dimanche, 22 décembre 2024
L’assassinat de Kirillov et la double morale occidentale
L’assassinat de Kirillov et la double morale occidentale
Andrea Marcigliano
Source: https://electomagazine.it/lassassinio-di-kirillov-e-la-doppia-morale-occidentale/
Igor Kirillov a été assassiné. Un attentat, déclenché par un explosif à distance, a tué à Moscou le général et son adjoint. L’attaque a été officiellement revendiquée par le SBU, les services secrets ukrainiens, qui se félicitent d’avoir exécuté celui qu’ils considéraient comme responsable des attaques aux armes chimiques contre leur pays.
En effet, Kirillov était le commandant des forces chimiques, radiologiques et biologiques de l’armée russe. À ce titre, il avait dénoncé à plusieurs reprises la présence en Ukraine de centres produisant des armes chimiques, prétendument gérés par du personnel "étranger", à savoir américain et britannique.
En guise de représailles logiques, les services britanniques l’avaient accusé à plusieurs reprises d’avoir utilisé des armes chimiques, interdites par les conventions internationales, contre les forces ukrainiennes. Une accusation que Moscou a toujours rejetée avec indignation.
Ceci pour les faits.
Il reste néanmoins indéniable que le général Kirillov a été assassiné dans un attentat revendiqué par les services ukrainiens, avec au moins le soutien moral des services britanniques.
Un fait incontestable qui corrobore les accusations du Kremlin envers le SBU, qualifié d’organisation terroriste, dirigée par un gouvernement illégitime utilisant de tels moyens pour semer la panique, cherchant ainsi à maintenir un pouvoir désormais vacillant.
Au-delà de toute autre considération, il apparaît évident qu’un régime, celui de Kiev, en déroute sur le champ de bataille, ne trouve rien de mieux à faire que de recourir à des attentats – celui-ci n’étant que le dernier d’une longue série – contre la Russie.
Des attentats qui, par ailleurs, sont totalement inefficaces sur le plan militaire. Il est établi que le terrorisme n’a que peu d’impact militaire, étant généralement le fait d’organisations dépourvues d’assise étatique.
Le fait que, dans ce cas précis, un État et son gouvernement revendiquent un acte terroriste doit donc nous amener à réfléchir. Ou plutôt, à considérer deux points.
Premièrement, et c’est finalement le moins important, les dirigeants de Kiev ont désormais perdu tout sens des limites. Ils estiment pouvoir utiliser n’importe quel moyen pour retarder autant que possible ce qui semble être l’issue inéluctable du conflit: une victoire russe, avec l’annexion du Donbass et l’éviction de Zelensky et de son entourage, remplacés par un gouvernement à Kiev favorable à Moscou.
Deuxièmement, et c’est plus intéressant, on constate que certains pays occidentaux tendent à justifier l’usage du terrorisme et de l’assassinat politique, en totale violation des "règles de guerre" qu’ils avaient pourtant eux-mêmes établies.
Des règles qui, apparemment, ne devraient s’appliquer qu’aux autres.
Américains et Européens se réservent le droit de s’en affranchir lorsque cela sert leurs intérêts.
Une application intéressante du double standard moral : les autres, tous les autres, doivent respecter les règles. Et s’ils ne le font pas, ils sont bannis, hors-la-loi, criminels.
Mais nous, l’Occident, pouvons faire ce que nous voulons. Car nous, et nos alliés – en l’occurrence l’Ukraine – sommes les "gentils".
A priori.
C’est intéressant… mais il est regrettable que cette méthode ait cessé de fonctionner.
Et, bientôt, nous devrons malheureusement en prendre conscience.
De la manière la plus traumatisante qui soit.
20:18 Publié dans Actualité, Affaires européennes | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : actualité, ukraine, russie, igor kirillov, europe, affaires européennes | | del.icio.us | | Digg | Facebook
Les gouvernements démocratiques se moquent de leurs propres peuples
Les gouvernements démocratiques se moquent de leurs propres peuples
Enrico Toselli
Source: https://electomagazine.it/i-governi-democratici-se-ne-fre...
L'Institut de sondage Censis certifie que deux tiers des Italiens sont opposés à la guerre de Zelensky et au soutien qui lui est offert par le gouvernement de Rome et quiest financé aux frais des contribuables italiens. Pourtant, le ministre de la Défense, Guido Crosetto, envisage une augmentation des dépenses publiques en armement, jusqu’à atteindre 2,5% du PIB. Plus de la moitié des Polonais pensent qu’il faudrait mettre fin à la guerre en restituant à la Russie les régions russophones et russophiles mais le gouvernement de Varsovie veut poursuivre la guerre jusqu’au dernier Ukrainien et jusqu’à l’appauvrissement général des Polonais.
En Roumanie, les élections présidentielles sont annulées parce que le peuple a osé voter pour le candidat qui ne plaît pas à Bruxelles. En Géorgie, la présidente, de nationalité française, refuse de céder son siège parce que les Géorgiens ont voté pour le mauvais candidat. En Moldavie, pour renverser le vote populaire, on a fait appel au vote des Moldaves à l’étranger, mais uniquement de ceux qui ont émigré vers des « pays amis ». En France, le président Macron s’appuie sur un gouvernement minoritaire pour éviter d’accepter le verdict populaire qui l’a spectaculairement désavoué.
En Allemagne, le vote dans l’est du pays favorise la droite de l’AfD, mais un blocage se met en place pour exclure ce parti jugé dérangeant. Et peu importe que cela plaise ou non aux électeurs.
Oui, l’avis des électeurs ne compte plus. Le vote ne compte pas. Dans les urnes, un programme précis est approuvé, mais les élus s’en moquent et ne le respectent pas. « Démocratie, démocratie, c’est votre affaire, pas la mienne », chantait quelqu’un dans les années 1970. Mais malheur à celui qui en dit du mal. Car cette oligarchie – composée de politiciens valets au service des marchands de mort, des spéculateurs et des monopoles occidentaux – n’a rien de démocratique. Et encore moins d’aristocratique. Ce ne sont pas des gouvernements tenus par les meilleurs, ce ne sont pas des gouvernements qui dirigent les nations dans l’intérêt de leurs peuples respectifs.
Ce sont des peuples soumis, effrayés. Qui grognent, mais ne réagissent pas.
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Sur le chaos syrien
Sur le chaos syrien
par Georges Feltin-Tracol
Le Système médiatique occidental d’occupation mentale ne surprend jamais ceux qui connaissent son fonctionnement interne, examinent son incessante propagande mortifère et détectent son bourrage de crâne. La chute soudaine de la Syrie néo-baasiste en est une éclatante preuve.
Les plumitifs louent les soi-disant « libérateurs » islamo-terroristes et dénigrent le régime déchu. L’islamisme étant un cosmopolitisme, les journalistes occidentaux ne peuvent que se féliciter de cette sinistre victoire. Les Bisounours barbus paradent dans Damas. Dans leur précipitation, les médiacrates commettent cependant des erreurs factuelles.
C’est le 8 mars 1963 que la branche syrienne du Parti socialiste de la Renaissance arabe (ou Baas) s’empare du pouvoir à Damas, un mois après la révolution des 8–10 février à Bagdad. Or, si le gouvernement baasiste irakien demeure orthodoxe, celui de la Syrie s’allie bientôt aux communistes et impose une planification économique proto-soviétique. Des tensions émergent au sein du Baas syrien entre les partisans socialistes du Premier ministre Salah Jedid et la faction politico-militaire du ministre de la Défense nationale Hafez Al-Assad. Ce dernier provoque en 1970 une « révolution de rectification » et élimine la tendance rivale. Al-Assad père renonce implicitement au projet panarabe et entérine une ambition grande-syrienne naguère défendue par Antoun Saadé. L’épouse du dirigeant syrien et mère de Bachar Al-Assad, Anissa Makhlouf, milita dans sa jeunesse auprès du Parti social-nationaliste syrien (PSNS) de Saadé. Ces corrections idéologiques agacent fortement le fondateur du baasisme, Michel Aflak, qui se réfugie en Irak avant de décéder à Paris en 1989.
Emblème du parti Ba'ath et portrait d'Antun Saadé.
Déclenchée le 15 mars 2011, le conflit en Syrie reste un exemple de « guerre moléculaire ». Par cette expression, l’écrivain allemand Hans Magnus Enzensberger dépasse l’habituelle opposition entre deux ensembles belligérants. On dénombre en effet sept protagonistes en Syrie qui se détestent mutuellement (ou presque).
La rébellion se divise en une trentaine de groupes eux-mêmes rivaux dont les plus importants s’appellent l’Armée syrienne dite libre (ASL), le bras armé régional de la Turquie, et Hayat Tahrir al-Cham (HTC ou Organisation de libération du Levant). Par Levant, il faut comprendre l’espace géographique s’étendant de la Syrie au Sinaï en passant par l’Irak, le Liban, la Jordanie, la Palestine et Israël. Son chef actuel, Abou Mohammed Al-Joulani, pseudonyme d’Ahmed Hussein Al-Chara, serait né en 1982 à Riyad en Arabie Saoudite. Ses parents viendraient du Golan annexé par Tel-Aviv.
D’abord affilié à Daech, Al-Joulani (photo) s’en détache et se rallie ensuite à Al-Qaïda. Auparavant, parti combattre en Irak les troupes étatsuniennes, il a séjourné une durée indéterminée dans le camp de rééducation psychologique (avec des drogues issues du projet MK–Ultra?) d’Abou Ghraib. Travaillerait-il ou a-t-il travaillé pour la CIA? Des drones d’origine ukrainienne avec un personnel technique compétent semblent avoir contribué à la progression fulgurante des rebelles vers la capitale. Par ailleurs, HTC entretient d’assez bonnes relations avec les forces kurdes, ce qui semble paradoxal quand on sait qu’Ankara cherche à empêcher toute autonomie territoriale kurde. Al-Joulani dirige depuis plusieurs années la région d’Idleb aux portes de la Turquie. Par-delà un rigorisme islamiste avéré, HTC veut montrer aux journalistes occidentaux que son style de gouvernement ne s’inspire ni de Daech ni d’Al-Qaïda ou des Talibans. Ce mouvement doit aussi composer avec l’ASL et d’autres factions islamistes plus radicales encore guère enclines à partager un éventuel pouvoir.
Bien qu’affaibli, l’État islamique conserve toujours des poches territoriales discontinues dans l’Est syrien près de l’Irak. Contrairement aux rebelles victorieux qui comptent des musulmans venus d’Occident, le volontariat étranger en faveur de Daech s’est fortement tari.
Le troisième groupe en présence est les Kurdes et leur coalition, une vingtaine de mouvements plus ou moins réunis dans les Forces démocratiques syriennes (FDS). Sous l’impulsion de l’antenne locale du PKK (Parti des travailleurs du Kurdistan), les contrées kurdes de Syrie – le Rojava – assistent à la formation d’un proto-État pluricommunautaire féministe inclusif écolo-libertaire suivant les indications municipalistes de Murray Bookchin. Maints militants occidentaux d’extrême gauche ont intégré les FDS et souscrivent à cette utopie politique en difficile gestation. L’existence d’un Kurdistan autonome en Syrie irrite un quatrième intervenant, la Turquie, qui, pour la circonstance, retrouve des aspirations néo-ottomanes.
Un cinquième, collectif, aide plus ou moins directement l’action kurde. Il s’agit d’une alliance militaro-diplomatique qui comprend les États-Unis, le Royaume Uni, la France et l’Arabie Saoudite. Surtout orientée contre Daech, cette entente internationale applaudit néanmoins la chute du baasisme syrien. De façon informelle, les troupes étatsuniennes disposent en zone kurde de bases militaires clandestines. Cette présence scandaleuse viole en toute impunité une souveraineté syrienne aujourd’hui bien dissipée. Comment réagirait la Maison Blanche si la Chine installait une base militaire en Irlande ou la Russie au Mexique ?
Le sixième protagoniste est désormais le grand perdant de la période actuelle de cette longue guerre. L’armée loyaliste syrienne n’a pas résisté à la multiplicité des menaces armées. À côté des unités militaires de la République arabe syrienne combattaient diverses milices plus ou moins disciplinées. Outre les sections armées du PSNS probablement passées en clandestinité, le Baas a formé des Forces de défense nationale. Dès 2013 se constitue une Garde nationaliste arabe dont les références politiques divergent du baasisme officiel. Si elle salue le Vénézuélien Hugo Chavez, elle vante aussi l’Égyptien Nasser (guère apprécié d’Al-Assad père) et l’Irakien Saddam Hussein (grand rival de Hafez et de Bachar Al-Assad).
Le front syrien a vu des nationalistes-révolutionnaires originaires d’Europe venir combattre. Lancé en 2018 par la Ligue scandinave active en Islande, en Norvège et en Suède, Thorbrand aurait réuni une cinquantaine de volontaires. Dans la foulée des événements du Donbass en 2014, des nationaux-bolcheviks limonoviens auraient expédié en Syrie vers 2015 – 2016 jusqu’à deux mille combattants enregistrés dans le Mouvement des volontaires Interbrigade. Ils côtoient les quelques Grecs du Lys Noir fondé en 2013 à partir d’un site éponyme hellène qui se réclame des frères Gregor et Otto Strasser. Enfin, le Polonais Bartosz Bekier (photo, ci-dessus) anime la Falanga (la « Phalange »). Héritier radical du théoricien nationaliste russophile Roman Dmowski, il mêle un nationalisme grand-polonais qui lorgne sur l’Ukraine occidentale et une vision néo-eurasiste encouragée par Alexandre Douguine. Il est presque certain que ces combattants ont été rapatriés sur le front ukrainien.
Le septième intervenant est enfin l’État d’Israël. Il fait dorénavant face à cinq fronts simultanés (Gaza, Sud-Liban, Cisjordanie, Yémen et donc Syrie). Les bombardements massifs des sièges de commandement syriens, des arsenaux, des centres de stockage d’armes chimiques et techniques développées, des aéroports militaires et des installations navales représentent un entraînement grandeur nature dans la préparation de la prochaine attaque aérienne et informatique contre l’Iran. Cette offensive contre les laboratoires de recherche nucléaire iraniens commencera au lendemain de l’investiture de Donald Trump fin janvier 2025. De plus en plus christianophobe (qu’en pensent les idiots utiles d’une supposée droite nationale française servile ?), l’État hébreu prépare la déportation générale des Palestiniens de Gaza et de Cisjordanie occupée vers la Syrie. Le retour de Trump au pouvoir facilitera probablement l’annexion à venir des terres palestiniennes au mépris de toutes les conventions internationales.
L’« Axe de la Résistance » anti-sioniste est brisé. Le jour où l’Arabie Saoudite obtient de la FIFA l’organisation de la Coupe du monde de football 2034, une déflagration géopolitique inouïe bouleverse tout le Proche- et Moyen-Orient. Les nervis occidentaux de la presse de grand chemin n’ont toujours pas compris que la prise de Damas par les islamistes constitue déjà un très rude coup porté contre la civilisation européenne.
GF-T
- « Vigie d’un monde en ébullition », n° 138, mise en ligne le 17 décembre 2024 sur Radio Méridien Zéro.
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De la théologie négative
De la théologie négative
(Pettersson, Cacciari, Heidegger, Hölderlin, Maître Eckhart, Malévitch)
par Gérard Conio
On a établi un rapport entre la musique et les mathématiques, mais la musique peut aussi exprimer des aspirations théogoniques, comme cela m’est apparu en écoutant la sixième symphonie d’Allan Pettersson, dont j’ai trouvé le commentaire dans les réflexions de Massimo Cacciari sur « Le problème du sacré chez Heidegger ».
Parmi les symphonies d’Allan Pettersson (photo), la sixième est certainement la plus violente, la plus survoltée, la plus convulsive, la plus déchirante, la plus spasmodique, la plus tendue vers une harmonie inaccessible. Allan Pettersson a dit qu’elle n’était pas tragique, mais solaire. Le soleil, qui engendra Dionysos peut être, il est vrai, une source du tragique, comme chez les Grecs. Faut-il y voir la source de la force émotionnelle de Pettersson? Le tragique n’est pas incompatible avec l’extase, il en est même la face noire. Cette exaltation insatiable et incompressible concorde avec le Chaos sacré chanté par Hölderlin dans ses hymnes. Et la symphonie de Pettersson est elle-même un hymne au « chaos sacré », celui que Bakst a évoqué dans « Terror antiquus », mais aussi le « Heilig » décanté par Heidegger dans « Comme au jour de fête... » de Hölderlin:
« Quel est le sens de « Heilig », s’interroge Cacciari, comment ce sens revit-il chez Hölderlin ? Dans « heil » résonne cette idée de vigueur, de vitalité, d’impulsion, qui caractérise le terme védique isirah et le hiéron grec. C’est l’attribut des vents, des chevaux, des hommes et des villes (« Ilion sacrée »), mais aussi des choses saisies à leur acmé, à l’instant culminant de leur puissance. Dans ce sens, en un passage d’une prodigieuse violence, Homère (Illiade, XVI, 407) qualifie de hiéron le poisson qui se débat hors de l’eau, à l’extrémité de la ligne - et cette image lui est suggérée par le spectacle terrible de Thestor harponné à la mâchoire par la lance de Patrocle qui lui transperce la tête de part en part et le soulève ainsi par-dessus la rampe de son char où il avait cherché refuge. Cet éclair de vie (fa-villa !) est si puissant et inoubliable, jusque dans son instantanéité, qu’il semble parfait, accompli, inéluctable. Par ailleurs, la foudre gouverne toutes choses – et Aiôn est pour Plotin esklampon, éclair...
Heilige conserve intact ce sens chez Hölderlin; il s’oppose donc étymologiquement à toute idée de sacralité (sacer: ce qui est séparé, éloigné, et préservé justement du fait qu’il est séparé: arkeo, arcanum). L’heilig surgit devant nous, vif et « sauf » dans sa présence (gothique: hails, d’où heilen = guérir; et il faut noter la correspondance avec l’anglais holy, équivalent de heilig, et whole = entier, intègre), quand bien même cette présence serait le spasme de Thestor. Hiéron, dirait le chrétien, primordialement, est le cri du Christ sur la croix. »
Ce cri, ce spasme, retentissent dans la sixième symphonie d’Allan Pettersson.
C’est le spasme d’un accouchement, le spasme d’un commencement qui n’aura pas de fin et qui embrasse la terre et les hommes.
« Il ne faut pas croire, a dit Pettersson, que j’ai pitié de moi-même, j’ai voulu exprimer ma compassion pour la souffrance des hommes. »
Les hommes sont les enfants de la terre qu’ils ont sacrifiée et leur souffrance, née du chaos originel, c’est la souffrance de la terre.
Dans les sonorités proprement inouïes qu’il tire de cette souffrance, Pettersson nous fait entendre ce que Carl Schmitt a appelé « le Nomos de la Terre ». C’est la terre qui se soulève pour prendre la parole, la terre blessée à mort par les hommes.
Cette énergie tellurique naît du chaos originel, du chaos sacré, du Heilig, elle se fond à ce grondement indistinct avant de prendre forme, avant de « se nommer », elle se lamente comme la terre humaine, et pourtant s’irradie toujours de plus en plus, monte comme un désir inassouvi et nous transporte dans des gradations qui culminent toujours sur la première note du premier motif et elle ne trouvera jamais sa résolution car elle se tord sur elle-même comme un serpent qui se mord la queue. En dépit du gigantisme d’une polyphonie pléthorique, cet éternel commencement, ce martèlement lancinant du même motif matriciel, de la même note aiguë, lancée très haut, dans une répétition obsédante, se rapproche davantage des compositeurs minimalistes que de Gustav Mahler auquel on a souvent comparé Pettersson.
Le chaos sacré n’est pas seulement l’attente du Nomos, un appel vers le Nomos, il a besoin du Nomos pour exister, il est déjà le Nomos en puissance: « L’immédiat, écrit Cacciari, ne devient pas médiat, contrairement à ce qu’affirme Heidegger, mais n’est rien d’autre et depuis toujours que le fondement même de la médiation qui, dans la médiation, se révèle et se réalise », sans jamais « vaciller ». »
C’est ainsi que Pettersson articule le mouvement de sa symphonie dans une simultanéité des contraires, non comme Héraclite dans le changement et dans l’absorption dans le processus, mais dans l’affirmation du fondement de l’être, comme Malévitch. C’est l’abîme qui nous parle.
« Et il est inévitable que cela soit, poursuit Cacciari, si je pense le Commencement sous la forme grecque du Chaos, de l’Ouvert (et cela seul, je le nomme « das Heilige »): Chaos reste toujours une puissance théo-gonique. Et donc, dans ce cadre, le Commencement n’est pas autrement pensable sinon comme ce qui donne-commencement, ce qui est source et origine, et donc lié en lui-même, dans son être le plus intime, à la physis: commencement-de-la-nature, Ouvert qui est depuis toujours hymne de (génitif absolu) la nature. Ainsi le rapport entre Chaos et Nomos n’est pas problématique, le Chaos étant depuis toujours pré-compris comme origine du Nomos, au sens radical qu’il en est le présupposé. Mais le présupposé est pose, il est une position : la pensée pose le Chaos comme origine essentielle des lois qui ordonnent son propre langage»
Dans une intuition de la pensée sensible, Pettersson nous apporte la même révélation.
