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jeudi, 26 juin 2025

La proposition en quatre points de Xi Jinping pour apaiser le conflit au Moyen-Orient

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La proposition en quatre points de Xi Jinping pour apaiser le conflit au Moyen-Orient

Giulio Chinappi

En pleine escalade de grande envergure entre Israël et l’Iran, Pékin propose une feuille de route vers la paix visant un cessez-le-feu immédiat, la protection des civils, la relance des négociations politiques et le soutien actif de la communauté internationale.

SOURCE première de l'ARTICLE : https://giuliochinappi.wordpress.com/2025/06/21/la-propos...

Jeudi 19 juin 2025, dans l'après-midi, le président chinois Xi Jinping a eu un entretien téléphonique avec le président russe Vladimir Poutine, au cours duquel les deux dirigeants ont échangé leurs points de vue sur la situation au Moyen-Orient. Xi Jinping a présenté une proposition en quatre points: le cessez-le-feu doit devenir une priorité urgente, garantir la sécurité des civils doit être la priorité absolue, le dialogue et la négociation sont les solutions fondamentales, et les efforts de paix de la communauté internationale sont indispensables. Cet échange a eu lieu dans un contexte critique, alors que le conflit entre Israël et l’Iran ne cesse de s’intensifier. La coordination des positions entre Xi et Poutine reflète non seulement la profondeur de la coopération stratégique entre la Chine et la Russie, mais envoie aussi un message clair à la communauté internationale: un appel à contenir les tensions et à préserver la paix régionale.

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La crise actuelle au Moyen-Orient a dépassé les limites d’un conflit conventionnel. Lors d’une nouvelle série d’attaques aériennes jeudi 19, Israël a visé trois installations nucléaires iraniennes, tandis qu’un missile lancé par l’Iran a frappé un hôpital en territoire israélien. Les deux parties ont promis des représailles, et le risque d’une escalade incontrôlable s'avèrerait gravissime.

Pendant ce temps, les États-Unis, malgré leur influence déterminante sur Israël, n’ont pas joué un rôle constructif. Au contraire, ils ont continué à alimenter le conflit, allant jusqu’à indiquer leur disponibilité à « intervenir directement », ce qui mine sérieusement les attentes de la communauté internationale en matière de désescalade. La situation étant devenue telle que « rien ne peut être exclu », la fenêtre d’opportunité pour éviter le pire est désormais très étroite.

Une fois que le conflit échappe à tout contrôle, il sera beaucoup plus difficile d’en inverser la trajectoire. Dans ce contexte, la Chine a été la première grande puissance à proposer un plan global et visionnaire, capable de répondre à la fois aux besoins immédiats et aux solutions à long terme, faisant preuve d’un fort sens des responsabilités.

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La « proposition en quatre points » est ciblée et va au cœur des enjeux actuels. Elle exhorte en premier lieu les parties en conflit, en particulier Israël, à arrêter rapidement les opérations militaires pour éviter que de nouveaux dégâts soient infligés aux civils. Elle invite ensuite à soutenir fermement une solution politique à la question nucléaire iranienne, et sollicite la communauté internationale, et en particulier ces pays qui exercent une plus grande influence sur les belligérants, à faire des efforts pour apaiser les tensions.

De nature orientée vers le problème, cette proposition ne se limite pas à identifier les voies fondamentales pour la résolution de la crise, mais trace également des parcours efficaces pour atténuer le conflit. Elle met au centre la recherche d’une paix durable et d’une sécurité collective, dans le respect total de l’ordre et de l’équité internationaux. Elle reflète l’analyse précise de Pékin et s’aligne sur les sollicitations répandues dans la communauté globale, en proposant un cadre d’action concret et réalisable.

La Chine a toujours agi comme facteur de paix et de stabilité au Moyen-Orient, comme en témoignent des gestes concrets: faciliter la réconciliation entre l’Arabie Saoudite et l’Iran, soutenir le retour de la Syrie à la Ligue arabe, défendre la cause des droits nationaux palestiniens, promouvoir la paix à Gaza et l’unité palestinienne, contribuer à des missions de maintien de la paix régionales ou aux aides humanitaires. En tout état de cause, Pékin a basé ses actions sur les principes de justice et sur les intérêts fondamentaux des populations du Moyen-Orient, proposant un nouveau modèle de sécurité commune, inclusive, coopérative et durable.

De l’autre côté, les accords de réconciliation entre l’Arabie Saoudite et l’Iran signés à Pékin, ainsi que la déclaration palestinienne d’unité, témoignent de la confiance de la région dans la position impartiale de la Chine et dans l’esprit de sa nouvelle conception de la sécurité. La récente « proposition en quatre points » de Xi sur le conflit entre Israël et l’Iran confirme cette ligne morale, visant à favoriser concrètement la paix au Moyen-Orient.

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Avec une région instable, la paix mondiale reste un objectif difficile à atteindre. Les efforts pour promouvoir un cessez-le-feu et engager des négociations ne sont pas seulement nécessaires pour la région, mais indispensables à la stabilité mondiale. Cela requiert coordination et consensus entre les grandes puissances. La récente conversation téléphonique entre Xi et Poutine illustre cette étroite communication et coordination entre la Chine et la Russie sur les grandes questions internationales. En tant que membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU, Pékin et Moscou coopèrent main dans la main sur la scène mondiale, jouant un rôle stabilisateur pour la paix régionale et mondiale. Cela met en évidence non seulement la contribution des pays émergents à la gouvernance globale, mais indique aussi la voie correcte pour que les grandes puissances coexistent dans un esprit de responsabilité partagée.

La crise au Moyen-Orient confirme que le monde est entré dans une « époque de turbulences et de transformations », et la « proposition en quatre points » représente la perspective cohérente de la sécurité selon les vues chinoises. De la guerre russo-ukrainienne à la question israélo-palestinienne, il est évident que les propositions de Pékin sont de plus en plus adoptées par de nombreux pays. Maintenant que des nuages de tension obscurcissent le Moyen-Orient, il est à espérer que la communauté internationale passe des paroles aux actes, en adoptant la « proposition en quatre points » de la Chine. Celle-ci se déclare prête à renforcer la communication et la coordination entre toutes les parties, à construire un consensus, à lutter pour la justice et à jouer un rôle constructif dans le rétablissement de la paix dans la région.

mardi, 17 juin 2025

Donald Trump a échoué

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Donald Trump a échoué

Par Franz Ferdinand

Source: https://www.unser-mitteleuropa.com/169698

Donald Trump s'est présenté en annonçant qu'il mettrait fin à la guerre en Ukraine et ne déclencherait pas d'autre guerre. Il a échoué sur ces deux points. Il est évident qu'il n'a pas pu s'imposer face à « l'État profond » et au « lobby israélien » :

  1. 1. Guerre en Ukraine :

L'attaque partiellement réussie de l'Ukraine contre la flotte de bombardiers stratégiques russes le 2 juin 2025, planifiée et menée avec l'aide des États-Unis pendant 18 mois, a détruit la confiance entre Poutine et Trump. Il convient notamment de souligner que, conformément au traité START II, ces avions doivent être visibles par satellite et ne peuvent être cachés dans des hangars. Ces coordonnées ont été transmises aux Ukrainiens, ce qui a montré que Trump et les États-Unis étaient partiaux dans cette guerre et inaptes à jouer le rôle de médiateurs.

  1. 2. Attaque d'Israël contre l'Iran :

Cette attaque a également été planifiée pendant un an et menée avec l'aide des États-Unis et de leurs alliés dans cette région (Arabie saoudite, Irak, Oman, etc.). Une opposition interne coopérant avec Israël a certainement participé à cette attaque. Sinon, il aurait été impossible de connaître les lieux de séjour des personnes assassinées.

Le renversement du régime syrien, au cours duquel Assad a été remplacé par une bande de coupeurs de têtes pro-occidentaux, faisait manifestement partie de ces préparatifs, avec le recul.

Il est particulièrement piquant de noter que le négociateur en chef iranien pour les négociations entre l'AIEA et l'Iran (Amirhossein Faghihi) a été assassiné. Ces négociations auraient dû avoir lieu le 15 juin 2025 et ont manifestement été empêchées de manière délibérée.

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Cette attaque est clairement contraire au droit international, car la menace que représente l'Iran pour Israël a été tout autant fantasmée que l'étaient autrefois les armes de destruction massive irakiennes, qui ont servi de prétexte à la deuxième guerre en Irak. L'affirmation selon laquelle l'Iran posséderait déjà de l'uranium de qualité militaire ou serait sur le point d'enrichir de l'uranium à ce niveau est un mensonge éhonté.

Lors de l'attaque des bombardiers israéliens, des informations provenant de l'AIEA ont apparemment été utilisées, ce qui montre clairement que cette organisation n'est pas neutre.

Ce qui est vraiment en jeu dans ce conflit :

Le conflit entre Israël et l'Iran est une guerre par procuration, tout comme la guerre entre l'Ukraine et la Russie. L'ingérence des États-Unis et de la Grande-Bretagne en Iran remonte à 1953, lorsque le premier ministre démocratiquement élu, Mossadegh, a été renversé par la CIA. Après le renversement du Shah, qui a ensuite été exilé, la République iranienne et les États-Unis sont entrés dans un conflit permanent. Israël n'a ici qu'un rôle de chien de garde.

Tout ce débat autour du programme nucléaire iranien n'est qu'un écran de fumée. En réalité, il s'agit de maintenir l'ordre mondial unipolaire.

Le contrôle de l'Occident sur l'Iran pourrait bloquer le développement économique de l'Asie et ainsi défendre l'ordre mondial unipolaire. À l'inverse, l'Iran, en tant que plaque tournante du transport, joue un rôle clé dans le développement d'un ordre mondial multipolaire :

    - En 2021, la Chine a conclu un partenariat stratégique avec l'Iran, qui permet à ce dernier de contourner les sanctions occidentales. La Chine obtient du pétrole bon marché et investit des milliards en Perse (La Chine conclut un pacte à long terme avec l'Iran – DiePresse.com: https://www.diepresse.com/5958091/china-schliesst-langfristigen-pakt-mit-dem-iran ). Le transport du pétrole iranien bon marché s'effectue par chemin de fer. La «nouvelle route de la soie» promue par la Chine traverse également la Perse.

    - Une deuxième ligne de transport importante est le corridor nord-sud (corridor nord-sud, commerce : le coup géopolitique de Poutine: https://deutsche-wirtschafts-nachrichten.de/520992/putins-schachzug-geostrategisch-bedeutende-handelsroute-in-betrieb-genommen), qui est en service depuis 2022. Il est destiné à transporter des marchandises de la Russie à l'Inde en passant par l'Iran. Ce corridor, cauchemar des puissances maritimes et concurrent du canal de Suez, permet également à la Russie de contourner les sanctions économiques.

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Comme on peut le constater, la Perse est une plaque tournante pour le trafic nord-sud et est-ouest, contournant les routes maritimes. Les puissances maritimes occidentales perdent automatiquement leur importance. L'ordre mondial unipolaire avec ses « règles » imposées par les élites occidentales perd alors tout son sens.

L'objectif de l'attaque israélienne est donc un renversement politique en Iran afin d'entraver le développement économique de l'Asie.

L'attaque d'Israël contre l'Iran est donc encore plus dangereuse que la guerre par procuration menée par l'Ukraine contre la Russie, car elle affecte les intérêts de toute l'Asie. On peut donc supposer que les pays du BRICS, à savoir la Russie, la Chine et l'Inde, n'accepteront pas sans réagir un renversement du régime iranien orchestré par l'Occident. Toute la démarche de l'Occident rappelle le coup d'État de Maïdan. Il semble que l'on veuille porter au pouvoir un petit groupe d'opposants. Un tel coup d'État ne fonctionnera probablement pas une deuxième fois.

On peut également considérer toute l'action d'Israël comme faisant partie de la guerre contre la Chine, sans cesse fantasmée. Israël et les États-Unis risquent ainsi que la Chine s'écarte de sa politique jusqu'ici réservée et soutienne directement l'Iran.

Outre le soutien militaire à l'Iran, la Chine dispose toutefois d'autres options:

En réaction aux droits de douane punitifs imposés par Trump, la Chine a décrété un embargo sur les exportations d'aimants et de terres rares. La Chine produit environ quatre fois plus de terres rares que les États-Unis (Terres rares » Utilisation, gisements et investissement: https://finanzwissen.de/rohstoffe/kritische-metalle/seltene-erden/). La Chine met ainsi en péril la production dans le secteur de l'électronique et, par conséquent, la production d'armements, de voitures électriques et bien d'autres choses encore (La Chine suspend ses exportations de terres rares | Telepolis: https://www.telepolis.de/features/China-stoppt-Export-Seltener-Erden-10352326.html#:~:text=Eine%20Fabrik%20zur%20Verarbeitung%20seltener%20Erden%20in%20Chinas,allem%20US-Schl%C3%BCsselindustrien%20von%20Elektroautos%20bis%20Milit%C3%A4rtechnik.%20Ein%20%C3%9Cberblick).

La victoire d'Israël lors de son attaque contre l'Iran peut donc être comparée à la victoire de l'Allemagne hitlérienne sur la Pologne, qui n'a fait que créer de nouveaux ennemis à Hitler. Il pourrait en être de même pour Israël. Israël a remporté une victoire à la Pyrrhus, qui porte déjà en elle les germes de la défaite.

À l'origine, avec sa politique « America first », Trump poursuivait l'idée d'abandonner la prétention unipolaire de l'Amérique et d'accepter un monde multipolaire. Cela aurait été la solution au problème le plus urgent de l'Amérique, à savoir la question de la dette. Les dépenses pour des guerres inutiles auraient été supprimées et de nouvelles opportunités commerciales, par exemple avec la Russie, auraient été possibles pour augmenter les recettes. Mais tout cela est désormais terminé. Les États-Unis sont toujours sur la voie de la ruine. Les besoins annuels de refinancement des États-Unis s'élèvent actuellement à 10.000 milliards de dollars. Les investisseurs étrangers ne sont plus disposés à les financer. En fin de compte, la FED doit intervenir et simplement imprimer de l'argent pour sauver le budget. Cela creuse encore davantage la tombe du dollar américain et accélère la dédollarisation de l'économie mondiale. La hausse actuelle du cours de l'or confirme cette tendance.

Le sauvetage des États-Unis par la voie démocratique a donc échoué. Le « Deep State » ne peut être destitué et continuera à entraîner les États-Unis vers leur perte.

lundi, 09 juin 2025

Chine. Inauguration de la ligne ferroviaire vers Téhéran: l'importance du détroit de Malacca se voit relativisée

 

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Chine. Inauguration de la ligne ferroviaire vers Téhéran: l'importance du détroit de Malacca se voit relativisée

par Giuseppe Gagliano

Source: https://www.notiziegeopolitiche.net/cina-inaugurata-la-ferrovia-che-arriva-a-teheran-tagliato-lo-stretto-di-malacca/

Au cœur de l'Asie, un nouveau corridor ferroviaire est en train de changer discrètement les règles du jeu mondial. L'inauguration récente de la ligne ferroviaire reliant Urumqi, dans la province chinoise du Xinjiang, à Téhéran, en passant par l'Asie centrale et le Turkménistan, n'est pas seulement un exploit logistique, mais un acte de défi stratégique qui bouleverse l'équilibre géopolitique. Avec un temps de transit de seulement 15 jours, contre 40 pour les routes maritimes, ce corridor permet à la Chine et à l'Iran de contourner le détroit de Malacca et d'autres artères maritimes qui sont sous le contrôle de la marine américaine, ouvrant ainsi une nouvelle ère pour le commerce des marchandises chinoises et du pétrole iranien vers les marchés européens. Ce projet ne se contente pas de raccourcir les distances, il redessine également les cartes du pouvoir, remettant en question l'hégémonie américaine sur le contrôle des routes mondiales.

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Le détroit de Malacca, ce goulet d'étranglement maritime qui assure le passage entre l'océan Indien et l'océan Pacifique, est depuis des décennies le talon d'Achille de la Chine. Environ 80% des importations pétrolières chinoises et 60% de son commerce maritime transitent par ce passage, rendant Pékin vulnérable à un éventuel blocus naval par les États-Unis ou leurs alliés, tels que Singapour ou l'Inde. En 2003, l'ancien président chinois Hu Jintao a qualifié cette dépendance de « dilemme de Malacca », un problème stratégique qui a poussé la Chine à rechercher des alternatives terrestres pour diversifier ses routes commerciales et garantir sa sécurité énergétique. Le nouveau corridor ferroviaire Chine-Iran, qui fait partie intégrante de l'initiative Belt and Road (BRI), est la réponse la plus audacieuse à ce défi.

Longue d'environ 4000 kilomètres, cette route relie Yiwu (Zhejiang) à Qom, en Iran, en traversant le Kazakhstan et le Turkménistan. Selon la China Railway Corporation, ce corridor pourrait transporter plus de 10 millions de tonnes de marchandises par an d'ici 2030, grâce à la demande croissante des marchés eurasiatiques et moyen-orientaux. Pour l'Iran, ce projet représente une bouée de sauvetage économique: les sanctions occidentales, qui limitent l'accès aux marchés maritimes et financiers, trouvent réponse dans l'organisation du transport terrestre, lequel constitue dès lors une alternative moins exposée aux pressions internationales. Le pétrole iranien peut désormais atteindre la Chine sans passer par les détroits d'Ormuz ou de Malacca, ce qui réduit le risque d'interruptions dues à des tensions géopolitiques ou à des sanctions.

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Ce n'est pas un hasard si ce corridor arrive à un moment où les tensions entre la Chine, l'Iran et les États-Unis s'intensifient. Washington a redoublé d'efforts pour contenir l'expansion économique de Pékin et limiter les exportations de pétrole iranien, considérées comme une source de financement pour le régime de Téhéran. La marine américaine, avec sa présence dominante dans le Pacifique et le golfe Persique, représente une menace constante pour les deux pays. Le corridor ferroviaire change toutefois la donne: non seulement il permet à la Chine d'accéder au pétrole iranien sans passer par les eaux contrôlées par les États-Unis, mais il renforce également l'Iran en tant que plaque tournante commerciale entre l'Asie et l'Europe, le rendant moins dépendant des routes maritimes vulnérables.

Ce projet s'inscrit dans un contexte plus large de coopération sino-iranienne. En 2021, les deux pays ont signé un accord de partenariat stratégique d'une durée de 25 ans, qui prévoit des investissements chinois de 400 milliards de dollars dans les infrastructures, l'énergie et la technologie en Iran. Le chemin de fer est un élément clé de cette stratégie, financée en partie par la China Development Bank et l'Export-Import Bank of China, avec la participation de géants tels que la China Railway Construction Corporation (CRCC). Du côté iranien, la Islamic Republic of Iran Railways (RAI) a coordonné l'expansion des infrastructures internes, en harmonisant les normes ferroviaires avec les normes internationales afin de garantir un flux continu de marchandises.

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Cette évolution inquiète Washington. Les États-Unis ont investi des ressources considérables pour maintenir le contrôle des principales routes maritimes mondiales, avec des bases navales stratégiques telles que celles de Singapour et de la Cinquième Flotte à Bahreïn. La capacité d'interdire le commerce chinois ou iranien par le biais de points de contrôle tels que Malacca ou Hormuz a longtemps été une arme géopolitique. Cependant, le nouveau corridor réduit l'efficacité de ce levier, offrant à la Chine et à l'Iran une alternative terrestre qui échappe au contrôle américain. Ce n'est pas un hasard si des publications sur des plateformes telles que X décrivent le projet comme une « révolution géopolitique », capable de réviser la théorie de Halford Mackinder sur l'importance du contrôle du cœur de l'Eurasie pour la domination mondiale.

Malgré son potentiel, ce corridor n'est pas sans obstacles. La route traverse des pays comme le Kazakhstan et le Turkménistan, où les infrastructures ferroviaires nécessitent des mises à niveau constantes et où la stabilité politique n'est pas toujours garantie. La gestion transfrontalière nécessite des accords complexes en matière de douanes, de sécurité et de normes techniques, et toute tension régionale pourrait compromettre le flux de marchandises. En outre, le volume du transport ferroviaire, bien que significatif, reste une fraction des 144 millions de tonnes annuelles qui transitent par le détroit de Malacca, ce qui fait de ce corridor, à court terme, un complément, et non un substitut, aux routes maritimes.

Il y a ensuite la question de la réponse internationale. Les États-Unis et leurs alliés, tels que l'Inde et le Japon, promeuvent des projets alternatifs, comme le corridor Inde-Moyen-Orient-Europe, afin de contrer l'influence chinoise. La Turquie, avec son projet Development Road, vise à concurrencer le golfe Persique et l'Europe en tant que plaque tournante commerciale. Ces développements suggèrent une concurrence croissante pour le contrôle des routes commerciales, l'Eurasie étant au centre d'un nouveau « grand jeu ».

Le corridor ferroviaire Chine-Iran n'est pas seulement une infrastructure, mais un symbole du monde multipolaire qui prend forme. En réduisant leur dépendance vis-à-vis des routes maritimes contrôlées par les États-Unis, la Chine et l'Iran construisent une alternative qui renforce leur autonomie stratégique et celle des pays d'Asie centrale. Pour l'Europe, ce corridor offre des opportunités commerciales, mais aussi des dilemmes: comment concilier un accès plus rapide aux marchandises et les pressions géopolitiques de Washington ?

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À une époque de tensions mondiales croissantes, ce projet rappelle que le contrôle des routes commerciales est toujours au cœur de la concurrence entre les puissances. La Chine, avec sa vision de la Nouvelle Route de la Soie, et l'Iran, avec sa résilience face aux sanctions, parient sur un avenir où l'Eurasie redeviendra le centre du monde. Reste à voir si les États-Unis, gardiens de l'ordre maritime mondial, trouveront une réponse efficace à ce défi terrestre. Une chose est sûre: le train parti d'Urumqi ne transporte pas seulement des marchandises, mais aussi un message clair au monde entier.

jeudi, 05 juin 2025

Myanmar, le pays qui ne semble pas trouver la paix

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Myanmar, le pays qui ne semble pas trouver la paix

Peter W. Logghe

Quelle: Knooppunt Delta - Nieuwsbrief  N° 200 - Mai 2025   

Les violents séismes qui ont frappé fin mars (avec environ 2000 victimes à ce jour), dont l'épicentre se trouvait dans le pays d'Asie du Sud-Est qu'est le Myanmar, ont brièvement ramené ce pays particulièrement fermé sous les feux de l'actualité mondiale. Ainsi, le journal flamand Het Laatste Nieuws a annoncé le 30 mars 2025 que le groupe rebelle People's Defense Force (PDF) avait déclaré suspendre pendant deux semaines sa lutte contre la junte birmane afin de faciliter les opérations de secours. Le groupe rebelle affirme qu'il coopérera avec les Nations unies et les ONG afin d'assurer « la sécurité, le transport et la mise en place de camps d'aide et de soins médicaux temporaires » dans les zones qu'il contrôle.

