avions symbolise au mieux l’union stratégique entre la mer et l’air. Néanmoins, vu les possibilités d’observation constante par satellite, l’avantage de la mobilité des porte-avions (ils sont les moins vulnérables lors d’offensives à l’étranger) face aux aérodromes stationnaires se relativise sensiblement.

Vladimir WIEDEMANN.

00:05 Publié dans Géopolitique, Philosophie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : géopolitique, philosophie | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

De Boerenkrijg tussen hamer en aambeeld

boerenkrijg.jpg

Archief 1998

De Boerenkrijg tussen hamer en aambeeld

Wannes Alverdinck en Jan Creve

Ex: http://www.devrijbuiter.be

Tweehonderd jaar geleden werd in de Zuidelijke Nederlanden een ware oorlog uitgevochten. Gedurende 3 maanden streden verspreide plattelandslegertjes tegen één van de machtigste oorlogsmachines van die tijd. De Franse invaller won tenslotte het pleit maar de strijd van de Brigands bleef voortleven in de herinnering. Honderden activiteiten in tal van Vlaamse gemeenten herdachten afgelopen maanden deze 'Boerenkrijg' (1). Maar van overheidswege werd er in alle talen gezwegen. Minister van Binnenlandse Zaken Di Rupo wilde er zelfs geen postzegel aan wijden.

TWEE VISIES

Is de Boerenkrijg wel zo belangrijk geweest dat we er papier aan zouden verspillen!? Grosso modo zijn twee meningen te onderscheiden die lijnrecht tegenover elkaar staan:

1. De Boerenkrijg was de strijd van ons volk tegen een vreemde indringer. Het was een bevrijdingsstrijd. Een heroïsche strijd. De herdenking is een eerbetoon aan deze helden.

2. De Boerenkrijg is een oproer geweest van een minderheid, van wat landvolk en geboefte. Een laatste opstoot van een voorbijgestreefde en verdwijnende wereld. Het betreft een fait-divers dat enkel interesse verdient vanuit wetenschappelijk-historisch oogpunt.

De eerste benadering vindt voornamelijk aanhang bij Vlaamsgezinde katholieken, al is dat ooit anders geweest (2), de tweede is die van het politieke en historisch-wetenschappelijke establishment.

De enen willen bewijzen dat de Boerenkrijg een volksopstand was van Vlaanderen tegen het Franse imperialisme. De anderen (zien zij de wervende kracht van dit postulaat?) grijpen - onder het mom van wetenschappelijkheid - alles aan om de Boerenkrijg te minimaliseren. Zo is er het werk van de Gentse professor Luc François die niets onverlet laat om de Boerenkrijg af te doen als een geheel van onbeduidende en onge-organiseerde opstandjes. Op zich is het uitgangspunt van François en zijn studenten, namelijk de historische feiten scheiden van de 19de eeuwse (romantische) fictie, zéér lovens-waardig. Maar het resultaat is niet om wild van te worden: Het negeren van een aantal historische documenten, vereenvoudigingen, zelfs verdraaiingen zijn eerder regel dan uitzondering. Zo geeft men in dit boek een opsomming van gemeenten "zonder", met "een kleine", "een grotere" en "een sterke actiebereidheid". Wat we hieronder in concreto moeten verstaan is onduidelijk maar de bedoeling van deze werkwijze is dat wel: namelijk aantonen dat in de opsomming van honderden gemeenten 'slechts' enkele tientallen gemeenten een "grotere" of "sterke" actiebereidheid vertoonden. Uitgezet op grafiek komt dat zeer overtuigend over maar wie zich de moeite geeft om dezelfde gegevens eens op een kaart te bekijken kan niet anders dan besluiten dat bepaalde streken werkelijk in vuur en vlam stonden. (3) Het zijn niet de enige zaken waarin de Gentse professor opvalt: zo ontkent hij het bestaan van enige organisatie, stelde hij op een uiteenzetting in Putte dat cijfers over de getalsterkte van het boerenleger door 10 moeten gedeeld worden en, op een andere uiteenzetting in Gent, dat het voornaamste motief voor de Boerenkrijg te vinden is in economische factoren, zijnde de terugval van de huisnijverheid op het platteland einde van de 18de eeuw en de tegenstelling platteland-stad.

EEN POGING TOT SYNTHESE

300px-Boerenkrijg.jpgToegegeven, het is niet gemakkelijk de woelige tijd van de Boerenkrijg te reconstrueren. Ongetwijfeld bevatten beide voormelde thesissen een kern van waarheid. De Boerenkrijg was een georganiseerde opstand van de plattelandsbevolking tegen het Frans imperialisme. En ja, de Boerenkrijg ontstond uit spontane woede en was een verbeten wanhoopsdaad om het tij te keren. Maar eigenlijk dringt zich een derde thesis op: Dé Boerenkrijg heeft zich nooit voorgedaan!

Op 12 oktober 1798 begaf zich een groep Franse soldaten, sansculotten (4) naar een boerderij in Overmere (Oost-Vlaanderen) waar een boer weigerde de zoveelste oorlogsbelasting te betalen. Andere bronnen spreken van een opstand van dienstplichtigen. Hoe dan ook, plaatselijke bewoners gingen de Fransen te lijf met alles wat maar op een wapen leek: vliemen, houthakkersbijlen, knuppels, dorsvlegels... Binnen de kortste keren waren de Fransen verdreven. In hun overwinningsroes trokken ze het dorp binnen, kapten de door de Fransen geplante 'vrijheidsboom' om, openden de kerkdeuren en luidden de kerkklokken. (5) Het was de aanleiding voor een opstand die reeds een maand eerder met de afkondiging van de Franse conscriptiewetten nog moeilijk te vermijden leek.

Als een lopend vuur verspreidde de opstand zich over het land. In West-Vlaanderen werd de opstand, met honderden doden in Ingelmunster en Kortrijk, na tien dagen bedwongen. In het Houtland, Waasland, Hulst, tot aan het Vlaams Hoofd voor Antwerpen, trokken de opstandelingen van dorp tot dorp. Maar de verdedigings-mogelijkheden waren in dit vlakke land beperkt en de Franse troepen konden vanuit de steden (Gent, Oostende en Doornik) gemakkelijk deze streken bestrijken. En in Hulst, dat zijn poorten opende voor de Wase Boerenkrijgers, lieten de Brigands zelfs een scheepskonvooi met een lading van 300 kanonnen zomaar voorbijvaren.

In de streek van Bornem, St-Amands, Willebroek en Hingene kon het Boerenleger onder de kundige leiding van de handelaar Emmanuel-Benedict Rollier langer weerstaan. Niet alleen was deze streek, met zijn moerassen, waterlanden en bossen, geprangd tussen enkele rivieren, beter geschikt voor een zich steeds hergroeperend leger, maar daarnaast was dat leger waarschijnlijk ook beter bewapend én getraind. Het kon beschikken over Engelse bakergeweren en Engels geld om de vrijwilligers te betalen. Maar uiteindelijk moest men ook daar zwichten voor de militaire overmacht. Bornem werd grotendeels in de as gelegd en ook elders vonden represailles plaats.

In de Antwerpse en de Limburgse Kempen wist het boerenleger zich langer te verweren. Onder leiding van de drukker Pieter Corbeels, de brouwerszoon Jozef Emmanuel Van Gansen en de jonge advokaat Eelen speelde het boerenleger, dat op een bepaald moment meer dan 5000 strijders telde, tussen Essen en Hasselt gedurende verschillende weken een kat-en-muis-spel met de Fransen. In de morgen van 5 december werd het leger in Hasselt echter verrast en definitief verslagen.

De Boerenkrijg kostte aan duizenden opstandelingen het leven. Corbeels en Meulemans werden met honderden medestanders terechtgesteld. Rollier dook onder, net als van Gansen die de rest van de Franse tijd in zijn eigen dorp overleefde.

Op verschillende plaatsen in het land smeulde de opstand nog na maar nergens kreeg hij nog de afmetingen van wat in het najaar van 1798 had plaatsgevonden. (6)

DE OORZAKEN VAN DE BOERENKRIJG

Ondanks de herhaalde bezettingen en oorlogen behoorden onze streken in de 18de eeuw tot de meest welvarende van Europa. De landbouw kende dankzij het systeem van de teeltwisseling (7) een hoge productiviteit. Er was een goed uitgebouwd net van land- en waterwegen. We kenden een hogere alfabetiseringsgraad dan in de 19de eeuw (tot 60 procent in bepaalde streken). Alle standen en regio's waren vertegenwoordigd in het politiek bestel. De vrijheden en privilegies uit de Middeleeuwen hadden hier, meer dan elders, dankzij de desinteresse van onze vreemde vorsten, kunnen standhouden.

Toen de Oostenrijkse keizer Jozef II met zijn radicale hervormingen deze toestand ongedaan probeerde te maken brak er een gewapende opstand uit (1789) die uitliep op de vorming van de Republiek der Verenigde Nederlandse Staten (République des Etats Unis de la Belgique). Eén van de (geheime) genootschappen die mee aan de basis lag van het verzet tegen de nieuwe denkbeelden van de keizer heette zeer toepasselijk "Pro Aris et Focis" ("Voor Outer en Heerd"). Daarmee duidelijk beklemtonend dat de opstand in feite draaide om het behoud van de tradities tegenover de nieuwlichterij van de keizer. (8) Onderling gekrakeel maakte echter snel een eind aan de jonge republiek. Al in 1790 wisten de Oostenrijkers hun gezag te herstellen. In 1792 marcheerden de Frans-republikeinse troepen hier voor het eerst binnen. Enkele maanden later werden ze opnieuw verdreven maar in juni 1794 behaalden ze met de slag bij Fleurus een definitieve overwinning op de Oostenrijkers. En in oktober 1795 werden de Zuidelijke Nederlanden ingelijfd bij de Franse republiek.

Boerenkrijg5-300x434.jpgDe ware aard van deze "bevrijding" onder de leuze "vrijheid, gelijkheid, broederlijkheid" werd snel duidelijk. De "nieuwe departementen" werden systematisch geplunderd. Naast deze plunderingen - het Louvre dankt er een groot deel van haar collectie aan - waren er de belastingen; de vorderingen van graan, hooi, vee en paarden; de inkwartiering van Franse soldaten bij de bevolking; de invoering van assignaten, papieren geld dat na herhaaldelijke devaluaties niets meer waard was; de vervolging van priesters die de eed van trouw aan de republiek weigerden af te leggen; de invoering van de republikeinse kalender die de jaartelling startte op 22 september 1792 en de vloer aanveegde met de traditionele feestdagen (Van de 80 dagen waarop er niet diende gewerkt te worden tijdens het "Ancien Régime" bleven er na 1795 nog amper 40 over...).

De opstand smeulde. Vertegenwoordigers van de standen die voordien in de Staten zetelden, organiseerden zich en vroegen om steun bij de vijanden van hun vijanden: de Engelsen, de Pruisen, Oostenrijk en de kringen rond de prins van Oranje die in ballingschap leefde (ook Noord-Nederland was door de Fransen onder de voet gelopen).

Afspraken werden gemaakt. De eerste ladingen geweren, de eerste financiële steun sijpelden het land binnen. Hiervan getuigen onder meer de verslagen van Franse spionnen (9). Een (begin van?) landelijke organisatie lijkt dus wel erg waarschijnlijk. Net als de samenwerking met andere mogendheden. De Engelsen patrouilleerden voor de kust en voerden regelmatig raids uit. Enkele maanden voor de Boerenkrijg uitbrak werd Oostende gebombardeerd vanuit zee. En in Vlissingen was er een mislukte landing. Op 27 oktober zou de Boerenkrijg moeten beginnen. Maar dit plan werd uiteindelijk niet gevolgd, zodat we belanden bij de thesis dat de Boerenkrijg zoals hij gepland was, nooit heeft plaatsgevonden. Reden voor het voortijdig uitbreken van de Boerenkrijg was de invoering van de dienstplicht voor alle jongemannen tussen 20 en 25 jaar, gedurende 5 jaar in vredestijd en voor onbepaalde tijd in oorlogstijd. En het was oorlog. Er was geen houden meer aan. De plattelandsbevolking greep vervroegd naar de wapens.

BETEKENIS

OuterEnHeerd-3.jpgHet is ontegensprekelijk zo dat het romantische beeld van de Boerenkrijg zoals het in de 19de eeuw is ontstaan nood had aan bijsturing. De Boerenkrijg was géén avant-première van de strijd voor Vlaamse onafhankelijkheid en was ook, in tijd en plaats, geen unieke gebeurtenis. Eerder had in onze streken onder impuls van gelijklopende motieven de Brabantse Omwenteling plaatsgevonden. Elders in Europa waren er de opstanden in de Vendée en in Süd-Tirol; de Klöppelkrieg in Luxemburg, de Chouannerie, het gewapende verzet van Charles Jacquemin de Loupoigne in Vlaams én Waals Brabant, de opstand in het departement van de Ourthe...

De Boerenkrijg past op die manier in een brede tegenbeweging die overal in Europa op gang kwam tegen de rationalisering en 'modernisering' van de samenleving. Een beweging die niet de "nieuwe" en maakbare mens als norm nam maar de gemeenschap met haar geheel aan gebruiken en tradities. En dààrin ligt ongetwijfeld de betekenis van deze en andere opstanden.

Noten:

(1) Brigand betekende zoveel als rover en was het scheldwoord waar de Franse overheid zich van bediende om opstandelingen aan te duiden.

In de literatuur heeft men het steeds over de 'Boerenkrijg' maar in feite speelden boeren slechts een bescheiden rol in deze oorlog. Het aandeel van ambachtslieden, dagloners, handelaars was minstens even groot.

(2) 'De Boerenkrijg' van Conscience (1852), 'La guerre des paysans' van August Orts (187O) en 'La Belgique sous la domination Française' van Paul Verhaegen (1924) zijn geschreven vanuit een Belgisch-unitair standpunt.

(3) Tekenend voor de werkwijze van deze Gentse professor is dat de gemeenten Menen, Moorslede, Wervik worden opgenomen in de lijst van gemeenten "zonder actiebereidheid" maar in een ander hoofdstuk lezen we dat in Menen al begin oktober pamfletten circuleerden; dat in Moorslede een grote groep Brigands verzamelde; en dat er in Wervik incidenten plaatsvonden en er "een opstand dreigde". Melsele en Kruibeke worden omschreven als gemeente met een kleine actiebereidheid terwijl ze in een ander hoofdstuk omschreven staan als centra van de Boerenkrijg in het Waasland.

(4)sansculotten: diegenen die niet de aristocratische kniebroek maar de povere pantalon, of volksbroek droegen. Buiten Frankrijk werden er de (vaak pover aangeklede) Franse soldaten mee bedoeld.

(5)De vrijheidsboom, was een linde of berk, geplant in opdracht van de republikeinse overheid als symbool van hun vrijheidsstreven. Het omhakken van de vrijheidsboom en het openbreken van de kerkdeuren was in die zin een sterk symbolisch geladen actie.

(6) In de zomer van 1799 liep de Brabantse opstandelingenleider Charles Jacquemin de Loupoigne in een Franse hinderlaag en zijn hoofd werd in Brussel op een staak tentoongesteld. Gevangengenomen Brigands werden massaal gevonnist, steden en dorpen beboet. Daarmee leek er zogoed als een eind gekomen te zijn aan de de reeks van opstanden. In de loop van 1800, Napoleon had zich intussen meester gemaakt van de macht, werden de verbanningsbesluiten t.o.v. duizenden priesters ingetrokken en keerden de meeste gevangengenomen Brigands weer naar huis.

(7) Teeltwisseling veronderstelt de totale bebouwing van het akkerland. Bij het oudere drieslagstelsel werd 1/3 van het akkerland braak gelaten opdat het niet zou uitgeput raken. Bij teeltwisseling werd er gebruik gemaakt van zgn. grondverbeteraars als rapen en klavers wat ervoor zorgde dat het vee niet meer moest gedecimeerd worden voor de voedselarme winter.

(8) Pro Aris et Focis was de geheime organisatie van de "democratische" volgelingen van Jan-Frans Vonck. Of de strijdkreet "Voor Outer en Heerd" effectief gebruikt werd tijdens de Boerenkrijg wordt door verschillende historici betwist. Volgens hen zou de slogan door 19de eeuwse schrijvers aan de Boerenkrijgers zijn toegedicht.

(9) voor het terugvinden van deze aanwijzingen over de internationale draagwijdte van de Boerenkrijg verwijzen wij graag naar het Boerenkrijgkomitee Klein-Brabant dat ondermeer de tentoonstelling in St-Amands 'Het Verzet van 1798. Van Evolutie tot Revolutie, van Zelfbestuur tot Dictatuur en van Federalisme tot Centralisme' heeft gerealiseerd. In feite vormen zij de kern van alle evenementen die zich dit jaar rond de Boerenkrijg hebben afgespeeld. De tento is reeds afgelopen, maar waarschijnlijk zij er nog (zeer uitgebreide) catalogen beschikbaar, Aan alle geïnteresseerden warm aanbevolen. Daarvoor kan u contact opnemen met dhr. Aimé De Decker, tel. nr. 052/33.41.53

Bibliografie:

FRANCOIS, L., De Boerenkrijg. Twee eeuwen feiten en fictie, Leuven 1998.