Et dans son hymne « Comme au jour de fête… » Hölderlin ne nous dit rien d’autre :
« Mais voici le jour ! Je l’espérais, je le vis venir
Et ce que je vis, que le Sacré soit ma Parole
Car elle, elle-même, plus ancienne que les temps
Et au-dessus des dieux du soir et de l’orient,
La Nature maintenant s’est éveillée avec tumulte,
et haut de l’Ether jusqu’à l’abîme en-bas
Selon un ferme statut, comme jadis, tiré du Chaos sacré
L’Esprit se sent à nouveau créateur. »
Cacciari constate le dilemme dans lequel la position de Hölderlin a enfermé Heidegger en le retournant contre lui-même. Et son commentaire pourrait parfaitement s’appliquer à la musique de Pettersson qui suit inexorablement la voie indiquée par Hölderlin en produisant « le tumulte avec lequel la Nature s’est éveillée quand, du haut de l’Ether jusqu’à l’abîme en-bas, tiré du Chaos sacré, l’Esprit se sent à nouveau créateur » :
« Dans les limites de la compréhension grecque de l’origine, que Heidegger fait sienne, Chaos est fondamentalement et de manière constante disposé au Nomos, et la parole du Nomos disposée à l’écoute du Chaos qui en est à l’origine. Ainsi, le chant commence par le Chaos. Mais le Commencement, ainsi nommé et posé, n’est autre sinon « quod debet esse » - ce qui doit être – fondement qui ne peut être scindé de l’advenir, immédiat qui n’est autre que le domaine propre des médiations. Que le Commencement devienne, qu’il s’articule et procède, qu’il pâtisse de la « décision » du rayonnement, qu’il soit dit et pris en garde dans l’hymne, est pur destin. Est sacré le destin même de la manifestation du sacré. Mais ne devient sacrée, ainsi, finalement, que la pure dé-latence, dans laquelle se nie toute léthé.
Précisément la conclusion à laquelle Heidegger voudrait éviter d’arriver, qu’il croyait même éviter en pensant l’immédiateté de l’Ouvert. Heidegger est mu essentiellement par l’exigence de « sauver » l’immédiate omniprésence de l’Ouvert, du Commencement, de la « voracité » du processus, mais il ne peut satisfaire une telle exigence, justement parce qu’il la conçoit dans les termes théo-goniques de la tradition classique (revécue par Hölderlin) d’une part, et dans les termes idéalistes du rapport (qui reste inexorablement dialectique) entre immédiat et médiat d’autre part. Et cette pensée qu’il voulait montrer « en elle-même intacte et sauve (heilig), das Heilige finit par appartenir, en réalité, à l’horizon historique de la dé-sacralisation (dans tous les sens du terme: non seulement dans celui de l’anéantissement du sacer, processus qui est déjà la quintessence du christianisme, mais dans le sens aussi de l’élimination de toute différence essentielle entre le Sacré et sa parole). La méditation sur « das Heilige » apparaît véritablement décisive pour Heidegger, en tant que d’elle dépend l’instance fondamentalement anti-idéaliste de toute sa pensée et, en même temps, du naufrage qui la menace depuis toujours. »
Si on rapporte cette conclusion à la menace qui hante la pensée musicale de Pettersson, on trouvera la même résistance à « la voracité du processus », puisque le minimalisme latent que nous avons constaté s’inscrit contre le développement qui, dans la symphonie classique, détruit le fondement sur lequel il est posé.
Mais Pettersson est radicalement opposé à toute altération, toute aliénation du Commencement, de l’Ouvert, du « Heilige », et il reste indéfectiblement arrimé à un embarcadère d’où ne partira aucun « bateau ivre », vers aucun naufrage à « l’horizon historique de la dé-sacralisation ».
Et la déshérence du Sacré séparé de sa parole, du Chaos privé de son Nomos, a été conjurée par les prophètes du « logos apophantique » qui ont prôné le relâchement de la volonté de puissance, une abstention, un vouloir-non vouloir, un retrait de la décision créatrice, et c’est la Gelassenheit de maître Eckhart, celle des pauvres d’esprit, c’est le zéro des formes et le rien libéré de Malévitch qui apparaissent comme le seul moyen possible d’empêcher la catastrophe annoncée.
Et même si cet horizon historique constitue notre présent, nous pouvons puiser chez ces grands déconstructeurs du progrès, de la modernité, le courage nécessaire pour nous sauver.
Le salut est dans la superssentialis divinitas, la Gottheit de Maître Eckhart qui, écrit Cacciari, « semble indiquer cet infiniment Ultérieur, cet Ouvert qui donne lieu aux choses, que Heidegger nommait « das Heilige », à la suite de Hölderlin, Gottheit n’est ni terre, ni ciel, ni dieu ni homme. […..] La Gottheit comme « das Heilige », se montre dans l’instant même de son retrait et, se retirant, en cela se révèle. Le penser - non pas le calcul proportionné à des fins spécifiques, non le rechnen, mais le denken, - est ouvert à ce jeu originaire de l’Etre, qui ne peut avoir d’explication-détermination théologique, qui doit être médité dans son « ohne Warum ».
Le problème d’une pensée non-représentative-calculante, qui se constitue comme ouverture à une telle écoute, et donc en analogie avec l’Ouvert (responsable, en tant qu’elle « prend soin » de l’Ouvert) domine le Heidegger postérieur au Kant. Cette ouverture de la pensée est, à la fin, nommée Gelassenheit, terme eckhartien. La pensée se relâche, sich-ein-lassen, ne-voulant-rien, n’attendant-rien, se libère, se désenchaîne du sé-duisant des représentations, s’intériorise au fond du Soi, s’abandonne au jeu sans pourquoi de l’Etre, et s’abandonne devant les choses elles-mêmes pour saisir, dans leur réveil, « das Heilige ». Elle s’abandonne pour s’ouvrir au mystère.
Ce mystère meut le « vouloir-non vouloir » de la dé-liaison entre les phrases tonales et atonales qui s’interpénètrent chez Pettersson, dans les renversements du même thème où le retrait, le relâchement des îlots lyriques répond aux climax des tutti orchestraux qui sonnent comme des tremblements de terre. La succession des marches et des transes est sans cesse transcendée par la Gottheit, la superssentialis divinitas qui surplombe la souffrance de la terre et des hommes.
« A travers Maître Eckhart, écrit Cacciari, Heidegger tente de désenchaîner l’Ouvert de la nécessité du donner-commencement: au sens de la nécessité de la manifestation. L’abandon est une libération de la représentation vers le mystère d’un tel Commencement; une révocation de la volonté en tant que volonté-à dessein, un vouloir-non vouloir, pour « insister » uniquement dans l’attente de l’abandon. Vouloir le non vouloir est une aporie typique du « pauvre eckhartien »: c’est de là aussi qu’elle est reprise par Schopenhauer (et par Michelstaedter bien avant Heidegger). On peut l’imaginer comme un rester dans l’attente sans attendre, sans préfigurer quelque chose d’attendu. Et, en vérité, c’est le rien qui est ici attendu, puisque le rien c’est l’Ouvert. Gelassenheit c’est se re-laisser-aller à l’Ouvert, qui n’est pas. La « quiète » dynamique de l’abandon ferait signe pourtant au néant du Commencement-Ouvert-Heilige et donc, en libérerait l’idée de toute nécessité épiphanique, révélatrice. »
Pettersson nous donne à entendre cet en-soi qui résorbe les tensions d’une âme souffrante et coïncide avec le rien libéré de Malévitch en réalisant la fusion des contraires dans l’attente de la Gottheit, au-dessus de toutes les manifestations pour s’ouvrir à l’Etre pauvre et nu.
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samedi, 21 décembre 2024
L'UE rouvre ses relations diplomatiques avec le nouveau gouvernement djihadiste du Califat syrien
L'UE rouvre ses relations diplomatiques avec le nouveau gouvernement djihadiste du Califat syrien
Source: https://dissident.one/eu-gaat-diplomatieke-betrekkingen-m...
L'Union européenne va bientôt engager un dialogue formel avec les nouveaux dirigeants islamistes en Syrie et rouvrir sa délégation diplomatique dans le pays, ont annoncé mardi 18 décembre Kaja Kallas, responsable de la politique étrangère du bloc, et Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne, rapporte l'EC.
Cette décision fait suite à des annonces de plusieurs pays occidentaux, dont l'Allemagne, le Royaume-Uni et les États-Unis, visant à rétablir leurs relations diplomatiques avec Damas après la chute du régime d'Assad.
La délégation de l'UE en Syrie, qui fonctionnait en pratique comme l'ambassade du bloc, n'a jamais été officiellement fermée, mais le dialogue avait été suspendu en raison de l'absence d'ambassadeur accrédité à Damas durant la guerre civile commencée en 2011.
« Nous souhaitons que cette délégation redevienne pleinement opérationnelle », a déclaré Kallas, ancienne Première ministre d'Estonie, mardi dernier devant le Parlement européen. Elle a ajouté avoir déjà ordonné lundi à la délégation de se rendre à Damas et d'établir des contacts avec tous les principaux groupes rebelles, y compris le dirigeant du Hayat Tahrir al-Sham (HTS).
Le HTS, issu du Front al-Nosra, une scission d'Al-Qaïda, est désigné depuis 2018 comme une organisation terroriste par le Conseil de sécurité des Nations unies. Toutefois, étant donné qu'il a joué un rôle de premier plan dans les efforts visant à renverser le régime d'Assad et qu'il est désormais la faction dominante dirigeant le pays, l'ONU envisage de le retirer de la liste pour faciliter les interactions futures.
« À ce que l'on sait, ils ont agi avec prudence jusqu'à présent », a expliqué un porte-parole allemand, justifiant pourquoi Berlin fut l'une des premières capitales à établir des liens avec le HTS.
La stabilité régionale est actuellement la priorité de l'UE, Bruxelles craignant qu'un éventuel effondrement de la fragile situation actuelle ne provoque une nouvelle guerre civile et une crise migratoire similaire à celle de 2015-2016.
De plus, soutenir la direction sunnite du HTS pourrait être le seul moyen d'empêcher d'autres acteurs, comme l'Iran, la Russie ou même Daech (ISIS), de combler le vide laissé par Assad.
Mohammad al-Joulani était effectivement un émir de l’État islamique. Les mensonges de l'UE tentent désormais de faire comme si cela n'avait jamais été le cas.
« L'imprévisibilité de la situation exige une prudence extrême », a déclaré von der Leyen le même jour lors d'une visite au président turc Recep Tayyip Erdoğan à Ankara. « Le risque d'une résurgence de Daech (État islamique), notamment dans l'est de la Syrie, est réel. Nous ne pouvons pas laisser cela se produire », a affirmé la cheffe de la Commission.
Un autre objectif est de garantir que la Russie ne regagne pas une position d'influence dans le pays. Lundi, Kallas a déclaré qu'une des principales exigences que l'UE adressera à la direction du HTS sera la fermeture des bases militaires russes restantes en Syrie.
« De nombreux ministres des Affaires étrangères ont souligné que cela devrait être une condition pour la nouvelle direction: se débarrasser également de l'influence russe, car c'est une base où ils mènent aussi leurs activités vers l'Afrique et les pays voisins du Sud », a déclaré Kallas. « Nous aborderons donc cette question avec la direction lors de nos réunions. »
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Comment un dialogue énergétique entre la Russie, l'Inde et la Chine (RIC) peut déboucher sur un réseau électrique panasiatique
Comment un dialogue énergétique entre la Russie, l'Inde et la Chine (RIC) peut déboucher sur un réseau électrique panasiatique
Le super-réseau asiatique peut devenir une réalité si la Russie, l'Inde et la Chine parviennent à un consensus.
Atul Aneja
Source: https://atulaneja.substack.com/p/how-a-russia-india-china...
L'idée d'un grand réseau électrique panasiatique a germé en 2011, dans le contexte du tsunami qui a frappé l'Asie cette année-là.
La triple catastrophe du tremblement de terre, du tsunami et de la fusion nucléaire qui a frappé le nord-est du Japon en mars 2011 a servi de signal d'alarme pour Masayoshi Son, fondateur, président et directeur général de SoftBank Group, une multinationale japonaise spécialisée dans les télécommunications et l'internet.
Ayant perçu les dangers des centrales nucléaires de Fukushima, M. Son (photo) a ressenti le besoin de remplacer l'énergie nucléaire par des énergies renouvelables plus sûres et plus propres pour un avenir meilleur. L'aversion pour la technologie nucléaire est d'autant plus compréhensible qu'elle se nourrit de la mémoire collective des horreurs vécues lors des attaques nucléaires d'Hiroshima et de Nagasaki.
Pour accélérer le déploiement d'énergies renouvelables propres, sûres et abordables, Son a fondé le Renewable Energy Institute (REI). Cela a conduit à la conceptualisation de l'« Asia Super Grid (ASG) » en septembre 2011.
Parallèlement, une avancée technologique majeure avait eu lieu en Chine, qui allait jouer un rôle clé dans la concrétisation des rêves de Son.
Au début des années 2000, la Chine était confrontée à d'importantes pannes d'électricité dues à des pénuries d'énergie. Le nœud du problème était la transmission. Alors que les ressources énergétiques telles que le charbon et le gaz se trouvaient dans le nord, le nord-ouest et le sud-ouest du pays, les centres de la demande majeure d'énergie se trouvaient dans les zones industriels le long des côtes est et sud, dans et autour de villes animées telles que Shanghai et Guangzhou.
La solution a été imaginée par Liu Zhenya (photo), alors directeur du StateGrid chinois. Liu a proposé de résoudre le problème de transmission en établissant des lignes électriques à ultra-haute tension (UHV). Contrairement aux lignes conventionnelles, les lignes de transport à très haute tension peuvent transférer de grandes quantités d'énergie sur de longues distances. En effet, cette technologie permet de réduire au minimum les pertes d'énergie pendant le transport.
En 2006, le transport d'électricité à très haute tension a été intégré au plan quinquennal de la Chine. La Chine a donc commencé à construire une liaison de 640 km entre le centre charbonnier de Shanxi, au nord, et la province centrale de Hubei, en passant par un point d'arrêt au milieu. En 2009, cette ligne est devenue opérationnelle.
D'autres projets plus ambitieux ont suivi. Par exemple, la ligne Xiangjiaba-Shanghai a été achevée en 2010. Il s'agissait alors du système de transmission le plus long et le plus puissant au monde. En transmettant 6,4 gigawatts, la ligne répondait à près de 40 % de la demande d'électricité de la ville.
En avril 2024, la Chine avait mis en place 38 lignes à très haute tension, capables d'acheminer de l'énergie conventionnelle et renouvelable sur de vastes distances.
Les avancées chinoises en matière de transport à longue distance ont rendu le projet ASG de Son réalisable.
Une fois la transmission à longue distance en place, SoftBank a recherché des centres de production d'énergie sur de vastes territoires. Le groupe SoftBank a donc créé la SB Energy Corp. pour mettre en place des centrales de production d'électricité renouvelable au Japon.
L'entreprise a également cherché des partenaires en dehors du Japon pour renforcer l'approvisionnement en énergie renouvelable. La Mongolie a été retenue en raison de son énorme potentiel en matière d'énergie éolienne. C'est ainsi que SB Energy Corp. a créé Clean Energy Asia LLC avec Newcom LLC, un conglomérat mongol, comme partenaire. La coentreprise a obtenu un droit de location de terres dans le désert de Gobi pour les 100 prochaines années afin de développer et d'exploiter des parcs éoliens d'une valeur de 7 GW. L'entreprise a également créé une coentreprise appelée SBG Cleantech Ltd en Inde, avec l'entreprise indienne Bharti Enterprises Pvt. et le groupe technologique taïwanais Foxconn, pour développer un parc photovoltaïque solaire de 350 MW dans l'État indien de l'Andhra Pradesh.
Après avoir obtenu une capacité suffisante en matière d'énergie renouvelable, le prochain défi pour Son était d'acheminer l'énergie renouvelable au Japon et dans toute l'Asie. L'entrepreneur japonais a trouvé en Liu Zhenya, pionnier chinois de la transmission UHV, un partenaire de choix. Le duo s'est associé à Hwan-Eik Cho, président-directeur général de Korea Electric Power Corp. (KEPCO), une compagnie d'électricité publique sud-coréenne. En mars 2016, ces trois organisations ont été rejointes par Rosseti, un opérateur russe d'énergie électrique et de réseau.
Le quatuor a signé un protocole d'accord pour mener des études de faisabilité technique et économique en vue de la création d'un réseau de transmission international en Asie du Nord-Est.
L'accord a débouché sur l'idée de créer un « anneau d'or » desservant la majeure partie de l'Asie. Pour concrétiser cette idée, il est envisagé de transmettre l'énergie éolienne produite en Mongolie au Japon, en passant par la Chine et la Corée du Sud, via des câbles de transmission sous-marins. Par ailleurs, l'énergie hydroélectrique produite en Russie pourrait être acheminée vers le Japon et d'autres pays. Son qualifie ces deux voies de transport d'énergie d'« anneau d'or » en Asie du Nord-Est.
Tirer parti de la diversité des charges et des ressources
Mika Ohbauashi, directeur de REI, a déclaré que cette intégration interrégionale du réseau peut contribuer à maximiser l'utilisation des énergies renouvelables, qui sont dispersées géographiquement. Une fois les réseaux reliés, il sera possible de tirer parti des différents modèles de charge, y compris des périodes de pointe. En tirant parti de la diversité des charges et des ressources, l'ASG peut accroître la flexibilité des réseaux dans chaque pays.
Les énergies renouvelables s'avèrent également rentables. Par exemple, le coût de l'acheminement de l'hydroélectricité de la Russie vers le Japon par des câbles de transmission sous-marins est inférieur à 10,5 cents/kWh, soit le coût de l'électricité produite par une centrale au charbon au Japon. De même, le coût de l'acheminement vers le Japon de l'énergie éolienne produite en Mongolie via la Chine puis la Corée du Sud est également estimé à moins de 10,5 cents/kWh.
« Les énergies renouvelables sont propres et sûres, mais elles étaient auparavant très chères », aurait déclaré Son de SoftBank. Il ajoute : « En partageant l'énergie renouvelable avec d'autres: « En partageant l'énergie renouvelable entre nous, les énergies renouvelables sont désormais propres, sûres, stables et peu coûteuses ».
Alors que le Japon s'est concentré sur les énergies renouvelables, en particulier après Fukushima, Liu Zhenya, anciennement du StateGrid de Chine, semble plus neutre en termes de sources d'énergie. Liu a proposé un réseau mondial qui tirerait l'électricité des éoliennes du pôle Nord et des vastes réseaux solaires dans les déserts d'Afrique, puis la distribuerait aux quatre coins du monde. Selon M. Liu, ce système produira, entre autres avantages, « une communauté de destin commun pour toute l'humanité, avec un ciel bleu et des terres vertes ».
L'Inde peut devenir un point d'appui majeur dans le super-réseau asiatique. SoftBank a déjà déclaré que la construction d'une centrale solaire de 350 mégawatts dans l'État indien de l'Andhra Pradesh était en cours, et que l'entreprise visait à établir un projet de 20 GW dans le pays, à terme.
Selon une carte du super-réseau asiatique publiée par la REI, l'électricité éolienne produite en Mongolie serait acheminée vers Pékin. De la capitale chinoise, elle sera envoyée à Chengdu, la capitale de la province du Sichuan, dans le sud-ouest de la Chine. Chengdu devient le point de jonction à partir duquel l'électricité est transmise à travers le Tibet jusqu'au Bhoutan, d'où elle se dirige vers Delhi et est vendue à un coût de 0,14 $ par KW/h. Selon les projections d'ASG, Dhaka est un autre point de jonction à partir duquel l'électricité serait transmise à Chennai au coût de 0,1 dollar par KW/h. Le nœud de réseaux en constante expansion envisage également le rôle de l'Inde en tant que méga-consommateur et plateforme de fourniture et de transit d'électricité pour le Sri Lanka. D'autres opportunités peuvent être explorées dans ce sens.
En fait, à l'instar de la communauté européenne du charbon et de l'acier, qui est devenue le précurseur de l'Union européenne (UE), le GSA peut devenir le noyau d'une Union asiatique (UA) dans les années à venir.
Si l'économie d'un GSA semble être en place, la réflexion géopolitique accuse un sérieux retard. Par exemple, la méfiance entre l'Inde et la Chine risque de faire obstacle, car le projet implique le développement d'infrastructures essentielles.
Si l'Inde et la Chine peuvent entamer un dialogue bilatéral sur l'énergie à la suite de la rencontre décisive du Premier ministre Narendra Modi pour trouver une solution, il serait peut-être prudent d'impliquer la Russie dans la conversation, car Moscou est un acteur majeur de la constellation ASG. Par conséquent, le partenariat énergétique pourrait être un sujet majeur de délibération avec le sous-groupe Russie-Inde-Chine (RIC), qui a déjà tenu des réunions institutionnalisées au niveau des ministres des affaires étrangères avant que la pandémie de Covid ne frappe.
Le RIC peut à son tour inviter le Japon en tant que partenaire dans la discussion sur le projet ASG, qui peut décoller sur la base de la bonne volonté, de l'interdépendance et de l'évaluation des avantages géoéconomiques, qui sont suffisamment importants pour l'emporter sur les différences géopolitiques.
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La Russie, la Chine et Trump
La Russie, la Chine et Trump
Stefano Vernole
Source: https://telegra.ph/Russia-Cina-e-Trump-12-17
Trump parviendra-t-il à briser l'alliance sans limite entre la Russie et la Chine?
Il y a quelques semaines, le journal britannique The Guardian, qui fait autorité en la matière, a indiqué quelles seraient les conditions de la nouvelle administration américaine pour mettre fin à la guerre en Ukraine: «Trump négociera les conditions de la Russie avec Kiev si Moscou rompt ses relations militaires avec la Chine».
Il s'agit d'une suggestion compréhensible si l'on se place du point de vue de Washington, mais irréalisable à la lumière de la situation intérieure et mondiale actuelle si l'on se place du point de vue de Moscou et de Pékin. C'est aussi la principale raison pour laquelle je pense que le conflit avec l'OTAN en Ukraine n'est pas près de se terminer: Trump n'a rien à offrir à Poutine, Poutine n'a rien à offrir à Trump.
Les liens russo-chinois remontent à loin, même à la doctrine Primakov des années 1990, lorsque le triangle géopolitique Moscou-Beijing-New Delhi - qui devait être étendu à l'Iran - était identifié par le diplomate russe comme la clé de la stabilité de l'Eurasie face à la pénétration militaire américaine.
Ces relations se sont ensuite renforcées au fil des années, d'abord au sein de l'Organisation de coopération de Shanghai dans le but d'empêcher l'avancée de la thalassocratie américaine en Asie centrale, puis grâce à la plateforme géopolitique des BRICS.