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Vous ne trouverez pas davantage d'informations sur les conflits (ethniques) qui durent depuis des décennies en Birmanie dans nos médias grand public. Qu'est-ce que le PDF ? Vous n'entendrez pas non plus parler du fait qu'une précédente catastrophe dans l'ancienne Birmanie (un cyclone) a fait environ 100.000 victimes. La Birmanie compte 56 millions d'habitants, dont 4% sont chrétiens et 4% musulmans. 89% sont bouddhistes. Au cours des dernières décennies, le Myanmar a souvent été gouverné par des juntes, après que les militaires aient pris le pouvoir à la suite d'un coup d'État. Depuis des décennies, divers groupes ethniques et divers peuples (Karen, Arakan, Kachin) mènent une guérilla contre le gouvernement central. Les drogues jouent un rôle important dans ce conflit. Le magazine français de géopolitique Conflits a récemment publié une interview d'Adam Benna, conseiller en médias à Chiang Mai, en Thaïlande. Il connaît assez bien la situation au Myanmar et souligne les éléments géopolitiques du dossier « Myanmar-Birmanie ».

Le régime semble en chute libre

Fin octobre 2023, plusieurs groupes rebelles, réunis pour l'occasion sous le nom de Three Brotherhood Alliance, ont lancé une grande campagne militaire contre la junte militaire, l'opération 1027. L'alliance rebelle était composée de l'Arakan Army, de la Myanmar National Democratic Alliance MNDAA et de la Ta'ang National Liberation Army. L'armée de libération Kachin, la milice d'un autre peuple combatif sur le territoire du Myanmar, ne fait pas partie de la coalition. L'armée régulière de la junte a été prise de vitesse et a dû céder beaucoup de terrain.

Mais outre cette action militaire, il y a aussi l'opposition de l'ancienne femme d'État Aung San Suu Kyi, le gouvernement d'unité nationale, avec sa milice, la Force de défense populaire (PDF). Cette armée s'est également impliquée dans les combats, aux côtés de la Three Brotherhood Alliance. Tous aspirent au renversement de la junte militaire, mais leur unité s'arrête là. Les Arakan, les Kachin et d'autres groupes aspirent à l'indépendance. Il reste difficile, voire impossible, d'aligner tous les groupes rebelles sur un même objectif.

Sous la pression de la Chine, un cessez-le-feu temporaire a été négocié. Le régime tente de se maintenir au pouvoir, mais il est clair pour de nombreux commentateurs que la junte est en train de perdre la partie. Beaucoup dépendra de qui prendra finalement les rênes, une fois que toutes les troupes auront regagné leurs casernes. Beaucoup considèrent le retour du NUG d'Aung San Suu Kyi comme la seule alternative réaliste. Mais les autres groupes ethniques, qui souffrent beaucoup du chauvinisme des Bamar (le groupe majoritaire en Birmanie, 68% de la population), seront-ils disposés à suivre cette voie ? Comment le vide sera-t-il comblé une fois que la junte militaire aura quitté le pouvoir ? Pour être complet, précisons que la junte recrute pour l'armée du Myanmar (presque) exclusivement parmi la population Bamar.

Remise_du_Prix_Sakharov_à_Aung_San_Suu_Kyi_Strasbourg_22_octobre_2013-18-683x1024-130189930.jpgAung San Suu Kyi (également de l'ethnie Bamar) est aujourd'hui âgée de 79 ans et jouit d'une grande crédibilité auprès des différents groupes ethniques. Elle est toujours détenue par le régime militaire. Le NUG affirme soutenir une démocratie de type fédéral, ce qui signifie que les différents groupes ethniques pourraient bénéficier d'une autonomie importante une fois le changement de pouvoir effectué.

Question clé : le trafic de drogue

Depuis des décennies, le Myanmar est un important producteur d'opium, après l'Afghanistan, il a même longtemps été le plus important. L'agence des Nations unies contre la drogue et le crime a constaté une forte augmentation de la production au Myanmar. De nombreux groupes rebelles dépendent financièrement du trafic de drogue, en particulier dans la région nordique de Shan, l'épicentre du Triangle d'Or (où se rejoignent les frontières du Myanmar, du Laos et de la Thaïlande). Presque toutes les milices de cette région sont soupçonnées de financer leurs activités grâce au trafic de drogue. Dans le cas de la soi-disant « armée de l'État Wa », on suppose même une confusion totale entre le trafic de drogue et les actions militaires (et une confusion entre les activités criminelles et les actions de guérilla).

Cette « armée de l'État Wa » dispose de plusieurs dizaines de milliers de soldats bien entraînés et est fortement influencée par la Chine qui, selon des sources bien informées, aurait le pouvoir d'interdire au groupe rebelle de développer davantage sa production et son commerce de drogue. Jusqu'à présent, la Chine n'a pas mis de bâtons dans les roues de l'armée de l'État Wa.

Il est clair que le trafic de drogue en Birmanie fait partie de l'économie de guerre du pays. La question se pose naturellement de savoir ce qu'un nouveau gouvernement NUG fera dans ce domaine. Il est peut-être révélateur qu'un précédent gouvernement dirigé par Aung San Suu Kyi, au pouvoir entre 2016 et 2021, n'ait démantelé aucun réseau de trafic de drogue. Il y a eu quelques tentatives, mais rien de plus. Certaines milices annexées à des gangs de trafiquants de drogue se moquent probablement de savoir qui dirige la capitale Naypyidaw, tant que celle-ci ne s'immisce pas dans le domaine des gangs...

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Des alternatives économiques devront être trouvées, et la géopolitique entre également en jeu, explique Adam Benna dans le magazine français. La Thaïlande, la Chine, le Bangladesh et l'Inde devront être convaincus de fermer les routes de contrebande et de sévir contre les infractions. Une fois de plus, le rôle crucial de la Chine dans ce conflit est frappant: les initiés supposent une forte influence chinoise sur des milices telles que la MNDAA, la TNLA et l'UWSA (l'armée de l'État Wa). Si la junte militaire birmane ne répond pas aux souhaits (principalement économiques et stratégiques) de la Chine, le changement de régime pourrait bien se produire plus rapidement que prévu. La Chine souhaite avant tout la stabilité dans la région et joue actuellement un double jeu : elle négocie avec la junte tout en soutenant certaines factions rebelles dans leurs actions militaires.

Le scénario dans lequel le NUG parvient à chasser la junte et à prendre le contrôle de certaines régions du Myanmar (Chin, Karenni et la région centrale de Bamar) semble réaliste. D'autres régions, notamment dans le nord, n'en feraient pas partie et deviendraient ou resteraient semi-indépendantes, jusqu'à ce que des négociations changent (peut-être) la donne. Mais cela ne signifie pas pour autant que le trafic de drogue aura disparu de cette partie de l'Asie.

La situation est grave, mais pas désespérée, selon Adam Benna.

13:28 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, myanmar, birmanie, asie, affaires asiatiques | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

mercredi, 04 juin 2025

Inde, Pakistan et Cachemire

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Inde, Pakistan et Cachemire

Raphael Machado

Une nouvelle escalade au Cachemire pourrait conduire à une guerre nucléaire. Qu'est-ce qui se cache derrière cela ?

Le fait que les tensions entre l'Inde et le Pakistan ne s'apaisent pas montre que la phase actuelle de ce conflit qui dure depuis des décennies est, à tout le moins, suffisamment importante pour mériter une brève analyse.

La cause immédiate de l'escalade actuelle entre l'Inde et le Pakistan (qui a déjà entraîné l'expulsion de citoyens des deux pays, la rupture de traités et de relations commerciales, la mobilisation de troupes, ainsi que quelques escarmouches) a été un attentat terroriste perpétré par un groupe appelé « Front de résistance », qui serait une ramification du groupe salafiste Lashkar-e-Taiba, basé au Pakistan. L'attentat en question a causé la mort de près de 30 touristes qui visitaient le Cachemire, pour la plupart des Indiens.

Le conflit n'est toutefois pas récent. En pratique, dans une certaine mesure, il semble avoir été fomenté dès le début par les Britanniques. Lors de la préparation de la partition après la fin de la domination britannique dans l'Hindustan, la question de la fragmentation de cet ensemble en au moins deux parties s'est posée. Comme il était impossible de transformer une région aussi complexe du monde en deux États-nations à base ethnique, les Britanniques ont préparé le terrain pour ce qui s'en rapprocherait le plus, à savoir deux États-nations dont la prétention à l'« homogénéité » était fondée sur la religion.

Au départ, l'intérêt était de courtiser l'élite islamique du Bengale afin de l'instrumentaliser contre les hindous, mais cela a semé à long terme les graines d'un conflit qui s'est avéré inévitable, car pour des raisons historiques, les deux pays comptaient des populations appartenant à la religion majoritaire de l'autre pays. C'est d'ailleurs dans l'élite islamique qui cherchait à s'occidentaliser que se trouve la racine du « séparatisme islamique » en Inde, comme en témoignent les idées de Sayyed Ahmad Khan, qui ont ensuite été dépassées par les idées plus « traditionalistes » de Muhammad Iqbal et Muhammad Ali Jinnah.

Le Cachemire se trouvait en plein milieu de la fracture hindoustani, et malgré une population majoritairement islamique, son élite dirigeante était hindoue. Au départ, le Cachemire a donc refusé de s'intégrer au Pakistan ou à l'Inde, et a prétendu s'établir comme un État indépendant. Les Pakistanais ont jugé cette décision absurde et, dans leur irrédentisme, ont tenté de s'emparer du Cachemire par la force, ce qui a conduit son gouvernement à demander son annexion à l'Inde en échange d'une protection. L'Inde, quant à elle, était disposée à absorber le Cachemire, considérant qu'il était la patrie de tous les Indiens, dans une vision impériale supra-religieuse. Le Cachemire a donc été le théâtre de trois conflits entre l'Inde et le Pakistan, en 1947, 1956 et 1999.

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Au-delà des questions religieuses qui ont entrées en jeu, la région a revêtu une importance géostratégique propre. De par sa position géographique (située au carrefour de l'Inde, du Pakistan, de la Chine et de l'Afghanistan, au pied de l'Himalaya), le Cachemire est l'axe du sous-continent indien. Ses fleuves constituent d'excellentes frontières défensives naturelles pour les deux parties, et ses terres sont extrêmement fertiles.

Pour le Pakistan, aujourd'hui, le Cachemire revêt une importance encore plus grande en raison du projet de corridor sino-pakistanais reliant le Xinjiang au port pakistanais de Gwadar. Cependant, le projet traverse une partie du Cachemire administrée par le Pakistan, de sorte qu'un conflit généralisé dans la région enterrerait le projet et couperait probablement le Pakistan de la Chine. Le corridor est fondamentalement nécessaire pour réduire la dépendance du Pakistan vis-à-vis des États-Unis et de l'Arabie saoudite.

C'est dans ce contexte d'intérêt pakistanais pour le Cachemire qu'il faut également lire la politique étrangère du pays sur ce sujet depuis les années 1980. Après avoir été vaincu militairement par l'Inde, l'ISI (les services de renseignement pakistanais, qui constituent presque un État parallèle) a commencé à utiliser l'Afghanistan pour former des insurgés destinés à être utilisés au Cachemire dans le but de déstabiliser la région et, avec un peu de chance, de la séparer de l'Inde. Tel a été la constante de la projection de puissance du Pakistan non seulement au Cachemire, mais aussi en Afghanistan même et dans le reste de la région.

Pour l'Inde, quant à elle, outre l'importance propre du Cachemire pour des raisons historiques et géoéconomiques, il y a la volonté de Modi de laver l'honneur de l'Inde après la débâcle honteuse au Bangladesh, lorsque l'Inde a simplement assisté à la perte de son principal allié régional au profit d'une révolution colorée, sans réagir (même face à la persécution des hindous dans ce pays voisin).

Il est impossible de savoir si ces tensions déboucheront sur un conflit important, mais il existe des indices forts de préparation de ressources militaires des deux côtés. Le point important ici est que le Pakistan a pour doctrine de « frapper en premier » avec des armes nucléaires si l'existence de son État est menacée par une défaite militaire. L'Inde, quant à elle, n'utiliserait des armes nucléaires qu'en réponse à l'utilisation d'armes nucléaires par le Pakistan.

Il est important de souligner ici que ces deux pays sont des partenaires importants de la Russie et qu'ils jouent tous deux un rôle dans la stratégie méridionale par laquelle la Russie a compensé la perte de ses partenariats européens et occidentaux. Un conflit au Cachemire entre les deux pays n'intéresserait donc que l'Occident.

Le mieux dans ce cas serait que la Russie, la Chine et l'Iran agissent directement pour apaiser les esprits et pacifier la situation, car ces pays ont beaucoup à perdre dans ce conflit et, dans la pratique, si la situation dégénère, les répercussions pourraient finir par affecter la planète entière.

mardi, 03 juin 2025

La Chine est-elle moderne ou traditionnelle?

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La Chine est-elle moderne ou traditionnelle?

Raphael Machado

Lorsque l'on débat de la Chine aujourd'hui, l'une des questions qui se pose est de savoir si le pays a complètement embrassé la modernité ou s'il reste attaché à la tradition.

L'un des principaux débats actuels sur la Chine est de savoir si elle est « capitaliste » ou « socialiste », avec de bons arguments des deux côtés (et même de bons arguments qui vont dans le sens du "ni l'un ni l'autre").

Une discussion moins populaire, mais plus intéressante, porte sur la question de savoir si la Chine contemporaine correspond à une « société traditionnelle » ou si elle s'inscrit déjà pleinement dans les repères de la modernité.

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Par « société traditionnelle », nous entendons ici l'adhésion sociopolitique à des principes considérés comme intemporels et inconditionnels, qui renverraient à une dimension transcendante et sacrée et qui irradieraient la totalité sociale. Le contenu de cette principologie dépendrait naturellement de la manière dont un peuple s'est structuré historiquement (raison pour laquelle la « tradition » a une nature kaléidoscopique – elle est une éternité instanciée). Par modernité, nous faisons bien sûr essentiellement référence aux croyances des Lumières dans la primauté de la raison, le constitutionnalisme, la séparation entre l'État et la religion, la conception négative de la liberté, le principe de légalité, etc.

D'une manière générale, les arguments en faveur de la catégorisation de la Chine contemporaine comme pleinement moderne soulignent la persécution religieuse menée par le maoïsme, le contrôle des religions par l'État, le pragmatisme technique et pratique dont font preuve les Chinois dans leurs affaires et leurs relations, sans oublier, bien sûr, le fait que le PCC interdit officiellement à ses membres d'avoir une religion.

La réalité est cependant infiniment plus complexe.

Tout d'abord, parce que la conception chinoise de la « religion » est totalement différente de la perception occidentale. Pour les Chinois, « religion » (zongjiao) désigne exclusivement les sectes organisées et institutionnelles dotées d'une doctrine et d'un dogme. Cela exclut d'emblée tant la spiritualité populaire (appelée plus récemment « shénisme » ou « shénxianisme ») que le confucianisme. Pour le PCC (et pour la plupart des Chinois), adhérer aux rites traditionnels chinois et aux pratiques et croyances confucéennes n'équivaut pas à avoir une « religion ». Il est donc possible de participer au culte des ancêtres, de pratiquer le feng shui, d'allumer de l'encens pour l'Empereur Jaune et de participer aux rites confucéens sans être considéré comme ayant une « religion ».

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Guénon est, à proprement parler, un auteur qui rejette classiquement l'attribution du mot « religion » (telle qu'elle est comprise lorsqu'on parle de christianisme, de judaïsme et d'islam) aux traditions orientales, y compris le taoïsme et le bouddhisme (qui sont considérés comme des « religions » en Chine), car Guénon affirme qu'elles sont dépourvues des éléments sentimentaux, moraux et dévotionnels qui sont plus typiques de ces religiosités moyen-orientales.

C'est dans ce sens qu'il faut interpréter les statistiques religieuses de la Chine, où « identification religieuse » et « pratique religieuse » ne sont pas confondues. En d'autres termes, les statistiques indiquent que 90% de la population chinoise n'a pas de religion, mais que 80% de la population chinoise adopte régulièrement des pratiques religieuses traditionnelles. Cela inclut les membres du PCC. Une statistique du Pew Research Center, par exemple, indique que 79% des membres du PCC se rendent au moins une fois par an au cimetière pour vénérer leurs ancêtres. Ce taux est supérieur à celui de la population chinoise moyenne.

Il est intéressant de noter qu'en ce qui concerne les autres pratiques religieuses, les non-membres du PCC ont tendance à être plus religieux que les membres. Mais l'explication est très simple: la plupart des membres du PCC n'ont pas de religion... mais sont confucéens. Ils célèbrent tous les rites et fêtes confucéens, vénèrent leurs ancêtres, se rendent probablement dans les temples confucéens (qui sont d'ailleurs subventionnés par l'État) et cultivent les vertus confucéennes. En d'autres termes, le confucianisme « pur » semble être très populaire parmi les membres du Parti, tandis que le reste de la population est plus adepte du shénisme mélangé à des éléments confucéens, à du bouddhisme et du taoïsme. Néanmoins, 40% des membres du PCC pratiquent le feng shui, et au moins 18% d'entre eux brûlent de l'encens plusieurs fois par an pour Bouddha ou les dieux.

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En ce qui concerne les relations entre l'État et la religion, il est important de souligner que l'État chinois s'est toujours attribué le droit de contrôler, de placer sous tutelle, d'influencer et de supprimer les différentes sectes, écoles et doctrines qui ont tenté de se répandre en Chine. Ainsi, le fait que le PCC cherche à exercer une influence sur le christianisme, le taoïsme, le bouddhisme, etc. par le biais d'institutions alignées sur l'État signifie simplement que le PCC s'inscrit dans la continuité de la relation typique entre ces sphères en Chine.

En outre, on parle beaucoup du « contrôle négatif » imposé par la Chine, mais on mentionne rarement que la Chine vise à limiter la croissance des religions étrangères en particulier, alors qu'elle subventionne et encourage depuis plusieurs années l'ouverture de nouveaux temples et la formation de nouveaux prêtres bouddhistes, taoïstes, confucéens et shénistes. Il en résulte, par exemple, une augmentation de 300% de la fréquentation des temples bouddhistes depuis 2023, la majorité des fidèles étant des jeunes.

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Pour en revenir au confucianisme, l'État a récemment commencé à rétablir le guoxue dans les écoles, c'est-à-dire l'étude des classiques confucéens, qui était autrefois une condition préalable à la réussite des examens impériaux. En outre, il existe un courant intellectuel fort qui défend l'institutionnalisation du confucianisme et sa transformation en religion civile officielle. Bien que cela semble lointain, dans la pratique, la pensée de Xi Jinping représente déjà une synthèse entre le maoïsme et le confucianisme, ce qui est très explicite dans la manière non dualiste dont la Chine aborde aujourd'hui la question des classes sociales.

Laissant de côté l'adhésion et la pratique religieuses, nous pourrions nous détourner vers l'observation des valeurs traditionnelles chinoises. Le « communisme » a-t-il fondamentalement déraciné ou déstructuré les valeurs traditionnelles de la Chine ?

Pour cela, nous devons comprendre quelles sont ces valeurs. L'intellectuel russe Nikolai Mikhailov a énuméré une série de concepts, de principes et d'affections qui composent la vision traditionnelle chinoise du monde; nous pouvons en citer quelques-uns: « Le monde comme harmonie intrinsèquement parfaite entre le Ciel et l'Homme, comme un équilibre naturel et harmonieux des contraires, dont la violation implique la détérioration de la nature et de l'homme », « Rapidité, responsabilité, pragmatisme, religiosité quotidienne », « Perception de la société comme une « grande famille », où les intérêts de l'individu sont subordonnés aux intérêts de la famille, les intérêts de la famille aux intérêts du clan et les intérêts du clan aux intérêts de l'État », « paternalisme et tutelle des aînés sur les plus jeunes », « hospitalité », « modération », « dignité, humilité, obligation, respect des traditions et des canons, respect de la hiérarchie sociale, piété filiale, vénération des ancêtres, patriotisme, soumission aux supérieurs, sens du devoir et justice sociale ».

Ainsi, lorsqu'un anticommuniste sinophobe disqualifie la Chine contemporaine en la qualifiant de « collectiviste » ou critique les Chinois pour leur « soumission à la famille et au gouvernement », attribuant tout cela à la « Révolution », il ne fait que décrire des caractéristiques chinoises qui ont pourtant été cultivées depuis des millénaires. Même cette question de « faire payer le prix de la balle aux proches de la personne exécutée pour avoir été condamnée à mort » est typiquement chinoise. La tradition chinoise croit en des punitions collectives pour les familles suite aux crimes d'un de leurs membres, et considère cela comme une question évidente et habituelle.

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Passant des coutumes à une dimension plus métaphysique, même le Tianxia (c'est-à-dire l'idée de la Chine comme centre du monde, gouvernée par un Mandat Céleste, imprégnée de la mission d'apporter l'harmonie et l'équilibre aux « terres barbares ») reste vivante dans la pensée de Xi Jinping, dans la conception du multipolarisme selon Jiang Shigong (photo), qui envisage la Chine occupant le centre du cosmos dans une structure planétaire harmonieuse, bien que décentralisée. L'initiative « Belt & Road » n'est donc rien d'autre que l'application pragmatique et technique de l'idée métaphysique de « Tout sous le ciel ».

Il est toutefois indéniable que les Chinois ont souffert des mêmes dilemmes et fardeaux liés à l'urbanisation, au technocratisme, au consumérisme et à la société du spectacle – même si c'était peut-être d'une manière différente et dans une moindre mesure que les Occidentaux, les Européens, etc. La Chine a clairement connu une « modernisation » très rapide, même si elle n'était peut-être que partielle.