SUYKENS, A., Franse Revolutie en Boerenkrijg in Klein-Brabant, Brussel, 1948.

VOORDE, H. VAN DE (e.a.), Bastille, Boerenkrijg en Tricolore. De Franse Revolutie in de Zuidelijke Nederlanden, Leuven, 1989.

vendredi, 01 novembre 2013

Ständig gegen den Westen protestierend

 

a002353449-001.jpg

Ständig gegen den Westen protestierend
Gemeinsamkeiten von »konservativen Revolutionären« in Deutschland und russischen Slawophilen

Alexander Krassnov

Ex: http://www.deutsche-stimme.de

Der Konservatismus in Deutschland und Rußland weist eine lange Geschichte der Zusammenarbeit und gemeinsamer Traditionen auf. Ungeachtet aller Unterschiede und fatalen Fehler in der Außenpolitik gab es viele Berührungspunkte rechter Denker beider Völker, z.B. der Kampf gegen den Marxismus und Liberalismus als der beiden wirklich extremistischen Strömungen in der Weltpolitik. Dieser Beitrag spürt dem Einfluß des russischen Dichters Fjodor Dostojewski auf die »konservativen Revolutionäre« Arthur Moeller van den Bruck und Oswald Spengler nach.


Zur Einführung sei ein Zitat aus dem zweiten Band von Oswald Spenglers »Der Untergang des Abendlandes« angeführt, das sich völlig mit den Positionen der russischen Slawophilen von damals und heute deckt. Wenn Spengler über Rußland sprach, stellte er stets Lew Tolstoi und Fjodor Dostojewski gegeneinander. Den ersten Dichterdenker hielt er für einen Repräsentanten des europäisierten Rußlands, den zweiten hingegen für einen Vertreter des uralten und zugleich kommenden Volksrußlands.


So formulierte Oswald Spengler: »Tolstoi ist das vergangene, Dostojewski ist das kommende Rußland. Tolstoi ist mit seinem ganzen Inneren mit dem Westen verbunden. (…) Sein mächtiger Haß redet gegen Europa, von dem er selbst sich nicht befreien kann. Er haßt es in sich, er haßt sich. Er wird damit der Vater des Bolschewismus. (…) Diesen Haß kennt Dostojewski nicht. Er hat alles Westliche mit einer ebenso leidenschaftlichen Liebe umfaßt. Seine Seele ist apokalyptisch, sehnsüchtig, verzweifelt, aber dieser Zukunft gewiß. (…)


Tolstoi ist durchaus ein großer Verstand, ,aufgeklärt‘ und ,sozial gesinnt‘. Alles, was er um sich sieht, nimmt die späte, großstädtische und westliche Form des Problems ein. Jener ist ein Ereignis jenseits der europäischen Zivilisation. Er steht in der Mitte zwischen Peter dem Großen und dem Bolschewismus. Die russische Erde haben sie alle nicht zu Gesicht bekommen. Sein (Tolstois) Haß gegen Besitz ist nationalökonomischer, sein Haß gegen die Gesellschaft sozial-ethischer Natur; sein Haß gegen den Staat ist eine politische Theorie. Daher seine gewaltige Wirkung auf den Westen. Er gehörte irgendwie zu Marx, Ibsen und Zola. Seine Werke sind nicht Evangelien, sondern späte geistige Literatur.


Dostojewski gehört zu niemand, wenn nicht zu den Aposteln des Urchristentums. Dostojewski lebt schon in der Wirklichkeit einer unmittelbar bevorstehenden religiösen Schöpfung. (…) Dostojewski ist ein Heiliger, Tolstoi ist nur Revolutionär. Von ihm allein, dem echten Nachfolger Peters, geht der Bolschewismus aus: nicht das Gegenteil, sondern die letzte Konsequenz des Petrinismus (…) Das Christentum Tolstois war ein Mißverständnis. Er sprach von Christus und meinte Marx. Dem Christentum Dostojewskis gehört das nächste Jahrtausend.«


Diese tiefgründige Gegenüberstellung von Tolstoi und Dostojewski wirft die Frage auf: Woher hat ein deutscher Denker, der ein so fulminantes Werk über den Untergang der abendländischen Zivilisation geschaffen hat, solch eine »slawophilen-übliche« Einstellung zu diesem Problem?


Eine Erklärung: Anfang des 20. Jahrhunderts wurden in Deutschland die Werke des Dichters Fjodor Dostojewski geistig entdeckt. Einen entscheidenden Beitrag dazu leistete der herausragende konservativ-revolutionäre Denker Arthur Moeller van den Bruck sowie das Ehepaar Mereschkowski. Dem Ideenkreis der konservativen Revolutionäre gehörte auch Oswald Spengler an. Nicht zuletzt unter dem Einfluß von Dostojewski schrieb Moeller van den Bruck sein berühmtestes Werk »Das dritte Reich« (1923), das zu einem Katechismus der Konservativen Revolution wurde.


Die Idee eines  dritten Reiches


Man sollte auch erwähnen, daß die Vision Moellers vom dritten Reich eine bestimmte Verbindung mit den Ideen des russischen Intellektuellen Dimitri Mereschkowski aufwies. Bereits im Jahre 1903 schuf Mereschkowski sein kritisches Werk »Lew Tolstoi und Dostojewski«. Neben einer Analyse des Schaffens und der ethischen Konzepte beider Denker entwickelte er dort seine Vorstellung einer neuen christlichen Besinnung. Das historische Christentum habe in der Religion zu stark das Geistige betont, was zu einer Vernachlässigung des Materiellen geführt habe. Seine Lehre bezeichnete Mereschkowski als »mystischen Materialismus« und plädierte für eine mystische Einigung des Geistigen und des Materiellen. Die Weltgeschichte faßte er dabei im Sinne Hegels als eine dialektische Dreiheit auf, wobei er das Heidentum für eine These und das Christentum für eine Antithese hielt. Anfang des 20. Jahrhunderts sollte es nach seiner Meinung zu einer Synthese kommen, deren Realisierung er als eine Art »Drittes Testament« verstand. Das Dritte Testament hielt Mereschkowski für ein neues Religionszeitalter im Leben der ganzen Menschheit.


In seinem Werk schuf Moeller van den Bruck eine ähnliche Triade im Bereich der Politik; er träumte von einem neuen politischen System ohne Linke und ohne Rechte, in dem die Idee des Reiches und die Idee des Menschen verknüpft wären.


In diesem Zusammenhang ist zu betonen, daß die konservativen Revolutionäre in Deutschland eine allgemein positive Einstellung zu Rußland hatten. Ihre russenfreundlichen Aussagen zeugen davon, daß sie im geistigen Leben Rußlands das erraten zu haben glaubten, was wohl keine Umsetzung ihrer Ideale in der Gegenwart verkörperte, aber eine Umsetzung in der Zukunft versprach. Rußlandfreundliche Stimmungen waren in den entsprechenden Denkzirkeln weitverbreitet und beständig, und es läßt sich dies für eines der Hauptmerkmale des revolutionären Konservatismus in Deutschland halten.


Anfang des 20. Jahrhunderts nahm der kulturelle Dialog einen besonderen Platz im deutsch-russischen Verhältnis ein. Es war eine Zeit gewaltiger Wandlungen in allen Bereichen des menschlichen Lebens und der Umwertung der Werte in beiden Richtungen. Deshalb ist es kein Zufall, daß viele Vertreter der Konservativen Revolution – neben Moeller van den Bruck und Oswald Spengler auch der frühe Thomas Mann – in ihrem Schaffen einen großen Einfluß russischer Kultur und Literatur, in erster Linie von Dostojewski, verraten. Dank Fjodor Dostojewski kehrten nach Deutschland die Ideen zurück, die einst die Slawophilen von den deutschen Romantikern geerbt hatten. Viele deutsche Konservative, wie z.B. Thomas Mann, haben die antiwestlichen Ideen Dostojewskis ausgedeutet und von Deutschland als von einem Staat geschrieben, der ständig gegen den Westen und dessen Nihilismus protestiert.


Die Publizistik Moellers war von seinem kulturellen und politischen Interesse an den östlichen Nachbarstaaten geprägt. Dieses Interesse hatte mehrere Wurzeln, darunter die außenpolitischen Traditionen Preußens im 19. Jahrhundert sowie die Entgegensetzung der lebendigen Kultur des Ostens und der sterbenden Zivilisation des Westens in den Werken deutscher Kulturphilosophen.


Wenn Moeller über seine Faszination von Dostojewski sprach, redete er ständig über die Jugend des Russentums, das die Kontakte mit seinen Ursprüngen noch nicht verloren habe und voll von schöpferischen Kräften sei. Moellers Propagierung des russischen Genies führte dazu, daß in Deutschland eine Art Dostojewski-Kult entstand. Er beließ es aber nicht bei der Herausgabe der Werke des Russen, sondern interpretierte sie samt der geheimnisvollen russischen Seele. Dies war naheliegend, da Dostojewskis Werke um scharfe Fragen der Freiheit und des Willens, der Gewalt und des Rechtes, des Guten und des Bösen in enger Verbindung mit dem russischen Inneren kreisten. In der Tiefe der russischen Seele erblickte der konservative Revolutionär Spuren einer ständigen Konfrontation mit dem westlichen Einfluß. Russische Literatur widerspiegelte für ihn alles Ursprüngliche, Reingehaltene und Fremde im Gegensatz zur entfremdeten und sterilen Lebenswelt des Westens.


Der Verfasser des »Dritten Reiches« sah in Dostojewskis Werken »die Beschreibung des Lebens, das wir gestern gelebt haben (…) Die von Dostojewski dargestellten Leute sind russische Leute. Aber wir erraten an ihnen vieles von uns selbst.« In diesem Sinne war der russische Schriftsteller ein echter Lehrer für den deutschen konservativen Denker. Moeller van den Bruck, der geistige Leitstern des legendären Juni-Klubs, lernte von dem Russen in erster Linie, an die große Mission seines Volkes zu glauben und dieses als größten Wert zu betrachten.


Absage an westliche »Werte«


Besonders anziehend wirkte an Dostojewski stets seine Ablehnung hohler westlicher »Werte«. Auch Moeller war von der Überzeugung durchdrungen, im Westen sterbe der Volksgeist und das organische Ganze des Volkes. Er behauptete, daß es den Deutschen an russischer Geistigkeit fehle, die Deutschland als Antithese gegen den Westen brauche. Aus Dostojewskis Erbe speiste sich auch die Wahrnehmung Deutschlands als eines stets gegen den Westen protestierenden Landes sowie die Idee der jungen Völker, welche die alten Nationen Europas herausfordern. Die Vorstellung der Slawophilen von der Jugend slawischer Völker verwandelte sich in Moellers Publizistik in die der Jugend des deutschen Volkes. Dabei kritisierte dieser wie die Slawophilen die westlichen »Werte« von Rationalismus, Individualismus und Materialismus. Solche Gegenüberstellung war eine Art kulturkritische Abstraktion des Gegensatzes von Westen und Osten.


Es sei auch erwähnt, daß der Weg Dostojewskis zu den Herzen deutscher Leser gar nicht leicht war. Das Interesse erreichte seinen Höhepunkt, als die Prozesse der gesellschaftlichen Modernisierung in Deutschland immer gewaltiger und schneller wurden. Eine ganze Generation deutscher Neuromantiker nahm den Mystiker aus dem Osten begeistert auf. Seitdem war das Thema Rußland immer häufiger in Kreisen deutscher Intellektueller zu finden. Stephan Zweig sagte zum Beispiel: »Nur über einen deutschen Dostojewski kann die Welt zum russischen Original kommen.« Viele deutsche Schriftsteller – genannt seien nur Friedrich Nietzsche, Rainer Maria Rilke, Thomas Mann, Hermann Hesse – bezeichneten die Werke Dostojewskis als die gewaltigste Erfahrung, die ihr Schaffen geprägt habe. Der Kulturphilosoph Oswald Spengler begann sogar unter dem Einfluß seiner Romane die russische Sprache zu lernen.


Nach dem Ersten Weltkrieg wurden die Gedanken des Russen über die Rettung Europas durch junge Völker und über Deutschland als ständig gegen den Westen protestierendes Land zu einem der Hauptthemen konservativer deutscher Denker.


Der Einfluß von Dostojewskis russischem Messianismus im Hinblick auf das europäisierte Rußland läßt sich in den Werken Oswald Spenglers und des Panslawisten Nikolaj Danilewski ausmachen. Spenglers Gedanken zu der Pseudomorphose Rußlands unter Peter dem Großen ähneln der Kritik Danilewskis am »Europawahnsinn«, die er in seinem Werk »Rußland und Europa« an die Adresse der russischen Oberschicht richtete. Spengler benannte das Problem so: »Eine zweite Pseudomorphose liegt heute vor unseren Augen: das petrinische Rußland. (…) Auf diese Moskowiterzeit der großen Bojarengeschlechter und Patriarchen, in der beständig eine altrussische Partei gegen die Freunde westlicher Kultur kämpfte, folgt mit der Gründung von Petersburg (1703) die Pseudomorphose, welche die primitive russische Seele erst in die fremden Formen des hohen Barock, dann der Aufklärung, dann des 19. Jahrhunderts zwang. Peter der Große ist das Verhängnis des Russentums geworden. (…)


Der primitive Zarismus von Moskau ist die einzige Form, welche noch heute dem Russentum gemäß ist, aber er ist in Petersburg in die dynastische Form Westeuropas umgefälscht worden. Der Zug nach dem heiligen Süden, nach Byzanz und Jerusalem, der tief in allen rechtgläubigen Seelen lag, wurde in eine weltmännische Diplomatie mit dem Blick nach Westen verwandelt. (…) Ein Volkstum (dessen Bestimmung es war, noch auf Generationen hin geschichtslos zu leben,) wurde in eine künstliche und unechte Geschichte gezwängt, deren Geist vom Urrussentum gar nicht begriffen werden konnte.«


In der Schrift »Preußentum und Sozialismus« ging Spengler – ganz im Sinne der Slawophilen – mit dem »Europawahnsinn« der russischen Oberschicht ins Gericht: »Dies kindlich dumpfe und ahnungsschwere Russentum ist nun von Europa aus durch die aufgezwungenen Formen einer bereits männlich vollendeten, fremden und herrischen Kultur gequält, verstört, verwundet und vergiftet worden. Städte von unserer Art, mit dem Anspruch unserer geistigen Haltung, wurden in das Fleisch dieses Volkstums gebohrt, überreife Denkwesen, Lebensansichten, Staatsideen, Wissenschaften dem unentwickelten Bewußtsein eingeimpft.


Um 1700 drängt Peter der Große dem Volk den politischen Barockstil, Kabinettdiplomatie, Hausmachtpolitik, Verwaltung und Heer nach westlichem Muster auf; um 1800 kommen die diesen Menschen ganz unverständlich englischen Ideen in der Fassung französischer Schriftsteller herüber, um die Köpfe der dünnen Oberschicht zu verwirren; noch vor 1900 führen die Büchernarren der russischen Intelligenz den Marxismus, ein äußerst kompliziertes Produkt westeuropäischer Dialektik, ein, von dessen Hintergründen sie nicht den geringsten Begriff haben. Peter der Große hat das echt russische Zarentum zu einer Großmacht im westlichen Staatssystem umgeformt und damit seine natürliche Entwicklung verdorben, und die Intelligenz, selbst ein Stück des in diesen fremdartigen Städten verdorbenen echt russischen Geistes, verzerrte das primitive Denken des Landes mit seiner dunklen Sehnsucht nach eigenen, in ferner Zukunft liegenden Gestaltungen wie dem Gemeinbesitz von Grund und Boden zu kindischen und leeren Theorien im Geschmack französischer Berufsrevolutionäre.


Petrinismus und Bolschewismus haben gleich sinnlos und verhängnisvoll mißverstandene Schöpfungen des Westens, wie den Hof von Versailles und die Kommune von Paris, dank der unendlichen russischen Demut und Opferfreude in starke Wirklichkeiten umgesetzt.«


Auch in »Preußentum und Sozialismus« wurde der abendländischen Welt die russische entgegengesetzt, und damit die kommende, noch schwer begreifbare Kultur des Ostens positiv von dem in die bloße Zivilisation absinkenden Westen abgesetzt: »Ich habe bis jetzt von Rußland geschwiegen; mit Absicht, denn hier trennen sich nicht zwei Völker, sondern zwei Welten. Die Russen sind überhaupt kein Volk wie das deutsche und englische, sie enthalten die Möglichkeiten vieler Völker der Zukunft in sich, wie die Germanen der Karolingerzeit. Das Russentum ist das Versprechen einer kommenden Kultur, während die Abendschatten über dem Westen länger und länger werden. Die Scheidung zwischen dem russischen und abendländischen Geist kann nicht scharf genug vollzogen werden. Mag der seelische und also der religiöse, politische, wirtschaftliche Gegensatz zwischen Engländern, Deutschen, Amerikanern, Franzosen noch so tief sein, im Vergleich zum Russentum rücken sie sofort zu einer geschlossenen Welt zusammen.«


Spengler war sich sicher, daß das untergehende Abendland durch ein junges Rußland abgelöst werde, obgleich seine mentalen und geographischen Umrisse für ihn noch unklar waren. Er glaubte fest daran, daß europäische Institutionen wie Kapitalismus und Bolschewismus bald an der russischen Kultur zugrundegehen würden.


