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samedi, 22 juillet 2023

Oswald Spengler et la stérilité du civilisé

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Oswald Spengler et la stérilité du civilisé

Nicolas Bonnal

On va parler de Spengler mais je voudrais faire quelques rappels préalables et indispensables pour expliquer pourquoi les Européens sont certainement morts comme êtres depuis longtemps.

Dans mon recueil sur les penseurs allemands j’ai souligné cette haine et cette peur du monde moderne et de la catastrophe qu’il amène ; on les retrouve chez tous les grands penseurs allemands ou autrichiens, y compris les juifs.

Dans son petit texte sur la guerre, voici ce Freud écrit sur la culture :

« Et voici ce que j’ajoute : depuis des temps immémoriaux, l’humanité subit le phénomène du développement de la culture (d’aucuns préfèrent, je le sais, user ici du terme de civilisation). C’est à ce phénomène que nous devons le meilleur de ce dont nous sommes faits et une bonne part de ce dont nous souffrons. Ses causes et ses origines sont obscures, son aboutissement est incertain, et quelques-uns de ses caractères sont aisément discernables. »

Voici les conséquences de ce développement culturel si nocif à certains égards, et auxquelles nos élites actuelles se consacrent grandement :

 « Peut-être conduit-il à l’extinction du genre humain, car il nuit par plus d’un côté à la fonction sexuelle, et actuellement déjà les races incultes et les couches arriérées de la population s’accroissent dans de plus fortes proportions que les catégories raffinées. »

Goethe lui rêvait déjà du paysan, pas encore trop pollué par la civilisation :

« Notre population des campagnes, en effet, répondit Goethe, s'est toujours conservée vigoureuse, et il faut espérer que pendant longtemps encore elle sera en état non seulement de nous fournir des cavaliers, mais aussi de nous préserver d'une décadence absolue ; elle est comme un dépôt où viennent sans cesse se refaire et se retremper les forces alanguies de l'humanité. Mais allez dans nos grandes villes, et vous aurez une autre impression… »

Et il insiste encore, au début du tome deuxième de ses entretiens avec Eckermann (voyez mes textes), sur l’affaiblissement des hommes modernes :

« Causez avec un nouveau Diable boiteux, ou liez-vous avec un médecin ayant une clientèle considérable - il vous racontera tout bas des histoires qui vous feront tressaillir en vous montrant de quelles misères, de quelles infirmités souffrent la nature humaine et la société… »

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Venons-en au déclin de l’occident de Spengler. Dans le tome II et le chapitre sur les villes notre auteur écrit des lignes admirables sur la fin du tact cosmique. On écoute le maître :

« Ce qui rend le citadin de la ville mondiale incapable de vivre ailleurs que sur ce terrain artificiel, c'est la régression du tact cosmique de son être, tandis que les tensions de son être éveillé deviennent chaque jour plus dangereuses. N'oublions pas que le côté animal du microcosme, l'être éveillé, s'ajoute à l'être végétal, mais non inversement. Tact et tension, sang et esprit, destin et causalité sont entre eux comme la campagne fleurie et la ville pétrifiée, comme l'être et ce qui dépend de lui. La tension sans le tact cosmique qui l'anime est le passage au néant. »

Comme Mirbeau, Spengler se rend compte que dans les grandes villes « toutes les têtes se ressemblent » :

« L'intelligence est le substitut de l'expérience inconsciente de la vie, l'exercice magistral d'une pensée squelettique et décharnée. Les visages intelligents se ressemblent chez tous les peuples. C'est la race elle-même qui ·se retire d'eux. Moins l'être sent le nécessaire et l'évident, plus il s'habitue à vouloir tout« éclairer», plus l'être éveillé calme sa phobie par la causalité. D'où l'identification par l'homme du savoir et de la démonstration; d'où la substitution aussi du mythe causal ou théorie scientifique au mythe religieux; d'où enfin la notion d'argent abstrait, considéré comme pure causalité de la vie économique, par opposition au commerce d'échanges ruraux qui est tact et non système de tensions. »

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Et comme je citais Mirbeau :

« …j’ai remarqué, à quelques exceptions près, que les villes, surtout les villes de travail et de richesses, qui, comme Anvers, sont des déversoirs de toutes les humanités, ont vite fait d’unifier, en un seul type, le caractère des visages… Il semble maintenant que, dans les grandes agglomérations, tous les riches se ressemblent, et aussi tous les pauvres. »

C’est dans La 628-E8, un livre prodigieux dont l’héroïne est une… automobile.

Maigre divertissement urbain (Spengler de nouveau) :

« La seule forme de récréation, spécifique à la ville mondiale, que connaisse la tension intellectuelle est la détente, la « distraction ». »

Et tout amène logiquement à la stérilité qui frappe toutes les races et tous les peuples du monde en ce vingt-et-unième épris de grands remplacements et d’inintelligence artificielle. Spengler :

« Et de ce déracinement croissant de l'être, de cette tension croissante de l'être éveillé il résulte, comme conséquence suprême, un phénomène préparé de longue date, sourdement, qui se manifeste soudain à la claire lumière de l'histoire pour mettre fin à tout ce spectacle : la stérilité du civilisé. »

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Ce n’est pas la culture de mort du pape polonais, c’est « le tournant métaphysique vers la mort » qu’incrimine plus justement Spengler (cela explique pourquoi les renaissances chrétiennes envisagées depuis deux siècles ont toutes échoué) :

« Ce phénomène est impossible à comprendre par la causalité physiologique, comme l'a tenté, par exemple, journellement la science moderne. Car il implique absolument un tournant métaphysique vers la mort. Certes oui comme individu, mais comme type, comme collectivité, le dernier homme des villes mondiales ne veut plus vivre : la phobie de la mort est éteinte dans cet organisme collectif. La crainte profonde et obscure qui s'empare du paysan, l'idée de la mort de sa famille et de son nom, ont perdu leur sens. Dans la continuité du sang, proche parent du monde intérieur visible; on ne sent plus un devoir du sang, la condition dernière de l'être, une fatalité. »

Spengler sera rejoint par Freud sur ce point précis :

« Les enfants manquent non seulement parce que leur naissance devient impossible, mais parce que l'intelligence extrêmement avancée ne trouve plus de raisons pour sa propre existence. »

Problème auquel furent déjà exposés les grecs et les romains (voyez mon recueil sur leur décadence) et dont parla abondamment Ibn Khaldun. On voit bien du reste cette impossibilité – en Russie actuelle comme ailleurs – de repeupler. Les gens ne veulent/peuvent plus. Le dépeuplement venu de la civilisation nihiliste occidentale n’est pas ce besoin dont a parlé Hitler à Rauschning : c’est devenu un destin.

Sources :

https://www.dedefensa.org/article/goethe-et-les-entropies...

https://www.dedefensa.org/article/sigmund-freud-politique...

https://ia802903.us.archive.org/14/items/oswaldspenglerle...

https://lesakerfrancophone.fr/ibn-khaldun-et-notre-modern...

https://reseauinternational.net/pourquoi-ibn-khaldun-pref...

http://www.dedefensa.org/article/ibn-khaldun-et-le-modele...

https://www.amazon.fr/livre-noir-d%C3%A9cadence-romaine/d...

https://www.amazon.fr/GOETHE-GRANDS-ESPRITS-ALLEMANDS-MOD...

http://euro-synergies.hautetfort.com/archive/2021/03/12/g...

http://euro-synergies.hautetfort.com/archive/2018/09/28/g...

 

vendredi, 21 juillet 2023

Spengler, Faust et Napoléon

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Spengler, Faust et Napoléon

Constantin von Hoffmeister

Source: https://www.eurosiberia.net/p/spengler-faust-and-napoleon?utm_source=post-email-title&publication_id=1305515&post_id=135284357&isFreemail=true&utm_medium=email

"Napoléon avait, dans ses moments les plus graves, un sens aigu de la logique profonde du devenir du monde, et dans ces moments-là, il pouvait deviner dans quelle mesure il était, et dans quelle mesure il avait, un destin".

- Oswald Spengler, Le déclin de l'Occident, vol. I

Au crépuscule des civilisations, tel un voyageur fatigué contemplant l'éclat déclinant d'un soleil couchant, nous discernons la silhouette d'un personnage solitaire se profilant sur la pâleur du passé: Napoléon Bonaparte. Oswald Spengler, philosophe allemand de l'histoire, a postulé l'existence de tels hommes, hérauts d'une époque, qui incarnent l'esprit d'une culture à son apogée, mais qui préfigurent aussi son déclin imminent. Il a dépeint Napoléon comme l'incarnation de l'esprit faustien de l'Occident ou ce que l'on pourrait appeler à juste titre un "homme-destin".

Spengler voyait en Napoléon un homme providentiel, pas seulement un homme d'ambition ou de pouvoir. À ses yeux, le soldat corse était l'expression de la grandeur et de la fatalité de son époque - une âme culturelle incarnée. Napoléon était le rêve fiévreux d'une époque où le désir brûlant de l'infini dansait avec la mélancolie de l'inévitable, tout comme une flamme danse avec l'ombre qu'elle projette.

Dans son ouvrage phare, Le déclin de l'Occident, Spengler a décrit Napoléon comme une force historique, un acteur prédestiné sur la scène de la civilisation occidentale. Il n'est pas considéré comme un créateur, mais comme l'exécutant d'une volonté supérieure, un instrument du destin. Il s'agissait toutefois d'un destin qui ne relevait pas d'une décision divine, mais des rythmes inéluctables de la culture et de la civilisation, aussi fiables que la descente du crépuscule.

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Le destin que Spengler attribue à Napoléon s'apparente à l'esprit du temps, ce qu'il appelle l'"esprit faustien". Nommé d'après le personnage légendaire qui vendit son âme pour obtenir un savoir illimité et des plaisirs mondains, l'esprit faustien dénote un effort incessant, une aspiration à l'inaccessible. Napoléon, avec son insatiable désir d'expansion, sa quête incessante du pouvoir et son affirmation de la suprématie de l'individu sur la tradition et les normes établies, était la quintessence de cet esprit.

Cependant, comme dans tous les grands drames, le récit de Spengler ne s'arrête pas au zénith. L'homme-destin, l'acteur héroïque, est en fin de compte une figure tragique, prise dans le cycle de croissance et de décadence qui définit toute culture. Ainsi, l'histoire de Napoléon n'est pas seulement le récit d'une montée en puissance, mais aussi d'une chute dans l'oubli. La fin tragique à Sainte-Hélène est plus que la chute d'un homme, c'est le début de la fin de la culture qu'il représentait.

De plus, Spengler voit en Napoléon la personnification de l'esprit technologique et mécaniste de l'époque. La façon dont Napoléon a systématisé la guerre, dont il a utilisé les progrès de son époque, non seulement en matière d'armement, mais aussi d'administration et de communication, pour exercer son contrôle et étendre son empire, est le pacte faustien de l'homme avec le démon de la technologie. Mais comme toujours, ce pacte a un prix. La mécanisation qui a permis l'ascension de Napoléon devait, selon la prophétie de Spengler, conduire la culture à une ère de matérialisme sans âme.

En fin de compte, Napoléon, tel qu'il est dépeint par Spengler, est la quintessence de la culture qu'il habite. Il était l'écho de sa grandeur et le signe avant-coureur de son déclin. Sa vie est un monument à l'ambition de l'esprit faustien et à la tragédie inévitable qu'elle entraîne. La grandeur était éphémère, la décadence terminale, et dans ce jeu d'ombres et de lumières, Spengler a présenté un portrait de Napoléon aussi obsédant et beau que sinistrement prophétique. À travers l'interprétation cyclique de l'histoire par Spengler, Napoléon n'apparaît pas seulement comme un individu mais comme un symbole, une incarnation de son époque - à la fois son éclat éblouissant et son crépuscule funèbre. Il était un acteur jouant un scénario écrit par les forces du destin, animé par les rythmes d'une culture à la fin de l'automne, annonçant l'approche d'un hiver long et froid.

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jeudi, 06 juillet 2023

Spengler, Marx et Lénine : Capitalisme, communisme et racisme

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Spengler, Marx et Lénine: Capitalisme, communisme et racisme

Constantin von Hoffmeister

Source: https://www.eurosiberia.net/p/spengler-marx-and-lenin-capitalism?utm_source=post-email-title&publication_id=1305515&post_id=132756558&isFreemail=true&utm_medium=email

L'aigle bicéphale du Saint-Empire romain germanique ou de l'Empire russe comme symbole de l'hypertrophie impériale : les collisions entre les dirigeants et les dirigés ne peuvent disparaître que lorsque les intérêts de profit sont réduits et que les crises internes d'accumulation du travail et du capital sont résolues, ce qui, dans des conditions de type impérialiste, ne peut jamais être que temporaire. En fait, il n'y aura pas de fin tant que les entités impérialistes et leurs structures capitalistes sous-jacentes n'auront pas été détruites. Cependant, les écrits d'Oswald Spengler ne doivent pas seulement être lus comme un examen du socialisme, mais aussi comme un bilan du capitalisme de Manchester. La raison en est que Spengler considère ce dernier comme une variante du marxisme. Tous deux sont anti-étatiques et matérialistes de part en part. Spengler justifie ce point de vue en soulignant que le marxisme, comme le "manchesterisme", considère le travail comme une "marchandise" et non comme une profession, un service ou un but dans la vie. Pour le prouver, Spengler utilise l'équation du travail et de la marchandise avec laquelle Karl Marx analyse le système capitaliste à travers la théorie de la plus-value. Dans le socialisme prussien, le travail est un devoir - dans le marxisme, c'est une marchandise. Ce qui peut être vendu ne doit pas être conservé. Un devoir est une obligation interne et n'est donc pas disponible pour le troc - c'est un ancrage dans la société, et non un choix.

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Spengler a combattu la République de Weimar et voulait avant tout éviter que sa crise ne débouche sur une révolution. Il s'est donc efforcé de dénoncer les communistes, qui voulaient mettre l'expérience du bolchevisme à l'ordre du jour en Allemagne, comme n'étant pas dignes de confiance. Dans son livre L'homme et la technique, publié en 1931, Spengler affirme que, contrairement aux discours internationalistes des partis marxistes, les peuples opprimés d'Europe ont en réalité profité de la pratique de l'exploitation dans d'autres parties du monde. A y regarder de plus près, les classes inférieures avaient elles aussi un "niveau de vie luxueux" par rapport aux peuples non-européens, grâce au "salaire élevé de l'ouvrier blanc", qui "reposait exclusivement sur le monopole que les chefs d'industrie avaient érigé autour de lui", c'est-à-dire sur le partage des profits supplémentaires générés dans les colonies.

Certes, ce sont les catastrophes de l'époque de la guerre mondiale, les crises de l'impérialisme européen et les convulsions d'un capitalisme qui s'affirme à l'échelle mondiale qui ont fourni aux mouvements de lutte communistes les armes, les arguments et la force morale. Mais ce sont les conditions extérieures qui ont amené le communisme au pouvoir, tout comme elles l'ont fait pour le fascisme italien et, plus tard, pour le national-socialisme allemand. Ces deux mouvements désormais classés "à droite" ont été précédés par l'exemple soviétique de la mobilisation d'innombrables esprits et de mains qui voulaient créer quelque chose de nouveau et de bon au sens propre, et pas seulement pour eux-mêmes et leur groupe politique ou leur classe sociale, ou même pour leur "race", mais idéalement pour toute l'humanité.

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Vladimir Lénine avait besoin d'un ennemi politique concret et l'a trouvé dans le "capitaliste". Il plaide pour la destruction sociale et physique du capitaliste, dans l'esprit des théories racistes. Pour cet "excrément de l'humanité, ces éléments désespérément pourris et dépravés, cette peste, ce fléau, ce furoncle", il ne devait y avoir aucune pitié, disait Lénine. Dans les quelques écrits où Marx a traité du racisme, il a déjà développé trois éléments fondamentaux : premièrement, le capitalisme favorise la concurrence entre les travailleurs ; deuxièmement, la classe dirigeante utilise délibérément le racisme pour maintenir les travailleurs à l'écart les uns des autres et les rendre ainsi plus contrôlables ; et troisièmement, l'oppression d'un groupe de travailleurs a des effets néfastes sur tous les travailleurs parce qu'elle les affaiblit dans les luttes de classe.

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mardi, 04 juillet 2023

Le déclin shivaïque de l'Occident selon Poe

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Le déclin shivaïque de l'Occident selon Poe

Constantin von Hoffmeister

Source: https://www.eurosiberia.net/p/the-poesque-shiva-decline-of-the?utm_source=post-email-title&publication_id=1305515&post_id=126626115&isFreemail=true&utm_medium=email

Les tambours battants du temps ne cessent de sonner pour l'Occident, ce géant autrefois vigoureux aujourd'hui drapé dans le manteau du déclin. Le déclin de l'Occident est une oeuvre majeure, une élégie en prose composée par le sage et éclairé Oswald Spengler, qui lance un appel depuis les profondeurs du passé, et mon objectif est de mettre en exergue son spectre obsédant. "Tout ce que nous voyons ou semblons voir n'est qu'un rêve à l'intérieur d'un rêve", a écrit Edgar Allan Poe, illustrant la grandeur éphémère de l'Occident dans le rêve sans fin du temps.

Dans les salles autrefois resplendissantes de la culture occidentale, le silence règne désormais. Les échos du passé - les grandes philosophies, l'art, les gloires de Rome et d'Athènes - ne sont plus que des murmures noyés dans la course bruyante du temps et l'inévitable chute des civilisations. Comme l'observe avec sagacité Spengler, il existe dans le monde un rythme inéluctable, semblable au flux et au reflux des marées de l'océan. Toutes les cultures, comme si elles suivaient un chef d'orchestre céleste omnipotent, s'élèvent, atteignent des sommets, puis s'écrasent sur les rivages de l'obscurité. C'est ainsi que se dessine la trajectoire de l'Occident. "Au plus profond de ces ténèbres, je me suis longtemps tenu là, m'interrogeant, craignant, doutant, rêvant de rêves qu'aucun mortel n'avait jamais osé rêver auparavant", médite Poe dans Le Corbeau, ce qui est peut-être une réflexion appropriée sur la fin de la longue journée de la culture, suggérée par Spengler.

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Une telle culture naît dans le ventre d'un paysage unique, d'un milieu singulier. Son enfance est une période de mysticisme et de proximité avec le sol. La progression du temps témoigne de la maturation de cet être en une culture. Les facultés intellectuelles se développent en même temps que le corps. La religion se transforme en philosophie ; l'art devient le miroir de l'âme ; l'âge des héros est supplanté par celui de la raison. Comme l'éclosion d'une rose, cela marque l'apogée de la croissance culturelle.

Cependant, tout comme chaque rose est destinée à se faner, il en va de même pour chaque culture. Les ravages du temps sont une réalité au même titre que la conception métaphysique de l'existence elle-même. C'est ainsi qu'apparaît la notion de civilisation, stade qui représente la sénescence, le grisonnement d'une culture. C'est là que la rose commence à perdre sa floraison. L'esprit et l'âme, qui ont fleuri si magnifiquement, commencent à se flétrir. L'esprit de l'Occident, autrefois personnifié par la vivacité de son art, la profondeur de sa pensée et la puissance de ses héros, commence à s'effacer dans les annales de l'histoire. "Les frontières qui séparent la vie de la mort sont au mieux ombragées et vagues. Qui dira où finit l'une et où commence l'autre?". Les mots de Poe dans son poème en prose Eureka résument le soir des cultures tel qu'observé par Spengler.

À travers le voile mystérieux d'Eureka, Poe déploie sa propre vision cosmologique, un mélange alchimique de science, de philosophie et de métaphysique. Dans sa contemplation, il s'interroge sur le flux rigide du cosmos, une danse sans fin de la genèse et de l'oubli, évoquant des images qui rappellent la progression cyclique de la vie et de la mort, de la floraison et de la décadence. Cette rumination, interprétée à la lumière ambiante des bougies de la métaphore, s'aligne de manière obsédante sur le concept de réincarnation - la naissance, la mort et la renaissance de l'âme dans la valse sans fin de l'existence.

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Au fur et à mesure que la culture vieillit, la ville prend le pas sur la campagne. Les âmes, autrefois libres et ouvertes comme les plaines vallonnées, sont désormais confinées dans des murs de pierre et d'acier. Le matérialisme prend le pas sur le spirituel et le dynamisme de la société s'étiole. La richesse et le pouvoir deviennent les priorités, supplantant les quêtes intellectuelles et spirituelles. C'est là que se joue la tragédie de l'Occident, dans un tableau aussi sinistre que celui peint par la main macabre de la mort elle-même. "Je suis devenu fou, avec de longs intervalles d'horrible santé mentale", écrit Poe, symbolisant la désillusion culturelle qui marque le début du déclin.

Pourtant, dans cette triste narration, le désespoir n'est pas absolu. Car, comme l'a écrit Poe lui-même, "il n'y a pas de beauté exquise sans une certaine étrangeté dans les proportions". Le déclin de l'Occident, s'il est un récit d'appréhension et de désespoir, est aussi un récit d'inévitabilité et de transition, une danse cyclique de Shiva sur la mélodie de l'existence elle-même. Car des cendres de l'ancien surgira le nouveau, et le chant de la vie continuera à jouer, sans fin et éternel. "Le plaisir qui est à la fois le plus pur, le plus élevé et le plus intense provient, je le maintiens, de la contemplation du beau", nous rappelle Poe, qui nous exhorte à trouver la beauté même dans les édifices en ruine et de panoramas autrefois majestueux.

Dans le ballet spectral de Shiva, le célèbre "Seigneur de la danse", se déploie un panorama fantasmagorique de l'ondulation incessante de l'univers. Ce spectacle est un tableau gothique, illustrant la création par un tambour symbolique, la protection par une pose sereine et la destruction par une flamme brûlante. Simultanément, un pied en l'air signale la libération, tandis qu'un nain écrasé illustre la folie des mortels. Encapsulée dans un halo de lumière ardente, cette danse palpitante reflète la cadence incessante de l'existence. Ainsi, la danse de Shiva, empreinte d'une beauté mélancolique, est une symphonie intemporelle de naissance, de vie, de mort et de renaissance, un reflet vivant du rythme du cosmos.

La rose de l'Occident, autrefois resplendissante, n'est plus que l'ombre d'elle-même. Ses pétales, autrefois étincelants et grouillants de vie microscopique, sont aujourd'hui ratatinés et sans vie, témoignant du caractère éphémère de toute chose. Pourtant, cela n'inspire pas le désespoir, mais plutôt une acceptation rationnelle. Le rythme qui conduit le jeu des civilisations est hors de portée des mains des mortels. L'Occident n'est qu'un acteur dans ce grand opéra qu'est l'histoire, et il doit tirer sa révérence lorsque son rôle est terminé. "Même dans la tombe, tout n'est pas perdu", a dit un jour Poe, indiquant que même dans sa chute, l'esprit de l'Occident persiste.

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Dans le grand spectacle de l'histoire, Spengler affirme que l'Occident est maintenant à son crépuscule. Lorsque le soleil se couche, on ne peut s'empêcher de pleurer le passage du jour. Pourtant, dans ce deuil, il y a aussi une résignation approbatrice, un respect pour la grandeur passée et la paix à venir. "Ceux qui rêvent le jour sont conscients de beaucoup de choses qui échappent à ceux qui ne rêvent que la nuit", écrivait Poe, réfléchissant aux braises déclinantes de la civilisation occidentale.

En fin de compte, l'histoire racontée n'est pas celle de la chute de l'Occident, mais celle de sa trajectoire à travers le temps - un voyage partagé par toutes les civilisations qui ont honoré cette Terre. Dans les ombres menaçantes de la déconstruction, il y a une beauté mélancolique, un sombre sacrifice pour Kali au rythme du battement de tambour persistant du temps. L'orchestre de l'histoire est incessant dans son rythme, et nous devons accueillir cette vérité. "C'est ainsi que, jeune et plongé dans la folie, je suis tombé amoureux de la mélancolie", a écrit Poe, une réflexion pertinente sur la mélancolie poétique qu'inspire le traité de Spengler.

Dans le grand théâtre cosmique, la danse de Kali apparaît comme une extension du tourbillon rythmique de Shiva. Souvent revêtue du manteau de la destruction, le rôle de Kali est néanmoins plus nuancé. Sa danse, bien que féroce, ne fait pas simplement écho à la danse de dissolution de Shiva. Au contraire, elle incarne également les aspects génératifs et nourriciers du divin. En tant que Shakti, l'énergie primaire du temps et de la transformation, la danse de Kali peut être considérée comme le maestro qui dirige les métamorphoses de l'univers à travers ses processus cycliques. Par essence, sa danse tempétueuse réalise le potentiel né de la danse de Shiva, en le guidant vers une maturation fructueuse.

La vie, enseigne Spengler, est un cycle - une chanson éternelle, et dans chaque note de cette mélodie, une culture naît, s'épanouit et puis se décompose. Pourtant, c'est cette désintégration même qui alimente la naissance de nouvelles vies, de nouvelles cultures et de nouvelles civilisations. Tout comme le crépuscule ouvre la voie à l'arrivée d'une nouvelle aube, la mort d'une civilisation annonce la naissance d'une autre. Le cycle de la naissance, de l'épanouissement, du déclin et de la mort fait autant partie des civilisations que des organismes vivants. "Il n'est pas du tout irrationnel de penser que, dans une existence future, nous considérerons ce que nous pensons être notre existence actuelle comme un rêve", a un jour songé Poe, sous-entendant la nature cyclique de l'existence et sa relation avec les civilisations.

L'âme de la population, autrefois pleine d'entrain et d'un lien primitif avec la nature et le divin, évolue et se transforme dans la monotonie mécanique de l'existence urbaine. Le matérialisme, la recherche du pouvoir, de la richesse et de la domination deviennent le centre d'intérêt, éclipsant les quêtes spirituelles et intellectuelles d'une culture à son apogée. Les villes s'élèvent alors que la nature recule, témoignage concret de la conquête arrogante de la terre par l'homme. Pourtant, sous ce triomphe se cache la tragédie de la perte - une perte de connexion, une perte d'esprit, une perte d'âme. "Nous avons aimé d'un amour qui était plus que de l'amour", le vers obsédant de Poe semble résonner avec l'amour perdu pour la nature et la spiritualité.

Dans ce récit morbide mais édifiant, Spengler, tel un élève érudit du calme Bouddha, dévoile la vérité du destin de l'Occident. Son brillant crescendo de progrès, de philosophie et d'art a commencé à faiblir, s'enfonçant dans une tonalité mineure. Le grand sonnet de l'Occident entre maintenant dans ses dernières strophes. Pourtant, il y a une reconnaissance des rythmes et des cycles du monde, une compréhension de l'éternelle récurrence de toutes les choses. Cependant, contrairement à la philosophie de Friedrich Nietzsche, ce qui revient prendra toujours une forme différente et ne sera jamais deux fois le même.

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Imaginez un jeu incessant, où l'on passe continuellement du triomphe à la défaite, reflétant l'idée de Nietzsche d'une éternelle récurrence - une boucle sans fin des hauts et des bas de la vie. Pourtant, cette théorie, aussi étrange soit-elle, ne rend pas compte de la véritable essence de l'existence. En effet, dans la vie humaine et les civilisations, si l'âme, le noyau éternel, persiste, ses manifestations diffèrent à chaque itération, comme un acteur incarnant différents rôles, l'essence étant constante mais le caractère mutable. Nietzsche pose une question : "La répétition éternelle de votre vie vous inspirerait-elle de la terreur ou de la joie ?" Une réponse de peur, affirme-t-il, appellerait un changement jusqu'à ce que la pensée de la répétition sans fin devienne désirable. Mais c'est oublier que, malgré la constance de l'âme, chaque cycle de vie, chaque renaissance de civilisation, n'est pas une répétition monotone mais un spectacle nouveau, une nouvelle danse au rythme de la vie. Shiva sourit éternellement.

Nous sommes donc au bord du gouffre, témoins de la phase terminale de l'Occident. C'est un triste spectacle que celui de ce géant qui s'effondre, alors qu'il était autrefois si dynamique, si plein de vie. Pourtant, dans ce chagrin, il y a une véritable compréhension. C'est le propre de toutes les cultures, de toutes les civilisations, de s'élever et de s'effondrer. Alors que la morosité enveloppe l'Occident, nous nous recueillons en silence, honorant ce qui a été, pleurant ce qui a été perdu et anticipant ce qui est encore à venir. Le vers de Poe "Once upon a midnight dreary, while I pondered, weak and weary" résonne dans la conscience collective, incarnant l'introspection collective que la disparition de l'Occident rend nécessaire.

Le Déclin de l'Occident, ce requiem d'une civilisation, est ainsi compris. Ses échos se répercutent dans les couloirs du temps, mélodie lancinante qui murmure la réalité de notre existence. L'Occident, comme une bougie au bout de sa mèche, brille de mille feux avant de sombrer dans l'obscurité tranquille. Pourtant, dans ces ténèbres, il y a la promesse d'une nouvelle aube, d'une nouvelle civilisation qui s'élèvera des braises, poursuivant le cycle, l'éternelle procession de la vie. "C'est le battement de son cœur hideux", dit Poe dans "Le cœur révélateur", une métaphore du pouls persistant de la civilisation au milieu de son déclin, un testament de la propension tenace de la vie au renouvellement et à la continuité.

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dimanche, 30 avril 2023

Critique de "L'Europe : tradition, identité, empire et décadence"

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Critique de "L'Europe : tradition, identité, empire et décadence"

Par Hyperbola Janus

Source: https://www.hiperbolajanus.com/posts/resena-europa-tradicion-identidad-imperio-decadencia/

Europe : Tradition, Identité, Empire et Décadence, par Armin Mohler, Carlos X. Blanco, Julius Evola, Matteo Luca, Robert Steuckers

★★★★★

EUROPA
TRADICIÓN, IDENTIDAD, IMPERIO y DECADENCIA

Editeur : EAS (https://editorialeas.com/producto/europa-2/ )

Année : 2022 | Pages : 136

ISBN : 978-8419359025

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L'Europe : tradition, identité, empire et décadence est un ouvrage collectif qui nous présente une variété de thèmes vraiment attrayants qui, bien qu'a priori très différents les uns des autres, font partie de nos propres racines politico-culturelles et intellectuelles, et plus particulièrement de certaines, aux contours tranchés, de la pensée dissidente ou politiquement incorrecte. La pensée de Julius Evola et d'Oswald Spengler nous sert de guide et d'itinéraire et façonne l'idée de Tradition, d'Empire ou de technique. L'avant-propos de David Engels nous offre une série d'orientations pour nous situer dans le cadre de l'ouvrage, en insistant particulièrement sur l'idée de crise existentielle et la menace qui pèse sur l'avenir de notre civilisation. Il s'agit d'une défense implicite du véritable Occident, de ses valeurs transcendantes et héroïques, de ce que nous appelons souvent la "civilisation de l'être", par opposition à l'Europe d'aujourd'hui, que nous pouvons englober sous l'étiquette toujours trompeuse d'"Occident", en l'occurrence l'"Occident postmoderne", qui est la conséquence de développements ultérieurs dérivés de toute cette culture moderne et bourgeoise qui a ses racines dans les Lumières et la pensée des Lumières et qui brandit aujourd'hui les bannières du multiculturalisme, du transhumanisme, de la culture de masse et, en bref, de la déshumanisation de l'homme et de sa conversion en un simple produit sur le marché mondial.

Oswald Spengler et Julius Evola

Dans ces conditions et face à un horizon incertain, il n'y a pas d'autre choix que de défendre des principes anciens et pérennes, ceux qui ont fini par articuler "l'autre Europe", d'où la nécessité de défendre la valeur de la Tradition et des grands archétypes qui constituent son héritage et son patrimoine, comme le rappelle Carlos X Blanco d'un point de vue clairement spenglérien. Ce sentiment de continuité et d'appartenance, issu de processus historiques complexes et d'une ethnogenèse à la confluence de peuples divers tels que les Celtes, les Romains et les Germains, est ce qui a construit l'Europe et s'est nourri à son tour de sources traditionnelles de la plus haute antiquité, en particulier dans le bassin méditerranéen, carrefour de peuples et de civilisations depuis l'aube de la civilisation.

La crise de la Tradition, ou sa grande dissimulation, comme le souligne l'auteur asturien, se trouve dans l'aveuglement et le manque de perspective historique de l'époque actuelle, qui ignore la valeur d'une tradition ancestrale en propageant de fausses antithèses et dichotomies qui n'ont rien à voir avec nos racines et notre identité. La menace de devenir des peuples fellahisés (Spengler) en antithèse à l'homme faustien, véritable architecte de la culture européenne occidentale, et qui représente l'homme décadent et médiocre de notre époque, incapable de faire face aux défis à venir.

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À partir d'une conception dualiste de l'inspiration évolutive, Blanco souligne l'importance décisive, dans le cadre de l'esprit faustien qui animait l'Europe d'autres temps, de la tradition celtique-nordique, expression du pôle viril et aristocratique de l'existence, solaire et guerrier, pour combattre l'esprit qui anime ce principe de civilisation sclérosé et sans vie du pôle lunaire et féminin qui représente le substrat méridional et afro-sémitique présent dans notre civilisation, qui a acquis une importance totale dans l'Occident post-moderne. C'est le modèle de civilisation qui trouve ses derniers échos au Moyen Âge sous la figure de l'archétype du guerrier et du chevalier, avec les symboles de l'Imperium et des luttes du Saint Empire contre l'Église, incarnant les pôles solaire et lunaire de l'existence représentés respectivement dans les catégories des Gibelins et des Guelfes. Julius Evola voyait dans le "conflit des investitures" bien plus qu'une lutte pour la suprématie dans le domaine du contingent afin de défendre la Tradition dans un sens pur et authentique, le sens primordial, celui des débuts, avec son unité primordiale régalienne/sacrée contre un christianisme d'inspiration sacerdotale et théocratique.

Les peuples barbares et nordiques-païens ont un impact positif sur la construction de l'ordre féodal qui caractérise l'ethos médiéval, et sur ce processus de transfiguration qui transforme le barbare en chevalier, et qui fait revivre dans le christianisme l'élément romain sous une nouvelle aura spirituelle et transcendante dans ce qu'Evola lui-même qualifierait de dernière des grandes étapes historiques dans lesquelles la Tradition, obéissant à sa signification primordiale, s'est transformée en une véritable tradition, obéissant à sa signification primordiale, s'est manifestée dans toute sa splendeur sous l'exemple paradigmatique du Saint Empire romain, et en même temps c'est l'ère de l'homme faustien spenglérien, animé d'une soif de conquête, bâtisseur des grands cycles historiques.

Le contraste se trouve dans l'Occident capitaliste moderne, véritable bourbier de dégénérescences et de perversions, sous l'empire d'une anthropologie libérale qui abaisse l'homme, le subordonne à la technique et le réduit à la servitude, à l'exploitation et le condamne finalement à sa propre autodestruction. D'où la nécessité de redécouvrir les archétypes anciens, et avec eux la Tradition dont ils sont porteurs, face au démonisme de l'économie et de la technologie auquel l'homme moderne s'est abandonné.

Le concept d'Empire, dont Rome est l'archétype universel, fait l'objet d'une analyse dans l'article suivant de l'auteur belge Robert Steuckers, L'idée impériale en Europe. Dans sa définition de base, l'empire apparaît comme l'incarnation d'une autorité transcendante, capable de s'imposer à des peuples divers et hétérogènes, en reconnaissant une hiérarchie qui va du général au particulier. Steuckers nous offre une synthèse historique du développement de l'empire, de Rome au Saint-Empire romain germanique en passant par le royaume franc, et avec lui l'idée d'Europe, qui est associée à une nouvelle vision du monde, une anthropologie traditionnelle dans laquelle prévalent le principe de subsidiarité et une conception organique du social, en contraste évident avec le centralisme jacobin d'inspiration libérale et toutes ses formules analogues. Face aux nouveaux défis auxquels l'homme et la société sont confrontés à partir de la seconde moitié du XXe siècle, il est nécessaire de revitaliser un corpus idéologique d'inspiration traditionnelle capable d'impliquer l'homme dans la construction de son avenir, d'en faire un acteur direct des formes de gouvernement, ce qui rappelle dans une large mesure le modèle espagnol traditionaliste avec l'implication des "corps intermédiaires" dans les tâches d'organisation et de gouvernement, au-delà du parlementarisme libéral et des oligarchies servies par la partitocratie.

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La réflexion de Steuckers se poursuit en approfondissant l'idée impériale dans la section suivante, où il nous propose une vision de l'Empire à travers Charles Quint, et plus particulièrement à travers son médecin, Andrés Laguna, dont le témoignage permet de parfaitement contextualiser les difficultés et les menaces qui pèsent sur l'Empire : la réforme luthérienne et les guerres de religion qui ont détruit l'ordre œcuménique chrétien issu du Moyen Âge, les menaces de l'ennemi extérieur turco-ottoman et plus tard, à partir de Philippe II, l'hostilité résolue des papes romains. Tous ces facteurs ont contribué à affaiblir le projet impérial paneuropéen que l'empereur Charles Quint avait projeté sur une Europe déchirée par des conflits internes. L'héritage de ces siècles se projette également sur le carrefour actuel d'une Europe affaiblie et soumise à l'impérialisme anglo-saxon d'outre-Atlantique, face auquel, si elle veut encore s'affirmer comme un pôle géopolitique dans le monde, avec une voix et une influence, elle doit s'intéresser aux nouveaux blocs internationaux qui se forment dans un cadre plus large qui concerne les politiques eurasiatiques et la consolidation et la projection de l'héritage européen dont nous sommes les gardiens.

Dans le chapitre suivant, Evola et Spengler, également rédigé par Robert Steuckers, l'auteur analyse deux figures fondamentales qui servent de fil conducteur à l'ensemble du livre, afin d'exposer les différences entre l'Italien et l'Allemand. Bien qu'ils soient très proches, puisque dans leurs œuvres respectives ils ont tous deux entrepris une analyse morphologique de l'histoire, Révolte contre le monde moderne et Déclin de l'Occident (Vol. I et Vol. II), Evola a toujours considéré que l'historien allemand restait en quelque sorte prisonnier des schémas intellectuels de la modernité, avec l'absence de cette dualité et dichotomie marquée entre le monde traditionnel et le monde moderne, si caractéristique du traditionaliste romain. Comme Nietzsche, Evola reproche à Spengler d'être redevable aux idéologies modernes, en particulier à celles post-romantiques qui se nourrissent d'un activisme vitaliste qui caractérise l'homme faustien, dans la définition spenglérienne duquel il le voit représenté par un volontarisme immanent qui n'a pas la verticalité et la transcendance aristocratico-virile proposée par la pensée évolienne. La critique d'Evola est trop dure et il nie toute influence de l'auteur allemand sur sa propre œuvre, ce qu'Attilio Cucchi estime très nuancé, détectant des traces de cette pensée dans la critique du bolchevisme et de l'américanisme ainsi que dans le césarisme politique représenté par le fascisme.

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À la suite de l'article de Steuckers, le présent ouvrage nous offre un texte très révélateur de Julius Evola, Le mythe et l'erreur de l'irrationalisme, inclus dans son ouvrage L'arc et la massue (1968), où il se concentre sur la critique de l'irrationalisme auquel adhèrent une multitude de courants de la pensée moderne, engendrés pour la plupart au cours de la seconde moitié du XIXe siècle et au début du XXe siècle, et qui, au lieu de prendre pour référence l'esprit et un principe supérieur d'objectivité transcendante, se concentrent sur le mysticisme au service de la vie, qui constituent un danger égal ou supérieur au rationalisme avec des mouvements comme l'existentialisme ou des auteurs comme Bergson ou Jung, qui définit une antithèse fausse et limitée entre le rationalisme et l'irrationalisme incapable d'opérer une synthèse supérieure de niveau ontologique-métaphysique capable d'agglutiner toute la connaissance de la réalité dans une théorie de l'Être qui nous renvoie au monde des principes et à l'unité primordiale des origines. Ainsi, la connaissance du monde moderne est réduite à des catégories purement humaines, à des spéculations philosophiques et à une connaissance abstraite incapable de connaître la substance profonde des choses. C'est la raison de l'incompréhension et des obstacles insurmontables qui existent entre le monde traditionnel et le monde moderne, et qui est intimement liée à un processus régressif de décadence et d'involution dans lequel la perte du sacré et la défiguration du principe intellectuel sont des clés fondamentales, et en ce sens les travaux de René Guénon et de Frithjof Schuon sont un complément indispensable. L'Occident post-moderne actuel n'est rien d'autre que la conséquence de ces processus de dissolution qu'Evola décrit parfaitement dans cet écrit de la fin des années 60 qui, rappelons-le, coïncide avec les années de ce que l'on appelle la contre-culture, où l'on retrouve nombre d'éléments idéologiques qui ont servi par la suite à cimenter ce que l'on appelle aujourd'hui l'idéologie woke (idéologies du genre, transhumanisme, destruction des valeurs traditionnelles...).

Deux écrits majeurs sur la figure d'Oswald Spengler occupent le devant de la scène dans la dernière partie de l'ouvrage, sous la plume de Robert Steuckers et Carlos X Blanco, Las matrices prehistóricas de civilizaciones antiguas en la obra posthumous de Spengler et Tecnicidad, biopolítica y decadencia : Commentaires sur le livre d'Oswald Spengler "L'homme et la technique", qui soulignent l'originalité de la classification morpho-psychologique de l'histoire de l'auteur allemand, au-delà des catégorisations progressives et linéaires habituelles de l'historiographie académique et officielle, en utilisant des analogies avec la vie naturelle et en mettant en évidence un type humain très particulier, dominé par un élan d'action volontariste applicable et élevé par la maîtrise de la technique appliquée à la guerre et à la conquête, qui donne un sens absolu à leur vie et trouve sa plus haute expression dans le char comme arme, et nous pouvons en trouver l'expression historique chez les Grecs, les Romains, les Indo-Aryens et les Chinois, ce qui, après la publication du Déclin de l'Occident, l'amène à s'interroger sur l'importance accordée à la civilisation faustienne, cela conduit Steuckers à émettre l'hypothèse d'une réorientation de la pensée spenglérienne vers des positions eurasiatiques et un rejet des peuples anglo-saxons et thalassocratiques, qui auraient trahi la solidarité germanique.

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Dans le dernier grand chapitre de la dernière partie du livre, Carlos X Blanco analyse un sujet complexe, inspiré de L'homme et la technique de l'historien allemand. L'écriture est dense et couvre de nombreux aspects, d'un point de vue zoologique, naturaliste, dialectique et opérationnel dans une synthèse physico-biologique et historique de l'homme depuis les premiers temps de la préhistoire jusqu'à la culture et enfin à la décadence. Les positions de départ de Spengler sont résolument opposées aux positions bourgeoises et libérales des Lumières, aux philosophies égalitaires et à l'évolutionnisme qui en découlent. Pour Spengler, la technicité exprime quelque chose de profondément organique et lié à la vie, à la tactique de la vie, à l'action et à la lutte qui naît de la volonté de puissance nietzschéenne et qui s'inscrit dans une échelle cosmique qui concerne tous les êtres, qui dépasse les déterminismes classificatoires de la science, laquelle opère sur des concepts et des abstractions de l'humain. Notre condition biologique, d'"animal de proie" et de prédateur contre toute forme de vie végétative, fait partie de notre nature. En même temps, Spengler revendique une histoire des individus qui, en fin de compte, façonnent le cours des événements, par opposition à l'homme-masse, qui fait partie du troupeau et qui représente la régression vers les strates animales.

Blanco reproche également à Spengler les "préjugés anti-évolutionnistes" qui parlent de l'importance de l'œil et de la main dans le développement de la technicité humaine, qui apparaît soudainement, sans être liée à un processus d'évolution ou de développement biologique, graduel ou soudain, et croit que l'anthropologie évolutionniste peut l'expliquer "en termes de causalité circulaire et synergique". Spengler parle de la "pensée de la main" qui représente la double facette de la pensée humaine sur le plan cognitif, et qui différencie l'homme de l'animal, et par opposition à l'instinct de ce dernier, chez l'homme prime l'action créatrice et personnelle, qui définit différents types humains (théoriques et pratiques, hommes de faits et hommes de vérités) qui a provoqué une scission arbitraire entre le Moi et le monde sous un présupposé dualiste qui est l'expression de la divergence entre la nature et l'histoire par rapport à la même technicité. Enfin, cette technique qui a nourri les réalisations de la culture faustienne se retourne contre l'homme, contre la civilisation et contre l'Europe dans l'ordre postmoderne du machinisme et de l'automatisation, nous entraînant vers une dérive nihiliste et suicidaire. Le texte de Carlos Blanco contient une analyse profonde de la question qui invite à une relecture de l'œuvre de Spengler et à son contraste avec la réalité du présent.

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Les derniers articles, plus courts, consistent en un hommage à la figure d'Oswald Spengler par Armin Mohler, corollaire de tout ce qu'a dit l'auteur, des lignes fondamentales de sa pensée, de sa conception anthropologique et de quelques notes biographiques marquantes. Cet article est suivi d'un texte consacré à Dominique Venner, par Luca Andriola, et à ses apports doctrinaux et au niveau des structures de formation et de militantisme dans la sphère nationale-révolutionnaire, notamment à travers sa Critique positive, avec la revendication d'un nationalisme ethnique et de l'idée communautaire face à l'idéologie libérale moderne, en ce sens l'influence sur des mouvements comme la Nouvelle Droite française et son organe métapolitique, le GRECE, est notable. On se souvient de l'interpellant suicide de Dominique Venner à Notre Dame en mai 2013, visant à éveiller les consciences sur les destructions qui menacent la survie de la civilisation européenne.