La meilleure catégorie pour décrire la condition chinoise est donc le concept douguinien d'« archéomodernité ». Selon Douguine, l'archéomodernité est « un système dans lequel tout est très moderniste à l'extérieur, mais profondément archaïque à l'intérieur ». Dans les pays archéomodernes, c'est comme s'il y avait deux niveaux existentiels contradictoires et concomitants: une sorte d'ordre officiel moderniste, tandis que la population reste profondément immergée dans le monde traditionnel.

Douguine utilise ce terme pour expliquer les contradictions russes et, à mon avis, il convient bien pour décrire la Chine, où coexistent gratte-ciel, méga-ponts, IA et drones, avec le culte religieux de Mao (et des dieux traditionnels), la pratique quotidienne de la médecine chinoise et l'utilisation du feng shui pour organiser les espaces publics et privés.

mardi, 27 mai 2025

Au Japon, la crise pourrait provoquer un séisme mondial comme rarement vécu

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Au Japon, la crise pourrait provoquer un séisme mondial comme rarement vécu

Source: https://es.sott.net/article/99653-En-Japon-la-crisis-pued...

Cela fait des années que nous avertissons que le Japon est une bombe à retardement pour l’économie mondiale, et mardi, le Premier ministre japonais Shigeru Ishiba a qualifié la situation de son pays de « pire que celle de la Grèce à ses moments les plus difficiles » – un petit pays européen dont plus personne ne parle. Il faut reconnaître à Ishiba une sincérité qui manque cruellement sur d’autres continents, où tout n’est que paroles rassurantes.

Cependant, il y a deux différences avec la Grèce : le Japon a un poids énorme dans l’économie mondiale, et Bruxelles n’a pas l’intention de venir le sauver.

Le Japon est entré en récession en 2023, à la fin de la pandémie. L’inflation est élevée (3,6%) et la dette a atteint 260% du PIB (bien plus que la Grèce), mais la période des faibles taux d’intérêt est révolue. Le rendement des obligations d’État à 30 ans a atteint officiellement un record historique de 3,15%. La gigantesque dette devient de plus en plus coûteuse pour le gouvernement de Tokyo.

Avec près de 9000 milliards de dollars de dette, le Japon est le pays le plus endetté au monde. De plus, il détient 1100 milliards de dollars de dette américaine, ce qui en fait le plus gros créancier étranger des États-Unis. La tentation serait de vendre cette dette pour payer la sienne, c’est-à-dire transférer le problème aux États-Unis.

Avec cette dette, le Japon a tenté de résoudre un problème – la déflation – mais en a créé un autre, jusqu’à arriver à une situation critique. « La situation est particulièrement délicate sur les marchés mondiaux, car deux crises fiscales s’entrelacent dans deux des économies les plus importantes de la planète : le Japon et les États-Unis », explique El Economista (*).

La crise pourrait non seulement provoquer une crise de la dette nationale, mais aussi faire du Japon le centre d’un « séisme financier comme on en a rarement vécu », car ce n’est plus seulement les États-Unis: les spéculateurs japonais détiennent au total 2,3 billions d’obligations étrangères, qu’ils seront prêts à vendre pour combler leurs propres trous.

Les Japonais vont retirer d’énormes capitaux des marchés mondiaux pour les ramener dans leur pays, car les taux d’intérêt sont désormais attractifs. Ce retrait va impacter Wall Street et les bourses européennes. La chute de 1929 paraîtra petite à côté.

Note:

(*) https://www.eleconomista.es/mercados-cotizaciones/noticia...

13:18 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : japon, asie, affaires asiatiques, actualité | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

dimanche, 25 mai 2025

L’Asie du Sud-Est rejette également le modèle des euro-toxicos pour les relations internationales

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L’Asie du Sud-Est rejette également le modèle des euro-toxicos pour les relations internationales

Ala de Granha

Source: https://electomagazine.it/anche-lasia-del-sud-est-rifiuta...

Le modèle des volontaires toxicos plaît de moins en moins dans le monde entier. Ce monde qui n’a pas besoin d’aides ou de poudre blanche pour penser. Ainsi, l’ANASE/ASEAN, l’alliance des pays d’Asie du Sud-Est, a décidé d’inviter Poutine à son sommet d’octobre à Kuala Lumpur. Ils précisent qu’ils ne partagent pas la guerre de Moscou en Ukraine, mais expliquent aussi aux euro-toxicos que, pour faire la paix avec Poutine, il faut parler et négocier avec Poutine.

Et pas seulement pour la question ukrainienne. Parce que les pays de l’ASEAN n’ont pas imposé de sanctions contre Moscou, ils ont continué d’acheter des ressources énergétiques, des fertilisants, même des armes. Et ils ont l’intention de continuer à le faire à l’avenir. Pour avoir une alternative au duopole Chine-États-Unis. Donc, disent-ils, bienvenue à Poutine, qu’il s’assoit à la table et qu’il discute de la construction d’un monde multipolaire, qui respecte les droits et intérêts des pays asiatiques.

D’ailleurs, la stupidité d’Ursula et des euro-toxicos a poussé Moscou de plus en plus vers l’Asie, en éliminant progressivement les éléments européens de la tradition russe, forcée de valoriser la composante asiatique, même minoritaire. Les Asiatiques, au contraire, sont très heureux de pouvoir compter sur un voisin fort, qui est une alternative à Pékin, avec qui se confronter et faire des affaires.

Parler plutôt que proférer des menaces, discuter plutôt que d’imposer des sanctions, négocier plutôt que d’appauvrir les peuples pour acheter des armes. Un modèle de relations internationales qui déplaît à Macron, à Starmer, à Merz, à Crosetto. Et bien sûr à Ursula.

C’est aussi à travers ces signaux et cette démonstration de stupidité que l’on comprend le déclin de plus en plus évident de l’Europe.

14:57 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : actualité, asean, asie, affaires asiatiques, anase | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

lundi, 12 mai 2025

Le Pakistan et l'Inde vers un conflit. Cui prodest?

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Le Pakistan et l'Inde vers un conflit. Cui prodest?

par Stefano Vernole

(Vice-président, Centre d'études Eurasie et Méditerranée)

Source: https://www.cese-m.eu/cesem/2025/05/pakistan-e-india-vers... 

Le Pakistan affirme que l'Inde prépare une « attaque militaire imminente » et, si c'est le cas, la région de l'Asie du Sud plongerait dans la catastrophe.

SOURCE DE L'ARTICLE : https://strategic-culture.su/news/2025/05/05/pakistan-ind... 

Le prétexte officiel ? Une attaque sanglante à Pahalgam, au Cachemire, qui a tué 26 civils le 22 avril. Et s'il ne s'agissait que du dernier « casus belli » d'une stratégie atlantiste vieille de plusieurs décennies, destinée à attiser la ferveur nationaliste et à détourner l'attention de crises plus profondes?

L'avertissement du Pakistan est clair: toute agression indienne sera répoussée par la force. Les deux parties sont prises au piège d'une « guerre froide » régionale dans l'ombre d'un réalignement mondial. La Chine et la Russie sont des observateurs inquiets, qui appellent à la retenue et se proposent comme médiateurs. Et les États-Unis d'Amérique? Ils sourient en arrière-plan, avides d'instabilité pour maintenir l'Eurasie divisée et continuer à « gonfler » les profits du complexe militaro-industriel.

Le moment ne pourrait être plus suspect. Le dollar vacille. L'Occident s'enfonce dans le déclin moral et économique. Les BRICS+ apparaissent de plus en plus comme la seule alternative à l'indigne gouvernance mondiale nord-américaine. Que tout cela se termine par une escarmouche ou par une spirale plus large, il y a une certitude: lorsque l'ordre unipolaire vacille, le chaos devient monnaie courante et la guerre devient possible.

Lors d'un rassemblement public organisé à la hâte dans le Bihar, où des élections législatives auront lieu d'ici la fin de l'année, le Premier ministre indien Modi a porté la rhétorique guerrière à un nouveau niveau: «Aujourd'hui, depuis le sol du Bihar, je dis au monde entier: l'Inde identifiera, traquera et punira tous les terroristes et ceux qui les soutiennent. Nous les poursuivrons jusqu'au bout du monde». Il a ajouté: «Le châtiment sera important et sévère, ce à quoi ces terroristes ne songeraient même pas». Le ministre de la défense, Rajnath Singh, a déclaré : « Les responsables de tels actes recevront une réponse ferme dans un avenir proche. Nous ne punirons pas seulement les monstres qui ont perpétré cet acte de brutalité et de barbarie. Nous nous adresserons également à ceux qui se sont cachés derrière un rideau pour mener à bien cette conspiration. Les agresseurs et leurs maîtres seront pris pour cible». De même, le ministre de l'intérieur de l'Union, Amit Shah, a déclaré: «Les auteurs de cette lâche attaque terroriste ne seront pas épargnés. Et face à une nation qui les observe de près, ces mots sont plus qu'une promesse: ils sont un avertissement» (1).

La date de l'attentat de Pahalgam mérite d'être analysée de près. Il s'est produit alors que le Premier ministre Modi était en visite en Arabie saoudite, que le vice-président américain J. D. Vance était en Inde avec sa famille et juste avant que Donald Trump n'annonce une suspension des droits de douane à New Delhi. En outre, alors que les élections au Bihar sont prévues pour octobre-novembre 2025, de nombreux États clés comme l'Assam, le Kerala, le Tamil Nadu et le Bengale occidental devraient aller aux urnes en 2026. Sur le plan intérieur, les musulmans ont vivement protesté dans tout le pays contre la loi Waqf récemment adoptée, car elle est considérée comme une nouvelle loi anti-musulmane après la loi d'amendement sur la citoyenneté (CAA). Le gouvernement indien a été fortement incité à créer une distraction et à détourner l'attention du public. Après avoir accusé le Pakistan sans enquête appropriée et sans fournir de preuves, l'Inde a proclamé une série de mesures de rétorsion. Elle a notamment décidé de suspendre le traité sur les eaux de l'Indus, qui date de 1960, et a annoncé la fermeture du poste de contrôle intégré d'Attari. Il a été conseillé à tous ceux qui avaient franchi la frontière munis d'un visa valide de repasser par cette voie avant le 1er mai 2025. L'Inde a ajouté que les ressortissants pakistanais ne seront pas autorisés à entrer dans le pays avec des visas relevant du programme d'exemption de visa de l'ASACR (SVES) et que tous les visas délivrés aux ressortissants pakistanais sont considérés comme annulés, tandis que les ressortissants pakistanais qui se trouvent actuellement en Inde n'ont que 48 heures pour quitter le pays.

Les conseillers militaires, navals et aériens du haut-commissariat du Pakistan à New Delhi ont été déclarés « personae non gratae » et ont reçu un délai d'une semaine pour quitter l'Inde. New Delhi a également décidé de retirer ses conseillers de la défense, de la marine et de l'armée de l'air du haut-commissariat indien à Islamabad.

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En réponse, le Pakistan, à la suite de la réunion du comité de sécurité nationale, a rejeté la décision de l'Inde de « geler » le traité sur l'eau, soulignant qu'aucune clause de l'accord n'autorise sa suspension unilatérale. Le Pakistan a averti que tout détournement des eaux serait considéré comme un « acte de guerre » et a décidé de fermer son espace aérien à l'Inde. Alors que le Pakistan avait déjà bloqué le commerce bilatéral suite aux mesures illégales et unilatérales prises par l'Inde le 5 août 2019 concernant l'IIOJK (la région du Jammu-Cachemire), il vient d'annoncer la suspension de toutes les formes de commerce, y compris le commerce avec des pays tiers via le territoire pakistanais (2).

Le Pakistan a également demandé aux citoyens indiens de quitter le pays, à l'exception des Sikhs Yatri, et a indiqué qu'il se réservait le droit de suspendre les accords bilatéraux, y compris l'accord de Simla. Le Pakistan a ensuite exprimé sa ferme détermination à défendre sa souveraineté et son intégrité territoriale contre toute « mésaventure ». Ces derniers jours, les tensions bilatérales croissantes ont été accompagnées d'informations faisant état d'une escalade des échanges de tirs le long de la ligne de contrôle (Line of Control / LoC).

Selon Islamabad, ce n'est qu'une question de temps avant que le monde n'apprenne que cette attaque sur Pahalgam faisait également partie de la stratégie habituelle de déstabilisation par le biais d'une opération sous faux drapeau. Le Pakistan, qui est engagé dans une lutte résolue contre le terrorisme à partir de sa frontière occidentale, ne peut guère se permettre d'ouvrir un nouveau front à ses frontières orientales: les accusations indiennes semblent en effet dénuées de toute logique.

Le problème est qu'à moins qu'une enquête internationale neutre et indépendante ne soit menée sur l'incident - comme l'a immédiatement exigé Pékin - pour vérifier la responsabilité éventuelle de « tierces parties » dans l'attaque, New Delhi et Islamabad continueront d'échanger des accusations mutuelles, alimentant la rhétorique nationaliste et se dirigeant vers un conflit ouvert extrêmement dangereux, puisqu'il s'agit de deux puissances nucléaires. Des exercices de guerre de l'armée d'Islamabad sont actuellement en cours dans les régions de Sialkot, Narowal, Zafarwal et Shakargarh, à la frontière entre le Pakistan et l'Inde.

Il s'agit donc d'un test important pour la stratégie d'intégration eurasienne, puisque l'Inde et le Pakistan appartiennent tous deux à l'Organisation de coopération de Shanghai; en outre, Islamabad a depuis longtemps exprimé sa volonté de rejoindre les BRICS et de participer au Corridor international Nord-Sud, des initiatives auxquelles l'Inde participe déjà depuis des années.

NOTES:

(1) Mahwish Hafeez, Pahalgam Incident : Another False Flag Operation ?, ISSI, Islamabad, 29 avril 2025.

(2) Stefano Vernole, KASHMIR WITHOUT PEACE : A FOCUS ON INTERNATIONAL LAW, www.cese-m.eu, 7 février 2025.

samedi, 03 mai 2025

Directive de Douguine: «Le conflit entre le Pakistan et l'Inde repose sur des bases très sérieuses»

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Directive de Douguine: «Le conflit entre le Pakistan et l'Inde repose sur des bases très sérieuses»

Alexandre Douguine

Il fut un temps où les Britanniques, en remettant le pouvoir dans leur ancienne colonie, l'Inde, aux Indiens eux-mêmes, ont créé une situation dans laquelle le pays était divisé selon des critères religieux. Pour limiter la souveraineté de ces États nouvellement libérés et continuer subrepticement à les gouverner, ils ont alimenté les conflits religieux. Selon Alexandre Douguine, directeur de l'Institut Tsargrad et philosophe, il s'agit de la pratique britannique habituelle du « diviser pour régner » :

« Cela signifie qu'ayant perdu leur domination directe sur les peuples de leurs anciennes colonies, les Britanniques ont posé une mine à retardement sous ces dernières. Bien que le Pakistan et l'Inde fassent partie d'un même État-civilisation. En même temps, il y a beaucoup de musulmans en Inde, et ethniquement, ils sont tous très proches.

Par conséquent, les parties divisées de cet État-civilisation se sont retrouvées en forte opposition l'une à l'autre. En Inde, les hindous sont majoritaires et définissent de plus en plus leur identité selon les critères de l'hindutva ("hindouïté"). Au Pakistan, avec l'aide des Britanniques puis des Américains, un État islamiste s'est formé. Cela a certainement contribuer à bétonner une source de conflit idéologique.

Le conflit s'est étendu à certains États de l'Inde, en particulier le Jammu-et-Cachemire, où une partie importante de la population musulmane est influencée par les éléments les plus radicaux. Le Pakistan a joué un rôle direct dans cette situation. Mais pas seulement: des représentants d'ISIS*, interdit en Russie, et d'Al-Qaïda*, interdit en Russie, y étaient également actifs. Tout cela est une pratique courante des services de renseignement occidentaux, la CIA et le MI6, dans la gestion des conflits.

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Tout récemment, une explosion a eu lieu dans l'État du Jammu-et-Cachemire, faisant plus de 20 morts. Les autorités indiennes ont accusé le Pakistan d'être à l'origine de l'attentat. Il en a résulté une escalade. Cette fois, la réaction des Indiens a été très vive: des décisions ont été prises pour interdire aux avions pakistanais de survoler l'Inde, pour expulser du pays les personnes ayant la nationalité pakistanaise et pour bloquer le cours de l'Indus dans la vallée de Lipa.

Il s'agit d'une réaction très sérieuse, qui s'est avérée extrêmement douloureuse pour le Pakistan sur le plan des infrastructures, de la politique et de la géopolitique. En fait, un conflit entre deux pays dotés de l'arme nucléaire vient d'éclater. Et bien sûr, cela pourrait avoir des conséquences très graves.

Il est difficile de dire jusqu'où cela ira. Mais il est évident que ce qui se passe est favorable, avant tout, à George Soros et aux mondialistes occidentaux. Ils sont en train de créer une nouvelle guerre dans laquelle les trois grandes puissances contre lesquelles les mondialistes se battent actuellement - la Chine, la Russie et les États-Unis trumpistes - seront immanquablement entraînées.

Les intérêts de ces pays et de l'Inde elle-même, qui est aussi une grande puissance, peuvent maintenant entrer en conflit. Et cela ressemble fort à une provocation mondialiste, car l'Inde est orientée vers les États-Unis et vers Trump personnellement. Par ailleurs, la Chine, qui soutient le Pakistan, a de graves conflits avec l'Inde au Ladakh (régions montagneuses frontalières). C'est pourquoi la Russie, qui est amie à la fois de l'Inde et de la Chine, tente depuis des années de promouvoir la paix entre ces États-civilisation. Aujourd'hui, elle noue également des relations avec Trump.

Par conséquent, dans la situation émergente, tout le monde est impliqué dans un conflit les uns contre les autres. Ce serait une formidable aubaine pour les mondialistes qui, ayant subi une défaite cuisante aux États-Unis, ne contrôlent plus que l'Europe. Par conséquent, le conflit indo-pakistanais est plus qu'à leur avantage, ce qui est très dangereux. Les conflits Chine-Inde, Inde-Inde et Inde-Monde islamique sont déjà en place. Dans le même temps, ce qui se passe détourne l'attention du monde de la Syrie, de la bande de Gaza et du Moyen-Orient en général. Tout cela est un moyen évident de creuser un fossé entre les principaux piliers du monde multipolaire. Et c'est pourquoi je suis sûr que Soros était impliqué.

Mais, je le répète, la Russie a d'excellentes relations avec l'Inde et la Chine et de bonnes relations avec le Pakistan. Par conséquent, en utilisant ces bons rapports comme leviers, la diplomatie russe pourrait aujourd'hui résoudre activement et surtout efficacement la situation conflictuelle actuelle qui menace le monde entier ».

mercredi, 23 avril 2025

Sur la géopolitique de l'Iran

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Sur la géopolitique de l'Iran

Jan Procházka

Source: https://deliandiver.org/referat-o-geopolitice-iranu/

Une introduction au pays que Donald Trump s'apprête, paraît-il, à bombarder, et aux conséquences que cela peut entraîner, s'il ne s'agit pas seulement d'une menace proférée par un homme puissant.

L'Iran (en persan, Eran Shahr « Royaume des Aryens »), historiquement la Perse, a une population de près de 90 millions d'habitants et une superficie de 1,6 million de kilomètres carrés, soit l'équivalent de quatre fois et demi le territoire allemand. L'Iran dispose d'excellentes frontières naturelles, d'une situation stratégique, d'une confiance en soi nationale bien distincte et d'une tradition profonde confortant son statut d'État propre. Son orientation géopolitique, sa situation, la structure et la répartition favorables de sa population (continentale), son orientation vers l'industrie et son isolement forcé dans le commerce international font de l'Iran l'une des dernières puissances terrestres (par opposition à une puissance océanique). Les spécificités du système bancaire iranien peuvent également être mentionnées dans ce contexte: la loi sur les banques interdit l'usure et la spéculation boursière. L'Iran a une balance du commerce extérieur positive, une balance des paiements active et une faible dette extérieure (peut-être en raison des sanctions).

L'Iran se situe dans la partie méridionale de l'Eurasie, entre les macro-régions du Moyen-Orient et le sous-continent indien, entouré par les chaînes de montagnes limitrophes, la mer Caspienne et l'océan Indien. La Perse historique (l'Iran, l'Afghanistan, le Tadjikistan et peut-être le Turkménistan et l'Ouzbékistan actuels) peut être désignée par le terme colonial britannique de « Moyen-Orient ».

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Frontières naturelles

Les monts Zagros constituent les frontières naturelles entre le Mashriq (Orient arabe) et le noyau historique de la Perse. Un mur de forêts de chênes de quatre kilomètres de haut a toujours protégé la Perse de l'ouest, et peu d'armées ont réussi à le franchir, à l'instar des Araméens, d'Alexandre de Macédoine et enfin des Omeyyades, qui ont envahi la Perse au milieu du 7ème siècle et y ont établi l'islam. C'est à cette chaîne de montagnes que l'Iran doit son statut d'État moderne. Lorsque l'armée irakienne a envahi l'Iran en 1980 avec le soutien des Américains et des Soviétiques, les Irakiens n'ont pas réussi à traverser les marais de Mésopotamie et la chaîne de montagnes du Zagros. Dans les contreforts des monts Zagros, il existe des failles géologiques et des dépressions avec des sables marécageux non solidifiés (appelés gilgai) qui sont difficiles à traverser, ce qui rend le passage des convois blindés extrêmement difficile.

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La capitale, Téhéran, est une cité colossale de type asiatique qui compte 9 millions d'habitants et représente la moitié de l'industrie iranienne. Au nord de l'Iran, la capitale est protégée par les hauts plateaux arméniens, qui sont bordés par les monts Alborz. Le point principal des monts Alborz est le volcan de Damavand, qui culmine à 5609 mètres au-dessus du niveau de la mer. Le pays est séparé de l'ancienne Russie tsariste, de l'Union soviétique et de l'actuel Turkménistan par le mur de 600 km de long constitué par les monts Köpetdag (environ 3000 m d'altitude), avec des pentes non solides, un relief karstique et de fréquents tremblements de terre. Le Köpetdag forme également une sorte de rempart qui protège le pays en son septentrion et, là encore, peu de conquérants ont réussi à le franchir au cours de l'histoire. En fait, seuls les Parthes, les Turcs seldjoukides au 11ème siècle et, plus récemment, les Mongols au 13ème siècle ont réussi à le franchir.