Diese Hoffnung auf Rettung des je Eigenen gegen die Nivellierungsmacht der westlichen Zivilisation verband die konservativen Revolutionäre in Deutschland mit den Slawophilen in Rußland – eine Ideenverbindung, die heute nötiger denn je ist, um die westlichen Demokraturen geschichtlich entsorgen zu können. Denn wie formulierte der Nationalbolschewist Ernst Niekisch in seinem Beitrag »Revolutionäre Politik« (1926) zeitlos: »Westlerisch sein heißt: mit der Phrase der Freiheit auf Betrug ausgehen, mit dem Bekenntnis zur Menschlichkeit Verbrechen in die Wege leiten, mit dem Aufruf zur Völkerversöhnung Völker zugrunderichten.«

Alexander Krassnov

Alain Soral dédicace chez Facta

00:05 Publié dans Evénement | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : alain soral, événement, paris, france | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

jeudi, 31 octobre 2013

Espionnage américain : que pourrait faire l'Europe?

espion.jpg

Espionnage américain : que pourrait faire l'Europe?

par Jean-Paul Baquiast et Christophe Jacquemin

Ex: http://www.dedefensa.org

Le premier acte du conseil des 28 Etats européens, réuni le 25 octobre à Bruxelles, ne contrariera en rien nos « alliés » américains. Il en est résulté une modeste « initiative franco-allemande » pour discuter avec ceux-ci d'un « cadre de coopération » en matière de renseignement. Ce code de bonne conduite devra être finalisé « d'ici la fin de l'année » avec Washington, selon le calendrier avancé par François Hollande.

Précédemment, les quelques chefs d'Etat qui avaient manifesté leur inquiétude auprès d'Obama, quant aux écoutes qu'ils subissaient à haute dose, se sont fait répondre que tout le monde en fait autant, et que de plus la lutte commune contre le terrorisme justifie ces opérations. Même si ces opérations, quand elles visent l'Europe, s'exercent surtout à l'encontre des postes diplomatiques ou des industriels européens susceptible d'entrer en concurrence avec leurs homologues américains.

Sur leur lancée, les chefs d'Etat se sont refusés à suspendre les discussions, qui viennent de commencer en juillet, pour un grand marché transatlantique, bien que celui-ci comporte des transferts de données personnelles. François Hollande fait mine de refuser cette dernière clause. Mais sans doute ignore-t-il que ces données sont, dans le monde des big data, une véritable mine d'or. Non seulement pour la NSA et autres CIA, mais pour les géants du web, tous américains. Aucun n'acceptera les moindres restrictions.

Certains commentateurs s'étonnent de cette docilité des Européens. C'est qu'ils n'avaient pas pris jusqu'ici la pleine mesure de la domination qu'exerce l'Amérique sur l'Europe, tant au plan économique que politique et même culturel. Cette domination s'exprime avec une parfaite bonne conscience, ou si l'on préfère, le plus parfait cynisme. Les Américains connaissent depuis longtemps et exploitent la faiblesse des Européens dans le monde des technologies de communication. De plus, bien renseignés par les Britanniques qui sont leurs représentants les plus efficace au sein de l'Union, ils ont encouragé les complicités diverses qui, au sein de l'Union, font des forces vives de celle-ci leurs alliées implicites, sinon leurs complices consentants.

Le scandale est devenu tel cependant que beaucoup d'observateurs, des deux côtés de l'Atlantique, se demandent si l'Europe va enfin se décider à réagir, et de quelles façons elle pourra le faire. Notre position sur cette question a été souvent exposée. Elle est très pessimiste. L'Europe ne voudra pas se libérer de l'emprise américaine. Si certains en son sein décident de le faire, ils n'en auront pas les moyens.

L'Europe ne voudra pas se libérer de l'emprise américaine.

* Le temps n'est plus où en France, le général de Gaulle avait essayé d'assurer seul une partie de la défense de la France contre non seulement l'impérialisme soviétique mais contre l'impérialisme américain. Depuis plus de trente ans, les gouvernements européens ont refusé les dépenses nécessaires à une défense européenne indépendante des Etats-Unis, y compris sur le plan économique. Il en résulte que les moyens militaires dont dispose l'Europe en propre sont sans doute 30 à 50 fois inférieurs, à ceux des Etats-Unis, Ceci dans un monde mondialisé, en grande partie sous la pression des intérêts militaires et civiles américains, où le retard ne se rattrape pas.

Il en est de même dans le domaine devenu sensible des technologies de l'information, sous leurs diverses formes. Sauf exceptions marginales, les Européens achètent tout ce dont ils croient avoir besoin à des industriels américains, des outils spatiaux jusqu'aux services en ligne, en passant par les composants et les réseaux. Quand ils ne le font pas directement, ils le font sous un contrôle étroit de l' « allié » américain. Ceci vient d'être rappelé à propos de Alcatel-Lucent. Dans ces domaines, la disproportion entre les moyens propres des Européens et ceux des Etats-Unis est sans doute de 1 à 1000.

* Il s'ensuit que les gouvernements, ne pouvant plus s'opposer à l'Amérique, ont choisi la voie de la coopération. Mais il ne s'agit pas d'une coopération sur un plan égalitaire. Il s'agit d'une coopération où le faible se contente des miettes que veut bien abandonner le fort, en échange d'une soumission presque totale. La situation, dans le domaine du renseignement, vient d'être mise en évidence (aux yeux de ceux qui l'ignoraient encore). On découvre aujourd'hui (grâce en partie aux bons soins des Russes) que les services de renseignement allemand et français coopèrent très largement avec leurs homologues américains, notamment la NSA, au moment où les chefs d'Etat allemand et français manifestent une indignation de façade.

Or si l'Europe devait prendre son indépendance en matière diplomatique ou de politique industrielle, en s'affranchissant de l'espionnage américain, elle ne pourrait le faire qu'avec un engagement plein et continu des Etats et de leurs services secrets. Ceci, même, dans le monde de l'internet prétendu ouvert aux initiatives des citoyens, ne pourrait se faire sans l'appui de gouvernements forts et volontaristes.

* Plus en profondeur, les Européens se trouvent très bien de vivre sous l'influence américaine. Pourquoi dans ce cas chercheraient-ils à échapper aux différents espionnages traduisant concrètement cette influence? Au plan diplomatique, en ce qui concerne la Russie, la plupart des Européens continuent à craindre une résurgence d'un « ogre néo-soviétique » en partie inventé pour les besoins de la cause par les milliers d'espions américains opérant en Russie sous le couvert d'ONG.

Par ailleurs, qui en Europe souhaiterait s'allier, dans une lutte pour la liberté des réseaux, avec les Chinois, même si ceux-ci semblent de plus en plus tentés par une certaine libéralisation. Ceci aurait pu se faire, sur un plan de puissance à puissance, au sein d'une nouvelle force géostratégique unissant les Européens et les pays du BRICS, sous le nom d'EuroBRICS. Mais, du fait des influences atlantistes, une telle perspective demeure encore largement illusoire, du moins dans l'esprit des Européens.

Le danger du terrorisme arabo-islamique, constamment évoqué par la NSA et le Département de la défense aux Etats-Unis même, l'est aussi en Europe. On constate effectivement, dans le monde entier, le développement d'une guerre de plus en plus ouverte entre les démocraties libérales et des intérêts politiques et religieux que l'on qualifiera d'islamistes par commodité. Mais en y regardant bien, on constate que ce danger réel a été créé en grande partie par les manœuvres tortueuses de la diplomatie et du renseignement américain, pour se donner des arguments afin de renforcer leur emprise sur le pétrole et les voies de communication du Moyen-Orient, tout en éloignant la Russie. Ceci depuis le temps où ils avaient créé Bin Laden, jusqu'à nos jours où ils dispensent un soutien irresponsable aux pétro-monarchies du Golfe (soutien activement relayé il est vrai par les Européens.

* Quand aux citoyens européens, notamment au niveau des jeunes générations, nul ne ressent le moindre désir d'autonomie par rapport, non seulement à la culture américaine en général, mais aux « services » rendus par les géants du web, tous américains. Certains de ces services sont commodes. Qui veut aujourd'hui acheter un livre dans une librairie de quartier, alors qu'il peut se le procurer quasi en temps réel auprès d'une multinationale américaine bien connue? Qui renonce aux propositions de la publicité en ligne, même en sachant que cette publicité est en train de construire un consommateur entièrement conditionné par les intérêts économiques américains ou leurs représentants en Europe. Et si ces géants du web conservent pendant un siècle les informations personnelles ingénument confiées par les citoyens européens, qui s'en souciera vraiment parmi ces derniers? Chacun croit garder son autonomie. Au pire, il se dit que dans un siècle, il sera mort.

Absence de moyens des Européens

Cette constatation découle des considérations qui précèdent relatives au retard technologique pris par les Européens.

* Il s'agit d'abord du retard des moyens mis au service de l'espionnage et des écoutes, des contre-mesures et à terme des cyber-guerres qui se préparent. L'énorme avance prise par l'Amérique la met pour de longues années à l'abri de toute concurrence sérieuse, même provenant de grands pays comme la Chine décidés à revenir au niveau mondial. Aussi l'argument constamment utilisé par Barack Obama, ses représentants et les ambassadeurs américains actuellement convoqués par les pays visés, ne tient pas: « Tout le monde en fait autant ». Tout le monde en fait peut-être autant, mais la disproportion des moyens déployés enlève tout poids à cet argument. Là où un pays européen consacre un budget de quelques dizaines, voire au mieux quelques centaines de millions à ses services secrets, le budget annuel de la NSA avoisine les 80 milliards de dollars, sans mentionner celui consacré par le Département de la Défense et ses autres agences. Il en est de même dans le domaine du renseignement spatial.

* Cette disproportion ne devrait pas cependant empêcher les pays espionnés, en premier lieu le Brésil, de mettre en place des câbles aussi étanches que possible, ou utiliser des matériels et des logiciels spécialement conçus (par eux et non par la Silicon Valley) pour échapper aux écoutes. De même les règles de l'internet, actuellement presque exclusivement définies par des représentants américains, devraient pouvoir être revues. Différents articles circulent actuellement et présentent des listes de tels dispositifs. Citons par exemple, du Washington Post, une proposition. On remarquera cependant qu'il s'agit d'un document américain. Est-ce beaucoup s'avancer en supposant que la NSA est depuis longtemps informée, sinon à la source, de certaines de ces initiatives?

* Mais les pays espionnés ne peuvent-ils pas espérer que ce que l'on appelle parfois le Système, autrement dit le système de domination mondiale mis en place par la conjonction des intérêts militaires, politiques et industriels américains, puisse prochainement s'effondrer. Divers commentateurs suivent avec beaucoup d'attention les signes d'un tel effondrement. Il pourrait provenir des excès d'un hubris perdant conscience de ses limites, ou des erreurs à répétition commises par des responsables « humains, trop humains ».

Nous ne le pensons pas pour ce qui nous concerne. D'une part, le cœur, peu visible mais bien ancré du Système, échappera à l'auto-destruction. Au contraire, il se renforcera à l'échelle des attaques qu'il subira. D'autre part une grande partie des décisions stratégiques découlant des informations recueillies par le Système sur le reste du monde seront progressivement prises par des systèmes anonymes fonctionnant sur le mode des robots autonomes. C'est déjà le cas en ce qui concerne le monde opaque du « trading à haute fréquence » ou d'ordres d'attaque intéressant le domaine confidentiel des drones autonomes. Ce sera bientôt le cas partout. Il suffira que le Système conserve un petit noyau de décideurs ayant tout les leviers en mains pour échapper aux offensives internes et externes menées contre lui. Les Edward Snowden ne vont probablement pas se multiplier. En tous cas, leur efficacité, l'effet de surprise passé, diminuera très vite.

Faut-il conclure de ce qui précède que les Européens subiront pendant des siècles encore la domination américaine? Pourquoi pas? Cela s'est déjà vu dans l'histoire. En tous cas, pour y échapper, il faudrait des mobilisations générales, dans le cadre de nouvelles alliances internationales. On ne voit pas venir de telles alliances pour le moment, même au sein de l'euroBRICS. Mais sait-on jamais?

 

Jean-Paul Baquiast et Christophe Jacquemin

La Kriegsmarine et l'Opération Barbarossa

Kriegsmarine-battleship-KMS-Gneisenau-Sea-trials-08.jpg

La Kriegsmarine et l'Opération Barbarossa

Ingo Lachnit

En conquérant toute la côte atlantique de la France en juin 1940, les armées de Hitler ont dégagé le Reich de l'encerclement maritime que lui avaient imposé les Britanniques et les Français. La victoire allemande à l'Ouest ouvre au Reich les portes du large. A partir de ce moment, la Kriegsmarine ébauche des projets globaux et non plus purement défensifs, limités à la Mer du Nord et à la Baltique. C'est l'Amiral Carls, Commandant en chef du Groupe Est, qui fut le premier à fournir une étude globale, définissant les objectifs de la guerre sur mer (1). Son mémorandum reflète parfaitement l'état d'esprit des chefs de la marine allemande, après que les côtes atlantiques de la France soient tombées aux mains des Allemands.

L'Allemagne: une puissance d'ordre à l'échelon mondial

Carls, dans son mémorandum, parlait un langage clair. Sans circonlocutions, il déclare que l'Allemagne, désormais, doit devenir une puissance mondiale. Il ne craint pas de mener la guerre “contre la moitié ou les deux tiers du monde”. Déjà en 1938, il avait dit que l'Allemagne pouvait envisager de mener un tel combat avec succès. En déclarant que l'Allemagne devait devenir une puissance mondiale, Carls imposait à la marine une ligne de conduite, qui impliquait, à son tour, plusieurs objectifs de guerre: après avoir récupéré les anciennes provinces et territoires du Reich à l'Ouest et réclamé le retour des anciennes colonies africaines, Carls préconisait la constitution d'une confédération des Etats d'Europe du Nord sous l'égide allemande, regroupant, outre le Reich, une Grande-Flandre, les Pays-Bas, le Danemark et la Norvège, y compris leurs possessions d'outre-mer. Les possessions qu'apporteraient le Danemark et la Norvège dans la nouvelle communauté d'Etats (Spitzberg, Groenland, Islande, Iles Féroé), garantirait la domination maritime du Reich dans l'Atlantique-Nord, qui serait encore consolidée par l'annexion des Iles anglo-normandes et des Shetlands  —la marine considéraient encore l'annexion de ce petit archipel au Nord de l'Ecosse comme un but de guerre en 1944. Cette position fortifiée dans le Nord aurait permis à l'Allemagne d'avoir un accès libre aux zones centrales de l'Atlantique, grâce à l'inclusion dans la sphère d'influence du Reich d'une bande littorale ouest-française. Les ports de cette bande littorale auraient servi de tremplin vers le sud, permettant du même coup de se rendre maîtres de la côte ouest-africaine. Sur cette côte, l'Allemagne devra s'assurer quelques territoires, de façon à s'aménager des points d'appui. Ensuite, l'Union Sud-Africaine, y compris la Rhodésie du Sud, deviendraient des Etats indépendants et se détacheraient de l'Empire britannique, s'empareraient de Madagascar et des îles avoisinantes, de façon a créer une “chaîne” de points d'appui qui s'étendrait de l'Océan Indien au Pacifique, en passant pas les colonies néerlandaises (Indonésie), tombées sous influence allemande grâce à l'inclusion de la Hollande dans la communauté des Etats du Nord de l'Europe. Cette “chaîne” aboutirait au Bornéo septentrional qui serait, lui aussi, détaché de l'Empire et passerait sous domination allemande.

