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mardi, 09 novembre 2021

Le voyage atlantique de l'impubliable Jünger

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Le voyage atlantique de l'impubliable Jünger

Andrea Scarabelli

Ex: https://blog.ilgiornale.it/scarabelli/2017/08/07/il-viaggio-atlantico-dellimpubblicabile-junger/

Ernst Jünger, Voyage atlantique, Londres, 1947. Deux ans après la fin de la guerre mondiale, un petit livre inhabituel a été publié dans une série destinée aux prisonniers de guerre allemands en Angleterre. Ernst Jünger est donc l'auteur de Atlantische Fahrt, récemment publié en italien chez Guanda sous le titre Traversata atlantica, dans une traduction d'Alessandra Iadicicco et avec un éditeur enfin digne de ce nom. En plus du texte, le volume contient un riche appareil de correspondance, des annexes bio-bibliographiques, un grand nombre de notes et une critique d'Erhart Kästner de 1948. Reconstituée à travers ces riches apports, l'histoire éditoriale de Atlantische Fahrt est comique dans un certain sens. Le premier livre d'après-guerre de Jünger n'a pas été publié en Allemagne, en raison de la répression "démocratique" qui l'a interdit de publication et de parole, en même temps que d'autres dieux de la philosophie du 20ème siècle, dont Martin Heidegger et Carl Schmitt. L'épuration culturelle et anthropologique de la nouvelle Allemagne finit par le toucher lui aussi, abandonné à lui-même, incapable d'écrire et de publier et pourtant imprimé et réimprimé à l'étranger (surtout en Suisse, dans ces années-là), alors qu'une longue lignée d'intellectuels était intervenue en sa faveur. Le veto des autorités alliées durera jusqu'en 1949. Jusque-là, rien ne pouvait être fait. "Faut-il être un prisonnier allemand pour pouvoir lire un certain auteur interdit en Allemagne?" a amèrement remarqué l'écrivain Stefan Andres en critiquant Jünger en 1949.

À la fin des années 1940, le futur lauréat du prix Goethe est donc enchaîné : mais Jünger, le paria, s'est métamorphosé, a changé de peau, assumant la tâche de "phare aristocratique de la douleur", comme il le dira quelques années plus tard. C'est la chair des vaincus qui réclame l'attention dans ces pages lumineuses, que la sagesse européenne ne pourra pas ignorer longtemps. Un cri qui sera certainement malvenu pour certaines belles âmes, mais qui fait de ses paroles l'un des chants les plus intenses du 20ème siècle.

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En tout cas, le livre a été publié en 1947, mais il s'agit du récit d'un voyage au Brésil onze ans plus tôt : de Hambourg à Belém, Recife, São Paulo, Rio de Janeiro et Bahia. Avec une escale préliminaire aux Açores, occasion idéale pour faire le point sur la situation de l'Allemagne qu'il vient de quitter: "Leur archipel me semblait un symbole de notre situation: comme une chaîne de volcans qui, à l'extrême frontière de l'Europe, s'élève au milieu de solitudes infinies". Il décide de faire une pause dans une civilisation dont il commence à entrevoir les ombres, changeant d'hémisphère, sous un soleil et des constellations différents. Ce voyage allait marquer un profond changement dans sa vision du monde, en déplaçant l'accent de la situation en Allemagne vers celle du monde dans son ensemble, comme le note Detlev Schöttker dans son essai à la fin du livre. Mais Jünger ne le sait pas encore, et dans le Nouveau Monde, dans sa surabondance protéiforme, il cherche les images, les phénomènes originaux dont parlait Goethe dans ses écrits sur la métamorphose des plantes. Chacune de ces images réveille des réminiscences anciennes, faisant de chaque homme un artiste et un artifice. L'Atlantique comme un miroir, dans lequel le poète d'Orages d'acier se reconnaît et se retrouve. Ici, chaque découverte est une (auto)révélation, un retour à la maison. Il s'en rend compte lorsqu'il aperçoit un poisson de forme bizarre, inconnu des classifications occidentales. Quelque chose de dormant se réveille en lui :

"A la vue de ces créatures fabuleuses, ce qui nous frappe, c'est avant tout l'accord entre l'apparition et l'imagination. Nous ne les percevons pas comme si nous les découvrions, mais comme si nous les inventions. Elles nous surprennent et en même temps nous nous sentons intimement familiers avec elles, comme si elles étaient des parties de nous-mêmes réalisées en images. Parfois, dans certains rêves et, très probablement, à l'heure de la mort, cette imagination acquiert en nous une force extraordinaire. Les mythes naissent là où les réalités supérieures et suprêmes s'accordent avec le pouvoir de l'imagination".

Mais l'Amérique du Sud n'est pas seulement une nature non contaminée. Au milieu des dédales de végétation et des humbles rives de rivières sans fin se dressent d'imposantes mégalopoles, encore inconnues des Européens de l'époque. C'est en présence de ces agglomérations vertigineuses que s'opère la révolution copernicienne de l'écrivain : la technologie, vue à l'œuvre dans la Première Guerre mondiale puis dans l'industrie, est devenue un phénomène mondial. Les acolytes du Travailleur ont envahi le globe, le transfigurant et redessinant ses frontières. Rio de Janeiro le consterne: "La ville a une forte impression sur moi. C'est une résidence pour l'esprit du monde". Et c'est précisément dans ces pages qu'apparaît le nom d'Oswald Spengler, qui dans Le Déclin de l'Occident avait indiqué dans les métropoles inorganiques et amorphes l'un des symptômes des phases terminales d'une civilisation. Des prophéties aussi amères que d'actualité, même un siècle après la publication de son monumental traité sur la morphologie des civilisations.

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Et pourtant, comme l'écrivait Hölderlin, là où le danger grandit, surgit aussi ce qui sauve, et au cours de ce voyage au bout de l'Occident, une fois encore, la nature sauvage et intacte agit comme un buen retiro, comme un contrepoids à la technicisation planétaire effrénée. Une lettre à son frère Friedrich Georg, écrite le 20 novembre 1936 à Santos, en témoigne: "Dans ces contrées, il y a un proverbe que j'aime beaucoup ; il dit: la forêt est grande, et cela signifie que quiconque se trouve en difficulté ou est victime de persécutions peut toujours espérer trouver refuge et accueil dans cet élément". Il est probable que certains de ses compagnons de voyage pensent la même chose, et lorsqu'ils arrivent au Brésil, ils décident de quitter le navire et de ne pas retourner en Allemagne. Au contraire, il l'a fait, vivant la tragédie européenne jusqu'à son dernier acte, mais emportant avec lui cette image de la forêt, développée quelques années plus tard dans Le traité du rebelle. Dans la forêt, il verra l'authentique patrie spirituelle de l'homme, par opposition au navire, domaine de la vitesse et du progrès, et le rebelle sera celui qui se tournera vers la forêt, en se donnant à la brousse - en quittant le navire, en fait.

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Mais il n'y a aucune trace de cela dans sa biographie. Pour l'instant, il n'y a que la haute mer et les îles, l'immensité de l'Atlantique et l'abri des atolls et des archipels, pour réitérer l'irréductible dualité qui constitue la quintessence littéraire - mais pas seulement - d'Ernst Jünger. L'océan, sous le charme duquel "notre être s'écoule et se dissout ; tout ce qui est rythmique en nous s'anime, résonances, battements, mélodies, le chant originel de la vie qui berce les âges". Son charme nous fait revenir vides, mais heureux comme après une nuit passée à danser". Les îles, en revanche, contiennent la promesse d'une joie "plus profonde que le calme, que la paix dans cet élément orageux déplacé des profondeurs". Même les étoiles sont des îles dans la mer de lumière de l'éther".

Les îles, la mer... Il est tard. Notre voyageur note ces mots en retournant dans son Europe, martelée par l'urgence de l'histoire, secouée par des vents qui vont bientôt révéler leur forme monstrueuse et titanesque. Les derniers mots du journal brésilien sont datés du 15 décembre 1936 :

"Je suis satisfait de ce voyage. Éole et tous les autres dieux ont été propices. Plus intense encore est le plaisir que j'y ai ressenti par rapport aux temps menaçants qui s'annoncent de plus en plus clairement, dont les flammes vacillent déjà à l'horizon".

Ces flammes qui finiront par embraser une civilisation entière, une civilisation dont Jünger choisira d'être le témoin, payant à la première personne, comme beaucoup d'autres, sa propre inactualité.

lundi, 11 mai 2020

Le Groenland : territoire à vendre ?

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Le Groenland : territoire à vendre ?

En août 2019, le président américain Donald Trump affirme vouloir acheter le Groenland au Danemark. Derrière l’attitude cavalière et le ton proche de la plaisanterie, la proposition, plus sérieuse qu’il n’y paraît, révèle de nombreux enjeux économiques et géopolitiques, indices de l’intérêt croissant que suscite l’Arctique.

La proposition n’est pas si saugrenue de la part des États-Unis, dont l’expansion doit historiquement beaucoup à l’acquisition de territoires (la Louisiane à la France en 1803, la Floride à l’Espagne en 1819, l’Alaska à la Russie en 1867). Mais pourquoi Donald Trump s’intéresse-t-il à cet immense territoire peu peuplé (2,16 millions de kilomètres carrés pour 55 992 habitants au 1er janvier 2019) ? Une partie de la réponse réside dans les énormes richesses dont regorge le Groenland, qu’il s’agisse des minerais (cuivre, zinc, fer, diamant, or, titane, uranium) ou des hydrocarbures offshore, lesquels ne sont toutefois pas assez concentrés pour en permettre une exploitation rentable vu le coût élevé de l’extraction dans les conditions extrêmes du milieu arctique. D’autres acteurs les convoitent, à l’instar de la Chine, qui a des visées sur les terres rares, une matière première dont elle est la première importatrice mondiale, et dont le Groenland abrite 12 à 25 % des réserves mondiales. Ces ressources sont encore peu exploitées puisque 85 % des recettes d’exportations de ce territoire autonome dépendant du Danemark sont issues des produits de la pêche.

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Pourtant, l’intérêt des États-Unis est plus stratégique qu’économique. Entre Europe et océans Arctique et Atlantique, le Groenland a une situation aussi importante que l’Alaska, autre porte de l’Arctique, et qui a justifié par le passé deux tentatives d’achat, en 1867 et en 1946. Les États-Unis disposent d’ailleurs d’installations militaires de premier plan sur ce territoire, avec la base de Thulé, dans le nord-ouest, et des équipements de surveillance spatiale. Cette proposition de Donald Trump s’inscrit donc dans les nouvelles orientations de la stratégie américaine, révélant le regain d’intérêt de l’Arctique pour la première puissance mondiale.

Les États-Unis cherchent à réinvestir la région face à la réémergence russe et aux appétits chinois, comme en témoigne en septembre 2019 la visite du vice-président américain, Mike Pence, en Islande. Déjà, en mai 2019, le secrétaire d’État, Mike Pompeo, avait tenu un discours agressif contre la volonté supposée de la Russie et de la Chine de s’approprier la région, un ton surprenant pour une réunion du Conseil de l’Arctique, le forum intergouvernemental regroupant les États riverains de l’Arctique, plutôt caractérisé par la coopération que par le conflit.

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Cette proposition a pourtant peu de chances d’aboutir, un achat nécessitant l’accord du Parlement groenlandais (l’Inatsirartut, Chambre monocamérale de 31 membres), certes autonome du Danemark auquel il est rattaché, mais qui lui assure une grande partie du financement de son fonctionnement, à hauteur de 500 millions d’euros annuels. Le poids des partis indépendantistes rend improbable le choix d’une nouvelle tutelle pour un territoire qui recherche plutôt les moyens de son indépendance, aussi bien politique qu’économique. 

jeudi, 05 décembre 2019

Le Serpent à plumes, un dieu normand ?

Avant d’avoir été un dieu, le Serpent à plumes, originaire d’une lointaine contrée, débarqua au Mexique. Il devint le chef d’un peuple ancien, les Toltèques. Le Serpent à plumes était considéré comme le plus beau des hommes. Ses cheveux et sa barbe avaient la couleur des rayons de l’astre solaire. La légende raconte que Quetzalcoatl, une des incarnations du Serpent à plumes, apprit aux hommes à fondre les métaux et tailler les pierres précieuses. Malheureusement, des rivalités politiques obligèrent Quetzalcoatl à quitter le pays. Avant son départ, il lança au peuple : « Un jour, des hommes blancs et barbus comme moi viendront de l’Orient pour rétablir mon ancien royaume ». Puis, il s’embarqua dans le golfe du Mexique avec quelques compagnons pour disparaître au-delà de l’Océan.

En fouillant la mémoire des peuples Mayas, Muiscas, Vénézuéliens, on retrouva quelques traces de son passage. Son nom diffère selon les peuples : Kukulkan, Zumé, Bochica, Viracocha… Un homme blanc, blond et barbu.

Cinq siècles plus tard, face aux Espagnols, Aztèques et Incas pensaient avoir affaire à ces dieux barbus de leur panthéon. Quelle grave erreur, quelle méprise ! Il s’agissait des conquistadors Cortès et Pizarre.

En ces temps reculés que certains situent au Xe siècle, quel peuple à la barbe et aux cheveux clairs avait bien pu impressionner les Amérindiens au point de le faire entrer dans la légende ?

Lequel, sinon ce peuple de hardis navigateurs – les Normands – seuls capables d’affronter l’Océan avec leurs bateaux, esnèques ou drakkars, durant le Haut Moyen Âge,

On trouve, en Amérique du Sud, des portraits européens sous forme de sculptures ou de fresques, des momies blondes sont détenues par le Musée anthropologique de Lima, au Pérou, une écriture étrangement semblable à des runes au Paraguay, un navire de type nordique à Lambayeque, au Pérou et même une carte avec le tracé précis de l’Amérique du Sud avant la découverte du Pacifique par Balboa et le voyage de Magellan.

Les Normands implantés en baie de Seine surent alors établir des routes commerciales régulières avec l’Amérique méridionale. À la fin du XIIIe siècle, le bois du Brésil est mentionné dans les « Droitures, coustumes et appartenances de la viscomté de l’eau ». En outre, la coutume d’Harfleur et les douanes de Dieppe prélevaient à la même époque des droits sur les troncs de sapang, qui donnent une teinte rouge, que l’on retrouve en Amérique centrale et du Sud.

En parallèle à ce négoce transocéanique, les cartes commencent à situer dans l’Océan Atlantique une « île » que les géographes appellent Bracil, Berzil, Brazil…

Dans le sillage des courageux navigateurs normands du Moyen Âge, le gentilhomme honfleurais, le capitaine Paulmier de Gonneville accoste au Brésil en 1503 et Jean Denis, maire de Honfleur, explore l’embouchure du Saint-Laurent en 1506.

Pour effectuer ces découvertes, les Normands sont à la pointe.

EuroLibertés vous conseille deux livres de Jacques de Mahieu aux éditions Dualpha pour découvrir la présence viking en Amérique du Sud :

Le grand voyage du Dieu-Soleil : Le professeur de Mahieu apporte avec ce livre les preuves formelles de l’arrivée, cinq siècles avant Christophe Colomb, des Drakkars Vikings en Amérique. Le grand voyage du Dieu­-Soleil, c’est la magnifique épopée des drakkars partis à la conquête du Nouveau Monde. C’est l’exploration et l’occupation des terres inconnues. C’est, enfin, un livre à grand spectacle doublé d’une recherche passionnée, minutieuse et savante. Une contribution magistrale à l’histoire pré­colombienne de ce continent. Pour commander ce livre, cliquez ici.

Drakkars sur l’Amazone : Au sud de l’Amazone, dans l’état brésilien du Piaui, Jacques de Mahieu a relevé et identifié les Sept-Villes, un lieu de culte qu’il attribue aux Vikings. Pour commander ce livre, cliquez ici.

mardi, 02 octobre 2018

Il viaggio atlantico dell’impubblicabile Jünger

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Il viaggio atlantico dell’impubblicabile Jünger

Andrea Scarabelli

Ex: http://blog.ilgiornale.it/scarabelli

Londra, 1947. A due anni dalla fine del conflitto mondiale viene pubblicato un singolare volumetto, in una collana destinata ai prigionieri di guerra tedeschi detenuti in Inghilterra. È Ernst Jünger l’autore di Atlantische Fahrt, appena uscito con il titolo Traversata atlantica per Guanda, nella traduzione di Alessandra Iadicicco e con una curatela finalmente degna di questo nome. Oltre al testo, infatti, il volume contiene un ricco apparato epistolare, appendici biobibliografiche, una gran mole di note e una recensione di Erhart Kästner del 1948. Ricostruita attraverso questi ricchi apparati, la storia editoriale di Atlantische Fahrt ha del comico. Il primo libro pubblicato da Jünger nel dopoguerra, infatti, non uscì in Germania, complice il repulisti democratico che mise al bando lui e altri numi della filosofia novecentesca, tra cui Martin Heidegger e Carl Schmitt. La piazza pulita culturale e antropologica della nuova Germania finì per colpire anche lui, abbandonato a se stesso, impossibilitato a scrivere e pubblicare eppure stampato e ristampato all’estero (soprattutto in Svizzera, in quegli anni), nonostante una lunga cordata d’intellettuali fosse intervenuta a suo favore. Il veto durerà fino al 1949. Fino ad allora, nulla da fare. «Bisogna essere prigionieri tedeschi per poter leggere un certo autore proibito in Germania?» noterà amaramente lo scrittore Stefan Andres, recensendolo nel 1949.

ej-tratl.jpgAlla fine degli anni Quaranta, insomma, il futuro premio Goethe è in catene: ma Jünger, il reietto, si metamorfosa, cambia pelle, assumendosi il compito di fari aristocratico del dolore, come dirà pochissimi anni più tardi. È la carne degli sconfitti a reclamare attenzione in queste luminose pagine, che la sapienza europea non potrà a lungo ignorare. Un grido che di certo risulterà sgradito a certe anime belle, ma che fa delle sue parole uno dei canti più intensi del secolo XX.

Il libro, ad ogni modo, esce nel ’47, ma è il resoconto di un viaggio compiuto undici anni prima in Brasile: da Amburgo a Belém, Recife, San Paolo, Rio de Janeiro e Bahia. Con uno scalo preliminare alle Azzorre, occasione ideale per fare il punto sulla situazione della Germania, che si è appena lasciato alle spalle: «Il loro arcipelago mi è parso un simbolo della nostra situazione: come una catena di vulcani che, sull’estremo confine dell’Europa, si leva in mezzo a infinite solitudini». Decide di prendersi una pausa da una civiltà di cui comincia a intravvedere le ombre, cambiando emisfero, sotto un sole e costellazioni differenti. Un viaggio che segnerà una svolta profonda nella sua visione del mondo, spostando l’asse dalla situazione della Germania a quella mondiale, nella sua totalità, come nota Detlev Schöttker nel suo saggio in conclusione del libro. Ma Jünger ancora non lo sa, e nel Nuovo Mondo, nella sua sovrabbondanza proteiforme, cerca le immagini, i fenomeni originari di cui ha parlato Goethe nei suoi scritti sulla metamorfosi delle piante. Ognuna di queste immagini risveglia antiche reminiscenze, rendendo ogni uomo artista e artefice. L’Atlantico come specchio, nel quale il poeta delle Tempeste d’Acciaio si riconosce, ritrovandosi. Qui ogni scoperta è una (auto)rivelazione, un ritorno a casa. Lo intuisce scorgendo un pesce dalla forma bizzarra, sconosciuto alle classificazioni occidentali. Qualcosa di sopito si risveglia in lui:

«Alla vista di simili creature favolose, ciò che colpisce è soprattutto l’accordo tra apparizione e immaginazione. Non le percepiamo come se le scoprissimo, ma come se le inventassimo. Ci sorprendono e al tempo stesso le sentiamo intimamente familiari, come fossero parti di noi stessi che si realizzano in immagini. A volte, in certi sogni e, molto verosimilmente, nell’ora della morte, questa immaginazione acquista in noi una forza straordinaria. I miti nascono dove realtà superiori e supreme si accordano con la forza dell’immaginazione».

Ma il Sudamerica non è solo natura incontaminata. Tra i dedali vegetali e gli umbratili argini di fiumi senza fine svettano imponenti megalopoli ancora sconosciute agli europei di quegli anni. È proprio al cospetto di questi vertiginosi agglomerati che avviene la rivoluzione copernicana dello scrittore: la tecnica, vista all’opera nella Prima guerra mondiale e poi nelle industrie, è diventata un fenomeno planetario. Gli accoliti del Lavoratore hanno invaso il globo, trasfigurandolo, ridisegnandone le frontiere. Rio de Janeiro lo sgomenta: «La città esercita su di me un’impressione possente. È una residenza dello spirito del mondo». E proprio in queste pagine compare il nome di Oswald Spengler, che ne Il tramonto dell’Occidente aveva indicato nelle metropoli, inorganiche e amorfe, uno dei sintomi delle fasi terminali di una civiltà. Profezie amare quanto attuali, anche a distanza di un secolo dalla pubblicazione del monumentale trattato di morfologia delle civiltà.