Le dernier article, pour compléter la liste variée des sujets et des auteurs abordés, est une brève synthèse du nationalisme russe, oscillant toujours entre slavophiles et occidentalophiles, entre l'idée d'une intégration dans l'espace civilisationnel euro-occidental et le rejet de ce modèle de civilisation moderne et libéral qui représente une abomination pour les valeurs traditionnelles du panslavisme russe. Parmi les différents courants du nationalisme russe, ceux qui se distinguent aujourd'hui sont l'eurasisme, avec des leaders comme Goumilev, Troubetzkoi, Savitsky et Vernadsky, dont la doctrine repose sur une conception impériale de la Russie, intégratrice des peuples périphériques, et qui sont également favorables à une alliance avec les peuples turcs ou avec l'Islam. Alexandre Douguine est actuellement le principal représentant de ce courant au sein du néo-eurasisme, avec une nouvelle dimension géopolitique qui, en liaison avec les événements internationaux de ces dernières années et la résurgence de la Russie en tant que puissance mondiale, est en train de prendre une place prépondérante. Aux côtés des néo-eurasianistes, on trouve des pan-eurasianistes, des national-communistes ou des nationalistes ethniques, dans ce qui constitue une mosaïque variée de positions et d'organisations sous un dénominateur commun qui est le rejet de l'Occident post-moderne et le renforcement de la position géopolitique de la Russie dans le monde en tant qu'empire continental.

lundi, 06 mars 2023

Oswald Spengler et Hiroshima

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Oswald Spengler et Hiroshima 

Constantin von Hoffmeister

Source: https://eurosiberia.substack.com/p/oswald-spengler-1

Oswald Spengler (1880-1936) était un penseur du déclin et des renaissances. Il croyait que l'histoire était cyclique et que les civilisations étaient comme des organismes qui venaient au monde, se révélaient florissantes puis dépérissaient. Mais nous ne devons pas nous inquiéter ! Il s'agit simplement du cercle éternel de la vie projeté sur la montée et la chute des grandes nations et des empires. Son écriture est une extase poétique ; à chaque page, il évoque des images d'une telle grandeur que l'on peut littéralement voir des vues épiques d'armées sans fin de toutes les couleurs et de tous les tons défiler dans notre esprit.

Selon Spengler, l'Europe "blanche" faisait face à une révolution mondiale "colorée", et le bolchevisme était "un élément central" de cette lutte. Grâce à la victoire rouge, l'Asie reconquiert la Russie. Le nouveau centre de la politique bolchevique se déplaçait toujours plus vers l'est. Spengler interprétait le régime de Lénine et de Staline comme une sorte de tsarisme rouge, et plus tard aussi comme une forme modernisée de despotisme asiatique modelé sur Gengis Khan. Ce qui viendrait après la défaite de la Russie soviétique, Spengler n'a pas osé le prophétiser.

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Spengler a entièrement raison lorsqu'il affirme que ce ne sont pas les individus qui comptent, mais uniquement les collectifs. Ce sont les États et les sociétés qui écrivent l'histoire et non les unités humaines individuelles et atomisées - les cosmopolites sans racines dans les villes créées et conçues par la volonté d'un peuple se sentiront toujours étrangers dans un environnement reflétant les désirs et les aspirations de la majorité. La dictature du plus haut pourcentage signifie la domination du propre sur l'autre. Alors qu'un cheval peut changer de propriétaire au cours de sa vie, le territoire attribué à un peuple peut facilement tomber entre les mains d'un autre. La géographie n'est pas sacrée et ne constitue donc pas un point de référence fixe. La race, la nation ou l'empire sont des corps et des esprits faits chair par le processus alchimique connu sous le nom de transsubstantiation - le Christ était le modèle et les activités arcanes liées à la région, connues sous le nom de traditions de mystère par les esprits ésotériques, sont des expressions de la chair consommée par la combustion de calories et transformée en énergie cinétique. L'accélérateur de particules et l'explosion d'Hiroshima deviennent ainsi les symboles ultimes de la sainte communion entre un membre d'une communauté de sang et l'hôte, également appelé la Mère ou le Berceau. Une fois livrés à eux-mêmes, les petits se frayent un chemin vers la mer à travers les dunes dangereuses, toujours à l'affût des prédateurs ailés qui pourraient plonger et les empaler avec des becs aussi tranchants que l'acier de Krupp est dur. Les éclosions se répandent le long du rivage, fondant des colonies alors qu'ils migrent toujours plus loin. Leur sang se répand d'un récif à l'autre, d'un rouge profond, symbole de la valeur de la virilité et du feu de la fertilité - marques d'une race en pleine ascension (une métaphore de fusée pour servir les prétentions futuristes).

Tempus fugit - memento mori. Ce que nous ne pouvons réaliser dans la vie, nous ne le réaliserons jamais dans la mort, bien que les anciens Égyptiens puissent ne pas être d'accord. Nous traverserons la mort - pour en ressortir de l'autre côté, en clignant des yeux face à la réalité éclatante d'un nouveau départ dans une maternité blanche et stérile. Spengler a supposé que Napoléon aurait pu être journaliste dans d'autres circonstances, et peut-être le deviendra-t-il dans une incarnation future dans la Provence rurale, écrivant des articles intimes et liés à la glèbe sur les voleurs de foin et les pitreries de l'ivrogne local pour le journal du village, sentant les fleurs après le travail en se promenant dans les champs de tournesols radieux sous un soleil d'automne mourant, qui est prêt à s'étendre et à se transformer en une géante rouge, plongeant la planète bleue dans l'obscurité et le froid éternels - un corps céleste vide de vie, tournant comme un carrousel funéraire.

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dimanche, 05 mars 2023

Poutine et Lénine, selon Spengler

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Poutine et Lénine, selon Spengler

Constantin von Hoffmeister

Source: https://eurosiberia.substack.com/p/putin-and-lenin-according-to-spengler

Dans les profondeurs sombres et exaspérantes du passé, Spengler a contemplé une figure sinistre connue sous le nom de Vladimir Lénine, un présage de la fin de l'Occident, dont l'existence même menaçait de briser les fondements de la société traditionnelle. Aux yeux de Spengler, Lénine et son parti bolchevique incarnaient les pouvoirs malveillants de la modernité, une force qui menaçait d'engloutir le monde dans un tourbillon de chaos et de destruction. En Lénine, Spengler voyait l'issue inévitable de la descente de l'Occident dans la folie et le désespoir, alors que la culture autrefois grande était consumée par sa propre hubris et avait perdu le contact avec ses racines spirituelles.

Pourtant, dans les profondeurs de l'esprit de Spengler, il aurait pu entrevoir une vision de Vladimir Poutine comme un leader plus banal, s'efforçant de ressusciter la vitalité culturelle et spirituelle de la Mère Russie. Peut-être aurait-il même pu voir en Poutine un symbole de défi contre les forces sinistres de l'âge moderne, celles qui visent à décimer les principes sacrés de la tradition et de la vertu.

Spengler était convaincu qu'au crépuscule du déclin d'une civilisation, une figure formidable et captivante apparaîtrait, capable d'assurer l'ordre et la sécurité par la seule force de sa volonté et de sa personnalité. Cette croyance constituait le fondement de sa thèse de "l'avènement des Césars", qu'il considérait comme un schéma récurrent dans les annales de l'histoire, de tels leaders émergeant souvent au cours de périodes de bouleversements et de catastrophes.

À l'époque actuelle, la notion d'un nouveau César est toujours pertinente, car le globe est en proie à des problèmes contrariants qui exigent un leadership fort et inébranlable. Néanmoins, cette idée a suscité des critiques pour avoir "promu l'autoritarisme et le mépris des valeurs démocratiques". En outre, l'impact qu'un individu peut avoir sur le cours de l'histoire diminue à l'ère de la mondialisation et du progrès technologique. Les défis auxquels les sociétés modernes sont confrontées nécessitent des efforts et des solutions collectives qui dépassent la capacité d'un seul leader, aussi imposant ou magnétique que soit son aura.

Par conséquent, bien que la notion de nouveau César puisse encore conserver une certaine pertinence à notre époque moderne, il est impératif que nous l'examinions à la lumière des obstacles du présent et de la nécessité de trouver des moyens coopératifs pour faire face aux difficultés. Spengler a postulé que lorsque les sociétés entrent dans leur phase finale de déclin, elles ont tendance à engendrer des leaders formidables et séduisants, expérimentés dans la préservation de la loi et de la stabilité par la puissance de leur résolution et de leur présence.

Spengler voyait ces dirigeants comme les Césars de la Rome antique, qui pouvaient maintenir intact un empire en ruine grâce à leur charme personnel et leur volonté inflexible. Il estimait que l'Occident était confronté à une période de déclin comparable à celle de l'Orient, et que ce n'était qu'une question de temps avant qu'un nouveau César ne surgisse pour rétablir l'ordre et la stabilité. Peut-être Poutine, avec son leadership autoritaire et ses efforts pour rétablir la position de la Russie dans le monde, aurait-il été considéré par Spengler comme un prétendant à ce rôle convoité. Spengler a peut-être aussi été conscient des entreprises de Poutine pour rétablir la domination de la Russie sur la scène mondiale.

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vendredi, 24 février 2023

Entretien avec Constantin von Hoffmeister - Discussions sur l'œuvre de Spengler et les traductions récentes

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Le projet Oswald Spengler

Entretien avec Constantin von Hoffmeister

Discussions sur l'œuvre de Spengler et les traductions récentes

Source: https://spergler.substack.com/p/interview-with-constantin-von-hoffmeister?utm_source=cross-post&publication_id=1021314&post_id=104100913&isFreemail=true&utm_campaign=1305515&utm_medium=email

Je suis ravi de m'entretenir avec Constantin von Hoffmeister. Constantin a récemment produit un certain nombre de traductions des œuvres de Spengler. Il s'agit notamment d'une révision de la traduction de Charles Francis Atkinson de The Decline of the West et de deux traductions récentes Prussianism and Socialism de Spengler et de son œuvre Early Days of World History, qui n'avait jamais été traduite auparavant. Ce dernier ouvrage a suscité un vif intérêt sur Twitter, avec de nombreux fils de discussion qui ont permis d'introduire cet ouvrage dans l'anglosphère pour la première fois. Après l'avoir lu, j'ai décidé d'entrer en contact avec Constantin pour une interview. Nous avons discuté de l'œuvre de Spengler ainsi que des traductions de Constantin dans l'entretien qui suit ici. Les deux ouvrages Early Days of World History et Prussianism and Socialism peuvent être achetés auprès de Legend Books via Amazon.

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Cliquez ici pour voir Early Days of World History sur Amazon: https://www.amazon.com/Early-Days-World-History-Reflections/dp/8367583027

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Cliquez ici pour voir Prussianisme et socialisme sur Amazon:

https://www.amazon.com/Prussianism-Socialism-Oswald-Spengler/dp/8367583272

Acolyte de Spergler : Constantin, merci de vous joindre à moi sur The Oswald Spengler Project.

Constantin von Hoffmeister : C'est un plaisir d'être ici. Merci de me recevoir.

SA : Pouvez-vous parler un peu de vous aux lecteurs et leur expliquer comment vous vous êtes intéressé aux œuvres d'Oswald Spengler ?

CVH : J'ai étudié l'anglais et les sciences politiques à l'université de la Nouvelle-Orléans. J'ai vécu et travaillé dans divers pays, notamment en Inde, où j'ai écrit des articles pour des journaux indiens de langue anglaise, en Ouzbékistan, où j'ai enseigné dans une école primaire privée britannique, et en Russie, où j'ai dispensé des formations en anglais commercial aux directeurs et aux gestionnaires de diverses entreprises.

Mon exposition à différentes cultures et langues m'a donné une perspective unique et une capacité à naviguer avec aisance dans des situations interculturelles complexes. Ma fascination pour les œuvres d'Oswald Spengler a commencé lorsqu'un ami du lycée m'a offert une version abrégée de The Decline of the West. Cette expérience s'est avérée transformatrice, déclenchant une passion pour les idées de Spengler qui m'a poussé à rechercher et à dévorer toutes les éditions allemandes originales. Mon intérêt pour les œuvres de Spengler n'a cessé d'inspirer et d'éclairer ma réflexion, surtout lorsqu'il s'agit de questions concernant le destin de la civilisation occidentale.

519F83XHYGL._SX195_.jpgSA : Qu'est-ce qui vous a motivé à vous lancer dans les traductions ?

CVH : En tant que perfectionniste dans l'âme, je me suis parfois trouvé insatisfait des traductions existantes de diverses œuvres, y compris celles d'Oswald Spengler et d'autres auteurs célèbres. Poussé par mon amour de la langue et mon désir de partager ces textes importants avec les lecteurs anglophones, j'ai décidé de me lancer dans la traduction.

Avec un sens aigu du détail, je me suis plongé dans le travail, déterminé à produire des traductions qui rendraient justice aux textes originaux. Mes efforts m'ont non seulement permis de satisfaire mes propres exigences, mais ont également contribué à faire connaître à un public plus large des œuvres jusqu'alors non traduites.

Je suis très fier de la qualité de mes traductions, et il est immensément gratifiant de savoir que mon travail a contribué à rendre ces œuvres importantes accessibles à une nouvelle génération de lecteurs. Pour moi, l'art de la traduction n'est pas seulement un travail, mais une passion qui me pousse à continuer à repousser les limites de ce qui est possible dans le domaine de la traduction littéraire.

SA : Charles Francis Atkinson (CFA) a longtemps été considéré comme la "référence" pour les traductions de Spengler. Grâce à votre travail avec Arktos, vous avez produit une traduction révisée de The Decline of the West. Quel genre de changements avez-vous apporté à la traduction de CFA ?

CVH : Je n'ai fait aucun changement. J'ai simplement corrigé des coquilles évidentes et d'autres erreurs, qui n'avaient apparemment jamais été corrigées depuis la première publication, il y a presque cent ans.

SA : J'ai remarqué que, dans la préface du traducteur, CFA mentionne combien la traduction de certains passages peut être difficile. Quelles sont certaines des difficultés à capturer le style de Spengler en anglais ?

CVH : Capturer le style de Spengler en anglais peut être un défi pour plusieurs raisons.

Tout d'abord, Spengler était connu pour son style d'écriture dense et complexe, qui incorpore de nombreux termes techniques, néologismes ainsi que des métaphores difficiles à traduire directement en anglais. Son utilisation du vocabulaire philosophique et scientifique allemand ajoute également une couche supplémentaire de complexité à la tâche de traduction de ses œuvres. Trouver des termes et des phrases équivalents qui transmettent le même sens en anglais peut être une tâche difficile.

Deuxièmement, les écrits de Spengler emploient souvent un style hautement métaphorique et poétique, profondément ancré dans la culture et la littérature allemandes. Il est donc difficile de saisir tout le sens et les connotations de son langage dans la traduction, car nombre de ses métaphores et références culturelles sont propres à la langue et à la culture allemandes.

Troisièmement, les œuvres de Spengler intègrent souvent un style très idiosyncrasique et personnel, ce qui rend difficile pour les traducteurs de séparer la voix de l'auteur du contenu de ses idées. Cela exige une compréhension profonde des idées philosophiques et historiques de Spengler et une capacité à transmettre ces idées d'une manière qui préserve le sens et le ton voulus par l'auteur.

Dans l'ensemble, la traduction des œuvres de Spengler exige non seulement une connaissance approfondie de l'allemand et de l'anglais, mais aussi une compréhension profonde du style unique de Spengler, de sa philosophie et de son contexte culturel.

51WS5++HOLL._SX337_BO1,204,203,200_.jpgSA : Dans l'introduction, Spengler emploie la phrase de Goethe "exakte sinnliche Phantasie" pour décrire son approche de la détermination des formes historiques. La traduction de CFA rend cette expression par "flair intellectuel". Ce n'est que lorsque j'ai relu l'allemand que j'ai réalisé que Spengler citait directement les écrits scientifiques de Goethe en utilisant cette expression. Une traduction plus littérale pourrait être "imagination sensorielle exacte". Dans la préface du traducteur, Atkinson mentionne cette phrase particulière comme étant difficile à traduire. Je l'ai excusé car je me suis dit qu'il n'était pas trop familier avec les écrits philosophiques de Goethe et que, par conséquent, l'intention littérale de Goethe derrière cette phrase était un peu perdue pour Atkinson. Mais cela m'a fait me demander : la traduction de CFA a-t-elle d'autres rendus inhabituels ou même inexacts en anglais ?

CVH : Il est possible que la traduction de CFA de Spengler contienne d'autres interprétations anglaises inhabituelles ou même inexactes, car la traduction est un processus complexe et souvent subjectif. Dans toute traduction, il y a toujours le risque de perdre une partie du sens ou de la nuance d'origine, en particulier lorsqu'il s'agit d'idées complexes et de références culturelles.

Dans le cas de l'expression "exakte sinnliche Phantasie", il est clair que la traduction de CFA a choisi d'utiliser "flair intellectuel" comme une approximation de l'idée, tout en reconnaissant dans la préface du traducteur qu'une traduction plus littérale pourrait être difficile à réaliser. Même si cette traduction ne rend pas entièrement le sens de la phrase allemande originale, c'est au lecteur de décider si le rendu anglais est adéquat.

Comme pour toute traduction, il est important d'aborder la traduction de CFA des œuvres de Spengler avec un œil critique, et de consulter d'autres traductions ou le texte original allemand en cas de doute sur l'exactitude ou la pertinence d'un rendu particulier.

SA : Maintenant, je veux déplacer la conversation vers vos travaux plus récents. Vous avez récemment produit deux traductions de Spengler : Prussianism and Socialism et Early Days of World History. La publication de Early Days of World History a suscité beaucoup d'intérêt sur Twitter au cours des derniers mois. Pour ceux qui l'ignorent, Early Days of World History n'avait jamais été traduit en anglais auparavant. Votre traduction inaugure une ère nouvelle dans la recherche sur Spengler car c'est la première fois que le monde anglophone a pu se mettre sous la dent les enquêtes de Spengler sur la préhistoire. Pouvez-vous nous donner quelques informations sur le contexte de cette œuvre ? Dans quel état était-elle au moment de la mort de Spengler et comment a-t-elle été publiée à l'origine?

CVH : Early Days of World History était l'un des principaux ouvrages sur lesquels Oswald Spengler travaillait au moment de sa mort en 1936. C'est une œuvre fragmentaire, et de nombreuses sections consistent en des notes ou des phrases incomplètes. Spengler a laissé derrière lui de nombreuses notes et fragments pour le livre, mais il n'a pas eu l'occasion de les organiser et de les compléter avant sa mort. En conséquence, le texte est souvent difficile à lire et n'a pas la cohérence et la structure des autres œuvres de Spengler. Cependant, malgré sa nature fragmentaire, Early Days of World History reste une source importante des idées de Spengler sur la première période de l'histoire mondiale et de sa philosophie de l'histoire en général.

SA : Étant donné que l'œuvre a été laissée comme une série inachevée de notes, j'imagine qu'il a dû y avoir de nombreux défis associés à sa traduction. Pouvez-vous en décrire quelques-uns ?

CVH : Traduire une œuvre fragmentaire et inachevée comme Early Days of World History est un défi à plusieurs égards. Tout d'abord, le texte est lacunaire ou incomplet, ce qui peut rendre difficile la saisie du sens voulu. Deuxièmement, le manque de contexte dans certaines parties de l'œuvre rend difficile la traduction précise de certaines phrases ou passages. En outre, la nature inachevée de l'œuvre peut entraîner un manque de clarté ou de cohérence dans certaines sections, ce qui peut être difficile à transmettre dans la traduction. En outre, le style et le ton de l'écriture peuvent être non conventionnels, ce qui rend plus difficile la capture du ton et du sens voulus par l'auteur dans une autre langue. Enfin, en tant que traducteur, j'ai également dû effectuer des recherches approfondies sur les contextes historiques et culturels de l'œuvre afin d'exprimer avec précision le sens voulu pour le public cible.

images.jpgSA : En tant que traducteur, comment décidez-vous quand et où apporter des changements susceptibles d'améliorer la lisibilité de l'œuvre tout en restant fidèle à l'état du matériau source ?

CVH : Les traducteurs sont souvent confrontés à un équilibre difficile entre rester fidèle au matériau source et apporter des changements qui améliorent la lisibilité de l'œuvre. S'il est important de transmettre avec précision le sens et le style voulus par l'auteur, il arrive que le matériau source soit difficile à comprendre ou à lire dans la langue cible en raison de différences de grammaire, de syntaxe ou de contexte culturel. Dans de tels cas, il peut être nécessaire d'apporter des modifications pour améliorer la lisibilité de l'œuvre, à condition que le traducteur ne modifie pas le sens ou l'intention du texte original. En fin de compte, l'objectif de toute traduction devrait être de rendre l'œuvre accessible à un public plus large sans sacrifier l'intégrité du matériau source. Si Spengler était peu clair ou vague dans l'original, j'ai reproduit cette ambiguïté dans la traduction. Si sa formulation est maladroite dans l'original, je voulais également montrer cette maladresse dans la traduction.

SA : Quelles sont les principales idées que Spengler présente dans Early Days of World History?

CVH : Dans Early Days of World History, Spengler présente un certain nombre d'idées sur les débuts de l'histoire de la civilisation humaine. Voici quelques-unes des principales idées :

1) Le concept de "culture-amibe". Spengler suggère que les civilisations sont comme des amibes : elles sont mobiles et ne sont pas ancrées en un endroit spécifique. Il identifie trois principales cultures-amibes : l'Atlantide (l'Ouest), le Kash (le Sud-Est), et le Turan (le Nord). Atlantis, Kash, et Turan sont des cultures morphologiquement distinctes dans la religion et les arts. L'Atlantide vénère les morts et met l'accent sur le domaine ultra-tellurique avec une relation obsessionnelle aux ancêtres. Son art est centré sur les constructions en pierre avec un sentiment de complaisance inerte. Kash a une religion tropicale et contenue, où les mathématiques du cosmos dominent et la vie après la mort est une question qui laisse indifférent. Le symbole central de Kash est le temple, où les prêtres scrutent les mathématiques célestes. Le Turan valorise le pouvoir des lignées royales et l'héroïsme individuel et a un amour pour la beauté et l'ornementation.

2) La notion de cultures "primitives" : Spengler suggère qu'il existe un certain stade dans le développement des cultures humaines qui se caractérise par une pensée primitive et magique, qui se distingue de la pensée plus rationnelle et scientifique des civilisations ultérieures.

3) Le rôle du mythe et de la religion dans les premières civilisations : Spengler affirme que le mythe et la religion ont joué un rôle crucial dans le façonnement des premières civilisations et qu'ils sont intimement liés à l'identité culturelle et spirituelle d'un peuple.

imaosdoccges.jpgSA : Dans le monde anglophone, John Farrenkopf a soutenu que les idées présentées ici ainsi que celles contenues dans L'homme et la technique représentent une "métamorphose" de la philosophie de l'histoire de Spengler. Alors que Le Déclin de l'Occident met en avant une vision non linéaire de l'histoire, le dernier Spengler semble modifier quelque peu cette perspective. Comment la vision de l'histoire de ce dernier Spengler a-t-elle évolué ? Et en quoi est-elle restée la même ?

CVH : Dans Le Déclin de l'Occident, Spengler présentait une vision cyclique de l'histoire dans laquelle les cultures passent par un cycle de vie prévisible de naissance, de croissance, de maturité et de déclin. Cependant, dans ses œuvres ultérieures telles que L'homme et la technique et L'heure de la décision, Spengler semble s'écarter de cette vision cyclique de l'histoire et adopter une perspective plus linéaire.

En outre, les œuvres ultérieures de Spengler (ndt: aujourd'hui disponibles en anglais), notamment Man and Technics et Prussianism and Socialism, se concentrent davantage sur l'impact de la technologie et de la montée de la machine sur la civilisation humaine. Dans ces œuvres, Spengler soutenait que la machine n'était pas simplement un outil, mais une nouvelle forme de vie qui transformait le monde d'une manière sans précédent dans l'histoire de l'humanité. Il croyait que la technologie ne changeait pas seulement les conditions matérielles de la vie, mais qu'elle transformait également la nature humaine elle-même.

Cependant, si les derniers travaux de Spengler se sont davantage concentrés sur l'impact de la technologie, ils n'ont pas complètement abandonné sa vision cyclique antérieure de l'histoire. Au lieu de cela, ils présentaient une sorte de synthèse entre les visions cyclique et linéaire de l'histoire, dans laquelle les cultures continuaient à passer par un cycle de vie de naissance, de croissance et de déclin, mais étaient également soumises à des forces externes telles que les changements technologiques qui pouvaient accélérer ou décélérer ce cycle de vie.

Dans l'ensemble, si la vision de l'histoire de Spengler a quelque peu évolué dans ses dernières œuvres, il est resté attaché à l'idée que les cultures passent par des cycles de vie prévisibles de naissance, de croissance et de déclin. Cependant, il a également reconnu l'importance des facteurs externes tels que les changements technologiques dans le façonnement du cours de l'histoire humaine.

SA : Les idées exprimées dans Early Days of World History ont-elles eu un impact direct sur les domaines de l'anthropologie, de l'archéologie et/ou de l'histoire ? Ou bien la mort prématurée de Spengler les a-t-elle laissées relativement inconnues et non étudiées ?

CVH : Il est difficile de savoir dans quelle mesure les idées de Spengler dans Early Days of World History ont eu un impact direct sur les domaines de l'anthropologie, de l'archéologie et de l'histoire. La mort prématurée de Spengler en 1936, avant l'achèvement du livre, peut avoir contribué à son obscurité relative par rapport à The Decline of the West. Cependant, certains chercheurs ont noté l'influence des idées de Spengler sur les penseurs ultérieurs dans ces domaines. Par exemple, certains ont suggéré que l'accent mis par Spengler sur l'unité de la culture et la nécessité de comprendre les cultures selon leurs propres termes a anticipé les tendances ultérieures de l'anthropologie et des études culturelles. Spengler était en fait un précurseur du relativisme culturel. En outre, l'accent mis par Spengler sur l'importance des cycles historiques et la nécessité de comprendre les phénomènes historiques dans leur contexte culturel et civilisationnel plus large a été considéré comme influent dans les études historiques et comparatives. Dans l'ensemble, bien que l'impact des idées de Spengler dans Early Days of World History puisse être difficile à mesurer, elles restent un sujet d'intérêt et de débat parmi les chercheurs en histoire, en anthropologie et en études culturelles.

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SA : En plus de Early Days of World History, il existe un autre volume posthume de l'œuvre inachevée de Spengler intitulé Urfragen (= Primordial Questions). Celui-ci n'a pas encore été traduit en anglais. Prévoyez-vous de traduire cette œuvre ? Pouvez-vous nous dire quelque chose sur Urfragen ?

CVH : Oui, c'est sur ma liste de traductions futures. Le livre se compose de notes et d'essais que Spengler a écrits au cours de sa vie, mais qu'il n'a pas organisés en une œuvre cohérente. Le titre du livre fait référence aux questions fondamentales qui, selon Spengler, sont à la base de toutes les cultures humaines, telles que le sens de la vie et de la mort, la nature de l'existence et le but de l'histoire.

Urfragen est considéré par certains comme l'aboutissement de la pensée de Spengler, car cet ouvrage reflète ses idées les plus mûres et les plus développées sur ces questions fondamentales. Cependant, comme le livre est resté inachevé au moment de la mort de Spengler, on ne sait toujours pas comment il avait l'intention de développer davantage ces idées, ni comment il les aurait finalement synthétisées en un système philosophique cohérent.

SA : Vous avez également traduit récemment le tract politique de Spengler, Prussianité et Socialisme. Pouvez-vous nous donner un aperçu de certaines des idées contenues dans ce texte ?

CVH : Le prussianisme est un phénomène culturel et politique qui a émergé en Prusse au cours du 18ème siècle, caractérisé par un sens aigu du devoir, de la discipline et de l'ordre. Il met l'accent sur l'importance de l'État et la supériorité de la culture germanique. Le socialisme, tel qu'il s'est développé en Allemagne, a également été influencé par les valeurs prussiennes. Spengler affirme que le socialisme allemand n'était pas un mouvement prolétarien, mais plutôt un mouvement des classes moyennes et supérieures désillusionnées par la démocratie libérale de la République de Weimar.

Selon Spengler, le prussianisme et le socialisme font tous deux partie d'un phénomène historique plus vaste qu'il appelle "le socialisme prussien". Ce socialisme est enraciné dans l'expérience culturelle et historique unique de la Prusse et de l'Allemagne. Spengler soutient que l'avenir de l'Allemagne dépend de la réussite de la fusion du prussianisme et du socialisme. Il plaide pour un gouvernement fort et autoritaire, capable de mettre en œuvre des politiques socialistes pour atteindre les objectifs nationaux. Selon Spengler, cela nécessite un rejet de la démocratie libérale et la priorité de l'État sur les droits individuels. Il affirme que cette synthèse mènera à une Allemagne puissante et unifiée, capable de rivaliser sur la scène mondiale.

SA : Quel genre d'impact ce texte a-t-il eu dans les cercles intellectuels et politiques de l'Allemagne de Weimar ?

CVH : Prussianité et Socialisme a eu un impact significatif sur les cercles intellectuels et politiques de l'Allemagne de Weimar. Il a été largement lu et discuté parmi les intellectuels et les politiciens, et ses idées ont influencé le développement de la pensée conservatrice et nationaliste dans le pays.

Le texte était particulièrement influent parmi les groupes conservateurs et nationalistes qui étaient désillusionnés par la démocratie libérale de la République de Weimar et recherchaient une vision alternative pour l'avenir de l'Allemagne. L'appel de Spengler en faveur d'un gouvernement fort et autoritaire capable de mettre en œuvre des politiques socialistes a trouvé un écho auprès de nombre de ces groupes, et ses idées ont contribué à façonner le développement des mouvements politiques conservateurs et nationalistes dans le pays.

En même temps, les idées de Spengler étaient également controversées et contestées. Certains intellectuels et politiciens ont critiqué sa vision du socialisme prussien comme étant autoritaire et anti-démocratique et ont affirmé qu'elle représentait une menace pour les principes de la démocratie libérale et de la liberté individuelle.

41BVDY+1q+L._SX314_BO1,204,203,200_.jpgSA : Il semble que ce texte soit l'un des nombreux produits de la révolution conservatrice dans la République de Weimar. En quoi les idées exprimées dans Prussianité et Socialisme diffèrent-elles de celles qui sont apparues plus tard avec le National Socialisme ? Je me souviens que la sœur de Friedrich Nietzsche a écrit une lettre à Spengler ne comprenant pas le désaccord de Spengler avec le national-socialisme. Elle écrit : "Notre Führer que nous honorons sincèrement n'a-t-il pas les mêmes idéaux et valeurs pour le Troisième Reich, que vous [Spengler] avez exprimés dans le Prussianité et  socialisme ?". Comment lui répondriez-vous ?

CVH : Les idées exprimées dans Prussianité et Socialisme de Spengler sont souvent associées au mouvement intellectuel plus large de la Révolution conservatrice. Ce mouvement était caractérisé par un rejet de la démocratie libérale et des valeurs des Lumières, et une adhésion à l'autoritarisme, au traditionalisme et à un fort sentiment d'identité nationale.

S'il existe certainement des similitudes entre les idées exprimées dans Prussianité et socialisme et celles qui sont apparues plus tard avec le national-socialisme, il existe également des différences importantes. La vision de Spengler d'un gouvernement fort et autoritaire mettant en œuvre des politiques socialistes n'était pas nécessairement liée à l'idéologie raciale ou au type de militarisme agressif associé au national-socialisme.

Les idées de Spengler étaient ancrées dans une compréhension culturelle et historique plus large de la place de l'Allemagne dans le monde, alors que le national-socialisme s'appuyait fortement sur des théories raciales et une vision mythifiée du passé de l'Allemagne. En outre, Spengler était critique du type de politique de masse qui caractérisait le national-socialisme et croyait en l'importance d'un leadership fort et autoritaire plutôt qu'au type de mouvement populiste qui était au cœur de la montée des nazis.

En réponse à la lettre de la sœur de Nietzsche, il est important de noter que, bien qu'il ait pu y avoir un certain chevauchement en termes de certaines valeurs et objectifs, Spengler n'était pas un partisan du national-socialisme et ne le considérait pas comme une solution viable aux problèmes de l'Allemagne. Au lieu de cela, ses idées étaient plus étroitement alignées avec le mouvement intellectuel et politique plus large de la Révolution conservatrice, dont beaucoup de partisans étaient également opposés au national-socialisme.

SA : Il semble que la vision du monde du libéralisme anglais ait dominé le globe dans les années qui ont suivi la mort de Spengler. Pensez-vous qu'il existe un avenir dans lequel un "esprit prussien" pourrait revenir ?

CVH : Les idées et les valeurs des différentes périodes historiques et cultures sont souvent en constante évolution, et leur pertinence et leur attrait peuvent changer avec le temps. Si les idées de Prussianité et  socialisme ont eu un impact significatif sur l'Allemagne de Weimar, elles ont également été confrontées aux critiques et à l'opposition d'autres mouvements intellectuels et politiques. Il est possible que ces idées refassent surface et gagnent en popularité à l'avenir, mais il est également possible qu'elles ne le fassent pas. En fin de compte, l'avenir est façonné par une interaction complexe de facteurs sociaux, politiques et culturels qu'il est difficile de prévoir avec certitude.

SA : Votre édition de Prussianité et Socialisme comprend également l'essai de Spengler "Le double visage de la Russie et les problèmes allemands à l'Est". Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur cet essai et pourquoi il a été inclus dans cette édition ?

CVH : "Le double visage de la Russie et les problèmes allemands à l'Est" est un essai écrit par Spengler en 1922. Dans cet essai, Spengler examine la relation entre la Russie et l'Allemagne, ainsi que les problèmes politiques et culturels complexes qui existent entre les deux pays.

Spengler affirme que la Russie a un "double visage". D'une part, c'est une nation dotée d'un patrimoine culturel riche et unique, profondément liée à la terre et aux rythmes de la nature. D'autre part, il s'agit également d'une nation fortement autoritaire, avec une tendance à la centralisation bureaucratique et à l'ingénierie sociale.

Spengler explore également les questions historiques et géopolitiques qui ont conduit au conflit entre l'Allemagne et la Russie, notamment la compétition pour la domination de l'Europe centrale et orientale, ainsi que le choc entre les cultures des deux nations. Il soutient que l'Allemagne a historiquement été prise entre les deux pôles de la culture occidentale et orientale, et que cela a rendu difficile pour l'Allemagne de trouver une identité politique et culturelle stable.

Dans l'ensemble, "Le double visage de la Russie et les problèmes allemands à l'Est" est un document important pour comprendre la vision de Spengler sur la géopolitique et l'histoire culturelle, ainsi que ses idées sur les défis auxquels sont confrontées les nations modernes à la suite de l'effondrement des structures culturelles traditionnelles.

J'ai inclus cet essai en raison de sa pertinence dans le climat géopolitique actuel de tensions entre l'Occident et la Russie.

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SA : Quel a été, selon vous, l'héritage à long terme des œuvres politiques de Spengler ?

CVH : L'héritage à long terme des travaux politiques de Spengler est complexe et controversé. D'une part, ses idées ont été adoptées par certains mouvements politiques au début du 20ème siècle, en particulier ceux associés à la Révolution conservatrice. Ces mouvements ont cherché à redéfinir le sens du conservatisme, rejetant les valeurs libérales des Lumières et prônant un retour aux valeurs traditionnelles et à un État fort et autoritaire.

Cependant, l'œuvre de Spengler a également été critiquée pour son pessimisme, son déterminisme culturel et son rejet de la démocratie. Nombre de ses idées ont ensuite été reprises par les nazis, qui prétendaient réaliser la prophétie de Spengler sur le "déclin de l'Occident" et la montée d'un nouvel ordre autoritaire.

Malgré ces critiques, l'œuvre de Spengler continue d'être étudiée et débattue par des chercheurs dans divers domaines, notamment la philosophie, l'histoire et les sciences politiques. Certains chercheurs ont affirmé que ses idées sur les cycles culturels, l'importance de la tradition et les limites de la raison sont toujours d'actualité, notamment face à la mondialisation et à l'érosion des valeurs traditionnelles. D'autres ont affirmé que son travail est trop profondément ancré dans le contexte historique spécifique de son époque, et que ses théories sont trop déterministes et essentialistes.

SA : Pour conclure, je voudrais vous poser quelques questions sur l'influence de Spengler aujourd'hui. Il semble qu'il y ait une nouvelle génération de personnes intéressées par les œuvres de Spengler. Ces dernières années, nous avons assisté à la naissance d'organisations comme la Oswald Spengler Society. Elles commencent à organiser des conférences qui présentent des analyses spengleriennes de l'histoire, de la culture et de la politique. De plus, j'ai remarqué que l'Internet s'intéresse de plus en plus aux idées de Spengler. Il semble y avoir beaucoup d'intérêt autour de Spengler. Pourquoi y a-t-il un tel regain d'intérêt pour Spengler ?

CVH : Il y a plusieurs raisons pour lesquelles il y a eu un regain d'intérêt pour Spengler ces dernières années. L'une d'entre elles est la crise perçue de la civilisation occidentale, notamment à la suite de la crise financière de 2008 et des changements politiques, économiques et sociaux en cours au XXIe siècle. Les vues pessimistes de Spengler sur le déclin de la civilisation occidentale et la nature cyclique de l'histoire ont trouvé un écho chez certains qui voient des parallèles entre la situation actuelle et le déclin des civilisations passées.

Une autre raison du regain d'intérêt pour Spengler est son analyse de la montée de l'autoritarisme et du rôle de la technologie dans la société moderne. Les œuvres de Spengler anticipent bon nombre des développements qui ont eu lieu aux 20ème et 21ème siècles, notamment la montée des régimes totalitaires, l'impact des médias de masse et des technologies de communication, ainsi que le déclin des valeurs et des institutions traditionnelles.

Enfin, on constate également un regain d'intérêt pour le style littéraire de Spengler et la manière dont il mêle l'analyse historique à la critique culturelle et à la réflexion philosophique. Certains chercheurs considèrent Spengler comme une figure importante dans le développement du modernisme littéraire et l'utilisation de techniques littéraires dans l'écriture de non-fiction. L'accent mis par Spengler sur la relativité des valeurs culturelles et son rejet des vérités universelles et des absolus anticipent dans une certaine mesure le postmodernisme.

SA : Quelle est l'importance de lire Spengler aujourd'hui ?

CVH : Lire Spengler aujourd'hui peut être important pour plusieurs raisons. Tout d'abord, son œuvre offre une perspective unique sur l'histoire et la culture qui remet en question les vues occidentales traditionnelles. La vision cyclique de l'histoire de Spengler, par exemple, remet en question l'idée de progrès et l'inévitabilité de la domination occidentale. Cela peut aider les lecteurs à réfléchir de manière plus critique à leurs propres hypothèses et à développer une compréhension plus nuancée du monde.

SA : Après avoir passé autant de temps à lire et à traduire Spengler, votre point de vue sur sa pensée a-t-il changé d'une quelconque manière ?

CVH : Pas du tout. Cela n'a fait que cimenter mon opinion sur sa philosophie. Après toutes ces années, il reste toujours l'homme du jour !

SA : Constantin, je tiens à vous remercier de vous être joint à moi pour The Oswald Spengler Project.

CVH : Merci de me laisser participer. Je l'apprécie énormément.

Si vous souhaitez lire ces traductions par vous-même, envisagez de les acheter auprès de Legend Books via Amazon. Les ayant achetées et lues moi-même, je peux personnellement attester de leur qualité et je suis heureux de leur donner mon cachet d'approbation. Toutes deux sont solides, joliment conçues et constituent les meilleures éditions disponibles à l'achat.

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Eurosiberia

vendredi, 03 février 2023

Oswald Spengler et le cycle des renaissances

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Oswald Spengler et le cycle des renaissances

Constantin von Hoffmeister

Source: Eurosiberia / https://eurosiberia.substack.com

L'examen méticuleux des cultures par Oswald Spengler est d'ordre quasi pathologique. Il ouvre le cadavre d'une culture et le dissèque avec une telle précision qu'il trouve toujours la cause de la mort cachée au plus profond de ses entrailles complexes. Le coupable habituel est la décadence avec l'inertie et la stagnation qui l'accompagnent, communes à tous les organismes qui ont dépassé la fleur de l'âge et qui, par conséquent, dépassent la durée de leur vie.

Contrairement à ce que beaucoup de gens, sinon la plupart, croient, Spengler n'est pas un prophète de malheur. Il décrit la montée et la chute des cultures comme s'il s'agissait d'êtres vivants et respirants, qui naissent, vieillissent et finissent par mourir. La cause de la mort est presque toujours la même - la culture devient paresseuse et désintéressée. Elle ne peut que nourrir des passions pour les choses les plus basses de la vie: le sexe, la violence et le fait de regarder avec jubilation se dérouler des événements montés de toutes pièces ou des spectacles chorégraphiés. C'est ainsi que la culture devient primitive et monotone. Elle se transforme en une civilisation (alias une "société du spectacle"), qui répète mécaniquement des traditions périmées, vidées de toute vie et dépourvues de toute tendance à l'innovation.

Imaginons Spengler aux Enfers : Charon se tient raide devant lui, une rame dressée dans la main gauche et la main droite tendue, attendant ostensiblement que Spengler y dépose le prix requis. Mais hélas ! Spengler n'a pas d'argent car personne n'a pensé à mettre une pièce dans la bouche de son cadavre. Il sera maintenant forcé de marcher sans but pendant cent ans le long de la rive de l'Achéron, contemplant sans fin le concept de l'éternel retour de Nietzsche avec les ombres à sa gauche et à sa droite qui tirent constamment sur les manches de sa chemise, le suppliant de leur rappeler pourquoi, après la mort de chacune de leurs incarnations, elles se retrouvent sur la rive de l'Achéron sans argent. Spengler répond patiemment: "C'est parce que vous êtes morts dans une civilisation, et non pas dans une culture. Dans une culture, les gens sont religieux et croient, alors les proches mettent une pièce dans la bouche du parent mort. Dans une civilisation, les gens sont rationnels et ne croient pas, donc les proches ne voient pas l'intérêt de mettre une pièce dans la bouche du parent mort".

Lorsqu'une civilisation est vraiment morte, une nouvelle culture naîtra de ses cendres. La nature a horreur du vide, et selon la physique newtonienne, l'énergie n'est jamais perdue mais toujours constante. Spengler confirme ainsi le cycle sans fin des renaissances auquel les hindous croient depuis des millénaires. Tout comme l'âme d'un être vivant erre d'un vaisseau physique à un autre, les vestiges d'une civilisation peuvent être transportés dans la nouvelle culture et incorporés - comme le Zeus grec se transformant en Jupiter romain.

mardi, 13 septembre 2022

David Engels réfléchit sur l'œuvre de Spengler : penser à l'avenir

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David Engels réfléchit sur l'œuvre de Spengler : penser à l'avenir

Par Javier Navascués

Source: https://elcorreodeespana.com/hispanidad-y-geopolitica/558345695/David-Engels-reflexiona-sobre-su-obra-Spengler-Pensando-en-el-futuro-Por-Javier-Navascues.html

Le célèbre historien David Engels (né à Verviers, en Belgique, en 1979) est professeur en charge de recherches à l'Instytut Zachodni de Poznan (Pologne), où il se consacre à l'étude approfondie de toutes les questions liées à l'histoire intellectuelle occidentale et à l'identité européenne. Il est également président de la Société Oswald Spengler. Auteur d'un livre fondateur, intitulé Le declin, David Engels consacre également une grande partie de son ouvrage à l'esquisse d'une possible réforme des institutions européennes basée sur ce qu'il appelle "l'Hespérialisme", une combinaison profonde et rénovatrice du meilleur patriotisme européen avec le conservatisme culturel le plus élaboré. Auprès de l'éditeur espagnol Letras Inquietas, il a participé à l'ouvrage collectif Las 13 claves del Nuevo Orden Mundial.

Pourquoi Spengler a-t-il été le grand scrutateur de l'âme occidentale ?

Spengler est sans aucun doute l'un des plus grands philosophes de l'histoire de la civilisation occidentale. On peut discuter de la valeur de sa pensée métaphysique - il appartenait à l'école du vitalisme, qui se résume finalement à un dualisme très difficile à maintenir sur le plan de la logique - mais les parallèles factuels qu'il a découverts entre les grandes civilisations humaines comptent parmi les choses les plus importantes jamais écrites dans ce domaine. Personnellement, ce n'est pas tant l'analyse de l'histoire européenne que je qualifierais d'originale - dans une large mesure, ses contemporains la considéraient également comme telle - mais la découverte de son inévitable nécessité à la lumière de développements analogues dans d'autres cultures ; un double "éloignement" historique qui nous permet non seulement de voir l'Occident sous un jour entièrement nouveau, mais aussi d'aborder les civilisations non européennes dans une perspective complètement différente.

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Il faut ajouter à cela la précision presque mathématique avec laquelle Spengler a également tenté de prédire l'avenir de l'Europe sur cette base ; une tentative qui doit être largement considérée comme vérifiée 100 ans après la publication du Déclin de l'Occident, où l'on annonçait le déclin de la population, le déclin du christianisme, le socialisme à plusieurs milliards de dollars, la pollution environnementale, le populisme, les migrations de masse, la montée des peuples non-européens (notamment d'Asie et du monde musulman), le pacifisme, l'extinction des villages, la fatigue spirituelle, la désindustrialisation, le leadership allemand sur l'Union européenne et bien d'autres encore, tandis que la guerre en Ukraine pourrait marquer le dernier chapitre du césarisme. Mes propres recherches sur Spengler sont donc guidées par deux impératifs : d'une part, en tant qu'historien, pour approfondir la pensée de Spengler par analogie (et la corriger à l'occasion), et d'autre part, en tant qu'Occidental du 21ème siècle, pour contribuer à façonner de manière analytique et essayistique notre propre présent à la lumière de la morphologie culturelle de Spengler.

Parlez-nous brièvement du mythe de Faust et de son application à l'homme européen, et donc de la nature faustienne.