Bien qu'ayant averti l'Occident de ne pas aller trop loin lors de son discours de Munich, la présidence de Poutine a été contrainte d'abord de s'engager dans un conflit éphémère en Géorgie, puis d'intervenir militairement en Syrie en empêchant l'OTAN de mettre la main sur sa base de Tartous. Il en va de même pour le raid et le référendum qui s'en est suivi en Crimée en 2014, qui a permis de sceller la souveraineté russe sur la base navale de Sébastopol, en mer Noire.
La Chine a suivi de près depuis 2008 (compte tenu de la crise financière résultant de l'éclatement de la « bulle » des subprimes américains) et avec une compréhension croissante tous les mouvements russes, sentant que le renversement d'Assad en 2011 aurait favorisé un « régime hasardeux » en Iran que Pékin lui-même n'aurait pas apprécié, puis aidant économiquement la Russie face à l'assaut spéculatif de la finance américaine contre le rouble et aux sanctions euro-atlantiques en 2014.
L'amitié sans bornes scellée par les deux dirigeants, Poutine et Xi Jinping, ainsi que la déclaration commune en faveur d'un nouveau monde multipolaire, représentent l'épilogue naturel d'une relation géopolitique russo-chinoise intime sur laquelle peu d'analystes avaient parié auparavant.
Pékin a résisté à toutes les pressions occidentales au cours des trois dernières années et a continué à soutenir conjointement l'économie russe attaquée par les sanctions renforcées de l'UE et des États-Unis après le début de l'opération militaire spéciale. Les deux grands projets d'infrastructure eurasiens, la Razvitie russe et la Nouvelle route de la soie terrestre et maritime chinoise, ont été harmonisés au nom d'une vision géopolitique commune: la défense du « Heartland ».
Moscou et Pékin ont ainsi identifié une série de points de convergence: renforcement de la multipolarité, élargissement des BRICS à de nombreux pays (BRICS+), dédollarisation dans les échanges monétaires internationaux et les relations commerciales réciproques, clôture de l'accord énergétique Power of Siberia 2 qui pourrait entrer en fonction prochainement, partenariat dans l'Arctique face aux ingérences de l'OTAN.
Bien entendu, toutes les nominations de l'administration Trump vont dans le sens de provoquer une rupture de l'amitié stratégique globale entre la Russie et la Chine et d'empêcher Pékin d'acheter de l'énergie à l'Iran; le coup d'État armé à Damas de ces dernières semaines va dans ce sens et constitue une menace directe pour l'initiative Belt and Road et pour la géopolitique russe d'accès aux « mers chaudes »; ainsi que la réactivation du projet de gazoduc qatari via la Turquie vers l'Europe se fait au détriment du projet énergétique iranien qui devait exploiter le gisement de South Pars.
Les propos de Poutine après le tir du missile Oreshnik ont mis en garde les États-Unis contre la création de nouvelles crises non seulement dans l'« étranger proche », mais aussi dans le quadrant Asie-Pacifique, où Washington aimerait en fait diriger son attention après avoir « gelé » le conflit en Ukraine.
Alors que la nouvelle administration Trump est truffée de partisans du Projet 2025, un manifeste néoconservateur décliné géopolitiquement dans un sens anti-chinois et anti-iranien, Moscou continue de tisser sa toile de relations vers l'Asie de manière de plus en plus rigoureuse: de l'Afghanistan au Pakistan (voir par exemple l'adhésion d'Islamabad au Corridor économique Nord-Sud), de la République démocratique de Corée au Myanmar, à la fois pour réaffirmer qu'elle se coordonnera avec la Chine en cas de crise militaire entre Washington et Pékin, et pour donner corps à la vision multivectorielle de vieille mémoire qui laisse entrevoir la formation d'un nouvel axe mondial sunnite par rapport auquel la Russie veut se placer en interlocuteur crédible et égalitaire.
L'initiative « la Ceinture et la Route » (BRI), l'Union économique eurasienne (UEE), l'Organisation de coopération de Shanghai (OCS) et le partenariat de la Grande Eurasie font tous partie d'un paradigme sans précédent des relations internationales, propre au fonctionnement d'un ordre mondial qui correspond aux nouvelles conditions inaugurées par un monde multipolaire caractérisé par les processus concomitants de la mondialisation et de la régionalisation. Toutefois, la Russie et la Chine aspirent à une intégration beaucoup plus large de la macro-région eurasienne et ne se limitent pas à une éventuelle zone de libre-échange Chine-EEE ou Chine-ASEAN.
Cela crée les conditions nécessaires pour développer la BRI avec la participation d'autres acteurs, qu'il s'agisse d'États ou d'organisations régionales. Pour concrétiser les visions existantes, il sera nécessaire d'éliminer les risques et les faiblesses des relations sino-russes et de renforcer une identité commune et une pensée orientée vers l'Eurasie.
Le lancement du corridor économique Chine-Mongolie-Russie (CMREC), qui met l'accent sur le double objectif de Moscou et de Pékin de parvenir à l'indépendance économique vis-à-vis des marchés occidentaux tout en conservant un contrôle stratégique sur les corridors de transit est-ouest essentiels, sera déterminant. Ce projet à multiples facettes repose sur trois mécanismes stratégiques cruciaux : les concessions tarifaires et commerciales, l'expansion des infrastructures et les accords de partage des ressources.
Un corridor économique et logistique s'inscrit dans le cadre plus large de la réorientation de la Russie vers l'Asie (prônée par Sergei Karaganov), renforcée par son partenariat croissant avec la Chine, qui réoriente les ressources et le commerce des routes occidentales traditionnelles vers l'Est.
18:34 Publié dans Actualité, Eurasisme, Géopolitique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : russie, chine, donald trump, eurasie, eurasisme, asie, affaires asiatiques, géopolitique | | del.icio.us | | Digg | Facebook
vendredi, 20 décembre 2024
L'UE adopte un 15ème train de sanctions qui, une fois de plus, ne touche guère la Russie
L'UE adopte un 15ème train de sanctions qui, une fois de plus, ne touche guère la Russie
La nouvelle responsable des affaires étrangères, Kaja Kallas, a présidé lundi sa première réunion des ministres des Affaires étrangères de l'UE à Bruxelles.
Par Elena Fritz
Source: https://www.pi-news.net/2024/12/eu-beschliesst-15-sanktio...
Le Conseil des ministres des Affaires étrangères de l'UE s'est réuni lundi sous la direction de la nouvelle haute représentante pour les Affaires étrangères et la politique de sécurité, l'Estonienne Kaja Kallas. Il était déjà clair à l'avance que Kallas n'adopterait pas une ligne plus modérée. Au contraire, sous sa direction, l'UE poursuit son escalade, sa politique de sanctions et sa confrontation ouverte - surtout contre la Russie.
Le quinzième train de sanctions a été adopté, qui doit soi-disant frapper la « flotte fantôme » russe. Selon la lecture occidentale, cette flotte sert à contourner le plafonnement des prix du pétrole imposé par les pays du G7. Les sanctions visent 27 pétroliers russes ainsi que 52 autres navires battant d'autres pavillons. Ils se voient désormais interdire l'accès aux ports européens et l'accès aux services européens.
Ce qui est salué à Bruxelles comme une « étape nécessaire » s'avère toutefois, à y regarder de plus près, être une politique symbolique qui ne touche guère la Russie. Le commerce du pétrole s'est depuis longtemps déplacé vers l'Asie, où la Chine, l'Inde et d'autres marchés émergents ont remplacé l'Occident. Les dégâts restent du côté de l'Europe, qui continue de s'affaiblir elle-même en raison de la spirale des prix de l'énergie et des désavantages économiques.
L'UE étend la spirale des sanctions à la Chine et à l'Inde
Mais les sanctions ne s'arrêtent pas là: 54 personnes supplémentaires, dont des représentants des services de sécurité russes, ainsi que 32 entreprises de Chine, d'Inde et d'Iran ont été ciblées. C'est la première fois que Bruxelles s'en prend aussi ouvertement aux entreprises de ces pays. Le fait que l'UE étende désormais sa spirale de sanctions à la Chine et à l'Inde montre à quel point cette orientation est dangereuse.
Tout en croyant imposer sa « politique des valeurs », Bruxelles met en péril les relations européennes avec les puissances économiques émergentes et rend l'Europe encore plus dépendante de partenaires transatlantiques dont les intérêts ne coïncident pas toujours avec ceux de l'Europe. Une diplomatie réellement souveraine serait différente.
Kallas elle-même profite de son nouveau poste pour augmenter la pression sur l'espace post-soviétique. Dans la perspective des prochaines élections présidentielles en Biélorussie, elle a annoncé que l'UE soutiendrait le « peuple biélorusse » et élaborerait de nouvelles sanctions contre le « régime de Loukachenko ». A Bruxelles, cela sonne comme une noble intention. En réalité, cela signifie une ingérence dans les affaires souveraines qui pourrait déstabiliser davantage le pays.
Ceux qui ne se soumettent pas à Bruxelles seront isolés
La Géorgie s'est également retrouvée dans le collimateur. Le gouvernement de ce pays a annoncé qu'il suspendait le processus d'adhésion à l'UE jusqu'en 2028 - un acte de décision souverain. Pour Kallas et les dirigeants de l'UE, c'est apparemment inacceptable. En guise de sanction, les projets de l'UE financés par le budget doivent être gelés et la circulation sans visa doit être limitée. Une fois de plus, Bruxelles montre ce qu'il faut penser du « partenariat » : celui qui ne se soumet pas sera isolé.
L'Ukraine reste le pilier central de la politique étrangère de Kallas. Outre un soutien militaire supplémentaire, l'intégration de l'industrie de l'armement ukrainienne dans la base européenne est poursuivie. En outre, l'UE revendique un rôle de premier plan dans un futur processus de paix - une revendication remarquable alors que, dans le même temps, on continue à livrer des armes et à ignorer les pourparlers de paix.
Quelques jours avant le Conseil des ministres, Kallas et des ministres des Affaires étrangères comme Annalena Baerbock se sont rencontrés pour adopter la « Déclaration de Berlin ». Cette déclaration se veut une réponse aux éventuels changements de cap des Etats-Unis sous la présidence de Trump. Des garanties de sécurité à long terme pour l'Ukraine doivent pousser l'UE dans un rôle qui n'est ni durable ni dans l'intérêt de l'Europe.
La politique étrangère de Kallas : conflictuelle, peu diplomatique et chargée d'idéologie
La critique de Kallas à l'encontre d'Olaf Scholz et de Viktor Orbán a montré à quel point il reste peu de place pour une diplomatie autonome. Tous deux avaient téléphoné à Poutine - Scholz probablement par calcul de politique intérieure, Orbán avec des propositions concrètes pour une offre de cessez-le-feu à Noël et un échange de prisonniers. Mais Kallas remet en question la légitimité de tels contacts au nom de l'UE.
Derrière cela se cache la prétention de Bruxelles de saper la souveraineté nationale et de monopoliser ses propres canaux diplomatiques. Celui qui agit de manière indépendante est immédiatement remis à sa place par Kallas et ses collègues.
Kaja Kallas incarne le nouveau style de la politique étrangère européenne: conflictuelle, non diplomatique et chargée d'idéologie. Elle agit comme une fauconne politique qui se voit volontiers dans le rôle d'une politicienne de pouvoir - alors qu'elle amène l'UE toujours plus profondément dans une zone de risques économiques et de dépendances politiques.
Kallas pousse l'Europe sur une voie qui coûte cher aux citoyens: des prix en hausse, des désavantages économiques et une paix de plus en plus fragile sont les conséquences de cette politique.
L'Europe n'a pas besoin aujourd'hui d'une « Lady Hawk », mais d'Etats souverains prêts à rechercher le dialogue, à défendre leurs propres intérêts et à ne pas perdre de vue la paix pour des raisons idéologiques. Le temps est venu pour une politique qui ramène l'Europe à la force économique et à l'autonomie politique - au-delà des dogmes de Bruxelles et d'un cours qui ne fait qu'affaiblir l'Europe.
18:12 Publié dans Actualité, Affaires européennes | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : actualité, sanctions, europe, union européenne, affaires européennes, kaja kallas | | del.icio.us | | Digg | Facebook
Du badge de l'État islamique au relooking médiatique: comment le courant dominant pratique la cosmétique de guerre
Du badge de l'État islamique au relooking médiatique: comment le courant dominant pratique la cosmétique de guerre
Source: https://report24.news/vom-isis-patch-zum-pr-makeover-wie-...
Dans le monde surréaliste du reportage de guerre, un phénomène remarquable se répète: les médias occidentaux jouant les conseillers en image pour des groupes de combat aux comportements problématiques. Le dernier exemple en date est celui d’un correspondant d’ABC qui attire subtilement l’attention des "rebelles modérés" en Syrie sur leur symbolique liée à l'État islamique (ISIS), rappelant étrangement une mise en scène similaire observée en Ukraine.
En 2021 encore, les médias occidentaux rapportaient de manière critique l’utilisation ouverte de symboles d’extrême droite par le régiment Azov. Cette unité, arborant le symbole du Wolfsangel – un emblème connu de l’époque nazie – dans son insigne, était qualifiée d’extrémiste dans de nombreux reportages. En 2018, le FBI l’avait désignée dans un rapport comme une "organisation paramilitaire nationaliste".
Cependant, avec le début de l'opération militaire spéciale de l'armée russe, une métamorphose médiatique notable s’est opérée. Les "combattants d’extrême droite" sont soudain devenus des "défenseurs héroïques de Marioupol". Le symbole du Wolfsangel a disparu – tout comme la "Soleil noir" et d’autres emblèmes similaires – peu à peu des reportages, tandis que les critiques s’atténuaient. Un exemple typique de recodage médiatique.
Ce schéma se répète maintenant en Syrie. James Longman, correspondant en chef d’ABC News pour les affaires internationales, démontre involontairement comment cette correction d’image fonctionne en pratique. "Le logo de l’État islamique pourrait être mal interprété en Occident" – une façon diplomatique de dire : "Changeons l’apparence". Ali Abunimah, d’Electronic Intifada, résume bien la situation: "Les combattants interprètent ses commentaires comme un conseil amical sur leur présentation". La comparaison avec le régiment Azov s’impose, ce dernier ayant également adapté son apparence extérieure, tout en maintenant une orientation idéologique largement inchangée.
Cette forme de cosmétique journalistique suit un schéma inquiétant : ce qui était considéré hier comme extrémiste devient aujourd’hui acceptable grâce à une mise en scène médiatique habile. Le symbole du Wolfsangel disparaît, l’emblème ISIS est retiré – mais le problème de fond demeure. Des changements cosmétiques ne constituent pas des réorientations profondes.
C’est une forme de journalisme qui masque davantage la réalité qu’elle ne la révèle. Alors qu’en Ukraine, le régiment Azov a été réhabilité par les médias, nous assistons désormais en Syrie à un processus similaire de requalification des jihadistes les plus brutaux. Les médias occidentaux semblent agir moins comme des observateurs critiques que comme des conseillers en relations publiques. Ironiquement, tandis que la Russie exploite évidemment cette évolution à des fins de propagande, les médias occidentaux sapent leur propre crédibilité. Une chose est claire : un loup déguisé en mouton reste un loup – que ce soit à Marioupol ou en Syrie.
17:47 Publié dans Actualité, Manipulations médiatiques | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : manipulation médiatique, actualité, syrie, hts, rebelles syriens, cosmétique de guerre | | del.icio.us | | Digg | Facebook
Grande-Bretagne: relations diplomatiques avec les rebelles syriens
Grande-Bretagne: relations diplomatiques avec les rebelles syriens
Source: https://unser-mitteleuropa.com/154204
Selon David Lammy, chef du ministère britannique des Affaires étrangères, la nouvelle organisation dirigeante syrienne, « Hayat Tahrir al-Sham » (HTS), reste inscrite sur la liste noire du gouvernement britannique. Cependant, cela n’exclut pas que Londres ait établi des relations diplomatiques avec cette organisation, ce qui est désormais le cas.
Lammy a déclaré à la « BBC »: « La Grande-Bretagne souhaite instaurer un gouvernement représentatif et non exclusif en Syrie, mais également sécuriser les stocks d’armes chimiques syriens afin que personne ne puisse les utiliser. Londres vise aussi à mettre fin à la violence en Syrie. »
Ainsi, le gouvernement britannique s’efforcera de… « communiquer avec HTS par tous les canaux possibles, y compris diplomatiques et de renseignement, dans les domaines où cela est nécessaire » – a ajouté le ministre britannique des Affaires étrangères.
Bien que le « HTS » reste pour le moment sur la liste des organisations interdites, car le groupe « est issu du réseau terroriste Al-Qaïda », responsable de la mort de nombreuses personnes en Grande-Bretagne, Londres souhaite désormais juger le « HTS » sur ses actes, a poursuivi Lammy.
Groupe terroriste interdit depuis 2012
En 2012, le gouvernement britannique avait désigné le « HTS » comme une organisation terroriste en vertu de la loi antiterroriste et interdit toutes ses activités au Royaume-Uni, le groupe ayant été lié par le passé à Al-Qaïda. Cependant, le « HTS » a rompu ses liens avec ce réseau terroriste en 2016.
Selon la législation antiterroriste britannique, il est illégal d’être membre d’un groupe figurant sur la liste des interdictions ou de soutenir activement ses activités. Ces infractions sont passibles de peines pouvant aller jusqu’à 14 ans de prison.
Parmi les 79 groupes figurant sur la liste des interdictions, on trouve, en plus du « HTS », le mouvement islamiste radical « Hamas » dans la bande de Gaza, la milice chiite libanaise « Hezbollah », alliée à l’Iran, le groupe jihadiste « État islamique » et le groupe de mercenaires russe « Wagner ».
Rapprochement prudent
Pat McFadden, ministre britannique chargé des relations intergouvernementales, a également déclaré récemment à la « BBC » que le gouvernement britannique « envisageait », s’il était nécessaire, de continuer à classer le groupe syrien comme une organisation terroriste.
McFadden, le deuxième plus haut fonctionnaire du Cabinet Office après le Premier ministre Sir Keir Starmer, a ajouté que le chef du « HTS », Abu Mohammed al-Julani, s’était…
…« distancé de certaines déclarations qu’il avait faites dans le passé »…
…et avait désormais fait des « déclarations appropriées » concernant la protection des minorités et le respect des droits humains.
Cependant, Starmer a rapidement précisé que « retirer le HTS de la liste des organisations terroristes n’est absolument pas à l’ordre du jour ».
Il y a déjà des contacts personnels
Des images diffusées par « HTS » montrent désormais son dirigeant, Ahmad al-Sharaa, lors d’une rencontre avec des hauts responsables dans la capitale syrienne, Damas. Parmi les personnes présentes sur ces photos figure notamment Ann Snow, envoyée spéciale britannique pour la Syrie.
17:29 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, grande-bretagne, syrie, hts, rebelles syriens, levant, proche-orient | | del.icio.us | | Digg | Facebook
Les systèmes trifonctionnels chez Dumézil, Steiner et Stirner
Les systèmes trifonctionnels chez Dumézil, Steiner et Stirner
Troy Southgate
Source: https://troysouthgate.substack.com/p/threefold-systems-in...
La représentation du paradis médiéval par Pieter Bruegel l'Ancien, Le pays de Cockaigne (1567), met en scène un clerc, un paysan et un guerrier et représente ainsi les trois « fonctions » de la société indo-européenne. Autour d'un arbre, qui fait office de moyeu central, les personnages de la gravure représentent les rayons d'une roue, bien que la quatrième position - celle du noble - ait été occupée par une volaille rôtie.
Un critique a suggéré que Bruegel avait l'intention de dénoncer l'autosatisfaction bourgeoise des Pays-Bas du troisième quart du 16ème siècle. La composition tripartite de la société indo-européenne a été longuement discutée par le philologue français Georges Dumézil (1898-1986), bien que son affirmation de toujours, selon laquelle un système trifonctionnel est une marque fondamentale de la société indo-européenne, ait été critiquée par J. P. Mallory (né en 1945) dans son ouvrage de 1989, In Search of the Indo-Europeans : Language, Archaeology, and Myth. Contrairement à Dumezil qui insiste sur le fait qu'il représente une partie unique de notre identité sociale, Mallory pense qu'il s'agit d'un concept plus universel et qu'il n'est donc pas du tout confiné aux Indo-Européens.
Rudolf Steiner (1861-1925), qui a commencé à formuler sa théorie trifonctionnelle des « trois plis » sociaux peu après la fin de la Première Guerre mondiale, croyait, lui aussi en des solutions universelles, mais son approche était quelque peu différente. Partant du principe biologique que l'organisme humain est composé de trois systèmes indépendants qui coopèrent les uns avec les autres - à savoir notre « activité nerveuse et sensorielle », les « processus rythmiques » et le « système métabolique » - il explique ensuite comment cela peut servir de schéma directeur pour ce qu'il décrit comme la « vie économique », la « vie des droits » et la « vie culturelle » de l'humanité. Plutôt que de diviser les gens selon une sorte de pyramide des classes, Steiner souhaitait une forme d'autogestion dans laquelle nous participons à chacune des trois sphères tout en conservant notre indépendance.
Dans la nouvelle édition traduite de son texte de 1991, The Threefolding Movement, 1919 : A History, Albert Schmelzer explique que Steiner « s'est donc expressément défini par rapport à l'ancienne conception de Platon d'un État-statut. Alors que dans la société platonicienne, les êtres humains devaient être divisés en trois classes, les savants, les soldats et les paysans, la société trifonctionnelle à trois plis est elle-même articulée en fonctions d'une manière qui permet à chaque individu de collaborer de manière autodéterminée à la vie des trois domaines » (p.53).
La carte de l'organisme humain est transposée à la société humaine parce qu'elle est composée de trois systèmes qui coopèrent tout en conservant leur autonomie. Steiner, fortement influencé par son prédécesseur anarcho-individualiste, Max Stirner (1806-1856), applique essentiellement la méthode dite de « l'union des égoïstes » que ce dernier avait exposée dans L'Unique et sa propriété (1844). Selon les propres termes de Stirner: "Seuls les individus peuvent s'unir les uns aux autres, et toutes les alliances et ligues de peuples sont et restent des combinaisons mécaniques, car ceux qui s'unissent, du moins dans la mesure où les « peuples » sont considérés comme ceux qui se sont unis, sont dépourvus de volonté. Ce n'est qu'avec la dernière séparation que la séparation elle-même prend fin et se transforme en unification".