Cette esquisse des ambitions allemandes, élaborée par Carls, correspondait bel et bien à l'état d'esprit qui régnait dans les états-majors de la marine. Seuls quelques officiers ont émis des revendications plus modérées, mais qui ne portaient que sur les détails, non sur l'essentiel. Ainsi, le Chef du 1er Skl., le Contre-Amiral Fricke, en formulant une ligne de conduite légèrement différente, estimait que l'Allemagne devait en priorité s'affirmer comme puissance européenne dominante. Fricke suggérait de ne pas mettre la charrue avant les bœufs et de ne pas aller trop vite en besogne en voulant faire de l'Allemagne une puissance mondiale. Le Commandant-en-chef de la Marine, le Grand-Amiral Raeder, pour sa part, refusait de s'emballer pour les projets trop audacieux et ne voulait pas perdre de vue l'essentiel: les objectifs à court terme; l'acquisition de points d'appui insulaires et continentaux le long des côtes africaines ne serait alors qu'un objectif à moyen terme. Dans les détails, les buts déclarés variaient d'une personnalité à l'autre. Mais il n'en demeure pas moins vrai que tous les officiers de l'état-major de la marine de guerre étaient d'accord sur un point: l'Allemagne était devenu une puissance d'ordre et devait s'affirmer en tant que telle sur toute la surface du globe. Aucun officier de marine ne mettait en doute la nécessité de faire du Reich la puissance hégémonique en Europe, la puissance organisatrice d'un “grand espace” économique européen, avec son complément colonial africain. Cette mission devait forcément donner à l'Allemagne une vocation planétaire. Toutes les ébauches de la marine impliquaient une Weltpolitik  de grande envergure. Sans la moindre hésitation, les officiers de la marine prévoyaient de bétonner et de consolider les positions du “Reich Grand-Allemand” sur le plan géostratégique, de même que ses intérêts outre-mer, de “façon définitive, sur le fond, pour tous les temps”.

L'objectif à court terme: devenir une puissance coloniale

Les exigences coloniales de la marine allemande, de même que sa volonté d'acquérir des points d'appui, vise en premier lieu à asseoir solidement les revendications allemandes. Carls souhaitait un désarmement de l'Angleterre et de la France et pensait qu'il ne fallait réaccorder l'égalité en droit à ces deux puissances que lorsqu'elles auraient accepté l'ordre nouveau imposé par le Reich à l'Europe. Leurs empires coloniaux devront être réduit en dimensions, afin qu'ils soient égaux en taille aux possessions allemandes d'outre-mer, mais ne devront en aucun cas être détruits. Les possessions coloniales de la Grande-Bretagne, de la France et de l'Italie demeureront suffisamment vastes, après que l'Allemagne ait accedé au statut de grande puissance mondiale, “pour leur assurer l'existence et assez de puissance”, toutefois “dans les proportions que nous aurons souhaitées”. L'objectif de devenir “puissance mondiale” ne pourra se concrétiser que dans la mesure où l'Allemagne se montrera capable d'assurer l'équilibre entre les autres puissances. Carls parle en fait d'“auto-limitation” (Selbstbeschränkung)  quand il parle du Reich; il ne perçoit pas celui-ci comme une puissance qui règnerait seule sur le destin de la planète, mais qui serait davantage “régulatrice” de la politique internationale. La notion de “puissance mondiale” (Weltmacht) n'est donc pas synonyme, dans la pensée de Carls”, de “domination (non partagée) sur le monde” (Weltherrschaft).  Les objectifs coloniaux énoncés dans le mémorandum ont une connotation nettement restauratrice. Ils se contentent, pour l'essentiel, de rétablir les colonies allemands d'avant 1918, en leur adjoignant quelques possessions françaises et la Rhodésie, qui souderait ses colonies entre elles.

Carls renonce à toute acquisition en Méditerranée et à toute intrusion dans les sphères d'infuence américaine et japonaise. Il tient compte du fait “que le Führer ne veut pas s'installer en Méditerranée, ni s'immiscer dans les sphères d'influence américaine et japonaise”. Carls savait intuitivement quel état d'esprit régnait dans le quartier général du Führer et devinait ce que ce dernier voulait entendre. Il élaborait ses plans non pas dans les limites de son propre domaine mais tenait davantage compte des intentions du commandement suprême que Raeder quand il rédigeait ses rapports. Raeder, lui, n'élaborait de projet que sur base de son domaine spécifique et tentait, envers et contre tout, de l'imposer au commandement suprême.

Ce qui frappe, c'est la mansuétude de Carls à l'égard de l'ennemi principal du Reich, la Grande-Bretagne. Celle-ci, dans la mesure du possible  —c'est-à-dire si elle ne s'oppose pas au Reich allemand de manière irrémédiable—  conserverait son Empire et demeurerait une puissance thalassocratique. Carls exprime de la sorte, outre une admiration pour l'œuvre coloniale des Britanniques, le point de vue de la marine: l'Empire britannique a eu une fonction stabilisante dans l'équilibre international. Sa chute favoriserait le Japon, puissance qui cherche l'hégémonie à l'échelle du globe, et qui se révèlerait, dans un avenir plus lointain, un nouvel adversaire du Reich allemand.

La Marine: facteur de décision dans la guerre

ship5.jpgLa marine de guerre allemande s'est toujours définie dans et par sa lutte contre la flotte britannique. Dans cette optique, l'Allemagne, en s'opposant à l'Angleterre, est logiquement, par la volonté du destin, obligée de devenir une puissance thalassocratique à l'échelle du globe. Cette vision des choses est solidement ancrée dans la marine depuis Tirpitz. Le corps des officiers de marine n'a jamais cessé de penser et d'agir dans le cadre de ces idées claires et compactes; tous ses objectifs s'inscrivent dans cette logique implaccable, même après 1918, année de la défaite que n'admettent pas plus les officiers de marine que ceux de l'armée de terre. Dans son Dienstschrift IX  (Note de service IX), rédigé en 1894, Tirpitz avait conçu le rôle des armées de terre  —protéger l'Etat contre l'arbitraire de l'ennemi—  comme inférieur à celui, sublime, de la marine: emporter la décision en cas de guerre. Cet état d'esprit témoigne de la cohésion morale, élitaire et sélective, du corps des officiers de marine allemands; ces hommes étaient convaincus de l'importance de leur arme et cette conviction, largement partagée, s'est perpétuée et renforcée après 1918 et l'intermède de Weimar. Le vocabulaire lui-même en témoigne: la marine est kriegsentscheidend,  elle force la décision, fait la décision, en cas de guerre. Tel est le noyau de la pensée stratégique et opérative de la marine. Ce qui explique la franchise avec laquelle la marine élabore ses plans pour faire de l'Allemagne une Weltmacht. Elle n'est pas victime de l'euphorie qui règne dans le Reich après la victoire sur la France mais s'inscrit plus simplement, plus naturellement, dans la tradition forgée à la fin du XIXième siècle par Tirpitz, tout en espérant, avec les nouveaux acquis territoriaux, rencontrer plus de succès.

Le problème de l'Angleterre

Comme les opérations contre la “forteresse insulaire” britannique s'avèrent lentes et n'emportent aucun succès, et comme l'invasion de l'Angleterre est reportée à l'année 1941, les esprits, en Allemagne, se concentrent sur le “problème anglais”. Si l'Angleterre ne peut être vaincue sur son île métropolitaine, il faudra trouver des points faibles dans l'Empire et y remporter des victoires décisives qui obligeront le gouvernement britannique à composer et à accepter la paix allemande. Cette question, essentielle, préoccupait bien entendu tous les militaires allemands, les chefs de la marine comme l'état-major de la Wehrmacht. Pour résoudre le problème anglais, il y avait plusieurs possibilités:

1) Une guerre contre les sources d'approvisionnement qui s'inscrirait dans le cadre d'une guerre économique de plus vaste envergure.

2) Des attaques ponctuelles contre les points névralgiques de l'Empire, de façon à ce qu'il s'effondre. A portée des Allemands, par ordre d'importance, nous avions, à l'époque: Suez, Gibraltar et Malte.

3) L'acquisition de positions stratégiques navales en Afrique du Nord et de l'Ouest, afin de donner aux opérations dans l'Atlantique l'ampleur souhaitée.

4) Intensifier la guerre des croiseurs. C'est l'idée motrice de Raeder.

La question qui se pose alors: où les chefs de la marine allemande doivent-ils porter le poids de leurs armes, en concentrant toutes leurs forces? Afin d'obtenir l'effet escompté le plus rapidement possible, avec les meilleures chances de succès?

Le tonnage anglais se concentrait dans l'Atlantique. C'est par l'Atlantique et la Méditerranée que passent les axes vitaux qui relient la Grande-Bretagne à ses sources d'énergie venues d'outre-mer. Fragmenter ces axes était la mission des sous-marins. Les chefs de la marine considéraient donc que la guerre anti-tonnage dans l'Atlantique était prioritaire. Mais le commandant en chef de la Marine tenait à la guerre traditionnelle des croiseurs, qu'il voulait mener en deux endroits: dans l'Atlantique et en Méditerranée (sur ce théâtre en guise de diversion). Mais comme les plus lourdes unités allemandes se trouvent dans l'Atlantique, elles ne peuvent être déployées en Méditerranée. Convaincu du grand impact que pourrait avoir sa stratégie de diversion  —laquelle ne pouvait que s'amplifier dès le début de la guerre du Pacifique et prendre des proportions globales—  Raeder envoya ses sous-marins en Méditerranée. Il s'est heurté à une critique sévère des sous-mariniers, hostiles à cette stratégie de diversion. Pour Dönitz, la Méditerranée n'avait qu'une importance secondaire. Selon Dönitz, toutes les mesures qui visent à diviser et disperser les forces ennemies sont erronées, car elles ne peuvent que contribuer à prélever des forces allemandes hors de la zone principale des combats, qui est l'Atlantique. Mais, dans l'optique de Raeder, au contraire, la Méditerranée ne revêt pas une importance stratégique qui ne vaudrait que pour la diversion qu'il entend planifier. En lançant une offensive contre Suez, il veut trancher l'“artère principale” de l'organisme qu'est l'Empire britannique et porter ainsi le coup fatal à l'Angleterre. Après la prise de Suez, les résidus de la domination britannique en Méditerranée pourraient facilement être éliminés avec l'aide de la flotte française. Sans nul doute, Raeder exagérait l'importance de la Méditerranée pour les Britanniques mais n'avait pas tort de valoriser l'importance des côtes du nord et de l'ouest de l'Afrique et comptait sur la coopération française dans les opérations navales dans l'Atlantique.

L'Atlantique, l'Afrique du Nord-Ouest et Suez: tels sont les objectifs principaux de la stratégie de la marine allemande.

Y avait-il communauté d'intérêt entre la France et l'Allemagne?

Au fur et à mesure que les officiers supérieurs de la marine allemande élaborent et peaufinent leur stratégie, la France vaincue acquiert de plus en plus de poids à leurs yeux. Le choc de Mers-el-Kébir et de Dakar du côté français, l'impossibilité de mener à bien l'Opération Seelöwe  (le débarquement en Angleterre) du côté allemand, contribuent à un rapprochement franco-allemand, qui devrait se concrétiser par un effort de guerre commun. Et comme les Italiens et les Espagnols n'ont pas réussi à chasser les Britanniques de la Méditerranée, contrairement à ce qu'avaient espéré les Allemands, les chefs de la marine allemande en viennent à estimer que la participation française à la guerre navale contre l'Angleterre est indispensable. Pour que les Français deviennent les adversaires de l'Angleterre, les Allemands doivent leur donner des garanties politiques, qui valent le prix d'une entrée en guerre de Vichy à leurs côtés. Raeder envisage une alliance en bonne et due forme avec les Français et souhaite que Berlin élargisse l'axe tripartite Rome-Berlin-Tokyo à Vichy. L'inclusion de la France dans le nouvel ordre européen a été l'une des exigences de base des chefs de la marine allemande.

Ceux-ci ont trouvé des appuis dans l'état-major de la Wehrmacht. Le Général-Major Warlimont, Chef du L/WFSt, après une visite à Paris, s'est fait l'avocat du rapprochement franco-allemand. L'Afrique du Nord-Ouest et de l'Ouest constitue un flanc stratégique indispensable contre l'Angleterre ainsi qu'un espace économique soustrait au blocus britannique. Le conseiller militaire de Hitler, le Chef de l'état-major général de la Wehrmacht, le Colonel-Général Jodl, partage ce point de vue. La France pourrait aider le IIIième Reich et lui donner la victoire finale, si elle met à la disposition des Allemands ses bases africaines. Si l'Allemagne perd les bases nord-africaines possédées par la France, expliquent les chefs de la marine, il ne sera plus possible de battre l'Angleterre dans la guerre commerciale qui se déroule dans l'Atlantique. Cette formulation est évidemment osée. Mais il n'en demeure pas moins vrai que la masse territoriale nord-africaine et ouest-africaine constitue une barrière importante contre toutes les attaques anglo-saxonnes contre le Sud de l'Europe. En outre, ce territoire peut servir de base pour des attaques de l'aviation allemande contre les Etats-Unis.

Kriegsmarine-Cruiser-KMS-Prinz-Eugen-14.jpgUne alliance franco-allemande constituerait donc un atout complémentaire, qui permettrait au Reich de faire son jeu sur le continent européen. Mais Hitler s'imaginait toujours qu'il allait pouvoir faire la paix avec l'Angleterre. Il laisse le sort de la France dans l'indécision. Après Mers-el-Kébir, l'Allemagne assouplit encore ses mesures de démobilisation, politique qui ne correspond pas du tout aux souhaits de la Marine et de l'état-major de la Wehrmacht, qui, eux, envisageaient de consolider militairement une communauté d'intérêt franco-allemande.

La campagne de Russie

Mais un projet militaire va s'avérer plus déterminant que tous les problèmes soulevés par la stratégie nouvelle, proposée par la marine allemande, plus déterminant aussi que tous les problèmes non résolus et toutes les occasions perdues: celui de lancer une campagne contre la Russie. Ce projet freine définitivement le développement de la stratégie maritime suggéré par Carls. La stratégie maritime dépend désormais de la guerre sur terre.

Pour les chefs de l'armée de terre, la capitulation de la France et l'impossibilité pour la Grande-Bretagne d'entreprendre des opérations sur le continent ont rendu impossible la guerre sur deux fronts. Du moins dans un premier temps. Mais l'élimination de la France n'a pas donné à la Kriegsmarine la liberté qu'elle souhaitait avoir sur ses arrières. Les forces opérationnelles de la marine allemande étant faibles, ses chefs ne pouvaient considérer l'Opération Barbarossa que comme un fardaud supplémentaire. Mais, mise à part cette objection, la marine n'avait nulle crainte quant au déroulement de la guerre à l'Est: “Les forces militaires qu'aligne l'armée russe doivent être considérées comme très inférieures à nos troupes expérimentées. L'occupation d'un territoire s'étendant du Lac Ladoga à la Crimée en passant par Smolensk est militairement réalisable, de façon à ce qu'en détenant ce territoire, il nous soit possible de dicter les conditions de la paix” (2). Les chefs de la marine partagent la conviction des dirigeants politiques de l'Allemagne: le Reich gagnera la guerre à l'Est sans difficulté. Mais doutent que, par cette victoire, la guerre contre l'Angleterre sera plus rapidement terminée. La marine croit en effet que l'impact d'une victoire allemande à l'Est sera mininal sur le moral de l'ennemi occidental. Les victoires allemandes sur le continent ne contraindront nullement la Grande-Bretagne à composer. Au contraire, l'effort exigé par la campagne de Russie sera tel qu'il favorisera une victoire anglaise dans l'Atlantique et rendra aux Britanniques toutes les positions perdues. Pire: si la Russie ne s'effondre pas immédiatement, l'Allemagne court un danger très grave, dans le sens où les territoires non neutralisés de l'URSS deviendront ipso facto des tremplins pour une attaque américaine. Dans l'esprit des chefs de la marine, le combat principal, c'est-à-dire la guerre contre l'Angleterre, pourrait bien être perdu, même si l'Opération Barbarossa débouche sur une victoire.

La guerre à l'Est soulage l'Angleterre

Les chefs de la marine jugent la sécurité globale de l'Allemagne, en incluant le facteur “Russie” dans des catégories qui justifient l'attaque contre l'URSS: la sécurité de l'Allemagne exige la consolidation, par des moyens militaires, d'un espace qui soit à l'abri de toute attaque extérieure, l'élimination, par des moyens politiques, des petits Etats peu fiables, et, enfin, la construction, par des moyens économiques, d'une autarcie continentale. Les chefs de la marine, de surcroît, acceptent les projets de colonisation et les dimensions idéologiques inhérents à la guerre contre l'URSS. Sur un plan politique plus général et animés par la conviction que les forces armées soviétiques de terre et de mer constituent un danger pour le Reich, les chefs de la marine s'alignent exactement sur les thèses du gouvernement allemand. Si les objectifs de construire un espace intangible ou une autarcie économique justifiaient dans une certaine mesure la guerre à l'Est, aux yeux du gouvernement, la marine, elle, tire des conclusions opposées. Dans son évaluation de la situation, trois éléments sont importants: 1) la conviction que l'Allemagne aurait obtenu tout ce qu'elle voulait de la Russie, même sans lui faire la guerre; 2) le problème anglais restait sans solution; 3) un éventail de réflexions sur l'industrie militaire.

Pour la marine, l'Angleterre est l'ennemi n°1

Du point de vue de la marine, le gouvernement du Reich surestime la “masse soviétique” et poursuit, vis-à-vis de Moscou, une politique de concessions inutile. Le gouvernement allemand devrait au contraire montrer à l'Union Soviétique, fragile parce que tout un éventail de crises la guette, la puissance politique et militaire du Reich. Les Russes, pour l'état-major de la marine, sont prêts à négocier, ce qui rend toute guerre inutile. Moscou, pensent les officiers supérieurs de la marine allemande, ira au devant de tous les souhaits de l'Allemagne.