Eppure, come scrisse Hölderlin, dove cresce il pericolo nasce anche ciò che salva, e, nel corso di questo viaggio al termine dell’Occidente, a far da buen retiro, da contrappeso alla sfrenata tecnicizzazione planetaria è ancora una volta la natura selvaggia e illibata. Lo testimonia una lettera a suo fratello Friedrich Georg, scritta il 20 novembre 1936 a Santos: «Da queste parti c’è un proverbio che mi piace tanto; dice: Il bosco è grande, e significa che chiunque si trovi in difficoltà o sia vittima di persecuzioni può sempre sperare di trovare rifugio e accoglienza in questo elemento». Probabilmente la pensano così anche alcuni dei suoi compagni di viaggio, i quali, giunti in Brasile, decidono di scendere dalla nave, non tornando in Germania. Cosa che lui invece farà, vivendo la tragedia europea sino al suo ultimo atto ma portando con sé questa immagine del bosco, sviluppata pochi anni dopo ne Il trattato del ribelle. Nel bosco vedrà l’autentica patria spirituale dell’uomo, contrapposta alla nave, dominio della velocità e del progresso, e il ribelle sarà colui che passa al bosco, dandosi alla macchia – scendendo dalla nave, appunto.

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Di questo, però, non c’è ancora traccia nella sua biografia. Per ora non vi è che mare aperto e isole, l’immensità dell’Atlantico e il riparo di atolli e arcipelaghi, a ribadire quella dualità irriducibile che costituisce la quintessenza letteraria – ma non solo – di Ernst Jünger. L’oceano, nella cui malia «il nostro essere fluisce e si dissolve; tutto ciò che in noi è ritmico si ravviva, risonanze, battiti, melodie, il canto originario della vita che va cullandosi nei tempi. Il suo incantesimo ci fa tornare indietro svuotati, eppure felici come dopo una notte trascorsa danzando». Le isole, invece, che custodiscono la promessa di una gioia «più profonda della quiete, della pace in questo elemento tempestoso mosso fin dai fondali. Anche le stelle sono isole nel mare della luce dell’etere».

Le isole, il mare… Si è fatto tardi. Il nostro viaggiatore annota queste parole mentre torna nella sua Europa, martellata dall’urgenza della storia, squassata da venti che ben presto riveleranno la loro forma mostruosa e titanica. Le ultime parole del diario brasiliano sono datate 15 dicembre 1936:

«Mi sento soddisfatto del viaggio. Eolo e tutti gli altri dèi sono stati propizi. Ancora più intenso appare il piacere che vi ho provato rispetto ai tempi minacciosi che si annunciano in maniera sempre più evidente, le cui fiamme anzi già guizzano all’orizzonte».

Quelle fiamme che finiranno per incendiare una civiltà intera, una civiltà di cui Jünger sceglierà di farsi testimone, pagando in prima persona, come tanti altri, la propria inattualità.

mercredi, 09 mai 2018

L'Atlantique Nord redevient une mer américaine

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L'Atlantique Nord redevient une mer américaine

par Jean-Paul Baquiast

Ex: http://www.europesolidaire.eu

La Marine américaine, par la voix de l'Amiral John Richardson, chef des Opérations navales, vient d'annoncer qu'elle réactivait sa « Seconde flotte ». Celle-ci, décommissionnée depuis 2011, couvrira une grande partie de l'Atlantique depuis le pôle nord jusqu'à la Mer des Caraïbes, incluant les côtes européennes. La Seconde flotte avait été mise en place après la seconde guerre mondiale, dans le cadre de l'Otan.

Aujourd'hui, comme précédemment, la Seconde Flotte sera principalement dirigée contre la Russie. Les incursions de la marine russe sont extrêmement rares dans l'ensemble de cette zone. Elles se limitent à la mer de Norvège et à la mer du Nord, en couverture des frontières russes. Récemment l'Otan avait accusé la Russie d'opérations de surface et sous-marines en Baltique, Atlantique Nord et mers arctiques. Avant 2011, la flotte comportait environ 126 navires, 4.500 avions et 90.000 hommes. Elle était répartie sur diverses bases de la cote Est américaine.

La nouvelle Seconde flotte, d'effectifs sans doute plus réduits, pour raisons d'économie, se donnera pour mission, selon l'amiral Richardson, d'exercer toutes manœuvres utiles dans l'ensemble de l'Atlantique, ainsi que d'intercepter pour examen tout navire suspecté de représenter une menace. Le concept de coordination éventuelle avec les marines européennes n'a pas été évoqué. Manifestement, celles-ci ne seront pas consultées.

On notera que cette annonce de l'US Navy suit de près celle faite par Vladimir Poutine concernant l'existence de missiles hypersoniques. Le Pentagone sait parfaitement que de tels missiles peuvent détruire tout navire ennemi, sans possibilités avant longtemps de parade. On consultera à ce sujet un article de Dedefensa http://www.dedefensa.org/article/les-usa-face-a-lhyperson...

Faut-il en conclure que Washington courra délibérément le risque de voir un de ses navires, après des provocations répétées de la Seconde flotte, détruit par un missile russe du type Kinzal ? La seule riposte à sa portée sera en ce cas nucléaire, nucléaire tactique avant de devenir stratégique. Ce seront l'occasion attendue d'une guerre nucléaire contre la Russie, difficile à engager actuellement sans prétexte.

Comme nous l'avons relaté, Vladimir Poutine le sait et ne veut pas provoquer délibérément d'incident avec les Etats-Unis susceptible d'entraîner une riposte nucléaire. D'où l'accusation de « mollesse » que certains lui ont faite. Mais si la Seconde flotte, en Atlantique Nord, en Baltique et en Arctique, se fait de plus en plus agressive, pourra-t-il longtemps ne pas répondre ?

jeudi, 06 juillet 2017

Apocalypse touristique en Islande

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Apocalypse touristique en Islande

par Nicolas Bonnal

Ex: http://www.dedefensa.org

L’Islande c’était l’île sauvage, magique et sous-peuplée. Un rêve pour Jules Verne et tous nos rayons verts.

L’Islande c’était aussi le pays du ragnarok, du grand crépuscule des dieux. Or on a ici le tsunami de l’invasion touristique. Deux millions de touristes, en attendant dix ou cent pour exciter les enthousiastes des réseaux sociaux, pour 340 000 habitants. Au boom spéculatif qui ruina cette pauvre île, succède le boom touristique qui la dévaste. Mais c’est comme ça. J’ai vu d’autres coins comme ça disparaître à la surface de la terre, et j’ai bien lu la thérapie de choc de Naomi Klein qui explique comme le tsunami précipita la vraie dévastation, celle touristique, de l’océan indien. Mais qui va interdire aux milliards de Tartarin de voyager ?

On a parlé ici de la catastrophe touristique. Elle n’est pas seulement grave pour le paysage, elle est grave pour l’humain qui pratique ce tourisme.

On a connu le romantique qui écrivait et qui gravait, le petit éduqué qui lisait le Guide bleu, maintenant on a le massifié abruti qui se fait un selfie et se fout de tout le reste. Il veut se prendre en photo devant une chute d’eau, descend du bus pour ça et puis c’est tout. On est tous cons, mais pas au point de voyager, disait Sam Beckett.

Lisons le Monde pour une fois :

« Ce sont eux qui font la renommée du bourg, dont la plage est souvent classée parmi les plus belles du monde. En se retournant, la vue porte sur le glacier Myrdalsjökull, qu’on pourrait presque toucher par temps clair. Bienvenue en Islande, à Vik, 572 âmes, 1,2 million de touristes attendus en 2017.

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A la sortie du village, le long de la route circulaire qui fait le tour de l’Etat insulaire sur 1 339 kilomètres, trois autocars déversent leurs passagers à doudounes, tout sourire, à la porte du magasin de souvenirs. Devant la station-service, c’est un ballet incessant de voitures : en mars, il en est passé près de 3 000 par jour en moyenne. Il y a encore cinq ans, le touriste était pourtant une espèce essentiellement estivale, comme la sterne.

A seulement 186 kilomètres de Reykjavik, Vik était l’étape idéale sur la route du Sud et ses merveilles naturelles : plages, ­ cascades, glaciers, icebergs. Mais d’octobre à juin, sous un ciel souvent maussade, le village hibernait.

C’est un temps révolu. A l’office du tourisme, Beata Rutkowska travaille à un nouveau plan du bourg. De nombreuses adresses sont à modifier : « Ici vont s’ouvrir deux chambres d’hôte. Là, nous allons mettre en service une tyrolienne. Le loueur de chevaux a changé de place, pour avoir des écuries plus grandes. »

On frétille en continuant, à 400 euros la nuit de base :

« La boutique, déjà vaste, va encore s’agrandir. Deux hôtels vont augmenter leur capacité. Un autre ouvrira en 2018. Vik et ses environs proches disposent à ce jour de 1 800 lits. Mais inutile de chercher une chambre pour le pic de l’été. Rien n’est disponible à moins de 50 kilomètres. A 400 euros la nuit minimum, pour une famille de quatre.

Le village fait face au cyclone touristique qui s’est emparé de toute l’Islande. L’île accueillait 400 000 visiteurs en 2006. Elle en a reçu 1,7 million en 2016. Les prévisions pour cette année font état de 2,3 millions. La moitié de ces voyageurs, au moins, transitent par la commune, qui compte plusieurs spots touristiques… »

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Chose importante : « Il est impossible de trouver une maison à louer à Vik. Dès qu’une se ­libère, les hôtels se jettent dessus pour loger leurs employés », explique l’édile.

J’ai déjà expliqué que comme on ne peut plus se loger sur terre, les employés écossais d’Amazon par exemple campent. On organise des tombolas pour les distraire. 200 000 parisiens dorment sous la tente, et peut-être dix millions d’Américains, pour rester dans les légendaires pays dits développés.

Car on n’arrête pas le progrès.

Après la journaliste du Monde est toute triste : « Effets sur l’environnement. »

Mot magique ! L’environnement !

Car si la population islandaise devant les billets oublie toute pudeur, la population touristique n’oublie pas de déféquer.

« Voici une retombée du tourisme de masse dont l’Islande se serait bien passée. Les sites d’information locaux ne parlent que de ça : la fâcheuse tendance qu’ont les visiteurs de faire leurs besoins n’importe où, dans la nature et même en zone urbaine. Une photo prise par un fermier de Fljotsdalur (sud) a récemment fait le tour des réseaux ­sociaux. On y voit un touriste, pantalon sur les chevilles, ­accroupi devant la boîte aux lettres de Thorkell Daniel ­Eiriksson, pourtant venu lui dire son mécontentement. » 

On continue sur les urinoirs :

« Les Islandais attribuent ce comportement au manque de lieux d’aisance, en rapport au nombre croissant de touristes. Et au fait que plein de cafés et restaurants réservent leurs toilettes à la clientèle – ou font payer les gens de passage. Cela ne suffit pas toujours à éviter les malentendus. Ainsi, des instructions placées dans les WC publics demandent ­expressément de ne pas poser les pieds sur la lunette – une habitude asiatique, selon les gérants. Des panneaux de signalisation ronds encore plus explicites sont parfois ­accolés à ceux qui interdisent le camping sauvage. Ils sont, pour l’heure, réservés aux ­propriétés privées. »

Pourquoi parler des chiottes ?

Lisez Léon Bloy pardi :

« Par nature le Bourgeois est haïsseur et destructeur de paradis. Quand il aperçoit un beau Domaine, son rêve est de couper les grands arbres, de tarir les sources, de tracer des rues, d'instaurer des boutiques et des urinoirs. Il appelle ça monter une affaire. »

Pour le reste, rappelez-vous Apocalypse now : le baba cool cite TS Eliot (The Hollow men, les hommes creux), et son monde qui ne crèvera pas dans un boom, mais dans un pleurnichement. La vraie apocalypse, c’est le triomphe de la médiocrité et de la massification que nous vivons !

Mais rassurez-vous : on fabriquera plus de chiottes trois étoiles Michelin, on mettra les piaules à 2000 euros la nuit pour les familles, et on balisera tous les sentiers GR. 10mn maximum selfies compris !!!

Sources

Nicolas Bonnal – Le voyageur éveillé

Bloy – Exégèse des lieux communs

En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/m-perso/article/2017/06/02/en-islande-un-village-submerge-par-les  touristes_5137763_4497916.html#qhDt2veJT1fkx6Wk.99

vendredi, 22 avril 2016

Un probable deuxième site viking découvert en Amérique

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Un probable deuxième site viking découvert en Amérique

Ex: http://metamag.fr

Des vestiges ont été retrouvés bien plus au sud que le premier emplacement mis au jour

Les drakkars se sont-ils aventurés davantage vers le sud des côtes américaines? La découverte au Canada de ce qui pourrait constituer le deuxième site viking en Amérique relance les spéculations sur leur parcours dans le Nouveau Monde, 500 ans avant Christophe Colomb.

Une équipe d’archéologues dirigée par l’Américaine Sarah Parcak a mis au jour au sud-ouest de l’île canadienne de Terre-Neuve des vestiges qui pourraient bien avoir été un bâtiment érigé par les navigateurs scandinaves, ont-ils annoncé vendredi.

Jusqu’à présent, la présence Viking en Amérique n’avait été confirmée qu’à l’extrême nord de Terre-Neuve, à l’Anse aux Meadows. Les fondations de huit bâtiments, ainsi que des artefacts, avaient été découverts dans les années 1960 à l’emplacement de ce qui, selon les archéologues, avait constitué un village habité par ces Européens entre 900 et 1050.

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Traces de charbon de bois

A l’aide de relevés satellites, Sarah Parcak a identifié le site de Pointe Rosée, à 500 kilomètres au sud de l’Anse aux Meadows. Elle y a mené deux semaines de fouilles en juin dernier. Outre un foyer destiné à une forge, les fouilles ont permis de découvrir de traces de charbon de bois et neuf kilogrammes de scories, c’est-à-dire des résidus de fer transformé à partir de tourbe, un procédé bien connu des Vikings qui n’étaient pas de grands mineurs. En utilisant la datation au carbone 14, l’équipe de Sarah Parcak a conclu que le lieu découvert a été fréquenté entre 800 et 1300, soit lorsque les navigateurs scandinaves sillonnaient l’Atlantique Nord.

« Vinland »

«C’est très excitant. Cette découverte donne espoir de trouver un site occupé plus longtemps et de manière plus significative», a indiqué Karyn Bellamy-Dagneau, une historienne canadienne spécialiste du Moyen-Age scandinave. Dans les «Sagas», ces textes semi-légendaires narrant les épopées des Vikings, les Scandinaves évoquent une terre luxuriante baptisée «Vinland», sise au-delà du Groenland qu’ils avaient déjà colonisée.

Pointe Rosée relance donc les spéculations des chercheurs: jusqu’où les Vikings ont-ils navigué? La péninsule de Pointe Rosée se situe à la pointe méridionale de Terre-Neuve, là où les eaux du golfe du Saint-Laurent rencontrent celles de l’Atlantique Nord. Elle constitue donc un bon avant-poste pour explorer le Saint-Laurent ou le littoral américain, relève Karyn Bellamy-Dagneau.
Les côtes du Maine ne sont par exemple qu’à quelques heures de traversée. Et c’est dans cet état américain qu’une pièce en cuivre datant du XIe siècle a été retrouvée, il y a quelques années.

L’emplacement de Pointe Rosée correspond aux usages des Vikings car «ils avaient besoin d’un endroit accessible facilement depuis la plage et offrant un bon point de vue. Ce lieu est donc situé parfaitement: vous pouvez voir vers le nord, l’ouest et le sud», a déclaré Sarah Parcak au magazine National Geographic qui a financé une partie de ses recherches.

«Nous n’en sommes qu’au début des recherches. Jusqu’à présent, aucune preuve ne démontre que ce sont des Vikings qui ont fréquenté ce lieu», confie à l’AFP Shannon Lewis-Simpson, archéologue à l’Université Memorial de Terre-Neuve. Elle rappelle qu’il a fallu huit années de fouilles pour tirer les conclusions sur l’Anse aux Meadows.

«Enthousiaste» au sujet des travaux de Sarah Parcak, elle souligne que dans cette île canadienne, «personne n’a jamais enterré l’idée qu’un autre site viking pourrait être découvert».

jeudi, 21 février 2013

The Medieval Norse on Baffin Island

The Medieval Norse on Baffin Island

By Andrew Hamilton

Ex: http://www.counter-currents.com/

Christian Krohg, Leiv Eriksson oppdager Amerika (Leif Eriksson Discovers America), 1893 [1]

Christian Krohg, Leiv Eriksson oppdager Amerika (Leif Eriksson Discovers America), 1893

Thanks to the sagas, it has long been known that Vikings reached the North American continent about 1000 AD. But not until the 1960s did archaeological evidence emerge in Newfoundland, Canada to corroborate the written accounts. Until recently, that site provided the only archeological substantiation of the Viking presence, apart from a few Norse artifacts obtained from scattered Eskimo and Indian excavations.

But in October 2012, after 13 years of field research, Canadian archaeologist Patricia Sutherland, 63, presented findings at a meeting of the Council for Northeast Historical Archaeology in St. John’s, Canada suggesting the presence of a second Viking outpost, on Baffin Island, part of a former Norse region known as Helluland.

Scandinavian Expansions

Prior to 1945, Scandinavia experienced three large population expansions resulting in major out-migrations.

The first caused the Goth migration from Sweden to Germany in the last century BC and the first two centuries AD. The subsequent fall of Rome relieved population pressures throughout the Teutonic world.

A second baby boom led to the spectacular Viking expansions of 800-1100 AD, almost unimaginable in terms of their geographic scope. Exploration, piracy, plunder, warfare, trade, conquest, and settlement were all integral to this vast out-migration.

Swedes, known as East Vikings, Varangians, and Rus, sailed east across the Baltic and the great continental network of Russian rivers to the Caspian and Black Seas, which they also crossed. They established the first Russian states, Novgorod and Kiev, and commanded and staffed the Eastern Roman Empire’s Varangian Guard, described by William Pierce as “an elite military unit composed entirely of Vikings, the Schutzstaffel [SS] of its day.”

Danes swept across England and south over the European continent, including France, the Mediterranean Sea, North Africa, and Asia Minor. As in Russia, the shallow draft of their ships, the most sophisticated seagoing vessels of the day, enabled them to penetrate far inland—in France, as far as Paris.

To the north and west, Norwegians traveled to the limits of the known world, high above the Arctic Circle from the White Sea in Russia to the edge of the great ice, to Iceland and, on a different continent, Greenland and Canada.

Such was the general directional thrust, though in reality it was more complex.

For example, King Harald’s Saga, part of Icelandic chronicler Snorri Sturluson’s Heimskringla (1230), narrated a legendary Norwegian, not Swedish, leader’s expedition to the East, his marriage to a Rus princess, command of the Varangian Guard, brilliant exploits in Constantinople, Syria, and Sicily, his skaldic achievements as a poet, and his battles in England against Harold Godwinson. The saga king fell at Stamford Bridge in 1066, just a few days before Godwinson himself died at the Battle of Hastings in an attempt to fend off another warrior of Viking descent, William the Conqueror.

Finally, between 1815 and 1939 Scandinavian overpopulation created a net outflow of 2.75 million Norse to the New World—1.25 million Swedes, 850,000 Norwegians, 350,000 Danes, and 250,000 Finns. Relative to size, Norway’s contribution was the largest.

Iceland and Greenland

Iceland, a small island just south of the Arctic Circle in the North Atlantic, was settled by the Norse c. 850-875 AD. It lies 570 miles west of Norway, but only 155 miles southeast of Greenland, which in turn is adjacent to Canada.

Until recently the population of Iceland was extremely homogeneous, being almost entirely of Scandinavian and Celtic descent. The Icelandic language remains nearer to the Old Norse of Iceland’s original Viking settlers than it does to other Scandinavian languages. Old Norse literature attained its greatest flowering in Iceland between 1000 and 1350 AD.

The medieval Landnámabók (The Book of Settlements) describes in considerable detail the settlement of Iceland in the 9th and 10th centuries AD.

Greenland, the largest island in the world, lies mostly north of the Arctic Circle and is separated from Canada on the west by Davis Strait and Baffin Bay and Iceland on the east by the Denmark Strait. There are numerous islands along its coast, which is deeply indented by fjords. Eighty-five percent of its total area is ice cap.

The island was discovered and settled about 982 AD by outlaw Norwegian chieftain Eric the Red, father of famed Icelandic-born explorer Leif Ericsson. Greenland was uninhabited at the time of the Norwegians’ arrival—the Eskimos did not migrate to the island until more than 200 years later, c. 1200 AD.

In the 1200s the island fell under Norwegian and, subsequently Danish, rule. The colonists mysteriously disappeared around 1435, possibly due to a climate change known as the Little Ice Age. Archaeological remains and written records indicate malnourishment among the dwindling number of white inhabitants. The last written records of the Norse Greenlanders pertain to a 1408 wedding in HvalseyChurch, today the best-preserved Norse ruins in Greenland.

Grœnlendinga Saga [2] and Eiríks Saga [3] are the primary written accounts of the discovery and settlement of Greenland and, in North America, Helluland (“Flat Stone Land”—Baffin Island), Markland (“Woodland”—Labrador), and Vinland (“Wineland”—Newfoundland), all in present-day Canada.

Iceland, Greenland, Helluland, Markland, Vinland [4]

Iceland, Greenland, Helluland, Markland, Vinland

The Vikings in North America

In North America the Norsemen encountered a race they called “skraelings.” The sagas describe them as “short people with threatening features and tangled hair on their heads . . . large eyes and broad cheeks.” The Smithsonian Institution states that although the exact meaning of “skraeling” is unclear, “it was certainly a derogatory term.”

In fact, the Norse encountered not only different tribes but, in all probability, both Eskimos (Inuit) and Indians, though the records provide only a single name for all these groups.

In the 1960s a Norwegian husband and wife team, Helge Ingstad and Anne Stine Ingstad, discovered and excavated a Viking base camp at L’Anse aux Meadows on the northern tip of Newfoundland, the first archaeologically confirmed Viking outpost in the Americas. It pre-dated the voyages of Christopher Columbus and John Cabot by 500 years. Dated to between 989 and 1020 AD, the camp boasted three Viking halls and an assortment of huts for weaving, iron-working, and ship repair.