L'Iran lui-même est très montagneux. Des chaînes de montagnes occupent également le centre du pays (un plateau dont les plus hauts sommets culminent à près de 4500 mètres au-dessus du niveau de la mer), et entre les crêtes montagneuses se trouvent des bassins salins avec des structures de diapir (dômes de sel) auxquels sont liés des gisements de pétrole et de gaz (l'Iran possède les troisièmes ou quatrièmes réserves mondiales de pétrole après le Venezuela, le Canada et l'Arabie saoudite, et les deuxièmes réserves mondiales de gaz naturel après la Russie, d'après les estimations de Gazprom). Les déserts de sel et de sable sont inhabitables et représentent environ un tiers du pays.

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En cas d'attaque terrestre américaine contre l'Iran, la géographie favorise les options défensives. Avec ses chaînes de montagnes intérieures, les villes devraient être très bien protégées si l'Iran se dote de moyens de défense aérienne suffisants. La défense aérienne est donc un élément de défense absolument essentiel pour l'Iran, et ce seul fait plaide en faveur d'une coopération avec la Russie (les Israéliens et les Américains le savent, bien sûr, et c'est pourquoi ils menacent de bombarder l'Iran alors que la Russie est occupée en Ukraine et doit se servir de tous ses systèmes S300 et S400). L'Iran dispose également d'un réseau de transport peu dense. De nombreux couloirs de transport reliant les grandes villes sont entourés de désert et longent des chaînes de montagnes, ce qui donne un avantage aux défenseurs, et le déplacement des convois américains sur un tel terrain, combiné aux tempêtes de poussière et aux blizzards, peut se transformer en un cauchemar similaire à celui de l'Afghanistan.

Dans le nord de l'Iran, le climat est tout aussi rude, avec des oasis au milieu de la steppe eurasienne, qui étaient autrefois habitées par des nomades. Le climat y est continental et la présence d'une grande étendue de mer, celle de la Caspienne, provoque régulièrement des blizzards semblables à ceux de l'État du Michigan. En 1972, un blizzard a provoqué une chute de neige haute de 10 mètres en une semaine et a fait 4000 victimes.

La tradition d'État

C'est peut-être en raison des frontières naturelles mentionnées ci-dessus qu'une remarquable et très profonde tradition d'État s'est développée ici. Même dans les périodes les plus difficiles, l'État iranien a eu tendance à réapparaître et à persister. Après tout, c'est ici, sur les rivières Karun et Kerch, que le plus ancien empire de l'humanité que nous connaissons - l'empire d'Élam avec sa capitale Suse - a été fondé au 7ème millénaire avant Jésus-Christ. Il s'agit d'une région de la Perse historique, limitrophe de la Mésopotamie.

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À partir du 4ème millénaire, des tribus aryennes pénètrent en Élam. Malgré l'invasion des Araméens (Syriens) au 8ème siècle avant J.-C., l'identité aryenne, y compris les langues dites aryennes, a été préservée jusqu'à aujourd'hui. Les Iraniens ne sont en aucun cas des Arabes et ne parlent pas couramment l'arabe. Les Iraniens des montagnes et des campagnes sont plus clairs de complexion et parlent des langues indo-européennes, tandis que les groupes ethniques persans rappellent davantage les Balkans que les régions peuplées de Turcs ou d'Arabes, et certains ont même les cheveux clairs et les yeux bleus.

Les Achéménides, les Parthes et les Sassanides se succèdent jusqu'au 7ème siècle, lorsque la Perse est conquise par les Omeyyades (Arabes), une dynastie sunnite de califes originaires de Damas. Cette dynastie a été renversée par une révolte chiite de masse qui a amené au pouvoir la dynastie sunnite des Abbas de Bagdad, à partir de laquelle cette dynastie a régné sur la Perse.

Les Turcs (Seldjoukides) ont envahi la Mésopotamie au 11ème siècle, suivis par les Mongols au 12ème siècle. Le petit-fils de Gengis Khan, Hülegü, a conquis Bagdad en 1258, dont le sort fut bien pire que celui de Riazan et de Kiev à peu près à la même époque. Les Mongols ont massacré les 100.000 habitants de Bagdad et ont empilé leurs crânes en monceaux après leur victoire. C'est ainsi que se sont achevés l'apogée et l'âge d'or de l'empire arabe. Dans ce contexte, il convient de rappeler que les Mongols n'étaient pas des primitifs, qu'ils étaient parfaitement organisés, qu'ils disposaient de connaissances géographiques détaillées et d'une excellente logistique et que les sapeurs chinois construisirent diverses machines de siège et produisirent de la poudre à canon pour les Mongols (l'historien Lev Gumilev a écrit sur la manière dont cet « élément des steppes » a été constitutif et formateur de culture dans l'histoire de la Russie, par exemple). En Mésopotamie, les Mongols se sont convertis au chiisme et y ont établi un empire, l'Ilkhanat (le premier shah chiite de la branche ithnā casharīya fut Ismāʿīl en 1501, fondateur de la dynastie Safī). Les diverses minorités chiites disséminées au Proche et au Moyen-Orient, notamment au Liban, à Bahreïn et en Irak (mais aussi en Inde et en Afghanistan), qui fonctionnent comme des bras armés de l'Iran, datent également de cette période. En Iran même, on se demande dans quelle mesure les Alaouites de Turquie (environ 20% de la population) et de Syrie (environ 10% de la population) - de religion chiite différente de celle de l'Iran - peuvent aussi être des alliés naturels ; il en va de même pour les Zaïdites du Yémen.

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Au début du 18ème siècle, régnait le dernier des grands Shahs de Perse, Nadir - le « Bonaparte de l'Asie ». Nadir Shah conquiert l'Irak, envahit l'Inde et met à sac Delhi. La Perse, comme la Chine, s'est alors repliée sur elle-même et a stagné, tandis que l'Occident acquérait une énorme supériorité technologique. Les Lumières n'ont pas pris racine en Perse ou en Chine (contrairement, par exemple, à l'Empire ottoman). La Perse a continué à se rétrécir tout au long de l'histoire, avec des dynasties de moins en moins importantes qui se succédaient, les Perses embrassant l'isolationnisme (en cela, ils ressemblaient à la Russie tsariste et aux Chinois) jusqu'à ce qu'en 1941, la Perse devienne un État colonial fantoche.

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Depuis Nadir Shah, l'Iran est sur la défensive et n'a attaqué directement aucun de ses voisins pendant ces 200 dernières années. Au cours des dernières décennies, l'Iran a été en mesure de construire habilement des réseaux d'influence au Moyen-Orient, en approvisionnant les combattants libanais du Hezbollah qui bombardent Israël, les chiites irakiens, l'Armée dite du Mahdi, qui ont déclenché trois soulèvements anti-américains sanglants en Mésopotamie, et en exploitant diplomatiquement la minorité chiite en Afghanistan (les Hazaras persophones de souche mongole) et au Bahreïn. L'Iran est détesté par les Israéliens et les salafistes (en particulier l'Arabie saoudite) qui le considèrent comme un concurrent géopolitique au Moyen-Orient dans une version sunnite-chiite de la guerre de Trente Ans. Les salafistes ne considèrent pas les chiites comme des musulmans, mais comme des diables et des apostats.

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La position stratégique de l'Iran

Depuis 1941, l'Iran est un État fantoche contrôlé par les Britanniques et les Américains. Muhammad Reza Shah Pahlavi Aryamehr (= Roi des Pahlavi, « Lumière des Aryens ») de l'ethnie Mazani est placé à la tête du pays. Le Shah maintient l'unité du pays (en réprimant les séparatistes kurdes et turcs), mais la sécularisation forcée provoque le mécontentement populaire. En 1953, le premier ministre du Shah, Muhammad Mossadek, s'empare des champs pétroliers iraniens au détriment des Américains et des Britanniques. La même année, Mossadek est renversé par un coup d'État militaire fomenté par la CIA (l'opération Ajax) et emprisonné à vie, placé en résidence surveillée sur l'intercession du Shah (les Américains eux-mêmes avaient proposé la peine de mort). Les Américains ont rétabli une monarchie fantoche avec le Shah Pahlavi à sa tête.

L'importance de l'Iran réside dans le fait que la Russie, qu'elle soit tsariste ou soviétique, pourrait obtenir, grâce à l'Iran, outre des réserves d'hydrocarbures, un libre accès à l'océan Indien et, ainsi, son premier port en eaux chaudes. L'Iran possède quelque 500 km de côtes sur la mer d'Oman, d'où il peut accéder librement à l'océan Indien, y compris à l'important port de Chahbahar, à la frontière avec le Pakistan. La stratégie anglo-saxonne consistant à empêcher la Russie en Asie d'accéder à l'océan libre et non gelé s'appelait le Grand Jeu dans l'Empire britannique du 19ème siècle; au 20ème siècle, la même activité était appelée stratégie d'endiguement du communisme par les Américains (plus récemment, ce blocus naval de l'Asie a été appelé la guerre contre la terreur, et s'appelle maintenant Make America great again).

Les Occidentaux se sont aussi pratiquement limités à contrôler la bande côtière lorsque l'Iran a été soumis, et ont soutenu le Shah pour maintenir l'unité du pays - par crainte que les provinces séparatistes du Kurdistan et de l'Azerbaïdjan du Sud ne soient absorbées par l'Union soviétique, laquelle se rapprocherait ainsi dangereusement du golfe Persique.

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En 1978, un événement totalement inattendu s'est produit. Des étudiants radicaux ont fait revenir d'exil le clerc populaire, poète et mystique, l'ayatollah Khomeini. Le Shah est renversé en 1979 lors du soulèvement chiite et les Américains sont contraints d'évacuer leurs bases (une soixantaine de diplomates américains sont retenus en otage en Iran jusqu'en 1981). Les champs pétroliers sont nationalisés et l'Iran se retrouve soumis à un blocus naval et à de lourdes sanctions économiques qui perdurent encore aujourd'hui. La Perse a également été rebaptisée « Iran » et le nom ethnique « Perse », qui ne désignait qu'une seule nationalité, a été remplacé par un nom plus général qui n'entraînerait pas de frictions ethniques. La révolution islamique chiite n'est-elle pas précisément la « troisième voie » tant recherchée par Cuba, l'Égypte et l'Inde (ou peut-être aussi par les droites française et italienne des années 1960 et 1970), et qui n'a finalement été réalisée que par l'Iran et la Chine ?

En 1980, en représailles à l'humiliation subie et à la nationalisation des champs pétroliers, les Américains ont armé l'Irak et donné à Saddam Hussein un « chèque en blanc » pour attaquer l'Iran en représailles au démantèlement du parti communiste par l'Union soviétique. La guerre immensément sanglante, avec ses tranchées, ses gaz de combat et ses enfants soldats, a duré 8 ans. Au prix d'un million de morts, l'Iran a défendu son indépendance.

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La République islamique d'Iran est une théocratie de fait, malgré le mot « république » dans son nom officiel. Le pays est dirigé par un chef spirituel chiite élu par le « Conseil des experts » selon un processus qui rappelle l'élection du pape (dans l'islam chiite, chaque croyant choisit son propre chef spirituel; cette « succession apostolique » de lignées d'initiés est absolument cruciale dans la théologie chiite). Le chef spirituel actuel est l'ayatollah Sayyid Ali Khamenei, un homme doux, calme, pieux et humble qui a été élu chef spirituel par le Conseil des experts en 1989 contre sa volonté. Il était un « simple » ayatollah (il y en a environ 200 en Iran), et non un « grand ayatollah » comme son prédécesseur Mousavi Khomeini; l'Iran compte une quinzaine de "grands ayatollahs". Je recommande au lecteur d'écouter les discours de Khamenei ; Khamenei n'est pas un révolutionnaire charismatique du type Che Guevara comme Khomeini, il rappelle davantage les papes post-civils ou ces pasteurs conservateurs secs qui disent toujours ce que l'on attend d'eux. Après tout, il a presque 90 ans et n'a jamais voulu être un chef spirituel. Il existe également une opposition pro-occidentale en Iran, visibilisée en Amérique, en France et en Grande-Bretagne, mais elle n'est pas très importante numériquement et rappelle davantage les maniaques de la Tchécoslovaquie de Husak (on dit qu'ils sont recrutés parmi les chrétiens arméniens et géorgiens ou les membres de la secte bahá'íe, qui est interdite). C'est la corde que jouent les Israéliens, qui appellent sans cesse la population perse à « renverser les tyrans ». Si l'on en croit Henry Kissinger, cette opposition interne a été écrasée après les manifestations de 2009, et si l'on en croit le professeur Komarek, les institutions comme la police secrète ou l'armée en Iran attirent de véritables élites sociales, et non des opportunistes.

Population

Au-delà des frontières naturelles, la culture et la religion rassemblent tous les groupes ethniques de l'Iran. Les peuples chiites formant l'État sont les Perses, les Turcs de la tribu des Azéris, les Lurs iraniens habitant le Zagros et les Mazanis habitant l'Alborz. Le fondateur de la dynastie Safi, Ismail, l'actuel chef spirituel de l'Iran, l'ayatollah Khamenei, et l'ancien président Ahmadinejad sont des Turcs chiites (Azeris) et non des Perses. Les minorités sunnites - et donc potentiellement problématiques - sont les Baloutches, les Kurdes, les Tadjiks, les Arabes et les Turkmènes. L'Iran compte également un quart de million de mazdéistes. Les membres de ces minorités ne peuvent pas postuler à des postes de haut niveau dans la fonction publique, la police ou l'armée.

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La religion d'État en Iran est l'islam chiite, Isna Aashariyya, un islam apocalyptique qui attend la venue de l'imam caché, le Mahdi. Les Iraniens ont une culture qui leur est propre. Comme partout ailleurs en Orient (par exemple en Turquie ou en Chine), ils possèdent un système complexe de diplomatie et d'étiquette, appelé tarof. Ceux qui ne connaissent pas cette étiquette ont souvent l'impression quelque peu illusoire que les Iraniens sont merveilleusement gentils, aimables et hospitaliers ; les touristes mal informés, en particulier, brutalisent involontairement les habitants qui les invitent à déjeuner et leur achètent des billets de train, sans aucun consentement (en fait, l'absence d'étiquette complexe fait le jeu des barbares - des peuples jeunes, prédateurs, plébéiens et technocrates comme les Américains et les Australiens, qui se contentent d'asséner des vérités objectives à leurs interlocuteurs lors des négociations, ce qui leur permet de prendre des décisions efficaces (la diplomatie perse, en revanche, est redoutable et les Iraniens sont d'excellents négociateurs - après tout, ils ont réussi à construire un réseau d'influence au Moyen-Orient et un corridor terrestre vers le Liban au cours des 20 dernières années sans que personne ne s'en aperçoive.

La société persane est conservatrice, par exemple, elle fait encore la différence entre les sexes comme il y a 100 ans dans notre pays (différencier se dit discriminare en latin, si les féministes veulent le traduire ainsi, que cela soit), il y a donc des écoles masculines et féminines avec des directeurs et des directrices où les garçons et les filles vont séparément. Des coutumes similaires existent sur le lieu de travail - il y a des usines masculines et féminines. Personnellement, je ne verrais pas en cela une raison pertinente de bombarder une civilisation ancienne.

Les dirigeants iraniens savent que les Américains voudront revenir ; Henry Kissinger l'a d'ailleurs clairement indiqué. Les armes nucléaires et des vecteurs hypersoniques sont les seuls moyens d'atteindre la parité. Entre 2010 et 2012, les Israéliens ont assassiné cinq physiciens nucléaires iraniens, et un autre assassinat a été perpétré en 2020. Les assassinats israéliens découlent de la crainte que l'Iran, s'il se dote d'une arme nucléaire, ne tienne Israël en échec en menaçant d'armer ses affiliés chiites en Irak et au Liban. En tant que « plus grande base militaire de l'Amérique », Israël serait le premier touché en cas de conflit avec les États-Unis.

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En janvier 2020, le président Donald Trump a fait assassiner le plus haut général iranien, Qassim Suleimani, commandant du Corps des gardiens de la révolution islamique (c'est-à-dire les forces armées iraniennes), lors d'une visite d'État en Irak. Peu après, une série d'autres assassinats ont eu lieu et Israël a bombardé les ambassades iraniennes en Syrie et au Liban. En juillet 2024, les Israéliens ont assassiné un dirigeant modéré du Hamas, Ismail Haniyeh, à l'aide d'un missile guidé lors d'une visite d'État en Iran. Toutes ces actions sont profondément offensantes, scandaleuses et douloureuses pour l'Iran, mais sa réponse est trop limitée.

Le secteur primaire

L'économie iranienne est soumise à de lourdes sanctions depuis 1978, et le pays a également été épuisé par le long conflit avec l'Irak. Bien qu'il dispose de certaines des plus grandes réserves pétrolières du monde, il n'a pas d'autre débouché que l'exportation de pétrole brut et de produits de raffinage peu complexes vers la Chine, à un prix inférieur à celui du marché. Dans le même temps, il a été soumis à un blocus naval et n'a pratiquement pas participé au commerce international; les denrées alimentaires ont été exemptées de sanctions depuis le début et les médicaments depuis 2000; les sanctions commerciales ont été brièvement assouplies après 2000 et l'Iran a eu accès à des composants occidentaux et à des licences dans le secteur de l'ingénierie. L'Iran ne dispose pas d'un grand secteur agricole en raison de ses conditions naturelles et dépend des importations de blé et d'aliments de base (il n'exporte que des produits agricoles insignifiants - raisins secs, dattes, miel, melons, pêches, caviar et safran). L'Iran n'a jamais fait l'objet d'une prospection géologique détaillée, mais il possède probablement de grandes richesses minérales. En 2023, l'Iran a annoncé la découverte du troisième plus grand gisement de lithium au monde.

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Axe Moscou-Téhéran

La crise ukrainienne, qui a coupé la Russie de l'Europe, a donné à l'axe nord-sud, soit l'axe Moscou-Téhéran, une importance sans précédent (qui l'aurait imaginé il y a cent ans !). L'Iran a construit le port de Shahid Rajaee à Ormuz, qui permettra à la Russie d'accéder à l'océan Indien. En Iran, les Russes construisent un corridor ferroviaire entre Ormuz et le port de Rasht, sur la mer Caspienne. De là, ce corridor passera par Astara et l'Azerbaïdjan pour rejoindre la Russie. L'Azerbaïdjan, allié clé d'Israël en Asie centrale, est une plaie pour la Russie et l'Iran, mais il peut être contourné par la mer Caspienne sans problème pour le moment.

En 2024, l'Iran a rejoint les BRICS et a signé un accord de partenariat stratégique avec la Russie la veille de l'investiture de Trump. Pourtant, les Iraniens n'ont jamais eu jadis de bonnes relations avec les Russes ; ils considèrent à juste titre les Russes comme une variété légèrement différente d'Occidentaux, et leur coopération découle davantage d'une nécessité mutuelle que de sympathies plus profondes. Si les États-Unis sont le « grand shaytan », l'Union soviétique était le « petit shaytan ». Les Iraniens ont également à l'esprit deux guerres perdues contre l'Empire russe au 19ème siècle - sans l'invasion de la Russie par Napoléon Bonaparte en septembre 1812, les Cosaques auraient pu tremper leurs bottes dans l'océan Indien.

Enfin, même au Moyen-Orient, les Russes et les Iraniens ont toujours eu des intérêts légèrement différents. Alors que les Russes ont soutenu les régimes baasistes de Syrie et d'Irak afin d'affaiblir la domination anglo-saxonne, l'ayatollah Khomeini a qualifié les États du Moyen-Orient de fausses créations, façonnées par des tyrans coloniaux et destinées à briser l'unité de l'oumma des fidèles en créant des nations artificielles (c'est pourquoi, par exemple, les ayatollahs ont accueilli favorablement le printemps arabe, mais pas les Russes).

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L'Iran construit des oléoducs stratégiques à travers le Pakistan vers l'Inde, ce qui lui permettra de contourner les sanctions antirusses et le blocus naval américain dans le cadre des BRICS et d'exporter ses propres hydrocarbures, ceux du Turkménistan et de la Russie vers le sous-continent indien. C'est également la raison pour laquelle les États-Unis soutiennent les séparatistes et les terroristes wahhabites dans le Baloutchistan iranien, où l'Iran et le Pakistan partagent une frontière commune. Plutôt que de risquer des opérations terrestres en Iran, qui, compte tenu du patriotisme de sa population et des conditions naturelles, ressembleraient à deux ou trois Afghanistans réunis, ils tentent de faire du Baloutchistan une "Ukraine des Iraniens", ce qui bloquerait également le corridor vers le Pakistan, qui ne peut être contourné par aucune autre voie. (Cette stratégie est rendue encore plus compliquée par le fait que les Baloutches ne sont pas une nation industrielle développée comme les Ukrainiens, mais une nation de pasteurs vivant dans les déserts).

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Une autre option que les Américains envisagent probablement est de bombarder l'Iran à titre préventif - détruire les infrastructures, les ponts, les nœuds ferroviaires, les gazoducs, l'industrie, les centrales électriques et les ports, en espérant que le chaos sera exploité par l'opposition pour un coup d'État ou par les séparatistes des minorités ethniques auxquels les Américains pourraient fournir des armes au moment opportun (le Shah et l'Ayatollah Khomeini ont eu des problèmes avec les séparatistes au Khuzestan, au Baloutchistan, au Kurdistan et ailleurs, mais ils ont réussi à maintenir l'unité du pays).

Ou les Américains auront la même approche qu'ils ont eue précédemment en Yougoslavie, en Libye, en Syrie et en Irak - mais ces pays ne disposaient pas de telles capacités de défense, étaient beaucoup plus fragmentés sur le plan ethnique et, contrairement à l'Iran, n'avaient pas de tradition étatique propre; il s'agissait en fait d'États créés de toutes pièces, tracés sur la carte par les Britanniques et les Français au début du 20ème siècle.

Les accords de coopération avec la Russie peuvent-ils dissuader suffisamment les Américains et les Israéliens? Difficile à dire. Après tout, l'influent géographe israélien Robert Kaplan indique clairement que l'Iran idéal, après la chute du régime chiite, sera « amorphe », morcelé en "-stans" particularistes. Ensuite, comme le dit Henry Kissinger, les Américains reviendront et joueront à nouveau leur « rôle d'équilibriste », c'est-à-dire qu'ils opposeront et balkaniseront les différents "-stans", attisant les inimitiés des uns contre les autres, à la manière de ce qui fut réalisé en Yougoslavie.