Comme je l'ai expliqué dans mon livre, The Self Unleashed : Max Stirner and the Politics of the Ego (2017) :
« Plutôt que d'accepter l'abstraction de la « communauté », l'égoïste ne voit que l'inégalité et le potentiel d'utiliser ou d'ignorer ses homologues. Cette relation ne doit cependant pas être une exploitation, car les égoïstes sont capables de former des unions pour atteindre leurs objectifs mutuels. Ces unions ne sont pas fondées sur la ferveur religieuse ou les valeurs libérales, par lesquelles les individus eux-mêmes sont liés à un idéal, et elles n'ont pas non plus besoin d'être centrées sur une famille ou une tribu, car l'union elle-même appartient à l'individu et devient sa propriété dans la poursuite de ce dont il a besoin. Ni Dieu, ni l'humanité, ni l'État, ni la nation, ni la famille, ni la communauté ne permettent une telle liberté individuelle. (pp.103-4).
Stirner poursuit en disant que:
Dans une société, on est employé, avec sa force de travail ; dans la première, on vit égoïstement, dans la seconde, humainement, c'est-à-dire religieusement, en tant que « membre du corps de ce Seigneur » ; on doit à une société ce que l'on a, on est lié à elle par le devoir, on est possédé par des « devoirs sociaux » ; on utilise une union, et on l'abandonne consciencieusement et infidèlement lorsqu'on ne voit plus comment l'utiliser davantage.
Si une société est plus que vous, alors elle est plus pour vous que vous-même ; une union n'est que votre instrument, ou l'épée avec laquelle vous aiguisez et augmentez votre force naturelle ; l'union existe pour vous et par vous, la société, à l'inverse, vous réclame pour elle-même et existe même sans vous ; en bref, la société est sacrée, l'union vous appartient ; la société vous consomme.
Comme Steiner, l'importance des systèmes trifonctionnels faisait partie de la philosophie de Stirner et son œuvre était divisée en un trio de stades de développement, tous importants: non intellectuel (enfant), intellectuel (jeune) et égoïste (homme).
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Nicola Cospito : l'Europe a besoin de forces qui luttent contre l'ancien ordre mondial et se montrent sensibles aux nouveaux horizons géopolitiques
Nicola Cospito : l'Europe a besoin de forces qui luttent contre l'ancien ordre mondial et se montrent sensibles aux nouveaux horizons géopolitiques
Propos recueillis par Eren Yeşilyurt
Source: https://erenyesilyurt.com/index.php/2024/09/12/nicola-cos...
Après avoir commencé cette série d'entretiens sur le révolutionnarisme conservateur, je me suis rendu compte que nous ne connaissions pas les intellectuels italiens. Il existe différents "bassins intellectuels" qui s'accumulent de manière différenciée dans le monde de la Méditerranée. Avec Cospito, nous avons parlé du révolutionnarisme conservateur, de la droite naissante, d'Evola.
Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs turcs ?
Je suis né à Tarente, dans les Pouilles, en 1951 et je vis à Rome. J'ai obtenu un diplôme de littérature moderne avec les meilleures notes. Je suis journaliste indépendant, traducteur, conférencier et connaisseur de la langue et de la culture allemandes. Je suis l'auteur de plusieurs publications. J'ai enseigné l'histoire et la philosophie dans des lycées pendant 38 ans et j'ai également été professeur adjoint d'histoire des doctrines politiques à l'université E-Campus. Je suis l'auteur du livre I Wandervögel, qui en est à sa troisième édition (plus une en espagnol), avec lequel j'ai présenté au public italien l'histoire du mouvement de jeunesse allemand au début du 20ème siècle. Avec l'historien allemand Hans Werner Neulen, j'ai publié Julius Evola in the secret documents of the Third Reich et Salò Berlin, l'Alleanza difficile. J'ai également publié Nazionalpatriottici et Walter Flex, a Generation in Arms. Avec la Fondation Evola, j'ai publié Julius Evola dans les documents secrets de l'Ahnenerbe et Julius Evola dans les documents secrets de la SS. J'ai édité le magazine d'histoire, de politique et de culture Orientamenti. Je traduis actuellement de l'allemand la bibliographie monumentale du volume Die Konservative Revolution in Deutschland de l'historien Armin Mohler.
Evola est connu en Turquie comme haute figure de l'école traditionaliste. L'influence d'Evola sur la droite italienne m'a surpris lors de mes recherches. Comment Evola a-t-il influencé la droite italienne ? Comment est-il devenu une figure aussi importante ?
Evola a été et reste en Italie l'un des principaux inspirateurs non seulement des intellectuels de droite, mais aussi des cercles politiques traditionalistes, et ce, avant et après la Seconde Guerre mondiale. Auteur de nombreuses publications traduites en plusieurs langues, il a surtout exercé son influence avant la guerre avec des ouvrages tels que Diorama filosofico, supplément au quotidien Il Regime Fascista. Il a écrit des livres tels Théorie de l'individu absolu (1930), L'homme comme puissance (1927), La tradition hermétique (1931), Révolte contre le monde moderne (1933) et, après la guerre, des essais d'une grande profondeur tels que Chevaucher le tigre (1961), Les hommes au milieu des ruines (1953) et Masque et visage du spiritualisme contemporain (1949).
Partant d'un idéalisme hégélien, vu cependant dans une tonalité romantique, influencé par la pensée de Nietzsche, dans l'exaltation d'un « individu » absolutisé par une profonde conscience de soi sublimée par la prédisposition à l'action, Evola attire l'attention sur le monde de la Tradition, caractérisé dans la lointaine antiquité par des valeurs fondées sur une hiérarchie aristocratique (basée sur les vertus), sur une spiritualité « solaire », virile, limpide, fière, sur une vision organique de l'Etat, par opposition au monde décadent, libéral, démocratique, obscur, né avec le Kali Yuga et qui a accentué sa décadence avec l'avènement de la Révolution française et de la modernité où l'homme est devenu l'esclave du « démon de l'économie », perdant le contact avec une civilisation supérieure. Surtout Révolte contre le monde moderne et Les hommes au milieu des ruines, mais aussi le court essai Orientamenti, sont devenus une sorte de bible pour ceux qui ont voulu s'engager dans une action ascendante, dans la recherche d'horizons spirituels, en allant occuper un champ de bataille qui ne peut jamais être conquis ou occupé par un quelconque ennemi. Les pages d'Orientamenti, comme l'a récemment écrit la revue Il Cinabro, pénètrent le cœur du lecteur et tracent une direction, une orientation à suivre, en éveillant des idéaux d'une grande force.
Rutilio Sermonti, l'un des dirigeants du mouvement Ordine Nuovo, la formation la plus inspirée par les enseignements d'Evola, a affirmé: « en lisant Evola, je n'ai pas découvert Evola, mais moi-même. Et je n'ai jamais reçu de cadeau plus précieux ». Face à l'œuvre destructrice du monde moderne, Julius Evola lance son mot d'ordre: « une seule chose: se maintenir debout dans un monde de ruines ». Nous assistons donc aujourd'hui à une « Renaissance d'Evola » qui se reflète également dans la pensée d'Alexandre Douguine qui, à côté des nouvelles frontières géopolitiques, envisage la recherche d'une nouvelle dimension spirituelle qui s'oppose aux faux mythes et aux icônes du monde démocratique libéral, une recherche inspirée par les idées de Julius Evola.
Dans l'Allemagne du 19ème siècle, comment le mouvement Wandervogel et d'autres mouvements similaires ont-ils construit l'esprit allemand ? Quelles sont les figures les plus importantes de cette période et quel impact leurs idées ont-elles eu sur l'Allemagne moderne ?
Le mouvement des Wandervögel, également connu sous le nom de Jugendbewegung (mouvement de jeunesse), tire son nom d'un poème de l'écrivain romantique Joseph von Eichendorff. Il est né à Berlin sous la forme d'un cercle d'étudiants sténographes qui se consacraient aux Wanderungen (grandes promenades dans les forêts et les vallées allemandes). L'histoire des Wandervögel commence à la fin du siècle dernier, vers 1896 pour être précis. Selon certains historiens, qui ne voient dans les "oiseaux migrateurs" allemands qu'un mouvement de rébellion contre le système scolaire rigide et schématique de l'ère wilhelminienne, elle s'est achevée en 1914 à la veille de la Première Guerre mondiale, selon d'autres en 1933 avec la Machtübernahme, la prise de pouvoir par les nationaux-socialistes, et enfin d'autres chercheurs sont d'avis qu'elle ne peut être considérée comme définitivement terminée (1).
Tous s'accordent cependant à reconnaître l'importance et la signification extraordinaires de ce mouvement de jeunesse, dont la connaissance est indispensable pour comprendre et interpréter correctement les transformations psychologiques, politiques et sociales radicales qui ont caractérisé l'Allemagne au cours des dernières années du 19ème siècle et de la première moitié du 20ème siècle. Fondé par Hermann Hoffmann, étudiant à l'université de Berlin, le mouvement a connu plusieurs dirigeants en alternance, dont le plus influent fut Karl Fischer (photo, ci-dessous), qui lui a insufflé un grand dynamisme en favorisant sa forte expansion dans toute l'Allemagne.
Le plus grand historien de la Jugendbewegung fut Hans Blüher (buste, ci-dessus) qui lui consacra plusieurs ouvrages. Le grand rassemblement de 1913 sur le mont Meissner, auquel participèrent plus de deux mille jeunes, est mémorable. Lors de ce rassemblement, les voies de la réforme de la vie ont été tracées: la lutte contre l'alcool et le tabagisme, la redécouverte du sacré dans la nature, la valorisation de l'identité nationale germanique et les lignes d'une nouvelle pédagogie ont été tracées. La compréhension du phénomène Wandervogel ne serait pas possible sans tenir compte du fait qu'il trouve ses racines les plus profondes dans le mouvement romantique du début du 19ème siècle et dans le mysticisme national-patriotique qui imprégnait l'âme de la jeunesse allemande à l'époque des guerres de libération où les étudiants étaient aux premières loges de la croisade contre Napoléon. C'est ainsi qu'après la Seconde Guerre mondiale, l'attention des chercheurs et des universitaires s'est concentrée sur l'histoire allemande des deux derniers siècles, avec l'intention spécifique, pour certains, d'identifier dans la culture romantique, hostiles aux Lumières et au rationalisme étriqué des premières décennies du 19ème siècle, les origines de ce que George L. Mosse a appelé « la crise de l'idéologie allemande » (2) et qui a trouvé sa plus grande expression dans les dimensions et les formes politiques du totalitarisme national-socialiste.
Lorsque l'on pense au « fascisme », on pense généralement à Hitler et aux nationaux-socialistes. Qu'est-ce qui distingue le fascisme italien, représenté par Mussolini, du fascisme allemand ?
Par rapport au national-socialisme, le fascisme peut se prévaloir du mérite de la primogéniture dans la naissance d'un mouvement qui visait immédiatement la création d'un État-providence capable de mettre au centre la justice distributive et les intérêts des citoyens, en rétablissant la primauté de la politique sur l'économie. Mussolini montre sa détermination lorsqu'en 1926, face à la spéculation financière internationale, il fixe d'autorité le taux de change de la livre sterling, alors monnaie de référence, à 90 lires. Cette mesure a sauvé l'Italie de la crise de 1929, lorsque la bourse de Wall Street s'est effondrée.
À cet égard, il convient toutefois de noter que les deux mouvements avaient certainement beaucoup en commun en ce qui concerne le dépassement des idéologies du 19ème siècle, l'aversion pour le marxisme et ses principes classistes, le rejet de toutes les opinions matérialistes et antipatriotiques et la nécessité de forger un homme nouveau doté d'une forte identité.
Le fascisme italien s'est distingué par l'organisation de travaux publicsde grande ampleur. Aujourd'hui encore, il est possible de regarder avec étonnement et admiration l'impressionnante œuvre architecturale du fascisme, ouverte à une vision aérée de l'urbanisme, fondée sur l'exaltation des grands espaces. Nombreuses sont les villes fondées par le régime de Mussolini qui, aujourd'hui encore, témoignent de leur solidité, même face aux catastrophes naturelles. Contrairement au national-socialisme, le fascisme, tout en exaltant le passé et le romanisme impérial, n'est pas caractérisé par le mythe du sang et de la race aryenne, qui, en revanche, a joué un rôle prépondérant en Allemagne.
De même, les lois raciales de 1938, votées dans un contexte d'isolement international et de rapprochement avec l'Allemagne, ne séduisent pas la population italienne qui n'a jamais été antisémite. L'antisémitisme reste confiné à d'étroits cercles intellectuels réunis autour de Giovanni Preziosi et de sa revue La vita italiana. Même pendant les 600 jours de la République sociale italienne, les Allemands ne font pas confiance aux fascistes dans leur gestion de la question juive et restent très méfiants à l'égard des Italiens.
Les révolutionnaires conservateurs allemands s'appelaient eux-mêmes « révolutionnaires conservateurs » pour se distinguer des national-socialistes et des fascistes. Où les chemins du révolutionnarisme conservateur, du fascisme et du national-socialisme se sont-ils croisés et ont-ils divergé?
Le mouvement révolutionnaire conservateur est officiellement né en Allemagne avec la diffusion des idées de l'écrivain Arthur Moeller van den Bruck. C'est lui qui, le premier, a traduit toutes les œuvres de Dostoïevski en allemand. Son œuvre la plus importante est Das Dritte Reich, dans laquelle il fait une critique radicale des principes démocratiques libéraux, appelant à la naissance d'une nouvelle Allemagne impériale.
En réalité, Moeller van den Bruck, qui reste le principal représentant du mouvement, n'a fait que reprendre ce qui avait déjà été élaboré dans la seconde moitié du 19ème siècle par des penseurs tels que Paul de Lagarde et Julius Langbehn, ce qui avait été énoncé par Arthur de Gobineau et Richard Wagner avec son cercle de Bayreuth, par Stefan George et d'autres intellectuels nationalistes.
La révolution conservatrice, comme l'a bien observé Armin Mohler dans sa thèse intitulée Die Konservative Revolution in Deutschland, a en fait rassemblé de nombreux mouvements intellectuels similaires mais différents, notamment les Völkische, les Bündische, les nationaux-conservateurs, les fédéralistes, les monarchistes, les révolutionnaires nationaux, les bolcheviks nationaux, mais aussi les ésotéristes et les antisémites extrémistes.
La révolution conservatrice s'est répandue non seulement en Allemagne, mais aussi en Autriche et en Suisse et a été représentée par des penseurs de haut niveau tels que Carl Schmitt, Oswald Spengler, les frères Jünger, mais aussi Max Weber, Max Scheler, Ludwig Klages et Hugo von Hofmannsthal. Le mouvement compte dans ses rangs des historiens, des géographes, des spécialistes de l'histoire de l'art, des conteurs, des poètes et toutes sortes d'intellectuels, et s'appuie sur de nombreuses revues culturelles et la collaboration de diverses maisons d'édition.
Les révolutionnaires conservateurs, tout en anticipant les exigences du national-socialisme - c'était aussi l'époque des Corps francs, du Stahlhelm et d'autres organisations paramilitaires qui luttaient pour empêcher l'Allemagne de perdre de nouveaux territoires après le Diktat de Versailles - et en mettant l'accent sur la redécouverte de l'esprit germanique avec sa culture paysanne, liée au Blut und Boden, se sont démarqués, voire opposés, à ce dernier au fil du temps.
Dans une certaine mesure, les révolutionnaires conservateurs ont peut-être exprimé des positions plus marquées que le national-socialisme sur le thème des racines, mais en même temps, tout en rejetant les principes de la démocratie libérale, ils n'ont pas entièrement sympathisé avec Hitler, considérant la figure du Führer comme une fonction remplaçable dans un nouveau système politique. Cette idée ne pouvait manquer de susciter des tensions. De même, ils étaient souvent attentifs aux instances mystico-ésotériques qui entraient en conflit avec le pragmatisme politique du NSDAP. Cela les sépare également du fascisme italien, plus attentif aux besoins sociaux et populaires.
La droite se développe en Europe. En y regardant de plus près, on s'aperçoit qu'il s'agit de conservateurs libéraux. Est-ce vraiment la « droite » qui se développe en Europe ou ces mouvements sont-ils intégrés dans le système mondial?
Certes, la droite se développe en Europe, mais elle apparaît parfois comme une droite invertébrée, pour reprendre les termes du penseur espagnol Miguel de Unamuno. Une droite faible dans son contenu et dépassée dans son nom même. Aujourd'hui, droite et gauche ne signifient en effet presque plus rien et n'expriment plus correctement les forces en présence sur la scène politique. Le monde actuel est caractérisé par l'affrontement entre libéraux et antilibéraux, entre les défenseurs de l'ancien monde unipolaire, consolidé après la chute du mur de Berlin, et ceux qui ont au contraire compris la nécessité de s'ouvrir à une nouvelle dimension multipolaire qui met de côté le suprémacisme américain et crée de nouveaux équilibres mondiaux.
Le monde change et la naissance des BRICS en est la preuve. Le dollar est en crise mais la droite ne l'a pas compris. De même, le soutien à Israël et au génocide criminel du peuple palestinien est un scandale. La droite ne stigmatise pas assez l'insuffisance de l'Union européenne et le soutien à Zelenski n'est qu'une faveur à la « proxy war » voulue par les Américains pour tenir l'Europe en laisse.
L'OTAN est un facteur de déstabilisation dans le monde et en Italie, par exemple, le gouvernement Meloni agit en tant que plénipotentiaire des États-Unis, ce qui met gravement en péril la sécurité du pays. L'Italie accueille environ 120 bases américaines sur lesquelles le gouvernement n'a aucune juridiction. En cas de conflit mondial, nous serions les premiers à en subir les conséquences néfastes.
Le gouvernement Meloni n'est donc pas du tout souverainiste comme certains continuent à le penser à tort. Le seul qui se sauve est Victor Orban, qui est certainement le plus intelligent et le plus avisé des dirigeants européens. L'Europe a besoin de forces qui luttent contre l'ancien ordre mondial et se montrent sensibles aux nouveaux horizons géopolitiques, par exemple le projet Eurasia qui appelle à de nouvelles alliances et à de nouveaux pactes, à commencer par une Union méditerranéenne dans laquelle la Turquie, par exemple, pourrait jouer un rôle absolument important.
14:45 Publié dans Entretiens, Mouvements de jeunesse, Révolution conservatrice | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : entretien, nicola cospito, révolution conservatrice, mouvement de jeunesse, wandervogel, allemagne, italie | | del.icio.us | | Digg | Facebook
jeudi, 19 décembre 2024
Argentine: chute libre
Argentine: chute libre
La consommation s'effondre en Argentine: elle a chuté de 9,6% en novembre
Pablo J. Davoli (*)
Source: https://euro-sinergias.blogspot.com/2024/12/reporte-argen...
Récemment, un rapport de la société de conseil Scentia, basé sur les ventes des principales chaînes de supermarchés et de magasins en libre-service du pays, a été rendu public. Ce rapport confirme l'évolution d'un grave problème que plusieurs économistes et hommes d'affaires ont mis en garde depuis plusieurs mois: la consommation en Argentine est en chute libre.
En effet, selon l'enquête contenue dans le rapport, en octobre 2024, la baisse de la consommation, en général, a atteint 20,4% en glissement annuel, accumulant une baisse de 12,8% depuis le début de l'année ([1]) Plus précisément, dans le cas des supermarchés, la rétraction a atteint 20,7% (zone métropolitaine de Buenos Aires: 18,2%; reste du pays: 22,8%), avec une accumulation de 12,8% depuis le début de l'année. Pendant ce temps, dans les magasins de libre-service de gros, la dynamique a atteint 20,2% et 11,8%, respectivement.
De plus, l'évolution mensuelle des volumes de vente ne montre aucune reprise. Au contraire, depuis le mois d'avril de cette année, on observe une stagnation des volumes vendus ([2]). La chute de la consommation est si prononcée que, dans les hypermarchés, des rabais de 25% ont été fixés sans plafond de remboursement, tandis que, dans le secteur du commerce de gros, des ventes aux enchères spéciales de marchandises à bas prix ont été lancées pour voir la possibilité de réduire les pertes ([3]).
En outre, le rapport indique que les chutes brutales ont été vérifiées dans la totalité des catégories de produits contrôlées. Néanmoins, les baisses les plus importantes ont été observées dans la catégorie des produits que Scentia classe comme impulsifs. Cette catégorie a enregistré une baisse de 29,1% et, compte tenu de l'ampleur de la diminution, elle est suivie des catégories suivantes:
- Hygiène et cosmétique:25,8%
- Boissons alcoolisées: 22,3%.
- Boissons non alcoolisées: 17,1%.
- Petit-déjeuner et snacks: 19,3%.
- Ménage et nettoyage du linge: 18,2%.
- Denrées périssables: 17,2%.
- Alimentation: 17,1%.
Face à ce panorama, les grandes entreprises de consommation de masse ne prévoient d'atteindre les niveaux de vente de 2022 et 2023 que dans deux ou trois ans, selon un homme d'affaires qui s'est confié à un portail d'information numérique argentin bien connu ([4]).
En privé, les entrepreneurs reconnaissent que, pour retrouver le niveau des ventes, il est nécessaire de récupérer le pouvoir d'achat des salaires ([5]). En même temps, les analystes de la consommation affirment qu'avec les fortes augmentations des prix des services qui se sont produites à la fin de l'année dernière, les dépenses des ménages ont été reconfigurées, réduisant la disponibilité de l'argent à dépenser pour les aliments consommables ([6]). En outre, dans la période du 23 octobre au 24 octobre, la variation des prix a été de 197,9% ([7]).
Certes, depuis l'arrivée de Javier Milei au gouvernement, jusqu'en octobre 2024, le salaire minimum, vital et mobile a été réduit de 28,4%, en termes réels. Cela représente une diminution de près d'un tiers par rapport à la fin de l'année dernière et d'environ la moitié par rapport à la fin de l'année 2015, selon le dernier rapport du Centre de recherche et de formation de la République argentine (C.I.F.R.A.).