L’Anse aux Meadows was not Vinland, but rather situated within a land called Vinland extending south from L’Anse aux Meadows to the St. Lawrence River and New Brunswick. The outpost served as a winter camp and base for expeditions.

In the 50 years since the discovery of the thousand-year-old settlement, archaeologists and amateur historians have unsuccessfully combed North America’s east coast searching for further traces of Viking visitors.

Finally, in October and November 2012, it was reported that archaeologist Patricia Sutherland, adjunct professor of archeology at Memorial University in Newfoundland and a research fellow at the University of Aberdeen in Scotland, had announced new archaeological evidence strongly supporting the presence of a second Viking outpost on Baffin Island.

Sutherland was alerted to the possibility of a Norse camp in 1999, when she discovered two unusual pieces of cord excavated from a Baffin Island site by an earlier archaeologist and stored at the Canadian Museum of Civilization in Gatineau, Quebec, where she worked.

Rather than consisting of twisted animal sinew, the cords were expertly woven Viking yarn identical to yarn produced by Viking women in Greenland in the 14th century.

Sutherland scoured other museums, finding more pieces of Viking yarn and a small trove of previously overlooked Viking gear including wooden tally sticks for recording trade transactions and dozens of Viking whetstones.

The specimens derived from four sites located across a thousand miles of territory extending from northern Baffin Island to northern Labrador. The sites belonged to the Dorset culture [5], an extinct Paleo-Eskimo people.

From the artifacts at Dorset sites, Sutherland conjectured the Eskimos had traded with Vikings, which of course may be true. But, as archeologist Lawrence H. Keeley has impudently pointed out [6], items found in this manner can just as easily represent the spoils of war.

The archaeologist focused on the most promising of the four sites, Tanfield Valley on the southeast coast of Baffin Island. There, in the 1960s, a US archaeologist named Moreau Maxwell had excavated parts of a stone-and-sod building which he described as “very difficult to interpret.” She believed the site might have been occupied by different cultures at different times, raising the possibility that the enigmatic stone ruins, which bear a striking resemblance to Viking buildings in Greenland, were European.

Since 2001, Sutherland’s team has been carefully excavating the site, where they have discovered a wide range of artifacts pointing to the presence of European seafarers: pelt fragments from Old World rats; a whalebone shovel similar to those used by Viking settlers in Greenland to cut sod; large stones that appear to have been cut and shaped by European stone masons; and more Viking yarn and whetstones.

Using energy dispersive spectroscopy, the team examined wear grooves on more than 20 whetstones, detecting microscopic streaks of bronze, brass, and smelted iron—evidence of European metallurgy.

After 13 years of careful research, the weight of the evidence placed European traders on Baffin Island sometime between 1000–1300 AD.

“The Norse were here over a long period of time,” Sutherland said. “There were Europeans on the site, no question about that. I think we’ve only just begun to delve into what the Norse were doing there, and we’ve just got the beginning of the story.”

Archeologist Pat Sutherland on Baffin Island [7] Archeologist Pat Sutherland on Baffin Island

Viking Project “Derailed”

Besides her teaching jobs, Dr. Sutherland had been associated with the Museum of Civilization in Gatineau, Quebec for 28 years. Twelve years ago she was hired to run the Helluland archeology project. Recently she served as the Museum’s curator of Arctic Archeology.

The Museum is a major institution—Canada’s largest national museum, a significant research establishment, and one of North America’s oldest cultural organizations. It is situated on the Ottawa River across from the Canadian Parliament.

In 1910 Jewish anthropologist and linguist Edward Sapir was appointed the first anthropologist in its newly formed anthropology division upon the recommendation of American German-Jewish anthropologist Franz Boas.

Until 1986 the Museum was known as the Museum of Man, but after Left-wing elites denounced the name as “gender biased,” it was changed to the Museum of Civilization. It will soon change again to the Canadian Museum of Civilization.

In the spring of 2012, Dr. Patricia Sutherland was dismissed from her position with the Museum. Simultaneously, Museum officials stripped her husband, prominent Canadian archaeologist Robert McGhee, of the emeritus status he’d enjoyed since his retirement from the Museum in 2008.

No one involved will say why this happened. Two off-the-record sources told the Ottawa Citizen that the firings followed a year-long external investigation into allegations of “bullying and harassment,” although who was allegedly bullied and harassed, or who did the bullying, was not reported.

Dr. Sutherland is contesting the dismissal through her union, which is treating the case as a wrongful dismissal. It is currently before an arbitrator. Meanwhile, the Helluland Project has been suspended.

According to the Ottawa Citizen [8],

Some of the artifacts Sutherland had assembled were on loan from other institutions, and within days of her dismissal, they were sent back to museums in Newfoundland and Greenland.

Sutherland intended to co-publish her findings with 15 international collaborators, but her dismissal dashed those plans. She also wanted to work with the community of Kimmirut to get national historic site designation for the Nanook site.

The book cannot go forward unless she regains access to her research materials.

“I’m very confident that what we have is an indication of a Norse presence in the Canadian Arctic that we weren’t aware of before, that it was over a longer period of time, and that the interactions with the aboriginal people were more complex and extensive than we thought before.”

Because it was only a two-day sail to Norse outposts in Greenland, “One could reasonably argue that the travels to the east coast of Canada, to the Arctic, was over a period of four centuries,” she adds.

Further Information

Canadian Broadcasting Corp., “The Norse: An Arctic Mystery [9],” The Nature of Things, November 22, 2012. Executive Producer: Gordon Henderson. Produced, written and directed by Andrew Gregg. A 45-minute Canadian television documentary about Patricia Sutherland’s Baffin Island discoveries. Viewable online only in Canada.

Helge Ingstad and Anne Stine Ingstad, The Viking Discovery of America: The Excavation of a Norse Settlement in L’Anse Aux Meadows, Newfoundland (New York: Checkmark Books, 2001)

PBS Television, “The Lost Vikings [10],” Secrets of the Dead, May 16, 2000. 55 mins. Narrated by Roy Scheider. Archaeologists and forensic anthropologists investigate the disappearance of the Greenland Vikings. Full episode available online.

The Vinland Sagas: The Norse Discovery of America (London: Penguin Books, 2004; 1st ed. 1965), trans. by Magnus Magnusson and Hermann Pálsson. English translation of Graenlendinga Saga and Eirik’s Saga, both of which are short and easily read. Devoted as much to the settlement of Greenland and the family of Erik the Red as to the discovery of the New World.

 


Article printed from Counter-Currents Publishing: http://www.counter-currents.com

URL to article: http://www.counter-currents.com/2013/02/the-medieval-norse-on-baffin-island/

URLs in this post:

[1] Image: http://www.counter-currents.com/wp-content/uploads/2013/02/Christian-Krohg-Leiv-Eriksson-oppdager-Amerika-1893.jpg

[2] Grœnlendinga Saga: http://en.wikipedia.org/wiki/Greenland_saga

[3] Eiríks Saga: http://en.wikipedia.org/wiki/Eir%25C3%25ADks_saga_rau%25C3%25B0a

[4] Image: http://www.counter-currents.com/wp-content/uploads/2013/02/Iceland-Greenland-Helluland-Markland-Vinland.jpg

[5] Dorset culture: http://en.wikipedia.org/wiki/Dorset_culture

[6] archeologist Lawrence H. Keeley has impudently pointed out: http://www.counter-currents.com/2012/02/debunking-another-lie/

[7] Image: http://www.counter-currents.com/wp-content/uploads/2013/02/Archeologist-Pat-Sutherland-on-Baffin-Island.jpg

[8] According to the Ottawa Citizen: http://www.ottawacitizen.com/travel/Ottawa+researcher+firing+derails+Viking+project/7591294/story.html

[9] The Norse: An Arctic Mystery: http://www.cbc.ca/natureofthings/episode/the-norse-an-arctic-mystery.html

[10] The Lost Vikings: http://www.youtube.com/watch?v=eq7OtF45-CU

vendredi, 02 novembre 2012

Solutreans Are Indigenous Americans

Solutreans Are Indigenous Americans

 

jeudi, 20 octobre 2011

Petites réflexions éparses sur la découverte de l’Amérique par les Scandinaves

 

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Robert STEUCKERS:

Petites réflexions éparses sur la découverte de l’Amérique par les Scandinaves

En me demandant d’écrire un petit article sur la découverte de l’Amérique par les Scandinaves, Bernard Levaux, sans aucune intention maligne, ouvre, une fois de plus, ma secrète boîte de souvenirs d’adolescent. C’est une fois de plus parce que l’article qu’Yves Debay a écrit récemment dans les colonnes de ce bulletin, avait déjà ravivé quelques bons et solides souvenirs car ce sacré Yves Debay était un camarade d’école, forcément inoubliable vu sa personnalité, et un compagnon de voyage en Grèce en 1973. Enfin, parce que le thème que Bernard Levaux me demande d’aborder me ramène en fait à la même année: The Vinland Saga – The Norse Discovery of America est le tout premier livre sérieux, le tout premier classique, que j’ai acheté en anglais, sans vraiment connaître encore tous les secrets de la langue de Shakespeare. Généralement, en anglais, j’achetais en temps-là des livres ou des revues sur les maquettes d’avions ou de chars, comportant profils ou guides de peinture. A cette époque, j’avais la même habitude que le Professeur Piet Tommissen, dont on vient de déplorer la disparition à Bruxelles en août 2011, celle d’inscrire la date d’achat de chaque livre sur un coin de la première page. C’est donc avec émotion que j’ai repris entre mes mains de quinquagénaire ce premier bon livre anglais de ma bibliothèque et que j’ai retrouvé la mention “20 Jan. 1973”.

Ce petit livre de la collection “Penguin Classics”, à dos noir, voulait compléter l’exposé, fait un an auparavant, d’un camarade de classe, Eric Volant, passionné par la saga des Vikings. Si Debay a connu une brillante carrière de soldat puis de journaliste militaire à “Raids” ou à “Assaut”, Eric Volant, lui, a connu un destin tragique et n’a vécu que vingt ans: ce garçon, au sourire toujours doux et franc, les joues constellées de taches de rousseur, désirait ardemment devenir historien. Et se préparait à un tel avenir. Mais rapidement, le couperet est tombé: son paternel refusait de lui financer des études. A 18 ans, au boulot! Et hors de la maison! Eric est devenu sombre: son éternel sourire s’est effacé. Son ressort intérieur était brisé. Du jour au lendemain, il est devenu communiste! Nous ne pensions pas que le père allait mettre son projet à exécution et flanquer son aîné à la porte du foyer parental au lendemain même de la proclamation de fin de secondaires. Mais, hélas, il l’a bel et bien fait et Eric est venu sonner chez moi début juillet: il avait trouvé un cagibi absolument sordide, au fond d’une cours, où habiter. Il n’avait pas de meubles, juste un sac avec ses hardes et quelques livres: mon père, bouleversé, lui a aussitôt donné une table, une bibliothèque, deux chaises et quelques autres babioles, que nous avons amenées aussitôt dans la triste annexe qui devait lui servir de logis. On l’a ensuite vu errer dans les rues, de plus en plus sombre et rancuneux. Et, deux ou trois ans plus tard, nous avons appris sa mort tragique: il s’était porté volontaire pour servir de passeur à l’ETA basque, que les Républicains espagnols, fort nombreux dans son quartier et quasi les seuls militants communistes dans le Bruxelles du début des années 70, estimaient être la seule force politique capable de ramener une mouture modernisée du “Frente Popular” au pouvoir dans les premières années du post-franquisme. Eric a été descendu par des tireurs embusqués, au moment où il franchissait un ruisseau dans les Pyrénées. On a retrouvé son corps quelques jours plus tard. Il a été enterré à la sauvette, paraît-il, dans un petit village basque. Personne n’a voulu rapatrier le corps. Nous avions perdu un garçon qui avait été un très bon camarade. Il avait marché jusqu’au bout de la passion qu’avait généré son immense déception.

Voilà, je viens de payer mes dettes à mon passé, à ceux qui ont disparu.

Revenons au thème du modeste exposé scolaire d’Eric Volant, c’est-à-dire à la conquête de l’Atlantique Nord par les Scandinaves. Aujourd’hui, on devine qu’ils ne furent pas les premiers Européens à avoir abordé le continent de l’hémisphère occidentale. Déjà Louis Kervran, dans son “Brandan, le grand navigateur celte du VI° siècle” (Laffont, 1977), posait la thèse que les Scandinaves, lancés à l’aventure sur les flots glacés de l’Atlantique Nord et tous probablement proscrits ou en fuite, ont suivi des routes maritimes découvertes antérieurement par des ermites irlandais ou bretons, qui s’en allaient méditer aux Orcades, aux Féroé, en Islande et, pourquoi pas, plus loin, au Labrador, ou sur les terres que les Vikings nommeront “Helluland”, “Markland” ou “Vinland”. On retrouve leur nom sur une carte des “terres hyperboréennes”, dressée vers 1590 par un géographe, Sigurdur Stefansson. Louis Kervran rappelait fort opportunément que les peuples de la façade atlantique des Gaules et de la “Britannia” romaine possédaient une solide tradition maritime et que les multiples récits des voyages de Saint Brandan ont constitué une thématique littéraire très répandue et très appréciée tout au long du moyen âge européen. Kervran conclut que Brandan a très problablement suivi un itinéraire de Saint Malo ou de l’Irlande vers les Orcades et les Féroé, l’Islande, les côtes canadiennes pour aboutir probablement aux Antilles: certains textes de la matière “Brandan” décrivent des îles luxuriantes et des animaux exotiques. La légende rappelle, très précisément, que Brandan est parti avec douze compagnons pour entreprendre un voyage de neuf ans sur l’Atlantique. Par ailleurs les pêcheurs de morue poussaient très vraisemblablement jusqu’au large du Labrador, qu’ils aient été scandinaves, flamands, bretons, galiciens ou portugais. Colomb connaissait-il les secrets de ces pêcheurs ou de ces itinéraires scandinaves? La question demeure ouverte.

Pour les deux spécialistes allemands de l’ère mégalithique, Gert Meier et Hermann Zschweigert, Ulysse, dont la légende remonterait à la proto-histoire mégalithique de la vieille Europe, aurait déjà testé les flots atlantiques: en cinglant de Gibraltar vers les Açores (l’île Ogygie) et, poussé par le Gulf Stream de celles-ci vers Heligoland, il aurait abouti en face des côtes aujourd’hui danoises qui recelaient l’ambre, matière très prisée par les peuples méditerranéens. L’histoire marine de l’Europe, pour nos deux savants allemands, est bien plus ancienne qu’on ne l’a cru jusqu’ici. Les embarcations faites de peaux pourraient bien remonter à 10.000 ans. En 1976, l’historien anglais Tim Severin traverse l’Atlantique sur une copie du bateau attribué à Brandan, démontrant que de telles embarcations étaient parfaitement capables de tenir l’océan, exactement comme le Norvégien Thor Heyerdahl avait traversé le Pacifique sur le Kon-Tiki en 1947, pour démontrer la véracité des récits traditionnels polynésiens et prouver que des peuples marins de l’aire pacifique avaient été capables de cingler jusqu’à l’île de Pâques. Les Maoris néo-zélandais construisaient des embarcations capables de transporter de 60 à 100 guerriers, couvrant parfois des distances de 4000 km en l’espace de plusieurs semaines. Ces embarcations étaient mues par rames et/ou par voiles. L’aventurier allemand Hannes Lindemann a réussi à traverser l’Atlantique au départ des Canaries en 65 puis en 72 jours, sur un petit bateau africain, en se guidant par les étoiles: la navigation en haute mer étant plus aisée de nuit que de jour, du moins à hauteur des tropiques et de l’Equateur (au nord, vu la nébulosité permanente, elle est plus “empirique” donc plus hasardeuse et plus aventureuse, plus risquée). Nos ancêtres avaient un atout complémentaire par rapport à nous, dégénérés par la civilisation et par ce que le sociologue Arnold Gehlen nommait les “expériences de seconde main”: celui de pouvoir correctement s’orienter en connaissant à fond la carte du ciel. Le lien de l’homme à la mer n’est pas récent mais quasi consubstantiel à toute forme de culture depuis la préhistoire. Mais ce lien à la mer n’est pas pensable sans connaissances astronomiques précises, fruit d’une observation minutieuse du ciel.

Meier et Zschweigert évoquent aussi la voie “terrestre” vers l’Amérique, qu’il était possible d’emprunter, il y a environ 16.000 ans. La calotte glaciaire pesait à l’époque sur l’ensemble de la Scandinavie, sur une bonne partie des Iles Britanniques et sur tout le pourtour de la Baltique et sur l’Allemagne du Nord. L’actuel Canada et une bonne frange du territoire des Etats-Unis se trouvaient aussi sous une épaisse calotte. Mais la côte orientale de la Mer Blanche et l’Alaska étaient dégagés de l’emprise des glaces. Il y avait possibilité, en longeant la banquise arctique et en passant de la Sibérie occidentale à la péninsule de Kola, d’aller vers les Spitzbergen et, de là, au Groenland. Au nord de cette grande île atlanto-arctique se trouvait le “Pont Blanc” qui menait au Canada puis à la terre ferme et dégagée des glaces que constituait alors l’Alaska. On pouvait suivre ensuite la côte pacifique jusqu’en Californie et au Mexique actuels. De la Mer Blanche à l’Alaska, la distance est de 2500 km. Elle devait s’effectuer en 60 jours environ. Selon cette hypothèse, désormais dûment étayée, l’Amérique n’a pas seulement été peuplée par des ethnies sibériennes venues du nord de l’Asie par le Détroit de Bering mais aussi par des éléments venus d’Europe, encore difficilement identifiables au regard des critères de l’archéologie scientifique. Comment cette migration par le “Pont Blanc” s’est-elle opérée avant les nombreuses submersions qui eurent lieu vers 8500 avant notre ère et qui détruisirent notamment la barrière Tanger/Trafalgar et la bande territoriale qui liait l’Italie et la Sicile au continent africain, faisant du lac méditerranéen initial une mer salée? Ces voyages s’effectuaient par traineaux à traction canine, à la mode lapone, le chien étant l’animal domestique par excellence, la première conquête de l’homme; ou ne devrait-on pas plutôt parler d’une fusion “amicale” entre deux espèces morphologiquement très différentes pour que toutes deux puissent survivre en harmonie? Le chien est effectivement un allié dans la chasse, un chauffage central qui chauffe en hiver (les Aborigènes australiens parlent de “five-dogs-nights”, de nuits où il faut cinq chiens pour chauffer un homme; l’expression est passée dans l’anglais moderne), un pharmacien qui lèche les plaies et les guérit vu l’acidité de sa salive, un gardien et un compagnon, qui, en guise de récompense, reçoit les reliefs des repas.

Magnus Magnusson et Hermann Pàlsson ont rédigé une brillante introduction pour mon petit livre de 1973, qui n’est autre que le texte même de la “Vinland Saga”, de la saga du voyage vers le Vinland américain. Cette introduction relate l’histoire de la colonisation scandinave de l’Islande et du Groenland et retrace l’épopée nord-atlantique des marins norvégiens et islandais. La colonisation de l’Islande s’est déroulée à la suite de l’émigration de proscrits norvégiens, chassés pour “avoir provoqué mort d’homme”, à la suite de méchantes manigances ou pour raisons d’honneur voire pour refus d’être christianisés. Celle du Groenland procède de la même logique: Eirik le Rouge est banni d’Islande au 10ème siècle. Il fonde les premières colonies scandinaves du Groenland. Un marin prudent, Bjarni Herjolfsson, dévié par les vents et les éléments déchaînés de sa route entre l’Islande et le Groenland, aperçoit les côtes de terres inconnues vers 985 ou 986. Leif Eirikson, dit Leif l’Heureux, achète le dernier bateau survivant de l’expédition incomplète et chamboulée de Bjarni et décide de partir à la découverte des terres aperçues au loin par son prédécesseur. C’est ainsi que fut découvert le “Vinland”, terre sur la rive méridionale du Saint-Laurent, où les explorateurs nordiques ne découvrent pas seulement une baie qui ressemble au raisin mais surtout la principale matière première dont ils ont besoin, le bois, ainsi que du gibier en abondance, du saumon à profusion et du blé sauvage prêt à être récolté. Leif ne restera pas en Amérique: c’est son beau-frère Thorfinn Karlsefni qui tentera d’installer une première colonie permanente sur le sol américain. Thorfinn fait le voyage accompagné de sa femme. Elle met un bébé au monde sur la terre américaine. Mais elle meurt peu après l’accouchement. Thorfinn passe l’hiver avec l’enfant qu’il parvient à sauver de la mort. Ce petit Snorri Thorfinnson a probablement été le premier Européen attesté et non mêlé d’Amérindien ou d’Esquimau à avoir vu le jour dans l’hémisphère occidental. Quant à Thorvald, fils d’Eirik, il est un des premiers Européens tombés au combat face aux natifs du continent américain: il a été frappé d’une flèche en défendant une implantation dans l’actuel Labrador canadien.