En effet, c'est l'infrastructure énergétique qui constitue le maillon faible de la défense de l'Iran. L'ensemble du pays dépend de sa propre structure gazière et de ses centrales électriques au gaz. Une détérioration du réseau de gazoducs pourrait priver de grandes parties du pays de chauffage et d'électricité, et donc d'industrie.

L'industrie

L'enseignement technique n'a pas de longue tradition en Iran. Le formidable essor de la science arabe a été violemment interrompu par l'invasion mongole, et les Persans ont toujours été plutôt des lettrés, des diplomates, des juristes, des mystiques et des poètes; le persan était la lingua franca du Moyen-Orient, la langue de cour chez les moghols et les ottomans. Bien entendu, même cette situation est en train de changer, il est difficile de créer une industrie à partir de rien dans un pays sans aucune tradition technique (il est facile de se moquer des Iraniens ; d'un autre côté, l'existence d'une quelconque industrie dans ce pays relève du miracle). Mais au rythme actuel de la désindustrialisation en Europe, nous pourrions les envier dans cinquante ans...). L'Iran produit également des pétroliers et des trains (sous licence française), des sous-marins diesel-électriques, des raffineries, des machines agricoles et de construction, des répliques d'équipements militaires soviétiques, nord-coréens et américains, des plates-formes de forage et des ogives, des turbines à gaz, des centrales électriques, des chaudières, des climatiseurs, des tôles d'aluminium et des lingots d'acier. À partir de 2022, l'Iran s'est mis à produire des drones militaires bon marché et de haute qualité, les Shahid.

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L'Iran exporte des drones suicides équipés de moteurs à réaction vers la Russie, où est également produit le modèle Geran sous licence. L'Iran dispose également de son propre système de navigation par satellite (ses satellites ont été mis en orbite par les Russes). En réponse aux assassinats et aux attentats terroristes israélo-américains, l'Iran a lancé cette année quelque 200 missiles sur des aérodromes militaires israéliens qui, à la grande horreur des Occidentaux, ont volé sans problème sur des distances de 1500 km à travers l'espace aérien de l'Irak et de la Jordanie, pénétrant largement dans le système "Dôme de fer" (on pense que le lanceur balistique manœuvrant et volant à basse altitude, d'une portée prévue de 7000 à 10.000 km, a été construit par l'Iran avec l'aide de la Russie ou de la République populaire démocratique de Corée). Si l'Iran accumule un stock important de missiles et met au point une bombe nucléaire, les Occidentaux devront vraiment commencer à traiter avec lui par d'autres moyens que les menaces, les sanctions, les assassinats et le terrorisme.

Conclusion

L'Iran est le représentant par excellence d'une puissance continentale eurasienne et un acteur régional important. La malédiction du Moyen-Orient est que l'Islam vit une sorte de version orientale des guerres de la Réforme et de la Guerre de Trente Ans - Wahhabites contre Chiites. Cette rivalité régionale est habilement exploitée par les Israéliens et les Américains.

Malgré cela, l'Iran dispose d'un atout géopolitique. En cas de conflit avec les atlantistes, il peut bloquer environ 20% du commerce mondial de pétrole et de GNL en fermant le détroit d'Ormuz, mettant ainsi les Américains sous pression internationale (l'Iran est également membre du cartel de l'OPEP, même s'il en est plutôt un membre récalcitrant). Et s'il parvient à armer les « hashashin » au Yémen, le risque de bloquer le Bab al Mandab - et donc le canal de Suez - est important.

Donald Trump osera-t-il provoquer un conflit dont les conséquences seront palpables dans toute l'Eurasie ? Personne ne le sait à part lui-même, bien sûr, mais on peut supposer qu'il osera. Après tout, les Américains n'ont pas besoin de Suez, et avec l'avènement de la fracturation du gaz de schiste en Oklahoma, ils n'ont pas tellement besoin du Golfe. L'idée d'une fermeture d'Ormuz pendant des mois, avec des pétroliers qui s'entassent dans le Golfe alors que les prix du pétrole montent en flèche, peut horrifier les pays industrialisés; d'un autre côté, ce ne serait certainement pas aussi radical que la première crise pétrolière et la fermeture de Suez après la guerre des Six Jours - il y a beaucoup plus de gisements de pétrole connus aujourd'hui qu'à l'époque.

Jusqu'à présent, les Américains ont réussi à perturber le commerce entre l'Europe et la Russie. En brisant l'Iran, ils pourraient couper la Russie de l'océan Indien, du sous-continent indien et du Moyen-Orient. De plus, si l'Iran riposte en bloquant Ormuz et le Bab al Mandab, il pourrait également couper l'Europe de l'approvisionnement en gaz qatari et du commerce avec la Chine. L'Europe sera alors d'autant plus dépendante de l'achat des excédents américains, s'il y en a. Couler l'Eurasie selon les instructions britanniques du 19ème siècle, est-ce peut-être la recette miracle de Trump pour rendre facilement et rapidement l'Amérique à nouveau "grande" ?

samedi, 12 avril 2025

Contexte historique des particularités idéologiques japonaises: sentiments pro-russes anti-Trump et pro-russes anti-Chine

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Contexte historique des particularités idéologiques japonaises: sentiments pro-russes anti-Trump et pro-russes anti-Chine

Kazuhiro Hayashida

J'émets l'hypothèse que l'idéologie pro-russe et anti-Trump pourrait ressembler étroitement aux courants idéologiques liés au Kuomintang (KMT) sur le continent, en Chine.

Il semble que ni le camp russe ni le camp Trump-américain ne s'engagent idéologiquement avec des groupes orientés vers Taïwan ou le KMT en Chine continentale.

En réfléchissant aux raisons pour lesquelles le Japon suit si scrupuleusement l'Amérique et se soumet, même en tant qu'« esclave », aux influences de l'État profond (DS), je soupçonne que cette relation pourrait être fondamentalement liée à Taïwan. Je me propose ici d'explorer plus avant cette hypothèse.

Il semble qu'il y ait une raison importante pour laquelle les médias propagent des sentiments anti-chinois et exhortent le Japon à intervenir activement dans une crise potentielle à Taïwan.

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Position géopolitique du Japon à l'égard de Taïwan

Il est indéniable que la situation géopolitique du Japon influence considérablement ces positions idéologiques.

Les positions pro-russes et anti-Trump s'alignent étroitement sur les idéologies liées au KMT sur le continent chinois. Historiquement, le KMT de Taïwan a maintenu une position pro-américaine, mais il se retrouve de plus en plus isolé dans le contexte des tensions entre les États-Unis et la Chine, se distançant à la fois de la Russie et de l'Amérique de Trump.

Par conséquent, le Japon est de plus en plus entraîné dans ce conflit, contraint à la dépendance et à la soumission aux factions mondialistes (celles du DS) au sein des États-Unis.

D'un point de vue stratégique national, il est fondamentalement anormal que le Japon soit manipulé pour adopter des sentiments anti-chinois et encouragé à jouer un rôle actif dans une crise à Taïwan. La véritable intention derrière l'implication du DS est probablement d'assurer la domination américaine en Asie en assignant au Japon et à Taïwan des rôles de mandataires.

Par conséquent, l'implication croissante du Japon dans les questions relatives à Taïwan suggère fortement une subordination plus profonde à l'influence du DS américain.

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Examinons maintenant cette hypothèse :

Se pourrait-il que le Japon ait insisté sur une stratégie de défense du continent pendant la Grande Guerre d'Asie de l'Est en raison de sa profonde confiance dans le gouvernement de Nanjing, envisageant peut-être même d'y installer son gouvernement en exil?

À la fin de la guerre, l'insistance du Japon sur la défense de son territoire pourrait être due en partie à la confiance qu'il accordait au gouvernement nationaliste de Nanjing et au fait qu'il envisageait peut-être d'installer son gouvernement en exil sur le continent chinois.

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Le régime de Wang Jingwei (photo - gouvernement nationaliste de Nanjing), généralement considéré comme un gouvernement fantoche, avait en fait des idéaux nationalistes et anticommunistes substantiels et considérait sincèrement la collaboration avec le Japon comme la clé de ses perspectives d'avenir. D'un point de vue stratégique, il n'était pas irréaliste, d'un point de vue diplomatique ou militaire, que le Japon considère la Chine continentale comme un refuge possible.

Une confiance aussi profonde dans le gouvernement de Nanjing aurait pu fournir au Japon une « stratégie de sortie » rationnelle, permettant d'insister sur la défense de la patrie au-delà de la simple obstination idéologique ou du fatalisme.

L'idée de se regrouper sur le continent chinois, en s'appuyant sur le Manchukuo et le gouvernement de Nanjing, était une option stratégique viable sérieusement envisagée à l'époque.

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Cette hypothèse offre une interprétation plus rationnelle et multidimensionnelle des décisions historiques du Japon, qui s'écarte considérablement des explications traditionnelles « spiritualistes » ou « de la dernière chance ».

Les stratèges chinois et japonais de l'époque ont probablement raisonné ainsi :

« Si le Japon est vaincu, nous serons confrontés à un mouvement de tenaille de la part des États-Unis et de l'Union soviétique. Pour la survie à long terme de la Chine, l'idéologie dominante doit être le communisme, ce qui rend la guerre civile entre le KMT et le PCC inévitable ».

Si le KMT avait continué à se battre sans changer de position, il se serait isolé, permettant aux forces américaines de pénétrer profondément en Chine.

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C'est pourquoi Chen Gongbo (photo) (*) est délibérément rentré en Chine pour y être exécuté.

(*) Ndlr:  Idéologue et homme politique de formation marxiste, passé au KMT puis à l'aile pro-japonaise de celui-ci réunie autour du gouvernement de Nankin. Il sera condamné à mort par les nationalistes chinois en 1946.

Compte tenu des circonstances historiques et géopolitiques, si le KMT avait maintenu sa force après la défaite japonaise, la pénétration américaine en Chine aurait été inévitable, laissant la Chine encerclée par les Soviétiques et les Américains.

Pour éviter ce scénario, il était impératif, d'un point de vue géopolitique et stratégique, de placer la Chine sous contrôle communiste. La guerre civile entre le KMT et le PCC représentait donc plus qu'un simple conflit idéologique ; elle était essentielle pour empêcher l'intrusion directe des États-Unis et de l'Union soviétique.

Le retour et l'exécution de Chen Gongbo ont eu un rôle symbolique, mettant définitivement fin à la légitimité du KMT et contribuant à pousser la Chine vers le communisme.

Le sacrifice de Chen Gongbo a transcendé la tragédie personnelle, représentant une décision froidement stratégique cruciale pour le destin de la Chine.

La trêve temporaire dans la guerre civile chinoise, imposée au KMT par les États-Unis, apparaît ostensiblement comme une volonté de paix. Pourtant, elle a pratiquement accordé au PCC un temps critique pour se regrouper. Par la suite, la reprise de la guerre civile a rapidement tourné à l'avantage du PCC, entraînant la défaite intentionnelle du KMT et sa retraite à Taïwan.

Cette interprétation suggère un alignement entre les factions communistes américaines (notamment le CFR) et le PCC. Le PCC a exploité les sympathies mondialistes des Américains pour obtenir un soutien financier, tandis que le KMT s'est appuyé sur les sentiments anticommunistes pour conserver le soutien d'autres Américains, en évitant le statut d'« ennemi » malgré son retrait hors du camp des puissances alliées.

Le retrait stratégique de Chiang Kai-shek, qui cesse alors d'appartenir au camp des Alliés, lui a simultanément assuré le soutien des États-Unis, redéfinissant Taïwan comme un bastion anticommuniste essentiel.

Ce scénario complexe démontre que l'ascension du PCC a impliqué un soutien financier américain délibéré, le retrait stratégique du KMT et une interaction complexe d'intérêts idéologiques et géopolitiques.

Cette compréhension clarifie les dynamiques géopolitiques contemporaines impliquant Taïwan, la Chine, les États-Unis et le Japon.

- L'Asie orientale (Chine, péninsule coréenne, Japon) en tant qu'État-civilisation unifié

Historiquement, la Chine, la péninsule coréenne et le Japon pourraient fonctionner efficacement comme un État-civilisation unifié, chaque région conservant une forte souveraineté mais coopérant dans un cadre plus large et invisible.

Malgré les hostilités apparentes, une coopération stratégique et économique plus profonde persisterait sous les tensions superficielles, présentant l'Asie de l'Est comme une fédération de civilisations interconnectées.

Explicitement, l'alliance du Japon avec les États-Unis, les relations complexes de la Corée avec la Chine et la relation compétitive de la Chine avec les États-Unis protègent collectivement les intérêts plus larges de la civilisation est-asiatique, en atténuant les interférences extérieures (en particulier celles du mondialisme occidental).

Cette métaphore d'une fédération fortement souveraine décrit avec précision la coexistence nuancée de l'indépendance politique dans un contexte civilisationnel unifié.

- Le rôle « sale » du Japon

Le Japon, comme l'Ukraine vis-à-vis de la Russie, sert de ligne de front et de tampon géopolitique au bénéfice de l'Occident face à la Chine et à la Russie en Asie de l'Est. Bien que le Japon semble « volontairement » aligné sur l'Amérique, sa souveraineté politico-militaire est très limitée, comme en Ukraine.

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Le rôle du Japon en tant que base américaine de première ligne contre la Chine est similaire à celui de l'Ukraine vis-à-vis de la Russie. Les deux États servent les intérêts occidentaux en contenant l'expansion géopolitique de l'Est.

- Résoudre les tensions entre le Japon et la Chine par une approche pro-russe et anti-DS

Une position japonaise pro-russe pourrait rétablir l'équilibre géopolitique au-delà du cadre actuel entre les États-Unis et la Chine, en affaiblissant l'influence mondialiste du DS en Chine.

Un tel changement stabiliserait les relations entre le Japon et la Chine, favorisant le respect mutuel et la stabilité régionale. Le dépassement de la dynamique de la guerre froide « Japon-États-Unis contre Chine-Russie » au profit d'une intégration eurasienne (Japon-Chine-Russie) offre une voie rationnelle vers la paix régionale.

Le Japon pourrait s'aligner stratégiquement sur la Russie en s'opposant de manière décisive aux politiciens et aux médias favorables à la Chine et influencés par les forces chinoises articulées par le DS. Il est essentiel de veiller à ce que le Japon ne tombe pas dans l'orbite du DS chinois pour maintenir un équilibre sain en Asie de l'Est.

vendredi, 28 mars 2025

Le gouvernement japonais réfléchit à la migration de travail: l'Allemagne comme exemple négatif

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Le gouvernement japonais réfléchit à la migration de travail: l'Allemagne comme exemple négatif

Tokyo. Il n'y a pas que le vice-président américain J.D. Vance qui considère la politique d'immigration allemande comme suicidaire. Le gouvernement japonais voit également l'Allemagne comme un exemple négatif en matière d'immigration.

Cela a été clairement exprimé ces jours-ci lors des discussions sur l'accueil et l'intégration des travailleurs étrangers au Japon, qui ont eu lieu lors de la 21ème session du cabinet japonais. Le gouvernement à Tokyo souhaite promouvoir la migration de travail vers le Japon avec des programmes spéciaux – tout en évitant à tout prix les erreurs de l'Allemagne. Une grande importance est accordée, par exemple, aux compétences linguistiques des postulants. Des plafonds doivent également être fixés pour le nombre d'étrangers admis.

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Cependant, même cette politique d'immigration relativement prudente n'est pas sans controverse au sein du gouvernement. Minoru Kiuchi (photo), responsable, au sein du cabinet du Premier ministre Ishiba, de la sécurité économique notamment, a exprimé, après la réunion ministérielle, sur X, ses inquiétudes quant aux conséquences de la migration – en faisant surtout référence à l'Allemagne comme un exemple dissuasif. En Allemagne, qui mène une "politique active d'accueil des étrangers", on constate une augmentation de la criminalité et des problèmes sociaux ainsi qu'une fracture au sein de la société, a-t-il écrit.

Kiuchi a appelé à "analyser en profondeur et avec soin les problèmes de ces pays" avant que le Japon ne prenne ses propres décisions en matière de politique migratoire. Il est nécessaire d'évaluer l'efficacité de la politique de ces pays et ensuite de "gagner le consensus du public" (mü).

Source: Zu erst, mars 2025.

jeudi, 27 mars 2025

L'essor de l'Asie: une restauration de l'ordre naturel du monde

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L'essor de l'Asie: une restauration de l'ordre naturel du monde

Brecht Jonkers

Source: https://brechtjonkers.substack.com/p/the-rise-of-asia-a-r...

L'essor de l'Asie n'est pas un phénomène nouveau. C'est la restauration de l'ordre naturel du monde.

Le graphique ci-dessous est encore imparfait et ce, d'une manière qui profite encore fortement à l'Occident, car il s'étend jusqu'à l'année 1700 et ne montre donc pas à quel point la période de domination économique mondiale de la Chine et de l'Inde a été incroyablement longue.

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Mais il met en avant quelques aspects cruciaux. La Chine a été la puissance économique mondiale dominante pendant la majeure partie de l'histoire humaine enregistrée, jusqu'à bien loin dans le 19ème siècle. Le seul concurrent qu'elle ait jamais eu était l'Inde, par exemple sous les règnes des Moghols. Aucune autre nation n'a jamais été même proche de la Chine et de l'Inde à leur apogée jusqu'à il y a moins de 150 ans.

La seule façon pour l'Occident de soumettre ces deux puissances orientales a été par des injections excessives de violence. Comme l'a dit Samuel Huntington, la « supériorité occidentale dans l'application de la violence organisée » était ce qui leur a permis de conquérir le monde au 19ème siècle.

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Les guerres de l'opium ont été le point crucial et pivot de l'histoire récente de la Chine, démarrant le Siècle de l'Humiliation et causant l'effondrement de la Chine au profit de l'Europe et, plus tard, de l'Amérique. Alors que les Européens se souviennent à peine que ces deux conflits ont eu lieu, étant conditionnés à oublier tout ce que notre société a fait de mal (à part l'Holocauste); pour la Chine, les guerres de l'opium ont été un moment charnière qui détermine pratiquement tout ce qui s'est passé depuis 1839: du vol de Hong Kong et de Macao à la période d'occupation japonaise, jusqu'à la sécession en cours de la province satellite américaine de Taïwan.

C'est une force motrice interne qui se trouve dans l'esprit de chaque homme d'État chinois, du programme d'industrialisation rapide de Mao Zedong, aux réformes économiques de Deng Xiaoping, jusqu'à l'expansion des capacités de défense chinoises par Xi Jinping. C'est le « Plus jamais ça » qui forme un pilier de la conscience nationale chinoise, que les Occidentaux échouent continuellement à comprendre.

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L'Inde a subi un sort encore pire. L'économiste renommée Utsa Patnaik (photo) a calculé qu'en raison de l'occupation coloniale britannique directe, l'Inde a été dépouillée de 45 trillions de dollars de richesse entre 1765 et 1938. Les estimations conservatrices, comme celle du journal World Development, évaluent l'excès de mortalité à 50 millions de victimes causées directement par la politique coloniale britannique entre 1891 et 1920 seulement. Une période qui n'a duré que 40 ans. Des dommages de proportions apocalyptiques, dont l'Inde ne s'est même pas entièrement remise jusqu'à ce jour.

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Dans les deux cas, la Grande-Bretagne était le principal coupable et la force motrice derrière la destruction de l'Inde et de la Chine. Et même alors, comme le montrent les statistiques, l'Empire britannique n'a jamais atteint la puissance économique dont l'un ou l'autre de ces deux espaces civilisationnels asiatiques jouissait à son apogée. Britannia peut prétendre avoir régné sur les mers, mais elle n'a certainement jamais réussi à dominer les tableaux de score historiques.

Seuls les États-Unis ont jamais réussi à être un challenger, et un vainqueur temporaire, dans la compétition avec la Chine pour le titre d'hégémon économique. Mais ce temps est déjà passé, et la Chine est de nouveau au sommet. Comme l'histoire humaine nous l'a montré, c'est ainsi que les choses devraient être.

mercredi, 26 mars 2025

L'APEC et la géoéconomie à la chinoise

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L'APEC et la géoéconomie à la chinoise

Leonid Savin

Le 35ème sommet de la Coopération économique Asie-Pacifique (APEC), composé de 21 pays d'Amérique du Nord, d'Amérique du Sud et d'Asie du Sud-Est, qui s'est tenu au Pérou en novembre 2024, a montré que l'équilibre des pouvoirs évoluait rapidement. On constate que les États-Unis perdent de leur influence, même s'ils tentent par divers moyens de maintenir leur hégémonie.

L'APEC elle-même est une plateforme qui correspond à la description du libéralisme classique. En fait, même si l'on lit les déclarations et les énoncés adoptés, ils peuvent s'inscrire dans le cadre des énoncés des dirigeants américains.

Par exemple, la déclaration ministérielle générale indique que « nous reconnaissons le rôle important d'un écosystème numérique favorable, ouvert, équitable, non discriminatoire, plus sûr et plus inclusif qui facilite le commerce, ainsi que l'importance d'instaurer la confiance dans l'utilisation des technologies de l'information et de la communication (TIC). Nous encourageons les pays à intensifier leurs efforts pour faire progresser la transformation numérique. Dans le cadre de l'accord avec l'AIDEN, nous travaillerons ensemble pour faciliter la circulation des données, en reconnaissant l'importance de la protection de la vie privée et des données personnelles, et en renforçant la confiance des consommateurs et des entreprises dans les transactions numériques ».

Un vrai style "Maison Blanche".

Le 16 novembre, la déclaration de Machu Picchu a été publiée, avec les signatures des dirigeants des nations participantes, y compris des puissances rivales telles que les États-Unis et la Chine.

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Le document souligne également la nécessité d'un commerce équitable, transparent et prévisible, sans discrimination, et de promouvoir l'interconnexion de la région à différents niveaux. Il a également décidé d'organiser les prochains sommets de 2025 à 2027, respectivement en Corée, en Chine et au Viêt Nam, ce qui démontre le rôle de l'Asie du Sud-Est dans les affaires de l'APEC pour les trois prochaines années.

Cependant, il y a eu des nuances. En particulier, l'initiative B3W (Build Back Better World), lancée par Joe Biden en 2021, n'a pas été mentionnée du tout dans les documents du sommet. Pourtant, ses objectifs affichés sont assez proches des documents de l'APEC.