La mission première de la marine de guerre est donc d'affronter directement l'Angleterre. Si celle-ci est abattue, le Reich obtiendra presque automatiquement la victoire. Toute campagne militaire à l'Est influencerait négativement la situation stratégique de l'Allemagne sur mer et jouerait en faveur de l'Angleterre, qui serait de fait soulagée. Le Korvettenkapitän Junge, chef du département “marine” auprès de l'état-major général de la Wehrmacht, tire les mêmes conclusions: l'Allemagne ne doit pas entrer en guerre contre la Russie, avant que l'Angleterre ne soit mise hors course.

La campagne à l'Est a-t-elle été une alternative?

Fricke (Chef de la 1ière Skl.) constatait que les Anglo-Saxons, affaiblis après avoir perdu leur allié continental potentiel, la Russie, ne s'en prendraient plus à la grande puissance continentale que serait devenue l'Allemagne. Mais cette constatation n'a en rien influencé l'élaboration de la stratégie navale allemande, favorable, en gros, à la campagne de Russie. La marine a été incapable de s'opposer avec succès à l'option anti-soviétique du gouvernement allemand. Mais ni Fricke ni les officiers supérieurs de la Kriegsmarine n'ont pu voir dans le projet “Barbarossa” une entreprise qui aurait contribué à abattre l'Angleterre (pour Hitler, ce n'était d'ailleurs pas l'objectif). Les gains territoriaux à l'Est ne compenseront nullement le tonnage que les Allemands, occupés sur le continent, ne pourront couler dans l'Atlantique, théâtre où se décide réellement le sort de la guerre. Les chefs de la marine ne voient ni la nécessité ni l'utilité d'une opération à l'Est, qui éloignerait les Allemands de l'Atlantique. Le Reich, pour les marins, ne perdra ni ne gagnera la guerre en Russie. Le destin de l'Allemagne se joue uniquement dans l'Atlantique.

Si l'option Barbarossa se concrétise, l'industrie de l'armement consacrera tous ses efforts à l'armée de terre et à l'aviation. Si les livraisons russes cessent d'arriver en Allemagne à cause de la guerre germano-soviétique, la marine en essuiera les conséquences et ne pourra plus espérer aucune priorité dans l'octroi de matières premières et de carburants. La guerre à l'Est ôtera à la marine son principal fournisseur de matières premières. Ses chefs ne pensent pas, en conséquence, que les opérations en Russie apporteront une solution au problème des matières premières, domaine où l'Allemagne est dans une situation précaire. Les livraisons de pétrole pour l'Opération Seelöwe ne seront pas nécessairement assurées, une fois l'Opération Barbarossa terminée. En conséquence, la marine estime que la campagne de Russie n'est qu'un élargissement compromettant de la guerre, pire, qu'elle l'étend dans une mauvaise direction et au moment le plus inapproprié.

Appréciation

Avec la victoire sur la France en juin 1940, la marine allemande peut enfin mettre au point sa “grande stratégie”. Mais cette stratégie prend fin avec le débarquement allié en Afrique du Nord de novembre 1942. Pour Raeder, la “grande stratégie navale” est une alternative à l'Opération Seelöwe et, plus tard, à l'Opération Barbarossa, dont il n'a jamais été convaincu de l'utilité. La stratégie maritime n'est pas une stratégie partielle ou complémentaire, qui se déploierait parallèlement à la guerre sur terre. Elle est une stratégie globale qui affecte également les opérations sur le continent. Aujourd'hui, il n'est pas possible de dire comment elle aurait influencé le cours de la guerre, si elle avait été appliquée sans restriction.

Dans les mois qui se sont écoulés entre la fin de la campagne de France et le début de la campagne de Russie, le III° Reich a pu choisir entre plusieurs options: 1) Il se tient coi, renonce à entamer toute opération et organise la défensive; 2) Il poursuit la guerre à l'Ouest jusqu'à la capitulation anglaise et impose sa paix; 3) Il se tourne vers l'Est, soumet la Russie et se retourne vers l'Ouest avec l'atout complémentaire: un continent uni par la force et inexpugnable. Aucune de ces options n'avait la chance de réussir à 100%. Toutes pouvaient réussir ou échouer. Evidemment, la stratégie consistant à demeurer coi ou la stratégie navale préconisée par les chefs de la marine, qui n'a pas été appliquée, ont le beau rôle dans les querelles entre historiens: personne ne peut dire avec certitude qu'elles étaient erronées, puisqu'elles ne se sont pas traduites dans le concret. Quant à la “solution continentale”, recherchée par Barbarossa, elle a échoué. Mais elle aurait pu réussir.

Notes:

(1) M. SALEWSKI, Die deutsche Seekriegsleitung 1935-1945, 3 tomes, tomes 1 & 2, Francfort s. M., 1970-75. Tome 3: Denkschriften und Lagebetrachtungen 1938-1944. Pour notre propos: Tome 3, pp. 108 et suivantes.

(2) 1/Skl, “Betrachtungen über Russland”, 28 juillet 1940 (Salewski, tome 3, pages 141 et suivantes).  

Nietzsche fenomenologo del quotidiano

 

nietzsche31.jpg

Scolari, Paolo, Nietzsche fenomenologo del quotidiano

 

 

 

Milano-Udine, Mimesis , 2013, pp. 233, euro 20, ISBN 978-88-5751-472-7

 

 

Recensione di Massimiliano Chiari 

Ex: http://recensionifilosofiche.info

 

 

Nietzsche è stato senza dubbio un filologo precoce e promettente: non ancora venticinquenne, e non ancora laureato, ottenne – per meriti scientifici – la cattedra di filologia classica all’Università di Basilea. È stato anche, e in misura incommensurabilmente maggiore, un filosofo di primissimo piano capace di condizionare il pensiero filosofico dell’intero Novecento, e oltre. Tutto ciò è assolutamente noto, direi a tutti.

 

 

Ciò che, invece, è senza dubbio meno universalmente noto del pensiero di Nietzsche, è la sua propensione fenomenologica verso la quotidianità, la sua capacità – cioè – di offrire una lettura tagliente, profonda, lucidissima e in molti casi profetica (nel senso di anticipatrice) della realtà quotidiana e delle sue strutture sociali ed economiche. Accanto a un Nietzsche “maggiore” (filologo e, soprattutto, filosofo) ci sarebbe dunque anche un Nietzsche “minore”, semplice (pour ainsi dire) osservatore della realtà che lo circonda, analista e descrittore (fenomenologo, appunto) del quotidiano: questa è la tesi sostenuta – e ampiamente dimostrata – dal giovane (classe 1983) Paolo Scolari nel libro in esame, pubblicato anche grazie ad un contributo finanziario dell’Università Cattolica, “sulla base di una valutazione dei risultati della ricerca in esso espressa”. È chiaramente un giovane molto promettente l’autore di questo bel libro che ci conduce, ci accompagna per mano, fra i luoghi meno noti – e pur tuttavia interessantissimi – del pensiero di Nietzsche.

 

“Il suo sguardo fenomenologico – ci ricorda Scolari – si posa su quei piccoli temi – «le cose prossime e più vicine di tutte», come le chiama Nietzsche – che vanno a comporre l’esistenza degli uomini della società moderna: «le ventiquattro ore del giorno, il mangiare, l’abitare, il vestirsi, l’aver rapporti sociali, la condotta di vita, la ripartizione della giornata, la professione ed il tempo libero, la festività e il riposo, il matrimonio e l’amicizia»” (p. 15-16); insomma, questo Nietzsche minore, o “terreno” come lo definisce anche Scolari, questo “osservatore dei «luoghi umani» della convivenza”, fa del filosofo tedesco un vero e proprio fenomenologo del quotidiano, testimone di «quella cronaca quotidiana che indagò come sfera dell’umano troppo umano»” (p. 16), per riproporre un’efficace espressione utilizzata da S. Moravia.

 

Scolari ha individuato un saldo filo conduttore che attraversa tutta la nietzscheana fenomenologia del quotidiano; si tratta della “frammentazione dell’umano” (p. 118): “Io mi aggiro in mezzo agli uomini, come in mezzo a frammenti (Bruchstücken) e membra (Gliedmaassen) di uomini! E questo è spaventoso ai miei occhi: trovare l’uomo in frantumi (zertrümmert) […]” (p. 119, cit. da Così parlò Zarathustra). L’uomo in frantumi è quello che si manifesta, al fenomenologo, nelle strutture sociali ed economiche della seconda metà dell’Ottocento: nella scuola, nella cultura, nel lavoro, nel tempo libero, nella città come luogo dell’abitare, e perfino nel giornalismo. L’uomo in frantumi è l’anticipazione nietzscheana dell’uomo a una dimensione, teorizzato da Herbert Marcuse nel suo famoso saggio Der eindimensionale Mensch del 1964.

 

Così ad esempio, la “cultura” prodotta dalle scuole tedesche “perde in profondità quanto pretende di guadagnare in estensione. Non una «vera cultura» (Wirkliche  Bildung), bensì solo una «specie di sapere intorno alla cultura», una «culturalità» (“Gebildetheit”) che «si ferma al pensiero e al sentimento della cultura»” (p. 44). La cultura non ha più come fine se stessa, “ma viene sfruttata per realizzare quelli che, un tempo semplici mezzi, sono ora diventati i fini più importanti dell’esistenza umana: l’utile economico e la potenza dello Stato” (ivi). Ciò che Nietzsche critica aspramente è il “democraticismo” della cultura (e della scuola) tedesca, e ciò in quanto “il valore della cultura è inversamente proporzionale alla sua diffusione: la «cultura quanto più possibile vasta e universale» e «comune a tutti» ha una sola via d’uscita, la «barbarie»” (p. 47). Per Nietzsche la cultura autentica “deve rifiutare ogni asservimento, non deve «servire» a niente, deve cioè essere “«fine a se stessa», gratuita, socialmente disinteressata, al di sopra della mischia sociale” (p. 57). Ma più propriamente, a cosa è asservita – secondo il filosofo tedesco - la cultura dei suoi tempi (e, potremmo aggiungere, dei nostri tempi)? Essa è innanzitutto e per lo più asservita al denaro: “In una modernità «travolta da un’economia del denaro gigantesca e spregevole», dove si rincorrono freneticamente «tutti i mezzi e le vie per guadagnare più facilmente possibile del denaro (Geld)», la cultura «si fa sempre più utile in senso economico»: nei tempi moderni «esiste una naturale e necessaria alleanza di “ricchezza e cultura”, e, ancor più, questa alleanza sarebbe una necessità morale»” (p. 62, cit. da Sull’utilità e il danno della storia per la vita). Un’anticipazione profetica: non grazie alla cultura, ma sotto la spinta del commercio mondiale – ha scritto Nietzsche – “sarà il «denaro a costringere l’Europa a stringersi insieme in un’unica potenza»” (p. 63).

 

In che senso, quindi, il decadimento della cultura e l’egemonia del denaro gettano l’uomo “in frantumi”? Nel senso che “la società sarà dominata da “uomini attuali” senza identità, facilmente spendibili, in grado di valutare ogni cosa soltanto in termini di utilità economica. Uomini coinvolti nel mercato del lavoro, scambiabili e ridotti a valore di scambio: uomini-merce che, «livellati dallo spirito del mercato», hanno perso la propria «qualità individuale» e ritengono superflua una consapevolezza di sé che vada al di là di una mera determinazione del prezzo” (p. 65).

 

Ma l’uomo moderno non è “frammentato” solo a livello culturale, lo è anche nell’ambito lavorativo e perfino nella fruizione del suo (presunto) tempo libero: “ovunque c’è frammentazione, lì ne va dell’umano” (p. 85). L’analisi nietzscheana del lavoro rimanda, forse inconsapevolmente, al concetto marxiano, ed hegeliano prima, di “alienazione”; “nell’era del dominio della fabbrica, continuando a specializzarsi, l’operaio non solo ripete meccanicamente e ininterrottamente la medesima azione, ma diventa l’oggetto di quell’azione: non solo produce la vite per la macchina, bensì si trasforma lui stesso in quella vite” (p. 95). In un aforisma di Umano, troppo umano, Nietzsche scriverà che “«La macchina umilia, è impersonale (unpersönlich), sottrae al pezzo di lavoro la sua fierezza, la sua individuale bontà e difettosità, ciò che rimane attaccato ad ogni lavoro non fatto a macchina, – quindi il suo pezzetto di umanità (sein Bisschen Humanität)»” (p. 96). Anche il tempo libero, che dell’antico otium non mantiene neppure lontanamente la parvenza, diventa funzionale a qualcosa di diverso da sé, serve ormai solamente “per riprendersi dalla stanchezza del negotium” (p. 103). Perfino “la religione moderna”, quella “che vive nell’epoca della morte di Dio” è “ridotta a un dovere della domenica, un ulteriore impegno fra le numerose occupazioni del cittadino moderno” (p. 108).

 

Di particolare pregio è il quarto capitolo (pp. 160-202) del saggio di Scolari, quello in cui viene riproposta la “fenomenologia della città” (luogo dell’abitare) che il giovane studioso fa sapientemente emergere, in particolare, dalle pagine del Prologo di Così parlò Zarathustra. “La città è quell’affascinante palcoscenico sul quale va in scena l’umanità dell’epoca moderna: un’umanità che Nietzsche, «seduto al caffè» della piazza, osserva con molta attenzione (p. 166). Zarathustra incomincia la predicazione del «superuomo» proprio nella piazza della città: “nonostante la dirompente portata del suo messaggio, la folla è indifferente nei confronti di Zarathustra”, non gli presta ascolto, “egli «passa in mezzo a questa gente e lascia cadere qualche parola, ma essi né sanno prendere né trattenere». Questi uomini non riescono a capire ciò di cui parla, continuando imperterriti ad aspettare lo show del saltimbanco” (p. 181). “In quella piazza, l’agire della «folla» si spinge ben oltre la semplice indifferenza. Essa non solo non ascolta Zarathustra, ma con grande fragore «ride di lui»” (p. 183). Ma da chi è composta la gente che affolla quella piazza? Dall’uomo moderno, frammentato, incapace di prestare attenzione a, di cogliere un messaggio nuovo e rivoluzionario che intende ricondurre l’umano alla sua interezza. La gente della piazza “è popolata da «buoni», «giusti» e «credenti»: «esperti di ‘bene’ e di ‘male’», uomini «prigionieri della loro buona coscienza»” (p. 184). La piccolezza di quegli uomini si riflette, perfino, nelle loro abitazioni: quel tipo d’uomo “abita in case ristrette e «saltella su una terra diventata piccola» […]: una piccola «felicità», una piccola «ragione», una piccola «virtù», una piccola «giustizia», una piccola «compassione». Piccolezza e moderazione che tuttavia sanno molto di «accontentabilità» e mediocrità” (p. 186).

 

Il saggio di Scolari offre altri numerosi esempi di fenomenologia del quotidiano, così come viene filtrata dalle lenti di Nietzsche, ma sempre medesimo appare il tratto distintivo di quell’umanità moderna così banale: ciò che ne emerge è l’uomo frammentato, l’uomo a una dimensione per dirla con Marcuse, l’uomo che ha perso il senso della sua originaria unità e potenza, l’uomo che sarà protagonista del ventesimo secolo e, anche, dei giorni nostri.

 

 

 

Indice

 

 

Premessa

 

Sguardo sul quotidiano: Nietzsche e le “cose prossime”

 

 

Capitolo I

 

Sull’avvenire delle nostre scuole: cultura, educazione, società

 

 

Capitolo II

 

Frammentazione dell’umano: cultura, lavoro e tempo libero

 

 

Capitolo III

 

Fenomenologia delle masse: Nietzsche e le logiche collettive

 

 

Capitolo IV

 

Fenomenologia della città: Nietzsche e i luoghi dell’abitare

 

 

Appendice

 

La preghiera del quotidiano: Nietzsche e i giornali

00:05 Publié dans Livre, Livre, Philosophie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : nietzsche, philosophie, livre, allemagne | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

„Man muß das Leben einsetzen“

mishimaLLL.png

„Man muß das Leben einsetzen“

Interview mit Dominique Venner

Ex: http://www.sezession.de

Der französische Historiker Dominique Venner hat sich heute in der Kathedrale Notre Dame in Paris erschossen [2], um gegen die Einführung der Homo-Ehe in Frankreich zu protestieren. Vor einer Woche erst führte Sezession mit Venner ein für das August-Heft geplantes Interview. Anlaß war Venners neues Buch: Le Choc de l‘Histoire – Der Schock der Geschichte. Im Verlauf des Gesprächs deutet Venner an, daß unsere Zeit reif sei für symbolische Aktionen und persönliche Opfer. Die Fragen stellte Benedikt Kaiser [3].

SEZESSION: Le Choc de l’Histoire behandelt Fragen, die Sie schon seit langem untersuchen. Wozu also Ihr neues Buch?