L’âge viking, l’ère en laquelle les Normands se répandirent en Europe, en Russie jusqu’au comptoir de Bolgar sur la Volga et dans l’espace nord-atlantique, est une époque où l’Europe ne connaît plus la gloire de l’Empire romain: en ce temps-là, nous explique le Prof. Roger Grand, le trop-plein démographique scandinave descendait calmement la Weser germanique, jusqu’à hauteur du premier grand affluent du Rhin, la Lippe, pour aller se présenter dans les castra des légions de l’Urbs et trouver une affectation militaire ou civile dans l’Empire. La chute de l’Empire romain interdit cette transhumance: la masse démographique germanique-continentale s’est déplacée à l’intérieur de l’Empire, dans les provinciae de Germania Inferior et Germania Superior et dans le nord de la Gallia Belgica, voire dans la vallée du Rhône pour les Burgondes, installés principalement dans la “Sapaudia” (la terre des sapins) jurassienne, entre Besançon et le lac de Neuchâtel selon l’axe Ouest-Est, et entre Belfort et Grenoble, selon l’axe nord-est/sud-ouest. L’Europe est trop pleine et, en plus, elle est désorganisée. Les Germains continentaux n’ont plus d’affectations à offrir à leurs cousins du Nord. L’Europe est dangereusement ouverte sur la steppe qui s’étend de la Puszta hongroise jusqu’à la Mandchourie. Entre le Danube à hauteur de Vienne et l’Atlantique, les populations romanisées et germanisées sont acculées, dos à l’Océan, d’où les Nordiques viennent pour remonter leur fleuves et piller leurs villes et abbayes. En Méditerranée, elles sont harcelées par le débordement démographique sarrazin, c’est-à-dire hamito-sémitique.

La recherche d’échappatoires est donc une nécessité vitale: la Russie offre un tremplin vers la Mer Noire et l’espace byzantin et, via la Volga, vers la Caspienne et l’Empire perse. Mais, là aussi, l’élément scandinave, finalement trop ténu, ne pourra pas, comme avaient partiellement pu le faire avant eux les tribus gothiques, maîtriser le cours des grands fleuves russes et ukrainiens pour avancer les pions des populations européennes vers l’espace persan. La seule route pour trouver terres, matières premières et espaces apaisés est celle de l’Atlantique septentrional. Cette donnée stratégique est une constante de l’histoire européenne: elle sera reprise par Henri le Navigateur, roi du Portugal, désireux de contourner la masse continentale africaine pour éviter la Méditerranée contrôlée par les puissances musulmanes et atteindre l’Inde par voie maritime et non plus terrestre. Elle sera reprise par Ivan le Terrible quand il descendera la Volga pour l’arracher au joug tatar, sous les conseils d’un marchand anglais, qui n’avait pas oublié la route varègue (suédoise) vers le comptoir de Bolgar, vers la Caspienne et l’espace persan. Les recettes norroises et varègues ont donc servi de source d’inspiration aux tentatives européennes, en l’occurence portugaises et russes, de désenclaver l’Europe.

La première tentative de désenclavement par l’Ouest atlantique a donc été celui du quatuor Bjarni, Eirik, Leif et Thorsinn. Elle est importante dans la mesure où les marins scandinaves, paysans sans terre à la recherche d’un patrimoine, cherchent non plus à fusionner avec d’autres sur une terre étrangère, comme le fut peut-être la Normandie, mais à créer des communautés scandinaves homogènes sur des sols nouveaux. Ce sera le cas en Islande, où les colonies se sont maintenues. Ce sera le cas au Groenland, du moins tant que durera l’optimum climatique médiéval. L’installation en Amérique, dans “l’Anse aux Meadows” sera, elle, éphémère: elle se heurtera à la résistance des indigènes d’Amérique du Nord, les “Skraelinger” des sagas, que les Scandinaves ne pourront vaincre, en dépit de la supériorité de leurs armes en fer. Les “Skraelinger” disposaient d’armes de jet, des arcs mais aussi une sorte de catapulte ou de balliste, qui leur permettaient de tenir tête à des guerriers dotés d’armes de fer mais qui ne disposaient plus, au Groenland, de forges et de mines capables d’en produire à bonne cadence. Tout devait être importé d’Europe. La logistique scandinave en Atlantique nord était trop rudimentaire pour permettre de se tailler une tête de pont, comme le firent plus tard les Espagnols ou les Anglais, pourvus d’armes à feu.

Le trop-plein démographique scandinave, à la suite de mauvaises récoltes, ne s’est plus déversé en Europe, à partir d’un certain moment quand l’espace impérial carolingien s’organise et s’hermétise, mais dans les îles de l’Atlantique (Shetlands, Féroé, Orcades, Hébrides) et en Islande. Cet exode d’audacieux répond aussi à une nouvelle donne politique: le pouvoir royal, imité du pouvoir impérial carolingien et armé de la nouvelle idéologie chrétienne, marque des points dans les vieilles terres scandinaves et déplait car jugé trop autoritaire et irrespecteux tant de la liberté personnelle que de la liberté des communautés d’hommes libres. L’Islande sera ainsi le laboratoire d’une démocratie populaire et originale: le pouvoir sera d’emblée limité par des lois; le chef, élu temporairement, devra respecter un contrat avec les représentants du peuple siégeant au “Thing” (= Assemblée, parlement); le médiateur au sein de ces assemblées de paysans libres, les “bondi” ou les “godhar” (“les chefs”, désignés par leurs propres communautés) joue un rôle capital. L’île de Thulé, que mentionnent les sources de l’antiquité et du haut moyen âge telles celles d’Orose, de Boèce (“à six jours de navigation” du continent) et de Bède le Vénérable, est indubitablement l’Islande.

En 825, le moine irlandais Dicuil, actif à la Cour de Charlemagne, écrit un traité de géographie (“Liber de mensura orbis terrae”), où, pour la première fois, on peut lire une description détaillée de cette “Thulé” de l’Atlantique nord, grâce à des renseignements transmis par trois ermites irlandais qui l’avaient abordée en 795, au moment où les Vikings lançaient leurs premiers assauts contre l’Irlande et ses monastères. Quand les premiers colons norrois abordent l’Islande vers 860, l’île est déjà occupée par quelques moines irlandais, comme le mentionnent d’ailleurs les sources scandinaves et l’attestent des noms de lieux comme “Papey” (“L’île aux moines”) et “Papyli” (“Aux moines”). En 870, Ingolf Arnarson doit quitter la Norvège, car “il y a commis mort d’homme”, et fonde la première colonie permanente et non monacale en Islande, sur le site même de l’actuelle capitale Reykjavik. C’est au départ de l’installation d’Ingolf et des siens qu’un système politique démocratique original, alliant pouvoir temporel et religieux, s’implante dans le pays et que celui-ci devient la base de départ de nouvelles découvertes: non seulement le Groenland et le Vinland, mais des îles stratégiques à la jonction des eaux de l’Atlantique et de l’Arctique, telles les Spitzbergen (vers 1170) et l’île Jan Mayen en 1194.

L’Islande médiévale fut donc à coup sûr la société la plus originale d’Europe, en marge du continent soumis aux assauts sarrazins et mongols ou disloqués par les querelles intestines. Elle développe un commerce intense, surtout avec la Norvège et l’Angleterre; elle exporte de la laine, du tweed, des peaux de mouton ou de phoque, du fromage, du suif (pour les chandelles), des faucons et du soufre en échange de bois (rare sous ces latitudes boréales), de goudron, de métaux, de farine, de malt, de miel, de vin, de bière et de lin. Mais, rappellent Magnusson et Pàlsson, l’exportation majeure, la plus étonnante et forcément la plus originale de cette Islande en apparence isolée et géographiquement marginale, ce sont les productions littéraires; en effet, les Islandais, lettrés et producteurs de sagas qui sont les premières manifestations d’une littérature achevée en Europe, produisent une poésie courtisane, des chants et des éloges pour les rois et les princes, qu’affectionnaient tout particulièrement les “earls” des Orcades, les grands féodaux anglais et les riches habitants de Dublin (colonie norvégienne). Ces récits, poèmes ou chants se payaient au prix fort. Ensuite, les contextes géographiques dans lesquels se déroulaient les récits des sagas sont minutieusement décrits et échappent à toute exagération ou falsification d’ordre mythique ou légendaire. La saga du Vinland ou le “Landnàmabök” (le livre de la colonisation de l’Islande) confirment parfaitement cette objectivité narrative. La première littérature “moderne” (pour autant que ce mot soit adéquat) en Europe a été islandaise. Né en Islande en 1067, Ari Thorgilsson peut être considéré comme le premier historien d’Europe en langue vernaculaire, alliant précision, érudition et volonté d’inscrire l’histoire islandaise dans un cadre général européen. C’est lui qui nous a transmis la plus grande partie du savoir dont nous disposons sur l’âge dit des sagas (930-1030). Il y a dix siècles, l’Islande fournissait à l’Europe un historien qui relatait des faits sans les embellir de légendes, de merveilleux ou de paraboles hagiographiques.

L’Islande a donc été le centre d’un monde thalassocentré, aux institutions politiques originales et uniques, que décrit remarquablement l’historien américain Jesse L. Byock, de l’université de Californie (UCLA). Quand les deux colonies du Groenland se sont mises à péricliter, l’Islande est redevenue marginale, une simple excroissance occidentale du monde scandinave. Mais elle n’a certainement pas exclu de sa mémoire l’épopée aventureuse, commerciale et colonisatrice vers le Groenland et les terres situées plus à l’Ouest. Une carte controversée, probablement une falsification car elle fait du Groenland une île à part entière (ce que l’on ne savait pas avant 1890), montre les trois terres (Helluland, Markland et Vinland) découvertes par Leif. Les falsificateurs dataient cette carte de 1440, cinquante-deux ans avant le voyage de Colomb. Falsification ou non, les terres extrême-occidentales devaient être toujours présentes dans la mémoire des Islandais, comme devaient au moins les deviner les pêcheurs normands, bretons, flamands, anglais, galiciens, portugais ou norvégiens qui cherchaient les bancs de morues. Vers 1020, les tentatives d’installation au Vinland ont dû définitivement cesser, du moins dans le sillage immédiat de Leif et de ses proches. L’évêque Eirik du Groenland a toutefois tenté une nouvelle expédition en 1121, pour “aller voir s’il y avait là-bas des chrétiens survivants”. Il aurait constaté le contraire. En 1347, des Annales mentionnent le retour d’une petite embarcation qui avait été au “Markland”, avec dix-huit hommes à son bord. On sait que les résidents des deux colonies groenlandaises ont évacué leurs installations, sans que l’on puisse dire avec toute la certitude voulue s’ils sont revenus en Islande ou en Norvège ou s’ils ont cinglé vers l’Ouest, pour disparaître sans laisser de traces.

L’universitaire britannique Gwyn Jones, dans une étude consacrée aux Vikings et à l’Amérique, relève deux hypothèses convergentes, non étayées mais plausibles, et qui mériteraient d’être vérifiées: celle de l’Islandais Jon Dùason et celle du Canadien Tryggve Oleson. L’une date des années 1941-1948, l’autre de 1963. Ces deux hypothèses postulent que, vu la détérioration du climat et les difficultés logistiques à vivre à l’européenne (ou du moins à la mode norvégienne) en terre groenlandaise, bon nombre de Scandinaves de ces deux colonies extrême-occidentales ont fini par adopter le mode de vie esquimau, non seulement au Groenland mais aussi au Canada, c’est-à-dire au moins au Helluland et au Markland. Réduit à la précarité, les colons islando-norvégiens auraient traversé la mer entre le Groenland et le Canada pour s’y fixer et finir par se mêler aux populations autochtones de la culture dite du Dorset et former ainsi une nouvelle population, voire une nouvelle ethnie, celle de la culture dite de Thulé, qui aurait repris pour son propre compte l’ensemble du territoire groenlandais, après le recul ou la disparition de la population scandinave homogène qui y avait résidé depuis l’arrivée d’Eirik. Duason et Oleson pensent dès lors qu’une fusion entre Scandinaves résiduaires et chasseurs-trappeurs de la culture dite de Dorset a eu lieu, ce qui a donné à terme la nouvelle culture dite de Thulé. Ensuite, les ressortissants métis de la culture de Thulé seraient entrés en conflit avec les derniers Islando-Norvégiens du Groenland qui auraient alors plié bagages et se seraient installés, très peu nombreux et fort affaiblis, dans l’île actuellement canadienne de Baffin, en se mêlant à la population locale et en disparaissant par l’effet de ce métissage en tant que communauté scandinave homogène. La seule source qui pourrait étayer cette thèse est importante et fiable, c’est un écrit tiré des annales de l’évêque Gisli Oddsson, écrite en latin en 1637, probablement inspirée par une source antérieure disparue et évoquant les événements en “Extrême-Occident” scandinave (ou atlanto-arctique) de 1342: “Les habitants du Groenland ont abandonné la vraie foi et la religion chrétienne de leur propre volonté, ayant déjà rejeté toutes les bonnes manières et les véritables vertus, et se sont tournés vers les peuples d’Amérique (“et ad Americae populos se converterunt”)”.

Si les ermites irlandais ou celtiques cherchaient des terres, c’était pour aller y pratiquer la méditation en solitaire et non pour la colonisation. Pour le celtisant anglais Geoffrey Ashe, comme d’ailleurs pour Louis Kervran, les moines irlandais cherchaient le “Paradis terrestre”, qui, à leurs yeux, n’était nullement un “au-delà” mais une contrée bien terrestre quoiqu’inconnue. Les sources de diverses “matières celtiques” évoquent tantôt la Terre d’Avalon (ou “Avallach” ou encore “Ablach”) tantôt la Terre de “Tir na nOg”, un pays de jouvence éternelle située loin à l’Ouest, au bout de l’Océan. Religion biblique, mythes celtiques et fonds factuel se mêlent de manière trop inextricable dans les récits de la matière de Brandan, qui ne recèlent par conséquent aucune fiabilité scientifique, sauf peut-être si on les lit avec l’acribie dont fit montre Kervran, dans son livre paru en 1977. La colonisation scandinave est rationnelle et les récits qu’elle suscite sont réalistes. Les Irlandais ont toutefois été les premiers à aborder l’Islande et probablement le continent américain. Mais rien n’atteste objectivement de leurs voyages, sauf en Islande, où Dicuil mentionne la présence d’ermites voyageurs. Cette volonté de fuite vers l’Ouest, au-delà de l’Océan Atlantique, indique pourtant que l’humanité de souche européenne a été, pendant quasi tout le moyen âge, depuis la chute de l’Empire romain, un ensemble de populations assiégées et contenues dans l’espace étroit de la péninsule européenne, ce promontoire au Ponant de l’immense masse continentale eurasienne. Les assiégeants, comme l’indique d’ailleurs l’auteur anglais du 12ème siècle Guillaume de Malmesbury après l’invasion seldjoukide des “thermes” orientaux de l’Empire byzantin, sont les peuplades turques, mongoles, hunniques, berbères et arabes. Pour bon nombre d’Européens du haut moyen âge, et pour les Scandinaves qui ne trouvent plus d’affectations suffisantes dans l’espace euro-méditerranéen suite à l’effondrement de la civilisation romaine, l’Europe est une terre que l’on cherche à fuir: en effet, les Nordiques ne sont plus des barbares intégrables de la périphérie (Altheim, Toynbee, Grand) ni dans l’espace catholique-romain ni dans l’espace byzantin (en dépit de l’aventure de la “Garde varègue”); l’Europe leur est devenue un espace fermé tant à cause de la détresse provoquée par les siècles de gabegie mérovingienne et par les assauts sarrazins et hongrois qu’à cause de la fermeture qu’instaure le système carolingien pour procéder à une réorganisation interne du continent. La seule exception, c’est-à-dire la seule colonisation réussie dans l’espace jadis romanisé, est la Normandie et probablement l’aire réduite que constitue l’embouchure du Rhin et de la Meuse en Hollande actuelle, sans compter le Yorkshire anglais (le “Danelaw”). A l’Est, la Russie de Novgorod est une autre terre de colonisation possible pour les Varègues de l’actuelle Suède. Mais ces terres sont bien étroites et soumises à des institutions féodales qui déplaisent aux hommes libres du Nord. La tentative de contrôler l’espace scaldien (de l’Escaut), en établissant un vaste camp militaire dans l’actuelle ville de Louvain sur la petite rivière qu’est la Dyle, a été réduite à néant par les armées d’Arnold de Carinthie, un général pugnace du clan carolingien.

La tragédie scandinave est une tragédie européenne: la volonté de conserver une autonomie politique aussi complète que possible, dans des espaces ethniquement homogènes, sans le moindre compromis sur ce chapitre, se heurte à la nécessité d’une organisation impériale, seul moyen de verrouiller en Méditerranée et sur la steppe les voies d’accès potentielles au coeur du continent. L’Europe a besoin de la liberté scandinave comme elle a besoin de l’organisation impériale: quand trouvera-t-on le juste milieu, le mode politique qui parviendra à réconcilier ces deux aspirations essentielles?

Robert STEUCKERS.

Fait à Forest-Flotzenberg, septembre 2011.

Bibliographie:

-          Geoffrey ASHE, Kelten, Druiden und König Arthur – Mythologie der Britischen Inseln, Walter-Verlag, Olten, 1992.

-          Régis BOYER, Le Livre de la colonisation de l’Islande (Landnàmabök), Mouton, Paris, 1973.

-          Jesse BYOCK, L’Islande des Vikings, Aubier, Paris, 2007-2011.

-          James GRAHAM-CAMPBELL, Das Leben der Wikinger – Krieger, Händler und Entdecker, Kristall-Verlag, Hamburg, 1980.

-          Gwyn JONES, “The Vikings and North America”, in R. T. FARRELL, The Vikings, Phillimore, London, 1982.

-          Louis KERVRAN, Brandan, le grand navigateur celte du VI° siècle, Laffont, Paris, 1977.

-          Jean MABIRE, Les Vikings à travers le monde, Ed. de l’Ancre de Marine, Saint-Malo, 1992.,

-          Magnus MAGNUSSON / Hermann PALSSON, “Introduction”, in The Vinland Saga – The Norse Discovery of America, Penguin, Harmondsworth, 1965-1971.

-          Gert MEIER / Hermann ZSCHWEIGERT, Die Hochkultur der Megalithzeit – Verschwiegene Zeugnisse aus Europas grosser Vergangenheit, Grabert, Tübingen, 1997.

 

dimanche, 02 octobre 2011

Il collasso delle colonie norvegesi in Groenlandia

Il collasso delle colonie norvegesi in Groenlandia

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Ex: http://www.centrostudilaruna.it/

Una pagina di storia particolarmente interessante dal punto di vista dell’equilibrio fra società umane e ambiente naturale è quella relativa alla fallita colonizzazione scandinava della Groenlandia, terminata con l’abbandono dei due insediamenti, occidentale (Vestribyggd) e orientale (Eystribyggd), posti, in realtà, entramibi sulla costa occidentale della grande isola, l’uno più a nord, l’altro più a sud, presso il Capo Farewell. A metà strada fra i due esisteva un terzo insediamento, molto più piccolo, che si può chiamare Insediamento medio.

Le fonti storiche scandinave sono incerte e confuse, per cui la fine di queste tre colonie europee, poste letteralmente all’estremità del mondo allora conosciuto, rimane a tutt’oggi avvolta nel mistero. Non sappiamo se vennero distrutte dagli Eschimesi, chiamati Skraeling dai coloni norreni, o se scomparvero per una serie di cause legate ai mutamenti climatici che, fra il 1200 e il 1600, videro in tutto l’emisfero boreale il ritorno di una ‘piccola età dei ghiacci’, come è stata chiamata da alcuni scienziati. Oltre ad impoverire ulteriormente le già magre risorse ambientali, dalle quali dipendeva la sopravvivenza dei coloni, l’espansione dei ghiacci rese assai più difficili le rotte marittime nei mari settentrionali e fece sì, che a poco a poco, cessarono di partire dalla Norvegia le navi che avrebbero dovuto assicurare i collegamenti con quell’estremo avamposto europeo.

Certo è che, abbandonati a se stessi, i coloni norvegesi scomparvero.

Le testimonianze letterarie dicono che gli abitanti dell’insediamento occidentale finirono per abbandonare la religione cristiana, probabilmente per adottare quella degli Eschimesi, con i quali, evidentemente, dovette esservi una fusione, o, quanto meno, un tentativo di convivenza pacifica, dopo una fase certamente cruenta, in cui i due popoli vennero a contatto per la prima volta. Va ricordato, infatti, che il peggioramento delle condizioni climatiche indusse gli Eschimesi a spingersi verso sud, inseguendo la loro preda preferita, la foca, dalla quale dipendevano totalmente (un po’ come gli Indiani del Nord America dipendevano dal bisonte).

Mappa della Groenlandia del XVII secolo

Mappa della Groenlandia del XVII secolo

Quanto all’insediamento orientale, che sopravvisse più a lungo – anche perché era assai più consistente -, le testimonianze archeologiche indicano che gli ultimi norvegesi vennero seppelliti secondo il rito cristiano, indossando i loro migliori abiti; per cui si sarebbe portati a credere che, in quel caso, non vi fu alcuna assimilazione da parte dell’elemento indigeno; della quale, del resto, non v’è traccia neanche dal punto di vista antropologico fra gli Eschimesi o Inuit attuali. Nulla, infatti, indica che le due stirpi si siano mescolate: nessun carattere fisico degli Scandinavi, per quanto sporadico, è osservabile negli Eschimesi odierni.

Sempre le testimonianze archeologiche attestano che l’insediamento occidentale fu occupato dagli Eschimesi a partire dal 1341, per cui la fine della colonia norvegese dovette precedere di pochissimo tale data. Nell’insediamento medio, la presenza eschimese sostituisce quella scandinava dal 1380 circa; e per quello orientale, ciò dovette avvenire nei primissimi anni del 1500. Ma, ripetiamo, non è dato sapere, allo stato attuale delle nostre conoscenze, se gli Eschimesi occuparono i fiordi già abbandonati dai norvegesi, o già spopolati dalla ‘morte bianca’; oppure se li occuparono con la forza, uccidendo gli abitanti fino all’ultimo uomo e, magari, facendo prigionieri un certo numero di ragazzi e ragazze, come è documentato che accadde in alcuni scontri di minore entità, verificatisi nei decenni che precedettero la fine della colonia occidentale.