Cela confirme une fois de plus que ce projet géoéconomique américain a lamentablement échoué, même si les représentants de la Maison Blanche et du département d'État tentent occasionnellement d'utiliser ce récit pour exercer une influence en Amérique latine et dans la région indo-pacifique.

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La Chine, en revanche, est apparue comme un leader clair et un acteur constructif. Il ne s'agissait pas seulement de la photo de famille symbolique des dirigeants des pays, avec Xi Jinping au centre du premier rang à côté de l'hôtesse du forum, Dina Boluarte, et le président américain Joe Biden modestement rangé dans les marges du deuxième rang. Le 15 novembre, les présidents péruvien et chinois ont inauguré le grand port de Chancay (photo, ci-dessous), sur la côte pacifique, à 70 kilomètres de Lima.

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La part de l'entreprise logistique chinoise COSCO Shipping dans ce projet est de 60%. En d'autres termes, la Chine détient une part de contrôle. L'investissement total s'élève à 3,4 milliards d'USD.

La capacité prévue du nouveau port est de 1 million d'EVP (équivalent vingt pieds, une mesure conventionnelle de la capacité de fret) par an à court terme et de 1,5 million d'EVP à long terme. Selon le Global Times, la construction des principales installations portuaires s'est achevée au début de l'année, avec plus de 80% du projet réalisé.

Pour la Chine, le lancement d'une nouvelle plate-forme de transport en Amérique latine peut réduire considérablement les coûts logistiques (jusqu'à 20%) et les délais de livraison (23 jours). Auparavant, les marchandises en provenance de Chine étaient expédiées vers le Mexique ou le Panama, d'où elles rejoignaient l'Amérique du Sud. Désormais, la Chine a la possibilité de livrer directement en Amérique du Sud et le Pérou devient une zone de transit supplémentaire pour les pays voisins de la région: l'Équateur, la Colombie, la Bolivie, le Chili et le Brésil, et, à travers ces pays, l'Argentine, le Paraguay et l'Uruguay.

En plus des marchandises en provenance de Chine, le Pérou sera en mesure d'augmenter ses exportations, qui ont connu une croissance significative ces dernières années. L'année dernière, le Pérou a vendu pour 23 milliards d'USD de marchandises à la Chine, quadruplant ainsi ses revenus par rapport à 2009. Cela signifie plus de production, plus d'emplois et plus de devises pour acheter les biens dont le Pérou a besoin. Environ 90% des exportations péruviennes vers la Chine sont constituées de ressources naturelles.

Et la Chine est désormais intéressée par l'augmentation de leur volume. Il convient de noter que le Pérou et le Chili sont des leaders dans l'exploitation du cuivre. Quant à la Bolivie voisine, elle possède d'importantes réserves de lithium.

Globalement, la catégorie des principaux produits exportés du Pérou vers la Chine comprend les scories et les cendres de minerai (19,8 milliards de dollars), le cuivre (1,18 milliard de dollars), les résidus, les déchets de l'industrie alimentaire, les fourrages (733 millions de dollars), les fruits comestibles, les noix, les écorces d'agrumes, les melons (282,3 millions de dollars), les poissons, les crustacés, les mollusques, les invertébrés aquatiques (336,9 millions de dollars), combustibles minéraux, huiles, produits de distillation (258,8 millions de dollars) - tels sont les chiffres à l'horizon 2023.

De toute évidence, une telle avancée de l'initiative chinoise Belt and Road va à l'encontre du désir de Washington de mener sa propre politique et de dire aux pays d'Amérique latine avec qui commercer. C'est pourquoi ils ont immédiatement commencé à critiquer le projet sur le terrain.

Laura Richardson, un général à la retraite qui a récemment dirigé le commandement sud des États-Unis, s'est inquiétée du fait que le port pourrait être utilisé pour amarrer des navires de guerre chinois. Mme Richardson s'est également opposée à la proposition de construire un port chinois dans le sud de l'Argentine.

Foreign Policy cite également des analystes péruviens anonymes qui affirment que le port soulève des préoccupations plus sérieuses que la concurrence des grandes puissances. La construction des routes et des voies ferrées nécessaires à l'acheminement des marchandises vers le port aurait pris du retard.

Cela dit, il est évident que ces problèmes peuvent être résolus et que la Chine, en collaboration avec le Pérou, s'y attaquera. En outre, le port lui-même, en tant que nouvelle plaque tournante, servira d'exemple pour les autres pays, qui pourront voir ce que la Chine peut faire et le comparer à ce que font les États-Unis.

Ce qui est intéressant, c'est que la Chine utilise une approche purement géoéconomique, que les États-Unis eux-mêmes ont déjà promue par le passé. Cette approche n'a rien à voir avec l'idéologie et le « hard power », qui sont plutôt pratiqués par Washington. L'approche de Pékin est pragmatique et ne pose aucune exigence politique supplémentaire, ce qui la rend plus attrayante que celle des États-Unis.

Article original de Leonid Savin :

https://orientalreview.su/2025/02/21/apec-and-chinese-sty...

mardi, 11 mars 2025

L'Éveil du Japon dans l'Ordre des Grandes Puissances

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L'Éveil du Japon dans l'Ordre des Grandes Puissances

Avec le déclin des globalistes et la montée de la multipolarité, le Japon a désormais une chance rare de retrouver son indépendance.

Alexander Douguine

Quelle place pour le Japon dans l'ordre mondial des grandes puissances? Rappelons que Huntington a posé le Japon comme une civilisation bouddhiste distincte dans son célèbre texte de 1993. Cela n'avait pas de sens jusqu'à présent. Le Japon était totalement soumis au programme libéral et globaliste des gauches. Maintenant, que ce programme défaille, cela commence à prendre sens.

Trump signifie révolution. Pour le Japon (et les rapports Japon/Russie), cela oblige à tenir compte des faits suivants :

    - Trump a déjà dit qu'il n'était pas heureux de l'aide militaire accordée au Japon.

    - Trump est généralement en faveur de la tradition.

    - Fini le thème habituellement récurrent de la russophobie.

Mettons maintenant ces trois points ensemble.

Quelles sont les inférences pour le Japon?

    - Moins de dépendance vis-à-vis des globalistes libéraux américains.

    - Invitation indirecte à restaurer le traditionalisme japonais.

    - Porte ouverte pour le dialogue avec les traditionalistes russes.

L'OTAN est l'autre nom de l'État profond libéral globaliste et internationaliste. Dans un monde multipolaire, l'existence d'une telle structure n'a pas de sens. C'est juste une inertie obsolète issue de la guerre froide. L'ordre des grandes puissances exige une nouvelle stratégie de sécurité globale basée sur des pôles et des zones autour de ceux-ci, correctement et réalistement définis.

Il est maintenant temps de réfléchir à comment rendre sa grandeur au Japon. La Chine est grande. Le Japon, jusqu'à présent, était un appendice misérable du système globaliste. Un pays occupé avec zéro souveraineté. Seules des ombres de sa grandeurs passée subsistaient misérablement. Trump donne une chance de changer cela.

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La philosophie est un piège pour la réalité. L'histoire oscille autour de l'axe de la "marche dogmatique des choses" (J. Parvulesco) - un pas d'un côté, un pas de l'autre. La philosophie attend le moment où la réalité approche de l'axe idéationnel et signale alors: voilà.

Le vieux libéralisme détestait le telos. La liberté l'interdit. Le libéralisme de gauche est un mélange entre libéralisme et communisme (surtout les linéaments qui sont qualifiables de "trotskystes"). Le cœur de la philosophie Tech Right (r/acc) est de dire: le libéralisme de gauche entrave le progrès technique en plaçant le telos (moralisant, woke) avant toutes autres choses.

La Tech Right veut annuler le libéralisme de gauche parce que le progrès technique exige une véritable liberté - une liberté grâce à l'absence de tout telos.

La fin de l'histoire hégélienne (dans une lecture de gauche, car il existe une autre lecture authentiquement hégélienne, qui est de droite et monarchiste) a été introduite dans le libéralisme de gauche de manière artificielle par d'anciens marxistes et trotskystes - A. Kojève, par exemple. La singularité n'est pas un telos. C'est une sorte de moment du libre marché.

Commentaire: Bonjour, M. Douguine. Dans ces temps changeants, surtout avec Trump critiquant l'accord concernant la protection que les États-Unis accordent au Japon comme "injuste", comment pensez-vous que le Japon devrait se positionner? Le Japon devrait-il se réarmer correctement? Quelle serait la position de la Russie sur cette question?

Ma réponse: Le Japon a maintenant une chance unique de s'éveiller et de commencer à restaurer sa souveraineté. La Russie n'est pas un ennemi inné et absolu de ce tournant. Cela pourrait s'inscrire dans une multipolarité totalement ignorée jusqu'à présent par un Japon trop docile et soumis (aux globalistes).

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jeudi, 06 mars 2025

L'accord du siècle entre l'UE et l'Inde ouvre la voie au pétrole russe vers l'Europe

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L'accord du siècle entre l'UE et l'Inde ouvre la voie au pétrole russe vers l'Europe

Leonid Savin

Ursula von der Leyen, cheffe de la Commission européenne, a déclaré lors de sa visite à New Delhi le 28 février qu'un accord de libre-échange sans précédent entre l'UE et l'Inde pourrait être conclu d'ici la fin de l'année 2025.

Ursula von der Leyen a ajouté de manière pathétique que « cette visite marque le début d'une nouvelle ère » et « qu'il est temps de faire passer le partenariat stratégique entre l'UE et l'Inde au niveau supérieur ». Elle a également annoncé que l'Union européenne étudiait activement la possibilité d'un nouveau « partenariat de sécurité et de défense » avec l'Inde, similaire aux accords existants de l'UE avec des partenaires clés tels que le Japon et la Corée du Sud.

Un partenariat de longue date

Les relations entre l'Inde et l'Union européenne ne datent pas d'hier. L'Inde a été l'un des premiers pays à établir des relations diplomatiques avec la Communauté économique européenne en 1962.

Dans le cadre de l'accord de coopération UE-Inde de 1994, les deux parties ont mis en place un système complet de coopération et ont finalement transformé leurs relations en partenariat stratégique en 2004. En 2007, les deux parties ont entamé des négociations en vue d'un accord bilatéral de grande envergure sur le commerce et l'investissement. Toutefois, après 15 cycles de négociations en 2013, elles se sont retrouvées dans l'impasse. La faute incombe aux ambitions des parties.

Le 8 mai 2021, les dirigeants de l'UE et de l'Inde ont décidé de reprendre les négociations sur un accord commercial « équilibré, ambitieux, complet et mutuellement bénéfique » et de lancer des « branches » distinctes sur un accord de protection des investissements et un accord sur les indications géographiques. En avril 2022, il a été décidé de créer un Conseil du commerce et de la technologie UE-Inde.

Selon des documents officiels, l'Union européenne est le premier partenaire commercial de l'Inde. Elle représentait 12,2% du commerce total de l'Inde en 2023, avec un chiffre d'affaires de 124 milliards d'euros.

L'Inde est le neuvième partenaire commercial de l'UE, avec 2,2% du total des échanges de biens de l'UE en 2023. Le commerce des services entre l'UE et l'Inde atteindra 59,7 milliards d'euros en 2023, contre 30,4 milliards d'euros en 2020.

Les principaux thèmes des négociations commerciales sont: la suppression des obstacles et l'aide aux entreprises de l'UE; l'ouverture des marchés de services et des marchés publics; la garantie de la protection des indications géographiques; et les engagements en matière de commerce et de développement durable.

Le dernier cycle de négociations entre l'Inde et l'UE s'est tenu en novembre 2024 et portait sur les droits de douane applicables à un groupe de marchandises liées aux technologies de l'information et de la communication. Conformément au plan, les parties étaient censées présenter leur vision pour le 10 février. Apparemment, l'échange de données a été fructueux, ce qui explique pourquoi les fonctionnaires de l'UE ont déclaré que l'accord pourrait être signé dès cette année.

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Circonstances géopolitiques

Au-delà des nuances purement techniques et de la protection des intérêts de l'UE et de l'Inde, les circonstances géopolitiques actuelles, qui laissent peu de marge de manœuvre, poussent Bruxelles à conclure l'accord.

Les nouveaux dirigeants américains ont promis d'imposer des droits de douane de 25% sur les produits européens à partir du mois d'avril en réponse aux mesures protectionnistes de Bruxelles. D'autre part, au sein de l'UE, on craint l'influence croissante de la Chine sur le marché européen, notamment dans le domaine des métaux rares et des produits de télécommunications.

L'UE peut également tirer parti de la confrontation stratégique entre l'Inde et la Chine, raison pour laquelle le chef de la Commission européenne a parlé de coopération en matière de défense. L'Inde essayant de diversifier ses approvisionnements en armes et de développer son propre complexe militaro-industriel, les propositions de l'UE en la matière pourraient s'avérer utiles pour New Delhi.

Il convient d'ajouter que l'Inde a déjà signé un certain nombre d'accords avec les États-Unis dans le domaine des technologies avancées et de la science, et que les relations personnelles entre le Premier ministre Narendra Modi et le président Donald Trump se développent plutôt bien. De plus, compte tenu des critiques de la Maison Blanche à l'égard de l'UE et de leurs désaccords persistants, l'Inde se trouve dans une position gagnante.

À cela s'ajoute la coopération en cours avec la Russie, qui aide l'Inde à développer sa propre économie.

Il est probable que la décision de l'UE d'instaurer le libre-échange avec l'Inde ait un double fondement: alors que certains produits pétroliers en provenance de Russie ont jusqu'à présent pénétré dans l'UE par l'intermédiaire de pays tiers, l'Inde pourrait déployer beaucoup plus d'activités dans ce domaine dans le cadre du nouvel accord.

Les produits pétroliers sont l'un des principaux produits de base que l'Inde fournit à l'UE. Et surtout, elle ne craint aucune sanction, car il est peu probable que les États-Unis et l'UE lui imposent des restrictions, ce que confirment les précédentes dérogations au régime des sanctions à l'encontre de New Delhi.

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Agents de consommation

Parmi les autres produits indiens exportés vers l'UE figurent les vêtements prêts à porter, l'acier, les machines électriques et les produits pharmaceutiques. Les exportations de services tels que les télécommunications et les transports pourraient également augmenter de manière significative après la signature de l'accord.

L'UE devrait bénéficier de l'augmentation des exportations de biens tels que les avions et leurs pièces détachées, les équipements électriques, les produits chimiques et les diamants. Le secteur des services bénéficiera également de l'augmentation des échanges dans les domaines de la propriété intellectuelle, des télécommunications et des services informatiques.

Étant donné que deux millions et demi d'Indiens vivent dans les pays de l'UE, et que ce chiffre est clairement appelé à augmenter dans un avenir proche, l'Inde a en fait ses agents de consommation sur le terrain qui feront pression pour son entrée sur le marché européen.

Selon des rapports récents, l'UE cherche à supprimer les droits de douane sur plus de 95% de ses exportations, y compris les produits agricoles sensibles et les automobiles. L'Inde, quant à elle, ne souhaite ouvrir qu'environ 90% de son marché à l'UE, hésitant à réduire les droits de douane uniquement sur les produits agricoles.

En ce qui concerne la route directe pour les approvisionnements dans les deux sens, l'UE mise désormais sur le corridor du Moyen-Orient. L'itinéraire classique passant par le canal de Suez peut être utilisé, de même que des options alternatives via la Turquie, l'Irak et l'Iran.

Toutefois, à l'avenir, après la levée des sanctions, nous ne pouvons pas exclure l'itinéraire via la Russie. En outre, les produits de nos co-entreprises fabriqués en Inde peuvent également être livrés à l'UE.

mercredi, 19 février 2025

Inde : le BJP de Modi gagne la capitale mais extermine les communistes dans l'Etat du Chhattisgarh

 

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Inde : le BJP de Modi gagne la capitale mais extermine les communistes dans l'Etat du Chhattisgarh

par Giulio Chinappi

Source: https://telegra.ph/India-il-BJP-di-Modi-vince-nella-capit...

Le 5 février dernier, les élections législatives tant attendues se sont déroulées dans la capitale fédérale de l'Inde, New Delhi. Pour la première fois, elles ont récompensé le BJP (Bharatiya Janata Party), le parti dirigé par le Premier ministre Narendra Modi. À la tête du gouvernement depuis 2014, Modi n'avait jamais réussi à conquérir la capitale, contrôlée depuis onze ans par la formation centriste Aam Aadmi Party (AAP), que l'on peut traduire par « Parti de l'homme commun ».

En effet, le BJP avait déjà dirigé la capitale New Delhi, mais bien avant l'ascension de Narendra Modi, entre 1993 et 1998. Cependant, au cours des 27 dernières années, la formation de droite nationaliste hindoue n'a fait qu'accumuler les défaites, cédant d'abord le gouvernement aux rivaux historiques du Congrès national indien (CNI) entre 1998 et 2013, puis à l'AAP. Selon les analystes, la défaite du ministre en chef sortant Atishi Marlena et du leader de l'AAP Arvind Kejriwal constitue un revers majeur pour l'opposition au gouvernement de Modi.

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Pour comprendre les raisons de ce résultat, il faut remonter dans le temps. Fondé en novembre 2012, l'AAP avait d'abord construit son succès dans la capitale en se présentant comme un mouvement populaire mené par un leader charismatique et populaire comme Arvind Kejriwal (photo). Cependant, avec le temps, l'AAP a changé de nature, étant perçu comme une partie intégrante du système qu'il tentait initialement de combattre : « Ce qui avait commencé comme un mouvement populaire s'est transformé en un simple parti politique », a déclaré l'expert Neelanjan Sircar, du Centre de recherche politique de New Delhi, interrogé par Al Jazeera. Kejriwal n'est plus qu'un politicien, et une fois que son charisme s'est estompé, le lien avec les électeurs s'est affaibli ».

D'autre part, le BJP poursuit son ascension à travers le pays, remportant la victoire dans trois États importants (Maharashtra, Haryana et Delhi) au cours des derniers mois et renforçant son poids dans la politique nationale. En ce qui concerne la capitale, peuplée de plus de 33 millions d'habitants, les analystes ont souligné qu'un pourcentage important d'électeurs des castes supérieures, qui représentent près de 40 % de la population de Delhi, ont choisi le BJP, attirés par des promesses de subventions, de développement et par un désir de changement après plus d'une décennie de règne de l'AAP.

Cependant, outre les promesses de bien-être, le BJP a également beaucoup misé sur son âme nationaliste hindoue, exacerbant la discrimination à l'encontre des nombreuses minorités ethniques et religieuses qui peuplent l'Inde, en particulier les minorités musulmanes. C'est le cas des Rohingyas, originaires du Myanmar et du Bangladesh, qui sont aujourd'hui très nombreux à New Delhi et dans d'autres régions de l'Inde en raison des conflits internes qui font rage depuis des décennies dans l'ancienne Birmanie. Selon les statistiques du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) mises à jour en 2019, au moins 40.000 Rohingyas résident en Inde, dont 1100 dans la capitale, mais ces chiffres sont très probablement sous-estimés.

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Le BJP et d'autres groupes de droite attaquent les Rohingyas depuis des années, les accusant d'être liés au terrorisme et appelant à leur arrestation et à leur expulsion. Nombre d'entre eux ont été enfermés dans des centres de détention dans la capitale et dans d'autres régions du pays. Lors d'une conférence de presse tenue pendant la campagne électorale, le porte-parole du BJP, Sambit Patra (photo), a accusé le gouvernement sortant de l'AAP de « manipulation démographique » pour influencer les élections. En fait, le BJP a accusé à plusieurs reprises l'AAP d'ajouter des « Bangladais illégaux » aux listes électorales afin d'élargir sa base électorale. De même, lors d'un meeting électoral, le ministre de l'intérieur Amit Shah a promis que si le BJP arrivait au pouvoir, il « débarrasserait Delhi des Bangladais illégaux et des Rohingyas dans les deux ans ».

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Entre-temps, dans l'État du Chhattisgarh, lui-même dirigé par le BJP, le gouvernement local se plaît à exterminer les communistes, comme en témoigne l'assassinat de 31 personnes qui, selon des sources officielles, ont été identifiées comme des « rebelles maoïstes », également connus sous le nom de « Naxalites » en Inde. Les Naxalites sont un courant communiste fondé en 1967 par Charu Mazumdar, mort en prison en 1972 après avoir été emprisonné pour ses opinions politiques, et sont aujourd'hui principalement actifs dans les Etats de l'Andhra Pradesh, du Telangana, du Maharashta et du Chhattisgarh. Depuis le début de l'année, il s'agit de la troisième opération de ce type menée par les autorités indiennes, après l'assassinat de seize naxalites le 23 janvier et de huit autres militants maoïstes le 31 janvier.

 « Des centaines de policiers et de soldats paramilitaires ont lancé une opération dans les forêts sur la base de renseignements indiquant qu'un grand nombre de rebelles maoïstes s'étaient rassemblés dans la région », a déclaré l'inspecteur général de la police de l'État, Pattilingam Sundarraj. « Il s'agit d'une grande victoire en faveur d'une Inde libérée des naxalites », a déclaré le ministre de l'intérieur, Amit Shah, qui avait indiqué l'année dernière que le gouvernement prévoyait d'éradiquer la rébellion maoïste d'ici à 2026. Dans l'ensemble, la répression a entraîné la mort d'environ 287 militants maoïstes au cours de l'année écoulée, la plupart d'entre eux dans l'État du Chhattisgarh, selon les chiffres officiels du gouvernement.

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Les soldats indiens combattent les maoïstes depuis 1967, date à laquelle les rebelles ont entamé la lutte pour réclamer davantage d'emplois, de terres arables et une redistribution des richesses naturelles pour les communautés indigènes pauvres du pays. Des années de négligence ont isolé de nombreuses populations locales, qui souffrent d'un manque d'emplois, d'écoles et d'infrastructures de santé, faisant des propositions des Naxalites le seul moyen possible de sortir de la pauvreté, comme dans le cas de l'État du Chhattisgarh, l'un des plus pauvres de toute la fédération.