Concrètement, ce rapport arrive aux conclusions suivantes, qui sont reproduites presque mot pour mot, en reprenant exactement toutes les données statistiques :
* Le salaire minimum, vital et mobile a subi une perte brutale de pouvoir d'achat, dès l'entrée en fonction du gouvernement actuel. C'est la conséquence de la dévaluation de la monnaie et de son impact sur les prix. Dans les mois qui ont suivi, au sein du Conseil national pour l'emploi, la productivité et le salaire minimum, vital et mobile, c'est le ministère du Travail qui a déterminé les augmentations nominales, ce qui fait qu'il est resté pratiquement figé à cette valeur déprimée. Il n'y a eu aucun redressement du salaire minimum. Ce salaire qui, en octobre, à 0,271,571 $, affichait une valeur réelle inférieure de 28,4% à celle de novembre 2023.
* Cette perte se cumule avec les reculs des années précédentes: le salaire minimum a vu son pouvoir d'achat diminuer de plus de 10% pour chacune des années 2018, 2019 et 2020. En octobre 2024, le pouvoir d'achat du salaire minimum était inférieur de 39,9% à celui de novembre 2019, à la fin du gouvernement Cambiemos, et de 54% à celui de novembre 2015.
* Le recul historique est tel que la valeur réelle du salaire minimum est déjà inférieure à ce qu'elle était pendant la majeure partie des années 1990 et même pendant la crise finale du régime de convertibilité des monnaies, qui s'est produite en 2001-2002.
* Une comparaison du salaire minimum avec les seuils de pauvreté et d'indigence révèle une situation pire que celle de l'année critique 2001.
En octobre, le salaire minimum ne permet d'acheter que 54,3% du panier alimentaire de base qui définit le seuil d'indigence pour une famille typique et un peu plus d'un quart du panier correspondant au seuil de pauvreté.
* Si la perte de pouvoir d'achat du salaire minimum qui s'est produite depuis la fin de l'année 2015 jusqu'à aujourd'hui n'avait pas eu lieu, en octobre dernier, le salaire minimum aurait été supérieur à 590.000 dollars (mesuré en pesos de ce mois) et aurait représenté plus de 143% du panier alimentaire de base mentionné ci-dessus.
À la lumière de ces observations, il est clair que nous sommes confrontés à une double chute, étroitement liée: celle de la consommation de masse et celle du pouvoir d'achat. Ceci est en consonance inquiétante avec une autre chute brutale: celle de l'activité industrielle. A cet égard, M. Carlos Aga rappelait il y a quelques jours que :
- En novembre 2024, la moyenne de l'ensemble de l'industrie, selon l'indice d'activité industrielle de l'Institut national de la statistique et des recensements (INDEC), est de -12% (soit une baisse de 12%).
- Plus de 50% de la capacité industrielle installée du pays est inactive.
- En moyenne, 12,5 PME (petites et moyennes entreprises) ferment leurs portes... par heure ! Cela signifie qu'environ 80 employés perdent leur emploi... Toujours par heure !
Bref, il s'agit d'un phénomène dramatique, aussi implacablement logique que hautement problématique, qui constitue une facette supplémentaire de ce nouveau maillon de la chaîne déjà longue (et lourde !) d'échecs politico-économiques ostensibles que subit le peuple argentin depuis au moins une décennie ([8]).
Malgré tout, l'Argentine est toujours debout... Et, dans les entrailles de ses terres et de ses mers, comme dans les profondeurs de l'âme de son peuple, elle conserve -en état de semi-dormition- une énorme capacité de récupération... Du moins, pour l'instant...
Principales sources consultées:
* Article non signé. Chute de la consommation : les ventes dans les supermarchés ont baissé de 20,4 % par rapport à l'année précédente. Ámbito Financiero. 16/11/24.
https://www.ambito.com/economia/caida-del-consumo-las-ven...
* Glezer, Luciana. Le côté obscur du modèle : la consommation s'effondre et le salaire minimum est pire qu'en 2001. La Política Online. 03/12/24.
https://www.lapoliticaonline.com/economia/el-consumo-no-m...
* González, Mariana. Informe sobre la evolución del Salario Mínimo, Vital y Móvil. Centre d'information et de formation de la République argentine. 26/11/24.
https://centrocifra.org.ar/informe-sobre-la-evolucion-del...
* Maza, Agustín. La consommation de masse a chuté de 20,4 % d'une année sur l'autre en octobre et les ventes stagnent depuis avril. Infobae. 15/11/24.
https://www.infobae.com/economia/2024/11/15/el-consumo-ma...
* Interview télévisée du Lic. Juan Manuel Soaje Pinto au Lic. Carlos Aga, dans le programme Contracara de la chaîne TLV1, le 04/12/24.
https://www.youtube.com/watch?v=hG-euNlJx1s
Tous ces documents ont été vérifiés pour la dernière fois par l'auteur le 07/12/24.
(*) Pablo J. Davoli est avocat, analyste politique, professeur d'université et écrivain. Il est également conseiller législatif au Sénat de la République argentine et représentant de l'Association d'amitié euro-sud-américaine (A.A.E.S.A.) en Argentine.
Notes:
[1] En septembre, une baisse de 22,3% avait été enregistrée, la plus forte des vingt dernières années (dans le domaine des grandes chaînes de supermarchés, elle était de 21,2%).
[2] « Une donnée très consultée par différents secteurs est ce qui s'est passé par rapport au mois précédent et, bien qu'il ne s'agisse pas d'un indicateur suivi par les questions saisonnières, exceptionnellement nous le suivons et nous pouvons dire que depuis avril il y a une situation de stabilité des ventes et pour avoir un regard plus précis, il en va de même pour les ventes quotidiennes moyennes », a expliqué le directeur de « Scentia », Osvaldo del Río (Infobae, 15/11/24).
La fin de l'année approche, c'est la haute saison pour les supermarchés, et seules quelques chaînes affirment qu'au cours du dixième mois de l'année, elles ont vendu plus qu'en septembre, en analysant la moyenne journalière. D'autres, en revanche, insistent sur le fait que les unités vendues sont restées stables au cours des derniers mois. En fait, selon des sources du cabinet Scentia, qui mesure l'évolution des ventes de produits alimentaires, de boissons, d'hygiène et de nettoyage sur une base mensuelle, les unités vendues en octobre sont restées « flat » - inchangées - depuis avril (Infobae, 12/11/24).
[3] La Política Online, 03/12/24.
[4] Idem ci-dessus.
[5] Idem ci-dessus.
[6] Infobae, 15/11/24.
[7] Ámbito Financiero, 16/11/24.
(8] Nous avons analysé d'autres aspects problématiques de la phase actuelle de la crise argentine dans nos précédents rapports sur l'Argentine, n°1 et 2, datés respectivement du 24/08/24 et du 13/10/24.
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Bienvenue dans la post-démocratie européenne
Bienvenue dans la post-démocratie européenne
Salvatore Bravo
Le cas roumain n'est pas un « cas » isolé et le roi (en l'occurrence l'Occident) est de plus en plus nu. Recommençons à penser et à travailler dur pour sauver la démocratie en regardant Toyland en face, c'est le premier pas pour nous sauver de l'abîme...
La Cour constitutionnelle de Roumanie a annulé le premier tour de l'élection présidentielle. Le candidat Călin Georgescu est accusé d'être un pro-russe, car pendant la campagne électorale, il a promis de suspendre l'aide militaire à l'Ukraine. Il s'agit d'une Europe démocratique tenue en laisse par les atlantistes. Nous sommes en démocratie tant que nous élisons des représentants alignés sur les politiques de la ploutocratie transnationale. Le premier fait indiscutable est que la démocratie bourgeoise en Europe est désormais un héritage du passé. Nous sommes désormais dans la post-démocratie, une nouvelle forme de totalitarisme qu'il faut comprendre et définir.
Nous savions que la volonté du peuple ne compte pas. Le peuple n'est qu'un pion dans la lutte entre les oligarchies capitalistes. Les médias et les moyens superstructurels sont utilisés pour manipuler et inoculer l'opium avec lequel on domine les consciences. La transformation des Russes en monstres, avec les peurs et les terreurs qui y sont associées, est un moyen efficace de diviser les peuples, de les fragmenter et de les conduire à l'abattoir.
La Roumanie, dont les voisins sont l'Ukraine et la Russie, semble reproduire, d'une manière différente, ce qu'a vécu l'Ukraine. Annuler les élections pour mettre au pouvoir un candidat pro-OTAN, c'est créer les conditions d'une possible guerre civile et, en même temps, ouvrir potentiellement un nouveau front de guerre pour « expulser les Russes qui sont entrés en Roumanie avec Tiktok ».
Ils ne disent rien du fait que la Roumanie abrite l'une des plus grandes et des plus importantes bases de l'OTAN dans le monde, de sorte que la présence de cette base de l'OTAN ne peut qu'influencer la politique de la Roumanie ; en outre, présenter le peuple roumain comme conditionnable par Tiktok dénote un racisme subtil. Les Roumains doivent être protégés d'eux-mêmes et n'ont donc pas la capacité de résister aux pressions extérieures, c'est pourquoi la loi intervient pour les protéger des probables influences russes. En bref, les Roumains doivent être protégés et mis sous tutelle sous l'aile de l'OTAN, une aile bourrée de missiles.
Nous sommes tous incapables de nous opposer aux oligarchies transnationales. Nous vivons un nouveau chapitre du mépris des élites pour le peuple. Un mépris marqué par le désespoir, alors qu'une opposition aux politiques européennes, encore sans projet clair, s'organise dans les entrailles des peuples. Les processus de déréalisation échouent face à un quotidien de plus en plus invivable et irrationnel. La réduction des dépenses publiques et la réduction de la population à des consommateurs silencieux de biens et de visions du monde préemballées ne peuvent que conduire à des « surprises électorales ».
La répétition d'élections contestées et de coups d'État (comme en Corée du Sud) dénote également une tentative tragique de contrôler des parties de l'empire qui se dirigent désormais vers un dangereux état de guerre perpétuelle, parce qu'il ne veut pas mourir. Nous sommes à un carrefour de l'histoire et nous n'avons pas d'hommes politiques capables de faire face à ce tournant de l'histoire. Les gens sont seuls, c'est un fait. La solitude est la condition émotionnelle des peuples et de cette condition émotionnelle nous devons espérer que renaîtra un sens de la communauté et de l'identité, respectueux de la social-démocratie et de toutes les identités.
Assiéger la Russie par une série de conflits, telle semble être la stratégie atlantiste désespérée, la menace d'ouvrir de nouveaux fronts de guerre devrait amener les Russes à craindre d'épuiser leurs énergies et les conduire à des intentions plus clémentes à l'égard de l'Ukraine.
Il s'agit d'une stratégie visant à encercler la Russie et à affaiblir la capacité critique des peuples européens par le biais de la russophobie. Terroriser pour que nous ne comprenions pas les dynamiques et les contradictions qui secouent la mondialisation, telle semble être l'intention ultime. Dans le même temps, les peuples européens, de moins en moins éduqués et de plus en plus conditionnés par le contrôle incessant des médias, deviennent l'objet d'une opération de manipulation psychologique sans précédent.
La destruction de l'éducation, remplacée par un parcours éducatif sans contenu et sans solidité critique et sociale, prédispose à une acceptation passive des contingences et des besoins historiques. La famille, lieu d'autonomie et de réflexion, a été dissoute au nom des droits individuels illimités. L'aversion culturelle pour toute forme de libre échange social se manifeste dans le démantèlement culturel. C'est un scandale car elle repose, au moins idéalement, sur la gratuité de l'amour et la stabilité.
La précarité des migrants n'est pas secondaire, les individus perpétuellement déracinés à la recherche d'un salaire de subsistance ne peuvent qu'être indifférents aux événements qui affectent leurs communautés nationales.
En toile de fond, des décennies de destruction du sens de la politique par la déconstruction étudiée des personnalités par le truchement de l'hédonisme de masse. Le capitalisme a régné avec l'utopie Toyland qui a transformé les individus en « ânes braillards », selon Collodi, sans pensée et sans langage. La pensée est le langage de la complexité qui permet de dépasser le manichéisme binaire. C'est la force nihiliste du système qui fait tout s'évaporer lentement.
Ce vide est une opportunité pour nous, les subordonnés, malgré le danger apocalyptique du moment historique, de reconstruire la planification politique sur des bases onto-axiologiques. La volonté éthique de chacun peut faire la différence, si chacun devient un « point de lumière optique » dans la nuit du monde. Si nous nous laissons dominer par le désespoir et les attitudes millénaristes, ils ont déjà gagné.
La guerre en cours est avant tout une bataille culturelle à laquelle nous ne devons pas échapper ; chaque contribution est pertinente pour sauver la civilisation de l'abîme. Commençons à penser différemment et travaillons dur pour sauver la démocratie en regardant Toyland en face, c'est le premier pas pour nous sauver de l'abîme :
« Dans ce pays béni, on n'étudie jamais. Il n'y a pas de cours le jeudi, et chaque semaine se compose de six jeudis et d'un dimanche. Imaginons que les vacances d'automne commencent le premier janvier et se terminent le dernier décembre. Voilà un pays tel que je l'aime beaucoup ! Voilà ce que devraient être tous les pays civilisés ! [1].
L'espoir désespéré est préférable à l'acceptation passive qui devient une complicité avec les destructeurs.
Note:
[1] C. COLLODI, Les aventures de Pinocchio, in Œuvres, édité par D. Marcheschi, Milan, Mondadori « I Meridiani », 1995, p. 479.
Source: https://www.girodivite.it/Benvenuti-nella-postdemocrazia....
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Le monde anglo-saxon se réclame du Grand Israël
Le monde anglo-saxon se réclame du Grand Israël
par Valentin Katasonov
Source: https://telegra.ph/Il-mondo-anglosassone-pretende-di-esse...
Aujourd'hui, le mot « Occident » apparaît dans les médias russes aussi fréquemment que le mot « Russie ». Il en va de même pour les dérivés du mot « Occident »: « civilisation occidentale », « sanctions occidentales », « culture occidentale », « domination occidentale », etc. Wikipédia explique que l'Occident désigne les pays d'Europe occidentale, l'Amérique du Nord, l'Australie, la Nouvelle-Zélande et quelques autres pays. Les historiens, les politiciens et les philosophes essaient de trouver un dénominateur commun qui unit les pays qui sont ainsi mentionnés. Ils appellent la somme de ces pays la « civilisation occidentale ». Elle réunirait dès lors des pays qui ont une idéologie commune. Le noyau de cette civilisation occidentale est le monde anglo-saxon. En effet, l'idéologie occidentale est née dans les pays anglo-saxons. Le monde anglo-saxon est le regroupement idéologique, politique, militaire et financier de cinq pays: la Grande-Bretagne, les États-Unis, le Canada, l'Australie et la Nouvelle-Zélande. La formation du monde anglo-saxon a commencé au départ de la Grande-Bretagne. Pendant plusieurs siècles, elle a étendu son influence à d'autres parties du monde. Elle a colonisé le Nouveau Monde et créé l'Empire britannique, dans lequel « le soleil ne se couchait jamais ». Il faut d'abord parler de l'influence idéologique de la Grande-Bretagne, puis de son influence politique, militaire, financière et économique.
Au 20ème siècle, le noyau du monde anglo-saxon est devenu les États-Unis d'Amérique. Ils dominent le monde anglo-saxon et l'ensemble du monde occidental par leurs positions géopolitiques, militaires, financières, économiques et idéologiques. J'en viens maintenant à l'idéologie du monde anglo-saxon. Le plus souvent, on dit qu'il s'agit de l'idéologie du libéralisme. Mais le mot « libéralisme » est un terme mal compris. À l'époque soviétique, il existait une définition plus claire de l'idéologie occidentale en général et de l'idéologie anglo-saxonne en particulier: « idéologie du capitalisme », « idéologie de l'impérialisme », « idéologie de la domination mondiale », etc. En outre, on a constaté à l'époque soviétique que dans les pays occidentaux non inclus dans le monde anglo-saxon (comme la France, l'Allemagne, l'Italie, etc.), c'est-à-dire dans les pays d'Europe continentale, l'idéologie est légèrement différente de celle de la Grande-Bretagne, des États-Unis, du Canada, de l'Australie et de la Nouvelle-Zélande.
L'idéologie anglo-saxonne se distingue nettement des autres idéologies. Et ces différences se retrouvent dans les racines religieuses du monde anglo-saxon. Il convient de noter que dans les cinq pays du monde anglo-saxon mentionnés ci-dessus, le protestantisme a été la religion dominante pendant plusieurs siècles. Au moment de la Réforme (au 16ème siècle), le protestantisme est apparu dans de nombreux pays d'Europe, avec des orientations et des nuances différentes. Mais dans les îles de la brumeuse Albion, il avait des nuances bien spécifiques.
Les causes de nombreux événements actuels dans le monde anglo-saxon et dans le monde entier sont à rechercher dans l'Angleterre des 16ème et 17ème siècles. Sans remonter plus loin dans le temps, je rappellerai que certaines mouvances protestantes (en fait des sectes) prêchaient la doctrine de l'exclusivité de leurs membres. Dans le sens d'être les élus de Dieu. Ils partaient du fait qu'eux, les habitants de la Foggy Albion, sont les descendants des tribus d'Israël. Plus précisément, des tribus qui avaient été chassées de la Terre promise. Selon certaines versions, ils sont les descendants de ceux qui ont été expulsés lorsque les Assyriens, au 8ème siècle avant J.-C., ont conquis la partie nord d'Israël avec ses dix tribus de descendants de l'Ancien Testament, soit de Jacob, fils d'Isaac et petit-fils d'Abraham. Il y avait aussi quelques « charismatiques » qui se considéraient comme les descendants des deux tribus restantes, ces Juifs de l'Ancien Testament qui avaient été expulsés de Judée (le royaume du sud) par les armées romaines des empereurs Vespasien et Titus au premier siècle avant J.-C. et qui, après la révolte de Bar Kokhba (132-136 avant J.-C.), avaient été expulsés de la Palestine tout entière. En bref, les protestants britanniques pensaient être les descendants des Israélites de l'Ancien Testament, qui avaient erré à travers le monde en empruntant différentes routes pendant de nombreux siècles. Et finalement, par la volonté du Tout-Puissant, ils se sont retrouvés sur les Iles britanniques.
Comme nous le racontent les historiens, l'idée d'avoir des racines dans l'Ancien Testament n'a pas seulement séduit les Anglais, mais aussi d'autres protestants. Par exemple, en 1590, le huguenot français Pierre Le Loyer a publié un livre intitulé « Les dix tribus perdues ». Il y exprime sa conviction que les Anglo-Saxons, les Celtes, les Scandinaves, les Allemands et d'autres peuples apparentés sont les descendants directs des Israélites de l'Ancien Testament. Au bout d'un certain temps, presque tous les Européens ont abandonné ces théories, n'en ont plus parlé et les légendes sur leur « élection par Dieu » ont été progressivement oubliées.
A l'exception des Anglo-Saxons, tous se sont calmés en ce domaine. Les protestants britanniques les plus « charismatiques » ont continué à se considérer comme le peuple d'Israël. Avec toutes les conséquences que cela implique pour ces « charismatiques » eux-mêmes et pour leur entourage. L'un de ces « charismatiques » était le roi Jacques VI d'Écosse, alias Jacques Ier d'Angleterre (1566-1625), qui se considérait comme le roi d'Israël. Il affirmait avec assurance que le peuple britannique était le descendant direct des dix tribus perdues d'Israël et que le monarque britannique était le véritable héritier du royaume de David, l'ancien roi d'Israël le plus célèbre.
Bien entendu, l'un des représentants les plus éminents du protestantisme pro-israélien était Oliver Cromwell. Le talmudiste juif portugais Menasseh ben Israel (de son vrai nom Manoel Dias Soeiro) a eu une grande influence sur la formation des sentiments pro-israélites de Cromwell. Cromwell n'a jamais caché ses sympathies pour les Juifs et a favorisé par tous les moyens la réinstallation des Juifs de Hollande dans la brumeuse Albion. Bien entendu, Cromwell était également guidé par des considérations économiques: il voyait dans les riches maisons de commerce juives de puissants alliés.
John Sadle (1615-74), ami et secrétaire personnel d'Oliver Cromwell, a publié en 1649 Rights of the Kingdom, qui expose « la généalogie israélite du peuple britannique ».
Au 19ème siècle, les protestants britanniques avaient leurs propres "théologiens" et "scientifiques", qui prouvaient déjà sur une base dite « scientifique » que les habitants de la Grande-Bretagne étaient « génétiquement, racialement et linguistiquement des descendants directs » des tribus perdues de l'ancien Israël. On parlait avec assurance des dix tribus. La période de travail littéraire et scientifique actif sur le sujet de la Grande-Bretagne et d'Israël a probablement été ouverte par le livre de Richard Brothers de 1794, A Revealed Knowledge of the Prophecies and Times (Une connaissance révélée des prophéties et des temps).
Un livre de l'Anglais John Wilson, Our Israelitish Origin, publié en 1840, a suscité un grand intérêt chez les Anglais. De même, un livre de 1879, de John Pym Yeatman, The Shemetic Origin of the Nations of Western Europe (L'origine shemétique -sémitiques- des nations de l'Europe occidentale).
En 1890, le livre de John Garnier Israel in Britain : a brief statement of the evidence proving the Israelite origin of the British race (Israël en Grande-Bretagne: un bref exposé des preuves prouvant l'origine israélite de la race britannique) sort de presse. Ce livre était particulièrement populaire sur le sujet qui nous occupe ici. Il a été réimprimé à plusieurs reprises en Angleterre et dans plusieurs pays anglophones. A lasuite de ce livre, les termes « British Israelism » ou « Israelitism » et « Anglo-Israelism » sont apparus.