Sappiamo soltanto che sono stati identificati i resti di numerose fattorie norrene nonché di alcune chiese, a testimonianza del fatto che, ai loro tempi d’oro (se mai ve ne furono), i colonizzatori avevano spiegato notevoli mezzi per creare condizioni di vita che fossero quanto più simili possibile a quelle che avevano lasciato nella loro lontana madrepatria, in Norvegia – e, in minor misura, in Islanda.

Scrive il saggista e scrittore gallese Gwyn Jones, nel suo importante studio Antichi viaggi di scoperta in Islanda, Groenlandia e America, ripubblicato alcuni anni fa dalla Casa editrice Newton Compton (titolo originale: The Norse Atlantic saga. Being the Norse Voyages of Discovery and Settlement to Iceland, Greenland, America, 1964, Oxford University Press; traduzione italiana Giorgio Romano, Milano, Bompiani Editore, 1966, pp. 82-110):

“La colonia di Groenlandia, che va tenuta distinta dallo stato o nazione di Groenlandia, sopravvisse fino all’inizio del secolo XVI, e il modo in cui avvenne la sua fine ha interessato a lungo gli studiosi. La Colonia di Groenlandia era il più remoto avamposto della civiltà europea e la sua fine – su un lontano lido, in un paese quasi dimenticato, in condizioni climatiche che peggioravano e in circostanze assai tetre – è stata considerata da molti la più impressionante tragedia vissuta da un popolo nordico. Essa rimane uno dei problemi insoluti della storia.

“Vediamo oggi, col senno di poi, come tutto, nella colonizzazione norrena in Groenlandia, fosse giocato al suo limite. I colonizzatori sarebbero potuti sopravvivere soltanto se non fosse intervenuto nessun mutamento in peggio. In Islanda l’Europeo del Medioevo aveva rischiato le sue ultime possibilità per vivere al nord, e aveva potuto osar questo senza rinunziare a un sistema di vita scandinavo. L’Islanda si trova all’estremo limite del mondo abitabile; la Groenlandia oltre quel limite. Papa Alessandro VI scriveva nel 1492: «La Chiesa di Gardar è situata alla fine del mondo» e la strada per raggiungerla era infaustamente nota: per mare non minus tempestosissimum quam longissimum. Era pertanto un prerequisito per i groenlandesi – se volevano dominare il destino – possedere un naviglio loro capace di solcare i mari. Ben presto invece non ebbero non ebbero a disposizione né i capitali né il materiale per costruirlo; dopo essersi sottomessi alla Norvegia fu loro esplicitamente vietato di usare navi proprie: e, da allora in poi, le condizioni per la sopravvivenza non dipesero più dalla loro volontà. I cambiamenti politici ed economici all’estero, senza loro colpa né offesa, potevano ormai distruggerli, e la loro negligenza doveva mostrarsi altrettanto letale di un attacco. Secondariamente il loro numero era pericolosamente esiguo: probabilmente non raggiunsero mai le tremila anime. La popolazione dell’Islanda dell’anno 1100 era pressappoco di 80.000 persone. Il fuoco, i ghiacci, le pestilenze e l’abbandono da parte dei norvegesi ridussero questo numero a 47.000 nel 1800: uno sciupio omicida per una razza molto prolifica. La Groenlandia non possedeva una siffatta riserva di umani sacrifici. In terzo luogo: di tutte le comunità europee essa era la più vulnerabile ai cambiamenti climatici. Per gli altri uomini dell’Europa una serie di inverni freddi e di cattive estati è una seccatura e un fastidio; per i groenlandesi rappresentava il suono di una campana a morte. (…)

“Con tutta probabilità il freddo crescente e la maggior aridità dopo il 1200 contribuirono gli eschimesi a recarsi verso sud. Man mano che il ghiaccio andava estendendosi lungo le coste ovest della Groenlandia, anche le foche si diffusero; a loro volta gli Skraeling seguirono le foche, perché ogni aspetto della loro vita dipendeva da questi animali. Trichechi e balene, caribù e orsi, pernici bianche e piccoli pesci erano tutti bene accolti dagli eschimesi, ma alle foche essi erano legati in modo particolare. I norreni si spingevano a nord, alla ricerca di territori di caccia e di legname trasportato dalle correnti; gli eschimesi scendevano a sud inseguendo le foche: il loro incontro era inevitabile. Non sappiamo quanti di questi incontri abbiano lasciato tracce di sangue sulla neve, poiché tanto per i norreni quanto per gli eschimesi la posta era alta, ed essi dovevano ben saperlo. Il futuro sarebbe stato favorevole a quel popolo che sarebbe riuscito ad adattarsi meglio al mutamento del clima. Gli eschimesi, resi autosufficienti dalle foche, ben impellicciati e protetti contro il freddo, con le loro tende per l’estate, le case per l’inverno e i velocissimi caicchi, erano invero mirabilmente attrezzati. I norreni, legati alle abitudini europee sino alla fine, della colonizzazione, attaccati ai greggi, alle mandrie e ai pascoli che andavano scomparendo, non potevano sopravvivere al loro fimbulvetr, a quel lungo, spietato, terribile inverno, il cui avvicinarsi annunciava la fine del loro mondo. (…)

“L’insediamento occidentale ebbe termine nel 1342. Abbiamo scarse prove di come ciò sia avvenuto, e sono inoltre prove discutibili. Gli Annali del vescovo Gisli Oddsson precisano sotto la data di quell’anno che: «Gli abitanti della Groenlandia, di loro spontanea volontà, abbandonarono la vera fede e la religione cristiana, avendo abbandonato il retto sentiero e le virtù fondamentali, e si unirono coi popoli dell’America (ad Americae populos se converterunt). Alcuni considerano anche che la Groenlandia si trova molto vicina alle regioni occidentali del mondo. E da questo derivò che i cristiani rinunciassero ai loro viaggi in Groenlandia». Per il vescovo i ‘popoli dell’America’ erano quasi certamente gli eschimesi, cioè quegli stessi Skraeling che i groenlandesi avevano incontrato molto tempo prima in Marclandia e in Vinlandia; e la sua asserzione dev’essere interpretata come un’indicazione che già nel 1342 si riteneva che i groenlandesi fossero divenuti indigeni per costume e religione. Fu probabilmente per esaminare il carattere e l’estensione di quest’apostasia che un anno prima, nel 1341, il vescovo Hakon di Bergen aveva inviato il prete Ivar Bardarson in una spedizione divenuta poi famosa. (…)

“Si sparse la voce che i norreni stavano ‘convertendosi’ alla fede egli eschimesi e abbandonavano la religione cristiana; si disse che bisognava fare qualcosa a questo proposito. Ma allorché Ivar Bardarson arrivò in Groenlandia, una di queste due cose doveva essere accaduta: o gli ultimi sopravvissuti dell’insediamento occidentale si erano ritirati verso il sud per cercare scampo, o erano stati vinti e sterminati dagli Skraeling. Comunque, la spedizione di Ivar non servì che a confermare questo fatto: «attualmente gli Skraeling occupano tutta la Colonia occidentale». La cultura tipicamente scandinava scomparve ovunque al di là della latitudine 62° nord. Dopo il 1350 circa l’esistenza di colonie norrene in Groenlandia era limitata a Eystridyggd.

“I documenti storici e archeologici dimostrano che l’insediamento orientale combatté tenacemente per la propria esistenza. Lì viveva gran parte della popolazione norrena, e lì si trovavano anche le terre migliori. Ciononostante la perdita dell’Insediamento occidentale rappresentò per quello orientale un’irreparabile calamità. Da un lato portò alla perdita del Nordseta, il miglior terreno di caccia della Groenlandia, che si trovava più a nord dell’insediamento perduto e, sebbene la richiesta di prodotti del Norseta fosse in declino, ciò costituì una drastica riduzione delle risorse dei coloni. Ma ancora più grave fu la sensazione che un destino analogo minacciasse anche l’insediamento rimasto. Certamente gli eschimesi stavano reagendo duramente alla presenza dei bianchi nel sud; e noi apprendiamo dagli Annali islandesi (Gottskalksannal) che intorno al 1379 «gli Skaraeling attaccarono i groenlandesi, ne uccisero diciotto e rapirono due ragazzi che fecero schiavi». (…)

“Le testimonianze relative alle comunicazioni tra la Groenlandia e il mondo esterno, dopo la metà del secolo XIV, si possono così sintetizzare: nei primi decenni una nave, protetta dal monopolio regale, compì, a intervalli frequenti se non proprio ogni anno, il tragitto Norvegia Groenlandia. Era questo il Groenlands knörr, il Corriere della Groenlandia; ma non sembra che sia stato sostituito dopo che andò perduto nel 1367 o ’69. In seguito le comunicazioni furono scarse. Tutte le prove che possediamo di viaggi in Groenlandia riguardano una strana serie di uomini: Bjorn Einarsson Jorsalafari, detto il Pellegrino di Gerusalemme, fece naufragio in Groenlandia e vi rimase per due anni; un gruppo d’islandesi, smarrita la rotta, vi arrivò nel 1406 e vi rimase quattro anni; una coppia alquanto misteriosa, Pining e Pothorst, fece un viaggio piuttosto chimerico in Groenlandia, e pare anche oltre, nell’oceano occidentale, forse anche fino al Labrador, poco dopo il 1470, aggiungendo così nuove sfumature fantastiche alla cartografia del Rinascimento e qualche luce, ma anche molte ombre, alle vaghe conoscenze che il XVI secolo ebbe del più remoto settentrione. (…)

“Quando e come si sia estinto l’Insediamento orientale non sapremo mai. Con ogni probabilità il fenomeno si verificò subito dopo la fine del 1500. Deve esserci stato un progressivo indebolimento della Colonia. A Herjolfsnes, e ancor più probabilmente a Unartoq, ci sono prove di sepolture collettive che possono far pensare a una morte per epidemia, forse per peste, sebbene non se ne trovi conferma nelle fonti storiche. Come per Vestribyggd, dobbiamo immaginare che la Colonia si sia andata ritirando sotto la pressione eschimese, mentre le famiglie che vivevano ai confini indietreggiavano verso le zone centrali, e alcuni (non necessariamente gli spiriti più deboli) coglievano l’occasione per far ritorno in Islanda o in Norvegia. Altri furono rapiti da violenti predoni europei, tra i quali par che predominassero gli inglesi; ed è logico ritenere che l’isolamento, profondamente sentito, unito alle altre sciagure, abbia alimentato una debolezza fisica e morale che ridusse la volontà di sopravvivenza. Nel complesso la vecchia teoria che la Colonia groenlandese sia andata morendo tra l’indifferenza del resto del mondo rimane sostanzialmente valida. (…)

“Quando nel 1586 l’inglese John Davis riuscì a sfuggire all’atroce desolazione delle coste sud-orientali della Groenlandia e contemplò con sollievo «semplice paesaggio campestre con terra ed erba», all’interno dei fiordi occidentali, non trovò nessuna traccia di bianchi, «né vide alcuna cosa a eccezione di avvoltoi, corvi e piccoli uccelli, come allodole e fanelli». Questi erano i fiordi dell’antico Insediamento occidentale, ma la stessa cosa era di quello orientale. La terra, l’acqua e tutto ciò che esse potevano offrire appartenevano ormai agli esuberanti e tenaci eschimesi. La vicenda norrena in Groenlandia era giunta alla fine”.

La Groenlandia era stata visitata da arditi navigatori vichinghi già al principio del X secolo e colonizzata a partire dal 982 per opera di Erik il Rosso, che la chiamò “Terra Verde” perché tale, in estate, è l’aspetto di alcuni fiordi riparati, ove fioriscono alcuni verdi prati e si concentra buona parte della fauna dell’isola.

Grazie alla presenza di correnti marine calde, era la costa più lontana dall’Europa, ossia quella occidentale, a presentare le condizioni più favorevoli per un insediamento; e fu lì che si concentrarono gli sforzi di quei primi coloni, provenienti tutti dall’Islanda. Il loro numero si stabilizzò intorno alle tremila unità; la loro economia, oltre che su di una limitata attività silvo-pastorale, era basata essenzialmente sul commercio delle pelli di foca e sulle ossa di balena (cfr. Enzo Collotti, La storia della Groenlandia, in Enciclopedia Geografica Il Milione, Novara, De Agostini, 1970, vol. X, p. 135).

Anche il cristianesimo si organizzò presso quelle comunità scandinave, tanto che nel 1126 fu insediato in Groenlandia, per la prima volta, un vescovo norvegese.

Scrive il Collotti (loc. cit.):

“Seppure per breve tempo, i legami con la Norvegia erano destinati a divenire ancora più stretti ed istituzionali, allorché nel 1261 fu riconosciuta sull’isola la sovranità del re di Norvegia. Successivamente, il progressivo allentamento dei rapporti con la penisola scandinava fu conseguenza della creazione di un nuovo equilibrio di forze politiche e di nuove correnti di traffico, che dirottarono il commercio norvegese verso gli interessi dei mercanti tedeschi, che avevano finito con l’assumere di fatto il controllo dei traffici della Norvegia”.

Anche se si tratta di una pagina di storia generalmente poco conosciuta, il collasso della colonizzazione norvegese in Groenlandia offre un esempio, che si potrebbe definire paradigmatico, di come una società umana non possa reggersi indefinitamente in un ambiente in cui essa non è in grado di adattarsi in maniera adeguata.

Non vi sono prove del fatto che i Norvegesi abusarono delle risorse locali offerte dalla magra vegetazione e dalla fauna artica; è certo, invece, che non furono in grado di fronteggiare il peggioramento climatico con gli scarsi mezzi di cui disponevano. Il colpo di grazia venne poi da una serie di circostanze concomitanti: il disinteresse del re di Norvegia, che di fatto li abbandonò al loro destino, dopo averli obbligati a rinunciare, per legge, all’esercizio di una propria marineria; le migrazioni verso sud di gruppi, relativamente numerosi, di Eschimesi, assai meglio adattati alla sopravvivenza in quell’ambiente ostile; alcune probabili pestilenze, testimoniate da un certo numero di sepolture comuni; e, infine, le incursioni di alcuni pirati europei, specialmente inglesi, che rapirono gli abitanti e devastarono le loro fattorie.

Ad ogni modo, la lezione che possiamo trarre da quella lontana vicenda è chiara: un gruppo umano non può mantenersi su un determinato territorio, a meno che sappia integrarsi con l’ambiente, usufruire adeguatamente delle sue risorse, adattarsi ai cambiamenti climatici ed ecologici e introdurre quelle innovazioni, nei suoi metodi di lavoro e nella sua psicologia, che gli consentano di attenuare l’impatto dovuto ai mutamenti stessi.

Il risultato della incapacità dei coloni norvegesi in Groenlandia di adattarsi a condizioni di vita sensibilmente diverse da quelle esistenti in Scandinavia fu la decadenza della loro società, il suo progressivo restringimento, che dovette essere anche morale e spirituale oltre che materiale, e infine la loro scomparsa totale e irreversibile.

Il loro principale errore, se così possiamo chiamarlo, fu, in altre parole, quello di aver cercato di colonizzare la Groenlandia come se fosse stata la Norvegia o magari l’Islanda: non si resero conto che le condizioni del clima e del suolo erano sostanzialmente diverse e che solo sforzandosi di elaborare nuove forme di caccia, di pesca, di architettura e di riscaldamento, avrebbero potuto sopravvivere e, forse, prosperare. Il loro fu un vero e proprio collasso tecnico e morale: ed è impressionante pensare che dei coraggiosi e valentissimi marinai, quali essi erano stati, alla fine, quando ciò sarebbe stato questione di vita o di morte, non seppero mettere in mare neppure una nave per ristabilire il collegamento con l’Europa o, almeno, per evacuare ordinatamente i loro sfortunati insediamenti.

Per trovare un esempio altrettanto drammatico di come la decadenza dell’arte della navigazione possa segnare il destino di una importante società umana, bisogna spostarsi di molte decine di migliaia di chilometri, fino nel cuore dell’Oceano Pacifico meridionale, sull’isola di Pasqua (Rapa-Nui in polinesiano). Gli studi più recenti hanno ormai ampiamente dimostrato che la civiltà che aveva saputo costruire gli sbalorditivi monumenti di pietra, i Moai, che tanto colpirono i primi coloni europei, dopo la scoperta dell’isola da parte di Roggeveen nel 1722, subì un collasso irreversibile a causa del dissennato disboscamento praticato dagli indigeni. L’isola di Pasqua, allorché vi giunsero i colonizzatori polinesiani provenienti da occidente – probabilmente da Tahiti – era ammantata da una straordinaria, lussureggiante foresta primigenia. Ma, nel corso di alcuni secoli, essa venne ridotta a una landa sassosa battuta dai venti, a causa della deforestazione incontrollata, il cui scopo era mettere a coltura nuovi terreni fertili, procurare legname per le imbarcazioni da pesca, per le abitazioni, e per il riscaldamento, nonché la stessa tecnica di trasporto delle statue colossali, dalle pendici del vulcano centrale fino alle coste dell’isola, che richiedeva l’uso dei tronchi degli alberi in funzione di rulli.

Allorché l’ultimo albero venne abbattuto, la pratica della navigazione d’alto mare andò irrimediabilmente perduta e quei fieri navigatori, regrediti a coltivatori sedentari del tutto isolati dal resto del mondo, precipitarono in una serie di guerre intestine che cancellarono perfino il ricordo della passata grandezza.

Al giorno d’oggi, gli uomini fanno totalmente affidamento sui continui progressi della tecnica per imporre un controllo sempre più forte sull’ambiente in cui vivono; sono convinti, infatti, di poter padroneggiare qualsiasi ambiente naturale, tanto è vero che sono allo studio persino dei progetti di colonizzazione spaziale.

Ma, in questo modo, ci sembra che la lezione della fallita colonizzazione norvegese in Groenlandia (e del collasso della civiltà dell’isola di Pasqua, di cui ci occuperemo in un prossimo lavoro), sia andata interamente perduta. Non bisognerebbe puntare, infatti, su una radicale trasformazione dell’ambiente ai fini delle esigenze umane, bensì puntare al raggiungimento dell’equilibrio fra le esigenze della società umana – economiche, culturali e spirituali – e l’ambiente medesimo. In altre parole, l’uomo dovrebbe cercare di vivere in armonia con la natura, e non di imporre ad essa, in tutto e per tutto, le sue necessità, cercando di creare quasi una seconda natura “artificiale”. Procedendo in quest’ultima direzione, infatti, egli crea con le sue stesse mani le premesse per una degenerazione degli equilibri ambientali, che prima o poi gli si ritorcerà contro; senza contare che la tecnologia, quanto più è sofisticata, tanto più è settoriale e non adeguata a fronteggiare situazioni impreviste, quali un rapido cambiamento climatico.

I piccoli Eschimesi, ben coperti nelle loro calde pellicce e ben attrezzati per la caccia alla foca, sia per mare che a terra, sopravvissero all’avvento della ‘piccola età glaciale’, che si abbatté sulla Groenlandia a partire dal XIII secolo; mentre gli alti e forti Norvegesi si estinsero miseramente, senza lasciar di sé alcuna traccia, tranne alcune fattorie in rovina e poche chiese abbandonate, con i loro malinconici cimiteri.

La lezione, ripetiamo, è piuttosto chiara.

Qualora le circostanze climatiche e ambientali dovessero mutare, anche a livello globale, non sarebbe una tecnologia sempre più invasiva a salvarci, ma, al contrario, la capacità di elaborare una tecnologia a misura di ambiente, ossia la capacità di creare condizioni di adattamento eco-compatibili che, rispettando le altre specie viventi animali e vegetali, offrirebbero anche a noi maggiori possibilità di sopravvivenza.

È evidente che, in una simile prospettiva, dovremmo rinunciare alla funesta ideologia dello sviluppo illimitato e al delirio di onnipotenza che le filosofie scientiste hanno veicolato, dal 1600 ad oggi; per ritrovare, invece, le ragioni di una presenza umana sul pianeta Terra che non sia più vista in termini di ‘crescita’ e di sfruttamento indiscriminato delle risorse, ma di armonioso inserimento nell’ambiente naturale.

mardi, 30 août 2011

Prof. Buela: Sur l'accord franco-brésilien pour les sous-marins d'attaque

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Entretien avec le Professeur Alberto Buela sur l'accord franco-brésilien pour les sous-marins d'attaque

Ex: http://fr.novopress.info/

Buenos Aires (NOVOpress) – L’accord de coopération franco-brésilien pour la construction de sous-marins d’attaque est passé largement inaperçu et peu de commentateurs en ont pris la juste mesure. Nous avons interrogé le professeur Alberto Buela, un des rares spécialistes argentins de géopolitique, pour qu’il mette en perspective les ambitions navales du Brésil.

Novopress : vous êtes un spécialiste reconnu de la géopolitique et de la géostratégie du continent américain. Comment analysez-vous les ambitions maritimes du Brésil, mises en lumière par le récent accord franco-brésilien sur la construction de sous-marins d’attaque ?
 
Alberto Buela : Depuis toujours le Brésil ambitionne de se bâtir une sphère d’influence dans l’Atlantique sud, notamment en se constituant un corridor maritime entre ses côtes et l’Afrique occidentale, plus particulièrement (mais pas uniquement) en direction des pays de langue portugaise et française. Cet intérêt explique la forte présence diplomatique brésilienne dans ces pays qui contraste avec le peu d’intérêt manifesté par l’Argentine pour ce continent.