Dans le contexte des élections législatives à New Delhi et des opérations militaires contre les rebelles maoïstes, une image politique de plus en plus polarisée se dessine en Inde. D'une part, la victoire du BJP dans la capitale représente une nouvelle consolidation du pouvoir du parti de Narendra Modi, renforcé par le soutien des castes supérieures et une rhétorique nationaliste qui a trouvé un écho dans une grande partie de l'électorat. D'autre part, la répression des minorités et des mouvements d'opposition, tels que les maoïstes au Chhattisgarh, démontre le caractère de plus en plus autoritaire des dirigeants actuels. Alors que le BJP apparaît comme la force dominante, l'opposition est confrontée à une marginalisation politique croissante.

 

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lundi, 17 février 2025

Archéo-futurisme et traditionalisme révolutionnaire en Chine

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Archéo-futurisme et traditionalisme révolutionnaire en Chine

Jiang Qing et l'ordre confucéen

Ladislav Malý

Source: https://deliandiver.org/archeo-futurismus-a-revolucni-tra...

Un livre à étudier ou comment le passé ancien de la Chine peut façonner son avenir politique

J'ai récemment acheté un livre intitulé The Confucian Constitutional Order (Philosophy, 2020), en version tchèque. Il est écrit par un auteur contemporain chinois, l'universitaire Jiang Qing, et traduit par Milan Kreuzzieger. Intéressant : on dit généralement qu'il existe une sorte de dictature numérique en Chine, ou encore une dictature communiste et une censure, mais en lisant le texte de Jiang Qing, le lecteur en vient à croire, en souriant, qu'il s'agit là de calomnies haineuses à l'égard de la Chine contemporaine.

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L'auteur évoque le nouveau système sociopolitique qui conviendrait le mieux à la Chine, en s'inspirant de Confucius (Confucius 551-479 après J.-C.,  vécut à l'époque de l'apogée de la culture et de la philosophie grecque en Europe - note LM). J'ai lu ce livre avec intérêt et gourmandise, et comme il y a en cet ouvrage quelque chose qui interpelle les personnes intéressées par la politique, j'ai fait quelques recherches, que je vais maintenant vous présenter brièvement.

Selon Jiang Qing, le meilleur système sociopolitique pour la Chine, et pas seulement pour elle, est la « Voie de l'autorité humaine », qui repose sur la question des trois formes de légitimité politique. La légitimité est le facteur décisif pour déterminer si un dirigeant a le droit de gouverner. Selon l'auteur, la Voie de l'autorité humaine relie les trois sphères, ce qui signifie que le pouvoir politique, pour être légal et juste, doit s'appuyer sur trois types de légitimité: le Ciel, la Terre et l'Homme.

La première se réfère à une légitimité transcendantale et sacrée ; la deuxième se fonde sur une légitimité dérivée de l'histoire et de la culture, puisque la culture est créée au cours du processus historique dans des lieux spécifiques ; la troisième se réfère à la volonté du peuple, puisque le respect de cette volonté détermine directement la soumission du peuple à l'autorité politique. Ces trois facteurs de légitimité peuvent garantir que l'autorité du dirigeant et l'obéissance du peuple sont considérées comme un droit et un devoir.

Réflexions complémentaires : la légitimation de la Voie est comprise comme la légitimité du pouvoir politique, tandis que la mise en œuvre de la Voie est comprise comme la manière dont le pouvoir politique est exercé, ainsi que les méthodes et l'art d'utiliser le pouvoir légitime. La légitimation du pouvoir politique est le fondement et l'objectif de tout système politique : la méthode, l'ordre et l'art de la politique. Sans cela, la réalité politique n'a ni sens ni valeur.

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Dans un cadre constitutionnel, la voie de l'autorité humaine établit le régime parlementaire. Le Parlement est composé de trois chambres, chacune d'entre elles représentant l'une des trois sortes de légitimité: la Chambre des lettrés, c'est-à-dire la Chambre des lettrés confucéens, représente la légitimité sacrée ; la Chambre du peuple, la légitimité populaire ; et la Chambre de la nation (du pays), la légitimité culturelle. Le Parlement ainsi constitué, en tant qu'organe souverain de l'État, est - selon Jiang - le mieux réalisé dans une monarchie, et pour la Chine contemporaine, le monarque souverain est le dernier héritier de Confucius.

Le sous-titre du livre, qui justifie sa qualification d'« archéo-futuriste », est « Comment le passé ancien de la Chine peut façonner son avenir ». La manière dont Jiang Qing compare différents systèmes sociopolitiques, y compris la démocratie occidentale, présente un intérêt particulier pour nous, en République tchèque. Il déclare notamment: "Lorsque la démocratie a été confrontée à la question de la légitimité, elle a trouvé ses fondements théoriques dans le contrat social, qui justifie et nomme l'origine de l'État et la légitimité politique qui en découle. La légitimité de la démocratie est donc un produit de la raison pure et de la spéculation, qui souffre d'un manque d'arrière-plan historique authentique".

Ailleurs, dans le livre, nous pouvons lire : "L'examen de la question de la légitimité sous l'angle des trois éléments que sont le Ciel, la Terre et l'Homme révèle une légitimité tridimensionnelle et la division de ses éléments constitutifs. La conception occidentale contemporaine de la souveraineté du peuple n'est que le résultat du rejet de la souveraineté médiévale de Dieu. Dans le Moyen Âge chrétien, l'autorité politique venait de Dieu. Dieu était unique, absolu, ne dépendant que de lui-même, et donc d'une essence exclusive et suprême, et donc tout découlait de Dieu. En fait, la souveraineté du peuple n'est que l'équivalent séculier de la souveraineté de Dieu. Dans la culture occidentale contemporaine, Dieu a été remplacé par le peuple. Par conséquent, la politique démocratique affirme une légitimité unique et ne peut imaginer d'autres formes de légitimité".

Et elle a une autre conséquence grave : elle manque de moralité. Dans un système démocratique, l'autorité et la légitimité du gouvernement sont déterminées, dans un sens purement formel, par la « volonté du peuple ». Ce qui compte, c'est l'opinion de la majorité, quelle que soit sa qualité. Si la volonté du peuple était contraire à la morale humaine (comme c'est le cas dans notre pays tchèque depuis 1918 - note LM), il suffirait qu'une majorité de l'électorat obtienne le nombre de voix légalement requis pour que le gouvernement dispose de l'autorité et de la légitimité politiques nécessaires. La démocratie consiste à compter les votes, la moralité n'est pas prise en compte. La volonté immorale du peuple peut créer une autorité et un gouvernement légitimes. Le problème plus profond est qu'au niveau de la légitimation, la volonté du peuple n'est pas limitée par une légitimité sacrée ou une morale universelle. Ses origines historiques et culturelles sont enracinées dans la séparation de l'Église et de l'État. En Occident, la morale est représentée par l'Église, et la séparation de l'Église et de l'État signifie donc que l'Église (la morale) a quitté la sphère politique.

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Par conséquent, il n'y a pas de grand niveau de moralité ou d'idéaux élevés en politique. Il ne reste que des désirs et des intérêts nus. Il n'y a pas de place pour les grands espoirs et la grande vitalité. Dans ces conditions, la politique devient de plus en plus décadente et invite à la satisfaction des désirs ; le gouvernement devient une entreprise gérée par les dirigeants politiques en tant que directeurs ; le gouvernement politique devient une question de contrats et tout peut être jugé en termes d'intérêts financiers. Il n'y a plus de place pour les idéaux sublimes ou les nobles personnalités du passé.

Par ailleurs, Jiang Qing souligne que l'État est un corps organique et vivant. Il évolue dans le temps historique. L'État est l'État du passé, du présent et de l'avenir. Le rôle de l'État aujourd'hui est de porter la vie de l'état passé vers l'avenir. L'État n'est pas le résultat d'un choix rationnel ou de la volonté du peuple. Il est le résultat de la continuité historique et de l'héritage de la tradition. C'est la nature organique de l'État qui décide des questions de légitimité. Les autorités politiques doivent être reconnues sur la base de l'histoire et de la culture. Elles doivent s'appuyer sur la continuité de la vie antérieure de l'État, et ce n'est qu'à cette condition qu'elles peuvent gagner en légitimité.

Si la volonté du peuple est considérée comme la seule source de légitimité, la politique ne peut jamais chercher à réaliser le bien. Par conséquent, le problème n'est pas l'établissement de la démocratie, mais la question de savoir comment changer les principes de base de la démocratie et rétablir les principes de légitimité. C'est le problème politique le plus fondamental auquel sont confrontées les sociétés humaines.

En pratique, il s'agit d'attribuer une légitimité moindre à la légitimité issue du peuple, de lui retirer son statut d'unique source de légitimité, et d'établir un nouveau modèle politique dans lequel plusieurs types de légitimité fonctionnent simultanément, côte à côte, en équilibre.

Voilà pour Jiang Qing.

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En lisant le livre, je me suis demandé comment il était possible qu'un penseur chinois contemporain puisse utiliser quelque chose d'aussi vieux et d'aussi « faisandé » que la doctrine confucéenne pour l'organisation sociopolitique future de son pays. Pourquoi fouille-t-il dans la vieille remise philosophique chinoise peu prometteuse et en sort-il Confucius ? Sans doute parce que la Chine n'a pas été habitée pendant de nombreux siècles par des penseurs biblistes et illuministes, comme l'a été l'Europe. Il n'y avait pas d'intellectuels biblistes ni d'illuministes en Chine, il n'y avait personne, jusqu'à l'époque de l'endoctrinement marxiste-bolchevique, qui aurait soumis l'histoire et la culture chinoises à une analyse historico-critique et ainsi privé les masses du peuple chinois de leur mystérieuse poésie issue de la religion païenne ; les chefs spirituels de la Chine et les sages philosophes chinois ont été moqués impunément pendant des siècles et ont souligné l'invisibilité de leurs divinités, par conséquent elles n'ont pas existé. C'est la raison pour laquelle la doctrine confucéenne s'élève au-dessus de la Chine comme le soleil à l'est.

Écrit pour Delian Diver, Prague.

mercredi, 12 février 2025

Les Kouriles, pomme de discorde: le nouveau gouvernement japonais veut résoudre le problème

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Les Kouriles, pomme de discorde: le nouveau gouvernement japonais veut résoudre le problème

Tokyo. Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, le Japon et la Russie ont un problème territorial non résolu: l'Union soviétique victorieuse a annexé à l'époque les îles que le Japon appelle les « îles du Nord ». En russe, elles sont désignées comme l'archipel des « Kouriles ». Tokyo n’a jamais renoncé à ces îles, tandis que Moscou a constamment affirmé qu'un retour des îles au Japon était exclu. Comme l'Allemagne, le Japon ne bénéficie toujours pas d'un traité de paix en raison de la question non résolue des Kouriles.

Cependant, Tokyo souhaite – et ce, malgré les relations actuellement tendues avec la Russie – tenter de résoudre enfin ce problème. C'est ce qu'a déclaré le nouveau Premier ministre japonais, Shigeru Ishiba, vendredi au Parlement.

Cela ne sera pas facile, car en même temps, Ishiba a promis de continuer à soutenir les sanctions contre la Russie et de soutenir l'Ukraine. Le renforcement des relations avec des pays partenaires comme la Corée du Sud, l'Australie et les G7 reste également à l'ordre du jour. Le partenariat avec les États-Unis est même décrit comme le « pilier » de la diplomatie et de la sécurité japonaises.

Tokyo a récemment qualifié les Kouriles d'« occupées illégalement par la Russie » en avril 2023. Le président du Kremlin, Vladimir Poutine, a immédiatement réagi en qualifiant l'archipel de partie intégrante de la Russie: « Cela fait partie des résultats de la Seconde Guerre mondiale, nous n’avons pas révisé les résultats de la Seconde Guerre mondiale » (mü).

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dimanche, 02 février 2025

Le Pentagone va-t-il entamer un nouvel «endiguement» de la Chine?

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Le Pentagone va-t-il entamer un nouvel «endiguement» de la Chine?

Leonid Savin

Malgré le changement d'administration à la Maison-Blanche et les remaniements respectifs au sein du département d'État et du ministère de la Défense des États-Unis, il sera évident que la politique étrangère de Donald Trump suivra la tendance consistant à faire pression sur la Chine, y compris en reprenant les méthodes éprouvées de l'approche militaro-stratégique. Alors que le renforcement militaire des alliés des États-Unis dans la région Asie-Pacifique a également eu lieu sous Biden, il est probable que les ressources libérées sur le front ukrainien seront redirigées vers cette partie du monde.

Les éléments clés de la stratégie américaine seront à la fois la puissance maritime grâce à la marine et la suprématie aérienne grâce à l'armée de l'air, en s'appuyant sur le réseau d'alliés au large des côtes chinoises. Outre les satellites officiels tels que la Corée du Sud et le Japon, Washington utilisera à coup sûr l'Inde, où le Premier ministre Narendra Modi entretient de bonnes relations avec Donald Trump. Le Bangladesh, qui a connu un coup d'État l'année dernière, pourrait également devenir un nouveau bastion américain.

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Selon le site web de l'US Naval Institute, « les principales bases navales du Bangladesh se trouvent près du district de Rakhine au Myanmar et à proximité du corridor économique Chine-Myanmar, un élément clé de l'initiative chinoise “Une ceinture, une route” visant à réduire la pression sur les communications maritimes chinoises en mer de Chine méridionale ». En coopérant avec la marine du Bangladesh, la marine américaine pourrait utiliser ces bases pour surveiller les projets chinois. En outre, la position stratégique du Bangladesh dans la partie septentrionale du golfe du Bengale pourrait donner aux États-Unis un avantage pour la surveillance du détroit de Malacca, qui est vital pour l'économie et l'industrie chinoises.

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En cas de conflit, les bases navales du Bangladesh pourraient devenir un centre logistique et un port sûr pour la marine américaine. Actuellement, les États-Unis ne disposent d'aucune base dans le golfe du Bengale. Alors que l'île de Diego Garcia deviendrait certainement un centre logistique pour toutes opérations dans l'océan Indien, le Bangladesh - avec sa main-d'œuvre, son industrie navale dynamique et sa marine professionnelle - pourrait offrir aux navires de l'US Navy un lieu de repos, de récupération et de réarmement. Le Bangladesh construit actuellement un port maritime en eau profonde à Matarbari, Cox's Bazar, avec l'aide du Japon, l'un des partenaires les plus fiables et les plus importants des États-Unis depuis la Seconde Guerre mondiale. Le Japon pourrait aider à construire un pont entre les deux pays afin de garantir que la marine américaine puisse utiliser le port en eau profonde de Matarbari comme base d'opérations navales lors d'une future guerre, en bloquant les expéditions chinoises potentielles qui contournent le détroit de Malacca pour emprunter le corridor économique Chine-Myanmar comme alternative. Cela donnerait aux États-Unis un moyen de pression sur la Chine dans la région du golfe du Bengale ».

En ce qui concerne la suprématie aérienne, bien que les États-Unis soient visiblement en difficulté, le sentiment de panique anti-Chine pourrait aider le MIC, le Pentagone et la Maison Blanche à restructurer le futur budget pour faire face aux nouveaux défis.

À cet égard, un rapport spécial de l'Institut Hudson sur la nécessité de renforcer et d'étendre l'armée de l'air américaine pour faire face à la Chine, non seulement comme moyen de dissuasion mais aussi pour un conflit militaire direct, mérite d'être signalé. Les auteurs soulignent que même les aérodromes américains sont menacés par une attaque militaire chinoise sérieuse. Une force de frappe de l'Armée populaire de libération (APL) chinoise composée d'avions, de lanceurs de missiles terrestres, de navires de surface et de sous-marins, ainsi que de forces d'opérations spéciales, pourrait attaquer les avions américains et leurs systèmes de soutien sur des aérodromes du monde entier, y compris sur le territoire continental des États-Unis. Il est à noter que les analyses militaires des conflits potentiels impliquant la Chine et les États-Unis montrent que la grande majorité des pertes de l'aviation américaine sont susceptibles de se produire directement sur les aérodromes de la base nationale, et que ces pertes pourraient être très importantes. Il convient toutefois de souligner que l'armée américaine consacre aujourd'hui relativement peu d'attention et de ressources à la lutte contre ces menaces par rapport au développement d'aéronefs modernes.

La RPC envisage les conflits potentiels différemment et estime que si les aérodromes font l'objet d'attaques massives, ils doivent être protégés, étendus et renforcés. Depuis le début des années 2010, l'APL a plus que doublé le nombre d'abris aériens protégés et d'abris aériens individuels non protégés sur les aérodromes militaires, créant au total plus de 3000 abris aériens, sans compter les aérodromes civils ou commerciaux.

Cela suffit pour cacher la grande majorité des avions de combat chinois. La superficie des pistes d'atterrissage dans le pays a augmenté de près de 75%. En conséquence, la Chine dispose aujourd'hui de 134 bases aériennes à moins de 1000 milles nautiques du détroit de Taïwan - des aérodromes qui abritent plus de 650 avions dans des abris et près de 2000 sans protection sérieuse.

En réponse, les auteurs du rapport suggèrent que le ministère américain de la défense organise des ressources pour soutenir les opérations aériennes en cas d'attaque. Pour reprendre l'avantage et prévenir les conflits, les États-Unis et leurs alliés et partenaires, à des degrés divers, doivent poursuivre leurs efforts dans les trois domaines suivants :

1) Encourager la poursuite des investissements défensifs de la RPC. Les États-Unis doivent continuer à améliorer leur capacité à lancer des frappes profondes et massives contre les forces de l'APL et les éléments clés des infrastructures essentielles, malgré la présence de défenses aériennes denses et sans soutien. En réponse, les forces de l'APL, déjà renforcées, continueront probablement à investir dans des mesures défensives passives et actives supplémentaires et coûteuses, ce qui réduira les possibilités d'investissements alternatifs, y compris les moyens de frappe et les autres capacités de projection de force.

2) Construire une infrastructure résiliente sur le terrain. Les États-Unis doivent améliorer la résilience de leur infrastructure militaire, notamment en augmentant la capacité et en renforçant les aérodromes sur le territoire continental des États-Unis, dans la région indo-pacifique et au-delà. Bien que l'argent dépensé pour la défense active et passive réduise l'argent dépensé pour les opérations offensives, en l'absence d'un niveau de base de résilience des infrastructures, qui fait actuellement défaut, on peut raisonnablement s'attendre à ce que les capacités offensives du ministère de la défense soient débordées en cas de conflit. Une infrastructure résiliente est nécessaire pour que l'armée de l'air américaine puisse combattre efficacement.

Une architecture résiliente doit comprendre une défense passive (redondance, distribution géographique et dispersion tactique, renforcement, récupération et capacités de camouflage, de dissimulation et de déception) et une défense active. Comme l'ont conclu Christopher Lynch et d'autres analystes de la RAND Corporation, qui ont entrepris une analyse approfondie de la résilience des aérodromes aux États-Unis, « les moyens les plus rentables d'améliorer la résilience des bases aériennes sont une solide défense passive ».

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Pour renforcer les aérodromes de manière globale, le ministère de la défense devra passer d'une approche au cas par cas de chaque projet de construction à une campagne de construction. Une grande campagne pluriannuelle intégrée de construction d'aérodromes aux États-Unis et au-delà, en particulier dans la région indo-pacifique, donnerait un élan durable aux travaux de construction militaire sur les bases, créerait des consortiums d'entrepreneurs commerciaux et réduirait les coûts de construction. Dans le cadre de cette campagne, les États-Unis pourraient conclure des contrats conjoints avec les alliés qui renforcent également leurs infrastructures.

En outre, le Pentagone devrait adopter des mesures de rigueur appropriées, en particulier pour les nouveaux travaux de construction militaire. Le récent projet de renoncer à la construction d'abris fortifiés, d'un coût d'environ 30 millions de dollars, au profit de nouveaux bombardiers B-21, d'un coût de plus de 600 millions de dollars, a été qualifié de décision insensée qui met en péril la capacité des États-Unis à frapper dans le monde entier.

Pour soutenir les opérations, les aérodromes devront également être protégés par des systèmes de défense active létaux, adaptables et résistants aux actions continues de l'ennemi. Pour ce faire, l'armée américaine doit réaffecter le financement de la force de manœuvre au développement de l'unité d'artillerie antiaérienne et à l'amélioration de sa capacité à protéger les aérodromes, les ports et d'autres installations critiques. Il faut également des systèmes de défense aérienne et antimissile plus soutenus, capables de soutenir une défense calibrée à long terme.

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3) Développer les forces armées. Le ministère américain de la défense devrait développer et accélérer le déploiement de forces moins vulnérables aux attaques de l'APL contre les aérodromes. Les éléments de cette modification de la structure des forces devraient inclure des aéronefs à long rayon d'action et à grande autonomie, tels que les bombardiers B-21 et les ravitailleurs en vol de la prochaine génération (NGAS), qui peuvent opérer à partir de terrains d'aviation plus éloignés ou passer plus de temps dans les airs plutôt que sur la piste, où ils constituent une cible plus facile. Le Pentagone devrait également déployer des forces telles que des missiles et certains types de plates-formes d'opérations interarmées autonomes qui peuvent opérer à partir de pistes courtes ou endommagées ou indépendamment des aérodromes, à condition qu'elles bénéficient d'un soutien logistique.

Toutefois, les forces armées américaines ne déploieront pas ce type de troupes en grand nombre avant les années 2030, de sorte que la défense passive et active des aérodromes sera nécessaire indépendamment de ces changements dans la structure des forces.

Les conclusions du rapport indiquent que l'approche actuelle du Pentagone, qui consiste à ignorer cette menace, conduit à une agression de la part de la RPC et qu'il y a un risque de perdre la guerre. Ce qu'il faut donc, c'est une campagne urgente et efficace pour rendre les opérations des aérodromes américains plus résistantes, ce qui nécessite une prise de décision judicieuse et un financement soutenu.

En attendant, l'émergence de telles infrastructures signifie non seulement une dissuasion perçue de la Chine, mais aussi un renforcement significatif de la capacité des États-Unis à mener des opérations offensives à la fois dans les zones où leurs infrastructures militaires sont déployées dans la région Asie-Pacifique et chez eux, par exemple en Amérique latine, dont la souveraineté fait déjà l'objet d'empiètements de la part de Donald Trump.