VENNER: Dieses Buch stellt eine Synthese in der dynamischen Form von Gesprächen dar. Die Wahrnehmung historischer Umwälzungen steht schon lange im Zentrum meiner Arbeiten und Überlegungen als Historiker. Sie umfaßt die Beziehungen zwischen Religion und Identität, Kontinuität und Renaissance der Kulturen, die als Ausdruck der Identität der Völker auf lange Sicht ausgelegt sind. So hat Europa in seiner sehr langen Geschichte viele Antworten, die ihre Quelle in den homerischen Gedichten haben, als Ausdruck eines mehrere tausend Jahre alten indoeuropäischen Erbes gefunden.

SEZESSION: Wieso haben Sie dann den Titel Schock der Geschichte gewählt – und was soll er bedeuten?

VENNER: Den Schock der Geschichte erleben wir, ohne es zu begreifen. So verhielt es sich schon immer. Erst später ermißt man die Reichweite von Veränderungen. Viele Epochen vor uns haben historische Schocks erfahren und haben unermeßlichen Herausforderungen getrotzt: die Perserkriege für die antiken Griechen, der Verfall der römischen Republik vor Augustus. Im Laufe der „modernen“ und zeitgenössischen Jahrhunderte haben historische Schocks Ideenveränderungen hervorgerufen. Machiavelli ist beispielsweise das Resultat der Wirren Florenz’ und Italiens gegen Ende des 15. Jahrhunderts, Montaigne ist das Resultat der Religionskriege in Frankreich, Hobbes der ersten englischen Revolution, Martin Heidegger der Wahrnehmung des Einflusses der Technik, Carl Schmitt der deutschen Katastrophe in der Folge des Versailler Vertrages (2), Samuel Huntington der neuen Welt nach dem Kalten Krieg – wobei Huntington die Dinge als Amerikaner, nicht als Europäer sah.

SEZESSION: Wo ist hier der präzise Unterschied zwischen amerikanischem und europäischem Blickwinkel?

VENNER: Das 20. Jahrhundert war für die Vereinigten Staaten ein Zeitalter des kontinuierlichen Aufstiegs in Richtung Dominanz und Beherrschung der Welt – einschließlich des kulturellen Raumes. Dieselbe Periode – besonders nach 1945 – war für Europa jedoch jene des Zusammensturzes, der Unterwerfung und der beispiellosen Demoralisierung.

SEZESSION: Und inwiefern manifestiert sich der neue Schock der Geschichte?

VENNER: Mit Beginn des 21. Jahrhunderts sind wir in ein neues historisches Zeitalter eingetreten, das die Europäer von den Folgen des Jahres 1945 befreien wird. Schon von den zwei großen Kräften, die sich 1945 in Yalta Europa geteilt hatten, ist eine verschwunden; das ist etwas, was sich doch niemand vorgestellt hätte. Der Kommunismus (die Zukunft der Welt!) implodierte, und ein neues Rußland ist aus den Trümmern hervor gestiegen. Und dieses nationale Rußland wird der kontinentale Partner Europas gegenüber den Vereinigten Staaten. Was die Vereinigten Staaten betrifft, müssen sie ja jetzt mit China, dem Islam, Südamerika und einer unbeständigen Welt rechnen. Die Helden von gestern werden die Verdammten von morgen werden…

SEZESSION: Wenn Sie hier von Europa als dem Partner eines neuen Rußlands sprechen, werden sie wohl kaum an die Strukturen der Europäischen Union in ihrer jetzigen Form denken.

VENNER: Ich denke an gar keine derzeitige politische Struktur, aber an unseren jahrtausendalten Kulturkreis, an unsere Identität, an eine gewisse „europäische“ Art und Weise zu denken, zu fühlen, zu leben, die die Zeit überdauert hat.

SEZESSION: Sie schreiben, daß die großen Kulturen keine verschiedenen Regionen auf einem Planeten darstellen, sondern selbst verschiedene „Planeten“ sind. Was meinen Sie damit?

VENNER: Die Menschen bestehen nur durch das, was sie unterscheidet: Clan, Stamm, Stadt, Nation, Kultur, Zivilisation und nicht durch das, was sie rein animalisch gemeinsam haben, die Sexualität oder das Bedürfnis nach Nahrung. Ihre Menschlichkeit begründet sich in Traditionen und geistigen Werten, die die Zeit überdauern. Wenn zum Beispiel die simple Sexualität als Handlung so universell ist, wie sich zu ernähren, ist doch die Liebe in jeder Kultur verschieden; so verschieden wie die Darstellung der Weiblichkeit, der Wahrnehmung des Körpers, der Gastronomie oder der Musik. Diese Züge sind die Spiegelungen einer gewissen Morphologie der Seele, die durch Atavismus sowie durch Erfahrung übermittelt wurde. Man weiß ja, daß der Einfluß neuer Religionen die Vorstellungen und das Verhalten verändern kann. Aber die Tradition eines Volkes wandelt auch die eingeführten Religionen. In Japan hat der Buddhismus etwa eine kriegerische Prägung erhalten, die er in China nicht kennt. Man könnte sagen, daß jedes Volk seine eigenen Götter hat, die von sich selbst kommen und sogar dann noch überleben, wenn sie bereits vergessen scheinen.

SEZESSION: Sie schreiben und sprechen von einer „Morphologie der Seele, die durch Atavismus sowie durch Erfahrung übermittelt wurde“. Das gilt in unserem Kontext doch ebenfalls für europastämmige US-Amerikaner. Wie erklären Sie sich, daß Amerikaner genuin europäischen Ursprungs mit der europäischen Tradition gebrochen haben, um eine neue Tradition zu begründen, die ihrer alten europäischen entgegengesetzt ist?

VENNER: Ich verweise auf eine Beobachtung des österreichischen Geopolitikers Jordis von Lohausen (3). Er stellte fest, daß umgesiedelte Deutsche irgendwo in Europa, zum Beispiel in Rußland, immer deutsch bleiben, selbst mehrere Jahrhunderte nachdem sie ausgewandert waren. Andererseits reicht schon eine Generation aus, damit in die USA ausgewanderte Deutschen aufhören, sich deutsch zu fühlen und statt dessen Amerikaner werden, die den anderen gleichen. Das wirft eine ernsthafte Frage auf. Sie umfaßt auch, daß nicht alles von der „Rasse“ abhängt, wie man einst annahm. Die aus Europa gekommenen Amerikaner haben jedoch die „animalischen“ Qualitäten ihrer Ursprünge beibehalten: Energie, kämpferischer und unternehmender Elan, Erfindergeist… Aber ihre „Vorstellungen“ (ihrer Weltanschauung) sind durch ihre Umsiedlung in die Neue Welt verwandelt worden. Es ist das Ergebnis der biblischen Utopie des „Gelobten Landes“, dem Traum von einer neuen Welt fern Europas. Die Gründer trugen die Überzeugungen, das neue „auserwählte Volk“ zu verkörpern, das auserkoren wurde, der ganzen Welt den „Geist des Kapitalismus“ zu bringen, um eine Formulierung von Max Weber aufzugreifen. Vergessen wir nicht, daß die tägliche Bibelrezeption in den amerikanischen Schulen genauso zwingend vorgeschrieben ist wie der Schwur am Sternenbanner. Die messianische „Sendung“ der Gründer ist ebenso diejenige der Mehrzahl der Einwanderer geworden. Und diese politische Religion implizierte, mit der ganzen aristokratischen und tragischen europäischen Tradition zu brechen.

SEZESSION: Das betrifft Europa und die USA. Die Welt beherbergt aber zweifellos mehr Kulturkreise.

VENNER: Ja, und anderswo werden die Sachen wahrgenommen, wie es sich weder die Amerikaner noch die Europäer vorstellen können. Um diese Tatsache zu erfassen, bringe ich in meinem Buch Rückschlüsse aus der französischen Erfahrung an. Zum Beispiel jenes Beispiel von Dalil Boubakeur, dem Vorsteher der Moschee von Paris. Der Islam, erklärt er, ist „sowohl eine Religion, eine Gemeinschaft, ein Gesetz als auch eine Kultur. […] Muslime sind nicht nur jene, die die fünf Pfeiler des Islam praktizieren, sondern alle, die zu dieser identitären Gemeinschaft gehören.“ Das entscheidende Wort ist hier „identitär“. Der Islam ist demzufolge nicht nur eine Religion. Er geht über die Religion hinaus und ist: „eine Gemeinschaft, ein Gesetz, eine Kultur“.

Wenn man von christlicher Kultur geprägt ist, universalistisch und individualistisch, überrascht das. Viele andere Religionen, u. a. eben der Islam oder das Judentum, aber auch der Hinduismus, der Shintoismus oder der Konfuzianismus, sind eben nicht nur Religionen im christlichen oder laizistischen Sinn des Wortes, das heißt eine Art persönliche Beziehung zu Gott, sondern sie bilden Identitäten, Gesetze, Gemeinschaften aus.

SEZESSION: Könnte eine neue Wahrnehmung der Identität den Europäern helfen, wieder zu sich zu finden, sich neu zu schaffen?

VENNER: Ich denke durchaus, daß sie den Europäern helfen kann, ihre eigene Authentizität wiederzufinden – jenseits einer persönlichen Religion oder ihres Fehlens.

SEZESSION: Wie definieren Sie dann überhaupt die eigene „Authentizität“?

VENNER: Zuerst wie ein zu weckendes identitäres Gedächtnis. Ein Gedächtnis, das fähig ist, die Europäer moralisch zu bewaffnen, um ihrem Verschwinden im Nichts der großen universellen Rassenmischung und der Globalisierung zu trotzen. Ebenso wie andere sich als Söhne von Shiva, von Mohammed, von Abraham oder von Buddha wiedererkennen, ist es nicht verkehrt, sich als Söhne und Töchter von Homer, von Odysseus und von Penelope zu wissen.

SEZESSION: In einem Editorial der Nouvelle Revue d’Histoire wandelten Sie die berühmte Formel „Politik zuerst“ um, und betonten, daß man heute sagen müßte: „Mystik zuerst, Politik danach“. Was wollten Sie dem Leser mit dieser eigenwilligen Parole sagen?

VENNER: Unser Zeitalter fordert nicht mehr ein, „die Macht zu ergreifen“, wie man früher sagte. Es gewährt dem Traum vom „Tag der Wende“ keinen Raum mehr. Die Politik ist nicht mehr das Band, das dem Leben einen Sinn gibt. Ungeachtet der Stärken der politischen Aktion ist es nicht die Politik, die den Europäern das Gewissen zurückgeben kann, was sie sind, und sie kann ihrem Leben desgleichen keine Orientierung bieten. Dieses Gewissen kann nur durch eine starke Wahrnehmung der Identität kommen. Mit anderen Worten: keine politische Aktion von hohem Niveau ist denkbar ohne die Vorbedingung eines identitären Gedächtnisses, das fähig ist, sie zu lenken. Aber Worte reichen dann nicht aus. Man muß Worte durch Taten bekräftigen können, man muß das Leben einsetzen, und dies muß bis zur Bereitschaft reichen, das Leben zu opfern, wenn es erforderlich erscheint.


Article printed from Sezession im Netz: http://www.sezession.de

URL to article: http://www.sezession.de/38844/man-mus-das-leben-einsetzen-interview-mit-dominique-venner.html

URLs in this post:

[1] Image: http://www.sezession.de/wp-content/uploads/2013/05/venner2.jpeg

[2] Kathedrale Notre Dame in Paris erschossen: http://www.sezession.de/38833/dominique-venner-hat-sich-in-notre-dame-erschossen-protest-gegen-die-homo-ehe.html

[3] Benedikt Kaiser: http://www.sezession.de/autoren/Kaiser

mercredi, 30 octobre 2013

Briser l'influence du gauchisme culturel...

 

france,gauchisme,idéologie dominante

Briser l'influence du gauchisme culturel...

par Jean-Pierre Le Goff

Ex: http://metapoinfos.hautetfort.com/

Vous pouvez découvrir ci-dessous un point de vue de Jean-Pierre Le Goff, cueilli dans le quotidien Le Monde et consacré à l'emprise du gauchisme culturel sur le gouvernement socialiste.

Jean-Pierre Le Goff est sociologue et a publié de nombreux essais, dont La gauche à l'épreuve 1968 - 2011 (Tempus, 2012) et La fin du village (Gallimard, 2012).

Briser l'influence du gauchisme culturel

Ce qu'on appelle l'affaire Leonarda a fait apparaître une nouvelle fois l'opposition qui existe depuis longtemps entre une gauche politique et sociale et un gauchisme sociétal qui s'est approprié le magistère de la morale. Ce dernier accentue la coupure de la gauche avec les couches populaires et mine sa crédibilité. En refusant de rompre clairement avec ce courant, la gauche au pouvoir récolte les fruits amers de ce qu'elle a semé.

Des représentants du gauchisme sociétal appellent les lycéens à reprendre la lutte, multiplient les leçons de morale envers le gouvernement et un peuple considéré comme des "beaufs" fascisants. Par un paradoxe historique et la grâce électorale du Parti socialiste, certains, toujours prompts à jouer la société contre l'Etat, à considérer l'idée de nation comme xénophobe et ringarde, se retrouvent ministres et représentants de la nation. De nouveaux moralistes au pouvoir entendent éradiquer les mauvaises pensées et comportements en changeant les mentalités par la loi. Ils sont relayés par des militants et des associations qui pratiquent la délation, le lynchage médiatique et multiplient les plaintes en justice. La France vit dans un climat délétère où l'on n'en finit pas de remettre en scène les schémas du passé : "lutter contre le fascisme" toujours renaissant, "faire payer les riches" en se présentant comme les porte-parole attitrés des pauvres, des exclus et des opprimés de tous les pays du monde, en développant un chantage sentimental et victimaire contre la raison.

La confiance dans les rapports sociaux, la liberté d'opinion et le débat intellectuel s'en trouvent profondément altérés. Le chômage de masse, l'érosion des anciennes solidarités collectives et les déstructurations identitaires qui touchent particulièrement les couches populaires paraissent hors champ de ce combat idéologique entre le camp du progrès revisité et l'éternelle réaction. Des pans entiers d'adhérents, de sympathisants ou d'ex-militants ne se reconnaissent pas dans les camps ainsi tracés, tandis que le désespoir social gagne chaque jour du terrain. Ils désertent et s'abstiennent, quand ils ne sont pas tentés par les extrêmes pour exprimer leur protestation.

Dans une situation où les tensions s'exaspèrent, le cynisme et les calculs politiciens décrédibilisent la parole politique et la puissance publique. Quand l'Etat devient à ce point incohérent, la société se morcelle et le débat tourne à la confusion. Le plus surprenant en l'affaire est la légèreté avec laquelle on dénie cette réalité en pratiquant la langue de caoutchouc pour dire tout et son contraire avec aplomb.

UN PAYS EN PERTE D'ESTIME

La gauche au pouvoir est en panne de projet et de vision : elle n'en finit pas d'essayer tant bien que mal de réduire la dette et les fractures sociales et fait du surf sur les évolutions sociétales problématiques, en essayant de satisfaire les intérêts contradictoires de sa majorité et de ses clientèles électorales. La perspective difficile d'une inversion de la courbe du chômage, outre son caractère incertain, ne peut être le remède miracle au mal-être français. Les fractures sont à la fois sociales et culturelles. Le roman national est en panne, écrasé entre une version pénitentielle de notre histoire et un avenir indéterminé au sein d'une Union européenne qui pratique la dérégulation et ne parvient pas à maîtriser les flux migratoires.

Un pays qui ne sait plus d'où il vient et où il va perd l'estime de lui-même. Il faut aborder les questions qui dérangent en dehors des tabous et des invectives : quel rapport la gauche entretient-elle aujourd'hui avec la nation ? Les références éthérées à l'Europe et aux droits de l'homme ne peuvent tenir lieu de réponse à cette question ; l'attachement au modèle social ne peut suffire. Qu'en est-il de ce "cher et vieux pays" au sein de l'Union européenne et dans le monde ? La gauche devrait expliquer de façon cohérente et crédible le sens qu'elle donne désormais à la République face aux groupes de pression qui font valoir leur particularité ethnique, communautaire ou religieuse en considérant la laïcité comme discriminatoire.

La question n'est pas celle de maintenir à tout prix une majorité divisée sur des questions essentielles, mais de la crédibilité de la puissance publique et de l'unité du pays dans la période difficile qu'il traverse. Un tel enjeu suppose d'en finir avec la pratique de la " synthèse" et ses salmigondis, de trancher le nœud gordien entre l'angélisme et le sens de l'Etat qui enserre la gauche au pouvoir et l'entraîne vers la débâcle. L'affaire Leonarda en aura été l'occasion manquée. C'est l'avenir d'une gauche républicaine et sociale, attachée à l'état de droit, respectueuse des libertés d'opinion et du débat intellectuel, qui est désormais en question.