 

L’inspirateur de cette politique n’est pas un penseur d’aujourd’hui. De même que les Nord-Américains sont encore influencés par les théories d’Alfred Thayer Mahan (1840-1914), les Brésiliens n’ont pas oublié les écrits du penseur « intégrationniste » portugais Antonio Sardinha (1888-1925) dont l’ouvrage majeur A Aliança Peninsular défend la thèse de la transformation de l’Atlantique sud en « mare nostrum » d’une alliance ibero-américaine.

Quand le Brésil décide de se doter d’une flotte de sous-marins d’attaque, un des outils de la puissance souveraine les plus efficaces mais aussi les plus coûteux, le fait-il dans une perspective purement nationale ou cherche-t-il à devenir le champion des nations du cône sud du continent ?
 
Alberto Buela : ne vous laissez pas leurrer par le nom que les marchands d’armes lui donnent. Grâce à sa grande autonomie et à sa faible signature, le sous-marin d’attaque est avant tout une arme de dissuasion. Cette future flotte sous-marine brésilienne sera un argument solide pour asseoir la suprématie militaire de Brasilia en Amérique du sud et pour conserver la tête de file d’une communauté régionale de défense intégrant les nations du cône sud de l’Amérique.

 

En Argentine nous vivons depuis 2003 dans le cadre d’un régime social-démocrate qui a écarté avec horreur le conflit armé du champ des options permises au politique. Depuis cette date, les gouvernements successifs poursuivent une politique obstinée de démantèlement des Forces armées dans leurs trois composantes, Terre, Air et Mer.

Comment interprétez la collaboration entre le Brésil et l’Argentine dans le domaine de l’énergie nucléaire, plus particulièrement dans le domaine si avancé de la construction de chaudières nucléaires embarquées ?
 
Alberto Buela : au cours des années 1990, le Brésil était très en retard par rapport à l’Argentine dans les domaines de la recherche et de l’industrie nucléaires. Mon pays était aussi plus en avance dans la technique de construction de sous-marins grâce aux accords de coopération germano-argentins. Malheureusement, le gouvernement du président Menem a condamné les chantiers navals spécialisés Domecq García et il remis à plus tard le financement de la recherche nucléaire. Aujourd’hui, c’est le Brésil qui prend le relais en acceptant une coopération qui rend service aux deux pays, en valorisant la recherche argentine dans les réacteurs nucléaires de petites dimensions et en renforçant la capacité industrielle brésilienne.
 
Le tir de la fusée argentine Gradicom II est-il le signal d’une renaissance des Forces armées de votre pays ?
Alberto Buela : le tir du vecteur Gradicom II est un vieux projet ressorti des cartons. Cet essai réussi ne veut pas dire que la mise en quarantaine de l’armée touche à sa fin dans mon pays.
 
Quelle peut-être la réaction du Chili face à un éventuel rapprochement entre l’Argentine et le Brésil ?
 
Alberto Buela : le Chili s’est toujours méfié d’une possible alliance entre le Brésil et l’Argentine. Mais les circonstances ont changé depuis les affrontements entre nos trois pays au cours du XIXe siècle. Aujourd’hui le Chili a absolument besoin du corridor terrestre qui relie Santiago avec la région métropolitaine de Sao Paulo. Le « grand espace » que forment désormais les grandes nations du cône sud de l’Amérique impose sa dynamique aux nationalismes rances hérités du passé.
 
Comment voyez-vous les dix années à venir pour l’Atlantique sud ? Les Anglais ont-ils raison d’avoir peur ?

Alberto Buela : les Anglais possèdent une base puissante aux îles Malouines, dotée des équipements de détection les plus sophistiqués et d’avions de combat les plus modernes. Cette situation ne changera pas dans un avenir proche.

Entretien avec le Pr Alberto Buela sur l'accord franco-brésilien pour les sous-marins d'attaque

Le professeur Buela photographié pendant un entretien à Madrid en novembre 2008

En revanche, une communauté de destin des nations du sud du continent, renforcée par une force aéronavale conjointe argentine, brésilienne et chilienne, chargée d’assurer la défense régionale, change la donne. Elle encourage les autres nations à nous traiter avec davantage de respect, notamment les puissances qui pillent nos ressources maritimes.

Mais nous devons être réalistes. Tant que le Brésil et l’Argentine ne seront pas capables de montrer le chemin en constituant une force navale conjointe, les Anglais n’ont rien à craindre. En outre, tant que les Argentins resteront obnubilés par leurs problèmes internes et qu’ils n’accorderont pas à leur inimitié avec le Royaume Uni l’importance qu’elle mérite, Londres peut dormir sur ses deux oreilles.

Enfin, de la même manière que le Brésil et l’Argentine se rapprochent, dans l’hémisphère nord les Anglais cherchent à se rapprocher des Français pour compenser leur inéluctable affaiblissement. Nous devons donc prendre en compte non plus un affrontement qui opposerait les nations américaines à l’Angleterre, mais à une alliance franco-britannique. Alors, les données du jeu ne seront que plus complexes.

lundi, 25 avril 2011

La spedizione algerina in Islanda del 1627

La spedizione algerina in Islanda del 1627

Autore: Francesco Lamendola

 

Nel diciassettessimo secolo gli Stati costieri del Maghreb – Marocco, Algeri, Tunisi, Tripoli -, nominalmente infeudati all’Impero Ottomano, erano in piena fioritura economica e politica. Una parte notevolissima del loro benessere proveniva dalla pirateria, esercitata in maniera diretta o indiretta, cioè esigendo il pagamento di un tributo dagli Stati cristiani che volevano vivere tranquilli. Altro denaro affluiva nelle casse dei pascià maghrebini sotto forma di riscatto per gli schiavi cristiani che i parenti volevano far liberare; anche il grande scrittore Miguel de Cervantes conobbe questa dolorosa vicissitudine, dal 1575 al 1580. (1) Si calcola che nella prima metà del 1600 vi fossero, nella sola Algeria, più di 20.000 schiavi cristiani. (2) L’intera struttura economico-sociale di Tunisi e di Algeri, che in quell’epoca avevano riunito le loro forze, poggiava sulla guerra di corsa.

La cornice storica

A partire dal 1618 l’Europa fu travolta dalla Guerra dei Trent’Anni, in un crescendo di distruzioni e carestie. Le forze navali dei maggiori Stati europei furono distratte dalle esigenze della difesa contro i barbareschi, prime fra tutte quelle del colosso spagnolo, che già si avviava a una inarrestabile decadenza economica, politica e, infine, militare (quest’ultimo fattore si rivelerà solo nel 1643, con la disfatta nella decisiva battaglia di Rocroi contro i Francesi del Condé). Di tale situazione profittarono i veloci e leggeri vascelli moreschi per spingere le loro audaci imprese sempre più lontano, anche fuori del Mediterraneo. Le isole Canarie furono uno dei loro obiettivi, sporadici ma fruttuosi e quasi senza rischi (3). Nel terzo decennio del secolo giunsero ad Algeri notizie allettanti sulla remota isola del nord, l’Islanda. Essa era a quel tempo una terra particolarmente isolata: dal 1602 il il Governo danese aveva concesso alla Compagnia d’Islanda, gestita da mercanti di Copenhagen, il monopolio su tutto il commercio estero dell’isola (4). Inoltre, sembra che già allora fosse iniziato nel nord Atlantico quel movimento di espansione neoglaciale che condusse, nei secoli XVIII e XIX, il limite meridionale dei ghiacci galleggianti a sud dell’Islanda (mentre dal 1920 è tornato stabilmente a nord di essa) (5).

Il raffreddamento complessivo del clima e l’assolutismo dei re danesi non erano però riusciti ancora a distruggere le basi economiche della società islandese, poggianti soprattutto su una fiorente attività peschereccia. In particolare, la costa sud-orientale (oggi pressoché disabitata, e divenuta tale per l’eruzione del vulcano Lakagigar nel 1738) (6), godeva di un certo benessere, dovuto alla pescosità di quelle acque. Sopravviveva anche una certa vivacità culturale: tanto che nel 1643 il vescovo Brynjólf Sveinsson scopriva la raccolta di antichi carmi norreni denominata Edda.

Ce n’era abbastanza per invogliare all’impresa gli audaci pirati barbareschi. Essi sapevano che le nebbie e il pack dei mari artici sarebbero stati, più che dei nemici, dei preziosi alleati per sfuggire a una peraltro improbabile sorveglianza delle flotte cristiane. Il re di Danimarca, Cristiano IV, s’era lasciato coinvolgere, nel 1625, nella Guerra dei Trent’Anni, e col Wallenstein che minacciava l’invasione dello Jutland, aveva ben altro cui pensare che la difesa del lontano possedimento islandese. Quanto al bottino che si sperava di fare nell’impresa, le bionde donne nordiche dagli occhi azzurri costituivano un articolo quanto mai pregiato per gli harem del Nord Africa; e, per rivendere i beni materiali che si sarebbero razziati, c’erano sempre i mercanti ebrei di Algeri (ma anche quelli di Livorno, se del caso), pronti alla bisogna.

Una straordinaria impresa marinara

Dal punto di vista nautico, la spedizione moresca in Islanda si presentava come una grossa impresa. È necessario porsi davanti a un globo geografico di una certa scala, per esempio 1:25.000.000, per afferrarne tutta la grandiosità. Si trattava di compiere un balzo di ventotto gradi di meridiano (dai 36° lat. N dello Stretto di Gibilterra ai 64° della costa meridionale islandese) navigando in pieno Atlantico, lontano da qualsiasi costa amica. Coprire qualcosa come 3.100 chilometri in linea d’aria nel solo viaggio di andata, e senza contare la navigazione costiera da Algeri a Céuta e dallo Stretto di Gibilterra al Cabo de São Vicente, estrema punta sud-occidentale del Portogallo (allora sottomesso alla corona spagnola di Filippo IV). In totale, fra andata e ritorno, più di 8.000 chilometri di navigazione, pari – per farsi un’idea concreta – ad oltre un quinto della circonferenza terrestre!

C’erano, è pur vero, alcuni elementi che giocavano a vantaggio della flotta barbaresca. In primo luogo, i Turchi – e quindi i loro alleati nordafricani – disponevano di ottime carte nautiche relative a tutti i mari del mondo, delle quali la famosa carta di Piri Reis, conservata nel Museo Topkapi di Istanbul, è solo un esempio. Poi, a partire dal 45° parallelo Nord circa, la flotta moresca nel viaggio di andata (ma solo in quello di andata!) avrebbe potuto sfruttare in pieno il ramo principale della Corrente del Golfo, che l’avrebbe sospinta di poppa dritta dritta fino all’Islanda (7). Gli icebergs, però, nell’ultima fase del viaggio, avrebbero costituito un pericolo temibile, specialmente di notte. (E si badi che lo sarebbero stati, praticamente, fino all’introduzione del radar, come dimostrerà l’immane tragedia del grandioso transatlantico Titanic in piena belle époque: nel 1912!). Senza contare che le caratteristiche tecniche del naviglio moresco – la leggerezza e l’esilità dello scafo e delle strutture di coperta – se costituivano un vantaggio nel Mediterraneo, poiché consentivano di sviluppare una velocità superiore a quella dei grossi vascelli europei, ponevano tuttavia un’incognita nelle violente tempeste dell’Atlantico settentrionale.

L’incognita principale, comunque, era data dalla novità stessa dell’impresa. Fino a quel momento le navi di Algeri, come quelle di tutte le potenze rivierasche maghrebine, non avevano mai intrapreso delle spedizioni verso obiettivi così lontani. E, pur essendo dotate, da prima delle cristiane, di bussola magnetica, le navi musulmane preferivano senz’altro la navigazione costiera a quella d’altura. Fuori del Mediterraneo, non avevano molta esperienza: le stesse Canarie, obiettivo di alcune precedenti scorrerie, non distano che un centinaio di chilometri dal litorale marocchino – all’altezza della più orientale di essa, Lanzarote: tanto che, nelle giornate in cui l’aria è limpida, si possono vedere reciprocamente le due opposte sponde.

È pur vero che alcuni audaci ra’is (così si chiamavano i comandanti delle navi corsare) avevano vòlto la prua anche più lontano, fino alle Azzorre (1.400 km. a ovest del Portogallo) e perfino alle Isole del Capo Verde (500 km. a ovest della costa africana). Altri avevano compiuto scorrerie ai danni dei pescherecci europei sui Grandi Banchi, al largo delle coste occidentali iberiche e irlandesi (8). Nessuna però di queste imprese può essere paragonata a quella contro l’Islanda, almeno dal punto di vista nautico. Tanto le isole di Capo Verde quanto i Banchi di pesca della Penisola Iberica e delle Isole Britanniche erano indubbiamente degli obiettivi lontani, ma potevano essere raggiunti navigando, per lo più, in vista delle coste; e le Azzorre, benché poste in pieno Oceano, sono molto più vicine allo Stretto di Gibilterra che non l’Islanda, e circondate da acque assai più miti.

La spedizione contro l’Islanda del 1627 aveva, dunque, tutti i caratteri della eccezionalità e presentava rischi non indifferenti. Dovettero essere approntati vascelli più solidi dell’usuale, e raccolti equipaggi capaci di tenere il mare per parecchie settimane consecutive. Le spese per armare una tale flotta furono considerevoli, e i preparativi più complessi del solito. A quell’epoca, del resto, e per lungo tempo ancora – dal 1587 al 1659 – Algeri era governata direttamente da un pascià nominato dal sultano di Costantinopoli; questi, nel 1627, era l’energico e capace Murad IV. Fu quindi con l’approvazione e l’appoggio dell’Impero Ottomano, una delle massime potenze navali del Mediterraneo, che venne varata la spedizione algerina nel Nord Atlantico.

I Turchi, da parte loro, non avevano esperienza diretta di navigazione sulle rotte oceaniche (9), e tutti gli aspetti tecnici dell’impresa ricaddero sulla flotta di Algeri. Al Governo della Sublime Porta sarebbero andati, comunque, secondo l’uso della pirateria barbaresca, un quinto del bottino e tutte le navi cristiane eventualmente catturate. Il resto spettava ai proprietari delle navi, agli equipaggi e ad alcuni funzionari (10).

Il fattore sorpresa

Quando giunsero in vista della costa meridionale islandese, quei vascelli corsari, usciti come per incantesimo dall’orizzonte, provocarono una sorpresa totale. Se pure ai pacifici abitanti dell’isola era giunta notizia delle incursioni moresche al largo della Manica, mai avrebbero pensato di vedersi un giorno assalire da quel nemico sconosciuto, partito dalle lontanissime coste dell’Africa.

Tutto fu quindi facile, dopo le fatiche e i pericoli della traversata, per i corsari algerini. Guidati dalla vetta del Hvannadalshnúkur (2.119 metri sul livello del mare, corrispondenti, però, da un punto di vista climatico, botanico e alpinistico a un 5.000 delle nostre Alpi) e dal bianco scintillante del grandioso ghiacciaio Vatnajökull, allora ancor più esteso di oggi (12), essi diressero le prore verso la costa, animati in pari misura dal sacro zelo della Gihad, la guerra santa contro gli infedeli, e dalla prospettiva di un ricco e facile bottino.

Le prime vittime dell’attacco furono le navi della flotta peschereccia; poi vi fu lo sbarco nel consueto stile corsaro: la cattura degli schiavi, il saccheggio delle abitazioni, l’incendio. Quel po’ di benessere accumulato dagli abitanti con la faticosa pesca del merluzzo e delle aringhe, non ancora del tutto eroso dalla rapacità del monopolio danese, andò distrutto in poche ore. Accadde tutto così in fretta e così imprevedibilmente, che gli scampati faticavano ancora a capacitarsene, quando già era tutto finito. Essi vedevano bruciare le case e le barche, loro sola fonte di sopravvivenza; allontanarsi su quelle navi misteriose i loro cari, rapiti per sempre (e che sarebbero morti ben presto in gran numero nel clima africano), e non potevano pensare che a un’opera del demonio. In tempi in cui la società islandese viveva ancora – come del resto altri paesi d’Europa e d’America – nel clima della superstizione e della caccia alle streghe (13), era quella l’unica, istintiva, possibile spiegazione.

“Quei pirati che giungevano dal nulla, esportando morte e una lingua incomprensibile – è stato giustamente scritto -, sono rimasti nei secoli, emblematicamente, cifra del Male, popolando saghe e racconti imperniati fin allora su Zeus-Odino” (14).

Conclusioni

È stata a lungo opinione degli studiosi che la navigazione e l’esplorazione delle regioni polari sia un capitolo esclusivo della storia occidentale. Nessuno, a quel che ci risulta, ha tentato di porre in luce il contributo dei popoli extraeuropei. Una rara eccezione è data da Silvio Zavatti, che nel suo Dizionario degli Esploratori e delle scoperte geografiche ricordava anche episodi quali la traversata del Pacifico da parte del cinese Hui-Sien, nel 499 d.C., o la navigazione antartica del polinesiano Hui-Te-rangi-Ora, nel secolo VII o VIII (15). A proposito della quale ultima, il celebre etnologo Peter Buck si esprimeva in termini negativi, giudicando poco credibile che dei Polinesiani succintamente vestiti possano aver navigato fra ghiacci e icebergs, tanto più che essi – a suo avviso – non sarebbero comunque disposti ad avventurarsi in mari freddi e grigi (16).

Ebbene, un tale argomento “psicologico” deve essere scartato, non solo perché i popoli della fascia climatica tropicale possono aver navigato alle alte latitudini per cause accidentali, trascinati dalle tempeste – e di fatto così avvenne nella maggior parte dei casi -, ma anche perché non pertinente. Ancora nel 1800 i Maori della Nuova Zelanda si spingevano, con le loro piroghe, fino alle isole subantartiche di Auckland, 500 km. a sud dell’isola meridionale (o, più precisamente, dell’Isola Stewart, da essi chiamata Rakiura o “Terra dai Cieli Ardenti”, forse per via delle aurore polari) (17). E la spedizione corsara algerina in Islanda del 1627 conferma che navigatori non europei, originari di Paesi caldi, erano in gradi di affrontare con successo le rotte polari, anche al tempo della navigazione a vela.

Certo, non si trattava di spedizioni a carattere scientifico, volte ad ampliare il patrimonio nautico e geografico: ma lo stesso si può dire per gran parte delle navigazioni polari degli Europei fino al XIX secolo. Furono i cacciatori di foche e di balene che diedero un contributo decisivo alla conoscenza delle terre e dei mari artici e antartici (al prezzo assai elevato, questo è un fatto, di terribili distruzioni della fauna e, indirettamente, della flora di quelle regioni, fino alll’estinzione totale di un gran numero di specie viventi). E se la spedizione algerina del 1627 non andò oltre le rotte già note agli Europei, tuttavia dimostra che il freddo, gli icebergs e l’impatto psicologico con situazioni climatiche e ambientali tanto diverse da quelle a loro abituali, non bastavano a fermare dei navigatori africani. La circostanza, triste invero, che quegli audaci navigatori fossero dei corsari spietati, non modifica questa realtà. Né dovremmo dimenticare che un corsaro spietato fu pure sir Francis Drake, il primo circumnavigatore inglese della Terra (e il secondo in assoluto dopo Magellano); e tali furono molti altri esploratori europei.

Una storia delle navigazioni polari compiute dai popoli così detti “di colore” aspetta ancora d’essere scritta. Essa dovrebbe prendere in considerazione le imprese dimenticate degli Eschimesi o Inuit, dei Siberiani, dei Polinesiani, dei Maori, dei popoli canoeros della costa americana sud-occidentale (Chonos, Alakaluf, Yahgan o Yàmana) nonché, forse, quelle accidentali dei Tasmaniani (che però, a quanto ci è noto, non erano in grado di raggiungere nemmeno la vicina costa del continente australiano). Molte difficoltà presenterebbe la sua stesura, trattandosi di eventi attestati, per lo più, da semplici tradizioni orali, e perciò sospesi nel Limbo fra lo storico e il leggendario.

La prima e più grave difficoltà, tuttavia, speriamo d’averla rimossa: ed era la tipica ripugnanza dello studioso occidentale ad ammettere che, anche in questo campo, non fu vanto esclusivo dell’uomo bianco quello d’aver valicato gli orizzonti di Ulisse.

Note

1) Carlo Boselli – Cesco Vian, Storia della letteratura spagnola, Firenze, 1946, p. 95.
2) Henry Louis Etienne Terrasse, Barbary Pirates, in Encyclopedia Britannica, ed. 1946, vol. 3, p. 147.
3) Robert Percy Beckinsale, Canary Islands, in Enc. Brit., ed. 1964, vol. 4, p. 767.
4) Islanda, storia, voce della Enciclopedia Europea, vol. 6, 1978, p. 298.
5) George H. Denton – Stephen C. Porter, Neoglaciazione, su Le Scienze, sett. 1970.
6) Haroun Tazieff, E l’Inferno venne a galla, su Atlante, ott. 1970, pag. 31.
7) Cfr. ad es. il World Atlas della Enc. Brit., 1963, vol. 24, tav. 19, Drainage Regions & Ocean Currents.
8) J. P. Cooper, in Storia del mondo moderno della Cambridge University press, tr. it. Milano, 1971, vol. IV, pag. 264.
9) B. L. Montgomery, Storia delle guerre, Milano, 1970, pag. 263.
10) Francesco Beguinot, Barbareschi, Stati, voce della Enciclopedia Italiana, ed. 1949, vol. VI, pp. 121-122.
11) J. P. Cooper, c. s.
12) Lo stesso fenomeno di espansione riguardò, oltre quelli islandesi, i ghiacciai svizzeri. Cfr. F. C. Spooner, in Storia del mondo moderno di Cambridge, cit., vol. IV, pp. 76-77.
13) Vermund G. Lausten, Islanda, storia, voce della Enc. Ital., ed. 1949, XIX, p. 629.
14) Enrico Devalle – Maurizio Gily, La grande sfida alla natura, su Geodes, marzo 1986, p. 31.
15) Silvio Zavatti, Dizionario degli Esploratori e delle scoperte geografiche, Milano, 1967, p. 150.
16) Peter Buck, I Vichinghi d’Oriente. Le migrazioni dei Polinesiani, Milano, 1961, pp. 122-124.
17) Elsdon Best, Map showing the Routes and some recorded Voyages of the Polynesians in the Pacific Ocean, in The Geographical Review, nr. 3, marzo 1918.