Pour Spengler, chaque culture se caractérise par une vision du monde unique et inimitable, profondément ancrée dans son âme culturelle, une façon spécifique et inimitable de voir et de comprendre Dieu, l'Homme et le monde. L'Égyptien voit le monde comme une longue route menant directement au royaume des morts et à l'au-delà, l'Oriental comme un espace de destinée entièrement déterminé par l'incalculable arbitraire divin, le Grec et le Romain comme une collection de corps concrets et matériels, et l'Occidental comme un espace de puissance abstraite et infinie qui invite à atteindre constamment l'horizon, à se dépasser et à traduire tout ce qui existe en pouvoirs et en fonctions. Comme le légendaire Faust, l'Occidental est insatiable, insatisfait, intempestif, toujours aussi curieux que mégalomane. Son avidité de "plus" s'exprime aussi bien dans la dimension architecturale des cathédrales et des gratte-ciel que dans la dimension musicale de la polyphonie des orgues de salle et des grands orchestres symphoniques, dans la dimension politique des croisés et des conquérants que dans la dimension scientifique des voyages spatiaux et de la fission nucléaire. On aurait donc tort de considérer l'histoire comme une sorte de développement linéaire du progrès par rapport à l'état actuel des connaissances des Européens : la haute technologie est plutôt un pur produit de l'homme occidental (qui, pour sa part, est incapable d'apprécier à leur juste valeur nombre des grandes créations des autres civilisations) et disparaîtra avec lui dans le temps prévisible de quelques générations et périra à l'exception de quelques rudiments de technologie de simple application.....

Quelles solutions proposez-vous pour éviter ce déclin ?

Soyons francs : nous ne pouvons pas empêcher le déclin ; tout au plus pouvons-nous le freiner un peu et, surtout, essayer de le façonner de manière à pouvoir défendre notre honneur et maintenir notre civilisation comme cadre de vie le plus longtemps possible malgré sa pétrification naissante ; c'est le devoir que nous avons non seulement envers nos ancêtres, qui ont construit cette civilisation au prix de grands sacrifices, mais aussi envers nos descendants, à qui nous voulons la laisser aussi indemne que possible. L'Empire romain, la dynastie chinoise des Han ou les Ramessides égyptiens sont des exemples typiques de la manière dont une telle civilisation fossilisée a pu perdurer pendant de nombreuses générations, bien que sous une forme de plus en plus affaiblie et simplifiée, et transmettre son héritage aux civilisations ultérieures.

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À cet égard, j'ai mis l'accent sur deux solutions dans mes différents ouvrages récents sur le sujet. Dans "Que faire ? Vivre avec le déclin de l'Europe" (Ed. esp.: Madrid, EAS, 2019), j'ai montré des approches quant à la façon dont les individus peuvent rester fidèles aux idéaux de leur civilisation, même contre la résistance de toute une société, et les transmettre aux générations suivantes ; dans Renovatio Europae (Renovatio Europae. Por una renovación hesperialista de Europa; éd. esp.: Madrid, EAS, 2020) et mon dernier volume, Europa Aeterna (pas encore publié en anglais), j'ai exposé avec de nombreux co-auteurs l'idée politique de l'"hesperialisme", c'est-à-dire un patriotisme européen culturellement conservateur qui pourrait nous aider à surmonter notre crise actuelle et à initier la phase finale de notre civilisation sur la base de la connaissance des rouages de l'histoire.

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Javier Navascués

Directeur adjoint de El Correo de España. Présentateur de radio et de télévision, conférencier et scénariste. Il a été rédacteur sportif de El Periódico de Aragón et de Canal 44. Il a collaboré à des médias tels que EWTN, Radio María, NSE et Canal Sant Josep, Adelante la Fe, dont il a été le directeur, et Agnus Dei Prod. Acteur du documentaire Cura de Ars et d'une autre œuvre contre le marxisme culturel, John Navasco. Il a réalisé des vidéos virales telles que El Master Plan et El Valle no se toca. Il tient actuellement un blog sur le prestigieux portail InfoCatólica et participe occasionnellement à Somatemps, Ahora Información, Español Digital et Radio Reconquista à Dallas, au Texas. Il collabore avec le programme Javier Cárdenas sur OKDIARIO.

 

samedi, 14 mai 2022

Spengler et l'Europe faustienne

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Spengler et l'Europe faustienne (article introductif dans "El Manifiesto")

Le livre Oswald Spengler y la Europa fáustica, de Carlos X. Blanco Martín est paru naguère aux éditions Fides, sous la forme d'une relecture très originale que notre auteur asturien fait de l'œuvre de Spengler et des malentendus que beaucoup de ses interprétations ont encourus (parfois, surtout, de ses "mésinterprétations" suspectes et partisanes). Une relecture urgente et nécessaire.                          

Carlos X. Blanco Martin

Source: https://decadenciadeeuropa.blogspot.com/2016/10/spengler-y-la-europa-faustica-articulo.html                    

Dans les pages qui suivent, nous allons lire l'oeuvre d'Oswald Spengler (1880-1936). Ce philosophe allemand est, à mon humble avis, le penseur le plus important du 20e siècle. La publication de tous ses écrits, même les textes les plus éloignés de ce qu'on appelle aujourd'hui le "politiquement correct", est pleinement justifiée.

Mes déclarations au sujet de Spengler, comme je le sais pertinemment bien, a peu de soutien dans les milieux académiques. Le philosophe de Déclin de l'Occident n'est pas un favori dans les cercles universitaires. Pour ma part, je le place parmi les grands. Leibniz et Kant se distinguent au 18e siècle. Hegel et Marx ont régné en maîtres au 19e siècle. Heidegger, Ortega et Spengler dominent le 20e siècle. En effet, je me dois d'inclure ici le grand Spengler comme une figure fondamentale pour comprendre notre siècle et ceux à venir.

Qui était Spengler ? Un philosophe allemand aux connaissances encyclopédiques, auteur d'un livre de grande envergure et d'une perspective très large, Le Déclin de l'Occident, l'homme qui a fait des pas de géant dans la compréhension de l'Europe et de ses grandes réalisations dans le contexte général où il y a d'autres civilisations et cultures. Le philosophe qui était capable de prédire le cours des événements européens, presque un prophète. L'homme qui était capable de voir les civilisations et les cultures comme des êtres vivants soumis au destin [Schicksal], jamais soumis à la légalité physique-naturelle mais seulement à leur propre trajectoire biologique.

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Dans le monde académique, notamment en Espagne, on s'intéresse très peu à cette figure et à son œuvre. Les références que l'on lit sur l'auteur du Déclin de l'Occident ont tendance à être expéditives, voire à n'être que condamnatoires. Il n'est pas rare de lire des anathèmes contre Spengler de la part de professeurs dont on devrait s'attendre à ce qu'ils soient plus honnêtes et mieux informés. Il semble être un auteur maudit. Se consacrer à l'étude de l'œuvre de Spengler a mauvaise presse, et je suis personnellement conscient et victime de telles attitudes. Quiconque fait une telle chose, même s'il le fait avec une distance critique et de l'objectivité, peut s'attendre à ce qu'on lui jette le même anathème qu'on a jeté contre Spengler lui-même. Une telle situation devrait nous faire réfléchir à la crise de l'éducation en Espagne et à la crise de l'enseignement supérieur dans ce pays. Imaginons quel terrain vague deviendrait la philosophie et les sciences sociales lorsque l'étude de l'œuvre de Marx (je répète, même avec distance et objectivité critique) attirerait le soupçon de "communisme". Une telle chose nous apparaîtrait comme une folie fanatique. Pourtant, il est toujours plus "confortable" d'étudier Marx et ses épigones à l'université que Spengler. La liberté de la recherche académique exige l'étude de tous les auteurs et de tous les courants de pensée fondamentaux, une exigence incontournable pour la critique, l'amélioration et la transformation de leurs théories et pour la promotion d'une jeunesse critique et éduquée. La stupidité capitale de certains libéraux et conservateurs est patente, qui, tels des inquisiteurs, ont accusé Marx de nous conduire au goulag ou au stalinisme. Il en va de même pour la pratique consistant à condamner Nietzsche pour avoir "inspiré" l'Holocauste, applaudir le chauvinisme masculin ou être un ennemi de la "démocratie". Stupidité même en raison du caractère rétroactif de la condamnation, une condamnation qui conduirait à la guillotine des personnes déjà mortes depuis des siècles, et à la guillotine morale et à l'ostracisme pour leurs exégètes.

Spengler ne présente aucun intérêt pour l'establishment académique. Il est associé, pour les plus mal intentionnés ou les moins informés, au nazisme, et ce, de manière générale. Chez certains intellectuels et chroniqueurs de la sphère plus conservatrice, il est pris en considération, et il est cité, très brièvement, comme un "philosophe du pessimisme", comme un "théoricien de la décadence". Et peu d'autres choses, je pense. Cependant, la philosophie de Spengler est arrivée en Espagne avec les meilleures références. Pour le public hispanophone, nul autre qu'Ortega y Gasset a fait office d'introducteur à son œuvre, et c'est lui qui a favorisé la publication de La Decadencia de Occidente ; et García Morente a entrepris une belle traduction. Le livre continue d'être lu et réimprimé et se trouve dans toutes les librairies et bibliothèques à dotation minimale. D'autres de ses œuvres, bien que moins importantes, sont également traduites ou republiées. L'intérêt pour la philosophie spenglerienne dans le monde hispanophone est incontestablement fort. Mais c'est un anathème dans la bulle universitaire. On continue à le lire, mais en silence et avec prudence ; on continue à le réimprimer, mais peu d'études, de relectures critiques, d'enquêtes sur son œuvre voient le jour. Cette situation soulève de nombreux doutes et questions dans mon esprit.

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Il me semble que cette situation est conforme à la biographie de l'auteur lui-même. L'enseignement de Spengler s'est déroulé au niveau de l'école secondaire et il n'a pas bénéficié des privilèges et du confort d'une chaire universitaire pour développer ses théories. Il y a eu des obstacles à l'achèvement de sa thèse de doctorat, et son travail a été initialement rejeté. C'était un homme dont les relations avec le pouvoir étaient toujours difficiles, un exemple d'indépendance intellectuelle face aux pressions et aux séductions du pouvoir en place, incarné à l'époque par le nazisme. Un intellectuel dont les idées sont influentes et, en soi, pleines de force, peut facilement être coopté, soudoyé ou, au contraire, ostracisé. La montée en puissance d'Hitler s'inscrit plutôt dans l'adoption de cette dernière catégorie. Les biographes savent qu'il n'y avait aucune empathie ou compréhension entre le Führer et le philosophe de Blanckenburg. Les différences étaient trop insurmontables, les pertes d'amis, tués sous la brutalité d'un Pouvoir qui s'éloignait de plus en plus du projet de "socialisme prussien", trop douloureuses. Spengler, me semble-t-il, était au fond un philosophe nationaliste allemand, substantiellement anti-nazi, partisan d'une conception hiérarchique et aristocratique du socialisme, proche du projet régénéraliste et corporatiste qui visait à faire de chaque Allemand un fonctionnaire au service de l'État. Ce projet ne pouvait être mené que par "les meilleurs", dans le meilleur sens platonicien du terme : l'aristocratie, le pouvoir des meilleurs. De l'ouvrier d'usine, au scientifique ou au technologue, en passant par l'entrepreneur, l'étudiant ou l'artiste, tout le monde, absolument tout le monde doit mettre sa volonté au service d'une Patrie, d'un État (Reich) qui, à son tour, étant situé "au milieu" de l'Europe, dans son propre cœur et sa propre moelle, doit chercher à contenir sa décadence. Ce socialisme spenglérien n'a rien à voir avec le national-socialisme hitlérien, dont le vrai visage apparaît en termes de mobilisation de "masses" dirigées par des cadres ignorants et brutaux. Le national-socialisme, en tant que bolchevisme qui, par son contenu, avait usurpé les idéaux nationalistes, conservateurs et révolutionnaires de toute une génération, ne pouvait être du goût de notre philosophe. C'est plutôt le contraire, en fait.

En somme, et au prix d'une lecture approfondie du livre dont je suis l'auteur, je voudrais souligner ici quelques thèses qui me semblent absolument révolutionnaires chez Spengler, ce sont les suivantes :

a) Nous ne devons pas identifier le "christianisme" avec la civilisation européenne. La distinction entre au moins deux christianismes, d'âmes complètement différentes, l'"ancien-magique" et le faustien. Notre civilisation n'est née que du christianisme faustien, c'est-à-dire du Moyen Âge.

b) Il n'est pas légitime d'identifier la civilisation gréco-romaine et la civilisation européenne. Comprendre que le père qui lègue pour mourir est un être complètement différent du fils qui hérite et fait un libre usage de cet héritage. L'organisme antique gréco-romain, qui est mort si lentement et a généré tant de pseudomorphoses, avait une âme complètement différente de l'organisme européen. Notre organisme n'est pas seulement postérieur dans le temps et héritier partiel de ces cadavres et ruines, il n'est pas seulement un organisme culturel avec des parties matérielles très différentes et des formes nouvelles qui naîtront comme conséquence de Covadonga (722) et Poitiers (732) : le christianisme faustien. C'est un autre être, un autre destin.

c) Aucune construction métahistorique linéaire, providentialiste, téléologique ou déterministe ne doit être admise. Chaque culture a son propre destin, la trajectoire générale de cet organisme suit son propre cours et seules les constantes les plus génériques permettent des comparaisons : une naissance, un développement, un zénith, un déclin... ses parties matérielles (races, peuples, territoires) et ses parties formelles (formes politiques, militaires, artistiques, "scientifiques") n'admettent que des analogies.

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d) L'Europe a le droit de réagir à sa ruine et de contenir son déclin. Par Europe, on entend l'ensemble de ses peuples. Il existe une unité d'"âme", un territoire défini, un cours de développement distinct de celui des autres civilisations. Sans ce type de réaction défensive, l'Europe serait depuis longtemps une extension de l'Afrique ou un appendice de l'Asie. Aujourd'hui, elle prend son temps face aux nouvelles menaces (perte de souveraineté nationale, islamisation, américanisation, substitution ethno-culturelle, mondialisation, etc.)

e) Le facteur précipitant de toute décadence, avant ou après les "invasions barbares" de toutes sortes, réside dans la barbarie interne et la montée de l'Ochlocratie. Le fait qu'une couche sociale de sans-racine et de parasites tend toujours à se former dans les grandes villes, couche qui, dans des conditions de crise axiologique profonde, émerge et devient visible, est le point de départ du déclin. C'est une couche croissante qui peut s'emparer du pouvoir, en parlant au nom du "peuple" : c'est l'un des plus grands dangers. C'est de cette couche que naissent les totalitarismes les plus sanglants. C'est cette couche de la base qui a toujours ouvert les portes de tous les murs défensifs contre l'arrivée des envahisseurs.

f) L'inévitabilité du socialisme. Le socialisme est compris comme l'autogestion par un peuple de ses propres ressources (terre, production industrielle, capital, force de travail). La noblesse elle-même, l'élite militaire et économique, les cerveaux de la technologie, les forces conservatrices, etc. devraient se rendre compte de son caractère inévitable. Il ne s'agit pas de "réagir" contre elle pour l'arrêter. Le réactionnaire perd toujours : il se bat contre le Destin [Schicksal]. Il s'agit, dans cette phase inexorable, d'assumer le socialisme mais dans une phase supérieure, non unilatérale : la "classe ouvrière" ne peut et ne doit pas créer une dictature. Ce serait un socialisme construit par l'alliance des classes, au lieu de la lutte des classes.

g) L'existence non plus d'une "Technique" en général, mais d'une technique propre à chaque culture et Civilisation. L'existence, également, d'un usage différencié selon l'âme et la civilisation de chaque invention. L'Europe a cédé sa créativité à d'autres peuples. Ses armes et ses inventions sont désormais entre les mains de ceux qui peuvent, au XXIe siècle, nous asservir.

Cette liste n'est pas exhaustive. L'œuvre d'Oswald Spengler regorge d'idées et d'intuitions, de programmes entiers pour la praxis et la théorie, des programmes qui peuvent aider à la reconstruction de l'Europe et de ses nations pour tout le siècle à venir. Saluons toutes les traductions et publications de son œuvre. Il est urgent de lire ses ouvrages. Les incendies sont déjà visibles près de chez vous. On entend déjà des détonations. Déjà l'odeur du sang et de la fumée. Le continent entier tremble. Tout doit être repensé, encore et encore, radicalement et depuis le début. Ce livre vous aidera.

jeudi, 14 avril 2022

Le diagnostic du déclin occidental (vu par Spengler)

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Le diagnostic du déclin occidental (vu par Spengler)

Il y a cent ans, Spengler publiait son essai monumental "Le déclin de l'Occident". Maintenant, la maison d'édition Aragno publie le deuxième volume de l'ouvrage en traduction italienne. L'occasion de reparler des concepts mis en avant par le philosophe allemand de l'histoire.

par Gennaro Malgieri

Source: https://www.barbadillo.it/103985-la-diagnosi-del-declino-occidentale-vista-da-spengler/

Une admirable description de la décadence des formes organiques, voilà ce qu'offre la fresque d'Oswald Spengler à ses lecteurs dans les pages du deuxième volume du Déclin de l'Occident, publié en 1922, il y a cent ans. Aujourd'hui, ils réapparaissent dans toute leur dramaturgie préconçue. Les "perspectives de l'histoire universelle" dans lesquelles l'auteur s'attarde, avec des références très cultivées, cachées dans les plis du temps des civilisations, sont celles parmi lesquelles, depuis quelques millénaires, nous, héritiers du faustianisme en liquidation, errons, perdus, contemplant parfois avec complaisance notre état de paria. La plante qui a poussé, grandi et s'est développée est en train de mourir. Le morphologue a l'obligation morale de nous sauver de nos illusions. Les civilisations sont des plantes. L'homme est une plante. Son début est sa fin. Avec lui, la Kultur se termine puis renaît, mais la perspective ne nous empêche pas de vivre avec la Zivilisation notre destin extrême.

Les civilisations, comme toutes les formes de vie, appartiennent au "monde organique" et répondent donc à un principe biologique. C'est pourquoi elles sont dotées d'une âme qui les caractérise. Avoir une histoire, cultiver un destin, c'est adhérer aux dictats de l'âme. Dans la période ascendante d'une civilisation (Kultur), les valeurs spirituelles et morales prédominent, donnant un sens à l'existence des êtres qui vivent selon les préceptes de la loi naturelle; l'existence communautaire est organisée en ordres, castes et hiérarchies ; un profond sentiment religieux domine dans le cœur des peuples, imprégnant l'art, la politique, l'économie et la littérature. Lorsque la civilisation vieillit et que son âme se flétrit, elle passe au stade de la "civilisation" (Zivilisation); le principe de la qualité est remplacé par celui de la quantité ; l'artisanat est remplacé par la technologie ; l'envahissement de la massification des goûts et des coutumes écrase les différences ; la ville, évoquant la vie de la campagne et organisée à l'échelle humaine, est remplacée par la mégalopole comme forme extrême de l'indifférentisme, une termitière sans dimension humaine ; les sociétés sont nivelées, l'hédonisme et l'argent sont les seules valeurs reconnues. Ce n'est que lorsque, avec l'avènement de la civilisation", écrit Spengler, "commence la marée basse de tout le monde des formes, que les structures des simples conditions de vie apparaissent nues et dominantes : Les temps viennent où le dicton vulgaire selon lequel "la faim et le sexe" sont les vrais moments de l'existence, cesse d'être ressenti comme une impudeur, les temps où ce n'est pas devenir fort en vue d'une tâche, mais le bonheur du plus grand nombre, le bien-être et le confort, panem et circenses, qui constituent le sens de la vie et où la grande politique cède la place à la politique économique comprise comme une fin en soi".

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Des mots qui semblent avoir été écrits en ces temps troublés : ils ont été pensés il y a plus d'un siècle, lorsque Spengler a voulu créer, vers les années 1910, un grand roman historique et s'est retrouvé, transporté par le sentiment de décadence, à décrire ce qui allait inévitablement se produire. L'heure du coucher du soleil est notre heure. Celui qui nous a mis devant ce destin sévère, aussi livide que les couchers de soleil d'hiver, est notre contemporain. Ses avertissements doivent être accueillis avec le sérieux et la préoccupation qu'ils méritent. Le politiquement correct, l'organisation gluante du consensus égalitaire, la culture de l'annulation, l'homologation des coutumes, des vices et de l'absence de vertus, la construction du "dernier homme" voué au happy end et à l'existence de fellah sont autant d'éléments d'un déclin qui ne peut être endigué, tandis que la gloire effrayante du nihilisme se réjouit de nos destins rétrécis.

Le deuxième volume du Déclin - publié quatre ans après le premier, qui a secoué les consciences les plus alertes de l'époque, et réédité il y a quelques années par Nino Aragno (pp. 787, € 40,00) dans son habituel format élégant et son remarquable choix graphique - est la manière la plus solennelle, compte tenu de l'époque, de déclarer un anticonformisme absolu dépourvu de justification. Et Spengler noue l'élémentaire avec le complexe, identifiant les symptômes de la décadence dans le mode de vie de l'Occidental qui a écrit sa fin dans le mode de vie standardisé.

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Voici les plus essentiels. La monumentalité des logements et des structures esthétiques, hideuses par définition puisqu'elles sont inspirées par le critère de l'utilité et non de la beauté pour réconforter nos petites âmes corrompues pour la plupart inadaptées à comprendre la grandeur, le pouvoir vulgaire de l'argent comme moteur de la vie bovine que nous menons, l'arrogance du démos inculte qui pousse la modernité jusqu'au sentiment de divertissement de masse nauséabond et terrifiant, sont les éléments qui connotent la fin de la Civilisation, les signes éloquents de la Civilisation.

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Le "royaume" dans lequel tout cela se déroule est la ville. C'est le portrait tragique de Spengler qu'il a formulé avec une heureuse et dramatique clairvoyance au début des années 1920, lorsque la deuxième partie du Déclin prenait forme : "Le colosse de pierre appelé 'cosmopolis' se dresse à la fin du cycle de vie de chaque grande civilisation. L'homme de la civilisation, façonné psychiquement par la campagne, devient la proie de sa propre création, la ville ; il est obsédé par sa créature, devient son organe exécutif et finalement sa victime. Cette masse de pierre est la ville absolue. Son image, telle qu'elle se dessine en lignes d'une beauté grandiose dans le monde de lumière de l'œil humain, recueille le sublime symbolisme mortuaire de tout ce qui est définitivement "devenu". L'histoire millénaire du style a finalement transformé la pierre spiritualisée des bâtiments gothiques en la matière désanimée de ce désert démoniaque et saxicole (= qui vit sur le roc, sur les rochers)".

Spengler dit, et nous ne pouvons que le constater, que les maisons qui composent les villes n'ont rien des origines archaïques du style ionique ou baroque, elles ne rappellent pas l'ancienne demeure paysanne, ce ne sont pas des maisons dans lesquelles les dieux peuvent trouver une place, comme sur les petits autels des maisons helléniques et romaines. Ce sont des maisons désacralisées. Les villes sont des agrégations anonymes dans lesquelles on célèbre la frénésie orgiaque d'une vie sans but, comme l'aurait dit le plus grand poète allemand du 20ème siècle, Gottfried Benn, dans ses poèmes déchirants: "Les maisons sont les atomes dont elles sont composées". La deuxième partie du Déclin célèbre le mythe de la Zivilisation faustienne.

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Le chapitre intitulé "L'âme de la ville", qui constitue le cœur du livre, propose les tons, les couleurs et les angoisses qui seront rendus célèbres par le chef-d'œuvre de Fritz Lang, Metropolis (1927). À l'arrière-plan se trouve "notre" avenir, le monde romain, dont le faustisme trace inévitablement les contours politiques. La monumentalité et la corruption, la domination de l'argent comme force prépondérante des pouvoirs obscurs du démos, c'est-à-dire les éléments constitutifs du césarisme, se mêlent à une perception de la modernité que l'on pourrait qualifier de psychédélique. Et dans ce tourbillon d'éléments hétérogènes, au centre duquel se prépare la catastrophe de la Seconde Guerre mondiale, l'œil de Spengler voit plus et mieux que ses contemporains. Ses "erreurs", a écrit Ernst Jünger, "sont plus significatives que les vérités de ses adversaires".

De la dissolution des formes organiques aux baraquements. La métaphore de la décadence est complète. Et pour la compléter, elle se déploie dans le déclin de la prolificité, dans la virilité flétrie, dans la fin de la fonction royale et maternelle des femmes, dans le repli de l'amour sur une sexualité dépourvue de séduction et d'érotisme, dans l'existence du guerrier réduit à un militarisme bureaucratique dépourvu d'héroïsme.

Spengler ne néglige aucun aspect du chemin de transformation de la vie associée jusqu'à son déclin.

La deuxième partie du Déclin est l'admirable ascension de l'intelligence dans le vertige de l'histoire de l'homme occidental. Contrairement à la première partie, le "paysage" domine la description morphologique. Et ce qui en ressort sont des joyaux de génie authentique dans la composition et la décomposition des âges jusqu'à nos jours.

Dans des pages à la fois séduisantes et choquantes, comme une tempête nocturne qui nous empêche de dormir, l'œil de Spengler poursuit le tourbillon des éléments constitutifs de la civilisation et, tout étourdi que nous soyons, réussit à nous faire comprendre l'état dans lequel nous nous trouvons. Le char de la civilisation est descendu jusqu'à nous. Les marchandises qu'il transporte sont de peu de valeur. Que se passera-t-il après le naufrage de la dernière illusion, le césarisme ? Spengler répond à cette question par la phrase qui clôt son livre prophétique, tirée des Épîtres à Lucilius de Lucius Anneus Seneca : Ducunt fata volentem, nolentem trahunt (Le destin guide ceux qui veulent être guidés et entraîne ceux qui ne le veulent pas).

On ne peut rien ajouter d'autre, sinon que face à tous les couchers de soleil de nos fragiles existences, la prière reste le dernier acte de l'esprit, tandis que l'intelligence, se tournant vers les pages de Spengler, peut saisir les signes d'un destin qui n'est qu'apparemment indéchiffrable. Ce que l'on ne comprend pas, c'est parce que l'on ne le connaît pas. Oswald Spengler paie sa dette d'homme du vingtième siècle envers l'humanité souffrante dont il fait partie en enlevant les voiles de la réalité qui dissimulent les falsifications de la modernité afin de nous relier au passé, dans la vision cyclique de l'histoire, non pas pour le restaurer, mais pour comprendre l'avenir pour ceux qui l'auront.

@barbadilloit

Gennaro Malgieri

dimanche, 06 février 2022

L'Europe entre l'Est et l'Ouest

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Dawid Kaczmarek

L'Europe entre l'Est et l'Ouest: réflexions spenglériennes

Ex: https://3droga.pl/w-pol-drogi/numer-1/dawid-kaczmarek-europa-miedzy-wschodem-i-zachodem/

Oswald Spengler (1880-1936) - Historien, publiciste et Kulturphilosoph allemand. Né dans une famille de la petite bourgeoisie. Dès l'école secondaire, il a développé activement ses intérêts scientifiques. Il a étudié en tant qu'auditeur libre, choisissant des conférences dans divers domaines à Munich, Berlin et Halle. En septembre 1913, il publie le premier volume de son œuvre phare, Le déclin de l'Occident. Ce livre, qui constitue une sorte de manifeste programmatique du catastrophisme alors très répandu, lui a valu une popularité considérable dans le monde entier. Ses lecteurs, cependant, étaient plus souvent des artistes et des écrivains philosophes que des universitaires, qui, dès le début, ont soulevé de nombreuses objections quant à ses méthodes de recherche. Dans tous les cas, Spengler a inclus dans ses pages sa propre conception du changement social cyclique. Il considérait la civilisation comme un organisme vivant pareil à tous les autres, et définissait donc son développement de la même manière, au sein duquel il distinguait trois étapes principales : la croissance, le déclin et la chute.

Cette vision du concept a également influencé de manière appropriée sa compréhension de l'histoire. Spengler a rejeté sa forme linéaire (c'est-à-dire celle qui présuppose une image de l'histoire comme une ligne allant d'un début préhistorique à un point indéfini dans le futur, qui constitue en même temps le stade le plus élevé du progrès humain), préférant une approche cyclique qui décrit l'histoire comme un cercle fermé d'événements spécifiques dont le chemin est chaque fois déterminé par un destin incontestable et immuable.

La biographie d'Oswald Spengler, ou peut-être surtout sa théorie, fournit un excellent contexte pour mes prochaines réflexions. La notion de changement, qu'on la rapporte ici à la civilisation, à la culture ou à l'équilibre des forces dans les relations internationales, est sans doute le leitmotiv de l'époque dans laquelle nous vivons aujourd'hui. Vous pouvez le sentir dans l'air aujourd'hui et le voir dans presque tous les domaines de la vie humaine. On pourrait écrire beaucoup de choses à ce sujet, en s'appuyant sur les travaux de nombreux éminents philosophes, mais la clé pour nous ici sera, avant tout, de comprendre et d'accepter le caractère inévitable des changements en cours. Ce seul fait devrait suffire à nous faire comprendre qu'il ne contournera pas la Pologne, et même si notre pays n'est pas à l'avant-garde, cela ne dispense pas les élites dirigeantes d'en assumer les conséquences.

En analysant le sujet au plus haut niveau de généralité, on peut définir le système actuel des relations internationales en le considérant comme une sorte de résultat de la rivalité mondiale entre les États-Unis et la République populaire de Chine et (selon certains experts) la Fédération de Russie. Dans cette optique, les États-Unis apparaissent dans la position d'une puissance dominante, défendant l'état actuel des choses, dont, en principe, depuis la fin de la guerre froide, ils sont l'unique architecte et le principal bénéficiaire. La Chine est une puissance révisionniste qui, en raison d'une série de conditions politiques, économiques et idéologiques différentes, a un profond (et croissant au fil des ans) sentiment d'injustice et la conviction que le système actuel non seulement sous-estime sa puissance, en lui conférant pas une place appropriée dans la hiérarchie mondiale, mais ne lui fournit pas non plus des conditions équitables pour un développement ultérieur. Une telle approche semble également tentante pour la Russie qui, après avoir résolu ses problèmes internes lors de la transformation politique du début du siècle, s'efforce plus ou moins activement depuis près de 20 ans de retrouver sa position de superpuissance de l'ère soviétique.

Les relations de ces deux Etats sont certes déterminées par une certaine convergence d'intérêts dans le monde (notamment lorsqu'il s'agit de contrer les Etats-Unis), mais il ne faut pas présumer à l'avance de leur unanimité et de leur accord. Il ne faut pas oublier qu'il s'agit néanmoins de deux acteurs différents, avec un agenda stratégique et une culture différents. La relation entre elles est largement asymétrique, il s'agit en fait d'un "mariage de convenance" (et un tel mariage est conclu dans un but précis, dure rarement et se défait une fois que l'objectif initial a été réalisé), qui profite actuellement davantage aux Chinois, pour qui la Russie, en plus d'être un partenaire économique et politique, est aussi un voile détournant efficacement l'attention de l'opinion publique mondiale de leurs propres actions sur la scène internationale.

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On peut donc conclure que le changement actuel dans la configuration des relations internationales se déroule dans les conditions d'un "choc des empires". Bien entendu, il s'agit d'un terme journalistique plutôt que scientifique. Elle ne doit pas être comprise en termes militaires (bien que cette rivalité se transforme parfois en guerres par procuration, qui seront abordées plus loin), mais plutôt comme un état objectivement existant d'affrontement dynamique d'intérêts contradictoires d'acteurs individuels. Nous sommes conscients du fait que toute présentation exhaustive de sa nature dépasse le cadre de cet article, et que toute tentative d'analyse plus détaillée ne présentera de toute façon qu'un fragment incomplet de la réalité, aussi, pour aller plus loin, il convient de procéder au moins à une classification de base des niveaux sur lesquels elle se déroule actuellement.

Le premier d'entre eux sera donc le niveau financier. Bien qu'elle se trouve, pour ainsi dire, dans l'ombre (hors de la vue de l'homme ordinaire, sans effets visibles dans la vie quotidienne), elle est aussi importante que les autres. Le début des empires dans cette zone consiste principalement en un phénomène de dédollarisation. Je fais ici référence à toutes les mesures prises par les Etats pour minimiser l'importance du dollar américain dans les transactions internationales. La Chine et la Russie sont toutes deux actives dans ce domaine et encouragent l'utilisation du yuan chinois dans les règlements internationaux. Actuellement, cette monnaie est utilisée, par exemple, dans les échanges entre la Chine et les pays africains en développement, ou pour payer le pétrole en provenance de Russie et, plus récemment, d'Iran (en raison des sanctions américaines renouvelées dans le cadre du retrait de l'accord JCPOA). L'objectif est de saper la position des États-Unis dans le système monétaire international, ce qui affecte directement, par exemple, l'état de leur économie nationale ou la compétitivité de leurs marchandises sur le marché étranger.

Le second sera le plan technologique. Deux questions méritent une mention spéciale : la controverse sur les activités de Huawei et le programme de développement d'armes hypersoniques (qui seront indétectables par les systèmes radar actuels). Sur le premier point, les Américains soulèvent des objections quant aux normes internes de l'entreprise (en Chine, il n'existe pas de réglementation légale protégeant la confidentialité des données acquises, ce qui, dans le cas des réseaux 5G, peut revêtir une importance stratégique) et ont réussi à la faire expulser des marchés locaux (par exemple dans le cas du Canada, du Japon ou de l'Australie). La Pologne a même vu l'arrestation d'un employé chinois de cette société pour espionnage.

Les armes hypersoniques (sur lesquelles la Russie, et certainement la Chine, sont plus avancées que les États-Unis) permettront à un pays d'acquérir un avantage stratégique sur le champ de bataille du futur, où le principal déterminant du succès sera la capacité à frapper rapidement une cible désignée.

L'affrontement sur le plan politique (au sens large du terme) est plus visiblement centré sur le projet de la nouvelle route de la soie. Cet énorme projet d'infrastructure est calculé non seulement pour obtenir des bénéfices économiques concrets, mais aussi pour renforcer l'influence de l'Empire du Milieu dans le monde et défier le modèle américain de communauté internationale (à différents niveaux). Avec une telle analyse formulée de cette manière, il est également nécessaire de mentionner les guerres par procuration (qui représentent le plus souvent l'étape suivante des guerres civiles, qui se poursuivent là où les intérêts des superpuissances s'accumulent dans des conditions de déstabilisation générale). L'exemple le plus marquant de ce type de guerre sera la Syrie, où le conflit civil entre le président Bachar al-Assad et l'"opposition" s'est transformé en une véritable guerre par procuration aux conséquences mondiales, qui oppose de facto la Russie (soutenue par l'Iran et le Hezbollah, entre autres) aux États-Unis (soutenus par la France et l'Occident au sens large).

Cette classification permet d'identifier quelques régularités intéressantes. Tout d'abord, jusqu'à récemment, les Etats-Unis, suivant une doctrine encore pratiquement issue de la guerre froide, ont mené des actions calculées pour contenir l'influence de la Russie (notamment en Europe de l'Est et au Moyen-Orient). Actuellement (malgré un durcissement formel de sa rhétorique générale), elle réoriente apparemment son intérêt vers l'Asie orientale. Cela s'explique non seulement par l'importance croissante de cette partie du monde, mais aussi par les actions de plus en plus audacieuses de la Chine dans cette région (par exemple, dans le cas du différend sur la mer de Chine méridionale). Le tournant de l'administration de Donald Trump vers l'Asie a été mis en œuvre de manière extrêmement inepte, trébuchant à chaque étape du processus. Au Moyen-Orient, la Russie en a profité (Poutine a utilisé la Syrie pour sortir de l'isolement international après avoir annexé la Crimée).

Nous pouvons également constater une différence significative dans le schéma d'action entre la Russie et la Chine. Les deux pays cherchent à contester l'influence de l'Amérique à différents niveaux et le font de différentes manières. La Chine préfère les actions douces, politiques et en coulisses. La Russie, quant à elle, n'hésite pas à s'engager dans des actions militaires et hybrides. Cela nous révèle l'essence de la relation entre les deux États. Les actions de la Russie et de la Chine (du moins si l'on parle de celles qui s'opposent aux États-Unis) semblent effectivement complémentaires, mais c'est la Chine qui tire le plus de bénéfices réels des actions de la Russie, qui semblent lui permettre de "gagner" du temps jusqu'au moment où elle sera obligée de s'engager plus directement dans les problèmes internationaux. La Russie est certainement consciente de la disproportion qui existe dans les relations avec la Chine, il ne faut donc pas supposer aveuglément la compatibilité permanente de ces acteurs. Il y a donc là une sorte d'espace de négociation que les États-Unis pourraient, dans des conditions favorables, utiliser pour rallier la Russie à leur cause. Même si une telle démarche ne devait rester que du domaine du possible, elle n'en a pas moins de sérieuses implications stratégiques.

Bien sûr, les empires ont leurs alliés (puissances régionales, petits États), et ils utilisent leur aide pour poursuivre leurs propres objectifs, mais ils ne placent pas leurs liens avec eux au-dessus de leur stratégie préconçue ou de l'équilibre des forces entre eux et leurs rivaux directs. Cela conduit à la conclusion que les empires ont deux objectifs principaux sur la scène internationale : obtenir un avantage sur leur rival direct et empêcher les puissances régionales de trop se renforcer. Ce point est bien illustré par la question de l'influence croissante de l'Iran en Syrie. Lorsque, suite à l'avancée des troupes d'Assad et des milices iraniennes qui lui sont alliées, la possibilité s'est présentée de créer un pont terrestre reliant l'Iran (via l'Irak, la Syrie et le Liban) à la Méditerranée, ce qui renforcerait Téhéran économiquement et politiquement, les États-Unis ont immédiatement agi, qui a établi une base militaire à Al-Tanf (un endroit stratégique à la frontière irako-syrienne), mais aussi la Russie, qui a presque immédiatement réorienté son engagement ailleurs dans le pays, privant les forces iraniennes d'un soutien aérien et d'un parapluie politique.

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L'Europe n'est impliquée dans aucun des affrontements que je viens de mentionner et qui sont cruciaux pour la nouvelle image du monde (à l'exception du conflit avec Huawei, où il y a eu des tentatives maladroites de développer une position). Dans toutes ces questions, dont la grande majorité est extrêmement importante pour les relations internationales actuelles, l'Union européenne est un objet, et non un sujet, de la politique des superpuissances. Ses États sont joués par des empires qui s'affrontent, ce qui ne fait qu'approfondir son chaos institutionnel et renforcer sa stagnation progressive. Un élément de ce jeu est le projet Tri-City animé par la Pologne, qui n'a aucune chance d'être mis en œuvre, et qui est soutenu par Trump dans le seul but de créer un marché pour son GNL et ainsi de faire pression sur la Russie (que les Américains abandonneront sans hésiter ; que ce soit au nom d'une réinitialisation diplomatique suite au changement d'administration au Capitole ou en cas de renforcement radical de la Chine), ou la politique énergétique de la Fédération de Russie, qui, en manipulant les prix du gaz ou par le biais de projets tels que Nord Stream 2, divise l'Europe en pays occidentaux et orientaux, ce qui lui permet d'y mener beaucoup plus facilement sa politique de puissance.

Pendant la guerre froide, le mouvement des non-alignés a permis d'équilibrer les actions des blocs politiques hostiles et a été l'un des facteurs qui ont empêché le déclenchement d'un conflit armé à grande échelle. S'il est certainement impossible d'assimiler le "choc des empires" d'aujourd'hui à la réalité de cette époque, le choc des deux périodes révèle néanmoins la nécessité naturelle de l'émergence d'un troisième système dans les relations internationales, qui non seulement s'opposerait à toutes les puissances adverses, mais serait également capable de contrer activement leurs actions en sauvegardant la souveraineté de ses membres et en luttant pour leurs intérêts à l'échelle mondiale. Nous devrions abandonner les fantasmes paranormaux à ce sujet et dire clairement qu'aucun pays d'Europe n'est aujourd'hui capable de défendre seul son indépendance. Il n'est pas possible d'élaborer un programme de politique étrangère sur la base d'un empire, quel qu'il soit, car la disproportion du pouvoir signifie inévitablement qu'aucun autre pays que lui-même ne sera jamais traité comme un partenaire par un tel empire. Enfin, notre sort ne sera pas assuré par l'Inter-Marium qui, même s'il voyait le jour, dans la réalité actuelle, ne pourrait être qu'un projet poursuivant les intérêts américains, totalement incapable d'agir de manière indépendante en raison de la désintégration institutionnelle de l'Ukraine et des États baltes trop faibles. Face à la faillite apparente de toutes les autres orientations politiques, l'ère du "choc des empires" révèle la nécessité historique pour l'Europe d'émerger à nouveau comme un bloc uni actif dans la politique mondiale.

Il est évident que l'Union européenne n'est pas en mesure aujourd'hui d'assumer cette responsabilité. Compromise par ses fondements idéologiques libéraux, ses nombreux et graves échecs - tels que le Brexit, la crise de l'immigration, son incapacité à combler le fossé entre les pays de l'ancienne et de la nouvelle Union, ou encore sa bureaucratie pléthorique - elle doit finalement être reléguée hors de l'histoire, laissant place à un nouveau modèle d'intégration européenne. Il est donc nécessaire de créer un système qui prenne en compte et valorise correctement l'identité de ses membres et assure sa survie dans les conditions de la mondialisation. L'institution qui naîtra de sa mise en oeuvre, que nous l'appelions Organisation des Nations Européennes, Alliance Européenne ou simplement Empire, deviendra un acte si capital dans l'histoire du monde que, comme l'a écrit Spengler, il donnera lieu non seulement à un véritable changement dans l'ordre international, mais ouvrira aussi une phase entièrement nouvelle dans l'histoire de notre civilisation. Il n'y a pas de retour aux anciennes méthodes. Les idées d'il y a un siècle ne nous sauveront pas. Nous ne pouvons pas nous permettre de rêvern d'être dans les nuages. Lorsque la volonté créatrice reviendra à l'Europe, qui reste malgré tout le centre de notre monde, et que la force sera à nouveau rassemblée autour d'elle - le troisième système dans les relations internationales, qui se développera entre l'Est et l'Ouest -, cela rétablira la stabilité nécessaire au monde et nous donnera la place qui nous revient.

Bibliographie :

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R. Oliver, La pensée d'Oswald Spengler ; critique et hommage, portail 3droga.co.uk, 

J. Bartyzel, Oswald Spengler, Myśl Konserwatywna, https://myslkonserwatywna.pl/oswald-spengler/ (26.03.2018).

W. Repetowicz, Al-Kaim; klucz do granicy z Syrią i szlaku z Iranu nad Morze Śródziemne, Defence24, https://www.defence24.pl/irackie-al-kaim-klucz-do-granicy-z-syria-i-szlaku-z-iranu-nad-morze-srodziemne (26.03.2018).

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F. Pieraccini, How Russia and China gained a strategic advantage in hypersonic technology, Strategic Culture Foundation, https://www.strategic-culture.org/news/2018/05/21/how-russia-china-gained-strategic-advantage-in-hypersonic-technology.html (26.03.2018).

Europę uratuje tylko Imperium – rozmowa z Tomaszem Gabisiem, Nowa Konfederacja,

samedi, 20 novembre 2021

La philosophie de l'histoire de Spengler

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La philosophie de l'histoire de Spengler

Rudolf Jičín

Ex: https://deliandiver.org/2007/10/spenglerova-filosofie-dejin.html

La conception spenglérienne de l'histoire en tant que développement de cultures humaines individuelles est basée sur Kant. Le monde n'est pas une chose en soi, c'est un phénomène. Si quelque chose, n'importe quoi, doit exister pour nous, il doit entrer dans notre conscience et ainsi prendre ses formes. Ce qu'elle est sur et pour elle-même est indétectable pour nous. Notre monde, ou le monde, n'est donc rien en soi, mais c'est la totalité de ce qui nous apparaît et de ce que nous apportons à ces phénomènes de l'intérieur, c'est notre connaissance. Le monde et la connaissance, si nous comprenons le terme "connaissance" de manière assez large, sont la même chose.

La connaissance se produit dans certaines formes de sensibilité et de raison a priori qui nous sont données et auxquelles nous ne pouvons échapper. Notre monde prend donc nécessairement, du point de vue de la sensibilité, la forme de l'espace et du temps en particulier, et du point de vue de la raison, la forme de la compréhension causale des phénomènes. Pour le Kant à la pensée anhistorique, ces formes sont identiques pour tous les sujets humains de tous les temps et de tous les types. Ce n'est pas le cas du philosophe de l'histoire Spengler. Les formes sensibles et rationnelles sont identiques à certains égards, mais elles diffèrent aussi toujours à certains égards. Spengler suit ici Nietzsche et Chamberlain, mais nous trouvons l'idée dans sa forme fondamentale chez Leibniz. Il n'y a pas d'identité dans la nature, seulement de la similitude. Aucun sujet (monade) ne peut être absolument identique à un autre et, par conséquent, leurs formes cognitives doivent différer. Il n'y a pas un seul type de sujet humain qui évolue vers le haut quelque part et qui est constamment "perfectionné", peut-être comme le design d'une voiture ou d'un avion, mais différents sujets de différents types de personnes qui ont émergé historiquement, créant leur monde spécifique de formes, leur cognition et leur culture. Il n'y a donc pas un seul "monde", un "monde entièrement humain", mais de nombreux mondes, c'est-à-dire des mondes bien spécifiques et différents les uns des autres, bien que toujours similaires à certains égards, des mondes de sujets différents. La connaissance n'est pas une évolution de la raison "humaine". Cette raison prétendument universelle, la raison en tant que telle, n'est qu'une projection de notre raison spécifique dans l'histoire de la connaissance.

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La division de la connaissance entre sensible et rationnel est en grande partie un schéma artificiel. Nous savons déjà, depuis Berkeley, que toute perception sensorielle s'accompagne d'une activité de la raison. Par exemple, l'identification d'un objet présuppose la participation de la mémoire et la capacité de généraliser. Goethe, auquel Spengler se réfère souvent comme source principale pour sa philosophie de l'histoire, divise différemment le monde du sujet, à savoir en "ce qui arrive" et "ce qui est arrivé". La vie est un flux d'événements. La raison interprète cet événement en le traduisant en formes généralisées de concepts et d'idées. "Ce qui s'est passé" peut alors être compris comme une connaissance dans un sens plus étroit.