Dans la seconde moitié du 19ème siècle, l'israélisme en Angleterre commence à prendre des formes organisationnelles. Les partisans de l'israélisme, qui appartenaient à différents courants du protestantisme, se devaient de trouver des personnes partageant les mêmes idées. En effet, dans certaines églises anglaises, tout le monde n'était pas disposé à partager les vues de l'israélisme. Beaucoup pensaient que les racines israélites du peuple britannique étaient une pure fiction, un mythe. Dans certaines églises protestantes, il y a même eu des schismes à ce propos. Par exemple, le cardinal catholique John Henry Newman (1801-1890) avait été membre de l'Église anglicane pendant la première moitié de sa vie. Cependant, en 1845, il a quitté cette Église anglicane pour rejoindre l'Église catholique romaine. John Henry expliqua la raison de ce choix en déclarant qu'il existait un danger très réel de voir les partisans de l'israélisme britannique « prendre le contrôle de l'Église d'Angleterre ».
À la fin du 19ème siècle, Edward Hine, Edward Wheeler Bird et Herbert Aldersmith fondent le mouvement israélite britannique. L'Anglo-Israel Association est créée et compte, en 1886, 27 branches dans toute la Grande-Bretagne. En 1880, la publication de l'Anglo-Israel Almanach est apparu pour la première fois et a été distribué non seulement dans les îles de la brumeuse Albion, mais aussi dans d'autres pays de l'Empire britannique. L'édition de 1914 contient un aperçu intéressant des groupes qui soutiennent l'idéologie de l'israélisme britannique non seulement dans les îles de la brumeuse Albion, mais aussi en Australie, en Nouvelle-Zélande, en Afrique du Sud, au Canada et aux États-Unis d'Amérique.
L'édition de 1906 de l'Encyclopédie juive indique qu'au début du 20ème siècle, il y avait environ deux millions d'adeptes de l'israélisme britannique en Grande-Bretagne et aux États-Unis d'Amérique.
En 1919, la British-Israel-World Federation (BIWF) est fondée à Londres. En 1922, Covenant Publishing a été fondée pour servir la Fédération. La Fédération existe toujours aujourd'hui et couvre de nombreux pays du Commonwealth britannique.
L'une des pierres angulaires de la plate-forme idéologique de la BIWF est l'affirmation selon laquelle la famille royale britannique est l'héritière par le sang et par l'esprit du roi David d'Israël. Il n'est donc pas surprenant que la Fédération ait toujours eu des mécènes de premier plan. Voici la liste des premiers mécènes (1920): Son Altesse Royale la Princesse Alice, Comtesse d'Athlone (elle est restée sur cette liste jusqu'à sa mort en 1981) ; l'Honorable Comtesse douairière de Radnor ; le Duc de Buckclough ; l'Honorable Lord Guisborough ; l'Honorable Lord St John of Bletsoe ; Son Eminence, l'Evêque des Iles Falkland ; le Révérend Evêque John D. M. McLean et d'autres encore.
Un grand nombre de livres sont publiés en Russie et à l'étranger sur le contexte mondial, la conspiration mondiale, l'élite mondiale. Presque tous les auteurs de ces livres s'accordent à dire que le noyau de l'arrière-scène mondiale (de l'élite) est constitué par les Anglo-Saxons. Leur principale caractéristique n'est même pas leur lieu de résidence, mais leur appartenance religieuse. Ils appartiennent tous à différentes branches du protestantisme et adhèrent à l'idéologie de l'israélisme britannique. Les porteurs de cette idéologie et même les fanatiques de l'israélisme britannique étaient Benjamin Disraeli (premier ministre britannique en 1868 et 1874-1880), Cecil Rhodes (magnat du diamant qui a fondé De Beers), Lord Alfred Milner et d'autres. Ils croyaient fermement à la supériorité des Anglo-Saxons, considérant les autres peuples comme, au mieux, arriérés, voire comme des communautés de sous-hommes, presque des animaux. D'où la conviction totale que le pouvoir sur terre leur a été donné par le Tout-Puissant, à eux, les descendants d'Israël. Et que les autres devaient servir les Anglo-Saxons « choisis par Dieu », être leurs esclaves. Ceux qui ne veulent pas être esclaves doivent être tués sans pitié, car ce sont des sous-hommes, des animaux aux traits humanoïdes.
Ainsi, les Anglo-Saxons ont remplacé Dieu par la race, le sang. Comme l'a écrit la chercheuse Hannah Arendt, Benjamin Disraeli, juif baptisé, s'est soudain souvenu à l'âge adulte qu'il était plus sémite qu'anglais. Et tous les « sémites », selon lui, méritaient le titre d'« aristocrates par nature ». Disraeli, comme l'écrit Arendt, fut « le premier idéologue qui osa remplacer le mot “Dieu” par le mot “sang” ». "La race est tout, et sa base est le sang", "Tout est race, il n'y a pas d'autre vérité". "La question raciale est la clé de l'histoire du monde" : tels sont les points clés de l'idéologie du Premier ministre britannique. Cependant, dans les îles de la brumeuse Albion, selon Disraeli, Juifs et Anglo-Saxons n'ont rien à partager. Ils doivent remplir ensemble leur mission historique, qui est de dominer le monde. Pourquoi n'y a-t-il rien à partager? Parce que les Juifs sont les descendants des deux tribus expulsées de Judée (le royaume du Sud) et les Anglo-Saxons sont les descendants des dix autres tribus (celles qui furent expulsées du royaume du Nord, appelé Israël). La City de Londres, le quartier des plus grandes banques britanniques et internationales, est un symbole frappant de cette unité des descendants des douze tribus d'Israël (celles qui provenaient à l'origine de Jacob, fils d'Isaac et petit-fils d'Abraham). De nombreux Anglo-Saxons modernes partagent le point de vue de Disraeli et pensent donc qu'il est plus correct d'utiliser le terme « paix anglo-juive » plutôt que « paix anglo-saxonne ».
L'israélisme britannique est une idéologie raciste pure, sur laquelle l'Empire britannique a été construit. C'est sur la base de cette idéologie raciste anglo-saxonne que naîtra plus tard le fascisme britannique (apparu avant même les versions italienne et allemande). L'idéologie raciste britannique sera ensuite implantée en Allemagne et prendra la forme du national-socialisme du Troisième Reich (où le rôle de surhommes est attribué aux soi-disant « Aryens »).
Une description assez compacte de l'histoire et de l'essence de l'israélisme britannique peut être trouvée dans l'ouvrage suivant: William H. Brackney, Historical Dictionary of Radical Christianity.
Au 20ème siècle, un grand nombre de livres sur le sujet de l'israélisme britannique ont continué à être publiés en Angleterre, ainsi que dans d'autres pays du Commonwealth britannique. Alexander James Ferris a été particulièrement prolifique dans ce domaine. Je citerai quelques-uns de ses ouvrages les plus significatifs :
Armageddon is at the doors (Armageddon est aux portes, 1933) ;
The British-Israeli Teaching on the 'Signs of the Approaching End of the Age' (1933) ;
Why the British are Israel : nine conclusive facts showing that the Anglo-Saxons represent the House of Israel of the Scriptures (Pourquoi les Britanniques sont Israël : neuf faits concluants montrant que les Anglo-Saxons représentent la Maison d'Israël des Ecritures) (1934) ;
L'enseignement israélo-britannique sur la grande pyramide de Gizeh (1934) ;
Le trône éternel de David (1935) ;
The Great Pyramid : A Simple Explanation of the Great Pyramid's Divine Message to the Anglo-Saxon Race (1935) ;
Le couronnement et le trône de David, 1940 ;
Great Britain & The U.S.A. Revealed as Israel. The New Order (La Grande-Bretagne et les États-Unis révélés en tant qu'Israël. Le nouvel ordre, 1941).
When Russia invades Palestine (Quand la Russie envahit la Palestine, 1945) ;
Palestine for Jews or Arabs (Palestine pour les Juifs ou les Arabes? 1946).
Une grande partie des propos de cet adepte fanatique de l'israélisme britannique devient évidente dès que l'on lit le titre de ses livres. Il exalte la famille royale britannique en tant qu'héritière du roi David. Il parle des racines israélites des Britanniques, faisant d'eux le « peuple élu de Dieu ». Citant l'Apocalypse, il est certain de la fin imminente de ce monde « pécheur », qui sera suivie d'un millénaire de règne de la couronne britannique. Enfin, il conclut que les « élus » de Dieu ne vivent pas seulement sur les îles de la brumeuse Albion. On les trouve dans d'autres pays du Commonwealth britannique. Et ils sont particulièrement nombreux dans le Nouveau Monde.
Il y a environ 400 ans, 30.000 puritains charismatiques se sont installés en Nouvelle-Angleterre pour y créer une société théocratique. Puritains, baptistes, méthodistes et autres colons britanniques à tendances religieuses particulières ont impitoyablement massacré les Indiens. La colonisation active du Nouveau Monde par les Britanniques s'est poursuivie pendant plus de deux siècles. Bien entendu, les colons ne venaient pas seulement des îles de la brumeuse Albion, mais aussi d'Europe continentale: de France, de Hollande, de Suisse, d'Allemagne, de Belgique et d'autres pays. Mais l'épine dorsale de l'État américain restait les charismatiques natifs de Grande-Bretagne (d'Angleterre, du Pays de Galles, d'Écosse, d'Irlande). C'est leur protestantisme teinté d'israélisme britannique qui est devenu l'idéologie dominante dans le Nouveau Monde. Sans tenir compte de cette base idéologique et religieuse ancrée en Amérique, il est difficile de comprendre la politique étrangère des États-Unis dans le Nouveau Monde et surtout durant l'époque moderne. Et de comprendre l'invisible communauté de vues entre les États-Unis et la Grande-Bretagne, qui forme un seul monde anglo-saxon cherchant à soumettre le reste de l'humanité.
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Quelle sera donc la religion du futur ?
Quelle sera donc la religion du futur?
Claude Bourrinet
Le fonctionnement intellectuel et imaginaire humain est tel qu'il lui est nécessaire de s'appuyer sur des comparaisons. Un exercice scolaire itératif consiste à établir des parallèles entre des périodes de l'histoire. Cette paresseuse tentation, malgré parfois les séductions de l'apparence, a le défaut d'oublier un facteur important: la réalité. Si le cycle de la naissance, du développement, et de la mort, loi naturelle, se retrouve en permanence dans la longue marche de l'humanité - encore est-ce là une perception distanciée, car quand on y regarde de près, les limites imparties à chaque phase ne sont pas si tranchées, et, en tenant compte des différents domaines des réalisations humaines, on est contraint de constater qu'il y a, au fil du temps, d'innombrables naissances, et autant de développements et de morts, ce qui rend fort problématique les découpages auxquels les historiens se sont tenus à un certain niveau - pour le reste, c'est-à-dire les hypothétiques similitudes entre certaines époques, il faut bien en rabattre: l'homme, être plastique, modulable, protéique, change à tel point de nature, qu'il n'est plus le même à mesure qu'il évolue. Un Romain du 1er siècle est complètement dissemblable d'un Romain du 4ème, et ne parlons pas des hommes de moyen âge, ou de l'époque contemporaine. L'hétérogénéité n'est pas seulement de degré, mais elle est radicale. Lorsqu'on pense "comprendre" un texte de Cicéron, par exemple, nous l'appréhendons en fonction de ce que nous sommes. Il est impossible de le saisir comme un citoyen romain de la République romaine. On ne peut que s'en approcher, prudemment, à l'aide d'un appareil critique conséquent.
Il en va de même de toutes les productions humaines. L'histoire ne repasse pas les plats, où il s'agit alors de parodie, de singerie. Les Révolutionnaires français ont mimé Sparte, Rome etc., mais la Révolution est la source de la modernité, non de l'Antiquité renaissante. La tranchée est immense entre un Brutus, et un Robespierre. Ce sont deux espèces différentes.
Aussi a-t-on tenté de prévoir la "spiritualité" de l'avenir, et certains se sont essayés à dessiner les contours de la religion qui succédera à un christianisme moribond. Les nationalistes identitaires occidentaux craignent l'islam, sans se demander de quel islam ils parlent, et si celui-ci ne subira pas le sort du christianisme, et pour les mêmes causes (société de consommation, nihilisme techniciste etc.). Il faudrait aussi analyser les causes d'un soi-disant revival musulman, dans une région qui subit de plein fouet l'effet destructeur de l'Occident. L'islam actuel n'est peut-être que la réaction moderne, voire moderniste (l'utilisation pointue de la technique, par exemple) d'une société qui craint de mourir.
Il est courant de prévoir que l'extinction du christianisme, sous toutes ses formes, amènera l'avènement d'une nouvelle religion, éclectique, inspirée d'un New age, qui est déjà installé dans les pays occidentaux depuis près d'un siècle, mais qui ne touche que les classes moyennes. Ce courant n'est structuré qu'en une multitude de sectes, et il règne comme atmosphère mentale, inspirant par exemple la publicité, la production d'objets, et des pratiques tenant de très près aux finalités hygiénistes ou thérapeutiques de bien-être et d'adaptabilité à une société sous tension. Il est difficile de parler à son sujet de religion, ni même de spiritualité. Mais il est indéniable que des millions d'individus en sont adeptes, même si la profondeur de leur engagement n'est pas très convaincants, malgré les prédictions d'un Jünger, qui pensait qu'une sorte de shintoïsme, de bouddhisme cool, de paganisme éthéré, suivrait l'avènement de l'Etat universel, ou, plus sérieusement, une nouvelle poésie de l'être, comme l'espérait Heidegger, sans trop y croire.
A ce sujet, celui de la palingénésie, c'est-à-dire de la transformation d'un ensemble religieux en un autre - songeons au remplacement du paganisme du haut-empire néoplatonicien par le christianisme de l'Antiquité tardive - nous avons certes des points apparents de comparaison. Mais la Weltanschauung d'un disciple de Plotin était en gros similaire à celle d'un saint Ambroise, par exemple. Saint Augustin a glissé du néoplatonisme au catholicisme sans véritable heurt. Les racines épistémologiques, philosophiques, théologiques, relativement parentes entre ces traditions, ont été consolidées dans la terre civilisationnelle de la vieille Europe durant plusieurs siècles.
Rien de tel à notre époque, qui est inédite dans l'histoire. Pour la première fois, le passé est renié, considéré comme inutile pour fonder la société du présent et du futur, l'homme est, de même, aboli, perçu comme construit selon un tas de critères, la dimension suprahumaine, qui fondait le politique et les liens sociaux depuis toujours, a disparu, même à l'état de reste, plus aucun repère ne subsiste des temps anciens. On ne peut se fonder sur ce vide absolu pour imaginer une suite qui ressemblerait à ce qui s'était passé il y a des millénaires. Nous sommes dans un temps impensable. On ne peut le penser, car, pour penser, il faut comparer.
Mais que l'on ne tombe pas dans la caricature ! Les phénomènes historiques sont rarement scindés brutalement. Il subsiste toujours des terreaux antiques, même ténus, ou, le plus souvent, contaminés. Il existera encore des chrétiens, et sans doute plus solides que maintenant, mais ils seront ultra-minoritaires. Car il ne faut pas s'imaginer qu'il puisse exister un avenir fiable pour les Eglises. Poutine peut bien se rendre à l'office, il n'en demeure pas moins qu'en la sainte Russie, comme chez nous, il n'y a plus que 2% de pratiquants. Certes, comme dit Emmanuel Todd, il se peut qu'à l'Est, on ait encore des croyants "zombies", mais arrivera le temps du degré 0 de la croyance et de la pratique, les mêmes causes créant les mêmes effets (l'occidentalisation a conquis la planète, avec son nihilisme, latent ou actif).
Aux Etats-Unis, non seulement le nombre de ceux qui ne croient pas dépasse désormais celui des croyants en Dieu, mais, comme le faisait remarquer Rod Dreher, la pratique (ce à quoi il est indispensable de prêter attention, plutôt qu'aux déclarations de principe) le recentrement individuel, le genre de vie hédoniste et individualiste, voire narcissique, contredisent violemment les "valeurs" chrétiennes, certains "fondamentaux" évangéliques, comme la chasteté, le rejet de l'homosexualité, de l'avortement, le mépris de l'argent, de la réussite sociale impérative, l'inculture religieuse rendant parfois ce négationnisme sociétal invisible, ou acceptable. L'évangélisme, du reste, était déjà une accommodation crue et matérialiste aux séductions de l'American way of life, de son système codifié lié au travail, au commerce, au spectacle, au show business. Si de nombreux Africains ou Moyen Orientaux se laissent prendre à ce puritanisme made in USA, c'est parce qu'il permet d'échapper à l'emprise de la société traditionnelle, avec ses contraintes claniques et familiales, et délivre des liens psychologiques afin de permettre des activités plus proches de ce que le monde moderne, individualiste, utilitariste, promeut.
L'hypothèse d'une nouvelle "religiosité" doit tenir compte de la réalité du monde de la technoscience. L'humanisme, qui était à l'origine solidaire du christianisme, est devenu une religion séculaire à partir du XVIIIe siècle. L'homme est devenu le centre de l'existence, de la civilisation, et le porteur du sens de la vie. Nous assistons maintenant à sa métamorphose. La vraie foi qui semble mouvoir les esprits, les coeurs et les corps, et susciter un véritable enthousiasme, maintenant, c'est la démultiplication des pouvoirs de l'humain, et le rêve d'un homme éternellement jeune, voire immortel. C'est un projet faustien (tout-à-fait compatible avec ce "supplément d'âme" qu'est le New Age, du reste), entreprise méphistophélique que Goethe a dépeinte dans son fameux drame, et qui est l'un des rares mythes à être encore virulent dans notre univers nihiliste. A mon sens, voilà la religion du futur, prévue, somme toute par la Bible : "Et nous serons comme des dieux".
Je prophétise en pleurant.
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La Russie et son double
La Russie et son double
Ouvrage édité par "Perspectives libres", novembre 2023
Exposé liminaire
par Gérard Conio
J’ai écrit ce livre pour donner de la Russie une autre image que celle propagée par une russophobie délirante fondée sur l’ignorance et le dénigrement systématique.
J’ai voulu montrer tout d’abord l’état rédhibitoire de la Russie que j’ai constaté en 1996 pour qu’on puisse le comparer à l’essor qu’elle connaît aujourd’hui grâce au redressement opéré par Vladimir Poutine, depuis son accession à la présidence.
Ce que j’ai observé d’une manière subjective est confirmé par les statistiques objectives des économistes et des politologues indépendants qui ont refusé de se plier à la doxa officielle.
Le conflit entre la Russie et l’Occident est avant tout un choc des civilisations qui oppose des visions du monde et on peut comprendre que les adorateurs de la démocratie regrettent une évolution qui écarte la Russie de la sacro-sainte liberté individuelle au nom de laquelle elle a été entraînée dans un paradis qui s’est révélé pour elle un enfer.
Les débats fondés sur des axiomes et des pétitions de principe engendrent le déni des réalités vécues par le peuple russe dans son adhésion à une autorité qui lui rendait sa souveraineté et son indépendance en lui apportant une sécurité et une stabilité retrouvées ainsi que l’amélioration de ses conditions de vie détériorées par l’emprise de quelques prédateurs sur la société russe.
Le narratif occidental sur « l’opération spéciale » a le tort de se polariser sur un moment isolé de son contexte, sans tenir compte de tous les facteurs qui ont pesé sur une rupture dont les conséquences n’ont été sérieusement envisagées ni dans une décision que le président russe jugeait inévitable ni dans les « sanctions » qu’elle a suscitées et qui se sont retournées contre leurs auteurs.
Une « agression » aux objectifs limités a provoqué « le basculement du monde », parce qu’elle avait des origines très anciennes.
Ce moment n’est pas né « par hasard », il s’inscrit dans un devenir historique.
C’est pourquoi j’ai jugé bon de relater mon expérience des stades successifs d’une évolution dont j’ai été le témoin.
Mais, pour éclairer une opinion abusée par la fausse parole, il importe en tout premier lieu de remettre la Russie à sa place sur la carte du monde.
L’histoire de la Russie est déterminée par « le fait géographique » qui l’ouvre vers l’Ouest et vers l’Est, l’Europe et l’Asie. Dépourvue de frontières naturelles, elle a dû se défendre contre les invasions qui, depuis des siècles, sont venues se briser contre le Heartland, le coeur du monde, ainsi nommé par Mackinder, le fondateur de la géopolitique au 19ème siècle qui avait déduit le résultat de ses observations dans une formule restée célèbre: «Qui contrôle l’Europe de l’est, contrôle le Heartland, qui règne sur le Heartland, règne sur le monde». Mackinder désignait ainsi l’Empire russe couvrant « la plaine qui s’étend de l’Europe centrale à la Sibérie occidentale et rayonne sur la mer Méditerranée, le Moyen Orient, l’Asie du Sud et la Chine ».
Un géopoliticien américain, Nicolas Spykman (photo), appliquera cette théorie à la deuxième guerre mondiale. Il ajoute au Heartland la bande de terre côtière qu’il appelle le Rimland et il critique Mackinder en parodiant sa formule: « Qui contrôle le Rimland contrôle l’Eurasie, qui règne sur l’Eurasie contrôle le destin du monde ». Et il souhaite que les Américains contrôlent le littoral européen afin de contenir l’expansion du Heartland.
La vision de Spykman est à la base de la "politique d'endiguement" formulée par le diplomate Georges Kennan (photo) dans son article, The Sources of Soviet Conduct (juillet 1947) et mise en œuvre par les États-Unis dans la guerre froide.
Il s’agissait « d’endiguer » le Heartland en contrôlant la zone tampon du Rimland, auquel appartenaient les satellites de la Russie soviétique, dont l’Ukraine était le maillon fondamental.
On tient dans ce schéma tous les paramètres de l’évolution qui a mené la Russie de la chute de l’URSS sous Gorbatchev à sa déliquescence sous Boris Eltsine, puis à son redressement sous Vladimir Poutine.
La chronologie de cette évolution s’inscrit entre deux catastrophes, la fin de l’URSS et la guerre en Ukraine.
Mais on doit inscrire en filigrane de cette évolution une continuité dans la pensée géopolitique occidentale manifestée par Mackinder, Spykman, Kennan, et plus tard Brzezinski.
Mackinder se disait convaincu de la suprématie des Anglo-Saxons qui leur donnait le droit de dominer le monde et donc de s’emparer du Heartland. Il opposait les puissances de la terre aux puissances de la mer et redoutait l’émergence d’une Allemagne forte pouvant s’allier à l’Empire russe.