* * *

(Articolo pubblicato sul numero 3, anno XLIII, settembre 1987 de “Il Polo. Rivista trimestrale fondata dal prof. Silvio Zavatti”, pp. 35-39; e, con il titolo La spedizione moresca in Islanda, nel volume miscellaneo edito dal Museo Nazionale della Montagna Terra di ghiaccio. Arte e civiltà dell’Islanda, Torino, 1989, pp. 167-170).

 

Francesco Lamendola

mardi, 22 février 2011

Bernard Lugan: la différence entre le Maroc et l'Algérie

Bernard Lugan:

la différence entre le Maroc et l'Algérie

 

mardi, 12 octobre 2010

12 octobre 1943: les Alliés anglo-saxons occupent les Açores

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12 octobre 1943 : les Alliés anglo-saxons occupent les Açores

 

Les Alliés pourront occuper les Açores, y établir des bases aéronavales et faire relâche dans les ports de l’île, suite à des accords secrets anglo-portugais où Londres force la main à Lisbonne, en lui rappelant un traité signé au 19ème siècle et scellant une alliance entre les deux pays. Par cet accord, plusieurs centaines de kilomètres sur le territoire océanique ne seront plus livrés au bon vouloir des sous-marins allemands. Hitler perd définitivement la bataille de l’Atlantique. Rétrospectivement, nous pouvons en conclure que les Açores sont un archipel de très grande importance stratégique pour l’Europe et pour le contrôle de l’Atlantique à partir des côtes du Vieux Continent. Elles permettent notamment de contrôler la route vers les Amériques et de surveiller les côtes marocaines. Il ne s’agit pas seulement de « confettis d’Empire », de résidus de la grandeur passée du Portugal mais d’une position stratégique de toute première importance qu’il ne s’agit pas de perdre.

dimanche, 29 août 2010

Jean Mabire: La maîtrise des mers

La maîtrise des mers

Jean Mabire

Ex: http://www.centrostudilaruna.it/

L’Angleterre l’avait compris. La possession de colonies et la liaison avec l’Amérique supposent la maîtrise des mers, donc une puissante marine. Avec ses Normands, ses Bretons ou ses Basques, la France ne manquait pas de marins. Mais les marins ne font pas une marine.

La traversée de l’Atlantique pour rejoindre “les Amériques” fut longtemps une grande aventure. Les histoires de la marine, en privilégiant la Royale, c’est-à-dire la flotte de guerre, restent assez lacunaires – une fois passée la période des grandes explorations – sur les bâtiments armés pour le commerce ou la pêche. Pourtant l’épopée de Terre-Neuve est demeurée très présente dans l’imaginaire des gens de nos côtes jusqu’au début de ce siècle.

Pour se rendre outre-Atlantique, il fallait donc des bâtiments, des capitaines, des équipages.

Une fois les grandes lignes maritimes inaugurées, un mouvement continuel de navires devait amener sur les terres du Nouveau Monde des soldats, des missionnaires, des négociants et aussi des émigrants, hommes et femmes.

L’histoire océanique de la France américaine est étroitement liée à l’évolution de ce qu’on appellera un jour notre empire colonial, dont les possessions canadiennes ou acadiennes sont sans doute moins pittoresques que les multiples comptoirs antillais, avec leur arrière-plan de flibuste, de violence et de plaisirs.

L’époque des grandes explorations, qui va tant marquer le XVI siècle européen, voit la France occuper une place singulière. Elle arrive après les Espagnols, certes, mais elle précède les Britanniques et les Hollandais. Sur la façade maritime du royaume, de Dieppe à Bayonne, on retrouve les héritiers de ces populations dont la naissance et l’activité sont étroitement liées au monde maritime: au nord, les Normands qui n’ont jamais coupé tout à fait les liens avec les Vikings; en proue avancée du continent, les Bretons qui se souviennent d’être arrivés outre-Manche; ensuite, au-delà de la Loire, vers le sud, les Poitevins, qui furent à la fois gens de terre et gens de mer, navigateurs et colonisateurs; enfin les Basques qui, même dans leurs expéditions lointaines, gardent quelque chose de mystérieux toujours lié à leur énigmatique identité.

Mais il n’est pas de tradition navale sans construction navale. Une flotte, ce n’est pas seulement le désir de l’aventure, appel irrésistible vers quelque inconnu situé au-delà de l’horizon. C’est aussi et c’est d’abord un chantier naval.

La technique prime et impose sa loi. Les historiens expliquent avant tout l’épopée viking par ces longs serpents à proue et poupe identiques et dont les bordés sont assemblés “à clin”. Ce sera une révolution du même genre – en sens exactement contraire – qui va imposer, dès la fin du XV, siècle, le bordage “à carvel”.

Quant au nombre de mâts, il passe d’un seul à deux et même, plus souvent, à trois. Un “château” à l’avant, un autre à l’arrière. Entre les deux, s’étagent les ponts où l’on trouve parfois des canons. La voilure se complique. On commence à jouer habilement d’une garde-robe fournie où voiles triangulaires et voiles carrées s’harmonisent pour régler l’allure de navires auxquels on demande, autant que possible, de remonter au vent, même si cela tient encore de l’acrobatie.

Ces navires du XVIe siècle, à l’heure des grandes navigations transocéaniques sont encore de petite taille. Armés pour la guerre, le commerce ou la pêche, ils ne dépassent guère une centaine de tonneaux. Peu à peu, ce tonnage va monter en puissance. On verra même au Havre-de-Grâce, fondé par François Ier à l’embouchure de la Seine, des vaisseaux de mille tonneaux et même davantage.

En remontant la Seine, on arrive à Rouen et on découvre, sur les berges du grand fleuve, un des plus singuliers hauts-lieux de la technique marine: le “Clos des galées” , chantier de construction à l’inlassable activité. Il s’agit de construire les bâtiments qui partiront des ports voisins de Fécamp ou de Honfleur pour tenter l’aventure au Nouveau Monde.

Quelques hectares de bois pour construire un navire

Les Bretons, bien entendu, ne sont pas en reste sur les Normands. Mais ils construisent et utilisent des bâtiments d’une taille généralement inférieure à ceux de leurs voisins d’outre-Couesnon. Ces navires y gagnent en maniabilité et un plus faible tirant d’eau va leur permettre de remonter profondément les fleuves américains sans crainte d’échouage. Après viendra l’emploi des canots, sur le modèle des légères embarcations indigènes.

Un chantier ce n’est pas seulement des scieries qui débitent les troncs abattus dans la région ou venus des pays du Nord, ce sont aussi des voileries, des corderies, des entrepôts, des magasins. A Rouen, le fameux Clos occupe toute une partie des berges de la Seine. En Bretagne, les chantiers se dispersent, au hasard des abers, en de petites entreprises vivantes et familiales où la tradition s’accompagne de ces multiples initiatives auxquelles se reconnaît la main du maître charpentier.

Tout cela coûte cher. D’où l’importance des armateurs qui constituent de véritables dynasties et qu’on verra, les poches pleines, s’intéresser à la course… comme au commerce du “bois d’ébène”.

Les écoles d’hydrographie, à commencer par celle de Dieppe, où enseigne le fameux abbé astronome Descellers, forment les pilotes à la navigation hauturière. La science de la navigation ne fait que s’affiner et arrive en renfort d’un sens marin que rien ne saurait remplacer. Du grand explorateur au moindre patron de pêche qui ose affronter l’océan, la qualité des maîtres des navires s’affirme.

Encore faut-il des équipages pour mener leurs bâtiments. Le recrutement obéit à certaines règles, souvent empiriques. Ainsi l’historien Philippe Bonnichon précise: “Un homme par tonneau, c’est un ordre de grandeur, variable du simple à la moitié et loin d’être une règle fixe. Mousses et novices embarquent jeunes, souvent avec des parents, pour se former, devenir mariniers et servir jusqu’à la cinquantaine. Communautés de famille et de paroisse se retrouvent à bord et, de retour, travaillent la terre après avoir bourlingué. Les salaires sont peu élevés, proportionnels à la compétence technique”.

Malgré les expéditions des Normands, des Bretons, des Poitevins ou des Basques, le royaume de France n’en reste pas moins une puissance terrienne, peu tournée vers la mer, malgré l’extraordinaire variété de ses côtes. C’est un handicap qui ne va guère cesser tout au long de son histoire.

La liaison avec l’Amérique suppose ce qu’on nommera un jour “la maîtrise des mers”. Faute d’être soutenues par une imposante flotte de guerre, bien des aventures coloniales sont vouées au dépérissement et à l’échec.

 

Construction d'un navire pour la navigation en haute mer au XVIe  siècle
Construction d’un navire pour la navigation en haute mer au XVIe siècle

Finalement, les périodes favorables aux entreprises maritimes d’envergure sont rares. On cite la première moitié du XVIe siècle, la première moitié du règne de Louis XIV, la fin du règne de Louis XV et le règne de Louis XVI.

Faute de soutien de l’État, les entreprises lointaines sont souvent individuelles ou pour le moins privées. D’où le rôle des fameuses “compagnies”. Mais que peut le commerce seul sans le renfort de la Royale et de ses canons?

Ce royaume qui tourne le dos à la mer et a toujours considéré comme “étrangers” les peuples maritimes qu’il devait subjuguer, à commencer par les Normands et les Bretons, eut la chance de posséder quelques grands hommes d’État qui comprirent que les rivages du nord-ouest de l’Hexagone n’étaient pas des limites mais au contraire des aires d’envol d’où allaient partir caravelles et vaisseaux. Trois grands noms: Richelieu, Colbert et Choiseul.

Au lendemain des guerres de religion, une patrie réconciliée pouvait renaître outre-mer. Sur la terre d’Amérique, la Nouvelle-France devenait plus vaste et plus jeune que celle du Vieux Monde. Ainsi vit-on les étendards fleur de lysés battre au Canada et en Acadie, aux Antilles ou en Guyane.

Techniciens dieppois, malouins et olonnais

Les grands ministres qui furent, de leur bureau continental, de véritables “seigneurs de la mer” n’hésitèrent pas à s’inspirer des expériences septentrionales en matière de construction navale. Des ingénieurs et des ouvriers furent même recrutés en Hollande et au Danemark, en Courlande ou en Suède.

Ces remarquables techniciens, aidés par le vieux savoir-faire des Dieppois, des Malouins ou des Olonnais amenèrent le bâtiment de ligne à une quasi-perfection technique. On n’avait pas vu une telle science nautique depuis les “esnèques” scandinaves du Haut Moyen Age!

Claude Farrère, qui fut aussi bon historien de la mer qu’il fut bon romancier, a laissé une belle description de la construction d’un vaisseau aux temps les plus splendides de la marine à voile.

“Un vaisseau, au temps de Louis XIV, est d’ores et déjà l’un des chefs-d’œuvre de l’industrie humaine. Voyons un peu ce qu’est un vaisseau. Cela peut mesurer quelque soixante ou soixante-dix mètres de long, sur quinze ou vingt mètres de large. Cela déplace de mille à cinq mille tonneaux. La coque comporte une quille, laquelle joint l’étrave à l’étambot, c’est-à-dire la proue à la poupe, -puis des couples, c’est-à-dire de robustes côtes taillées en plein cœur de chêne, et courbées comme il faut; ces couples prennent appui de part et d’autre sur cette façon d’épine dorsale qu’est la quille, et montent du plus profond de la bâtisse jusqu’au plus haut, jusqu’au tillac, dit aussi pont des gaillards. Une charpente horizontale, – les lisses, des préceintes, doublées d’un bordé, qu’on assemble à clins ou à franc-bord, – lie les couples entre eux. Et les ponts et les faux-ponts, régnant de tribord à bâbord, et d’arrière en avant, achèvent la solidité merveilleuse de l’ensemble. Au-dessus de la flottaison, deux ou trois entreponts s’étagent vers les gaillards, – gaillard d’avant ou château, gaillard d’arrière ou dunette. Ces entreponts vont du faux-pont, qui est juste au-dessous des gaillards. Et, plus haut, il n’y a que les mâts”.

Quatre mâts. Trois verticaux, l’artimon, le grand mât, la misaine. Un quatrième oblique, le beaupré, à l’avant. Deux de ces mâts, le grand mât et le mât de misaine, servent principalement à la propulsion. Les deux autres, beaupré et artimon, principalement à l’orientation du navire, ce pourquoi chaque mât porte des vergues, et chaque vergue sa voile. Le tout fait une montagne de toile blanche, haute de soixante mètres environ, chaque basse voile étant large d’au moins vingt-cinq. Rien de plus majestueux qu’un vaisseau de l’ancienne marine sous ses voiles.

Ce qui va le plus manquer à la marine royale – qu’elle soit de guerre ou de commerce – c’est la persévérance. Certes, au temps des grandes compagnies maritimes, les Français porteront leur flotte marchande de trois cents à mille vaisseaux. Mais les Britanniques vont en aligner quatre mille et les Hollandais seize mille! Dans cette disproportion se trouve déjà inscrite la perte de la plupart des possessions américaines, malgré les exploits des capitaines corsaires ou des flibustiers.

Il n’est pas d’empire sans maîtrise des mers. L’infortuné Louis XVI devait le comprendre, alors que tout était déjà joué depuis le funeste traité de 1763 – dont certains ont voulu faire une date aussi significative que celle de 1789.

Claude Farrère devait parfaitement tirer la leçon de près de trois siècles d’aventure navale à la française, une histoire en tragiques dents de scie, où l’héroïsme des équipages n’a que rarement compensé l’impéritie des gouvernants.

“C’est une criminelle erreur d’avoir cru qu’on peut avoir des colonies en négligeant d’avoir une marine”.

jeudi, 04 mars 2010

La nationalité canadienne

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Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1987

La nationalité canadienne

 

 

par Mario Gagné

 

L'histoire est faite d'événements passés dont les effets continuent de manifester aujourd'hui leur présence. Ceux-ci, parce qu'ils sont chargés de sens, parlent à la psychè collective. De la même façon que les territoires, l'âme des peuples est aussi le champ du politique (1). La conscience de cette réalité nous permet d'abord de comprendre une situation historique et, peut-être, de modifier par la suite le cours des événements.

 

Parce que nos sociétés sont encarcannées dans cet Occident qui a pour centre les Etats-Unis d'Amérique, il est nécessaire de comprendre les représentations qui nous révèlent l'Amérique. Toutefois, gardons-nous bien de confondre cette dernière avec les Etats-Unis. En effet, il existe des américanités plus anciennes et plus authentiques que celle-ci: entre autres, la nationalité canadienne.

 

Les récits de fondation

 

Dans la tradition politique et culturelle européenne, les nationalités apparaissent à la suite d'une alliance conclue entre deux ou plusieurs ethnies. Afin d'expliquer le sens de cet événement fondateur, les générations subséquentes mettront très souvent au point une interprétation fabuleuse et légendaire.

 

Ainsi la France est née à la suite du Baptême de Clovis. Le rite conféré par Saint Rémi dans cette Rome liturgique qu'est Reims a non seulement permis l'union politique des Gallo-Romains et des Francs mais il a aussi été perçu comme le moment où l'imperium romain et la culture gréco-latine, principes spirituels dont l'Eglise s'était instituée le fiduciaire à l'époque de la migration des peuples (2), ont été remis en héritage à la France.

 

Le mythe fondateur de la Suisse célèbre à la fois le serment de Rütli prononcé par les représentants des Trois Cantons et l'établissement de la société helvétique sur le modèle des ordres indo-européens (3). Celui de l'Angleterre doit être recherché dans le couronnement de Guillaume le Conquérant à Westminster à la suite de la bataille de Hastings; il rappelle à la fois l'alliance (plus ou moins volontaire) des Normands et des Saxons et l'avènement définitif de la romanité dans l'île britannique. On pourrait multiplier ainsi de semblables exemples.

 

Le Canada comme américanité

 

Transportons-nous le 19 juillet 1603 à Tadoussac, lieu où se jette le fleuve Saguené dans l'estuaire maritime du Canada. A cet endroit, les représentants des tribus etchemine, montagnaise et algonquine se sont réunis afin de souhaiter la bienvenue à Champlain et aux colons français qui vont s'établir à sa suite dans le pays (4).

 

Grâce à l'habile politique de Champlain, les Français furent les seuls Européens, parmi ceux qui sont venus en Amérique, à ne pas avoir acheté ou acquis par la force les territoires sur lesquels ils se sont installés; seuls, ils furent expressément conviés par les autochtones. A l'occasion du Paoua de Tadoussac, Champlain dit à peu près ceci aux chefs des tribus indiennes: "Nos fils épouseront vos filles et ils deviendront une seule nation". Ceux-ci lui répondirent: "Les enfants de vos fils apprendront de leur mère à devenir des hommes valeureux (5)".

 

Le métissage est l'événement fondateur du Canada, pays dont les racines plongent à la fois dans le passé européen et dans le passé immémorial de l'Amérique autochtone. Une telle hybridation ne fut pas seulement somatique mais aussi et surtout culturelle.

 

En adoptant maints aspects du mode de vie indien, les colons français ont d'abord pu survivre malgré les rigueurs du climat canadien. En voyageant tantôt dans des canots d'écorce, tantôt sur des chevaux indiens appelés "cayouche", les descendants de ces mêmes colons ont pu explorer la Nord-Amérique à partir de la vallée du Saint-Laurent jusqu'aux Montagnes Rocheuses et même au-delà, de l'Océan Arctique jusqu'au Golfe du Mexique. Ayant fait l'apprentissage des langues indiennes, les Canadiens ont pu rallier à la France un immense continent. En assimilant les techniques de guerre indiennes, les Canadiens ont encore forcé les Anglo-Saxons à demeurer sur le rivage de l'Océan Atlantique.

 

La nationalité canadienne, création européenne en terre d'Amérique, possède donc un caractère véritablement autochtonien (6). Le Canada se présente ainsi, avec le Mexique, la Caraïbe et le Brésil, comme une authentique construction américaine. A cet égard, il est intéressant de constater que le mythe de la fondation du Mexique prend aussi la forme d'une métaphore conjugale, c'est-à-dire celle de l'union de Guadeloupe et de Quetzalcoatl (7).

 

L'acculturation étatsunienne

 

Tout autre est le mythe de fondation des Etats-Unis d'Amérique. Revivifié aujourd'hui par le pasteur Falwell, allié politique du président Reagan, un tel mythe raconte la venue en Nord-Amérique des Pères pélerins à bord du Fleur-de-mai (Mayflower).  Chassés d'Europe parce qu'ils poursuivaient le rêve du paradis puritain, les Pères pélerins continuèrent d'y être fidèles dans le Nouveau Monde, notamment en choisissant de demeurer à l'écart de l'Amérique autochtone. De cette attitude découleront les guerres d'extermination, qu'eux et leurs héritiers vont entreprendre contre les Indiens, et la création de réserves pour y enfermer les survivants.

 

Les Etats-Unis d'Amérique ne sont donc pas nés d'une alliance entre deux peuples mais bien plutôt d'un double refus: à la fois celui de l'Europe originelle et celui de l'Amérique primordiale. Ce pays qui ne voulait pas avoir de racines, ni en Amérique, ni en Europe, ne forma donc jamais un véritable peuple. Conformément aux fantasmes des Pères pélerins, cette entité étrangère à la fois à la terre d'origine et à la terre d'accueil, s'efforcera de ne devenir rien d'autre qu'«une bonne et solide prospérité étalée au grand jour» (8).

 

Afin de se donner un semblant de légitimité politique et historique, les E.U.A. se sont désespérément mis en quête d'une identité nationale. D'abord, comme leur nom l'indique, ils se sont octroyés le monopole de l'américanité; ensuite, ils ont usurpé l'identité des peuples véritables, en particulier celle des Canadiens.

 

Derrière la silhouette des personnages de Fennimore Cooper, que l'auteur a créés afin de donner aux Yanquis une familiarité qu'ils n'ont jamais eu avec la terre d'Amérique, se profile l'image à peine transposée du coureur-de-bois canadien. Sans la geste du cavalier métis, dont Hollywood s'est abondamment inspiré pour fabriquer en série ses héros de plateau de tournage, la figure du gardien de vaches, symbole de l'Amérique yanquie, apparaîtrait clairement pour ce qu'elle est, c'est-à-dire bien misérable.

 

Tout aussi significatif est le travestissement effectué par cette autre formation politique, voisine des E.U.A., qu'est l'Amérique du Nord Britannique. Comme en témoigne sa toponymie où se rencontrent des Kingston, des Windsor, des London, etc., l'A.N.B. fut créée sur le modèle de la Grande-Bretagne. Désirant n'avoir de racines qu'en Europe, l'A.N.B. choisit, comme les E.U.A., de demeurer étrangère à l'Amérique autochtone.