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Ce qui est vrai du sujet individuel l'est aussi des sujets collectifs. Leur vie passée, leur histoire, est également un flux, ou plutôt un ensemble de nombreux flux, quelque chose qui se passe, en cours, un "happening" - mais avant, pas aujourd'hui. D'autre part, l'historiographie, la description et l'interprétation de cet événement, ne peut que témoigner de "ce qui s'est passé", c'est-à-dire qu'elle pétrifie cet "événement" antérieur, le transforme sous la forme de concepts et d'énoncés périmés, "sans événement". La présence du "happening", la présence passée, ne peut être saisie que sous forme de pensée, c'est-à-dire sous forme de "devenir". L'histoire telle qu'elle s'est passée, l'histoire "réelle", est donc différente de l'historiographie, un traité sur l'histoire. L'historiographie est toujours le point de vue d'un sujet particulier ou d'un ensemble de sujets, c'est-à-dire de personnes pensantes d'un type culturel particulier et d'une époque particulière. Elle est déterminée à la fois par la gnoséologie, car le "se produire" est toujours différent du "devenir", et par la diversité des sujets, de leurs formes cognitives et de leurs mondes. "Chaque époque a sa propre histoire du passé... Chaque époque imagine le passé selon elle-même", dit Feuerbach.

Dans le "happening", dans l'histoire, le facteur déterminant n'est donc pas la raison, mais quelque chose qui la dépasse, ce qu'on peut appeler l'essence, la nature, le caractère, l'âme d'un certain type d'homme, ou dans la manifestation de l'homme sa volonté. Ici, Schopenhauer a eu un effet sur Spengler. Dans l'histoire, comme dans la vie de l'individu, la raison joue un rôle servile ; elle n'exécute que ce qui lui est donné par l'âme, ce que la volonté veut, et cherche divers moyens de le réaliser. C'est pourquoi nous ne trouvons pas dans l'histoire un seul courant d'art, de science, de religion, de philosophie, mais leurs différents styles selon les types respectifs d'âmes humaines. Si la raison était déterminante, tous les hommes seraient essentiellement les mêmes, seraient des "rationalistes" et agiraient pour des raisons "rationnelles". Mais il y a toujours autre chose derrière la rationalité, à savoir ce qui est poursuivi rationnellement, et cela est inexplicable par la seule rationalité. Les anciens Égyptiens ont construit les pyramides de manière rationnelle, mais la raison pour laquelle ils les ont construites ne peut être comprise à partir de la seule rationalité. La chose primordiale est la volonté, le fait qu'ils aient voulu quelque chose, et cette volonté est l'expression de leur caractère spécifique, de leur nature, de leur âme.

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Si l'histoire avait été gouvernée par la raison, c'est-à-dire, en fait, la raison telle que nous l'imaginons aujourd'hui, car nous sommes incapables de comprendre par ce terme autre chose que ce que nous donne notre conception de la vie et notre nature, à savoir la raison utilitaire, alors les hommes qui nous ont précédés ont dû être les mêmes "rationalistes" que nous, mais avec moins de connaissances et peut-être une pensée moins développée. Mais alors il leur serait impossible, par exemple, de construire des maisons gothiques ou baroques avec des décorations irrationnelles et des formes complexes complètement inutiles, dysfonctionnelles et inutiles, mais ils devraient consacrer tous leurs efforts, comme nous, à des questions d'hygiène, de confort et de "goût".

L'histoire ne confirme pas notre rationalisme. Ils ne confirment pas une quelconque "évolution de l'homme", d'une sorte de singe à l'homme préhistorique, puis de l'antiquité à nous en passant par le Moyen Âge. L'homme d'un âge plus récent ne peut pas être dérivé de manière causale de l'homme d'un âge plus ancien. Si l'évolution de l'homme, de sa raison et donc aussi de sa création devait se faire, disons, à partir des anciens Égyptiens comme l'imaginent les "rationalistes" d'aujourd'hui, les Grecs auraient dû construire des pyramides encore plus hautes que les Égyptiens, et aujourd'hui nous devrions les construire à au moins 5 km de hauteur. Ce serait un développement "logique". Il ne serait pas non plus difficile de nous insérer à l'endroit approprié dans la série d'images panoptiques des anthropologues, en commençant par une sorte d'"homme-singe", qui est censé être un enfant de la fin du Tertiaire, mais qui est en fait tout à fait contemporain, un orang-outan cosmétiquement modifié, et se terminant par l'apparence tout aussi humoristique d'un "intellectuel" du trentième siècle, doté d'un énorme front super haut, d'une petite bouche, d'un minuscule menton et peut-être d'une couleur de visage universelle, apparemment un mélange de blanc, de jaune et de noir. Mais, par exemple, les types d'hommes anciens et germaniques, sans parler des Chinois et autres, ne présentent pas de différences qui permettraient de les placer dans une telle série, et les Grecs ont commencé à construire des temples antiques au lieu de pyramides, et les Allemands des cathédrales gothiques. L'art grec n'est pas une continuation de l'art des civilisations antérieures, et encore moins de la préhistoire. Et comment expliquer, par exemple, l'extinction de la pensée grecque et la montée du christianisme ? Peut-être le "progrès de la raison" ou peut-être un "changement dans les relations de production"?

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Expliquer l'histoire de l'humanité comme un enchaînement logique de causes et d'effets est inutile, car nous la soumettons toujours à un expédient, non pas objectif, car nous n'en connaissons pas, mais taillé à la mesure de nos idées présentes. De même que les images des anthropologues mentionnées ci-dessus découlent de leur idée subjective que l'homme devient de plus en plus intelligent par l'évolution, c'est-à-dire de l'idée que l'histoire de l'homme et peut-être même de l'univers poursuit comme but la création d'êtres toujours plus "intelligents", de même les idées des optimistes de la science et de la technologie découlent d'une conception subjective de la finalité du monde comme un quantum toujours croissant de découvertes, de vérités et de produits matériels. Ainsi, nous ne pourrons jamais expliquer d'où viennent les nouvelles races, les nouveaux peuples dotés d'aptitudes bien spécifiques, d'aptitudes bien particulières, jusqu'alors inédites. Peut-on les déduire de la précédente "histoire de l'humanité" comme étant les résultats de certaines causes ? D'où venaient ces Hellènes, par exemple ? Comment pouvons-nous les déduire ? D'où ? Ou, d'un autre côté, imaginons que seuls les Chinois vivent sur cette planète. Une culture et une civilisation de notre type actuel naîtraient-elles jamais dans le monde ? Y aurait-il une musique, une peinture, une technologie européennes ? Est-il concevable que les Chinois seraient parvenus à ces formes s'ils avaient eu 5000 ans de plus ? Et pourquoi, en fait, n'y sont-ils pas parvenus depuis longtemps ? Seul Spengler peut répondre à cette question : la volonté chinoise était dirigée dans une autre direction, poursuivait d'autres objectifs, posait d'autres questions. Son âme était différente.

imoswwages.jpgL'homme n'est pas un produit de son environnement, il n'est pas créé par des influences extérieures. Par conséquent, il ne peut être expliqué de manière causale. Däniken suggère que les tours des temples gothiques ressemblent à des fusées et sont donc le souvenir d'une visite d'"extraterrestres". Ce qui est intéressant, ce n'est pas tant la comparaison elle-même que la manière dont Däniken y est parvenu. Cette approche typiquement mécaniste et complètement erronée de l'explication des événements historiques n'est malheureusement pas l'apanage du "peu sérieux" Däniken d'aujourd'hui. La culture ne naît pas du fait que quelqu'un entend ou voit quelque chose quelque part, puis l'imite ou s'en souvient. La culture ne vient pas à l'homme de l'extérieur, mais découle de lui comme une expression de son moi intérieur, de son âme. Däniken a raison de dire qu'il existe une similitude de forme entre un clocher d'église et une fusée. Mais s'il y a une raison à cela, nous ne pouvons pas la chercher causalement dans une certaine continuité des idées sensorielles, mais dans la similitude des âmes et de leurs désirs. Selon Spengler, la caractéristique essentielle de l'homme d'Europe occidentale est l'aspiration à la distance, l'élan vers l'avant et vers le haut, le désir de l'infini. Et c'est ce désir qui s'exprime à la fois dans la tour gothique et dans la fusée. Dans le premier cas, il s'agit de l'expression de la nostalgie de Dieu dans les cieux, dans le second de la pénétration des espaces infinis de l'univers. Les deux sont des expressions du même type d'homme, de la même âme, seulement à des périodes différentes de son développement : dans le premier cas, au début de la culture, à l'âge du mythe et de la vraie religion ; dans le second, à la fin, dans sa période de civilisation, caractérisée par le rationalisme, la science et la technologie.

L'histoire n'est pas un mystère technique, mais un mystère métaphysique. Rien de substantiel ne peut être expliqué en répondant à la question de l'artisan qui a posé des pierres les unes sur les autres. En effet, à l'origine, il n'y avait pas ces pierres et l'idée rationaliste qu'elles pouvaient être posées les unes sur les autres jusqu'à former une pyramide, mais - de façon tout à fait platonicienne - l'idée de la pyramide, le produit mystérieux d'une âme humaine spécifique et de ses étranges désirs, et ce n'est qu'ensuite que cette idée a cherché les moyens et les méthodes pour sa réalisation. Le développement de la pensée technique ne nous apprend pas grand-chose sur l'histoire de l'homme, car cette pensée n'est pas primaire et essentielle, mais secondaire, déjà une manifestation, une réalisation de quelque chose d'autre. Il faut avant tout s'intéresser aux sentiments de l'homme qui a réalisé certaines créations techniques, et ensuite seulement aux moyens et méthodes par lesquels il les a réalisées. Ce sentiment, la vision de la vie et du monde au sens large, est le véritable mystère primaire à résoudre, et non pas quelques problèmes de leviers et de poulies, de moyens de production, de forces et de relations. L'interprétation matérialiste, quelle qu'elle soit, entre toujours en conflit avec les faits fondamentaux de l'histoire et n'explique jamais rien, car elle pose des questions de manière mécaniste. L'homme tel que nous le connaissons dans l'histoire n'est pas un simple "améliorateur". S'il l'était, l'histoire devrait être un peu différente.

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Tout comme des peuples et des cultures spécifiques émergent soudainement dans l'histoire, les personnalités font de même. Les explications causales ne peuvent pas non plus être appliquées ici. Il n'est jamais arrivé auparavant que le génie engendre le génie. Les enfants de génies sont médiocres. Il s'ensuit que les génies sont nés de médiocrités, et donc que leur émergence est inexplicable par le raisonnement génétique. Un génie n'est pas le résultat de l'empilement des gènes de ses parents. La causalité, l'enchaînement des causes et des effets matériels, n'est d'aucune utilité ici, et même si nous supposons qu'elle existe "objectivement", elle ne nous dit rien dans ce cas car elle est indétectable. Cependant, la causalité n'a rien d'objectif. Nous savons, grâce à Kant, qu'il ne s'agit que de notre façon de penser, rien qui soit extérieur à nous, quelque part dans le monde "objectif". C'est juste la méthode de notre raison pour expliquer les événements tels qu'ils nous sont donnés par nos sens.

Et toute autre explication de tout développement, en particulier de l'histoire humaine, est aussi absurde que les explications génétiques causales des caractéristiques individuelles. Il y a aussi des génies : des nations, des tribus géniales. Et leur existence, avec leurs caractéristiques spécifiques, leurs capacités, et aussi toujours avec des limitations très spécifiques, ne peut être comprise par une quelconque compilation de connexions causales. Ainsi, la causalité et toutes les sciences fondées sur elle ne conviennent qu'aux cas ordinaires, et non aux cas exceptionnels. Plus un phénomène est courant, plus il est causal ; plus il est exceptionnel, plus il défie la causalité et la logique. Mais ce sont les cas exceptionnels qui sont importants et décisifs pour l'histoire de l'humanité. Ce qui est commun, ordinaire, médiocre est en dehors de l'histoire, car le développement historique ne peut naître de rien de tel. S'il n'y avait pas d'exceptions, alors, bien sûr, l'histoire serait effectivement ce que les matérialistes obsédés par les explications causales "scientifiques" pensent qu'elle est : la simple accrétion de l'ordinaire, le développement constant des "forces de production". Mais nous savons que l'histoire n'est pas comme ça. L'histoire des individus, des nations, des cultures, de l'humanité ne peut être calculée.

indkpkkkex.jpgSi tout, ou du moins l'essentiel de l'histoire, se déroulait selon un lien de causalité, il n'y aurait pas de problème particulier à prédire scientifiquement l'avenir. Et en effet, une telle prédiction existe ! Il s'agit même d'une discipline scientifique particulière ! La superficialité et la banalité de la futurologie ne sont qu'une preuve supplémentaire de la folie des idées évolutionnistes matérialistes.

Puisqu'il n'y a pas de développement quantitatif continu de la raison ou de quoi que ce soit d'autre dans l'histoire, mais le développement de types humains individuels, et non pas un développement dirigé vers l'infini, mais - comme l'expérience biologique et historique élémentaire nous le dit - l'émergence, la montée, le développement, le déclin et l'extinction des types, il est impossible de parler du développement de l'humanité dans son ensemble. Nous entendons ici Nietzsche et d'autres prédécesseurs de Spengler : Chamberlain, Danilevsky. Toutes les hypothèses d'un tel développement ne sont que des spéculations de personnes qui font passer leurs idées sur les buts et les objectifs du développement historique pour des "lois objectives". Mais "l'humanité", ce n'est pas seulement eux. Il fut un temps où les gens poursuivaient des intérêts bien différents de l'utilité fonctionnelle de chaque chose, telle que nous y avons succombé, se préoccupaient de problèmes autres que l'élévation du "niveau de vie", et créaient à partir de leurs âmes spécifiques leurs mondes de phénomènes, leurs cultures et leurs civilisations. Mais ces personnes, comme tous les êtres vivants, ont fini par s'éteindre, et il n'y a aucune raison de penser que nous, avec nos images de vie, notre âme, notre culture et notre civilisation, ferons exception.

Spengler distingue, outre la Russie, qui est un cas particulier, huit cultures dites élevées dans l'histoire, à savoir la culture chinoise, indienne, babylonienne, égyptienne, antique, arabe, mexicaine et la culture actuelle de l'Europe occidentale, qu'il qualifie également de faustienne. Ces cultures sont des formes distinctes, causalement inséparables l'une de l'autre, qui ne se développent pas l'une de l'autre. Chaque culture, dans toutes ses manifestations de vie, possède ses propres caractéristiques, qui sont l'expression du type de personne qui la crée. Les cultures ne poussent pas les unes des autres comme les branches d'un arbre, mais chacune représente un arbre particulier, individuel, avec sa naissance, sa jeunesse, sa maturité, sa vieillesse, son déclin et sa mort. Cela correspond également à l'expérience historique. Il est impossible de prédire ou de déduire de manière causale quand une nouvelle culture apparaîtra et quelles seront ses formes, tout comme il est impossible de calculer la naissance d'un génie. On ne peut parler d'eux que lorsqu'ils sont là.

La méthode de compréhension du monde mort, selon Spengler, est la loi mathématique ; la méthode de compréhension des formes vivantes est l'analogie. Par conséquent, la compréhension de l'histoire humaine ne peut être abordée en recherchant des continuités causales de formes, mais seulement en les comparant les unes aux autres. Les formes individuelles ont été pour nous depuis le troisième millénaire avant J.-C. les grandes cultures. Si nous voulons lever un tant soit peu le voile du mystère, nous devons les comparer et rechercher leurs caractéristiques communes et générales. En effet, nous constatons que leur développement du début à la fin est similaire à bien des égards. La culture prend naissance lorsque le château, avec sa noblesse guerrière au pouvoir, et l'église, avec son clergé, s'élèvent au-dessus du paysage agricole. Dans la phase suivante, la ville apparaît comme l'antithèse du village et continue à prendre de l'importance. C'est là que se développent les arts et, plus tard, les sciences. Le citadin triomphe sur le noble, le marchand sur le guerrier, l'argent sur le sang. Avec la croissance des villes, la culture passe au stade de la civilisation. La dernière classe est mise en avant : le peuple. Avec elle, ses idéologies, notamment le matérialisme et le socialisme, s'installent. La victoire des masses signifie un nouveau déclin des valeurs, tout est déjà en voie d'extinction. Les petites villes deviennent les périphéries insignifiantes des villes géantes, les petits États les périphéries des grands États. Le monde est dominé par de moins en moins de grandes puissances. La démocratie dégénère en tyrannie, l'art s'éteint, toutes ses formes sont épuisées, et il ne reste que des efforts civilisateurs et matérialistes. La science et la technologie sont encore florissantes pendant un certain temps. Alors il n'y a plus rien à poursuivre, les idées qui animaient l'âme meurent. C'est la mort de la culture. Sur leurs ruines, au lieu des nations qui aspiraient à quelque chose, il reste une simple population qui veut vivre en privé, rien de plus, rien d'autre. Le sens du "nous" et le désir commun de faire quelque chose n'existent plus. C'est l'ère finale du féodalisme sans héritage et du césarisme. C'est un moment à Pékin, qui dure mille ans.

Dans Le Déclin de l'Occident, Spengler retrace en détail les analogies du développement de chaque culture séparément dans tous les aspects de la vie, en comparant leur art, leur science, leur économie, leur politique, leur état, leur philosophie, leur religion, leur droit. Notre culture, la culture de l'Europe occidentale, dit-il, se caractérise avant tout par l'aspiration aux distances, à l'infini, comme cela se manifeste au début dans sa religion, qui est une religion différente du christianisme originel du chaos des peuples du pourtour méditerranéen, et plus tard dans l'art, surtout dans la peinture de paysage avec ses horizons infinis, dans le portrait avec son regard sur les profondeurs incommensurables de l'âme humaine, et dans la musique comme un art à part entière, exprimant le plus complètement le sentiment de la vie de cet homme. Sa science et sa technique dynamiques, basées sur la catégorie de la puissance, de l'énergie, découlent également de ce sentiment. Notre culture commence aux alentours de l'an 1000, atteint son apogée artistique à l'époque baroque, passe au stade de la civilisation au début du 19ème siècle, et s'approche maintenant de sa fin. Par analogie avec d'autres cultures, Spengler estime la durée de cette culture à environ mille ans.

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Selon Spengler, toutes les visions optimistes, qu'elles soient marxistes à propos d'un paradis communiste, professorales à propos d'une humanité toujours cultivée qui se dirige en progrès constant vers les normes de justice et de liberté, ou technocratiques à propos de la transformation de l'homme dans la société "post-industrielle" de surabondance qui s'approche, doivent être incluses parmi les anecdotes, car elles méconnaissent l'homme et créent encore des illusions sur lui et sur l'histoire. Le monde humain et le monde de chaque communauté humaine, tout comme le monde de chaque individu, ne sont pas régis par la raison, la morale ou l'économie, mais par la volonté, qui est immuable et aveugle. L'homme ne peut pas changer ses désirs, ses passions et ses instincts. C'est donc en fonction de ces passions que sont gouvernées sa raison, sa moralité et les tendances de l'économie. Si l'âme d'une culture change en son sein, c'est parce que d'autres personnes, des membres d'autres classes, des personnes à la pensée et aux sentiments quelque peu différents, accèdent au pouvoir effectif. Mais à la fin d'une culture, il n'y a pas d'autres possibilités de transformation interne. C'est, selon Spengler, notre cas.

La prédiction de Spengler était fausse à bien des égards, et à bien des égards, elle se réalise. La science et la technologie sont loin d'être épuisées. La complexité non seulement de la pensée mais aussi de la vie se poursuit, même à un rythme toujours plus rapide. Cette tendance doit-elle vraiment se terminer un jour par un effondrement ? C'est la question qui préoccupe les intellectuels. La pensée scientifique et technique ne se pose pas la question et travaille, réfutant par l'action le pronostic pessimiste de Spengler.

Si, au contraire, nous voulons accorder à Spengler le bénéfice du doute, nous pouvons tout d'abord affirmer que le progrès matériel amène la planète entière au bord de la destruction. L'air devient irrespirable, l'eau imbuvable. Pourtant, on croit généralement que la science sauvera ce qu'elle a causé. Tout "le peuple" court frénétiquement après la prospérité matérielle ; la société ne connaît plus de problèmes sérieux autres qu'économiques. La culture vit du passé, les nouveaux arts ne sont que des expositions ou de la médiocrité, le goût prime sur le style. Le grand art ne sert qu'à donner à la foule une apparence occasionnelle de solennité et de "culture". Mais son cœur est attiré par le kitsch, il l'aime et le vit profondément. Et en musique, on ne doit même plus l'appeler ainsi ! La musique pop, ce crachat sur toutes les grandes valeurs du passé, n'est plus kitsch, mais une sorte d'art. Les passions de la foule s'affirment avec une insouciance absolue. L'automobilisme dans les grandes villes pollue l'air au point que la population est en danger d'empoisonnement lent, mais personne ne doit s'opposer à cette passion populaire la plus massive et la plus destructrice. Plus les horreurs à l'horizon sont grandes, plus les préoccupations qui occupent le peuple sont triviales. L'importance de la mode, qui change à des intervalles de plus en plus courts, a énormément augmenté. Tout le monde veut voyager constamment, tout voir, tout absorber. Une grande importance est accordée au sport, comme si le résultat d'un match était un événement historique dont dépendait le sort du monde. Pourtant, en quelques jours, tout est oublié, il y a à nouveau de nouvelles sensations. La foule est toujours informée des nouvelles. Cette néophilie annule toute notion de valeur, il n'y a plus rien de durable. Les valeurs éthiques ont disparu. Des concepts comme l'amour, l'amitié, l'honneur, la fierté, la bravoure, la loyauté ont perdu leur sens profond. Il y a une surenchère pour l'avantage personnel et le "succès". Dans une société atomisée d'individus "auto-réalisateurs", personne n'est prêt à sacrifier quoi que ce soit pour l'ensemble. Et au-dessus de tout cela plane le spectre inquiétant de la mort atomique.

La vie devient de plus en plus artificielle et organisée. Mais alors qu'auparavant, il n'y avait que des tentatives d'organiser les masses d'en haut, aujourd'hui la foule s'organise d'ailleurs elle-même. Il a besoin d'organisation autant que d'artificialité. Il joue parfois les amoureux de la nature, mais au quotidien, il observe les vitrines des magasins pour voir les nouveautés et admirer leur "beauté". L'homme ne peut être organisé et manipulé de manière arbitraire, mais uniquement dans le sens qui convient à sa nature. Il peut y avoir des manipulateurs qui pétrissent le peuple dans leurs griffes, mais ces manipulateurs ne s'accrochent au pouvoir qu'en se pliant aux passions des masses.

Si nous pensons en termes juridiques, c'est-à-dire si nous comprenons l'homme comme capable de libre choix et responsable de ses actes, nous conclurons que la responsabilité de toutes ces tendances négatives incombe à la foule et à ses représentants qui attisent ses passions matérialistes. Ces gens, organisateurs de la foule et de ses idoles, professent eux-mêmes les passions de la foule et appartiennent donc pleinement à la foule. Il y a non seulement une foule d'ouvriers, de paysans, de commerçants et d'employés, mais aussi une foule de politiciens, d'artistes et de scientifiques, et même une foule de philosophes. Quiconque professe les passions de la foule appartient à la foule, quelle que soit sa profession ou son éducation. La foule est une question d'opinion de vie. Spengler soutient que la soif d'amusement, de félicité et d'indulgence "n'est pas le goût des grands explorateurs eux-mêmes... ni des experts en problèmes techniques." C'était peut-être encore le cas au début du XXe siècle, mais aujourd'hui, il ne fait aucun doute que la grande majorité de ces personnes sont du même acabit que la foule, professant les mêmes passions et la même conception de la vie.

imaosppppges.jpgD'un côté, nous trouvons des signes de déclin, de l'autre, des progrès sans précédent dans l'histoire. Cette incohérence peut être observée dans presque tous les domaines de la vie moderne. Partout, on peut trouver des raisons d'être optimiste et, en même temps, les pronostics les plus sombres.

Il n'y a pas de "progrès" en tant que tel, mais toujours un progrès dans quelque chose, ce qui signifie en même temps une régression dans autre chose. C'est la nature même du fait que certains trouvent un avenir glorieux pour l'humanité, d'autres une catastrophe imminente. Cela dépend du point de vue de chacun.

Spengler est parfois décrit comme "l'un des précurseurs théoriques du nazisme". C'est une évaluation très simpliste. Bien que Spengler reprenne certaines idées de base de Chamberlain, sa conception de l'histoire dans Le Déclin de l'Occident n'est pas raciste. Spengler, ne considère pas les hautes cultures individuelles comme "inférieures" et "supérieures", et encore moins comme l'œuvre d'une seule race exceptionnelle. Ils sont pour lui des expressions de la vie intérieure - des images de certains types de personnes. C'est tout. Dans L'homme et la technique, il surestime apparemment l'influence des Normands dans les débuts de la culture de l'Europe occidentale. Les Russes, par contre, il les inclut comme un élément non créatif parmi les "gens de couleur", bien que son analyse de l'âme russe, déchirée depuis Pierre le Grand entre l'Europe et ses propres sentiments, soit l'une des meilleures parties du deuxième volume du Déclin de l'Occident. Dans L'homme et la technique, cependant, Spengler part du principe qu'il connaît Le déclin de l'Occident.

Spengler est un fataliste historique. Il ne croit pas que l'effondrement de la culture occidentale européenne actuelle puisse être évité ou retardé de manière significative. Cela était inacceptable pour l'idéologie nationale-socialiste. Rosenberg l'accuse de révéler, comme beaucoup d'autres avant lui, quelques "régularités" historiques. Nous ne connaissons pas de telles lois, juge Rosenberg, et nous ne prétendons pas agir en accord avec elles et avoir une quelconque "vérité", encore moins une vérité scientifique. Mais nous sommes convaincus que nous avons la volonté et l'énergie nécessaires pour réaliser une idée à laquelle nous croyons profondément. D'où le "mythe du 20e siècle".

Mais l'idéologie démocratique est également en contraste frappant avec la philosophie de l'histoire de Spengler. Selon Spengler, un monde démocratique n'est à nouveau que le monde d'un certain type de personnes d'un certain temps, tout comme, par exemple, un monde monarchiste. La démocratie, surtout de type anglo-américain, ne représente certainement pas pour lui une "référence" à laquelle "l'humanité" est arrivée à travers des milliers d'années de développement ou de "progrès", de sorte qu'elle ne l'abandonnera pas à l'avenir et que désormais, au motif qu'elle est "le meilleur système parmi les mauvais", elle se concentrera sur son amélioration continue. Une telle conception est, selon lui, à nouveau un mythe, non pas de n'importe quel "homme", mais précisément de l'homme moderne et intelligent des grandes villes de la civilisation européenne occidentale et de ses contemporains.

Comme Le déclin de l'Occident, L'homme et la technique a suscité une tempête de réactions négatives et positives. Aujourd'hui, alors que la recherche historique a mis en doute certaines des généralisations spéculatives de Spengler, mais qu'elle a en revanche accepté presque universellement son affirmation de base selon laquelle la culture de l'Europe occidentale en tant qu'entité historique spécifique émerge au dixième siècle, nous devons reconnaître que son œuvre reste un sujet de réflexion opportun. Nous ne sommes pas obligés d'être d'accord avec Spengler. Mais cela ne change rien au fait que son œuvre fournit une quantité considérable d'idées originales et stimulantes qui le placent à juste titre parmi les grands penseurs.

***

Oswald Spengler, philosophe allemand de l'histoire, né le 29 mai 1880 à Blankenburg (Harz), mort le 8 mai 1936 à Munich. Jusqu'en 1911, professeur au Gymnasium de Hambourg, puis écrivain à Munich.

Travaux :

Der Untergang des Abendlandes (1918-1922)

Preussentum und Sozialismus (1920)

Politischen Pflichten der deutschen Jugend (1924)

Neubau des deutschen Reiches (1924)

Der Mensch und die Technik (1931)

Jahre der Entscheidung (1933)

Reden und Aufsätze (1937)

Postface de Rudolf Jičín à l'édition tchèque de L'homme et la technique, Neklan Publishing House, Prague 1997, ISBN 80-901987-6-7. Dans une version éditée (complétée par une sélection de pensées d'O. Spengler), la postface est publiée sous le titre Thoughts Worth Remembering : Spengler dans le magazine Marathon n° 2/2004.

dimanche, 01 août 2021

De Covadonga à la nation espagnole : l'hispanité selon une interprétation spenglerienne

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Recension :

De Covadonga a la nación española. La hispanidad en clave spengleriana (De Covadonga à la nation espagnole. L'hispanité selon une interprétation spenglerienne), de Carlos X Blanco

De Covadonga à la nation espagnole: l'hispanité selon une interprétation spenglerienne

Ex: https://www.hiperbolajanus.com/2021/07/de-covadonga-la-nacion-espanola-la.html?m=1

9788494959646-fr.jpgL'ouvrage que nous allons recenser, De covadonga a la nación española, de Carlos X Blanco, possède déjà un titre suffisamment suggestif qui invite à la lecture et suscite un grand intérêt, surtout quand on lit le sous-titre qui l'accompagne, "La hispanidad en clave spengleriana"; dans l'introduction Robert Steuckers commence déjà à exposer certaines des idées qui seront développées tout au long du livre. Dès le départ, une dualité décisive s'instaure dans la configuration toujours actuelle que l'Espagne acquerra au fil des siècles, une empreinte indélébile qui a conditionné le développement de la plus ancienne nation d'Europe occidentale, cette dualité apparaît clairement, avec l'existence de deux pôles ou deux âmes, de deux visions du monde opposées et conflictuelles : d'une part, celle représentée par les peuples du nord-ouest de la péninsule, pionniers et artisans des premières étapes de la Reconquête depuis le Royaume des Asturies, marquée par la présence d'un important élément celto-germanique, également romanisé mais sans le poids décadent et crépusculaire des civilisations précédentes, et d'autre part, les peuples hispano-romains du Levant et du sud de la péninsule, qui sont tombés sous la domination arabe et ont pris forme sous un modèle de civilisation différent, marqué par l'influence de civilisations disparues ou tombées en déclin, comme les civilisations romaine, byzantine ou arabe. C'est précisément cette antithèse qui forme la colonne vertébrale du livre, dans lequel l'auteur, Carlos X Blanco, utilise les théories et les interprétations du célèbre philosophe allemand de l'histoire Oswald Spengler et de son œuvre monumentale Le déclin de l'Occident. 

Cependant, cet essai ne reste pas une simple analyse des contraires qui ont marqué l'histoire espagnole, mais nous fournit, au fil des pages, un schéma d'idées assez précis pour délimiter l'histoire de l'Espagne depuis ses débuts jusqu'à nos jours en fonction des catégories de la pensée spenglerienne. Il nous avertit également que nous devons comprendre les approches du philosophe et historien allemand dans leur contexte, avec toute sa terminologie et ses méthodes d'interprétation, tout en tenant compte des limites et des erreurs qu'il a pu commettre dans son travail tout au long de sa carrière intellectuelle. Il convient également de noter comment, dans la dernière partie du livre, il est fait référence à José Ortega y Gasset, que notre auteur décrit comme "le Spengler hispanique" pour sa vision plus élaborée des problèmes et des solutions possibles au problème espagnol et pour "sa compréhension du fait national". 

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Revenons à l'antithèse entre ces deux modèles de civilisation qui s'enracinent dans l'Espagne de l'Antiquité tardive et du haut Moyen Âge, dans une sorte de dualité qui, à la lumière de la pensée spenglerienne, permet de distinguer parfaitement les concepts antagonistes de "culture" (Kultur) et de "civilisation" (Zivilisation) si caractéristique de son approche. La culture représente l'état d'apogée vital, des grandes conquêtes et des réalisations historiques qui déterminent un type humain audacieux et particulièrement doué, qui deviendra l'archétype de la culture faustienne, qui dans le cas hispanique se reflète dans le nord-ouest de la péninsule, dans les territoires inclus dans le royaume asturien, et qui représente la tendance qui sera hégémonique dans le reste de l'orbe européen sous le christianisme faustien et où la présence de l'élément germanique sera fondamentale.

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La base fondatrice du royaume asturien était constituée d'Asturiens, de Cantabres et de Goths appartenant à la petite noblesse qui avaient fui l'avancée musulmane, se réfugiant dans les montagnes du nord. De cette union des peuples, de cette ethnogenèse, pour reprendre la terminologie de l'auteur, est né un nouveau peuple, une nouvelle culture au sens spenglerien. C'est un peuple avide de conquête, avec une conscience claire et sûre de la nécessité de chasser l'envahisseur maure et infidèle de la péninsule et d'être le porteur de l'Imperium. C'est par le début du processus de la Reconquête que se crée la nation espagnole, dont le point de départ est les Asturies, qui trouvera plus tard une continuité dans les actions de la Castille.

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En ce qui concerne l'hégémonie castillane, l'auteur cultive un certain préjugé à son égard, car elle représenterait un "concept métis et douteusement chrétien" qui a vécu son multiculturalisme de manière traumatique, avec pour conséquence les expulsions de Juifs et de Maures, l'Inquisition et l'intolérance. Tout cela était dû, selon notre auteur, au manque d'homogénéité sur le plan ethnique et religieux en raison d'un problème d'identité. En revanche, le Nord-Ouest représentait une société plus homogène sur le plan ethnique et religieux, avec son empreinte celto-germanique, beaucoup plus comparable au reste de l'Europe. En ce sens, peut-être devrions-nous nous tourner vers certains essais qui, depuis des années, ont contribué, avec une sorte de révisionnisme, à dissiper certains clichés et préjugés qui obscurcissaient l'histoire de l'Espagne dans ses siècles d'or, comme Elvira Roca Barea ou Iván Vélez, pour citer les plus importants. 

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Un autre des aspects déterminants signalés par rapport au Nord-Ouest est l'absence de villes, un environnement à prédominance rurale, dominé par la vie paysanne et villageoise libre, dans ce qui constitue l'axe principal du développement de la culture spenglerienne, et qui s'enracine et prospère sur le territoire, s'intégrant au paysage, se constituant ainsi comme une unité vivante assimilable à l'élément végétal, un conglomérat de peuples producteurs-conquérants. C'est le contraste évident avec l'homme antique et méditerranéen, l'homme du sud qui vit dans la ville, un produit de la civilisation, lorsque la culture perd son souffle vital et finit par se scléroser. Les habitants de ces villes sont les héritiers d'une civilisation qui fut en plein déclin, vieillie, produit de la pseudo-morphose romaine. Ils sont le sous-produit dégradé d'un modèle capitaliste urbain, esclavagiste, qui asservit et détruit les campagnes. Une nouvelle antithèse naît précisément de l'opposition entre la campagne et la ville, et elle est représentée par deux types d'âme différents : l'âme magique, typique de l'homme méditerranéen romain tardif, et l'âme faustienne des peuples du Nord-Ouest, ce qui explique en grande partie les attitudes différentes des uns et des autres face à l'invasion musulmane de 711.

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Le nouveau peuple né dans les montagnes cantabriques, avec son élément celto-germanique, montre les éléments vivants d'une culture faustienne, totalement indo-européenne dans sa formulation, avec le besoin de hiérarchies militaires dans une phase de vie très différente de l'hispano-romaine méridionale, et qui n'a rien à voir avec un quelconque élément de nature quichottesque, avec tout romantisme qui est explicitement rejeté par Spengler lui-même, comme cela se produira peut-être plus tard sous l'Empire, avec l'illusion de gouverner selon les postulats de la politique en ignorant les autres variables économico-matérielles, car ce qui compte dans l'histoire, ce sont les faits, matérialisés par les entreprises politiques dans leur ensemble. Dans ce cas, les rois asturiens ont effectivement assumé le passé mythique du royaume gothique déchu afin de prendre conscience de leur mission de propriétaires légitimes des terres usurpées par l'envahisseur sarrasin. Et la noblesse qui a émergé de ces terres était la quintessence de la classe villageoise que Spengler désigne comme la base fondamentale de toute culture faustienne. En même temps, comme toute culture faustienne, elle était fondée sur le principe dynastique et du sang, protégé dans le temps, l'aire de domination de tout principe aristocratique propre à la classe primordiale de la noblesse. 

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Mais le discours de Carlos X Blanco ne se limite pas aux débuts de la Reconquête, il comprend également un examen de l'histoire de l'Espagne dans son ensemble, comme nous l'avons noté dans les premières lignes de notre compte rendu. Le XVIIIe siècle, avec les Lumières et les grands changements et transformations politiques qui ont annoncé l'avènement de la modernité, surtout depuis la Révolution française, nous a présenté une Europe vieillissante, malade et en décomposition. Dans le cas de l'Espagne, à laquelle Spengler n'attache pas trop d'importance dans ses idées, bien qu'il reconnaisse qu'elle a fait partie d'une culture faustienne sous la figure du soldat et du conquérant, mais il croit qu'elle est passée. 

Avec la révolution industrielle, les archétypes du prolétaire et du bourgeois sont venus remplacer les précédents marqués par l'héritage et la lignée dans le monde agricole. Dès lors, le processus de dégénérescence est marqué par le triomphe de l'individualisme, du libéralisme, du démocratisme et par le triomphe de la ville sur la campagne. Avec tous ces éléments est venu l'avènement du matérialisme extrême, le triomphe de l'abstrait sur le concret, le pouvoir des grandes masses, de l'ochlocratie et le discours du marxisme, à l'égard duquel Spengler s'est livré à des préjugés idéologiques contre le prolétaire, en opposition ouverte, selon Spengler, au paysan, une populace envieuse et un détritus de la ville.

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Le début de la modernité, après 1789, est aussi la fin des nations, le début du jacobinisme centralisateur et la dénaturalisation des peuples dont les membres deviennent des citoyens, totalement inorganisés et atomisés. Et il est important de noter ici la différence entre peuple et nation, si souvent confondue à notre époque moderne, et qui dans le second cas correspond au légalisme et au vernis du constitutionnalisme, alors que le premier est une unité naturelle au-dessus des classes et des formalismes bourgeois. Cette dérive vers le bas s'accentue avec le temps jusqu'à atteindre le capitalisme d'entreprise d'aujourd'hui, avec une Europe géopolitiquement inopérante et devenue politiquement inexistante après la Seconde Guerre mondiale.

Après la guerre froide, l'Europe et ses démocraties libérales, qui ne sont rien d'autre que des ploutocraties, tournent le dos à leur histoire et tentent de se couvrir de ce vernis légaliste à travers des constitutions, des lois et la doctrine des soi-disant "droits de l'homme", et voilà la distinction spenglerienne entre les "vérités" (doctrines, idées, etc.) et les faits déterminés par la factualité même de l'histoire. C'est le monde des bourgeois, dont le socialiste fait également partie comme l'un de ses sous-produits les plus marquants, ennemis des peuples et des nations, ennemis des "classes primordiales" pointées par Spengler (la noblesse et le sacerdoce). Mais ce qui est fondamental dans ce monde décadent et artificiel, c'est le pouvoir de la technologie conçue comme un instrument de domination de la nature et de soumission de l'homme, l'outil fondamental du rationalisme qui imprègne toute la science. Aujourd'hui, nous le voyons plus que jamais à travers le pouvoir de la technologie sur nos vies et dans la formation d'un marché mondial ou dans l'avancée même du transhumanisme et, par conséquent, de la déshumanisation. 

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Dans le cas particulier de l'Espagne, qui obéit au contexte fondamental de l'essai, la modernité met en évidence l'existence d'un État failli, qui n'est pas à la hauteur des autres puissances européennes comme le Royaume-Uni ou la France. Nous sommes géopolitiquement inconséquents, d'un emplacement présenté comme un pont ou une charnière entre l'Europe et l'Afrique, historiquement soumis à des influences afro-sémitiques, étant les parents pauvres de l'Union européenne dans une adhésion qui, comme le souligne à juste titre l'auteur, a été une fatalité pour l'Espagne et sa souveraineté économique en démantelant les principaux secteurs stratégiques, le secteur agricole, et en nous laissant au secteur des services et au tourisme, ce qui offre peu d'opportunités d'emploi pour nos jeunes et le développement de notre potentiel en tant que nation. C'est une Espagne qui a renoncé à l'autosuffisance productive, un pays soumis à la corruption politique, à la mafia syndicale, à un patronat tyrannique et au parasitisme social, dont aucun secteur n'est capable d'exercer un rôle de leadership moral face à une telle catastrophe. 

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L'Espagne a également un autre problème, à savoir sa propre configuration territoriale et l'idée même de nation ou de patrie, ainsi que la manière dont elle est conçue. Tous ces problèmes sont devenus plus évidents que jamais avec l'actuel régime de 1978, sous un système libéral qui ignore complètement les particularités des différents peuples dont l'Espagne est née, car, comme le souligne à juste titre notre auteur, les territoires ont une mémoire et sont imprégnés d'histoire. Mais pour réunir à nouveau tous les peuples hispaniques, il est nécessaire de dépasser aussi bien le centralisme libéral d'origine jacobine et bourbonienne, celui du "centralisme madrilène", que celui du sécessionnisme périphérique et provincial, afin de promouvoir un changement qui doit venir du nord-ouest de la péninsule, des territoires qui ont été le point de départ de la Reconquête et qui représentent le principal foyer de l'européanité. L'Espagne autonome s'est déjà révélée non viable économiquement, historiquement et culturellement, et a également entravé le processus d'intégration entre la population et le territoire. Carlos Blanco est allé jusqu'à proposer son propre modèle d'organisation/division territoriale basé sur les territoires du Nord-Ouest (Galice, Asturies, León et Cantabrie), les deux Castillas fusionnées en une seule, et d'autres unités fédérées comme Aragon et Valence, ainsi que des unités intermédiaires au niveau local et foral. Ce serait un modèle très proche dans son idée de celui du traditionalisme hispanique, loin des caprices d'oligarchies libérales corrompues étrangères à notre histoire. Un modèle décentralisé, animé par la richesse et la pluralité des territoires qui composent ce que l'on appelait autrefois Las Españas. 

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Conformément au postulat de la pensée spenglerienne, dans la nécessité d'approfondir les aspects culturels et vitaux dans le développement de chaque âme collective et particulière, chaque peuple doit être jugé par les faits historiques et les réalisations auxquelles il a participé, dans ses aptitudes spécifiques. Particulièrement intéressant est l'appel que notre auteur fait à Ortega y Gasset, qui, comme Spengler, se positionne dans des positions anti-libérales et anti-socialistes, en ce qui concerne l'Espagne et ses problèmes de "vertébration".

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Pour Ortega, l'important était la nation au-dessus de tout pragmatisme juridique, et l'essentiel, comme le souligne à juste titre Spengler dans son œuvre, est la configuration ethnique des peuples qui habitent ses différents territoires face à toute imposition provenant du centralisme bourgeois et du modèle radial bourbonien. Il est intéressant de voir comment il est fait appel aux éléments de l'Espagne traditionnelle, aux corps intermédiaires, à toutes ces formes d'organisation sociale avec leurs propres conditionnements socio-juridiques, comme la Commune et la Famille, de caractère pré-étatique. La raison historique devient l'outil fondamental pour assembler les institutions, la société et les pouvoirs publics en un tout parfaitement organique. Par conséquent, il faut avant tout considérer la constitution historique, l'existence de formes coutumières dérivées de cette expérience historique. L'histoire ne doit donc pas être considérée comme un élément mort, un objet à collecter comme l'a fait la science historique positiviste, mais comme un élément vivant dont l'homme est porteur dans le présent, d'où la nécessité de tenir compte des expériences passées de chaque peuple dans l'organisation et le fonctionnement de chaque communauté nationale et organique. 

En guise de conclusion, nous pouvons dire que ce livre nous invite à une profonde réflexion sur l'Espagne d'aujourd'hui à la lumière de la pensée spenglerienne, et qu'il cherche à trouver les moyens d'inverser le cours de la décadence et de la dégénérescence qui nous conduisent vers une mort certaine en tant que civilisation en état de putréfaction à tous les niveaux, ou du moins qu'il s'agit d'un diagnostic très précis de notre situation actuelle et du monde moderne dans lequel nous nous trouvons. En résumé, ce travail nous permet de comprendre les dimensions du problème auquel nous sommes confrontés à partir de paramètres interprétatifs politiquement incorrects, avec un penseur fortement stigmatisé, mais non moins précis dans sa méthodologie et son analyse interprétative.

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mercredi, 16 juin 2021

Le déclin de l'Europe annoncé il y a un siècle

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Le déclin de l'Europe annoncé il y a un siècle

Valentin Katasonov*

Ex: http://www.elespiadigital.com/index.php/tribuna-libre/34222-2021-05-27-11-56-23

Il y a environ cent ans paraissait le livre "Le déclin de l'Occident" (Der Untergang des Abendlandes) d'Oswald Spengler (1880-1936). Je dis "approximativement" parce que l'œuvre se compose de deux volumes, elle a dès lors deux dates de naissance. Le premier volume a été publié en 1918, le second en 1922.

Le livre est né à une époque où l'Europe se consumait dans les flammes de la Première Guerre mondiale, et les mots "décadence", "effondrement", "mort" de l'Europe en 1918 n'étaient pas perçus comme choquants.

Dans une traduction exacte, le titre du livre de Spengler ressemble plutôt à l'anglais "The Sunset of the West" (= Le crépuscule de l'Occident), et l'accent mis sur l'Europe dans l'édition traduite a été mis dans les années 1920 : l'Amérique du Nord semblait alors assez prospère, il n'y avait aucun signe du déclin du nouveau monde. Aujourd'hui, il s'agit d'une autre question, celle de savoir si le livre de Spengler doit revenir à son titre original que nous baptiserions en anglais "Sunset of the West".