Jean-Pierre Le Goff (Le Monde, 25 octobre 2013)

 

france,gauchisme,idéologie dominante


Munich ou Athènes-sur-l’Isar: ville de culture et matrice d’idées conservatrices-révolutionnaires

 

 

mib_05_6.jpg

Robert STEUCKERS:

Munich ou Athènes-sur-l’Isar: ville de culture et matrice d’idées conservatrices-révolutionnaires

Conférence prononcée à Vlotho im Wesergebirge, université d’été de “Synergies Européennes”, 2002

Cette conférence est la recension des premiers chapitres de:

David Clay Large, Hitlers München – Aufstieg und Fall der Hauptstadt der Bewegung, C. H. Beck, Munich, 1998.

koenig_ludwig_i_von_bayern.jpgLe passé de Munich, capitale bavaroise, est marqué par la volonté culturelle de ses rois. Il y a d’abord eu Louis I, qui règne de 1825 à 1848. Ce monarque, quand il était prince héritier, a fait le voyage en Italie, en 1817-1818: il a été, comme beaucoup d’Allemands, fasciné par l’urbanisme traditionnel des villes de la péninsule et veut faire de Munich, sa “Residenzstadt”, un centre culturel allemand incontournable, au service d’une véritable renaissance culturelle qui a, cette fois, pour point de départ, l’espace germanophone du centre de l’Europe. Pour embellir la “ville de résidence”, il fait appel à des architectes comme Leo von Klenze et Friedrich von Gärtner, tous deux appartenant à l’école dite “classique”, renouant avec les canons grecs et romains de l’antiquité, ceux de Vitruve. En épousant la cantatrice espagnole Lola Montez, il se heurte à la bourgeoisie philistine de la ville, hostile aux dépenses de prestige voulues par le roi et qui prend le prétexte de ce mariage avec une roturière étrangère, pour manifester sa désapprobation à l’endroit de la politique royale et du mécénat pratiqué par le monarque. Ce mariage donnera lieu à quantité de ragots irrévérencieux, censés saborder l’autorité de ce monarque tourné vers les arts.

De Maximilien II au Prince-Régent Luitpold

Prinzregent_Luitpold_von_Bayern_1911_Dittmar.pngSon successeur sur le trône bavarois, Maximilien II, règnera de 1848 à 1864. En dépit des cabales menées contre son père, il poursuivra l’oeuvre de ce dernier, ajoutant au classicisme une touche de futurisme, en faisant construire un palais des glaces (de fer et de verre) comme celui de Londres, prélude à une architecture différente qui ne table plus uniquement sur la pierre comme matériau de construction. Maximilien II attire des savants d’Allemagne du Nord à Munich, qui ne sont évidemment pas des Bavarois de souche: on parlera alors des “Nordlichter”, des “Lumières du Nord”. Louis II, qui règne de 1864 à 1886, prônera une nouvelle architecture romantique, inspirée par les opéras de Wagner, par le moyen âge, riche en ornementations. On connaît ses châteaux, dont celui, merveilleux, de Neuschwanstein. Cette politique se heurte également à une bourgeoisie philistine, insensible à toute forme de beauté. Après Louis II, après sa mort étrange, le Prince-Régent Luitpold, aimé du peuple, préconise une industrialisation et une urbanisation de la Bavière. Munich connaît alors une évolution semblable à celle de Bruxelles: en 1800, la capitale bavaroise comptait 34.000 habitants; en 1880, elle en avait 230.000; en 1910, 596.000. Pour la capitale belge, les chiffres sont à peu près les mêmes. Mais cette industrialisation/urbanisation provoque des déséquilibres que la Bavière ne connaissait pas auparavant. D’abord il y a l’ensauvagement des moeurs: si la liaison entre Louis I et Lola Montez avait fait scandale, alors qu’elle était toute romantique et innocente, les trottoirs de la ville sont désormais livrés à une prostitution hétérosexuelle et homosexuelle qui n’épargne pas les mineurs d’âge. Il y a ensuite les mutations politiques qu’entraîne le double phénomène moderne de l’industrialisation et de l’urbanisation: les forces politiques conservatrices et catholiques, qui avaient tenu le haut du pavé avant l’avènement du Prince-Régent Luitpold, sont remises en question par la bourgeoisie libérale (déjà hostile aux rois mécènes) et par le prolétariat.

Bipolarisme politique

Un bipolarisme politique voit le jour dans la seconde moitié du 19ème siècle avec, d’une part, le “Patriotenpartei”, fondé en 1868, rassemblant les forces conservatrices catholiques, hostiles à la Prusse protestante et au “Kulturkampf” anti-clérical lancé par le Chancelier Bismarck. Pour les “Patrioten”, l’identité bavaroise est catholique et conservatrice. Les autres idées, importées, sont nuisibles. Face à ce rassemblement conservateur et religieux se dresse, d’autre part, le “parti social-démocrate”, fondé en 1869, qui parvient à rassembler 14% des suffrages à Munich lors des élections de 1878. Le chef de file des sociaux-démocrates, Georg von Vollmar, n’est pas un extrémiste: il s’oppose à tout dogmatisme idéologique et se profile comme un réformiste pragmatique. Cette politique paie: en 1890, les socialistes modérés et réformistes obtiennent la majorité à Munich. La ville est donc devenue rouge dans un environnement rural et semi-rural bavarois majoritairement conservateur et catholique. Cette mutation du paysage politique bavarois s’effectue sur fond d’un antisémitisme ambiant, qui n’épargne que quelques vieilles familles israélites, dont celle du mécène Alfred Pringsheim. Les Juifs, dans l’optique de cet antisémitisme bavarois, sont considérés comme les vecteurs d’une urbanisation sauvage qui a provoqué l’effondrement des bonnes moeurs; on les accuse, notamment dans les colonnes d’une feuille populaire intitulée “Grobian”, de spéculer dans le secteur immobilier et d’être les “produits collatéraux” du progrès, notamment du “progrès automobile”. Cet antisémitisme provoque une rupture au sein des forces conservatrices, suite à la fondation en 1891 d’un nouveau mouvement politique, le “Deutsch-Sozialer Verein” ou DSV, sous la houlette de Viktor Hugo Welcker qui, armé de quelques arguments tirés de cet antisémitisme, entame une campagne sociale et populaire contre les grands magasins, les agences immobilières et les chaînes de petits commerces en franchise, dont les tenanciers ne sont pas les véritables propriétaires de leur boutique.

Les pangermanistes

A l’émergence du DSV s’ajoute celle des cercles pangermanistes (“Alldeutscher Verband”) qui véhiculent également une forme d’antisémitisme mais sont constitués en majorité de protestants d’origine nord-allemande installés en Bavière et hostiles au catholicisme sociologique bavarois qu’ils jugent “rétrograde”. Les pangermanistes vont dès lors s’opposer à ce particularisme catholique bavarois et, par voie de conséquence, au “Patriotenpartei”. Pour les pangermanistes, la Bavière doit se détacher de l’Autriche et de la Bohème majoritairement tchèque, parce que celles-ci ne sont pas “purement allemandes”. Dans une seconde phase, les pangermanistes vont articuler dans la société bavaroise un anti-christianisme sous l’impulsion de l’éditeur Julius Friedrich Lehmann. Pour ce dernier et pour les théoriciens qui lui sont proches, une lutte systématique et efficace contre le christianisme permettrait aux Allemands de mieux résister à l’emprise du judaïsme ou, quand cet anti-christianisme n’est qu’anti-confessionnel et ne touche pas à la personne du Christ, de faire éclore une “chrétienté germanique” mâtinée d’éléments de paganisme. Cette attitude du mouvement pangermaniste en Bavière ou en Autriche s’explique partiellement par le fait que la hiérarchie catholique avait tendance à soutenir les populations rurales slaves de Bohème, de Slovénie ou de Croatie, plus pieuses et souvent plus prolifiques sur le plan démographique. Les protestants “germanisés” dans le cadre du pangermanisme affirmaient que l’Allemagne et la Bavière avaient besoin d’un “nouveau Luther”.

Le contre-monde de Schwabing

Telle était donc la scène politique qui animait la Bavière dans les deux décennies qui ont précédé la première guerre mondiale. Deuxième question de notre exposé aujourd’hui: comment le choc des visions du monde (car c’est bien de cela qu’il s’agit) s’est-il manifesté à Munich au sein de la bohème littéraire, productrice d’oeuvres qui nous interpellent encore et toujours? Cette bohème littéraire a, de fait, généré un contre-monde libre-penseur, débarrassé du fardeau des “tu dois”, propre au chameau de la fable de Nietzsche, un contre-monde qui devait s’opposer aux raideurs du wilhelminisme prussien. On peut dire aujourd’hui que la bohème munichoise était une sorte d’extra-territorialité, installée dans les cafés à la mode du faubourg de Schwabing. Les “Schwabinger” vont remplacer les “Nordlichter” en préconisant une sorte de “laisser-aller joyeux et sensuel” (“sinnenfrohe Schlamperei”) contre les “ours lourdauds en leur cerveau” (“bärenhaft dumpf im Gehirn”). Cette volonté de rendre l’humanité allemande plus joyeuse et plus sensuelle va amorcer un combat contre les étroitesses de la religion (tant catholique que protestante), va refuser les rigidités de l’Etat (et du militarisme prussien), va critiquer la domination de plus en plus patente de la technique et de l’argent (en déployant, à ce niveau-là, une nouvelle forme d’antisémitisme antimoderne). Les “Schwabinger”, dans leurs critiques, vont englober éléments de droite et de gauche.

Le 18 décembre 1890 est le jour de la fondation de la “Gesellschaft für modernes Leben” (“Société pour la vie moderne”), une association animée par Michael Georg Conrad (très hostile aux catholiques), Otto Julius Bierbaum, Julius Schaumberger, Hanns von Gumppenberg. Pour Conrad, qu’admirait Arthur Moeller van den Bruck, la tâche principale de la littérature est “d’abattre les vaches sacrées” (tâche encore plus urgente aujourd’hui!). Conrad s’attaquera à la personnalité de l’Empereur Guillaume II, “le monarque qui n’a pas le temps”, lui reprochant sa frénésie à voyager partout dans le monde, à sacrifier au culte de la mobilité fébrile propre à la Belle Epoque. Conrad sera plusieurs fois condamné pour “crime de lèse-majesté” et subira même un internement de deux mois en forteresse. Mais cet irrévérencieux n’est pas ce que nous appelerions aujourd’hui un “gauchiste”. Il s’oppose avec virulence à l’emprise sur Munich de la SPD sociale-démocrate et de son idéologie de la lutte des classes. Conrad veut une réconciliation des masses et de la monarchie, en dépit des insuffisances actuelles et conjoncturelles du wilhelminisme. Pour lui, les socialistes et les ultramontains sont à mettre dans le même sac car ces deux forces politiques ont pour objectif de détruire “l’esprit national”, lequel n’est nullement “bigot”, “bourgeois” au sens de “Biedermeier” mais, au contraire, doit s’affirmer comme insolent (“frech”) et moqueur (“pfiffig”). L’Allemand de demain doit être, selon Conrad, “uilenspiegelien” (la mère de Charles De Coster était munichoise!) et opposer aux établis coincés le cortège de ses frasques et de ses farces. La littérature a dès lors pour but de “libérer la culture allemande de tout fatras poussiéreux” (“Die deutsche Kultur von allem Angestaubten zu befreien”). L’art est l’arme par excellence de ce combat métapolitique.

Insolence et moqueries

panizza.jpgInsolence et moqueries dans ce combat métapolitique de libération nationale seront incarnées par Oskar Panizza (1853-1921), psychiatre et médecin militaire, auteur de pièces de théâtre et de poèmes. Panizza s’insurge contre le moralisme étouffant de son époque, héritage du formatage chrétien. Pour lui, la sensualité (souvent hyper-sexualisée) est la force motrice de la littérature et de l’art, par voie de conséquence, le moralisme ambiant est totalement incompatible avec le génie littéraire. Panizza consigne ces visions peu conventionnelles (mais dérivées d’une certaine psychanalyse) et blasphématoires dans une série d’écrits et de conférences visant à détruire l’image édulcorée que les piétistes se faisait de l’histoire de la littérature allemande. Dans une pièce de théâtre, “Das Liebeskonzil”, il se moque du mythe chrétien de la Sainte Famille, ce qui lui vaut une condamnation à un an de prison pour atteinte aux bonnes moeurs et aux sentiments religieux: c’est la peine la plus sévère prononcée dans l’Allemagne wilhelminienne à l’encontre d’un auteur. Une certaine gauche spontanéiste, dans le sillage de mai 68, a tenté de récupérer Oskar Panizza mais n’a jamais pu annexer son antisémitisme affiché, de facture pansexualiste et délirante. Panizza, en effet, voyait le judaïsme, et le catholicisme figé, pharisaïque, qui en découlait, comme une source de l’anti-vitalisme dominant en Europe qui conduit, affirmait-il avec l’autorité du médecin-psychiatre, à l’affadissement des âmes et à la perversité sexuelle. Ses tribulations, jugées scandaleuses, le conduisent à un exil suisse puis français afin d’échapper à une condamnation en Allemagne pour lèse-majesté. En 1904, pour se soustraire au jugement qui allait immanquablement le condamner, il sort nu dans la rue, est arrêté, considéré comme fou et interné dans un asile psychatrique, où il mourra en 1921.

Le “Simplicissimus”

simplicissimus2.jpegEn 1896 se crée à Munich la fameuse revue satirique “Simplicissimus” qui, d’emblée, se donne pour tâche de lutter contre toutes les formes de puritanisme, contre le culte des parades et de la gloriole propre au wilhelminisme, contre la prussianisation de l’Allemagne du Sud (“Simplicissimus” lutte à la fois contre le prussianisme et le catholicisme, la Prusse étant perçue comme un “Etat rationnel”, trop sérieux et donc “ennemi de la Vie”), contre le passéisme bigot et rural de la Bavière. On peut dès lors constater que la revue joue sur un éventail d’éléments culturels et politiques présents en Bavière depuis les années 70 du 19ème siècle. Le symbole de la revue est un “bouledogue rouge”, dont les dents symbolisent l’humour agressif et le mordant satirique que la revue veut incarner. Le mot d’ordre des fondateurs du “Simplicissimus” est donc “bissig sein”, “être mordant”. Cette attitude, prêtée au bouledogue rouge, veut faire comprendre au public que la revue n’adoptera pas le ton des prêcheurs moralistes, qu’elle n’entend pas répéter inlassablement des modes de pensée fixes et inaltérables, tous signes patents d’une “mort spirituelle”. En effet, selon Dilthey (puis selon l’heideggerien Hans Jonas), on ne peut définir une chose que si elle est complètement morte, donc incapable de produire du nouveau, par l’effet de sa vitalité, même atténuée.

L’homme qui se profile derrière la revue “Simplicissimus”, en abrégé “Der Simpl’”, est Albert Langen (fondateur d’une maison d’édition qui existe toujours sous le nom de “Langen-Müller”). Il est alors âgé de 27 ans. Il rejette le wilhelminisme comme David Herbert Lawrence rejetait le victorianisme en Angleterre ou August Strindberg l’oscarisme en Suède. Cette position anti-wilhelminienne ne participe pas d’une hostilité au patriotisme allemand: au contraire, Albert Langen veut, pour la nation, contribuer à faire éclore des idéaux combattifs, finalement assez agressifs. Les modèles dont il s’inspire pour sa revue sont français car en France existe une sorte de “métapolitique satirique”, incarnée, entre autres initiatives, par le “Gil Blas illustré”. Pour confectionner le pendant allemand de cette presse parisienne irrévérencieuse, Langen recrute Ludwig Thoma, virtuose des injures verbales, comme le seront aussi un Léon Daudet en France ou un Léon Degrelle en Belgique; ensuite l’Israélite Thomas Theodor Heine, excellent caricaturiste qui fustigeait les philistins, les ploutocrates, les fonctionnaires et les officiers. Le dramaturge Frank Wedekind se joint au groupe rédactionnel pour railler les hypocrisies de la société moderne, industrialisée et urbanisée. Langen, Heine et Wedekind finissent par être, à leur tour, poursuivis pour crime de lèse-majesté. Langen s’exile à Paris. Heine écope de six mois de prison et Wedekind de sept mois. Du coup, la revue, qui tirait à 15.000 exemplaires, peut passer à un tirage de 85.000.

Pour une armée nouvelle

simplicissimus.jpgLes moqueries adressées à la personne de l’Empereur ne signifient pas que nos trois auteurs niaient la nécessité d’une autorité monarchique ou impériale. Au contraire, leur objectif est de rétablir l’autorité de l’Etat face à un monarque qui est “pose plutôt que substance”, attitude risible, estiment-ils, qui s’avère dangereuse pour la substance politique du IIème Reich. Les poses et les parades du wilhelminisme sont la preuve, disaient-ils, d’une immaturité politique dangereuse face à l’étranger, plus équilibré et moins théâtral dans ses affirmations. S’ils critiquaient la caste des officiers modernes, recrutés hors des catégories sociales paysannes et aristocratiques traditionnellement pourvoyeuses de bons soldats, c’est parce que ces nouveaux officiers modernes étaient brutaux et froids et non plus sévères et paternels: nos auteurs plaident pour une armée efficace, soudée, capable de prester les tâches qu’on réclame d’elle. De même, notre trio du “Simpl’”, derrière leurs satires, réclament une meilleure formation technique de la troupe et fustigent l’anti-militarisme des sociaux-démocrates.