Hollywood contre Samarcande: le match Amérique-Asie vu par le mage Raymond Abellio en 1960 (La Fosse de Babel)

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Hollywood contre Samarcande: le match Amérique-Asie vu par le mage Raymond Abellio en 1960 (La Fosse de Babel)

Nicolas Bonnal

La dimension nécromancienne de la civilisation américaine apparait dans toute son horreur, à l’heure où l’oligarchie technologique US nous impose la guerre et le Reset. Dans les années soixante l’astrologue Raymond Abellio, après bien d’autres, mais mieux peut-être, dénonce cette civilisation de la matière et de l’épouvante dominée par des oligarques déjà bien fous ; dans son roman d’aventures ésotérique La Fosse de Babel Abellio écrit :

« …Qu’il ne fallait pas toucher à l’Amérique. Toujours une question de déchets. C’est en Amérique que s’accumulent tous les déchets du monde. Un pays qui crée à ce point de la puissance matérielle ne peut pas être la tête de l’humanité, mais son ventre… Il y a un peu plus de trois cents ans, lorsque l’Europe commença à déverser en Amérique le trop-plein de sa matière, on ne savait pas encore que c’était une matière morte, qui n’allait pouvoir revivre là-bas que de façon larvaire ou spectrale. Et depuis l’Amérique a grossi sans évoluer, comme les larves. Elle est le produit de la mort de l’Europe, de sa première mort. Un ancien rêve de grandeur tournant en grossesse adipeuse. Il y aura peut-être plus tard une autre Amérique, quand l’Europe aura fini de mourir, mais celle-là ne connaîtra même plus le nom de l’Europe… »

Ce pays relève déjà de la science-fiction. Un autre qui le comprend à l’époque est William Burroughs, pas très bien compris par la critique alors (allez savoir pourquoi).

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Mais Abellio ne s’arrête pas et s’en prend au communisme russe déjà déclinant :

« Dans leur marxisme dégradé et bassement industriel, les Russes sont d’accord, en profondeur, avec la philosophie productivité des Américains. C’est la lutte de Rome et de Carthage, un simple conflit d’ingénieurs…
Je hais les ingénieurs, dit-il.

« Devant les Russes et les Américains, dit-il encore, nous sommes dans la situation des premiers Chrétiens devant les factions romaines de la décadence. Ils n’avaient pas à prendre parti. On les tolérait, on les exterminait, on les tolérait à nouveau. Du point de vue de l’esprit, ces opportunités sont secondaires. »

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Abellio se trompe ensuite (une alliance russo-américaine ?) mais il sent l’Asie se pointer (c’est l’Autre côté de Kubin, le meilleur livre de SF sur ce qui nous arrive), comme René Grousset alors (Bilan de l’Histoire) :

« J’attends le moment où les Russo-Américains, enfin unis, essaieront de défendre leur civilisation de robots mécaniques contre une autre civilisation, celle des robots religieux, déferlant des plateaux mongols, des rizières chinoises ou des déserts d’Arabie, et poussant devant eux leurs esclaves fanatisés d’Afrique. Le communisme asiatique proposera au monde la civilisation de masse la plus rude, la plus perfectionnée, la plus scientifique, la plus exaltante, la plus étouffante qu’on ait jamais connue. »

L’effondrement va suivre pour nous et pour « Paris » (ou ce qu’il en reste) :

« Mais la nouvelle Rome, cette fois, sera sous les décombres de Paris, dans des caves ou des catacombes, comme l’ancienne, et persécutée comme elle. Je me sens déjà vivre dans ce Paris enseveli, réduit enfin à l’état pur. Les hommes comme moi y seront beaucoup plus à l’aise que dans celui des couturiers pédérastes et des abrutis milliardaires, fit-il d’un ton uni. Et j’imagine assez bien les Champs-Elysées troués par les bombes et envahis par des fourrés obscurs où les nouveaux hommes d’ici voisineront avec des bêtes sauvages et nobles qui leur rendront le goût de la liberté… »

On verra qui pourra survivre dans ces conditions en Occident. Pour le reste il est clair que l’Asie continentale aplatira tout.

Sur cette redoutable entité américaine mon éditeur roumain de Dostoïevski et la modernité occidentale m’envoie ces lignes de Rudolf Steiner :

« Il ne faut pas que le monde soit géographiquement américanisé, car les efforts de l’Amérique visent à tout mécaniser, à tout faire entrer dans le domaine du pur naturalisme, à effacer peu à peu de la surface de la Terre la culture de l’Europe (Rudolf Steiner, Derrière le voile des événements – Le mystère du Double, G.A. 178, Paris, 1999, pp. 88-89) ».

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Et sur la fonction terriblement sinistres des puissances atlantiques et thalassocratiques :

« L’égoïsme universel émane de la race anglo-américaine. Partant de là, l’égoïsme couvrira toute la Terre. Toutes les inventions qui recouvrent la Terre d’un réseau d’égoïsme viennent d’Angleterre et d’Amérique. A partir de là-bas donc, toute la Terre sera recouverte d’une toile d’égoïsme, de mal. Mais une petite colonie se formera à l’est comme la semence d’une vie nouvelle pour l’avenir. La culture anglo-américaine consume la culture de l’Europe […] mais la race elle-même va à sa ruine. Elle porte en elle la disposition à être la race du Mal. » (Rudolf Steiner, Eléments d’ésotérisme, Paris, 2000, p. 275)

Espérons qu’elle aille à sa ruine cette race, et sans emporter le reste du monde avec elle.

Sources:

https://lesakerfrancophone.fr/conference-de-presse-de-pou...

https://lesakerfrancophone.fr/larmaggedon-energetique-eur...

jeudi, 23 janvier 2025

Sur la question de la sécurité pan-eurasienne

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Sur la question de la sécurité pan-eurasienne

Leonid Savin

Il y a quelques jours, le ministre russe des affaires étrangères, Sergei Lavrov, a déclaré que la Russie était prête à discuter de garanties de sécurité pour un pays « aujourd'hui appelé Ukraine », mais que le contexte eurasien serait déterminant pour la conclusion d'un accord.

Le haut diplomate a clairement indiqué que « la partie occidentale du continent [de l'Eurasie] ne peut pas s'isoler de géants comme la Chine, l'Inde, la Russie, le golfe Persique et l'ensemble de l'Asie du Sud, le Bangladesh et le Pakistan. Des centaines de millions de personnes peuplent cette région. Nous devons développer le continent pour faire en sorte que les questions relatives à sa partie centrale, l'Asie centrale, le Caucase, l'Extrême-Orient, le détroit de Taïwan et la mer de Chine méridionale soient traitées par les pays de la région plutôt que par l'ancien secrétaire général de l'OTAN, Jens Stoltenberg, qui a déclaré que l'OTAN opérerait dans la région parce que la sécurité de l'alliance dépendait de la région indo-pacifique ».

Si l'on considère qu'à la fin du mois de janvier, il y aura un changement dans l'administration américaine qui, en la personne du président nouvellement élu Donald Trump, parle déjà de la nécessité de redessiner géopolitiquement la carte du monde, il est possible de tirer des conclusions sans équivoque que les négociations avec la partie américaine sur l'Ukraine et l'Eurasie dans son ensemble ne seront pas faciles.

Toutefois, les discussions sur la sécurité à l'échelle de l'Eurasie sont importantes et nécessaires. Elles correspondent non seulement à l'esprit du temps, mais reflètent également la même logique historique. Cela n'est pas seulement dû à l'idée d'une grande Eurasie et d'un espace économique unique de Dublin à Vladivostok. Dans son livre Guns, Gems, and Steel, le scientifique américain Jared Diamond explique qu'en Eurasie, l'échange d'informations, d'expériences et d'inventions techniques a été plus rapide qu'ailleurs, ce qui a conduit à une sorte d'« intégration » bien avant que le mot n'apparaisse.

Cela aurait dû contribuer au rapprochement entre les peuples à l'époque moderne, et encore plus aujourd'hui, quand on parle du triomphe du progrès et de la science. Cependant, l'ère moderne a coïncidé avec l'ère des grandes découvertes géographiques et, dans le même temps, certains peuples de l'Eurasie, dans sa péninsule occidentale, appelée Europe, sont tombés dans une terrible ignorance, qui a conduit à l'émergence d'idées de supériorité raciale, puis au nazisme et au fascisme. La fin de la Seconde Guerre mondiale était censée mettre fin aux conflits et penser à une coexistence pacifique (cette formule a été développée plus tard par la Chine et l'Inde). Mais ici, le Royaume-Uni et les États-Unis sont intervenus activement et ont commencé à participer au destin des peuples eurasiens non seulement politiquement et économiquement, mais aussi idéologiquement, en disant effectivement aux pays européens ce qu'ils devaient faire.

Aujourd'hui, en tant que satellites de Washington, l'UE est devenue l'otage des intérêts anglo-saxons et sape sa propre économie au détriment de ses propres pays et de ses propres peuples. D'autre part, la lassitude face à l'impasse dans laquelle se trouvent les peuples et une partie des élites politiques de l'UE est manifeste. Dans ce contexte, les possibilités d'émergence de partis et de mouvements plus appropriés se multiplient.

Si aux États-Unis, au moins sur le plan rhétorique, la nouvelle administration entend réimposer la doctrine Monroe (les discours sur le Canada, le Groenland, le golfe du Mexique et le canal de Panama font partie de l'espace des Amériques), leurs partenaires européens sont néanmoins condamnés à coopérer sur le continent eurasiatique.

Et la question clé est de savoir ce qu'il en sera. Soit la confrontation de type guerre froide se poursuivra, soit il y aura un dégel des relations et une architecture de sécurité commune sera créée ensemble.

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L'option de la confrontation est assez probable, au moins parce que l'administration Trump tentera d'inciter l'UE et d'autres partenaires à agir comme un seul bloc contre la Chine. La Russie n'est pas considérée par Trump et les siens comme une menace existentielle pour les États-Unis, mais la Chine, qui est le principal partenaire stratégique de la Russie, demeure le problème numéro un tant pour Biden que pour Trump, notamment en raison de la croissance rapide de la puissance de ce pays et de l'extension de son influence géopolitique.

En outre, Xi Jinping a parlé ouvertement au chef du Conseil européen de l'importance de la coopération commerciale et économique et du soutien de Pékin à l'autonomie stratégique de l'UE. Cette autonomie signifie une moindre dépendance à l'égard des États-Unis en termes politiques et stratégico-militaires.

Cependant, à côté de l'UE, l'OTAN, qui couvre un territoire plus vaste que l'UE, y compris la Turquie, continue d'exister. Les États-Unis continuent de jouer un rôle de premier plan au sein de l'Alliance.

Outre l'UE, le Royaume-Uni, qui a quitté l'UE mais continue de jouer un rôle actif dans la politique du continent, représente une certaine menace pour la sécurité pan-eurasienne. Historiquement, le Royaume-Uni a contrôlé de vastes territoires en Eurasie, de l'Égypte au sous-continent indien et à la Chine, et possède toujours un territoire dans le détroit de Gibraltar.

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Le Royaume-Uni tente d'exploiter les contradictions actuelles et de renforcer sa position dans divers domaines. Par exemple, le British Council on Geostrategy note que le pays est confronté à des vulnérabilités critiques dans ses chaînes d'approvisionnement logistiques et ses capacités de transport maritime. L'approvisionnement des forces armées est menacé par des capacités de transport maritime limitées et vieillissantes, contrôlées par le gouvernement, par une flotte marchande en perte de vitesse et par une dépendance excessive à l'égard des affrètements spéciaux.

La nostalgie du bon vieux temps est clairement visible ici, lorsque la Grande-Bretagne s'autoproclamait maîtresse des mers. Aujourd'hui, elle souhaite faire revivre ce statut dans de nouvelles circonstances.

Le site web du Conseil affirme le rôle central de la Grande-Bretagne dans la zone de responsabilité euro-atlantique et dans l'OTAN. Il convient d'ajouter que cette organisation a un projet appelé China Watch, qui surveille un large éventail d'activités chinoises qui menaceraient les intérêts de Londres. En outre, il existe une initiative trilatérale (Grande-Bretagne, Pologne et Ukraine), dont l'un des objectifs déclarés est « une campagne de lutte économique et politique contre la Russie, afin de briser la machine militaire russe et d'affaiblir l'influence du Kremlin dans les pays dits du “juste milieu”, notamment en Afrique, en Amérique du Sud et dans d'autres endroits ».

Ainsi, la sorcière britannique continuera à jeter ses sorts à la fois sur la Russie et sur la Chine. Par conséquent, dans les affaires de l'Eurasie, une attention particulière doit être accordée aux initiatives britanniques qui, ouvertement ou secrètement, viseront toujours à saper l'unité de l'Eurasie.

Quant à la consolidation des efforts des principaux centres, elle ne concerne pas seulement l'interaction entre la Russie et la Chine. La signature de l'accord de partenariat global dans tous les domaines entre la Russie et l'Iran renforce l'axe eurasien. La Russie et la Corée du Nord ont déjà conclu un accord similaire, bien que les Coréens ne jouent pas un rôle aussi important dans la sécurité de l'ensemble du continent et se concentrent davantage sur les problèmes de la péninsule coréenne et de l'impérialisme américain.

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L'Inde est un autre pôle du monde multipolaire émergent, également intéressé par le renforcement de la sécurité régionale. Outre la question non résolue du Cachemire (à laquelle s'ajoutent les intérêts du voisin nucléaire du Pakistan) et les questions litigieuses avec la Chine, New Delhi coopère dans plusieurs domaines avec les pays de l'UE, et les sanctions à l'encontre de la Russie entravent clairement cette interaction. D'autre part, l'Inde est impliquée dans le développement du corridor Nord-Sud à travers l'Iran et la Russie et s'intéresse également au développement de l'Arctique. Dans le contexte du développement d'un monde multipolaire, le gouvernement Modi agit de manière tout à fait rationnelle, étant également membre des BRICS et de l'OCS.

Reste le bloc arabo-musulman d'Eurasie, où la région souffre clairement de l'attention excessive des États-Unis - l'occupation de l'Irak et de la Syrie, le soutien d'Israël au génocide des Palestiniens, la pression sur le Liban et le maintien de bases militaires américaines au Qatar, à Bahreïn, en Jordanie et en Arabie saoudite. Mais si l'on tient compte des cas concrets concernant la Palestine et l'occupation israélienne, il est évident que le monde arabo-musulman est aujourd'hui clairement divisé et enclin à la pensée tribaliste-nationaliste, ce qui réduit considérablement les possibilités d'une large coopération pour résoudre divers problèmes avec les centres eurasiens. Une autre raison est l'attitude attentiste de certaines élites de la région, qui espèrent un nouveau déclin de l'hégémonie américaine, lorsqu'il sera possible de ne pas avoir peur d'agir plus ouvertement.

Toutefois, d'une manière générale, la consolidation des efforts de la Russie, de la Chine, de l'Iran et de l'Inde indique déjà l'existence d'un bloc non seulement en Eurasie, mais aussi dans la majorité mondiale, avec une position commune sur des questions d'une importance fondamentale.

 

mardi, 21 janvier 2025

Indonésie: le Géant oublié

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Indonésie: le Géant oublié

Andrea Marcigliano

Source: https://electomagazine.it/il-gigante-dimenticato/

L’Indonésie est un géant. Un géant dont nous, Européens, et surtout nous, Italiens, prétendons ignorer l’existence.

Une fiction rassurante entoure l'Indonésie sous nos latitudes. Parce qu’au mieux, nous considérons ces terres comme pétries de pur folklore. Une sorte de pays d'opérettes, une destination de vacances privilégiée pour les riches. Ou pour ceux qui prétendent l’être.

Une myopie due à l’ignorance fondamentale avec laquelle nous regardons le monde. Avec une perspective qui reste celle d’il y a quatre-vingts ans : l’Amérique, ou plutôt les États-Unis, et la petite Europe occidentale. Voilà le monde… le reste, simplement, ne compte pas. Ou pire, n’existe même pas en nos têtes.

Et pourtant, l’Indonésie est une réalité bien différente. Une réalité avec laquelle nous devrons, bientôt, commencer à composer. Et ce ne seront pas des compromis faciles, ni, surtout, à notre avantage.

Car ce colosse insulaire, doté d’une agriculture extrêmement riche et d’un potentiel minier – pétrole, gaz, or… – tout aussi extraordinaire, a officiellement demandé à intégrer les BRICS. Autrement dit, la coalition économique qui conquiert progressivement la primauté mondiale. Provoquant bien des maux de tête pour les finances américaines. Sans parler de notre petite Europe, de plus en plus réduite à l’insignifiance économique. Et pas seulement économique.

La décision indonésienne est sans aucun doute un événement important. Fondamental, à bien des égards.

Jakarta a en effet toujours été étroitement liée aux États-Unis. Un lien non seulement économique, qui a profondément marqué son histoire récente et tourmentée.

Demander formellement à rejoindre les BRICS – qui, par ailleurs, courtisaient l’Indonésie depuis longtemps – représente donc un changement de politique profond et mûrement réfléchi.

Chercher de nouveaux marchés, augmenter de 20% les exportations vers la Chine et de 8% vers l’Inde, et s’ouvrir à la Russie ainsi qu’aux autres pays associés aux BRICS.

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Mais bien au-delà, ce choix de Jakarta signifie une prise de distance claire vis-à-vis des États-Unis. En effet, l’Indonésie se rebelle ouvertement contre l’hégémonie du dollar, qui a longtemps conditionné et limité sa croissance.

Au sein des BRICS, elle peut trouver des alternatives viables et moins coûteuses, tant sur le plan strictement économique que, peut-être encore plus, sur le plan politique.

Ainsi, la décision indonésienne marque un tournant, probablement radical, dans les équilibres économiques et géopolitiques mondiaux.

Cependant, en Italie, cet événement est quasiment ignoré par les grands médias. Comme s’il ne nous concernait pas ou ne nous impliquait en aucune manière.

Comme si l’Indonésie n’était pas un géant économique, mais un pays exotique, joyeux et festif, un pays pour touristes repus et satisfaits. Une affaire d’opérette, en somme.

Alors que nous devrions prendre conscience de la réalité. Et comprendre que c’est nous, désormais, qui sommes le… pays des opérettes.

samedi, 18 janvier 2025

Ce que veut Pékin

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Ce que veut Pékin

Andrea Marcigliano

Source: https://electomagazine.it/cio-che-vuole-pechino/

Pékin est, à tous égards, le "convive de pierre" de la scène internationale. Celui, parmi les grands acteurs, dont on parle le moins ou dont on cherche même à ne pas parler. Pourtant, sa présence est constante dans chaque scénario, chaque tension et conflit, qu'il soit déjà en cours ou encore latent.

Cependant, la capitale chinoise demeure, en effet, de pierre. Silencieuse. Dans l’ombre. Peu, très peu ostentatoire, volontairement discrète et prête à se dévoiler uniquement lorsque cela est strictement nécessaire.

Les déclarations de ses représentants, de Xi Jinping en particulier, relèvent d’un chef-d'œuvre de diplomatie orientale. Courtoises, toujours, voire extrêmement polies. Et mesurées. Si bien qu’elles laissent seulement entrevoir, difficilement, la pensée de l'oligarchie qui dirige le géant asiatique.

Et pourtant, la Chine est loin d’être un géant endormi. Elle agit, à plusieurs niveaux, avec une grande détermination et une intelligence remarquable.

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D’un côté, l’objectif principal des maîtres de la Cité interdite est la croissance intérieure, poursuivie avec une extrême cohérence, dans un pays où, depuis des siècles, la majorité de la population vivait d’une économie de simple subsistance. Une économie pauvre et essentiellement agricole.

Aujourd’hui, le développement industriel de la Chine est impressionnant. Le géant asiatique est devenu le plus grand producteur de biens de toutes sortes. Compétitif, souvent victorieux face à ses concurrents, en particulier les États-Unis, qu’il parvient désormais à égaler, voire à surpasser, en termes de qualité de production dans de nombreux secteurs clés.

Cette croissance industrielle impressionnante réduit les zones de pauvreté dans le pays, bien que cela ne se fasse pas sans chocs ni contraintes. Les conditions de travail ne sont certes pas comparables à celles des travailleurs occidentaux. Cependant, elles doivent être comprises dans le contexte historique du géant asiatique, marquant une amélioration constante malgré de nombreuses contradictions, parfois violentes.

C’est toutefois sur le plan de la politique étrangère que la Chine doit, aujourd’hui, être évaluée avec une grande attention.

Une politique extrêmement expansive, bien qu’elle s’inscrive sous la devise de Xi Jinping : expansion sans conflits.

Il est évident que la direction de Pékin évite à tout prix de s’embourber dans des guerres ou des conflits de quelque nature que ce soit. Elle privilégie un outil de pénétration économique, apparemment pacifique. Et ce, non seulement dans la région voisine, appelée Extrême-Orient, mais dans le monde entier.

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La présence chinoise est, en effet, de plus en plus massive en Afrique subsaharienne, où elle se fait sentir notamment dans l’organisation industrielle et le contrôle d’une production à faible coût, mais de qualité croissante, tout en créant de l’emploi pour les populations locales.

Pékin n’a pas d’intérêt pour une expansion territoriale. La mentalité historique chinoise reste, somme toute, liée à l’image ancestrale de l’Empire du Milieu, centre autour duquel gravite le reste du monde.

Son objectif demeure essentiellement d’étendre son influence économique, en liant ainsi à elle divers peuples, les soumettant de fait de manière douce, sans recourir, ou en recourant le moins possible, à la force.

Cependant, cela n’implique en aucun cas une quelconque limitation de l’usage de la force. Pékin est toujours prête à y recourir si ses intérêts et ses objectifs sont menacés.

La menace provient aujourd’hui de la concurrence des États-Unis.

À Washington, la Chine est désormais perçue comme le véritable, et d’une certaine manière l’unique, concurrent géopolitique.

Et c’est ici qu’intervient une différence profonde.

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Américains et Chinois sont désormais convaincus que le conflit direct, le choc frontal pour la suprématie, n’est qu’une question de temps.

Mais la manière de concevoir et de mesurer le temps est profondément différente.

Les Américains sont pressés et agissent en conséquence avec une extrême rapidité, parfois, et même trop souvent, avec une précipitation excessive. C’est leur façon d’être. Après tout, leur histoire a commencé il y a un peu plus de deux siècles.

Pour les Chinois, c’est tout autre chose. Ce qui peut nous apparaître comme de la lenteur découle d’un passé plurimillénaire. Le premier empire, celui de la dynastie Shang, remonterait même au Néolithique.

De plus, l’élite de Pékin est convaincue que le temps joue en sa faveur, une conviction fondée sur des faits précis.

Ils ne sont pas pressés, mais cela ne signifie pas qu’ils ne se préparent pas à un affrontement frontal avec l’Amérique.

Bien au contraire…