Or, cette obsession a été partagée par les dirigeants américains qui n’ont cessé d’oeuvrer pour empêcher une alliance aussi favorable au développement de l’économie européenne que nuisible à leurs intérêts. Ils l’ont sapée définitivement en détruisant le Nordstream 2 et en privant l’Allemagne d’une source d’énergie indispensable pour son industrie. Aujourd’hui, les entreprises allemandes sont contraintes, pour exister, de se délocaliser aux Etats-Unis.
Spykman, en donnant la primauté au Rimland sur le Hearland, posait déjà la question du rapport de force entre la Russie et l’Union européenne. En se concentrant sur les choix de l’Ukraine, cet antagonisme est à l’origine d’un conflit localisé qui, en s’aggravant, met à présent le monde au bord de l’escalade nucléaire.
Les stratèges américains ont fait fausse route en misant sur la supériorité du Rimland et en minimisant la puissance du Heartland russe.
Au lieu d’affaiblir la Russie en instrumentalisant l’Ukraine, l’Occident a démontré sa propre faiblesse dont visiblement il n’avait pas conscience et en s’infligeant des échecs imputables à ses erreurs de calcul.
Mon témoignage sur une Russie qui, dans les années 90, sombrait dans l’anarchie et le chaos, trouve un éclairage paradoxal dans Le Grand Echiquier de Brzezinski paru en 1997, la veille de la faillite financière de l’État russe sous le gouvernement de Boris Eltsine.
En cette même année 1998, où la Russie a été sur le point de disparaître, Soljénitsyne consignait dans La Russie sous l’avalanche un constat analogue sur le désespoir d’une population décimée par les privatisations et par l’emprise des oligarques qui avaient pris le pouvoir, ces oligarques n’étant que les prête-noms des « bandits dans la loi » qui sévissaient déjà à l’époque soviétique.
En dépit de cette situation désespérée qui semblait ôter tout soupçon de velléité impérialiste, Brzezinski reprend les idées de Mackinder et de Spykman en les actualisant et il considère que, malgré la disparition de sa puissance, la Russie, par sa position dominante dans le Heartland, restait une menace pour l’ordre du monde instauré par les Etats-Unis.
Il en avait conclu qu’il fallait séparer l’Ukraine de la Russie pour enlever à celle-ci toutes les chances de redevenir une grande puissance.
Si l’on admet que les analyses de Mackinder et de Spykman trouvaient un fondement dans un empire qui détenait le Heartland en couvrant la moitié de l’Europe, il est plus difficile de sonder les motivations de Brzezinski quand il souhaitait la destruction d’une Russie qui s’était déjà détruite elle-même.
Et il convient de rappeler que Kennan, pourtant promoteur de la politique d’« endiguement » contre l’URSS, a été très circonspect sur les « guerres humanitaires » menées par des politiciens incompétents et aventureux qui prenaient leurs désirs pour des réalités. On le donne même en exemple aujourd’hui en Russie en l’opposant à la courte vue des dirigeants qui lui ont succédé.
Il a fortement désapprouvé l’élargissement de l’Otan qui a été le coup d’envoi d’une escalade dont il prévoyait les dangers pour la paix du monde.
On ne saurait comprendre le processus qui a mené de la fin de l’URSS à la guerre en Ukraine, sans faire état du « syndrome occidental » qui a pesé de tout temps sur la mentalité et la politique russe.
La Russie a été sans cesse confrontée à son double par son désir passionné d’être reconnue par l’Occident comme un partenaire à part entière. Et Vladimir Poutine lui-même n’a pris conscience que fort tard du péril auquel il exposait la sécurité de la Russie en accordant sa confiance à des interlocuteurs qui après la réunification de l’Allemagne, ont refusé la main tendue par les Russes dans l’espoir d’une coopération économique qui devait se substituer à leurs yeux au conflit entre les deux idéologies en lice dans la guerre froide.
En sacrifiant son empire, sans contre partie, la Russie avait donné un gage de sa volonté de devenir une démocratie qui entrerait de plain-pied dans le concert européen.
Et cette coopération s’appuyait sur des intérêts réciproques qui auraient assuré la consolidation de la paix et une meilleure prospérité dans le continent européen.
Mais les passions idéologiques ont pris le pas sur les intérêts économiques et cet espoir a été battu en brèche à trois reprises, lorsque l’Otan n’a pas tenu la promesse de ne pas s’étendre à l’est, lorsque les accords de Maïdan, garantis par la signature de trois ministres européens, ont été violés sans autre forme de procès, et enfin quand les accords de Minsk, destinés à réintégrer à l’Ukraine les républiques séparatistes, ont été signés sans la volonté de les appliquer pour réarmer le gouvernement de Kiev, issu d’un putsch, et continuer la guerre inaugurée par «l’opération contre- terroriste » déclenchée en 2014 par le gouvernement de Kiev contre des populations civiles.
Même si on juge obsolètes aujourd’hui les prophéties de Fukuyama sur la fin de l’histoire et les assertions de Brzezinski, en 1997, sur la nécessité de mettre un terme au danger potentiel représenté par la Russie, il n’en reste pas moins que ces convictions triomphalistes étaient conformes à la doctrine Wolfowitz (photo) qui, dès 1992, avait annoncé l’invasion de l’Irak pour pérenniser la domination des Etats-Unis sur le monde.
Si le bellicisme des néo-conservateurs peut s’expliquer du point de vue des Etats Unis, il apparaissait alors contraire aux intérêts de l’Europe, c’est pourquoi la France et l’Allemagne, en accord avec la Russie et la Chine, ont dénoncé une violation du droit international qui ne pouvait mener qu’à un désastre humanitaire.
Mais on est en droit de s’interroger sur les raisons qui poussent aujourd’hui les Européens à ruiner leur économie en participant à fonds perdus à la guerre en Ukraine en se soumettant, contre leurs intérêts, au diktat des Etats-Unis et en reprenant à leur compte les arguments des anciens satellites de l’URSS qui brandissent le spectre d’une menace russe.
L’agression de l’Ukraine confirme à leurs yeux cette menace, qui apparaît d’autant plus irréelle que, nonobstant la supériorité militaire acquise par Vladimir Poutine, la Russie n’aurait pas les moyens de la mettre en exécution, du fait de sa démographie et des rapports de force avec la coalition de l’Otan.
Et pour mieux comprendre les tenants et les aboutissants de la rupture consommée le 24 février 2022, il n’est pas inutile de revenir a posteriori sur les raisons qui poussaient Wolfowitz en 1992 et Brzezinski en 1997 à se lancer dans une confrontation qui met aujourd’hui le monde au bord du gouffre.
On assiste, en effet, à une fuite en avant de la part des néo-conservateurs qui, malgré leurs échecs successifs refusent de voir en face les conséquences planétaires de leur aventurisme. A cause de leurs tentatives mal calculées, mal engagées, ils ont provoqué la méfiance croissante des trois quarts de la planète à l’égard des Etats-Unis qui ne sont plus en mesure d’imposer au monde leur hégémonie par la suprématie du dollar.
Le réveil de la Russie a été le facteur principal de ce renversement du monde unipolaire auquel l’Occident reste attaché comme le pendu à sa corde.
L’Occident démocratique subit aujourd’hui la même psychose qui a entraîné l’Union soviétique à sa perte.
On assiste à une inversion des rôles et il faut considérer que, pour redevenir une puissance « normale », uniquement soucieuse de son indépendance et de sa souveraineté, sans céder à la mégalomanie messianique, la Russie devait passer par la cure d’une démocratisation ratée qui alimente encore les rêves de sa minorité libérale.
Après avoir, dans cette première partie, évoqué, à des fins pédagogiques, ce passé douloureux, je me suis appuyé sur quelques-uns de mes travaux pour montrer l’apport de la Russie au patrimoine culturel, artistique et scientifique de l’humanité.
Dans « La vision russe du cosmos », j’ai indiqué les sources spirituelles du cosmisme russe fondé par le philosophe Nicolas Fiodorov, qui a été le mentor de Tsiolkovski, dont les travaux sur les fusées ont abouti au vol de Gagarine.
Au moment où l’on glose sur la renaissance de la religion pour compenser le vide idéologique, j’ai retracé dans « L’Empire russe et Moscou Troisième Rome », les relations ambivalentes entre l’orthodoxie et l’autocratie.
Dans « La dialectique du double chez Dostoïevski », j’ai analysé dans le thème du double la parodie romanesque de la dialectique de Hegel dans une esthétique de la création verbale qui trouvera son accomplissement chez les futuristes.
Dans « Le dernier dialogue de Bakhtine », j’ai tiré la quintessence des mémoires parlés du grand philosophe russe dans ses entretiens avec Douvakine, professeur de Siniavski et Daniel dont il a pris la défense lors de leur procès.
Puis, j’ai analysé longuement le thème du MLB ( « la plongée dans le sein maternel ») dans Ivan le Terrible d’Eisenstein et dans sa mise en scène de la Walkyrie au Bolchoï en 1940.
En raison du rôle controversé de la Pologne dans le conflit ukrainien, j’ai tenu à rendre hommage à Wat et Mlosz, deux auteurs polonais que j’ai traduits et commentés pour mettre en exergue leur russophilie qui n’était pas incompatible à leurs yeux avec leur critique du communisme totalitaire. Cette largeur de vue chez ces «dissidents » antisoviétiques tranche sur l’amalgame raciste et imbécile pratiqué aujourd’hui entre la culture et la politique vis-à-vis de la Russie.
Enfin j’ai cité mes interventions à un colloque sur « L’URSS, un paradis perdu ».
Et j’ai mis en conclusion une réflexion sur les deux Russies qui s’opposent aujourd’hui à propos de la guerre en Ukraine.
Chaque livre est une bouteille à la mer et j’espère que celui-ci trouvera les bons lecteurs qui sauront en tirer la substantifique moelle.
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mercredi, 18 décembre 2024
Exigence effrontée envers les pays BRICS: Trump va-t-il trop loin?
Exigence effrontée envers les pays BRICS: Trump va-t-il trop loin?
Washington. Sous la future présidence de Donald Trump, le conflit entre l'économie occidentale dominée par le dollar et le bloc émergent des BRICS pourrait s'intensifier. Trump a récemment ciblé les efforts de certains pays BRICS visant à réduire leur dépendance au dollar et les a explicitement menacés de représailles si ces efforts se poursuivaient. Parmi les destinataires de ces menaces figurent notamment la Russie, la Chine, l’Inde, ainsi que les Émirats arabes unis et d’autres pays membres des BRICS depuis début 2024.
Sur son réseau social "Truth Social", Trump a menacé les pays BRICS d'imposer des droits de douane (punitifs) de 100% s'ils abandonnaient le dollar comme moyen de paiement international et créaient une monnaie concurrente. Trump a même exigé qu’ils s’engagent à ne jamais poursuivre un tel objectif. Textuellement, il a déclaré: «Nous exigeons de ces pays un engagement à ne pas créer de nouvelle monnaie BRICS ni à soutenir une autre devise pour remplacer le puissant dollar américain».
À défaut, ces pays seraient frappés par des droits de douane de 100 % « et devraient s'attendre à devoir renoncer à vendre [leurs produits] à la formidable économie américaine ».
Cette menace est à la fois risquée et présomptueuse. La dédollarisation est en effet déjà en cours depuis un certain temps, accélérée par les sanctions occidentales imposées au début de la guerre en Ukraine et par l’exclusion de la Russie du système de paiements SWIFT. D’autres pays, comme la Chine, qui se considèrent comme des cibles potentielles des sanctions américaines, ont intensifié leurs efforts pour réduire leur dépendance au dollar et privilégier l’utilisation des monnaies locales. La monnaie chinoise, le yuan (renminbi), est particulièrement utilisée comme alternative. De plus, des pays comme l’Arabie saoudite souhaitent également abandonner le dollar. En juin dernier, ce géant pétrolier a décidé de ne pas renouveler l’accord pétrodollar vieux de 50 ans – un tournant stratégique significatif. Les observateurs estiment que cette décision aura un impact majeur sur le rôle du dollar comme monnaie de réserve mondiale.
Lors du dernier sommet des BRICS à Kazan, le projet de création d'une monnaie commune a été temporairement suspendu, mais seulement reporté à une date ultérieure, non encore précisée. Actuellement, le groupe BRICS représente environ 45% de la population du globe et 35% de l'économie mondiale – plus que le G7, le groupe des pays industriels occidentaux. Environ 30 autres pays souhaitent également rejoindre les BRICS.
La question n'est donc pas de savoir si, mais quand le dollar perdra sa position de monnaie de réserve mondiale dominante. À Moscou, la réponse aux exigences de Trump a été diplomatiquement réservée mais sans équivoque. Selon l'agence de presse russe Interfax, Dmitri Peskov, porte-parole du Kremlin, a déclaré lundi que l’attractivité du dollar « s’érode déjà » et que la monnaie américaine perdait de son influence à l’échelle mondiale.
« Si les États-Unis continuent de forcer les pays à utiliser le dollar, cela renforcera encore davantage la tendance à passer aux paiements en devises nationales », a prédit Peskov. Il a ajouté qu’il s’agit d’une tendance déjà en cours, qui ne concerne pas seulement les pays BRICS.
Le futur président américain semble toutefois déterminé à imposer le dollar au reste du monde à tout prix, malgré les risques d’escalade des conflits commerciaux qui, en fin de compte, pourraient nuire à l’économie américaine elle-même. Trump a récemment annoncé qu’il mettrait en œuvre dès son premier jour au pouvoir une politique commerciale agressive avec des droits de douane élevés contre la Chine, ainsi que contre ses voisins directs, le Canada et le Mexique. Il a justifié ces mesures par le trafic de drogue et d’êtres humains à la frontière. Cette annonce alimente les craintes d’une guerre commerciale entre les États-Unis et deux de leurs plus grands partenaires commerciaux. La présidente mexicaine Claudia Sheinbaum a averti que le plan tarifaire de Trump aurait des conséquences désastreuses pour les deux pays – et a laissé entendre que des mesures de rétorsion pourraient être envisagées (mü).
Source: Zu erst, 12/2024.
21:00 Publié dans Actualité, Economie | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : états-unis, donald trump, politique internationale, brics, monnaie, dollar | | del.icio.us | | Digg | Facebook
L'Allemagne perd du terrain: sa «souveraineté numérique» est désormais en danger
L'Allemagne perd du terrain: sa «souveraineté numérique» est désormais en danger
Berlin. Pas un jour ne passe sans de nouvelles annonces inquiétantes concernant l’Allemagne en tant que site économique et technologique. Désormais, c’est aussi la « souveraineté numérique » qui est menacée. Cela s’explique par le fait que l’Allemagne perd rapidement du terrain sur le marché des centres de données. Les détails ont été fournis dans une étude présentée récemment par l’association numérique Bitkom. Selon ce rapport, environ dix milliards d’euros sont investis chaque année en Allemagne dans les infrastructures, les nouvelles capacités et les technologies des centres de données. Cependant, les taux de croissance enregistrés restent nettement inférieurs à ceux de pays comme l’Irlande, la Chine ou les États-Unis.
En Allemagne, il existe environ deux mille centres de données de taille moyenne et 100 grands centres (serveurs) auxquels sont connectés 2,4 millions d’ordinateurs en réseau. À l’échelle mondiale, on compte environ 100 millions de serveurs de ce type – principalement aux États-Unis et en Chine – qui stockent les données des utilisateurs privés, des administrations et des entreprises.
Avec la numérisation croissante dans les sociétés modernes, les centres de données prennent une importance toujours plus grande. Mais, avertit l’association numérique Bitkom dans son étude : l’Allemagne néglige depuis dix ans l’expansion nécessaire de ses capacités. Ainsi, le pays est en passe de perdre son lien avec les sites internationaux en forte croissance. L’Allemagne risque de perdre progressivement sa « souveraineté numérique », met en garde Bernhard Rohleder, directeur général de Bitkom.
L’État doit désormais agir pour améliorer les conditions d’implantation en Allemagne. La loi sur l’efficacité énergétique doit être révisée, et de manière générale, les procédures de planification, d’autorisation et de construction doivent être raccourcies. Dans d’autres pays, il ne faut que quelques mois entre la planification et la mise en service d’un centre de données, alors qu’en Allemagne, cela prend souvent des années. Il est douteux que Habeck et ses collègues soient réceptifs à de tels arguments (st).
Source: Zu erst, décembre 2024.
20:28 Publié dans Actualité, Affaires européennes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : souveraineté numérique, allemagne, actualité, europe, affaires européennes | | del.icio.us | | Digg | Facebook
Lorsqu'un coup d'Etat échoue, il faut en essayer un autre...
Lorsqu'un coup d'Etat échoue, il faut en essayer un autre...
par Andrea Zhok (*)
Lorsqu'un coup d'État échoue, on en tente un autre.
Après le retrait de la loi martiale en Corée du Sud - le président Yoon Suk-yeol n'a pas pu surmonter l'obstacle de la démission du ministre de la défense, qui lui avait retiré le soutien de l'armée - nous voici face au coup d'État « légal » préparé par la Cour constitutionnelle roumaine, qui a annulé les résultats du premier tour des élections présidentielles et reporté les élections à une date ultérieure.
Comme on le sait, le candidat C. Georgescu est arrivé en tête au premier tour et les sondages le donnaient gagnant au second tour (63% contre 37% pour l'autre candidate, Elena Lasconi). Georgescu n'est pas aligné sur les positions de l'OTAN et c'est bien là le problème.
Les motivations de la Cour constitutionnelle roumaine sont dignes du meilleur numéro d'un cabaret: le candidat Georgescu aurait bénéficié d'une campagne Tik-Tok qui « ressemblait » (sic) aux tactiques russes.
En substance, le soupçon d'une possible influence étrangère marginale suffirait à annuler les élections.
(Pour un pays comme l'Italie, qui a voté de 1948 à aujourd'hui, toujours sous une pression internationale colossale, de Washington à la BCE, selon ce critère, toutes les élections pourraient être invalidées, sans exception).
Qu'est-ce que ces retours autoritaires ont en commun ?
C'est très simple. C'est l'autoritarisme officiellement mis au service des libéraux.
Naturellement, le court-circuit n'est qu'apparent.
Depuis que le libéralisme est devenu la colonne vertébrale de la politique européenne au 19ème siècle, il a toujours joué la carte de l'appel à la liberté démocratique lorsqu'il devait se défendre contre la perspective de voir revenir l'étatisme, et la carte de la répression paternaliste lorsque le demos ne votait pas dans le sens qui plaisait aux maîtres du navire.
Ce que ces secousses autoritaristes indiquent, c'est l'état dangereusement fragile dans lequel se trouve le récit démocratique libéral, qui, malgré ses énormes efforts pour manipuler l'opinion publique, n'est plus en mesure de persuader - pas toujours - la majorité de la population que les vexations et les répressions violentes qu'on lui assène si généreusement sont "pour son bien".
Le jeu consistant à gouverner l'opinion publique dans une démocratie formelle est toujours risqué.
Au 19èmee siècle, on a longtemps cru que seul le suffrage universel permettrait d'établir des régimes fonctionnant dans l'intérêt du peuple. Ainsi, depuis l'instauration du suffrage universel, tous les efforts des classes dirigeantes libérales ont toujours visé à convaincre la majorité que les sacrifices constants imposés à cette majorité, afin de maintenir les privilèges de quelques-uns, étaient la seule chose à faire.
La stratégie narrative utilisée pour parvenir à ce résultat, le seul considéré comme essentiel, peut varier. Mais en général, le résultat est obtenu en persuadant la majorité qu'une menace bien plus grave rôde que celle qui consiste à maintenir les privilèges oligarchiques, et que les seuls capables de défendre le pays contre cette menace sont précisément les membres de l'élite libérale.
Moins ce discours s'impose, plus la nature des démocraties libérales apparaît clairement: le pouvoir réel réside uniquement dans la sphère « libérale », c'est-à-dire dans la grande propriété, où la « démocratie » n'est que la variable dépendante, utilisable comme couverture idéologique tant qu'elle peut être manipulée, mais librement subordonnée dès qu'elle s'avère réfractaire aux souhaits des élites.
(*) Poste paru sur Facebook, 7 décembre 2024.
Source: https://www.lantidiplomatico.it/dettnews-andrea_zhok__fal...
20:04 Publié dans Actualité, Définitions, Théorie politique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, définition, libéralisme, élections, théorie politique, politologie, sciences politiques | | del.icio.us | | Digg | Facebook
La démocratie, c'est ce qui profite aux écosocialistes
La démocratie, c'est ce qui profite aux écosocialistes
Par Conny Axel Meier
Source: https://www.pi-news.net/2024/12/demokratie-ist-was-den-oe...
« Cela doit avoir l'air démocratique, mais nous devons tout avoir en main » (Walter Ulbricht début mai 1945).
L'émission de ZDF-Heute de samedi dernier était très révélatrice à un égard. Il s'agissait de la Corée du Sud. On sait que le président Yoon Suk Yeol y avait déclaré la loi martiale pour une raison futile (il s'agissait du budget à venir) et qu'il avait ensuite dû se dégonfler et lever cette loi martiale. Cela n'a pas suffi à l'opposition de gauche du « Parti démocratique » qui a demandé au Parlement le remplacement du président qui avait été démocratiquement élu par le peuple. Pour cela, ils avaient d'abord besoin, avant que la Cour constitutionnelle n'intervienne, d'une majorité des deux tiers des voix des députés, c'est-à-dire 200 sur un total de 300 qui peuvent déposer la demande auprès de la Cour constitutionnelle. Parallèlement, l'opposition a envoyé ses partisans dans la rue pour manifester en faveur de la destitution. La proclamation de la loi martiale étant également allée trop loin pour une partie du parti au pouvoir, Yoon a été destitué par 204 voix. Cela a suffi de peu pour obtenir une majorité des deux tiers.
La gauche entend définir seule ce qu'est la démocratie
Ce qui frappe ici, c'est le commentaire de la ZDF. Ils citent comme seule voix à ce sujet Park Chan Dae, le président du groupe parlementaire du Parti démocrate (DP), un parti d'opposition, situé à gauche. Celui-ci a qualifié le vote des parlementaires de « victoire pour le peuple et la démocratie ».