Sur le plan géopolitique, la revue “Simplicissimus” a fait preuve de clairvoyance. En 1903, elle réclame une attitude allemande plus hostile aux Etats-Unis, qui viennent en 1898 d’arracher à l’Espagne les Philippines et ses possessions dans les Caraïbes, l’Allemagne héritant de la Micronésie pacifique auparavant hispanique. L’Allemagne et l’Europe, affirmaient-ils, doivent trouver une réponse adéquate à la Doctrine de Monroe, qui vise à interdire le Nouveau Monde aux vieilles puissances européennes et à une politique agressive de Washington qui chasse les Européens du Pacifique, en ne tenant donc plus compte du principe de Monroe, “l’Amérique aux Américains”. Le “Simpl’” adopte ensuite une attitude favorable au peuple boer en lutte contre l’impérialisme britannique. Il est plus souple à l’égard de la France (qui avait offert l’asile politique à Langen). Il est en revanche hostile à la Russie, alliée traditionnelle de la Prusse.

Les cabarets

439976_Die-Elf-Scharfrichter-The-Eleven-Executioners.jpgA côté du “Simplicissimus”, le Munich de la première décennie du 20ème siècle voit naître le cabaret “Die Elf Scharfrichter” (“Les onze bourreaux”) qui marquera durablement la chronique entre 1901 et 1903. Ce cabaret, lui aussi, se réfère à des modèles étrangers ou non bavarois: “Le chat noir” de Paris, “Il quatre cats” de Barcelone, le “Bat” de Moscou et l’“Überbrettl” de Berlin. Les inspirateurs français de ce cabaret munichois étaient Marc Henry et Achille Georges d’Ailly-Vaucheret. Mais Berlinois et Bavarois appliquent les stratégies du rire et de l’arrachage des masques préconisées par Nietzsche. En effet, la référence au comique, à l’ironie et au rire chez Nietzsche est évidente: des auteurs contemporains comme Alexis Philonenko ou Jenny Gehrs nous rappellent l’importance critique de ce rire nietzschéen, antidote précieux contre les routines, les ritournelles des conformistes et des pharisiens puis, aujourd’hui, contre la critique aigre et inféconde lancée par l’Ecole de Francfort et Jürgen Habermas. Jenny Gehrs démontre que les cabarets et leur pratique de la satire sont étroitement liés aux formes de critique que suggérait Nietzsche: pour celui-ci, l’ironie déconstruit et détruit les systèmes de valeurs et les modes de pensée qui figent et décomposent par leurs raideurs et leur incapacité vitale à produire de la nouveauté féconde. L’ironie est alors expression de la joie de vivre, de la légèreté d’âme, ce qui n’induit pas une absence de sériosité car le comique, l’ironie et la satire sont les seules voies possibles pour échapper à l’ère du nihilisme, les raideurs, rigidités, pesanteurs ne produisant que “nihil”, tout comme le “politiquement correct” et les conventions idéologiques de notre temps ne produisent aucune pensée féconde, aucune pensée capable de sortir des ornières où l’idéologie et les praxis dominantes se sont enlisées. La pratique de l’ironie implique d’adopter une pensée radicale complètement dépourvue d’indulgence pour les conventions établies qui mutilent et ankylosent les âmes. L’art, pour nos contestataires munichois comme pour Jenny Gehrs, est le moyen qu’il faut déployer pour détruire les raideurs et les rigidités qui mènent le monde à la mort spirituelle. Alexis Philonenko rappelle que sans le rire, propre de l’homme selon Bergson, les sociétés basculent à nouveau dans l’animalité et ruinent les ressorts et les matrices de leur propre culture de base. Si ne règnent que des constructions idéalisées (par les médiacrates par exemple) ou posées comme indépassables ou éternelles, comme celle de la pensée unique, de la bien-pensance ou du “politiquement correct”, le monde sombrera dans la mélancolie, signe du nihilisme et du déclin de l’homme européen. Dans ce cas, il n’y a déjà plus de perspectives innovantes, plus aucune possibilité de faire valoir nuances ou diversités. Le monde devient gris et terne. Pour nos cabaretistes munichois, le wilhelminisme était une praxis politique dominante qui annonçait déjà ce monde gris à venir, où l’homme ne serait plus qu’un pantins aux gestes répétitifs. Il fallait réagir à temps, imméditement, pour que la grisaille envahissante ne dépasse pas la première petite étape de son oeuvre de “monotonisation”.

Franziska zu Reventlow

revenpor.jpgFranziska zu Reventlow est la figure féminine qui opère la jonction entre ce Schwabing anarchisant et la “révolution conservatrice” proprement dite, parce qu’elle a surtout fréquenté le cercle des Cosmiques autour de Stefan George, où se manifestaient également deux esprits profonds, Alfred Schuler et Ludwig Klages, dont la pensée n’a pas encore été entièrement exploitée jusqu’ici en tous ses possibles. David Clay Large définit la vision du monde de Franziska zu Reventlow comme “un curieux mélange d’idées progressistes et réactionnaires”. Surnommée la “Reine de Schwabing”, elle est originaire d’Allemagne du Nord, de Lübeck, d’une famille aristocratique connue, mais, très tôt, elle a rué dans les brancards, sa nature rebelle passant outre toutes les conventions sociales. La lecture du Norvégien Ibsen —il y avait un “Ibsen-Club” à Lübeck— du Français Emile Zola, du socialiste allemand Ferdinand Lassalle et, bien entendu, de Friedrich Nietzsche, dont le “Zarathoustra” constituait sa “source sacrée” (“geweihte Quelle”). Elle arrive à Schwabing à 22 ans et, aussitôt, Oskar Panizza la surnomme “la Vénus du Slesvig-Holstein” (“Die schleswig-holsteinsche Venus”), tout en ajoutant, perfide, qu’elle était “très sale”. Les frasques de Franziska ont choqué sa famille qui l’a déshéritée. A Munich, elle crève de faim, ne prend qu’un maigre repas par jour et se came au laudanum pour atténuer les douleurs qui l’affligent. Rapidement, elle collectionne quelques dizaines d’amants, se posant comme “mère libre” (“freie Mutter”) et devenant ainsi l’icône du mouvement féministe, une sorte de “sainte païenne”.

Quel est le “féminisme” de Franziska zu Reventlow? Ce n’est évidemment pas celui qui domine dans les esprits de nos jours ou qui a animé le mouvement des suffragettes. Pour la Vénus de Schwabing, le mouvement de libération des femmes ne doit pas demander à ce qu’elles puissent devenir banquières ou courtières en assurances ou toute autre horreur de ce genre. Non, les femmes vraiment libérées, pour Franziska zu Reventlow, doivent incarner légèreté, beauté et joie, contrairement aux émancipées acariâtres que nous avons connues naguère, les “Emanzen” dont se moquent aujourd’hui les Allemands. Franziska les appelaient déjà les “sombres viragos” (“Die finstere Viragines”). Si les femmes libérées ne deviennent ni légères ni belles ni joyeuses le monde deviendra atrocement ennuyeux et sombrera dans la névrose, bannissant en même temps toute forme charmante d’érotisme.

Les “Cosmiques” de Schwabing

 

2-format43.jpg

Malgré le scandale que suscite ses positions féministes et libératrices, Franziska zu Reventlow demeure d’une certaine manière “conservatrice” car elle valorise le rôle de la femme en tant que mère biologique, dispensatrice de vie mais aussi d’éducation. La femme doit communiquer le sens de la beauté à ses enfants, les plonger dans le patrimoine littéraire de leur nation et de l’humanité toute entière. Cette double fonction, à la fois révolutionnaire et conservatrice, Franziska zu Reventlow la doit à sa fréquentation du cercle des “Cosmiques” de Schwabing, autour de Karl Wolfskehl et Stefan George, d’une part, d’Alfred Schuler et Ludwig Klages, d’autre part, avant la scission du groupe en deux clans bien distincts. Les “Cosmiques”, au nom d’une esthétique à la fois grèco-romaine, médiévisante et romantique, teintée de pré-raphaélisme et d’Art nouveau, présentaient tous les affects anti-industriels de l’époque, déjà repérables chez leurs prédécesseurs anglais; ils vont également renouer avec l’anti-rationalisme des premiers romantiques et manifester des affects anti-parlementaires: la raison conduit, prétendaient-ils, aux horreurs industrielles de la sur-urbanisation inesthétique et aux parlottes stériles des députés incultes, qui se prennent pour des émules de Socrate en n’émettant que de purs discours dépourvus de tous sentiments. Les “Cosmiques” toutefois ne renouent pas avec le christianisme romantique d’un Novalis, par exemple: ils déploient, surtout chez Schuler et Klages, une critique radicale du christianisme et entendent retourner aux sources païennes de la culture européenne pré-hellénique qu’ils appeleront “tellurique”, “chtonienne” ou “pélasgique”. Ce paganisme est, en filigrane, une révolte contre les poncifs catholiques du conservatisme bavarois qui n’abordent la spiritualité ou la “carnalité” de l’homme qu’en surface, avec la suffisance du pharisaïsme: pour les “Cosmiques”, “il existe des chemins sombres et secrets”, qu’il faudra redécouvrir pour redonner une “aura” à la culture, pour la ramener à la lumière. Franziska zu Reventlow, dans ses souvenirs de Schwabing, où elle se moque copieusement des “Cosmiques”, dont certains étaient tout-à-fait insensibles aux séductions de la féminité, que les hommes et les femmes qui emprunteront ces voies “sombres et secrètes” seront les initiés de demain, les “Enormes” (“Die Enormen”), tandis que ceux qui n’auront jamais l’audace de s’y aventurer ou qui voudront les ignorer au nom de conventions désuètes ou étriquées, seront les “Sans importance” (“Die Belanglosen”).

De Bachofen à Klages

Si Stefan George a été le poète le plus célèbre du groupe des “Cosmiques”, Ludwig Klages, qui se détachera du groupe en 1904, en a indubitablement été le philosophe le plus fécond, encore totalement inexploré aujourd’hui en dehors des frontières de la germanophonie. Figure de proue de ce qu’Armin Mohler a défini comme la “révolution conservatrice”, Klages ne basculera jamais dans une tentation politique quelconque; il étudiera Bachofen et Nietzsche, fusionnera leur oeuvre dans une synthèse qui se voudra “chtonienne” ou “tellurique”, tout en appliquant ses découvertes philosophiques à des domaines très pratiques comme la science de l’expression, dont les chapitres sur la graphologie le rendront mondialement célèbre. La postérité a surtout retenu de lui cette dimension de graphologue, sans toutefois vouloir se rappeler que la graphologie de Klages est entièrement tributaire de son interprétation des oeuvres de Bachofen et Nietzsche. En effet, Klages a été l’un des lecteurs les plus attentifs du philosophe et philologue bâlois Bachofen, issu des facultés de philologie classique de Bâle, tout comme Nietzsche. Klages énonce, suite à Bachofen, une théorie du matriarcat primordial, expression spontanée et non détournée de la Vie mouvante et fluide que le patriarcat a oblitéré au nom de l’Esprit, censé rigidifier les expressions vitales. L’histoire du monde est donc une lutte incessante entre la Vie et l’Esprit, entre la culture (matriarcale) et la civilisation (patriarcale). Alfred Schuler, mentor de Klages mais qui n’a laissé derrière lui que des fragments, mourra lors d’une intervention chirurgicale en 1923; Klages s’exilera en Suisse, où il décédera en 1956, après avoir peaufiné son oeuvre qui attend encore et toujours d’être pleinement explorée dans diverses perspectives: écologie, géophilosophie, proto-histoire, etc. Quant à Franziska zu Reventlow, elle quittera Munich pour une autre colonie d’artistes basée à Ascona en Suisse, une sorte de nouveau Schwabing avec, en plus, l’air tonifiant des Alpes tessinoises. Elle y mourra en 1918.

Thomas Mann patriote

La guerre de 1914 balaie le monde de Schwabing, que les conservateurs aigris voulaient voir disparaître, pour qu’il ne puisse plus les ridiculiser. Bon nombre d’artistes s’engagent dans l’armée, dont le poète Richard Dehmel et les peintres August Macke et Franz Marc (du groupe “Blauer Reiter”, le “Cavalier bleu”) qui, tous deux, ne reviendront pas des tranchées. Le “Simplicissimus” cesse de brocarder cruellement les officiers, ces “analphabètes en uniforme”, et les généraux, ces “sombres simplets”, et devient un organe patriotique intransigeant, sous prétexte qu’en temps de guerre, quand la patrie est en danger, “les muses doivent se taire” et qu’il faut participer “à une guerre qui nous est imposée” et “au combat pour défendre la culture menacée par l’étranger (belliciste)”. Thomas Mann participe à l’effort de guerre en opposant la culture (vivante, tirée d’un humus précis) à la civilisation dans un opuscule patriotique intitulé “Gedanken im Kriege” (“Idées en temps de guerre”). La culture (allemande) pour Mann, en cette fin août 1914, est “homogénéité, style, forme, attitude et bon goût”. Quant à la “civilisation”, représentée par l’Ouest, elle est “rationalité (sèche), esprit des Lumières, édulcoration, moralisme, scepticisme et dissolution”. La tâche de l’Allemagne, dans cette guerre est de défendre la fécondité vitale de la culture contre les attaques de la civilisation qui entend “corseter” les âmes, leur faire perdre leurs élans, édulcorer la littérature et la musique qui ne peuvent se développer que sur un terreau “culturel” et non “civilisationnel”. Ces idées nationales de Thomas Mann sont consignées dans “Betrachtungen eines Unpolitischen” (“Considérations d’un apolitique”). Son frère Heinrich Mann, en revanche, plaidait pour une civilisation marquée par l’humanisme de Zola, adepte d’une justice pour chaque individu, au-delà de toute institution ou cadre politique, un Zola qui s’était précisément hissé, lors de l’affaire Dreyfus, au-dessus des institutions politiques de la France: pour Heinrich, Thomas aurait dû prendre une position similaire à l’auteur du “J’accuse” et se hisser au-dessus de l’idée patriotique et de l’Etat semi-autoritaire du wilhelminisme. A partir des années vingt, les deux frères se réconcilieront sur base des idées “occidentales” de Heinrich.

Noire vision spenglerienne

Oswald Spengler était revenu à Munich en 1911, après y avoir passé une année d’étude en 1901: toujours amoureux de la ville bavaroise, il était cependant déçu en s’y réinstallant. Il ne retrouvait plus intact le style classique de Louis I, y découvrait en revanche “l’ornementalisme imbécile” de l’“Art Nouveau” et les “escroqueries expressionnistes”, toutes expressions du déclin qui affecte l’Europe entière. Pour Spengler, qui s’apprête à rédiger sa somme “Der Untergang des Abendlandes”, les affres de décadence qui marquent Munich sont autant de symboles du déclin général de l’Europe, trop influencée par les idées “civilisatrices”. Pour Spengler, la transition entre, d’une part, la phase juvénile que constitue toute culture, créatrice et d’abord un peu fruste, et, d’autre part, la phase sénescente de la civilisation, s’opère inéluctablement, comme une loi biologique et naturelle. Les hommes —les porteurs et les vecteurs de culture vieillissants— se mettent à désirer le confort et le raffinement, abandonnent les exigences créatrices de leur culture de départ, n’ont plus la force juvénile d’innover: tous les peuples d’Occident subiront ce processus de sénescence pour en arriver d’abord à un stade de lutte planétaire entre “pouvoirs césariens”, ensuite à un stade d’uniformité généralisée, à une ère des masses abruties, parquées dans des villes tentaculaires, dont l’habitat sera constitué de “casernements” sordides et sans charme. Ces masses recevront, comme dans le Bas-Empire, du pain et des jeux. Tel est, en gos, le processus de déclin que Spengler a voulu esquisser dans “Der Untergang des Abendlandes”.

Le déclin de Munich et de toute l’Europe était donc en germe avant le déclenchement de la première grande conflagration intereuropéenne. La guerre accélère le processus. Au lendemain de l’armistice de novembre 1918, nous aurons donc affaire à un autre Munich et à une autre Europe. Une autre histoire, bien différente, bien plus triste, pouvait commencer: celle de l’après-Schwabing. Avant d’assister à la lutte plénétaire entre les nouveaux Césars (Hitler, Staline, Churchill, Roosevelt). Après la victoire du César américain, l’ère des masses abruties par la consommation effrénée et par le confort matériel a commencé. Nous y sommes toujours, malgré les ressacs dus aux crises: l’aura des Cosmiques n’élit plus personne. Les masses abruties sont là, omniprésentes. Les villes tentaculaires détruisent les cultures, au Japon, au Mexique, en Afrique. Et pas seulement en Europe et en Amérique du Nord. Les jeux virtuels sont distribués à profusion. Spengler avait raison.

Robert Steuckers.

(Forest-Flotzenberg, Vlotho im Wesergebirge, été 2002).