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Pendant une centaine d'années, l'œuvre de Spengler a figuré parmi les plus célèbres ouvrages du XXe siècle sur la philosophie de l'histoire et de la culture. À différents moments, l'intérêt pour le livre a explosé puis s'est émoussé. K. A. Svasian, qui a fait une nouvelle traduction du premier volume de Der Untergang des Abendlandes donne, dans la préface à la publication de ce volume en 1993, des statistiques intéressantes. En Allemagne, entre 1921 et 1925, la bibliographie des ouvrages sur Spengler contient 35 titres. Dans les cinq prochaines années, leur nombre sera réduit à cinq. 1931-1935 - pendant la période marquée par la persécution de Spengler par les nazis, neuf œuvres apparaissent, en 1936-1940 - cinq encore. "Dans la période d'après-guerre", écrit K. A. Svasyan, "l'image s'est considérablement détériorée, et ce n'est que dans les années 1960 qu'il reveindra timidement à l'avant-plan, grâce aux efforts d'Anton Mirko Koktanek (l'auteur du livre Oswald Spengler und seine Zeit publié en 1968 - V.K.) , lequel a publié la correspondance de Spengler et certains matériaux de son héritage... éphémère..."

Il me semble que dans les années 1990 et 2000, l'intérêt pour l'œuvre de Spengler a commencé à retomber, est resté le même dans les années 2010, et depuis l'année dernière, l'intérêt est reparti. Et ce n'est pas étonnant : des signes sont apparus non seulement du déclin, mais aussi de la mort de l'Europe, de l'ensemble du monde occidental, voire de l'humanité.

oseph.jpgLes évaluations du travail de Spengler étaient différentes, parfois diamétralement opposées. L'une des premières estimations appartient au philosophe et sociologue allemand Georg Simmel (1858-1918). Il a pris connaissance du premier volume du Déclin de l'Occident un mois avant sa mort et a qualifié l'œuvre de Spengler de "philosophie la plus significative de l'histoire après Hegel". Mais le philosophe et culturologue allemand Walter Benjamin (1892-1940) considérait l'auteur du Déclin de l'Occident comme "un petit chien sans intérêt".

L'œuvre de Spengler est inégale et ambiguë. On y trouve de la trivialité et de l'ingéniosité, mais aussi des choses tout à fait originales. L'auteur fait preuve d'une étonnante érudition en termes de connaissance de nombreuses cultures. Certains critiques ont fait remarquer à Spengler qu'il avait construit sa philosophie de l'histoire sur des bases fragiles, sans se référer à de nombreux ouvrages sur la philosophie de l'histoire. Spengler dans les pages de Der Untergang des Abendlandes réfute les attaques qu'il attendait. Il déclare qu'il ne fait pas confiance à la science académique officielle. Cette histoire, comme les autres sciences sociales (humanitaires), il ne la considère pas comme une science, s'appuyant uniquement sur les sciences naturelles. Mathématicien de formation, Spengler s'appuie principalement sur cette science-là. Il aime le mysticisme des nombres, et le premier chapitre du premier volume s'intitule "Sur la signification des nombres".

Beaucoup ont attribué l'œuvre de Spengler au genre de la philosophie de l'histoire (l'historiosophie). Cependant, l'auteur lui-même a déclaré que les critiques ne comprenaient même pas son intention. Il s'agit d'un ouvrage portant non pas sur la philosophie de l'histoire, mais sur la culture en tant que phénomène de l'histoire humaine. Dans l'histoire, certaines cultures sont remplacées par d'autres, diverses cultures coexistent, les cultures peuvent s'influencer mutuellement, s'emprunter quelque chose, se concurrencer et même essayer de se détruire. Avec une certaine variabilité dans les formes externes, la structure interne de la culture est très forte. L'objet de recherche de Spengler est la culture, sa structure et ses formes. Le sous-titre de Der Untergang des Abendlandes explique d'ailleurs l'intention de l'auteur : "Essais sur la morphologie de l'histoire mondiale".

imaosdows.jpgSpengler considère la science historique officielle comme primitive : "Le monde antique, le Moyen Âge, les temps modernes : voilà un schéma incroyablement maigre et vide de sens". Spengler oppose ce schéma linéaire à son schéma morphologique. La morphologie est une science née dans le cadre des sciences naturelles, qui étudie la structure et les formes des différents objets du monde matériel : minéraux, végétaux, organismes vivants. Et Spengler applique le schéma de l'étude morphologique de la nature à la société humaine. Pour Spengler, toute société est un organisme à la structure complexe, aux éléments et aux formes interconnectés. Et cet organisme social s'appelle "culture". Toute culture est précédée par la naissance d'une "âme", par laquelle Spengler entend une nouvelle vision du monde (religieuse ou scientifique) : "Toute nouvelle culture s'éveille avec une certaine nouvelle vision du monde".

Spengler a identifié huit cultures mondiales : égyptienne, babylonienne, chinoise, indienne, mésoaméricaine, antique, arabe et européenne. Spengler mentionne également la neuvième grande culture : la culture russe-sibérienne. Il la considérait comme un éveil et en parlait très brièvement, ses contours étaient vagues pour lui.

Il est facile de voir que la "culture" de Spengler correspond à ce qu'on appelle plus souvent "civilisation" aujourd'hui.

Bien que Spengler ait également fait usage du concept de "civilisation", mais l'utilise toutefois dans un sens différent. Dans son concept, chaque culture a son propre cycle de vie : "Chacune a sa propre enfance, sa propre jeunesse, sa propre maturité et sa propre vieillesse". Ce qui précède la vieillesse, Spengler l'appelle culture au sens propre du terme. Et il appelle une culture vieillissante et mourante une "civilisation": "Chaque culture a sa propre civilisation". Les civilisations "continuent à devenir ce qu'elles sont devenues, la vie comme la mort, le développement comme l'engourdissement ...". Spengler calcule l'espérance de vie moyenne des cultures à un millénaire, suivi de la léthargie et de la mort. Pour décrire la civilisation, Spengler a introduit le concept de "fellahisation", c'est-à-dire "l'acquisition lente d'états primitifs dans des conditions de vie hautement civilisées".

Plusieurs cultures sont déjà passées par une phase de civilisation, disparaissant ensuite de l'histoire (les cultures égyptienne, babylonienne, antique). Spengler identifie les traits distinctifs suivants de la phase de civilisation: la domination de la science (scientisme) ; l'athéisme, le matérialisme, le révolutionnisme radical; la sursaturation technologique; le pouvoir de l'État devient tyrannie; l'expansion extérieure agressive, la lutte pour la domination mondiale. Il considère également comme un signe de "civilisation" le remplacement des établissements ruraux par des villes géantes, la formation de grandes masses humaines dans celles-ci : "dans la ville-monde, il n'y a pas de gens, il n'y a que de la masse".

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Spengler identifie et analyse scrupuleusement tous les signes de la disparition des cultures primitives afin de répondre à la question : à quel stade de son développement se trouve la culture européenne ? Selon lui, cette culture est née à la jonction du premier et du deuxième millénaire après la naissance du Christ. La durée de vie moyenne des cultures qu'il a examinées avant d'entrer dans le stade de la "vieillesse" ("civilisation") est d'environ mille ans. Il s'avère que sur la base de ces termes estimés, la culture européenne est sur le point de se transformer en civilisation.

Apparemment, Spengler ne croyait pas vraiment (ou ne voulait pas croire) que la culture européenne entrerait rapidement dans une phase de décrépitude et de mort. Lui-même, comme il l'a avoué dans ses notes autobiographiques, est arrivé à cette conclusion de manière soudaine. Ce fut une sorte de révélation au moment où il apprit le déclenchement de la Première Guerre mondiale : "Aujourd'hui, au plus grand jour de l'histoire du monde qui tombe sur ma vie et qui est si impérieusement lié à l'idée pour laquelle je suis né, le 1er août 1914, je me sens seul chez moi. Personne ne pense même à moi. C'est alors qu'il a conçu l'idée de justifier rationnellement le "déclin de l'Europe".

De nombreux détracteurs de Spengler l'ont accusé d'emprunter, voire de plagier. La liste des prédécesseurs à qui Spengler aurait "emprunté" est assez longue. Plus d'une centaine de noms sont cités, en commençant par Machiavel, en poursuivant par Hegel, Schelling, les encyclopédistes français, pour finir par Henri Bergson, Theodore Lessing, Houston Stuart Chamberlain, Max Weber, Werner Sombart. Ces listes comprenaient également deux penseurs russes : Nikolai Danilevsky et Konstantin Leontiev.

51D11GFPS9L._SX348_BO1,204,203,200_.jpgEn réponse à ces attaques, Spengler a déclaré que s'il avait réellement étudié les œuvres d'un cercle aussi large de personnes intelligentes, voire brillantes, il n'aurait pas eu le temps d'écrire ses propres œuvres. Spengler a admis qu'il avait des prédécesseurs: Johann Wolfgang Goethe et Friedrich Nietzsche. Les deux sont les idoles de Spengler. Voici un extrait des notes de Spengler sur Nietzsche : "Il a découvert la tonalité des cultures étrangères. Personne avant lui n'avait la moindre idée du rythme de l'histoire...... Dans le tableau de l'histoire, que les recherches scientifiques ultérieures ont résumé en dates et en chiffres, il a d'abord connu un changement rythmique d'époques, de mœurs et de modes de pensée, de races entières et de grands individus, comme une sorte de symphonie ... Le musicien Nietzsche élève l'art du sentiment au style et au sentiment des cultures étrangères, sans tenir compte des sources et souvent en contradiction avec elles, mais quel sens !". Dans les notes autobiographiques de Spengler, publiées après sa mort, on trouve une telle révélation : "J'ai toujours été un aristocrate. Nietzsche était clair pour moi avant même que je ne le connaisse."

L'influence de Goethe sur Spengler n'est pas moins évidente. La culture européenne, qui était au centre de l'attention de Spengler, il l'appelle la culture faustienne, ou "la culture de la volonté", et Faust en est un symbole. Pour lui, la culture faustienne qui se désintègre est la civilisation faustienne, et le citoyen de la civilisation faustienne est un nouveau nomade, pour qui l'argent et le pouvoir passent avant les mythes héroïques et la patrie.

PS : Dans ses mémoires, la sœur de Spengler a écrit à propos du dernier voyage de l'auteur du "Déclin de l'Occident" : "Nous avons mis Faust et Zarathoustra dans le cercueil. Il les prenait toujours avec lui quand il partait quelque part".

Le déclin de l'Europe hier et aujourd'hui

En poursuivant la conversation sur Le déclin de l'Occident d'Oswald Spengler, il n'est pas superflu de parler de ceux qui peuvent être considérés comme ses précurseurs et ses suiveurs.

J'ai déjà dit que Spengler lui-même a identifié ses mentors, deux seulement : Goethe et Nietzsche. "Il avait cette façon, écrit Spengler à son éditeur Oscar Beck, de connaître plus de cinquante prédécesseurs, dont Lamprecht, Dilthey et même Bergson. Leur nombre, quant à lui, devait dépasser la centaine. Si je m'étais mis en tête d'en lire au moins la moitié, aujourd'hui je n'aurais pas fini .... Goethe et Nietzsche sont les deux penseurs dont je me sens dépendant de manière fiable. Celui qui, depuis vingt ans, déterre des "prédécesseurs" ne pense même pas que toutes ces pensées, et de surcroît dans une édition beaucoup plus anticipée, sont déjà contenues dans la prose et les lettres de Goethe, comme, par exemple, l'enchaînement des premiers temps. de l'ère, de l'ère postérieure et de la civilisation dans un petit article "Epoques spirituelles", et qu'il est aujourd'hui généralement impossible de dire quoi que ce soit qui n'ait été mentionné dans les volumes posthumes de Nietzsche."

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Nikolai Danilevski & Konstantin Leontiev.

Dans la longue liste de ceux qui ont alimenté de leurs réflexions l'auteur du Déclin de l'Occident, les penseurs russes Nikolai Yakovlevitch Danilevsky (1822-1885) et Konstantin Nikolaevitch Leontiev (1831-1891) sont également mentionnés. Cependant, il est ici presque impossible de parler d'emprunts: en Occident, ces penseurs étaient peu connus, peu traduits. Ainsi, la traduction allemande de Russia and Europe (1869) de Danilevsky n'a été publiée qu'en 1920, deux ans après la publication du premier volume de Der Untergang des Abendlandes. Rien n'indique que Spengler ait lu Danilevsky, Leontiev et les auteurs russes en général.

Et la similitude de certaines des idées entre ces trois-là est frappante. Pour un Allemand, le concept clé est "culture", pour N. Danilevsky, c'est "type culturel-historique". Pour un Allemand, la "culture" signifie un "organisme", c'est-à-dire un système social complexe composé d'une idéologie (religion), d'une science, d'un art, d'une économie, d'un droit et d'un État interconnectés. Danilevsky dit presque la même chose dans son Russia and Europe. La même composition, le même principe morphologique (la forme détermine le type de culture). Même analogie avec les organismes vivants (Danilevsky était biologiste de formation).

La "culture" de Spengler, le "type culturel-historique" de Danilevsky, la "civilisation" de Toynbee sont des concepts identiques, Danilevsky a juste eu recours à ce concept plusieurs décennies avant Spengler et Toynbee.

En ce qui concerne la proximité idéologique entre Konstantin Leontiev et Oswald Spengler, il convient de noter que le penseur allemand consacre une part importante de son œuvre à la description du cycle de vie de la culture. Pour lui, le point de départ de la naissance d'une culture est la vision du monde: "Chaque nouvelle culture s'éveille avec une certaine nouvelle vision du monde". Spengler, dans le cadre de la vision du monde, peut comprendre à la fois la religion et le système des vues scientifiques. La vie de la culture, selon Spengler, se développe selon le schéma suivant: "Chaque culture passe par les étapes de l'âge d'un individu. Chacun a son enfance, sa jeunesse, sa maturité et sa vieillesse". Dans Der Untergang des Abendlandes, il identifie quatre étapes du cycle de vie de la culture : 1) l'origine ("mythologique-symbolique") ; 2) le début ("morphologique") ; 3) le sommet ("métaphysique et religieux") ; 4) le vieillissement et la mort ("civilisation").

Konstantin Leontiev (qui a repris de Danilevsky le concept de "types culturels-historiques", mais a également utilisé les termes "culture" et "civilisation") a presque le même schéma. Leontiev a formulé la loi du "processus trilatéral de développement", selon laquelle tous les organismes sociaux ("cultures"), comme les organismes naturels, naissent, vivent et meurent : il a défini la naissance comme la "simplicité primaire", la vie comme la "complexité florissante", la mort comme la "simplification secondaire du mélange". Leontiev a diagnostiqué le début de la transition de la culture européenne de la phase de "complexité florissante" à la phase de "simplification par mélange secondaire" dans l'ouvrage Byzantinisme et monde slave (1875). Dans le langage de Spengler, c'est le "déclin de l'Europe". La chronologie des étapes de la civilisation (culture) européenne est similaire pour Spengler et Leontiev. L'apogée de l'Europe dans les deux cas remonte à la période des XVe-XVIIIe siècles, et la transition vers le stade de l'extinction commence au XIXe siècle. Seul Leontiev a formulé l'idée d'un "processus de développement trilatéral" ("cycle de vie de la culture") quarante-trois ans avant le philosophe allemand.

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Arnold Toynbee.

En Occident, il est généralement admis que l'ouvrage le plus fondamental sur l'histoire et la théorie des civilisations est l'ouvrage fondamental (en 12 volumes) A Study of History d'Arnold Toynbee (1889-1975). Cet Anglais a admis que pour lui Spengler était un génie, et, lui, Toynbee, a adopté et développé l'enseignement de l'Allemand sur les cultures et les civilisations (Toynbee a étendu la liste de Spengler de 8 cultures majeures à 21, les appelant civilisations).

La priorité incontestée de deux penseurs russes - Danilevsky et Leontiev - par rapport à Spengler et Toynbee est malheureusement rarement, voire pas du tout, évoquée.

Les chercheurs de l'œuvre de Spengler notent la forte influence de Der Untergang des Abendlandes sur José Ortega y Gasset (1883-1955), philosophe, publiciste et sociologue espagnol. Dans ses œuvres majeures La déshumanisation de l'art (1925) et La révolte des masses (1929), un Espagnol a exposé pour la première fois dans la philosophie occidentale les idées fondamentales sur la "culture de masse" et la "société de masse" (culture et société qui se sont développées en Occident à la suite de la crise de la démocratie bourgeoise et de la pénétration des diktats de l'argent dans toutes les sphères des relations humaines). Mais cette idée a d'abord été formulée par Spengler, qui a décrit les signes de la mort de la culture dans les phases de la civilisation. Le signe le plus important de cette mort est l'urbanisation, la concentration de personnes dans des villes géantes, dont les habitants, selon Spengler, ne sont plus du tout des citoyens, mais une "masse humaine" dans laquelle une personne a le sentiment de faire partie d'un collectif impersonnel, d'une foule.

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Nikolai Berdiaev.

Tous les intellectuels allemands n'ont pas eu le temps de réagir à la sortie du Déclin de l'Occident, et à Petrograd en 1922 est apparu le recueil Oswald Spengler et le déclin de l'Europe (auteurs N. A. Berdiaev, Ya. M. Boukchan, F.A., S . L. Frank). Le plus intéressant de ce recueil est l'essai de Nikolaï Berdiaev intitulé Pensées de Faust sur son lit de mort ..... Berdiaev pensait à Oswald Spengler lui-même, un admirateur de la culture "faustienne" (européenne). Le paradoxe de ce nouveau Faust, selon Berdiaev, est que, tout en décrivant les signes de l'apocalypse, il n'a pas compris qu'il s'agissait de l'Apocalypse de Jean le Théologien. Il (c'est-à-dire Faust, également connu sous le nom de Spengler) montre que la culture européenne, qui entre dans la phase de "civilisation", mourra, et qu'une nouvelle culture la remplacera, mais elle ne viendra pas ! La tragédie de Spengler-Faust, souligne N. Berdiaev, est que, étant athée, il ne réalise pas que la religion est le noyau de toute culture. La civilisation européenne (selon Berdiaev) tue finalement la religion, et, sans elle, la suite de l'histoire terrestre est impossible. Les chercheurs qui se sont penchés sur la créativité de N. Berdiaev ont noté que les travaux de Spengler ont eu une forte influence sur le philosophe russe,

La Seconde Guerre mondiale a pleinement manifesté la tendance désastreuse décrite dans Le Déclin de l'Occident. Depuis lors, de nombreux philosophes, historiens et politologues ont diffusé un état psychologique alarmant. Cette alarme est portée sur les couvertures des livres publiés: Jane Jacobs, The Decline of America. The Dark Ages Ahead (1962); Thomas Chittam, The Collapse of the United States. The Second Civil War. 2020  (1996) ; Patrick Buchanan, Death of the West (2001), On the Brink of Death (2006), The Suicide of a Superpower (2011); Andrew Gamble, A Crisis Without End ? The Collapse of Western Prosperity (2008), etc.

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L'un des auteurs qui a utilisé les concepts de "culture faustienne" et de "civilisation faustienne" de Spengler était Igor Ivanovitch Sikorsky, qui, en tant que concepteur d'avions de premier plan (et d'hélicoptères), était également théologien. En 1947, son ouvrage Invisible Encounter est publié aux États-Unis. L'un des concepts avec lesquels Sikorsky décrit l'état du monde au 20ème  siècle est la "civilisation faustienne" de Spengler.

*Professeur, docteur en économie, président de la Société économique russe. S.F. Sharapova.

jeudi, 10 juin 2021

L'intuition d'un livre intuitif. Un siècle après Spengler

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L'intuition d'un livre intuitif. Un siècle après Spengler

Le produit de masse de la décadence de la civilisation occidentale est déjà une sorte d'animal urbain dénaturé, qui a enterré ou tué ses archétypes.

par Carlos X. Blanco

Ex: https://www.tradicionviva.es/2021/06/08/la-intuicion-de-un-libro-intuitivo-un-siglo-despues-de-spengler/   

Der Untergang des Abendlandes est un livre intuitif à lui seul. Le véritable historien est un philosophe de l'histoire, un homme doté d'une faculté particulière, l'intuition historique, un pouvoir avec lequel il saisit, à la manière d'un artiste, les objets de sa connaissance. Ce qui est à découvrir dans l'Histoire, ses objets, ne sont pas des entités statiques, fixes et mortes, mais un flux d'êtres historiques, comme le fleuve d'Héraclite dans lequel on ne peut se baigner deux fois. Les êtres historiques ne sont pas du tout des objets rigides ou morts. L'intuition historique est, avant tout, un devenir. Le philosophe de l'histoire n'a d'autre choix que de se présenter devant le devenir. En tant que penseur, il fait partie de ce devenir, et il n'est pas libre de saisir ce qu'il doit saisir si son contexte personnel est, en fait, celui d'un philosophe de l'histoire. Dans l'avant-propos de la deuxième édition allemande, Spengler écrit : "Un penseur est un homme dont le destin consiste à représenter symboliquement son époque au moyen de ses intuitions et concepts personnels. Il ne peut pas choisir. Il pense comme il doit penser, et ce qui est vrai pour lui est finalement ce qui naît avec lui, constituant l'image de son monde " [LDO, I, p. 20]. Ein Denker est dans Mensch, dem es bestimmt war, durch das eigene Schauen und Verstehen die Zeit symbolisch darzustellen. Il n'a pas le choix. Er denkt, wie er denken muss, und wahr ist zuletzt für ihn, was als Bild seiner Welt mit ihm geboren wurde, VII].

cms_visual_1056799.jpg_1529499361000_267x450.jpgLe philosophe de l'histoire porte en lui un archétype, inné et non construit, et lorsque ces objets fluides lui sont présentés, il n'a pas le choix. Il déploie les potentialités de son archétype. Au niveau personnel et gnoséologique, il se passe la même chose que dans le cycle des cultures. L'âme de chaque culture, lorsqu'elle naît dans une parcelle primordiale, est tout entière un immense -mais non infini- rassemblement de possibilités : la biographie de cette culture est l'ensemble des manifestations déjà closes, qui se présentent à son regard et à sa compréhension. Une manifestation historique est déjà une obstruction à des possibilités qui n'ont pas eu lieu.

Et qu'est-ce que la vérité historique ? Il ne s'agit pas, à la manière de l'évolutionnisme et du matérialisme historique, d'une construction ou de la découverte de causes finales ou efficientes, de relations fonctionnelles, etc. La vérité historique spenglerienne est une vérité par découverte, mais par découverte de l'archétype qu'un type d'homme très spécifique doit réaliser. Un homme, disait Fichte, réalise la philosophie selon le genre d'homme qu'il est. Eh bien, le philosophe spenglerien, ou le véritable historien qui comprend l'objet du devenir, est un homme très proche du poète. Le poète n'est ni un raisonneur ni un bâtisseur de systèmes. Il est une lanterne qui se concentre dans les profondeurs de son âme et trouve le trésor auquel il est appelé :

"La vérité, il ne la construit pas, mais la découvre en lui-même. La vérité, c'est le penseur lui-même ; c'est sa propre essence réduite à des mots, le sens de sa personnalité vidé en une doctrine. Et la vérité est immuable pour toute sa vie, parce qu'elle est identique à sa vie" [LDO, I, 19] [Es ist das, war er nicht erfindet, sondern in sich entdeckt. Es ist er selbst noch einmal, sein Wesen in Worte gefasst, der Sinn seiner Persönlichkeit als Lehre geformt, unveränderlich für sein leben, weil es mit seinem Leben identisch ist", VII].

Il n'y a pas d'invention de la vérité historique, il y a l'intuition et la découverte de son propre archétype. Une faculté intuitive qui rend compte de la construction de l'histoire est en accord avec un livre qui a fait l'histoire : Le Déclin de l'Occident, un texte qui, selon les mots de son auteur lui-même, est "... intuitif dans toutes ses parties". Il est écrit dans un langage qui cherche à reproduire avec des images sensibles les choses et les relations, au lieu de les substituer par des séries de concepts" [LDO, I, p. 20]. Il est difficile de rédiger et de faire rédiger un texte dans une langue qui décrit les situations et les relations d'une manière claire et nette, sans qu'il soit nécessaire d'établir des comparaisons entre les textes, et c'est aux lecteurs qu'il revient de le faire, car les textes et les images sont tout aussi claires", VIII]  [Es ist anschaulich durch und durchgeschrieben in einer Sprache, welche die Gegenstände und die Beziehungen sinnlich nachzubilden sucht, statt sie durch Begriffsreihen zu ersetzen, und es wendet sich allein an Leser, welche die Wortklänge und Bilder ebenso nachzuerleben verstehen”, VIII]..

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Ce lecteur, pour vraiment comprendre ce livre, doit être un lecteur poétique. Il est obligé de percevoir la décadence très profondément. Le produit de masse de la décadence de la civilisation occidentale est déjà une sorte d'animal urbain dénaturé, qui a enterré ou tué ses archétypes. Ou bien c'est une créature transplantée d'autres cultures, le nouveau nomade, l'être sans racines. Ce type de lecteur ne verra dans la grande œuvre spenglerienne qu'une accumulation d'absurdités, de textes non rationnels, de fatras de toutes sortes de choses. Pour ce nouveau nomade sans racines, pas le livre qu'écrit Spengler. Mais dans la même présentation de l'ouvrage, Oswald Spengler s'adresse de façon individuelle à celui qui est capable d'intuitionner l'archétype même qui lui parlera de la décadence de sa civilisation, car il lui suffira d'opposer cette âme faustienne à tous les phénomènes -parfois horribles- qui se déroulent autour de lui et alors... quoi ? Alors il ne succombera pas au désespoir. Le sort qui nous est réservé ici n'est pas à regretter. Il faut aimer le destin et chevaucher le tigre. Vous devez vous préparer pour un dernier combat.

Un monde entier s'effondre, mais avant le chaos et la décadence, il reste un combat à mener. Le philosophe du socialisme prussien n'est pas - pas du tout - le philosophe pessimiste, qui prône la passivité ou la lâcheté de la résignation. Il est l'homme qui voit loin et qui est capable de prévoir, comme il y a juste un siècle, les tâches de lutte pour un monde qui va tomber. Parce qu'il doit y avoir une lutte, et que la transition vers un nouveau "monde" au sens spirituel est inéluctable, et que sans notre lutte, l'horreur ne fera que croître.

Note : les citations sont extraites de la traduction espagnole de Manuel García Morente, La Decadencia de Occidente, volume I, Austral, Madrid, 2011. La version allemande consultée est celle du Deutscher Taschenbuch Verlag, Munich, 1979, qui est elle-même basée sur celle de Beck (Munich, 1923) : 

lundi, 21 décembre 2020

Spengler et le kathekon

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Spengler et le kathekon

Carlos X. Blanco

Ex: https://decadenciadeeuropa.blogspot.com

Le philosophe allemand Oswald Spengler a été, à mon avis, le grand phare du XXe siècle. Au-delà de quelques exagérations, surtout dans le domaine de ses analogies et de ses audaces poétiques, et au-delà de son allergie au rationalisme et à la pensée systématique, cet homme était, avant tout, un prophète, un esprit puissant et fin, une lumière qui nous éclaire sur la longue perspective.

Il y a un siècle, il a publié Le Déclin de l'Occident [Der Untergang des Abendlandes]. Le titre même, la polysémie (surtout pour un hispanophone) du terme Untergang, sa propre conception très originale, c'est-à-dire une conception qui veut que l'histoire ait une morphologie, qu'elle est un paysage de cultures et de civilisations plutôt qu'un flux d'événements qui peuvent être "expliqués" par des lois ... tout cela et bien d'autres choses encore ont fait que son livre était destiné au succès et, pour ou contre lui, de près ou de loin, tout le monde en parlait. Spengler est, comme son compatriote Schopenhauer, l'auteur d'"un livre". Il est vrai qu'il a fait publier d'autres textes, dont aucun n'est exempt d'étincelle féconde, d'intuition, de substance, d'intérêt historique, politique, sociologique, métaphysique. Mais Der Untergang des Abendlandes est sa cathédrale, son Magnum Opus, son sommet, d'une manière similaire à la façon dont Le monde comme volonté et comme représentation a été la carte d'entrée unique à l'Olympe de la pensée pour Arthur Schopenhauer. C'est dans ce fait là, celui d'être les auteurs d'un seul grand livre, et non dans leur « pessimisme », que je placerais la parenté entre les deux penseurs, Oswald Spengler et Arthur Schopenhauer. Je ne pense pas qu'il y ait un réel pessimisme - du moins pas chez Spengler - lorsque l'auteur nous dit que cet effondrement et cette dissolution (Untergang) sont aussi étrangers à nos sentiments et à nos désirs que l'évaporation d'une goutte du fleuve ou le lent glissement d'une couche tectonique peuvent l'être pour la galaxie tout entière. Un tel regard "cosmique", et plus que "cosmique", quasi théiste, avec lequel le philosophe de l'histoire veut se donner une vaste perspective, en vue de dépouiller le cours inexorable des événements humains de tout anthropomorphisme, rappelle notamment les prédécesseurs non reconnus de Spengler : Hegel ou Marx, que ces prédécesseurs regardent le passé avec les yeux du réactionnaire, ou qu'ils entrevoient l'avenir de façon progressiste et révolutionnaire.

Hegel et Marx, eux aussi, ont adopté dans une large mesure le "point de vue de Dieu" pour voir ce que font les rois, les sujets, les concurrents ou les paysans, les ouvriers ou les magnats, en tant que sujets encastrés dans des masses, ou à la manière des fourmis piégées dans le miel, une substance collante fourrée dans un bocal de verre sur le point de tomber en morceaux sur le sol. Que la raison suive son cours inexorable (Hegel), ou que "les forces sociales au-dessus de la volonté humaine" (Marx) déterminent les individus et les groupes dans leurs lignes de conduite, sont des schémas de pensée qui ne sont pas très éloignés du fatum spenglerien. Ce dernier nous dit que l'histoire est la biographie des cultures et que les cultures - et non les "sociétés" ou les "nations" - sont la véritable unité vitale dont le cours doit être étudié par l'historien.

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L'homme européen, et plus précisément une partie importante et déterminante de cet homme européen, l'Espagnol, vit aujourd'hui une époque sombre, à la croisée des chemins. Il y a trop de ténèbres ce soir pour savoir quel chemin prendre. Certains chemins mènent à coup sûr à une falaise dont le fond semble aussi profond que l'enfer. D'autres pistes sont incertaines et mènent à la "mort". Qui, si ce n'est Spengler, a réfléchi aussi subtilement à la mort fatale des cultures ? Les cultures, déjà anciennes et atteintes de sclérose, sont appelées Civilisations. Ce sont les grandes civilisations de la Terre, des plantes flétries de plus en plus solidifiées, presque minérales. Et leurs villes sont faites de pierre (ou d'asphalte, de béton, d'acier). Des villes disproportionnées et hautaines, "cosmopolites" et "multiculturelles" qui, en réalité, ignorent le sol dont elles sont issues et se développent contre les racines mêmes d'où cette culture, en tant que jeune progéniture, a un jour germé. Nous vivons dans une Espagne et une Europe asphaltées, à plusieurs mètres au-dessus de l'humus dont sont issus nos groupes ethniques, nos racines, nos croyances. Nous vivons, daltoniens, sans voir le sang rouge de ceux qui ont versé le leur pour que nous puissions être ici.

Aucun parti politique ne peut redonner vie au cadavre de notre Espagne et de notre culture européenne, qui est devenue une civilisation universelle pétrifiée. La peur de la balkanisation de l'Espagne, le dégoût de l'euro-bureaucratie de Bruxelles, l'horreur de l'invasion allogène, la détérioration de la famille, la dangerosité et l'impunité des criminels, les moqueries à l’encontre de notre Histoire et de nos Gloires, l'injustice économico-sociale, la montée de l'ochlocratie à l'intérieur et à l'extérieur des partis... Rien de tout cela, seul ou en synergie, ne peut aujourd'hui constituer le déclencheur du souci collectif de former un "katehon", un mouvement de résistance face à la dissolution. L'Espagne seule ne peut plus résoudre ces problèmes. Nous avons besoin d'un mouvement de résistance et d'opposition à la décadence des deux côtés de l'Atlantique, sur les rives de l'océan où nous avons encore des frères : l'Amérique et l'Europe. Une "droite", bourrée de complexes et jouant à gagner des sièges et des conseils ne nous suffit plus. En réalité, ni la gauche ni la droite ne nous sont utiles. Toute la petite affaire montée en 1978 en Espagne (le nouvel ordre constitutionnel post-franquiste) ne sert plus à rien. Nous avons besoin d'un grand pôle de rétivité populaire et d'une nouvelle sève innervée de colère. La nuit sera très sombre. C'est le moment pré-césariste que Spengler a prophétisé. C'est l'obscurité qui pénètre dans votre âme, où tout est confus, dans un bourbier où même les excréments sont avalés avec plaisir et il faut, à ce moment-là, avoir un phare dans le cerveau et voir les choses bien à l'intérieur.

Source : La Tribuna del País Vasco

mardi, 13 octobre 2020

Soldiers, Anarchs, and Ideologues

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“Soldiers, Anarchs, and Ideologues” 

I have a contribution to this titled “Nietzsche vs. Hitler: Anti-Nazism on the German Revolutionary Right.”

Copies of SOLDIERS, ANARCHS & IDEOLOGUES: HEROES OF THE CONSERVATIVE REVOLUTION are 175 pages in length and cost just 20 EUROS with free postage to anywhere in the world. The PayPal address is blackfrontpress@yahoo.co.uk and you can find more details below.

AFTER the tremendous success of our two-volume series, Eye of the Storm, Black Front Press has decided to widen its scope a little and feature one or two examples of those who pursued similar ideas elsewhere. Rather than confine our study to Germany, therefore, this latest volume includes Conservative Revolutionary trends from countries as far afield as Portugal and China. We are certain that this book will provide you with both a sufficient grounding in the subject concerned and a springboard from which to inform and enhance your own thoughts and actions.

Chapters include

Unity in Diversity: Ernst Jünger and the Importance of Multiplicity;

Chiang Kai-Shek: Revolutionary Conservative;

The Marburg Speech;

A Critical Look at Jünger’s Workerism;

The Fortunes of War: A Curious Link Between Otto Strasser and Walter Benjamin;

Nietzsche vs. Hitler: Anti-Nazism on the German Revolutionary Right;

Oswald Spengler and History as Destiny;

Life as an Anarch;

Parallels in Mannheim, Jünger and Gramsci;

The 20th July Conspirators: ‘Traitors’ to Tyranny, Heroes of Geheimes Deutschland;

Life, Death and Will: Echoes of Jünger in Stefan Zweig;

Sardinha’s Path to Tradition: Counter-Revolution, Monarchy and a Republic of Free Men;

The Hand of Mystery: Spengler and Prophecy;

Ernst Jünger and the Myth of Cultural Marxism;

From Ernst Jünger to Armin Mohler: An Interview with Robert Steuckers;

Ode to Spengler;

Work and Power: Jünger’s Debt to Stirner;

Walter Benjamin: Unlikeliest of Revolutionary Conservatives.

The contributors are Troy Southgate, Robert Steuckers, Tomislav Sunic, K.R. Bolton, Keith Preston, Richard J. Levy, Manuel Rezende and Sean Jobst.

mercredi, 13 mai 2020

Oswald Spengler and the Destruction of Intelligence - Matt Raphael Johnson

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Oswald Spengler and the Destruction of Intelligence

Matt Raphael Johnson

 
Spengler cannot be summarized in an hour. Therefore, we concentrate on one important element of his thought, that around which all other elements revolve: the distinction between culture and civilization.
 
Culture is the organic state; the natural life. Civilization is the decay of that state into formalism and quantity. Authority turns into power. In thought, this is manifest in the over-formalization of the intellect and the rise of the mass-intellectual. This intellectual is not a scholar, he's an actor in a role. He's the pseudo-intellectual.
 
This lecture will briefly discuss Spengler in relation to the mass-intellectual and the means to tell the phoney from the legitimate scholar. It is an unpleasant excursion into the world of fakery and fraud.
 
Presented by Matt Johnson

mardi, 05 mai 2020

Peut-on faire un lien entre véganisme et suicide civilisationnel de l'Occident?

Peut-on faire un lien entre véganisme et suicide civilisationnel de l'Occident?

(via Facebook)

Sans tomber dans l'éthologie (Fabre, Lorenz surtout, ...), soit absolument calquer le comportement humain sur celui des animaux (et vice-versa), je me souviens de Spengler notifiant quelque part que les herbivores sont caractérisés par une vision monoculaire, avec leurs yeux logés sur les positions latérales du crâne, là où les carnivores ont une vision binoculaire, avec leurs yeux au front ; c'est que les animaux herbivores sont bas dans la chaîne alimentaire, ils doivent regarder autour deux pour éviter le danger, qui est surtout représenté par les animaux carnivores, qui eux regardent droit devant, puisqu'ils guettent et complotent pour leur nourritures ; Spengler écrit alors que le carnivore étant par défaut un prédateur, il regarde "face à lui" ou "vers l’horizon", et sur un plan humain on pourrait dire qu'il a une "idéologie", donc un "avenir".

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Les végans, qui, rappelons-le, "radicalisent" le végétarisme (ils refusent absolument tout ce qui est lié à l'animal, donc même les produits laitiers), semblent donc correspondre à cette typologie : le fait qu'ils soient devenus "herbivores" pourrait être perçu comme un des nombreux symptômes de la fin de la civilisation occidentale.

51jUjQe6GUL._SY445_QL70_ML2_.jpgPlus encore, la nutrition des végans, selon plusieurs études scientifiquement, entament plus précisément un déficit de vitamine B12, de créatine et de testostérone, celle-ci étant bien sûr la testostérone mâle qui régule (à travers l'amygdale) des traits typiquement virils, et Barzilai - un Israélien - fait de la "biohistoire" (interpréter l'histoire de la civilisation à travers les modifications biologiques chez l'homme), et lui pense que c'est la chute du taux de testostérone qui justement explique la chute de l'Occident, et notamment la montée du féminisme, de l'irrationalisme, etc (par-delà même les caractéristiques que nous connaissons tous à propos des déficients en testostérone, soit la dysfonction érectile, etc).

Tout cela serait bien sûr à creuser mais il semblerait bien que, comme à plusieurs endroit, la réalité soit binaire, soit on est le prédateur, soit on est la proie, et le véganisme semble être un choix explicite.

mardi, 31 mars 2020

Homenaje a Oswald Spengler

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Homenaje a Oswald Spengler

Armin Mohler

Traducción: Carlos X. Blanco

Ex: https://decadenciadeeuropa.blogspot.com

Hay muchas maneras de ignorar los pensamientos de los grandes hombres, y de vivir como si esos pensamientos nunca hubieran sido expresados. En 1980, cualquier espectador en la Alemania Federal habría visto precisamente eso. Celebramos el centenario del nacimiento de Oswald Spengler. Incluso en los homenajes ofrecidos al filósofo, uno habría encontrado, objetivamente, lagunas. Algunos subrayaron la importancia de la filosofía spengleriana de la historia, cuyas profecías serían confirmadas por los acontecimientos; pero así evitaron abordar las afirmaciones políticas del autor de La decadencia de Occidente. Otros querían "rescatar" al político Spengler convirtiéndolo en antifascista y estudiando sólo muy superficialmente los vínculos que existían entre Spengler, Hitler y el nacional-socialismo. No diré nada de los "brillantes" ensayistas que trabajaron prodigiosamente en su estudio de Spengler para sacar tan poco de él.

El Spengler total

Fue otro gran hombre, Herbert Cysarz (nacido dieciséis años después de Spengler), quien pudo comprender verdaderamente a Spengler en su totalidad. El homenaje que ofreció, en el número de enero de la revista Aula, editada en Graz, Austria, comenzó con estas palabras:

"Ningún historiador contemporáneo ha conocido una gloria tan grande como Oswald Spengler. Ninguno ha sido, en su vida, tan incontestablemente original. Este hombre, hostil a toda la literatura y a todo idealismo, totalmente alejado del mundo abstracto de las letras, ha examinado los grandes temas y las múltiples capas de la Historia, y ha subrayado, como ningún hombre lo ha hecho hasta ahora, la intensidad que reside en la voluntad y la acción. Ha dado al mundo una nueva forma de concebir lo político, con una particular manera de ver, pensar y presentar la Historia."

No cabe duda de que Cysarz comprende que Spengler es más que un historiador: en lo que respecta a su obra, escribe, sigue siendo un signo del destino que se manifestó en el cambio de nuestra época.

Un hombre de la misma generación que Cysarz, Ernst Jünger, escribió cosas de este tipo en los años 20... Aunque su tono fuera más comedido, no tan lleno de patetismo. En un artículo político muy importante de esa época (por cuya reedición en las obras completas de Jünger no deberíamos esperar, claro está), expresa una opinión compartida por muchos de sus contemporáneos: por un cerebro del calibre de Spengler, estarían encantados de dar todo un Parlamento.

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Las debilidades del trabajo de Spengler

Una recepción tan entusiasta de la totalidad de la obra de Spengler no significa que aprobemos todos sus detalles, por lo demás, sin formular ninguna crítica. Spengler no es un superhombre: él también tenía sus debilidades. Además de las profecías que se cumplieron de hecho están las que no se han cumplido. Los profundos estudios de Spengler sobre las diversas culturas de la Historia nos obligan a señalar que no todos los dominios de la actividad humana creativa le son igualmente familiares. Por ejemplo, el estilo literario de Spengler no siempre puede estar a la altura de sus temas; esto no debe aturdirnos, ya que estos textos despiertan las emociones más fuertes. Los enemigos de Spengler también se deleitan en citar frases que muestran cierto "kitsch". Además, Spengler sufre una debilidad como muchos visionarios: lo más inmediato se le escapa. Por lo tanto, según él, el gran poeta de su generación no es ni Stefan George ni Rainer Maria Rilke, sino Ernst Droem, que, con razón, ha languidecido en la oscuridad.

Muy reveladora es la reacción del autor de la Decadencia de Occidente al envío, por parte de un joven escritor, de uno de los libros más importantes de nuestro siglo. En 1932, Ernst Jünger envió a Spengler, con sus más cálidos saludos, su libro titulado Der Arbeiter (El Trabajador). Spengler se contentó con hojear el libro y responder:

"En Alemania, el campesinado sigue siendo una fuerza política. Y cuando uno se opone al campesinado - supuestamente moribundo - el "Obrero" - es decir, el trabajador manufacturero - uno se distancia de la realidad, y se excluye de toda influencia en el futuro..."

Como Spengler no leyó el libro, no podía saber que Jünger no hablaba del obrero de la fábrica. Pero es bastante sorprendente que sobrevalore las potencialidades políticas del campesinado que, unos años más tarde, sería completamente aniquilado.

Obstrucción interna

29976181.jpgNi estos pocos puntos ciegos, ni los extraños aspectos de la vida de Spengler, deben desviar nuestra atención de la masa de su trabajo. Este hombre sensible usaba una máscara, adoptó un estilo que no debe ser tomado directamente. Por lo tanto, los admiradores de Spengler deberían evitar confundir su verdadera personalidad con esa "máscara Cesárea" que usó en sus numerosas apariciones públicas.[i]

Los detractores de Spengler, por su parte, intentarán no describirlo, a la luz de su vida privada, como una especie de extraño tótem de la burguesía decadente.

Por supuesto, la vida solitaria de Spengler permite ciertas suposiciones. Nació el 29 de mayo de 1880, hijo de un alto funcionario postal, en Blankenburg en Harz.[ii] No fue su padre, un hombre apacible, quien dominó el hogar familiar, sino su madre, una criatura medio loca, devorada por ambiciones pseudo-artísticas. Adornó su gran apartamento con tal cantidad de muebles, que el joven Oswald y sus tres hermanas tuvieron que dormir en los desvanes bajo las vigas.

Después de defender una disertación sobre Heráclito, Spengler se convirtió en profesor de matemáticas y ciencias naturales en un instituto de secundaria (Gymnasium). La posterior muerte de su madre no le dejó una gran herencia, pero le permitió vivir sin trabajar: desde 1911 hasta su muerte por un ataque al corazón el 7 de mayo de 1936, vivió retirado como investigador independiente en Munich, en un inmenso apartamento de estilo Gründerzeit (el estilo de los años 1870-80), repleto de enormes muebles y situado en la Widenmayerstraße. Una de sus hermanas lo atendía.

Viajaba poco y sólo mantenía un círculo de conocidos restringido. Rechazó el puesto de profesor que le ofrecieron. Quedó trastocado por la Primera Guerra Mundial. Esta vida parece dominada por el feroz rechazo de todo contacto humano. No sabemos nada de ninguna relación erótica. Desde el principio, hubo un repliegue hacia la interioridad. Y en Spengler, los únicos resultados que nos interesan son los productos de ese aislamiento después de 1917. La castidad de esta existencia no es en absoluto un argumento contra el trabajo de Spengler. Así como el aislamiento en una celda monástica no sería un argumento contra Agustín.

Más allá del optimismo y el pesimismo

En la historia de las ideas, el sentido de la obra de Spengler reside en que, en estado de crisis, devuelve a la conciencia los fundamentos "subterráneos" del pensamiento, con un vigor que recuerda al de un Georges Sorel. ¿Y cuáles son estos fundamentos "subterráneos"? Es el pensamiento resueltamente realista iniciado por Heráclito y la escuela del Pórtico (Stoa). Es un pensamiento que siempre ha renunciado a los falsos consuelos y a la organización del destino de los sistemas fundados en pseudo-órdenes cósmicos. De manera magistral, Spengler confronta a la generación de la guerra con este pensamiento. Su estilo era una curiosa mezcla de "monumentalidad" clásica y expresionismo, realizada con pinceladas de fuertes colores. Y fueron precisamente los que más profundamente habían experimentado el colapso del mundo burgués (el del "espectáculo de marionetas" [Puppenspiel]) los que escucharon su llamamiento.