A retenir: si la gauche gagne, c'est une victoire pour le peuple et la démocratie ! Si cinq des 300 députés démocratiquement élus avaient voté différemment, la proposition aurait échoué. Selon la ZDF, ce ne serait alors pas une victoire pour la démocratie. « Démocratique », c'est seulement ce qui profite à l'oligarchie de gauche. Si le vote n'est pas conforme aux souhaits des rouges-verts, il ne s'agit plus de démocratie.
C'est nous qui décidons de ce qu'est la démocratie, disent-ils ! Les exploiteurs socialistes du peuple en sont convaincus. Partout où ils sont au pouvoir, ils gonflent les ministères et les institutions avec leurs partisans inutiles. Les tribunaux, les commissariats de police, les parquets et les dirigeants de la "protection de la Constitution" (Sûreté allemande) sont tous fidèles à l'extrême gauche.
Démocratie et "mur coupe-feu" (Brandmauer ou "cordon sanitaire")
La conception de la démocratie du cartel des partis écosocialistes a déjà été abordée dans nos colonnes à plusieurs reprises. Conformément à leur doctrine d'exclusion, celle du « mur coupe-feu » (Brandmauer, équivalent du "cordon sanitaire" belge, ndlr), la démocratie n'est pas simplement la volonté du peuple, mais exclusivement ce qui correspond à leurs fixations idéologiques. Lorsque, au Bundestag, les représentants des « partis du bloc » parlent de « notre démocratie » et des « partis démocratiques », cela rappelle la conception de la démocratie qu'avaient les communistes au 20ème siècle.
L'ancien président du Conseil d'État de la « République démocratique ( !) allemande », Walter Ulbricht, aurait été fier de ses petits-enfants spirituels de la CDU/CSU, de la SPD, de la FDP et des Verts. Les communistes du parti de gauche (Die Linke) et les adhérents de la Ligue de Wagenknecht sont de toute façon en phase. Tous sont d'accord et chantent en chœur: nous sommes les « démocrates » et l'AfD est « antidémocratique ». Les faits ne jouent aucun rôle dans leurs raisonnements, seule l'idéologie compte. On vient de voir comment cela fonctionne en Thuringe. La queue communiste remue désormais même si elle est celle du chien pseudo-conservateur.
La CDU/CSU peut écrire ce qu'elle veut dans son programme électoral, même si elle copie le modèle de l'AfD à l'identique. Ils n'appliqueront rien de tout cela. Ils ne le veulent d'ailleurs pas. Celui qui, comme Friedrich Merz, veulent absolument former une coalition avec les Verts, ne veulent et ne peuvent rien changer à la situation désastreuse de l'Allemagne. Merz ne veut pas quitter la grande coalition des écosocialistes, mais en devenir la mascotte.
Vous voulez d'autres exemples ?
Géorgie
Cette situation complexe n'existe pas seulement en Corée du Sud et en Allemagne. En Géorgie, les écosocialistes veulent se débarrasser du gouvernement patriotique récemment élu en toute bonne pratique démocratique, organisent des manifestations violentes et recourent au chantage financier, avec le soutien de la Commission européenne. Ce gouvernement n'est pas, comme le prétendent les gauchistes dans les médias, favorable à la Russie. Il est favorable à la Géorgie !
Moldavie
En Moldavie, les marionnettes de l'UE ont rapidement exclu de l'élection presque tous les Moldaves expatriés en Russie, de peur que les élections ne se déroulent pas comme prévu par la tutelle de l'UE. En revanche, les Moldaves résidant dans les pays occidentaux ont pu voter sans encombre, car ces derniers ont largement fait pencher la balance en faveur des vassaux de l'UE.
Roumanie
En Roumanie, c'est également un patriote, Calin Georgescu, qui a remporté le premier tour des élections présidentielles. Lui non plus n'est pas un ami de la Russie, comme on le prétend. Il a gagné parce qu'il a fait passer les intérêts roumains avant les intérêts de l'OTAN. Bruxelles a obtenu que l'élection soit annulée.
Pour cela, il a fallu « convaincre » la Cour constitutionnelle roumaine qu'une prétendue influence russe s'était exercée, car quelques jours auparavant, a contrario, la régularité des élections avait été confirmée.
Les bureaucrates de gauche autoproclamés de Bruxelles, Berlin et Paris préfèrent qu'à l'avenir, dans toute l'Europe, les candidats et les partis qui ne sont pas favorables à l'UE et à l'OTAN soient exclus des élections. Il ne sera alors plus possible de voter « mal ». Tout cela avec la prémisse suivante: cela doit avoir l'air démocratique, mais nous, les écosocialistes, voulons tout avoir en main.
Qui est Conny Axel Meier?
Conny Axel Meier (né en 1956) est actif depuis plus de 20 ans en tant que publiciste, défenseur des droits de l’homme et critique de l’islam. Depuis 2004, il a été secrétaire de la "Fédération des mouvements citoyens" (BDB). En 2006, il faisait partie des premiers membres de "Pax Europa". En 2008, il a joué un rôle clé dans la fusion des deux associations pour créer le "Mouvement citoyen PAX EUROPA" (BPE) et en est devenu le premier directeur général à plein temps jusqu’en 2016. En 2019, il a déménagé avec son épouse et est parti en exil politique en Hongrie, d’où il écrit régulièrement pour PI-NEWS.
19:25 Publié dans Actualité, Affaires européennes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, europe, affaires européennes, allemagne, corée du sud, moldavie, géorgie, roumanie, élections, écosocialistes | | del.icio.us | | Digg | Facebook
Politique énergétique et instabilité en Syrie
Politique énergétique et instabilité en Syrie
Markku Siira
Source: https://markkusiira.com/2024/12/10/energiapolitiikkaa-ja-...
La chute du régime d’Assad et le passage (du moins pour l’instant) de la Syrie aux mains des rebelles islamistes ont surpris beaucoup de monde. Dans une tentative de comprendre ces événements qui furent rapides, toutes sortes de théories et d’hypothèses ont été avancées, mais la majorité des informations reste pure spéculation, faute de faits concrets.
Il y a des années déjà, on estimait que la « guerre civile » syrienne avait éclaté lorsque Assad avait refusé le projet de gazoduc soutenu par l’Occident, le Qatar et la Turquie. Ainsi est née la narration médiatique dominante d’un « régime tyrannique » contre lequel luttait « l’opposition syrienne », avec ses casques blancs. Dans cette théorie, la Russie serait intervenue pour consolider ses propres intérêts en matière de politique énergétique.
Tout le tumulte dans la région trouve ses origines dans le programme américain Timber Sycamore, qui a financé et armé divers groupes combattant le gouvernement syrien. Les vassaux occidentaux, à savoir l’Arabie saoudite, le Qatar, la Turquie et la Jordanie, ont également soutenu les rebelles. Israël, fidèle à sa politique, a soigné dans ses hôpitaux des terroristes qui combattaient Assad.
Après la chute de Damas ce week-end, les forces israéliennes se sont empressées de pénétrer plus profondément en Syrie. L’armée de l’air israélienne a déjà effectué plus d’une centaine de frappes aériennes contre des cibles militaires. L’armée sioniste a détruit des avions de combat, des hélicoptères, des systèmes de défense aérienne et des dépôts d’armes, sous prétexte d’assurer sa propre sécurité.
Il s’agit de l’une des plus grandes opérations offensives de l’histoire de l’armée de l’air israélienne. Contrairement à ce que les États-Unis avaient fait en se retirant d’Afghanistan, aucun équipement militaire fonctionnel n’a été laissé au nouveau gouvernement. Il est donc probable que les rebelles islamistes ne puissent pas établir un émirat en Syrie à l’image de ce que fit le mouvement taliban.
Israël ne souhaite ni une Syrie forte ni unifiée. Son plan serait plus compatible avec une région plongée dans l’instabilité. La Syrie pourrait devenir une nouvelle Libye, où des seigneurs de guerre et divers groupes s’affronteraient, tandis qu’à proximité, un État sécuritaire extrémiste juif étendrait ses colonies. Qu’adviendra-t-il alors des ambitions ottomanes d’Erdoğan dans cette équation?
Selon l’Arabie saoudite, les sionistes cherchent à saboter les possibilités pour les Syriens de retrouver des conditions de vie sûres. L’Irak et le Qatar ont également condamné les actions d’Israël, mais qui pourrait réellement empêcher le régime de Tel Aviv d’agir ? L’administration Biden prétend soutenir le nouveau gouvernement syrien.
Les hauteurs du Golan, illégalement occupées, sont désormais considérées par les sionistes comme une « partie intégrante de l’État d’Israël ». Israël a annexé les hauteurs du Golan syrien en 1981, après quoi la compagnie énergétique américaine Genie Energy, appartenant à des intérêts judéo-américains, a commencé à y forer du pétrole. L’intérêt de diverses parties pour la Syrie semble être lié non seulement à des objectifs géopolitiques, mais aussi à des projets énergétiques, notamment pétroliers et gaziers.
Quel que soit l’avenir de la Syrie, les 54 années de règne de la famille Assad ont pris fin. Né en 1965, Bachar al-Assad a au moins évité le sort de Saddam Hussein et de Mouammar Kadhafi, obtenant un refuge en Russie, où lui et sa famille pourront mener une vie luxueuse à l’abri de la politique.
18:56 Publié dans Actualité, Géopolitique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, politique internationale, syrie, pétrole, hydrocarbures, levant, proche-orient | | del.icio.us | | Digg | Facebook
mardi, 17 décembre 2024
Le gouvernement globaliste du Canada s'effondre
Le gouvernement globaliste du Canada s'effondre
Source: https://report24.news/kanadas-globalisten-hoerige-regieru...
Le gouvernement canadien, fidèle au Forum Économique Mondial (WEF), se désintègre. Le ministre du Logement Fraser et la ministre des Finances Freeland ont annoncé leur démission. Même le Premier ministre Trudeau semble en avoir assez. Le Canada pourrait bientôt organiser de nouvelles élections – avec une victoire très probable des conservateurs.
Dans la capitale canadienne Ottawa, les événements se précipitent. La femme la plus puissante du cabinet de Justin Trudeau, Chrystia Freeland (photo), ministre des Finances, a annoncé hier, à la surprise générale, sa démission – un coup de tonnerre qui secoue le paysage politique canadien.
La raison du départ de Mme Freeland est aussi simple qu’explosive : Trudeau voulait la reléguer à un autre poste. Mais au lieu d’accepter un simple transfert, la politicienne, fidèle au WEF, tout comme Trudeau, a tiré la sonnette d’alarme. Dans une lettre de démission remarquablement cinglante publiée sur X (anciennement Twitter), elle a clairement indiqué qu’il s’agissait d’un conflit interne au parti.
« Depuis quelques semaines, vous et moi sommes en désaccord sur la meilleure voie à suivre pour le Canada », écrit-elle à l’adresse de Trudeau. Le véritable point de rupture : les droits de douane menaçants de 25 % imposés par le futur président américain Trump. Alors que Trudeau semble vouloir continuer à distribuer des cadeaux électoraux, Freeland plaide pour une politique stricte d’austérité afin de se préparer à la guerre commerciale imminente.
Les marchés financiers ont réagi immédiatement : le dollar canadien a chuté à son plus bas niveau depuis la crise du Covid. Mais ce n’est pas tout. Le ministre du Logement, Sean Fraser, a lui aussi jeté l’éponge ce week-end et ne se présentera pas aux prochaines élections. Deux poids lourds quittent le cabinet – cela ressemble fort à des rats qui abandonnent un navire en perdition.
Mais ce n’est pas encore tout : selon les informations de la chaîne canadienne CTV News, Trudeau envisagerait désormais lui-même de démissionner ou de dissoudre le Parlement. Selon certaines sources, il aurait déjà informé son cabinet et prévoit de prononcer un discours devant le Parlement dans la journée. Si cela se confirme, le Canada serait, après la France, l’Allemagne et la Corée du Sud, la quatrième démocratie occidentale à voir son gouvernement sombrer dans une crise existentielle. Les démocraties autrefois stables de l’Occident ressemblent de plus en plus à des châteaux de cartes politiques.
Le plus grand défi reste encore à venir pour le Canada : une possible guerre commerciale avec les États-Unis pourrait mettre le pays à l’épreuve. Les provinces riches en pétrole de l’Ouest, notamment l’Alberta et la Saskatchewan – bastions de l’opposition conservatrice – pourraient alors devenir des poudrières.
Pour Justin Trudeau, autrefois l’enfant chéri de la politique progressiste et globaliste, cela pourrait bien marquer la fin de sa carrière politique. Comme l’avait si justement dit Margaret Thatcher : « Le problème avec le socialisme, c’est qu’à un moment donné, on finit par manquer de l’argent des autres. » Dans le cas de Trudeau, on pourrait ajouter : et à un moment donné, on manque aussi de ministres loyaux.
16:24 Publié dans Actualité, Politique | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : canada, actualité, politique internationale, justin trudeau, politique | | del.icio.us | | Digg | Facebook
Le premier narco-État du monde: l’«État failli» de Haïti
Le premier narco-État du monde: l’«État failli» de Haïti
Peter W. Logghe
Source: Nieuwsbrief Knooppunt Delta, n°195, décembre 2024
Voici l’histoire d’une île qui s’est finalement divisée en deux parties. Des parties qui ont pris des directions totalement opposées. Une seule île, un même climat, et pendant un certain temps, une histoire commune. Mais aussi deux réalités politiques et socio-économiques diamétralement opposées. Il s’agit de l’île d’Hispaniola dans la mer des Caraïbes.
L’île a été divisée en deux. Une partie, Haïti, est devenue une colonie française avant de proclamer son indépendance en 1804, l’une des premières colonies au monde à le faire. Quarante ans plus tard, la partie orientale de l’île, sous tutelle espagnole, proclame à son tour son indépendance. Cette partie devient la République dominicaine.
À partir de ce moment-là, les deux États connaissent des trajectoires historiques diamétralement opposées, selon Helena Voukolsky dans le magazine français de géopolitique Conflits (novembre/décembre, n°54). Haïti a connu coup d’État sur coup d’État. Entre 1957 et 1986, le pouvoir était entre les mains du père et du fils Duvalier: d’abord Papa Doc jusqu’en 1971, puis Baby Doc (Jean-Claude Duvalier) jusqu’en 1986, année où Baby Doc a été contraint de fuir le pays. Le pays et le régime des Duvalier étaient mondialement célèbres pour leurs escadrons de la mort et leur terreur. Cette époque prit heureusement fin, mais les décennies suivantes ne furent guère meilleures: les bandes criminelles se sont multipliées, les trafiquants de drogue ont pris le contrôle de l’île, qui a sombré encore davantage dans une pauvreté structurelle et endémique.
La maigre industrie qui existait était concentrée sur le commerce du bois. Par conséquent, de vastes portions du territoire autrefois forestier ont été déboisées. Cela a rendu le pays vulnérable aux catastrophes climatiques et aux tempêtes, une vulnérabilité aggravée par la pauvreté et l’absence de développement économique. Cette combinaison fatale a été révélée lors du tremblement de terre du 12 janvier 2010, qui a coûté la vie à 300.000 personnes. Le séisme a atteint une magnitude de 7 sur l’échelle de Richter. À titre de comparaison, dans la ville chilienne de Concepcion, en février de la même année, un tremblement de terre d’une magnitude de 8,8 n’a causé que 525 morts.
La combinaison du vaudou et de la violence des bandes armées
« On ne peut pas comprendre Haïti sans voir l’omniprésence du vaudou, apporté sur l’île par les esclaves africains », explique Mme Voukolsky dans Conflits. Le vaudou s’est mélangé au christianisme, en adoptant ses rites tout en les complétant parfois par des sacrifices humains, des rituels sexuels et d’autres pratiques qui échappent totalement à l’esprit rationnel des Occidentaux. Le vaudou est l’une des explications de la violence extrême des chefs de bandes et des familles de narcotrafiquants.
Jusqu’en 2021, le président Jovenel Moïse était au pouvoir en Haïti. En 2021, il a été assassiné par une bande criminelle restée jusqu’ici inconnue. Le meurtre n’a jamais été élucidé. Depuis lors, l’île sombre dans un chaos politique et social sans précédent. Le Premier ministre Ariel Henry est devenu chef d’État par intérim après cet assassinat, avec l’accord qu’il resterait en fonction jusqu’à l’organisation d’élections présidentielles. Mais en avril 2024, il s’est avéré qu’en raison du chaos politique et socio-économique et de la violence des bandes, Haïti était tout simplement incapable d’organiser des élections. Entre-temps, il est apparu que des quartiers entiers de la capitale, Port-au-Prince, étaient de facto sous le contrôle de bandes de trafiquants de drogue.
Le Premier ministre Ariel Henry (photo) s’est rendu au Kenya pour négocier l’envoi de troupes kényanes en Haïti afin de rétablir l’ordre. Mais juste avant son retour, il a appris que les autorités haïtiennes ne lui permettaient pas de revenir. Son avion est resté bloqué à Porto Rico. Quelques semaines plus tard, il a présenté sa démission et la présidence a été transférée à un collectif, un soi-disant "Conseil stratégique". Depuis 2021, la fonction de président en Haïti est vacante, un exemple parfait d’un État en pleine faillite.
Haïti n’a ni gouvernement de droit ni direction. Une administration gangrenée par la corruption et un tissu social en décomposition. Ce qu’il reste, ce sont quelques forces de police et de sécurité qui, faute d’être payées par un État fonctionnel, se retournent contre la population et se mettent au service des chefs de drogue et des chefs de bandes qui, eux, les paient.
L’un de ces chefs de la police haïtienne, Jimmy Cherizier (photo), s’est, comme beaucoup d’autres, retourné contre l’État et a organisé sa propre bande criminelle (composée en grande partie d’anciens policiers). Il sème la terreur dans les rues de la capitale et s’est vu attribuer le surnom de « Barbecue » – une référence aux nombreuses maisons qu’il a incendiées, et aussi à son supposé cannibalisme. Selon les croyances vaudou, il s’approprierait ainsi les forces de ses adversaires. Cherizier a lancé plusieurs campagnes militaires contre les derniers vestiges de l’État haïtien. On pourrait le qualifier de dirigeant de facto d’un État qui n’existe même plus. Le cancer de la drogue s’est infiltré partout. Les drogues, provenant d’Amérique latine, transitent par Haïti pour être exportées via les Caraïbes vers les États-Unis, les îles touristiques et, bien sûr, l’Europe.
La République dominicaine (la partie orientale de l’île) surveille évidemment en permanence ses frontières avec Haïti et suit de près la situation dans le pays voisin. Il est difficile d’ignorer la « bombe sociale » qui existe sur l’île d’Hispaniola: le PIB en Haïti, le pays le plus pauvre des Amériques, s’élève à 1750 dollars par habitant, contre 10.500 dollars en République dominicaine.
La faillite d’Haïti crée des tensions dans toute la région des Caraïbes (Martinique, Antilles, Guadeloupe, et plus largement les deux Amériques). Haïti est aussi le symbole de l’échec d’un certain courant tiers-mondiste de gauche, ce qui explique peut-être en partie pourquoi on entend si peu parler de cet échec dans nos médias traditionnels.
15:54 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, caraïbes, haïti, état failli | | del.icio.us | | Digg | Facebook
La démocratie, enfin, si l'on peut dire...
La démocratie, enfin, si l'on peut dire...
Andrea Zhok
Source: https://www.ariannaeditrice.it/articoli/chiamala-se-vuoi-...
Après le saccage du bureau diplomatique italien à Damas, le ministre des Affaires étrangères Tajani nous dit que « tout est sous contrôle ».
Seule omission négligeable, on ne sait pas très bien sous quel contrôle.
D'un autre côté, si le Premier ministre Giorgia Meloni s'efforce toujours d'« établir la responsabilité » de ceux qui ont tiré sur les troupes italiennes de l'Unifil au Liban, il est au moins aussi plausible de dire que si l'on pille votre ambassade, "tout est sous contrôle".
En fin de compte, le problème de la politique contemporaine est là: les mots ne valent plus l'air chaud qu'ils produisent.
Les mots ne relèvent que d'une gestuelle dans un acte qui envoie des signaux aux employeurs de ces politiciens-acteurs.
Leur contenu de vérité est nul.
Et tout le monde sait que leur contenu de vérité est parfaitement nul.
Mais en même temps, il y a toute une danse médiatique exécutée par des menteurs professionnels, ironiquement appelés « journalistes », dont la tâche principale est de lubrifier les mensonges les plus épineux pour qu'ils soient quand même gobés.
Nous sommes donc dans le pur royaume du mensonge illimité, dans lequel trouver des contradictions, des incohérences, des doubles standards est devenu un passe-temps stérile, car ce qui n'est pas un mensonge n'est un mensonge que par accident, comme une horloge cassée donne l'heure exacte deux fois par jour.
Ce qui n'est pas encore bien compris, c'est qu'une sphère publique où il n'y a que des mensonges, des manipulations ou des vérités accidentelles et occasionnelles est une sphère publique qui ne possède aucune autorité. Or, comme tout pouvoir légitimé découle d'une autorité, la sphère publique d'aujourd'hui ne possède plus aucun pouvoir perçu comme légitime.
C'est au fond l'histoire simple de l'Occident contemporain :
1) Les mensonges, les incohérences, les doubles standards, les omissions sélectives, la rhétorique déformante et la manipulation effrénée règnent sans partage sur le discours public.
2) Par conséquent, le discours public semble totalement dépourvu d'autorité et, de ce fait, le pouvoir qu'il exerce est dépourvu de légitimité.
3) En l'absence de la possibilité d'exercer un pouvoir généralement perçu comme légitime, il ne reste que la possibilité de l'exercer sous des formes autoritaires, coercitives, faites de chantage, d'oppression, de fraude, qui sont systématiquement contraires aux besoins et aux volontés de la majorité.
Et, conformément à ce qui précède, cela s'appelle la « démocratie ».
13:55 Publié dans Actualité, Définitions | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : post-vérité, mensonge, démocratie, définition | | del.icio.us | | Digg | Facebook