 

Comme les E.U.A., l'A.N.B. se retrouva bientôt devant le même vide identitaire. Comme les E.U.A., l'A.N.B. essayera de le combler en usurpant l'identité des Canadiens. Mais cette fois-ci, ce sera de manière plus profonde: alors que l'A.N.B. refuse précisément au Canada le droit à l'existence, elle s'attribuera le nom du Canada et voudra se faire reconnaître pour tel à la face du monde. Une telle opération, il va sans dire, aura aussi pour but de minoriser les Canadiens dans leur identité et de vider de toute substance leur nationalité.

 

Le refus français de l'Amérique

 

Alors que les Canadiens avaient, au-delà de l'Océan Atlantique, ouvert à la France un espace illimité et plein de possibilités pour son expansion territoriale et démographique, celle-ci ne comprit jamais l'importance de ses possessions nord-américaines. Au contraire, elle s'entêta dans sa traditionnelle politique d'expansion vers l'Est. Vu l'exigüité et le peuplement déjà dense du territoire européen, une telle politique allait non seulement faire perdre à la France son rôle de grande puissance de l'avenir mais aussi entraîner jusqu'à nos jours l'Europe dans de nombreux conflits, causes premières de son actuel déclin (9).

 

La France s'est volontairement départie de ses territoires nord-américains, d'abord en empêchant les Canadiens d'utiliser les techniques de guerre adaptées au Nouveau Monde  -ce qui allait conduire à la chute de Québec en 1759-  et, ensuite, en vendant la Louisiane aux Etats-Unis d'Amérique. Construite sur le refus de l'aventure américaine, la France moderne  chassera de sa mémoire historique le Canada en intériorisant systématiquement le point de vue yanqui sur l'Amérique (10). Pour pouvoir agir autrement, il aurait fallu reconnaître explicitement l'erreur de jugement historique qui lui a valu la perte de son imperium.

 

Les Etats-Unis étant surtout pour la France l'"Amérique", il est significatif de constater que sa littérature romanesque ira jusqu'à affubler, pour faire plus "américain" des noms anglais aux Indiens -lesquels ont très souvent des ascendants français- et à les faire évoluer dans une toponymie non moins anglo-saxonne. Tout aussi significativement, elle mesurera désormais à l'aune yanquie les différentes manifestations de la "modernité" et de la "démocratie". Dans cette perspective, constater que le refus français de l'Amérique a entraîné l'asservissement aux Etats-Unis est le moindre des paradoxes.

 

Seule l'attitude du Général de Gaulle, qui a permis à la France de redécouvrir l'Amérique, représente une exception (11). Ce n'est pas par hasard si l'homme d'Etat qui fut à l'origine du rapprochement franco-allemand, c'est-à-dire de la mise en cause de la traditionnelle politique étrangère française, fut aussi celui qui appuya le mouvement indépendantiste du Canada français. Cet appui, rappelons-le ici, avait pour but d'annuler dans une certaine mesure les effets du désastreux traité de Paris (1763).

 

Le nationalisme de l'Eglise canadienne

 

Après la cession du Canada à la Grande-Bretagne, différents mouvements de résistance à la présence anglaise surgirent. Le plus important de ceux-ci fut l'Insurrection des Patriotes qui eut lieu en 1837 et en 1838. Influencés par les meilleures idées de la Révolution française (12), les Patriotes élaborèrent une légitimité en vertu de laquelle l'autochtonité du peuple canadien fondait son droit à la liberté et à la souveraineté politiques. Ils l'utilisèrent afin de l'opposer au droit de domination que le pouvoir britannique s'était arrogé.

 

La défaite de l'Insurrection fut le moment qui permit à l'Eglise de s'accaparer, avec la complicité de l'occupant, le pouvoir culturel; notamment, sa présence se fit sentir dans le domaine de l'enseignement public et dans celui de la formation des élites professionnelles et politique. En gros, cette mainmise allait durer de 1840 à 1960.

 

Pendant toute cette période, l'Eglise s'acquitta fidèlement de son pacte de collaboration. Afin d'empêcher à l'avance d'autres tentatives d'émancipation politique, elle mit au point un nationalisme qui, tout en faisant appel au sentiment national des Canadiens, allait aussi et surtout le neutraliser. Centré autour de la Province of Quebec, nom que le conquérant avait donné au Canada dès la Proclamation royale de 1763, ce nationalisme s'opposa résolument au caractère autochtonien de la nationalité canadienne.

 

Au moins deux raisons amenèrent l'Eglise à collaborer avec l'occupant. D'abord, elle se faisait du pouvoir politique une conception théocratique et déracinée. Puisque le Canada avait été cédé à la Grande-Bretagne en vertu d'un accord passé entre deux monarques, qui étaient l'un et l'autre les représentants de Dieu sur terre, on devait alors au roi d'Angleterre la même obéissance que l'on avait accordé au roi de France. Ensuite, la nationalité canadienne, qui avait émergé à la suite d'un contact prolongé avec la Grande Sauvagerie, représentait pour les Français qui venaient s'établir en Nord-Amérique et leurs descendants une façon de couper les ponts avec la Rome catholique. A l'exemple de Marie de l'Incarnation, le clergé se plaignait amèrement: "Un Français devient plutôt sauvage qu'un Sauvage ne devient Français."

 

L'Eglise favorisa donc la construction d'une histoire et d'une sociologie fictives dont les principaux axes furent la francité et la catholicité. On s'en doute bien, l'intériorisation du point de vue français ne pouvait manquer d'être aliénante. C'est ainsi que progressivement l'élite politique et culturelle canadienne évacua, comme le fit la France, le Canada de sa mémoire historique.

 

La fausse nationalité québécoise

 

Au début des années 1960, apparut un nationalisme qui, tout en se voulant nouveau, alla porter cent vingt années d'influence cléricale à son ultime conséquence. Bien loin de s'inspirer de l'Insurrection des Patriotes ou de la Relève des Métis (1869 et 1885), qui furent des moments d'affirmation de la nationalité canadienne, les néo-nationalistes fabriquèrent de toute pièce une nationalité québécoise qui serait exclusive de la nationalité canadienne et qui, de ce fait, entérinerait l'usurpation faite par l'A.N.B. Bien qu'ils proclamaient bien haut la nécessité de l'indépendance politique, les néo-nationalistes la niaient dans les faits puisqu'ils interdisaient le recours à la nationalité canadienne qui parle à la psychè collective et qui seule peut fonder un tel droit.

 

Sans le savoir, les néo-nationalistes, qui étaient souvent des anticléricaux virulents, reprirent l'essentiel de l'ancien nationalisme clérical. Les modifications apportées à celui-ci furent mineures. Ainsi, le terme "Québec" se substitua à celui de "Province" et le "corporatisme social" des années 1930 devient la "sociale démocratie" des années 1970 (13). Si l'Eglise disparut du domaine de l'éducation et des affaires sociales ce fut au profit d'une instance toute aussi maternante: l'Etat technocratique pourvoyeur de services. Pour le reste, les néo-nationalistes continuèrent d'agiter le drapeau à fleurs de lys blanches du clergé, véritable symbole d'abdication nationale.

 

Si la fausse nationalité québécoise a pu exercer un attrait durant un certain moment, c'est justement parce qu'elle promettait de faire accéder un peuple à la souveraineté politique sans avoir à soutenir de combat contre un adversaire identifiable. Après s'être donné une nouvelle identité qui l'exorciserait de tout un passé jugé colonial, il lui suffirait, aux dires du Parti québécois, de pratiquer la "démocratie" et de devenir "moderne" à la manière dont les Anglo-Saxons l'entendent. A leurs yeux, il lui aurait été enfin possible de mériter l'indépendance.

 

Une telle vue de l'esprit soutend une démarche semblable à celle que doit suivre le catéchumène chrétien: on se purifie d'un passé jugé inacceptable en abandonnant le nom de sa lignée et en pratiquant certaines vertus dans le but de se mériter le salut éternel devant Dieu.

 

Les néo-nationalistes ont donc conduit le mouvement indépendantiste du peuple canadien dans l'impasse. Ils n'ont pas voulu comprendre qu'un mouvement de libération nationale est d'abord et avant tout une révolution. Révolution, parce qu'à l'exemple de la conduite d'actions inscrites dans l'histoire, elle exige du courage, au moins celui qui permet de mettre en cause les schémas intellectuels étriqués.

 

Révolution aussi, parce qu'une action inscrite dans l'histoire est toujours  -comme l'indique l'étymologie du terme, revolvere-  un retour aux origines. Or, un peuple ne se maintient dans le monde que parce qu'il actualise constamment son mythe de fondation et sa tradition de lutte nationale.

 

Mario GAGNE.

 

 

NOTES

 

(1) C'est l'opinion du géopoliticien Jordis von Lohausen telle que rapportée dans le "Dossier géopolitique" de la revue  Orientations,  octobre 1980, p. 4.

(2) Voir à ce sujet Louis Rougier dans  La France en marbre blanc,  Bourquin, éd., Genève, 1947, p. 73.

(3) Voir Pierre Maugué dans  "Les origines de la Suisse et la Tradition celtique",  Etudes et recherches,  n°3, automne 1984, p. 3.

(4) Voir Jean-Marc Soyez,  Quand l'Amérique s'appelait Nouvelle-France,  Fayard, Paris, 1981, p.84.

(5) Voir le texte en exergue du livre de Hugh Broody,  The People's Land Eskimos and Whites in the Eastern Arctic,  Penguin Books Ltd., Harmondsworth, 1975.

(6) Voir Alain de Benoist,  Démocratie, le problème,  éd. Le Labyrinthe, Paris, 1985; en particulier les pp. 13, 14 et 15.

(7) Voir Jacques Lafaye,  Quetzalcoatl et Guadeloupe, la formation de la conscience nationale au Mexique, 1531-1813,  Gallimard, 1974.

(8) L'expression est de Hawthorne et elle a été citée par Jean Morisset dans son livre  L'Identité usurpée,  tome I, éd. Nouvelle Optique, 1985, p. 58. Jean Morisset, dont les analyses sont une source d'inspiration féconde, est, avec Raoul Roy, l'un des rares intellectuels canadiens à défendre la nationalité canadienne contre la méprise que constitue la fausse identité québécoise.

(9) voir Jordis von Lohausen,  op. cit., p. 15.

(10) L'Atlas mondial de la découverte  préparé par Gérard Chaliand et Jean-Pierre Rageau (Fayard, Paris, 1984) est caractéristique de l'attitude déconcertante des Français envers le Canada. Alors qu'ils décrivent avec soin les explorations effectuées par les Espagnols, les Portugais et les Anglais en Amérique, aucune allusion n'est faite quant aux pérégrinations des explorateurs français et canadiens dans le nouveau monde. Même les voyages de Jacques Cartier sont ignorés. Ces deux géopoliticiens, qui ne peuvent avoir pour eux l'excuse de l'ignorance, se sont donc conformés aux vœux des Anglo-Saxons qui ont toujours combattu la présence de la France en Nord-Amérique.

(11) Le très beau livre de Jean-Marc Soyez  (op. cit.),  qui se lit comme un roman, est l'un des rares ouvrages français qui présente l'Amérique à la France et à l'Europe; il y a tout lieu de croire qu'il n'a pu être écrit que dans le contexte de la présidence du Général de Gaulle.

(12) Les dirigeants du mouvement des Patriotes étaient fascinés par les tentatives de "retour à l'antiquité" effectuées par la Révolution française. Un Ludger Duvernay, fondateur et directeur du journal  La Minerve,  puisait ses modèles politiques dans la démocratie athénienne ou dans la République romaine.

(13) Sur les liens de parenté existant entre les deux nationalismes, voir Clinton Archibald,  Un Québec corporatiste?,  éd. Asticou, Hull, 1983. 

mercredi, 24 février 2010

Kriegsvorbereitungen: Nach 28 Jahren rüsten sich Argentinier und Briten vor den Falkland-Inseln für die nächste Schlacht

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Kriegsvorbereitungen: Nach 28 Jahren rüsten sich Argentinier und Briten vor den Falkland-Inseln für die nächste Schlacht

Udo Ulfkotte / Ex: http://info.kopp-verlag.de/

Unbemerkt von deutschen »Qualitätsjournalisten« rüsten sich Briten und Argentinier für einen neuen Falkland-Krieg. Der letzte hat rund tausend Menschen das Leben gekostet. In der kommenden Woche wird sich der Ton verschärfen, die Argentinier durchsuchen nun alle Schiffe, die auf die Falkland-Inseln wollen. Denn die Briten wollen dort die Ölförderung aufnehmen. Die Argentinier aber sehen die Inselgruppe weiterhin als ihr Staatsgebiet an.

Zwischen April und Juni 1982 führten Großbritannien und Argentinien Krieg um die Falkland-Inseln (auch Malwinen – argentinisch »Islas Malvinas« – genannt), die Sandwich-Inseln und um Südgeorgien. Der damalige amerikanische Präsident Ronald Reagan sagte zu jener Zeit, er können  nicht verstehen, warum sich zwei Verbündete um »einige eisige Felsen« stritten. Doch es ging nicht um die kaum bewohnten Felsen. Es ging schon damals um die vermuteten reichen Ölvorkommen. Argentinien beharrt seither weiterhin auf dem Besitzanspruch in Bezug auf die Inseln. Der Konflikt zwischen beiden Staaten um die Rohstoffe der Region ist zwar seither in Vergessenheit geraten, aber nicht gelöst.

Vor dem Hintergrund der schweren britischen Wirtschaftskrise sucht die Londoner Regierung nun nach neuen Einnahmen und nach einer Möglichkeit, die immer unzufriedender werdende britische Bevölkerung geschlossen hinter sich zu vereinen. Mit einem neuen Krieg um die Falkland-Inseln könnte sie beides erreichen: Die Briten patriotisch hinter sich aufreihen und Großbritannien nach den versiegenden Nordeefeldern endlich große neue Ölvorkommen dauerhaft sichern lassen. In aller Ruhe hat die Lononer Regierung in den vergangenen Wochen Ölbohrungen auf den Falkland-Inseln vorbereitet – und parallel dazu »rein zufällig« immer mehr Kriegsschiffe und Truppen in die Region verlegt.

Die Argentinier kontrollieren nun alle Schiffe, die in Richtung der umstrittenen Inselgruppe fahren und durchsuchen diese. Ein britisches Schiff mit Ölbohrausrüstung haben sie gerade beschlagnahmt.

Nun will Buenos Aires offiziell wieder die Kontrolle über den gesamten Seeverkehr zwischen Südamerika und der Inselgruppe ausüben, die ohnehin energisch von Argentinien beansprucht wird, auch wenn dort Briten leben. Mit der Entdeckung gewaltiger Erdöl- und Gasvorräte in dem Seegebiet um die drei großen Inseln geht der Streit nun in die nächste – möglicherweise kriegerische – Runde. Denn die großen britischen Ölkonzerne vermuten allein unter einem einzigen Feld südlich der Falklands mindestens 60 Milliarden Barrel Öl. Wenn das zutrifft, dann wäre es etwa ein Drittel mehr, als bislang in der gesamten Nordsee gefördert wurde. Man muss, um sich die gewaltige Dimension vorstellen zu könenn, auch wissen: Das größte Ölfeld der Welt, Ghawar in Saudi-Arabien, wird auf 80 Milliarden Barrel geschätzt.

Großbritannien hat zum Schutz der genannten Ölvorkommen schon wieder mehr als tausend Soldaten auf der Inselgruppe stationiert, vor der Küste zudem Fregatten und einen Zerstörer. Luftlandetruppen werden derzeit verlegt. In den nächsten Tagen wird eine Ölbohrinsel zu den Inseln geschleppt. Die Argentinier sehen das als offene Kriegserklärung an. Wenn die Londoner Regierung will, dann kann sie die unzufriedene eigene Bevölkerung nun jederzeit mit einem spontanen Krieg von den inneren Problemen ablenken.

 

Donnerstag, 18.02.2010

Kategorie: Allgemeines, Geostrategie, Enthüllungen, Wirtschaft & Finanzen, Politik

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jeudi, 09 avril 2009

La disparition des Vikings au Groenland au XVème siècle

La disparition des Vikings au Groenland au XVème siècle

La survie d’une société ne dépend pas que de sa puissance militaire ou économique mais aussi de l’attitude des adversaires et de la réponse que la société apporte à ses propres défis. C’est ce qu’analyse Jared Diamond dans « Effondrement, comment les sociétés décident de leur disparition ou de leur survie » paru en 2006. L’exemple le plus parlant du livre est celui de la société viking installée depuis plus de trois siècles au Groenland qui s’éteignit entre 1300 et 1400 après J.C et dont les Inuits ont délibérément contribué à la disparition.

Depuis la fin du VIIIème siècle après JC, les Vikings menaient une stratégie d’expansion depuis la Scandinavie, s’installant en Grande-Bretagne, Irlande, Russie, Islande, autour du Rhin et de la Loire, Espagne, Italie… D’après les documents de l’époque, Erik le Rouge fut successivement exilé de Norvège en Islande puis au Groenland où il fonda la colonie viking en 984 après J.C. Cette colonie, située à 2500 km de la Norvège, était constitué de 250 fermes regroupées autour de 14 églises. Vers l’an 1000, quatre mille personnes vivaient dans l’Etablissement de l’Est, situé au sud du Groenland et mille personnes dans l’établissement de l’Ouest, situé 500 km plus au nord. La société viking importa son modèle culturel qu’elle reproduisit à l’identique au Groenland : tenue vestimentaire à l’européenne, construction d’églises chrétiennes suivant le style norvégien, régime alimentaire… Cependant, les conditions climatiques n’étaient pas les mêmes que celles de Norvège : le climat était plus froid et plus venteux, l’environnement plus fragile. En voulant à tout prix maintenir le même type d’alimentation qu’en Norvège, les Vikings du Groenland consacrèrent beaucoup de ressources à l’élevage d’animaux qui n’étaient pas adaptés au climat local comme les vaches pour la nourriture ou les chevaux pour le transport. La duplication du modèle culturel à tout prix entraîna une fragilisation puis une destruction de l’environnement. Par conséquent, les Vikings du Groenland durent rapidement importer de Norvège du fer, du bois d’œuvre et du goudron pour la construction d’habitations, de meubles et d’outils. Ils exportaient des objets de faible volume à forte valeur comme des peaux de phoques, d’ours polaires ou de bovins, des défenses en ivoire de morses, le Groenland étant à cette époque la seule source d’ivoire pour les Européens… Les Vikings étaient donc grandement dépendants de l’Europe pour survivre.

Les Inuits étaient, tout comme les Vikings, dans une stratégie d’expansion, provenant du détroit de Béring à travers l’Arctique canadien. Ils arrivèrent au Groenland par le Nord-Ouest vers 1200 après JC et atteignirent la région de l’Etablissement de l’Ouest vers 1300 et de l’Etablissement de l’Est vers 1400. Ils maîtrisaient la vie dans l’environnement arctique, notamment les techniques de chasse à la baleine et au phoque qui leur permettaient de se nourrir, de s’éclairer et de se chauffer (utilisation de la graisse des animaux) ainsi que la construction des kayaks (utilisation de peaux sur une structure en bois plutôt qu’un bateau tout en bois comme les Vikings) et des traîneaux à chiens qui favorisaient un transport rapide des marchandises. Les Vikings rejetèrent les « sraeklings » (miséreux en vieux norrois) qu’ils considéraient comme inférieurs car non-chrétiens et comme des envahisseurs. Les contacts entre les deux peuples furent absents ou hostiles, mais en aucun cas pacifiques sur une longue durée. Les Inuits ne partagèrent donc pas avec les Vikings leurs techniques de chasse et de pêche pourtant largement plus efficaces dans un environnement arctique.

Vers 1300, début du Petit Age Glaciaire, le Groenland connu un refroidissement soudain, entraînant une raréfaction des ressources alimentaires et plaçant les peuples inuit et viking en situation de survie. Du fait des glaces, les bateaux en provenance d’Europe ne purent arriver jusqu’au Groenland et livrer les cargaisons de bois et de fer attendues par les Scandinaves. La conséquence directe de ce phénomène fut la perte pour les Vikings de leur avantage militaire ainsi qu’une moindre efficacité dans leurs activités économiques puisqu’ils ne pouvaient plus fabriquer d’outils. Les Inuits qui auparavant étaient dans un rapport du faible au fort, retournèrent la situation à leur avantage. Meilleurs chasseurs, ils purent continuer à se nourrir et à se chauffer grâce aux baleines et aux phoques. Ils allèrent même jusqu’à attaquer l’Etablissement de l’Est en 1379. Les Scandinaves, campés sur leur modèle européen de vie, se retrouvèrent démunis devant la diminution de pâturages et donc de nourriture pour leurs bêtes, de gibiers à chasser et l’absence de bois pour se chauffer en provenance d’Europe. Sans ressources, la société viking périclita et disparut vers 1400 après JC.

En conclusion, la stratégie de puissance d’un peuple ne s’exprime pas forcément dans un affrontement direct et rapide. Elle peut aussi être indirecte et durer plusieurs dizaines d’années. Ce fut le cas pour l’affrontement entre les Vikings et les Inuits entre le XIVème et XVème siècles après JC. La civilisation viking au Groenland ne mourut pas d’un affrontement direct avec le peuple inuit mais d’un affrontement indirect où les techniques de survie en milieu hostile furent l’enjeu principal. Alors que les Inuits étaient considérés comme plus faibles militairement, ils ne maîtrisaient pas la technique du fer, ils retournèrent la situation à leur avantage grâce à leur maîtrise du mode de vie en Arctique.

Virginie Monthioux

source : www.infoguerre.fr [1]


Article printed from Altermedia Canada: http://ca.altermedia.info

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