Este pensamiento se sitúa más allá del optimismo y el pesimismo. El título que el editor eligió para la obra maestra de Spengler (La decadencia de Occidente) engaña. Es posible que Spengler, en privado, deplorara el colapso de un mundo que le era querido. Pero su obra no deplora nada: más bien nos sorprende que la Historia sea un movimiento único de surgimiento y declive, y que no haya nada que el hombre pueda hacer sino afrontar esta realidad con compostura, en el lugar que el destino le ha asignado. Esto es lo que impide a Spengler identificarse con el Tercer Reich, y lo que le llevó en 1933, en su última obra, Jahre der Entscheidung (Años Decisivos), a enfrentarse al NSDAP por su ceguera en política exterior. Para Spengler, la política exterior, por ser un combate, es primordial con respecto a la política interior, que a su vez insiste en la importancia del bienestar. Por lo tanto, el carácter híbrido del nacionalsocialismo aparece claramente: como socialismo, alimenta una fuerte tendencia a la utopía, aunque también conoce la fascinación de la melodía heraclítea.

Sin duda, ninguna praxis política es posible sin una cierta dosis de esperanza, y sin alusiones a un orden (cósmico) dotado de sentido (teleológico). Sólo una minoría de individuos puede sostener la mirada de la Gorgona. Dentro de esta minoría, el porcentaje de hombres de acción es mayor que el de los intelectuales, o sacerdotes, o de otros fabricantes de opinión. En todo caso, los discípulos de Heráclito poseen un consuelo propio, que sacan precisamente de lo que constituye, para los demás, una fuente de terror. La lectura de Spengler nos demuestra el doble aspecto del pensamiento de Heráclito.

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Inflexibilidad

De manera muy pertinente Herbert Gysarz cita dos frases que muestran de manera insuperable lo que separa a Oswald Spengler de la sociedad liberal, como de cualquier tipo de dictadura del bienestar (ya sea roja o marrón). La primera de estas frases dice: "Los hechos son más importantes que las verdades". La segunda: "La vida no es sagrada". Este es el lado duro de la filosofía de Spengler; y es en El Hombre y la Técnica (1931), un libro ajeno a toda ambigüedad, donde Spengler lo subraya más particularmente, para desafiar toda la cháchara de nuestro siglo.

Heinz Friedrich, en su artículo en Die Welt, escrito para el centenario del filósofo, ofrece fórmulas aún más precisas. Comienza con el hecho de que el propio Spengler es un discípulo declarado de Goethe y Nietzsche. El propio Cysarz dice que la noción spengleriana de destino muestra más afinidad electiva con las sagas germánicas y el heroísmo trágico de Shakespeare que con el humanismo clásico. Friedrich escribe, en un idioma nada Spengleriano (¡habla de "verdades"!):

Al final de la era del caos, los ciudadanos deben habituarse no sólo a llegar a tomar conciencia de las verdades, sino también a vivirlas y a convivir con ellas. Como dijo Goethe, no sólo la naturaleza es insensible, sino también la historia; porque, parafraseando a Spengler, se podría decir que conserva más características naturales que las que nos gustaría admitir. Por consiguiente, es con una absoluta indiferencia que ella ignora nuestras esperanzas y temores.

Para Friedrich, lo que es nietzscheano en esto es el diagnóstico que representa la decadencia como una debilidad vital: "El agente de la vida, el factor favorecido del eterno devenir es, para Nietzsche, la voluntad de poder". Friedrich añade una advertencia: "La voluntad de poder, reconocida por Nietzsche como principio vital, es cualquier cosa menos el orgullo biológico y muscular que aún hoy queremos que signifique". Esta concepción vulgar de las cosas es compartida por los adeptos de Nietzsche como por sus adversarios. Simplemente significa que toda la vida siente el impulso de afirmarse a sí misma. Spengler es más que un discípulo de Nietzsche: lo completa y lo transforma. La contribución personal de Spengler a esta escuela de pensamiento es cumplir algo que encontró en Nietzsche en forma de un llamamiento.

Los colores de la vida

Quien se resiste a la mirada de la Gorgona no se aparta del mundo. Al contrario: ve el mundo de una manera más intensa, más plástica, más colorida. Esta es la paradójica verdad del asunto. La mirada de la esperanza, por otra parte, sólo puede ver coherencias, leyes, y, por esta razón, desvía su atención de lo particular para perderse en lo general: desencanta al mundo.

Hay que tener en cuenta cómo los Weltanschauungen dominantes, que son un lúgubre pastiche de la insípida ideología de la Ilustración y del cristianismo secularizado, han transformado el mundo, para el hombre mediocre, en un conjunto de tristes esquemas. Es el resultado de una visión bien definida de la Historia (en la Historia, el hombre descifra el mundo para comprenderlo). ¿De dónde, en esta visión, saca su valor la vida? De algo que se alcanzará en un futuro lejano, después de una larga evolución, y después de nuestra propia muerte. Nada es en sí mismo; todo existe sólo en la medida en que significa otra cosa, que está "detrás".

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La vida se ve entonces reducida a una racionalidad mediocre, que excluye todas esas grandes efervescencias que conducen a las alturas o a las profundidades; el hombre se mueve entonces dentro de una angosta estrechez, que no le ofrece nada más que la satisfacción de sus necesidades físicas. Por encima de esta estenosis sopla un tibio aliento de ética conductista. Arnold Gehlen llamó a esto "eudaimonismo masivo". Las masas están constituidas por individuos aislados, que no están enraizados en nada sólido, que no están enredados en una estructura de hormigón, que vagan sin rumbo en lo "general".

Es en este contexto que el ciclón spengleriano debe ser entendido: rompe la monotonía de lo que se llama a sí mismo "moderno", y reinvierte el mundo con tonalidades vibrantes. En la visión Spengleriana, el hombre ya no se manifiesta como una "generalidad", que comparte con todos sus semejantes. Al contrario, pertenece a una cultura específica, que no puede ser reducida a ninguna otra cosa, pero que tiene su propio significado. Toda cultura es de naturaleza totalmente litúrgica, porque de todo lo que produce surge el símbolo con el que se identifica y por el que se distingue. Spengler vio a estas culturas viviendo como viven las plantas: con sus fases de crecimiento y declive. Cada una de estas fases de crecimiento ocupa su propio rango. ¡Qué fuerte suena una melodía en su evocación del fin de una cultura o del Cesarismo! Podríamos citar con placer páginas enteras del primer volumen de La Decadencia:

"Una vida real se lleva a sí misma. No está determinada por el intelecto. Las verdades se sitúan más allá de la Historia y de la vida. [...] Los pueblos de la cultura son formas efímeras del río de la existencia. [...] Para mí, el pueblo (Volk) es una unidad de alma (Seele). [...] La mirada se libera de los límites de la vigilia. [...] Lo que confiere valor a un solo hecho es simplemente el mayor o menor poder de su lenguaje formal, la fuerza de sus símbolos. Más allá del bien y del mal, lo superior y lo inferior, lo necesario y lo ideal."

Todavía debemos añadir una última palabra sobre el alemán que fue Oswald Spengler. No evocó la pluralidad de culturas para sublimarse a través del exotismo. Escribió sus libros para los alemanes que vivieron el colapso del Reich. Spengler no lleva a los alemanes ante un tribunal de "generalidad", sino que los confronta con su especificidad, en el espejo de su historia. En todos los escritos de Spengler, uno siente su convicción de que los alemanes han jugado en el pasado un papel particular, y que los prusianos lo jugarán en el futuro. Estas convicciones de Spengler obviamente desmienten el deseo de mantener la mentalidad frustrada que reina hoy en día.

Versión inglesa de Fergus Cullen: https://ferguscullen.blogspot.com/2020/03/armin-mohler-homage-to-oswald-spengler.html. Con nuestro agradecimiento.

Versión francesa: http://www.archiveseroe.eu/spengler-a48363374

[i] [* Nota del autor. Podríamos, por supuesto, discutir el buen gusto de publicar la foto de Spengler en su lecho de muerte. Esta foto prueba, sin embargo, que esta máscara no impregnó de forma duradera la fisonomía de Spengler].

[ii] [** Nota del autor. Otro protagonista de la revolución conservadora que vino de esta ciudad es August Winnig. Nació dos años antes que Spengler en 1878, y era hijo de un sepulturero].

 

dimanche, 29 mars 2020

Russia’s World Mission

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Russia’s World Mission

Ex: https://blackhousepublishing.com

It would be easy to regard Oswald Spengler, author of the epochal Decline of The West in the aftermath of World War I, as a Russophobe. In so doing the role of Russia in the unfolding of history from this era onward could be easily dismissed, opposed or ridiculed by proponents of Spengler, while in Russia his insights into culture-morphology would be understandably unwelcome as being from an Slavophobic German nationalist. However, while Spengler, like many others of the time in the aftermath of the Bolshevik Revolution, regarded – partially – Russia as the Asianised leader of a ‘coloured revolution’ against the white world, he also considered other possibilities.

RUSSIA’S ‘SOUL’

Spengler regarded Russians as formed by the vastness of the land-plain, as innately antagonistic to the Machine, as rooted in the soil, irrepressibly peasant, religious, and ‘primitive’. Without a wider understanding of Spengler’s philosophy it appears that he was a Slavophobe. However, when Spengler wrote of these Russian characteristics he was referencing the Russians as a still youthful people in contrast to the senile West. Hence the ‘primitive’ Russian is not synonymous with ‘primitivity’ as popularly understood at that time in regard to ‘primitive’ tribal peoples. Nor was it to be confounded with the Hitlerite perception of the ‘primitive Slav’ incapable of building his own State.

To Spengler, the ‘primitive peasant’ is the well-spring from which a race draws its healthiest elements during its epochs of cultural vigour. Agriculture is the foundation of a High Culture, enabling stable communities to diversify labour into specialisation from which Civilisation proceeds.

However, according to Spengler, each people has its own soul, a German conception derived from the German Idealism of Herder, Fichte et al. A High culture reflects that soul, whether in its mathematics, music, architecture; both in the arts and the physical sciences. The Russian soul is not the same as the Western Faustian, as Spengler called it, the ‘ Magian’ of the Arabian civilisation, or the Classical of the Hellenes and Romans. The Western Culture that was imposed on Russia by Peter the Great, what Spengler called Petrinism, is a veneer.

The basis of the Russian soul is not infinite space – as in the West’s Faustian (Spengler, 1971, I, 183) imperative, but is ‘the plain without limit’ (Spengler, 1971, I, 201). The Russian soul expresses its own type of infinity, albeit not that of the Western which becomes even enslaved by its own technics at the end of its life-cycle. (Spengler, 1971, II, 502). (Although it could be argued that Sovietism enslaved man to machine, a Spenglerian would cite this as an example of Petrinism). However, Civilisations follow their life’s course, and one cannot see Spengler’s descriptions as moral judgements but as observations. The finale for Western Civilisation according to Spengler cannot be to create further great forms of art and music, which belong to the youthful or ‘ spring’ epoch of a civilisation, but to dominate the world under a technocratic-military dispensation, before declining into oblivion like prior world civilisations. It is after this Western decline that Spengler alluded to the next world civilisation being that of Russia.

According to Spengler, Russian Orthodox architecture does not represent the infinity towards space that is symbolised by the Western high culture’s Gothic Cathedral spire, nor the enclosed space of the Mosque of the Magian Culture, (Spengler, 1971, I, 183-216) but the impression of sitting upon a horizon. Spengler considered that this Russian architecture is ‘not yet a style, only the promise of a style that will awaken when the real Russian religion awakens’ (Spengler, 1971, I, p. 201). Spengler was writing of the Russian culture as an outsider, and by his own reckoning must have realised the limitations of that. It is therefore useful to compare his thoughts on Russia with those of Russians of note.

41JkTwFc0dL.jpgNikolai Berdyaev in The Russian Idea affirms what Spengler describes:

There is that in the Russian soul which corresponds to the immensity, the vagueness, the infinitude of the Russian land, spiritual geography corresponds with physical. In the Russian soul there is a sort of immensity, a vagueness, a predilection for the infinite, such as is suggested by the great plain of Russia. (Berdyaev, 1).

The connections between family, nation, birth, unity and motherland are reflected in the Russian language:

род [rod]: family, kind, sort, genus родина [ródina]: homeland, motherland родители [rodíteli]: parents родить [rodít’]: to give birth роднить [rodnít’]: to unite, bring together родовой [rodovói]: ancestral, tribal родство [rodstvó]: kinship

Western-liberalism, rationalism, even the most strenuous efforts of Bolshevik dialectal materialism, have so far not been able to permanently destroy, but at most repress, these conceptions – conscious or unconscious – of what it is to be ‘Russian’. Spengler, as will be seen, even during the early period of Russian Bolshevism, already predicted that even this would take on a different, even antithetical form, to the Petrine import of Marxism. It was soon that the USSR was again paying homage to Holy Mother Russia rather than the international proletariat.

‘RUSSIAN SOCIALISM’

Of the Russian soul, the ego/vanity of the Western culture-man is missing; the persona seeks impersonal growth in service, ‘in the brother-world of the plain’. Orthodox Christianity condemns the ‘I’ as ‘sin’ (Spengler, 1971, I, 309).

The Russian concept of ‘we’ rather than ‘I’, and of impersonal service to the expanse of one’s land implies another form socialism to that of Marxism. It is perhaps in this sense that Stalinism proceeded along lines often antithetical to the Bolshevism envisaged by Trotsky et al. (Trotsky, 1936).

A recent comment by an American visitor to Russia, Barbara J. Brothers, as part of a scientific delegation, states something akin to Spengler’s observation:

The Russians have a sense of connectedness to themselves and to other human beings that is just not a part of American reality. It isn’t that competitiveness does not exist; it is just that there always seems to be more consideration and respect for others in any given situation.

Of the Russian traditional ethos, intrinsically antithetical to Western individualism, including that of property relations, Berdyaev wrote:

Of all peoples in the world the Russians have the community spirit; in the highest degree the Russian way of life and Russian manners, are of that kind. Russian hospitality is an indication of this sense of community. (Berdyaev, 97-98).

9782081223219.jpgTARAS BULBA

Russian National Literature starting from the 1840s began to consciously express the Russian soul. Firstly Nikolai Vasilievich Gogol’s Taras Bulba, which along with the poetry of Pushkin, founded a Russian literary tradition; that is to say, truly Russian, and distinct from the previous literature based on German, French and English. John Cournos states of this in his introduction to Taras Bulba:

The spoken word, born of the people, gave soul and wing to literature; only by coming to earth, the native earth, was it enabled to soar. Coming up from Little Russia, the Ukraine, with Cossack blood in his veins, Gogol injected his own healthy virus into an effete body, blew his own virile spirit, the spirit of his race, into its nostrils, and gave the Russian novel its direction to this very day.

Taras Bulba is a tale on the formation of the Cossack folk. In this folk-formation the outer enemy plays a crucial role. The Russian has been formed largely as the result of battling over centuries with Tartars, Muslims and Mongols.

Their society and nationality were defined by religiosity, as was the West’s by Gothic Christianity during its ‘Spring’ epoch, in Spenglerian terms. The newcomer to a Setch, or permanent village, was greeted by the Chief as a Christian and as a warrior: ‘Welcome! Do you believe in Christ?’ —‘I do’, replied the new-comer. ‘And do you believe in the Holy Trinity?’— ‘I do’.—‘And do you go to church?’—‘I do.’ ‘Now cross yourself’. (Gogol, III).

Gogol depicts the scorn in which trade is held, and when commerce has entered among Russians, rather than being confined to non-Russians associated with trade, it is regarded as a symptom of decadence:

I know that baseness has now made its way into our land. Men care only to have their ricks of grain and hay, and their droves of horses, and that their mead may be safe in their cellars; they adopt, the devil only knows what Mussulman customs. They speak scornfully with their tongues. They care not to speak their real thoughts with their own countrymen. They sell their own things to their own comrades, like soulless creatures in the market-place…. . Let them know what brotherhood means on Russian soil! (Spengler, 1971, II, 113).

Here we might see a Russian socialism that is, so far form being the dialectical materialism offered by Marx, the mystic we-feeling forged by the vastness of the plains and the imperative for brotherhood above economics, imposed by that landscape. Russia’s feeling of world-mission has its own form of messianism whether expressed through Christian Orthodoxy or the non-Marxian form of ‘world revolution’ under Stalin, or both in combination, as suggested by the later rapport between Stalinism and the Church from 1943 with the creation of the Council for Russian Orthodox Church Affairs (Chumachenko, 2002). In both senses, and even in the embryonic forms taking place under Putin, Russia is conscious of a world-mission, expressed today as Russia’s role in forging a multipolar world, with Russia as being pivotal in resisting unipolarism.

Commerce is the concern of foreigners, and the intrusions bring with them the corruption of the Russian soul and culture in general: in speech, social interaction, servility, undermining Russian ‘brotherhood’, the Russian ‘we’ feeling that Spengler described. (Spengler 1971, I, 309).

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The Cossack brotherhood is portrayed by Gogol as the formative process in the building up of the Russian people. This process is not one of biology but of spirit, even transcending the family bond. Spengler treated the matter of race as that of soul rather than of zoology. (Spengler, 1971, II, 113-155). To Spengler landscape was crucial in determining what becomes ‘race’, and the duration of families grouped in a particular landscape – including nomads who have a defined range of wandering – form ‘a character of duration’, which was Spengler’s definition of ‘race’. (Spengler, Vol. II, 113). Gogol describes this ‘ race’ forming process among the Russians. So far from being an aggressive race nationalism it is an expanding mystic brotherhood under God:

The father loves his children, the mother loves her children, the children love their father and mother; but this is not like that, brothers. The wild beast also loves its young. But a man can be related only by similarity of mind and not of blood. There have been brotherhoods in other lands, but never any such brotherhoods as on our Russian soil. (Golgol, IX).

The Russian soul is born in suffering. The Russian accepts the fate of life in service to God and to his Motherland. Russia and Faith are inseparable. When the elderly warrior Bovdug is mortally struck by a Turkish bullet his final words are exhortations on the nobility of suffering, after which his spirit soars to join his ancestors. (Gogol, IX). The mystique of death and suffering for the Motherland is described in the death of Tarus Bulba when he is captured and executed, his final words being ones of resurrection:

‘Wait, the time will come when ye shall learn what the orthodox Russian faith is! Already the people scent it far and near. A czar shall arise from Russian soil, and there shall not be a power in the world which shall not submit to him!’ (Gogol, XII).

PSEUDOMORPHOSIS

A significant element of Spengler’s culture morphology is ‘Historic Pseudomorphosis’. Spengler drew an analogy from geology, when crystals of a mineral are embedded in a rock-stratum: where ‘clefts and cracks occur, water filters in, and the crystals are gradually washed out so that in due course only their hollow mould remains’. (Spengler, II, 89).

By the term ‘historical pseudomorphosis’ I propose to designate those cases in which an older alien Culture lies so massively over the land that a young Culture, born in this land, cannot get its breath and fails not only to achieve pure and specific expression-forms, but even to develop its own fully self-consciousness. All that wells up from the depths of the young soul is cast in the old moulds, young feelings stiffen in senile works, and instead of rearing itself up in its own creative power, it can only hate the distant power with a hate that grows to be monstrous. (Ibid.).

A dichotomy has existed for centuries, starting with Peter the Great, of attempts to impose a Western veneer over Russia. This is called Petrinism. The resistance of those attempts is what Spengler called ‘Old Russia’. (Spengler, 1971, II, 192). Spengler described this dichotomy:

Nikolai Berdyaev wrote in terms similar to Spengler’s: ‘Russia is a complete section of the world, a colossal East-West. It unites two worlds, and within the Russian soul two principles are always engaged in strife – the Eastern and the Western’. (Berdyaev, 1).

With the orientation of Russian policy towards the West, ‘Old Russia’ was ‘forced into a false and artificial history’. (Spengler, II, 193). Spengler wrote that Russia had become dominated by Late Western culture:

Late-period arts and sciences, enlightenment, social ethics, the materialism of world-cities, were introduced, although in this pre-cultural time religion was the only language in which man understood himself and the world. (Spengler, 1971, II, 193).

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Ivan Aksakov

‘The first condition of emancipation for the Russian soul’, wrote Ivan Sergyeyevich Aksakov, founder of the anti-Petrinist ‘Slavophil’ group, in 1863 to Dostoyevski, ‘is that it should hate Petersburg with all this might and all its soul’. Moscow is holy, Petersburg Satanic. A widespread popular legend presents Peter the Great as Antichrist.

The hatred of the ‘West’ and of ‘Europe’ is the hatred for a Civilisation that had already reached an advanced state of decay into materialism and sought to impose its primacy by cultural subversion rather than by combat, with its City-based and money-based outlook, ‘poisoning the unborn culture in the womb of the land’. (Spengler, 1971, II, 194). Russia was still a land where there were no bourgeoisie and no true class system but only lord and peasant, a view confirmed by Berdyaev, writing: ‘The various lines of social demarcation did not exist in Russia; there were no pronounced classes. Russia was never an aristocratic country in the Western sense, and equally there was no bourgeoisie’. (Berdyaev, 1).

The cities that emerged threw up an intelligentsia, copying the intelligentsia of Late Westerndom, ‘bent on discovering problems and conflicts, and below, an uprooted peasantry, with all the metaphysical gloom, anxiety, and misery of their own Dostoyevski, perpetually homesick for the open land and bitterly hating the stony grey world into which the Antichrist had tempted them. Moscow had no proper soul’. (Spengler, 1971, II, 194). Berdyaev likewise states of the Petrinism of the upper class that ‘Russian history was a struggle between East and West within the Russian soul’. (Berdyaev, 15).

RUSSIAN THE KATECHON

Berdyaev states that while Petrinism introduced an epoch of cultural dynamism, it also placed a heavy burden upon Russia, and a disunity of spirit. (Ibid.). However, Russia has her own religious sense of Mission, which is as universal as the Vatican’s. Spengler quotes Dostoyevski as writing in 1878: ‘all men must become Russian, first and foremost Russian. If general humanity is the Russian ideal, then everyone must first of all become a Russian’. (Spengler, 1963, 63n). The Russian Messianic idea found a forceful expression in Dostoyevski’s The Possessed, where, in a conversation with Stavrogin, Shatov states:

fyodor-dostoevsky-the-possessed-by-fritz-eichenberg-01.jpgReduce God to the attribute of nationality?…On the contrary, I elevate the nation to God…The people is the body of God. Every nation is a nation only so long as it has its own particular God, excluding all other gods on earth without any possible reconciliation, so long as it believes that by its own God it will conquer and drive all other gods off the face of the earth. …The sole ‘God bearing’ nation is the Russian nation… (Dostoyevsky, 1992, Part II: I: 7, 265-266).

This is Russia as the Katechon, as the ‘nation’ whose world-historical mission is to resist the son of perdition, a literal Anti-Christ, according go the Revelation of St. John, or as the birthplace of a great Czar serving the traditional role of nexus between the terrestrial and the divine around which Russia is united in this mission. This mission as the Katechon defines Russia as something more than merely an ethno-nation-state, as Dostoyevsky expressed it. (Ibid.). Even the USSR, supposedly purged of all such notions, merely re-expressed them with Marxist rhetoric, which was no less apocalyptic and messianic, and which saw the ‘decadent West’ in terms analogous to elements of Islam regarding the USA as the ‘Great Satan’. It is not surprising that the pundits of secularised, liberal Western academia, politics and media could not understand, and indeed were outraged, when Solzhenitsyn seemed so ungrateful when in his Western exile he unequivocally condemned the liberalism and materialism of the a ‘decadent West’. A figure who was for so long held up as a martyr by Western liberalism transpired to be a traditional Russian and not someone who was willing to remake himself in the image of a Western liberal to for the sake of continued plaudits. He attacked the modern West’s conceptions of ‘rights’, ‘freedom’, ‘happiness’, ‘wealth’, the irresponsibility of the ‘free press’, ‘television stupor’, and referred to a ‘Western decline’ in courage. He emphasised that this was a spiritual matter:

But should I be asked, instead, whether I would propose the West, such as it is today, as a model to my country, I would frankly have to answer negatively. No, I could not recommend your society as an ideal for the transformation of ours. Through deep suffering, people in our own country have now achieved a spiritual development of such intensity that the Western system in its present state of spiritual exhaustion does not look attractive. Even those characteristics of your life which I have just enumerated are extremely saddening. (Solzhenitsyn, 1978).

These are all matters that have been addressed by Spengler, and by traditional Russians, whether calling themselves Czarists Orthodox Christians or even ‘Bolsheviks’ or followers of Putin.

Spengler’s thesis that Western Civilisation is in decay is analogous to the more mystical evaluations of the West by the Slavophils, both reaching similar conclusions. Solzhenitsyn was in that tradition, and Putin is influenced by it in his condemnation of Western liberalism. Putin recently pointed out the differences between the West and Russia as at root being ‘moral’ and religious:

Another serious challenge to Russia’s identity is linked to events taking place in the world. Here there are both foreign policy and moral aspects. We can see how many of the Euro-Atlantic countries are actually rejecting their roots, including the Christian values that constitute the basis of Western civilisation. They are denying moral principles and all traditional identities: national, cultural, religious and even sexual. (Putin, 2013).

Spengler saw Russia as outside of Europe, and even as ‘Asian’. He even saw a Western rebirth vis-à-vis opposition to Russia, which he regarded as leading the ‘coloured world’ against the whites, under the mantle of Bolshevism. Yet there were also other destinies that Spengler saw over the horizon, which had been predicted by Dostoyevski.

Once Russia had overthrown its alien intrusions, it could look with another perspective upon the world, and reconsider Europe not with hatred and vengeance but in kinship. Spengler wrote that while Tolstoi, the Petrinist, whose doctrine was the precursor of Bolshevism, was ‘the former Russia’, Dostoyevski was ‘the coming Russia’. Dostoyevski as the representative of the ‘coming Russia’ ‘does not know’ the hatred of Russia for the West. Dostoyevski and the old Russia are transcendent. ‘His passionate power of living is comprehensive enough to embrace all things Western as well’.  Spengler quotes Dostoyevski:

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‘I have two fatherlands, Russia and Europe’. Dostoyevski as the harbinger of a Russian high culture ‘has passed beyond both Petrinism and revolution, and from his future he looks back over them as from afar. His soul is apocalyptic, yearning, desperate, but of this future he is certain’. (Spengler, 1971, II, 194).

To the ‘Slavophil’, of which Dostoyevski was one, Europe is precious. The Slavophil appreciates the richness of European high culture while realising that Europe is in a state of decay. Berdyaev discussed what he regarded as an inconsistency in Dostoyevski and the Slavophils towards Europe, yet one that is comprehensible when we consider Spengler’s crucial differentiation between Culture and Civilisation:

Dostoyevsky calls himself a Slavophil. He thought, as did also a large number of thinkers on the theme of Russia and Europe, that he knew decay was setting in, but that a great past exists in her, and that she has made contributions of great value to the history of mankind. (Berdyaev, 70).

It is notable that while this differentiation between Kultur and Zivilisation is ascribed to a particularly German philosophical tradition, Berdyaev comments that it was present among the Russians ‘long before Spengler’, although deriving from German sources:

It is to be noted that long before Spengler, the Russians drew the distinction between ‘culture’ and ‘civilization’, that they attacked ‘civilization’ even when they remained supporters of ‘culture’. This distinction in actual fact, although expressed in a different phraseology, was to be found among the Slavophils. (Ibid.).

Dostoyevski was indifferent to the Late West, while Tolstoi was a product of it, the Russian Rousseau. Imbued with ideas from the Late West, the Marxists sought to replace one Petrine ruling class with another. Neither represented the soul of Russia. Spengler states: ‘The real Russian is the disciple of Dostoyevski, even though he might not have read Dostoyevski, or anyone else, nay, perhaps because he cannot read, he is himself Dostoyevski in substance’. The intelligentsia hates, the peasant does not. (Ibid.). He would eventually overthrow Bolshevism and any other form of Petrinism. Here we see Spengler unequivocally stating that the post-Western civilisation will be Russian.

For what this townless people yearns for is its own life-form, its own religion, its own history. Tolstoi’s Christianity was a misunderstanding. He spoke of Christ and he meant Marx. But to Dostoyevski’s Christianity, the next thousand years will belong. (Ibid.).

To the true Russia, as Dostoyevski stated it, ‘not a single nation has ever been founded on principles of science or reason’. (Dostoyevski, 1872, II: I: VII).

By the time Spengler had published The Hour of Decision in 1934 he was stating that Russia had overthrown Petrinism and the trappings of the Late West, and while he called the new orientation of Russia ‘Asian’, he said that it was ‘a new Idea, and an idea with a future too’. (Spengler, 1963, 60). To clarify, Russia looks towards the ‘East’, but while the Westerner assumes that ‘Asia’ and East are synonymous with Mongol, the etymology of the word ‘Asia’ comes from Greek Aσία, ca. 440 BC, referring to all regions east of Greece. (Ibid., 61). During his time Spengler saw in Russia that,

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Race, language, popular customs, religion, in their present form… all or any of them can and will be fundamentally transformed. What we see today then is simply the new kind of life which a vast land has conceived and will presently bring forth. It is not definable in words, nor is its bearer aware of it. Those who attempt to define, establish, lay down a program, are confusing life with a phrase, as does the ruling Bolshevism, which is not sufficiently conscious of its own West-European, Rationalistic and cosmopolitan origin. (Ibid.).

Of Russia in 1934 Spengler already saw that ‘of genuine Marxism there is very little except in names and programs’. He doubted that the Communist programme is ‘really still taken seriously’. He saw the possibility of the vestiges of PetrineBolshevism being overthrown, to be replaced by a ‘nationalistic’ Eastern type which would reach ‘gigantic proportions unchecked’. (Spengler, 1963, 63). Spengler also referred to Russia as the country ‘least troubled by Bolshevism’, (Ibid.,182) and the ‘Marxian face [was] only worn for the benefit of the outside world’. (Ibid., 212). A decade after Spengler’s death the direction of Russia under Stalin had pursued clearer definitions, and Petrine Bolshevism had been transformed in the way Spengler foresaw. (Brandenberger, 2002).

CONCLUSION

As in Spengler’s time, and centuries before, there continues to exist two tendencies in Russia : the Old Russian and the Petrine. Neither one nor the other spirit is presently dominant, although under Putin Old Russia struggles for resurgence. U.S. political circles see this Russia as a threat, and expend a great deal on promoting ‘regime change’ via the National Endowment for Democracy, and many others; these activities recently bringing reaction from the Putin government against such NGOs. (Telegraph, 2015).

Spengler in a published lecture to the Rheinish-Westphalian Business Convention in 1922 referred to the ‘ancient, instinctive, unclear, unconscious, and subliminal drive that is present in every Russian, no matter how thoroughly westernised his conscious life may be – a mystical yearning for the South, for Constantinople and Jerusalem, a genuine crusading spirit similar to the spirit our Gothic forebears had in their blood but which we can hardly appreciated today’. (Spengler, 1922).

Bolshevism destroyed one form of Petrinism with another form, clearing the way ‘for a new culture that will some day arise between Europe and East Asia. It is more a beginning than an end’. The peasantry ‘will some day become conscious of its own will, which points in a wholly different direction’. ‘The peasantry is the true Russian people of the future. It will not allow itself to be perverted or suffocated’. (Ibid.).

The arch-Conservative anti-Marxist, Spengler, in keeping with the German tradition of realpolitik, considered the possibility of a Russo-German alliance in his 1922 speech, the Treaty of Rapallo being a reflection of that tradition. ‘A new type of leader’ would be awakened in adversity, to ‘new crusades and legendary conquests’. The rest of the world, filled with religious yearning but falling on infertile ground, is ‘torn and tired enough to allow it suddenly to take on a new character under the proper circumstances’. Spengler suggested that ‘perhaps Bolshevism itself will change in this way under new leaders’. ‘But the silent, deeper Russia,’ would turn its attention towards the Near and East Asia, as a people of ‘great inland expanses’. (Ibid.).

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While Spengler postulated the organic cycles of a High Culture going through the life-phases of birth, youthful vigour, maturity, old age and death, it should be kept in mind that a life-cycle can be disrupted, aborted, murdered or struck by disease, at any time, and end without fulfilling itself. Each has its analogy in politics, and there are plenty of Russophobes eager to stunt Russia’s destiny with political, economic and cultural contagion. The Soviet bloc fell through inner and outer contagion.

Spengler foresaw new possibilities for Russia, yet to fulfil its historic mission, messianic and of world-scope, a traditional mission of which Putin seems conscious, or at least willing to play his part. The invigoration of Orthodoxy is part of this process, as is the leadership style of Putin, as distinct from a Yeltsin for example. Whatever Russia is called outwardly, whether, monarchical, Bolshevik or democratic, there is an inner – eternal – Russia that is unfolding, and whose embryonic character places her on an antithetical course to that of the USA.

REFERENCES

Nikolai Berdyaev, The Russian Idea, MacMillan Co., New York, 1948.

D Brandenberger, National Bolshevism: Stalinist culture and the Formation of Modern Russian National Identity 1931-1956. Harvard University Press, Massachusetts, 2002.

T A Chumachenko, Church and State in Soviet Russia, M. E. Sharpe Inc., New York, 2002.

H Cournos,‘Introduction’, N V Gogol, Taras Bulba & Other Tales, 1842, http://www.gutenberg.org/files/1197/1197-h/1197-h.htm

Fyodor Dostoevsky, The Brothers Karamazov, 1880

Dostoevsky, The Possessed, Oxford University Press, 1992.

V Putin, address to the Valdai Club, 19 September 2013.

Alexander Solzhenitsyn, A World Split Apart — Commencement Address Delivered At Harvard University, June 8, 1978

Oswald Spengler, Prussian and Socialism, 1919.

Spengler, ‘The Two Faces of Russia and Germany’s Eastern Problems’, Politische Schriften, Munich, 14 February, 1922.

Spengler, The Hour of Decision, Alfred A Knopf, New York, 1963.

Spengler, The Decline of The West, George Allen & Unwin, London, 1971.

TelegraphVladimir Putin signs new law against ‘undesirable NGOs’, May 24, 2015,

Leon Trotsky, The Revolution Betrayed: what is the Soviet Union and where is it going?, 1936.

jeudi, 27 février 2020

Historian of the Future: An Introduction to Oswald Spengler’s Life and Works for the Curious Passer-by and the Interested Student

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Historian of the Future:
An Introduction to Oswald Spengler’s Life and Works
for the Curious Passer-by and the Interested Student

By Stephen M. Borthwick
Ex: https://europeanheathenfront.wordpress.com

There have been two resurgences in the popularity of Oswald Spengler since the initial blooming of his popularity in the 1920s; the first in the 1980s and the second most recently, with almost ten major books dealing directly with him or his thought published in the last ten years, and more articles in various academic journals. It is a resurgence in the popular mind that may yet be matched in the academy, where Spengler has hardly been obscure but nevertheless an unknown—a forbidden intellectual fruit for what was, in the words of Henry Stuart Hughes, his first English-language biographer, “obviously not a respectable performance from the standpoint of scholarship” calling Decline of the West, in form typical to Hughes’ species “a massive stumbling block in the path to true knowledge”.[1] This is a pervasive attitude amongst academics, whose fields, especially history, are dominated by a specialisation that Spengler’s history defies with its broad perspective and positivist influences. As such when Spengler’s magnum opus first appeared, it was immediately subject to what in popular parlance can only qualify as nit-picking, which did not cease when the author corrected what factual errors could be found in his initial text. Nevertheless, in the popular mind Spengler has remained an influential if obscure author. Most recently, his unique, isolated civilisations encapsulated in their own history has been observed in Samuel Huntington’s Clash of Civilizations and the Remaking of the World Order, though the development of civilisations from Mediterranean to Western that he paints resembles the dominant theory posited by William McNeill in his Rise of the West rather than Spengler’s Decline of the West. Nevertheless, Spengler’s theory of encapsulated cultural organisms growing up next to one another, advanced by subsequent authors like Toynbee, remains a stirring line of thought, growing more relevant in the rising conflict between Western countries and the resurging Islamic world.

T9780195066340_p0_v1_s550x406.jpgo understand this adversity that Spengler’s ideas struggle against in the academic establishment, and therefore to know why his ideas have filtered through the decades but left his name and book behind, it is necessary to do what very few academics dare to do: to explore and openly discuss the significance of Spengler’s thought. This is the project of this essay; to explain to any who have recently discovered Spengler, especially if they are a college student or college graduate, why they have never heard the name “Spengler” before, and what his thought entails at its most basic level. This discussion will deal not just with Spengler’s most famous work, Der Untergang des Abendlandes (“The Downfall of the Occident”, popularly known as Decline of the West, after C.F. Atkinson’s translation) but also with his numerous political pamphlets and subsequent works of philosophy and history. His philosophical texts include, chiefly: Man and Technics, a specialised focus expanding on the relationship of the human being and the age of technology in which we live already mentioned in Decline, The Hour of Decision, which foresees the overthrow of the Western world by what today would be called the “Third World”, or what Spengler refers to as the “Coloured World”, and Prussianism and Socialism, his first major political text, prescribing the exact form of political structure needed, in his view, to save Germany immediately after the First World War. Numerous other texts, published by C.H. Beck in Munich, also exist, compiled in two primary collections, Politischen Schriften (“Political Writings”) of 1934 and posthumous Reden und Aufsätze (“Speeches and Essays”) of 1936; these are joined by Gedanken (“Reflections”), also of 1936. His unfinished works, posthumously collected and titled by chief Spengler scholar Anton Koktanek in the 1960s, Urfragen and Frühzeit der Weltgeschichte, will not be touched upon in this brief introduction, since they are not available in the English language, but readers fluent in German are encouraged to explore them as well as Koktanek’s other works.

On the assumption that without understanding a man, one cannot grasp his thought, it seems most appropriate to begin any exploration of Spengler the philosopher with Spengler the man. Spengler was a conservative first, then a German nationalist, then a pessimist (though he regarded himself as a consummate realist). Further, he was one of the few men (if not the only man) to meet Adolf Hitler and come away completely unmoved by the demagogue and future dictator of Germany. He openly attacked National Socialism as “the tendency not to want to see and master sober reality, but instead to conceal it with... a party-theatre of flags, parades, and uniforms and to fake hard facts with theories and programmes” and declared that what Germany needed was “a hero, not merely a heroic tenor.”[2] Nevertheless, when voting in the 1932 elections, Spengler, along with some 13.5 million other Germans, cast his ballot for the National Socialist ticket; he explained his choice to friends by saying enigmatically “Hitler is an idiot—but one must support the movement.”[3] At the time people speculated what he meant, and have subsequently continued to speculate to what he was referring when he said “the movement”, especially after his sustained criticisms of National Socialism well into what other Germans were experiencing as “the German Rebirth” in the years between 1933 and his death in 1936.

Spengler’s sustained pessimism about the National Socialist future (he remarked sarcastically shortly before his death that “in ten years the German Reich will probably no longer exist”) is reflective of a realism he had well before the beginning of the First World War, when the idea that would become Decline of the West were first conceived shortly after the Agadir crisis in 1911. Spengler lived and wrote largely in unhappy times; his chief contributions were made in Germany’s darkest hours of the interwar period, dominated by an unstable, incompetent government, extraordinary tributes exacted by the victorious allies, and as a result unrivalled poverty, inflation, and unemployment while the former Allied Powers (save for Italy) were experiencing the so-called “Roaring ‘20s”. He was born and he died, however, in times when things were looking bright. Few regular Germans in 1936 could or did foresee the barbarity of Hitler’s reign, five gruelling years of World War and the planned extermination of non-“Aryans” in conquered territories as well as at home, just as Wilhelmine Germany was oblivious to the consequences of the First World War almost right through it. All that the Germans saw was Germany, their Germany, was on the rise! In 1880, when the young Oswald was born to Bernhard Spengler and his wife Pauline, the German Empire was led by Kaiser Wilhelm I and his Iron Chancellor Bismarck, and the German Reich was still celebrating its formation and the unification of the German nation. Aside from the tribulation of the “year of three emperors” when the young Oswald was eight, there was no reason for the average German to worry about catastrophe: the kindly old Kaiser Wilhelm was replaced by his young, virulent grandson, Wilhelm II, who promised his people “a place in the Sun”. Later, in 1936, when the now established scholar died in his sleep of a heart-attack, the German people were again in good spirits; from the popular perspective, all they could see was that they at last had jobs again, inflation no longer loomed as so painful a memory, their shattered Reich was being rebuilt, and someone had finally reasserted German control over the Rhineland and the Saar—where the memory of the insulting use of colonial occupation forces by the French, and the various abuses civilians suffered during the occupation, still lingered in the German mind.

Early Life (From Youth to Decline, 1880-1917)

All of this blithe cheerfulness and celebration, though, did not affect either the young or the old Oswald Spengler. The opening chapter of Koktanek’s biography of him is titled “Ursprung und Urangst” – “Origin and Original Anxiety”, and not without good reason. Throughout his life, Spengler suffered a nervous affliction and anxiety, leading to chronic headaches in later years so bad that they caused minor short-term memory loss. He would later reflect in his planned autobiography that in his youth he had “no friends, with one exception, [and] no love: a few sudden, stupid [infatuations], fearful of the bond [of relationship]. [I had] only yearning and melancholy.”[4] His home life was similarly dismal. John Farrenkopf characterises it as the typical bourgeois home of the period; his father, a former copper miner turned civil servant, was proud of the Fatherland, conservative in social attitudes, and generally took for granted his loyalty to the Prussian State. It was, in Spengler’s own eyes, a cold place, and an unhappy one. Spengler remarked that his parents were “unliterarisch”—“unlettered, unliterary”—and they “never opened our bookcase nor bought a book”; he himself developed an early love for reading, which earned him ire from his father, of whom he wrote was characterised by a “hatred for all recreation, most of all books”.[5] Despite his newspaper reading and bourgeois sensibilities, though, Bernhard Spengler rarely raised the topic of politics in the household, and young Oswald was only exposed to the workings of the State by outside influences. He would break from this aloofness of politics only once in his life, shrinking after his failure back into scholastic and theoretical efforts to influence the political climate.

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Spengler’s mother led an unhappy life; she married Bernhard, it would seem, out of convenience rather than deep feeling, and bitter about her lot. Originally from the famous Grantzow clan of ballerinas and ballet masters, Pauline Spengler was prevented from ballet and the stage because of her figure, and then forced to leave her beloved home town, the quiet hamlet of Blanckenburg in the Harz mountains, for the bustling Hessian city of Halle-an-der-Saale when young Oswald was ten and her husband changed his trade from mining to postal work (a change he was not especially excited about, either). She displayed her dissatisfaction by brooding over her painting (an effort to cling to what artistry she could maintain in competition with her sisters) and playing petty tyrant over her children.

The young Spengler escaped this life through fantasy and fiction, inventing imaginary kingdoms and world-empires and writing childish theatre-plays with echoes of Wagner. He found further escape after he began his schooling at the Latina, administered by the Franckean Foundation in Halle, where he formally studied Greek and Latin, but in his free time devoured Goethe and Schiller, the first of literary influences that would later be joined by such eclectic writers as William Shakespeare, Gerhart Hauptmann, Henrik Ibsen, Maksim Gorky, Honoré de Balzac, Heinrich von Kleist, E.T.A. Hoffmann, Friedrich Hebbel, Heinrich Heine, Leo Tolstoy, Fyodor Dostoevsky, Émile Zola, Gutave Flaubert, and others.[6] Spengler complained of the Franckean focus on Greek and Latin that prevented him from learning “practical languages”, and he was forced as a result to teach himself French, English, Italian, and, later, during his university days, Russian, through reading authors in those languages. His fluency in the languages was astounding to many, but he himself never felt comfortable enough with them to correspond with many of the authors he would later read and who would bring to bear influence on his own magnum opus in their own languages. Anton Koktanek blames this anxiety and lack of formal training in modern foreign languages for Spengler remaining “a German phenomenon”.[7]

Spengler’s interest in world history and contemporary history also began here, and added to the fiction he wrote, including a short story set in the Russo-Japanese War titled Der Sieger as well as poetry, librettos, dramatic sketches, and other notes and such, most of which he would commit to the flames in 1911.[8] At University, he read the entirety of Goethe’s corpus and discovered two men who would bear tremendous influence on his later writing: Arthur Schopenhauer, and Friedrich Nietzsche. He would also become a devotee of Richard Wagner during this time, declaring his favourite work to be Tristan and Isolde.[9] His interest in Nietzsche especially would have great bearing on his choice of thesis topic, the pre-Socratic philosopher Heraclitus.

Spengler’s father died in 1901, just as Oswald was beginning University studies. He was by and large emotionally unaffected by the loss, and began all the more focusing on his studies. Like most students at University in those days, Spengler matriculated at several Universities while formally enrolled at the University of Halle. First, he travelled to Munich, a city with which he would fall in love and later make his home. Subsequently he would also study at the University of Berlin and then returned to Halle to complete his dissertation topic, entitled “Heraklit: eine Studie über den energetischen Grundgedanken seiner Philosophie” (“Heraclitus: A Study of the Energetic Fundamental Thought of his Philosophy”). It was, as Klaus Fischer observes, “a daring subject for a young scholar because Heraclitus had only left a few and highly cryptic fragments of his thought.”[10] Spengler, however, dared, and presented the first form of his thesis in 1903, but failed the oral defence. Despite his own typically depressed personality, however, he was not downtrodden at the failure; rather, he agreed with almost every criticism that was offered against his work—in his autobiography he called himself “naïve”. He had not, as most biographers observe, consulted any professors on his thesis before submitting it, and therefore had made errors and omissions that one only really avoids from consultation and discussion of one’s work.[11] The primary complaint was his lack of citations. He would repeat this mistake with the first edition of Decline of the West in 1917, writing the book entirely alone and isolated from the outside world—after initial criticism of the book he would revisit and largely revise the text, such that when it arrived in second edition in 1922 he had fixed most of his errors, but did not, as the academics insisted he should, increase the number of citations.

Spengler received his Ph.D. in 1904 and immediately went on to pass State examinations in a number of subjects that allowed him to become a Gymnasium teacher. His first assignment was a major turning point in his life, when he resolved not to be a teacher after stepping off the train in the little town of Lüneburg, taking a glance about at the town and the school and realising how terribly provincial his life would be. Spengler promptly boarded a train for his home town of Blankenburg and had a nervous breakdown. From this point forward he resolved to use teaching as a support for his true passions of study and writing. He recovered from his breakdown and took a different assignment, this time in Saarbrücken, happy to be so close to the French border that would allow him to take several holidays in France.[12] After a year there, he moved on to Düsseldorf, where he taught for another year before taking on a permanent (or so it appeared at the time) position in Hamburg.

Spengler flourished in these cities of big industry and metropolitan life—despite his writings criticising money power and the soul-stealing metropolis, Spengler remained a cosmopolitan urbanite throughout his life. An attestation to this aspect of his personality is his behaviour while teaching. Spengler remembered his days in the Franckean Latina with mixed disdain for the parochial moralists he had as teachers and gratitude for the training he received. He resolved, in the words of Klaus Fischer, “to avoid the foibles commonly attributed to schoolteachers: pedantry, narrow provincialism, and incivility” and made an effort to keep himself fully attuned to the petty culture of fashion and the latest advances in his scholarly fields (he taught German, mathematics, and geography). He would also frequent the theatre (where he would weep easily at especially moving plots and concertos) and local museums—in Düsseldorf he was even spotted frequently in the casino, a place quite foreign to most schoolteachers![13] His time in teaching, however, was short-lived. By almost all accounts Spengler hated Hamburg, not for itself, nor because he disliked the people, his colleagues or his students—indeed in all these respects he was well-respected and well-loved and returned these feelings of affection—but because of the weather. The cold, wet north German city terrorised him, increasing the acuteness and the frequency of his chronic headaches to such a degree that he took a year sabbatical in 1911 from which he would never return. His immediate plans were a holiday in Italy, where he would sojourn frequently in imitation of Goethe.[14]

His complete departure from teaching, much to the disappointment of both colleagues and students, who regarded him as a superlative teacher and amicable fellow, was by and large decided by his mother’s death in 1910. He had little regard for his mother, who psychologically tortured his sister Gertrude, disdained his other sister Hildegard, and was no kinder to his beloved sister Adele.[15] While he marked his father’s passing in 1901 with reflections of the latter’s loyalty to Prussia, his mother’s death was marked only with his inheritance and departure from his childhood home, leaving his sister Adele to dissolve the household.[16] Adele, a frustrated bohemian and largely talentless aspiring virtuoso, quickly spent the 30,000DM she inherited and committed suicide in 1917. Oswald’s inheritance, on the other hand, was wisely invested and used with some measure of thrift, giving him a comfortable lifestyle in Munich and allowing him to pursue his desire to be a writer.

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At first, Spengler hadn’t the slightest idea what to write about. In Heraklit he displayed some of the budding thought which came to fruition as his magnum opus, to be sure. In one of the thicker sections of notes for Eis Heauton, the author proclaims that “my great book, Untergang des Abendlandes, was already emotionally conceived in my twentieth year” (four years before he would submit his doctoral thesis).[17] Farrenkopf observes that Spengler’s dissertation bears the marks of Decline as well, declaring that “what Spengler later attempted as a philosopher of history is analogous to what he claimed Heraclitus had accomplished in Greek philosophy”.[18] The true inspiration for Decline, however, came not from Heraclitus nor from Goethe or Nietzsche; nor did it come to him, as it did with Gibbon and Toynbee, from a physical visit to any landmarks. Rather, the genesis of Decline of the West was in a much different, political work titled Liberal and Conservative, which Spengler began writing in response to the Agadir Crisis of 1911.

Agadir, briefly put, was an attempt on the part of Kaiser Wilhelm II to imitate the American support of the Panamanian rebellion against Columbia, which was accomplished by placing the American fleet off the coast of Panama to prevent Columbian intervention. When Moroccans rebelled against the puppet Sultan Abdelhafid after years of allowing his country to be exploited by European powers, the French offered to support Fez by sending in troops. Wilhelm attempted to assert German interests in the region by sending the gunboat Panther to the harbour of Agadir, much to the chagrin of the French, who would later take over Morocco as part of their colonial Empire, and the British, who viewed the act as a challenge to their own power and a threat to peace in Europe. The end result of the whole event was a strengthened Entente cordiale that would eventually become the Allied Powers in the First World War.

Spengler was keenly aware of the situation at the time, and took on the task of writing a book on the subject that would contrast German and British world-aims and national spirits. The general thrust of this work would become his later work Prussianism and Socialism of 1919, but as he worked on Liberal and Conservative, he found his topic broadening more and more, to the point where he was taking into account not the national rivalries of the nineteenth and twentieth centuries, but the great trials and tribulations of entire civilisations over the course of millennia. Thus the work transformed into the first volume of his Decline of the West, the title of which he probably derived from discovering Otto Seeck’s Geschichte des Untergangs der antiken Welt (“History of the Downfall of the Ancient World” or The History of the Decline of Antiquity) in a store-front window.[19] He would complete the work over the next few years, well into the World War, about which he maintained a positive outlook, to the extent that his introduction to the first volume of Decline, appearing in 1917, bore the hope of the author (omitted in Atkinson’s translation) that “this book might not stand entirely unworthy next to the military achievements of Germany.”[20]

The book that took shape was sweeping in scale, painting the picture of a broad history of mankind as the life cycle(s) of massive organisms to which Spengler gave two names: Kultur and Zivilisation, each representing the youth and the adulthood of the organism. These organisms passed through four seasons of life—(as Kultur) Spring, Summer, (as Zivilisation) Autumn, and Winter—before passing from existence and leaving the soil to which it is tied to give rise to a new organism. A more detailed discussion of the theory may be required before departing into Spengler’s life after the War and the publication of Decline.

Decline of the West and its Influences

Der Untergang des Abendlandes occurs as a part of a long tradition of German historical writing, dating from the early nineteenth century and in which the giants of the field, both famous and infamous, stand: G.W.F. Hegel, Karl Marx, Heinrich von Treitschke, Leopold von Ranke, Heinrich Friedjung, among others. It also occurs as a part of a long tradition of German philosophy and social thought, dating even further into history and starting, not with the rational Kant, but with the intuitive and romantic, sometimes quasi-mystical writings of Goethe, following to Nietzsche, Ferdinand Tönnies, Max Weber, and still more. More can be said of Spengler’s influences, and has been said in the works of Farrenkopf and Fischer on the subject, but a brief discussion of chief influences will be sufficient for our purposes.

osimagep.jpgIf Spengler was the first to propose a World-Historical view, as he claims in the early pages of Decline, Leopold von Ranke preceded him by for the first time proposing a European-Historical view in his two-volume Deutsche Geschichte im Zeitalter der Reformation (“German History in the Age of Reformation”) of 1845/47.[21] Ranke wrote a history which belongs to a very specific school of historical inquiry, dependent on objectivity and a slice of historical fact drawn from primary source work with bearing only on that exact moment in history, showing things wie es eigentlich gewesen, as he proclaims in his 1824 work Geschichte der romanischen und germanischen Völker von 1494 bis 1514 (“History of the Latin and Teutonic Peoples, 1494-1514”). For all his efforts at objectivity in history, he was a firm believer in the balance of power of nation-states, and his loyalty to this state philosophy bleeds through in his writing. He is significant to Spengler in that both men sought to broaden historical inquiry into an objective rather than national project, and that Spengler was certainly beholden to the school of narrative historicism that Ranke would found, inasmuch as his project was heavily criticised by more loyal Rankeans than himself.

Spengler’s other major historical inheritance was G.W.F. Hegel, who stood with Ranke in his typical nineteenth century fascination with the nation-state but was completely opposed to Ranke’s objective, slice-of-history approach, demanding a broader view, and the ability to see the future in the past. Hegel was also a dedicated Prussian, much like Spengler’s father and Spengler himself—so much so, in fact, that he is among several German historians of preceding centuries who are mentioned by Shirer in his fumbling, attempt to link National Socialism and the Prussian state in Rise and Fall of the Third Reich. His declaration in Grundlinien der Philosophie des Rechts (“Elements of the Philosophy of Right”) that “the course of God in the world—that is the State—and its foundation is the mighty force of Reason actualising itself as Will” is reflected in Spengler’s own firm belief in the role of fate in the lifespan of Kultur-Zivilisation organisms.[22] Furthermore, like Hegel, Spengler’s history is a designated march to a designated end: for Hegel, the “end of history” is a progressive, linear movement from antiquity to modernity and the pinnacle of mankind’s development—a belief that has earned Hegel accusations of arrogance and stubbornness, among other things, from detractors. He would pass this view onto his student Karl Marx, who proclaimed the same progression, but from a strictly economic view, of modes of production through history, culminating in the elimination of alienation and the realisation of Species-being in Communism. The difference between the Hegelian and Marxian view of history and Spengler, however, is two-fold: while the given lifespan of a Kultur-Zivilisation organism can be viewed as linear, it is a downward motion rather than the upward motion Hegel and Marx see; further, there is no single linear history of all mankind, the way Hegel and Marx see it. Quite the contrary, Spengler echoes Goethe, declaring that “‘Mankind’ is a zoological concept or merely an empty word.”[23]

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It seems contradictory, of course, that Spengler would reject that “mankind” exists while attempting very earnestly to write a “world-history.” As much as Spengler reflects Hegel and Ranke as historical predecessors, his views of the organism of society bear the marks of Ferdinand Tönnies, whose famous work Gemeinschaft und Gesellschaft would practically found the discipline of sociology, influencing both Max Weber’s seminal The Protestant Ethic and the Spirit of Capitalism as well as Emile Durkheim’s functional theories of society.[24] Tönnies summarises his project in Gemeinschaft und Gesellschaft in the very first page, saying “The connexion will be understood either as real and organic – this being the nature of the Gemeinschaft – or in an ideological and mechanistic form – this being the notion of Gesellschaft” and further summarising the difference between the two by saying that, “all that is familiar, private, living together exclusively (we find) is understood as life in a Gemeinschaft. Gesellschaft is the public sphere, it is the World”.[25]

Spengler’s structure of the communal, agrarian Kultur passing into individualised, urban Zivilisation has much in common with Tönnies’ conception of the organic Gemeinschaft and its artificial counterpart Gesellschaft. It is also important to bear in mind that the key to the Gemeinschaft/Gesellschaft schema is two-fold—both the contrast of the private with the public spheres as well as the organic with the artificial—when considering Spengler’s own contrast of the representative of Kultur, which is the “country-town” with the representative of Zivilisation, which is the megalopolis. As Spengler says himself, “long ago the country bore the country-town and nourished it with her best blood. Now the giant city sucks the country dry, insatiably and incessantly demanding and devouring fresh streams of men, till it wearies and dies in the midst of an almost uninhabited waste of country.”[26]

The contrast of the organic with the artificial, the personal with the impersonal, and the village with the city runs throughout Spengler’s whole structure. Spengler’s vision is two-fold: both the binary progression of Kultur crystallising and stagnating into Zivilisation as well the four-phase life cycle that all Kultur-Zivilisation structures (or, more properly, organisms) follow. Describing this, Spengler uses two sets of terms: organic terms, describing the actual birth, growth, decline, and death of the Kulture-Zivilization organism as a life form, and the fatalistic language for which he has been so criticised: he declares “the Civilisation is the inevitable destiny of a Culture… Civilisations are… a conclusion, the thing-become succeeding the thing-becoming, death following life”.[27] The central concept there—Werden and Gewordene, “becoming” and “become”—are ideas for which Spengler is deeply indebted (as he admits) to Goethe, and play strong role in the contrast he makes between the vivacious, developing Kultur and the stagnant, crystallised Zivilisation.[28]

These Kultur-Zivilisation organisms are detailed in three tables he includes in his work: the first details the passage of Spring-Summer-Autumn-Winter, which for the Occident begins in 900, after the Carolingian period and the final death of Antiquity, and ends (or begins to end) with modernity, completely the roughly thousand-year lifespan which Spengler assigns to his Kultur-Zivilisation organisms (except those of the far east). Each Kultur-Zivilisation organism has a symbol which accompanies it in the Kultur phase; for the West it is infinite space; for the Egyptian, the long corridor; the Semitic, the cavern; the Greeks, the idealised statue, etc. Spengler also specifically names three of the “souls” of these organisms with especial bearing on the Occident. The West itself is “Faustian” defined by Goethe’s own character and his constant outward-reaching for knowledge and more; Antiquity, which the West has replaced, is “Apollonian”, a term readily borrowed from Nietzsche, defined by the Nietzschean Apollonian rationality and thirst for worldly perfection; finally, the Semitic, being Jewish, Arabic, etc. is a sort of mixed Kultur-Zivilisation organism called “Magian”, after the mystics who visited the birth of the Christ-child, and is defined by the preoccupation with essence rather than space.

9200000078648382.jpgThe Magian requires some further discussion, since it represents for Spengler a different “mutation” (to keep with the biological sense of an organism) of the main species of Kultur-Zivilizationen. This is because of a process Spengler describes in the second volume of Decline called “pseudomorphosis”. He asserts in the first volume that the “Arabian soul was cheated of its maturity—like a young tree that is hindered and stunted in its growth by a fallen old giant of the forest,” but after critiques of the work began to circulate back to him, realised that this was inadequate to explain the unique situation that the Magian Kultur-Zivilisation finds itself.[29] He therefore suggests a parallel with mineralogy, pointing the phenomenon of “pseudomorphosis”, by which volcanic molten rock flows into spaces left by washed away minerals in the hollows of rocks; likewise, since the Arabian culture’s pre-historical period is encompassed by Babylonian Civilization, and later as it develops it is stunted by Antiquity with the Roman conquest of Egypt.[30] Spengler sees a similar occurrence with the Russian Kultur-Zivilisation, which is pressed between the Faustian Kultur-Zivilisation and the Asiatic hordes which repeatedly conquer it. He maintains even in his last work, Jahre der Entscheidung, that the Bolshevist revolution represented a part of this pseudomorphosis that Russia is experiencing: “Asia has conquered Russia back from “Europe” to which it had been annexed by Peter the Great”.[31]

This is the structure within which the subject of Spengler’s title exists. Spengler remarked on his title at length in an essay titled “Pessimismus?” (“Pessimism?”) appearing in the Preußischer Jahrbücher in 1921:

But there are men who confuse the downfall [literally “going under”] of Antiquity with the sinking of an ocean liner. The notion of a catastrophe is not contained in the word. If one said—instead of downfall—completion, an expression that is linked in a special way with Goethe’s thought, the “pessimistic” side is removed without the real sense of the term having been altered.[32]

He is not, therefore, discussing a cataclysmic event that would bring about the end of Western civilisation, though no doubt much of the appeal of his work was the recent catastrophe of the Great War. What he sees instead is a general inadequacy in the trends coming out of his contemporary West, which the Great War only compounded. Faustian civilisation had come to stagnate with the rise of bourgeois economists; as he says, “through the economic history of every Culture there runs a desperate conflict waged by the soil-rooted tradition of a race, by its soul, against the spirit of money”.[33] The capitalism and industrialisation of liberal Europe represents the bleeding dry of the soul of Faustian Kultur; it, too, however, shall pass in the coming Ceasarism of the Faustian Winter that Spengler predicts. He speaks of “the sword” being triumphant over money-power and finance capital, bringing about the final period of where violence of spirit triumphs and is marked by the rise of the “Caesars”, demagogues who will bring about a Western World Imperium that Spengler envisioned being headed by Germany. It is worth noting that John Farrenkopf believes this to remain an accurate prediction for America, which Spengler himself discounted, as most Europeans at the time, as an adolescent child of Europe, hardly capable of contributing to Faustian Zivilisation in any great way.

It is, at last, important to note that while Spengler offers this structure that explains history, it is not his intent to “save” the Occident. He participated in politics that would, in his view, further the progression of Faustian Zivilization out of its Autumn and into Winter, but, in true Nietzschean fashion, he encourages his readers to adopt an amor fati toward the decline of their Kultur-Zivilisation. Indeed, the hope one retains after reading Spengler is of a peculiar kind—since all Kultur-Zivilisationen are destined to wither and die, the Faustian man should embrace the destruction of the Occident with an eye to the subsequent Kultur-Zivilisation organism that will take its place, which Spengler predicts will be Russian, a society which due to close contact to both the Occidental and Asian Kultur-Zivilisation organisms has not been able to come into itself—in short, it is not yet Werden, existing in the historyless period that marks the beginning and end of every Kultur-Zivilisation organism.

The Conservative Revolutionary (Political Writings and Speeches, 1919-1924)

The Decline of the West marks a high-point in Spengler’s life, and also a turning point for both his own life and the life of Germany as a whole. Decline appeared complete in two volumes in 1922, four years after Germany’s defeat in the First World War and in the midst of the Weimar Republic struggling to get on its feet. As mentioned above, this contributed greatly to the book’s circulation, though it is unclear how many enthusiasts made an effort to read the entire text. Spengler found himself now ushered into higher intellectual circles, battling with intellectual greats over the value of his work, and once again able to enjoy the delicacies he had to go without for the duration of the War (he wrote that much of the work he did on Decline was done by candlelight). In 1919 he joined such famous names as Hermann Alexander Graf Keyserling (for his seminal work Reisetagebuch eines Philosophen, “Travel-Diary of a Philosopher”) and distinguished Kant scholar Dr. Hans Vaihinger (for his work Philosophie des Als Ob, “The Philosophy of As-If”) in being awarded the Nietzsche Archives’ “Distinguished Scholar Award” with an academic diploma and the sum of 1,500.00DM (roughly $45.00 in 1919).[34]

Despite his acute sense of the depressing reality of his work, Spengler was materially well-off and led a generally comfortable life because of its popularity. He moved from the small flat where he had written Decline during the war to a spacious apartment that overlooked the Isar River. He decorated it with a variety of fine paintings, Chinese and Greek-styled vases, and other pieces obtained at auctions or gifted to him by admirers, and shocked visitors with his vast library, which literally lined the walls of his new home. He covered the fine hard-wood floors with even finer rugs, most markedly a strikingly red carpet in his office upon which he was known to pace endlessly in the night while he worked.[35] He was, though, of relatively modest tastes, and was frugal with his money. He took holidays to Italy frequently, but otherwise only left Germany when another party could pay for his travel; his tastes at home included trips to the theatre, fine wines, and a regular supply of dark cigars. He never hired a housekeeper or married, and his sister Hildegard, widowed by the World War, would keep house for him. He rarely entertained and continued to devote himself to work. His work now, though, was not strictly scholarly.

41-idJ1g3nL._SX339_BO1,204,203,200_.jpgA well-known name now, Spengler began to take a greater interest in politics than he had hitherto. He wrote to Admiral Alfred von Tirpitz in 1920 regarding the recovery of the flag from the SMS Scharnhorst, which was sunk in the Battle of the Falkland Islands in 1914, taking Admiral Maximillian Graf von Spee to the bottom with it; the flag, Spengler wrote, had fallen into the hands of an anti-German party who wished to send it to Britain to be a trophy of war, something offensive to Spengler as a German nationalist.[36] Admiral von Tirpitz replied that he would refer the matter to the admiralty, but the flag was undoubtedly not that from the Scharnhorst’s main post, which went down flying, and therefore the value of the demands of the original owners for the flag (50,000-60,000DM) was probably not equal even to its sentimental value. The admiral added, probably much to Spengler’s satisfaction, that he had thoroughly enjoyed reading Prussianism and Socialism, and wrote “I only wish that your ideas could find response in the Marxist-infected working classes.”[37]

The work Admiral Tirpitz praised so highly was Spengler’s second attempt to reflect on the Agadir crisis and the significance of German and British relations. Prussianism and Socialism appears in English translation by Donald O. White with a number of other shorter articles that Spengler penned in the early 1920s. The work appears in White’s 1967 collection Selected Essays, which is roughly a translation of Politischen Schriften, but making some omissions and drawing also from Rede und Aufsätze. The overall collection gives a decent introductory glance at Spengler’s social and political thought, which merits it some exposition here. Other works included in it are “Pessimism?”, which was written as a response to the charge levelled against Decline, his two speeches “The Two Faces of Russia and Germany’s Eastern Problems” (delivered to a conference of influential Ruhr industrialists in 1922) and “Nietzsche and his Century” (delivered at a conference hosted by the Nietzsche Archive in 1924 before Spengler severed ties with Elizabeth Förster-Nietzsche because of her alignment with Hitler ten years later), another short essay titled “On the German National Character”, published in 1927, and finally a brief response given by Spengler to a query posited internationally by Hearst International’s The Cosmopolitan, titled “Is World Peace Possible?”, which was published in what White calls “barely adequate translation” in 1936 alongside answers from Mohandas K. Gandhi, Eleanor Roosevelt, General Billy Mitchell, and Lin Yu-tang.[38]

Prussianism and Socialism abandons Spengler’s earlier, less informed political alignment with the Kaiser, but beyond this minor change it expresses and sets the tone for almost all of Spengler’s other political writings before and after, including his final major work, Hour of Decision. It is also the work that initiated Spengler’s name into the collection of intellectuals and aristocrats that formed the “Conservative Revolution” movement in Weimar Germany. The names he is included with range from the completely obscure to the internationally famous. Among them are obscure authors like Arthur Moeller van den Bruck, for his work, later appropriated by the Nazis, Das Dritte Reich (1923—available in English as Germany’s Third Empire) and Edgar Julius Jung, who is seen as the leader of the movement, for his work Die Herrschaft der Minderwertigen (“The Reign of the Mediocre”, 1927), and more famously for Franz von Papen’s “Marburg Speech”, the last open condemnation of Nazism made in Weimar Germany. However, members of the movement also included men like the internationally acclaimed Ernst Jünger, for his famous memoir of the World War, In Stahlgewittern (first published in 1920 and having been revised by the author 7 times, it is now available in very good translation by Michael Hoffmann as Storm of Steel), Der Kampf als inneres Erlebnis (“Battle as Inner Experience”, 1922), Das Wäldchen 125 (“Copse 125”, 1925) and Feuer und Blut (“Fire and Blood”, 1925) as well as the famous and widely translated Carl Schmitt, now well known for his works Die Diktatur (1921—now available in translation as On Dictatorship), Politische Theologie (1922—available as Political Theology), Die geistesgeschichtliche Lage des heutigen Parlamentarismus (1923—now available in a good translation by Ellen Kennedy titled The Crisis of Parliamentary Democracy), and his extremely significant Der Begriff des Politischen (1926—now available as The Concept of the Political). The unifying feature of the movement was a desire to bridge the gap between nationalist conservatism and socialism, though another major factor was the distaste that all the men had for Adolf Hitler and his, in the words of Moeller van den Bruck, “proletarian primitiveness”.[39]

Spengler’s interactions with other conservatives were largely done through his involvement in the Juniclub (“June Club”) a gathering of Conservatives and Monarchists who shared Spengler’s hatred of the Versailles Treaty (commonly known in Germany as the Versailles Diktat because of the lack of input allowed from the German delegation). Among the group’s founding members was Arthur Moeller van den Bruck, with whom Spengler had many encounters from 1919 until Moeller’s suicide in 1925 through lectures that both gave to the Juniclub. At the Juniclub he also had the opportunity to meet and begin correspondence with Crown Prince Rupprecht of Bavaria, Walther Rathenau, Erich Ludendorff, Hans von Seeckt, and create friendships and lasting ties to major industrialists like Paul Reusch, Roderich Schlubach, Alfred Hugenberg, Karl Helfferich, and Hugo Stinnes.[40] Aside from Moeller, however, his encounters with the other major thinkers of the Conservative Revolutionary movement seemed few; he had some contact later with Jung, who wrote him on several occasions. However, his major inclination during his years of involvement with the Juniclub was toward becoming actively involved in conservative politics, not merely being a theoretician. His ambitions during this time were as disparate and far-flung as leading German intellectuals into politics and founding a newspaper cartel in imitation of William Randolph Hearst.[41]

SpenglerAD.jpgSpengler’s letters during this time are often brief (owing to his preference for meeting people rather than writing them) and to a wide variety of people, including invitations to tea with Erich Ludendorff and his wife, which he maintained as a regular affair until Ludendorff’s involvement in the Beer Hall Putsch in 1923. There was also an extended correspondence with the German government regarding interaction with General Jan C. Smuts, who had invited General Paul von Lettow-Vorbeck (with whom Spengler also corresponded) to a dinner for African commanders of the war.[42] He also met semi-regularly, it would seem, with the Prussian royal family; Crown Prince Wilhelm wrote him a number of times, and Spengler sent copies of his magnum opus to Huis Doorn. He also managed to elicit a positive response from Gregor Strasser, a prominent rival of Hitler’s in the National Socialist party who was murdered in the Night of the Long Knives.[43]

Spengler, however, remained primarily a theoretician; he met many men with whom he had lasting friendships, but he was not a man of political action and he was acutely aware of that. Throughout his brief political career, he was advised by friends not to waste his genius on petty affairs of state, and he eventually gave in and retreated from public life in 1924 after five years of immense popularity and prolific writing. In addition to the one or two speeches and articles in the White collection, in 1924 alone Spengler published Frankreich und Europa (“France and Europe”), Aufgaben des Adels (“Tasks of the Nobility”), Politische Pflichten der deutschen Jugend (“Political Duties of the German Youth”), Neubau des deutschen Reiches (“Reconstruction of the German Reich”), Neue Formen der Weltpolitik (“New Forms of Global Politics”) all of which were derived from speeches and lectures he had given at the Juniclub or at various Industrial clubs and conferences during his involvement there. Some of them, including Politische Pflichten and Neubau would appear in Spengler’s Politischen Schriften of 1932, the others would only be published together in 1937 in the posthumous Reden und Aufsätze collection. The works, all expressing a common theme of the necessity to “reclaim socialism” from Marx and bring about a new birth of “Prussianism” in the German population, brought Spengler immense notoriety in Germany while Decline was making its way through foreign circles. Other presentations included his Das Verhältnis von Wirtschaft und Steuerpolitik seit 1750 (“The Relationship of Economy and Tax Policy since 1750”, 1924). His lectures drew tremendous crowds and he participated in a number of public debates between 1919 and 1924.

Prussianism and Socialism: A Brief Glance

Of all Spengler’s political writings and speeches, both from his public career and after, the most detailed and the most significant remains Prussianism and Socialism. In the work, Spengler makes two arguments, one unique to his own time and one with far-reaching relevance. The work’s principal argument surrounds the “true German spirit” with “the German Michel”, which Spengler declares “the sum of all our weaknesses: our fundamental displeasure at turns of events that demand attention and response; our urge to criticise at the wrong time; our pursuit of ideals instead of immediate action; our precipitate action at times when careful reflection is called for; our Volk as a collection of malcontents; our representative assemblies as glorified beer gardens.”[44] The thrust of the work is a contrast between “English” parliamentarianism and liberalism, which the “German Michel” typifies, the Marxist socialist movement of the Sparticists, which at least has the integrity that the “German Michel” lacked, and real “German” socialism, which Spengler ties to Prussian military spirit and civic duty to create the “Prussian socialism” that he insists is the only way to bring about a rebirth of the German Reich.

The opening of Prussianism and Socialism declares the same sense of destiny found in Decline, quoting Seneca's aphorism ducunt volentem fata, nolentem trahunt (“Fate leads along the willing soul and drags the unwilling”).[45] He declares that “the spirit of Old Prussia and the socialistic attitude, at present driven by brotherly hatred to combat each other, are in fact one in the same”, defining “socialism” itself, which he claims “everyone thinks… means something different”.[46] Spengler’s hero of socialism is August Bebel, the Marxist founder of the SPD who was famously born in a Prussian army barracks. He praises Bebels’ party for its “militant qualities…the clattering footsteps of workers’ battalions, a calm sense of determination, good discipline, and the courage to die for a transcendent principle” and damns the SPD in power in the Weimar Republic for abandoning the revolution and throwing in its lot with the “foe of yesteryear” and encouraging the Freikorps to crush the Spartacists, who Spengler felt “retained a modicum of integrity”.[47] It is not the Marxism of the Social Democrats Spengler admires, however; rather, it is their integrity and their dedication to their beliefs—something that simply does not exist for the “German Michel”, the contemporary parliamentarian.

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He goes on to condemn the “so-called German Revolution” that took place in November, saying that the Germans “produced pedants, schoolboys, and gossips in the Paulskirche and in Weimar, petty demonstrations in the streets, and in the background a nation looking on with faint interest”—not at all what a real revolution entails, but something feeble, something belonging to the parliamentarian and the “German Michel”.[48] Spengler establishes the foundation of Prussian Socialism with “the real German Socialist Revolution” which he says happened in 1914—a real revolution because it involved “the whole people: one outcry, one brazen act, one rage, one goal”.[49] He further asserts that the revolution is not over—a notion he expands on in later speeches and essays. The Revolution of the German people cannot come to full fruition for Spengler and his fellow conservatives, until the German nation is truly born—for 1918 in Germany was not 1789 in France; the nation and the revolution were not the same.

He concludes that “Socialism is not an instinct of dark primeval origin… it is, rather, a political, social, and economic instinct of realistically-minded peoples, as such it is a product of one stage of our civilisation—not of our culture.”[50] He asserts a thoroughly modern origin and a thoroughly modern role for socialism: the realistic, the enemy of the dictatorship of money and capitalism, defined in socialistic form by a sense of duty to the whole, that whole being the German nation. It is in this way that “all Germans are workers”, so that the failing of Marx, he asserts, is his inability to grasp anything more in Hegel, “who by and far represented Prussianism at its best” than mere method.[51] Marx misleads socialism by creating class antagonism when in reality the bourgeois is a meaningless term, Spengler asserts—and the real enemy is the English spirit of mercantilism and parliamentarianism of the feeble “German Michel”; it is not worker against burgher, nor burgher against elite, but German against the Englishman in himself. This is why the German Revolution is incomplete: because the national revolution that unites and brings about the birth of the German nation has not been achieved.

Perhaps the most significant aspect of this and subsequent political texts is the complete absence of any mention of Germany’s Jews. Spengler did not believe, as many of his day did, that the Jewish people had any connexion to parliamentarianism or Marxism or Capitalism or any other distinctly Western phenomenon; rather Western man was at war with himself and himself alone in the conflict between Prussian Socialism and English Mercantilism, between Revolution and Cowardice. He calls Marx “an exclusively English thinker”, unable to see beyond mere economics and ignoring the notion of everyone working for the whole, but each in his own destined place—the King for Spengler’s socialist is “the first servant of the state”, in the highest place among the rest of the nation serving a single, national goal. It is such a different picture than the typical anti-Bolshevik stance in Germany that never tired of reminding the world of Marx’s Jewish origins (his grandfather was a rabbi). This, for Spengler, was as much a simplification as Marx’s class antagonism, because it directed anger and action toward an invented foe instead of directing it toward corrective measures in the West itself.

The Hermit-Scholar (Return to Private Life 1924-1930)

After he retreated from public life, Spengler returned to the lonely life of the hermit scholar, and rededicated himself to work on the theories put forth in Decline. His re-entry into politics was prevented both my deteriorating health as well as a decrease in opportunity with the rising tide of National Socialism. Of all the Conservative Revolutionary thinkers, only Jünger and Schmitt would live to see the Second World War, and their literary lives were even shorter; Spengler was silenced by the Nazi state as early 1933, Jung was murdered, along with several of Spengler’s friends, in the Night of the Long Knives in 1934, and Moeller van den Bruck had a nervous breakdown and committed suicide as early as 1925. Others, like Hugo von Hofmannsthal and Stefan George (especially famous for his Das Neue Reich of 1928), died of natural causes, Hofmannsthal of a stroke in 1929, George four years later of old age. It is indubitable with his voracious appetite for the latest works that Spengler encountered these men through their writing, but no correspondence between them exists. This is not terribly surprising—Spengler wrote letters when he felt the passion to do so (such as to Admiral Tirpitz), or when it furthered his studies (such as the many letters to academics and professors). This was not out of a dislike of people; rather, it was because he detested the task of writing letters and preferred to grant an interview or meet with friends in person, something he did frequently—his sister, Hilde, who became primary caretaker of his estate after his death, remarked that “he always disliked writing letters, even when he was a child.”[52] Those political letters he did write he wisely burned in 1933 to protect himself and others from the National Socialist state.

The return to private living gave Spengler a tremendous opportunity to begin scholarly work again after some years of pamphleteering (something he himself hated, remarking to a friend in 1919, referring to Prussianism and Socialism that “I am not a born journalist and consequently I wrote out 500 pages of rough draft in four weeks and then started paring to get 100 pages of readable German. I realise now how I ought to work and shall never again accept any assignment that carries a deadline with it”).[53] He never ceased his correspondences with high-level academics and contributors in almost every field of study, but after 1924 he was able to begin to write more widely. He wrote frequently to Elizabeth Förster-Nietzsche and it was in 1924 after his departure from public life that he presented his paper “Nietzche and His Century”.

From 1925 onward his time was dominated by lectures, correspondences, and his old reading habits. He took several holidays in Italy and elsewhere, and as early as 1925 was in correspondence with Benito Mussolini, who would write a review of Hour of Decision in 1933 for Il Popolo d’Italia in December of that year. The Italian dictator, it would seem, was somewhat reserved about Spengler, who he felt tread close to Fascism but was not close enough.[54] He was not alone; after Spengler’s retreat from politics, was when his works came under heaviest fire from popular political personalities. His correspondence with Gregor Strasser in 1925 displays the chief dispute with Spengler, which seems to be his dislike of “popular movements”, like National Socialism, which he regarded as vulgar and mob-driven.[55] Aside from these, however, the bulk of his letters are not with political men but with academics.

lelivr_R240137969.jpgThe reason for this likely had much to do with Germany’s growing stability after 1925. Arthur Helps, who translated Spengler’s letters, suggests that Spengler left the public sphere precisely because of this; however, it is more likely that Spengler simply tired of the time he spent in the public eye—the constant assault of attention from both enthusiastic supporters and detractors of all stripes wore on the man whose sensitivity was well-known only to his sister and perhaps very close friends. He was a man who throughout his life was soft-hearted and sympathetic, ever striving to overcome the little boy whose nightmares in his bedroom in Halle haunted him vividly until he was well into his forties; the image he had inadvertently created of the hard-hearted, iron-willed prophet of doom was not an easy persona for him to fulfil on a constant basis, and put tremendous stress on his body. Fischer observes in his biographical sketch that “he agonised about his weaknesses with the same honesty as Rousseau did in the Confessions, with the difference that Spengler rarely tried to project his shortcomings on society… [he] believed that, in the final analysis, the individual has to assume responsibility for his own weaknesses”.[56]

Spengler’s physical weaknesses became acute during his time in politics, as the stress increased his headaches and other ailments. In 1925, rarely does a letter mention an illness or time of sickness—he seemed to recover from his ailments from getting away from stress of politics and the dismal state in which he perceived his beloved German Reich to be. He took cures in the sun of Italy, writing in February of 1925 from Palermo, after which he travelled to Rome and elsewhere.[57] In 1926, deep in the scholarly world once again, Spengler was invited by the Philosophical Congress in the United States to travel to America and conduct a lecture tour (C.F. Atkinson’s translation of the first volume of Decline appeared that very year). His excuse for declining the offer was that he felt America would leave too deep an impression on him that would disrupt the work he was conducting on his latest book (still unfinished at his death), Urfragen (“Primordial Questions”). His letters are strewn with questions to experts and professors of ancient history after information about Babylonian tablets and other Middle Eastern interests.

These interests, as a preparation for Urfragen, had begun as early as 1924, when Spengler appeared before the Oriental Institute in Munich with a lecture titled “Plan eines neuen Atlas Antiquus” (“Plan for a new Atlas Antiquus”), which detailed the need of a new cartographic project to map the ancient world within the scope of the Apollonian Kultur-Zivilisation organism.[58] The general thrust of his work, whether this lecture or the later letters to colleagues, is a collaborative effort that would overcome the increasing specialisation of history already in its adolescence in Spengler’s day and still increasing in contemporary academic history. During subsequent years he also became first enthralled and then embroiled with the famous archaeologist and ethnographer of Africa, Leo Frobenius, whose initial agreement with cyclical history caught Spengler’s attention, but his argued proofs for slow, gradual development of civilisations drew the censure of the author of Decline, who believed in epochal moments rather than gradual evolution (he detested all forms of Darwinism). His correspondence took him in more positive directions with the famous Assyriologist Alfred Jeremias, who took an immense interest in Spengler’s work.

Most striking about Spengler’s time as a private scholar in the late 1920s was the vast amount of interest being generated in his works abroad. 1927 saw contacts coming from The New York Times attempting to solicit an article from him; the paper had featured him in full-page articles twice before, and after including him in an article “Will our Civilization Survive?” of 1925, hoped he might appear in print with them—they even offered a sum of $100, which was no small sum of money in Germany at the time.[59] No response to their inquest ever came, however, and it does not appear Spengler showed any interest in taking up any journalistic venture. A query that Spengler felt did merit response came from André Fauconnet, a professor at Poitiers whose Un philosophe allemeand contemporain Oswald Spengler. Le prophète du déclin de l'Occident (“A Contemporary German Philosopher: Oswald Spengler, the Prophet of the Decline of the Occident”) appeared in 1925. He also received an invitation to speak at the University of Saragossa, which promised he could speak in German and translations of his speech would be distributed beforehand.[60] Spengler accepted the engagement, spending the entire month of April of 1928 on holiday in Spain; he loved the climate and found the place to have a profoundly positive affect on his demeanour—he even did some mountain climbing. He wrote his sister Hilde from Granada (where he stayed for about a week), “Grenada is beautiful beyond all description… I could live here”, and, later that week, that “here every day pleases me better”.[61]

lelivr_R240137968.jpgDuring all of his touring and international correspondence, Spengler did manage to make one or two forays back into political life; the first occasion was a speech in Düsseldorf before the Industry-Club titled “Das heutige Verhältnis zwischen Weltwirtschaft und Weltpolitik” (“The Contemporary Relationship between World Economics and World Politics”) in 1926, and was solicited by Edgar Julius Jung a year later to make a speech before the German Student Union, historically a hotbed for right-wing politics. 1927 also saw him begin writing on the topic again, with “Zur Entwicklungsgeschichte der Deutschen Presse” (“Toward a Developmental History of the German Press”) appearing in the Der Zeitungsverlag and “Vom Deutscher Volkscharakter” (“On the German National Character”) appearing in Deutschland the same year. After some time of soliciting his attention, Richard Korherr also finally convinced Spengler to write a brief introduction to his thesis “Über den Geburtenrückgang” (“Regarding the Decline of Birthrates”) of two years previous, which the author had dedicated to Spengler. Korherr hounded Spengler with information of the thesis, especially when it was translated into Italian by deputies of Mussolini’s in 1928.[62] Spengler regarded the young student well, and congratulated him on his success; he would probably not have had so positive a view of the young Dr. Korherr twelve years later, when he became one of Heinrich Himmler’s most loyal lieutenants in executing the “Final Solution”.[63]

Cassandra (Last Writings and Death, 1930-1936)

The years of 1929 and 1930 were eventful for Germany, but for Spengler much of the same that he had experienced in the second half of the 1920s. His pessimism was beginning to be proven true, with the stock market crash in 1929 and the swift rise of National Socialist and German Communist party power in the shattered Weimar Republic. In September 1930, the results gave the Nazis 107 seats in the Reichstag, and increased the Communist seats from 54 to 77. When the Reichstag took its seats, no business could be conducted, with the National Socialist “delegates” showing up in full uniform, sometimes with flags, interrupting the proceedings with chants, shouts, and songs; the Communists, not to be outdone, followed suit, and together they made a mockery of what was left of Weimar democracy.[64] Spengler was generally not disappointed with the turn of events, and, having put his Urfragen project on hold, wrote a prolegomena to his planned work titled Der Mensch und die Technik (“Man and Technics”) in 1931.

The work can hardly be said to be of the same calibre as Decline or even of Prussianism and Socialism—but then, it was never meant to be. The most important introductory note that can be given on Man and Technics is that it is fundamentally meant to be a primer for planned works. It is, by and large, a restatement of things said in Decline, and an expansion on the relationship between human beings and the tools they create. Fischer describes the book by saying “Spengler tried to show that primitive man was a magnificent predatory animal who possessed two major advantages over other beasts of prey: a superior brain and ambidextrous hands.”[65] The work is a true experiment in Nietzschean psychology by Fischer’s estimate: a tragic conflict between a naturally savage and predatory human being with the moral codes he makes to contain his savagery, but he cannot flee from it, for as he develops his technology, he also develops his means of savagery, and therefore his savagery itself.[66]

In greater detail, the book develops themes of conflict between man and external nature as well. Farrenkopf highlights that Spengler sees a religious grounding for this conflict—a suggestion not lost on several subsequent environmentalists—declaring that Spengler “claims to have uncovered the ‘religious origins’ of Western technical thought in the meditations of early Gothic monks, who in their prayers and fastings wrung God’s secrets from Him.”[67] Farrenkopf, working at the turn of the twenty-first century, attempts to make Spengler the prophet of “climate change” and “ecological disasters”, and points to a thesis in his own work—that Spengler’s thought changed from Decline to his later works—to say that Spengler was arguing for the inevitable failure of mankind’s struggle against nature. Whether his thesis has merit or not is not really a line of inquiry this introduction need undertake, but the conflict and eventual failure of humankind because of its own “progress” is certainly present in the work. A line from Decline of the West, quoted above, accurately encapsulates the entire purpose of Man and Technics: “the giant city sucks the country dry, insatiably and incessantly demanding and devouring fresh streams of men, till it wearies and dies in the midst of an almost uninhabited waste of country.”[68]

The urban sprawl and disappearance of the “green belt” that contemporary commentators, especially in America, where there is so much of the “green belt”, have witnessed is somewhat captured in this picture. The dangers of an industrial dystopia and plea for an agrarian Reich was one also being preached by the National Socialists at this time—Walther Darré’s 1928 pamphlet “Das Bauerntum als Lebensquell der nordischen Rasse” (“The Peasantry as the Life-source of the Nordic Race”) stands as a testament to that. The Nazis, though, were better at selling their message than Spengler was his own, primarily because of what each promised the German people. Spengler promised that the path of Western civilisation was destined and irreversible, and the coming destruction guaranteed by the very nature of Faustian man of his home-soil should be greeted with a Nietzschean amor fati. The Germans in 1931 were in no mood to hear that they were themselves to blame for their situation, and that it was an inescapable destiny.

The Nazis, on the other hand, gave the Germans an enemy—the Jews—that were causing this industrialisation and destruction of the nation, and if they could just get rid of them, there was a bright hope and future for Germans. The German people declared which message they preferred with dismal sales for Man and Technics, and subsequent tremendous victories at the ballot for the National Socialists. Hitler’s biographer, Lord Bullock gives a deep insight into the exact state of affairs; “taking 1928 as a measuring rod,” he declares, “the gains made by Hitler – close on thirteen million in four years – are still more striking,” adding that by early 1932, “with a voting strength of 13,700,000 electors, a party membership of over a million and a private army of 400,000 S.A. and S.S., Hitler was the most powerful political leader in Germany, knocking on the doors of the Chancellery at the head of the most powerful political party Germany had ever seen.”[69]

Spengler was shocked, if not a little appalled, by this turn of events. To Spengler, as he had been to Moeller, Adolf Hitler was an idiot in the scientific sense of the word: a vulgar proletarian clown shouting and flailing his arms and playing about in the muck, not a statesman who could lead Germany to her rebirth or a realistic forward-thinker. For the time being, though, there were few other options, and Spengler was willing to give the Führer the benefit of the doubt before meeting him—a meeting at which he hoped that his stature as one of Germany’s leading conservative intellectuals might moderate the Austrian firebrand somewhat.[70] He was dreadfully wrong.

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Spengler met with Hitler in 1933 at the invitation of the National Socialist Party, hoping to make use of Spengler’s sustained popularity. Fischer describes the meeting, of which little account exists on either side. It was Hitler, characteristically, who did most of the talking when the two men met, and used all of his well-accounted-for charm. Spengler was sufficiently fooled that Hitler, though a clown, was a well-meaning clown who basically wanted what was best for Germany. He nevertheless would remark later that “sitting next to him one did not gain the slightest inkling that he represented anything significant”—the jobless Austrian post-card painter may have built himself up into a powerful and captivating demagogue, but in the end he remained the disaffected young delinquent who wandered the streets of Munich and Vienna building a fantasy world in which he was important.[71] According to a popular anecdote, when the men had finished their encounter, Hitler asked Spengler for advice, to which the scholar enigmatically replied “watch your Praetorian guard!” a comment many have taken to be a bit of advice Hitler acted on in the Night of the Long Knives, when he purged his “praetorian guard” and replaced it—the S.A.—with a new one, the S.S. There is no evidence that this is accurate, but if it is, as Fischer asserts, it would be the first time Spengler had any direct influence on a public leader.[72]

It was not long, however, before the spell of Hitler’s charm over coffee wore off. The Nazis went on to preach a proletarian utopian future founded fundamentally in scapegoating the Jews and answering Germany’s problems with “party-theatre” of mass rallies and a well-tuned propaganda machine. It was in answer to the delusions of the National Socialist political machine that Spengler wrote his final book, Jahre der Entscheidung (“Years of Decision”, more popularly known in translation as Hour of Decision) in 1933. This work, largely considered Spengler’s most overtly political and explicit in its message, was banned by the Nazis as soon as they figured out what was in it—which took them a full year, even after one of their own published a critique of the book (Arthur Zweininger’s Oswald Spengler im dritten Reich), by which time the book had already made it into English translation and had received extensive comment by The New York Times.[73] Spengler also, naïvely, sent a signed copy directly to Hitler, accompanied by an expression of hope that the two might meet and discuss the work in the future.[74] Hitler consented to meet, but disparaged Spengler’s pessimism in what he was selling as Germany’s brightest hour.

Jahre der Entscheidung
deserves some specific attention to be paid to it. The first thing worth mention is that it was originally intended to be the first volume of a several-volume work, but after it was banned in 1934, Spengler abandoned the work, writing Goebbels that he would only write the conclusions of his own mind and that he would “not write books for confiscation”.[75]

The press was especially cruel to the new work, evoking (despite Fischer’s claims to the opposite) a number of highly sympathetic letters to Spengler from old conservative colleagues like Alfred Hugenburg, Crown Prince Wilhelm, Carl Friedrich Goerdeler (later executed as a resistance leader), as well as some new names, including Grand Duke Joseph Franz von Habsburg, who was enthralled by the new work, and Rudolf Graber, a professor of Theology and later Bishop of Regensburg. Despite the press and the Nazis, however, the book was initially a tremendous success, especially compared with Man and Technics. Heinrich Beck wrote to Spengler in November of 1933 that “the success of your Jahre der Entscheidung already surpasses, at least as far as tempo is concerned, The Decline of the West. You will certainly be pleased and I am proud also of publishing such a book.”[76] The Roman Curia was also impressed, and allowed the book to be placed by the Cardinal Hayes Literature Committee in the “First Circle” of their “White List” for Roman Catholics in America; the section was named for the First Circle of Hell in Dante’s inferno, where honest pre-Christian thinkers who were valuable to Christianity resided—on the White List proper for that year were titles like Essays in History by Pope Pius XI.[77]

l_9783938176153.jpgThe contents of the book are significant not just for Spengler’s life, but to his overall philosophy as well. Spengler frequently uses what critics have called “fetishistic” terms in his works like “blood”, “race”, “soul”, etc. The accusations of critics were left largely unanswered until Jahre der Entscheidung, which saw Spengler for the first time seriously take on the task of defining what he meant by “race” especially. Benito Mussolini, at the time still in his virulent anti-racist stage, received a copy of the work almost immediately after it was published, and wrote a review of the work highlighting that “Spengler clearly wishes to differentiate his views from the vulgar, materialistic Darwinism now fashionable among anti-Semites in Europe and America” (words he was in fact borrowing from Spengler) and points to Spengler’s declaration that “ ‘racial unity’ is a grotesque phrase considering that for centuries all types and kinds have mixed.”[78]

Spengler does indeed use the word “race”; however, he defines against the biological racial theories of Chamberlain, Gobineau and the various authors of National Socialism. “Race” to Spengler was captured in a spiritual feeling or will of a culture—thus in Jahre der Entscheidung, even the Russians find themselves included in Spengler’s “Coloured World”. The Faustian soul—and the Faustian will—that is the Faustian “race”. Farrenkopf observes from reading Spengler’s unpublished political writings that “Race for Spengler meant having ‘strong instincts’”, something reflected in Gedanken, where Spengler says “Men without race are without Will. Indeed, the more of a “race” one has, the more resolute is his sense of self”.[79] Spengler references this notion in Man and Technics as well, concluding with the exemplary of a man with “strong race”, the legionary who kept his post in Pompey as Vesuvius erupted because his superiors had forgotten to relieve him; “It is greatness, namely to have race”.[80] This sort of conception of race is one that has fled the English and German languages (and most other languages, really) in the wake of the biological racialist movements of the early twentieth century, but is still present in English when one says “the human race”—but for Spengler, there is no “human race”, there are different spiritual types of humans. Farrenkopf quotes him “There are not any noble races. There are only noble specimens of all races.”[81]

With this sense of “race” in mind, Spengler portrays two revolutions taking place in the coming decades and centuries: a White World-Revolution and a Coloured World-Revolution, the former of which will be a class revolution, and the latter will be a racial revolution. As he suggested in Decline, the Occident is failing, and some other Kultur-Zivilisation organisms must come into itself in order to replace the dying Faustian Zivilisation. This is what is meant in the “Coloured World-Revolution”; a collapse of the Western direct control over the rest of the world and the beginning of a new birth. The “White World-Revolution”, on the other hand, will be one of class: not because of Bolshevism, but because of the liberalism that destroyed the social structure of the West in the Autumnal season and brought about the new sense of egalitarianism. These combined “World-Revolutions” must ultimately arise from a great World War which Spengler foresees in the near future; it is his hope that the War will set the West back on its path toward Ceasarism, and begin the final phase of decay which has been prevented, be believes, by the defeat of the “Prussian Spirit” in the First World War; he therefore proclaims at the end of the work that, “Only the militarist Prussian spirit remains as a shaping force, not only for Germany, but everywhere.”[82]

Farrenkopf offers the critique that Spengler does not sufficiently “probe” into “how geopolitical competition among non-Western powers will interact with the conflict between the West and the non-West”.[83] Nevertheless, for a German in a time of when the general feeling of the nation was one of peace and plenty, to foresee a world-shattering global conflict that would bring about a post-colonial age is hauntingly astute, and speaks to the significance of Spengler’s overall corpus to contemporary political and historical study. Another testament to his skills of prophecy is the very military power gained by the United States subsequent to the Second World War; Farrenkopf also observes that Spengler discounted America but nevertheless may be applied in an American paradigm.

With all the talk of “race” and the “militaristic Prussian spirit” and Spengler’s relationship to National Socialism, it seems fitting that a special word be said of Spengler’s relationship to the Jewish community. He himself found anti-Semitism especially abhorrent, and recognised it for exactly what it was: namely, social and political scapegoating. As Fischer observes, “Spengler observed that the character of the Jew was moulded by his position as an outsider…[who is] generally forced to adopt attitudes that are inimical to the mainstream of society,” which is why they are viewed as threats; the only solution Spengler could see for the Jews to escape this inevitable situation was to assimilate or, though Spengler never suggests it, to leave.[84] A similar conclusion was reached by Theodor Herzl, the founder of Zionism, in his 1896 Der Judenstaat, which proposed the second option: that the Jews remove themselves from European society physically to escape anti-Semitism.

After his name was officially banned from the press and his book taken off the shelves in German bookstores, Spengler once again retreated from the public eye, this time never to return. Unlike other intellectuals of the day, he declined offers to university jobs, including the rectorship of the University of Leipzig’s Institute for Cultural and Universal History and a professorship at the University of Marburg. He was, nevertheless, honoured in 1933 with membership in the Senate of the German Academy, which he maintained even after his work was officially censored by the Nazi state. He was encouraged by friends to flee Germany and emigrate to America or England and continue his studies, but he refused to leave. He did, however, continue his work on Urfragen and his other unfinished book, Frühzeit der Weltgeschichte. He still received some attention from other countries, and in 1935 wrote an article entitled “Zur Weltgeschichte des zweiten vorchristlichen Jahrtausends” (“Toward a World History of the Second Millennium BC”) in the journal Die Welt als Geschichte.

9783902475435xxl.jpgSpengler’s final contribution while he was alive was a reply to a cable from Hearst International Cosmopolitan magazine, which at the time was still a respectable publication that gave attention to serious global political issues. The work, entitled Ist Weltfriede moeglich? (“Is World Peace Possible?”) was translated by editors of the magazine and published in January of 1936. This last work is largely ignored by Spengler biographers, but is rather his last real political offering, in which he expressed that the question was one that “can only be answered by someone familiar with world history… [which] means to know most humans as they have been and always will be.”[85] His next words encapsulate his “strong pessimism”, when he says that “there is a vast difference… between viewing the history of the future as it shall be and as one might like it to be. Peace is the wish, war is an actuality”: he echoes his introduction to Jahre der Entscheidung, “it is the great task of the connoisseur of history to understand the actualities of his age and, using them, to sense the future, to indicate and to sketch out what will come, whether we desire it or not.”[86] He follows it saying that, ultimately, man will always resort to violence in some form or another. He declares that a man may “be branded a criminal, a class can be called revolutionary or traitorous, a people bloodthirsty, but that does not alter the actuality” that violence is in escapable.[87]

He then repeats a his message to the Western world, hoping perhaps for an audience in liberal America where he had lost his in Germany: “It is a deadly reality that today only the white peoples speak of ‘world peace’, not the many coloured peoples. As long as individual thinkers and idealists do this—and they have done it in all ages—it is ineffective. When, on the other hand, entire peoples become pacifistic, it is a symptom of senility. Strong and unspent breeds do not do it: it is abandonment of the future, because the pacifist ideal is a terminal state that contradicts the reality of life.”[88] Spengler would go to his grave convinced that half of the Occident had adopted this very abandonment of the future, and the other half had gone mad on the drunkenness of National Socialism. Fischer observes that “convinced of the truth of his ideas, Spengler seems to have resigned himself to a life of quiet desperation.”[89] His desperation ended before the dawn of the 8th of May 1936, when a sudden heart attack mercifully took him from the world before he could witness his most recent predictions of death and doom become reality.

Eleven days after Spengler’s death, his closest friend, August Albers, who Fischer calls his “philosophical sounding board”, which he had been since Decline in 1917, threw himself in front of a train, unable to cope with the absence of his mentor and friend. His sister collected his papers and would spend the rest of her life handling the publication of his remaining papers; her daughter would devote most of her academic life to studying and publicising his contributions to history, politics, and philosophy. Paul Reusch chose and paid for the grave marker, a simple block of polished black granite with SPENGLER etched across it in stark white letters. Beneath it Spengler rests holding a copy of Nietzsche’s Thus Spoke Zarathustra and Goethe’s Faust.



[1] H. Stuart Hughes, Oswald Spengler: A Critical Estimate (New York: Charles Scribner Sons, 1952), 1.

[2] Anton Mirko Koktanek, Oswald Spengler in Seiner Zeit (Munich: C.H. Beck, 1968), 435.

[3] Koktanek, Spenger in Seiner Zeit, 427.

[4] Oswald Spengler, Ich beneide jeden, der lebt, ed. Gilbert Merlio and Hilde Kornhardt (Munich: C.H. Beck, 2007), 16. The original title of the text was to be Eis heauton, in imitation of Marcus Aurelius, and the manuscript was originally edited by Spengler’s niece and her mother, both named Hilde Kornhardt.

[5] Spengler, Ich beneide, 14.

[6] John Farrenkopf, Prophet of Decline, (Baton Rouge: Louisiana State University, 2001), 9.

[7] Koktanek, Spengler in Seiner Zeit, 19.

[8] Farrenkopf, Prophet, 7-8.

[9] Farrenkopf, Prophet, 8-9.

[10] Klaus P. Fischer, History and Prophecy: Oswald Spengler and the Decline of the West (New York: Peter Lang, 1989), 34.

[11] Fischer, History and Prophecy, 35.

[12] Fischer, History and Prophecy, 36.

[13] Fischer, History and Prophecy, 36.

[14] Farrenkopf, Prophet, 11.

[15] Fischer, History and Prophecy, 28.

[16] Fischer, History and Prophecy, 37.

[17] Spengler, Ich beneide, 73.

[18] Farrenkopf, Prophet, 15.

[19] Fischer, History and Prophecy, 45.

[20] Oswald Spengler, Der Untergang des Abendlandes, (Munich: C.H. Beck, 1969), x.

[21] Thomas A. Brady, German Histories in the Ages of Reformations (Cambridge: Cambridge University, 2009), 3.

[22] G.W.F. Hegel, Grundlinien der Philosophie des Rechts (Leiden: A.H. Adriani, 1902), 238.

[23] Oswald Spengler, Decline of the West, trans. C.F. Atkinson (New York: Alfred A. Knopf, 1928), 21. He derives this notion from Goethe, who says in a letter to Heinrich Luden (†1847), “‘Die Menschheit’? Das ist ein Abstraktum. Es hat von jeher nur Menschen gegeben und wird nur Menschen geben.(“‘Mankind’? It is an abstraction. There have only ever been men and will only ever be men.”) (p 281)

[24] The proper rendering of Gemeinschaft and Gesellschaft in English is highly disputed among translators; the former is often translated as “community” but may also be understood (perhaps more clearly) as “communion”, while the latter is rendered both as “society” and “association,” with the latter being favoured in recent scholarship. Cf. Ferdinand Tönnies: A New Evaluation, ed. Werner J. Cahnman (Leiden: E.J. Brill, 1973).

[25] Ferdinand Tönnies, Gemeinschaft und Gesellschaft (Berlin: Karl Curtius, 1912), 3-4.

[26] Spengler, Decline, 109.

[27] Spengler, Decline, 31.

[28] Spengler, Decline, 53.

[29] Spengler, Decline, 212.

[30] Spengler, Decline, 191-192.

[31] Oswald Spengler, Jahre der Entscheidung (Munich: C.H. Beck, 1933), 43. He doesn’t, however, make clear what the implications of Stalin’s “modernisation” policies and the five-year plan might be.

[32] Oswald Spengler, “Pessimismus?” in Rede und Aufsätze (Munich: C.H. Beck, 1937), 63-64.

[33] Spengler, Decline, 485. N.B. The notion of “race” here should not be understood as the restrictive biological concept but retaining its nineteenth-century use as a term for a broad cultural unit.

[34] Oswald Spengler, Letters 1913-1936, trans. Arthur Helps (London: George Allen Unwin, 1966), 87.

[35] Fischer, History and Prophecy, 68.

[36] Spengler, Letters, 92.

[37] Spengler, Letters, 93.

[38] Donald O. White, Introduction to Selected Essays, by Oswald Spengler, trans. and ed. Donald O. White (Chicago: Henry Regnery, 1967), xiii.

[39] Timothy Ryback, Hitler’s Private Library (New York: Alfred A. Knopf, 2008), 112.

[40] Fischer, History and Prophecy, 61.

[41] Fischer, History and Prophecy, 61.

[42] Spengler, Letters, 133-138.

[43] Spengler, Letters, 181.

[44] Spengler, Selected Essays, 7.

[45] Spengler, Selected Essays, 3.

[46] Spengler, Selected Essays, 1, 3.

[47] Spengler, Selected Essays, 10-11.

[48] Spengler, Selected Essays, 13.

[49] Spengler, Selected Essays, 13.

[50] Spengler, Selected Essays, 29.

[51] Spengler, Selected Essays, 92.

[52] Spengler, Letters, 11.

[53] White, Introduction, xi.

[54] Benito Mussolini, “Anni decisive di Osvaldo Spengler”, Il Popolo d’Italia, 15 December 1933, p. 16.

[55] Spengler, Letters, 184.

[56] Fischer, History and Prophecy, 71.

[57] Spengler, Letters, 180.

[58] Cf. Oswald Spengler, Reden und Aufsätze (Munich: C.H. Beck, 1937), 96.

[59] Spengler, Letters, 211; “Will Our Civilization Survive?” New York Times, 24 May 1925, SM1; “Doom of Western Civilization,” New York Times, 2 May 1926, BR1. 

[60] Spengler, Letters, 222.

[61] Spengler, Letters, 229.

[62] Spengler, Letters, 203, 204, 219-220, 235.

[63] Spengler, Letters, 2031.

[64] Fischer, History and Prophecy, 73.

[65] Fischer, History and Prophecy, 66.

[66] Fischer, History and Prophecy, 66.

[67] Farrenkopf, Prophet, 202.

[68] Spengler, Decline, 109.

[69] Alan Bullock, Hitler: A Study in Tyranny (New York: Harper & Row, 1962), 217-218.

[70] Fischer, History and Prophecy, 74.

[71] Fischer, History and Prophecy, 74.

[72] Fischer, History and Prophecy, 74.

[73] William McDonald, “Spengler’s New Challenge” New York Times, 11 February 1934.

[74] Fischer, History and Prophecy, 78.

[75] Farrenkopf, Prophet, 238.

[76] Spengler, Letters, 291.

[77] “June ‘White List’ of Books Issued” New York Times, 26 May, 1934, p. 15.

[78] Spengler, Jahre der Entscheidung, 157.

[79] Farrenkopf, Prophet, 256; Oswald Spengler, Gedanken, (Munich: C.H. Beck, 1941), 23.

[80] Spengler, Der Mensch und die Technik (Munich: C.H. Beck, 1931), 89.

[81] Farrenkopf, Prophet, 256.

[82] Spengler, Jahre der Entscheidung, 165.

[83] Farrenkopf, Prophet, 258.

[84] Fischer, History and Prophecy, 76.

[85] Spengler, Reden und Aufsätze, 292.

[86] Spengler, Reden und Aufsätze, 292; Spengler, Jahre der Entscheidung, vii.

[87] Spengler, Reden und Aufsätze, 292.

[88] Spengler, Reden und Aufsätze, 292-293.

[89] Fischer, History and Prophecy, 68.

mercredi, 26 février 2020

The Two Faces Of Russia And Germany’s Eastern Problems

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Oswald Spengler:

The Two Faces Of Russia And Germany’s Eastern Problems

An address delivered on February 14, 1922, at the Rhenish-Westphalian Business Convention in Essen

First published in Spengler, Politische Schriften (Munich, 1932).

Ex: https://europeanheathenfront.wordpress.com

In the light of the desperate situation in which Germany finds itself today -- defenseless, ruled from the West by the friends of its enemies, and the victim of undiminished warfare with economic and diplomatic means -- the great problems of the East, political and economic, have risen to decisive importance. If from our vantage point we wish to gain an understanding of the extremely complex real situation, it will not suffice merely to familiarize ourselves with contemporary conditions in the broad expanses to the east of us, with Russian domestic policy and the economic, geographic, and military factors that make up present-day Soviet Russia. More fundamental and imperative than this is an understanding of the world-historical fact of Russia itself, its situation and evolution over the centuries amid the great old cultures -- China, India, Islam, and the West -- the nature of its people, and its national soul. Political and economic life is, after all, Life itself; even in what may appear to be prosaic aspects of day-to-day affairs it is a form, expression, and part of the larger entity that is Life.

One can attempt to observe these matters with "Russian" eyes, as our communist and democratic writers and party politicians have done, i.e., from the standpoint of Western social ideologies. But that is not "Russian" at all, no matter how many citified minds in Russia may think it is. Or one can try to judge them from a Western-European viewpoint by considering the Russian people as one might consider any other "European" people. But that is just as erroneous. In reality, the true Russian is basically very foreign to us, as foreign as the Indian and the Chinese, whose souls we can likewise never fully comprehend. Justifiably, the Russians draw a distinction between "Mother Russia" and the "fatherlands" of the Western peoples. These are, in fact, two quite different and alien worlds. The Russian understands this alienation. Unless he is of mixed blood, he never overcomes a shy aversion to or a naïve admiration of the Germans, French, and English. The Tartar and the Turk are, in their ways of life, closer and more comprehensible to him. We are easily deceived by the geographic concept of "Europe," which actually originated only after maps were first printed in 1500. The real Europe ends at the Vistula. The activity of the Teutonic knights in the Baltic area was the colonization of foreign territory, and the knights themselves never thought of it in any other way.

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Soviet architecture, 1920s

In order to reach an understanding of this foreign people we must review our own past. Russian history between 900 and 1900 A.D. does not correspond to the history of the West in the same centuries but, rather, to the period extending from the Age of Rome to Charlemagne and the Hohenstaufen emperors. Our heroic poetry, from Arminius to the lays of Hildebrand, Roland, and the Nibelungs, was recapitulated in the Russian heroic epics, the byliny, which began with the knights at the court of Prince Vladimir (d. 1015), the Campaign of Igor, and with Ilya Muromets, and have remained a vital and fruitful art form through the reigns of Ivan the Terrible and Peter the Great, the Burning of Moscow, and to the present day. [1] Yet each of these worlds of primeval poetry expresses a very different kind of basic feeling. Russian life has a different meaning altogether. The endless plains created a softer form of humanity, humble and morose, inclined to lose itself mentally in the flat expanses of its homeland, lacking a genuine personal will, and prone to servility. These characteristics are the background for high-level politics in Russia, from Genghis Khan to Lenin.

(1. Cf. my The Decline of the West, II, 192ff.)

Furthermore, the Russians are semi-nomads, even today. Not even the Soviet regimen will succeed in preventing the factory workers from drifting from one factory to another for no better reason than their inborn wanderlust. [2] That is why the skilled technician is such a rarity in Russia. [3] Similarly, the home of the peasant is not the village or the countryside into which he was born, but the great expanses. Even the mir or so-called agrarian commune -- not an ancient idea, but the outgrowth of administrative techniques employed by the tsarist governments for the raising of taxes -- was unable to bind the peasant, unlike his Germanic counterpart, to the soil. Many thousands of them flooded into the newly developed regions in the steppes of southern Russia, Turkestan, and the Caucasus, in order to satisfy their emotional search for the limits of the infinite. The result of this inner restlessness has been the extension of the Empire up to the natural borders, the seas and the high mountain ranges. In the sixteenth century Siberia was occupied and settled as far as Lake Baikal, in the seventeenth century up to the Pacific.

(2. Cf. several stories of Leskov, and particularly of Gorki.)

(3. Except perhaps in the earlier arteli, groups of workers under self-chosen leaders, which accepted contracts for certain kinds of work in factories and on estates. There is a good description on an artel’ in Leskov’s The Memorable Angel.)

Even more deep-seated than this nomadic trait of the Russians is their dark and mystical longing for Byzantium and Jerusalem. It appears in the outer form of Orthodox Christianity and numerous religious sects, and thus has been a powerful force in the political sphere as well. But within this mystical tendency there slumbers the unborn new religion of an as yet immature people. There is nothing Western about this at all, for the Poles and Balkan Slavs are also "Asiatics."

The economic life of this people has also assumed indigenous, totally non-European forms. The Stroganov family of merchants, which began conquering Siberia on its own under Ivan Grozny [4] and placed some of its own regiments at the tsar’s disposal, had nothing at all in common with the great businessmen of the same century in the West. This huge country, with its nomadic population, might have remained in the same condition for centuries, or might perhaps have become the object of Western colonial ambitions, had it not been for the appearance of a man of immense world-political significance, Peter the Great.

(4. Grozny means "the terrifying, just, awe-inspiring" in the positive sense, not "the terrible" with Western overtones. Ivan IV was a creative personality as was Peter the Great, and one of the most important rulers of all time.)

There is probably no other example in all of history of the radical change in the destiny of an entire people such as this man brought about. His will and determination lifted Russia from its Asiatic matrix and turned it into a Western-style nation within the Western world of nations. His goal was to lead Russia, until then landlocked, to the sea -- at first, unsuccessfully, to the Sea of Asov, and then with permanent success to the Baltic. The fact that the shores of the Pacific had already been reached was, in his eyes, wholly unimportant; the Baltic coast was for him the bridge to "Europe." There he founded Petersburg, symbolically giving it a German name. In place of the old Russian market centers and princely residences like Kiev, Moscow, and Nizhni-Novgorod, he planted Western European cities in the Russian landscape. Administration, legislation, and the state itself now functioned on foreign models. The boyar families of Old Russian chieftains became feudal nobility, as in England and France. His aim was to create above the rural population a "society" that would be unified as to dress, customs, language, and thought. And soon an upper social stratum actually formed in the cities, having a thin Western veneer. It played at erudition like the Germans, and took on esprit and manners like the French. The entire corpus of Western Rationalism made its entry -- scarcely understood, undigested, and with fateful consequences. Catherine II, a German, found it necessary to send writers such as Novikov and Radishchev into jail and exile because they wished to try out the ideas of the Enlightenment on the political and religious forms of Russia. [5]

(5. "Jehova, Jupiter, Brahma, God of Abraham, God of Moses, God of Confucius, God of Zoroaster, God of Socrates, God of Marcus Aurelius, God of the Christians -- Thou art everywhere the same, eternal God!" (Radishchev).)

And economic life changed also. In addition to its ages-old river traffic, Russia now began to engage in ocean shipping to distant ports. The old merchant tradition of the Stroganovs, with their caravan trade to China, and of the fairs at Nizhni-Novgorod, now received an overlay of Western European "money thinking" in terms of banks and stock exchanges. [6] Next to the old-style handicrafts and the primitive mining techniques in the Urals there appeared factories, machines, and eventually railroads and steamships.

(6. Cf. Decline of the West, II, 480f., 495.)

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German architecture, 1920s, "Chilehaus" in Hamburg and Berlin Tempelhof

Most important of all, Western-style politics entered the Russian scene. It was supported by an army that no longer conformed to conditions of the wars against the Tartars, Turks, and Kirghiz; it had to be prepared to do battle against Western armies in Western territory, and by its very existence it continually misled the diplomats in Petersburg into thinking that the only political problems lay in the West.

Despite all the weaknesses of an artificial product made of stubborn material, Petrinism was a powerful force during the two hundred years of its duration. It will be possible to assess its true accomplishments only at some distant future time, when we can survey the rubble it will have left behind. It extended "Europe," theoretically at least, to the Urals, and made of it a cultural unity. An empire that stretched to the Bering Strait and the Hindu Kush had been Westernized to the extent that in 1900 there was hardly much difference between cities in Ireland and Portugal and those in Turkestan and the Caucasus. Travel was actually easier in Siberia than in some countries in Western Europe. The Trans-Siberian Railway was the final triumph, the final symbol of the Petrinist will before the collapse.

Yet this mighty exterior concealed an internal disaster. Petrinism was and remained an alien element among the Russian people. In reality there existed not one but two Russias, the apparent and the true, the official and the underground Russia. The foreign element brought with it the poison that caused that immense organism to fall ill and die. The spirit of Western Rationalism of the eighteenth century and Western Materialism of the nineteenth, both remote and incomprehensible to genuine Russian thought, came to lead a grotesque and subversive existence among the intelligentsia in the cities. There arose a type of Russian intellectual who, like the Reformed Turk, the Reformed Chinese, and the Reformed Indian, was mentally and spiritually debased, impoverished, and ruined to the point of cynicism by Western Europe. It began with Voltaire, and continued from Proudhon and Marx to Spencer and Haeckel. In Tolstoy’s day the upper class, irreligious and opposed to all native tradition, preened itself with blasé pretentiousness. Gradually the new world view seeped down to the bohemians in the cities, the students, demagogues, and literati, who in turn took it "to the people" to implant in them a hatred of the Western-style upper classes. The result was doctrinaire bolshevism.

At first, however, it was solely the foreign policy of Russia that made itself painfully felt in the West. The original nature of the Russian people was ignored, or at least not understood. It was nothing but a harmless ethnographic curiosity, occasionally imitated at bals masques and in operettas. Russia meant for us a Great Power in the Western sense, one which played the game of high politics with skill and at times with true mastery.

What we did not notice was that two tendencies, alien and inimical to each other, were operative in Russia. One of these was the ancient, instinctive, unclear, unconscious, and subliminal drive that is present in the soul of every Russian, no matter how thoroughly westernized his conscious life may be -- a mystical yearning for the South, for Constantinople and Jerusalem, a genuine crusading spirit similar to the spirit our Gothic forebears had in their blood but which we hardly can appreciate today. Superimposed on this instinctive drive was the official foreign policy of a Great Power: Petersburg versus Moscow. Behind it lay the desire to play a role on the world stage, to be recognized and treated as an equal in "Europe." Hence the hyper-refined manners and mores, the faultless good taste -- things which had already begun to degenerate in Paris since Napoleon III. The finest tone of Western society was to be found in certain Petersburg circles.

At the same time, this kind of Russian did not really love any of the Western peoples. He admired, envied, ridiculed, or despised them, but his attitude depended practically always on whether Russia stood to gain or lose by them. Hence the respect shown for Prussia during the Wars of Liberation (Russia would have liked to pocket Prussian territory) and for France prior to the World War (the Russians laughed at her senile cries for revanche). Yet, for the ambitious and intelligent upper classes, Russia was the future master of Europe, intellectually and politically. Even Napoleon, in his time, was aware of this. The Russian army was mobilized at the western border; it was of Western proportions and was unmistakably trained for battle on Western terrain against Western foes. Russia’s defeat at the hands of Japan in 1905 can be partly explained by the lack of training for warfare under anything but Western conditions.

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Such policies were supported by a network of embassies in the great capitals of the West (which the Soviet government has replaced with Communist party centers for agitation). Catherine the Great took away Poland, and with it the final obstacle between East and West. The climax came with the symbolic journey of Alexander I, the "Savior of Europe," to Paris. At the Congress of Vienna, Russia at times played a decisive role, as also in the Holy Alliance, which Metternich called into being as a bulwark against the Western revolution, and which Nicholas I put to work in 1849 restoring order in the Habsburg state in the interest of his own government.

By means of the successful tradition of Petersburg diplomacy, Russia became more and more involved in great decisions of Western European politics. It took part in all the intrigues and calculations that not only concerned areas remote from Russia, but were also quite incomprehensible to the Russian spirit. The army at the western border was made the strongest in the world, and for no urgent reason -- Russia was the only country no one intended to invade after Napoleon’s defeat, while Germany was threatened by France and Russia, Italy by France and Austria, and Austria by France and Russia. One sought alliance with Russia in order to tip the military balance in one’s favor, thus spurring the ambitions of Russian society toward ever greater efforts in non-Russian interests. All of us grew up under the impression that Russia was a European power and that the land beyond the Volga was colonial territory. The center of gravity of the Empire definitely lay to the west of Moscow, not in the Volga region. And the educated Russians thought the very same way. They regarded the defeat in the Far East in 1905 as an insignificant colonial adventure, whereas even the smallest setback at the western border was in their eyes a scandal, inasmuch as it occurred in full view of the Western nations. In the south and north of the Empire a fleet was constructed, quite superfluous for coastal defense: its sole purpose was to play a role in Western political machinations.

On the other hand, the Turkish Wars, waged with the aim of "liberating" the Christian Balkan peoples, touched the Russian soul more deeply. Russia as the heir to Turkey -- that was a mystical idea. There were no differences of opinion on this question. That was the Will of God. Only the Turkish Wars were truly popular wars in Russia. In 1807 Alexander I feared, not without reason, that he might be assassinated by an officers’ conspiracy. The entire officers’ corps preferred a war against the Turks to one against Napoleon. This led to Alexander’s alliance with Napoleon at Tilsit, which dominated world politics until 1812. It is characteristic how Dostoyevsky, in contrast to Tolstoy, became ecstatic over the Turkish War in 1877. He suddenly came alive, constantly wrote down his metaphysical visions, and preached the religious mission of Russia against Byzantium. But the final portion of Anna Karenina was denied publication by the Russian Messenger, for one did not dare to offer Tolstoy’s skepticism to the public.

As I have mentioned, the educated, irreligious, Westernized Russians also shared the mystical longing for Jerusalem, the Kiev monk’s notion of the mother country as the "Third Rome," which after Papal Rome and Luther’s Wittenberg was to take the fulfillment of Christ’s message to the Jerusalem of the apostles. This barely conscious national instinct of all Russians opposes any power that might erect political barricades on the path that leads to Jerusalem by way of Byzantium. In all other countries such political obstacles would simply disturb either national conceit (in the West) or national apathy (in the Far East); in Russia, the mystical soul of the people itself was pierced and profoundly agitated. Hence the brilliant successes of the Slavophil movement, which was not so much interested in winning over Poles and Czechs as in gaining a foothold among the Slavs in the Christian Balkan countries, the neighbors of Constantinople. Even at an earlier date, the Holy War against Napoleon and the Burning of Moscow had involved the emotions of the entire Russian people. This was not just because of the invasion and plundering of the Russian countryside, but because of Napoleon’s obvious long-range plans. In 1809 he had taken over the Illyrian provinces (the present Yugoslavia) and thus became master of the Adriatic. This had decisively strengthened his influence on Turkey to the disadvantage of Russia, and his next step would be, in alliance with Turkey and Persia, to open up the path to India, either from Illyria or from Moscow itself. The Russians’ hatred of Napoleon was later transferred to the Habsburg monarchy, when its designs on Turkish territory -- in Metternich’s time the Danubian principalities, and after 1878 Saloniki -- endangered Russian moves toward the south. Following the Crimean War they extended their hatred to include Great Britain, when that nation appeared to lay claim to Turkish lands by blockading the Straits and later by occupying Egypt and Cyprus.

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Finally, Germany too became the object of this hatred, which goes very deep and cannot be allayed by practical considerations. After 1878, Germany neglected its role as a Russian ally to became more and more the protector and preserver of the crumbling Habsburg state, and thereby also, despite Bismarck’s warning, the supporter of Austro-Hungarian intentions in the Balkans. The German government showed no understanding of the suggestion made by Count Witte, the last of the Russian diplomats friendly to Germany, to choose between Austria and Russia. We could have had a reliable ally in Russia if we had been willing to loosen our ties to Austria. A total reorientation of German policy might have been possible as late as 1911.

Following the Congress of Berlin, hatred of Germany began to spread to all of Russian society, for Bismarck succeeded in restraining Russian diplomacy in the interest of world peace and maintaining the balance of power in "Europe." From the German point of view this was probably correct, and in any case it was a master stroke of Bismarckian statesmanship. But in the eyes of Petersburg it was a mistake, for it deprived the Russian soul of the hope of winning Turkey, and favored England and Austria. And this Russian soul was one of the imponderables that defied diplomatic treatment. Hostility to Germany kept on growing and eventually entered all levels of Russian urban society. It was diverted momentarily when Japanese power, rising up suddenly and broadening the horizons of world politics, forced Russia to experience the Far East as a danger zone. But that was soon forgotten, especially since Germany was so grotesquely inept as to understand neither the immediate situation nor the future possibilities. In time, the senseless idea of the Berlin-Baghdad Railway came up; Germany now seemed intent on capturing full control of this path to Constantinople, a move which would have benefitted neither German politics nor the German economy.

Just as in the field of politics, the economic life of Russia was divided into two main tendencies -- the one active and aggressive, the other passive. The passive element was represented by the Russian peasantry with its primitive agrarian economy; [7] by the old-style merchants with their fairs, caravans, and Volga barges; by Russian craftsmen; and finally by the primitive mining enterprises in the Urals, which developed out of the ancient techniques of pre-Christian "blacksmith tribes," independent of Western mining methods and experience. The forging of iron was invented in Russia in the second millennium B.C. -- the Greeks retained a vague recollection of the beginning of this art. This simple and traditional form of economy gradually found a powerful competitor in the civilized world of Western-style urban economy, with its banks, stock exchanges, factories, and railroads. Then it was money economy versus goods economy; each of these forms of economic existence abhors the other, each tries to attack and annihilate the other.

(7. On the contrast between agrarian and urban economy, see Decline of the West, II, 477ff.)

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The Petrinist state needed a money economy in order to pay for its Westernized politics, its army, and its administrative hierarchy, which was laced with primitive corruption. Incidentally, this form of corruption was habitual public practice in Russia; it is a necessary psychological concomitant of an economy based on the exchange of goods, and is fundamentally different from the clandestine corruption practiced by Western European parliamentarians. The state protected and supported economic thinking that was oriented toward Western capitalism, a type of thinking that Russia neither created nor really understood, but had imported and now had to manage. Furthermore, Russia had also to face its doctrinary opposite, the economic theory of communism. Communism was in fact inseparable from Western economic thinking. It was the Marxist capitalism of the lower class, preached by students and agitators as a vague gospel to the masses in the Petrinist cities.

Still, the decisive and truly agitating factor for Russia’s future was not this literary, theoretical trend in the urban underground. It was, rather, the Russians’ profound, instinctively religious abhorrence of all Western economic practices. They considered "money" and all the economic schemes derived from it, socialistic as well as capitalistic, as sinful and satanic. This was a genuine religious feeling, much like the Western emotion which, during the Gothic centuries, opposed the economic practices of the Arabic-Jewish world and led to the prohibition for Christians of money-lending for interest. In the West, such attitudes had for centuries been little more than a cliché for chapel and pulpit, but now it became an acute spiritual problem in Russia. It caused the suicide of numerous Russians who were seized by "terror of the surplus value," whose primitive thought and emotions could not imagine a way of earning a living that would not entail the "exploitation" of "fellow human beings." This genuine Russian sentiment saw in the world of capitalism an enemy, a poison, the great sin that it ascribed to the Petrinist state despite the deep respect felt for "Little Father," the Tsar.

Such, then, are the deep and manifold roots of the Russian philosophy of intellectual nihilism, which began to grow at the time of the Crimean War and which produced as a final fruit the bolshevism that destroyed the Petrinist state in 1917, replacing it with something that would have been absolutely impossible in the West. Contained within this movement is the orthodox Slavophils’ hatred of Petersburg and all it stood for, [8] the peasants’ hatred of the mir, the type of village commune that contradicted the rural concept of property passed down through countless family generations, as well as every Russian’s hatred of capitalism, industrial economy, machines, railroads, and the state and army that offered protection to this cynical world against an eruption of Russian instincts. It was a primeval religious hatred of uncomprehended forces that were felt to be godless, that one could not change and thus wished to destroy, in order that life could go on in the old-fashioned way.

(8. "The first requirement for the liberation of popular feeling in Russia is to hate Petersburg with heart and soul" (Aksakov to Dostoyevsky). Cf. Decline of the West, II, 193ff.)

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The peasants detested the intelligentsia and its agitating just as strongly as they detested what these people were agitating against. Yet in time the agitation brought a small clique of clever but by and large mediocre personalities to the forefront of power. Even Lenin’s creation is Western, it is Petersburg -- foreign, inimical, and despised by the majority of Russians. Some day, in some way or other, it will perish. It is a rebellion against the West, but born of Western ideas. It seeks to preserve the economic forms of industrial labor and capitalist speculation as well as the authoritarian state, except that it has replaced the Tsarist regime and private capitalist enterprise with an oligarchy and state capitalism, calling itself communism out of deference to doctrine.

It is a new victory for Petersburg over Moscow and, without any doubt, the final and enduring act of self-destruction committed by Petrinism from below. The actual victim is precisely the element that sought to liberate itself by means of the rebellion: the true Russian, the peasant and craftsman, the devout man of religion. Western revolutions such as the English and French seek to improve organically evolved conditions by means of theory, and they never succeed. In Russia, however, a whole world was made to vanish without resistance. Only the artificial quality of Peter the Great’s creation can explain the fact that a small group of revolutionaries, almost without exception dunces and cowards, has had such an effect. Petrinism was an illusion that suddenly burst.

The bolshevism of the early years has thus had a double meaning. It has destroyed an artificial, foreign structure, leaving only itself as a remaining integral part. But beyond this, it has made the way clear for a new culture that will some day awaken between "Europe" and East Asia. It is more a beginning than an end. It is temporary, superficial, and foreign only insofar as it represents the self-destruction of Petrinism, the grotesque attempt systematically to overturn the social superstructure of the nation according to the theories of Karl Marx. At the base of this nation lies the Russian peasantry, which doubtless played a more important role in the success of the 1917 Revolution than the intellectual crowd is willing to admit. These are the devout peasants of Russia who, although they do not yet fully realize it, are the archenemies of bolshevism and are oppressed by it even worse than they were by the Mongols and the old tsars. For this very reason, despite the hardships of the present, the peasantry will some day become conscious of its own will, which points in a wholly different direction.

The peasantry is the true Russian people of the future. It will not allow itself to be perverted and suffocated, and without a doubt, no matter how slowly, it will replace, transform, control, or annihilate bolshevism in its present form. How that will happen, no one can tell at the moment. It depends, among other things, on the appearance of decisive personalities, who, like Genghis Khan, Ivan IV, Peter the Great, and Lenin, can seize Destiny by their iron hand. Here, too, Dostoyevsky stands against Tolstoy as a symbol of the future against the present. Dostoyevsky was denounced as a reactionary because in his Possessed he no longer even recognized the problems of nihilism. For him, such things were just another aspect of the Petrinist system. But Tolstoy, the man of good society, lived in this element; he represented it even in his rebellion, a protest in Western form against the West. Tolstoy, and not Marx, was the leader to bolshevism. Dostoyevsky is its future conqueror.

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There can be no doubt: a new Russian people is in the process of becoming. Shaken and threatened to the very soul by a frightful destiny, forced to an inner resistance, it will in time become firm and come to bloom. It is passionately religious in a way we Western Europeans have not been, indeed could not have been, for centuries. As soon as this religious drive is directed toward a goal, it possesses an immense expansive potential. Unlike us, such a people does not count the victims who die for an idea, for it is a young, vigorous, and fertile people. The intense respect enjoyed over the past centuries by the "holy peasants" whom the regime often exiled to Siberia or liquidated in some other way -- such figures as the priest John of Kronstadt, even Rasputin, but also Ivan and Peter the Great -- will awaken a new type of leaders, leaders to new crusades and legendary conquests. The world round about, filled with religious yearning but no longer fertile in religious concerns, is torn and tired enough to allow it suddenly to take on a new character under the proper circumstances. Perhaps bolshevism itself will change in this way under new leaders; but that is not very probable. For this ruling horde -- it is a fraternity like the Mongols of the Golden Horde -- always has its sights set on the West as did Peter the Great, who likewise made the land of his dreams the goal of his politics. But the silent, deeper Russia has already forgotten the West and has long since begun to look toward Near and East Asia. It is a people of the great inland expanses, not a maritime people.

An interest in Western affairs is upheld only by the ruling group that organizes and supports the Communist parties in the individual countries -- without, as I see it, any chance of success. It is simply a consequence of Marxist theory, not an exercise in practical politics. The only way that Russia might again direct its attention to the West -- with disastrous results for both sides -- would be for other countries (Germany, for instance) to commit serious errors in foreign policy, which could conceivably result in a "crusade" of the Western powers against bolshevism -- in the interest, of course, of Franco-British financial capital. Russia’s secret desire is to move toward Jerusalem and Central Asia, and "the" enemy will always be the one who blocks those paths. The fact that England established the Baltic states and placed them under its influence, thereby causing Russia to lose the Baltic Sea, has not had a profound effect. Petersburg has already been given up for lost, an expendable relic of the Petrinist era. Moscow is once again the center of the nation. But the destruction of Turkey, the partition of that country into French and English spheres of influence, France’s establishment of the Little Entente which closed off and threatened the area from Rumania southwards, French attempts to win control of the Danubian principalities and the Black Sea by aiding the reconstruction of the Hapsburg state -- all these events have made England and, above all, France the heirs to Russian hatred. What the Russians see is the revivification of Napoleonic tendencies; the crossing of the Beresina was perhaps not, after all, the final symbolic event in that movement. Byzantium is and remains the Sublime Gateway to future Russian policy, while, on the other side, Central Asia is no longer a conquered area but part of the sacred earth of the Russian people.

In the face of this rapidly changing, growing Russia, German policy requires the tactical skill of a great statesman and expert in Eastern affairs, but as yet no such man has made his appearance. It is clear that we are not the enemies of Russia; but whose friends are we to be -- of the Russia of today, or of the Russia of tomorrow? Is it possible to be both, or does one exclude the other? Might we not jeopardize such friendship by forming careless alliances?

Similarly obscure and difficult are our economic connections, the actual ones and the potential ones. Politics and economics are two very different aspects of life, different in concept, methods, aims, and significance for the soul of a people. This is not realized in the age of practical materialism, but that does not make it any less fatefully true. Economics is subordinate to politics; it is without question the second and not the first factor in history. The economic life of Russia is only superficially dominated by state capitalism. At its base it is subject to attitudes that are virtually religious in nature. At any rate it is not at all the same thing as top-level Russian politics. Moreover, it is very difficult to predict its short and long-range trends, and even more difficult to control these trends from abroad. The Russia of the last tsars gave the illusion of being an economic complex of Western stamp. Bolshevist Russia would like to give the same illusion; with its communist methods it would even like to become an example for the West. Yet in reality, when considered from the standpoint of Western economics, it is one huge colonial territory where the Russians of the farmlands and small towns work essentially as peasants and craftsmen. Industry and the transportation of industrial products over the rail networks, as well as the process of wholesale distribution of such products, are and will always remain inwardly foreign to this people. The businessman, the factory head, the engineer and inventor are not "Russian" types. As a people, no matter how far individuals may go toward adapting to modern patterns of world economics, the true Russians will always let foreigners do the kind of work they reject because they are inwardly not suited to it. A close comparison with the Age of the Crusades will clarify what I have in mind. [9] At that time, also, the young peoples of the North were nonurban, committed to an agrarian economy. Even the small cities, castle communities, and princely residences were essentially marketplaces for agricultural produce. The Jews and Arabs were a full thousand years "older," and functioned in their ghettos as experts in urban money economy. The Western European fulfills the same function in the Russia of today.

(9. Cf. Decline of the West, II, Chapters XIII and XIV, "The Form-World of Economic Life.")

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Machine industry is basically non-Russian in spirit, and the Russians will forever regard it as alien, sinful, and diabolical. They can bear with it and even respect it, as the Japanese do, as a means toward higher ends, for one casts out demons by the prince of demons. But they can never give their soul to it as did the Germanic nations, which created it with their dynamic sensibility as a symbol and method of their struggling existence. In Russia, industry will always remain essentially the concern of foreigners. But the Russians will be able to distinguish sensitively between what is to their own and what is to the foreigners’ advantage.

As far as "money" is concerned, for the Russians the cities are markets for agricultural commodities; for us they have been since the eighteenth century the centers for the dynamics of money. "Money thinking" will be impossible for the Russians for a long time to come. For this reason, as I have explained, Russia is regarded as a colony by foreign business interests. Germany will be able to gain certain advantages from its proximity to the country, particularly in light of the fact that both powers have the same enemy, the financial interest-groups of the Allied nations.

Yet the German economy can never exploit these opportunities without support from superior politics. Without such support a chaotic seizure of opportunities will ensue, with dire consequences for the future. The economic policy of France has been for centuries, as a result of the sadistic character of the French people, myopic and purely destructive. And a serious German policy in economic affairs simply does not exist.

Therefore it is the prime task of German business to help create order in German domestic affairs, in order to set the stage for a foreign policy that will understand and meet its obligations. Business has not yet grasped the immense economic significance of this domestic task. It is decidedly not a question, as common prejudice would have it, of making politics submit to the momentary interests of single groups, such as has already occurred by means of the worst kind of politics imaginable, party politics. It is not a question of advantages that might last for just a few years. Before the war it was the large agricultural interests, and since the war the large industrial interests, that attempted to focus national policy on the obtaining of temporary advantages, and the results were always nil. But the time for short-range tactics is over. The next decades will bring problems of world-historical dimensions, and that means that business must at all times be subordinate to national politics, not the other way around. Our business leaders must learn to think exclusively in political terms, not in terms of "economic politics." The basic requirement for great economic opportunity in the East is thus order in our politics at home.